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THE FRENCHREVIEW, Vol. 70, NO. 1, October 1996 Printed in U5.A Hydre-miroir: Les Romanesques d'Alain Robbe-Grillet et le pacte fantasmatique par Nancy M. Frelick [. . .1 pour tout ce qui concerne au moins l'être parlant, la réalité est comme ça, c'est-à-dire fantasmatique. -Lacan 81 Le dernier écrivain, mal armé encore 1.. .l, se ressent déjà lui-même comme une faille dans l'ordre des choses: enne- mi naturel de la vertu, pourfendeur de sa propre raison, manque d'être au sein de sa propre conscience, abîme trouant soudain la vérité, il est l'absence, il est l'oubli, il est la déroute. -Robbe-Grillet Angélique 82 LA QUESTION QUI SE RÉPÈTE AVEC INSISTANCE à travers la lecture des Ro- manesques d'Alain Robbe-Grillet est d'ordre générique: ces livres, se classent-ils sous le genre autobiographique ou sous le genre romanesque? Composés d'une alternance déroutante (mais jouissive) entre le repor- tage d'événements dans la vie de l'auteur et la narration de certains sou- venirs oniriques d'origine mystérieuse, ces textes rendent une lecture linéaire impossible et semblent vouloir résister à toute définition. Comme le suggère le titre paradoxal de la trilogie (Romanesques serait un drôle de titre pour une autobiographie traditionnelle'), cette œuvre est pleine de contradictions. Mireille Rosello, en parlant du premier volet des Romanesques, explique: "une des grandes séductions du Miroir qui revient est de maintenir un équilibre vertigineux entre deux propositions apparem- ment incompatibles: toute autobiographie est impossible, mais par ailleurs, toute écriture est autobiographique" (1).

Nancy M. Frelick, Hydre-Miroir

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  • THE FRENCHREVIEW,Vol. 70, NO. 1, October 1996 Printed in U5 .A

    Hydre-miroir:Les Romanesques d'Alain Robbe-Grillet et le pacte fantasmatique

    par Nancy M. Frelick

    [.. .1 pour tout ce qui concerne au moins l'tre parlant, la ralit est comme a, c'est--dire fantasmatique.

    -Lacan 81

    Le dernier crivain, mal arm encore 1.. .l, se ressent dj lui-mme comme une faille dans l'ordre des choses: enne- mi naturel de la vertu, pourfendeur de sa propre raison, manque d'tre au sein de sa propre conscience, abme trouant soudain la vrit, il est l'absence, il est l'oubli, il est la droute.

    -Robbe-Grillet Anglique 82

    L A QUESTION QUI SE RPTE AVEC INSISTANCE travers la lecture des Romanesques d'Alain Robbe-Grillet est d'ordre gnrique: ces livres, se classent-ils sous le genre autobiographique ou sous le genre romanesque? Composs d'une alternance droutante (mais jouissive) entre le repor- tage d'vnements dans la vie de l'auteur et la narration de certains sou- venirs oniriques d'origine mystrieuse, ces textes rendent une lecture linaire impossible et semblent vouloir rsister toute dfinition. Comme le suggre le titre paradoxal de la trilogie (Romanesques serait un

    drle de titre pour une autobiographie traditionnelle'), cette uvre est pleine de contradictions. Mireille Rosello, en parlant du premier volet des Romanesques, explique: "une des grandes sductions du Miroir qui revient est de maintenir un quilibre vertigineux entre deux propositions apparem- ment incompatibles: toute autobiographie est impossible, mais par ailleurs, toute criture est autobiographique" (1).

  • LES ROMANESQUES D'ALAIN ROBBE-GRILLET 45 Dans le deuxime volume des Romanesques, intitul Anglique ou l'en-

    chantement, le dfi lanc la critique autobiographique s'explicite lorsque Robbe-Grillet dnonce les ides de Philippe Lejeune quant l'acte auto- biographique:

    Aussi ne saurais-je partager l'avis de Philippe Lejeune concernant la mise en texte des souvenirs. "L'exigence de signification est le principe positif et premier, dit-il, de la qute autobiographique". Non, non! Cer- tainement pas! Cet axiome n'est valable, de toute vidence, ni pour le manuscrit dont la rdaction a occup Corinthe pendant les deux dernires dcennies de son existence, ni pour ma propre entreprise actuelle. (67)

    Malgr les objections de Robbe-Grillet aux dfinitions du "pape auto- bioo2, le texte de cette "aut~fiction"~ ou de cette "nouvelle autobiogra- phie" maintiendra quand mme un certain rapport, quoique ambivalent, avec l'ouvrage de Lejeune. Pour commencer, Les Romanesques semblent parfois se classer nettement sous le genre autobiographique, selon les cri- tres tablis par Lejeune dans Le Pacte autobiographique. Dans le premier paragraphe du Miroir qui revient, Robbe-Grillet s'identifie au narrateur, au sujet de l'nonciation et de l'nonc du rcit, en indiquant clairement que le "je", celui qui parle et dont il est question pour le moment, est identique au "je" qui a crit et publi ses livres (mme si celui-ci semble parfois porter un nom diffrent, celui de Jean Robin4, par la suite). Le rcit s'annonce ainsi: "Si j'ai bonne mmoire, j'ai commenc l'criture du prsent livre vers la fin de l'anne 76, ou bien au dbut de 77, c'est--dire quelques mois aprs la publication de Topologie d'une cit fantme" (7).De plus, Robbe-Grillet affirme deux pages plus loin que l'uvre dont il s'agit ici est une autobiographie. A la quatrime page du texte, il devient encore plus explicite en disant (non sans ironie) qu'il "accepte en ce moment prcis d'crire un 'Robbe-Grillet par lui-mme' " (10). Or, mme si les livres sur un crivain "par lui-mme" ne sont pas normalement composs par lui, Robbe-Grillet fait sans doute allusion au Roland Barthes par Roland Barthes, suggrant qu'il existe une identit troite entre Robbe-Grillet, le narrateur et le personnage principal du livre. Cependant, ds le dbut du Miroir Robbe-Grillet sme aussi le doute sur

    le statut de son texte. Les problmes de dfinition commencent surgir dans le deuxime paragraphe-avant mme que l'auteur ne nous dise que ce livre doit faire figure d'autobiographie-lorsque Robbe-Grillet pose la question inattendue: "Qui tait Henri de Corinthe?" Puisque l'auteur s'in- terroge sur l'identit de ce personnage inconnu avant de nous dire qu'il s'agit ici d'un "Robbe-Grillet par lui-mme", le lecteur non averti risque de se demander si le livre qu'il a en main ne serait pas une biographie (relle ou romanesque) " la troisime personne" et "h~modigtique"~, dite "de tmoin" (Genette 251-54). D'ailleurs, pourquoi serait-ce, selon le mot de l'auteur, "dans le but-incertain-de donner de telles questions sur [Henri de Corinthe] ne serait-ce qu'un semblant de rponse, que"

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    Robbe-Grillet aurait "entrepris [...] de rdiger cette autobiographie" (Miroir 9)? On se demande: Qui donc est cet Henri de Corinthe? Et quel rapport peut-il bien avoir avec Robbe-Grillet? Va-t-il faire figure d'inspi- rateur, tout simplement? Ou va-t-il occuper une place plus importante dans cette autobiographie? Est-il un personnage rel? Ou fictif? Au lieu de rpondre ces questions, Robbe-Grillet continue semer le

    doute chez son lecteur, faisant en sorte qu'Henri de Corinthe reste tou- jours dans un espace ambigu, nigmatique, voire phmre. Ainsi, ds le dbut du livre, le souvenir d'Henri de Corinthe est mis en cause par le narrateur: "Je pense [. ..] ne l'avoir jamais rencontr moi-mme, sauf, peut-tre lorsque j'tais encore un tout petit enfant" (Miroir 7). Robbe-Grillet souligne aussi la nature incertaine de la mmoire en admettant que ses souvenirs personnels peuvent trs bien tre des inventions:

    Mais les souvenirs personnels qu'il me semble parfois avoir gards de ces brves entrevues (au sens propre du mot: comme entre les deux bat- tants disjoints d'une porte accidentellement mal close) ont trs bien pu avoir t forgs aprs coup par ma mmoire-mensongre et travailleuse-sinon de toutes pices, du moins partir seulement des rcits dcousus qui circulaient voix basses dans ma famille, ou aux alentours de la vieille maison. (Miroir 7-8)

    Or, on peut se demander s'il ne s'agit pas d'un fantasme. D'ailleurs, l'au- teur met aussi en cause le souvenir de la frquence des visites de cet "illustre visiteur", parlant de celles-ci comme d'apparitions fugitives:

    M. de Corinthe, le comte Henri comme l'appelait le plus souvent mon pre [. ..] venait souvent nous voir, c'est peu prs certain.. . Souvent? Je suis aujourd'hui totalement incapable de chiffrer cette frquence. Venait-il par exemple chaque mois? Ou davantage? Ou bien ne passait-il qu' peine une ou deux fois dans l'anne, ses apparitions-bien que fugitives-lais- sant ensuite des traces si fortes, si durables dans l'esprit de tous, qu'elles s'y trouvaient aussitt multiplies par le souvenir? (Miroir 8)

    Les incertitudes du lecteur se multiplient comme les traces de ces apparitions chez l'auteur, car, outre les rcits incertains mais prtention biographique indiqus ci-dessus, et l Robbe-Grillet nous raconte des histoires trs prcises, quoique contradictoires et oniriques, sur ce per- sonnage, comme, par exemple, dans "l'pisode (dit du miroir qui revient)" (Miroir 89-103) qui se lit comme le fragment d'une histoire fan- tastique. Dans cet pisode, qui pourrait provenir d'une lecture de jeunesse ou d'un rve de l'auteur, Henri de Corinthe dcouvre, en chevauchant sur la plage, un miroir dans les flots de la mer. Ce miroir, qui revient comme un signifiant rprim dont le signifi doit demeurer jamais mystrieux, effraie le cheval du comte, car la glace ne renvoie que l'image de Marie-Ange, la jeune matresse "dont on croyait comprendre par moment qu'[Henri] l'aurait tue lui-mme de faon accidentelle, ou bien, d'autres fois, qu'elle avait disparu dans le naufrage d'une embarca- tion quipe pour la chasse sous-marine" (Miroir 98). Les renseignements

  • LES ROMANESQUES D'ALAIN ROBBE-GRILLET 47 qui nous sont donns sur la disparition de Marie-Ange (qui semble plus tard se confondre avec Anglique et d'autres figures fminines dans l'uvre de Robbe-Grillet) sont sans doute contradictoires parce que ni son identit, ni les faits rels ne sont importants. Elle est le signifiant d'un dsir pour l'objet qui manque. Le nom et l'image de Marie-Ange sont des signifiants de l'inaccessible, parce qu'ils n'ont ni rfrent, ni signifi sta- ble. Marie-Ange reprsente non seulement la femme idalise hors d'at- teinte, qui appartient un autre monde (son appartenance l'au-del est signale la fois par son nom et par sa mort), mais le dsir de l'Autre, dsir refoul qui revient sans cesse hanter la mmoire du sujet. Henri de Corinthe est aussi un signifiant sans signifi particulier, un

    "signifiant flottant" (Sheringham 32). Si ce personnage est difficile cerner, ce n'est pas cependant parce qu'il manque de rfrents ou de signifis, mais parce que ceux-ci se multiplient sans cesse, en partie par le glissement progressif de ses noms6, pour crer tout un labyrinthe de signes incertains qui confondent lecteurs et lectrices. Robbe-Grillet souligne la confusion quant ce personnage phmre en admettant qu'il l'a peut-tre confondu avec plusieurs personnages historiques:

    Il est possible, enfin, que je prte involontairement Corinthe des traits de caractre, des faits d'armes ou des particularits biographiques plus anodines qui ne lui appartiennent pas, emprunts peut-tre d'autres personnalits plus ou moins clbres de l'poque, Henri de Kerillis, Franois de la Rocque, ou mme le comte de Paris, qui s'appelait Henri galement et prtendait au trne de France. (Miroir 103)

    Que faire de ce personnage? Qui est-ce? Que signifie-t-il? Aprs quelques recherches extra- et intertextuelles le lecteur dcouvre qu'Henri de Co- rinthe est aussi un personnage fictif, un personnage mythique ou lgen- daire qui parat, sous diffrentes formes dans les uvres de Michelet (La Sorcire) et de Goethe (cit par Michelet), ainsi que chez Robbe-Grillet (le film La Belle captive)'. Henri de Corinthe est un personnage changeant, proten, un personnage qui peut tre li la fois la puret, la vir- ginit, la rpression, la sexualit dfendue, au vampirisme, la sorcel- lerie, la Vnus infernale et, chez Robbe-Grillet, au fascisme et au crime sexuel. Le rle d'Henri de Corinthe ne s'claircit que dans les deux derniers volets de l'uvre, Anglique et Les Derniers jours de Corinthe, o l'on comprend que ce personnage insolite est comme la reprsentation fantasmatique ou, si l'on veut, l'incarnation romanesque, voire le signifi- ant des obsessions de l'auteur avec la violence, le crime sexuel et la per- version, obsessions qui surgissent dans la plupart des uvres de Robbe- Grillet, et dont il fait l'aveu personnel dans Les Romanesques. Mais Henri de Corinthe n'est pas le simple alter-ego de l'auteur. Le lien entre Corinthe et le pre du narrateur pourrait reprsenter une qute impossi- ble de ses origines, de sa propre gense (voir Sheringham 32). Les paroles de Robbe-Grillet appuient cette thse lorsqu'il crit:

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    Que venait faire chez mon pre ce personnage qui tait le comte Henri de Corinthe, dont l'existence est atteste-mais pas plus que celle de Rollebon en quelque sorte? Et mme quelquefois, j'ai pens que je les confondais tous les deux. Et tout coup j'ai crit cette phrase: "Si j'ar- rivais dire qui tait Henri de Corinthe, peut-tre finirais-je par savoir qui je suis?", c'est--dire: si je pouvais combler ce manque dans mon existence d'enfant, peut-tre qu'un sens apparatrait, flagranp.

    Ailleurs Robbe-Grillet souligne aussi la (con)fusion possible de son pre et de Corinthe, et l'impossibilit de vrifier l'identit de ce dernier: "Quand il tait la maison, je n'avais pas le droit d'entrer dans la pice o il se trouvait" et "Il avait la mme voix que mon pre. Je pense que j'tais trs inquiet de savoir [...] s'ils ne faisaient pas, en ralit, un seul per- ~onnnage"~.Or Corinthe, n'est-il pas li au "Non (sinon au Nom) du Pre"lo? Dans une optique lacanienne, Corinthe est aussi le signifiant du dsir. A un certain niveau, il est vrai, il reprsente le dsir de l'autre dans un rapport fantasmatique. Celui-ci est l'autre du domaine Imaginaire et correspond plus ou moins au concept d'alter-ego". Mais ce personnage cre aussi une sorte de bance dans le texte. Il ouvre une voie (et ainsi donne voix) au dsir de l'Autre, de "l'inter-dit" du domaine Symbolique (encore le "Non/Nom du Pre" chez Lacan), qui s'insre dans le discours de Robbe-Grillet pour subvertir l'impression fautive et sductrice d'un moi cartsien, d'une pense, d'un tre et d'une parole unis et transpar- ents qui pourraient se reprsenter fidlement dans une uvre autobi- ographique. Dans Les Derniers jours, Corinthe semble mme se ddoubler plusieurs reprises-il se voit ou voit un homme qui lui ressemble par- faitement et qui se sert du mme pseudonyme. On suggre qu'il aurait adopt, pour se protger, le nom de son sosie, celui d'Henri Robin (pre de Jean Robin, alias notre narrateur?) qui aurait t tu pendant la guerre (79-80). Corinthe reprsente sans doute aussi le "Non" de Robbe-Grillet nonc

    face aux critres de signification et de vracit postuls par Lejeune dans son Pacte. Le lien en est implicite dans le passage de Robbe-Grillet sur Lejeune (cit plus haut) puisque le principe de signification est ni la fois pour le texte qu'crit Corinthe et pour celui que compose notre auteur. Comme le dit Robbe-Grillet, "la pice manquante, la pice fausse, la pice purement imaginaire va tre l'lment fondamental de l'autofic- tion, c'est--dire non pas de l'autobiographie traditionnelle, mais de la nouvelle autobiographie" (Hornung 120-21). Mme s'il affirme qu'il ne fait pas ceci "pour embter" Lejeune, Robbe-Grillet indique clairement que sa "nouvelle autobiographie" se dfinit au moins en partie par rap- port aux ides du critique:

    Rajouter volontairement une pice fausse, ce n'est pas du tout fait pour embter Philippe Lejeune, comme il l'a dit une fois publiquement mon sujet, c'est seulement avec l'espoir qu'il s'agit l d'un oprateur efficace: introduire dans le texte autobiographique une fausse pice au milieu des

  • LES ROMANESQUES D'ALAIN ROBBE-GRILLET 49 pices qu'on croit vraies. Cette intervention plus ou moins prmdite s'op- pose au principe de sincrit, cher Lejeune et Rousseau. (Homung 121)

    Le texte de Corinthe brouille aussi les pistes pour le lecteur, car le comte mystrieux devient parfois le narrateur et nous parle la premire personne, son rcit alternant avec celui de Robbe-Grillet (ou de Jean Robin). Dans le dernier volume, Corinthe parle mme de "ce choix que j'ai fait de parler la troisime personne" (Derniers jours 55),ce qui sug- gre que tout le rcit de Robbe-Grillet sur Corinthe la troisime per- sonne pourrait tout aussi bien tre celui de Corinthe. Sans doute Corinthe devient-il donc aussi le lieu, le lieu absent (comme

    le centre du miroir) o se manifeste le dsir du lecteur la recherche du sens, voire de la vrit, incarn dans un rfrent ou dans un signifi clair et stable. Ce dsir est inter-dit par l'opacit et le glissement des signifiants dans l'uvre de Robbe-Grillet, uvre, d'ailleurs, qui sert ainsi de "miroir qui revient" pour ses lecteurs. Cette autobiographie fonctionne comme le miroir sur la plage qui ne renvoie pas l'image que l'on attendait (celle de celui qui s'y contemple), mais les reflets et les rflexions d'un Autre qui se fait entrevoir travers l'optique prismatique du travail onirique de l'inconscient, c'est--dire travers la condensation, le dplacement, la figuration et l'laboration secondaire du "traumarbeit" freudien. Ce miroir qui ne rflchit pas reflte aussi le manque de rfrents sta-

    bles dans l'uvre. Il est vident que l'inclusion du personnage bizarre et incertain qu'est Henri de Corinthe, met en cause les termes du "contrat autobiographique" en brisant "le contrat rfrentiel" de l'autobiographie traditionnelle telle que la dfinit Lejeune:

    Par opposition toutes les formes de fiction, la biographie et I'autobio- graphie sont des textes rfrentiels: exactement comme le discours scien- tifique ou historique, ils prtendent apporter une information sur une "ralit" extrieure au texte, et donc se soumettre une preuve de vri- fication. Leur but n'est pas la simple vraisemblance, mais la ressemblance au vrai. Non "l'effet de rel", mais l'image du rel. Tous les textes rfrentiels comportent donc ce que j'appelerai un "pacte rfrentiel", im- plicite ou explicite, dans lequel sont inclus une dfinition du champ du rel vis et un nonc des modalits et du degr de ressemblance aux- quels le texte prtend. (36)

    Corinthe est la "pice fausse", l'lment imaginaire qui est fondamental l'autofiction telle que la dfinit Robbe-Grillet ci-dessus. Ds la publica- tion du Miroir, Robbe-Grillet confirme que dans son livre "le pacte auto- biographique n'est pas respect, car pour pouvoir signer ce pacte, il faut probablement tre sr de ce qu'on dit, c'est--dire, croire la vrit de ses souvenirs; or je ne crois pas la vrit de mes souvenirs" ("Rtro- spection" 117). Cependant, il faut noter que l'interviewer (anonyme) de "Rtrospection" rpond pertinemment que l'on "a l'impression que le pacte autobiographique finit quand mme par s'imposer", surtout en ce qui concerne les pisodes historiques (117). Or, comment classer ce texte?

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    Est-il question dans Les Romanesques d'un pacte "mal tenu, sans que la valeur rfrentielle du texte disparaisse" compltement (Lejeune 37)? Ou d'un cas de "mythomanie"? C'est--dire, selon Lejeune, "[. ..] non pas les erreurs, les dformations, les interprtations consubstantielles l'laboration du mythe personnel dans toute autobiographie, mais la substitu- tion d'une histoire carrment invente, et globalement sans rapport d'exac- titude avec la vie" (40). Les Romanesques semblent en effet se ranger dans cette dernire cat-

    gorie, car comme l'affirme Robbe-Grillet dans les citations ci-dessus, la pice fausse est l'lment fondamental de la nouvelle autobiographie. Ds le premier volume, il exprime d'ailleurs une certaine jouissance face au statut ambigu de son uvre, affirmant qu'il n'a aucune intention de se tenir un rcit vridique, car cela serait mensonger:

    parlant de moi tout coup depuis la maison d'en face, j'prouve comme une aisance toute neuve, une lgret, un tat joyeux de narrateur irre- sponsable. II ne faudrait donc pas attendre de ces pages quelque explica- tion dfinitive que ce soit, ni seulement vridique (celle, recueillie la source, que fournit l'auteur lui-mme!), concernant mes travaux crits ou films: leur fonctionnement authentifi, leur signification relle. Je ne suis pas homme de vrit, ai-je dit, mais non plus de mensonge, ce qui reviendrait au mme. Je suis une sorte d'explorateur, rsolu, mal arm, imprudent, qui ne croit pas l'existence antrieure ni durable du pays o il trace, jour aprs jour, un chemin possible. Je ne suis pas un matre penser, mais un compagnon de route, d'invention, ou d'alatoire recherche. Et c'est encore dans une fiction que je me hasarde ici. (Miroir 12-13)

    Cependant, malgr son "non" au "pape de l'autobiographie", Robbe-Grillet ne peut pas plus se dfaire des catgories de Lejeune qu'il ne peut supprimer ses fantasmes et les lois de l'inconscient qui les gouvernent: l'criture de Robbe-Grillet, mme si elle insiste sur son manque de signi- fication, se reclasse malgr tout sous une des dfinitions de Lejeune, qui semble dj avoir prvu la problmatique de l'autofiction (l'ide que la fiction peut reprsenter une vrit plus vraie que les simples faits, n'est pas entirement nouvelle). Lejeune rcupre les textes rebelles en des ter- mes qui s'accordent parfaitement la lecture des Romanesques:

    disqualifi comme autobiographie, le rcit gardera tout son intrt comme fantasme, au niveau de son nonc, et la fausset du pacte autobic graphique, comme conduite, restera pour nous rvlatrice, au niveau de l'nonciation, d'un sujet intention malgr tout autobiographique que nous continuerons supposer au-del du sujet truqu. C'est revenir donc analyser sur un autre plan, non plus le rapport biographie-autobiogra- phie, mais roman-autobiographie, dfinir ce qu'on pourrait appeler l'espace autobiographique, et les effets de reliefqu'il engendre. (4041)

    Quel est ce rapport roman-autobiographie dont parle Lejeune? Il l'ex- plicite en utilisant l'exemple de Gide et de Mauriac, qui ont tous deux af-

  • LES ROMANESQUES D'ALAIN ROBBE-GRILLET 51 firm que la fiction tendait tre plus "vraie" que l'autobiographie, non pas pour condamner l'autobiographie, mais pour dsigner "l'espace autobiographique dans lequel ils dsirent qu'on lise l'ensemble de leur uvre" (41):

    Loin d'tre une condamnation de l'autobiographie, ces phrases souvent cites sont en ralit une forme indirecte du pacte autobiographique: elles tablissent en effet de quel ordre est la vrit dernire que visent leurs textes. Dans ces jugements, le lecteur oublie trop souvent que l'au- tobiographie apparat deux niveaux: en mme temps que l'un des deux termes de la comparaison, elle est le critre qui sert la comparaison. Quelle est cette "vrit" que le roman permet d'approcher mieux que l'autobiographie, sinon la vrit personnelle, individuelle, intime, de l'auteur, c'est--dire cela mme que vise tout projet autobiographique? Si l'on peut dire, c'est en tant qu'autobiographie que le roman est dcrt plus vrai. (4142)

    Cette affirmation s'accorde parfaitement l'nonc de Robbe-Grillet dans le Miroir qui revient: "Je n'ai jamais parl d'autre chose que de moi. Comme c'tait de l'intrieur, on ne s'en est gure aperu" (10). Ainsi, le pacte autobiographique est ni, mais il russit quand mme s'imposer indirectement et de manire rcuprer tous les crits de l'auteur sous la mme rubrique. Or, dans Les Romanesques, l'auteur invite le lecteur participer ce que Lejeune nomme "le pacte fantasmatique": "Le lecteur est [...] invit lire les romans non seulement comme des fictions renvoyant une vrit de la "nature humaine", mais aussi comme des fantasmes rvlateurs d'un individu" (4142). Le rcit fantasm dans cette autobiographie de Robbe-Grillet (qui

    incorpore toutes ses uvres) est donc cens tre rvlateur de sa vie in- trieure, de ses fantasmes, de ses rves et cauchemars, et de ses obses- sions. Comme il le dit lui-mme,

    ce plaisir douteux [ utiliser la forme traditionnelle de l'autobiographie] m'intresse dans la mesure o d'une part, il me confirme que je me serais mis crire des romans pour exorciser ces fantmes dont je ne venais pas bout, et me fait d'autre part dcouvrir que le biais de la fic- tion est, en fin de compte, beaucoup plus personnel que la prtendue sincrit de l'aveu. (Miroir 16)

    Le texte de Robbe-Grillet est, en effet, peupl d'allusions aux fan- tasmes, aux fantmes et aux spectres. Ceux-ci fonctionnent comme les miroirs de ses obsessions: de sa fascination pour les images de la mer et de la noyade, de la violence et du sang, du fascisme, du ftichisme, du crime sexuel et de la perversion. Ils sont aussi (et peut-tre surtout) rvlateurs de ses proccupations d'crivain, car ils mettent en cause les problmes de la reprsentation et de la caractrisation-comme le dit l'auteur du Miroir, tout personnage romanesque n'a-t-il pas une existence fantmatique ou spectrale? (21)-, les mythes du ralisme et de l'objec- tivit, les piges de la narration, ainsi que les questions quant la nature

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    de l'imaginaire, de la vrit, et de la ralit. Selon Robbe-Grillet, le rel est fugace et fragmentaire, et "[ll'avnement du roman moderne est pr- cisment li cette dcouverte: le rel est discontinu, form d'lments juxtaposs sans raison dont chacun est unique, d'autant plus difficiles saisir qu'ils surgissent de facon sans cesse imprvue, hors de propos, alatoire" (Miroir 208). Le fantasme permet ainsi Robbe-Grillet de con- struire une autobiographie mouvemente, un texte mobile qui imite la perception de la ralit, un texte qui, comme une sorte df"hydre-miroir"(Miroir Il),renvoie l'image des fragments d'une vie dont les l- ments apparemment disparates seront toujours reclasser selon l'op- tique changeante de la mmoire, selon le flux et reflux du conscient et de l'inconscient. Pourquoi le grand reprsentant du Nouveau Roman, fait-il retour

    cette "forme traditionnelle"? La rponse, au prime abord, semble facile: comme il le dit lui-mme, maintenant que le Nouveau Roman fait partie du dogme de la tradition, il est temps de tout remettre en question:

    Maintenant que le Nouveau Roman dfinit de faon positive ses valeurs, dicte ses lois, ramne sur le droit chemin ses mauvais lves, enrle ses francs-tireurs sous l'uniforme, excommunie ses libres penseurs, il de- vient urgent de tout remettre en cause, et replaant les pions leur point de dpart, l'criture ses origines, l'auteur son premier livre, de s'in- terroger nouveau sur le rle ambigu que jouent, dans le rcit moderne, la reprsentation du monde et l'expression d'une personne, qui est la fois un corps, une projection intentionnelle et un inconscient. (Miroir 12)

    Ce projet ne remet pas simplement en question l'criture (que ce soit sous la forme de l'autobiographie, de la biographie ou du roman), la narration et la reprsentation de la ralit, il demande aussi au lecteur de changer son "horizon d'attente" et son mode de lecture en remettant en cause la notion d'auteur. Ainsi, Robbe-Grillet invite ses lecteurs le redcouvrir, le lire et le relire, r-crire le texte mobile que forment ses films, ses rves, ses fantasmes, ses cauchemars et ses romans, et ainsi remettre en cause tous les concepts labors par la critique structuraliste et post- structuraliste quant aux discours de la fiction. Mais cette invitation, ce pacte fantasmatique (voire diab~lique?'~), ne

    faut-il pas s'en mfier? Cette promesse paradoxale d'une vrit intime dcouvrir, n'est-ce pas encore un pige tendu par cet auteur qui admet non seulement son penchant pour la perversion, mais annonce firement sa "vocation de romancier pervers" (Derniers jours 38)? Aprs tout, puisqu'il ne peut tre apprhend qu' travers les textes et les images qu'il profre, l'auteur devra garder une existence aussi fantasmatique et imaginaire pour ses lecteurs que ses personnages. D'ailleurs, en nous invitant le chercher, l'analyser travers ses uvres, Robbe-Grillet n'essaie-t-il pas de nous sduire, de nous leurrer travers notre dsir de savoir, notre dsir de l'Autre? Ne nous encourage-t-il pas participer

  • LES ROMANESQUES D'ALAIN ROBBE-GRILLET 53 un autre pacte de lecture, savoir un jeu de transfert et de contre-trans- fert, voire de complicit, qui risque de nous changer irrmdiablement de par le ftichisme et le voyeurisme que cette nouvelle lecture implique? Dans Psychoanalysis and Stoytelling, Peter Brooks nous rappelle que l'at- tention au dtail que requirent certaines sortes de narrations de types 'ralistes', par exemple, peuvent faire appel au ftichisme, tout comme la promesse d'un dvoilement progressif de la vrit fait place au jeu du voyeur et de l'exhibitionniste (30-31). Le texte des Romanesques fonc- tionne en effet selon le modle du strip-tease (labor par Barthes dans son Plaisir du Texte et cit comme exemple par Brooks), car les lments du texte et les dtails de la vie (rfrentiels et imaginaires) se dvoilent progressivement au lecteur et semblent promettre une dcouverte de la vrit, ou dans ce cas-ci, une mise nu du moi de l'auteur-rvlations qui, jouant selon la loi du signifiant, sont jamais diffres. L'uvre se termine inacheve la fin des Derniers jours de Corinthe. Houppermans nous avertit sur le compte de l'crivain: "Pour vaincre le 'horror vacui' il faut non seulement changer sans cesse de dcors et de victimes: c'est aussi le lecteur qu'il faut piger, sduire, mduser, vampiriser inter- minablement.. . pour qu'il ne reste pas indiffrent de toute facon" (Alain Robbe-Grillet 79). Le danger dans ce Miroir, dans les Romanesques-n'ou- blions pas que les livres ont toujours une fonction spculaire pour le lecteur-c'est que nous y sommes impliqus. Tout comme dans l'pisode du "miroir qui revient", notre reflet risque, par effet de contagion, de se confondre celui de cet autre qu'est l'auteur, et de nous revenir sous une forme altre, portant la marque de changements dont nous ne serons mme pas conscients. Rappelons les ambitions nihilistes de Corinthe (n'est-il pas aussi l'auteur du texte que nous lisons?), qui annonce que le nouvel crivain pourra tout se permettre avec ses lecteurs:

    Dans cette lutte mort, tous les matriaux sont bons prendre, condition d'en pervertir l'arrangement [...] Contrairement l'homme dsirant le dsir de l'autre, le romancier a en effet le droit de tuer son lecteur. D'autres lecteurs viendront prendre sa relve, pour le reconnatre, travers tous les sicles des sicles. Car, paradoxalement, il n'y aura pas de dernier lecteur. (Robbe-Grillet Anglique 84)

    Ce comte de Corinthe, ne reprsente-t-il pas finalement le conte fonda- mental, le mythe personnel qui cre la personne, voire tous les contes qui (r)crivent le moi? C'est--dire non seulement le moi crivant (scripteur ou auteur), mais tout sujet? Ce conte fondamental voquerait toutes les histoires et tous les discours qui nous hantent et nous forment, partir des mythes jusqu'aux rcits de l'histoire, en passant par le kalidoscope des images oniriques et quotidiennes. Aprs la mise en question du sujet et de l'auteur, il s'agit sans doute de mettre en cause le lecteur-de lui montrer une glace qui ne le rflchit pas tel qu'il pensait tre, et de lui faire voir que l'imaginaire et les discours qui le constituent-la littra

  • 54 FRENCH REVIEW

    ture, le cinma, la thorie, ainsi que les mythes et l'histoire-sont plus forts que le rfrentiel. Dans cette optique, le lecteur n'est peut-tre, en fin de compte, qu'une autre cration fantasmatique de l'auteur, un effet de lecture tout aussi ponctuel et vanouissant que le sujet lacanien.

    Notes

    'Comme le suggre Houppermans, ce titre semble avoir t inspir par Barthes (Alain Robbe-Grillet 15). 2Terme de Houppermans pour dsigner Lejeune (Alain Robbe-Grillet 47). Oserait-on parler

    d'un dsir quasi-dipien ou bloomien (The Anxiety oflnfluence), chez Robbe-Grillet, de tuer le pap(a) de l'autobiographie? Voir Thomas Spear, "Staging the Elusive Self" (Harger-Grinling 55-76) pour une discus-

    sion de ce terme de Doubrovsky. 'Personnage nigmatique dans Le Voyeur. 5Comme le prcise Grard Genette dans Figures 111,la narration " la troisime personne"

    implique toujours un sujet de l'nonciation, un 'je' racontant une histoire (251-54). D'ailleurs, dit-il, "la vraie question est de savoir si le narrateur a ou non l'occasion d'em- ployer la premire personne pour dsigner l'un de ses personnages. On distinguera donc ici deux types de rcits: l'un narrateur absent de l'histoire qu'il raconte (exemple: Homre dans l'Iliade, ou Flaubert dans I'Education sentimentale), l'autre narrateur prsent comme personnage dans l'histoire qu'il raconte (exemple: Gil Blas, ou Wuthering Heights). Je nomme le premier type, pour des raisons videntes, htrodigtique, et le second homodigtique" (252). Il est intressant de noter que Robbe-Grillet parle dam Les Derniers jours de Corinthe de son "entreprise a~to-htro-bi6~ra~hi~ue"(190); Thnomne que l'on aura pu noter pour Marie-Ange/Anglique aussi. Pour une discus-

    sion de ce personnage fminin et de ses diverses incarnations voir Houppermans, "Fan- tastique Anglique" (Harger-Grinling 77-99). 7Selon Houppermans, "C'est le mariage entre l'unheimliche et 1'Intertextualit qui donne

    sa marque au texte de Robbe-Grillet: la relation avec les textes se fige dans des images-cls et celles-ci sont rintroduites dans une articulation symbolique" ("n miroir enchant" 44). 8Entretien indit cit par Goulet (Allemand 52-53). Goulet nous rappelle que M. de

    Rollebon "serait un mystrieux aventurier du XVIIIe sicle sur qui Roquentin, le hros de La Nause, effectue des recherches dans la bibliothque municipale de Bouville" (Allemand 81). Ainsi, Robbe-Grillet brouille-t-il encore les pistes entre le rfrentiel et l'intertextuel. 'Entretien avec J.-J. Brochier dans le Magazine littraire de fvrier 1988, cit par Houpper-

    mans ("Un miroir enchant" 3940). Allemand suggre aussi que Corinthe serait peut-tre le double schizophrne du pre de l'crivain (94-96). loVoir Ben Stoltzfus. "Toward Bliss: Barthes. Lacan. and Robbe-Grillet". "Pour une discussion de l'Imaginaire lacanien dans l'autobiographie de Barthes voir

    Sheringham, 28-29, Selon lui, " ~ u t o b i o ~ r a ~ h ~ an activity which is clearly qu in tes~e~t ia l l~ reeks of l'imaginaire, the apotheosis of the adjectivised self" (29). Notons aussi que Robbe- Grillet a invit le rapport entre son uvre et la thorie lacanienne en disant dans un entre- tien avec Jean-Pierre Salgas publi dans la Quinzaine littraire du 18 janvier 1985, intitul "R-G: 'Je n'ai jamais parl d'autre chose que de moi"', que "Le Miroir qui raiient correspond au stade du miroir lacanien: l'enfant recolle ses morceaux dans la glace et s'aper~oit que l'image de lui-mme est un autre!" '2~appelons,comme le fait Allemand, que Corinthe, le double fantasmatique de l'auteur,

    est diabolique (98-101).

  • LES ROMANESQUES D'ALAIN ROBBE-GRILLET Rfrences

    Allemand, Roger-Michel et Alain Goulet. Imaginaires, critures, lectures de Robbe-Grillet d'Un Rgicideaux Romanesques. Lion-sur-Mer: Arcane-Beaunieux, 1991.

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