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Quel rôle pour l’infirmier pour la santé physique et la vie quotidienne du
patient souffrant de schizophrénie?Exemple de l’éducation thérapeutique
Thomas CHARPEAUD
L’infirmier : un intermédiaire entre institution et soins externes
ARSPG – Paris, le 22 mars 2016
Objectif de l’atelier
Permettre aux participants de développer dans leurs structures respectives un atelier
d’éducation thérapeutique structuré pour la schizophrénie.
La psychoéducation
Terme • employé par Anderson et al. (1980) pour définir une stratégie composée de 4 types d’actions :
Informer les patients sur leur maladie–
Les entra– îner à la résolution de problèmes
Les entraîner à communiquer–
Les entraîner à s– ’affirmer
Ces actions• peuvent (doivent?) inclure les proches.
L’éducation thérapeutique
• Droit fondamental du malade d’être informé de la maladie et deses traitements (charte du patient hospitalisé, code de déontologiemédicale, code de la santé publique, résolution 46/119 de l’ONU).
• L’éducation thérapeutique vise à répondre à ce droit, maiségalement se fixe pour objectifs:
– L’amélioration de la qualité de vie des malades,
– L’amélioration de leur pronostic fonctionnel,
– La consolidation de l’alliance thérapeutique,
– L’optimisation du traitement médicamenteux.
• Il s’agit d’un travail « au quotidien » avec le malade, enconsultations individuelles, ou de manière plus structurée, lors deprogrammes de groupes d’éducation thérapeutique…
Notion d’éducation thérapeutique
• L’éducation thérapeutique du patient vise à aider les patients à acquérir ou maintenir les compétences dont ils ont besoin pour gérer au mieux leur vie avec une maladie chronique 1.
• Les finalités spécifiques de l’éducation thérapeutique sont :– l’acquisition et le maintien par le patient de compétences
d’autosoins,– la mobilisation ou l’acquisition de compétences
d’adaptation: la maladie complique les choses, mais ne les rend pas forcément impossibles…
1. OMS. Therapeutic Patient Education – Continuing Education Programmes for Health Care Providers in the field of Chronic Disease. 1996
Les objectifs
1
Optimiser le traitement médicamenteux
2
Prévenir les récidives, le nombre et la durée des hospitalisations
3
Améliorer la qualité de vie
4
Favoriser et entretenir l’alliance thérapeutique
L’ETP est:
- Un entraînement
- Une technique médicale et une augmentation de la capacité des patients
- Destinée aux patients et à leur entourage
- Un des constituants d’un nouveau paradigme thérapeutique
L’ETP n’est pas:
- Uniquement de l’information
- Juste un type de pratique médicale
- Uniquement une intervention de crise
- Seulement destinée aux patients
- Seulement destinée à l’entourage
- Donner un manuel ou l’adresse d’un site web
- Une technique de « self-help »
Pourquoi un nouveau paradigme?
• La relation thérapeutique est plus fondée sur la confiance que sur l’autorité.
• Le thérapeute doit être prêt à prendre en compte les difficultés avec un traitement, soulevées par un patient bien informé et « entraîné ».
• Modification de la relation entre un médecin « soignant » et un patient passif.
• La psychoéducation permet de mettre en place une alliance thérapeutique basée sur la collaboration, l’information et la confiance. Les modalités de traitement tendent vers un modèle de décision médicale partagée.
• Le patient « psycho-éduqué » « sait ce que l’on sait »…
-6 -4 -2 0 2 4 6 8 10
1 er épisode
Sévérité
sym
pto
matiq
ue
Symptomes négatifs
Psychose
Déficits cognitifs
Trouble de l'humeur
État
prémorbide
Prodrome
Profil évolutif de la maladie
Kraepelin et la notion de démence précoce
• Psychose chronique– survenue chez un adolescent ou un jeune adulte
– caractérisée par de graves troubles intellectuels et affectifs
– évolution progressive vers un effondrement psychique.
• Symptômes :– troubles de la mémoire, du langage, du raisonnement
– accès de négativisme, de maniérisme
– période d’excitation
Ciompi et Muller 1976
L’enquête de Lausanne
• 220 patients au diagnostic de schizophrénie, suivis sur 20 ans.
• Évolution « oscillante » pour 47%.• Évolution favorable pour près de 50% des
malades.
• Critiques méthodologiques nombreuses, notamment sur les critères diagnostiques utilisés…
La schizophrénie: Quelle évolution?
• 18 études.• Suivi supérieur ou
égal à un an, après un diagnostic initial de schizophrénie.
• Évolution hétérogène:• Défavorable dans
moins de 50% des cas
• Favorable dans moins de 50% des cas
Van OS J et Kapur S 2009
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 75 80 85 90
Symptômes psychotiques
Un scénario catastrophe à éviter…
Exemple de la mauvaise observance:Défaut d'observance et 1er épisode psychotiqueRésultats de l’étude EUFEST
EUFEST, European First Episode Schizophrenia Trial; GAF, Global Assessment of Functioning Kahn et al. Lancet 2008;371:1085–1097
Etude européenne, 498 patients de 18 à 40 ans présentant un 1er épisode psychotique:Taux d’arrêt du traitement à un an = 30 à 70%, équivalent à celui observé dans le cadre du suivi au long cours.
La mauvaise observance au traitement « Drugs don’t work in patients who don’t take them… » C. Everett Koop
Phénomène «• dynamique »Influencé par:•
Un faible niveau d• ’insight,Une attitude négative vis• -à-vis des médicaments,Des antécédents de mauvaise •
observance,Une hygiène de vie inadaptée• ,Un faible niveau d• ’alliance thérapeutiqueUne mauvaise tolérance•
Un nombre important de prises •
quotidiennesLa «• pression de l’entourage »Les éventuels troubles cognitifs•
La «• stigmatisation dans la société »…
Keith & Kane J Clin Psy 2003,Lacro et al. J Clin Psy 2002,
Robinson et al. Arch Gen Psy 1999
La mauvaise observance au traitement multiplie par 5 le risque de rechute après un 1er épisode psychotique.
L’évolution de la schizophrénie est donc loind’être systématiquement péjorative…
L’exemple de la mauvaise observance autraitement oral, et le risque de rechute qui endécoule, sont en faveur d’interventionspsychoéducatives spécifiques…
ETP et Schizophrénie
• La prise en charge de la schizophrénie est multifocale: pharmacologique, psychothérapique, sociale…
• L’éducation thérapeutique est un volet de la prise en charge, permettant probablement d’aboutir à:– Une meilleure observance au traitement,– Une diminution du risque de rechute,– Un meilleur fonctionnement social,– Une meilleure évaluation de la qualité de vie,– Une plus grande satisfaction des patients vis-à-vis des
soignants.
Xia et al. 2011
Les recommandations
Dans le domaine « psychothérapeutique », on retrouve uniquement des recommandations concernant l’utilisation des prises en charge psycho-
éducatives.
1. Gaebel et al (2005)
Quizz
Quelle est votre expérience de l’éducation thérapeutique dans la schizophrénie?
A: Je n– ’ai aucune expérience dans ce domaine.
B: J– ’ai assisté à des groupes d’éducation thérapeutique dans mon service.
C: J– ’anime régulièrement des groupes d’éducation thérapeutique.
ETP & Schizophrénie
ETPConnaître la maladie
Connaître et prendre les traitements
La vie affective
Les relations avec les
professionnels de santé
Les relations avec les autres: famille, amis,
travail…
L’hygiène de vie
La vie culturelle
La réinsertion professionnelle
Vivre avec la maladie
Quelles prises en charges?
Traitement des addictions
Psychothérapie
Hospitalisation partielle
Traitement pharmacologique
Accompagnement social
Hébergements thérapeutiques
Travail des habiletés sociales
Remédiation cognitive
Travail en milieu protégé
Règles hygiéno-diététiques
Prises en charges multiples et complexes
Comment les ordonner?
Abord par l’intermédiaire d’un
programme d’éducation:
Définir les objectifs individuels du malade,
aussi bien sur sa maladie que sur sa
qualité de vie…
Qu’en pensez-vous?Vrai – Sans avis – Faux
• Les groupes d’ETP doivent être homogènes (symptomatologies similaires)…
• L’ETP peut se faire à n’importe quelle phase de la maladie…
• Le malade doit être stabilisé depuis au moins six mois pour participer à un groupe d’ETP…
• Le malade doit être informé du diagnostic de schizophrénie avant de participer à un programme d’ETP…
ETP & Schizophrénie
• Malades informés du diagnostic.• En dehors d’une phase de décompensation aigüe
de la maladie.• Accompagnement de l’entourage à favoriser.• Programme souple, modulable, sans objectif « de
performance ».• Tout doit pouvoir être abordé, à partir de
compétences pluridisciplinaires.• Utilisation de supports adaptés, interactifs et
ludiques…• Dès le début de la maladie…
• La participation au groupe d’ETP répond à une indication médicale.
• L’animation d’un groupe d’ETP nécessite la présence systématique d’un médecin.
• L’animation d’un groupe d’ETP exclue la présence de malades eux-mêmes.
• L’animation d’un groupe d’ETP est réalisée par des intervenants « fixes ».
Qu’en pensez-vous?Vrai – Sans avis – Faux
Quels éléments intégrez-vous dans le bilan éducatif?
« Le diagnostic éducatif est la première étape de la démarche d’éducation qui permetd’appréhender différents aspects de la personnalite du patient, d’identifier ses besoins,d’évaluer ses potentialités, de prendre en compte ses demandes dans le but deproposer un programme d’éducation personnalisé »
D’Ivernois et al. 2008
Le bilan éducatif doit…
• Permettre de faire connaissance avec le malade, sa maladie, mais aussi son mode de vie…
• Synthétiser les attentes du malade vis-à-vis du programme
• Synthétiser ses connaissances• Intégrer éventuellement des outils d’évaluation
objective (qualité de vie: SF36, adhésion au traitement: MARS...)
• Mais SURTOUT, explorer ce qui donne envie au patient de prendre soin de sa santé.
Sandrin-Berthon B. Med Maladies Métaboliques 2010
Un bilan éducatif
0
0,5
1
1,5
2
2,5
3
3,5
4
4,5
5
Organisation
Acceptation
RetentissementExpertise
Projet
Date 1
Date 2
L
Le Programme SCHIZ’EDUC
Programme d• ’ETP destiné aux patients souffrant de schizophrénie, stabilisés; et à leurs proches.Objectifs:•
Connaissance de la maladie, ses symptômes, ses aspects –neurobiologiques.Connaissance des traitements: effets thérapeutiques, –effets indésirables, intérêt de la bonne observance sur le risque de rechute.Encourager vers des démarches de réhabilitation –fonctionnelle et de réinsertion.
• Déstigmatiser la maladie• Favoriser l’échange et rééquilibrer la
relation soignants – soignés• Éviter le risque de rechute
Programme ETP
SCHIZ’EDUC
Module N°1:
Connaissance de la maladie
Module N°3:
Vivre avec la maladie
Module N°2:
Connaissance des traitements
• 12 séances• 3 modules de 4 séances• Modules réalisables dans
n’importe quel ordre:• Au choix du malade• Et selon l’indication médicale
Module n°1: Connaissance de la maladie
• Différents supports, notamment vidéos sont utilisés. • Les objectifs se centrent sur la reconnaissance des
principaux symptômes de la maladie, mais aussi des symptômes annonciateurs de rechute.
• Des cartes « coupe-feu » sont distribuées pour proposer au malade des moyens d’intervention en cas de crise.
• L’utilisation de pictogrammes permet d’expliciter un vocabulaire spécifique à la maladie, dans l’objectif de réduire l’incompréhension entre ce que veut dire le malade lors de la consultation, et ce que perçoit finalement le médecin.
• Des données épidémiologiques et neurobiologiques de base sont également données, à partir d’un support interactif de neuro anatomie simplifiée.
Module n°2: Connaissance des traitements
• Différents supports sont utilisés pour rendre l’information ludique, et créer des échanges à l’intérieur du groupe : jeux de cartes, brainstorming, classement des médicaments, jeux de rôles …
• Les objectifs principaux sont d’informer le malade sur la nécessité d’une bonne observance médicamenteuse, mais aussi de libérer l’expression vis-à-vis des traitements, et du ressenti des malades, aussi bien concernant les effets positifs que les effets secondaires possibles.
• Le malade doit ainsi pouvoir connaître et s’approprier les différents éléments de son traitement, et pouvoir discuter librement, sans complexe, de son ressenti, de ses doutes, des raisons de sa mauvaise observance…
• Enfin, une séance est consacrée aux approches thérapeutiques non-médicamenteuses : psychothérapies, relaxation, mindfullness, entrainement aux habiletés sociales.
45
L’antagonisme dopaminergique D2…
Diminution des symptômes productifs
Aggravation des symptômes déficitaires
Levée d’inhibition sur la sécrétion de prolactine
Effets indésirables extrapyramidaux
46
L’antagonisme sérotoninergique 5-HT2A…
Limite le blocage dopaminergique, et l’aggravation des symptômes déficitaires
Limite le blocage dopaminergique et les effets indésirables extrapyramidaux
Module n°3: Vivre avec la maladie• Il s'agit d’insister sur le fait que toute la vie du malade ne doit pas se
résumer aux aspects purement médicaux liés à sa maladie. • Ce troisième module se tourne donc vers la vie quotidienne, en dehors de
l’hôpital. • Pour cela, les aspects sociaux, notamment la recherche d’un logement
adapté, parfois en passant par des structures de type appartements thérapeutiques, la question de l’argent, et des mesures de protection, tout comme la question de l’emploi sont bien sûr abordées.
• Les modalités de soins sans consentement, y sont abordées également afin de dédramatiser ces situations, et d’évoquer notamment la place des proches dans la prise en charge de la maladie.
• Au-delà, c’est aussi la vie de l’individu dont il est question à travers les loisirs, le fonctionnement quotidien, la pratique d’une activité physique, le respect de règles d’hygiène de vie…
• La dernière séance se veut moins formelle, comme une synthèse du programme, mais aussi et surtout, comme une mise en perspective pour l’avenir : quel est mon projet ? Comment je peux le réaliser ? De qui et de quoi ai-je besoin pour le réaliser ?... Si la maladie complique bien sûr les choses, le malade ne doit pas pour autant en être l’esclave.
Monsieur B, 32 ans
• Diagnostic de schizophrénie depuis 10 ans, avec addiction au cannabis.
• Symptômes essentiellement négatifs: apragmatisme, aboulie, clinophilie…
• Abord et illustration des symptômes négatifs de la schizophrénie à partir d’une situation clinique du film PACT
• Monsieur B sourit, et nous confie: « c’est vrai que ça me ressemble un
peu… »
Madame D, 42 ans
Schizophrénie paranoïde depuis • 20 ans
Symptômes délirants et désorganisation de la pensée et du •
comportement.
Illustration d• ’un comportement désorganisé à partir de la vidéo de PaulMadame D nous explique •
qu’elle va prendre la douche mais elle laisse couler l’eau sans se laver ou qu’elle ressort de la douche sans s’essuyer et s’habille directement…
Monsieur J, 34 ans
• Diagnostic de schizophrénie depuis 14 ans.
• Symptômes délirants à type d’hallucinations auditives résistantes …
• Mauvaise tolérance des traitements
• Abord et illustrations des effets secondaires à type de troubles cognitifs et d’endormissement
• Mr J nous explique que la prise du traitement entraînait les mêmes effets chez lui : « je n’arrivais plus à lire », « je n’arrivais plus à dessiner »
Une autre image de la maladie…
Rosane essaie une voiture…
• Jeunes patients• En début de maladie• Démarches de réinsertion en
cours
Créer un Groupe de Travail
• Objectif: Mettre au point un programme et soumettre un dossier d’accréditation auprès de l’ARS.
• Doit comprendre:– Un ou des coordonnateurs– Une équipe pluridisciplinaire: IDE, médecins,
psychologues, diététiciens, addictologues, éducateurs sportifs…
– Des patients– Des familles– Des membres d’association: UNAFAM, GEM…
• Avec l’aide de l’équipe transversale d’ETP (une par CHU)
http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-10/etp_grille_aide_evaluation_autorisation_programme_ars_web.pdf
Conclusion
• L’éducation thérapeutique renvoie à un nouveau modèle en médecine, en rééquilibrant la relation thérapeutique, et en favorisant l’alliance thérapeutique.
• Le patient doit devenir un professionnel de samaladie et donc de sa santé.
• L’éducation thérapeutique est une des seules stratégies thérapeutiques non-médicamenteuses à être recommandée par les sociétés savantes, et le plus tôt possible dans l’idéal.
• Créer un programme d’ETP est un travail d’équipe.• L’expérience prouve à quel point ce travail est utile!
Etes-vous satisfaits?
• J’ai beaucoup apprécié la présentation et le Dr Charpeaud était génial.
La présentation était formidable, tout comme •
le Dr Charpeaud.
Tout était parfait, surtout le Dr Charpeaud.•
MERCI DE VOTRE ATTENTION.
Contact:Thomas CHARPEAUDUnité Pariou – Centre Expert Dépression Résistante Fondation FondaMentalService de Psychiatrie de l’adulte B – Pr PM. LLORCACHU de [email protected]