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Mémoire de Maîtrise en médecine No 3389 Métacognition et symptômes dans le trouble de la personnalité borderline Étudiante Sarah Salvador Tuteur Prof. Jean-Nicolas Despland Dpt de Psychiatrie, CHUV Co-tuteur Ueli Kramer, PhD, PD Dpt de Psychiatrie, CHUV Expert Yves de Roten, PhD, PD MER Dpt de psychiatrie, CHUV Remerciements Pauline Maillard Dpt de psychiatrie, CHUV Lausanne, 07.11.2016 1

Métacognition et symptômes dans le trouble de la

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Page 1: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Mémoire de Maîtrise en médecine No 3389

Métacognition et symptômes dans le trouble de la personnalité borderline

Étudiante Sarah Salvador

Tuteur Prof. Jean-Nicolas Despland Dpt de Psychiatrie, CHUV

Co-tuteur Ueli Kramer, PhD, PD

Dpt de Psychiatrie, CHUV

Expert Yves de Roten, PhD, PD MER

Dpt de psychiatrie, CHUV

Remerciements Pauline Maillard

Dpt de psychiatrie, CHUV

Lausanne, 07.11.2016 �1

Page 2: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Table des matières

Abstract 3 ...................................................................................................................................

Introduction 4 ............................................................................................................................

Mentalisation 4 .......................................................................................................................

Déficit de mentalisation et développement du trouble de la personnalité borderline 6 ..........

Mécanismes de défense et mentalisation 8 .............................................................................

Atteintes spécifiques des capacités métacognitives dans le trouble de la personnalité

borderline 10 ...........................................................................................................................

Traitements ciblés pour le trouble de la personnalité borderline 10 .......................................

Méthode 11 ................................................................................................................................

Sujets 11 ..................................................................................................................................

Traitement 12 ..........................................................................................................................

Instruments 12 .........................................................................................................................

Procédure 14 ...........................................................................................................................

Résultats 15 ................................................................................................................................

Discussion 16 ..............................................................................................................................

Conclusion 19 .............................................................................................................................

Références 21.............................................................................................................................

�2

Page 3: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Abstract

Le trouble de la personnalité borderline est un grave trouble psychique qui se caractérise par une

grande impulsivité, une instabilité des relations interpersonnelles, des émotions et de l'image de soi,

ainsi que la présence de mécanismes de défense typiques. Il est fréquemment associé à d'autres

troubles des axes I et/ou II et présente un taux de mortalité élevé. Comme pour les autres troubles

de la personnalité, les personnes souffrant du trouble borderline éprouvent des difficultés à réguler

leurs émotions et interagir avec les autres. Ceci est en partie expliqué par une capacité diminuée à

prendre conscience de soi, identifier l'état cognitivo-émotionnel des autres et utiliser ces

connaissances pour résoudre des problèmes personnels. Ces compétences sont regroupées sous le

terme de métacognition et sont nécessaires à l'adaptation sociale. Il semble intéressant de se pencher

sur le lien entre le niveau de métacognition et les symptômes afin d'étudier l'utilité des thérapies

ciblées sur l'amélioration de la métacognition.

Cette étude a pour objectif de déterminer par une approche quantitative la corrélation entre le

niveau de métacognition et le niveau de symptômes en testant l'hypothèse suivante : le niveau de

métacognition est négativement corrélé au niveau de symptômes. Autrement dit, plus la capacité de

métacognition est présente, moins le patient présente de symptômes. L'étude porte sur 37 patients

atteints du trouble de la personnalité borderline dont les premières et avant-dernières séances de

thérapie ont été codées par MAS (Metacognitive Assessment Scale). Tous les patients ont un score

sur OQ-45 (Outcome Questionnaire-45). Des analyses de corrélation et régression ont été utilisées

pour tester l'hypothèse opérationnelle.

Les résultats ont montré une relation inverse significative entre le score de MAS total et le score de

relations interpersonnelles de l’OQ-45 ainsi qu’entre le score de Mastery de la MAS et le score de

relations interpersonnelles. Cela suggère qu'en général un patient avec une plus grande capacité

métacognitive présente moins de symptômes. On peut donc se demander si le trouble de la

personnalité borderline est la conséquence d'une faible métacognition dont l'amélioration pourrait

mener à une diminution des symptômes, voire une guérison de cette maladie. Ainsi cette étude

s'inscrit dans une démarche globale cherchant à améliorer les thérapies à disposition pour le trouble

de la personnalité borderline.

�3

Page 4: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Introduction

Mentalisation

Les interactions sociales sont le noyau de la vie en société. Sans elles, difficile de trouver un

équilibre dans un monde où nous sommes en contact avec les autres en permanence. Ces

interactions sont possibles grâce à notre capacité à comprendre les autres et à nous définir en tant

qu’individu distinct, ces capacités étant réunies sous le terme de mentalisation [1]. Selon Peter

Fonagy, psychanalyste anglais, la mentalisation est le processus conscient ou inconscient permettant

de se représenter les états mentaux affectifs et cognitifs de soi-même et des autres [2]. On distingue

dans cette définition plusieurs dimensions: la façon dont l’information est traitée (consciente/

inconsciente), la nature de l’information traitée (affective/cognitive), et le sujet concerné (soi-

même/les autres).

La mentalisation consciente définit une réflexion intentionnelle sur un état mental. Elle est

typiquement rencontrée en thérapie lors de la verbalisation de nos pensées. Le processus de

mentalisation inconscient se fait en revanche de manière automatique et se rencontre par exemple

lors d’une conversation lorsque quelqu’un sait que c’est à lui de parler sans avoir à y réfléchir. Ces

deux modes de mentalisation sont par ailleurs traités dans des zones distinctes du cerveau, la partie

consciente de la mentalisation étant régie par des parties du cerveau phylogénétiquement plus

récentes que la partie inconsciente qui implique entre autres l’amygdale [2].

Les états mentaux affectifs concernent tout ce qui touche aux émotions. Les états mentaux cognitifs

comprennent quant à eux les pensées, les croyances, les besoins, les désirs, les intentions, etc. Ces

deux pôles de mentalisation sont également gouvernés par différentes zones du cerveau [3].

Les aspects de la mentalisation concernant soi-même ou les autres sont étroitement liés,

contrairement aux deux autres dimensions. En effet, la capacité à réfléchir sur ses propres états

mentaux et ceux des autres semble non seulement emprunter des voies neuronales communes

[4,5,6] mais se développe également de manière interdépendante [7].

Enfin, une quatrième dimension qui n’apparaît pas dans la définition donnée précédemment peut

être identifiée. Il s’agit de la capacité à déduire les états mentaux sur la base d’informations externes

visibles comme les expressions faciales ou sur la base d’informations internes telles que les

pensées. Ces deux modes d’analyse sont, comme les deux premiers, distinguables au niveau

neuronal [5].

�4

Page 5: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Ainsi, la mentalisation est un concept dont l’aspect multidimensionnel est largement appuyé par les

neurosciences [8]. Néanmoins, cette vision d’une mentalisation multidimensionnelle n’est pas

toujours mise en avant. Ainsi, les échelles développées afin d’évaluer la mentalisation telles que The

Reflective Functioning Scale [9,10], The Reflective Function Questionnaire [11] ou encore The

Assimilation of Problematic Experience Scale [12], sont basées sur une vision unidimensionnelle de

la mentalisation. Ce type d’échelles rend possible une comparaison quantitative entre des patients

différents, sans permettre toutefois la distinction entre les possibles dimensions composant la

mentalisation.

Il convient maintenant de définir un concept proche de celui de mentalisation et sur lequel est basée

cette étude, à savoir la métacognition. La métacognition est une gamme de compétences permettant

d’identifier et de réfléchir à propos de ses propres états mentaux ou ceux des autres et d’utiliser ce

savoir afin de développer des stratégies d’adaptation face à des situations problématiques [13,14].

Ce dernier élément concernant les stratégies d’adaptation est défini sous le terme de Mastery et est

une notion non comprise dans le concept de mentalisation de Fonagy. La métacognition possède

également une structure modulaire avec une différenciation entre affectif/cognitif et soi/autrui

comme pour la mentalisation. Cependant, cette sous-catégorisation de la métacognition comporte

encore d’autres capacités métacognitives semi-indépendantes [15,16] telles que la différenciation,

capacité à garder une distance critique face à ses propres pensées et à distinguer la réalité des

pensées; l’intégration, capacité à décrire de manière cohérente ses propres états mentaux cognitifs et

affectifs ainsi que leur évolution dans le temps et capacité à décrire des pensées ou états mentaux

multiples, voire contradictoires, de manière intégrée et cohérente; la décentration, capacité à

imaginer les états mentaux des autres indépendamment de sa propre perspective. Afin d’évaluer le

niveau de métacognition, Semerari et coll. ont d’abord développé The Metacognitive Assessment

Scale (MAS) [14,17], échelle utilisée dans cette étude, puis The Metacognitive Assessment Interview

(MAI) [18]. Toutes deux sont des échelles utilisées dans le cadre d’entretiens psychothérapeutiques

retranscrits et se basent sur le concept de métacognition comme étant une entité faite de plusieurs

sous-fonctions relativement indépendantes et pouvant être sélectivement endommagées

[14,16,15,19]. Ces échelles basées sur une vision multidimensionnelle de la métacognition ont

l’avantage de permettre une distinction qualitative entre différents patients atteints de manières

distinctes dans leurs capacités de métacognition.

A noter que les termes de mentalisation et de métacognition englobent ou partagent des aspects de

plusieurs autres concepts tels que la théorie de l’esprit, l’empathie, la pleine conscience, la

cognition sociale et bien d’autres encore. Ceux-ci ne seront pas approfondis ici, d’autres articles �5

Page 6: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

ayant déjà traité de manière claire et plus complète le sujet [20]. Dans le cadre de ce travail, les

termes mentalisation et métacognition seront utilisés en respectant la terminologie adoptée par les

auteurs cités tout au long du texte. Notons que le terme de capacités métacognitives fera référence

aussi bien à la mentalisation qu’à la métacognition.

Déficit de mentalisation et développement du trouble de la personnalité borderline

La métacognition est formée de différentes capacités qui peuvent être altérées de façon plus ou

moins indépendante. Par exemple quelqu’un peut réussir à identifier ses propres états mentaux mais

difficilement ceux des autres. Selon la fonction métacognitive diminuée chez un individu, celui-ci

aura des difficultés d’adaptation particulières et sera vulnérable à différentes pathologies

psychiatriques [14,16]. Le trouble de la personnalité borderline se caractérise principalement par

une instabilité des relations interpersonnelles, des émotions et de l'image de soi, une forte

impulsivité, ainsi que la présence de mécanismes de défense typiques. Une altération de certaines

capacités métacognitives est aujourd’hui considérée comme un facteur jouant un rôle central dans le

développement de ce trouble de la personnalité [20,13].

Fonagy et Luyten [2] distinguent plusieurs facteurs responsables d’une diminution de la capacité de

mentalisation. Tout d’abord, le développement d’une capacité de mentalisation fonctionnelle semble

étroitement lié à la nature du système d’attachement développé pendant l’enfance [21,22]. Selon

Fonagy [23], c’est « the primary caretaker’s marked and contingent mirroring of a child’s internal

states within a secure attachment » qui permettrait le bon développement du soi et de la

mentalisation chez l’enfant [20]. Le parent ou la personne s’occupant de l’enfant devrait renvoyer à

ce dernier une expression congruente avec l’état émotionnel de l’enfant afin que celui-ci puisse

identifier correctement ses propres états mentaux. Par exemple, face à son enfant qui pleure,

afficher un visage triste serait une manière appropriée de répondre du point de vue des expressions

faciales. Mais cette expression de l’adulte devrait également être exagérée pour que l’enfant

l’identifie bel et bien comme son reflet et non comme l’état mental propre de l’adulte.

Un mauvais mirroring des parents peut être dû à de la maltraitance ou négligence de leur part, une

incapacité des parents à identifier l’état mental de leur enfant, eux-mêmes ayant une capacité de

mentalisation diminuée, ou encore la conséquence d’un trouble neurocognitif de l’enfant, rendant

ses états mentaux difficilement interprétables. En ce qui concerne le plan neurocognitif, on relèvera

que de nombreuses études [24] ont mis en évidence des déficits cognitifs chez les personnes

atteintes d’un trouble de la personnalité borderline. Ces troubles neurocognitifs, d’origine génétique

[25] ou acquis, regrouperaient principalement un déficit de vitesse de traitement, d’encodage et de �6

Page 7: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

mémoire des informations visuo-spatiales, et/ou un problème général d’allocation des ressources

neuronales ayant des conséquences sur plusieurs capacités cognitives dont les fonctions exécutives.

Dans le cas d’un mirroring réussi, il est clair que la présence de troubles cognitifs chez l’enfant

pourrait également empêcher ce dernier d’intégrer correctement les informations appropriées

renvoyées par le parent. Que ce soit un mauvais mirroring ou la mauvaise intégration d’un

mirroring adapté, les conséquences resteront les mêmes, à savoir que l’enfant, ne pouvant pas

identifier correctement ses propres états mentaux, ne parviendra pas à les réguler. Dans un contexte

d’attachement sécure, les multiples expériences vécues avec les adultes prenant soin de l’enfant sont

encodées de façon intégrée et forment un modèle sur lequel les futures réponses aux interactions

sociales pourront se baser [26]. En revanche, si l’enfant ne trouve pas de réponse adaptée à ses

besoins, il risque de développer un système d’attachement insécure et désorganisé qui ne lui

permettra pas par la suite d’interagir de façon adaptée avec les autres.

Deux types de problèmes peuvent surgir chez l’enfant en cas de mirroring inadapté [27]. En cas

d’un mirroring incongruent, l’enfant risque de développer une représentation inexacte de ses états

internes pouvant mener à des difficultés à construire une image cohérente de soi. En cas d’un

mirroring insuffisamment exagéré, l’enfant peut interpréter la réaction du parent comme étant l’état

mental réel de l’adulte et non un reflet du sien. Cette expérience pouvant être vécue comme une

contagion de l’autre par ses propres états mentaux peut fortement déstabiliser l’enfant et contribuer

à la difficulté à percevoir les limites entre soi-même et les autres, difficulté retrouvée dans le trouble

de la personnalité borderline [28,29]. Ainsi, cette instabilité de l’image de soi combinée à un

système d’attachement insécure aurait comme conséquence persistante à l’âge adulte une

hypersensibilité lors de relations interpersonnelles menant à des situations émotionnellement

envahissantes. Dans ces situations de stress émotionnel, il se produirait alors un basculement de la

mentalisation contrôlée du système cortical vers une mentalisation automatique du système sous-

cortical [5,30]. Cette mentalisation automatique mènerait à des réactions comportementales plus

instinctives et donc moins adaptées à des situations interpersonnelles complexes.

Selon le modèle de Fonagy, la capacité de mentalisation diminuée dans le trouble de la personne

borderline résulterait donc à la fois de facteurs distaux, soit des troubles neurocognitifs

constitutionnels ou acquis et le développement du système de soin durant la petite enfance, et de

facteurs proximaux, à savoir les situations interpersonnelles émotionnellement fortes activant le

système d’attachement.

Ajoutons que selon Fonagy, le manque de mentalisation contrôlée laisserait place à 3 modes de

prémentalisation: l’ « équivalence psychique » où les pensées de l’individu sont considérées comme �7

Page 8: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

étant la réalité externe et aucune vision alternative n’est envisageable, le « mode semblant » où les

actions de l’individu n’ont pas de conséquence dans la réalité et restent dans l’imaginaire, et le

« mode téléologique » où les états mentaux ne sont significatifs qu’à travers l’action. Lors d’un

développement normal, l’enfant intègre l’ « équivalence psychique » et le « mode semblant » et

arrive à une vision cohérente où son monde interne et le monde externe sont liés tout en restant

distincts l’un de l’autre [31,32]. Chez un enfant dont la mentalisation n’est pas parvenue à se

développer correctement, ces modes de prémentalisation sont difficilement intégrables et se

traduisent par les traits caractéristiques du trouble de la personnalité borderline ainsi que les

mécanismes de défense typiquement associés [33].

Il semble important de préciser que, si le modèle de compréhension exposé dans ce chapitre relie le

système d’attachement et la mentalisation de manière causale [34,35], ce lien causal n’est pas

toujours établi pour ce qui est de la métacognition. En effet, une étude [36] a identifié la

métacognition comme un médiateur de la relation entre les perturbations du système d’attachement

et la sévérité du trouble de la personnalité borderline. Un système d’attachement perturbé et des

capacités de métacognition altérées seraient alors vus comme étant deux facteurs indépendants qui,

lorsqu’ils coexistent, permettraient le développement du trouble de la personnalité borderline. Ainsi,

certains [36,37,38] opposent parfois à la mentalisation reliée causalement au système d’attachement

une métacognition indépendante du système d’attachement en mettant en avant le fait que les

déficits de métacognitions pourraient survenir dans différents contextes autres qu’un système

d’attachement perturbé [39]. Néanmoins, un déficit de mentalisation pourrait également surgir dans

des contextes variés liés à plusieurs types d’interactions sociales autres que le système

d’attachement telles que la compétition et la coopération [40,22]. Des études à large échelle

mesurant les concepts de mentalisation et métacognition de manière standardisée permettraient

peut-être une meilleure compréhension de leur interaction avec le système d’attachement ainsi que

l’établissement d’un modèle de compréhension plus largement partagé.

Mécanismes de défense et mentalisation

La dissociation, caractéristique centrale du trouble de la personnalité borderline [41,42,43], peut

être définie comme une perturbation de l’intégration normale de la mémoire, de l’identité et des

perceptions. Elle a longtemps été considérée comme un mécanisme de défense face à un trauma

[44]. Cependant, les manifestations cliniques de la dissociation ne sont peut-être que le reflet d’un

déficit de mentalisation ne permettant pas l’intégration cohérente des informations. Cette nouvelle

interprétation de la dissociation pourrait concerner d’autres mécanismes de défense centraux dans

�8

Page 9: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

ce trouble de la personnalité tels que le déni, le clivage et la projection [24]. Ainsi, le déni, qui peut

être défini comme une apparente absence de conscience de plusieurs aspects de soi, pourrait refléter

un déficit de capacité d’identification de ses états mentaux. De même, le clivage peut être interprété

comme la manifestation d’un manque de la capacité métacognitive d’intégration. Il se définit

comme une incapacité à avoir des pensées contradictoires à propos des autres, à comprendre qu’ils

peuvent avoir des motivations concurrentes et que les états mentaux peuvent évoluer dans le temps.

Les autres sont ainsi vus comme étant entièrement bons ou mauvais, cette vision étant basée sur les

expériences interpersonnelles immédiates et non sur l’intégration de ces expériences sur le long

terme. Enfin, la projection est l’attribution de ses propres émotions et pensées à quelqu’un d’autre.

Ceci reflète à la fois un manque de conscience de ses propres états mentaux et une confusion quant

à l’auteur de ces états mentaux due à un manque d’intégration de ces derniers dans sa propre

histoire personnelle. La projection contient donc des éléments du déni, manque d’identification des

états mentaux, et du clivage, manque d’intégration des informations. Le trouble de la personnalité

borderline serait donc premièrement une maladie neurodéveloppementale dont les manifestations

anciennement interprétées comme mécanismes de défense pourraient être comprises en tant que

manifestations du traitement inadéquat de l’information interpersonnelle, soit un processus

neurocognitif pathologique.

Le déficit de mentalisation a lui-même été interprété comme étant un mécanisme de défense face à

des traumatismes [45]. On trouve à l’origine de cette interprétation le constat d’un haut pourcentage

de trauma chez les personnes atteintes du trouble de la personnalité borderline [46]. Il pourrait être

ainsi plus supportable de vivre des événements douloureux en fermant l’accès à ses états mentaux

ou aux états mentaux malveillants des bourreaux. Une autre interprétation pourrait être que les

traumas ont pour conséquence le retrait social, ce qui empêche le bon développement de la

mentalisation qui nécessite les interactions sociales, ou encore favorisent des états

émotionnellement instables qui perturbent les capacités de mentalisation [45]. Enfin, une troisième

hypothèse est de considérer la mentalisation comme outil permettant la résilience face à un trauma,

le développement du trouble de la personnalité borderline étant la conséquence non du trauma en

soi mais du manque de résilience face à celui-ci, ce manque de résilience découlant lui-même d’un

manque de mentalisation antérieur au trauma [45].

�9

Page 10: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Atteintes spécifiques des capacités métacognitives dans le trouble de la personnalité

borderline

Les individus atteints du trouble de la personnalité borderline ne sont pas diminués de manière

globale dans leur capacité de mentalisation, mais plus ou moins dans certains aspects de celle-ci. En

effet, il a été mis en évidence que les dimensions conscientes, cognitives et internes étaient

spécifiquement atteintes dans ce trouble de la personnalité [2]. De plus, du point de vue de la

métacognition, les capacités d’intégration et de différenciation semblent être particulièrement

altérées [15,47] et associées à l’instabilité caractéristique de ce trouble [48]. Une altération dans la

capacité de différenciation, qui se réfère à la capacité à reconnaître la nature représentationnelle et

subjective des états mentaux et à les distinguer de la réalité, est à mettre en lien avec l’équivalence

psychique décrite par Bateman et Fonagy [1], où les pensées de l’individu sont considérées comme

étant la réalité externe et aucune vision alternative n’est envisageable. Ce manque de différenciation

est probablement en cause dans la tendance chez les individus touchés par ce trouble à

surinterpréter les états mentaux des autres, phénomène connu sous le nom d’hypermentalisation

[49,50,51]. Il est plausible que le déficit de différenciation joue également un rôle dans l’impulsivité

caractéristique de ce trouble [47]. De plus, une corrélation entre un déficit d’intégration et un déficit

en Mastery a été mise en évidence [15]. Cette corrélation est compatible avec le modèle de Fonagy

selon lequel la principale cause des difficultés d’adaptation des personnes atteintes du trouble de la

personnalité borderline semble être une perturbation des capacités d’intégration. Enfin, les patients

atteints du trouble de la personnalité borderline ainsi que d’autres troubles de la personnalité

semblent rencontrer des difficultés de décentration, capacité à émettre des hypothèses sur les états

mentaux cognitifs et affectifs des autres de manière indépendante de leur propre perspective et de

leur relation avec les autres [15,19].

Traitements ciblés pour le trouble de la personnalité borderline

Le trouble de la personnalité borderline est une maladie psychiatrique sévère avec un taux de

mortalité par suicide 50 fois supérieur à celui de la population générale [52]. Touchant en moyenne

1% de la population [53] et nécessitant en général un traitement sur le long terme [54], ce trouble

engendre des coûts de santé considérables [55]. Dans un souci d’économicité et d’augmentation de

l’efficacité des thérapies, le développement de traitements ciblés sur les besoins spécifiques du

trouble de la personnalité borderline semble pertinent. Il existe actuellement deux traitements

thérapeutiques spécifiques au trouble de la personnalité borderline et empiriquement validés comme

�10

Page 11: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

étant plus efficaces que les traitements non spécifiques: la psychothérapie focalisée sur le transfert

[56] et le traitement basé sur la mentalisation [1]. Le traitement basé sur la mentalisation a pour but

de développer l’intérêt du patient pour les états mentaux ainsi que sa capacité à identifier les

émotions et pensées de soi-même et des autres. Cette thérapie a été mise au point par Bateman et

Fonagy en s’appuyant sur le concept de mentalisation proposé par Fonagy et coll. [23]. En se basant

cette fois sur le concept de métacognition, Dimaggio et coll. ont également développé une thérapie

visant à améliorer la capacité à réfléchir sur les états mentaux affectifs et cognitifs de soi-même et

des autres. Ce traitement, la thérapie métacognitive interpersonnelle [57], n’est en revanche pas

spécifique au trouble de la personnalité borderline mais s’adresse à tous les troubles de la

personnalité.

Ces thérapies centrées sur la mentalisation ou la métacognition ont montré une amélioration des

capacités métacognitives et une diminution des symptômes du trouble de la personnalité borderline

[58,59,60,61,57]. Néanmoins, il n’existe à ce jour que très peu d’études analysant le lien entre le

niveau de mentalisation [62] ou de métacognition [47,48] et les symptômes dans le trouble de la

personnalité borderline. Cette étude tente de renforcer les données scientifiques soutenant le

concept de métacognition comme étant une cible centrale dans le traitement du trouble de la

personnalité borderline.

Méthode

Sujets

Les patients retenus pour cette étude ont été sélectionnés parmi les 60 completers d’une plus grande

étude [63] dont 3 ont été éliminés à cause de problèmes techniques d’enregistrement des entretiens

et 20 ont été éliminés aléatoirement pour une question de faisabilité. L’étude porte donc sur 37

patients adultes (âge moyen de 33,78 avec déviation standard de 9,097) atteints du trouble de la

personnalité borderline dont 26 (70,3%) femmes et 11 (29,7%) hommes. En moyenne, ces patients

ont suivi une formation de 2,5 ans de plus après l’école obligatoire. Un abus d’alcool ou d’autres

substances était présent respectivement chez 10 (27%) et 9 (24.3%) patients. Afin d’augmenter la

validité externe de l’étude, un minimum de critères d’exclusion a été retenu, à savoir la présence

d’un trouble psychotique, un retard mental ou un abus de substances au premier plan.

�11

Page 12: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Traitement

Les patients ont suivi une thérapie basée sur le modèle du Good Psychiatric Management (GPM)

selon J. Gunderson [64]. Ce modèle est basé principalement sur les points suivants: établissement

des diagnostics psychiatriques et communication de l’information au patient; établissement de

l’anamnèse psychiatrique; identification des principaux problèmes à traiter et établissement d’un

plan de traitement; définition d’objectifs à court terme et renforcement général de la motivation;

identification et prise en charge des problèmes interférant avec le traitement, et formulation

d’interprétations relationnelles des principaux thèmes conflictuels [63]. Certains patients ont

bénéficié en plus d’une relation thérapeutique centrée sur les motifs [65]. Le traitement fut réparti

sur 10 séances à raison d’une séance par semaine.

Instruments

OQ-45

L’Outcome Questionnaire-45 [66,67] (voir annexe 1) est un auto-questionnaire visant à évaluer les

résultats obtenus à travers la psychothérapie en estimant le niveau de détresse du patient. Il se

compose de 45 items dont 25 mesurent des symptômes d’anxiété et de dépression (Symptom

Distress), 11 sont liés à la détresse dans les relations interpersonnelles avec les proches

(Interpersonal Relations) et 9 concernent le fonctionnement dans les rôles sociaux tels que l’école,

le travail et les loisirs (Social Role). Ces items sont notés sur une échelle de type Likert allant de 0

(jamais) à 4 (toujours) et donnent un score final composé de la somme des scores des 3 sous-

échelles mentionnées ci-dessus.

MAS

La Metacognition Assessment Scale [14,17] (voir annexe 2) est une échelle évaluant le succès ou

l’échec de l’utilisation des capacités métacognitives. Elle se compose de 20 items pouvant être

subdivisés en 3 sous-échelles:

Understanding One’s Own Mind (UM):

- Basic Requirements (RB): la personne reconnaît posséder des fonctions mentales et se représente

en tant qu’individu pensant et ressentant de manière indépendante.

- Cognitive Identification (UM1): capacité à identifier ses propres opérations cognitives telles que

penser, se rappeler, imaginer, se demander, croire, prévoir, vouloir, etc.

- Emotional Identification (UM2): capacité à identifier ses propres états émotionnels

�12

Page 13: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

- Relating Variables (UM3): capacité à établir des liens et identifier les causes et conséquences de

ses propres pensées et états émotionnels

- Differentiation: capacité à garder une distance critique quant à ses propres pensées et à

comprendre qu’elles ne peuvent pas influencer la réalité (UM4) / capacité à différencier les rêves,

les pensées et la réalité (UM5)

- Integration: capacité à décrire de manière cohérente ses propres états mentaux cognitifs et

affectifs ainsi que leur évolution dans le temps (UM6) / capacité à décrire des pensées ou états

mentaux multiples, voire contradictoires, de manière intégrée et cohérente (UM7)

Understanding Other’s Mind (UOM):

- Cognitive Identification (UOM1): capacité à identifier les opérations cognitives des autres telles

que penser, se rappeler, imaginer, se demander, croire, prévoir, vouloir, etc.

- Emotional Identification (UOM2): capacité à identifier les états émotionnels des autres

- Relating Variables (UOM3): capacité à faire des liens et identifier les causes et conséquences des

pensées et états émotionnels des autres

- Decentration (D): capacité à émettre des hypothèses sur les états mentaux cognitifs et affectifs

des autres de manière indépendante de sa propre perspective et de sa relation avec les autres

Mastery (M):

- Basic requirement (M1): la personne décrit ses états mentaux en tant que problèmes à résoudre et

adopte une position active face à ceux-ci.

- First Level Strategies: tentative d’agir sur l’état problématique en modifiant l’état corporel (M2) /

tentative d’agir sur l’état problématique en évitant physiquement une situation ou en faisant

appel au soutien relationnel (M3)

- Second Level Strategies: tentative d’agir sur l’état problématique en s’imposant ou inhibant un

comportement (M4) / tentative d’agir sur l’état problématique en se distrayant du problème (M5)

- Third Level Strategies: tentative d’agir sur l’état problématique en utilisant ses connaissances sur

son propre fonctionnement mental (M6) / tentative d’agir sur l’état problématique interpersonnel

en utilisant ses connaissances sur le fonctionnement mental des autres (M7) / tentative d’agir sur

l’état problématique en acceptant ses propres limites en terme de capacité à changer ses états

mentaux et ceux des autres (M8)

Les items Cognitive Identification, Emotional Identification et Relating Variables sont regroupés

sous le terme de Monitoring.

Dans les entretiens retranscrits, chaque changement d’intervenant est numéroté puis le texte est

divisé en trois parts égales codées individuellement. Il y a principalement deux raisons à cela. �13

Page 14: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Premièrement, un texte trop long risquerait de diminuer la qualité du codage pour lequel une vue

d’ensemble est nécessaire. Secondairement, les capacités métacognitives fluctuant selon les thèmes

abordés, la séparation de l’entretien en plusieurs parties permet d’identifier les contenus liés à des

difficultés métacognitives. Il est recommandé de lire dans un premier temps l’entretien en entier

afin de se faire une idée générale des capacités du patient, puis de coder par partie, avec une lecture

pour chaque sous-échelle. Les items sont notés sur une échelle de type Likert à 6 points. Si un item

n’est pas abordé, un score Not-Engaged (N.E.) est attribué à la partie concernée. Si un item est

présent, le codage peut aller de 1 (Scarce) à 5 (Sophisticated) selon la fréquence, la spontanéité, la

complexité et l’adéquation de son usage.

Procédure

Toutes les sessions ont été enregistrées puis chaque première et avant-dernière séance retranscrite et

codée selon l’OQ-45 dans le cadre de la grande étude. Pour cette étude, ces mêmes 74 séances ont

également été codées à l’aveugle par la MAS de manière aléatoirement répartie entre 3 codeurs, à

savoir l’auteur de l’échelle MAS, une psychologue en formation post-graduée et moi-même

étudiante en master de médecine. Lors de codages trop divergents, ceux-ci étaient réévalués en

groupe afin de trouver un accord.

Figure 1. Description de l’échantillon (N=37)

Minimum Maximum Mean Std. deviation

Age 20 55 33.73 8.974

No_sympt_BPD 5 9 7.08 1.516

OQ45_1 30 150 98.49 26.409

SD_1 15 95 60.32 17.051

IR_1 4 39 23.49 7.526

SR_1 4 27 14.68 6.519

TotalMAS_1 1.03 3.03 1.6494 0.46834

MeanUM_1 1.07 3.20 1.8100 0.54331

MeanUOM_1 1.00 2.75 1.4054 0.42415

MeanM_1 1.00 3.00 1.5918 0.50203

�14

Page 15: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Résultats

Une analyse de corrélation a été effectuée avec OQ45_1, SD_1, IR_1, SR_1, TotalMAS_1,

MeanUM_1, MeanUOM_1 et MeanM_1 avec un seuil à p= .05

Figure 2. Analyse de corrélation *Corrélation significative au seuil .05 (2-tailed)

Il ressort de cette analyse une relation inverse significative entre le score de MAS total

(TotalMAS_1) et le score de relations interpersonnelles (IR_1) (p= .029) ainsi qu’entre le score de

Mastery (MeanM_1) et les relations interpersonnelles (IR_1) (p= .034). Cette relation inverse se

retrouve également entre les autres scores de MAS et OQ-45 de manière cependant non

significative bien que parfois limite (MeanM_1 et SD_1: p= .050, MeanM_1 et OQ45_1: p= .052,

MeanUOM_1 et IR_1: p= .053, MeanUM_1 et IR_1: p= .056).

Une analyse de régression a ensuite été effectuée avec le score de MAS total (TotalMAS_1) comme

variable indépendante et le score de relations interpersonnelles (IR_1) comme variable dépendante.

Figure 3. Analyse de régression prédisant les problèmes interpersonnels

OQ45_1 SD_1 IR_1 SR_1

TotalMAS_1 Pearson Correlation Sig. (2-tailed)

-.301 .070

-.267 .110

-.359 .029*

-.106 .532

MeanUM_1 Pearson Correlation Sig. (2-tailed)

-.249 .137

-.196 .245

-.317 .056

-.130 .444

MeanUOM_1 Pearson Correlation Sig. (2-tailed)

-.296 .076

-.275 .100

-.321 .053

-.109 .522

MeanM_1 Pearson Correlation Sig. (2-tailed)

-.322 .052

-.324 .050

-.349 .034*

-.055 .747

Unstandardized Coefficients

Standardized Coefficients

B Std. Error Beta t Sig. R²

TotalMAS_1 -5.762 2.536 -0.359 -2.272 0.029 0.129

�15

Page 16: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Selon les résultats, la variation du score de MAS total explique environ 13% (R²= .129) de la

variation du score de relations interpersonnelles.

Discussion

Des capacités de mentalisation réduites semblent jouer un rôle important dans un grand nombre de

psychopathologies [68,48]. Cela concerne entre autres le trouble de la personnalité borderline pour

lequel plusieurs études ont mis en évidence un lien avec la mentalisation tant chez les adolescents

[69,49] que chez l’adulte [70]. Durant ces vingt dernières années, il s’est développé un intérêt

croissant pour les thérapies visant à améliorer les fonctions de mentalisation [71] ou de

métacognition [72]. Cependant, le lien théorique entre mentalisation et symptômes du trouble de la

personnalité borderline avancé par Fonagy et Luyten [2] n’a en réalité que très peu été validé

empiriquement. Cette étude a donc eu pour objectif de déterminer la corrélation entre le niveau de

métacognition mesuré par MAS et le niveau de symptômes sur OQ-45 chez des patients ayant un

trouble de la personnalité borderline.

Premièrement, les analyses de corrélation ont montré une relation inverse significative entre le score

de MAS total et le score de relations interpersonnelles de l’OQ-45. Ceci suppose qu’un individu

ayant des difficultés à réfléchir sur ses propres états mentaux et ceux des autres aura tendance à

rencontrer plus de problèmes dans ses interactions avec les autres. La nature de notre étude ne

permet cependant pas de tirer des conclusions quant à la direction de cette association et donc

d’affirmer un lien de causalité. Quoi qu’il en soit, il y a de fortes chances que cette association soit

bidirectionnelle. En effet, plusieurs études ont mis en évidence la mentalisation ou la métacognition

comme étant un médiateur important entre les difficultés dans l’enfance ou le type d’attachement et

la symptomatologie du trouble de la personnalité borderline [22,73,36]. Ceci soutient l’idée qu’un

déficit de mentalisation rendrait un individu plus vulnérable au développement de ce trouble et

probablement aux difficultés relationnelles qui l’accompagnent. Par ailleurs, des relations

interpersonnelles perturbées seraient également susceptibles d’influencer les fonctions de

mentalisation qui semblent particulièrement atteintes dans le trouble de la personnalité borderline

dans les situations où le système d’attachement est engagé [2]. Ainsi, le fait même de parler de

relations conflictuelles en entretien pourrait momentanément diminuer les capacités métacognitives

[74]. Cette association entre MAS et les relations interpersonnelles va dans le même sens que les �16

Page 17: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

résultats obtenus dans d’autres études. L’une d’entre elles a trouvé une association entre une faible

mentalisation et des plus hauts niveaux de détresse symptomatique et interpersonnelle, de plus

faibles niveaux de fonctionnement de personnalité concernant les relations et l’identité, un

fonctionnement psychosocial plus faible ainsi que des problèmes d’estime de soi plus fréquents

[62]. Une autre étude a fait ressortir une association significative entre le niveau de métacognition

mesuré par le MAI et les problèmes interpersonnels [75]. Une revue de littérature récente a

néanmoins conclu que l’association entre la mentalisation et la sévérité des symptômes était non

concluante [10]. Ces divergences témoignent de la nécessité de continuer la recherche à ce sujet.

Deuxièmement, une analyse de régression effectuée avec le score de MAS total comme variable

indépendante et le score de relations interpersonnelles comme variable dépendante a fait ressortir un

coefficient de détermination R² de 0.129. Ainsi, 13% de la variance du score de relations

interpersonnelles est expliqué par la variation du score de MAS total. Les difficultés

interpersonnelles chez les patients atteints du trouble de la personnalité borderline semblent donc

être influencées par les capacités de métacognition mais pas de manière exclusive. Ce résultat paraît

être en accord avec d’autres études ayant identifié une réactivité émotionnelle accrue lors de

situations interpersonnelles stressantes, des comportements agressifs augmentés dans un contexte

interpersonnel ou encore un manque de coopération et de confiance envers les autres comme autres

facteurs jouant un rôle dans les difficultés interpersonnelles retrouvées dans le trouble de la

personnalité borderline [76,77].

Troisièmement, cette étude a également mis en évidence une corrélation inverse significative entre

la sous-fonction de la métacognition Mastery et les relations interpersonnelles. Cela suppose qu’un

individu ayant des difficultés à utiliser son savoir sur ses propres états mentaux et ceux des autres

afin de résoudre des problèmes, faire face au stress et s’adapter au monde qui l’entoure aura

tendance à rencontrer des difficultés relationnelles. Ce résultat va dans le même sens que plusieurs

autres études [76] qui montrent que les personnes atteintes du trouble de la personnalité borderline,

lorsqu’elles sont confrontées à des situations interpersonnelles problématiques, auraient tendance à

y répondre de manière plus passive [78,79], moins pertinente [80,81], moins efficace et moins

spécifique que les sujets sains [81]. L’amélioration des stratégies d’adaptation pourrait donc être

une cible thérapeutique intéressante pour le trouble de la personnalité borderline. Une étude récente

a d’ailleurs mis en évidence à la fois une amélioration dans l’utilisation des stratégies d’adaptation

et une diminution des symptômes sur OQ-45 chez des patients ayant bénéficié d’un entraînement

aux compétences basé sur la thérapie comportementale dialectique [82]. De plus, l’amélioration de

la capacité d’intégration de différents états mentaux chez un patient borderline a été mise en �17

Page 18: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

corrélation avec une meilleure capacité de Mastery [14] et une amélioration de fonctionnement

social [83]. Ainsi, une amélioration des capacités d’adaptation semble pouvoir être atteinte à la fois

dans des thérapies ciblant directement ces dernières et indirectement via des thérapies visant à

améliorer les capacités métacognitives de manière plus large.

Les résultats de notre étude n’ont cependant rejoint que partiellement notre hypothèse de départ. En

effet, il était attendu une corrélation claire entre le niveau de métacognition et la sous-échelle de

l’OQ-45 mesurant les symptômes d’anxiété et de dépression (Symptom Distress). De fait, une étude

[48] a trouvé une corrélation inverse significative entre le niveau de métacognition et la sévérité des

troubles de la personnalité mesurée par The Symptom Checklist-90-R [84], une échelle évaluant

entre autres des symptômes d’anxiété et de dépression. Cette absence d’association entre la

métacognition et ces symptômes dans notre étude pourrait en partie être expliquée par le faible

nombre de participants. Un autre facteur expliquant ce manque d’association pourrait être

l’utilisation d’un auto-questionnaire pour l’évaluation des symptômes chez les patients. Ainsi, il

n’est pas exclu qu’un bas niveau de métacognition, l’envie de paraître socialement plus désirable,

ou encore la présence de défenses narcissiques, processus conscients ou inconscients visant à

préserver les aspects idéalisés du soi [85], aient conduit à une sous-évaluation des symptômes. Une

possible surévaluation de ces derniers est également à prendre en compte dans le cas de patients

cherchant de manière consciente ou non à recevoir de l’attention. Par ailleurs, les patients atteints

du trouble de la personnalité borderline semblent avoir accès de manière disproportionnée aux

souvenirs négatifs et tendraient à s’évaluer de façon négative [86]. Une hétéro-évaluation de ces

mêmes symptômes aurait peut-être mené à une corrélation plus forte et plus étendue.

Il aurait été intéressant de comparer le niveau de métacognition entre la première et avant-dernière

session afin d’évaluer l’évolution des capacités métacognitives au cours d’une psychothérapie [38].

Une comparaison entre les scores de MAS des patients sous thérapie simple et ceux bénéficiant en

plus d’une relation thérapeutique centrée sur les motifs aurait également permis une meilleure

compréhension de l’utilité des diverses thérapies à disposition. Enfin, une analyse des mécanismes

de défense mise en lien avec la métacognition aurait permis d’approfondir les connaissances sur

cette relation.

Plusieurs limites dans cette étude sont toutefois à relever. Tout d’abord, le nombre limité de

participants ne permet pas de tirer des conclusions définitives sur le lien entre une faible �18

Page 19: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

métacognition et un nombre élevé de symptômes. Une étude à plus grande échelle serait nécessaire

pour confirmer nos résultats. De plus, la Metacognition Assessment Scale (MAS) évalue la

métacognition au travers d’un entretien libre. L’absence d’utilisation d’une sous-fonction

métacognitive peut donc refléter un déficit mais peut aussi simplement être une absence

d’utilisation de cette sous-fonction dans cette situation spécifique. Ainsi, dans la perspective d’une

étude à plus grande échelle, l’utilisation du Metacognitive Assessment Interview (MAI) à la place de

la MAS permettrait une investigation ciblée de la métacognition via des questions spécifiques tout

en réduisant le temps nécessaire à la cotation [87,18]. Une autre limitation à notre étude pourrait

être l’utilisation de l’auto-questionnaire OQ-45 afin d’évaluer les symptômes chez des patients qui

pourraient justement avoir des difficultés à s’évaluer correctement de par leurs faibles capacités

métacognitives [88]. Certains patients pourraient également avoir tendance à minimiser leurs

difficultés afin de paraître socialement plus désirables ou par défense narcissique. À l’inverse, des

patients pourraient surévaluer leurs difficultés afin d’obtenir de l’attention ou par biais cognitif

négatif [86]. Enfin, l’absence d’utilisation d’une fonction métacognitive ne permet pas de dire s’il

s’agit d’un réel déficit primaire de cette fonction ou si cela résulte d’un mécanisme de défense

empêchant l’accès à une fonction métacognitive intacte. Plus de recherche est nécessaire afin

d’expliquer la relation entre mécanismes de défense et métacognition.

Conclusion

Cette étude avait pour objectif de déterminer par une approche quantitative la corrélation entre le

niveau de métacognition et le niveau de symptômes dans le trouble de la personnalité borderline.

Pour ce faire, des analyses de corrélation et régression ont été utilisées sur des scores de MAS et

OQ-45 attribués à des séances retranscrites de 37 patients. Sur la base du concept de mentalisation

et de son rapport au trouble de la personnalité borderline, il était attendu que le niveau de

métacognition serait négativement corrélé au niveau de symptômes. En accord avec cette

hypothèse, les résultats ont montré une relation inverse significative entre le score de MAS total et

le score de relations interpersonnelles ainsi qu’entre le score de Mastery et les relations

interpersonnelles. Cette relation inverse s’est également retrouvée entre les autres scores de MAS et

OQ-45 de manière cependant non significative bien que parfois limite. En conclusion, cette étude

soutient le concept de mentalisation développé par Fonagy selon lequel un déficit de mentalisation

serait à l’origine de la symptomatologie du trouble de la personnalité borderline. De plus, les �19

Page 20: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

résultats encouragent l’utilisation de thérapies pour le trouble de la personnalité borderline visant à

améliorer la mentalisation, tel que le traitement basé sur la mentalisation de Bateman et Fonagy, ou

à approfondir les capacités de métacognition, telle que la Thérapie Métacognitive Interpersonnelle

pour les troubles de la personnalité de Dimaggio et coll..

Il faut cependant plus de recherche pour le développement d’outils d’évaluation de la métacognition

moins coûteux en temps, tel que le Metacognition Assessment Interview, permettant d’évaluer les

thérapies les plus appropriées pour le trouble de la personnalité borderline. La recherche

transdiagnostique est également nécessaire afin de mieux comprendre les liens entre le style

d’attachement, le style de personnalité, les mécanismes de défense, la métacognition, et les

symptômes et permettrait peut-être d’aboutir à une nouvelle nosographie des troubles

psychiatriques.

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Page 21: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

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�25

Page 26: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Annexe 1

�26

Page 27: Métacognition et symptômes dans le trouble de la

Annexe 2

MAS – R 2010Not engage

d

Scarce

Mini

mal

Mo

derate

Good

Sophisticated

Basic req

.

RB The person recognizes to possess mental functions and represents her/himself as an individual who thinks and feels in an independent manner.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

monitoring

UM1 COGNITIVE IDENTIFICATION the person is able to distinguish and differentiate his/her own cognitive operations (e.g. remembering, imagining, having fantasies, dreaming, desiring, deciding, foreseeing and thinking).

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

UM2 EMOTIONAL IDENTIFICATION the person is able to define, distinguish and name his/her own emotional states.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

UM3 RELATING VARIABLES the person identifies and describes the relations among the aspects of subjective experience: i.e. causes for his own thought or emotion or behaviour, the effects of a thought or an emotion, the inner or social factors influencing own actions.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

differentiation

UM4 the person recognises his/her thought as subjective, his/her opinions and forecasts as hypotheses, considering the possibility they change as contexts change and time passes (including the ability to take a critical distance from own beliefs). Thoughts are not considered reality per se and ideas or wishes cannot influence directly events or change reality.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

UM5 the person distinguishes among belief, fantasy, dreams, memories and forecasts. Reality judgement is intact and the person is aware of when and where a scene is taking place.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

integration

UM6 the person is able to describe in a coherent narrative the cognitive and emotional aspects of his/her own states of mind and how they were changing during time, grasping links and causal relations that promoted changes.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

UM7 the person describes the cognitive and emotional aspects of his/her own different states of mind integrating the multiplicity – and possible contradictions – of representations in a consistent narrative.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

monitoring

UOM1 COGNITIVE IDENTIFICATION the person is able to define and distinguish the others’ cognitive operations (e.g. remembering, imagining, having fantasies, dreaming, desiring, deciding, foreseeing and thinking).

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

UOM2 EMOTIONAL IDENTIFICATION the person is able to define and distinguish the others’ emotional states.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

UOM3 RELATING VARIABLES the person is able to make hypotheses about the links explaining the relationships among other’s thoughts, emotions and overt behaviour, e.g. the causes behind a thought, emotion or type of behaviour

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

Decen tration

D The person is able to describe the other’s mental state forming hypothesis which are independent from his/her own perspective and from his/her own involvement in the relationship.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

Basic req

.

M1 The person discusses his own behaviour and psychological processes and states not as simple matter-of-fact data but as tasks to be done and problems to be solved, defining the terms of the problem in a plausible way and adopting an active problem-solving stance

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

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1st level

strat.

M2 the person tries to act on problematic states modifying the bodily state.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

M3 the person tries to avoid the eliciting conditions of a problematic state and/or uses the relational context as a support.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

2nd level

strat.

M4 the person deals with the problem voluntarily imposing or inhibiting a behaviour on him/herself.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

M5 the person deals with the problem through the regulation and management of his/her mental states, distracting her/himself from ideas and emotions causing suffering.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

3rd level

strat.

M6 the person deals with the problem operating on underpinning beliefs and evaluations and/or by using his/her general knowledge on his/her own mental functioning.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

M7 The person faces the interpersonal dimension of the problem using his/her own knowledge of other people' s mental functioning.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

M8 The person faces the problem accepting in a mature way his/her own limits in changing his/her own inner states and influencing events.

N.E. □

1 □

2 □

3 □

4 □

5 □

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