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Principes d'éthique et de securité recommandés pour les recherches sur les actes de violence familiale à l'égard des femmes Département Genre et santé de la femme Groupe Santé familiale et communautaire Organisation mondiale de la Santé Genève, Suisse Priorité aux femmes: WHO/FCH/GWH/01.1 Distribution: General Original: English

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Principes d'éthique et de securité recommandés pour les recherches sur les actes de violence

familiale à l'égard des femmes

Département Genre et santé de la femmeGroupe Santé familiale et communautaire

Organisation mondiale de la SantéGenève, Suisse

Priorité aux femmes:

WHO/FCH/GWH/01.1Distribution: GeneralOriginal: English

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Le Dharma-Chakra ou roue de la loi est le symbole le plus important du bouddhisme. Dans la vie d'une personne, le Dharma se manifeste par une bonne conduite ou conduite noble. Chakra signifie "roues" et symbolise un univers en constante transformation. Les 8 rayons de la roue correspondent aux 8 chemins qui conduisent à l'illumination, à savoir:

1. Bonne opinion2. Bonne résolution3. Bonne parole4. Bonne conduite5. Bons moyens de subsistance 6. Bon effort7. Bonne conscience8. Bonne concentration

Le Dharma-Chakra, ouroue de la loi

Conception de la couverture: Máire Ní Mhearáin

Dessin inspiré des roues en pierre du Temple du Soleil de Konarak (province d' Orissa, en Inde).(source: Tissues Ikat Textiles of India, par Chelna Desai).

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Principes d’éthique et de securité recommandéspour les recherches sur les actes de violence familialeà l’égard des femmes

Organisation mondiale de la SantéGenève, Suisse

WHO/FCH/GWH/01.1Distribution: General Original: English

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© Organisation mondiale de la Santé, 2001

Ce document n'est pas une publication officielle del'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et tous les droitsy afférents sont réservés par l'Organisation. S'il peut êtrecommenté, résumé ou cité sans aucune restriction, il nesaurait cependant être reproduit ni traduit, partiellement ouen totalité, pour la vente ou à des fins commerciales.

Les opinions exprimées dans les documents par desauteurs cités nommément n'engagent que lesdits auteurs.

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Ces principes sont inspirés des recommandations formulées parCharlotte Watts, Lori Heise, Mary Ellsberg et Claudia GarciaMoreno pour l’étude multipays conduite par l’Organisationmondiale de la Santé sur la santé des femmes et les violencesfamiliales à l’égard des femmes. Ils reposent sur la somme desexpériences recueillies par le Réseau international de recherchesur la violence à l’égard des femmes. Nous tenons à remercier deleurs conseils et de leur participation le Comité d’orientation del’Etude et le Groupe d’examen scientifique et éthique duProgramme spécial de Recherche, de Développement et deFormation à la Recherche en Reproduction humaine de l’OMS, enparticulier Ruth Macklin. Nous exprimons également notrereconnaissance à Henriette Jansen, Shana Swiss et CathyZimmerman de leurs observations et contributions pendent la miseau point de la version antérieur de ce document(WHO/EIP/GPE/99.2).

Pour de plus amples renseignements sur ces principes directeurset l’étude multipays de l’OMS, prière de contacter:

Dr Claudia Garcia-Moreno, CoordonnateurEtude sur la santé des femmes et la violence au foyer.Genre et santé de la femmeOrganisation mondiale de la Santé20 Avenue Appia1211 GenèveSuisse

tél: 41(22)791 4353fax: 41(22)791 4328mél: [email protected]

1Claudia Garcia-Moreno, OMS, est coordonnateur de l’étude multipays de l’OMS sur lasanté des femmes et les violences familiales à l’égard des femmes. Lori Heise et MaryEllsberg, PATH, Washington D.C., et Henriette Jansen, OMS, sont conseillers techniquespour l’étude multipays de l’OMS. Charlotte Watts est chargée de cours en épidémiologieet politiques de santé à la London School of Hygiene and Tropical Medicine et Conseillertechnique principal pour l’étude.

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Introduction

La violence à l’égard des femmes, sous sesdiverses formes, est endémique dans toutesles communautés et tous les pays, sans

distinction de classe, de race, d’âge, de religionou de nationalité. D’après la Déclaration del’Organisation des Nations Unies, on entend parviolence à l’égard des femmes “tous actes deviolence dirigés contre le sexe féminin, et causantou pouvant causer aux femmes un préjudice oudes souffrances physiques, sexuelles oupsychologiques, y compris la menace de telsactes, la contrainte ou la privation arbitraire deliberté, que ce soit dans la vie publique ou dans lavie privée.”(Organisation des Nations Unies,1993). Dans le monde, la forme la plus courantede violence à l’égard des femmes est la “violenceau foyer”, c’est-à-dire les sévices physiques,psychologiques et/ou sexuels infligés aux femmespar leurs partenaires ou ex-partenaires (Heise etal 1999). Il existe d’autres formes de violence,comme les chantages à la dot et à l’héritage, quisont liées à des coutumes traditionnelles et

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limitées à des régions et communautésparticulières.

C’est maintenant seulement que grâce à laténacité de diverses organisations féminines, laviolence à l’égard des femmes, y compris laviolence au foyer, commence à retenir l’attentionau niveau international. Alors que la violencefamiliale contre les femmes commence à êtrelargement reconnue et débattue, des questionsimportantes se posent sur son ampleur dansdifférents contextes, ses causes, sesconséquences et ses facteurs de risque. Demême, on se rend compte qu’il faudrait avoir desdonnées plus précises sur l’efficacité desdifférents types d’interventions.

En raison des limites des données recueillies enmilieu institutionnel, la prévalence des actes deviolence familiale ne peut être chiffrée avecexactitude qu’au moyen d’enquêtes dans lapopulation consistant à interroger directement unéchantillon représentatif de femmes sélectionnéesau hasard. Ces enquêtes fournissent aussi desindications précieuses sur certaines desconséquences de la violence et les facteurs derisque qui lui sont associés et, à long terme, surles tendances observées et l’impact de différentesinterventions. D’un autre côté, des recherchesqualitatives plus approfondies permettent de

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mieux cerner les différents contextes de cetteviolence et sa dynamique et de mieuxcomprendre comment les femmes, les enfants etles communautés en sont affectés. Enfin, desétudes sur les hommes peuvent donner desrenseignements utiles sur les causes de laviolence et l’impact de différentes formesd’interventions.

Les recherches sur la violence à l’égard desfemmes posent d’importants problèmes d’éthiqueet de méthodologie qui s’ajoutent aux problèmesposés par tous les types de recherches. La naturemême du sujet fait que les questions de sécuritéet de confidentialité ainsi que les compétences etla formation des enquêteurs y sont encore plusimportantes qu’ailleurs. Il n’est pas exagéré dedire que si les précautions voulues ne sont pasprises, l’integrité physique et le bien-êtrepsychologique des personnes interrogées maisaussi des chercheurs peuvent être menacés.

L’Organisation mondiale de la Santé a doncformulé les recommandations qui suivent sur lesrègles d’éthique à respecter pour les recherchessur les actes de violence familiale. Elles reposentsur les expériences recueillies par le réseauinternational de recherche sur la violenceà l’égard des femmes. Elles ont été examinées etapprouvées par le Comité d’orientation de l’étude

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multipays de l’OMS sur la santé des femmes etles violences familiales à l’égard des femmes etsoumises également aux principaux membres duComité d’examen scientifique et éthique duProgramme spécial de Recherche et deFormation à la Recherche en Reproductionhumaine (HRP). Ces recommandations s’ajoutentaux recommandations contenues dans lesprincipes directeurs formulés par le Conseil desOrganisations internationales des SciencesMédicales (CIOMS) pour l’examen éthique desétudes épidémiologiques (1991).

Ces recommandations s’adressent aussi bien àquiconque compte faire des recherches sur laviolence familiale à l’égard des femmes(chercheurs, coordonnateurs de projets, etc) qu’àceux qui lancent ou examinent de tellesrecherches (donateurs, comités d’examenéthique, etc.). Les principes énoncés ici sont axéssur les questions d’éthique et de sécuritéassociées à la planification et à la conduite derecherches sur ce sujet. Il ne s’agit pas de formulerici des indications ou des recommandationsgénérales sur la planification, la méthodologie et lalogistique des recherches sur la violence familiale àl’égard des femmes ou sur les questions d’éthiqueposées par la conduite des recherches en général(elles font l’objet des principes directeurs duCIOMS mentionnés plus haut.)

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Ces recommandations ont été formulées à l’issuede l’examen des recommandations préparéespour l’étude multipays de l’OMS sur la santé desfemmes et les violences familiales à l’égard desfemmes. Elles concernent plus particulièrementles principes d’éthique et de sécurité à respecterlors de la conduite d’enquêtes dans la populationsur la violence familiale à l’égard des femmes,mais beaucoup de ces principes s’appliquentaussi à d’autres formes de recherches qualitativeset quantitatives sur le même sujet.

Ces recommandations ne concernent pas lesrecherches sur les autres formes de violenceauxquelles sont soumises les femmes (situationsde conflit ou traite des femmes par exemple). S’ilest probable que sous certains de leurs aspectsces principes s’appliquent aussi dans de tellessituations, les différences peuvent également êtreimportantes.

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Recherches sur laviolence familiale al’égard des femmes

On dit souvent que les actes de violence aufoyer à l’encontre des femmes sont unsujet trop sensible pour faire l’objet

d’enquêtes dans la population et que la honte, unsentiment de culpabilité ou la crainte empêchentles femmes de parler. Pourtant, plus de 50 étudessur ce sujet ont été faites avec succès dans descommunautés en Asie, en Afrique, au MoyenOrient, en Amérique latine, en Europe et enAmérique du Nord (Heise, 1994, OMS, 1997,Heise et al 1999) et plusieurs instruments ont étémis au point pour quantifier la nature, l’étendue, lagravité et la fréquence de différentes formes deviolences interpersonnelles. Les études montrentqu’il est possible d’étudier la violence au foyercontre les femmes en respectant pleinement lesouci de préserver l’éthique et la sécurité. Ellesmontrent aussi que lorsqu’elles sont interrogéesen toute impartialité dans un contexte approprié,

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beaucoup de femmes n’hésitent pas à raconterles violences qu’elles subissent. Les faits donnentà penser que loin d’être un obstacle, le fait departiciper à des études sur la violence estconsidéré par beaucoup de femmes comme unebonne chose (Center for Health and GenderEquity, 1996).

Malgré ces conclusions positives, il n’en reste pasmoins que des recherches conduites sans égardpour la sécurité et la confidentialité peuvent êtreéprouvantes et exposer les personnesinterrogées, et parfois les enquêteurs, à desrisques. Toutes les études sur la violence au foyerà l’égard des femmes doivent privilégier avant toutla sécurité et prévoir des moyens de protéger lasécurité de tous les participants ainsi que derespecter les règles d’éthique et la sensibilité despersonnes. Les grands principes d’éthique et desécurité qui doivent guider toutes les recherchessur les violences familiales à l’égard des femmessont résumés dans l’encadré 1. Ensuite, sontdécrites les mesure recommandées pour fairerespecter ces principes.

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ENCADRE 1 : PRINCIPES D’ETHIQUE ET DESECURITE RECOMMANDES POUR LES RECHERCHESSUR LA VIOLENCE AU FOYER

a. La sécurité des sujets de l’étude et des chercheurs passe avant tout et doit inspirer toutes les décisions prisespour le projet.

b. Les études sur la prévalence des actes de violence doiventêtre conduites selon une méthodologie rationnelle et mettre à profit les enseignements tirés des recherches actuelles sur les moyens de réduire la sous-notification au maximum.

c. Il est essentiel de préserver la confidentialité pour garantir la sécurité des femmes et la qualité des données.

d. Tous les membres de l’équipe de recherche doivent être sélectionnés avec soin, recevoir une formation spécialisée et bénéficier d’un soutien continu.

e. Des moyens d’atténuer au maximum le caractère éventuellement éprouvant de l’enquête doivent être inclus dans le plan de l’étude.

f. IIl faut que les enquêtrices apprennent à adresser vers desservices appropriés les femmes qui demandent une aide. Si de tels services n’existent pas, il pourra être nécessaire de mettre en place des structures de soutien à court terme aux fins de l’étude.

g. Les chercheurs et les donateurs ont l’obligation morale de veiller à ce que les résultats des études soient correctement interprétés et utilisés pour favoriser la préparation de politiques et d’interventions.

h. Des questions sur la violence ne devraient être intégrées à des enquêtes portant sur d’autres sujets que si les conditions à respecter en matière d’éthique et de méthodologie peuvent être satisfaites.

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a) La sécurité des sujets de l’étude etdes chercheurs passe avant tout et doitguider toutes les décisions prises pour leprojet.

Il est absolument indispensable de protéger lespersonnes enquêtées et les enquêtrices contred’éventuels actes de violence exécutés enreprésailles par le ou les auteurs des sévicesdénoncés. Si le sujet d’une étude auprès desménages sur la violence familiale vient à êtreconnu - au sein du foyer ou dans la communauté- il peut venir à la connaissance d’un auteur deviolences. Pour les femmes battues, le simple faitde participer à une étude peut les exposer à denouvelles violences. Cette situation peut êtresource de danger pour la personne interrogée oul’équipe d’enquêtrices. En même temps, en tantque sujet et que bénéficiaire de l’entretien, lafemme interrogée doit y donner sonconsentement en toute connaissance de cause.Ainsi, pour des raisons éthiques et de sécurité, ilest important que l’enquête ne soit pas présentéedans la famille et la communauté comme portantsur la violence. A ce stade, l’étude devrait êtredéfinie différemment, par exemple comme uneétude sur la santé et les conditions de vie desfemmes. Toutefois, la femme elle-même doit êtrepleinement informée de la nature des questions

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qui lui seront posées. Le caractère sensible duthème de l’étude doit être évoqué au cours de laprocédure initiale de consentement. Au cours del’entretien, l’enquêtrice devra faire très attention,avant d’aborder la moindre question sur laviolence, d’avertir la femme interrogée sur lanature de ces questions et lui donner l’occasionde mettre fin à l’entretien ou de ne pas répondre àcertaines de ces questions.

■ Les entretiens doivent avoir lieu en privé.La personne interrogée doit se sentir libre demodifier la date (ou le lieu) de l’entretien pourchoisir un moment (ou un endroit) plus sûr ou pluscommode pour elle.

■ L’étude doit être présentée comme uneétude sur la santé, les conditions de vie ou la viefamiliale des femmes afin que les personnesinterrogées puissent en parler aux autres sansrisquer pour leur sécurité. Cette explication peutaussi être utilisée par les chercheurs/enquêtricespour décrire l’étude aux membres de lacommunauté et de la famille. Une fois seule avecla personne interrogée, l’enquêtrice lui préciserala nature exacte de l’étude dans le cadre de laprocédure de consentement.

■ Lorsque c’est le ménage qui est l’unité

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d’échantillonnage, seule une femme par ménagesera interrogée pour l’enquête. Si plusieursfemmes sont susceptibles d’être retenues, on ensélectionnera une au hasard. Si d’autresmembres du ménage (hommes ou femmes) sontinterrogés, on évitera de leur poser des questionssur leur attitude à l’égard de la violence ou encoresur leur expérience ou leur utilisation de laviolence car ils pourraient deviner que lapersonne sélectionnée comme sujet de l’enquêtea elle aussi été interrogée sur la violence au foyer.

■ Pour les enquêtes dans les ménages, lesenquêtrices devront apprendre à changer de sujetou à mettre fin à l’entretien s’il devait êtreinterrompu par une personne extérieure, ycompris des enfants. Une solution pourrait être unpetit questionnaire de diversion sur un thèmemoins sensible en rapport avec la santé desfemmes (menstruations, planification familiale ouespacement des naissances par exemple) quipourra être mis au point à cette fin. L’enquêtricepourra alors dire à l’avance à la femme interrogéequ’elle se mettra à parler de cet autre sujet sil’entretien était interrompu et, au besoin, passeraau questionnaire de diversion.

■ La préparation logistique devra prévoirentre autres la nécessité de garantir la sécurité

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des enquêtées. Le budget devra notammentménager la possibilité de changer la date decertains entretiens. Il faudra également repérer àl’avance d’autres endroits (centre de santé localpar exemple) où pourraient avoir lieu lesentretiens si certaines femmes préfèrent ne pasêtre interrogées chez elles.

■ La préparation logistique et le budgetdevront également prendre en considération lasécurité des enquêtrices. Il pourra être nécessairepour elles de voyager deux par deux, d’avoir destéléphones portables, d’utiliser des moyens detransport/chauffeurs désignés à l’avance ou de sefaire accompager par un homme de confiance sielles doivent se rendre dans certains quartiersconsidérés comme dangereux pour les femmesseules. Cela vaut en particulier pour les entretiensprévus le soir.

b) Les études sur la prévalence des actesde violence doivent être conduites selon uneméthodologie rationnelle et mettre à profitles enseignements tirés des recherchesactuelles sur les moyens de réduire la sous-notification au maximum.

L’intérêt croissant que suscite la violence à l’égard

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des femmes a, dans certains cas, donné très vitelieu à des enquêtes conduites dans la populationpour recueillir des informations sur la prévalencede différentes formes de violence et de mauvaistraitements. Comme chaque fois qu’est évoqué unsujet sensible, les personnes interrogées ont dansce cas aussi tendance à cacher une partie de laréalité. Le risque est donc qu’une étude bienintentionnée mais mal préparée ou mal exécutéene donne sur la prévalence des actes de violencedes chiffres très inférieurs à la réalité, ce qui posedes questions d’ordre moral et pratique.

Sur le plan éthique, il est inacceptable deconduire une étude mal conçue dont on ne sauraitattendre qu’elle réponde aux objectifs initialementfixés et cela en particulier quand il s’agit duproblème de la violence à l’égard des femmes,qui oblige ces dernière à des confidences difficileset douloureuses et qui, de par sa nature même,peut en outre leur faire courir des risques.

D’un point de vue pratique aussi, il est regrettablequ’une étude aboutisse à la conclusion que laprévalence de la violence au foyer est faible dansun milieu où les faits attestent le contraire. Desinformations erronées risquent d’être pires quepas d’information car des taux de prévalence peuélevés pourraient être utilisés pour contester

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l’importance donnée à la violence en tant quelégitime sujet de préoccupation. Il est doncimportant que les enquêtes sur la violence aufoyer soient conduites selon une méthodologiesolide et s’appuient sur les recherches en courspour réduire la sous-notification au maximum.

Les recherches actuelles suggèrent que lapossibilité d’obtenir des réponses exactes dépendde la façon dont les questions sont préparées etposées. D’une manière générale, il faut éviterd’utiliser des termes aussi chargés de sens que“sévices”, “viol” ou “violence” mais demanderplutôt aux femmes si elles ont été l’objet d’actesbien précis, par exemple si elles ont été frappées,giflées ou battues. Pour chaque type de mauvaistraitement, il est utile de s’enquérir sur tout unéventail de comportements tout en donnant desindications pouvant aider la personne interrogée àenvisager différents contextes (la maison, le lieude travail ou l’école par exemple) ou desbourreaux potentiels (les partenaires du moment,d’ex-partenaires, d’autres hommes de la famille,des hommes en position d’autorité). Desquestions isolées et générales sur les mauvaistraitements/la violence ne permettentgénéralement pas d’obtenir des taux deprévalence exacts (Center for Health and GenderEquity, 1995). L’exactitude des réponses dépendaussi de la nature et de la longueur des autres

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questions posées, du nombre des occasionsdonnées aux femmes interrogées de se confier,enfin, de la présence ou de l’absence de tiercespersonnes lors de l’entretien (Ellsberg M. et al.,2001)

La facilité avec laquelle les femmes accepterontde parler de leurs expériences de la violencedépendra également du sexe, de l’habileté, descompétences et de l’attitude de l’enquêteur. Laplus grande partie des actes de violence sur desfemmes sont le fait d’hommes et l’expériencemontre que les femmes se livrent plus facilementlorsqu’elles ont affaire à d’autres femmes. On aégalement constaté que les femmes adultespréfèrent ne pas parler de violence avec despersonnes dont elles estiment qu’elles risquent dene pas les comprendre ou de ne pas compatir.C’est pourquoi des problèmes se sont parfoisposés quand les enquêtes étaient conduites pardes femmes jeunes ou non mariées, ou quin’avaient pas l’habitude de parler de sujetsdélicats. Cela montre à quel point il est importantde veiller à ce que les entretiens soient menéspar des enquêtrices sélectionnées et forméesavec le plus grand soin et qu’il est indispensablede pré-tester et d’expérimenter les instruments derecherche avec beaucoup de rigueur ainsi que desurveiller la qualité de l’exécution de l’étude.Lorsque l’on enregistre de très faibles taux de

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violence ou que l’on obtient des conclusionsinattendues, il convient d’examiner les résultatsavec ceux qui ont fourni les informations et lesdifférents groupes communautaires avant de lesdiffuser largement et, si les groupes en questionmettent en doute la validité des conclusions del’étude, d’exposer aussi leurs réserves lors de ladiffusion des résultats.

c) Il est essentiel de préserver laconfidentialité pour garantir la sécurité desfemmes et la qualité des données.

La plus grande partie des informations donnéespar les personnes interrogées serontextrêmement personnelles. La dynamique desrelations dominées par la violence est telle que lefait de révéler l’existence de mauvais traitementsà quelqu’un d’extérieur à la famille peutdéclencher un nouvel épisode de violences. Il estpar conséquent fondamental de préserver laconfidentialité des informations recueillies aucours d’une enquête ou d’entretiens approfondisavec des victimes d’actes de violence. Un certainnombre de mesures peuvent être prises à cettefin, notamment:

■ Donner à tous les enquêteurs des

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instructions très strictes sur la nécessité de laconfidentialité. Cette nécessité devra aussi êtreévoquée dans leur formation. Les enquêteurs nedevraient jamais travailler dans leur proprecommunauté.

■ Ne pas inscrire de noms sur lesquestionnaires mais les distinguer à l’aide decodes. Si des éléments d’identification sontnécessaires pour relier les questionnaires audomicile des ménages ou aux personnesinterrogées, les conserver à part et les détruireune fois l’enquête terminée. Pour l’analyseultérieure des données, identifier lesquestionnaires au moyen des codes. Lesparticipants seront informés des mesures prisespour respecter la confidentialité lors de laprocédure de consentement.

■ Si des enregistrements d’interviews devictimes de violences sont faits, les conserversous clef dans des dossiers accessibles auxseules personnes autorisées et les effacer unefois transcrits. Ne faire d’enregistrement qu’avecl’autorisation de la personne interrogée. Làencore, ne pas conserver d’enregistement du nomde la personne et informer celle-ci des noms despersonnes qui seront autorisées à consulter lesbandes ainsi que de la date à laquelle ces

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dernières seront effacées.■ Lors de la présentation des résultats del’étude, faire très attention à ce que les donnéessoient suffisamment agrégées pour qu’aucunecommunauté ou aucun individu ne puisse êtreidentifié. Lors de la présentation des résultatsd’études de cas, changer suffisamment de détailspour qu’il soit impossible d’identifier la source desinformations.

■ Si des photographies de femmes victimesde mauvais traitements peuvent être un moyentrès fort de susciter l’émotion au sujet de laviolence au foyer, de tels documents doivent êtreutilisés avec un maximum de précautions. Il fautdemander aux femmes, lors de la procédure deconsentement, si elles accepteraient que de tellesphotos soient prises et montrées. Il faut aussi leurdire comment et où ces photos pourraient êtremontrées ou exposées.

d) Tous les membres de l’équipe de recherchedevraient être sélectionnés avec soin,recevoir une formation spécialisée etbénéficier d’un soutien continu.

L’une des leçons tirées de l’expérience desmembres du réseau international de recherche

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sur la violence à l’égard des femmes est que leséquipes entières, y compris les enquêtrices quifont des recherches sur la violence à l’égard desfemmes ont besoin d’une formation spécialisée etd’un soutien plus importants que ceux qui sontnormalement prévus pour les chercheurs. Cetteformation devrait comporter une introduction auxproblèmes de la violence au foyer et aux notionsde différences sociales, de discrimination etd’inégalité entre les sexes. Elle devrait aussidonner aux chercheurs appelés à travailler sur leterrain la possibilité de regarder en face et desurmonter les préjugés, les peurs et les idéespréconçues que leur inspire la violence à l’égarddes femmes. Beaucoup auront intériorisé latendance omniprésente à rejeter le blâme sur lavictime - ce qui risque de les empêcher d’obtenirdes réponses franches et complètes de la partdes femmes qu’ils interrogeront. Il est un fait queles taux de notification des cas de violence sontfortement influencés par le sentiment quel’enquêteur porte ou non un jugement ou unblâme.

La formation doit également donner auxchercheurs la possibilité de régler leurs proprescomptes avec la violence. En effet, la violence àl’égard des femmes est tellement répandue dansle monde qu’il est hautement probable quecertains membres de l’équipe de chercheurs aient

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été eux-mêmes les cibles directes ou les témoinsd’actes de violence familiale. Si cela peut en soiaccroître leurs compétences et leur empathie, lefait d’être associé à une telle étude (en tantqu’enquêteur, superviseur, préposé au traitementdes données ou statisticien) peut éveiller desimages et susciter des émotions et des conflitsinternes. De telles réactions risquent d’affecter lacapacité de travailler, d’avoir un impact négatif surla santé et d’être source de tensions dans lafamille. Enfin, même pour ceux ou celles qui n’ontjamais été victimes de mauvais traitements, lesimple fait d’entendre le récit de scènes deviolence et de sévices peut être éprouvant voireinsupportable, comme lorsque l’on est appelé àétudier des questions telles que la mort.L’expérience a montré que quand cette réalitén’est pas affrontée directement, les personnelsaffectés à ce genre de projet peuvent êtrenombreux à démissionner.

On dispose de plusieurs moyens pour faire faceaux besoins émotionnels de ceux et celles quiseront chargés d’enquêter et de travailler sur leterrain. Pendant la formation, il est importantd’aborder directement le thème de la violence etde donner aux membres de l’équipe la possibilitéde se retirer de l’étude sans subir aucunpréjudice. Sur le terrain, il faudra prévoir desmises au point régulières au cours desquelles

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chacun pourra raconter ce qu’il entend, dire quelssont ses sentiments à ce sujet et comment cela letouche. Le but de ces mises au point doit être desoulager les tensions nées du travail sur le terrainet d’éviter toute conséquence négative. Il fautégalement donner aux enquêteurs la possibilitéde s’entretenir en privé avec les responsables del’étude s’ils le souhaitent.

Malgré ces mesures, il pourra être nécessaire deconfier à certains des tâches émotionnellementmoins éprouvantes, de leur permettred’interrompre provisoirement leur travail, voire dequitter définitivement. Il faudra aussi aider lesenquêteurs à comprendre le rôle qui doit être leleur face à une femme qui dit subir des violences:être prêts à l’aider si elle le demande (voir ci-dessous), mais ne pas lui dire ce qu’elle doitfaire ou assumer personnellement la lourdecharge de “sauveur”. Il ne faut pas que lesenquêteurs jouent le rôle de conseillers. Touteactivité de conseil qui serait proposée dans lecadre de l’étude doit être parfaitement distincte dela collecte des données.

e) Des moyens d’atténuer au maximum leseffets éventuellement éprouvants del’enquête doivent être inclus dans le plan del’étude.

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Des mesures doivent être prises pour réduire aumaximum le stress que pourraient éprouver lesparticipants. La violence au foyer est un sujetsensible qui suscite l’opprobre et, souvent, lesfemmes sont blâmées pour les mauvaistraitements qu’elles subissent. Toutes lesquestions sur ce sujet et ses conséquencesdevraient être posées avec sympathie etneutralité. Il faut également veiller à ce que lesquestionnaires ne soient pas rédigés en destermes pouvant passer pour moralisateurs,critiques ou réprobateurs (Liss and Solomon,1996).

Comme on l’a vu plus haut, il semblerait que denombreuses femmes constatent que parler de cequ’elles vivent leur fait du bien. Toutefois, le faitd’évoquer des expériences angoissantes,humiliantes ou extrêmement douloureuses peutprovoquer un choc émotionnel. Il faut donc queles enquêteurs sachent quels effets peuvent avoirleurs questions et apprennent à réagir au mieuxen fonction de l’état émotionnel de la personne. Ilpeut arriver que certaines femmes ‘craquent’ aucours d’un entretien mais demandent néanmoinsà poursuivre après avoir eu un moment pour seressaisir. Il faut que la formation donnée auxenquêteurs leur apprenne aussi concrètement àmettre fin à un entretien quand l’impact des

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questions devient trop négatif.Les entretiens doivent toujours finir sur une notepositive (Parker and Ulrich, 1986) qui renforce lesmoyens de défense de la femme et lui rappelleque les renseignements qu’elle vient de fournirsont importants et serviront à aider d’autresfemmes. De même, il faut que les enquêteursaffirment que personne ne mérite d’être maltraitéet informent la femme de ses droits.

f) Les enquêtrices doivent apprendre àadresser vers des services appropriés lesfemmes qui demandent une aide. Si de telsservices n’existent pas, il pourra êtrenécessaire de mettre en place des structuresprovisoires de soutien aux fins de l’étude.

Il est important que les chercheurs soient prêts àrépondre comme il convient aux femmes quiauront peut-être besoin d’une aide supplémentairependant ou après un entretien. Aussi, devront-ilsau préalable rencontrer des représentants desservices concernés (notamment des servicessanitaires, juridiques, sociaux et éducatifs de lacommunauté) ainsi que d’autres instances moinsofficielles (représentants de la communauté, chefsreligieux, guérisseurs et associations fémininespar exemple) et voir avec eux quelles formes de

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soutien chacun est en mesure d’apporter. Uneliste de ces possibilités sera alors établie etremise à toutes les personnes interrogées,qu’elles aient déclaré ou non être maltraitées.Cette liste devra être courte afin de pouvoir êtrecachée facilement ou nommer au contraire touteune série d’autres services afin de ne pas éveillerde soupçons sur la nature de l’informationdonnée.

Là où il n’y a pas de services de soutien, il pourraêtre nécessaire de demander à une conseillèrequalifiée ou à une militante de la cause féministed’accompagner l’équipe d’enquêtrices etd’intervenir selon les besoins. Généralement, celaconsistera à informer les participants qu’unepersonne spécialisée dans les problèmesfamiliaux sera disponible pour s’entretenir avectoutes celles qui en auraient besoin ou seraientinteressées à une date et dans un lieu donné,lequel sera de préférence un centre de santé, uneéglise ou une association locale où les femmespeuvent aller facilement sans éveiller lessoupçons.

g) Les chercheurs et les donateurs ontl’obligation morale de veiller à ce que lesrésultats des études soient correctement

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interprétés et utilisés pour favoriser lapréparation de politiques et d’interventions.

Il est important que les résultats des recherchesservent à alimenter les actions en cours pour ladéfense des femmes, l’élaboration de politiques etla mise au point d’interventions. Trop souvent, ilséchappent à l’attention des décideurs et desmilitants qui seraient les mieux à même de lesutiliser. Le coût considérable de la violence àl’égard des femmes sur les plans personnel,social et sanitaire met les chercheurs et lesdonateurs dans l’obligation morale de faire ensorte que les résultats de leurs études soientappliqués dans la pratique. Il est égalementimportant que les communautés étudiées soientrapidement informées (dans leur propre langue)des résultats des travaux auxquels elles ontparticipé.

Un moyen d’améliorer l’utilité pratique des projetsde recherche est de leur associer dès le débutdes représentants de groupes d’action ou deservices de soutien, soit à titre de partenaires àpart entière, soit comme membres d’un comitéconsultatif. Ces comités peuvent jouer un rôleimportant en aidant à établir le plan de l’étude, endonnant des avis sur le libellé des questions, enaidant à former les enquêteurs et en donnant desconseils sur l’analyse et l’interprétation des

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résultats. Ils jouent aussi un rôle déterminant dansla diffusion et l’application des conclusions del’étude.

Plusieurs mesures peuvent être prises, à l’aidedes moyens de communication officiels et nonofficiels, pour diffuser les résultats de l’étude auxniveaux local et international et explorer lesmoyens d’en tirer parti. Dans toute la mesure dupossible, ces résultats devraient être utilisés pourles activités de sensibilisation, d’élaboration depolitiques et de mise au point d’interventions encours, telle la campagne internationale “Seizejournées de mobilisation contre la violence àmotivation sexiste (25 novembre - 10 décembre)2.

C’est aux chercheurs de prendre les devants pourveiller à ce que les résultats de leurs travauxsoient interprétés correctement par le public et lesmédias. S’il peut apparaître que certains sous-groupes sont plus exposés que d’autres à desformes particulières de violence, les chercheursdoivent faire très attention, lorsqu’ils présententde tels résultats, de ne pas conforter d’éventuelsstéréotypes négatifs sur tel ou tel groupe ethniqueou social et faire en sorte qu’aucune communautéou personne particulière ne puisse être identifiée

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2 Ces 16 journées de mobilisation contre la violence à motivation sexiste font partie de la campagne mondiale pour les droits des femmes lançée en 1991 par leCenter for Women’s Global Leadership aux Etats-Unis d’Amérique.

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ou montrée du doigt. Une stratégie consiste àsouligner que la violence à l’égard des femmesexiste dans toutes les communautés et tous lesgroupes socio-économiques. Une autre consiste àinsister sur les similitudes et les parallèlesobservés dans différents sous-groupes et àmontrer comment des formes particulièresd’inégalités peuvent être sources de différences(Aronson and Fontes, 1997). Ainsi, on a souventsignalé des niveaux plus élevés de violencesphysiques dans les catégories socio-économiquesles plus défavorisées. Dans ce genre de situation,il est important d’utiliser les résultats obtenus pourpréconiser des améliorations et non pour accablerencore davantage les groupes considérés.

h) Des questions sur la violence ne devraientêtre intégrées à des enquêtes sur d’autressujets que si les règles éthiques etméthodologiques requises peuvent êtrerespectées.

De plus en plus, les chercheurs trouventintéressant d’inclure des questions sur la violenceà l’égard des femmes dans des études dontl’objet premier est autre. Ce peut être utile enprincipe pour obtenir des données de base sur laviolence dans les cas où une étude plus poussée

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de la question ne peut être envisagée et pouravoir une idée des liens qui existent entre laviolence et d’autres éléments de la santé et dudéveloppement (par exemple, inclure desquestions sur le harcèlement dans une étude surles tentatives de suicide chez les femmes).

Pourtant, l’expérience montre que cette façon defaire n’est souvent pas sans inconvénients. Eneffet, il est souvent beaucoup plus difficile degarantir la qualité des données et la sécurité desenquêtées que lors d’études axées sur la violenceuniquement (Ellsberg et al., 2001). Les taux deréponses exactes étant fonction de plusieursfacteurs (dont la durée de l’entretien, le type et lenombre des questions ainsi que la nature desrapports qui s’instaurent entre les enquêteurs etles enquêtés), le fait de glisser quelquesquestions sur la violence au milieu de questionsportant sur tout autre chose n’incite guère lesfemmes à s’ouvrir sur ce sujet et peut doncdonner des taux de prévalence inexacts. Parailleurs, bien qu’il soit essentiel, pour toute enquêtesur la violence à l’égard des femmes, de donnerune formation spécialisée aux enquêteurs, derespecter la confidentialité des informations fournieset de prévoir un soutien pour tous les participants, ilest souvent beaucoup plus difficile de fairerespecter ces principes quand la violence nereprésente qu’une petite partie du sujet de l’étude.

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Pour ces raisons, il ne faut envisager d’insérerdes questions sur la violence dans d’autresétudes que si l’équipe de chercheurs se montredésireuse et capable de respecter ces grandsprincipes éthiques et méthodologiques. Si ce n’estpas le cas, on évitera d’interroger directement lesfemmes sur leur expérience de la violence maison leur poser plutôt des questions moinspersonnelles sur ce qu’elles pensent du problèmeet/ou sur des cas de violence dont elles auraientconnaissance, l’important étant de ne pas fouillerdirectement dans leur propre passé. Plus on posede questions aux femmes sur les violencesqu’elles ont éventuellement subies, plus il estimpératif de prévoir un soutien et de veiller à laconfidentialité.

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Conclusion: La securité des

femmes avant tout

La violence au foyer suscite maintenantbeaucoup d’attention, si bien que lesrecherches sur les actes de violence à

l’égard des femmes bénéficient partout dedavantage de crédits. Les recommandationsprésentées ici reflètent l’état actuel desconnaissances sur les principes d’éthique et lesrègles de sécurité qui doivent être respectés pourles études sur la violence au foyer. Le caractèreparticulier du problème exige que la sécurité soitprise en compte dès le début de l’étude, tout aulong de l’exécution et au moment de la diffusiondes résultats, ce qui signifie que de telles étudesdurent nécessairement plus longtemps et coûtentplus cher. Les donateurs et les chercheurspeuvent apporter leur propre contribution à lasécurité des femmes en respectant ces principeset en ne faisant jamais passer les objectifs d’une

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étude avant le bien-être des femmes.

Bibliographie

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Ellsberg M., Heise L., Peña R., Agurto S. andWinkwist A., (2001) Researching violence againstwomen: methodological and ethicalconsiderations. Studies in Family Planning 32 (1):1-16.

CHANGE - Center for Health and Gender Equity(1995) Measuring Violence Against WomenCross-Culturally. Notes from a Meeting. 29 juin,1995. Document non publié.*

CHANGE - Center for Health and Gender Equity

* Pour des exemplaires de ces rapports, s’adresser à: [email protected]

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(1996) Second Annual Meeting of theInternational Research Network on Violenceagainst Women. Dec. 8 -19, 1996. Documentnon publié.*

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Organisation mondiale de la Santé (1997). La violence à l’égard des femmes : une prioritépour l’action de santé publique.WHO/FRH/WHD/97.8.

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