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formation | mise au point 14 Quand déterminer la CMI chez les bactéries à Gram négatif ? La nécessité de parfois mettre en œuvre une CMI repose sur des arguments microbiologiques et techniques (techniques de routine pas toujours fiables) ainsi que sur des arguments cliniques et thérapeutiques. Selon les indications du CA-SFM (Comité de l’antibiogramme de la Société française de microbiologie), la détermination de la CMI s’impose pour un certain nombre de bactéries et d’antibiotiques (encadré 1). Entérobactéries et bêta-lactamines En cas de résistance à l’ertapénème avec sensibilité à l’imipé- nème relevé sur l’antibiogramme par diffusion, il est prudent de confirmer la sensibilité aux carbapénèmes par une CMI et de ne pas faire d’interprétation. Concernant les C3G il est recommandé de rendre les résul- tats de l’antibiogramme « comme on les lit » sans règles inter- prétatives et en cas d’utilisation thérapeutique (ceftazidime, ceftriaxone, cefotaxime) de vérifier par la CMI la réponse S pour la céphalosporine utilisée. Bacilles à Gram– et colistine En raison de l’émergence de bactéries multirésistantes, un regain d’intérêt est observé quant à l’utilisation thérapeutique de la colistine. OptionBio | vendredi 29 mars 2013 | n° 487 en défaut de détection d’un mécanisme spécifique de résis- tance et l’étendue de la gamme de concentrations testées est limitée à une ou deux dilutions au-dessus ou au-dessous des concentrations critiques. Technique de gradient de concentration La technique de gradient de concentration ou E-Test ® est en pratique la méthode la plus facile à réaliser (figure 1). | Figure 1. Gradient de concentration E-Test. DR Encadré 2. Paramètres influençant la détermination de la CMI. Le milieu de culture : touche tous les antibiotiques et toutes les bactéries Le temps d’incubation : plus il est long et plus la CMI augmente La température d’incubation : affecte la croissance, l’activité de l’antibiotique, la diffusion, l’expression des résistances La phase de l’inoculum : une phase de latence longue diminue la CMI L’atmosphère, le pH et la concentration en ions divalents peuvent influencer l’activité de certains antibiotiques La subjectivité de la lecture De nombreux paramètres peuvent influencer la détermination de la CMI, toutes méthodes confondues (encadré 2). Malgré les limites des différentes techniques, une méthode correctement standardisée permet de mesurer une CMI à une dilution près dans 95 % des cas et à deux dilutions près dans 99 % des cas. | Source D’après une communication de F. Jehl (Strasbourg) 32 e Réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuse Paris – novembre 2012 Encadré 1. Quand déterminer une CMI. Indications CA-SFM Contexte thérapeutique Entérobactéries Ertapénème C3G Entérobactéries, BGN fermentant Colistine Neisseria Bêta-lactamines Fluoroquinolones Haemophilus influenzae Bêta-lactamine Fluoroquinolones Impasse thérapeutique Pronostic vital engagé Multirésistantes Hétérogénéité des CMI des souches intermédiaires

Quand déterminer la CMI chez les bactéries à Gram négatif ?

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Page 1: Quand déterminer la CMI chez les bactéries à Gram négatif ?

formation | mise au point

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Quand déterminer la CMI chez les bactéries à Gram négatif ?

La nécessité de parfois mettre en œuvre une CMI repose sur des arguments microbiologiques et techniques (techniques de routine pas toujours fiables) ainsi que sur des arguments cliniques et thérapeutiques. Selon les indications du CA-SFM (Comité de l’antibiogramme de la Société française de microbiologie), la détermination de la CMI s’impose pour un certain nombre de bactéries et d’antibiotiques (encadré 1).

Entérobactéries et bêta-lactaminesEn cas de résistance à l’ertapénème avec sensibilité à l’imipé-nème relevé sur l’antibiogramme par diffusion, il est prudent de confirmer la sensibilité aux carbapénèmes par une CMI et de ne pas faire d’interprétation.Concernant les C3G il est recommandé de rendre les résul-tats de l’antibiogramme « comme on les lit » sans règles inter-prétatives et en cas d’utilisation thérapeutique (ceftazidime, ceftriaxone, cefotaxime) de vérifier par la CMI la réponse S pour la céphalosporine utilisée.

Bacilles à Gram– et colistineEn raison de l’émergence de bactéries multirésistantes, un regain d’intérêt est observé quant à l’utilisation thérapeutique de la colistine.

OptionBio | vendredi 29 mars 2013 | n° 487

en défaut de détection d’un mécanisme spécifique de résis-tance et l’étendue de la gamme de concentrations testées est limitée à une ou deux dilutions au-dessus ou au-dessous des concentrations critiques.

Technique de gradient de concentrationLa technique de gradient de concentration ou E-Test® est en pratique la méthode la plus facile à réaliser (figure 1).

| Figure 1. Gradient de concentration E-Test.

DR

Encadré 2. Paramètres influençant la détermination de la CMI.

• Le milieu de culture : touche tous les antibiotiques et toutes les bactéries

• Le temps d’incubation : plus il est long et plus la CMI augmente• La température d’incubation : affecte la croissance, l’activité de

l’antibiotique, la diffusion, l’expression des résistances• La phase de l’inoculum : une phase de latence longue diminue la CMI• L’atmosphère, le pH et la concentration en ions divalents peuvent

influencer l’activité de certains antibiotiques• La subjectivité de la lecture

De nombreux paramètres peuvent influencer la détermination de la CMI, toutes méthodes confondues (encadré 2).Malgré les limites des différentes techniques, une méthode correctement standardisée permet de mesurer une CMI à une dilution près dans 95 % des cas et à deux dilutions près dans 99 % des cas. |

SourceD’après une communication de F. Jehl (Strasbourg)32e Réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuseParis – novembre 2012

Encadré 1. Quand déterminer une CMI.

Indications CA-SFM Contexte thérapeutique

Entérobactéries• Ertapénème• C3G

Entérobactéries, BGN fermentant• Colistine

Neisseria• Bêta-lactamines• Fluoroquinolones

Haemophilus influenzae• Bêta-lactamine• Fluoroquinolones

Impasse thérapeutique

Pronostic vital engagéMultirésistantes

Hétérogénéité des CMI des souches intermédiaires

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La diffusion de cet antibiotique étant mauvaise, l’antibiogramme ne permet que la vérification de la résistance naturelle de cer-taines espèces.Pour les bacilles à Gram–, la CMI de la colistine qui s’impose en cas d’utilisation thérapeutique de la molécule doit être détermi-née par une technique de dilution en milieu liquide.

Neisseria meningitidisUne diminution de la sensibilité aux pénicillines peut être déter-minée sur l’antibiogramme grâce au disque d’oxacilline 5 μg quand le diamètre critique est ≤ à 18 mm.Le résultat est à confirmer par la détermination de la CMI (par dilution ou à défaut par E-Test®).Un phénotype R aux pénicillines (CMI de la pénicilline G > 1 μg/ml) a été signalé mais reste exceptionnel. La détection de ce phénotype rare repose sur la réalisation d’un test chromogé-nique mettant en évidence la pénicillinase.

Neisseria gonorrhoeaeLe traitement actuel des infections à N. gonorrhoeae repose sur l’utilisation des céphalosporines de 3e génération.

En France, à ce jour, aucune souche de sensibilité diminuée à ces molécules n’a été décrite. Seule la recherche d’une péni-cillinase par test chromogénique est justifiée.Lorsque sur l’antibiogramme le diamètre d’inhibition autour du disque d’acide nalidixique (30 μg) est < 25 mm, la détermination de la CMI de l’ofloxacine et de la cipro-floxacine doit être effectuée (résistance croisée à toutes les fluoroquinolones).

Haemophilus spp.La résistance aux pénicillines est déterminée par la recherche d’une pénicillinase par tests chromogéniques.Une diminution de la sensibilité aux bêta-lactamines liée aux PLP peut être détectée sur l‘antibiogramme (diamètre d’inhi-bition autour du disque d’ampicilline à 2 μg < 20 mm ou de cefalotine à 30 μg < 17 mm. Cette diminution de sensibilité affecte peu les C3G, toutefois en cas d’infection sévère ou d’échec thérapeutique, les CMI des bêta-lactamines utilisées doivent être recherchées.Une diminution de la sensibilité aux fluoroquinolones peut être détectée sur l’antibiogramme par un diamètre d’inhibi-tion autour du disque d’acide nalidixique (30 μg) < 21 mm. La détection d’une sensibilité diminuée justifie la détermination de la CMI des fluoroquinolones (ofloxacine, ciprofloxacine, levo-floxacine, moxifloxacine).

En conclusionLa détermination des CMI est indispensable pour de nom-breuses indications. Les techniques de gradient en gélose donnent des résultats suffisamment fiables et sont en routine les plus couramment utilisées. |

SourceD’après une communication de R. Bonnet (Clermont-Ferrand)32e Réunion interdisciplinaire de chimiothérapie anti-infectieuseParis – novembre 2012

Déclaration d’intérêt : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

CHANTAL BERTHOLOMProfesseur de microbiologie

École nationale de physique-chimie-biologie – [email protected]

OptionBio | vendredi 29 mars 2013 | n° 487 15

DR

DAV

ID M

PH

ILLI

PS

/ B

SIP

| Neisseria gonorrhoeae.