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1 HAMPE VINCENT MEMOIRE pour le CAAPSAIS option D PRODUIRE DES ECRITS EN CLIS pour se réinscrire dans une dynamique d’apprentissage. Session de juin 2003 Académie de Toulouse

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HAMPE VINCENTMEMOIRE pour leCAAPSAIS option D

PRODUIRE DES ECRITS EN CLIS

pour se réinscrire dans une dynamique d’apprentissage.

Session de juin 2003Académie de Toulouse

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SOMMAIRE

Introduction PAGE 3

1. SITUATION DE DEPART ET REFLEXION VERS L'ELABORATION D'UN DISPOSITIF PEDAGOGIQUE ADAPTE. PAGE 4

1.1. Cadre de l’intervention pédagogique : des classe de CLIS 1 PAGE 5

1.1.1. Présentation du public visé.

1.1.2. La CLIS de La Clavelle.

1.1.3. La CLIS de Vendôme.

1.2. Les besoins spécifiques des élèves. PAGE 6

1.2.1. Les textes officiels.

1.2.2. Le constat de départ.

2. REFLEXION THEORIQUE RELATIVE A L’ECRIT. PAGE 9

2.1. Les programmes de l’école élémentaire. PAGE 9

2.2. La dimension historique. PAGE 9

2.3. La dimension culturelle . PAGE 10

2.4. Quels choix pédagogiques sur la lecture-écriture. PAGE 11

2.4.1. Les activités de lecture. PAGE 12

2.4.2. Les productions d’écrits, pourquoi les développer? PAGE 12

2.4.3. Les compétences visés. PAGE 13

2.4.4. La démarche de chantier. PAGE 14

2.5. Les étapes d’une production écrite. PAGE 16

2.6. La fonction de motivation. PAGE 16

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3. MISE EN ŒUVRE DES PROJETS D’ECRITURE PAGE 18

3.1. La classe de CLIS de l’école de la Clavelle. PAGE 18

3.1.1. La fiche de fabrication. PAGE 18

3.1.1.1. Présentation du projet et des objectifs.

3.1.1.2. Analyse et bilan .

3.1.2. La lettre. PAGE 21

3.1.2.1. Présentation du projet et des objectifs .

3.1.2.2. Analyse et bilan .

3.1.3. L’histoire inventée sur le modèle du conte. PAGE 24

3.1.3.1. Présentation du projet et de ses objectifs.

3.1.3.2. Analyse et bilan .

3.2. La classe de CLIS de l’école Vendôme et l’histoire interactive. PAGE 27

3.2.1. Présentation du projet et des objectifs .

3.2.2. Analyse et bilan.

4. CONCLUSION PAGE 30

5. BIBLIOGRAPHIE PAGE 31

6. ANNEXES LIVRET JOINT AVEC LE MEMOIRE.

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INTRODUCTION

Je suis en poste d'enseignant spécialisé depuis 3 ans maintenant, en classe

d'intégration scolaire accueillant des enfants déficients intellectuels légers (CLIS 1).

Fraîchement sorti de l'IUFM, j'ai été nommé sur ce poste dit "difficile" et j'ai vite pris

conscience du retard scolaire des élèves, de leur faible motivation ainsi que de leur

difficulté à entrer dans les apprentissages. Mon objectif premier a été d'instaurer un

espace classe équilibré et détendu, où le rire est permis mais où le travail est aussi

nécessaire. Cet espace créé, il fallait retrouver l'envie d'apprendre.

On se rend rapidement compte de plusieurs réalités en classe de Clis : d'une part

que l'individualisation du travail et la différenciation deviennent obligatoires, d'autre part

qu’un projet motivant incluant des apprentissages disciplinaires ou transversaux est un

facteur important de réussite.

Une des autres réalités de la classe de Clis est la grande difficulté des enfants à

entrer dans l'apprentissage de la langue écrite. Ce point soulève beaucoup de questions :

Comment leur apprendre à lire ? Quelle méthode choisir? Faut-il reproduire les méthodes

avec lesquelles beaucoup ont échoué au CP ? Comment, en tenant compte du handicap

propre à chaque élève, les faire accéder aux apprentissages ?

Un élément de réponse m'est apparu l'année dernière lors d'un projet d'écriture d'une

histoire illustrée sur l'ordinateur par les dessins et les voix des enfants. Quelque chose a

changé : les élèves se sont impliqués, sont devenus demandeurs d'aides pour réaliser leur

production individuelle qui allait être mise à la vue de leurs parents et de leurs camarades

de cours. Produire devenait un plaisir. Ce projet m'a ouvert les yeux sur l'importance de la

situation de production qui rend l'élève producteur, pour lui-même et pour les autres, le

faisant passer ainsi d’une situation de passive de réception à celle active de production.

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Au regard de mon expérience, je fais l'hypothèse que :

Pour des enfants déficients intellectuels, l'implication dans un projet de production

d'écrit motivé par une situation de communication réelle, contribue, en cohérence avec les

besoins repérés, à développer non seulement des compétences spécifiques dans le

domaine de la langue écrite mais aussi des compétences transversales comme la

confiance en soi ou le désir d'apprendre. Sans ce désir, cette envie, tout apprentissage est

vain.

On n’apprend pas à lire si on n’en sent pas le désir, si on ne comprend pas son intérêt .

De même qu’on apprend pas à écrire à un enfant, c’est lui qui s’apprend à écrire ( avec

notre aide et celle de ses pairs).(J.Jolibert). Et apprendre à lire et à écrire, c’est entrer

dans une culture nouvelle.

C'est sur ce thème que j'ai choisi de travailler ,dans une classe de CLIS 1, afin de

réinscrire les élèves dans une dynamique de lecteur et d'améliorer leurs compétences

d'écrivains et de lecteurs.

Dans un premier temps, je propose au lecteur de découvrir l’environnement institutionnel

dans lequel se situe mon intervention ainsi que l’analyse des besoins spécifiques qui

m’ont poussé à élaborer ce projet de production d’écrits. Dans un second temps, une

réflexion théorique sur l’écrit permettra de mieux cibler les différentes composantes de

l’écriture et de la production d’écrits. Enfin, la troisième partie présentera les différents

projets de production d’écrits réalisés avec les deux classes de CLIS 1 sur lesquelles

j’interviens ainsi qu’une analyse réfléchie permettant de vérifier la cohérence de ces

projets quant aux objectifs à atteindre et à l’hypothèse de travail présentée ci-dessus.

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1. SITUATION DE DEPART ET REFLEXION VERS L'ELABORATION D'UN

DISPOSITIF PEDAGOGIQUE ADAPTE.

1.1 Cadre de l’intervention pédagogique : des classe de CLIS 1.

Ce projet de production d’écrit étant bien un dispositif mis en place dans la recherche

d’une pédagogie adaptée à une situation professionnelle donnée, prenons le temps de

présenter tout d’abord le public visé, puis les classes dans lesquelles se situe mon

intervention.

1.1.1 Présentation du public.

Les projets d’écriture sont menés avec deux classes d’élèves de Classe d’Intégration

Scolaire (CLIS) de la ville de Gaillac dans le Tarn.

Chacune de ces classes, intégrées dans les groupes scolaire de La Clavelle et de

Vendôme, compte 12 enfants orientés dans ce dispositif par la C.D.E.S.

Relevant de l’éducation spéciale, tous ces enfants sont reconnus déficients mentaux

légers et bénéficient dans certains cas d’accompagnements éducatifs, rééducatifs ou

thérapeutiques.

Ce dispositif d’intégration scolaire permet à tous ces élèves de poursuivre une scolarité

adaptée à leurs besoins spécifiques notamment grâce au Projet Individuel d’Intégration

Scolaire (P.I.I.S) et au contrat d’intégration propre à chacun.

1.1.2 La Clis de l’école La Clavelle.

Elle est intégrée au groupe scolaire de la Clavelle, regroupant 8 classes dont 7 de cycle 2

et une de cycle 3.

Cette année, la classe accueille 12 élèves de 7 à 10 ans, dont les niveaux scolaires vont

de la fin des apprentissages premiers à la fin du cycle des apprentissages fondamentaux.

Il n’est pas possible de faire correspondre un élève à un niveau global tant les difficultés

scolaires sont importantes, et les différences entre chaque individu marquées.

Mon intervention se situe principalement sur cette classe, où j’enseigne pour la deuxième

année. Une A.T.S.E.M est à mi-temps sur la classe, aidant à la réalisation d’ateliers tous

les après-midi de la semaine.

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1.1.3 La Clis de l’école Vendôme.

Cette classe, regroupant des enfants de 8 à 12 ans, située dans l’école voisine de La

Clavelle, est intégrée au groupe scolaire de Vendôme, réunissant toutes les classes du

cycle des approfondissements. Mon intervention dans cette classe s’effectue sous le

regard de mon tuteur de stage de pratique accompagnée, Mr Estaffin, maître spécialisé

titulaire de l’option E.

1.2. Les besoins spécifiques des élèves.

1.2.1 Les textes officiels.

La nouvelle circulaire n° 111 du 30 mai 2002, nous donne des précisions sur les

élèves intégrés collectivement dans le dispositif pédagogique qu’est la CLIS 1. Cette

classe a “ vocation à accueillir des enfants présentant des troubles importants des

fonctions cognitives qui peuvent avoir des origines diverses : retard mental global,

difficultés cognitives électives, troubles psychiques graves, troubles graves de

développement… ”.

Il faut concevoir cette classe comme “ une classe ouverte ”, permettant aux élèves de

“ bénéficier de temps d’intégration dans les classes ordinaires ”.

Il est indiqué que le maître doit “ mettre en œuvre une démarche pédagogique adaptée ”

pour “ répondre aux besoins particuliers de chacun ”.

1.2.2 Le constat de départ.

Enseignant depuis 3 années en classe de CLIS 1, j’ai observé les attitudes, les

besoins des élèves, ainsi que leurs façons d’aborder le travail scolaire. Ces observations

me permettent d’ajuster ma pédagogie, d’être plus efficient. Je présenterai ici les raisons

qui m’ont amené à conduire ce projet de production d’écrits.

Une faible motivation pour les apprentissages scolaires, tout particulièrement ceux

concernant le Lire-écrire. Ceci se traduit par des soupirs de lassitude, un manque

d’attention important et aboutit parfois à un refus pur et simple de travail. Cette faible

motivation s’explique certainement par les échecs répétés vécus par les élèves au cours

de leur scolarité, il devient difficile pour eux de croire en leur réussite.

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La plupart des élèves arrivant en CLIS sortent d’un CP ou y ont même passé 2

ans. Durant ces années, ils se sont découragés de la lecture. Or l’apprentissage de la

lecture est un des objectifs majeur de l’école élémentaire. C’est aussi, et sans aucun

doute l’élément le plus douloureux à aborder car il est souvent synonyme d’échec . La

complexité de son apprentissage explique certainement cette non-réussite : maîtriser le

code, le système grapho-phonologique, trouver sa démarche de lecture, acquérir du sens,

autant d’opérations à combiner simultanément.

Les enfants de CLIS, déficients mentaux, ont aussi beaucoup de difficultés à

construire du sens au travers des apprentissages. Ils leur est difficile de faire des liens,

de transférer leurs compétences. Beaucoup s’enferment dans la sécurité de la répétition,

éprouvant du plaisir à recommencer la même activité, par exemple, D. qui redemande

sans cesse de compter jusqu’à 5, puisqu’il “ sait faire ”. Ils réussissent souvent à

comprendre le mécanisme opératoire de l’addition mais ne peuvent l’utiliser correctement

dans un problème. Ils peuvent réussir dans la reconnaissance de phonèmes mais ne pas

mobiliser leurs connaissances dans le déchiffrage de mot nouveaux. Les enfants

effectuent peu de transfert entre les différents apprentissages qu’ils réalisent et à leurs

yeux les disciplines paraissent toutes plus ou moins cloisonnées entre-elles.

Parmi les élèves de CLIS, beaucoup ont du mal à se mobiliser, à entrer dans

l’apprentissage, à se projeter dans le futur. Il faut leur proposer des projets, nécessitant

l’acquisition de compétences spécifiques, clairement définies à leurs yeux et qui leur

permettent rapidement de tirer le bénéfice de leur investissement.

Se mettre en projet leur permet d’arriver à une réalisation motivante et porteuse de

sens, ce qui leur permet un regard positif sur leur travail et leur redonne confiance face à

leurs apprentissages. C’est cette restauration de l’estime de soi qui est nécessaire pour

acquérir de nouvelles connaissances.

On remarque très vite en enseignant en CLIS cette auto-dévalorisation des

enfants : “ je ne sais pas faire parce que je n’y arrive jamais ”, “ c’est trop dur pour moi, je

n’en suis pas capable ”. La restauration de leur image, de leur réussite permettra de

positiver leur confiance en eux.

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Parmi les besoins repérés, on peut aussi noter une ouverture restreinte sur le monde,

avec des difficultés à se situer géographiquement au-delà de leur vécu quotidien, domicile

et école .

Motivation, lire-écrire, donner du sens aux apprentissages, prendre confiance en soi,

s’ouvrir sur le monde, autant de besoins qui sont des difficultés pour les enfants de CLIS

et qui freinent leur entrée dans les apprentissages. En tant qu’enseignant spécialisé, il me

faut prendre en compte ces données pour mettre en place un dispositif pédagogique leur

permettant d’accéder au statut d’élève et leur permettant d’accéder aux apprentissages,

avec la volonté de croire en leur réussite “ ils sont capables de … ”, chacun à un niveau

différent, visant des objectifs plus disciplinaires pour certains ou plus transversaux pour

d’autres mais où tous pourront accéder aux apprentissages.

C’est donc pour répondre à ces besoins repérés, en prenant en compte la diversité

des élèves, de leur projet individuel, que j’ai été amené à mettre en place ce projet de

production d’écrits.

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2- REFLEXION THEORIQUE RELATIVE A L’ECRIT.

2.1. Les Programmes de l’école élémentaire.

Parmi les Programmes de l’école élémentaire, je propose de reprendre les repères

qui nous intéressent plus particulièrement pour notre projet de production d’écrits.

Les nouveaux programmes de 2002 pour l’école primaire précisent, dans le chapitre

“ Maîtrise du langage et de la langue française ” au cycle 2 :

“ L’apprentissage de la lecture et de l’écriture sont parfaitement

complémentaires….Apprendre à écrire est l’un des meilleurs moyens

d’apprendre à lire. ” (p66)

Plus loin, il est indiqué :

“ Des moments spécifiques doivent être consacrés à des activités qui conduisent

les élèves à se doter (…) avant même la fin du cycle, de la capacité de produire de

manière autonome un texte court mais structuré, qu’il s’agisse d’un texte narratif ou

d’un texte explicatif (…) en mettant en œuvre des projets d’écriture, ancrés dans

des situations de communication véritables. ”

Les projets de production d’écrits seront aussi l’occasion d’acquérir des compétences

dans le domaine de la découverte du monde, de l’informatique ou dans des domaines

plus transversaux (méthodes de travail, autonomie, socialisation).

2.2. La dimension Historique.

Pour comprendre les problèmes auxquels sont confrontés les élèves qui découvrent la

Lecture-écriture, on peut tenter de brièvement de cerner le pourquoi on écrit et pourquoi

on lit, et en particulier pourquoi on a inventé et utilisé l’écriture (G. Chauveau).

En effet, nous sommes tellement habitués à vivre avec l’écrit et au milieu de l’écrit qu’on

pourrait oublier qu’à peine une centaine de langues sur 3000 dans le monde s’écrivent, et

ce depuis seulement 5000 ans.

C’est avec l’apparition des premières cités-états, vers 3500 av JC, qu’est apparue la

nécessité de noter, mémoriser, archiver les transactions marchandes. Cette 1ère naissance

de l’écriture a un rôle très fonctionnel et est exclusivement réservée à des professionnels,

les scribes, qui servent d’intermédiaires entre producteurs et marchands ou d’écrivains au

service de l’administration. Progressivement, le graphisme évolue des pictogrammes

représentants les objets à une stylisation plus grande. L’écriture devient alors un moyen

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de communication permettant de “ fixer des messages verbaux sur un support

indépendant des personnes (auteurs et messagers) qui les transmettent ”1.

Son contenu et son usage son purement utilitaires. Ce n’est que beaucoup plus tard que

l’écriture trouvera un usage plus littéraire avec l’apparition de romans ou de légendes

issus de la civilisation mésopotamienne.

Cet éclairage historique me semble important pour insister sur l’aspect utilitaire de

l’écriture, et c’est cette utilité qu’il me paraît important de faire comprendre aux élèves.

2.3. La dimension culturelle.

L’école, en Hébreu, signifie “ la maison du livre ” 2. L’école est donc une institution

comme d’autres : bibliothèques ou librairies.

Il n’est pas certain, comme le souligne J. Fijalkow, que tous les enfants soient à même de

rentrer dans cette maison commune. Il existe à ce niveau une barrière culturelle que tous

les enfants ou adultes non lecteurs ne veulent pas franchir . Car apprendre à lire, ce n’est

pas seulement apprendre un code et une technique culturelle, “ c’est entrer dans une

autre culture, dans un autre monde ” 3.

Accéder au monde des lettrés, des gens qui vont dans les musées, les bibliothèques peut

faire peur à certaines familles des enfants qui nous sont confiés. Ces familles, dont la

culture n’est pas une culture de l’écrit, peuvent craindre de perdre leur enfant qui,

apprenant à lire, s’éloignera de l’identité culturelle de la famille.

Nous pouvons aussi retrouver cette idée dans la préface des nouveaux

programmes de l’école élémentaire de Jack Lang :

“ Je le répèterai toujours : la langue française nous construit et nous réunit. Chaque enfant

doit pouvoir entrer dans cette maison commune, s’y sentir à l’aise, chez lui. ”

Un autre auteur, G. Chauveau, insiste lui aussi sur cette dimension culturelle de

l’écrit en y ajoutant une perspective langagière.

Pour lui, l’enfant apprenti lecteur entre dans le monde de l’écrit, et la maîtrise du savoir

lire et écrire dépend de l’expérience qu’a l’enfant de ce nouveau monde.

Il nous précise deux dimensions dans l’acte de lire.

1 G. Chauveau, Comment l’enfant devient lecteur, édition RETZ, p 262 J. Fijalkow, Entrer dans l’écrit, édition MAGNARD, p 23.3 J. Fijalkow, id.

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“ Lire, c’est nécessairement lire pour : pour s’informer, se divertir, agir, imaginer,

apprendre, se cultiver, répondre à une question, satisfaire sa curiosité, s’émouvoir, etc...

Et lire, c’est lire dans ou sur : dans/sur un livre, un album, un journal, un document, une

fiche technique, une affiche, une lettre , etc… La lecture n’existe pas en dehors de

l’intention du lecteur et en dehors du support (objet culturel porteur du message ” 4.

Ce nouveau monde, dont l’enfant doit faire l’expérience, comprend une multitude

d’éléments physiques ou matériels : les supports ( livres, journaux…), les outils pour écrire

( claviers, stylos…), les lieux pour lire et écrire ( bibliothèques…) mais aussi tous les

pratiquants de la lecture et de l’écriture. C’est donc un monde vaste qui s’ouvre à l’élève.

La dimension langagière évoquée plus haut s’explique par la spécificité de l’écrit : lire,

c’est traiter un message verbal mis par écrit. Outre le décodage et l’identification des mots,

l’enfant lecteur doit reformuler une production langagière. Il se trouve ainsi confronté à une

situation de communication verbale particulière qui met en présence un émetteur ( absent

physiquement) , un récepteur (lui) et un message écrit porteur de sens.

Ces deux dimensions peuvent nous aider à comprendre les difficultés des élèves de la

classe de CLIS dont j’ai la charge ( enfants de culture étrangère et/ou issus de milieux

socioprofessionnels défavorisés) .

2.4. Quels choix pédagogiques sur la Lecture-écriture ?

Je reprendrai ici quelques citations qui ont motivé mes choix sur le lire-écrire.

“ C’est en apprenant à lire-écrire pour de bon que l’enfant apprenti lecteur peut

le mieux prendre conscience des aspects formels de la langue orale et écrite. ”

(A. Ouzoulias)

“ Pratiquer l’écriture, pour des enfants longtemps arrêtés au seuil de la culture

écrite peut produire des effets spectaculaires. ” ( J. Fijalkow)

“ En définitive, il faut que, pour chaque enfant, écrire soit, non pas synonyme

de corvée, blocage, échec, mais évoque plutôt des projets réalisés grâce à

l’écrit, ou des projets d’écriture de fiction aboutis (…) ” ( J. Jolibert)

4 G ; Chauveau, comprendre l’enfant apprenti lecteur,édition RETZ ..

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2.4.1. Les activités de lecture.

Pour ne pas réutiliser des méthodes ou manuels avec lesquels les élèves de la CLIS ont

été en échecs, et aussi pour se doter d’une pratique de lecture vraie, nous avons fait le

choix de n’utiliser que des albums de littérature de jeunesse comme support de

l’apprentissage de la lecture.

Ainsi, les élèves apprennent à lire sur de vrais livres. La découverte du texte se fait

progressivement, sollicitant à la fois le sens et le décodage. Comme nous le dit G.

Chauveau :

“ C’est la combinaison de ces 2 traitements, l’un grapho-phonologique, l’autre

syntaxico-sémantique, qui produit la lecture compréhension. C'est-à-dire la re-

production par le lecteur du message écrit. ”

Différents niveaux de travail du texte sont préparés pour répondre aux besoins des

enfants.

2.4.2. Les productions d’écrits, pourquoi les développer ?

Mr Ouzoulias le rappelait lors de la conférence du 22 janvier à Toulouse5 :

“ La production d’écrit est la voie royale vers l’apprentissage de la lecture- écriture. ”

Pour reprendre J. Fijalkow 6, écrire a trois avantages majeurs :

Le premier tient à la nature même de l’acte d’écrire. Ecrire place l’enfant dans une

situation de production alors que l’acte de lire exige une activité de réception.

Le second avantage est relatif à la clarté cognitive. Considérant que l’enfant se trouve

confronté à un objet, la langue écrite, dont il ne comprend ni la fonction ni les structures,

le problème cognitif majeur qu’il a à résoudre pour s’approprier cet objet, est de le

comprendre.

Cela permet de démystifier l’écrit, de s’interroger sur les paramètres de la production : qui

écrit ? où ? pourquoi ? quand ? comment ? Ainsi, l’enfant accède à une compréhension de

ce qu’est l’écrit. Il s’aperçoit alors qu’écrire consiste d’abord à coder d’une autre façon ce

que l’on dit. Il peut alors trouver des réponses à ces mêmes questions pour les écrits qui

sont proposés à sa lecture.

5 A. Ouzoulias, L’apprenti lecteur en difficulté. Conférence du 22 janvier 2003 à l’Irfces de Toulouse.6 J. Fijalkow, Entrer dans l’écrit, éd. MAGNARD.

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Le troisième avantage tient à la confrontation directe au code grapho-phonologique ,

permettant à l’élève de comprendre qu’il existe des relations systématiques entre les

phonèmes et les graphèmes. Cet apprentissage de la correspondance graphèmes-

phonèmes prend alors tout son sens.

Ce point de vue est partagé par G. Chauveau qui précise que “ l’ossature du français écrit

est phonique….le code phonographique rend compte de 80 pour cent de l’écriture d’un

texte ”.

Enfin, cette confrontation au code donne à l’élève le moyen de comprendre l’unité

phonème ainsi que la notion de mot. Deux éléments du langage écrit qui ne dérivent pas

de l’oral et qui demande une conceptualisation importante.

D’autres points intéressants concernant les activités de production d’écrits nous sont

apportés par le groupe de recherche d’Ecouen7 .Il indique qu’il est important que chaque

enfant-écolier, comme lecteur et comme producteur fasse l’expérience :

De l’utilité et des fonctions diverses de l’écrit,

Du pouvoir que donne une maîtrise suffisante de l’écrit,

Du plaisir que procure la production

Chaque enfant producteur se dotera , au fur et à mesure des projets, d’une connaissance

des divers écrits ainsi que des stratégies pour les produire. Il accèdera ainsi à une vision

plus large du monde qui entoure l’écrit : un mode social, culturel, économique, industriel

de l’écrit.

2.4.3. Les compétences visées 8.

Je ne reprendrai ici que les compétences qui me semblent les plus appropriées aux élèves

de la classe de CLIS. Les chantiers d’écriture permettront à l’élève de :

se construire une représentation positive de son interaction avec l’écrit (être dans un

projet « pour de bon », obtenir un écrit efficace, valorisant) ;

se percevoir comme sujet écrivant (être en situation de producteur, d’apprenant) ;

se doter de la connaissance de différents types d’écrits, de leur utilité et de leur

organisation textuelle, d’un vocabulaire spécifique;

développer une stratégie de production d’écrits et des outils d’évaluation réutilisables.

7 Groupe de recherche d’écouen, J. Jolibert, Former des enfants producteurs de textes, éd HACHETTE.8 Groupe de recherche d’écouen, chapitre 1 sur les objectifs d’apprentissages.

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2.4.4. La démarche de chantier d’écriture.

Un chantier est un module d’apprentissage 9, centré sur un type de texte, inscrit dans la

durée et inclut dans un projet qui a du sens aux yeux des enfants.

La démarche présentée vise à amener l’enfant à produire un texte pertinent le plus abouti

possible et à le doter d’une stratégie et d’outils réinvestissables dans d’autres situations.

DEMARCHE GENERALE D’UN CHANTIER

Pour les enfants : projet de classe projet d’écriture projet de chantier1

Pour le maître : Préparation minutieuse du chantier.

2Cerner les paramètres de la situation de productionDestinataire, énonciateur, but de l’écrit à produire, enjeu, objet précis de l’échange.

3 Premier jet individuel

Dégager les caractéristiques globales du texte par les confrontationsEntre pairs : on confronte les premiers jets de la classe.

4 Avec des écrits sociaux du même type. Dégager des caractéristiques : silhouette, vocabulaire, schéma typologique…Fabrication d’une grille de réécriture du texte.

5

Activités de systématisation linguistique( grammaire de texte, silhouette du texte, lexique…)

Réécriture du premier jet Avec les outils créés précédemment.

6

Production individuelle finale- Maquette finale ( à relire pour “ toiletter ”, mettre en forme),- Chef-d’œuvre ,et envoi au(x) destinataire(s)

7

Evaluation pragmatique des camarades, réactions du destinataire systématique : auto-évaluation par chaque enfant, par le maître

Situations de réinvestissement, complexification. Elaboration de nouveaux outils, travail de nouvelles variables.

9 Groupe de recherche d’écouen, J. Jolibert, Former des enfants producteurs de textes, chapitre 3

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Ces chantiers visent à créer la plus grande individualisation possible de la construction

des compétences en sollicitant les acquis et l’esprit de recherche de tous.

Condensé des différentes étapes du chantier :

étape 1 : Il doit y avoir pour les enfants un enjeu réel s’inscrivant dans un projet de

classe ou un projet d’écriture. Ce chantier doit aussi s’insérer dans un projet

d’apprentissage perçu par les élèves ( exemple : “ Nous sommes en train

d’apprendre à écrire une lettre ” ). Pour le maître, il doit se préparer à l’aide d’une

trame précise détaillant les caractéristiques attendues du chantier.

étape 2 : Cerner les paramètres de production.

Phase indispensable pour se doter d’une stratégie d’écrivant, les paramètres sont au

nombre de 5 : - destinataire ( “ à qui j’écris ”) ;

- statut de l’énonciateur ( “ qui écrit ? moi ? la classe ? “) ;

- but de l’écrit à produire ( “ à quoi va-t-il servir ? ”) ;

- enjeu de l’écrit à produire ( “ pourquoi j’écris ? ”) ;

- objet précis de l’échange.

étape 3 : C’est le premier jet individuel, où l’enfant investit tout ce qu’il sait faire et

se met dans le projet. Cette première production lui permettra à la fin du chantier de

se rendre compte du chemin parcouru, et donc de l’apprentissage qu’il a effectué.

étape 4 : Les confrontations pour dégager les caractéristiques globale du type de

texte étudié. Elles concernent la superstructure du texte ainsi que les aspects les

plus apparents de la grammaire de texte. Les deux étapes sont la confrontation

entre les premiers jets de la classe ( comparaison des différents choix, des

similitudes ou différences, phase d’explicitation en vue de conserver les critères de

réussite) et la confrontation avec les écrits sociaux ( pour comprendre comment

fonctionne l’écrit étudié et être en mesure de le produire).

A ce niveau, mon rôle consiste à :

- aider à l’émergence des idées quant à l’observation du texte, “ pourquoi

ont-ils écrit ça ? ici ? à quoi ça sert ? ” ;

- être une personne ressource pour l’aide à l’écriture de mots inconnus, de

syllabes ou de sons ;

- aider à la mise en forme des idées, à la formulation des phrases.

Ces deux phases permettent la construction d’une grille de réécriture construite

avec les éléments propres au type de texte étudié.

étape 5 : Les activités métalinguistiques permettent à l’élève d’amorcer la phase de

réécriture de son premier jet en ayant des connaissances nouvelles pour réussir

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son entreprise. Cette réécriture faite il peut s’évaluer puis remodeler à nouveau son

écrit.

étape 6 : la dernière, pour effectuer le toilettage orthographique et mettre

définitivement en forme son texte.

2.5. Les étapes d’une production écrite.

On peut distinguer 4 étapes importantes dans toute production écrite 10 :

La conceptualisation ou planification.

Elle rassemble la recherche des idées, le choix d’énonciation et permet de distinguer 3

paramètres centraux : le thème (écrire sur quoi), le but (écrire pour quoi) et le destinataire

(écrire pour qui). Les auteurs rappellent qu’il est important d’avoir des connaissances

thématiques préalables pour faciliter la recherche, l’organisation des idées et le

déroulement de l’activité afin d’éviter une surcharge cognitive.

La formulation ou mise en texte.

A ce niveau, 3 types d’opérations de formulation pour transformer les idées en unités

linguistiques : la sélection et la production de mots, la construction des propositions et des

phrases et la coordination thématique ( cohérence) et textuelle (cohésion).

La dernière opération nécessite de maîtriser diverses marques linguistiques (pronoms,

déterminants, connecteurs, ponctuation…) pour réussir ce double pilotage.

La transcription.

Chez l’enfant apprenti-lecteur, c’est l’étape la plus coûteuse en temps car le code grapho-

phonétique n’est pas automatisé. Le décalage entre la parole et le rythme d’écriture ne

permet pas le maintien des idées évoquées lors de l’étape précédente.

La révision.

Activité nécessaire, elle s’effectue avant, pendant ou à la fin de la production du texte. Elle

permet une retour nécessaire sur le « 1er jet » pour détecter ( décalage entre l’intention et

le résultat) , identifier (quelles erreurs, oublis ?) et modifier. L’élève peut ainsi se décentrer

de son texte , et voir que l’écrit se retravaille, qu’il n’est pas figé dès le premier essai.

2.6. La fonction de motivation

Tout d’abord, commençons par définir la motivation :

10 Document de la circonscription de Gaillac,en référence à J-N Fouchin et S. Mouchon, dans « Psychologie de l’éduction »

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c’est l’ensemble des mécanismes biologiques et psychologiques qui permettent le

déclenchement de l’action , de l’orientation ( vers un but ou à l’inverse pour s’en éloigner)

et enfin de l’intensité et de la persistance : plus on est motivé plus l’activité est grande.

Un homme, Clark Hull, chercheur béhavioriste dans les années 1950 a pressenti la

nécessité de lier apprentissage et motivation. Il a défini une formule :

Apprentissage = Motivation x Habitude

H étant le niveau d’apprentissage antérieur et M le mobile. La conséquence directe de

cette définition est que l’on apprend pas sans être motivé.

Un autre facteur est aussi à prendre en compte : le renforcement positif ou négatif.

Evidemment, en tant qu’enseignant spécialisé, face aux difficultés importantes des

enfants, un renforcement négatif comme “ tu ne sauras jamais lire ” ou “ vous ne faites

pas d’efforts pour réfléchir ” ne saurait augmenter la motivation des élèves et leur faire

oublier leurs échecs passés.

Enfin, Alain Lieury11, nous précise deux types de motivations : la motivation extrinsèque,

(contrôlée par les renforcements, les notes, les prix….) et la motivation intrinsèque (

recherche de l’activité pour l’intérêt qu’ elle procure en elle-même) qui correspond à

l’intérêt, la curiosité, l’envie. C’est le sens courant de la motivation.

L’auteur nous indique quelques pistes pour motiver les élèves qui nous sont confiés :

- L’attitude de l’enseignant doit être encourageante en dédramatisant l’échec et en recherchant la

valorisation des points forts de l’élève.

- Rendre l’enfant acteur de ces apprentissages en lui donnant la possibilité d’initiative et de choix,

en lui confiant des responsabilités.

- Expliciter précisément la compétence à atteindre et n’évaluer qu’elle, pas l’individu.

- Présenter clairement l’activité.

- Avoir un but d’apprentissage raisonnablement difficile, à la hauteur des capacités de l’élève.

Ces quelques conseils peuvent nous aider à remotiver les élèves pour qu’ils réapprennent

le chemin de la réussite, ce qui aura des répercussions sur leur confiance en eux,

réveillera leur curiosité.

Il paraît aussi important d’arriver, par des projets concrets et ciblés aux niveaux des

compétences de chaque individu, ici la production d’écrits en situation réelle de

communication par le biais de la correspondance scolaire, à passer d’une motivation

extrinsèque à une motivation intrinsèque, c'est-à-dire s’investir dans ses apprentissages et

en percevoir le sens.

11 Lieury, Motivation et réussite scolaire , éditions DUNOD.

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3. MISE EN ŒUVRE DES PROJETS D’ECRITURE.

Il est temps maintenant d’en venir à la présentation concrète des projets d’écriture réalisés

dans les deux classes. Mon intervention s’effectuant sur 2 écoles, je présenterai

séparément les actions menées dans chaque classe.

3.1 La classe de CLIS de l’école la Clavelle.

3.1.1 La fiche de fabrication.

3.1.1.1 Présentation du projet et des objectifs.

Ce projet est motivé par le fait que la fiche de fabrication est un écrit prescriptif et à ce

titre il :

permet de travailler sur un référent très précis, l’objet de la fiche est ciblé et il

impose une organisation logique très précise ( structure du texte, hiérarchisation

des étapes);

oblige l’enfant à “ expliciter l’implicite ” et demande un effort de “ décentration ” pour

se mettre à la place du lecteur ;

demande de classer les informations et d’adopter un vocabulaire précis ;

permet la mise en place d’activités métalinguistiques précises comme l’utilisation de

l’infinitif ainsi que l’utilisation d’un vocabulaire spécifique ;

C’est aussi un projet d’écriture qui peut se dérouler sur un temps court.

3.1.1.2 Analyse et bilan.

Analyse du chantier.

Naissance du projet : étape 1 et 2

Suite à une séance de travaux manuels ayant pour but de reproduire des euros ( pièces

et billets) afin de pouvoir s’en servir dans les activités de mathématiques de manipulation

de monnaie, j’ai invité les élèves à écrire une fiche de fabrication expliquant comment ils

avaient fait . Pour des raisons d’emploi du temps, seulement 9 élèves sur les 12

participent à ce projet.

Cette fiche de fabrication a 2 fonctions :

- garder une trace écrite de leur démarche pour pouvoir refabriquer plus facilement les

euros une prochaine fois,

- elle doit permettre à d’autres enfants de réaliser ces euros.

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Cette double fonction permet de cerner les paramètres de la production de l’écrit à

réaliser, c'est-à-dire le destinataire (pour qui écrit-on ? ) et l’utilité de l’écrit ( expliquer au

lecteur de la fiche comment s’y prendre) .

La démarche adoptée celle dite de chantier présentée au paragraphe 2.2.4.

étape 3 : Pour ne pas mettre les élèves en difficultés trop importantes dans ce premier

chantier, l’écriture du premier jet n’est pas individuelle mais en binôme afin que les

enfants puissent s’aider mutuellement dans l’écriture (voir Annexe 1) . J’ai fait le choix de

groupes hétérogènes ( un pré-lecteur avec un lecteur un peu plus confirmé). Après

formulation, beaucoup de mots sont donnés aux enfants pour qu’ils puissent écrire leur

phrase.

étape 4 : A la lecture des productions de leurs camarades, la confrontation collective des

fiches permet de mettre en avant les points suivants (qui seront conservés pour la suite):

difficulté à lire car beaucoup de fautes et ratures ;

les phrases ne veulent rien dire, il manque les points et les majuscules ;

il faut dire les choses dans l’ordre sinon on ne comprend pas ;

ne pas dire trop de “ on fait … ” , “ on prend… ”, “ on… ” ;

dire les outils à prendre ;

expliquer “ comment on fait ”.

A mon niveau je peux constater, au cours de cette séance, que les enfants ont

énormément de mal à se décentrer de leur vécu personnel et restent sur leur position de

“ c’est moi qui a raison ”, ce qui engendre des critiques assez négatives des productions

des autres. Les euros ayant été fabriqués de manière empirique, il n’est pas simple de se

mettre d’accord ou de se remémorer la démarche employée.

étape 4bis : Pour trouver d’autres idées, je distribue une vraie fiche de fabrication aux

enfants, Le Manège (annexe 2). La consigne est la suivante : “ Je vous distribue cette

fiche pour que vous la regardiez, ou la lisiez pour voir comment elle a été fabriquée, pour

trouver des idées pour écrire la notre. ”

D’emblé, les enfants se sont mis à lire le texte. Grâce à mon aide, chaque groupe a réussi

à se poser des questions sur l’organisation du texte pour comprendre comment il est

construit. La synthèse collective a permis de faire apparaître la silhouette de la fiche de

fabrication (annexe 3) et à établir une grille de critères de réussite pour la réécriture à

venir ( annexe 5).

étape 5 : J’ai proposé 3 activités visant à construire chez l’enfant une représentation plus

fine de la fiche de fabrication. Les deux premières visent la structure du texte avec un

travail sur la fiche du manège, puis la reconstitution d’une fiche de fabrication inconnue où

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tous les blocs de texte étaient éclatés (annexe 4). Cet exercice a très bien marché, pour

les lecteurs comme pour les non – lecteurs. Les enfants ont pris des indices dans le texte

comme la numérotation des consignes, la forme évidente du titre, le mot matériel. La

troisième activité est orale et porte sur la formulation de consignes par transformation, afin

d’aider les élèves à réécrire leur texte.

exemple : “ on découpe la feuille découper la feuille ou découpe la feuille. ”

A ce niveau, j’ai juste insisté sur la formulation d’ordres, utilisant l’infinitif ou l’impératif.

La réécriture s‘est faite par binôme, sur papier puis sur ordinateur (permettant une

réécriture finale plus pratique et une impression de la maquette pour l’évaluer grâce à la

grille de relecture). Ce ne fut pas tâche facile, car les explications sont trop brèves, pas

assez explicites pour permettre à un inconnu de réaliser ce qu’on lui demande. Les

formulations sont “ trace le billet ” sans préciser comment le faire, “ écrire le nombre ” sans

dire où ni quel nombre. De plus, tous les binômes rencontrent la difficulté du tracé

géométrique des billets ou des pièces. Comment obtenir à chaque fois la même forme ?

Plusieurs réponses ont été trouvées collectivement :

- “ on prend un truc et on fait faire le tour ” propose Gaëlle ;

- “ on le fait sur une feuille puis ils ( les enfants ) font des photocopies ” dit Stéphane ;

-“ il faut un modèle ” propose Joris.

Nous adoptons l’idée du patron et du modèle que je réaliserai par scan des billets.

La réécriture sur la maquette d’une fiche de fabrication est présentée en annexe 6.

étape 6 : Une nouvelle impression puis une relecture permettent le toilettage

orthographique. Enfin, les élèves , sachant pour la plupart manipuler quelques fonctions

du traitement de texte, mettent en page leur “ chef-d’œuvre ” en choisissant librement leur

police, la taille de leur police, surlignement, gras… (voir annexe 7)

Bilan.

Les enfants ont été pour la majorité, très volontaires dans le projet d’écriture. La

production finale étant destinée à d’autres, ils ont eu très envie de “ se montrer capables

de … ”. La démarche de chantier, nouvelle pour eux, leur a permis de voir qu’il n’était pas

toujours nécessaire de “ lire ” dès que le maître distribuait une feuille, que prendre du

recul par rapport au texte pouvait permettre de se poser des questions pour se demander

“Comment est-il construit ? Pourquoi ce morceau de texte est-il ici ? A quoi sert- il ?” .

Cette prise de distance, contextualisant l’écrit, favorise par la suite une meilleure lecture.

Enfin, des réelles acquisitions ont été faites notamment sur la silhouette du texte. Il n’en

demeure pas moins toutefois des difficultés :

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seulement 3 binômes sur les 4 de départ sont arrivés à la fin du chantier. Les temps

d’intégration ou de soins ne permettent pas facilement d’avoir la présence de tous.

pour certains, l’aide de l’adulte est quasi obligatoire tant la tâche d’écriture est

difficile .

La présence de dessins sur les écrits sociaux ne se retrouve pas dans les

productions des enfants, il est en effet très difficile pour eux de produire un dessin

compréhensible ou satisfaisant.

3.1.2 La lettre.

3.1.2.1 Présentation du projet et des objectifs.

Choix de l’écrit.

Pour mettre les enfants de la classe en situation réelle de communication, ayant une

finalité concrète, j’ai choisi de faire produire des lettres aux élèves dans le cadre d’une

correspondance scolaire multiple. Pourquoi une correspondance multiple ? :

pour que chaque groupe d’enfants ait la responsabilité d’une classe ;

pour que plusieurs productions finales soient envoyées, et pas seulement une ;

pour créer plus d’occasions d’échanges et de sollicitations motivantes pour les

élèves ;

pour une ouverture plus grande de la classe sur l’extérieur.

Les projets de la classe auront ainsi des destinataires réels, qui par leurs réponses, feront

naître d’autres projets, choisis avec et par les élèves.

La lettre permet en outre de travailler sur une silhouette de texte plus complexe, de bien

cerner la notion de destinataire, de formuler des questions, l’utilisation de phrases simples,

écrites au présent, de découvrir des formules de politesse.

3.1.2.2 Analyse et bilan.

Analyse du chantier.

Mise en projet (étapes 1 et 2).

J’informe les enfants que j’ai trouvé des classe de CLIS ou d’IME qui cherchent des

correspondants ( nous essayons de définir le mot ensemble).

Une discussion s’en suit pour savoir ( nous cernons ainsi les paramètres de la production):

Pourquoi leur écrire ? les enfants trouvent tout de suite diverses motivations “ s’envoyer

des histoires ”, “ des jeux ”, “ aller les voir ” , “ leur montrer ce que l’on fait en classe ”.

A qui on écrit ? “ à des enfants d’une autre classe. ”

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Qui écrit ? “ nous, les enfants de la CLIS de Gaillac, de Vincent et Sébastien ”

Je leur indique qu’à cette occasion, nous allons fabriquer un jeu de Qui-est-Qui ? sur

l’ordinateur afin de nous présenter aux classes. Nous résumons la situation en précisant

les 2 points importants de l’écrit à produire :

demander aux enfants des classe s’ils veulent bien correspondre avec nous ;

leur dire ce qu’on leur envoie, un jeu de présentation qui s’appelle le « Qui-est-qui ? »

Par groupe de 2, sur feuille, les élèves écrivent la lettre avec l’aide des adultes pour les

mots difficiles à écrire.

La répartition est la suivante : 9 écrivains pour la lettre , 3 autres se chargeront des

adresses. Les écrivains forment des binômes et choisissent à qui ils désirent écrire ( 4

classes disponibles ) .

étape 3 : L’écriture du premier jet s’est déroulée de la même manière que pour le

précédent chantier. On peut remarquer en annexe 8, que les phrases sont plus

structurées que pour la fiche de fabrication.

étape 4 : La confrontation a mis à jour des réussites et des oublis. Tous ont constaté

l’impossibilité de lire certaines phrases ou certains mots. Nous avons dégagé 5 critères

pour améliorer nos lettres (annexe 9).

Dire “ Bonjour ” (présent dans 4 lettres), pour “ être poli, comme quand on rentre dans une

classe ” ;

Dire “ Au revoir , à bientôt ” (3 lettres/5) “ pour être poli aussi, finir la lettre ” ;

Dire “ qui on est à la fin ” ou “ signer ”, pour “ savoir qui c’est qui a écrit, qu’ils puissent

nous répondre ” ce point a fait apparaître un oubli important “ Ils ne peuvent pas nous

répondre, ils ne savent pas où on est ! ”, nous avons donc décidé de mettre notre adresse

sur la lettre. Enfin, à la lecture des lettres, les élèves ont pu remarquer qu’ils ont souvent

oublié de parler de 2 choses importantes : demander aux correspondants s’ils veulent

correspondre avec nous et parler du jeu que nous leur envoyons.

étape 4bis : En demandant aux enfants comment trouver des idées pour améliorer nos

lettres, je m’attendais à un transfert du chantier précédent et qu’ils pensent à regarder

dans d’autres lettres. La première idée a été “ il faut regarder dans le livre de bricolage ”,

ce livre devenant en quelque sorte un livre magique. Progressivement est apparue l’idée

de la lettre reçue à la maison, puis dans l’école, la décision a été prise d’aller en demander

à la directrice.

étapes 5 et 6: Les activités proposées visent essentiellement à dégager de l’observation

de vraies lettres récupérées à l’école la silhouette de l’écrit étudié. La première

observation (annexe 10) met en évidence différents blocs de texte. Les enfants ont mieux

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compris pourquoi nous observions cette lettre, la synthèse collective permet de dessiner la

silhouette (annexe 11) au tableau. Le rôle de chaque bloc est expliqué en groupe et les 3

élèves non- lecteurs participent à la réflexion. Le travail de structuration qui suit (annexe

12 et 13) permet d’ancrer véritablement la silhouette de la lettre.

Pour la réécriture du premier jet, les enfants disposent de l’adresse de l’école écrite au

tableau, de mots de vocabulaire pour les formules de politesse, de leur premier jet. Nous

pouvons constater l’évolution du travail de Stéphane qui a très bien structuré ses blocs de

texte et a fait un effort d’écriture important (annexe 15). La saisie ordinateur génère

quelques nouvelles fautes au niveau de la frappe mais permet une correction sur la

maquette (annexe 16) à l’aide de la grille de relecture (annexe 14) rapide en vue d’obtenir

le chef d’œuvre final (annexe 17).

Les enfants non – lecteurs sont associé au projet à différents niveaux, c’est par exemple à

eux que revient la responsabilité de l’écriture de l’adresse à coller sur l’enveloppe, avec

l’aide de l’ATSEM présente en classe.

Le projet est finalisé par une sortie en ville, à la recherche d’une boîte aux lettres pour

poster les 3 lettres écrites, une partant par e-mel.

Bilan.

Ce deuxième chantier a bénéficié du premier. Les élèves ont développé une capacité à

s’interroger sur un texte pour en comprendre le mécanisme. Ainsi, les séances de

confrontation ont été plus dynamiques et ont permis de dégager rapidement les critères

de réécriture. Tous ont pu, à différents moments, participer au projet à leur niveau que se

soit oralement ou dans des activités réelles de production d’écrit. Le plus grand

investissement de chacun m’a permis de les amener à une phase de réécriture

individuelle, donc à une implication personnelle plus forte. La multi – correspondance,

facteur motivant, a permis à chacun de se sentir concerné tout au long du chantier.

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3.1.3 L’histoire inventée sur le modèle du conte.

3.1.3.1 Présentation du projet et des objectifs.

Mise en projet.

Suite à la recherche d’idées pour envoyer quelque chose aux correspondants, les

enfants ont pensé à écrire une histoire illustrée sur ordinateur. L’idée est apparue aux

enfants déjà présents en CLIS l’année précédente. Nous avions réalisé une histoire par

enfant, illustrée par des dessins avec le texte lu et enregistré sur l’ordinateur. Le tout étant

assemblé par le maître avec le logiciel Powerpoint de Microsoft. Ce logiciel permet de

créer un “ livre multimédia” . Le lecteur peut ainsi choisir l’histoire qu’il veut écouter en

cliquant sur le prénom des écrivains.

Les objectifs.

En termes de comportement : s’impliquer dans le projet, mener le travail à son terme.

En termes disciplinaires : se familiariser avec la structure du conte, transcrire une

production langagière en écrit, produire une illustration en relation avec son texte ou

inversement, mémoriser l’écriture de mots usuels les plus courants ainsi que les

graphèmes les plus fréquents, lire de manière fluide et expressive son histoire, saisir son

texte sur l’ordinateur.

Démarche du projet.

Séance 1°- Le tri de livres.

Afin d’en savoir plus sur les contes, une recherche en B.C.D est effectuée. Elle permet de

distinguer différents écrits : les romans, les documentaires, les journaux et les contes . La

distinction est difficile, seul le journal est facilement reconnu. Les enfants arrivent

cependant à différencier “ les histoires qui se passent en ce moment, avec des

personnages réels ” de celles qui sont “ d’un pays qui n’existe pas, que l’on ne sait pas

quand ça se passe ”. Cette différence réel / imaginaire, nous permet de trouver des contes

principalement issus de la revue mensuelle “ Milles et une histoires ”.

Séance 2°- Observation des personnages présents dans les livres de contes.

De la recherche dans les livres ramenés de la BCD, nous listons tous les personnages qui

pourraient être dans les rôle des gentils (dont le héros) / méchants . Cette séance permet

de se familiariser avec l’univers du conte, et permettra par la suite à chacun de choisir ses

personnages.

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Séance 3°- Préciser la structure du conte.

Suite à la lecture d’histoires, les enfants essaient de formuler comment l’histoire se

déroule : “ Il y a la fée, (gentille), qui est embêtée par un ogre, il lui veut du mal, mais elle

arrive à gagner en le tuant . ”. Nous faisons le choix d’un héros, qui va rencontrer un

problème (par exemple un méchant), essayer de le résoudre pour que l’histoire finisse

bien.

Séance 4°- Choix de la trame, isoler les début de contes.

Individuellement, chaque enfant me précise qui sera son héros, ses amis, le(s)

méchant(s) , le problème qu’il va rencontrer puis comment se déroulera la suite jusqu’au

dénouement. Cette trame d’idées est conservée pour la suite ( pour mémoire).

La lecture du début de plusieurs contes permet pour remarquer des similitudes et

dégager une façon de commencer son histoire : “ Il était une fois…Il y a très

longtemps…Jadis….Autrefois….Il y a bien longtemps…..Dans un pays lointain….. ”

Séances suivantes : écriture et illustration des différentes phases de l’histoire.

C’est un travail individuel. Chaque enfant avance à son rythme dans l’écriture. A chaque

nouveau texte, l’élève passe formuler ses phrases avec moi, en relation avec le dessin

déjà fait ou à venir. J’aide à la formulation de phrases cohérentes avec la trame décidée

lors de la séance 4. Avant chaque nouvelle production, le texte déjà écrit est relu

individuellement, avec mon aide ou devant la classe. Les enfants disposent d’une feuille

d’écriture pour chaque texte.

3.1.3.2 Analyse et bilan.

Analyse.

Groupe des non- lecteurs :

Dans ce groupe de 2 élèves, la production écrite se limite aux étapes de conceptualisation

et de formulation12. Etant non - scripteurs, avec des troubles de la motricité fine, le support

de narration a été choisi sur un livre de conte dont les dessins les inspiraient pour

inventer leur histoire. Chaque dessin est incrusté sur une feuille blanche, et mis en couleur

par l’élève. La formulation du texte se fait grâce au dessin sous forme d’une dictée à

l’adulte. A chaque nouvelle séance, l’enfant reprend son histoire et la mémorise.

Exemple de Dorian :

Pour son dessin 2 ( annexe 18), la formulation est progressivement passée de « ya des

filles, elles dansent… le garçon, il regarde, ….. l’a une bosse. » à « Le garçon, il regarde

12 en référence au paragraphe 2 .5 sur les étapes d’une production d’écrit.

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les filles, l’a une bosse…derrière » puis « Le garçon regarde les filles. Il / le garçon a une

bosse dans le dos. ».

Groupe des pré- lecteurs :

Les objectifs sont différents suivant les besoins des élèves, en voici quelques exemples :

Ludovic :

C’est un enfant très en souffrance dans la classe. Dans une situation familiale difficile, il ne

s’investit pas dans les activités de la classe, ne rentre pas dans la lecture. Pourtant, sur

ce projet d’écriture, il paraît motivé et fait preuve d’une très grande application dans la

réalisation graphique de ses dessins. Pour lui, lors de la formulation, j’inscris tous les

mots ( sauf mots usuels ou déjà vus) dont il a besoin pour écrire son texte. La transcription

devient une activité d’identification de mots ( annexe 19) et de mémorisation ( le , la, les

…). Projet motivant pour lui, il s’investit même dans la lecture de son histoire devant les

autres enfants de la classe.

Gwénaël (annexe 20):

La formulation est guidée mais transcription moins aidée (réservoir de mots moins grand).

La formation de syllabes phonétiques est mieux maîtrisée, la confrontation au code est

plus grande.

Stéphane :

Très investi dans l’activité, il avance à grand pas dans la production de dessin et de texte.

Progressivement, il essaie d’écrire seul car il a une idée précise de son histoire qui devient

un véritable roman ( 9 textes produits) . La révision de sa production se fait par la lecture

du texte. Son écriture devient quasi-phonétique (voir annexe 21). On peut remarquer «

un piaije » pour piège, « Sê » pour C’est, « piqeu » pour pic.

Bilan.

Malgré la longueur du projet et les difficultés qu’ils rencontrent, les élèves restent motivés

dans la production. Ils ont tous hâte de pouvoir voir et écouter leur histoire sur les

ordinateurs, de les envoyer aux correspondants sous la forme d’un CD-ROM et de les

présenter aux autres classes (une page d’écran est présentée en annexe 22). Leur

motivation me paraît réellement intrinsèque, c’est leur histoire, qu’ils ont eux-mêmes

inventée et mise en texte. Je peux aussi constater qu’au fur et à mesure que le chantier

avance, mon aide est moins importante, la formulation est plus rapide, les mots usuels

sont mieux orthographiés. Il y a moins de mots oubliés dans les phrases, de syllabes

tronquées.

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3.2 La classe de CLIS de l’école Vendôme.

3.2.1. Présentation du projet et des objectifs.

L’histoire Interactive, Clis de Vendôme.

Dans le cadre du mémoire sur la production d’écrits, j’ai proposé à Mr Estaffin de créer

une histoire interactive de type multimédia ( textes, dessins, sons) où le lecteur pourra

choisir comment orienter son histoire en cliquant sur différents liens ou boutons d’actions

(une page d’écran est proposée en annexe 23). L’histoire suit une structure arborescente

( voir le schéma complet en annexe 24) .

La finalité du projet est de disposer d’un CD-ROM pour soi ( la classe) , pour envoyer aux

correspondants de la classe de Graulhet, mais aussi d’inviter les autres classes de l’école

à se servir de ce CD-ROM, et leur en expliquer le fonctionnement (objectif de

communication et d’intégration active).

Les objectifs du projet .

A partir d’une évaluation diagnostique, avec Mr Estaffin, nous avons défini des objectifs

propres à chaque enfant ou groupe d’enfants .

Un travail préalable a été mené en amont sur l’étude des contes . L’objectif principal est de

s’engager dans un projet d’écrit de fiction sur le modèle du conte. D’autres objectifs plus

précis sont travaillés lors des séances de révision du texte (structuration de la phrase,

travail sur le code, les accords sujet-verbe …)

3.2.2. Analyse et bilan.

Analyse des séquences 1 et 2. (fiche de préparation en annexe 25 )

Séquence 1 : Lors de la recherche individuelle du héros, 3 enfants ont eu un manque

d’inspiration pour imaginer leur personnage. Beaucoup d’élèves veulent mettre en héros

des copains, les noms inventés s’en ressentent : Younoff ou Yougui pour Younous. Le

passage à l’écriture s’est fait grâce au dessin, avec aide au tableau (mot écrit à la

demande) ou, pour certains, avec les aides existantes en classes ( cahiers ou affichages).

Les écrits produits sont marqués par le vécu de la classe ou des enfants : cours d’anglais,

origines espagnole ou portugaise. Le vote a permis de créer un consensus sur le héros de

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l’histoire. Miguel, créateur de Mathias (annexe 26 ), le personnage choisi, a pour la 1° fois

lu son écrit face au groupe classe.

Séquence 2 : La recherche des 3 premiers textes présentant le lieu de l’histoire, la

description du héros et de son problème pose quelques difficultés. Au sein des groupes, il

n’y a pas assez d’activité pour tous les enfants (un dessin et un texte à produire pour 4).

De plus les élèves écrivains « réinventent » le héros en se l’appropriant des problèmes

de cohérence apparaissent. Enfin, la représentation graphique du héros n’est pas à

l’identique du modèle. Chacun invente son héros, son histoire. Ces difficultés seront le

point de départ de l’activité de révision collective du texte .

Les différentes activités de révision menées .

Progressivement, au cours de l’avancement du projet, les activités de révision ont été

conduites avec des groupes d’élèves de plus en plus restreint.

En groupe classe (12 élèves) : elle correspond à la séquence 3 ( annexe 25 ). Le texte

a été modifié par le groupe classe suivant les propositions de chacun, et suivant les

discussions.

En groupe d’écriture (6 élèves) : l’activité proposait aux enfants de se confronter par la

lecture à leur texte brut tapé à l’ordinateur. Cette lecture pouvait permettre de repérer des

mots mal orthographiés ou des oublis dans la ponctuation (annexe 27). Une deuxième

fiche présentait le même texte, avec des indices visuels indiquant les points à réviser.

En groupe de niveau de compétences : ces activités sont menées par le maître de la

CLIS de Vendôme dans le cadre de sa programmation de classe. Elles correspondent à

un travail de structuration de l’écrit ( code orthographique, ponctuation, accords,

pronominalisation, conjugaison….).

Bilan.

Le projet, par son ampleur ( 43 dessins, 43 textes + 19 liens) , s’est étalé sur plusieurs

mois. La motivation initiale des élèves était forte. A la moitié du projet, nous sommes

rendus compte que les élèves étaient perdus dans l’histoire, les productions des enfants

ne tenaient plus compte de la problématique du héros, la motivation s’effilochait. Chacun

s’appropriait l’histoire pour l’écrire à sa façon. Une séance de recadrage a été nécessaire

pour resituer l’action et la problématique du héros, chercher collectivement des idées

possibles pour la suite. Pour relancer la motivation, une ébauche du CD-ROM a été

présentée aux enfants sur un ordinateur.

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Ce « flottement » à mi-projet m’a amené à penser aux améliorations possibles du

chantier, j’en présenterai ici quelques une :

La construction dès le début de l’histoire d’un grand panneau retraçant l’avancement

du chantier (arborescence avec texte et dessins) aurait permis aux enfants de mieux s’y

retrouver, de mieux se situer dans les différents chemins possibles ;

Ce grand panneau aurait pu servir de support de lecture pour , à chaque séance,

“ jouer ” avec le texte en choisissant son chemin comme le fera le futur lecteur ;

Voir le projet se monter au fur et à mesure de son avancement sur l’ordinateur (mais il

y a des difficultés techniques de transport de données, de matériel sur place) aurait été un

facteur motivant.

Le pari de l’engagement de tous dans le projet a été gagné. Je peux aussi souligner la

forte implication des élèves dont la lecture est hésitante lors des séances d’enregistrement

des textes. Enfin, la plus belle récompense, pour les élèves, a été de pouvoir utiliser le

CD-ROM, de s’écouter raconter l’histoire, de jouer avec elle.

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4. CONCLUSION

Ces quelques pages m’ont permis d’exposer ma conception du travail d’enseignant

spécialisé option D intervenant dans une classe de CLIS 1. Les productions d’écrits mises

en place ont toutes eu un enjeu de communication réelle sur un support concret avec des

interactions effectives entre pairs mais également entre les élèves et l’écrit. Chaque élève,

par les stratégies adaptées qui lui ont été proposées, a pu produire à son niveau, et

participer au projet commun à toute la classe.

Le projet de correspondance a été perçu très positivement. Vecteur d’une forte motivation,

il a responsabilisé les élèves et leur a fait prendre conscience du rôle de l’écrit.

Face aux difficultés rencontrées, la recherche d’aides adaptées à chacun et la mise en

place d’une pédagogie individualisée ont permis la réussite de tous.

La classe, dans son organisation spatiale et sa dynamique relationnelle s’en est trouvée

changée : les affichages des productions sont plus vivants, les idées sont discutées en

grand groupe, les choix faits en commun, un ordinateur a pris place au fond de la pièce.

Par ce projet de correspondance multiple, la classe s’est ouverte sur l’extérieur, les

élèves, eux, se sont « ouverts » à la lecture et à l’écriture.

Les sollicitations « extérieures » se multiplient, stimulant les apprentissages et favorisant

la naissance de nouveaux projets.

Les enfants ont développé des stratégies d’écriture de textes et ont appris à s’interroger

devant l’écrit. Ils ont perçu la relation entre la langue et l’écrit , entre l’écrit et la lecture,

entre la lecture et l’oral. Par ce chemin, ils se sont réconciliés avec les trois aspects

fondamentaux de la langue : l’oral, la lecture et l’écrit.

Véritables vecteurs de motivation, ces projets ont redonné confiance aux élèves quant à

leur capacité à réussir et à apprendre; confiance nécessaire pour leur permettre de se

réinscrire dans un processus d’apprentissage de la langue et de retrouver leur statut

d’élève à part entière.

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5. BIBLIOGRAPHIE

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Comprendre l’enfant apprenti lecteur, recherches actuelles en psychologie de l’écrit, G.

CHAUVEAU, ed. RETZ, 2001

Comment l’enfant devient lecteur, G. CHAUVEAU, ed RETZ, 1997.

Motivation et réussite scolaire, A. Lieury, F. Fenouillet, ed DUNOD, 1997.

Les nouveaux programmes de l’école élémentaire, MEN, 2002.

Mauvais lecteurs, pourquoi ?, J. Fijalkow, ed PUF, 1996.

Former des enfants producteurs de textes, J. Jolibert, Hachette éducation, 1988.