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Document généré le 22 avr. 2018 13:24 Lien social et Politiques Migration et solidarité intergénérationnelle : le cas des immigrants portugais du Luxembourg1 Charles Fleury Les réseaux familiaux transnationaux : nouvelles familles, nouveaux espaces de citoyenneté ? Numéro 64, automne 2010 URI : id.erudit.org/iderudit/1001402ar DOI : 10.7202/1001402ar Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Lien social et Politiques ISSN 1204-3206 (imprimé) 1703-9665 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Fleury, C. (2010). Migration et solidarité intergénérationnelle : le cas des immigrants portugais du Luxembourg1. Lien social et Politiques, (64), 95–111. doi:10.7202/1001402ar Résumé de l'article L’article examine les pratiques de solidarité intergénérationnelle au sein des familles transnationales. Prenant le cas des immigrants portugais du Luxembourg, nous cherchons à savoir comment les attentes normatives à l’égard de la famille se conjuguent à l’éloignement spatial engendré par la migration. Nous montrons que les immigrants portugais adhèrent fortement aux normes d’obligation filiale propres à leur pays d’origine et qu’ils viennent régulièrement en aide à leurs parents malgré l’éloignement géographique. Examinant ensuite la question des transferts financiers intergénérationnels, nous discutons du lien entre solidarité intergénérationnelle et cohésion sociale, et abordons la question de l’homogénéisation des systèmes de sécurité sociale européens. Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter en ligne. [https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique- dutilisation/] Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. www.erudit.org Tous droits réservés © Lien social et Politiques, 2011

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Lien social et Politiques

Migration et solidarité intergénérationnelle : le casdes immigrants portugais du Luxembourg1

Charles Fleury

Les réseaux familiaux transnationaux : nouvellesfamilles, nouveaux espaces de citoyenneté ?Numéro 64, automne 2010

URI : id.erudit.org/iderudit/1001402arDOI : 10.7202/1001402ar

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Éditeur(s)

Lien social et Politiques

ISSN 1204-3206 (imprimé)

1703-9665 (numérique)

Découvrir la revue

Citer cet article

Fleury, C. (2010). Migration et solidarité intergénérationnelle :le cas des immigrants portugais du Luxembourg1. Lien socialet Politiques, (64), 95–111. doi:10.7202/1001402ar

Résumé de l'article

L’article examine les pratiques de solidaritéintergénérationnelle au sein des familles transnationales.Prenant le cas des immigrants portugais du Luxembourg, nouscherchons à savoir comment les attentes normatives à l’égardde la famille se conjuguent à l’éloignement spatial engendrépar la migration. Nous montrons que les immigrants portugaisadhèrent fortement aux normes d’obligation filiale propres àleur pays d’origine et qu’ils viennent régulièrement en aide àleurs parents malgré l’éloignement géographique. Examinantensuite la question des transferts financiersintergénérationnels, nous discutons du lien entre solidaritéintergénérationnelle et cohésion sociale, et abordons laquestion de l’homogénéisation des systèmes de sécuritésociale européens.

Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des servicesd'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vouspouvez consulter en ligne. [https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/]

Cet article est diffusé et préservé par Érudit.

Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Universitéde Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pourmission la promotion et la valorisation de la recherche. www.erudit.org

Tous droits réservés © Lien social et Politiques, 2011

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Plusieurs travaux portant surles solidarités familiales ont souli-gné que celles-ci étaient fonctionde la proximité spatiale (VanPevenage, 2009†; Segalen, 2008†;Attias-Donfut, 1995). Cette proxi-mité n’explique cependant pastout, la densité et les formes d’en-traide familiale variant égalementen fonction de l’univers cultureldans lequel vivent – ou sont socia-lisés – les individus. En Europe,par exemple, on observe que lesliens familiaux sont plus forts etles normes d’obligation familialeplus prégnantes dans les pays duSud que dans les pays du Nord etde l’Ouest, jugés plus individua-listes (Kalmijn et Saraceno, 2008†;Daatland et Herlofson, 2003†;Reher, 1998).

Comment ces attentes norma-tives se conjuguent-elles à l’éloi-gnement spatial engendré par lesmigrations internationales†? Lesimmigrants tendent-ils à harmoni-

ser leurs attentes et leurs obliga-tions à l’égard de la famille aveccelles des autres résidants du paysd’accueil†? Dans quelle mesurel’éloignement spatial contraint-ill’exercice de la solidarité intergé-nérationnelle au sein des famillesimmigrantes†? Le présent articlevise à répondre à ces interroga-tions et examine, pour ce faire, lecas spécifique des immigrants por-tugais vivant au Luxembourg.S’appuyant sur diverses donnéesd’enquête recueillies au cours dela dernière décennie, il étudie lesattentes et les obligations fami-liales des immigrants portugais etanalyse la façon dont ceux-ci exer-cent leur solidarité avec leursparents restés, pour la plupart, aupays d’origine, ainsi qu’avec leursenfants vivant au Luxembourg. Ildébouche sur une discussion àpropos du processus d’homogé-néisation des systèmes de sécuritésociale et des obligations familialesau sein de l’Union européenne.

Le choix du Luxembourg et desimmigrants portugais comme ter-rain et objet d’étude se justifie deplusieurs façons. D’une part, avecses 42†% de ressortissants étrangers– dont plus du tiers (37†%) pro -viennent du Portugal et plus de86†% d’un pays membre de l’Unioneuropéenne – le Luxem bourg estun des pays où la proportion d’im-migrants est la plus importante(Thill-Ditsch, 2010)†; il constituedès lors un lieu privilégié pour exa -miner les comportements desfamil les transnationales en matièrede solidarité intergénérationnelle.D’autre part, par son caractèrerésolument européen, tant par sacomposition culturelle (Thill-Ditsch, 2010†; Fleury, 2009a) quepar sa position géographique etson rôle dans la cons truction del’Union européenne (Trausch, 2009†;Trausch, 2005 et 2001†; Gillisen,1998), le Luxem bourg fait office delaboratoire per mettant d’examinerdans quelle mesure les différents

Lien social et Politiques, 64, Les réseaux familiaux transnationaux : nouvelles familles, nouveaux espaces de citoyenneté ? Automne 2010, pages 95 à 111.

Migration et solidarité intergénérationnelle : le cas des immigrants portugais du Luxembourg1

Charles Fleury

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systèmes de sécurité sociale euro -pé ens – auxquels les normes d’obli-gation fami liale sont étroitementliées – ont été harmonisés et jus-qu’à quel point les obstacles liés àla mobilité communautaire ontété enra yés. Le contraste que pré-sente le Luxembourg par rapportau Por tugal en matière de généro-sité du système de sécurité sociale(Ame tepe et Hartmann-Hirsch,2010†; Soa res, 2010†; OCDE, 2009†;Trausch, 2009), de normes d’obli-gation fami liale et d’étendue de lafamille (Segalen, 2008†; Wall et al.,2001†; Millar et War man, 1996†;Ferrera, 1996) s’avère, à ce propos,particulièrement intéressant. Ilpermet de mettre en relief cer-taines spécificités des systèmes desécurité sociale qui perdurent enEurope ainsi que d’exa minerquelques-unes des con séquencesliées à ces spécificités pour lesimmigrants communautaires.

L’adhésion aux normes d’obligation familiale

Dans le cadre de ses enquêtespériodiques menées en Europedepuis maintenant trente ans, l’Eu -ropean Values Study (EVS) inter -roge les Européens à propos deleurs attentes à l’égard de la

famille2. L’une des questions portesur les obligations des enfants àl’égard de leurs enfants ets’énonce ainsi†: «†Avec laquelle deces opinions êtes-vous le plusd’accord†? 1) Quels que soient lesqualités et les défauts de sesparents, on doit toujours les aimeret les respecter†; 2) On n’a pas ledevoir de respecter et d’aimer sesparents quand ils ne l’ont pasmérité par leur comportement etleur attitude†». Une seconde ques-tion porte sur les obligations desparents à l’égard de leurs enfantset se lit comme suit†: «†Laquelledes deux affirmations suivantescorrespond le mieux à votre opi-nion concernant la responsabilitédes parents à l’égard de leursenfants†? 1) Le devoir des parentsest de faire de leur mieux pourleurs enfants, même aux dépensde leur propre bien-être†; 2) Lesparents ont leur vie à eux, et on nedoit pas leur demander de sacri-fier leur propre bien-être au béné-fice de leurs enfants†». Motivéepar les inquiétudes liées au vieil -lissement démographique et laremise en question des systèmesde sécurité sociale, une troisièmequestion a été introduite en 2008.Elle porte sur les devoirs desenfants à l’égard de leurs parentsâgés ayant besoin d’une aide delongue durée et est formulée de lamanière suivante†: «†Laquelle desdeux affirmations suivantes cor-respond le mieux à votre opinionen ce qui concerne la responsabi-lité des enfants adultes lorsqueleurs parents ont besoin d’une aidede longue durée†? 1) Les enfantsadultes doivent fournir l’aide quenécessitent leurs parents, mêmeaux dépens de leur propre bien-être†; 2) Les enfants adultes ontleur vie à eux, et on ne doit pas

exiger qu’ils sacrifient leur proprebien-être à celui de leurs pa -rents†». La présente section exa-mine les réponses obtenues en 2008à ces différentes questions au seinde quelques pays européens etexplore, dans un deuxième temps,les spécificités des réponses formu-lées par les immigrants portugaisvivant au Luxembourg.

L’adhésion aux normes d’obligation familiale dansquelques pays d’Europe

Le graphique 1 offre un aperçudu niveau d’adhésion à certainesnormes d’obligation familiale dansdifférents pays européens en 2008.Il présente de manière plus spéci-fique la proportion d’individus quisont dits d’accord avec les troisénoncés que sont 1) «†le devoir desparents est de faire de leur mieuxpour leurs enfants, même auxdépens de leur propre bien-être†»(obligation parentale)†; 2) «†quelsque soient les qualités et lesdéfauts de ses parents, on doit tou-jours les aimer et les respecter†»(obligation filiale) et 3) «†les enfantsadultes doivent fournir l’aide quenécessitent leurs parents, mêmeaux dépens de leur propre bien-être†» (obligation filiale).

Comme le révèle le graphique1, d’importantes différences s’ob-servent en Europe en matièred’adhésion aux normes d’obliga-tion familiale. En fait, commel’ont remarqué d’autres observa-teurs avant nous (Attias-Donfutet Wolff, 2009†; Daatland et Her -lofson, 2003†; Reher, 1998), il sem-blerait que l’adhésion aux normesd’obligation familiale varie selonun axe nord-sud. Ainsi, on observeque les normes sont plus pré-gnantes dans les pays d’Europe du

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Sud comme le Por tugal, la Grèceet l’Espagne, alors qu’elles le sontbeaucoup moins dans les paysd’Europe du Nord, comme lesPays-Bas, le Danemark et laFinlande. Les différences s’obser-vent pour les deux types d’obliga-tion familiale, mais celles relativesaux obligations filiales sont plusprononcées†: lorsqu’il s’agit desnormes d’obligation parentale,moins de 30 points de pourcen-tage séparent les pays les plusnormatifs (Portugal et Espagne)du pays le moins normatif (Dane -mark)†; en revanche, lorsqu’il s’agitdes normes d’obligation filiale,plus de 40 points les séparent. Lecontraste semble encore plusmarqué lorsqu’on examine lesrépon ses à la question introduiteen 2008 à propos des devoirs desenfants adultes à l’égard de leursparents qui ont besoin d’une aidede longue durée. On constate eneffet que plus de 60 points depourcentage séparent le pays leplus normatif (Portugal) des paysles moins normatifs (Finlande etDanemark), plus de 80†% desrépondants portugais disant qu’ondoit aider ses parents même auxdépens de son propre bien-être,contre moins de 20†% en Finlandeet au Danemark.

Malgré les études nous mettanten garde contre une interprétationdes résultats au moyen de la typo-logie des régimes providentiels(Kal mijn et Saraceno, 2008†; Reher,1998), on ne peut pas s’empêcherde faire un parallèle entre le gra-phique 1 et le niveau de dévelop-pement des systèmes de sécuritésociale européens (Mas son, 2009†;Esping-Andersen, 1999†; Ferrera,1996). Aux deux extrêmes du gra-phique, on retrouve en effet lesdeux grands types de régimes de

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Graphique 1. Niveau d’adhésion aux normes d’obligation fami-liale par pays

Source†: EVS Foundation/Tilburg University†: European Values Study 2008, 4th wave,Integrated Dataset. GESIS Cologne, Germany, ZA45800. Data File Version 1.0.0 (2010-06-30) DOI†:10.4232/1.10059.

Champ†: ensemble des individus âgés de 18 ans ou plus.

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11

Le devoir des parents est de faire de leur mieux pour leurs enfants

On doit toujours aimer et respecter ses parents

Les enfants adultes doivent fournir l’aide que nécessitent leurs parents

Proportion d’individus qui adhèrent à l’énoncé, en %

100

80

60

40

20

0

LÉGENDE

1 Portugal

2 Grèce

3 Espagne

4 France

5 Belgique

6 Luxembourg

7 Irlande

8 Allemagne

9 Finlande

10 Pays-Bas

11 Danemark

sécurité sociale que sont le régimeméditerranéen, réputé moins déve -loppé et fortement familialiste, etle régime social-démocrate, plusdéveloppé et individualiste. Entreles deux, nous retrouvons les payscorporatistes, favorables aux soli-darités familiales, mais offrantd’importants transferts publics auxplus âgés, et un pays libéral(Irlande), plus ou moins favorableaux solidarités familiales et offrantpeu de transferts publics (Masson,2009).

En ayant cette typologie à l’es-prit, il est intéressant d’examinerla position qu’occupent le Por tu -

gal et le Luxembourg sur le gra-phique 1, lequel classe les paysdans un ordre décroissant suivantleur niveau d’adhésion aux nor -mes d’obligation filiale. Le Por tu -gal, dont le régime de sécuritésociale de type méditerranéen secaractérise par un faible niveau depension publique, de fortes atten -tes à l’égard de la solidarité fami-liale et une définition large de lafamille (OCDE, 2009†; Segalen,2008†; Ogg et Renaut, 2005†; Wall etal., 2001†; Millar et Warman, 1996†;Ferrera, 1996), se trouve à l’ex-trême gauche, étant l’un des paysoù le niveau d’adhésion aux nor -

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mes d’obligation familiale est leplus élevé, que ce soit lorsqu’ils’agit des obligations parentales oulorsqu’il s’agit des obligations filia -les. En revanche, le Luxem bourg –où le niveau des pensions est parmiles plus élevés d’Europe et où lesattentes à l’égard de la famille selimitent aux membres de la famillenucléaire (Ametepe et Hartmann-Hirsch, 2010†; Trausch, 2009†; OCDE,2009†; Segalen, 2008†; Millar et War -man, 1996) – se situe entre les deuxextrêmes, près des autres pays cor-poratistes, de la France et de laBelgique notamment. C’est doncdans un pays caractérisé par d’im-portants trans ferts publics destinésaux plus âgés et par un niveaud’adhésion aux normes d’obliga-tion filiale relativement faible ques’intègrent les Portugais qui s’éta-blissent au Luxembourg. La pro-chaine section examine l’effet decet établissement sur leurs atti-tudes à l’égard des normes d’obli-gation familiale.

L’adhésion aux normes d’obligation familiale auLuxembourg

Diaspora quasi mondiale, lesimmi grants portugais sont régu-lièrement cités comme un exem -

ple d’in tégration économique etsociale réussie, ce qui leur vaut,en Europe, les qualificatifs de com -munauté «†discrète†» et «†invisi -ble†» (Ghemmaz, 2008†; Cor deiroet Hily, 1999†; Codeiro, 1985).Plusieurs études sociologiquesmontrent pourtant que si cettecommunauté s’insère dans lasociété d’accueil, elle n’oubliepas pour autant sa culture d’ori-gine (Leandro, 2003†; Volovitch-Tavares, 1999†; Echardour, 1996†;Cunha, 1988). Il semble en faitque, loin de signifier l’intériorisa-tion par chacun des normes de lasociété d’accueil, cette discrétionet cette invisibilité constitue-raient «†une stratégie fondée parla communauté et contrôlée parla communauté pour s’assurerd’un accueil bienveillant†» (Cor -deiro et Hily, 1999†: 46). Cettestratégie masquerait l’intensitédes liens intercommunautaires etdes rapports conservés et entre-tenus avec le Portugal (Charbit etal., 1997), intensité qui ne seraitpas étrangère au désir initial deplusieurs immigrants portugaisde retourner vivre au Portugal(Dos Santos et Wolff, 2010†;Leandro, 2003†; Beirão, 1999).

Bien que plus visible au Luxem -bourg en raison de l’absence decommunautés étrangères sociale-ment et culturellement plus dis-tantes (Ghemmaz, 2008†; Cordeiro,1990†; Gehring, 1981), la commu-nauté portugaise du Luxembourgne partage pas moins plusieurscaractéristiques de la diasporaportugaise en Europe et en Amé -rique du Nord. Estimée à près de80 000 personnes en 2009, ellereprésente un peu plus de 16†% del’ensemble de la population duLuxembourg (Thill-Ditch, 2010†;Statec, 2009). Essentiel le ment éco -

nomique et familiale, l’immigra-tion portugaise au Luxem bourg avéritablement débuté vers la findes années 1960 et a la particula-rité de se poursuivre aujourd’hui(Berger, 2008†; Beirão, 1999†; Carreet al., 1987). Il en résulte une com-munauté qui compte, parmi seseffectifs, des primo-arrivants ins-tallés au Luxembourg depuis prèsde 40 ans et qui ont atteint ou quiapprochent l’âge de la retraite, desprimo-arrivants installés récem-ment, mais aussi des descendantsdes primo-arrivants de la pre-mière heure dont une faible pro-portion a opté pour la nationalitéluxembourgeoise (Berger, 2008).

Malgré une relative ascensionsociale chez les descendants desprimo-arrivants, la communautéportugaise du Luxembourg, àl’ins tar de la diaspora portugaiseen Europe et en Amérique duNord, demeure globalement peuscolarisée et œuvre essentiellementdans le secteur de la cons truction etcelui des services (Trausch, 2009†;Ghemmaz, 2008†; Berger, 2008).Elle constitue une des commu-nautés où s’observe la plus forteproportion de bas salaires et où letaux de risque de pauvreté est leplus élevé (Statec, 2008). En ce quiconcerne la famille, la plupart deses membres adultes vivent en cou -ple et ont des enfants au Luxem -bourg (Bodson et al, 2010†; Leducet Villeret, 2009 et 2007). Mal gréune installation qui devient deplus en plus permanente au fur età mesure que les enfants grandis-sent, les liens que les immigrantsportugais du Luxembourg entre-tiennent avec leur pays d’origineet la famille qui y est restéedemeurent intenses. Cela se tra-duit par de fréquents retours auPortugal, notamment durant les

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vacances estivales (Dubajic, 2002†;Beirão, 1999).

Ces retours fréquents au Por -tu gal signifient-ils que les immi-grants portugais continuentd’adhé rer fortement aux normesd’obligation familiale qui carac-térisent leur pays d’origine†?N’assiste-t-on pas à un certainaffaiblissement de cette adhésionau fur et à mesure que l’individus’intègre au Luxem bourg†? Encoreune fois, les données recueilliesdans le cadre des enquêtes EVSpermettent d’examiner – au moinspartiellement – ces interrogations,les questions relatives aux normesd’obligation familiale ayant nonseulement été posées au Luxem -bourg, mais d’autres questionsportant sur la nationalité, l’âge etl’année d’immigration ayant éga-lement été posées. Il est donc pos-sible de comparer les réponsesque nous fournissent les immi-grants portugais aux questionsrelatives aux normes d’obligationfamiliale avec celles que nousdonnent les Luxembourgeois etles autres immigrants3, mais égale-ment d’examiner comment lesattitudes des immigrants portu-gais évoluent avec la durée del’établissement au Luxembourg.

Le graphique 2 présente la pro-portion de résidants du Luxem -bourg qui sont d’accord avec lesénoncés relatifs aux normesd’obligation familiale selon lanationalité. Ces énoncés étaient,rappelons-le, 1) le devoir desparents est de faire de leur mieuxpour leurs enfants, même auxdépens de leur propre bien-être†;2) quels que soient les qualités etles défauts de ses parents, on doittoujours les aimer et les respec-ter†; et 3) les enfants adultes doi-

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Graphique 2. Niveau d’adhésion aux normes d’obligation fami-liale selon la nationalité

Source†: EVS Luxembourg 2008, CEPS/INSTEAD.

Champ†: ensemble des individus âgés de 18 ans et plus.

73 82 68 76 60 80 61 65 44 65 38 58

Le devoir des parentsest de faire de leurmieux pour leurs

enfants

On doit toujours aimeret respecter ses parents

Les enfants adultesdoivent fournir l’aideque nécessitent leurs

parents

Proportion d’individus qui adhèrent à l’énoncé, en %

vent fournir l’aide que nécessitentleurs parents, même aux dépensde leur propre bien-être. D’entréede jeu, il apparaît que les Por tu -gais du Luxembourg adhèrentplus fortement aux normes d’obli-gation familiale que ne le font lesLuxembourgeois et les autres res-sortissants étrangers. À nouveau,c’est à propos des normes d’obli-gation filiale que les différencessont les plus importantes. Pour cequi est de la norme relative àl’amour et au respect dus auxparents, ce sont 80†% des Portu -gais qui y sont favorables, contre60†% des Luxembourgeois, 61†%des ressortissants des pays limi-trophes et 65†% des autres ressor-

tissants étrangers. Quant à lanorme relative à l’obligation d’ai-der ses parents qui ont besoind’une aide de longue durée, cesont 65†% des Portugais qui y sontfavorables, contre 44†% des Luxem -bourgeois, 38†% des ressortissantsdes pays limitrophes et 58†% desautres ressortissants étrangers. Ensomme, tout indique que, mêmeau Luxembourg, la communautéportugaise continue d’adhérerfortement aux normes d’obliga-tion familiale. Elle se distinguefortement des Luxembourgeois etdes ressortissants des pays limi-trophes, chez qui l’adhésion estplus faible, et jusqu’à un certainpoint des autres ressortissants

90

80

70

60

50

40

30

20

10

0

Luxembourgeois Portugais Limitrophe Autre étranger

Obligation parentale Obligations filiales

LÉGENDE

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étrangers. Concernant ce derniergroupe, il faut toutefois noter lecaractère hétérogène de ses mem -bres, ce groupe réunissant unegrande proportion d’Italiens, éta-blis depuis longtemps au Luxem -bourg, et de ressortissants del’Europe de l’Est, établis plusrécemment.

Si le graphique 2 indique que lesPortugais du Luxembourg adhè -rent plus fortement aux normesd’obligation familiale que ne lefont les autres nationalités, il nenous dit toutefois rien à propos dela façon dont évoluent ces normesau fur et à mesure que s’allonge ladurée de vie au Luxembourg. Legraphique 3 permet de répondre àcette question. Il présente leniveau d’adhésion des Portugaisaux normes d’obligation familialeselon l’âge d’arrivée au Luxem -bourg et, pour les immigrants por-tugais arrivés à l’âge de 16 ans ouaprès4, le nombre d’années pas-sées au Luxembourg. On constateque, de manière générale, leniveau d’adhésion aux normesd’obligation familiale demeuretrès élevé même après plusieursannées vécues au Luxembourg.En fait, si ce niveau d’adhésion tendà diminuer légèrement, aucune dif-

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Migration et solidarité intergénérationnelle :le cas des immigrants portugais duLuxembourg

férence n’apparaît statistique-ment significative. Seuls les Portu -gais arrivés au Luxem bourg avantl’âge de 16 ans adhèrent un peumoins fortement à ces normes†; ilssont notamment moins favorablesà l’énoncé voulant que les enfantsadultes doivent fournir l’aide quenécessitent leurs parents. Fait inté-ressant, ces résultats s’observentmême lors que nous tenons comptede l’effet de l’âge, une variablequi, selon certaines étu des, est liéeaux attitudes des individus àl’égard des obligations familiales(Daatland et Herlofson, 2003).

Si les Portugais arrivés avantl’âge de 16 ans adhèrent un peu

moins fortement aux normesd’obligation familiale que ne lefont les autres immigrants portu-gais, il demeure néanmoins qu’ilsy adhèrent davantage que ne lefont les autres résidants nés auLuxembourg. Comme le montrele graphique 4, qui présente laproportion d’individus âgés de 18à 44 ans5 nés au Luxembourg ouarrivés avant l’âge de 16 ans selonla nationalité, les Portugais adhè-rent toujours plus fortement auxnormes d’obligation familiale quene le font les autres groupes.Encore une fois, les différencessont particulièrement nettes lors-qu’il s’agit des normes d’obliga-tion filiale, que ce soit le devoir

Graphique 3. Niveau d’adhésion aux normes d’obligation fami-liale des Portugais selon leur âge d’arrivée et ladurée de leur séjour au Luxembourg

Source†: EVS Luxembourg 2008, CEPS/INSTEAD.

Champ†: ensemble des individus âgés de 18 ou plus de nationalité portugaise.

Note (*)†: cette catégorie inclut les Portugais qui sont nés au Luxembourg.

- de 5 ans 5 à 9 ans 10 à 19 ans 20 ans et + Arrivé avant l’âge de 16 ans*

Le devoir des parents est de faire de leur mieux pour leurs enfants

On doit toujours aimer et respecter ses parents

Les enfants adultes doivent fournir l’aide que nécessitent leurs parents

Proportion d’individus qui adhèrent à l’énoncé, en %

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80

60

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L’exercice de la solidaritéascendante

La section précédente a mon-tré que les immigrants portugais,les Luxembourgeois et les autresimmigrants se distinguaient lesuns des autres dans leur manièred’envisager les obligations fami-liales, les immigrants portugaisétant notamment beaucoup plusnombreux à penser qu’ils ontl’obligation d’aider leurs parentsqui ont besoin d’une aide delongue durée. Il s’agit maintenantde savoir comment ces normesd’obligation familiale parvien-nent à se concrétiser dans uncontexte où les parents viventloin, la plupart des immigrantsportugais adultes n’ayant pas deparents qui vivent au Luxem -bourg. Plus concrètement, il s’agitde savoir si, malgré l’éloignementgéographique, les immigrants por-tugais parviennent à s’acquitterde leurs «†obligations†» à l’égardde leurs parents âgés et, le caséchéant, de savoir comment ilsparviennent à le faire.

Nous examinons ces questionsà partir de différentes donnéesrecueillies au Luxembourg et por-tant sur le soutien intergénéra-tionnel apporté aux parents âgés.Parce qu’ils sont les plus suscep-tibles de venir en aide à leursparents (Attias-Donfut, 2000),nous nous intéressons exclusive-ment à l’aide fournie par lesmembres de la génération pivot6.Il s’agit en fait de savoir dansquelle mesure les immigrants por-tugais âgés de 45 à 64 ans vien-nent en aide à leurs parents et enquoi leur exercice de la solidaritése distingue de celui qui s’observechez les Luxembourgeois et chezles autres immigrants. Étant donné

101

d’aimer et de respecter ses parentsou celui de leur venir en aide encas de besoin.

En somme, il semblerait que lecontraste entre le Portugal et leLuxembourg se maintienne enterritoire luxembourgeois, lesimmigrants portugais adhérantplus fortement aux normes d’obli-gation familiale que ne le font lesLuxembourgeois et les autres res-sortissants étrangers, mais sem-blant également transmettre detelles valeurs à leurs descendants.Cette persistance des valeursfamiliales est à mettre en lien avecl’importance des liens qu’entre-tiennent les immigrants portugais

avec leur pays d’origine, y comprisceux de la deuxième génération.

Qu’est-ce que cela veut dire, si j’ai-mais aller au Portugal†? Je ne mesuis jamais posé la question. Pourmoi, c’était toujours normal. Lemois d’août, tu pars en vacances auPortugal. Je ne me suis pas renducompte non plus que les autres, quesais-je, qu’ils allaient en Espagne,aux îles Canaries ou en Angleterreen vacances. Je suis toujours alléau Portugal avec mes parents†:c’étaient les vacances (Extrait d’en -trevue avec l’enfant d’un immigrantportugais au Luxembourg, cité parBeirão, 1999†: 155).

Graphique 4. Niveau d’adhésion aux normes d’obligation fami-liale selon la nationalité chez les personnes nées auLuxembourg ou arrivées avant l’âge de 16 ans etactuellement âgées de 18 à 44 ans

Source†: EVS Luxembourg 2008, CEPS/INSTEAD.

Champ†: ensemble des individus âgés de 18 à 44 ans et nés au Luxembourg ou arrivés avantl’âge de 16 ans.

74 76 67 83 60 73 48 61 43 57 39 57

Le devoir des parentsest de faire de leurmieux pour leurs

enfants

On doit toujours aimeret respecter ses parents

Les enfants adultesdoivent fournir l’aideque nécessitent leurs

parents

Proportion d’individus qui adhèrent à l’énoncé, en %

9080706050403020100

Luxembourgeois Portugais Limitrophe Autre étranger

Obligation parentale Obligations filiales

LÉGENDE

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le fait que les immigrants portugaisappartenant à la génération pivotsont presque tous arrivés auLuxem bourg à l’âge adulte, aucunedistinction n’est faite à propos dela génération d’immigration.

L’intérêt d’examiner le soutienapporté par les membres de lagéné ration pivot d’origine portu-gaise est double. D’une part, etcomme nous venons de le souli-gner, la génération pivot constituela génération qui est la plus sus-ceptible de venir en aide à sesparents†; elle constitue dès lors lagénération idéale pour examinercomment les immigrants portugaisparviennent à conjuguer leurs obli-gations filiales avec l’éloignementspatial engendré par la migra tion.D’autre part, cet examen permet desavoir comment cette générationrépond aux deman des de soutienprovenant de ses ascen dants vivantau Por tugal avec celles de sesenfants qui vivent au Luxem -bourg. Car il s’agit bien là de laposition particulière de la généra-tion pivot, susceptible, en tantqu’enfant adulte, d’être sollicitéepar les besoins de ses parents âgésen début de dépendance et, entant que parents, par ceux de sesenfants en voie d’autonomisation

(Bonvalet et Ogg, 2009†; Attias-Donfut, 2000). Or, contrairementà la génération pivot autochtoneet, dans une moindre mesure, àcelle provenant des pays limi-trophes, l’arbitrage de la généra-tion pivot portugaise se fait dansdeux contextes sociétaux diffé-rents, l’un caractérisé par desattentes importantes à l’égard dela famille dans le soutien aux per-sonnes âgées (Segalen, 2008†; Wallet al., 2001†; Millar et Warman,1996), l’autre par la prégnance dessolidarités familiales descendan -tes, l’État ayant ni plus ni moinspris en charge les besoins desgénérations âgées, mais ayantlaissé à la famille le soin de subve-nir aux besoins des jeunes généra-tions (Masson, 2009†; Attias-Don -fut, 2000†; Esping-Andersen, 1999).

En somme, en examinant lesoutien apporté par les membresde la génération pivot portugaiseà ses parents âgés, nous exami-nons non seulement commentcette génération parvient à conju-guer des normes d’obligationfiliale particulièrement prégnan -tes avec l’éloignement géographi -que, mais nous ouvrons la porte àl’examen de quelques-unes desconséquences liées à l’arbitrageque doivent faire les mem bres dela génération pivot por tugaiseentre les demandes de soutienprovenant des ascendants et cellesprovenant des descendants. Cettedernière question sera discutéeplus à fond dans la troisième partie.

L’aide apportée par la générationpivot

Dans le cadre de son voletluxembourgeois, l’enquête EVSde 2008 a interrogé les résidantsadultes à propos de l’intensité de

l’aide qu’ils avaient fournie à leursparents au cours des trois mois quiavaient précédé l’enquête. Cettequestion s’énonçait ainsi†: «†Aucours des trois derniers mois, com-bien de fois avez-vous apportéune aide matérielle, un conseil, unsoutien moral à vos parents qui nevivent pas dans votre ménage7

†?†»Les choix de réponses étaient lessuivants†: régulièrement, souvent,rarement ou jamais. Les réponsesfournies par les membres de lagénération pivot suivant leur natio -nalité sont consignées dans le gra-phique 5. À sa lecture, il appa raîtclairement que la distance géogra-phique qui sépare les immigrantsportugais de leurs parents ne lesempêche pas de leur venir en aide,21†% d’entre eux le faisant réguliè-rement et 32†% le faisant souvent.Compara ti vement aux Luxem bour -geois, les immigrants portugais nesemblent pas venir beaucoupmoins en aide à leurs parents,24†% des immigrants portugaisn’étant jamais venus en aide àleurs parents con tre 23†% chez lesLuxembourgeois.

On ne manquera certainementpas d’observer que ce sont lesressortissants des pays limitro -phes qui viennent le plus souventen aide à leurs parents. Ce résul-tat mériterait sans doute d’êtreappro fondi, mais on peut avancerl’hypothèse d’une conjonction defacteurs, dont un éloignementgéo graphique moins importantpar rapport aux autres immigrantset des transferts publics aux plusâgés un peu moins élevés qu’auLuxembourg (OCDE, 2009). Seloncette hypothèse, le soutien filialapporté par les ressortissants despays limitrophes serait d’autantplus important qu’il serait plusnécessaire (par rapport au Luxem -

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LIEN SOCIAL ET POLITIQUES, 64

Migration et solidarité intergénérationnelle :le cas des immigrants portugais duLuxembourg

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parents vivent à l’étranger ou non.Comme l’a révélé l’étude de Bor -sen berger8 (2003), étude luxem -bour geoise où nous puisons lesdonnées du graphique 6, l’aidefournie par les membres de lagénération pivot dont les parentsvivent à l’étranger prend essen-tiellement les formes du soutienmoral et de l’aide financière, les-quelles n’exigent pas la proximitégéographique. En ce qui concernel’aide financière, le contraste entreles individus pivots dont les parentsvivent au Luxembourg et ceuxdont les parents vivent à l’étran-ger est particulièrement frap pant.Alors que 10†% des pivots ayantun parent à l’étranger déclarentavoir aidé financièrement leursparents au cours des trois moisqui ont précédé l’enquête, cetteproportion est pratiquement nullechez les pivots n’ayant pas deparents vivant à l’étranger (gra-phique 6).

On rejoint ici les récents tra-vaux d’Attias-Donfut et de Wolff(2009), lesquels observent, enFrance, que les immigrants versentbeaucoup plus d’argent à leursascendants que ne le font les mem -bres de la population autoch tone.Cela n’est pas étranger au faitque, contrairement à plusieursfamilles immigrantes, les famillesfrançaises ont été libérées du sou-tien financier aux personnes âgées.Cette observation est encore plusvraie au Luxembourg, où non seu-lement le niveau des pensions estparmi les plus élevés des pays del’OCDE, mais où le taux de risquede pauvreté des personnes âgéesest parmi les plus faibles (Trausch,2009†; OCDE, 2009†; STATEC,2008†; Hausman, 1993).

103

bourg) et plus réalisable en raisondes distances géographiques moinsimportantes qui séparent ces im -mi grants de leurs parents (parrap port aux autres immigrants).

Ce que nous retiendrons de cesrésultats, cependant, c’est surtoutque le fait que l’éloignement spa-tial ne signifie pas l’absence desoli darité intergénérationnelle.Au con traire, comme l’ont mon-tré plu sieurs observateurs (VatzLaa roussi, 2007†; Baldassar, 2007†;Baldassar et al., 2007†; Wilding,2006†; Baldock, 2000), la solidaritéintergénérationnelle demeure trèsforte au sein des familles transna-tionales. Elle l’est d’autant plusque son exercice n’exige pas tou-jours une présence physique (lessoutiens moral et financier notam-ment) et qu’il a largement bénéfi-

cié des progrès technologiquesrécents en matière de transportet de communication (Wilding,2006). Grâce au développementde moyens de transport plus rapi -des (TGV), à la démocratisationrelative de leurs coûts (compagnieaérienne à bas prix) et au déve-loppement des technologies descommunications (Internet, télé-phonie, etc.), il est non seulementplus facile de se rendre dans sonpays d’origine pour venir en aideà ses parents, mais les formes desolidarité «†à distance†» sont gran -dement facilitées.

Le type d’aide apporté par lagénération pivot

Les formes de soutien adoptéespar les familles ne sont toutefoispas les mêmes selon que les

Graphique 5. Fréquence de l’aide apportée par la génération pivotà ses parents selon la nationalité

Source†: EVS 2008, CEPS/INSTEAD

Champ†: ensemble des individus âgés de 45 à 64 ans ayant encore au moins un parent sur-vivant.

26 (77

27 (52)

25

23 (76)

32 (53)

21

24 (92)

22 (68)

46

28 (80)

28 (53)

25

Distribution des réponses, en %

100

90

80

70

60

50

40

30

20

10

0

Régulièrement Souvent Rarement

Obligation parentale Obligations filiales

LÉGENDE

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L’aide financière apportée parla génération pivot

Tous les ménages immigrantsn’ont toutefois pas la même pro-babilité d’avoir versé de l’argent àleur ascendant. De fait, comme lemontre le graphique 6, lequel pré-sente la proportion de ménagespivots qui ont versé régulière-ment de l’argent à un parent aucours des douze derniers moisselon le sens du transfert et lanationalité du chef de ménage9, cesont essentiellement les ménagespivots portugais qui ont effectuéce type de transfert. Concrè te ment,ce sont 17†% des ménages pivotsportugais qui sont venu en aide àleurs parents de cette façon†; ausein des autres ménages pivots,cette proportion est inférieure à5†%, voire 2†% au sein des ména -ges pivots luxembourgeois. Cerésultat peut évidemment s’ex -pliquer par les caractéristiquespropres aux ménages pivots por-tugais, lesquels sont plus jeunes etont plus souvent des parents sur-vivants que les autres ménagespivots. Une analyse multivariéevisant à mesurer l’effet net de lanationalité a pourtant montréque, toutes choses étant égalespar ailleurs, les ména ges pivots

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LIEN SOCIAL ET POLITIQUES, 64

Migration et solidarité intergénérationnelle :le cas des immigrants portugais duLuxembourg

Graphique 6. Proportion d’individus ayant rendu service aumoins une fois dans l’année à leur père/mère partype de services rendus et selon le lieu de résidencedu parent (en %)

Source†: M. Borsenberger (2003), La solidarité des 45-64 ans avec leurs parents âgés, CahierPSELL no 136.

Champ†: ensemble des individus âgés de 45 à 64 ans ayant encore au moins un parent sur-vivant ne vivant pas dans le ménage.

19 6 32 6 27 5 24 4 36 25 0 10

4035302520151050

LÉGENDE

1 Aide santé (soins)

2 Accompagnement, transport

3 Courses

4 Papiers, démarches administratives

5 Soutien moral, conseils

6 Aide financière (don, prêt)

portugais faisaient davan tage detransferts ascendants que les ména - ges pivots luxembourgeois et, dansune moindre mesure, que les autresménages pivots étrangers (Fleury,2010a).

Encore une fois, on rejoint lesobservations d’Attias-Donfut etde Wolff (2009) qui observent queles Portugais vivant en Franceversent davantage d’argent àleurs ascendants que ne le fontles Fran çais et les autres immi-grants d’Eu rope, s’apparentantainsi aux immi grants provenantdes pays du Magh reb. En dehorsde normes d’obligation filialeplus prégnan tes, ce qui ressort deces résultats est, à notre avis, les

différents niveaux de générositédes sys tè mes de sécurité sociale àl’échelle européenne et interna-tionale. Moins généreux que celuidu Luxem bourg, le système desécurité sociale portugais exige,faute d’autres ressources, uneplus grande participation de lafamille dans le soutien aux per-sonnes âgées (Segalen, 2008†; Wallet al., 2001†; Millar et Warman,1996†; Hespanha, 1995). Il enrésulte une obligation de redistri-bution ascen dante privée plusimportante, obligation à laquellen’échap pent pas les immigrantsportugais qui s’établissent auLuxembourg. Comme nous allonsle voir dans la prochaine section,

1 2 3 4 5 6

Parent au Luxembourg Parent à l’étranger

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et à faciliter l’acquisition de leurlogement. À propos du loge-ment, Trausch (2009) souligned’ailleurs que les jeunes ménagesdu Luxem bourg sont tributairesde ces aides, «†face au coût exor-bitant des logements†» (Trausch,2009†: 66). En 2002, on estimait àprès de 38†% la proportion dejeunes ménages ayant été aidéspar leur famille pour accéder àleur logement actuel, une aidedont le montant médian s’élevaità près de 25 000 euros parmi lesménages aidés (Fleury, 2009b).Comme ailleurs dans les autrespays européens, ces transfertsfinanciers sont toutefois distri-bués inégalement, ceux-ci profi-tant essentiellement aux jeunesménages les plus favorisés (Fleury,2009b†; Déchaux, 2007†; Bawin-Legros et Stassen, 2002). En fait,tout indique que, devant des res-sources financières limitées, lesfamilles procèdent à des arbitra -ges financiers dans l’aide qu’ellesaccordent à ses membres. Lestransferts sont d’autant plus raresque les ressources sont limitéeset le nombre de bénéficiairespotentiels est élevé.

Les enfants des ménages portu-gais semblent faire les frais de cesarbitrages financiers. Comme l’in-dique le graphique 7, qui présentela proportion de ménages pivotsayant régulièrement versé de l’ar-gent à un descendant au cours desdouze derniers mois ainsi quecelle qui est venue en aide à undescendant pour accéder au loge-ment au cours des cinq dernièresannées11, il apparaît que les ména -ges pivots portugais sont moinssusceptibles d’avoir versé uneaide financière à leurs descen-dants que les autres ménagespivots. En ce qui concerne l’aide

105

de telles obligations semblentavoir des conséquences impor-tantes sur le niveau de l’aide sus-ceptible d’être accordée aux des-cendants.

Des obligations familiales quigénèrent des inégalités sociales

Les différents travaux qui ontporté sur la solidarité intergénéra-tionnelle dans les pays européensde type corporatiste comme leLuxembourg s’entendent pourdire que le développement dessys tèmes de sécurité sociale a pro-fondément modifié les rapportsentre les générations (Attias-Don fut, 2000†; Kholi, 1999). Un desprincipaux changements fut pro -voqué par l’instauration des géné-reux systèmes de retraite. Fonc -tion nant selon le principe de laré partition publique des char ges10,ces systèmes ont non seulementper mis de libérer les familles desobligations financières à l’égarddes personnes âgées, mais ont eu

pour effet d’inverser le sens dessoli darités. Selon Attias-Donfut,les transferts privés circuleraientau jour d’hui en sens inverse destransferts publics, «†selon des fluxcirculaires révélateurs de lacom plé mentarité entre ces deuxtypes de transferts†» (Attias-Don -fut, 2000†: 664). Cette complémenta-rité des transferts publics et privésaurait pour conséquence de ré -duire les inégalités intergénéra-tionnelles, les jeunes générationsbénéficiant indirectement destransferts publics destinés auxplus âgés.

Au Luxembourg, les aidesfinan cières familiales versées àdes descen dants sont considé-rables (Fleury, 2010a, 2010b et2009b). À l’instar des transfertsfinanciers familiaux observés dansles autres pays européens de typecorporatiste, elles sont prioritai-rement destinées à financer lesétu des de plus en plus longuesdes enfants et des petits-enfants

Graphique 7. Proportion de ménages pivots qui ont versé réguliè-rement de l’argent à un parent selon la nationalitédu chef de ménage (en %)

Source†: PSELL-2/2002, CEPS/INSTEAD.

Champ†: ensemble des ménages résidant au Luxembourg dont le chef est âgé de 45 à 64 ans.La question s’énonçait ainsi†: «†Au cours des douze derniers mois, avez-vous versé réguliè-rement de l’argent à des membres de votre famille a) pour contribuer aux frais de maisonde retraite de votre père/mère ou b) à vos parents pour d’autres motifs†».

2 17 5 3

20

16

12

8

4

0Luxembourgeois Portugais Pays limitrophe Autre nationalité

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au logement, ce sont moins de 2†%des ménages pivots portugais quiont versé une telle aide, contre11†% des ménages pivots luxem-bourgeois, 4†% des ménages pivotsprovenant d’un pays limitrophe12

et 8†% des autres ménages pivotsétrangers. Quant aux transfertsréguliers descendants, ce sont àpeine un peu plus de 8†% desménages pivots portugais qui ontprocédé à ce type de transferts,contre 22†% au sein des ménagespivots provenant d’un pays nonlimitrophe et 14†% au sein desména ges pivots luxembourgeois.Il nous paraît important d’insistersur ce dernier résultat en le con -frontant à celui présenté au gra-phique 6. Alors que les ména gespivots non portugais font davan-tage de transferts réguliers des-cendants que de transferts régu-liers ascendants, c’est l’inverse quis’observe chez les ména ges pivotsportugais, les transferts ascen-dants étant deux fois plus nom-breux que les transferts descen-dants. En fait, tout se passe commesi la génération pivot portugaise,dans l’octroi de son aide finan-cière, privilégiait ses parents res-tés au Portugal au détriment deses enfants vivant au Luxem -bourg. Cette hypothèse serait d’au-

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LIEN SOCIAL ET POLITIQUES, 64

Migration et solidarité intergénérationnelle :le cas des immigrants portugais duLuxembourg

tant plus probable qu’elle sem blepropre aux ménages pivots portu-gais. De fait, même lorsque noustenons compte, dans un modèlede régression logistique (Fleury,2010b), des effets du revenu, de lasituation du ménage, de l’âge et dela composition de la famille (pré-sence et nombre d’ascendants/descendants), les ména ges pivotsportugais apparaissent toujourscomme les moins susceptiblesd’avoir fait des transferts finan-ciers réguliers descendants, commesi le fait d’être Portugais expli-quait, à lui seul, cette plus grandepropension.

La façon la plus efficace de vali-der l’hypothèse d’un arbitrage

financier qui se ferait au détrimentdes descendants serait de mesu rerla probabilité d’avoir versé untransfert régulier descendant selonle fait d’avoir versé ou non untransfert ascendant. Mal heureu -sement, en raison de la taille denotre échantillon et de la raretérelative des transferts ascen dants,nos données ne nous permettentpas de procéder à ce type d’ana-lyse et nous ne disposons pas, àl’heure actuelle, d’au tres donnéespour le faire. Cela dit, cette hypo-thèse semble trouver une certainevalidation dans l’examen de laproportion de jeunes ménages13

qui ont été aidés pour accéder àleur logement principal (graphi -

Graphique 8. Proportion de ménages pivots qui ont versé de l’ar-gent à un descendant selon le type de transfert effec-tué et la nationalité du chef de ménage (en %)

Source†: PSELL-2/2002, CEPS/INSTEAD.

Champ†: ensemble des ménages résidant au Luxembourg dont le chef est âgé de 45 à 64 ans.Les transferts réguliers renvoient à l’argent (hors pension alimentaire en cas de divorce)qui a été régulièrement versé au cours des douze mois qui ont précédé l’enquête a) à desenfants ayant fini leurs études†; b) à des petits-enfants†; c) à un enfant ou un petit-enfantpour lui constituer un compte capital ou d) à un enfant ou un petit-enfant pour une autreraison. L’aide au logement renvoie quant à elle aux transferts financiers qui ont été effec-tués occasionnellement au cours des cinq années ayant précédé l’enquête pour aider unenfant ou un petit-enfant à acquérir un logement où s’y installer.

14 11 8 1 6 4 22 8

25

20

15

10

5

0

Transfert régulier Aide au logement

Luxembourgeois Portugais Pays limitrophe Autre nationalité

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blent indiquer que le statut d’im-migrant et le milieu social d’oùl’on est issu ne suffisent pas àexpli quer le fait que les jeunesménages portugais sont moinssou vent aidés et laissent penserque le pays d’origine, ou certainesde ses caractéristiques, y jouentégalement un rôle déterminant.

Cette décision de privilégier lesparents dans l’attribution des res-sources financières se comprendaisément. Ne pouvant pas interve-nir physiquement et de manièrerégulière dans la prise en chargede leurs besoins, les immigrantsportugais compenseraient leurabsence par l’envoi régulier deressources financières. Cette déci-sion s’imposerait d’autant plus queles besoins de leurs enfants vivantau Luxembourg seraient rela ti -vement limités, ceux-ci acquérantrapidement leur autonomie finan-cière, poursuivant, pour diversesraisons et parfois malgré eux, desétudes courtes au sein du systèmepublic d’enseignement et s’insé-rant rapidement sur le marché del’emploi (Bodson, 2010†; Leduc etVilleret, 2009†; Echardour, 1996).De même, vivant à proximité deleurs enfants, ils pourraient aisé-ment compenser l’absence desoutien financier par des aides ennature. À cet égard, les études surla diaspora portugaise témoignentbien de l’intensité des solidaritésfamiliales au sein des familles por -tugaises immigrantes (Ghemmaz,2008†; Leandro, 2003†; Beirão, 1999).

On l’a compris, l’arbitragefinan cier que les immigrants por-tugais semblent faire au profit deleurs parents âgés vivant au Por -tugal ne signifie nullement l’ab-sence de solidarité à l’égard desenfants vivant au Luxembourg. Il

107

que 8). On cons tate en effet queles jeunes ména ges portugais,qu’ils soient de la première ou dela deuxième génération, ont éténettement moins aidés que lesautres jeunes ména ges†: alors queplus de 50†% des jeunes ménagesluxembourgeois ont été aidéspour accéder au logement qu’ilsoccupent actuellement, seulement12†% des immigrants portugais dela deuxième génération l’ont été.Cette proportion est supérieure àcelle observée chez les jeunesménages portugais de la premièregénération (6†%), mais semble lar-gement inférieure à celle observéechez les autres immigrants de deu -xième génération, dont la proba-

bilité d’avoir été aidé oscille entre50†% et 65†%14 et s’apparente àcelle observée chez les jeunesLuxem bourgeois. Encore une fois,les caractéristiques sociodémogra -phi ques des jeunes ménages por-tugais ne semblent pas expliquercette spécificité†: même en tenantcompte de l’effet des autres varia -bles susceptibles d’expliquer laspécificité portugaise (originesociale, âge, revenu, niveau de sco-larité, âge au moment de l’arrivéeau Luxembourg, etc.), les jeunesménages portugais, qu’ils soientde la première ou de la deuxièmegénération, sont toujours moinssusceptibles d’avoir été aidés(Fleury, 2010a). Ces résultats sem-

Graphique 9. Proportion de jeunes ménages qui ont reçu de l’ar-gent de la part de leur famille en vue d’accéder à unlogement selon la nationalité du chef de ménage(en %)

Source†: PSELL-2/2002, CEPS/INSTEAD

Champ†: ensemble des ménages résidant au Luxembourg dont le chef est âgé de 18 à 44 ans.Les ménages qui ont été aidés sont ceux qui reçoivent de l’aide financière de la part de leurfamille pour payer leur loyer, ceux qui sont logés gratuitement ou à moindres frais par desmembres de leur famille et ceux, nettement plus nombreux, qui ont reçu une aide finan-cière pour acquérir leur logement actuel.

Note (*)†: 15>n<25. Interpréter avec prudence.

52 6 12 20 63 19 53

70

60

50

40

30

20

10

0

Lux. Portugais Pays limitrophe Autre nationalité

1re 2e 1re 2e 1re 2e

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demeure néanmoins que, dans unpays où les transferts financiersdescendants revêtent une telleimportance et constituent unecondition sine qua non pour accé-der au logement, un tel résultat estmajeur†; il témoigne d’importantesinégalités en matière de solidaritéintergénérationnelle. On rejointici la thèse de Déchaux (2007),lequel soutient que la solidaritéinter générationnelle n’accroît pasla cohésion sociale, laissant cha quecatégorie sociale aux alentours desa position d’origine. Dans le casdes immigrants portugais, cettesolidarité tendrait même à accroî -tre les inégalités, ceux-ci cumulantun certain nombre de désavan-tages économiques en plus d’avoirà faire face à des obligations finan-cières que n’auraient pas les mem -bres de la population autochtone.

Discussion

Au terme de notre analyse, ilressort que les valeurs et les obli-gations familiales propres au paysd’origine ne disparaissent pas avecla migration. Au contraire, parceque la plupart des immigrants ontlaissé des membres de leur familleau pays d’origine – notammentleurs parents –, ils continuent

d’adhé rer fortement à ces valeurset à ces obligations familiales, lestransmettant même à leurs enfants.L’éloignement géographique n’estd’ailleurs pas incompatible avecces normes d’obligation familiale†:au Luxembourg, les immigrantsportugais viennent presque aussisouvent en aide à leurs parentsque le font les Luxembourgeois.Cette solidarité s’exerce d’abord àdistance et prend la forme du sou-tien moral et du soutien financier.Cela dit, grâce aux progrès tech-nologiques intervenus dans ledomaine des transports et descommunications, le soutien directaux parents est de plus en plusenvisageable, ces progrès ayantfortement «†réduit†» les distancesgéographiques et ayant rendu plusaccessibles les coûts des trans-ports et des communications.

Il ressort également que lesvaleurs et les obligations fami-liales propres à un pays sont étroi-tement liées au système de sécu-rité sociale qui le caractérise. Ence sens, la migration constituel’occasion d’une confrontationentre deux – et parfois plus – sys-tèmes de sécurité sociale. Or,parce qu’ils sont conçus dans uneperspective où les générationscohabitent au sein d’un mêmepays et parce qu’ils envisagentparfois les relations intergénéra-tionnelles différemment, leurconfrontation peut s’avérer pro-blématique, les immigrants devantnotamment faire face à des exi-gences contradictoires à l’égardde la famille et de ses membres.C’est le cas des immigrants portu-gais du Luxembourg, lesquelsmaintiennent leurs obligationsfinancières à l’égard de leursparents âgés, mais vivent dans unpays réputé les avoir libérés de

telles obligations et ayant fait destransferts descendants la princi-pale (et nécessaire) forme de sou-tien financier intergénérationnel.Aussi, devant des obligations filia -les héritées de leur pays d’origine etdes obligations parentales héritéesde leur pays d’accueil, les immi-grants portugais sont con traints deprocéder à un arbitrage financier,arbitrage qui, faute de moyenssuffisants, semble se faire au détri-ment de la plus jeune géné ration.Il en résulte un accroissement desinégalités chez cette génération,les enfants des immigrants portu-gais étant moins susceptibles derecevoir des transferts financiersintergénérationnels que ne le sontles enfants des Luxembourgeoiset les enfants des ressortissantsdes pays limitrophes.

Cette situation est vécue par lesimmigrants portugais du Luxem -bourg†; on peut croire qu’elle estvécue encore plus intensémentpar les immigrants provenant despays économiquement les pluspauvres, où la solidarité familialeconstitue le principal, voire l’uni -que pilier sur lequel s’appuie lasécurité sociale. L’intérêt d’avoirétudié le cas des immigrants por-tugais du Luxembourg est qu’il apermis d’illustrer le fait que,même à l’intérieur d’une zone oùd’importants efforts d’harmonisa-tion des systèmes de sécuritésociale ont été faits et où les prin-cipaux obstacles liés à la mobilitégéographique ont été enrayés,d’importantes différences subsis-tent en matière de valeurs etd’obligations familiales, ce quin’est pas sans avoir quelquesconséquences sur les immigrantscommunautaires. Cela pose en faitla question de l’intégration desimmigrants provenant des pays

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européens économiquement lesplus pauvres au sein des payseuropéens les plus riches.

Cette question est d’autant plusimportante que les frontières del’Europe se sont élargies au coursdes dernières années aux paysd’Europe de l’Est, mais d’impor-tantes difficultés économiquessemblent actuellement surgir dansles pays d’Europe du Sud†; il s’agitd’autant de phénomènes qui ren-forcent les divergences entre leséconomies des pays européens etqui sont susceptibles d’avoir desconséquences sur les famillesimmigrantes. À cet égard, lesmesu res d’austérité annoncéespar le gouvernement portugais enavril 2010 et visant à éviter unecrise financière semblable à celleque traverse la Grèce pourraientbien venir renforcer les obliga-tions de soutien qui échoientactuellement aux familles portu-gaises, que ses membres vivent, ounon, au Portugal.

Charles FLEURY

Centre d’études des populations,de pauvreté et de politiques

socio-économiques (CEPS/INSTEAD)

Notes

1 Le présent article s’inscrit à l’intérieurdes projets Relations entre générationsau Luxembourg†: solidarité, ambi -valence, conflit†? et Valeurs et cohé sionsociale (VALCOS), financés par leFonds national de la recherche duLuxembourg (FNR) dans le cadre deson programme VIVRE. Je remerciema collègue Monique Borsen bergerainsi que les évaluateurs anonymespour leurs commentaires et leurs sug-gestions.

2 Menées à intervalles réguliers deneuf ans, les enquêtes EVS interro-gent, dans chaque pays, un échantil -lon représentatif de la populationadulte d’au moins 1 000 individus. Lequestionnaire est largement iden-tique d’un pays à l’autre, ce qui per-met des comparaisons internatio-nales. Le Luxembourg participe àcette enquête depuis 1999, le Por -tugal, depuis 1990. Pour plus d’infor-mations sur cette enquête, voir le siteInternet de l’EVS (www.europeanva-luesstudy.eu).

3 À cet égard, il est intéressant de dis-tinguer les immigrants des pays limi-trophes (Allemagne, France, Belgi -que) des immigrants portugais, lespre miers vivant plus près de leursparents que les seconds et provenantde pays caractérisés par des régimesde sécurité sociale relativement simi-laires à celui du Luxembourg (Masson,2009†; Segalen, 2008). Notons que lesimmigrants des pays limitrophesreprésentaient un peu plus de 26†%de la population immigrante auLuxem bourg en 2009 (Statec, 2009).

4 Le seuil de 16 ans se justifie par notrevolonté de distinguer les immigrantsadultes de ceux qui sont nés auLuxem bourg ou qui y ont immigré entant qu’enfant d’immigrant. Il s’agitd’une distinction pratique, et noussommes conscients qu’elle ne renvoiepas à la distinction courante de lagénération d’immigration, notre objec -tif étant simplement de distinguer lesimmigrants les plus susceptiblesd’avoir un parent au Luxembourg.

5 Nous retenons ce groupe d’âge enrai son du fait que les immigrantsportugais de la deuxième générationsont généralement âgés de moins de45 ans et afin de contrôler l’effet del’âge sur les attitudes des individus àl’égard des normes d’obligationfamiliale.

6 Fait partie de la génération pivot toutepersonne âgée de 45 à 64 ans ayantau moins un parent survivant.

7 Notons que la proportion d’individuspivots vivant avec un parent demeuretrès faible au Luxembourg (Leduc etVilleret, 2009†; Kuepie, 2002). Selon

les données de l’EVS de 2008, cetteproportion varie d’ailleurs très peuselon la nationalité.

8 Cette étude s’appuie sur les donnéesindividuelles du panel des ménagesPanel Socio Économique Liewen zuLëtzebuerg mené en 2000 auprèsd’un échantillon représentatif de lapopulation résidante.

9 Les données de ce graphique provien -nent du panel des ménages Panel SocioÉconomique Liewen zu Lëtze buergmené au Luxembourg en 2002 auprèsd’environ 3 000 ménages résidants.

10 C’est-à-dire où chaque générationfinance la retraite de la générationprécédente.

11 Les données de ce graphique pro-viennent du panel des ménages PanelSocio Économique Liewen zu Lëtze -buerg mené au Luxembourg en 2002auprès d’environ 3 000 ménagesrésidants.

12 Cette faible proportion s’expliqueessentiellement par le fait que lesménages pivots provenant d’un payslimitrophe sont moins susceptiblesd’avoir un enfant adulte vivant à l’ex-térieur du ménage.

13 À l’instar d’Attias-Donfut (2000),nous définissons les jeunes ménagescomme étant ceux dirigés par un chefâgé de 18 à 44 ans.

14 La petite taille de l’échantillon nousoblige toutefois à être très prudentsavec ces chiffres.

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