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UN ÉQUIPEMENT de protection indi- viduelle, usuellement appelé EPI, a pour fonction de garantir, de mettre à l’abri une personne, d’empêcher toute atteinte. Il y a dans « protection » l’idée de faire écran à certains phénomènes dangereux ou désagréables. Les pre- miers hommes se sont ainsi protégés du froid en tannant des peaux d’ani- maux pour couvrir leur corps. La fonc- tion première du vêtement est bien de protéger. À cet égard, la fourrure fut le premier des EPI. Depuis, la fonction du vêtement a subi les évolutions des sciences et des techniques, des activités qui en découlent et des modes de vie. Si la protection reste toujours sa mission essentielle, le vêtement a également celle de couvrir dans une perspective morale, de distinguer la fonction occu- pée, de parer et d’embellir. Depuis l’Antiquité, le vêtement a satis- fait à des besoins civils, professionnels et militaires. En envisageant spéciale- ment les EPI, nous considèrerons qu’ils ont bien mission de répondre à ces trois besoins. Compte tenu de l’importance accordée à l’équipement du guerrier et du soldat, les équipements indivi- duels de type militaire ont exercé une influence déterminante sur les équipe- ments professionnels et civils. Cepen- dant, la notion d’EPI, n’appartient pas au vocabulaire militaire. Le terme est en effet né de la législation hygiène et sécurité du travail, ce qui lui donne une connotation professionnelle. La frontière entre le professionnel et le civil est toutefois poreuse, en raison de la proximité de certaines activités et de l’accroissement exponentiel de la technique dans la vie quotidienne. Dès lors, nombre d’EPI sont à usage civil. En ouvrant ce dossier, nous souhaitons faire mieux apprécier ce que sont les enjeux de la conception, de la fabri- cation et de la distribution. Le marché des EPI n’est pas totalement libre, car il doit satisfaire à des réglementations nationales et internationales et à une normalisation. Il doit en outre répondre aux nouvelles exigences du dévelop- pement durable, qui supposent une prise en compte de l’EPI en tant que déchet. Mais c’est surtout l’efficacité de l’équipement qui est en cause. Or, le dispositif réglementaire et normatif ne garantit pas pleinement celle-ci. D’où l’importance qu’il convient d’accorder aux garanties offertes par les meilleurs professionnels. Les équipements de protection individuelle par Hubert Seillan Wisis adiat lortio eu facin utpatis augueros autem iurerat, quat.Od molobore dolore dolore feuis nullaor ip ea faci blam nis nulput ing enis ad tie vendio con hent wis nibh elese modionsenim amet alit lore magna feummy nim venisis del dio dunt aut landreet autat, consecte eros aliquat luptat lore et ute facilit, quating eugiamet dolobor suscinim iusto cortion ullandit irilisim zzrit, quis dio ea autpat velesto ex ent pratisi tin ulla auguero odionse ctetumsan henim nullutat. Equis num in henissed ea ad tio ea feugiat iscillan utat vulla con ulluptat nonsent vulla feu facincidunt la augiat. Dit alisit laoreet, vulputpat ipsuscil eraessed mod tatet lorer sed dolum zzriusto dolorem in hendre consendipis nonse minissenis nonullaore et laorer acil ut venibh eum quat nullandion volore min velissim zzrilla faccums andigna conseniamet augait adiat in vent landrero consectet ipit lorem eniat vel ut esto consendigna acin ut ad eugait vel utpation ut atum ex etummy nit lorem nit lorpero conse min . Mots clés à déterminer Photo Sperian Protection Photo 3M France SANTÉ SÉCURITÉ AU TRAVAIL 28 Préventique Sécurité - N°99 - Mai-juin 2008 Protection individuelle > Équipements

Protection individuelle - Formation, Recherche, Innovationpicardje/xpubli/2008EPI.pdf · nationales et internationales et à une normalisation. Il doit en outre répondre aux nouvelles

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UN ÉQUIPEMENT de protection indi-viduelle, usuellement appelé EPI, a pour fonction de garantir, de mettre à l’abri une personne, d’empêcher toute atteinte. Il y a dans « protection » l’idée de faire écran à certains phénomènes dangereux ou désagréables. Les pre-miers hommes se sont ainsi protégés du froid en tannant des peaux d’ani-maux pour couvrir leur corps. La fonc-tion première du vêtement est bien de protéger. À cet égard, la fourrure fut le premier des EPI. Depuis, la fonction

du vêtement a subi les évolutions des sciences et des techniques, des activités qui en découlent et des modes de vie. Si la protection reste toujours sa mission essentielle, le vêtement a également celle de couvrir dans une perspective morale, de distinguer la fonction occu-pée, de parer et d’embellir.

Depuis l’Antiquité, le vêtement a satis-fait à des besoins civils, professionnels et militaires. En envisageant spéciale-ment les EPI, nous considèrerons qu’ils ont bien mission de répondre à ces trois besoins. Compte tenu de l’importance accordée à l’équipement du guerrier et du soldat, les équipements indivi-duels de type militaire ont exercé une influence déterminante sur les équipe-ments professionnels et civils. Cepen-dant, la notion d’EPI, n’appartient pas au vocabulaire militaire. Le terme est en effet né de la législation hygiène et sécurité du travail, ce qui lui donne une connotation professionnelle. La frontière entre le professionnel et le civil est toutefois poreuse, en raison de la proximité de certaines activités et de l’accroissement exponentiel de la technique dans la vie quotidienne. Dès lors, nombre d’EPI sont à usage civil.

En ouvrant ce dossier, nous souhaitons faire mieux apprécier ce que sont les enjeux de la conception, de la fabri-cation et de la distribution. Le marché des EPI n’est pas totalement libre, car il doit satisfaire à des réglementations nationales et internationales et à une normalisation. Il doit en outre répondre aux nouvelles exigences du dévelop-pement durable, qui supposent une prise en compte de l’EPI en tant que déchet. Mais c’est surtout l’efficacité de l’équipement qui est en cause. Or, le dispositif réglementaire et normatif ne garantit pas pleinement celle-ci. D’où l’importance qu’il convient d’accorder aux garanties offertes par les meilleurs professionnels.

Les équipements de protection individuelle

par Hubert Seillan

Wisis adiat lortio eu facin utpatis augueros autem iurerat, quat.Od molobore dolore dolore feuis nullaor ip ea faci blam nis nulput ing enis ad tie vendio con hent wis nibh elese modionsenim amet alit lore magna feummy nim venisis del dio dunt aut landreet autat, consecte eros aliquat luptat lore et ute facilit, quating eugiamet dolobor suscinim iusto cortion ullandit irilisim zzrit, quis dio ea autpat velesto ex ent pratisi tin ulla auguero odionse ctetumsan henim nullutat.

Equis num in henissed ea ad tio ea feugiat iscillan utat vulla con ulluptat nonsent vulla feu facincidunt la augiat. Dit alisit laoreet, vulputpat ipsuscil eraessed mod tatet lorer sed dolum zzriusto dolorem in hendre consendipis nonse minissenis nonullaore et laorer acil ut venibh eum quat nullandion volore min velissim zzrilla faccums andigna conseniamet augait adiat in vent landrero consectet ipit lorem eniat vel ut esto consendigna acin ut ad eugait vel utpation ut atum ex etummy nit lorem nit lorpero conse min .

Mots clés à déterminer Phot

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> Que représente le marché français des EPI ?

< Nous ne disposons pas d’éléments sta-tistiques précis, mais, la France compor-tant près de 18 millions de travailleurs, il peut être estimé entre 700 millions et 1 milliard d’euros. Cela représente à peu près 10 % du marché mondial qui est de l’ordre de 7 milliards de dollars. C’est donc un petit marché en termes de chiffres d’affaires, mais très important compte tenu du nombre de travailleurs concernés.

> La concurrence européenne est-elle forte pour les entreprises françaises ?

< Elle existe, mais là n’est pas la ques-tion, car il s’agit d’une économie très intégrée. Nos entreprises doivent avoir une taille européenne. La concurrence vient d’ailleurs, d’Asie du Sud-Est notamment.

> Les professionnels distinguent les vêtements d’image des vêtements de protection. La distinction ne me sem-ble pas très aisée à faire. Quels sont les critères distinctifs ?

< Le vêtement de travail ou d’image ne répond pas à la même vocation que le vêtement de protection. Mais il est vrai que la confusion est possible, lorsque un vêtement d’image est aussi un vêtement de protection, cas par exemple lorsque des bandes réfléchissantes sont apposées sur des vêtements d’entreprise.

> Mais les réglementations relatives à la mise sur le marché ne sont pas les mêmes…

< En effet, les vêtements de travail ne sont pas obligatoirement fournis par l’entreprise, alors que les vêtements de protection et autres EPI doivent être mis gratuitement à la disposition des travailleurs à protéger. Les EPI peuvent être, selon les cas, auto-certifiés ou sou-mis à certification par un organisme notifié. Cela confirme leur conformité aux exigences de la directive euro-péenne et autorise le marquage CE. Les vêtements d’image n’ont pas à être marqués CE. Mais, dans la pratique, nous observons l’existence de certaines dérives.

Des vêtements sont marqués CE alors qu’ils ne devraient pas l’être et des EPI sont auto-certifiés contre des risques mineurs, alors qu’en fait ils devraient être certifiés par un organisme noti-fié. Cette pratique très laxiste est bien connue. Elle aboutit à la mise sur le mar-ché de vêtements multiusages servant à tout et à rien, ne prenant pas en compte les normes spécifiques de sécurité. À l’usage, le principe d’auto-certification se révèle inadéquat.

> La certification par un organisme notifié donne-t-elle toutes les garanties ?

< Nous ne devons pas oublier que, si l’UE a pour fonction première de favo-riser le développement du marché, par la libre circulation des produits en son sein, elle n’intervient pas directement dans la surveillance du marché ; ce sont

les États qui en ont la haute main. Ce sont également eux qui désignent les organismes notifiés. Une évolution est cependant envisagée : il s’agirait d’impo-ser aux États des critères plus contrai-gnants et précis pour leur désignation. En France, nous avons un organisme, le COFRACQ, qui contrôle l’activité des organismes notifiés. Ainsi un organisme ne peut être désigné s’il ne dispose pas d’un laboratoire. Ce n’est pas le cas dans d’autres pays, et notamment en Grande-Bretagne où un organisme notifié peut

EPI

R. Sieffert est président d’honneur du Synamap (Syndicat national des matériels et articles de protection)

Titre de l’interviewpar Raymond Sieffert

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Mai-juin 2008 - N°99 - Préventique Sécurité 29

Protection individuelle > Équipements

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sous-traiter les essais à un laboratoire

privé. Les pratiques de certification

sont quelque peu différentes d’un pays

à un autre, malgré l’existence d’une

coordination des organismes notifiés.

Mais, comme les produits ont vocation

à circuler sur le marché intérieur euro-

péen, il est tout à fait indispensable de

réformer l’ensemble afin d’harmoniser

les pratiques.

> Cependant, face à la mondialisa-tion des marchés, l’organisation telle qu’elle est prévue en Europe est-elle suffisante ?

< La question se posait moins hier, mais elle est aujourd’hui d’actualité. Quand, à la fin des années 80, l’UE s’est enga-gée dans la démarche dite « nouvelle approche », elle a donné mandat au CEN (Comité européen de normalisation)

d’établir les outils normatifs nécessai-res pour permettre la conformité. Cela a représenté un coût important pour le budget européen. Mais aujourd’hui, alors que les normes doivent être révi-sées, le financement n’est plus là.

La tendance est de dire qu’il faut inter-nationaliser et recourir aux normes ISO. Mais la solution est dangereuse, car l’Europe risque d’en perdre la maîtrise. Les Américains, qui sont entrés en force dans ISO, peuvent arriver à imposer des caractéristiques qui leurs sont favora-bles. Et, comme les réunions des TC de l’ISO sont organisées n’importe où dans le monde, cela rend difficile la partici-pation des industriels européens de la branche, essentiellement des PME. Cependant, malgré ce risque, je pense que la transformation de la normali-sation européenne en normalisation mondiale est inéluctable. Le tout est de faire en sorte que les exigences euro-péennes essentielles soient bien prises en compte. Notre système a permis des progrès importants et peut être profita-ble à d’autres régions du monde. Soyons simplement (très) vigilants.

Le 12 décembre 2007, passage du « flambeau présidentiel » de Raymond Sieffert à Bernard Cuny (à gauche), actuel président du Synamap.

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SANTÉ SÉCURITÉ AU TRAVAIL

30 Préventique Sécurité - N°99 - Mai-juin 2008

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LES ÉQUIPEMENTS de protection indi-viduelle (EPI) font l’objet d’une législa-tion et d’une réglementation abondante quant à leur conception et à leur mise en œuvre.

Leur conception fait l’objet d’un mar-quage CE, ainsi les EPI font l’objet d’une directive nouvelle approche. Concevoir un EPI peut être très complexe et coû-teux. De plus, il convient de se protéger d’une concurrence utilisant le marquage CE de façon parfois abusive.

La mise en œuvre des EPI, dans le cadre d’activités professionnelles comme de loisir, n’est pas aisée dès lors qu’il convient d’identifier les risques et de parer à des risques multiples.

Enfin, une réglementation et des normes complexes ne facilitent pas leur mise en œuvre. Se pose ainsi le paradoxe du caractère criminogène des normes trop complexes donc mal appliquées et apportant ainsi un sentiment de sécurité inapproprié et donc dangereux.

Selon le Code du travail, les EPI sont « tous les dispositifs ou moyens portés par une personne en vue de la protéger contre les risques susceptibles de menacer sa santé et sa sécurité »1. Cela comprend en outre les accessoires, mais exclut les équipements anti agression ou militaires, etc. Les EPI peuvent être complexes et faire appel à de la haute technologie. Certains textiles sont conçus comme des produits n’ayant

pas seulement des propriétés, mais de véritables fonctions. Ils peuvent se comporter comme un capteur capable de détecter des signaux ou avoir une action sur l’environnement. Leur couleur, leur propriété physique peuvent ainsi s’adapter aux conditions d’utilisation.

Exigences de la conception

Les enjeux de la conceptionLe fournisseur doit fournir un produit conforme aux exigences nationales à sa date de mise sur le marché. Les exigen-ces françaises sont presque toutes euro-péennes, issues de deux directives. Les EPI sont ainsi soumis au marquage CE. Le concepteur doit donc, pour tout EPI, soumettre sa conception aux exigences essentielles de sécurité énoncées par la directive européenne concernant la conception des EPI. Il s’agit de la direc-tive 89/686/CEE modifiée plusieurs fois. Or, les exigences essentielles, comme nous le verrons ci-après, sont généra-les et scientifiquement très imprécises. De la sorte, la commission européenne, comme pour toute directive de ce type2, a mandaté le comité européen de nor-malisation (CEN)3 pour qu’il produise des normes techniques précisant les exigences de la directive. Ces normes, dites normes harmonisées, sont fort nombreuses. Elles énoncent ainsi des critères techniques pour un ou plusieurs types d’EPI, afin qu’ils satisfassent aux exigences essentielles de sécurité issus de la directive visée. La conformité à ces normes emporte une présomption de conformité aux exigences de la directive selon le droit européen4. Mais

cette conformité aux normes n’est pas obligatoire pour les EPI, elle est faculta-tive. Seule la conformité aux exigences de la directive est obligatoire.

Le concepteur qui veut limiter sa res-ponsabilité (surtout pénale) en cas d’accident, va naturellement être poussé à faire certifier ses produits au regard des normes harmonisés. Mais le concepteur basé dans des pays lointains peut être tenté de s’affranchir de telles contraintes. Ainsi, un produit conçu en France ou en Europe est le plus souvent beaucoup plus fiable du fait de la pres-sion juridique à laquelle il est soumis. Cela étant, notons que le premier res-ponsable est la personne qui met sur le marché le produit. Ainsi l’importateur, le distributeur ou le vendeur seront visés. Bien souvent ceux-ci sont des mar-chands peu scrupuleux, peu solvables. Les dirigeants de telles officines sont souvent basés à l’étranger. De ce fait toute pression juridique à leur encontre est quasiment vaine. Le marquage CE

Choisir les EPILes données fondamentales de la décision

1. Art R 233-83-3

2. Que l’on appelle « directive nouvelle approche »

3. Le CEN (avec le CENELEC pour le domaine électrique et électrotechnique et l’ETSI pour les télécommunications)

regroupe les organismes de normalisation européens.

4. Voir notamment l’arrêté du 29/09/97 (JORF du 26/10/97), annexe II, modifié par l’arrêté du 12/01/99 (JORF du 03/03/99).

J.M. Picard est enseignant-chercheur à l’Université de technologie de Compiègne et auditeur de l’Institut national des hautes études de la sécurité (INHES).

par Jean-Marc Picard

SANTÉ SÉCURITÉ AU TRAVAIL

Mai-juin 2008 - N°99 - Préventique Sécurité 31

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des lunettes de soleil vendues sur des champs de foire n’a donc que la valeur que le client est prêt à lui accorder…

Le concepteur scrupuleux, outre la conformité à la directive, va généra-lement se caler sur les exigences des normes harmonisées. Or, ces normes évoluent fréquemment, sans que la législation transposant les directives ou les directives elles-mêmes n’évo-luent. Cette anticipation des normes, cette veille normative n’est pas simple et suppose de lourds investissements. Il s’écoule en effet beaucoup de temps (plusieurs années) entre l’élaboration d’un cahier des charges pour un EPI en début de conception et sa mise sur le marché. Un EPI peut ainsi, à sa mise sur le marché, ne pas être conforme à une norme harmonisée, alors qu’il l’était en phase de conception.

L’anticipation normative devient donc aujourd’hui un problème crucial pour les concepteurs dans tous les domaines, car les normes changent plus vite encore que la réglementation. Nous sommes

dans un vaste sujet de lobbying et d’in-telligence économique. Influencer les normes et les réglementations peut donc être une façon de protéger plus ou moins son marché. Or, les normes étant moins visées par les dispositions antiprotectionnistes de l’OMC que la réglementation, l’investissement des concepteurs européens dans la pro-duction de normes devraient leur être très favorable pour contrer les produits étrangers souvent dangereux ou défi-cients. Cela étant, les produits euro-péens ne sont pas pour autant toujours à la hauteur…

Le concepteur devra en outre intégrer les spécificités locales, tant réglemen-taires que culturelles. Compte tenu du climat par exemple, une chaussure de sécurité, généralement chaude, se por-tera plus facilement en Norvège qu’au sud de l’Espagne en été. Enfin un EPI doit comporter une notice d’utilisation, celle-ci fait partie de la conception. L’adéqua-tion de la notice au bon EPI n’est pas une mince affaire, dès lors que doivent être prises en compte toutes les variantes du

produit, que la notice doit être correctement traduite dans de nombreuses langues et qu’elle doit rester simple et claire. Une parfaite maîtrise des techni-ques de traçabilité et de ges-tion de configuration s’impose. Tous les bureaux d’études ne les maîtrisent pas.

Par ailleurs, la sécurité de la conception dans le cadre du marquage CE comprend par-fois, suivant les EPI, des exi-gences de contrôle parfois très poussées au niveau de

l’industrialisation et de la fabrication. De la sorte, les problèmes de sous-traitance deviennent ténus. La responsabilité des sous-traitants, leur évaluation, leur con-trôle dans un marché mondial n’est pas chose facile.

Enfin, si les directives européennes imposent un marquage de sécurité CE, ce dernier ne se limite qu’aux aspects sécurité-innocuité des EPI, mais n’apporte aucune exigence quant à la qualité générale des produit, ce qui pose un problème pour le client final.

La directive 89/686/CEE modifiéeCette directive que nous venons d’évo-quer a été révisée plusieurs fois5. Elle a fait l’objet de diverses transpositions dans notre droit à travers plusieurs tex-tes dont le décret 96-725 du 14 août 1996, relatif aux règles techniques et aux procédures de certification suivant l’article L. 233-5 du Code du travail6.

La directive classe les EPI en trois niveaux (cf. encadré à gauche), selon qu’ils visent :1. les risques mineurs ;2. les risques intermédiaires ;3. les risques majeurs.

Elle énonce, en son annexe II, les exigen-ces essentielles (de santé et de sécurité) auxquelles les EPI doivent êtres sou-mis. Elle dispose d’exigences générales propres à tout EPI (innocuité, etc.) et d’exigences spécifiques propres à certain type d’EPI et à certains types de risques (voir encadré page suivante).

Induire les risques n’est pas chose facile pour les concepteurs. Par exemple, peu

5. Modifiée par la directive n° 93/68/CEE du 22/07/93 art. 7 (JOCE n° L. 220 du 30/08/93), par la directive n°93/95/CEE du Conseil du 29/10/93 (JOCE n° L. 276 du 09/11/93) et par la directive n° 96/58/CE du 3/09/96 (JOCE n° L.236 du 18/09/96).

Les EPI destinés aux risques mineursIls concernent l’hygiène ou une blessure superficielle, par exemple un vêtement de pluie. Le fabricant (à défaut l’importateur, le distributeur ou le vendeur) procède lui-même au marquage CE attestant ainsi de la conformité de l’EPI aux exigences de la directive.

Les EPI destinés aux risques intermédiairesIls sont destinés aux activités mécaniques, thermi-ques, chimiques, par exemple les vêtement haute visibilité. Le fabricant fait une demande d’examen CE, accompagnée du dossier technique de l’EPI auprès d’un organisme notifié, qui procède à une série d’essais et à l’étude du dossier.

Les EPI destinés aux risques majeursIls doivent protéger des accidents mortels ou irréver-sibles pour la santé, ce sont, par exemple, les vêtement de protection contre les hautes températures. Le fabri-cant, en supplément de la catégorie précédente, doit maîtriser et contrôler fabrication et production.Ces produits portent le marquage CE avec une notice d’information comportant des indications de stockage, d’entretien, etc.

3 niveaux de classement

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pensent au risque de chaleur pour une combinaison de plongée, et pourtant !

Mais ces exigences essentielles restent trop générales pour le concepteur, comme nous l’avons préalablement évoqué (cf. l’encadré ci-contre). Ainsi tout repose sur le niveau d’exigence de conception, voire de production, tradui-sant les exigences de la directives. Ces exigences, quand elles sont le seul fait du

Exigences d’utilisation

La directive 89/656/CEE

L’utilisation professionnelle des EPI

La directive 89/6567 fixe les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour l’utilisation par les travailleurs au tra-vail d’équipements de protection indi-viduelle. Elle est la troisième directive particulière au sens de l’article 16, para-graphe 1, de la directive 89/391/CEE. Cette dernière est la grande directive de référence en matière de sécurité au travail, à l’origine notamment du décret

6. Les principales transpositions sont :

A. EPI à usage professionnel :- Loi n° 91-1414 du 31/12/91 modifiant le Code du travail et le Code de la santé publique en vue de favoriser la prévention des risques professionnels et portant transposition de directives européennes relatives à la santé et à la sécurité du travail (JORF du 07/01/92).- Décret n°92-765 du 29/07/92 déterminant les équipements de travail et moyens de protection soumis aux obligations définis au I de l’article L. 233-5 du Code du travail et modifiant le Code du travail - deuxième partie : décrets en Conseil d’État (JORF du 07/08/92).- Décret n° 92-766 du 29/07/92 définissant les procédures de certification de conformité et diverses modalités du contrôle de conformité des équipements de travail et moyens de

protection et modifiant le Code du travail - deuxième partie : décrets en Conseil d’État (JORF du 7/08/92).- Décret n° 92-768 du 29/07/92 relatif aux règles techniques et aux procédures de certification de conformité applicables aux équipements de protection individuelle visés à l’article R. 233.83.3 du Code du travail et modifiant le Code du travail - deuxième partie, décrets en Conseil d’État (JORF du 7/08/92).- Décret n° 96-725 du 14/08/96 relatif aux règles techniques et aux procédures de certification de conformité applicables aux équipements de travail et moyens de protection soumis à l’article L.233-5 du Code du travail, modifiant le code du travail (deuxième partie : décrets en conseil d’État) et portant transposition de diverses directives européennes (JORF du 18/08/96).

B. EPI pour la pratique sportive et de loisirs :Décret n°94-689 du 5/08/94 relatif à la prévention des risques résultant de l’usage des EPI pour la pratique des sports et des loisirs (JORF du 12/08/94).

7. Transposé notamment par la loi 91-1414 (cf. Code de la santé publique) et les décrets 92-765/92-766/92-768/96-725

concepteur, engagent vendeur et ache-

teur à lui faire confiance. Néanmoins,

pour certains EPI très sensibles (appareil

respiratoires de plongée par exemple), le

marquage CE sera fait via un organisme

notifié. Celui-ci apposera un identifiant

à 4 chiffres après le marquage CE. De ce

fait, le contrôle par organisme notifié (ON)

pour certains EPI est en général sérieux.

1. Exigences de portée générale à tous les EPI Principes de conception : innocuité des EPI, facteurs de confort et d’efficacité, notice d’information du fabricant ;

2. Exigences supplémentaires communes à plusieurs genres ou types d’EPI Systèmes de réglage, protection du corps, du visage, des yeux ou des voies respiratoires.

3. Exigences supplémentaires spécifiques aux risques à prévenir Protection contre les chocs mécaniques, chutes de personnes, vibrations mécaniques, prévention des noyades, protection contre la chaleur, le feu ou le froid, protection contre les chocs électriques et les rayonnements, protection contre les substances dangereuses et agents infectieux, dispositifs de sécurité des équipements de plongée...Prenons un exemple bien peu technique de ces exigences (in « 3.1. Protection contre les chocs mécaniques, « 3.1.2. Chutes des personnes, « 3.1.2.1. Prévention des chutes par glissade) : « Les semelles d’usure des articles chaussants appropriés à la prévention des glissades doivent être conçues, fabriquées ou dotées de dispositifs rapportés appropriés, de façon à assurer une bonne adhérence, par engrènement ou par frottement en fonction de la nature ou de l’état du sol. »

Exigences essentielles formulées par la directive 89/686

Nouvelle approche pour les ONAfin de réaliser le marché unique, les États de l’UE ont créé le concept de « nouvelle approche ». Dans ce cadre, tous les produits peuvent circuler librement sous réserve de respecter, le cas échéant, des exigences essen-tielles de sécurité (EE). Ces exigences sont formulées dans une directive propre à une catégorie de produits. Il existe à ce jour une vingtaine de directives dites « nouvelle approche ».Les produits pour circuler librement doivent respecter ces « EE » formu-lées dans la directive concernée. Le respect de ces EE est attesté notam-ment par l’apposition du marquage « CE ». Ce marquage peut être fait par le fabricant, mais, lorsqu’un contrôle plus poussé est nécessaire, par un organisme tiers. Ce type d’organisme est appelé organisme notifié (ON), car chaque État notifie à la commission les organismes qu’il a agréés pour vérifier tout ou partie des EE d’une catégorie de produit. Les États engagent donc leur responsabilité à ce niveau. En vertu des principes de libre échange et de marché unique, un produit étranger marqué CE via un O.N. est libre de circuler dans toute l’Europe. De ce fait, un produit étranger contrôlé par un ON étranger peut être commercialisé librement en France comme dans tout autre pays.Se pose dès lors la qualification des ON. Sont-ils tous de même niveau ? Hélas non, et c’est la raison pour laquelle l’UE a engagé une politique visant à l’accréditation des ON au niveau européen. Ainsi, un projet de réglement européen, voté en février par le Parlement, devrait voir le jour en juin. Celui-ci impose quasiment une accréditation de chaque ON. L’ac-créditation que l’on qualifie parfois de « certification des certificateurs », est en France le monopole du COFRAC. Chaque pays de l’UE dispose d’un (parfois plusieurs) organisme accréditeur. Ces organismes sont soumis à des normes et aux accords et réglements notamment de l’Eu-ropean Accreditation. Ainsi à terme, les ON devraient fournir un niveau de prestation équivalent, mais c’est loin d’être le cas aujourd’hui et de ce fait le contrôle du marquage CE n’est pas poussé au même niveau dans toute l’Europe.

SANTÉ SÉCURITÉ AU TRAVAIL

Mai-juin 2008 - N°99 - Préventique Sécurité 33

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dit « document unique » de novembre 2001 que tous les employeurs sont censés appliquer.

Cette directive est essentielle. Afin que les États, au nom de la sécurité, ne créent pas d’obstacles techniques au commerce des EPI par des règles d’utili-sation restrictives8 et afin aussi d’harmo-niser la sécurité des travailleurs, l’UE a donc produit la directive 89/656 com-plétant la directive générale 89/391. Elle postule que l’utilisation des EPI doit être appropriée par rapport au risque à prévenir9. Courte, elle propose trois annexes fort intéressantes, notamment pour les PME ou les entreprises ne dis-posant pas de spécialiste de la sécurité. Ces trois annexes couvrent : 1. un schéma pour l’inventaire des

risques ;2. une liste indicative d’EPI ;3. une liste des activités et secteurs

pouvant nécessiter le port d’EPI.

Cette directive met l’employeur dans l’obligation de :• mettre à disposition, gratuitement et de

manière personnelle, les EPI adaptés ;• vérifier le bon choix des EPI, sur la

base d’analyse des risques à couvrir et des performances offertes par les EPI ;

• veiller à l’utilisation des EPI ;• vérifier la conformité des EPI mis à

disposition ;• informer les personnes chargées de la

mise en œuvre ou de la maintenance des EPI ;

• assurer le bon fonctionnement et un état hygiénique satisfaisant des EPI ;

• informer les utilisateurs et les former à une bonne utilisation des EPI (cela comprend la mise à disposition de notices dans la langue nationale) ;

• remplacer les EPI détériorés.

L’utilisation non professionnelle

Les EPI font l’objet de dispositions spé-cifiques quant à leur utilisation non pro-fessionnelle : c’est le cas des utilisations sportives. Nous pensons par exemple aux baudriers d’escalade ou aux casques de cavaliers utilisés dans le cadre d’une activité collective. Cette utilisation, à laquelle tous les clubs sportifs devront se conformer, fait l’objet des dispo-sitions du décret no94-689 du 5 août 1994, relatif à la prévention des risques résultant de l’usage des équipements de protection individuelle pour la pratique sportive ou de loisirs. Le décret no2004-249 du 19 mars 2004, modifiant l’article R. 233-155 du Code du travail et relatif à la location ou la mise à disposition d’équipements de protection indivi-duelle d’occasion pour certaines acti-vités de sports ou de loisirs10, complète le dispositif. Ces dispositions nationales ont été complétées par des normes nationales dont la XP S 72-701 (publiée en juin 2004) « Mise à disposition d’équi-pements de protection individuelle et matériels de sécurité pour les activités physiques, sportives, éducatives et de loisirs dédiés à la pratique de l’escalade, l’alpinisme, la spéléologie et activités des techniques et équipement similai-res. Modalités de contrôle et de suivi des EPI et équipement similaires. »

Rappelons que le cadre de l’utilisation non professionnelle pour la pratique sportive ou de loisir relève non du cadre européen, mais du cadre français.

L’achat et la mise à disposition des EPI

L’achat des EPI est un véritable casse- -tête pour les entreprises. En effet, sui-vant le principe d’adéquation de l’EPI et du risque qu’il est censé limiter, cela n’est pas simple d’identifier toutes les situations à risque. L’employeur ayant dorénavant, en matière de sécurité, une obligation de résultat, la mise en œuvre des EPI est complexe.

L’employeur est confronté à de nombreux problèmes dont :

• l’identification des risques ;• l’optimisation et le regroupement des

achats sans sacrifier la sécurité ;• la mise à disposition à temps et aux

bons endroits gratuitement, cela comprend notamment une notice d’utilisation dans la langue nationale… ;

• l’entretien des EPI et la gestion précise du parc ;

• la formation aux EPI ;• la vérification, la validation de la

qualité et de la sécurité des EPI.

En outre, deux points nous semblent particulièrement sensibles :• l’établissement et la maîtrise du lien

entre l’utilisateur, le prescripteur et l’acheteur ; leurs impératifs étant différents, une coopération sérieuse entre eux doit être envisagée ;

• après avoir identifié les situations d’emploi et de travail et les risques (pas simple), il convient de trouver les bons EPI. La connaissance des normes harmonisées est alors primordiale, mais difficile. Le support du fournisseur est donc essentiel, l’achat par des distributeurs nationaux, professionnels reconnus est primordial au risque d’acheter n’importe quoi et d’engager fortement sa responsabilité.

Un des problèmes majeurs est donc la lisi-bilité des normes, car il en existe d’innom-brables et elles se recoupent souvent.

Les normesLes normes sur les EPI sont fort nom-breuses et l’utilisateur est en général incapable de les connaître et de savoir si son EPI est à la bonne norme.

Il existe par exemple plusieurs normes sur les gants. L’EN 420 est générale, l’EN 388 traite des dangers mécaniques, l’EN 511 de la protection contre le froid, l’EN 407 des dangers thermiques et l’EN 374 de la protection contre les produits chimiques. Si mon besoin est un gant me protégeant contre les projections d’acide chaud issu d’équipement trans-portables, il convient de prendre les normes 388, 407 et 374. C’est ainsi que l’on se retrouve soit avec un gant ina-dapté, soit avec un gant hors de prix, soit avec 3 paires de gants sur soi… et à condition de respecter le bon ordre !

8. Susceptible de poser un problème aussi dans le cadre de l’accord sur les obstacles techniques au commerce (OTC) composant le cadre général de l’OMC dans le cadre des

accords de Marrakech.

9. Lien implicite document unique…

10. JORF du 21 mars 2004

Les normes utilisent une signalétique complexe et immaîtrisable pour le simple utilisateurNorme EN 388 : dangers mécaniques1er chiffre : résistance à l’abrasion 0 à 4 :2e chiffre : résistance à la coupure par lame 0 à 5 :3e chiffre : résistance à la déchirure 0 à 4 :4e chiffre : résistance à la perforation 0 à 4 :Norme EN 407 : Dangers thermiques1er chiffre : résistance à l’inflammabilité (0 à 4)2e chiffre : résistance à la chaleur par contact (0 à 4)3e chiffre : résistance à la chaleur de convection (0 à 4)4e chiffre : résistance à la chaleur rayonnante (0 à 4)5e chiffre : résistance à de petites projections de

métal en fusion6e chiffre : résistance à d’importantes projections de

métal en fusionNorme EN 511 : Gants protégeant contre le froid1er chiffre : résistance au froid de convection (0 à 4)2e chiffre : résistance au froid de contact (0 à 4)3e chiffre : perméabilité à l’eau (0 à 1)

Une signalétique complexe

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Enfin, il conviendrait de normaliser les normes ! Sur les gants toujours, la plupart des normes disposent que ceux-ci doivent, par le biais de plu-sieurs chiffres visibles, permettent de prendre connaissance de leurs caracté-ristiques. Évidemment, chaque norme propose une signification différente à ces chiffres. L’encadré ci-contre illustre parfaitement ce désastre qui conduit immanquablement à ce que les utili-sateurs soient incapables, pour la plu-part d’entre eux, d’identifier les types d’utilisation et les caractéristiques des gants qu’ils portent.

Ce problème pour les gants va se retrouver tant pour les masques à cartouche que pour les vêtements de protection. De nombreuses normes traitent du vêtement associant des pictogrammes aux risques, pictogram-mes que le professionnel de la sécurité connaît comme les technocrates, mais que le salarié lambda est incapable de maîtriser. Notre expérience d’auditeur international en hygiène et sécurité au travail nous a permis de faire plusieurs fois ce constat dans toute l’Europe.

Derniers conseilsTraiter un si vaste sujet en si peu de place peut laisser de côté nombre de précisions utiles. Néanmoins, nous souhaitons que les lecteurs aient retenu l’importance des quelques points suivants.

1. Le choix des EPI et leur mise à dis-position n’est pas chose facile. Elle engage la responsabilité de l’employeur. Acheter au plus bas prix est risqué, il convient de vérifier a minima la présence du marquage CE, de l’attestation de conformité à la directive EPI, voire le cas échéant aux normes harmonisées, et de la notice d’utilisation dans la langue nationale (cas de tout produit visé par le marquage CE).

2. La connaissance des normes est indispensable ; à défaut, il convient de disposer d’un vendeur conseil de très bon niveau. Le poids des normes étant considérable, la conformité à une norme, mieux une conformité attestée par un organisme de certifi-cation européen, est un gage de sécu-rité surtout pour les produit CE non contrôlés par un organisme notifié.

Les responsables sécurité doivent se former aux normes relatives aux EPI, aux règles du marquage CE et suivre l’actualité sur le sujet. En effet, sans que la réglementation ne change, les normes peuvent évoluer. Le mar-quage CE ou la référence à une norme peut donc être trompeur si l’on n’en connaît pas parfaitement le sens. Et un EPI non conforme aux dernières nor-mes peut engager la responsabilité de l’employeur qui, au titre de l’obligation générale de sécurité, se voit dans la quasi obligation de la mise en confor-mité aux dernières normes de ses EPI. Ainsi, un casque vieux de dix ans a tou-tes les chances d’être non conforme en cas d’accident, son obsolescence peut parfois être portée à l’encontre de l’employeur.

3. Enfin, outre l’Afnor, l’INRS et le minis-tère du travail, deux organismes sont susceptibles de fournir des informa-tions très pertinentes : il s’agit du Syn-dicat professionnel des matériels et articles de protection (SYNAMAP) et du Bureau de normalisation de l’industrie textile (BNITH).

Le marché français des EPILes entreprises en bonne place sur un marché mondial par Patrick Haas

> Que représente le marché européen ?

< Le marché est de 6 milliards d’euros. Mais, dans ce montant, il faut exclure 10 % qui correspondent au chiffre d’affaire des entreprises européennes hors d’Europe, soit un marché de 5,4 mil-liards d’euros. À titre de comparaison, il représente 30 % du marché mondial, le marché d’Amérique du Nord, 45 %, d’Asie 18 % et le reste du monde 7 %.

On observe que c’est un marché qui est très lié au niveau de développement éco-nomique. Les plus gros consommateurs d’EPI sont l’industrie, spécialement dans le secteur de la chimie, et le BTP. Ce sont des industries à risques élevés qui n’exis-tent pratiquement pas dans les pays en voie de développement.

> Quelles sont les caractéristiques du marché français ?

< Il est de l’ordre de 2 milliards d’euros, ce qui correspond à près d’un tiers du marché européen rectifié. C’est donc un marché fort. Cette importance s’explique par le dynamisme des sociétés françaises et par le niveau élevé de réglementation. Il est une spécificité française. Une petite part de ce marché concerne les EPI non professionnels, correspondant aux activi-tés de bricolage et jardinage, soit environ 10 % du marché français global, ce qui est relativement faible. Cela s’explique par le fait qu’il s’agit d’équipements de petit prix, si on les compare notamment aux équipements vendus dans l’industrie chimique. Beaucoup de monde, mais un petit chiffre d’affaire !

P. Haas est le directeur des publications En Toute Sécurité

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> Quelles sont les perspectives du marché français ?

< Elles sont mitigées, car il s’agit avant tout d’un marché de renouvellement. Sous réserve d’achats ponctuels corres-pondant à des événements exception-nels, l’évolution est donc plutôt stable. Ainsi, en 2006, la crise de la grippe aviaire a pu perturber assez fortement le marché en raison de l’achat de mas-ques pour un montant de plusieurs dizaines de millions d’euros. Ces achats exceptionnels n’ont bien évidemment pas été reconduits. C’est un marché où les prix sont assez disputés en raison de la concurrence asiatique, notamment sur les produits de bas de gamme. Ces sociétés asiatiques interviennent encore essentiellement au titre de la sous-traitance pour le compte des majors, mais on peut observer qu’elles inter-viennent sur le marché, en distribuant directement les produits les plus bas de gamme, ou indirectement avec des petites sociétés françaises ou européen-nes. Il s’agit le plus souvent de produits qui ne répondent pas aux normes. Ce marché hors normes correspond cepen-dant à environ 10 ou 15 % du marché national, ce qui permet de constater

que les employeurs français ne sont pas assez regardants.

> Quelles sont alors les caractéristiques des entreprises françaises ?

< Malgré cette agressivité commerciale, les société françaises s’en sortent bien grâce à la qualité de leur production. Le secteur des EPI est, avec le contrôle technique, le seul secteur de la sécurité où nos entreprises occupent une bonne place à l’exportation.

Il est important de souligner que le lea-der mondial est français, c’est Sperian. Il est coté en bourse, de même que le n°2 Delta Plus, ce qui est exceptionnel dans la sécurité. Cependant, le plus grand nombre des entreprises sont des PME familiales qui ont du mal face à la loi des grandes séries d’un marché mondial où évoluent des grands grou-pes. Elles sont confrontées à un fort mouvement d’internationalisation et de regroupement. Ainsi Sperian vient d’acheter une société norvégienne, Delta Plus des sociétés en Angleterre, en Espagne et aux Émirats arabes unis et 3M se renforce en achetant Aearo. Face à ce mouvement de concentration, les PME doivent être attentives, leurs forces étant dans la qualité de leurs produits.

Leur attention doit aussi se porter sur la venue sur le marché des EPI de sociétés venant d’autres secteurs. C’est le cas d’Honeywell qui vient de racheter son compatriote Norcross.

La fin de vie des EPI des sapeurs-pompiers

C. Chelingue est commandant à la brigade de sapeurs-pompiers de Paris, chargé en particulier des fournitures, des services et de l’habillement.

1. Les sapeurs-pompiers de la BSPP sont des militaires (de l’Armée de terre), comme ceux du bataillon de marins-pompiers de Marseille (BMPM, corps de la Marine nationale) ; les sapeurs-pompiers des SDIS sont des civils (ndlr).

vent à l’origine d’innovation dans la pro-fession. Il n’est donc pas surprenant de voir la BSPP se pencher sur les difficultés environnement, leur approche pragmati-que et la recherche de solutions simples et pérennes.

Les EPI des sapeurs-pompiers européens et françaisLa qualité des équipements des sapeurs-pompiers français et européens s’est con-sidérablement améliorée au cours des trente dernières années, une véritable

LES 250 000 SAPEURS-POMPIERS français sont de différents statuts (mili-taires, professionnels, volontaires, pri-vés au profit d’entreprises). Ils portent secours sur tout le territoire , y compris outre mer et voient leur activité aug-menter inexorablement chaque année. Ils effectuent ainsi plus de 4 millions d’interventions par an.

Pour Paris et la petite couronne, la brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP1) est intervenue plus de 460 000 fois en 2007, dont 20 000 fois pour combattre des incendies. Ce corps prestigieux est sou-

Évolution de la croissance en France

1999 : + 11, 5 %2000 : + 18 %2001 : + 4,4 %2002 : 0 %2003 : - 3 %2004 : 0 %2005 : + 2, 1 %2006 : + 4, 5 %La décroissance des années 2002 à 2004 s’explique par la baisse des prix des produits due à la concurrence asiatique. Le taux de l’année 2006 ne tient pas compte de l’accroissement ponctuel de 100 millions du CA des entreprises lié aux commandes de masques contre la grippe aviaire.

par Claude Chelingue

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SANTÉ SÉCURITÉ AU TRAVAIL

36 Préventique Sécurité - N°99 - Mai-juin 2008

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révolution des vêtements et articles de protection a eu lieu avec l’arrivée de nou-veaux textiles, en particulier les aramides, et la création de normes européennes ou internationales. Les sapeurs-pompiers sont équipés par leur employeur et uti-lisent des EPI au quotidien.

L’achat de ces équipements est réalisé dans un cadre de marché public. Leur distribution, renouvellement, lavage, réparation et échange est aujourd’hui à la charge de l’employeur (commissariat militaire, service départemental d’incen-die et de secours, entreprise). La fin de vie des équipements mérite aujourd’hui une attention toute particulière, car les prochaines années seront porteuses, très probablement, de contraintes nouvelles, financières, normatives et matérielles.

À la BSPP, certains des vêtements et EPI sont échangés en un seul lieu. Ce pro-cédé permet de voir l’état de l’article avant de le remplacer, mais il est utile aussi de voir comment le produit a vieilli et quels sont ses points faibles. Ceci

permet de voir avec le confectionneur, ou lors des modifications des cahiers des charges, s’il est nécessaire de produire une amélioration.

Un EPI doit durer, il doit satisfaire le porteur, mais aussi le gestionnaire, car les coûts sont souvent en rapport avec le niveau de risque à couvrir. Même si l’EPI n’est pas une fin en soi, le sapeur-pompier a des exigences particulières et s’avère assez difficile à satisfaire.

À Paris, les sapeurs-pompiers, du fait de leur statut, s’inspirent souvent du vocabulaire ou des sigles militaires pour dénommer leurs nouveaux produits. Ainsi, après la génération F1 des années 1980, puis F2 pour le début des années 2000, il faut déjà penser à la génération F3. Cette dernière série de produits devra à la fois poursuivre l’utilisation de texti-les techniques, s’attacher à respecter au mieux les contraintes normatives, mais aussi de tenir compte des nouveaux cri-tères liés au développement durable, au commerce équitable et au recyclage.

Vie et fin de vie des textiles et des EPI

Les textiles en fin de vie Qui n’a pas encore vu les conteneurs métalliques disposés en ville et des-tinés à recueillir les vêtements de la population ? Ce sont souvent Emmaüs, la Croix Rouge, le Secours Populaire ou des fripiers qui organisent ces collec-tes. Cette collecte permet de récupérer 120 000 tonnes par an. Certains vête-ments sont à nouveau portés, offerts ou revendu à des prix modestes ; dans cer-tains cas, les articles partent à l’étranger au profit de peuples démunis. Une autre partie de ces textiles est triée et reven-due au poids pour des filières de trans-formation et en vue d’autres utilisation (protection thermique, phonique, géo-textile, rembourrages divers…). Enfin, certains textiles repartent ou repartiront d’où ils viennent, et souvent en Asie pour une seconde vie. Toutefois, cette situa-tion aura vite ses limites, car le principe de la « passe à l’aide », pour employer une expression du rugby, qui consiste à déplacer le problème de la fin de vie des textiles, représente un coût et atteindra des proportions inacceptables pour l’Asie ou l’Afrique.

Les autres textiles, sous diverses formes, terminent souvent leur vie à l’incinérateur ou en site d’enfouissement des déchets. Il s’agit de milliers de tonnes dont une partie dégage, au moment de leur incinération, des particules sans doute dangereuses à long terme pour l’homme.

La fin de vie actuelle des EPI

En France

Une bonne partie des EPI et articles textiles ou cuir des sapeurs-pompiers français sont placés en déchetterie et terminent leur vie à l’incinérateur ou en site d’enfouissement.

Précisons que les aramides peuvent être enfouis et présentent peu ou pas de risque pour les nappes phréatiques. En revanche, il est assez coûteux de les détruire par le feu, ce qui n’est pas sur-prenant, voire même rassurant pour le sapeur-pompier !

Une partie des EPI est offerte aux sapeurs pompiers de pays particulière-ment sous-équipés, en Afrique ou en Amérique-du-Sud. Cette manière de faire va disparaître progressivement, car les EPI pour diverses raisons (coût

Les EPI des sapeurs-pompiers31 % des EPI

achetés en France sont des articles textile ;

21 % des EPI achetés sont des gants ;

26 % des EPI sont des chaussures.

SANTÉ SÉCURITÉ AU TRAVAIL

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de transport, honnêteté vis-à-vis des sapeurs-pompiers bénéficiaires de ces cessions gratuites, concurrence déloyale pour les confectionneurs africains…).

À Paris

À Paris, les EPI sont lavés pour certains, réparés avant d’être remis en service, échangés ou réformés. S’ils sont hors d’usage, ils sont mis en ballots et pla-cés en incinérateurs à proximité de la caserne chargée de la logistique.

Le rythme de mise en réforme est d’en-viron 1 000 ensembles de protection textile par an pour la BSPP, ce volume sera régulier à partir de 2008. D’autres EPI sont mis en réforme annuellement : 4 000 à 5 000 pantalons F1 et 1 000 ves-tes F1. Pour les articles en cuir (vestes, bottes d’incendie et bottes à lacets), le rythme est stable et à hauteur de 1 000 pièces de chaque par an. Les gants de protection en cuir sont échangés et génèrent un volume de mises en réforme de 12 000 à 14 000 paires par an.

Enfin, d’autres EPI et articles d’habillement composent les lots de mises en déchette-rie avant incinération. Il s’agit des parkas, gilets haute visibilité, imperméables, sur-vêtements de sport, divers vêtements de travail, des articles de bagagerie, pulls, chaussures et articles de couchage.

Certains composants des articles tex-tiles ou des chaussants ne s’envolent pas en fumées neutres ou inoffensives pour l’environnement. À plus ou moins long terme, des taxes vont apparaître pour inciter à moins brûler et à faire des efforts. Les budgets des administrations n’étant plus élastiques, il faut vite réflé-chir pour trouver d’autres solutions de fin de vie… Ceci est valable à Paris, mais aussi en province et dans toute l’Europe.

Indications diverses

Le poids moyen des articles en textiles techniques détenus par un sapeur-pom-pier français est de l’ordre de 8,5 kg. Ceci génère environ 400 à 500 tonnes par an, hélas répartis dans tous les corps de sapeurs-pompiers, donc sur tout le ter-ritoire national. Ce volume peut paraî-tre attractif, mais représente toutefois un coût de ramassage non négligeable. Le vêtement de pompier, comme tout vêtement militaire ou uniforme (comme celui des policiers) aura sans doute peu de chance de se retrouver dans les bac des associations de type Emmaüs, du fait du risque d’usurpation d’uniforme.

Le prix de rachat des aramides les plus attractifs est d’environ 10 euros au kilo-

gramme, car il faut tenir compte du démontage de l’EPI et du tri des matiè-res. Cette voie pourrait être exploitée par des ateliers protégés.

La vie des EPI Nettoyage et réparation

Un autre critère doit être pris en compte dans la fin de vie des EPI, c’est la salissure ou l’imprégnation de substances pou-vant se révéler dangereuses au sein des fibres en voie de recyclage. Un vêtement de sapeur-pompier en fin de vie a ren-contré toutes sortes de situation et a pu être souillé en profondeur. En dépit des lavages, en moyenne deux à trois fois par an pour ce qui concerne les ensembles de protection textile, il n’est pas exclu de devoir se résoudre à détruire l’effet. Les vestes sont lavées un peu plus souvent que les surpantalons, qui sont un peu plus souvent réparés que les vestes.

Le coût moyen global des réparations des ensembles de protection textile de la BSPP approche les 100 000 euros par an, soit un coût par EPI de l’ordre de 6 euros. Le coût moyen de lavage par EPI avoisine les 8 euros par an.

Il est nécessaire de faire durer leur vie pour diverses raisons, n’en déplaise à ceux qui sont impliqués de près ou de loin dans leur fabrication. La réparation et le lavage sont deux éléments qui sont confiés à des prestataire externes ou internes, comme par exemple les maître-ouvriers tailleurs et cordonniers possédant des ateliers au sein même de la BSPP.

Tout moment de la vie d’un EPI est pro-pice au retour d’expérience et ainsi à l’évolution de la protection du porteur

Contrôles des EPI

Un EPI mérite une surveillance régulière et méthodique. Chaque porteur d’EPI doit être éduqué au port et au contrôle sommaire de ses équipements. Il en va parfois de sa survie.

L’employeur ne peut se satisfaire des garanties apportées par le confectionneur au moment de la fabrication. D’autres contrôles, entre chaque utilisation et de manière plus périodique, doivent être provoqués afin de garantir au mieux le porteur de l’EPI. Chaque corps de sapeurs-pompiers doit ainsi s’organiser. Ce prin-cipe de contrôle permet de suivre l’EPI et de le réparer autant que nécessaire. Ainsi la durée de vie de l’EPI est assurément prolongée. De ce fait, il est possible de mener une action de sécurité, mais aussi de préservation de l’environnement.

Durée de vie

Les normes ne prévoient pas toujours de durée de vie ou de date de fin d’utili-sation ou de péremption de la garantie de protection. Parfois les durées de vie sont associées assez maladroitement à des durées d’amortissement.

C’est néanmoins en allongeant la durée de vie d’un EPI, ou en prolongeant son utilisation par un autre usage après démontage et valorisation des com-posants, qu’il sera possible de faire des économies, sur le coût énergétique par exemple. Ce principe de préservation et d’allongement de la durée de vie pour le cuir des EPI est encore plus important que pour le textile en raison du volume important d’eau et de produit toxique employé pour traiter et tanner le cuir.

Traçabilité des EPI

La traçabilité est déclinée de nos jours sous diverses formes et buts. Pour les EPI, elle s’adresse au confectionneur et au propriétaire de l’EPI, mais aussi au laveur et réparateur, au gestionnaire de matériels. Les matières premières ou les composants des EPI devront très pro-bablement être tracées à l’avenir, afin d’améliorer encore les possibilités de

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valorisation ou de recyclage, voire de mode de destruction.

Les « points durs »

Certains composants des EPI présentent des structures ou des compositions chimiques complexes. Il s’agit par exem-ple des membranes imper-respirantes, des fermetures à glissière, des bandes textile auto agrippantes,de certains textiles non tissés et laminés, des bandes fluo rétro réflé-chissantes, des semelles anti-perforation, des coques de sécurité, etc. Lors de l’inciné-ration ou du démontage d’un EPI, ces composants génèrent des coûts importants dont il faudra tenir compte à l’avenir.

Les solutions

De nombreuses solutions sont à étudier. Elles sont énumérées ci-après, sans ordre de préfé-rence, de coût associé ou de facilité de mise en œuvre.

• Il faudra donc à l’avenir être réaliste et savoir accepter de

rechercher rapidement des solutions pour faire face aux difficultés financiè-res et techniques associées à la fin de vie des EPI.

• Dans certains cas,il faudra sans doute renoncer à certains articles du paque-tage devenus superflus ou trop coûteux par rapport à leur fréquence d’utilisa-tion. Le recours à des effets polyvalents est envisageable pour certains EPI.

• L’externalisation réfléchie et mesurée de certaines tâches est recommandé, notamment pour avoir la garantie d’une économie des énergies, de la traçabilité et de la préservation de l’environnement.

• La standardisation et la vente à dis-tance sont d’autre part deux approches qu’il ne faut pas négliger.

• La prise en compte de l’aspect envi-ronnemental, avec la compétence de spécialistes du domaine dans chaque administration, peut apporter des résul-tats concrets et mesurables, au moins pour les coûts de mise en destruction.

• L’amélioration du confort des por-teurs et leur éducation restera sans doute un point à ne pas négliger, au seul profit d’envie de préserver la planète. Il ne faut pas inverser trop facilement les

priorités, la protection de l’homme par un EPI doit subsister tout en prenant en compte d’autres contraintes, en particu-lier environnementales.

• L’intégration de périphériques et de textiles dits intelligents au sein des EPI constitue encore un pas technologique supplémentaire associant contrôle en opération, traçabilité, géoposition-nement, détection, communication, information, etc. En bref, il faut faire encore mieux pour aider l’homme dans les situations de danger, mais il faut pouvoir et savoir démonter à bas coût ces accessoires hautement technolo-giques au moment de la fin de vie de l’équipement.

• Le recyclage après transformation et la deuxième, voire troisième, vie de certaines matières sont autant de piste à suivre pour valoriser les constituants des EPI de troisième génération, c’est-à-dire la génération F3.

• L’allongement la durée de vie des EPI, il s’agit là d’une philosophie générale qui s’oppose aux effets de mode ou d’imita-tion. Ce n’est pas, c’est évident, ce qui fera le plus plaisir aux fabricants…

• L’anticipation sur le démontage de fin de vie des EPI se présente aujourd’hui comme difficile à intégrer alors que les équipements doivent absolument rester fiables durant toute leur vie. Pourtant, il faudra s’y pencher assez rapidement pour l’intégrer dans la génération F3.

• Le choix de produits pouvant être réel-lement éliminés ou dégageant moins de particules toxiques au moment de l’incinération doit être privilégié.

• Organiser le regroupement des pro-duits et EPI en fin de vie dans un seul lieu par entité constitue déjà une économie de temps. Cette méthode procure éga-lement d’autres avantages techniques et tactiques pour l’amélioration des marchés et des produits.

• S’efforcer de faire des échanges EPI usés contre EPI neufs apporte aussi de multiples avantages. Il s’agit d’une organisation à mettre en place et à rationaliser.

• L’étude des coûts deviendra de plus en plus primordiale (achat, possession, élimination…).

• Développer des filières nouvelles, en particulier pour la récupération des EPI ou des matières valorisables.

• Éviter de transférer nos futurs déchets ailleurs, loin de la France par exemple. Les solutions existent peut être chez

nous… C’est sans doute un problème de communication.

• Envisager l’éco-conception et rédiger autrement les CCTP2 en intégrant par exemple les informations fournies par le futur « Guide destiné aux acheteurs publics »( en cours de finalisation ).

• Accepter certains produits déjà recyclés.

• Faire des efforts pour participer aux travaux normatifs concernant les EPI et intégrer d’emblée dans certai-nes normes à rédiger des paramètres directement liés à l’environnement.

• Utiliser la traçabilité des matières.

• Proposer une « éco-taxe » comme il en existe déjà pour certains produits ven-dus à grande échelle en France ou en Europe.

• Regarder autour de nous, et voir nos voisins européens qui ont pris conscience pour certains des nécessités urgentes de préservation de l’environnement.

• Expliquer et convaincre nos chefs (poli-tiques, militaires, administratifs…)que nous avons avec fierté certains défis à relever.

• Limiter les phénomènes de mode ou d’imitation et rechercher à standardiser.

Conclusions

L’étude de risque reste l’axe de travail essentiel à réaliser au début d’une pro-cédure d’acquisition d’EPI. La mise en réforme, la seconde ou troisième vie des matières le constituant représentent des défis importants à relever au cours des prochaines années. Les coûts et taxes associés à la fin de vie des produits et EPI vont augmenter rapidement , tout le monde s’en doute, donc ne nous voilons pas la face et réfléchissons ensemble, politiques, administrations ,entreprises, utilisateurs… Il faudra du courage, du temps, sans doute des investissements de démarrage des nouvelles filières, et surtout de la volonté.

Comme nous l’avons dit lors du collo-que VIP à Paris, le 11 mars, et le 24 avril, lors de la convention internationale d’af-faires des textiles techniques à Troyes : « jetons-nous à l’eau ». Alors, ensemble et avec conviction, jetons-nous à l’eau ! Ce sont, pour l’instant, nos meilleurs espoirs olympiques français qui nous le montrent, soyons donc champions nous aussi dans notre domaine. ■

2. CCTP : cahier des clauses techniques particulières.

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