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RAPPEL DES DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES En matière d’étanchéité à l’air pour les bâtiments de logement, la réglementation thermique RT 2012 fixe les exigences suivantes : • logement individuel : Q 4Pa-surf 0,6 m 3 /(h.m 2 ); • logement collectif : Q 4Pa-surf 1,0 m 3 /(h.m 2 ). La justification de ces performances doit être assurée soit par des mesures in situ, soit en adoptant une démarche qualité, conformément aux dispositions de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif aux caractéristiques thermiques et aux exigences de performance énergétique des bâtiments nouveaux et des parties nouvelles de bâtiments. Ces mesures doivent être réalisées par un opérateur autorisé par le ministère (qualification 8711 de Qualibat). Il est rappelé que les mesures portent sur la perméabilité à l’air et non l’étanchéité à l’air. Pour les bâtiments autres que les logements, la réglementation thermique RT 2012 offre deux possibilités : • soit l’utilisation d’une valeur par défaut dans les calculs réglementaires : – bâtiment tertiaire : Q 4Pa-surf = 1,7 m 3 /(h.m 2 ), – industrie/commerce : Q 4Pa-surf = 3,0 m 3 /(h.m 2 ); • soit la justification par la mesure d’une performance contractuelle (figurant dans les DPM) ou une démarche qualité. Photo CTICM Photo CTICM Exemple de mise en œuvre d’un pare-air dans une façade en bardage double peau. Exemple de mise en œuvre d’un pare-air dans une façade en bardage double peau.

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RAPPEL DES DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES

En matière d’étanchéité à l’air pour les bâtiments de logement, la réglementation thermique RT 2012 fixe les exigences suivantes :• logement individuel : Q4Pa-surf �� 0,6 m3/(h.m2) ;• logement collectif : Q4Pa-surf �� 1,0 m3/(h.m2).La justification de ces performances doit être assurée soit par des mesures in situ, soit en adoptant une démarche qualité, conformément aux dispositions del’arrêté du 26 octobre 2010 relatif aux caractéristiques thermiques et aux exigences de performance énergétique des bâtiments nouveaux et des partiesnouvelles de bâtiments. Ces mesures doivent être réalisées par un opérateur autorisé par le ministère (qualification 8711 de Qualibat). Il est rappelé que lesmesures portent sur la perméabilité à l’air et non l’étanchéité à l’air.Pour les bâtiments autres que les logements, la réglementation thermique RT 2012 offre deux possibilités :• soit l’utilisation d’une valeur par défaut dans les calculs réglementaires :

– bâtiment tertiaire : Q4Pa-surf = 1,7 m3/(h.m2),– industrie/commerce: Q4Pa-surf = 3,0 m3/(h.m2) ;

• soit la justification par la mesure d’une performance contractuelle (figurant dans les DPM) ou une démarche qualité.

Photo CTICMPhoto CTICM

Exemple de mise en œuvre d’un pare-air dans une façade en bardage double peau.Exemple de mise en œuvre d’un pare-air dans une façade en bardage double peau.

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Conçus initialement pour les besoins des activités industrielleset commerciales, les bâtiments en acier ont vu leur domaine

d’emploi s’élargir au fil du temps. Conséquence: ils doivent maintenant, euxaussi, répondre aux exigences de la RT 2012 depuis le 1er janvier 2013. Plutôtque de tenter, en cours de projet, de les rendre étanches à l’air, la meilleureapproche est d’y réfléchir dès le stade de la conception et de mobiliserl’ensemble des intervenants autour de cette problématique.

TEXTE : FRANCK GAUTHIERPHOTOS & ILLUSTRATIONS :CTICM, RAGE, SOPREMA

CONSTRUCTION ACIER

COMMENTAMÉLIORERL’ÉTANCHÉITÉÀ L’AIR?

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PATHOLOGIEMISE EN ŒUVRE

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Àl’origine, la construction métallique per-mettait essentiellement de construire,rapidement et pour un coût modéré, desbâtiments fonctionnels, associant struc-ture, façades et toiture en acier, répondant

aux besoins des activités industrielles et commer-ciales (1). Partant de l’observation que leur habillagedemandait peu d’entretien et que les parementsproposés adoptaient des esthétiques de plus en plussoignées, le secteur tertiaire s’y est ensuite inté-ressé pour ses locaux d’activité. Et il y a même euquelques opérations dans le secteur de l’habitat.«Le problème est que l’on est parti de constructionsqui n’étaient pas prévues pour être isolées ou bien trèssommairement. Pour mémoire, les Règles profes-sionnelles concernant les bardages datent du débutdes années 1980. Pour répondre aux exigences crois-santes des réglementations thermiques, des solutionstelles que le recours à des bardages double peau,prenant en sandwich un isolant thermique ou thermo-acoustique, par exemple, s’est donc développé, toutcomme l’usage d’isolants sur les bacs acier, maiscela ne règle pas pour autant tous les problèmes…»,explique Denis Lehnen, directeur technique deSoprema Entreprises. Avec l’entrée en vigueur de la RT 2012, qui s’appliquedonc aussi depuis le 1er janvier 2013 aux bâtimentsnon résidentiels, de nouvelles difficultés appa-raissent. «Dans le secteur tertiaire, les bâtiments sontconstruits “comme avant” mais on y ajoute une exigencenouvelle: l’étanchéité à l’air. Et, partant de là, certainsprojets visent même une démarche HQE® ou BBC…Ce n’est évidemment pas la bonne méthode car il y a

une totale déconnexion entre cette demande de per-formances nouvelles, adaptées à notre époque, etune logique de conception autre, plus ancienne. Géné-ralement, le concepteur dessine son bâtiment, commed’habitude, et l’exigence portant sur l’étanchéité àl’air vient se greffer sur le projet au dernier moment.Donc trop tard. Circonstance aggravante, les marchéssont souvent saucissonnés en lots et plusieursentreprises interviennent donc sur le chantier, indé-pendamment les unes des autres. Au final, personnene se préoccupe vraiment des interfaces. Qui doit in-tervenir? Comment? Quand? Qui assure l’étanchéitéà l’air? Qui est responsable? Comme généralementla toiture est réalisée avant la façade, le dernier in-tervenant est souvent le façadier. Mais si l’équipe deconception ne lui a pas clairement confié cette mission, que se passe-t-il concrètement sur le ter-rain ? », s’interroge Dominique Royer, directeurtechnique de Smac.«En matière d’étanchéité à l’air, si rien n’a été inscritdans les DPM (2) et si aucune mesure n’a ensuite étéprise pour réduire la perméabilité à l’air du bâtiment,il ne faut évidemment pas s’attendre à des miracles!Les performances espérées ne seront certainementpas au rendez-vous», ajoute Amor Ben Larbi, direc-teur projets de recherche du Centre techniqueindustriel de la construction métallique (CTICM).

Attention aux zonesde discontinuitéAmor Ben Larbi précise «qu’un bâtiment construitavec un bardage double peau – constitué de plateauxpleins, perforés ou crevés, d’écarteurs, d’isolant et d’un

POUR EN SAVOIR PLUSTEXTES DE RÉFÉRENCE

• Les Recommandationsprofessionnelles RAGE surles bardages en acier seronttrès prochainement disponiblessur www.reglesdelart-grenelle-environnement-2012.fr.

DOCUMENTATIONS

• L’étanchéité à l’air des

bâtiments (octobre 2012),fiche d’informations techniquesT16 réalisée par Enertech pourla Mutuelle des architectesfrançais (Maf), téléchargeablesur www.enertech.fr/rubrique-L%27enveloppe-45-222.html.

• Guide à l’usage des maîtres

d’ouvrage: étanchéité à l’air

dans les logements collectifs

et les bâtiments tertiaires

(février 2010) deRhônalpénergie-Environnement,téléchargeable à l’adressewww.raee.org/administration/publis/upload_doc/20100316022532.pdf.

• Étanchéité à l’air des

bâtiments, guide édité parl’Ademe et les Conseilsrégionaux de Bourgogne,d’Alsace, de Franche-Comtéet des Pays de la Loire,téléchargeable surwww.ademe.fr/etancheite-air-batiments.

• Réglementation thermique

RT 2012 et bâtiments à

structure en acier

(novembre 2011), fichetechnique du CTICM,téléchargeable à l’adressewww.cticm.com/sites/default/files/rt_2012_28nov_2011_web.pdf.

• Guide technique de

l’étanchéité à l’air des

bâtiments métalliques BBC

téléchargeable surwww.soprema.fr.

• Étanchéité à l’air, à l’eau et au

vent : les solutions pour

l’enveloppe des bâtiments

tertiaires, guide téléchargeablesur www.siplast.fr.

SITES INTERNET

• www.cnees.fr :site du Centre nationald’expertise de l’enveloppeet de la structure.

• www.smac-sa.com :site de la Société des minesd’asphaltes du Centre.

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PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE

(1) Répondant à une autre logique constructive, la plupart des gratte-ciel américains (Chicago, New York…)et nombre d’immeubles haussmanniens ont aussi eu recours à l’acier pour leur construction.

(2) Documents particuliers du marché.

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parement extérieur – et possédant une couverture enbacs acier étanchés, présente couramment uneperméabilité à l’air Q4Pa-surf � 4 m3/(h.m2) (3) avec unimpact sur la consommation d’énergie du bâtimentqui peut dépasser 40 %.»Pourtant, les infiltrations d’air sont la cause d’uncertain nombre d’inconvénients : une sensationd’inconfort, des phénomènes de condensation pou-vant être préjudiciables, l’apparition de salissureset de moisissures, des nuisances sonores (là où l’airpasse, le bruit passe…), une surconsommationd’énergie… De plus, tous les édifices ne sont paslogés à la même enseigne: selon son implantationgéographique et son orientation, une constructionsubira de façon plus ou moins marquée les effetsdu vent. «La qualité de l’enveloppe du bâtiment et laqualité de son étanchéité au vent sont donc essen-tielles pour que, sous la pression du vent, l’air nes’infiltre pas par les défauts de la construction. Danscertains cas, ce renouvellement d’air parasite peutatteindre les 10-15m3/(h.m2)… On est donc bien loin desvaleurs réglementaires», souligne Denis Lehnen.« Ces fuites d’air proviennent de toutes les zonesde discontinuité : angles de bardages, liaisonsfaçades/toiture, liaisons façade/longrines, jonctionsbardages/menuiseries, éléments traversants, lan-terneaux… Les fuites d’air à travers l’enveloppe dubâtiment peuvent être à l’origine de 10 à 40 % deses déperditions thermiques », précise ThierryBraine-Bonnaire, directeur général du Centre na-tional d’expertise de l’enveloppe et la structure(Cnees), créé par la Fédération française du bâ-timent (FFB).«La performance de perméabilité à l’air du bâtimentest assurée par tous les composants du clos, ducouvert et de leurs jonctions. Il faut donc assurer lacontinuité de l’étanchéité à l’air de tous ces ouvrages

(bardages, toitures, menuiseries, etc.). Une des ap-proches possibles est de réaliser un calfeutrementdes joints entre plateaux ainsi que des calfeutrementsdes joints entre structure et plateaux et au niveaudes jonctions entre parois (façade/toiture, façade/longrine…)», indique Amor Ben Larbi.

Généraliser l’usaged’un pare-vapeur ?Pour améliorer l’étanchéité à l’air des constructionsmétalliques, plusieurs professionnels proposent lamise en place systématique d’un pare-vapeur entoiture, sous l’isolant. Cette solution est d’ailleursdéjà obligatoire sur les bâtiments à forte hygro-métrie pour éviter les risques de condensation.Cela sous-entend une mise en œuvre soigneuseavec un recouvrement des lés entre eux et un rac-cordement aux autres ouvrages en périphérie, pourformer un plan d’étanchéité continu. Le pare-vapeurchoisi doit, en outre, être à la fois souple et résis-tant pour supporter la dilatation de l’acier sous l’effetde la chaleur. En façade, pour réduire les fuites d’air, le traitementindividualisé des joints et liaisons du bardage im-pliquerait trop de linéaire à gérer. «Le doublageintérieur de la paroi métallique à l’aide de plaques deplâtre, avec ou sans isolant, est une solution envisa-geable. Des bandes adhésives appropriées peuventensuite être employées pour les jonctions avant la posedu revêtement décoratif. Il y a toutefois un peu de jeuau niveau des plaques de plâtre car elles sont poséessur des cales, masquées par une plinthe, en partiebasse. Et, en partie haute, elles ne sont pas liées auplafond afin de pouvoir supporter les déformations del’acier. L’étanchéité à l’air ainsi procurée est donc plu-tôt relative… D’où l’idée de préférer le recours à unemembrane d’étanchéité à l’air, placée du

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(3) L’indice de perméabilitéà l’air est calculé à partirde mesures effectuéessous un écart de pressionde 4 Pascals, conformémentà la norme NF EN 13829Performance thermique desbâtiments – Déterminationde la perméabilité à l’airdes bâtiments – Méthodede pressurisation parventilateur (février 2001)et son guide d’applicationGA P50-784 de février 2010.

���

“Une desapproches

possibles est de réaliser un

calfeutrementdes joints entre

plateauxainsi que des

calfeutrementsdes joints

entre structureet plateaux

et au niveaudes jonctionsentre parois”

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moins possible, ce qui devrait lui conférer une plusgrande durée de vie», recommande Dominique Royer.Signalons également qu’il est prévu que les Re-commandations professionnelles RAGE sur lesbardages en acier, dont la publication est imminente,consacreront un chapitre et une annexe à la per-méabilité à l’air.

Un premier bâtimentmétallique BBCTirant les enseignements d’une première opérationà Brest, Soprema Entreprises a construit son agencede Poitiers en se fixant comme objectif d’être conformeà la RT 2012, sans pompe à chaleur ni apport photo-voltaïque. «Pari tenu puisque cette agence est le pre-mier bâtiment BBC en charpente métallique de typeindustriel en France», commente Denis Lehnen.Pour y parvenir, ses parois de 300 mm d’épaisseursont fortement isolées. Au final, le coefficient detransmission thermique Up est respectivement de0,16 W/m2.K et 0,20 W/m2.K pour la toiture et lesfaçades. « L’étanchéité à l’air de l’enveloppe est assurée par l’association d’une membrane d’étan-chéité Sopravap pour la toiture et de la nouvellemembrane brevetée Sopratec III pour les parois ver-ticales. Le raccordement entre les deux s’effectue auniveau des acrotères. La membrane est aussi soi-gneusement raccordée à la menuiserie, l’étanchéitéà l’air entre le dormant et l’ouvrant étant ensuite sousla responsabilité du lot menuiserie. Des fourreauxsont prévus pour les différents réseaux, leur étanchéitéà l’air étant après sous le contrôle de ceux qui passentles câbles», détaille Denis Lehnen.Travailler bien en amont avec l’architecte s’imposepour repenser la coordination des différents inter-venants et le phasage du chantier. « Il faut fairetravailler les entreprises dans un ordre précis avantde passer à l’étape suivante. Il faut employer desproduits et systèmes de qualité, choisir des entre-prises aux compétences reconnues, bien définir oùsont les responsabilités, etc. Il faut aussi privilégierdes solutions simples à mettre en œuvre, faciles àcontrôler et, si nécessaire, réparables aisément etrapidement», souligne Denis Lehnen.Pour confronter l’approche théorique, liée à l’étuderéglementaire, au comportement réel du bâtimenten situation, celui-ci est muni de plusieurs dispo-sitifs de comptage fonctionnant en continu. «Cettedémarche s’impose car les clients nous demandentde plus en plus de nous engager sur des résultats»,confie Denis Lehnen.

Mobiliser l’ensemble des compétencesL’étanchéité à l’air s’appuie sur une obligation derésultats et non plus de moyens. Sans une réelleconcertation entre le maître d’ouvrage, le maîtred’œuvre et les entreprises intervenant sur le chan-tier, il est quasiment impossible d’obtenir un résultatperformant et pérenne pour un coût maîtrisé.«Aboutir à un bâtiment performant sous-entend uneconception de qualité, l’emploi de produits et systèmesde qualité, une mise en œuvre de qualité», ajouteThierry Braine-Bonnaire.

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PATHOLOGIE MISE EN ŒUVRE

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côté extérieur de la paroi», explique Dominique Royer. Pour que cette solution soit efficace, cette mem-brane «pare-air» doit être continue, ce qui sous-entend que les lés soient raccordés entre eux de fa-çon étanche, tout comme doivent être soignées lesjonctions avec les menuiseries ou autres éléments.Mais un certain nombre de questions se posentencore. «Les produits actuellement disponibles surle marché pouvant jouer ce rôle viennent de la familledes pare-pluie, des écrans de sous-toiture,etc., et n’ontdonc pas été, jusqu’à présent, vraiment testés pource nouvel usage. De plus, le raccordement des lés, entreeux ou sur des matériaux de différentes natures, grâceà une sorte de scotch n’est pas très rassurant. Lesconditions de mise en œuvre de l’adhésif doiventnotamment être respectées, avec un support propreet sec. Une pression régulière et continue doit êtreappliquée sur toute la longueur de l’adhésif, une opé-ration pas toujours très facile à faire depuis une na-celle, par exemple. Pour plus de sécurité, il faudraitdonc prévoir l’intervention d’une personne munie d’unsèche–cheveux pour préparer les surfaces à coller, etd’une roulette, comme pour le papier peint, pour bienpresser le joint. Mais cela fait un salaire en plus, doncdes coûts supplémentaires, difficiles à répercuter surle devis, étant donné l’actuel contexte tendu desmarchés. Et tout cela sans avoir, pour le moment, lacertitude de la tenue dans le temps de ces adhésifs,intrinsèquement d’une part, et sous les effets de ladilatation de l’acier», analyse Dominique Royer.Pour disposer d’une meilleure visibilité sur leurcomportement au fil du temps, Smac réalise doncdes essais de vieillissement accéléré en laboratoiremais aussi en conditions réelles. «Nous avons déjàdeux ans de recul avec un pare-pluie et ses joints,exposé en plein air, sans habillage de protection. Lesystème reste toujours étanche à l’air bien qu’il ne soitprotégé ni des intempéries, ni du rayonnement ultra-violet», précise Dominique Royer.

Le recours à une membraned’étanchéité ?Pour s’affranchir des interrogations subsistantactuellement sur la durabilité des performancesen matière d’étanchéité à l’air des membranesliaisonnées par un adhésif, une autre solution est aussienvisageable: l’emploi d’un système de membraned’étanchéité à l’air de type HPV (4). C’est la solutionretenue par Soprema Entreprises qui propose deplacer une membrane d’étanchéité spécifique,entre deux couches d’isolant. «Cette membrane(Sopratec III) dérive d’une version pré-existante,étanche à l’eau, qui a été modifiée de manière à ceque les lés puissent être raccordés entre eux parsoudage à l’air chaud», précise Denis Lehnen. Si les deux solutions – collage ou soudage des lés –conviennent pour les parties courantes, reste ledélicat problème des jonctions au niveau des pointssinguliers. « Le collage (mastic, double face, etc.)entre matériaux de géométrie et de nature souventdifférentes n’est pas toujours simple. Il est prudentde le compléter par des dispositifs mécaniques pourque l’adhésif ne subisse pas seul les efforts de pres-sion/dépression liés au vent. Ainsi, il sera sollicité le

“Il faut fairetravailler lesentreprisesdans un ordreprécis avant depasser à l’étapesuivante. Il faut employerdes produitset systèmes de qualité,choisir desentreprises auxcompétencesreconnues, bien définiroù sont lesresponsabilités,etc.”

(4) Haute perméabilité à lavapeur d’eau (Sd � 0,1 m).

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penser en amont et en aval. C’est une démarche d’es-prit qui, de toute façon, devra s’imposer sur les chantierscar la logique sera à l’avenir exactement la même avecla thermique», souligne Thierry Braine-Bonnaire. «Ce qui est cruel, c’est qu’autant la réalisation d’unbâtiment irréprochable au niveau de la thermique etde l’étanchéité à l’air est une opération tout de mêmedélicate, autant il est facile de la vérifier en quelquesinstants! Avec la porte soufflante, les tests avec desfumigènes et les appareils de thermographie infra-rouge, tous les défauts apparaissent aussitôt »,signale Denis Lehnen.Et si le résultat n’est pas satisfaisant, il faudra sa-voir l’interpréter avec justesse. «L’objectif est delimiter au strict minimum les fuites, pas d’atteindre lezéro fuite. Identifier les passages d’air est une chose,déterminer si tel ou tel passage est excessif ou nonen est une autre. Est-ce pénalisant ou non ? Quellefuite traiter en priorité? Où est la fuite principale?L’interprétation dépendra de l’expert», signale Do-minique Royer.Un autre aspect concomitant à ne pas négliger: laVMC. Par définition, le degré de tolérance des bâ-timents étanches à l’air vis-à-vis des imperfectionsde la VMC est très faible. Raison pour laquelle elledoit être dimensionnée correctement, bien réglée(débits suffisants et bien équilibrés) et réguliè-rement entretenue (nettoyage des filtres au moinstrois fois par an). «Vu la perméabilité à l’air importante, supérieure à5m3/(m2.h), et la destination des bâtiments métalliques“ancienne génération”, l’hygrométrie intérieure était,dans ce cas, sensiblement égale à l’hygrométrie ex-térieure. Donc pas de flux de vapeur et aucun risquede condensation, quelle que soit la qualité des paroisou de la VMC. En revanche, en améliorant considéra-blement l’étanchéité à l’air, l’hygrométrie intérieure etplus généralement la qualité de l’air intérieur dépen-dront de la ventilation mécanique. Tout défaut de ven-tilation, tout défaut de conception ou d’exécution dela paroi peuvent alors conduire à un problème decondensation, en particulier au niveau des toituresétanchées», prévient Denis Lehnen. Assez icono-claste, Dominique Royer estime que «de nouvellespathologies vont probablement apparaître. Mais,paradoxalement, elles vont faire progresser lesconnaissances…» D’autres questions se posent encore. «C’est biend’avoir un bâtiment étanche à l’air lors de la récep-tion de l’ouvrage, mais encore faut-il que cetteperformance soit pérenne. Qu’en sera-t-il quelquesannées plus tard?», se demande Amor Ben Larbi.En effet, quel serait le résultat obtenu à l’issued’une nouvelle mesure de perméabilité à l’airquelques jours avant la fin de la garantie décen-nale d’un bâtiment BBC? ■

«Le principe fondamental pour assurer une bonneétanchéité à l’air de l’enveloppe est de réaliser une peauétanche et continue. En plan et en coupe, le concep-teur doit pouvoir suivre cette peau avec un crayonsans avoir à le relever. À chaque point singulier et àchaque liaison entre deux éléments de l’enveloppe, ilfaut réaliser un détail technique indiquant commentla continuité de l’étanchéité à l’air va être traitée. Il fautégalement préciser qui interviendra sur ce détailtechnique et à quel moment. Les CCTP doivent clai-rement signaler à quel lot est attribuée quelle tâche»,précise Amor Ben Larbi. La réalisation d’un carnetde croquis, recensant les principales coupes fai-sant apparaître les joints, les membranes, lesadhésifs, etc., ainsi que la manière de traiter lespoints singuliers, lèvera toutes les ambiguïtés. Amor Ben Larbi ajoute que « le CTICM a été à l’originedes premiers développements dans le domaine del’étanchéité à l’air des bâtiments en acier avec le projetPrebat-Acieco (voir encadré ci-contre), et a rédigéles Recommandations professionnelles RAGE surles bardages en acier en collaboration avec lesprofessionnels de la filière. Le CTICM assure aussi desformations dans ce domaine et apporte également unsoutien aux professionnels pour le développement etla mise en œuvre de solutions performantes.»De son côté, le bureau d’études Enertech, qui a ré-digé pour la Mutuelle des architectes français (Maf)une intéressante fiche technique sur l’étanchéitéà l’air, recommande de bien faire figurer le poste«étanchéité à l’air» dans la Décomposition du prixglobal et forfaitaire (DPGF) en détaillant clairementles tâches élémentaires qui y sont liées.Thierry Braine-Bonnaire rappelle que le Cnees estune association créée pour aider les entreprises àconcevoir et construire des enveloppes perfor-mantes. «Cela passe par trois axes d’action: l’assis-tance à l’innovation, tant sur le plan technique quelogistique, la formation continue, notamment deformateurs, et l’information d’un public plus large surla physique du bâtiment et le savoir-faire des entre-prises», précise-t-il. « Il ne faut pas non plus hésiter à penser le bâtimentautrement. Plus sa géométrie est complexe, plus il ya de traversées, plus l’étanchéité à l’air sera difficileà assurer. Cela revient à créer les conditions opti-males pour le défaut. C’est le cas, par exemple, avecun auvent car la charpente “traverse” littéralementla façade, par exemple», signale Dominique Royer.

Une période de transition délicateAu niveau de la mise en œuvre, la formation despersonnels de terrain doit aller dans le sens d’uneprise de conscience du problème et des moyens dele régler. L’objectif est de leur (re)donner le goût dutravail bien fait et de leur (ré)apprendre à respecterle travail des autres équipes présentes sur le chantier.« Ils doivent également comprendre que la mesure deperméabilité à l’air agrège tous les défauts accumu-lés par tous les intervenants sur le chantier. Ils sonttous dans le même bateau donc tous co-responsables.Chacun doit donc faire attention à ce qu’il fait mais aussià ce qu’a fait celui intervenant avant lui et faciliter letravail de celui qui vient après. Il faut apprendre à

“C’est bien d’avoir un bâtiment étanche à l’airlors de la réception de l’ouvrage, mais encorefaut-il que cette performance soit pérenne.Qu’en sera-t-il quelques années plus tard?”

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Dirigé par Amor Ben Larbi (CTICM),le projet Prebat Acieco, qui s’est dérouléentre juin 2008 et septembre 2011avec comme partenaires le CSTB,le Cete de Lyon et le Leptiab del’Université de La Rochelle (1)ainsi que Soprema Entreprises et Smac,et un soutien financier de l’Ademe,visait les bâtiments tertiaires en acier. L’objectif de ce projet était d’améliorerla performance énergétique del’enveloppe des bâtiments et lamodernisation durable des bâtimentsexistants par la recherche et la mise enœuvre de solutions performantesaméliorant l’étanchéité à l’air et letraitement des ponts thermiques. L’étude a notamment comportéune partie expérimentale portant surneuf bâtiments (huit bâtiments tertiaireset un collectif d’habitation).Les mesures de perméabilité à l’airont démontré le niveau assez élevé deleur perméabilité à l’air (généralementsupérieure à 3 m3/(h.m2)), malgré le fait

que les bâtiments soient assez récents(construits pour la plupart dans les cinqdernières années). À cela s’est ajoutéela localisation des ponts thermiquesprésents dans leurs enveloppes parthermographie infrarouge.La récurrence des emplacements defuites d’air les plus importantes(jonctions entre parois, façade/toiture,façade/façade, façade/plancher bas,toiture/lanterneaux…) a été mise enévidence.À l’issue des campagnes d’essais,des solutions et mesures adéquatespermettant d’améliorer l’étanchéitéà l’air et de réduire les ponts thermiquesont été proposées et mises en œuvresur un bâtiment existant et trois autresbâtiments neufs BBC et Bepos (2).

Les mesures et diagnostics effectués à laréception du bâtiment tertiaire BBCde Brest ont confirmé l’efficacitédes solutions mises en œuvre.Les ponts thermiques ont notammentété corrigés. Les solutionsd’amélioration de l’étanchéité à l’airmises en œuvre ont permis de diviserd’un facteur 10 les valeurs deperméabilité constatées dans lapremière étape du projet(Q4Pa-surf = 0,36 m3/(h.m2)).Les mesures de perméabilité à l’air dubâtiment tertiaire Bepos à Poitiers,en cours de chantier, ont confirmél’efficacité des différents choix et surtoutla haute qualité de la mise en œuvre(Q4Pa-surf = 0,18 m3/(h.m2)).Le dernier bâtiment construitdans le cadre du projet, un bâtiment debureaux à Rennes, est encore plusperformant malgré son architecture biendifférente des deux autres.La perméabilité à l’air mesurée en coursde chantier est de 0,14 m3/(h.m2). ■

LES ENSEIGNEMENTSDE PREBAT-ACIECO

Des mesures de perméabilité à l’air et des tests complémentaires (de fumée, de thermographie infrarouge…) en cours de chantier peuvents’avérer utiles pour contrôler la mise en œuvre à différentes phases.

Photo CTICM

(1) Laboratoire d’études des phénomènesde transfert et de l’instantanéitéagro-industrie et bâtiment.

(2) Bâtiment à énergie positive.

51J U I L L E T / A O Û T 2 0 1 4 • N ° 1 4 5 • Q U A L I T É C O N S T R U C T I O N