NOUVEAU MONDE TOME 2 : L’ARMURE CASTIENNEdata.over-blog-kiwi.com/0/69/01/13/20140309/ob_4027a3_armurecastie... · percer du cuir. Elle en avait été réduite à vivre de larcins

NOUVEAU MONDE

TOME 2 :

L’ARMURE CASTIENNE

par

C. L. Scholey

TORRID BOOKS

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TORRID BOOKS

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Impression par Whiskey Creek Press LLC

Whiskey Creek Press

PO Box 51052

Casper, WY 82605-1052

Copyright 2012 by C. L. Scholey

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cette œuvre sous droits d’auteur est illégale. La copie

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Les noms, les personnages et les événements décrits dans ce livre sont issus de l’imagination de l’auteur ou sont employés de façon fictive. Toute ressemblance à des événements, des lieux, des organismes ou des personnes existants ou ayant existé ne serait que purement fortuite et serait totalement

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Aucune partie de cette publication ne peut être reproduite ou transmise sous aucune forme ou par aucun moyen, mécanique ou électronique, y compris la photocopie ou l’enregistrement, ni par aucun moyen de stockage ni d’extraction d’information

sans la permission écrite de l’éditeur.

ISBN 978-1-61160-181-7

Crédits Couverture : Gemini Judson Éditeur : Melanie Billings

Imprimé aux États-Unis d’Amérique

Du même auteur, chez Torrid Books:

www.torridbooks.com

Nouveau Monde, Tome 1 : Le Guerrier Castien

Dédicace

À mes amis qui ont perdu la bataille : vous êtes partis,

mais on ne vous oublie pas.

À mes amis qui luttent : votre armure, c’est votre courage.

1

Prologue

« C’est trop dangereux, Amy. »

Amy pouvait lire la terreur sur le visage de son amie,

devant elle. Pourtant, elle essayait de paraître forte. Les yeux

bleu sombre de son amie étaient remplis d’inquiétude. Amy

la vit repousser d’un doigt une mèche de cheveux roux

emmêlés. Elle lui serra la main, rapidement, pour la rassurer.

C’était tout ce qu’elle pouvait lui offrir. Les deux femmes

savaient que la périlleuse mission dans laquelle Amy

s’engageait n’était pas optionnelle. Les autres, dans la grotte,

allaient bientôt mourir de faim. Amy était la plus forte,

même si elle se sentait plutôt pitoyable.

« Ça va aller, Meg », la rassura Amy. Elle jeta un bref

coup d’œil alentour pour vérifier ce qui se trouvait dans son

champ de vision, par habitude. Le danger se tapissait

toujours dans l’ombre quand on s’y attendait le moins. « Je

serai entrée et sortie du campement des hommes avant même

qu’ils ne comprennent ce qui leur arrive. »

« Et s’ils t’attrapent… »

« Ça n’arrivera pas », Amy s’empressa-t-elle de

répondre. Elle réprima un frisson de peur. Elles savaient

toutes deux ce qui se passerait si Amy était capturée. La

mort serait une alternative bien douce en comparaison.

Nouveau Monde Tome 2 : L’Armure Castienne

2

Amy leva les yeux au ciel. C’était l’une des rares nuits

où l’on pouvait apercevoir non pas une mais deux étoiles.

Les météorites calcinaient tellement la Terre que

l’atmosphère était chargée d’un épais voile brumeux et

pollué. Dus aux nombreuses éruptions volcaniques, des

nuages de cendre se déposaient parfois comme de la neige.

Amy se sentait de plus en plus misérable. De fines couches

de poussière se soulevaient à chacun de ses pas. Elle avait

l’impression de se rendre à l’échafaud à chaque fois qu’elle

devait sortir de la grotte. Une pluie glaciale tombait par

moment, semblable à une douche de peinture grisâtre. L’eau

se mélangeait aux cendres sur le sol pour former des flaques

boueuses.

Le soleil ne parvenait guère à percer le brouillard

opaque, et la température baissait de jour en jour. C’était la

Terre… et pourtant, plus vraiment. Comme un cercueil à ciel

ouvert, elle semait la mort. Les gens n’avaient plus beaucoup

de temps devant eux, Amy encore moins. L’année avant que

le monde se mette à tomber en ruines, on lui avait

diagnostiqué un cancer du sein. L’annonce avait été

dévastatrice pour la jeune femme de vingt-quatre ans. La

mère d’Amy était morte de la même maladie dix ans

auparavant. On le lui avait détecté trop tardivement.

Avec le traitement, Amy aurait eu de grandes chances

Onvra. Seuls les riches, jeunes et en bonne santé, se voyaient

offrir le salut, et le voyage vers la nouvelle planète. Amy

était une cause perdue. Seule une poignée de médecins

étaient restés encore un peu sur la Terre. Aussi rapidement

que possible, toutes les femmes en âge de procréer avaient

été examinées et envoyées sur Onvra. Celles dont les


3

examens n’étaient pas concluants étaient renvoyées sans

aucun traitement. Étonnamment, Amy était toujours vivante

et en excellente forme. Elle était persuadée de le devoir aux

six femmes et aux trois enfants de la grotte qui dépendaient

d’elle depuis déjà plusieurs mois.

Ils avaient constaté avec effarement que le nombre

d’hommes abandonnés à une mort certaine était

considérable. Même des hommes forts et en bonne santé.

Pour Amy, il était évident que les colons d’Onvra faisaient le

plein de femmes pour la nouvelle planète. Elle avait trouvé

l’idée bizarre, et pourtant il s’était finalement avéré que les

navettes n’embarquaient bel et bien que des femmes. La

Terre avait été abandonnée aux mains d’un groupe

d’hommes très en colère, qui semblaient aussi instables que

les météorites, et tout aussi explosifs.

« Il fait déjà noir », dit Meg. Elle leva à son tour les

yeux vers les étoiles. Sa mine était lugubre. « Il ne va bientôt

plus y avoir de lumière du tout. Nous serons plongés dans

des ténèbres perpétuelles. »

« Je sais », répondit calmement Amy. Il aurait été

illusoire de chercher à nier l’évidence de leur triste situation.

« Je ferais mieux d’y aller. »

« Reviens-nous », fit Meg en la serrant dans ses bras.

Elles se disaient toujours au revoir de cette façon. Dans

« au revoir », il y avait la crainte de ne pas se revoir, une

impression que ce serait le dernier voyage. Il y avait

longtemps qu’elles avaient ainsi cessé d’employer ce terme.

Elles réservaient leurs au revoir aux morts. Amy hocha la

tête et, le sourire de travers, elle s’enfonça dans la nuit. Elle

jeta un dernier coup d’œil en arrière pour apercevoir Meg

disparaître dans la grotte parfaitement camouflée. La fissure


4

permettant d’y entrer était étroite ; il était difficile pour les

femmes, pourtant sous-alimentées, de s’y faufiler. Elles

devaient y pénétrer debout, en rentrant le ventre et retenant

leur respiration. Aucun homme n’y parviendrait jamais.

La forêt qui s’étendait devant les yeux d’Amy était

silencieuse. Comme toujours. Ce n’était pas le cas au début,

lorsqu’Amy avait rejoint les autres femmes et les enfants.

Pendant quelque temps, durant la journée, on avait entendu

quelques oiseaux gazouiller. Aujourd’hui, ils avaient tous

disparu. Cela faisait bien un mois que le dernier oiseau

s’était envolé. Le silence en pleine journée était effrayant,

mais l’obscurité était bien pire encore. Ces derniers temps, la

nuit était toujours remplie de cris et de hurlements de terreur.

C’était la lutte pour la survie. La mort était partout. Les

animaux chassaient les gens, les hommes chassaient les

animaux, et les humains comme les bêtes s’attaquaient aux

plus faibles. Amy frissonna à cette pensée.

Les gens se regroupaient en bandes pour plus de

sécurité. Malheureusement, il semblait que se soit installée

une véritable guerre des sexes. Les hommes s’en prenaient

aux femmes tant la nourriture venait à manquer. Les gros

animaux carnivores, échappés des zoos, représentaient une

menace constante. On ne savait jamais ce qui pouvait surgir

au prochain tournant : homme, ours polaire, gorille ou

éléphant enragé. Amy avait essayé d’apprendre à chasser.

Les armes se faisaient extrêmement rares ; la plupart avaient

été emportées sur la nouvelle planète, Onvra, accompagnant

les survivants que l’on avait jugés suffisamment importants

pour être acheminés. Avec la découverte d’une planète

capable d’abriter la vie humaine, l’espoir d’être sauvé avait

vu le jour.


5

Navette après navette, on quittait l’atmosphère terrestre,

dans une course effrénée contre la montre. Enfin, le temps

fut intégralement écoulé. Des séismes ébranlaient les

fondements de la planète. Des effondrements de terrain

engloutissaient des villes entières. Des tsunamis dévastaient

côte après côte, réclamant toujours plus de terre, à tel point

que la moitié de la planète en fut submergée. Dire que les

éléments étaient capricieux serait un doux euphémisme. Les

dernières navettes avaient cessé de revenir de leur nouveau

foyer, tandis que la Terre tombait en ruines. La planète se

retrouvait livrée à elle-même. Sur des milliards, seule une

poignée de survivants fut abandonnée. À cause de son

cancer, Amy n’avait pas eu droit à la navette. Elle avait été

condamnée à mort, à une agonie qui s’annonçait infernale. Il

était presque amusant de constater que le cancer était devenu

sa préoccupation secondaire. Dans un champ d’imprévisibles

possibles, il n’était pas exclu qu’elle soit plutôt dévorée par

un tigre. Voilà qui donnait matière à réfléchir.

Amy avait fait de son mieux pour apprendre à chasser.

Ses performances au tir à l’arc étaient lamentables. Elle était

incapable de lancer un javelot même si sa vie était menacée ;

ses bras n’étaient pas suffisamment forts pour parvenir à

percer du cuir. Elle en avait été réduite à vivre de larcins.

C’était un jeu dangereux qu’elle jouait pour sa survie, en

volant ainsi à des hommes cruels et désespérés. On n’avait

pas laissé le choix aux femmes. Au début, les hommes

offraient de la nourriture contre du sexe. C’était comme un

jeu pour eux. Mais lorsque la nourriture vint à manquer et

que s’installa l’évidence que rien ne s’améliorerait plus, les

hommes n’offrirent plus rien et s’emparèrent de ce dont ils


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avaient envie. Une cruauté généralisée avait envahi la Terre.

On ne les arrêtait plus.

Amy et les autres se cachaient dans leur grotte pendant

la journée et patrouillaient la nuit, lorsqu’elles le pouvaient.

Dernièrement, ses compagnes avaient cessé de vagabonder,

cessé de faire des efforts. Elles représentaient un morne petit

groupe résigné, abandonnées par les leurs. Mais Amy ne

pouvait pas se résoudre à baisser les bras, ce n’était pas dans

sa nature.

Avec détermination, elle se fraya un chemin à travers la

vaste étendue de feuillages en décrépitude. La Terre avait

elle en était

infestée. Les délicates senteurs de lilas avaient disparu

depuis bien longtemps. Cela faisait un an qu’Amy n’avait

pas vu de fleur. Lever les yeux vers les cimes des arbres tout

flétris n’était guère réconfortant. Ils ressemblaient à des

squelettes se détachant sur un ciel gris. Leurs longues

branches osseuses étaient dénuées de feuilles. Ils se

balançaient, lugubres, en une danse macabre rythmée par le

vent qui gémissait entre leurs troncs. Un frisson lui

parcourut le corps et elle croisa les bras devant sa poitrine.

Tout son monde était devenu gris.

Autour de ses pieds étaient tressés des haillons qui

étouffaient ses bruits de pas au contact du sol aride de la

forêt. Les semelles en caoutchouc des baskets avaient depuis

longtemps entièrement brûlé sur la terre carbonisée, laissant

derrière elles une puanteur révélatrice. À l’aide de plusieurs

couches de tissu, elle parvenait à les compléter ou même à

moins de bruit pour ses raids. Son corps était emmitouflé

sous des couches de vêtements en lambeaux, qui la


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réchauffaient un tant soit peu. Ces derniers temps, la chaleur

avait quitté son monde. La nuit dans la grotte, le feu

parvenait à peine à calmer les frissons, guère plus.

Constamment, les femmes devaient rendre l’eau saumâtre

trouvée dans des flaques ou des ruisseaux boueux propre à la

consommation, en la faisant bouillir au-dessus des petites

flammes, dans des cannettes toutes cabossées. Dans les

moments de désespoir, ce qui arrivait souvent, elles

suspendaient aux branches mortes de nombreux sachets en

plastique, en espérant que la pluie en remplisse au moins

quelques-uns.

Amy ne se souvenait pas de la dernière fois qu’elle avait

pris un vrai bain. Les ruisseaux qui coulaient toujours étaient

glacials. Y plonger la tête et se tremper était le meilleur

moyen d’attraper une pneumonie. Amy se demandait

pourquoi elles s’en inquiétaient encore. La vie n’était qu’une

coquille vide. Le fameux verre n’était ni à moitié plein, ni à

moitié vide ; ici, le verre n’existait même pas. Remarquant

qu’elle marchait de plus en plus voûtée, elle se donna un bon

coup de pied aux fesses.

« Maintenant, ça suffit », s’ordonna-t-elle à haute voix.

« Ne commence pas à t’apitoyer sur toi-même. Ne te dis pas

que tu sens mauvais. Considère que c’est un camouflage. Un

excellent moyen de rester cachée. Ce soir tu trouveras de la

bonne nourriture, et demain sera un autre jour. »

À travers le fin tissu qui entourait ses pieds, elle sentait

les moindres pierres et brindilles du sol, mais elle continua.

Bientôt, sa destination fut en vue. Les rochers étaient

accessibles et elle escalada jusqu’à une structure de débris

empilés. La forteresse des hommes était entourée par un

épais mur d’un mètre cinquante de hauteur, composé de bois


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et de petits gravats. Un véritable chaos organisé. Quatre

brasiers illuminaient le centre d’un cercle bien délimité.

Amy pouvait entendre les hommes parler et rire. Ils

n’avaient aucune raison de rester discrets. Ils étaient eux-

mêmes les prédateurs. Habituellement une sentinelle était de

guet, mais pas ce soir. Ce soir, ils semblaient

particulièrement tapageurs. Amy espérait qu’ils n’avaient

pas trouvé une femme ; elle n’était pas en mission sauvetage.

Elles ne pouvaient pas se permettre de recueillir d’autres

vagabondes.

Une bourrasque de vent fit frémir les narines d’Amy, on

cuisinait de la viande. Ah, voilà pourquoi ils sont si heureux.

Amy se glissa sans bruit sur un rondin, puis sur un autre.

Elle s’aplatit au sol. L’espace était étroit, bien qu’elle soit

pourtant très maigre et mal nourrie. Elle avait posé son

menton sur ses mains, la tête penchée de côté, et, pendant un

moment, elle se contenta de rester allongée, à humer le

gibier rôti. Si elle fermait les yeux, elle savait qu’elle verrait

son père, dans leur fumoir, occupé à faire sécher des

tranches de bœuf. Amy garda les yeux ouverts. Ce n’était pas

le moment d’être sentimentale

aussi ; il avait disparu dans un glissement de terrain.

Un homme massif était accroupi près du feu le plus

proche, se découpant un gros morceau dans l’arrière-train de

la bête. Amy déglutit avec peine lorsque ses dents

s’enfoncèrent dans la portion qu’il s’était octroyée et qu’il

gémit de délice tout en mâchant bruyamment. Du jus coulait

le long de son menton barbu avant de venir goutter sur le col

de sa chemise crasseuse.

Amy passa sa langue sur ses lèvres ; elle avait l’eau à la

bouche et salivait abondamment. Elle avait envie de cette


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viande. Ses yeux balayèrent la zone. Elle était déjà venue ici,

mais jamais aussi près. Ces derniers temps, ses seules

tentatives de vol avaient eu pour victimes des hommes en

vadrouille près de leur domaine. C’était inévitable. Les

hommes avaient cru que les femmes étaient trop faibles et

avaient jugé suffisant de chasser deux par deux. C’était sans

compter sur un groupe de sept femmes désespérées, prêtes à

les passer à tabac pour voler leurs prises. Sans attendre, les

hommes avaient revu leur organisation, même si leurs egos

en avaient pris un coup, et ils chassaient désormais en grands

groupes de neuf ou dix.

La nourriture pour Amy et sa grotte avait été quasi

inexistante au cours des trois derniers jours. Il était

dangereux de trop s’éloigner de leur abri, mais à proximité,

il n’y avait plus la moindre denrée comestible. Elle était

affamée, désespérée et prête à risquer sa vie pour celles de

ses compagnes et sa propre survie. Amy recula et contourna

précautionneusement le campement pour rejoindre un recoin

plus sombre du cercle. Elle allait devoir y entrer et en sortir

précipitamment. Elle prit une petite pierre ronde dans sa

poche arrière gauche, qu’elle cala dans sa fronde. Une fois

qu’elle l’aurait lancée, il serait trop tard pour changer d’avis.

Elle prit une profonde inspiration, se murmura quelques

paroles d’encouragement, puis elle choisit le plus imposant

des hommes du groupe. Il se pavanait tel un coq, et un coup

porté à son ego aurait pour effet d’éparpiller tout le monde.

De son pouce et son index, elle tira sur l’épaisse bande de

caoutchouc et elle éjecta la pierre. Le gros homme poussa un

cri de surprise et de douleur lorsque la pierre le percuta

derrière l’oreille. Son repas roula à terre. Il aboya des ordres.

Les hommes s’agitèrent. Aussi furtive qu’une ombre dans la


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nuit, Amy était déjà de retour sous son étroit rondin, bien

cachée. Les hommes s’élançaient sur les hautes barricades,

pressés de trouver l’endroit d’où le tir était parti. Amy

retenait son souffle. Sa cachette était proche de la nourriture,

et l’énorme morceau que l’homme avait laissé tomber était

presque à portée de main.

Avec une détermination d’acier, Amy se décida. Une

rapide roulade, puis deux, elle s’empara de la viande et roula

en arrière. Elle enfouit son visage dans son butin à la

seconde où elle se retrouva à couvert. De grandes bouchées

disparurent derrière ses lèvres, à peine mâchées avant d’être

avalées. Les hommes pestaient toujours tout autour d’elle

tandis qu’elle se remplissait la panse aussi vite que possible.

Si elle ne faisait pas suffisamment attention, ils sentiraient la

nourriture en s’approchant d’elle. Elle fourra ce qu’il restait

dans sa bouche. Les pas des hommes, brouillons et

précipités, lui indiquaient très facilement où ils se situaient.

Lorsqu’Amy eut terminé son repas, elle se lécha les doigts et

s’extirpa de sa cachette. Les hommes avaient crié dans tous

les sens mais à présent ils écoutaient, aux aguets.

Se sentant rassérénée, Amy sortit à nouveau sa fronde

de sa poche arrière et se remit à viser, à l’aide d’une pierre

qu’elle avait récupérée dans sa veste. L’homme qu’elle visait

était plus loin qu’elle ne l’aurait souhaité, mais elle devait

les attirer dans la direction opposée. Elle tira. Son jet était

trop court, mais il rebondit contre un arbre et vint frapper un

autre homme à l’aine. Il s’effondra sur le sol en hurlant, se

tenant les bijoux de famille comme si quelqu’un allait les lui

arracher. Amy ricana devant un tel spectacle, mais se couvrit

aussitôt la bouche. Elle s’accroupit à nouveau dans sa

cachette.


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Les hommes avaient repris leur chasse aux sorcières.

Amy avait sorti son couteau. Elle roula hors de son abri et se

retrouva aussitôt à genoux, tailladant le cuissot du gibier. Il

était brûlant quand elle s’en empara. Elle fut leste. Deux

rapides coupures déchiquetèrent la viande, lui en laissant

assez pour nourrir son groupe pendant deux jours. Elle se

jeta sur le flanc et roula. Avant de rejoindre sa cachette, elle

fut stoppée net. Amy poussa un cri lorsqu’on tira sur ses

cheveux courts pour la soulever. On lui arracha son couteau

des mains, ainsi que la viande.

Amy envoya son poing au visage de son assaillant, suivi

d’un coup de coude dans les côtes. Il la lâcha. Elle fit volte-

face pour les affronter. Ils étaient trois. Trois hommes grands

et massifs. Leurs cheveux étaient longs et emmêlés, et leurs

barbes broussailleuses. Leurs vêtements étaient aussi

dégoûtants que les siens. Ils sentaient mauvais, leur puanteur

lui parvenait, agressant ses narines.

« Tu veux de la viande, ma belle, je vais t’en donner »,

fit l’un des hommes en dardant sur elle un regard dégoûtant.

« Dîner spectacle, les gars », lança un autre en éclatant

de rire.

Une bûche encore rougie avait roulé de l’un des

brasiers. Une rapide torsion de la cheville et Amy l’avait

lancée dans sa main. Elle agita devant eux le bout encore

brûlant. Les hommes l’encerclaient en riant. L’un des

hommes appela les autres, leur annonçant qu’ils avaient

trouvé de quoi bien s’amuser. Amy poussa un gémissement.

Trois hommes, c’était déjà assez costaud, mais devoir les

combattre tous les quinze

cependant pas leur donner la satisfaction de lire la terreur sur

son visage.


12

« Toi », dit-elle, pointant le doigt vers l’homme qui

l’avait attrapée par les cheveux. « Tu seras le premier à

mourir. »

Les trois hommes hurlèrent d’un rire tonitruant. Les

mots vulgaires qu’ils employaient étaient plus qu’insultants.

Amy sentit son visage s’empourprer. Elle désigna un autre

homme.

« Tu seras le suivant à mourir », dit-elle, impassible.

« Je suis toujours le dernier », lâcha le dernier homme

en faisant la moue.

« Au moins le troisième ce soir, Léon », dit le premier

homme.

« Comment ça, bébé ? Tu vas me tuer en dernier ? »

demanda Léon.

Amy le toisa et secoua la tête. Le dénommé Léon ne

devait pas encore avoir atteint la vingtaine. Encore une fois,

Amy se demanda pourquoi la plupart des navettes n’étaient

revenues que pour les femmes au cours de la dernière année.

Les trois hommes qui lui faisaient face étaient jeunes, en

bonne santé et virils, et pourtant ils n’avaient pas été choisis.

Cette question restait pour eux tous un mystère. Le plus

jeune d’entre eux était plutôt beau garçon, grand et

athlétique. Quel dommage. Il devrait être en train de faire la

fête, d’étudier à l’université, ou de conduire sa petite amie au

cinéma. À la place, son visage d’ange était couvert de crasse

et il attendait la mort. La mort était inévitable ; le sort de

chacun ne dépendait que de soi

« Va-t’en et je te laisserai la vie sauve », l’avertit Amy.

Le jeune homme ricana. « Pas question, ma jolie. »

Amy balança le bras avec violence lorsque le plus grand

des trois essaya de l’attraper. Elle le percuta de plein fouet


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dans la tête avec son arme, l’homme s’effondra. Les deux

autres restèrent bouche bée, abasourdis, jusqu’à ce que

l’homme à terre se mette à hurler, enragé, qu’il allait la tuer

quand il en aurait fini avec elle. Une fois de plus, Amy le

frappa de toutes ses forces. Le deuxième plus grand se saisit

de la bûche et Amy s’envola. Elle atterrit douloureusement à

terre sur les côtes. Elle en eut le souffle coupé. Elle se hissa

sur ses genoux. Ils l’entouraient comme des vautours. Elle

était effrayée et leva les mains devant elle, paumes ouvertes,

pour repousser l’attaque inévitable.

Le plus grand des trois hommes se pencha sur elle, les

poings tout faits. « Ça va faire mal. » Il ricana tout en levant

le poing.

Amy eut le souffle coupé lorsqu’un voile noir s’abattit

devant ses yeux. Pendant un instant, sa vision se troubla,

puis elle tressaillit de surprise.

L’homme qui allait l’attaquer avait décollé du sol, ses

pieds se balançaient à quelques centimètres de hauteur. Sa

bouche et ses yeux étaient grands ouverts, sous l’effet de la

surprise inattendue.

Une créature comme elle n’en avait jamais vu se tenait à

quelques pas d’elle. Elle était toute de noir vêtue, et des

crocs sortaient de sa bouche. Elle avait des griffes en guise

de pieds, cinq serres épaisses devant et une derrière, en lieu

et place de son talon. Sur le côté de son visage, un tatouage

vert étincelait.

L’imposante créature en face d’elle maintenait d’une

main l’homme, pourtant costaud, suspendu au-dessus du sol.

Quatre de ses cinq grandes serres étaient plantées dans le

ventre de l’homme. La créature gronda, dévoilant davantage

de crocs ivoire, longs de près de trois centimètres. Amy était


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bien trop terrorisée pour hurler. S’il avait existé un

croisement entre le croque-mitaine et le monstre du Loch

Ness, le résultat aurait été cette sinistre créature. En un geste

fluide, elle jeta l’homme qui avait voulu s’en prendre à Amy,

comme une vulgaire poupée de chiffon, contre la barrière en

bois. La projection avait été si violente que le corps vint

s’encastrer dans le bois, produisant un craquement sonore.

Les deux autres hommes retrouvèrent l’usage de la

parole et le deuxième se mit à hurler, aussitôt empalé sur les

serres pointues. Une sale entaille sur le torse de l’homme

avait déchiré son vêtement, où se mêlaient à présent le sang

et la chair. Le plus jeune, Léon, valsa à son tour dans les airs.

Amy regarda avec une fascination morbide les menaces

qu’elle avait proférées mises à exécution. Ils mouraient dans

l’ordre.

Du sang jaillissant de sa bouche, le deuxième homme

fut projeté sur le nouveau cercle qui venait de se former. Six

d’entre eux roulèrent sur le sol, assommés, lorsque son corps

sans vie les percuta.

Ce fut à ce moment qu’Amy retrouva l’usage de ses

pieds

roulade, et retourna dans sa cachette. Elle se faufila vers la

sortie et détala.

Derrière elle, Léon s’était élancé sur la barrière de

débris. Il courut vers Amy, la tira en arrière, et manqua de la

piétiner dans sa hâte de fuir au plus loin de l’affreuse

créature. Amy resta sonnée, étalée sur le sol. Le monstre

bestial bondit par-dessus la palissade, comme s’il ne

s’agissait que d’une simple haie franchie par un athlète. Il

atterrit à quatre pattes, à quelques centimètres d’elle. Amy

aurait juré que le sol venait de trembler. Un léger nuage de


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poussière se souleva avant de retomber autour de lui. La

peau de la créature était étincelante, d’un noir d’ébène. Elle

inclina la tête sur le côté pour mieux l’observer. La bête était

chauve. Des bosses ressortaient à l’endroit où ses yeux

auraient dû se trouver. Il gronda et Amy frissonna, incapable

de bouger.

Oh mon Dieu, elle est immense.

« Cours », lui intima la créature.

Elle avait prononcé ce mot en un grondement sourd qui

vint siffler entre ses crocs. C’était une voix d’homme.

Amy se remit sur ses pieds à grand-peine, se demandant

si la bête avait envie de jouer au chat et à la souris avec elle.

Elle s’élança à toute vitesse dans les ténèbres. Ses jambes

moulinaient frénétiquement sous elle. Elle risqua un bref

coup d’œil en arrière. La créature ne la suivait pas. Sur sa

gauche, un cri d’agonie lui parvint. La créature avait trouvé

Léon. Amy courut jusqu’à ce que ses poumons soient sur le

point d’éclater. Puis elle trébucha et resta immobile sur le

sol. Ses inspirations douloureuses et haletantes étaient une

véritable torture pour ses poumons. Elle se redressa sur ses

genoux et se mit à ramper.

Que devait-elle faire ? Elle ne pouvait pas laisser la

chose la suivre jusque dans la grotte. Si les hommes s’étaient

révélés impuissants face à la bête, son malheureux groupe de

femmes et d’enfants sous-alimentés n’aurait absolument

aucune chance. Se relevant en prenant appui contre un tronc

d’arbre, Amy retrouva l’équilibre et repartit t en

titubant. La nuit était remplie de cris de terreur et d’agonie. Il

ne faisait aucun doute pour Amy que la créature était en train

de tuer chaque homme du campement.


16

Amy accéléra le pas. Elle rebondissait presque sur

chaque tronc, dans sa hâte de fuir au plus vite. La créature

savait qu’elle était la plus vulnérable. Il gardait le meilleur

pour la fin. Elle devait prévenir les autres. Il fallait qu’elle

protège les enfants. Mais comment ? L’être mesurait au

moins deux mètres. Des crocs de vampire sortaient de sa

bouche. La regarder suffisait à vous pétrifier.

L’entrée de sa grotte se rapprochait. Elle y était presque.

Un bruit à la cime des arbres l’arrêta net. Amy fit volte-face

et leva les yeux. Le nuage gris suspendu au-dessus de sa tête

venait de s’écarter pour laisser passer la lumière des étoiles.

Oh, mon Dieu. Il se trouvait dans les arbres au-dessus d’elle,

et la regardait, la tête en bas. Les épaisses serres de ses

mains et de ses pieds étaient accrochées à l’écorce de deux

arbres tout proches, enfoncées dans le bois rigide aussi

aisément que tout à l’heure dans la chair humaine. De l’une

de ses serres, il tapotait contre le tronc comme s’il effectuait

le compte à rebours qui la séparait du trépas. Amy et la

créature restèrent figées, à l’exception de cette unique serre.

Le cœur d’Amy cognait dans sa poitrine, cessait de battre,

puis cognait de plus belle avant de s’arrêter à nouveau. Elle

vital se poursuivre.

La créature bondit de l’arbre sur le sol, avant de

remonter dans le suivant, engloutissant ainsi la distance entre

elles, prenant plus d’élan à chaque centimètre. Dans

quelques secondes, elle serait sur elle. Amy poussa un

hurlement. Elle n’avait jamais été aussi terrorisée de sa vie.

Elle détala comme un lapin. La fissure sombre était juste

devant ses yeux. Elle se glissa à l’intérieur, apercevant déjà

le vif éclat de lumière synonyme d’espoir. Le martèlement


17

de son cœur résonnait dans ses oreilles. Tout son corps était

couvert de sueur, qui dégoulinait le long de sa nuque.

Amy sentit qu’on la soulevait par la chemise. Elle

poussa un hurlement lorsqu’une immense serre s’enfonça

dans son habit. Amy se trouvait dans la grotte, et pourtant on

l’avait attrapée. La portée de cette créature, avec ses serres

noires acérées d’une trentaine de centimètres, était

phénoménale. Les autres femmes et les enfants hurlaient,

tandis qu’Amy tentait de s’extraire de son manteau. Sa

fermeture Éclair était coincée dans un bout de tissu. La

créature tira. Ce mouvement vif déchira son vêtement tout

en l’entraînant en arrière vers la fissure. Ses pieds fébriles

glissaient sur le sol crasseux. Les femmes et les enfants la

tirèrent à leur tour. Leur jeu de tir à la corde était de plus en

plus violent, les deux côtés s’acharnaient.

Enfin, Craig, un jeune garçon d’une douzaine d’années,

attrapa un couteau et libéra Amy de ses habits. Tous

roulèrent en arrière, les quatre fers en l’air, sur le sol de la

grotte, évitant de peu le foyer ardent. La griffe de la créature

disparut avec son inutile trophée.

Amy fit quelque chose qu’elle n’avait pas fait depuis

des lustres. Elle s’effondra à terre, le visage dans ses mains,

se sentant abattue par cette nouvelle menace, et sanglota de

terreur dans la poussière. Elle resta ainsi un long moment.

Tous avaient passé leurs bras autour d’elle, l’enveloppant

dans une bulle humaine réconfortante. Comment pouvaient-

ils espérer s’en sortir désormais ?


18

Chapitre 1

Dasks resta un moment à regarder le vêtement qu’il

tenait entre ses serres, flottant sous la brise. Il fronça les

sourcils. La femelle devrait être dans ses bras à présent,

rentrer avec lui au vaisseau, et non pas pleurer ainsi toutes

les larmes de son corps dans une grotte humide. Il pencha la

tête sur le côté et renifla la fissure. Il pouvait sentir la peur,

beaucoup de peur. Les odeurs étaient étranges. Il compta

sept arômes femelles. Puis le parfum de deux toutes petites

femelles. La dernière odeur lui arracha un grondement. Il y

avait une odeur de mâle dans la grotte. Lui faisait-il du mal ?

La femelle était à Dasks. Il l’avait trouvée. La loi castienne

s’appliquait ici aussi désormais, puisqu’ils y avaient atterri.

Ces femelles n’appartenaient plus aux mâles de leur monde

en perdition. Elles étaient des récompenses pour les

Castiens. Dasks rugit de rage. Le bruit résonna sur les parois

de la grotte. Chacun de ses occupants poussa un

hurlement… y compris le mâle.

Bien .

La question était à présent : comment allait-il faire sortir

sa femelle ? Ses longues serres cliquetèrent contre la roche

tandis qu’il réfléchissait. Dasks ne connaissait pas grand-

chose à propos des femelles. Au cours du long voyage qui

l’avait mené de sa galaxie jusqu’à la planète Terre, ils

avaient reçu quelques leçons de la part de leur chef, Cobra.

Par chance, quelques femelles terriennes avaient fait


19

naufrage sur Dargon il y avait des mois de cela, et on avait

communiqué leur odeur à chaque mâle castien pour ne pas

qu’ils en tuent par accident une fois qu’ils auraient atteint la

surface de la Terre.

L’atmosphère terrestre ne régulait pas sa température

comme la planète de Dasks et celles qui l’environnaient.

Cobra avait prévenu ses guerriers que les femelles seraient

entièrement vêtues. Normalement, une femelle était censée

garder les épaules dénudées. On savait ainsi si elles étaient

en couple ou non. Une épaule nue sur laquelle n’apparaissait

aucun tatouage signifiait que la dame n’avait pas été déclarée

sienne par un guerrier castien. Cobra leur avait expliqué que

sur Terre les mâles ne marquaient pas leurs femelles de la

même façon. Par conséquent ces dernières, même si elles

s’étaient accouplées, ne le montraient pas car elles n’en

portaient pas la marque. Elles étaient donc disponibles.

Sur la planète de Dasks, les femelles avaient été

et en étaient toutes mortes, il y avait environ quatre cents

ans. Ces bâtards assoiffés de sang avaient tué ses deux

parents. Lorsque Dasks avait été sevré de sa mère à trois ans

et demi, la cuirasse de son armure ne l’avait plus protégée.

Les Castiens s’unissaient pour la vie, ainsi, quand sa mère

était morte, son père l’avait suivie. Dasks avait été élevé par

un frère aîné qui ne s’était jamais mis en couple. Dasks avait

presque quatre cents ans ; son frère en avait huit cents. Son

frère, Segan, ne parlait jamais des femelles, pas même de sa

mère. Les mâles plus âgés sur la planète de Dasks avaient

décidé qu’après la mort de leurs femelles, on n’en parlerait

plus. Pourquoi entretenir le souvenir de quelque chose qu’ils

ne pourraient jamais vivre ?


20

Le sort avait voulu que la navette transportant des

femelles, ou des « femmes », comme les humains les

appelaient aussi, se posât en urgence sur Dargon. Dargon

n’était pas la planète maternelle de Dasks, mais une planète

voisine où de nombreux Castiens s’étaient exilés lorsque

Cobra avait perdu le pouvoir avant de le reconquérir. La

découverte des femelles fut un événement bienheureux pour

les guerriers désespérés qui avaient perdu tout espoir de

jamais poser à nouveau les yeux sur l’une d’entre elles. La

plupart des mâles sur Dargon venaient juste d’atteindre leur

maturité émotionnelle. Quand le souvenir des femelles fut

rappelé à leurs sens, chaque guerrier eut envie de posséder sa

propre compagne.

Les femmes humaines parlaient l’ancienne langue

castienne, et on en avait déduit qu’à une époque les Castiens

connaissaient les humains et leur avaient même appris leur

langue. On racontait que, des milliers d’années auparavant,

de jeunes guerriers castiens s’étaient rendus sur la Terre. À

cette époque, ils avaient considéré que les humains étaient

bien trop barbares et s’en étaient désintéressés. La Terre fut

alors décrétée planète sinistrée et elle sombra dans l’oubli.

De nombreux mâles castiens, parmi les plus âgés, avaient été

abasourdis d’apprendre que la Terre abritait toujours la vie

après tant de temps. Les peuples terrestres étaient trop

combatifs et destructeurs. Les planètes qui entouraient la

Terre ou à proximité de son système solaire étant déjà

mortes et incapables de supporter la vie, ce n’était qu’une

question de temps avant que le même sort s’abatte sur les

Terriens.

Il était très prometteur que les Castiens et les femelles

de la Terre puissent s’accoupler et se reproduire. La situation


21

précaire et désespérée de la Terre était également bénéfique

pour eux. Les guerriers castiens voulaient seulement sauver

les femmes de la destruction de leur planète. Pourtant, en

reniflant l’entrée de cette grotte, Dasks s’était rendu compte

que sa femelle n’était vraiment pas enthousiaste de le

rencontrer. L’odeur de la peur était prégnante, Dasks n’y

était guère habitué. Un guerrier castien n’affichait jamais ce

genre d’émotion, et même les sales guerriers toniens n’en

faisaient jamais montre. Dasks en fut bouleversé.

Dasks savait que la femelle dans la grotte avait peur de

lui. Elle n’avait jamais posé les yeux sur un guerrier castien.

Son armure était impressionnante. Dasks était volumineux

comparé aux mâles humains. Les quinze hommes qu’il avait

déchiquetés étaient si vulnérables, c’en était pathétique. Les

mâles castiens n’avaient en rien besoin des mâles terriens.

Seulement des femelles. Les mâles de cette planète étaient

des dommages collatéraux. Dasks ne devait pas tous les tuer,

mais après avoir senti leur impureté, il n’avait pas pu s’en

empêcher. Ils savaient tous qu’une femme était présente. Et

tous quinze étaient excités. Ils l’auraient tuée comme un

Tonien l’aurait fait. Les Toniens n’avaient aucun honneur.

La première rencontre de Dasks avec les humains avait laissé

un goût amer dans sa bouche.

Lorsque Dasks était tombé sur les deux petites créatures

qui discutaient entre elles un peu plus tôt, il avait senti qu’il

s’agissait de femelles. L’une avait une couleur de cheveux

des plus étranges, telle qu’il n’en avait jamais vu. Elle était

aussi rousse que les deux soleils de Dargon, quand ils se

couchaient à l’horizon. L’autre avait des cheveux aussi noirs

que la nuit, comme lui. La femelle rousse avait le nez

constellé de minuscules petites taches brunes. Le teint de


22

l’autre était clair, si l’on ne tenait pas compte de la couche

de crasse épaisse comme le pouce qui recouvrait son menton

délicat.

Les deux femmes étaient belles, mais celle dont les

cheveux étaient noirs était cependant différente. Elle

semblait plus forte de caractère. Dasks avait observé la petite

femelle tandis qu’elle parlait à son amie, un peu plus tôt.

Dasks était tout excité de les voir toutes les deux. Lui et son

compagnon d’armes, Talsk, s’étaient séparés à l’atterrissage

du vaisseau. Aucun ne serait mis en danger par une créature

terrestre. Leur armure était presque indestructible, invincible

sur Terre. Chacun était parti à la recherche de sa propre

compagne pour la vie, et si Dasks trouvait une deuxième

femme, pour Talsk, alors l’union serait double. L’idée lui

plaisait.

Les deux femelles étaient si petites qu’elles rappelaient

à Dasks son animal de compagnie de race Glosh, Ebbie. Il

avait envie de les ramasser toutes deux et de les câliner

comme il le faisait à Ebbie, étant enfant. Cette idée le fit

sourire. Il n’avait pas pensé à Ebbie depuis bien longtemps.

C’était un cadeau de sa mère. Ebbie était mort quand Dasks

avait cinquante ans. À l’âge de cent ans, il avait désactivé le

programme holographique d’Ebbie. Après tout, il était

proche de la race humaine. Il était devenu trop vieux pour

avoir des animaux de compagnie. Ce n’était qu’une image

interactive, qui n’avait pas besoin de lui. À la vue de la

femelle humaine, il s’était à nouveau senti responsable de

quelqu’un d’autre. C’était une douce impression. Cobra avait

raison ; ces femelles parvenaient à faire fondre l’armure des

guerriers.


23

Dasks avait senti à quel point les deux femmes étaient

inquiètes pour celle aux cheveux noirs, lorsqu’elles

discutaient ensemble. Quand la femme aux cheveux noirs

était sortie, Dasks s’était dit qu’il serait mieux de garder un

œil sur elle. Elle mijotait quelque chose. La rouquine était

retournée dans la grotte en boitillant légèrement. La femelle

avait grimacé en posant le pied. La petite rousse était blessée

et Dasks avait de la peine pour elle. Talsk et lui devaient la

plonger dans leurs eaux curatives. Une odeur très distincte

d’appréhension s’était installée entre les deux femmes, elle

en était presque palpable.

Comme la femelle aux cheveux noirs n’avait pas détecté

la présence de Dasks, il en avait profité pour bien l’étudier.

Son odeur était enivrante. Son parfait petit corps se mouvait

avec grâce à travers les broussailles épaisses. Il savait qu’elle

ne parvenait pas à voir dans l’obscurité aussi bien que lui.

Elle trébucha sur quelques débris mais retrouva rapidement

l’équilibre. Si elle avait dû s’arrêter et regarder derrière elle,

elle ne l’aurait pas vu. Ses cheveux noirs lui tombaient à

peine aux épaules. Sa peau était aussi pâle que les fleurs

d’Effie au printemps. La détermination que traduisait le

mouvement de ses épaules était fascinante. Si minuscule et

pourtant si forte.

Lorsque l’odeur des hommes avait empli ses narines,

autour du feu, Dasks s’était senti mal à l’aise. L’odeur du

sang était prégnante. Dasks vit la chair rôtie léchée par les

flammes et grimaça. Quels barbares ! Il avait beau savoir

que les humains avaient besoin de chasser et de tuer, il

n’était pas préparé pour cette vue. D’aussi loin que Dasks

s’en souvienne, il avait consommé de la nourriture

dupliquée. Nul besoin de faire du mal à quelque créature que


24

ce soit. Les hommes avaient du gibier, et de toute évidence

ils étaient fiers de leur exploit. Il était dangereux pour une

femelle d’être dans les parages. Mais la petite chose, appelée

Amy par son amie, était persévérante.

Dasks s’était installé dans un arbre pour l’observer. Il

avait trouvé adorable la façon dont son projectile avait blessé

l’homme près du feu. Dasks savait que les hommes de la

Terre ne possédaient aucune armure corporelle auto-activée.

Assister à une réelle attaque physique était très bizarre,

d’autant plus que l’assaillant était minuscule. Le caillou

qu’elle avait envoyé siffler dans les airs avec tant de force

n’aurait fait que heurter l’armure de Dasks sans même qu’il

s’en rende compte.

Amy était une petite créature rapide et astucieuse.

Lorsqu’elle avait attrapé le morceau de viande et bondi à

nouveau dans sa cachette, il avait eu peur pour elle. Elle n’en

avait fait qu’une bouchée. La pauvre était morte de faim !

Mais Dasks s’était bien gardé d’intervenir. Il s’était

douté que la viande était le but de sa mission, qu’il n’y en

avait pas d’autre. De toute évidence, elle avait l’intention

d’en ramener aussi à son amie. Il avait perçu l’inquiétude

d’Amy, ainsi qu’une légère odeur de trahison douloureuse.

Dasks se dit que la jeune femme ne devait pas être une

voleuse, qu’elle était seulement désespérée. Ces mâles

répugnants n’auraient jamais partagé avec elle

étonnant que la femme se sente trahie. Les siens lui avaient

tourné le dos. Quand elle avait lancé son deuxième assaut,

elle avait commis l’erreur de pouffer en atteignant sa cible.

Dasks devait reconnaître qu’il avait lui-même failli rire avec

elle en voyant la silhouette de l’homme, affalé au sol, les


25

mains protégeant sa virilité. Il n’avait jamais assisté à un tel

spectacle, mais cette vue lui provoqua une étrange gêne à

t, il n’avait jamais été directement blessé à

cet endroit. Il ressentait une empathie évidente pour

l’homme qui se roulait par terre. Voilà qui était très curieux.

Trois hommes avaient entendu le rire moqueur d’Amy.

Elle était en danger. Quand le premier chasseur l’avait

attrapée, Dasks savait qu’il était un homme mort. Lorsque sa

femelle appartenait

hommes un par un, affichant une telle bravoure, il avait

compris ce qu’il devait faire. Quand ils s’étaient rués sur

elle, Dasks était passé à l’action et avait mis ses menaces à

exécution. Après tout, elle n’avait jamais précisé que ce

serait par sa propre main qu’ils allaient périr. Personne

n’avait le droit de s’en prendre à ce qui lui appartenait.

Amy avait paru tout aussi terrifiée à la vue de Dasks que

les hommes, lorsqu’il s’était manifesté. Son armure l’avait

effleurée un instant. À sa grande surprise, un centimètre

carré de sa cuirasse s’était abaissé à l’endroit où ses petites

mains grandes ouvertes s’étaient posées. Sa terreur lui faisait

mal à tel point qu’il en fut lui-même abasourdi. Il la

ressentait. Pendant une seconde, ils ne formèrent plus qu’un,

jusqu’à ce que leur contact soit rompu quand il avait

continué. Cobra leur avait expliqué que les femelles

humaines étaient des créatures émotives et que leur corps

réagirait pour apaiser leur peur, mais sentir ses émotions de

la même façon qu’il sentait son odeur était une chose à

laquelle Dasks ne s’attendait pas. La moiteur de son toucher

l’avait pénétré, et sa propre peau avait produit des sécrétions

à l’endroit où elle l’avait effleuré. Quand leur contact s’était

rompu, sa cuirasse s’était refermée d’un coup sec. La peur de


26

la jeune femme s’était muée, chez lui, en une rage folle que

sa cuirasse avait lutté pour contenir, régulant ses émotions.

Dasks n’y pouvait rien, il voulait que les hommes soient

réduits en pièces, mais il voulait aussi la posséder sur-le-

champ. Son envie de s’accoupler avec elle était

phénoménale. C’était la première fois qu’il ressentait une

certaine excitation sexuelle. Le conflit soudain qui l’avait

assailli l’avait rendu comme fou.

Lorsque son impérieux besoin de tuer, mû par une rage

incontrôlable, avait atteint son apogée et qu’elle était

tombée, sans défense, sur le sol devant ses yeux, Dasks avait

compris l’avertissement de Cobra. Un Castien en rut

représentait un danger pour lui-même ou pour les femelles.

Si son armure s’était abaissée pour le laisser s’accoupler

avec elle, il se serait retrouvé vulnérable. Il ne pouvait pas

laisser ses hormones sexuelles, démultipliées, mettre la

survie de la jeune femme en danger. Il lui avait alors

demandé de fuir. Il la rattraperait assez facilement une fois la

menace des autres hommes écartée.

Dasks soupira. Peser le pour et le contre ne servirait à

rien. Il n’avait aucune idée de la marche à suivre. Lorsqu’il

l’avait sauvée, il avait pensé qu’elle en serait heureuse. Dans

son esprit, elle aurait dû l’associer à l’un de ces chevaliers en

armure étincelante dont il avait lu des histoires à bord de la

navette qui l’avait conduit ici. Dasks avait lu tout ce qui lui

était passé sous la main à propos des femmes humaines et de

leurs goûts. Peut-être pourrait-il trouver la créature appelée

petit chien pour la lui offrir en guise d’appât. Ou du

chocolat… cette substance sombre dont les femelles

humaines semblaient raffoler.


27

Une alarme dans l’armure de Dasks se mit à sonner, et il

gronda de dépit. Il n’y avait aucun soleil digne de ce nom par

ici, et après cette bataille, aussi expéditive fût-elle, son

armure avait besoin de se régénérer. Cela signifiait qu’il

allait devoir retourner au vaisseau. Avec un dernier regard

languissant en direction de la grotte, Dasks s’éloigna. Il

banda ses muscles et s’élança sur l’arbre le plus proche. Sa

femelle devait être en sûreté à présent. Il ne détectait aucune

menace immédiate. Elle connaissait sûrement le mâle qui se

trouvait dans la grotte. Dasks s’arrêta net, agrippé la tête en

bas à l’arbre sur lequel il se trouvait. Il détestait la rudesse de

cette écorce rigide, il était habitué à un terrain plus

spongieux. Des pensées plus inquiétantes l’habitaient.

Et si elle était en couple avec le mâle de la grotte ?

Cobra les avait avertis : certaines des femelles

pourraient être déjà en couple. Bien que les mâles sur cette

planète ne marquent pas leurs femelles, ils éprouvaient de

l’attachement l’un envers l’autre. Dasks aurait besoin de

l’aide d’un autre Castien pour tuer son compagnon. Cobra

leur avait expliqué que dans la culture humaine, le mâle et la

femelle ne mouraient pas nécessairement le même jour

quand ils étaient en couple. La femelle ne courrait donc

aucun danger si son compagnon venait à mourir. Quelle

étrange culture. Comment pouvaient-ils bien s’attacher les

uns aux autres ? Cependant, Amy ne voudrait jamais

l’accepter ni lui faire confiance si c’était lui qui mettait un

terme à la vie de son compagnon. Dasks se remit à bondir.

Sa vitesse augmenta jusqu’à ce qu’il ne soit plus qu’un petit

point flou à l’œil humain.

Dasks décida de demander conseil à Cobra. La petite

femelle ne pouvait pas rester dans sa grotte éternellement.


28

Elle allait avoir besoin de nourriture ; la pauvre petite chose

était affamée. Dasks s’arrêta net et se suspendit à nouveau la

tête en bas dans un arbre pour mettre de l’ordre dans ses

pensées. La nourriture. Bien sûr. Il allait attirer sa petite

femelle, Amy, hors de la grotte avec de la nourriture. Elle

finirait par se montrer, si ce n’était pas pour elle, du moins

pour les autres.

Dasks, tu es un génie.

* * * *

« Dasks, tu es un idiot. Ça ne marchera jamais. Pourquoi

une femelle apeurée se montrerait-elle juste pour un peu de

nourriture ? » lui dit Talsk d’un ton maussade.

« Chut », lui intima Dasks. « Parce qu’elle est morte de

faim. Il n’y a pas de nourriture ici, et elle est désespérée. J’ai

vu à quel point elle était à bout la nuit dernière. Elle a failli

être blessée en volant de la nourriture aux hommes desquels

je l’ai sauvée. »

« Les mâles laissent leurs femmes mourir de faim ici ?

Seraient-ils cousins avec ces saletés de Toniens ? » Talsk

semblait consterné. « Pas étonnant que Cobra se soit montré

si pressé de nous amener ici. »

Dasks était sur le point de lui dire qu’elles n’étaient pas

affamées volontairement. La Terre était dépourvue de

nourriture. Même les mâles étaient sous-alimentés et

désespérés. Puis il se souvint alors des hommes qu’il avait

tués. Ils ne voulaient pas partager avec sa femelle ; ils étaient

prêts à lui faire du mal pour cette histoire de viande. Il garda

donc le silence, laissant son compagnon d’armes penser ce

qu’il voulait. Talsk inclina la tête vers Dasks, et ce dernier

haussa les épaules.


29

Personne ne le connaissait mieux que Talsk. Chaque

guerrier castien avait un compagnon de guerre. Talsk et

Dasks s’étaient unis en se mordant l’un l’autre au cours

d’une cérémonie et en échangeant ainsi leur sang, à l’âge de

douze ans. Leurs sentiments l’un envers l’autre s’étaient

approfondis jusqu’à ce qu’ils parviennent presque à lire

mutuellement dans leurs pensées. L’un savait toujours où se

trouvait l’autre. L’un savait si l’autre était en danger. Un

Castien combattait en armure, sans aucune arme. Les armes

étaient pour les faibles. Un Castien et son compagnon

d’armes combattaient toujours dos à dos. Ils se mouvaient si

furtivement que rien ne pouvait se placer entre eux.

La petite grotte qui abritait sa femme était en vue, et

Dasks put sentir la peur qui en émanait. Tout le monde

restait silencieux dans la caverne, comme si leur silence

pouvait faire croire à leur absence. Ce que les humains ne

savaient pas, c’était que Dasks et Talsk pouvaient percevoir

leurs émotions. Ils avaient laissé un panier de nourriture à

découvert, puis étaient allés se cacher.

« Je perçois sept femmes », fit Talsk, curieux, la tête

penchée. « Une odeur de mâle, et deux toutes petites

femelles. Que penses-tu que ce soit ? Je parle des petits. »

« Des animaux de compagnie ? »

« Des petites femelles de compagnie ? »

« Les humains garderaient-ils d’autres humains, plus

petits, pour les divertir ? » demanda Dasks. C’était un

mystère. Pourtant, on détectait bien les odeurs de deux

petites femelles humaines.

« Peut-être qu’ils enverront leurs toutous pour chercher

la nourriture », dit Talsk.


30

Dasks pouvait ressentir la curiosité qui dévorait son

compagnon d’armes.

« S’ils le font, ne les tue pas. J’ai lu que les humains

pouvaient s’attacher à leurs animaux de compagnie. »

L’odeur de Talsk était à présent chargée d’un soudain

dégoût. « Je ne ferais jamais de mal à une femelle. »

« Chut », chuchota Dasks. « Elle sort. »

« Elle est belle », fit son compagnon, impressionné.

Une nouvelle odeur émanant de Talsk saisit Dasks, et il

se hérissa.

« Elle est à moi », gronda-t-il. L’autre le regarda. Dasks

pouvait percevoir la confusion chez son compagnon

d’armes. Il ne lui avait jamais grogné au visage. « Désolé,

Talsk. »

« Tes hormones masculines sont inhabituellement

aiguisées », répondit Talsk.

« Je sais. C’est plus fort que moi quand elle n’est pas

loin. Ma peau a touché la sienne et je l’ai ressentie. Il y a

quelque chose de très primitif dans l’accouplement. »

« On devrait se tenir prêts. Elle est presque arrivée à

l’appât. »

Dasks acquiesça. Ils observèrent la timide approche

d’Amy, à une dizaine de mètres d’eux.

Elle examina les environs, fit un pas, s’arrêta et scruta à

nouveau tout autour d’elle. Lorsqu’Amy se fut suffisamment

rapprochée, elle attrapa la nourriture posée sur une souche et

détala à toute vitesse pour se mettre à l’abri. Ses bras

fléchissaient sous le poids du panier et ses pas titubaient. Le

panier garni de viande, de pain et de fromage tous dupliqués

était assez proche de la grotte pour qu’elle en ressente déjà


31

une fausse impression de sécurité. Il avait été lesté de

quelques pierres.

La femelle n’avait pas la notion de la vitesse dont était

capable l’armure d’un guerrier castien. Dasks fut à l’entrée

de la fissure avant qu’Amy n’ait fait trois pas. Le cri étouffé

qu’elle poussa fit battre son cœur jusqu’à ce que son armure

reprenne le contrôle.

Amy lui jeta le panier et courut. Elle n’alla pas loin

avant que Talsk ne s’accroupisse devant elle, lui bloquant

toute échappatoire. Amy recula. Son cou pivota de droite à

gauche, elle les regardait tout en cherchant une nouvelle

issue. Son corps se mit à trembler comme ils se

rapprochaient d’elle. Cobra leur avait dit que s’ils attrapaient

une femelle, ils devaient retourner immédiatement au

vaisseau. Sur la Terre, il était dangereux d’abaisser son

armure. Les femelles ne pouvaient donc pas les voir tels

qu’ils étaient avant d’être en sécurité à bord du vaisseau.

Cobra les avait prévenus : les femmes les trouveraient

terrifiants. Il serait difficile pour un mâle castien de ne pas

réagir à l’odeur musquée de la terreur. Aussi fort que puisse

être leur parfum de peur, il était impératif pour eux de rester

en armure.

« Allez-vous-en », implora Amy.

Ses mots étaient fermes mais sa voix tremblait, et Dasks

sourit. Elle ne pouvait voir son sourire.

« N’aie pas peur », dit-il pour la rassurer. « Nous ne te

ferons pas de mal, Amy. »

Ses yeux s’écarquillèrent à la mention de son nom. Elle

cligna des yeux, troublée. Ses émotions changèrent si vite

que Dasks fut bombardé d’une variété d’odeurs jusqu’à en

avoir mal à la tête. Peur, frustration, colère, tristesse, attente,


32

douleur, jaillirent pêle-mêle de son petit corps. Seigneur de

Dargon, ce qu’il avait envie d’abaisser son armure pour la

réconforter ! Il était irrésistiblement attiré par elle. Ses

longues serres en forme de rasoir s’allongèrent vers elle,

pour la ramener à lui. Amy se protégea. L’odeur de terreur

était si palpable qu’il recula. Peut-être que s’il abaissait

l’armure de ses mains…

Soudain, un petit point flou se jeta sur Dasks. De

surprise, Dasks le repoussa d’une petite bourrade. Le petit

être hurla, fut envoyé dans les airs, atterrit lourdement sur les

fesses, s’effondra sur le côté et resta immobile.

Amy hurla à Dasks de ne pas lui faire de mal. Amy

accourut vers l’humain

Les serres de Dasks cliquetèrent lorsqu’il se rapprocha

de la femme recroquevillée. Amy avait les bras autour du

petit mâle qui gisait à terre, étourdi. Le petit être leva les

yeux vers lui. Il avait une tignasse tout indisciplinée et des

yeux bleus tels qu’il n’en avait jamais vu. Grand Seigneur de

mâle humain.

À quatre pattes, Dasks le renifla. Ses crocs grandirent

lorsqu’il huma l’odeur musquée du mâle et un grondement

profond se forma dans sa gorge. Le petit mâle poussa un cri

de terreur. Il se blottit dans les bras d’Amy et Dasks émit un

grognement féroce.

Amy frappa Dasks de ses petits poings, et lâcha un cri

en heurtant son armure. Sans se décourager, elle frappa à

nouveau.

Si elle continuait à frapper son armure, elle finirait par

se blesser ; il en était conscient.


33

Quand elle le percuta, une petite portion de son armure

se rétracta, et le petit poing vint cogner contre sa peau.

Dasks la sentit, perçut sa terreur. Il dut faire un effort

pour ne pas abaisser le reste de son armure. Aussitôt, la

petite portion d’armure qui avait été frappée se remit en

Mais son armure réagissait déjà à elle. Elle lui appartenait.

Dasks dévisagea le mâle humain, le regard plein de haine.

« C’est ton compagnon ? » demanda Dasks avec colère.

« Quoi ? » articula Amy.

« Ce mâle est-il ton compagnon ? »

« Ce n’est qu’un petit garçon », dit Amy.

Ses mots étaient empreints de désespoir face à son

incompréhension. Mais Dasks ne comprenait toujours pas.

« Un petit quoi ? »

« C’est un petit garçon », répéta Amy en haussant le ton

lorsque Dasks se rapprocha.

« Laissez-le tranquille ! » hurla soudain quelqu’un.

Dasks vit, fasciné, l’une des petites humaines femelles à

l’odeur forte attaquer Talsk. Il avait cru qu’Amy était

minuscule, mais ce petit être faisait la moitié de sa taille.

Talsk ramassa la petite femelle, la soulevant par le

morceau de tissu autour de son cou. Il la hissa devant lui et

la suspendit au-dessus du sol. La femelle continuait de

donner des coups de pieds en hurlant. Ses petits membres

pas plus grands que des brindilles terrestres s’agitaient,

cognant l’armure de Talsk jusqu’à ce qu’il l’écarte du danger

qu’elle courait de se faire mal.

« Quelle curieuse petite chose », lança Talsk, tout en

l’examinant sous toutes ses coutures. « Ne pèse rien, pas de

crocs, aucune force, pas d’armure. Où sont ses moyens de


34

défense ? Quelle petite créature, si mignonne et si

vulnérable. Pas étonnant que vous en ayez fait votre animal

de compagnie. »

« Pour l’amour de Dieu, c’est la première fois que vous

voyez des enfants ? » s’exclama Amy.

Des enfants terrestres ? Dasks sentit à nouveau l’odeur

du mâle ; il y avait en effet quelque chose qu’il avait raté

dans son élan de colère précipité. C’était un mâle, mais pas

un mâle adulte. Dasks et Talsk n’avaient jamais vu d’enfant

femelle, et cela faisait quatre cents ans qu’ils n’avaient pas

vu d’enfant mâle, depuis qu’eux-mêmes avaient grandi.

Talsk et lui avaient-ils vraiment été aussi petits un jour ?

Amy avait peur pour le petit enfant mâle. Dasks sentait

qu’il était encore plus vulnérable que sa femelle. Le tuer

serait cruel.

Talsk reposa l’enfant femelle sur ses pieds et elle

s’effondra, épuisée, dans la boue. Amy la prit dans ses bras.

« S’il vous plaît, laissez-nous prendre la nourriture », dit

Amy très calmement.

« Vous pouvez prendre la nourriture et les enfants

peuvent retourner dans la grotte sans qu’il leur soit fait de

mal, mais toi, tu viens avec moi », répondit Dasks.

« Où ça ? »

Dasks se renfrogna, elle avait l’air horrifiée, et la

puanteur de sa peur imprégnait ses narines.

« Toi, et au moins une autre femme, vous nous

accompagnerez à notre vaisseau. »

« Qu’êtes-vous donc ? »

« Un guerrier castien. Talsk est mon compagnon

d’armes. Je t’ai choisie pour être ma femelle. Le mieux serait

que la femme Meg vienne aussi avec nous », dit Dasks.


35

« Que ferez-vous de nous ? » chuchota Amy.

« Nous nous unirons à vous. »


36

Chapitre 2

Amy entendait ses compagnes pleurer dans la grotte. Si

ces créatures l’emportaient, les autres n’avaient aucune

chance de survie. Que pourraient faire les trois pauvres

enfants ? Leah, leur mère, agonisait sous un tas de

couvertures pourries. Les quatre autres femmes ne se

serraient les coudes que pour survivre. Si Meg et Amy

partaient, les autres ne verraient aucun intérêt à aider Leah et

ses enfants. Les femmes grommelaient déjà que la petite

famille était un poids pour elles. Elles ne le faisaient pas par

cruauté. Les enfants étaient trop jeunes pour chasser et

étaient, bien sûr, très soucieux de l’état de leur mère, les

deux plus petits pleuraient d’ailleurs très souvent. Les trois

plus jeunes souffraient du froid, ce qui les rendait

particulièrement malheureux. Si Amy et Meg partaient, qui

ferait chauffer de l’eau pour que les enfants aient de quoi

boire la nuit, afin de calmer leur toux ? Qui les bercerait

quand ils auraient peur ? Leur mère pouvait à peine bouger.

« Je ne peux pas partir », murmura Amy, au désespoir.

Que voulaient dire ces créatures lorsqu’elles parlaient de

s’unir ? Ne voyaient-elles pas qu’ils étaient trop

différents ? La chose devant elle ne devait pas peser moins

de cent cinquante kilos. Amy serait écrasée sous son poids.

Elle savait que c’était un mâle, mais elle n’apercevait aucun


37

sexe. Il y avait juste une grosse bosse arrondie à l’endroit où

le sexe d’un homme se situait habituellement. Les fesses des

deux créatures étaient bien dessinées et semblaient solides

comme le roc. Ils ne portaient aucun vêtement et l’air froid

ne les faisait pas frissonner. Si par hasard les humains et ces

choses pouvaient bel et bien procréer, la créature qui lui

tiendrait lieu de bébé ne manquerait pas de la déchirer à la

naissance, avec ses serres et ses griffes. Si elle survivait à un

tel accouchement, ses seins seraient déchiquetés par ses

crocs lorsqu’il lui faudrait l’allaiter.

« Je ne peux pas », martela Amy.

« Votre monde est déjà mort », dit celui qui avait tué les

autres hommes la nuit dernière. « Si tu viens avec moi, tu

seras saine et sauve. Tu ne connaîtras plus la faim. Je

t’offrirai ma protection contre ce que tu voudras m’apporter.

Je jure que je ne te ferai jamais le moindre mal. Mon monde

te plaira. Il est rempli de couleurs, rien à voir avec ce néant

grisâtre. Deux soleils y brillent, et tu n’auras plus jamais

froid. Je sens bien ton inquiétude et ta confusion. Je suis en

suis plus grand que la plupart des mâles de la Terre mais nos

anatomies sont similaires. Nous sommes compatibles. Tu me

trouveras peut-être même attirant une fois que j’aurai

rétracté mon armure à bord de notre vaisseau. »

« Je viens. »

Amy leva les yeux vers Danni, qui émergeait de la

grotte d’un pas hésitant.

Danni resta un moment à évaluer la situation,

précautionneusement. Puis elle s’avança timidement du

panier de provisions renversé. Aucune créature ne l’arrêta.

Sa main jaillit pour attraper la nourriture, et elle mordit dans


38

une miche de pain. Elle la dévora, l’engloutissant avec

gloutonnerie, avant de s’emparer d’un gros morceau de

fromage jaune. Danni était une petite blonde. Son visage

était aussi pâle que l’albâtre. Dans les yeux verts de Danni,

on lisait comme dans un livre ouvert une attente et un besoin

désespérés. Elle serait magnifique une fois lavée. Son regard

était optimiste lorsqu’elle le posait sur les victuailles étalées

devant elle.

Amy prit conscience du caractère misérable de la vie

qu’elles menaient, en constatant que ces femmes étaient

prêtes à aller n’importe où avec des êtres à l’allure étrange,

sur la seule base de leurs promesses.

« Tu peux venir », dit la créature en armure en toisant

Danni. « Nous trouverons quelqu’un pour s’unir à toi, si tant

est que tu sois fertile. Si tu ne l’es pas, peut-être un Castien

plus âgé acceptera de te prendre quand même, mais il ne

s’unira probablement pas avec toi pour la vie. Dans tous les

cas, tu seras à l’abri de tout mal sur notre planète maternelle,

Bagron. Mais d’abord, nous nous rendons sur Dargon. »

Amy secoua la tête tristement. Danni était jeune et sans

nul doute fertile. Danni était censée partir avec l’une des

navettes, mais sa mère était tombée malade et elle avait

refusé de la quitter. Après la mort de sa mère, c’était trop

tard. Si ces créatures disaient la vérité, l’espoir était permis

pour Danni. Mais Amy allait mourir. Une fois qu’ils

l’apprendraient, elle serait rejetée sur Terre et une nouvelle

fois abandonnée. L’être qui lui proposait sa protection en

échange de ce qu’elle consentirait à lui donner ne voudrait

plus avoir affaire à elle. Il avait bien spécifiquement réclamé

une compagne. Quel autre mâle, même plus âgé, aurait envie

de s’unir avec une mourante ?


39

« Quelles femmes parmi vous ont envie de vivre et de

quitter cet enfer ? » tonna la créature en direction de la

grotte.

Il le sait. Comment sait-il qu’il y a d’autres personnes

dans la grotte ? Comment sait-il que ce sont toutes des

femmes ?

Une par une, les femmes se faufilèrent lentement hors

de la grotte jusqu’à ce qu’une seule manque à l’appel. Amy

aperçut la plus jeune de la fratrie, Lisa, quatre ans, jeter un

coup d’œil depuis l’intérieur de la fissure. L’enfant posa les

yeux sur la nourriture que les femmes dévoraient à même le

sol. Elle avait trop peur pour s’avancer. Amy regarda Meg,

son amie.

« Nous sommes en train de mourir, Amy », dit Meg

d’un ton calme. « Il n’y a plus aucun espoir ici. Absolument

aucun. Personne ne viendra jamais nous chercher. »

Amy voyait que Meg avait baissé les bras, mais qu’elle

s’accrochait toujours à de vaines promesses. Il existait un

pouvoir de séduction dans le simple fait de vouloir être

désiré. Meg, elle aussi, avait été laissée pour compte,

abandonnée par la race humaine. Seuls les physiques parfaits

ou les plus riches étaient partis à bord des navettes. Lorsque

le tour des autres était arrivé, le temps était écoulé. C’était

comme la planète des jouets cassés. Meg n’avait qu’un seul

rein, c’était suffisant pour la déclarer imparfaite.

« Et Leah et ses enfants ? » demanda Amy.

« Laissez-les venir aussi », demanda Meg à l’une des

bêtes cuirassées. « S’il vous plaît, il y a une femme dans la

grotte qui est malade. C’est la pneumonie. Si vous avez un

remède, elle peut guérir. Elle a eu trois enfants, alors elle est

bien fertile. »


40

Non sans amertume, Amy comprit qu’elle avait raison.

Leah était fertile. Elle et ses trois enfants illégitimes avaient

été abandonnés à une mort certaine sur la planète pour

couvrir les petits secrets inavouables d’un sénateur. Amy

n’imaginait même pas le sentiment de trahison qu’avait dû

ressentir la jeune femme. C’était assez cruel de la part de cet

homme d’abandonner Leah, mais condamner ses propres

enfants était immonde. Amy espérait que sa navette s’était

écrasée et qu’il était mort.

« Comme t’appelles-tu ? » demanda Amy à la créature

devant elle.

« Dasks. »

« S’il te plaît, Dasks. Je viendrai sans faire d’histoires si

tu laisses les autres venir aussi. » Une fois qu’ils

découvriraient que c’était trop tard pour Amy, les autres

seraient hors de danger. Où, elle l’ignorait, mais rien ne

pouvait être pire que cet enfer. Meg avait raison, il ne restait

plus rien pour personne ici. La Terre était bel et bien morte.

Même la poignée d’hommes n’existait plus, et il ne restait

personne à qui voler des vivres. Si ces créatures voulaient

leur mort, ils les auraient déjà massacrées. L’un d’entre eux

avait déchiqueté quinze hommes à lui seul ; de quoi étaient

capables les deux réunis ? De toute évidence, d’après le

contenu du panier, les créatures avaient de la nourriture.

Fraîche, qui plus est. Sans doute y en avait-il davantage.

Dasks sembla réfléchir. Elle avait du mal à le

déterminer car la chose n’avait aucune expression faciale.

Oh mon Dieu, il est si moche. Comment pourrait-elle avoir

des relations sexuelles avec un être si répugnant ? La seule

chose à peu près acceptable chez lui était son tatouage. Amy

n’avait jamais vu d’aussi beaux et d’aussi complexes motifs.


41

Ils illuminaient les deux côtés de son visage, de ses tempes

jusqu’à sa mâchoire. L’autre créature avait le même type de

tatouage brillant, mais le sien était résolument différent.

peut-être, comme les flocons de neige, n’en existaient-ils pas

deux les mêmes.

« Tout le monde vient, sauf le mâle », dit enfin Dasks.

« C’est un enfant », éclata Amy en bondissant sur ses

pieds. Elle ne s’était pas attendue à une telle réponse. Ils ne

pouvaient pas laisser le petit garçon tout seul, livré à lui-

même ; ce serait cruel.

« C’est un mâle. Nous n’avons pas besoin de davantage

de mâles sur notre planète. »

« Ce n’est qu’un petit garçon », hurla Meg. Elle sautilla

sur sa cheville foulée jusqu’à l’autre guerrier et leva une

main suppliante qu’elle posa sur son bras. La créature se

pencha sur elle. « S’il te plaît, il va mourir tout seul ici. »

« Et si on laissait Cobra décider ? » fit l’autre bête en

armure.

Amy remarqua la façon dont la créature reniflait l’odeur

de Meg. L’être se rapprocha d’elle et, étrangement, Meg ne

s’écarta pas ni ne sembla effrayée. Elle avait l’air troublée.

« Talsk, Cobra a dit pas de mâles », souligna Dasks.

Amy tendit la main vers Dasks, et la posa sur son bras.

Pendant une seconde, elle eut l’impression de toucher de la

peau et elle sentit une bouffée électrique les traverser. Elle

ne s’était pas trompée l’autre soir. Cette sensation était bien

réelle. Dasks le sentit lui aussi car il sursauta.

« Je t’en prie, Dasks », implora-t-elle. « Leur mère est

mourante. Ils n’ont que nous. S’il te plaît ? Je viendrai avec

toi si le garçon peut venir. J’envisagerai même une union. »


42

Ce fut léger et à peine visible, mais Dasks hocha la tête.

Amy se pencha et aida les deux enfants à se relever. Dasks

les surplombait tous. Elle l’entendit prendre une profonde

inspiration et un léger grondement cliqueta au fond de sa

gorge. Il pencha la tête vers elle et Amy se demanda si ces

êtres ressentaient la déception. Amy frissonna ; elle pensait

ce qu’elle avait dit, mais elle avait laissé de côté l’annonce

de sa mort inévitable. Étonnamment, elle appréhendait

surtout ce qui se produirait quand ils découvriraient son

secret. Avec un peu de chance, elle serait loin de cet enfer

en route vers Dieu sait où. Mais au moins, elle serait loin.

* * * *

Amy resta bouche bée lorsqu’on la conduisit au plus

gros vaisseau qu’elle ait jamais vu. On aurait dit un stade

olympique couvert, qui flottait devant eux. Il était en

suspension au-dessus du sol. Les arbres en dessous avaient

été réduits en brindilles, de toute évidence écrasés au

moment de l’atterrissage. Des rangées de souches brisées,

toutes réduites à la même taille, semblaient le soutenir. Elle

avait l’impression de contempler une mer de pierres

tombales enracinées. Une passerelle brillante se déroula dans

les airs pour les accueillir. Lorsque Dasks y monta, Amy fut

étonnée de ne pas entendre ses pieds griffus racler sur le sol

de la plate-forme. Elle comprit pourquoi en y posant les

pieds à son tour ; la passerelle était douce sous ses pieds. Le

plancher remonta, ou plutôt glissa horizontalement comme si

un mur d’eau épais se fermait derrière eux, scellant ainsi leur


43

Dasks portait Leah dans ses bras, elle respirait à peine.

Chaque bouffée d’air qu’elle luttait pour inspirer semblait

l’être à travers une paille. Elle était toute molle et sans

réaction. Amy et Meg avaient rencontré quelques difficultés

lorsqu’elles avaient dû la porter et la tirer hors de la grotte.

Talsk tenait Lisa dans ses bras. La petite fille s’était

endormie contre lui après qu’il lui eut offert de la nourriture

qu’elle avait engloutie avec enthousiasme. Le don de la

jeunesse, qui ne jugeait pas selon les apparences. Seule la

gentillesse de Talsk avait compté pour elle.

L’air à bord du vaisseau était parfumé, pur, et Amy fut

prise d’une quinte de toux tant elle ne s’y attendait pas. Elle

avait l’habitude de la poussière et de la fumée qui

assaillaient constamment ses poumons. À l’intérieur,

l’espace était ouvert, beau et propre. Amy se souvenait de la

propreté ; elle y aspirait de tout son être. Elle était bien

consciente de sa crasse et en était mal à l’aise. Elle enroula

ses bras autour d’elle en espérant pouvoir se cacher de sa

propre puanteur.

Il lui fallut faire preuve d’un grand courage pour ne pas

fuir lorsqu’une autre créature démesurée fondit sur eux. Elle

était à quatre pattes. Ses énormes griffes martelaient le

vaisseau à toute allure, comme elle bondissait sur les murs et

le sol. Elle étendait devant elle ses bras puissants et

musculeux pour engloutir en quelques secondes la surface

qui les séparait, tel un énorme prédateur. Amy pouvait voir

les griffes qu’elle enfonçait dans la douce surface brune du

vaisseau pour prendre de l’élan. La matière sous ses pieds

était spongieuse, presque élastique, et avait la texture d’un

tapis bien trop épais. La déférence dont les deux créatures


44

firent montre envers celle qui approchait lui laissa supposer

qu’il s’agissait de leur chef.

« J’ai dit aucun mâle », rugit la créature.

Lorsqu’elle se déploya de toute sa hauteur tout en

continuant d’avancer et qu’elle se dirigea vers eux sans

ralentir pour autant, Amy tressaillit. L’être était plus grand

que Dasks.

Amy bondit en entendant sa voix tonitruante, qui porta

tout autour d’eux, résonnant sur les parois du vaisseau.

Lisa se réveilla et se mit à pleurer. Craig recula de

quelques pas, les yeux grands ouverts, et percuta Talsk.

Talsk posa sa main griffue sur l’épaule du garçon et plaça

ses serres en travers de sa poitrine, le maintenant contre son

armure.

« Voici la mère du petit mâle, Cobra », dit Dasks. Il

désigna la femme inanimée qu’il tenait blottie contre son

torse puissant.

« Les créatures terriennes mâles n’ont aucune chance de

survivre sur notre planète. Ils ne développeront jamais de

cuirasse et ne pourront pas recevoir la protection d’un

guerrier castien. Une proie facile pour une attaque

tonienne », dit Cobra d’un ton brusque. « Je ne suis pas

cruel. J’énonce des faits. »

« Et les petites femelles ? » demanda Talsk.

« Ce sont des enfants, Talsk. Elles sont bienvenues à

bord. Les femelles humaines grandissent au même rythme

que les femelles castiennes le faisaient lorsqu’elles étaient en

vie. Nos hommes seront toujours capables de les protéger

tant qu’elles seront enfants, c’est instinctif. Sans les

femelles, nous ne pouvons pas avoir de descendance.

Lorsqu’elles grandiront, elles bénéficieront de la protection


45

de leurs compagnons », dit Cobra, en se retournant pour

s’éloigner et les congédier.

Amy se raidit de colère.

« Alors, c’est comme ça ? » lança-t-elle d’un ton acerbe.

Ses pieds avaient bougé, s’avançant de leur propre initiative.

« Pourquoi vos guerriers ne protégeraient-ils pas un enfant

mâle ? »

Cobra s’arrêta et se retourna.

Pendant une seconde, Amy hésita et songea à battre en

retraite, mais elle se campa sur ses jambes. Les yeux d’Amy

s’écarquillèrent de surprise lorsqu’elle vit, sidérée, l’armure

noire de la créature commencer à disparaître à l’intérieur de

son corps. Elle était absorbée, et il n’en resta plus rien

lorsque ce fut fait. Devant elle se tenait un homme. Il était

grand et costaud, autoritaire. Amy espérait que son cœur

n’était pas de marbre. L’armure avait épousé son corps.

Chaque courbe musculaire qu’elle avait vue sur son corps

était bien réelle. L’armure était aussi noire que de la titanite ;

l’homme qu’elle avait devant les yeux semblait extrêmement

bronzé. Amy se souvint que Dasks avait mentionné que sa

planète avait deux soleils.

La transformation était saisissante. Cobra n’était plus

une espèce de bête hideuse munie de crocs et dotée de

protubérances à la place des yeux. Il était torse nu et pieds

nus, et n’avait ni griffes, ni serres. Un pantalon noir brillant

moulait ses hanches, ses cuisses et son généreux entrejambe.

Amy déglutit avec peine lorsqu’il se campa devant elle. Sa

tête ne lui arrivait même pas aux épaules. Elle inclina la tête

en arrière pour le regarder dans les yeux. Son expression

était sévère. C’était un être très puissant. Elle sentit qu’elle

se mettait à trembler. Elle ne reculerait pas. La vie d’un


46

enfant était en jeu. Amy n’avait rien à perdre. Être sur le

point de mourir rendait plutôt impertinent.

Lorsque la main de Cobra se dressa en direction de sa

joue, Amy vit Dasks se raidir à côté d’elle. Cobra fit glisser

le dos de ses doigts sur sa peau douce. Ils étaient tièdes et

légèrement humides. Son teint sombre, sain et buriné, offrait

un contraste détonant avec sa peau maladivement pâle. Il

était d’une beauté à couper le souffle. Ses longs cheveux

noirs retombaient sur ses épaules. Ses yeux étaient marron

foncé, fascinants, et semblaient trop vieux pour appartenir à

un homme si jeune et si viril. Elle aurait dû être terrorisée,

mais étrangement, elle fut apaisée à son contact. Il lui était

agréable de sentir ses doigts moites sur sa peau. Elle n’avait

plus envie de se disputer avec lui. C’était comme si sa colère

l’avait quittée. Mais elle se sentit soudain très malheureuse.

« On ne peut rien faire ? » murmura-t-elle. « C’est un

bon garçon. Il mourra si on le laisse seul. »

« Tu n’as pas idée de ce que tu demandes. Un mâle

castien n’a jamais protégé un autre mâle, pas même ses

propres rejetons. Nos mâles sont nés avec une cuirasse qui se

développe dans cette armure que vous voyez sur nous, et ils

ne la perdent jamais », expliqua Cobra. « Tu ne comprends

pas notre façon de faire, petite femelle. »

Cobra retira ses doigts de sa peau et Amy eut

l’impression d’être soulagée d’une certaine emprise.

« Peut-être pas, mais je comprendrais un geste de

compassion », le défia-t-elle. « Si vous enlevez les femmes

terrestres de notre planète sans leurs enfants mâles, vous

serez haïs et craints. »

Cobra sembla considérer ses paroles.


47

Il hocha la tête. « Emmenez la femme à nos eaux

curatives », ordonna-t-il à Dasks. « Si elle vit, le garçon

restera ; si elle meurt, il quittera mon vaisseau. Les enfants

femelles resteront dans tous les cas. »

Cobra

office de loi à bord de son vaisseau. Amy pouvait l’entendre

dans le ton de sa voix, ainsi qu’à la façon qu’eurent Dasks et

Talsk d’acquiescer aussitôt. Amy espérait de tout son cœur

que Leah survivrait. Morceau par morceau, l’armure de

Cobra se remit en place sans un bruit. Bientôt, il se déplaça à

nouveau à une allure qui rendit sa silhouette floue, comme il

rebondissait entre le sol et les parois. C’était comme regarder

se mouvoir une machine robuste. Amy le regarda partir

jusqu’à ce que l’ampleur du vaisseau l’enveloppe. Où

qu’elle porte le regard, elle voyait de puissants hommes, en

armure ou au naturel. Le vaisseau se composait de plusieurs

niveaux. Les derniers étages se perdaient dans les ténèbres.

D’abord, Amy se demanda comment ils atteignaient ces

espaces élevés, puis elle aperçut quelques créatures en

armures escalader le long des murs pour se rendre dans les

étages. Ils arrivaient à quatre pattes devant les ouvertures,

puis ils se débarrassaient de leurs armures en arrivant à

destination pour marcher librement sur les plates-formes. Le

vaisseau bourdonnait d’activité. Tous travaillaient côte à

côte sans parler, du moins verbalement, car pourtant chacun

semblait savoir ce que l’autre était en train de faire. C’était

comme s’ils se sentaient les uns les autres. Amy réprima un

frisson.

Un autre mâle en armure s’approcha et Amy s’écarta. Il

prit Leah des mains de Dasks. Lisa se débattit dans les bras


48

de Talsk pour suivre sa mère, mais il la maintenait. Son

armure commençait à se rétracter dans sa chair.

Amy fut étonnée. Talsk était très beau. Des yeux d’un

bleu sombre étincelaient là où les bulbes s’étaient trouvés

peu de temps auparavant. Ses longs cheveux blonds

retombaient sur ses épaules, comme ceux de tous les autres

hommes présents. Avec curiosité, Amy jeta un regard autour

d’elle. Visiblement, tous les hommes étaient soit blonds, soit

brun foncé

les boucles rousses en bataille de Meg.

Lisa assista bouche bée à la transformation de Talsk.

Ses minuscules petits doigts s’approchèrent de son visage

é de près.

Pas même un soupçon de barbe ne venait assombrir son

menton. Des sourcils fins, d’un blond presque platine, se

devinaient. Talsk souriait à la fillette. Il souleva sans

problème le poids plume de l’enfant. Sa grosse main,

désormais dénuée de serres, glissa sur ses cheveux emmêlés.

Il la renifla dans le cou et la petite fille se tortilla en riant.

« J’en veux un comme ça », dit Talsk en souriant, de

toute évidence ravi. Il la fit sauter dans les airs avant de la

rattraper, provoquant des éclats de rire enchantés de la part

de la fillette.

Cela faisait bien longtemps qu’Amy n’avait pas vu

l’enfant sourire. Pour une raison étrange, elle se sentait

plutôt sur la défensive.

« Ce n’est pas un jouet », dit Amy avec colère.

« Donne-la-moi. »

Amy tendit la main pour récupérer l’enfant et recula

d’un bond lorsque l’armure de Talsk se referma en claquant,

à la vitesse de l’éclair. Lisa disparut avec lui. Il n’y avait plus


49

aucune trace d’elle, pas même les contours de sa minuscule

silhouette.

Maddy se mit à hurler. « Tu as mangé ma petite sœur »,

braillait-elle.

« Je ne l’ai pas mangée », grommela Talsk. Puis il jeta

un coup d’œil à Dasks. « Elle est ici avec moi. Blottie contre

mon torse. Vous ne la voyez pas ? »

« Je ne parviens même pas à la sentir », répondit Dasks

d’un ton bourru.

« Cobra a dit que c’était instinctif. C’est arrivé quand

j’ai senti la colère de ta femelle, Dasks », dit Talsk, tout

simplement émerveillé. « Mon armure régule la respiration

de la petite, ainsi que la température de son corps comme si

c’était la mienne. Un scan est en train de l’examiner. Elle a

un virus que mon armure s’est mise à attaquer. »

Pour Amy, il était évident qu’il disait la vérité. Bien

qu’il soit dénué de toute expression faciale lorsqu’il portait

son armure, elle pouvait déceler l’émerveillement dans sa

voix. Amy avait éprouvé de la colère. Elle avait ressenti un

manque lorsque Talsk avait taquiné la petite et l’avait fait

rire. Talsk lui faisait toucher du doigt combien elles avaient

échoué à bien s’occuper des enfants. Lisa avait un rhume, et

tous avaient terriblement peur que ce soit le début d’une

pneumonie comme sa mère.

« Elle va bien, maintenant », dit Talsk.

Morceau par morceau, l’armure s’abaissa, pour révéler

la fillette, serrée fermement contre le torse de Talsk. Elle

releva la tête.

« Z’étais coincée », dit Lisa. Elle inspira. « Z’ai plus de

rhume. »


50

Amy était sidérée ; l’enfant ne semblait pas perturbée le

moins du monde par ce qui venait de se produire.

Lisa tendit les bras en direction d’Amy. Avec réticence,

Talsk la lui remit.

L’autre fille de Leah se mit à sangloter et Meg prit

l’enfant de six ans dans ses bras. Elle passa sa main dans les

cheveux de la fillette.

« Ne pleure pas, Maddy. Ils essaient d’aider ta maman,

et tu vois, Lisa va bien. Talsk ne lui a pas fait de mal », dit

Meg.

« Ils vont tuer mon frère ? » demanda Maddy.

« Non », dit Amy abruptement, tout en gratifiant Dasks

d’un regard rude. « Vas-tu rester caché longtemps ? »

Lorsque l’armure de Dasks se rétracta de son corps,

Amy fut éblouie. Ses cheveux étaient aussi noirs que la nuit,

raides, lisses et brillants comme son armure. Ils lui arrivaient

aux épaules. Sa peau était douce et bronzée. Ses biceps se

gonflèrent. En fait, tous ses muscles semblaient se

contracter. La puissance de ces masses indescriptibles était

fabuleuse. Il était torse nu et avait les pieds à l’air libre. Le

même pantalon noir que celui de Cobra épousait ses

délicieuses hanches. Amy serra la mâchoire pour s’assurer

de ne pas baver. Elle ne pouvait pas croire à cette

transformation. C’était un extra-terrestre vraiment

magnifique. Il était difficile de ne pas ressentir ne serait-ce

qu’un brin d’attirance envers cet Adonis.

Oh Seigneur.

Ses genoux faiblirent et manquèrent de se dérober. Et ce

beau gosse voulait s’unir à elle ? Oh, si seulement… Ses

yeux marron, sombres et rêveurs, se posèrent sur elle. Elle

avait envie de se perdre dans son regard. Mais elle pencha la


51

tête, troublée, en plongeant ses yeux plus profondément dans

les siens. Pour une obscure raison, Dasks paraissait

terriblement en colère.


52

Chapitre 3

Dasks ordonna à deux autres guerriers d’emmener les

enfants et de les surveiller.

Amy ne lâcha la petite fille qu’après s’être assurée que

les enfants allaient recevoir de la nourriture et qu’il ne serait

fait aucun mal au garçon.

Dasks fronça les sourcils en sentant qu’elle ne lui faisait

pas entièrement confiance. Dasks voyait bien qu’elle avait

envie de le croire mais qu’elle n’était pas encore convaincue

de sa bonne foi. Il était difficile pour Dasks d’en avoir la

certitude, car les phéromones de sa femelle montaient en

flèche à chaque fois qu’elle le regardait. Cette odeur était

enivrante et, dans ces moments-là, il se sentait moins sûr de

lui. Par qui était-elle attirée ? Lui ? Cobra ? Talsk ? Dasks

était incapable de se concentrer sur son odeur car elle

éprouvait trop d’émotions en très peu de temps. Il en avait

mal à la tête, et il avait envie de gronder pour exprimer sa

contrariété.

Talsk sentit lui aussi l’hésitation de la jeune femme et

lui sourit.

De mauvaise humeur, Dasks regarda Talsk soulever de

terre la petite femelle, Maddy, et la porter contre son torse.

L’armure de Talsk se referma sur l’enfant pendant quelques


53

relâcha, il déclara que la petite fille n’avait plus aucun

parasite, et qu’un petit doigt cassé à sa main gauche avait été

remis en place.

Talsk éprouva un élan de compassion lorsque Craig

renifla et essuya son nez dégoulinant. Il leur affirma que s’il

le pouvait, il protégerait aussi le petit mâle. Mais sa cuirasse

ne le permettrait pas. Cette idée était bien trop inhabituelle.

Il était à espérer que les eaux curatives puissent quelque

chose pour lui, même si c’était un mâle. L’eau n’avait jamais

été testée sur un mâle auparavant ; les guerriers castiens n’en

avaient aucun besoin.

Pour l’instant, Amy devait faire confiance à Dasks et à

Talsk, elle devait croire ce qu’ils disaient.

Amy fut véritablement émerveillée en examinant la

petite femelle. Son regard reconnaissant étincela en direction

du compagnon d’armes de Dasks, et il lui donna une

nouvelle fois sa parole qu’il ne serait fait aucun mal à

l’enfant mâle.

Seul un être cruel ferait du mal à une chose si petite et si

vulnérable. Dasks était furieux de ne pas avoir pensé lui-

même à examiner la petite femelle. Mais en réalité, Dasks

était en colère depuis que Cobra avait touché sa femelle. Il

avait senti sa détresse quand Cobra s’était approché d’elle et

il l’aurait bien réconfortée lui-même s’il ne tenait pas la

femme malade dans ses bras.

Dasks savait que pour Leah, tout irait pour le mieux.

Son armure n’avait pas pu la soigner

compagne, ils n’étaient pas liés par le sang et elle n’était pas

une enfant. Les eaux curatives la guériraient. Cobra

permettrait au garçon de rester. Mais ce faisant, le petit mâle

serait sous la responsabilité de Cobra. Dasks se demanda ce


54

qu’il allait bien pouvoir faire de lui. Cobra n’avait pas menti

ne savait quand serait leur prochaine attaque. Les guerriers

toniens et les Castiens étant à armures égales, la bataille

entre les deux races n’avait presque aucune chance de se

terminer. Des deux côtés, ils étaient quasiment

indestructibles. Cela faisait des milliers d’années que la

situation durait. Chaque camp devait développer une

tactique militaire unique pour prendre l’ascendant sur

l’autre.

Dasks était si frustré par les émotions qui affleuraient

que son armure se releva ; il jeta Amy sur son épaule et

escalada les parois jusqu’au niveau cinq, sans tenir compte

des cris apeurés qu’elle poussa le temps que dura

l’ascension. Visiblement, sa petite femelle avait une aversion

pour les hauteurs. Son froncement de sourcils s’accentua

quand il se rendit compte qu’elle croyait en fait qu’il serait

capable de la laisser tomber. Talsk suivit avec Meg qui, elle,

resta silencieuse. Leurs chambres étaient adjacentes et Talsk

disparut dans la sienne avec sa femelle.

« Voici ma chambre, la tienne désormais », fit Dasks en

pénétrant dans sa cabine avec Amy. Son armure se baissa

quand il posa Amy sur ses pieds.

Amy lui lança un regard froid. « Vous n’avez pas

d’ascenseurs ? »

« Qu’est-ce qu’un ascenseur ? »

« Laisse tomber », lâcha-t-elle.

Amy se dirigea vers une immense fenêtre qui courait sur

toute la longueur de sa chambre. Ils étaient toujours sur

Terre. Le vaisseau y resterait jusqu’à ce qu’ils atteignent leur

quota de femelles, dans la mesure du possible. La cuirasse de


55

l’engin faiblissait à chaque instant, car le soleil n’était pas

suffisant pour la régénérer. Il ne leur restait au plus que sept

jours terrestres. De nombreux guerriers s’aventuraient à la

recherche de trophées, mais très peu d’entre eux revenaient

victorieux. Sur Terre, les femelles humaines étaient peu

nombreuses et dispersées. Jusqu’à présent, toutes les femmes

qu’ils avaient trouvées avaient une blessure ou étaient

malades. Dasks ne sentit aucune blessure sur sa petite

femelle

Le ciel s’était assombri. Des météorites bombardaient

une fois de plus la surface de la Terre. Elles sifflaient en

passant contre la cuirasse du vaisseau et explosaient sans

faire le moindre dégât. L’une d’entre elles vint éclater contre

la fenêtre et Amy recula d’un bond. Elle serra ses bras autour

de sa poitrine. Elle avait l’air toute perdue. Une fois de plus,

elle s’avança, écarta les doigts contre la vitre et contempla

les ravages généralisés. Le souffle d’Amy se fit plus saccadé

et sa peur grandit tandis que les météorites continuaient de

tomber et explosaient devant ses yeux. De la hauteur à

laquelle ils se trouvaient, ils avaient une vue dégagée sur la

Terre dévastée. Les lumières du vaisseau illuminaient la

zone sur des kilomètres à la ronde. On aurait dit un terrain

vague désolé et rougeoyant. Des nuages amassés flottaient

non loin du sol. Des volutes de brume et de fumée

s’étendaient jusqu’au ciel, telles des montagnes chevauchant

de gigantesques raz-de-marée.

Dasks avait vu des images de la Terre à l’apogée de sa

gloire. Une luxuriante palette de verts, de rouges et de

violets recouvrait alors le sol. De l’eau cristalline et pure

abritait des créatures aquatiques scintillantes. De beaux

oiseaux voletaient sous un soleil éclatant. De la neige,


56

élément que Dasks n’avait jamais vu, étalait sa blancheur

immaculée. Elle était magnifique, recouvrant les arbres et la

terre. C’était fini. Plus de brillant, aucun éclat. La neige était

une bien triste

profanation de ce qui avait existé autrefois et qui ne

reviendrait jamais plus.

Dasks se rapprocha d’Amy. Son visage était un livre

ouvert traduisant des émotions brutes, qui se reflétait sur la

surface vitrée. Dasks n’était pas sûr de reconnaître l’odeur

étrangère qu’il percevait en elle. Il savait qu’il n’aimait

guère ce parfum. Il se rapprocha encore plus et la huma

profondément.

Amy lui lança un regard sévère.

« Je ne suis pas ton dîner », lâcha-t-elle.

Il plissa les paupières tout en la fixant. « Je connais cette

odeur ; c’est quelque part au fond de mon esprit, mais je ne

l’ai jamais sentie auparavant. C’est l’odeur de la tromperie. »

Amy blêmit et s’agita, mal à l’aise.

Dasks pouvait à présent percevoir de la peur. Il sentait

sa solitude, sa tristesse, et s’en étonnait. Elle avait peur de

lui… non, pas de lui physiquement. Elle avait juste peur.

Spontanément, ses mains se portèrent à son visage et il lui

caressa la joue. Des gouttelettes d’humidité pénétrèrent de sa

peau dans la sienne. Elles furent aussitôt absorbées, sous ses

yeux. Amy se calma instantanément. Il fut étonné lorsqu’elle

s’appuya contre son torse. Des bras fins enlacèrent sa taille.

Sa joue était tiède contre sa peau. Quelque chose dans ses

sécrétions avait dû l’attirer vers lui pour y chercher refuge.

Intéressant.

Dasks aimait sa façon de se blottir contre lui. Et, bien

qu’elles restent conflictuelles, ses émotions s’apaisèrent


57

durant leur étreinte. Elle était si tiède et si minuscule. Dasks

sentit son envie de s’accoupler avec elle grandir. Il leva la

main et effleura ses cheveux. Ils étaient ébouriffés et

rugueux, les mèches étaient collées les unes avec les autres

et le nez de Dasks se fronça. Le ventre d’Amy produisit un

curieux grognement. Sa petite femelle avait besoin de se

laver et de manger. C’était à lui de prévenir ses moindres

besoins.

« Viens avec moi », fit Dasks en lui prenant la main.

Il conduisit Amy dans une petite pièce.

Dasks demanda que la lumière s’allume, sachant que si

la pièce restait sombre elle serait incapable de voir. Il sourit

en l’entendant étouffer un cri de surprise face à la vue qui

s’offrait à elle. C’était la salle où ils se lavaient.

L’hologramme représentait un lointain bassin à l’eau claire,

d’un bleu vert intense, entouré d’une multitude de végétation

éclatante. L’original se trouvait là-bas, sur sa planète. Amy

s’avança à pas mesurés, sa main toucha l’une des fougères

rouges et il aperçut un léger sourire. Elle se baissa pour

humer une fleur d’Effie. L’eau coulait et Dasks commença à

se déshabiller. Lorsqu’Amy se retourna et le vit nu, elle

poussa un cri et plaça sa main devant ses yeux pour les

couvrir.

« Les humains se lavent-ils habillés ? » demanda-t-il.

« Ils se lavent seuls », marmonna-t-elle.

Amy écarta très légèrement les doigts et ses yeux

parcoururent son corps, de la tête aux pieds, en s’arrêtant un

long moment sur le symbole de sa masculinité. Dasks sourit.

Il pouvait percevoir un frisson d’attirance. Elle aimait ce

qu’elle voyait et, cette fois, il savait qu’il était lui-même à


58

l’origine de l’odeur qui lui montait aux narines. Elle était

très agréable et excitante à respirer.

« Pas tout de suite », dit-il. « Je veux voir si tu as des

blessures. Les eaux curatives soigneront tes petites maladies.

Mais n’en bois pas, les produits chimiques te rendraient

malade. Nous les avons mis au point sur Dargon, pour

chasser les Slocks qui ne cessaient d’entrer dans nos bassins

de nettoyage et essayaient de nous mordre les orteils. Elles

guérissent les femelles humaines après leur accouplement

avec un Castien. »

« Est-ce que ça guérit n’importe quoi ? »

Dasks l’observa. Elle semblait si pleine d’espoir qu’il en

eut mal au cœur. « Presque toutes les maladies. Nos femmes

ont été empoisonnées par les Toniens il y a presque quatre

cents ans de cela. Nous avons compris que les eaux curatives

n’auraient pas pu les sauver. »

Le regard d’Amy s’assombrit.

Dasks entra dans l’eau. Elle resta debout, de toute

évidence encore indécise. Quelque chose bataillait à

l’intérieur d’elle-même. Il y avait à la fois tant d’espoir et

tant de crainte d’être déçue. Contre quoi luttait-elle donc ?

Ses épaules étaient droites, déterminées. Une odeur de

Très lentement, les haillons qu’elle portait commencèrent à

tomber sur le sol. Chaque morceau soulevait une fine couche

de poussière en atteignant le sol. Dire que son corps était

crasseux serait très poli. La majeure partie était aussi grise

que la Terre. La crasse s’était logée entre ses orteils, qu’elle

dévoila en libérant ses petits pieds. Une fine couche de poils

blonds couvrait le bas de ses jambes, et autour de son sexe se

trouvaient des poils plus sombres et plus drus. Intéressant


59

Dasks était presque sans poil. Les poils sont-ils une espèce

de cuirasse femelle ?

La perfection du corps qu’il avait devant les yeux était

difficile à croire. Sale, elle l’était peut-être, mais belle,

assurément. Ses courbes soulignaient son harmonie. Ses

jambes étaient longues et fines, de même que ses bras. Ses

petites mains coururent à son sexe pour le recouvrir. Dasks

sourit. Il n’y avait rien à couvrir ; il savait que son sexe était

à l’intérieur, attendant sa venue. Elle est si fine. Il devrait

s’assurer qu’elle ne connaisse plus jamais la faim. Un grand

sentiment de protection l’envahit à nouveau.

Non sans anxiété, elle s’avança, ses bras croisés devant

les collines rondes et appétissantes que Dasks savait être des

seins. Ils rebondissaient légèrement quand elle approcha et

semblaient gros par rapport à sa silhouette frêle. Ils étaient

aussi blancs que la neige dont il avait vu des images, et

surpassaient de loin les fleurs d’Effie. Il avait vu ses tétons

roses et poussiéreux et sa bouche éprouva un soudain besoin

de les sucer et d’en lécher les mamelons.

Amy descendit dans les eaux fumantes. Elle gémit et

Dasks reconnut que c’était un son enchanteur. Elle s’enfonça

jusqu’à ce qu’elle soit couverte jusqu’au cou. L’eau se mit à

pétiller autour d’elle et tourbillonna tout en la nettoyant. Elle

coulait en décrivant des cercles autour de son corps, la

faisant à la fois rire et tressaillir. Elle eut l’air surprise et

abasourdie par les bulles qui frottaient ses cuisses laiteuses.

« Eh. Qu’est-ce qui se passe ? » s’écria-t-elle tandis que

l’intensité du mouvement circulaire augmentait

considérablement et tournoyait de plus en plus haut jusque

sous son menton.


60

Dasks l’attira contre lui aussitôt qu’il sentit son

angoisse. Pour une raison qui lui échappait, l’eau lui faisait

peur. « Tout va bien. Tu es en train d’être nettoyée. » Elle

paraissait si fragile dans ses bras.

« L’eau me lave d’elle-même ? »

Elle était incrédule et Dasks sentit qu’elle se mettait sur

la pointe des pieds en essayant de fuir cette intrusion.

« Bien sûr. Comment te laverais-tu sinon ? »

Soudain, Amy étouffa un petit cri. Un faible « hiii »

s’échappa de ses lèvres et elle resta immobile, les yeux

écarquillés. « J’ai été visitée par l’eau ; elle est entrée dans

mon… dans mon… Oh, mon Dieu ! »

Dasks gloussa lorsqu’elle serra fermement les jambes.

« Quelle chanceuse, cette eau. Maintenant immerge-toi

complètement pour que l’eau finisse son travail, puis tu

pourras manger. Prends ta respiration. »

Amy prit une faible inspiration et Dasks la poussa sous

l’eau. Amy se débattit mais Dasks la maintenait tandis que

l’eau s’attaquait à ses cheveux de paille. Ses mèches

revinrent à la vie en grésillant tout autour de sa tête. Il sentait

qu’il l’agaçait, mais ce n’était pas un sentiment très vivace et

il ne s’en inquiéta pas. Après tout, c’était dans son intérêt.

Juste avant qu’elle n’ait à nouveau besoin de respirer, il la

relâcha.

Elle jaillit et inspira bruyamment une grande goulée

d’air. Ses mains se portèrent à son nez et elle éternua

plusieurs fois. Puis elle tira sur ses oreilles.

Peut-être aurait-il dû la prévenir que l’eau la nettoierait

partout. Dasks l’immergea à nouveau. Elle arrêta de se

débattre et bientôt, l’eau s’apaisa et cessa de tourbillonner.


61

Dasks la libéra. Quand elle se redressa, ses yeux étaient

ouverts et elle avait une expression médusée sur le visage.

« Dasks ? »

« Oui. »

« L’eau, euh, elle m’a rasée. Euh, partout. »

« J’ai bien peur que les mâles castiens n’aient pas de

poils, à part sur la tête. Ils nous tirailleraient ou resteraient

accrochés dans l’armure. L’eau a dû les considérer comme

de la saleté. »

Vivement, Amy tendit la main vers sa tête pour toucher

ses cheveux. Ils étaient plus longs quand ils n’étaient plus

aussi emmêlés, et bien plus sombres. Elle poussa un soupir

de soulagement. « Pourquoi avez-vous des cheveux sur la

tête mais pas de poils sur le corps ? »

« Ça remonte aux temps anciens », dit-il en haussant les

épaules. « Je crois que c’est l’équivalent des dents de sagesse

chez les humains. À une époque ils étaient nécessaires, mais

la nature ne veut pas se résoudre à tout abandonner. J’espère

que tu n’étais pas trop attachée aux poils que tu avais à ces

endroits. Ils ne repousseront pas. »

« Jamais ? »

« Non. »

« Comment le sais-tu ? »

« Il y a quelques femelles humaines sur Dargon. Le fils

de Cobra, Rask, s’est uni à l’une d’entre elles et a expliqué

quelques petites choses aux autres guerriers avant notre

départ. Maintenant que nos eaux curatives t’ont soignée, tu

n’auras plus jamais la même maladie. »

« Tu veux dire que Lisa n’aura plus jamais de rhume ?

Comme un vaccin ? »


62

Dasks connaissait ce mot et il hocha la tête. « Oui, et

Leah ne souffrira jamais plus du même mal. Cependant, des

os guéris peuvent être cassés mais sont réparés assez

facilement par un compagnon ou par un guerrier adulte s’il

s’agit d’un enfant. Tu n’auras plus jamais de poils là où les

femelles humaines en ont normalement. »

Heureusement, elle ne sembla pas en être affectée,

simplement curieuse à ce sujet.

Amy paraissait s’examiner car elle restait immobile.

Dasks sentit ses mains bouger sous l’eau près de son sein

gauche. Pendant un moment elle sourit, l’espoir jaillit

retomba brutalement. Le sourire fut remplacé par de la

tristesse. Il le vit et le ressentit en même temps.

« Amy ? »

Elle prit une profonde inspiration et sembla à nouveau

joviale, mais il savait que c’était un sourire forcé.

« Et bien, je suis visiblement propre. »

« Qu’est-ce qui ne va pas ? » demanda-t-il.

« Rien », murmura-t-elle. Elle baissa la tête pour

dissimuler ses yeux.

Dasks n’avait jamais senti ce nouveau parfum. Il le

comprit lorsque l’odeur assaillit ses sens. Elle lui mentait, et

non seulement était-elle triste, mais elle avait peur.

* * * *

Dasks passa sa main sur le panneau de contrôle. Une

série de cliquetis et de petits sifflements se fit entendre. Le

bruit provenait de ses empreintes. Aucune autre main sur le

panneau de la porte ne produirait le même son, tous étaient

uniques. C’était ainsi que Talsk pouvait l’identifier comme


63

son compagnon d’armes. La porte était solide, garantissant

l’intimité. Les émotions d’une personne lui appartenaient en

propre, dans le sanctuaire de sa chambre.

Talsk parut tout échevelé lorsque la porte coulissa.

Dasks regarda derrière lui. Meg était profondément

endormie dans le lit de Talsk. Dasks pouvait sentir une odeur

différente sur son compagnon d’armes. C’était comme si

Meg faisait partie de lui, comme si son sang coulait dans ses

veines. Et parce que le sang de Talsk coulait dans celles de

Dasks, il sentit un soudain élan de protection vis-à-vis de la

femme. Si la femme mourait, Talsk mourrait aussi.

« Tu t’es accouplé », fit Dasks d’un air surpris.

« Déjà ? »

Talsk l’entraîna dans la chambre et la porte se referma.

« C’était »

Les yeux de Dasks s’agrandirent. On aurait dit que

Talsk avait envie de bondir dans tous les sens. Dasks renifla

l’air et se renfrogna. Il se dirigea vers Meg. Il y avait du sang

sur le lit.

« Elle est blessée. »

Talsk le rejoignit et lui fit signe de parler moins fort.

« Je l’ai marquée. Regarde. »

Avec beaucoup de tendresse, Talsk retourna légèrement

Meg pour que Dasks puisse voir son dos. Sur son omoplate

gauche se trouvait la marque que Talsk portait au visage, sur

son armure. La marque était déjà guérie et rayonnait d’une

lueur verte. Elle était parfaite.

« C’est toi qui as fait ça ? » demanda Dasks.

« Avec mes crocs. »

« Ça ne lui a pas fait mal ? »


64

« Au début. Souviens-toi de mordre Amy avant de la

marquer. Il n’y aura pas de douleur si tu la mords et qu’elle

reste totalement immobile. »

« Pourquoi tout ce sang alors ? Elle est guérie. »

« Meg m’a dit que les mâles castiens avaient plus

d’endurance que les mâles humains. Elle était trop fatiguée

pour aller jusqu’aux eaux curatives une deuxième fois après

s’être lavée, alors que je lui ai ramené un morceau de drap et

je l’ai lavée pendant qu’elle dormait. Je n’ai pas eu le cœur

de la réveiller pour que le lit puisse changer ses draps. Elle

est si parfaite quand elle dort. »

Dasks avait des yeux ronds comme des billes. Son

compagnon d’armes était fou amoureux !

Talsk fit courir une main attentionnée sur le méli-mélo

élastique de boucles rousses propres. Dasks remarqua que la

femme présentait toujours une myriade de minuscules taches

brunes sur le nez et les joues. Elles étaient mignonnes. Les

Castiens n’avaient pas de telles marques et Dasks passa tout

doucement un doigt sur sa peau.

« Meg appelle ça des taches de rousseur. »

Lorsque Talsk regarda Dasks, ses yeux étaient

rayonnants de bonheur. Un élan impressionnant d’affection

pour cette femme émanait de Talsk. Non, c’était bien plus

que de l’affection. Cette émotion était… un lien

indestructible. Dasks sentit ses tripes se tordre. Il avait envie

de ressentir la même chose envers sa femelle.

« Donne-lui du temps », lui dit Talsk.

Dasks savait que ses émotions diffusaient une odeur

forte. Talsk les détectait facilement.

« Meg m’a dit que tu avais tué des mâles humains

devant ta femelle et que ça lui avait fait peur. »


65

« Je l’ai sauvée », s’écria Dasks.

Meg remua et fronça les sourcils dans son sommeil, elle

marmonna quelque chose d’un air apeuré.

Talsk sauta au bas du lit, prit le bras de Dasks et

l’entraîna plus loin. Talsk gronda.

« Ta colère lui fait peur », fit Talsk d’un ton sec.

« Je ne suis pas furieux contre elle. Tu sais que je ne lui

ferais jamais de mal »

« Pourquoi es-tu ici au fait ? Tu ne devrais pas être en

train d’essayer avec Amy ? »

« Cobra veut qu’on lui amène la mère des trois enfants,

avec ses rejetons. Les petites femelles t’aiment bien. Ce

serait mieux que tu viennes. »

Talsk changea radicalement d’attitude et il sourit. « Meg

m’a promis de me donner une petite femelle. Je veux être

père. J’ai hâte de voir comment un enfant de cette taille

arrive au monde. »

« Je crois que les bébés sont plus petits », dit Dasks,

sans pourtant en avoir jamais vu.

« Plus petits ? » s’exclama Talsk, surpris. « Impossible

d’imaginer quelque chose plus petit que Lisa. »

Dasks haussa les épaules. « Viens, Cobra nous attend. »

Ils laissèrent Meg endormie et allèrent chercher la

femme et ses enfants. Peu de temps après, ils se trouvaient

dans la vaste cabine où Cobra gérait ses affaires.

La femme qui se tenait devant Dasks était fine mais plus

grande qu’Amy. De longs cheveux blonds couraient jusqu’à

sa taille. Elle était de toute beauté. Leah était debout, droite

comme un i, devant Cobra. Ses yeux, de la même couleur

que ceux de son fils, étaient rivés sur le chef.


66

Dasks admira le courage de la femme. Cobra avait trois

mille ans, il ne s’était jamais uni avec une femelle mais avait

un fils, Rask. Rask s’était occupé de Dargon en l’absence de

son père. Cobra n’était pas le chef de l’armée castienne pour

rien. Leur commandant était juste mais sévère.

« J’ai donné ma parole que si tu vivais, ton fils pourrait

rester à bord avec toi. Il est cependant honnête de te dire

qu’il n’a aucune protection », annonça Cobra.

Leah pâlit et Dasks perçut son angoisse.

« Vos hommes lui feront-ils du mal ? » demanda-t-elle

calmement.

« Non. Mes guerriers ne le toucheront pas. Ils

connaissent son odeur et se sont souvenus que c’était un

enfant. »

« Souvenu ? » demanda Leah, visiblement troublée.

« Nos souvenirs olfactifs remontent à des centaines de

milliers d’années. Parce que nous sommes tous connectés

émotionnellement, si un mâle castien a connu l’odeur de

quelque chose, tous les mâles castiens se souviendront aussi

de cette odeur en la percevant. Il en va de même pour le

mensonge. La plupart des Castiens n’en ont jamais entendu,

à l’exception de certains. Une odeur de tromperie ou de quoi

que ce soit d’inhabituel et nous le détectons aussitôt. Il est

capital que tu ne me mentes jamais », l’avertit Cobra.

La femme émettait à présent une forte contrariété.

« Je ne suis pas une menteuse. Je veux juste m’assurer

qu’il ne sera fait aucun mal à mon fils », fit-elle d’un ton sec.

« Un guerrier castien ne tuerait jamais un enfant. Quand

je dis qu’il sera sans protection, je veux dire que nous serons

dans l’incapacité de le protéger si nous sommes attaqués.

Nous sommes en guerre contre les Toniens, qui n’ont aucun


67

guerrier peut protéger un enfant femelle, mais pas un mâle.

Mes hommes s’accouplent avec les femmes qu’ils ont

ramenées à bord pour assurer leur propre protection. Seul un

compagnon, la famille de son mâle et son compagnon

d’armes, peuvent protéger une femelle adulte. Ils sont liés

par le sang. »

Dasks changea la position de ses pieds, et Cobra lui

lança un regard perçant. Dasks eut un hochement de tête en

signe de compréhension. Pour le bien d’Amy, il devait

s’accoupler avec elle. C’était son seul moyen d’être à l’abri

du danger. Une fois unis, ils seraient connectés et ainsi il

serait averti si elle devait connaître des difficultés. Peu

importe où elle se trouve ou qu’elle soit loin, il pourrait

ressentir ses états émotionnels et physiques.

« Pourquoi ne pouvez-vous pas le protéger ? » demanda

Leah.

Dasks entendit la vibration suppliante de sa voix.

Cobra leva la main vers le visage de la femme. Le revers

de ses doigts brilla quand il l’effleura. Curieusement, la

femme ne fut pas apaisée. Cobra se renfrogna. De toute

évidence, il ne s’y attendait pas.

« Ce n’est pas que nous ne le voulons pas, mais nous ne

le pouvons pas », expliqua Cobra. « Un mâle castien a sa

propre armure protective. Nous sommes nés avec. Un

existe aucune trace. »

« Mais mon fils n’est pas castien. »

« Exactement. »

« Vous dites ça comme si c’était un facteur primordial,

alors que ce qui importe, c’est qu’il est à bord de votre


68

vaisseau et que vous en êtes responsable », tempêta Leah.

« Alors arrêtez de me dire pourquoi vous ne pouvez le

garder sain et sauf et commencez à me dire comment vous le

protégerez. »

Elle a du cran. La dernière personne à avoir tenu tête à

Cobra était presque passée à travers un mur d’acier.

« Talsk, emmenez les enfants de cette femelle à une

personne qu’ils connaissent », dit Cobra.

Leah attrapa ses filles et son fils et ramena les trois

enfants vers elle. « Ce sont mes enfants. Chacun d’entre eux.

Vous nous prenez tous les quatre ou vous nous laissez partir,

ensemble », exigea-t-elle.

Cobra soupira bruyamment lorsque la femme le défia,

une lueur dans le regard.

Dasks s’amusa de l’apparente frustration de son chef,

ainsi que de l’attirance qu’il sentait chez Cobra envers cette

femme. Les femelles étaient trop importantes pour qu’on les

relâche. Leah était de toute évidence fertile et de trop grande

valeur pour être abandonnée. La mère ne laisserait jamais

son fils seul sur une planète à l’agonie. Pas étonnant que la

caresse de Cobra n’ait pas ému Leah ; son amour pour

l’enfant était comme une étoile brûlante d’émotions, qui

brillait bien trop vivement pour être assombrie par quelques

sécrétions.

Cobra baissa les yeux sur l’enfant mâle. Il s’accroupit au

niveau de son visage. Le petit mâle se tenait aussi droit que

sa mère.

« On m’a dit que c’était toi qui avait empêché mon

guerrier d’emporter sa trouvaille », dit Cobra.

Dasks se raidit.


69

« C’est une femme, pas une trouvaille, et oui, je l’ai

libérée », répondit Craig.

Dasks fut impressionné par la réponse du garçon.

« Il existe des créatures que nous combattons, telles que

tu n’en as jamais vu », dit Cobra.

« Je n’en ai jamais vu des comme vous avant, et je ne

suis pas mort », répliqua Craig.

« Mon armure ne peut pas te protéger », le prévint

Cobra.

« Alors apprenez-moi à être un guerrier comme vous »,

lança Craig, plein d’espoir, les yeux brillant d’un vif

enthousiasme.

Dasks sentait que le petit mâle n’avait pas peur de

Cobra, mais plutôt qu’il était fasciné.

La demande de Craig étonna Dasks ; l’enfant ne pourrait

jamais être un véritable guerrier digne de ce nom. La requête

ne sembla pas déstabiliser Cobra. L’enfant était sérieux.

L’idée était amusante ; il était si petit et sans défense. Mais

Dasks perçut nettement que Cobra le comprenait

sentait le respect craintif qu’il inspirait au petit mâle. Leur

chef avait trouvé un moyen évident de toucher la mère en

passant par l’enfant.

« Si je t’apprends à combattre comme un Castien, alors

tu seras mon guerrier. Tu devras m’obéir à moi avant les

autres, y compris la mère », dit Cobra.

Craig leva les yeux vers sa mère, sourit d’un air penaud

et haussa les épaules. « Désolé, maman. »

Talsk et Dasks étouffèrent un petit rire.

Le petit mâle avait l’esprit aussi vif que sa mère. Peut-

être que les guerriers ne pouvaient pas le protéger, mais

Dasks décida qu’en cas de besoin, il l’aiderait à se défendre.


70

Il était vraiment dommage que le petit mâle ne puisse jamais

avoir de compagnon d’armes pour surveiller ses arrières.

Aucun Castien ne prendrait un tel risque. Cobra se releva. Il

braqua le regard sur Dasks.

« Emmène-les à ma cabine », dit Cobra.

Dasks était médusé, mais il ne dit rien. L’odeur

d’attirance impérieuse qui se dégageait de Cobra était

palpable. Talsk et lui accompagnèrent la femme et ses

enfants.


71

Chapitre 4

« Pourquoi est-ce que je ne peux pas sortir de ta

cabine ? » demanda Amy à Dasks.

Cela faisait une semaine qu’Amy était à bord du

vaisseau. Dasks l’avait séquestrée tout ce temps. Elle

commençait vraiment à souffrir d’isolement. La curiosité

pour les jeux holographiques était vite passée. Dasks lui

avait présenté une chose très bizarre et inquiétante, un

Glosh, du nom d’Ebbie. Apparemment il l’avait réactivée. Il

disait qu’Ebbie était son ancien animal de compagnie et qu’il

pensait qu’elle l’apprécierait. Ce n’était pas le cas. On aurait

dit un Ewok doté de crocs, qui marchait à quatre pattes. Ses

yeux rouges luisaient dans le noir et ne se fermaient jamais.

Il lui donnait la chair de poule à chaque fois qu’il grondait et

grognait. Elle avoua qu’elle avait peur de rester seule avec

Amy avait beaucoup dormi. Elle en avait déduit que tout

son corps devait avoir besoin de sommeil. Les eaux

curatives l’accueillaient deux fois par jour. À chaque fois la

boule dans son sein rapetissait un tout petit peu mais ne

disparaissait jamais totalement. Au fond d’elle-même, Amy

savait que les eaux ne la guériraient pas, mais que peut-être

elles prolongeraient un peu sa durée de vie.


72

Amy et Dasks étaient assis ensemble sur des nattes

plates, au sol, devant une petite table. Le sol était doux ; ils

n’avaient pas besoin d’oreillers ni de rembourrage. Amy

avait mangé plus qu’elle ne l’avait fait depuis bien

longtemps. Son ventre était tout rond et bien rempli. Les

Castiens étaient venus préparés. Leurs duplicateurs avaient

été programmés en fonction de la cuisine terrienne, en plus

des plats castiens habituels. La maigreur commençait à

quitter ses joues creuses au fur et à mesure qu’elle se

régalait. Elle n’avait pas grand-chose d’autre à faire que

manger. Amy commençait à se sentir comme Gretel et se

demandait si on l’engraissait. Dasks avait dit vrai. Depuis

qu’elle était montée à bord du vaisseau, elle n’avait pas eu

froid ni faim. Elle se sentait juste dévorée par un ennui

mortel. Elle n’aimait pas rester seule avec ses pensées.

Qu’elles soient belles, mauvaises ou déprimantes.

Dasks était très occupé à bord du vaisseau et partait

souvent. Ses premiers essais pour la séduire avaient échoué

lamentablement et elle se demandait si c’en était la raison.

Dasks semblait avoir des connaissances limitées en matière

de sexe et de femmes. Il voulait qu’elle lui explique les

différentes parties de son corps mais elle avait fini par être

gênée par ses perpétuelles questions intrusives. Il lui avait dit

c’était une conspiration pour en apprendre le plus possible.

Amy se posait de plus en plus de questions sur cette race de

guerriers mâles. Tout récemment, elle avait découvert que

Dasks avait appris comment s’emboîtaient un mâle et une

femelle. Son innocence était rafraîchissante après la

bestialité lubrique des chasseurs sur Terre.


73

Amy aimait penser que l’on avait plusieurs chances

dans la vie, même si ce n’était que pour peu de temps. Elle

avait décidé qu’elle laisserait Dasks s’accoupler avec elle.

Quel risque prenait-elle ? Il était beau et prenait grand soin

de son bien-être. Quand il l’effleurait, elle avait envie d’en

sentir plus. Il savait quand elle avait peur dans la nuit et il la

prenait dans ses bras. Quand elle se sentait seule, il lui offrait

du réconfort. C’était étrange la façon qu’il avait de toujours

savoir quelles étaient ses émotions. Dasks lui avait expliqué

que son peuple fonctionnait ainsi

les émotions. Ainsi, ils pouvaient travailler côte à côte sans

besoins les uns des autres. Dasks avait réveillé Amy de

quelques cauchemars. Comme elle ne pouvait pas dormir la

nuit après ces horribles rêves, il lui parlait de sa planète

bien-aimée. Amy apprit que les eaux y étaient toujours

empoisonnées et il lui parla d’une planète appelée Dargon,

où il avait passé quelque temps en exil après que Cobra eut

été provisoirement éloigné du pouvoir.

Depuis que Cobra était redevenu chef, la planète Dargon

avait été garnie d’hologrammes encore plus extraordinaires

en attendant qu’ils puissent récolter des créatures sur Terre.

Dasks était si enthousiaste et spontané. Amy n’avait jamais

rencontré quelqu’un comme lui et commençait à éprouver de

l’affection. Amy pourrait lui dire après leur accouplement

qu’elle allait mourir et que les eaux curatives ne guériraient

pas son cancer du sein. La tumeur avait réduit encore un peu

plus aujourd’hui. Elle se sentait mal de le lui cacher pour

l’instant mais cela faisait longtemps qu’elle ne s’était pas

vraiment sentie aussi heureuse. Pourquoi ne pas se donner la


74

chance de vivre un amour passager, ou même une certaine

tendresse ? Quel mal pouvait-il y avoir à cela ?

« Tu ne peux pas te promener parce que toutes les

femelles à bord rendent les hommes un peu trop imbus

d’eux-mêmes avec toutes ces odeurs féminines. C’est plus

qu’on en peut supporter et il est difficile pour nous de nous

concentrer si nous entrons en rut à tout moment. Ça va ça

vient et Cobra veut que les femmes soient à l’abri. Nous

n’avons malheureusement trouvé que quarante femelles

jusqu’à présent, dont dix sont trop jeunes pour s’accoupler.

Il y a deux cents guerriers à bord et bien plus sur Dargon et

ma planète maternelle. Comme toi, de nombreuses femmes

ont vécu terrées, dans la peur. »

« Es-tu en train de dire que je serai violée si tu me

laisses sortir ? » demanda Amy, abasourdie.

« Violée, qu’est-ce que c’est ? »

Amy cligna des yeux. Il avait pourtant l’air sincère.

« C’est quand un homme ou un mâle force une femme à

l’accepter en elle. »

« Cobra a juste expliqué à ses guerriers qui avaient

trouvé une femme comment s’accoupler et qu’est-ce qui

allait où. Il a spécifié que les femmes devaient être

consentantes. »

« Hein ? Tu es en train de me dire que ces hommes

n’ont aucune idée de la façon dont marche le sexe avec les

femmes ? Ils n’ont jamais assisté à aucune relation sexuelle

avant ? Toi non plus ? »

« Les femelles ont disparu de notre planète depuis des

siècles. La plupart des Castiens sur ce vaisseau ont le même

âge que moi et viennent juste d’atteindre leur maturité


75

sexuelle. Il n’y a aucune femelle d’aucune sorte sur la

planète où j’ai grandi », souligna-t-il.

« Pas même des animaux ? »

« Rien. L’eau empoisonnée a tué toutes les femelles. »

« Alors pourquoi ne puis-je pas me balader si les autres

ne savent pas ce qui va où ? »

« Tu ne serais pas blessée volontairement. Les mâles

castiens sont bien plus lourds que les femelles. Ton odeur est

comme un aphrodisiaque pour nous. Tu pourrais être

plaquée et, tandis qu’un mâle chercherait désespérément à

comprendre ce qui va où, il te mordrait pour te soumettre.

Peut-être par plus d’un mâle. »

« Me mordrait ? » Elle avait glapi plus que parlé.

« C’est ainsi que nous préparons les femelles pour

l’accouplement. »

« Je ne comprends pas. Tu veux dire que vous nous

mordez jusqu’à ce que nous nous tenions tranquilles ? C’est

si cruel. »

« Une morsure te rendra plus docile pour notre rituel

d’accouplement. Il y a une hormone que nos dents sécrètent

quand nous sommes excités et qui nous rend acceptables par

vous. Elle apaise les femmes pour qu’elles ne ressentent

aucune douleur. Pendant notre union, tu seras marquée

comme étant mienne. »

« Attends une minute. Tu veux dire comme une marque

de possession ? »

« C’est bien plus que cela. La marque nous connecte. »

« Nous connecte comment ? »

« Quand un Castien s’accouple, c’est pour la vie. »

Amy grimaça. « Mais tu as quatre cents ans. Je serai

morte bien avant de vieillesse ou, euh, d’autre chose. »


76

« Si tu m’autorises à te marquer, je te donnerai mon

cadeau

d’un époux à sa jeune épouse. Aussi longtemps que je vivrai,

tu vivras. Les Castiens peuvent vivre plusieurs milliers

d’années. »

« Et si je meurs ? »

« Alors je mourrai », dit-il simplement, en souriant.

Amy sentit le sang quitter son visage. Dasks mourrait si

nous nous accouplions. Dieu merci elle ne l’avait pas encore

laissé s’unir à elle avant d’apprendre ça. Elle lui aurait donné

une condamnation à mort en tant que « cadeau ». À présent,

elle se rendait compte qu’elle ne pourrait jamais s’accoupler

avec lui. C’était injuste ; elle avait été si proche d’un

semblant de bonheur, simplement pour se le voir dérobé.

Elle avait envie de pleurer devant une telle injustice. Dasks

comptait déjà beaucoup pour elle. Elle aimait sa compagnie.

Dasks lui prit la main. Comme toujours quand elle se

sentait inquiète ou angoissée, son contact la calma. Qu’il

sache ainsi systématiquement quand elle avait besoin de

réconfort l’agaçait un peu. Les sécrétions de sa peau

pénétraient la sienne au moindre frôlement. Amy gémit, elle

avait désespérément envie de se blottir dans ses bras.

« Veux-tu t’accoupler avec moi ? » demanda-t-il.

Il semblait si jeune pour quelqu’un de si vieux.

Pourtant, il lui avait expliqué qu’il venait seulement

d’atteindre l’âge adulte. Ce n’était que lorsqu’un Castien

pouvait se reproduire qu’on le considérait adulte.

« J’ai besoin de temps pour y penser », dit-elle de façon

évasive. « Un Castien peut-il avoir des relations sexuelles

avec une femelle sans s’unir à elle pour toujours ? Sans la

marquer comme sienne ? »


77

« Oui, c’est possible », répondit-il. « J’ai appris que nos

propres femmes pouvaient autoriser un mâle à libérer sa

semence, mais que si elle sentait qu’il n’était pas prêt pour

elle, elle pouvait le repousser et l’accouplement n’était pas

validé. Cobra est vieux de trois mille ans. Il a un fils, Rask.

Cobra et la mère de Rask ne se sont jamais unis. »

Le cœur d’Amy manqua un battement. « Je ne peux pas

te repousser. Tu me blesserais. »

« Jamais. Un guerrier castien ne ferait jamais de mal à

une femelle volontairement. Vous nous donnez la vie. Si

notre armure sent que ce serait dangereux pour une femelle,

elle ne se lève pas. C’est alors que nous sommes les plus

vulnérables. Tu m’as frappé un jour, tu t’en souviens ? Tu

étais blessée. La deuxième fois que tu as frappé mon armure,

elle s’est aussitôt souvenue à quel point tu étais fragile. »

« Me laisseras-tu du temps ? » demanda Amy.

« Promets-tu de ne pas me marquer, de ne pas t’unir

entièrement à moi ? »

« C’est important pour toi ? » demanda Dasks.

« C’est très important pour moi. »

« Je sens que tu m’apprécies », dit Dasks, l’air troublé.

« Mais il y a autre chose. »

« Tu veux avoir des relations, oui ou non ? » répliqua

Amy.

« Bien sûr », répondit-il.

Amy se dit qu’une approche directe devrait faire

l’affaire. Elle le prit par la main et l’entraîna vers le lit

rabaissé. Elle s’était émerveillée de la taille du lit et de sa

solidité. Elle avait été encore plus ravie en constatant que le

lit se faisait tout seul chaque matin, les draps roulant vers le

bas et de nouveaux apparaissant. Amy s’étendit sur les draps


78

frais et propres, s’allongea et attendit. Elle leva les yeux vers

Dasks qui s’allongea et attendit lui aussi.

Un long moment s’écoula ainsi. Amy pouvait entendre

sa respiration. Dasks la regarda. Amy fronça les sourcils.

« Euh, Dasks ? Normalement l’homme commence par

toucher la femme. »

« Okay… où ? »

Amy se redressa et baissa les yeux vers lui.

Dasks était allongé sans bouger, les bras ballants, la

respiration saccadée.

Amy se rendit compte qu’il n’avait aucune idée de ce

qu’il fallait faire. L’explication qu’il avait reçue quant à ce

qui entrait où avait visiblement été très sommaire. Il était à

court de ressources. Voilà qui pourrait être intéressant. Amy

lui toucha le torse. Sa main glissa vers le bas et remonta sur

ses larges épaules. Le corps de Dasks était dépourvu de poils

et de tétons. Ses muscles étaient comme de l’acier. Il était

lisse, soyeux, et si dur ! C’était comme toucher une voiture

de course avec tous les chevaux rugissant sous le capot,

attendant d’être lancés. Sa langue éprouva l’envie piquante

de le lécher. Amy se pencha et embrassa sa gorge.

Dasks bondit.

« Est-ce que tu me goûtes ? » chuchota-t-il.

« Oui. » Son corps était sucré et il avait un goût exquis.

Sa bouche était pleine de l’arôme d’un banquet enivrant.

Quel raffinement.

« J’ai bon goût ? »

« Oui. » Son odeur était exaltante. La virilité absolue qui

émanait de lui était excitante et elle avait une envie folle de

le mordre à pleines dents.

« Je peux te goûter ? »


79

Les dents d’Amy le titillèrent et il bondit à nouveau

avant de se tenir à nouveau tranquille. Son front pressa

contre sa moiteur. Le bout de son nez était froid et elle le

frotta sur sa peau.

« Bien sûr. » Amy leva les yeux vers son visage et

tressaillit de surprise. Elle recula comme elle le put et dans

sa hâte faillit presque tomber du lit.

« Quoi ? »

Dasks se redressa vivement et tendit le bras vers elle.

Amy s’éloigna encore de quelques pas précipités.

« Tes dents, tes crocs sont sortis », martela-t-elle. Elle

ne l’avait jamais vu avec des crocs hormis quand il était en

armure. Dasks leva le doigt et effleura ses crocs d’ivoire.

« Je crois que c’est normal qu’ils soient sortis. »

« Et bien rétracte-les », ordonna-t-elle.

Dasks fronça les sourcils et se concentra. Son visage se

tordit en signe de profond effort. « Ils ne bougent pas. »

« Je t’ai dit que je ne voulais pas encore m’unir

définitivement. »

« Bon, ne panique pas. Je te promets de ne pas te

mordre. »

« Peut-être que nous ne devrions pas faire ça », fit Amy.

« Si, allons-y », répondit Dasks en criant presque.

Il fit glisser sa main le long de son bras nu.

« Je sens tes phéromones et elles me rendent fou. »

« C’est bien de ça que j’ai peur. »

Dasks se tint immobile. « Tu n’as pas peur de coucher

avec moi. Je peux sentir ton excitation sur tout ton corps. Tu

as peur que je m’unisse à toi pour de bon. Est-ce si

désagréable de m’imaginer comme compagnon ? Je te jure

que je ne te ferai jamais de mal. Je prendrai soin de toi et de


80

nos rejetons. Amy, tu es un cadeau. Je n’avais jamais cru

m’accoupler un jour ; à présent tu es à portée de main, ainsi

que la possibilité d’avoir une famille. S’il te plaît, désire-

moi. »

Amy s’effondra. Il avait l’air si découragé par ses

rebuffades. Ce n’était pas juste pour Dasks. Elle valait mieux

cruel. Après tout ce qu’il avait fait pour elle, elle jouait avec

ses nerfs. Dasks méritait la vérité. Amy jeta un coup d’œil

par la fenêtre. Une fois de plus, la planète était bombardée

par les flammes d’un feu destructeur. Elle était terrifiée à

l’idée d’être rejetée dans cet enfer qui s’étalait devant ses

yeux. Elle le voyait tous les jours par la fenêtre, qui la

narguait en lui rappelant sa duperie. Dehors, c’était le néant,

le vide. Si elle s’accouplait avec Dasks et le condamnait à

mort, elle serait aussi lamentable que la Terre et se sentirait

tout aussi vide.

Je ne prendrai pas ta vie.

« Je ne peux pas avoir de relations avec toi, Dasks. Et je

ne pourrai jamais m’unir à toi. Ni à aucun autre Castien. »

« Mais pourquoi ? »

« Tes eaux curatives ne peuvent pas guérir ce que j’ai.

J’espérais que ce serait le cas, j’y ai presque cru. Mais je ne

peux pas faire semblant à tes dépens. J’ai un cancer du sein,

Dasks. Je suis en train de mourir. Si tu t’accouples avec moi,

je te tuerai. »


81

Chapitre 5

Dasks regarda Amy, médusé. Il savait qu’elle disait la

vérité, car l’odeur en était écrasante. Au moment où elle le

lui avait dit, le parfum de tromperie et de mensonge avait

aussitôt disparu, comme si elle avait ôté une vieille

couverture crasseuse de son dos. Toute la semaine, il avait

senti ces odeurs détestables sur elle. C’était la seule chose

qui le retenait de la demander pour compagne. Ce ressenti

ainsi que son attitude n’avaient cessé de le repousser.

Quelque chose d’affreux luttait en elle jusqu’à aujourd’hui.

Enfin, pour une raison quelconque, elle avait décidé qu’elle

voulait

elle le tuerait.

Une fois ces odeurs disparues, les autres étaient plus

prégnantes. Une perte, elle ressentait une perte. Amy avait

voulu s’accoupler avec lui et devenir pleinement sa femelle.

Elle en avait eu envie et s’en était réjouie. Son changement

avait atténué les émotions plus rudes jusqu’à ce que son

désir ait pris corps. Mais elle avait refusé de lui faire du mal.

Dasks pouvait sentir son excitation, sa peur et sa colère face

à l’injustice. Amy entretenait d’autres pensées qui venaient

tourmenter ses émotions. Elle avait peur qu’il lui fasse

quelque chose

l’impression de le mériter.


82

« Je ne te ferai aucun mal, Amy », dit-il, en pleine

confusion.

Quand elle leva les yeux vers lui, il vit le sillon qu’une

larme avait laissé le long de sa joue pâle. Il était très rare

qu’elle laisse ses yeux couler devant lui. Lorsque de son

doigt il recueillit la larme, l’humidité s’enfonça dans sa

peau, le faisant sursauter. Quelle tristesse.

« Je sais que tu ne me ferais jamais de mal

physiquement, Dasks. Je ne te suis d’aucune utilité à présent.

Je ne peux pas m’accoupler avec toi ni avec aucun autre

Castien. Je suis inutile. Je préfère être morte qu’être rejetée

sur la Terre toute seule. C’était un rêve si doux d’imaginer

passer mes derniers jours dans tes bras. »

C’était bien ce qu’il avait ressenti. Il l’avait conquise.

Elle l’avait laissé entrer et à présent refermait la porte. Dasks

l’attira dans ses bras. « Je ne t’abandonnerai pas. Tu viens

toujours à Dargon avec moi. »

« Mais nous ne pourrons jamais nous unir », lui rappela-

t-elle.

Amy n’essaya même pas de s’éloigner de lui. La peau

de Dasks réagissait à ses émotions. Des sécrétions

circulaient de son corps vers le sien, essayant de l’apaiser. Sa

joue était collée à son torse. Sa main caressait sa peau nue,

pour tenter de la calmer, et Dasks avait toujours envie d’elle

quoi qu’il arrive. Elle se serra plus fort et le sentiment

délicieux d’être désirée l’assaillit.

« C’est quoi, ce cancer ? » demanda-t-il.

Amy lui prit la main et la posa sur son sein gauche. Elle

était douce et très agréable au toucher. Elle prit ses doigts et

les dirigea vers un endroit en particulier, jusqu’à ce que

Dasks sente une boule. À la seconde où ses doigts


83

l’effleurèrent, son armure se mit en alerte. Ce mal

représentait en effet une véritable menace pour la vie de sa

femelle. Dasks sentait que son armure s’efforçait de faire

quelque chose. Il savait qu’elle ne se refermerait pas tant

qu’il était si près, même si elle sentait la menace. Son

instinct de ne pas blesser une femelle était trop fort. Dasks

recula légèrement, et perçut immédiatement qu’elle se

sentait blessée.

« Dasks ? N’aie pas peur. Ce n’est pas contagieux ; je te

le promets. C’est une tumeur maligne. À part si nous nous

unissons, tu es hors de danger. Tu es si merveilleux et j’ai

tellement envie de toi. Plus tu libères tes sécrétions près de

moi, plus je te veux. Je sais que plus je suis bouleversée,

plus tu réagis. C’est comme une guerre entre émotions

contraires.

« S’il te plaît, j’aimerais vraiment faire l’amour avec toi

si tu me promets de ne pas t’unir à moi. Si tu ne peux pas me

le promettre, alors je ne le ferai pas. Ce n’est vraiment pas

juste et je suis désolée pour nous deux. Je te jure que je

t’aurais donné tout de moi si nous nous étions unis. »

Dasks sentit ses lèvres effleurer le côté de son cou. Il

pouvait sentir qu’elle disait la vérité. Cette maladie n’était

pas dangereuse pour lui. Il sentait aussi un autre besoin. Le

ressenti de ses émotions était si fort qu’il pouvait presque les

sentir dans sa bouche. Peut-être que les sécrétions le lui

permettaient. Son excitation était bien plus vive que celle du

simple plaisir sexuel, elle avait aussi besoin d’être

réconfortée. Dasks n’avait jamais eu de relations sexuelles.

Était-ce ce qui les connectait tant ? Se retrouver ensemble ?

« Je veux savoir comment calmer ton corps quand nous

sommes ensemble », dit-il.


84

Amy réprima un rire. C’était mignon.

« J’imagine que ce sera plutôt un calme déchaîné si nous

faisons l’amour. »

« Que signifie faire l’amour ? » demanda Dasks.

« C’est plus qu’un Castien en rut. Ou même qu’une

femelle excitée. C’est avoir envie de donner tout en prenant

ce que l’autre a à offrir, sans l’exiger. »

« Je veux te faire l’amour. »

Faire l’amour était important. Dasks pouvait le sentir.

Amy avait peur pour sa vie, elle avait besoin de sa force.

Dasks savait qu’il pourrait lui offrir son pouvoir. Il était un

guerrier sans peur. Contrarié, il savait que ce n’était pas la

même chose. Il ne pouvait pas la protéger contre quelque

chose qu’il ne pouvait vaincre. Dasks sentit les petites mains

d’Amy glisser le long de son corps. C’était agréable. Il se

demanda si elle éprouverait pareille douceur s’il lui faisait la

même chose. Dasks leva la main et il se mit à l’imiter. Son

corps était incroyablement souple. L’odeur de son excitation

s’accentua quand il la toucha. Dasks pouvait sentir la chaleur

jusque dans ses narines et elles frémirent. Ses lèvres se

rétractèrent pour laisser passer ses crocs qui semblaient

grossir. Dasks sentit un grondement sourd se former dans sa

gorge. Son sexe s’anima et Dasks s’immobilisa. Il baissa les

yeux. Dasks était abasourdi. Son sexe grandissait.

« Amy ? »

« Hmm. »

Sa bouche était posée contre son ventre.

« Je ne veux pas te faire peur, mais visiblement mes

crocs ne sont pas la seule chose qui grossit en moi quand je

suis excité. »

« Je vois ça. »


85

Elle n’avait pas l’air effrayée. C’était bon signe. Les

yeux de Dasks s’agrandirent en voyant ses lèvres continuer à

descendre. Dasks pouvait voir sa masculinité. Seigneur de

Dargon, elle était énorme. À sa place, il se serait enfui. Amy

ne s’enfuyait pas, et il ne sentait pas qu’elle soit

particulièrement choquée par ce qui lui arrivait. Comment

peut-elle rester si calme ? Le cœur de Dasks faillit s’arrêter

de battre dans sa poitrine lorsque sa bouche s’arrêta sur son

énorme érection. Il tressaillit, le souffle coupé. Ses mains

tremblaient. Dasks ne pouvait pas lui faire la même chose…

elle n’avait pas de sexe ! Qu’était-il censé faire ? De haut en

bas et de bas en haut, sa bouche glissait d’avant en arrière

sur lui, autour de lui. Dasks sentit que la literie se froissait et

se déchirait sous ses doigts. Sa langue le parcourait tout

entier, son corps frissonna.

Ce n’était comparable à rien de ce que Dasks avait déjà

senti auparavant. La petite langue d’Amy léchait son gland

en petits mouvements circulaires avant de l’enfoncer

profondément dans sa bouche. La douceur de velours de sa

petite bouche, mêlée à l’odeur qui résultait de son envie de

lui faire plaisir, était grisante. Lorsque la main d’Amy

rejoignit ses boules pour les caresser, Dasks fut submergé. Il

lui fallut toute sa concentration pour ne pas la jeter sur le dos

et s’allonger sur elle.

Les fesses parfaites d’Amy, rondes et belles, bougeaient

lentement tandis qu’elle le suçait. Dasks relâcha sa poigne,

destructrice pour le drap, et empoigna ses hanches. Elle le

repoussa pour qu’il s’allonge. Ses cheveux étaient juste

assez longs pour lui permettre de le balayer de façon

coquine. Dasks n’en était pas certain, mais il devina

instinctivement que l’accouplement ne s’arrêtait pas là.


86

« Amy ? »

Amy laissa son sexe et escalada sur Dasks. « Il n’y a que

si tu me marques que nous serons unis, n’est-ce pas ? »

« Oui. »

« Si tu jouis en moi, nous ne serons pas unis ? »

« Jouir ? »

« Libérer ta semence. »

Ma semence ? Visiblement, Cobra avait omis quelques

détails du processus rituel d’accouplement. « Nous ne serons

pas unis », dit-il non sans un certain trouble. « Pas à moins

que je te marque. »

« Ne me marque pas. »

Amy lança sa jambe par-dessus lui et s’assit un peu plus

haut que sa taille. Dasks n’avait jamais vu le sexe d’une

femelle et il se dit que tout devait être à l’intérieur. Amy

guida sa main jusqu’à ses lèvres. De ses doigts

précautionneux, il les effleura et les écarta. Un petit

bourgeon pointa sous ses doigts et, curieusement, il le

caressa. Amy produisit un petit son guttural. Elle aimait sa

caresse. Encouragé, le doigt de Dasks se mit à frotter le

délicat petit bourgeon. Elle se tortilla. Dasks glissa un doigt

à l’intérieur, au-delà de ses lèvres aguicheuses et de son

bourgeon. Dedans, c’était chaud et humide. Amy avait ses

propres sécrétions. Dasks savait qu’un humain pouvait

transpirer, mais là, c’était différent. Quand Dasks avait senti

sa bouche sur son sexe, il avait senti ses émotions à travers

sa salive. Ses sécrétions vaginales furent absorbées par sa

peau et l’envie primitive de Dasks monta en flèche.

Dasks glissa un autre doigt en elle. Ses parois internes

se refermèrent autour de lui et Amy gémit. De haut en bas,

elle bougea contre lui. Les sécrétions sur ses doigts la


87

rendaient encore plus humide. La bouche d’Amy s’ouvrit et

elle tressaillit. Une chaleur moite entourait ses doigts et

Dasks put sentir qu’elle jouissait. Il en fut rempli et il se

sentit consumé de désir. Le sexe de Dasks bondit et il sut

soudain qu’il voulait l’enfoncer en elle. Il voulait fourrer sa

magnifique érection si profondément en elle qu’elle hurlerait

de désir. Retirant ses doigts, Dasks la poussa plus bas, en

direction de son but. Elle se laissa faire bien volontiers.

Dasks grogna lorsqu’elle guida sa masculinité dans sa

chaleur humide. Oh Seigneur de Dargon. Elle l’enfonça en

elle et, comme il disparaissait, il se demanda l’espace d’un

bref instant s’il reverrait son magnifique sexe. Lorsqu’elle se

redressa et qu’il glissa vers la sortie, il fut troublé ; il avait

envie de rester enfoncé en elle pour toujours.

« Ne pars pas encore », marmonna-t-il.

Amy se baissa à nouveau. Elle se redressa, s’assit

encore, le chevauchant de plus en plus fort et de plus en plus

vite. Son dos se cambra et elle rejeta la tête en arrière. Ses

parois internes se refermèrent autour de lui. Ses mains

s’agrippèrent aux siennes et elle l’encouragea à caresser ses

seins.

Le plat de son pouce frotta un bourgeon, qui se durcit.

Ses doigts se refermèrent sur le petit caillou, et il le tira

doucement. Elle gémit et il put sentir son intérieur

s’humidifier davantage. Dasks pouvait sentir sa moiteur

pénétrer dans son sexe comme tout à l’heure dans ses doigts.

Les sucs qu’il avait en lui furent ainsi stimulés et sa semence

commença à se manifester. L’instinct prit le dessus. À

présent, il comprenait. Sa semence, comme elle l’appelait,

servait pour la procréation. C’était fabuleux de savoir avec

une telle force qu’il avait en lui le pouvoir de produire la vie.


88

Le sang affluait de plus en plus fort et de plus en plus

vite dans ses veines tandis qu’Amy bougeait. Elle plaqua ses

mains contre son torse pour prendre appui. Dasks la souleva

puis la rabaissa sur lui. Il bougea plus rapidement et plus

violemment jusqu’à ce qu’elle crie. Amy se fatiguait. Ses

jambes se mirent à trembler et elle le supplia de venir en

elle. Venir ? Il y était déjà. Il ne comprenait pas cette

terminologie. Il ne voulait être nulle part ailleurs qu’en elle

en cet instant.

Les bras puissants de Dasks continuaient à déplacer

Amy verticalement. Ses mains étaient accrochées à elle. La

sueur d’Amy recouvrait son corps d’une fine pellicule. Ses

sécrétions le rendaient sauvage. Il sentit son épuisement,

mais cela ne fit qu’ajouter à son désir bestial. Dasks se

sentait plus fort en percevant son odeur d’abandon total qui

flottait de son corps vers le sien.

Dasks pouvait se sentir grossir à l’intérieur d’Amy. La

sensation d’afflux comme il se remplissait décupla son désir.

Bombardé de souvenirs millénaires, il savait qu’il faisait

comme il le fallait, mais qu’il y avait encore autre chose.

Amy ouvrit des yeux ronds, choquée. Lorsqu’elle se souleva,

Dasks comprit pourquoi. Son énorme queue était encore plus

grosse et plus épaisse qu’à la seconde précédente, alors que

sa semence s’y frayait un chemin. Dasks était en plein

accomplissement sexuel, et il comprit soudain qu’il était

important qu’il se remplisse intégralement, afin de procréer

efficacement.

Amy gémit et essaya de se retirer de lui. Dasks la fit

basculer sous lui. Son bras passa sous ses hanches, la

maintenant dans cette position. Dasks devait terminer. Il

brûlait de ce désir. Il devait la faire sienne. De toute


89

évidence, Amy sentit son intention car elle se mit à se

débattre.

« Non, Dasks, tu mourras », cria-t-elle. « S’il te plaît,

arrête, tu me fais mal. »

Leurs respirations étaient saccadées et elle luttait pour le

repousser. Au fond de lui, Dasks sentit d’instinct qu’il devait

faire quelque chose. Il devait empêcher qu’elle souffre. Il

baissa la tête et enfonça ses crocs contre son cou. Amy gémit

et sa lutte cessa quand il lui injecta son sérum. Ses bras se

reposèrent mollement de part et d’autre de son corps. Elle se

détendit complètement pour l’accepter tout entier. À

l’exception de ses yeux. Les yeux d’Amy le suppliaient

d’arrêter avant qu’il ne soit trop tard. Mais ce serait

reprendre ce qu’elle lui avait donné. Dasks ne pouvait pas

s’arrêter de la posséder, il avait envie de faire jaillir sa

semence en elle, sans lui donner sa marque. Ça le tuait de ne

pas pouvoir le faire. Son instinct était si fort que des

générations lui hurlaient d’aller jusqu’au bout.

« J’ai presque fini », dit-il. « Je te fais toujours mal ? »

« Non, mais promets-moi de ne pas t’unir à moi. »

« Je te promets que je ne nous unirai pas aujourd’hui »,

répliqua-t-il.

Amy hocha la tête.

Dasks sentait bien qu’il ne lui faisait pas mal, mais il

avait besoin qu’elle le lui dise. Il savait aussi qu’elle aimait

le sentir. Dasks pouvait sentir sa queue toute gorgée étirer

ses parois internes. Il bougeait aussi délicatement que

possible, sachant que ce n’était pas le moment d’être violent.

Pas étonnant qu’un mâle castien se retrouve en rut. Dasks

n’avait jamais rien senti d’aussi parfait dans toute sa vie. Le

pouvoir coulait en lui. Il était en harmonie avec chaque


90

gramme qu’il faisait peser sur elle. Son corps savait

exactement ce qu’elle pouvait supporter. Le sérum qu’il lui

avait injecté avait accru ses émotions, provoquant chez lui

en lui

déclarer sienne coulait sous forme de sueur qui gouttait de

son corps sur le sien. Les gouttes la pénétrèrent, préparant

son corps à former un nouvel abri pour leur progéniture. Son

bébé, s’ils en concevaient un, serait plus que juste une partie

de lui, il faudrait qu’il ait un élément de lui.

Le cœur de Dasks cognait à se rompre, car il savait que

s’il réussissait, et si sa semence s’ancrait, Amy serait

protégée de la mort par la cuirasse de l’armure du bébé.

Mâles ou femelles, tous les bébés étaient conçus avec une

armure cuirassée qui leur était propre. C’était un cadeau de

leur père. Les mâles, dans leur espèce, conservaient leurs

armures pour la vie. Ils étaient guerriers ainsi que

protecteurs. Une femelle gardait la sienne jusqu’à ce qu’elle

soit sevrée ; elle la protégeait non seulement elle, mais aussi

d’un enfant femelle ou tout mâle castien pouvaient la

protéger contre les agressions jusqu’à ce qu’elle devienne

une femme, à vingt et un ans. Après quoi, quand elle

décidait de s’accoupler, elle était protégée par l’armure de

son compagnon. Le cycle de la vie, dans son infinie sagesse,

avait ôté la cuirasse des femelles pour qu’elles aient besoin

de chercher des mâles.

Si Dasks pouvait donner un enfant à Amy, elle serait

protégée pendant les quatre prochaines années. Il ne pouvait

pas lui donner la vie éternelle, mais il pouvait lui donner

plus de temps. Mais qu’adviendrait-il après les quatre ans ?

Elle mourrait et son bébé serait orphelin de mère… tout


91

comme lui. Segan était un bon frère mais pas un jour ne

passait sans que sa mère et son père ne lui manquent. Et

Amy ? Cela lui ferait-il de la peine de savoir qu’elle ne

pourrait voir grandir son enfant que jusqu’à ses trois ans et

demi ?

Oui.

Ce n’était pas une décision que Dasks pouvait prendre

seul. À la dernière seconde, il se retira d’elle et regarda sa

semence, curieux mélange de blanc et de noir profond, se

répandre sur le lit. Des morceaux de son armure étaient

mélangés à son sperme. Un sentiment de perte l’envahit, car

l’un d’entre eux aurait pu être son enfant. Dasks s’effondra

sur le côté, émotionnellement et physiquement vidé, et attira

Amy contre lui. Que devait-il faire ? Il ne pouvait pas vivre

avec elle et la regarder mourir. Il ne pouvait pas s’unir à elle

tout en sachant qu’ils mourraient tous les deux. La réponse

lui arrachait le cœur.

* * * *

Amy fut réveillée par une alarme qui hurlait dans tout le

vaisseau. Elle descendit du lit à tâtons et regarda par

l’immense fenêtre. Ce qu’elle vit faillit lui provoquer une

crise cardiaque. Un énorme vaisseau gris flottait au-dessus

de la Terre près du leur. Comme Amy l’observait, la coque

du vaisseau gris scintilla et un éclat de lumière explosa

devant ses yeux. Le vaisseau de Cobra fut frappé par une

énergie vibrante et Amy tomba les quatre fers en l’air. Elle

atterrit sur les fesses, près de la porte massive de la chambre

de Dasks.

« Viens avec moi », lui ordonna-t-il.

Amy poussa un cri lorsque Dasks surgit près d’elle en

armure. Son tatouage vert palpitait. Les contours en étaient


92

peut-être plus nets, mais elle en reconnaissait la marque. Il

l’attrapa par la main, la hissa sur ses pieds et la jeta sur son

épaule. Le sol sous ses pieds défilait tandis que Dasks

bondissait du mur au plancher à la vitesse de l’éclair. Amy

en eut le mal des transports. Elle ferma les yeux et se couvrit

le visage. La poigne de Dasks sur ses fesses était

inébranlable.

La coque du vaisseau éclata à nouveau, mais les serres

et les griffes de Dasks étaient profondément ancrées dans le

revêtement spongieux du bâtiment. Dasks était debout sur

ses jambes lorsqu’ils atteignirent une gigantesque porte.

Amy fut reposée sur ses pieds. Un groupe de femmes était

retenu à l’intérieur. Meg était dans la pièce, ainsi que Danni,

Leah et ses enfants. Meg courut vers elle.

« Amy, nous sommes attaqués ! » cria Meg.

Cobra surgit devant elle. « Ne quittez pas cette salle »,

leur enjoignit-il.

Dasks gratifia Amy d’un dernier regard avant de partir

avec Cobra et Talsk. Amy était ravie de voir que Leah

rayonnait de santé. Tous ses enfants étaient massés autour

d’elle, l’air apeuré. Amy prit Meg dans ses bras, puis Leah et

les petits. Danni se précipita vers elle.

« Où sont les autres ? » demanda Amy.

« Une navette a emporté un grand nombre de femmes

vers Dargon hier. Apparemment Cobra s’attendait à du

grabuge », dit Leah. « Ils ont appris qu’un vaisseau tonien se

dirigeait vers la Terre. L’ennemi essaie aussi de trouver des

femelles. »

« Comment sais-tu cela ? » demanda Amy.

Leah rougit. « Cobra s’est uni à moi. Il ne sait pas garder

un secret avec moi, et il ne ment pas. Sous ses apparences


93

brutes, c’est un véritable petit ange. Avec lui je me sens en

sécurité. Cobra ne trahira pas mon amour. Il y a quelque

chose de spécial chez cette race de mâles et dans la façon

dont ils comprennent les émotions et les ressentent. Je suis

amoureuse de lui et de son honnêteté. »

Les yeux d’Amy s’agrandirent de surprise. Leah était

une belle femme d’une trentaine d’années. Amy avait appris

que Cobra avait trois mille ans et ne s’était jamais uni. Une

très longue vie de célibataire. Leah semblait ravie de sa

situation. Leah se tourna légèrement. Son épaule droite était

découverte et Amy aperçut un tatouage vert lumineux

brillant. Il était identique aux marques de Cobra. Le visage

de Leah était rayonnant lui aussi, de bonheur, et Amy savait

à quel point il était important pour elle de ne plus jamais se

sentir trahie.

Meg montra à Amy le tatouage sur son épaule, identique

à celui que Talsk avait au visage. Amy était heureuse pour

son amie. Amy vit également la marque de Danni. C’était

une joie douce-amère. Ses amies étaient saines et sauves ;

Amy aurait aimé pourvoir l’être elle aussi. Elle donnerait

tout pour porter la marque de Dasks et savoir qu’ils vivraient

ensemble mille ans.

Une autre explosion vint ébranler le vaisseau. Lisa se

mit à pleurer. Leah prit sa fille dans ses bras. Amy souleva

Maddy. La pièce fut soudain plongée dans le noir. Amy se

tint immobile. Une faible lueur vacillante s’éclaira. Courant

électrique d’urgence. Le courant devait être alimenté par

leurs cuirasses. La pièce dans laquelle elles se trouvaient

presque dit une cellule. Une idée germa dans l’esprit d’Amy.

C’était peut-être une cellule. Si elles ne pouvaient pas en


94

sortir, alors avec un peu de chance personne ne pouvait y

entrer.

À peine avait-elle eu cette pensée que la porte de la

pièce vola en éclats. Tout le monde se mit à hurler lorsqu’un

Castien en armure vint s’écraser, aux prises avec une

créature grise. La créature grise était hideuse. Ses serres

emprisonnèrent le Castien. Amy n’avait aucune idée de qui

cela pouvait bien être ; elle n’avait jamais vu ce tatouage-là

sur le visage d’un guerrier castien. Le Tonien battait l’air de

sa queue fourchue et l’enroula autour de sa cheville. Un

énorme pied griffu s’abattit sur la queue et la coupa en deux.

Le Tonien hurla.

« Tu veux m’avoir en traître ? » glapit le Tonien.

« Bâtard de Castien. »

À la plus grande horreur d’Amy, la créature projeta son

bras puissamment musclé en avant et ses serres jaillirent en

direction de Leah. Leah hurla et se baissa. Lisa tomba à terre.

Le Tonien partit voler avant même d’atteindre le buste de

Leah. La créature rebondit contre le mur. Lisa s’élança vers

sa mère, mais elle aussi fut envoyée dans les airs.

« Éloigne-toi d’elle ! » hurla le Castien. « La femme

porte sans doute le bébé de mon père. Sa cuirasse est dressée

et ne se rétractera pas. Rien ne peut la pénétrer. »

« Mes enfants ! » s’écria Leah.

Leah s’assit sur le sol, l’air terrifiée et bouleversée, elle

avait envie de rejoindre ses enfants mais elle en était

incapable. Amy était en état de choc. Dasks avait mentionné

au détour d’une conversation qu’une femme bénéficiait

d’une cuirasse quand elle était enceinte, mais c’était la

première fois qu’elle voyait une si petite femme envoyer

voler un guerrier sans lever le petit doigt. Et la pauvre Lisa


95

était étalée sur le dos, appelant sa mère en hurlant. Amy

courut vers l’enfant et la prit dans ses bras. D’autres Castiens

aux prises avec des Toniens firent irruption dans la pièce.

« Dasks ! » hurla Amy lorsqu’elle vit son tatouage.

Amy se retrouva entre Talsk et Dasks. Meg était à côté

d’elle, accroupie sur le sol, Maddy dans ses bras. Leah se

pelotonna en boule et personne ne s’approcha d’elle. Amy

perdit Craig de vue. Lisa se débattait dans les bras d’Amy et

se dégagea. Amy l’appela. Talsk et Dasks se déplaçaient à

une telle vitesse devant elle qu’elle parvenait à peine à les

voir. Leurs serres tailladèrent l’armure en produisant un

crissement abominable et envoyant des étincelles un peu

partout. Lisa était suffisamment petite pour se glisser dans

une ouverture, tandis qu’une queue de Tonien cherchait à

atteindre Meg d’un mouvement furtif.

Le pied de Talsk s’abattit violemment et coupa la queue

en deux, dans un craquement. Lisa était partie. Amy cria à

Dasks de retrouver l’enfant mais ni lui ni Talsk ne rompit le

rang. Ils combattaient comme un seul homme. Dans un

rugissement, les serres de Dasks tranchèrent la gorge d’un

Tonien, quand l’armure de son ennemi faiblit d’épuisement.

Il n’y avait guère de lumière sur Terre. Ils avaient besoin de

rentrer chez eux pour se régénérer, lui avait expliqué Dasks.

Si les Toniens sentaient une baisse de puissance, leur

cuirasse corporelle s’en ressentirait. Quand la créature

tomba, Amy aperçut Lisa. Elle hurla lorsqu’un Tonien

s’approcha de l’enfant pour s’en emparer.

« Rask ! » hurla Dasks. « L’enfant ! »

Amy avait entendu parler de Rask.

C’était le Castien aux commandes de Dargon. Peut-être

Cobra l’avait-il appelé, sachant qu’il allait y avoir des


96

problèmes. Si Rask et ses hommes combattaient, leurs

amures tiendraient plus longtemps car elles avaient été

régénérées par les deux soleils de Dargon. Amy vit le fils de

Cobra attraper Lisa, et sa cuirasse se redressa en claquant,

tandis qu’un autre guerrier castien couvrait ses arrières. Amy

savait qu’il devait s’agir du compagnon d’armes de

l’homme. Lisa était invisible, mais en sécurité.

Rask et son compagnon d’armes continuaient de se

battre. Un par un, les Toniens tombaient et s’enfuyaient. Les

Castiens proclamèrent leur victoire par des rugissements.

Meg lâcha Maddy, qui rejoignit timidement sa mère.

« Maman ? »

« Je crois que ça va, petit cœur. Viens lentement vers

moi », la prévint sa mère.

Maddy se rapprocha et se jeta dans les bras de sa mère.

L’armure de Rask s’abaissa et il reposa Lisa sur ses pieds.

L’enfant rejoignit sa mère en râlant.

« Tu m’as lâchée », dit-elle en tapant du pied.

Rask eut un petit rire. « Ce n’était pas ta maman, petite.

C’est ta petite sœur, le bébé, qui a fait ça. »

Lisa colla son nez sur le ventre de sa mère. « Ne me

lâche plus, bébé. »

Leah éclata de rire et regarda autour d’elle. « Où est

Craig ? »

Bientôt, Leah fut debout. Elle se précipita vers Cobra

qui tenait le garçon inanimé contre son torse. Amy aperçut le

sang. Craig avait le torse et la gorge tailladés par des serres.

Leah poussa un hurlement. Cobra avait l’air dévasté, et

serrait l’enfant contre lui.


97

« J’ai essayé, mais je n’ai pas de compagnon d’armes

pour surveiller mes arrières. J’ai pensé pouvoir être assez

rapide, mais ils étaient quatre. »

« Non, non », sanglotait Leah.

« Il lui faut un docteur », dit Amy. Au vu des blessures,

elle doutait cependant que ce soit utile.

« Nous n’avons pas de docteurs », dit Cobra. « Nos

cuirasses nous guérissent si nous sommes blessés. Je crains

que les eaux curatives ne lui soient d’aucun secours. Il a

perdu trop de sang. »

« Alors nous pouvons lui faire une transfusion », dit

Danni.

Amy savait que Danni était allée à l’école d’infirmières,

il y avait des lustres de cela.

« C’est quoi, une transfusion ? » demanda Cobra.

« On prend du sang de quelqu’un pour le lui donner »,

expliqua Danni.

« Un Castien ne peut pas donner du sang s’il le désire.

Notre armure ne permettra pas que quelque chose pénètre

notre peau », dit Rask.

« Mais tu as un compagnon d’armes. Tes crocs sont

entrés dans la peau d’un guerrier », dit Amy d’un air

désespéré.

« Ce n’est possible que parce que cela contribue à notre

propre protection », dit Cobra. Doucement, il déposa l’enfant

sur le sol.

Leah était sur lui et pleurait de façon hystérique. Elle

leva vers Cobra des yeux pleins de larmes. « Tu as dit que tu

prendrais soin de lui », l’accusa-t-elle. « Tu l’as juré quand

nous nous sommes unis. »

Cobra semblait terrassé par sa souffrance.


98

Amy savait qu’il ressentait ce qu’elle éprouvait. La

douleur irradiait de ses yeux, Amy voyait bien qu’il aimait le

garçon. Il n’avait pas d’autre choix que de l’aimer car Leah

aimait son enfant. Cobra ressentait la même chose qu’elle.

« Je suis désolé », articula-t-il.

« J’ai mal », gémit Craig.

Cobra s’agenouilla près de lui. « Ferme les yeux. »

« Ne le touche pas », siffla Leah. Elle leva la main et

frappa Cobra au visage. Un filet de sang coula de sa bouche.

Amy était surprise que son armure ne se soit pas dressée,

puis se souvint que l’armure castienne ne sortait pas si elle

risquait de faire mal à une femelle. Elle l’avait frappé avec

l’intention de le blesser ; l’armure aurait pu lui briser la

main.

Amy se demanda si Cobra avait senti ce qu’elle allait

faire, et présuma qu’en effet il l’avait su.

« Je peux apaiser sa douleur ». Le ton de Cobra était

grave.

Amy pleurnichait dans les bras de Dasks lorsque Cobra

se baissa et mordit la joue du garçon. Amy savait que Craig

ne ressentirait aucune douleur après la morsure. Il mourrait

en paix.

Leah hurla lorsque Cobra se retira. Elle prit son enfant

dans ses bras et le serra contre sa poitrine.

Amy fut abasourdie lorsque Leah fut soudain

violemment repoussée et atterrit sans mal sur le sol, en un

rebond.

Un cri de surprise se forma dans sa gorge lorsqu’une

armure se referma doucement autour du corps de Craig.

Morceau par morceau, elle se mit en place et enveloppa le

garçon.


99

« Cobra ? » demanda Rask, confus.

Cobra tendit la main vers sa bouche et l’effleura. « Nos

sangs se sont mêlés. » Cobra trébucha et glissa à terre. Il

avait l’air éreinté.

« Cobra ? » s’écria Rask en s’agenouillant près de lui.

« Je n’ai pas de compagnon d’armes. Cela fait presque

quatre cents ans que je n’en ai plus. Mon armure a senti ma

frustration lorsque je combattais. Personne ne couvrait mes

arrières. » Cobra se mit à rire. « J’ai donné deux morceaux

de mon armure en quelques jours. Pas étonnant que je me

sente un peu faible. Le premier était pour le nouveau bébé.

Maintenant il semblerait que j’aie un nouveau compagnon

d’armes. »

« Mais c’est un petit garçon », dit Leah en rampant vers

lui.

« C’est un guerrier castien à présent. Tu as dit qu’il avait

presque douze ans. C’est l’âge auquel un Castien prend un

compagnon d’armes », déclara Cobra. Il eut un petit rire en

voyant la mine que faisait Leah. « Tout va bien, Leah. Il est

parent avec le bébé. Elle le laissera s’approcher après avoir

appris à reconnaître son odeur. Elle peut le sentir par ton

nez. C’était juste un choc tout à l’heure de se retrouver si

près d’un mâle, puis d’un guerrier mâle. Même aussi

minuscule dans ton ventre, un bébé peut ressentir des

émotions et un sentiment de possession. Apprendre de quel

mâle rester à distance et de quel mâle rechercher l’aide fait

partie de ses réflexes pour vous protéger, toi et elle.

L’instinct chez nos petits naît au moment même de leur

conception. »


100

« Qu’est-ce qui vient de se passer, alors ? » demanda

Amy. Elle avait l’impression qu’une locomotive à vapeur

venait de la renverser.

« Quand tu porteras le bébé de Dasks », lui expliqua

Cobra, « le bébé créera sa propre cuirasse à la seconde même

de sa conception. Rien ne peut faire de mal à l’enfant ni à la

mère tant qu’elle le porte ou l’allaite, jusqu’à ses trois ans et

demi. La mère et le bébé sont indestructibles. C’est la seule

raison pour laquelle mon fils et son compagnon d’armes ont

pu laisser leurs épouses sur Dargon. Rien ne peut leur faire

du mal. Y compris un autre guerrier. Quand une femelle est

enceinte, un mâle est attiré par son odeur. Leurs hormones

les rendent irrésistibles. À moins d’être une femelle, ou de la

même famille que la mère, on ne peut pas s’approcher d’elle.

La cuirasse l’interdit. Une fois que le bébé est né, la femme a

une nouvelle odeur qui rend un mâle castien très protecteur

envers elle et ses petits. Ce parfum prépare les mâles pour le

moment où la cuirasse disparaît. L’instinct intervient pour

garder un enfant femelle à l’abri des nuisances, grâce à son

armure. »

« Maman ? »

L’armure de Craig retomba doucement. Le garçon se

redressa et se frotta les yeux. Il n’avait plus aucune marque.

Cobra le souleva et grommela. « Tu es devenu bien

lourd soudain », dit-il joyeusement.

« Où l’emmènes-tu ? » demanda Leah.

« Son armure a besoin d’être régénérée. Comme nous

tous, d’ailleurs », leur annonça Cobra. « Nous devons

retourner sur Dargon et régénérer la cuirasse du vaisseau.

Messieurs, nous rentrons à la maison. »


101

Chapitre 6

« J’aurai quatre ans de sursis, vraiment ? » demanda

Amy à Dasks. « Et nous n’avons pas besoin de nous unir ?

De la même façon que la mère de Rask ne s’est jamais unie à

Cobra quand elle a appris qu’elle était mourante ? Je ne te

tuerai pas ? »

Dasks fixait le plafond. Amy n’apercevait plus la Terre

par la grande fenêtre. L’espace était une couverture d’étoiles

de toute beauté. Elle avait été impressionnée de voir les

planètes familières défiler avant de pénétrer dans un nouveau

système solaire.

Dasks répondait à sa multitude de questions. Il était

moins occupé à présent qu’ils faisaient cap sur Dargon. Ils

passaient chaque seconde ensemble.

Amy était tombée amoureuse de lui. Ce serait beau qu’il

puisse garder pour toujours un bout d’elle-même. Ce serait

beau de savoir qu’une part d’elle-même resterait avec lui.

Dasks tourna la tête et la regarda. « Si je te donne un

bébé, je ne peux pas m’unir à toi. Je ne peux pas laisser

notre enfant seul pour que mon frère l’élève. Je sais que ça

ne le dérangerait pas, mais j’ai perdu mes deux parents. Je ne

ferai pas ça à notre bébé. »

Dire que la sincérité se lisait dans ses yeux serait un

euphémisme. Amy avait compris qu’un Castien ne pouvait


102

pas mentir. Ils étaient trop connectés aux odeurs et aux

émotions pour être capables de les mettre de côté. Elle avait

aussi appris à ne pas lui mentir, ce serait inutile. Avoir la

chance de vivre encore quatre ans était si tentant. Mais

serait-ce la meilleure chose à faire pour Dasks ? Pourrait-il

vivre en sachant qu’au cours des quatre ans, à tout moment,

s’arrêterait de battre ? Serait-ce juste pour le bébé ? Serait-ce

juste pour Amy ? Toutes ces émotions la bombardaient.

Dasks effleura le bord de sa mâchoire avec son doigt.

Comme toujours, ce contact l’apaisa.

« Ce n’est pas juste, si ? » finit par articuler Amy. « Je

ne peux pas exiger que tu attendes tant d’années avant de

t’unir alors qu’il y a si peu de femmes. Tu n’auras peut-être

pas de seconde chance. Il y a toujours quelques femmes qui

ne se sont pas accouplées, n’est-ce pas ? »

« Elles ne s’appellent pas Amy. »

« Tu sens bien que je suis amoureuse de toi. »

« Si nous étions unis, tu sentirais l’amour que j’éprouve

pour toi. »

« Je ne serai pas la cause de ta mort. »

« J’ai déjà l’impression de mourir. »

« Je suis vraiment désolée, Dasks. » Amy enroula ses

bras autour de lui. Elle enfouit son nez dans son cou et huma

son odeur virile.

« Les eaux curatives t’aident un peu, au moins ? »

demanda Dasks avec espoir.

« Un peu. » Amy hocha la tête. « Au moment où j’y

entre, l’eau tourbillonne comme une folle autour de mon

sein gauche. La boule rétrécit pendant un temps puis

retrouve sa taille normale quand je sors de l’eau. Je ne me


103

sens pas aussi fatiguée non plus. Si je pouvais, je dormirais

dans le bassin. Je n’ai jamais pensé avoir un jour envie

d’être une sirène, mais l’idée ne m’est pas désagréable. »

« Peut-être que si les eaux te guérissent un peu chaque

jour, tu continueras à vivre longtemps. »

« Peut-être. »

« Peut-être Cobra peut-il trouver quelque chose. »

Amy se redressa. « Tu ne le lui as pas dit ? »

« Je n’ai pas eu beaucoup de temps. Et quand j’ai enfin

pu l’approcher, je n’ai pas pu. »

« Mais ne va-t-il pas sentir quelque chose ? »

« Si, c’est déjà le cas. Cobra sait que nous ne nous

sommes pas unis. Il ne m’a pas demandé pourquoi. Il attend

que j’aille vers lui, et je ne sais pas si je peux. »

« M’aurait-il laissée sur Terre ? »

Dasks sembla peser ses mots avec soin. « Tu présentes

une menace pour l’un de ses guerriers. Un Castien ne ferait

jamais de mal à une femelle. Cobra aurait pu t’abandonner

avec des provisions, mais il a plutôt choisi de ne pas poser

de questions. Tu es ma femelle. La décision me revient. Je

ne peux pas te renvoyer pour aller avec une autre. Tu es sous

ma responsabilité. Je sais que c’est dur. Un mâle en rut

chercherait à s’accoupler avec toi. Maintenant que d’autres

mâles ont des compagnes, la façon de procéder a fini par se

savoir. Par mon égoïsme, je te mets en danger, ainsi que mes

amis guerriers. Je dois parler à Cobra de ta condition, afin

qu’il exige de ses guerriers qu’ils ne te touchent pas.

Certains d’entre eux ne se préoccuperont peut-être pas que tu

sois en train de mourir. Et peut-être que quelqu’un prendra

quand même le risque. »

« Même en sachant qu’il pourrait mourir ? »


104

« Ce n’est pas si évident », dit Dasks calmement. « Je

veux toujours m’unir à toi tout en sachant que je mourrai.

Mais à présent, tu me proposes d’être un père ou un

compagnon. »

« Tu n’as pas la possibilité de choisir d’être mon

compagnon. Je refuse de m’unir à toi. »

« Alors tu n’as aucune protection ! » Dasks se redressa.

« Bon sang, ce qui est arrivé à Craig pourrait t’arriver et je

ne peux pas te guérir si mon armure ne peut pas

t’envelopper. »

« J’aurais aimé savoir si ton armure pouvait me guérir

de mon cancer. »

« Nous pouvons essayer », lança-t-il désespérément.

Amy prit son visage entre ses paumes. « Tu te doutes de

ma réponse ? »

Dasks lui prit les poignets dans une main et l’attira sous

lui. « Je pourrais te forcer », fit-il d’un ton sec.

Amy voyait bien qu’il ne le ferait pas. Il avait l’air

dégoûté de lui avant même que les mots soient sortis de sa

bouche. Il avait désespérément envie de la sauver. Elle

pouvait sentir que son cœur voulait le rejoindre.

« S’il te plaît », chuchota-t-il, le souffle court.

« Quoi ? »

« Chaque jour qui passe nous rapproche », dit-il.

« Je t’aime. Je veux te faire l’amour. Ne pouvons-nous

pas profiter l’un de l’autre pendant le temps qui nous reste

au lieu d’agoniser sur le temps que je n’ai pas ? »

« Laisse-moi garder une partie de toi. »

« Dasks, un bébé, c’est beaucoup de responsabilités.

Nous savons déjà que j’aurai une fille. C’est le cycle

reproducteur de votre peuple qui veut que l’on produise une


105

femelle, puis dans quatre ans, un mâle, si j’en crois ce que

dit Cobra. Une fois que sa cuirasse disparaîtra, la partie sera

terminée pour moi. »

« J’ai besoin de quelque chose de ta part. S’il te plaît ! »

Il avait l’air si désespéré et elle lui devait tant qu’Amy

acquiesça. Lorsqu’il lâcha ses poignets, elle l’attira contre

elle.

La bouche chaude de Dasks se posa sur la sienne.

Comme toujours, ses dents se rétractèrent lorsqu’ils

s’embrassèrent.

Sa langue roulait lascivement avec la sienne. Il pesa

plus lourdement sur elle.

Amy n’était pas certaine du poids qu’il faisait, mais elle

savait qu’il pesait au moins cent cinquante kilos. Au lieu de

craindre d’être écrasée, elle avait envie de le sentir

davantage. Une couverture cuirassée. Une puissance

phénoménale l’enveloppa et pourtant, elle parvenait à sentir

son désespoir. Il s’accrocha à elle comme un homme à

l’agonie. L’expression sur son visage était tourmentée.

« Dasks ? »

« Elle te ressemblerait. Chaque jour je me rappellerais

ce que j’ai perdu. »

« Dasks, est-ce ce que tu veux réellement ? »

« Non. Je ne peux pas, Amy », fit Dasks.

« Tu ne peux pas quoi ? »

« Je ne peux pas te donner de bébé. Je ne peux pas te

faire l’amour année après année en sachant que je ne pourrai

jamais t’avoir. »

« Tout va bien, Dasks. Je comprends. »

« Vraiment ? »

« Je crois que je serais tentée de te laisser t’unir à moi. »


106

La main de Dasks glissait le long de la cuisse d’Amy.

Elle leva les jambes plus haut pour les enrouler autour

de lui. La tête de Dasks se baissa pour lécher son sein ferme.

Amy se cambra. Ses ongles l’éraflèrent. Dasks gronda et

Amy sourit. Elle pourrait lui faire tout ce qu’elle voulait et

son armure ne se manifesterait pas pour le protéger tant

qu’elle était si près de lui. Dasks lui avait dit à quel point il

était vulnérable. Les Toniens avaient capturé des femelles

humaines. De toute évidence, la planète Onvra était aux

mains de l’ennemi. Les femelles humaines étaient forcées à

avoir des relations sexuelles avec les prisonniers castiens

pour les soumettre. On racontait qu’un collier avait été

conçu pour empêcher les armures des Castiens de se

redresser. Pendant l’amour, les Toniens faisaient irruption et

bouclaient le collier autour de leurs victimes inattentives, les

rendant à leur merci. Dasks lui avait dit que lorsqu’ils

arriveraient à Dargon, leur nouvelle mission serait de sauver

les guerriers prisonniers et de libérer les femelles humaines.

Amy avait frissonné en entendant la nouvelle. Elle avait de

la famille sur Onvra.

« Pourquoi as-tu des pensées si tristes ? » demanda

Dasks avant de couvrir son épaule de baisers gourmands.

« Je me disais juste à quel point tu es vulnérable sans

ton armure. Je ne veux jamais faire l’amour avec toi en

sachant que des Toniens ne sont pas loin. »

« L’environnement est différent sur Onvra. On m’a dit

que les Toniens avaient développé un produit chimique

spécial qui les faisait ressembler à des Castiens, grâce à des

hologrammes copiant leurs armures noires. Ce n’est pas

cas autrefois. Avec le temps, leurs armures se sont


107

transformées pour mieux correspondre à leur sournoiserie.

Elles sont grises, ternes, plus d’un noir pur. Leurs queues

poussent à force de proférer des mensonges. Quand on les

coupe, ils ont mal et cette douleur leur rappelle à quel point

ils sont devenus répugnants. »

« On dirait qu’ils n’ont pas d’âme. »

« Ils tuent pour le plaisir, pour s’amuser. La douleur et

la souffrance des autres les amusent. »

Amy frissonna et Dasks la serra plus fort.

« Je ne veux pas penser à eux alors que tu sens si bon et

que je peux presque sentir ton goût dans ma bouche. Ce

n’est pas juste que tu puisses me prendre entre tes lèvres, et

que je ne puisse pas atteindre ton sexe à l’intérieur pour faire

la même chose. »

En riant, Amy poussa sa tête vers le bas. « Essaie. »

Dasks parut un instant troublé, puis sourit. Il descendit.

Ses doigts l’écartèrent et l’un d’entre eux se glissa à

l’intérieur.

Amy gémit en se tortillant. Elle sursauta lorsque les

lèvres de Dasks se posèrent sur elle. Sa langue explora

chaque centimètre de son intimité, l’aspirant et la léchant

jusqu’à ce qu’elle frémisse sous ses caresses. Sa bouche tira

sur sa petite excroissance et elle geignit. Son dos se cambra

et elle agrippa les couvertures sous elle lorsque sa langue

plongea plus avant et qu’il lécha ses parois internes. Elle

avait si chaud. Il était tellement excitant de faire l’amour

avec un mâle qui comprenait ce qu’elle aimait au moment où

il le faisait.

Les doigts et la bouche de Dasks travaillaient de

concert. Ses doigts étaient glissants et Amy savait que ses

sécrétions étaient accentuées par son odeur alors qu’elle se


108

rapprochait de l’orgasme. La sensation qu’il lui procurait en

s’enfonçant dans sa peau la calmait et l’excitait à la fois.

C’était comme une drogue sexuelle, lubrifiante et enivrante.

En décrivant de petits cercles, sa langue se frotta à elle

jusqu’à ce qu’elle étouffe un cri en jouissant. Ses mains se

refermèrent sur ses cheveux soyeux, et elle repoussa sa tête.

« C’est donc ça ce goût si agréable », dit Dasks en se

léchant les lèvres.

Les crocs de Dasks grandirent lorsqu’il s’allongea sur

elle. Ses yeux étaient vitreux et il avait l’air saoul. Quand il

s’enfonça en elle, Amy poussa un cri. Ses langoureux coups

de reins la firent bientôt haleter. Elle le voulait plus que

jamais. Dasks répondit à son désir. Il la pénétra encore plus

fort. Les puissantes mains de Dasks la maintenaient

immobile sous lui, la bloquant sur place tout en venant buter

contre elle. Amy enroula ses jambes autour de sa taille,

tandis qu’il s’arc-boutait pour garder la cadence. Lorsqu’il

était en rut, Dasks était une pile électrique débordant

d’énergie sexuelle. Amy hurlait comme ses hanches venaient

buter furieusement contre elle. Il l’écrasait de plus en plus

sous son poids.

Quand Dasks commença à émettre un grondement

guttural, Amy comprit qu’il n’allait plus tarder à gonfler.

Davantage de sécrétions de son pénis coulèrent en elle,

aussitôt absorbées. C’était la façon qu’avait sa queue de la

faire sienne. L’humidité qui l’entourait était toujours tiède et

si agréable que son corps s’abandonna au plaisir. Comme

toujours, elle fut la première à jouir. Elle savait que son

odeur l’excitait à libérer sa semence. Amy gémit en sentant

sa queue se mettre à grossir et à se durcir. Elle pouvait le

sentir la remplir, centimètre après centimètre. Son intérieur


109

s’étira et elle dut lutter pour l’accepter tout entier. Amy se

retint aussi longtemps qu’elle le put, jusqu’à ce que la

sensation devienne insupportable.

« Oh, Dasks, s’il te plaît », implora-t-elle.

Dasks lui donna un dernier coup, puis se retira

lentement.

Amy se tortillait en gémissant. C’en était trop. Ses yeux

étaient grands ouverts lorsqu’elle les leva vers lui.

« C’est ma douleur », dit-il soudain. « Souffrir d’une

pression qui doit cesser. Quand je ne peux pas m’unir à toi,

je la ressens. Ce besoin de mettre fin à ma douleur m’est

intolérable. Quand je jouis, je perds véritablement un

morceau de moi-même. »

Avec une lenteur insoutenable, Dasks baissa la tête et

enfonça ses crocs dans son cou. Le soulagement fut

immédiat. Amy avait envie de sangloter, mais il était si

agréable. Elle voyait la lueur qui brillait dans ses yeux

comme il continuait à se balancer contre elle. Il ne pouvait

pas avoir de compagne ; sa semence se répandrait sur le lit et

il ne pourrait pas avoir d’enfant. Que pouvaient-ils faire ?


110

Chapitre 7

Dargon était l’endroit le plus somptueux qu’Amy ait

jamais vu. Le sol était spongieux, avec une texture de

velours, mais il était ferme et il était aisé de marcher dessus.

La sensation sous le pied nu était très agréable. C’était

comme à l’intérieur du vaisseau spatial. Des arbres tels

qu’elle n’en avait jamais vus s’élevaient vers les quelques

nuages. Ils étaient d’une teinte brune légère. L’écorce des

troncs était semblable à de l’écume. Quand on s’y appuyait,

elle devenait rigide, puis se reformait dès que l’on se retirait.

Pas étonnant que Dasks se soit plaint des arbres malingres de

la Terre, qui ployaient sous son poids. D’énormes racines

s’enroulaient sur le sol et s’y enfonçaient. Si la planète avait

été mystique, Amy aurait parfaitement imaginé les arbres

marcher avec de telles racines. En hauteur, elle apercevait

des feuilles d’un vert kaki, qui mesuraient la moitié de sa

taille, se balancer dans la brise légère.

Amy fut présentée à la compagne de Rask, Grace.

C’était une belle blonde aux yeux bleu clair. Amy remarqua

que Dasks se tenait à une respectueuse distance d’elle, tout

comme les autres guerriers castiens à l’exception de Cobra

qui la prit dans ses bras avant de la présenter à Leah et au

reste de sa famille. Amy se souvint que Dasks lui avait dit


111

que la femme était enceinte, ce qui était évident si l’on

regardait le ventre rond de Grace.

Amy prit conscience que c’était la cuirasse du bébé qui

empêchait les mâles de s’approcher de Grace, à l’exception

des membres de la famille ou des parents par le sang.

Craig fut autorisé à s’approcher d’elle

désormais liés par le sang. Depuis que Cobra avait donné

son armure à Craig, sa masse corporelle s’était

considérablement accrue. Le garçon, autrefois plus maigre

que la moyenne, donnait à présent l’impression d’avoir fait

des années de musculation. Bientôt, le garçon serait capable

de soutenir la comparaison avec n’importe quel autre

guerrier. Craig avait dû s’approcher précautionneusement de

Grace, le temps que le bébé qu’elle portait s’habitue à son

odeur, qu’elle percevait à travers le nez de sa mère.

Puisqu’Amy était une femelle, la cuirasse ne s’était pas

dressée contre elle.

« Bienvenue à Dargon », s’exclama Grace à l’attention

des nouveaux venus.

La jeune femme était rayonnante de bonheur et rejoignit

bientôt les bras de son mari.

Quand Rask et Grace s’embrassèrent, Amy put voir tout

l’amour et l’affection dont ils débordaient l’un envers

l’autre. Quand Dasks passa son bras autour des épaules

d’Amy, elle se blottit contre lui avec envie. Dasks la serra

plus fort et Amy sut qu’il avait compris son émotion.

Meg avait raconté à Amy que Talsk était tellement en

phase avec elle et ses besoins que c’en était parfois agaçant.

Apparemment, une fois qu’ils étaient unis, un mâle castien

pouvait pénétrer les rêves de sa compagne. Meg lui avait

avoué qu’il lui avait fallu un moment pour s’y habituer.


112

Talsk ne lâchait pas Meg d’une semelle jusqu’à ce qu’elle

établisse une règle lui demandant de lui laisser un peu

d’espace. Talsk était alors resté religieusement à distance des

rêves de sa compagne, sauf s’il la sentait en détresse.

L’idée ne semblait guère plaisante. Toujours savoir ce

que l’autre faisait, ou ressentait. C’était comme être une

seule personne dans deux corps. Amy ne savait trop qu’en

penser.

Meg lui avait assuré que c’était certes étrange mais

néanmoins intéressant.

Amy comprenait désormais pourquoi un mâle castien

mourait s’il perdait sa compagne et vice versa.

Quand Amy avait demandé à Dasks pourquoi il ne

mourrait pas si son compagnon d’armes mourait, il avait

éclaté de rire. Puis il s’était vite rembruni quand il avait

réalisé qu’elle ne plaisantait pas. Après tout, les compagnons

d’armes s’étaient mordus et avaient échangé leur sang. Oui,

ils étaient liés par le sang, mais pas dans la mort. Si Dasks et

Amy s’unissaient, elle représenterait plus que Talsk pour lui.

Amy ne ferait plus qu’un avec Dasks. C’était nécessaire pour

déjà la vie éternelle, c’était un mâle.

« Tu as envie de voir ton nouveau foyer ? » demanda

Dasks.

Amy hocha la tête. Dasks la conduisit à travers la forêt.

La première chose qu’Amy remarqua fut qu’il avait l’air de

suivre un chemin, invisible à l’œil. Lorsqu’elle lui en fit part,

il sourit et leva les yeux. Amy suivit son regard et remarqua

une ouverture dans le sol. Un peu plus loin, il y en avait une

autre, plus grande. Alors elle comprit


113

avançaient en bondissant sur le sol et en prenant appui sur

les arbres. C’était le chemin qu’ils suivaient.

Dasks la mena vers un nid absolument fascinant. Il était

d’ailleurs presque impossible de deviner qu’il s’agissait

d’une maison. Elle devait sans doute être indétectable depuis

le ciel. C’était un tronc d’arbre massif qui formait un dôme

semblable à celui d’un champignon. Les racines entremêlées

étaient nouées et tressées entre elles. Amy n’avait jamais

rien vu de tel. C’était aussi pittoresque que dans un livre de

contes. Lorsqu’ils s’avancèrent, une lourde porte s’ouvrit en

coulissant. À l’intérieur, il faisait sombre, un peu comme

dans une grotte. De nombreux panneaux illuminaient les

murs arrondis. Dedans, on retrouvait la même matière

spongieuse du sol au plafond. Ici, la couleur en était d’un

vert sombre.

« C’est magnifique », dit-elle, abasourdie.

« Viens », lui dit Dasks en l’entraînant avec lui.

Ils arrivèrent devant une grosse porte marron, Dasks

passa la main devant un panneau. La porte disparut dans le

mur puis se referma dans un claquement une fois qu’ils

eurent pénétré à l’intérieur de la vaste pièce.

Amy regarda autour d’elle. Une fenêtre courait tout le

long du mur, autour de la pièce. À travers, Amy pouvait en

apercevoir de nombreuses autres qui s’étendaient tout autour

d’eux.

« Pas de rideaux ? » demanda-t-elle.

« Une protection peut nous envelopper, si tu le

souhaites », dit Dasks. « Elle se met généralement en place si

nous sommes attaqués. Mais personne ne peut voir à

l’intérieur. Le dôme a une protection invisible. Depuis que

Cobra a repris le pouvoir, la sécurité a été grandement


114

améliorée. Nous ignorons quelles informations les

prisonniers castiens ont pu divulguer aux Toniens. Dénués

de leurs armures, nos guerriers captifs peuvent ressentir la

douleur. Ce n’est pas une chose à laquelle les Castiens sont

habitués. Nous avons été protégés par nos cuirasses toute

notre vie durant. »

« Oh. »

« Non loin d’ici se trouvent nos sources et nos bains.

Nous avons une petite salle d’eau privative dans notre

chambre, mais j’aime les bains communs. Maintenant qu’il y

a des femelles, nous avons décrété des périodes où l’on peut

y avoir un peu d’intimité. Je suis certain que d’autres

moments similaires seront ménagés. Je sais que ça te paraît

un peu primitif, mais cette planète en est encore à ses

balbutiements. »

Amy tournait sur elle-même. L’endroit était en effet

primitif, doté d’un charme désuet. Mais il était aussi bien

plus avancé que sur la Terre. Il n’y avait aucune image au

mur dans leur chambre. Ils n’avaient vraiment pas besoin

d’avoir une si grande fenêtre. À l’extérieur, Amy aperçut

Meg et Talsk. Talsk était en train de montrer à Meg un

immense papillon qui ne devait pas mesurer moins de trente

centimètres de haut. Amy n’avait jamais rien vu d’aussi

coloré. Il brillait de mille nuances bariolées qu’Amy n’avait

jamais vues auparavant. Amy éclata de rire lorsque le

papillon se posa sur la tête de Meg. Les antennes écartèrent

la frange du front de la jeune femme. Elle put voir Meg

émettre un petit rire lorsque la créature la caressa du bout de

ses pattes.

Quand les bras de Dasks se posèrent autour d’elle, Amy

se blottit contre lui. Elle fut étonnée de voir une biche surgir


115

brusquement du buisson devant la fenêtre. Elle s’approcha

sans crainte de Talsk et bientôt, il tapotait doucement la tête

de l’animal.

« Nous avons rapporté quelques animaux terrestres.

Rien de dangereux pour nos femelles. »

« Comment se fait-il que la biche n’ait pas peur ? »

s’émerveilla Amy. « Elle est chassée par les hommes depuis

toujours, sur Terre, et au cours de l’année passée, les choses

ont dû nettement se gâter. »

« L’animal sent nos intentions. Talsk est amoureux de

ces créatures

choses dernièrement. La biche peut sans nul doute ressentir

son intention. Je crois que si elle savait que Talsk meurt

d’envie de la câliner, la pauvre petite chose partirait au

galop. »

Amy gloussa et Dasks rit tout bas. Le compagnon

d’armes de Dasks était un gros nounours. Pas étonnant que

Meg soit amoureuse de lui. Amy l’adorait elle aussi. Talsk

jetait souvent des coups d’œil à Amy quand il se trouvait

dans sa présence. Amy savait qu’il sentait la frustration de

Dasks. La plupart du temps, Talsk ne disait rien, mais à

quelques reprises, Amy avait perçu son agacement à l’égard

de son compagnon d’armes. Meg avait toujours su détourner

l’air de rien l’attention de Talsk en ces occasions. Amy

s’était ouverte à Meg à propos de ses craintes. Son amie

n’avait su que lui dire. C’était la décision d’Amy et de

Dasks ; Meg les soutiendrait quelle qu’elle soit.

« L’un des guerriers a pratiquement supplié Cobra de le

laisser emporter un tigre », dit Dasks. « Cobra a refusé, car il

s’inquiétait pour les femelles. Un tigre ne causerait aucun

mal à un guerrier castien et ferait un excellent animal de


116

compagnie. Comme compromis, Cobra a promis de

programmer un tigre en hologramme. Je crois qu’il était lui

aussi très intrigué par cette bête à crocs. Alors sache-le. Tout

tigre ou toute panthère que tu peux voir ne sont que des

images et ne te feront aucun mal. »

« Mais tu as dit que les Slocks vous grignotaient les

orteils. »

« C’était juste un divertissement pour les guerriers

castiens. Une farce. Je dois reconnaître que c’est puéril, mais

nous nous ennuyions. Sans femmes, les journées étaient

assez ternes pour les guerriers qui ne les avaient pas

oubliées. Nous avons inventé de nombreux animaux

étranges avec de réelles capacités, pour nous divertir et nous

occuper. Beaucoup de choses ont été désactivées depuis, ou

reprogrammées. Mais sans ces petits soucis liés aux Slocks,

nous n’aurions jamais inventé les produits chimiques pour

les repousser et ainsi trouvé ces eaux curatives si efficaces

pour les femelles. Ils ont mis à l’épreuve notre inventivité.

Nous avons grandi. »

« Peut-être pouvons-nous inventer d’autres procédés

curatifs », hasarda Amy.

« Notre union pourrait te guérir », avança à nouveau

Dasks.

« Ou te tuer. »

Dasks soupira et l’attira dans ses bras. Aussitôt, Amy

sentit une chaude moiteur émaner de son torse et pénétrer

dans sa joue. Sa sueur n’avait pas d’odeur, mais la faisait

toujours se sentir tiède et en sécurité. Amy inclina la tête en

arrière pour lever les yeux vers lui.

« Je ne veux pas passer le temps qui me reste avec toi à

songer au probable et au possible. Regardons juste ce qui est.


117

Je ne sais pas de combien de temps je dispose. Tout ce que

je sais est que sans toi, mes derniers jours n’auraient été que

torture. Merci de m’avoir sauvée de ces hommes. Merci de

m’avoir emmenée ici. Ne me demande pas ce que je ne suis

pas en mesure de te donner. Tout le reste t’appartient jusqu’à

mon dernier souffle. »

« Alors faisons en sorte que ces derniers souffles soient

les plus heureux de ta vie », dit Dasks, affichant un sourire

triste.

Amy leva la main vers son visage, qu’elle effleura. « À

quoi penses-tu ? » demanda-t-elle.

« Que les humains ne bénéficient que d’une vie si

courte. Comment avez-vous même le temps de créer des

liens ? »

Amy sourit. « Les guerriers castiens peuvent ressentir

les émotions, mais quelque chose me dit que les humains

ressentent les émotions de façon plus intense. »

Dasks acquiesça. « Peut-être. Au début, toutes les

émotions que j’ai reçues venant de toi ont failli me rendre

fou. »

Amy eut un petit rire. « Elles rendent la plupart des

hommes fous. »

« Quand nous faisons l’amour, il y a une puissante

odeur qui émane de toi. Une émotion d’ironie. Pourquoi

ressens-tu cette émotion pendant l’amour ? »

« Nous faisons l’amour comme si nous ne le ferons plus

jamais. Vivre comme si on allait mourir, j’imagine, revient

aussi à aimer comme si c’était la dernière fois. Comme c’est

le cas, ça explique peut-être mon odeur. »

« Comment ferais-tu l’amour autrement ? »


118

Pour Amy, il avait l’air amusé par l’idée mais attristé

par la vérité qu’elle sous-entendait.

« Et bien », dit-elle sur un ton enjoué. Elle avait envie

de s’amuser et d’ôter la tristesse de son visage. « D’abord, je

trouverais un endroit épatant, comme une planète étrangère.

Oh

le plus sexy qui existe. Oh, déjà fait aussi. Puis je

demanderais à l’homme le plus sexy du monde de me

trouver son endroit favori et de m’y emmener, et nous

pourrions alors nous donner du plaisir l’un à l’autre. »

Amy vit la mâchoire de Dasks tressauter.

Son armure se referma sur lui avec une vitesse

fulgurante. Amy glapit lorsque Dasks la jeta par-dessus son

épaule. Une fois dehors, Dasks fusa à une vitesse

vertigineuse. Ils s’enfoncèrent au plus profond de la forêt, en

bondissant sur les arbres et le sol spongieux. Lorsque Dasks

ralentit l’allure et la déposa sur ses jambes, c’était Amy qui

était à bout de souffle.

Troublée, Amy posa une main sur sa poitrine. « Il

devrait y avoir une étiquette sur chaque Castien : attention,

grande vitesse. »

Dasks lui sourit et lui prit la main. Il la conduisit jusque

dans une grotte.

Amy jeta autour d’elle un regard curieux. Le sol était

toujours spongieux et ce n’était nettement pas aussi sombre à

l’intérieur qu’elle ne l’aurait cru. Elle comprit pourquoi. Les

murs étaient d’un rose pastel. Des cristaux brillaient sur les

murs de la grotte pour l’éclairer. Amy en effleura un.

Curieusement, c’était doux, comme de l’écume. Pourtant, on

aurait dit des pierres rugueuses. Ils s’enfoncèrent plus avant

dans la caverne. Amy entendit de l’eau.


119

« Est-ce ton eau curative ? » demanda-t-elle.

De la vapeur s’élevait en un nuage autour des pierres

pastel du sol qui formaient un réservoir d’eau claire. Tout le

bassin était illuminé et brillait. L’air était tiède. Amy sentit

des mains sur ses épaules, qui firent glisser sa courte

chemise sur sa taille puis ses hanches. Elle portait un

pantalon qui lui arrivait aux genoux. Les mains de Dasks

vinrent par-derrière pour se poser sur ses seins.

« Non, ce ne sont pas des eaux curatives. C’est un

hologramme. »

« Mais on dirait que c’est réel. »

« Pourtant ça te donnera l’impression d’être réel, crois-

moi. C’étaient les eaux de Bagron qui étaient empoisonnées.

Pas celles-ci. »

Amy se retourna pour regarder Dasks dans les yeux. Le

regard intense de Dasks se posa sur elle. « Que veux-tu

faire ? » murmura-t-elle.

« Les Castiens prennent une femelle par-derrière quand

ils s’unissent à elle, pour qu’elle puisse être marquée. Je

veux t’avoir comme ça. L’eau ne te guérira pas donc je ne

serai pas tenté de te marquer. Je crois que tu vas aimer ce

bassin-là. Il ne guérit pas, mais il a d’autres qualités

spéciales que tu peux trouver intéressantes. »

Amy frissonna lorsque ses mains se posèrent à nouveau

sur ses seins. Ses doigts se mirent à jouer avec ses tétons.

Amy enleva son pantalon. Lorsque Dasks ôta le sien, ils

restèrent debout et se regardèrent. Amy se posait des

questions sur ses sécrétions. Ce n’était pas étonnant que les

humains aient des larmes. En un sens, leurs yeux absorbaient

les émotions. Elle pouvait voir ce qu’il ressentait. Les yeux

d’Amy étaient remplis de sa beauté.


120

Amy fit un pas en avant vers Dasks et fit courir sa main

sur son torse. Elle savait que si elle appuyait son doigt sur sa

peau douce, elle sentirait l’armure en dessous. Elle prit sa

main et la souleva pour l’observer. Ses ongles étaient d’un

blanc pur mais à part cela, elle était normale. Elle était

exceptionnellement grande mais pas non plus bizarre.

Baissant les yeux sur ses pieds, elle constata qu’eux aussi

étaient normaux, si ce n’est plus grands et plus larges. Ils lui

allaient bien.

En se penchant, Amy le huma comme il avait l’habitude

de le faire avec elle. Il sentait la nature, un parfum de pin qui

dégageait une odeur mâle musquée. Quand elle sortit sa

langue pour le goûter, il frissonna. Elle savait qu’il pouvait

sentir ses émotions par le simple goût. Amy était excitée.

Elle était bouillante pour lui et il le savait.

Dasks s’avança, la faisant reculer. Quand ils atteignirent

le bassin, Amy saisit sa queue déjà bien dure. Dasks appuya

sur ses épaules et Amy recula dans l’eau. Elle entra dans

l’eau tandis que Dasks restait devant elle jusqu’à ce que son

visage soit au niveau de son érection. Ses mains glissaient

toujours sur son membre généreux. De petits baisers de haut

en bas sur toute sa longueur et elle entendit sa respiration

s’accélérer.

Lorsqu’Amy enroula ses lèvres autour de lui, les mains

de Dasks se raidirent dans ses cheveux. Quand Dasks se

baissa, Amy s’enfonça dans l’eau. À ses pieds se trouvaient

d’autres pierres douces. Il était à genoux, les jambes

écartées, et Amy était appuyée contre le rebord du bassin

pour atteindre toute sa longueur. Tandis que sa bouche

glissait sur et autour de lui, Amy pouvait sentir les pierres lui

masser les seins, et elle bougea avec elles. Une autre lui


121

pressa le clitoris, et elle tortilla ses hanches pour se

rapprocher. Plus elle suçait le sexe de Dasks et plus elle

sentait les pierres contre elle, poussant contre son orifice.

Amy n’avait jamais utilisé de vibromasseur ; elle se dit que

ce devait être ce que l’on ressentait avec. C’était presque

trop.

Dasks lui empoigna les poignets d’une main avant

qu’elle se redresse. Il enfonça l’autre dans ses cheveux et lui

fit accélérer le rythme. Une partie de la pierre douce

bougeait en elle. La substance mousseuse changeait de forme

pour mieux s’accommoder et prendre une épaisseur parfaite.

Elle s’enfonça en elle. Parce que la pierre changeait de

forme, son clitoris était sans cesse sollicité tandis qu’elle se

pressait contre elle. Ses seins étaient comprimés contre le

rebord du bassin mais encore une fois, ils étaient caressés

par la substance étrange.

La matière glissait en elle au fur et à mesure qu’Amy

bougeait d’avant en arrière.

La main de Dasks sur ses poignets était gluante des

sécrétions qui l’apaisaient tant.

Amy n’avait pas peur, elle était juste surprise. La

substance s’enfonça encore plus profondément quand elle se

détendit. Lorsqu’elle sentit qu’elle ne pouvait pas en

supporter davantage, Dasks augmenta la cadence. Sa queue

s’enfonçait encore plus dans sa bouche. Ses poings se

serrèrent lorsqu’elle sentit son orgasme arriver. Amy ne

parvint pas à croire qu’elle jouissait réellement de cette

façon.

Elle cherchait son souffle lorsque Dasks se retira lui-

même de sa bouche et sauta dans l’eau derrière elle. Il la

maintint dans la position dans laquelle elle se trouvait pour


122

que tout son corps vienne frotter contre son dos. Amy fut

ensuite soulevée ; la pierre en forme de sexe sortit. Ses pieds

se posèrent sur des pierres plus hautes pour qu’elle se

retrouve à la même hauteur que Dasks. Les pierres du bassin

se modifièrent pour envelopper ses pieds et Amy ne put plus

bouger. Dans cette position, la substance douce ne la

pénétrait plus, mais d’autres pierres la caressaient toujours et

massaient ses tétons.

La queue de Dasks se pressa contre son orifice chaud et,

en un grand coup, il s’enfonça en elle. La pierre près d’elle

appuya contre son clitoris et la titilla. Amy n’y tint plus, elle

hurla. C’était comme si plusieurs partenaires lui faisaient

plaisir en même temps. Tous voulaient qu’elle leur donne

tout ce qu’elle avait.

Dasks était vraiment dur. La pierre était ferme et douce

contre son clitoris et ses seins. Dasks accéléra le

mouvement. Amy faisait de son mieux pour respirer. Elle

sentit ses mains chaudes sur ses épaules. Ses sécrétions la

pénétraient, à la fois apaisantes et stimulantes. C’était

fantastique. Elle était submergée, ressentant orgasme sur

orgasme comme des vagues successives de plaisir. Amy

sentit les dents de Dasks dans sa gorge. Les vagues qui se

succédaient devinrent des raz-de-marée. Les genoux d’Amy

se dérobèrent et, lorsqu’elle fut poussée plus fort, l’étrange

substance pierreuse se referma sur ses genoux pour la

maintenir droite.

Amy sentit Dasks se retirer d’elle, elle savait qu’il allait

jouir. Il sortit et elle sentit un instant une pointe de déception

jusqu’à ce que ses hanches reviennent buter encore plus fort

contre elle. Amy sentit la douce substance se frayer à


123

nouveau un chemin en elle et elle jouit une fois de plus

tandis que Dasks se frottait contre elle.

« Oh, mon Dieu, c’était incroyable », chuchota Amy.

« Je suis ravi que tu aies aimé », haleta Dasks. « Parce

qu’on va recommencer. Je veux que tu te sentes vivante

chaque seconde de ta vie avec moi. »

* * * *

Pendant des semaines, Amy s’était réveillée en ayant

l’impression d’être une princesse. Dasks s’assurait que son

petit déjeuner l’attendait avant qu’il ne parte au travail. Une

fleur appelée fleur d’Effie était déposée pour elle chaque

matin. Dasks lui avait dit qu’elle lui rappelait cette belle

fleur blanche à l’odeur entêtante.

Pendant son temps libre, Dasks l’emmenait pique-

niquer au sommet des arbres. Elle les trouvait magnifiques,

malgré sa peur des hauteurs. C’était comme pénétrer dans un

nouveau monde de branches entrelacées.

Bientôt, elle courait après Dasks, Meg et Talsk dans les

branches et jouait à cache-cache sous les feuilles épaisses.

Ils allaient nager seuls dans des lacs et des courants où

de véritables éléphants se baignaient et batifolaient. Des

grues et des hérons atterrissaient. Des canards

s’interpellaient. Amy trouvait triste que si peu d’animaux

aient réchappé à la dévastation de la Terre. Dasks était plus

positif. Il disait que les hologrammes des créatures

dureraient des milliers d’années, contribuant à

l’enchantement de Dargon. Dasks disait qu’Amy contribuait

à l’enchantement de Dargon.

Ils faisaient l’amour tendrement, délicatement, et

souvent. Ils retournaient à la grotte spéciale de Dasks de


124

temps en temps, quand il sentait qu’il avait besoin de la

marquer mais savait qu’il ne le pouvait pas.

Pour le plus grand amusement d’Amy, Dasks s’était mis

à regarder de vieux films terriens des années cinquante. Il

l’avait appelée « madame » une fois

Le feu était interdit sur Dargon ; le sol spongieux était

trop vulnérable. Dasks improvisait et dupliquait des lampes

qui ressemblaient à des bougies. Il avait conduit Amy aux

eaux curatives, dans l’espace de bain commun et, d’un grand

geste, avait lancé une poignée de pétales dans l’eau. Dasks

avait regardé, bouche bée et avec horreur, l’eau s’attaquer à

ces éléments étrangers et les profaner sans états d’âme. Amy

avait hurlé de rire puis l’avait embrassé jusqu’à ce qu’ils en

perdent tous deux la respiration.

Toutes les nuits, Amy allait se coucher le sourire aux

lèvres grâce à Dasks. Elle se pelotonnait dans ses bras et lui

racontait les meilleurs moments de sa journée tout en

remerciant son grand Seigneur de Dargon pour l’existence

de Dasks. Elle pouvait voir que vivre chaque jour comme si

c’était le dernier l’affectait. Elle le sentait quand il la serrait

dans ses bras. Dasks s’accrochait avec une telle force que

c’était comme s’il défiait la mort de la prendre. Amy

l’apaisait par de tendres caresses. Et quand elle pensait qu’il

s’endormait, elle effleurait discrètement son sein et se

retenait de pleurer.


125

Chapitre 8

Amy était à l’extérieur, loin de l’arbre qui abritait son

foyer. Elle levait les yeux. Quelques instants plus tôt, une

alarme assourdissante avait résonné pour avertir d’une

attaque imminente. Comme en cas de feu, Cobra avait lancé

peu de temps après leur arrivée une fausse alerte pour

familiariser les nouveaux habitants au son. Cette fois, le

doute n’était pas permis. Ce n’était pas un exercice. Deux

ombres grises massives et menaçantes flottaient dans le ciel,

assombrissant le sol en dessous. Dargon était attaqué. Les

vaisseaux s’étaient matérialisés, sortant de nulle part. Leurs

dispositifs de protection avaient dû changer pour parvenir à

nouveau à pénétrer l’atmosphère sans se faire repérer. Les

vaisseaux planaient, juste au-dessus de la cime des arbres.

Amy pouvait entendre chaque souffle qu’elle expirait.

Elle mit ses pieds en mouvement et courut rejoindre les

autres à couvert. Où qu’elle regarde, les guerriers castiens

attrapaient leurs compagnes femelles.

Les armures se refermaient autour d’eux, enveloppant

les couples comme du métal en fusion. Les femmes étaient à

l’abri des dangereuses explosions qui éclaboussaient à peine

les armures castiennes. Des éclats de lumière produisaient

dans les airs une succession de petites explosions pour

désarçonner les guerriers. Mais ces derniers s’éloignaient des


126

boules de feu sans la moindre marque. Des ordres étaient

lancés et bientôt un nouveau vaisseau rejoignit les deux

autres dans les airs… C’était un oiseau de proie castien. Les

vaisseaux s’engagèrent dans une bataille féroce.

Amy se précipita dans son refuge en forme de

champignon, en espérant que la protection s’était remise en

place. Après avoir essayé de reconfigurer leur dispositif de

camouflage, les Castiens avaient opté pour garder leurs

protections rétractées pendant une journée. Ils ne s’étaient

pas attendus à un assaut si rapide.

Des explosions entouraient Amy. Les Toniens

attaquaient pour se venger. Ils devaient sans doute avoir eu

connaissance de la vulnérabilité de cet endroit en particulier.

Cela signifiait qu’il devait y avoir un traître dans leurs rangs.

Qui que ce soit, il devait être extrêmement habile à ce jeu

pour s’être infiltré parmi ces guerriers castiens hyper-

sensibles.

Derrière elle, Amy pouvait voir les êtres tout en muscles

et revêtus d’armures grises atterrir sur le sol. Une porte

s’ouvrit et les Toniens se frayèrent un chemin, sur les arbres

et à terre, à une allure folle. Le cœur d’Amy battait la

chamade lorsqu’elle entra dans la chambre de Dasks. Elle

chercha fiévreusement un endroit où se cacher. Il n’y avait

rien. Dasks était avec Cobra, Rask et Talsk. Leah et Grace

étaient à l’abri. Les enfants avaient dû être aussitôt

enveloppés par la protection du guerrier le plus proche

d’eux. Amy s’inquiétait pour Meg.

Un petit bruit se fit entendre. Elle fit volte-face et se

retrouva confrontée à son pire cauchemar.

Un guerrier tonien s’approchait d’elle à pas lents.


127

Les yeux grands ouverts, Amy recula lentement. De tout

son esprit, elle appelait Dasks. Elle prit alors conscience que

si elle avait été sa compagne, il aurait su exactement où elle

se trouvait et dans quel état elle était. Dasks aurait été

capable de la retrouver n’importe où, ou sur n’importe quel

monde.

« Pas de compagnon ? » demanda le Tonien.

Amy sentit la chair de poule la parcourir ; les mots

semblaient avoir déserté sa bouche.

« Dasks arrive », articula-t-elle, sans trop de bravade et

en bégayant.

Le Tonien prit une profonde inspiration. « Tu n’as pas

non plus de rejetons. Intéressant. Alors pourquoi un mâle

castien laisserait-il sans défense et toute seule un petit lot tel

que toi ? »

« Je suis mourante », lança Amy. « Je ne vous suis

d’aucune utilité. »

« Peut-être pour ton guerrier mâle. Mais pour moi, tu

n’as pas de prix. Nos Castiens captifs adoreront t’avoir à

bord. Si tu ne fais pas l’affaire en tant que compagne, ils

n’auront aucun scrupule à te partager. »

Amy se mit à trembler. Le Tonien la traquait.

« Allez-vous-en », ordonna-t-elle.

« Une humaine courageuse. Comme c’est

rafraîchissant. »

« Un Tonien sans compassion, comme c’est

prévisible. »

Le Tonien ricana. « Nous n’avons pas tous été doués de

compassion à la naissance. Quelques-uns d’entre nous ont

pris des compagnes humaines. Elles nous trouvent

agréables. »


128

« Je suis sûre que vous êtes un vrai tombeur », dit-elle

d’un ton sarcastique.

« Tu es une petite chose amusante. Si tu viens de ton

plein gré, je te garderai peut-être même pour moi », dit le

Tonien. « Ton guerrier castien ne veut pas de toi. N’est-ce

pas évident ? Depuis combien de temps es-tu avec lui ? Des

semaines ? Un mois ou plus ? Il devrait savoir à quel point ta

situation est dangereuse sans cuirasse. Ils ont même abaissé

leurs protections, comme pour une invitation. Et maintenant

tu te retrouves là, sans défense et apeurée. Je peux sentir ta

peur. Et ils disent que c’est nous qui sommes cruels. Pauvre

petite chose. Je sens bien que tu perds courage à chaque pas

que je fais. »

« Allez-vous-en », fit Amy, d’une voix encore plus

calme.

Le Tonien huma à nouveau l’air environnant. « Tu

m’intoxiques. Ta peur me remplit en ce moment. Je peux te

donner un enfant, une chance pour toi de vivre quatre ans de

plus quelle que soit ta maladie. »

« Vous mentez », cracha Amy. « Les Toniens sont trop

égoïstes. Ils ne partageraient pas leur armure même avec leur

propre enfant. »

« Je pourrais faire une exception. »

Il était sur elle.

Amy ne pouvait pas lutter. Des serres l’empoignèrent

fermement. Sa queue s’enroula autour de ses chevilles et tira

violemment. Elle bascula et serait tombée s’il ne l’avait pas

maintenue droite. Le Tonien était presque aussi grand que

Dasks. Lui aussi avait un tatouage sur le visage, mais le sien

son cou et exerça une faible pression. Amy pouvait entendre


129

l’être produire des cliquetis au fond de sa gorge. Sa tête se

baissa pour respirer son odeur.

« Quelle adorable petite chose », gloussa-t-il.

« Lâche-la. » Un grondement monta derrière eux.

« Dasks. » Amy en pleura de soulagement.

Le Tonien fit volte-face, l’entraînant avec lui. « Celle-ci

n’appartient à personne, elle est à moi maintenant », grogna

le Tonien.

Dasks ne répondit même pas. Il s’avança et essaya

d’arracher Amy de sa poigne.

Amy hurla, les deux mâles en armure refusaient de la

lâcher. Elle se sentait déchirée par ce jeu de tir à la corde.

Dasks griffa le Tonien au visage.

Le Tonien pesta lorsqu’une partie de son armure lui fit

défaut et qu’une bande rouge apparut, déchirée, juste un

instant sur sa joue. Son armure se remit en place en claquant.

Dasks s’abattit lourdement et coupa la queue en deux.

Le Tonien poussa un nouveau hurlement et le morceau

de queue qui tenait les chevilles d’Amy retomba en petit tas.

« Nous allons plonger d’autres parties d’Onvra dans les

ténèbres », menaça Dasks. « Jusqu’à ce que plus aucun

d’entre vous puissiez garder votre armure. Je peux sentir ta

faiblesse. »

« Les Castiens continuent à se battre sans honneur »,

glapit le Tonien. « -la. »

Le souffle d’Amy fut coupé lorsque quatre serres

s’enfoncèrent dans son ventre comme un couteau tiède dans

du beurre mou. Sa bouche s’ouvrit et se referma tandis

qu’elle cherchait désespérément l’air. Ses yeux se posèrent

sur le visage gris dénué d’expression. Pourquoi ? Qu’avait-

elle fait pour mériter ce qu’il venait de lui infliger ?


130

Le Tonien la jeta dans les bras de Dasks.

Amy vit le sang s’écouler de ses blessures. Ses ongles

s’agrippèrent à l’armure de Dasks. Elle savait qu’elle perdait

du sang, elle savait qu’elle avait mal, mais elle n’arrivait pas

à parler

Dasks laissa éclater sa rage pour deux.

Le Tonien balança une griffe pour frapper à nouveau,

mais Dasks para le coup et, d’un seul bras, il la projeta. Amy

se sentit voler dans les airs, par-dessus la tête du Tonien. Le

vent balayait ses cheveux. Pendant le temps qu’elle resta

portée par les airs, Dasks et le Tonien combattirent

âprement.

Amy atterrit dans les eaux curatives de la pièce voisine,

dans une gerbe d’éclaboussures. Elle coula jusqu’au fond,

vidée de son énergie, incapable de remonter à la surface. Un

cercle ensanglanté l’entourait. L’eau s’attaqua à sa plaie. Le

bassin se mit à tourbillonner, tout était flou. Des bulles se

refermèrent autour d’elle. Amy sentait l’eau en elle. L’eau

livrait bataille contre sa blessure. Les sensations qu’elle

provoquait dans et hors de sa peau, tissant sa chair déchirée,

la raccommodant frénétiquement, étaient répugnantes. Elle

ne pouvait que rester assise, les fesses posées sur le fond

moelleux du bassin, capable de rien d’autre.

La douleur commença à s’apaiser. L’attaque ralentit et

se mua en un doux mouvement caressant. Quelques bulles

capricieuses éclataient et flottaient, emportées par un léger

courant. Et au moment où Amy crut qu’elle allait mourir

d’asphyxie, les bulles cessèrent. Un gros objet s’écrasa dans

le bassin, la faisant onduler. Elle sentit les mains de Dasks la

tirer à la surface. Amy inspira de grosses bouffées d’air.


131

« Dasks. » Il n’avait pas d’armure. Elle regarda derrière

lui, dans l’autre pièce. Le Tonien avait disparu.

« Laisse-moi regarder », demanda Dasks.

Dasks la souleva et vérifia l’état de ses blessures. Seuls

quatre points de suture restaient visibles.

Amy déglutit à grand-peine.

« Elle va bien ? » demanda Talsk.

Dasks enfouit sa tête dans sa chevelure mouillée. « Elle

va bien. »

« Meg ? » demanda Amy, inquiète.

« Elle va bien elle aussi », dit Talsk. Ses yeux étaient

fixés sur ceux de Dasks, ils étaient empreints de colère.

« Elle porte mon bébé, alors rien ne peut lui faire du mal. »

« Dieu merci », chuchota Amy.

Amy n’avait pas besoin de savoir sentir pour percevoir

l’animosité qui émanait de Talsk vis-à-vis de Dasks. Elle

savait pourquoi il était en colère. C’était sa faute, pas celle

de Dasks.

« Je suis mourante, Talsk », fit Amy calmement.

« Dasks ne s’est pas uni à moi parce que je pourrais le tuer.

Ce n’était pas de sa faute. Je l’ai refusé. »

Talsk avait l’air abasourdi. « Les eaux curatives… »

« Elles ne guérissent pas cette maladie appelée cancer »,

dit Dasks.

Talsk avait l’air dévasté.

Un raclement de gorge se fit entendre en provenance de

l’entrée.

Ils regardèrent tous en direction de Cobra, qui se tenait

là.

« Cobra, je peux tout expliquer. » Dasks tituba un

instant, souleva Amy et bondit hors de l’eau.


132

« Tu aurais dû venir me voir », dit Cobra.

« J’avais peur », balbutia Dasks.

« Tu as eu peur que je la laisse sur Terre. »

C’était une affirmation. Dasks n’essaya pas de la nier.

C’était la vérité.

« C’est de ma faute », dit Amy doucement. « Je suis

mourante, Cobra. J’ai supplié Dasks de ne pas s’unir à moi.

Les eaux curatives ne fonctionnent pas. Je ne veux pas le

tuer. »

Dasks la serra vivement contre sa poitrine.

Amy était certaine qu’il avait peur qu’on l’arrache à lui.

« Ce n’est pas de ta faute », dit Cobra. « J’aimerais

pouvoir te dire que si vous vous unissez tu seras guérie.

Mais je n’en suis pas sûr. Nous n’avons pas pu sauver nos

propres femmes du poison. »

« Mais, Cobra », dit Dasks, « nous ignorons ce qui va se

passer. Personne ne savait quand les cuirasses des bébés

disparaîtraient. Personne n’était certain du moment où les

femmes arrêteraient d’allaiter. Si leurs compagnons avaient

été présents à ce moment précis, qui sait si leurs armures ne

les auraient pas prises et soignées ? »

Cobra secoua la tête. « Tu t’accroches, Dasks. Mais

c’est toujours trop incertain. Tu pourrais mourir. »

« Mais elle pourrait vivre », dit Dasks avec désespoir.

Cobra regarda Amy. Son expression était tendre. « Je

me rends sur notre planète maternelle. Leah et les enfants

viennent avec moi. Elle pourrait avoir besoin de ton aide,

Amy. Tu seras plus en sécurité sur Bagron, sans cuirasse.

Dargon en est toujours à son stade primitif. Ses défenses

sont trop incertaines, et des guerriers castiens sont toujours

prisonniers sur Onvra. Seuls les hommes en couple, dont les


133

femelles attendent des enfants et sont donc sont invincibles,

peuvent rester ici. Aussi longtemps que tu vivras, je

m’assurerai que l’on s’occupe bien de toi. »

« Cobra… » dit Dasks.

Le regard de Cobra se durcit. « Elle a failli mourir

aujourd’hui. Tu savais que la protection avait été

endommagée. Au moment où les alarmes se sont

déclenchées, tu as décollé. Tu n’as rien dit. Je te tiens pour

l’unique responsable de cet incident. Tu ne peux pas utiliser

ton armure pour la protéger. Tu ne peux pas t’unir à elle

parce que tu risques de mourir. Je peux la tenir à l’écart des

guerriers, chez moi. Je suis désormais responsable de son

bien-être. Tu pars avec le prochain vaisseau pour Onvra. »

Cobra tourna les talons et partit. Dasks paraissait

dévasté. Amy sentit son cœur se briser.

* * * *

« Dasks ? »

Lorsqu’il entra dans leur chambre, il resta debout à la

regarder. Amy lui sourit. L’eau de Bagron avait fini par être

purifiée. Amy ne risquait pas d’être empoisonnée. Elle était

reconnaissante envers Cobra de lui offrir un nouveau foyer.

Elle aimait beaucoup Leah et ses enfants. L’arrivée du bébé

allait occuper toute la maisonnée. Leah affirmait qu’elle se

sentait merveilleusement bien. En fait, elle ne s’était jamais

sentie aussi bien de toute sa vie. Amy était heureuse pour

elle.

Depuis que Grace avait donné naissance à sa fille, toutes

les femmes enceintes se sentaient rassurées. Pas étonnant

qu’ils n’aient aucun besoin de médecins.

Amy n’avait jamais assisté à un accouchement si

étonnant et sans douleur.


134

Grace avait déclaré n’avoir ressenti aucune douleur ni

aucune gêne.

Cobra leur avait expliqué que cela venait de la cuirasse.

Si la mère n’allait pas bien, la cuirasse se mettait en place et

le bébé ne sortait pas. Sans douleur, le bébé était doucement

poussé hors de l’utérus. Pendant les vingt-quatre heures

suivantes, la cuirasse était dressée. Personne n’était autorisé

à s’approcher de la mère et de l’enfant, pendant qu’ils

dormaient, qu’ils faisaient connaissance et que le bébé se

nourrissait.

Plus tard, seul Rask fut autorisé à s’approcher.

« C’est la meilleure chose à faire », Amy expliqua à

Dasks. « Je serai en sécurité avec Cobra sur votre planète. Tu

pourras aller sur Onvra et sauver d’autres Castiens et des

femelles humaines. Tu pourras trouver une vraie compagne.

Tu le mérites. Je veux que ça t’arrive ; je veux que tu sois

heureux et que tu trouves le bonheur. »

Dasks s’avança et la prit dans ses bras. « Je t’aime,

Amy. »

« Et je t’aime aussi. » Elle se pencha en arrière et écarta

une mèche de ses cheveux. Il était si beau. Son cœur se

serrait à la pensée de devoir le quitter. Mais elle aurait

encore plus mal si elle devait le tuer.

« Je veux te faire l’amour », dit Dasks.

« Une dernière fois, mon amour. Pour que tu te

souviennes de moi », accepta Amy.

Dasks la souleva tendrement dans ses bras et la déposa

sur le lit. Il prit sa chemise à pleine main et la lui arracha

avec une lenteur minutieuse. Tandis que le tissu se déchirait,

ses yeux ne quittaient pas les siens. Il semblait si intense, si

résolu. Amy savait que c’était pour le mieux. C’était une


135

bonne façon de se dire… au revoir. Elle serait bientôt morte

à ses yeux. La pensée lui fit monter les larmes aux yeux.

Dasks était sur elle. Tout son poids était sur un bras

tandis que de l’autre, il la serrait contre elle. Il inspira son

parfum. De sa langue, il lui lécha le cou et remonta jusqu’à

sa mâchoire.

Amy enfouit ses mains dans ses cheveux. Quand leurs

lèvres se rencontrèrent, elles lui laissèrent un petit goût

sucré. Amy fit glisser sa langue sur la sienne et fut aussitôt

submergée par ses sécrétions de plaisir. Elle mordilla sa

lèvre inférieure, l’attirant contre elle.

Amy sentit les mains de Dasks descendre pour lui

écarter les jambes. Son torse puissant et nu était pressé

contre le sien, appuyant contre ses seins. Amy passa ses bras

autour de lui, le serrant aussi fort qu’elle le put. Le sexe dur

de Dasks entra en elle et il se mit à bouger avec force. Amy

enroula ses jambes autour de lui et s’accrocha. Elle gémit

lorsqu’il commença à venir buter contre elle. Dasks semblait

vouloir la posséder comme si sa vie en dépendait. Elle

cambrait le dos sous ses coups bestiaux. Aucun homme ne

s’approcherait plus de Dasks et elle décida ici et maintenant

que ce serait la dernière fois qu’elle permettrait à un homme

de s’approcher d’elle. Elle mourrait avec l’image de Dasks à

l’esprit.

Dasks la retourna sous lui. Elle ne s’en inquiéta pas. Il

l’avait prise ainsi assez souvent dans la grotte. Il resta

enfoncé en elle et pendant quelques instants, ses mains

caressèrent l’arrondi de sa croupe. Il glissa une main sous

elle, qu’il cala entre ses seins. Ses coups frénétiques

ralentirent et Amy put le sentir se remplir. Elle se retint tant

qu’elle put, pour que cette dernière expérience lui dure le


136

restant de sa courte vie. Enfin, elle n’en put plus. Ses parois

internes ne pouvaient pas s’étirer davantage, à moins qu’elle

ne soit complètement apaisée. Amy hurla. Elle sentit les

crocs de Dasks s’enfoncer dans son épaule. Son corps

s’effondra, mais elle pouvait le sentir bouger. Elle sentait le

roulement de ses hanches, d’avant en arrière, se reposant

parfois contre l’arrière de ses cuisses.

Amy perçut son souffle chaud sur sa nuque, comme il

continuait à la lécher. C’était une sensation si agréable.

Encore une fois, elle sentit sa morsure. Amy commençait à

être fatiguée. Les mouvements de Dasks étaient si doux et

attentionnés. Alors qu’elle sombrait dans le sommeil, elle

entendit Dasks lui dire que tout se passerait bien. Il lui disait

qu’il l’aimait. Elle sourit ; elle le savait déjà. Elle pouvait

ressentir son amour.


137

Épilogue

Amy voyait les météorites exploser autour d’elle. Elle se

tenait dans la brèche de sa grotte, sur Terre, à regarder à

l’extérieur, comme elle le faisait les nuits où elle ne

réussissait pas à dormir. Quand elle regarda derrière elle, la

caverne était sombre, vide. Elle était seule. Il ne restait

personne à part elle. Dasks n’était plus qu’un doux souvenir.

Après avoir découvert qu’elle avait le cancer, ils l’avaient

abandonnée sur la Terre à une mort solitaire. Dasks était en

sécurité, c’était tout ce qui comptait. Elle avait ses fantasmes

pour lui tenir compagnie. La douceur avec laquelle il lui

faisait l’amour. La façon dont ses yeux brillaient d’amour et

de tendresse. C’était quelque chose qu’elle emporterait avec

elle dans sa tombe.

« C’est donc à ça que tu rêves », dit une voix. « Tu

penses si peu à moi ? »

Amy sortit de la grotte. Elle sourit à Dasks en se

demandant ce qu’il fais

« Je pense tant à toi. Tu es parti. Je ne t’ai pas tué, mon

amour. »

Dasks soupira bruyamment. Il leva les doigts pour lui

caresser la joue. « C’est donc habituellement de ça que je

dois te réveiller ? »


138

Amy regarda alentour. Une autre météorite s’écrasa en

explosant. La Terre était plongée presque intégralement dans

le noir. Sans la lueur des météorites, l’obscurité serait totale.

Elle se sentait troublée. Ses doigts capturèrent les siens et

elle déposa un baiser sur sa main.

« Que veux-tu dire par “je dois te réveiller” ? »

« Tu es en train de rêver, Amy. »

« Non », articula-t-elle.

Dasks l’attira contre son torse. « Ferme les yeux. »

Amy obéit. Elle eut l’étrange impression de bouger, et

pourtant ses pieds restaient immobiles. Quand Dasks le lui

demanda, elle ouvrit les yeux, et elle en resta bouche bée. Ils

étaient au sommet d’un arbre, sur Dargon. Le soleil brillait.

Amy pouvait tout voir depuis son poste d’observation.

C’était beau. Elle serra Dasks encore plus fort, toujours un

peu apeurée par la hauteur mais s’y habituant peu à peu, en

ayant la certitude qu’il la garderait en sécurité.

« C’est comme dans mon rêve », murmura-t-elle.

« Tu n’as pas rêvé Dargon. Tu vis ici, avec moi. »

« Mais comment est-ce possible ? Comment ceci peut-il

exister ? Tu es si réel. Je peux te sentir. »

« Amy, réveille-toi », ordonna-t-il.

« Je ne veux pas. Tu seras parti et je serai seule dans ma

grotte », dit-elle en sanglotant. « Ne pars pas encore. Reste

encore un peu. S’il te plaît. »

« Fais-moi confiance, Amy. »

Amy pouvait à peine le voir à travers ses larmes. Elle

l’aimait tellement. La vie était si injuste de le lui donner

pour ensuite le lui enlever. Mais elle devait le laisser partir,

même dans ses rêves. C’était une douce torture que de

l’avoir si près d’elle, de le toucher. Sa peau était si tiède et


139

accueillante. Il baissa lentement la bouche pour lui déposer

un tendre baiser. Encore une fois, il lui murmura de lui faire

confiance.

« Je t’aimerai toujours, Dasks. »

Amy ferma les yeux. Elle pouvait sentir ses bras serrés

autour d’elle. Avec anxiété, elle attendit que l’odeur froide et

humide de la grotte emplisse ses narines. Bientôt, la

puanteur brûlante des météorites viendrait polluer ses

poumons. Elle lèverait la main pour sentir la boule dans son

sein qui lui rappellerait qu’elle était mourante. Comme un

signe malade qui la tourmentait. Amy pouvait sentir la mort

sous sa main. Elle pleura à chaudes larmes lorsque Dasks lui

dit d’ouvrir les yeux et de le regarder. Il devrait être parti à

présent. Pourquoi est-il toujours dans mon rêve ?

Lorsqu’Amy finit par ouvrir les yeux, ils se trouvaient dans

leur lit à Dargon.

« Non, non », sanglota-t-elle en comprenant.

« Je suis désolé, Amy. Il le fallait. Je ne peux pas te

laisser partir. Je ne peux pas vivre sans toi », dit Dasks.

Son pouce essuya ses larmes. Leurs sécrétions se

mélangèrent.

« Pourquoi, Dasks ? »

« J’ai besoin de toi. »

Ça paraissait si simple. Elle leva la main et sentit la

boule dans son sein. Leur union n’avait pas guéri sa maladie.

Elle pleura encore et Dasks la serra très fort. Elle pouvait

sentir combien il était désolé pour elle. Tout son être la

remplit. Elle comprenait à présent ce que Meg avait dit à

propos de l’union. Dasks s’était uni à Amy. Ils ne formaient

qu’un. Ils vivraient comme une seule chair ; ils mourraient

comme tels.


140

« Tu n’avais pas le droit », l’accusa-t-elle en essayant de

le repousser.

Il la serra plus fort. « J’en avais absolument le droit. »

« Je t’ai tué. »

« Je serais mort sans toi de toute façon. »

« Et s’il y a un bébé ? Elle sera toute seule. »

Dasks inspira son parfum. « Il n’y a pas de bébé. »

« Je suis toujours mourante. »

« Je le sais. »

« Qu’est-ce qu’on fait maintenant ? »

« Nous faisons l’amour ; nous vivons tant que nous en

avons l’occasion. »

Amy sentait ses mains la caresser. Il avait renoncé à sa

vie pour elle. Elle ne consacrerait pas une seconde à être

fâchée contre lui. Quand il l’attira sous lui et pénétra en elle,

elle enroula ses jambes autour de lui. Elle enfouit son visage

dans son cou. Elle sentit son corps tout entier l’envelopper.

Ses seins étaient pressés contre son torse. Les draps en

dessous lui procuraient une sensation étrange. Dasks ne

transpirait plus. Ses coups de boutoir n’avaient absolument

pas cessé. Amy ne pouvait plus bouger. Elle leva les yeux au

plafond. Ses bras tentèrent de changer de position mais elle

était pétrifiée.

« Dasks ? » murmura-t-elle.

« N’aie pas peur. C’est mon armure. À la seconde où je

suis entré en toi, elle s’est dressée. »

« Je suis dedans avec toi ? »

« Oui. »

« C’est comme un cocon. » Elle pouvait tout voir autour

d’elle mais elle ne pouvait pas bouger le moindre muscle.

C’était comme s’ils étaient collés l’un à l’autre, fusionnés. »


141

Dasks gloussa puis il éclata de rire. « C’est bien un

cocon, Amy. Ma jolie petite chenille va recevoir des ailes

pour pouvoir voler. »

Amy ne put que rester songeuse face à ces paroles. Elle

était toujours pressée contre son corps. Soudain, Dasks se

mit à accélérer la cadence de ses coups. Amy sentit que ses

hanches étaient plaquées contre les draps. Elle pouvait sentir

Dasks grandir en elle.

« Je t’en prie, Dasks, pas de bébé. »

« Oh, nous allons faire un bébé. Tu me dois une fille. Il

n’y a pas que Talsk qui peut connaître le bonheur conjugal.

À mon tour », déclara-t-il. « Et dans quatre ans, tu me

donneras un fils. Un guerrier castien qui deviendra aussi fort

et vigoureux que son père. »

« Quoi ? » dit-elle en tressaillant. « Oh, Dasks, s’il te

plaît. C’est trop. »

Dasks enfonça ses crocs dans son cou. L’euphorie la

gagnait et elle resta sous lui, jouissant de tout ce qu’il lui

faisait. Il se balançait contre elle. Elle pouvait voir son

sourire dans le clair de lune et s’en étonna. Une minute… Il

lui avait dit qu’elle lui donnera

comme son père.

« Dasks ? »

« Mon armure a senti le danger », dit-il. Sa voix était

empreinte d’émerveillement et de délice. « Tu es saine et

sauve, Amy. Ton cancer est parti. Mon armure l’a attaqué et

t’a guérie. »

« Quoi ? » Sidérée, Amy toucha son sein. Il n’y avait

aucune boule. « Tu en es sûr ? Vraiment sûr ? »

« C’est la vérité, Amy. Mon armure ne sent plus aucune


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sommes ensemble et en bonne santé, et nous vivrons

pendant des siècles. Nous pouvons voir grandir nos enfants,

et leurs enfants, et les enfants de leurs enfants. »

Dasks glissa sur le côté une fois qu’il eut fini. Sa main

restait posée sur son ventre. « Tout va bien, Amy. Mon

armure t’a guérie avant que nous concevions. »

« Concevions ? » Elle poussa un petit cri aigu.

« Oui, concevions. Notre bébé aura deux parents à ses

petits soins »

Amy resta allongée, sous le choc. Dasks avait sacrifié sa

vie pour elle. Au final, il les avait sauvés tous les deux.

Quand il tendit la main vers elle, elle put sentir tout son

bonheur. Ses émotions l’entouraient de toute part,

l’emmitouflaient. Amy savait ce qui s’était passé. Elle avait

été enveloppée par l’amour et rien n’était plus impénétrable

que son armure.

À PROPOS DE L’AUTEURE

C. L. Scholey vit dans son Ontario natal, avec son mari

et ses enfants. Elle travaille actuellement à l’écriture du

prochain livre de sa série. Elle aime beaucoup être en contact

avec ses lecteurs, et est joignable à

l’adresse [email protected], ou via son site web

www.clscholey.com.

mailto:[email protected]

http://www.clscholey.com/

Pour plus de plaisirs de lecture, nous vous invitons à consulter notre boutique en

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NOUVEAU MONDE TOME 2 : L’ARMURE CASTIENNEdata.over-blog-kiwi.com/0/69/01/13/20140309/ob_4027a3_armurecastie... · percer du cuir. Elle en avait été réduite à vivre de larcins