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BULLETIN TRIMESTRIEL DE L’A.S.B.L. PATRIMOINE INDUSTRIEL WALLONIE-BRUXELLES Publié avec l’aide de la Communauté Française N° 63-64 OCTOBRE 2005- MARS 2006 Belgique/België P.P.-P.B. 4020 Liège 2 9/180 Bureau de dépôt : Liège X

N° 63-64 · 2010-11-28 · BULLETIN TRIMESTRIEL DE L’A.S.B.L. PATRIMOINE INDUSTRIEL WALLONIE-BRUXELLES Publié avec l’aide de la Communauté Française N° 63-64 OCTOBRE 2005-MARS

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BULLETIN TRIMESTRIEL DE L’A.S.B.L.PATRIMOINE INDUSTRIEL WALLONIE-BRUXELLESPublié avec l’aide de la Communauté Française

N° 63-64OCTOBRE 2005-MARS 2006

Belgique/BelgiëP.P.-P.B.

4020 Liège 29/180

Bureau de dépôt :Liège X

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Création de l’AAFB

L'Association des ArchivistesFrancophones de Belgique(AAFB) est née à la fin de l'annéepassée. Cette nouvelle ASBLpermettra, notamment, de fédé-rer tous les archivistes issus desdifférents secteurs. Deux admi-nistrateurs du PIWB, Claude De-pauw et Guénaël Vande Vijver,occupent un poste similaire ausein de l'association.

Le SAICOM sur le site duBois-du-Luc

L'ASBL SAICOM, présidée parH. Hasquin, a décidé de venirs'installer sur le site des ancienscharbonnages du Bois-du-Lucprès de La Louvière. Nous assis-tons donc à un regroupementdes archives charbonnières pour

la Province du Hainaut car l'Eco-musée régional du Centre, basésur ce même site, a également dé-veloppé un centre d'archivesconsacré à l'histoire industrielle.Les deux ASBL pourront travail-lent ensemble sur la conserva-tion et la numérisation des archi-ves industrielles de ce territoire.De plus amples informations se-ront communiquées dans le cou-rant de cette année.

“Art. 3. L’association a pour objet lasauvegarde, l’étude et la mise en valeurdu patrimoine immobilier et mobilier,ainsi que des documents écrits, sonoresou figurés, se rapportant à l’histoire età l’archéologie de l’industrialisationdans les régions wallonne et bruxelloisede la Belgique.

L’association exerce une action de coor-dination et de promotion en faveur desorganismes et des personnes qui consa-crent leurs activités en tout ou en partieà ce domaine.

Toutefois, elle peut agir directement,lorsque les circonstances le requièrent,sans préjudice de la liberté ni de la res-ponsabilité des personnes physiques oumorales qui constituent ses membres.”

Cela étant dit, tout n’est pas dit.Car des intentions à la pratique, ily a de la marge.

Depuis plus de vingt ans, avecl’aide de la Communauté fran-çaise de Belgique, nous œuvronspour qu’il existe, en Wallonie et àBruxelles, une conscience d’unpatrimoine industriel à préserveret ce, de diverses façons et selonles possibilités raisonnables : insitu, dans les musées, sous formede bâtiments, d’objets, de textesécrits et d’enregistrements,d’images...

Nous intervenons, le caséchéant, auprès des autoritésadéquates afin d’activer des sau-vetages négligés, ignorés ou“dormants”.

Nous publions la présente revue,appréciée, pensons-nous, de nosmembres autant que des spécia-listes correspondants à l’étran-ger.

Ces actions ne sont cependantpossibles que grâce au soutienactif de nos adhérents.

Quel soutien ? Nous attendonsd’eux qu’ils participent à nos as-semblées, à nos excursions, qu’ilsnous écrivent, qu’ils exprimentleur point de vue, qu’ils recrutentde nouveaux membres (en n’ou-bliant pas les plus jeunes), qu’ilsrédigent – le cas échéant – des ar-ticles pour cette revue, bref qu’ilsse manifestent activement.

La préservation et la promotiondu patrimoine industriel exigentdes actes volontaristes et pas uni-quement des sympathies passi-ves.

Bruno Van Mol,Président.

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Editorial

Nouvelles

ILLUSTRATION DE COUVERTURE tirée del’article “Molenbeek, commune industrielle”dans le présent numéro, p. 3-6 : dès 1883,Delhaize dispose, à la gare de l'Ouest, d'unquai pour l'acheminement des marchandises(Archives du groupe Delhaize).

CI-DESSOUS : Les Ateliers du Bois-du-Luc,futur emplacement du SAICOM.

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L’industrialisation peut-ellegénérer l’urbanisation ? C’estl’une des questions que posela nouvelle exposition de LaFonderie : “Molenbeek, ré-cits de ville”.

Bruxelles, longtemps principaleville industrielle du pays en ter-mes d’emplois, a attiré l’attentionde nombreux chercheurs. Dansce contexte, quelle est la placed’une commune comme Molen-beek, parfois surnommée – dumoins pour l’une de ses parties –le “Petit Manchester belge” ?Quelle ampleur, quels visages,pour cette industrialisation ?Quelles conséquences, surtout,sur le territoire, sur la population,sur l’activité économique ?

Les réponses ne vont pas de soilorsque l’on sait qu’en 1880 en-core, les terres agricoles repré-sentent près de 50% du territoirede la commune...

Molenbeek avant 1830 : desfabriques dans les faubourgs

Le régime français est extrême-ment propice à l’industrie“belge”, en particulier à Bruxel-les et dans ses environs.

L’industrie bruxelloise, tradition-nellement implantée dans la val-lée de la Senne, essentiellement àl’intérieur de la seconde enceinte,commence à se développer au-delà de cette limite. Les fau-bourgs connaissent peu à peudes implantations d’entreprises,suivies du percement de nouvel-les rues. Les communes qui bé-néficient le plus de ces dévelop-

pements sont Anderlecht et sonhameau de Cureghem d’une part,Molenbeek de l’autre, mais aussiLaeken et Schaerbeek.

À Molenbeek, l’industrialisationet l’urbanisation nouvelles dé-marrent en dehors du noyau vil-lageois ancien, d’abord timide-ment puis plus vigoureusementdans les quartiers proches desanciennes portes, détruites quel-ques années plus tôt. En 1829, lacommune compte une cinquan-taine d’entreprises. L’industrie yest beaucoup plus diversifiéequ’à Cureghem où le textile do-mine largement. Molenbeek ac-cueille notamment une fabriquede colle, une savonnerie, une fa-brique d’amidon, mais aussi troisbrasseries, quatre tanneries, deuxfaïenceries, ainsi que plusieursateliers de carrossiers. Seulesquelques petites fabriques témoi-gnent de la présence, encore trèsembryonnaire, de la métallurgie.

Un canal, des usines...

L’indépendance de la Belgique etle choix de Bruxelles comme ca-pitale donnent à la région un es-sor considérable. Jouissant d’unesituation centrale, ville la pluspeuplée du nouveau pays,Bruxelles voit se multiplier sesfonctions de capitale : siège despouvoirs exécutif, législatif et ju-diciaire, centre financier et intel-lectuel.

Cependant, le principal atoutéconomique de la ville sera de setrouver au centre du réseau decommunications dont se dote lenouvel État. Le fond de la valléede la Senne, axe industrieux tra-ditionnel, est ainsi renforcé par lenouveau canal charbonnier re-liant Bruxelles à Charleroi, ou-vert à la navigation en 1832.Trois ans plus tard, la gare del’Allée Verte est inaugurée sur unterritoire qui fait alors partie deMolenbeek. Première garebruxelloise sur le tracé du pre-mier axe de chemin de fer pourvoyageurs sur le continent (Mali-nes-Bruxelles), elle sera bientôtrejointe par les stations du Midi(1840) et du Nord (1841). Dèslors, les entreprises se fixent àproximité de ce réseau de trans-ports et, bientôt, en attirent d’au-tres dans leur sillage.

De plus, la nouvelle voie d’eauapporte à la ville le charbon enprovenance des régions houillè-res du sud. L’arrivée de cetteénergie primaire à bas prix pro-voque l’efflorescence des indus-tries travaillant le métal. Les nou-velles entreprises s’organisent lelong du canal, dans le quartierSaint-Martin à Molenbeek enparticulier, ainsi qu’à Anderlechtet à Laeken.

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ETUDE *

* Cet article est une version résumée de l'arti-cle de P. CHARRUADAS, C. A. DUPONT etJ. PUISSANT, “La formation de Molenbeek :industrialisation et urbanisation”, paru dansMolenbeek, une commune bruxelloise, Bruxelles,2005, p. 13-28 (“Cahiers de La Fonderie”,n°33).

Le Canal de Charleroi, carte postale, vers1900 (Coll. Musée communal de Molenbeek-Saint-Jean, fonds Hebbelinck).

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Molenbeek, commune industrielle

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Le recensement industriel de1846 permet de dresser un pre-mier état de l’industrie à Bruxel-les-Ville mais aussi à Molenbeek,commune choisie par les autori-tés statistiques pour tester lequestionnaire du recensement.Une comparaison entre les deuxentités démontre de manièreéclatante la supériorité deBruxelles, qui compte alors dixfois plus d’emplois manufactu-riers que son faubourg occiden-tal. À Molenbeek, on voit se dé-velopper de nouvelles activités,comme la transformation desmétaux ou celle, mécanique, dubois, bien représentée. Il fautsurtout noter l’apparition d’uneindustrie plus lourde, par les ma-tériaux mis en œuvre et les pro-duits qui en sont issus, qui seconcentre le long du canal. Ils’agit du secteur de la construc-tion mécanique, lié aux dévelop-pements des nouvelles infra-structures comme le chemin defer et à l’utilisation de plus enplus massive de la vapeur danstoutes les industries.

De fait, la fabrication de machi-nes à vapeur et d’équipementsconnaît un développement re-marquable. 10 fabricants molen-beekois en ont construit 72 entre1830 et 1850, soit 30% des ma-chines fabriquées en Brabant et47% de celles qui proviennent deBruxelles. C’est peu, sans doute,par rapport aux 2.000 machinesproduites en Belgique à cetteépoque. Les deux plus impor-tants constructeurs molenbee-kois sont Pauwels d’une part,Cail et Halot de l’autre. Installéesà la limite du faubourg, dans lequartier Ransfort, sur de vastesterrains encore agricoles, ces en-treprises deviendront énormes etn’auront d’ailleurs aucun équiva-lent à Bruxelles ou dans son ag-glomération. Elles jouent ainsi,de par leur taille et l’importancede leur main-d’œuvre, un rôlemajeur dans l’extension de l’ur-banisation de Molenbeek.

Cependant, la vie industrielle estsyncopée. La Compagnie desBronzes qui subsiste plus d’unsiècle à Molenbeek est une ex-ception. De grands établisse-ments, comme Pauwels (disparuen 1867) ou Cail et Halot (en1900), arrêtent leurs activités.Ces arbres vigoureux, vénérablesmais fragiles, ne doivent pas ca-cher la forêt des nombreuses en-treprises qui se créent, disparais-sent ou restent modestes maisprospères.

Made in Molenbeek

Le recensement industriel de1896 donne un nouvel aperçudes développements de l’indus-trie dans les communes bruxel-loises. À Molenbeek, 2.218 entre-prises industrielles emploient10.960 personnes dont 9.624 sa-lariés. Comme à Bruxelles-Ville,qui reste toujours de loin la prin-cipale commune industrielle del’agglomération, la majorité desentreprises est constituée de pe-tites unités, pour la plupart desateliers à domicile, en particulierdans la confection de vêtementset d’accessoires de mode.

L’activité industrielle se répartitdans les secteurs suivants : tra-vail du bois, peaux et cuirs, mé-taux, bâtiment mais aussi chimie,alimentation, textile, tabac, pa-pier et livre, industrie d’art et deprécision, canaux et transports.Au total, la commune représente,

dans l’ensemble de la province,5% des entreprises, 7% des ou-vriers et 8% de la puissance-va-peur installée. On voit donc queson caractère industriel s’est net-tement affirmé, tant en nombred’ouvriers par entreprise qu’enéquipement énergétique.

Pour la transformation des mé-taux, il importe de s’installer àproximité du canal, pour l’appro-visionnement en énergie (char-bon) et en matières premières.Visseries, poêleries et autres fon-deries se concentrent donc dansles communes de Bruxelles etLaeken (qui totalisent 31% desentreprises dans ce secteur en1896), de Molenbeek (25%) etd’Anderlecht (14%). À Molen-beek, on peut citer la célèbre fa-brique de poêles Nestor Martin,qui implante dès 1868 sa pre-mière usine bruxelloise rueUlens.

À l’époque, ce quartier n’abriteencore que quelques entreprisesmais il connaîtra un développe-ment fulgurant, grâce surtout àl’ouverture, en 1907, de Tour etTaxis. Le quartier acquiert bien-tôt le qualificatif de maritime.Les usines de transformation s’ymultiplient. Leurs matières pre-mières transitent par le com-plexe, où elles sont taxées et dé-

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L'usine Cail, Halot et Compagnie, vers1850, extrait de La Belgique industrielle (Coll. LaFonderie).

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douanées. Ceci explique la pré-sence importante, dans cettezone bien précise de la ville (et deMolenbeek), d’entreprises detransformation de tabac, et denombreux importateurs de vins,de spiritueux, de cafés, d’épiceset d’autres produits coloniaux.Le quartier maritime est appelé àdevenir ainsi l’un des principauxpôles de développement de lacommune au XXe siècle.

Dans l’est de la commune, l’in-dustrie peut donc clairement êtreconsidérée comme un moteur del’urbanisation. En effet, la plu-part des entreprises s’établissentà front de rue, en utilisant les in-térieurs d’îlots pour déployerleurs unités de production. Ellesdéterminent donc l’organisationet l’utilisation de l’espace mais nele bouleversent pas. Elles condi-tionnent les circulations des genset des marchandises. On ob-serve, le long des axes de com-munication, la multiplication descommerces de détail : cafés, bou-langeries, épiceries... qui tententd’attirer le chaland et de “fidéli-ser” une clientèle ouvrière. L’ha-bitat ouvrier est relégué dans lesrues adjacentes, en particulierdans les nombreuses impassesdépourvues d’air et de lumière,sous-équipées d’installations sa-nitaires. Elles accueillent surtoutles nouveaux arrivants, les ou-vriers peu qualifiés, tandis que denombreux ouvriers qualifiés ha-bitent toujours le centre-ville.L’ouverture de grands axes ou deplaces publiques encourage la di-versification sociale de la popula-tion. Le démantèlement desgrandes entreprises permet d’ou-vrir de nouvelles voiries. La di-versité est totale, qui mêle entre-prises industrielles, commerces,habitat sordide, maisons de rueabritant des ateliers domestiques,maisons “de maître” plus presti-gieuses pour la bourgeoisie.

Toujours plus à l’ouest

Un rapide coup d’œil sur unecarte actuelle de la communemontre toujours une différencemarquée entre les deux parties deMolenbeek, dont l’ouest apparaîtcomme nettement plus vert, plusrésidentiel, au maillage des ruesbeaucoup moins dense. C’est làque se trouvent les exploitationsagricoles. Les autres activitéséconomiques ne s’y implanterontque tardivement, et de manièrebeaucoup moins dense qu’à l’estde la commune.

En réalité, l’urbanisation est limi-tée par le chemin de fer del’Ouest et par la gare du mêmenom (mise en service en 1872).Cette gare de formation va relierpar l’ouest les stations du Nordet du Midi, mettant ainsi unterme à la liaison ferroviaire desboulevards. L’intérêt de la gareest bien sûr de faciliter l’approvi-sionnement des entreprises etl’expédition des produits qu’ellesgénèrent. Elle permet aussi à lamain-d’œuvre de se rendre plusfacilement sur son lieu de travail.Même si de nombreux ouvrierss’installent à proximité de l’entre-prise qui les emploie, comme entémoignent les nombreuses citésqui fleurissent dans ces quartiers.

À partir de l’extrême fin du XIXe

siècle, l’urbanisation progresse àla hauteur de la gare, à l’estcomme à l’ouest du chemin defer. Autour de la gare, d’autresentreprises s’implantent bientôt: outre les petits ateliers ou entre-pôts peu spécialisés, sans liens di-rects avec les grandes filièresproductives, on compte surtoutquelques grandes entreprises qui

donnent l’impression d’être iso-lées au milieu d’un paysage en-core très rural. C’est le cas deDelhaize, certainement l’ensei-gne la plus connue de Molenbeek(VOIR L’ILLUSTRATION DE COU-VERTURE).

À l’ouest de la commune, les ter-rains à bas prix, la proximité duchemin de fer, les possibilitésd’extension ont donc joué le rôlede facteurs d’attraction pourquelques grandes entreprises quiont choisi ces espaces pour déve-lopper leurs activités. Mais il nefaut pas négliger le rôle de lachaussée de Gand, le long de la-quelle se développent, jusqu’àBerchem-Sainte-Agathe, denombreuses activités commer-ciales et industrielles. Durantl’Ancien Régime déjà, cet axeavait joué un rôle important dansle développement économiquede Molenbeek. Les importantsmouvements de main-d’œuvreont facilité ces évolutions.Comme Delhaize a employé plusde 1.000 personnes, le site et l’ha-bitat se sont développés.

La fin des usines

Au-delà des années 1930, cepen-dant, l’implantation de nouvellesentreprises à l’origine de l’urba-nisation a épuisé ses effets. Lesimportantes imprimeries Hayezet Guyot par exemple, qui quit-tent le centre ville, utilisent d’an-ciennes implantations de l’est deMolenbeek, complétées éven-tuellement par de nouvellesconstructions.

Le Molenbeek du XIXe siècle ainduit une urbanisation mixte defabriques, d’ateliers, de commer-

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La population de Molenbeek

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ces, d’habitat modeste mais aussibourgeois. Après la SecondeGuerre mondiale, c’est laconstruction résidentielle quidésormais est à l’origine de laformation de la ville nouvelle.

La crise économique, urbaine etfinancière des années ‘70 provo-que la multiplication d’abandonsde bâtiments qui se dégradent.De nombreuses friches apparais-sent, comme celle de la brasserieVandenheuvel qui marque triste-ment le paysage du côté de lagare de l’Ouest. Cette évolutionévoque, pour l’observateur exté-rieur, les ravages d’une véritableguerre. Cependant, la réutilisa-tion d’anciens bâtiments indus-triels pour de nouvelles affecta-tions devient courante : laraffinerie Graeffe, rue de Man-chester, est ainsi reconvertie au-jourd’hui en lieu de spectaclevoué à la danse contemporaine(le Plan K). Dans le quartier ma-ritime, les tabacs Gosset ont cédéla place notamment à Télé-Bruxelles. D’anciennes surfacesindustrielles sont aussi transfor-mées en logements, qu’il s’agisseou non de lofts, dont la mode serépand à Molenbeek aussi.

Quelques marques célèbres quiont fait la gloire de Molenbeek

subsistent dans les mémoires : lacassonade Graeffe, les tabacsAjja, les cigarettes Boule d’Or,Boule Nationale ou Saint-Mi-chel, la gueuze Belle-Vue (mo-lenbeekoise après la SecondeGuerre mondiale), les pâtes l’Épicréées par la minoterie Farcy, lesproduits Delhaize, ... Les rues etles quais des quartiers où cesmarques étaient produites por-tent des noms qui évoquent demanière explicite le caractère in-dustriel de ceux-ci : rue de Bir-mingham, rue de Manchester,rue de Liverpool, rue de la Sa-vonnerie, rue des Houilleurs, ruedes Ateliers, quai de l’Industrie,

quai de Mariemont, quai desCharbonnages...

La société industrielle a large-ment façonné le passé mais ellereste bien visible au cœur mêmede l’actualité de la commune.

Christine Dupont,Conservatrice à La Fonderie

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L’exposition se tient à La Fonderie, 27

rue Ransfort, à 1080 Bruxelles du11 février au 15 octobre 2006.

de 10h à 17h dumardi au vendredi et de 14h à 17h lessamedis, dimanches et jours fériés.

5€ tarif normal, 4 €pour les seniors, 3€ tarif réduit.

(enfrançais et en néerlandais) : forfait de60€ en plus du prix d’entrée (réduc-tions pour les écoles).

02/410.99.50.

La publication est un numéro spé-

cial des Cahiers de La Fonderie.124 pages présentent la communeet ses différents visages dans desarticles inédits et richement illus-trés, documentés exceptionnelle-ment par des cartes en couleur. Lecahier est disponible au prix de15€ au Musée, aux librairies Quar-tiers Latins et P.U.B. (U.L.B.) oupar envoi postal après versementde 18€ (15€ + 3€ de frais de port)sur le compte : 068-1048190-35(avec mention Cahier Molenbeek).

Plus d'informations sur le site de LaFonderie :

Animation au Plan K, ancienne RaffinerieGraeffe (Administration communale deMolenbeek-Saint-Jean, photo : EmmanuelFrancq, 2005).

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“Molenbeek, récitsde ville”

Heures d’ouverture :

Prix d’entrée :

Visites guidées pour les groupes

Infos/réservations :

Molenbeek, une com-mune bruxelloise

www.lafonderie.be

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1. Législation minière1 & 2

a) Sous l’ancien régime

A quelle époque remonte, en no-tre pays, l’exploitation de lahouille ?

Dans le foyer de l’hypocausted’une villa gallo-romaine, dontles ruines ont été découvertes, en1907, au milieu de la place Saint-Lambert, à Liège, on a retrouvédes blocs de charbon à moitiéconsumés. Il est donc certain quela houille a été utilisée à Liège dèsles premiers siècles de notre ère.On peut affirmer, par contre,qu’elle ne faisait pas, à cette épo-que, l’objet d’une exploitation ré-gulière. Occasionnellement, auhasard des découvertes, on utili-sait les affleurements voisins deshabitations ; les forêts environ-nant de toutes parts la bourgade,suffisaient largement à ravitaillerles habitants en combustibles, etil était sans intérêt de rechercherdans le sol un équivalent dont lebesoin ne se faisait pas sentir.

Dans le dernier quart du XIIe siè-cle, par contre, les défrichementssuccessifs éloignent les forêts deLiège ; on se procure plus diffi-cilement le bois de chauffage ; leprix en devient plus élevé. Peu àpeu, on s’habitue à lui substituerla houille et l’on reconnaît lesavantages de celle-ci. Attaquantles couches affleurant à la sur-face, chacun se contente d’abord

d’extraire le charbon qui lui estnécessaire. On opère par tran-chées, à ciel ouvert. Puis, les re-cherches se multiplient ; le char-bon devient un objet decommerce. C’est à l’année 1195,sous le règne d’Albert de Cuyck,qu’un contemporain, Reiner,moine de l’abbaye de Saint-Jac-ques, fait remonter ces débuts del’industrie houillère.

A partir du XIIIe siècle, nouscommençons à trouver, dans leschartes et actes relatifs à des ces-sions de terrain, des stipulationsrelatives à la houille que ces ter-rains peuvent contenir. La plusancienne pièce où pareille clausefigure, est une charte du monas-tère du Val Saint-Lambert, demai 1228 ; elle vise une terre si-tuée à Ans. Un document de1235 de la collégiale Saint-Bar-thélemy nous apprend que l’ex-traction de la houille se pratiquedès alors suivant un système de-venu usager. C’est du XIIIe siècleque date la création de la Courdes Voirs Jurés du charbonnage.Le plus antique monument denotre législation minière, les Sta-tus et Ordinanche del Mestier de Cher-bonaige, remonte à 1318 ; il coor-donne les règles coutumières envigueur.

De tout temps, à Liège, la pro-priété du sol a emporté la pro-priété du dessous : qui possèdele comble, possède le fonds. Lepropriétaire peut exploiter son

terrain sans avoir besoin d’au-cune autorisation quelconque ; ilpeut également, à son gré, céderla mine en tout ou en partie.

Au XIIIe siècle, aux débuts del’industrie houillère, les terres dela banlieue liégeoise apparte-naient exclusivement aux égliseset aux abbayes. Les exploitationsfurent cependant des plus nom-breuses. Les églises et les ab-bayes, en effet, concédaient, engénéral, l’exploitation des minesse trouvant sous leur sol, et lesconcessions ne portaient que surdes terrains de peu de superficie.Il n’était guère que l’Abbaye duVal Saint-Lambert, “le couventcharbonnier”, qui exploitât elle-même ses mines : elle possédaitplusieurs fosses dirigées par unmoine, qui portait le titre de Maî-tre des houillères.

Toutefois, les difficultés crois-santes de l’extraction amenèrentprogressivement une concentra-tion, sans laquelle les progrès dela technique nouvelle n’eussentpas été possibles. L’exploitation àciel ouvert est bientôt arrêtée parl’importance croissante des dé-blais et les venues d’eaux. Ondoit exploiter en galerie descen-dante suivant la pente des cou-ches ; puis, la difficulté de soute-nir ces voies inclinées etd’amener à la surface les produitsde l’abattage, conduisent à l’ex-ploitation par puits vertical, seulmoyen de développer convena-blement les déhouillements. Descapitaux de plus en plus impor-tants deviennent, en consé-quence, nécessaires. On voitalors apparaître des sociétés, les“couples de maîtres”, composéesde grands bourgeois et compre-nant jusqu’à 15 et 16 membresou comparçoniers.

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ETUDE

1. Législation minièreSous l'ancien régime, périodes française, hollandaise et belge

2. Ecoles des minesParis, Liège, Mons

3. Accidents survenus dans les travaux souterrains4. Eclairage minier

Davy, Boty, Mueseler, Marsault, Wolf5. Travail des femmes et des enfants

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Esquisse d'un historique de la législation minière et ducorps des ingénieurs des mines

Plan de l’article

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A ces sociétés, la législation avaitdonné peu à peu la possibilitéd’obtenir un champ d’activitéplus vaste que les concessionsprimitives. Lorsqu’un proprié-taire n’exploite pas lui-même lahouille se trouvant dans son sol,on peut obtenir, par enseigne-ment de justice, le droit de tirermines de ce terrain, en payant aupropriétaire le terrage et le dou-ble intérêt : en 1582, quantité demines étant noyées, le prince Er-nest de Bavière accorde la pro-priété de celles-ci à ceux qui lesdémergeront. L’Etat en arrivedonc à octroyer de véritablesconcessions sur le terrain d’au-trui, lorsque le propriétaire neveut pas exploiter ou n’en est pascapable.

Il ne faut certes pas exagérerl’importance de ce mouvementde concentration. Au milieu duXVIIIe siècle, on compte 98 fos-ses à houille entre Ivoz-Ramet etCheratte, dont une vingtained’une importance suffisantepour permettre une exploitationrationnelle.

Car à l’augmentation des difficul-tés de l’extraction et aux possibi-lités que crée l’étendue plusgrande des concessions, corres-pond un développement pro-gressif des règles techniques ré-gissant l’industrie houillère.

La Cour des Voirs Jurés du char-bonnage a eu, au point de vuetechnique, la même influenceheureuse que celle qu’elle a exer-cée sur l’évolution du droit mi-nier. Gardienne des usages etcoutumes juridiques dont elle at-testait l’existence en des avis ourecords, connaissant en premièreinstance de toutes les causes enmatière de mines (litiges entreexploitants et propriétaires de lasurface, contestations entre ex-ploitants voisins, difficultés entreles charbonnages et leurs four-nisseurs), la Cour des Voirs Jurésexerçait en même temps une sur-

veillance active et constante surtoutes les exploitations. Rassem-blant et coordonnant les leçonsde l’expérience, les Voirs Juréstracent aux exploitants les règlesà suivre, autorisent les travauxavantageux, interdisent ceux quipourraient causer du dommagesoit à la surface, soit aux exploi-tations voisines, effectuent lelevé des travaux souterrains,exercent les fonctions d’experts.Grâce à leur action, les travauxprennent une marche plus ra-tionnelle, plus sûre. Dès le XVIIe

siècle, on n’en est plus à la pé-riode d’apprentissage. Nousnous trouvons en présence deméthodes d’exploitation logique-ment établies et d’une industrieen plein épanouissement.

b) Période française

Pendant 20 ans, notre contrée futrattachée à la France.

Déjà, dès 1431, Charles VI avaitdénié à tous seigneurs le droit detaxer les mines. Mais c’est en1744 que la France a réellementdépouillé les Seigneurs hauts-jus-ticiers de tout droit sur les ex-ploitations minières. Pour sur-veiller les travaux souterrains,elle avait établi en 1781 quatrepostes d’inspecteurs.

A la veille de la Révolution, unservice plus étendu comprenaitun intendant général, deux com-missaires du Roi, 26 inspecteurs,ingénieurs et élèves ingénieurs.Cette nouvelle organisation avaitpris plus de force grâce à la créa-tion, par arrêt du Conseil du RoiLouis XVI du 19 mars 1783, del’Ecole des Mines.

Avant d’étoffer davantage soncadre administratif, la France sedonne une première loi de cadre: celle du 28 juillet 1791, publiéepar Louis XVI le 23 mars 1792.Désormais, en France, “les mi-nes et minières, tant métalliquesque non métalliques, ainsi que les

bitumes, charbons de terre ou depierre et pyrites, sont à la dispo-sition de la Nation”. Ce n’est pasune nationalisation, comme lesmots pourraient aujourd’hui lelaisser croire. Cela signifie que lessubstances minérales ne pour-ront être exploitées que duconsentement de la Nation etsous sa surveillance. Dès lors,l’exploitation du fond est séparéede la propriété de la surface : lepropriétaire du sol conserve ce-pendant les cent premiers piedsdu gisement et bénéficie de lapréférence, lors de l’octroi de laconcession du sous-sol. Un nou-veau type de propriété est né,concessible pour 50 ans et limitéà six lieues carrées.

La loi de 1791 est muette sur lerôle des fonctionnaires des mi-nes. C’est le Comité de Salut Pu-blic qui s’assure du concours depersonnes compétentes. Il créepar arrêt du 13 messidor de l’anII (1er juillet 1794) une “Agencedes Mines”, comprenant trois ci-toyens qui auront la haute mainsur les mines de la République,puis de l’Empire. En 1810 ce-pendant, l’un d’eux conserveraseul la direction de l’Administra-tion, avec le titre de Directeur gé-néral des Mines.

Le 18 messidor de l’an II (6 juil-let 1794), un arrêté du Comité deSalut Public groupe, sous l’auto-rité de l’Agence des Mines, 60inspecteurs, ingénieurs et élèvesdes mines. Le même arrêté divisele territoire de la République enhuit arrondissements miniers.

Sur la liste des Officiers des Mi-nes de la République, nomméspar le Comité de Salut Public, le15 vendémiaire de l’an III (4 oc-tobre 1794), figure le citoyenBAILLET de BELOY, inspec-teur des mines, qui viendra enBelgique.

A partir du 22 octobre 1795,l’Agence des Mines s’appelle le

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“Conseil des Mines de la Répu-blique” qui est rattaché au Minis-tère de l’Intérieur.

Dix-sept mois après la bataille deFleurus (1794), les Représentantsdu Peuple décrètent, à Bruxelles,par arrêté du 20 brumaire de l’anIV (20 novembre 1795), l’entréeen vigueur de la loi de 1791 dansles territoires réunis à la Républi-que.

Au cours de ces dix-sept mois, lecitoyen BAILLET de BELOY,Officier des mines français enBelgique, surveille l’exploitationdes mines de la Belgique. Les ré-sultats de ses enquêtes sont re-produits dans le Journal des Mi-nes de la République.

Ses rapports ne révèlent aucuneprétention de conquête : ils sontobjectifs, d’ordre technique etsurtout économique, laudatifs engénéral pour les exploitants. Ilsont trait notamment à la cala-mine de Limbourg, à la mine deplomb de Vedrin, aux minesd’alun, à la fabrication du sel am-moniac dans les pays conquis,aux scieries de marbre, aux fabri-ques de fer et au danger du gri-sou.

De son côté, le Conseil des Mi-nes de la République ne montreaucun empressement pour en-voyer d’autres inspecteurs enBelgique. Il laisse, durant les pre-mières années, aux préfets desdépartements le soin de faire ap-pliquer la loi de 1791. Ce n’estque le 25 germinal de l’an VI (14avril 1798), que l’inspecteurBAILLET de BELOY est chargédes départements réunis à la Ré-publique et que l’ingénieurCHAMPEAUX est placé en sta-tionnement à Liège, à la tête dupremier arrondissement minéra-logique de la première division,laquelle comprend huit départe-ments dont le département del’Ourthe (Liège).

En 1802, l’ingénieur LENOIRsuccède à CHAMPEAUX. En-suite, un décret impérial du 19octobre 1806 nomme à la placede celui-ci l’ingénieur MA-THIEU, avec les instructions sui-vantes :

“Art. 1er – Il sera placé en rési-dence, dans le département del’Ourthe, un ingénieur ordinairedes mines, qui aura sous sa direc-tion un élève de l’école des mi-nes, et trois conducteurs prisparmi les mineurs de profession.

“Art. 2 – Cet ingénieur serachargé de la surveillance généraledes exploitations desdites mines.

“Art. 3 – Il portera spécialementson attention et ses soins à laconservation des galeries ditesareines franches, qui fournissentdes eaux à la ville de Liège.

“Art. 4 – Pour satisfaire provisoi-rement aux dépenses de ce modede surveillance, d’une manièreanalogue à ce qui se pratiquait ci-devant dans le pays de Liège, ilsera payé la somme de vingt-qua-tre francs par mois, par chaqueexploitation en activité dans ledépartement.”

Trois ans plus tard, un nouveaudécret impérial confirmera queles fonds provenant des redevan-ces perçues sur les mines du dé-partement de l’Ourthe, doiventêtre exclusivement appliqués auxfrais de surveillance et d’amélio-ration des mines du départe-ment. Ces dépenses seront déter-minées et ordonnées par leMinistre de l’Intérieur, sur avisdu préfet et de l’Administrationdes Mines. Les taxes qui, en par-tie, indemnisent les ingénieursdes mines deviendront vite im-populaires et ces derniers serontaccusés d’en accroître l’impor-tance à leur profit.

En 1809, paraît dans le Journaldes Mines de la République un

rapport sur les houillères du dé-partement de Sambre et Meuse,signé par BOÜESNEL, ingé-nieur au Corps impérial des Mi-nes, à Namur. BOÜESNEL s’in-téresse en 1811 aux mines de ferde Sambre et Meuse, en 1812 auxardoisières, en 1813 à la mine deVedrin. Il reste chez nous sous lerégime hollandais et deviendra lechef de l’Administration des Mi-nes du Royaume des Pays-Bas.

A la veille de la révision de cettepremière loi de cadre de 1791 parcelle du 21 avril 1810, l’Adminis-tration des Mines de l’Empirecomptait 60 personnes : troisconseillers et 57 inspecteurs, in-génieurs et élèves.

Un état des traitements, dressépar le Conseil des Mines le 22 dé-cembre 1808, donne le total desrémunérations annuelles qui at-teint 143.800 F ainsi que leur dé-tail.

Un Conseiller était payé 8.000 F.Les onze inspecteurs et ingé-nieurs en chef reçoivent chacun3.000 F l’an. A cette somme, ilfaut ajouter des indemnités exi-gées des territoires surveillés, de600 à 900 F par département.

Les vingt-cinq ingénieurs ordi-naires touchent 2.500 F et lesdix-huit élèves 600 F. Quant aubureau qui assiste le Conseil desMines, il comprend un secrétaire,douze membres et six personnesde service, dont un portier autraitement de 800 F.

Les frais mis à charge des préfec-tures et parfois des exploitantssont souvent jugés excessifs. Dèslors, les interventions des ingé-nieurs des mines sont mal inter-prétées : elles soulèvent mêmede vives protestations lorsqu’el-les entraînent des déchéancespour des manquements considé-rés comme légers par les intéres-sés. Beaucoup d’exploitants bel-ges souhaitent une limitation de

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la surveillance des officiers desmines. Ils trouvent un allié en lapersonne de l’Empereur. “Napo-léon lui-même craint toujours lestracasseries que ces agents peu-vent faire aux propriétaires”, lit-on dans un procès-verbal desséances du Conseil chargé de larévision de la loi.

D’autre part, la loi de 1791 favo-risait le propriétaire de la surface,au détriment de l’économie de lamine elle-même. Par contre, elledonnait peu d’assurances auxnouveaux exploitants, qui redou-taient d’investir au profit de leurssuccesseurs éventuels, puisque laconcession était limitée à 50 ans.

Voulant concilier les intérêts dupropriétaire de la surface avecceux des concessionnaires dusous-sol, la loi avait permis aupremier de pratiquer des fouilleset d’extraire à son profit jusqu’àcent pieds de profondeur : elleavait imposé au second des char-ges et des obligations quicréaient des obstacles à une saineexploitation des veines profon-des.

Dès 1806, le Corps législatiffrançais avait entrepris la révisionde la loi minière de 1791. LeConseil chargé de cette révisionne tarde pas à être l’objet denombreuses sollicitations, biensouvent contradictoires. Ainsi,par exemple, malgré l’oppositiondes trois Conseillers des mines,conscients des graves inconvé-nients des concessions par cou-ches, les exploitants du Hainauten réclament le maintien et finis-sent par imposer leur point devue.

La loi du 21 avril 1810 fut votéepar 230 voix contre 11. Elleconcède la mine à perpétuité, re-tire au propriétaire le droit depréférence et le droit d’exploitersans concession jusqu’à 100pieds sous terre. Elle favorised’autre part le concessionnaire

qui fait preuve de capacité. Elleencourage une exploitation ra-tionnelle en accordant un droitd’occupation, pour empêcherqu’un propriétaire de la surfacepuisse refuser de céder son ter-rain à l’exploitant qui estime judi-cieux de creuser un puits en cetendroit.

Cette fois, la loi de 1810 contientaussi un titre relatif à la surveil-lance sur les mines par l’adminis-tration.

Le décret du 18 novembre 1810,en réorganisant le Corps impérialdes Mines, établit une hiérarchieparmi ses membres. Il crée leConseil d’Etat, dont l’autorité sesubstitue à celle du Conseil desMines.

La discipline du corps est confiéedorénavant à un directeur géné-ral, le comte LAUMONT,Conseiller d’Etat, attaché auprèsdu Ministre. Mais ce Conseild’Etat n’a plus qu’une chargeconsultative. Il reste composédes trois “sages” de 1794, qui,par la même occasion, sont nom-més inspecteurs généraux sié-geant à Paris. En province, lenouveau cadre comporte 75 ins-pecteurs, ingénieurs en chefs, in-génieurs ordinaires et élèves.

Au lieu de huit divisions miniè-res, l’Empire en compte mainte-nant douze, dont deux chevau-chent la France, les Pays-Bas, laBelgique et l’Allemagne.

Quant au département de l’Our-the, il fait toujours partie de lapremière division, égalementsous la tutelle de l’inspecteurBAILLET de BELOY. Son chef-lieu est Liège, où l’ingénieur enchef MATHIEU et son succes-seur BLAVIER, assistés l’un etl’autre par l’ingénieur ordinaireMIGNERON, sont fort préoc-cupés par la lutte contre les acci-dents ; car, en cette fin du pre-mier Empire, le bassin de Liège

s’est acquis le redoutable privi-lège de la fréquence des inflam-mations de grisou et des coupsd’eau.

Hélas, il faut en convenir : la po-lice des mines constitue souventun martyrologe. La triste expé-rience des accidents obligea, eneffet, le Gouvernement Impérialà prescrire des mesures de sécu-rité et de prudence. En 1812,deux désastres arrivés dans le dé-partement de l’Ourthe accélère-ront l’intervention du pouvoir.Ce fut le 10 janvier une explosionde grisou qui fit 68 victimes, à lamine de Horloz, et puis, le 28 fé-vrier, la catastrophe de la bure deBeaujonc, où, ignorant la pré-sence de vieux chantiers, faute deplans, des mineurs percèrent unbain d’eau et provoquèrent uneinondation brutale des galeries etdes puits environnants. Durantcinq jours, le sort de beaucoupd’ouvriers demeura incertain :70 parvinrent à échapper grâce àl’héroïsme des sauveteurs, mais22 restèrent noyés ou ensevelissous les éboulis.

Le maître ouvrier Hubert GOF-FIN, enfermé avec ses compa-gnons, montra au cours du sau-vetage un courage qui est restécélèbre. Il fut décoré par Napo-léon.

Quant à l’ingénieur MIGNE-RON, qui s’était déjà signalé àl’accident du Horloz, il dut luttercontre les ouvriers de Beaujoncqui, par excès de zèle, voulaientconduire les travaux de dégage-ment dans une mauvaise direc-tion.

Sans tarder, le Ministre de l’Inté-rieur impose, par arrêté du 3mars 1812, le levé de plans et decoupes et l’exécution de sonda-ges préventifs aux eaux. Le len-demain, il dépêche à Liège l’ins-pecteur BAILLET de BELOY etun ingénieur en chef, aux ordresdu préfet. Ces deux émissaires se

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réunissent en comité avec lesdeux ingénieurs résidents, MA-THIEU et MIGNERON, en vuede rechercher les causes de la ca-tastrophe et de proposer les me-sures à prendre dans l’immédiat.MATHIEU fera valoir le dé-vouement dont il a fait preuve àBeaujonc, pour solliciter la placed’inspecteur général devenue va-cante en janvier 1813.

Entretemps, l’Empereur reçoit lerapport de son Ministre au sujetdes causes qui, selon lui, sont àl’origine des récents accidents.

Napoléon transmet ce rapportau Conseil d’Etat et, sur l’avis dece Conseil, arrête le 3 janvier1813 une série de prescriptionsqui tendent à prévenir les acci-dents, dont la tenue des registresd’avancement journalier des tra-vaux et l’exécution de plans inté-rieurs que vérifieront les ingé-nieurs des mines.

Pour exécuter les plans que doi-vent vérifier les ingénieurs desmines, il est question, dès cetteépoque, de confier ces opéra-tions à des géomètres. Un arrêtéministériel du 3 mars 1812 pro-pose l’institution des géomètres,à Liège, et un arrêté du préfet del’Ourthe nomme d’office desgéomètres, parce que les exploi-tants ne satisfont pas au travailrequis.

Quant au décret impérial du 3janvier 1813, il restera plus d’unsiècle la base des prescriptions

réglementaires de sécurité. Il nesera définitivement remplacéchez nous que par les disposi-tions de l’arrêté royal du 5 mai1919, portant règlement généralde police sur les mines, minièreset carrières souterraines.

c) Période hollandaise

A la suite de la retraite des ar-mées impériales en 1814, les in-génieurs des mines français nousquittent aussi, sauf BOÜES-NEL, qui reste à Namur et passeau service du Gouvernementhollando-belge. Pour l’assister àMons, on trouve comme com-missaire royal un autre ingénieurdu Corps des Mines français quipassera également au service dela Belgique.

Le 24 mars 1816, un arrêté duRoi Guillaume transfère, au Mi-nistère du Waterstaat et des Tra-vaux publics, l’administration etla surveillance des mines. Le 20avril, le Ministre désigne un ins-pecteur du Waterstaat en rempla-cement de l’ingénieur en chefdes mines, pour assurer lecontrôle des exploitations miniè-res. Mais, dès le 10 avril 1817, lemême Ministre invite BOÜES-NEL à s’occuper du service ordi-naire général dans la province deNamur et du service supérieurdes mines dans les provinces deNamur, Hainaut, Liège, Lim-bourg et Luxembourg.

Sans attendre les propositions deBOÜESNEL, le Ministre du Wa-terstaat détermine le 7 mai 1818les attributions respectives desingénieurs et des commissairesroyaux des mines, nouveaux pos-tes créés pour suppléer au man-que d’ingénieurs.

Petit à petit, les affaires minièresreviennent au service des mineset, le 17 décembre 1819, un ar-rêté royal confie la charge des mi-nes et des carrières à un seul in-génieur en chef, à savoir

BOÜESNEL. Pour l’assister àMons, on trouve comme com-missaire royal un autre ingénieurdu Corps des Mines français,CHEVREMONT, qui passeraégalement au service de la Belgi-que. A Liège sont présents deuxcommissaires royaux, l’un pourla rive gauche, l’autre pour la rivedroite de la Meuse.

d) Période belge (jusqu’au dé-but XXe)

Dès le 29 août 1831, un arrêté duRoi Léopold Ier réorganise com-plètement le service des mines etle transfère au Ministère de l’In-térieur. Seules les provinces ditesminières restent soumises aucontrôle des ingénieurs des mi-nes. Elles forment trois divisions,Mons, Namur et Liège, dirigéeschacune par un ingénieur en chefassisté d’un sous-ingénieur.

Les ingénieurs en chef corres-pondent directement avec le Mi-nistre et leurs divisions sont sub-divisées en sept districts, àchacun desquels sont attachés uningénieur et plusieurs conduc-teurs des mines. Après un an, lessous-ingénieurs sont appelés àdevenir ingénieurs.

Près du département de l’Inté-rieur est constitué un Conseil desIngénieurs des Mines. En fontpartie les trois ingénieurs en chefet trois autres membres déléguéspar les chambres de commerce.Ce Conseil des Ingénieurs desMines devait connaître des de-mandes en concession et des af-faires contentieuses que ne pour-raient traiter les autoritésprovinciales. Mais le 20 octobre1832 un arrêté royal abroge cesdispositions. L’instruction desaffaires en cours patienterajusqu’à la création, par la loi du 2mai 1837, du Conseil des Mines,organe de composition toute dif-férente qui reprendra les fonc-tions conférées au Conseil d’Etatpar la loi du 21 avril 1810.

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Dévouement de Goffin et de son fils.Gravure, vers 1812. S.A. des charbonnages dePatience et Beaujonc. Les mines et les arts à tra-vers les âges / Société de l'industrie minérale, 1950.Coll. CLADIC.

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L’arrêté royal du 13 janvier 1837replace l’Administration des Mi-nes au département des Travauxpublics, sous l’autorité du Direc-teur général des Ponts et Chaus-sées et des Mines.

Entretemps, un événement mar-quant est survenu : c’est la créa-tion, à Liège, d’une Ecole spé-ciale des Mines de l’Etat, qui metl’institution du Corps des Minesen rapport avec l’organisation del’enseignement supérieur.

Le premier poste d’inspecteurgénéral des mines est créé parl’arrêté royal du 10 juin 1844. Ilest confié à Jean de VAUX, ingé-nieur en chef à Liège. Son traite-ment annuel est porté à 12.000 F.Le 15 septembre 1845, cet ins-pecteur général est nommé Chefdu Corps des Mines et est assi-milé à l’inspecteur général desPonts et Chaussées

En 1850, l’A.R. du 28 mars neparle plus d’inspecteur général etramène le cadre à deux directionset six districts, en excluant leLimbourg. Il reste ainsi à la têtedu service des mines du paysdeux ingénieurs en chef : l’unfixé à Liège, l’autre à Mons.

En 1860, un inspecteur généraldes mines est de nouveau attachéà l’Administration centrale desPonts et Chaussées et des Mines.Il concourt, sous les ordres duDirecteur général de l’Adminis-tration des Ponts et Chaussées etdes Mines, à l’expédition de tou-tes les affaires au niveau de l’ad-ministration centrale. Il assumela surveillance des services mi-niers de provinces, c’est-à-diredes deux ingénieurs en chef, des46 ingénieurs et sous-ingénieursprévus au cadre de l’époque.

En 1879, le Roi institue une com-mission chargée de préparer larévision des règlements de policesur les mines.

L’année 1884 marque une étapenouvelle. Devançant d’un mois lapublication d’un Règlement depolice des Mines, l’arrêté royal du29 mars 1884 consacre la scissionde l’Administration des Mines decelle des Ponts et Chaussées. Cemême arrêté procède à une re-classification hiérarchique de sesmembres tant en province quedans la capitale.

Quant aux travaux de la commis-sion, ils aboutissent à l’arrêtéroyal du 28 avril 1884, lequelcontient des dispositions concer-nant les règles pour assurer la sé-curité du travail, l’admission desenfants, la tenue des plans, lespuits, la descente et la montée,l’aérage, l’éclairage, les explosifs,les mesures à prendre contre lescoups d’eau, les dispositions spé-ciales pour prévenir les accidentset les mesures à prendre en casd’accident.

2. Ecoles des mines

Dans ce chapitre, je me limiteraià l’enseignement dans les écolesd’ingénieurs des mines de Paris,fondée en 1783, de Liège, fondéeen 1825, de Mons, créée en 1836; je cite, pour mémoire, Louvain,décidée en 1864, Bruxelles, ou-verte en 1873, et Gand, fondéeen 1925.

a) Ecole des Mines de Paris

Inorganisée depuis l’époque ro-maine, l’exploitation des minesmétalliques en France reprendvers le milieu du XVIIIe. L’admi-nistration des finances, à laquelle

les mines sont rattachées, a alorsune double préoccupation : ré-glementer la perception desdroits attachés à l’exploitationdes mines et former un person-nel capable de donner des ins-tructions techniques aux exploi-tants.

L’Ecole des Mines est créée parl’arrêt du Conseil du Roi du 19mars 1783.

Les cours sont donnés au 1er

étage de l’Hôtel des Monnaies,dans la salle où le chimiste miné-ralogiste Balthazar-GeorgesSAGE a rassemblé ses collec-tions.

Après un passage au PetitLuxembourg, l’Ecole s’installedéfinitivement en 1816 au Boule-vard Saint Michel, à l’hôtel duDuc de Vendôme, vendu commebien national à la Révolution.Elle s’y trouve toujours !

Sa mission, fixée par l’ordon-nance du 5 septembre 1816, estde former les futurs membres del’Administration parmi les élèvesissus de Polytechnique, ainsi queles futurs responsables d’usines.

b) Ecole des Mines annexée àl’Université de Liège

Le fondateur de l’Université deLiège fut Guillaume Ier, roi desPays-Bas, qui fit voter la charteuniversitaire intitulée “Règle-ment sur l’organisation de l’En-seignement supérieur dans lesprovinces méridionales duRoyaume des Pays-Bas”. L’article7 de cette charte prévoyait lacréation de trois universités del’Etat établies respectivement àLiège, Louvain et Gand ; cha-cune d’elles comportant les cinqfacultés traditionnelles.

Les cours s’ouvrirent le 3 no-vembre 1817. Il y eut 259 élèvesen 1818, 477 en 1826, 540 en1830.

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Frans Van Kuyck, 1880. Coll. CommunautéFrançaise.

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Il est à noter que la Sociétél’Emulation de Liège, fondée en1779, avait patronné l’école dechirurgie Saint-Clément, consi-dérée à juste titre comme le ber-ceau de la faculté de médecine del’Université de Liège.

Sous la domination françaiseavait été créé un Lycée impérial,qui devint “le Gymnase”, en1814, au temps de l’éphémèreadministration prussienne.

Créée par arrêté royal du 13 mai1825, l’Ecole des Mines de Liègefut intégrée dans l’Ecole d’ingé-nieurs des Arts et Manufactures,et rattachée comme celle-ci à laFaculté des Sciences. L’adminis-trateur-inspecteur de l’Univer-sité, M. ARNOULD, en fut lepremier directeur.

Cette Ecole des Mines ne pritréellement son essor qu’en 1835,à la faveur de la première loi or-ganique de l’enseignement supé-rieur. Cette année-là, la chaired’exploitation des mines, restéele plus souvent sans titulaire, futconfiée au professeur LE-SOINNE, ancien élève del’Ecole des Mines de Paris ; l’an-née suivante, le français DEVAUX en reçut la charge qu’iltransmit à TRASENTER en1844.

Au début, l’école ne donna pasentière satisfaction. Dans unebrochure qui fit quelque bruit,Ch. DE BROUCKERE écrivait

en 1829 : “Les cours sont tropthéoriques, tandis que la pratiqueest de première nécessité dans lessciences et les arts industriels”.

Par les débouchés nouveauxqu’elle ouvrit aux ingénieurs,l’Administration des Mines, insti-tuée par arrêté royal du 28 août1831, donna un regain d’activitéà l’Ecole des Mines de Liège.

On envisagea d’abord la créationd’une école polytechnique dis-tincte de l’université, et une com-mission se prononça dans cesens en 1842. L’année suivantetoutefois, une autre commissionproposa d’ajouter simplementdes sections spéciales aux Facul-tés des Sciences des deux univer-sités de l’Etat : à Gand, les Pontset Chaussées, à Liège, les Mines.Cette thèse prévalut. La loi du 27juillet 1835 créa à Liège une sec-tion des mines.

L’arrêté royal du 27 septembre1836 porta de deux à quatre ansla durée des études. Les deuxpremières années, communesaux sections Arts et Mines,étaient consacrées à l’enseigne-ment théorique, tel le calcul dif-férentiel et intégral ; les deuxdernières années – troisième etquatrième – formaient l’écoled’application proprement dite.

Le programme de l’Ecole desMines comportait entre autre desexercices de lever de plans de mi-nes, des visites de chantiers enactivité, des excursions minéralo-giques et géologiques.

Autre particularité : l’Ecole desMines de Liège était subdiviséeen deux sections : la section su-périeure formait des ingénieurs,l’autre des conducteurs de mines.Cette organisation était calquée,rappelons-le, sur celle de l’Admi-nistration des Mines.

Pendant la durée de leurs études,les étudiants pouvaient être atta-chés au Corps des Mines, maissans rétribution. Ils ne prenaientrang dans la hiérarchie de ceCorps qu’après avoir terminéleurs études, et par ordre de mé-rite, jusqu’à épuisement des pla-ces disponibles.

L’arrêté royal du 6 mai 1842 ins-titua le Conseil de Perfectionne-ment de l’Ecole des Mines. C’estsur recommandation de ceconseil, en date du 28 août 1842,que la durée des études de la sec-tion d’application des ingénieursfut prolongée d’un an : trois aulieu de deux, ce qui portait à cinqans la durée totale des études.C’est encore ce même Conseil dePerfectionnement qui proposa,en 1845, la suppression de la sec-tion des conducteurs des mines.

Il semble que ce soit l’arrêté or-ganique du 25 septembre 1852qui ait créé le titre d’Ingénieur ci-vil des Mines. “Ces diplômes se-ront délivrés aux personnes quine désirent pas entrer au Corpsdes Mines, qu’elles aient pu ounon fréquenté l’école, mais à lacondition expresse qu’elles aientsubi les épreuves exigées par lesprogrammes”.

DE VAUX, attaché à l’Ecolependant huit ans, en fut le vérita-ble organisateur. Quant à LouisTRASENSTER, il enseigna lecours d’exploitation des minesdurant quarante ans, de 1844 à1884.

Sous le rectorat de TRASENS-TER, l’enseignement supérieurde l’Etat entra dans une voie

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Projet de Palais de l'Université de Liège.Estampe de J.N. Chevron en 1822. Coll.CLADIC.

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nouvelle, par l’association pluscomplète des travaux pratiquesaux leçons orales. En 1880,TRASENSTER propose d’éle-ver le niveau des études de l’en-seignement supérieur en général; pour justifier son point de vue,il signale que les universités alle-mandes n’ont cessé d’oeuvrerdans ce sens pour le plus grandbien de l’industrie allemande.TRASENSTER conseillait “dejoindre au but professionnelpoursuivi par les universités bel-ges, le but scientifique, et de don-ner le pas à celui-ci”.

En 1884, TRASENSTER futremplacer par HABETS, un deses anciens élèves et disciple.

En 1912, la chaire d’exploitationdes mines était confiée à LucienDENOEL, répétiteur du coursdepuis 1893, ingénieur au Corpsdes Mines à Mons, ancien pro-fesseur d’exploitation des minesà l’école industrielle du soir deDour.

Le Professeur LABASSE suc-cède à DENOEL. Le ProfesseurPierre STASSEN, directeur del’Institut national de l’Industriecharbonnière, devenu par la suiteINIEX, prend la relève.

Son frère Jean, Inspecteur géné-ral des mines, déjà chargé descours de sécurité minière, suc-cède à son frère. A sa retraite en1987, la charge est supprimée.

c) Faculté polytechnique deMons

Le 10 octobre 1836, sur proposi-tion du gouverneur J.B.THORN, qui avait succédé à DEPUYDT en 1834, le Conseil pro-vincial du Hainaut créait, àMons, une école d’ingénieurscomportant deux années d’étu-des et des spécialités multiples.

L’Ecole de Mons ayant adoptél’essentiel des programmesd’études de l’Ecole de Paris,

confia ses destinées à deux jeu-nes ingénieurs sortis de cette im-portante institution, GUIBAL etDEVILLEZ. GUIBAL avait lacharge de plusieurs cours, dontcelui d’exploitation des mines.DEVILLEZ enseignait la méca-nique, les constructions civiles etassumait en plus les fonctions dedirecteur de l’école. GUIBALavait 23 ans et DEVILLEZ 24ans !

L’école eut des débuts difficiles,car les milieux industriels del’époque comportaient essentiel-lement des praticiens de grandevaleur, mais sans formationthéorique appréciable. Certainsd’entre eux savaient à peine lireet écrire.

Mais les progrès techniques de-vaient trouver leur résonancedans les programmes de l’ensei-gnement supérieur.

Aussi en 1876, conscient de sesresponsabilités, le Directeur DE-VILLEZ proposa-t-il au Conseilprovincial de porter à quatre ansla durée des études de son école.

En 1903, la durée des études futportée à cinq ans ! A ce moment,le rayonnement de l’Ecole est siconsidérable que sur 298 ingé-nieurs occupés dans l’ensembledes charbonnages du pays, 181sortent de Mons.

C’est pour donner à ses ingé-nieurs, le prestige qu’ils méritentque l’Ecole prit le nom de “Fa-culté polytechnique de Mons”.

3. Accidents survenus dans lestravaux souterrains3

A la fin XIXe, Hyacinthe KU-BORN, Docteur à Seraing etProfesseur à l’Université deLiège, a publié une étude intitu-lée : “De l’exploitation des mi-nes en Belgique au point de vuede la sécurité des ouvriers qui ysont employés”.

Cette étude révèle notammentque le nombre d’ouvriers tués de1831 à 1896, par 10.000 travail-leurs occupés, passe de 31 à 17.

Pendant la même période, lenombre d’ouvriers tués par mil-lion de tonnes de houille extraiteest passé de 34 à 10.

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Faculté polytechnique de Mons. Coll. Fac-ulté Polytechnique de Mons

Tués par million de tonnes extraites.Province de Liège, 1850-1970. Histoire des ac-cidents de travail survenus dans les charbonnages dela région liégeoise depuis le depuis du XIXe siècle /Henri Delrée, 1992. Bulletin de l'Institutarchéologique liégeois, Tome CIV, Fig. 3, p.361. Coll. CLADIC.

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Le Docteur KUBORN rappellel’observation faite par le Direc-teur général des mines EmileHARZE : “Il serait injuste dene pas attribuer une bonne partde la décroissance des accidents àla mise en exécution du règle-ment général de police des minesde 1884, à l’organisation admi-nistrative de l’étude scientifiquedes accidents, qui ont aussicontribué à donner plus de sécu-rité au travail minier.”

4. Eclairage minier4 & 5

Les houilleurs s’éclairant par deschandelles, fixées à leur chapeaude cuir au moyen d’argile, chaqueapparition de grisou donnait lieuà un coup de feu.

Au début XVIIe, tous les jours,avant la descente du personnel,deux ouvriers, appelés ripasseurs,parcouraient les voies et les tra-vaux. Le premier, la tête envelop-pée dans un sac de toile, agitaitune pièce de tissu ; le second lesuivait à distance avec une chan-delle allumée.

Lorsque le dégagement de grisouétait trop important, on avaitd’autre moyen que de l’enflam-

mer volontairement : un ouvrier,appelé le pénitent, se rendait seulsur les travaux, muni d’une lon-gue perche à laquelle était fixéeune chandelle.

a) Lampe Davy (Sir Humphry,1778-1829)

Ce chimiste anglais découvre leprincipe du coincement de laflamme.

Sa lampe consiste uniquement enun tamis cylindrique (144 mailles

par cm carré) surmontant unelampe à l’huile grasse et entou-rant la flamme. Les fils métalli-ques de ce tamis forment écran.De ce fait, le pouvoir lumineuxest réduit de deux tiers.

A la suite d’accidents, les expé-riences ont établi que la lampeDAVY n’était pas de sûreté dansun mélange grisouteux en vi-tesse.

b) Lampes Boty, Clanny

Pour remédier au manque de lu-minosité de la lampe Davy, on in-tercala entre la lampe et le tamisun cylindre en cristal : lampe deporion à simple toile. De ce fait,on réalisa un premier progrès,toutefois sans améliorer la sécu-rité. Celle-ci fut cependant dansla suite augmentée par la super-

position d’un second tamis : lalampe CLANNY.

c) Lampe Mueseler (Mathieu,1799-1867)

La lampe MUESELER est d’ori-gine liégeoise (1841). Son inven-teur fut décoré de la Croixd’honneur par Napoléon III.

Cette lampe a été imaginée pourremédier au manque de sécuritédes lampes précédentes. Voici enquoi elle consiste : entre le verreet le tamis d’une lampe BOTY,on intercale un diaphragme hori-zontal en toile métallique portanten son centre une cheminée entôle.

Les gaz brûlés s’échappent par lacheminée, l’air entre au-dessusdu verre, traverse le diaphragmeet arrive à la flamme. Si ce cou-rant vient à être renversé, les gazbrûlés redescendent sur laflamme et l’éteignent. Dans lamine, c’est ce qui arrive fréquem-ment par inclinaison de la lampe.Nous verrons plus loin que cerenversement du courant gazeux,considéré longtemps comme unavantage, est en réalité un graveinconvénient. Il n’en est pasmoins vrai que la lampe MUE-SELER était la plus sûre parmitoutes celles présentées lors desexpériences ayant précédé l’éla-boration du règlement belge de1884. Aussi, jusqu’en septembre

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L'éboulement. La vie souterraine ou la mine etles mineurs / L. Simonin, 1867, fig. 84, p. 203.Coll. CLADIC.

Lampe de sûreté modèle Mueseler XXe

siècle. Lampes pour mines / Fabrique lié-geoise de lampes de sûreté, 1912 (?). Fig. 1, p.8. Coll. CLADIC.

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161616

1904, a-t-elle été imposée auxmines belges à l’exclusion detoute autre.

En effet, la profondeur et l’ex-tension des travaux avaient né-cessité des ventilateurs de plus enplus puissants, conduisant encertains endroits à des vitessesimportantes de courants gazeux.Ces courants, dont les inclinai-sons varient, mettaient les lam-pes DAVY, BOTY et MUESE-LER en défaut, ainsi que l’avaitmontré l’Ingénieur MARSAULT,Directeur des mines de Bessèges,et comme l’avait confirmé les ex-périences faites à Frameries, àl’Institut National des Mines, parles Ingénieurs du Corps des Mi-nes WATTEYNE et STAS-SART.

WATTEYNE et STASSARTsoumirent la lampe MUESE-LER à des courants d’air ascen-sionnels, soit verticaux, soit incli-nés à 45° sur l’axe de la lampe. Ilsconstatèrent qu’à partir d’une vi-tesse assez faible, 3 ou 4 mètres àla seconde, avec un teneur en gri-sou de 9%, le sens du parcoursde l’air dans l’appareil se renver-sait, la flamme passait immédia-tement au-dessus du diaph-ragme, puis, au bout de quelques

secondes, traversait à son tour letamis et passait au dehors.

d) Lampe Marsaut

C’est une lampe de porion à dou-ble toile, mais recouverte d’unecuirasse pour la soustraire à l’in-fluence des courants. La lampeMARSAUT est de sécurité abso-lue ; elle résiste aux courants devitesse, orientés, et pour des te-neurs de 9%, son échauffementest peu considérable, et la toilen’atteint pas la coloration durouge vif.

e) Lampe Wolf à benzine

Elle ne diffère de la lampe MAR-SAUT que par ce qu’elle est ali-mentée à la benzine, qu’elle estpourvue d’un rallumeur et que lasection des orifices d’évacuationde la cuirasse est un peu plusgrande. Il résulte donc de ce quenous avons dit plus haut à pro-pos de la comparaison entre lesmodes d’alimentation des lam-pes, que le haut degré de sûretéreconnu pour la lampe MAR-SAUT à l’huile s’applique à lalampe WOLF à benzine typeMARSAUT.

Six ans après le règlement de1904, 46.000 lampes WOLF,provenant de la Fabrique Lié-geoise de lampes de sûreté, àLoncin, étaient en service dansles charbonnages belges.

5. Travail des femmes et desenfants6 & 7

a) Situation en Angleterre

Les éléments qui suivent sont ap-parus lors d’une enquête ordon-née par le Parlement anglais en1840 sur le travail des enfantsdans les mines. Le rapport rédigépar les commissaires fut soumisau Parlement par ordre de laReine le 21 avril 1842.

Au sujet de l’âge d’admissiondans les travaux souterrains, les

commissaires ont constaté descas où les enfants avaient été misau travail dans les houillères dèsl’âge de 4 ans ; mais c’est d’ordi-naire entre 8 et 9 ans que com-mence, pour les enfants, le travaildans les mines.

Cela étant, la proportion des jeu-nes ouvriers âgés de moins de 18ans aux ouvriers adultes, varied’un tiers à deux tiers.

Généralement, les jeunes fillessont employées dans les houillè-res au même âge que les jeunesgarçons. La commission signaleles inconvénients auxquelsdonne lieu ce mélange dans lestravaux souterrains où la surveil-lance est presque toujours nulle.Les ouvriers, sans distinction desexe, la jeune fille comme lafemme mariée, travaillent sou-vent dans un état de complètenudité.

En ce qui concerne leur engage-ment, la plupart des enfants etdes jeunes gens employés au tra-vail des mines appartiennent auxfamilles des ouvriers adultes, oufont partie de la population laplus pauvre du voisinage ; ilssont engagés et payés, soit par lesouvriers eux-mêmes, soit par lespropriétaires.

Dans la majorité des exploita-tions, les moyens de ventilationet de dessèchement sont essen-tiellement défectueux : les en-fants travaillent pendant 14 heu-res, mouillés jusqu’à la peau, et ilsne pouvent se changer qu’unefois rentrés à la maison.

La tâche des plus jeunes enfantsconsiste généralement à ouvrir età fermer les trappes ou portesd’aérage pour donner le passageà un traîneau en bois ou à un wa-gonnet. Les trappiers travaillentle plus souvent dans des galeriesobscures, et leur présence dansles fosses est requise dès le com-

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M.V. Watteyne. Mémorial d'un institut nonagé-naire : de la station expérimentale de l'Administra-tion des mines à l'Institut scientifique de service pub-lic : 1902-1990 : 1991-1992, 1992. Fig. 1, p. 2.Coll. CLADIC.

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171717

mencement des travaux jusqu’àl’heure où ils finissent.

Mais la plupart des enfants em-ployés dans les houillères sontoccupés à charger et à traîner leswagons ; pour faire mouvoir cesderniers, ils les poussent en avantavec toute la vélocité que com-porte l’inclinaison de la galerie.Dans la plupart des mines, les ga-leries sont munies de rails, et leswagons ont des roues. On ytrouve cependant encore des fos-ses où l’on a conservé l’anciennecoutume de charrier le charbon àl’aide de paniers ou de traîneauxen bois. Le traîneur est munid’une ceinture de cuir, à laquelleest suspendue une chaîne, qui estattachée au traîneau au moyend’un crochet. Harnaché de lasorte, il rampe sur les pieds et surles mains, traînant après lui sonfardeau ; s’il n’est pas assez fort,on lui adjoint un autre enfant, unpeu plus jeune, qui pousse le traî-neau par derrière. Le poids deswagons ou des traîneaux chargésvarie, dans les différentes mines,depuis 200 jusqu’à 900 kilos ;mais dans les fosses où l’on sesert de traîneaux sans roues, iln’excède pas 400 kilos.

Un commissaire a vu un enfant,une charmante petite fille, âgéeseulement de 6 ans, portant sur ledos un panier de 50 kilos decharbon, et faisant régulière-ment, avec ce lourd fardeau, qua-torze longs et pénibles trajets parjour, de plus de 100 mètres surles échelles des puits intérieurs.

Les salaires des enfants et desjeunes gens employés dans lesmines de houille, bien que leurtaux ne soit guère en rapportavec la rigueur du travail qu’ils

devraient rémunérer, suffisentnéanmoins pour accroître les res-sources d’un grand nombre defamilles et leur procurer certainsavantages qui manquent à d’au-tres classes de travailleurs.

L’échelle des salaires s’abaissejusqu’à 3 pence (environ 30 cen-times) pour les plus jeunes en-fants, et s’élève jusqu’à 3 shillingspar jour (3 fr. 75 centimes) pourles jeunes gens parvenus à l’âgede 17 à 18 ans.

Les conclusions de cette enquêtesont pour le moins étonnantes.Le rapport conclut en effet que lasituation est satisfaisante dans laplupart des mines et que leschantiers souterrains sont sou-vent plus salubres, et même plusagréables, que bon nombre d’ate-liers de surface.

Le travail qui consiste à pousserdes wagons chargés de charbon,loin d’être malsain en lui-même,est au contraire un exercice salu-taire !

Au sujet des galeries dans les-quelles les enfants doivent ram-per, les commissaires estimentque, malheureusement, il est im-possible d’augmenter l’ouverturedes “conduits”, la dépense dé-passant largement le bénéfice àretirer de l’exploitation des cou-ches minces.

Ils ajoutent qu’il n’y a qu’un seulremède à cet inconvénient, c’estde légiférer pour défendre d’em-ployer des enfants.

b) Situation en Belgique

En Belgique, en 1840, les gar-çons de moins de 9 ans et les fil-les de moins de 10 ans ne pou-vaient déjà plus travailler dans lesexploitations souterraines.

En 1841, une enquête similairesur les conditions de travail desfemmes et des enfants est de-mandée aux Ingénieurs du Corps

des Mines par le Ministre de l’In-térieur. Dans le pays, 37.000 per-sonnes exercent alors la profes-sion de mineur. Le district deCharleroi occupe 8.340 mineurset l’enquête est effectuée dans 17des exploitations les plus impor-tantes regroupant 4.232 mineurs,c’est-à-dire un échantillon repré-sentatif.

Le nombre total de mineurs desexe masculin, féminin et desdeux sexes, âgés de moins de 17ans est respectivement de 21%,41% et 24%. La différence peutêtre attribuée à deux causes.

La première est qu’une foule deprofessions industrielles s’of-frent aux jeunes garçons, tandisqu’une seule est ouverte aux jeu-nes filles.

La seconde cause, c’est que, pourdes raisons de moralité, les mi-neurs mariés ne permettent ja-mais à leurs femmes de continuerà travailler dans les mines.

D’un côté, nous avons une causequi augmente le nombre de jeu-nes filles de 17 ans et moins, etune seconde cause qui diminueet réduit presque à zéro le nom-bre des femmes qui ont atteint latrentaine.

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Annales des travaux publics de Belgique, Tome 1,1844. Coll. Administration des mines.

Annales des travaux publics de Belgique, Tome 1,1844. Coll. Administration des mines.

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En 1884, l’interdiction est portéeà 12 ans pour les garçons et 14ans pour les filles.

En 1892, l’interdiction sera enfinétendue aux femmes de moins de21 ans. A cette époque, la législa-tion était manifestement en re-tard sur la réalité du terrain, puis-que, de fait, les femmes nedescendaient plus !

Michel Mainjot

Bibliographie/notes

1 Haversin de Lexhy, Les houillèresliégeoises au temps des Princes-Evê-ques, La Belgique Judiciaire, 1931.

2 H. Delrée, A. Linard de Guerte-chin, Esquisse d’un historique de lalégislation et de l’Administration desMines (Cent cinquantième anni-versaire du corps des ingénieursdes mines), 1961.

3 H. Delrée : “Histoire des acci-dents de travail survenus dans lescharbonnages de la région lié-geoise depuis le début du XIXe

siècle”, dans Bulletin de l’InstitutArchéologique Liégeois, tome CIV,1992.

4 H. Joris, Lampes pour mines (Ca-talogue-Album de la fabrique lié-geoise de lampes de sûreté àLoncin), 1912.

5 Haton de la Goupillière, Coursd’exploitation des mines, quatrièmeédition, Paris, Dunod, 1942.

6 Ed. Ducpetiaux, Analyse de l’en-quête ordonnée par le Parlement an-glais, sur le travail des enfants dans lesmines, Annales des Travaux Pu-blics de Belgique, 1843

7 Eug. Bidaut; Du travail des femmeset des enfants dans les mines de houillede l’arrondissement de Charleroi, An-nales des Travaux Publics de Bel-gique, 1844.

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Le site du Bois du Cazier à Mar-cinelle est depuis quelques an-nées ouvert au public et abrite enplus d’un espace consacré à la ca-tastrophe du 8 août 1956, le mu-sée de l’industrie2. Toujours enpleine expansion, le site devraitbientôt accueillir le Musée duVerre de Charleroi. Si le muséeprend actuellement une certaineampleur grâce à un effort de pu-blicité et à l’organisation de bonnombre d’expositions et com-mémorations, peu de gens sontencore capables de dire ce qu’ils’est réellement passé le 8 août1956 au Bois du Cazier. Le pro-cès destiné à mettre en lumièreles différentes responsabilités n’apas non plus retenu l’attention.La catastrophe du Bois du Cazierest pourtant un des évènementsles plus marquants pour l’indus-trie minière belge dans la se-conde moitié du 20e siècle.

Rappel historique

Suite à la Seconde Guerre Mon-diale, la Belgique tente de se re-construire. Cela s’avère plus fa-cile que prévu puisquel’occupant nazi n’a pas détruitl’appareil industriel belge. Parcontre, les infrastructures de nosvoisins sont très endommagées.Dès lors, ils ont d’énormes be-soins. La Belgique est un de leurprincipal fournisseur de matièrespremières et notamment de char-bon. Afin de relever le paysAchille Van Acker, alors premierministre, lance la “Bataille duCharbon”. Malgré le statut demineur (avantages supplémentai-res accordés aux mineurs) qui estcréé pour attirer de nouvelles re-crues dans la mine, et bien que laBelgique se soit servie des pri-sonniers de guerre, le manque demain-d’œuvre se fait cruellement

sentir. Pour les Belges, le métierde mineur “(…) était le dernierque l’on puisse accepter de sup-porter”3. Afin de pallier ce man-que, l’Etat belge conclut, le 20juin 1946, un traité avec l’Italie.La main-d’œuvre italienne estmise à la disposition de l’indus-trie charbonnière belge. Enéchange, la Belgique “(…) s’en-gage à fournir à un prix avanta-geux cinq tonnes de charbon parmois pour chaque travailleur ita-lien”4 recruté. Les conditionsdans lesquelles sont accueillis lesouvriers italiens sont souvent dé-plorables. Les logements qui leursont proposés sont insalubres etles conditions de travail, suite no-tamment au manque de forma-tion, sont extrêmement précai-res5.

ETUDE

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Le procès du Bois du Cazier (1959-1962)1

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La rapide reconstruction dontbénéficie le pays occulte une réa-lité économique peu favorable.L’appareil charbonnier belge estresté vétuste en comparaison decelui des pays voisins qui ontprofité de la reconstruction pourse moderniser. Le prix de revientdu charbon belge est très élevé etles prix de vente sont artificielle-ment bas pour rester concurren-tiels. En outre, les investisse-ments sont détournés versd’autres secteurs beaucoup plusattractifs. L’entrée en vigueur, en1951, du traité de la CECA etavec elle l’ouverture des marchésbouleverse également la vie desbassins charbonniers belges.Pour maintenir les charbonnagesbelges à flot, la Haute Autoritéde la CECA et le gouvernementbelge mènent une politique desubsides. Malgré cela, les ferme-tures de charbonnages wallons,peu concurrentiels s’accélèrent.Les années 1958 à 1961 sontconsidérées comme les plus noi-res qu’aient connues les char-bonnages wallons. Les régions deCharleroi et du Centre sontparmi les plus touchées6. C’estdans ce contexte de morosité quese déclare la catastrophe.

Le Bois du Cazier et la catas-trophe

Le Charbonnage du Bois du Ca-zier, actif depuis la fin du 19e siè-cle, ne fait partie d’aucun grandgroupe financier. C’est une petiteconcession dirigée depuis plu-sieurs décennies par une poignéed’actionnaires.

Vétuste, le charbonnage n’offrepas les meilleures conditions detravail à ses ouvriers7. En 1956,les chevaux de fond sont encoreau nombre de quarante-six et ac-complissent la majeure partie destravaux de transport de wagon-nets8. Pour l’époque, l’emploi dechevaux au fond est réellementune marque d’archaïsme. Pour-tant, le rendement est relative-

ment satisfaisant et des travauxvisant à moderniser le charbon-nage sont en cours. Mais celan’est pas suffisant.

Le 8 août 1956, un ouvrier italienaffolé remonte au jour et déclarequ’ “il y a le feu” au niveau 975.Une mauvaise manœuvre d’enca-gement et une série d’incompré-hensions entre les différents pré-posés à la remonte du charbonont provoqué l’arrachement deplusieurs conduites d’huile et decâbles électriques. Un incendietrès puissant se déclare alors à975 mètres de profondeur. Pen-dant plusieurs jours les secourstentent de sauver les mineurs res-tés au fonds mais mis à part les13 personnes remontées dans lespremières heures de l’accident, iln’y a aucun survivant. Le bilanest lourd : 262 mineurs ont périet parmi eux, 136 Italiens et 95Belges.

Quelques années avant la crisecharbonnière, la catastrophe duBois du Cazier est perçuecomme un véritable révélateurde la situation dans les charbon-nages9. C’est le révélateur desmauvaises conditions de travail,de l’absurdité de la politique derendement qu’aucun investisse-ment ne vient soutenir et du ca-ractère insensé de maintenir envie des concessions vouées à ladisparition. Elle provoque égale-ment le blocage des relationsitalo-belges. Le gouvernementitalien, choqué par l’ampleur dela catastrophe, cesse immédiate-ment toute émigration vers laBelgique10.

Les enquêtes

Suite à la catastrophe, trois en-quêtes sont mises sur pied afinde dégager les causes du drameet les éventuels responsables. Ils’agit d’une enquête judiciairemenée par le juge d’instructiondu tribunal de Charleroi et deplusieurs experts nommés par

celui-ci, d’une enquête adminis-trative sous l’égide de l’Adminis-tration des Mines et d’une en-quête parlementaire établie par legouvernement belge. Ces enquê-tes constituent la base des discus-sions menées lors du procès deMarcinelle.

Suite à l’analyse des rapports is-sus de ces enquêtes, on distingueclairement deux points de vueopposés sur les causes du drameet les responsabilités du char-bonnage et de l’administration.Le rapport des experts judiciai-res11 met en lumière la vétustédes installations du charbonnageet la mauvaise organisation de lacommunication entre fond etsurface. Ils imputent ces erreursau Directeur des travaux, et àl’Ingénieur en Chef du Bois duCazier. Par contre, dans leur rap-port les experts de l’Administra-tion des Mines et le DirecteurDivisionnaire responsable duBassin de Charleroi-Namur, nedésignent aucun responsable. Ilsconsidèrent, en outre, que lesinstallations du Bois du Cazierétaient absolument satisfaisantes.En effet, selon le Directeur Divi-sionnaire du bassin, “(…) lespuits du Bois du Cazier, quoiqueanciens, n’étaient pas désuets et(…) leurs caractéristiques géné-rales n’ont pas joué un rôle dansla catastrophe”12. L’enquête gou-vernementale, mise sur pied parle Ministre des Affaires Econo-miques, le libéral Jean Rey, le 25août 195613, doit établir les causesde la catastrophe et en tirer lesenseignements afin que ce genred’évènement ne se reproduiseplus14. On retrouve parmi les par-ticipants des représentants desdifférents syndicats, du patronatet de l’administration des Mineset notamment le Directeur Divi-sionnaire. Les représentants del’Administration des Mines exer-cent une grande influence sur lesdébats qui tournent essentielle-ment autour de questions techni-ques précises. Les questions es-

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sentielles comme l’accroissementinsensé de la production, lemode d’exploitation vieilli, lestravailleurs sans qualification quiignorent les risques du métier, lesystème disciplinaire, le pro-blème du manque d’investisse-ment et de l’entrée en vigueurdes normes de la CECA serontcomplètement éludées par lesmembres de la Commission auprofit des questions techniques.Ce sont pourtant ce genre d’in-terrogations qui circulent dansl’opinion publique15.

Le procès du Bois du Cazier

Le procès du Bois du Cazier dé-bute le 6 mai 1959 et s’achève enfévrier 1962. Cette période coïn-cide avec un moment détermi-nant pour l’industrie charbon-nière belge. La crise du charbonfait rage depuis 1958, dans tout lepays mais surtout en Wallonie.

Cinq personnes se trouvent surle banc des prévenus. Il s’agit duDirecteur des Travaux et de l’In-génieur en Chef du Charbon-nage du Bois du Cazier16, du Di-recteur Divisionnaire du bassin,de l’Ingénieur des Mines ayantdans ses attributions la surveil-lance du Bois du Cazier et d’unélectricien employé par une so-ciété tierce et chargé de la vérifi-cation des installations électri-ques au Bois du Cazier. Ladéfense des prévenus est assuréepar plusieurs avocats à la réputa-tion prestigieuse. La défense s’estégalement entourée de nom-breux experts issus de l’Adminis-tration des Mines et de plusieursuniversités du pays.

L’accusation se compose du Pro-cureur du Roi et des parties civi-les. Les parties civiles, au nombrede 195, sont les parents, épouses,enfants, frères ou sœurs des mi-neurs décédés dans la catastro-phe. La plupart d’entre elles ontdéjà été indemnisées soit enfonction de la loi sur les acci-

dents du travail de 190317, soitpar le Comité provincial d’aideaux familles des victimes d’acci-dents mortels du travail18. Leursréclamations portent plus sur desréparations morales et de prin-cipe que sur des réparations pu-rement matérielles. Si pour laplupart des victimes italiennes lesfamilles se sont constituées par-ties civiles, seule la moitié desvictimes belges ont suscité l’en-gagement de poursuites judiciai-res.

La plupart des parties civiles sontdéfendues par un collectif d’avo-cats formé à l’initiative dugroupe Notre Solidarité issu duParti Communiste Belge19. Lamajorité des avocats participantau collectif sont également detendance communiste. A côté del’initiative belge, l’organisationitalienne INCA (ConfédérationNationale d’Assistance), compa-rable à l’Office de droit social,subsidiée par l’Etat italien et gé-rée par le syndicat socialiste etcommuniste, a collaboré avecNotre Solidarité dans la constitu-tion du collectif d’avocats défen-dant les parties civiles20. D’autresorganismes italiens participentégalement au procès comme lesACLI (Associazione CristianaLavoratori Italiana) issues dusyndicat chrétien italien.

Du côté belge, outre l’initiativede Notre Solidarité, il semble quebien peu d’actions aient été en-treprises. Les syndicats belges nesont que peu présents. Seul l’exé-cutif régional de la FGTB deCharleroi se porte partie civile etest représenté par son propreavocat. Il semble que les tendan-ces politiques des avocats du col-lectif, d’une part, et l’implicationd’organisations italiennes, d’au-tre part, soient les causes princi-pales de la différence d’engage-ment entre Belges et Italiens. Lerôle mineur joué par les syndicatsbelges explique aussi la propor-

tion moins élevée de parties civi-les du côté belge.

Lors de la première instance auTribunal Correctionnel de Char-leroi, les débats ne tournent es-sentiellement qu’autour de ques-tions techniques. A tel point quela presse qualifie le procès d’en-nuyeux et que la salle d’audiencese vide de son public. Les débatssont totalement hermétiques àtoute personne n’étant pas diplô-mée de l’Ecole des Mines.

Même si le côté humain de la ca-tastrophe est rappelé par la pré-sence au procès de nombreusesfamilles de victimes, les vérita-bles questions que se pose l’opi-nion publique quant à l’avenirdes mines et le malaise que res-sent la population ouvrière sontentièrement éludées. On assiste àune véritable bataille d’expertsqui ne se préoccupent absolu-ment pas des problèmes socio-économiques qui entourent la ca-tastrophe de Marcinelle. Lesavocats des parties civiles tente-ront en vain dans leurs plaidoi-ries d’attirer l’attention sur cesquestions.

Le tribunal prononce l’acquitte-ment général le 1er octobre 1959.Cette sentence choque l’opinionde gauche, comme en témoignele gros titre du 2 octobre 1959 duDrapeau Rouge qui écrit “UNSCANDALE : Cazier acquitte-ment général”21 mais ne fait quepeu de remous dans l’opinion ca-tholique et libérale. Suite à l’ac-quittement, le sénateur commu-niste René Noël fait remarquerlors d’une interpellation au Sé-nat, l’étrange imbrication de l’en-quête gouvernementale et del’enquête administrative22. Cetteinterpellation ne connaît pas desuite.

Le collectif fait appel de la déci-sion du tribunal de Charleroi.Après presque quarante audien-ces, la Cour d’Appel de Bruxelles

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inculpe le Directeur des Travauxdu Charbonnage, incriminé pouravoir “(…) par défaut de pré-voyance ou de précaution, maissans intention d’attenter à la per-sonne d’autrui, involontairementcausé la mort de 262 personnes(…), [et] porté des coups ou faitdes blessures à 6 autres (…)”23.Sorte de bouc émissaire, le direc-teur est considéré comme seulresponsable de cette atroce ca-tastrophe. Le collectif insatisfaitpar cette décision qui ne prendtoujours pas en compte les dom-mages civils se pourvoit en cassa-tion. L’affaire est portée devantla Cour d’Appel de Liège. Lesdeux parties décident alors des’arranger à l’amiable. Les avo-cats travaillaient sur le dossiergratuitement depuis plusieursannées et “tout le monde était es-soufflé”24.

Loin du grand bilan que l’on an-nonçait, le procès dont ne vou-laient ni le patronat ni les syndi-cats, s’étouffe de lui-même dansun débat fermé qui ne laisse au-cune opportunité à de réelles ré-flexions concernant les gravescarences dont souffrent alors lescharbonnages belges.

Julien Urbain, licenciée enhistoire

Notes

1 Cet article est un court résumédu mémoire de l’auteur : JulieUrbain, Le procès de la catastrophedu Bois du Cazier 1959-1962, Uni-versité Libre de Bruxelles, mé-moire présenté sous la directiond’Anne Morelli en vue de l’ob-tention du titre de licenciée enhistoire, année académique2002-2003.

2 Le site du Bois du Cazier est ou-vert tous les jours sauf le lundi.Du mardi au vendredi de 9 à 17het les weeks-ends et jours fériésde 10 à 18h.Pour d’autres informations cf :http://www.leboisducazier.be.

3 A. Bastenier, L’Etat Belge face àl’immigration. Les politiques socialesjusqu’en 1980, Louvain-La-Neuve, Academia, Coll. SYBIDIPapers 101992, p. 16.

4 S. Jaumain, Industrialisation et so-ciété. La Belgique (1830-1970), Pa-ris, Ed. Ellipses, 1998, p. 76.

5 Voir à ce sujet : A. Morelli,“L’appel à la main-d’œuvre ita-lienne par les charbonnage et saprise en charge à son arrivée enBelgique dans l’immédiat après-guerre” in Revue Belge d’HistoireContemporaine, XIX, 1988, p. 83-130.

6 M. Bruwier, “Que sont devenusles mineurs des charbonnagesbelges ? Une première approche: problématique et méthodologi-que” in M. Bruwier, Industrie et so-ciété en Hainaut et en Wallonie duXVIIe au XXe siècles, Recueil d’ar-ticles, Bruxelles, Crédit Commu-nal, Coll. Histoire in 8°, XIX, 1-2, p. 137.

7 Voir à ce sujet : J. Van Lierde, 6Mois dans l’enfer d’une mine belge. LeBois du Cazier à Marcinelle avant lacatastrophe du 8 août 1956, Bruxel-les, Jeunes Gardes socialistes,1956.

8 Cenforsoc, Procès de la catas-trophe du Bois du Cazier, Archi-ves du Collectif d’avocats desparties civiles, Dossier 2, p. 8.“Pro justitia des experts duCorps des Mines. Charbonnagesdu Bois du Cazier. Catastrophedu 8 août 1956”.

9 F. Dassetto, M. Dumoulin(Ed.), 8 août 1956, Marcinelle,Louvain-la-Neuve, CIACO,1986, p. 26.

10 Morelli, A., “L’immigration ita-lienne en Belgique au XIX etXXe siècles” in A. Morelli (dir.),Histoire des étrangers et de l’immigra-tion en Belgique de la Préhistoire à nosjours, Bruxelles, Vie Ouvrière,1992, p. 202.

11 Cenforsoc, Procès de la catas-trophe du Bois du Cazier, Archi-ves du Collectif d’avocats desparties civiles, Dossier n°4a,“Rapport et conclusions des ex-perts judiciaires”.

12 Cenforsoc, Procès de la catas-trophe du Bois du Cazier, Archi-ves du collectif d’avocats desparties civiles, Dossier 2, “Lettredu Directeur Divisionnaire desMines à Monsieur le procureurdu Roi. Administration des Mi-nes Bassin de Charleroi-Namur”,p. 29.

13 Arrété Royal du 25 août 1956,publié au Moniteur belge le 26août 1956.

14 Cenforsoc, Procès de la catas-trophe du Bois du Cazier, Archi-ves du collectif d’avocats desparties civiles, dossier n° 3, “Pro-cès verbal de la séance tenue parla Commission d’enquête sur lescauses de la catastrophe du Boisdu Cazier du 29 août 1956”, p. 5.

15 F. Dassetto, M. Dumoulin,op.cit., p. 18.

16 Ces ingénieurs sont responsa-bles du fonctionnement du siègecharbonnier sous les ordres del’administrateur délégué repré-sentant les actionnaires.

17 P. Horion, Nouveau précis de droitsocial belge, Liège, Faculté de droit,1965, p. 329.

18 Aussi appelé Fonds Cornez dunom de son président EmileCornez, gouverneur de la pro-vince de Hainaut. Ce fonds, crééen 1951, canalisa lors de la catas-trophe les nombreux dons adres-sés aux familles des victimes et se

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chargea de leur redistribution.(Cf. Comité provincial d’aide auxfamilles des victimes d’accidentsmortels du Travail. 4e rapportgénéral d’activité. Période du 1eroctobre 1951 au 31 décembre1958, T. IV, Mons, mars 1959, p.8.)

19 Entretien avec François Colli-net, avocat des parties civiles,Gilly, 13 mars 2003.

20 Entretien avec Jacques Moins,avocat des parties civiles, Ixelles,9 avril 2003

21 Le Drapeau Rouge, vendredi 2octobre 1959, 38e année, n°192,p. 1.

22 “Interpellation de M. NOËL auMinistre des Affaires Economi-ques et au Ministre du Travail surles mesures qu’ils comptentprendre en vue d’établir claire-ment les responsabilités dans lacatastrophe de Marcinelle et deréparer les préjudices subis parles familles des victimes”, in An-nales Parlementaires (Sénat),2 dé-cembre 1959.

23 Cenforsoc, Procès de la catas-trophe du Bois du Cazier, Archi-ves du collectif d’avocats desparties civiles, Dossier n° 11,“Arrêt de la Cour d’appel séant àBruxelles, 13e chambre, siégeanten matière de police correction-nelle du 28 janvier 1961”, feuil-lets 22 à 26.

24 Entretien avec Jacques Moins,avocat des parties civiles, Bruxel-les, 9 avril 2003.

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ETHNO-TÉMOIGNAGE

[Pour la première partie, voirle PIWB n° 62, pages 12 à 14]

La vie au charbonnage était dif-férente chaque jour. Bons etmauvais moments se succé-daient, sans jamais entamer l'en-thousiasme des travailleurs qui,lorsqu'un accident se produisait,se rappelaient les risques qu'ilsencouraient quotidiennement :

“Je pourrais vous raconter beau-coup d'anecdotes sur le travail aucharbonnage. J'ai vu un jour unaccident assez grave au caisson àschlamm (il y avait un caisson àfines et un caisson à schlamm).Un ouvrier est tombé dans lecaisson à schlamm1. Il est passédans l'entonnoir qui évacuait leschlamm vers un bac inférieuroù il était remué à l'aide d'unegrosse barre de fer. Une fois dansle bac inférieur, le malheureux aagrippé la barre de fer. Il en estsorti vivant. Si vous aviez vu paroù il était passé... c'est difficile àcroire ! On l'a retiré par la gained’évacuation. C'était un fameuxgaillard. Quand on l'a retiré, l'in-

génieur de service a voulu leconduire à l'hôpital. Mais lui arefusé et a continué à travailler. Ila eu une chance infernale : la per-sonne qui scafotait2 avec la barrea senti quelque chose et a appeléle chef. Il a dit : ‘Nom de Dieu ,Jérôme, je scafotte, je scafotte, etil y a ène sakè3 qui tient...’. Il asorti une bottine et a crié ‘...Il y aun homme dedans...’. Mais lesplus beaux souvenirs, ce sont lesjours de fête. A la Sainte-Barbepar exemple, on réalisait des cha-pelles dans les triages comme aufond. Mais attention, après lepassage du directeur qui étaitparfois accompagné par sonépouse et ses enfants, il fallait seremettre au travail. On érigeaitdes chapelles mais il ne fallait pasarrêter de travailler. Si, par exem-ple, il fallait tirer 1000 cârs (deschariots) d'habitude ; à la Sainte-Barbe, il ne fallait pas s'arrêter à900. La même production étaitindispensable. La veille deSainte-Barbe n'était pas jour decongé. On devait travailler toutela journée. Même celui qui assu-rait le service de nuit. Bien en-

tendu, vous imaginez la suite. Ontravaillait normalement, mais enquittant la fosse, on allait boire !Dans le temps, on n'avait pas lamême vie que maintenant, onn'allait s'amuser ‘ène bèkéye’4

que le dimanche. Je n'allais jamaisà la messe. C'était toujours lesmêmes qui allaient à la messe.Celui qui allait à l'église était bienvu par le directeur. Dans le fond,pour avoir une belle place... Jen'allais à l'église qu'avec la fan-fare. Mais, attention, la fanfareétait à peine entrée dans l'églisepour jouer la Brabançonne que jem'éclipsais pour aller au cabaretsitué sur le coin, en face del'église et de l'école des filles :‘L'Hôtel du Quinconce’. Envi-ron cent mètres plus loin, il yavait un autre café : ‘Au Gaillard.Quand la fanfare sortait del'église, j'allais rechercher montambour et on redescendait. J'aijoué de la musique à Trivièreségalement, mais pas très long-temps. Avec la fanfare, nousavons été dans beaucoup de vil-les belges (Liège, Gand, etc). Onjouait lors des cortèges fleuris.

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Souvenir d’un ancien surveillant au triage-lavoir de Saint-Emmanuel (charbonnage du Bois-du-Luc) - 2e partie

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A l'étranger, je ne suis jamais allé.J'étais trop jeune pour accompa-gner la fanfare hors de Belgique.J'ai commencé à jouer de la mu-sique en 1927, j'avais dix ans.Une année plus tôt, la fanfareavait joué à Paris. S'il n'y avait paseu la guerre, la fanfare existeraitencore, à moins qu'elle n'ait dis-paru à la fermeture des charbon-nages. On devait rendre les ins-truments et les costumes. On atout laissé pourrir ! Celui quipouvait prendre ène sakè... Il y aeu des vandales ! Le costume de-vait être entretenu par le musi-cien ou sa famille. Il y a eujusqu’à 120 musiciens dans lafanfare. Tous travaillaient aucharbonnage. Tous les musiciensavaient une belle place au char-bonnage, sauf moi. Je n'ai jamaiseu une belle place au charbon-nage. Pourquoi ? Je n'en saisrien ! Tous les autres musiciensavaient une belle place : surveil-lant à la cour au bois, par exem-ple. Il n'y avait pas beaucoup defêtes locales à Bois-du-Luc, àl'exception de la kermesse quiétait réputée comme étant lameilleure du Centre. Elle duraittrois jours. Quand je suis rentré à

la fosse, on commençait la jour-née à 7 heures 30 et on s'arrêtaità 12 heures pour manger. Onavait droit à un quart d'heure, pasun quart d'heure et 10 secondes.Le travail n'arrêtait pas. La per-sonne qui vous remplaçait pen-dant que vous preniez votre re-pas travaillait parfois plus viteque vous. Au lavoir, il y avait lechef laveur, le surveillant, le res-ponsable du lavoir, le laveur à fi-nes, le laveur à grosses. La mêmehiérarchie était présente lors despauses du matin et de l'après-midi. On était ‘scrant’5, maisc'était le bon temps…”.

On vivait en autarcie au charbon-nage. La société avait construitun hôpital, un hospice, une citéouvrière, un magasin, un café,des écoles, une église, un parcavec kiosque, une salle des fêtes,une bibliothèque, etc .. Prochesau travail, les gens étaient égale-ment proches dans leur vie pri-vée. Les liens créés au travail,soudaient les travailleurs quis'amusaient généralement entreeux : “…On ne sortait qu'unefois par semaine, mais on s'amu-sait bien. Maintenant, c'est di-

manche tous les jours... Au Bois-du-Luc, le long du Pavé, avantd'arriver au charbonnage, il yavait sept cafés. Dans les Carrés,en face du musée, au coin de larue, il y avait un café (ou deux ?).En face du café, il y avait un ma-gasin : ‘A Pierre le Champêtre’.En face de la gare, il y avait qua-tre ou cinq cafés. Deux d'entreeux étaient également des salonsde danse , le ‘Café de l'Espé-rance’ par exemple. A Saint-Amand6, il y avait deux cafésaussi. Après la guerre, on allaits'amuser à Bracquegnies et mafemme m'accompagnait. Mainte-nant, nous buvons de l'eau !C'était bien en ce temps-là, onétait pauvre mais on s'amusaitbien ! Si on pouvait dépenser 100francs, il ne fallait pas en dépen-ser le double. Le charbonnage ra-massait les immondices une foispar semaine. Pour chaque mai-son, il n'y avait qu'un seau d'im-mondices. Les seaux étaient vi-dés dans un barot qui était

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Triage-lavoir du Bois-du-Luc. Coll. HenriPot.

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déchargé sur le terril situé près dela gare de Bois-du-Luc. Alorsque maintenant... Il y avait égale-ment deux cordonniers (‘Mo-nonc Auguste’ et ‘L'Jamb deBos’), un coiffeur (derrièrel'église de Bois-du-Luc), deuxbouchers, un pâtissier (à Saint-Amand) et un magasin ‘Le BonGrain’. A ce moment-là, on avaitplus de contact avec les gens quemaintenant. On avait droit à 500kg de charbon chaque mois et unbon de bois par an. Plus tard, ona eu droit à une augmentation desalaire, à la place des bons decharbon Au ‘Bon Grain’, ontrouvait de tout, sauf des vête-ments, même des sabots. Il yavait aussi le cercle horticole. Onpouvait gagner des prix à l'occa-sion de concours. Tous les mois,il y avait une conférence et uneloterie. On gagnait des brouettes,des pelles, des fleurs, etc. Tou-jours des objets utiles, des ‘affai-res pour travailler’. Il y avait aussile concours du plus beau jardin.J'ai habité vingt-trois ans dans lesCarrés. Les maisons étaient re-peintes chaque année, avant lakermesse, par les ouvriers ducharbonnage (deux à trois semai-nes avant la kermesse). La cou-leur (d'abord de la chaux blan-

che, puis jaune) était mise dansdes chariots de mine. On a peintà la brosse, puis avec un pulvéri-sateur. La plupart du temps, lespeintres étaient flamands, à uneexception près. Les portesétaient repeintes en vert (foncéou pâle, peu importe, il pouvait yavoir plusieurs sortes de vert). Lecharbonnage repeignait les faça-des ; les locataires, les portes. Ja-mais une autre couleur (brun oubleu), toujours du vert. Mainte-nant ce sont des portes en PVC.Les châssis en fonte des fenêtresétaient peints en blanc. Quand jeme levais le matin en hiver, il yavait des glaces au plafond.Quand je descendais, le poêle aucharbon était tout rouge mais,dans la chambre, il fallait se cou-vrir. Malgré tout, on se plaisaitbien. J'y ai habité vingt-trois ans.Il fallait se laver dans de grandesbassines ou des cuvelles en bois.On allait chercher l'eau à l'exté-rieur, à la pompe. On avait uneclé (je l'ai encore !) pour action-ner la pompe. On se lavait torsenu. Si on pouvait avoir la mêmevie, on recommencerait. Autriage, il y avait une bonne am-biance. Il fallait venir quand celamarchait, c'était un beau film àvoir. On ne gagnait pas beau-coup, mais on s 'amusait bien.On vivait vieux au charbonnage :j'ai 78 ans, ma femme en a 75.

Mon père travaillait aux fours àcoke. Il ne gagnait pas beaucoupet c'était le bagne. Au charbon-nage, les plus malheureux étaientles ouvriers qui travaillaient auxfours à coke. On jouait à la ballesur la place de Bois-du-Luc.Quand mon père rentrait, il se la-vait et allait voir jouer à la balle. Ildisait : ‘...Regardez, ils jouent à laballe, eux ils savent jouer à laballe, mais moi, quand j'ai fini majournée, je ne sais pas jouer à laballe...’. C'était un Flamand quiest venu en Wallonie dans les an-nées 1890. Il était vannier. Il n'yavait plus de travail dans les Flan-dres et il est venu par ici. Le di-recteur avait son propre chauf-feur qui le conduisait partout enBelgique et à l'étranger. Mais at-tention, le chauffeur restait tou-jours à l'écart...”.

Alain Dewier

Notes

1 Schlam : déchet de charbon.2 Scafoter : chercher, tripoter.3 Ene sakè : un petit quelquechose.4 Ene bèkéye : un petit peu.5 Scrant : fatigué.6 Le siège Saint-Amand fut ou-vert en 1827. Il ferma en 1914,après avoir atteint la profondeurde 196 mètres.

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Chapelle Sainte-Barbe au fond, fosseSaint Emmanuel, vers 1950. Coll. Henri Pot.

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Le 24 novembre dernier, la Com-mune de Saint-Nicolas (Liège)accueillait la presse afin de luiprésenter en détail un projettransfrontalier de “Route desTerrils” initié dans le cadre euré-gional des projets Interreg III.

Ce projet rassemble 24 partenai-res dont 11 en Province de Liège.15 anciens sites miniers liégeois,situés dans les communes deSaint-Nicolas (à l’initiative duprojet en ce qui concerne la ré-gion liégeoise), Soumagne,Chaudfontaine, Flémalle, Blegny,Liège, Fléron, Plombières, Wel-kenraadt, Lontzen et La Cala-mine, sont concernés.

Cette Route des Terrils est déve-loppée parallèlement à un autreprojet Interreg III intitulé“Grünmetropole” (MétropoleVerte), qui concerne le Limbourgbelge, le Limbourg néerlandais etla région d’Aachen, et formeavec la Route des Terrils un en-semble sous le vocable de “In-dustrielle Folgelandschaft” (pay-sages post-industriels).

Dans la plupart des villes et com-munes fortement urbanisées, lesterrils sont devenus des refugespour une flore et une faune spé-cifiques d’une grande diversité.

Leur morphologie et le phéno-mène de combustion toujoursprésents chez certains d’entreeux favorisent l’apparition etl’adaptation d’espèces insolitesdans le Nord de l’Europe (digi-taire sanguine, mousses tropica-les, séneçon d’Afrique duSud…).

Le projet vise à mettre en évi-dence, de façon uniforme etstructurée, la valeur patrimonialeet écologique des sites concer-

nés. Il repose sur deux thémati-ques : une thématique environ-nementale, visant à la protectionet la mise en valeur de la biodi-versité des sites découlant d’uneconnaissance plus approfondiedes lieux liée aux différents in-ventaires scientifiques et histori-ques réalisés, et une thématiquetouristique, par la mise en valeurd’un patrimoine industriel et na-turel à destination d’un tourismed’un jour, tourisme vert, tou-risme doux, prenant en compteles objectifs de développementdurable.

Le concept consiste à restitueraux visiteurs, au travers desmoyens de communications dy-namiques, ludiques et scientifi-ques les différentes informationsobtenues via les inventaires, lebut essentiel étant de mettre enavant l’origine des différentscomposants constituant les ter-rils, leur histoire, leur réalité etleur devenir.

Sont ainsi prévus un balisage, despanneaux et modules didacti-ques, des brochures pédagogi-ques et des plans de visite.

La Route des Terrils aura sa“Maison des Terrils” ; elle serasituée dans l’ancien lavoir à char-bon du Gosson II. Elle sera lecentre scientifique et didactiquedu projet. Elle servira de lieu decolloques, de rencontres, de ma-nifestations ponctuelles, de jour-nées thématiques. Des activitésde prestige et des stages de va-cances pourront s’y dérouler.

La Route des Terrils représenteun maillage vert, prolongationdu travail entrepris dans le Nordde la France et le Hainaut et réa-lisant le lien avec la Province duLimbourg Hollandais/du Lim-

bourg belge et la Région d’Aa-chen.

Sur le plan administratif, le projeta été accepté par la fondationEuregio le 11 octobre 2005 et parles deux ministres wallons char-gés du co-financement, à savoirles Ministres André Antoine (dé-veloppement territorial) et Be-noît Lutgen (environnement ettourisme) le 26 octobre 2005. UnAccord de Coopération formali-sant les relations entre tous lespartenaires a été signé à la mi-dé-cembre.

Le budget global pour la partie“Route des Terrils”est de 2.640.109,42€, dont1.250.429,71€ de financementeuropéen, 1.240.703,77€ de co-financement wallon et148.975,94€ de co-financementdes partenaires. Il doit être ter-miné pour 2008.

Jacques CRUL, Directeur dudomaine touristique

de Blégny Mine

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REPORTAGE

Ci-dessous : visites scolaires sur le terril Al-bert Ier, près de Saint-Vaast (La Louvière).Photo : Robert willame.

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La route des terrils

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Au départ simple et modestefonderie établie à Haine-Saint-Pierre (près de La Louvière), lasociété Baume & Marpentdevint au cours des années uneentreprise de constructionmétallique et de génie civil aucaractère international.L'entreprise ne connutquasiment aucune limite à sonexpansion territoriale, qui touchaentre autres l'Egypte, la Chine,l'Amérique du Sud…

Durant l'année 2005, l'Ecomuséerégional du Centre proposa uneexposition retraçant le parcoursde cette société. Grâce à un trèsbeau fonds d'archives et à des té-moignages oraux, une partie del'histoire et du fonctionnementde cette véritable multinationalea pu être sauvée de l'oubli. Lesorganisateurs de l'événement nevoulaient surtout pas tomberdans l'anecdote. L'expositionprésentait donc l'entreprise dansun contexte plus général : celuides autres usines de constructionmétallique de la région, de l'ar-chitecture préfabriquée et desnouvelles techniques en matièrede génie civil. A la suite de cette exposition,

vient de paraître en ce débutd'année 2006 une publicationconsacrée à Baume & Marpent.Ce livre est construit autour dedeux grands axes.

Dans une première partie, huitarticles donnent un aperçu géné-ral de l'entreprise et du contexteéconomique de l'époque. Toutcomme pour l'exposition, c'estl'histoire comparative qui est àl'honneur ici : ainsi, à côté d'arti-cles consacrés pleinement àBaume & Marpent (analyse desfacteurs qui ont permis à Baume& Marpent de devenir une puis-sante multinationale, aspect ar-chitectural, production ferro-

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PUBLICATION

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Baume & Marpent.De la Haine au Nil... Itinéraire d’un géant

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viaire, travail des enfants, etc.),on retrouvera d'autres articlesplus “généralistes” (la destinéedes anciens sites industriels de larégion du Centre, l'étude archi-tecturale d'un bassin olympique,les Ateliers de La Louvière-Bouvy, etc.).

Dans une seconde partie est ex-posé un catalogue de production,montrant si besoin est l'énormediversité de la production deBaume & Marpent : châssis àmolettes, wagons, locomotives,bateaux, voitures, camionnettes,pylônes, gazomètres, ponts,charpentes, maisons démonta-bles... De fait, un des principauxatouts de Baume & Marpent étaitson incroyable faculté d'adapta-tion. Les ingénieurs et architectesde cette entreprise, associés à unemain-d'œuvre hautement quali-fiée, ne se contentaient pas de fa-briquer des pièces en série demanière statique : ils en étaientaussi les concepteurs, fabriquantpour tel ou tel commanditairedes objets uniques répondantaux besoins particuliers du mo-ment.

Outre ces deux grands axes,mentionnons la présence danscette publication d'une carte dela production de Baume & Mar-pent sur le plan mondial.

Informations pratiques : Baume& Marpent. De la Haine au Nil...Itinéraire d'un géant, La Louvière,Ecomusée régional du Centre,2006. 220 pages, préface de Phi-lippe Busquin, introduction deJean Puissant. Articles de Gué-naël Vande Vijver, Yves Quai-riaux, Alain Dewier, OlivierCnockaert, Karima Haoudy,Iwan Strauven, Benoit Moritz,Pierre Rasson et Michel Thiry.

Prix de vente : 10€. Commandeet informations : Ecomusée ré-gional du Centre. Rue Saint Pa-trice 2b 7110 La Louvière. Tél. :064/28.20.00. Site web :www.bois-du-luc.com.

Lionel Vanvelthem

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PATRIMOINE INDUSTRIEL WALLONIE-BRUXELLES

: Halles du NordRue de la Boucherie, 4B-4000 LIEGE (Belgique)Tél. : 04/221.94.16 ou 17Fax : 04/[email protected]

: Bruno VAN MOL: Jean-Louis DELAET

Claude GAIER: A.S.B.L.Grand-Hornu Images

(Maryse WILLEMS): Jacques CRUL: Jean DEFER

Claude DEPAUWJosé DUPONTClaude MICHAUXJean-Claude SCHUMACHER Guido VANDERHULSTGuénaël VANDE VIJVERJean-Jacques VAN MOL

Publié avec l'aide de la Communauté Française

Membre individuel effectif : 12,50 €Associations culturelles : 18,50 €Associations commerciales : 25 €Membres protecteurs : 75 €Cotisation à l'ASBL (sans la revue) : 2,50 €

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Claude GAIERRue F. Lapierre, 35/11B-4620 FLERONTél. : 04/221.94.17Fax : 04/[email protected]

Guénaël VANDE VIJVERBoulevard de la Sennette, 427190 Ecaussinnes Tél. : 0475/33.49.28 ou 067/87.81.33Fax : 064/[email protected]

Lionel [email protected]

TABLE DES MATIERES

, par B. VAN MOL 2, par C. DUPONT 3

, par M. MAINJOT 7, par J. URBAIN 18

, par A. DEWIER 22, par J. CRUL 25

, par L. VANVELTHEM 26

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Association sans but lucratif fondée en 1984

Siège social

Conseil d'administration

PrésidentVice-présidents

Secrétariat

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Secrétariat de rédaction

EditorialEtude : Molenbeek, commune industrielleEtude : Esquisse d’un historique de la législation minière...Etude : Le procès du Bois du CazierEthno-témoignage : Souvenir d’un ancien surveillant au triage-lavoir de St-Emmanuel (2)Reportage : la route des terrilsPublication : Baume & Marpent. De la Haine au Nil... Itinéraire d’un géant