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PROGRÈS MOTEURS ET GYMNASTIQUE AU C.E.M. DES ALOUETTES PAR B. ROBERT ENFANTS HANDICAPES ET APS « Je veux bouger, je peux bouger, et je progresse »... Tel est le cri d'espoir et de volonté que nous lancent les enfants qui participent aux séances de gymnastique rythmique, de gymnastique au sol et aux agrès ; séances que nous avons mises en place depuis trois ans au Centre d'Education Motrice (CEM) « les Alouettes », de Lille. Imaginer que des infirmes moteurs cé- rébraux puissent monter sur une poutre, sur des barres parallèles, se suspendre aux anneaux, ou faire du trampoline, pouvait sembler une gageure sinon une provocation. C'est pourtant la démarche que nous avons tentée avec huit enfants Infirmes Moteurs Cérébraux (IMC) et que nous relatons ici brièvement NOTRE PROJET EDUCATIF Partant de l'hypothèse que la pratique d'activités physiques contribue à aider l'enfant handicapé à mieux connaître son corps et ses possibilités, à mieux s'adapter à la vie de tous les jours et à ses conditions changeantes, mais toujours contraignantes, nous avons pris l'initiative en 1986-1987 de faire participer deux groupes d'enfants volontaires IMC à des activités gymniques. Pour cela, nous leur avons proposé d'in- vestir l'ensemble des espaces et des agrès de la salle de gymnastique du complexe sportif Gaston Berger de notre ville. Le choix de la pratique de la gymnastique est à envisager ici comme un des moyens de l'éducation et de la rééducation de l'enfant, notamment par la recherche d'au- tonomie, par l'intégration et l'épanouisse- ment. POURQUOI LA GYMNASTIQUE ? Nous avons considéré qu'il fallait augmen- ter le champ d'expérimentation et de rela- tion de ces enfants privés totalement ou en partie de leur motricité, évoluant dans un 62 Revue EP.S n°226 Novembre-Décembre 1990 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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Page 1: PROGRÈS MOTEURS ET GYMNASTIQUE

PROGRÈS MOTEURS ET GYMNASTIQUE AU C.E.M.

DES ALOUETTES

PAR B. ROBERT

ENFANTS HANDICAPES ET APS « Je veux bouger, je peux bouger, et je progresse »... Tel est le cri d'espoir et de volonté que nous lancent les enfants qui participent aux séances de gymnastique rythmique, de gymnastique au sol et aux agrès ; séances que nous avons mises en place depuis trois ans au Centre d'Education Motrice (CEM) « les Alouettes », de Lille. Imaginer que des infirmes moteurs cé­rébraux puissent monter sur une poutre, sur des barres parallèles, se suspendre aux anneaux, ou faire du trampoline, pouvait sembler une gageure sinon une provocation. C'est pourtant la démarche que nous avons tentée avec huit enfants Infirmes Moteurs Cérébraux (IMC) et que nous relatons ici brièvement

NOTRE PROJET EDUCATIF

Partant de l'hypothèse que la pratique d'activités physiques contribue à aider l'enfant handicapé à mieux connaître son corps et ses possibilités, à mieux s'adapter à la vie de tous les jours et à ses conditions changeantes, mais toujours contraignantes, nous avons pris l'initiative en 1986-1987 de faire participer deux groupes d'enfants volontaires IMC à des activités gymniques. Pour cela, nous leur avons proposé d'in­vestir l'ensemble des espaces et des agrès de la salle de gymnastique du complexe sportif Gaston Berger de notre ville. Le choix de la pratique de la gymnastique est à envisager ici comme un des moyens de l'éducation et de la rééducation de l'enfant, notamment par la recherche d'au­tonomie, par l'intégration et l'épanouisse­ment.

POURQUOI LA GYMNASTIQUE ?

Nous avons considéré qu'il fallait augmen­ter le champ d'expérimentation et de rela­tion de ces enfants privés totalement ou en partie de leur motricité, évoluant dans un

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espace réduit au fauteuil, au tricycle, au déambulateur, aux canes et aux chaussures orthopédiques. Après accord médical, il a été décidé de faire ôter tout appareillage ou moyen de locomotion ; le corps de ces enfants s'est trouvé ainsi placé dans un rapport nou­veau au temps et à l'espace (au sol comme aux agrès ou par l'intermédiaire de rubans, cerceaux, balles, et de structures sonores rythmées). La salle de gymnastique présen­tait également l'avantage d'être un lieu inhabituel, un espace à partager avec des étudiants et lycéens pratiquant au même moment des activités gymniques ou des exercices de musculation ; un lieu favora­ble à l'expression, à la libération puis à l'organisation de la motricité, l'objectif étant de : prendre conscience, non de ses incapacités, mais de ses capacités, pour s'en servir dans tous les espaces possibles.

NOTRE DEMARCHE

Pour contribuer à la recherche du déve­loppement de nouvelles possibilités chez ce groupe d'enfants, nous avons proposé, avec l'équipe d'encadrement responsable des heures d'éducation physique (trois étudiants en licence, un étudiant en maî­trise STAPS mention « EPS pour handica­pés », un enseignant, un kinésithérapeute et un stagiaire « Travaux d'Utilité Collec­tive » du CEM), des situations gymniques permettant d'atteindre les objectifs sui­vants : - augmenter, élargir, varier les champs d'expérience et les expérimentations des enfants ; - appréhender tous les espaces possibles ; - créer des jeux de relation. Notre mode de fonctionnement, au départ totalement empirique (nous avions certes une connaissance réelle de la gymnastique et des IMC, mais pas de ces mêmes enfants en « situation-problème » en gymnastique) s'est progressivement élaboré et nous a permis de construire et de complexifier des situations dans lesquelles les enfants ont réussi à « disposer » d'eux-mêmes. Préci­sons que l'objet central de nos interven­tions porte, non sur la recherche du geste technique isolé, mais sur l'habileté (cf. encadré). Les exemples de situations-problèmes qui suivent illustrent, en partie, cette approche pédagogique.

EXEMPLES DE SITUATIONS

SITUATION AUX ANNEAUX (*)

• Description de la tâche Après élan sur un plinth, effectuer des balancers en suspension aux anneaux ; puis lâcher ceux-ci pour faire une chute contrôlée.

• Variantes Balancers - Varier l'élan sur le plinth (le reculer par rapport à la verticale des anneaux). - Après chaque élan reprendre un appui équilibré sur le plinth. Chutes - Tomber droit équilibré. - Entrer dans un cerceau. - Tomber assis. - Effectuer une vrille (1/2, entière...). - Tomber dos.

• But de la tâche Balancers - Aller toucher un ballon tenu en avant des anneaux. - Aller « taper » dans un ballon. - Aller faire tomber un tapis maintenu verticalement en avant des anneaux. Chutes - Dans une cible matérialisée sur le tapis. - Après avoir envoyé un ballon vers le haut, chute assis. - Après avoir fait un tomber tapis en bout de suspension, chute sur le dos.

• Mise en place - Placer un plinth en arrière de la verticale des anneaux pour augmenter les possibili­tés d'attraper les anneaux et de prendre un élan. - Mettre une aire de réception en gros tapis mousse. - Au-delà de la verticale des anneaux, matérialiser une cible sur le tapis. - Selon la taille des enfants et leurs possibi­lités, mettre un tremplin ou autre dispositif pour rehausser l'ensemble et leur permet­tre d'attraper les anneaux par leurs propres moyens.

• Déroulement - Les enfants sont aidés à monter sur le plinth, les plus handicapés sont « hissés ». L'objectif est le travail aux anneaux, non le franchissement des obstacles.

- Pour attraper les anneaux, pour résister « dans » la suspension et dans les lâchers, chacun doit se « débrouiller » seul, au maximum de ses possibilités. - La parade doit le moins possible se trans­former en aide, tout en assurant à chacun toute la sécurité nécessaire (suivi des tra­jectoires par le pareur).

- L'aide est effective lors de l'impossibilité d'un enfant d'attraper l'un ou les 2 an­neaux (dans ce cas on peut l'aider à s'ac­crocher et lui maintenir les mains sur les anneaux). - Pour les enfants très handicapés, on peut effectuer les balancers et la chute avec eux (prise sous les aisselles de l'enfant - chute sur le dos, l'enfant sur soi). - L'enfant peut être aidé dans ses balancers en le tenant aux genoux. - Toutes les chutes sont « assurées » (ac­compagnement par le pareur). - Tous les enfants doivent vivre les sensa­tions de chute, de balancer, de réception...

(*) Pour des informations complémentaires sur le contenu des situations présentées ici (lâchers, mise en place, déroulement) se reporter aux films cités en [2] et [3].

LA PEDAGOGIE DE LA TACHE Hors de son contexte, le geste n'a pas de sens : replacé dans son contexte, il appar­tient à une habileté. L'habileté est une configuration efficace de gestes, de déplacements de segments cor­porels les uns par rapport aux autres, pour régler le problème posé dans l'activité. L'habileté est définie par rapport à un but, un objectif à atteindre et elle est orientée vers ce but. Elle se caractérise par : - la réception et l'identification des informa­tions venant de l'environnement ou du corps propre ; - la sélection de la réponse appropriée (stra­tégies, planification) ; - la construction de la réponse motrice (pro­gramme) ; - l'exécution et le contrôle de la réponse.

La tâche se caractérise par le but à atteindre. On distingue : - le but de la tâche ; - les contraintes régulatrices de la tâche (plus ou moins d'incertitude).

EPS № 226 NOVEMBRE DÉCEMBRE 1990 63 Revue EP.S n°226 Novembre-Décembre 1990 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé

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SITUATION AU TRAMPOLINE

• Description de la tâche Enfoncer la toile, rebondir en variant les positions de départ, en enchaînant diffé­rentes positions.

• Variantes - Adapter des positions de départ différen­tes : debout, à 4 pattes, à genoux, allongé. - Rebondir en prenant une position définie (debout, à genoux, à quatre pattes, sur le dos, sur le ventre, 1/2 tour...). - Enchaîner deux, puis trois positions.

• But de la tâche - Sur des lignes matérialisées en avant et en arrière de la croix centrale, rebondir en avançant puis en reculant le plus de fois possible. - Rebondir le plus de fois possible en effectuant des enchaînements de position.

• Mise en place - Matérialiser deux lignes en avant et en arrière de la croix centrale du trampoline. - L'accès de la toile se fait par « porter » pour augmenter le nombre de passages sur le trampoline. - Autour du trampoline, les enfants qui restent, participent à la parade.

• Déroulement - Chaque enfant passe dans la position qui convient à ses possibilités et cherche à battre son propre record ou celui d'un camarade. - Les passages en positions ventrale ou dorsale ne peuvent se faire dans un pre­mier temps qu'à partir d'une position 4 pattes ou à genoux. - Les changements de position pour être validés doivent se faire au centre du tram­poline sur la croix. - Pour les plus handicapés, les positions ventrale et dorsale sont proposées au dé­but. La position à quatre pattes leur est égale­ment soumise dans un deuxième temps pour qu'ils essayent de prendre, de main­tenir cette position et rebondir. Ils doivent également réaliser les enchaînements de positions : demi-tour, position ventrale...

SITUATION DE RYTHME

• Description de la tâche Sur une musique avec des accents nets, marquer les accents avec un engin de GRS : balle, cerceau, ruban.

• Variantes Balle - faire rebondir la balle ; - la lancer et la rattraper ; - la lancer, la laisser rebondir puis la rat­traper.

Cerceaux - le faire rouler, vers l'avant, vers l'arrière ; - le lancer en avant et le faire revenir vers soi ; - le lancer, le rattraper...

Ruban - faire bouger le ruban dans tous les sens ; - faire des dessins, jouer dans un espace (ronds, petits ou grands, vers l'avant, l'ar­rière, les côtés...) ; - faire des dessins dans un espace en se déplaçant...

• But de la tâche - Faire le plus possible de lancers, de rou-lers, d'attrapers (selon l'engin) en gardant le contrôle et sans faire de nœuds avec le ruban (l'objet est de jouer, de s'amuser avec un engin en le contrôlant).

• Mise en place - Choisir une musique avec des accents nets. - Pratiquer dans une salle avec si possible un plafond très haut, une balle de GRS chacun. - Pour les plus handicapés (sur le dos), prévoir des ballons de beaudruche ou des balles dégonflées pour une meilleure pré­hension. - Assurer un temps d'écoute, de reconnais­sance et de mémorisation des accents avant exécution complète.

• Déroulement - La musique règle les comportements. Tous travaillent en même temps. L'éduca­teur conseille collectivement ou individuel­lement. - Selon son niveau de handicap, chacun se place au départ debout, à genoux ou al­longé... - Pour les plus handicapés, quelques adap­tations sont nécessaires : Balle : utiliser un ballon de beaudruche. Une tierce personne fait office d'obstacle sur lequel doit rebondir le ballon de beau­druche de l'enfant. L'animateur se place sur le côté, en avant ou en arrière de l'en­fant. Cerceaux : un petit anneau peut être utilisé. Avec le grand cerceau, on peut faire des jeux de position et de déplacement (passer dedans, par le haut, par le bas, le côté). Ruban : le ruban est raccourci.

SITUATION AU SOL

Franchir des obstacles

• Description de la tâche Passer dessus, dessous, entre différents obstacles et dans différentes positions (de­bout, à genoux, à 4 pattes, en rampant sur le ventre, sur le dos, en roulant en avant ou sur le côté).

• Mise en place Tous les obstacles sont imaginables : bar­res (plus ou moins long, plus ou moins large), lattes de bois, haies, cylindres assez larges, mini poutre, plinth, mouton.

• Déroulement - La disposition des obstacles sous forme de circuit en variant les passages successifs est intéressante. - Les plus handicapés font le même circuit que les autres sur un seul mode de dépla-

UNIVERSITÉ D'ÉTÉ 1990 EPS À L'ÉCOLE.

UN LIEU DE RÉACTUALISATION DES CONNAISSANCES.

L'Université d'été 1990 sur l'EPS à l'école (du 2 au 6 septembre à l'Université de Poitiers} est né© d'une volonté conjointe de la Direction des Ecoles du Ministère de l'Education Nationale et de l'équipe doctorale STAP5 dirigée par Alain Junqua et centrée autour de l'U.A. 131 du CNRS. Les apports de la recherche et des techniques multimé­dias à la connaissance des activités physiques et sporti­ves ont constitué le thème central de cette session. Les objectifs affichés consistaient à : - permettre le rapprochement entre les chercheurs uni­versitaires, français et étrangers et les formateurs, spé­cialistes de l'activité physique du jeune enfant ; - contribuer à la formation des formateurs ; - développer des projets pédagogiques innovants ; - chercher la meilleure élaboration de contenus d'ensei­gnement performants ; - étudier les techniques nouvelles de transmission des connaissances. Les concepteurs de cette Université se sont attachés à organiser les travaux pour permettre à des experts de l'enseignement et de la formation de saisir ce que peut apporter la recherche à la connaissance de l'EPS à l'école. Parallèlement à une actualisation de leurs connaissances, les stagiaires ont pu bénéficier d'infor­mations sur des secteurs de recherche peu exploités à ce jour dans le domaine de la motricité du jeune enfant : la mécanique de la motricité, la physiologie de l'activité musculaire de l'enfant, la modélisation des pratiques, la vision artificielle et la reconnaissance des formes, les systèmes experts, les technologies éducatives interacti­ves et les outils multimédias de la communication scienti­fique. L'équipe d'animation a tenté de donner une cohérence d'ensemble aux différentes interventions. L'environne­ment technologique innovant du Futuroscope a permis des observations inhabituelles : - par le kinemax en faisant émerger la « puissance » évocatrice de l'image ; - par le cinéma dynamique en faisant constater que le pilotage par ordinateur des mouvements imposés aux sièges des spectateurs et coordonnés à l'image, modifie la perception de l'action présentée à l'écran ; - par l'omnimax en vision sphérique en saisissant les difficultés d'un vol spatial, donc en situation d'apesan­teur. Un certain nombre de questions ont été abordées dans les conférences qui ont suivi : • Alain Junqua, professeur STAPS, a traité d'une nou­velle approche des principes essentiels de l'activité humaine fondée sur la recherche scientifique : la méca­nique du mouvement et les lois de la Physique et les limites de l'observation empirique des objets en mouve­ment ; • Michel Leard, Professeur E.E.A. et directeur du centre de formation à l'informatique et à ses applications pédagogiques, a fait un exposé sur la vision artificielle et la reconnaissance des formes ainsi que sur leurs limites ; • Jacques Van Hoecke, chercheur à l'INSEP, a décrit le fonctionnement des chaînes musculaires et les liaisons entre les forces internes et les énergies développées ; • Philippe Marton, Professeur à l'Université Laval de Québec, est intervenu sur la liaison entre Informatique et Pédagogie, sur l'apprentissage interactif permis par l'usage du vidéodisque piloté par ordinateur et les limi­tes de cette interactivité. Plusieurs séances de travaux pratiques ont été réalisées dans le cadre du Lycée « innovant » du Futuroscope, autour de trois types d'outils : une analyse informatique d'un geste sportif après modélisation (Winter) : un sys­tème de prise d'image à grande vitesse (50 ima­ges/s) - IMNOF 2000 et un système V.A.O. développé par l'antenne universitaire. La traduction concrète de ces informations reçues a fait l'objet de productions de posters et de séries de transpa­rents réalisés au cours de travaux pratiques dirigés dans le Laboratoire de Communication d'Informations Scienti­fiques (LABCIS). Bernard Castagna, Directeur du LABCIS, s'est attaché à décrire l'étendue des possibilités dans une conférence préalable. Cette université d'été, qui avait pour tâche essentielle d'alerter les stagiaires sur les ressources fournies par la recherche scientifique et utilisables pour la construction de contenus d'enseignement et de formation pertinents, semble donc avoir atteint un de ces objectifs. Les travaux réalisés à cette occasion dans le domaine de la commu­nication scientifique des fondements de l'EPS à l'école pourront vraisemblablement se prolonger vers l'élabora­tion de productions interactives tournées vers la forma­tion des maîtres et l'élaboration de contenus d'ensei­gnement. E.P.S. 64

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cement et de franchissement. Par exem­ple : ramper le plus loin possible et en franchissant sur le mode « ramper » le plus d'obstacles possibles (on peut passer au-dessus d'une latte sur le sol, ou sous un banc...).

Cordes et balancés

• Description Se balancer au ras du sol, par ses propres moyens (jouer à Tarzan !...).

• Mise en place - Une ou des cordes pour les simples ba-lancers. - Un plan surélevé pour le départ avec élan (un banc par exemple). - Une aire de réception (tapis mou) pour des « sorties » plus ou moins complexes mais toujours équilibrées.

• Déroulement - Selon ses moyens, chacun utilise la corde à noeud ou la corde lisse. Tendre vers l'utilisation de la corde lisse pour la plu-

part des enfants. Varier les « sorties » de corde (debout, sur le dos, retour au point de départ...).

Roulades

• Description Essayer toutes les formes de roulades

possibles : en avant, en arrière, sur les côtés, groupés, sur le plan longitudinal...

• Mise en place - Utiliser des plans très inclinés au départ puis de moins en moins inclinés par la suite. - Les roulades dans le plan longitudinal se font aussi au sol pour se déplacer ou pour accéder par l'intermédiaire d'un plan in­cliné à un plan surélevé. - On peut prévoir plusieurs ateliers de niveau de difficulté différent.

• Déroulement - L'accès au plan incliné haut doit être

adapté pour que chacun puisse le faire par ses propres moyens et selon ses moyens (positions debout, à 4 pattes, ramper). - Les plus handicapés, même s'ils ne peu­vent se « grouper » pour réaliser une rou­lade avant, doivent vivre la roulade sur le plan incliné élevé. Dans ce cas, les porter sur le plan, les placer puis les aider dans la rotation.

RESULTATS - EVALUATION

Pour juger de l'amélioration des capacités motrices de notre groupe d'enfants, une évaluation a été faite à partir de deux tests passés à un an d'intervalle [1]. Cette évaluation est basée sur l'analyse vidéo, image par image, du comportement moteur de deux diplégiques et deux qua-driplégiques en fauteuil roulant électrique. Chaque enfant est comparé à lui-même. Elle a permis de mettre en évidence qu'au deuxième test : - les enfants bougent davantage et plus rapidement ;

- ils utilisent plus et mieux l'ensemble du corps ; - ils agissent avec plus d'économie et plus d'amplitude. Les enfants ont donc modifié leurs façons de « bouger », d'utiliser leur corps. Ils s'en servent de façon plus efficiente au deuxième test (cf. encadré 2). Nous avons pu également observer sans toutefois le mesurer que : - le plaisir de chaque enfant est manifeste et les absences aux séances de gymnastique nulles ; - tous les agrès sont investis et des enchaî­nements complexes apparaissent ; - le corps de l'autre gêne moins les en­fants ; - les liens (aide, question, discussion) se créent entre les enfants et la population fréquentant habituellement la salle de gymnastique ; - l'espace, les chutes ne font plus peur.

CONCLUSION

L'étude présentée dans cet article n'est qu'un aspect limité de notre recherche. Il n'est donc pas question de prétendre que l'éducation physique dispensée par le biais de la gymnastique est la seule cause des changements observés chez les enfants de notre Centre. Les contextes familial, scolaire, médical, para-médical gardent toute leur impor­tance dans leurs fonctions respectives. Cependant, les résultats recueillis à partir des tests de fin d'année, viennent confir­mer notre hypothèse de départ, à savoir que la pratique des activités physiques a contribué au développement des enfants du CEM « Les Alouettes » et que par une éducation physique « adaptée » il est pos­sible de permettre à tout enfant handicapé d'exploiter sur le plan moteur, sensoriel, cognitif et affectif, toutes ses capacités restantes et de faire des progrès.

Bernard Robert Professeur EPS

UFR STAPS Lille Ronchin

PHOTOS : AUTEUR

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES ET VIDEOGRAPHIQUES

[1] ROBERT (B.), Organisation du comportement moteur d'enfants IMC ; approche éthologique, Mémoire DEA STAPS - Université de Paris X Nanterre - Laboratoire de biologie et de physiolo­gie du comportement, 1986, 157 p. [2] ROBERT (B.), « Handicapé moteur je veux bouger, je peux bouger et je progresse ». Film VHS couleur - Durée 27 minutes. Film produit par le CRDP de Lille. [3] HAGE (O.), ROBERT (B.). « Handicapé mo­teur, la gymnastique comme les autres ? ». Film VHS couleur - Durée 25 minutes. Film produit par l'Ecole Normale de filles de Douai. Pour tous renseignements sur les références [1], [2], [3] écrire à : Bernard Robert - UFR STAPS de Lille 9, chemin Latéral - 59790 Ronchin.

AMELIORATION DU COMPORTEMENT MO­TEUR Sébastien vit en fauteuil électrique. Placé au sol, il ne rampait que sur quelques centimè­tres en début d'année. En fin d'année, il franchit des obstacles de 20 à 25 centimètres de haut et enchaîne des roulades et des rotations sur des plans incli­nés ou au sol. Valérie marche avec beaucoup de difficulté. Elle traverse pourtant la poutre (1,20 m au-dessus du sol) sans chuter et en « rattra­pant » seule ses pertes d'équilibre. Frédéric marche mal, tombe beaucoup. Il réalise au trampoline un enchaînement de rebondissements (debout, à genou, assis) et de rotations (1/4 de tour, 1/2 tour...). Des modifications du comportement moteur sont enregistrées par les parents dans la vie quotidienne. Sébastien tombe encore de son fauteuil, mais il ne se blesse plus ; il fait un « roulé boulé ». Stéphane, également en fauteuil électrique, n'a plus peur de rester assis tout seul au bord de son lit. Il accepte le vide.

EPS N° 226 NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1990 65 Revue EP.S n°226 Novembre-Décembre 1990 c. Editions EPS. Tous droits de reproduction réservé