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OÙ VA L'EUROPE DE L'ÉNERGIE ? Jean-François Cirelli Editions Choiseul | Géoéconomie 2014/1 - n° 68 pages 9 à 18 ISSN 1284-9340 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2014-1-page-9.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Cirelli Jean-François, « Où va l'Europe de l'énergie ? », Géoéconomie, 2014/1 n° 68, p. 9-18. DOI : 10.3917/geoec.068.0007 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Editions Choiseul. © Editions Choiseul. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 21/03/2014 02h20. © Editions Choiseul Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 21/03/2014 02h20. © Editions Choiseul

Où va l'Europe de l'énergie ?

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OÙ VA L'EUROPE DE L'ÉNERGIE ? Jean-François Cirelli Editions Choiseul | Géoéconomie 2014/1 - n° 68pages 9 à 18

ISSN 1284-9340

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2014-1-page-9.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Cirelli Jean-François, « Où va l'Europe de l'énergie ? »,

Géoéconomie, 2014/1 n° 68, p. 9-18. DOI : 10.3917/geoec.068.0007

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Distribution électronique Cairn.info pour Editions Choiseul.

© Editions Choiseul. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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Où va l’Europe de l’énergie ?

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Jean-François Cirelli est vice-président, directeur général délégué de GDF SUEZ

La politique européenne de l’énergie répond depuis une quinzaine d’années à un projet ambitieux aux objectifs

multiples. Elle a été d’abord construite sur une volonté de libéralisation et d’intégration des différents marchés européens de l’énergie. L’enjeu était alors de mettre un terme aux monopoles nationaux et d’ouvrir les frontières énergétiques. Depuis la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), le sujet énergétique a toujours été un cheval de Troie de l’intégration européenne. Peu à peu, est montée en puissance la question environnementale. L’Europe s’est alors saisie du combat contre le réchauffement climatique et a inauguré une politique ambitieuse. C’est ainsi que, depuis la fin des années 1990, plusieurs grands paquets législatifs européens se sont succédés. Ils ont porté sur la séparation des réseaux de la production et fourniture d’énergie (en 1998, 2003, et 2009), sur la sécurité d’approvisionnement (en 2010) et sur le développement durable (en 2009). Ils ont été renforcés par différentes directives sur les énergies renouvelables ou l’efficacité énergétique, une Roadmap 2050, etc. Les fameux

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« objectifs 20-20-20 » étaient censés faire de l’Europe le fer de lance de la lutte contre le changement climatique. Entre temps, la crise économique est venue remettre en cause les orientations énergétiques prises en Europe et jeter une lumière plus crue sur les faibles résultats obtenus.

L’Europe de l’énergie fait aujourd’hui face à plusieurs défis de taille. Le premier défi est d’inscrire la croissance des énergies renouvelables dans une réflexion plus générale du mix énergétique optimal pour l’Europe. Ce mix optimal doit proposer une énergie à la fois compétitive, sécurisée et la moins carbonée possible. La politique jusqu’à maintenant menée n’y est pas parvenue. Le second défi tient à la question du financement de cette politique volontariste et coûteuse. Dans un contexte de contraction économique, d’absence de vision commune, de contradictions nationales, de régulations instables, d’interventionnismes et de subventions incertaines, qui seront les investisseurs de l’énergie de demain ? Et quel cadre serait le plus à même de répondre aux investissements massifs que la transition énergétique européenne rend nécessaires ? Au lendemain des élections allemandes, qui ont accordé à l’énergie une place centrale, et à la veille des élections européennes, comment retrouver un souffle énergétique commun en Europe ?

Des besoins immenses

Dans un monde aux besoins énergétiques en forte croissance, l’Europe donne l’impression de faire cavalier seul. Au cours des deux décennies à venir, l’Agence internationale de l’énergie estime l’investissement cumulé nécessaire dans le secteur énergétique à environ 40 000 milliards de dollars. C’est davantage que le produit intérieur brut annuel de la Chine, de l’union européenne et des États-unis combinés ! L’électricité se taille la part du lion, avec un peu moins de la moitié des investissements, suivie par le pétrole et le gaz. La croissance énergétique mondiale concernera donc d’abord le secteur électrique.

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L’Europe ne connaît assurément pas la même explosion de la demande. La demande électrique, depuis 2008, a chuté en moyenne à un rythme annuel de 0,5 %. La consommation de gaz, elle, accuse un recul de 2 % par an. Mais, en dépit de cette demande atone, le paradoxe est que l’Europe a aussi à faire face à un mur d’investissements importants. Dans les conditions actuelles, il peut même sembler infranchissable.

L’Europe est en effet au pied d’un mur d’investissement des plus élevés pour mener à bien la transition énergétique que nos gouvernements peinent à conduire. Les estimations peuvent varier, mais les montants restent toujours colossaux. On a évoqué le chiffre de 1 000 milliards d’euros pour l’ensemble de l’union à l’horizon 2020. En Allemagne, le tournant énergétique coûterait plus de 200 milliards. En Grande-Bretagne, les montants avancés sont équivalents. La construction de nouvelles capacités de production renouvelable représente le premier poste d’investissement. Mais l’Europe est aussi confrontée à des besoins d’infrastructures importants : réseaux de transport, interconnections, installations de stockage. L’enveloppe consacrée aux infrastructures de réseaux atteindrait à elle seule 200 milliards d’euros.

une politique énergétique dans l’impasse

Les besoins qu’implique le projet européen de transition énergétique sont par conséquent colossaux. L’Europe s’en donne-t-elle les moyens ? On peut en douter à considérer l’instabilité des règles du jeu avec lesquelles doivent composer les principaux acteurs du secteur. À la crise économique, qui a réduit les marges de manœuvre budgétaire, s’est ajoutée l’incapacité politique à définir un cadre offrant les perspectives de long terme indispensables. Le pas de temps énergétique est en effet long. Les sommes en jeu considérables. Apparaissent de plus en plus des décisions, de nature souvent rétroactive, qui viennent remettre en cause les règles en vigueur. L’Espagne, devant le

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poids pour les finances publiques d’une politique incontrôlée de développement renouvelable, est revenue sur ses engagements. En Hongrie, le pouvoir s’est emparé des questions énergétiques pour en faire un cheval de bataille politique ; il en résulte des mesures qui s’apparentent pour ainsi dire à une nationalisation du secteur. En Pologne et en Roumanie, l’État a également revu à la baisse ses subventions aux renouvelables, en dépit des promesses annoncées et du cadre légal défini. Dans ce contexte, les énergéticiens perdent confiance et les États découragent les investisseurs.

La crise économique que connaît le continent européen rend par ailleurs plus sensible la question du coût des politiques énergétiques. L’un des leviers de financement des nombreux investissements prévus se trouve à l’arrêt. Le marché ETS -European Trading System- du CO2 était censé à l’origine jouer un rôle moteur dans la transition énergétique vers un parc de production faiblement émetteur. Le faible prix actuel du CO2 ne permet plus d’offrir des conditions favorables d’investissement dans de nouvelles installations renouvelables. une réforme du marché du CO2 se révèle à ce titre indispensable. La Commission, qui s’interroge actuellement sur la prochaine feuille de route énergétique à l’horizon 2030, serait bien inspirée de traiter durablement ce sujet clef.

L’autre levier de financement possible tient à la hausse des factures énergétiques des consommateurs européens. Au regard des objectifs annoncés et des besoins d’investissement, cette hausse ne doit pas mettre en danger la compétitivité des entreprises européennes. L’émergence de questions comme la précarité énergétique d’une part croissante de foyers européens témoigne également de la difficulté d’une augmentation excessive des taxes et des coûts. Selon un rapport publié en 2013 par le Médiateur national de l’énergie, on constate chaque année une progression de la préoccupation des Français en matière d’énergie : « ce sont 8 Français sur 10 désormais (contre 75 % en 2011 et 70 % en

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2010) qui jugent leur facture énergétique préoccupante ». Selon l’INSEE, 3,8 millions de ménages en France se trouvent en situation de précarité énergétique - consacrant plus de 10 % de leurs revenus à l’énergie. Les consommateurs ne peuvent raisonnablement soutenir à n’importe quel prix la transition énergétique européenne.

Or, les mesures de soutien aux énergies renouvelables, qui ont souvent créé des effets d’aubaine et des niches, ont considérablement alourdi les factures – les énergies renouvelables n’étant pas encore compétitives face aux autres sources de production. L’Europe, en pleine crise économique, a installé plus d’énergies renouvelables qu’ailleurs dans le monde ces dernières années. Depuis 2009, ce sont 160 gigawatts supplémentaires qui ont été installés, majoritairement en éolien terrestre et solaire soit environ trois fois le parc nucléaire français. En 2012, ces deux formes d’énergie ont totalisé plus de 64 % de toutes les nouvelles capacités de production électrique. En Allemagne, les coûts des subventions aux renouvelables se sont élevés en 2012 à un peu plus de 14 milliards d’euros. En Italie, à environ 8 milliards d’euros.

Pour l’industrie européenne énergivore, comme la sidérurgie, la pétrochimie ou la plasturgie, les conséquences sont lourdes. Le graphique ci-dessous donne une idée des écarts de coûts pour un industriel entre les États-unis et l’Europe, à la fois pour le gaz et l’électricité.

Allemagne France Italie uK JaponAllemagne France Italie uK Japon

prix du gaz prix de l'électricité

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Bien qu’il existe certaines exemptions pour les grands consommateurs, l’industrie du Vieux Continent, déjà fragilisée par la crise, accuse un différentiel de coût insoutenable dans de nombreux secteurs. C’est la conséquence directe, d’un côté, de l’exploitation américaine des hydrocarbures de schiste (gaz et pétrole) et, de l’autre, de la préférence européenne pour les énergies chères.

Si elle développe à grand vent les énergies renouvelables, l’Europe n’en réduit pas pour autant ses émissions de gaz à effet de serre. En Allemagne par exemple, champion européen du renouvelable, elles devraient augmenter de 1,5 % cette année. Aux États-unis, en revanche, les émissions de gaz à effet de serre ont diminué de 12 % entre 2005 et 2012 : elles sont même à leur plus bas niveau en 2013 depuis 1994. S’il en est ainsi, c’est que le charbon a le vent en poupe en Europe. La baisse du prix du charbon exporté en masse par les États-unis – qui lui préfèrent le gaz moins polluant- couplé à un marché du carbone qui ne joue pas son rôle ont conduit à la constitution d’un couple énergétique paradoxal en Europe : celui du charbon et du renouvelable.

L’Europe ne doit donc pas être condamnée à voir, année après année, coexister une énergie plus chère et une augmentation des émissions de CO2, à l’exception des périodes de récession. Les entreprises européennes doivent maintenir leur compétitivité sur la scène internationale. La question du coût de notre politique énergétique mérite d’être posée.

quel mix énergétique pour l’europe de demain ?

L’Europe de l’énergie est encore largement à bâtir. Et ce chantier accumule les retards. Il n’existe pas aujourd’hui de mix énergétique européen. Il existe certes des mix énergétiques nationaux, mais ils convergent peu. Le choix d’un mix énergétique est historiquement l’apanage des États. Ils ont été très différents en Europe. Là où la Grande-Bretagne a privilégié le charbon puis le gaz, la France a résolument opté pour le nucléaire, l’Italie pour le gaz, les pays

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scandinaves pour l’hydraulique, etc. Et ces divergences se poursuivent. Là où l’Allemagne décide sans concertation d’arrêter ses centrales nucléaires, la Grande-Bretagne décide le lancement de grands projets nucléaires. Les disparités nationales se retrouvent dans les secteurs du gaz et du charbon. Alors que certains pays principalement d’Europe occidentale se sont éloignés du charbon, d’autres pays d’Europe orientale comme la Pologne en ont fait un des piliers de leur politique énergétique.

Les difficultés économiques actuellement traversées par l’Europe renforcent l’idée qu’il convient de mieux articuler les questions de compétitivité et de lutte contre le changement climatique, notamment en soutenant la réduction des émissions de CO2 au meilleur coût. Pour parvenir à un système énergétique faiblement émetteur de CO2, dont ne résulte pas nécessairement une explosion des coûts pour les consommateurs ou une menace en termes d’approvisionnement, la question de notre mix énergétique ne doit pas être envisagée avec des œillères.

Les énergies fossiles représentent aujourd’hui environ les trois quarts du mix européen. L’Europe a décidé d’accorder une place importante aux énergies renouvelables. Cette option, encore plus que toute autre, incite à un bouquet énergétique équilibré et diversifié. Des énergies d’appoint souples sont indispensables. Accompagner le développement d’énergies propres d’unités hautement émettrices comme le charbon reviendrait à contredire les engagements européens. À ce titre, le gaz a un rôle important à jouer. Le gaz est une énergie abondante, comparativement peu onéreuse, qui n’est pas soumise à un régime de subventions et qui est faiblement émettrice quand on la rapporte par exemple au charbon. Il a l’avantage de permettre d’atteindre les objectifs de l’union européenne, dans la mesure où sa flexibilité le rend complémentaire des énergies renouvelables et où il peut être stocké en grande quantité. La situation actuelle ne favorise pas le choix stable et cohérent d’un mix énergétique varié accordant ce rôle au gaz. Au moment où les États-unis font le choix du gaz, l’Europe paradoxalement s’en éloigne.

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La politique énergétique et climatique actuelle conduit en effet à la contradiction suivante : alors que la croissance souhaitée de la part des énergies renouvelables dans la production électrique est en bonne voie, on assiste à l’augmentation simultanée de l’utilisation de combustibles à teneur en carbone plus élevée. Ainsi, alors que la demande de gaz naturel a chuté de 11 % en Europe l’année passée, la consommation de charbon, qui présente une empreinte carbone plus élevée, n’a cessé d’augmenter. Tandis que des centrales au charbon reprennent du service, des centrales au gaz sont mises à l’arrêt. Les grands énergéticiens européens ont fermés 25 gigawatts de centrales à gaz depuis 2008. Ils prévoient d’en fermer 27 dans les années à venir. Au total, cela représente l’ensemble des parcs de production portugais, hongrois et belge cumulés. Ce ne sont pas les capacités renouvelables intermittentes qui, à leur place, couvriront les besoins de pointe les soirs d’hiver.

un cadre à redéfinir

Dans le monde de l’énergie, les investissements sont lourds et de long terme. Le besoin de visibilité est, plus que dans tout autre secteur économique, un impératif. En Europe, on l’a vu, les besoins sont immenses.

Or l’environnement européen actuel n’est pas à la hauteur des ambitions affichées. De nouvelles taxes surgissent et les prix garantis par les gouvernements sont souvent en-deçà des coûts auxquels doivent faire face les entreprises du secteur. Les décisions unilatérales de certains États membres devraient céder la place à davantage de concertation. La priorité accordée aux énergies renouvelables devrait également intégrer les énergies flexibles de soutien ; il est essentiel de comprendre que ces unités complémentaires sont indispensables pour compenser l’intermittence des sources renouvelables. Elles fonctionnent comme une assurance contre le risque naturel d’absence de vent et de soleil. Dans ces conditions, il s’agit de mettre en place de nouveaux mécanismes qui permettent d’en assurer la rentabilité.

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Le développement renouvelable n’a pas de sens s’il n’intègre pas le coût de l’assurance sans laquelle il ne peut fonctionner. C’est à ces conditions que le mix européen sera équilibré et efficace.

La crise ne cesse de rendre plus urgente la prise en considération de ces questions. La sécurité de notre système énergétique est un thème qui redevient d’actualité. Du point de vue gazier, la production domestique européenne déclinera de moitié à l’horizon 2035. L’Europe sera par conséquent de plus en plus dépendante à un nombre réduit de fournisseurs. Cette situation nécessitera de diversifier nos sources d’approvisionnement vers de nouvelles régions comme la Caspienne par exemple ou, bientôt, l’est de la Méditerranée. C’est dans ce contexte qu’il convient d’envisager la question du gaz improprement dit de schiste. Mais, à nouveau, l’Europe agit en ordre dispersé. Quand la Grande-Bretagne et la Pologne se lancent dans l’exploration, d’autres - comme la France ou la Bulgarie - ferment la porte. Du point de vue électrique, la sécurité du réseau est également mise en danger par l’intermittence renouvelable et les fermetures de centrales thermiques. La transition du bouquet énergétique européen ne peut pas laisser de côté certains faits : l’Europe produit moins de la moitié de l’énergie qu’elle consomme ; les marges de manœuvre de financement se rétractent. Le besoin est fort aujourd’hui en Europe d’un cadre stable, lisible et durable.

Jamais autant de nuages n’ont couvert le ciel de l’énergie européen. Les grands acteurs du secteur sont prêts à engager de vastes programmes d’investissement, à condition que l’on restaure un climat de confiance énergétique en Europe. L’union européenne doit envoyer des signaux plus explicites pour attirer les investisseurs. Les énergéticiens européens, qui occupent au niveau mondial de puissants leaderships, sont mis à rude épreuve. De même que l’Europe ne peut pas faire cavalier seul dans sa stratégie de décarbonisation énergétique, de même il est impossible qu’elle ne prête pas toute son attention à sa facture énergétique. La transition verte apparaît comme l’un des grands défis européens. La réponse, là aussi, ne peut pas être médiocre.

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Résumé

L’Europe de l’énergie fait fausse route. Le projet énergétique, imaginé au tournant des années 2000 et mis en place depuis, n’a pas porté les fruits attendus. La bataille de l’environnement n’est pas gagnée. Celle de la compétitivité est perdue. Celle de la sécurité du système menace. Pour sauver l’Europe de l’énergie, un sursaut serait salutaire. Il passerait par des mesures concrètes et la relance d’un projet commun à l’échelle européenne.

Abstract

Energy Europe is going in the wrong way. The European energy project, designed at the turn of the 2000s and implemented since, has not carried out what has been expected. The battle of the environment is not won. The competitiveness one is lost. The security one threats the overall system. To save Energy Europe, a start would be beneficial. It would require concrete measures and the recovery of a joint project on a European scale.

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