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Problèmes liés àl'étude de la nuptialité des migrants Author(s): Michèle Tribalat Source: Population (French Edition), 43e Année, No. 2 (Mar. - Apr., 1988), pp. 375-390 Published by: Institut National d'Études Démographiques Stable URL: http://www.jstor.org/stable/1532835 . Accessed: 07/12/2014 15:47 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Institut National d'Études Démographiques is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Population (French Edition). http://www.jstor.org This content downloaded from 128.235.251.160 on Sun, 7 Dec 2014 15:47:06 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Problèmes liés à l'étude de la nuptialité des migrants

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Problèmes liés àl'étude de la nuptialité des migrantsAuthor(s): Michèle TribalatSource: Population (French Edition), 43e Année, No. 2 (Mar. - Apr., 1988), pp. 375-390Published by: Institut National d'Études DémographiquesStable URL: http://www.jstor.org/stable/1532835 .

Accessed: 07/12/2014 15:47

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PROBLEMES LIES A L'ETUDE DE LA NUPTIALITE

DES MIGRANTS

Ce qui fait sans doute la particularitd de la ddmographie en regard des autres sciences sociales, c'est la prdcision de ses observations et de ses estimations au point que l'dtablissement des donndes et des sdries peut parfois constituer sa seule fonction. Or, I'affinage des mesures ne peut s'effectuer sans une thdorie du phdnomine observd. La thdorie montre oit sont les risques de biais dans l'observation; elle indique aussi comment les corriger ou comment limiter les effets nefastes des interfdrences entre phdno- mines.

Dans un domaine important d l'heure actuelle, celui de la nuptialitd des migrants (son dvolution permet par exemple de porter un jugement sur l'intigration des immigres ou sur leur mise d l'dcart), Michele TRIBALAT* se livre ici i ce ndcessaire exercice thdorique; avec des moyens simples, elle nous montre les problkmes de mesure crdds par l'interfdrence entre migration et nuptialitd et nous fait voir comment certains modes de calcul doivent 6tre prefdrds pour limiter les biais.

La mesure des ph6nomenes demographiques par cohorte est obtenue par construction de tables d'6v6nements. Celles-ci indiquent comment un phenomene se serait deroul6 dans le temps en l'absence d'6venements pouvant en gener l'expression qu'on appelle perturbateurs. Le temps est mesure par rapport a un 6venement origine qui est generalement celui " partir duquel le ph6nomene 6tudi6 devient possible. Tout 6venement susceptible d'interf6rer avec ce phenomene n'a pas necessairement un caractere perturbateur. Ainsi, dans la mesure de la nuptialit&, quand le champ de l'analyse est dtfini par la migration (nuptialit6 des migrants) celle-ci ne joue plus le r61le de simple perturbation. Quel sens y aurait-il en effet "a 'tudier la nuptialit& de migrants telle qu'elle se serait deroulke en l'absence de migration ? C'est ce cas que nous 6tudions ici apres avoir rappelk brievement la maniere dont on mesure habituellement la nuptialit6

* INED.

Population, 2, 1988, 375-390.

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376 LA NUPTIALITE DES MIGRANTS

lorsque la migration n'intervient pas dans la d6finition du champ d'analyse mais, par exemple, lorsque le critere de d6termination du domaine d'6tude de la nuptialit6 est purement geographique (nuptialit6 des individus d'un pays ou d'une region donn6s).

Nuptialite des celibataires : 1'emigration perturbe l'observation des mariages

Plaqons-nous donc dans le cas habituel oii il s'agit d'&tudier la nuptialit6, dans un pays d6termin6, d'individus qui peuvent disparaitre (ou s'absenter) de l'observation au fil des ages (entre 15 et 50 ans par exemple, ages auxquels on se limite g6n6ralement dans l'6tude de la nuptialit6 des c61ibataires) par 6migration ' et n6gligeons les effets de la mortalit6. L'6migration empAche ou diffbre l'observation des mariages qui, si elle n'avait pas eu lieu auraient 6t6 c616br6s dans le pays. L'6v6nement origine a partir duquel le mariage des c61ibataires devient possible est l'age 16gal au mariage. La dur6e 6coul6e depuis cet age se confond avec l'avancement en age lui-mAme et 6tudier le mariage en fonction de cette dur6e revient l'6tudier en fonction de l'Age lui-m6me. Nous devons alors construire une

table de nuptialit6 d'une g6n6ration d'hommes se mariant entre 15 et 50 ans. Se rapportant a un 6v6nement non renouvelable, la table se compose alors de trois grandeurs qui se d6duisent les unes des autres : les quotients de nuptialit6, les fr6quences du c61ibat et les mariages.

Les quotients de nuptialit6 sont obtenus en rapportant, a chaque Age x le nombre de mariages au nombre de c61ibataires. Ils expriment la probabilit6, pour des c61ibataires d'age x de se marier entre l'age x et x + 1.

Le compl6ment a l'unit6 de cette grandeur mesure la probabilit6, pour ces m6mes c61ibataires, de ne pas se marier entre x et x + 1. Le produit de ces probabilit6s pour les ages anterieurs " x (depuis 15 ans) donne les individus qui, a cet Age ne seraient pas encore mari6s, si la nuptialit6 seule 6tait intervenue : c'est la fr6quence du c61ibat. Si on ne dispose pas de donn6es permettant de calculer des quotients et d'en d6duire les fr6quences du c61ibat a chaque age, on peut estimer ces fr6quences par le calcul de proportions de c61ibataires en rapportant a chaque age, le nombre de c61ibataires a l'ensemble - c61ibataires et mari6s - a l'occasion des recensements par exemple.

Le produit de la fr6quence du c61ibat a un age x par la probabilit6 de mariage entre x et x + 1 donne les mariages de la table. Ces derniers peuvent 6tre estim6s en rapportant les mariages entre l'age x et x + 1 l'ensemble des cl61ibataires et mari6s; on obtient ainsi des taux de nuptialit6 appel6s encore mariages r6duits.

(1) Louis Henry. - << D'un probl6me fondamental de l'analyse d6mographique >, Population no 1, 1959.

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LA NUPTIALITE DES MIGRANTS 377

II suffit ainsi de disposer d'une des trois series - quotients, pro- portions de c61ibataires ou taux de nuptialit6 - pour d6duire les deux autres. On peut alors dire combien dans cette g6n6ration d'hommes ont fini par se marier ou, ce qui revient au m6me, combien sont rest6s c1libataires (fr6quence du cl1ibat

" 50 ans). On peut 6galement d6crire la nuptialit6 de ces hommes suivant l'age et r6sumer cette information a travers un age moyen ou m6dian par exemple.

On ne peut et ne doit pourtant pas se lancer dans ces calculs avant d'avoir r6fl6chi sur leurs conditions de validit6. Si le calcul d'une probabilit6 de mariage A un age donn6 ne n6cessite aucune pr6caution particulibre (2), la combinaison de ces quotients dans une table de nuptialit6 requiert une condition : il ne doit pas y avoir de liaison entre probabilit6 d'6migrer et probabilit6 de mariage. C'est la condition d'ind6pendance.

Si au contraire c'est, par exemple, une m6me cat6gorie d'hommes qui se marient plus et 6migrent plus, la combinaison des quotients ne peut plus se faire sans erreur. En effet, ces hommes ont a chaque age une probabilit6 de mariage plus forte m6me s'ils n'ont pas encore 6migr6. Comme ils ont aussi une plus forte probabilit6 de s'expatrier, ils seront de moins en moins nombreux relativement aux autres, au fil des ages. D'un Age au suivant, le groupe de ceux qui se marient le moins devient plus important et la r6partition entre les uns et les autres n'est jamais la meme.

Les quotients de nuptialit6 sous-estiment donc de plus en plus, a mesure qu'on avance en age les probabilit6s de mariage des hommes qu'on aurait obtenues si on avait pu garder l'ensemble des hommes en obser- vation (<< en l'absence d'6migration >>). Cette sous-estimation peut 6tre n6glig6e lorsque l'6migration reste un ph6nomene marginal. Autrement, il convient d'6tudier s6par6ment s6dentaires et 6migrants, ce qui ne peut guere se faire qu' partir d'enquites r6trospectives.

Par ailleurs, la construction de la table de nuptialit6 par les quotients, permet d'1liminer l'influence de l'6migration des c61ibataires, alors que le calcul des mariages r6duits ou des proportions de c61ibataires doit annuler l'incidence de l'6migration dans la population totale, c61ibataires et mari6s. L'6quivalence des diverses series n'est r6alis6e que si le mariage n'entraine pas de discontinuit6 dans les risques d'6migrer; c'est-a-dire si le fait de se marier ne modifie pas la probabilit6 d'6migration. Pour qu'il soit possible d'estimer les mariages ou les c61ibataires de la table a partir des mariages r6duits ou des proportions de c61ibataires, les deux conditions (ind6pen- dance et continuit6) doivent done 6tre r6unies (3)

Enfin, la discontinuit6 que la migration peut entrainer dans les probabilit6s de mariage importe peu, pourvu que la condition d'ind6pen-

(2) Mais que faire d'une probabilit6 de mariage ' un age x que l'on ne pourrait

comparer A celle valant pour x - 1 ou x + 1 ? (3) Louis Henry. - << Analyse et mesure des ph6nomenes d6mographiques >, Popula-

tion no 3, 1966 et << D'un probl6me fondamental de l'analyse d6mographique >>, d6ji cit6. Daniel Courgeau. - < Interf6rence entre ph6nombnes d6mographiques >. Population,

no sp6cial 1977.

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378 LA NUPTIALITE DES MIGRANTS

dance soit v6rifi6e avant que la discontinuit6 n'apparaisse. On sous-entend alors que ceux qui sont partis se seraient mari6s comme les autres s'ils 6taient rest6s. Si tel n'6tait pas le cas, cela reviendrait a remettre en cause la validit6 de l'hypothese d'ind6pendance.

II faut bien avouer que distinguer ces deux conditions relive g6n6ralement de l'artifice. Comment savoir par exemple, si la faiblesse de la nuptialit6 des immigr6s telle qu'elle peut apparaitre dans le pays d'accueil relativement a celle des compatriotes rest6s au pays, est l'effet d'une discontinuit6 apparue apr6s la migration ou si elle refl6te (au moins pour une part) un comportement qui pr6-existait a la migration. Seules des enquetes r6trospectives appropri6es permettraient de trancher, puisque les diff6rences ne sont mesurables qu'apr6s la migration. Interpr6ter ces observations comme la manifestation exclusive d'une discontinuit6 parti- cipe d'un acte de foi. Si l'erreur commise ainsi lors d'une 6tude nationale peut 6tre n6glig6e, il n'en va pas de m6me a l'occasion d'6tudes r6gionales.

Nuptialite des migrants

Supposons maintenant que l'on d6sire mesurer la nuptialit6 des personnes qui 6migrent d'un pays A exclusivement vers un pays B. Le caractere de migrant prime alors sur la r6f6rence a un lieu geographique. Un migrant peut se marier avant son depart dans le pays d'origine ou apres. Dans ce dernier cas, I'union peut &tre c616br6e dans le pays d'accueil mais aussi dans le pays d'origine a l'occasion d'un court sejour ou apr6s un retour d6finitif. La nuptialit6 des migrants se realise donc soit dans le pays de depart soit dans le pays d'arriv6e. Afin de l'6tudier, il conviendrait de disposer d'un enregistrement continu avant et apr6s migration. Le caractere national de la collecte ne convient guere a ce genre d'6tude.

N6gligeons pour l'instant cet 6tat de choses et supposons que l'on dispose d'un enregistrement continu ad6quat portant essentiellement sur date de naissance, date de la migration et date du mariage. L'6v6nement origine demeure alors l'ge 16gal au mariage et l'6tude sera men6e par g6n6ration. On peut ainsi calculer des quotients de nuptialit6 et construire une table dans ces g6n6rations. Une telle mesure d6pendrait sans doute des conditions d'observation et notamment de l'ge & la migration puisqu'il suffirait que cet age varie pour qu'intensit6 et calendrier de la nuptialit6 s'en trouvent changes. En effet, l'hypoth6se d'une discontinuit6 dans les probabilit6s de mariage faisant suite a la migration 6tant hautement vraisemblable, I'age a la migration est facteur d'h6t6rog6n6it6 dans la g6n6ration. N6anmoins ce facteur jouant de la m6me fagon d'un age au suivant il n'est pas g6nant. Pour s'en affranchir il suffirait de se r6f6rer dans chaque g6n6ration A des sous-cohortes d'age / la migration.

Cette discontinuit6 risquerait d'8tre plus g6nante si l'on devait 6tudier la nuptialit6 des migrants, / partir des donn6es collect6es dans le pays d'origine, g supposer que ceux qui vont 6migrer soient parfaitement

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LA NUPTIALITE DES MIGRANTS 379

isolables avant qu'ils ne partent. En effet, on ne peut alors calculer des probabilit6s de mariage dans une g6n6ration qu'en admettant que ceux qui sont d6ji partis se marient comme ceux qui sont encore 1l sans pouvoir tenir compte de la reduction, pendant quelque temps, des chances de mariage des individus qui quittent leur pays. Cette discontinuit6 se produirait pour chaque emigrant a l'age de son depart et son impact sur le risque de c61ibat d6pendrait 6troitement de cet age. Pratiquement nul chez les individus qui partent tard puisque l'essentiel de leur nuptialit6 s'est r6alis6e dans le pays d'origine, il serait au contraire assez fort chez ceux qui partent encore jeunes.

La mesure synth6tique de la nuptialit6 d'une g6n6ration obtenue au pays d'origine ne repr6senterait alors que celle des personnes parties apres 50 ans, une fois la nuptialit6 entierement accomplie. On surestimerait ainsi la nuptialit6 r6elle. Pour que les effets d'une telle discontinuit6 soient importants, il faut bien stir que nuptialit6 et migration soient concentr6s sur certains ages et qu'il y ait chevauchement.

Or c'est bien le cas, la distribution des ages au mariage 6tant le plus souvent tres concentr6e avec un mode entre 20 et 30 ans qui correspond justement aux ages de forte migration.

Dans la r6alit6, les migrants ne sont pas isolables dans le pays de d6part. Un individu ne peut 6tre observable en tant que migrant que lorsque la migration a eu lieu c'est-a-dire dans le pays d'accueil. A moins d'enqu6tes retrospectives, I'information ne sera disponible que li. Cette contrainte d'ordre geographique nous donne alors le choix entre deux pistes d'investigation :

- Integrer cette nouvelle contrainte et restreindre par 1i m6me le champ de l'6tude. Cela reviendrait alors ai se limiter a l'6tude de la nuptialit6 des migrants telle qu'elle se d6roule dans le pays d'arriv6e.

- Essayer, a partir de ces donn6es partielles de rendre compte, malgr6 tout, de la nuptialit6 des migrants dans son int6gralit6, telle qu'elle se d6roule avant et apr6s la migration.

Nuptialiti des migrants dans le pays d'accueil

Soient des migrants n6s dans un pays A et s'expatriant exclusivement dans un pays B. N6gligeons pour l'instant, a la fois les re-

tours d6finitifs et les mariages conclus au pays a l'occasion d'un bref s6jour.

Ceux qui arrivent en B de6j mari6s ne nous interessent pas. Nous ne devons consid6rer que ceux qui migrent encore c61ibataires. L'6v6nement qui rend possible l'observation des mariages en B est donc la migration. C'est l'6v6nement origine par rapport auquel nous devons construire une table de nuptialit6 et le temps mesur6 a partir de l'ann6e d'entr6e s'exprime alors en dur6e de s6jour. On peut ainsi obtenir la proportion de migrants entr6s c61ibataires une ann6e donn6e qui ont fini par se marier et dire a quel rythme.

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380 LA NUPTIALITIE DES MIGRANTS

Dans les faits, les retours ne sont pas n6gligeables. Ils interviennent alors, et nous nous limiterons aux retours d6finitifs, comme ph6nomene perturbateur (emp6chant l'observation des mariages en B). Si probabilit6 de mariage et probabilit6 de retour sont ind6pendantes, la combinaison dans une table, des quotients de nuptialit6 ne pose pas de probleme. Mais on peut redouter qu'il n'en soit pas ainsi. Les migrants ne vont-ils pas reporter un mariage en prevision d'un retour ? Dans ce cas la combinaison des quotients surestime notablement la nuptialit6. Si la condition d'ind6- pendance a peu de chances d'etre verifiee, I'hypothese de continuit6 risque aussi d'8tre mise a mal. La conclusion d'un mariage ne risque-t-elle pas de modifier le projet du migrant et par cons6quent sa probabilit6 de retour ? Dans la mesure oui l'intensit6 des retours est rarement n6gligeable, la perturbation li6e au retour ne peut 6tre facilement 6vacu6e.

On est alors ramen6 " un des problemes pr6c6dents : mesurer, dans

un pays, la nuptialit6 de cohortes, oii se m61angent a tout moment, s'dentaires et futurs migrants, les probabilit6s de mariage y 6tant diff6- rentes et la part du second groupe se r6duisant constamment par rapport au premier. On a vu qu'il fallait alors pouvoir distinguer les deux categories de c61ibataires, a priori selon leurs intentions de rester, ou a posteriori par une observation retrospective simultan6ment au pays d'accueil et dans celui du retour. C'est la seule 6ventualit6 a peu pres r6aliste.

On a donc peu de chances, meme en admettant que la collecte statistique n6cessaire 'a la construction de tables de nuptialit6 suivant l'ann6e d'entr6e et la dur6e de sejour existe, ce qui n'est pas le cas, de mesurer sans erreur la nuptialit6 des immigrants c61ibataires a partir des seules donn6es disponibles dans le pays d'arriv6e.

Qu'en est-il lorsqu'a cette incertitude, on ajoute celle qui provient de la conclusion fr6quente pour certains migrants d'un mariage au pays d'origine A, apres s'"tre expatri6 en B, a l'occasion d'un court s6jour.

Les quotients et les mariages r6duits calcul6s "a partir des donn6es d'6tat civil de B deviennent inutilisables. La seule ressource est alors l'utilisation de proportions de c61ibataires qui neutralisent l'effet du caractere incomplet de l'enregistrement.

Outre les risques d'erreur li6s a la perturbation des retours, une telle etude a des limites. En effet, elle ne permet pas de comparer la nuptialit6 de ces migrants a celle en vigueur dans le pays d'accueil ou d'origine. L'une est mesuree en fonction de l'ann6e d'entree et de la dur6e de s6jour, les deux autres par g6n6ration suivant l'age. Elle n'autorise que des comparaisons entre migrants, suivant le pays d'origine par exemple; encore faudrait-il pour que les comparaisons soient fructueuses faire intervenir l'age A l'entr6e !

L'int6r6t limit6 d'une telle mesure et I'absence d'enregistrement statistique permettant de la r6aliser, tant il est vrai que la migration et la population 6trang~re font rarement l'objet d'une collecte sp6cifique, nous portent tout naturellement

. examiner si l'6tude de la nuptialit6 des

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LA NUPTIALITt DES MIGRANTS 381

migrants dans son int6gralit6 est possible, a partir d'une observation dans le pays d'accueil du mariage suivant I' ge et sous quelles conditions.

Mesure de la nuptialiti totale des migrants a partir d'observation

dans le pays d'accueil

Dans l'hypothese d'une chute des probabilit6s de mariage apres la migration, les quotients de nuptialit6 calcul6s a partir d'ob-

servations recueillies dans le pays d'arriv6e diff6reraient syst6matiquement de ceux qu'on obtiendrait avec des donn6es couvrant a la fois le pays d'origine et le pays d'accueil. 11 en irait de meme pour les proportions de c1libataires et les mariages r6duits. II convient donc de mettre en 6vidence ces 6carts, de rechercher si possible, des trois indices quel est celui qui permet d'estimer, avec le moins d'erreur possible, les grandeurs de la table de nuptialit6 totale des migrants et dire dans quelle mesure ces erreurs sont supportables.

Nous continuerons d'omettre les influences de la mortalit6. Par ailleurs, les retours et les 6ventuelles compensations introduites par des mariages au pays seront pour l'instant n6glig6s afin de mettre clairement en evidence les m6canismes de biais intervenant dans nos calculs d'indices.

1. Retours et mariages au pays nuls

Consid6rons une g6n6ration d'hommes qui migrent d'un pays A vers un pays B entre 15 et 50 ans avec le calendrier aj repr6sentant la part, dans l'ensemble des migrations, de celles qui se produisent a l'age j (les migrations sont suppos6es intervenir aux anniversaires).

Dans leur pays d'origine, avant la migration, ces hommes sont soumis a une loi de nuptialit& dtfinie par la serie des quotients n1, i repr6sentant l'age au mariage.

Nous ferons l'hypothese qu'a l'issue de l'immigration, ces quotients se trouvent r6duits dans des proportions liees a l'anciennet6 du sejour dans le pays d'accueil (forte r6duction au debut, faible apres plusieurs ann6es. La figure 1 illustre une rupture de comportement entrainant une diminu- tion de moiti6 de la probabilit6 de migrer A l'entr6e; cette reduction s'6mousse avec la dur6e de s6jour et s'annule au bout de 10 ans). De ce fait, a chaque age j ~i la migration correspond une table de nuptialit6 particu- litre n (i, j), soit au total 35 tables correspondant aux 35 cohortes d'age a l'entr6e.

Appelons gi les quotients donnant une mesure nette des probabilit6s de mariage, tels qu'ils seraient obtenus si on disposait d'une observation continue sur le pays de depart et le pays d'arriv6e. A chaque Age i on a: ci i = a15C(i, 15) n(i, 15) + a16 C(i, 16) n(i, 16)

49

+ ... + ao C(i,j) n(i,j) = ci C(i,j) n(i,j) j=-15

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382 LA NUPTIALITE DES MIGRANTS

avec 49

C,= aj C(i,j) j=15

donc : 49

1aj C(i, j) n (i, j) i j= 1549

Sai, C(i,j) j= 15

Soit une moyenne ponder~e des 35 tables de nuptialit6 n(i,j).

Echelle logarithmique Pour 1000 500 S1 Il i l l i i l i l i II D

Probabilites de mariage des 48687

migrants alors qu'ils sont encore dans le pays d'origine

200-

ImmigrentI S25 ans I

100 - ImmigrentImmgrent a30 ans

So0- Immgrent 520 ans

,

Immigrent a * 35 ans 20 - -*

Immigrent f a 15 ans 10

O l II l II I I l lI I I lI I I I I I I I I I I 1 15 20 25 30 35 40 45

Age au mariage

Figure 1. - Probabilites de mariage suivant I'Sge pour diff6rents ages 6 la migration

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LA NUPTIALITA DES MIGRANTS 383

a) Quotients

Appelons lt', les quotients calcul6s "a partir des mariages d'hommes immigr6s observes en France. On a :

C'jt', = a' (i, j) C (i, j) n (i, j)

avec j=i

a' (ij) = Iix et C'i = a' (i,j) C(i,j) j=j=

15

ij=15

done : o' (ij) C(i,j) n(ij) It' i = 1= 5s

St' (i,j) C(i,j) j= 15

Ces quotients sont eux aussi une moyenne pond6r6e des quotients n (i,j), mais ne font intervenir, a chaque age i, que les cohortes d'age a 1'entr6e j inf6rieur a i. Ainsi, dans la probabilit6 de mariage a 15 ans p'15 ne compte que le quotient de nuptialit6 n (15, 15) des hommes entr6s

PROBABILITtS DE MARIAGE SUIVANT L'AGE AU MARIAGE ET L'AGE A LA MIGRATION

Age a la migration j 15 16 17 18 19 20

15 0,50 x n 5 n 5 n,5 n,5 n,5 n, ...........

Age 16 0,45 x n,6 0,50x n,6 n,6 n 6 n , n,6 ...........

au 17 0,40xn7, 0,45xn7, 0,50xn

n,7 n , n, marage

i 18 0,35xn,8 0,40xn,8 0,45xn,8 0.50xn,8 n,8 n,8 ........... 19 0,30 x n19 0,35 x n19 0,40x n9 0,45x n19 0,50x n19 n19 ........... 20 0,25 x n20 0,30 x n20 0,35 x n20 0,40 x n20 0,45n20 0,50 x n20 ......... ...................

Dans l'hypothese d'une reduction des probabilit6s de migrer a l'entr6e (en supposant que la migration a lieu << pile >> aux anniversaires), similaire 'a celle figurant dans la figure 1 on aurait :

49

0,5 a15 (c5, 1, + a+ Gq5,. j- 16

j15 = X n15 15

j

qS1 j5,

) j- 15

alors que 9's = 0,5 x ns 49

(0,5 aX5 15 16,

15) + 0,45 a16 16,

16) + I Yj

(q16,]j)

1649 x n16

alors que : !6'6

= (0,5 a'(6, (1 )6, 15 + 0,45 a'~

I,6,16) q16,16 x 6

6(16, 15) q 16, 15) + .,(16, 16) q 16, 16)

etc.

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384 LA NUPTIALITI DES MIGRANTS

15 ans. Tous ceux qui entreront par la suite ne sont pas repr6sent6s (voir encadr6 page pr6c6dente). Cela revient a consid6rer qu'- chaque age i, la chance de mariage des hommes c61ibataires qui ont immigr6 en B avant cet age est representative de celle caracterisant l'ensemble, y compris ceux qui viendront plus tard (j > i) et qui se marient encore au pays d'origine. Pour que [t' = ti, il faudrait supposer que, a chaque age i, les hommes qui n'ont pas encore immigr6 se sont mari6s jusqu' cet age comme ceux que l'on observe; ce qui n'est pas le cas. Comme ils se sont en fait mari6s plus souvent que les autres,

-' sous-estime les probabilit6s de mariage li.

Par ailleurs, alors que dans le calcul des i,, la pond6ration aj est identique d'un age au suivant, au contraire, dans le calcul des g', la pond6ration sousjacente a' (i, j) varie avec i. Plus on avance en age plus la serie des I' (i, j) se rapproche de g (i, j), prenant en compte un nombre croissant de cohortes d' ge a l'entr6e. De ce fait, a 49 ans, dans l'hypothese d'un handicap se maintenant jusqu'a cet age sans rattrapage, et dans la mesure oi les 35 cohortes d' ges a l'entr6e sont repr6sent6es, g'9 est 6gal a jL49.

De maniere g6n6rale, le calcul des quotients de nuptialit6 d'hommes immigr6s, a partir des mariages observes en B, tous ages A l'entr6e confondus, risque de sous-estimer les probabilit6s de mariage par age. M6me si cette sous-estimation s'att6nue au fil des ages puis disparait

" 49 ans, la fr6quence du c61ibat d6finitif devrait s'en trouver au total notablement surestimbe.

b) Proportions de cdlibataires

Les proportions d'hommes immigr6s c61ibataires telles qu'on pourrait les calculer a l'occasion d'un recensement en France par exemple, sont a chaque age yi, une moyenne pond6r6e par les effectifs observes tous 6tats matrimoniaux a' (i, j), des c61ibataires C(i, j) correspondant aux quotients n (i, j). On aurait ainsi :

Y15 = a' (15, 15) x C(15, 15) avec a' (15, 15) = 1 Y16 = a' (16, 15) x C(16, 15) + a' (16, 16) x C(16, 16)

avec a' (16, 15) + a' (16, 16) = 1 yj = la' (i,j) C(i,j) avec Ya' (i,j) = 1

Contrairement aux quotients, les proportions de c6libataires C(i,j), qui sont des cumuls, integrent la nuptialit6 qui s'est deroule dans le pays d'origine. Mais on continue d'omettre a chaque age l'experience de ceux qui n'ont pas encore immigr6 et dont la nuptialit6, realis~e au pays d'origine, est plus forte que celle des autres. Les proportions de c6libataires au pays d'accueil surestiment donc celles de l'ensemble des immigrants. D'un age au suivant, la sous-nuptialitV des hommes

dvj. immigr s ajoute ses effets, mais on int~gre en m~me temps une nouvelle cohorte d'immi- grants, mieux marius que ceux qui sont

d~j. en place. Ces effets se

compensent diff~remment suivant l'age. Aux ages oif on se marie le plus,

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LA NUPTIALITt DES MIGRANTS 385

les proportions de c61ibataires surestiment alors de faqon croissante le c61ibat des immigr6s. Mais au-delh, les proportions se rapprochent de l'ensemble pour des raisons exactement oppos6es, les nouvelles cohortes d'immigrants prises en compte connaissant une nuptialit6 superieure a la moyenne parce que v6cue pour l'essentiel dans le pays d'origine.

Ainsi, au fil des ages, la surestimation du c61ibat s'amenuise pour disparaitre a 50 ans, puisqu'" cet age les 35 cohortes sont repr6sent6es et la serie des a' (49, j) s'identifie a celle des ai. On obtient alors une bonne mesure de la fr6quence du c61ibat d6finitif. Notons aussi qu'" chaque age, la proportion de c61ibataires est bien meilleure (et donc plus faible) que celle d6duite des quotients de nuptialit6.

c) Mariages rdduits

Les mariages r6duits ,~//+j, que l'on calculerait en rapportant les

mariages d'hommes immigr6s observes en France une ann6e donn6e entre l'age i et l'age i + 1

" la population moyenne correspondante, donne une estimation tres biais6e des mariages de la table.

En effet, puisque retours et mortalit6 diff6rentielle suivant l'6tat matrimonial sont supposes nuls, on a donc:

e/i+1f = m, ,1/P,(1 - q1/2) = m. +j1/Ci(1

- q/2) x CI/Pi = Li

X yi Calculer des mariages r6duits 6quivaut alors a multiplier les proba-

bilit6s de mariage faibles L'i " des c61ibataires bien inf6rieurs a ceux

d6coulant de la combinaison de ces m6mes quotients dans une table; d'oil une sous-estimation des mariages de la table qui aboutit " une mesure synth6tique de la nuptialit6 encore inf6rieure a celle, d6ji affaiblie, que donne l'usage des quotients de nuptialit6. Comme les autres indices, les mariages r6duits tendent vers une mesure correcte de la nuptialit6 totale des migrants lorsque la migration elle-m6me tend vers zero, c'est-a-dire au plus tard " 50 ans.

Ainsi, en l'absence de mariages lors d'un bref s6jour au pays d'origine et de retours, des trois indices, seules les proportions de c1libataires sont a m6me de donner une estimation correcte du cl1ibat d6finitif d'une population d'immigr6s observ6e dans le pays d'accueil. Ils sont en effet les seuls " tenir compte, m6me si c'est imparfaitement avant 50 ans, de la nuptialit6 qui s'est r6alis6e avant la migration. Par ailleurs, la distorsion de ces indices se modifiant avec l'age, et tendant en particulier a s'annuler vers 50 ans, aucune de ces mesures n'est susceptible de d6crire correctement le calendrier de la nuptialit6 totale des migrants.

2. Prise en compte des retours au pays

Aux erreurs induites par la discontinuit6 apport6e par l'expatriation, s'ajoutent celles provenant des retours affectant la population 6tudi6e. Supposons pour simplifier que ces retours se fassent tous en bloc au bout

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386 LA NUPTIALITE DES MIGRANTS

d'une certaine dur6e de s6jour. Ils perturbent l'observation des mariages en changeant les ponderations des sous-cohortes, meme si probabilit6 de mariage et probabilit6 de retour ne sont pas directement liees et qu'on n'observe pas de discontinuit6 dans les risques de retour apr6s le mariage (ce ne serait, par exemple plus le cas si les migrants retardaient un mariage en prevision d'un retour - d6pendance directe - ou modifiaient leur projet de retour une fois mari6s - discontinuit6 -). Pourtant, ces probabilit6s sont liees par l'interm6diaire d'une troisieme variable. En effet, les chances de mariage a un age donn6 dependent de l'age a la migration et de la dur6e de sejour. De meme, les risques de retour sont fonction de la dur6e de sejour.

De ce seul fait, au fil des ages, les cohortes d'age a l'entr6e les plus r6centes, non encore touch6es par les retours mais subissant une reduction maximale des chances de mariage, sont privil6gi6es dans le calcul des quotients; source d'une sous-estimation de la nuptialit6 qui vient s'ajouter a celle pr6c6demment envisagee.

Par suite, dans le calcul des proportions de c61ibataires, les retours enlevent du poids aux hommes qui ont une certaine dur6e de s6jour et sont donc entr6s assez jeunes, au profit de ceux entr6s plus tard et qui ne sont pas encore touches par un depart. Ces derniers sont aussi le plus souvent mari6s, les mariages ayant eu lieu encore essentiellement au pays d'origine. Les proportions de c61ibataires sont donc plus faibles que celles que nous avions calcul6es pr6c6demment, en l'absence de retour. Comme nous surestimions alors le c61ibat des migrants, cet effet se trouve maintenant contrari6 par une erreur de sens inverse like aux retours. Ce dernier biais l'emporte g6n6ralement assez vite sur l'autre au fil des ages (4) et il en r6sulte globalement une sous-estimation du c61ibat d6finitif. Cette erreur sera d'autant moins 61ev6e que les retours sont moins nombreux, qu'ils se font tard et que leur intensit6 varie peu en fonction de l'age a la migration.

Dans la mesure oi il n'y a pas d6pendance directe entre probabilit6 de mariage et probabilit6 de retour, on a toujours :

-,i+l = I1' x y, avec t';

= git

x (1 - ai) oui 0 < ai < 1

y, = Cgit

x (1 - bi) ou 0 < bi < 1 et oiu Cg?L repr6sente les c61ibataires de la table d6duits des quotients gi.

Le biais entachant le calcul des mariages r6duits multiplie ceux affectant le calcul des quotients et des proportions de c61ibataires. Calculer des mariages r6duits revient a appliquer a des c61ibataires trop peu nombreux des chances de mariage trop faibles, d'oui une sous-estimation globale des mariages de la table. La encore, le calcul des mariages r6duits

(4) D'apres v6rification par simulation dans laquelle variaient la dur6e de sejour, l'intensit6 des retours et la reduction des chances de mariage apres expatriation.

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LA NUPTIALITI DES MIGRANTS 387

serait la plus mauvaise m6thode pour parvenir a l'estimation des grandeurs de la table des migrants.

De fagon g6n6rale, la surestimation de la nuptialit6 liie aux retours dans le calcul des proportions de c61ibataires rend l'emploi de ces proportions d61icat car ils ne constituent plus de maniere certaine, une meilleure approche que celle par les quotients. Ils ne permettent plus d'estimer sans erreur la fr6quence du c61ibat d6finitif. Pourtant des simulations semblent montrer qu'ils sont encore meilleurs lorsque la r'duction des probabilit6s de mariage a l'expatriation est cons6quente.

Du seul fait de la discontinuit6 "

l'entr6e dans les probabilit6s de mariage, il n'y aurait jamais de fait ind6pendance entre probabilit6 de mariage et probabilit6 de retour.

Supposons maintenant que le mariage entraine en plus une disconti- nuit6 dans les probabilit6s de retour.

Elle n'entraine pas de biais suppl6mentaire dans le calcul des quotients. Seuls les retours de c61ibataires changent le systeme de pond6ra- tion des 35 cohortes d'age a l'entr6e. Ind6pendamment du fait qu'il y ait discontinuit6 ou non, l'erreur, et donc la sous-estimation de la nuptialit6, sera d'autant plus 61ev6e que les retours seront plus importants.

Au contraire, toute sur6migration des c61ibataires accroit la suresti- mation de la nuptialit6 par les proportions de c61ibataires, alors qu'une sur6migration des mari6s l'att6nue.

A moins d'avoir une id6e correcte des facteurs de biais, il devient difficile de dire quelle est des quotients ou des proportions de c61ibataires, la moins mauvaise maniere de proc6der pour estimer les grandeurs de la table.

Les sources d'erreur se multiplient pour peu qu'on envisage la slHection au retour des c61ibataires ou des mari6s, non plus seulement comme l'expression d'une discontinuit6 dans les chances de retour par le mariage, mais aussi comme la manifestation d'une liaison directe entre probabilit6 de mariage et probabilit6 de retour. Rien n'interdit par exemple de penser que les hommes qui repartent plus volontiers lorsqu'ils sont c61ibataires, ne se sont pas mari6s en prevision de ce retour. L'aptitude au retour cr6erait alors un facteur d'h6t6rog6n6it6 suppl6mentaire qui, s'il est important, serait source d'une nouvelle erreur dans l'estimation des grandeurs de la table, quelque soit le type d'indice choisi. Les retours interviennent comme facteur de surestimation dans l'6ventualit6 d'une nuptialit6 plus faible parmi ceux qui repartent, et de sous-estimation dans le cas contraire.

Au total, en l'absence d'information pr6cise sur le sens et l'ampleur des diff6rents facteurs d'erreurs, il est bien difficile d'etre sOr du sens et de l'ampleur de l'erreur totale qui en d6coule, tant sur l'age au mariage que sur la fr6quence du c61ibat d6finitif.

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388 LA NUPTIALITt DES MIGRANTS

3. Mariages au pays d'origine

Un retour provisoire au pays d'origine pour s'y marier est susceptible de permettre un rattrapage de tout ou partie des mariages qui n'ont pu se conclure normalement. Et de fait, nombreux sont les 6trangers qui retournent se marier au pays 5). La discontinuit6

" l'immigration subsis-

terait mais trouverait progressivement une compensation qui risque d'ailleurs d'etre, elle aussi, variable avec l'age a l'expatriation. Dans le meilleur des cas, c'est-a-dire en supposant que l'on dispose de l'enregis- trement des mariages qui ne se concluent pas au pays de residence, la mesure de la nuptialit6 serait donc l encore entach6e d'erreurs en raison des comportements diff6rents suivant l'age a l'entr6e. Mais comme en outre on ne dispose g6n6ralement pas des unions contract6es au pays d'origine, les taux et les quotients de nuptialit6 que l'on calculerait a partir des seules donn6es d'etat civil du pays d'accueil sous-estimeraient notablement la nuptialit6. En l'absence d'enquete ceci renforce la position des proportions de c61ibataires qui prennent en compte, au moins partiellement, les mariages au pays d'origine, malgr6 les biais entrain6s par la discontinuit6 des probabilit6s de mariage au moment de l'expatriation et par les retours.

Conclusion

En l'absence d'une collecte sp6cifique des donn6es par enquete, la mesure de la nuptialit6 des migrants se heurte a de grandes difficult6s. Le ph6nom6ne, dans sa totalit6, devrait 6tre saisi en suivant les g6n6rations de migrants par dessus les frontieres, aussi bien au pays d'origine que dans le pays d'accueil. Si on se contente de l'observation d'un seul de ces aspects il faudrait pouvoir, a l'origine, distinguer et 6tudier s6par6ment les personnes qui finiront ensuite par migrer et a l'arriv6e, introduire dans la description de la nuptialit6 la date d'installation comme nouvel 6v6nement origine. De plus, la mesure risque d'etre perturb6e dans ce dernier cas par les flux de retour au pays si ceux-ci ne sont pas ind6pendants de la nuptialit6. La mesure est impossible au pays d'origine et les probl6mes s'accumulent au pays d'accueil. Le premier, li6

" la discontinuit6 dans les probabilit6s de mariage a l'expatriation suggere une observation non plus seulement par g6n6ration mais aussi par age a l'entr6e. Le deuxieme, li6 aux retours, appelle une segmentation entre s6dentaires et non s6dentaires. Si on peut toujours envisager de demander, " l'occasion d'un recensement, aux 6trangers qui ne sont pas n6s en France par exemple leur ann6e d'entr6e, il semble plus difficile de distinguer les s6dentaires des autres X partir de la simple observation dans le pays d'accueil.

(5) Francisco Munoz-Perez et Michele Tribalat. - < Mariages d'dtrangers et mariages mixtes en France : Evolution depuis la Premiere Guerre >>. Population no 3, 1984.

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LA NUPTIALITt DES MIGRANTS 389

Enfin, les syntheses qui 6vitent de multiplier les sous-cohortes d'observation ne peuvent 6tre conduites que par duree de s6jour, rendant ainsi difficile une comparaison avec les mesures traditionnelles de la nuptialit6 : c61ibat d6finitif a 50 ans et distribution des ages au premier mariage.

C'est pourquoi on s'est interrog6e sur la signification des indices classiques calcul6s au pays d'accueil et combines en fonction de l'ge (quotients, proportions de c61ibataires et mariages r6duits) car on ne pourra g6n6ralement recourir qu'" ces substituts. Seules les proportions de c1libataires a 50 ans sont d'interpr6tation simple, mesurant la nuptialit6 totale des migrants aux pays d'accueil et de destination si les flux de retour ne perturbent pas trop gravement l'observation. Si Ga n'6tait pas le cas, la fr6quence du c61ibat d6finitif estimee par ces proportions ne donnerait qu'une mesure de la nuptialit6 des seuls migrants qui, a 50 ans, ne sont pas encore repartis. Les autres mesures sous-estiment en g6n6ral serieuse- ment ce meme resultat et aucune serie ne donne une evaluation satisfai- sante de la distribution des ages au mariage.

Seules des enquetes rendant compte de ce qui s'est passe dans le pays d'origine (et donc de retour) et dans le pays d'accueil, permettraient d'6clairer la question et participeraient a la mise en evidence des sources d'erreurs et de l'ampleur des biais. Leur r6alisation est d'autant plus souhaitable que les difficult6s mises en lumiere sur l'exemple de la nuptialit6 sont communes a tous les phenom6nes d6mographiques sus- ceptibles d'etre affect6s par la migration lorsque celle-ci entraine une rupture de comportement. 11 faudrait par exemple s'interroger sur la forme que prend cette discontinuit6 pour la f6condit6, sur la port6e des indices classiques appliques alors aux residents 6trangers et sur leur interpretation en l'absence d'une mesure de la dur6e de s6jour.

Les difficult6s rencontr6es dans la mesure des ph6nom6nes d6mogra- phiques d'un groupe de migrants tiennent a ce qu'on n'a pas consid6r6 avec suffisamment d'interet la sp6cificit6 et le caractere determinant de la migration qu'il n'est plus possible de traiter comme simple ph6nomene perturbateur. La migration est constitutive de la population qu'on 6tudie et s'accompagne d'une rupture de comportement que l'on doit prendre en consideration. II en va de m6me pour toute sous-population formee a partir d'un ph6nom6ne porteur de discontinuit6.

Michele TRIBALAT.

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390 RESUME - SUMMARY - RESUMEN

TRIBALAT Michele. - Problemes lies a l'etude de la nuptialite des migrants.

Lorsqu'on 6tudie la nuptialit6 d'une population de migrants, le champ d'observation s'6tend a la fois sur le pays d'origine et sur le pays d'accueil. Le ph6nomene dans sa totalit6 devrait 6tre saisi en observant les comportements des g6nerations aussi bien dans les pays d'origine que dans le pays d'accueil. Le caractere national de la collecte ne convient guere a ce genre d'6tude. La mesure est impossible au pays d'origine et difficile au pays d'accueil.

La discontinuit6 dans les probabilites de mariage lide A l'expatriation impose une observation non plus seulement par g6neration mais aussi par age a l'entr6e. Par ailleurs, les perturbations diverses apportees par les retours appellent une segmentation entre sedentaires et non sedentaires.

L'enregistrement statistique classique (6tat civil et recensement) ne permet pas de satisfaire ces exigences. Seules des enquetes simultanees rendant compte de ce qui s'est passe dans le pays d'origine (et donc de retour) et dans le pays d'accueil, sont a m6me d'6clairer la question.

TRIBALAT Michele. - Problems related to Migrants' Marriage Rates.

When marriage rates in migrant populations are studied, account should be taken not only of conditions in the migrants' country of origin but also in that of the country of destination. Marriage rates can only be understood by observing the behaviour of different cohorts in both countries. However, because information about marriages is generally collected on a national basis, it is often not appropriate for this kind of study. Statistics tend not to be readily available in the country of origin, and are difficult to obtain in the country of destination. Discontinuities in age-specific marriage rates, following emigration, imply that age at arrival in the new country as well as cohort should be used as a criterion. In addition, errors caused by the return of migrants to their country of origin must be taken into consideration, and a distinction made between permanent and temporary migrants.

This information is not provided from the usual statistical records (civil registration and censuces). The necessary data can only be obtained from surveys carried out simulta- neously in the country of origin and the country of destination.

TRIBALAT Michele. - Problemas asociados a la nupcialidad de los migrantes.

Cuando se estudia la nupcialidad de los migrantes, el campo de observaci6n abarca, a la vez, el pais de origen y el pais de destino. El fen6meno en su totalidad deberia ser estudiado observando los comportamientos de las generaciones en los dos paises implicados en el movimiento migratorio. El caraicter nacional de la recolecci6n de datos no permite este tipo de estudios. La medici6n es imposible en el pais de partida y muy dificil en el pais de acogida.

La discontinuidad en las probilidades de casarse, asociada a la expatriaci6n, impone una observaci6n no solamente por generaci6n, sino que tambien por edad de entrada en observaci6n. Por lo demis, las diversas perturbaciones provocadas por los retornos, implican una clasificaci6n en sedentarios y no sedentarios.

El registro estadistico cl sico (estado civil y censos) no permite satisfacer estas exigencias. S61o encuestas simultineas, que describan la situaci6n tanto en el pais de origen (y por lo tanto de retorno) como en el pais de destino, permitirian aclarar este problema.

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