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Rapport de synthèse sur le projet « Valorisation de l’étude relative à la prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence- Alpes-Côte d’Azur » Rapport final BRGM/RP-59324-FR Décembre 2010

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Rapport de synthèse sur le projet « Valorisation de l’étude relative à la prise

en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans

l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte d’Azur »

Rapport final

BRGM/RP-59324-FR Décembre 2010

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Rapport de synthèse sur le projet « Valorisation de l’étude relative à la prise en compte de la problématique des risques liés

aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte d’Azur »

Rapport final

BRGM/RP-59324-FR Décembre 2010

Étude réalisée dans le cadre des projets de Service public du BRGM 2010

N. Marçot

Vérificateur : Original signé par Alexis Stepanian

Date : 18 janvier 2011

Approbateur : Original signé par David Dessandier

Date : 18 janvier 2011

En l’absence de signature, notamment pour les rapports diffusés en version numérique,l’original signé est disponible aux Archives du BRGM.

Le système de management de la qualité du BRGM est certifié AFAQ ISO 9001:2008.

I

M 003 - AVRIL 05

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Mots clés : Falaises côtières, érosion, aléa, risques, vulnérabilité, perception, ateliers, colloque, EUCC, Carry-le-Rouet, Marseille, Bouches-du-Rhône, Provence-Alpes-Côte d’Azur

En bibliographie, ce rapport sera cité de la façon suivante :

N. Marçot (2010) - Rapport de synthèse sur le projet « Valorisation de l’étude relative à la prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence Alpes Côte d’Azur ». Rapport final BRGM/RP-59324-FR - 32 pages, 2 Ill. et 2 An. © BRGM, 2010, ce document ne peut être reproduit en totalité ou en partie sans l’autorisation expresse du BRGM.

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Synthèse

n prolongement du projet réalisé entre 2004 et 2008 concernant la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en région

Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Conseil Régional et la DREAL. ont souhaité communiquer et mieux valoriser les résultats obtenus auprès des différents acteurs de la gestion de ces territoires littoraux. Pour ce faire, un projet comportant deux volets a été mené à bien :

- un 1er volet concernant la réalisation d’ateliers de terrain co-organisés avec l’association EUCC-France. Ces ateliers se sont déroulés les 1er et 2 avril 2009 ;

- un 2ème volet concernant l’organisation d’un colloque thématique sur le sujet de l’érosion des côtes rocheuses en PACA réunissant les acteurs concernés par la problématique de l’ensemble du littoral régional. Ce colloque s’est déroulé le 2 décembre 2010 à Marseille.

Les ateliers ont réunis sur les deux journées 71 personnes, le compte-rendu ainsi que la liste des participants sont disponibles en Annexe 1 du présent rapport. Ils ont permis de réunir élus, gestionnaires et scientifiques autour de la problématique de l’érosion des falaises côtières sur la commune littorale de Carry-le-Rouet (Bouches-du-Rhône) confrontée à ce sujet, en présentant le contexte local, et en discutant sur les outils de gestion existants à l’heure actuelle.

La journée de colloque a réuni près de 110 personnes, le compte-rendu ainsi que la liste des participants sont joints en Annexe 2 du présent rapport. De manière générale, cette journée a permis de faire un état des lieux sur la connaissance en matière d’érosion des falaises côtières, à la fois en région PACA mais également au travers de retours d’expériences d’autres régions de France (Normandie, Aquitaine) et d’Italie, en abordant notamment les questions de responsabilités et de gestion intégrée des zones côtières, ainsi que la notion de perception du risque par les élus et le citoyen.

En résumé, ce projet de valorisation a donc permis d’une part, de faire connaître le travail entrepris par le BRGM, le Conseil Régional et la DREAL Provence Alpes Côte d’Azur à l’échelle régionale, sur l’état de l’érosion des falaises côtières en PACA, et d’autre part, de s’informer sur d’autres contextes grâce aux retours d’expériences d’autres régions françaises.

Il ouvre également des perspectives sur la nécessité de mener des travaux de recherche sur la compréhension des mécanismes multi-temporels et multi-échelles d’évolution des falaises littorales, dans les régions françaises métropolitaines dont la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

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Sommaire

1.  Contexte et objectifs ................................................................................................ 7 

1.1. OBJECTIFS ET BESOINS ................................................................................... 7 

2.  Ateliers de terrain EUCC : 1er et 2 avril 2009 sur la Côte bleue ............................ 9 

2.1. OBJECTIFS ......................................................................................................... 9 

2.2. PROGRAMME DES ATELIERS ........................................................................ 10 

2.3. CONCLUSIONS................................................................................................. 12 

3.  Colloque « Instabilités de falaises côtières : pour une meilleure gestion des risques » : 2 décembre 2010 à Marseille .............................................................. 13 

3.1. OBJECTIFS ....................................................................................................... 13 

3.2. PROGRAMME DU COLLOQUE ........................................................................ 13 

3.3. CONCLUSIONS................................................................................................. 15 

4.  Conclusion et perspectives ................................................................................... 19 

5.  Bibliographie ........................................................................................................... 21 

Liste des illustrations

Illustration 1 : Localsiation des sites d’observation ..................................................................... 11 Illustration 2 : Journée de colloque Falaises côtières à l’Hôtel de Région .................................. 16

Liste des annexes

Annexe 1 Compte rendu des ateliers EUCC-France des 1er et 2 avril 2009 à Carry-le-Rouet (13) et liste des participants 

Annexe 2 Actes du colloque « Instabilités de falaises côtières : pour une meilleure gestion des risques » du 2 décembre 2010 à l’Hôtel de Région à Marseille 

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1. Contexte et objectifs

1.1. OBJECTIFS ET BESOINS

En prolongement du projet réalisé entre 2004 et 2008 concernant la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le Conseil Régional et la DREAL ont souhaité communiquer et mieux valoriser les résultats obtenus auprès des différents acteurs de la gestion de ces territoires littoraux.Contexte régional et interêts du projet

Le littoral méditerranéen, et particulièrement celui de la Région Provence-Alpes-Côte d'Azur, représente un patrimoine naturel et économique très important. La densité de population y est très forte et la zone côtière est le siège d'une très importante activité touristique et donc économique.

A l’exception de la Camargue, zone sableuse, le littoral de PACA se singularise par des côtes rocheuses qui impliquent une problématique spécifique en terme de risques liés à leur, plus ou moins grande, stabilité.

La stabilité des falaises et les risques d'écroulement et de chutes de blocs sont liés à la nature des roches qui les composent ainsi qu'à leur morphologie, leur structuration tectonique et à la protection de leur base contre l’action de sape des houles déferlantes.

Dans les zones très instables où les enjeux sont importants, des travaux de purge ou de confortement sont généralement programmés. Ces études et travaux spécifiques sont réalisés, au cas par cas, en fonction des situations de danger.

Par ailleurs, il existe aussi beaucoup de zones instables, sans infrastructure ou habitat particulier, mais qui font l'objet d'une fréquentation importante en période estivale (plages et circuits de randonnée). Ces falaises ne font pas l'objet de travaux particuliers, et, dans le meilleur des cas, les zones à risques sont interdites.

Au terme de l’étude sur la prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte d’Azur une qualification de l’aléa « instabilités de falaises » pour chacun des types de mouvements de terrain, a été réalisée sur l’ensemble du linéaire côtier (rivages du continent, de l’étang de Berre et des îles habitées de la région PACA). La deuxième phase d’étude a permis de hiérarchiser le risque « instabilités de falaises côtières » sur le littoral à partir d’un inventaire des enjeux et de leur croisement avec la caractérisation et la cartographie de l’aléa. Enfin, la troisième année d’étude a mis en évidence des sites particulièrement sensibles, sur lesquels des schémas de type d’aménagement ont été proposés, et une méthodologie d’approche de gestion du risque à l’échelle d’une commune littorale a été abordée, en tenant compte notamment de la perception du risque par les usagers.

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Afin de mieux valoriser l’ensemble des résultats obtenus, un projet comportant deux volets a été mené à bien :

- un 1er volet concernant la réalisation d’ateliers de terrain co-organisés avec l’association EUCC-France. Ces ateliers se sont déroulés les 1er et 2 avril 2009 ;

- un 2ème volet concernant l’organisation d’un colloque thématique sur le sujet de l’érosion des côtes rocheuses en PACA réunissant les acteurs concernés par la problématique de l’ensemble du littoral régional. Ce colloque s’est déroulé le 2 décembre 2010 à Marseille.

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2. Ateliers de terrain EUCC : 1er et 2 avril 2009 sur la Côte bleue

2.1. OBJECTIFS

Le premier volet du projet consistait à l’organisation d’ateliers de terrain qui se sont tenus les 1er et 2 avril 2009, organisés conjointement avec l’association EUCC-France (European Coastal and Marine Union)1.

Cette association (loi 1901) entend contribuer à une gestion raisonnée des milieux littoraux qui tient compte des dynamiques naturelles, des pratiques sociales et des enjeux économiques. Ces membres sont des scientifiques, des gestionnaires, mais également des institutions comme le Conservatoire du Littoral, l’Office National des Forêts, l'EID (Entente Interdépartementale de Démoustication), le Conseil général de l’Hérault ou l'ANEL (Association Nationale des Elus du Littoral).

L'organisation d'ateliers sur le terrain fait l'originalité de la branche française de l'EUCC, dont l'objectif est de réunir scientifiques et gestionnaires dans une dynamique commune. Ces ateliers de terrain d'une durée d’une journée et demie ont lieu deux fois par an.

La première journée de ces ateliers est en général consacrée à des visites détaillées de sites littoraux, organisée autour de problématiques de gestion intégrée des zones côtières. Le lendemain, une demi-journée est consacrée à des séances de discussion entre les gestionnaires de ces sites et les participants, y compris les élus locaux, pour éclairer les points de vue, débattre sur les solutions de gestion et d’aménagement présentées sur le terrain, et aboutir éventuellement à la formulation de conseils.

Des ateliers ont ainsi été consacrés ces dernières années à différents sujets tels que la gestion de l’érosion des plages (Oléron, Chatellaillon, Vias, Sète, Capbreton-Anglet, Wissant-Hardelot) ; au recul des falaises côtières (Dieppe et Guéthary) ; à l’entretien et la réhabilitation des massifs dunaires (Olonne, Merlimont, Sérignan) ; à la gestion des zones humides (pointe d’Arçay, salins d’Hyères). D’autres sont prévus sur la gestion des risques en zone urbaine et sur les stratégies d’aménagement concerté.

L’atelier de Carry-le-Rouet avait pour thème principal l’érosion des falaises côtières, mais d’autres thématiques comme la qualité des eaux littorales, la gestion marine et portuaire de la Côte Bleue ont été abordées au cours de ces journées. Réalisé en collaboration avec la commune de Carry-le-Rouet, le BRGM, le Conseil Régional PACA et la DREAL PACA, cet atelier a réuni plus d’une soixantaine de participants.

1 http://www.eucc.nl/fr/

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La journée de terrain avait pour objectif de réunir élus, gestionnaires et scientifiques autour d’une problématique commune, au travers de l’examen de 6 sites présélectionnés, et de présenter aux participants la problématique du risque « instabilités de falaises côtières », et les modes de gestions associés à ces espaces littoraux soumis au risque, mais également à d’autres problématiques telles que la qualité des eaux littorales et la préservation du milieu.

Le fort intérêt de la commune de Carry-le-Rouet sur le sujet, notamment du fait d’éboulements récents durant l’hiver 2008 ayant occasionné des dommages aux riverains, a également été un des points forts à l’origine de l’organisation de cet événement.

Le public visé pour ces ateliers pratiques regroupait les membres de l’association EUCC-France cités ci-dessus, les acteurs locaux agissant dans la gestion intégrée du littoral, les collectivités concernées et Services de l’Etat, et enfin les scientifiques travaillant sur la problématique.

2.2. PROGRAMME DES ATELIERS

L’EUCC-France a choisi en 2009 de proposer un atelier de terrain sur la Côte Bleue dans les Bouches-du-Rhône, en axant les journées sur la problématique « instabilités de falaises côtières » principalement sur la commune de Carry-le-Rouet, où les participants ont été reçus par le Maire M. Pene, ainsi que sur la commune du Rove où le Maire M. Grosso a accueilli également les participants.

D’autres sujets comme la gestion portuaire, le dragage des sédiments, le domaine du Conservatoire, la gestion intégrée des zones côtières et la qualité des eaux littorales ont été abordés au cours de ces journées.

Les sites suivants (Illustration 1) ont été choisis à la fois pour leur intérêt technique et scientifique, mais également afin de pouvoir observer des panoramas plus généraux montrant la géomorphologie des sites alentours.

Les différents sites et les sujets traités ont été :

Site 1a : Pointe du Moulin - Introduction générale, présentation des journées - Etude BRGM sur la problématique « Falaises Côtières » sur le littoral de la

région PACA, cas de Carry-le-Rouet - Présentation de la géologie du site et des instabilités

Site 1b : Sentier du lézard - Présentation des résultats de l’enquête de perception du risque par les usagers

(BRGM) - Etude CETE sur l’érosion marine en 2007 - Discussions autour de la problématique littorale : sentier du littoral, loi littorale,

référence à l’étude CETE sur la Vesse… - Instabilités sur le talus Ouest du Port de Carry-le-Rouet

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Illustration 1 :Localisation des sites d’observation

Site 2 : Port de Carry-le-Rouet - Géologie et instabilités de falaises (éboulement de février 2008) - Mode de gestion du site par la commune de Carry-le-Rouet (études

géotechniques et travaux de protection) - Etude des schémas de dragage portuaire (étude CETMEF pour MPM)

Site 3 : Calanque du Cap Rousset - Géologie et instabilités de falaises (aménagements récents) - le Parc Marin, modèle de gestion et réserve naturelle - Présentation des missions de la cellule qualité des eaux littorales de la DDTM

Site 4 : Port du Rouet - Histoire de l’Anse du Rouet - Géologie et instabilités de falaises (éboulement de 2005) - Intervention de la commune de Carry-le-Rouet sur les choix de gestion du site - Présentation des études géotechniques et travaux de confortement réalisés et

engagés - Intervention du BRGM sur l’utilisation du scan laser pour l’étude d’une falaise

littorale (ex : Falaise du Rouet)

Site 5 : Chapelle du Rouet - Géologie / géomorphologie et instabilités de falaises - L’éboulement de Barqueroute en février 2008 et travaux envisagés - Le problème de l’urbanisation du littoral

Site 6 : le Rove : domaine du Conservatoire du Littoral - Gestion partenariale du Conservatoire du littoral et de l’ONF

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2.3. CONCLUSIONS

Ces ateliers ont réunis sur les deux journées plus d’une soixantaine de personnes, le compte-rendu ainsi que la liste des participants sont disponibles en Annexe 1 du présent rapport.

Ils ont permis de réunir élus, gestionnaires et scientifiques autour de la problématique de l’érosion des falaises côtières sur une commune littorale des Bouches-du-Rhône confrontée à ce sujet, en présentant le contexte local, et en discutant sur les outils de gestion existant à l’heure actuelle. La demi-journée de discussion a permis un échange entre les gestionnaires de ces sites et les participants, y compris les élus locaux, pour éclairer les points de vue, débattre sur les solutions de gestion et d’aménagement présentées sur le terrain la veille, et aboutir à la formulation de conseils et de piste de réflexion, comme par exemple le recul stratégique, qui a été abordé lors des débats.

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3. Colloque « Instabilités de falaises côtières : pour une meilleure gestion des risques » :

2 décembre 2010 à Marseille

3.1. OBJECTIFS

Le deuxième volet du projet de valorisation de l’étude falaises côtières a été l’organisation d’un colloque intitulé : « Instabilités de falaises côtières : pour une meilleure gestion des risques ». Cette journée s’est tenue le 2 décembre 2010 à l’Hôtel de Région à Marseille et a réuni près de 110 personnes.

Les objectifs du colloque étaient :

• d’identifier l’état des connaissances et la prise de conscience de la problématique ;

• d’engager des échanges entre élus, gestionnaires et scientifiques ; • d’engager une meilleure prise en compte du risque « instabilités » dans

l’aménagement du territoire littoral ; • d’évaluer la responsabilité des maires et celle des usagers ; • de faire un retour d’expérience sur des problématiques similaires en dehors de

la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et dans les pays transfrontaliers ; • d’étudier les stratégies d’adaptation possibles : Gestion intégrée des zones

côtières (GIZC), réglementation (type Plan de Prévention des Risques - PPR…), recul stratégique, information et formation du public, suivi, instrumentation … ;

• d’évaluer quelle est réellement la perception du risque aujourd’hui sur le littoral.

3.2. PROGRAMME DU COLLOQUE

Le colloque s’est déroulé sur une journée selon le programme suivant :

9h00 Accueil des participants

9h30 Ouverture de la journée

Cécile Helle - Vice présidente déléguée à l’aménagement des territoires, politiques territoriales et contractuelles, Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur Thibaud Normand - DREAL PACA Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement Provence-Alpes-Côte d’Azur

9h45 Le littoral de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, un territoire à enjeux

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Nancy Spinousa - Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur – Service Risques Majeurs Nathalie Quelin - DREAL PACA Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement Provence-Alpes-Côte d’Azur – Service Biodiversité, Eau et Paysages

10h05 La problématique des risques liés aux falaises côtières en Provence-Alpes-Côte d’Azur

Nathalie Marçot - BRGM Service Géologique Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur

10h50 Pause

11h10 Gestion du trait de côte et responsabilités

Maître Bourilhon - Société d’Avocats Mauduit Lopasso et associés Frédéric Raout - DGALN MEEDDM Direction générale de l’Aménagement, du Logement et de la Nature du Ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer

11h55 Actualités sur les actions nationales et européennes

Christine Clus-Auby - EUCC France European Costal and Marine Union

12h15 Retour d’expérience en Italie (Côte Ligure)

Marco Del Soldato - Province de la Spezia (Italie – Région Ligure)

12h45 Buffet

14h00 Tables rondes

Table ronde n° 1 : Aléa et vulnérabilité du littoral rocheux, état des connaissances et impact du changement climatique.

Retour d’expérience Côte Normande (Seine-Maritime) Co-animation Pierre Azémard - CETE Méditerranée Centre d’Etudes Techniques du Ministère de l’Equipement

Jean Mauger - Ville de Criel-sur-mer (Seine-Maritime) Stéphane Costa - Université de Caen Philippe Quemart - DREAL PACA Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement Provence-Alpes-Côte d’Azur - Service Risques naturels majeurs Claude Vella - CEREGE Centre Européen de Recherche et d’Enseignement des Géosciences de l’Environnement Thomas Dewez - BRGM Service Risques Naturels et Sécurité du Stockage de CO2

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Table ronde n°2 : Quelles stratégies en termes de réponses et moyens d’adaptation possibles, et quelles observations ?

Retour d’expérience Pays Basque (Pyrénées-Atlantiques) Co-animation Corine Lochet - Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur – Service Mer

Albert Larousset - Ville de Guéthary (Pyrénées-Atlantiques) Sandrine Aubié - BRGM Service Géologique Régional Aquitaine / Observatoire de la Côte Aquitaine Stéphane Costa - Université de Caen Arnaud Gueguen - Groupement d'Intérêt Public (GIP) Littoral Aquitain Olivier Le Neannec – Toulon Provence Méditerranée

Table ronde n°3 : La perception du risque et l’efficacité des moyens de communication

Retour d’expérience Côte Bleue (Bouches-du-Rhône) Co-animation Yvonne Battiau - EUCC France European Costal and Marine Union

Jean Montagnac - Ville de Carry-le-Rouet (Bouches-du-Rhône) Nathalie Marçot - BRGM Service Géologique Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur Cécilia Claeys - Université de la Méditerranée - Faculté des Sciences de Luminy Henry Baumier - DDTM 83 Direction Départementale des Territoires et de la Mer du Var

17h15 Synthèse et conclusions

Thibaud Normand - DREAL PACA Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement Provence Alpes Côte d’Azur Mireille Peirano - Vice Présidente déléguée à la Mer, pêche et littoral, Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur

3.3. CONCLUSIONS

Cette journée de colloque a réuni près de 110 personnes. Le compte-rendu ainsi que la liste des participants sont joints en Annexe 2 du présent rapport.

Un des points forts du colloque a été la participation d’un grand nombre d’acteurs régionaux ; on citera notamment :

- les collectivités locales et territoriales (6 communes de la région PACA étaient représentées, ainsi qu’une commune de Normandie et une commune du Pays Basque ; un Conseil Général (Var) et des membres et élus du Conseil Régional PACA étaient présents) ;

- les communautés d’agglomérations (Riviera Française dans les Alpes-Maritimes, Toulon Provence Méditerranée dans le Var et Marseille Provence Métropole dans les Bouches-du-Rhône) ;

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- les Universités (CEREGE, Géosciences Azur, Université de Marseille-Luminy et Université de Caen) ;

- l’Etat avec un représentant du Ministère de l’Ecologie, la DREAL, l’ONF et les DDTM du Var et des Bouches-du-Rhône ;

- un certain nombre de bureaux d’études locaux (au nombre de 6) ;

- les Services Techniques du Ministère de l’Equipement avec le CETE Méditerranée ;

- le BRGM avec le Service Géologique Régional PACA basé à Marseille, le Service Géologique Régional Aquitaine basé à Bordeaux et l’Unité Risques Naturels et Stockage de CO2 basée à Orléans ;

- les Associations (ARGAL, CRIGE, EUCC-France, ANEL, CAF…) ;

- les indépendants (Cabinet d’avocat, …).

Illustration 2 : Journée de colloque Falaises côtières à l’Hôtel de Région

De manière générale, cette journée de colloque a fait le point sur la connaissance en matière d’érosion des falaises côtières, à la fois en région PACA mais également au travers de retours d’expériences d’autres régions de France et d’Italie.

Ces connaissances sont importantes mais souvent trop localisées, et il est difficile aujourd’hui de prendre du recul et d’évaluer le phénomène à une échelle plus globale. La difficulté de transfert de la connaissance entre la recherche et les élus a été soulignée, notamment pour leur utilisation dans les prises de décision.

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Certains outils d’aide à la gestion voient néanmoins le jour en région littorale comme par exemple l’Observatoire de la Côte Aquitaine, ou les actions de l’association EUCC-France, qui cherchent à construire une concertation entre les acteurs.

Une stratégie nationale à travers « le guide de gestion du trait de côte » a été présentée par le Ministère en charge de l’Ecologie, mais elle doit tenir compte des initiatives régionales et locales entreprises par ailleurs, qui, en région PACA, vont se poursuivre au travers notamment des travaux du BRGM suite à l’étude Falaises réalisée entre 2004 et 2008 dans le cadre du Contrat de Plan Etat-Région.

Enfin, le citoyen a également été intégré dans le débat, notamment à travers la notion de perception du risque et de la responsabilité (responsabilité du citoyen bien sûr mais également des collectivités). L’information et la communication sur ce risque instabilités de falaises côtières ne pourront qu’améliorer l’acceptation des prises de décisions des élus locaux par le citoyen et les usagers du site, notamment dans le cas de fermetures de sentiers du littoral, voire d’expropriation comme cela a été le cas par exemple en Normandie sur la commune de Criel-sur-Mer.

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4. Conclusion et perspectives

Ce projet de valorisation de l’étude sur la prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte-D’azur a permis de faire connaître le travail réalisé à l’échelle régionale par le BRGM en partenariat avec le Conseil régional et la DREAL, mais également de profiter de retours d’expériences dans d’autres régions françaises.

Il a également montré la nécessité de mener des travaux de recherche sur la compréhension des mécanismes multi-temporels et multi-échelles d’évolution des falaises littorales, dans les régions françaises métropolitaines.

En région Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’objectif est donc aujourd’hui d’améliorer la connaissance sur certains secteurs identifiés comme sensibles et où des phénomènes d’érosion se produisent de façon irrégulière, et où par conséquent le risque instabilités doit être intégré à une stratégie de gestion.

Compte-tenu de l'importance touristique de cette partie du littoral provençal, ce dernier est de plus en plus confronté au problème de l’érosion des falaises, avec des questions qui se posent sur la réalisation ou non de travaux coûteux de protection dans un souci d’aménagement.

Pour ce faire, un programme de suivi a récemment débuté sur la commune de Carry-Le-Rouet (Bouches-du-Rhône), avec pour objectif de réaliser une numérisation 3D dense par scan Laser dynamique d’un linéaire de 3,5 km de littoral et d’en suivre l’évolution au cours des 3 prochaines années (échelle court-terme). Cette portion du littoral régional (« Côte Bleue » ; à l’Ouest de Marseille) présente un intérêt fort d’étude, et ce à plusieurs titres :

- une géologie particulière du Tertiaire de la côte Bleue (faciès variés, érodés, exposés aux tempêtes et aux fortes houles hivernales) ;

- presque 10 km de littoral rocheux en aléa moyen à fort dont plus de 2 km en aléa fort d’après l’étude régionale du BRGM ;

- des événements d’éboulements récents (2005 le Rouet, 2008 Port de Carry, Barqueroute…) ;

- 27 km de littoral rocheux sur 4 communes (Martigues, Sausset-les-pins, Carry-le-Rouet, Ensuès-la-Redonne), soit plus de 60 000 habitants permanents concernés ;

- un enjeu touristique majeur (importance de la population de vacanciers ou d’excursionnistes, par rapport à la population permanente de la commune).

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5. Bibliographie

Dewez T., Gebrayel D., Lhomme D. et Robin Y. (2008) - Quantification de l'évolution des côtes sableuses et rocheuses par photogrammétrie et lasergrammétrie. Conférence de la Société Hydrotechnique de France, « Nouvelles Approches Sur Les Risques Côtiers », Paris 30-31 Janvier 2008. Dewez T., Chamblas G., Lasseur E., Vandromme R. (2008) – Five seasons of coastal erosion at Mesnil Val, Upper Normandy (France) : phenomenology of chalk cliff collapse surveyed with a terrestrial laser scanner. Geomorphology. Dewez T., Rohmer J., Closset L. (2007) – Laser survey and mechanical modelling of chalky sea cliff collapse in Normandy, France, in : Mclnnes R., Jakeways J., Fairbanks H., Mathie E. (Eds.), Landslides and climate change, challenges and solutions, Taylor and Francis edLondon, pp.281-288.

Marçot N., Azibi L. avec la collaboration de Boucher E. (2008) – Prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte d’Azur – Année 3 : Etude de segments représentatifs, propositions d’aménagement et établissement d’une méthodologie pour réduire la vulnérabilité à l’échelle d’une commune Rapport BRGM RP-56090-FR.

Marçot N. (2007) – Prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte-D’azur – Année 3 : Rapport d’avancement : Etude de segments représentatifs, propositions d’aménagement et établissement d’une méthodologie de gestion de risque communale. Rapport BGRM RP-55945-FR.

Marçot N. (2006) – Prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte-D’azur – Année 2 : Définition des enjeux sur le linéaire de falaises côtières, caractérisation et hiérarchisation des risques. Rapport BGRM RP-54316-FR.

Marçot N. avec la collaboration de Mathon C. (2005) – Prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte-D’azur – Année 2 : Complément : Qualification de l’aléa instabilités de falaises sur le littoral de l’Etang de Berre et des îles habitées de la région PACA. Rapport BGRM RP-53951-FR.

Marçot N. avec la collaboration de Mathon C. (2004) – Prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire en Provence-Alpes-Côte-D’azur – Année 1 : Bilan des connaissances, définition des instabilités et qualification de l’aléa. Rapport BGRM RP-52829-FR.

Meur-Ferec C. (2006) – De la dynamique naturelle à la gestion intégrée de l’espace littoral : un itinéraire de géographe. Mémoire HDR.

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Rapport de synthèse sur le projet valorisation de l’étude falaises côtières

22 BRGM/RP-59324-FR – Rapport final

Meur-Férec C., Deboudt Ph., Morel V, Longuépée J. (2006) - La vulnérabilité des territoires côtiers à l'érosion : vers une prise en compte des risques dans la gestion intégrée des zones côtières. Actes du colloque " Prospective du littoral – Prospective pour le littoral", Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable, 1 - 2 mars 2005, Paris.

Sites Internet

BRGM http://www.brgm.fr

Conseil Régional www.regionpaca.fr

DREAL www.paca.developpement-durable.gouv.fr

EUCC-France : http://www.eucc.nl/fr/index.htm

MEEDDTL : http://www.ecologie.gouv.fr

Parc Marin de la Côte Bleue http://www.parcmarincotebleue.fr/ Portail de la prévention des risques majeurs www.prim.net

Projet Eurosion : www.eurosion.org Rapports du GIEC (groupe intergouvernemental d'experts du climat) 2007 : www.ipcc.ch

Société ATM3D www.atm3d.com

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Rapport de synthèse sur le projet valorisation de l’étude falaises côtières

BRGM/RP-59324-FR – Rapport final

Annexe 1

Compte rendu des ateliers EUCC-France des 1er et 2 avril 2009 à Carry-le-Rouet (13) et liste des

participants

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Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

Compte rendu de l’atelier EUCC-France des 1er et 2 avril 2009

Les falaises côtières, érosion, qualité des eaux

littorales, gestion marine et portuaire de la Côte Bleue (Bouches-du-Rhône)

Organisateurs : Nathalie Marçot (BRGM), Marie-Claire Prat (LGPA Univ Bordeaux et EUCC-France), Jean Favennec (ONF et EUCC-France) - Compte-rendu rédigé par Nathalie Marçot.

Cet atelier avait pour thème principal l’érosion des falaises côtières, mais d’autres thématiques comme la qualité des eaux littorales, la gestion marine et portuaire de la Côte Bleue ont été abordées au cours de ces journées. Réalisé en collaboration avec la commune de Carry-le-Rouet, le BRGM, le Conseil Régional PACA et la DIREN PACA, cet atelier a réuni plus d’une soixantaine de participants.

Journée sur le terrain, mercredi 1er avril La journée de terrain avait pour objectif au travers de 6 sites présélectionnés, de présenter aux participants la problématique du risque instabilités de falaises côtières, et les modes de gestions associés à ces espaces littoraux soumis au risque mais également à d’autres problématiques telles que la qualité des eaux littorales et la préservation du milieu. 1. Erosion de falaise et rôle de la végétation sur le sentier du Lézard au niveau de la Pointe du Moulin à Carry-le-Rouet Le secteur du littoral Ouest de la commune de Carry-le-Rouet dispose d’un sentier du littoral aménagé et entretenu régulièrement par la DDE des Bouches-du-Rhône entre le port de Carry-le-Rouet et l’Anse de la Tuilière. Le secteur de la Pointe du Moulin est particulièrement soumis à l’érosion, notamment à l’ouest de la pointe où des falaises d’une dizaine de mètres de hauteur montrent une érosion différentielle marquée et la chute de blocs calcaires de l’Aquitanien Supérieur (Miocène) par basculement de dalles mises en déséquilibre, ainsi qu’à l’ouest de la Pointe en retournant vers le Port où le pied de falaise est particulièrement touché, formant un sous-cavage profond, qui a été estimé comme étant stable à moyen terme par le CETE Méditerranée.

Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

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Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

L’étude falaise réalisée par le BRGM pour le compte de la Région PACA et de la DIREN a permis de faire un état de l’érosion des falaises sur tout le littoral de la région PACA, et elle est allée plus loin sur 4 communes dont Carry-le-Rouet, en proposant notamment une approche de la perception du risque par les usagers du littoral (marcheurs, plagistes, promeneurs…). Cette étude a montré entre autre que les pratiques des usagers influençaient le degré de proximité, d’exposition et de conscience du risque. L’ONF travaille également beaucoup sur la végétation du littoral et notamment sur la faculté d’adaptation et de parade contre l’érosion qu’ont certains végétaux adaptés à ce milieu très particulier soumis à la fois aux agressions marines et terrestres.

2. Erosion de falaise et gestion portuaire au Port de Carry-le-Rouet Le Port de Carry-le-Rouet présente à l’Ouest des talus rocheux fortement altérés qui ont été fragilisés par l’enlèvement d’un certain nombre de pins qui stabilisaient le terrain. Le CETE a présenté l’étude de risque qu’ils ont réalisée sur ce secteur et qui a amené à l’installation de parades passives comme les filets suspendus, n’empêchant pas les éboulements, mais guidant les pierres et/ou blocs directement en pied de talus pour éviter d’atteindre les voitures garées sur les parkings et potentiellement blesser des personnes. Dans la législation française, une personne propriétaire en haut de falaise est responsable de la protection de la falaise et doit théoriquement en assurer les coûts de gestion pour protéger son bien et assurer la sécurité des personnes. Dans le cas présent, la commune a pris en charge 50 % du montant des travaux pour s’assurer qu’ils soient réalisés. A l’Est du Port, un éboulement a eu lieu en février 2008 occasionnant la chute d’une masse d’une dizaine de mètres cubes environ de marnes et sables de l’Aquitanien Moyen (Miocène). Aujourd’hui, la commune a engagé des travaux de confortement alliant béton projeté et systèmes drainants sur 20 mètres de linéaire et une dizaine de mètres de hauteur. L’accent a

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été mis sur la coloration du béton devant se confondre avec la couleur naturelle de la roche originelle visible de part et d’autre. La commune agit aujourd’hui principalement en curatif sur le problème des falaises côtières. Elle considère qu’elle ne dispose pas de vision à moyen ou long terme pour hiérarchiser les secteurs sur lesquels il devient nécessaire d’agir par des aménagements de parades, et ceux particulièrement exposés sur lesquels une évolution naturelle de la falaise et un recul stratégique s’impose. Le port de Carry-le-Rouet fait partie des ports gérés par la Communauté Urbaine Marseille Provence Métropole (MPM), il a également fait partie d’une étude d’élaboration d’un schéma de dragage des ports de plaisance consistant à dresser un état des lieux des 24 ports de MPM, à analyser des sédiments portuaires, à rechercher des débouchés pour le traitement, le recyclage et la valorisation possible des sédiments et enfin à élaborer un schéma de gestion avec estimation financière et programmation des actions. 3. Erosion de falaise et gestion du Parc Marin de la Côte Bleue au niveau de la calanque du Rousset à Carry-le-Rouet La Calanque du Rousset est située au centre du littoral concerné par la zone du Parc Marin de la Côte Bleue, qui nous a été présenté par son directeur M. Bachet. Le Parc Marin de la Côte Bleue (PMCB) poursuit des objectifs de protection du milieu marin, de gestion des ressources de pêche, d’information du public, et de promotion d’actions expérimentales et de recherche dans ces domaines. Il intervient sur l’ensemble de la Côte Bleue, entre le golfe de Fos et la rade de Marseille. Il s’agit d’un établissement public qui associe les 5 communes de la Côte Bleue (Martigues, Sausset, Carry, Ensuès et le Rove), la Région Provence Alpes Côte d'Azur, le Département des Bouches du Rhône, et les organisations professionnelles de la pêche. Le service Qualité des eaux littorales de la DDE13 n’a malheureusement pas pu exposer ses actions. Les éléments sur le sujet sont néanmoins dans le Livret Guide des ateliers.

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Le site de la calanque du Rousset est également marqué par une très forte érosion différentielle et des sous cavages déstabilisant fortement les formations saumâtres du Rousset datées de l’Aquitanien Moyen (Miocène). Le CETE a travaillé sur ce secteur notamment dans le cadre d’une étude de l’aléa chutes de masses rocheuses pour la faisabilité d’un sentier du littoral entre le Port de Carry-le-Rouet et le port du Rouet. Des travaux et des estimations de coûts associés ont été proposés en cas d’aménagement d’un sentier. La matinée s’est clôturée par l’observation des travaux en cours de réalisation que la commune a engagés pour stabiliser le fond de la calanque qui subissait une érosion marquée pouvant entraîner à court terme la déstabilisation de la voie communale en amont permettant l’accès aux villas et au parking de la calanque. Ces travaux prévoient la construction de deux restanques conséquentes en béton et d’un système drainant permettant l’évacuation des eaux pluviales. 4. Histoire de l’Anse du Rouet, érosion de falaises et scan laser (Carry-le-Rouet) En début d’après midi, nous avons repris l’atelier par une présentation de l’histoire de l’Anse du Rouet depuis le début du XXème siècle, par M. Ceccaldi, commissaire-enquêteur auprès du Tribunal administratif de Marseille. Nous avons pu voir à partir d’anciennes photographies l’évolution de cette zone balnéaire, initialement naturelle puis utilisée en tant que salines, jusqu’aux premiers aménagements urbains (parkings, bâtiments…) et le devenir des constructions de garages à bateaux sur la partie Est de l’Anse. En effet, une partie des constructions existantes a été construite dans l’inégalité, avant la loi littorale, et le cas des garages à bateaux édifiés au pied de la falaise du Rouet sur une terrasse existante est caractéristique en termes de confortement. Leur destruction pourrait en effet entraîner à nouveau une érosion naturelle de ce littoral suspendue pendant plusieurs dizaines d’années par ces constructions précaires. D’autre part, l’épi central perpendiculaire à la plage a été, pour la commune, très bénéfique pour freiner le départ de galets et permettre le dépôt de sédiments et de galets de l’autre côté de la baie. En effet, l’Anse du Rouet est principalement concernée par des déplacements sédimentaires de galets, les matériaux sableux sont peu nombreux dans cette baie. La falaise du port du Rouet, constituée d’une alternance de grès roses et de poudingues Oligocène, est particulièrement soumise à l’érosion, et a fait l’objet d’étude d’aléa notamment par Antea (société d’ingénierie) qui a qualifié un aléa élevé à très élevé, et préconisé un certain nombre de travaux de confortements. La commune avait décidé de s’occuper de cette falaise avant que ne survienne l’éboulement qui s’est produit en avril 2005 et qui a occasionné la chute de 200 m3 de matériaux. Le site d’observation sur le port du Rouet permet d’avoir une belle vue vers l’est et notamment vers la falaise du Rouet sur laquelle a été réalisée au cours de l’étude Falaises du BRGM, une tentative d’analyse par scan laser 3D. Le BRGM a réalisé cette approche afin d’essayer d’appréhender l’évolution de l’érosion de la falaise sur 6 mois (entre octobre 2007 et avril 2008) en comparant les deux scans acquis à ces deux périodes. Des problèmes de calages et de végétation n’ont pas permis d’analyser quantitativement le recul de la falaise, en revanche, le système a permis de cibler des zones sur lesquelles l’érosion avait été particulièrement importante (déstabilisation de galets dans la Brêche du Cap de la Vierge au sommet, ravinements marqués dans les marnes de l’Oligocène en pied de falaise par exemple). Les suivis réalisés actuellement par le BRGM sur la côte à falaises de craie en Normandie et présentés à cette occasion, ont permis de montrer que la technique avait progressé et qu’il était possible aujourd’hui de réaliser des levés scan par bateau ou hélicoptère sur des distances de plusieurs dizaines de kilomètres pour des précisions allant jusqu’à la dizaine de cm. L’objectif

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étant sur plusieurs levés et avec un catalogue d’événements fourni, d’évaluer une probabilité de rupture en fonction d’une intensité (volume éboulé) et d’une période de retour. 5. Erosion de falaise et point de vue au niveau de la Chapelle du Rouet (Carry-le-Rouet) Le site de la Chapelle du Rouet a permis de clôturer la thématique érosion de falaises côtières en observant vers l’Ouest l’éboulement de février 2008 sur la falaise de Barqueroute, étudié par le CETE méditerranée, qui a mobilisé 500 m3 de terrain et endommagé plusieurs parcelles de propriétaires, ainsi qu’une piscine au sommet de la falaise. Les formations concernées étaient les formations saumâtres du Rousset (marnes et sables) de l’Aquitanien Moyen (Miocène). Ce panorama a permis également de réaliser l’ampleur de l’urbanisation sur la côte à falaise, et en particulier les villas construites juste avant la loi littoral en bordure de falaise. 6. La gestion partenariale du Conservatoire du Littoral et de l’ONF sur la commune du Rove Sur le dernier site de la journée, nous avons été accueillis par l’ONF et le Conservatoire du Littoral sur la « route Pompidou », témoin d’un ancien projet d’urbanisation, et situé sur le territoire géré en partenariat entre ces deux organismes. En effet, la commune du Rove a souhaité préserver une grande partie (80 %) de son territoire non urbanisé en cédant ses terrains à l’ONF et au Conservatoire. Même si le risque principal est ici le risque feux de forêts, les gestionnaires assurent quotidiennement l’entretien et l’aménagement de ces territoires encore préservés, et l’on notera la présence dans le massif du dernier troupeau de chèvres du Rove, espèce très originale et protégée car en voie d’extinction aujourd’hui.

Réunion débat, jeudi 2 avril Les participants ont été accueillis dans la salle du Grand Bleu sur l’Anse du Rouet, mise à disposition pour l’occasion par la ville de Carry-le-Rouet, et par Monsieur le Maire, M. Pene, pour débattre des problématiques présentées la veille sur le terrain. Y. Battiau-Queney, nouvelle présidente de l’EUCC-France, présente l’association et rappelle les objectifs : promouvoir la gestion intégrée des zones côtières, assurer la préservation de l’environnement côtier et marin, permettre un développement « durable » des milieux côtiers et marins, c’est dire « réconcilié avec la nature » (formule d’Yves Henocque). Pour réaliser ces objectifs, intégrer « la connaissance » à « la gouvernance », EUCC-France s’appuie avant tout sur l’organisation biannuelle d’ateliers de terrain. C’est un travail concret qui devrait trouver des prolongements dans des activités de formation destinées aux gestionnaires de terrain et aux élus. Par ailleurs, l’appartenance à une grande ONG européenne « the Coastal and Marine Union (EUCC) » est un atout supplémentaire. Y. Battiau-Queney remercie également tous les organisateurs et participants de cet atelier très réussi (dont Nathalie Marçot, Marie-Claire Prat et Jean Favennec) et redonne la parole à Marie-Claire Prat, présidente d’honneur d’EUCC-France, pour diriger les débats. M-C. Prat rappelle le thème principal de l’atelier : les risques liés aux instabilités des falaises côtières. Des thèmes secondaires ont aussi été développés, allant dans le sens de la Gestion Intégrée des Zones Côtières (GIZC). L’aléa instabilités a été précisément étudié par le BRGM dans le cadre d’une étude menée entre 2004 et 2007, l’atelier a permis ici de présenter aux acteurs du risque (élus, scientifiques et gestionnaires) les étapes permettant les différentes approches du risque, allant de l’aléa, à la perception du risque et à la gestion du risque réalisée par les collectivités locales.

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C. Sandel, élue littoral à la Région PACA, précise que les élus ont effectivement un rôle important à jouer. Peu de Plans de Prévention des Risques (PPR) littoraux ont été mis en place. La question est posée de savoir s’il s’agit là de bons outils ? Et pourquoi sont-ils si peu utilisés ? N. Spinousa, Chef du service Risques Naturels Majeurs à la Région PACA, présente à titre d’exemple ce qui se fait pour les inondations dans le cadre du Plan Rhône, où l’accent est mis sur le partenariat et la contractualisation Etat/Régions qui permet une planification de la programmation sur une période donnée (2007-2013). Un exemple d’outil de gestion pourrait être un Plan littoral sur le modèle du Plan Rhône, mais en tout état de cause la responsabilité relève de l’Etat Un autre outil pourrait être la création d’un Observatoire des risques comme en Languedoc-Roussillon. L’amélioration et le partage de la connaissance sont essentiels et l’on dispose aujourd’hui de nombreux travaux, notamment du BRGM. Elle conclut en précisant que la culture du risque reste évidemment à développer dans ce domaine. M. Bacou de la Diren PACA ajoute que l’information doit être partagée par l’ensemble des acteurs. L’étude du BRGM est un outil pour avoir une vision globale de l’aléa sur les falaises côtières de la région PACA. Il existe aujourd’hui sur le littoral quelques PPR correspondant à d’anciens PER, et qui sont davantage vus sous l’angle des mouvements de terrain. Il conclut en précisant qu’il est nécessaire dans ce domaine d’avoir une vision multicritères/multiacteurs qui privilégie l’information. J. Favennec de l’ONF et l’EUCC-France rappelle qu’on arrive toujours aux mêmes conclusions mais que l’on ne peut pas laisser les gens face au risque. Il faut aussi anticiper, c'est-à-dire laisser un espace de liberté comme on le fait pour les dunes, pour permettre au milieu d’évoluer. Il s’agirait ici d’un espace de recul, et d’après lui c’est notre rôle de dire cela. Il faut réfléchir à moyen terme, au moins à 20 ans. Ces milieux sont dynamiques, il est normal qu’une falaise s’érode. Les PPR sont des outils indispensables. Les communes disent souvent qu’elles sont d’accord pour avoir un PPR, à l’Etat de les prescrire. L’Etat doit prendre sa place. La loi Barnier évoquée la veille sur le terrain n’est applicable que s’il y a un PPR. En conclusion il faut gérer les falaises et non défendre les falaises. J-P. Viguier de l’ONF pense que l’on n’a pas de certitudes, mais en revanche on dispose aujourd’hui de probabilités. Cela permet d’avoir une idée du coût de gestion à moyen terme sur les 20 à 30 prochaines années. La démarche PPR permet de ne pas avoir à réagir dans l’urgence mais d’anticiper et d’estimer des coûts pour les interventions. N. Marçot du BRGM Marseille ajoute que l’étude Falaises du BRGM dont il a été question a plusieurs reprises au cours des ateliers a permis d’avoir un état zéro de l’érosion des falaises du littoral de la région PACA, et non une analyse quantitative du recul. L’objectif aujourd’hui serait de poursuivre sur les secteurs les plus sensibles par une étude de l’évolution à court et moyen terme de l’érosion des falaises en utilisant par exemple les outils scan laser 3D déjà utilisés en Normandie afin d’estimer une probabilité de recul. D. Dessandier, Directeur du BRGM Marseille reprend l’idée d’Observatoire. En soi, cela ne veut rien dire, on travaille ensemble et on voit ce qu’on peut faire (par exemple associer l’ONF sur la problématique stabilité des falaises par la végétation…). Il existe une volonté partagée d’un certain nombre d’acteurs pour comprendre les mécanismes à une échelle assez grande. L’idée est d’aller de la Recherche au Service Public pour répondre de la meilleure manière à la problématique. Il cite l’exemple de l’Observatoire de la Côte Aquitaine.

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Ph. Dutartre, Directeur du BRGM Aquitaine fait une rapide présentation de l’Observatoire de la Côte Aquitaine. Bien que les problématiques soient différentes côte sableuse/côte rocheuse, la côte rocheuse ressemble néanmoins à celle de la région PACA, mais la pression urbaine y est moindre. Monsieur Montagnac, adjoint au Maire de Carry a souligné la veille sur le terrain qu’il fallait gérer les falaises dans un tissu urbain dense et vivant. Il faut gérer la sécurité des personnes. La côte sableuse aquitaine est peu urbanisée, on y réalise surtout des études physiques du trait de côte. Les partenaires de l’Observatoire de la côte Aquitaine sont nombreux : BRGM, ONF, 3 CG (33,40, 64)... Dans les Pyrénées Atlantiques, ont lieu aujourd’hui des réflexions importantes sur la marge de liberté du trait de côte. L’idée a été acceptée par les élus, on note une cohésion d’esprit, et une évolution positive. La symbiose des partenaires s’est faite très tôt, d’où une harmonie dans la réflexion, comme par exemple sur le recul stratégique. M. Pene, Maire de Carry-le-Rouet, rejoint la séance de débat : “On nous dit de traiter en préventif mais à quel coût ? Notre attitude reste de traiter où il y a des problèmes, nous ne pouvons agir qu’au coup par coup. Normalement, la gestion d’une falaise appartient au propriétaire, ce qui pose la question des permis de construire donnés pour les maisons et les piscines. La Loi Littoral a limité les constructions nouvelles mais n’empêche pas les travaux sur le bâti existant. Nous avons des subventions de la Région quand une falaise s’écroule. Faire du préventif coûte très cher. Jusqu’où peut-on aller dans l’application du principe de précaution ? Les actions sont disproportionnées par rapport aux moyens de la commune. Nous avons toujours des urgences”. N. Spinousa précise qu’actuellement, nous agissons en pompiers, elle demande s’il existe ailleurs des expériences qui pourraient être utiles pour nous ? C. Sandel souligne qu’un Observatoire en PACA serait très utile N. Spinousa précise que les enjeux sont forts en Région Provence Alpes Côte d’Azur du fait de l’urbanisation du littoral, elle ajoute que 80% de la population est concentrée sur le littoral c'est-à-dire sur 20% du territoire. Y. Battiau-Queney rappelle que la sécurité est un élément essentiel à prendre en compte mais il faut éviter, dans la mesure du possible les solutions irréversibles (comme le béton projeté) qui détruisent une fois pour toute des coupes géologiques dont l’intérêt scientifique est parfois très élevé et qui participent aussi à la beauté du paysage. On rejoint là la notion de patrimoine naturel. C’est une dimension qu’il faut désormais intégrer dans tout plan de gestion M. le Maire est d’accord mais il ne sait pas de combien reculent les falaises ni où intervenir et par conséquent où conforter les falaises. N. Marçot rappelle les objectifs de l’étude Falaises qui n’étaient pas de mesurer le recul des falaises mais bien de hiérarchiser le risque sur l’ensemble du linéaire de la Région. H. Heurtefeux de l’EID Méditerranée site l’exemple de la commune de Criel-sur-Mer en Normandie où 10 maisons ont été expropriées, ainsi que l’exemple de Cayeux-sur-Mer en Picardie où il est envisagé un recul de 3 000 habitants. La planification existe. En région PACA, par exemple sur la commune des Stes Maries-de-la-mer, on a décidé de tenir la côte, mais autour, on réfléchit sur la façon d’organiser le recul. L’exemple du recul de la route entre Sète et Marseillan en région Languedoc-Roussillon a été estimé à 54 millions d’euros. N. Marçot rappelle la notion de perception du risque abordée la veille sur le terrain. Les usagers viennent également pour le paysage.

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L. Azibi, étudiant, a réalisé pour le BRGM l’étude de perception du risque par les usagers, celle-ci a également montré un déni du risque par les usagers fréquents, ou le fait qu’on s’habitue au risque. V. Duvat-Magnan de l’Université de la Rochelle explique qu’il faut que la perception du risque serve de levier pour l’action. L’Etat doit être un acteur majeur. Ce sont souvent les facteurs socio-économiques et le fait que la société ne suit pas qui bloquent les politiques. Il est important de communiquer, de faire progresser l’information, cela aiderait les élus. Pour avancer, il faut que les usagers, les résidents, les acteurs socio-économiques deviennent des partenaires. Elle est convaincue de la supériorité des facteurs humains pour préparer à l’idée du recul inéluctable. Il faut s’inscrire dans une démarche réaliste, aucune étude ne peut garantir que telle ou telle falaise tiendra. M-C. Prat résume les propos en précisant que la technique seule ne peut résoudre le problème. M. le Maire repose la question de savoir où traiter ? Et où les événements peuvent se produire et par conséquent comment traiter ? V. Duvat-Magnan propose la solution de bonne intelligence qui est de préparer à long terme le retrait. M-C. Prat confirme l’urgence de commencer à réfléchir et d’engager une démarche collective à laquelle le Public doit adhérer. V. Duvat-Magnan rappelle également le parallèle à faire entre le principe de précaution et le principe d’incertitude. La science ne sait pas tout. S. Lobbedey du Conseil Général de l’Hérault insiste sur le rôle des Régions, des Conseils Généraux, qui est de venir en aide aux communes et de proposer des schémas de développement pérennes au lieu de faire systématiquement du curatif. Deux fronts sont à mener en parallèle : le risque quotidien (éboulements) et l’organisation du territoire à long terme avec un développement économique qui ne soit pas forcément au ras de la côte. N. Spinousa insiste sur le fait qu’il faut que l’intégration du risque dans l’aménagement soit un réflexe. C. Sandel explique que chez certains élus, le déni du risque est total, comme par exemple sur la commune des Stes Maries-de-la-mer, où il n’y a pas d’information au public. La région a fait une plaquette sur les risques naturels pour informer et éduquer les maires. Elle ajoute que les PPR littoraux sont très différents des PPR Inondation et espère que des PPR littoraux seront bientôt mis en place. T. Dewez du BRGM à Orléans pose la question de savoir ce qui marche bien comme outil de communication pour informer les élus ? M-C. Prat souligne l’importance d’expliquer et donne l’exemple des conférences à destination du grand public dans lesquelles elle voit une évolution positive du public, qui devient beaucoup plus réceptif. J-P. Viguier de l’ONF explique qu’en matière d’incendie, la communication est très importante et qu’il faut toujours toucher directement le public, par le biais de panneaux d’information par exemple, et surtout se déplacer vers les gens.

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V. Duvat-Magnan précise que l’information passe par des actions de fond. Il faut travailler au niveau des différentes générations. L’évènement catastrophique joue un rôle important dans la prise de conscience. Nous devons utiliser ces évènements extrêmes pour accélérer l’information, et par conséquent pour accélérer l’action. Thomas Dewez ajoute que lorsqu’on parle d’Observatoire, il faut aussi prévoir l’éducation D. Dessandier précise que le maire a besoin d’une réponse immédiate. Le scientifique ne donne pas une réponse sur l’immédiat, mais sur le moyen terme. Le coût de l’information est dérisoire par rapport au coût des travaux, donc il faut faire de l’information. J. Favennec attire l’attention sur le fait que l’on dit trop qu’on ne sait pas, or on sait. Sur la Côte Aquitaine par exemple, on sait que le Nord est en érosion. Si la prévision que l’on fait n’est pas tout à fait juste, quelle importance ? L’Observatoire de la Côte aquitaine fait des expertises, c’est un risque qu’il faut prendre, les scientifiques doivent prendre ce risque. J. Morelli de l’Université de Nice informe sur l’existence du projet LITMED (Action éducative Internationale) ayant pour objectif d’associer les élus et scientifiques pour former et préparer l’évolution des mentalités C. Lochet , chargée du mission au service mer à la Région PACA, informe que concernant les études d’évolution des plages, l’information est faite à l’échelle de la cellule hydro-sédimentaire et qu’il est nécessaire d’en informer les maires. Cette information est mise à disposition pour les communes, les bureaux d’études, elle est normalement mise en ligne sous forme de SIG sur le site du CRIGE PACA. Un travail est également réalisé avec les écoles et les collèges. Une base de données a également permis de regrouper les études disséminées dans les communes depuis des années. Un réseau Mer a également été créé pour l’éducation à l’environnement. S. Aubié du BRGM Aquitaine revient sur l’Observatoire de la Côte Aquitaine et expose les différentes actions qui existent à différentes échelles. L’observatoire a permis de mener des actions générales d’expertise, d’information, et de production de données SIG… Ceci a permis d’identifier des sites à problèmes et d’établir des stratégies d’intervention (des priorités). Les sites identifiés ont ainsi pu être instrumentés et suivis. De la vulgarisation auprès du grand public a également été mise en place, comme par exemple des associations de médiation scientifique, et des déplacements sur le terrain avec les élus pour expliquer les phénomènes. C’est parce que l’Observatoire existe depuis quelque temps qu’on a pu y arriver. Aujourd’hui, les communes peuvent solliciter gratuitement l’expertise de l’Observatoire. Il est également possible de travailler sur le patrimoine en mettant en valeur la richesse paysagère d’un littoral, par exemple la route de la Corniche basque. A. Vincent de l’ONF rappelle ce qui a été dit et vu la veille au sujet des falaises stabilisées grâce à la végétation. Il est donc nécessaire d’étudier également les falaises stables en analysant leur fonctionnement végétal et géologique pour éviter de voir disparaître la végétation qui agit ici comme parade naturelle. Le rôle d’amortisseur de la végétation face à la mer et aux processus continentaux des eaux est donc primordial. V. Duvat-Magnan pose la question à l’ONF de savoir s’il existe des exemples de stabilisation de falaises par plantations ? A. Vincent répond que dans les Bouches du Rhône, il n’y a pas d’exemple. On végétalise actuellement pour limiter les passages, mais pourquoi pas pour stabiliser la falaise ? Les techniques sont à mettre au point.

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Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

J. Favennec rappelle qu’on ne peut pas toujours protéger, simplement pour des raisons économiques. Il faut s’inscrire dans la logique d’un processus. Ce n’est pas au scientifique de dire ce qu’il faut faire. Le maire doit aussi savoir prendre ses responsabilités, savoir dire : “Ici on va défendre, là on va reculer” mais c’est un travail qu’il ne doit pas réaliser tout seul mais bien en collaboration avec les différents acteurs (scientifiques, techniciens, gestionnaires) puis prendre une décision. M. le Maire répond qu’il est difficile de dire aux gens de reculer. D. Dessandier pose la question de savoir si c’est bien aux communes d’avoir le pilotage d’un Observatoire ? M. le Maire répond qu’il existe en PACA une charte pour l’environnement durable et que la commune de Carry-le-Rouet dispose de 6,4 km de côtes. D. Dessandier propose de sélectionner des sites pilotes expérimentaux où seraient mis en place des suivis, qui impliqueraient des collectivités, des services Publics et l’EUCC dans le rôle du facilitateur. J. Favennec attire l’attention sur le terme « Observatoire ». Ce serait plutôt un centre de partage de connaissances, d’approfondissement de la connaissance, d’expertise. La maîtrise d’ouvrage doit être Régionale, l’échelle régionale est en effet plus appropriée que celle de la commune pour respecter la cohérence des milieux. Il faut qu’il y ait autour de la table des personnes pour apporter l’information. C. Sandel demande si l’érosion de la partie marine est aussi importante que celle de la partie terrestre ? Y. Battiau-Queney répond que dans de nombreux cas, les processus continentaux (ruissellement, ravinement, processus gravitaires, gel-dégel...) sont décisifs dans le mécanisme du recul. M. le Maire informe pour conclure de son souhait d’organiser une journée de la mer et des falaises, pour début 2012, avec la collaboration de l’EUCC. Y. Battiau-Queney s’engage au nom d’EUCC-France à participer activement à cette journée. En conclusion, M. Pene et Marie-Claire Prat remercient les intervenants de cet atelier et se réjouissent des échanges fructueux sur le terrain aussi bien qu’au cours du débat.

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Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

Liste des participants et invités aux journées des 1er et 2 avril 2009 Participants AUBIE Sandrine BRGM Aquitaine [email protected] AVIAS Patrice ONF [email protected] BALOUIN Yann BRGM LRO [email protected] BATTIAU-QUENEY Yvonne EUCC-France [email protected]

BELON Rémi BRGM LRO [email protected] BODERE Gwénaëlle BRGM Corse [email protected] BONNARD Delphine ONF [email protected]

BRIAND Olivier Service des Ports de Marseille [email protected]

CLUS-AUBY Christine EUCC-France [email protected] DESCAMPS Jean-Paul ONF [email protected] DUTARTRE Philippe BRGM Aquitaine [email protected] DUVAT-MAGNAN Virginie Univ la Rochelle [email protected]

FERNANDEZ Pedro EUCC-Centre Méditerranée [email protected]

GERVAIS Mathieu BRGM LRO [email protected] GOUGUET Loïc ONF Nantes [email protected] GROSSET Stéphanie EID-Méditerranée [email protected] HENNEQUIN Vincent BRGM LRO [email protected] HERTZOG Pierre-Christophe ONF PACA [email protected]

HEURTEFEUX Hugues EID-Méditerranée [email protected] KÖRFER Aude EUCC-France [email protected] LE ROY Sylvestre BRGM [email protected] LOBBEDEY Stéphane CG 34 [email protected] MAILLET Albert ONF [email protected] MATHON Christian BRGM Marseille [email protected] MIRGON Carola BRGM Marseille [email protected]

MORELLI Jacques UMR espace / Univ de Nice [email protected]

MOSSOT Gabrielle Univ la Rochelle [email protected] NOVELLI Laurent ONF / CELRL [email protected] PALVADEAU Eric BRGM Corse [email protected]

PEISSON Romain Service des Ports de Marseille [email protected]

PLAT Emmanuelle BRGM Marseille [email protected] ROCHE Amélie CETMEF [email protected] ROSEBERY David ONF Gironde [email protected] TROTTET François ONF Vendée [email protected] VIGUIER Jean-Pierre ONF [email protected]

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Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

Intervenants ANDRES Bruno CETMEF [email protected] AZEMARD Pierre CETE Méditerranée [email protected] AZIBI Ludovic Etudiant [email protected] BACHET Frédéric Parc Marin [email protected]

BRUZOU Jean DDE 13 Arrdt maritime [email protected]

CECCALDI Hubert Commissaire Enquêteur [email protected]

CUBILIER Patrice Dir Services Techniques Mairie de Carry-le-Rouet

[email protected]

DEWEZ Thomas BRGM Orléans [email protected] FAVENNEC Jean ONF et EUCC-France [email protected] MARCOT Nathalie BRGM SGR PACA [email protected]

MONTAGNAC Guy Premier adjoint au Maire de Carry-le-Rouet

-

PENE Pierre Maire de Carry le Rouet -

PICARD Gilles ANTEA [email protected]

PRAT Marie-Claire LGPA Univ Bordeaux et EUCC-France [email protected]

THEUNISSEN Accri-Line

THOURAUD Stéphane DDE 13 Arrdt maritime [email protected]

VINCENT Alain ONF [email protected] Invités BACOU Michel DREAL PACA [email protected] BERGERE Hervé Parc de Port Cros [email protected] BERTRANDY Mary-Christine DDE 13 Mary-Christine.Bertrandy@developpement-

durable.gouv.fr

CRUZEL Fréderic ANTEA [email protected] DAUTREY Elisabeth DREAL PACA [email protected]

DE SOYE Marie-Anne Conseil Régional PACA Service Risques

[email protected]

DESSANDIER David BRGM SGR PACA [email protected] GAUFRES Pierre CETMEF [email protected]

LOCHET Corine Conseil Régional PACA Service Mer [email protected]

MANSUELLE David DDE 13 [email protected] MEJEAN Adrien BRGM SGR PACA [email protected] NARBAIS-JAUREGUY Didier DREAL PACA Didier.NARBAIS-JAUREGUY@developpement-

durable.gouv.fr

RAMPAUD-RAIDIN Magali

Conseil Régional PACA Service Risques

[email protected]

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Atelier EUCC-France, Côte Bleue, 1er-2 avril 2009 – Compte-rendu

ROSE Angélique ONF PACA [email protected]

SANDEL Christine Conseiller Régional PACA [email protected]

SPINOUSA Nancy Conseil Régional PACA Service Risques

[email protected]

TERRAMORSI Serge DDE 13 [email protected] VERRIER Nicole CETMEF [email protected]

- Conseil General 13 Service Environnement

-

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Rapport de synthèse sur le projet valorisation de l’étude falaises côtières

BRGM/RP-59324-FR – Rapport final

Annexe 2

Actes du colloque « Instabilités de falaises côtières : pour une meilleure gestion des

risques » du 2 décembre 2010 à l’Hôtel de Région à Marseille

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Actes du colloque

SOMMAIRE

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Colloque « Instabilité des falaises côtières : Pour une meilleure gestion des risques » - 2 décembre 2010

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Colloque « Instabilité des falaises côtières : Pour une meilleure gestion des risques » - 2 décembre 2010

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Sommaire

Ouverture .................................................................................................................... 5 Le littoral de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur : Un territoire à enjeux ................................................................................................ 10 Gestion du trait de côte et responsabilités ................................................................ 23 Actualités sur les actions nationales et européennes ............................................... 34 Retour d'expérience en Italie (Côte Ligure) .............................................................. 38 TABLE RONDE N° 1 Aléa et vulnérabilité du littoral rocheux, état des connaissances et impact du changement climatique ............................................................................................. 44 TABLE RONDE N° 2 Quelles stratégies en termes de réponses et moyens d'adaptation possibles, et quelles observations ? .............................................................................................. 61 TABLE RONDE N° 3 La perception du risque et l'efficacité des moyens de communication ..................... 74 Synthèse et conclusions ........................................................................................... 90

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Colloque « Instabilité des falaises côtières : Pour une meilleure gestion des risques » - 2 décembre 2010

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Colloque « Instabilité des falaises côtières : Pour une meilleure gestion des risques » - 2 décembre 2010

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(La séance est ouverte à 9 heures 40)

OUVERTURE

Madame HELLE.- Je vous propose de commencer nos travaux. Un certain

nombre de personnes vont nous rejoindre puisqu’il y a une centaine de personnes qui se sont inscrites. Je vais commencer déjà par me présenter :

Cécile HELLE, Vice-présidente en charge de l’Aménagement du territoire, des politiques territoriales et contractuelles à la Région.

Je vous souhaite donc la bienvenue à l’Hôtel de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur et dans cet hémicycle.

Je voulais aussi saluer Thibaud NORMAND, adjoint au Chef de service Prévention des risques de la Direction régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement Provence-Alpes-Côte d’Azur. Et puis, Monsieur DESSANDIER, qui est le Directeur régional du BRGM. Je les remercie d’être l’un et l’autre à mes côtés puisque ce colloque « Instabilité des falaises côtières : Pour une meilleure gestion des risques » a été préparé en partenariat avec les services de la Région, de la DREAL et du BRGM.

Sont également présents à la tribune : Nancy SPINOUSA, Chef du service Risques à la Région, et Nathalie QUELIN, de la DREAL, qui interviendront dans la poursuite de mes propos introductifs et de ceux de Monsieur NORMAND.

Je voulais aussi, par avance, saluer deux de mes collègues qui vont nous rejoindre dans cette journée de discussions et de débats : Mireille PEIRANO, Vice-présidente en charge de la Mer, de la Pêche et du Littoral, qui viendra conclure notre journée de travail ; et Christine SANDEL, qui est Conseillère régionale déléguée à la Protection du littoral et du milieu marin.

Je voulais aussi vous présenter les excuses du Président Michel VAUZELLE, qui ne peut pas participer à l’ouverture de nos travaux, mais qui m’a demandé de le représenter ; de vous dire qu’il était important pour nous, en tant que Collectivité régionale, de pouvoir organiser ce colloque sur l’instabilité des falaises côtières.

Vous savez, en effet, que la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur est mobilisée, depuis de nombreuses années, notamment à travers une politique volontariste en matière de gestion et de prévention des risques naturels majeurs. Cette volonté, qu’a montrée très tôt la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, s’explique principalement par la prégnance des risques naturels et technologiques dans notre région puisque toutes les communes de la région, soient plus de 960 sont soumises à un ou plusieurs risques naturels. Cela montre bien l’importance qu’il y a à prendre en compte la problématique des risques naturels majeurs dans l’ensemble des politiques publiques, notamment dans les politiques d’aménagement du territoire.

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Il nous semblait important, en tant que Collectivité régionale, de rappeler que nous intervenons en matière de prévention et de gestion des risques naturels majeurs, à travers un certain nombre de dispositifs dans lesquels la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur est impliquée, souvent en partenariat d’ailleurs avec l’État. On peut citer bien sûr le Plan Rhône, mais il y a aussi un volet « risques » intégré dans le contrat de projets Etat-Région. La Région intervient également à travers une politique dite de solidarité, notamment pour venir en soutien aux victimes de catastrophes naturelles, face à des situations d’urgence. En ce sens, il nous semblait important, en ouverture de cette journée, d’avoir une pensée pour les victimes des inondations catastrophiques qui ont eu lieu en juin dernier dans la région de la Dracénie, et qui ont fortement marqué ces territoires et leurs populations.

Devant la prégnance de cette vulnérabilité aux risques de notre région, au-delà de la politique de prévention et de lutte contre les risques naturels majeurs, au-delà de cette politique de solidarité que nous avons voulu mettre en place, nous souhaitons, à la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, essayer aussi de nous mobiliser plus fortement sur la prise en compte de la vulnérabilité aux risques et sur le développement de la culture du risque. Il nous semble que ce sont deux dimensions essentielles, sur lesquelles nous souhaitons pouvoir nous mobiliser encore plus fortement que ce que nous le faisions jusqu’alors, à travers un certain nombre de dispositifs que nous souhaitons mettre en place. Je sais que, parmi les ateliers que vous aurez cet après-midi, vous allez aborder ces notions de culture du risque : comment faire en sorte que les populations de notre région intègrent dans leur vie quotidienne cette notion de vivre avec le risque, et donc sachent mieux se prémunir, notamment en cas d’événements catastrophiques ?

Par rapport à la problématique qui concerne plus spécifiquement le colloque d’aujourd’hui, sur l’instabilité des falaises côtières, au premier abord, on peut penser que c’est une préoccupation qui est peut-être moins prégnante que sur d’autres littoraux du territoire français, je pense aux côtes normandes et aux côtes basques. Mais, quand on y réfléchit, on voit bien que c’est un sujet qui, dans notre région, soulève une série d’enjeux importants et qui seront abordés tout au long des débats de cette journée. Notamment des enjeux en matière de sécurité, en matière de protection et également des enjeux environnementaux et d’aménagement. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si, dans le cadre du Schéma régional d’Aménagement et de Développement durable des territoires, qui a été adopté à l’unanimité par les élus de la Région en 2006, nous avions souhaité identifier le littoral de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur comme étant l’un de nos territoires à enjeux. Sachant que l’on entend par « territoire à enjeux » un territoire qui doit mobiliser l’attention des acteurs publics et institutionnels pour y développer, dans un partenariat, des politiques qui essaient d’intégrer les multiples enjeux qui se posent au sein des territoires, comme celui du littoral.

Je rappelle, en effet, que le littoral de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur est celui qui concentre la majeure partie de la population de notre région. C’est aussi ce territoire qui concentre les principales villes, et donc les principaux points de concentration des populations et de nos activités économiques. Une grande partie également des flux de transport et de communication. Cela montre l’importance qu’il y

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a sur ce littoral à pouvoir englober et intégrer la problématique du risque. C’est d’ailleurs en ce sens que, suite aux réflexions et aux travaux que nous avions conduits dans le cadre du Schéma régional d’Aménagement et de Développement du territoire, nous souhaitons mettre en place une politique de développement durable vis-à-vis de ce territoire du littoral, avec le souci permanent d’entretenir le lien qu’il établit entre l’arrière-pays et le domaine maritime. Nous sommes bien là sur une interface qui a ses fragilités et qui subit de multiples pressions. C’est cela aussi qui va être au cœur de vos débats d’aujourd’hui.

Je terminerai en remerciant le BRGM avec lequel, aux côtés de l’État nous travaillons en partenariat, depuis plusieurs années, sur des travaux de cartographie et de hiérarchisation des risques, principalement travaux qu’il a conduits sur le littoral régional et sur lesquels nous allons pouvoir nous appuyer aujourd’hui, mais aussi dans l’avenir pour mettre en place des politiques publiques efficaces et efficientes en matière de prévention et de lutte contre les risques naturels majeurs, en particulier sur cette problématique de l’instabilité des falaises côtières. Puisque nous sommes aussi convaincus, au niveau de la Collectivité régionale, que c’est par une meilleure connaissance des risques et des formes que prennent les risques que l’on arrivera à mieux les prendre en compte dans nos différentes politiques.

Voilà ce que je souhaitais dire dans mon propos introductif, en vous réaffirmant la volonté de la Région de continuer à se mobiliser fortement sur cette problématique des risques naturels majeurs. C’est, pour nous, quelque chose qui nous apparaît comme essentiel, vous l’avez compris dans mon propos, par la prégnance de ces risques, comme je le disais tout à l’heure. C’est à la fois, pour nous, un symbole de solidarité vis-à-vis des territoires et des populations soumis aux risques, et à travers notre compétence en matière d’aménagement du territoire, il nous apparaît aussi essentiel de pouvoir intégrer cette problématique des risques naturels majeurs.

Je nous souhaite de bons travaux, de bons débats. Je vous remercie encore d’être présents dès ce matin pour ce colloque sur l’instabilité des falaises côtières, et je vais passer la parole à Monsieur NORMAND.

Monsieur NORMAND.- Je voudrais revenir rapidement sur le contexte de ce colloque et la démarche entreprise en Provence-Alpes-Côte d’Azur par l’État, la Région et le BRGM, autour du risque d’instabilité des falaises côtières.

L’origine de notre colloque réside dans une étude réalisée en 2007 par le BRGM, qui s’intègre dans notre travail de long terme avec l’État et le Conseil régional sur la prévention des risques. Cette première étude a permis de décrire l’état d’érosion des falaises de notre région et d’aboutir à une cartographie des zones d’aléa d’instabilité des falaises côtières. Une trentaine de secteurs sensibles a été identifiée, et quatre d’entre eux font l’objet d’études plus avancées.

Cette problématique est relativement nouvelle et insuffisamment prise en compte dans l’aménagement. C’est pourquoi cette démarche d’amélioration de la connaissance sur l’ensemble de notre région est décisive aujourd’hui pour la prise de conscience de ce risque.

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Nous allons poursuivre cette acquisition de connaissances dans les années qui viennent, à travers des méthodes innovantes dont vous aurez des aperçus aujourd’hui. Mais, il était essentiel, une fois les aléas connus, d’associer les élus et les gestionnaires, afin de passer à l’élaboration d’une véritable politique de gestion et de prévention des risques d’instabilité. C’est dans ce but qu’un atelier a réuni, en 2009, sur le terrain, à Carry-le-Rouet, ces différents acteurs. Cette journée au pied de la falaise a permis de communiquer sur les études entreprises, de mieux présenter concrètement le risque aux élus et aux gestionnaires, et de débattre des modes de gestion adaptés.

Devant la qualité et la pertinence des débats qui ont eu lieu au cours de cette journée, nous avons souhaité élargir les échanges à l’ensemble des acteurs concernés de la région. Nous avons aussi cherché à dépasser nos frontières, en invitant des représentants d’autres régions qui nous feront bénéficier de leur retour d’expérience, et même de nos voisins italiens.

Notre démarche de concertation sur le mode de gestion de ces risques doit s’accompagner d’une information préventive de la population. L’Etat et la Région ont à cœur de diffuser, le plus largement possible, toute l’information sur les risques dans notre région. Cette diffusion auprès du grand public sera donc un axe très important de notre action sur les instabilités de falaises côtières, et toute cette connaissance que nous avons acquise sera intégrée dans les outils d’information du public en cours d’élaboration.

Les thèmes abordés aujourd’hui recouvriront bien ces trois étapes de notre politique de prévention des risques : la connaissance du risque, la définition d’une stratégie de réponse concertée et l’information du public.

Je souhaite donc que cette journée puisse répondre à vos questions, sans doute nombreuses, comme par exemple : Quel est l’état de nos connaissances ? Quel est l’impact du risque sur notre aménagement ? Quelle responsabilité pour les maires, pour les usagers ? Comment communiquer de manière efficace sur le risque lié aux falaises côtières ?

Je vous encourage donc à vous exprimer tout au long de la journée, le plus librement possible, afin que nos échanges soient instructifs et nourris.

Madame ROCCHESANI.- J’ai le plaisir d’être avec vous aujourd’hui pour animer ces échanges, qui seront, je l’espère, très nombreux. Nous avons prévu des temps de débats, de questions, au fil de cette journée.

Ce matin, deux temps où vous pourrez poser vos questions. Et cet après-midi, des formats « table ronde » beaucoup plus interactifs.

Rapidement, le programme. Ce matin, nous allons faire un point très large sur les enjeux naturels, démographiques en matière d’aménagement du territoire sur la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Nous ferons également un retour sur l’étude sur la prise en compte des problématiques liées aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire.

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Un peu après la pause, qui aura lieu aux alentours de 11 heures, nous reviendrons dans cette salle pour 11 heures 10, nous ferons un focus sur le Guide de gestion du trait de côte, qui est paru en mars dernier, et un point tout particulier, qui vous intéressera bien évidemment, sur les aspects juridiques et de responsabilité.

Puis, nous élargirons notre discussion en fin de matinée sur les différents programmes européens, dans la continuité d’EUROSION, ce qui s’est fait, et on fera un point tout particulier sur un retour d’expérience en Italie, avec nos invités italiens qui nous font le plaisir d’être avec nous ce matin, sur la Cinque Terre.

Et, cet après-midi, trois tables rondes que vous avez déjà évoquées. Pour commencer nos échanges, ce matin, un point sur les enjeux naturels,

démographiques. Nathalie QUELIN et Nancy SPINOUSA vont nous présenter ces enjeux naturels. Nathalie QUELIN, dans un premier temps, sur les aspects sableux, rocheux, la biodiversité, les sites classés, avec un projet d’Observatoire vu de la mer qui pourrait contribuer à cette meilleure connaissance des falaises. Nancy SPINOUSA nous parlera de démographie et d’aménagement du territoire.

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LE LITTORAL DE LA REGION PROVENCE-ALPES-CÔTE D’AZUR : UN TERRITOIRE A ENJEUX

Madame QUELIN.- Afin de démarrer ces travaux de la journée sur les

falaises côtières, nous avons pensé qu’un petit rappel général sur le littoral et ses enjeux naturels, puis anthropiques, était important pour donner le cadre.

Je suis, à la DREAL Provence-Alpes-Côte d’Azur, responsable de la Mission « Milieux marins et littoraux ».

La topographie littorale en Provence-Alpes-Côte d’Azur est composée de côtes meubles et de côtes rocheuses. Ces côtes rocheuses représentent 400 kilomètres sur un littoral qui en fait 687. C’est une proportion assez importante. Nous avons un relief très contrasté, mais les zones de falaises sont des côtes de type « érosion » car ce sont des côtes qui ne peuvent pas avancer, elles ne peuvent que reculer, contrairement aux zones sableuses, et cela dépend soit des matériaux qui les constituent, soit des conditions auxquelles ces falaises sont soumises. Avant d’enchaîner sur les différents types de falaises que l’on peut rencontrer dans notre région, je tenais à vous rappeler une définition donnée par Guilcher en 1954 sur ce qu’est une falaise. Cela me semble important en ce début de journée.

La falaise est un ressaut qui n’est pas couvert de végétation, mais qui est en forte pente- qui peut aller de 15° à un surplomb- de hauteur variable, au contact de la mer et de la terre, et qui est dû à l’action ou à la présence marine.

Les falaises, en l’occurrence, sont effectivement bien liées à cette notion de marinisation.

Nous avons plusieurs types de falaises régionales, de natures géologiques différentes. Des falaises qui sont plutôt calcaires, comme nos Calanques, des falaises plutôt d’origine cristalline (par exemple : la pointe des Chevaliers sur la Presqu’île de Giens ou le massif des Maures), des falaises plutôt porphyriques (comme le massif de l’Estérel, plus à l’Est de notre région).

Les paysages littoraux Suite à un travail très partenarial, notamment entre différents services, les

services de la Région, des experts, il a été établi en région Provence-Alpes-Côte d’Azur des atlas départementaux du paysage. Il en existe 6, qui sont d’ailleurs tous accessibles soit sur les sites Internet des institutions, dont celui de la DREAL Provence-Alpes-Côte d’Azur, soit en consultation papier pour celui des Bouches-du-Rhône. Ces atlas ont permis de faire une typologie des paysages régionaux.

Nous avonsainsi, sur la zone littorale, des grands ensembles qui permettent au sein desquels se distinguent tous les massifs côtiers.

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Pour information, nous sommes en train de réfléchir à la mise en place d’un Observatoire photographique « vu de la mer » qui pourrait, selon la façon dont il sera bâti, servir aussi à une meilleure connaissance de ces zones de falaises.

Les protections Les richesses patrimoniales sont protégées et sont caractérisées en

particulier au travers des monuments naturels, ou des sites qui ont un patrimoine historique, artistique, scientifique, légendaire ou pittoresque, mais qui relèvent de l’intérêt général. Cela est codifié dans le Code de l’environnement, et c’est issu de la loi de 1930. À ce titre-là, nous avons deux niveaux de protections : soit le classement, soit l‘inscription.

Un site classé est un site pour lequel on considère que la valeur patrimoniale est tellement importante qu’il faut absolument le préserver pour les générations futures, de façon à ce qu’il leur soit transmis intact. Toute modification est soumise à autorisation.

Sur le littoral PACA, nous avons quand même 136 sites classés sur les départements littoraux sur les 211 de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ; ce qui n’est pas négligeable. En général, les massifs côtiers sont des sites classés.

Il y a aussi des sites inscrits. L’inscription nécessite une vigilance particulière. C’est un peu moins fort que le classement, mais l’idée est aussi d’être très vigilant sur des espaces qui sont sensibles et dont le maintien de la qualité est nécessaire (les travaux sont soumis à l’architecte des bâtiments de France). Il y en a 185 dans les départements littoraux sur les 358 sites inscrits de PACA.

Sur le littoral, nous avons une politique pour essayer d’avoir plutôt des sites dits surfaciques plutôt que des sites ponctuels. En effet, le littoral étant une zone où il y a beaucoup de choses qui se passent, nous avons besoin d’avoir des grands ensembles pour avoir des cohérences à la fois paysagères et de préservation. Le massif de la Nerthe, par exemple, est en cours de classement.

Les inventaires Les richesses patrimoniales faunistiques et floristiques sont, par ailleurs,

inventoriées au travers des zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique. Il en existe sur terre et en mer. Un premier inventaire de 1988 a été actualisé en 2004. Ces éléments sont accessibles sur notre site Internet. Ces zones sont caractérisées par un intérêt biologique remarquable.

Il existe aussi des ZNIEFF dites géologiques. Il s’agit d’un inventaire qui date de 1988. Nous sommes en train de réfléchir pour voir comment l’actualiser, sachant que, pour la géologie, ce sont principalement des sites d’intérêt paléontologique, et beaucoup moins grands que les zones d’intérêt faunistique et floristique pour les espèces. Il y en a notamment beaucoup en zone littorale.

Pour information : quelques espèces que l’on trouve sur les falaises, qui peuvent provoquer des risques, en termes d’aménagement ou de réhabilitation de falaise, qui sont inféodées sur certaines falaises, et qui peuvent nécessiter des

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précautions particulières quand on met en place des aménagements ou des réhabilitations de falaise.

Par exemple : la doradille marine, qui est une espèce assez rare sur la zone chez nous. Elle a été récemment retrouvée à Porquerolles. Comme elle est inféodée aux fentes profondes des falaises, elle est assez sensible aux éboulements de falaise et à certaines espèces invasives, comme les griffes de sorcière.

En espèces animales, j’ai pris l’exemple du phyllodactyle d’Europe, qui est un petit gecko présent sur les îles et îlots de Méditerranée. On l’a notamment sur les îles de Marseille où il est, a priori, en légère régression. C’est une espèce qui est, pour l’instant, assez mal connue, dans le sens où l’on ne connaît pas les raisons de sa disparition. Comme c’est une espèce qui vit uniquement sur nos îlots, il y a là aussi une vigilance particulière.

L’astragale de Marseille est une espèce protégée. Elle est très localisée sur nos massifs calcicoles, d’où son appellation. Les menaces sont liées à tout ce qui est urbanisation et fréquentation. C’est une espèce qui ne se retrouve qu’en Méditerranée occidentale.

Un exemple d’oiseau : le martinet pâle. C’est un oiseau qui peut être amené à nicher dans nos falaises. En l’occurrence, nous avons répertorié des sites de nidification à la fois sur les Calanques, sur le Cap Canaille, le Cap Sicié, les Iles d’Hyères. Il a des menaces liées à d’autres espèces comme le rat noir, mais aussi des menaces liées au dérangement. On pense à des usages tels que l’escalade. Mais, on peut aussi penser que, si l’on est amené à intervenir sur une falaise qui s’éboule, il faut prendre en compte cet aspect-là.

La nivéole de Nice est une espèce qui se trouve inféodée au département des Alpes-Maritimes. C’est aussi une espèce qui est à prendre en compte de façon particulière.

Je voulais vous présenter ce petit panel pour illustrer. Je vais laisser la parole à ma collègue, qui va vous parler des aspects anthropiques.

Madame SPINOUSA.- Quelques cartes simplement pour poser le décor, comme cela a été rappelé à l’instant, pour donner quelques-uns des grands enjeux qui se posent sur ce territoire du littoral. Comme l’a rappelé Madame la Vice-présidente, c’est effectivement un territoire qui d’emblée a été affiché par la Région comme un territoire à enjeux, d’enjeu régional. Et comme cela a été déjà un peu introduit, c’est un territoire qui va concentrer énormément de questionnements : à la fois un lieu de concentration en termes de population, mais aussi en termes d’équipements, d’activités.

Une première carte montre la densité de la population. J’ai laissé la dimension régionale pour bien voir cette part du littoral dans l’ensemble de la dynamique démographique de la région. On voit bien une forte concentration de la population de Provence-Alpes-Côte d’Azur sur ce littoral. Elle est source de frottements, de conflits d’usage puisque c’est un territoire de la cohabitation des hommes, des activités, des équipements.

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La carte, de mon point de vue la plus intéressante, est celle qui rend compte de l’occupation du sol. On voit bien que la partie en vert concerne encore une forte part de la forêt et des milieux semi-naturels. On voit que, sur le littoral, c’est encore une part très importante. Ce qui renforce aussi les phénomènes de concentration dans les lieux urbanisés et agglomérés. En bleu foncé, vous avez les zones humides : pour l’essentiel la partie de la Camargue. En jaune, on voit les terres agricoles qui sont, à chaque fois, soit ancrées dans des territoires urbanisés, artificialisés, soit vraiment à la plus proche périphérie. C’est une problématique assez spécifique à notre région. La partie rouge est la partie artificialisée. Il faut voir là que nous avons une spécificité régionale puisque vous voyez une proportion de 30 % de ces territoires dits figés artificiellement contre 16,7 % pour le reste de la France. C’est donc un taux relativement important. On voit que ce taux est en grande partie dû aux équipements, notamment portuaires au sens large puisqu’on a des ports maritimes, des ports de plaisance qui représentent plus de 27 % de cette part figée artificiellement.

Une carte des infrastructures de communication puisque c’est aussi sur la bande du littoral que nous avons la concentration de nos aéroports, des plates-formes logistiques, des pôles d’échanges multimodaux, autoroutes et LGV.

J’ai rajouté cette carte qui montre aussi la densité des équipements touristiques, des hébergements (hôtels, campings, locations de vacances) puisque la concentration de populations à l’année est renforcée en saison estivale, et plus largement maintenant avec les systèmes de RTT, de week-ends prolongés, par une occupation de populations touristiques.

Pour autant, je l’ai dit en introduction, ce territoire est un territoire du développement économique de la région. C’est le territoire aussi des mutations économiques, de l’innovation. Est-il aujourd’hui limité dans son développement ?

Pour aborder cette dynamique, au niveau de l’évolution de la population, en volume et non pas en pourcentage, on voit que ce territoire littoral poursuit son développement et poursuit l’accueil des populations. Il reste, à l’échelle régionale, le territoire le plus dynamique du point de vue démographique.

En revanche, j’avais une autre carte qui montrait, en pourcentage, l’évolution de la population. Elle montrait que la zone qui est tout de suite dans l’influence du littoral, à savoir le moyen pays et l’arrière-pays du littoral est proportionnellement en augmentation de population. C’était pour donner à voir l’influence de ce littoral pour l’arrière-pays et les territoires qui lui sont tout de suite en proximité, qui sont des territoires qui sont aussi amenés à se développer fortement à l’échelle de notre région. Cela permet d’évoquer un enjeu, que l’on ne pourra pas développer complètement aujourd’hui : l’enjeu de la métropolisation. On sait que c’est sur les territoires du littoral que l’on a la plus forte concentration de nos agglomérations communautés urbaines, communautés d’agglomération, syndicats d’agglomération nouvelle. Les communautés de communes sont surtout positionnées sur le reste de la région, notamment sur le massif alpin.

Une carte sur l’intercommunalité de projets et pays, qui fait écho à la précédente. Je souhaitais vous la présenter parce qu’il y a aussi la présence forte de

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parcs, Parc régional de Camargue, et de pays en émergence, comme le Pays des Maures dans la partie varoise. Ce sont des agglomérations, mais pour expliquer aussi cette confrontation de territoires très urbanisés et artificialisés avec des espaces naturels encore très prégnants et très caractéristiques de cette zone.

Une carte pour exprimer aussi des organisations et les outils d’aménagement du territoire, notamment le Schéma de cohérence territoriale, pour montrer qu’il y a une organisation de ce territoire et des partenariats qui se sont constitués. On l’a vu par les contrats d’agglomération, mais également en termes de gestion et de prospective et de schéma de cohérence d’ensemble. Ces schémas sont importants à souligner puisqu’ils ont vocation aussi à se décliner dans les Plans locaux d’urbanisme et à avoir un impact fort sur l’avenir de l’aménagement de ce territoire.

J’en finirai par ce petit tableau parce que, au fond : quid des risques ? La journée étant consacrée aux risques d’érosion des falaises côtières. On ne dispose pas de carte synthétique concernant les risques sur ce territoire, mais on sait, par pratique, par expérience et par étude, que c’est un territoire soumis à l’ensemble des risques naturels majeurs, souvent au sein d’une même agglomération, d’une même commune et, a fortiori, d’un département. Nous sommes donc dans des approches multirisques :

- Les inondations. C’est le risque principal et le plus récurrent dans notre région.

- Les crues des fleuves côtiers puisque bon nombre de territoires du littoral sont traversés et irrigués par des fleuves côtiers. C’est aussi une problématique importante.

- Les coups de mer. Récemment, notre littoral de Provence-Alpes-Côte d’Azur a subi une série de coups de mer. Sainte-Maxime avait été notamment touchée.

- Le risque de tsunami n’est pas exclu ; loin s’en faut. - Les feux de forêt qui sont assez récurrents dans notre région. - Des zones à fort taux de sismicité. Je pense au Var en particulier et aux

Alpes-Maritimes. Pour autant, les populations et les habitants de ce littoral méditerranéen ont

conscience de cette exposition aux risques. C’est une étude qui date de 2005. C’était bien avant la catastrophe de Xynthia et, plus récemment, celle du Var. Mais, on voit, en comparaison avec le reste de la France, qu’il y a une conscience beaucoup plus forte puisque seulement 5 % des personnes interrogées considèrent n’être exposées à aucun risque, contre 23 % pour le reste de la France, et que nous avons une forte conscience du risque inondation, incendie de forêt, tremblement de terre, sécheresse dans une moindre mesure. À noter que les tempêtes ne sont pas évoquées, les coups de mer non plus. Un petit clin d’œil : dans l’enquête, on n’avait pas jugé peut-être opportun de suggérer le risque qui va nous intéresser aujourd’hui : le risque lié à l’érosion des falaises côtières.

Madame ROCCHESANI.- Merci beaucoup de nous avoir dressé ce contexte.

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Nous avons bien compris quels sont les enjeux naturels, les enjeux démographiques et économiques sur la région. On va se concentrer maintenant plus sur les risques liés aux falaises. Beaucoup d’études existent sur ce sujet. Nathalie MARÇOT et le BRGM ont trouvé opportun d’avoir une vision globale générale de toutes ces études pour nous en faire une synthèse, et pour ouvrir nos travaux de la journée.

Madame MARÇOT.- Je vais vous présenter, comme cela a été dit en introduction, une étude réalisée par le BRGM entre 2004 et 2007, dans le cadre du contrat de plan Etat-Région, dont l’objectif était d’étudier l’aléa « érosion des falaises côtières ». L’étude s’intitulait : La prise en compte de la problématique des risques liés aux falaises côtières dans l’aménagement du territoire.

Cette étude s’est réalisée sur 3 ans, avec un état des connaissances, en première année, une définition des enjeux et une hiérarchisation du risque en deuxième année, et un zoom sur quelques secteurs, avec une analyse socioéconomique en troisième année.

La première année a consisté à vraiment faire l’état d’érosion, le niveau 0 de l’état d’érosion des falaises côtières sur l’ensemble du linéaire de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur :

• Déterminer la nature lithologique et morphologique de ces falaises. La géologie est extrêmement variée d’un bout à l’autre, de Port-de-Bouc à Menton.

• Faire une reconnaissance des zones d’instabilité et identifier les plus sensibles.

• Etudier les historiques d’événements qui avaient pu se produire, ainsi que toutes les études géotechniques qui avaient pu se faire sur ces secteurs.

• Définir, à dire d’expert, un niveau d’aléa « instabilité de falaises côtières » par une segmentation.

Quelques généralités sur le littoral : Si on distingue les trois départements, même si le linéaire est plus une

notion géologique et géomorphologique qui passe au-delà des frontières départementales :

- Dans les Bouches-du-Rhône : 320 kilomètres de côtes dont plus de 100 de côtes rocheuses, avec la spécificité des Calanques, de la Côte bleue. C’est généralement une Provence calcaire. On notera la présence de la plus haute falaise maritime de France au Cap Canaille.

- Dans le Var : 330 kilomètres de côtes, dont plus de 200 rocheuses, assez diversifiées et tourmentées, essentiellement une lithologie cristalline.

- Dans les Alpes-Maritimes : un littoral très étroit et très aménagé, avec de véritables mégalopoles.

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Quelques illustrations, qui montrent vraiment la grande diversité de la côte rocheuse en Provence-Alpes-Côte d’Azur. À la fois des micro falaises et des hautes falaises, des matériaux durs ou meubles, d’origine granitique, basaltiques, argileuse ou calcaire. Et puis, en pied de falaise, différents types de morphologie : soit un banc rocheux plat et érodé, soit des couches de matériaux épais et grossiers, avec des plages en pied.

Cette étude a permis d’établir une typologie de ces instabilités. Nous avons mis en évidence que le phénomène « chute de blocs » était le phénomène récurrent. Plus de 17 % du littoral a été défini avec un aléa fort en instabilité rocheuse, et une trentaine de secteurs ont été déclarés sensibles.

Ce travail a été répertorié sur le système d’information cartographique avec un linéaire identifié en termes d’aléa, c’est-à-dire la probabilité d’occurrence qu’un événement se produise, de type chute de blocs et instabilité côtière. L’aléa allait de l’aléa nul à faible à l’aléa fort.

Trente secteurs dits sensibles ont été identifiés sur l’ensemble du linéaire côtier, avec les communes concernées mises en évidence. On retiendra principalement :

• dans les Bouches-du-Rhône : des secteurs de la Côte bleue, avec notamment Carry-le-Rouet ;

• dans le Var : pas mal de secteurs Centre Var et, à l’est, avec des instabilités assez caractéristiques ;

• dans les Alpes-Maritimes : le cap Estel, le cap Ferrat, des secteurs très urbanisés.

En deuxième année, nous avons fait un travail d’évaluation des enjeux. Nous avons inventorié tous les enjeux sur le linéaire, et nous avons confronté l’aléa et les enjeux pour mettre en évidence un risque d’instabilité.

Pour l’identification : - En termes d’habitat et de population : des grandes mégalopoles sur le

littoral entre Marseille, Toulon et Nice, et la Riviera française. - En termes d’activités industrielles et commerciales : quelques secteurs

importants de zones portuaires, de zones d’activité industrielle et commerciale, notamment dans le Var, sur Marseille et un peu sur les Alpes-Maritimes.

- En termes de poids touristique : un gros attrait touristique sur le littoral, y compris rocheux, dans notre région, avec une grosse part dans le Var, les Alpes-Maritimes, sur toute la Riviera française, et également sur les Bouches-du-Rhône.

- En termes d’accès au littoral : nous avons identifié tous les types d’accès à ce littoral rocheux, qu’il soit via des sentiers de randonnée, via des voies de circulation et, évidemment, beaucoup dans les Alpes-Maritimes, la voie ferrée qui se trouve, elle aussi, exposée à ce risque d’instabilité des falaises côtières.

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Je ne reviendrai pas sur les enjeux environnementaux car ils ont été exposés tout à l’heure.

À partir de tout cet inventaire des enjeux sur le littoral rocheux de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, nous avons attribué des codes arbitraires pour essayer de pondérer les enjeux par rapport aux dommages qui peuvent être entraînés en cas d’instabilité de falaises côtières.

Ensuite, nous les avons croisés à l’aléa pour estimer un niveau de risque. Par exemple : en ce qui concerne les accès au littoral, on a pu identifier des tronçons de littoral qui sont plus à risque pour les personnes qui parcourent ces sentiers, ou alors en termes d’urbanisation pour l’aménagement du territoire, surtout en amont des falaises.

Les résultats de cette deuxième année d’étude : Nous avons mis en évidence qu’en dehors des périodes de facteur aggravant

(augmentation de la fréquentation touristique ou les périodes de tempête comme on les subit souvent en automne), nous avons des secteurs à risque élevé à très élevé, en termes de dommages humains surtout, fonctionnels et d’impact économique.

L’analyse est pertinente à l’échelle régionale puisque l’on est bien dans une étude globale, à une échelle régionale.

L’objectif de cette étude était d’être utilisée à visée d’aménagement pour utiliser ce risque dans tous les documents d’aménagement.

L’année 3 de cette étude a consisté à choisir quelques sites représentatifs, particulièrement sensibles, et d’y réaliser une approche socioéconomique que l’on développera tout à l’heure.

Les sites représentatifs qui ont été sélectionnés sont : - Carry-le-Rouet et Istres bord de mer, sur l’Etang de Berre, qui connaît des

mouvements de terrain. - Le site de Port Cros, dans le Parc national de Port Cros. - La commune d’Eze bord de mer, dans les Alpes-Maritimes. La partie socioéconomique et perception du risque sera présentée dans la

table ronde n° 3. Je ne vais pas l’aborder ce matin. L’objectif était de proposer une méthodologie de gestion du risque et de

définir des schémas types d’aménagement sur ces quatre secteurs. Un rappel sur ce qui peut se faire. On verra, cet après-midi, les différents

outils pour gérer ce littoral rocheux. Un des outils, c’est évidemment l’aménagement pour stabiliser ces falaises, qui se fait assez souvent sur notre littoral, souvent au coup par coup dès qu’un événement se produit.

Quelques éléments : on traite souvent les falaises côtières au même titre que des falaises terrestres, avec des systèmes de drainage, de reprofilage, d’ancrage et de boulonnage. Et, souvent, la spécificité d’être en bord de mer est que l’on peut

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également mettre des protections en pied. Le problème réside dans les modifications des apports de matériaux ou non de ces falaises dans l’ensemble du système.

En termes de mesures d’aménagement, on distingue, au même titre que sur les falaises terrestres :

• des mesures structurales, à la fois pour réduire l’aléa et la vulnérabilité,

• des mesures actives ou passives,

• différents types de parade,

• des mesures non structurales. On verra aussi cela cet après-midi : formation et information du public,

législation, aménagement et assurance. Quelques focus sur les quatre sites étudiés plus en détail, qui sont

disponibles dans l’étude, qui est publique et téléchargeable sur le site du BRGM. - Sur Istres Bouches-du-Rhône : il existe des PPR Mouvements de terrain.

Nous sommes allés plus loin et nous avons essayé d’inventorier le problème sur ce littoral. Ce sont surtout des problématiques de chute de blocs et, sur un secteur particulier, des gros glissements de versant vers l’Etang de Berre.

On avait décomposé l’ensemble du glissement à partir des études faites par le CETE, pour replacer tout le contexte de ces phénomènes et les caractériser.

- Sur Carry-le-Rouet : nous avons repris l’ensemble des événements qui avaient pu se produire sur cette commune. Nous en parlerons également cet après-midi. Pour vous citer deux événements récents : un, de faible volume, le 6 février 2008, qui a néanmoins déstructuré une partie de la falaise au-dessus du port. Ce n’était pas plus de 5 mètres cubes et, depuis, quelques travaux ont été réalisés. Egalement un éboulement de 500 mètres cubes sur la falaise de Barqueroute, qui a commencé à grignoter les parcelles privées en hauteur, et où l’accès en pied de falaise était autorisé. En 2005, des effondrements sur la suite de la falaise de Barqueroute assez spécifiques, mais qui ne dépassaient pas les 200 mètres cubes.

Nous sommes allés un peu plus loin dans l’analyse de l’aléa, et nous avons essayé d’évaluer les volumes érodés, à partir notamment d’une comparaison photographique multi temporelle entre deux périodes espacées d’une trentaine d’années. Nous avons pu estimer, en 30 ans, qu’environ 34 % de la surface s’était érodée. Dans un deuxième temps, nous avons fait un essai de scan laser : deux levés successifs du relief à partir d’un laser qui permet d’obtenir un maillage de points, et donc un modèle numérique de terrain extrêmement précis, associé à une orthophoto. À partir de ces comparaisons, nous avons pu mettre en évidence également des secteurs particulièrement érosifs, marqués par de l’érosion différentielle, des déstabilisations de galets issues du poudingue en amont, des ravinements en pied de falaise, et des ravinements et érosions sous forme de plaquettes de marne qui ont été identifiées.

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Ce travail est en train de se poursuivre sur l’ensemble du linéaire de la commune de Carry-le-Rouet, pour essayer, à partir de 6 levés scan laser encadrant les trois prochains hivers, d’évaluer beaucoup plus précisément les volumes érodés et les replacer dans une série temporelle, afin d’évaluer un aléa probabiliste sur ce littoral rocheux qui s’érode de manière assez particulière.

- Sur le site de Port Cros : une demande d’aller plus loin par le Parc national, notamment parce que peu d’événements ont été recensés et inventoriés. En revanche, les falaises s’érodent assez rapidement. Le Parc national a un poids touristique très important en région, et les parades et les aménagements sont difficiles à dimensionner compte tenu de l’impact esthétique du site. Nous avons donné quelques éléments sur quelques secteurs qui nous paraissaient sensibles. À la fois par rapport à des accès qui se faisaient régulièrement par les plaisanciers, en dehors des accès par le port, par des sentiers qui sont à requalifier, recalibrer par rapport à des sites assez dangereux, et par la fréquentation des scientifiques qui étudient notamment les oiseaux et qui se baladent sur des secteurs assez dangereux.

- Pour la partie Eze bord de mer, dans les Alpes-Maritimes : nous sommes dans un site très différent, très urbanisé, et on arrive plus à une problématique terrestre que littorale puisque c’est la route et les voies ferrées qui, souvent, passent en pied. Nous avons proposé des modèles d’aménagement, avec des évaluations très rapides en termes de coût, pour donner des idées et pour ensuite pouvoir aller plus loin dans des études d’aménagement.

En termes de méthodologie de gestion de risques : Nous avons essayé de mettre en évidence les grandes étapes indispensables

pour gérer cet aléa à l’échelle d’une commune. Si on reprend les étapes dans l’ordre : - Faire un état des connaissances sur une commune : savoir si des études

géotechniques ont déjà été engagées, si la réglementation prend en compte ou pas ce phénomène, et si l’information préventive est présente ou non.

- Prendre en compte la perception du risque par les usagers. C’est ce qui sera abordé dans la table ronde, cet après-midi.

- Selon ce qui existe et ce qui est décidé à l’échelle communale, engager ou non des études supplémentaires d’amélioration de l’état des connaissances de l’aléa, de choix de parade ou d’aménagement, et les coûts d’investissement et d’entretien de ces aménagements, pour améliorer cette prise en compte du risque, à la fois en termes de gestion et pour diminuer la vulnérabilité.

Tout cela est à pondérer en termes de coût/bénéfice, aussi bien pour :

• Les aménagements et les parades.

• L’information au public, donc de la vulgarisation, du déploiement via les écoles, des panneaux d’information, l’appropriation de l’information.

• La mise en place ou pas de comités d’experts pour la sécurité et l’aménagement.

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• La réflexion en amont sur l’accès du littoral. Là, on revient à une échelle beaucoup plus globale, c’est-à-dire à des aménageurs, des études générales sur les risques et des modifications de schémas d’aménagement.

• La mise en place d’un système d’alerte en cas de phénomènes potentiellement dangereux.

C’est cette méthodologie qui a été proposée dans cette étude, et qui est applicable sur l’ensemble des communes du littoral, avec les contextes particuliers à étudier chaque fois.

Pour résumer : cette année 3 de l’étude a permis de définir des schémas types d’aménagement sur quatre sites, de proposer cette méthodologie de gestion du risque à l’aide d’une évaluation socioéconomique et de l’analyse de perception du risque.

Quelques rappels, avant la discussion et la présentation, tout à l’heure, sur la responsabilité et la gestion du trait de côte, sur les objectifs et les phases de la gestion des risques.

Ce document figure dans les DVD sur les risques naturels majeurs et les risques de mouvements de terrain, en particulier, qui vous ont été fournis à l’entrée.

Les quatre grandes phases sont :

• La prise en compte des risques.

• La réduction du risque.

• L’anticipation de la crise.

• La reconstruction, en cas de crise. Les principaux documents d’information préventive et d’ordre

réglementaire qui existent aujourd’hui sont résumés ici : - Documents d’information aux maires : les « porter à connaissance » qui

sont réalisés par le préfet à destination des élus. - En termes de documents publics, on distingue : les documents

d’information (les DICRIM, les DDRM, les documents réglementaires, les Plans communaux de sauvegarde et les Plans de prévention des risques) et, en intermédiaire, à destination surtout des particuliers, l’information acquéreur/locataire qui vise à signaler l’état des risques, issu des Plans de prévention des risques, dans tous les documents d’achat de biens.

Concernant les acteurs de la gestion des risques : ils vont du citoyen au préfet, en passant par les maires qui ont le pouvoir de police en termes de risques naturels, et qui ont toute la responsabilité de mettre en place un certain nombre de documents.

Madame ROCCHESANI.- Premier temps d’échanges : avez-vous déjà des questions à poser à Nathalie MARÇOT, Nathalie QUELIN, Nancy SPINOUSA sur

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leurs présentations ? Des questions peut-être très précises, sachant que nous allons revenir, au cours des ateliers de cet après-midi, sur la plupart des thèmes qui vous ont été présentés. Si déjà il y a des questions bloquantes, autant les poser tout de suite.

Monsieur HAMEL.- (Fédération des Clubs alpins de la montagne) Qui dit falaise dit possibilité de grimper et possibilité de randonner parce qu’il y a des paysages extraordinaires. Le sujet est donc très intéressant. Ceci étant, quelques mots prononcés me font peur, et reviennent bien souvent : aménagement et équipement. Je crois que nous avons des sites naturels extraordinaires dans notre région et qu’il faut faire le maximum pour les préserver et les conserver. Je crois qu’il ne faut pas raisonner à l’envers. En termes de risque, il est évident qu’une maison ou des habitations qui ont été implantées au sommet d’une falaise au bord de la mer, un jour ou l’autre, elles finiront par tomber. Il faudrait éviter d’autoriser les constructions de ces maisons.

Je voulais insister sur cet aspect de conservation des sites naturels. Je crois que nous avons la chance d’avoir des sites naturels extraordinaires, il ne faut pas les aménager, les sur aménager. Il faut le faire à bon escient. Je m’étonne d’ailleurs que l’on n’ait pas évoqué une fois le Parc national des Calanques, alors qu’il y a des débats très importants qui existent aujourd’hui dans la région marseillaise. Je crois qu’il faut en parler parce que voilà une méthode pour conserver un site naturel. Mais il n’est pas question d’aller grillager, bétonner et faire, je n’ose pas dire ce qui a été fait sur la Côte d’Azur. De grâce ! Evitons l’aménagement et conservons nos sites naturels extraordinaires.

Madame ROCCHESANI.- Je ne sais pas s’il y a une réponse tout de suite ou si l’on attend les échanges de cet après-midi. Je pense que l’on en débattra lors des ateliers.

Y a-t-il d’autres interventions ou questions ? Madame QUELIN.- Un élément de réponse : je n’ai pas dit qu’il y a tout

un panel de mesures de gestion qui existe par ailleurs sur le littoral, dont les parcs nationaux, bien évidemment. Nous avons évoqué Port Cros. Il y a le futur Parc des Calanques. De toute façon, les Calanques sont d’ores et déjà en site classé, au titre du massif des Calanques, et donc les travaux sont évidemment concertés entre le besoin de conforter ou pas une zone à risques et le fait que l’on est en site classé et qu’il y a donc des règles à respecter et un besoin de protection du milieu, et des espaces.

INTERVENTION.- (Chargée de mission DAT Région Provence-Alpes-Côte d’Azur) J’aimerais savoir quelles pourraient être les conséquences du réchauffement climatique sur les falaises ?

Madame ROCCHESANI.- C’est aussi le thème de notre première table ronde. Nous y reviendrons cet après-midi. Nous allons effectivement aborder toutes les questions cet après-midi. Je vous propose donc de prendre quelques minutes de pause. On se retrouve dans 20 minutes, et je n’oublierai pas votre question, on la posera dans la première table ronde de l’après-midi.

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(La séance est suspendue à 10 heures 40) ……………………………………………………………………………..

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(La séance est reprise à 11 heures 10)

GESTION DU TRAIT DE CÔTE ET RESPONSABILITES

Madame ROCCHESANI.- Nous allons reprendre nos échanges, avec

Frédéric RAOUT, du Bureau du littoral et du domaine public maritime, à la Direction de l’eau et de la biodiversité, au ministère de l’Ecologie, pour la présentation du Guide de gestion du trait de côte. Et, dans un deuxième temps, il nous fera une ouverture sur l’élaboration d’une stratégie nationale de gestion du trait de côte, avec un groupe de travail qui vient de se réunir hier.

Monsieur RAOUT.- Je vais vous présenter le Guide de gestion du trait de côte, que je présente comme un outil de gestion du trait de côte, dont je vais vous détailler le contenu, et qui est une des pierres de l’ensemble des réflexions en cours ou futures sur la gestion du trait de côte. Je précise également que l’on a édité un petit résumé de ce guide, dont vous avez un exemplaire dans votre pochette et qui, comme tous les résumés, est incomplet, donc n’empêche pas de consulter le guide lui-même.

Ce guide a été publié en mars 2010. C’est un ouvrage collectif, avec de nombreux intervenants : le ministère lui-même, différents services administratifs ou techniques, la Direction de la prévention des risques en particulier, de nombreux partenaires publics et privés, des universités, des centres techniques de l’équipement, le BRGM, l’Office national des forêts, l’Entente de démoustication Méditerranée et des bureaux d’études. Il a été diffusé au niveau communal, régional, départemental, suite à sa parution.

Ce guide est constitué de trois chapitres. - Le premier chapitre, que l’on peut qualifier de scientifique, fait le détail

des différents processus et des dynamiques des milieux littoraux, que ce soient côtes rocheuses ou côtes sédimentaires. Je précise que ce chapitre 1 a été rédigé sous la coordination de Monsieur COSTA ici présent, qui sera à la table ronde cet après-midi, qui pourra répondre à vos questions plus précises.

- Le chapitre 2 a été rédigé par l’administration centrale du ministère. C’est un chapitre qui décrit une démarche d’aide à la décision, avec une part « responsabilité », une part « méthodologie de réflexion », différentes options stratégiques possibles et une manière de choisir la meilleure ou la moins pire.

- Le chapitre 3, que l’on pourrait qualifier de technique, décrit la manière dont on réalise les études, les outils de suivi et les techniques de mise en œuvre de défense contre la mer ou de gestion du trait de côte (ouvrages en dur, ouvrages plus souples).

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Chapitre 1 : Son objectif est de fixer les choses en termes de vocabulaire. Pour le cas

particulier des falaises, le guide décrit les trois types de falaise existants : les falaises avec une plate-forme d’érosion en pied de falaise, les falaises qui sont plongeantes avec, éventuellement, une partie basse très érodée, et les formes particulières, telles que les abers bretons, les calanques méditerranéennes ou les fjords à l’étranger.

Ce chapitre décrit les différents processus qui sont en œuvre, notamment les érosions marines, mais aussi les érosions dues au vent ou à l’ensemble des phénomènes terrestres. Et puis, les différentes formes que les falaises peuvent prendre en fonction de la force respective des éléments marins et des éléments terrestres.

Ce chapitre, qui est assez dense, que je ne peux pas vous résumer ici, insiste en particulier sur le caractère mobile du trait de côte, avec pour le cas des falaises, une mobilité qui est uniquement en recul, alors que pour les côtes sableuses, on peut avoir des zones d’accumulation.

Le guide présente le littoral comme un système hydro-sédimentaire c’est-à-dire qu’il est important de raisonner à l’échelle sédimentologique adaptée pour identifier ce qu’on appelle les cellules sédimentaires à l’échelle desquelles se font tous les échanges, et à l’échelle de laquelle il faut raisonner pour pouvoir avoir une gestion la plus cohérente possible.

Autrement dit, l’idée est d’identifier les cellules sédimentaires, les apports qui interviennent soit de la partie terrestre, soit de la partie marine, et les pertes qui peuvent être vers le large, mais aussi les mouvements transversaux. L’idée est d’identifier les systèmes sédimentaires spécifiques à chaque zone et qui n’ont strictement rien à voir avec les limites administratives communales. Ce serait trop simple. Forcément, les choix qui sont faits en termes de gestion du trait de côte doivent tenir compte de ce qui se passe à l’aval ou à l’amont, dans le sens de la dérive littorale.

Chapitre 2 : C’est un chapitre d’aide à la décision, qui présente, dans un premier temps,

un petit historique de la manière dont on a géré le trait de côte. Pendant longtemps, la réaction, qui peut se comprendre, a été de fixer le

trait de côte. On a construit, en particulier dans la zone méditerranéenne, beaucoup de protections rigides (des épis, des brise-lames).

Dans un deuxième temps, plus récemment, on a évolué vers des techniques de protection un peu plus douces ou qui tiennent compte de la dynamique environnementale, avec des choses comme la gestion des dunes ou le rechargement de plages.

Et puis, encore plus récemment, une prise de conscience du risque et des limites de ces techniques. Cela a abouti vers les démarches, que l’on appelle gestion intégrée de la zone côtière (GIZC), qui sont basées sur la concertation, sur les réflexions en amont, sur la prise en compte de l’ensemble des phénomènes physiques, sociaux, environnementaux, pour aboutir à ce que l’on appelle une gestion durable du

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trait de côte, de la même manière que l’on a parlé récemment encore de développement durable.

Concrètement, dans le guide de gestion, sont identifiées les quatre options stratégiques possibles en termes de gestion du trait de côte. Ce sont des résultats de l’étude EUROSION de 2004. Elle a identifié quatre démarches possibles.

La première consiste à ne rien faire. On laisse l’évolution naturelle se faire. Ce n’est pas possible partout, mais aux endroits où il n’y a pas d’enjeu important, la solution la plus sage est vraiment de ne rien faire.

Un petit peu plus subtil : l’intervention limitée. Quand les enjeux le justifient, on gère l’évolution naturelle du trait de côte, mais en essayant de la contrôler, donc en construisant ou en réaménageant, par exemple, des dunes, des cordons dunaires, ou même des choses un peu plus dures. Mais, en tout cas, l’idée est de tenir compte du fait que le trait de côté évolue, mais on essaie de contrôler son évolution pour protéger les enjeux qui sont derrière.

La troisième option consiste à fixer le trait de côte. C’est assez simple. C’est l’inverse du laisser-faire. On dit que l’on ne veut pas que cela bouge. On construit des ouvrages, soit en dur, type digues, soit des choses un peu plus écologiques, pour faire simple – quoique cela se discute - des rechargements de plage ou des cordons dunaires.

La dernière option, que l’on a encore du mal à imaginer localement, c’est le recul stratégique. On considère que la partie est perdue contre la mer, et donc on déplace les enjeux. Cela coûterait trop cher de défendre cette partie-là, donc on recule, et on réaménage éventuellement des protections un peu plus en arrière, mais on déplace les enjeux.

Une fois que l’on a posé ces quatre options, laquelle choisir ? Le guide précise aussi une méthode pour le faire - c’est la démarche stratégique - sous forme de schéma de gestion du trait de côte. C’est une méthode utilisée notamment en Angleterre, qui se base sur l’identification des cellules sédimentaires indépendantes, et la comparaison des différentes options. On a parlé tout à l’heure d’analyse coût/bénéfice ou coût/avantage. L’idée est de mettre les quatre options sur la table, de comparer leurs impacts et leurs coûts objectivement et, au final, d’en tirer la conclusion la meilleure. Qu’est-ce qui, à long terme, reviendrait moins cher ? Qu’est-ce qui est le plus raisonnable pour tout le monde ?

Dernier point : l’établissement d’un plan de suivi. C’est important. J’y reviendrai tout à l’heure.

Si on voulait résumer le chapitre 2 en particulier en 5 points : - La connaissance. Pour faire des choix, il faut connaître le fonctionnement

hydraulique et sédimentaire du trait de côte. C’est un préalable. Sur ce point, on s’aperçoit que, d’une manière générale, nombre de connaissances existent, mais elles sont assez disparates. Nous sommes en train de travailler, au niveau du ministère, avec le BRGM d’ailleurs, pour essayer de capitaliser toutes ces connaissances qui existent. Il y a des endroits où l’on ne les connaît pas bien, mais il y en a où il y a beaucoup de

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connaissances, qui ne sont pas connectées, pour lesquelles il n’y a pas de synthèse suffisante ; ce qui fait que l’on arrive à des solutions assez absurdes, qui consistent à refaire des études, alors que l’on a déjà des choses.

- Anticiper. Les solutions les plus adaptées sont encore mieux si on peut les anticiper.

- Echelles adaptées. À la fois l’échelle spatiale au niveau des cellules, et l’échelle temporelle. On ne prend pas les mêmes décisions suivant que l’on raisonne à 10 ans ou à 50 ans ou à 100 ans.

- Reculer ? C’est une notion qui apparaît de plus en plus. Est-ce que, finalement, la meilleure solution n’est pas le recul ? Reculer ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut vraiment y réfléchir tout de suite, même si ce n’est pas demain que l’on va le faire. Mais, peut-être que, dans 50 ans, ce sera forcément ce qui sera fait. C’est particulièrement vrai au niveau des falaises. Il y a des endroits où la falaise recule. Même si on peut gérer ce recul, sur le fond on ne peut pas faire grand-chose, et la falaise finit par tomber.

- La concertation. Toutes les décisions ne peuvent être acceptées que si la concertation a été menée dès l’amont, et qu’elle continue après.

Chapitre 3 : C’est le chapitre technique, qui précise la manière dont on mène les études,

et les procédures de suivi, une fois que ces travaux sont faits. Importance de l’étude préliminaire : se poser les bonnes questions. Si on ne

pose pas les bonnes questions, on n’aura pas les bonnes réponses. Les outils de suivi à mettre en place. Ce chapitre permet de comparer les techniques. En termes de protection de

falaise, il précise les solutions possibles : Est-ce que l’on fait de la protection en pied ? Est-ce que l’on fait du reprofilage avec des terrasses ? Est-ce que l’on fait du drainage, ancrage, boulonnage ? Est-ce que l’on fait des protections en partie terrestre avec des systèmes de couverture qui font que cela limite les intrusions d’eau ?

Il y a différentes solutions possibles. C’est forcément du cas par cas. Cela a forcément ses limites à chaque fois. En particulier, si on stabilise les falaises, cela veut dire qu’on limite l’érosion. C’est ce que l’on veut faire. Mais, si on limite l’érosion, le stock qui est accumulé en pied de falaise, s’il y a du transit littoral, ne se retrouve pas à l’aval dans le sens du transit. Donc une solution positive localement peut avoir un impact négatif sur une zone à proximité.

En continuité de ce guide, le Grenelle de la mer a demandé la définition d’une stratégie nationale de gestion du trait de côte, dont l’intitulé complet est : Gestion du trait de côte, recul stratégique et défense contre la mer.

Cette stratégie vient tout juste d’être commencée. Un groupe de travail national de type Grenelle (avec les 5 collèges du Grenelle classique) s’est réuni hier pour la première réunion, avec une échéance, qui était au départ juin 2011, mais la nouvelle ministre de l’Ecologie a voulu mettre sa marque sur le groupe et montrer son

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intérêt, et les délais ont été raccourcis. Les résultats du groupe de travail doivent être édités pour le mois de mai. C’est assez court. Mais, on s’est aperçu déjà à la réunion d’hier qu’il y avait des choses relativement consensuelles et d’autres qui l’étaient moins, notamment en termes de nécessité d’avoir un cadrage national qui ne soit pas trop rigide non plus, pour permettre aux collectivités locales d’avoir une certaine marge de manœuvre, mais pas toutes les marges de manœuvre.

Le Guide de gestion du trait de côte a été édité aux éditions Quae. Il sera consultable, à partir du mois de mars, sur le site du ministère de l’Ecologie.

Madame ROCCHESANI.- Avant de poser des questions, je vous propose de faire un point juridique avec Maître BOURILHON, du cabinet Mauduit Lopasso.

Nous allons revenir plus en détail sur cette partie juridique, la responsabilité des élus, de l’État et des propriétaires privés.

Monsieur BOURILHON.- J’ai la charge de vous exposer la responsabilité juridique en matière de gestion de trait de côte. Pour débuter, j’aimerais préciser que l’on est véritablement en présence d’une schizophrénie juridique en la matière. En effet, nous verrons ensemble que la loi impose aux Départements d’ouvrir au public les espaces naturels dont ils font l’acquisition ; ce qui a institué un véritable service public des espaces naturels.

Par ailleurs, la loi impose aussi aux maires la police des rivages, et la jurisprudence a érigé en service public l’organisation des bains de mer et donc l’accès du public aux rivages.

Mais, en termes de responsabilité, les espaces littoraux sont de simples dépendances domaniales privées, sans prise en compte des difficultés liées à tous les aléas, climatiques ou géologiques. Dès lors, on oblige les collectivités à ouvrir au public sans cette prise en compte des aléas, et ce qui va resurgir sur le régime juridique des responsabilités que nous allons évoquer ensemble.

Nous verrons qu’il y a une véritable multiplicité des régimes de responsabilité en matière de trait de côte. Les personnes privées peuvent être mises en cause. Les personnes publiques également. Mais, quoi qu’il arrive, le plus souvent, les responsabilités s’enchevêtrent. Dès lors, mon propos va s’orienter essentiellement sur la responsabilité des collectivités, mais on verra aussi que, même dans le cadre de la mise en jeu de ce type de responsabilité, la responsabilité des personnes privées va avoir aussi une certaine valeur. J’ai fait parvenir un tableau sur la responsabilité civile des collectivités publiques. Je pense qu’il vous a été fourni.

Deux sous parties :

• La responsabilité civile des collectivités publiques au titre de leur domaine public.

• La responsabilité pénale liée aux accidents. S’agissant de la responsabilité civile, de prime abord, la responsabilité de

plein droit pèse sur la collectivité, en vertu de l’article 1384, alinéa premier du Code civil. C’est ce qu’on appelle la notion de garde de la chose. Vous verrez que la garde

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est analysée en réalité comme le pouvoir de contrôle, de direction et d’usage de la chose.

Dès lors, peu importe qu’il y ait ou qu’il n’y ait pas de faute du gardien. Il suffit, en quelque sorte - et là, je prends un raccourci volontaire - d’être le propriétaire, le simple gardien de cette chose.

Toutefois, malgré cette règle de principe, nombreux sont les cas d’exclusion, voire d’exonération totale de cette responsabilité des collectivités.

S’agissant des cas d’exclusion, on trouve de prime abord le transfert de la garde de la chose à un tiers. Ainsi, à titre d’exemple, dans l’hypothèse d’une falaise communale inaccessible, vous trouverez une jurisprudence de la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence du 3 juin 2009, aux termes de laquelle il y a absence de pouvoir de contrôle de la commune sur cette falaise, et donc transfert de la garde de la chose au Département qui est en charge de la conservation du domaine public routier.

Responsabilité de plein droit, cas d’exclusion, mais aussi - et c’est souvent le cas et c’est là que l’on s’aperçoit de l’enchevêtrement des responsabilités aussi bien des collectivités que des personnes privées - des cas d’exonération. Celle-ci peut être totale ou au partielle.

Le cas d’exonération le plus connu est celui dit « de force majeure », tel que prévu par l’article 1048 du Code civil. Des critères sont nécessaires pour révéler ce qui est un cas de force majeure. Ainsi, il s’agit d’un événement imprévisible et irrésistible. Le plus souvent, la jurisprudence va définir le cas de force majeure en éludant ce qu’est ou ce que n’est pas le cas de force majeure. Ainsi, puisque je suis devant vous pour évoquer la question de la responsabilité de gestion en matière de trait de côte, l’éboulement d’une falaise instable ne saurait être considéré comme un cas de force majeure. Il ne s’agit pas d’un événement imprévisible et irrésistible.

La cause étrangère aussi peut être cause d’exonération. Il y a nécessité, dans cette hypothèse, d’un événement ayant une origine extérieure, sans que l’on retrouve nécessairement les critères des cas de force majeure. À titre d’exemple : des dommages causés par les sangliers qui seraient possibles à maîtriser. Dans cette hypothèse, la cause est certes imprévisible, mais pas irrésistible.

Dans un deuxième temps, l’exonération peut être aussi, à nouveau, totale, voire partielle, et c’est là qu’intervient la responsabilité éventuellement de la victime, de l’usager du domaine. À titre d’exemple : l’accès à un lieu visitable en l’absence de protection ou de balisage précis n’est pas considéré comme telle.

De la même manière, on considère l’acceptation du risque comme l’installation d’un magasin à proximité d’un rocher instable. A contrario, la construction d’habitations en zone de montagne n’est pas considérée comme telle. Là, la commune doit pourvoir à la sécurité des habitants.

Vous le voyez, responsabilité de plein droit de la collectivité, au titre de son domaine privé, mais on n’exclut pas la responsabilité de la personne privée. Et, cela joue également en cas de responsabilité pénale. On va voir que la mise en jeu de la

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responsabilité pénale des collectivités peut être exercée, mais que la responsabilité pénale des personnes privées peut être intégrée dans cette réflexion.

Deux codes, pour l’essentiel, nous fixent les règles de la responsabilité pénale liée aux accidents : le Code pénal, évidemment, et le Code général des Collectivités territoriales.

L’article 121-2 du Code pénal prévoit ce que l’on appelle les fautes intentionnelles de la collectivité. Je vous le cite : Les personnes morales, à l’exclusion de l’État, sont responsables pénalement des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants. Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de convention de service public. Et in fine, il est bien précisé que la responsabilité pénale des personnes morales n’exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits.

On est véritablement là dans le cadre d’un fait dit intentionnel. Mais, il peut arriver aussi que l’on se trouve dans l’hypothèse de l’imprudence, voire de la négligence. C’est ce que l’on va qualifier de délit non intentionnel, tel que prévu par l’article 121-3 du Code pénal :

Il y a donc également délit en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales, compte tenu de la nature de ses missions ou de ses fonctions.

Dès lors, il y a une véritable recherche de l’intention ou de la non intention de la collectivité ou de l’agent. La responsabilité pénale va donc pouvoir peser aussi sur l’agent public qui va commettre un délit dans le cadre, ou en dehors du cadre, de l’exercice de ses fonctions.

Le CGCT prévoit également des hypothèses de mise en œuvre de la responsabilité pénale. Je vous renvoie à l’article 2123-34 du CGCT, qui prévoit que le maire ou un élu municipal le suppléant ou ayant reçu une délégation ne peut être condamné sur le fondement de l’article 121-2 du Code pénal s’il est établi qu’il n’a pas accompli les diligences normales compte tenu de ses compétences. On voit bien que le CGCT a intégré dans ses propres dispositions les dispositions du Code pénal.

Madame ROCCHESANI.- Avez-vous des cas concrets, des exemples de jurisprudence qui pourraient intéresser ?

Monsieur BOURILHON.- J’en ai déjà livré quelques-uns dans le tableau que je vous ai fourni. J’y reviendrai à l’occasion de la table ronde, si vous le souhaitez.

Il faut bien comprendre que l’on est véritablement face à un patchwork de règles juridiques, qui va être précisé, la plupart du temps, par la jurisprudence ; ce qui ne saurait vous satisfaire, et moi encore moins.

La mise en œuvre de mesures de police, la prise en compte des risques, l’anticipation des risques, en une expression la gestion du risque, doit pouvoir fixer de manière plus précise les cas de mise en jeu de la responsabilité des collectivités, voire

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des personnes privées et, à tout le moins, exclure, voire limiter, les possibilités de recours.

Des actions apparaissent ainsi possibles pour limiter ces possibilités de recours envers la collectivité : améliorer la connaissance des risques naturels, délimiter et baliser les lieux visitables, voire établir un programme de protection.

Aujourd’hui, il faut bien avoir conscience que la responsabilité des collectivités au titre de la gestion des traits de côte va pouvoir être mise en œuvre de multiples manières. Elle va pouvoir peser sur la collectivité, sur les agents. Elle va être mise en route par le canal civil, par la voie pénale, voire par la voie administrative.

Nous sommes donc face à la fois à une sorte de schizophrénie mise en place par le législateur, qui n’a pas su protéger l’administration, en ce sens qu’il lui a offert et imposé des pouvoirs sans la prise en compte de toutes les conséquences qu’elles entraînent.

Madame ROCCHESANI.- Je vous propose d’échanger avec Maître BOURILHON sur des cas auxquels vous avez été confrontés ou peut-être des explications avec un diagnostic sur le champ de Maître BOURILHON. On profite de votre présence. Est-ce que vous avez des questions ou des cas particuliers à partager ?

Madame SANDEL.- Je voulais intervenir parce que le guide qui a été réalisé me semble extrêmement bien fait. Il est sorti peu de temps, ou quasiment en même temps que la tempête Xynthia. J’ai moi-même été co-présidente du COMOP n° 6 du Grenelle de la mer, sur l’aménagement, la gestion et la protection du littoral. Nous sommes revenus, suite aux effets de cette tempête, sur des sujets aussi prégnants, en particulier pour les élus du littoral.

J’ai quelques questions à vous poser également au niveau juridique. Sur le sentier du littoral, on voit que de nombreuses portions du sentier du littoral sont très souvent fermées par les communes parce qu’elles sont situées sur des sites à risque, où la fréquentation du public est extrêmement réglementée. Les communes ferment tout bonnement le sentier du littoral. Et là, on ne sait plus qui a la responsabilité de l’entretien. Ce sont souvent les Départements. Les Régions interviennent modestement dans la restauration du sentier du littoral. Je crois que c’est un problème important, et je voulais vous demander votre avis au niveau juridique.

Concernant la restauration des sites dégradés, on voit souvent des épis en mer qui sont inutiles, et il y a très peu d’exemples de retrait de ces épis. À ma connaissance, dans la baie d’Agay, des épis ont été retirés, donc restauration du milieu marin. Pourquoi n’active-t-on pas plus cet aspect : remettre le trait de côte dans sa situation originelle puisque l’on sait que, maintenant, les épis sont très nocifs pour le milieu ?

Monsieur BOURILHON.- Il est vrai que la plupart des communes, pour anticiper les éventuels accidents, décident de fermer les sentiers littoraux. C’est une décision qu’elles prennent au regard de leur propre responsabilité.

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S’agissant de l’entretien, les Départements prennent très souvent le relais. Je crois que la commune devrait aussi, à un moment ou à un autre, assumer l’entretien de ses sentiers. Et la responsabilité doit d’ailleurs leur incomber.

INTERVENTION.- (DDTM13, service Mer et Littoral) Je voudrais rebondir sur ces problèmes de sentier littoral. La mise en place de la servitude des biens est de la compétence de l’État. Actuellement, sur les Bouches-du-Rhône, le sentier n’est pas présent au titre de la servitude partout. Parfois, les communes se prévalent d’un sentier littoral qui n’est pas officiel. Lorsqu’il l’est, normalement l’entretien devrait être fait par l’État, sauf s’il y a une convention mise en place pour l’entretien donnant la responsabilité à la commune. C’est ce que nous essayons de mettre en place dans le département, chaque fois que nous ouvrons une section.

C’est bien la commune qui a la charge de l’entretien. Au vu des problèmes de risque, on comprend parfaitement que, dans un premier temps, elle se permette de fermer ces tronçons pour faire prévaloir la sécurité sur la beauté du paysage.

Monsieur HAMEL.- (Club alpin français) Je ne peux pas ne pas intervenir puisque, bien souvent, en étant pratiquants, nous utilisons tous ces sentiers, et nous regrettons les fermetures. Nous ne sommes pas des inconscients. On revient toujours à ce problème dont vous parliez : la schizophrénie. J’avais envie de vous poser une question : est-ce que l’on peut espérer un jour mettre fin à cette schizophrénie ?

Je crois que l’on a affaire à des gens responsables. Nous sommes des pratiquants dans des fédérations, et on enseigne ce que l’on appelle l’autonomie et la responsabilité. Chose qui mérite d’être soulignée et devrait être développée un peu partout. Nous sommes responsables de nous-mêmes. Nous ne sommes pas des enfants à qui il faut dire : n’allez pas là, c’est dangereux.

Je sais bien que je provoque car j’ai eu plusieurs fois des discussions avec des responsables et des maires. Il est tout à fait anormal qu’ils se voient condamnés. Vous auriez pu citer l’exemple de l’arrêté de la grotte Bibémus, qui s’est passé dans le secteur d’Aix-en-Provence, la montagne Sainte-Victoire. Ce n’est pas une falaise côtière, mais on a exactement le même problème : dans une grotte, des randonneurs font un feu, un rocher s’écroule, malheureusement une fille se voit amputée d’une jambe. C’est le Conseil général qui a été attaqué, qui a perdu en appel et qui s’est vu condamné à indemniser cette personne-là. C’est tout à fait anormal. Résultat : la décision a été prise de fermer toutes les grottes. Pour ceux qui connaissent la région marseillaise, fermer la grotte Rolland, cela consiste à mettre des grilles pour empêcher les gens de rentrer. Mais, bon sang ! C’est dommage ! De plus, quand on veut fermer, on va toujours prôner que c’est pour des raisons de sécurité ou pour des raisons de protection. Là, en l’occurrence, on va fermer les grottes pour protéger les chauves-souris. C’est un petit peu hypocrite. En fait, c’est pour se protéger. Et je le comprends.

Monsieur BOURILHON.- Je comprends votre frustration éventuelle à la fermeture de ce genre de site. Toutefois, vous êtes, j’en suis sûr, des personnes responsables. Ce n’est pas la question. Mais, des personnes responsables, j’en vois tous les jours qui me disent : je fais telle ou telle action en pleine connaissance de cause, et qui, une fois l’accident arrivé, introduisent l’action contentieuse parce

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qu’elles ont subi des blessures physiques. La responsabilité morale des promeneurs n’est pas en cause. Toutefois, il faut bien comprendre aussi que lorsque la collectivité décide d’opérer telle ou telle fermeture, ce n’est pas tout d’abord pour se protéger elle-même, mais c’est déjà pour protéger ces personnes privées de ce type de risque.

Je vois bien que ce discours n’a pas l’air de vous satisfaire complètement. Toutefois, il faut bien avoir conscience que c’est quand même l’intérêt principal de la collectivité de protéger les usagers.

Monsieur HAMEL.- C’est ce principe de précaution qui, poussé à l’extrême, interdit toute action et est vraiment regrettable. On peut pousser le principe de précaution, et contribuer à tout fermer et à restreindre toutes les libertés.

Monsieur GUEGUEN.- (GIP Littoral Aquitain) Ma première question s’adresse à Monsieur RAOUT et concerne l’intégration des approches régionales. Nous en avons une en Aquitaine. Vous en avez aujourd’hui l’exemple qu’il y en a une en cours d’émergence en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Comment seront intégrées ces approches locales, voire régionales pour certaines, dans la stratégie nationale ? Est-ce que le comité de pilotage, dont vous avez fait état tout à l’heure, intègre ces représentations régionales ?

La deuxième question concerne les stratégies qui émergeront de cette stratégie nationale : comment se traduira-t-elle en termes d’outils réglementaires et financiers ? Je pense notamment à ce que vous avez appelé le recul stratégique. Est-ce que vous intégrez la notion de relocalisation en arrière du front de mer ou pas ?

Monsieur RAOUT.- Pour la première question sur les approches régionales : oui, bien sûr, nous allons tenir compte des exemples déjà mis en œuvre. C’est le cas en Aquitaine. C’est aussi le cas en Nord-Pas-de-Calais, en Languedoc-Roussillon. Des choses ont été très bien faites, qui n’ont pas attendu qu’il y ait une stratégie nationale pour faire des choses localement. L’idée est de prendre en compte les bons exemples locaux, quand ils ont été réalisés. Nous allons regarder cela de très près. On les connaît déjà, mais on va les présenter au groupe de travail.

D’autre part, les approches étrangères, également. On pense en particulier à la démarche anglaise. On nous parle souvent des Pays-Bas, mais ils sont dans une situation un peu différente de la France. Nous allons quand même regarder ce qu’ils proposent.

Nous allons prendre en compte tout ce qui existe, que ce soit bon ou mauvais d’ailleurs, mais plutôt les bons, bien sûr, ou les mauvais en contre-exemples.

Sur le recul stratégique et les moyens de mettre en œuvre, financiers, réglementaires et autres, c’est vraiment la grande question. Dans cette stratégie, on parle de plein de choses : sur la gouvernance, sur l’articulation des politiques publiques entre les différents ministères. Mais, la grande question est : si l’on veut faire du recul, comment le fait-on ? Qui le fait ? Qui est responsable de quoi ? Qui paye ? C’est vraiment le sujet central.

Nous sommes en phase de réflexion. Nous allons nous inspirer de ce que font les Anglais. Nous allons essayer de fixer le vocabulaire car « recul stratégique » a

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une connotation négative. Les Anglais parlent de réalignement. Il y a sûrement des choses à faire en termes de communication. On a vu, avec Xynthia, que l’appellation des notions peut avoir un impact énorme, que l’on ne prend pas en compte au départ. Quand on parle de zones noires, ce n’est pas pareil que de parler de zones de solidarité. On voudrait donc déjà fixer les choses en termes de vocabulaire. Mais, quand on a défini le vocabulaire, on n’a encore rien fait. Ensuite, il va falloir, en termes réglementaires, d’urbanisme, financiers, définir des choses. C’est le gros sujet. Pour l’instant, je n’ai pas de réponse. C’est le sujet sur lequel on nous attend, et c’est normal.

Je voulais répondre à la question concernant la destruction des épis et des autres ouvrages. Il y a beaucoup d’ouvrages qui ont un impact soit négatif, soit carrément plus aucun impact parce qu’ils sont complètement immergés, maintenant. La question est : faudrait-il les détruire ? Oui, bien sûr. Mais, honnêtement, compte tenu des crédits financiers que l’on a sur l’entretien du DPM, la démolition des blockhaus par exemple, où il y a encore beaucoup de choses à faire, ce n’est pas la priorité. C’est une bonne question, il faut qu’on l’ait en tête. Mais, pour parler clairement, quand on en sera là, on aura déjà fait du chemin. Et j’ai bien peur que, sauf exception, nous ayons encore beaucoup d’ouvrages qui restent pendant un certain temps sur le domaine public maritime. Sans compter qu’en termes d’acceptation, ce n’est pas facile non plus d’expliquer aux gens que cet ouvrage ne sert à rien, qu’on va l’enlever. Cela peut avoir un impact négatif. Enlever un ouvrage n’est jamais neutre complètement. Et cela coûte de l’argent. C’est une question de priorité qui est importante.

Monsieur VELLA.- (Université de Provence, CEREGE, responsable d’un master Gestion des risques naturels et technologiques) Je voudrais faire deux remarques. Tout d’abord sur les sentiers littoraux. Il ne faudrait pas imaginer, parce que l’accès à pied aux sentiers littoraux est relativement soft que cela n’a pas d’impact sur les processus. Parfois, dans certains cas, il faut le juger au cas par cas, le piétinement a des forts impacts sur notamment le ruissellement des eaux, et va accélérer les processus d’érosion, principalement dans certains cas de falaises meubles, mais dans quasiment tous les cas. L’accès est parfois coupé par les communes aussi pour ralentir le processus d’érosion.

Concernant le recul stratégique, je ne voudrais pas que, dans la salle, on puisse comprendre que l’on recule, on déplace les enjeux, et que c’est juste un problème financier, de foncier et juridique. Si l’on pratique le recul stratégique, il ne faut pas laisser faire non plus totalement la nature. Ne serait-ce que surveiller comment le processus de recul va s’amorcer. Notamment pour les ouvrages anciens, si on pratique le recul stratégique, il va être impératif, dans certains cas, d’enlever les ouvrages anciens qui perturbent considérablement le transit sédimentaire et les courants. Parfois, il faudra peut-être aider à ce recul pour retrouver une stabilité du profil de plage, quand c’est une côte sableuse, voire de la falaise. Le recul stratégique n’est pas : on recule les enjeux et on laisse faire du côté face mer les processus naturels. Il va falloir les accompagner, les surveiller.

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Monsieur RAYBAUT.- (Conseiller municipal Carry-le-Rouet) Je reviens au chemin du littoral. Quelquefois, il est détourné et ne passe pas en crête de falaise parce qu’il y a des propriétés privées. À ce moment-là, le propriétaire est responsable. Si le pied de falaise est accessible aux baigneurs ou aux pêcheurs, il y a un ménage à trois : le propriétaire, le baigneur ou le pêcheur et la collectivité. Est-ce que vous pouvez nous préciser les différences de responsabilité ?

Monsieur BOURILHON.- Le ménage à trois est assez évident. Pour la collectivité, on retombe sur la responsabilité, dite de plein droit, de garde de la chose. Pour le pêcheur ou le baigneur, on est dans le cadre de l’usager, que j’évoquais tout à l’heure. Pour le propriétaire privé, le propriétaire est gardien de la chose. On retombe sur un ménage à deux, en réalité. Tout dépend du lieu où se situe l’accident.

Monsieur RAOUT.- Pour répondre à l’intervention de tout à l’heure, j’adhère tout à fait à ce qui a été dit sur l’impact qui peut être important des usagers du sentier sur l’érosion côtière. Je suis passé peut-être un peu vite sur le recul. C’est une démarche active. On déplace les enjeux et, en plus, on aménage activement le littoral, d’une part en modifiant éventuellement les digues en place, et en en construisant d’autres plus en arrière pour protéger les enjeux quand ils ont été déplacés.

L’expérience montre aussi que l’acceptabilité du recul est encore meilleure s’il y a cette démarche active d’aménagement, c’est-à-dire l’impression de maîtrise de l’homme sur la nature. On aménage le littoral en fonction des enjeux en place, et on ne laisse pas faire. Cette option n’est pas du tout du laisser-faire.

Madame ROCCHESANI.- Nous reviendrons sur toutes ces questions cet après-midi.

ACTUALITÉS SUR LES ACTIONS NATIONALES ET EUROPÉENNES

Je vous propose, à présent, d’élargir le débat à l’Europe. Nous allons

revenir avec vous, Christine CLUS-AUBY, Secrétaire général de l’EUCC (Union européenne pour la préservation des côtes), sur une sélection des programmes dans la continuité d’EUROSION. Et peut-être, dans un premier temps, pouvez-vous nous rappeler les grands principes d’EUROSION ?

Madame CLUS-AUBY.- Je vais tâcher de vous présenter des programmes concernant l’érosion côtière en général parce qu’il est apparu qu’il y a assez peu, même très peu, de programmes spécifiques aux falaises, mais les programmes falaises entrent dans le cadre de programmes plus généraux.

Un petit rappel du programme EUROSION, qui a été très important pour l’orientation des recherches, depuis quelques années. C’était une étude commandée par la DG Environnement, à l’initiative du Parlement européen, qui a duré 2 ans, qui a coûté 5 M€ et qui a couvert les côtes de 20 pays membres de l’Union européenne. Elle a été mise en place par un Consortium européen piloté par l’Institut national de la gestion côtière et maritime des Pays-Bas.

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Ses objectifs étaient de dresser un bilan de l’érosion côtière à l’échelle européenne, d’évaluer les impacts socioéconomiques et écologiques de l’érosion des côtes et d’identifier des pistes d’action.

Au bout de deux ans, elle a réalisé une importante base de données, montrant l’ampleur de l’érosion sur toutes ces côtes européennes, un guide de gestion du trait de côte, malheureusement uniquement en anglais, qui détaillait les cinq conclusions majeures du programme, et un document à l’intention des décideurs, qui s’appelait Vivre avec l’érosion côtière en Europe.

Ce dernier document énonce les quatre recommandations clés qu’EUROSION a définies pour une gestion durable du risque d’érosion.

1ère recommandation : Dans la perspective du changement climatique attendu, il est recommandé

que la résilience côtière soit renforcée, en rétablissant l’équilibre sédimentaire, en laissant la place nécessaire pour s’adapter à l’érosion et pour permettre le libre jeu des processus naturels, et en identifiant les réserves stratégiques de sédiments.

2ème recommandation : L’impact, le coût et le risque liés à l’érosion côtière devraient être maîtrisés

par une meilleure intégration des problèmes dans la planification et les décisions d’ordre financier.

Ainsi, la responsabilité publique devrait être limitée, et une partie appropriée du risque devrait être à la charge du bénéficiaire et des investisseurs qui sont directement concernés par le cas local.

Ces risques devraient faire l’objet d’un suivi, être cartographiés, évoluer et être intégrés dans des plans et des politiques d’investissement.

3ème recommandation : La gestion de l’érosion côtière devrait passer des solutions partielles à une

approche planifiée. Cette stratégie devrait être guidée par le besoin de rétablir la résilience côtière, une situation sédimentaire favorable, par l’identification de plans de gestion des sédiments côtiers.

4ème recommandation : La base de connaissances de la gestion et de la planification de l’érosion

devrait être renforcée par le développement de stratégies de l’information. Celle-ci devrait inclure la diffusion des majeures pratiques de gestion.

Beaucoup de programmes ultérieurs traitant de l’érosion s’inscrivent dans la continuité de ce programme, dans la mesure où ils visent à mettre en place ces recommandations.

Je vais vous présenter quelques initiatives. Il est impossible de présenter tout ce qui se fait. J’ai fait un choix de quelques initiatives assez représentatives de la gestion de l’érosion, actuellement.

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- COPRANET (Coastal Practice Network) a deux objectifs prioritaires :

• Aider à l’établissement d’un réseau de praticiens du littoral et rapprocher les scientifiques et les aménageurs en Europe.

• Favoriser l’échange de connaissances sur les modes de gestion de l’érosion côtière, du tourisme durable et de l’aménagement des plages.

En ce sens, il se raccorde à la recommandation 4 d’EUROSION. Pour le premier de ces objectifs, le programme a réalisé un Guide de

gestion des plages, réalisé par les vingt organisations partenaires, soixante études de cas tout autour de l’Europe, et a mis en place une base de données conséquente, qui est encore disponible sur le site Internet qui a été créé pour ce programme.

- RESPONSE (Répondre aux risques liés au changement climatique dans les zones côtières) : c’est un projet de 3 ans, qui a reçu le soutien du programme LIFE. Neuf organisations partenaires, au Royaume-Uni, en Italie, en Pologne, en France, ont participé à ce projet. Il était coordonné par le Centre de développement côtier de l’Ile de Wight.

Son objectif est :

• Aider les organisations gestionnaires du trait de côte à évaluer les risques induits par le changement climatique.

• Etablir des priorités et les intégrer dans les processus d’aménagement et d’urbanisation.

Ce projet offre un cadre qui permet de comprendre les impacts du changement climatique sur le trait de côte européen, et de s’y préparer. Il se raccorde à la recommandation 2 d’EUROSION.

Le projet a proposé une cartographie de l’évolution de la côte à l’échelle régionale, qui prend en compte les impacts du changement climatique. Voici une carte qui montre, par exemple, le changement des risques côtiers dans le Pays Basque français. Nous en parlerons plus longuement cet après-midi

Dans l’étude RESPONSE, les coûts actuels et futurs des aléas côtiers ont été analysés, afin de mettre en avant des solutions efficaces et financièrement assumables.

Voici un exemple de conseil donné par le programme RESPONSE aux aménageurs locaux :

Une falaise en érosion. La zone rouge représente la zone qui pourrait disparaître d’ici 20 ans. On voit que les constructions y sont interdites, ainsi que les réhabilitations. Plus on s’écarte de la côte, plus la quantité d’aménagements est possible, jusqu’à la zone verte qui est considérée à l’écart du risque pour les 60 prochaines années.

- CONSCIENCE : c’est un programme financé par l’Union européenne, qui était dans le 6ème programme-cadre pour la recherche. Il a été lancé en 2007 dans

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l’intention d’améliorer la mise en place d’une gestion durable de l’érosion, en se basant sur une approche scientifique.

L’objectif était de tester et de développer des concepts et des outils, en se basant sur les dernières avancées scientifiques et sur l’expérience pratique.

Les concepts et les outils ont été testés dans six sites pilotes en Europe, en s’appuyant sur les recommandations d’EUROSION.

Le programme a proposé un certain nombre de documents, de conseils, d’outils, pour mettre en place une stratégie durable de la gestion de l’érosion. Il s’agissait de permettre aux gestionnaires de choisir la solution la plus durable qui permette la résilience côtière.

- ANCORIM : c’est un projet européen qui a réuni 19 partenaires de sept régions atlantiques, dans quatre pays : Irlande, France, Espagne, Portugal. Le leader en est la Région Aquitaine. Il a commencé l’année dernière et va se prolonger jusqu’en 2012.

Il est cofinancé par la Communauté européenne et les régions partenaires. Il est né de la volonté des gestionnaires et des scientifiques de mieux s’associer pour prévenir et gérer les risques littoraux.

Ses objectifs sont de :

• Faciliter les décisions en matière de prévention et de gestion, grâce au déploiement d’outils qui permettent de traduire l’information scientifique, et d’anticiper les risques.

• Mettre en réseau l’expertise disponible sur l’espace atlantique.

• Renforcer les concepts de gestion intégrée des zones côtières et de gouvernance sur l’arc atlantique.

Trois thèmes sont prioritaires sur ce projet :

• La mobilité du trait de côte et l’érosion.

• L’aménagement des espaces littoraux.

• La qualité des eaux côtières. Actuellement, ce programme, qui a commencé il y a un an, a procédé au

recensement des ressources existantes, à l’analyse des besoins. Le premier séminaire s’est tenu, début octobre, dans la presqu’île de Gâvres, en Bretagne.

- CLAREC (Contrôle par laser aéroporté des risques environnementaux côtiers) : c’est un programme interrégional piloté par l’université de Caen, qui regroupe quatre régions bordées par la Manche : la Haute-Normandie, la Basse-Normandie, la Picardie et le Nord-Pas-de-Calais. Il est financé par les quatre Régions et le CNRS.

Son objectif est de comprendre et de mesurer l’évolution du littoral, depuis la Baie du Mont Saint-Michel jusqu’à la frontière belge, avec l’idée d’anticiper sur les risques à venir.

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Pour obtenir des instantanés des côtes, un lidar est embarqué dans un avion, afin de réaliser des relevés topographiques très précis. Ces relevés sont comparés aux données photogrammétriques dont on dispose déjà. Parmi les exemples de sites qui sont surveillés par lidar, il y a les fameuses falaises crayeuses de Haute-Normandie.

Les résultats attendus sont l’estimation des vitesses et des rythmes de recul, et surtout une cartographie précise des risques.

- BRITISH GEOLOGICAL SURVEY : ce programme concerne exclusivement les falaises. Il consiste à surveiller les côtes, à l’aide d’un lidar terrestre. Le lidar est placé sur les plages, face aux falaises, et à l’aide de plusieurs scans pris à des moments différents, on peut calculer le changement de volume et le taux de récession des hautes falaises. On peut également obtenir plus d’informations sur la manière dont la falaise change qu’avec de simples photos. On peut scanner 800 mètres de falaise à la fois. Et le scan collecte 2 000 mesures individuelles par minute. On a donc énormément de données.

Le British Geological Survey suit actuellement douze sites en Grande-Bretagne, qui ont été choisis parmi les falaises non protégées, de roches tendres, afin que les changements puissent être enregistrés pendant toute la durée du projet.

Ce catalogue n’a absolument pas la prétention de l’exhaustivité. D’autres programmes existent, mais pas forcément à l’échelle européenne, et ils sont plus limités.

Madame ROCCHESANI.- On développera les programmes cet après-midi, au fil des tables rondes. Et, tout de suite, un programme en Italie.

RETOUR D’EXPÉRIENCE EN ITALE (CÔTE LIGURE)

Monsieur DEL SOLDATO.- J’ai résumé, dans cette présentation,

l’expérience des études et de la gestion du problème des côtes et des falaises, mais aussi du Plan de Bassin, une expérience débutée il y a 10 ans.

La côte de la Ligurie orientale, de La Spezia en particulier, est très souvent concernée par des phénomènes d’instabilité de versants, qui ont des conséquences sur les territoires et sur la sûreté des résidents. Nous avons 4 226 habitants concentrés sur une superficie de moins de 4 kilomètres carrés, qui correspondent à la bande côtière du Parc national des Cinque Terre.

Il y a 361 exploitations agricoles, sur une superficie totale de 92 hectares, concentrant la production du DOC sciacchetrà, le plus célèbre et connu des vins des Cinque Terre, et surtout du tourisme (2 millions et demi de visiteurs par an sur les sentiers qui traversent le Parc national des Cinque Terre) : la via dell’Amore et le sentier Azzurro pour rappeler les plus fameux. Tout cela produit toujours des problèmes, des victimes, des accidents.

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L’image satellitaire met en évidence la prépondérance de la côte haute à falaises dans le territoire compris entre Gênes à La Spezia. Depuis, à l’extérieur en Toscane, il y a le plan côtier le plus important. Mais, le territoire de notre compétence est pratiquement tout en côte haute.

Dans la Carte de la prédisposition aux mouvements des versants, qui a été réalisée pour le Plan de Bassin, et qui englobe la bordure côtière de La Spezia, on a identifié les zones à risques d’éboulements et hydrogéologiques élevés (en couleur orange) et plus élevés (en couleur marron et rouge). Elles sont très présentes sur toute la côte.

Cette image aérienne met en évidence la diffusion de villages surplombant la côte haute.

La côte haute à falaises est particulièrement développée le long de la bande côtière, entre les promontoires de Punta Mesco et Porto Venere, qui sont à l’extrémité de la province de La Spezia, et comprend le Parc national des Cinque Terre.

Ces sections transversales à la côte montrent le développement de la falaise active, qui atteint souvent les 400 mètres de hauteur.

Le paysage de la région des Cinque Terre est la conséquence directe du grand pli de La Spezia. C’est un vaste pli anticlinal renversé, couché, aligné le long de la direction nord-ouest/sud-est, développé sur 30 kilomètres, de Pignone jusqu’à Porto Venere, avec un plan axial proche de l’horizontale, mais légèrement plongeant vers le nord-ouest et appuyé sur son flanc occidental. Les versants les plus raides et les falaises de la côte des Cinque Terre représentent la charnière et une partie du flanc inversé de ce pli.

La distance très faible entre la ligne de partage des eaux et la côte, l’alignement le long de l’axe du pli et l’action prolongée érosive ont détérioré et emporté les parties fragiles et ont construit le paysage actuel.

La combinaison des facteurs tectoniques et lithologiques, avec les actions destructrices de l’altération et de la mer, a entraîné l’apparition de nombreux types de phénomènes d’éboulements différents.

Par exemple, l’éboulement du type rock topple, c'est-à-dire le basculement de dalles de Varnes (1978), se manifestent en correspondance à une stratification subverticale ou à des charnières de plis.

Les phénomènes d’éboulements les plus diffus sont les débris flow linéaires de Varnes (1978), qui se produisent du bord de la falaise jusqu’à la mer, et constituent l’unique source d’alimentation des petites plages côtières.

Le plus important élément exposé à ce risque est le chemin de fer de la ligne Milano-Roma, dont la mise en sécurité a nécessité de considérables ouvrages de protection. Cette ligne a été réalisée à partir de 1860 et, pendant ces 150 années, le manque d’entretien a diminué l’efficacité des ouvrages. Les ouvrages de protection de la ligne sont aujourd’hui presque inefficaces. Ils sont traversés aussi par des portions

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des sentiers des Cinque Terre, et conduisent inévitablement à des problèmes et des accidents.

Un des ouvrages de défense passive le plus original réalisé pendant la construction du chemin de fer est le by-pass au-dessus de la vieille gare de Corniglia, aujourd’hui abandonnée. Il s’agit d’un tunnel qui capture le débris flow et qui transfère le matériau issu des éboulements sur la plage d’en face.

Ensuite, cette plage a été encore alimentée par les matériaux reçus du nouveau chemin de fer en 1960, qui ont été déposés le long de cette plage qui, aujourd’hui, par l’érosion, n’existe plus.

Enfin, se produisent de vastes mouvements gravitaires de versants, comme celui de Rodalabia ou de San Bernardino-Guvano, qui est encore traversé par une route provinciale et par le sentier des Cinque Terre. C’est un vaste éboulement, qui prend origine en bordure de la falaise et qui alimente un vaste mouvement gravitaire de versant, qui était encore en mouvement parce que les ouvrages qui avaient été mis en œuvre pour limiter l’érosion au pied du chemin de fer ne fournissent plus d’action de protection.

Le cas le plus célèbre des dernières années est celui de l’éboulement de Punta Corvo, au début sur la plage du même nom, qui est classé parmi les 21 plages les plus belles d’Italie et qui est intensément fréquentée par les touristes et les baigneurs malgré les défenses et les effondrements qui continuent. Jusqu’à l’année passée, on avait encore un magnifique arc de roche en bordure de la plage, qui s’est écroulé.

Ensuite, à l’obtention d’un financement de la Région Ligurie de 300 000 €, il a été réalisé une étude géologique détaillée, un projet et les premiers travaux pour réduire le risque pour les baigneurs ont été exécutés.

(Film montrant la situation pendant la phase d’étude) L’étude et le projet ont été réalisés pendant 5 mois. Par contre, la mise en place et la réalisation du projet s’est encore

poursuivie pendant 5 ans du fait de la longueur des pratiques administratives. En particulier, pour l’Administration publique locale, la priorité était de

réaliser les barrières « débris flow » à haute absorption d’énergie afin de donner une image de sécurité pour ceux qui fréquentent la plage. Par contre, on n’a pas encore réalisé toute la partie des activités de contrôle électronique avec des webcams et les instruments qui mesurent le basculement des blocs.

En même temps, le Maire a mis en place des interdictions d’accès à la plage pour limiter la fréquentation, et il a été reconnu que le nombre idéal doit être de 660 personnes par jour.

Le problème est qu’il y a des entreprises qui font le transport des baigneurs par bateau car cette plage est accessible seulement par un sentier très difficile ou par la mer. C’est une des entreprises les plus importantes de la commune.

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La plage comporte des interdictions sur la partie qui est à la base du couloir. Nous avons mis des barrières.

Pendant la réalisation de ce projet, un petit fait nouveau est survenu : mercredi passé, la commission institutionnelle de l’autorité de la Région Ligurie a porté en discussion un projet de loi sur le plan de la côte. On a repris les indications fournies dans le Plan de Bassin. Et l’idée à la base de cette loi est qu’elle a résulté de la cohérence avec le projet Punta Corvo, c'est-à-dire qu’il est prévu l’interdiction de toute la falaise pour des édifications sur la bordure de 30 mètres en arrière de la falaise. Les intervenants possibles seront uniquement ceux de réduction des risques. L’hypothèse la plus importante est que le débris flow doit alimenter cette plage. C’est naturel. J’espère que cette loi permettra de réaliser ce qui est possible.

Madame ROCCHESANI.- Nous allons aborder une séance de questions/réponses.

Madame BATTIAU.- (Présidente de l’association EUCC France) Toutes ces photos sont remarquables, mais ce n’est pas une vraie falaise marine. C’est un versant continental qui évolue sous l’action de différents processus plutôt qu’une vraie falaise marine où l’action de la mer agit de façon vraiment décisive.

Monsieur DEL SOLDATO.- Il est vrai mais, je crois, partiellement. Je dois dire que l’action de la mer n’est pas continue, pendant toute la longueur de la côte, mais il y a une action de la mer considérable pour une marée de force 4 ou supérieure. Nous avons la ligne d’initiation de la végétation au-dessus de l’action directe de la mer. Mais, pas continue.

Par exemple, nous avons essentiellement deux parties qui sont sauvegardées : Rodalabia et San Bernardino. Rodalabia a encore en protection sur toute la ligne du chemin de fer, avec des structures imposantes. San Bernardino avait une digue, mais elle ne fonctionne plus parce que la mer l’a démolie. Sur le versant vers Porto Venere, il y a une côte verticale très développée et aussi des grottes où la mer a une action très directe sur la falaise.

Les versants sont d’une hauteur de 200 à 450 mètres et sont directement verticaux sur la mer. Il n’y a pas de plage.

Monsieur POZZANI.- Nous avons des problèmes liés à la tectonique, à l’action de la mer à la base et à l’utilisation touristique. C’est une économie très concentrée, il n’y a pas tellement de plages. Alors il y a la pression des entreprises qui gèrent les bateaux qui ne veulent pas renoncer à cette activité. Mais, quand même, on ne peut pas exposer les gens à des risques réels. C’est une situation très compliquée. Pour ce qui concerne l’aspect technique, on a mis 5 mois pour préparer le projet. Après 5 années pour le réaliser. Maintenant on est encore dans l’attente de la réalisation du système d’alarme pour avertir avec des sirènes qu’il y a des problèmes et qu’il faut se déplacer.

Madame SANDEL.- Une question sur les programmes européens qui se succèdent parfois de façon continue ou discontinue sur ces sujets. Les résultats sont disponibles, mais comment est-ce que l’appropriation peut se faire par les élus, par les

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décideurs publics sur tous ces sujets ? Je sais que les pays du nord sont beaucoup plus avancés que nous en termes de réponse. Il me semble qu’il y a un décalage entre la production intellectuelle et la prise de connaissance par les élus.

Madame CLUS-AUBY.- Il n’y a pas vraiment de réponse à apporter, vous avez tout à fait raison. Les résultats des programmes sont mal diffusés chez les décideurs. Cependant, je trouve que cela s’améliore. Si on regarde l’évolution des programmes, les programmes les plus anciens étaient vraiment de scientifiques à scientifiques, et les programmes plus récents intègrent les décideurs, les élus, dans la réflexion et dans l’élaboration du programme.

Quant à la diffusion, en général, tous les programmes que je vous ai présentés ont un site Internet, et donc leurs résultats sont tout à fait libres d’accès pour tout le monde. Mais faut-il encore connaître le programme pour aller chercher son site Internet, je suis bien d’accord.

Madame QUELIN.- Je voulais revenir sur l’exemple italien parce que je me posais la question de la communication et de l’appropriation du public, sachant que l’on est dans une zone très touristique, qui est par ailleurs un parc. Je voulais savoir quels étaient éventuellement les éléments de communication qui accompagnent la démarche actuelle, notamment vis-à-vis de cette plage qui risque de subir des interdictions. Est-ce que les gens prennent conscience ? Est-ce que le tourisme se sent concerné par ce genre de problématique ? Quel est votre retour par rapport à cela ?

Monsieur DEL SOLDATO.- Nous n’avons pas de communication, sinon les articles qui parlent des accidents dans le journal.

Je pense que l’intérêt local est celui de donner des informations sur les risques. Il n’est pas juste et je ne le partage pas, mais à chacun son interprétation.

L’histoire récente indique que les Cinque Terre, il y a 15 ou 20 ans étaient des pays fantômes, complètement abandonnés. Avec le projet du Parc national, on a reporté les habitants et on a développé le tourisme. En revanche, on a obtenu beaucoup de financement par la Région, par l’administration centrale, pour intervenir ponctuellement sur des problèmes de grande urgence. Mais, on n’a pas encore une vue globale du problème. Le Plan de Bacino a identifié le problème du risque à une échelle plus vaste. Mais, on n’a pas encore activé toutes les solutions pour intervenir de manière globale.

Aujourd’hui, l’information est l’information normale, les avis, des interdictions de quelques parties, mais elle n’est pas organisée et organique.

Madame LAIR.- (Déléguée générale de l’ANEL) Je voudrais rebondir sur ce que vient de dire Christine SANDEL, une élue qui a d’ailleurs siégé à l’ANEL, pour souligner l’importance de l’appropriation par les élus, les décideurs politiques, et la population, de ces enjeux d’aménagement, de protection - les deux allant de pair - du littoral. D’ailleurs, je trouve que Christine CLUS-AUBY est tout à fait modeste parce que l’EUCC nous a beaucoup aidés à monter des journées pour alerter les élus sur les risques littoraux. En 2006, se sont déroulées deux journées nationales sur ce thème de la gestion du trait de côte pour sensibiliser les élus à ces problématiques. Je

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crois qu’il y a eu beaucoup d’avancées puisque, dans votre dossier, j’ai vu également que des Présidents de Région étaient prêts à envisager le recul stratégique.

Je pense que la grande question est effectivement de mieux communiquer. Mais, je crois que, notamment avec les ateliers de l’EUCC, nous arrivons à faire venir des élus dans des sites très précis, et je pense qu’ils commencent à être sensibilisés à ces problématiques.

(La séance est suspendue à 12 heures 45) ………………………………………………………………………………

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(La séance est reprise à 14 heures 05)

TABLE RONDE N° 1 ALÉA ET VULNERABILITE DU LITTORAL ROCHEUX, ÉTAT DES CONNAISSANCES ET IMPACT DU CHANGEMENT CLIMATIQUE

Monsieur AZEMARD.- Les objectifs de cette table ronde sur les aléas et

l’impact du changement climatique sont de faire un point de l’état des connaissances et des dernières avancées dans la caractérisation, non seulement de l’aléa ponctuel tel qu’on l’analyse classiquement par les études géologiques et géotechniques que l’on a l’habitude de mener à chaque événement, pour réparer les dégâts, mais d’aller plus loin sur des méthodes qui permettent d’analyser une vue plus globale des problèmes, plus à même d’apporter des renseignements pour la gestion des territoires. À savoir : Quelle est l’évolution de ces côtes rocheuses, de ces falaises ? Quelle est la vitesse de régression ? Quelle est la productivité de blocs de ces falaises ? Quelles sont les conséquences que l’on peut en tirer pour la gestion des espaces ? Quel sera l’impact éventuel des changements climatiques sur ces paramètres ?

Madame ROCCHESANI.- Une première partie de cette table ronde porte sur le retour d’expérience de la Côte normande.

Monsieur COSTA.- Nous allons faire une présentation, à deux voix, avec Monsieur le Maire de Criel qui va vous présenter un mode de gestion assez spécifique des problèmes d’érosion côtière et, me concernant, je vais faire quelques rappels sur le contexte général et l’établissement des vitesses d’évolution de ce secteur de côte de la Haute-Normandie.

Géologiquement, nous nous trouvons, en Haute-Normandie, au niveau de la terminaison nord occidentale du bassin sédimentaire de Paris, qui se termine par des plateaux qui eux-mêmes se terminent très brutalement par des falaises, dont l’altitude moyenne est de 70 mètres. Falaises de craie et de silex datant de l’ère secondaire, du crétacé plus précisément.

Ces matériaux sont peu résistants face à l’érosion. Et cette érosion dissymétrique se marque vraiment bien dans le paysage. À l’échelle humaine, nous avons des reculs qui affectent fortement les populations.

Une dynamique régressive qui rattrape l’urbanisation, qui s’est imprudemment implantée trop près du rivage. Mais, comme il a été évoqué ce matin, un recul utile puisque lorsque les falaises s’effondrent, la craie se dissout rapidement, ne reste que des silex qui, roulés par la mer, vont devenir galets, qui vont alimenter les cordons de galets qui constituent le meilleur tampon protecteur contre l’assaut des houles de tempête au débouché des vallées, urbanisées souvent, ou encore au pied des falaises.

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Avant de gérer, il est nécessaire d’avoir une connaissance assez précise des dynamiques. Je vais donc vous présenter quelques informations quant à la quantification des vitesses de recul, mais également sur des études en cours sur la tentative de détermination des processus responsables du déclenchement des effondrements.

Nous avons affaire à une côte particulière, avec un modelé particulier puisque, certes, l’érosion des falaises est continue, mais son recul se fait par à-coups, sur des temps relativement longs : pendant 10, 20, 30, 50, 100 ans, cela ne va pas bouger, puis d’un seul coup, on va perdre 10 mètres, 20 mètres.

Ce recul est lié à une combinaison de facteurs, aussi bien des processus continentaux (ruissellements, infiltrations, alternance gel/dégel) voire même l’appel au vide, phénomènes de décohésion ou des processus marins agissant au pied des falaises. Le problème est que nous avons énormément de mal à définir l’efficacité de chacun de ces processus.

S’agissant des méthodes et des techniques de mesure du recul des falaises, il y en a 6 communément utilisées. Je vais vous présenter uniquement les résultats de l’analyse photogrammétrique, qui permet d’avoir des données assez précises, une marge d’erreur de + ou – 50 centimètres, alors que les autres méthodes ont des marges d’erreur métriques, voire plurimétriques. Je ne parlerai pas non plus du laser aéroporté que l’on utilise en ce moment en Haute-Normandie, qui a une précision remarquable.

S’agissant de l’analyse photogrammétrique, de quoi s’agit-il ? On utilise des photographies aériennes de l’IGN, mais pas n’importe quelle mission aérienne puisque, avant le passage de l’avion, un certain nombre de bornes ont été mises sur le littoral, en haute falaise mais également sur les cordons de galets. Ces bornes sont connues en longitude, altitude, latitude, à quelques centimètres près. Et grâce à elles, on est capable d’avoir un semis de points, et chaque point est connu en longitude, altitude, latitude, à quelques décimètres près. Et puis, surtout, cela nous permet d’avoir une vision très précise de l’objet géographique qui nous intéresse. À savoir : la position du trait de côte du haut de falaise en 1999 et en 1961.

À partir du moment où l’on a ces données fiables numériques, il est possible de définir le recul moyen sur l’ensemble du littoral. En Haute-Normandie, il est de 20,9 centimètres par an. Comme toute moyenne, c’est faux puisque le recul se fait par à-coups.

Par ailleurs, il existe une grande variabilité spatiale du recul où la méthodologie nous permet d’établir des vitesses de recul tous les 50 mètres. Les histogrammes vous montrent cette grande variabilité spatiale du recul, liée à des variations lithologique ou à des ouvrages anthropiques.

Cette précision nous permet d’aboutir à une cartographie des risques où, au regard des vitesses établies sur les 40 meilleures années, il est possible d’établir la position du trait de côte d’ici 50 ans ou 100 ans, en imaginant que les conditions environnementales restent les mêmes ; ce qui n’est pas forcément le cas. En tout cas, cela permet de définir une sorte d’enveloppe, à l’intérieur de laquelle il y a des enjeux

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menacés. Ensuite, aux décideurs, aux élus, de prendre leur responsabilité, d’amener leur réponse : savoir s’il faut déplacer les populations ou pas.

J’évoquais, il y a quelques instants, pour expliquer la variabilité spatiale du recul, l’impact des ouvrages. Nous avons, sur le site de Criel-sur-Mer, un épi majeur qui entraîne une accumulation de galets dans le sens de la dérive. Mais, immédiatement en aval, vous avez une (?) sédimentaire, qui permet à l’action de houle d’être plus efficace au pied des falaises. Ce petit graphique montre les variations de vitesse de recul tous les 50 mètres. Et il s’avère qu’en aval des rives et l’immédiat des ouvrages, nous pouvons avoir une multiplication par 3, voire par 6, des vitesses de recul moyennes. Donc, une accentuation des vitesses considérable par des actions ou la mise en place d’ouvrages parfois malencontreusement implantés.

S’agissant de la détermination des processus responsables du déclenchement des effondrements, qui peuvent concerner quelques mètres cubes à quelques dizaines, voire centaines de milliers de mètres cubes, un inventaire hebdomadaire est réalisé depuis 2002, par l’association ESTRAN de Dieppe, qui parcourt une trentaine de kilomètres, et qui recense l’ensemble des effondrements de quelques mètres cubes au plus gros, localise et date l’ensemble de ces événements.

C’est une analyse qui est en cours, mais voici un premier graphique qui montre que, contrairement à ce que l’on pense, c’est-à-dire des effondrements qui s’effectuent dans la période hivernale, nous pouvons avoir, en juin, juillet, août, des effondrements qui affectent ces falaises, période pendant laquelle nous avons un grand nombre de touristes au pied des falaises.

Si nous essayons de corréler les effondrements, les précipitations et les températures, on s’aperçoit sans surprise que les effondrements s’effectuent précisément lorsqu’il y a des alternances gel/dégel ou de très fortes précipitations cumulées ou instantanées.

Quand on regarde dans le détail, à titre d’exemple : vous avez des cercles rouges qui correspondent à des effondrements. Ils correspondent à la période d’alternance gel/dégel très probablement. Mais est-ce que cela ne correspond pas non plus à de très fortes précipitations qui se sont réalisées quelques jours avant ? Ou encore n’est-ce pas le résultat des actions marines qui ont été particulièrement fortes quelques jours avant cette alternance gel/dégel ? C’est peut-être le résultat des trois.

De même, ces effondrements correspondent à quel facteur évoqué précédemment ? Il y a là peut-être un phénomène que l’on appelle d’hystérésis, un phénomène de retard, qui nous pose d’énormes problèmes quant à la détermination des facteurs responsables des effondrements. Aujourd’hui, il nous est difficile de dire quel est le facteur prépondérant, quel est le facteur auxiliaire. On peut au mieux déterminer des types de temps générateurs d’effondrements.

En termes de conclusion partielle, il s’avère nécessaire de mesurer sur le plus long terme possible, et en continu, avec des méthodes fiables, homogènes, la dynamique des côtes car on a des vitesses d’évolution, mais aucune information quant au rythme d’évolution des côtes. Cela plaide finalement pour la mise en place d’observatoires.

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La connaissance scientifique est fondamentale pour limiter les imprécisions parce que l’imprécision scientifique va finalement aboutir à une imprécision dans la prise de décision politique. En dépit de ces connaissances scientifiques, de la mise en place de ces observatoires, il n’en demeure pas moins qu’il restera trois questions évidentes qui se posent systématiquement aux élus, aux décideurs, quel que soit le risque. Et les responsables doivent amener des réponses et décider entre trois questions :

- Doit-on sur dimensionner nos ouvrages par anticipation ? Lutter contre la nature est peut-être illusoire, cela coûte cher et, parfois, cela va à l’encontre de ce que l’on recherche.

- Doit-on accepter les dommages éventuels ? Les populations et les élus concernés le refusent.

- Doit-on déplacer les enjeux, retirer les enjeux des zones à risque ? S’il n’y a plus d’enjeu, il n’y a plus de risque.

Dans de nombreux endroits, il faudra probablement reculer. C’est inéluctable, d’autant plus que la mer monte, c’est une certitude maintenant. Mais, il ne faudra pas être dogmatique en la matière. Autrement dit, il est possible de continuer à protéger certains endroits parce que l’intérêt économique est fondamental, et cela se justifie. Mais, il faudra protéger avec un discours clair, un discours qui indique que la mise en place des ouvrages de défense contre la mer sont là pour un temps, un temps qui permet de réfléchir et de faire comprendre aux populations et aux décideurs qu’il faudra, à un moment ou à un autre, se déplacer.

C’est finalement une transition pour mon ami, Monsieur MAUGER, qui va nous parler de Criel-sur-Mer qui a mis en place une politique de déplacement des populations.

Monsieur MAUGER.- Je viens de tout là-haut vers le sud pour vous présenter une expérience dont on se serait bien passé : celle de la mise en place d’une loi Barnier. On s’en serait bien passé, mais elle nous a bien aidés dans les prises de décision.

Il s’agissait tout simplement de l’expropriation par l’État de biens exposés aux risques naturels de mouvements de terrain menaçant gravement des vies humaines.

Nous avons, dans notre commune, les plus hautes falaises de craie d’Europe (106 mètres). Vous voyez sur cette photo comment l’homme a anticipé et a voulu s’approprier ces bordures de falaise. Autrefois, vous aviez à peu près plus de 20 mètres de falaises devant. Les gens se sentaient parfaitement en sécurité.

Là, c’est le petit hameau de Ménival, à côté, où Monsieur COSTA, avec les équipes du BRGM sont souvent sur le terrain pour étudier. C’est encore un peu plus dramatique.

L’enjeu à Criel-sur-Mer était ces habitations. Face à cette problématique, dès 1995, des citoyens, qui commençaient à voir les falaises se rapprocher de leurs terrasses, se sont groupés en association, en disant : que va faire la commune ? Bien

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entendu, tout le monde a ses solutions. Là, je me tourne vers les élus : vous avez toujours, dans les communes, des gens qui ont la solution meilleure que celle du voisin. C’était : pourquoi est-ce que vous ne mettez pas des murs jusqu’en haut ? Pourquoi vous ne faites pas… Bref ! N’importe quoi ! Je ne veux pas dire que les associations font n’importe quoi, je dis que certains se permettent n’importe quoi.

En juin 1996, face à un événement très particulier, la chute d’un bloc de falaise relativement important, nous avons décidé de lancer la procédure d’expropriation, la loi Barnier qui venait d’être votée l’année précédente par l’État. Nous avons été une des premières communes à mettre en place ce dispositif Barnier qui nous a énormément aidés dans la suite des événements.

La réglementation est claire. Je vous fais grâce des décrets. Ce que dit la loi Barnier est important : Lorsqu’un risque prévisible de mouvement de terrain, d’avalanche et de crue torrentielle menace gravement des vies humaines, les biens exposés à ce risque peuvent être expropriés par l’État, dans des conditions prévues par le Code de l’expropriation, pour cause d’utilité publique, sous réserve que les moyens de sauvegarde et de protection des populations s’avèrent plus coûteux que les indemnités d’expropriation.

Je pense à nos collègues italiens, avec cette petite plage où se déversent des milliers de touristes. Cela en vaut-il le coup ?

Toutefois, pour la détermination du montant des indemnités, qui doit permettre le remplacement des biens expropriés, il n’est pas tenu compte de l’existence du risque.

C’est un point important dans le cadre de la détermination des valeurs. On pourrait dire : votre maison ne vaut plus rien. Ce n’est pas du tout ce qui passe. C’est le fonds qui a été créé par la loi Barnier, au travers des assurances, de la gestion du risque.

Il est important aussi de tenir compte des travaux d’accompagnement, de clôture, démolition, remise en état des lieux. Ce n’est pas sans signification à la fin de l’opération.

31 décembre 1997 : éboulement de falaise à Criel-sur-Mer. Février 1998 : étude BRGM Synthèse de l’évolution des falaises et de

l’arrière-pays immédiat à Criel-sur-Mer. Je dois vous dire aussi que l’on était loin des connaissances actuelles sur la gestion des traits de côte et sur les risques inhérents à ce type d’aléa.

19 février 1998 : arrêté de péril pris par le maire. Là, le maire a fini son boulot car, après la gestion de la loi Barnier, ce n’est plus le problème du maire, c’est le problème de l’État et du préfet.

Une anecdote pour vous raconter comment le maire a été obligé de prendre cet arrêté de péril : un Parisien venait d’acheter une maison au bord de mer pour y passer la fin de l’année. Tout se passe bien. Une nuit, il entend un grand bruit, il se réveille, il se dit que ce n’est pas le métro qui passe, il se recouche. Une heure après, le

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métro qui repasse... Et là, il sort, et la brouette avec laquelle il avait travaillé toute la journée était en bas de falaise, et la falaise au ras de sa maison.

Vous comprenez pourquoi, le 19 février 1998, l’arrêté de péril a été pris par le maire. Là, s’enclenche toute la démarche de la loi Barnier : visite du DPPR, avril 1999, les études. Avis favorable du ministère au vu du rapport préalable. Demande de réaliser un dossier d’expropriation. 14 septembre : envoi du dossier au ministère. Et ainsi de suite. En gros, ce sont des dossiers qui font des va-et-vient entre le préfet et trois ministères car, dans le cadre de la loi Barnier, il faut l’accord de trois ministres.

27 mars 2000 : demande d’études complémentaires. Et vous comprendrez pourquoi, de temps en temps, les élus finissent par être fatigués par les études. Ce n’est pas gentil pour vous, les gens du BRGM, mais on a tellement d’autres études à côté que cela fait beaucoup.

8 juin : réunion publique. Il faut faire accepter à la population les choix que l’on a faits. À Criel-sur-Mer, on avait fait le choix de faire tomber les maisons. Nous étions donc sur un recul, pas de protection. C’est la position du maire actuel, mais ce peut être une position tout à fait différente car l’élu peut changer. Le maire actuel dit : pourquoi une falaise est-elle faite ? Un des grands maîtres, le professeur PASKOFF, disait : une falaise, c’est fait pour tomber. Donc on les laisse tomber, puis on les suit. Mais, de temps en temps, cela fait un peu de dégâts. Il faut expliquer cela à ses concitoyens. À l’heure actuelle, cela passe beaucoup mieux, mais c’était il y a 10 ans. Les gens ne comprenaient pas trop. Je suis assez têtu et, à un moment, ils comprenaient ou pas, je leur ai fait comprendre que c’était comme cela qu’il fallait faire.

Envoi du dossier au ministère, arrêté de DUP en 2001 et indemnisation des propriétaires.

Nous avons eu un peu de chance à Criel car toutes ces maisons étaient des résidences secondaires. Pas de relogement pour le maire. Et, nous avons eu une deuxième chance : pas de procédure d’expropriation, tout s’est passé en discussions longues, parfois tendues, on avait un avocat dans le lot, ce n’est pas toujours facile avec eux. L’autre avantage était que tous les propriétaires étaient des personnes âgées. En fait, les enfants attendaient beaucoup plus la monnaie que la sauvegarde de la maison. Cela nous a permis d’aller beaucoup plus vite.

Madame ROCCHESANI.- Comment a été fixée l’indemnisation ? Monsieur MAUGER.- Indemnisation principale : valeur vénale du bien

estimée, non dépréciée par l’existence du risque ; indemnisation accessoire du réemploi : l’argent dont aurait eu besoin le propriétaire pour racheter un bien ailleurs ; indemnité d’éviction : le pretium doloris que l’on connaît régulièrement.

Coût total des indemnisations : 900 000 €. C’est une rigolade ! Est-ce que vous imaginez : 11 maisons, 900 000 €. Pour une maison à Cassis, c’est le prix du garage et de la salle de bain.

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Estimation des Domaines, demande de crédits au ministère, délégation des crédits. Je passe pour arriver rapidement au reste et à la fin : on casse, audit de désamiantage, détermination des filières d’évacuation des déchets, consultation pour la démolition des bâtiments, recherche des matériaux, et les travaux ont eu lieu de janvier à avril 2006. Coût total des travaux : 200 000 €. Et en mars 2006 : remise en état des terrains pour redonner les lieux à la nature. Et on ne fait pas cela avec n’importe quel matériau, en particulier les terres sont choisies, recouvrement avec de l’argile, semis de graminées, estompage des dénivellations. Et on arrive à cette photo : un pin qui subsiste, avec un point de vue extraordinaire de la rue de Chevington.

Et ce n’est pas fini car cela redémarre. Je suis à nouveau en procédure, avec les collègues du BRGM, sur 3 ou 4 maisons qui sont menacées, et peut-être à très court terme.

Tout cela pour vous dire qu’une échelle de 20 ans, ce n’est rien. Comme le disait le professeur COSTA, on prend des échelles à 100 ans. Mais, 100 ans, ce sont deux vies. Cela va très vite. Les mesures mises en place par la commune face à ce risque ont été un nouveau PLU, recul des zones de constructibilité à 100 mètres. Pour moi, c’est beaucoup trop court, mais il faut le faire avaler par les citoyens. Il faut savoir qu’un élu a une autre composante dans sa vie d’élu : celle d’être réélu. Il faut faire avaler les pilules. De temps en temps, on doit mentir. Et la démocratie a ses limites.

Madame ROCCHESANI.- Maintenant, nous allons entendre quelques mots sur l’étude Suivi de l’érosion d’une falaise de craie par lasergrammétrie. Et en quoi ces études sur les Côtes normandes peuvent être applicables ailleurs, et les particularités de ces falaises.

Monsieur DEWEZ.- Vous voyez ici une étude réalisée à Criel-sur-Mer, pour une raison très simple : nous savions par des études antérieures que la falaise était très mobile. Et comme on se posait des questions sur l’utilisation d’un scanner laser pour voir ce que l’on pouvait en tirer en termes de données appliquées et de soutien aux politiques publiques, nous avons décidé d’aller là-bas parce qu’on savait que cela bougeait.

Nous avons lancé ces études à partir de 2005. Un cas que Monsieur MAUGER a juste évoqué : cette maison qui se trouve

en tête de falaise, il doit rester une douzaine de mètres entre le bord de la falaise et la porte d’entrée.

La question posée : il vient de se passer quelque chose, est-ce que cela peut encore se reproduire ? La réponse est souvent « oui ». Mais, dans combien de temps ? On ne sait pas. C’est un peu le but de nos études. On essaie de se rapprocher le plus possible pour essayer de soutenir les décideurs en essayant de vous donner des billes, mais souvent, on n’a pas de billes parce que l’on ne connaît pas l’historique.

Ici, on voit la cicatrice d’érosion : un éboulement qui s’est produit en janvier 2008.

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Pour les relevés par lasergrammétrie, il s’agit d’installer un système laser qui envoie un petit pointeur. L’intérêt est que cela mesure le temps de vol de l’impulsion lumineuse, et cela vous dit à combien se trouve le point sur lequel vous avez tapé avec le laser. C’est un système motorisé qui va balayer l’espace vertical et horizontal, mais il va mesurer plein de points autour de vous, sur un rayon de 360°, et sur un angle de 80 ou 90° d’ouverture.

Madame ROCCHESANI.- Peut-on le faire à partir d’un bateau ? Monsieur DEWEZ.- Oui, depuis très peu de temps, on peut le faire d’un

bateau. Nous allons essayer d’appliquer les conclusions que je vais vous montrer à

la région de Carry-le-Rouet, pour voir ce que donne l’expérience acquise en Normandie, et essayer de proposer les mêmes modèles.

Voici le relief de la falaise, en septembre 2007, puis en avril 2008. C’est un relief ombré. La résolution de ce relief ombré est 5 centimètres. Et on est capable de mesurer toute érosion de l’ordre de 3 centimètres d’épaisseur ou plus. L’avantage est que l’on peut voir les petits objets, et tous ceux qui emportent la totalité de la falaise. Dans ce cas particulier de l’éboulement que je vous évoque, cela permet de calculer l’épaisseur de cet éboulement qui s’est produit fin janvier 2008. Nous avons une cartographie de l’épaisseur de la cicatrice d’éboulement, et on voit point par point à quelle épaisseur cela correspond. On peut cuber précisément le volume tombé. Nous avons suivi cette falaise depuis décembre 2005, et on s’est constitué un catalogue d’événements. Il y a eu de petits éboulements qui faisaient de l’ordre d’un litre, et qui vont jusqu’à 70 000 mètres cubes. Cela emporte la totalité de la hauteur sur 80 mètres de haut, et en largeur de l’ordre de 100 à 120 mètres. L’épaisseur maximum de l’écaille est 19 mètres. C’est énorme. Si vous vous trouvez à cette distance de la tête de falaise, en général vous estimez que vous êtes en sécurité ; en fait, non, pas tout à fait.

En ayant un catalogue assez complet, sur les deux ans et demi, nous avons observé 8 500 événements, du plus petit jusqu’au très gros, cela nous permet de fabriquer ce que l’on appelle une relation d’aléas.

On classe les événements depuis le plus petit (un litre) jusqu’au plus gros (ici 70 000 mètres cubes). Voici le nombre d’événements que l’on va observer pendant une année, dans cette gamme de volume-là. Par exemple : on va observer 2 700 événements d’un litre, tous les ans, par kilomètre de falaises. Et on calcule une droite linéaire dans un espace temps. C’est du détail de technicien.

L’intérêt est que l’on a une équation qui décrit la relation qu’il y a entre un volume que l’on observe et sa fréquence annuelle sur un kilomètre de falaise. La question est : pour l’événement de 5 000 mètres cubes, j’ai tracé une position, je regarde où cela tombe sur ma relation linéaire, je vois que cela fait 0,5 fois par an, soit une période de retour de tous les ans et demi. Cela vous donne une appréhension de ce que cela représente. Cela permet d’avoir vraiment une dimension : est-ce que j’ai le temps d’attendre le prochain événement de 5 000 mètres cubes ? Oui. Cela évolue à l’échelle de 20 ans, 100 ans. Certes, mais là, ce sont des trucs déjà substantiels, qui commencent à vous préoccuper à une échelle très courte.

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D’un point de vue du décideur, cela vous donne vraiment une idée de savoir si les choses sont rares ou pas.

Madame ROCCHESANI.- C’est vraiment une aide à la décision importante, que vous allez donc appliquer très bientôt dans la région.

Monsieur DEWEZ.- Exactement. Pour faire cela, il faut avoir des relevés très précis et répétés dans le temps. Nathalie MARÇOT a monté ce projet-là avec le soutien de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur pour essayer de voir ce que cela donne sur la commune de Carry-le-Rouet, 3 kilomètres et demi de falaise. Et puisque l’on ne bénéficie pas de marées basses importantes, on est bien obligé de mettre le scanner laser sur un bateau, et la technologie vient d’être mise à disposition par les prestataires.

Madame ROCCHESANI.- Claude VELLA, je me tourne vers vous pour aller plus loin dans ces recherches. Quelques mots sur le CEREGE et les recherches en cours sur les falaises.

Monsieur VELLA.- Le CEREGE est un laboratoire de recherche, une UMR associant le CNRS, l’INRA, les universités d’Aix-Marseille.

Actuellement, sur les falaises de la région, des études récentes, en particulier sur la falaise de Cassis, ont porté sur les effondrements et ont essayé de dater ces effondrements sur cette falaise.

Il y avait des travaux plus anciens sur les falaises de la Côte bleue, qui ne comprenaient pas le secteur de Carry-le-Rouet sur lequel le BRGM se penche actuellement. C’était plutôt le secteur de la commune de Martigues, où l’on avait montré que c’était une zone particulièrement friable. C’est à peu près la même géologie : des alternances de roches carbonatées et de marnes, qui favorisaient des processus rapides de recul.

Et, depuis très peu de temps, nous travaillons sur la partie de la côte qui est comprise entre Carro et la zone de Ponteau, sur laquelle nous avons découvert, depuis peu - et cela va nous permettre d’évoquer la question du changement climatique - des événements de tempête très importants, qui ont soulevé des blocs parfois de plus de 30 tonnes, qui ont été projetés en arrière sur le littoral.

Il est à remarquer, dans ce cas de Carro, que nos côtes à falaise sont particulièrement exposées la plupart du temps à des événements de sud-est. Les grosses tempêtes chez nous, ce sont des tempêtes plutôt automnales, avec des vents de sud-est. Mais, dans le cas des blocs soulevés à Carro, ce sont plutôt des tempêtes dont l’origine serait de sud-ouest. C’est particulièrement inquiétant parce que les populations littorales et les maires des communes ont plutôt une expérience vis-à-vis d’événements qui se produisent de cette direction sud-est et pas sud-ouest. Est-ce que le changement climatique va accroître l’importance d’événements de sud-ouest envers lesquels nous sommes plutôt démunis ? C’est une question que nous nous posons actuellement.

Ce matin, une question a été posée sur le changement climatique et, dans le cadre du changement climatique, comment vont réagir ces côtes rocheuses ? Il est vrai

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que, sur des côtes rocheuses particulièrement verticales, des falaises cohésives comme les falaises des Calanques de Marseille, dans des calcaires urgoniens, une variation du niveau marin de 50 ou 60 centimètres aura moins d’effet que sur des côtes à falaises comme le littoral de la Côte bleue, dans lequel on a des alternances très rapides de faciès géologiques, avec des niveaux durs et des niveaux fins. Et, suivant où la mer va arriver, avec cette montée du niveau marin, 40 ou 50 centimètres, ce qui est relativement modeste dans certains cas pour certaines falaises, dans des falaises où il y a une alternance lithologique très importante, les niveaux tendres vont être atteints par la mer et cela va augmenter probablement la vitesse de recul de ces falaises.

Jusqu’à présent, on a vu des exemples dans des falaises plutôt homogènes, même s’il y a des bancs de silex dans ces falaises de craie. Sur la Côte bleue, ce sont des falaises avec des alternances très rapides de faciès, et si la mer arrive à ce niveau tendre, il faut s’attendre probablement à des reculs accélérés du profil de falaise.

Madame ROCCHESANI.- Je vous propose de terminer la table ronde avec vous, Monsieur QUEMART, en rebond sur tout ce qui vient d’être dit sur les besoins des décideurs en termes d’études, et également un complément sur le réchauffement climatique.

Monsieur QUEMART.- Comme on l’a déjà dit ce matin, le littoral est un milieu naturel en perpétuel mouvement, source de risques, mais aussi vecteur d’aménité. À tel point que, sur le littoral des Alpes-Maritimes par exemple, on a une urbanisation à 98 %. Nous avons donc en Provence-Alpes-Côte d’Azur un littoral très organisé.

Au niveau physique, il y a des différences par rapport à d’autres façades maritimes, ne serait-ce qu’au niveau géologique ou morphologique. Nous avons des côtes falaises plongeantes, sans plate-forme d’érosion. Au niveau physique, on a aussi des différences, au niveau géologique aussi. On a essentiellement des côtes rocheuses et non des côtes à falaises meubles comme certaines régions de Bretagne où les côtes meubles sont beaucoup plus sujettes au changement climatique, notamment les côtes de Bretagne septentrionale où l’on a des loess et des limons. Ces côtes-là sont beaucoup plus sensibles que les nôtres. Je pense qu’au niveau aléa, les côtes méditerranéennes sont beaucoup moins vulnérables que d’autres côtes sur d’autres façades maritimes.

Sur la prise en compte et la gestion du risque d’érosion côtière, de recul et d’instabilité rocheuse sur les falaises, nous sommes un peu dans le même cas de figure que les autres régions. La politique de prévention de l’État, qui repose sur 7 piliers, s’applique en tout point du territoire, malgré les différences en termes d’enjeux, physiques et autres.

Je ne vais pas détailler les 7 piliers de la prévention du risque, mais il y en a un qui me tient particulièrement en cœur : la prise en compte du risque dans l’aménagement du territoire, la maîtrise de l’urbanisation.

Différents outils sont à notre disposition :

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Les SCOT, qui sont des outils de planification territoriale, qui doivent prendre en compte l’aléa et le risque.

Les documents d’urbanisme : à partir du moment où les collectivités ont le porter à connaissance de l’État, ils doivent l’intégrer dans les documents d’urbanisme lorsqu’ils sont élaborés ou révisés.

Au niveau réglementaire, nous avons les Plans de prévention des risques naturels. L’objet des PPR est de réglementer l’usage du sol, mais l’usage futur du sol. Malheureusement, il sert aussi à gérer l’existant. Je pense qu’il faut prendre en compte les processus d’expropriation qui peuvent être mis en œuvre dans le cadre des PPR, s’agissant de l’existant. Mais, normalement l’usage du PPR est vraiment de réglementer l’usage futur du sol. Je pense qu’il y a matière à engager des actions pour développer cela.

Sur les autres piliers de la prévention des risques, il y a l’amélioration de la connaissance, avec les études. Ce n’est pas l’amélioration seulement, c’est aussi la faire partager.

L’information préventive : des documents doivent être mieux développés qu’aujourd’hui. Je pense aux dossiers départementaux des risques majeurs. Quand on voit, dans ces dossiers, que le couplet relatif à l’érosion des côtes et aux instabilités côtières est tout petit, je pense qu’il y a moyen de développer un peu.

Les autres documents sont des documents élaborés par les collectivités : le DICRIM et les PCS.

Madame ROCCHESANI.- Je propose de prendre les questions de la salle. Monsieur BRIAND.- (Conseil général Bouches-du-Rhône, service des

Ports) Je souhaitais poser une question à Monsieur MAUGER parce que j’ai aussi entendu parler d’un projet de recul du trait de côte, non pas au niveau de l’aménagement en falaise, mais au niveau de votre cordon de galets. Est-ce que vous pouvez nous en parler ? Même si cela ne concerne pas la falaise, je pense que la réflexion qui a eu lieu à Criel-sur-Mer est intéressante.

Monsieur MAUGER.- C’est un vaste projet qui date aussi d’une dizaine d’années. C’était plus qu’un recul, c’était une réestuarisation de la base « galets », qui a amené les pour et les contre, tout le monde avait ses bonnes raisons. Bref ! Ce projet, qui avait été initié à un moment par la mairie, avec les appuis des autres collectivités, nécessitait une somme particulièrement importante : 47 M€.

Vous comprenez qu’à l’heure actuelle, ce projet est tombé à l’eau car, si les collectivités, Département et Région, avait trouvé un consensus sur le terrain, je pense qu’ils y seraient allés. Comme il voit la commune, non pas se déchirer mais presque, s’affronter, 50/50 chaque fois, ce projet est totalement tombé à l’eau.

J’avais proposé, dès mon arrivée, en 2001, un recul limité pour essayer de tempérer un peu. Les scientifiques m’ont dit que cela n’avait aucun intérêt. Donc, projet terminé : maintien du trait de côte et on se bat pour ne pas voir arriver le béton.

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Il y a une autre problématique, qui est toujours dans le même domaine : la remontée des salmonidés. Vous n’êtes pas sans savoir que, théoriquement, depuis 2005, on ne doit plus porter obstacle à la remontée des salmonidés dans les cours d’eau. La Côte normande est très particulière, elle a toujours ses buses estuariennes, et elle a donc simplement 6 ans d’infraction au niveau de l’Europe. À Criel-sur-Mer, on est en train de travailler sur l’effacement de la buse estuarienne, éventuellement.

Monsieur SABATIER.- (Ville de Marseille) Une question à Monsieur MAUGER : une décennie pour un dossier d’expropriation, est-ce le délai normal ? Est-ce plutôt court parce vous avez eu de la chance ? Est-ce plutôt long parce que c’était un des premiers ?

Monsieur MAUGER.- C’est un dossier normal. La construction d’une école pour un élu, c’est 4 ou 5 ans. Un dossier aussi gros que celui-là, 10 ans, c’est parfaitement normal. Mais, cela énerve beaucoup les élus.

Monsieur ARGYRIADIS.- (CERGEM) La question est très importante. Je suis d’accord avec Philippe QUEMART. Elle est aussi complexe parce que, dans ces relations entre la mer et le continent, c’est un film où jouent deux acteurs : l’eau et la terre. Il se trouve qu’actuellement, c’est très à la mode de s’occuper de l’eau, mais la terre bouge, et elle bouge vite. Très souvent, elle bouge plus vite que la surface des océans, qui est d’ailleurs difficile à mesurer dans l’absolu. Exemple : la grosse différence entre l’Europe du nord-ouest avec ce que les pétroliers connaissent depuis 50 ans, l’ennoyage bordier de la plate-forme européenne. C’est pour cela que la Hollande a fait des digues. C’est pour cela que l’on envisage des digues sur la Tamise. Le bout de l’Europe plonge. La Méditerranée ne bouge pas. Le marégraphe de Marseille ne bouge pas depuis le début du XXe siècle.

Alors, vous me direz : quelle importance que ce soit l’eau ou la terre qui bouge ? Le mouvement relatif est le même. Oui et non, parce que, mécaniquement, ce n’est pas du tout la même chose. Prenez un récipient en terre cuite, faites monter l’eau, il ne se passera rien du tout. Essayez de tordre les parois : vous allez voir ce qui va se passer. C’est bien ce qui se passe. Evidemment, c’est beaucoup plus complexe que ce que je viens de dire, il y a la nature des roches qui jouent, les conditions climatiques, etc. Mais, il ne faut pas négliger cet acquis de la géologie que l’on est en train d’oublier de façon catastrophique : pour notre période géologique élargie depuis le méssinien, depuis 5 millions d’années, la terre bouge, elle se flexure, elle se courbe, pour des raisons tectoniques, épirogéniques, volcaniques, selon les régions. Il faut faire attention à cela.

Madame ROCCHESANI.- Monsieur MAUGER, pensez-vous avoir assez d’informations et d’études à votre disposition ou, parfois trop, pour prendre les décisions ?

Monsieur MAUGER.- Il y en a tellement déjà... Elles sont tellement différentes selon les acteurs qui les mettent à disposition... Un élu n’est pas un scientifique. Il doit savoir s’entourer pour prendre une décision. Si elle est bonne, on pourra le dire 20 ans après.

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Après, il y a les décisions d’urgence : ce sont les plus mauvaises. À Criel-sur-Mer, vous les avez vues. Le professeur COSTA, notre collègue du BRGM, l’a montré tout à l’heure, cela a été les deux digues qui ont été bâties, sans étude, simplement en commandant les toupies de béton. Il y en avait 11 de prévues comme cela. Heureusement, on a arrêté, on n’avait plus d’argent. Sinon, vous voyez les dégâts que cela aurait pu faire sur la plage de Criel-sur-Mer. Quelque part, nous avons eu de la chance, nous n’avons rien fait. Nous n’avons pas compromis comme sur une plage que je connais bien, en Baie de Somme, Mers-les-Bains, où le village est bâti au-dessous du niveau de la mer pour une partie. Ils ont mis des digues, énormément d’argent, et on s’aperçoit que la digue commence à être affouillée. Aux dernières grandes tempêtes, on a vu les blocs voler en l’air.

On n’a jamais assez d’études, mais nous ne sommes pas aptes à prendre des décisions face aux études. Nous ne sommes pas scientifiques.

Monsieur RAYBAUT.- (Conseiller municipal Carry-le-Rouet) Je voudrais donner une information à Monsieur VELLA, et poser une question à Monsieur MAUGER.

Mon expérience professionnelle a fait que, par le passé, je me suis intéressé aux études du port de Fos. Dans les années 66 à 68, nous avions mis un houlographe au large du phare de la Couronne, et nous avions fait étudier par des laboratoires comme la SOGREA et le Laboratoire national d’hydraulique, les statistiques de houle. Nous nous sommes rendu compte que la vague la plus forte provenait du sud-ouest. Vous pourrez peut-être retrouver les informations auprès de ces laboratoires ou auprès du Port Autonome.

En ce qui concerne Monsieur MAUGER, vous avez parlé de ce Parisien qui, le matin, a trouvé sa maison au bord de la falaise, et dans la question « qui paie quoi ? », pourquoi n’est-ce pas le particulier qui gère lui-même son problème ? Pourquoi est-ce la collectivité publique qui met la main à la poche ?

Monsieur MAUGER.- D’une part, cela n’a rien coûté à la commune : loi Barnier, État. Une chance inouïe. Pour la commune : totalement indolore. En revanche, pour l’État, oui. C’est notre argent. Pourquoi le particulier ? Non ! À cette époque-là, on n’avait pas un PLU, on n’avait pas un PPR, on n’avait pas tout cela. Dans le document d’urbanisme, quand il a acheté sa maison, on ne lui signalait pas qu’il y avait un danger potentiel.

Je vais revenir sur autre chose qui se produit. Il y avait ces 11 maisons, une rue qui sépare, la rue de Chevington. Pour les maisons derrière, le prix de l’immobilier était en train de baisser. Quand on a abattu les maisons, en une année, les maisons qui se sont trouvées de l’autre côté de la rue, ont pris entre 20 et 30 % à la hausse, parce qu’elles ont un point de vue. Nous avons été très surpris. Nous avons vu énormément de Belges, de Hollandais et d’Anglais acheter ces maisons-là. Les Criélois allaient en centre-ville. On s’est interrogé. Pour le Français, la maison est un élément patrimonial. C’est quelque chose que l’on transmet à ses enfants, donc il faut que cela dure. Dans les populations du nord, y compris chez les Anglais, on passe avec son habitation. On

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en a profité ; quand on meurt, c’est fini. Mais, ils ont vécu 30 ans avec un superbe point de vue. Tout cela ne s’explique pas, c’est de l’humain.

Ce n’était pas au particulier de payer. S’il n’y avait pas eu la loi Barnier, qu’auraient dit les tribunaux ? Est-ce qu’ils n’auraient pas dit que cela revenait à la collectivité de Criel-sur-Mer qui avait signé un permis de construire ? Je ne voudrais pas être à la place du préfet de Vendée à l’heure actuelle : il y en a 600 qui ont signé, mais peut-être 600 qui n’ont pas signé. Qu’est-ce que cela va donner ?

Je voudrais revenir sur quelque chose et je vais poser une question. Je me tourne vers le professeur COSTA et vers Monsieur DEWEZ.

Demain, le maire de Criel-sur-Mer se sauve, et vous êtes élu maire : quelle décision prenez-vous ?

Monsieur DEWEZ.- Je vais éluder la question en disant : je ne suis pas candidat, et ce n’est pas mon métier.

J’ai essayé de présenter ici, d’une part, une recherche scientifique parce que l’on aime bien se poser des questions. On travaille un certain temps et on essaie d’y répondre. C’est satisfaisant, c’est un exercice qui est chouette, mais en même temps, du fait du boulot que l’on fait au BRGM, nous avons un devoir de retour vers les pouvoirs publics, en faisant de la recherche appliquée. J’ai essayé de me rapprocher au plus près de ce que je pouvais, pour l’instant, des besoins que vous pouviez avoir. Je ne sais pas ce que je ferais effectivement. Pour l’éboulement de 5 000 mètres cubes dont je vous ai parlé et du rapprochement de la tête de falaise de la maison de la rue du Golfe, effectivement je me suis rapproché de vous et de vos services pour signaler l’information parce que, en tant que sachant, je me devais de vous transmettre cette information. Monsieur BOURILHON va peut-être pouvoir nous éclairer là-dessus : en termes d’expertise, j’ai cru comprendre que l’expert était responsable à titre personnel et pas en tant que représentant d’une entreprise ou d’un établissement public. Si j’ai bien compris, je suis responsable personnellement d’une information que je détiendrais et que je retiendrais par rapport à l’élu qui doit prendre une décision.

Monsieur BOURILHON.- Vous êtes responsable tant que vous ne l’avez pas communiquée.

Monsieur DEWEZ.- C’est exactement ce que j’ai fait début octobre. Monsieur COSTA.- Je souscris sur la dimension recherche. À l’université,

c’est pareil : on fait des recherches et certaines, qui sont dans un premier temps fondamentales, peuvent servir les questions de société, et on ne se prive pas de vous donner l’ensemble de nos résultats. C’est financé par des deniers publics, donc à partager par le plus grand nombre. À nous de faire en sorte que ces informations soient compréhensibles pour le plus grand nombre. Peut-être que là nous sommes pris en défaut, à nous d’améliorer les choses.

Concernant le fait de savoir si on aurait fait différemment ou pas, j’aurais peut-être fait même pire : je serai allé dans le même sens que vous. Pour les falaises, il n’y a pas le choix, on est rattrapé par le recul, on ne peut pas faire autrement. En revanche, je crois qu’il faut, d’ores et déjà, interpeller l’État. On parle de recul des

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populations, de déplacement de populations, chez vous cela s’est assez bien passé, mais il faudrait peut-être réfléchir aussi aux communes sur lesquelles il n’y aura pas le foncier nécessaire pour accueillir et déplacer ces populations. Donc, mettre des populations sur d’autres secteurs, sur d’autres communes. Comment redistribuer les cartes fiscales entre les communes qui seront affectées ? Une réflexion est lancée par le Gouvernement actuellement : il y a un vrai vide juridique, et pourtant les questions vont poser, et ce sont de vraies questions.

Monsieur GUEGUEN.- (GIP Littoral Aquitain) On parle de 10 ans entre l’arrêté de péril et la réalisation concrète de la destruction. Que font les habitants ? Ou sont-ils ?

D’autre part, est-ce que vous pensez qu’avoir un PPR permettrait de faire un Criel II d’une façon plus rapide et plus efficace ?

Monsieur MAUGER.- J’ai dit dans mon exposé que nous avions eu de la chance : il n’y avait pas de résidents à l’année, donc ils sont rentrés chez eux dans leur maison principale, et ils ont attendu que cela se passe.

Maintenant, dans les documents d’urbanisme, les notaires nous interpellent à chaque vente. L’aléa est connu, les risques sont connus, les 100 mètres sont déterminés très précisément à la parcelle. Cela veut dire que quand on est interrogé, on répond. Les personnes qui achètent le font en pleine connaissance de cause. C’est pourquoi je pense que l’État sera plus vigilant sur l’attribution de ces fonds maintenant, en disant : vous avez acheté, Monsieur, mais vous saviez. Pour moi, on a fait un énorme pas dans ce domaine. Bien entendu, les SCOT le seront aussi. Mais, on est dans du 5 ans, 10 ans, c’est énorme. Il faut encore vivre. Une commune vit tous les jours, on n’attend pas non plus les résultats scientifiques, des bureaux d’études et autres, on continue à vivre tous les jours. On prend certainement de mauvaises décisions, oui.

Monsieur SALEN.- (Géologue indépendant) Comment la population vit-elle chez vous avec cette épée de Damoclès ? D’autre part, la déclaration d’utilité publique est obligatoire : est-ce que les gens n’ont pas un peu traîné les pieds ? Je parle un peu d’expérience dans certains domaines.

Monsieur MAUGER.- Les gens ont un peu traîné les pieds pour récupérer le maximum. Plus vous laissez traîner plus la somme monte. C’est du domaine de la plaidoirie, n’est-ce pas Maître ? Plus on traîne, plus ça augmente. Il y a un moment où l’on considère qu’il faut en terminer parce qu’après, cela peut se gâter et on prend des mesures draconiennes. Face aux populations, il faut leur expliquer.

J’entendais parler aussi de ce fameux arrêté : « Dans cette bande des 100 mètres, on n’a plus le droit de faire des travaux, ni de faire ceci ou cela ». On a des habitations qui datent de l’après-guerre, quand quelqu’un achète une maison dans la bande des 100 mètres, je vous le dis honnêtement : je prends des décisions, de temps en temps, qui sont contre la loi. Je n’ai jamais eu de contrôle de légalité défavorable. Est-ce que vous allez interdire à quelqu’un de faire une salle de bain correcte chez lui ? Il faut arrêter ! Donc on lui permet de faire une salle de bain. On lui permet de faire un garage. Et alors ?

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Monsieur BOURILHON.- Je précise que la notion d’information est au cœur de la question de la responsabilité, aussi bien pour les experts que pour les collectivités et, par extension, pour le particulier. Effectivement, la responsabilité de l’expert peut être engagée, celle de la collectivité ou de l’agent de la collectivité aussi, en cas de défaut d’information. Elle peut également se dédouaner, si elle peut démontrer que l’information a été bien clairement transmise, notamment par le canal des documents d’urbanisme.

Monsieur GAUFRES.- (Centre d’études techniques maritimes et fluviales) Ma première remarque fait suite à la présentation de Monsieur DEWEZ. En France, on raisonne en fréquence sur l’aléa. Dans d’autres pays anglo-saxons, en particulier les Américains, ils essaient d’exprimer, dans le niveau de l’aléa, un pourcentage de ce que peut produire la nature dans ses extrêmes. Par exemple : les pluies maximales probables, les débits probables, etc. On ne peut pas le faire pour tous les aléas, mais en réponse à la question de Monsieur le Maire, nous scientifiques, nous essayons d’analyser la nature et de vous prévenir sur les risques. Il serait peut-être intéressant d’imaginer ce que, dans ses extrêmes, la nature pourrait produire. C’est une façon d’appréhender les aléas.

Deuxième remarque : en France aussi, dans la plupart des études d’aléa, on raisonne actuellement à climat constant. L’objet de cette table ronde est de prévoir à long terme, pas les échéances électorales bien sûr, ce que pourrait produire la nature avec d’autres forçages, d’autres orientations. Là, on bute sur une autre communauté, les climatologues, qui doivent produire des scénarios climatiques régionaux qui ne sont pas encore tous disponibles. Cela rajoute une incertitude supplémentaire. C’est pour cela que l’on est aujourd’hui dans ce flou. Chacun présente un peu son expérience, mais il n’y a rien de figé parce que l’on attend le produit de modélisation pour le futur, qui dépend de notre comportement vis-à-vis du CO². Voilà pourquoi on ne peut pas dire aux citoyens qu’il y aura telle côte en absolu. Cela fait partie de cette culture de l’estimation de l’alerte. En Europe, on ne peut pas dire bien plus que les hypothèses d’aléa raisonnées en stationnaire.

Je pense qu’il faut avoir - et tout scientifique l’a - une humilité vis-à-vis de la nature. Et on ne peut que dire aux élus de faire attention.

D’autre part, pour les falaises comme bien d’autres aléas lithologiques, on hérite d’un patrimoine immobilier. On sait à peu près où vont reculer les falaises, à quel niveau on va atteindre l’eau, quelle sera la subsidence en zone, comme l’a fait remarquer un collègue, quels sont les tassements dans certaines zones, le rebond glacio-isostatique en Europe du Nord. En revanche, les problèmes liés aux phénomènes naturels sont essentiellement des problèmes d’urbanisme. Sauf la personne qui va photographier les vagues, qui va se faire emporter. On l’a vu avec Xynthia. C’est pour cela que, dans des colloques comme celui-ci, il est important que viennent la communauté d’assureurs, de promoteurs, les décideurs dans l’urbanisme, parce que ce sont ces personnes qui, dans leurs choix, mettent les personnes in fine en danger. D’où l’utilité de communiquer parce que la décision ou le risque est un risque global, en particulier de l’urbanisme.

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Madame ROCCHESANI.- Cela pourrait faire l’objet d’une autre table ronde. Pierre AZEMARD, je vous laisse la possibilité de conclure nos échanges pour cette première table ronde.

Monsieur AZEMARD.- Je vous remercie de vos interventions. Un des points qui me semble important dans toute cette discussion, c’est la difficulté qu’il y a à faire passer l’incertitude scientifique sur la connaissance des phénomènes vers une gestion. On a parlé in fine du problème du changement climatique. Une des incertitudes majeures est qu’actuellement nous n’avons pas de relation clairement établie entre les événements climatiques et la conséquence sur l’activité d’une falaise. Nous avons quelques pistes qui sont un petit peu connues. Nous avons travaillé notamment sur le problème de gestion de la route en corniche à La Réunion, où l’on a une 2 x 2 au pied d’une falaise littorale de 200 mètres de haut. Donc, avec beaucoup de problèmes de risque. On a pu établir que, sur ce site, à partir d’un certain seuil pluviométrique de 20 millimètres sur 24 heures, la probabilité de chute était beaucoup plus importante que pendant une période de 48 heures, que le risque normal standard, le bruit de fond de la falaise. Mais que le bruit de fond existait de toute façon. Nous n’avons pas travaillé sur la relation entre le niveau de pluie et le nombre de blocs qui tombaient derrière. Mais ce genre de relation ne peut être établi que si l’on a des mesures fiables et précises, continues et longues sur des sites actifs, notamment.

Les expériences, que ce soit sur Criel-sur-Mer ou autres, sont à mener et à poursuivre pendant un temps relativement long avant d’avoir un catalogue de données qui permette de déterminer une relation entre un niveau climatique et une activité de la falaise. Tant que l’on n’a pas cela, on ne pourra pas quantifier les effets du changement climatique. Il n’y a qu’à partir des mesures que l’on pourra déterminer des lois qui permettront de mieux gérer ce risque. Il ne faut pas se leurrer : c’est du long terme, et entre-temps, il faudra bien gérer tous les cas qui arrivent.

Il est clair que les 10 ans pour passer en loi Barnier… Heureusement que les gens n’avaient pas à être relogés. Les quelques autres exemples que je connais se passent beaucoup moins bien, notamment parce qu’il faut bien reloger les gens. Souvent, pendant toute la procédure, les gens continuent à être chez eux, même si, officiellement, on les a délogés. Ce n’est pas très clair au niveau responsabilité.

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TABLE RONDE N° 2 QUELLES STRATÉGIES EN TERMES DE RÉPONSES ET MOYENS

D’ADAPTATION POSSIBLES, ET QUELLES OBSERVATIONS ?

Madame AUBIE.- Nous allons évoquer l’Observatoire de la Côte

Aquitaine, donc le retour d’expérience que nous avons en Aquitaine, plus particulièrement sur le littoral de la côte rocheuse, le littoral de la Côte basque.

Pourquoi la mise en place d’un Observatoire en Aquitaine ? La Côte Aquitaine représente 270 kilomètres de côte, avec 40 kilomètres de côte rocheuse. Nous avons une pression anthropique relativement importante sur le littoral de la Côte basque notamment, avec 70 % du littoral qui est urbanisé.

L’érosion est également présente, surtout sur le littoral de la côte rocheuse. Sur le littoral de la côte sableuse, c’est beaucoup plus localisé et ponctuel.

Une prise en compte de l’évolution géomorphologique a été effectuée dans les projets d’aménagement. Une prise de conscience pour intégrer et essayer d’accompagner ces processus d’érosion. Il y a donc eu une mobilisation de l’ensemble des gestionnaires du littoral pour créer et mettre en place un Observatoire de la Côte Aquitaine. Les premières études ont été effectuées dans les années 96. Et de fil en aiguille, nous sommes arrivés aujourd’hui à un partenariat régional opérationnel.

Quels sont les objectifs de cet observatoire ? - Mettre à la disposition des élus un outil d’aide à la décision. La première

chose est de fédérer la collecte d’informations pour éviter d’avoir une information disparate, localisée. L’intérêt est de pouvoir faire remonter l’ensemble des informations à travers un centre de ressources collectées sur l’ensemble du littoral et sur différentes thématiques. Ce n’est pas uniquement sur l’évolution morphologique, mais également sur l’aspect faune, l’aspect flore, pour avoir un panel assez complet sur les milieux littoraux.

- Opérer des suivis réguliers. Depuis de nombreuses années, de nombreux suivis ont été effectués sur l’ensemble du littoral, à partir de descripteurs qui ont été identifiés. Le premier est la géomorphologie de la côte, avec le trait de côte. De nombreuses études pluridisciplinaires ont été réalisées en géologie, en géotechnique, en hydrogéologie, de manière à avoir une bonne connaissance à l’échelle de ce littoral.

- Un des objectifs très important, sur lequel on intervient à la demande des partenaires, mais également des élus : l’Observatoire réalise des avis techniques, des expertises, gratuitement délivrés pour les partenaires de l’Observatoire, mais également pour toutes les collectivités locales. Par exemple : ce peut être à la suite d’un événement tempétueux, sur des mouvements de terrain ou sur des dossiers pour des projets d’aménagement, dans le cadre de demandes de subvention. L’Observatoire est sollicité pour émettre un avis afin de pouvoir prendre une décision.

L’ensemble de ces données est diffusé. Il y a des organisations de formation, de manière à faire connaître ce projet. La communication est un volet

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également très important de l’Observatoire. Des plates-formes d’informations géographiques sont également en place, de manière à mettre en place des conventions de mise à disposition, de fédérer des moyens afin de ne pas se disperser, mais bien identifier les thématiques sur lesquelles on a besoin d’avoir de l’information pour pouvoir répondre à une demande.

L’organisation des acteurs du littoral : - Le GIP Littoral Aquitain. C’est vraiment l’outil de gouvernance qui

ressemble les services de l’État et les collectivités. - Le Réseau de recherche littorale aquitain, qui est vraiment le réseau des

universités. Environ 900 chercheurs sont ralliés à travers ce réseau. Il y a vraiment une recherche fondamentale qui vient nourrir aussi des besoins beaucoup plus appliqués.

- L’Observatoire de la Côte Aquitaine, qui est un centre de ressources, avec son côté opérationnel.

Il y a vraiment une relation étroite entre le monde de la recherche, l’action opérationnelle et l’outil de gouvernance, le GIP, qui a une vision régionale. De ce fait, on ne fonctionne plus au coup par coup, mais il y a vraiment une stratégie par rapport à une échelle régionale.

Le partenariat est régional, avec des financeurs à travers l’Europe, l’État, les collectivités, notamment la Région Aquitaine, les trois Départements qui sont sur le littorale, Gironde, Landes et Pyrénées-Atlantiques, le Syndicat intercommunal du bassin d’Arcachon et deux opérateurs techniques et financeurs que sont l’ONF et le BRGM.

L’Observatoire n’a pas une structure juridique, c’est vraiment un partenariat qui lie, à travers une convention, l’ensemble de ces partenaires. Nous avons aussi des partenaires scientifiques et techniques, tels que l’IFREMER, le Conservatoire du littoral, les universitaires et le monde de la médiation scientifique.

Les décideurs et les élus ont un rôle important à travers le GIP Littoral Aquitain, et à travers le Conseil de développement des élus du Pays Basque. Nous avons donc des instances de décision spécifiques sur le littoral de la Côte basque. Il y a également des fournisseurs de données et des gens qui mettent à disposition et transmettent leurs informations pour alimenter le centre de ressources, avec des conventions de partenariat passées avec des associations, des syndicats mixtes, l’université, de manière à identifier où est la donnée, faire des catalogages de méta-données pour pouvoir, lorsque l’on a besoin d’avoir accès à l’information, connaître les personnes ressources pour prendre les décisions.

L’Observatoire fonctionne avec un comité de pilotage et des comités techniques, qui se réunissent plusieurs fois par an, en fonction des thématiques. Ces comités techniques sont élargis aux partenaires scientifiques et techniques, outre les partenaires financiers.

Le projet en lui-même fonctionne au travers de modules. Ce sont des modules par environnement côtier : le littoral de la côte sableuse, le bassin d’Arcachon

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et le littoral de la côte rocheuse, qui sont des environnements côtiers différents. À côté de cela, on a des modules communs : patrimoine et environnement côtier, tout ce qui a trait à l’information sur l’environnement au sens large et l’acquisition de la donnée, des expertises, et un module de communication. L’ensemble étant pour apporter des documents d’aide à la décision, avec des analyses, des rapports, des avis qui sont fournis aussi régulièrement que possible.

Les travaux sur la côte rocheuse ont été initiés suite aux intempéries de 1999. Il n’y avait pas eu encore d’étude d’ensemble. Des études pluridisciplinaires ont été menées : des états des lieux au niveau géologique, hydrogéologique, géotechnique, océanographique. L’objectif étant, sur certains secteurs, d’identifier quels sont les facteurs les plus prépondérants dans les problématiques d’instabilité. Comme nous n’avions pas suffisamment de connaissances, nous avons entrepris également des travaux de recherche, avec la réalisation d’une thèse sur 3 ans, de 2005 à 2008, sur les problèmes d’altération des roches et des instabilités associées sur le littoral, en collaboration avec l’université de Bordeaux.

Sur la Côte basque, les objectifs sont : l’acquisition et l’analyse de la donnée, étudier les processus d’évolution morphologique de la côte, caractériser l’aléa. Nous avons la connaissance à l’échelle régionale. Et c’est surtout réaliser des suivis. L’Observatoire assure vraiment aussi le suivi régulier des instabilités pour la côte rocheuse, et le suivi du trait de côte pour la côte sableuse. L’importance de ces suivis est de pouvoir recaler des événements de tempête. Par exemple : les dernières tempêtes que l’on a subies sur le littoral aquitain. Des mesures sont faites suite à ces événements, et du fait que l’on a des séries de mesures importantes dans le temps, on arrive à restituer l’importance des événements par rapport à une évolution normale.

Un exemple de cartographie géologique sur la Côte basque : nous avons 40 kilomètres de côte, mais une géologie extrêmement variée, donc une multitude de dégradations possibles. Cela va du phénomène d’éboulement à des glissements. Nous avons vraiment une typologie très variée sur ce littoral.

Nous avons une vision globale régionale du traitement de l’aléa, mais également à l’échelle de site. Un site, sur la commune de Guéthary a été instrumenté de manière à acquérir de la donnée et comprendre quels étaient les processus de déclenchement.

Sur d’autres types de secteur, avec une morphologie différente, on a entrepris la réalisation de scanner sur une falaise en particulier. Les résultats sont intéressants : en l’espace d’un an, sur 400 mètres de linéaire de falaise, on a perdu 10 000 mètres cubes de matériaux.

La deuxième partie très importante est le volet expertise, qui est l’outil opérationnel.

L’Observatoire apporte un avis technique, qui reste factuel, soit sur des projets sollicitant des crédits, soit à la suite d’événements. Il peut y avoir également des collèges d’experts : l’Observatoire n’a pas forcément toutes les compétences et peut donc s’attacher d’autres compétences, de manière à répondre au mieux à la demande.

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Monsieur LAROUSSET.- On voit bien les problèmes concernant Guéthary. Nous avons un premier problème avec un mur qui s’était effondré. Est-ce qu’on laisse faire ou pas ? Comme c’était un accès aux plages, nous avons décidé de le faire. Nous avons fait un traitement doux : des drains mis en place dans la falaise. C’est une nouveauté aussi. Plutôt que de choisir des solutions lourdes, nous avons drainé la falaise pour retirer l’eau. Pour le moment, cela marche, et c’est le moins onéreux.

Un autre problème : cette maison qui avait de gros problèmes de glissement en 1958 a été cloutée. Il y a eu un autre glissement. Comme on n’allait pas assez vite, la propriétaire a saisi le TA. Nous avons désigné un expert qui nous a trouvé une solution horriblement lourde. Nous nous sommes automatiquement rapprochés du BRGM qui nous a proposé des drains. Cela s’est terminé à la Maison des avocats, et d’un commun accord, ils ont accepté cette solution. Au lieu de 300 000 € pour consolider, on s’en est sorti avec 60 000 €, avec un suivi derrière.

Un autre secteur : cette promenade a été construite en 1936, avec des moellons. En 1965, tout cela a été renforcé avec des blocs d’ophite. À l’époque, c’étaient deux ou trois tonnes ; aujourd’hui, il faut des blocs de six tonnes. Il y a 15 jours, nous avons eu le même problème. C’est reparti encore une fois.

Quels sont les problèmes chez nous ? Nous avons les expertises, l’Observatoire. Chaque fois que l’on nous annonce une houle qui vient d’Irlande : Attention ! Elle amène des grosses houles et une surcote. Là, c’est une surcote de 20 centimètres, avec des houles de 7 mètres, et avec un marnage chez nous de 4,50 mètres plus le vent. Cela ne pardonne pas : 3 vagues et cela vous casse tout. Grosse difficulté pour nous de prédire. La prédiction est vraiment le monde des aveugles.

À l’échelle régionale, les missions de l’Observatoire permettent d’élaborer des choix d’action. Ceci est très important parce que l’on voit bien que la côte aquitaine représente 270 kilomètres et, nous, nous faisons 40 kilomètres. Pour se faire entendre au niveau régional, il faut être bien présent. Nous le sommes.

Il y a aussi une organisation au Pays Basque : une architecture de pays, avec un conseil de développement, un conseil des élus, qui permet de prendre en compte ces problèmes. Ils partent de la langue basque jusqu’à l’eau de baignade, l’économie, les transports, les déplacements. Ce sont des lignes que l’on met dans le contrat de plan Etat-Région. Sitôt que l’on a un souci, il nous faut l’expertise du BRGM pour être validés par le comité d’action, la Région et l’État, etc.

Pour nous, c’est très important. C’est ce qui nous a permis de faire des avancées. Nous n’avons pas eu la loi Barnier. En 1958, trois maisons ont été englouties dans l’argile, pratiquement au même moment, et celles qui restent sont sur le substratum ou sur pilotis.

Nous allons hiérarchiser les interventions de protection des falaises sur les zones critiques. Quand il faut, on laisse faire. Aujourd’hui, on ne peut plus construire. En plus, on a vraiment un millefeuille de toutes les lois : les ZNIEFF, les Natura 2000 Mer, les Natura 2000 Falaises, la loi littorale... Et maintenant, il y a l’existant. Il y a une maison chez nous qui vient de se vendre à 3 M€ parce qu’elle a vu sur la mer. Le

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gars vient me voir et me dit : j’ai 2 enfants, la maison fait 200 mètres, je veux 200 mètres de terrain de plus. J’ai dit : non. Et pourtant, c’est un joueur de foot en retraite qui a d’énormes appuis. Pour vous dire qu’aujourd’hui, c’est grave. L’autre à 300 mètres plus loin s’est vendue à 6 millions : pareil. C’est un peu la folie.

Dernier point : appuyer les élus locaux dans leurs projets d’aménagement. Le PLU, pour nous, est un outil incontournable. En plus, nous avons mis en

place une ZPPAUP. Ces maisons existantes sont en zone Nb. S’il y a un incendie, c’est un accident, on peut reconstruire. S’il y a un glissement de terrain, il faut démolir.

Madame AUBIE.- Au-delà de la réponse au besoin régional par rapport au premier point, qui est le réchauffement climatique, les réseaux de mesure régulière d’indicateurs permettent de resituer les événements dans leur contexte d’évolution. Cela s’inscrit également dans la directive-cadre européenne INSPIRE, qui est donc la partie catalogage de méta-données, pour identifier où est la donnée, qui a la donnée, et mettre à disposition les informations.

Egalement, participation à des réseaux d’experts européens, avec des projets évoqués ce matin.

Et puis, répondre au Grenelle de la mer, dans le cadre de l’amélioration des connaissances et de projets de GIZC.

Madame LOCHET.- Je voudrais remercier nos collègues du GIP Littoral Aquitain. C’est un véritable exemple de gouvernance multi niveaux sur les éléments qu’ils viennent d’exposer. On y trouve beaucoup d’éléments pour mettre en place une politique de suivi de gestion. Je discutais avec mon voisin de la DREAL Provence-Alpes-Côte d’Azur sur la validité de la donnée, l’opposabilité de la donnée, parce que c’est particulièrement important quand on met en place tout ce travail qu’ils exercent à la fois pour maintenir la concertation, par la quantité d’organismes qui sont fédérés, sur le GIP Littoral Aquitain et sur l’Observatoire. Pour nous, c’est quelque chose de tout à fait exemplaire. Pour autant, il faut que ces données puissent être utilisées dans les documents d’urbanisme.

Je voudrais faire le pendant avec ce qui se passe en région Provence-Alpes-Côte d’Azur où les choses ne sont pas toujours aussi claires. Nous avons également un organisme de mutualisation de la donnée, qui n’est pas centré sur les données littorales, qui s’appelle le Centre régional d’informations géographiques, qui est une mutuelle financée par l’État, la Région et les Départements pour mettre en commun les données et les restituer gratuitement à la sphère publique qui les utilise pour sa planification et sa gestion.

La question que l’on se pose est : lorsque nous établissons des atlas de risques, comme nous l’avons fait sur nos trois départements littoraux, ils ne sont pas obligatoirement pris en compte par les maires. Nous avons élaboré trois atlas de risques couvrant nos 900 kilomètres de côte pour l’érosion et la submersion. Nous avons également un atlas de risques sur les falaises. On ne constate pas forcément l’utilisation de ces données dans les documents d’urbanisme des collectivités et

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l’utilisation par les maires. Ce n’est pas obligatoire. Pour autant, comme le disait Monsieur le Maire de Criel-sur-Mer, on le sait.

Je souhaitais compléter ce qu’ils ont dit par le fait que nous travaillons avec la Région Aquitaine dans un projet porté par une association de 160 Régions d’Europe, qui s’appelle la CRPM, qui envoie des messages à Bruxelles, notamment dans le cadre du livre blanc sur l’adaptation au changement climatique, dans le cadre de la directive INSPIRE et de la mise en place d’un réseau européen de données, qui s’appelle EMODNET. Nous avons souhaité montrer toutes les données élaborées dans les niveaux régionaux, et pas seulement aux niveaux nationaux. Nous avons fait cette démonstration avec une quinzaine de régions de tous les bassins maritimes d’Europe. L’Observatoire était à nos côtés pour démontrer son expérience et ses compétences auprès des différents DG de la Commission européenne.

Madame ROCCHESANI.- Un exemple très concret avec vous, Monsieur Olivier LE NAENNEC. Nous partons vers l’Agglomération de Toulon Provence Méditerranée. Vous êtes chargé de mission au service Environnement. Vous suivez la gestion du littoral aux côtés d’une dizaine de communes entre Six-Fours et Hyères. En termes de gestion, ce n’est pas toujours très simple. À quelles difficultés principales êtes-vous confronté ? Premier retour d’expérience entre vos besoins et la réalité concrète.

Monsieur LE NEANNEC.- Notre cas est un peu particulier : la Communauté d’agglomération Toulon Provence Méditerranée est gestionnaire d’un sentier du littoral, par convention avec l’État, via la DDTM, et avec un partenariat financier, celui du Conseil Général du Var et de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Jusqu’à présent, nous avions un programme de travaux assez classique pour permettre la réouverture des tronçons fermés, et la requalification. Les derniers épisodes climatiques des hivers 2008 et 2009 nous ont amenés à chambouler toute notre organisation, sachant que nous n’étions pas forcément préparés à ce type d’aléa et à ce type d’intervention. Nous sommes passés d’une requalification classique à des gestions d’éboulement de falaises, de reconstruction entière d’ouvrages de franchissement, à la pose de grillages plaqués. On a essayé de trouver des solutions innovantes pour respecter les sites, le paysage et l’environnement ; ce qui n’est pas sans créer des problèmes au niveau foncier et responsabilité. J’attendais beaucoup de l’intervention de ce matin au niveau de la responsabilité parce que l’on se retrouve avec trois acteurs, sachant que la servitude s’applique sur un fond privé. Nous avons le propriétaire, nous en tant que gestionnaire, et la commune.

On se retrouve confronté à savoir qui fait quoi, qui paye quoi, sachant que l’on a une forte pression par rapport à l’intérêt touristique et économique du sentier du littoral. Une forte fréquentation et donc un intérêt politique très important.

Nous avons été amenés en urgence à faire des travaux de mise en sécurité, à tout de même réaliser des études préalables, des études de dimensionnement pour ne pas faire n’importe quoi. Monsieur le Maire précisait que les élus en avaient un peu assez des études. Nous avons été aussi confrontés à ce genre de remarque, mais nous

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sommes un peu obligés, même si ce n’est pas la panacée et si l’on ne peut pas résoudre tous les problèmes avec les études, à partir du moment où l’on est censé intervenir et rétablir la continuité dans le cheminement, d’avoir un minimum d’informations au préalable.

L’organisation de réunions publiques avec les riverains concernés a été un préalable obligatoire et nécessaire.

Sur les deux dernières années les coûts avoisinent les 2,5 millions d’euros pour remettre en état un sentier du littoral.

Maintenant, on profite de cette expérience, lors de la relance de nos marchés publics, pour avoir un niveau d’expertise bien plus élevé, avec l’appui de géologues, de géotechniciens, d’hydrauliciens, la capacité à pouvoir faire des études de houle, des études de dimensionnement spécifique, pour éviter de se retrouver confrontés à nouveau à cette situation. Arriver à répondre même dans l’urgence, mais avec une solution adaptée, tout en respectant le site parce que l’on ne peut pas proposer aux usagers un cheminement littoral, qui est censé être naturel et respectueux des sites, entièrement bétonné et artificialisé.

Maintenant, se pose la question : jusqu’où devons-nous aller dans le maintien de ce sentier du littoral ? Au niveau des finances publiques, l’impact est assez élevé. La situation pour l’ensemble des collectivités est assez difficile. Il y a des projets structurants pour les Agglomérations qui sont bien plus prioritaires que le maintien d’un sentier du littoral. Est-il bien nécessaire de continuer à s’engager dans ces démarches de travaux lourds et coûteux ? Est-ce qu’il ne vaut mieux pas mettre en avant ces solutions de repli stratégique et repousser l’assiette du sentier vers l’intérieur des terres, quitte à ce qu’il soit moins littoral et moins conforme à son appellation d’origine ?

Ce sont les questions que l’on se pose actuellement pour arriver à trouver des solutions durables pour l’environnement et pour les usagers, pour leur donner satisfaction et assurer leur sécurité.

À partir du moment où la servitude s’applique sur un fond privé, nous sommes gestionnaires d’une bande de 3 mètres maximum, ce qui se passe au-dessus et ce qui se passe au-dessous nous concerne, mais pas totalement. Du moins, jusqu’où ? Le propriétaire l’est de part et d’autre du sentier du littoral, mais aussi là où cheminent les usagers. Nous sommes gestionnaires de cette partie-là,. pour ce qui est au-dessus, on peut considérer que le propriétaire a, par rapport à la réglementation, un devoir de maintenir ses terres. Le problème se pose pour ce qui est en dessous, qui sert de support à l’assiette du sentier du littoral, pour lequel le propriétaire considère qu’il n’a plus de responsabilité parce qu’il n’en a plus l’usage. Parfois, il ignore même que cela lui appartient. C’est un peu un artifice au début des discussions. On arrive à trouver des solutions avec des conventionnements, et puis, on coupe la poire en deux : on s’occupe de ce qui est en dessous et qui permet de préserver l’assiette du sentier du littoral, et le propriétaire s’occupe de ce qui est au-dessus, quand c’est possible.

Madame LOCHET.- Pour recadrer les données qu’a certainement fournies Madame SPINOUSA ce matin : 4,8 millions d’habitants en Provence-Alpes-Côte

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d’Azur, dont 80 % sur le littoral, et 35 millions de touristes par an, 80 % également veulent visiter le littoral, notamment le sentier et nos falaises. Ces considérations « Jusqu’où aller ? », « Quels effort financiers faire ? » sont très dépendantes des considérations économiques.

Madame ROCCHESANI.- Arnaud GUEGUEN, quelle gouvernance dans un groupement comme le GIP ? Comment cette gouvernance peut-elle s’appliquer à l’érosion des falaises ?

Monsieur GUEGUEN.- Nous avons, en Aquitaine, la chance d’avoir une organisation comme l’Observatoire, mais aussi une organisation comme le GIP. C’est une originalité. Nous avons, du coup, un outil de gouvernance et un outil dédié à la gestion intégrée du littoral en Aquitaine vraiment différent de l’Observatoire de la Côte Aquitaine. Nous avons un fort historique en termes d’aménagement de la côte, avec une mission interministérielle qui a été créée dans les années 80, qui était une décision d’État. À sa disparition, il y a eu un vide que les collectivités et les services de l’État ont souhaité combler en créant ce GIP, qui a mis une dizaine d’années à être monté.

Les acteurs qui le composent sont : l’État, la Région, les trois Départements, et l’ensemble des Communautés de communes et des communautés d’agglomération. Nous n’avons pas l’échelon communal tout simplement pour des questions de facilitation de la prise de décision. Les communes sont représentées par les communautés de communes et les communautés d’agglomération.

Jusqu’en mars 2010, la présidence était assurée par le Président de la Région Aquitaine. Aujourd’hui, c’est le Vice-président en charge du Tourisme.

Une implication importante des élus. Monsieur LAROUSSET est administrateur du GIP. Il pourra, si besoin, dans les questions, vous préciser comment se prennent les décisions au sein du GIP.

À la fin de l’année 2009, les élus du littoral et les services de l’État nous ont demandé de réfléchir à une stratégie régionale de gestion du trait de côte, qui se fasse à deux échelons : un échelon local et un échelon régional. Un échelon régional pour aider les services de l’État et les grandes collectivités (Départements et Région) à mieux sérier leurs interventions, et un échelon local pour que cette stratégie soit vraiment au cœur de l’action et des préoccupations des collectivités, des mairies et des communautés de communes, pour que cette stratégie régionale s’appuie sur du concret. Je ne pourrai pas vous dire aujourd’hui où l’on en est au niveau de la doctrine régionale car elle est en cours de discussion. C’est pour cela que je posais la question à Monsieur RAOUT : comment sortir la stratégie nationale ? Il faut que tout s’emboîte et que nous, en Aquitaine, on ne dise pas des choses et qu’au niveau national, on vienne rebattre les cartes.

Au niveau local, nous avons choisi de nous appuyer sur trois sites tests. Nous avons des élus qui sont fortement impliqués dans la réflexion et qui sont à un niveau de réflexion où l’ensemble des scénarios de gestion du trait de côte est envisagé : à la fois des scénarios de protection et de repli. On bute aujourd’hui sur la concrétisation de ces scénarios.

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Sur les trois sites tests, nous avons fini la réflexion, c’est-à-dire la définition de l’aléa, l’identification des enjeux. Nous avons fait travailler les élus sur les objectifs de gestion du trait de côte. Nous avons voulu vraiment faire en sorte que ce soient les territoires qui définissent un projet, et que l’on ne vienne pas plaquer des scénarios tout faits sur ces territoires. On ne leur a pas dit que ce serait soit du repli, soit de la protection. On les a d’abord fait réfléchir sur ce qu’ils voulaient faire sur leurs territoires. Ensuite, l’Observatoire de la Côte Aquitaine, qui est notre maître d’œuvre pour la définition de l’aléa et notre assistant à maîtrise d’ouvrage, a défini, avec un bureau d’études, des scénarios permettant de répondre aux objectifs des élus.

Aujourd’hui, nous avons fait l’évaluation de ces scénarios. Les élus sont en train de choisir le scénario qui va s’appliquer sur le territoire. Il ne reste plus que, avec les services de l’État, à trouver la faisabilité de ces scénarios. Une fois que l’on aura ce retour du local, on reviendra au niveau régional pour définir, au niveau du littoral aquitain, une doctrine qui s’appliquera sur l’ensemble du territoire.

Madame ROCCHESANI.- Je vous propose de prendre les premières questions.

Monsieur VINCENT.- (Office national des Forêts - Responsables travaux sur le secteur Bouches-du-Rhône/Var) Dans la table ronde, est évoqué « Quelle stratégie en termes de réponses, et moyens d’adaptation possibles ? Quelles observations ? », et je vois, en fin de document, que l’on parle du couvert végétal. J’aimerais intervenir pour dire qu’on a vu des falaises instables en voie ou en cours d’effondrement. Et puis, très souvent, latéralement à ces falaises, on voit des zones vertes, stables, très souvent couvertes de végétation. Il me semblerait important de se poser la question : pourquoi est-ce que ces zones vertes sont stables ? On connaît en partie la réponse : la végétation sur le littoral se développe à travers une composition floristique particulière, et à travers une structuration verticale aérienne comme racinaire toute particulière, qui permet la protection physique de ce littoral. Sur les côtes rocheuses méditerranéennes, on l’a vu à Carry, il y a encore, y compris en ville, de nombreuses zones végétalisées, naturelles, composées d’espèces locales endémiques, qui assurent une protection d’un certain nombre d’habitations. On a vu aussi des zones qui commencent à s’éroder, souvent à cause du sur piétinement de sentiers mal gérés.

Il serait important, à mon sens, que soit menée une réflexion, en parallèle des actions curatives, sur les actions préventives. Ces zones, un jour ou l’autre, lorsque la végétation disparaîtra par des phénomènes soit de piétinement, soit des phénomènes climatiques, d’incendie par exemple, ne seront plus protégées.

L’Office national des Forêts est impliqué sur le littoral aquitain. Sur le littoral méditerranéen, en particulier en Provence-Alpes-Côte d’Azur, on commence très sérieusement à s’intéresser à ce problème, notamment avec notre service RTM pour la partie expertise, avec nos naturalistes et nos équipes d’ouvriers spécialisés qui travaillent déjà sur le terrain, sur des actions de plantation ou de protection de ces zones.

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Monsieur LAROUSSET.- Je voudrais dire que, sur la Côte basque, vous avez raison, nous avons la corniche avec cette lande vraiment littorale très importante. Tout cela a été identifié par un botaniste. Actuellement, notre problème est de lutter contre les plantes invasives. Si l’on n’y prend pas garde, notre paysage sera terminé. C’est vraiment un gros travail surtout où l’on a des voies de chemin de fer, des autoroutes, on voit bien que les herbes de la pampa blanchissent tout le paysage et asphyxient tout ce qu’il y a dessous.

Monsieur VINCENT.- Ici, nous avons la griffe de sorcière. Ces plantes invasives n’ont pas du tout la même composition floristique, ni la même structuration racinaire et aérienne que la végétation naturelle. La protection physique qui est faite par ces espèces est beaucoup plus fragile et instable que celle de la végétation naturelle composée de pinèdes ou de lentisques.

Madame LAIR.- Je voulais intervenir à nouveau sur la nécessité de cohérence dont parlait Monsieur GUEGUEN, mais également, on le voit actuellement dans toutes les politiques et les groupes de travail mis en place, que ce soit celui sur les zones humides, sur la trame bleue/trame verte, la biodiversité. Je pense qu’il y a une globalité. Quand il s’agit d’aider les élus à prendre des décisions de politique publique, il faut mettre en cohérence une réflexion générale. On le voit dans les outils d’urbanisme. On l’a vu encore récemment pour l’urbanisme, la politique de l’eau. On voit que l’érosion des falaises ou même l’érosion côtière ne vient pas uniquement de l’eau, du côté de la mer, mais bien aussi des activités anthropiques et de la terre. Je crois que nous avons aussi besoin de reconstituer cette globalité. Nous sommes tous éclatés dans des groupes de travail, et il faut bien, à un moment donné, que l’on refasse une cohérence pour que tous ces éléments de réflexion arrivent aux élus quand il s’agit de décider, que ce ne soit pas sectorisé comme c’est le cas en ce moment.

Madame LOCHET.- Nous partageons totalement ce diagnostic, qui est celui du millefeuille. Dans notre région, nous avons un empilement d’initiatives : les SAGE, les contrats de baie, les chartes diverses et variées. Comme vous le dites, on se répartit la présence. Un élu va au contrat de baie, un autre va au SAGE, sur le même territoire, mais ils ne se parlent pas. Certains évoquent les risques, d’autres pas. On élabore des documents. Pour travailler sur les côtes basses, je suis toujours vraiment navrée de la représentation que l’on donne aux élus de nos côtes, qui sont en général aveugles en mer. C’est un trait bleu, il n’y a rien. On ne vous figure pas non plus les bassins versants côtiers qui, sur Provence-Alpes-Côte d’Azur, sont particulièrement dangereux puisque, compte tenu des évolutions climatiques récentes, dans les 10 dernières années, notamment des événements violents, nous avons souvent empilement des événements les mêmes jours.

Je partage tout à fait votre demande de cohérence et de cohésion. Nous demandons, dans les contrats de baie, qu’une action particulière soit faite pour identifier sur la zone toutes les actions en cours, et essayer de sensibiliser les élus, ne serait-ce que leur transmettre les documents cartographiques puisqu’on a même des SCOT qui ne tiennent pas compte des documents élaborés dans un contrat de baie quelques mois avant, sur les mêmes sites.

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Monsieur LAROUSSET.- Je suis tout à fait d’accord, sauf que les SCOT, comme beaucoup de documents d’urbanisme, c’est une grande concertation. Il faut que, derrière, on ait des maîtrises d’ouvrage. S’il n’y a pas de maîtrise d’ouvrage pour mener à bien les orientations des SCOT, cela ne marche pas. On voit bien qu’aujourd’hui, dans l’organisation de nos territoires, dans les maîtrises d’ouvrage, il faut qu’il y ait une dimension des territoires. Au minimum communauté de communes. Il faut qu’il y ait un gros territoire pour définir un enjeu.

L’autre chose que l’on regarde en tant qu’élu : nos grands élus légifèrent à tour de bras, mais il faudrait que chaque fois qu’il y a une loi, on mette en face les moyens. Aujourd’hui, c’est ce qui est un peu gênant : on légifère, mais il n’y a toujours pas les moyens qui sont en face des grandes lois qui sont mises en place. Quand on veut les mettre en application, quand on va chercher de l’argent public, il n’y en a plus. Il faudrait qu’il y ait adéquation entre la loi et les moyens pour mettre tout cela en place. On a parlé du Grenelle, des trames vertes et des trames bleues, c’est formidable au point de vue environnemental, mais derrière, il faut des moyens pour mettre en place.

Je suis dans une communauté de communes importante et si l’on veut travailler là-dessus, il faut embaucher quelqu’un. Comment ? C’est de l’argent public. On ne peut pas non plus embaucher à tour de bras. Il y a une grande inquiétude.

Comme il n’y a pas de moyens en France, qu’est-ce qui se passe ? Cela traîne. On prend son rythme, et il n’est pas assez rapide actuellement.

Monsieur COSTA.- Une réaction par rapport à la notion de cohérence. Je crois que la cohérence ne pourra pas être en fonction des limites administratives. Que ce soit une collectivité territoriale qui essaie de coordonner les choses, c’est très bien, mais je crois qu’il faudrait gérer en fonction non pas des limites administratives, mais des phénomènes naturels générateurs de dommages. Cela peut dépasser les communes, les régions, et cela nécessitera des ententes interrégionales.

En termes de cohérence, je pense qu’il serait bien aussi, sans tomber dans l’État providence, que l’État prenne ses responsabilités et essaie de mettre en place une cohérence en collaboration avec les collectivités territoriales.

Madame LOCHET.- Effectivement, depuis 15 ans, nous travaillons avec notre voisine et cousine, la Région Ligurie puisque c’est plutôt plus cohérent pour nous avant la barrière du Rhône, et nous avons plus de ressemblances sur ce type de phénomène et sur les transports de pollution, en raison du courant ligure. Nous avons ici une représentante de la Communauté d’agglomération de la Riviera française qui pourra témoigner de cette mise en place sur notre zone transfrontalière, où il y a une baie qui va de Monaco à Bordighera, qui dépend de deux pays européens et d’une principauté non européenne : six communes et une principauté avec Monaco, l’Italie et la France. Nous essayons de dépasser nos limites administratives pour aller vers la cohérence géographique. C’est pour cela que je vous parlais de contrat de baie.

Madame ROQUES.- Effectivement, la communauté d’agglomération de la Riviera française a participé à l’appel à projets GIZC du Gouvernement français. Quand nous y avons répondu, bien que nous étions maîtres d’ouvrage, nous avons très

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naturellement dépassé les frontières administratives pour aller travailler sur la totalité d’un bassin-versant transfrontalier, tri-national : la France, et l’Italie dans l’Union européenne, et Monaco, qui est hors Union européenne, et pour lequel, en théorie, nous ne pouvons pas collaborer directement en tant que collectivité territoriale. Il faut passer par l’État français. Mais, cela n’empêche pas des contacts techniques et informels.

Nous essayons de poursuivre en travaillant sur des programmes européens, notamment sur les thématiques des pollutions marines, en dépassant ces limites administratives. Nous y avons travaillé sans outil juridique et sans forcément associer les financements parce que l’on rentrait dans des choses plus compliquées. La communauté d’agglomération a fait le choix de financer des études qui se sont déroulées pourtant sur le territoire italien.

Monsieur MAUGER.- Pour réagir à ce que disaient Stéphane COSTA, Monsieur LAROUSSET et d’autres sur la mutualisation des sources et la cohérence de prise de décision, il y a quelque chose qui me fait très peur à l’heure actuelle : c’est la nouvelle loi sur les collectivités territoriales. L’Etat se désengage complètement. Je suis désolé. Je n’ai pas l’habitude de pratiquer la langue de bois. Les services de l’État sont dans une déliquescence dramatique. Les gens ne sont pas remplacés. Le travail n’est plus assumé aussi correctement qu’il l’était il y a quelques années. Les gens ne sont pas responsables. C’est l’État qui est responsable puisqu’il ne leur donne pas les moyens. Il faut savoir qu’il est inscrit dans la loi de modernisation des collectivités territoriales, et que les préfets ont comme lettre de mission à l’heure actuelle, la suppression de tous les syndicats, avec prise de compétence par les communautés de communes ou d’agglomération. Je peux vous assurer que, sur le terrain, cela va faire du dégât.

On peut se retourner. Si on était méchants, on dirait à l’État d’assumer sa responsabilité. Je peux vous assurer que l’on ne va pas vers le bien.

Monsieur NORMAND.- Sur l’état de déliquescence des services de l’État, je n’ai pas une expérience comme la vôtre dans le service public, mais il me semble néanmoins que l’appréhension du risque croît fortement aujourd’hui, que l’action publique au sens large en matière du risque croît aussi, et les moyens de l’État ne croissent pas. Nous avons plus à faire à des moyens constants, voire légèrement en baisse. Nous sommes bien d’accord. C’est pour cela que le partenariat avec les collectivités est important pour nous. L’Etat ne peut pas gérer seul l’ensemble de la politique des risques en France.

Madame AUBIE.- Sur les perspectives de l’Observatoire, les projets se poursuivent en termes de suivi et d’observation, et surtout les missions d’expertise pour venir en appui aux collectivités, notamment aux élus de certaines communes qui ont donc des soucis et des projets d’aménagement. Nous sommes en appui pour les aider et pour être surtout fédérateurs à l’échelon régional, avec le GIP Littoral Aquitain et le réseau de recherche Littoral en Aquitaine.

Monsieur LAROUSSET.- Je voudrais rendre hommage à l’EUCC car nous avons pu bénéficier de leur expertise sur notre secteur. Depuis, nous travaillons

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très bien avec eux. Nous avons eu aussi le label Quality Coast grâce à notre travail. C’est une bonne reconnaissance, mais en plus de cela, il faut s’approprier des sujets. Comme c’est un dossier européen un peu complexe, c’est un moment fort pour que tous les élus s’accaparent ce projet et le mènent à bien. Ce sont des orientations, avec un point important : l’obligation d’avancer. Pour moi, c’est un bon outil.

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TABLE RONDE N° 3 LA PERCEPTION DU RISQUE ET L’EFFICACITÉ DES MOYENS DE

COMMUNICATION

Madame BATTIAU.- Je tiens d’abord à remercier les organisateurs de ce

colloque de m’avoir invitée. J’apprécie beaucoup. Je suis là en tant que Présidente de l’EUCC France. C’est un sigle formé de mots anglais. Si on le traduit, il signifie : Association européenne pour la protection du littoral. C’est une ONG européenne, EUCC France étant la branche française

Notre association a une double mission : promouvoir la gestion intégrée des zones côtières, et promouvoir un développement durable des zones littorales.

La branche française a été créée, il y a plus de 15 ans, par un universitaire, Roland PASKOFF, qui s’était aperçu que beaucoup de recherches scientifiques étaient très mal connues, sinon complètement ignorées, alors qu’elles auraient pu être utiles aux décideurs et aux gestionnaires. Inversement, il voulait que les scientifiques soient beaucoup mieux à l’écoute de la demande des décideurs et des gestionnaires. Une rencontre était donc nécessaire entre deux mondes qui ne se parlaient pas beaucoup.

Que faisons-nous à EUCC France depuis plus de 10 ans ? Nous organisons des ateliers de terrain et nous réunissons sur un site donné tous les acteurs du littoral, les scientifiques, les gestionnaires, les experts. Nous travaillons beaucoup avec le BRGM, qui est un des partenaires les plus fidèles d’EUCC France. Nous travaillons avec le Conservatoire du littoral, avec l’ONF, avec l’EID Méditerranée qui sont tous trois adhérents de l’association. Pendant ces ateliers, tous les acteurs se parlent, discutent, échangent, dialoguent. Tout cela pour essayer de faire avancer les dossiers. Plus de 20 ateliers ont eu lieu en métropole. Nous allons en faire l’année prochaine un à Mayotte et un à La Réunion. Il ne faut pas oublier que la France, c’est aussi tous les départements d’outre-mer ; nous avons donc du travail.

Nous sommes très modestes parce que le chantier est énorme. Il s’agit d’aider à la diffusion de ces connaissances scientifiques auprès des élus et des gestionnaires. Donc, il faut être très modeste devant l’ampleur du chantier, mais nous sommes aussi très ambitieux. Nous avons vraiment conscience que nous pouvons être utiles.

Le colloque d’aujourd’hui se situe un peu dans le prolongement de l’atelier de terrain qui a eu lieu, en 2009, sur Carry-le-Rouet. Cet atelier était centré sur la problématique du risque lié à l’instabilité des falaises. Et j’en viens à cette table ronde, qui est axée sur la perception du risque.

La perception du risque est un problème extrêmement vaste, qui a été étudié par les sociologues, par les économistes, par les compagnies d’assurance, par des géographes. Mais, y a-t-il une spécificité du risque liée aux falaises ? On peut se poser la question.

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Il faut reprendre ce qui a été dit ce matin : qu’est-ce qu’une falaise ? C’est une côte qui recule. C’est un objet qui est vivant. Il est vivant par toute la richesse de la biodiversité que l’on y trouve. C’est un objet vivant aussi parce qu’il évolue constamment. Cela bouge tout le temps, mais pas à la même vitesse, selon des modalités et des rythmes extrêmement différents d’un lieu à l’autre. La perception du risque va varier selon ces modalités et ces rythmes.

Quand la fréquence est très importante, par exemple en cas d’éboulements récurrents, s’il y a beaucoup de chutes de blocs, le risque est bien perçu, mais cela ne correspond pas forcément aux aléas les plus dangereux. En revanche, il y a des aléas extrêmement rares, peu fréquents, et qui peuvent être catastrophiques.

La perception du risque dépend aussi des enjeux. Des enjeux sont bien ciblés : il y a des maisons, on sait qu’elles sont menacées. C’est relativement facile à gérer. Tandis que lorsque l’on a des enjeux diffus, anonymes, le promeneur qui se balade en haut ou au bas des falaises, il est beaucoup plus difficile de cerner le risque.

Il peut y avoir un risque accepté : celui de l’alpiniste qui va escalader la falaise. Il accepte le risque, mais il s’équipe. C’est aussi le chercheur qui a besoin d’aller échantillonner en haut d’une falaise et qui lui aussi prend des risques, mais c’est accepté et il va s’équiper. En revanche, il y a le risque qui est accepté inconsciemment, par exemple par le promeneur qui ne sait pas ce qu’il risque s’il n’est pas informé. D’où le gros problème de l’information.

Cette information vis-à-vis des risques évolue énormément en fonction de la connaissance scientifique. Plus la connaissance scientifique progresse, plus la société est exigeante vis-à-vis des élus et des gestionnaires. En cas d’accident, le citoyen va dire : ils savaient, mais ils n’ont rien fait. Il faut que la connaissance progresse, mais il faut aussi qu’il y ait une transparence et une diffusion de cette connaissance pour que les élus et les décideurs puissent intégrer cela dans un plan de gestion. Cela pose de nombreux problèmes.

Une fois que l’on est bien informé, quelle va être la réaction du public ? Ce n’est pas forcément une réaction intelligente. Même si on met des panneaux, il peut continuer à se balader au pied de la falaise. D’autre part, vis-à-vis des élus, il y a le problème de l’attitude des élus : est-ce que l’on peut faire n’importe quoi avec une falaise ?

Je répète souvent qu’une falaise est aussi un livre grand ouvert sur la géologie d’une région, et que si on détruit la falaise en la bétonnant, on va supprimer quelque chose qui fait partie de notre patrimoine. Il faut en tenir compte.

Nous allons voir l’expérience de Carry-le-Rouet, qui est extrêmement intéressante.

Monsieur MONTAGNAC.- J’aurais souhaité ne pas participer à cette expérience. Cela prouverait que Carry-le-Rouet n’a pas de problèmes de falaise. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Le sentiment de l’élu que je suis, partagé par les membres du Conseil municipal de Carry-le-Rouet, est que nous avons été relativement tranquilles ou épargnés pendant quelques années puisqu’une chute importante, qui

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avait d’ailleurs entraîné la mort d’un baigneur, se situe aux environs des années 70. Jusqu’aux années 2000, nous n’avons plus eu de souci au niveau de nos falaises, au niveau de notre sentier du littoral, de nos plages et de nos calanques.

Et puis, - Pourquoi ? Je ne sais pas. Peut-être que les scientifiques pourraient le dire mieux que moi - nous avons eu, à partir de 2000, des chutes successives, aussi bien au niveau du port de plaisance, sur les falaises est et ouest, qu’au niveau du sentier qui chemine et qui récupère énormément de plaisanciers et de touristes, qui part du port de Carry-le-Rouet et qui va jusqu’aux calanques de Sausset. Et puis sur le Rouet Plage et le cap Rousset. Nous avons observé une série d’éboulements, plus ou moins importants en fonction des lieux, qui ont mis en péril des habitations, le chemin des douaniers, une calanque avec une plage, etc.

Nous avons été un peu pris de court sur les premiers événements. Ensuite, nous avons fait appel à différents scientifiques, notamment bureaux d’études. Je remercie d’ailleurs Madame MARÇOT d’être à mes côtés, pour le travail que le BRGM a fait au point de vue étude sur les falaises de Carry-le-Rouet.

Pour répondre à certaines questions et à quelques affirmations, en tant qu’élus, nous sommes toujours très partagés entre le besoin et le souci de permettre à nos habitants et aux touristes, aux gens qui viennent nous visiter, de continuer à pouvoir se baigner dans nos calanques, promener sur nos chemins littoraux, et le souci que nous avons de protéger ces falaises et les habitations qui ont été construites il y a quelques années en arrière, chose qui ne devrait plus se faire maintenant parce que nous sommes en train de préparer un PLU pour remplacer notre POS. Dans ce PLU, nous allons faire en sorte que les quelques terrains qui restent, qui se situent en bordure de falaise, soient inconstructibles, ou au moins qu’il y ait le recul nécessaire pour éviter les incidents que nous avons connus il y a quelques mois, puisque nous avons eu une chute importante de roches et de terre, qui a menacé deux ou trois habitations en bordure de mer. C’est la difficulté que nous rencontrons et qui représente un point d’interrogation pour nous. Quand on a posé la question en préfecture pour savoir qui était responsable de ces falaises, qui devait les conforter, qui devait prendre les mesures de sécurité, on n’a pas été affirmatif, mais on s’est adressé à Monsieur le Maire en lui demandant de faire les travaux nécessaires, et je pense que, s’il y avait eu des incidents graves, ce serait revenu immédiatement sur la table du maire.

Nous sommes conscients des difficultés que nous allons avoir dans les années à venir. Nous sommes conscients de nos responsabilités. Nous sommes conscients des enjeux économiques que cela peut représenter. Mais, nous sommes également conscients de l’importance financière de ces travaux. La moindre intervention sur une falaise, quelle que soit sa hauteur, représente des coûts importants pour des communes comme la nôtre, une petite commune puisque je rappelle que les falaises, malgré l’arrivée de la communauté urbaine, appartiennent encore à la Ville et sont donc gérées financièrement et au point de vue sécurité par les Villes.

Il y a eu ce colloque, l’année dernière, à Carry-le-Rouet, avec les différents représentants des organismes. Il est vrai qu’il nous a apporté une idée de ce que nous devions faire et des travaux à venir. Nous avons pris comme décision de mandater un

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bureau d’études, qui va nous permettre, dans l’année 2011, de situer nos difficultés et les points sensibles, et de pouvoir organiser, année par année, en fonction de nos budgets respectifs, les travaux nécessaires. C’est quelque chose qui, pour nous, est très difficile. En plus, on s’aperçoit que, quelquefois, ce n’est pas forcément une érosion due à la mer, mais une érosion climatique. On s’aperçoit que les falaises s’éboulent, que les chemins sont de plus en plus difficiles à entretenir parce qu’il y a une érosion due notamment à la pluie et à la consistance de ces falaises. Les scientifiques pourront le dire mieux que moi. En tout cas, c’est une expérience que je ne vous souhaite pas de partager avec nous parce que nous nous en serions bien passés.

Madame MARÇOT.- Je vais poursuivre en reprenant les conclusions de l’étude globale sur le littoral de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur présentée ce matin, avec notamment la partie liée aux sciences humaines, c’est-à-dire à la notion de perception des risques par les usagers.

Cette partie avait été demandée par le Conseil régional, dans le cadre du contrat de plan Etat-Région. Elle avait été réalisée avec l’aide d’un étudiant du Master Mathématiques et Sciences sociales de l’université de Marseille, Ludovic AZIBI. Je vais donc me faire l’écho de son travail, et vous présenter les quelques résultats.

Cela se situait donc dans la troisième phase de l’étude, en 2008, sur l’utilisation d’une enquête de perception intégrée dans une étude de risques.

Je vais passer assez vite sur le massif de la Côte bleue, ce sont des généralités. Ce massif, qui s’étend depuis l’ouest de Marseille, à partir de l’Estaque jusqu’à Port-de-Bouc, comporte en général des falaises de 50 mètres de hauteur au maximum, de terrain sédimentaire tertiaire, avec un des principaux types de phénomène d’instabilité, qui s’appelle l’érosion différentielle, c’est-à-dire l’altération importante des niveaux meubles par rapport à des niveaux plus indurés. Et la mise en évidence de secteurs à risque élevé.

D’un point de vue aménagement, nous avons des accès par sentiers sur quasiment l’ensemble de la Côte bleue, avec une population de randonneurs toujours croissante, et des plages de poche encastrées entre deux falaises.

Sur Carry-le-Rouet principalement, c’est un littoral communal assez aménagé, avec des sentiers, des plages, un port, une urbanisation importante.

Nous avons fait l’état de l’ensemble des études géotechniques faites sur Carry-le-Rouet. Il y en avait déjà un certain nombre qui avaient été faites au coup par coup suite à différents événements. Ceci avait bien montré que, malgré un aléa modéré à fort en termes d’instabilité, il revient à la commune de décider de l’évolution de ces sites particulièrement sensibles.

En termes d’analyse, une enquête de perception a été réalisée sur ce littoral de Carry-le-Rouet, avec différents objectifs.

Tout d’abord, questionner les populations d’usagers sur le degré d’exposition au risque, sur la connaissance du risque qu’ils avaient en empruntant ce sentier, en utilisant ces plages, et avec tous les usages connus sur ce littoral, s’ils avaient une conscience du risque ou pas, leur degré d’anticipation en cas d’événement,

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une notion ou pas de la gestion du risque, un degré de prise de risque et de respect des consignes quand il y en a, un degré d’information et des questions d’évocation et de déterminants sociaux.

Cette enquête a été faite sur un panel de 209 personnes, entre avril et juillet 2007. La passation du questionnaire s’est faite sur quatre zones précises : le site du Moulin et du Phare, le site du cap Rousset où l’aléa est assez fort, le site du port du Rouet et le site de la pointe du Rouet.

Nous avons décortiqué tous les résultats pour voir quelle était la population, et surtout si c’était une population locale ou pas. En général, les personnes qui ne sont pas de Carry viennent quand même de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. À cette saison-là, on avait peu de personnes en dehors de la région.

Nous avons une identité sociale, qui est un facteur explicatif puissant : il y a vraiment des personnes qui se sentent plus ou moins concernées par cet aléa.

Le déni du risque est assez quotidien et, selon les activités, la prise de conscience est différente.

Sur ce schéma, nous avons essayé de replacer l’ensemble des activités, l’ensemble des personnes interrogées. Dans les zones d’aléa fort, on retrouve des gens qui pratiquent des activités de type baignade, plutôt des jeunes, en général des gens qui viennent pour la première fois sur ces sites. Et puis, des gens qui, finalement, ont la conscience d’être exposés à un aléa fort.

Cette enquête de perception s’est intégrée dans une analyse plus globale de gestion du risque. En reprenant les travaux de Catherine Meur-Ferrec, qui a énormément travaillé sur le sujet, la perception s’est complètement intégrée parmi 4 composantes : l’aléa, les enjeux, la gestion, et la perception, pour évaluer une vulnérabilité. Je ne reviens pas sur l’aléa, les enjeux, la gestion. Quant à la perception, on sort du domaine de la géologie, on est vraiment dans un domaine de géographie sociale, de sociologie, mais importante pour une gestion du risque global.

Concrètement, dans notre analyse, nous avons détaillé toute cette évaluation qualitative de la vulnérabilité à partir de grilles, avec des rubriques qui définissaient des paramètres sur telle ou telle composante, et puis une analyse globale.

Un exemple de grille qui analysait l’aléa. Nous avons repris toutes les informations issues à la fois de l’étude réalisée à l’échelle globale avec le zoom sur Carry-le-Rouet et les études géotechniques. Nous avons ressorti l’ensemble des éléments pour qualifier un indice de vulnérabilité relatif à l’aléa moyen : une vulnérabilité du littoral assez conséquente.

En termes d’enjeux, si on reprend sur Carry-le-Rouet l’ensemble des enjeux, c’est-à-dire un tourisme de proximité, plutôt des usagers qui viennent de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, un front de mer aménagé assez fortement puisque l’on a un sentier quasiment sur l’ensemble du littoral, en tout cas sur le sentier de la pointe avec le sentier du Lézard, et donc une forte fréquentation en période estivale, des circuits côtiers, et des plages en pied, avec par exemple 3 240 personnes comptabilisées à l’été 1993. On a aussi un patrimoine architectural et historique, des

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domaines environnementaux qualifiés avec une ZNIEFF marine, des herbiers de posidonies, des aires marines protégées.

En termes de vulnérabilité concernant les enjeux, nous avons évalué un indice moyen à partir de toutes ces données.

En termes de gestion, sur la commune de Carry-le-Rouet, il n’y a pas de document type PPR. Le PLU est en révision. Il existait à l’époque de l’enquête.

Un dossier départemental des risques majeurs, et pas de dossier communal synthétique.

En termes de vulnérabilité, cela avait été qualifié de fort, en termes de gestion.

En termes de perception, 77 % de la population est concernée à très concernée par cet aléa.

En termes de localisation, 95 % des personnes interrogées parvenaient à localiser approximativement sur une carte les risques d’éboulement.

En termes de conscience, 40 % de l’échantillon pensait qu’il y aurait probablement des éboulements dans la commune, mais plus un individu fréquente le littoral moins il a conscience de ce risque.

Et 76 % de notre échantillon a une bonne ou très bonne perception du risque de la zone. Finalement, un indice moyen.

Tous ces indices ont été regroupés et synthétisés en un indice global. C’est une méthode de synthèse radar qui existe, et qui a été réutilisée dans cette approche, et qui donne en termes de conclusion :

- Sur l’aléa, un linéaire côtier relativement exposé. - Une commune qui accueille de nombreux résidents. - L’échantillon interrogé a une bonne perception du risque. La part de sous-

estimation au risque reste faible. - Les personnes interrogées parviennent facilement à localiser le risque. - Le rythme de fréquentation, l’âge, l’activité pratiquée influencent la

perception du risque, mais aussi le degré d’exposition. Madame ROCCHESANI.- Henri BAUMIER, vous êtes en charge du

sentier littoral au sein de la DDTM 83. Vous allez nous faire partager votre expérience sur la mise en place d’un tel sentier littoral. Quelles sont les principales contraintes ?

Monsieur BAUMIER.- Nous essayons principalement de privilégier une solution qui passe en haut de falaise, suffisamment en retrait à l’intérieur des terres pour ne pas être concernés par d’éventuels éboulements, glissements ou par l’érosion.

Pour étudier un tracé, nous missionnons une équipe pluridisciplinaire qui comprend notamment un géologue, afin qu’il fasse une analyse des risques géologiques et des constats visuels. Sur la base de ces constats visuels et des études qui

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ont déjà été réalisées sur le site ou des études générales, le géologue va apprécier la stabilité des talus, des falaises, et établir une cartographie précise du site.

Sur cette cartographie, il va faire une estimation d’une distance de sécurité par rapport à la crête de falaise. Elle correspond à un recul qui garantit la sécurité des usagers et la durabilité des aménagements que l’on va proposer.

Une fois le tracé arrêté, il faut prévoir un dispositif qui empêche les usagers de pénétrer ou de stationner dans la zone qui peut présenter des risques, et qui se trouve entre la crête de falaise et le futur sentier.

Un des dispositifs les plus efficaces que l’on met en œuvre, c’est de faire des plantations dans cette zone, en les protégeant par des clôtures légères de type ganivelle ou casse-patte, et en indiquant avec des panneaux d’information que c’est une zone de régénération naturelle. En général, c’est un aménagement qui est assez bien respecté par les usagers, et qui permet également de stabiliser les crêtes de falaise.

De plus, le long du cheminement, à intervalles réguliers, on va positionner des panonceaux qui indiquent que cette promenade peut présenter des risques, notamment en bordure immédiate de falaise.

Sur les sentiers existants, pour reprendre ce qu’ont dit nos partenaires de Toulon Provence Méditerranée, qui ont la gestion des sentiers, nous allons nous efforcer, quand il y a un problème d’éboulement ou d’effondrement, de trouver des solutions de déviation qui permettent d’éviter les zones à risque, et d’appliquer les mêmes principes que pour les nouvelles sections.

Madame ROCCHESANI.- La communication se fait sur site essentiellement. C’est là où c’est le plus efficace, d’après votre expérience. Et la concertation pour prendre en compte les besoins des usagers et cette perception du risque.

Monsieur BAUMIER.- Il y a déjà une concertation en amont, quand on fait le projet, avec les propriétaires riverains puisqu’ils ont du mal à admettre qu’on leur demande de prendre une partie plus importante de terrain que ce qu’ils imaginaient puisqu’ils n’imaginent pas les problèmes de stabilité de falaise. Avec les usagers, il y a uniquement les panneaux d’information aux différents accès du sentier, et le long du sentier également.

Madame ROCCHESANI.- Nous allons prolonger nos échanges avec notre sociologue, Cécilia CLAEYS. Vous avez fait des études sur la prise en compte des risques par les usagers. Peut-être un premier retour d’expérience et les premiers enseignements sur ces études.

Madame CLAEYS.- Un mot peut-être pour présenter en quoi le sociologue peut intervenir sur ce genre de thématique. On associe généralement la sociologie au travail, à la famille, à l’école. Or, depuis une trentaine d’années maintenant, on s’est rendu compte que les thèmes qui, jusqu’alors, étaient circonscrits à des approches des sciences de la vie, de la terre ou des techniques, avaient un volet humain bien plus important que ce que l’on soupçonnait. Il me semble que les débats qui ont eu lieu jusqu’à présent, dans ce colloque, en sont des témoignages récurrents.

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En effet, il est indispensable de connaître le processus physique et biologique à l’œuvre. C’est cette fameuse dimension que l’on nomme l’aléa. Mais, qu’importe l’aléa, si l’on ne mesure pas aussi ce qui se passe au niveau des enjeux, ce que l’on appelle la vulnérabilité. Là commence le propos du sociologue : identifier cette vulnérabilité.

Lorsque l’on est sollicité, soit par des collègues qui viennent des sciences dites dures ou inhumaines, ou par des décideurs, bien souvent, le réflexe qui est le vôtre est de nous dire comment ils perçoivent, en sachant que vous avez un présupposé : les gens perçoivent mal. Expliquez-moi à quel point ils perçoivent mal pour qu’ensuite, je les informe et que je puisse les convaincre que j’ai la vérité sur le sujet. C’est souvent l’arrière-pensée de nos interlocuteurs.

En effet, vous n’avez pas tout à fait tort. L’approche cognitive, ces fameuses notions de perception évoquées à plusieurs reprises, montrent bien qu’il existe des distorsions entre ce que les individus perçoivent et la réalité objective. Des distorsions que l’on peut expliquer avec des variables classiques : l’appartenance sociale des individus, leur culture, leur histoire personnelle. Une variable fondamentale, qui est ressortie dans les discussions aujourd’hui, qui permet d’expliquer les distorsions : l’intérêt économique. Mais, dans ce cas-là, nos interlocuteurs ne sont pas dans l’ignorance. Ils ont juste une vision très particulière qui fait qu’ils vont laisser traîner une procédure pour avoir un gain pécuniaire plus important. Ce n’est pas de l’ignorance. C’est juste qu’ils n’ont pas le même objectif que vous, décideurs. En effet, cette dimension perception est incontournable, et il faut l’aborder. Mais, cette distorsion entre la subjectivité et la réalité objective renvoie à une question subalterne, et peut-être pas si secondaire que cela : Qu’est-ce que la réalité objective ?

Nous avons bien vu, au cours de la journée et de l’après-midi, que les experts eux-mêmes sont parfois dans le doute parce que les processus en jeu sont d’une complexité telle que l’on ne peut pas précisément prévoir, au mètre près ou à l’année près, quand et comment la falaise va s’écrouler.

Peut-on toujours jeter dans le registre de l’ignorance les perceptions de nos acteurs sociaux, alors qu’en fait ce qui se trame ici est une complexité de phénomènes ? À ce titre, les sociologues parlent de plus en plus de controverses socio-techniques. Des controverses où les débats se font entre experts, mais aussi où le débat strictement scientifique s’élargit et se mélange à des considérations politiques, économiques, sociales, culturelles.

C’est aussi une façon de vous signifier que si vous voulez comprendre les processus sociaux, ne les rejetez pas uniquement dans la sphère de la perception biaisée, mais plutôt dans la complexité et la pluralité des savoirs et des intérêts qui sont à l’œuvre.

Je continue à monter en généralité dans mon propos. Ce qui ressort de vos expériences, c’est que l’on a, sur de nombreux terrains, un héritage moderniste. Ce n’est pas seulement l’ignorance des habitants, c’est l’héritage de notre société tout entière, acteurs politiques, acteurs économiques, scientifiques et techniques compris.

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L’héritage, qui nous vient de la modernité du XIXe siècle qui, pendant quelque temps, nous a fait croire que nous étions techniquement et scientifiquement capables de maîtriser la nature. Héritage qui était pendant longtemps un défi technique pour les ingénieurs d’État, qui allaient presque en découdre avec la nature pour montrer à quel point l’être moderne était capable de faire fi de cette nature, en tout cas de la contrôler.

Aujourd’hui, suite à plusieurs processus, parfois concomitants, parfois en opposition, nous sommes dans une phase qui tente d’aller vers une sorte de post-modernité. Qu’est-ce que la post-modernité en termes de risques ? C’est vouloir accepter le risque, vouloir reconnaître la vulnérabilité. Imaginez la violence de ce changement ! Le poids de l’héritage moderniste et, tout d’un coup, en 30 ans, - ce n’est rien à l’échelle de l’humanité - il faudrait que l’on passe à une vision post-moderne. Bien évidemment, le changement ne peut pas se faire du jour au lendemain. Et ce que les élus ont à gérer, c’est ce changement-là.

Pourquoi, tout d’un coup, avons-nous cet appel à la post-modernité ? Bien sûr, on a des changements idéologiques, 68 est passé par là, la redéfinition des sciences de la vie avec une approche éco-systémique, mais aussi des enjeux très économiques. La modernité coûte cher. En découdre avec la nature et vouloir la contrôler coûte cher. Finalement, tout le monde est aussi en recherche de stratégie économique. Il aurait été important d’avoir un économiste pour réagir sur ce point-là.

Voilà ce que je voulais mettre en avant en tant que sociologue : de la perception à la modernité et à la post-modernité, des échelles impliquées les unes avec les autres.

Madame ROCCHESANI.- Et la multiplication de l’information, Internet, les forums, etc., est-ce que cela a un impact ? On parle d’ignorance, mais nous n’avons jamais été aussi proches de l’information.

Madame CLAEYS.- Il ressort que, dans les différentes études dans le domaine du risque, pas forcément sur les falaises, ce peut être des risques environnementaux, sanitaires, ce n’est pas que les individus ne perçoivent pas le risque, c’est qu’ils filtrent l’information et ne retiennent l’information en général que lorsqu’ils ont les pieds dans la boue ou la falaise qui s’écroule sous les pieds. Ce déni est récurrent. C’est aussi une façon de se protéger. Imaginez si, tous les matins, vous faisiez la liste de tous les risques auxquels vous êtes exposés. On serait tous dans une situation de névrose ingérable. Le déni du risque est aussi une façon de se protéger, mais qui aboutit aussi à des situations où, stratégiquement, on ignore les choses auxquelles on est exposé.

L’exemple classique est que si un individu est exposé une seule fois à un risque, il a une approche probabiliste de dire : j’ai eu ma dose, c’est fini, je n’ai plus de problème. C’est quand ils sont exposés deux ou trois fois au même risque que leur perception des choses change complètement, et le risque est intégré à leur mode de vie. Ils sont même prêts, pour certains d’entre eux, à faire des investissements économiques à titre personnel pour se protéger de ce risque.

Madame ROCCHESANI.- Peut-on en déduire que ceux qui viennent en touristes ont moins cette prise de conscience ?

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Madame CLAEYS.- Ce phénomène est récurrent. Par exemple : récemment, nous avons fait des études sur le moustique chikungunya, et nous avons une corrélation forte entre la gêne ressentie par les habitants concernant les moustiques et le fait de donner de l’importance ou non aux enjeux environnementaux et sanitaires liés à ce moustique. Quand on est très gêné par les moustiques, on pense que c’est très grave et qu’il va falloir faire quelque chose rapidement. Quand on n’est pas gêné, on pense que c’est secondaire. Pour la falaise, on va retrouver ce processus-là.

Monsieur KELLE.- (Président du Comité régional des Clubs alpins et ancien guide de haute montagne) La notion de risque est quelque chose que je connais. En ce qui concerne l’escalade, les escaladeurs recherchent toujours des parois qui soient les plus saines possibles, c’est-à-dire avec un rocher de qualité. Nos parois des Calanques ou des falaises du côté de Monaco ne se renouvellent pas tous les 10 ans, comme je l’ai vu du côté de la Normandie ; ce qui m’a fortement impressionné. Au niveau des Calanques et des falaises littorales, il y a très peu de risques de chute de pierres naturelle. Ce n’est pas pour cela qu’il n’y a pas de risques de chute de pierres, avec des cordées qui sont au-dessus. Mais, les risques de chute de pierres naturelle dans les Calanques sont extrêmement faibles parce que le rocher est plutôt de bonne qualité aux endroits que l’on le fréquente.

Je signalerais aussi que la plupart des entreprises de travaux acrobatiques sont gérées par des grimpeurs. C’est grâce aux grimpeurs que vous pouvez sécuriser un certain nombre de falaises qui présentent beaucoup de risques.

Deuxième point : les randonneurs. Ils sont très nombreux. Je prends l’exemple des Calanques : il y a à peu près entre un à deux millions de randonneurs qui fréquentent les Calanques par an. À ma connaissance, il y a eu un accident mortel, à un endroit qui s’appelle les Pierres tombées, qui porte bien son nom parce qu’il y a là effectivement un risque de chute de pierres, signalé sur place. Mais, au niveau des randonneurs, ils n’ont peut-être pas conscience de ce risque. On dit qu’il y a déni du risque. Mais, prenez des chiffres : un accident mortel pour un ou deux millions de personnes qui fréquentent par an, sur les 50 dernières années, cela fait très peu de monde. C’est un risque tout à fait acceptable. Vous avez beaucoup plus de risques en vous baladant dans les rues de Marseille de recevoir une tuile de la tête, si ce n’est une météorite.

Pourquoi parle-t-on autant de ce risque ? C’est pour une question de responsabilité. En cas de problème, c’est le propriétaire qui est responsable. C’est la raison pour laquelle vous avez des panneaux qui surgissent un peu partout : « Attention ! Chute de pierres ». Je pense qu’il serait souhaitable que, comme dans d’autres législations, on modifie cette loi qui rend responsable le propriétaire ou qu’on l’allège. Cela simplifierait bien des choses.

Monsieur GUEGUEN.- Est-ce que, pour les décideurs, la connaissance de la perception du risque au niveau de sa population doit influencer la prise de décision ? Est-ce que le fait de savoir que la population accepte ou pas le risque doit modifier la prise de décision de l’élu ?

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Pour revenir sur ce que disait Monsieur le Maire de Criel-sur-Mer, il nous a dit qu’il avait la chance d’avoir des résidences secondaires sur la falaise, et que c’était plus facile pour les décideurs de faire un repli. Je vais contrebalancer ses propos par une étude qui vient d’être faite par le BRGM et la communauté des chercheurs qui s’appelle MISEEVA, réalisée en Languedoc-Roussillon, qui montrait que la perception du risque par les propriétaires d’une résidence secondaire était complètement différente de celle d’une résidence principale et que, du coup, les personnes de résidences secondaires étaient beaucoup plus attachées à leur maison et qu’il était plus difficile de les exproprier parce qu’ils étaient dans une relation affective qui empêchait le repli.

Monsieur MAUGER.- Je suis parfaitement d’accord avec vous, mais j’ai rajouté un autre item : ils étaient très âgés.

J’en profite pour revenir sur la gestion du risque. À Criel-sur-Mer, nous avons des risques majeurs. Les falaises : cela ne concerne pas grand monde, à part les maisons concernées, maintenant il n’y en a plus que 4. Du moment que l’on n’interdit pas aux gens d’aller à la pêche aux moules, tout va bien. Deuxième risque : les inondations. Nous sommes inondés tous les deux ans. Là, je peux vous assurer qu’une fois tous les deux ans, les pieds dans la boue, les voitures qui se promènent et les maisons à sécher : cela fait quelque chose. Puis, on a un autre risque, et là tout le monde s’en fout : la centrale nucléaire. Lors des exercices d’évacuation, c’est la rigolade. Le jour où cela va péter....

Monsieur MONTAGNAC.- Pour répondre à la question de notre intervenant, il est évident que, nous élus et responsables de nos villes et de nos concitoyens, nous prenons conscience, chaque fois que des événements sur le terrain se passent, et ils nous obligent à prendre des décisions.

Mais, je voudrais rebondir sur ce que l’on disait tout à l’heure parce que, quand nous mettons des panneaux, quand nous posons des grilles, quand nous mettons en place un système pour éviter que des gens, le dimanche, le samedi ou pendant les vacances, viennent sur nos côtes qui sont dangereuses, et que, tous les lundis, quand le responsable des services techniques fait un peu le tour, on a jeté à la mer les grillages, que l’on a cassé et démonté les panneaux, à un moment donné on se pose la question de savoir si ces gens sont conscients des risques qu’ils prennent. Et cela nous oblige à avoir une surveillance permanente sur ces sites parce qu’après, selon l’incident, nos avocats nous disent : s’il n’y a pas de panneaux et pas une interdiction formelle écrite quelque part, vous serez responsables si les gens ont eu accès à ces lieux dangereux. La difficulté est de faire comprendre à ces gens, qui ne sont pas forcément de notre commune, des alentours ou de plus loin, qui ont un seul objectif, quels que soient les risques : arriver au bord de mer le plus près possible, être le plus loin possible d’un voisin pour être tranquilles, et donc ils prennent tous les risques. Sur notre chemin du Lézard, il y a des panneaux indiquant qu’il y a des endroits dangereux, qui sont susceptibles de s’ébouler. Malgré ce, vous trouvez des gens qui viennent pique-niquer avec des enfants au pied de ces falaises qui peuvent s’ébouler du jour au lendemain. Notre difficulté est de le faire comprendre aux gens. Le Carryen lui-même sait où c’est

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dangereux, il n’y va pas. Mais, c’est le touriste, qui vient régulièrement, et que nous trouvons dans les endroits difficiles et dangereux d’accès.

INTERVENTION.- Une remarque sur l’intervention très intéressante de notre sociologue.

Je pense, Madame, que vous sous-estimez l’ignorance. Je ne parle pas de l’ignorance du quidam moyen, mais de l’ignorance en science, qui a des sources multiples, qui peuvent s’appeler « mode », « pensée unique », « argent ». Et cette ignorance-là nous mène sur une pente glissante très dangereuse.

INTERVENTION.- Je voulais rebondir sur la remarque de Monsieur MONTAGNAC et avoir une question pour Monsieur BOURILHON. Est-ce que le fait d’indiquer qu’il y a un danger dédouane le maire de sa responsabilité d’assurer la sécurité du public ? Si jamais, dans ces zones où il y a un panneau d’interdiction d’aller, il n’y a jamais un accident, est-ce que le maire peut être tenu pour responsable parce qu’il n’a pas fait une mise en sécurité suffisante ?

Monsieur BOURILHON.- Oui, je l’ai indiqué ce matin. La faute de la victime peut exonérer partiellement ou totalement la collectivité. J’avais cité l’exemple de la visite d’un lieu par une personne privée, qui n’était pas balisé ou mal indiqué. Dans ce cas-là, la responsabilité de la commune va être engagée. A contrario, cela signifie que, dans ce type de lieu qualifié à risque, si le balisage est bien effectué, si les indications sont bien posées sur ces lieux, la collectivité va pouvoir s’exonérer de sa responsabilité. La difficulté pratique qui se pose, c’est dans l’hypothèse évoquée par Monsieur MONTAGNAC, où le balisage est fait, il est retiré et qu’une personne se présente sur le lieu à risque. Quid de la démonstration du balisage, dans la mesure où il a été ôté par un tiers ?

Monsieur MONTAGNAC.- Nous avons fait constater par huissier que nous avons fait les travaux nécessaires empêchant l’accès et indiquant la zone dangereuse.

Monsieur BOURILHON.- C’est tout ce qu’il y a à faire, et de manière régulière, d’ailleurs.

Monsieur DEWEZ.- Je voudrais réagir par rapport à la proposition de Monsieur BAUMIER, et sur la perception des indications portées sur un chemin. Tout à l’heure, vous évoquiez le fait que vous barriez les chemins éventuellement, et que vous indiquiez une information qui est plutôt ressentie positivement : « zone de restauration de la nature », ou une formulation équivalente. Je pense qu’il y a une information très riche là-dedans : on est face à une cause positive. Un risque embête tout le monde. D’abord, cela ne va jamais m’arriver. En plus, cela m’ennuie qu’on me barre le chemin pour un truc qui ne va jamais m’arriver. Alors que la chose positive de dire que l’on ne passe plus là parce que l’on fait repousser des trucs, c’est vachement bien. En plus, c’est dans la pensée environnementale. Je pense qu’il y a là un truc intéressant, qui rejoint la sociologie : la façon de délivrer le message par rapport à quelque chose qui est reçu positivement par la population.

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Monsieur BAUMIER.- Nous nous sommes aperçu que ce type d’information était bien respecté par les usagers, alors que les informations d’interdiction ne l’étaient pas.

Pour apporter une modification à ce que vous disiez : une zone de régénération, ce n’est pas pour barrer les sentiers, c’est pour empêcher les personnes de s’approcher du haut des falaises qui sont instables.

Monsieur LAROUSSET.- Bien que la sociologue en ait parlé en fin de son exposé, je pense qu’il est très important que l’on puisse associer l’économie à toutes les études. On voit bien qu’aujourd’hui, les gens sont tous d’accord pour avoir la continuité du circuit, des sentiers du littoral, etc., mais sitôt que l’on parle de sous, ce n’est plus pareil. Pour l’économie, il manque des modèles. Nous avons un exemple en Aquitaine, avec un jeune thésard qui a fait toute sa thèse sur la qualité de l’eau de baignade, et nous sommes surpris de voir combien les gens sont prêts à verser pour avoir une eau de qualité. C’est de l’ordre de 4 ou 5 €. Les gens sont prêts à mettre, en rentrant à la plage, 4 ou 5 € pour qu’il y ait une eau de qualité. Il y a tout un modèle à redéfinir, ne serait-ce que pour avoir accès à la vue de la mer. Si, demain, on veut tout sécuriser, on ne verra plus la mer. Il y a eu un procès d’ailleurs avec le Conservatoire du Littoral à ce sujet, et c’est assez intéressant. Le juge a demandé : combien est-ce que cela coûte de ne plus aller voir la mer ? Je pense qu’il y a des modèles à définir en économie.

Monsieur STEPANIAN.- (BRGM Marseille) Je voulais revenir sur l’intervention de Monsieur GUEGUEN à propos du projet MISEEVA, qui vise à voir la vulnérabilité du littoral de Languedoc-Roussillon au risque de submersion marine, dans la perspective du changement climatique. L’étude de perception a été faite courant été 2009, et parmi les risques qui venaient avant le risque de submersion marine, il y avait le risque perte d’emploi. En février 2010, il y a eu Xynthia, et je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui, on ait les mêmes résultats de cette étude.

Monsieur BRUSO.- (DDTM13, service Mer et Littoral, en charge du sentier du littoral) Je n’ai pas de question, mais trois petits témoignages. Le premier par rapport à la commune de Carry-le-Rouet : sur le chemin du Lézard, nous avions remarqué, lors d’une tournée d’inspection, qu’il y avait un affaissement sous le sentier. Nous avons alerté les services techniques de la commune, des mesures de sécurité ont été prises immédiatement. Puis, nous avons réfléchi ensemble à un report du sentier un peu plus haut.

Par rapport aux zones de régénération spontanée, je pense que, dans le Var, ils doivent être un peu plus chanceux que chez nous dans les Bouches-du-Rhône parce que nous avons beau mettre des panneaux, avec des plantes à régénération spontanée, les gens y marchent dedans ; il faut faire la police constamment.

D’autre part, quand on met en place un projet de sentier littoral, dès le début on en parle à la commune, et nous signons avec elle une convention d’entretien, qui entrera en fonction à la fin des travaux. Dans cette convention, on définit bien le passage régulier de la commune pour l’entretien et la surveillance des panneaux, des garde-corps et de tous les ouvrages.

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Monsieur PUCHOL.- (DDTM 13) J’ai une question suite à ce qu’a dit le représentant du Club alpin français : est-ce qu’il y a une notion juridique qui correspond au « risque acceptable » ?

Est-ce que, en étant élu, on a des limites dans l’investissement ou autres, suivant la notion du risque observé ou l’aléa observé ?

Monsieur BOURILHON.- J’ai le risque accepté. Il n’y a pas de problème. Je ne crois pas qu’il y ait une définition juridique très précise sur le risque acceptable. À charge au juge et à la jurisprudence de déterminer, au cas par cas, ce qu’il considère comme un risque acceptable. Ceci étant, ou alors je ne la connais pas, il n’y a pas de définition du risque acceptable, surtout pas en la matière quand on voit les enjeux en termes de responsabilité.

Monsieur NORMAND.- Nous avons des éléments de réponse dans les textes réglementaires, pour certains types de risques, notamment dans les plans de prévention des risques technologiques, où l’on va définir des probabilités d’aléa autour des sites industriels, et on a des probabilités pivots pour lesquelles, si on a des phénomènes dangereux plus récurrents, on va demander aux gens soit de délaisser leur maison, soit on va les exproprier. À l’inverse, en dessous d’une certaine probabilité, on va prescrire de conforter leur habitation, mais on tolère qu’ils restent dans ces murs parce que l’on juge qu’ils seront protégés à telle distance et avec telle probabilité du risque.

C’est un élément de réponse pour un type de risque particulier, mais où une probabilité est bien citée dans les textes.

INTERVENTION.- (DDTM 13) J’ai bien compris qu’il y avait un curseur sur les aléas, mais qui fixe le curseur, sachant que le risque 0 n’existe pas ? C’est finalement très subjectif.

Monsieur NORMAND.- Tout à fait ! Et en plus, c’est ici un curseur composite, qui n’est pas lié qu’à une probabilité, mais aussi au nombre de personnes exposées à cette probabilité. C’est donc un peu plus complexe.

Monsieur LE NEANNEC.- On se rend compte aussi que, pour la problématique du sentier du littoral, la perception du risque peut être rattachée aux cheminements de montagne. Autant en montagne, le risque va être accepté parce que les gens savent qu’ils se retrouvent dans un milieu hostile, ils s’y préparent, ils s’équipent, ils s’informent ; autant sur le littoral, qui est une frange assez étroite et très prisée, les gens vont avoir une perception uniquement de plage, de littoral plat, ils ne sont pas forcément préparés, notamment en Méditerranée et en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, à se retrouver dans des milieux à fort dénivelé, avec des risques de chute. Il y a donc une surprise à ce niveau. Il y a besoin d’y avoir une information et une communication sur le site, mais aussi au préalable, pour faire prendre conscience aux gens que le sentier du littoral est assimilable à un chemin de grande randonnée en montagne. Cette perception du risque vaut pour les usagers et pour les élus, dans la façon de mener les politiques de travaux et dans les financements.

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Par rapport aux locaux, on peut se rendre compte que la personne qui vit sur le site vit un peu dans une forme d’immunité et d’impunité. À partir du moment où il connaît le site, il estime connaître le risque, il pense qu’il va pouvoir y aller et que rien ne peut lui arriver parce qu’il connaît. On se retrouve avec des locaux qui franchissent les barrières d’interdiction et qui ne respectent pas les arrêtés. On se retrouve également avec des touristes qui franchissent les barrières et que l’on retrouve sur les zones de chantier pendant que l’on travaille, pendant que l’on intervient pour sécuriser parce que le littoral étant prisé, et qu’ils sont là pour des vacances, pour une courte durée, ils ne veulent pas qu’on leur gâche leurs vacances et leurs moments de loisir.

Madame ROCCHESANI.- Finalement, ce n’est peut-être pas la proximité du site qui fait la différence ?

Monsieur LE NEANNEC.- Il y a aussi un problème de civilité, de citoyenneté. Mais aussi un problème d’espace : les gens n’ont peut-être pas conscience qu’en montagne, il y a de la place pour tout le monde, alors que, sur le littoral, l’espace est tellement réduit que si l’opportunité d’y accéder se présente, rien ne doit les en empêcher, qu’il y ait un risque, une barrière ou une interdiction.

Monsieur VINCENT.- (ONF) Pour continuer sur cette thématique, bien souvent, quand on émet une interdiction dans le milieu naturel, on n’offre pas d’alternative. J’aimerais témoigner sur une expérience faite à l’entrée des Calanques du côté de Cassis, où l’on avait constaté, pendant des années, que le public accédait en tongs sur des sentiers dangereux pour aller à En Vau. La commune de Cassis a décidé, avec notre aide, de créer un sentier alternatif très court, pour du grand public, à Port Miou. Avec un sentier d’un kilomètre et d’une heure de balade, on est arrivé à détourner la moitié de la fréquentation, c’est-à-dire 150 000 personnes. On s’est aperçu vraiment qu’en matière de randonnée, il n’y a pas que les randonneurs qui marchent 2 heures, il y a aussi des promeneurs qui ont envie de marcher une heure. Pourquoi les envoyer si loin sur des sentiers escarpés, difficiles, sur lesquels il faut absolument faire des aménagements lourds ?

De cette réflexion, nous avons repris tout le schéma des sentiers de randonnée des Calanques, avec la FFRP, les propriétaires, le GIP, pour créer des boucles périurbaines de promenade, et dévier les sentiers dangereux vers l’intérieur des terres, sur des points haut ; ce qui rejoint aussi la question de déplacer les sentiers en haut de falaise. Il est vrai que le public préfère se balader en haut de falaise parce que l’on a une vue beaucoup plus en belvédère qu’au fond des vallons.

Je crois qu’il faut aussi faire une analyse sociologique de ce dont a besoin le promeneur, le randonneur. Tout le monde n’est pas un randonneur chevronné quand il va se balader sur le littoral.

Monsieur GAUTIER.- (Directeur SYMADREM) Je voudrais intervenir sur la notion du risque acceptable et faire accepter socialement le risque, qui peut être lié à des notions de coût économique. Lorsque l’on arrive à avoir un risque socialement accepté, on peut aussi éviter de faire des travaux pharaoniques qui engagent des fonds publics très importants. Le problème est que, même si vous avez, au niveau d’une collectivité ou d’un territoire, une population qui est prête à accepter un certain niveau

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de risque, vous aurez toujours quelqu’un qui sera à la recherche, parce qu’il y a eu un accident, d’un responsable. À ce moment-là, dans la mesure où vous avez, ne serait-ce qu’une seule personne qui peut être dans la logique du juridique, en tant que responsable public de collectivité - je rappelle que le maire d’une collectivité doit assurer la protection des biens et des personnes, et que lorsqu’il connaît le risque, il doit tout mettre en œuvre pour le supprimer ou le réduire - on devra faire en sorte de mettre en place des actions pour supprimer, voire réduire, le risque, et interdire certaines zones.

Je poserais une question au juriste : lorsque vous avez une zone aménagée, une plage, un sentier du littoral, qu’il existe un risque de chute de pierres en l’occurrence, et que vous engagez des actions en matière de réduction de l’aléa, s’il y a un accident qui intervient, est-ce que le juge va considérer que la personne victime de l’accident était un usager ou un tiers, au regard de la zone en question ?

Monsieur BOURILHON.- Que fait la personne privée sur la zone ? Elle s’installe ? Elle passe ?

Monsieur GAUTIER.- Prenons l’exemple une plage qui est ouverte au public. Elle appartient à une collectivité. Est-ce qu’il est usager ou tiers ? En termes de responsabilité, ce n’est pas la même chose : si je suis usager, s’il arrive un accident, la commune pourra toujours dire qu’elle avait mis des panneaux, engagé des travaux, etc. Il peut donc y avoir un dédouanement de la collectivité. S’il est tiers, la notion de tiers arrive au niveau de la responsabilité, quels que soient les aménagements que vous faites, quelle que soit l’information que vous pouvez faire, vous serez, en tant que propriétaire ou exploitant, condamné. C’est une notion très importante aujourd’hui, et dont il faudrait peut-être arriver à débattre sérieusement. Cela veut dire que, sur les risques, que ce soit sur les risques inondations derrière des digues, ou que ce soit sur d’autres thématiques, si la notion de tiers est retenue à travers une jurisprudence, les maîtres d’ouvrage seront tenus, quels que soient les travaux qu’ils vont faire, pour responsables. C’est très inquiétant pour l’avenir.

Madame ROCCHESANI.- Cela pourra faire l’objet d’un autre débat. La question est posée.

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SYNTHESE ET CONCLUSIONS

Monsieur NORMAND.- Je remercie tous les participants. Nous avons eu

une qualité des débats remarquable. Je me réjouis de la présence de maires, des collectivités au sens large, de gestionnaires, de scientifiques.

Nous avons vu, ce matin, à quel point le littoral de notre région est soumis à des contraintes et à des problématiques diverses : pression foncière, risques, tourisme, paysages, biodiversité.

Je retiens qu’en termes d’aléa, finalement des connaissances importantes existent, mais souvent très localisées sur des falaises précises. Le problème des falaises est qu’elles ont une spécificité qui fait que l’on a du mal à avoir une approche globale. Mais, il y a un vrai enjeu de diffusion de ces études. Et, Monsieur MAUGER l’a rappelé : pas simplement de diffusion, mais d’intermédiation entre les scientifiques, qui sont dans l’incertitude inhérente à leurs recherches, et l’élu qui a besoin de prendre une décision dans un timing assez contraint. Je pense qu’un des enjeux de ce colloque, et un des rôles de l’État et de la Région, est de faire émerger cette intermédiation, ce lien entre le scientifique et l’élu. Les exemples de l’association EUCC et de l’Observatoire du littoral aquitain sont des exemples remarquables de structuration de ce lien entre des chercheurs et des acteurs, élus ou acteurs des politiques publiques en général.

Je retiens aussi l’aller-retour entre une démarche expérimentale sur des sites précis, des falaises données, des communes bien identifiées, et le début d’une approche générique sur ce type de risque. On voit poindre une stratégie nationale de gestion du trait de côte qui devra s’interfacer avec des approches régionales et des expériences locales. Nous devons, en Provence-Alpes-Côte d’Azur, développer cette double approche, continuer à travailler sur des ateliers autour des sites sensibles que nous avons définis avec le BRGM, et développer le lien avec les élus et la diffusion de manière structurée des connaissances scientifiques dans ce domaine.

J’ai évoqué le chercheur et l’élu, mais nous venons de parler longuement d’un troisième acteur : le citoyen. Nous avons beaucoup débattu autour des questions de responsabilité, qui sont complexes, mais qui sont au cœur du fait que l’on s’intéresse au risque d’instabilité des falaises côtières. Il me semble que les études de perception du risque dont on a parlé doivent bien nous rappeler que le citoyen, l’usager n’est pas dans une irrationalité, mais dans une logique propre que nous devons comprendre si nous voulons mieux communiquer, informer de manière positive et, peut-être, faire accepter des décisions parfois difficiles comme la fermeture d’une plage, d’un sentier, voire même l’expropriation dans le cas de Criel-sur-Mer. Et même si nous avons parlé de recul stratégique tout au long de la journée, de falaises qui reculent, voire de recul par rapport à la modernité, j’espère que ce colloque nous aura permis d’avancer dans la direction d’une meilleure gestion des risques.

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Je voudrais remercier le BRGM, qui a assuré l’organisation de ce colloque, et la Région, notre hôte du jour et notre partenaire de long terme sur cette démarche de prévention des risques autour des falaises côtières.

Madame PEIRANO.- Monsieur Thibaud NORMAND, représentant Monsieur le Préfet, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs, je souhaitais, tout d’abord, vous remercier d’être venus des trois façades maritimes françaises pour débattre de ce sujet, malheureusement d’actualité, qui est le risque en milieu littoral. Je salue aussi la présence de ma collègue, Christine SANDEL, qui est déléguée auprès de moi pour la protection du littoral et du milieu marin.

Aujourd’hui, vous avez centré vos travaux sur le problème des falaises côtières, qui a ses spécificités techniques. Aussi, en tant que vice-présidente de la Région en charge des questions de la mer, du littoral et de la pêche, je sais que nous développons tous nos politiques de gestion de nos zones côtières avec une vision globale et intégrée. Que l’on soit sur nos côtes basses en proie à l’érosion et aux submersions régulières ou sur nos falaises côtières, le littoral constitue un champ de travail permanent. Les événements météorologiques violents ou d’ampleur exceptionnelle se sont multipliés ces cinq dernières années, et les dégâts humains et matériels sont considérables.

Sur le littoral de Provence-Alpes-Côte d’Azur, la présence de 80 % de notre population, le passage de 35 millions de touristes par an, ainsi que les pressions exercées sur nos écosystèmes marins fragilisés, confèrent une grande responsabilité à la sphère publique.

Il nous appartient de développer avec volontarisme les synergies nécessaires pour faire avancer la connaissance des risques côtiers, et sa diffusion, la prévention, la sensibilisation et la défense de notre littoral.

Monsieur le représentant de la DREAL vient de rappeler les principaux points techniques issus des débats de votre journée, et je constate combien vos échanges ont été riches et ont permis d’ouvrir de nouveaux champs de réflexion. Qu’il s’agisse de falaises côtières ou de plages, la connaissance et la compréhension des phénomènes sont capitales pour évaluer et mettre en place nos politiques de gestion.

Cette connaissance doit être recueillie à l’échelle pertinente, et nous constatons que les phénomènes météorologiques extrêmes se traduisent en milieu côtier par des inondations et des submersions. Aussi, je vous informe que les Régions littorales de Méditerranée ont demandé, il y a déjà 3 ans, à la Commission européenne, dans le cadre du livre blanc sur l’adaptation au changement climatique, que l’unité bassin-versant B soit une unité minimale de gestion de ces problématiques. Aussi, nous nous réjouissons de l’évolution des PAPI vers la prise en compte des risques de submersion.

Cependant, comme sur les autres littoraux, nos 900 kilomètres de côte ne seront pas couverts demain par ces plans très longs à mettre en œuvre. Nous vous proposons de réfléchir ensemble à la mise en place d’une stratégie sur ce sujet, dans le cadre du Plan sur les submersions marines. Il est nécessaire que ces informations soient partagées et comprises à la fois par les acteurs techniques et politiques de la

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gestion des littoraux. Le CNFPT, les pôles de compétitivité et d’autres partenaires de terrain constituent pour nous des relais. Cela permettrait d’améliorer l’appropriation et d’éclairer les choix stratégiques des décideurs locaux.

Nous avons vu des exemples de partage des données et je suis sûre que l’on vous a expliqué le fonctionnement de notre Centre régional d’informations géographiques, financé par l’État, la Région et les Départements, pour mutualiser l’acquisition de données et la mettre à disposition gratuitement de la sphère publique, et parfois du grand public. Un pôle Mer Littoral nous permet de rassembler les données et les études comme celles qui vous intéressent aujourd’hui.

Je vous informe, à cette occasion, que Monsieur NORMAND vient de me confirmer l’accord du ministère pour la mise en place d’une plate-forme d’acquisition de données de litho 3D marines dans notre région. Ces données sont particulièrement attendues par les sédimentologues et tous ceux qui tentent de prévoir les houles qui vont, malheureusement, déferler sur nos côtes.

Concernant les méthodes de protection, je souhaiterais insister sur la nécessité de la prise en compte des impacts sur le milieu, en particulier sur les posidonies qui, par ailleurs, luttent avec nous contre l’érosion.

Nous souhaitons favoriser les échanges d’expérience sur les méthodes de lutte, bonnes ou mauvaises, surtout les mauvaises d’ailleurs, et enclencher un mouvement de concertation des acteurs publics et privés sur ces méthodes.

Par ailleurs, le choix des méthodes de protection de nos littoraux et la réponse, face à ces phénomènes diffèrent notablement d’une façade maritime à une autre. Aussi, il est indispensable, a minima, que les documents d’urbanisme, les acteurs locaux intègrent les données existantes sur les zones à risque, et n’aggravent plus les situations que l’on sait d’ores et déjà critiques.

Cela m’amène sur le terrain de la perception du risque où l’on peut dire que de grandes marges de progrès existent. Il nous semble que des efforts considérables doivent être faits pour améliorer la prise de conscience, l’information, l’alerte du public et des gestionnaires sur les risques côtiers, dont ceux liés aux falaises côtières. Vous en avez beaucoup parlé pendant que j’ai assisté à vos travaux. Qu’il s’agisse de risques sur les personnes comme sur les biens et sur les infrastructures communes, des outils de sensibilisation peuvent être élaborés et adaptés à la situation locale.

En partenariat avec vous, la Région souhaite poursuivre la réflexion sur ces questions qui soulèvent tant d’enjeux, à la fois en termes d’aménagement du territoire, de développement local, et surtout humains.

Il me reste à vous remercier pour le partage de vos expériences et vos réflexions, et à vous souhaiter à tous un très bon retour.

(Applaudissements) (La séance est levée à 17 heures 30)

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Centre scientifique et technique

3, avenue Claude-Guillemin BP 36009

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