60
UNE INITIATIVE DU Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs québécois ? AMÉLIOREZ LA PERFORMANCE DE VOTRE ENTREPRISE VOLUME 1, ÉDITION 2003 Alain Bellemarre Pratt & Whitney Canada Suzanne Blanchet Cascades – Groupe Tissu Alban D’Amours Mouvement Desjardins Daniel Lamarre Cirque du Soleil Sylvain Toutant Réno-Dépôt EN PRIMEUR : UN SONDAGE SUR LE QUOTIENT INTERNET DES DIRIGEANTS QUÉBÉCOIS POSTE - PUBLICATIONS - CONVENTION N O 40028072

Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

  • Upload
    others

  • View
    5

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

U N E I N I T I A T I V E D U

Quelles sont les grandes

préoccupations des décideurs

québécois ?

A M É L I O R E Z L A P E R F O R M A N C E D E V O T R E E N T R E P R I S E

VOLUME 1, ÉDITION 2003

Alain BellemarrePratt & Whitney Canada

Suzanne BlanchetCascades – Groupe Tissu

Alban D’AmoursMouvement Desjardins

Daniel LamarreCirque du Soleil

Sylvain ToutantRéno-Dépôt

EN PRIMEUR :UN SONDAGE SUR

LE QUOTIENT INTERNET DES DIRIGEANTS QUÉBÉCOIS

PO

ST

E -

PU

BL

ICA

TIO

NS

- C

ON

VE

NT

ION

NO

40

02

80

72

Page 2: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

Relations clients Approvisionnement Ressources humaines Communications Infrastructure

Concentrez-vous sur vos affaires et laissez Bell s’occuper du reste. Des

solutions d’affaires électroniques en réseau – incluant l’approvisionnement

et la facturation – à la gestion de la relation client et aux ressources

humaines, en passant par des solutions de gestion comprenant la

sécurité, les services de communications de bureau convergent et la

gestion de réseaux, vous y trouvez une gamme complète de solutions

qui fonctionnent à même le réseau de Bell et non le vôtre. Oubliez l’achat,

l’installation ou l’entretien coûteux d’équipements et de logiciels. Oubliez

aussi les casse-tête de gestion de systèmes complexes, d’intégration et

de compatibilité. Confiez tout à l’expertise de Bell et à son réseau souple

et convivial. Des solutions qui se développent à votre façon, au rythme

de vos besoins d’affaires.

Appelez votre représentant ou visitez le www.affairesreseau.bell.ca

Affaires électroniques réseau

S o l u t i o n s d ’ a f f a i r e s é l e c t r o n i q u e s e n r é s e a u d e B e l l

S p é c i a l i s é d a n s l e s j o u e t s ? V o u s n ’ a v e zq u ’ u n e c h o s e à f a i r e : p e n s e r a u x j o u e t s.

Page 3: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

3P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

C O M I T É É D I T O R I A L

Éditrice et rédactrice en chefLiette D’AmoursDirectrice, communications et marketingCEFRIO

Rédacteur en chef adjointRéjean RoyConseiller en technologies del’information

CollaborateursYan Barcelo, Danielle Stanton

Comité éditorialPrésident : Jean-Marc LégerPrésident, Léger Marketing

Membres :Claude Béland, professeur et titulairede la Chaire économie et humanismeUniversité du Québec à Montréal

Monique Charbonneau, présidente-directrice générale, CEFRIO

Gérald Larose, professeurÉcole de travail socialUniversité du Québec à Montréal

Stéphane Le Bouyonnec, associéSecor

Robert L. Papineau, directeurgénéral, École Polytechnique de Montréal

Conseiller : Adel El Zaïm, directeur innovation et transfert, CEFRIO

RéviseursThérèse Le Chevalier et Louise Letendre

Conception graphique et infographieBrigitte [email protected],assistée de Richard Duchesnepour les graphiques

PhotographeYves Lacombe

PerspecTIves est une initiative du CEFRIO (Centre francophoned’informatisation desorganisations)

900, boul. René-Lévesque EstBureau 717Québec (Québec)G1R 2B5Téléphone : (418) 523-3746Télécopieur : (418) 523-2329

550, rue Sherbrooke OuestBureau 350Montréal (Québec)H3A 1B9Téléphone : (514) 840-1245Télécopieur : (514) 840-1275

Courriel : [email protected]

www.cefrio.qc.cawww.infometre.cefrio.qc.ca

Dépôt légal : quatrième trimestre 2002Bibliothèque nationale du QuébecBibliothèque nationale du CanadaISSN : 1703-7956

« Écrit pour les gens d’affaires, PerspecTIves sedistingue par son approche pratico-pratique.Contrairement à certaines revues spécialisées,son contenu est fouillé sans pour autant êtrehermétique. Sa force : mettre en perspective tantl’expertise de hauts dirigeants que les réflexionsde chercheurs réputés en matière d’innovation.Ce qui nous donne accès au meilleur des deuxmondes. Je l’ai apprécié d’une couverture àl’autre : chaque texte m’a appris quelque chose. »

Robert Papineau, directeur général, École Polytechnique de Montréal

« En 2003, le dirigeant sera encore et toujoursconfronté à cette course au rendement, cettecomplexification des affaires qui force l’adap-tation continuelle et en accéléré de sonorganisation. Dorénavant, il se doit, en plusd’affirmer la cohérence de ses choix straté-giques, d’assurer la cohésion et l’adaptation deses troupes dans la mise en œuvre. À ce niveau,la revue PerspecTIves met en relief toute

l’importance que prendront les technologies de l’information dansl’élaboration de stratégies d’entreprises. »

Stéphane Le Bouyonnec, associé, Secor

« Keynes et Marx disaient la même chose :l’économique précède le social et le social estune dépense. De toute évidence, ce paradigmene tient plus. Aujourd’hui, le social est uninvestissement déterminant du rendement del’investissement économique. La clé d’accès à cecapital social est désormais faite de savoirs, deformation, de mises en réseau, de technologiesde l’information, etc. PerspecTIves en fait ladémonstration. Cette revue est franchement partisane ! Elle milite pourla valorisation du capital humain. À lire absolument. »

Gérald Larose, professeur, École de travail social Université du Québec à Montréal

«Nous ne changeons pas de millénaire mais d'époque.L'intégration des technologies de l’information donnenon seulement l'occasion de réviser ses processusd'affaires, mais engendre une révolution culturelle ausein des organisations. PerspecTIves se veut un outilpour tirer le maximum de ces transformations.»

Claude Béland, professeur et titulaire de la Chaireéconomie et humanisme, Université du Québec à Montréal

« Quand les dirigeants d’entreprise affrontent les défis de demain avec les méthodes d’hier, ils ont les problèmes d’aujourd’hui. La revuePerspecTIves est justement un des instrumentsessentiels pour les gens d’affaires pour aller au-delà des tendances, pour comprendre lesnouveaux défis qu’imposent les nouvellestechnologies de l’information, et pour prendredes décisions d’affaires éclairées. »

Jean-Marc Léger, président, comité éditorial et président, Léger Marketing

Page 4: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

4 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

É D I T O R I A L

R éaliser des profits dansun contexte économi-

que incertain; satisfaire sesactionnaires tout en demeu-rant intègre; prendre desrisques sans y laisser sapeau ; innover juste-à-temps… Le moins que l’onpuisse dire, c’est que dirigeraujourd’hui une entreprisen’est pas de tout repos. Les

attentes sont grandes et les défis sont de taille.

Évidemment, les dirigeants québécois ne font pasexception. Comme leurs pairs sur la scèneinternationale, ils subissent de plus en plus depressions et ont de moins en moins droit à l’erreur.Mais, nonobstant ces généralités, qu’est-ce quidistingue les décideurs québécois? Quelles sontleurs grandes préoccupations? Sont-ils confrontésaux mêmes défis que leurs homologues européens,par exemple ? L’impact d’Internet sur leurindustrie les touche-t-il autant que les Japonais?Sont-ils aussi branchés que les Américains?

En publiant ce tout premier numéro de Perspec-TIves, le CEFRIO voulait non seulement répondreà ces questions de manière concrète, mais aussiproposer un temps d’arrêt aux décideurs québé-cois. Pour leur donner l’heure juste, des entre-vues ont été réalisées auprès de hauts dirigeantsquébécois et un sondage a été mené en collabo-ration avec Léger Marketing auprès des 500 plusgrandes entreprises du Québec. PerspecTIvesvous présente donc en primeur la toute premièreétude réalisée sur le quotient Internet desdirigeants québécois.

À la manière du CEFRIO, dont la mission estd’aider les entreprises à mieux performer grâce àune meilleure appropriation des technologies del’information, ce magazine, publié annuellement,s’intéresse bien plus à l’humain qu’aux ordina-teurs que celui-ci utilise. Ses articles traitent desdernières tendances en matière de gestion et desprincipaux défis qui attendent les dirigeants aucours des prochaines années.

Dans ce premier numéro, vous trouverez doncdifférents articles portant sur les préoccupationsdes dirigeants québécois et sur la façon dont lestechnologies peuvent les aider à relever ces défis.De nature pratico-pratique, ces textes font la lumière

sur les conditions de réussite, les occasions et lesdangers inhérents à ces nouvelles pratiques.

PerspecTIves ne se contente toutefois pas d’aborderles sujets de l’heure – pénurie de main-d’œuvre,impact d’Internet, effets de la mondialisation, réten-tion et loyauté des clients, etc. ; il cherche aussi àdevancer l’avenir en présentant les résultats derecherches qui, bien que peu connus à l’extérieur dumilieu universitaire, nous semblent susceptiblesd’intéresser grandement les chefs d’entreprise.

PerspecTIves se veut donc une vitrine pourvaloriser tant l’expertise de hauts dirigeants queles réflexions de chercheurs réputés en matière degestion. Contrairement à certains autres magazinesspécialisés, il traite de sujets innovateurs qui nesont pas pour autant hermétiques, et vise à explorerde nouvelles pistes dans un but ultime: contribuerà améliorer la compétitivité des entreprises.

Évidemment, un projet d’une telle envergure ne seréalise pas sans aide. Je voudrais d’abord rendrehommage aux membres du comité éditorial,constitué d’hommes d’affaires généreux qui, mal-gré leurs horaires chargés, ont pris le temps denous prodiguer leurs précieux conseils et leurssages recommandations. Un merci tout particulierà son dynamique président, Jean-Marc Léger,président de Léger Marketing, et à ses membresprestigieux : Claude Béland, professeur et titulairede la Chaire économie et humanisme à l’Universitédu Québec à Montréal ; Gérald Larose, professeur àl’École de travail social de l’Université du Québecà Montréal ; Stéphane Le Bouyonnec, associé chezSecor, et Robert L. Papineau, directeur de l’ÉcolePolytechnique de Montréal.

Je tiens également à souligner la précieuse contri-bution des gens d’affaires et des chercheurs quiont consenti à nous accorder des entrevues, et àceux et celles qui ont bien voulu répondre ausondage NetLeader. Leurs propos apporterontsûrement un éclairage nouveau dont profiterontles leaders québécois.

Il ne me reste plus qu’à souhaiter que ce premiernuméro de PerspecTIves vous plaise et vous inspire.

Bonne lecture !

Monique CharbonneauPrésidente-directrice générale du CEFRIO

Pour vous donner l’heure juste…

Page 5: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

Les grandes préoccupations des dirigeants québécois

Qu’est-ce qui inquiète les dirigeants québécois ?Éprouvent-ils les mêmes soucis que leurs pairs nord-américains ou encore européens et asiatiques? Huit déci-deurs québécois, qui comptent parmi les plus influentsdans leurs secteurs d’activité respectifs, font le point.

Gérer le capitalhumain à l’èred’InternetLe manque de relève, combinéau départ massif à la retraitedes baby-boomers, amène lesdirigeants québécois à revoiren profondeur leurs stratégies

de gestion des ressources humaines. Quelques conseilspour se préparer efficacement.

Innovation : vos clients conçoi-vent-ils vos nouveaux produits ?

Entrevue exclusive avec Eric von Hippel, professeur à la Sloan School of Management du MassachusettsInstitute of Technology (MIT).

Préparer son entreprise à affronter 2007

Quelles décisions les dirigeants devraient-ils prendreaujourd’hui pour que leur entreprise soit positionnéeadéquatement en 2007 ? Comment les technologiespeuvent-elles leur permettre de résoudre les problèmesauxquels ils seront alors confrontés ? Trois experts seprononcent.

Le quotient Internet (QI) des dirigeants québécois

Menée auprès des 500 plus grandes sociétés de laprovince, l’enquête NetLeader trace pour la premièrefois au Québec un portrait de ce que les dirigeantsd’entreprise pensent de l’informatisation et de l’impactd’Internet.

Technologies : gare aux miroirsaux alouettes

Entrevue exclusive avec Riccardo Petrella, l’un despenseurs européens les plus en vue.

Nouvelle économie, nouveauconsommateur ?Le marketing traditionnelagonise-t-il ? Internet a-t-il crééun nouveau type de consom-mateur ? Deux spécialistes seprononcent : le Québécois

Jacques Nantel et l’Américain David Weinberger.

Apprendre à gérer l’attention :une question de survie

Entrevue exclusive avec Thomas H. Davenport, direc-teur du Accenture Institute for Strategic Change etcoauteur du best-seller The Attention Economy,Understanding the New Currency of Business.

Grande entreprise et fournisseurs : un modèle d’affairesélectroniques encoreà définirLe modèle d’affaires électro-niques qu’on présente auxPME s’applique-t-il vraiment à

leur réalité ? Cinq fournisseurs québécois exposent leurpoint de vue.

5P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

S O M M A I R E

6 26

30

38

48

15

21

42CEFRIO : la référence en matièred’appropriation des technologiesde l’informationEn tant que spécialiste de la transformation desorganisations, le CEFRIO se penche au quotidiensur ce qui favorise ou freine l’appropriation destechnologies de l’information, au Québec etailleurs. Ses interventions prennent la forme deprojets de recherche-action et de veille menés encollaboration avec des partenaires provenant tantdes secteurs privé que public. Par exemple, leCEFRIO étudie actuellement le potentiel des outilsd’apprentissage en ligne en matière de formationdes travailleurs (eLearning), examine les tenants etles aboutissants de la mise en œuvre de servicesélectroniques auprès des entreprises et descitoyens par le gouvernement du Québec, et gère lesite PME Québeclic, un portail sur les affairesélectroniques destiné aux PME québécoises.

À ce jour, le CEFRIO a mené plus de 200 projetsde recherche totalisant plus de 30 millions dedollars. Son portefeuille de recherche actuels’élève à 4,5 millions de dollars. Quinze ansaprès sa fondation, il regroupe plus de 140 mem-bres issus tant des secteurs privé que public, etsa réputation le précède dans un nombre encoreplus grand d’organisations.

53

Page 6: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

6 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Les grandes préoccupationsdes dirigeants québécois

PA R L I E T T E D ’ A M O U R S

P remier constat : bien que tous les dirigeants àl’échelle internationale soient plus au moins

confrontés aux cinq mêmes enjeux – pénurie de main-d’œuvre/lutte pour le talent ; pressionssur les prix ; effets de la mondialisation sur laconcurrence ; loyauté et rétention des clients et impact d’Internet –, l’ordre dans lequel ilsclassent leurs préoccupations varie radicale-ment d’un continent à l’autre. Ainsi, selonl’étude d’Accenture, les dirigeants européensseraient surtout touchés par l’impact d’Internet,les Asiatiques, par les effets de la mondialisa-tion sur la concurrence et les Nord-Américains,par la pénurie de main-d’œuvre/lutte pour letalent (voir tableau, page 12).

Si on compare maintenant l’étude internationaleau sondage NetLeader, CEFRIO-Léger Marketing(voir tous les résultats en page 30), on constateque la pénurie de main-d’œuvre représente nonseulement le défi numéro un des dirigeants

nord-américains (39% selon Accenture-ConferenceBoard), mais aussi celui de 36% des chefs d’entre-prise québécois (voir graphique et tableau, pages10 et 12).

Preuve que les Québécois ont de la suite dans les idées, la pénurie de main-d’œuvre/lutte pourle talent a également été jugée comme la premièrepréoccupation des huit dirigeants interviewésdans le cadre de cet article. Histoire d’en appren-dre davantage sur les principaux défis que pose la gestion d’une grande entreprise en 2002 et sur la façon dont ces dirigeants utilisent lestechnologies de l’information pour les relever, un bref questionnaire leur a été soumis. Jetonsmaintenant un coup d’œil sur ce qui passe réelle-ment sur le terrain.

À titre de dirigeant, quelle est votre plusgrande préoccupation ? (Parmi les cinqchoix proposés par Accenture) « En raison de la complexité des services offerts,toutes les institutions financières réclament désor-

Pénurie de main-d’œuvre, rétention et loyauté des clients, pressions sur les prix… Qu’est-

ce qui inquiète le plus les dirigeants québécois à l’heure actuelle ? Éprouvent-ils les mêmes

soucis que leurs pairs nord-américains ou encore européens et asiatiques ? Pour le savoir,

le CEFRIO, en collaboration avec Léger Marketing, a effectué en août 2002 un sondage

auprès des 500 plus importantes entreprises du Québec. Ces résultats ont par la suite été

comparés à ceux d’une étude similaire réalisée à l’échelle internationale par la firme-conseil

Accenture et le réputé Conference Board. Pour enrichir ces données, nous avons en outre

interviewé huit dirigeants québécois qui comptent parmi les plus influents dans leurs

secteurs d’activité respectifs.

Alban D’Amours, président et chef de la direction,Mouvement DesjardinsÉlu Personnalité financière de l’année par le journaléconomique Finance et Investissement en 2001 et Personnalité de l’année dans le domaine desaffaires au Gala Excellence de La Presse en 2000,Alban D’Amours œuvre au sein de la hautedirection du Mouvement Desjardins depuis 14 ans. En septembre 2001, l’Université duQuébec lui décernait un doctorat honoris causapour souligner l’importance de sa contribution sur le plan professionnel.Ph

oto

: Yv

es L

acom

be

Page 7: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

7P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E S G R A N D E S P R É O C C U P A T I O N S D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

mais beaucoup de compétences, lance d’entrée de jeu Alban D’Amours, président et chef de ladirection au Mouvement Desjardins. La concur-rence est à ce point vive que nous nous sommesrécemment dotés d’un plan d’action pour ledéveloppement de la main-d’œuvre pendant lestrois prochaines années. » Desjardins y injectera 50 millions de dollars, à raison de 17 millions parannée. On parle à la fois d’un plan pour la relève,le recrutement de jeunes universitaires et laformation tant des dirigeants et des cadres supé-rieurs que des employés-conseils.

L’importance d’attirer une main-d’œuvre quali-fiée n’échappe pas non plus à Madeleine Paquin,présidente et chef de la direction de Logistec.« Pour assurer l’avenir du secteur du transport au Québec, nous aurons besoin de personneltalentueux afin de mettre au point de nouvellestechniques de manutention des marchandises,trouver des manières de maximiser l’efficacité denos vaisseaux et créer les solutions qui permet-tront au client de suivre les déplacements de sacargaison à l’aide d’Internet. »

Œuvrant dans un secteur des plus spécialisés, leCirque du Soleil, pour sa part, doit littéralementratisser la planète pour mettre la main sur lesmeilleurs artistes. Le joyau québécois emploie 2 400 personnes parlant plus de 25 langues etprovenant de 40 pays différents. « Pour contour-ner le problème de la relève, des écoles de cirqueont été mises sur pied au Québec, précise DanielLamarre, président-directeur général, Spectacleset nouvelles entreprises au Cirque du Soleil. Les Québécois sont d’ailleurs en train de devenir

des leaders mondiaux dans le domaine. Ainsi,tant qu’on restera leader de notre industrie, onpourra retenir le talent. Toutefois, nous sommeségalement conscients que les artistes à notreemploi sont de plus en plus sollicités. »

Même son de cloche à HEC Montréal: «Bien que lemonde universitaire soit un univers internatio-nalisé depuis très longtemps, la concurrence s’yest beaucoup intensifiée depuis les dix dernièresannées, explique Jean-Marie Toulouse, directeurde HEC Montréal. Il y a 25 ans, on s’arrachait les

bons candidats à l’échelle continentale (Canada,États-Unis). Aujourd’hui, recruter en Nouvelle-Zélande est devenu fréquent. Avec Internet, il estdevenu plus facile de repérer des candidats auxquatre coins de la planète. Résultat : je consacreune bonne partie de mon temps à essayer de recru-ter des professeurs et l’autre à tenter de les garder.Le plus curieux, c’est que je perds aujourd’huiplus de professeurs au profit de l’entrepriseprivée que de mes rivales universitaires. »

« Dans l’industrie du détail, nous devons travail-ler très fort pour retenir les jeunes, déclareSylvain Toutant, président et chef de la directionde Réno-Dépôt. Ils sont davantage attirés par lesTI et les métiers de la nouvelle économie que parun emploi dans la vente en magasin. Si bien quenous éprouvons aujourd’hui plus de difficulté à recruter et surtout, à retenir une main-d’œuvrede qualité. » Pour contourner ce problème, lespécialiste de la rénovation a usé de créativité :« On recrute désormais de jeunes retraités. Desgens en pleine santé qui ont entre 55 et 60 ans et

Madeleine Paquin, présidente etchef de la direction, Logistec

Depuis qu'elle dirige Logistec, uneentreprise spécialisée dans

la manutention de marchandises, le chiffre d'affaires a plus que doublé (173 M$). Elle occupe

actuellement le 3e rang auclassement PROFIT/Châtelaine des

100 premières propriétairesd’entreprise au Canada (Top 100

Women Business Owners 2002), et lepremier rang parmi les Québécoises.

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 8: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

8 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E S G R A N D E S P R É O C C U P A T I O N S D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

le goût de travailler deux à trois jours par semai-ne, et qui amènent avec eux tout un bagage deconnaissances. Cela compense. »

Ce qui fait le bonheur des uns inquiète parfois lesautres. Ainsi, Suzanne Blanchet, présidente etchef de la direction de Cascades – Groupe Tissu,appréhende le départ massif à la retraite desbaby-boomers. D’ici 10 ans, une forte proportionde la population active prendra le chemin de la Floride. C’est pourquoi il faut élaborer des

stratégies dès aujourd’hui. « Pour permettre auxemployés d’usine de retarder leur départ à laretraite, nous envisageons la possibilité descinder les quarts de travail en deux, ce qui seraphysiquement moins contraignant. » Tout commeRéno-Dépôt, Cascades est boudée par les jeunes :« Le travail en usine n’est pas très valorisé chezles 18-30 ans », reconnaît la jeune dirigeante. Il faudra donc redoubler d’imagination pourassurer la relève.

Les autres défis…«L’industrie des pâtes et papier est également con-frontée à un autre problème: la mondialisation,ajoute Suzanne Blanchet. Le Canada est devenumoins compétitif dans la fabrication de la pâte de bois. Nos concurrents proviennent désormais

de l’Amérique du Sud et de l’Asie. Le bois ypousse plus vite, la main-d’œuvre y coûtebeaucoup moins cher, et les infractions auxnormes environnementales y sont moins sévère-ment sanctionnées... »

Le secteur du transport non plus n’est pas épar-gné par la mondialisation des marchés. « Laconcurrence dans notre domaine est internatio-nale, affirme Madeleine Paquin. Comme lesservices que nous offrons sont une commodity,

nous subissons de fortes pressions pour baisserles prix. » Pour résister à cette tendance, Logistecn’hésite pas à investir dans l’achat et la mise au pointde nouveaux appareils et de technologies qui luipermettront d’accroître l’efficacité de l’entreprise.

Chez Pratt & Whitney Canada, c’est plutôt laloyauté et la rétention des clients qui préoccupentles dirigeants. Il faut dire qu’en raison de soncréneau particulier, le fabricant de moteursd’avion compte tout au plus 25 acheteurs à traversle monde. « Il est donc primordial pour nousd’établir un climat de confiance mutuelle afin quenos partenariats s’échelonnent sur plusieursannées (15 à 25 ans), pour faire en sorte que noscontrats soient assurés », explique Alain M.Bellemare, président de l’entreprise. Précisonsqu’un nouveau contrat signifie non seulement quel’on devient le fournisseur pour la construction del’appareil, mais également pour son entretien.Ainsi, par ricochet, Pratt & Whitney approvisionne9000 opérateurs à l’échelle internationale.

«Nos moteurs volent dans 183 pays. Cela vousdonne une idée du genre de service après-venteque l’on doit fournir ! Pour nous faciliter la tâche,nous avons mis un système informatisé à la dispo-sition de nos clients. Ceux-ci ont donc accès entout temps à la fiche technique du moteur – ungenre de “dossier médical ” qui le suit toute sa vie

Daniel Lamarre, président-directeurgénéral, Spectacles et nouvellesentreprises, Cirque du Soleil Arrivé à la barre du Cirque du Soleilen 2001, l’ancien patron de TVA est, entre autres, responsable desspectacles, un secteur qui génère85 % des revenus de l’entreprise

évalués pour leur part à plus de 450 millions de dollars par année.

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 9: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

9P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

– et peuvent ainsi effectuer des diagnostics àdistance et obtenir des conseils techniques.»

Pour Cisco Systems, le leader mondial en solu-tions de réseautage Internet, c’est évidemmentl’impact du Net qui occupe la première place auclassement. « La pénurie de main-d’œuvre, lapression sur les prix, la concurrence et larétention des clients sont des préoccupationsd’entrepreneurs qui ne datent pas d’hier, lanced’entrée de jeu Pierre-Paul Allard, directeurgénéral de la filiale canadienne. Toutefois, dansles années 2000, c’est l’impact d’Internet quichange la donne. Internet a multiplié laconcurrence par cent. Désormais, la concurrenceprovient non seulement d’entreprises situéesgéographiquement à mille lieues de la nôtre, maisaussi de sociétés œuvrant dans d’autres secteursindustriels. Même constat pour les consomma-teurs, qui proviennent de partout et qui sontd’ailleurs bien plus éduqués, bien plus avertis. »

«Toutefois, l’impact le plus important d’Internetse situe sur le plan de la productivité, poursuit le

directeur. Les entreprises qui s’approprient conve-nablement les technologies Internet pour changerleurs façons de faire en profondeur – et non pasjuste sur le plan des ventes – sont avantagées parrapport à leurs concurrents, car Internet leurpermet de réduire leurs coûts et d’augmenterconsidérablement leur marge de profit. »

En quoi l’avènement d’Internet change-t-ilactuellement les façons de faire dans votredomaine ?« Il y a trois ans, nous craignions que l’avènementd’Internet ne bouleverse complètement notre envi-ronnement et mette même en péril les réseauxtraditionnels de distribution des produits etservices financiers, raconte Alban D’Amours. Cen’est que tout récemment que nous avons réaliséque l’avenir d’une institution financière ne passepas seulement par Internet. La virtualité ne suffitpas. Il faut garder le contact avec les clients.Internet est alors devenu pour nous un outil deplus pour rejoindre nos membres et répondre àleurs besoins financiers. Nous avons ainsi opté pourune approche intégrée, et non dichotomique.»

Alain M. Bellemare, président de Pratt & Whitney Canada

Promu président de Pratt & Whitney Canadaen mai 2002, il s’est mérité au cours de sa

carrière plusieurs distinctions, dont le titre deNouveau Performant dans la catégorie des

Grands Gestionnaires, décerné par Performpour l’excellence de sa gestion (2001).

La même année, il joint les rangs du Top Forty Under 40 pour ses réalisations, sa vision et

son leadership.

Pierre-Paul Allard, directeur généralde Cisco Systems Canada

À la barre de la plus importanteentreprise en technologies del’information au pays, il a été

nommé coprésident de l’Initiativepour les affaires électroniques

canadiennes, un partenariat public-privé visant à cerner et à évaluer de

plus près l’important rôle que lesaffaires électroniques peuvent jouerpour stimuler la productivité, créer

des emplois et accroître lacompétitivité des entreprises

canadiennes sur le marché mondial. Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 10: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

10 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Il ne faut pas croire pour autant qu’Internet necompte pas parmi les priorités de Desjardins. « En1996, nous avons été les premiers à offrir la possi-bilité d’effectuer des transactions en ligne. En2002, nous atteindrons 130 millions de transac-tions réalisées par Internet. Depuis le début, cenombre double chaque année », lance fièrementson président. Précisons également que chezDesjardins, 85 % des opérations se font par voieélectronique, soit par Internet, par dépôt direct,par paiement direct ou par guichet automatique.

« Cisco n’aurait jamais atteint sa taille actuelle niconnu un taux de croissance annuel de 100 %pendant sept années consécutives (1990 à 1997)si nous n’avions pas profité des technologiesqu’offrait Internet, affirme pour sa part Pierre-Paul Allard. Nous sommes devenus le cordonnierbien chaussé. Aujourd’hui, 82 % de nos ventess’effectuent par Internet, sans aucune interven-tion humaine. Nous avons en outre élaboré unmodèle de fabrication virtuelle où tous nos pro-cessus transitent par le Web. Ces nouvelles façonsde faire ont accéléré considérablement le déve-loppement des produits et réduit de beaucoupnos coûts de fabrication. Par exemple, au débutdes années 90, des délais de livraison de 8 à 12 semaines étaient courants. Aujourd’hui, onparle de 48 heures à l’échelle internationale.

«Nos partenaires conçoivent nos produits selon nosspécifications, poursuit Pierre-Paul Allard. Nosingénieurs et ceux de nos partenaires collaborententièrement par le Web; il n’y a plus de papier, plusd’appels d’offres. L’impact réel, c’est que la livraisons’effectue directement de nos partenaires à nosclients sans qu’aucun employé de Cisco ne toucheaux produits. Et ce, toujours avec la même qualité,la même satisfaction, le même logo, etc. Etl’opération est aussi transparente, qu’elle passe parune usine Cisco ou par celle d’un partenaire. Maispour ce faire, il faut abaisser les barrières tradi-

tionnelles et faire participer non seulement nosemployés, mais aussi nos partenaires, nos clients etnos fournisseurs; nous devons rendre l’informationdisponible juste-à-temps, et en assurer la sécurité.»

«Nous faisons affaire avec tout près de 1300 four-nisseurs de produits. Inutile de préciser qu’avantl’avènement d’Internet, repérer un produit dans un catalogue ou encore obtenir de l’informationsur ce dernier était très, très laborieux, se rappelleSylvain Toutant. Aujourd’hui, l’accès à ces don-nées est extrêmement rapide et les communi-cations avec nos fournisseurs sont égalementaccélérées, ce qui nous permet de gérer plusefficacement nos stocks. Résultat : la “coupure”entre le manufacturier et le détaillant devientpresque invisible. C’est sur cet aspect que nousinvestissons nos efforts : travailler presque entemps réel avec nos fournisseurs. Voilà quireprésente un avantage de taille.»

« Dans notre approche marketing, Internet modi-fie de façon importante nos façons de faire,

Jean-Marie Toulouse, directeur, HEC MontréalNommé membre de la Société Royale duCanada en 1997, on lui doit, entre autres, l’important virage technologique entreprispar HEC Montréal en 1996 et la création desnombreuses chaires qui ont vu le jourdepuis. Il a récemment été nommé président du conseil d’administration de CANARIE, un organisme canadien dont la mission est de favoriser l’adoption d’Internet.

Sour

ce:

Net

Lead

er,

CEF

RIO

-Lég

er M

arke

ting,

aoû

t 20

02

Principales préoccupations des dirigeants québécois

Loyauté etrétention des clients16 %

Aucune 1 %

Impactd’Internet 3 %

Effets de lamondialisation surla concurrence17 %

Pressions sur les prix27 %

Pénurie demain-d’œuvre

36 %

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 11: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

Propulsez vos affaires à la PuissanceWebMC

Déployez dans votre entreprise toute la PuissanceWebMC des solutions intégrées

de données, Internet, voix et sans fil de TELUS. Profitez de solutions d’héberge-

ment Web et de serveurs qui grandissent avec vos projets d’affaires électroniques.

Protégez au maximum vos données dans nos centres de traitement à la fine pointe de

la technologie. Bénéficiez d’un accès haute vitesse aux informations et aux applications

cruciales. Enfin, gérez votre entreprise sans tracas grâce à nos solutions de connectivité

avec gestion évoluée qui vous assurent le savoir-faire et la technologie les plus actuels.

Découvrez tout ce que vous pouvez réaliser en affaire grâce aux nombreuses

solutions PuissanceWebMC de TELUS.

MC : PuissanceWeb est une marque de commerce exclusive à TELUS.

1 877 520-1212telusquebec.com

Page 12: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

12 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

déclare Daniel Lamarre. Primo, de plus en plusde consommateurs achètent désormais leursbillets de spectacle sur le Web. Secundo, grâce au Club Cirque – un réseau virtuel qui compteactuellement 350 000 membres répartis auxquatre coins du monde –, nous commençons àvendre nos produits dérivés en ligne. Évidem-ment, comme nous travaillons à l’échelle inter-nationale, nous avons beaucoup recours à Inter-net dans nos communications internes. Nouscommençons même à faire de la conception despectacle à distance. »

« Internet nous permet d’effectuer un meilleursuivi des marchandises tout le long de leur dépla-cement, affirme pour sa part Madeleine Paquin.Nous misons d’ailleurs sur l’appropriation desnouvelles technologies pour atteindre notreobjectif premier, qui consiste à maximiser le ton-nage des marchandises manutentionnées afin demaintenir nos coûts et d’optimiser par le faitmême notre rentabilité. »

Quelle grande réussite attribuez-vous à l’appropriation des technologies del’information dans votre entreprise ?« Compter parmi les premières institutions finan-cières en Amérique du Nord à avoir offert desservices de guichets automatiques au début desannées 80 », souligne fièrement Alban D’Amours.

«Avoir mis les technologies de l’information auservice de nos étudiants, à qui nous avons offert

dès 1996 l’un des bâtiments les plus techno-logiques du Québec, déclare Jean-Marie Toulouse.HEC Montréal compte plus de 8 000 prises debranchement réseau ; 800 kilomètres de fibreoptique courent dans ses murs, sans parler deslaboratoires spécialisés et de la salle de marchéqui donne accès aux cotes de la bourse avecseulement 15 minutes de délai. Nous avons faitle pari qu’avec les TI, nous pouvons apprendreplus, mieux et différemment. C’est pourquoi tousnos étudiants doivent désormais posséder unordinateur portable. Aujourd’hui, lorsqu’uneentreprise embauche un de nos diplômés, elletient pour acquis qu’il sait se servir de ces nou-veaux outils. »

« Notre passage au système de gestion intégréSAP, précise pour sa part Alain Bellemare. Il fautdire qu’avant 1998, Pratt & Whitney comptaitquelque 80 systèmes d’information différents.Nous avons ensuite mis de l’avant une stratégiede commerce électronique des plus agressives.Des portails-clients ont été créés pour permettre,par exemple, la commande de pièces de rechange.Résultat : plus de 80 % des commandes sontaujourd’hui effectuées en ligne, ce qui a considé-rablement simplifié le processus. En outre, desportails-fournisseurs donnent maintenant accès àtous nos horaires de production. Nous pouvonsainsi synchroniser de façon très serrée l’ensemblede notre chaîne d’approvisionnement, depuis lescommandes des clients jusqu’aux pièces chez nos fournisseurs. »

Suzanne Blanchet, présidente et chef de la direction, Cascades – Groupe TissuTout juste un an après son accès à la vice-présidence de Cascades – Groupe Tissu(autrefois Perkins), l’entreprise réalise desbénéfices records. Forte de ce succès, elle accède à la présidence et devient ainsi, à 39 ans, l’unique femme présidente d’unepapetière au pays et l’un des rares chefsféminins d’une entreprise d’envergure (2 100 employés, répartis dans cinq usines).

Continent Phénomène le plus Proportion des PDG sondés fréquemment cité percevant ce phénomène comme le

plus important (Top Challenge)

Amérique du Nord Pénurie de main-d’œuvre qualifiée 39 %

Europe Impact d’Internet 50 %

Asie-Pacifique Effets de la mondialisation 59 %sur la concurrence

Les préoccupations des dirigeants à l’échelle internationale

Sour

ce:

The

CEO

Cha

lleng

e, T

op M

arke

tpla

ce a

ndM

anag

emen

t Is

sues

,Acc

entu

re-C

onfe

renc

e Bo

ard,

200

1

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 13: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

L E S G R A N D E S P R É O C C U P A T I O N S D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

À l’échelle internationale…Quelles sont les grandes préoccupations des dirigeants d’entreprise à l’échelle internationale ?Depuis quelques années déjà, le Conference Board et la firme-conseil Accenture sondent lesPDG d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Asie sur cette question. Leur dernier rapport, The CEOChallenge, Top Marketplace and Management Issues, a été publié en 2001 1.

Sondage 2000 Sondage 2001

Amérique du Nord 9e préoccupation en importance 4e préoccupation en importance

Europe 8e 1ère

Monde 8e 2e

Sondage 2000 Sondage 2001

Amérique du Nord 4e défi en importance 2e défi en importance

Europe 12e 1er

Asie-Pacifique – 9e

Monde 3e 8e

Source : The CEO Challenge, Top Marketplace and Management Issues

L’embauche d’employés en mesure d’aider l’entre-prise à survivre dans un marché en pleine évolutionreprésente un enjeu de plus en plus pressant aux yeux des présidents-directeurs généraux. Cette

tendance est particulièrement marquée en Europe :12e défi en importance en 2000, la lutte pour letalent y occupait la première place du classement unan plus tard.

La réduction du nombre de travailleurs qualifiés interpelle les dirigeants

Accroître la loyauté Lutter pour Augmenter la souplesse,du client le talent la cadence

Amérique du Nord 40 % 33 % 28 %

Europe 31 % 36 % 36 %

Asie-Pacifique 38% – 45 %

Source : The CEO Challenge, Top Marketplace and Management Issues

Source : The CEO Challenge, Top Marketplace and Management Issues

13P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

1 Un résumé du rapport peut être téléchargé gratuitement à l’adresse suivante : www.accenture.com/xdoc/en/ideas/RR-1286_ACC_ES.pdf.

Les préoccupations des PDG changent rapidement.Ainsi, selon l’étude réalisée par le Conference Boardet Accenture, la montée d’Internet était sur peu deradars en 2000. Un an plus tard, elle est devenue unphénomène à surveiller beaucoup plus étroitement.

Une situation qu’on pourrait peut-être observer auQuébec l’an prochain, car pour l’heure, l’impactd’Internet se classe au dernier rang des préoccupationsdes dirigeants québécois, selon le récent sondageNetLeader, CEFRIO-Léger Marketing d’août 2002.

La montée d’Internet tient-elle les PDG sur le qui-vive ?

Quels défis les PDG considèrent-ils prioritaires?Il existe un lien entre les préoccupations princi-pales des dirigeants de la planète et les défis queceux-ci considèrent prioritaires, mais ce lien n’estpas parfait… Ainsi, bien que la pénurie de main-d’œuvre soit le problème le plus souvent cité aux

États-Unis et au Canada, la lutte pour le talent n’estque le deuxième défi en importance en Amériquedu Nord. Sur notre continent, l’accroissement de laloyauté du client constitue un défi hautementprioritaire pour 40 % des directeurs généraux. La lutte pour le talent vient ensuite, avec 33 %.

Page 14: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

14 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E S G R A N D E S P R É O C C U P A T I O N S D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

«Chaque année, nous réinjectons 30% de notrechiffre d’affaires en technologie. C’est plus quetous nos concurrents combinés, affirme Pierre-Paul Allard. Notre meilleur coup: avoir rendu tousles cadres de notre organisation imputables dudéveloppement de leur secteur d’activité respectifen misant sur leur capacité à innover et às’approprier les nouvelles technologies. Ainsi, onne se contente pas de décentraliser des budgets : onamène nos employés à prendre conscience du faitque tout le monde doit emboîter le pas et adopterles technologies de l’information pour améliorer

ses performances. Désormais, les spécialistes en TIont un rôle de soutien, et non plus de sauveurs quidevinent les besoins.»

«Nous avons acquis d’excellents systèmes compta-bles qui permettent non seulement d’accéder plusrapidement à de l’information de pointe telle que la progression des machines à papier, maisaussi de gérer l’entreprise à distance », expliqueSuzanne Blanchet.

Dans quatre ou cinq ans, quels aspects de votre organisation lestechnologies de l’information auront-elles transformés ?«Plus les technologies évolueront et plus nosfaçons de faire changeront, déclare Jean-MarieToulouse. Les étudiants que nous accueillonsaujourd’hui maîtrisent déjà la navigation Internet,jouent depuis belle lurette à des jeux vidéo, etc. Ilsexigent donc des méthodes d’apprentissage quileur ressemblent. Ces jeunes qui grandissent avec lemultimédia sont les dirigeants de demain… Cetterelève sera donc beaucoup plus “technologique”.»

« La gestion des stocks deviendra extrêmementautomatisée et l’intervention humaine sera doncconsidérablement réduite, prévoit pour sa partSylvain Toutant. Si bien qu’on se concentrerabien plus sur l’aspect opérationnel des magasinset sur la mise en marché que sur la gestion de lachaîne d’approvisionnement. »

« Internet imposera des changements majeurs surle plan de la diffusion de contenu, déclare DanielLamarre. Comme nous comptons parmi les plusimportants vendeurs de disques au Canada, nous

suivons cela de très près. Toute l’industrie de lamusique est actuellement bouleversée par le pro-grès de ces nouvelles technologies. »

« On tend de plus en plus vers l’entreprise numé-rique, explique Alain Bellemare. L’idée est trèssimple : nous pourrons éventuellement concevoirdes produits de façon numérique, les tester defaçon numérique, développer nos méthodes defabrication de façon numérique et avoir une fichequi suivra le produit tout au cours de sa vie. »

« L’apparition de logiciels de plus en plus perfor-mants en matière de gestion de conteneurs, cequi facilitera considérablement notre travail »,déclare Madeleine Paquin.

«Dans quatre ou cinq ans, les technologies de l’infor-mation nous auront permis de réduire nos coûts parune révision assez approfondie de nos processusd’affaires, déclare Alban D’Amours. Nous pourronsainsi mieux résister aux pressions exercées sur lesprix et nos employés seront plus compétents pournous assurer une plus grande loyauté et une meil-leure rétention de nos membres.» ■

Sylvain Toutant, président et chef de la direction, Réno-DépôtConsidéré comme l’un des 40 meilleurs PDG au Canada selon le Top Forty Under 40. Ce concours,organisé par la société CaldwellInternational en collaboration avec le quotidien The Globe and Mail, vise à reconnaître les 40 Canadiens de moins de 40 ans les plus performants.Ph

oto

: Yv

es L

acom

be

Page 15: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

15P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

« Il est ridicule de demander aux gens de prendre leur

retraite à 65 ans. À cet âge, j’avais encore des boutons. »

– George Burns, humoriste américain

(1896-1996)

Gérer le capital humain à l’ère d’InternetIl y a plus de 200 ans, Benjamin Franklin affirmait qu’en ce bas monde, « rien n’est certain, à part

la mort et les impôts ». Dans son dernier ouvrage, Management Challenges for the 21st century 1,

Peter Drucker adapte le célèbre aphorisme en énonçant cinq « certitudes » dont toute entreprise

devrait absolument tenir compte au moment de préparer son plan d’affaires. Aux yeux du gourou

américain, toutes sont importantes, mais l’une d’elles l’est bien davantage que les autres :

l’effondrement brutal du taux de natalité dans les pays industrialisés 2.

PA R R É J E A N R O Y

S elon Peter Drucker, la chute, dans les Étatsoccidentaux et dans certains pays asiatiques

comme le Japon, du nombre d’enfants par femmeen âge de procréer constitue un phénomèned’importance majeure sur les plans social,politique et économique, parce que « jamais onn’avait encore vu dans l’histoire une structuredémographique dans laquelle le nombre dejeunes était inférieur au nombre de personnesayant dépassé l’âge traditionnel de la retraite ».

« Depuis au moins 200 ans, continue l’expert, nos institutions – les entreprises en particulier –fonctionnent en tenant pour acquis que lapopulation continuera de croître avec régularité.À partir de maintenant, les organisations des paysindustrialisés devront cependant élaborer leursstratégies en tenant compte... d’une hypothèsecomplètement différente selon laquelle lespopulations, et plus particulièrement le nombrede jeunes, décroissent. »

1965 1999

Québec 3,07 1,45Canada 3,16 1,54 *Ontario 3,12 1,53 *

États-Unis 2,91 2,08France 2,84 1,77Italie 2,66 1,22

Allemagne 2,50 1,36Suède 2,42 1,50Japon 2,14 1,40

Nombre d’enfants par femme dans quelques États industrialisés

Sour

ce:

Inst

itut

de la

sta

tistiq

ue,

La s

ituat

ion

dém

ogra

phiq

ue a

u Q

uébe

c,Q

uébe

c, 2

001,

p.

61.

* Données datant de 1998

Page 16: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

16 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G É R E R L E C A P I T A L H U M A I N À L ’ È R E D ’ I N T E R N E T

Concrètement, la diminution du nombre depersonnes accédant chaque année au marché del’emploi ou atteignant un niveau d’expériencedonné devra amener les entreprises du Québec et d’ailleurs à revoir de fond en comble leursstratégies de gestion des ressources humaines.Plus précisément, les dirigeants devront sepréparer à :

1) Intensifier leurs efforts pour attirer et retenirles services des jeunes diplômés et destravailleurs expérimentés ;

2) Recourir à de nouveaux types de main-d’œuvre, particulièrement aux personnes ayantdépassé l’âge traditionnel de la retraite ;

3) Changer le mode de fonctionnement de leurorganisation, notamment en favorisant l’auto-matisation de certains procédés ;

4) Travailler à l’augmentation radicale de la pro-ductivité du personnel actuellement à l’emploide l’entreprise.

Explorons tour à tour chacune de ces avenues.

La bataille de l’emploiDes milliers de Québécois s’apprêtent actuellementà quitter le marché du travail. Ainsi, selon lesresponsables du site Jobboom, 5000 travailleurs despâtes et papier prendront leur retraite au cours des

prochaines années; sous peu, 1800 infirmières enmoyenne laisseront chaque année leur emploi (unnombre trois fois plus élevé qu’à l’heure actuelle) ;près de 70 % des fonctionnaires quitteront lafonction publique d’ici 2010, et ainsi de suite.

Remplacer la main-d’œuvre perdue ne sera pas unemince tâche pour ces organisations. En effet, auQuébec comme ailleurs, il y a de moins en moinsde jeunes sur les bancs d’école pour combler lespostes disponibles au sein des entreprises. Parexemple, il y a deux ans, 504327 personnes étaientâgées de 20 à 24 ans au Québec, alors qu’il n’y enaura plus que 451910 en 2010 (voir graphique).

Il risque également d’y avoir bientôt une pénuriede personnel aux échelons intermédiaires et éle-vés des organisations. Ainsi, alors que la demandede gestionnaires s’accroît généralement au mêmerythme que le produit intérieur brut (PIB), lenombre de Québécois de 35 à 44 ans connaîtraune chute prononcée de 25 % d’ici 2010.

Le rétrécissement du bassin de personnes en âgede travailler ou d’occuper des postes supérieurssignifie que la bataille de l’emploi s’intensifieraconsidérablement au cours des prochaines années.Pour subsister et croître, toute entreprise devra eneffet faire mieux que ses rivales pour attirer les

0

100 000

200 000

300 000

400 000

500 000

600 000

700 000 Nombre en 2010

Nombre en 2000

10 à14

15 à19

20 à24

25 à29

30 à34

35 à 39

40 à44

45 à49

50 à54

55 à59

60 à64

65 à69

70 à74

75 à79

(Tranches d’âge)

(Population)

Nombre de Québécois par tranches d’âge

Sour

ce:

Inst

itut

de la

sta

tistiq

ue (

selo

n de

sdo

nnée

s de

Sta

tistiq

ue C

anad

a) e

t C

EFRI

O,

2001

Ces données ne tiennent pas compte de facteurs comme l’arrivée d’immigrants au Québec ou le départ de Québécois pour l’étranger.

Page 17: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

17P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G É R E R L E C A P I T A L H U M A I N À L ’ È R E D ’ I N T E R N E T

candidats intéressants et les garder à son emploi.Pour atteindre cet objectif, chaque organisationdevrait commencer par faire de la gestion dupersonnel une question hautement prioritaire.« Un premier pas en ce sens pourra consister àreconsidérer la place et le rôle de la direction desressources humaines dans l’entreprise, souligneJohn Salveson, un chasseur de têtes américain.Par le passé, les entreprises percevaient qu’aumieux, leurs responsables des ressources humainesjouaient un rôle nécessaire ou utile sur le planadministratif et qu’au pire, ils coûtaient cher sans

rien rapporter. De nos jours, les dirigeantsdevraient comprendre que les responsables desressources humaines peuvent et doivent contri-buer à l’atteinte des objectifs de l’entreprise. Ilsdevraient leur confier la mission de s’occuper dequestions cruciales comme la planification dela relève, le développement du leadership et ledesign organisationnel.»

Toute entreprise devra ensuite aborder le marchéde l’emploi comme n’importe quel autre marché.Autrement dit, elle devra définir avec précisionle profil du candidat idéal et arrêter le contenu du plan destiné à l’attirer et à le retenir pendantplusieurs années. « Pour attirer et retenir lesemployés dont vous avez besoin, vous devez leur

faire une proposition de valeur et la raffiner conti-nuellement, souligne Elizabeth Chambers, consul-tante chez McKinsey & Company3. Cette propo-sition devra répondre à la question : « Pourquoiune personne intelligente, énergique et ambi-tieuse voudrait-elle venir travailler ici plutôt quepour l’entreprise voisine ? »

La proposition de valeur devrait évidemmenttraiter des aspects monétaires, mais d’autresincitatifs pourront séduire les travailleurs viséspar l’entreprise. Par exemple, Spectrum Signal

Processing, une société de Colombie-Britanniqueclassée parmi les 100 meilleurs employeurs auCanada, offre à ses employés la possibilité detravailler selon un horaire flexible ou d’entre-prendre des études de deuxième cycle universi-taire aux frais de l’entreprise. Pour sa part, Diane-Gabrielle Tremblay, professeure à l’UQAM4, a relevédans un projet sur le télétravail mené par le CEFRIOque le gouvernement fédéral tente de résister à laforte concurrence du secteur privé en matière derecrutement en donnant aux candidats la possibilitéde travailler à domicile plutôt qu’au bureau.

D’autres mesures permettront aux organisationsde se distinguer en matière de recrutement. Les travaux d’Elizabeth Chambers, entre autres,

Selon un sondage réalisé

en 1998 par McKinsey

& Company, 23 % des

dirigeants américains

croient fermement que

leur organisation réussit

à embaucher des gens

« très talentueux ».

Cependant, seulement

10 % d’entre eux

pensent que leur

entreprise sait retenir la

majorité des « gens très

performants » qu’elle

réussit à attirer.

Page 18: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

18 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G É R E R L E C A P I T A L H U M A I N À L ’ È R E D ’ I N T E R N E T

semblent bien dé-montrer que lesentreprises à la re-cherche continuellede candidats devaleur font nette-ment mieux sur lemarché de l’emploique celles qui selimitent à embau-cher quand le besoinse présente : « Toutesociété dont l’appro-che , en mat i è r ed’embauche, consis-te à combler dans les trois mois lespostes devenus va-cants doit s’attendreà perdre la course àla recherche de genstalentueux », avancel a c o n s u l t a n t e .Autrement dit, laproactivité rapporte.

Âge d’or : mine d’or ?

Tout comme la présence d’un nombre élevé deconcurrents incitera souvent le pêcheur à changerde lac, de nombreuses entreprises pourrontrésoudre leurs problèmes de main-d’œuvre en

recrutant leur personnel dans des bassins decandidats moins fréquentés. Le plus importantsera sans doute celui des travailleurs à laretraite. En effet, comme le souligne PeterDrucker, les personnes nées à l’époque de laDeuxième Guerre mondiale « constituent [...] lapremière cohorte de travailleurs qui, après 30 ou40 années de travail à temps plein, n’est pas uséejusqu’à la corde. Des travaux manuels éreintantsn’ont pas épuisé la majorité des baby-boomers,qui demeurent capables de fonctionner aussi bienphysiquement que mentalement ».

À ce jour, seule une poignée d’entreprises – parexemple, McDonald, Réno-Dépôt ou Wal-Mart –ont cherché à tirer profit de l’explosion du nom-bre de travailleurs qui prennent leur retraite. Il est cependant clair, comme le souligne PeterDrucker, que les organisations en mesure d’inté-grer harmonieusement les personnes de 45 ans et plus à leur organigramme auront une longueurd’avance considérable sur la concurrence.

Selon le Conseil consultatif du travail et de lamain-d’œuvre du Québec 5, l’intégration réussiedes travailleurs de ce groupe passera en fortepartie par leur formation, une formation adaptéeà leur façon d’apprendre et à leur expérience. De même, les organisations qui s’aventureront surce terrain prometteur devront veiller à adapter lacharge de travail physique et mental exigée des45 ans et plus. Par exemple, « l’horaire de travail

Richard McDermott est le coauteur de l’ou-vrage Cultivating Communities of Practice*.Ce sociologue américain de formation, quicompte parmi ses clients Shell, Ericsson et la Banque mondiale, est conseiller dans le projet d’étude des nouveaux moyens decollaboration virtuelle entrepris récemmentpar le CEFRIO.

Selon ce chercheur américain, les commu-nautés de pratique (CdP) sont constituées depersonnes ayant de l’expertise sur unequestion (ou montrant un fort intérêt pourcelle-ci). Les membres d’une CdP ne travail-lent pas nécessairement ensemble au quoti-dien, mais ils approfondissent leur connais-sance d’un sujet en échangeant les uns avecles autres de manière continue, que ce soitlors de réunions formelles, dans le cadre

d’activités sociales ou encore par l’entre-mise de l’inforoute.

En outre, Richard McDermott croit que lesCdP peuvent jouer un rôle clé dans letransfert d’expertise des employés les plusexpérimentés d’une organisation à sa jeunemain-d’œuvre. « L’un de mes clients, unesociété de télécommunications, a fondé unecommunauté dans ce but précis. Certainsgestionnaires de projets chevronnés étaientsur le point de prendre leur retraite etl’entreprise craignait que leurs connais-sances ne disparaissent avec eux. Pour évitercette situation, la direction a décidé deréunir ses recrues et quelques anciensemployés au sein d’une CdP. Ces derniers yjouent le rôle de mentors en enseignant leurstrucs et leurs façons de faire aux premiers. »

Communautés de pratique et mentorat

Une étude menée en

Grande-Bretagne pour

le compte de la société

FiftyOn révélait

récemment que 83 %

des Britanniques croient

qu’il est bénéfique, pour

l’image d’une entreprise,

d’employer des personnes

de 50 ans et plus.

En outre, 75 % pensent

que les personnes

appartenant à ce groupe

d’âge sont plus honnêtes

que la moyenne.

*Harvard Business School Press, 2002

Page 19: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

19P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G É R E R L E C A P I T A L H U M A I N À L ’ È R E D ’ I N T E R N E T

flexible (réduction du nombre d’heures, accès àdes congés supplémentaires, etc.) représente, auxyeux du Conseil, un outil efficace d’adaptationdes milieux de travail au vieillissement ».

Dans une veine semblable, les organisations de-vraient accorder une attention accrue à la possi-bilité de recourir à des candidats handicapés ouparticulièrement peu qualifiés pour combler lespostes laissés vacants. Par le passé, une forteproportion de ces personnes devait se contenterde prestations de l’aide sociale. Cependant, lestechnologies rendent désormais plus facile leurintégration au monde du travail. À titre d’exem-ple, les outils de synthèse de la voix permettentdésormais aux personnes atteintes de cécité deconsulter un document Word à l’écran et de sepromener sur l’inforoute. De plus, grâce àl’installation de terminaux de points de ventespéciaux, plusieurs chaînes de restaurationrapide sont désormais en mesure d’embaucherdes caissiers ne sachant ni lire ni compter6.

Expertise : à consommer avant 2007Selon Peter Drucker, une troisième façon, pour lesorganisations, de composer avec la baisse du tauxde natalité consistera à améliorer aussi vite que

possible la productivité de l’ensemble de leursemployés actuels. «Celles qui ne le feront pass’affaibliront et s’appauvriront irrémédiablement.»Face à la difficulté croissante de recruter des tra-vailleurs et des gestionnaires d’expérience, lesentreprises québécoises pourront notammentchercher à accélérer le développement de leursjeunes employés. Une stratégie prometteuse pouratteindre cet objectif consistera à utiliser lescommunautés de pratique. Bien utilisée, cetteméthode de collaboration pourra favoriser letransfert rapide de connaissances entre employésaguerris et employés peu expérimentés.

Une autre façon d’accroître la productivité de ses employés consiste à pallier l’obsolescencerapide de leurs connaissances. Voilà qui pose un problème réel. En effet, une étude réaliséedans les années 907 en Allemagne a biendémontré que l’utilité du savoir acquis sur lesbancs d’école diminue avec l’âge. Lors de leurpremière année au travail, 60 % des cols bleus etdes cols blancs allemands interrogés se sont ditsen mesure d’appliquer une grande part desconnaissances acquises pendant leurs études ; ce pourcentage ne s’établissait plus qu’à 39 %cinq ans plus tard.

Rendez vos clients heureux de recevoir leurs factures !Partout au pays, de plus en plus de consommateurs ont compris les nombreux avantages d’utiliser le service de documents par Internet webdoxsMC pour recevoir la plupartde leurs factures et en effectuer le paiement à partir du sitetransactionnel de leur institution financière.

Votre entreprise est-elle prête ?

Ajoutez votre facture à la centaine déjà présentées surwebdoxsMC et disposez ainsi d’un moyen sûr et efficace d’envoyer à votre clientèle leurs factures, relevés de compteet autres documents, et ce, sans timbres ni enveloppes.

Renseignements :Jacques Hébert (514) 349-5118

www.webdoxs.com

Page 20: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

20 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G É R E R L E C A P I T A L H U M A I N À L ’ È R E D ’ I N T E R N E T

Il paraît donc clair que la formation permanente,c’est-à-dire l’adaptation des employés de l’entre-prise à l’évolution du savoir et de la sociétéplutôt que leur remplacement par d’autres tra-vailleurs, devrait être perçue comme un inves-tissement hautement stratégique, au même titreque l’achat d’équipement de pointe.

Pour favoriser l’acquisition de nouvelles connais-sances par son personnel, l’entreprise pourrautiliser diverses approches, notamment l’appren-

t i s sage en l igne .Quoique les travauxsur la question ensoient encore à leursdébuts, il ressort quecette stratégie peutprésenter plusieursavantages . D ’unepart, il est souventmoins coûteux deformer le personnelen ligne qu’en classe,surtout lorsque lesétudiants doivent sedéplacer sur de bon-

nes distances. D’autre part, l’examen de 49 étudesmenées sur le e-learning a révélé qu’il n’est pasplus efficace de prodiguer l’enseignement demanière traditionnelle que par Internet. Aucontraire, 30 % d’entre elles ont démontré que lesétudiants préfèrent apprendre en ligne et qu’ilsobtiennent de meilleurs résultats quand ilsutilisent cette méthode.

Domo arigato, Mr RobotoFace à la difficulté de recruter du personnel, lesentreprises pourront finalement emprunter unequatrième avenue, laquelle consistera à auto-matiser certains processus ou à confier au client lesoin d’accomplir certaines tâches. Ainsi, grâce à lamise en place de guichets automatiques et deservices en ligne, les institutions financières sontaujourd’hui en mesure de fonctionner avecnettement moins d’employés que par le passé. De même, l’installation de comptoirs de boissonslibre-service permet à certains restaurants d’êtreperformants malgré un personnel réduit. Enfin,encore aujourd’hui, le déploiement de robots dansles usines nippones vise en bonne partie à pallierla faiblesse de l’offre de main-d’œuvre japonaise.

Évidemment, on ne saurait substituer la machineà l’être humain sans faire preuve de la plusgrande circonspection. Au-delà de son impactmajeur sur les travailleurs, pareille opération

pourrait mener l’entreprise à sa ruine. Dans denombreux cas, le contact avec ses semblables esten effet nécessaire au client ou à l’employé.

Celui qui « finit » de changer...Les résultats du sondage CEFRIO-Léger Marketingsur les grandes préoccupations des Québécois(voir page 30) démontrent bien que les dirigeantsquébécois sont conscients de ce que l’embaucheet la rétention d’employés de qualité constituentdes enjeux de taille. En effet, 35 % des respon-sables d’entreprise considèrent que la pénurie demain-d’œuvre est le problème le plus importantqu’ils aient à affronter à l’heure actuelle.

Heureusement, comme nous venons de le voir, ilexiste diverses solutions à ce problème, et lesentreprises québécoises les plus hardies et lesplus imaginatives devraient pouvoir éviter unepartie des ennuis reliés à la faiblesse du taux denatalité et au départ à la retraite d’un nombrecroissant de travailleurs.

Toutefois, une certitude demeure : «Celui qui finitde changer... est fini », comme le soulignaitégalement Benjamin Franklin, voilà deux siècles.■

1 Harper Business, 19992 Les autres certitudes relevées par Peter Drucker sont la

redistribution du revenu disponible des consommateurs, laredéfinition du concept de performance, la hausse de lacompétitivité des entreprises de certaines régions, etl’incapacité croissante des États à répondre aux impératifs dela mondialisation.

3 Voir Chambers, Elizabeth et autres, « Tell me again : Whywould someone really good want to join your company ?And how will you keep them for more than a few years ? »,McKinsey Quarterly, no 3, 1998, p. 44-57.

4 Voir Tremblay, Diane-Gabrielle, « Le télétravail : définition etenjeux » dans Liette D’Amours (direction), Télétravail :Concilier performance et qualité de vie, IQ collectif –CEFRIO, 2001, p. 29.

5 Voir le document du Conseil intitulé Adapter les milieux detravail au vieillissement de la main-d’œuvre, Québec, 2002.

6 Évidemment, toute entreprise devrait aussi garder en têteque grâce aux technologies, il lui est maintenant possible detrouver le personnel nécessaire à l’extérieur de son bassinhabituel – c’est-à-dire à l’extérieur de sa ville ou de sa région.Par exemple, grâce au Web, de nombreuses sociétésinformatiques nord-américaines sont désormais en mesurede confier certains mandats de programmation et d’analysecomplexes à des partenaires commerciaux situés en Russieou en Inde. Pour leur part, de nombreux illustrateursquébécois travaillent de plus en plus étroitement avec desclients américains grâce à Internet.

7 Blechinger, Doris et Friedhelm Pfeiffer, «Technological Changeand Skill Obsolescence: the Case of German ApprenticeshipTraining » dans Hans Heijke et Joan Muysken, Education andTraining in the Knowledge Based Economy, AEA-MacmillanSeries Houndsmill, 2000, p. 243-278.

« Les organisationsqui sauront intégrerles personnes de 45 ans et plus à leurorganigrammeauront une longueurd’avance considé-rable sur laconcurrence. »

– Peter Drucker

Page 21: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

21P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Depuis 20 ans, Eric von Hippel s’intéresse à l’idée que les clients d’une entreprise peuvent devenir

d’importantes sources d’inspiration pour la création de nouveaux produits. On lui doit notamment

le concept d’utilisateur de pointe. Dans un récent article1, le chercheur approfondit cette idée en

alléguant que les entreprises devraient surveiller de près la manière dont leurs clients utilisent leurs

produits. Il affirme même que les fabricants pourraient gagner davantage en les équipant de trousses

d’appui à l’innovation-client. Elles sous-traiteraient ainsi une partie de leurs activités de recherche et

développement (R-D) aux utilisateurs.

I N N O V A T I O N

Vos clients conçoivent-ilsvos nouveaux produits ?

CEFRIO : Depuis 20 ans, vous soutenez que denombreux produits à succès sont d’abord

pensés et prototypés par des utilisateurs depointe (lead users) plutôt que par la division R-Dde sociétés manufacturières. Qu’est-ce qu’un« utilisateur de pointe » ?

VON HIPPEL : Ce sont des consommateurs ou desentreprises qui présentent deux caractéristiquesprincipales. Primo, ils sont nettement en avancesur le marché, c’est-à-dire qu’ils éprouvent dèsmaintenant des besoins qui ne se généraliserontque dans quelques mois ou quelques années.Secundo, ils cherchent eux-mêmes à répondre àces besoins ; vu les avantages de la mise en placed’une solution rapide, ils n’attendent pas qu’unfournisseur le fasse à leur place.

Par exemple, une étude portant sur les 57 innova-tions marquantes de l’histoire du rouli-roulant, de laplanche à neige et de la planche à voile a révélé quece sont des sportifs très engagés plutôt que dessociétés manufacturières qui ont amorcé la plupartde ces innovations. Ces utilisateurs de pointe

créaient de nouvelles pièces d’équipement poursatisfaire leurs propres besoins ou ceux de leurscamarades. Les producteurs n’intervenaient queplus tard, en récupérant l’invention des lead users – lorsque ceux-ci n’avaient pas décidé de la com-mercialiser eux-mêmes en créant une entreprise.

CEFRIO: En quoi les utilisateurs de pointe diffèrent-ils des acheteurs précoces (early adopters)?

VON HIPPEL : Les acheteurs précoces sont parmiles premiers à adopter un nouveau produit,tandis que les utilisateurs de pointe passent àl’action quand il n’y a rien à adopter, parce quel’un de leurs besoins est mal comblé.

CEFRIO : Dans la même optique, l’utilisateur depointe est-il nécessairement un client ou unclient potentiel de l’entreprise ?

VON HIPPEL : Pas nécessairement. Par exemple,un constructeur automobile désireux de trouverdes façons novatrices d’améliorer le freinage deses voitures gagnera à se tourner vers des con-

Entrevue exclusive avec Eric vonHippel, professeur à la Sloan School of

Management du MassachusettsInstitute of Technology (MIT) etauteur de plusieurs publications

scientifiques portant sur la gestion de l’innovation. Le CEFRIO l’a

rencontré à Cambridge,Massachusetts, pour discuter des

résultats de ses recherches actuelles.

Page 22: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs
Page 23: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

23P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

I N N O V A T I O N : V O S C L I E N T S C O N Ç O I V E N T - I L S V O S N O U V E A U X P R O D U I T S ?

ducteurs exigeants à cet égard, comme les coureursautomobiles. Cependant, il aura aussi intérêt àexaminer de près les solutions élaborées dans lesautres secteurs où stopper rapidement un objet enpleine course revêt une grande importance,comme dans le secteur de l’aérospatiale (de fait,c’est là que les freins ABS ont d’abord été mis aupoint). Les utilisateurs de pointe peuvent doncprovenir de secteurs industriels autres que celuide l’entreprise.

CEFRIO : De toute évidence, l’approche de l’utili-sateur de pointe convient particulièrement à l’en-treprise qui désire innover de manière radicaleplutôt que graduelle ?

VON HIPPEL : C’est exact. Cette approche estappropriée lorsque l’entreprise désire innover,mais ignore ce que le client espère véritablement.Le fabricant de processeurs qui sait que sesclients recherchent une version 10 % plus rapidede son tout dernier modèle n’a pas besoin derecourir à la stratégie de l’utilisateur de pointe.Par contre, il pourrait s’agir d’une bonne idéepour l’entreprise qui tente de produire unenouvelle génération de processeurs.

CEFRIO : L’approche est-elle aussi appropriéepour des sociétés traditionnelles (low tech) quepour des entreprises de haute technologie ?

VON HIPPEL : Tout à fait. Il y a quelques années,nous avons mené une étude pour le compte d’uneentreprise suisse alémanique. Ses dirigeantsétaient convaincus que l’approche de l’utilisateurde pointe ne donnerait pas de résultats valables.Selon eux, les clients de la société n’étaient pasassez, disons, « allumés ». La société fabrique dessupports à tuyaux, c’est-à-dire principalement unassemblage de crochets métalliques et de pincesutilisés dans le secteur du bâtiment. Le fabricantétait à la recherche d’un tout nouveau concept.Eh bien, durant l’étude, nous nous sommes renducompte que plus du tiers des utilisateurs depointe repérés avaient dessiné, construit etinstallé des supports à tuyaux qu’ils avaientinventés eux-mêmes, une proportion plus élevéeque celle relevée dans des secteurs aussi high-techque la conception assistée par ordinateur.

CEFRIO : Parlons un peu de la mise en œuvreconcrète de cette approche. Comment repère-t-onun utilisateur de pointe ?

VON HIPPEL : On s’y prend un peu de la manièredont un journaliste effectue un reportage. Il fautcommencer par demander aux personnes situées

dans l’entourage du fabricant ce qu’elles saventde la question étudiée et si elles connaissent desexperts dans le marché ciblé. Ensuite, ondemande aux experts repérés s’ils connaissentd’autres experts à l’extérieur du marché ciblé.

Puis, on effectue une première collecte d’infor-mation à partir d’entretiens téléphoniques,d’échanges électroniques et de visites industriel-les. Quelques utilisateurs de pointe – entre six et huit – sont ensuite invités à participer à une

séance de travail intensive de deux ou trois joursen présence de membres clés de l’entreprise.

Fait important à mentionner : très souvent, lesutilisateurs de pointe sollicités amènerontl’entreprise à remettre en question ses hypothèsesde départ. Par exemple, une société d’imageriemédicale avec laquelle j’ai travaillé avait pourquestion de départ : « Comment pourrait-onaugmenter la résolution des images médicales » ?La question se justifiait dans la mesure où la détection de détails de plus en plus petits était une tendance majeure dans l’industrie.Cependant, dans le milieu militaire et ailleurs,l’accent portait sur la mise au point de méthodesde reconnaissance des formes – une stratégieintéressante quand on ne peut pas augmenter la

3M et les utilisateurs de pointe

Où la société américaine 3M a-t-elle repéré lesutilisateurs de pointe capables de l’aider à mettre au point de nouvelles approches de contrôle desinfections opératoires ? Dans les hôpitaux, certes,mais aussi :

• Dans les hôpitaux vétérinaires : certains présen-taient un taux d’infection nettement inférieur àcelui des meilleurs hôpitaux, même si, logique-ment, il aurait dû y être plus élevé ;

• Dans les hôpitaux militaires aménagés sur le ter-rain : les militaires ont découvert des manièresoriginales de créer des salles d’opération stériles,malgré la saleté ambiante ;

• Dans les studios de cinéma : les maquilleurs em-ploient des matériaux qui collent efficacement à lapeau, qui n’irritent pas et qui s’enlèvent facilement– trois propriétés recherchées dans les hôpitaux.

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 24: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

24 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

I N N O V A T I O N : V O S C L I E N T S C O N Ç O I V E N T - I L S V O S N O U V E A U X P R O D U I T S ?

résolution. Cela a mené l’entreprise à revoir saquestion de départ, ce qui, bien sûr, a influé surles résultats de l’étude.

CEFRIO : Comment amène-t-on les utilisateurs depointe à collaborer avec l’entreprise ? Certains semontrent-ils réticents à dévoiler leurs secrets ?Exigent-ils d’être payés pour leurs services ?

VON HIPPEL : Il est rare qu’un utilisateur depointe refuse de discuter gratuitement de sesbesoins et de ses projets. Cela dit, il faut être trèsclair sur ce que l’entreprise entend tirer de cetteapproche. Et il faut donner aux gens la possibilitéde se retirer. Si un utilisateur paraît hésitant,mieux vaut le remercier et le remplacer.

CEFRIO : Le CEFRIO mène actuellement un projetsur les communautés de pratique. Existe-t-il descommunautés d’utilisateurs de pointe ?

VON HIPPEL : Bien sûr. Le mouvement d’appuiau logiciel libre (par exemple, Linux) est en faitune immense communauté d’innovateurs. Sesmembres travaillent ensemble à l’améliorationd’applications informatiques. Ils le font pour une

foule de raisons – certains cherchent simplementà s’amuser, d’autres font de l’autopromotion –,mais les résultats sont souvent impressionnants.Ainsi, malgré la concurrence de Netscape et deMicrosoft, un logiciel libre comme Apache estutilisé sur 60 % des sites Web de la planète.

CEFRIO : Diriez-vous que l’approche de l’utili-sateur de pointe est utilisée autant qu’ellepourrait l’être par les entreprises à la recherchede nouveaux produits?

VON HIPPEL : Elle pourrait l’être davantage. L’undes problèmes, c’est que l’entreprise qui veutfaire de la R-D de haut niveau sait qu’elle a besoinde détenteurs de doctorats. Par contre, pour samise en marché, elle se contente souvent d’em-baucher des diplômés M.B.A. qui n’ont suivi quequelques cours de marketing pendant leursétudes. Fréquemment, ces diplômés ne connais-sent pas d’autres outils que les sondages ou lesgroupes-témoins, des outils qui ne permettentpas d’innover de manière radicale.

CEFRIO : Vos travaux sur le concept de l’utilisa-teur de pointe vous ont récemment amené à vousintéresser à une nouvelle approche, celle destrousses d’appui à l’innovation-client (tool kits forcustomer innovation). Qu’en est-il exactement ?

VON HIPPEL : Le concept d’utilisateur de pointeest assez simple : les utilisateurs innovent, alorscherchons à voir ce qu’ils font et intégrons leursmeilleures idées à nos produits. Je suis passé de ce concept à un autre : pourquoi l’entreprisen’équiperait-elle pas les utilisateurs de manière à ce qu’il soit plus facile pour eux d’innover à sa place ?

Cette idée n’est pas totalement nouvelle. Par exem-ple, il y a 20 ans déjà que les trousses d’appui àl’innovation-client sont apparues dans l’universsophistiqué de la conception et de la fabricationsur mesure de circuits intégrés. Dans ce secteur,les produits étaient hautement complexes. Parconséquent, il en coûtait très cher aux fabricantsde ne pas comprendre rapidement et précisémentce qu’un acheteur donné avait en tête. Pourcontourner le fait qu’ils avaient de la difficulté àdéfinir correctement les besoins de leurs clients,les fabricants ont commencé à les équiper detrousses d’outils. Ainsi, les acheteurs pouvaientfaire eux-mêmes le design des produits qu’ilssouhaitaient acquérir du fabricant. L’introductiondes trousses a d’ailleurs permis de réduire desdeux tiers les délais de développement dans lesecteur des semi-conducteurs.

Les trousses d’appui à l’innovation-client sont-elles faites pour vous ?

Trois signes indiquent qu’une entreprise pourrait etdevrait sans doute se doter de trousses d’appui àl’innovation-client :

1) Ses segments de marché diminuent et les clientsexigent de plus en plus de produits faits surmesure. L’entreprise cherche à s’adapter à ceschangements, mais ses coûts augmentent sanspouvoir être transférés aux acheteurs ;

2) Trop d’itérations sont requises avant que le clientne mette enfin la main sur un produit le satis-faisant. Certains clients se plaignent que le produitfinal ne répond pas à leurs attentes initiales. Pour pallier ces difficultés, l’entreprise cherche à standardiser ses produits, ce qui mécontente ses plus petits clients ;

3) L’entreprise ou ses concurrents utilisent des logi-ciels de simulation ou de prototypage à l’interne.Les procédés de fabrication de l’entreprise sontadaptables et permettent de produire des articlessur mesure.

Sour

ce:

Thom

ke,

Stef

an e

t Er

ic v

on H

ipp

el (

2002

), «

Cus

tom

ers

as In

nova

tors

, A

New

Way

to

Cre

ate

Valu

e»,

Har

vard

Bus

ines

s Re

view

,avr

il, p

. 74

-81.

Page 25: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

25P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

I N N O V A T I O N : V O S C L I E N T S C O N Ç O I V E N T - I L S V O S N O U V E A U X P R O D U I T S ?

Maintenant, on trouve des trousses dans d’autresdomaines. Par exemple, la division USA’s FoodServices de Nestlé a récemment créé une troussequi aide les chaînes de restaurants à concevoirelles-mêmes leurs produits alimentaires. Par lepassé, certains clients abordaient Nestlé avec unéchantillon maison et disaient : « Produisez-nouscette sauce mexicaine ». D’autres décrivaient legoût recherché en espérant que le fabricantpuisse le créer. Le problème, c’est que lesfabricants alimentaires ne peuvent pas simple-ment prendre la recette d’un chef et la reproduireen usine : la fabrication en usine relevant plus de la chimie que de la cuisine, le produit n’a pasle même goût. En outre, il est difficile dereproduire une saveur à partir d’une simpledéfinition verbale ou écrite. Pour contournercette difficulté, Nestlé a créé une trousse quipermet aux chefs d’apprendre par la pratique etde jouer avec une version usine des ingrédientsqu’ils ont l’habitude d’utiliser. Les résultats sontsensationnels. Les délais de production surmesure d’un aliment sont passés de 26 semainesà trois semaines.

CEFRIO : Le coût de production de ces troussesest-il élevé ? Sont-elles accessibles aux grandesentreprises seulement ?

VON HIPPEL : Pas vraiment. En 1980, lesfabricants de circuits dont je parlais auparavantn’étaient que des start-ups sans grandes ressour-ces. La vraie question n’est pas : Avez-vousl’argent pour le faire ?, mais plutôt : De quel typede trousses avez-vous besoin ? Les outils à mettreentre les mains de l’utilisateur ne seront pasnécessairement high-tech ou différents de ceuxque l’entreprise utilise elle-même.

À titre d’exemple, Sony a récemment créé un siteWeb où les utilisateurs les plus maniaques desjeux PlayStation peuvent trouver des outilsd’aide à la programmation de nouveaux modules.Cette idée est formidable ! Après tout, pourquoiun fabricant devrait-il se contenter de n’avoir àson service que 50 ou 100 développeurs quand,en trois ou quatre semaines, 10 000 joueursenthousiastes peuvent être enrôlés pour trouverde nouvelles idées de jeux, les tester et lesconcrétiser ? Une telle stratégie est aussi à laportée de plus petites entreprises.

CEFRIO : L’approche des trousses est séduisante,mais n’est-elle pas risquée ? Après tout, elleentraîne un certain transfert de pouvoirs dufabricant à l’utilisateur.

VON HIPPEL : C’est exact. Il faut d’ailleurs en tenircompte au moment de prendre la décision d’allerde l’avant ou non. Certains clients pourraientutiliser votre trousse contre vous et se transformeren rivaux. Les avantages et les désavantages decette approche doivent être soupesés.

CEFRIO : Un article soulignait récemment quePolaroid a utilisé une approche semblable à celleque vous proposez. Les consommateurs pouvaientaller sur le site de l’entreprise et construirel’appareil photo deleurs rêves. L’informa-tion ainsi transmisepar la clientèle cibleétait ensuite utiliséepar Polaroid pourconcevoir le produitoptimal.

VON HIPPEL : Il y aune différence fonda-mentale entre cetexemple et ceux quej’ai donnés plus tôt.D a n s l e c a s d ePolaroid, le but étaitd e r e c u e i l l i r d el’information, de fairedes moyennes et deproduire l’appareilsusceptible de plaireau plus grand nom-bre. Dans le cas deNestlé ou des autresentreprises recourantaux trousses, nousparlons plutôt deproduire sur mesure.Ce qui déterminera sil’approche de Polaroid ou celle de Nestlé serasuivie, ce sont les coûts de production del’entreprise. Par exemple, vous et moi pourrionsdessiner une voiture neuve à l’aide de la troussed’un constructeur automobile, mais en raison descoûts de fabrication d’une automobile surmesure, notre rêve ne deviendra jamais réalité. ■

1 « Customers as Innovators. A New Way to Create Value »,Harvard Business Review, avril 2002

http ://harvardbusinessonline.hbsp.harvard.edu/b01/ en/common/item_detail.jhtml?id=R0204F

« Pourquoi unfabricant de jeux

électroniques devrait-ilse contenter d’avoir 50 ou 100 dévelop-peurs à son servicequand, en trois ou

quatre semaines, 10 000 joueurs

enthousiastes peuventêtre enrôlés pour

trouver de nouvellesidées de jeux,

les tester et lesconcrétiser ? »

– Eric von Hippel

Page 26: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

26 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Quelles décisions les dirigeants devraient-ils prendre aujourd’hui pour que leur organisation soit

adéquatement positionnée demain ? Quels changements devraient-ils apporter dès maintenant à

leurs façons de faire pour se préparer pour 2007 ? Comment les technologies de l’information

pourraient-elles leur permettre de résoudre les problèmes auxquels ils seront confrontés ?

Préparer son entreprise à affronter 2007

PA R R É J E A N R O Y

Ces questions sont d’une grande importance ;après tout, ainsi que l’a remarqué Charles F.

Kettering, l’inventeur du système d’allumage auto-mobile, « nous devrions fortement nous préoc-cuper de l’avenir, parce que nous aurons à ypasser le reste de notre vie ». Pour y répondre,

nous avons donc réuniautour d’une table rondetrois chercheurs québé-cois, spécialisés chacundans un domaine diffé-rent : Michel Audet,professeur en relationsindustrielles à l’Univer-sité Laval, expert entransformation organisa-tionnelle dans le secteurpublic ; Réal Jacob, pro-fesseur en managementà HEC Montréal, experten transformation orga-nisationnelle dans lesecteur manufacturierainsi que Jacques Nantel,professeur en marketingà HEC Montréal, experten commerce électro-

nique de détail. En outre, ces experts agissentcomme directeurs scientifiques au CEFRIO.

Les enjeux actuelsCEFRIO : Commençons par discuter des princi-paux défis que les entreprises tentent présen-tement de relever sur le plan technologique. Entant que professeurs-chercheurs, vous êtes toustrois en contact étroit avec les dirigeants dediverses organisations. Selon vos observations,qu’est-ce qui les empêche actuellement des’endormir, le soir ?

J. NANTEL : Il y a deux ou trois ans, les dirigeantsquébécois dormaient mal lorsqu’on les confron-tait au fait que leur entreprise n’avait pas encorede plan d’affaires électroniques. Avant queNortel, NASDAQ et autres pasdeprofits.com nes’effondrent, de nombreux PDG étaient paniquésà l’idée de rater la vague Internet, avec pourrésultat que plusieurs se sont lancés à l’eaun’importe comment, de peur que la première.com venue ne les jette sur la paille.

Comme on le sait, les mois ont passé et plusieursvedettes du Web ont fait faillite, ce qui a eu poureffet de réconforter de nombreux dirigeants de

Forrester Researchestime qu’en 2007, aux États-Unis, 8 % de l’ensemble desventes au détail seront réalisées par le Web. Ce pourcentages’élève actuellement à environ 1,2 %, selon le U.S. Department of Commerce.

Michel Audet, professeur en relations industrielles à l’Université Laval

Réal Jacob, professeur en management à HEC Montréal

Page 27: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

P R É P A R E R S O N E N T R E P R I S E À A F F R O N T E R 2 0 0 7

27P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

PME qui se félicitent maintenant de leur inertie.C’est toutefois là que le bât blesse : ceux qui s’en fai-saient trop hier ne s’en font pas assez aujourd’hui.

R. JACOB : On note le même phénomène dans lesecteur manufacturier. Bon nombre de fabricantsn’ont pas compris que les problèmes de certainesboutiques en ligne n’ont en rien sonné le glas ducommerce électronique interentreprises (B2B).Prenons par exemple le domaine de l’aéronau-tique. Par le passé, les constructeurs d’avionsfaisaient directement affaire avec une multitudede sous-traitants pour la production de leursappareils. Aujourd’hui, ils ne veulent plus traiterqu’avec un nombre restreint d’intégrateurs – unfournisseur capable de leur livrer un siège aucomplet, un train d’atterrissage assemblé, etc.Résultat : les sous-traitants doivent désormaiss’organiser entre eux pour fabriquer des produitsfinis. Malheureusement, certaines PME n’ontnullement les compétences organisationnelles ettechniques requises pour travailler en réseau avecdes partenaires locaux ou étrangers et livrer juste-à-temps, tandis que d’autres ignorent encorequ’elles devraient les développer !

CEFRIO : Est-ce à dire que certains dirigeants secouchent trop sereins ?

J. NANTEL : Tout à fait. Il n’est pas nécessaired’être un précurseur pour réussir, mais il fautquand même porter attention aux changements encours. Par exemple, il y a quelques années, ladirection de Wal-Mart a décidé de ne pas compterparmi les pionnières de la vente au détail en ligne.Ce qui ne veut toutefois pas dire qu’elle n’avaitpas de stratégie d’affaires électroniques ! Aucontraire, Wal-Mart a très tôt décidé de consacrerau e-commerce des efforts proportionnels à sonpotentiel. Autrement dit, si la vente à distancereprésente 15% du chiffre d’affaires de votreindustrie, vous devriez consacrer au moins 15 %de vos efforts à la vente par Internet.

M. AUDET : Dans lemilieu gouvernemen-tal, le problème quitient les dirigeants surle qui-vive est diffé-rent. La volonté detirer profit du poten-tiel des technologiesen éducation, en santéou dans l’administra-tion publique en géné-ral est très forte – lescommissions d’en-quête tenues depuis10 ans ont donné lesfruits escomptés –,mais quand vient letemps de passer àl’action, d’effectuerles transformations attendues, ça bloque. Enraison de la force d’inertie de la machine bureau-cratique, on n’arrive pas à concrétiser la visiondécrite sur papier.

R. JACOB : Il faut dire que le contexte est différentde celui qui prévaut dans l’industrie privée. Dansle secteur public, il y a tellement de stakeholders,de groupes ou de personnes touchés par d’éven-tuelles transformations dans le fonctionnementde l’État, qu’il est complexe d’apporter lemoindre changement à l’organisation du travail.Par exemple, je prenais récemment part auxdiscussions entourant la transformation d’uncentre hospitalier montréalais. Autour de la table,il y avait 102 acteurs différents – syndicats, cor-porations professionnelles, etc. Pas facile, dans cecontexte, de trouver les consensus requis pourune intégration des TI réussie !

M. AUDET : Il est cependant indéniable que legouvernement du Québec consent actuellementdes efforts considérables pour améliorer l’offre deservices électroniques aux citoyens et aux

Selon ForresterResearch, l’industrie

du disque pourraitréaliser des revenus de

2,1 milliards de dollarsaméricains en 2007 – soit 17 % de sonchiffre d’affaires –,

grâce à l’adoption d’unmodèle de distribution

musicale favorisant legravage de disques par

les consommateurs.

Jacques Nantel, professeur en marketing à HEC Montréal

Page 28: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

28 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

P R É P A R E R S O N E N T R E P R I S E À A F F R O N T E R 2 0 0 7

entreprises, et cela tout en tenant compte du faitque la majorité de la population continuera, dansles prochaines années, à consommer les servicesde l’État de manière traditionnelle.

Les défis à venirCEFRIO : Et si on se projetait maintenant en2007. Quels défis les PDG devront-ils affronteralors et quels gestes gagneraient-ils à poser dèsaujourd’hui pour les relever avec succès ?

J. NANTEL : Quand on regarde l’univers de laconsommation, onremarque que certai-nes choses devraientchanger radicalement.Par exemple, si jeproduisais des dis-ques, je me prépare-rais fortement à lesdistribuer électroni-quement. Il est cer-tain, à la lumière deschiffres, qu’Internete s t u n e m e n a c esérieuse pour l’avenirdu CD et que lesmaisons de disquesdevront s’adapter auphénomène du télé-chargement de chan-sons et d’albums.

R. JACOB : Dans le secteur manufacturier, le granddéfi, d’ici 2007, sera la gestion des compétencesdisponibles. Les entreprises ont de moins enmoins de temps pour réagir à l’évolution de plusen plus rapide des marchés. Dans de nombreusesindustries, les anciennes saisons sont maintenantdevenues des demi-saisons. Pour répondre à cettepression, le savoir devra impérativement circuler

plus rapidement au sein des organisations. Lepersonnel devra donc être formé et reformé avecune rapidité accrue.

D’autre part, comme Michel Audet le démontraitrécemment dans ses travaux, les organisationsquébécoises devront très bientôt composer avecle départ à la retraite de milliers de travailleurs etde gestionnaires. Il ne faudrait pas que leursconnaissances prennent avec eux le chemin de la Floride !

M. AUDET : Dans certains cas, le marché del’éducation va faire son œuvre et les connais-sances des nouveaux travailleurs équivaudront à celles des retraités. Cependant, bien souvent,les écoles, les cégeps et les universités nepourront pas gérer la transition, et les orga-nisations devront débourser des sommes follespour combler les besoins en formation de leurpersonnel. Dans ce contexte, l’apprentissagevirtuel (e-learning) devrait connaître une expan-sion fulgurante.

J. NANTEL : Mais il ne faudrait cependant pas queles entreprises croient que l’apprentissage en ligne est une panacée. En enseignementcomme ailleurs, Internet est un complément, et non un substitut.

M. AUDET : En effet, c’est la mixité des moyensqui fait la force d’un programme d’apprentissage.La clé sera l’intégration des TI dans la formationtraditionnelle, plutôt que la mise au rancart dessalles de classe.

R. JACOB : De même, les entreprises devronttrouver des moyens de favoriser le partage desconnaissances tacites des employés, celles quis’enseignent difficilement à l’école. Le simple faitd’amener un groupe de vendeurs, d’infirmières

Un sondage réalisérécemment par leConference Boardauprès des entreprises a révélé que le nombrede programmes en gestion desconnaissances devraitcroître de 900 % au cours des cinqprochaines années.

Selon Gartner, les technologies à surveillerd’ici 2007 incluent les logiciels d’authen-tification biométrique – qui peuvent, parexemple, permettre d’ouvrir une porte aprèsvérification des empreintes digitales duvisiteur –, les outils de reconnaissanceautomatique de la voix, les places d’affairesélectroniques*, la messagerie Internet instan-tanée (par exemple, ICQ), les réseaux locaux

sans fil, les fonctionnalités radio Bluetooth etles terminaux mobiles procurant un accèscontinu au Web. * Voir, à ce sujet, le guide sur les places d’affaires élec-troniques intitulé Tirez profit des portails, produit en 2001 par le CEFRIO et disponible à l’adressehttps://extranet.cefrio.qc.ca/indexWeb.cfm?type=produits

Source : Fenn, Jackie (2001), Ten Technologies for 2002 to 2007, Gartner,21 décembre, note T-15-0205

Les technologies à surveiller

Page 29: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

P R É P A R E R S O N E N T R E P R I S E À A F F R O N T E R 2 0 0 7

ou d’ingénieurs à se parler entre eux, à discuterdes trucs du métier et de leurs expériences don-nera souvent de meilleurs résultats que n’importequel cours, en ligne ou non.

M. AUDET : Pour réussir à affronter les défis de2007, les organisations québécoises devraientégalement chercher à améliorer leur capacité àgérer le changement. Trop souvent, celui-ci estgéré de haut en bas, alors que les recherchesmontrent bien que cette stratégie échoue dans lamajorité des cas. Pour réussir une transformationorganisationnelle, il faut mettre tout le mondedans le coup dès le départ et accepter que les plusbeaux plans connaissent des ratés : certainsemployés craignent les bouleversements, d’autreséprouvent de la difficulté à fonctionner dans unnouvel environnement malgré leur bonne volon-té, les gestionnaires intermédiaires ont souventleur propre agenda politique, etc.

R. JACOB : En outre, on oublie souvent que les TIs’insèrent dans un milieu humain, avec pour con-séquence l’échec de 70 % des projets de trans-formation organisationnelle. Tout changementdevrait commencer par un plan, mais ce plan

devrait évoluer en cours de route, au fil dessuccès remportés et des difficultés éprouvées.

CEFRIO : Y a-t-il d’autres gestes à poser, d’autrestendances importantes dont nous devrons tenircompte d’ici 2007 ?

M. AUDET : Il est difficile de jouer au futurologue.Cela dit, s’il est une choseque je recommanderais àtout dirigeant préoccupépar ce que l’avenir nousréserve, et plus particu-lièrement sur le plan tech-nologique, c’est de fré-quenter des jeunes.

R. JACOB : J’irais mêmejusqu’à ajouter que lesgens de la vieille géné-ration doivent accepterque les jeunes leur serventd’enseignants. Il est vraiqu’il faut préparer larelève, mais à certains égards, il faut aussi laisserla relève nous préparer. ■

IBM, le logo affaires électroniques et « Les affaires électroniques. Jouez gagnant. » sontdes marques déposées ou des marques de commerce d’International Business MachinesCorporation, utilisées sous licence par IBM Canada Ltée. Tous les autres noms de produitou marques appartiennent à leurs détenteurs respectifs. © IBM Corp., 2002. © IBMCanada Ltée, 2002. Tous droits réservés

WIMBLEDON JOUE POUR GAGNER.En affaires électroniques, gagner signifie offrirune expérience exceptionnelle accessible partoutdans le monde. wimbledon.org est conçu,monté et hébergé par IBM (le numéro un del’hébergement Web). À vous de jouer! Rendez-vousà www.can.ibm.com/affaires_electroniques

« Il est vrai qu’il fautpréparer la relève,

mais à certainségards, il faut aussi

laisser la relève nouspréparer. »

– Réal Jacob

Page 30: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

30 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Le quotient Internet des dirigeants québécois

PA R R É J E A N R O Y

A u fil des ans, différentes enquêtes ont été me-nées pour mesurer le quotient Internet (QI)

des dirigeants d’entreprise. Par exemple, auprintemps 2002, le magazine Forbes interviewait286 hauts dirigeants pour mieux évaluer leursconnaissances et leur perception en matière detechnologie. Malheureusement, les sondagesréalisés portent habituellement sur le QI des chefs d’entreprise de grands pays industrialisés.Par conséquent, ils ne permettent pas de situerles patrons québécois par rapport à leurs pairscanadiens, américains, européens ou asiatiques.

Pour pallier cette lacune, le CEFRIO et LégerMarketing ont effectué au cours de l’été 2002 lepremier sondage en la matière au Québec. Menéeauprès de hauts dirigeants qui n’œuvrent pasdans les technologies de l’information au sein des 500 plus grandes sociétés de la province,l’enquête NetLeader permet de tracer un portraitde la perception qu’ont les gens d’affaires del’informatisation et de l’impact d’Internet.

L’implantation des technologies : un défi majeurTout d’abord, il est clair que les efforts de sensi-bilisation menés au cours des dernières annéespar les différents paliers de gouvernement, lesgourous du management et les fournisseurs infor-matiques ont porté leurs fruits.

D’une part, selon le sondage, 85 % des grandesentreprises québécoises se sont à ce jour dotéesd’une stratégie Internet (graphique 1). Comme onpouvait s’y attendre, il existe un lien entre lataille d’une société et la probabilité que cettedernière ait mis en place un plan d’actioninforoutier. Ainsi, 93 % des entreprises comptantplus de 1 000 salariés disposent d’une stratégieInternet, alors que ce pourcentage baisse à 79 %chez les entreprises de 500 employés ou moins.

D’autre part, malgré l’effondrement de nombreu-ses sociétés Internet et les difficultés qu’éprou-vent présentement plusieurs firmes informatiquesreconnues, les dirigeants québécois demeurentfortement convaincus de l’importance, pour les

Seulement 4 % des hauts dirigeants québécois soutiennent que l’impact d’Internet sur le fonctionne-

ment des entreprises est leur principale préoccupation en termes de gestion. Bien que cette propor-

tion soit faible, on aurait tort d’y voir une preuve que le quotient Internet des leaders économiques

du Québec est peu élevé. En fait, selon les données de la première édition du sondage NetLeader,

CEFRIO-Léger Marketing, tout indique que les gestionnaires québécois démontrent une compétence

croissante dans leur manière d’aborder les questions d’ordre technologique.

Page 31: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

31P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

entreprises, de réaliser l’implantation des techno-logies de l’information (TI) et des affaires électro-niques. Ainsi, respectivement 43 % et 51 % desleaders interrogés considèrent qu’il sera «très im-portant» et «assez important» pour leur entreprisede relever ce défi au cours des trois prochainesannées (voir graphique 2, page 32).

Fait à noter, il existe un lien significatif entre l’usagequ’un dirigeant fait d’Internet et son attitude face àla question. Ainsi, les grands utilisateurs d’Internet– ceux qui l’utilisent plus de 10 heures parsemaine, à la maison ou au travail – sont encoreplus convaincus que les petits – ceux qui y con-sacrent trois heures ou moins chaque semaine – del’importance de recourir aux TI ou de prendre levirage des affaires électroniques: 57% des premiersconsidèrent la question « très importante » parrapport à seulement 36 % chez les seconds.

Le lien stratégie–TI : de plus en plus fortSelon Suzanne Rivard, fellow au Centre inter-universitaire de recherche en analyse des organi-sations (CIRANO), nombreuses sont les entre-prises qui ont reconnu que les technologies del’information ne peuvent plus être perçuescomme de simples outils de soutien administra-tif, et qu’elles peuvent – et doivent ! – jouer unrôle important dans la « stratégie corporative1 ».

Le Cirque du Soleil compte parmi ces entreprises.« Ici, on ne fait pas de distinction entre les projetstechnologiques et non technologiques, explique

Danielle Savoie, vice-présidente et chef destechnologies de l’information de ce fleuron qué-bécois. Il n’y a que des projets de soutien à lastratégie de l’entreprise, projets auxquels l’équipedes TI participe activement. Par exemple, leCirque vient de réaliser un projet ambitieux quilui permettra de resserrer ses liens avec la clien-tèle. Les gens du marketing ne nous ont pas passéune commande après avoir défini leurs objectifs

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

90 %

100 %

Entreprises detoutes tailles

85 %

15 %

79 %

21 %

87 %

13 %

93 %

7 %

500 employésou moins

501 à 1 000employés

Plus de 1 000employés

L’entreprise n’a pas de stratégie Internet.

L’entreprise a unestratégie Internet.

G R A P H I Q U E 1

Proportion des entreprises dotées d’une stratégie Internet, selon la taille

Renseignements méthodologiquesLes données de cet article ont été obtenues à la suited’un sondage exclusif CEFRIO-Léger Marketing menédu 1er au 27 août 2002. Au total, 283 entretiens télépho-niques ont été réalisés auprès de gestionnaires dirigeantles destinées des 500 plus importantes entreprises duQuébec, selon la liste dressée annuellement par l’hebdo-madaire LES AFFAIRES (édition hors série, 2002).

Seulement un répondant par entreprise a étésélectionné pour cette enquête. Les sondeurs ontd’abord demandé à parler au président de la société ;lorsque cette personne n’était pas disponible, ils ontcherché à interroger, dans l’ordre : le responsable desfinances, le responsable du développement des affaires,le responsable des ressources humaines et, finalement,le responsable des communications.

Pour une population de 465 répondants admissibles etun échantillon de 283 hauts dirigeants, la marge d’erreurde ce sondage s’établit donc à ± 3,8%, 19 fois sur 20.

Page 32: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

32 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

dans leur coin. Nous avons conçu le Club Cirqueavec eux de A à Z, en toute complicité. »

Le sondage confirme que les dirigeants approuventl’affirmation selon laquelle stratégies et techno-logies sont liées les unes aux autres. En effet, plusde neuf dirigeants québécois sur dix (91 %) sou-tiennent que la stratégie d’une entreprise nedevrait pas être élaborée en vase clos, et qu’il estau contraire important, à un degré ou à un autre,de tenir compte des possibilités offertes par lestechnologies avant de mettre cette stratégie aupoint (graphique 3).

Le lien stratégie-technologies de l’information paraîtparticulièrement fort aux yeux des grandsutilisateurs de l’inforoute. Ainsi, 59% des dirigeantsrecourant à Internet plus de 10 heures par semainejugent «très important» de mettre au point la stra-tégie de l’entreprise après un examen des possibilitéstechnologiques. En comparaison, seulement le tiers(36%) des petits utilisateurs de l’inforoute – troisheures ou moins – adhèrent à ces propos.

La même tendance est perceptible lorsqu’on demandeaux dirigeants québécois quelle est, selon eux, l’impor-tance des changements que l’inforoute a insufflés à lamanière dont les entreprises font des affaires. Tandisque 41% des grands utilisateurs d’Internet jugent queson apparition a provoqué des transformations «trèsimportantes», seulement 16% des petits partagent cetavis (voir graphique 4, page 34).

Et combien tout cela rapporte-t-il ?Il y a quinze ans, l’Américain Robert Solow, prixNobel d’économie, affirmait : «On peut voir les ordi-nateurs partout, sauf dans les statistiques de produc-tivité de la comptabilité nationale». Il est possible,lançait récemment à la blague le Boston Globe, quele «paradoxe de la productivité» s’explique du faitque la moitié des travailleurs se sert de l’infor-matique pour télécharger des jeux vidéo ou flirter enligne, tandis que l’autre 50% l’utilise pour faire sescourses ou visiter le site de Playboy.

Une chose est toutefois claire : en 2002, auQuébec comme ailleurs, un certain scepticismedemeure face au taux de rendement du capitalinvesti (RCI – en anglais, return on investment,ou ROI) par les entreprises en matière detechnologies. À preuve, 44 % des dirigeantssondés considèrent actuellement que les investis-sements en ce qui a trait aux projets tech-nologiques ou relatifs aux affaires électroniquesgénèrent un faible rendement (voir graphique 5,page 35). Une proportion similaire (43 %) trouvece dernier « assez élevé », alors que 7 % le consi-dèrent « très élevé ».

Ces données montrent bien que les dirigeantsquébécois ne perçoivent pas les technologiescomme une solution qui aura inévitablement deseffets miraculeux sur le bilan de l’entreprise. Au contraire, comme leurs collègues étrangers, ils s’interrogent sérieusement sur la valeur des

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

Très important

43 %

36 %

57 %

51 %53 %

38 %

6 %

11 %

4 %0 % 0 % 0 %

Assez important Peu important Pas du tout important

Grands utilisateurs(plus de 10 heures)

Petits utilisateurs(trois heures ou moins)

Ensemble des hauts dirigeants

G R A P H I Q U E 2

Importance du défi que représente l’implantation des TI et des affaires électroniques au cours destrois prochaines années, selon le temps d’utilisation d’Internet par semaine

Page 33: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

33P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

investissements consentis en informatique et encommerce électronique.

Que signifient ces résultats pour les responsablesdes TI et leurs alliés? Selon la revue Computer-world 2, il est clair que ces derniers devront désor-mais chercher à « trouver ou créer des manièrestoujours plus crédibles de mesurer le RCI enmatière de technologies». Trop souvent encore, ils se limitent à des promesses vagues (p. ex. : laproductivité augmentera) au lieu de promessesconcrètes (p. ex. : voici les effets précis que leprojet aura sur vos ventes), et à expliquer les avan-tages des technologies en jargon d’informaticienplutôt qu’en langage d’affaires.

Les obstacles à l’implantation des TIBien que les dirigeants soient parfois fortementconvaincus de l’importance de recourir auxtechnologies pour accroître la productivité deleur entreprise, mieux satisfaire leur clientèle,surveiller la concurrence plus efficacement, etc.,il peut exister un fossé profond entre leur attitudeface à cette question et leur capacité à instaurer lechangement souhaité. En effet, de nombreuxobstacles peuvent entraver l’implantation destechnologies de l’information et des affairesélectroniques au sein d’une entreprise.

Au Québec, l’obstacle le plus important sembled’ordre budgétaire: 51% des dirigeants affirmentspontanément – c’est-à-dire sans qu’on le leur

suggère – que leur entreprise n’a pas les moyens,pour une raison ou pour une autre, de concrétiser sapolitique en TI ou en affaires électroniques, ou de sedonner une telle politique (voir tableau 1, page 34).

Selon les données du sondage, les autres facteursd’irritation les plus fréquents sont tous reliés aufacteur « ressources humaines ». Ainsi, 31 % desdirigeants soutiennent que la « résistance auchangement » constitue un obstacle important àfranchir, 23% voient dans le «manque de forma-tion» du personnel une entrave majeure, tandis que13% citent «l’incompréhension des employés»comme étant le principal problème à résoudre.

En outre, d’autres résultats démontrent qu’une pro-portion substantielle des gestionnaires est préoc-cupée par l’adhésion des employés aux projetstechnologiques. Ainsi, 37% des responsables qué-bécois considèrent qu’il est difficile de faire avancerles dossiers technologiques auprès du personnel del’entreprise (voir graphique 6, page 36).

Cela dit, il est clair qu’aucun des groupesintéressés – en anglais, stakeholders – ne semblevraiment donner de fil à retordre aux dirigeantsdésireux de promouvoir l’utilisation des techno-logies au sein de leur entreprise. Par exemple,près de deux responsables sur trois (65 %)trouvent facile de promouvoir les dossierstechnologiques auprès des membres de leurconseil d’administration.

G R A P H I Q U E 3

Importance de tenir compte des possibilités offertes par les technologies avant d'élaborer la stratégie d’affaires d'une entreprise, selon le temps d’utilisation d’Internet par semaine

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

Très important

45 %

36 %

59 %

46 %

53 %

40 %

9 %11 %

2 % 0 % 0 % 0 %

Assez important Peu important Pas du tout important

Grands utilisateurs(plus de 10 heures)

Petits utilisateurs(trois heures ou moins)

Ensemble des hauts dirigeants

Page 34: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

34 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

Ces résultats ne surprennent pas Alain Rondeau,professeur-chercheur à HEC Montréal. Selon cespécialiste en transformation des organisations, il est indubitable que la promotion des dossierstechnologiques ne pose plus aujourd’hui autantde problèmes qu’il y a dix ou quinze ans. « Leschoses se font plus aisément parce qu’avec letemps, les dirigeants et les travailleurs se sontfamiliarisés avec les technologies. »

En outre, soutient Alain Rondeau, de nos jours, il est plus facile de faire avancer les projets techno-logiques parce qu’ils sont de plus en plus perçuscomme une composante même de la stratégie del’entreprise plutôt que comme un élément exté-rieur à cette dernière. «Ce qui est vraiment difficilepour un dirigeant, c’est de convaincre ses collè-gues, les membres du conseil d’administration etses partenaires du bien-fondé de la stratégie qu’il

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

Très importants

28 %

16 %

41 %

56 %

61 %

44 %

15 %

22 %

15 %

1 % 1 % 1 %

Assez importants Peu importants Pas du tout importants

Grands utilisateurs(plus de 10 heures)

Petits utilisateurs(trois heures ou moins)

Ensemble des hauts dirigeants

G R A P H I Q U E 4

Importance perçue des changements qu’Internet apporte à la façon dont les entreprises font desaffaires, selon le temps d’utilisation d’Internet par semaine

Pourcentage de dirigeantscitant cet obstacle

Les questions d’ordre budgétaire 51 %La résistance au changement 31 %Le manque de formation 23 %L’incompréhension des employés 13 %Les changements technologiques continuels / La lenteur ou la complexité du processus d’implantation des TI 9 %Le manque de ressources / de compétence / de connaissances 7 %Les incertitudes en matière de fiabilité / Les problèmes de compatibilité logicielle et matérielle 6 %Le faible taux de rendement du capital investi (RCI – en anglais, ROI) 5 %L’incompréhension des dirigeants 4 %Les questions de sécurité et de confidentialité des données 3 %

N.B. : Chaque répondant pouvait nommer plus d’un élément. Il est donc normal que la somme des pourcentages de la colonne soit supérieure à 100 %.

T A B L E A U 1

Principaux obstacles à l’implantation des technologies en entreprise

Page 35: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

35P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

met de l’avant. Une fois que cette victoire a étéremportée, il n’est pas si compliqué de promouvoirl’approche technologique qui s’y rattache.»

L’attitude face aux TI : une question d’âge ?En 2000, deux professeurs britanniques, MichaelEarl et David Feeny, publiaient dans la réputéeSloan Management Review un article décrivantau lecteur de quel bois devraient être faits lesdirigeants d’entreprise à l’ère d’Internet. Seloneux, une chose est claire : bien que de nombreuxPDG soient mal équipés pour tirer leur épingle dujeu dans la société de l’information, leur âge n’estpas la source du problème. « Certains soutiennentque les entreprises ont aujourd’hui besoin dedirigeants qui ont grandi dans un mondeimprégné par les technologies. Nous ne sommespas d’accord avec cette affirmation », déclarait leduo de chercheurs.

Les résultats du sondage semblent leur donnerraison. En effet, dans la majorité des cas, l’en-quête n’a révélé aucune différence marquée entreles attitudes et les comportements sur le plantechnologique des jeunes dirigeants (44 ans etmoins) et ceux des gestionnaires d’expérience (45ans et plus). Par exemple, la proportion deleaders convaincus de l’importance des chan-gements provoqués par l’apparition d’Internet estsimilaire dans les deux groupes, tout comme letaux d’utilisation du courrier électronique à desfins personnelles ou professionnelles.

Une exception semble toutefois confirmer la règle :les membres des deux groupes ne s’entendent pastout à fait sur la place que les entreprises doiventlaisser aux experts en informatique (voir graphi-que 7, page 36). Ainsi, les jeunes dirigeants (13%)sont plus enclins que les gestionnaires d’expé-rience (5 %) à trouver que les spécialistes entechnologies « n’ont pas assez de pouvoir ».

Il semble toutefois que cela ne signifie pas que lesdirigeants plus âgés craignent davantage que lesplus jeunes de se faire damer le pion par les expertsen informatique. En effet, dans chaque grouped’âge, un responsable sur cinq considère que lesexperts en technologies ont trop de pouvoir.

Bien que présente, la peur d’être tenu à l’écart del’action pendant que les spécialistes en techno-logies prennent du galon semble moins répandueau Québec qu’ailleurs. Par exemple, selon uneétude réalisée en l’an 2000 en Grande-Bretagne3,50 % des dirigeants britanniques « se sententmenacés par l’accroissement du pouvoir desresponsables en informatique ».

Mais que trament donc nos concurrents ? «Avant de passer aux méthodes à la James Bond, un

G R A P H I Q U E 5

Perception des dirigeants quant au taux de rendement du capital investi (RCI) dans les projets relatifs aux TI et auxaffaires électroniques

Pourcentage de dirigeants citant cet objectif

Améliorer le service à la clientèle 35 %Moderniser / rationaliser les opérations 27 %Consolider l’image de marque de l’entreprise 24 %Augmenter les revenus 15 %Améliorer les communications internes 14 %Améliorer les relations d’affaires 12 %Faciliter le recrutement de personnel 3 %

N.B. : Chaque répondant pouvait nommer plus d’un élément. Il est donc normal que la somme des pourcentages de la colonne soit supérieure à 100 %.

T A B L E A U 2

Principaux objectifs des stratégies Internet des entreprises québécoises

Assez élevé4 3 %

Très élevé7 %

Peu élevé42 %

Pas du tout élevé

2 %

Ne sait pas6 %

Page 36: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

36 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

bon espion commence toujours sa recherche de ren-seignements par les voies offrant le moins de résis-tance», soulignait un jour un détective privé dans larevue Corporate Espionage. Dans la foulée de cetteaffirmation, quel usage les dirigeants québécois font-ils du Web, une mine de renseignements relative-ment facile et économique à explorer, s’il en est une?

Une utilisation peut-être moins répandue qu’onpourrait le croire, si l’on se fie aux résultats dusondage. En effet, 46 % des dirigeants sondés

n’avaient pas visité les sites Web de leurs concur-rents au cours des trois mois précédant l’enquêteet ce, même s’ils n’étaient qu’à un clic de souris dedistance. Fait à noter, les gestionnaires d’entreprisescomptant 500 employés ou moins utilisent moinscette avenue (44%) que ceux provenant de sociétésde 500 employés et plus (60%) (graphique 8).

Doit-on conclure pour autant que trop de dirigeantsquébécois ne sont pas encore assez conscients dupotentiel d’Internet pour suivre les faits et gestes

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

Trop de pouvoir

20 % 19 %21 %

69 %

63 %

74 %

9 %13 %

5 %

Juste assez de pouvoir Pas assez de pouvoir

Dirigeants de45 et plus

Dirigeants de moinsde 45 ans

Ensemble des dirigeants

G R A P H I Q U E 7

Perception des dirigeants face au pouvoir exercé par les experts en informatique de l’entreprise, selon l’âge

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

90 %

100 %

34 %

50 %

25 %

6 %

9 %

9 %

58 %

23 %

3 %7 %

Haute direction

5 %

58 %57 %

21 %

62 %

8 %

7 %

25 %

5 %

6 %

1 %

8 %

3 %

10 %

Conseild'administration

Employés Clients Fournisseurs

Très difficile

Ne sait pas /refus

Assez difficile

Assez facile

Très facile

G R A P H I Q U E 6

Degré de difficulté à faire avancer les dossiers technologiques au sein des entreprises auprès de...

Page 37: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

37P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

L E Q U O T I E N T I N T E R N E T D E S D I R I G E A N T S Q U É B É C O I S

de leurs concurrents – dans le jargon des spécia-listes, faire de la veille concurrentielle ? «Pasnécessairement, souligne Louis Raymond, profes-seur titulaire en systèmes d’information et engestion des TI à l’Université du Québec à Trois-Rivières. Les dirigeants savent bien, par expérience,que de nombreux sites Web, particulièrement ceuxdes PME, sont passablement rudimentaires etrenferment, souvent sciemment, peu de donnéesd’une grande valeur stratégique sur les activités deleur propriétaire.» Dans ce contexte, un coup d’œilou deux par année sur les sites des concurrents peutsuffire au gestionnaire pour se tenir à jour.

«Surtout, ajoute Louis Raymond, qu’une entreprisepourra souvent recueillir des renseignements plusutiles sur ses adversaires en se fiant aux bonnesvieilles méthodes», c’est-à-dire en se concentrantsur l’information recueillie sur le terrain par sesvendeurs ou en participant aux foires commercialesles plus importantes de son secteur d’activité.

Cela dit, notons que plus un dirigeant passe detemps sur Internet, plus il est susceptible de s’enservir pour avoir la concurrence à l’œil. Ainsi, lesgestionnaires naviguant sur le Web plus de 10 heures par semaine sont nettement plus enclinsà consacrer une portion de ce temps à visiter dessites de concurrents (71%) que ceux qui n’y vontque trois heures ou moins (43%) par semaine.

Le premier d’une longue série de sondages Le sondage NetLeader, CEFRIO -Léger Marketingnous apprend également que 95 % des dirigeants

québécois ont adopté Internet comme outil detravail et que 93% s’en servent pour envoyer descourriels. En outre, plus de huit responsablesd’entreprise sur 10 consultent le Web pour prendredes nouvelles de la planète ou de leur secteurd’activité. Comme on le voit, l’image du patronincapable de se servir d’un ordinateur relèvedésormais davantage du stéréotype que de la réalité.

De même, il est clair que l’image du dirigeantcomplètement refroidi par la débâcle des sociétésInternet tient également de la caricature. En effet,les réponses des dirigeants d’entreprise contactésdans le cadre du sondage démontrent bien que,malgré l’essoufflement des AOL, Yahoo!, Nortel etautres, l’intérêt pour les TI et les affairesélectroniques n’est pas mort : une proportionimportante de gens d’affaires demeure en effetconvaincue de leur importance et est sensibiliséeau fait que les questions d’ordre technologiquesont reliées aux stratégies.

Leur perception et leur comportement se modifieront-ils à l’avenir ? Leur quotient Internet évoluera-t-il ? En viendront-ils à affirmer, comme MichaelEarl et David Feeny, que « IT is the businessstrategy » ? Il faudra attendre l’édition 2003 dusondage NetLeader pour le savoir. ■

1 Voir La structure du département T.I. : le défi de laflexibilité, CIRANO, 2001, p. 3.

2 Voir « Demystifying ROI », Computerworld, 22 avril 2002,p. 28.

3 Young, Ken, « Managers lack IT knowledge », IT Week,septembre 2000, p. 54.

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

60 %

70 %

80 %

90 %

100 %

Envoi de courriels

93 %90 %

94 %

81 %

90 %

66 %

44 %

95 %

86 % 88 %

73 %

54 %58 %

73 %

88 %

62 %

Visite de sitesinformationnels

Visite du sitede l'entreprise

Visite des sitesdes concurrents

501 à 1 000employés

500 employésou moins

Entreprises detoutes tailles

Plus de 1 000employés

G R A P H I Q U E 8

Utilisation d’Internet au cours des trois derniers mois, selon la taille de l’entreprise

Page 38: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

38 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

T E C H N O L O G I E S

Gare aux miroirs aux alouettes

P A R D A N I E L L E S T A N T O N

«Nous faisons montre d’une fascination mal-saine envers les technologies », déclare

sans détour Riccardo Petrella, qui aime bienlancer de gros pavés dans la mare de noscertitudes. Puis, il nuance son propos.

« Remarquez, je ne conteste pas les avantagesqu’Internet présente pour les consommateurs.D’ailleurs, qui pourrait le faire ? Il s’agit d’unoutil hors pair pour communiquer, voire mêmepour organiser des mouvements de contestation à l’échelle mondiale, comme à Seattle ou àJohannesburg. Mais il faut éviter que la techno-logie ne devienne une nouvelle source d’inéga-lités ou de légitimation de ces inégalités.Essayons donc plutôt d’en faire un instrumentdont tout le monde tirera profit, le citoyen toutautant que le consommateur. Mettons-la auservice du bien commun, faisons-en un instru-ment pour mieux vivre ensemble. Il faut associerau développement technologique l’idée de pro-grès, de croissance pour tous.

« Les dirigeants politiques, industriels, scienti-fiques, bref, tous ceux qui définissent notre ma-nière de voir la vie, puisent dans la technologieune nouvelle puissance qui leur permet deconcevoir et d’appliquer de nouveaux procédés,de produire davantage, de créer de nouveauxproduits, poursuit le penseur. Mais cette nouvellepuissance sert davantage des groupes relative-ment restreints, à qui elle profite. De plus, onconstate qu’elle contribue à aggraver de vieillesinégalités, et même à en créer d’autres. »

La force des technologies : maîtriser le temps et l’espaceMais pourquoi les nouvelles technologies sont-elles alors aussi bien acceptées? Pourquoi sont-elles aussi peu critiquées? Riccardo Petrella puisel’explication de ce phénomène dans l’histoire :«La technologie a toujours exercé une grandefascination, et cela n’est pas propre à notre époque.Depuis le début de l’industrialisation, au 18e siècle,le développement technologique a toujours étéassocié au renforcement de la capacité d’action del’être humain. La société évolue avec l’idée qu’il

Entrevue exclusive avec Riccardo Petrella, auteur des best-

sellers Le bien commun (Labor) et Limits to competition (MIT Press),président-fondateur du Groupe

de Lisbonne, collaborateur régulier au Monde diplomatique

et professeur à l’Université catholique de Louvain (Belgique)

Riccardo Petrella, l’un des penseurs européens les plus en vue actuellement, n’hésite pas à parler de

bien commun, de capital social, de citoyenneté, de solidarité, dans un monde dominé par la soif du

pouvoir, le capital financier, la consommation et la concurrence. En ce sens, on le place d’emblée

à gauche, si les catégories d’hier ont encore un sens. Son credo a le mérite de ramener à l’ordre du

jour des questions fondamentales, d’éveiller notre esprit critique, de remettre en question le concept

de « pensée unique ». Et, surtout, de nous rappeler notre devoir envers l’humanité.

Page 39: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

39P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

T E C H N O L O G I E S : G A R E A U X M I R O I R S A U X A L O U E T T E S

faut accepter d’emblée tout ce qui peut nous aiderà maîtriser les éléments, à améliorer notre confort,à mieux maîtriser la vie. En somme, nousmanifestons depuis plus de deux siècles une foiaveugle dans tout ce qui peut nous libérer descontraintes naturelles.

« Or, la grande force d’attraction des technologiesde l’information et des communications (TIC)provient du fait que celles-ci nous permettent dedominer les données naturelles les plus contrai-gnantes qui soient : l’espace et le temps. Imaginezle sentiment de puissance qui anime une personnelorsqu’elle envoie un texte de 100 pages à l’autrebout du monde en une seconde. Et celui queressent le dirigeant d’entreprise qui réalise qu’ilpeut dorénavant installer ses usines n’importe oùsur la planète. Le temps et l’espace sont devenusde moins en moins contraignants.

«Prenez la réalité virtuelle : c’est un peu l’aventurede l’homme créateur de la vie, de son immortalité.Si les promoteurs de la technologie et les dirigeantsd’entreprise ne pouvaient démontrer que celle-ci estsource de progrès, elle perdrait toute légitimité.»

Redonner voix au citoyenMais on ne peut tout de même pas être contre le progrès ? Riccardo Petrella rectifie : «Non, maison peut être contre une certaine idée du progrès.Si vous marchandisez tout, y compris le temps etl’espace, vous n’accordez pas les mêmes droits àtous, seulement à ceux qui ont les moyens deconsommer. Or, il faut bien se rendre à l’évidence :les TIC ont développé en nous le consommateur,et très peu le citoyen. Tellement, qu’on en estpresque venu à penser qu’on ne peut plus être uncitoyen si on n’est pas un consommateur. Nousfaisons des choix de consommateur. Nousexerçons notre pouvoir comme consommateur.On nous dit, tacitement : “Tu fais un choix chaquefois que tu achètes, donc tu votes”. C’est unemystification. Quelle différence y a-t-il entreacheter une Ford et une Volkswagen? Dans lesdeux cas, vous optez pour le transport privé,l’énergie non renouvelable, la pollution urbaine.Vous ne choisissez pas.»

Plusieurs estiment pourtant qu’Internet pourraitne pas être utilisé comme les dirigeants ou lespatrons industriels le souhaitent, qu’il pourrait

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 40: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

40 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

T E C H N O L O G I E S : G A R E A U X M I R O I R S A U X A L O U E T T E S

fournir à l’individu, au citoyen, l’occasion deraffermir son pouvoir. Riccardo Petrella en doute.« Il ne faut pas croire aux vertus de l’autorégu-lation. Cela aussi fait partie de cette fascinationque nous éprouvons pour les TIC. Rien ne vienttout seul ; il n’y a pas de génération spontanée. Sinous voulons que les choses évoluent différem-ment, nous devons orienter le progrès, le réguler.C’est la tâche des gouvernants, des citoyens, desacteurs sociaux.

«Pour l’heure, Internet répond de plusieurs logi-ques. Tout le monde saitqu’Internet (InterconnectedNetwork) est né au sein del’armée américaine pourdes besoins militaires. Lamême logique est aujour-d’hui à la base même dudéveloppement des satelli-tes : 80 % sont d’originemilitaire et poursuivent desfins militaires. Cette logiquea été élargie et appliquée àl’économie. La compéti-tivité est devenue notrechamp de bataille.

« La deuxième logique,c’est celle de l’appropriationindividuelle. Pour organiserun marché mondial, il fautque le plus grand nombre

possible d’individus, de consommateurs, ait accèsaux produits. Or, au niveau mondial, il n’y a pas derègles, pas de pouvoir de réglementation: c’estl’autorégulation qui prévaut.

« La troisième logique, c’est celle de la marchan-disation : tout est échangeable, monnayable.Même la connaissance.

« Tous ces éléments risquent de corrompre nosvaleurs. Vous savez, on peut déjà s’interrogeraujourd’hui sur le fait qu’un individu qui bour-sicote par Internet gagne généralement beaucoupplus d’argent qu’un enseignant du primaire.

« Je pense tout de même qu’il y a moyen dechanger les choses, de rétablir l’équilibre. Pourcela, il nous faut des engagements politiques etpersonnels extrêmement fermes. Rien n’ira desoi ; il faut abandonner cette idée. Il est vrai qu’àl’heure actuelle, nous ne sommes pas en mesured’établir des règles. Nous en sommes, si je puisdire, à l’abc, à apprendre à lire et à écrire. Plus lesgens participeront à la créativité du langage, plus

l’évolution sera positive. L’arrivée de logicielslibres comme Linux, un système d’exploitationconcurrent à Windows (Microsoft), me semblealler dans ce sens. Je ne dis pas qu’il ne faut pasde règles. L’expérience nous enseigne que laliberté doit être encadrée par des règles ;l’absence de règles, c’est la négation de la liberté.La question est donc de savoir qui définit lesrègles. L’entreprise privée ? Non. Seule uneautorité reconnue peut le faire. »

Le travail pour tousSelon Riccardo Petrella, l’explosion des TICsoulève un autre problème majeur : celui de ladestruction des emplois. Mais le penseur necroit-il pas, comme Jeremy Rifkin (auteur du best-seller La fin du travail), que l’être humain a toutà gagner face à des technologies qui le libèrentdes travaux répétitifs et contraignants ? « Je suisd’accord avec l’analyse de Rifkin, mais je nepartage pas sa conclusion , précise Petrella.

« Soyons réalistes. Le travail rémunéré demeurele ticket d’entrée dans le réseau social, le passe-port pour l’accès au revenu, la réalisation de soiet la reconnaissance de ses pairs. Alors, tant quenous n’aurons pas trouvé autre chose, nousdevrons chercher à offrir du travail à tous, viser le plein emploi. Nous ne sommes pas encoredans une civilisation où l’oisiveté est une valeurreconnue. C’est même le contraire.

« Il y a actuellement 1,3 milliard d’adultes dans lemonde qui n’ont pas de travail rémunéré. Ces genssont-ils moins humains que les autres ?

« On nous dit que le remplacement des tâches hu-maines par les TIC est un phénomène inexorable,et cela est vrai si le principe fondamental del’économie est d’accroître le capital en aug-mentant la valeur des actionnaires. Je crois plutôtque nous devons utiliser les technologies pourcréer de nouvelles possibilités d’emploi. Or, il me semble qu’aujourd’hui, les technologies sontd’abord utilisées dans une logique de substi-tution, de réduction des coûts. Pourquoi ne pasfavoriser plutôt une approche cumulative et valo-risante du travail par les technologies ?

« L’autre choix que nous avons, c’est d’accepterqu’il y ait de moins en moins de personnes autravail, donc de plus en plus d’exclus. On enarrive alors à l’idée du revenu de citoyenneté.C’est un sujet délicat qui, selon moi, nous renvoieà cette vieille notion de compassion apparue au18e siècle, lorsque l’Église a créé l’aide sociale.Pour ma part, je préfère l’équité à la compassion,

« Il faut revenir àune économie quigénère une forme de richesse deportée plus large,car une économiestrictementfinancière produitdes richessesvirtualisées pour les seuls détenteursde capitaux. »

– Riccardo Petrella

Page 41: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

41P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

T E C H N O L O G I E S : G A R E A U X M I R O I R S A U X A L O U E T T E S

car celle-ci nous amène souvent à blâmer l’exclu.Nous ne pouvons avoir une politique officiellequi repose sur la compassion. »

La nouvelle économieUne grave crise de confiance secoue actuellementles milieux financiers. Selon Riccardo Petrella,cette crise était inévitable. « Dans la logiqueactuelle du marché, le bon gestionnaire est celuiqui utilise le mieux les outils à sa dispositionpour valoriser le capital, les investissements.Pour assurer sa survie, il doit recourir à toutes lesméthodes. Or, toute économie qui cède à la seulelogique financière est une économie perverse. Lacrise actuelle démontre que les processus de lanouvelle économie, de la financialisation del’économie, étaient nécrophages. Il faut revenir àune économie qui génère une forme de richessede portée plus large, car une économie stricte-ment financière produit des richesses virtualiséespour les seuls détenteurs de capitaux.

« L’économie, comme les autres secteurs de l’acti-vité humaine, doit viser à augmenter la capacitédes gens de vivre ensemble. Elle doit intégrer lerespect de l’environnement, les droits des géné-

rations futures, etc. Ce n’est pas possible actuel-lement, parce que tout est centré sur le capital.De plus, dans les écoles d’administration, nousformons des lutteurs – pas de véritablesgestionnaires –, et nous les envoyons dans unearène où tous les coups sont permis, à conditiond’obtenir le meilleur rendement. Les techno-logies sont trop souvent utilisées dans cette seule logique. »

Riccardo Petrella reste néanmoins optimiste. «Lestechnologies renferment un grand potentiel. Peut-on être contre la numérisation? Contre Internet?Non, et il n’est pas question de revenir en arrière.Le problème, encore une fois, c’est l’usage qu’onen fait, la logique qui guide les actions. Voilàpourquoi on est parfois obligé de se positionnercontre, comme dans le cas de la mondialisation.

« Il est temps de se donner une vision positive dela technologie, pour améliorer et accroître lesliens entre les gens, la valeur du capital social, la capacité de tous les individus d’être des sujets– et non des objets – de l’histoire. Il est tempsd’orienter, de gérer le progrès selon les valeursque nous partageons. » ■

Fonds québécois de la recherche sur lasociété et la cul ture

Fonds québécois de la recherche sur lanature et les technologies

QUAND « TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION » RIME AVEC

F o r m a t i o n Les Fonds soutiennent la formation puisque lescompétences hautementqualifiées sont essentiellesau développement destechnologies, à leur appropriation et à la gestion innovante.

R e c h e r c h eLes Fonds financent larecherche, développantainsi les connaissances qui alimentent la capacitéd’innovation des entreprises des secteursprivé et public.

I n n o v a t i o n

Les Fonds favorisent lespartenariats qui renforcentl’interaction entre lesmilieux de recherche et les utilisateurs de nouveaux savoirs.

Pour plus d’ information, v is i tez nos si tes www.fqrsc.gouv.qc.ca › www.nateq.gouv.qc.ca

Page 42: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

42 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Nouvelle économie,nouveau consommateur ?

PA R R É J E A N R O Y

L ’idée que l’avènement d’Internet a fait appa-raître un tout nouveau type de consommateurs

est assez répandue dans les ouvrages de gestioncontemporains. Par exemple, dans The Soul ofthe New Consumer 1, Laurie Windham et KenOrton prétendent qu’avec la montée d’Internet,nous avons assisté à l’accroissement rapide del’importance économique d’un groupe de consom-mateurs «aux attitudes, aux aspirations et auxhabitudes d’achat complètement nouvelles. Groupequ’ils nomment les nouveaux consommateurs».

Cette idée a son corollaire : puisque le consom-mateur en ligne est radicalement différent duconsommateur traditionnel, il est impératif del’aborder à l’aide de nouvelles stratégies marke-ting. Ainsi, Chris Locke – l’un des 50 penseurs engestion les plus influents au monde selon le trèsconservateur Financial Times – souligne dansGonzo Marketing, Winning Through WorstPractices 2 que les hypothèses prédominantes enmatière de marketing « ne collent plus du tout à lamanière dont nous vivons maintenant nos vies ».Tout comme ces auteurs, David Weinberger croit

que l’avènement d’Internet constitue un pointtournant de l’histoire économique occidentale.

Selon lui, l’importance du Web tient à ce que celui-ci permet de redonner vie, sous une forme nou-velle, au marché ou au magasin général du XIXe

Il y a fort à parier qu’en feuilletant l’un des ouvrages marketing de l’heure, vous y appreniez que la

nouvelle économie a tout balayé sur son passage, que les acheteurs se sont métamorphosés en

critiques féroces et qu’en matière de mise en marché, les idées d’hier sont dépassées. Devez-vous

pour autant abandonner vos bonnes vieilles méthodes ou, pour paraphraser Mark Twain, l’annonce

de la mort du consommateur et du marketing traditionnels est-elle grandement exagérée ? Pour

discuter de cette question, le CEFRIO a rencontré deux spécialistes en la matière : le Québécois

Jacques Nantel et l’Américain David Weinberger.

L’avenir du marketing selon KotlerLes chercheurs qui prédisent la mort dumarketing traditionnel ne cherchent pastous à se faire un nom. Certains, commePhilip Kotler, professeur émérite à l’Univer-sité Northwestern et auteur de MarketingManagement 3, l’ouvrage en marketing leplus utilisé dans les facultés de gestionaméricaines, jouissent déjà d’une très fortenotoriété. Ce n’est donc point pour sedémarquer que M. Kotler affirmait récem-ment : « Les marchés changent beaucoupplus vite que le marketing. La majorité desstratégies de mise en marché des entre-prises sont aujourd’hui dépassées ! Avec leWeb, nous sommes entrés dans une èrenouvelle sur le plan mercatique ».

Page 43: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

43P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

siècle. «À cette époque, le marché était un lieu réeloù les gens se rencontraient, prenaient des nou-velles de leur monde et, bien sûr, échangeaient desbiens et de l’argent. À l’époque, le marché sesituait véritablement au cœur de la société. Au XXe

siècle, le concept s’est toutefois atrophié à un pointtel qu’il ne sert généralement plus qu’à désigner unendroit où les gens ne se rencontrent jamais, ne seconnaissent pas et n’ont qu’une seule chose encommun: acheter un produit donné en raison deleurs caractéristiques démographiques.»

« L’arrivée d’Internet a cependant contribué à re-donner au concept de marché une partie de sarichesse passée, poursuit l’expert américain. AvecInternet, ce qui a continué de subsister à l’échellelocale se produit désormais à une échelle pluslarge. Les gens qui achètent vos produits et quis’en soucient utilisent désormais l’inforoute pourrepérer vos autres clients et discuter avec eux àvotre propos, que ce soit par le truchement ducourriel ou des forums de discussion. Cent ansplus tard, les termes marchés et conversationssont donc littéralement redevenus synonymes. »

Pour David Weinberger, le rapport de forces entrel’entreprise et ses clients a été bouleversé du fait

qu’ Internet donne auxacheteurs la possibilité deconverser les uns avec lesautres. « Auparavant, l’en-treprise avait le contrôleparfait de l’informationcirculant sur ses produits.C’est elle qui choisissait cequ’elle ferait savoir au mar-ché, et même à ses employés.Avec Internet, les sociétésne sont désormais plus la meilleure source derenseignements sur ce qu’elles font. Leurs clientsont pris la place. »

Pour les entreprises, soutient David Weinberger,les implications de ce renversement sont triples.Dans un premier temps, celui-ci signifie que l’ave-nir du Web comme moyen de diffusion semblableà la télévision ou à la radio est mort. « L’entrepri-se qui pense que l’internaute l’écoutera docile-ment pendant qu’elle s’adresse à lui à l’aide depublicités électroniques toujours plus flam-boyantes fait fausse route. Le public Web n’estpas une masse passive à laquelle on peut s’adres-ser d’un bloc, mais bien un ensemble de person-nes uniques, actives, reliées les unes aux autrespar l’entremise de groupes virtuels où ellesdésirent s’exprimer. »

En outre, «parce que les gensne sont pas sur Internet pourfaire des courses, qu’ils ysont d’abord pour parler àleurs semblables », les entre-prises doivent se préoccuperde ce qui se passe dans lescommunautés Internet etparticiper activement à leursactivités. À titre d’exemple,une stratégie intéressantepour les constructeurs devoitures consistera à laisserleur personnel intervenirdirectement dans les forumsde discussion consacrés aux automobiles.

Finalement, David Weinbergeravance que pour rejoindredes clients mieux avisés que jamais, l’entreprisedoit maintenant leur parler en toute sincérité etdiscuter de ses bons coups comme de ses travers.Elle ne peut pas se contenter d’afficher sur sonsite corporatif des communiqués édulcorés pro-duits par les responsables de ses relations publi-ques. Elle ne peut pas non plus laisser ses

En 2000, la direction de Ford admettaitpubliquement queses utilitaires sport

étaient tropgourmands en

essence et troppolluants. Lorsque la presse s’étonna

d’une telle franchise, un haut dirigeant

de l’entreprises’exclama : « Pour

l’amour du Ciel, toutle monde en parle !

Pourquoi pas nous ? »

Quotidiennement,trois millions d’inter-

nautes américainsutilisent le Web

pour trouver un nouvel endroit

où demeurer.Source : Pew Internet Project

Jacques Nantel enseigne à HECMontréal, où il s’intéresse particu-lièrement au comportement desconsommateurs, au positionnementde produits et au commerceélectronique. Titulaire de la Chairede commerce électronique RBCGroupe financier, il a été nomméPersonnalité de l’année 2002 parl’Association Marketing de Montréal.

David Weinberger est l’un des coau-teurs de Liberté pour le Net 4, versionfrançaise de The Cluetrain Manifesto,l’un des ouvrages marquants desdernières années dans le domaine des affaires électroniques. Ancienvice-président marketing de lasociété logicielle OpenText, DavidWeinberger publiait récemmentSmall Pieces Loosely Joined 5, un essaisur la nature véritable du Web.

N O U V E L L E É C O N O M I E , N O U V E A U C O N S O M M A T E U R ?

Page 44: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

44 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

N O U V E L L E É C O N O M I E , N O U V E A U C O N S O M M A T E U R ?

employés intervenir dans les forums de discus-sion en disant autre chose que la vérité.

Dans Small Pieces, David Weinberger soutientque rien ne témoigne mieux de l’importance,pour une entreprise, de se montrer sous un jourvrai et humain que l’exemple du fabricant decartes de souhaits Hallmark :

« En 2000, Blue Mountain Arts contrôlait le qua-trième site en importance sur le Web en termes devisiteurs. Cette année-là, l’entreprise expédia plus

de 40 millions deValentins électroni-ques. En parallèle,Hallmark possédaitle 38e site le pluspopulaire du Web.Ce site reflétait lesvaleurs présentesdans tous les maga-sins Hallmark : pro-

preté, professionnalisme, sécurité. Celui de BlueMountain accueillait les visiteurs avec des cou-leurs tapageuses, des animations criardes et desgraphiques au goût douteux.

« Si Hallmark a réussi à prendre le dessus dans lemonde traditionnel [...] grâce au caractère irré-

prochable de ses boutiques, Blue Mountain estdevenu le meneur de la carte de vœux en ligne enraison de ses imperfections plutôt qu’en dépit deces dernières. Sur le Web, la perfection fait peur.»

Cette conclusion fait bondir Jacques Nantel.Selon lui, David Weinberger et plusieurs autresconcluent erronément que l’arrivée du Web a toutchamboulé, parce qu’ils ne tiennent pas compted’un facteur crucial : l’internaute moyen est encoretrès différent du consommateur moyen.

«Plusieurs oublient, dit Jacques Nantel, que lapremière chose qu’il faut faire en marketing, c’estisoler certaines variables pour voir à quoi un phé-nomène est vraiment imputable. Il n’est certes pasfaux de dire que le site de Blue Mountain est trèsfréquenté. Mais affirmer que cet exemple est lapreuve de bouleversements commerciaux radi-caux, c’est faire fi du facteur âge6. De même,soutenir que les internautes s’informent plus quele consommateur moyen, c’est ignorer que lespersonnes branchées sont encore aujourd’hui plusjeunes, plus scolarisées et plus à l’aise financière-ment que les autres, et que c’est le propre de cetype de clientèle de se renseigner – en ligne commeailleurs – sur ce qu’elle achète. Malheureusement,ce genre de raisonnements a mené tout droit auxcatastrophes Internet que l’on a connues.»

0 %

10 %

20 %

30 %

40 %

50 %

18 à 34 ans

29 %

42 %46 %

30 %

41 %

12 %

35 à 54 ans 55 ans et +

% de la populationdu Québec

% des internautesquébécois

Peut-on faire abstraction de l’âge des internautes* ?

*Ce graphique ne tient pas compte des personnes de moins de 18 ans.

Selon les données de Statistique Canada et du CEFRIO (NETendances), 88 % des internautes québécois étaient âgés de 18 à 54 ans en 2001,alors que seulement 70 % des Québécois appartiennent à ce groupe.

En 2001, 37 % desinternautes canadiens se sont tournés vers leWeb pour rechercher del’information médicale. Source : Industrie Canada

Page 45: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

45P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

N O U V E L L E É C O N O M I E , N O U V E A U C O N S O M M A T E U R ?

« Lorsqu’on isole les bonnes variables, poursuit lespécialiste québécois, on se rend compte qu’il n’ya pas de nouveau consommateur. Le consomma-teur Internet et le consommateur traditionnelsont une seule et même personne. L’internauteutilise l’inforoute comme complément lors de laprise de décision et non pas comme substitut. Parconséquent, l’approche eMarketing d’une entre-prise ne peut fonctionner que si elle vient segreffer de manière fonctionnelle à son approchemarketing habituelle. »

Selon Jacques Nantel, le consommateur n’est doncnullement une sorte de Dr Jekyll se métamor-phosant en Mr Hyde dès que l’on place un clavieret un écran devant lui. Par conséquent, touteentreprise mettant au point une stratégie Internetdevrait tenir compte de deux choses.

D’abord, l’entreprise devrait s’assurer de créer surInternet un environnement où le client sera par-faitement à l’aise, un cadre semblable à celui qui lui est déjà familier. « Pendant des années, surle plan technologique, on a priorisé ce qui étaitpossible plutôt que ce qui était souhaitable,explique Nantel. Résultat : une foule de sites Websont magnifiques mais trop compliqués ; il y arupture entre la manière traditionnelle de consul-ter de l’information ou de faire des achats, et lanouvelle. Par exemple, je mets n’importe qui audéfi de trouver une information plus vite dans unrépertoire d’entreprises en ligne qu’avec les Pagesjaunes traditionnelles. Pourquoi ? Parce qu’ils dé-paysent l’utilisateur, le client moyen ayant de ladifficulté à utiliser un moteur de recherche. Pour

résoudre le problème, il faut prendre une appro-che semblable à celle de la Pennsylvanie7 : là-bas,les Pages jaunes électroniques fonctionnentsensiblement comme celles de la vraie vie. Etelles sont jaunes ! Comme quoi il ne faut pastoujours penser out-of-the-box pour réussir... »

Selon le professeur Nantel, ceci ne signifie pas,évidemment, que les approches novatrices de-vraient toujours être évitées sur Internet, maisbien que tout changement devrait être introduitavec circonspection : « En matière de commerceélectronique, lesentreprises devraientsuivre l’exemple desb a n q u e s l o r s d el’introduction duguichet automatique.Si, dans les années80, les institutionsfinancières s’étaientmises du jour aulendemain à fermerdes succursales, onaurait vécu le chaos.Tout s’est donc faitprogressivement ! Je connais des caissiers qui sesont rendus 10 fois, 15 fois au guichet avec unclient avant que celui-ci se sente assez en con-fiance pour l’utiliser seul. Avec les technologies,il faut partir du point de départ des consom-mateurs, garder en tête qu’ils n’ont pas débarquéhier de la planète Mars et qu’ils ont tous une bon-ne idée de ce que c’est que d’acheter des livres,des vêtements, du pain... »

Parlez de moi en bien, parlez de moi en mal, mais parlez de moi ?

Selon un sondage mené en 2001-2002 par PricewaterhouseCoopersauprès de 1 161 PDG américains,européens et asiatiques, la réputa-tion et les ventes des entreprises ont commencé à subir les effets del’apparition de forums de discussionInternet, de l’émergence de sites Web parallèles (par exemple,gmsucks.com) et du lancement d’ap-pels virtuels au boycottage. Dans lesecteur des produits et des servicesde consommation et dans celui desproduits et des services industriels,45 % des dirigeants interrogés esti-ment que ces effets sont très impor-tants ou assez importants.

Aux États-Unis, près dequatre internautes surcinq (79 %) affirment

entretenir des lienssoutenus avec les

membres d’une ouplusieurs communautés

en ligne.Source : Pew Internet Project

Effets peu importants29 %

Ne sait pas18 %

Aucun effet 8 %

Effets très importants 6 %

Effets assezimportants 39 %

Page 46: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

46 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

N O U V E L L E É C O N O M I E , N O U V E A U C O N S O M M A T E U R ?

En outre, aucune entreprise ne devrait se lanceraveuglément dans l’aventure du commerce élec-tronique ; tout projet Internet devrait viser àaméliorer l’expérience du consommateur, à luiapporter quelque chose. Entre autres, cela pourrasignifier que l’on aide le consommateur à gagnerdu temps. « Vous savez, Internet ou pas, il n’y aque 24 heures dans une journée. Par conséquent,les technologies ou les services Web qui permet-tent aux acheteurs de gagner du temps connaî-tront souvent du succès. Quant aux autres, leurimpact sera limité... C’est ce qui me fait croire

que les communautés en ligne auront de l’impor-tance comme source d’information, mais pasautant que ne le croit David Weinberger. La vastemajorité des internautes n’auront pas le temps de discuter de leurs achats avec le personnel deHeinz, les employés de General Motors ou d’au-tres clients. Encore une fois, il ne faudrait pasconfondre les habitudes de vie de quelques techies(mordus de technologie) avec celles de la popu-lation en général. »

Ainsi, tous ne s’entendent pas sur l’ampleur exactedes changements provoqués à ce jour par l’appa-rition du Web. Il est clair que cette divergenced’opinions tient en forte partie à la nouveauté mêmede l’inforoute. En effet, comme l’écrivait récemmentRegis McKenna8, l’un des 100 responsables del’essor fantastique de Silicon Valley selon le SanJose Mercury News, «nous savons très peu de

choses des effets qu’Internet aura sur le marketingou le comportement des consommateurs, essentiel-lement parce qu’à ce jour, nous n’avons rien vud’autre sur le Web que des expérimentations».

Le Web en est peut-être à ses premiers balbutie-ments, mais il est une chose sur laquelle toussemblent s’entendre : sur Internet, le consom-mateur n’est pas passif, alors que plusieurs desthéories sur lesquelles s’appuient les spécialistesde la mise en marché depuis des décenniessupposaient précisément le contraire.

Quels seront les effets à long terme du réveil duconsommateur ? Il est encore tôt pour répondre à cette question, mais il ne fait pas de doute, pour reprendre les mots de Valéry, qu’en marke-ting comme ailleurs, à cause d’Internet, « l’ave-nir n’est plus tout à fait ce qu’il était ». ■

1 Allworth Press, 20002 Perseus Publishing, 20013 Prentice Hall, 19974 Village mondial, 20015 Perseus Publishing, 20026 « C’est aussi, ajoute le professeur Nantel, faire fi du fait qu’en affaires,

il est, depuis toujours, parfois avisé de prendre à gauche quand tout lemonde décide de virer à droite. »

7 Voir http://www.sbn.com/newstates/statepage.asp?source=SBN&url=www.sbn.com&CobrandID=1&stateID=pa

8 Cité dans Total Access, Harvard Business Press, 2002

Page 47: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs
Page 48: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs
Page 49: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

Nous sommes à l’ère d’Internet, de la messagerie avancée, des réseaux, de CNN. Nous voguons,

toutes voiles dehors, au cœur de la société de l’information. Au bureau, à la maison, et tout au long

du trajet qui nous mène de l’un à l’autre, nous recevons des milliers de messages. Tous les jours,

toutes les heures. Des tonnes de documents inondent nos ordinateurs et l’avalanche de courriels

menace constamment. Cependant, notre capacité d’absorption a des limites. La société de l’infor-

mation exige beaucoup d’attention. Mais maintenir l’attention est devenu une tâche ardue.

Apprendre à gérer l’attention:une question de survie

PA R D A N I E L L E S T A N T O N

S elon Thomas H. Davenport, nous vivons dansun monde où les ressources les plus rares ne

sont pas les capitaux, les idées ou le talent, maisbien l’attention. Pour l’auteur du récent best-seller The Attention Economy, Understanding theNew Currency of Business (Harvard BusinessSchool Press, 2001), la gestion de l’attention estdevenue l’enjeu de l’heure, « certainement le plusimportant déterminant du succès pour l’entre-prise d’aujourd’hui ».

« Il y a beaucoup trop d’information autour denous, plus que tout être humain peut en absorber,déclare Thomas Davenport. Prenez, par exemple,l’édition dominicale du New York Time : ellecontient plus de données factuelles que toute la documentation accessible au lecteur du 19e siècle. On dénombre plus de deux milliardsde sites Web actuellement et leur nombre doubletous les cent jours. Or, on sait qu’un individuconsulte en moyenne dix sites Web par mois. Si vous êtes un producteur, c’est un problème.Des entreprises dépensent aujourd’hui desfortunes pour capter l’attention des gens. Unexemple que j’aime bien rappeler : le film The

Blair Witch Project. On a dépensé 350 000 dollarspour le produire et 11 millions de dollars pour lepromouvoir. Vous voyez à quel point l’attentionse paie cher aujourd’hui. »

Dans son livre, Thomas H. Davenport traite dequatre aspects liés à la gestion de l’attention dontles entreprises doivent saisir l’impact si ellesveulent survivre : la mesure du degré d’attention ;la compréhension de ses dimensions psycho-logiques ; la maîtrise des nouvelles technologies ;enfin, l’adaptation des stratégies traditionnellesde l’industrie pour capter l’attention, comme lapublicité. En explorant ces aspects, ThomasDavenport apporte un éclairage nouveau sur lagestion des connaissances au sein de l’entreprise,le leadership organisationnel, la stratégie d’entre-prise et le commerce électronique. Pour cetexpert, « la gestion de l’attention peut aider lesentreprises à renforcer la motivation de leursemployés et à tirer profit de leur talent, à fidéliserle consommateur, et à impressionner les inves-tisseurs et les analystes ».

Le livre présente un instrument inédit : l’outil demesure de l’attention (AttentionScape). Cet ins-trument permet de diagnostiquer les problèmes

49P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Entrevue exclusive avec Thomas H.Davenport, directeur du AccentureInstitute for Strategic Change,professeur invité à la Tuck School of Business du Dartmouth College,coauteur du best-seller The AttentionEconomy, Understandind the NewCurrency of Business.

Phot

o:

Yves

Lac

ombe

Page 50: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

50 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

A P P R E N D R E À G É R E R L ’ A T T E N T I O N : U N E Q U E S T I O N D E S U R V I E

de répartition de l’attention dans l’entreprise, de déterminer comment celle-ci gère l’attentionde ses employés, et d’analyser l’attention quel’entreprise porte aux consommateurs.

À l’interne d’abordTous les arguments des chercheurs mènent aumême constat : le premier défi de l’entreprise estde gérer l’attention chez elle, auprès de ses cadreset de ses employés. Comment donc capter etretenir l’attention de ses effectifs, pour améliorerla productivité, pour procéder à des change-ments ? Thomas Davenport juge que l’employén’est pas différent du consommateur. « Chaquepersonne a appris à être un consommateurintelligent. Il faut voir ses motivations. Or, tout lemonde se pose implicitement la même question :est-ce que je fais maintenant la meilleureutilisation de mon attention ? Voilà pourquoi denombreux bulletins d’entreprise disparaissent :ils contiennent trop d’informations inutiles. Voilàpourquoi des projets de réingénierie se butent àde vieux réflexes. »

Selon Thomas Davenport, il faut adopter unenouvelle approche de gestion des connaissances,afin de diriger l’attention des employés. Lagestion des connaissances est une idée trèsrécente, qui date à peine du milieu des années 90.Son apparition a été marquée par l’inflationtechnologique. « Au départ, on a mis l’accent surles outils technologiques de gestion de l’infor-mation. Maintenant, on sait qu’il ne suffit pas dese doter d’outils informatiques puissants. Lesentreprises doivent éviter l’obsession technolo-gique pour mettre l’accent sur le facteur humain,la culture et les comportements. Je l’ai souventrépété : toute gestion des connaissances qui cana-lise plus du tiers de son budget dans les techno-logies ne constitue pas une initiative de knowl-edge management, mais un projet technologique.C’est l’être humain qui a raison. Encore ettoujours. N’est-ce pas rassurant ? »

Mais, comment l’être humain doit-il gérer le flotd’information qui lui est accessible? Selon ThomasDavenport, le défi actuel des entreprises estd’intégrer les connaissances au travail. Comment?

La première étape consiste, encore et toujours, à bien former ses employés. C’est sans doute unelapalissade, mais il semble que beaucoup d’entre-prises ne l’ont pas encore intégrée. Selon ThomasDavenport, il s’agit pourtant là d’un préalableessentiel. Si les employés et les cadres ne sontpas en mesure d’optimiser l’utilisation destechnologies à leur disposition et de gérer

efficacement leur environnement d’informationet de connaissances, comment croyez-vous qu’ilpourront maintenir leur attention face au travailet aux objectifs de l’entreprise ? »

Dans The Attention Economy, Thomas Davenportet John C. Beck rapportent les résultats d’unegrande enquête réalisée auprès de plusieursentreprises américaines. Les résultats : la moitiédes répondants n’ont reçu aucune formation pourrechercher et gérer l’information, seulement 18 %ont eu droit à plus de huit heures de cours.

Les communautés de pratique : la vieille approche est dépasséeLes communautés de pratique sont un autre moyende capter et de retenir l’attention des cadres etdes employés. Il s’agit de groupes organiséspermettant d’échanger sur un sujet, un domainede connaissance particulier. Elles visent à captu-rer le savoir tacite d’une organisation. On qualifiede virtuelle une communauté dont la pratiques’exerce sur Internet au moyen d’outils tels quedes collecticiels (logiciels de discussion, decollaboration, etc.) et des technologies de com-munication comme des salles de réunion virtuel-les, la téléconférence et la diffusion intranet à bande étroite.

Mais, là encore, pour que les communautés depratique soient efficaces, il faut en diriger l’évolu-tion. «Dans les premières années, les entreprisesétablissaient des réseaux d’employés et des com-munautés de pratique afin de construire un savoird’entreprise et d’encourager le partage de l’infor-mation. Les cadres et les employés étaient invités àparticiper à ces activités en plus de leur travailrégulier. Ce qui signifiait souvent rester un peuplus tard le soir ou arriver un peu plus tôt le matinpour enrichir la communauté de pratique et enprofiter. Comme résultat, le succès a été marginal.»

Le concept est-il dépassé pour autant ? « Les com-munautés de pratique captent l’attention, lasoutiennent et favorisent le partage du savoir,affirme Thomas Davenport. Elles offrent toujoursdes possibilités très intéressantes. Mais je croisque bon nombre d’entreprises jugent qu’il s’agitd’un concept marginal, et elles y investissent trèspeu. Par exemple, on ne recourt pas assez à desexperts pour soutenir ces communautés. Beau-coup les considèrent comme une des unités del’organisation, sans plus.»

Thomas Davenport suggère une nouvelle appro-che qui intègre le savoir à la pratique, au cœurdes activités quotidiennes. Dans un récent article

Page 51: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

51P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

A P P R E N D R E À G É R E R L ’ A T T E N T I O N : U N E Q U E S T I O N D E S U R V I E

publié dans le Harvard Business Review, il donnel’exemple du modèle appliqué à un grand hôpitalde Boston. « Nous y avons introduit le savoirmédical de pointe dans les emplois profes-sionnels hautement spécialisés – les spécialitésmédicales – afin de le rendre si facilement acces-

sible qu’il est impossible de l’éviter. Aujourd’hui,le problème en médecine, comme dans à peu prèstous les domaines, c’est qu’il y a tellementd’information disponible qu’il est impossiblepour un être humain, même le plus spécialisé, de tout absorber. Les technologies actuelles nous

Pour mesurer le niveau d’attention accordé par lepersonnel d’une entreprise à diverses questions– qu’elles soient ou non directement reliées à sesactivités –, Thomas Davenport et ses collègues ont créé un logiciel baptisé « AttentionScape ».Cet instrument s’utilise comme suit :

1) L’entreprise demande à son personnel, à unemployé ou aux membres d’une équipe detravail de dresser la liste des sujets qui occupentleur attention ;

2) Une liste de six énoncés standardisés est pré-sentée pour chaque sujet, parmi lesquels chaqueemployé doit faire un choix. Par exemple,l’employé doit dire s’il « se concentre vraimentsur telle question et y consacre du temps dequalité » ou s’il croit « qu’il aurait sans doutesouffert de conséquences négatives s’il n’y avaitpas porté attention » ;

3) Lorsque toutes les réponses ont été colligées, lelogiciel AttentionScape produit un schéma quiressemble un peu à celui présenté ci-dessous.

4) Les données recueillies sont ensuite analysées. Par exemple, selon le schéma ci-dessous, les

employés de l’entreprise accordent beaucoupd’attention à la clientèle (le cercle correspondantest grand) ; ils le font également avec un mélangede plaisir et d’agacement (le cercle est relative-ment pâle), et de manière soutenue plutôt queroutinière (voilà une excellente chose : en raisondu caractère changeant des relations fournisseur-client d’une entreprise, celles-ci ne peuvent êtregérées par un pilote automatique). Il n’y a qu’unproblème réel à l’horizon : le personnel s’occupebien des clients parce qu’il sent qu’il n’a pas le choix (le cercle se trouve à l’extrême gauchedu schéma) !

Une fois l’analyse complétée, des solutions sontapportées pour corriger les écarts existant entre lasituation présente et celle qui est souhaitée. Par exemple, le schéma ci-dessous montre bienque les employés consacrent une attention à lafois limitée et machinale à l’évolution de laconcurrence, alors que cette question est jugéecruciale par la direction. Pour favoriser unchangement à cet égard, la direction pourraitdécider de créer un groupe de veilleurs qui seréuniraient une ou deux fois par mois. Ellepourrait aussi récompenser les employés quicontribuent à l’effort de veille.

Comment mesurer le niveau d’attention

Attention soutenue (front of mind)

Attention routinière (back of mind)

Attentioncaptive

Attentionvolontaire

Innovation

Clients

Travail d'équipe

Logistique

Leadership

Environnementconcurrentiel

externe

Questions interpersonnelles

Famille

Sour

ce :

Dav

enp

ort,

The

Att

entio

n Ec

onom

y,

Har

vard

Bus

ines

s Sc

hool

Pre

ss,

2001

, p

. 44

.

Page 52: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

52 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

A P P R E N D R E À G É R E R L ’ A T T E N T I O N : U N E Q U E S T I O N D E S U R V I E

permettent de le faire et de trier l’information utileau moment précis où nous en avons besoin. Ainsi,la gestion du savoir n’est pas une activité séparéequi requiert du temps supplémentaire et unemotivation additionnelle. Elle doit être réellementintégrée aux processus de travail.» Selon ThomasDavenport, cette idée toute simple renferme unpotentiel révolutionnaire, aussi important quel’introduction du juste-à-temps dans l’industrie.Elle tient de la même philosophie. «C’est la mêmeidée appliquée au savoir.»

Et quelles sont les clés de la réussite dans l’applica-tion de cette nouvelle appro-che ? Thomas Davenporten relève six :

• Le système doit être sou-tenu par les travailleursconcernés, hautementspécialisés ; les motiva-tions peuvent être le ris-que d’erreur, le besoin deprécision, etc.

• L’information doit êtrefiable. Seuls les profes-sionnels hautement spé-

cialisés peuvent alimenter et maintenir la ban-que d’information.

• Il faut travailler en priorité sur les processuscritiques où un haut savoir est exigé. Les pro-cessus qui reposent sur une certaine ambiguïtédoivent être évités.

• Afin de justifier le temps et l’argent investisdans une gestion du savoir, il faut développer leréflexe de mesurer.

• Enfin, le système doit laisser la décision finaleà l’expert. Ce serait une erreur d’essayer de sesubstituer au spécialiste, de le retirer du proces-sus de décision. Le système doit plutôt enrichirle rôle de l’expert, devenir un partenaire plutôtqu’un concurrent.

• Le projet doit être monté par les décideurs, quiseront accompagnés par une équipe d’expertstechnologues.

« Il sera toujours tentant d’attribuer aux techno-logies les succès que l’on obtient, rappelleThomas Davenport. Toutefois, il faut le redire, la réussite dépend toujours des gens qui sontderrière les technologies. »

La gestion des connaissances : passez à l’action !Toutes les entreprises n’ont pas à gérer le hautsavoir. Mais toutes doivent gérer le savoir. L’enjeuest de taille puisque le savoir tacite représente

70% de l’avoir intellectuel des organisations. L’au-tre 30%, le savoir explicite, est déjà répertoriédans les processus, les pratiques de gestion, l’infor-mation sur les clients. Comment donc instaurer unbon système de gestion de l’information? Y a-t-il unintérêt réel pour cette idée? Si l’attention est lapremière ressource que les employés peuvent offrirà leur organisation, on pourrait croire que lesentreprises sont fortement intéressées par la gestionde l’information et du savoir.

« Deux choses me surprennent, déclare ThomasDavenport. L’augmentation de l’intérêt pour laquestion et le peu d’actions qui s’ensuit. Il y a jene sais combien de politiques de gestion desconnaissances au sein des organisations, mais ondénote peu d’efforts pour protéger les employéscontre l’information jetable qui leur parvient. »

Comment faire pour empêcher les employés desouffrir d’infobésité ? Dans un premier temps, ilfaut établir sur quels sujets ils concentrent leurattention (voir encadré, page 51). Ensuite, l’entre-prise doit se donner une politique pour capter etmaintenir leur attention lorsque cela comptevraiment. Par exemple, on pourrait choisir,comme certaines sociétés l’ont déjà fait, de bannirou de limiter sérieusement l’utilisation à l’internedu logiciel PowerPoint, pour éviter que lesemployés n’investissent trop de temps dans lacapture de l’attention de leurs collègues ou queles messages de la direction ne souffrent d’uneconcurrence indue. Finalement, les organisationsdoivent recourir aux technologies pour structu-rer, monitorer et protéger l’attention. Une entre-prise devrait-elle mieux contrôler les courriels etle clavardage de ses employés ? « Je sais que bonnombre d’employés apportent du travail à la mai-son, et des activités de la maison au bureau. Maisje persiste à croire qu’il faut protéger les celluleset l’espace des employés engagés dans des acti-vités de travail, tranche Thomas Davenport. C’estcertainement une condition de base pour main-tenir leur attention.»

Pour communiquer avec son personnel, quel mé-dium retient aujourd’hui davantage l’attention ?« Le courriel, évidemment, confirme ThomasDavenport. Il est intéressant de relever les carac-téristiques des messages qui retiennent davantagel’attention : la première, c’est la personnalisationdu message. La seconde, c’est la concision.Viennent ensuite l’émotion – négative ou positive –et la fiabilité de la source. »

Derrière les technologies, il y a toujours l’êtrehumain, disions-nous... ■

« Il faut apprendre à gérer l’attention,une ressourcedevenue très rare.Les entreprises qui y parviennentréussissent, les autresdisparaissent. »

– Thomas Davenport

Page 53: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

53P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Les PME québécoises sont-elles prêtes à relever le défi des affaires électroniques ? Même si certaines

d’entre elles gagneraient à être plus proactives, bon nombre ont déjà effectué le virage électronique,

soit de leur propre chef, soit sous la contrainte de leurs plus importants clients. Toutefois,

une question de premier plan demeure : le modèle d’affaires électroniques qu’on leur présente

s’applique-t-il vraiment à leur réalité ? Cinq fournisseurs québécois exposent leur point de vue.

G R A N D E E N T R E P R I S E E T F O U R N I S S E U R S

Un modèle d’affairesélectroniques encore à définir

PA R Y A N B A R C E L O

L e principal malentendu tient à un décalage quisubsiste entre un modèle d’affaires électroni-

ques emprunté au milieu des grandes sociétésinternationales et celui qui s’applique à la con-dition particulière des entreprises québécoises.Louis A. Lefebvre, chercheur associé au CEFRIOet directeur du Centre ePoly, un des plus impor-tants laboratoires de modélisation et de simu-lation de commerce interentreprise en Amériquedu Nord, nous donne une idée de ce modèleencore peu adopté par les PME d’ici.

Selon ce modèle, le client se trouve au pointd’aboutissement d’une longue chaîne d’approvi-sionnement qui, idéalement, est entièrementintégrée de façon à répondre à la moindre de sesexigences. Dell Computer est une des entreprisesqui incarnent le mieux ce modèle. Au moment oùle client commande son ordinateur sur Internet,l’appareil n’est pas encore fabriqué. La com-mande met en branle une série de déclencheurssur une chaîne d’approvisionnement, tous syn-chronisés de façon à assembler l’ordinateurdésiré et à l’expédier en moins de 24 heures. Avec

son modèle, Dell a réussi à faire en sorte que leclient paye à l’avance, en ligne, un ordinateur quin’est pas encore fabriqué. Le rêve de tout contrô-leur financier !

Une telle chaîne se doit évidemment d’être totale-ment informatisée. Pour satisfaire à la demande,Dell doit pouvoir se tourner vers ses fournisseurset commander auprès d’eux en juste-à-temps lespièces dont elle a besoin. À leur tour, ces derniersdoivent pouvoir compter sur un approvisionne-ment serré auprès de leurs propres distributeurs.Tel est du moins le modèle conceptuel.

Les fournisseurs qui ne veulent pas entretenirun inventaire coûteux doivent avoir mis enplace des systèmes sophistiqués de gestion deproduction, de type ERP (Enterprise ResourcePlanning). « Cet acteur, en recevant les com-mandes, doit savoir s’il peut produire et livrerdans les délais, fait valoir Louis A. Lefebvre.Pour ce faire, il faut que son plancher d’usinesoit intégré à ses systèmes d’affaires électro-niques. Mais combien d’entreprises peuvent à cejour faire ce lien entre le commerce électroniqueet leur plancher ? »

Page 54: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

54 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

Du rêve à la réalitéEncore très peu et ce, tant du côté de la petiteentreprise que de la grande. À preuve, Mesotec,l’une des PME québécoises les plus citées enexemple en matière d’affaires électroniques,dispose d’un système de gestion intégré deproduction de type ERP, mais aucun lien ne reliecelui-ci aux outils d’échange électronique.

Pourquoi ? Parce que planifier la production parinformatique relèverait de la folie pour ce fabri-cant sherbrookois de composants aéronautiqueset électroniques. « Nous sommes une entreprisede conception sur mesure, explique AlexandraLebel, directrice des services administratifs et des systèmes d’information. Quand nous faisons 50 pièces d’une série, c’est beau. L’ordonnance-ment est donc de nature artisanale. À chaquenouvelle commande, il faut étudier le plan deproduction. Notre marque de commerce est lasouplesse. Nous ne pouvons pas dépendre desystèmes qui rendraient notre fonctionnementplus rigide. Nous passerions plus de temps à lamodification des systèmes qu’à la planification. »

Et pourtant, Mesotec compte parmi les PME lesplus branchées du Québec. Elle exploite à fondles outils de communication électronique avecune demi-douzaine de grands clients, notammentGeneral Electric, IBM, Bombardier et Pratt &Whitney. Ainsi, elle reçoit ses bons de commandepar courriel, y apporte des modifications, rem-porte des contrats par enchères électroniques,participe à des séances de travail collaboratif enligne pour des travaux de design et d’ingénierie.Une foule de formulaires administratifs sonttraités par Internet, d’autant plus que l’entrepriseutilise les outils de l’EDI (échange de donnéesinformatisé) depuis une dizaine d’années.

Évidemment, l’impact sur l’entreprise est consi-dérable. Par exemple, les délais de réponse sesont beaucoup resserrés. « Auparavant, quand on

recevait les dessins par la poste, les délais étaientplus extensibles, rappelle Alexandra Lebel. À présent, il est certain que les clients s’attendentà des résultats plus rapides. »

Ainsi, l’adoption de ces nouvelles façons de fairelui a, entres autres, valu d’être présélectionnéepar General Electric pour participer à des encansélectroniques à huis clos. Désormais, les concur-rents de Mesotec viennent du Mexique, d’Asie,d’Europe et des États-Unis. Son carnet de com-mandes a augmenté de 25 %. Et pourtant, lescoûts associés au virage électronique ont étéminimes. Comme le résume Alexandra Lebel, « ila suffi d’aller chercher les documents Internetpertinents sur les sites de nos clients. Notre seulinvestissement, c’est un peu de notre temps pourfaire l’apprentissage des outils. »

Les coûts d’apprentissageCette histoire se répète chez bon nombre de PMEqui ont entrepris le virage électronique. L’inves-tissement requis est en général minime, même s’ilfaut parfois faire un effort supplémentaire,surtout au chapitre de l’apprentissage. C’est le casde Definiti Laser, un recycleur et vendeur decartouches d’imprimantes situé à Cornwall, enOntario. Afin de participer au portail d’appro-visionnement électronique Procuron, l’entreprisea dû investir quelques centaines d’heures pourmettre en format électronique son cataloguebilingue d’une centaine de produits. Mais aucunedépense n’a été requise pour l’infrastructured’ordinateurs et de logiciels, le tout étant fournipar Procuron.

Caristrap, une PME de Laval spécialisée dans la conception et la mise en marché de systèmesd’attaches non métalliques, est passée au com-merce électronique après que Home Depot l’aitinformée que l’octroi des contrats se ferait désor-mais par enchère inversée sur Internet. Contrai-rement à l’encan classique où le plus haut prix

Louis A. Lefebvre, directeur du Centre ePoly

André Pelletier, vice-président technologies, Premier Horticulture

Page 55: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

55P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G R A N D E E N T R E P R I S E E T F O U R N I S S E U R S : U N M O D È L E D ’ A F F A I R E S É L E C T R O N I Q U E S E N C O R E À D É F I N I R

Ensemble, éclairons le chemin

Les organisations les plus compétitives sont celles qui agissent en éclaireurs, découvrant de nouvelles possibilités,de nouveaux marchés.

Partenaire de ces entreprises, l'UniversitéLaval contribue non seulement à la formation de la main-d'œuvre qualifiéedont elles ont besoin maisaussi à l'avancement desconnaissances surlesquelles elles appuient leur développement.

Pour un partenariat

éclairé avec l’Université Laval,

composez le (418) 656-2053

ou visitez notre site www.ulaval.ca

Ensemble, éclairons le chemin

l’emporte, dans une enchère inversée, la plus bassesoumission gagne.

Là encore, les outils du commerce électronique sontminimes (un simple ordinateur, un lien Internet etquelques formulaires électroniques), et aucun lien neles rattache aux systèmes de production. Par contre,pour répondre à l’invitation de Home Depot, l’entre-prise a dû consacrer de nombreuses heures nonseulement à se familiariser au concept, mais aussi àétudier le marché et à négocier de meilleurs prix avec ses fournisseurs.

Toutefois, la proposition de Home Depot contenait à la fois un bâton, une carotte et une pilule. Le bâton,c’était qu’un échec à l’enchère inversée entraînerait laperte de la clientèle de Home Depot, dont Caristrapcomblait à 60 % les besoins nord-américains enattaches. La carotte : le succès à l’enchère faisait deCaristrap le distributeur exclusif pour les 1 200 suc-

cursales nord-américaines de Home Depot, ce qui n’estpas peu dire.

Caristrap a remporté l’enchère, mais elle doit désor-mais avaler sa pilule. L’enchère inversée se répétantchaque année, l’entreprise risque de perdre son plusimportant client. « Nous avons décroché le contrat enmai 2001 et en novembre, nous étions encore en traind’intégrer les technologies exigées par Home Depot,déclare Audrey Karass, présidente de Caristrap. Pouren valoir la peine, ces contrats devraient s’échelonnersur deux ans au moins. »

Heureusement, l’approche de Home Depot n’est pasuniverselle. Plusieurs donneurs d’ordres trouvent plusrentable d’établir une relation à long terme avec leursfournisseurs. « Si on entre dans un échange électro-nique en pensant qu’on pourra donner une volée auxfournisseurs, déclare Bruce MacCoubrey, chef desapprovisionnements chez Air Canada, on ne survivra

Page 56: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

56 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

pas très long-temps. La réduc-tion des coûtsd ’ a c q u i s i t i o nn’est pas le butpremier. C’est unavantage qu’onne peut tirer quedans un premiertour de piste.»

Premier Horticul-ture, un impor-tant acteur dud o m a i n e d e s

substrats de culture dans le secteur horticole, est de la même école. Quand la PME a mis enplace avec ses distributeurs un site d’échangeélectronique où ceux-ci pouvaient consulter l’étatdes commandes en cours, elle a laissé beaucoupde temps à ses agents pour s’adapter et intégrer la nouvelle technologie à leur rythme. « Laconversion de tous les agents nous a pris deuxans, rapporte André Pelletier, vice-présidenttechnologies, chez Premier Horticulture.Certaines personnes plus âgées ont mis plus detemps à faire le transfert. Mais ceux qui y ont adhéré se sont vite rendu compte qu’ilspouvaient passer plus de temps avec les clients. Le système les a libérés des appels de plaintes de la part des clients et des demandes concernantl’état des commandes. »

Une question de rythmeMême si la plupart du temps, les mégasociétésdonnent le ton au changement, il arrive parfoisque les PME soient plus rapides à adopter lesnouvelles technologies que leurs grands clients.L’expérience de VA TECH, un fabricant detransformateurs électriques de Trois-Rivières, estfort éloquente à ce sujet. Depuis quelques années,l’usine a implanté sur son plancher de produc-tion le système de gestion intégré MISysm, reliéau système comptable ACCPACC. Cet effortremarquable pour une PME d’environ 80 em-ployés avait pour but de permettre à VA TECH delivrer un transformateur en quatre semaines aulieu des 12 à 16 semaines qui constituent le délainormal dans l’industrie.

En août 2001, l’entreprise s’est jointe au trèssélect club Pantelos, un marché électronique quiregroupe une vingtaine de grands donneursd’ordres dans le secteur de l’électricité aux États-Unis. Leur force d’achat représente environ 30 %des biens et services vendus dans un marchéévalué à 130 milliards de dollars par an.

Or, ceci n’a apporté aucun résultat. « Jusqu’ici,on n’a récolté aucun avantage tangible dePantelos », affirme Gilbert D’Amours, vice-président et directeur général de VA TECH.Cette PME devait participer à des encansinversés sur Internet ; il n’en fut rien. Elles’attendait à élargir sa liste de clients ; toujoursrien. Elle espérait surtout tirer profit de sonavantage concurrentiel que représente sa capa-cité de livrer en quatre semaines, avantagequ’elle utilise avec succès au Canada. Rien n’y fît : « On n’a pas encore rencontré de clientaméricain pour qui cet avantage soit impor-tant », précise Gilbert D’Amours. Toute l’organi-sation de commandes et d’activités des entre-prises d’électricité américaines fonctionne àpartir du modèle traditionnel de livraison en 16 semaines ; la distinction de VA TECH n’estdonc pas essentielle pour ces entreprises.

Mais VA TECH n’a pas pour autant renoncé.« Nous demeurons enthousiastes, mais nous ajou-tons une plus forte dose de réalisme à nos actions,déclare Gilbert D’Amours. Le commerce électro-nique reste une tendance lourde. C’est une chosequi se réalisera, mais cela prendra plus de temps.»

L’expérience de VA TECH jette un éclairage fortdifférent sur la problématique des affaires élec-troniques telle qu’on la formule habituellementau sujet des PME. Comparée au modèle concep-tuel qu’expose Louis A. Lefebvre, il est certainque la feuille de route de la PME courante posedéfinitivement un problème.

Toutefois, la feuille de route des locomotiveshabituelles du commerce électronique – lesgrandes entreprises – n’est pas encore reluisantenon plus. Au début de 2001, dans un rapport surla situation du commerce électronique inter-entreprises, Forrester Research faisait état d’unesituation fort décevante. On apprenait que 82 %des dirigeants de grandes entreprises jugeaientque les affaires électroniques deviendraientcertes une partie importante de leurs activités, mais dans quelques années seulement. Une faibleproportion, soit 16 % d’entre eux, disait avoir misau point une stratégie pour effectuer les chan-gements nécessaires.

Or, si les grandes entreprises ne bougent pas, il est difficile d’en demander davantage aux PME qui, dans la plupart des cas, sont à leurremorque. Là encore, l’expérience de VA TECHest passablement éloquente. « Nous travaillonsavec des clients susceptibles de fonctionner enmode juste-à-temps, dit Gilbert D’Amours. Mais

Audrey Karass,présidente de Caristrap

Page 57: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

De l’administration au service à la clientèle, les affaires électroniquessont en train de changer nos façons de faire. Spécialement élaboré pourvous, le nouveau portail PME Québeclic vous propose une informationde pointe et des outils pratiques en matière de :

• Plan d’affaires électroniques• Systèmes de sous-traitance• Stratégie internationale• CRM (Gestion client)• Études de marché• Sites Web • Veilles• Systèmes d’approvisionnement• E-collaboration• Enchères électroniques• Portails• Hébergement• Sécurité et confidentialité

Les affaires électroniques sont incontournables pour demeurercompétitif. Notre portail l’est tout autant pour développer ou confirmervotre stratégie d’affaires électroniques !

Parce que les affaires électroniques sont aussi vos affaires

Le portail québécois des affaires électroniques

Page 58: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

58 P E R S P E C T I V E S 2 0 0 3

G R A N D E E N T R E P R I S E E T F O U R N I S S E U R S : U N M O D È L E D ’ A F F A I R E S É L E C T R O N I Q U E S E N C O R E À D É F I N I R

l’industrie est habituée à des approches plustraditionnelles et c’est très, très lent…»

Dans une grande mesure, VA TECH serait capabled’appliquer le modèle avancé par le professeurLouis A. Lefebvre. Elle dispose d’un systèmesophistiqué de contrôle de la production et pour-rait faire les liens nécessaires entre ce système etses outils de commerce électronique. Maisl’industrie dans laquelle elle œuvre n’est pasencore prête.

Des preuves à faire Et VA TECH n’est pas une exception. Dans laplupart des industries, le modèle transactionneln’a pas encore donné de résultats probants. Dansl’industrie automobile, par exemple, les activitésdes grands marchés électroniques à la Covisintrestent limitées et la preuve du concept reste àfaire. Il n’y a pour ainsi dire que dans les indus-tries de pointe, surtout celles de l’informatique etdes télécommunications, où des chaînes inté-grées d’approvisionnement électroniques ont étémises en place avec divers degrés de succès.

Même chez Dell, dont on a tant vanté la perfor-mance, le modèle demeure illusoire en grandepartie. Dell réussit à produire en juste-à-temps lesordinateurs commandés en ligne, mais c’est parcequ’elle a simplement transféré la note desinventaires à ses fournisseurs. Pour alimenter leschaînes de production de Dell, les fournisseurssont obligés de parquer des remorques pleines depièces et de composantes autour de leurs usinesd’assemblage. Une certaine optimisation de lachaîne d’approvisionnement a été réalisée, maisil y a encore bien des lacunes.

Pour l’instant, le modèle transactionnel du com-merce électronique reste une promesse, trèsattrayante sans doute, mais tout de même unepromesse. Il y a encore un vaste travail de détailsorganisationnels et de procédures à homogénéi-ser, de standards et de nomenclatures à norma-liser, et de protocoles informatiques à établir.

Le cas de RONA et de son aventure dans l’appro-visionnement électronique (MRO, pour Mainte-nance, Repair and Operation) en collaborationavec Mediagrif est également révélateur. En 2001,son président et chef de la direction, RobertDutton, révélait à la presse qu’il espérait réaliserdes ventes de 400 millions de dollars dès 2003grâce à cette initiative. Nous sommes toutefoisencore très loin du compte. « Nous avons réussiauprès de quelques entreprises qui utilisent lesystème, révèle Marc Dufresne, premier vice-

président, achats et logistiques, chez RONA, mais c’est marginal. Nous nous butons souvent àdes problèmes informatiques : chez l’un, on a affai-re à un système SAP, chez l’autre, à un systèmemaison. Nous voulons passer des commandesdirectes, et il y a continuellement des problèmes. »

Les concepteurs du commerce électronique ontoublié dans leurs projections quelques détails dela réalité. Par exemple, quand un client com-mande 100 « unités » d’un article, comme des visà écrous, veut-il dire 100 vis, 100 boîtes de vis ou 100 caisses de boîtes de vis ? « En matière decatalogage, l’exercice requiert un immense effortde standardisation », constate Marc Dufresne.

Or, les réseaux d’approvisionnement électroniqueétaient censés être la couche la plus facile à réali-ser des affaires électroniques. Et voilà que surgitla problématique imprévue des nomenclatures.Imaginons à présent les problèmes qui peuventcouver dans des systèmes d’échanges électro-niques où il faut coordonner les opérations dedizaines, voire de centaines de clients, de four-nisseurs et de sous-traitants !

Transactionnel par rapport à communicationnelEst-ce à dire que le domaine du commerce élec-tronique est complètement bloqué et qu’il n’y arien à faire ? Certainement pas. Mais pour y voirclair, il faut ajuster sa lunette conceptuelle etconstater qu’en attendant l’avènement du grandmodèle transactionnel, il en existe un autre, plusmodeste, mais dont les adeptes se multiplient,particulièrement dans les PME : le modèle com-municationnel, qu’a adopté Mesotec.

Pour l’heure, ce modèle convient mieux à ses besoins,davantage d’ordre informationnel que transaction-nel. Très fréquemment, la petite et moyenne entre-prise entretient une relation personnalisée avecquelques clients, relation pour laquelle le courriel etquelques formulaires électroniques administratifscalqués sur l’ÉDI (échange de données informa-tisées) constituent des outils suffisants. Ces outilsfont largement l’affaire pour échanger des plans de produits développés très souvent sur mesure etpour les échanges administratifs courants.

Ainsi, bien que les affaires électroniques n’aientpas radicalement bouleversé la planète comme onle prédisait lorsque les marchés boursiers nejuraient que par les technologies, il n’en demeurepas moins qu’elles s’intègrent peu à peu au cœurde nos entreprises et transforment définitivementleurs façons de faire. ■

Page 59: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

pour les

entreprises d’ici

Principal partenaire financier du CEFRIO, le gouvernement du

Québec est fier d’appuyer cet organisme qui, par ses projets de

recherche et de veille, assure le développement et la croissance

des affaires électroniques essentielles à la compétitivité de nos

entreprises.

• Ministère des Finances, de l’Économie et de la Recherche

• Ministère de la Culture et des Communications

Page 60: Quelles sont les grandes préoccupations des décideurs

_la force de l’engagement

gouvernementsservices financiers services de santétélécommunicationsmanufacturier/

distribution/détail

services publics

et énergie

La maîtrise du savoir

Le leader canadien de services en TI de calibre mondial

Certifiée ISO 9001 services-conseils/intégration de systèmes/gestion de fonctions informatiques et d’affaires/tsx:gib.a/nyse:gib/www.cgi.com