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MINISTERE DE LA COOPERATION I.N.S.E.E. Sous-Direction des ... · formules de calcul utilisées pour la détermination des parités de pouvoir d'achat. L'article de M. SERUZIER sur

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MINISTERE DE LA COOPERATION I.N.S.E.E.

Sous-Direction des Etudes du Développement Service de Coopération

SOMMAIRE

N° 45 - Mars 1986 Pagres

ISSN 0224-098X

- EDITORIAL 3

- Michel MOUYELO-KATOULA 5

Projet de comparaison internationale : les méthodes de calcul utilisées pour l'Afrique

- Michel SERUZIER

29

Le traitement des stocks en comptabilité nationale dans un contexte d'inflation

- Thierry PACCOUD 49

Exploitation micro-Informatique des données comptables des entreprises du Bénin

- Pierre MEYER

73

Quelles enquêtes peut-on dépouiller sur un micro-ordinateur ?

- Michel BLANC et Jean BUKIET

81

L'utilisation de la micro-informatique en statistique : pour une maîtrise de l'outil

- Notes de lecture

par Philippe COUTY

93

Georges DUPRE : Les naissances d'une société. Espace et historicité chez les Beembé du Congo

par Francis GENDREAU

103

Rémy CLAIRIN. Contribution à l'analyse des données démographiques imparfaites des pays africains

STATECO : Bulletin de liaison non officiel des Statisticiens et Economistes exerçant leur activité dans les pays du Tiers-Monde

Directeur de la Publication : Xavier CHAROY

Rédacteur en Chef : Michel BLANC

Secrétariat de Rédaction : I.N.S.E.E. - Service de Coopération 18 boulevard Adolphe Pinard 75675 PARIS CEDEX 14

Tirage : 1 200 exemplaires

-3

EDITORIAL

par Michel BLANC

Les deux premiers articles de ce numéro 45 de STATECO constituent les compléments,

annoncés par leurs auteurs, à deux articles du précédent numéro.

Il s'agit en premier lieu du projet de comparaison internationale (P.C.I.) des niveaux de

prix et des agrégats économiques d'un ensemble de pays africains. M. MOUYELO-KATOULA

avait donné une présentation générale du projet en décrivant en détail le cadre conceptuel, les

classifications de produits, le déroulement des enquêtes, et en définissant la notion de parité de

pouvoir d'achat, et avait fourni un aperçu des résultats obtenus pour quinze pays sur l'année

1980. L'article qu'il propose ici complète cette description en exposant les procédures et

formules de calcul utilisées pour la détermination des parités de pouvoir d'achat.

L'article de M. SERUZIER sur "Le traitement des stocks en comptabilité nationale dans

un contexte d'inflation" apporte, quant à lui, des précisions aux quelques lignes consacrées à la

variation des stocks dans son précédent article "La prise en compte de l'inflation dans

l'élaboration des comptes nationaux". Les divers problèmes liés à la valorisation de cette

grandeur y sont examinés à la fois de manière théorique et en relation avec les sources de

données statistiques, et suivant la nature des stocks (chez les producteurs, chez les utilisateurs

)u dans le commerce) ; des exemples sont fournis pour illustrer ces difficultés et des solutions

pratiques sont suggérées pour les résoudre.

Restant dans le domaine de la comptabilité nationale, Th. PACCOUD présente une

expérience en cours au Bénin "d'exploitation micro-informatique des données comptables des

entreprises". On sait que dans pratiquement tous les pays disposant d'un plan comptable des

entreprises du type "Plan Comptable OCAM" ont été mis en place des documents comptables

de fin d'exercice, destinés à présenter les comptes à l'administration, qui offrent un très grand

intérêt pour les statisticiens, notamment en vue de l'élaboration des comptes nationaux. Or il

arrive souvent que le traitement de ces comptabilités, en particulier la constitution d'une

centrale de bilans, exige des délais importants qui se répercutent généralement sur les comptes

nationaux. C'est en ce sens que l'opération qui est actuellement expérimentée à la Statistique

du Bénin, où le plan comptable national a été mis en place récemment, est exemplaire :

- 4 -

l'optique choisie est de privilégier la comptabilité nationale, en mettant en oeuvre une

exploitation des documents des entreprises directement par les comptables nationaux, à l'aide

de micro-ordinateurs.

On ne sera pas étonné que la micro-informatique prenne une place de plus en plus

importante pour les traitements des données réalisées dans les Services de Statistique des pays

en développement, comme d'ailleurs dans de nombreux autres organismes, et donc qu'elle soit

maintenant fréquemment mentionnée dans les articles que nous publions, comme un outil au

service des statisticiens, économistes, démographes, etc. Pourtant on ne peut pas encore dire

que son usage s'est "banalisé", au sens où une maîtrise parfaite de cet outil serait déjà

généralisée. Certes ceci provient de l'évolution constante des matériels ainsi que du

développement également continu des logiciels mais s'explique aussi par la rapidité de

l'expansion des micro-ordinateurs, intervenue le plus souvent de manière désordonnée et sans

qu'elle s'accompagne de la formation des personnes destinées à les utiliser. Il ne semble donc

pas inutile dans la situation présente de publier des articles spécialement dédiés aux problèmes

d'utilisation de la micro-informatique, en relation avec des expériences concrètes.

C'est ainsi qu'un article de P. MEYER donne, à partir d'expériences effectivement

réalisées sur des micro-ordinateurs, des indications sur leurs performances dans le traitement

d'enquêtes statistiques.

Un autre article, rédigé par J. BUKIET et moi-même, aborde le problème de l'utilisation

des micro-ordinateurs pour la statistique de manière plus générale, mais dans une optique

toutefois liée à la pratique ; la démarche consiste ici à caractériser divers types d'utilisation de

la micro-informatique pour faire apparaître un certain nombre de principes à respecter : l'article

tente ainsi de définir les exigences d'un savoir-faire en la matière.

Deux notes de lecture clôturent ce numéro. Dans la première, Ph. COUTY analyse le

livre de Georges DUPRE "Les naissances d'une société. Espace et historicité chez les Beembé

du Congo" et propose quelques réflexions, dont certaines dépassent un peu le cadre de

l'ouvrage, sur le rapport entre les classifications qu'introduisent les statisticiens -dont la

classification ethnique est un exemple- et l'histoire, ainsi que sur la méthode de recherche

suivie par l'auteur.

La seconde note de lecture, rédigée par F. GENDREAU, porte sur le dernier ouvrage

publié par le Groupe de Démographie Africaine, sous la signature de Rémy CLAIRIN, et intitulé

"Contribution à l'analyse des données démographiques imparfaites des pays africains".

PROJET DE COMPARAISON INTERNATIONALE :

LES METHODES DE CALCUL UTILISEES POUR L'AFRIQUE

par Michel MOUYELO-KATOULA*

I - INTRODUCTION

Les objectifs, l'historique et le cadre conceptuel et statistique du projet de

comparaison internationale (P.C.I.), ainsi que la méthodologie des enquêtes qui

sous-tendent ledit projet ont été présentés dans STATECO n° 44 (décembre 1985). Ce qu'il

convient d'en retenir parce que justifiant les méthodes de calcul décrites dans le présent

article peut être résumé en trois points :

1. la comparaison internationale des produits intérieurs bruts (PIB) réels nécessite la

détermination de parités de pouvoir d'achat (PPA) ;

2. pour ce faire, le PIB est décomposé en cinq emplois qui sont :

- la consommation privée,

- la consommation collective des administrations publiques,

- la formation brute de capital fixe,

- la variation des stocks,

- l'excédent des exportations sur les importations de biens et services ;

3. la décomposition du PIB est poussée plus avant grâce à une partition judicieuse

de chacun des trois premiers emplois en positions élémentaires.

Une position élémentaire est définie comme un groupe de produits homogène à

l'intérieur duquel on peut aisément sélectionner et identifier pour chaque pays un ou

plusieurs produits dont les prix révèlent bien le niveau des prix du groupe.

* Expert de l'Office Statistique des Communautés Européennes.

- 6 -

Il - PROCEDURE DE DETERMINATION DES PPA : CONSIDERATIONS GENERALES

2.1. Données nécessaires

La détermination des PPA repose principalement sur deux jeux de données, à sa-

voir :

1- des données de la comptabilité nationale : valeurs du PIB, de ses emplois, et des

dépenses qui correspondent aux positions élémentaires des trois premiers emplois ;

2- des prix moyens nationaux des biens et services sélectionnés à l'intérieur des

positions élémentaires.

2.2. Etapes de calcul

La détermination des PPA s'effectue en deux temps :

1- estimation des indicateurs de niveau des prix des positions élémentaires. C'est

l'étape de calcul des parités de pouvoir d'achat élémentaires ;

2- agrégation de ces parités élémentaires.

Ces deux étapes de calcul ne concernent guère la variation des stocks ni le solde

des exportations sur les importations. En effet, on considère que les incidences directes et

mutuelles de la dynamique des changes et de la dynamique de la balance des paiements

justifie bien l'utilisation des taux de change officiels des monnaies pour la comparaison

internationale des différences entre les exportations et les importations. Quant à la variation

des stocks, il lui est attribué la même PPA que la formation brute de capital fixe.

Ce qui précède révèle bien les temps forts de la procédure de calcul des valeurs

réelles du PIB et de ses emplois et sous-emplois. Si le calcul des PPA élémentaires et des

PPA synthétiques des trois principaux emplois intérieurs du PIB passe par l'échafaudage de

méthodes parfois très complexes, la prise en compte des deux autres emplois relève par

contre de l'arithmétique la plus simple.

2.3. Méthodes de calcul

Il existe tant pour les PPA élémentaires que pour les PPA synthétiques des familles

de méthodes mathématiques caractérisées par des propriétés bien précises. Mais ici, il n'est

- 7 -

fait état que des méthodes utilisées par l'Office Statistique des Communautés Européennes

pour la comparaison africaine de 1980. Le lecteur désireux de s'informer sur d'autres

méthodes pourra exploiter la bibliographie donnée en annexe.

III - CALCUL DES PPA ELEMENTAIRES

3.1. L'approche binaire de l'OSCE

L'Office Statistique des Communautés Européennes (OSCE -ou EUROSTAT-)

procède au calcul des PPA élémentaires selon une approche binaire à'urle échelle réduite.

Disons plus simplement qu'il calcule ces PPA à partir des rapports de prix existants pour

certains couples de pays. Ces rapports de prix sont calculés produit par produit. Dans la

comparaison africaine de 1980, ils ont été affectés de coefficients avant d'être agrégés.

Ces coefficients proviennent des pondérations reconnues par les pays aux produits

observés.

En réalité, les pondérations relatives aux différents produits d'une même position

élémentaire ne traduisent pas leur importance effective dans l'emploi qui en est fait par les

consommateurs finals. On pourrait considérer comme cela a été dit pour la comparaison

africaine de 1980 que chaque produit est affecté du poids de la classe d'équivalence des

produits similaires dont il est un représentant privilégié (parce que sélectionné pour les

besoins de la comparaison !). Cela autoriserait alors à calculer les PPA élémentaires à partir

de moyennes arithmétiques pondérées de rapports de prix entre pays.

Mais -et c'est bien là que réside la difficulté- ces classes d'équivalence ne sont pas

clairement définies, et leur importance relative n'est pas connue. Soulignons que si ces

classes de produits étaient correctement identifiées, elles correspondraient à des catégories

plus fines que les groupes qui les contiennent, donc à des positions élémentaires : grâce au

poids de chacune on estimerait aisément les valeurs de dépenses correspondantes. Il y a

donc lieu de douter de la fiabilité des données de pondération, même si elles ont conduit

pour 1980 à des parités non significativement différentes de celles que l'on aurait obtenues

si on ne les avait pas introduites dans les calculs.

Au lieu d'utiliser des pondérations explicites, des pondérations implicites devraient

suffire. Pour un pays donné, la pondération 1 (ou 100 %) est attribuée à tout produit

sélectionné à l'intérieur d'une position élémentaire en tant que révélateur des habitudes de

consommation, des modes d'investissement ou de la structure des dépenses de l'Etat. La

pondération 0 (zéro) est attribuée à tout produit dont les prix ne sont relevés que pour

permettre un calcul d'indice comparatif entre le pays considéré et les autres pays dans

lesquels ce produit est considéré comme important.

Pour un pays donné, l'échantillon des produits d'une position élémentaire contient

les produits représentatifs, c'est-à-dire typiques de ce pays, ainsi que les produits non

typiques qui ne sont retenus que pour les besoins des comparaisons binaires directes entre

pays.

La notion de comparaison binaire indirecte est introduite ici pour bien mettre en

exergue le fait qu'a contrario de la comparaison qui s'établit naturellement entre deux pays

dont les produits typiques de l'un sont observés dans l'autre, on estime, selon une méthode

qui sera exposée plus loin, un indice de comparaison (des prix relatifs à une position

élémentaire donnée) pour deux pays qui n'ont pourtant pas de produit-échantillon en

commun.

3.2. Méthode des astérisques

La méthode des astérisques doit son nom à l'attribution d'astérisques (ou de

pondération 1) aux produits typiques d'un pays.

Pour une position élémentaire, il peut y avoir plusieurs produits typiques d'un pays.

En affectant la pondération 1 ou le code de représentativité 1 ou encore un astérisque à

ces produits, on se donne tout simplement un signe de reconnaissance des produits d'une

position élémentaire dont les prix doivent intervenir dans le calcul des indices

caractéristiques du pays considéré.

En clair,

IA/B

étant un indice de prix entre les pays A et B, IA/B

est dit

caractéristique du pays A (respectivement B) si les produits dont les prix constituent cet

indice sont typiques de A (resp. B).

3.3. Indices de Laspeyres et de Paasche

i étant un produit typique du pays B dont les prix ont été relevés dans le pays A

aussi, un indice simple de prix (moyens) de A base le pays B s'écrit comme rapport entre le

1 V

j c J . pl

où v est le nombre de produits (appartenant à J) typiques de A également observés dans B.

PA/B

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prix moyen dei dans A, soit piA, et le prix moyen de i dans B, soit p.B.

Le rapport piA/p B est de toute évidence un indice de type Laspeyres.

S'il existe plusieurs produits typiques de B (supposons qu'il existe un ensemble I ; i e I), également observés dans A, il est recommandé de calculer les rapports simples des

prix correspondants et d'en prendre la moyenne géométrique.

L'indice composite de type Laspeyres ainsi obtenu est de la forme :

1 A ti

TT Pi L = A/B iel B Pi

où u est le nombre de produits appartenant à I.

Cet indice est caractéristique de B.

En suivant la même démarche on construit un indice caractéristique de A en tant

que synthèse de rapports de prix entre A et B pour des produits typiques de A. Il s'agit d'un

indice de type Paasche.

3.4. Indice de Fisher

Il est démontré que chacun de ces indices fournit une mesure biaisée du rapport de

prix réel entre A et B.

LA/B construit sur des produits représentatifs de B peut être souvent une

surestimation des indices de type Laspeyres que l'on aurait calculés (si c'était possible !) en

- 10 -

considérant l'ensemble des produits relevant d'une même position élémentaire. Cette

surestimation serait due d'une part à la faiblesse relative des prix des produits représentatifs

de B, et d'autre part au niveau de consommation certainement élevé de ces produits dans

A.

L'indice de Paasche, lui, sous-estimerait le rapport réel des prix entre A et B.

Ainsi, la moyenne géométrique (indice de Fisher) de ces deux indices présente, en

plus des propriétés qu'on lui conne, l'avantage de réduire l'un et l'autre biais

systématiques des Laspeyres et Paasche et d'être, dans un certain sens, de même

caractéristicité pour A et B, tenant compte à la fois des produits typiques de chacun de ces

pays.

3.5. Exemple

Il est intéressant de voir sur un exemple comment le choix des produits et

l'affectation des astérisques s'articulent avec le calcul des indices de Fisher.

Matrice des astérisques

Considérons cinq pays A, B, C, D, E dont on désire comparer les parités de pouvoir

d'achat correspondant à une position élémentaire donnée.

Pour cette position élémentaire, les produits typiques des différents pays sont

indiqués par une croix :

Pays

A B C D

Produits typiques

a

b x

c x

d

Comme on le voit, seul le produit a est typique de A. Pour B, il y a deux produits

typiques a et b, etc.

La matrice des astérisques, en tant que matrice booléenne permettant de

sélectionner les prix des produits intervenant au numérateur des rapports de type Paasche,

est donc la suivante :

1 1 1 0

0

o 1 o o 0

o o. 0 1

0

0 0 1 0

Matrice des prix

Pour que les comparaisons binaires puissent s'établir, il faut bien que chaque produit

typique d'un pays soit observé dans au moins un autre pays.

Supposons que le pays A ait enquêté sur les produits a, b et d, que B ait retenu a, b

et c, que C n'ait retenu que ses deux produits typiques a et d, que D ait choisi a et c et

que E n'ait observé que d. La matrice des prix se présentera comme suit pour la position

élémentaire considérée :

A B C D Pa Pa Pa Pa

A B Pb Pb 0 0

B D 0 Pc 0 Pc

PdA

0 PdC 0

Le zéro dans une colonne signifie simplement que le pays correspondant n'a pas

observé le produit considéré.

Association Matrice des astérisques - Matrice des prix

La lecture simultanée de la matrice des astérisques et de la matrice des prix permet

de savoir pour quels couples de pays l'on pourra procéder à la détermination directe des

indices de Fisher et montre les produits qui interviennent dans les indices de Laspeyres ou

de Paasche de deux pays.

0

0

0

E Pd

- 12 -

Pour chaque couple de pays les produits qui sont pris en compte dans le calcul des

indices de Laspeyres et de Paasche sont indiqués dans le tableau ci-dessous qu'il convient

de lire en considérant que les lignes correspondent aux pays de base en ce qui concerne

les indices de Laspeyres, tandis que les colonnes représentent les pays de base pour les

indices de Paasche.

A B C D E.

A a a a

B a,b a a

C a,d a a d

D c

E d d

Les comparaisons directes s'établissent donc pour les couples de pays pour lesquels

on peut calculer à la fois un indice de type Laspeyres et un indice de type Paasche. Il

s'agit de A-C, A-B, B-C, C-E, D-B.

C E D

(figure n° 1)

I A B

Tableau des indices de Fisher

Le tableau des indices de Fisher qui résulte de la matrice des prix et de la matrice

des astérisques présentées ci-dessus est incomplet : il ne contient que les indices de Fisher

directs relatifs aux couples A-C, A-B, B-C, C-E et D-B.

La méthode de calcul des parités de pouvoir d'achat élémentaires préconise,

lorsque le tableau des indices de Fisher est incomplet, qu'il soit complété par des indices

indirects estimés à l'aide des indices directs.

Les chemins à retenir pour relier deux pays doivent être les plus courts possibles.

Ainsi dans l'exemple précédent (voir figure n° 1), on relie E et B en passant par C et non

pas par C puis A. De même, le chemin optimal de D à E est le chemin D-B-C-E et non

D-B-A-C-E.

- 13 -

l'E/B étant l'indice direct de E base B, on écrit :

l E/B = IE/C x IC/B

où IE/C désigne l'indice direct de E base C.

I' DIE = D/B x B/C x IC/E.

La longueur d'un chemin est le nombre de segments qui le composent. S'il existe

pour deux pays donnés plusieurs chemins optimaux (c'est-à-dire ayant la longueur la plus

petite), l'indice indirect final est obtenu comme moyenne géométrique des indices indirects

correspondant aux différents chemins optimaux.

Par exemple, dans un cas de figure comme le suivant :

(figure n° 2)

l'indice indirect de D base E à inscrire dans le tableau des indices de Fisher est la moyenne

géométrique des indices indirects 11'D/E et 211D/E

1 D/E = ID/B x IB/C x IC/E

211D/E = ID/A x IA/C x IC/E

La procédure de remplissage du tableau des indices de Fisher repose sur la

condition de transitivité imposée aux indices utilisés, et préfigure en cela la détermination

des parités de pouvoir d'achat élémentaires de type EKS.

3.6. Parités EKS

Les indices de type Fisher, dont nous venons d'examiner la méthode de calcul tant

pour les comparaisons binaires directes que pour celles qui sont indirectes, peuvent ne pas

être transitifs.

- 14 -

On dérive de la matrice (complète) qu'ils forment des parités de pouvoir d'achat

élémentaires transitives, en minimisant la distance suivante due à Elteto, Koves et Szulc :

D = Z (LogEKSj - Log IFj)2 Z

Dans l'expression de cette distance D,

.EKS. désigne la PPA de type EKS que l'on désire déterminer pour le pays j, base le pays i ;

1Fi est l'indice de type Fisher (direct ou indirect) de j base i ;

et la somme double est effectuée sur tous les n pays comparés.

On démontre que, pour tout couple de pays, l'indice EKS de l'un (soit j) base l'autre

(soit i) est égal à la moyenne géométrique des n rapports entre un indice de Fisher de l'un

et un indice de Fisher de l'autre.

F 1Fj 2 j .EKS. x

1F1 2F1 X .. X

1 .Fj 1F1

. nFj x •• x x x 'Fi F.

.EKS j

n 1T 1=1 Li

j

1 n

IFj

1 ,

Sachant que IF = i .F1 , i on peut encore écrire .EKS sous la forme de la racine j

n-ième d'un produit d'indices F :

1 .EKS. = 1F.) x (if IFI n

J 1=1 J 1=1

On reconnart entre ces crochets d'une part le produit des éléments de la j-lème

colonne de la matrice de Fisher et d'autre part le produit des éléments de la i-ième ligne de

ladite matrice.

- 15-

Toutes les informations contenues dans la matrice EKS peuvent être reconstituées à

partir de n'importe laquelle de ses lignes ou colonnes étant donné la transitivité des indices

EKS.

Si on examine la n-lème ligne par exemple, on constate qu'elle contient les ppa de

chacun des pays par rapport au pays n.

Dans toute la suite de cet article, le vecteur de ces ppa s'écrira :

nppai.1 nppa12 nppa1.3 nPPai(n-1) nPPain avec nppain 1

n désigne le pays de base ; I désigne la position élémentaire dont la matrice des ppa transitives est réduite au n-ième

vecteur-ligne ci-dessus ;

j désigne le pays courant (pays de référence).

IV - AGREGATION DES PARITES DE POUVOIR D'ACHAT

La littérature sur les comparaisons internationales préconise de nombreuses

méthodes d'agrégation de parités de pouvoir d'achat (ppa) élémentaires, dont nous ne

présentons ici que celle utilisée par l'EUROSTAT pour la comparaison africaine de 1980.

4.1. Présentation de la méthode d'agrégation choisie

4.1.1. Propriétés désirées

Le choix de la méthode d'agrégation des parités de pouvoir d'achat élémentaires

est guidé par un certain nombre de propriétés parmi lesquelles on fait principalement valoir

l'invariance par rapport au pays pris comme base, la réversibilité des facteurs, la cohérence

interne et la transitivité.

a) Invariance par rapport à la base

Les résultats de la comparaison entre plusieurs pays ne doivent pas être influencés

par le choix d'un pays comme base. Les indices obtenus devraient être dans un certain

sens symétriques par rapport à l'ensemble des pays.

- 16 -

b) Réversibilité des facteurs

La condition de réversibilité des facteurs telle qu'elle est généralement utilisée est

remplie si le produit de la ppa par rapport à l'indice de volume est égal au rapport des

valeurs nominales (tous les trois éléments se situent dans un cadre spatial). Souvent, la

condition est faiblement remplie, la ppa ou l'indice de volume étant implicitement dérivé

l'un à partir de l'autre et de l'indice des valeurs nominales. Eri effet, dans les comparaisons

internationales, les indices de volume sont obtenus en divisant le rapport des valeurs

nominales par la ppa ; la condition exigée est alors automatiquement remplie.

Dans la littérature sur les indices, la condition de réversibilité des facteurs impose

aussi une autre exigence qui n'est pas respectée en pratique, à savoir que les ppa soient

obtenues en permutant dans les indices de volume les prix avec les quantités (et

inversement les indices de volume donnés par la permutation des quantités avec les prix

dans les ppa). Ce type de réversibilité des facteurs n'est pas utilisé, mais il est intéressant

de souligner que lorsque la deuxième exigence est satisfaite aussi, la condition entière

présente l'avantage de montrer si le produit de l'indice de volume avec la ppa (l'un obtenu

à partir de l'autre en permutant les prix avec les quantités) est bien égal au rapport des

valeurs nominales.

c) Cohérence interne (en anglais : internai consistency)

Cette condition recouvre deux nécessités différentes qui sont examinées ci-après :

1- Additivité

Cette condition concerne les valeurs réelles, c'est-à-dire les valeurs nominales des

différents pays pour les différents niveaux d'agrégation, converties dans une unité

commune à l'aide' des ppa spécifiques des agrégats.

Elle est satisfaite si la valeur réelle d'un agrégat d'un pays, est égale à celle qu'on

obtient par addition des valeurs réelles des composants de cet agrégat ; ceci pour

n'importe quel niveau d'agrégation.

Elle est remplie selon deux possibilités qui tiennent à la façon dont les ppa

spécifiques des composants sont calculées. En effet les ppa spécifiques peuvent être

calculées pour chaque composant indépendamment des autres prix et quantités, ou bien

comme fonction de ces prix et quantités aussi. Dans ce deuxième cas, l'additivité appelée

"matrix consistency" est aussi dite additivité faible. Dans le premier cas, il s'agirait de

l'additivité forte.

- 17 -

La condition d'additivité est très importante dans le contexte des comparaisons

internationales des agrégats des comptes nationaux.

2- Test de la moyenne des rapports de volume

Cette condition est étroitement liée à la précédente parce qu'elle concerne la

cohérence entre le rapport de volume d'un agrégat et celui de ses composants. Elle est

remplie si le rapport de volume de l'agrégat est compris entre le plus grand et le plus petit

des rapports de volume des composants.

Elle est extrêmement importante en raison de l'objectif principal poursuivi dans le

projet de comparaison des rapports de volume entre les pays.

Il faut signaler que si les indices de volume satisfont au "test de la moyenne", cela

n'est pas généralement le cas pour les ppa correspondantes. Cela implique que la

comparaison des niveaux relatifs des prix entre pays, pour être caractérisée par une

cohérence interne, nécessite que les ppa soient calculées à l'aide d'un indice qui remplit le

"test de la moyenne" des ppa.

d) Transitivité

La condition de transitivité est très importante dans le cadre des comparaisons

internationales parce qu'elle permet de comparer deux pays directement ou par le

truchement d'un autre ou de plusieurs autres pays. En d'autres termes, si alc indice de

volume ou de prix entre les pays a et c est inconnu, on peut l'obtenir en tant que produit

de l'indice alb du couple (a,b) par l'indice bIc du couple (b,c) si ces deux derniers indices

sont connus.

4.1.2. Equations de définition de l'indice Geary-Khamis

Parmi les méthodes connues qui satisfont les conditions mentionnées ci-dessus, le

choix de l'EUROSTAT s'est fixé sur l'indice Geary-Khamis par conformité au choix fait par

l'office statistique des Nations-Unies pour les comparaisons mondiales.

La méthode Geary-Khamis fait partie de l'ensemble des méthodes basées sur une

structure commune de prix moyens.

- 18 -

Ces prix moyens ou "prix internationaux" sont définis pour chaque produit en tant

que moyenne arithmétique des prix nationaux ; lesquels prix nationaux sont convertis en

une monnaie commune à l'aide de la parité globale, et pondérés par des quantités

spécifiques.

Si la moyenne Tri est le prix international du produit i, elle peut s'écrire comme suit :

n (GK 1) : Tr . =

j=1

qij

= 1, ...,m PPA.

j=1

qij /

La parité de pouvoir d'achat globale du pays j est :

(GK 2) : PPAi

j = 1, ...,n

Dans les équations (GK 1) le prix national p i, du produit i dans le pays j est pondéré

par le poids dudit pays dans la consommation totale (somme des quantités nationales =Zq. )

du produit considéré. Il y a m équations du type GK 1 : autant que de produits.

La parité de pouvoir d'achat globale d'un pays j, soit PPA j, le .niveau général

des prix dudit pays par rapport aux prix internationaux. C'est un rapport dont le numérateur

représente les quantités de tous les pr'oduits affectées des prix nationaux, tandis qu'au

dénominateur les quantités, qij sont multipliées par les prix internationaux.

Les (mi-n) équations sont résolues simultanément dès que toutes les données de

base sont connues : il s'agit des prix pg et des quantités qij.

4.1.3. Intégration des ppa élémentaires dans les formules GK

Dans le cadre des comparaisons internationales, les prix connus et disponibles se

rapportent à des produits bien spécifiés dont on ne connaît cependant guère les quantités

ni les valeurs consommées ou investies.

- 19 -

Les données de valeur existantes concernent des groupes de produits dont les plus

fins sont appelés "positions élémentaires".

Pour chaque position élémentaire, il est calculé une matrice de ppa transitives à

l'aide de la méthode EKS (ou de toute autre méthode connue). La n-ième ligne de la

matrice (lorsque n pays sont comparés) de la position élémentaire i contient les éléments

suivants :

. . nij p (avec nppain = 1) nppai.1 nppa12 nppa13 ppa . npai(n-1) nppa.

nppa. est la parité de pouvoir d'achat du pays j par rapport au pays n, pour la position

élémentaire i.

Sachant que le pays n est pris comme base, on peut omettre l'indice gauche n dans

l'expression des nppaii.

Pour la position élémentaire i, ppaii est en quelque sorte un prix. Il estime que si une

quantité donnée de produit composite i vaut 1 unité monétaire dans le pays n, elle vaudra

ppaij unités monétaires du pays j dans le pays j.

Les "prix" ppa, seront utilisés dans les équations de Geary-Khamis à la place des

pli. Malheureusement, ils ne correspondent pas à des quantités effectives ; à moins que l'on

ne détermine des indicateurs de volume en rapportant toutes les valeurs de dépenses des

positions élémentaires au niveau des prix du pays de base n, lesquels indicateurs joueraient

le rôle des quantités.

Cet expédient se justifie bien. En effet, la parité ppaij est un rapport de prix entre le

pays j et le pays n pour la position élémentaire i :

pij

nppaij = Pin

Valeur des dépenses de i Les indicateurs de volume sont : Qij - parité correspondante

vil Q = ij ppaij

- 20 -

Cette valeur V.. telle qu'estimée en comptabilité nationale (c'est une fraction du tl produit intérieur brut) peut être décomposée en un facteur prix pi) et un facteur quantité qq.

Ainsi, Q. pli / pin ; Qij qii x Pin

En guise de quantité, on considère dont la valeur des dépenses de la position élémentaire I (du produit composite i) aux prix du pays n.

Les équations de Geary-Khamis s'écrivent alors :

pi x qi

n ppaij Qij

(GK 3) if. = j=1 Z o. PPAJ 1=1

= • • M

m

(GK 4) PPA = 1 = 1 m

i = 1

ppa.. . Q. ij j = 1, ...

En remplaçant ppa. et Qij par leurs expressions respectives en fonction de p if , q. et pin, et en mettant en relief le produit 7tr i . pin, on se rend compte que les équations GK 3 et GK 4 fournissent

- des "prix internationaux" relatifs : ils sont rapportés aux prix du pays de base

-Tri / p • i in '

- des parités de pouvoir d'achat globales indépendantes du pays choisi comme base.

Solution du système d'équations de Geary-Khamis

Certes ces équations fournissent simultanément les TT. et les PPAI, mais la solution recherchée est le vecteur des PPAi.

dans :e lecteur trouvera une démonstration de l'existence et de l'unicité de cette solu-

tion

m r PPaij ppal.j

ij

r= 1 ,

ppaii

(GKH 2) : PPA.

= 1

j = 1, 2, ... , n - 1

- 21 -

D.S. PRASADA RAO : Aggregation Methods for the Computation of Purchasing Power

Parities - A Review and Comparison (Special IARIW Conference on Purchasing Pqwer

Parities : Luxembourg, 21-24 September).

Connaissant les parités élémentaires ppail (base pays n) et les valeurs nominales des

positions élémentaires en monnaie nationale V. les "prix internationaux" et les parités de

pouvoir d'achat globales PPA. sont calculés simultanément grâce au système de (m + n -

1) équations suivant :

(GKH 1) : =

V..

n

j=1

!plu

PPA.

ppail = 1, 2, • • • , m n V.

j = 1 ppaij

Ce système provient des équations GK 3 et GK 4 dont une est supprimée parce que

redondante, et dans lesquelles on utilise les rapports de valeurs nominales sur les parités

élémentaires comme indicateurs de quantités.

On écrit aisément ce système sous forme de système d'équations linéaires aux m 1

PPA.

4.1.4. Valeurs réelles et parités de pouvoir d'achat spécifiques

Dans la pratique, les calculs d'agrégation se font en trois étapes de calcul qui sont

explicitées ci-après :

inconnues Tri et aux (n - 1) inconnues

1ère étape : Calcul des prix moyens internationaux et des parités du total des principaux

emplois intérieurs. Les données nécessaires à ce stade des calculs sont les suivantes :

- 22 -

a) une matrice de parités élémentaires obtenues grâce à la méthode EKS. Chaque

ligne de cette matrice est un vecteur de parités dont la base est tel pays : le Cameroun

par exemple. Il est évident que la base est la même pour toutes les lignes. Il y a autant de

lignes que de positions élémentaires relatives à la consommation privée (CP), à la

formation brute de capital fixe (FBCF) et à la consommation collective des administrations

publiques (CCAP).

Cette matrice ne concerne pas la variation des stocks ni le solde des exportations

sur les importations qui font l'objet d'un traitement particulier qui sera explicité plus loin.

L'élément de la i-ième ligne, j-ième colonne de cette matrice est la parité du pays j

par rapport au pays de base choisi pour la position élémentaire i.

La colonne correspondant au pays choisi comme base ne comporte que des 1.

b) une matrice de valeurs nominales.

L'élément de la i-ème ligne, j-ième colonne de cette matrice est la valeur nominale

correspondant à la valeur élémentaire i dans le pays j ; laquelle valeur nominale est

exprimée en monnaie du pays j.

Les formules développées ci-dessus permettent de tirer de ces matrices d'une part

les m prix internationaux des différentes positions élémentaires, et d'autre part, pour

chaque pays, la parité de pouvoir d'achat correspondant au total des principaux emplois

finals intérieurs (CP + FBCF + CCAP). La parité de pouvoir d'achat obtenue pour un pays à

ce stade des calculs n'est pas encore globale parce qu'elle ne tient pas compte de la

variation des stocks ni du solde entre exportations et importations.

Ces deux derniers soldes pouvant être négatifs, leur inclusion dans la première

étape risquerait de conduire à des parités aberrantes.

2ème étape : calcul des parités de pouvoir d'achat et des valeurs réelles de tous les

niveaux de décomposition du produit intérieur brut.

Cette deuxième étape peut être scindée en trois temps qui sont l'agrégation des

parités élémentaires, puis le traitement de la variation des stocks et du solde entre

exportations et importations, et enfin la standardisation.

- 23 -

a) Agrégation des parités élémentaires.

Etant donné que la valeur réelle VRii des dépenses correspondant à la position

élémentaire i dans le pays j est égale à la quantité (mesure de volume) Vii/ppaii y relative

multipliée par le "prix international" (1) pour chaque pays, on peut calculer la valeur réelle

de n'importe quel sous-agrégat en additionnant simplement les valeurs réelles des positions

élémentaires qui composent ce sous-agrégat. Ce calcul est autorisé par l'additivité de

l'indice de Geary-Khamis. Il convient de souligner qu'il n'est effectué que pour les

sous-agrégats du total des principaux emplois finals intérieurs.

Connaissant déjà toutes les valeurs nominales, on obtient la parité de pouvoir

d'achat spécifique de chaque sous-agrégat en divisant sa valeur nominale par sa valeur

réelle.

b) Traitement de la variation des stocks et du solde entre exportations et

importations.

La notion de prix international pour ces deux agrégats n'étant pas définie, on se

contente de prendre d'une part la parité de la formation brute de capital fixe pour déflater

aussi la variation des stocks d'un pays donné, et d'autre part le taux de change officiel de

la monnaie de ce pays par rapport au pays de base pour convertir le solde entre

exportations et importations.

c) Standardisation.

Pour la comparaison africaine l'EUROSTAT, au lieu de privilégier la monnaie de l'un

des pays étudiés, a choisi comme "numéraire" une unité de référence qui est un amalgame

des monnaies de tous les pays comparés.

La procédure utilisée à cet effet est la standardisation. Elle consiste à se donner la

convention selon laquelle la somme sur tous les pays des valeurs réelles des PIB exprimées

en "numéraire" est égale à la somme sur tous ces pays des PIB exprimés en une monnaie

unique à l'aide des taux de change officiels.

(1) On sait que la valeur nominale de V., est égale au prix p.. multiplié par la quantité ql ., ;

quant à la parité ppa.i elle s'écrit Cbrnme rapport des 19rix entre le pays j et le pa4 de base n (ppaij = pij )1 pin). Comme 'g. / pin' on montre aisément que Vril = q

Ir ni,

- 24 -

Ce numéraire est le standard de pouvoir d'achat (SPA). Dans l'étude africaine de

1980 (et il en sera de même pour 1985) les PIB étaient exprimés en une monnaie unique

qui est le dollar US. Et l'on est convenu de désigner le SPA par l'expression "dollar africain

réel".

L'équation de standardisation s'écrit :

V. Vr.. = TC. j=1 1=1 j=1 1=1

Vrij est la valeur réelle de la position élémentaire i dans le pays j

Vij est la valeur nominale de i exprimée en monnaie du pays j

TC. est le taux de change de la monnaie du pays J par rapport au dollar US (1 dollar US =

TC unités monétaires)

M est le nombre de positions élémentaires y compris la variation des stocks et le solde

entre exportations et importations

n est le nombre de pays comparés.

Cette équation se traduit concrètement par la multiplication des valeurs réelles

calculées sous a) et b) par un scalaire qui ne modifie nullement les rapports entre les pays.

V - INDICES DE COMPARAISON

5.1. Principes généraux

Les résultats issus des calculs selon la méthode Geary-Khamis sont :

a) les parités de pouvoir d'achat du produit intérieur brut et de ses subdivisions

successives (agrégats, sous-agrégats) jusqu'au niveau des positions élémentaires ;

b) les valeurs réelles de ces agrégats et sous-agrégats.

Pour faciliter l'analyse de tous ces résultats, on calcule généralement des indices

de comparaison pour les pays comparés. Mais il est important de noter qu'un indice n'est

pas caractéristique du pays auquel il se rapporte. Certes, il concerne ce pays, mais il n'a

de signification que dans le contexte de la comparaison effectuée.

- 25 -

Si l'ensemble des pays étudiés venait à être modifié (insertion ou exclusion de

pays), les indices d'un pays donné pourraient être modifiés aussi.

De plus, les indices que l'EUROSTAT calcule dans le cadre de la comparaison

africaine ont pour base (= 100) l'ensemble des pays considérés.

Les indices de structure relative (comme les indices de niveau relatif des prix, et les

indices de volume relatif) ne doivent pas être utilisés pour dégager des conclusions sur un

pays donné (1). Ils ne servent qu'à comparer l'homogénéité des structures de prix ou de

volume entre pays.

5.2. Indice de niveau général des prix

L'indice de niveau général des prix d'un pays est égal au rapport de sa PPA globale

(celle relative au PIB) sur le taux de change officiel de sa monnaie (par rapport à la

monnaie prise comme numéraire) (voir définition suivante).

5.3. Indices de niveau (relatif) des prix

a) Indices de niveau des prix (moyenne de l'ensemble des pays = 100)

Ces indices sont obtenus en divisant la parité de pouvoir d'achat spécifique pour un

agrégat par le taux de change. L'indice de niveau des prix lorsqu'il se rapporte au PIB est

également connu sous le nom "d'indice de déviation par rapport au taux de change", mais

l'autre terme est préféré ici. Il s'agit d'une présentation standardisée des parités de pouvoir

d'achat de tous les pays. En effet, les indices de niveau dè prix permettent de comparer

directement les niveaux de prix entre les pays pour un agrégat donné parce qu'ils sont pour

tous les pays rapportés à la moyenne des indices de niveau des prix du PIB de l'ensemble

des pays. Lorsque cet indice pour un pays donné et pour un agrégat donné est supérieur à

100, cela signifie que le niveau de prix de cet agrégat pour ce pays est supérieur à la

moyenne de l'ensemble des pays, prise comme référence. La comparaison de cet indice

entre pays permet de déduire les niveaux de prix relatif entre ces pays, pour cet agrégat.

(1) Ansi on ne dira pas qu'au vu des indices de volume relatif la consommation de produits laitiers est de 20 % supérieure à celle de produits de la pêche dans tel pays, bien que l'indice de l'un soit 120 et celui de l'autre 100 (ce n'est qu'un exemple 9. On doit uniquement pouvoir dire que telle structure de tel pays est plus (ou moins) homogène que la structure correspondante de tel autre pays, compte tenu de la situation moyenne de l'ensemble.

- 26 -

b) Indices de niveau relatif des prix

Cet indice est obtenu en divisant la parité de pouvoir d'achat spécifique d'un

sous-agrégat par la parité de pouvoir d'achat d'un des agrégats de ce même pays. Il s'agit

donc d'une standardisation des parités spécifiques pour un pays donné et pour un agrégat

donné. Cet indice peut se définir à des niveaux d'agrégation différents, dans ce sens qu'il

mesure le rapport entre les parités des composants d'un agrégat et la parité de l'agrégat

même. On peut donc diviser par la parité du PIB, ou bien appliquer la parité de la

consommation privée et ainsi de suite. Lorsque, pour un agrégat donné, cet indice est

supérieur à 100, cela signifie que le niveau relatif des prix de cet agrégat est supérieur au

niveau relatif de prix de l'agrégat de référence. Bien entendu, la standardisation uniforme

de toutes les parités pour un pays donné peut se faire par rapport à la parité de pouvoir

d'achat du PIB. Lorsque l'on se réfère aux autres agrégats ou sous-agrégats, la parité de

référence varie et la standardisation se limite à un ensemble de parités seulement.

Un agrégat (ou sous-agrégat) étant pris comme référence (indice = 100), les indices

de ses composantes constituent un vecteur de structure relative des prix.

5.4. Indice de volume

a) Les indices de volume par habitant (moyenne des pays = 100)

Ces indices sont calculés à partir des valeurs réelles par pays et pour l'ensemble des

pays, en exprimant ces valeurs par habitant et en les rapportant à la valeur par tête d'un

habitant moyen de l'ensemble. La conversion par habitant est faite pour mieux comparer la

situation des habitants moyens des différents pays. Bien entendu, les valeurs réelles pour

chaque agrégat sont obtenues à (^'aide de la parité de pouvoir d'achat spécifique. Lorsque,

pour un pays donné et pour un agrégat donné, l'indice est supérieur à 100, cela signifie

que le volume par habitant pour ce pays est supérieur au volume par habitant pour

l'ensemble des pays. Cet indice peut se comparer agrégat par agrégat entre les pays par

rapport à la situation de l'habitant moyen de l'ensemble.

b) Indices de volume relatif

Cet indice est obtenu en divisant l'indice de volume par habitant d'une composante

par celui de l'agrégat. Pour un agrégat donné, les indices des composantes forment un

vecteur de structure relative des volumes.

L'analogie avec les indices de niveau relatif des prix est évidente.

- 27 -

BIBLIOGRAPHIE

EUROSTAT - 1985

Comparaison des niveaux de prix et des agrégats économiques : le cas de 15 pays africains - 1980.

EUROSTAT - 1983

Comparaison en valeurs réelles des agrégats du SEC - 1980.

MOUYELO-KATOULA Michel and MUNNSAD Kantilal

A note on methodologies used in a comparison of purchasing power parities and real economic aggregates in fifteen African' Countries -

Statistical Journal of the United Nations ECE 3 (1985) - 289-305.

KRAVIS Irving B., HESTON Alan W. and SUMMERS Robert

World product and income : international comparison of real gross product

(John Hopkins University Press, Baltimore, 1982).

PRASADA RAO D.S. •

Aggregation methods for the computation of purchasing power parities - A review and comparison

Special IARIW Conference on Purchasing Power Parities. Luxembourg, 21-24 September 1982

MOUYELO-KATOULA Michel

Projet de comparaison internationale : un outil pour l'amélioration des statistiques de prix en Afrique

STATECO n° 44 - décembre 1985.

GERARDI D. - 1981

Selected problems of inter-country comparisons on the basis of the experience of the EEC

17th General Conference of the IARIW, Paris, 1981.

1.

LE TRAITEMENT DES STOCKS EN COMPTABILITE NATIONALE

DANS UN CONTEXTE D'INFLATION

par Michel SERUZIER*

Dans l'analyse qu'elle fait des biens et services présents sur le marché d'une

économie nationale, la comptabilité nationale s'intéresse à tous les produits disponibles,

quelle que soit leur origine, nationale ou importée. Par rapport à une période donnée,

l'année en général, certains biens franchissent la barrière de temps retenue : on parle de

stock initial pour ceux qui proviennent du passé, de stock final pour ceux dont l'utilisation

n'est pas encore constatée en fin de période.

En général, l'équilibre Ressources-Emplois regroupe ces deux flux inter-temporels

en une seule opération désignée par le terme "Variation de stocks". Il s'agit d'un excédent

(ou d'une insuffisance) de produits disponibles au cours de l'année qui est conservé pour le

futur (prélevée sur une accumulation antérieure). La contrepartie de cet excédent

(insuffisance) se traduit par une variation d'immobilisation retracée au compte de capital

des secteurs institutionnels.

Quand il s'agit d'évaluer ce poste, il est souvent préférable de travailler en séparant

stock initial et stock final, d'autant plus que se posent de redoutables problèmes de

valorisation dès qu'apparaissent des variations dans les prix des produits concernés au

cours de la période considérée.

Le présent article propose une analyse théorique de ces problèmes et suggère des

solutions pratiques pour en assurer la résolution dans le cadre de l'élaboration des comptes.

* Expert en comptabilité nationale.

- 30 -

I - RAPPEL DE QUELQUES PRINCIPES

1.1. Où trouve-t-on les stocks ?

a) Il existe quatre variétés de stocks :

- les produits finis

- les produits en cours de fabrication

appelés stocks chez les producteurs (en abrégé stocks producteurs)

- les stocks de matières premières (appelés stocks utilisateurs)

- les stocks chez les commerçants (appelés stocks commerce).

b) La nature des stocks : seuls les biens donnent lieu à stockage ; en aucun cas les

services.

c) Les détenteurs de stocks :

- pour les stocks producteurs : les secteurs ayant une production marchande de

biens ;

- pour les stocks de matières premières : tous les secteurs producteurs marchands ;

en effet, on ne considère pas de stocks utilisateurs dans l'administration, à l'exception de

stocks de produits stratégiques ;

- pour les stocks commerce : les secteurs ayant une production de commerce à

titre principal ou secondaire.

Figurent également dans cette rubrique les stocks de logement détenus par les

promoteurs immobiliers (bien que ceux-ci ne relèvent pas de l'activité commerce

proprement dite).

1.2. La place des stocks dans l'équilibre R = E

La démarche comptable de l'équilibre Ressources-Emplois prend en compte, pour

un produit donné, l'ensemble des flux intervenus à l'intérieur du territoire au cours d'une

année civile. Les stocks représentent le franchissement des frontières temporelles :

stocks initiaux (en début de période) : Ressource

stocks finaux (en fin de période) : Emploi.

- 31 -

En ne retenant que leur variation, on procède à une réduction des phénomènes qui

complique à la fois l'élaboration et l'interprétation. Le retour à l'analyse séparée des deux

flux est une nécessité pour surmonter la plupart des obstacles rencontrés.

Selon la démarche comptable de l'équilibre, chaque emploi élémentaire est la

contrepartie d'une ressource, et la valorisation retenue de part et d'autre doit être la

même.

Dans le cas des flux concernant les stocks, il peut être utile de décrire les diverses

contreparties possibles.

a) Produits finis

entrée : de la production ou du stock d'en cours

sortie : vers stocks utilisateur stocks commerce consommation intermédiaire utilisation finale.

b) En cours

entrée : de la production

sortie : vers le stock produits finis ou les sorties de ceux-ci.

c) Chez l'utilisateur

entrée : de la production de l'importation du stock à la production du stock commerce

sortie : vers la consommation intermédiaire.

d) Dans le commerce

entrée : les mêmes que pour le stock chez l'utilisateur

sortie : vers stock chez l'utilisateur consommation intermédiaire utilisation finale.

- 32 -

1.3. La place des stocks dans le compte de capital

Les stocks sont enregistrés au compte de capital des secteurs institutionnels. Ils

constituent en effet un actif détenu par ceux-ci, dont la variation entraîne un besoin (ou

dégage une capacité) de financement.

Il va de soi que la même valorisation doit être retenue dans le TES et dans les

comptes de capital, de telle sorte qu'elle soit compatible avec les soldes retenus pour le

tableau des opérations financières.

En conséquence, on doit pouvoir réaliser des tableaux par nature de stocks,

croisant les secteurs institutionnels et les produits.

1.4. Le principe de valorisation

Quel prix appliquer aux entrées et sorties de stocks ? Différentes solutions existent.

La comptabilité d'entreprise en retient déjà plusieurs, qui ont toutes comme principe de

prendre pour la sortie un prix utilisé à l'entrée, condition nécessaire pour assurer la

continuité du patrimoine enregistré au bilan.

Un tel principe n'est pas applicable en comptabilité nationale, car il induit dans le

PIB une création de valeur provenant d'un écart de valorisation des patrimoines (plus ou

moins-value, appelée "appréciation" en comptabilité nationale). Or le PIB ne doit retracer

que la création de valeur issue de la production de l'année.

En fait, le principe à retenir pour la valorisation des stocks doit tenir compte à la fois

des deux exigences suivantes :

- ne pas induire par la valorisation retenue que la production, et donc le PIB,

contiennent ce qui résulte d'un accroissement de valeur provenant d'une variation dans les

prix des produits stockés. Cet accroissement, qui est "l'appréciation", ne constitue pas à

proprement parler un revenu, mais un transfert de valeur entre secteurs institutionnels ;

- proposer une valorisation qui soit cohérente avec les flux financiers enregistrés

par les secteurs institutionnels.

Pour satisfaire ces exigences, on doit valoriser les opérations sur biens et services

au "prix en vigueur au jour de la réalisation de l'opération".

- 33 -

Pour la variation des stocks, cette valorisation s'écrit selon la formule suivante :

tiS = X pi e, - Z p. s. (1) I 1 i 1 1

où ei et s.1 sont les quantités entrées et sorties aux jours i et j ; p.1 et p.

1 indiquent les prix en

vigueur les jours correspondants.

On peut encore écrire cette équation :

às =1p. (e. - s.) (1')

Si on considère un produit élémentaire qui est suivi dans le temps, on a e.1 = sj mais le prix n'est plus le même : c'est cette différence de eix qui représente justement

l'appréciation ; la formule (1) est la plus conforme à représenter cette approche.

Si on considère les mouvements un jour donné, alors on a p.1 = pj' mais cette fois-ci e. A si ; • C'est alors la formule (1') qui convient. C'est celle que nous allons retenir ici,

puisque l'approche des comptes relève de cette dernière perspective : la référence à une

période de temps.

On remarquera que cette manière de procéder conduit à ignorer les valeurs initiales

et finales des stocks : seules nous intéressent les entrées et sorties de l'année.

"Prix en vigueur au jour de la réalisation de l'opération" :

Cette formule est d'application simple quand entrée et sortie sont associées à une

transaction : on constate alors le prix de marché pratiqué, tel qu'il est également pris en

compte dans l'opération de contrepartie : production ou importation pour des entrées en

stocks, consommation intermédiaire (Cl) ou demande finale pour des sorties.

Mais certains mouvements de stocks ne donnent pas lieu à transaction. On doit

alors appliquer un prix fictif tenant compte de l'évolution des prix au jour du mouvement :

- 34 -

- du stock utilisateur à la Cl : soit le prix constaté sur le marché au jour du

mouvement ; soit en appliquant au prix d'acquisition la variation de prix constatée sur le

marché entre date d'achat et date d'utilisation ;

- pour les stocks d'en cours, la valeur d'entrée est progressive, au fur et à mesure

de la mise en oeuvre des facteurs ; en revanche, la sortie se fait en totalité au terme du

processus de production, et correspond normalement au prix de revient du produit actualisé

au jour de sortie ;

- pour les stocks producteurs, l'interprétation est moins immédiate. La définition

invite à prendre le prix de marché du jour de la production ; dans l'agriculture, il est même

difficile de procéder autrement. Mais le problème est différent dans l'industrie, où les

entreprises enregistrent en général les entrées en stock de produits finis au prix de revient ;

dans ce cas, la marge du producteur n'est prise en compte dans la production qu'au

moment de la commercialisation. Si la comptabilité nationale retient ce même principe de

valorisation (cas de la France), cela ne dispense pas de modifier le prix de sortie pour tenir

compte de l'inflation intervenue depuis le moment d'entrée en stock.

Il - LES SOURCES ET LEUR TRAITEMENT

2.1. La pratique d'enregistrement des agents

L'information sur les stocks vient presque exclusivement des données comptables

des agents économiques, soit par l'intermédiaire d'enquêtes auprès des établissements, soit

à partir des documents comptables eux-mêmes (au niveau des unités institutionnelles).

L'information manque donc le plus souvent en ce qui concerne les petits producteurs (et en

particulier les entrepreneurs individuels)*.

La valeur retenue en entrée est toujours le coût complet pour l'entreprise (y compris

coûts liés aux achats, tels les frais de transport, pour les biens acquis à l'extérieur ; prix de

revient complet pour les biens en cours de production ou terminés).

* La règle suivie en comptabilité d'entreprise est de valoriser la quantité sortie au prix même où cette quantité a été valorisée à l'entrée : ceci répond à la fois à des exigences fiscale et patrimoniale.

- 35 -

Pour la valeur de sortie, différentes méthodes sont proposées, en raison de la

difficulté de repérer chaque bien et sa valeur d'entrée :

- en prenant la valeur du dernier entré (LIFO) ;

- en prenant la valeur du premier entré (FIFO) ;

- en prenant le prix moyen des biens encore en stocks ;

- en prenant sa valeur d'entrée (inventaire permanent : cela suppose le suivi de

chaque bien nominativement).

La première méthode a pour conséquence de minorer le bénéfice de l'entreprise, si

bien qu'elle est refusée le plus souvent par les administrations fiscales. Les trois autres

donnent des résultats assez voisins les uns des autres ; dans la suite des travaux, c'est la

méthode FIFO qui sera prise comme hypothèse.

Mais quelle que soit la méthode retenue, aucune ne correspond aux besoins propres

de la comptabilité nationale. L'écart entre les deux valorisations s'appelle l'appréciation sur

stocks.

2.2. L'appréciation sur stocks

Prenons comme référence la méthode de l'inventaire permanent (la plus rigoureuse

en comptabilité) appliquée à un produit fini. Chaque sortie est valorisée au prix que le bien

avait à son entrée : à l'occasion de la vente, appareil une marge qui résulte de deux

facteurs :

- l'écart instantané entre prix de vente et prix de revient ;

- l'écart sur le prix de revient intervenu entre le moment de l'entrée et celui de la

sortie.

Ce dernier terme est fonction de l'inflation, et correspond à un gain que la

comptabilité nationale ne veut pas reprendre : c'est l'appréciation sur stocks.

C'est la raison pour laquelle la sortie est valorisée au prix de revient du jour de

sortie. Il en résulte donc une valeur de sortie supérieure (en période d'inflation) et donc une

variation plus faible des stocks.

- 36 -

patrimoine détenu en stocks :

= à S (selon la comptabilité nationale)

+ Appréciation sur stocks.

Le premier terme de l'équation correspond à la valeur comptable des entreprises

(bilan différentiel).

Rappelons que la production (la consommation intermédiaire) est calculée à partir

des ventes (des achats) auxquelles on ajoute (on retire) la variation des stocks

"producteurs" ("utilisateurs") ; la modification ainsi introduite sur la valeur de la variation a

pour effet de diminuer la valeur ajoutée de l'unité (on peut vérifier que les deux

modifications sur production et Cl vont dans le même sens).

En contrepartie, au compte de capital, la variation retenue pour les stocks est

également diminuée du même montant ; les deux modifications se compensent donc de

telle sorte que le besoin (ou la capacité) de financement de l'unité reste inchangé.

En fait, l'appréciation n'est qu'un des aspects d'un phénomène plus vaste : la

réévaluation permanente des actifs en période d'inflation. Celle-ci est prise en compte en

"réconciliation" du compte de patrimoine ; l'appréciation est la part de cette réévaluation

qui a été réalisée en cours d'année par vente ou utilisation (en effet, chaque sortie est

majorée de la réévaluation sur le produit concerné) ; elle est prise en compte dans les

stocks (comme moindre croissance de leur variation) car cette réalisation se traduit par un

accroissement de la capacité financière de l'unité. En revanche, la partie non réalisée reste

potentielle et n'a donc aucun effet sur les comptes de flux.

Notons, pour terminer, que la prise en compte de l'appréciation modifie de la

manière suivante les sources statistiques en provenance des unités productives :

- diminution de la valeur de la production ;

- accroissement de la valeur des consommations intermédiaires ;

- diminution de la marge commerciale.

En cas de forte inflation, les modifications à introduire peuvent atteindre une

proportion importante.

- 37 -

2.3. L'utilisation des sources

On a vu que les sources disponibles sont le plus souvent comptables, et au niveau

des unités institutionnelles. Or, l'analyse en terme de biens et services nécessite une

connaissance des stocks par produit. D'autre part, le calcul de l'appréciation s'établit à

partir des taux d'inflation par produit. L'évaluation de la variation des stocks en

comptabilité nationale passe donc par une transformation des sources qui permette

l'analyse par produits. En raison des traitements à appliquer (cf paragraphe suivant), cette

transformation ne peut se limiter à la seule variation du patrimoine ; il faut considérer

séparément les stocks initial et final. En l'absence d'informations sur le détail des produits

stockés, on peut utiliser les critères suivants pour en faire la décomposition :

- stocks d'en cours et de produits finis : on considère qu'il s'agit des mêmes

produits que ceux retenus pour la production (et dans la même proportion, sauf raison

particulière) ;

- stocks de demi-produits : en première approximation, on peut les assimiler au cas

précédent ; mais il peut s'agir aussi de produits achetés (sous-ensembles) ou d'un produit

de l'entreprise représentant un poste particulier dans la nomenclature des biens et servi-

ces ;

- stocks de matières premières : la liste des produits contenus est multiple ; elle

correspond normalement aux biens qui figurent en consommation intermédiaire dans le TES

pour l'activité correspondante. A défaut d'information plus précise, on peut répartir stocks

initial et final dans la même proportion que ces consommations intermédiaires ;

- stocks du commerce : seule une information par type de commerce permet un

traitement, qui sera de toute façon insatisfaisant. Il est en effet nécessaire de décomposer

ces stocks par produit ! Des sources spécifiques peuvent exister pour les matières

premières (agricoles ou minières) dont les rythmes de prix et de stockage sont particuliers,

entraînant des comportements spéciaux en matière d'appréciation.

III - DES EXEMPLES SIMPLES POUR EXPLICITER LES DIFFICULTES

A l'expérience, nous avons constaté que les difficultés théoriques se clarifiaient en

utilisant des exemples chiffrés très simples se limitant à un seul problème.

- 38 -

Exemple 1

Nous supposons un seul bien produit en début d'année et qui circule entre différents

stocks jusqu'à son utilisation dans un autre processus de production (consommation inter-

médiaire). Il n'y a de stock ni à l'origine, ni au terme ; la variation du patrimoine de chacu-

ne des unités est donc nulle dans leur comptabilité. En période 1, la valeur de marché est

100 pour un coût de production de 90. Le taux de marge du commerce est 20 %.

Trimestres 1 2 3 4 Equilibre annuel Indice d'inflation 100 110 125 150 Production 90 11 101 Marge 25 25 Consommation intermédiaire 180 180

producteur + 90 - 99 - 9 àstock commerce + 110 - 125 - 15

utilisateur + 150 - 180 - 30

A chaque étape, le détenteur du stock a bénéficié d'une appréciation qu'il réalise

au moment de la vente. La variation négative du stock représente une ressource

enregistrée au compte de capital, laquelle correspond aux ressources financières

supplémentaires dégagées lors de la vente ou de l'utilisation. Pour le producteur, en

revanche, c'est en production qu'on enregistre le gain réalisé sur l'accroissement de marge

dû au retard de commercialisation (ceci n'aurait pas lieu si l'entrée en stock se faisait au prix du marché).

Exemple 2

Cas d'un produit spéculatif présentant une baisse de prix

Indice de prix

1

100

2

90

3

80

Equilibre annuel

99 .

80

+ 9

+ 10

Production

Consommation intermédiaire

î producteur stock utilisateur

90

90

9

- 81

+ 90

80

- 80

- 39 -

La baisse de valeur du stock se traduit par une perte financière, laquelle est

enregistrée au niveau d'un coût relatif à la variation des stocks.

Exemple 3

Soit un commerce traitant une unité de produit dans les conditions suivantes :

Stock Stock Mai Août Octobre

au 1/1 au 31/12

Cas 1 90 vente 100 100 achat 100

Cas 2 90 achat 90 vente 100 90

Cas 3 90 vente 100 achat 110 110

Le stock initial est toujours le même : une unité dont la valeur d'achat était 90.

La vente indique la valeur de sortie du stock (prix de remplacement sur le marché).

En appliquant la formule (1') :.D S = Zp. (e. - s.1), on obtient :

Cas 1

Cas 2

Cas 3

OS= 0

à S = - 10

à S + 10

Alors qu'on a toujours :

quantité = 0

Appréciation = 10.

Dans le premier cas, l'appréciation est réinvestie dans le stock ; dans le cas 2, elle

est restituée sous forme financière ; dans le 3e cas, il est nécessaire en plus d'accrortre le

financement du patrimoine stocké.

- 40 -

IV - FORMALISATION DU TRAITEMENT

Dans la pratique, il n'est guère possible de mettre en oeuvre l'une des formules (1)

ou (1') pour évaluer la variation des stocks : l'information n'est pas disponible, et même

alors la mise en oeuvre en serait très complexe (on devra cependant y revenir dans le cas

de produits très importants à comportement spécial). C'est pourquoi nous proposons ici des

méthodes simplifiées d'évaluation ; mais il faut savoir que les hypothèses retenues pour leur

application ne sont vérifiées qu'approximativement dans la réalité.

4.1. Cas général

a) Premier leu d'hypothèses :

- connaissance des stocks initial et final en quantité : Q 1 et Q2 ;

- entrées et sorties régulières dans le temps ;

- régime d'inflation : croissance régulière des prix (1).

Reprenons la formule (1') :

àS = r p. (e. - s.)

durant chaque période de temps on a : ei - si = giQ

avec Si Q = Q2 - Ql. i

En cas d'évolution régulière des prix (même à rythme élevé) et de mouvement

régulier des stocks, on montre (voir encadré page suivante) qu'une bonne approximation de

cette équation est donnée par :

As = p . Q (2)

où 13 est le prix moyen de l'année et àQ = Q2 - 01.

La variation des stocks est alors mesurée par la variation des quantités valorisée au prix moyen de l'année.

(1) Sans variation spéculative des prix ; le rythme d'inflation peut être variable.

- 41 -

CALCUL DE L'APPROXIMATION SUR CROISSANCE LINEAIRE

DES PRIX ET DE LA VARIATION DES STOCKS

On mesure le temps sur l'année par la variable 0 < t <1.

Evolution des prix : soit o( le taux d'inflation po prix en début d'année.

P -= po (1 + oc t).

Evolution de la variation des stocks : d Q = (Q2 - Q1) [1 + a (t - 1/2)' dt

où a est le taux de croissance du volume de la variation.

On a donc : 1

AS = 5 Po (1 + « t) (Q2 - Q ) [1 + a (t - 1/4 dt ' o

A S= po (Q2 - 0 1' 3 ‘ {I :LI t3 1

I 0 +1 t2 2 (a + oC - r + (1

1

tà S = (Q2 - Q1) x po (1 + oe a 2 12

« )

Or, .,po (1 + ) représente le prix moyen sur l'année et a est le plus

souvent ie.: 0,1. 2

a oc est donc petit par rapport à tX 12 2

Dans le cas de D( = 2 (200 % d'inflation), négliger ce terme représente un écart

inférieur à 0,8 %.

En fait, l'inflation varie selon un rythme plus voisin de l'exponentielle. Quant aux

variations de stocks, elles subissent l'effet conjoncturel en l'amplifiant. Malgré tout, si de

telles variations restent assez régulières dans le temps, on peut encore utiliser l'appro-

ximation. On a donc :

AS c.-. ip A Q

ce qui représente la variation des quantités valorisées au prix moyen de l'année.

2i) t 111

- 42 -

Si les variations des prix et/ou des quantités n'offraient pas une évolution suffisam-

ment régulière, on pourrait décomposer le temps en trimestres ou même en mois et appli-

quer la même formule :

12 A S = Fi q

1 I

où pi est le prix moyen de chaque mois

8.q :a variation de quantité durant le même mois.

b) Deuxième leu d'hypothèses :

- connaissance en comptabilité des stocks initial et final en valeur, établis selon la méthode FIFO, pour un produit donné ;

- entrées et sorties régulières dans le temps ;

— régime d'inflation : croissance régulière des prix.

Soit le nombre de mois de stocks. On a :

„ 12 x (stock initial + stock final?

chiffres d'affaires x 2

(valable pour les stocks chez le producteur ; pour les stocks chez l'utilisateur, on prend les achats au dénominateur).

La valeur du stock initial s'écrit approximativement :

12 - 7

n-1

et celle du stock final :

p

12 - 2‘

n

où p1 = p n-1

12 - , prix de production (ou d'acquisition) pour le mois 12 -de l'année r

n-1, est une approximation du prix moyen auquel les biens en stock ont été entrés.

Q 1 = p1 Q 1

- 43 -

Soit D E la variation de stocks en comptabilité :

àE = p2 Q2 01

+ DE = (02 - Q P 1 P2 ) 2 Q + Q

+ (1)2 P1) 2 (3)

P + P2 est une approximation du prix moyen annuel entre les mois

fl 2 12 - 2 /n-1 et 12 - - P 2- in ; soit cr le différentiel moyen d'inflation entre chacun de

ces mois et le terme de l'année ; selon l'équation (2), on .a alors :

=1'(°2 - 1 p1 + p2 2

Le second terme est une approximation de l'appréciation A, à condition d'introduire

le même différentiel y :

à prix x quantités moyennes.

Il peut encore s'écrire :

P Q A= (p + ) (p2/p 1 - 1) (4) 2 1 1 p2/p1

qui donne une mesure de l'appréciation à partir de valeurs initiale et finale des stocks en

patrimoine.

P2 Q2 représente le stock final valorisé au prix moyen du stock initial

P2/Pi mesure le taux d'inflation entre les mois 12 - et 12 - — (1)

2 /n-1 2 /n

Or, on a : AS =41E - •

(1) Si l'inflation présente un rythme constant, on peut utiliser la variation des prix moyens annuels, connue dans le cadre des comptes à prix constant.

- 44 -

On peut donc calculer l'appréciation et la variation des stocks de la comptabilité

nationale à partir des données comptables, de leur transformation par produit et du profil

d'inflation annuelle de chacun d'eux.

En pratique, le travail se conduit ainsi :

- décomposition par "produit" de la nomenclature des stocks initial et final donnés

par la comptabilité ;

- évaluation du taux d'inflation pour ce produit sur la période p2/

p 1

(on prendra de

décembre à décembre, ou de novembre à novembre, selon le nombre de mois de stocks) ;

- ramener le stock final au prix du stock initial P2 02

P2/p1

- introduire le facteur er si celui-ci est significatif ;

- on peut calculer l'appréciation A ;

- la 4 S de la comptabilité nationale s'obtient alors par la formule £S =A E - A.

c) Commentaires par nature de stocks

- Produits finis : si on voulait valoriser ces stocks au prix du marché au lieu du prix

de production, il faudrait majorer p1 01 et p2 02 du taux de marge industriel :

prix du marché

m - prix d'entrée en stock

Il est par ailleurs important de vérifier quelle valorisation est retenue pour la produc-

tion industrielle dans les statistiques disponibles afin d'introduire les corrections nécessaires.

Au Pérou, par exemple, dans les formulaires statistiques, la production stockée est égale-

ment valorisée au prix du marché ; il est alors nécessaire de valoriser les stocks de la même

manière.

- Produits "en cours" : si on retenait la proposition que j'ai faite par ailleurs (1), ces

stocks seraient ajoutés à ceux des matières premières et ne seraient plus considérés en

production.

(1) Cf l'article "La prise en compte de l'inflation dans l'élaboration des comptes nationaux", STATECO n° 44 (décembre 1985), p. 71.

- 45 -

Quelle que soit la solution retenue, un traitement spécifique doit être apporté

compte tenu de la durée du cyle de production qui influe sur le facteur Cf . Si celui-ci est

long, une analyse plus précise est souhaitable (bétail, navires, logement, . . . ).

- Matières premières : il est fort probable que les statistiques disponibles sur les

consommations intermédiaires prennent comme valeur pour celles-ci le prix de sortie des

stocks. Dans ce cas, elles sont sous-estimées de la valeur de l'appréciation sur les mêmes

stocks. La correction qui en résulte peut être assez importante.

- Commerce : l'appréciation ainsi calculée doit permettre la mesure exacte du taux

de marge.

4.2. Les autres cas

Dès qu'une solution approximative est proposée, la question se pose de savoir

jusqu'où il est possible de l'utiliser. Dans le cas de produits à variation spéculative ou

associés à des cycles saisonniers de production, un traitement spécifique est nécessaire,

qui est décrit ci-dessous. Mais sans atteindre ces cas extrêmes, on peut concevoir des

situations suffisamment marginales pour que le cas général ne puisse s'appliquer qu'au prix

d'une grande approximation :

- changement conjoncturel marqué : modification brutale de l'équilibre entre offre et

demande ;

- comportement spéculatif général : qui entraîne une modification significative dans

la manière de stocker (ou déstocker) des agents économiques ;

- modification importante du rythme d'inflation.

On ne peut envisager que des réponses graduées face à des phénomènes de ce

genre, tenant compte de différents facteurs :

- importance économique des produits concernés ;

- existence de données permettant une analyse plus pertinente ;

- temps disponible pour s'engager dans un travail plus complexe.

- 46 -

4.2.1. Quand le cycle n'est pas saisonnier

La seule méthode a priori concevable est la mise en oeuvre de l'équation (1'),

réécrite sous la forme :

Ll s= X p. I Q

Le plus souvent, il suffit de décomposer l'année en 12 mois (il faudrait des cas très

particuliers pour entrer dans un plus grand détail). Mais il faut alors évaluer :

- le prix moyen mensuel ;

- la variation en quantité du stock pour chacun des mois de l'année.

On peut cependant imaginer pour des situations particulières (un profil donné

d'inflation, par exemple) des traitements spéCifiques permettant une adaptation du cas

général.

4.2.2. Cycle saisonnier

Il s'agit le plus souvent des produits agricoles. La difficulté est présente tant pour les

produits issus du processus de production que pour ceux qui en sont les inputs.

a) Les inputs

Leurs stocks sont à traiter dans l'équilibre des produits correspondants. Est posée la

question de la date à retenir pour leur inscription en consommation intermédiaire : entrée

dans le processus, ou date de production. Le retard envisagé dans un contexte d'inflation

majore la valeur des Cl et a pour conséquence une diminution du montant retenu pour la

variation des stocks (chez l'utilisateur).

b) Produit fini : chez le producteur

On fait l'hypothèse que la production intervient à un moment précis de l'année (et

pendant deux ou trois mois au maximum) : c'est le cas le plus fréquent des productions

agricoles saisonnières.

On propose les références suivantes :

- 47 -

temps t

quantité en stock

production

prix

année n - 1 année n

1/1 1/1 31/12 récolte récolte

1 2 3 4 51 S2 S3 S4

Qn-1 Qn pl p2 p3 p4

On désigne par p23 le prix moyen entre les dates 2 et 3, pondéré par les quantités traitées au cours de la période.

A noter que pour les produits agricoles, à défaut d'information sur le prix de

production, on est même amené le plus souvent à utiliser le prix de marché.

On fait l'hypothèse S3 = 0 (les producteurs n'ont rien gardé de la récolte précédente). On a alors :

entrées : p3 Qn

sorties : S2 i) + (Qn - S4) 1534 23

Si on introduit en + et en - les deux termes S4 p3 et S2 pl' on obtient :

s [S4 p3 - S2 p - [(Qn - S4) (1334 - p3) + S2 (i323 -1511

La variation de stocks se décompose donc en deux éléments :

- la différence des quantités en stock au début et à la fin de l'année, valorisées aux prix de récolte respectifs ;

- la réalisation de l'appréciation résultant du décalage de prix entre la récolte et le moment de la vente.

- 48 -

c) Produit fini stocké dans le commerce

Bien souvent, le commerçant assure au moins une partie du stockage saisonnier de

tels produits. Mais ceux-ci peuvent également avoir une origine étrangère. Il est donc

nécessaire d'introduire une distinction entre les stocks ,de produits importés et ceux

d'origine nationale.

Stocks de produits importés : le traitement relève a priori de la démarche proposée

en 4.2.1., sauf si les flux et les prix présentent une évolution régulière.

Stocks de produits nationaux : reprenons des hypothèses semblables à celles

formulées en b) et supposons que la production de l'année est vendue pour 11

% avant la

fin de l'année, (1 - y ) % l'année suivante. On a, en quantités :

entrées : (1 - e ).n _1 + ï Qn

sorties : S2 + entrées - S4

et en valeur :

entrées : (1 - V ) en-1 i323 + Y en /534 sorties :1324 {S2 - 54 + (1 -

en-1 + Qn

D'où :

A s = (s4 - S2) i>24 - (i)2 (1 - ) Q n_ 1 + (5

-1'24) Î en

La variation de stocks se décompose en trois éléments :

- la différence des quantités en début et fin, valorisée au prix moyen d'achat de

l'année (il peut s'agir du prix moyen simple si les sorties de stock ont été régulières) ;

- la réalisation de l'appréciation résultant de l'écoulement de la partie achetée dans

l'année à un prix inférieur au prix moyen annuel ;

- le coût du financement nécessaire pour acquérir la nouvelle récolte à un prix

supérieur au prix moyen annuel.

d) Produit fini chez l'utilisateur

Il s'agit du cas général si entrées et sorties sont régulières. Dans le cas où

l'utilisateur joue un rôle de stockeur de récolte, on se trouve dans une situation similaire à celle du commerçant.

EXPLOITATION MICRO-INFORMATIQUE DES DONNEES COMPTABLES

DES ENTREPRISES DU BENIN

par Thierry PACCOUD*

La République Populaire du Bénin traverse une période charnière de son

développement économique, ét pour en maximiser les effets, elle entend disposer d'une

panoplie d'instruments et d'outils permettant d'affiner la décision macro-économique. La

comptabilité nationale constituant un de ces outils, elle a entrepris, avec l'aide

d'organisations internationale, de développer sa capacité à élaborer des comptes le plus

complètement et le plus régulièrement possible ; c'est en ce sens qu'a été établi un projet

de travail conjoint entre l'Institut National de la Statistique et de l'Analyse Economique

(1.N.S.A.E.) et l'Office Statistique des Communautés Européennes (O.S.C.E.). Ce projet est

orienté dans deux directions principales

- l'amélioration des techniques de traitement des données de base nécessaires à

l'élaboration des comptes ;

- la mise en cohérence des différentes opérations spécifiques d'élaboration des

comptes autour d'un renforcement de la méthodologie et du transfert d'expérience.

L'analyse plus détaillée des procédures d'élaboration des comptes utilisées par la

Statistique béninoise a fait apparartre un domaine où il était relativement profitable, en

terme de coût financier, de coût humain et d'espérance de résultats rapides, d'engager une

action. Ce domaine est celui des informations concernant les entreprises,privées du secteur

moderne.

* Expert de l'Office Statistique des Communautés Européennes.

- 50 -

C'est cet aspect concernant le traitement des données comptables des entreprises,

réalisé à l'aide de la micro-informatique, qui va être développé ici. Cette présentation

générale ne couvre pas de manière approfondie l'ensemble des aspects techniques de

l'expérience. Pour de plus amples informations, il conviendra de contacter directement

I'O.S.C.E., Service "Analyses et Développement".

1 - LE PLAN COMPTABLE NATIONAL

Depuis le 1er janvier 1983, toutes les entreprises agricoles, industrielles,

commerciales ou artisanales ayant leur siège social (ou des établissements) sur le territoire

de la République Populaire du Bénin sont tenues d'appliquer le Plan Comptable National

(P.C.N.) et d'établir annuellement les 19 tableaux de synthèse qu'il comporte. Ces tableaux

remplis doivent être déposés, en double exemplaire, à la Direction des Impôts, au plus tard

deux mois après la clôture de l'exercice. Un de ces exemplaires est destiné à l'I.N.S.A.E.

Parallèlement, un Conseil National de la Comptabilité (C.N.C.) est créé afin d'assurer

l'édition et la diffusion du PCN et de contrôler son bon développement parmi les

professionnels et les formateurs. L'INSAE est représenté au sein du CNC par son Directeur

Général.

La situation quelque peu désordonnée qui prévalait avant 1983 est donc maintenant

totalement contrôlée et le Bénin peut dorénavant disposer d'une source d'information

structurée, cohérente et annuelle sur les entreprises (voir annexè 1), qu'elles soient privées

ou publiques, et ceci même si les structures mises en place sont jeunes et demandent

encore à être rôdées.

Pour l'INSAE, et la Comptabilité Nationale (C.N.) en particulier, le Plan Comptable

est l'occasion d'accrortre tant la couverture statistique du secteur des entreprises que sa

qualité, d'où l'effort qui a été entrepris pour le traitement informatique des données

contenues dans les tableaux de synthèse du PCN.

- 51 -

2 - OPTIONS SUIVIES POUR LA MISE EN PLACE DU TRAITEMENT

Les tableaux de synthèse du Plan Comptable National (T.S.P.C.N.) ont une double

vocation :

- fournir à la Direction des Impôts (D.I.) les bases comptables de la perception

fiscale sur les entreprises ;

- permettre à la Statistique (INSAE) de disposer des données primaires sur les

entreprises à des fins d'agrégation et d'analyse.

Ces deux vocations sont bien distinctes et correspondent à deux traitements des

données qui sont très éloignés tant dans les méthodes que dans l'esprit. Pour les

entreprises, il est certain que c'est l'aspect fiscal qui est privilégié lors du remplissage, ce

qui nuit parfois à la clarté et la cohérence statistique des documents.

2.1. Besoins de la Comptabilité Nationale

La première option suivie pour le traitement des TSPCN a été de le limiter aux seuls

besoins de la Statistique, et plus particulièrement aux seuls besoins de la comptabilité

nationale. Cela ne veut pas dire que l'administration fiscale soit totalement écartée de la

procédure car, dans le cas béninois, la Statistique dépend de la Direction des Impôts pour la

réception de la 2ème copie des TSPCN.

Il semble, pourtant, que la Statistique a tout intérêt à se démarquer de la Dl pour

conserver la neutralité qui lui est nécessaire à l'obtention de renseignements plus précis de

la part des entreprises. En outre, cette exploitation consciemment limitée permet une mise

en place plus souple, s'appuyant sur des moyens financiers limités et facilement

mobilisables et la couverture quasi exhaustive des besoins des comptes nationaux.

La comptabilité nationale béninoise poursuit deux objectifs complémentaires :

- la production de données, même partielles, afin de répondre aux attentes

immédiates des utilisateurs ;

- la redéfinition des concepts et méthodes qui ont gouverné jusqu'à présent

l'élaboration des comptes.

- 52 -

Concrètement, cela signifie tant l'exploitation formalisée des sources de données

traditionnelles de la CN que leur mise en cohérence sur des bases retravaillées. L'INSAE

traverse une période relativement favorable à la réalisation de ces objectifs : d'importants

travaux de collecte et de traitement de données primaires sont actuellement réalisés pour

divers secteurs (enquête budget-consommation, données du commerce extérieur, projet de

comparaison internationale) et la Direction des Etudes et Synthèses Economiques et

Financières (D.E.S.E.F., en charge de la comptabilité nationale) bénéficie d'une assistance

technique permanente des Nations-Unies.

2.2. Options informatiques

Le programme de traitement s'appuiera totalement sur du matériel

micro-informatique, l'INSAE étant particulièrement familiarisé avec ce type de matériel

(enquête budget-consommation et exploitation des résultats du recensement général de la

population).

La limitation du champ d'exploitation aux seuls besoins de la comptabilité nationale

et le nombre restreint d'entreprises à traiter sont autant d'éléments favorisant ce choix. La

micro-informatique permet, en outre, de réaliser un lien direct (sans l'intermédiaire d'un

spécialiste) entre l'utilisateur et les données, ce qui est particulièrement important dans le

cadre d'un traitement technique spécifique : le manipulateur est aussi un concepteur.

L'exploitation proprement dite est réalisée sur la base d'un logiciel commercial

simple et bien connu : MULTIPLAN de Microsoft. Il s'agit d'un tableur de 63 colonnes et 251

lignes.

Le choix d'une telle option résulte de la constatation, malheureusement courante,

que les logiciels spécifiques, élaborés en dehors des structures d'exploitation, posent

généralement plus de problèmes qu'ils n'en résolvent (dépendance d'un programmeur). Il

est souvent plus simple et plus sûr d'employer un logiciel commercial qui, si il est parfois

limité et général, n'en est pas moins connu de tous et parfaitement documenté.

2.3. Options techniques

Le développement du traitement micro-informatique des TSPCN se réalise

parallèlement à la réflexion méthodologique de la DESEF sur l'élaboration des comptes

nationaux. De plus, il doit s'attacher à correspondre au mieux aux structures propres de

- 53 -

l'économie béninoise et aux habitudes de travail des statisticiens. Trois options techniques

principales sont donc suivies :

- une approche branche par branche. Le tableau de l'annexe 2 donne la répartition

des TSPCN en 1983 par branches et sous-branches d'activité. Certaines ne nécessitent pas

de traitement, le nombre de TSPCN recueillis étant limité ou nul (ex : industries extractives),

alors que d'autres requièrent un traitement plus sophistiqué en fonction des méthodes

d'évaluation statistiques tenant compte d'un environnement spécifique à un pays en

développement. La situation est résumée dans le tableau ci-dessous :

Pas de traitement Traitement normal Traitement spécifique

Informatique Manuel

. Industries extractives

. Electricité, gaz et eau

. Industries manu-facturières

. BTP

. Banques et assurances

. Commerce

. Transports et communication

. Agriculture

. Services

- une approche compte par compte. Les comptes relatifs au secteur des entreprises

(production/exploitation, revenus et dépenses, capital et financement) sont plus ou moins

difficiles à établir et il convient, de plus, de conserver l'ordre logique de leur élaboration

pour faciliter la compréhension de l'utilisateur. Ce dernier ne doit pas être un simple

manipulateur qui attend les résultats des calculs de la machine, mais bien un utilisateur actif

qui garde le contrôle des données entrées en machine sur la base des soldes successifs.

Pour chaque branche (ou sous-branche) quatre tableaux de calculs sont élaborés puis les

principaux résultats sont reportés dans des tableaux récapitulatifs ;

- une approche des comptes en données brutes. Les différents soldes des comptes

caractéristiques (valeur ajoutée, excédent d'exploitation, épargne) seront tout d'abord

calculés en brut, la consommation de capital fixe (CCF) n'étant introduite que dans les

tableaux récapitulatifs. La Direction des Etudes et Synthèses examine actuellement les

différentes méthodes de calcul de la CCF et déterminera son choix pour , le traitement

informatique.

- 54 -

3 - CHRONOLOGIE DES OPERATIONS

Les formulaires des tableaux de synthèse sont envoyés aux entreprises à la fin de

l'exercice comptable. Les entreprises ont en pratique quatre mois pour les remplir et les

retourner à la Direction des Impôts, qui en transmet une copie à la Direction des Etudes et

Synthèses Economiques et Financières de I'INSAE.

3.1. "Récolte" et classement

En fait, l'arrivée des tableaux s'échelonne sur toute l'année suivant l'exercice en

revue. On peut Imputer ces retards tout à la fois à la nouveauté du PCN, les comptables

d'entreprises n'étant pas encore totalement rôdés à la nouvelle procédure, et à l'absence

de moyens de pression réels délégués à la Direction des Impôts ou à la Statistique.

La première étape du traitement consiste donc à réduire ces délais de fourniture en

mettant en place une méthode de récolte précise et régulière, qui s'organise autour de

quatre éléments principaux :

- le classement immédiat des tableaux reçus. Dès leur arrivée, les TSPCN doivent

être classés par branches d'activité, selon une nomenclature fixée, proche de la CITI ;

- l'introduction des données signalétiques des entreprises dans des listes de

référence. Ces listes consistent en des tableaux "MULTIPLAN" dans lesquels sont stockées

les informations générales sur chaque entreprise. Ces listes doivent permettre tout à la fois

de faciliter les relances, de rendre possibles certaines analyses fines sur la structure des

entreprises (emploi, localisation, .. . ) et de faciliter la détermination d'échantillons. Pour

être efficaces, elles doivent être mises à jour année après année.

Chaque tableau comporte 14 colonnes :

. 1ère colonne : le code CITI ;

. 2ème à 13ème colonne : les renseignements généraux tirés du tableau 1 des

TSPCN (sigle, siège social, activités, . . . ) ;

. 14ème colonne : l'évolution des réponses année après année.

Pour les sous-branches du commerce, les listes de référence permettront l'élaboration

d'échantillons représentatifs sur la base du chiffre d'affaire, de la marge brûte (MB), des

impôts indirects (II) et du ratio II/MB (4 colonnes supplémentaires) ;

- 55 -

- les relances. Sur la base des listes de référence, les entreprises pour lesquelles les

TSPCN ne sont pas disponibles au 1er avril, doivent être relancées :

. par courrier ;

. auprès de la Direction des Impôts.

Les TSPCN arrivant à la suite de cette relance doivent subir le traitement dans les listes de

référence ;

- les "descentes". Ce sont les visites directes aux entreprises. Elles devront débuter

dans le courant du 2ème semestre de l'année. Elles concerneront :

. les entreprises qui n'ont pas répondu à la suite de la relance par courrier ;

. les entreprises qui ont répondu, mais pour lesquelles les TSPCN comportent de

graves lacunes ou requièrent des compléments d'information.

A terme, et grâce aux listes de référence, il sera possible d'anticiper les relances e,t

les descentes, la dernière colonne de la liste permettant de saisir immédiatement les

habitudes de fourniture de chaque entreprise.

3.2. Contrôles

Les TSPCN sont remplis par les entreprises à des fins essentiellement fiscales et par

des comptables qui ne sont pas toujours au fait de l'évolution du PCN. Ainsi, ils sont

généralement entachés d'erreurs plus ou moins importantes. Le comptable national n'est

pas un comptable d'entreprise et il doit donc s'appuyer sur les compétences de spécialistes

pour détecter et corriger ces erreurs (pas toujours involontaires). Les procédures de

contrôle présentées ici ne couvrent que l'aspect purement comptable du contrôle d'entrée

des TSPCN ; pour le comptable national, un contrôle global de cohérence

macro-économique intervient en fin de traitement.

Il s'agit ici de déterminer, de manière rapide et efficace, quelles sont les TSPCN qui

nécessitent un contrôle comptable plus approfondi. Le passage ou non des contrôles sera

enregistré dans les listes de référence.

- Contrôle de cohérence comptable. Cette opération s'effectue avant tout

traitement d'un TSPCN. Les TSPCN qui ne satisfont pas à ce contrôle sont mis de côté, les

autres étant immédiatement introduits dans la charrie de traitement. Ce contrôle consiste en

la vérification manuelle de cohérence quantitative entre les différents tableaux des TSPCN

(ex : cohérence des soldes de gestion et des postes de bilan).

- 56 -

- Correction. Pour les TSPCN exclus par les contrôles, il s'agira de déterminer si les

erreurs peuvent ou non être corrigées directement par les cadres de la DESEF. Si tel n'est

pas le cas, il conviendra :

. de contacter le centre national de formation comptable (CENAFOC) chargé de

la diffusion des principes du PCN auprès des comptables d'entreprises (formation, conseils,

etc.) ;

. si ce n'est pas suffisant, de contacter directement les entreprises en cause.

A la suite des corrections, les TSPCN pourront être introduits.

- Echantillons. Dans le cas des branches d'activité où le nombre des TSPCN erronés

est important (ex : commerce), il conviendra de déterminer un échantillon type, sur lequel

seront appliqués des coefficients d'extrapolation, afin de ne pas perdre trop de temps en

corrections. Cette procédure devra rester exceptionnelle et la DESEF a tout intérêt à

faciliter le développement des normes du PCN même si elle doit perdre du temps dans les

premières années d'exploitation. A ce niveau, la concertation entre l'INSAE, le CENAFOC et

les entreprises est un élément central de la pérennité du traitement.

3.3. Exploitation

L'objectif du traitement est d'établir, sur la base des TSPCN, les comptes

caractéristiques des branches d'activité de la CITI. Ces comptes sont au nombre de quatre :

- le compte de production ;

- le compte de revenus et dépenses ;

- le compte de capital ;

- le compte de financement.

3.3.1. Principes généraux

A chaque agrégat et sous-agrégat des comptes caractéristiques correspondront un

ou plusieurs postes des TSPCN. Par exemple, la détermination de la consommation

intermédiaire (compte de production) nécessitera la prise en compte de différents éléments

des tableaux 2, 13 et 15 des TSPCN (matières et fournitures consommées, transports

consommés, primes d'assurances, etc.). Les correspondances entre les postes des comptes

caractéristiques et les postes des TSPCN ont été établies sur la base des prescriptions du

- 57 -

Système de Comptabilité Nationale des Nations-Unies (S.C.N.) et en étroite collaboration

entre la DESEF et le CENAFOC. Elles ont été délibérément établies par rapport à une

situation bien déterminée, mals il est apparu que :

- le PCN est en évolution et que certains postes des TSPCN pourront recouvrir des

réalités différentes dans le futur ; il conviendra d'en tenir compte ;

- elles se réfèrent aux TSPCN version normale, certaines informations devant être

négligées dans le cas des TSPCN simplifiés (critères d'importance de l'entreprise en terme

de chiffre d'affaire et d'emploi).

Ainsi, la DESEF devra-t-elle être particulièrement attentive aux modifications qui

pourront intervenir dans le futur.

3.3.2. Exploitation en chaîne

L'exploitation proprement dite s'effectue sur la base de l'ancien traitement manuel.

Les variables du TSPCN sont introduites dans le système au fur et à mesure de leur

nécessité dans le calcul des agrégats des comptes caractéristiques. On aurait pu envisager,

et la micro-informatique l'aurait d'autant facilité, d'entrer les informations selon leur ordre

d'apparition dans les TSPCN et de laisser le soin à l'ordinateur d'effectuer les

regroupements et les calculs. Il a semblé que cette option avait le grand désavantage

d'écarter le manipulateur de l'élaboration logique des comptes et qu'il perdait dès cet

instant tout contrôle sur le déroulement des opérations.

C'est pourquoi le micro-ordinateur est ici utilisé comme une simple "super"

calculatrice, le manipulateur pouvant suivre directement sur l'écran les différentes étapes

logiques d'élaboration des comptes caractéristiques d'une part et les passages et reports de

soldes entre eux d'autre part.

Sur le plan pratique, l'exploitation se réalise selon le schéma suivant :

- introduction des données relativet aux agrégats du compte de production pour

une première entreprise (l'introduction s'effectue en ligne dans le tableau "MULTIPLAN", les

titres étant ainsi toujours visibles par le manipulateur) ;

- calcul des agrégats et des soldes du compte de production pour cette entreprise ;

- 58 -

- répétition de l'opération pour les autres entreprises de la branche ;

- calcul des totaux de la branche (en colonne) pour les principaux agrégats ;

- report des soldes dans le compte de revenus et dépenses ;

- introduction des données par entreprise pour ce nouveau compte et calcul des

soldes pour la branche ;

- report dans le compte de capital ;

- introduction des données et calculs ;

- report dans le compte de financement ;

- introduction des données et calcul.

A la fin de ces opérations, les agrégats de chaque compte caractéristique sont

reportés dans des tableaux récapitulatifs par branche, prêts pour l'édition. Le traitement,

qui a été présenté ici dans son ensemble pour une branche d'activité, peut être interrompu

à la fin de chaque compte caractéristique.

Par branche, les tableaux récapitulatifs sont au nombre de deux ; le premier

recevant les reports du compte de production et de revenus et dépenses, le second ceux

des comptes de capital et de financement. Cette césure dans le traitement résulte d'une

constatation pratique : les deux premiers comptes caractéristiques sont en général

beaucoup mieux maîtrisés par les comptables nationaux et leurs composantes dans les

TSPCN mieux remplies par les comptables privés. En effet, les aspects financiers et de

capital semblent moins bien perçus que les aspects réels par les comptables privés, ce qui a

des répercussions immédiates sur la qualité de l'information contenue dans les TSPCN et sur

la fiabilité de l'exploitation qui peut en être faite.

L'inclusion, dans la procédure de traitement, des "écrans" que sont les tableaux

récapitulatifs vise quatre objectifs principaux :

- la visualisation des seuls agrégats de chaque compte, épurés de toutes leurs

composantes, permettant une première édition de lecture aisée ;

- la présentation immédiate de certains soldes importants, telle la valeur ajoutée

dans le cadre du compte de production, et leur confrontation directe avec les agrégats ;

- 59 -

- l'établissement, si nécessaire, de structures par branches (par rapport à l'un ou

l'autre des agrégats) qui serviront par la suite à l'estimation dans chaque branche des

activités traditionnelles ;

- l'introduction, au niveau désiré (entreprises ou branches) des estimations,

réalisées à part, de la consommation de capital fixe (CCF), ceci permettant de passer aux

comptes en net.

3.4. Structure de classement

3.4.1. Tableaux par branches

Une vue générale du schéma de traitement des TSPCN est fournie par le tableau de

la page suivante.

Pour chaque branche et sous-branche traitées, sept tableaux "MULTIPLAN" sont

élaborés, les noms de chacun d'entre eux répondant à un code alphanumérique composé

de deux ou trois lettres et de quatre chiffres.

Type de tableau

Branche concernée

3000 Industries manufacturières

5000 BTP

6110 Commerce de gros - tissus

6120 Commerce de gros - alimentation

6130 Commerce de gros - divers

6210 Commerce de détail - tissus

6220 Commerce de détail - alimentation

6230 Commerce de détail - divers

6240 Commerce de détail - pièces détachées

6300 Hôtels et restaurants

7000 Transports et communication

8000 Banques et assurances.

LR Listes de référence

PE Production/exploitation

RD Revenus et Dépenses

CA Capital

FI Financement

REA Récapitulatif PE + RD

REB Récapitulatif CA + FI

- 61 -

Les informations contenues dans les tableaux récapitulatifs sont reportées, pour

l'édition, dans quatre tableaux généraux qui reprennent les totaux par branche :

- TG0001 Production/exploitation

- TG0002 Revenus et Dépenses

- TG0003 Capital

- TG0004 Financement.

3.4.2. Agrégats

Chaque agrégat reçoit un code en trois lettres (nom de l'agrégat) et en quatre

chiffres (référence à la branche). Ainsi, par exemple, la consommation intermédiaire

calculée pour la branche des BTP prendra-t-elle le nom de CIN5000 et sera calculée dans

le tableau PE5000, puis reportée dans le tableau récapitulatif REA5000.

De plus, les deux premières colonnes des tableaux par branche (PE, RD, CA, FI,

REA et REB), concernant le code CITI et le sigle usuel de l'entreprise, recevront elles aussi

un code alphanumérique qui permettra de les reporter tableau après tableau. Ces codes

sont :

- pour le code CITI, CCI et les quatre chiffres de la branche ;

- pour l'entreprise, CEN et les quatre chiffres.

3.4.3. Reports de tableau à tableau

Les reports de tableau à tableau se feront en trois étapes :

- report de tableau détaillé à tableau détaillé ; il s'agit des soldes reportables

(excédent brut d'exploitation, épargne brute et capacité de financement), ainsi que des

deux premières colonnes (code CITI et sigles des entreprises). Ces reports s'effectueront en

colonne ;

- report de tableau détaillé à tableau récapitulatif ; il s'agit de synthétiser les

informations (reports d'agrégats). Ils s'effectueront en colonne ;

- report de tableau récapitulatif à tableau général ; il s'agit de reporter les totaux

par branche. Ils s'effectueront en ligne.

- 62 -

3.4.4. Stockage

L'objectif final est de stocker sur un même support toutes les informations relatives

à une même année. Le seul support capàble de répondre à cet objectif est un disque dur

(capacité de 10 Mo). En l'attente de disposer d'un tel support, les informations seront

stockées sur disquettes, chaque disquette enregistrant la totalité des informations

concernant une branche.

4 - TRAITEMENTS PARTICULIERS

Les structures partiéulières des branches "commerce" et "transports et

communication" ont nécessité la mise en place de traitements particuliers.

4.1. Commerce

Dans une première étape, les listes de références sont remplies par sous-branche

(tableaux LR6110 à LR6300). Un échantillon représentatif (rapport II/MB) est construit pour

chaque désagrégation. Les entreprises des échantillons sont alors introduites dans les

tableaux de calcul et les résultats répartis dans les tableaux récapitulatifs. Une

structure-type par sous-branche y est calculée (par rapport à la production).

Parallèlement, la production totale de la branche "commerce" est calculée sur la

base de la méthodologie habituelle. La part relative de chaque désagrégation de la branche

dans la production totale est déterminée sur la base des échantillons et reportée dans les

tableaux récapitulatifs. Sur ces montants, les structures par sous-branche sont appliquées

et les soldes recalculés. Ces résultats sont reportés dans les tableaux généraux puis

agrégés au niveau de la branche totale.

4.2. Transports et communication

Le traitement normal est modifié afin de prendre en compte les estimations globales

relatives aux transports routiers.

Dans les tableaux récapitulatifs, le total "transports routiers" est isolé et une

structure-type est calculée par rapport à la valeur ajoutée.

- 63 -

Parallèlement, et sur la base des enquêtes effectuées dans le cadre du Ilème Plan

de la République Populaire du Bénin (sous-secteur Transports et communication), une

valeur ajoutée est calculée pour la sous-branche des transports routiers. Cette valeur

ajoutée est appliquée à la structure calculée précédemment et les totaux recalculés pour le

total de la branche. Ces derniers montants sont reportés dans les tableaux généraux.

5 - LIMITES DE L'EXPERIENCE

Les options de traitement qui ont été présentés ici se réfèrent toutes à la situation

particulière de la République Populaire du Bénin. Il est ainsi évident que l'option

micro-informatique n'est réaliste que grâce au nombre restreint d'entreprises à traiter

(environ 300 en 1983, environ 400 en 1984) et à l'habitude des cadres béninois de l'INSAE

face au matériel informatique.

Le nombre limité d'entreprises permet l'introduction de données par les services

d'exploitation eux-mêmes sans recours à une codification et des équipes d'encodage,

nécessaires pour des volumes de données plus importants. Le matériel micro-informatique

joue, dans ce cas précis, un rôle actif qui n'exclut pas d'emblée l'initiative du manipulateur.

Même si le nombre des tableaux peut parartre important (7 par branches, 12

branches ou sous-branches traitées, soit 84 tableaux auxquels il faut ajouter les 4 tableaux

généraux et le tableau spécifique des transports routiers -au total 89 tableaux), leur gestion

est à la portée de l'utilisateur informatique moyen.

Concernant les options techniques, elles résultent d'un choix pris par la Direction

des Etudes et Synthèses de l'INSAE considérant l'état des réflexions méthodologiques sur la

construction des comptes nationaux et les objectifs qu'elle s'est assignés pour l'avenir.

Le modèle ne se veut donc pas universel, même si certaines options peuvent être

facilement adaptées et transposées à d'autres situations. Son rôle sera totalement rempli s'il

permet à la fois de faire progresser les diverses réflexions sur le domaine et d'améliorer

l'exploitation des données de base de la comptabilité nationale béninoise.

- 64 -

6 - OBJECTIFS DE CALENDRIER

L'assistance de l'OSCE en matière d'exploitation des TSPCN au Bénin s'est

développée, à partir du début de l'année 1985, selon un programme par étapes, défini

conjointement avec l'INSAE et qui est présenté en annexe 3.

Par rapport à ce calendrier indicatif, l'implantation du système de traitement

micro-informatique des TSPCN a pris quelque retard, imputable principalement aux

problèmes posés par la disponibilité du matériel. En effet, il est vite apparu que le matériel

déjà existant à l'INSAE (MICRAL 90-50 dans le cadre de l'enquête budget-consommation

des ménages, IBM-PC dans le cadre des statistiques démographiques) ne pouvait être

utilisé comme prévu pour le traitement des TSPCN, les activités des principaux services

utilisateurs de ces matériels se révélant suffisantes à monopoliser la totalité des capacités.

La dernière mission de suivi effectuée par l'OSCE (du 7 au 21 février 1986), qui

devait, selon le programme indicatif, marquer le démarrage effectif de l'exploitation

micro-informatique, n'a pu que consister en un test complet du logiciel sur une branche

d'activité spécifique (celle des BTP).

Ce test a été effectué sur un micro-ordinateur indépendant de l'INSAE (M24

d'Olivetti) et a permis, en une journée, d'entrer dans le système toutes les entreprises du

BTP et d'établir pour cette branche les différents comptes caractéristiques.

L'INSAE s'est engagé, au vu des résultats du test, à fournir pour la prochaine

mission (prévue en juin 1986) la disponibilité temps, si ce n'est machine, nécessaire au

rattrapage définitif des traitements des années 1983 et 1984.

A terme, l'exploitation des TSPCN devrait s'organiser selon le calendrier

approximatif suivant :

- janvier à mars :

. arrivée des TSPCN à l'INSAE et, après contrôle, intégration en continu dans la

chaîne de traitement ;

. après quelques années de pratique, il devrait être possible, sur la base des listes

de référence, d'établir des échantillons représentatifs par branche et de présenter des

résultats provisoires.

- 65 -

- avril à mai :

. relances pour les entreprises n'ayant pas répondu ;

. intégration en continu ;

. calcul des structures par branche et estimation des activités traditionnelles.

- juin :

. sortie définitive des résultats ;

. intégration dans les opérations de construction des comptes nationaux.

- 66 -

ANNEXE 1

TABLEAUX DE SYNTHESE DU PLAN COMPTABLE BENINOIS

REGIME NORMAL

Tableau 1 Fiche signalétique de l'entreprise

Informations concernant le régime juridique, le régime fiscal, les activités, la nationalité,

l'emploi, .

Tableau 2

Soldes caractéristiques de gestion Détermination de la marge brute, de la valeur ajoutée, du résultat d'exploitation, des

résultats sur cession d'actifs, du résultat net avant impôt, de l'impôt sur le résultat, du

résultat net de la période à affecter ...

Tableau 3 Mouvements patrimoniaux

Emplois et ressources.

Tableau 4

Bilan

Actif et passif.

Tableau 5

Détermination du résultat fiscal

Tableau 6 Détermination du bénéfice minimum fiscal

Tableau 7

Calcul des prélèvements fiscaux et parafiscaux

Tableau 8

Tableau des immobilisations

Détermination de l'investissement total.

- 67 -

Tableau 9

Tableau des amortissements

Tableau 10

Tableau des stocks

Tableau 11

Tableau des provisions

Tableau 12

Tableau des capitaux permanents

Capital, réserves, report à nouveau, résultats en instance d'affectation, provisions pour pertes et charges, emprunts, obligations, . . .

Tableau 13

Détail des services consommés et charges,

Transport, autres services, charges et pertes diverses, frais de personnel, impôts et taxes,

intérêts, dotations, .. .

Tableau 14

Détail des ventes et prestations fournies

Tableau 15

Détail des autres produits

Tableau 16

Détail des résultats sur cessions d'açtifs immobilisés

Tableau 17

Tableau de financement

Emplois et ressources.

Tableau 18

Evolution du fonds de roulement

Emplois et ressources.

Tableau 19

Engagement hors bilan

- 68 -

ANNEXE 2

REPARTITION DES TSPCN 1983 PAR BRANCHE D'ACTIVITE

1. AGRICULTURE 1 2. INDUSTRIES EXTRACTIVES 0 3. INDUSTRIES MANUFACTURIERES 31

3115. Corps gras 1 3116. Travail des grains 1 3117. Boulangerie 1 3131. Boissons non alcoolisées 1 3132. Alcools non maltés 1 3210. Textile 2 3240. Chaussures 1 3320. Meubles en bois 3 3400. Papier et imprimerie 5 3510. Chimie 1 3520. Autres produits chimiques 5 3560. Plastique 1 3600. Produits min. non métal. 2 3810. Ouvrages en métaux 1 3900. Autres industries manufacturières 5

4. ELECTRICITE, GAZ ET EAU 1 5. BTP 11 6. COMMERCE 203

61. Commerce de gros 120 611. Tissus 60 612. Alimentation, Boissons 26 613. Divers 34

62. Commerce de détail 81 621. Tissus 20 622. Alimentation, Boissons 10 623. Divers 42 624. Pièces détachées 8 625. Librairie/Papeterie 1

63. Hôtels et restaurants

7. TRANSPORTS ET COMMUNICATIONS 3 8. BANQUES ET ASSURANCES 5 9. SERVICES 8

TOTAL DES TSPCN CLASSES 263

TSPCN NON CLASSES 20

TOTAL 1983 283

- 69 -

ANNEXE 3

PROJET DE TRAVAIL CONJOINT I.N.S.A.E.-O.S.C.E.

SUR LE TRAITEMENT DES TABLEAUX DE SYNTHESE

DU PLAN COMPTABLE NATIONAL

OBJECTIFS

* Améliorer la saisie et le traitement statistique des données sur les entreprises non

financières (rapidité, efficacité et exhaustivité).

* Permettre le développement des analyses sur le secteur productif (moderne et

traditionnel) et améliorer la connaissance sur les filières de production.

* Améliorer la qualité des comptes nationaux (justesse, précision et cohérence).

MOYENS

* Missions.

* Expertises.

* Micro-informatique (déjà disponible au Bénin).

PROGRAMME

Programme en plusieurs étapes dont l'année 1985 consistera en une étape de

réflexion et de mise en place des procédures de traitement et l'année 1986 en une étape

d'exploitation définitive des instruments. Durant ces deux années, l'exploitation

traditionnelle (effectuée manuellement) coexistera avec les efforts de mise en place de la

procédure informatique : les deux traitements devront être aussi proches que possible

(charrie de traitement, résultats intermédiaires, contrôles).

PRINCIPES

La nouvelle procédure de traitement devra s'intégrer dans les efforts nationaux

déployés pour le développement de l'appareil et des instruments statistiques (définition

- 70 -

précise des objectifs à atteindre) et être adaptée aux besoins d'informations nécessaires au

développement des politiques et projets sectoriels, tels qu'ils sont définis dans la

Convention de Lomé III.

DETAILS

Première étape : 1985

Janvier à avril : Arrivée à I'I.N.S.A.E. des documents statistiques et fiscaux (décret 81-399 du 19

novembre 1981) relatif à l'année civile 1984.

Avril * Rencontres 0.S.C.E./I.N.S.A.E./Autres services producteurs ou utilisateurs de

données sur les entreprises.

* Trois types de questions à traiter :

Questions générales

- Utilisations désirées des résultats du traitement des données sur les entreprises

(fichier d'entreprises, centrale des bilans, analyses Emplois/Ressources, autres analyses

particulières).

- Principes à respecter pour la chaîne de traitement des données (cohérence avec

les autres actions sectorielles, parallélisme des traitements manuel et informatique, . ).

Questions méthodologiques

- Passage Plan Comptable béninois/concepts de comptabilité nationale (conformité

du Plan Comptable béninois, problèmes de collecte, double régime .. . ).

- Passage branches - secteurs.

- Entreprises d'Etat, Plan comptable sectoriel.

- Echantillon d'entreprises pour des enquêtes spécifiques.

Questions informatiques

- Type de traitement.

- Disponibilité en matériel.

- 71 -

- Personnel qualifié.

* Ces rencontres devront aboutir à la définition d'un programme de travail conjoint

0.S.C.E./I.N.S.A.E.

Mai à août :

* Elaboration des rapports et expertises définis dans le programme de travail.

* Exploitation manuelle des TSPCN sur l'année 1984.

Septembre :

* Réunion de synthèse O.S.C.E./I.N.S.A.E.

- discussion sur les rapports ;

- examen des résultats de l'exploitation manuelle des documents sur l'année

civile 1984 ;

- présentation du logiciel de traitement ;

- établissement du calendrier pour l'implantation informatique.

Octobre :

Préparation à l'implantation informatique (mise en forme des données disponibles).

Novembre :

* Implantation du logiciel.

* Essais.

Décembre :

Entrée des données 1984 et sortie des premiers résultats.

Deuxième étape : 1986

Janvier à avril :

* Fin de l'implantation des données 1984.

* Publication des résultats.

* Arrivée des documents 1985.

* Double exploitation, en parallèle (contrôles de cohérence et formation sur le tas

du personnel à la nouvelle procédure).

QUELLES ENQUETES PEUT-ON DEPOUILLER

SUR UN MICRO-ORDINATEUR ?

par Pierre MEYER*

L'utilisation de la micro-informatique, pour le traitement des enquêtes ou dans

d'autres domaines, provoque fréquemment des prises de position qui ont peu de rapports

avec les possibilités des machines.

Que ce soient les partisans de la micro-informatique, rêvant d'une informatique

enfin débarrassée des informaticiens, ou les tenants de la "grosse informatique", semblant

craindre une dévalorisation de leurs travaux dès lors que ceux-ci seraient traités sur de si

petites machines, les arguments avancés ont souvent manqué de l'objectivité souhaitable.

Ce type de matériel n'offre effectivement pas des capacités suffisantes pour

pouvoir traiter tous les types d'enquêtes qu'on peut être amené à dépouiller. Il semble

pourtant certain, lorsque c'est possible, qu'il y ait intérêt à traiter une enquête sur un

micro-ordinateur, principalement pour :

* la facilité de mise en oeuvre du matériel : un non-informaticien peut facilement

dépouiller une enquête s'il a suivi une initiation au matériel et au logiciel employé ;

* les coûts d'utilisation très réduits ;

* la facilité de transfert sur d'autres machines des fichiers et des logiciels, grâce à

la standardisation des systèmes.

* Directeur d'Etudes à la Société ACT (Etudes et recherches économiques et industrielles)

- 74 -

Il importe donc de définir les critères qui permettent de décider si une enquête peut

ou non être traitée sur un micro-ordinateur. C'est bien sûr la taille de l'enquête, résultant

du nombre d'observations et du nombre de variables, qui peut constituer le premier

obstacle, étant donné les capacités de stockage limitées des micro-ordinateurs. Mais on

doit considérer aussi les durées de traitements qui en plus de la taille dépendent aussi de la

structure du fichier de l'enquête.

Etant donné la diversité des performances des machines présentes sur le marché de

la micro-informatique, il faut cerner le champ de ce qui est considéré ici sous le vocable

de micro-informatique. Dans le secteur professionnel, c'est incontestablement la famille

des PC d'IBM (PC, PC-XT, PC-AT) qui sert de référence, avec tous les compatibles qui

sont proposés par la majorité des constructeurs. Il s'agit donc de matériel monoposte,

fonctionnant sous le système MS-DOS ou PC-DOS, et pouvant disposer d'un disque dur

allant jusqu'à une capacité de 40 Méga-octets, 40 millions de caractères, pour les

machines les plus récentes. A l'intérieur de cette famille de matériel, les performances

varient du simple au double en temps de traitement.

L'ESPACE MEMOIRE SUR DISQUE

Le calcul de la taille du fichier donne l'étendue d'espace mémoire nécessaire au

stockage de l'enquête. On le mesure en nombre de caractères. Dans le cas d'une enquête

à un seul type d'enregistrement, si N est le nombre d'observations et C le nombre de

caractères nécessaires au codage d'une observation, donc la taille de l'enregistrement, la

taille du fichier T est légèrement supérieure à C x N, car selon le type de logiciel utilisé, il

faut rajouter quelques caractères à C pour obtenir la taille réelle de l'enregistrement. Dans

le cas d'une enquête à plusieurs types d'enregistrement, le calcul de T dépend beaucoup

du logiciel utilisé, puisque l'on utilise une base de données qui occupe elle-même de

l'espace mémoire pour sa propre gestion.

Pour des raisons de rapidité de traitement, de facilité de sauvegarde et de

transformation du fichier, il faut pouvoir mémoriser simultanément au moins deux versions

du fichier sur le disque dur, et plutôt trois si possible. Ceci s'avère particulièrement

indispensable lors des contrôles et corrections, si l'on veut facilement pouvoir revenir à

l'étape précédente de correction.

- 75 -

En plus de l'espace utile au stockage de l'enquête, il faut prévoir au moins deux

Méga-octets pour le stockage du système, des utilitaires, du logiciel, du descriptif de

l'enquête et des différents fichiers de paramètres.

Ceci signifie que, en disposant d'une capacité de stockage de 20 Méga-octets, on

peut théoriquement traiter une enquête dont la taille du fichier atteint 9 Méga-octets, mais

il est préférable de se limiter à 6 Méga-octets, afin de disposer simultanément de trois

versions du fichier. Dans le cas d'un fichier simple (à un seul type d'enregistrement) cela

représente une enquête de 6 000 observations codées sur 1 000 caractères, ou 30 000 de

200 caractères. Avec une capacité de 40 Méga-octets, on peut aisément doubler ces

volumes, et l'apparition de disques de capacité encore nettement supérieure nous laisse

penser que les possibilités limites se situeront de moins en moins dans la capacité de stockage.

LA DUREE DES TRAITEMENTS

Bien que les performances des micro-ordinateurs aient été augmentées très

sensiblement avec l'apparition des vrais 16 bits (PC-AT et compatibles), ces dernières

demeurent le point faible des micros dès que l'on tente de traiter de gros fichiers. Il est

difficile de fixer un seuil au-delà duquel une durée de traitement sera inadmissible.

La rapidité de traitement à laquelle l'informatique nous a habitués a sensiblement

modifié notre organisation du travail. Des temps de calcul trop longs sont devenus une gêne dans le déroulement de nos travaux.

L'expérience montre que de façon générale les traitements ne doivent guère durer

plus d'une heure. Pour les dépouillements d'enquête, cette limite s'applique aux

traitements usuels tels que les tabulations et autres calculs statistiques. Pour les

applications plus longues comme les contrôles et les tris, on peut segmenter les traitements

ou lancer des traitements nocturnes, afin de ne pas fermer l'accès à la machine- pendant

les heures ouvrables.

- 76 -

Les temps de traitements que nous citons ici ont été mesurés lors d'un

dépouillement effectué sur une machine compatible PC-XT, sensiblement plus rapide que

ce dernier. Les progiciels étaient écrits en basic compilé. Le fichier avait un seul type

d'enregistrement, d'une longueur de 250 caractères.

Les temps donnés peuvent être sensiblement améliorés par l'utilisation de machines

plus performantes et de logiciels plus évolués ; ils représentent cependant une bonne

estimation de ce que l'on peut obtenir avec les micro-ordinateurs les plus répandus.

Le traitement de référence choisi ici est le calcul d'un tableau résultant du

croisement de quatre variables. Ce type de calcul fait une lecture de tous les

enregistrements du fichier et effectue sur chacun une tâche simple, représentative du

dépouillement d'enquête.

Pour le calcul d'un tableau à quatre dimensions, la vitesse de traitement a été de

715 observations par minute, avec des enregistrements de 250 caractères. Pour le calcul

de 5 tableaux à quatre dimensions, la vitesse obtenue est de 193 observations par minute,

et la performance chute à 100 observations par minute pour le calcul de 10 tableaux. Ceci

donne des capacités de traitement horaire respectivement de 42 900, 11 580 et 6 000

observations.

Ces performances ont été considérablement améliorées, en transformant les

variables non numériques du fichier (les codes des variables ont été remplacés par le

numéro de modalité que ce code représente). Cette transformation a permis de diviser les

temps de traitement par trois. Toutefois cette transformation ne peut être effectuée

qu'après apurement du fichier, et n'améliore donc pas la durée des contrôles.

Quelques essais sur un micro-ordinateur compatible PC-AT nous ont permis de

constater un coefficient multiplicateur de la capacité de traitement allant de 2 à 3, suivant

le type de traitement. Dans le tableau suivant, nous avons pris l'hypothèse la plus

défavorable d'un coefficieht égal à 2, c'est pourquoi ces capacités théoriques

représentent un minimum.

- 77 -

CAPACITE DE TRAITEMENT, MESUREE EN NOMBRE D'ENREGISTREMENTS

DE 250 CARACTERES TRAITES EN 1 HEURE

Avec un compatible

PC - XT

Résultats théoriques avec un compatible PC - AT

Calcul de 1 tableau

Calcul de 5 tableaux

Calcul de 10 tableaux

Résultats obtenus avec le fichier d'origine 42 900 11 580 6 000

Avec un fichier transformé 119 007 35 321 19 263

Fichier non transformé 85 800 23 160 12 000

Fichier transformé 238 014 70 642 38 526

Bien que ce soit plus difficilement transposable, nous pouvons donner pour mémoire

la durée des traitements de contrôle dans la même enquête, qui comprenait un contrôle de

validité sur 160 variables et 25 contrôles de cohérence. La vitesse de contrôle a été de

1 440 observations à l'heure, ce qui donne une bonne idée de la relative lenteur de ces

traitements. Mais comme presque tous les contrôles peuvent être effectués

quotidiennement, au fur et à mesure de la saisie du fichier, il est possible d'éviter ces longs

traitements.

Il ne serait pas significatif de donner des temps de traitement de fichier à plusieurs

types d'enregistrement. Dans ce cas les performances dépendent de trop de paramètres

pour qu'il soit possible de produire des résultats généralisables. L'on peut toutefois affirmer

que l'utilisation de base de données multiplie les durées de calcul au minimum par trois et

souvent par beaucoup plus. Il apparart donc préférable, chaque fois que cela est possible,

de ramener le fichier à un seul type d'enregistrement malgré la redondance d'information

que cette solution représente.

LA SAISIE

La saisie est la partie du traitement la moins affectée par le passage à la

micro-informatique. Que l'on saisisse sur un terminal connecté à une grosse machine ou

sur un micro-ordinateur, le programme de saisie et ses contrôles se déroulent de façon

- 78 -

identique, et les temps de réponse des micros (affichage de l'écran, contrôle, écriture),

s'avèrent suffisamment courts dans le cadre d'une saisie intelligente (i.e. contrôlée). La

seule contrainte nouvelle provient du fait que le micro (au sens où on l'a pris ici) est

encore monoposte.

Si le volume de l'enquête est trop important ou les délais particulièrement restreints,

il est possible d'utilisér un ou plusieurs micro-ordinateurs supplémentaires. Il suffit alors de

machines ayant la configuration minimale, un écran et un lecteur de disquettes. Il faut

alors aussi prévoir une procédure pour concaténer les fichiers saisis sur ces machines

annexes au fichier principal stocké sur la machine qui effectue les traitements. Une autre

solution peut être l'utilisation d'un réseau raccordant les machines annexes à la machine

principale ; mais cette solution plUs coûteuse et plus complexe ne nous semble justifiable

que dans le cas d'un fichier trop volumineux pour être traité sur un micro.

EN RESUME : DES PERFORMANCES HOMOGENES

Lorsque l'on pose la question de savoir si une enquête peut ou non être traitée sur

un micro-ordinateur, la réponse dépend principalement de la taille du fichier nécessaire et

de sa structure (fichier simple ou base de données). On a vu en effet que les capacités de

traitement et les capacités de stockage des machines sont assez homogènes et imposent

donc des limites de taille de fichier assez proches.

Supposons par exemple un traitement sur une machine compatible à un PC-XT

équipé d'un disque dur de 20 Méga-octets. La limite supérieure de la taille du fichier

admissible se situe alors à 9 Méga-octets, ce qui représente 9 000 enregistrements de

1 000 caractères ou 36 000 de 250 caractères. Nous avons vu que pour un traitement

durant lequel on calcule 5 tableaux à quatre dimensions, il fallait une heure pour traiter un

peu plus de 35 000 enregistrements de 250 caractères. Dans le cas où l'on voudrait

calculer l'équivalent de 400 tableaux de ce type, ce qui parait vraisemblable sur un

enregistrement de 250 caractères, cela supposerait 80 heures de traitement, c'est-à-dire

entre un et deux mois de travail. Dans le cas où l'on traiterait. 9 000 enregistrements de

1 000 caractères, les durées de traitement seraient nettement plus courtes mais le nombre

de traitements supérieur, ce qui ferait une durée globale sensiblement équivalente.

- 79 -

Sur les machines les plus récentes (compatibles PC-AT) avec un disque de 40

Méga-octets, ces capacités sont doublées, amenant la limite supérieure du fichier

exploitable à 18 Méga-octets, pour des durées de traitement équivalentes. La question qui

se pose alors est la durée de la saisie, ou plutôt le nombre de machines nécessaires pour

ramener cette durée à une longueur admissible.

LA GRANDE LIMITE : LE MONOPOSTE

Dans le cas extrême où l'on voudrait dépouiller une enquête dont le fichier atteint

18 Méga-octets, et dont la moitié des variables sont effectivement codées, on aurait alors

9 x 106 caractères à saisir. Avec deux agents de saisie, se succédant au clavier, à raison

de 5 heures chacun, il faudrait au moins 11 mois pour saisir la totalité du fichier dans un

mode de saisie contrôlée. Une telle durée réservée à la saisie est, dans la plupart des cas, difficile à admettre.

Pour ramener la durée de la saisie à 3 mois, il faudrait, dans ce cas, 4 machines, et

si l'on veut que le responsable du dépouillement puisse préparer les traitements et

commencer les contrôles et les corrections, il en faudrait 5. La solution micro-informatique

est alors très lourde, voire coûteuse s'il faut acquérir le matériel.

Cette limite devrait être levée dans les prochaines années avec la standardisation

de systèmes multipostes. Mais dans l'attente de ces systèmes on voit que c'est le

monoposte qui constitue le principal handicap au traitement des grands fichiers.

1

L'UTILISATION DE LA MICRO-INFORMATIQUE EN STATISTIQUE

POUR UNE MAITRISE DE L'OUTIL

par Michel BLANC

et Jean BUKIET

I - INTRODUCTION

C'est une banalité de dire aujourd'hui que la micro-informatique peut rendre

d'immenses services à un Office Statistique, spécialement dans des pays où la masse des

informations socio-économiques à traiter ne nécessite pas a priori le recours à des

capacités de mémoire ou de calcul considérables. Et il est vrai que, dans tous les services

centraux de statistique qui ont été dotés de micro-ordinateurs au cours de ces dernières

années, on a vu que certaines situations, qui étaient bloquées lorsqu'il fallait faire appel à

de gros ordinateurs -dont la statistique n'avait pas en général le contrôle-, évoluaient

favorablement et semblaient se débloquer. Ceci ne veut pas dire pourtant que la

micro-informatique constitue une panacée et qu'il suffit d'introduire des micro-ordinateurs,

le plus nombreux possible évidemment, pour voir disparartre tout à coup tous les problèmes

rencontrés par les statisticiens dans l'exploitation des données. On n'a pas vu en effet,

depuis l'avènement de ces machines, de Direction de la Statistique qui parvienne, même

après une période de rodage de quelques mois -voire quelques années-, à sortir

régulièrement les bulletins de statistique, les comptes nationaux ou les résultats d'enquêtes

qu'elle n'arrivait pas à produire auparavant.

Indépendamment du problème de la disponibilité et de la collecte des données

statistiques de base subsiste clairement un problème de méthode lié à l'utilisation des

micro-ordinateurs, qu'il s'agisse de l'existence de logiciels adaptés aux traitements

statistiques ou plus généralement de méthode d'organisation du travail autour et à l'aide de

* M. BLANC et J. BUKIET appartiennent au Service de Coopération de l'INSEE.

- 82 -

ces machines. Certes les solutions doivent être plus faciles à trouver et surtout plus faciles

à mettre en oeuvre que dans la situation antérieure, mais elles ne sont pas forcément

évidentes pour autant. Un outil ne vaut que par l'usage que l'on en fait, la martrise que l'on

en a, et le micro-ordinateur n'échappe pas à cette règle.

Nous allons donc essayer de caractériser les travaux de traitement des données

incombant à un service statistique dans l'optique de l'utilisation de la micro-informatique,

en faisant apparartre les difficultés ou les problèmes que cela entraîne, et en tentant

d'apporter, si possible, quelques éléments de solution.

Mais tout d'abord il convient de préciser de quels types de machines nous voulons

parler, et aussi de quels types d'application, c'est-à-dire quels types de données et quels

types de traitement.

Il - LE MICRO-ORDINATEUR

En ce qui concerne les micro-ordinateurs dont nous allons parler, ce seront a priori

des machines monotâches (un seul programme exécuté à la fois) et monopostes (un seul

utilisateur à la fois), dotées d'un système d'exploitation relativement simple. Le type en est

l'IBM PC et ses compatibles, sous MS-DOS (mais aussi la famille APPLE . . . ).

Les tailles mémoire des micro-ordinateurs et les capacités des disques durs

deviennent toujours de plus en plus grandes, aussi les principales caractéristiques

techniques qui les font différer des "gros" ordinateurs sont la vitesse des traitements, qui

reste incomparablement plus faible, et la simplicité du système d'exploitation.

Les micro-ordinateurs dotés d'un système d'exploitation complexe, permettant par

exemple de supporter le multiposte, nous semblent relever plus d'une philosophie "mini" que

"micro".

III - LES APPLICATIONS

On pense évidemment à tenter de différencier, parmi les diverses applications de

traitement de données réalisées dans une Direction de la Statistique, celles qui relèvent de

la micro-informatique et celles qui relèvent de l'informatique "classique".

- 83 -

Il faut pour cela commencer par distinguer les tâches de "production" statistique des

tâches "d'analyse". Le premier groupe se réfère à la première fonction d'un service

statistique, qui est de mettre de l'information chiffrée à la disposition d'utilisateurs (sous

forme de tableaux de résultats d'enquêtes, de recensement, sous forme d'indices, sous

forme de tableaux de comptes nationaux, etc.). Le deuxième groupe de tâches correspond

à la fonction d'études que peut s'attribuer le statisticien-économiste, lorsqu'il se fait le

premier utilisateur des données qu'il a produites.

3.1. Micro-informatique "de production"

En ce qui concerne les travaux de production statistique, on voit que ceux-ci

comprennent des opérations de nature, de périodicité et de volume divers. Ils vont en effet

de la production de statistiques de base à la "mise en forme" de ces statistiques sous forme

d'indices par exemple, à la mise en forme à des fins de présentation économique de

statistiques d'origine administrative, ou à une élaboration un peu plus sophistiquée dans le

cadre de la comptabilité nationale, etc. Les opérations de collecte de données de base

proprement dites peuvent elles-mêmes être plus ou moins lourdes, selon qu'elles se font au

travers d'un recensement général de la population, d'un recensement de l'agriculture, d'un

recensement de l'industrie, d'une enquête nationale sur le niveau et les conditions de vie

des ménages, ou alors d'une enquête légère, de relevés de prix sur quelques marchés, etc.

Mais la mise en évidence de cette diversité d'opérations et leur classement par le

volume des données traitées ou par la complexité des traitements à effectuer ne suffisent

pas pour permettre d'établir une frontière nette entre les travaux qui relèveraient

naturellement d'une exploitation micro-informatique et les autres. S'il est clair en effet que,

pour les opérations les plus simples et de moindre taille, comme les enquêtes légères ou le

calcul d'indices, on puisse envisager a priori de les traiter sur des micro-ordinateurs, rien ne

prouve qu'il faille l'exclure absolument pour les opérations lourdes et complexes. En effet,

compte tenu de l'évolution continue des matériels et du développement rapide de logiciels

dans des domaines variés, ce ne seront bientôt plus des raisons techniques qui

détermineront cette frontière, mais des raisons d'une nature différente : par exemple,

existence d'un savoir-faire, recherche d'une organisation adaptée.

3.2. Micro-informatique "d'étude"

Les micro-ordinateurs monopostes sont par nature destinés à être partagés entre un

nombre réduit de personnes, voire à ne servir qu'à une seule personne. La facilité d'utilisa-

tion, surtout avec le confort apporté par les progiciels et les "souris", en fait un outil idéal

- 84 -

pour des cadres n'ayant pas a priori de compétence informatique ou ne désirant pas entrer

dans les arcanes d'un langage ésotérique et d'un mode opératoire rebutant.

La logique de cette utilisation des micro-ordinateurs est la réalisation d'études où

l'outil informatique n'est pas une finalité en soi. Le cadre s'attachera à la validité des

résultats produits, pas à celle du déroulement informatique des traitements. Le but des

progiciels est d'éviter de programmer et de se poser des questions de nature informatique.

Les progiciels utilisés peuvent être des gestionnaires de données, des tableurs, ou

bien des progiciels intégrés, mais il peut s'agir aussi de progiciels beaucoup plus spécialisés

et adaptés notamment à l'analyse statistique. C'est ainsi qu'il existe des logiciels pour

micro-ordinateurs réalisant diverses sortes d'analyses de données (analyse en composantes

principales, analyse des correspondances, différentes méthodes de classification) ou des

analyses économétriques, y compris les méthodes les plus récentes incluant les variables

qualitatives.

Il s'agit donc a priori d'opérations qui ne sont pas répétitives, ou qui restent toujours

sous la responsabilité d'un même cadre qui les conçoit et les réalise. Toutefois on imagine

que ce dernier va être amené bien vite à vouloir répéter une même étude à échéances

régulières, et donc à vouloir conserver ses commandes dans un fichier permanent de

manière à éviter d'avoir à les rentrer à chaque fois. Par ailleurs, il voudra peut-être aller

plus loin et sortir des options standards du progiciel ; or certains progiciels disposent de

véritables langages de programmation.

On rejoint ainsi les caractéristiques de la micro-informatique de production, où on

bâtit un système informatique qui doit s'intégrer au fonctionnement du service et doit par

conséquent répondre à un certain nombre d'exigences de fiabilité, de sécurité, de

possibilités d'évolution, etc.

3.3. Micro-informatique

On voit donc qu'on arrive à un point où s'opère une distinction entre l'informatique

personnelle -l'ordinateur personnel (le "PC")-, et une organisation utilisant éventuellement

le même type de micro-ordinateurs mais requérant des compétences informatiques qui sont

exactement de même nature que celles exigées pour faire fonctionner l'informatique

•classique, avec même le cas échéant la nécessité d'avoir un informaticien à plein temps

pour gérer cette organisation.

- 85 -

Cette séparation ne doit toutefois pas être perçue comme une opposition de deux

situations extrêmes entre lesquelles il faudrait choisir ; il existe au contraire, si l'on peut

dire, un continuum de possibilités entre les deux.

Pour revenir à l'optique que nous avons choisie, qui est celle du cadre statisticien

confronté à un problème de production statistique (ou à un problème d'étude entrant dans

le cadre régulier des travaux et donc des publications de la Statistique, dont nous avons vu

qu'il rejoignait le précédent), elle semblait a priori proche de ce que nous venons d'appeler

informatique personnelle. Mais nous voyons maintenant que la solution se situe quelque part

sur le chemin défini ci-dessus, ce qui signifie que le statisticien ne pourra résoudre les

différents problèmes qui se posent à lui qu'après avoir acquis les connaissances et les

compétences nécessaires correspondant à cette situation.

Quelles sont donc ces compétences supplémentaires requises, ou quels sont les

écueils qui guettent celui qui se lance sans précaution particulière, même dans des

applications apparemment simples ? C'est ce que nous allons tenter de mettre en évidence

en passant en revue diverses exigences d'applications informatiques de type professionnel,

relatives ici à la statistique.

IV - LES EXIGENCES DE LA MICRO-INFORMATIQUE

4.1. Pérennité des applications

La crédibilité d'un service statistique et l'utilité de ses travaux se jugent certes à la

qualité mais aussi à la régularité de ses productions. Une application destinée à "tourner"

tous les mois, tous les trimestres ou tous les ans doit donc offrir toutes les garanties en ce

sens. Une des premières conditions est que la conception et la réalisation d'une telle

application ne doit pas être le fait d'une personne seule "bricolant" des programmes à sa

guise et construisant un monstre que personne ne saura plus utiliser après son départ.

La rotation des cadres étant en général plus importante dans les pays en

développement que dans les pays développés, ce problème doit faire l'objet d'une attention

particulière.

- 86 -

4.2. Organisation

Informatiser une fonction ou un service, même à l'aide de micro-ordinateurs

domiciliés et mis en oeuvre au sein du service, conduit inéluctablement à figer certains

aspects de l'organisation du service. Comme un service n'est jamais indépendant des

autres services d'une Direction, ni de l'extérieur, mais reçoit et transmet des informations,

informatiser signifie également figer certains aspects de l'organisation de la Direction, et

notamment certains circuits d'information.

L'introduction de l'informatique devrait s'accompagner de la réflexion sur

l'organisation, pour éviter des blocages immédiats ou à plus long terme, pour tirer le

meilleur parti des apports dus au nouvel outil, et pour s'inscrire dans des perspectives plus

larges (d'autres services, en amont ou en aval, sont informatisés ou vont l'être).

En tout état de cause, les impératifs de sécurité (cf infra) imposent une organisation

précise et rigoureuse de l'utilisation de la micro-informatique pour les applications de

production.

4.3. Conception des fichiers

Concevoir et organiser les différents fichiers et leurs liens est une opération délicate.

Et de mauvaises décisions en ce domaine conduisent inéluctablement à des programmes

plus complexes, voire à rendre les traitements quasiment impossibles.

Il est nécessaire d'envisager d'abord l'ensemble des informations que la tâche à

automatiser met en jeu, leurs liens et leurs occurrences, de manière à bâtir le système

d'information.

Puis en fonction des matériels et des logiciels que l'on prévoit d'utiliser, on déduira

les structures et organisations des fichiers physiques et leur accès.

Cette phase de conception et de structuration des fichiers est particulièrement

importante dans le cas de la micro-informatique de production statistique. Ceci est vrai déjà

pour des opérations en apparence simples (par exemple la gestion de relevés de prix et le

calcul d'indices), si on veut que l'application soit réellement efficace, mais devient vraiment

une condition de faisabilité de l'application lorsque l'opération devient plus complexe,

comme c'est le cas d'une enquête budget-consommation, avec de nombreux niveaux

d'observation et des liaisons à établir entre ces niveaux.

- 87 -

Certains progiciels imposent de bien définir la structure des données dès le départ,

mais laissent aussi beaucoup de libertés à l'utilisateur, ce qui bien sûr n'est pas mauvais en

soi, mais par ailleurs ne l'empêche pas de se noyer dès qu'il a affaire à un grand nombre de

fichiers et qu'il doit gérer toutes les liaisons entre eux. D'autre part la majorité de ces

progiciels ne permettent pas de définir des structures du type hiérarchique, sans lesquelles

l'exploitation et l'analyse des données de la plupart des enquêtes auprès des ménages ne

peuvent se concevoir valablement. De tels logiciels généraux adaptés au traitement de ce

type d'enquête commencent à voir le jour sur les micro-ordinateurs, mais aucun n'a encore

atteint l'efficacité et la notoriété de ceux qui ont été mis au point sur les gros ordinateurs.

4.4. Compatibilité et cohérence

Ce point mérite d'être mentionné, même s'il peut paraître évident, car, justement

peut-être parce qu'on le croit évident, on a tendance à en oublier toutes les implications.

Dans une Direction de la Statistique comme dans toute autre organisation, bien vite

le besoin sera ressenti de pouvoir échanger des programmes et des données avec d'autres

utilisateurs, donc avec d'autres machines. Se posent alors tous les problèmes de

compatibilité : compatibilité des données produites par des logiciels différents, compatibilité

des machines pour pouvoir échanger des programmes ou des données.

Mais il faut penser aussi aux problèmes de cohérence ; si les définitions ne sont pas

les mêmes, les données produites par une application seront difficiles, voire impossibles, à

exploiter dans une autre. Il faut par exemple se méfier des copies d'un fichier : plusieurs

utilisateurs du même service ont chacun leur copie, ou bien une copie est fournie à un

autre service. Il sera alors impossible d'assurer la cohérence entre les copies, qui ne seront

jamais dans le même état de mise à jour, et risquent même de diverger grandement.

Il est donc particulièrement important de veiller à la cohérence de l'ensemble de son

dispositif de traitement informatique : compatibilité des matériels qui équipent les différents

services, cohérence des données de manière que chacun des systèmes d'information

décentralisés participe bien au système d'information global.

4.5. Maintenance des programmes

Les programmes constituant l'application doivent pouvoir évoluer au cours du

temps, pour corriger des erreurs résiduelles qui apparaîtront pour des cas marginaux, mais

aussi parce que certaines fonctionnalités seront modifiées (changements de définition, de

règles administratives, etc.).

- 88 -

Un programme documenté, lisible, accompagné d'un dossier reprenant le fichier

logique d'entrée, la description algorithmique, la programmation, les jeux d'essai et les

procédures d'exploitation, sera rapidement compris par ceux qui devront le reprendre.

Un programme structuré et modulaire pourra très facilement être modifié, adapté et

enrichi de nouvelles fonctionnalités.

Cela nécessite aussi que les fichiers puissent être utilisés pour réaliser des

traitements qui n'étaient pas prévus initialement (mais qui s'inscrivent dans la même finalité)

sans avoir à être modifiés dans leur structure.

Penser le système d'information sans le lier aux programmes qu'il faudra écrire, mais

en l'envisageant comme une description des informations que manipule le service, permet

d'assurer une relative indépendance des données et des traitements.

4.6. Sécurité des données

Il s'agit là d'un point crucial, car les micro-ordinateurs offrent fort peu de sécurités,

pour les données comme pour les programmes.

Une fausse manoeuvre, un incident, et des heures voire des mois de travail peuvent

disparaître à tout jamais si l'utilisateur n'a pas fait l'effort d'organiser lui-même sa sécurité.

Sur un gros ordinateur des incidents se produisent aussi, mais un certain nombre de

procédures et de personnes réalisent des protections et des sauvegardes.

Les données doivent donc être protégées contre une destruction accidentelle (ce

qui arrive très souvent en micro-informatique où les supports des données sont manipulées

directement par les utilisateurs ; qui n'a été victime d'une commande DEL, COPY ou

FORMAT mal venue ?). Les micro-ordinateurs n'offrent aucune protection réelle et la seule

solution reste de sauvegarder systématiquement les fichiers de données, après chaque

manipulation, sur un autre support. Cette précaution permettra de faire face également aux

problèmes dus aux supports devenus illisibles. La nécessité de sauvegarder un disque dur

peut conduire à installer un dispositif de sauvegarde sur bande (streamer).

Un aspect particulier de la sauvegarde concerne les données qui demeurent un

certain temps en mémoire (comme par exemple les cellules d'une feuille lorsqu'on utilise un

tableur) car une coupure de courant les fera disparartre irrémédiablement ; là aussi une

sauvegarde régulière est nécessaire.

- 89 -

Il convient également de préserver l'intégrité, des données en empêchant des

modifications qui seraient apportées mal à propos et qui nuiraient à la fiabilité des fichiers ;

il n'existe malheureusement pas de solution générale à ce problème.

En outre, il est nécessaire de gérer les dates de mise à jour des données afin de

savoir si une modification a été répercutée et si un traitement a eu lieu avant ou après des

modifications.

Enfin il faut mentionner le problème de la confidentialité, qui recouvre notamment

l'obligation de secret pour un Office Statistique. Or les systèmes d'exploitation tels que

MS-DOS n'offrent aucune garantie pour protéger l'accès aux données enregistrées sur un

disque dur ; de plus il est facile d'effectuer des copies de ces fichiers sans laisser aucune

trace ; ét un utilisateur un peu expérimenté peut même retrouver le contenu de fichiers qui

ont été détruits.

4.7. Protection des programmes

Les programmes doivent également être protégés contre la destruction par

l'utilisation de copies de sauvegarde (les disquettes originales ne doivent jamais servir sauf

pour refaire une copie de travail lorsqu'il y en a besoin, ce qui pose des problèmes avec

des progiciels trop protégés).

Ils doivent aussi être protégés contre des modifications intempestives que leurs

utilisateurs pourraient leur apporter et qui seraient susceptibles de mettre en cause la

validité ou la cohérence des résultats produits ; la meilleure protection consiste alors à ne

fournir que des programmes exécutables obtenus par compilation (et ces programmes se

suffisent à eux-mêmes, alors que des programmes interprétés doivent être accompagnés de

l'interpréteur).

V - CONCLUSION

5.1. Envisager d'autres solutions

Un ou plusieurs micro-ordinateurs ne représentent pas la seule solution pour

informatiser un service.

- 90 -

Une solution mini-ordinateur par exemple (1) offrirait une meilleure sécurité des

données, par les procédures de sauvegarde automatique, et garantirait une meilleure

cohérence, par l'existence d'une seule base de données accessible par les différents

utilisateurs.

Cette solution nécessite la présence d'informaticiens, ce qui garantit la

connaissance de certaines techniques dont nous avons vu l'importance, et la mise en place

d'une organisation spécifique.

Cela dit, un micro-ordinateur multiposte multitâche (par exemple avec le système

d'exploitation UNIX) répond à cette définition.

Mais il est certain que la solution mini-ordinateur est lourde ; elle est d'abord plus

coûteuse, mais pas plus qu'un projet qui nécessiterait dix micro-ordinateurs. Mais surtout

elle est plus difficile à maltriser par les utilisateurs, et risque de conduire à des contraintes

concernant l'accès à la machine du type de celles que connaissent nombre de services

vis-à-vis d'un gros ordinateur central.

5.2. Nécessité d'une formation à la micro-informatique

Il apparaît que pour pratiquer une micro-informatique de production, le statisticien

devra avoir à sa disposition un certain nombre de connaissances et d'outils qui étaient

jusqu'ici plutôt réservés aux informaticiens. Certes il ne s'agit pas pour lui de devenir

informaticien, ni d'ailleurs de croire que les informaticiens ont résolu tous les problèmes

posés par le traitement automatique de l'information, mais il est également inutile de

réinventer un certain nombre de techniques qu'ils ont élaborées pendant quarante ans.

Une formation à la micro-informatique devrait alors comprendre :

- une approche d'une technique d'analyse permettant de concevoir le système

d'information et de réaliser un ensemble de programmes cohérent et planifié ;

- une formation plus poussée sur la conception des fichiers, qui sont la matière

première que traite l'informatique et dont l'organisation conditionne la faisabilité et la

facilité des traitements ;

(1) On aurait pu envisager aussi les avantages et inconvénients respectifs des réseaux locaux et des infocentres.

- 91 -

- une formation sérieuse à la programmation (structurée), seule garantie de pouvoir

mettre au point des programmes même longs et complexes, et surtout de pouvoir les

maintenir, les faire évoluer ;

- enfin il est nécessaire d'acquérir des compétences concernant le système

d'exploitation et les procédures de sauvegarde.

.

NOTE DE LECTURE

Georges DUPRE

LES NAISSANCES D'UNE SOCIETE, ESPACE ET HISTORICITE CHEZ LES

BEEMBE DU CONGO

ORSTOM, Paris, coll, Mémoires, n° 101, 418 pages

par Philippe COUTY

Après un premier ouvrage consacré en 1982 aux Nzabi du Congo (1), Georges

DUPRE, géologue devenu sociologue, nous donne un livre sur les Beembé, groupe ethnique

situé autour de Mouyondzi, entre Niari et Bouenza. Les deux études relèvent d'une même

recherche, qui vise à décrire et à faire comprendre les modalités et les ressorts de la

diversité des sociétés rurales congolaises. Les Nzabi s'opposent aux Beembé comme le

système s'oppose à l'histoire, comme l'ordre et ses règles sont aux antipodes de la

transaction : "La mobilité à quoi les a contraints leur système de production amène les

Nzabi à produire leur espace par un réseau de relations relativement rigides entre des

établissements humains essentiellement transitoires. Au contraire, c'est à partir des points

fixes des villages et des marchés que s'organise l'espace beembé, dans lequel les relations

sont mouvantes et sans cesse remises en cause" (p. 15).

On le comprend, l'auteur affirme la spécificité de chaque société, et reconnail qu'il

ne saurait construire librement l'image de ce qu'il observe : "Produire la connaissance de

ces sociétés, c'est d'abord apprendre à composer avec elles" (p. 13). Nous voilà d'emblée

à des années-lumière des travaux que certains anthropologues, il n'y a pas si longtemps,

(1) Un ordre et sa destruction. ORSTOM. Paris. Collection Mémoires, n° 93, 446 pages. Cet ouvrage a été analysé dans le Bulletin Analytique de Documentation d'AMIRA (n° 4, mars 1984) et également (plus brièvement) dans le Bulletin Bibliographique du Service de Coopération de l'INSEE (n° 2, 1983).

- 94 -

entreprenaient sur le terrain pour vérifier des schémas théoriques d'une solidité à toute

épreuve. En d'autres termes encore, l'analyse d'une société donnée ne peut se réduire à la

condamnation de la dépendance où cette société est maintenue : "Les Beembé ne se

contentèrent pas de réagir à la domination qui leur était imposée : ils lui assignèrent des

limites à ne pas dépasser" (p. 12).

Mais que faut-il entendre par spécificité d'une société ? Dès le premier chapitre,

DUPRE rejette le fixisme des anciennes classifications ethniques, et propose de reprendre le

problème sur d'autres bases. Il existe une entité beembé, soit, mais "à la notion d'ethnie

beembé dotée d'attributions hétéroclites, est substitué le concept de société productrice de

son histoire" (p. 27).

J'essaierai de montrer, dans la deuxième partie de cette note de lecture, que ce

changement de perspective entraîne des conséquences épistémologiques importantes.

Auparavant, toutefois, il convient de résumer brièvement le contenu du livre.

Trois parties : les mouvements de l'histoire (jusques et y compris la conquête

coloniale), les outils du présent, maîtriser le devenir.

LES MOUVEMENTS DE L'HISTOIRE

L'histoire des Beembé, c'est d'abord celle du peuplement d'un certain espace. La

conjonction des éléments téké et kongo produit les deux ensembles que l'on désigne de

nos jours au Congo sous le terme de Beembé : les Beembé stricto sensu et les Keengé. Le

processus revêt un caractère multiforme. DUPRÈ parle de "grignotage" des positions téké

par les Kongo, ou encore d'une réalité migratoire composite occultée par le nom unique

donné à chaque kanda (groupe de parenté d'extension maximale). Passer de l'histoire des

kanda à celle de l'ethnie -si ethnie il y a- c'est effectuer un saut au-delà du détail et

reconstituer des origines irrémédiablement problématiques. Peu importe : "C'est la

connaissance du peuplement, de ses modalités, des différentes phases et de ses conditions

géopolitiques, qui permet de lire ce qui ne serait autrement que singularités

ethnographiables. C'est en particulier la nature et l'intensité des rapports avec les Téké qui

confère à chaque groupe sa spécificité" (p. 61).

- 95 -

Allons jusqu'au bout : l'état de guerre permanent qui caractérise l'ancienne société

beembé doit être considéré comme l'aboutissement de conflits occasionnés par la maîtrise

et l'occupation de l'espace. En ce sens, la guerre n'est que la continuation du peuplement.

La guerre consolide l'emprise des migrants anciennement installés sur les lignages ou les

villages récents, faibles et pauvres. La guerre est si peu l'accoucheuse de relations créant

un espace politique paisible dépassant le village que, pour anéantir la violence, il faut que

la violence collective se déchaîne, jusqu'à le détruire physiquement, contre l'individu ou le

village coupable d'avoir enfreint la loi. "En l'absence de toute transcendance religieuse ou

politique qui puisse transformer la guerre en paix" (p. 90), cette extirpation de la violence

par la violence est toujours à recommencer. Schéma qui rappelle celui que propose René

GIRARD (1), bien que cet auteur ne soit pas cité dans la bibliographie. Même la création de

l'échange et du marché, c'est-à-dire de "l'anti-guerre" (p. 105), repose en dernière

analyse sur la violence. Derrière la paix du marché, "se profilait la violence collective et la

puissance guerrière du martre du marché ... Le marché apparat donc comme une réalité

dépendante dont la reproduction passe par celle des rapports de production guerriers" (p.

106).

Cette première partie se conclut par deux chapitres dramatiques. Vers les décennies

1860-1870, on voit des hommes éminents (nkanyi) constituer des unités politiques

supra-villageoises, en s'appuyant sur des pouvoirs surnaturels ancrés dans la réussite

économique. L'un d'eux, Mwa Bukulu, passe à la postérité pour avoir symboliquement

proposé de mettre fin à la guerre, de favoriser l'agriculture et de sauver les enfants. A

cette transformation politique, quatre sections de tirailleurs viennent mettre un terme en

trois mois de campagne, d'avril à juillet 1911. Pourtant la résistance ultérieure des Beembé

contraignit le colonisateur à leur réserver une place à part dans ses plans. Réfractaires aux

recrutements de travailleurs pour les chantiers Congo-Océan, les Beembé n'acceptèrent

que de fournir des produits agricoles à l'autorité nouvelle.

LES OUTILS DU PRESENT

C'est la partie la plus subtilement anthropologique de l'ouvrage. On y trouve un

exemple insigne de ce à quoi parvient un chercheur lorsque, cessant de se borner à

exposer minutieusement le contenu de ses notes de terrain, il impose à ses matériaux, par

(1) Des choses cachées depuis la fondation du monde. Livre de Poche, Biblio. Essais, Paris, 1983, 631 pages.

- 96 -

une sorte de coup de force créateur, le sens qui les organise en les unifiant. Il est question,

dans ces chapitres 6 à 11 compris, du système de parenté, de l'inscription du lignage dans

l'espace villageois, de la régulation (lors des funérailles) d'une accumulation de richesses

qui pourrait compromettre la perpétuation des lignages, de la circulation des femmes, des

rapports entre pouvoir sur les hommes et pouvoir sur la terre, et enfin de la légitimité que le

pouvoir sur les hommes trouve dans la familiarité avec le surnaturel. Sujets délicats, que

DUPRE traite avec une virtuosité confondante.

Ces pages fascinent parce qu'avec une évidence progressive, on y voit se

déformer, se transformer, se renouveler des thèmes trop souvent traités de manière scolaire

et répétitive. Il serait peu de dire que DUPRE pose de nouvelles questions, il force à voir les

choses autrement. Il propose par exemple (chapitre VI) toute une théorie de la

fragmentation des villages, selon une gradation qui l'amène à montrer comment la scission

peut créer de nouveaux rapports sociaux. Une distinction s'opère alors entre parents qui

habitent le même village, c'est-à-dire qui partagent une histoire commune incarnée dans

un même terroir, et parents dont les relations ressortissent à l'histoire seule. A cette

occasion, DUPRE explique que toute scission révèle une différence déjà existante entre

lignages forts et faibles, manifestant par conséquent un processus de

segmentation-domination qui s'exacerbe là où la richesse en jeu est la plus grande. On ne

manquera pas de noter que, dès le chapitre 7, l'exposé se réfère à des monographies de

terroir, dont la valeur heuristique est une fois de plus attestée. Certains résultats

surprendront, par exemple la mise en évidence d'un système de production guerrier (p.

178) -concept qui s'impose pourtant quand on mesure à quel point le travail agricole des

femmes n'était possible que sous la protection d'hommes en armes (p. 75). On méditera

également sur l'aspect fictif de la notion de terroir villageois dans les zones à forte densité

démographique (p. 179) où plus de la moitié des femmes d'un village cultivent en partie sur

des terres relevant d'un autre village . . .

MAITRISER LE DEVENIR

Cette troisième partie est sans doute celle qui intéressera le plus les économistes.

DUPRE l'ouvre en opposant les deux ensembles de représentations qui circonscrivent

l'identité beembé. Les unes concernent le pouvoir, le lignage, la terre et les ancêtres. Les

autres traitent de l'individu, du travail, de l'échange, de la richesse, de la réussite écono-

mique. Deux pôles donc, qu'il ne faudrait cependant pas assimiler aux concepts de tradition

- 97 -

et de modernité inlassablement remués par tant d'ouvrages académiques. Le modèle

beembé de la réussite n'est pas moderne, puisque dès l'époque précoloniale l'idéologie de

la reproduction du lignage et celle de la création de nouveaux rapports sociaux par la

réussite économique coexistent. Coexistence éminemment créatrice : "Le modèle lignager,

s'il était seul, aboutirait à l'homogénéisation de toute la société par l'extension illimitée des

relations de parenté. Par contre, le lignage qui perd, en tant que système de

représentation, son autonomie pour composer avec la richesse et se soumettre à ses

contraintes place la société sous le signe de l'hétérogénéité génératrice d'histoire" (p. 265).

Cette tension permanente entre deux pôles anime une prospérité fondée en premier

lieu sur une forte croissance démographique, une émigration massive, une exceptionnelle

accumulation de femmes facilitée par la modicité de la dot. Ces femmes soutiennent une

agriculture dynamique qui parvient, malgré les interventions intempestives de I'ONCPA

(Office National de la Commercialisation des Produits Agricoles) à maîtriser dans une

certaine mesure la commercialisation de ses produits. De nombreuses innovations, des

adaptations spontanées, témoignent d'une ingéniosité paysanne qui compense jusqu'à un

certain point la totale absence de soutien technique administratif (p. 282). Grâce à cette

assise agricole, les hommes peuvent se livrer à l'élevage, à l'artisanat, au commerce et au

transport.

Le chapitre 14 développe plus en détail le dynamisme économique beembé, en

décrivant successivement une intéressante technique d'agriculture intensive (1), la

fabrication artisanale du savon à l'huile de palme, et enfin les associations d'entraide pour

les funérailles. Rendant justice au travail féminin, fondement de la prospérité beembé, un

dernier chapitre examine les modifications qui affectent actuellement la situation des

femmes, les conflits conjugaux, la dot, la place faite aux commerçantes, la scolarisation

des filles, le développement du rite mukisi.

(1) Les maala. Il s'agit d'un buttage associé à l'écobuage, très exigeant en travail mais permettant, en 1ère année, deux récoltes vivrières sur des surfaces cultivées très réduites (pp. 288-89).

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Un ouvrage aussi riche pourrait donner lieu à d'infinis commentaires. Je me

contenterai de faire deux séries d'observations sur le renouvellement de la notion d'ethnie

et sur la méthode de recherche utilisée par l'auteur.

ETHNIE ET HISTOIRE

Les statisticiens, cherchant à stratifier leurs échantillons, ont recouru pendant

longtemps aux classifications ethniques. Il n'y avait là nul présupposé théorique, comme il

n'y en a pas non plus dans la pratique des géographes, des économistes, des agronomes et

des démographes qui, nous dit justement DUPRE, "repèrent sur le terrain des variations

significatives et reconnaissent des unités sur lesquelles ils hésitent à mettre un nom et dont

ils voudraient bien savoir que faire" (p. 16).

C'est alors qu'ils se tournent vers le sociologue. Que dit le sociologue ?

En vérité, sa réponse est déroutante. Tout le monde reconnaît aujourd'hui que la

référence à l'ethnie a tendu, par un effet d'agrégation bien connu des économistes, à

occulter les particularités et les structurations internes de cette entité équivoque. Le

modèle ethnique, par exemple, a complètement dénaturé la réalité des agricultures

forestières précoloniales, nous dit J.P. CHAUVEAU, car il est injustifié "d'attribuer à un

groupe ethnique particulier un modèle agricole ou alimentaire précis" (1).

Il n'en reste pas moins que les africanistes n'ont jamais autant publié d'ouvrages

consacrés à la société X ou à la société Y, comme l'atteste le catalogue de la librairie

Karthala (2). Suffit-il alors, pour apaiser les initiés, de substituer le terme de "société" à

celui d'"ethnie" ? DUPRE ne se contente pas de ce tour de passe-passe. Saisie dans son

(1) J.P. CHAUVEAU : L'avenir d'une illusion. Histoire de la production et des politiques vivrières en Côte d'Ivoire (à paraître dans Etudes Rurales).

(2) Les sociétés songhay-zarma Niger-Mali, par J.P. Olivier de SARDAN ; La société bété en Côte d'Ivoire, par J.P. DOZON ; La société wolof, par A. Bara DIOP.

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devenir historique, l'entité ethnique cesse réellement pour lui de ressortir à ces

"investissements de forme" dont parlent aujourd'hui les statisticiens professionnels (1). Que

sont les investissements de forme ? Des codes, des conventions, des modes d'organisation

qui, établissant des liens systématiques entre des cas singuliers et des formes plus

générales, permettent de faire l'économie d'une interprétation de chacun des cas. Eh bien

non, la présomption d'homogénéité ethnique ne permet plus cette économie bien commode.

Découvrir, à travers la genèse de l'ethnie ou de la société beembé, l'émergence "d'un

arrangement social singulier" (p. 27), c'est constater avec A. DESROSIERES que "l'intérêt

essentiel de l'histoire est d'aider à rompre avec l'autonomisation des formes, laquelle, en

offrant des outils tout faits, interdit de trouver ou même d'imaginer quelque chose qui ne

soit déjà inscrit dans ces outils" (2).

Les conséquences méthodologiques ne sont pas négligeables. Il devient exclu

désormais, me semble-t-il, de partager le point de vue exprimé par R. BASTIDE, selon

lequel "la connaissance du particulier à changer est moins importante que les

connaissances générales théoriques" ; exclu également d'assigner, comme le faisait

BASTIDE, une place secondaire à la connaissance intime de telle ou telle ethnie dans son

originalité et sa spécificité (3). Si chaque groupe ethnique constitue vraiment une entité

originale, alors on voit mal quel niveau de connaissance théorique pourrait se déployer

au-delà de la connaissance particulière de chaque devenir ethnique singulier, observé et

restitué dans sa spécificité inédite. Pas de comparaison concevable entre les parcours

originaux accomplis par des entités toutes uniques en leur genre. On s'aperçoit bien en

lisant DUPRE : à part quelques phrases très générales, et d'ailleurs prometteuses, inscrites

au début de son livre, nulle part il ne tente le rapprochement systématique que l'on

attendait entre le cas beembé et le cas nzabi. Et pour cause ! Le problème ne se pose plus

en ces termes. Il n'est plus question d'examiner, encore moins d'expliquer, la modulation

chez les X et chez les Y d'une catégorie commune telle que le progrès des richesses. Plus

question, par exemple, de chercher si le système de parenté de chaque ethnie est plus ou

moins compatible avec le développement économique. Il n'y a pas, à proprement parler, de

catégorie véritablement commune à plusieurs ethnies. Chacune devient ce qu'elle est, et le

cours inimitable de ces histoires non pareilles se caractérise par des accidents observables

mais inexplicables, comme par exemple un degré inégal de prospérité.

(1) M. ARMATTE et A. DESROSIERES : La recherche en histoire de la statistique. Les sour-ces, les techniques, les usages. Exposé devant le Séminaire recherche de l'INSEE le 16/01/1986.

(2) A. DESROSIERES : Histoires de formes. Statistiques et sciences sociales avant 1940. Revue Française de Sociologie, vol. XXVI, 1985, pp. 277-310.

(3) R. BASTIDE : Anthropologie appliquée, Paris, Pte. Bibl. Payot, 1971, p. 142.

- 100 -

Tout se passe alors, en fait, comme si se trouvait réhabilitée une tradition de

recherche qui remonte à Frédéric LE PLAY et à Emile CHEYSSON. Pour ces sociologues

polytechniciens, les études monographiques ne peuvent conduire à des généralisations ni

même â des esquisses de typologie. Aucune comparaison ne peut être entreprise entre les

familles puisque chacune d'elles est un cas spécifique résultant de "l'infinie variété des

coutumes" (1), exactement comme chaque entité ethnique est, aujourd'hui, un

"arrangement social singulier". A quoi sert alors, objectivement, la monographie ?

DESROSIERES propose une réponse : à reconstituer -au XlXème siècle- des rapports de

type familial entre dominants et dominés, entre patrons et ouvriers, entre propriétaires et

fermiers. Aujourd'hui, en Afrique, on peut de même se demander si, par l'intensité et la

durée des rapports qu'elle instaure entre chercheurs et informateurs, la recherche

anthropologique n'a pas d'abord pour fonction objective d'instituer des liens personnels et

un climat d'Einfühlung ("intuition") favorables à la compréhension puis à la présentation

d'une séquence historique parfaitement singulière. J'ai bien conscience d'écrire des choses

un peu provocantes, mais ne doit-on pas tenter d'aller jusqu'au bout de ce qu'implique le

retour à l'histoire tant célébré de nos jours par les anthropologues ?

METHODE DE RECHERCHE

L'ouvrage de DUPRE est complété par treize annexes du plus grand intérêt. Dans

certaines d'entre elles, en effet, on trouve un compte-rendu instructif des investigations

concrètes exécutées par le sociologue et ses collaborateurs. On nous explique, par

exemple (annexe I), comment un agent technique commença par recueillir des données de

base dans tous les villages beembé, ainsi que dans les villages laali et téké du district de

Mouyondzi (2). On nous précise que l'enquête sur le terrain proprement dit a duré cinq

mois, mais a bénéficié de la collaboration de nombreux lycéens et instituteurs beembé. Bien

entendu, l'essentiel du travail s'est fait lors d'entretiens avec des informateurs, ou par

exploitation d'archives et de documents administratifs. Trois points intéressants sont à

souligner :

(1) DESROSIERES A. : L'ingénieur d'Etat ou le père de famille : Emile CHEYSSON et la statistique. Comm. pour le Colloque "Emile CHEYSSON, ingénieur social", Le Creusot, 26/01/1985.

(2) En 1974, la population beembé s'élevait à 38 293 individus.

- 101 -

1- Une enquête visant à inventorier, localiser, décrire 85 anciens marchés a

comporté un questionnaire passé auprès de vieillards compétents. Parmi les questions

posées, il en est qui concernent la liste des produits vendus ou échangés, l'aire de

fréquentation du marché, etc. ; mais on ne trouve rien sur les prix ou les niveaux de troc

pratiqués, ce qui est assez caractéristique des enquêtes économiques menées par des

sociologues ou des géographes. A noter également que la technique du questionnaire a été

choisie "afin d'obtenir des informations de nature presque statistique" (p. 371). On aimerait

savoir ce que signifie exactement le mot "presque".

2- Trois enquêtes intensives ont été menées en ce point de passage obligé qu'est le

village (annexe VI). Parmi les travaux effectués, on mentionne le "croquis du terroir et

l'identification des parcelles et de leurs occupants", ainsi qu'un questionnaire agricole

s'adressant au« femmes.

3- On discute activement, chez les africanistes historiens, du statut qu'il convient

d'accorder à la tradition orale et aux documents écrits. L'affaire se complique lorsque la

tradition orale a fait l'objet d'un enregistrement écrit, ou lorsque des informateurs cultivés

récitent le contenu de documents manuscrits ou imprimés. Où s'arrête alors la tradition

orale, où commence la source écrite ? DUPRE traite succinctement mais judicieusement le

problème dans un bijou de note infrapaginale (18, p. 336), renouant ainsi avec la tradition

qui consiste -depuis Decline and Fall de GIBBON- à reléguer dans les soutes d'un ouvrage

les morceaux les plus drôlatiques ou les plus coquins. S'étonnant à juste titre qu'un

chercheur africain dise avoir recueilli, auprès d'un informateur, pour sa thèse de 3ème

cycle, des renseignements curieusement conformes à ce que BALANDIER avait déjà écrit

dans Sociologie actuelle de l'Afrique Noire, notre auteur note sarcastiquement : "Il serait

souhaitable que lorsque M. NDINGO-MBO retournera sur le terrain, il ne s'adresse pas à des

informateurs qui sachent par coeur l'oeuvre de G. BALANDIER".

Ce qui frappe, dans ces annexes, c'est la diversité des matériaux recueillis. Cette

diversité pose évidemment problème. S'il ne veut pas se limiter à une besogneuse

énumération de ses données de terrain, le chercheur se trouve en quelque sorte condamné

à prendre de la hauteur, à proposer une vision des choses que les données contribuent

certes à étayer et à nourrir, mais où l'invention et la construction jouent, au sens propre,

un rôle déterminant. On notera à ce propos, une fois de plus, que l'anthropologue ne

cherche pas à rassembler les moyens de constituer une histoire (p. 30). Il se contente de

- 102 -

recueillir, par exemple, des récits qui "ne donnent pas accès à une connaissance historique

unifiée embrassant l'ensemble du kanda" (p. 30) ou qui, à cause de leurs divergences,

"dessinent dans un halo ce qui fut l'origine des Mimbundi" (p. 32). Malgré les nombreux

informateurs qu'il sollicite, le travail de l'anthropologue ne prétend pas à l'exhaustivité et

permet simplement de "dessiner les contours, la composition et les lignes de force d'un

tableau historique dont le détail reste à peindre" (p. 44).

Le lecteur apprécie tant de ',modestie, mais avoue sa gêne devant cette

anthropologie qui revendique sa parenté avec l'histoire sans pour autant prétendre accéder

à part entière au niveau de la connaissance historique. Car enfin l'histoire, l'histoire

scientifique, s'appuie bien -en principe- sur la collecte, la critique et l'interprétation de

toute la documentation disponible ?". M. LANSON, écrit Charles PEGUY, est un scientifique.

M. LANSON suit la méthode. M. LANSON n'aura le droit d'écrire un mot sur l'Amérique que

quand il aura épuisé la documentation et la littérature sur l'Amérique depuis le

commencement . .. C'est nous autres, comédiens, qui avons le droit d'aller trois mois en

Amérique et de regarder ; et de voir, et de rapporter, et de parler, et de conter. M.

LANSON est tenu de dépouiller auparavant et d'épuiser toute la documentation et toute la

littérature sur l'Amérique. Autrement, M. LANSON n'est plus scientifique . . . " (1). Vous

avez bien lu : nous autres comédiens. L'anthropologie, cette histoire sélective et

incomplète, serait-elle par hasard un peu apparentée à la comédie ? J'ai fait le compte des

passages d'humour dans le livre analysé ici. Ils sont fort nombreux, et pas tous dissimulés

dans des notes. Je n'en donnerai qu'un seul exemple, illustrant l'habile utilisation d'effets

de voisinage :

Page 132

L'existence post mortem de Mwa Bukulu fait progresser l'intégration du pays beembé. La statue d'étoffe qui contient ses restes tient en son giron outre le balai du martre de la pluie la marmite du mukomo. Cette marmite indispensable à la magie du mukomo était, du vivant de Bukulu, possédée par un nganga laali qui était requis toutes les fois où cela était nécessaire ...

Page 133

Dans tous les domaines de la vie de Mwa Bukulu une prodigieuse synthèse créatrice est à l'oeuvre. Tirant sa force de l'union des contraires qu'il réalise dans sa vie, dans ses gestes et jusque dans son corps, Mwa Bukulu est, pour tout le pays beembé et pas seulement pour son village le héros qui, surgi de la violence, prend en charge les contradictions de l'histoire pour être le signe des temps nouveaux et annoncer la naissance d'une société.

(1) Ch. PEGUY : L'arclent t suivi de l'argent (suite), Paris, NRF, 1932, pp. 82-83.

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NOTE DE LECTURE

Rémy CLAIRIN

CONTRIBUTION A L'ANALYSE DES DONNEES DEMOGRAPHIQUES IMPARFAI-

TES DES PAYS AFRICAINS

Groupe de Démographie Africaine, Paris, 1985, 403 pages

par Francis GENDREAU

Quand, dans les années 1950, les démographes ont commencé à travailler de

façon systématique sur les données démographiques des pays du Tiers-Monde, la

nécessité de mettre au point des méthodes d'analyse adaptées à la qualité "imparfaite"

de ces données est apparue très vite. Il en est résulté l'éclosion de nombreuses méthodes

diffusées essentiellement par le biais d'articles dans les revues de démographie, mais qui,

dans certains cas, n'ont fait l'objet que de notes à diffusion restreinte.

Pour mettre à la disposition de la communauté scientifique l'ensemble de ces

innovations méthodologiques, la publication de manuels les regroupant a été entreprise.

Les principaux ouvrages de ce type parus en langue française sont les suivants :

- le manuel IV des Nations-Unies : "Méthodes permettant d'estimer les mesures

démographiques fondamentales à partir de données incomplètes" (1967) ;

- "Ajustement des données imparfaites", ouvrage de Rémy . CLAIRIN publié en

1973 par le Groupe de Démographie Africaine ;

- le livre de G. WUNSCH publié en 1978, réédité en 1984, "Méthodes d'analyse

démographique pour les pays en développement" ;

- 104 -

- enfin le manuel X des Nations-Unies : "Techniques indirectes d'estimation

démographique", rédigé à partir des travaux du Comité de la Population et de la

Démographie de l'Académie des Sciences des Etats-Unis et publié en 1984.

Ces quatre ouvrages constituent un ensemble hétérogène certes, mais

relativement complet, permettant une bonne approche de ce nouveau domaine de la

démographie. Pourquoi donc Rémy CLAIRIN, auteur d'un de ces manuels a-t-il éprouvé

le besoin de rédiger cette nouvelle "contribution" dont il est rendu compte ici ?

On peut avancer deux raisons qui en justifient la publication :

- tout d'abord un légitime souci d'actualiser le manuel de 1973, le sujet ayant

considérablement évolué depuis : mise au point de variantes à partir de méthodes

existantes, élaboration de nouvelles méthodes, ... ;

- mais surtout une volonté d'aborder la présentation de ces méthodes avec un

regard plus critique, certaines d'entre elles se révélant relativement inefficaces à l'usage,

d'autres, au contraire, apparaissant très utiles dans de nombreux cas.

Plutôt que de refondre complètement le manuel de 1973, l'auteur a préféré

publier le présent ouvrage en forme de "compléments", à partir de différentes notes qu'il

avait pu rédiger depuis cette date dans le cadre du cours qu'il dispensait à l'Institut de

Démographie de Paris ou à l'attention de chercheurs ou de démographes "de terrain".

Ces notes risquaient de conserver encore longtemps un caractère quasi-confidentiel et il

a été jugé préférable de leur donner une plus large diffusion. On doit d'ailleurs

reconnartre que certains de ces "compléments" sont eux-mêmes aujourd'hui dépassés

par les développements intervenus depuis leur rédaction, ce qui est tout à fait normal

dans une discipline en constante évolution.

Signalons enfin que, parallèlement, le Groupe de Démographie du Développement

(nouveau nom du Groupe de Démographie Africaine) décidait de réaliser, avec la

collaboration de l'OCDE, sous la responsabilité de R. CLAIRIN, D. WALTISPERGER et G.

ROGER, un programme de travail visant une approche plus systématique de la question,

et devant déboucher sur un manuel de démographie mathématique et une série de

fascicules (un par méthode) bâtis sur le même plan : description détaillée, exposé des

hypothèses, conditions d'actualisation, exemples pratiques commentés et critiqués.

-105-

Le contexte dans lequel s'insère la publication de cette "contribution" étant ainsi

posé, venons-en à son contenu. Le classement adopté est par "sujet" (fécondité,

mortalité, ... ). Les méthodes passées en revue sont les suivantes :

A - FECONDITE

- Estimation des variations passées de la natalité à partir d'une série de

recensements (méthode de BERNADELLI) ;

- Estimation de la fécondité à partir des résultats d'un recensement sur les

"propres" enfants (méthode de LEE JAY CHO) ;

- Estimation de la fécondité à partir de la descendance des femmes à des

recensements successifs (méthode DE C. ARRETX) ;

- Analyse de l'évolution de la descendance des femmes à partir de 50 ans

(méthode de DAS GUPTA) ;

- Analyse des histoires de maternité ;

- Ajustement de la descendance des femmes par cohorte de mariage (omission

préférentielle des filles, mortalité infantile).

B - NUPTIALITE ET FECONDITE

- Modèle de répartition des premiers mariages ;

- Modèles de fécondité.

C - MODELES DE MORTALITE

- Lois de GOMPERTZ et de MAKEHAM ;

- Tables-types de mortalité de GABRIEL et RONEN ;

- Analyse factorielle de la mortalité ;

- Modèles de mortalité fondés sur la transformation logit :

- modèle à 2 paramètres (BRASS)

- modèle à 4 paramètres (ZABA).

- 106 -

D - METHODES D'ESTIMATION DE LA MORTALITE

- Estimation de la mortalité, aux jeunes âges à partir de la survie parmi la

descendance des femmes (méthodes de SULLIVAN et TRUSSEL) ;

- Estimation de la mortalité à partir de la survie des parents (méthode de BRASS

et HILL) ;

- Utilisation de la répartition par âge des décès pour les ajustements :

- méthode de BOURGEOIS-PICHAT

- méthode de BRASS

- méthode de PRESTON

- méthode de COURBAGE et FARGUES.

E - MODELÉS DE POPULATION

- Age moyen des mères à la naissance de leurs enfants et intervalles entre

générations.

Comme le souligne l'auteur dans l'introduction de l'ouvrage, ces différents

chapitres sont de nature très variable, et cela de divers points de vue : ancienneté de la

méthode, situation par rapport à des méthodes déjà connues, utilisation des modèles ; car

il s'agit de "mélanges" et non d'un manuel solidement et logiquement structuré autour

d'un fil conducteur.

Mais telle quelle, cette "contribution" présente un intérêt évident pour les

démographes francophones ayant à analyser des données .imparfaites, surtout que les

différents chapitres sont émaillés d'exemples.

Certes, on a souvent mis l'accent sur le retard pris par les francophones en la

matière, mais il ne faut pas faire preuve d'un pessimisme excessif. Si retard il y a, il se

situe "au sommet", mais il n'est pas certain que la "base" anglophone soit mieux

familiariée avec ces problèmes.

En effet, en la matière, le nombre de spécialistes vraiment au fait de ces

méthodes, de leur utilisation efficace et de leurs limitations reste restreint et leurs

interventions restent dans l'ensemble assez ponctuelles.

- 107 -

Avec l'auteur, nous insisterons sur le sens critique dont doit faire preuve

l'utilisateur de telles méthodes : en effet, dans ce domaine, la prudence est de rigueur, et

l'analyse se doit de procéder à une étude approfondie, et en particulier à de nombreux

recoupements en comparant les résultats fournis par diverses méthodes, avant de

formuler ses conclusions. Ceci implique une collaboration entre les responsables des

différents pays concernés de façon à multiplier les expériences, comparer et critiquer

leurs résultats, seul moyen de porter un jugement objectif permettant de rentabiliser un

effort de recherche considérable, mais souvent trop éloigné des réalités terre-à-terre.