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Sommaire Le trimestre en chiffres 2 Espérance 3 Alstom et General Electric : l’histoire se répète 4 à 6 Vinci, Bouygues, Eiffage : trois champions modèles du savoir-faire français 7 à 9 La guerre de la monnaie 9 à 12 La productivité au cœur des enjeux économiques de demain 13 à 15 Où il est question de train… et d’arrière train 16 N° 110 - Juillet 2014 '8%/< '28,/+(7 *(67,21

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SommaireLe trimestre en chiffres 2

Espérance 3

Alstom et General Electric :l’histoire se répète 4 à 6

Vinci, Bouygues, Eiffage : trois championsmodèles du savoir-faire français 7 à 9

La guerre de la monnaie 9 à 12

La productivité au cœur des enjeux économiques de demain 13 à 15

Où il est question de train… et d’arrière train 16

N ° 1 1 0 - J u i l l e t 2 0 1 4

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Le Trimestre en Chif fre s: 30.12.2013 30.06.2014 Variation depuis le 30.12.2013

MARCHÉS BOURSIERS EUROSTOXX 50 3 100,93 3 228,24 4,1 % NEW YORK (Dow Jones) 16 504,29 16 826,60 2,0 % NEW YORK (Nasdaq) 4 154,20 4 408,18 6,1 % S&P 500 1 841,07 1 960,23 6,5 % TOKYO (Nikkei) 16 291,31 15 162,10 -6,9 % SUISSE (SMI) 8 202,98 8 554,52 4,3 % LONDRES (Ftse 100) 6 731,27 6 743,94 0,2 % FRANCFORT (Dax) 9 552,16 9 833,07 2,9 % PARIS (CAC 40) 4 275,71 4 442,84 3,4 % Or (Once en $) 1 196,50 1 327,32 10,9 % Pétrole (WTI en $) 99,29 105,37 6,1 % Pétrole (Brent en $) 111,21 112,36 1,0 %

TAUX10 ANS

France (OAT) 2,56 1,70 -0,86 Etats-Unis 2,97 2,53 -0,44 2 ANS France (OAT) 0,29 0,12 -0,17 Etats-Unis 0,35 0,46 0,10 3 MOIS Zone Euro 0,15 0,02 -0,12 Etats-Unis 0,06 0,05 0,00

DEVISES Euro/Dollar 1,3801 1,3692 -0,8 % Euro/Livre 0,8364 0,8005 -4,3 % Euro/Franc Suisse 1,2254 1,2143 -0,9 % Euro/Yen 145,09 138,74 -4,4 % Dollar/Yen 105,15 101,33 -3,6 %

DUBLY-DOUILHET GESTION*

Liberté 50 143,92 141,29 -1,8 % Liberté Euro PEA 168,63 165,02 -2,1 % Liberté Amérique 382,01 378,13 -1,0 % Liberté Santé 186,79 196,83 5,4 % Liberté Oblige 220,24 220,88 0,3 %

Liberté Info - Juillet 2014 - 32 - Liberté Info - Juillet 2014

Source : Bloomberg 30 juin 2014 - Les performances passées ne présagent pas des performances futures. * Valeur liquidative des OPCVM Dubly - Douilhet Gestion.

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Désespérer de la France et des Français est devenu un sport national…. et inter-national (« French Bashing »).

Endettement, chômage, coût du travail, poids des dépenses publiques, impôts, mauvais classements des universités, carences de l’école, dégradation des ser-vices publics, conservatisme des syndi-cats sont à la une des conversations et de l’information.

Parler des atouts de la France devient même mal vu. Et pourtant, comment oublier que notre pays a hérité du passé, d’une image prestigieuse et d’un statut international respecté qui lui ont per-mis d’être un des membres du conseil permanent de l’O.N.U. et un des prin-cipaux acteurs de la construction euro-péenne ?

Comment oublier que sa puissance mi-litaire d’intervention et de dissuasion est incontestable ? Que le Français est parlé par plus de 200 millions de personnes dans le monde et reste une des langues de la diplomatie ?

Et puis en termes de P.I.B., la France se situe au cinquième rang mondial. En termes d’infrastructures (routes, che-mins de fer, télécommunications), la France se situerait au quatrième rang mondial, en termes d’innovation au troisième après les U.S.A. et le Japon (classement du « Top 100 Global Inno-

vators » de Thomson Reuters), que sa natalité la place au second rang euro-péen, sans parler de son rayonnement culturel ou de la stabilité de ses institu-tions.

Enfin, il est un domaine où la France n’a pas à rougir : celui de ses entreprises. Sait-on que la France, dans le classe-ment des 500 plus grandes entreprises mondiales, compte plus d’entreprises que l’Allemagne. Et que dire de nos entreprises dans les secteurs du luxe, de l’aéronautique, de la santé, de la parfu-merie, des cosmétiques, du nucléaire, de la gestion de l’eau et des déchets, des logiciels, de la monétique, des nano-technologies, de la génomique, des bâti-ments et des travaux publics, que nous envie le monde entier ?

L’Histoire nous enseigne que la France a connu à de maintes reprises des périodes d’effacement, de déclin, de chute même, suivies de sursauts spectaculaires : guerre de cent ans suivie de la Renaissance, guerres de religion suivies du Siècle de Louis XIV, Révolution Française suivie de l’Empire, guerre de 1939-45 suivie des 30 glorieuses…

A quand le prochain sursaut ? La France parviendra-t-elle à vaincre ses démons qui la paralysent et l’empêchent de re-prendre sa marche en avant ?

Hugues [email protected]

ESPÉRANCE

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Alstom… Nous connaissons tous cette société ne serait-ce qu’au travers de notre fierté natio-nale, les TGV, quand bien entendu ceux-ci cir-culent… Cependant, l’activité Transport n’est que la face émergée de ce fleuron de l’économie hexagonale.En réalité, Alstom est avant tout un géant eu-ropéen de l’énergie (71% du chiffre d’affaires), mais un géant bien fragile du fait de son his-torique.

1929-1988 : La montée en puissanceLa société ALSTHOM est née juste avant la crise de 1929 de la fusion de la Société Alsacienne de Construction Mécanique et

de la Compagnie Française Thomson-Houston. Cette dernière n’est autre que la filiale française de General Electric !

En 1969, la Compagnie Générale d’Electricité (CGE), peu après avoir mis la main sur Alcatel, devient pro-priétaire d’Alsthom.

Nous sommes au milieu des trente glorieuses, le groupe ainsi constitué se développe tout azimut dans l’informatique, le transport, le nucléaire, les chantiers navals…En 1981, la première ligne TGV entre Paris et Lyon est inaugurée.

L’entreprise est alors à son zénith.

1989-1997 : Le mariage AnglaisDésireux d’atteindre rapidement une taille cri-tique sur le marché de la génération électrique, le Groupe CGE fusionne avec la branche « Power System » du britannique General Elec-tric Company (GEC qui n’a aucun lien avec General Electric). C’est la naissance du groupe GEC Alsthom nouveau poids lourd mondial du secteur électrique notamment capable de rivaliser avec l’allemand Siemens.

1998 : L’introduction en bourseNeuf ans plus tard, le groupe décide de se scin-der : Alcatel se spécialisera dans les télécommu-nications, GEC rebaptisé Marconi dans l’élec-tronique et la défense, GEC Alsthom dans la génération électrique et la construction navale.GEC Alsthom, qui devient pour l’occasion Als-tom sans H, fait son entrée en bourse de Paris. Mais GEC et Alcatel ont été très gourmands en s’octroyant préalablement à l’introduction le versement d’un dividende exceptionnel fort généreux (1.2 milliard d’euros) qui met à mal la trésorerie de la société.

1999-2002 : l’accident industriel Alors que ALSTOM fabrique depuis une décennie des tur-bines à gaz de grande puis-

ALSTOM ET GENERAL ELECTRIC : L’HISTOIRE SE RÉPÈTE

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sance sous licence General Electric (!), le pré-sident Pierre BILGER décide de mettre fin à ce partenariat industriel et de s’allier au groupe helvético-suédois ABB.

Cette décision aura 2 conséquences. Tout d’abord, en contrepartie de la rupture du partenariat, GE reçoit en dédommagement les sites industriels de fabrication de turbines à gaz. Alstom donne ainsi naissance à un redoutable concurrent.

Mais surtout, les turbines Alstom-ABB vont se révéler défaillantes et le groupe devra débourser 1.6 milliard d’euros pour corriger la situation.Les autres activités du groupe ne vont guère mieux à l’image des Chantiers de l’Atlantique qui subissent de plein fouet la faillite du croisié-riste américain Renaissance Cruise.

2003-2004 : Le sauvetageEn mars 2003, Patrick KRON (Imerys) prend la succession de Pierre BILGER démissionnaire.

Le groupe est complètement exsangue et doit de plus faire face à un fort retournement de conjoncture. Une sévère restructuration du groupe se met en place. Mais cela ne suffit pas, en 2004, face à un risque d’effondrement total, l’Etat doit dans l’urgence prendre 21% du capital afin de rassurer les milieux finan-ciers. Bruxelles exige des compensations. Il en résultera les cessions des turbines industrielles

à Siemens, de l’activité transport et distribution d’énergie à Areva et de la construction navale au Norvégien Aker Yards.

2005-2008 : L’espoirC’est le boom des émergents et de leurs besoins en infrastructure qui remet le groupe sur les rails de la croissance. En 2006, l’Etat revend sa par-ticipation à Bouygues en encaissant une subs-tantielle plus-value (1.26 milliard d’euros). On envisage alors la création d’un super champion français de l’énergie Areva-Alstom. En 2008, la crise vient contrarier tous ces bien jolis projets.

2008-2013 : La chuteLa crise financière suivie de la crise économique amène à un effondrement des commandes dans le secteur de l’énergie.

Selon le cabinet SIA Partners, alors qu’il affi-chait un rythme de croissance de 4 à 5 % par an avant la crise, le marché des centrales à gaz ou à charbon ne croîtra pas plus de 1 % par an sur les sept prochaines années. Avec de fortes disparités géographiques : il se contracte en Europe, où des capacités sont supprimées, tan-dis que l’essentiel de la croissance se concentre en Asie, notamment en Chine. Or Alstom y est quasi absent et de nouveaux concurrents y sont apparus, tels que les chinois Dongfang, Harbin et Shanghai Electric ou encore le coréen Kepco qui a remporté le projet nucléaire d’Abou Dha-bi. Le Moyen-Orient d’ailleurs est la seule zone en croissance où Alstom est bien positionné.

2014 : Epilogue momentané ?La morale de cette histoire industrielle aurait pu être : il se sont mariés (en 1928), puis ils se sont

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séparés (en 1998) pour mieux se retrouver (en 2014). La réalité est bien plus compliquée.

Alstom cède ce qui constitue aux yeux de l’amé-ricain sa plus grande richesse : ses capacités de production de nouvelles turbines à gaz et à vapeur, des positions mondiales dans l’hydrau-lique et le nucléaire, mais surtout ses centaines de gigawatts de capacités installées partout dans le monde, qui représentent autant de perspec-tives de services pour les années à venir. Il est clair que GE « adore » les services pour les reve-nus confortables et récurrents qu’ils procurent.

L’Etat est intervenu pour protéger les activités stratégiques (nucléaire notamment) et tenter de faire monter les enchères. Mais au final, en contrepartie de quelques concessions mineures, General Electric prend le contrôle opération-nel de la division énergie à un prix inférieur à celui de l’offre initiale. La branche transport qui devait devenir un « pure player » afin de faciliter des alliances notamment pour développer une offre « low-cost » à destination des pays émer-gents devra revoir tout ou partie de sa copie.

Le cash apporté par GE lui permettra certes de se renforcer et de procéder à des acquisitions, mais la somme qui entrera effectivement dans les caisses d’Alstom reste une grande inconnue. Sans compter que les actionnaires attendent un dividende exceptionnel, dont le montant reste à déterminer. Le patron d’Alstom Transport a d’ores et déjà annoncé qu’il n’excluait pas d’ou-vrir son capital à de nouveaux partenaires pour financer ses nouvelles ambitions.

Bouygues, en recherche de trésorerie pour financer notamment ses activités Télécom, se réjouissait de l’offre du groupe américain. Après de multiples rebondissements, le groupe est finalement contraint de réaliser une opération complexe de prêt de ses titres à l’Etat, dont on connaît les difficultés financières, qui pourra à tout moment faire valoir une hypothétique option d’achat. Cette manœuvre tout à fait inhabituelle pose à ce jour un réel problème de conformité à l’Autorité des Marchés Financiers.

Jérôme [email protected]

La turbine mise en mouvement par l’eau (ou la vapeur, le vent, le gaz en combustion…) fait tourner l’axe sur lequel elle est fixée, comme l’eau de la rivière fait tourner la roue à aubes du moulin à eau.

L’alternateur est l’appareil qui produit le cou-rant électrique. Fixé au même axe que la tur-bine, il est constitué d’un aimant mobile et d’une bobine fixe. La rotation de l’aimant crée un mouvement d’électrons à l’intérieur du fil de cuivre qui est enroulée au sein de la bo-bine, c’est-à-dire un courant électrique.

Les principaux fabricants de turbines sont General Electric, Siemens, Alstom, Vestas, Areva.

source : Commissariat à l’Energie Atomique

LA TURBINE ET L’ALTERNATEUR

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VINCI, BOUYGUES, EIFFAGE : TROIS CHAMPIONS MODÈLES DU SAVOIR-FAIRE FRANÇAIS

La construction :un savoir-faire bien français !

Chaque année, le forum économique de Da-vos publie un classement des pays en fonc-tion de leur compétitivité. La presse française ne retiendra du dernier classement de 2013 que la rétrogradation de deux places de la France désormais 23e sur 148. Cependant, de ce classement, il apparaît aussi que la France dispose de nombreux avantages compétitifs pour réussir dans la compétition mondiale. Parmi ceux-ci, il y a la qualité de la main d’œuvre, du système éducatif, mais surtout des infrastructures qui sont parmi les meil-leures au monde (4e rang mondial selon ce même classement). Depuis toujours la France a eu le souci de dé-velopper ses infrastructures, fer de lance de sa politique économique. Par exemple, l’école nationale des Ponts et Chaussées est créée dès le XVIIIe siècle pour assurer la construc-tion des voies de circulation. Mais c’est au XIXe siècle que la France va connaître l’essor de ses réseaux d’infrastructure parallèlement à l’industrialisation du pays. Au cours de ce siècle, le réseau des routes départementales et nationales est achevé, les chemins de fer sont créés, les canaux et les ports développés. Pour répondre à ces nouveaux besoins, plusieurs entreprises de construction d’infrastructures fleurissent : Fougerolles, Quillery, Beugnet, Eiffel, Sogea, GTM Dumez, SGE, etc.

Au XXe siècle le réseau routier est adapté à l’automobile ; les autoroutes et les aéro-ports sont créés. Au lendemain de la se-conde guerre mondiale, les grands noms de la construction apparaissent et se déve-loppent avec la reconstruction du pays,

puis petit à petit par opérations de fusions et acquisitions. Aujourd’hui la France compte 3 grands groupes de construction parmi les plus importants au monde : Vinci (capitalisation boursière de 32 mdse), Bouygues (capitalisation boursière de 10 mdse) et Eiffage (capitalisation boursière de 5 mdse).

Ces trois sociétés possèdent des compétences similaires : construction résidentielle et non résidentielle, génie civil, travaux routiers. Ce savoir-faire est mondialement reconnu et s’exporte même de plus en plus ! En effet, pour pallier la baisse récente du marché de la construction, les champions nationaux mul-tiplient les initiatives à l’international : métro au Caire, autoroute au Qatar, enceinte de confinement sur le site Tchernobyl, bâtiment public au Gabon, etc.

En plus de ce virage à l’international, les trois groupes ont entrepris des stratégies de diversification pour les mêmes raisons. En effet, Vinci et Eiffage se sont tournés vers les concessions et les partenariats publics pri-vés, tandis que Bouygues a préféré dévelop-per ses activités médias et télécoms. Ainsi, Vinci, déjà présent sur le métier des conces-sions depuis le début des années 70 avec Cofiroute, a acquis Sogeparc (réseau de par-king) en 1998, ASF (Autoroutes du Sud de la France) et Escota en 2005, suite à la privati-sation des sociétés d’autoroute. A la même occasion, Eiffage a acquis les autoroutes Paris Rhin Rhône (APRR). Quant au groupe Bouygues, il s’est lancé dans deux diversifica-tions avec plus ou moins de succès : le lance-ment de Bouygues Télécom en 1996 et une prise de participation au capital d’Alstom en 2006.

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Quoi qu’il en soit, les expertises techniques (maitrise d’œuvre), opérationnelles (exploi-tation de réseau) et financières (Conces-sions, partenariat public privé) de ces grands groupes français sont non seulement le fruit de l’histoire du BTP en France, mais aussi le reflet des compétences françaises qui ont aussi pu se développer grâce à un Etat central fort.

L’exemple de Vinci Parmi les trois groupes, Vinci sort particuliè-rement du lot. Les origines du groupe fran-çais remontent au XIXe siècle à travers une multitude de sociétés qui sont aujourd’hui dans son giron (Sogea, les Grands Travaux de

Marseille, Dumez ou encore SGE). Précur-seur, le groupe fut le premier à se diversifier dans les concessions. Depuis 3 ans, la société retrouve des couleurs en bourse et surper-forme ses confrères (+24% pour Vinci contre respectivement +15% et +3% pour Eiffage et Bouygues). Les investisseurs apprécient la visi-bilité de la division concession et la belle ré-sistance de l’activité « contracting » (construc-tion et travaux publics), grâce notamment au développement international.

En effet, la division concession est portée par le trafic qui croît à nouveau sur les autoroutes françaises depuis le deuxième trimestre 2013.

Autre élément positif : la direction a en-trepris une réorganisation de la division concession en vendant l’activité des parkings (vente de Vinci Park en février 2014) pour se renforcer dans la gestion des aéroports (acquisition d’une conces-sion sur les principaux aéroports portu-gais en février 2013 et augmentation de la participation au capital d’Aéroport de Paris), activité avec un plus fort poten-tiel de croissance. L’activité « contracting », quant à elle, résiste bien compte tenu de la conjonc-

ture. Le chiffre d’affaires de la division est aujourd’hui largement supérieur à celui d’avant crise (34.6 milliards d’eu-ros en 2013 vs 28.5 milliards d’euros en 2008). Seule ombre au tableau : l’augmentation du volume d’affaires de la division a été réalisée au détri-ment de la marge d’exploitation qui est aujourd’hui inférieure à celle de 2008 (4.1% aujourd’hui vs 4.8% en 2008).

Enfin, Vinci a fortement bénéficié de la baisse des taux en 2013. Ainsi, le coût

Evolution du trafic autoroutier de Vinci

Sour

ce :

Vinc

i

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de la dette de Vinci est passé de 4.9% à 3.2% en 5 ans, ce qui représente une économie de près de 190 millions d’eu-ros pour le groupe.

L’un dans l’autre, cela permet au groupe Vinci de générer d’importants flux de

trésorerie après investissements (2.2 mil-liards d’euros en 2013) qui permettent de rémunérer correctement l’action-naire avec un rendement de 3.4%.

Nicolas [email protected]

Mi 2013, le terme de « guerre des changes » était à la Une de tous les journaux économiques européens. Ils faisaient alors référence à la forte vola-tilité du marché des changes notam-ment celui des devises émergentes. Si la situation s’est un peu estompée ces derniers temps, une autre bataille mondiale autour de la monnaie est en train de prendre forme : « la guerre de la monnaie » plus connue sous le nom de « bataille des moyens de paiement ».

Cette guerre mondiale voit s’affronter trois grands groupes de titans :

• les sociétés de nouvelles techno-logies : Apple (577 Mds$ de capi-talisation) ; Google (389 Mds$ de capitalisation) ; Facebook (163 Mds$ de capitalisation) ; Amazon (151 Mds$ de capitalisation) ;

• les banques internationales : BNP (60 Mdse de capitalisation) ; Bank of America (164 Mds$ de capitalisation) ; Citigroup (143 Mds$ de capitalisa-tion) ; Société Générale (30 Mdse de capitalisation) ; VISA (122 Mds$ de capitalisation) ; AMEX (100 Mds$ de capitalisation) ; MASTERCARD (89 Mds$ de capitalisation) ;

• les entreprises de services : Atos

(6 Mdse de capitalisation) ; Ingénico (3.7 Mdse de capitalisation) ; Wire-card (3.8 Mdse de capitalisation) ; Gemalto (6.7 Mdse de capitalisation) mais aussi une multitude de petites start-up innovantes.

Au cœur de la bataille : la manière dont vous payerez vos dépenses, le contrôle de vos données sécurisées mais également le partage des commissions entre les diffé-rents intervenants. Le gâteau est appétis-sant et grossit chaque année : le nombre de transactions scripturales (c’est-à-dire autres que les espèces) est de 235 mil-liards. Ce nombre devrait dépasser les 400 milliards de transactions en 2016 dont 164 milliards dans les émergents et 249 milliards dans les pays matures soit une croissance annuelle de 12% et 5% respectivement.

Actuellement, le marché est dominé par les banques pour la gestion du système de paiement, et par les cartes bancaires pour ce qui est du moyen de paiement. Mais la « révolution digitale » est en train de bouleverser le secteur pour le meilleur et pour le pire. Le « meilleur » est bien évidemment l’apport de nouveaux ser-vices et d’une plus grande diversité dans

LA GUERRE DE LA MONNAIE

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la manière de payer. Le « pire » concerne la sécurité du paiement et l’utilisation des informations liées à votre paiement (où, quoi, comment…).

Bien qu’il existe plusieurs moyens de paiement avec des infrastructures diffé-rentes pour chacun d’entre eux (cf enca-dré), le monde du paiement est actuelle-ment divisé en deux :- les paiements respectant la norme EMV (Europay Mastercard Visa) qui devient progressivement le standard du paiement au niveau mondial. Il ne s’agit ni plus ni moins que la générali-sation, au niveau mondial, du paiement par carte à puce (très répandu en France mais beaucoup moins dans le monde) avec des standards de qualité, de sécu-rité et de compatibilité commun. Cette norme permet de garantir le paiement pour « l’accepteur » de la transaction (c’est à dire le commerçant), quel que soit la solvabilité du payeur à partir du moment où la transaction a été accep-tée par le système. Mais également la protection du consommateur en lui permettant de refuser une transaction dont il n’est pas à l’origine. Il s’agit de deux avantages importants puisque si l’on prend l’exemple du virement, une fois initié / accepté et si vous n’êtes pas à l’origine de la transaction il est plus difficile de le récupérer après coup. Bien évidemment ces assurances ont un coût à la fois pour le client par des cotisa-tions et pour l’accepteur du paiement avec des commissions commerçants. Cependant, en contrepartie, la fraude est extrêmement faible.- les solutions alternatives de paie-ment. Il y en a des nouvelles tous les jours. Elles sont majoritairement déma-

térialisées et s’appuient sur une ou plu-sieurs des infrastructures de moyens de paiement existants (cf encadré). La solution la plus usité est le « e-wallet » (porte-monnaie électronique) qui a pour avantage de simplifier le parcours client, de pouvoir s’appuyer sur plusieurs types de paiement au choix du consommateur (carte, virement, monnaie électronique) et également d’être multi-applications (paiement, fidélité, identification…). Suivant l’infrastructure de paiement choisi, les éléments d’assurance et de sécurité varient (peu pour la monnaie électronique, beaucoup plus pour le paiement type carte bancaire). Le choix du moyen de paiement est donc fonction de la prise de risque que le consommateur est prêt à assumer. Tout comme pour « l’accepteur » (ie, le commerçant) qui autorisera certains moyens de paiement en fonction du risque réputationnel qu’il encourt en cas de problèmes dans la chaîne de paie-ment.

Le plus connu des « e-wallet » est Pay-pal (propriété d’Ebay) mais de nom-breuses solutions alternatives existent comme V.Me (Visa), MasterPass (Mas-tercard), Blue et Fivory (Crédit Mutuel) ou encore Paylib (Société Générale/BNP/Banque Postale). Les grands dis-tributeurs mondiaux tels que Amazon ou Wal-Mart, développent aussi leurs propres systèmes afin d’y ajouter par exemple des avantages fidélité. Chacun a ses spécificités, notamment d’usage, mais le principe de fonction-nement est le même. Par exemple, Pay-lib est un moyen de paiement comme PayPal (identification par mail et code secret), tout comme Blue du Crédit

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Mutuel. Fivory (Crédit Mutuel) est plus axé sur le commerçant en lui permet-tant d’ajouter des avantages fidélité, des coupons de réduction personnalisés en plus du paiement, qui devient presque secondaire.

Si les deux mondes actuels fonctionnent bien ensemble, l’avènement des smart-phones vient brouiller les frontières et pourrait bien devenir le cheval de Troie des géants de l’internet dans l’industrie du paiement traditionnelle dominée par les banques. En effet, il y a encore 5 ans, le paiement mobile était inexis-tant mais les opportunités font doréna-vant rêver. En 2017, on devrait compter 721 milliards de dollars de paiements sur mobile pour 450 millions d’utili-sateurs, selon une étude Gartner. Plus d’un milliard d’individus dans les pays émergents ont un téléphone portable, mais pas de compte en banque, selon un rapport de McKinsey.

Dans ce domaine, les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) sont mo-teurs de l’innovation. Mais dès qu’une solution devient crédible, les acteurs historiques contre-attaquent. En effet, si Paypal n’a pas percé aux Pays-Bas, cela est dû au fait que les banques néer-landaises se sont dotées d’une solution commune de paiement en ligne bapti-sée « Ideal », par laquelle passent plus de 84 % des achats en ligne dans ce pays. Cette lutte acharnée n’est pas sans faire de victime. Par exemple, Square qui a lancé le paiement par carte de crédit sur mobile grâce à l’ajoût d’un lecteur adap-té, était promis à un avenir radieux il y a encore deux ans. Désormais, elle est à vendre car sa solution n’est pas compa-

tible avec les normes EMV et est donc considérée comme peu sécurisée.

Le principal avantage des banques vis-à-vis des géants du net réside dans la sécurité du système actuel avec un taux de fraude très faible au contraire des moyens de paiement alternatifs dont la sécurité d’utilisation peut parfois être mise à mal. Puisqu’elles sont considé-rées comme moins risquées (taux de fraude moins élevé), les solutions tradi-tionnelles sont également moins chères. À l’inverse, l’avantage principal des géants des nouvelles technologies et des start-up sont les moyens financiers co-lossaux dont ils disposent pour investir, les quantités pharaoniques de données en leurs possessions sur le client et la connaissance client qu’elles proposent. Apple possède d’ores et déjà 800 mil-lions de numéros de cartes dans son en-vironnement Itunes, et équipe tous ses « Apple stores » de solutions mobiles de paiement. Dans un « Apple store », les caisses ont presque totalement disparu et dorénavant vous payez sur un termi-nal mobile (fabriqué par Ingénico). Pay-Pal, quant à lui, est en train de tester à Nancy le paiement en magasin avec son compte Paypal.

Cependant, l’augmentation de la concurrence remet en cause la rentabi-lité des acteurs les plus fragiles. Les in-vestissements informatiques nécessaires se chiffrent en milliards d’euros et tant qu’aucune solution dominante n’a été trouvée, il faut mener plusieurs com-bats à la fois. Une consolidation dans le secteur semble donc inévitable à terme. Pour autant, prévoir quelle solution sur-vivra dans le temps est presque impos-

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sible. En revanche, ce qui est certain est que plusieurs solutions coexisteront, et une coopération entre les différents ac-teurs sera nécessaire à un moment donné pour définir des standards mondiaux comme cela est déjà le cas au sein du sys-tème EMV. De même, le « paiement » ne sera plus considéré isolément mais avec un ensemble de services autour de l’acte de « paiement ».

Dans cet environnement en pleine évo-lution avec une majorité d’acteurs à dominante Anglo-Saxonne, trois leaders mondiaux Français pourraient tirer leur épingle du jeu grâce à leurs offres inno-vantes mais également par acquisitions : Ingénico, Gemalto et Worldline.- Ingénico est un fournisseur de « moyens

d’acceptation » de paiement (39% de part de marché mondial). Le produit le plus connu est le terminal de paie-ment Ingenico dans lequel l’utilisateur introduit sa carte bancaire pour payer ses achats chez un commerçant. Il s’agit d’un duopole mondial avec l’améri-cain Vérifone. Mais grâce à de nom-breuses acquisitions, dont la dernière, GlobalConnect, date du mois de juin, le groupe est également présent dans les services (installation, maintenance, conseil et intégration monétique), les logiciels (monétique intégrée, gestion de parc) et les services de transaction.

- Gemalto est le leader mondial du mar-ché de la carte à puce et des solutions de sécurité avec près de 40% de part de marché. Son activité se répartit entre les solutions pour téléphones mobiles (49% du chiffre d’affaires), le paiement (25%) et l’identité / sécurité (17%).

- Worldline, filiale d’Atos dans le paie-ment, elle vient d’être introduite en

bourse afin de disposer de moyens fi-nanciers significatifs pour d’éventuelles acquisitions afin de renforcer son lea-dership européen dans la gestion du « process » de paiement, autrement dit le traitement informatique des flux de paiement par cartes bancaires. Il est également le seul acteur à être un « one stop shop » du paiement, car outre son activité de « processing », Worldline possède également une activité de ter-minal de paiement et de solution d’e-commerce.

Brieuc [email protected]

A l’heure actuelle, il existe 4 grands types de moyens de paiement qui s’appuient chacun sur des infrastructures différentes :Virement : initié par le payeur (débiteur) au profit du payé (bénéficiaire)Prélèvement : Initié par le payé (créditeur) sur la base d’un mandat donné par le payeur (débiteur)Paiement par carte : initié par le payé (accep-teur) sur la base d’un ordre donné par le payeur (porteur de carte)Monnaie électronique : transfert de valeur électronique (créance auprès d’un émetteur de monnaie électronique)Chèque : paiement papier initié par le payeur (débiteur) au profit du payé (bénéficiaire)L’industrie du paiement est une industrie de volume. Plus votre solution attire de clients/transactions plus vous êtes rentable.Hormis la France, le paiement par chèque est en fort déclin pour des raisons de coûts (impression papier), de sécurité (le risque de non-paiement est supporté par le bénéficiaire) et de réseau d’acceptation. En montant, les virements et prélèvements sont les plus impor-tants (peu de transactions mais des montants élevés). En volume, les cartes bancaires sont largement dominantes (beaucoup de transac-tions mais des montants faibles : 47 euros en moyenne en France). La monnaie électronique croît très rapidement (+18% pour le e-com-merce sur 2010/2014, +58% pour le mobile), mais concerne actuellement moins de 1% des transactions au niveau mondial.

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L’innovation bouleverse notre quotidien. Inutile de faire la queue pour réserver un billet de train, faire un virement bancaire ou même courir pour remplir le chariot du supermarché. Les progrès technologiques font partie de notre vie quotidienne et deviennent un moteur de la productivité du travail. Avec la baisse des prix, ces nouvelles technologies de l’information et de la communication se diffusent dans tous les secteurs d’activité, améliorant en permanence leurs performances. Pourtant contre toute attente, la tendance est à l’érosion de la productivité du travail.Le premier constat est que la producti-vité augmente moins vite que les salaires . Depuis la période de délocalisations mas-sives des entreprises occidentales au cours de la première décennie, les salaires ne cessent d’augmenter fortement dans le monde émergent. La création d’une classe moyenne émergente ayant des besoins croissants a fait naître une inflation des salaires pouvant aller jusqu’à 20% par an en Chine. Les gains de productivité ne peuvent croître à ce rythme. D’autant que

les entreprises mondialisées doivent main-tenir leurs positions concurrentielles dans un environnement où l’intensité en capital est plus élevée. En 2000, la construction d’une usine de semi-conducteurs coûtait 5 milliards de dollars, pour les nouvelles générations de produits, il faut investir désormais 15 milliards de dollars. La situation s’est même inversée aux Etats-Unis. Les techniques de fracturation des roches permettant d’extraire du gaz et du pétrole, ont permis à la première puis-sance mondiale, d’assoir une indépen-dance énergétique mais aussi d’enclencher un mouvement de ré-industrialisation (notamment dans la pétrochimie et l’auto-mobile). Depuis la crise, les salaires améri-cains sont restés à un niveau extrêmement faible. Aujourd’hui, un ouvrier dans l’Ala-bama coûte aussi cher qu’un ouvrier mexi-cain, mais en prenant en compte les coûts de transports et l’effondrement des coûts de l’énergie, certains produits chinois reviennent plus chers que ceux fabriqués directement sur le territoire américain.

LA PRODUCTIVITÉ AU COEURDES ENJEUX ÉCONOMIQUES DE DEMAIN

Productivité par personne employée(indice rebasé à 100 en 2000)

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Autre constat, la productivité au travail reste très liée au cycle économique du fait de la rigidité de l’emploi dans certains pays comme la France ou l’Italie. La pro-ductivité du travail recule car les entre-prises réduisent peu leurs effectifs au cours d’une récession en raison des coûts élevés de licenciement. De même, en période de reprise, elles n’embauchent pas parce qu’elles ont gardé trop d’emplois durant la récession. Le recul du PIB induit un recul presque égal de la productivité. Si la flexibilité de l’emploi est restée faible en France et en Italie, elle s’est affaiblie au Royaume-Uni et en Allemagne, et s’est considérablement accrue en Espagne et aux Etats-Unis. Au cours de la crise de la Zone euro, l’Espagne fut particulièrement affectée par l’explosion de sa bulle immo-

bilière. Les entreprises ibériques ont fait le choix de dévaluer les salaires pour rendre leur pays plus compétitif face à leurs voi-sins européens. Résultat : un coût horaire de la main d’œuvre espagnole inférieur à 22e de l’heure contre une moyenne en Zone euro à 30e, devenant très compétitif notamment pour des industriels comme PSA ou Volkswagen (le coût en Italie est de 32e et en France 35e). Compétitif mais encore trop cher pour l’Europe, PSA a confirmé la construction d’une quatrième usine en Chine avec son allié Dongfeng. En réponse à cet environnement concur-rentiel et à l’effondrement de la demande, le gouvernement espagnol vient d’adopter au mois de juin un plan d’action de 11 milliards d’euros pour « la croissance, la compétitivité et l’efficacité ».

Pour préserver la productivité par tête, il faut de la croissance et de l’investissement à l’heure où la croissance potentielle s’est structurellement érodée, notamment en France. Le taux d‘investissement des socié-tés non financières, publié par Eurostat, ac-cuse une chute de 16% entre 2008 et 2013 pour l’ensemble de l’Union Européenne.

La situation est d’autant plus paradoxale que les entreprises détiennent des liquidi-tés importantes dans leurs bilans et béné-ficient d’un environnement de taux très bas. Ces interrogations sont au cœur de la 14ème édition des rencontres économiques, se tenant début juillet, sur le thème « In-vestir pour inventer demain ». Au-delà des

Coûts horaires main d’œuvre

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Productivité horaire

velléités gouvernementales pour encoura-ger l’investissement, la Banque Centrale Européenne et la Banque Européenne d’Investissement cherchent à élargir leurs actions pour répondre aux besoins de fi-nancement des entreprises notamment de plus petites tailles.Enfin, un dernier élément serait que la

productivité du travail n’augmente plus car il n’y a plus de progrès technologiques depuis dix ans. Sans véritable nouvelle révolution technologique comme l’électri-cité, le moteur ou l’internet, les gains de productivité pourraient bien être épuisés pour le moment.

L’innovation crée des gains de productivi-té mais la compétitivité peut être préservée grâce à la créativité. C’est ce qui a permis à la France, cinquième puissance mondiale, de maintenir ses fleurons économiques dans les domaines du luxe, de l’aéronau-tique ou de la technologie. Malgré les coûts salariaux élevés, le peu de flexibilité de l’emploi, les trente-cinq heures et une fiscalité parfois dissuasive : la productivité horaire française reste la plus forte d’Eu-rope !Nos industries restent très convoitées à l’international. La productivité a permis de pallier la hausse du coût du travail. C’est par la valeur de son travail qu’une couturière de la maison Dior devient un élément irremplaçable, faisant partie du prestige de la haute-couture. Combien

même sa productivité ne peut pas être augmentée, son savoir-faire ne peut être délocalisé.Reste à explorer de nouvelles pistes pour construire une Europe plus compétitive avec la création d’un organisme supra-européen qui identifierait les bonnes pratiques et les imposerait dans tous les pays, harmoniser la fiscalité des entre-prises européennes et ramener le dialogue social au niveau de l’entreprise en France. La visibilité et la stabilité pourra générer l’envie d’investir. La confiance en l’avenir laissera naître l’investissement, révélant des talents, berceaux de la compétitivité.

Guillaume DI [email protected]

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LILLE NANCY50, boulevard de la Liberté - 59800 LILLE 62, rue Stanislas - 54000 NANCYTél. 03 28 36 14 36 - Fax 03 28 36 14 37 Tél. 03 83 17 32 32 - Fax 03 83 37 48 74

E-mail : [email protected] - www.dubly.frS.A. au capital de 5.468.400 e - R.C.S. Lille B 352.220.313

« Des TER trop larges commandés par la SNCF ! » Cette affaire avait fait grand bruit lors de sa divulgation dans « Le Canard Enchainé » en mai dernier. Si l’on en croit le journal « L’Opinion » du 21 mai 2014 reproduit ci-après, pour bien com-prendre le problème, il faut remonter à l’époque romaine.

La largeur des trains, des Romains à la navette spatialeCe ne sont pas les trains qui sont trop larges, ce sont les chevaux de l’empire romain qui avaient le derrière trop étroit.On peut railler les erreurs de calcul de la SNCF embarrassée par ses trains trop larges… Mais ima-gine-t-on que c’est la taille des chevaux des légions romaines qui, 2000 ans plus tard, a contraint les dimensions des navettes spatiales américaines ? La largeur du char romain était définie par la paire de chevaux de guerre qui le tirait (en fait, par la taille de leur postérieur). Il en résulte une largeur d’es-

sieu qui a servi à travers l’empire, sur des routes que des millions d’Européens empruntent encore. Les roues des chars ont creusé des ornières dans lesquelles ont roulé les charrettes des époques sui-vantes sans que la largeur d’essieu ne soit jamais modifiée, sous peine de voir les roues se briser en sortant des ornières. En Angleterre, les premiers tramways du XIXème siècle sont construits par des fabricants de charrettes qui ne s’embarrassent pas de modifier cette largeur d’essieu qui donc com-mandera, au final, l’écartement des voies. Soient 4 pieds et 8 pouces et demi. Le chemin de fer an-glais, français, puis américain, est développé selon le même standard (qui deviendra quasi universel).Les navettes spatiales de la Nasa dressées sur le pas de tir de Cap Canaveral, en Floride, étaient flanquées de deux boosters. Ces derniers étaient fabriqués à l’autre bout du pays, dans l’Utah. Ils auraient pu être plus gros (donc plus puissants) mais ils étaient acheminés sur le lieu de décollage par … train. Celui-ci empruntait des tunnels qui avaient été percés en tenant compte de la largeur de la voie, soit deux fois le cul d’un cheval.Le moyen de transport le plus moderne jamais construit par l’homme aurait donc vu ses per-formances dictées par l’armée romaine. On peut considérer qu’il s’agit de la victoire absolue de la bureaucratie sur la science. Et également songer que nos histoires de quais de gare trop étroits sont une plaisanterie à l’échelle de ce qui s’est peut-être joué (ou pas) à chaque décollage de Challenger ou de Discovery !

André [email protected]

OÙ IL EST QUESTION DE TRAIN…ET D’ARRIÈRE TRAIN