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  • 8/14/2019 MIAS2(Algbre lenaire)

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    Cours dalgebre lineaire

    MIAS2, deuxieme semestre

    Raphael Danchin

    Annee 2004-2005

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    Table des matieres

    1 Reduction des endomorphismes 51.1 Rappels et notations . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51.2 Sous-espaces stables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.3 Valeurs propres, vecteurs propres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

    1.3.1 Le cas des endomorphismes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81.3.2 Le cas des matrices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

    1.4 Polynome caracteristique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111.5 Endomorphismes diagonalisables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

    1.5.1 Resultats theoriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151.5.2 Methode pratique de diagonalisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18

    1.6 Endomorphismes trigonalisables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 181.7 Polynomes dendomorphismes et de matrices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 211.8 Polynome minimal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251.9 Sous-espaces caracteristiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

    2 Espaces euclidiens et endomorphismes symetriques 372.1 Formes bilineaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 37

    2.1.1 Generalites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 372.1.2 Formes bilineaires symetriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 39

    2.2 Espaces euclidiens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422.2.1 Generalites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 422.2.2 Projections orthogonales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46

    2.3 Adjoint dun endomorphisme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 482.4 Reduction des endomorphismes symetriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 512.5 Reduction des endomorphismes orthogonaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54

    2.5.1 Generalites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 542.5.2 Etude de O2(R) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 552.5.3 Reduction des endomorphismes orthogonaux . . . . . . . . . . . . . . . . 572.5.4 Endomorphismes orthogonaux en dimension 3 . . . . . . . . . . . . . . . . 59

    3 Equations differentielles lineaires 633.1 Generalites . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 633.2 Le cas homogene a coefficients constants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 64

    3.2.1 Exponentielles de matrices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 643.2.2 Calcul pratique de lexponentielle dune matrice . . . . . . . . . . . . . . 653.2.3 Systemes differentiels homogenes a coefficients constants . . . . . . . . . . 673.2.4 Equations scalaires lineaires homogenes a coefficients constants . . . . . . 71

    3.3 Equations differentielles lineaires generales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 733.3.1 Equations differentielles lineaires scalaires dordre 1 . . . . . . . . . . . . 733.3.2 Systemes differentiels lineaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 74

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    4 TABLE DES MATIERES

    3.3.3 La methode de variation des constantes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 773.3.4 Equations differentielles scalaires dordre quelconque . . . . . . . . . . . . 783.3.5 Application au cas des coefficients constants . . . . . . . . . . . . . . . . . 793.3.6 Utilisation des developpements en serie entiere . . . . . . . . . . . . . . . 81

    Bibliographie 83

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    Chapitre 1

    Reduction des endomorphismes

    Motivation

    Point de vue matriciel

    Transformer une matrice carree A en une matrice semblable B la plus simple possible.Dans la situation ideale, la matrice B sera diagonale, et on dira alors que A est diagonalisable.

    Dans les cas moins favorables, on pourra seulement transformer A en une matrice B trian-gulaire (et on dira que A est trigonalisable) voire triangulaire par blocs.

    Point de vue endomorphisme

    Decomposer un endomorphisme u en une somme finie u =p

    i=1 ui dendomorphismes uiplus simples.

    Dans les cas les plus favorables, les ui seront, a un facteur multiplicatif pres, des projectionssur un sous-espace vectoriel de E.

    1.1 Rappels et notations

    Dans tout ce qui suit, K designe R ou C, et E est un K-espace vectoriel de dimension finien 1.

    Si u End(E), on note u0 = Id ou Id est lapplication identite, u1 = u, u2 = u u puis,up+1 = u up = up u.

    Si u et v sont deux elements de E, on notera souvent uv au lieu de u v lendomorphismecompose.

    On notera diag(1, , n) la matrice carree diagonale de taille n suivante :

    diag(1, , n) =

    1 0 00 2

    . . ....

    .... . .

    . . . 00 0 n

    .

    Sommes de sous-espaces vectoriels : Considerons deux sous-espaces vectoriels1 F et G deE. On definit un troisieme sous-espace vectoriel F + G par

    F + Gdef= {x E | (y, z) F G, x = y + z}.

    1ou s.e.v. en abrege

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    6 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    On dit que F et G sont en somme directe si F G = {0}. On note alors F G la sommeF + G, et tout element x de F G se decompose de facon unique en x = y + z avec y F etz G.

    Homotheties : Soit K. Lapplication

    E Ex xest un endomorphisme sur E appele homothetie de rapport .

    Lhomothetie de rapport 1 est appelee identite et notee Id.

    Projecteurs : Soient F et G deux s.e.v. de E tels que E = F G. Tout x E se decomposealors de maniere unique en x = y + z avec avec y F et z G. On appelle projecteur sur Fparallelement a G lendomorphisme definit par p(x) = y. On rappelle que p2 = p, Im p = F etKer p = G.

    Reciproquement, tout endomorphisme p tel que p2 = p est le projecteur sur Im p pa-rallelement a kerp.

    Symetries : Soient F et G deux s.e.v. de E tels que E = F G. Pour x E se decomposant

    en x = y + z, on pose s(x) = y z. Lendomorphisme s obtenu est appele symetrie par rapporta F parallelement a G, et verifie s2 = Id. On dit que s est une involution.

    Reciproquement, toute involution est une symetrie.

    Matrice dun endomorphisme : Notons B = (e1, , en) une base de E. Soit u un endomor-phisme de End(E). Alors il existe des scalaires aij de K tels que

    j {1, , n}, u(ej) =ni=1

    aijei.

    La matrice A = (aij)1i,jn est appelee matrice de u par rapport a la base B.

    Exemple : La matrice dune homothetie de rapport est

    A =

    0 0

    0 . . .

    ......

    . . .. . . 0

    0 0

    .Dans le cas = 1 cette matrice est notee In, et appelee matrice identite.

    Matrice de passage : Soient B = (e1, , en) et B = (f1, , fn) deux bases de E. Supposonsque fj =

    ni=1pijei. La matrice P = (pij)1i,jn est appelee matrice de passage de la base B

    vers la base B. Une telle matrice est toujours inversible.

    Effet dun changement de base : Soient B = (e1, , en) et B

    = (f1, , fn) deux bases deE, et P la matrice de passage correspondante. Soit u un endomorphisme de End(E) de matriceA par rapport a la base B et de matrice B par rapport a la base B. Alors on a la formule

    B = P1AP.

    On dit que les matrices A et B sont semblables, et lon note A B.

    Matrices par blocs : Il est souvent pratique de decomposer une matrice M de Mn(K) en blocsplus petits : par exemple

    M =

    A BC D

    avec A Mp(K), B Mp,np(K), C Mnp,p(K) et D Mnp(K).

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    1.2. SOUS-ESPACES STABLES 7

    Pour faire le produit de matrices par blocs, on procede comme pour faire un produit habituel :A BC D

    A B

    C D

    =

    AA + BC AB + BD

    CA + DC CB + DD

    .

    Tout ceci se generalise sans difficultes a des matrices comportant plus de blocs.

    Attention : Les produits ci-dessus sont des produits de matrices. Il est interdit de permuterlordre des termes.

    Calcul du determinant : Si A Mn(K) et B Mn(K), alors det AB = det A det B. Si A Mn(K) et B Mn(K) sont semblables alors det A = det B. Si A Mp(K), B Mp,np(K) et C Mnp(K), on a

    det

    A B0 C

    = det A det C.

    1.2 Sous-espaces stables

    Definition 1.2.1 Soit u End(E) et F un s.e.v de E. On dit que F est un sous-espacestable de u si u(F) F.

    Remarque : Les sous-espaces {0} et E sont stables par tout endomorphisme. De meme, Im uet Ker u est toujours stable par u.

    Definition 1.2.2 Soit u End(E) et F stable par u. On appelle endomorphisme induit paru sur F lelement uF de End(F) defini pour tout x de F par uF(x) = u(x).

    Lorsque lon parvient a trouver deux sous-espaces stables par u, F et G tels que E = F G,alors il existe une base de E par rapport a laquelle la matrice de E est diagonale par blocs. Avantdenoncer le resultat precis, donnons la definition de base adaptee :

    Definition 1.2.3 Soit F et G deux s.e.v de E tels que E = F G. On dit que (e1

    , , en

    )est une base de E adaptee a la decomposition E = F G si (e1, , em) est une base de F et(em+1, , en) est une base de G.

    Proposition 1.2.4 Soit F, G, deux s.e.v de E tels que E = F G, et u End(E). Soit

    Bdef= (e1, , en) une base de E adaptee a la decomposition E = F G. Alors on a lequivalence

    entre les deux enonces suivants :

    i) Les s.e.v F et G sont stables par u,

    ii) La matrice de u par rapport a la base B est de la forme

    matB f =

    A 00 B

    ,

    avec A Mm(K) et B Mnm(K).

    Preuve : Pour le sens direct, on utilise simplement que u(ei) F = Vect(e1, , em) pouri {1, , m} et que u(ei) G = Vect(em+1, , en) pour i {m + 1, , n}.

    Reciproquement, si la matrice de f par rapport a la base B est donnee par

    matB f =

    A 00 B

    ,

    alors u(ei) F pour tout i {1, , m} et u(ei) G pour i {m + 1, , n}. CommeF = Vect(e1, , em) et G = Vect(em+1, , en), on en deduit la stabilite de F et de Gpar u.

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    8 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Remarque : Generalisation au cas de E = E1 Ep.Considerons une base B adaptee a la decomposition ci-dessus. Alors u End(E) laisse tous

    les sous-espaces Ei invariants si et seulement si sa matrice est diagonale par blocs :

    matB f = A1 0 00 A2 0

    ... . . . . . . 00 0 Ap

    ,ou le k-ieme bloc diagonal est une matrice carree de taille dim Ek.

    Exemples : Considerons F et G de dimension respective m et n m, et tels que E = F G.Soit B une base adaptee a la decomposition E = F G.

    1. Soit p le projecteur sur F parallelement a G. Alors

    matB p =

    Im 00 0

    .

    2. Soit s la symetrie par rapport a F parallelement a G. Alors

    matB s =

    Im 00 Inm

    .

    1.3 Valeurs propres, vecteurs propres

    1.3.1 Le cas des endomorphismes

    Definition 1.3.1 Soit u End(E). On dit que K est valeur propre de u sil existe unelement x non nul de E tel que

    u(x) = x.

    Si est une valeur propre de u, tout element x de E verifiant la relation ci-dessus est appelevecteur propre de u associe a la valeur propre .

    Lensemble des valeurs propres de u est appele spectre de u, et note Sp(u). Cest un sous-ensemble (eventuellement vide) de K.

    Definition 1.3.2 Si est une valeur propre de lendomorphisme u de End(E), on appelle sous-espace propre associe a lensemble des vecteurs propres de u pour . Ce sous-espace se noteE(u) (ou simplement E en labsence dambigute).

    Proposition 1.3.3 Si est une valeur propre de u, lensemble E est un sous-espace vectorielde E non reduit a {0}, et lon a

    E = Ker (u Id).

    Remarque : En particulier, 0 est valeur propre de u si et seulement si Ker u nest pas reduita 0, cest-a-dire si et seulement si u nest pas injectif. Dans ce cas E0 nest autre que Ker u.

    Proposition 1.3.4 On a les proprietes suivantes :

    i) Si est une valeur propre de u alors E est stable par u. Lendomorphisme uE induit paru sur E est egal a IdE .

    ii) Si et sont deux valeurs propres distinctes de u, alors E et E sont en somme directe.

    iii) Soit (x1, , xp) une famille de p vecteurs propres non nuls de E associes a des valeurspropres 1, , p deux a deux distinctes. Alors (x1, , xp) est une famille libre.

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    1.3. VALEURS PROPRES, VECTEURS PROPRES 9

    Preuve : Prouvons i). Soit x E. On a u(u(x)) = u(x) = u(x) par linearite de u. Parconsequent, u(x) E, et E est donc stable par u. On peut donc parler dendomorphismeinduit par u sur E, et il est trivial que uE = IdE .

    Si maintenant x est vecteur propre pour et pour , on a u(x) = x = x, donc ()x =0. On en deduit que = ou x = 0, ce qui prouve ii).

    Pour prouver iii), considerons un p-uplet (1, , p) deKp

    tel quepi=1

    ixi = 0.

    En appliquant successivement u, u2, , up a legalite ci-dessus, on obtient le systemesuivant :

    (S) :

    1x1 + 2x2 + + pxp = 011x1 + 22x2 + + ppxp = 0. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    p11 1x1 + p12 2x2 + +

    p1p pxp = 0.

    Si lon considere (1x1, , pxp) comme les inconnues du systeme, la matrice de (S)nest autre que la matrice de Vandermonde associee au p-uplet (1, , p). Comme lesi sont deux a deux distincts, on en deduit que (S) est de Cramer. Son unique solutionest clairement

    1x1 = 2x2 = = pxp = 0.

    Comme tous les xi sont distincts de 0, on conclut que tous les i sont nuls.

    Proposition 1.3.5 Si u et v sont deux endomorphismes de End(E) qui commutent2 alors toutsous-espace propre de u est stable par v. De meme Im u est stable par v.

    Preuve : Soit une valeur propre de u, et x un vecteur propre associe. On a u(v(x)) =v(u(x)) = v(x) = v(x), donc v(x) E.

    Si maintenant y Im u, alors il existe x E tel que y = u(x). Par consequent, v(y) =v(u(x)) = u(v(x)) Im u.

    Proposition 1.3.6 Soit u End(E), et F un sous-espace stable par u. Notons v lendomor-phisme induit par u sur F. Alors toute valeur propre de v est valeur propre de u, et lon aE(v) = E(u) F.

    Reciproquement, si E(u) F nest pas reduit a {0}, alors est valeur propre de v.

    Preuve : Il suffit de prouver E(v) = E(u) F. Linclusion E(v) E(u) decoule de la

    definition de v. Et bien sur, on doit avoir E(v) F puisque v est defini sur F !Reciproquement, si x E(u) F, alors v(x) est bien defini puisque x F, et vautu(x) = x puisque x E(u).

    Exemples :

    1. Projecteurs :

    Supposons que E = F G avec F et G non reduits a {0}. Soit p le projecteur sur Fparallelement a G. Alors

    Sp(p) = {0, 1}, E0 = Ker p = G et E1 = Im p = F.

    2cest-a-dire que uv = vu

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    10 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    2. Symetries :

    Si lon considere maintenant la symetrie s par rapport a F parallelement a G, alors on a

    Sp(s) = {1, 1}, E1 = G et E1 = F.

    3. Endomorphismes nilpotents :

    Definition 1.3.7 On dit que u End(E) estun endomorphisme nilpotent sil existeun p N tel que up = 0. Le plus petit p verifiant cette propriete est appele indice denilpotence de u.

    Proposition 1.3.8 Si u est un endomorphisme nilpotent alors Sp(u) = {0}.

    Preuve : Si Sp(u) ne contenait pas 0, alors Ker u serait reduit a {0}. Soit maintenantx E arbitraire. Alors up(x) = 0 donc u(up1(x)) = 0 dou up1(x) = 0. Unerecurrence elementaire permet de montrer que up(x) = up1(x) = = u(x) = x = 0,ce qui est absurde puisque E nest pas reduit a {0} ! Donc Sp(u) {0}.

    Montrons Sp(u) {0}. Soit Sp(u) et x un vecteur propre (non nul) associe. On

    etablit aisement que uk(x) = kx pour tout k 1. En particulier up(x) = px = 0.Donc p = 0, dou = 0.

    4. Deux exemples pathologiques en dimension infinie : Considerons lespace vec-

    toriel reel Edef= C(R;R) et

    u :

    E Ef f.

    Alors tout R est valeur propre de u avec pour vecteur propre associe la fonctionf : x e

    x. On conclut que Sp(u) = R.

    Prenons maintenant E = K[X] et

    u : E EP XP.

    Dire que u(P) = P signifie que (X )P = 0. Comme X nest pas le polynome nul,lintegrite de K[X] entrane que P = 0. Donc Sp(u) = .

    Ces quelques exemples montrent que le spectre de u peut prendre des formes tres diverses lorsqueE est un espace vectoriel quelconque.

    Nous supposons desormais que E est un espace vectoriel de dimension finie n 1. Nousallons alors etablir que Sp(u) contient au plus n elements. Lorsque K = C, nous verrons queSp(u) ne peut pas etre vide.

    1.3.2 Le cas des matrices

    Definition 1.3.9 Soit A Mn(K). On dit que K est valeur propre de A si la matriceA In nest pas inversible. Lensemble des valeurs propres de A est appele spectre de A, etnote Sp(A).

    Proposition 1.3.10 Soit A Mn(K). Les proprietes suivantes sont equivalentes :

    i) Sp(A),

    ii) rg (A In) < n,

    iii) il existe un vecteur colonne non nul X de Kn tel que AX = X.

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    1.4. POLYNOME CARACTERISTIQUE 11

    Preuve : i) ii) : Comme Sp(A), la matrice A In nest pas inversible. Son rang estdonc strictement inferieur a n.

    ii) iii) : Soit u lendomorphisme de matrice A par rapport a la base canonique(1, , n) de Kn. On a donc rg(u Id) < n. Donc, dapres le theoreme du rang,Ker(u Id) nest pas reduit a {0} et lon peut trouver x = x11 + + xnn tel que

    u(x) = x. Le vecteur colonne de composantes (x1, , xn) repond a la question.iii) i) : Si u designe lendomorphisme defini ci-dessus, et x = x11 + + xnn ou lesxi sont les composantes de X, alors x Ker(u Id). Donc u In nest pas inversible,et la matrice (par rapport a la base canonique) correspondante A In non plus.

    Definition 1.3.11 Si est valeur propre de A, tout vecteur colonne X tel que AX = X estappele vecteur propre de A.

    Proposition 1.3.12 Si A et B sont deux matrices semblables, alors Sp(A) = Sp(B)

    Preuve : Il suffit de remarquer que si A et B sont semblables, alors A In et B Inegalement. Par consequent A In et B In sont inversibles simultanement.

    Proposition 1.3.13 Soit u End(E), B = (e1, , en) une base de E et A la matrice deu par rapport a B. Alors Sp(A) = Sp(u). De plus, si est valeur propre de A ou u alorsx =

    ni=1 xiei est vecteur propre de u pour la valeur propre si et seulement si le vecteur

    colonne Xdef= t(x1, , xn) est vecteur propre de A pour .

    Preuve : La definition de Sp(A) et Sp(u) entrane que Sp(A) = Sp(u). Par ailleurs, si lonutilise les notations de la proposition, legalite u(x) = x est equivalente a AX = X.

    Definition 1.3.14 On dit que A Mn(K) est une matrice nilpotente sil existe un p Ntel que Ap = 0. Le plus petit p verifiant cette propriete est appele indice de nilpotence de A.

    Exemple : Toute matrice triangulaire superieure avec des 0 sur la diagonale est nilpotente.

    Proposition 1.3.15 Une matrice A est nilpotente si et seulement si lendomorphisme u End(Kn) de matrice A par rapport a la base canonique est nilpotent.

    Preuve : On utilise simplement la formule matB(uk) =

    matB(u)

    kvraie pour tout k N.

    Proposition 1.3.16 Si A est une matrice nilpotente alors Sp(A) = {0}.

    Preuve : On considere lendormorphisme u End(Kn) de matrice A par rapport a la basecanonique, et on applique la proposition 1.3.8.

    1.4 Polynome caracteristique

    Le calcul du polynome caracteristique (defini dans la proposition qui suit) va nous permettrede determiner les valeurs propres dune matrice ou dun endomorphisme.

    Proposition 1.4.1 Soit A Mn(K). La fonction

    A()def= det(A In)

    concide avec un polynome de degre n et de coefficient dominant (1)n, note A. Ce polynomeest appele polynome caracteristique de A. De plus, on a

    A = (1)nXn + (1)n1Xn1 tr A + + det A.

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    12 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Preuve : On developpe lexpression suivante

    det(A In) =

    a11 a12 a1na21 a22 a2n

    . . .

    an1 an2 ann

    .

    Exemples :

    1. Dans le cas n = 2, on a A = X2 Xtr A + det A.

    2. Si A est scinde avec A =n

    i=1(i X), alors tr A =n

    i=1 i et det A =n

    i=1 i.

    Donnons quelques proprietes importantes des polynomes caracteristiques :

    Proposition 1.4.2 Soient A et B deux matrices de Mn(K). On a :

    i) A = tA,

    ii) si A et B sont semblables alors A = B,iii) AB = BA.

    Preuve : La preuve de i) resulte de lidentite suivante valable pour tout K :

    det(A In) = dett(A In)

    = det(tA In).

    Considerons deux matrices semblables A et B. Alors il existe P GLn(K) telle queB = P1AP. On a visiblement

    B In = P1AP In = P

    1(A In)P.

    Donc B In

    et A In

    sont semblables, et leur determinant est donc egal.

    La facon la plus elementaire de prouver iii) consiste a passer dans M2n(K). On remarquealors que

    In AB In

    In 0

    B In

    =

    AB In A

    0 In

    ,

    In AB In

    In A0 In

    =

    In 0B BA In

    .

    Par consequent

    (1)n det

    In AB In

    = det(AB In) e t ()ndet

    In AB In

    = ndet(BA In).

    La fonction det

    In AB In

    est visiblement une fonction polynome de terme dominant

    n, donc non nulle. Grace a la relation ci-dessus, on peut donc conclure que det(AB In) = det(BA In) pour tout K. Dou AB = BA.

    Voici maintenant un resultat fondamental :

    Theoreme 1.4.3 Soit A Mn(K). Alors Sp(A) si et seulement si A() = 0.

    Preuve : Dapres la proposition 1.3.10, Sp(A) si et seulement si (A In) nest pasinversible, donc si et seulement si det(A In) = 0.

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    1.4. POLYNOME CARACTERISTIQUE 13

    Corollaire 1.4.4 i) Si A Mn(K) avec K = R ouC, alors Sp(A) a au plus n elements.

    ii) Si A Mn(C), alors Sp(A) nest pas vide.

    iii) Si A Mn(R) alors le spectre de A dans R est inclus dans le spectre de A dans C.

    Preuve : Pour i), on utilise le fait quun polynome de degre n a au plus n racines.

    La propriete ii) resulte du theoreme fondamental de lalgebre.

    Comme lensemble des racines reelles dun polynome est inclus dans lensemble de sesracines complexes, on obtient iii).

    Exemples :

    1. Soit A =

    0 1

    1 0

    .

    On a A = X2 + 1. Donc dapres le theoreme 1.4.3, le spectre de A dans C est {i, i}.

    Mais comme A na pas de racine reelle, le meme theoreme montre que A na pas de valeurpropre dans R.

    2. Matrices triangulaires : Le polynome caracteristique dune matrice triangulaire supe-rieure A de termes diagonaux 1, , n est

    A =

    1X

    0 2X. . .

    ......

    . . .. . .

    0 0 nX

    =

    ni=1

    (i X).

    Resultat identique pour une matrice triangulaire inferieure.

    3. Matrice de Frobenius (ou matrice compagnon) : Cest le nom que lon donne a unematrice A Mn(K) du type

    A =

    0 0 0 a01 0 0 a1

    0 1 0 a2.... . .

    . . ....

    ...0 0 1 an1

    .

    Par definition de A, on a

    A =

    X 0 0 a01 X 0 a1

    0 1. . . 0 a2

    .... . .

    . . .. . .

    ...0 0 1 an1X

    .

    Notons (Li) la i-eme ligne de ce determinant. Changer (L1) en (L1) + X(L2) + +Xn1(Ln) ne modifie pas le determinant. Par consequent,

    A =

    0 0 0 Xn +n1

    i=0 aiXi

    1 X 0 a1

    0 1. . . 0 a2

    .... . .

    . . .. . .

    ...0 0 1 an1X

    .

    En faisant un developpement de Laplace par rapport a la premiere ligne, on conclut que

    A = (1)n

    Xn

    n1k=0 akX

    k

    .

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    14 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    De meme, a tout endomorphisme defini sur un espace vectoriel E de dimension finie n, onpeut associer un polynome caracteristique :

    Definition 1.4.5 Soitu End(E) avec E de dimension finie, B une base de E, etA la matrice

    de u par rapport a B. On appelle polynome caracteristique de u, le polynome udef= A.

    Remarque : Dapres la proposition 1.4.2, deux matrices semblables ont meme polynome ca-racteristique. La definition ci-dessus ne depend donc pas de la base B choisie.

    On dispose bien sur du resultat fondamental suivant :

    Theoreme 1.4.6 Soit u End(E). Alors Sp(u) si et seulement si u() = 0.

    Exemples :

    1. Projecteurs

    Supposons que E = FG avec dim F = m et dim G = nm, et considerons p le projecteursur F parallelement a G. On sait que lon peut trouver une base B par rapport a laquellela matrice de p est

    matB

    (p) = Im 00 0 .Donc p = det

    (1 X)Im 0

    0 XInm

    = (1)n(X 1)mXnm.

    2. Symetries

    Soit s la symetrie par rapport a F parallelement a G. On peut trouver une base B parrapport a laquelle la matrice de s est

    matB(s) =

    Im 00 Inm

    .

    Donc s

    = det(1 X)Im 00 (1 X)Inm = (1)n(X 1)m(X+ 1)nm.3. Endomorphismes nilpotents

    On a vu que le spectre dun endomorphisme nilpotent u etait reduit a {0}. Par consequentu est un polynome de degre n et de coefficient dominant (1)n ayant pour unique racine0 dans C. Comme tout polynome (non constant) est scinde sur C, on en deduit queu = (X)n.

    Proposition 1.4.7 Soit u un endomorphisme de End(E).

    i) Soit F un sous-espace stable pour u. Notons uF lendomorphisme induit par u sur F. AlorsuF divise u.

    ii) Supposons que E = F G avec F et G stables par u. Alors u = uFuG .

    Preuve : Pour i), considerons une base (e1, , em) de F que lon complete en une baseB = (e1, , en) soit une base de E. Alors

    (1.1) matB(u) =

    A C0 B

    .

    Remarquons que A est la matrice de uF par rapport a la base (e1, , em). Donc uF =det(A XIm). Or, dapres (1.1), on a

    u =

    A XIm C0 B XInm

    .

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    1.5. ENDOMORPHISMES DIAGONALISABLES 15

    Le determinant a calculer est triangulaire par blocs. Donc

    u = det(A XIm)det(B XInm) = uF det(B XInm).

    Pour prouver ii), on choisit une base B = (e1, , en) adaptee a la decomposition E =F G de telle sorte que

    matB(u) = A 00 B .Or, A (resp. B) est la matrice de uF (resp. uG) par rapport a la base (e1, , em) (resp.(em+1, , en)). En procedant comme precedemment, on trouve donc

    u = det(A XIm) det(B XInm) = uFuG .

    Corollaire 1.4.8 Si est racine de u de multiplicite alors 1 dim E . Le nombreentier est appele multiplicite de la valeur propre . En particulier, si est racine simplealors dim E = 1. Resultat identique pour les matrices.

    Preuve : Si est racine de u alors est valeur propre de u (cf th. 1.4.6) et donc E nestpas reduit a {0}, dou

    def= dim E 1.

    De plus, dapres la proposition 1.3.4, lendomorphisme induit par u sur E concide avecIdE . Son polynome caracteristique est donc (X)

    . Dapres la proposition precedente,( X) divise donc u, ce qui montre (cf. theoreme de Gauss) que .

    Attention : En general dim E = 1 nimplique pas que est racine simple de u. En effet,considerons un espace vectoriel E de dimension 2, et soit (e1, e2) une base de E. On definitu End(E) par

    u(e1) = 0 et u(e2) = e1.

    Alors E0 = Ker u = Ke1 donc est de dimension 1. Mais comme u est nilpotent, on a u = X2

    donc 0 est valeur propre de multiplicite 1 bien que 0 soit racine double de u.

    1.5 Endomorphismes diagonalisables

    1.5.1 Resultats theoriques

    Dans toute cette section, E est un K-espace vectoriel de dimension finie n.

    Definition 1.5.1 On dit que u End(E) estdiagonalisable siu admet une famille de vecteurspropres (x1, , xn) qui est une base de E.

    Definition 1.5.2 On dit que A Mn(K) est diagonalisable si A est semblable a une matriceB diagonale.

    La proposition suivante fait le lien entre les deux definitions.

    Proposition 1.5.3 i) Un endomorphisme u End(E) est diagonalisable si et seulement si ilexiste une base B de E par rapport a laquelle matB(u) est une matrice diagonale.

    ii) Une matrice A est diagonalisable si et seulement si lendomorphisme u de matrice A parrapport a la base canonique de Kn est diagonalisable. Dans ce cas, si (e1, , en) est unebase de vecteurs propres de u, et (1, , n) les valeurs propres associees, on a

    A = Pdiag(1, , n)P1

    ou P est la matrice de passage de la base canonique a la base (e1, , en).

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    16 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Preuve : Si u est diagonalisable, alors sa matrice dans une base de vecteurs propres estdiagonale. Reciproquement, si dans une base B = (e1, , en) donnee la matrice de u estdiagonale, alors tous les ei sont vecteurs propres pour u. On a donc prouve i).

    Pour prouver ii), il suffit de remarquer que si A = P diag(1, , n)P1 et si lon note

    (1, , n) la base canonique de Kn, on a

    AP i = Pdiag(1, , n)i = iP i.

    Par consequent dire que A est diagonalisable equivaut a dire que lendomorphisme u dematrice A par rapport a la base canonique admet (P 1, , P n) comme base de vecteurspropres.

    Exemples :

    1. Projecteurs : Soit p le projecteur sur F parallelement a G. Alors nimporte quelle base(e1, , en) adaptee a la decomposition E = F G est une base de vecteurs propres pourp. Plus precisement, si dim F = m, ei est associe a la valeur propre 1 si 1 i m, et a lavaleur propre 0 si m + 1 i n.

    En conclusion, tout projecteur est diagonalisable.

    2. Symetries : Soit s la symetrie par rapport a F parallelement a G. Alors nimporte quellebase (e1, , en) adaptee a la decomposition E = F G est une base de vecteurs proprespour s. Plus precisement, si dim F = m, ei est associe a la valeur propre 1 si 1 i m,et a la valeur propre 1 si m + 1 i n.

    En conclusion, toute symetrie est diagonalisable.

    3. Endomorphismes nilpotents : Soit u un endomorphisme nilpotent. On sait que Sp(u) ={0}. Par consequent, dire que E admet une base de vecteurs propres pour u revient a direquil existe une base (e1, , en) de E telle que u(ei) = 0 pour tout i {1, , n}. Doncu est nul.

    En conclusion, un endomorphisme nilpotent est diagonalisable si et seulement si il est nul.

    Proposition 1.5.4 Considerons p sous-espaces propres (Ei)1ip de u associes a des valeurspropres deux a deux distinctes. Alors les (Ei)1ip sont en somme directe.

    Preuve : Il sagit de de prouver que tout x E1 + + Ep se decompose de facon uniqueen x = x1 + + xp avec xi Ei.

    Supposons quil existe deux decompositions de ce type

    x = x1 + + xp = y1 + + yp.

    Alors pi=1(xi yi) = 0 ce qui signifie quil existe une relation de dependance lineaireentre les p vecteurs propres x1 y1, xp yp. En vertu de la proposition 1.3.4, lun deces vecteurs doit etre nul. Par recurrence descendante, on conclut quils sont tous nuls.

    Theoreme 1.5.5 Soit u End(E). Notons Sp(u) = {1, , p}. Les quatre proprietes sui-vantes sont equivalentes :

    i) u est diagonalisable,

    ii) E =p

    i=1 Ei .

    iii) dim E =

    pi=1 dim Ei.

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    1.5. ENDOMORPHISMES DIAGONALISABLES 17

    iv) Il existe p entiers non nuls 1, , p tels que 1 + + p = n, et une base B de E parrapport a laquelle la matrice de u est

    matB(u) =

    1I1 0 00 2I2 0...

    ..

    .

    . ..

    ..

    .0 0 pIp

    .

    Preuve : Sachant que les Ei sont en somme directe et inclus dans E, on a ii) iii).

    i) iii) : Soit u diagonalisable. On considere une base (e1, , en) de vecteurs propresde u que lon ordonne de telle sorte que les 1 premiers vecteurs soient associes a 1, les2 suivants a 2. On a bien evidemment dim E1 = i et

    pi=1 i = n, ce qui entrane iii).

    ii) iv) : Supposons que E =p

    i=1 Ei . La matrice de u par rapport a une base adapteea cette decomposition est clairement du type voulu.

    iv) i) : Immediat.

    Corollaire 1.5.6 Si u a n valeurs propres deux a deux distinctes, 1, , n alors u est dia-gonalisable et tous ses sous-espaces propres sont de dimension 1. De plus, la matrice de u dansune base de vecteurs propres (x1, , xn) associes a 1, , n est

    matB(u) = diag(1, , n).

    Preuve : Comme les Ei sont en somme directe et tous de dimension au moins 1, on a

    dimni=1

    Ei =ni=1

    dim Ei n

    avec egalite si et seulement si tous les sous-espaces propres sont de dimension 1. Maispar ailleurs

    ni=1 Ei est inclus dans E donc est de dimension au plus n. On conclut que

    E =p

    i=1 Ei , et donc u est diagonalisable en vertu du theoreme 1.5.5.

    Theoreme 1.5.7 Un endomorphisme u End(E) est diagonalisable si et seulement siu est scinde dans K[X] et la dimension i de chaque sous-espace propre Ei de u estegale a la multiplicite i de i dans u. Dans ce cas, on a

    u = (1)n

    pi=1

    (X i)i ou Sp(u) = {1, , p}.

    Preuve : Grace au corollaire 1.4.8, on sait deja que pour tout i {1, , p}, on a i i.Puisque deg u = n, on a

    pi=1 i = n.

    Supposons u diagonalisable. Alors dapres le theoreme 1.5.5, on ap

    i=1 i = n, et doncnecessairement i = i pour tout i.

    Reciproquement, si i = i pour tout i, alorsp

    i=1 i = n, et donc u est diagonalisabledapres le theoreme 1.5.5.

    Attention : Lhypothese u scinde nentrane pas toujours u diagonalisable. On a vu parexemple que le polynome caracteristique dun endomorphisme nilpotent etait scinde : u =(X)n. Mais si u est nilpotent non nul alors u nest pas diagonalisable.

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    18 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    1.5.2 Methode pratique de diagonalisation

    Pour les endomorphismes : Soit u End(E) avec E de dimension n. On donne une methodesystematique permettant de determiner les valeurs propres et les sous-espaces propres de u.

    1. Calcul de u.

    2. Calcul des racines 1

    , , p de u.

    Si u a n racines deux a deux distinctes (i.e p = n), on peut tout de suite conclure que uest diagonalisable.

    3. On determine les sous-espaces propres de u.

    Le sous-espace propre Ei est lensemble des vecteurs x de E tels que

    (1.2) u(x) ix = 0.

    Si on note (x1, , xn) les coordonnees de x par rapport a une base donnee, resoudre(1.2) revient a resoudre un systeme homogene de n equations dont les n inconnues sontles coordonnees de x. La dimension i de Ei est le nombre dinconnues non principalesde ce systeme lineaire. La resolution du systeme lineaire permet de trouver i vecteursindependants x1i , , x

    i

    i de Ei .

    4. Conclusion.

    Lendomorphisme u est diagonalisable si et seulement si i est egal a la multiplicite i dei pour tout i. Dans ce cas, la famille (x

    11, , x

    11 , x

    12, , x

    22 , , x

    1p, , x

    pp ) est une

    base de vecteurs propres pour u.

    Pour les matrices : Soit A Mn(K). Donnons une methode systematique permettant dedeterminer valeurs propres et vecteurs propres de A.

    1. Calcul de A.

    2. Calcul des racines 1, , p de A. Si u a n racines deux a deux distinctes (i.e p = n),on peut tout de suite conclure que u est diagonalisable.

    3. Pour chaque i, on resout le systeme lineaire homogene (A iIn)X = 0. Lensemble deses solutions est Ei . La dimension i de Ei est le nombre dinconnues non principales.On peut extraire i vecteurs colonnes X

    1i , , X

    ii formant une base de Ei .

    4. Conclusion.

    La matrice A est diagonalisable si et seulement si i est egal a la multiplicite i de i pourtout i. Dans ce cas, on a

    A = P

    I1 0 0

    0 I2. . .

    ......

    . . .. . . 0

    0 0 Ip

    P1,

    ou P est la matrice de colonnes (X11 , , X11 , X

    12 , , X

    22 , , X

    1p , , X

    pp ).

    1.6 Endomorphismes trigonalisables

    Definition 1.6.1 On dit que u End(E) est trigonalisable sil existe une base B de Epar rapport a laquelle matB(u) est triangulaire superieure.On dit que A Mn(K) est trigonalisable sil existe B Mn(K) triangulaire superieuretelle que A B.

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    1.6. ENDOMORPHISMES TRIGONALISABLES 19

    Theoreme 1.6.2 Un endomorphisme u est trigonalisable si et seulement si son polynomecaracteristique u est scinde.De plus, si u =

    ni=1(i X) alors on peut trouver une base B de E telle que

    (1.3) matB(u) = 1

    0 2

    . ..

    ..

    ..... . .

    . . . 0 0 n

    .De meme, une matrice A Mn(K) est trigonalisable si et seulement si A est scinde. Deplus, si A =

    ni=1(i X), alors A est semblable a une matrice triangulaire superieure

    du type (1.3).

    Preuve : Traitons le cas dun endomorphisme. Si u est trigonalisable, alors la matrice T de udans une base bien choisie est triangulaire superieure. Par consequent u =

    ni=1(tii X),

    et donc u est scinde.

    La preuve de la reciproque se fait par recurrence sur n = dim E. On considere la propriete(Pn) suivante :

    E t.q. dim E = n, u End(E),u =

    ni=1

    (i X)

    B base t.q. matB(u) est du type (1.3)

    .

    Cas n = 1. Il ny a rien a prouver. Un endomorphisme de polynome caracteristique1 X dans un e.v. de dimension 1 est forcement lhomothetie de rapport 1.

    Supposons (Pn) vraie et montrons (Pn+1). Considerons un e.v. E de dimension n +1 et

    u End(E) tel que u =n+1

    i=1(i X).

    Soit e1 un vecteur propre non nul de u pour la valeur propre 1. On complete (e1) enune base B = (e1, e2, , e

    n+1) de E. Clairement, il existe A

    Mn(K) telle que

    matB(u) =

    1 0 A

    .

    Soit p le projecteur sur Fdef= Vect(e2, , e

    n+1) parallelement a Ke1. On definit u

    End(F) en posant u(x) = p(u(x)) pour x F. On constate que A est la matrice de u

    par rapport a la base (e2, , en+1) de F. On a donc

    u = (1 X)det(A XIn) = (1 X)u .

    Donc u =n+1i=2

    (i X).

    On peut donc appliquer (Pn) a lespace F et a lendomorphisme u et trouver une base(e2, , en+1) de F par rapport a laquelle la matrice de u est

    T =

    2

    0 3. . .

    .... . .

    . . .. . .

    ......

    . . . n 0 0 n+1

    .

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    20 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Si lon choisit Bdef= (e1, e2, , en+1), on trouve

    matB(u) =

    1 0 T

    ,

    donc matB(u) est du type voulu.

    Corollaire 1.6.3 Toute matrice est trigonalisable dans C. De meme, si E est unC-espacevectoriel de dimension finie, tout element de End(E) est trigonalisable.

    Preuve : Consequence immediate du theoreme de dAlembert-Gauss.

    Corollaire 1.6.4 Les quatre assertions suivantes sont equivalentes :

    i) u est nilpotent,

    ii) Sp(u) = {0},

    iii) u = (1)nXn,

    iv) Il existe une base B par rapport a laquelle la matrice de u est du type

    matB(u) =

    0

    0 0. . .

    ......

    . . .. . .

    0 0 0

    .Preuve : On a deja vu dans la proposition 1.3.8 que i) ii), puis que ii) iii).

    iii) iv) : Supposons que u = (X)n. Dapres le theoreme 1.6.2, on peut trouver une

    base par rapport a laquelle la matrice de u est triangulaire superieure avec des 0 sur ladiagonale.

    iv) i) : Si la matrice de u par rapport a une base donnee est triangulaire superieureavec des 0 sur la diagonale, alors elle nilpotente. Donc u est nilpotent.

    Corollaire 1.6.5 Si F est stable par u alors u trigonalisable entrane uF trigonalisable.

    Preuve : En vertu de la proposition 1.4.7, uF divise u. Donc uF est egalement scinde cequi, grace au theoreme 1.6.2 montre que uF est trigonalisable.

    Methode pratique de trigonalisation des matrices :

    1. Calcul de A

    2. Determination des racines de A.

    3. On determine les sous-espaces propres de A en resolvant AX = X pour Sp(A).

    On obtient ainsi p vecteurs colonnes propres lineairement independants (X1, , Xp). Sip = n, A est en fait diagonalisable, et on conclut comme dans le paragraphe precedent.Sinon, on complete (X1, , Xp) en une base (X1, , Xn) de Kn. Soit P la matrice decolonnes (X1, , Xn). On a

    A = P

    1 0. . .0 p

    0 B

    P1.

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    1.7. POLYNOMES DENDOMORPHISMES ET DE MATRICES 21

    Si lon note u lendomorphisme de matrice A par rapport a la base canonique de Kn, et le

    projecteur sur Fdef= Vect(Xp+1, , Xn), la matrice B est la matrice de lendomorphisme

    u : x (u(x)) de End(F) par rapport a la base (Xp+1, , Xn).

    Letape suivante consiste a trigonaliser B (qui est une matrice carree de taille n p seule-ment). Comme B est scinde (car divise A qui est scinde), la matrice B est trigonali-

    sable. Donc on peut trouver q vecteurs propres Y1, , Yq de B lineairement independantset associes a q valeurs propres 1, , q de B. On complete cette famille en une base(Y1, , Ynp) de Kn

    p. Si lon note R la matrice de colonnes (Y1, , Ynp), on a

    B = R

    1 0. . .0 q

    0 C

    R1.

    On peut aisement revenir a la matrice initiale A en interpretant la matrice par blocs

    Q =

    Ip 00 R

    comme la matrice de passage de (X1, , Xn) a (X1, , Xp, Y1, , Ynp). Finalement,on a donc

    A = PIp 00 R

    1 0. . .0 p

    01 0. . .

    0 q

    0 0 C

    Ip 00 R1P1.

    A ce stade, si C est triangulaire superieure, le processus de trigonalisation est termine,sinon, on applique la methode precedente a C qui est de taille n p q.

    Remarque : Si lon excepte le cas ou A est la matrice dune homothetie, une matrice trigona-lisable (resp. diagonalisable) est semblable a plusieurs matrices triangulaires (resp. diagonales)differentes.

    1.7 Polynomes dendomorphismes et de matrices

    Pour tout endomorphisme u End(E), on sait definir les puissances entieres de u. Lescombinaisons lineaires de ces puissances sont encore des elements de End(E). Cela motive ladefinition suivante :

    Definition 1.7.1 SoitP = apXp+ + a0 un polynome etu un endomorphisme. On note P(u)

    lendomorphisme obtenu en remplacant X par u dans lexpression de P avec la convention quele terme constant a0 est remplace par a0 Id. On dit que P(u) est un polynome dendomor-phisme.

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    22 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Attention : Un polynome dendomorphisme est un endormorphisme.

    Exemple : Soit P = X2 X+ 1 et u End(E). Lendomorphisme P(u) est par definition egala u2 u + Id.

    On dispose du resultat fondamental suivant (dont la preuve est immediate) :

    Proposition 1.7.2 Pour u End(E), lapplication

    :

    K[X] End(E)P P(u),

    (ouK[X] designe lensemble des polynomes a coefficients dans K) verifie

    1. P K[X], Q K[X], (P + Q) = (P) + (Q),

    2. P K[X], K, (P) = (P),

    3. P K[X], Q K[X], (P Q) = (P)(Q),

    4. (1) = Id.

    On dit que est un morphisme dalgebre.

    De meme, pour toute matrice carree A Mn(K) et tout polynome P = apXp + + a0 deK[X], on peut definir la matrice P(A) = apA

    p + + a0In. On a bien sur la

    Proposition 1.7.3 Pour A Mn(C), lapplication

    :

    K[X] Mn(K)P P(A),

    est un morphisme dalgebre.

    Exemple : Soit A une matrice triangulaire superieure :

    A =

    1

    0 2 . . . ......

    . . .. . .

    0 0 n

    .Alors pour tout P K[X], on a

    P(A) =

    P(1)

    0 P(2). . .

    ......

    . . .. . .

    0 0 P(n)

    .

    Il y a un rapport etroit entre polynomes dendomorphismes et polynomes de matrices :

    Proposition 1.7.4 Soit E e.v de dimension n, B base de E et u End(E). Notons A =matB(u). Alors, pour tout polynome P, on a

    matB(P(u)) = P(A).

    En plus detre des morphismes dalgebre, les applications et ont dautres proprietes utiles :

    Proposition 1.7.5 Soit u End(E) et A Mn(K). On a pour tout P K[X] et Q K[X],

    P(u)Q(u) = Q(u)P(u) = (P Q)(u), P(A)Q(A) = Q(A)P(A) = (P Q)(A) et t[P(A)] = P(tA).

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    1.7. POLYNOMES DENDOMORPHISMES ET DE MATRICES 23

    Preuve : Resulte dune part de la commutativite de K[X], dautre part de la formule t(A2) =tAtA = (tA)2 qui setend en t(Ap) = (tA)p pour tout p N.

    Proposition 1.7.6 Si u End(E) et P K[X] alors Im P(u) et Ker P(u) sont stables par u.

    Preuve : Comme u et P(u) commutent, le resultat decoule de la proposition 1.3.5.

    Proposition 1.7.7 Soit P K[X]. Soit u End(E) tel que u soit scinde. Alors P(u) estegalement scinde.

    Plus precisement, si u =n

    i=1(i X), alors on a P(u) =n

    i=1(P(i) X). Resultatanalogue pour les matrices.

    Preuve : Si u =n

    i=1(i X), le theoreme 1.6.2 assure lexistence dune base B de E telleque

    matB(u) =

    1

    0 2. . .

    ......

    . ..

    . .. 0 0 n

    .

    De ce fait,

    matB(P(u)) =

    P(1)

    0 P(2). . .

    ......

    . . .. . .

    0 0 P(n)

    .Il est donc immediat que P(u) =

    ni=1(P(i) X).

    Corollaire 1.7.8 Pour u End(E) et P K[X], on a toujours P(Sp(u)) Sp(P(u)). Si de

    plus u est scinde alors P(Sp(u)) = Sp(P(u)). En particulier, si E est un espace vectoriel dedimension finie surC, on aP(Sp(u)) = Sp(P(u)).

    Preuve : Soit Sp(u) et x un vecteur propre non nul de u associe a . Alors u(x) = x,puis par recurrence, uk(x) = kx pour tout k N. On en deduit que

    P(u)(x) = P()x,

    ce qui permet de conclure que P() Sp(P(u)). Dou P(Sp(u)) Sp(P(u)).

    Supposons de plus que u soit scinde. Dapres la proposition 1.7.7, si u =n

    i=1(i X),alors on a P(u) =

    ni=1(P(i) X). On en deduit que Sp(P(u)) si et seulement si il

    existe Sp(u) tel que P() = , ce qui est exactement le resultat voulu.Pour les matrices, on a le resultat suivant :

    Corollaire 1.7.9 Soit A Mn(K) trigonalisable et P K[X]. Alors P(Sp(A))=Sp(P(A)). Enparticulier, pour toute matrice A Mn(C) et P C[X], on a P(Sp(A)) = Sp(P(A)).

    Definition 1.7.10 Soit u End(E) (resp. A Mn(K)). On appelle polynome annulateurde u (resp. de A) tout polynome P tel que P(u) = 0 (resp. P(A) = 0).

    Proposition 1.7.11 Soit A et B, deux matrices semblables, et R K[X]. Alors R(A) R(B).En particulier R(A) = 0 si et seulement si R(B) = 0.

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    24 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Preuve : Soit P GLn(K) telle que B = P1AP. On a donc B2 = P1AP P1AP =

    P1A2P, puis par une recurrence elementaire,

    (1.4) k N, Bk = P1AkP.

    En faisant des combinaisons lineaires dexpressions du type ci-dessus, on obtient

    (1.5) R K[X], R(B) = P1R(A)P.

    Comme P est inversible, on en deduit que R(A) = 0 si et seulement si R(B) = 0.

    La recherche de polynomes annulateur est dune importance capitale dans le processus dereduction des matrices ou des endomorphismes. On dispose du resultat fondamental suivant :

    Theoreme 1.7.12 (Cayley-Hamilton) Soit u un endomorphisme sur un espace vectoriel Ede dimension finie. Alors u(u) = 0. De meme, si A Mn(K) alors A(A) = 0.

    Preuve :

    1. Cas dune matrice de Frobenius

    On veut montrer que A est un polynome annulateur de A dans le cas ou A est une

    matrice de Frobenius. Soit donc

    A =

    0 0 a0

    1 0... a1

    0. . .

    . . ....

    ......

    . . .. . . 0

    ...0 0 1 an1

    .

    Notons Ei le vecteur colonne dont la i-eme composante vaut 1 et dont les autrescomposantes sont nulles. On a clairement

    i {1, , n1}, AEi = Ai

    E1 = Ei+1 et AEn = An

    E1 = a0E1 + + an1En.On a par ailleurs etabli que

    A = (1)n(Xn

    n1i=0

    aiXi)

    donc, dapres les relations ci-dessus,

    A(A)E1 = (1)n

    AnE1 n1i=0

    aiAiE1

    = (1)n

    AEn n1i=0

    aiEi

    = 0.

    puis, pour i {2, , n},

    A(A)Ei = A(A)Ai1E1 = A

    i1A(A)E1 = 0,

    ce qui montre que A(A) = 0.

    2. Plus petit sous-espace stable contenant un element donne.

    Soit x E non nul. On cherche a determiner le plus petit sous espace stable F deu qui contient x. Un tel espace doit contenir aussi u(x), puis u2(x), etc. On posedonc F = Vect(x, u(x), , uk(x), ). Cest clairement un sous-espace stable deu. De plus, comme F est un sous-espace de E qui est de dimension n, la famille

    x, u(x), , up(x)

    est forcement liee des que p n. On en deduit aisement le lemmesuivant :

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    1.8. POLYNOME MINIMAL 25

    Lemme 1.7.13 Il existe un entier p n unique tel que

    x, u(x), , up1(x)

    soitune famille libre et la famille

    x, u(x), , up1(x), up(x)

    soit liee. On a alors

    F = Vect(x, u(x), , up1(x)).

    En particulier, F est de dimension p.

    Notons v lendomorphisme induit par u sur F, ei def= ui1(x) et B def= (e1, , ep). Ona u(ei) = ei+1 pour i < p. De plus la famille

    x, u(x), , up(x)

    etant liee, il existe

    p coefficients a0, , ap1 tels que

    u(ep) = up(x) = a0x + + ap1u

    p1(x) = a0e1 + + ap1ep.

    On en deduit que la matrice de v dans la base B est une matrice de Frobenius. Enparticulier, dapres la premiere etape, v(v) = 0.

    3. Preuve dans le cas general

    Soit x E. On cherche a montrer que u(u)(x) = 0. Si x = 0, cest evident. Sinon,on considere le plus petit sous-espace stable F contenant x, et lendomorphisme v

    induit par u sur F.On sait dune part que v(v) = 0 (et donc v(v)(x) = v(u)(x) = 0 puisque x F),dautre part que v divise u (cf prop. 1.4.7). Donc u(u)(x) = 0.

    1.8 Polynome minimal

    Nous avons vu dans la section precedente que tout endomorphisme u admettait au moinsun polynome annulateur non nul : u. On peut se demander sil en existe dautres et si certainspolynomes annulateurs sont dun interet particulier. Pour repondre a ces questions, il convient

    dabord de rappeler ce quest un ideal

    3

    deK

    [X].Definition 1.8.1 On dit que A est un ideal de K[X] si les proprietes suivantes sont verifiees :

    1. A est un sous-groupe de (K[X], +),

    2. A est stable par multiplication (i.e P A, Q K[X], P Q A).

    On dispose alors du resultat fondamental suivant :

    Theoreme 1.8.2 Pour tout ideal A de K[X] non reduit a {0}, il existe un unique polynomeunitaire4 I tel que A = IK[X]. Ce polynome I est appele generateur de lideal A et on dit queK[X] est un anneau principal.

    Mais revenons aux polynomes annulateurs. On a le

    Theoreme 1.8.3 Soitu End(E). Alors lensemble des polynomes annulateurs de u estKer (ou a ete definie a la proposition 1.7.2). Cet ensemble est un ideal de K[X] non reduit a {0}.Son generateur est appele polynome minimal de u et note mu.

    Preuve : Il est clair que lensemble des polynomes annulateurs de u est ker . Cet ensembleest stable par combinaison lineaire et par produit. Cest donc un ideal de K[X]. De plusil contient u (cf th. de Cayley-Hamilton) qui nest pas nul, donc ker nest pas reduit a{0}. Le theoreme 1.8.2 assure lexistence de mu.

    3Pour plus de details, consulter un cours de 1ere annee, par exemple [3].4Cest-a-dire a coefficient dominant egal a 1

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    26 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    La proposition suivante qui decoule facilement de la definition du generateur dun ideal, permetde caracteriser le polynome minimal.

    Proposition 1.8.4 Soit u End(E) et P un polynome unitaire. Les proprietes suivantes sontequivalentes :

    i) P = mu,

    ii) P(u) = 0 et

    Q(u) = 0

    P | Q

    ,

    iii) P(u) = 0 et

    Q(u) = 0 avec Q = 0

    deg P deg Q

    .

    De facon analogue, pour toute matrice carree A, ker est lensemble des polynomes annula-teurs de A. Cest un ideal non trivial de K[X], ce qui permet de definir le polynome minimalmA de A. Il y a bien sur une correspondance etroite entre polynome minimal de matrices etdendomorphismes :

    Proposition 1.8.5 Soit u End(E) de matrice A par rapport a une base B donnee. Alorsmu = mA.

    Dapres le theoreme de Cayley-Hamilton, le polynome caracteristique est un polynome annula-teur. De la proposition precedente, on deduit la

    Proposition 1.8.6 Le polynome minimal divise le polynome caracteristique. En particulier,

    1 deg mu n.

    De plus, si u (resp. A) est scinde alors mu (resp. mA) aussi.

    Voila quelques proprietes elementaires satisfaites par le polynome minimal :

    Proposition 1.8.7 Soit u End(E) et A Mn(K). On a

    i) mA

    = m tA

    ,

    ii) Si A est semblable a B Mn(K) alors mA = mB.

    Preuve : La preuve de i) decoule de la formule P(tA) = t(P(A)).

    Si A et B sont semblables, alors elles ont les memes polynomes annulateurs (cf. prop.1.7.11), ce qui donne iii).

    Comme pour le calcul du polynome caracteristique (cf. prop. 1.4.7), connatre des sous-espaces stables donne des renseignements sur le polynome minimal :

    Proposition 1.8.8 Soit u End(E).

    i) Si F est un sous-espace stable de u alors muF divise mu.

    ii) Si E = F G avec F et G sous-espaces stables de u alors mu = P P C M (muF , muG).Preuve : Soit F un sous-espace stable de u et soit P un polynome annulateur de u. On a

    P(u)(x) = 0 pour tout x E, donc a fortiori pour tout x F. Donc P(uF) = 0. DoncmuF divise P. En particulier, muF divise mu, ce qui prouve i).

    Si u possede deux sous-espaces stables F et G tels que E = F G, on sait deja dapres i)

    que muF et muG divisent mu. Donc Mdef= P P C M (muF, muG) divise mu.

    Pour montrer legalite, considerons x E que lon decompose en x = y + z avec y Fet z G. Le polynome M est un multiple de muF (resp. muG) donc est un polynomeannulateur de uF (resp. uG). En consequence M(uF)(y) = M(u)(y) = 0 et M(uG)(z) =M(u)(z) = 0, dou M(u)(x) = 0.

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    1.8. POLYNOME MINIMAL 27

    Proposition 1.8.9 Soit u End(E) et K. Les proprietes suivantes sont equivalentes :

    i) est valeur propre de u,

    ii) est racine de u,

    iii) est racine de mu.

    Resultat analogue pour les matrices.

    Preuve : i) ii) a deja ete prouve (cf. th. 1.4.6).

    i) iii) : Soit une valeur propre de u et x un vecteur propre non nul associe a . On a

    0 = mu(u)(x) = mu()x.

    Donc mu() = 0.

    iii) i) : Soit une racine de mu. Alors mu peut etre factorise par (X ) : il existeQ K[X] tel que mu = (X )Q. Or Q ne peut pas etre un polynome annulateur de u.Donc il existe x E tel que Q(u)(x) = 0.

    Par ailleurs,0 = mu(u)(x) = (u Id)[Q(u)(x)].

    Donc ker(u Id) contient un vecteur non nul, ce qui montre que est valeur propre deu.

    Exemples :

    1. Homotheties

    Si u End(E) est lhomothetie de rapport alors mu = X .

    En effet, par definition meme de u, le polynome X est un polynome annulateur de u.Mais comme deg mu 1, on en deduit que mu = X .

    2. Projections

    On suppose que E = F G (avec F et G non reduits a {0}). Soit p le projecteur sur Fparallelement a G. On sait que Sp(p) = {0, 1} donc 0 et 1 doivent etre racines de mp. DoncX2 X doit diviser mp. Mais tout projecteur verifie p

    2 p = 0. Donc

    mp = X2 X.

    3. Symetries

    On suppose que E = F G (avec F et G non reduits a {0}). Soit s la symetrie par rapporta F parallelement a G. On sait que Sp(s) = {1, 1} donc X2 1 doit diviser ms. Maistoute symetrie verifie s2 Id = 0. Donc

    ms = X2 1.

    4. Endomorphismes nilpotents

    Soit u nilpotent dindice p. Par definition meme de p, on sait que Xp est un polynomeannulateur de u, et que Xp1 ne lest pas. Donc mu doit diviser X

    p mais pas Xp1. Celaentrane

    mu = Xp.

    Remarque : Comme mu doit diviser u = (1)nXn, on a montre au passage que lindicede nilpotence dun endomorphisme nilpotent sur E est inferieur ou egal a la dimension deE.

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    28 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    5. Matrice de Frobenius

    Soit A une matrice de Frobenius de taille n. On a vu dans la preuve du theoreme deCayley-Hamilton que

    i {1, , n 1}, AiE1 = Ei+1.

    Donc les vecteurs colonnes (E1, AE1, , An1E1) sont lineairement independants. On en

    deduit quil nexiste pas de polynome P non nul de degre strictement inferieur a n et telque P(A)E1 = 0. Mais on sait que A (qui est de degre n) annule A. Donc,

    mA = (1)nA = X

    n n1i=0

    aiXi.

    Lemme 1.8.10 (Lemme des noyaux) SoitP etQ deux polynomes premiers entre eux. Alors

    ker(P Q)(u) = ker P(u) ker Q(u).

    Preuve : Dapres le theoreme de Bezout 5, il existe deux polynomes U et V tels que

    (1.6) P U + QV = 1.

    Soit x Ker P(u) Ker Q(u). Dapres (1.6), on ax = U(u)[P(u)(x)]

    y

    + V(u)[Q(u)(x)] z

    = 0

    puisque P(u)(x) = Q(u)(x) = 0. Donc Ker P(u) Ker Q(u) = {0}.

    Si maintenant x Ker(P Q)(u) alors, la decomposition x = y + z ci-dessus donne

    Q(u)(y) = (QUP)(u)(x) = (U P Q)(u)(x) = U(u)[(P Q)(u)](x) = 0,

    donc y Ker Q(u).

    De meme, on montre que z Ker P(u), dou

    Ker(P Q)(u) ker P(u) ker Q(u).

    Il est par ailleurs clair que ker P(u) ker(P Q)(u) et que ker Q(u) ker(P Q)(u), dou leresultat voulu.

    Remarque : Si P Q est un polynome annulateur de u, alors le lemme des noyaux donne unedecomposition de E en somme de deux sous-espaces stables de u.

    Remarque 1.8.11 Une recurrence elementaire permet de prouver la generalisation suivante dulemme des noyaux. Soit Q1, , Qk k polynomes premiers entre eux dans leur ensemble. Alorson a

    ker(k

    i=1

    Qi)(u) =k

    i=1

    ker Qi(u).

    Theoreme 1.8.12 Soit u End(E) de spectre Sp(u) = {1, , p}. Les proprietessuivantes sont equivalentes.

    i) u est diagonalisable,

    ii) mu =

    pi=1

    (X i),

    iii) mu est scinde a racines simples,

    iv) u admet un polynome annulateur scinde a racines simples.

    Resultat analogue pour les matrices.

    5Voir le cours de 1ere annee [3].

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    1.8. POLYNOME MINIMAL 29

    Preuve : i) ii) : Dapres la proposition 1.8.9, les racines de mu sont les valeurs propres de

    u. Donc le polynome Mdef=

    pi=1

    (X i) divise mu.

    Si xi est un vecteur propre associe a i, alors il est clair que (u i Id)(xi) = 0, et donc

    (1.7) M(u)(xi) = j=i

    (j Id u)(i Id u)(xi) = 0.Si u est diagonalisable alors en vertu du theoreme 1.5.5, E =

    pi=1 Ei . Donc tout x E

    se decompose en x = x1 + + xp avec xi Ei puis, grace a (1.7),

    M(u)(x) =

    pi=1

    M(u)(xi) = 0.

    ii) iii) et iii) iv) : Trivial.

    iv) i) : Soit P un polynome annulateur de u scinde a racines simples (que lon peut

    toujours supposer unitaire) :

    P =

    qi=1

    (X i) avec les i deux a deux distincts.

    Comme les polynomes Xi sont premiers entre eux dans leur ensemble, on peut appliquerle lemme des noyaux generalise (remarque 1.8.11), ce qui donne

    E = ker P(u) =

    qi=1

    ker(u i Id).

    Si, dans cette decomposition, on ne garde que les i tels que ker(u i Id) ne soit pasreduit a {0}, on a obtenu une decomposition de E en somme de sous-espaces propres deu. Donc u est diagonalisable.

    Corollaire 1.8.13 Soit u un endomorphisme diagonalisable et F un sous-espace stable de u.Alors lendomorphisme uF induit par u sur F est diagonalisable.

    Preuve : Si u est diagonalisable, alors, dapres le theoreme 1.8.12, il existe P K[X] scinde aracines simples tel que P(u) = 0. On a bien sur aussi P(uF) = 0. Donc, a nouveau dapresle theoreme 1.8.12, uF est diagonalisable.

    Theoreme 1.8.14 (Reduction simultanee) Soit u et v deux endomorphismes diagonalisa-

    bles de E qui commutent. Alors il existe une base de diagonalisation commune pour u et v.De meme, si A et B sont deux matrices diagonalisables qui commutent, alors il existe P

    GLn(K) et deux matrices diagonales D et D telles que

    A = P DP1 et B = P DP1.

    Preuve : Traitons le cas des endomorphismes. Soit donc u et v diagonalisables qui commutent.En vertu du theoreme 1.5.5, on peut ecrire

    (1.8) E =

    pi=1

    Ei(u).

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    30 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Comme u et v commutent, chaque Ei(u) est stable par v, et on peut donc definir len-domorphisme vi induit par v sur Ei(u). Dapres le corollaire 1.8.13, vi est diagonalisable.Donc on peut trouver une base (ei1, , e

    ii

    ) de Ei(u) qui est une base de vecteurs proprespour vi. Bien sur, chaque e

    ik est egalement vecteur propre de u pour i.

    En rassemblant les bases obtenues pour chaque Ei(u), on obtient une base de E (grace a

    (1.8)) qui est une base commune de vecteurs propres pour u et v.Remarque : Ce theoreme de reduction simultanee setend sans difficulte majeure au cas de pendomorphismes diagonalisables qui commutent.

    1.9 Sous-espaces caracteristiques

    Lemme 1.9.1 Soit u End(E) et une valeur propre de u. Notons la multiplicite de dansmu. Alors la suite de sous-espaces vectoriels {ker(u Id)

    m}mN est croissante (au sens delinclusion) et stationnaire a partir du rang .

    Preuve : Notons v

    def

    = u Id. Il est clair que vm

    (x) = 0 entrane vm+1

    (x) = 0. On a doncbien ker vm ker vm+1. De plus, il nest pas difficile de verifier queker vm = ker vm+1

    ker vm+1 = ker vm+2

    .

    Par consequent la suite

    dim(kervm)mN

    est une suite croissante dentiers qui devient

    stationnaire des que deux termes consecutifs sont egaux. Comme elle est visiblement ma-joree par n = dim E, on conclut quil existe un p n tel que (ker vm)mN soit strictementcroissante pour m p 1 et stationnaire a partir du rang p.

    Le polynome minimal mu de u peut se decomposer en

    mu = Q(X ).

    avec Q et (X ) premiers entre eux. A fortiori Q et X sont premiers entre eux, etdonc, dapres le lemme des noyaux,

    (1.9) ker Q(u) ker(u Id) = {0}.

    Par definition de p, il existe x ker(u Id)p tel que ydef= (u Id)p1(x) = 0. Comme

    de plus y ker(u Id), la relation (1.9) assure que y Ker Q(u). Donc

    Q(u)(y) = Q(u)(u Id)p1(x) = 0.

    On conclut que Q(X )p1 nest pas un polynome annulateur de u, et donc p .

    A ce point, on peut affirmer que ker(u Id) = ker(u Id)p. Appliquons le lemme desnoyaux :

    E = ker Q(u) ker(u Id) = ker Q(u) ker(u Id)p.

    On conclut que Q(X )p est un polynome annulateur de u, dou p.

    Definition 1.9.2 Soit u End(E) et une valeur propre de u de multiplicite dans mu.

    Lespace E(u)def= ker(u Id) (note simplement E en labsence dambigute) est appele sous-

    espace caracteristique de u associe a la valeur propre .

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    1.9. SOUS-ESPACES CARACTERISTIQUES 31

    Remarque : Si est valeur propre de u, on a toujours E E. De plus, si lon note la

    multiplicite de dans u, on a n et de ce fait,

    E = ker(u Id) = ker(u Id) = ker(u Id)n.

    Exemples :

    1. Endomorphismes diagonalisables : Si u est diagonalisable, pour chaque valeur propre de u, on a E = E

    .

    2. Endomorphismes nilpotents : Si u est nilpotent alors u a un seul sous-espace ca-racteristique : E0 = E.

    Theoreme 1.9.3 Soit une valeur propre de u de multiplicite dans u et dans mu. AlorsE est un sous-espace stable de u de dimension . De plus, lendomorphisme v induit paru Id sur E est nilpotent dindice .

    Preuve : La stabilite decoule de la proposition 1.7.6.

    Notons u (resp. v) lendomorphisme induit par u (resp. u Id) sur E.

    Dapres le lemme 1.9.1, v

    = 0 et v1

    = 0. Donc v est nilpotent dindice . Dapres laproposition 1.4.7, u divise u, et en revenant a la definition du polynome caracteristique,on montre facilement que

    x K, u(x) = v(x ).

    Mais v = (X)p avec p = dim E (cf corollaire 1.6.4), donc u = ( X)

    p.

    Par ailleurs, il existe un polynome Q premier avec (X ) et tel que u = Q(X ).

    Dapres le lemme des noyaux, on a

    (1.10) E = ker Q(u) ker(u Id),

    et lon sait que ker Q(u) est stable par u (cf prop. 1.7.6), et que ker(u Id) = E(puisque ). Soit w lendomorphisme induit par u sur ker Q(u). Remarquons tout desuite que nest pas valeur propre de w (cela contredirait (1.10)). Par ailleurs, dapres laproposition 1.4.7, on a

    u = uw = ( X)pw = Q(X )

    .

    Les polynomes (X)p et w (resp. Q et (X)) sont premiers entre eux. En appliquantle theoreme de Gauss, on conclut que = p.

    Theoreme 1.9.4 Soit u End(E) a polynome caracteristique scinde et de spectre Sp(u) ={1, , p}. Notons i la multiplicite de i dans u. Alors on a

    E =

    pi=1

    Ei

    et il existe une base B de E telle que

    matB(u) =

    T1 0 0

    0 T2. . .

    ......

    . . .. . . 0

    0 0 Tp

    ,ou Tk est une matrice triangulaire superieure de taille k avec des k sur la diagonale.

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    32 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    Preuve : Comme u est scinde, on a

    u = (1)n

    pi=1

    (X i)i .

    Les polynomes (Xi)i sont premiers entre eux dans leur ensemble. Le lemme des noyaux

    generalise assure donc que les sous-espaces caracteristiques sont en somme directe. Maison sait grace au theoreme precedent que dim Ei = i. Donc

    pi=1

    dim Ei =

    pi=1

    i = n,

    dou E =p

    i=1 Ei

    .

    Grace au theoreme precedent, lendomorphisme ui induit par u sur Ei

    peut secrire

    ui = iIdEi

    + vi avec vi nilpotent,

    et donc ui = (i X)i . Le theoreme 1.6.2 assure lexistence dune base Bi par rapport

    a laquelle la matrice Ti de ui est triangulaire superieure de taille i avec des i sur ladiagonale.

    En prenant la reunion de toutes ces bases Bi pour i decrivant {1, , p}, on obtient unebase B de E par rapport a laquelle la matrice de u est du type voulu.

    Theoreme 1.9.5 (Decomposition de Dunford) Soit u End(E) a polynome ca-racteristique scinde. Alors il existe un endomorphisme d diagonalisable et un endomor-phisme nilpotent tels que

    u = d + et d = d.

    Cette decomposition est unique.

    Preuve : Notons Sp(u) = {1, , p}.Existence de la decomposition : Soit pi le projecteur sur E

    i

    parallelement a

    i=j Ej

    .Posons

    d =

    pi=1

    ipi et = u d.

    Remarquons que, par construction, chaque Ei est stable par d, u et .

    De plus, il est clair que d(x) = ix pour tout x Ei

    . On en deduit que toute base adapteea la decomposition E =

    pi=1 E

    i

    est une base de vecteurs propres pour d. Donc d estdiagonalisable.

    Par ailleurs, lendomorphisme induit par u d sur Ei nest autre que uEi i IdE

    i

    qui

    est nilpotent (cf th. 1.9.3). En utilisant une fois de plus que E = pi=1 Ei , il est alors aisedetablir que

    def= u d est nilpotent.

    Reste a verifier que et d commutent. Soit x E. On peut decomposer x de facon uniqueen

    x =

    pi=1

    xi avec x1 E1 , , xp E

    p .

    Comme d(xi) = ixi, on a

    d(x) = (d) pi=1

    xi

    =

    pi=1

    (d(xi)) =

    pi=1

    i(xi).

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    1.9. SOUS-ESPACES CARACTERISTIQUES 33

    Mais comme chaque (xi) est dans Ei

    , on a egalement d((xi)) = i(xi), dou

    pi=1

    i(xi) =

    pi=1

    d((xi)) = (d) pi=1

    xi

    = d(x).

    Unicite de la decomposition : Supposons que lon puisse trouver un deuxieme couple(d, ) tel que u = d + avec d diagonalisable, nilpotent et d = d.

    On constate que

    ud = (d + )d = (d)2 + d = (d)2 + d = d(d + ) = du.

    De meme u et commutent. De ce fait, d et commutent avec tout polynome en u,donc en particulier avec tous les (u i Id)

    i . En appliquant la proposition 1.7.6, on endeduit que tous les Ei sont stables par d

    et .

    Des lors, les arguments qui ont servi a prouver que d = d permettent egalement demontrer que dd = dd et d = d. Comme = ud, on en deduit que d et commutentaussi avec .

    Le theoreme de reduction simultanee assure que d et d admettent une base commune devecteurs propres. Donc d d est diagonalisable. Par ailleurs, comme et commutent,on peut appliquer la formule du binome de Newton pour calculer ( )p :

    ( )p =

    pk=0

    Ckp k(1)pk()pk.

    Pour p 2n et k {0, , p}, lun des deux entiers k et p k est forcement superieurou egal a n, donc le produit k(1)pk()pk est nul. Donc ( )p est nul et estnilpotent.

    Mais = d d donc est a la fois nilpotent et diagonalisable. Cest donclendomorphisme nul. Cela entrane evidemment que d = d.

    Voici la version matricielle de la decomposition de Dunford :

    Theoreme 1.9.6 Soit A Mn(K) telle que A soit scinde. Alors il existe une matriceD diagonalisable, et une matrice N nilpotente telles que

    A = D + N et DN = ND.

    Cette decomposition est unique.

    Remarque : En particulier toute matrice A de Mn(C) admet une decomposition de Dunford

    dans Mn(C

    ).Attention : Dans la section 1.6, on a vu une methode de trigonalisation des matrices. Lamatrice triangulaire superieure obtenue peut bien sur se decomposer en D + N avec D diagonaleet N triangulaire superieure avec des 0 sur la diagonale, donc nilpotente. Mais il ny a aucuneraison pour que D et N commutent.

    Trouver la decomposition de Dunford dune matrice de Mn(C) :On note u lendomorphisme de matrice A par rapport a la base canonique de Cn. Voila

    comment proceder pour trouver la decomposition de Dunford de A.

    1. Calcul de A

    2. Determination des racines (1, , p) de A et de leur multiplicite 1, , p.

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    34 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

    3. Determination dune base particuliere adaptee a la decomposition E =

    Ei .

    Soit ui lendomorphisme induit par u sur Ei

    . On sait deja que ui = i IdEi

    +i avec i

    nilpotent dindice i (multiplicite de i dans le polynome minimal de A).

    On veut trouver une base de Ei par rapport a laquelle la matrice de i est triangulaire

    superieure avec des 0 sur la diagonale. Pour cela, on determine une base (ei1, , eip1) de

    ker(u i Id), que lon complete en une base (ei1, , eip1+p2) de ker(u i Id)2, que loncomplete ensuite en base de ker(u i Id)

    3, etc, jusqua obtention dune base (ei1, , eii

    )de ker(u i Id)

    i tout entier. Il est facile de verifier que la matrice de i par rapport a(ei1, , e

    ii

    ) est triangulaire superieure avec des 0 sur la diagonale.

    La base de Cn cherchee est la reunion de toutes les bases (ei1, , eii

    ) determinees prece-demment.

    Remarque : Il nest pas toujours evident de connatre i davance. En pratique, on trouvecet indice au cours de la procedure de recherche dune base de Ei comme ci-dessus : cest

    le plus petit indice verifiant ker(u i Id)i = (u i Id)i+1.

    4. Decomposition de Dunford

    On forme la matrice P dont les colonnes sont les vecteurs de la base obtenue a letapeprecedente. On calcule T = P1AP. Cette matrice T est triangulaire superieure. On ladecompose en T = + ou est la matrice diagonale dont les termes diagonaux sontceux de T. Il ne reste plus qua poser

    D = PP1 et N = PP1.

    Application : Calcul des puissances dune matrice

    1. Cas diagonalisable : Dans ce cas, il existe P GLn(C) et D diagonale telles que A =P DP1. On constate que A2 = P DP1P DP1 = P D2P1. Une recurrence elementairedonne

    k N, Ak = P DkP1.

    Or, Dk se calcule tres facilement :

    D = diag(1, , n) = Dk = diag(k1, ,

    kn).

    Finalement, dans le cas A diagonalisable, le calcul de Ak est immediat pourvu que lonconnaisse les valeurs propres de A et la matrice de passage de la base canonique de Kn

    vers une base de vecteurs propres.

    Remarque : Si A est diagonalisable dans C mais pas dans R, rien nempeche de diago-naliser dans Mn(C). Le resultat final doit bien sur etre reel !

    2. Cas non diagonalisable : Quitte a travailler dans C, on peut toujours supposer que Aest trigonalisable. Cest alors que la decomposition de Dunford va saverer particulierementutile.

    En effet, on peut ecrire A = D + N avec D diagonalisable, N nilpotente, et DN = ND.Comme D et N commutent, on peut appliquer la formule du binome de Newton :

    Ak =k

    j=0

    CjkNjDkj .

    En fait, comme N est nilpotente, on a Nj = 0 pour j p avec p indice de nilpotence deN. La somme ci-dessus comporte donc au plus p termes6 meme si k est tres grand.

    6et lon sait de plus que p n.

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    1.9. SOUS-ESPACES CARACTERISTIQUES 35

    Pour effectuer le calcul le plus simplement possible, on peut utiliser les matrices , et Pobtenues au cours du processus de determination de la decomposition de Dunford. Commepar construction et commutent, on a

    Ak = (D + N)k = P( + )kP1 = Pk

    j=0 Cjk

    jkjP1.

    Les puissances de sont immediates a calculer puisque est diagonale. Par ailleurs est nilpotente donc j = 0 pour j n. Donc au pire, il faudra calculer les n 1 premierespuissances de .

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    36 CHAPITRE 1. REDUCTION DES ENDOMORPHISMES

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    Chapitre 2

    Espaces euclidiens et

    endomorphismes symetriques

    2.1 Formes bilineaires

    2.1.1 Generalites

    Dans toute cette partie, E et F sont des espaces vectoriels sur R.

    Definition 2.1.1 On dit quune applicationb est une forme bilineaire sur E F si b est uneapplication de E F a valeurs dans R qui est lineaire par rapport a chacune de ses variables :

    (x, x, y) EEF, (, ) R2, b(x+x, y) = b(x, y) + b(x, y),(x,y,y) EFF, (, ) R2, b(x,y +y) = b(x, y) + b(x, y).

    On note L2(E F;R) lensemble des formes bilineaires sur E F.

    Exemples :

    1. Multiplication dans R :

    b :

    RR R(x, y) xy.

    2. Integration dun produit de fonctions de Edef= C([0, 1];R) :

    b :

    EE R

    (u, v)

    10

    u(x)v(x) dx.

    3. Produit scalaire de deux vecteurs de R2 :

    b :

    R2R2 R(u, v) u1v1 + u2v2.

    4. Determinant de deux vecteurs de R2 :

    b :

    R2R2 R

    (u, v) det(u, v).

    On supposera desormais que E et F sont de dimension finie : dim E = n et dim F = p.

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    2.1. FORMES BILINEAIRES 39

    2.1.2 Formes bilineaires symetriques

    Dans toute la suite, on supposera que F = E.

    Definition 2.1.7 On dit que b L2(E E;R) est une forme bilineaire symetrique si

    (x, y) E E, b(x, y) = b(y, x).

    On note S2(E;R) lensemble des formes bilineaires symetriques surR.

    Definition 2.1.8 Si b S2(E;R), on pose

    x E, q(x) = b(x, x).

    Lapplicationq est appelee forme quadratique associee ab. Lapplication bilineaire symetriqueb est appelee forme polaire de q.

    Remarque : La connaissance de q permet de retrouver b. On a les formules suivantes :

    (x, y) EE, b(x, y) = 12q(x + y) q(x) q(y) = 1

    4q(x + y) q(x y).

    Dans toute la suite, E est suppose de dimension finie n.

    Proposition 2.1.9 Soitb une forme bilineaire sur E etB = (e1, , en) une base de E. NotonsA la matrice de b par rapport a la base B. Alors b est symetrique si et seulement si A estsymetrique (i.e A = tA).

    Preuve : Supposons b bilineaire symetrique. Alors pour tout (i, j) {1, , n}2, on a

    aij = b(ei, ej) = b(ej, ei) = aji

    donc A est symetrique.Reciproquement, supposons A symetrique. Soit (x, y) E2, et notons X (resp. Y) levecteur colonne dont les composantes sont les coordonnees de x (resp. y) par rapport a labase B. Alors, dapres la proposition 2.1.4, la remarque qui suit, et la symetrie de A, on a

    b(x, y) = tXAY = tXtAY = t(tY AX) = tY AX = b(y, x).

    Corollaire 2.1.10 Lensemble des formes bilineaires symetriques est un sous-espace vectorielde L2(E E;R) isomorphe a lensemble Sn(R) des matrices symetriques reelles de taille n. On

    a donc dimL2(E E;R) = n(n + 1)/2.Proposition 2.1.11 Soit B et B deux bases de E, et P la matrice de passage de B a B.Soit b une forme bilineaire sur E. Soit A (resp. B) la matrice de b par rapport a B (resp.B). Alors on a

    B = tPAP,

    Preuve : Cest un cas particulier de la proposition 2.1.5.

    Remarque : Soit A et B deux matrices symetriques. Sil existe P GLn(R) telle que B =tPAP, on dit que les matrices A et B sont congrues. En particulier elles sont equivalentes, etont donc meme rang.

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    40 CHAPITRE 2. ESPACES EUCLIDIENS ET ENDOMORPHISMES SYMETRIQUES

    Attention : Ne pas confondre semblable et congru ! Il ny a pas de relation dimplication entreles deux notions.

    Definition 2.1.12 Soit b une forme bilineaire symetrique sur E, et F un sous-espace vectorielde E. On appelle restriction de b au s.e.v F la forme bilineaire symetrique bF sur F definie par

    (x, y) F2, bF(x, y) = b(x, y).

    Remarque : Soit F un sous-espace vectoriel de E de dimension p. Soit (e1, , en) une basede E telle que (e1, , ep) soit base de F. Considerons enfin b une forme bilineaire symetriquesur E, de matrice A par rapport a (e1, , en). Alors on a

    A =

    B CtC D

    ,

    avec B Mp(R) matrice de bF par rapport a la base (e1, , ep).

    Definition 2.1.13 Soit b une forme bilineaire symetrique sur E, et (x, y) E2. On dit que xest orthogonal a y si b(x, y) = 0. On note xy.

    Definition 2.1.14 Soit b une forme bilineaire symetrique sur E. Pour tout x E, on definitlorthogonal de x par rapport a b par la formule

    xdef= {y E | b(x, y) = 0}.

    Plus generalement, pour tout sous-ensemble A non vide de E, on definit lorthogonal de A par

    Adef= {y E | x A, b(x, y) = 0}.

    Proposition 2.1.15 Pour tout A E non vide, lorthogonal de A par rapport a la formebilineaire symetrique b est un sous-espace vectoriel de E.

    Preuve : Clairement A contient 0. Il suffit donc de verifier que A est stable par combinai-sons lineaires. Cest une consequence immediate de la linearite de b par rapport a chaque

    variable.

    Proposition 2.1.16 Soit b bilineaire symetrique sur E. Lensemble E est appele noyau de b,et note ker b. On a alors la formule suivante :

    rg b + dim(Ker b) = dim E.

    Preuve : Notons p = dim(Ker b). On considere une base (e1, , ep) de ker b que lon completeen une base (e1, , en) de E. Dans cette base, la matrice A de b est de la forme :

    A =

    0 0

    0 B

    ,

    avec B Snp(R). Il est donc clair que rg A n p.

    Supposons par labsurde quil existe une relation de dependance lineaire entre les colonnesde B. Quitte a changer lordre des n p derniers vecteurs de base, on peut toujourssupposer que la derniere colonne de B (ou de A) est combinaison lineaire des n p 1precedentes. Il existe donc (1, , np1) Rnp

    1 tel que

    i {1, , n}, b(ei, en) =

    np1j=1

    jb(ei, ej+p).

    On en deduit que en np1

    j=1 jej+p appartient a ker b. Ce vecteur nappartient visible-ment pas a Vect(e1, , ep), ce qui contredit lhypothese dim ker b = p.

    On a donc rg B = rg A = n p dou la proposition.

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    2.1. FORMES BILINEAIRES 41

    Definition 2.1.17 Une forme bilineaire symetrique b est dite : Non degeneree si ker b = E = {0}, Positive si pour toutx E, on a b(x, x) 0, Negative si pour tout x E, on ab(x, x) 0, Definie positive si elle est positive et non degeneree, Definie negative si el le est negative et non degeneree.

    Grace a la proposition 2.1.16, on a immediatement :

    Proposition 2.1.18 Une forme bilineaire symetrique sur E est non degeneree si et seulementsi elle est de rang n.

    Definition 2.1.19 Soit A Sn(R). On dit que A est Non degeneree si rg A = n, Positive si pour toutX Mn,1(R), on a tXAX 0, Negative si pour tout X Mn,1(R), on a tXAX 0, Definie positive si elle est positive et non degeneree, Definie negative si el le est negative et non degeneree.

    Remarque : Si A est la matrice dune forme bilineaire b par rapport a une base B de E alors best non degeneree si et seulement si A est non degeneree, b est positive si et seulement si A estpositive, etc.

    Proposition 2.1.20 (Inegalite de Cauchy-Schwarz) Soitb une forme bilineaire symetriquepositive sur E. Alors on a

    (x, y) E2, |b(x, y)|

    b(x, x)b(y, y).

    Preuve : Pour R, posons f() = b(x + y,x + y). Un calcul immediat donne

    (2.2) f() = 2

    b(y, y) + 2b(x, y) + b(x, x).

    La positivite de b entrane la positivite de la fonction f sur R entier.

    1er cas : b(y, y) = 0 : La fonction f est alors une fonction affine positive sur R entier.Donc necessairement le coefficient b(x, y) doit etre nul. Linegalite de Cauchy-Schwarzest donc bien verifiee.

    2eme cas : b(y, y) = 0 : La fonction f est un polynome de degre 2 en qui reste positifpour tout R. Son discriminant = 4|b(x, y)|2 4b(x, x)b(y, y) est donc negatif,ce qui montre linegalite voulue.

    Corollaire 2.1.21 Une forme bilineaire symetrique est definie positive si et seulement si pourtout x non nul, on a b(x, x) > 0.Resultat analogue pour les matrices.

    Preuve : Soit donc b une forme bilineaire symetrique definie positive. Par definition b(x, x) 0pour tout x E et E = {0}.

    Considerons un x E tel que b(x, x) = 0. Dapres linegalite de Cauchy-Schwarz, on ab(x, y) = 0 pour tout y E. Donc x E, dou x = 0.

    Reciproquement si b bilineaire symetrique verifie b(x, x) > 0 pour tout x non nul, elle estclairement positive. De plus tout x E verifie b(x, x) = 0, donc son noyau est reduit a{0}.

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    42 CHAPITRE 2. ESPACES EUCLIDIENS ET ENDOMORPHISMES SYMETRIQUES

    2.2 Espaces euclidiens

    Dans toute cette partie, E est un espace vectoriel reel de dimension finie n.

    2.2.1 Generalites

    Definition 2.2.1 Soit b une forme bilineaire symetrique sur E. On dit que b est un produitscalaire sur E si b est definie positive. Lespace E muni du produit scalaire b est alors appeleespace euclidien.

    Notation : Desormais, pour (E, b) espace euclidien, nous noterons ( | ) le produit scalaire1 :

    (x, y) E2, (x | y)def= b(x, y).

    Exemple : On peut munir Rn dune structure despace euclidien en definissant le produitscalaire suivant appele produit scalaire canonique de Rn :

    (x, y) Rn Rn, (x|y) =n

    i=1 xiyi.Notation : Pour tout x E, on pose

    xdef=

    (x | x).

    En vertu de la bilinearite du produit scalaire, on a donc

    (2.3) (c, d) E2, c + d2 = c2 + 2(c | d) + d2.

    Cela permet de prouver lidentite du paral lelogramme :

    Proposition 2.2.2 (Identite du parallelogramme)

    (x, y) E2, x + y2 + x y2 = 2x2 + 2y2.

    Preuve : En appliquant (2.3) a c = x, d = y, puis a c = x et d = y, on trouve

    x + y2 = x2 + 2(x | y) + y2 et x y2 = x2 2(x | y) + y2.

    Il ne reste plus qua sommer les deux egalites.

    Proposition 2.2.3 (Inegalite de Cauchy-Schwarz) SoitE un espace euclidien. Alorson a

    (x, y) E2, |(x | y)| xy,

    avec egalite si et seulement si x et y sont colineaires.

    Preuve : Linegalite a deja ete prouvee dans la section precedente. Concentrons-nous sur lescas degalite. Si x et y sont colineaires, il est clair que |(x | y)| = xy.

    Reciproquement, supposons quil y ait egalite et que y = 0 (sinon, il ny a rien a prouver).Introduisons a nouveau la fonction f : x + y2.

    Alors |(x | y)| = xy signifie que le discriminant associe a f est nul, cest-a-dire quef a une racine double 0. On a donc x + 0y2 = 0, donc, dapres le corollaire 2.1.21,x + 0y = 0, donc x et y sont colineaires.

    1Dans certains ouvrages, les notations < | > ou (, ) sont utilisees.

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    2.2. ESPACES EUCLIDIENS 43

    Proposition 2.2.4 Soit E un espace euclidien. Alors on a les inegalites suivantes :

    (x, y) E2, x + y x + y (premiere inegalite triangulaire),

    (x, y) E2,x y x y (deuxieme inegalite triangulaire).

    En particulier, lapplication E R+x x

    verifie

    i) x E, x 0 et x = 0 si et seulement si x = 0,

    ii) x E, R, x = ||x,

    iii) (x, y) E2, x + y x + y.

    On dit que cest une norme.

    Preuve : Pour prouver la premiere inegalite triangulaire, on calcule

    x + y2 = x2 + 2(x | y) + y2.

    Par linegalite de Cauchy-Schwarz, on a |(x | y)| xy. Donc

    x + y2 x2 + 2xy + y2 = (x + y)2.

    Dou le resultat en prenant la racine carree.

    Appliquons la premiere inegalite triangulaire a x et y x. Il vient

    y = x + (y x) x + y x,

    dou y x y x. En echangeant les roles de x et de y, on obtient egalementx y x y dou la deuxieme inegalite.

    Definition 2.2.5 On dit que (x1, , xp) est une famille orthogonale si les vecteurs de cettefamille sont orthogonaux deux a deux. On dit que (x1, , xp) est une famille orthonormalesi de plus xi = 1 pour tout i {1, , p}. Enfin, on dit que (x1, , xp) est une baseorthonormale de E si cest a la fois une base de E (ce qui entrane p = n), et une familleorthonormale.

    Remarque : Pour une famille orthonormale (x1, , xp), on a donc (xi | xj) = ij ou ij est lesymbole de Kronecker defini par ij = 0 si i = j et ii = 1.

    Theoreme 2.2.6 (de Pythagore) Soit (x1, , xp) une famille orthogonale. On a

    x1 + + xp2 = x1

    2 + + xp2.

    Preuve : Considerons le cas de 2 vecteurs orthogonaux x1 et x2. Le resultat decoule alorsdirectement de (2.3) compte tenu de (x1 | x2) = 0.

    Supposons le resultat vrai pour toute famille de p 1 vecteurs orthogonaux.

    En exploitant la linearite du produit scalaire par rapport a la deuxieme variable (parexemple), on constate que xp est orthogonal a (x1 + + xp1). Appliquons le theoremede Pythagore aux vecteurs xp et (x1 + + xp1) :

    x1 + + xp2 = (x1 + xp1) + xp

    2 = x1 + + xp12 + xp

    2.

    Mais on sait deja que x1 + + xp12 = x12 + + xp1

    2, dou le resultat pour pvecteurs.

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    44 CHAPITRE 2. ESPACES EUCLIDIENS ET ENDOMORPHISMES SYMETRIQUES

    Proposition 2.2.7 Soit (x1, , xp) une famille orthogonale constituee de vecteurs tous nonnuls. Alors cette famille est libre.

    Preuve : Supposons donc quep

    i=1 ixi = 0. En prenant le produit scalaire de cette egaliteavec xj , tous les termes disparaissent, sauf celui correspondant a i = j. On obtient doncjxj

    2 = 0. Mais comme xj = 0, on conclut que j = 0. Donc finalement tous les i sontnuls, ce qui donne le resultat voulu.

    Proposition 2.2.8 Soit (e1, , ep) une famille orthonormale de E et x Vect(e1, , ep).Alors on a

    (2.4) x =

    pi=1

    (x | ei)ei