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Le Point Vétérinaire / N° 246 / Juin 2004 / 64 Prat i quer / EN IMAGES / Le lavage des voies aériennes profondes,en aveugle ou sous bronchoscopie, contribue au diagnostic différentiel des pneumopathies. Réaliser un lavage broncho- alvéolaire PNEUMOLOGIE DU CHIEN ET DU CHAT e lavage broncho- alvéolaire (LBA) est une technique d’explo- ration des territoires bronchiques profonds et alvéolaires qui consiste à en prélever des cellules par irriga- tion et aspiration ; le prélève- ment fait l’objet de différentes analyses : cytologique, bactério- logique et parasitologique. L’indication principale du LBA est le diagnostic différentiel des broncho-pneumopathies. ! Limites et contre- indications du lavage broncho-alvéolaire Il convient en premier lieu de différencier le lavage broncho- alvéolaire du lavage trachéo- bronchique. Le LBA est une exploration des bronchioles et des alvéoles, tandis que le lavage trachéobronchique permet l’exploration des voies aériennes supérieures. Il convient donc de s’assurer de la zone prélevée et d’éviter toute contamination par des cellules de l’appareil respira- toire supérieur. Lors d’une pneumopathie, l’atteinte peut se localiser à trois niveaux : la lumière alvéolaire, la paroi alvéolaire et le tissu pulmonaire intersti- tiel. En pratique vétérinaire, le LBA apporte de très précieu- ses informations lors de l’exploration des atteintes luminales et pariétales. Chez l’homme, cet examen joue également un rôle détermi- nant dans le diagnostic différentiel des pneumopa- thies interstitielles. Cependant, chez l’animal, les résultats de trois publications récentes sont décevants et le diagnostic des pneumopathies intersti- tielles du chien reste actuelle- ment quasi exclusivement histologique [2, 4, 5]. Les contre-indications du LBA sont celles de l’anesthé- sie générale. Les incidents et les complica- tions sont rares lorsque le prélèvement est bien réalisé. La littérature signale des cas d’hyperthermie et des saignements [1]. ! LBA en aveugle ou sous bronchoscopie Le LBA peut être réalisé en aveugle ou lors d’une broncho- scopie. Le LBA en aveugle présente différents risques et inconvé- nients, et il convient de privilé- gier la technique perendosco- pique : - le LBA en aveugle n’a aucun intérêt lors d’atteinte localisée ; - lors d’atteinte diffuse, la cytologie peut différer selon le lobe pulmonaire prélevé [3]. Il est donc indiqué de réaliser le LBA au niveau de plusieurs lobes [3] ; - il n’est pas possible de situer la sonde : risque de faux négatifs si elle se trouve en territoire sain et risque de contamination du prélève- ment si elle est en territoire trachéobronchique (faux positif en bactériologie) ; - il est inutilisable chez les animaux de grande taille ; - son rendement est faible ; - les risques de lésions pulmonaires (hémorragie et perforation) ne sont pas négligeables ; - en l’absence de bronchosco- pie, aucune information sur l’aspect de la trachée et des bronches n’est disponible. L par Guillaume Humbert, Clinique vétérinaire du 8-Mai, 96 avenue du 8-Mai-45, 86000 Poitiers Matériel nécessaire Le matériel nécessaire comprend : - du soluté de chlorure de sodium isotonique tiède ; - une seringue stérile de 10, 20 ou 50 ml selon la taille de l’animal ; - un tube sec pour le prélèvement destiné à la parasitologie ; - un tube avec EDTA pour la cytologie ; - un tube avec milieu de transport pour la bactériologie. Les milieux de transport type Portagerm ® sont adaptés au LBA car ils permettent une conservation de la flore aérobie et anaérobie pendant vingt-quatre à quarante- huit heures à température ambiante. 1 Cliché : G. Humbert ! L’animal est anesthésié et maintenu en décubitus sternal. Le risque anesthésique est élevé chez les animaux sévèrement dyspnéiques. Différentes mesures permettent de réduire ce risque : - réaliser une oxygénation de l’animal cinq minutes avant et cinq minutes après l’examen ; - mettre en place un monito- ring cardiaque et respiratoire (électrocardiogramme et oxymétrie) ; - réaliser une anesthésie et une bronchoscopie de courte durée ; - utiliser un agent anesthé- sique limitant la dépression cardio-respiratoire (par exemple, le propofol) ; - surveiller le réveil (dyspnée, saignement, hyperthermie). Anesthésie de l’animal Matériel de LBA en aveugle Lorsque le LBA est réalisé en aveugle, une sonde d’intubation trachéale stérile et une sonde souple d’alimentation naso-œsophagienne sont utilisées en plus du matériel précédent. L’extrémité de la sonde naso-œsophagienne est sectionnée afin de faci- liter la réabsorption du liquide de lavage. 2 Clichés : G. Humbert © Le Point Vétérinaire - Reproduction interdite

Pneumologie lavage broncoalvéolaire

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Le Point Vétérinaire / N° 246 / Juin 2004 / 64

Pratiquer / EN IMAGES /

Le lavage des voies aériennes profondes, en aveugle ou sous bronchoscopie,contribue au diagnostic différentiel des pneumopathies.

Réaliser un lavage broncho-alvéolaire

PNEUMOLOGIE DU CHIEN ET DU CHAT

e lavage broncho-alvéolaire (LBA) estune technique d’explo-ration des territoiresbronchiques profonds

et alvéolaires qui consiste à enprélever des cellules par irriga-tion et aspiration ; le prélève-ment fait l’objet de différentesanalyses : cytologique, bactério-logique et parasitologique.L’indication principale du LBAest le diagnostic différentieldes broncho-pneumopathies.

! Limites et contre-indications du lavagebroncho-alvéolaireIl convient en premier lieu dedifférencier le lavage broncho-alvéolaire du lavage trachéo-bronchique. Le LBA est uneexploration des bronchioles etdes alvéoles, tandis que lelavage trachéobronchiquepermet l’exploration des voies

aériennes supérieures. Ilconvient donc de s’assurer dela zone prélevée et d’évitertoute contamination par descellules de l’appareil respira-toire supérieur.Lors d’une pneumopathie,l’atteinte peut se localiser àtrois niveaux : la lumièrealvéolaire, la paroi alvéolaireet le tissu pulmonaire intersti-tiel. En pratique vétérinaire, leLBA apporte de très précieu-ses informations lors del’exploration des atteintesluminales et pariétales. Chezl’homme, cet examen joueégalement un rôle détermi-nant dans le diagnost ic

différentiel des pneumopa-thies interstitielles. Cependant,chez l’animal, les résultats detrois publications récentessont décevants et le diagnosticdes pneumopathies intersti-tielles du chien reste actuelle-ment quasi exclusivementhistologique [2, 4, 5]. Les contre-indications duLBA sont celles de l’anesthé-sie générale.Les incidents et les complica-t ions sont rares lorsque le prélèvement est bien réalisé.La littérature signale des cas d’hyperthermie et dessaignements [1].

! LBA en aveugle ou sous bronchoscopieLe LBA peut être réalisé enaveugle ou lors d’une broncho-scopie.Le LBA en aveugle présentedifférents risques et inconvé-nients, et il convient de privilé-gier la technique perendosco-pique : - le LBA en aveugle n’a aucunintérêt lors d’atteinte localisée ;- lors d’atteinte diffuse, lacytologie peut différer selon lelobe pulmonaire prélevé [3]. Ilest donc indiqué de réaliser leLBA au niveau de plusieurslobes [3] ;- il n’est pas possible de situerla sonde : risque de fauxnégatifs si elle se trouve enterritoire sain et risque decontamination du prélève-ment si elle est en territoiretrachéobronchique (fauxpositif en bactériologie) ;- il est inutilisable chez lesanimaux de grande taille ;- son rendement est faible ;- l e s r i sques de lés ionspulmonaires (hémorragie etperforation) ne sont pasnégligeables ;- en l’absence de bronchosco-pie, aucune information surl’aspect de la trachée et desbronches n’est disponible. ■

Lpar Guillaume Humbert, Clinique vétérinaire du 8-Mai, 96 avenue du 8-Mai-45, 86000 Poitiers

Matériel nécessaire Le matériel nécessairecomprend :- du soluté de chlorure de

sodium isotonique tiède ;- une seringue stérile de 10, 20 ou50 ml selon la taille de l’animal ;- un tube sec pour le prélèvementdestiné à la parasitologie ;- un tube avec EDTA pour lacytologie ;- un tube avec milieu de transportpour la bactériologie. Les milieux de transport typePortagerm® sont adaptés au LBAcar ils permettent une conservationde la flore aérobie et anaérobiependant vingt-quatre à quarante-huit heures à température ambiante.

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! L’animal est anesthésié et maintenu en décubitussternal. Le risque anesthésiqueest élevé chez les animauxsévèrement dyspnéiques.Différentes mesures permettentde réduire ce risque :- réaliser une oxygénation del’animal cinq minutes avant etcinq minutes après l’examen ;- mettre en place un monito-ring cardiaque et respiratoire(électrocardiogramme etoxymétrie) ;- réaliser une anesthésie etune bronchoscopie de courtedurée ;- utiliser un agent anesthé-sique limitant la dépressioncardio-respi rato i re (parexemple, le propofol) ;- surveiller le réveil (dyspnée,saignement, hyperthermie).

Anesthésie de l’animal

M a t é r i e l d eLBA en aveugleLorsque le LBAest réalisé en

aveug le , une sonded’intubation trachéalestérile et une sondesouple d’alimentationnaso-œsophagienne sontu t i l i sées en p lus dumatér ie l précédent .L’extrémité de la sondenaso-œsophagienne estsectionnée afin de faci-liter la réabsorption duliquide de lavage.

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BronchoscopieLa bronchoscopie est réalisée à l’aided’un fibroscope de taille adaptée etparfaitement nettoyé. Il convient

d’apporter un soin particulier à la désinfectiondu canal opérateur.

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Technique de lavage broncho-alvéolaire au cours d’une bronchoscopie

PrélèvementUn aide introduit le cathéter stérile dans le canal opérateur. Lefibroscope est ensuite avancé jusqu’à ce que son extrémité obstruetotalement la bronche qui draine la zone choisie. Une seringue

est remplie de NaCl et de quelques millilitres d’air. La quantité de NaCl estd’environ 2 ml/kg ; l’air permet de vider le cathéter endoscopique. Le NaClest alors injecté et réaspiré après quelques secondes. Le rendement estgénéralement de l’ordre de 50 %. Grâce à cette technique, il est en outrepossible de réaliser sans risque plusieurs prélèvements successifs.

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Matériel de LBA sousbronchoscopieLe LBA est plus géné-ralement réalisé au cours

d’une bronchoscopie. Il est alorsnécessa i re de d isposer deplusieurs fibres optiques enfonction de la taille de l’animal.Pour les chiens qui pèsent plus de30 kg, un gastroscope de 10 mmde diamètre et d’au moins 1 m delong est utilisé ❶. Pour les chiensde plus petite taille (population laplus touchée par des symptômesde toux chronique) et les chats, unbronchoscope pédiatrique de 3 à4 mm de diamètre et de 60 à70 cm de long est idéal ❷ [2]. Lesoluté de NaCl peut être injectéd i rec temen t dans le cana lopérateur du fibroscope, maiscelui-ci est difficilement stérilisable.Il convient donc d’util iser uncathéter plastique stérile pour LBA.

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Bibliographie1 - Cadoré JL. Le lavagebroncho-alvéolaire. Point Vét.1994;26(160):75-76.2 - Corcoran BM. Cobb M, MartinMWS, et coll. Chronic pulmonarydisease in West Highland WhiteTerriers. Vet. Record.1999;29:611-616.3 - Hawkins EC, DeNicola DB,Plier ML. Cytological analysis ofbronchoalveolar lavage fluid inthe diagnostis of spontaneousrespiratory tract disease in dogs:a retrospective study. J. Vet.Intern. Med. 1995;9(6):386-392.4 - Lobetti RG, Milner R, Lane E.Chronic idiopathic pulmonaryfibrosis in five dogs. J. Amer. Anim.Hosp. Assn. 2001;37:119- 127.5 - Norris CR, Griffey SM, Walsh P.Use of keyhole lung biopsy fordiagnostis of interstitial lungdiseases in dogs and cats: 13 cases(1998-2001). J. Amer. Vet. Med.Assn. 2002;221(10):1453-1458.

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Intubation et introduction de la sondeL’animal anesthésié est intubé. Une sonde souple de type sonde naso-œsophagienne estensuite introduite dans la sonde d’intubation. Elle est avancée avec précaution afin de nepas léser le tissu pulmonaire. La distance maximale parcourue par la sonde souple ne doit

pas excéder la distance entre l’extrémité de la sonde endotrachéale et la onzième côte.

Technique de lavage broncho-alvéolaire en aveugle

Irrigation et aspirationLorsque la sonde se bloque, l’opérateurinjecte environ 5 ml/kg de soluté de NaCl,qu’il réabsorbe immédiatement. Le

rendement est habituellement faible : la littératureindique des valeurs de l’ordre de 10 % [1].

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Atteinte localisée. Atteinte diffuse.

Choix des zones prélevéesUne fois la bronchoscopie terminée, les zones lesplus représentatives de l’atteinte sont repérées.

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