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  La concertation avec les parties prenantes externes : principes, méthodologie, actions Septembre 2009

Note 21 La Concertation

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La concertationavec les parties prenantes externes

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  • La concertation avec les parties prenantes externes : principes, mthodologie, actions

    Septembre 2009

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 2

    Directrice de la publication : Dorothe Briaumont

    Etude ralise par : Nicolas Blanc, ancien responsable des Programmes, Comit 21 Dorothe Briaumont, directrice gnrale, Comit 21 Ugo Toselli, ancien charg de projet, Comit 21

    Ont galement particip : Karine Viel, responsable du Programme Economie responsable, Comit 21 Matthieu Gauvin, charg de mission, Comit 21

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 3

    Remerciements

    Nous remercions les entreprises et organisations qui ont contribu la ralisation de cette tude :

    Collge entreprises

    AREVA BURGEAP COCA-COLA Entreprise EIFFAGE GDF-SUEZ SUEZ ENVIRONNEMENT

    Collge associations

    Care France CFIE (Centre franais d'information sur les entreprises) EcoMed 21 FIR (Forum pour linvestissement responsable) UICN (Comit franais de lUnion mondiale pour la nature)

    Collge institutionnel, enseignement suprieur et mdias

    ESCP-Europe HEC

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 4

    Sommaire

    Remerciements 3

    Rsum 5

    Introduction 7

    Rpondre des enjeux complexes 7 Une opportunit de progrs pour lentreprise et les parties prenantes 8 Une co-construction de la stratgie de dveloppement durable 8 Stratgie versus communication 9

    1 Pourquoi sengager dans un processus de concertation ? 10

    Des actionnaires aux parties prenantes 10 Un critre de base pour les investisseurs 11 Un enjeu stratgique pour lentreprise 11

    2 la concertation selon le Comit 21 14

    Les pralables ncessaires 14 Le rle du facilitateur 16 Principes et rgles 17 Parties prenantes 18

    3 Droulement de la concertation 19

    Sessions plnires et runions thmatiques 19 Les fonctions assumes par le Comit 21 20 Perspective : concertation et ancrage territorial de la responsabilit 21

    Conclusion 22

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 5

    Rsum

    Dorigine britannique, la concertation dune entreprise avec ses parties prenantes se rpand peu peu en France, en raison sans doute de son importance stratgique et des bnfices retirs.

    Face aux enjeux complexes que rencontrent les entreprises dans le cadre de leur activit (biodiversit, climat, sant, diversit, risques sanitaires, investissement etc.), celles-ci doivent pouvoir les anticiper et y faire face. Lchange avec des reprsentants de la socit civile, au fait des mtiers de lentreprise et de leurs impacts, leur permet de mieux exercer leur responsabilit sociale, socitale et environnementale (RSE).

    La concertation organise la participation des parties prenantes llaboration des dcisions et la co-construction dune stratgie de dveloppement durable. Cette dmarche volontaire reprsente un engagement courageux et une opportunit. Elle est mene en temps de paix ; ce nest ni un tribunal ni un rglement de comptes. Par ailleurs, les dbats sont confidentiels. Elle est souvent facteur dinnovation et dacclration de projets. Ainsi les parties prenantes, en portant un regard critique et en suggrant lentreprise de dvelopper par exemple de nouvelles comptences ou dintgrer telle proccupation, laident dgager les priorits, voire redonner du souffle leur stratgie RSE. La conduite dune concertation est galement le signe dune saine gouvernance dentreprise et un indicateur regard de prs par les agences de notation extra-financire.

    Cet exercice, en mobilisant les dirigeants de lentreprise au plus haut niveau, grce la prsence du PDG et de son comit excutif, permet un dcloisonnement de lanalyse et une meilleure perception en direct des attentes des parties prenantes. La concertation peut tre aussi source de partenariats bilatraux.

    En ce qui concerne les parties prenantes, la prsence des directeurs stratgiques permet une meilleure comprhension des mtiers de lentreprise voire des difficults quelle rencontre. Elles ont galement loccasion de sadresser des interlocuteurs quelles ne ctoient pas habituellement, en dehors du directeur du dveloppement durable.

    Daucuns peuvent sinterroger sur la vracit de lengagement de lentreprise et dnoncent le risque dexploitation de la dmarche en termes dimage voire dinstrumentalisation des parties prenantes. Ce risque parat trs faible. De la mme faon, un partenariat ne signifie pas validation systmatique des actions de lentreprise.

    Depuis 2004, le Comit 21 conoit et anime des dmarches de concertation avec des panels de parties prenantes issues notamment de son rseau (chercheurs, syndicats, institutions, collectivits territoriales, ONG). Il accompagne, leur demande, des entreprises adhrentes (AREVA, COCA-COLA Entreprise, EIFFAGE, GDF-SUEZ, SUEZ ENVIRONNEMENT), sur la base de rgles dontologiques et oprationnelles.

    Nest traite ici que la concertation au niveau corporate des entreprises. Il est souhaitable que la concertation soit ensuite mise en uvre au niveau des sites dimplantation de lentreprise, en France ou ltranger. Par ailleurs, la concertation peut galement tre applique au niveau des collectivits locales, pour lvaluation par exemple dun Agenda 21.

    Ces deux types de concertation locale (entreprises, collectivits locales) feront lobjet de publications spcifiques ultrieures.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 6

    Si nous avons chacun un objet et que nous les changeons, nous avons chacun un objet.

    Si nous avons chacun une ide et que nous les changeons, nous avons chacun deux ides.

    Proverbe chinois

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 7

    Introduction

    La concertation avec les parties prenantes a pour but damliorer ladquation de la stratgie de lentreprise aux attentes de la socit civile et denrichir sa rflexion et ses engagements en matire de dveloppement durable. Elle doit conduire, terme, lentreprise prciser ses engagements et amnager en consquence son plan dactions. Elle permet lexpression de diffrents points de vue, analyses, critiques et propositions, tels quils sont perus par les diffrentes parties intresses.

    La concertation est un processus volontaire et dcisionnel. Elle rpond une dynamique cooprative mais ne vise pas le consensus. Elle enrichit la dcision et en conforte la lgitimit.

    La concertation ne doit pas tre confondue avec linformation, la communication, la consultation, la mdiation, la ngociation, le dbat public ni la participation.

    Rpondre des enjeux complexes

    Fondamentalement, cest lexercice de la responsabilit largie dentreprise (la RSE : responsabilit socitale dentreprise) qui les conduit devoir sengager et rendre des comptes de la manire la plus transparente qui soit sur les enjeux dexercice de leurs mtiers o elles ne sont pas toujours comptentes, ni encore moins lgitimes.

    Un nombre croissant denjeux complexes sont partags et, pour des raisons defficacit, les rponses ces enjeux doivent ltre galement avec des parties prenantes externes comptentes et lgitimes :

    - climat (plans climat territoriaux) - politique de sant, prvention sanitaire des risques, prvention du sida - protection de la biodiversit et restauration de milieux dgrads - accs des salaris et de leurs familles aux biens essentiels - droits de lhomme - insertion professionnelle des jeunes - investissement socialement responsable -

    Les responsables sont confronts une complexification de leurs mtiers et doivent, ce titre, assumer des responsabilits largies qui supposent des comptences nouvelles.

    Le dialogue avec les parties prenantes va sans doute devenir un passage oblig pour assurer la lgitimit et construire une stratgie de responsabilit sociale, socitale et environnementale, qui doit ensuite se dcliner concrtement lchelle des sites. Il ne sagit pas de sappuyer sur les parties prenantes pour faciliter lacceptation des prises de dcision mais bien de sappuyer sur celles-ci, qui reprsentent la socit civile dans sa diversit, afin de renforcer lefficacit et la responsabilit de lorganisation (tendre le champ de connaissance des impacts de lactivit, anticiper et prvenir les crises, grer les risques).

    Septembre 2009

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 8

    Une opportunit de progrs pour lentreprise et les parties prenantes

    Au-del des obligations rglementaires et des risques de rejet de ses mtiers, lentreprise doit comprendre la concertation avec les parties prenantes - internes et externes - comme source de progrs. Lintrt est double : cest la fois un apprentissage par lentreprise de lvolution des demandes sociales et une opportunit de progrs, un facteur de diffrenciation et de comptitivit supplmentaire, en particulier pour faire face des enjeux nouveaux laquelle elle nest pas prpare.

    La concertation permet dtre efficace et de gagner du temps. Il sagit dun argument quasi paradoxal, tant la concertation et le dialogue avec les parties prenantes externes sont souvent jugs comme un exercice chronophage et improductif. Il est effectivement improductif si les sujets mis en discussion sont arbitrs par avance et quaucune marge de progrs nest possible dans le cadre du dialogue. Lexercice peut par ailleurs tre, il est vrai, chronophage, si le temps des changes nest pas dtermin a priori. Si la mthodologie daction est claire, connue et accepte de tous, elle peut dboucher sur des prises de position plus rapides par rapport des enjeux complexes, laissant la place des zones dexercice partag de la responsabilit. Un projet dautant plus rapidement et efficacement appliqu que les parties prenantes auront t associes la problmatique, la slection des solutions, la mise en uvre du projet et la validation de son utilit.

    Une co-construction de la stratgie de dveloppement durable

    La concertation reprsente une mthode de gouvernance renouvele. Elle est indispensable pour aider les entreprises accomplir les mutations incontournables. La concertation nest pas affaire dimage ou de communication, elle relve de la stratgie.

    Une des tapes cls de la concertation est laccessibilit du plus grand nombre la comprhension des enjeux et des choix, dans un contexte : - de complexit des donnes (scientifiques, technologiques, conomiques, sociales) ; - de non-acceptabilit croissante par la population des risques (alimentaires, sanitaires,

    industriels, climatiques) ; - dclatement des pouvoirs et des savoirs (passage dune socit hirarchise une socit

    atomise).

    La concertation constitue un lment-clef du management donc de la dcision. Elle implique en effet une mutation culturelle et des rgles du jeu. Elle traduit lvolution dune culture dopposition et de confrontation une culture de construction collective. La concertation avec les parties prenantes est une stratgie de laction non violente, qui consiste provoquer chez votre interlocuteur des rflexes dintelligence plutt que des rflexes dindignation 1.

    1 Yves-Bruno Civel, directeur gnral dObservER.

    Considrez-vous que lentreprise fasse preuve de courage en se lanant dans une dmarche de concertation ?

    Olivier Bruel, professeur associ, HEC

    De courage globalement non, dans la mesure o elle ne s'expose pas vraiment du fait de la confidentialit des dbats et des changes. Pas de tmoins ni de diffusion hors du cercle ferm des participants. De culot et d'intelligence, oui, car il n'est pas si frquent que des dirigeants se disent qu'ils ont peut-tre apprendre, voire pcher des pistes ou ides nouvelles, dans des changes avec des non-spcialistes de leur mtier, voire simplement valider des intuitions qu'ils auraient eues auparavant.

    Martial Cozette, administrateur dlgu, CFIE (Centre franais d'information sur les entreprises)

    On peut parler d'un certain courage dans la mesure o les entreprises qui se prtent l'exercice sont encore peu nombreuses. Par ailleurs, il n'est jamais facile d'entendre voquer plusieurs heures de suite les points mritant d'tre amliors mme si l'entreprise est cense en tirer un bnfice.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 9

    En ce qui concerne les parties prenantes, lchange aves des reprsentants de lentreprise permet une meilleure comprhension des mtiers de lentreprise voire des difficults quelle rencontre. Elles ont galement loccasion de sadresser des interlocuteurs quelles ne ctoient pas habituellement, en dehors du directeur du dveloppement durable.

    Stratgie versus communication

    Certes, les entreprises nont pas attendu la concertation pour communiquer sur les bonnes pratiques en matire de dveloppement durable. La concertation permet daborder des sujets plus rarement abords et de pointer notamment les carts de budget entre la communication et la RSE.

    Par ailleurs, les rgles mthodologiques fixes par le Comit 21, en particulier la clause de confidentialit, permettent de contourner le risque dexploitation de la concertation des fins de communication. Elle suscite des changes directs, dnus deffets de tribune, approfondis et constructifs.

    Daucuns peuvent sinterroger sur la vracit de lengagement de lentreprise et dnoncent le risque dexploitation de la dmarche en termes dimage voire dinstrumentalisation des parties prenantes. Ce risque parat trs faible. De la mme faon, un partenariat entre une entreprise et une partie prenante ne signifie pas validation systmatique des actions de lentreprise.

    * * *

    La concertation est une mutation incontournable. Elle organise lexpression des diffrents aspects de lintrt collectif. En cela, elle permet la dfinition de lintrt le plus largement partag.

    Considrez-vous que l'entreprise fasse preuve de courage en se lanant dans une dmarche de concertation ?

    Prof. Ganal Bascoul, dpartement marketing, ESCP-Europe

    Oui, dfinitivement, le risque tant de lever le livre sur un certain nombre de problmes sans tre sr d'avoir toutes les rponses. D'un autre ct, ce qui peut a priori passer pour une prise de risque permet au contraire d'anticiper le risque et de connatre en amont quelle proccupations pourraient tre sensibiliss l'avenir les clients et les partenaires de l'entreprises en question. Il s'agit donc pour moi d'une tape stratgique de la communication corporate, c'est l'anti-communication de crise (mme si ce n'est pas encore l'antidote parfait, car une crise peut toujours arriver).

    Lentreprise ne risque-t-elle pas dutiliser la concertation pour amliorer son image ?

    Philippe Lvque, directeur gnral, Care France

    Non je ne le crois pas. Ce serait un raisonnement trop primaire et trs court terme. Il y a des faons bien plus astucieuses de rcuprer limage dune association. Je nai pas constat depuis huit ans (mon arrive chez Care) de manipulation de notre image suite une concertation.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 10

    1 Pourquoi sengager dans un processus de concertation ?

    Des actionnaires aux parties prenantes

    La thorie des parties prenantes ou stakeholders sintresse la satisfaction des besoins et des intrts des groupes et individus qui participent la vie de lentreprise et ceux qui composent son environnement2.

    Lentreprise est reprsente comme un systme ouvert, compos de parties prenantes (employs, propritaires, fournisseurs, collectivits locales, Etat). Cette rflexion a pour objet de dterminer la place des entreprises dans la socit et sinscrit aujourdhui au cur des dbats relatifs la gouvernance dentreprise et la responsabilit sociale des entreprises (RSE).

    La dfinition des stakeholders retenue par le Stanford Research Institute (SRI) tait ces groupes sans le support desquels lorganisation cesserait dexister 3. Dans le cadre dun modle dynamique, une partie prenante entretient une relation relevant la fois de la lgitimit et du pouvoir. Or, ce sont ces deux dimensions qui, aujourdhui, ont trs largement fait voluer lanalyse conomique de lentreprise ; elle ne relve plus seulement du pouvoir et de la lgitimit des shareholders (actionnaires) mais de tous les stakeholders (parties prenantes).

    Lintrt de la thorie des parties prenantes, en termes de management dentreprise, est surtout li la prise en compte du temps dans les stratgies conomiques : si une entreprise se met en position de mesurer et danticiper limpact de ses dcisions sur les parties prenantes, elle peut conduire des stratgies aptes garantir la durabilit de son activit. Lentreprise est une organisation complexe, un lieu de ngociation entre groupes en situation de mdiation, que doit organiser le management.

    2 Cette rflexion est ne lors de la grande dpression des annes 1930 aux Etats-Unis. Elle fait suite aux travaux des

    bhavioristes, qui conoivent la firme comme une coalition de groupes aux intrts divergents, voire antagonistes. La thorie des stakeholders va cependant plus loin dans lanalyse en ne sintressant non plus seulement au fonctionnement interne des organisations, mais la place de la firme dans la socit en gnral. 3 Lapproche moderne de la thorie des stakeholders est attribue R.E. Freeman, in Strategic management :

    A stakeholder approach , 1984, Pitman, Boston. Selon cet auteur, le terme stakeholder a t utilis pour la premire fois en 1963 dans un crit du Stanford Research Institute (SRI).

    Pourquoi avez-vous accept de participer une concertation ? Quels bnfices en avez-vous retirs ?

    Martine Lonard, vice-prsidente, FIR (Forum pour linvestissement responsable)

    Dans une concertation, chacun progresse dans la comprhension des enjeux et motivations des autres. Les sujets -mme difficiles- peuvent tre abords de faon directe, dautant que le cadre est extrieur lentreprise et que la rgle de transparence et de dialogue est clairement pose. Entendre les points de vue des autres parties prenantes est trs intressant.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 11

    Lentreprise ne risque-t-elle pas dutiliser la concertation pour amliorer son image ?

    Sbastien Moncorps, directeur, UICN France

    Lobjectif de la concertation est didentifier, par un dialogue constructif, les actions qui vont permettre lentreprise damliorer concrtement sa politique et ses activits pour rpondre aux objectifs du dveloppement durable. De plus, le cadre de discussion propos par le Comit 21 est tabli sur la base de la confidentialit des changes. Il sagit donc bien davoir un travail de fond sur les activits de lentreprise, et non de travailler sur sa communication. Les discussions peuvent nanmoins permettre lentreprise de mieux expliciter ses actions, en particulier dans son rapport dveloppement durable, et de communiquer par la suite sur la base de rels progrs accomplis.

    La concertation vous a-t-elle permis denrichir la stratgie de lentreprise ?

    Valrie David, directeur du dveloppement durable, EIFFAGE

    Oui, clairement. Les reproches et conseils des parties prenantes ont t couts, analyss et suivis car ils taient de qualit et de nature amliorer la lisibilit de notre politique de dveloppement durable oprationnelle. Cela a galement permis la direction dveloppement durable de conforter certaines demandes auprs de la direction gnrale. Un exemple concret : l'engagement dans la dfinition d'une politique de la biodiversit propre l'entreprise.

    Comment est ne lide de sengager dans une dmarche de concertation ?

    Valrie David, directeur du dveloppement durable, EIFFAGE

    Deux raisons qui ont dclench la dcision : - le rapport de notation sollicite 2008 de BMJ ratings qui pointait une insuffisante formalisation de nos relations avec les parties prenantes, - une exprience difficile sur un gros dossier de concession autoroutire (A 65) fin 2007 - dbut 2008 qui a montr l'importance de la concertation en amont avec la socit civile au-del des consultations rglementaires prvues dans les projets d'intrt public.

    Un critre de base pour les investisseurs

    Lentreprise est observe et analyse par un nombre croissant et vari dinterlocuteurs. Elle nest plus seulement envisage comme un acteur financier (rfrence aux annes 1970-80). Elle est devenue une partie prenante constitutive de la socit. Son activit lamne gnrer des externalits quelle doit savoir contrler. Fondamentalement, il est question dorganiser la compatibilit entre des objectifs conomiques et financiers et linternalisation dexternalits sociales et environnementales. Les rcentes rflexions sur la RSE entendent intgrer les revendications sociales adresses lentreprise et les modifications de lorganisation de la gouvernance dentreprise vont dans le sens dune plus grande prise en compte des entreprises envers les parties prenantes.

    Les agences de notation extrafinancire considrent que les indicateurs de dveloppement durable et en particulier la transparence -ce qui sous-entend linformation et lchange-, constituent un minimum minimorum. La conduite dune concertation est ainsi le signe dune saine gouvernance dentreprise et un indicateur regard de prs par ces agences. Par ailleurs, la monte en puissance des fonds socialement responsables peut avoir des rpercussions ngatives en termes dimage et donc dactivit conomique si lentreprise en est officiellement exclue.

    Un enjeu stratgique pour lentreprise

    La concertation avec les parties prenantes est un des fondements du dveloppement durable et un des piliers de la lgitimit et de lefficacit des stratgies dentreprise, sous rserve quelle dpasse le simple exercice de dialogue.

    Adquation avec les enjeux socitaux

    Les parties prenantes, quand elles apportent des comptences dans leurs domaines dintervention et des garanties de reprsentativit, peuvent contribuer renforcer ladquation de la stratgie de lentreprise ses enjeux socitaux et crer une culture partage du progrs au sein de lentreprise.

    Lentreprise doit pouvoir leur rendre des comptes. Or les dmarches de concertation avec les parties prenantes constituent une rponse en termes dvaluation stratgique : les parties prenantes amnent lentreprise intgrer (ou renforcer) des axes stratgiques, formuler des rponses oprationnelles et informer des rsultats obtenus.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 12

    Facteur dinnovation et dacclration de projets

    Les parties prenantes ne sont pas uniquement les parties directement intresses par lentreprise et ses activits (salaris, riverains). Il sagit aussi de parties prenantes qui soccupent de droits humains, qui apportent une analyse conomique de loffre de lentreprise en fonction des enjeux de changement climatique, etc. Les parties prenantes apportent une expertise complmentaire et contradictoire. Elles sont source de proposition. Cela permet galement lentreprise de hirarchiser ses projets, voire de redonner du souffle sa stratgie de dveloppement durable.

    Dcloisonner les enjeux

    En termes de management et dorganisation de la gouvernance, la concertation permet de dcloisonner les enjeux en interne et de faire partager les avances et difficults de la stratgie auprs de lensemble des directions stratgiques et oprationnelles.

    La concertation permet de faire en sorte que la direction du dveloppement durable soit moins isole lintrieur de lentreprise et soit davantage prise en compte par les autres directions. Elle permet galement aux parties prenantes de sadresser des interlocuteurs quelles ne rencontrent pas habituellement.

    Source de partenariats bilatraux

    La concertation pluriacteurs peut dboucher sur des partenariats privilgis, dans la dure, avec une ou des parties prenantes. Il convient de souligner la capacit croissante de vigilance et d'expertise des rseaux reprsentant la socit civile. Elle tient en grande partie la prise de conscience des ONG de la ncessit de coordonner leurs champs de revendication (protection de l'environnement, droits de l'homme, rgulation des marchs, lutte contre la corruption, solidarit locale, coopration internationale, libert d'expression, protection des minorits...) pour renforcer leur audience et leurs actions. Cette convergence des demandes sociales, certes encore mergente, contribue une pdagogie du dveloppement durable, tant auprs de l'opinion qu'auprs des dcideurs.

    Les entreprises ont besoin des ONG pour leur capacit anticiper sur les ralits et les perceptions sociales, crer des rseaux de reprsentation ; elles doivent s'appuyer sur leur expertise et leur connaissance fine du terrain, que l'on parle du travail des enfants, d'cosystmes ou de corruption.

    La concertation vous a-t-elle permis de nouer des partenariats bilatraux avec lentreprise par la suite ?

    Sbastien Moncorps, directeur, UICN France

    La concertation a effectivement permis davoir par la suite des changes directs avec lentreprise. Nous pouvons envisager la signature dun partenariat mais il faut auparavant que nous connaissions prcisment les engagements que le groupe est prt prendre pour protger la biodiversit. Nos partenariats sont en effet conditionns une dmarche volontaire qui aille au del du respect ou de la mise en conformit avec la rglementation, et o la biodiversit reprsente un enjeu stratgique pour lensemble du groupe. A ces conditions, nous sommes prts accompagner le groupe dans une dmarche de progrs car nous estimons que les entreprises ont aujourdhui un rle majeur jouer sur la biodiversit, en complment de laction des Etats, des ONG et des collectivits locales. La balle est dans leur camp !

    Avez-vous l'impression d'avoir influenc la stratgie de l'entreprise ?

    Martial Cozette, administrateur dlgu, CFIE (Centre franais d'information sur les entreprises)

    Les dmarches de concertation s'intgrent dans un ensemble d'initiatives de la part des entreprises. C'est pourquoi il n'est pas facile d'identifier les effets directs de ces dmarches sur les entreprises. Toutefois, je pense que, associe ces autres initiatives, elles influencent les pratiques et, sans doute terme, les stratgies.

    Martine Lonard, vice-prsidente, FIR (Forum pour linvestissement responsable)

    Peu ou prou. Mon objectif est plus modestement de contribuer la meilleure comprhension des contraintes que linvestisseur responsable simpose, les intgrer dans une rflexion plus globale et ainsi pauler lentreprise.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 13

    Les ONG doivent s'appuyer sur les contre-pouvoirs que constituent les entreprises pionnires, sur leurs capacits se projeter moyen et long terme et concrtiser des modes de cration et de rpartition des richesses, nourris par le dveloppement durable.

    Les partenariats prennent toute leur lgitimit dans la reconnaissance d'une vritable complmentarit des interventions, des savoirs et des expertises.

    Lentreprise prend la mesure des attentes des parties prenantes et ces dernires apprcient mieux les difficults et les limites parfois de lexercice de lactivit de lentreprise et de la mise en uvre de certaines actions.

    La concertation permet souvent dentamer une discussion qui peut se prolonger au-del de lexercice.

    GDF sest engag ds 2005, dans une dmarche de concertation. Quels bnfices en avez-vous retirs ?

    Franoise Guichard, directrice dveloppement durable, GDF-SUEZ

    Cest pour nous une dmarche de progrs continue. Lcoute et lchange avec nos parties prenantes permet dexaminer ensemble les points sur lesquels notre dmarche de dveloppement durable peut progresser. Cela nous a permis dacclrer notre rflexion sur des champs nouveaux pour nous, de mettre en uvre des actions, puis de prsenter le fruit de ces rflexions aux parties prenantes. Par exemple, sur cette priode, GDF-SUEZ a dploy sa stratgie sur les nergies renouvelables. Les ONG environnementales avaient fortement insist sur ce point. Pendant la priode, le Groupe a dvelopp ses offres solaire gaz et est devenu le premier oprateur de lolien en France. Cette volution a t trs apprcie. Sur un autre champ, nous avons t invits dvelopper laccompagnement socital de nos activits dexploration-production. Nous avons alors choisi de nous appuyer davantage sur notre ONG interne uvrant sur lhumanitaire, pour accompagner nos projets. Au fil du temps, cela a permis la fois de construire une relation de confiance avec les parties prenantes et de dvelopper des actions de progrs.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 14

    2 La concertation selon le Comit 21

    Depuis 2004, le Comit 21 conoit et anime des dmarches de concertation avec des panels de parties prenantes issues notamment de son rseau (chercheurs, syndicats, institutions, collectivits territoriales, ONG). Il accompagne, leur demande, des entreprises adhrentes (AREVA, COCA-COLA Entreprise, EIFFAGE, GDF-SUEZ, SUEZ ENVIRONNEMENT), sur la base de rgles dontologiques et oprationnelles.

    La concertation avec les parties prenantes peut contribuer enrichir la stratgie, sous rserve dimpliquer le cur de lentreprise et dinstaurer des rgles qui garantissent lefficacit de la dmarche dans le temps et sa lgitimit auprs de parties prenantes.

    Les pralables ncessaires

    Ancrage dans la dure

    Afin de renforcer la qualit de lchange et le climat de confiance, le processus de concertation doit sinscrire dans un processus de progrs continu et doit, ce titre, tre ancr dans le temps : un temps dcoute par lentreprise des parties prenantes puis un temps de rponses et dchanges entre les deux.

    Le succs de ce type de dmarche repose aussi sur la rcurrence de lexercice dans une logique coordonne et organise dexpression des attentes et dengagements de lentreprise, assortis de calendriers de ralisation valus. Cela renvoie donc un travail, des techniques, des rgles, un apprentissage rciproque. Une concertation est une construction et un engagement. Il ne sagit pas uniquement dune posture thique.

    Il est donc essentiel que lentreprise et ses parties prenantes conviennent de clauses de rendez-vous dans la dure. La poursuite de la concertation permet de raliser des bilans et de rajuster le cas chant la stratgie de lentreprise.

    Il est conseill de prvoir le renouvellement rgulier de la concertation (idalement tous les dix-huit mois) pour poursuivre lchange sur la prise en compte par lentreprise des attentes, le suivi des engagements pris, lintgration de nouveaux enjeux.

    Avez-vous rencontr des difficults dans la mise en uvre de la concertation et comment les avez-vous leves ?

    Alexandre Brailowski, direction des relations institutionnelles, de la stratgie et du dveloppement durable, SUEZ ENVIRONNEMENT

    Il faut diviser la rponse en deux volets, l'interne et lexterne. En ce qui concerne lexterne, nous avons rencontr trs peu de refus du dialogue. Le processus a dmontr qu'au contraire, nos parties prenantes taient demandeurs de ce dialogue et quelles taient prtes contribuer notre effort danalyse partir du moment o elles pensent cette dmarche sincre de notre part. Au plan interne, ce fut et cela reste toujours difficile. Partager les informations ou pire certaines dcisions avec le monde extrieur nest pas chose naturelle pour beaucoup de cadres dans notre entreprise. Loin dy voir une opportunit, de nombreux responsables vivent cette possibilit comme une menace. La rsistance interne ce type de processus douverture donc dadaptation au monde extrieur renvoie aux causes des agressions que nous avons subies et qui mettaient laccent sur notre arrogance et lopacit de notre mode de fonctionnement.

    La mobilisation du PDG et des directeurs stratgiques de lentreprise a-t-elle eu des impacts et lesquels ?

    Valrie David, directeur dveloppement durable, EIFFAGE

    Oui : le PDG montre ouvertement son engagement dans la dmarche de concertation et sa prsence rend crdible les rponses apportes aux parties prenantes. En interne, les directeurs oprationnels s'impliquent galement davantage et ont pris conscience du tournant stratgique qu'a dsormais pris pour nos mtiers le dveloppement durable. L'effet pdagogique en interne est galement plus fort (exemple : la dmarche a stimul l'avance de notre politique d'achats durables).

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 15

    Exercice en temps de paix

    Cette dmarche volontaire reprsente un engagement courageux et une opportunit pour lentreprise. En effet, elle peut mieux apprhender les risques et anticiper une crise. Elle est mene en temps de paix ; ce nest ni un tribunal ni un rglement de comptes. Il sagit bien de co-construire une stratgie de dveloppement durable.

    Portage de la dmarche haut niveau

    Limplication du PDG est indispensable et sa prsence est fortement souhaite pendant lexercice. Lexprience montre que la dtermination politique du dirigeant de sengager dans une dmarche de concertation officialise la dcision de souvrir au monde extrieur.

    Mobilisation transversale de lquipe dirigeante

    La prsence de tous les directeurs stratgiques et oprationnels (dveloppement durable, relations institutionnelles, stratgie, recherche et innovation, communication, marketing, achats, ressources humaines, finances etc.) permet une information directe de directions qui peuvent se sentir loignes de ces proccupations. La prparation dune concertation reprsente une opportunit de mobiliser toutes les directions de lentreprise autour dun projet fdrateur. Elle insuffle une dynamique de travail en quipe. Elle offre une possibilit rare aux parties prenantes de pouvoir sensibiliser de nouveaux interlocuteurs, en dehors du directeur du dveloppement durable, acquis leur cause plus facilement.

    Champ de la concertation non dlimit

    Le champ de la concertation ne doit pas tre dfini a priori lors du lancement de la dmarche. Lexprience a montr que, si le dbat tait dlimit, les attentes exprimes par les parties prenantes dpassaient ce cadre.

    Toutefois, il est tout--fait envisageable, aprs une premire session, dorganiser la suivante sur la base de thmatiques prcises. Un bilan chiffr des actions mises en uvre depuis la dernire session peut constituer une porte dentre.

    Lentreprise ne doit pas craindre de prsenter les difficults quelle a rencontres. Les parties prenantes apprcient cette franchise et sont plus mme daider lentreprise les lever.

    Pensez-vous que la concertation soit source de dcloisonnement des quipes ?

    Arnaud Rolland, responsable dveloppement durable, COCA-COLA Entreprise

    Effectivement. Nous avons sollicit beaucoup d'experts en interne sur ce projet, qui pour la plupart travaillaient pour la premire fois ensemble sur un objectif commun.

    La prsence de tout le comit de direction participant la concertation permet-il d'acclrer la prise de conscience des enjeux ?

    Farid Yaker, prsident, EcoMed 21

    Un des indicateurs d'implication relle et de sincrit de la dmarche de la part de l'entreprise est le niveau de reprsentation des cadres dirigeants dont le rle est essentiel dans la dfinition des politiques et des orientations de l'entreprise. La prsence des membres du Comite de direction est donc importante pour crdibiliser la dmarche et pour garantir un dialogue fcond entre les parties prenantes et les instances dirigeantes de l'entreprise.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 16

    Le rle du facilitateur

    Le rle dun tiers neutre indpendant, organisateur et facilitateur, est primordial. Son action permet de diffrencier fondamentalement lexercice de concertation de celui de consultation.

    En tant que garant de la neutralit de la dmarche, le facilitateur garantit un quilibre entre les intrts de lentreprise et ceux -potentiellement contradictoires- des parties prenantes. Il est une garantie dengagement dans la dure et de reprsentativit des expertises. Il veille ce que lentreprise rponde lensemble des questions poses. Aucune attente ne doit en effet rester sans rponse. Cela ne prfigure pas de laccord ni de la capacit de la compagnie dapporter des rponses oprationnelles ou immdiates toutes les demandes exprimes par les parties prenantes. Lentreprise sengage en revanche motiver toutes ses rponses, quelles soient positives ou ngatives.

    Le facilitateur agit en amont auprs de lentreprise pour que celle-ci fournisse lensemble des informations ncessaires aux parties prenantes de manire ce que ces dernires puissent se forger un avis le plus abouti possible sur la stratgie de lentreprise. Cela permet doptimiser le temps dchange entre les parties. Les runions de concertation rpondent une logique dexpression dattentes et dengagements. Elles nont pas pour vocation dinformer les parties prenantes de lexistant.

    Quel avantage voyez-vous recourir un tiers facilitateur pour la concertation ?

    Valrie David, directrice dveloppement durable, EIFFAGE

    Jy vois plusieurs avantages : - respect de la mthode de concertation qui ne peut s'improviser ; - crdibilit de l'exercice dirig par un tiers dont l'indpendance et la neutralit sont irrprochables ; - respect de la charte de dontologie (confidentialit, courtoisie).

    Laurent Corbier, directeur adjoint, DDPC, AREVA

    Un premier lment est que le dialogue entre lentreprise et le tiers facilitateur en amont de la concertation est particulirement riche et utile pour brainstormer sur le format et le contenu de la concertation, la liste des Parties Prenantes invites, et pour faire germer de nouvelles ides, les optimiser, etc. Ensuite, et trs basiquement , un avantage indniable est la prise en charge par le tiers facilitateur des aspects logistiques lourds qui ont trait aux contacts et invitations des Parties Prenantes, ainsi que le service post-session Enfin, il est clair galement que lintroduction dun tiers facilitateur est de nature injecter ds le dpart une forte dose de confiance dans le processus, en rassurant les Parties Prenantes sur lquit, la neutralit, le respect des formes, de la confidentialit, etc. et, par ailleurs, en rassurant aussi lentreprise elle-mme sur ces mmes aspects.

    Arnaud Rolland, directeur dveloppement durable, COCA-COLA Entreprise

    Le Comit 21 nous a permis de rassembler un panel d'experts bien adapt nos problmatiques, ce qui a permis une discussion entre professionnels trs constructives pour les deux parties.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 17

    Principes et rgles

    Le Comit 21 propose un cadre de principes et rgles, qui doivent tre appliqus par lentreprise, les parties prenantes et le Comit 21, afin dapporter aux changes un climat de confiance et de respect mutuel indispensable tous les stades du processus, et de garantir la crdibilit et lefficacit de ces dmarches.

    La confidentialit

    Le Comit 21, lentreprise et les parties prenantes sengagent :

    - respecter la confidentialit des changes durant toutes les phases du processus de concertation ; - ninformer ni la presse ni toute source dinformation

    extrieure du contenu de ces changes ; - nen raliser aucune diffusion, reproduction, distribution

    ou toute autre action qui en compromet la confidentialit.

    En revanche, lentreprise peut faire tat (dans sa communication ou au sein de son rapport dveloppement durable) de cette dmarche de concertation, mene avec lappui du Comit 21. Si elle le souhaite, le Comit 21 peut cet effet lui fournir un texte rsumant le droulement et les acquis de la concertation (sans citer les parties prenantes).

    La courtoisie des changes et la capacit dcoute

    Le Comit 21 veille la prise en compte de toutes les composantes du dveloppement durable, dans une approche systmique. Sont donc voqus des centres dintrt et des problmatiques diversifies, mais toutes indissociables. Il est demand aux participants, internes et externes, dtre lcoute denjeux, de comptences et dexpertises complmentaires. La courtoisie constitue galement une des conditions de srnit, donc defficacit des changes.

    Lexhaustivit des comptes rendus

    Le Comit 21 est charg de lensemble des relations avec les parties prenantes, de la rdaction et de lenvoi des comptes rendus du dialogue. Les comptes rendus sont soumis la lecture des reprsentants de lentreprise, qui peuvent y apporter des amendements dans la limite de lexhaustivit, de lintgrit et du respect des interventions. Les projets de compte-rendu sont ensuite adresss aux parties prenantes qui peuvent y apporter des amendements, avant lenvoi dfinitif.

    Avez-vous l'impression d'avoir influenc la stratgie de l'entreprise ?

    Prof. Ganal Bascoul, dpartement marketing, ESCP-Europe

    Il est difficile d'envisager son influence directe car les problmes traits par l'entreprise recoupent en gnral plusieurs des points de vue proposs. Cependant, j'ai l'impression que oui, in fine, mon point de vue a compt, comme ceux des autres intervenants, et que l'on pourra en voir en partie les effets dans les mois venir. Bien entendu, toutes les rponses ne peuvent tre apportes de manire dfinitive, mais la stratgie a t modifie, et donc aussi potentiellement un grand nombre des dcisions venir aussi.

    Que pensez-vous de la rgle de confidentialit ?

    - Concernant la participation une concertation :

    Philippe Lvque, directeur gnral, Care France

    Que du mal ! Il faut avoir le courage de ses opinions et assumer avec transparence avec qui lon parle !

    - Concernant les dbats : Jean-Claude Andrini, prsident directeur gnral, BURGEAP

    Elle est ncessaire sinon la libert de parole ne serait pas la mme.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 18

    Parties prenantes

    Le choix des parties prenantes invites (les panlistes) doit rpondre des impratifs de complmentarit, de lgitimit et dindpendance des expertises4.

    Le Comit 21 est en charge de la constitution de la liste des parties prenantes. Cette liste est soumise lentreprise, qui peut y porter des modifications et proposer dautres parties prenantes, sous larbitrage exprs du Comit 21. Le nombre optimal de participants est valu une quinzaine, parmi lesquels peuvent tre reprsents les milieux de la recherche, des collectivits territoriales, des associations de protection de lenvironnement, de la solidarit, de protection des consommateurs, de linvestissement socialement responsable, des droits de lhomme.

    Le panel est constitu en fonction des mtiers de lentreprise. Sa composition peut voluer au cours des annes pour sadapter aux nouveaux enjeux auxquels devra faire face lentreprise.

    Une indemnisation du temps pass peut tre verse aux associations pour leur participation aux runions de dialogue, sauf renonciation de leur part. Les associations sont de plus en plus mobilises pour apporter leur expertise dans le cadre de processus damlioration des stratgies des entreprises, des collectivits, des administrations. Elles doivent donc tre rmunres en tant quexpert. Cest de plus une condition de la prennit de leur action.

    Il sagit dune demande du Comit 21, qui se charge de prendre contact avec les parties prenantes associatives, pour connatre leur position sur leur rmunration ou non.

    4 Voir sur ce point ltude ralise par Utopies : Critical friends. The Emerging Role of Stakeholder Panels in

    Corporate Governance, Reporting and Assurance , March 2007.

    Comment prparez-vous la concertation en interne ?

    Laurent Corbier, directeur adjoint, DDPC, AREVA

    Le trs important travail de prparation en amont porte sur deux phases :

    - la mise au point de lordre du jour, avec la slection des thmes et sous-thmes qui seront traits loccasion de la concertation ; ce travail se fait en troite collaboration avec le Comit 21 ;

    - la mobilisation des Directions fonctionnelles ou oprationnelles qui sont contributrices cet ordre du jour, et donc au pack dinformations labor et distribu pralablement aux parties prenantes ; La Direction du Dveloppement Durable et du Progrs Continu pilote et coordonne ces deux phases lintrieur de lentreprise, et sassure de la bonne adquation entre les informations fournies dans ce cadre et les attentes des parties prenantes, connues ou perues, sur chacun des thmes.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 19

    3 Droulement de la concertation

    Une session de concertation est compose de deux runions dune demi-journe. La mme logique dorganisation pourra tre retenue pour les sessions suivantes.

    Session plnire et runions thmatiques

    Premire session

    Dans le cadre dune premire session, la rencontre avec les parties prenantes peut tre organise en deux temps : 1re runion : Il sagit dun temps dcoute de la part de lentreprise, qui a pour objet de prendre connaissance, dune part, des analyses et points de vue des parties prenantes sur lactivit de lentreprise et sur les enjeux (conomiques, environnementaux, socitaux) auxquels elle a faire face et, dautre part, de leurs propositions quant sa stratgie de dveloppement durable. Lentreprise peut, si elle le souhaite, rpondre en direct , un certain nombre dinterventions, mais nest pas tenue, ce stade, dapporter des rponses oprationnelles.

    2me runion (3 6 mois plus tard) : Cest lentreprise de disposer dun temps de rponse. Aprs avoir examin les attentes et les propositions, elle informe les parties prenantes des dcisions prises et des actions confirmes, sur la base dengagements concrets et mesurables et dun calendrier de ralisation. Ces dcisions doivent dans ce cas tre confirmes dans le rapport de dveloppement durable de lanne suivante. Lors de cette deuxime rencontre, les parties prenantes peuvent commenter ladquation des rponses de lentreprise avec les attentes exprimes et proposer des dveloppements futurs. Lentreprise prend dans ce cadre lengagement formel de rpondre toutes les questions poses, sans exception, mme si le processus de dialogue ne prfigure pas de laccord ni de la capacit de lentreprise dapporter des rponses oprationnelles et/ou immdiates toutes les demandes exprimes par les parties prenantes.

    Sessions suivantes

    Lors du lancement dune deuxime session -idalement 12 18 mois plus tard- les travaux sorganisent diffremment. La premire session a en effet permis de faire ressortir les principales thmatiques de travail qui auront t formalises par le facilitateur et lentreprise. Ce sont ces thmatiques qui vont dsormais permettre lorganisation des dbats.

    Lengagement dans la dure reprsente-t-il une contrainte ?

    Alexandre Brailowski, direction des relations institutionnelles, de la stratgie et du dveloppement durable, SUEZ ENVIRONNEMENT

    Non au contraire car ce type de dmarche prend du temps d aux contraintes des uns et des autres et ce projet na de sens que dans la dure.

    Avez-vous constat des progrs de la part de lentreprise dune sance de concertation lautre ?

    Sbastien Moncorps directeur de lUICN

    Une entreprise qui sengage dans ce processus de concertation le fait avec la volont de progresser sur les diffrentes thmatiques du dveloppement durable. Le processus de deux runions spares fait que lentreprise sengage rendre des comptes sur les propositions qui lui ont t faites lors de la premire runion. Nous pouvons donc constater si des avances ont t obtenues. Il est ncessaire de continuer suivre et valuer dans le temps les actions mises en uvre.

    L'intervalle entre deux runions vous a-t-il permis de jeter les bases de nouveaux projets, sur la base des suggestions des parties prenantes ?

    Arnaud Rolland, responsable dveloppement durable, COCA-COLA Entreprise

    Cela nous a permis de prendre encore plus conscience de questions cls correspondant de relles attentes et de faire un rel effort de pdagogie pour y apporter des rponses. Concernant notre dmarche environnementale, certains points ont t mis en exergue par les parties prenantes qui nous serviront de repres pour des dveloppements futurs.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 20

    Chaque thme de travail fait lobjet dun expos par un ou des reprsentants de lentreprise. Cette prsentation a vocation prsenter aux parties prenantes les avances et dcisions prises par lentreprise depuis la session prcdente. Ces lments de progrs auront t rpertoris par crit dans un document de synthse rdig par lentreprise, valid par le facilitateur, et envoys avant le dbut de la deuxime session lensemble des parties prenantes.

    Suite lexpos synthtique de la part du ou des reprsentants de lentreprise, un dbat sengage avec les parties prenantes sur ladquation des rponses aux attentes. Ces dernires expriment galement des propositions denrichissement.

    Dans lintervalle entre deux sessions, lentreprise peut choisir dorganiser une concertation spcifique sur un des thmes dgags lors des runions prcdentes (achats responsables, reporting, par exemple)

    Dans tous les cas, les rencontres avec les parties prenantes sappuient sur :

    - un dossier dinformation, envoy au pralable prcisant les rgles du processus (en particulier la clause de confidentialit), la liste des parties prenantes confirmes et une synthse des informations ncessaires aux parties prenantes pour formuler leurs avis et propositions ; - un compte-rendu exhaustif des changes, ralis par le Comit 21, adress dans le mois suivant lorganisation de chaque runion.

    Que pensez-vous apporter lors de votre participation une concertation ? Avez-vous limpression davoir influenc la stratgie de lentreprise ?

    Jean-Claude Andrini, prsident directeur gnral, BURGEAP

    Je pense sans modestie que mon exprience du secteur apporte un regard particulier qui aide lentreprise se situer. Ma fonction de chef dentreprise maide galement poser les bonnes questions.

    Pourquoi avez-vous accept de participer une concertation ? Quels bnfices en avez-vous retirs ?

    Prof. Ganal Bascoul, dpartement marketing, ESCP-Europe

    Pour moi, il s'agit d'une plate forme d'change unique, qui dresse des passerelles entre des acteurs et des secteurs a priori trs loigns. Il est rare d'avoir des points de vue aussi divers autour d'une mme table, et c'est une belle manire de comprendre la complexit du problme trait.

    Martial Cozette, administrateur dlgu, CFIE (Centre franais d'information sur les entreprises)

    Je crois pouvoir dire que, pour ma part, le principal attrait des exercices de concertation rside dans "l'agitation" des ides qu'ils suscitent, leur rencontre, le dcloisonnement des points de vue et des positions et, in fine, la construction d'espaces d'observation plus larges.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 21

    Les fonctions assumes par le Comit 21 :

    En amont de la concertation :

    conception des runions, fournissant la fois des rgles stratgiques et mthodologiques et un cadre cohrent pour la stratgie de la concertation du groupe ;

    participation une runion stratgique avec la direction du dveloppement durable pour validation de la conception et prparation de la runion : enjeux prendre en compte dans la dmarche, liste dfinitive des parties prenantes, directions mobiliser, prparation du dossier dinformation adresser aux parties prenantes ;

    animation dune runion prparatoire interne avec les dirigeants du groupe participant la runion pour faire partager ces rgles et renforcer lappropriation de la dmarche par les reprsentants de lentreprise.

    contact avec les parties prenantes pour garantir leur adhsion au cadre de la rencontre ;

    envoi aux parties prenantes dun dossier dinformation, rappelant les rgles du processus, la liste des parties prenantes confirmes et le dossier dinformation ;

    envoi aux parties prenantes dun modle de lettre les engageant par crit respecter le principe de confidentialit tout au long du processus.

    Pendant la concertation :

    animation des sessions.

    Aprs la concertation :

    organisation dune runion de dbriefing avec les reprsentants de lentreprise ;

    envoi du compte rendu aux parties prenantes pour validation ;

    remise la direction de lentreprise des conclusions de la runion concertation, avec un rsum des enjeux abords, une analyse des acquis et cueils de la dmarche ;

    lissue des deux runions de concertation, le Comit 21 propose, en concertation avec les reprsentants de lentreprise, de dterminer les modalits de communication interne et externe des rsultats du processus. La synthse, rdige par le Comit 21, valide par lentreprise, pourra constituer un document de communication externe.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 22

    Perspective :

    Concertation et ancrage territorial de la responsabilit

    Le Comit 21 intervient en tant que concepteur et animateur de dmarches de concertation au niveau stratgique. Il sagit l dune premire tape indispensable qui peut se traduire en concertation locale (cartographie de parties prenantes locales, etc.). Lancrage territorial est trs important car il est rvlateur du dficit existant aujourdhui en termes de reporting dveloppement durable, savoir la lisibilit de la responsabilit territoriale des grands groupes et donc lexercice de leur responsabilit socitale. Les donnes communiques, force de consolidation, recouvrent des ralits territoriales tellement diverses, quelles sont quasi-ininterprtables. En ce sens, un travail plus approfondi avec les parties prenantes locales permettrait dapporter des rponses oprationnelles et communicables. Le Comit 21 orientera ses travaux sur la concertation au niveau local pour, dune part, inciter les entreprises la dployer dans leurs units de production et, dautre part, transposer ce type de concertation dans les collectivits, dans le cadre par exemple de lvaluation des Agenda 21.

    Evaluation de la concertation

    La concertation sinscrit dans le temps, ce qui suppose un suivi des actions de lentreprise dune session lautre. Au-del des indicateurs que lentreprise peut fournir, il sera ncessaire de rflchir des indicateurs dvaluation de la concertation elle-mme.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 23

    Conclusion

    Cette note, enrichie de nombreux tmoignages, a eu pour objectif de dmontrer combien une dmarche de concertation allait bien au-del de la simple information, voire consultation des parties prenantes. Il sagit dune co-construction dune stratgie durable dans une confiance rciproque qui sinstalle peu peu, sans que cela sous-entende une caution systmatique, de la part des parties prenantes, des actions menes par lentreprise ce qui sans cela rendrait lexercice inutile.

    La prsence dun tiers facilitateur rend plus sereins les dbats. La mthodologie du Comit 21 pour une premire session de concertation, qui espace le temps dcoute et le temps de rponse, oblige les reprsentants de lentreprise couter les parties prenantes et inversement. La nature des questions poses, leur frquence revtent souvent plus dimportance que les rponses. Elles traduisent directement les priorits et lurgence des actions mettre en place. Par la suite, la prsentation par lentreprise dun projet qui tient compte des recommandations formules par les parties prenantes constitue une preuve tangible de linteraction qui a pu natre, mme si la rponse a t dcale dans le temps. Ce pas de temps a justement permis lentreprise de monter un projet. La concertation avec les parties prenantes externes demeure encore marginale en France. Les entreprises qui sengagent sont pionnires. Il sagit pourtant dune voie de progrs vritable car elle apporte notamment une rponse au dficit de vision stratgique du reporting dveloppement durable et permet, grce lanticipation des enjeux, de gagner du temps et de bnficier dun avantage comptitif. Elle se traduit galement en surcot vit. En effet, combien dentreprises ont perdu de largent en nayant pas pris le temps de la concertation avant la mise en uvre dun projet ! Les parties prenantes partagent galement lintrt de cette dmarche. En effet, rencontrer les reprsentants de lentreprise reprsente un effet de levier important car elles sadressent directement au PDG et aux directeurs dcisionnaires. Elles peuvent galement prendre la mesure des efforts quelles demandent lentreprise en valuant leur capacit relle y rpondre.

    Il sagit dune dmarche gagnant-gagnant, gage dun partenariat russi.

  • Comit 21 Notes 21 Concertation avec les parties prenantes septembre 2009 24