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| formation Cancérisation : de la connaissance des mécanismes au développement d’applications OptionBio | Lundi 18 juillet 2011 | n° 458 13 L e protéome est la collection des protéines d’un patient (ou leurs fragments). La protéomique est tout simplement la science du protéome. Les champs d’application de cette science sont potentiellement très vastes. Ils peuvent aller de la connaissance fondamentale du mécanisme de cancérisation (interactome), à l’identification de nouveaux biomarqueurs et la recherche de signatures de pathologies (technique Seldi : surface-enhanced laser desorption/ionization), mais aussi au développement de nouveaux médicaments (métabolome). Le protéome, structure complexe Ces axes sont assez semblables à ceux de la génomique, et cela n’a rien d’étonnant. En effet, c’est par l’intermédiaire des protéines que le génome contrôle la structure et le métabolisme de la cellule (le terme “protéome” a d’ailleurs été construit par analogie au génome). Le protéome est cependant bien plus complexe que le génome, car de nombreux gènes peuvent coder pour plusieurs protéines. Complémentaire de la génomique, le protéome résume à la fois le génotype et le phénotype. Il rend effectivement compte des modifications post-traductionnelles, de l’incidence de l’environnement, de l’historique récent et de la durée de vie des protéines, du comportement d’une tumeur comme du comportement de l’hôte. L’étude se fait sur sérum. Techniques d’études du protéome Par extension, la protéomique désigne également l’ensemble des techniques permettant l’étude du protéome. Il s’agit essen- tiellement de techniques d’électrophorèse bidimensionnelle quantitative ou non, de spectrométrie de masse (Maldi-Tof : matrix-assisted laser desorption ionization time-of-flight), ou encore de techniques combinant extraction et spectrométrie de masse (Seldi). Les étapes successives consistent à séparer les protéines, les visualiser sous forme d’acquisition d’images, faire l’analyse comparative des images pour exciser les protéines d’intérêt, assurer leur digestion afin d’en faire la spectrométrie de masse. Leur identification se fait alors par intégration dans les banques de données. Application au diagnostic des tumeurs Si le séquençage haut débit du génome est actuellement tout à fait réalisable, les freins technologiques sont encore très lourds pour l’équivalent protéomique (comme par exemple le fait de s’affranchir des protéines sériques majoritaires, repérer et iden- tifier les fragments et fiabiliser l’interprétation). C’est la raison pour laquelle la génomique, mais également la transcriptomique, sont de meilleurs candidats au diagnostic et typage des tumeurs. L’imagerie combinée aux marqueurs tumoraux est mieux placée également pour le suivi d’efficacité thérapeutique, apparition de récidive ou métastase. La protéomique pourrait-elle trouver sa place dans la recher- che de nouveaux marqueurs ? Il sera nécessaire de trouver des moyens techniques plus performants pour le savoir. En tout état de cause, une autre question reste posée : le jour où le protéome d’un patient sera totalement répertorié, connaîtrons-nous pour autant les séquences responsables des mécanismes tumoraux ? | ROSE-MARIE LEBLANC consultant biologiste, Bordeaux (33) [email protected] Protéomique, biologie et diagnostic du cancer La protéomique ou science du protéome, au champ d’application potentiellement très vaste, pourrait en théorie trouver une place de choix dans le diagnostic des tumeurs. Mais pour l’heure, les freins technologiques laissent plutôt la place à la génomique et à la transcriptomique. Définitions Définitions L’auteur n’a pas déclaré de conflit d’intérêts en lien avec cet article. Source Communication de B. Darbouret, lors du 26 e colloque Corata, juin 2009, Marne-la-Vallée (77).

Protéomique, biologie et diagnostic du cancer

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OptionBio | Lundi 18 juillet 2011 | n° 458 13

Le protéome est la collection des protéines d’un patient (ou leurs fragments). La protéomique est tout simplement la science du protéome. Les champs d’application de cette

science sont potentiellement très vastes. Ils peuvent aller de la connaissance fondamentale du mécanisme de cancérisation (interactome), à l’identification de nouveaux biomarqueurs et la recherche de signatures de pathologies (technique Seldi : surface-enhanced laser desorption/ionization), mais aussi au développement de nouveaux médicaments (métabolome).

Le protéome, structure complexeCes axes sont assez semblables à ceux de la génomique, et cela n’a rien d’étonnant. En effet, c’est par l’intermédiaire des protéines que le génome contrôle la structure et le métabolisme de la cellule (le terme “protéome” a d’ailleurs été construit par analogie au génome). Le protéome est cependant bien plus complexe que le génome, car de nombreux gènes peuvent coder pour plusieurs protéines. Complémentaire de la génomique, le protéome résume à la fois le génotype et le phénotype. Il rend

effectivement compte des modifications post-traductionnelles, de l’incidence de l’environnement, de l’historique récent et de la durée de vie des protéines, du comportement d’une tumeur comme du comportement de l’hôte. L’étude se fait sur sérum.

Techniques d’études du protéomePar extension, la protéomique désigne également l’ensemble des techniques permettant l’étude du protéome. Il s’agit essen-tiellement de techniques d’électrophorèse bidimensionnelle quantitative ou non, de spectrométrie de masse (Maldi-Tof : matrix-assisted laser desorption ionization time-of-flight), ou encore de techniques combinant extraction et spectrométrie de masse (Seldi).Les étapes successives consistent à séparer les protéines, les visualiser sous forme d’acquisition d’images, faire l’analyse comparative des images pour exciser les protéines d’intérêt, assurer leur digestion afin d’en faire la spectrométrie de masse. Leur identification se fait alors par intégration dans les banques de données.

Application au diagnostic des tumeursSi le séquençage haut débit du génome est actuellement tout à fait réalisable, les freins technologiques sont encore très lourds pour l’équivalent protéomique (comme par exemple le fait de s’affranchir des protéines sériques majoritaires, repérer et iden-tifier les fragments et fiabiliser l’interprétation).C’est la raison pour laquelle la génomique, mais également la transcriptomique, sont de meilleurs candidats au diagnostic et typage des tumeurs. L’imagerie combinée aux marqueurs tumoraux est mieux placée également pour le suivi d’efficacité thérapeutique, apparition de récidive ou métastase.La protéomique pourrait-elle trouver sa place dans la recher-che de nouveaux marqueurs ? Il sera nécessaire de trouver des moyens techniques plus performants pour le savoir. En tout état de cause, une autre question reste posée : le jour où le protéome d’un patient sera totalement répertorié, connaîtrons-nous pour autant les séquences responsables des mécanismes tumoraux ? |

ROSE-MARIE LEBLANC

consultant biologiste, Bordeaux (33)

[email protected]

Protéomique, biologie et diagnostic du cancer

La protéomique ou science du protéome, au champ d’application potentiellement très vaste, pourrait en théorie trouver une place de choix dans le diagnostic des tumeurs. Mais pour l’heure, les freins technologiques laissent plutôt la place à la génomique et à la transcriptomique.

DéfinitionsDéfinitionsD fi i i

L’auteur n’a pas déclaré de conflit d’intérêts en lien avec cet article.

SourceCommunication de B. Darbouret, lors du 26e colloque Corata, juin 2009, Marne-la-Vallée (77).