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DESCRIPTIF TECHNIQUE Pré-Eclampsie/Eclampsie: Prévention, Détection et Prise en charge DESCRIPTIF TECHNIQUE | Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge 1 LA PRE-ECLAMPSIE/L’ECLAMPSIE (PE/E) QU’EST CE QUE C’EST? Les troubles hypertensifs au cours de la grossesse sont l’unique groupe de complications qui causent une grave morbidité et la mortalité pour la mère et le bébé. Bien que la cause sous- jacente soit supposée être un défaut de la placentation, les symptômes cliniques de la PE/E survenant après 20 semaines de gestation, sont l’hypertension artérielle et la présence de protéines dans l’urine. Cela peut évoluer d’un trouble tensionnel léger à une condition potentiellement mortelle (voir Tableau 1), et il est difficile de prédire la progression. Toutes les femmes enceintes doivent être suivies pour rechercher la pré-éclampsie, et celles ayant les caractéristiques suivantes doivent bénéficier d’une surveillance complémentaire : Un antécédent personnel ou familial de PE/E Des conditions médicales préexistantes, comme l’obésité, l’hypertension chronique ou le diabète L’âge—grossesse chez les adolescentes ou les femmes de plus de 35 ans Primigeste Complications liées à la grossesse précédente, y compris retard de croissance intra-utérin (RCIU), décollement placentaire, ou mort fœtale Première grossesse avec un nouveau partenaire Bien que ces caractéristiques aident les prestataires à dépister la PE chez les femmes enceintes, il est toujours difficile de la prévenir ou la prévoir. Le diagnostic et la prise en charge de la PE avant qu’elle ne progresse vers l’éclampsie est une stratégie essentielle de santé maternelle et néonatale, parce que la PE/E est associée à un risque accru de résultats défavorables pour la mère et le fœtus. Cette stratégie peut également réduire les risques pour les grossesses futures, car les femmes ayant des antécédents d’éclampsie ont un risque accru d’éclampsie (1 à 2%) et de pré-éclampsie (22 à 35%) lors de grossesses suivantes. 1 Pour ces raisons, toutes les femmes enceintes doivent avoir accès à une gamme de soins pour la prévention, la détection et la prise en charge, basés sur l’évidence. Table 1. Diagnostics de la progression vers l’éclampsie Diagnostic probable Signes et symptômes typiques Hypertension chronique Tension diastolique 90 mm Hg ou plus avant 20 semaines de gestation PE surajoutée à une hypertension chronique Femmes avec hypertension et pas de protéinurie en début de grossesse (<20 semaines de gestation) Chez les femmes souffrant d’hypertension avant 20 semaines de gestation avec un des éléments suivants observés après 20 semaines: Survenue ou aggravation de la protéinurie, ou Elévation soudaine de la TA chez une femme dont l‘hypertension a déjà été bien contrôlée Figure 1. Diagnostic de la PE Source: American Society of Hypertension, 2009; http://www.aafp.org/afp/2004/1215/p2317.html#afp20041215p2317-b5

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DESCRIPTIF TECHNIQUE Pré-Eclampsie/Eclampsie:

Prévention, Détection et Prise en charge

DESCRIPTIF TECHNIQUE | Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge 1

LA PRE-ECLAMPSIE/L’ECLAMPSIE (PE/E) QU’EST CE QUE C’EST? Les troubles hypertensifs au cours de la grossesse sont l’unique groupe de complications qui causent une grave morbidité et la mortalité pour la mère et le bébé. Bien que la cause sous-jacente soit supposée être un défaut de la placentation, les symptômes cliniques de la PE/E survenant après 20 semaines de gestation, sont l’hypertension artérielle et la présence de protéines dans l’urine. Cela peut évoluer d’un trouble tensionnel léger à une condition potentiellement mortelle (voir Tableau 1), et il est difficile de prédire la progression. Toutes les femmes enceintes doivent être suivies pour rechercher la pré-éclampsie, et celles ayant les caractéristiques suivantes doivent bénéficier d’une surveillance complémentaire :

• Un antécédent personnel ou familial de PE/E

• Des conditions médicales préexistantes, comme l’obésité, l’hypertension chronique ou le diabète

• L’âge—grossesse chez les adolescentes ou les femmes de plus de 35 ans

• Primigeste

• Complications liées à la grossesse précédente, y compris retard de croissance intra-utérin (RCIU), décollement placentaire, ou mort fœtale

• Première grossesse avec un nouveau partenaire

Bien que ces caractéristiques aident les prestataires à dépister la PE chez les femmes enceintes, il est toujours difficile de la prévenir ou la prévoir. Le diagnostic et la prise en charge de la PE avant qu’elle ne progresse vers l’éclampsie est une stratégie essentielle de santé maternelle et néonatale, parce que la PE/E est associée à un risque accru de résultats défavorables pour la mère et le fœtus. Cette stratégie peut également réduire les risques pour les grossesses futures, car les femmes ayant des antécédents d’éclampsie ont un risque accru d’éclampsie (1 à 2%) et de pré-éclampsie (22 à 35%) lors de grossesses suivantes.1 Pour ces raisons, toutes les femmes enceintes doivent avoir accès à une gamme de soins pour la prévention, la détection et la prise en charge, basés sur l’évidence.

Table 1. Diagnostics de la progression vers l’éclampsie

Diagnostic probable Signes et symptômes typiques

Hypertension chronique Tension diastolique 90 mm Hg ou plus avant 20 semaines de gestation

PE surajoutée à une hypertension chronique• Femmes avec hypertension et pas de

protéinurie en début de grossesse (<20 semaines de gestation)

Chez les femmes souffrant d’hypertension avant 20 semaines de gestation avec un des éléments suivants observés après 20 semaines: • Survenue ou aggravation de la protéinurie, ou • Elévation soudaine de la TA chez une femme dont

l‘hypertension a déjà été bien contrôlée

Figure 1. Diagnostic de la PE

Source: American Society of Hypertension, 2009; http://www.aafp.org/afp/2004/1215/p2317.html#afp20041215p2317-b5

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2 Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge | DESCRIPTIF TECHNIQUE

Table 1. Diagnostics de la progression vers l’éclampsie

Diagnostic probable Signes et symptômes typiques

Hypertension gestationnelle • Hypertension transitoire de la grossesse si la

PE n’est pas présente au moment de l’accouchement et que la TA revient à la normale après 12 semaines du postpartum (diagnostic rétrospectif)

• Deux lectures de tension diastolique de 90 mm Hg ouplus mais moins de 110 mm Hg à 4 heures d’écart à >20 semaines de gestation

• Pas de protéinurie

PE modérée • Deux lectures de tension diastolique de 90–110 mm Hg à 4 heures d’écart

• Protéinurie 2+

PE sévère Diagnostic de PE modérée (selon les critères ci-dessus indiqués) PLUS un ou plusieurs des critères de diagnostic suivants: • Tension diastolique de 110 mm Hg ou plus • Protéinurie 3+ or more • Hyper réflexibilité, maux de tête (augmentation de la

fréquence, non soulagée par des analgésiques ordinaires)

• Vision trouble • Oligurie (moins de 400mL d’urine dans les 24 heures) • Douleur abdominale supérieure (épigastrique ou

douleur de l’hypocondre droit) • Œdème pulmonaire

Eclampsie PE avec: • Convulsions ou • Coma (inconscience)

Source: MCHIP. Prévention et prise en charge de la pré-éclampsie et de l’éclampsie. Manuel de référence pour les prestataires de soins de santé (Reference Manual for Healthcare Providers. 2011.

APPROCHES STRATEGIQUES DE PREVENTION Les preuves concluantes tirées dans les pays développés et en développement, suggèrent que les décès associés aux troubles hypertensifs de la grossesse sont les plus difficiles à prévenir.2 Les programmes de PE/E peuvent se concentrer sur trois approches stratégiques pour la prévention de la morbidité et de la mortalité:

• Prévention primaire—éviter le développement de la maladie ; éviter la grossesse et les conditions favorisant le développement de la PE

• Prévention secondaire—dépistage précoce de la maladie avant que les symptômes cliniques n’apparaissent

• Prévention tertiaire—prendre la maladie en charge à temps pour prévenir la progression et les complications

Ces trois approches stratégiques peuvent aussi être considérées comme la prévention, la détection et la prise en charge de la PE/E. Les prestataires qualifiés pour l’accouchement (SBA) ont un rôle essentiel à jouer dans ces efforts, en particulier ceux des centres de santé des zones périphériques qui offrent les services suivants : les soins prénatals ; le counseling aux femmes et à leurs familles ; le dépistage pour la PE et qui peuvent initier le traitement—première dose intramusculaire (IM) de sulfate de magnésium et première dose de médicament antihypertenseur—avant le transfert à une structure sanitaire de Soins Obstétricaux et Néonatals d’Urgence Complets (SONUC) équipée pour la chirurgie obstétricale et la prise en charge des complications. Ce descriptif technique met l’accent sur les soins qui peuvent être fournis à domicile par les prestataires qualifiés pour l’accouchement (SBA) ou dans un poste périphérique ou une structure sanitaire de référence. Prévention primaire de la PE: supplémentation en calcium et autres interventions La prévention primaire de la PE est difficile parce que sa cause n’est pas bien comprise et que les facteurs qui y sont associés sont difficiles à influencer. De nombreuses interventions ont été étudiées et revues pour la prise en charge de la PE ; le Tableau 2 résume les dernières preuves sur les interventions possibles pour la prévention primaire de la PE.

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DESCRIPTIF TECHNIQUE | Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge 3

Tableau 2. Résultats des interventions de prévention primaire pour la PE/E

Intervention Résultat de la grossesse Recommandé?

Prévention du RCIU La prévention du RCIU contribue théoriquement à la prévention primaire de la PE pour la prochaine génération

Oui

Planification familiale Peut réduire les grossesses à risque pour la PE Oui

Prévention pré-conceptuelle et/ou traitement de l’obésité

Peut réduire le risque de la PE Oui

Supplémentation en calcium

• Réduction de la PE chez les femmes à risque élevé, dont l’alimentation est pauvre en calcium

• Aucun effet sur la santé périnatale

Oui, pour les femmes présentant un haut

risque d’hypertension gestationnelle, ou ayant un apport de

calcium faible

Aspirine à faible dose • Réduction de la PE • Réduction de la mortalité fœtale et néonatale

Oui, pour lespopulations à risque

accru de développer la PE

Supplémentation en magnésium ou en zinc

Pas de réduction de PE Preuves insuffisantes

pour pouvoir recommander

Supplémentation en huile de poisson et autres sources de matières grasses

Aucune différence sur les populations à faible ou haut risque

Preuves insuffisantes pour pouvoir

recommander

Héparine ou héparine de bas poids moléculaire

Réduction de la PE chez les femmes qui ont des maladies rénales et une thrombopénie

Preuves insuffisantes pour pouvoir

recommander

Vitamines anti-oxydantes (C, E) Réduction de la PE dans un essai, mais pas dans tous les essais

Preuves insuffisantes pour pouvoir

recommander

Restriction protéique ou de sel Aucune différence Non

Source: MCHIP. Prévention et prise en charge de la pré-éclampsie et de l’éclampsie. Manuel de référence pour les prestataires de soins de santé (Reference Manual for Healthcare Providers. 2011.

La planification familiale est une stratégie efficace de prévention primaire pour prévenir, retarder et espacer les grossesses, éliminant efficacement le risque de PE ; le traitement de l’obésité est un moyen efficace d’intervention pré-conceptuelle. Cependant, la supplémentation en calcium et en aspirine à faible dose ont le plus de potentiel, en matière de stratégies ciblées de santé publique pour la réduction de la PE chez les femmes enceintes. Supplémentation en calcium La supplémentation en calcium semble prometteuse comme une intervention de grande envergure de santé publique pour prévenir la PE parmi les populations à haut risque ou ayant un déficit en calcium. Dans les pays en développement, les femmes enceintes ne consomment pas suffisamment de calcium. Selon une revue systématique de l’OMS (1991–2004) sur l’apport alimentaire en calcium chez les femmes enceintes, l’apport en calcium en Afrique et en Asie se situait entre 200 à 500 mg/jour. Un apport quotidien suffisant en calcium est estimé entre 1000 à 1300 mg pour les femmes non allaitantes en âge de procréer.3

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4 Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge | DESCRIPTIF TECHNIQUE

Selon les résultats d’un essai randomisé et contrôlé de l’OMS, les femmes enceintes ayant un faible apport en calcium, qui ont pris une supplémentation quotidienne de calcium, avaient un taux significativement plus faible d’hypertension gestationnelle sévère et d’éclampsie.4 Plus récemment, une revue Cochrane en 2010 a examiné l’effet de la supplémentation calcique pendant la grossesse sur les troubles hypertensifs de la grossesse et leurs conséquences sur la mère et l’enfant. Il y avait 13 études de bonne qualité (n=15,730 femmes). Les critères de sélection de la plupart de ces études ont identifié les femmes enceintes qui étaient à faible risque pour la PE et qui avaient un régime alimentaire pauvre en calcium. Les principales conclusions étaient que la supplémentation calcique semble réduire de moitié environ le risque de PE et celui d’accouchement prématuré. Plus précisément, les suppléments en calcium réduisent le risque moyen de TA élevée et de PE—avec le plus d’effet chez les femmes à haut risque et chez celles qui ont un apport de base de calcium faible. Cependant, la supplémentation calcique n’a pas diminué le risque de PE/E sévère ou la mortinatalité.5 (Voir la bibliographie annotée pour de plus amples renseignements concernant ces études.) Parce qu’il n’y a pas d’effets défavorables, la supplémentation calcique est généralement considérée comme relativement sûre et doit être prise en compte dans les cas de déficiences en calcium. En tant que stratégie de survie maternelle et infantile, la supplémentation calcique pour la mère a été reconnue avoir un effet suffisamment important sur le pronostic maternel et néonatal, pour la considérer comme une intervention de santé publique dans les milieux à ressources limités, le cas échéant. 6 En supposant que la supplémentation calcique a un effet similaire sur les décès dus aux troubles hypertensifs, la supplémentation calcique universelle pourrait prévenir plus de 21 500 décès maternels par an et réduire le coût par année de vie d’invalidité ajusté (DALYs) par 620 000.7 Aspirine à faible dose L’examen de 59 essais, impliquant 37 560 femmes, a montré que l’aspirine à faible dose est associée à une réduction de la PE de l’ordre d’environ un sixième (17%), à une réduction similaire de la mortalité fœtale (14%), et à une plus légère réduction de naissance prématurée (8%).8 Toutefois, les études à ce jour n’ont pas montré d’effet significatif sur la mortalité maternelle, fœtale ou du nouveau-né, ou sur la naissance de bébés qui sont petits pour leur âge gestationnel.9 Il n’existe aucun indice de nocivité pour la thérapie d’aspirine à faible dose, indépendamment du statut de risque de la femme,10 mais une supplémentation systématique d’aspirine n’est pas une stratégie de prévention recommandée pour les femmes sans facteurs de risque. Bien que l’aspirine fluidifie le sang et diminue la formation de caillot, l’aspirine à faible dose n’a pas augmenté le risque d’hémorragie (postpartum ou antepartum) ou néonatale. Les résultats de recherche suggèrent que l’aspirine à faible dose doit être débutée avant la 16ème semaine pour réduire de manière significative la PE.11 Prévention secondaire de la PE: Dépistage précoce Les stratégies de prévention secondaires sont axées sur le dépistage précoce de la PE—avant que les symptômes cliniques ne se manifestent—lorsque d’autres interventions peuvent améliorer le pronostic de la mère et son enfant. Le dépistage systématique de toutes les femmes enceintes est la seule façon de détecter la PE ; il n’y a pas de tests fiables ou de symptômes pour prédire qu’une femme aura la PE/E.12 Des données probantes (Tableau 3) appuient deux tests de dépistage pour la PE: mesurer la TA et les protéines dans l’urine. Les directives de l’OMS recommandent quatre visites prénatales

Figure 2. Niveaux d’apport quotidien en calcium alimentaire

472346 363

499 498352

860

0

500

1000

1500

World DevelopedCountries

Developingcountries

Africa Latin America Near East Far East

Minimum daily calcium intake, Adult WRA (1000−1200 mg/day)

Minimum daily calcium intake, Pregnant Women (1300−1500 mg/day)

472346 363

499 498352

860

0

500

1000

1500

World DevelopedCountries

Developingcountries

Africa Latin America Near East Far East

Minimum daily calcium intake, Adult WRA (1000−1200 mg/day)Minimum daily calcium intake, Adult WRA (1000−1200 mg/day)

Minimum daily calcium intake, Pregnant Women (1300−1500 mg/day)Minimum daily calcium intake, Pregnant Women (1300−1500 mg/day)

Source: Calcium and Prevention of Pre-eclampsia: Summary of Current Evidence, Monitoring, Evaluation and Research Task Force of the PE/E Working Group. 2010.

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DESCRIPTIF TECHNIQUE | Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge 5

pendant la grossesse, mesurer la TA de toutes les femmes à chaque visite, contrôler la protéinurie chez les femmes avec une pression artérielle élevée.13 Parce qu’une femme qui développe la PE a rarement une protéinurie avant que sa tension diastolique n’augmente,14 les recommandations de l’OMS sur les soins prénatals insistent sur les antécédents et la mesure de la TA. Une élévation de la pression artérielle et la présence de protéines dans l’urine sont toujours pathologiques chez une femme enceinte. Par conséquent, il est préférable de rechercher ces deux conditions, si possible, à chaque visite prénatale, que ce soit dans la communauté ou dans un centre de santé. Les défis d’un dépistage systématique incluent le manque de tensiomètre qui fonctionne, le manque de compétences des prestataires pour mesurer la pression artérielle ou la protéinurie, le peu de temps passé avec la femme pendant la visite prénatale, le coût des tests de protéinurie, et la logistique.

Tableau 3. Preuves des interventions pour déceler et dépister la PE

Intervention Résultat pour la grossesse Recommandé?

Dépistage de l’HTA pendant la visite prénatale

• Le dépistage de la TA élevée n’empêche pas la PE

• Le diagnostic précoce de la PE permet une meilleure prise en charge à temps, et peut empêcher la progression vers la PE/E sévère, réduisant ainsi des conséquences néfastes pour la mère et le fœtus

Oui

Dépistage des protéines dans l’urine si la TA diastolique est supérieure à 90 mm Hg lors de la visite prénatale

• Le dépistage de protéines dans l’urine n’empêche pas la PE

• Le diagnostic précoce permet une meilleure prise en charge à temps, et peut empêcher la progression vers la PE/E sévère, réduisant ainsi des conséquences néfastes pour la mère et le fœtus

Oui

Dépistage de ‘ HTA En raison des changements physiologiques de la grossesse, l’hypertension est rare dans la première moitié de la grossesse, mais se produit dans environ 10% des grossesses après 20 semaines. Une TA diastolique élevée, de 90 mm Hg, prise deux fois à quatre heures d’écart, peut indiquer une hypertension chronique, une PE surajoutée à une hypertension chronique, une hypertension gestationnelle, une PE modérée ou sévère, ou une éclampsie. Dans les milieux à ressources limitées, où les tests de protéinurie ne sont pas systématiquement disponibles, la prise de décision clinique autour de la PE va dépendre de la mesure précise de la TA. Tant dans les pays développés que dans ceux en développement, la TA est souvent incorrectement mesurée et enregistrée. En plus d’un stéthoscope bien calibré et de bonne qualité, mesurer la TA dans les milieux à ressources limitées nécessite un prestataire compétent et expérimenté. La technique d’auscultation conventionnelle est souvent mal faite, comme cela a été illustré par les résultats cliniques prénatals en Tanzanie, où les agents de santé détectaient seulement 4 des 12 cas de TA élevée parmi 397 patientes. Tout aussi préoccupant, plus de 100 femmes n’étaient même pas contrôlée pour une TA élevée,15 soulignant les occasions manquées de dépistage pour la PE pendant les soins prénatals. Compte tenu de l’étroite association entre une TA élevée au cours des visites prénatales et le diagnostic ultérieur de la PE, une évaluation minutieuse de la TA pendant les soins prénatals est justifiée.16 DEPISTAGE DE LA PROTEINURIE La protéinurie est définie comme la présence de 300 mg ou plus de protéines dans l’urine par litre recueillis aseptiquement et en milieu de jet.17 Les tests de protéinurie sont disponibles dans les pays développés à l’aide de bandelettes réactives, ou avec des tests d’ébullition. La méthode d’Esbach sur les urines de 24 heures, et les ratios protéinurie/créatinine sont parfois utilisés dans les centres de soins tertiaires. Bien qu’une étude au Pakistan ait révélé que l’analyse d’urine avec des bandelettes réactives est moins précise que la mesure des protéines dans l’urine de 24-heures,18 la simplicité, la facilité d’utilisation, et les résultats rapides, font que le test par

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6 Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge | DESCRIPTIF TECHNIQUE

bandelettes réactives est approprié pour le dépistage dans les milieux prénatals à haut volume et à ressources limitées. Le stockage et la manutention adéquats du test des bandelettes réactives sont requis pour des résultats précis. La présence de protéinurie avec une HTA étaye le diagnostic de la PE. La plupart des études ne démontrent pas que le degré de protéinurie est corrélé à la sévérité de la maladie. Par conséquent, la présence d’une protéinurie—plutôt que la gravité ou le changement dans la quantité de protéines dans l’urine—devait être le critère principal utilisé pour la prise en charge.19 Soins prénatals Parce que la détection de la PE survient principalement lors de la visite prénatale, la quantité et la qualité des visites prénatales sont importantes en matière de prévention secondaire pour atteindre toutes les femmes enceintes. La plupart des femmes viennent aux visites prénatales pendant le premier trimestre de la grossesse, généralement avant que la PE ne commence à se développer.20 Les visites prénatales ultérieures permettent de nombreuses interventions qui ont fait leurs preuves, et affectent la santé de la mère et du bébé, y compris des possibilités de détection et de prise en charge de la PE. Cependant, malgré le fait qu’environ deux tiers des femmes dans les pays à faibles et moyens revenus ont au moins une visite prénatale, moins de la moitié des femmes dans le monde (47%) ont les quatre visites prénatales recommandées (voir Tableau 3).21 Dans certains pays, moins d’un tiers des femmes ont une visite prénatale, et en Ethiopie, par exemple, seulement 12% des femmes reçoivent une consultation prénatale.22 Par ailleurs, les femmes des zones rurales sont deux fois moins susceptibles que les femmes des zones urbaines à rapporter avoir au moins quatre visites prénatales—ces mêmes femmes qui sont aussi moins susceptibles d’avoir un accès opportun à des soins obstétricaux d’urgence qui sauvent la vie, au cas où l’éclampsie se développerait. Le nombre de visites seul ne peut pas sauver des vies bien sûr, à moins que des interventions efficaces de haute qualité soient offertes au cours de ces visites. Lors des visites prénatales, plus de femmes ont la tension artérielle mesurée que des tests d’urine (voir Tableau 4). Certaines données suggèrent que la fréquence du dépistage ne peut conduire à l’amélioration des soins. Par exemple, dans un contexte à faibles ressources avec une forte incidence d’éclampsie en Tanzanie,23 la pratique des visites prénatales seule n’était pas efficace pour prévenir l’éclampsie. Dans cette clinique, une approche de dépistage au cours de la visite prénatale pour la détection de la TA élevée a atteint une couverture de 95%, et une couverture de 33% pour la protéinurie. Cependant moins de 50% parmi ces femmes qui ont développé l’éclampsie avaient été référées par les cliniques prénatales, et moins de 10% avaient été admises au service de consultation prénatale avant l’apparition des crises éclamptiques. Ceci suggère qu’une approche de dépistage et de détection précoce concentrée uniquement sur les femmes qui se présentent à la clinique prénatales, serait inadéquate.

Figure 3. Visites prénatales, une opportunité pour la détection de la PE

Source: Mandel B, Evidence Base for PE/E Strategy, 2009.

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DESCRIPTIF TECHNIQUE | Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge 7

Plusieurs facteurs peuvent contribuer à la faible performance des approches prénatales pour la détection de la PE. Il s’agit notamment de : la qualité insuffisante du processus de dépistage (exactitude de la mesure de la TA et de la protéinurie); l’absence d’un système efficace pour la référence des femmes présentant la PE; et un traitement ne répondant pas aux standards pour les femmes pré-éclamptiques qui sont référées. Le counseling et l’éducation de la patiente sont des composantes des soins prénatals indispensables—et souvent sous-estimés—. Parce que les femmes sont souvent asymptomatiques au moment du diagnostic de la PE, la possibilité de prévenir l’éclampsie se limite à la compréhension par la femme et sa famille de la cause sous-jacente, des signes précurseurs, et des conséquences potentielles. Prévention tertiaire de la PE: la prise en charge Une fois que la PE/E sévère est diagnostiquée, la prise en charge converge sur les quatre interventions basées sur l’évidence : thérapie anti-convulsivante ; traitement antihypertenseur ; surveillance attentive de la patiente ; et accouchement programmé (ou planifié). La prise en charge de la PE modérée inclut la prise régulière de la TA et la mesure de la protéinurie, ainsi que la surveillance attentive de la femme pour détecter les signes de progression de la maladie. Aucun diurétique, anticonvulsivants ou antihypertenseurs ne sont indiqués pour les formes modérées de la PE. Pour la prise en charge de la PE/E sévère, tous les prestataires qualifiés pour l’accouchement (SBA) devraient avoir la capacité et la possibilité de fournir les trois premières interventions mentionnées ci-dessus. Que ce soit à domicile ou dans un centre de soins périphérique, tous les prestataires devraient pouvoir administrer au moins la première dose d’antihypertenseurs et d’anticonvulsivants avant le transfert vers une structure de SONUC pour le suivi ultérieur, la prise en charge, et potentiellement, l’accouchement par césarienne. Il est essentiel de se rappeler que le seul traitement efficace pour la PE/E sévère demeure l’accouchement. La surveillance de la femme et l’administration des médicaments appropriés est une stratégie de prise en charge pour prévenir la morbidité ou la mortalité pendant l’accouchement, indépendamment que ce soit un accouchement par voie basse ou par césarienne.

Figure 4. PE Détection lors de visites prénatales en Afrique

Source: DHS of African Countries (years as noted above)

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8 Pré-éclampsie/éclampsie: prévention, détection et prise en charge | DESCRIPTIF TECHNIQUE

Tableau 4. Interventions pour le traitement de la PE/E sévère

Intervention Résultat pour la grossesse Recommandé?

Sulfate de Magnésium • Diminue les risques d’éclampsie sans aucun effet de fond sur la morbidité et la mortalité à long terme pour les femmes ou les enfants

Oui, pour la PE/Esévère

Si le MgSO4 n’est pas disponible, utiliser le

diazépam

Médicament anti-hypertensifs • Améliore la santé maternelle• Aide à réduire les complications maternelles,

tels que les accidents vasculaires cérébraux

Oui, si la TA diastolique est 110 mm Hg ou plus

Déclenchement du travail • Améliore le pronostic maternel et fœtal si effectué conformément aux recommandations pour la PE/E sévère

Oui, quel que soit l’âge gestationnel, en cas de PE/E sévère- Oui si PE modérée et âge gestationnel >37 semaines Si PE modérée et âge gestationnel <37 semaines, la prise en charge expectative est indiquée. Déclencher le travail si la PE sévère se développe

Source: Prévention et prise en charge de la pré-éclampsie et de l’éclampsie. Manuel de référence pour les prestataires de soins de santé (Reference Manual for Healthcare Providers. MCHIP 2011.

Thérapie anticonvulsive : le sulfate de magnésium Le sulfate de magnésium est l’unique médicament peu coûteux qui peut traiter la PE sévère, prévenir et traiter l’éclampsie. Chez la femme avec une PE sévère, le sulfate de magnésium s’est avéré réduire l’incidence de l’éclampsie de plus de 50% 24 et les décès maternels de 46%.25 Il réduit le risque d’éclampsie26 sans aucun effet fondamental sur la morbidité ou la mortalité à long terme chez les femmes ou les enfants.27

L’OMS a identifié le sulfate de magnésium comme le médicament le plus efficace pour le traitement de l’éclampsie. Il est plus efficace dans la réduction de la survenue des convulsions et des crises éclamptiques que le diazépam, la phénytoine ou d’autres médicaments.28 En outre, il est plus sûr et peut être plus facilement utilisé par les cadres moyens de santé en raison de sa gamme thérapeutique large. Malgré les données probantes et son faible coût, le sulfate de magnésium n’est pas largement disponible dans beaucoup de pays. Des médicaments moins efficaces et à plus haut risque (comme le diazépam et la phénytoine) sont encore couramment utilisés dans la plupart des pays en développement. Si le régime standard de Pritchard pour l’administration de sulfate de magnésium peut être lourd et difficile à utiliser, d’autres régimes anticonvulsivants ont été insuffisamment étudiés à ce jour. Ce régime combine une dose de charge administrée à la fois par voie intramusculaire (IM) et par voie intraveineuse (IV), suivi par une thérapie d’entretien dans les 24 heures qui suivent l’accouchement. Pendant la phase d’entretien la surveillance est nécessaire pour s’assurer que la patiente ne montre pas des signes d’excès de magnésium—fréquence respiratoire diminuée, diminution de la diurèse et absence des réflexes osté-tendineux. L’arrêt respiratoire, bien que extrêmement rare, est possible. Il est cependant facilement traité avec du gluconate de calcium, qui est un antagoniste du sulfate de magnésium. Il n’existe aucun antidote acceptable et largement disponible pour le surdosage au diazépam ou à la phénytoine.

La mise en œuvre de protocoles pour l’utilisation du sulfate de magnésium doit faire partie des efforts de réduction de la mortalité

maternelle de chaque pays

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Des régimes alternatifs qui pourraient réduire le coût et le temps (sans les 24 heures d’entretien) et simplifier le niveau de soins (sans administration d’IV et de risque de toxicité) suscitent un intérêt. Une dose de charge unique de sulfate de magnésium seul par IM, si elle est administrée sans délai, peut être suffisante pour la majorité des patientes.29 Chez les femmes atteintes de PE/E sévère traitées dans un centre de santé plus périphérique, la dose de charge donnée avant la référence et le transport à un hôpital a montré une réduction du nombre de convulsions, un contrôle des convulsions (94% contre 74% dans le groupe de contrôle), une diminution du temps d’inconscience, et une réduction de la mortalité maternelle et la mortinatalité.30 Deux essais (au Pakistan et au Bangladesh) ont comparé la dose de charge seule avec le régime standard de Pritchard et ont trouvé une efficacité équivalente entre les deux groupes dans la récurrence de convulsions et la mortinatalité.31 Selon la dernière revue de Cochrane en 2010, les preuves concernant ces régimes ne sont toujours pas concluantes pour recommander une large adoption.32 La dose de charge de sulfate de magnésium avant le transfert à un établissement de SONUC est la norme de soins recommandée pour la PE/E sévère en vue de stabiliser la femme et améliorer son pronostic et celui de son enfant. Par conséquent, il est recommandé d’administrer le régime standard de Pritchard de sulfate de magnésium à toutes les femmes diagnostiquées avec une PE/E sévère. Par ailleurs, toutes les structures de soins qui utilisent le sulfate de magnésium devraient avoir une ampoule de gluconate de calcium disponible, l’antidote du sulfate de magnésium, en cas d’arrêt respiratoire. Si la femme arrête de respirer, administrer 1g de gluconate de calcium 1g (10mL de solution à 10%) par perfusion d’IV lentement pendant 5 à 10 minutes.33 En collaboration avec des collègues de trois centres cliniques en Inde, des enquêteurs mènent une étude pilote qui examine l’introduction d’une méthode simple et peu coûteuse, une pompe à débit contrôlé, le Springfusor® pour l’infusion continue du sulfate de magnésium. On espère que ce système sera un moyen plus sûr, facile d’emploi, efficace par rapport au coût et aux contraintes de temps subies par le personnel.34 Traitement anti hypertensif Une femme ayant une PE/E sévère doit être étroitement surveillée et sa pression artérielle mesurée au moins toutes les heures. Si sa pression artérielle diastolique est à 110 mm Hg ou plus, lui administrer un antihypertenseur pour abaisser la TA et prévenir l’hémorragie cérébrale ou un accident cérébrovasculaire. Administrer l’antihypertenseur lentement pour diminuer la TA et la maintenir entre 90 à 100 mm Hg, réduisant ainsi le risque maternel sans nuire au fœtus. La diminution brutale de la TA risque d’induire une hypoperfusion cérébrale maternelle et un accident cérébrovasculaire. Bien que le choix des médicaments antihypertenseurs soit incertain, le labétalol, l’hydralazine et la nifédipine sont actuellement largement recommandés. Le Labétalol est un agent qui bloque les récepteurs adrénergiques, qui appartient à une classe de médicament considéré comme sûr pendant la grossesse, dont la posologie peut être ajustée pour atteindre l’effet désiré. La sûreté du labétalol pendant la grossesse, cependant, n’est pas aussi bien établie que le méthyldopa, malgré que les résultats avec le méthyldopa soient moindres. Bien que l’expérience avec des antagonistes du calcium (nifédipine) soit limitée, on n’a pas trouvé d’augmentation de la tératogénicité majeure à l’exposition de ces médicaments au cours du premier trimestre de la grossesse. En analysant les sous-groupes, les bêtabloquants pourraient être moins efficaces que les inhibiteurs calciques.35 Lorsque la PE sévère ou l’éclampsie est diagnostiquée, les prestataires qualifiés pour l’accouchement (SBAs) devraient donner au moins la première dose de médicaments anti hypertenseurs avant le transfert vers un établissement de soins de niveau supérieur ayant des capacités de SONUC.

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L’accouchement programmé (ou planifié) Même si la PE est modérée et stable, le déclenchement du travail est associé à un résultat amélioré pour la santé maternelle et devrait être conseillé pour les femmes au-delà des 37 semaines de gestation.36 Pour les grossesses de moins de 37 semaines, la prise en charge expectative avec une surveillance attentive est appropriée. Dans une étude effectuée en Afrique du Sud, une stratégie de prise en charge expectative pour la PE sévère diagnostiquée avant 37 semaines a entraîné la possibilité de prolonger la grossesse à 11 jours de gestation en moyenne avec une amélioration des taux de survie périnatale et néonatale.37 S’il est établi que l’induction doit être faite avant les 37 semaines de gestation, il faut administrer des corticostéroïdes à la mère dans le but de réduire le risque de syndrome de détresse respiratoire néonatale et de mortalité néonatale. Le traitement consiste en deux doses de bétaméthasone de 12 mg par IM, la première dose administrée immédiatement et la deuxième dose administrée 24 heures plus tard. Pour la PE sévère ou l’éclampsie, l’OMS recommande que l’accouchement ait lieu dès que la patiente est stabilisée. Le fait de retarder l’accouchement pour permettre au fœtus d’arriver à maturité risquerait de mettre en danger la vie de la femme et celle du bébé. Il convient de procéder à l’accouchement sans tenir compte de l’âge gestationnel. Dans les cas de pré-éclampsie sévère, l’accouchement doit avoir lieu dans les 24 heures qui suivent l’apparition des symptômes. Dans les cas d’éclampsie, l’accouchement doit avoir lieu dans les 12 heures qui suivent le début des convulsions. Si le col est favorable (mou, mince et partiellement dilaté), déclencher le travail. Cependant, si on ne peut prévoir un accouchement naturel par voie basse dans les 12 heures (pour l’éclampsie) ou 24 heures (pour la pré éclampsie sévère) ou si le rythme cardiaque fœtal est anormal, on doit pratiquer une césarienne.38 Surveillance

Une surveillance attentive de la femme avec une PE/E sévère est essentielle pour un résultat sain pour elle et son bébé. Les signes vitaux et le rythme cardiaque fœtal doivent être mesurés toutes les heures et enregistrés sur le partogramme. L’évaluation stricte du bilan hydrique en mesurant la quantité de liquide administrée (IV ou autre) et la diurèse doit être maintenue. Les réflexes patellaires (réflexes osté-tendineux) doivent être mesurés toutes les heures, et les poumons auscultés toutes les heures pour détecter la présence de râles ou d’œdème pulmonaire. Si possible, évaluer la coagulation en faisant un test de coagulation au lit de la patiente, la coagulopathie étant fréquente dans les cas de PE/E sévère. Si la femme est en travail, et le col dilaté à 4 cm ou plus, elle devrait également être surveillée à l’aide du partogramme. Cet outil guide l’observation et enregistre la condition de la mère et du fœtus et la progression du travail, et aide à la prise de décision concernant l’évolution du travail. En outre, avant l’administration répétée du sulfate de magnésium, il faut évaluer la fréquence respiratoire (au moins 16 par minute) les réflexes osté-tendineux (présents) et la diurèse (au moins 30 mL par heure pendant 4 heures). Surtout, lors de la prise en charge d’une femme avec une PE/E sévère, ne jamais laisser la patiente seule. Si à la suite d’une convulsion, la femme inhale les matières vomies, cela peut la tuer et tuer le fœtus. En plus de la prise en charge des convulsions ou si la femme éclamptique est inconsciente, les soins additionnels doivent inclure : 1) installer une perfusion par IV de sérum physiologique ou Ringer lactate ; 2) insérer une sonde vésicale pour contrôler la diurèse et la protéinurie ; 3) offrir des mesures visant à assurer le confort de la patiente ; et 4) communiquer continuellement avec la femme et sa famille sur son état et ce à quoi s’attendre.39 ROLE COMMUNAUTAIRE ETENDU Bien que ce document ait porté sur les aspects cliniques de la PE/E, on réalise de plus en plus que l’incidence de la PE/E chez une population ne pourra diminuer sans l’implication de la communauté. Afin d’atteindre les femmes, en particulier celles qui ne sont pas suivies par un prestataire qualifié pour l’accouchement (SBA) pendant la grossesse ou l’accouchement, le rôle de l’agent de santé communautaire (ASC) doit être élargi pour inclure des interventions appropriées pour la prévention et la détection précoce de la PE/E dans la communauté. L’ASC pourrait être engagé dans les efforts visant à prévenir la PE grâce à la supplémentation en calcium prénatal. Les ASC offrent déjà l’éducation à base communautaire aux femmes enceintes et leur enseignent ainsi qu’à la communauté les signes de danger de la PE/E, y compris où et comment chercher des

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soins immédiats. Des efforts sont également déployés pour développer des appareils simples pour mesurer la TA et pour détecter les protéines dans l’urine, qui peuvent être utilisés pour le dépistage et au niveau des ménages. Et, semblable à la pompe automatique Springfusor®, des tentatives sont faites pour développer un dispositif sûr pour administrer une dose de sulfate de magnésium par les prestataires qui ont peu ou pas d’expérience avec l’injection parentérale. REFERENCES

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