Upload
said-negredo-mejhoudi
View
212
Download
0
Embed Size (px)
DESCRIPTION
projet logistique
Citation preview
NS 330
La planification par l’exploitant dans le transport routier de marchandises :
méthode d’analyse et perspectives d’application inter-domaines
Partie 2
Note scieNtifique et techNique
La planification par l’exploitant dans le transport routier de marchandises :
méthode d’analyse et perspectives d’application inter-domaines
Partie 2
Koosha Kadhemi, Université de Toulouse Julien Cegarra, Université de Toulouse
Virginie Govaere, INRS HT-EPAP Liên Wioland, INRS HT-EPAP
Département Homme au travail Laboratoire Ergonomie et psychologie appliquées à la prévention
Publication réalisée dans le cadre de l’étude A.8/1.025 « Prévention dans le transport et la logistique :
évolutions technologiques et organisationnelles dans des entreprises en réseau »
NS 330février 2015
Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnellesSiège social : 65, boulevard Richard-Lenoir 75011 Paris • Tél. 01 40 44 30 00
Centre de Lorraine : 1, rue du Morvan CS 60027 54519 Vandœuvre-les-Nancy cedex • Tél. 03 83 50 20 00
La planification par l’exploitant dans le transport routier de
marchandise : méthode d’analyse et perspectives
d’application inter-domaines
(Partie 2)
Koosha KADHEMI1, Julien CEGARRA1, Virginie GOVAERE2, Liên WIOLAND2
1 EQUIPE CSDV-ISAE, UNIVERSITE DE TOULOUSE, CENTRE UNIVERSITAIRE J-F CHAMPOLLION, PLACE VERDUN, 81012 ALBI CEDEX
9, FRANCE – [email protected] – [email protected]
2 INRS, DEPARTEMENT HOMME AU TRAVAIL, AVENUE DE BOURGOGNE, 54500 VANDŒUVRE-LES-NANCY, FRANCE –
Préambule Les travaux réalisés à l’INRS dans le cadre des études et recherches autour des effets en termes de
santé et de sécurité des évolutions organisationnelles et technologiques dans le secteur du Transport
Routier de Marchandises et de la Logistique (études A8/1.018, A8/1.024, A8/1.025) pointent le rôle
primordial de l’agent d’exploitation quant à la qualité et la sécurité des transports. En effet, celui-ci
se situe au carrefour des échanges entre la direction, les conducteurs, les partenaires et les clients.
Son activité s’articule principalement autour de l’organisation, de la planification et du suivi des
tournées de transport. Ainsi, l’exploitant est en charge de choisir le véhicule selon la nature de la
marchandise, de réaliser les plannings en affectant les conducteurs et de fixer les heures de départ et
d’arrivée. Il fixe également les fenêtres temporelles des livraisons et l’ordre de passage lorsque
2
plusieurs destinataires sont concernés par la même tournée. Pendant un transport, l’exploitant
endosse plutôt un rôle de superviseur en restant en permanence en contact avec les conducteurs
pour apporter du soutien ou de nouvelles consignes, en assurant le suivi de commande aux clients et
en gérant tous types d’imprévus. Cette dernière dimension est d’autant plus fondamentale que
l’environnement du transport est dynamique, puisqu’il est soumis à de nombreuses évolutions non
contrôlées par l’exploitant (accidents, pannes, conditions météorologiques, etc.).
Pourtant, les études sur l’activité de l’exploitant transport et les risques auxquels il est exposé sont
rares dans la littérature en Ergonomie. Une collaboration initiée en 2012 avec le laboratoire CLLE1, et
plus particulièrement avec sa composante « Compatibilité entre Système Humain et Système
Artificiel », vise à combler ce vide. Une réflexion approfondie autour de l’activité de l’exploitant
transport et de ses processus cognitifs, dont la gestion de l’incertitude, occupent une place centrale
dans la démarche d’analyse.
Le fruit de cette collaboration est rapporté sous forme de 3 rapports constituant les étapes du projet.
Ceux-ci sont intitulés :
1. La planification par l’exploitant dans le transport routier de marchandise : contributions théoriques et méthodologiques
2. La planification par l’exploitant dans le transport routier de marchandise : méthode d’analyse et perspectives d’application inter-domaines
3. La planification par l’exploitant dans le transport routier de marchandise : enseignements et perspectives issus d’une démarche d’analyse empirique
A travers le rapport « la planification dans le transport routier de marchandise : contributions
théoriques et méthodologiques », un état de l’art sur les fondements théoriques de la planification
est proposé. Ce premier document introduit également les éléments initiaux pour la conception
d’une méthode d’analyse adaptée à l’activité de l’exploitant.
Le second rapport intitulé « la planification dans le transport routier de marchandise : méthode
d’analyse et perspectives d’application inter-domaines » propose une formalisation et une
application de la méthode d’analyse, basée sur un traitement des protocoles. En plus d’une définition
détaillée de la méthode conçue, ce rapport introduit le déploiement de la méthode au sein d’une
entreprise. Une typologie des différentes dimensions de la planification est également proposée dans
ce rapport. Celle-ci représente une base de référence pour la mise en œuvre d’une démarche de
comparaison inter-domaines. Cette mise en œuvre dans un second secteur d’activité (le soin à
domicile) fera l’objet d’un quatrième rapport attendu en 2016.
1 CLLE : Laboratoire Cognition, Langues, Langage et Ergonomie de l’Université de Toulouse Jean Jaurès.
3
Le troisième rapport, « la planification dans le transport routier de marchandise : enseignements et
perspectives issus d’une démarche d’analyse empirique », est dédié à l’analyse de l’activité de
l’exploitant, basée sur le traitement de données recueillies en conditions réelles de travail.
L’ensemble des travaux entrepris dans les deux premiers rapports, dont l’analyse bibliographique,
l’analyse d’un premier terrain de pré-étude et l’exploration préliminaire des résultats permettent de
dégager 3 thématiques majeures : l’activité de l’exploitant, les processus cognitifs mis en jeu dans
cette activité et la gestion de l’incertitude dans cette activité. En termes de prévention, les résultats
permettent d’identifier des pistes d’actions, notamment au niveau d’éventuels systèmes d’aides à la
gestion de l’incertitude.
Ce travail ne prétend pas proposer une description exhaustive de l’activité de l’exploitant, et nul
doute que ces résultats peuvent être largement complétés. Cependant, en adoptant des approches
différentes, nous avons veillé à ce que le portrait de l’activité soit dressé à travers plusieurs angles de
vue. Les approches quantitatives ou qualitatives, statiques ou dynamiques se sont succédées tout au
long de la collaboration afin d’éviter toutes conclusions réductrices, sur une activité qui demeure
complexe et peu connue.
4
Sommaire
Préambule ................................................................................................................................... 1
Introduction générale .................................................................................................................. 6
Chapitre I : De la conception à la mise en œuvre d’une méthode d’analyse de l’activité ............. 8
I. Formalisation de la méthode d’analyse de l’activité ............................................................. 8
1. Codage de l’activité et des tâches ............................................................................................... 9
2. Codage de l’activité cognitive .................................................................................................... 12
3. Marqueurs psycholinguistiques ................................................................................................ 14
II. Application et Interprétation du schème de codage ........................................................... 16
1. L’avant codage : phase de préparation ..................................................................................... 17
a. La sélection des données....................................................................................................... 17
b. La retranscription des données ............................................................................................. 17
c. Le découpage des données ................................................................................................... 17
2. Le codage : phase d’application ................................................................................................ 18
3. L’après codage : phase d’interprétation ................................................................................... 19
III. Déploiement de la méthode ............................................................................................... 20
1. Terrain d’étude : l’entreprise M ................................................................................................ 20
2. Dispositif expérimental ............................................................................................................. 24
a. Matériel ................................................................................................................................. 24
b. Consignes ............................................................................................................................... 26
c. Echantillon des données ........................................................................................................ 26
3. Résultats descriptifs .................................................................................................................. 26
a. Nature des données .............................................................................................................. 26
b. Problématiques opérationnelles ........................................................................................... 27
Conclusion ......................................................................................................................................... 37
Chapitre II : Typologie multidimensionnelle des situations d’ordonnancement ......................... 39
1. L’horizon temporel de l’ordonnancement ................................................................................ 41
5
2. Conditions d’ordonnancement ................................................................................................. 43
3. Règles d’ordonnancement ........................................................................................................ 45
4. Etapes de l’ordonnancement .................................................................................................... 46
5. Exigences cognitives .................................................................................................................. 47
6. Environnement de l’ordonnancement ...................................................................................... 50
7. Indicateurs de performance ...................................................................................................... 51
Conclusion ......................................................................................................................................... 53
Conclusion générale .................................................................................................................. 54
Références ................................................................................................................................ 56
Annexes ..................................................................................................................................... 59
6
Introduction générale
Avec plus de 37 000 entreprises, constituées principalement de PME et TPE, et près de 420 000
employés, le Transport Routier de Marchandises (TRM) se positionne comme un secteur clé de
l’économie nationale. Parmi les nombreux acteurs de ce secteur, l’exploitant transport endosse un
rôle particulièrement important de par sa position stratégique. En effet, celui-ci se situe au carrefour
des échanges entre la direction, les chauffeurs, les partenaires et les clients. Son activité s’articule
principalement autour de l’organisation, de la planification et du suivi des tournées de transport.
Ainsi, l’exploitant est en charge de choisir le véhicule selon la nature de la marchandise, de réaliser
les plannings en affectant les chauffeurs et de fixer les heures de départ et d’arrivée. Il fixe
également les fenêtres temporelles des livraisons et l’ordre de passage lorsque plusieurs
destinataires sont concernés par la même tournée. Pendant un transport, l’exploitant endosse plutôt
un rôle de superviseur en restant en permanence en contact avec les chauffeurs pour apporter du
soutien ou de nouvelles consignes, en assurant le suivi de commande aux clients et en gérant tous
types d’imprévus. Cette dernière dimension est d’autant plus fondamentale que l’environnement du
transport est dynamique, puisqu’il est soumis à de nombreuses évolutions non contrôlées par
l’exploitant (accidents, pannes, conditions météorologiques, etc.)(Amalberti et Hoc, 1998).
Les différents éléments exposés introduisent une donnée primordiale : dans une démarche de
prévention des risques dans le secteur du Transport Routier de Marchandise, non seulement
l’activité de l’exploitant doit être prise en compte, mais elle doit être placée au cœur de la réflexion
tant son rôle peut être assimilé à celui d’un « chef d’orchestre ». Pourtant, les études sur l’activité de
l’exploitant transport et les risques auxquels celui-ci est exposé sont inexistantes dans la littérature
en Ergonomie.
L’objectif de notre collaboration initiée en 2012 est de contribuer à combler ce vide en menant une
réflexion approfondie autour de l’activité de l’exploitant transport qui sera rapporté sous forme de
livrables
Le rapport 1 a été consacré à une revue des fondements théoriques de la planification. Ce cadre
théorique a été basé sur des apports pluridisciplinaires, issus notamment de l’Ergonomie et de la
Recherche Opérationnelle. Par ailleurs, l’étude de l’activité cognitive de l’exploitant n’étant pas
réalisable sans la mise en œuvre d’une méthodologie d’analyse adaptée, des éléments
méthodologiques ont également été introduits dans le précédent livrable. En effet, suite à une pré-
étude établie sur des enregistrements issus d’une salle d’exploitation, nous avions pu valider une
7
méthode d’analyse se basant principalement sur les verbalisations de l’opérateur. Plus précisément,
la méthode proposée s’articulait autour d’un schème de codage basé sur le modèle d’activité d’Hoc
et Amalberti (1998 ; 1999) et de l’analyse psycholinguistique (Chauvin, 2000).
Dans la continuité du rapport 1, ce second manuscrit présente un double objectif : la finalisation et la
mise en œuvre de la méthode d’analyse et la mise en évidence des dimensions de planification qui
pourraient être généralisables d’un secteur à un autre. Ce dernier point fera la transition avec les
prochains livrables, à savoir une étude de cas approfondie et finalisée dans le secteur du TRM
(rapport 3).
La présente étude s’articule autour de deux chapitres. Le premier chapitre portera sur la dimension
méthodologique. Celui-ci présentera la conception de la méthode jusqu’à sa mise en œuvre dans une
entreprise de transport. Les trois parties se référant à ce chapitre s’organisent de la manière
suivante :
La première partie sera dédiée à l’objectif de compléter et de formaliser la méthode précédemment
évoquée. Il s’agira ici d’exposer la méthode d’analyse finale, avec l’ensemble de ses composants et
caractéristiques.
La deuxième partie sera consacrée aux éléments concrets à prendre en compte dans l’application et
l’interprétation de la méthode. Ces précisions méthodologiques seront apportées afin de faciliter la
reproductibilité de la démarche, aussi bien auprès des chercheurs que des ergonomes de terrain.
Enfin, la troisième et dernière partie de ce chapitre portera sur la mise en œuvre de la méthode dans
une entreprise de transport. Bien que les résultats définitifs de cette étude ne soient prévus que
dans le cadre d’un prochain document, le contexte et quelques résultats préliminaires seront
exposés. Il sera ainsi possible d’avoir un premier aperçu des enseignements que la méthode
préconisée peut apporter.
Le chapitre 2 de ce manuscrit sera consacré à une prise de recul : une démarche transversale
d’analyse d’éléments généralisables des activités de planification. Cette typologie vise à adopter une
démarche de comparaison intersectorielle, en se basant sur des dimensions communes à l’ensemble
des situations de planification.
8
Chapitre I : De la conception à la mise en œuvre d’une méthode d’analyse de l’activité
I. Formalisation de la méthode d’analyse de
l’activité
La méthode d’analyse introduite dans le précédent livrable et finalisée à travers ce présent travail se
base sur l’analyse des protocoles. Amalberti et Hoc (1998) définissent un protocole comme « un
ensemble de données relatives à une situation observée ce jour-là, pour ce cas-là ». L’analyse des
protocoles, et plus particulièrement des protocoles verbaux, a été initiée au début du 20ème siècle
avec notamment les travaux de Watson (1924). En parallèle avec un intérêt grandissant pour ce type
d’analyse, de nombreuses critiques ont également vu le jour au milieu du siècle précédent. Parmi
celles-ci, nous pouvons citer Nisbett et Wilson (1977) qui ont mis en évidence plusieurs biais
remettant en question le lien entre les verbalisations et les processus mentaux réellement mis en
jeu. Enfin, à travers deux ouvrages, Ericsson et Simon (1984 ; 1993) ont posé les fondements de
l’analyse de protocoles en répertoriant différents types de verbalisation (simultanée vs
rétrospective), avec les points forts mais aussi les inconvénients de chacun. Les travaux de Leplat et
Hoc (1983), axés davantage sur la notion de « tâche », ont également abouti sur des conclusions
convergentes avec celles d’Ericsson et Simon. Le consensus étant établi, de nombreux travaux ont
été réalisés depuis les années 90 dans divers domaines, avec comme principal instrument l’analyse
des protocoles.
Cette première partie va ainsi être consacrée à la présentation de notre méthode. Celle-ci est
constituée de trois dimensions :
- l’analyse de l’activité et de la tâche ;
- l’analyse de l’activité mentale (Hoc, Amalberti, 1999) ;
- l’étude des indicateurs psycholinguistiques.
L’ensemble du protocole verbal enregistré va être découpé en unités plus réduites : les énoncés (Cf.
partie II.1.c). Ce découpage permet de rendre possible le codage et le traitement statistique. Ainsi,
les trois niveaux d’analyse (activité et tâche, activité mentale et indicateurs psycholinguistiques) sont
9
tous codés à partir des énoncés. L’ensemble de ces trois dimensions formera un schème de codage
unique tel qu’il est illustré par la Figure 1. Ces dimensions vont être définies plus précisément à
travers ce premier chapitre.
Fig. 1 : Schème de codage pluridimensionnel
1. Codage de l’activité et des tâches Pour comprendre l’activité de l’exploitant, il faut analyser l’activité réelle, répertorier les différentes
tâches et lister les outils qui permettent de les accomplir. En mettant ces éléments en parallèle avec
le codage de l’activité cognitive, il devient possible de comprendre les processus mentaux sous-
jacents à la réalisation des différentes tâches. Pour ce faire, il est indispensable de s’appuyer sur une
phase préalable d’analyse de l’activité avec notamment la mise en place d’entretiens et
d’observations.
L’aperçu des différentes variables et indicateurs qui composent le codage de l’activité et des tâches
sont représentées dans la Figure 2. Ceux-ci sont organisés du niveau le plus macro (phase
d’intervention) au niveau le plus micro (outils utilisés).
10
Fig. 2 : Codage des tâches et indicateurs de l’activité
• Phase d’intervention
En se référant à notre précédent travail, nous rappelons que l’activité d’un ordonnanceur se
compose d’une première phase d’élaboration d’un plan (planification), puis d’une seconde phase de
suivi ou d’adaptation, dès lors que l’exécution du plan a débuté. Toute intervention après le début de
la tournée sera considérée comme appartenant à la phase de replanification. Ainsi, dans un objectif
de comparaison des processus mentaux mis en jeu lors des deux étapes, nous préciserons la phase
de l’intervention pour chaque énoncé. Il s’agira de préciser, lorsque cela est possible, si l’exploitant
effectue une opération dans le cadre de « planification », phase préalable à l’exécution, ou bien s’il
s’agit de traitement lors de phase de « replanification ». A titre d’exemple, « je regarde qui est
disponible pour le mettre peut-être sur le voyage de demain » serait codé en phase « planification ».
A l’inverse, « je vérifie la position de Thierry pour voir si je peux lui faire faire un détour par le dépôt »
sera considéré comme une opération en phase de « replanification ».
• Principales tâches
En confrontant nos différentes constatations sur le terrain d’étude avec les travaux d’Hittinger
(2010), 4 tâches principales ont été répertoriées. Celles-ci se présentent de la manière suivante :
Phase d’intervention
•Phase de planification •Phase de replanification
Principales tâches
•L’organisation des tournées à venir •Le Suivi des tournées en cours de réalisation •Gestion des imprévus se produisant pendant la tournée •Gestion du matériel
Principaux outils
•Planning mural •Planning papier •Logiciel informatique •Téléphone •Carte
11
Fig. 3 : Tâches de l’exploitant transport
Bien que l’on retrouve la plupart des tâches répertoriées dans toutes les entreprises de transport
(exemple : organisation des tournées ou gestion des imprévus), il existe des spécificités qui
dépendent de l’activité propre et du mode de fonctionnement de chaque structure. Dans le cadre de
notre terrain d’étude, il existe par exemple une activité de location de matériel destiné aux travaux
publics. Cette activité, propre à cette entreprise, justifie ainsi la présence de tâche « gestion du
matériel ».
L’organisation des tournées à venir correspond à l’ensemble des processus de planification, avec la
prise en compte de l’ensemble des contraintes et des ressources, telles que les véhicules, les
chauffeurs, la marchandise, les points de livraisons, etc.
Le suivi des tournées en cours de réalisation fait référence aux mises à jour que l’exploitant effectue
concernant sa représentation d’une tournée qui est déjà en cours de réalisation. Le suivi peut être
motivé par le besoin d’une information précise ou encore dans un objectif de surveillance de
l’activité des conducteurs. Cette tâche peut être réalisée aussi bien en phase de planification qu’en
phase de replanification. En effet, si une prise d’information porte sur une tournée en cours
d’exécution dans le but d’apporter une modification ou des informations supplémentaires au
conducteur, l’énoncé sera codé comme une activité de replanification. A l’inverse, si le suivi d’une
tournée a pour but d’anticiper les tournées des jours suivants, alors l’intervention de l’exploitant sera
considérée comme de la planification.
La gestion des imprévus concerne la prise en charge de tous types d’événements se produisant
pendant l’exécution de la tournée par l’exploitant. Cependant, il ne faut pas considérer un imprévu
comme un événement obligatoirement dramatique, comme cela est souvent le cas dans l’utilisation
commune du terme. Il s’agit de faits non prévus dans de la phase de planification. Ainsi, au même
titre qu’un accident ou une panne, l’absence d’un client sur le lieu de livraison ou l’impossibilité de
Tâches de l’exploitant
Gestion des imprévus Organisation des tournées à venir
Suivi des tournées en cours de réalisation
Gestion du matériel
12
joindre un conducteur pendant sa tournée sont également des exemples d’imprévus gérés par
l’exploitant. La tâche « gestion des imprévus » ne se produit qu’en phase de « replanification ».
La gestion du matériel correspond aux tâches de maintenance de ressources et de suivi des
entretiens, mais comme cela a été précisé plus haut, cette tâche concerne aussi l’ensemble des
opérations liées à la location de différentes ressources matérielles (pelles mécaniques, grue, etc.). Ce
dernier point concerne un service annexe, spécifique à notre terrain d’étude.
• Principaux outils
Une autre variable codée pour chaque énoncé est « l’Outil ». Cette variable permet de récolter des
informations supplémentaires quant à l’utilisation des différents outils mis à disposition de
l’exploitant. Cette démarche répond au respect de l’interdépendance de l’activité individuelle avec
l’environnement matériel ou social. Cette variable est codée en se focalisant sur le moyen matériel
sur lequel l’attention de l’opérateur est portée au moment de la verbalisation (sauf dans le cas où il
n’y a aucune utilisation matérielle). De plus, lorsqu’il y a utilisation de deux outils en parallèle
(exemple : téléphone + carte), l’outil codé est celui qui aide à la prise d’information ou à la prise de
décision (la carte dans le cas de notre exemple). Sur notre terrain d’étude, les outils les plus
fréquemment utilisés par les exploitants ont été le téléphone, le logiciel informatique de
géolocalisation, le planning mural, le planning papier, les cartes ou autres carnets d’archivage.
2. Codage de l’activité cognitive La deuxième dimension du schème de codage présenté se fonde sur le codage d’activité d’Hoc et
Amalberti (1998 ; 1999), qui se présente sous le formalisme prédicat-argument. Les prédicats sont au
nombre de 10 et chacun code une activité distincte. Ces derniers sont répartis en 3 catégories. Le
récapitulatif et la définition des prédicats sont présentés dans la Figure 4.
13
Fig. 4 : Classes de prédicats (Hoc, Amalberti, 1999)
Les arguments apportent des précisions et permettent de caractériser chaque prédicat. Le choix du
type et du nombre d’arguments dépend directement des objectifs de l’expérimentateur. En effet, un
trop grand nombre d’arguments rend l’application du codage extrêmement lourd, et à l’inverse, un
mauvais choix d’arguments ou l’absence d’arguments peut bloquer l’accès à des informations
essentielles.
Pour l’étude de l’activité de l’exploitant, nous avons fait le choix de caractériser l’ensemble des
prédicats avec les arguments <Type-objet> et <But>. L’argument <Type-objet> se réfère à la classe
d’objet dont l’activité mentale fait référence. Dans le TRM, les principaux types d’objets sont
« chauffeurs », « clients », « véhicules », etc. L’argument <But> code, comme son nom l’indique, le
but qui motive l’activité cognitive. En ce qui concerne les prédicats de la classe d’activité
« Elaboration de l’information », nous avons opté pour deux arguments supplémentaires : <Variable>
et <Source>. Le choix du premier argument se justifie par une volonté d’aller plus loin sur l’objet de
l’activité en étudiant la variable précise sous-jacente à l’activité mentale. L’argument <Variable> peut
prendre des modalités telles que « temps », « tarifs » ou encore « position ». Et enfin, la désignation
de l’argument <Source> répond directement à la volonté d’analyser les relations Exploitant-
Environnement matériel et Exploitant-Environnement social. Il s’agira de détecter les personnes ou
les outils sollicités dans les prises d’information, selon différentes tâches et problématiques.
Catégories d’activités
Décision d’intervention Elaboration de l’information
- PI : Prise en compte d’une information non interprétée. Information transmise à l’operateur. - GPI : Gestion de prise d’information (exemple : prise d’information dans un certain ordre, dans un but précis, etc.). - RIM : Récupération d’une information en mémoire.
- IDENT : Identification : Activité de catégorisation qui débouche sur une certitude. - INFHY : Inférence d’une hypothèse. Activité de catégorisation qui débouche sur une incertitude. - TEST : Le fait de tester une hypothèse.
- DECI-SCH : Annonce d’une action globale, une direction, sans en donner les caractéristiques concrètes et précises. - DECI-PRS : Décision précise, avec les détails pour mener l’action concrètement. - ACT : Mise en œuvre d’une intervention. - DECI-EVAL : Rétroaction. Peut porter sur sa propre action ou celle d’un partenaire.
Diagnostic
14
Exemple :
Prédicat (<Type-objet>, <But>, <Variable>, <Source>)
GPI (Chauffeur, Réalisation de tournée, Temps, Planning mural)
Enoncé Prédicat Type-objet But Variable Source Euh…(Réflexion) laisse-moi vérifier… oui j’ai Gaston qui
revient demain matin de toute façon.
GPI Chauffeur Réalisation de tournée Temps Planning
mural
3. Marqueurs psycholinguistiques Les travaux en linguistique (Culioli, 1985; 1990) et psycholinguistique (Caron et Caron Pargue, 1989;
1991; 2000 ; 2005) mettent en avant le principe selon lequel il est possible de déduire l’activité
mentale à partir du discours. Cette théorie a été appliquée dans le cadre de travaux en ergonomie
cognitive, avec notamment l’élaboration d’un schème de codage portant sur les marques
linguistiques par Chauvin (2000), dans son étude sur l’activité d’anticollision des navires de
commerce. Bien qu’une démarche psycholinguistique ne soit au cœur de notre méthode, nous avons
tout de même opté pour retenir quelques indicateurs sur les productions langagières. Ces indicateurs
peuvent fournir des informations complémentaires à celles provenant du codage « prédicat-
argument », ce qui permet d’avoir une approche plus complète et une analyse plus approfondie de
l’activité de l’exploitant.
Les interruptions dans le discours sont des indicateurs importants sur les processus de raisonnement
et de résolution de problème. C’est pourquoi nous les prenons en compte en intégrant dans notre
démarche l’étude de plusieurs connecteurs traduisant ces interruptions de procédure. Dans un
premier temps, l’étude de plusieurs connecteurs a été intégrée dans la démarche d’analyse. Il s’agit
des connecteurs « Donc », «Mais » et « Si ». Pour Caron-Pargue et Caron (1989), « ces connecteurs
apparaissent comme des traces directement liées aux procédures mises en œuvre par le sujet » (p.25).
« Donc » représente une focalisation sur un élément important pour planifier la suite. « Mais »
signifie la prise en compte soudaine d’un élément qui n’avait pas été pris en compte au départ d’une
activité telle que la planification (engendrant éventuellement une modification). Enfin « Si » traduit
généralement la prise en compte d’une condition nécessaire à l’accomplissement de l’activité.
A travers la revue bibliographique exposée dans le travail précédent, nous avions démontré que la
gestion de l’incertitude apparait comme une dimension primordiale dans la planification, en
particulier dans le domaine du TRM. Ainsi, afin de mieux appréhender la gestion de l’incertitude
pendant les différentes tâches de l’exploitant, il nous a paru judicieux d’élaborer une échelle
d’incertitude en se basant sur les verbes épistémiques et adverbes modaux. En effet, lors d’une
15
étude réalisée sur 58 sujets, Caron et Caron-Pargue (1991 ; 1994) ont démontré que les verbes
épistémiques (je sais que, je crois que, je suppose que…) autant que les adverbes modaux (sûrement,
probablement, assurément…) s’ordonnent selon le niveau de certitude qui leur est attribué. Les
expressions et habitudes langagières étant propres à chaque individu, un questionnaire reprenant les
36 principaux verbes épistémiques et adverbes modaux est soumis à l’ensemble des exploitants dont
les verbalisations sont enregistrées (cf. Annexe 1). Dans ce questionnaire (type échelle de Likert), il
est demandé au sujet d’attribuer une note entre 1 et 10 à chaque mot, selon le niveau de certitude
que celui-ci exprime pour lui. Cela permet de classer ces marqueurs suivant trois niveaux de
certitude : certitude élevé, certitude moyenne et incertitude pour constituer une échelle
d’incertitude. Une échelle qui a été incluse dans la dimension psycholinguistique de notre méthode.
Le Tableau 1 illustre l’échelle de l’incertitude pour un exploitant.
Niveau de certitude Verbes épistémiques Adverbes modaux
Certitude élevée
Je trouve que
Je sais que
J’admets que
Je reconnais que
Je suis sûr que
J’affirme que
De fait
Inévitablement
Evidemment
Sûrement
Incontestablement
Certitude moyenne
Je présume que
Je suppose que
J’estime que
J’imagine que
Je considère que
Je juge que
Manifestement
Indubitablement
Vraiment
Vraisemblablement
Visiblement
Effectivement
Certainement
Assurément
Apparemment
Incertitude
Je pense que
Je doute que
Il me semble que
Je crois que
Je soupçonne que
Je prétends que
Peut-être
Sans doute
Probablement
Éventuellement
Tab. 1 : Echelle d’incertitude basée sur les verbes épistémiques et adverbes modaux pour un
exploitant de transport
16
Une multitude de variables a été présentée à travers la description de la méthode proposée.
Chacune d’entre elles répondant à un objectif prédéfini, ou à des pistes exploratoires intéressantes à
approfondir. Avant de passer au chapitre suivant, consacré aux aspects concrets de l’application de
cette méthode, il convient de donner un exemple récapitulatif mettant en exergue l’ensemble des
variables des trois dimensions du schème de codage (Figure 5). La variable « Nature des données »
n’est pas une variable portant sur l’activité et n’appartient pas aux trois dimensions définies. Son rôle
se résume uniquement à renseigner sur la provenance de l’énoncé selon le type de verbalisation
(conversation téléphonique, réflexion à voix haute, explication à destination de l’expérimentateur,
etc.).
Fig. 5 : Exemple de codage de protocole
II. Application et Interprétation du schème de
codage En parcourant la littérature sur l’activité de l’opérateur en ergonomie cognitive, on retrouve divers
travaux basés sur le même type d’analyse des protocoles que le nôtre. Cependant, on constate que
ces travaux n’exposent que très peu les détails méthodologiques et il est souvent impossible
d’assimiler les procédures concrètes d’application du codage. Cela constitue un frein au
développement de ce type de méthode, dont le réel potentiel n’est que très partiellement exploité à
l’heure actuelle. Cette explicitation a pour vocation de faciliter la reproductibilité de la démarche
dans d’autres contextes. En effet, l’utilisation de l’analyse des protocoles est bénéfique dans de
Enoncés Nature
des données
Activité et tâches Codage prédicat-argument Marqueurs psycholinguistiques
Phases Tâche Outil Prédicat Type-objet But Variable Source
Connecteur (Donc, Si,
Mais)
Echelle certitude
Je regarde s’il est
disponible pour le
mettre peut-être sur le voyage de
demain pour Serge
(Collègue)
Explication Planification
Organisation des
tournées à venir
Planning mural GPI Chauffeur
Répondre besoin collègue
Disponibilité
Planning mural
SI : Condition
« disponibilité»
Peut-être : Incertitude
17
nombreuses situations d’étude, auprès d’un public composé aussi bien de chercheurs que
d’ergonomes de terrain. Par conséquent, il apparait indispensable d’élaborer une « notice d’emploi »
de la méthode, rendant accessible son application et son interprétation dans le cadre de travaux
futurs. En partant de ce constat, l’objectif de cette partie du document est de préciser les dispositifs
à prendre dans l’application de la méthode présentée précédemment. Ainsi, la partie II sera
consacrée au développement des aspects procéduraux concrets de la mise en œuvre de la méthode.
1. L’avant codage : phase de préparation Une fois que les enregistrements des protocoles sont à disposition de l’expérimentateur, le codage
est précédé par une phase de « préparation » des données. Il s’agit principalement de la sélection, de
la retranscription et du découpage de l’ensemble des verbalisations.
a. La sélection des données
L’enregistrement de l’activité de travail contient une multitude de productions verbales qu’il faut
trier. Ainsi, seules les verbalisations en lien avec les objectifs professionnels doivent être
retranscrites. A titre d’exemple, les conversations téléphoniques privées ou encore les échanges de
courtoisie ou de plaisanterie entre collègues n’ont pas lieu d’être retenus dans le cadre d’un travail
sur l’activité de planification de l’exploitant.
b. La retranscription des données
L’expérimentateur doit prendre des précautions sur la manière dont la séquence sera retranscrite. Le
respect de l’orthographe et de la syntaxe des phrases ne doit être négligé, d’autant plus que le
schème de codage contient des marqueurs psycholinguistiques. De plus, certains aspects de l’activité
ne sont pas verbalisées, et il appartient à l’expérimentateur de détecter ceux-ci, et de les retranscrire
d’une manière ou d’une autre (exemple : (Réflexion)).
c. Le découpage des données
Pour pouvoir traiter statistiquement les protocoles, il faut découper les retranscriptions brutes en
unité réduites. Cette étape de découpage nécessite l’élaboration d’un certain nombre de règles,
permettant d’uniformiser et de balayer toute part de subjectivité dans le découpage des données
brutes.
L’ensemble des retranscriptions est divisé dans un premier temps sous forme d’épisodes. Chaque
épisode reflète une réflexion ou une conversation autour du même sujet. Par exemple, l’appel
téléphonique à un chauffeur dans le but de transmettre une information ou la résolution d’un
problème de planification particulier, etc. sont autant d’épisodes distincts. Dans un second temps,
chaque épisode est découpé en énoncés. On considère qu’un énoncé ne peut être codé qu’avec la
18
même combinaison de prédicat-arguments. Ainsi, dès que le prédicat ou l’un des arguments ne
correspond plus à la verbalisation, il est indispensable de marquer le changement d’énoncé par un
saut de ligne.
Exemple :
Épisode :
« Je regarde qui est disponible pour le mettre peut-être sur le voyage de demain, parce que à mon
avis il y a des chances que le client X revienne à la charge demain et me demande plusieurs
chauffeurs ».
Enoncé 1 : « Je regarde qui est disponible pour le mettre peut-être sur le voyage de demain »
Enoncé 2 : « parce que à mon avis il y a des chances que le client X revienne à la charge demain et me
demande plusieurs chauffeurs ».
Cet épisode doit être divisé en deux énoncés, puisque « Je regarde qui est disponible pour le mettre
peut-être sur le voyage de demain » est une activité de gestion de prise d’information (Prédicat GPI),
tandis que la seconde partie de la phrase, à savoir « parce que à mon avis il y’a des chances que le
client X revienne à la charge demain et me demande plusieurs chauffeurs » représente une activité de
diagnostic, débouchant sur une incertitude (Prédicat INFHY).
Le découpage des retranscriptions brutes sous formes d’énoncés revêt une importance particulière,
puisque l’ensemble des trois dimensions de la méthode (activité et tâche, activité mentale et
marqueurs linguistiques) sont codés à partir de ces énoncés.
2. Le codage : phase d’application Une fois la totalité des énoncés constitués, le codage peut être exécuté. L’attribution d’une modalité
du codage à un énoncé peut se réaliser de façon évidente dans certains cas, alors que dans d’autres
cas, cette distinction sera beaucoup plus complexe. Dans ces situations, l’expérimentateur devra se
référer au contexte général de la séquence analysée (exemple : un imprévu survenu la veille du jour
de l’enregistrement) pour mieux appréhender les opérations les plus implicites. Afin de préserver la
validité du codage et de son traitement statistique ultérieur, lorsqu’un énoncé ne peut être codé de
façon exclusive et que le codeur n’est pas en mesure de départager entre deux modalités (exemple :
deux prédicats), il convient de ne pas coder l’énoncé pour cette variable.
L’application du codage de protocoles se réalise manuellement. Il existe certaines solutions
informatiques telles que Microsoft Office Excel, Atlas.ti ou encore OpenShapa, mais celles-ci ne
19
facilitent que la structuration du schème de codage et le traitement statistique des données. Le
codage manuel représente une charge de travail extrêmement lourde pour l’expérimentateur. Selon
le type de codage, le ratio « temps d’analyse/temps de séquence » se situe entre 5 et 100 (Ericsson,
Simon, 1993). Cet indicateur révèle l’investissement considérable exigé par le codage de protocoles,
expliquant en partie le développement au ralenti de ce type de démarche, malgré tous les apports
qui lui sont connus et reconnus.
Dans le cadre de nos contributions méthodologiques, cette absence d’outil d’aide au codage a été
naturellement placée parmi les objets de notre réflexion. En parallèle de ce travail, un projet de
conception de logiciel d’assistance au codage est mené. Celui-ci a été initié dans le rapport 2012 à
travers l’étude des cooccurrences entre les modalités des deux schèmes de codage différents
(Prédicat-argument vs psycholinguistiques). L’étude des cooccurrences permet notamment de
mettre en évidence des règles d’association entre les marqueurs du discours et les différents types
d’activité cognitive. Ainsi, l’ensemble des règles définies pourrait être intégré dans un logiciel. De
plus, en se basant sur une série de protocoles codés manuellement par le chercheur, l’outil
informatique serait en mesure de détecter des associations systématiques et de les intégrer
automatiquement parmi les règles de codage.
Imaginer une solution entièrement automatique serait évidemment tout à fait utopique, tant les
variabilités de contextes et de données peuvent être importantes selon les études. De plus, seule la
sensibilité humaine est en mesure de résoudre les questionnements les plus complexes et implicites.
Cependant, une assistance, ne serait-ce que partielle, pourrait permettre de réduire le coût temporel
associé aux méthodes de codage. Un autre intérêt majeur d’une automatisation serait la diminution
des inférences (Amalberti, Hoc, 1998). Il est évident que là où l’Homme ne peut s’abstenir de se
baser sur sa propre expertise pour généraliser et interpréter, la « machine » sera, elle, bien plus
pragmatique et son « objectivité » ne pourra qu’améliorer la reproductibilité du codage.
3. L’après codage : phase d’interprétation Les résultats issus du schème de codage sont principalement sous forme de fréquences de
distribution. Des fréquences qui traduisent le poids des différentes modalités, comme les prédicats
ou les arguments. Cependant, l’analyste devra garder à l’esprit que ces fréquences sont relatives et
qu’un résultat ne peut être interprété sans la prise en compte de la distribution totale.
De plus, il convient de prendre certaines précautions quant à l’interprétation de ce type de codage.
Les généralisations hâtives sont ainsi à proscrire et l’interprétation doit se baser systématiquement
sur les spécificités du domaine et du contexte de l’étude. Les comparaisons inter-situationnelles
20
doivent s’appuyer sur une structure commune, constituée d’éléments préalablement identifiés. Cela
correspond précisément à l’objectif du Chapitre 2, qui consiste à élaborer une structure commune
des situations de planification.
Lorsque ces différentes conditions d’interprétation sont réunies, l’analyste est en mesure
d’appréhender et d’utiliser les résultats en se rapportant au cadre théorique du schème de codage. A
titre d’exemple, d’après Hoc et Amalberti (1999), le prédicat de « Rappel d’Information en
Mémoire » (RIM) peut être considéré comme un reflet de la charge en mémoire de travail. Une
récurrence importante de ce prédicat pourrait alors traduire un coût mental élevé, expliquant
certaines difficultés ressenties par l’opérateur. De même, le rapport entre le prédicat
identification certaine (IDENT) et identification débouchant sur une hypothèse (INFHY) peut être
considéré comme un indicateur de l’incertitude. Ainsi, dans une situation où les activités de
diagnostic débouchent systématiquement sur l’inférence d’une hypothèse, on peut penser que
l’opérateur doit faire face à un contexte relativement incertain ou bien que celui-ci ne dispose pas
suffisamment de moyens pour faire une détection plus précise.
III. Déploiement de la méthode Cette troisième partie du chapitre I présente la mise en œuvre de la méthode exposée dans le
domaine d’application du TRM, plus précisément au sein de l’entreprise M. Dans un premier temps,
ce sont les caractéristiques de ce terrain d’étude qui vont être exposées. Puis, nous expliciterons le
dispositif expérimental déployé pour cette étude. Enfin, ce chapitre sera clôturé par quelques
résultats préliminaires ; en effet, la totalité des résultats et les conclusions de cette étude de terrain
seront présentées dans le cadre d’un prochain manuscrit.
1. Terrain d’étude : l’entreprise M L’entreprise M est une entreprise de transport routier de taille moyenne (catégorie 50 à 100
véhicules) implantée dans le sud-ouest de la France. Celle-ci est composée de deux établissements :
le Transport M (TM) et le Transport MT (TMT). Bien que les deux établissements partagent le même
site géographique, leur gestion est indépendante. Les deux établissements ne partagent pas les
mêmes locaux (salle d’exploitation, secrétariat), ni les mêmes ressources (chauffeurs, véhicules).
Ainsi, bien que l’intervention ait eu lieu sur un seul site, il faut considérer que cette étude a été
menée au sein des deux établissements de transport distincts. La coexistence de ces deux
établissements différents accroît l’intérêt de ce terrain d’étude, puisqu’il laisse présager des
possibilités de comparaison avec une méthode d’analyse identique.
21
Les différences, et donc potentiels éléments de comparaison, entre les deux établissements peuvent
être articulés autour de 5 dimensions : le type de l’activité, la taille de la flotte et zones
géographiques desservies, le type de planification, le profil du planificateur (exploitant) et les outils
de planification. Les différences entre les deux entités TM et TMT ont été mises en exergue à travers
l’analyse de l’activité, étape préalable au recueil des données. Ces caractéristiques spécifiques sont
présentées ci-dessous.
• Type d’activité
La première différence au sein des deux entités concerne le type de l’activité et les services proposés.
L’activité du Transport M (TM) est très orientée vers le secteur du Bâtiment et Travaux Publics (BTP).
La quasi-totalité des clients sont des clients réguliers (plus de 90%). Le parc de véhicules est constitué
exclusivement de bennes et de citernes. De plus, l’entité propose également des locations d’engins
de travaux (pelles mécaniques, sauterelles, Bull Trax, etc.).
Le Transport MT (TMT) propose des transport en plateaux (charpente, préfabriqués) et des
transports de matériel agricole (moissonneuse-batteuse, etc.). Cet établissement prend également
en charge les convois exceptionnels. Bien qu’il existe également des clients réguliers, la part de ces
derniers est nettement inférieure à celle du Transport M (moins de 50%).
Le type d’activité est un facteur qui conditionne directement la planification. Par exemple, le
transport en plateaux induit les notions de lot complet (une seule destination) ou lots partiels
(destinations multiples), alors que cette problématique n’existe pas dans le cadre de transport en
benne ou citerne. D’autre part, les convois exceptionnels requièrent la prise en compte de conditions
supplémentaires en comparaison avec les convois classiques (trajet selon hauteur et tonnage des
ponts, etc.). Enfin, l’affectation d’un camion entre un point de retrait et une seule destination (type
navette) ne demande pas les mêmes exigences mentales que la construction d’une tournée avec des
points de retrait et de livraison multiples et inhabituels.
• Taille flotte et secteur géographique
Le Transport M (TM) dispose de 48 véhicules gérés par un seul exploitant. Du côté du Transport MT
(TMT), la taille de flotte gérée par l’exploitant est de 17. Il y a donc un rapport du simple au triple
entre la taille du parc des deux établissements, ce qui représente a priori un élément non négligeable
à prendre en compte dans l’analyse de la planification.
De même, TM propose ses services sur une zone géographique correspondant au grand sud-ouest,
alors que l’activité de TMT s’étend sur l’ensemble du territoire national ainsi que les pays du Benelux.
22
• Type de planification
Selon ses propres dires, l’exploitant de TM doit faire face à un environnement « très dynamique ». En
effet, il travaille majoritairement avec des clients réguliers, dont les besoins et les demandes sont
très variables d’un jour à un autre. De plus, les clients expriment leurs besoins très tardivement, soit
pour le jour J ou le J+1. Cela réduit considérablement la marge de manœuvre de l’exploitant qui doit
faire un effort conséquent d’adaptation.
Chez TMT, la fenêtre temporelle de planification est plus grande, puisque l’exploitant dispose de
deux demi-journées par semaine (jeudi après-midi et vendredi) pour réaliser la quasi-totalité des
tournées de la semaine suivante. Une construction de tournée qui comprend aussi les trajets de
retour, pour lesquels l’objectif est d’éviter à tout prix de rentrer à vide. Cela correspond à une
planification pour J+3 à J+8. Le contexte parait ainsi plus stable, et les deux phases de planification et
de suivi sont très distinctes.
Une autre différence notable concernant l’activité de l’exploitant entre les deux établissements est la
présence de deux opérateurs dans la salle d’exploitation de TMT. En effet, le gérant est situé dans la
même pièce, à proximité de l’exploitant, ce qui engendre parfois quelques interactions entre les deux
personnes. Bien que le gérant soit fréquemment en déplacement et qu’il ne soit pas officiellement
en charge de la planification des tournées et de l’affectation des chauffeurs, il arrive que ce dernier
s’implique dans ces tâches, soit de façon individuelle, soit en collaboration avec l’exploitant attitré. A
l’inverse, le « collectif » joue un rôle moindre chez TM, puisque l’exploitant est seul au sein de la salle
d’exploitation.
• Profil de l’exploitant
Un autre aspect discriminant les deux entités concerne les différences interpersonnelles entre les
deux agents d’exploitation. En effet, l’exploitant de TM a 57 ans et emploie un mode de travail
« traditionnel » (Papier crayon, téléphone, etc.). En se basant sur ses connaissances, son expérience
et ses capacités relationnelles, il a développé de nombreux automatismes qui constituent les
fondements de son activité. A l’inverse, ces habitudes représentent un frein au changement et cela
se traduit notamment par une certaine réticence vis-à-vis des nouvelles technologies. Enfin, il
convient de préciser que ce dernier est un ancien chauffeur qui a fait sa formation d’exploitant « sur
le terrain ». Son ancienneté (30 ans) et ses compétences font de lui un homme reconnu par
l’ensemble de ses collègues, qui le considèrent comme la « pièce maîtresse » de la réussite de
l’entreprise M.
23
Du côté de TMT, le profil de l’exploitant pourrait être décrit comme étant radicalement différent,
voire à l’opposé, du portrait qui vient d’être dressé. En effet, celui-ci appartient plutôt à la « jeune
génération » (30 ans). Il ne s’agit pas d’un débutant puisqu’il possède 3 années d’ancienneté. Au
même titre que le gérant de TMT, celui-ci a suivi un parcours de formation académique avec des
études de logistique en cycle supérieur. En somme, cet exploitant se dit « dépendant » des nouvelles
technologies qui représentent une dimension indispensable de son activité.
• Outils de planification
Les disparités dans l’activité et le fonctionnement propre à chaque exploitant se traduisent par des
différences concernant les outils utilisés pour accomplir leur activité de planification.
Les plannings papiers, les bons de commande, les cartes murales, l’annuaire, le tableau de passage
aux mines, la carte du réseau des poids lourds avec hauteurs et tonnage des ponts sont autant de
ressources que les exploitants des deux établissements ont à leur disposition. Cependant, les deux
outils majeurs sur lesquels la planification repose en grande partie ne sont pas tout à fait identiques.
Aussi bien chez TM que chez TMT, on retrouve un planning mural très sollicité pour la construction et
la représentation des tournées.
Chez TM, c’est un panneau représentant l’ensemble des ressources (conducteurs, véhicules,
matérielles) ainsi que l’ensemble des clients réguliers pour qui les ressources sont affectées (Figure
6). A l’aide de différents types d’étiquettes papier, l’exploitant met à jour l’état de l’affectation de
l’ensemble des ressources pour le jour même ou le lendemain. La représentation ne va pas au-delà
de 24 h.
Fig. : Panneaux des affectations chez TM
L’exploitant de TMT dispose d’un planning mural sous forme de Gantt. On retrouve en colonne
l’ensemble des ressources (conducteurs) et en ligne les différents jours de la semaine. Ce support est
24
adapté au type de planification de TMT, puisqu’elle permet d’y représenter des tournées à un
horizon temporel J+7 sans client « régulier » (Figure 7).
Fig.7 : Planning mural chez TMT
Les plannings muraux permettent aux exploitants de se représenter la répartition des ressources à un
instant T, et de programmer de manière efficace les tournées à venir. De plus, avec une visibilité
nettement supérieure au format informatique et au format papier, le support mural aide à simplifier
les échanges dans le cadre de réflexions collectives entre les personnes présentes dans la salle
d’exploitation.
Les deux établissements sont dotés de solutions informatiques, qui s’appuient sur les nouvelles
technologies. Chez TMT, il s’agit du logiciel Transcis, solution dite « complète » largement connue
dans le domaine du TRM. Celui-ci offre des fonctionnalités de géolocalisation en temps réel des
véhicules, un accès à l’ensemble des données sociales des conducteurs, une communication avec les
conducteurs et un partage direct des documents tels que les bons de commande. L’exploitant chez
TM ne possède qu’une solution partielle : Eurotoll. Il s’agit d’un logiciel qui visualise uniquement, en
temps réel, les véhicules en cours de tournées.
2. Dispositif expérimental
a. Matériel
La phase d’analyse de l’activité, qui nous a permis de repérer notamment les points qui viennent
d’être exposés, a été naturellement suivie par la phase du recueil de données. Le recueil s’est
effectué sous forme d’enregistrement vidéo et audio. Les caméras ont été placées de manière à
observer l’exploitant au sein de son poste de travail (Figures 8 et 9). La vue arrière a été privilégiée
pour favoriser la visibilité de l’écran de l’ordinateur et faciliter notamment la détection de certaines
prises d’information. Les phases de planification au planning mural ont également été enregistrées à
l’aide d’une rotation de la caméra effectuée par l’expérimentateur. De plus, les exploitants ont été
25
équipés de micros-cravates, afin d’optimiser la prise de son lors des déplacements les éloignant de la
caméra.
Fig. 8 : Plan de la structure et dispositif d’enregistrement.
Fig. 9 : Enregistrement de l’activité de l’exploitant au sein de son poste de travail.
TMT TM Secrétariat TMT
Secrétariat TM
Resp. Ex.
Entrée
Ex : Exploitant
Resp : Gérant de la structure
Sec : Secrétaire
: Caméra
: Planning mural
: Ecran d’ordinateur
Ex. Sec.
Sec.
Sec.
26
b. Consignes
Les exploitants avaient pour consigne de verbaliser au maximum leurs réflexions, lorsque cela était
possible, pour avoir des « traces » de leurs raisonnements. Hormis cette consigne, Il s’agissait pour
les exploitants de procéder exactement comme d’habitude, en faisant totalement abstraction de la
présence de l’expérimentateur et du dispositif d’enregistrement.
c. Echantillon des données
L’intervention s’est déroulée sur 6 demi-journées (d’environ 4h chacune) pour chaque établissement,
réparties à différentes périodes du mois et différents jours de la semaine. Cela correspond à plus de
40h de vidéos exploitables.
Nous allons ainsi présenter quelques résultats préliminaires dans la partie suivante. Ces résultats
sont issus de l’analyse d’une demi-journée d’activité au sein de l’établissement TM. L’ensemble des
résultats, portant sur les deux établissements avec des échantillons plus importants, sera présenté
dans le cadre du prochain rapport. Il comportera notamment des comparaisons entre les deux
établissements de l’entreprise M.
3. Résultats descriptifs Notre méthode pluridimensionnelle réunit un nombre important de variables, ce qui rend les
possibilités de croisement extrêmement conséquentes. Il ne s’agit donc pas de dresser une liste
exhaustive de l’ensemble des résultats possibles. La démarche correspondra plutôt à l’identification
d’une série de questions concrètes, répondant aux objectifs fondamentaux de l’étude.
Ainsi, après avoir présenté quelques statistiques descriptives sur la répartition des données, nous
évoquerons plusieurs questions opérationnelles sur l’activité des exploitants. Des interrogations
auxquelles nous tenterons de répondre avec des résultats provenant du schème de codage. Par
ailleurs, pour mieux appréhender la provenance des résultats, nous reprendrons systématiquement
la Figure 5 (p. 14) afin de préciser la dimension du schème de codage dont le résultat est issu.
a. Nature des données
Parmi les énoncés codés, 28% correspondent à la consigne donnée, à savoir verbaliser les réflexions à
voix haute (cf. Figure 10). 6% sont des explications provoquées par une intervention de
l’expérimentateur, comme une demande d’explication ou de clarification d’un point précis. Le reste
des énoncés traités correspond à une activité simultanée, qui se présente sous forme de
conversation téléphonique ou conversation directe (avec collègues ou conducteurs présents dans la
salle d’exploitation).
27
Fig. 10 : Répartition des énoncés selon leur nature
b. Problématiques opérationnelles
Pour illustrer les apports de la méthode conçue à travers quelques résultats, nous avons opté pour le
traitement de 3 problématiques. Celles-ci correspondent à des dimensions importantes de l’activité
de l’exploitant, telle que nous l’avons définie précédemment.
Quelle est la répartition des différentes tâches de l’exploitant ?
Cette première interrogation se situe à un niveau très général et a pour objectif de présenter la
proportion des principales tâches qui constituent l’activité de l’exploitant.
Tout d’abord, en s’intéressant à la répartition de l’ensemble des interventions (quelle que soit la
tâche) sur la Figure 11, on remarque que la part d’activité en phase de planification (avant le début
de la tournée concernée par l’intervention) est plus importante que celle en phase de replanification
(pendant la réalisation de la tournée). Nous pouvons trouver deux explications à cela : les clients de
TM sont pour la grande majorité des clients réguliers, avec des demandes habituelles. Les
conducteurs connaissent bien leurs missions et leurs interlocuteurs, ce qui les rend moins
dépendants de l’exploitant pendant l’exécution de la tournée. De plus, l’horizon temporel de
planification chez TM est assez court (H +24, H +48), ce qui réduit la probabilité de modification de la
demande ou des contraintes environnementales.
47%
19% 6%
28%
TM - Nature des données
ConversationtéléphoniqueConversation directe
Explication
Réflexion
28
Figure 11. Répartition des interventions selon la phase de planification
En observant la Figure 12, nous pouvons remarquer que, parmi l’ensemble des énoncés verbaux
codés, une majorité (59%) se rapporte à l’organisation des tournées à venir. La gestion du matériel
est logiquement la tâche la moins représentée, puisque que la location de matériel n’est pas l’activité
principale de TM.
Figure 12. Répartition des tâches effectuées par l’exploitant de TM
60%
40%
TM - Phase
Planification
Replanification
59% 22%
11% 8%
TM - Tâches
Organisation des tournéesà venir
Suivi des tournées encours de réalisation
Gestion des imprévus
Gestion du matériel
29
Sur quoi porte l’activité cognitive de l’exploitant ?
Une fois de plus, cette question n’a pas pour vocation de traiter les détails de l’activité mentale de
l’exploitant. Il s’agit simplement d’avoir un premier aperçu de la répartition des différentes
dimensions de l’activité cognitive de l’exploitant (cf. Figure 13).
Fig. 13 : Répartition des différentes catégories de l’activité cognitive de l’exploitant de TM
En se référant aux trois catégories des prédicats (cf. Figure 4 p.10), nous pouvons constater que les
activités d’élaboration de l’information représentent une part très importante des énoncés codés
(55%). Les prédicats se référant aux « décisions d’interventions » représentent eux un tiers du total.
Enfin, les activités de diagnostic sont les moins récurrentes pour l’exploitant des transports,
puisqu’elles ne représentent que 13% des activités mentales codées. Ce dernier point peut trouver
une explication avec le type des clients et des demandes, qui sont en majorité habituels.
Pour illustrer les apports de notre méthode dans l’analyse de l’activité cognitive, nous avons croisé
les différentes tâches opérationnelles avec les prédicats qui y sont sous-jacents. Les résultats
correspondant à ce croisement sont présentés dans les Figures 15.a, 15.b, 15.c et 15.d. Pour faciliter
la lecture de ces graphiques, la figure 14 rappelle la signification des intitulés des prédicats.
55%
13%
32%
0
10
20
30
40
50
60
Elaboration d’Information
Les activités dediagnostic
Décision d’intervention
Types d'activité mentale
30
Fig. 14 : Rappel de l’organisation et de la signification des différents prédicats
Fig. 15.a : Répartition des différents prédicats pour la tâche de « l’organisation des tournées à venir »
Il est intéressant de noter que l’organisation des tournées correspond principalement à de la gestion
d’information (GPI), puis à des décisions précises d’intervention (28%). Il faut également remarquer
que très peu d’informations sont récupérées dans la mémoire (5% de RIM) et que l’exploitant est en
mesure de donner des détails procéduraux et ne se contente pas d’instructions « vagues » (28% de
DECI-PRS contre 8% de DECI-SCH).
15%
28%
5% 7% 9% 8%
28%
0%5%
10%15%20%25%30%
Activité cognitive pour "Organisation des tournées à venir"
31
Fig. 15.b. Répartition des différents prédicats pour la tâche de « suivi des tournées en cours de
réalisation »
Le suivi de tournées en cours de réalisation se traduit principalement sous forme d’élaboration
d’information (PI+GPI+RIM= 76% de l’ensemble des prédicats). Il s’agit plus précisément de prises
d’informations brutes dans la plupart des cas (44% de PI).
Fig. 15.c : Répartition des différents prédicats pour la tâche de « gestion des imprévus»
44%
19% 13%
6% 6% 12%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
PI GPI RIM DECI-SCH DECI-PRS ACT
Activité cognitive pour "suivi des tournées en cours de réalisation"
29%
43%
14% 14%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
PI GPI IDENT INFHY
Activité cognitive pour "Gestion des imprévus"
32
La gestion des imprévus semble également exiger une partie importante d’élaboration d’information
(PI+GPI=72%). La particularité de cette tâche est aussi la présence d’activités de diagnostic, avec
autant d’identifications précises (IDENT) que de conclusions hypothétiques (INFHY), soit 14% pour
chacun des deux prédicats. Cependant, nos données préliminaires ne permettent pas de mettre en
exergue le type de décision d’intervention dans le cadre de la gestion des imprévus.
Fig. 15.d : Répartition des différents prédicats pour la tâche de « gestion du matériel»
Enfin, ces premiers résultats montrent que la gestion du matériel requiert principalement à une
activité de l’élaboration d’information (notamment sur la variable « disponibilité »). D’après nos
résultats, cette activité se conclut généralement par une décision schématique d’intervention (17%).
Par ailleurs, nous avons étudié le type d’objet sur lequel les différentes activités de l’élaboration de
l’information (PI, GPI, RIM) portent (cf. Figure 16).
50%
16% 17% 17%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
PI GPI RIM DECI-SCH
Activité cognitive pour "Gestion du matériel"
33
Fig. 16. les objets sur lesquels les prédicats de catégorie « élaboration d’information » portent
Les résultats montrent que la moitié des prises d’informations porte sur l’argument « voyage ». Un
« voyage » correspond à un transport, regroupant un conducteur, un véhicule et une commande.
15% des prises d’information concernent un conducteur en particulier, 12% un véhicule et 9% le
matériel.
La Figure 17 permet d’identifier les variables sur lesquelles les élaborations d’informations portent.
Nous pouvons constater que la « disponibilité » reste la principale préoccupation de l’exploitant dans
ses prises d’informations (35%). La « position » et le « temps » sont également des variables non
négligeables dans l’activité cognitive de l’exploitant.
Fig. 17 : les variables à l’origine de l’activité d’élaboration de l’information
15% 4%
5%
9%
3% 12%
52%
0%
TM - Type objet ConducteurClientModalités de livraisonMatérielLieuVéhiculeVoyageTarif
35%
13% 23%
19%
10%
0%
0%
TM - Variable
DisponibilitéOrdre tournéePositionTempsTrajetCapacitéCarburant
34
Enfin, la Figure 18 porte sur la dimension psycholinguistique du schème de codage, et plus
précisément sur l’indicateur « si ». En effet, comme nous l’avons vu précédemment, le rôle de cette
dimension est d’apporter des éléments de réponse supplémentaires quant aux interrogations sur
l’activité cognitive de l’exploitant. Bien que l’analyse des éléments psycholinguistiques nécessite le
traitement d’un échantillon plus important que celui sur lequel ces résultats préliminaires portent,
ces résultats nous accordent un premier aperçu de l’apport de cette dimension.
Fig. 18 : l’analyse du connecteur « si » en tant qu’indicateur de condition
Comme nous l’avons vu dans le cadre de la formalisation de la méthode, le connecteur « si » reflète
les conditions que l’exploitant doit prendre en considération lors de ses raisonnements. En analysant
les différents cas d’apparition de « si » en tant qu’indicateur de condition (et non pas dans le cadre
d’autres utilisations, exemple : réponse affirmative), il apparait que les conditions peuvent être
regroupées selon 3 catégories : les conditions qui relèvent des ressources, les conditions sur
l’avancement du processus et les conditions dépendantes des clients. Ainsi, il faut noter que la
condition implicite la plus présente est celle liée aux clients (67%). Il s’agit notamment de la demande
ou des besoins de ces derniers, qui conditionnent en grande partie les réflexions de l’exploitant dans
son activité de planification.
Environnement matériel : quelle est l’utilisation des différents outils ?
Cette question se justifie par un autre objectif de notre démarche d’analyse : l’étude des interactions
de l’exploitant avec son environnement humain et matériel. Concernant l’utilisation des principaux
outils répertoriés, on peut voir sur la Figure 19 que le téléphone reste le moyen le plus utilisé par
11%
67% 22%
0%20%40%60%80%Ressources
ClientProcessus
Connecteur "Si"
Fréquence de "Si"selon le type decondition
35
l’exploitant (46%), notamment pour communiquer avec les conducteurs ou les clients. Le planning
mural et les bons de commande sont également assez fréquemment sollicités (16% et 13%). A
l’inverse, l’exploitant a une utilisation de la solution informatique « Eurotoll » relativement faible
(8%). Cela pourrait s’expliquer par le fait qu’il ne s’agit que d’une solution partielle (simple
géolocalisation) ; mais aussi par une certaine réticence chez l’exploitant à utiliser les nouvelles
technologies, comme nous l’avons vu dans la description de son profil. Une très bonne connaissance
de ses conducteurs pourrait être une autre explication. Cela aurait pour conséquence une plus
grande « confiance », et donc une activité de contrôle moindre.
Fig. 19. L’utilisation des principaux outils par l’exploitant de TM
Par ailleurs, lorsque l’on étudie la tâche sous-jacente à l’utilisation d’un outil, on peut remarquer que
l’outil informatique est exclusivement utilisé pour la tâche de « suivi des tournées en cours de
réalisation » (cf. Figure 20). Cela confirme que l’utilisation de ce logiciel reste plutôt limitée dans la
structure étudiée.
1%
8%
16%
13% 46%
0% 16%
TM - Outils Carte
Eurotoll/Transics
Planning mural
Bon decommande/planning papierTél
Pages Jaunes
Aucun outil
36
Fig. 20. Utilisation du logiciel informatique « Eurotoll » dans l’accomplissement de différentes tâches
chez TM.
Environnement humain : dans quel cadre les interactions ont-elles lieu ?
Lorsque l’opérateur fait appel au collectif (collègues), cela peut être dans le cadre de tâches
diverses : pour 40% des cas il s’agit « d’organisation des tournées à venir », 20 % pour le « suivi des
tournées en cours de réalisation », 30% pour des cas de « gestion des imprévus » et enfin 10%
lorsqu’il s’agit de la « gestion du matériel » (cf. Figure 21).
Fig. 21 : Les tâches sous-jacentes aux sollicitations des collègues de travail
0%
100%
0% 0% 0%
20%
40%
60%
80%
100%
120%
organisationdes tournées à
venir
suivi destournées
gestion desimprévus
gestion dumatériel
Utilisation d'Eurotoll selon differentes tâches
40%
20%
30%
10%
TM - Tâches/solicitation des collègues
Organisation des tournées
Suivi des tournées
Gestion des imprévus
Gestion du matériel
37
Il est également très intéressant de constater que, lorsque l’exploitant sollicite un collègue pour
prendre une information, l’objet de la demande concerne un transport en cours d’exécution
(replanification) pour 64% des cas (cf. Figure 22).
Fig. 22. Les phases d’intervention sous-jacentes aux sollicitations des collègues de travail
Il est à noter que les collègues de l’exploitant ne sont pas présents dans la même salle que celui-ci.
Ainsi, la prise d’information auprès d’un collègue se traduit par un déplacement, mais aussi très
souvent par une interruption de l’activité de son interlocuteur. Ce résultat pourrait trouver une
explication dans le fait que la sollicitation d’un collègue est implicitement réservée pour les cas où la
pression temporelle est plus importante car le transport est en cours de réalisation.
Conclusion Les résultats présentés restent partiels et il apparait évident qu’ils n’ont pas pour vocation la mise en
exergue d’interprétations et de conclusions définitives. Cependant, ces derniers permettent de
clarifier deux points essentiels : il faut tout d’abord noter que la méthode pluridimensionnelle est
applicable sur un terrain d’étude en conditions réelles, et ce, malgré les spécificités et difficultés
associées à une démarche empirique. Par ailleurs, la méthode d’analyse présente une certaine
efficacité, puisque des éléments de réponses prometteurs ont pu être mis en évidence à travers les
résultats préliminaires. L’aperçu des premiers résultats laisse présager que les questionnements sur
l’activité de l’exploitant transport, en particulier sur ses activités mentales dans la planification,
peuvent trouver des réponses substantielles grâce au schème de codage proposé.
Si les tâches et l’activité réelle, présentes dans la première dimension du schème de codage peuvent
être étudiées suivant d’autres méthodologies (observation armée, etc.), la véritable valeur ajoutée
36%
64%
0%
20%
40%
60%
80%
Planification Replanification
TM - phase d'intervention/appel aux collègues
38
de la méthode conçue réside dans la finesse de l’analyse de l’activité mentale. En effet, le croisement
du codage de l’activité réelle avec le codage de l’activité cognitive permet de détecter les spécificités
et les exigences mentales pour les principales tâches que l’exploitant est amené à effectuer au
quotidien. De plus, la dimension psycholinguistique apporte un niveau de précision supplémentaire
dans cette analyse cognitive, puisqu’elle permet d’accéder à des traces de raisonnement que
l’exploitant ne serait pas en mesure de verbaliser consciemment. Par exemple, l’incertitude peut
paraitre comme une notion abstraite, difficile à mesurer pour un opérateur. Or le croisement de
l’échelle de l’incertitude avec les tâches permet de comparer, en se basant sur les éléments
langagiers spontanés, le niveau d’incertitude selon chaque tâche.
Ainsi, une liste de questions portant sur les différentes dimensions de l’activité de l’exploitant sera
dressée dans le prochain rapport. Les éléments de réponse seront apportés en croisant les
différentes modalités du schème de codage pluridimensionnel. Des résultats qui porteront sur des
données issues des deux établissements du terrain d’étude. Les questions demeurant sans réponses
ou avec des réponses partielles contribueront à définir les limites de la méthode utilisée. Enfin, un
traitement statistique sera appliqué à l’ensemble des résultats obtenus afin d’évaluer leur
significativité et de renforcer, ou de nuancer, les conclusions qui en découleront.
Une fois que les différentes dimensions de l’activité de planification de l’exploitant seront éclaircies,
un autre objectif devrait émerger : celui de comparer l’activité de planification dans le TRM à
d’autres domaines d’activité. Néanmoins, cette comparaison doit reposer sur une structure
commune, une structure que nous tentons de définir à travers le chapitre suivant.
39
Chapitre II : Typologie multidimensionnelle des situations d’ordonnancement
Nous avons vu dans le chapitre précédent comment des questionnements concrets sur l’activité des
exploitants pouvaient trouver des réponses pertinentes et objectives grâce à la méthode d’analyse
des protocoles. Des réponses qui laissent présager une meilleure compréhension, mais aussi des
perspectives d’intervention sur l’activité de cet acteur majeur du secteur des transports. Par ailleurs,
tout au long de ce manuscrit, nous avons affiché la volonté de faciliter la reproductibilité de la
méthode conçue en mettant l’accent sur son caractère adaptable. En effet, loin d’être spécifique à
l’activité de l’exploitant, la méthode présentée vise à être transposable dans une très grande
majorité de situations de planification et d’ordonnancement. Cette transposabilité méthodologique
entrouvre une nouvelle porte : celle d’une démarche comparative entre les différents secteurs
d’activité. Cependant, une telle démarche ne peut être réellement profitable que si elle se base sur
des critères d’évaluation préalablement établis. Ainsi, ce dernier chapitre s’inscrit dans un objectif de
regroupement des différentes dimensions de l’ordonnancement que l’on retrouve dans divers
secteurs d’activité.
Les typologies de l’ordonnancement ne sont pas rares dans la littérature. Toutefois, les objectifs
propres de ces travaux conditionnent les classifications qui y sont proposées. Les typologies
existantes sont souvent spécifiques à un domaine d’application unique, comme par exemple celle
concernant l’ordonnancement sur les plates-formes portuaires (Boysen, Fliender et Scholl, 2010).
D’autres études exposent des taxonomies sur l’ordonnancement avec une démarche plus
transversale ; cependant ces dernières se focalisent souvent sur une seule dimension, comme par
exemple celle de la résolution des problèmes d’ordonnancement à l’aide d’algorithmes. Parmi de
nombreux travaux, notamment issus de la Recherche Opérationnelle, les travaux de Yenisey et
Yagmahan (2013) illustrent bien cette focalisation sur l’unique dimension des algorithmes de
résolution. Partant de ce constat, Lodree, Geiger et Jiang (2009) ont proposé une taxonomie en
intégrant notamment les facteurs humains dans les tâches d’ordonnancement.
Ce travail a pour visée l’élaboration d’une typologie des critères de l’ordonnancement. Une typologie
fondée sur des éléments généralisables, nous permettant de caractériser et de comparer la
planification dans le secteur du TRM à celle présente dans d’autres secteurs d’activité, notamment
les secteurs dans lesquels on retrouve la planification de tournées. Cette démarche se rapproche
notamment des travaux de Liu et MacCarthy (1996), qui ont proposé un schème de classification
40
pour les situations d’ordonnancement dans les ateliers flexibles. Le schème conçu se repose sur 5
catégories d’indicateurs, comportant chacune une série de modalités. Ces catégories peuvent être
synthétiquement définies de la manière suivante :
Configuration d’ordonnancement : il s’agit du type d’atelier, avec le type d’ordonnancement qui lui
correspond. Exemple : atelier à machine unique, atelier à machines multiples, etc.
La contrainte de capacité : ce sont des indicateurs qui traduisent le niveau de contrainte lié à la
capacité des ressources. Avec pour chaque ressource trois modalités : capacité zéro, capacité limitée
et capacité illimitée.
Caractéristiques du processus : cela concerne le degré de complexité, qui est défini par le nombre
d’opérations nécessaire à chaque ordre de fabrication, ainsi que le degré de flexibilité caractérisé par
le nombre de machines pouvant réaliser la même opération. Les modalités possibles pour cette
catégorie sont par exemple « une seule opération pour chaque OF », « plusieurs opération pour
l’ensemble des OF », « une seule machine pour chaque opération » ou encore « plusieurs machines
pour l’ensemble des opérations ».
Stratégies de production : cette catégorie correspond aux décisions stratégiques supérieuress qui
affectent l’ordonnancement opérationnel. Il s’agit par exemple des choix des règles de priorité.
Objectifs d’ordonnancement : cette dernière dimension correspond aux objectifs généraux du
système d’ordonnancement de la production. Les objectifs peuvent se traduire sous la forme du taux
d’exploitation des ressources, de la durée du processus ou le contrôle des fenêtres temporelles.
En se basant sur ces critères, il devient possible de schématiser un grand nombre de situations
d’ordonnancement d’ateliers. Pour illustrer cela, les auteurs ont schématisé une situation
d’ordonnancement d’atelier flexible décrite par Lee et Iwata (1991). Cette description se présente de
la manière suivante :
Configuration d’ordonnancement - Flexible manufacturing cell (FMS). Il s’agit d’un
système composé de machines, d’un robot et d’une « cell
camputer », une carte informatisée qui gère le flux et les
différentes étapes du process.
La contrainte de capacité
- Machines : nombre limité
- Stocks : illimités
- Palets : nombre limité
- Dispositif automatisé de manipulation : illimité
41
Nous rappelons que l’objectif de ce chapitre réside dans la mise en œuvre d’une démarche similaire à
celle de Liu et MacCarthy (op. cit.). De plus, alors que le schème de classification de ces derniers se
focalise sur le contexte d’ordonnancement d’ateliers flexible, notre intérêt se porte sur une typologie
plus générique, adaptable notamment aux contextes d’ordonnancement avec réalisation de
tournées, quel que soit le secteur d’activité (TRM, commerciaux, infirmiers, etc.). D’autre part, nous
estimons que les dimensions prises en compte peuvent être élargies et d’autres types de critères
peuvent être intégrés dans la typologie. Par exemple, la dimension cognitive n’apparait pas dans la
catégorisation de Liu et MacCarthy, alors que celle-ci semble indissociable de l’activité
d’ordonnancement.
Nous avons ainsi répertorié 7 catégories, chacune composée d’un ensemble de critères
conditionnant l’activité d’ordonnancement :
• horizon temporel de l’ordonnancement ;
• conditions d’ordonnancement ;
• règles d’ordonnancement ;
• étapes d’ordonnancement ;
• exigences cognitives dans l’ordonnancement ;
• environnement de l’ordonnancement ;
• indicateurs de performance.
Ces dimensions vont être explicitées et illustrées à l’aide d’exemples concrets issus de situations
réelles, notamment en lien avec l’ordonnancement de véhicules.
1. L’horizon temporel de l’ordonnancement Les missions d’un ordonnanceur peuvent s’inscrire dans différents niveaux temporels. Crainic et
Laporte (1997) ont défini 3 niveaux distincts : le niveau stratégique, le niveau tactique et le niveau
opérationnel. Le niveau stratégique fait référence à l’horizon temporel le plus éloigné, avec un
positionnement sur le long terme comme la politique tarifaire, le choix du marché ciblé, l’acquisition
Caractéristiques du processus
- Plusieurs opérations pour un OF
- Une machine pour chaque opération
Stratégies de production
- Processus périodique (discontinu)
- Ordonnancement interdépendant pour les
différentes pièces
Objectifs d’ordonnancement
- Exploitation maximale des ressources (réduction
du temps du processus)
42
de ressources, etc. Le niveau tactique correspond à un horizon temporel moyen. L’objectif est ici
d’optimiser de manière générale l’utilisation des ressources, tout en anticipant l’évolution des
commandes futures. Enfin, le niveau opérationnel se traduit par une gestion à court terme, voire en
temps réel. Il s’agit d’opérations concrètes et immédiates, telles que la construction de plans,
l’affectation des ressources ou la gestion des opérations de maintenance.
Chaque niveau peut solliciter des opérateurs différents. Selon Cegarra (2004), le planificateur
intervient plutôt à long terme, sur les choix stratégiques. L’ordonnanceur intervient à moyen et court
terme en élaborant ou en réajustant les plans. Enfin, le répartiteur et le régulateur interviennent à
court terme, en assurant les tâches les plus opérationnelles. Cependant, on constate fréquemment
que l’ensemble de ces fonctions peut être assuré par un même opérateur, en particulier dans les
structures de petite taille.
Enfin, il existe également des différences d’horizon temporel à l’intérieur d’un même niveau. Par
exemple, le niveau opérationnel peut comprendre une planification à J + 7 dans un organisme, alors
que dans d’autres structures la planification opérationnelle se fera le jour J.
Le tableau 2 synthétise les différents horizons temporels dans l’ordonnancement.
Tab. 2 : horizons temporels dans l’ordonnancement
Horizon temporel Définitions et illustrations opérationnelles
Niveau stratégique
(HT long)
Choix des prestations, dates, études de faisabilité, etc. Pour une entreprise de transport, il s’agira par exemple de se positionner plutôt sur le marché du BTP que sur celui du transport alimentaire, et de s’équiper de ressources en adéquation avec son positionnement.
Niveau tactique
(HT moyen)
Utilisation plus efficiente des ressources, et notamment après une modification des contraintes. Par exemple, dans l’ordonnancement du TRM, la mise en place de l’écotaxe2 va exiger un choix de niveau tactique concernant les trajets empruntés : continuer à privilégier les trajets les plus rapides (autoroutes) en payant une taxe supplémentaire ou opter pour des itinéraires non taxés (routes nationales) au risque d’augmenter considérablement les temps de trajets.
Niveau opérationnel
(HT court)
Niveau le plus étudié, car c’est aussi le niveau le plus observable au quotidien. Il peut s’agir de l’affectation d’une équipe de pompier à un lieu d’intervention ou le choix de l’ordre des visites par un infirmier.
2 Taxe concernant les dommages environnementaux, mise en place par le gouvernement avec une entrée en vigueur le 1er janvier 2014.
43
Echéances opérationnelles :
Il s’agit de quantifier de façon plus précise l’horizon temporel dans l’ordonnancement opérationnel. La construction des tournées par l’infirmier peut se réaliser à J+1 ou J+2, d’une semaine à l’autre dans une industrie (J+7), ou bien en temps réel, comme l’affectation d’une équipe de pompiers. La détection des échéances opérationnelles est indispensable, puisqu’elle se traduit directement par des conséquences diverses sur le plan mental (pression temporelle).
2. Conditions d’ordonnancement Pour réaliser un ordonnancement, l’ordonnanceur devra prendre en compte un certain nombre de
contraintes. L’ensemble de ces contraintes contribue à construire un cadre général à respecter que
nous appellerons les « conditions d’ordonnancement ». Selon le domaine ou la situation, ces
contraintes peuvent être très variables. Il est donc impossible de dresser une liste exhaustive de
l’ensemble des contraintes recouvrant aussi bien l’ordonnancement de véhicules que
l’ordonnancement industriel ou de personnel. Cependant, les fondements de l’ordonnancement
étant indépendants du secteur d’activité, nous pouvons regrouper ces contraintes autour de 3
catégories transversales : les contraintes de ressources, les contraintes temporelles et les contraintes
externes ou environnementales. De plus, ces contraintes peuvent être de deux types : strictes ou
relâchables (Letouzy, 2001). Les contraintes strictes sont des exigences à respecter obligatoirement
alors que les contraintes relâchables peuvent, dans certains cas, ne pas être satisfaites. A ces
contraintes s’ajoutent d’autres éléments qui dépendent du type de planification et qui en
conditionnent la réalisation. Le type de tournée ou le type de client (réguliers vs occasionnels) sont
par exemple des critères qui sont à intégrer dans cette catégorie des conditions d’ordonnancement.
L’ensemble de ces éléments est présenté et illustré à travers le Tableau 3.
Tab. 3 : Conditions de l’ordonnancement
Conditions d’ordonnancement Définitions et illustrations opérationnelles
Contraintes de ressources
• Contraintes de ressources
matérielles
- Contraintes de capacité
- Contraintes d’utilisation
Dans l’ordonnancement des véhicules, la contrainte de capacité est très fréquemment présente. Celle-ci fait référence à l’ensemble des travaux sur la problématique CVRP (Capacitated Vehicle Routing Problem) (Toth et Vigo, 2002). Cette limite peut se traduire sous forme de volume ou de poids. De plus, les ressources peuvent être disjonctives (une tâche à la fois) ou cumulatives (plusieurs tâches à la fois) (Souier, 2011). Une citerne ne peut être que disjonctive alors qu’une semi-remorque peut être cumulative. Les contraintes d’utilisations des ressources peuvent être
44
• Contraintes de ressources humaines
diverses. Il peut par exemple s’agir d’une limite d’exploitation minimum à ne pas dépasser pour une machine. Eviter un retour à vide est un autre exemple qui montre la présence de ce type de contraintes dans le domaine du TRM. L’impossibilité d’affecter un véhicule trop usé sur un long trajet en est une autre illustration.
Dans de nombreuses situations, l’ordonnanceur doit gérer parallèlement les ressources matérielles avec les ressources humaines. L’humain est par exemple indispensable à l’utilisation d’une ressource telle qu’un véhicule. De ce fait, des éléments tels que le respect des horaires de travail doivent être pris en compte. Par ailleurs, dans de nombreuses situations le planificateur gère des contraintes humaines de façon implicite. Pour ce faire, il se base sur sa connaissance du personnel afin d’affecter le profil qui correspond le mieux à une mission (exemple : affecter le conducteur le plus « débrouillard » sur une tournée inhabituelle, avec beaucoup d’incertitude).
Contraintes temporelles
On retrouve les contraintes temporelles dans la quasi-totalité des situations d’ordonnancement. Ces contraintes correspondent au délai de fabrication, de livraison, de visite, etc. Cependant, d’une situation à une autre, la taille de la fenêtre temporelle n’est pas la même. Par ailleurs, tout comme les contraintes de ressources, les contraintes temporelles peuvent être strictes ou relâchables. Pour un infirmier, le respect de la fenêtre temporelle matinale lors d’une prise de sang à jeun sera beaucoup plus strict que pour un changement de pansement hebdomadaire. Concernant l’ordonnancement des véhicules, la prise en compte des contraintes temporelles a largement été traitée dans la littérature sous la forme du VRPTW (Vehicle Routing Problem with Time Windows) (Yu, Yang et Yao, 2010).
Contraintes environnementales
Les contraintes environnementales sont des contraintes externes au système, qui imposent au planificateur la prise en considération d’un certain nombre d’éléments supplémentaires. Evidemment, celles-ci dépendent directement du domaine et du contexte de l’ordonnancement. Les différentes réglementations, comme le code de la route, contraignent par exemple la vitesse de l’exécution d’un plan (tournée) par les limitations de vitesse.
Particularités de l’ordonnancement Au-delà des contraintes généralisables que nous avons évoquées, chaque situation d’ordonnancement comporte des particularités qui définissent, tout autant que les contraintes, les conditions d’ordonnancement. Il s’agit par exemple du type de tournée : si ce sont des tournées uni-destinataires, multidestinataires, de type navette, etc. De plus, le type de client et la demande de celui-ci peuvent être un autre critère de comparaison. En effet, les conditions d’ordonnancement ne seront pas les mêmes pour une entreprise travaillant uniquement avec des clients réguliers et des demandes
45
identiques, que lorsque les demandes sont variables. Idem lorsque les clients sont saisonniers, ponctuels ou sous-traitants.
3. Règles d’ordonnancement Un plan ne peut être élaboré sans l’application d’un certain nombre de règles, définissant les
priorités de l’ordonnanceur. En effet, l’ordonnanceur doit fréquemment satisfaire plusieurs
commandes, ce qui le conduit à faire un choix quant à l’ordre de l’exécution des plans. Si dans
certains domaines, tels que le secteur manufacturier, l’utilisation de ces règles se fait de manière
explicite, voire automatique (avec un emploi algorithmique), cette application est beaucoup plus
implicite, et même inconsciente, dans de nombreux autres contextes. L’analyse de l’activité doit ainsi
permettre de repérer dans un premier temps les principaux objectifs du système d’ordonnancement,
puis d’expliciter les règles de priorité qui en découlent. Enfin, l’analyste pourra noter si l’utilisation de
règles se fait de façon inconsciente ou consciente, dans quel cas il faudra différencier une application
algorithmique d’une application « manuelle ». Le Tableau 4 récapitule quelques-unes des règles de
priorités les plus couramment utilisées issues d’une littérature très riche, notamment en Recherche
Opérationnelle (Tsung-Che, Li-Chen, 2012). En se basant sur les travaux de Bonfil, Espuna, et
Puigjaner (2008), nous présenterons également 4 types d’interrogation majeurs dans
l’ordonnancement des transports qui illustrent la fonction des règles d’ordonnancement.
Tab .4 : Les règles de l’ordonnancement
Règles d’ordonnancement Définitions et illustrations opérationnelles
Principales règles de priorité dans
l’ordonnancement
• FCFS (First come, first served) :
la priorité est donnée aux
opérations/commandes selon leur ordre
d’arrivée.
• SPT (Shortest Processing Time) :
la priorité est donnée au.
opérations/commandes qui ont le délai de
fabrication le plus court.
• LPT (Longest Processing Time) :
la priorité est donnée aux
opérations/commandes qui ont un temps
Selon Bonfill, Espuna et Puigjaner (2008), les règles de priorité sont utilisées dans l’ordonnancement des transports pour répondre à 4 questions fondamentales : 1. Quelle commande traiter ? 2. Quelle ressource (véhicule) y affecter ? 3. Comment charger le véhicule ? 4. Quand exécuter le plan ?
Pour la première question, les règles appliquées sont plutôt EDD ou HD (Highest demand). L’ordonnanceur privilégiera donc les commandes avec l’échéance de livraison la plus proche ou bien les demandes qu’il jugera comme étant plus importantes et plus urgentes. En ce qui concerne la deuxième question, celle-ci se pose dans le cadre des situations ou l’état des véhicules est hétérogène. Les différentes règles possibles peuvent alors être : BFV (Best Fit Vehicle), BUV (Best Used Vehicle), FFV (First Fit Vehicle) et LUV (less used vehicle).
46
de fabrication le plus long.
• EDD (Earliest Due Date) :
la priorité est donnée aux
opérations/commandes dont la date de
fin promise est la plus proche.
• PCO (Prefered Customer Order) :
La priorité est donnée aux
opérations/commandes du client
« préféré »
• CR (Critical Ratio) :
la priorité est donnée aux commandes
dont le ratio critique est le plus élevé.
Le chargement peut s’organiser selon l’échéance de déchargement (Due Date), selon la charge maximum (Maximum Load) ou en fonction du temps de déchargement (Minimum Release Time). Enfin, une fois que l’ensemble des problèmes précédents a été résolu, il s’agit de choisir le moment de l’exécution du plan. Soit en appliquant une planification rétroactive (Backward due Date), soit en adoptant la règle du « plus tôt possible » (Forward from Earliest Pick up), qui sous-entend la disponibilité des ressources.
4. Etapes de l’ordonnancement Une démarche d’ordonnancement se caractérise par l’enchainement de plusieurs étapes. Dans la
littérature, nous constatons globalement une distinction entre deux phases principales : la phase
prédictive (ou proactive) et la phase réactive (ou rétroactive) (Pinot, 2008).
La phase prédictive a lieu avant l’exécution du plan. Pour ce faire, le planificateur doit se construire
un modèle du problème, et construire son plan, avec un niveau de précision plus ou moins
important, en se projetant dans le futur. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle cette phase exige un
sens certain de l’anticipation. Ainsi, la phase prédictive englobe l’ensemble des activités de prise
d’information permettant au planificateur de créer sa représentation du problème.
La phase réactive a lieu pendant l’exécution du plan. Lors de cette phase, il s’agit de réagir et de
réajuster le plan initial en fonction de l’évolution de la situation. La notion de « ré-ordonnancement »
est alors employée pour les interventions de l’ordonnanceur pendant cette phase. La phase réactive
nécessite des qualités d’adaptabilité, puisque la marge de manœuvre est plus réduite et la pression
temporelle plus importante (Pinot, op.cit.).
Dans le cadre d’une démarche comparative telle que la nôtre, le niveau d’intervention lors de chaque
phase est un facteur fort intéressant. En effet, la proportion de ré-ordonnancement (phase réactive)
est notamment un indicateur puissant du degré d’incertitude qui réside dans différents contextes
d’ordonnancement.
47
Tab .5 : Les étapes de l’ordonnancement
Etapes d’ordonnancement Définitions et illustrations opérationnelles
Phase prédictive
L’ensemble des prises d’informations sur la disponibilité des ressources, sur les fenêtres temporelles, sur les trajets possibles, etc. Plus les informations seront nombreuses et fiables, plus l’ordonnanceur consacrera du temps à cette phase.
Phase réactive
La phase réactive est présente dans l’ensemble des activités d’ordonnancement. Cependant, elle peut correspondre à une simple activité de suivi accompagnée de quelques ajustements dans certaines situations, alors que dans d’autres, il peut s’agir d’une activité de ré-ordonnancement continu en temps réel. Cette phase revêt une importance particulière dans les cas où l’incertitude ne permet pas d’élaborer un plan assez précis en phase prédictive. Par exemple, lorsque les temps de déchargement sont complètement aléatoires, une tournée multidestinataire avec des horaires précis de livraison ne peut être réalisée. Le plan doit être ainsi constamment « mis à jour » en phase réactive.
5. Exigences cognitives La construction de la représentation du problème, la prise en compte des différentes contraintes, la
priorisation des objectifs et l’ensemble des autres éléments de l’ordonnancement que nous avons
évoqués représentent un coût mental pour l’opérateur. Cependant, le niveau de cette exigence peut
varier selon des paramètres inter et intra-situationnels. Pour être en mesure de situer ce niveau
d’exigence mentale, nous devons répertorier, dans notre schème de classification, les principales
dimensions cognitives qui sont mises en jeux dans les activités d’ordonnancement. Ici, l’enjeu
consiste à ne pas se focaliser uniquement sur le système « matériel » de l’ordonnancement, mais de
centrer nos critères de comparaison aussi bien sur la machine que sur l’homme.
Pour ce faire, nous nous inspirons des travaux de Cegarra (2008) ayant porté sur l’élaboration d’une
typologie cognitive des situations d’ordonnancement. En effet, en se référant à d’autres travaux dans
le domaine des Facteurs Humains (Cellier, 1996 ; Van Der Schaaf, 1993 ; Wiers, 1997), ce dernier a
défini sept dimensions cognitives de l’ordonnancement, parmi lesquelles nous en avons retenues 4 :
• l’incertitude ;
• la pression temporelle ;
48
• Les différents cycles temporels ;
• Les objectifs multiples et contradictoires.
La dimension « complexité structurale » n’a notamment pas été retenue, puisqu’elle recoupe et
dépend de l’ensemble des catégories présentes dans notre schème de codage. Notre réflexion sur la
notion ô combien importante de la « complexité » sera développée en conclusion de ce chapitre. Les
explications et illustrations des dimensions cognitives de l’ordonnancement sont présentées à travers
le Tableau 6.
Tab.6 : Exigences cognitives dans l’ordonnancement
Exigences cognitives Définitions et illustrations opérationnelles
L’incertitude
2 types d’incertitudes :
• Incertitude sur les informations données ;
• Incertitude sur l’état futur du processus.
• Incertitude sur les informations données
Les informations peuvent aussi bien concerner la demande d’un client, le temps d’un trajet ou encore les horaires d’ouverture d’un lieu de livraison. Exemple tiré de notre étude au sein de l’entreprise M : L’exploitant admet que les informations sur les données sociales des conducteurs affichées par le logiciel informatique ne sont pas exactes et les écarts sont variables. Ainsi, le temps de conduite restant affiché par le logiciel peut être de 1H40 pour un conducteur, alors qu’en réalité il ne lui reste plus que 50 minutes à conduire. Une différence qui peut remettre en cause l’aboutissement d’une tournée en fin de journée. De plus, il est intéressant de différencier les stratégies que l’ordonnanceur pourrait adopter pour faire face à cette incertitude. Pour notre exemple, l’exploitant sollicite une autre source pour l’information incertaine. il s’agit d’appeler directement le conducteur. Cette incertitude peut également se traduire sous la forme d’un manque d’information. Ce qui explique souvent la favorisation de stratégies « d’attente » et de planification dynamique.
• Incertitude sur l’état futur du processus Ces incertitudes peuvent être liées soit à l’instabilité du processus même (probabilité de survenue d’aléas tels que les pannes, les accidents, etc.), soit à des facteurs externes, comme les variations des demandes des clients, conditions atmosphériques, absence de personnel, etc.
Pour le critère de l’incertitude, il convient de repérer pour chaque situation la nature de celle-ci, mais aussi les stratégies qui sont adoptées pour y faire face. La gestion de l’incertitude est notamment en lien directe avec le taux d’intervention selon la phase de l’ordonnancement (Tab. 5).
49
Plus le niveau d’incertitude sera élevé, plus les interventions de l’ordonnanceur se produiront pendant la phase réactive (Sanderson, Moray, 1990).
La pression temporelle
• Horizon temporel
• Rigidité des fenêtres temporelles
L’ordonnancement est une activité exigeante sur le plan mental, et requiert donc un temps important pour sa réalisation. Cependant, le temps mis à disposition de l’ordonnanceur n’est pas infini, et de nombreuses contraintes temporelles limitent la durée de réalisation d’un plan. La pression temporelle augmente avec la complexité et la réduction de l’horizon temporel. Elle se traduit par des ordonnancements plus simples, avec une évaluation plus « rapide » des différentes solutions alternatives.
La pression temporelle varie également selon la rigidité des fenêtres temporelles. Exemple : la planification d’une tournée avec produits alimentaires ou produit destinés à une grande industrie doit prendre en compte une fenêtre temporelle courte, et non « relâchable ». A l’inverse, le transport d’un matériel agricole correspondra à une fenêtre temporelle plus souple, puisque généralement pendant toute la journée l’agriculteur se trouve sur son exploitation et peut réceptionner son matériel. Il apparait évident que pour une échéance identique, l’exploitant aura davantage de pression temporelle dans le premier cas que dans le second.
Les différents cycles temporels
Les situations d’ordonnancement se caractérisent par la coexistence de plusieurs cycles temporels (Forrierre et al., 2011). Plus le rythme des différents acteurs va différer, plus cela va augmenter le niveau de complexité de l’ordonnancement. Par exemple, la planification des tournées de médecins du travail peut s’avérer problématique lorsque les médecins travaillent sur des horaires classiques alors que l’entreprise cible présente une activité de nuit uniquement.
Les objectifs multiples et
contradictoires
L’élaboration d’un ordonnancement s’accompagne fréquemment par la gestion d’un certain nombre de dilemmes. En effet, l’ordonnanceur doit satisfaire au mieux les objectifs de la direction, des opérateurs, des clients ou des partenaires. Cette conciliation est complexe, puisque les objectifs sont souvent divergents et peuvent dans certaines situations créer des conflits. A titre d’exemple, dans le cas du transport de fonds, les clients (banques) peuvent avoir une préférence pour être approvisionnés en début de matinée, alors que l’intérêt pour
50
l‘entreprise de transport, en particulier pour les convoyeurs, serait plutôt une livraison en fin de matinée (moins de circulation et plus de sécurité).
6. Environnement de l’ordonnancement L’activité de planification ne peut être analysée indépendamment du contexte et de l’environnement
dans lesquels elle se réalise. La planification peut s’accomplir de manière totalement individuelle par
un opérateur isolé, tout comme elle peut être réalisée de façon collective, par un groupe
d’ordonnanceurs formant un service, interagissant continuellement dans un espace commun. Entre
ces deux types de fonctionnement extrêmes, il existe un continuum sur lequel chaque situation
d’ordonnancement peut être située en fonction du type de planification, du nombre d’acteurs, de
leur proximité géographique, et du type de collaboration. Ce dernier point a fait l’objet de
nombreuses études, dont la revue de Bedwell et al. (2012) qui distinguent 3 catégories d’activité
collaborative : le travail d’équipe, la coordination et la coopération. Bien que ces termes soient
fréquemment employés en tant que synonymes interchangeables, ils traduisent en fait des concepts
différents. Le Tableau 7 présente les caractéristiques spécifiques des 3 catégories citées.
L’activité d’un ordonnanceur ne se réalise pas uniquement en interaction avec un environnement
humain. Les différents outils et moyens matériels forment également son environnement de travail.
Ainsi, la comparaison de deux situations de planification doit également prendre en compte la
présence de différents outils et le degré d’automatisation du processus d’ordonnancement.
Tab .7 : L’environnement de l’ordonnancement
Environnement de l’ordonnancement Définitions et illustrations opérationnelles
Environnement humain
Ordonnancement individuel/collectif
Types de collaboration :
• Travail d’équipe
2 ou plusieurs opérateurs formant une équipe.
Travail commun autour d’un but partagé.
• Coordination
La planification des tournées de camions peut se faire par un seul opérateur (individuel) ou par 2 personnes ou plus (collectif). Dans le cadre d’un ordonnancement collectif, il peut s’agir d’une coordination, si chaque opérateur est en charge d’une partie du processus de planification. Exemple : Lorsque l’exploitant 1 a pour rôle d’affecter les conducteurs et les véhicules et que l’exploitant 2 s’occupe du choix des clients à desservir et l’ordre de l’exécution de la tournée. A l’inverse, si ces derniers mènent une réflexion commune sur l’ensemble des étapes de l’ordonnancement en se concertant et en contrôlant mutuellement leur travail, il s’agira plutôt d’une activité de coopération. De plus, la proximité géographique est également à préciser. En effet, les conséquences sur l’activité ne seront
51
2 ou plusieurs opérateurs ou ressources
matérielles.
Agencement et interdépendance entre les
tâches de chacun pour parvenir au but final
• Coopération
Activité réciproque
Partage des tâches
Fonction de contrôle
pas les mêmes selon que les exploitants soient regroupés dans la même salle d’exploitation ou qu’ils soient postés sur deux sites différents.
Environnement matériel
• Liste des outils
• Niveau d’automatisation
En se basant sur l’analyse de l’activité, il s’agit de dresser une liste la plus complète de l’ensemble des outils qui sont sollicités pendant le processus de planification.
Enfin, la fonction des outils doit également faire l’objet d’une attention particulière. En effet, ces derniers peuvent être de simples sources d’information ou des supports de réflexions, tout comme ils peuvent permettre une planification automatique (exemple : logiciel basé sur un algorithme). Ainsi, un ordonnancement peut être manuel, automatique ou bien hybride, sollicitant aussi bien l’homme que la machine.
7. Indicateurs de performance Les indicateurs de performance sont des repères pour évaluer ou auto-évaluer l’activité
d’ordonnancement. Ces derniers dépendent directement des objectifs propres à chaque organisme,
ainsi que des règles d’ordonnancement établies pour les atteindre (cf. Figure 4, p.43). Tout comme
les règles de priorité, l’utilisation d’indicateurs de performance peut se faire de manière officielle,
avec un suivi statistique rigoureux, ou bien sous une forme beaucoup plus informelle. En effet, dans
de nombreux contextes les ordonnanceurs s’interrogent sur des points bien précis dans le but d’avoir
des feedbacks sur leur propre activité. Letouzey (2001) regroupe les indicateurs de performance
selon 5 catégories. Celles-ci sont décrites dans le Tableau 8. Il apparait évident que l’ensemble des
indicateurs de performance ne peut être évalué dans une seule situation donnée. Mais le but est de
détecter et de différencier les indicateurs exploités dans chaque structure, dans le cadre d’une
démarche comparative.
52
Tab.8 : Les indicateurs de performance dans l’ordonnancement
Indicateurs de performance Illustrations opérationnelles
Indicateurs temporels :
– Retard moyen ou maximal des commandes – Retard des commandes par priorité – Durée opératoire par commande – Temps de cycle par commande – Durée opératoire / temps de cycle par commande – Retard / temps de cycle par commande – Temps de réglage par commande – Temps de réglage / temps de cycle par
commande
L’utilisation des indicateurs temporels traduit un objectif
prioritaire qui est le respect des délais de fabrication/livraison.
Il s’agit de surveiller par exemple la proportion de livraison
hors délai, le temps de retard moyen ou le temps moyen passé
à effectuer une distance de référence.
Indicateurs de ressources :
– Taux d'occupation par ressource – En-cours – Nombre de ressources utilisées par commandes – Somme des temps de réglage par ressource
Ces indicateurs sont fréquemment utilisés dans les situations où l’exploitation des ressources peut être coûteuse. A titre d’exemple, le niveau de fréquentation des lignes de bus est un indicateur fort dans l’optique de les maintenir, de les modifier ou de les supprimer dans un réseau de bus urbain.
Indicateurs financiers :
– Surcoût en heures supplémentaires – Surcoût en sous-traitance – Coût de stockage
Quel que soit le domaine ou la taille des structures, rares sont les entreprises qui ne prennent pas en compte les indicateurs financiers. L’utilisation de ces indicateurs peut conduire à des réajustements tarifaires, comme dans le cas d’une augmentation du prix du carburant pour une entreprise de transport. Les indicateurs financiers s’appliquent davantage sur une évaluation à moyen, voire à long terme.
Indicateurs sur les opérateurs :
– Volume d'heures supplémentaires – Taux d'utilisation d'une compétence critique
Il s’agit des indicateurs centrés sur les salariés, plus précisément sur la quantité et les exigences de leur travail. L’analyse des absences et des maladies professionnelles peut également être intégrée dans cette catégorie.
Indicateurs sur l’incertitude :
– Nombre de ressources sur-réservées – Retards des commandes certains / retards des commandes incertains
Introduire la flexibilité dans un système pour gérer l’incertitude n’est pas sans coût. Cependant, l’échec dans l’exécution d’un plan par manque d’anticipation peut s’avérer désastreux. C’est pourquoi il existe des indicateurs concernant la gestion de l’incertitude, afin d’évaluer si celle-ci est sur ou sous-estimée.
53
Conclusion La typologie qui vient d’être exposée n’a pas la prétention de répertorier l’ensemble des éléments
repérables dans les différentes situations d’ordonnancement. Elle constitue une structure nous
permettant d’attribuer ces éléments à des catégories bien distinctes. Cela donne la possibilité de
schématiser un terrain d’étude, et de favoriser une démarche comparative avec d’autres situations
décrites selon les mêmes critères.
Pour illustrer cette schématisation et afin de récapituler l’ensemble des dimensions de notre
typologie, l’activité de planification chez TM peut être décrite de la manière suivante :
Tab.9 : Description de la situation d’ordonnancement chez TM.
1. Horizon temporel de
l’ordonnancement
Niveau opérationnel
Echéances opérationnelles : J+1, J+2
2. Conditions
d’ordonnancement
Contraintes de ressources :
Ressources matérielles : capacité limitée
Ressources : disjonctives (citerne, bennes)
Exploitation : pas de retour à vide
Ressources humaines : respect réglementation française (9 h par jour +
pauses + pas plus de 56 h par semaine) + pas de travail le weekend
Prise en compte des critères implicites (profil du conducteur, son lieu
d’habitation, le « mérite »)
Contraintes temporelles :
Fenêtres temporelles rigides Contraintes environnementales
Code de la route
Réglementation sur la circulation des poids lourds
Particularité :
Clients réguliers, demandes habituelles ou non, tournées uni-
destinataires.
3. Règles
d’ordonnancement
Choix de commande : clients les plus importants en priorité
Choix du véhicule : selon le type de la demande, pas de priorité entre
les véhicules de même type (parc homogène)
Choix du chargement : pas de priorité (bennes, citerne)
4. Etapes Prédictive et réactive, davantage d’interventions prédictives.
54
d’ordonnancement
5. Exigences cognitives
Incertitude : concernant les demandes des clients (très variables d’un jour à un autre). Incertitude concernant les données informatiques sur les temps de conduite, incertitude liée aux aléas de la route. Pression temporelle : horizon temporel très court, peu de marge de manœuvre. Rigidité temporelle importante pour certains clients (BTP). Les différents cycles temporels : cycles d’activité des clients très variables
6. Niveau de
collaboration
Environnement humain : planification individuelle, présence de collègues sur le site avec échanges ponctuels. Environnement matériel : planification manuelle. Logiciel Eurotoll (simple géolocalisation), panneau mural des affectations, carnet d’archivage, carte murale, planning papier, annuaire.
7. Indicateurs de
performance
Indicateur de ressource : nombre de conducteurs et de vehicules affectés par jour Indicateur financier : rentabilité/jour pour chaque conducteur, surcoût de sous-traitance (sous forme d’intérim) Indicateur d’incertitude : nombre de conducteurs/vehicules non affectés pour le J+1
L’ensemble des dimensions répertoriées conditionne la complexité d’une situation
d’ordonnancement. Par exemple, plus les cases de « conditions d’ordonnancement » ou « exigences
cognitives » seront étoffées, plus la situation de planification pourra être considérée comme
complexe. Cependant, toutes les modalités présentes dans la typologie n’ont pas le même impact sur
la complexité de la situation. L’une des perspectives futures serait alors de mener une réflexion en
vue de l’élaboration d’une échelle objective de complexité, à partir des critères répertoriés.
Conclusion générale Le rapport 1 intitulé « la planification dans le transport routier de marchandise : contributions
théoriques et méthodologiques » avait pour objectif d’asseoir les fondements méthodologiques
d’une démarche d’analyse de l’activité de l’exploitant transport. Nous avons formalisé cette méthode
d’analyse à travers le présent travail, en apportant les éléments nécessaires à sa compréhension et à
sa reproductibilité. En se basant sur un schème de codage pluridimensionnel, nous avons pu nous
apercevoir qu’il était possible d’allier la finesse d’analyse à la flexibilité et à l’adaptabilité
contextuelle. Nous avons par la suite présenté le déploiement de la méthode dans une entreprise de
transport. Bien que le traitement des données ne soit pas achevé, les résultats préliminaires sont
55
prometteurs tant au niveau de l’applicabilité de la méthode, que du bien-fondé de ses apports. Ces
apports peuvent être exploités à des fins multiples et surtout opératoires. En effet, au-delà des
apports descriptifs de l’activité de l’exploitant dans le domaine du TRM, la méthode peut apporter
des éléments de réponse concernant des problématiques concrètes. Contribuer à la conception, ou à
l’adaptation, des outils d’assistance à l’opérateur peut être une finalité pratique. L’ajustement ou la
construction d’outils pédagogiques, dans le cadre de la formation de nouveaux exploitants peut
représenter un autre objectif à long terme.
Le second chapitre de ce manuscrit a été consacré à la définition d’un ensemble de critères de
comparaison inter-situationnelles. Cette typologie permet d’avoir une structure de base, se reposant
sur des apports théoriques interdisciplinaires, pour comparer l’activité de planification d’un secteur
d’activité à un autre.
La conclusion de ce rapport n’est pas synonyme de l’achèvement de la démarche entreprise. A
l’inverse, elle représente une rampe de lancement pour les rapports 3 et 4. Ainsi, le rapport 3 sera
consacré à une analyse complète des résultats issus du terrain d’étude : l’entreprise M. Le rapport 4
aura pour objectif l’analyse de l’activité de planification, dans un autre secteur que le TRM. Le
secteur paramédical pourrait être une piste attractive, de par l’importance des enjeux qui y règnent
et du nombre de personnes (professionnels et patients) concernées.
Enfin, l’avancement de cette démarche d’étude des activités de planification nous oriente vers une
réflexion plus approfondie en ce qui concerne certaines dimensions. La gestion de l’incertitude et
l’évaluation de la complexité ouvrent notamment des perspectives de réflexion qui méritent
assurément d’être explorées.
56
Références
Amalberti, R. et Hoc J.-M., (1998). Analyse des activités cognitives en situation dynamique : pour
quels buts ? Comment ? Le travail humain, 61, 3, p. 209-234.
Bedwell, W.L., Wildman, J., DiazGranados. D., Salazar. M., Kramer, W.S., et Salas, E. (2012).
Collaboration at work: An integrative multilevel conceptualization. Human Resource
Management Review, 22, p. 128–145.
Bonfill, A., Espuna, A. et L. Puigjaner, L. (2008). Decision support framework for coordinated
production and transport scheduling in SCM. Computers and Chemical Engineering. 32,
1206–1224.
Boysen. N, Fliender, M. Scholl, A. (2010). Scheduling inbound and outbound trucks at cross docking
terminals, OR Spectrum 32 (1), p. 135–161.
Caron, J. (2005). La linguistique et la psychologie I : le rapport entre le langage et la pensée au XXéme
siècle. In S. Auroux & al. (eds.), Histoire des Sciences du Langage, Berlin, W. de Gruyter.
Caron, J. et Caron-Prague, J. (1991). Opérateurs modaux et représentation cognitive: recherches sur
la compréhension et la production de marqueurs modaux. Communication présentée au
Congrès de la Société française de psychologie. Clermont-Ferrand, France.
Caron, J. et Caron-Pargue J. (1994). Le traitement des modalités dans les langages naturelles.
Procceedings of the 5th International Conference « Information Processing and Management
of Uncertainty in knowledge-based systems”, p. 1202-1207.
Caron-Pargue J. et Caron J. (1989). Processus psycholinguistiques et analyse des verbalisations dans
une tâche cognitive. Archives de Psychologie, 57, p. 3-32.
Caron-Pargue J. et Caron J. (2000). Les interjections comme marqueurs du fonctionnement cognitif.
Cahiers de praxématique, 34, p. 51-76.
Cegarra, J. (2004). La gestion de la complexité dans la planification: le cas de l'ordonnancement
(Thèse de Doctorat en Psychologie non publiée). Université de Paris 8, Paris, France.
57
Cegarra, J. (2008). A cognitive typology of scheduling situations: a contribution to laboratory and field
studies. Theoretical Issues in Ergonomics Science, 9(3), p. 201-222.
Cellier, J.M. (1996). Exigences et gestion temporelle dans les environnements dynamiques. La gestion
du temps dans les environnements dynamiques, J.M. Cellier, V. de Keyser and C. Valot (Eds),
pp. 19–48 (Paris: Presses Universitaires de France).
Chauvin, C. (2000). Analyse de l'activité d'anticollision à bord des navires de commerce : des marques
linguistiques aux représentations mentales. Le Travail Humain, 63, p. 31-56.
Crainic, T. G. et Laporte, G. (1997), Planning models for freight transportation, European Journal of
Operational Research 97(3),p. 409–439.
Culioli, A. (1985). Notes du séminaire de DEA Poitiers, Departement de recherches linguistiques.
Culioli, A. (1990). Pour une linguistique de l'énonciation. Opérations et représentations. Paris :
Ophrys.
Ericsson, K.A., Simon, H.A. (1993). Protocol analysis: Verbal reports as data. Cambridge, MIT Press.
Forrierre, J., Anceaux, F., Cegarra, J. et Six, F. (2011). L’activité des conducteurs de travaux sur les
chantiers de construction : ordonnancement et supervision de situation dynamique. Le
Travail Humain. 74(3), p. 283-308
Hittinger, B., (2010). Les systèmes d'information embarqués dans le transport routier de
marchandises : analyse ergonomique chez différents utilisateurs (Mémoire en psychologie du
travail non publié). Université Paul Verlaine, Metz, France.
Hoc, J.M. et Amalberti, R., (1999). Analyse des activités cognitives en situation dynamique : d'un
cadre théorique à une méthode. Le Travail Humain, 62, p. 97-130.
Lee, Y. H. et Iwata, K. (1991). Part ordering through simulation-optimization in an FMS. International
Journal of Production Research, vol. 29, n° 7, p. 1309-1323.
Leplat J. et Hoc J-M. (1983).Tâche et activité dans l’analyse psychologique des situations. Leplat J.
(coord.) L’analyse du travail en psychologie ergonomique. Tome I. Octarès, Toulouse, p. 47-60.
58
Letouzey, A. (2001). Ordonnancement interactif basé sur des indicateurs : Applications à la gestion de
commandes incertaines et à l'affectation des opérateurs. (Thèse de Doctorat en Systèmes
Industriels non publiée). ENI, Tarbes, France.
Liu, J. et MacCarthy, B.L, (1996). The classification of FMS scheduling problems. International Journal
of Production Research, 34, p. 647–656.
Lodree, E.J., Geiger, C.D et Jiang, X. (2009) Taxonomy for integrating scheduling theory and human
factors: Review and research opportunities. International Journal of Industrial
Ergonomics 39:1, p. 39-51.
Nisbett, R. et Wilson, T. (1977). Telling more than we can know: Verbal reports on mental
processes. Psychological Review, 84 (3), p. 231-259.
Pinot, G. (2008). Coopération homme-machine pour l’ordonnancement sous incertitude (Thèse de
Génie informatique non publiée).Université de Nantes, Nantes, France.
Sanderson, P.M. et Moray, N. (1990). The human factors of scheduling behavior. Ergonomics of
Hybrid Automated Systems II, W. Karwowski and M. Rahimi (Eds), pp. 399–406.
Toth, P. et Vigo, D. (2002). The Vehicle Routing Problem. SIAM monographs on discrete mathematics
and applications. Society for Industrial and Applied Mathematics. 1073.
Tsung-Che, C. et Li-Chen, F. (2012). Rule-based scheduling in wafer fabrication with due date-based
objectives. Computers & Operations Research, Volume 39, Issue 11, Pages 2820-2835.
Van der schaaf, T.W. (1993. Developing and using cognitive task typologies. Ergonomics, 36, pp.
1439–1444.
Wiers, V.C.S. (1997). Human-computer interaction in production scheduling. Analysis and design of
decision support systems for production scheduling tasks (PhD Thesis). University of Eindhoven,
The Netherlands.
Yenisey, M.M., Yagmahan, B. (2013). Multi-objective permutation flow shop scheduling groblem :
Literature review, classification and current trends. Omega.
Yu B., Z.Z., Yang, Z. et Yao, B.Z. (2010). A hybrid algorithm for vehicle routing problem with time
windows. Expert Systems with Applications, 38, p. 435–441.
59
Annexes
Annexe 1 : Questionnaire de mesure de l’échelle de certitude
En vous basant sur vos propres habitudes langagières, attribuez une note entre 0 et 10 aux verbes
suivants, selon le degré de certitude qu’ils expriment.
Je sais que
Je crois que
Je pense que
Je suis sûr que
Je doute que
Je présume que
Je suppose que
J’imagine que
J’estime que
60
Il me semble que
Je trouve que
Je considère que
J’admets que
Je soupçonne que
J’affirme que
Je prétends que
Je juge que
Je reconnais que
61
En vous basant sur vos propres habitudes langagières, attribuez une note entre 0 et 10 aux
adverbes suivants, selon le degré de certitude qu’ils expriment.
Incontestablement
Inévitablement
Effectivement
Evidemment
Manifestement
Certainement
Indubitablement
Assurément
Vraiment
Sans doute
62
De fait
Sûrement
Peut-être
Probablement
Vraisemblablement
Apparemment
Éventuellement
Visiblement
63
Annexe 2 : Exemples de protocoles codés
Entreprise X
64