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- 1 - Recherche en agroforesterie en Guinée. Acquis et perspectives Nathalie Lamanda 1,2 et Moussa Diabaté 2 1 Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), Montpellier, France ; 2 Institut de recherche agronomique de Guinée (IRAG), Sérédou, Guinée. [email protected] [email protected] Présentation du 9/07/2007 « L’agroforesterie dans la gestion durable des paysages: Bases, Acquis et Perspectives ». Atelier organisé par l’ICRAF. projet LAMIL à Foulaya, Guinée, du 8 au 14/07/2007 Objectif de la présentation : 1. Définition des systèmes agroforestiers 2. Montrer que les pratiques agroforestières sont omniprésents en Guinée, avec une grande variété selon les régions naturelles, et comment ces pratiques sont le plus souvent prises en compte (par les projets et la recherche) 3. Présenter le programme Agroforesterie de l’IRAG, basé en Guinée Forestière 4. Présenter les principaux résultats acquis par la recherche sur les systèmes agroforestiers en Guinée Forestière 5. Présenter les perspectives de recherche sur les systèmes agroforestiers au niveau régional, national et de la sous-région Recherche en agroforesterie en Guinée : Acquis et perspectives Si les hommes ont de tout temps pratiqué les associations de culture, l’agroforesterie est une discipline scientifique relativement jeune (émergeant depuis les années 1980 environ) Au cours des vingt dernières années, de nombreuses définitions et classifications des systèmes agroforestiers ont été proposées (citées par exemple dans Nair, 1993). En introduction à la présentation sur les acquis et perspectives de la recherche sur les systèmes agroforestiers en Guinée, nous proposons de suivre la définition de Torquebiau (2000) Les pratiques agroforestières sont des pratiques de mise en valeur du sol avec une association simultanée ou séquentielle d’arbres et de culture ou d’animaux afin d’obtenir des produits et des services utiles à l’homme. Torquebiau (2000) Lorsque l’on traverse la Guinée, on est frappé par la fréquence des associations de culture. Sur tout le territoire, arbres et cultures sont liés de façon plus ou moins intime, dans le temps et l’espace. Par exemple : en Guinée Forestière on observe des paysages associant riz de coteau et palmier à huile dit naturel (car non planté mais conservé par les agriculteurs), des paysages de bas-fonds où sont associés riz de bas fond, palmiers raphia (pour la production de vin), Popo (bois blanc très apprécié pour la construction) et autres espèces d’arbres. Autour des villages de Guinée Forestière, on trouve des agroforêts où le café et le colatier sont cultivés en association avec de multiples espèces d’arbres, en des associations qui ressemblent à de véritables forêts. Mais ces pratiques agroforestières ne sont pas spécifiques à la Guinée

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Recherche en agroforesterie en Guinée. Acquis et perspectives

Nathalie Lamanda1,2 et Moussa Diabaté 2

1 Centre de Coopération Internationale en Recherche Agronomique pour le Développement (CIRAD), Montpellier, France ;

2Institut de recherche agronomique de Guinée (IRAG), Sérédou, Guinée. [email protected] [email protected] Présentation du 9/07/2007 « L’agroforesterie dans la gestion durable des paysages: Bases, Acquis et Perspectives ». Atelier organisé par l’ICRAF. projet LAMIL à Foulaya, Guinée, du 8 au 14/07/2007

Objectif de la présentation :

1. Définition des systèmes agroforestiers 2. Montrer que les pratiques agroforestières sont omniprésents en Guinée, avec une

grande variété selon les régions naturelles, et comment ces pratiques sont le plus souvent prises en compte (par les projets et la recherche)

3. Présenter le programme Agroforesterie de l’IRAG, basé en Guinée Forestière 4. Présenter les principaux résultats acquis par la recherche sur les systèmes

agroforestiers en Guinée Forestière 5. Présenter les perspectives de recherche sur les systèmes agroforestiers au niveau

régional, national et de la sous-région

Recherche en agroforesterie en Guinée : Acquis et perspectives Si les hommes ont de tout temps pratiqué les associations de culture, l’agroforesterie est une discipline scientifique relativement jeune (émergeant depuis les années 1980 environ) Au cours des vingt dernières années, de nombreuses définitions et classifications des systèmes agroforestiers ont été proposées (citées par exemple dans Nair, 1993). En introduction à la présentation sur les acquis et perspectives de la recherche sur les systèmes agroforestiers en Guinée, nous proposons de suivre la définition de Torquebiau (2000) Les pratiques agroforestières sont des pratiques de mise en valeur du sol avec une association simultanée ou séquentielle d’arbres et de culture ou d’animaux afin d’obtenir des produits et des services utiles à l’homme. Torquebiau (2000) Lorsque l’on traverse la Guinée, on est frappé par la fréquence des associations de culture. Sur tout le territoire, arbres et cultures sont liés de façon plus ou moins intime, dans le temps et l’espace. Par exemple : en Guinée Forestière on observe des paysages associant riz de coteau et palmier à huile dit naturel (car non planté mais conservé par les agriculteurs), des paysages de bas-fonds où sont associés riz de bas fond, palmiers raphia (pour la production de vin), Popo (bois blanc très apprécié pour la construction) et autres espèces d’arbres. Autour des villages de Guinée Forestière, on trouve des agroforêts où le café et le colatier sont cultivés en association avec de multiples espèces d’arbres, en des associations qui ressemblent à de véritables forêts. Mais ces pratiques agroforestières ne sont pas spécifiques à la Guinée

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Forestière, on en retrouve dans les autres régions de la Guinée. Ainsi par exemple dans la région de Mamou. Dans le Fouta Djallon, les tapades associent sur un espace restreint et clôturé par une haie vive (sumbala, koïleyala, guélodhi, etc..) une grande variété d’espèces (manioc, macabo, patate douce, courges, piments, papayers, caféiers, bananiers, avocatiers, manguiers, etc…). En Haute Guinée également arbres et cultures sont souvent associés, par exemple à Titoulenkoro, le système de culture des ignames intègre une composante arborée. La photo montre l’importance des arbres, en grande proportion dans les champs et pour de nombreux usages : reconstitution de la fertilité pendant la période de jachère, bois de chauffe au moment de la défriche, tuteur pour les lianes. Dans la région de Kindia, les agrumes (mandariniers, pamplemoussiers, orangers) sont cultivés en association avec d’autres fruitiers (manguiers, anacardiers, etc..). Les pratiques agroforestières apparaissent donc omniprésentes en Guinée, avec une grande diversité selon les caractéristiques pédoclimatiques et les pratiques des agriculteurs de chaque région. Mais elles sont le plus souvent étudiées de façon ponctuelle, le plus souvent dans le cadre de projets tandis que la recherche a jusqu’ici privilégié une approche « filière par plante ». Parmi les projets ayant travaillé sur l’agroforesterie, on peut citer, mais cette liste n’est pas exhaustive, le programme AGIR (Lacroix, 2004), le programme ESSOR (Mallet et Besse, 2004) et PNGREN (Keillabach et Duer, 2001), le PRGRR, PROGEFOR (1999-2002). La mission Keillaabach et Duer avait pour principal objectif l’identification des systèmes de production intégrant une composante arborée dans les différentes zones de la Guinée, ainsi qu’une évaluation socio-économique des performances de ces différents systèmes à l’aide du programme d’analyse « GFA Farm analysis program » et de son module pour les plantations forestières et produits ligneux et non ligneux (Keillabach et Duer, 2001). Lacroix a caractérisé les différents types de systèmes agroforestiers, les espèces présentes, et répertorié les principales pratiques des agriculteurs dans les différents systèmes dans les zones d’intervention du programme AGIR, à savoir dans le Fouta Djallon (AGIR – Labé), à Faranah (Moyenne Guinée) à Kissidougou (Guinée Forestière), et à Kankan (Haute Guinée). Il propose une importante base de données sur les espèces présentes dans ces systèmes et leurs usages, ainsi qu’une identification des différentes institutions (écoles, ONG, centre de recherche, etc…) en lien avec la thématique « agroforesterie » et acteurs et organisations des pistes (2004). Le programme ESSOR, basé dans le Fouta Djallon, avait pour principal objectif la participation à la lutte contre la déforestation, la stabilisation de l’agriculture et la diversification des sources de revenus des agriculteurs du Fouta Djallon (Mallet et Besse, 2004). Egalement basé, dans le Fouta Djallon, le PNGREN avait pour objectif la constitution de groupements forestiers et l’établissement de forêts communautaires. En Guinée Forestière, PGRR (Programme de Gestion des Ressources Rurales) a travaillé sur les mesures d’accompagnement des villages riverains des forêts classées pour la gestion participative de leurs terroirs. Ces projets et programmes ont significativement participé à l’amélioration des connaissances sur les pratiques agroforestières existantes en Guinée. Ils ont par ailleurs favorisé l’adaptation et la diffusion de nouvelles pratiques agroforestières, mais il est aujourd’hui difficile d’en faire un bilan. Les actions de ces projets ou programmes ne sont pas ou peu suivies une fois que le projet arrive à son terme et les résultats (connaissance des pratiques existantes et diffusion de nouvelles pratiques, leur adoption, etc…) ne sont que peu diffusés. Sans capitalisation au niveau national des résultats des projets sur la thématique « agroforesterie » en Guinée, il est donc aujourd’hui très difficile d’avoir un aperçu des recherches déjà effectuées sur les pratiques agroforestières en Guinée. Par ailleurs, différentes études de disciplines variées se sont intéressées, de manière plus ou moins directes aux pratiques

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agroforestières de Guinée, rendant plus difficile encore la capitalisation des acquis sur les pratiques agroforestières dans le pays. Parmi ces études on peut citer : Lauga Sallenave (1997) qui a finement étudié les systèmes de haies-vives mises en place dans le Fouta Djallon ; Delarue J (2007) qui décrit en particulier les systèmes de production en Guinée Forestière, et notamment les dynamiques d’installation des plantations de cultures pérennes et Camara (2007), qui dans son doctorat de géographie sur la conception d’un observatoire pour le développement de la Guinée Forestière a mis en évidence la dynamique d’extension des surfaces en agroforêts autour des villages de la Guinée Forestière (présenté en détail plus tard dans l’exposé). Pour accompagner les agriculteurs de Guinée vers un développement durable, il apparait aujourd’hui important de prendre le temps de capitaliser les différents résultats existants sur les systèmes agroforestiers de Guinée. Pour proposer des pistes de développement en adéquation avec le contexte local, il faut d’abord comprendre ce contexte local et les pratiques des producteurs. Ainsi, les différentes études sur les pratiques paysannes, en particulier agroforestières constituent une importante base pour comprendre les savoir-faire paysans et les logiques des agriculteurs. Les synthétiser et les faire mieux connaître et reconnaitre par les acteurs du développement en Guinée et dans la sous région permettraient d’orienter les recherches (de différentes disciplines telle que agronomie, sociologie, économie, etc…) et de proposer des pistes de développement agricoles plus en adéquation avec les réalités locales. Les études récentes de Camara (2007) et Delarue (2007) ont notamment souligné la méconnaissance des dynamiques agricoles locales par les acteurs du développement et leurs conséquences en terme de projets de développement souvent mal adaptés au contexte local et au final n’atteignant que peu leurs objectifs. Dans la suite de l’exposé, après avoir présenté le programme Agroforesterie de l’IRAG, son historique et ses principaux résultats depuis sa création en 2001, nous reviendrons sur les dynamiques d’extension des agroforêts en Guinée Forestière caractérisé par Camara (2007). Ces résultats sont à l’origine du projet de recherche sur la caractérisation et l’évaluation des performances des systèmes agroforestiers de Guinée Forestière actuellement en cours de réalisation par le programme. Nous en présenterons les premiers résultats, les orientations puis nous conclurons sur les perspectives de recherche en agroforesterie en Guinée. Le programme Agroforesterie de l’IRAG est basé au Centre de Recherche Agronomique de Sérédou. Il a été créé en 2000, avec le recrutement du botaniste Mr Moussa Diabaté, un pépiniériste et un observateur de terrain. Entre 1999 et 2002, le programme a essentiellement contribué à l’amélioration des connaissances de la biologie et la sylviculture des espèces forestières. En particulier, le programme a permis la mise en évidence de la grande diversité de symbioses forestières qui jouent un rôle important dans la croissance de la plupart des arbres et qui était jusqu’alors inconnus (Diabaté et Dreyfus, 2002). Les études conduites par le programme Agroforesterie ont montrées que l’inoculation de souches de Bradyrhyzobium et de champignons ectomycorhiziens améliorait très significativement la croissance de plusieurs espèces de légumineuses de la forêt tropicale humide en pépinière (Diabaté et Dreyfus, 2004). Toutes les souches de microorganismes utilisées sont des souches locales qui ont été isolées des forêts de Guinée Forestière (Diabaté, 2004, 2003). Elles sont actuellement conservées au Laboratoire des Symbioses Tropicales et Méditerranéennes de Montpellier, France. Le suivi régulier de la croissance en hauteur et en diamètre des plants inoculés pendant deux ans après leur plantation a ensuite montré que les effets positifs de l’inoculation observés en pépinière

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restent positifs chez quasiment toutes les espèces (Diabaté et Dreyfus, 2002). Ces résultats originaux confirment l’intérêt de l’inoculation en pépinière des légumineuses ligneuses locales avec des souches de rhizobium sélectionnées. Cette technique, simple et peu coûteuse peut donc être transférée aux projets visant à restaurer et planter des forêts tropicales humides, mais aussi à enrichir les plantations villageoises de Guinée Forestière en espèces de valeur. Le programme qui maîtrise les techniques sylvicoles de 110 espèces locales d’arbres dont certaines sont économiquement importantes pour la qualité de leur bois, l’utilisation des fruits ou leurs propriétés médicinales, a ainsi distribué une sélection d’espèces d’intérêt sous forme de jeunes plants dans quelques villages de Guinée Forestière où l’IRAG disposait d’observateurs. Les plants ont été implantés dans les plantations agroforestières des agriculteurs qui le désiraient et leur croissance a été suivie. Par ailleurs, le programme a produit 10 000 plants qui ont été replantés par le PGRR (Programme de Gestion des Ressources Rurale) à l’antenne des Eaux et Forêt (Diabaté et Dreyfus, 2002). Le programme Agroforesterie de l’IRAG gère également un important herbier (1671 espèces végétales, 1671 genres, 1507 espèces et 164 espèces non encore identifiées) créé en 1965 et actuellement en très bon état de conservation. Le programme Agroforesterie a comme ambition d’améliorer la gestion de cet herbier pour le mettre aux normes du réseau international des herbiers, permettant ainsi de bénéficier des nombreux échanges entre les membres de ce réseau. Associé à l’herbier, le programme Agroforesterie de Sérédou gère le jardin botanique, créé en 1949 par R. Portères. Le jardin qui contient plus de 256 espèces de forêt dense humide et de savane est un lieu de conservation ex situ de la biodiversité et un site reconnu pour la formation à la botanique. Délaissé depuis 2003, faute de financement, le jardin botanique est actuellement en cours de réhabilitation. Les activités de production de plants forestiers ont été suspendues à la fin du programme FAC1, mais pourrait reprendre avec la formation au métier de pépiniériste d’un jeune fonctionnaire récemment affecté au programme (David Foromo Kpoghomou). Enfin, le programme Agroforesterie conduit depuis mi-2006, un projet de recherche intitulé « Caractérisation et évaluation des performances des agroforêts de Guinée Forestière : cultiver la diversité pour accompagner le développement local». Ce projet a été construit à partir des résultats de Camara, qui a montré que contrairement aux idées reçues sur la déforestation de la Guinée les surfaces en agroforêts ont quasiment doublé au cours des 25 dernières années. Ces résultats rejoignent ainsi ceux de Fairhead et Leach (1996) qui avait mis en évidence la construction d’îlots forestiers par les agriculteurs de la région de Kissidougou. L’analyse de photos aériennes de 1979 et d’images satellite SPOT de 2003 du Sud-Ouest de la Guinée Forestière a permis de caractériser finement l’évolution du mode d’occupation des sols de cette zone. La comparaison des images traitées (avec la même nomenclature pour caractériser les types d’occupation des sols d’une image à l’autre) permet d’établir une matrice des changements d’occupation des sols entre 1979 et 2003. A Nienh par exemple, une augmentation d’environ 70% des surfaces en agroforêts a ainsi été mise en évidence. Les agroforêts représentent en 2003 près du quart de la surface du village (26% du territoire), et s’organisent en cercles concentriques autour du village et des sites de campements, aboutissant à la structure auréolaire typique des villages du Sud-Ouest de la Guinée Forestière.

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Figure 1: Evolution du mode d'occupation des terres entre 1979 et 2003. Exemple du village de Nienh (extrait de Camara, 2007) L’analyse de la matrice des changements d’occupation des sols (tableau 1) montre par ailleurs que cette extension des agroforêts se réalise aux dépends des zones de culture et des jachères. L’extension des agroforêts montre qu’il est possible pour les agriculteurs de Guinée Forestière de s'adapter à l'économie de marché et de renforcer leurs intégrations dans cette économie, tout en améliorant la gestion des ressources naturelles de manière durable. L’extension des agroforêts soulève donc d’importantes questions pour le développement agricole local : vers quels équilibres entre systèmes vivriers et système de rente s’oriente-t-on ? Quels sont les déterminants, les performances et la durabilité de ses systèmes ? Tableau 1:: Statistique de l’occupation du sol du village Nienh (1979-2003)

Village Nienh

S 1979 (ha) (% ) S 2003 (ha) (%) Evolution

(ha)

79-03

(%)

79-03

Habitat 11,62 0,36 23,58 0,72 11,96 102,93

Agroforêt 513,47 15,71 867,86 26,56 354,39 69,02

Cultures vivrières 526,06 16,10 490,81 15,02 -35,25 -6,70

Jachère 2216,77 67,83 1885,67 57,70 -331,10 -14,94

Relique forêt 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00 0,00

Total 3267,92 100,00 3267,92 100,00

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Malgré leur forte extension et leur importance dans le revenu des producteurs de Guinée Forestière, les dynamiques d’installation, les performances et les conditions de durabilité des agroforêts restent peu ou mal connues. L’objectif du projet de recherche du programme Agroforesterie de Sérédou est donc de mieux comprendre les agroforêts de Guinée Forestière afin d’accompagner le développement local en proposant des voies de développement en phase avec les dynamiques et pratiques locales.

Caractérisation des systèmes agroforestiers de Guinée Forestière : Les villages de Guinée Forestière se différencient selon leur densité de population, leur accessibilité (distance au goudron, à une sous préfecture), la probable végétation d’origine (savane ou forêt dense humide) et leur proximité d’un massif forestier classé (voir carte des villages d’étude). Pour appréhender la diversité des systèmes agroforestiers de Guinée Forestière, nous avons d’abord choisi 7 villages qui représentent la diversité de situation des villages de la région. Dans chacun d’eux, nous avons exploré la diversité des systèmes agroforestiers en parcourant des transects répartis sur tout le territoire du village. Sur chacun des transects, nous avons analysé la composition des associations et la structure de la végétation dans chaque système agroforestier rencontré.

Figure 2: Carte de situation des 7 villages étudiés pour la caractérisation des systèmes agroforestiers en Guinée Forestière (extrait de Diabaté et. al, 2007) Les observations de terrain confirment la structure auréolaire des villages, repérés sur les images SPOT. Les auréoles observées témoignent de la dynamique d’extension des agroforêts. Les mêmes types de systèmes sont observés sur les différents transects mais leur importance varie selon la toposéquence, le type de sol et l’historique de mise en valeur de la zone. Ainsi, on rencontre plus fréquemment les agroforêts à base de cacaoyers le long des cours d’eau dans les forêts galeries, ou bien sur les anciens sites des villages. Par ailleurs, la proportion en palmier sub-spontané Elaeis guineensis dura semble liée à la durée de culture de la parcelle (elle serait d’autant plus importante que la parcelle est cultivé depuis longtemps,

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les agriculteurs conservant les palmiers dans le cycle de friche – brûlis réalisé dans ces zones pour la culture du riz).

Figure 3: Organisation auréolaire des villages sur image SPOT 3 et transects réalisés dans le village de Nienh (extrait de Lamanda et al. 2007) Deux principaux types de systèmes agroforestiers dans les villages de Guinée Forestière : les agroforêts à base de caféiers/cacaoyers (1-a et 1-b) et les parcs à Elaeis guineensis (2) Deux principaux systèmes agroforestiers ont été caractérisés : (1) une ceinture agroforestière à base de caféiers qui est située autour du village et occupe un rayon d’environ 3km et (2) après cette ceinture agroforestiers on trouve un grand parc à Elaeis. Ce parc est dédié à la culture du riz sur brulis en association avec de nombreuses autres plantes alimentaires (mais, gombo, aubergine, arachide, manioc,….). Le riz et les plantes alimentaires sont cultivés dans un système de d’abattis brûlis avec des jachères de 7-10 ans (28% des parcelles observées) à 2 -3 ans (12% des parcelles observées). Dans la ceinture agroforestière à base de caféiers/cacaoyer, deux sous types peuvent être distingués : (1-a) agroforêt à base de caféiers et de colatiers qui constitue la ceinture la plus proche du village, et où les caféiers et les colatiers dominent largement la strate intermédiaire (2 à 10 m) (1-b) agroforêt à base de caféiers et de palmiers Elaeis guineensis, qui correspond à l’extension des agroforêts autour de la première ceinture d’agroforêts, le long des routes et autour des anciens sites de village. Le sous type 1-b se caractérise par une strate supérieure associant Elaeis guineensis et de nombreuses espèces héliophiles comme les différentes espèces d’albizia. Une première évaluation rapide de la diversité végétale dans les différents types de systèmes agroforestiers a été réalisée en dénombrant les espèces d’arbres et d’arbustes sur des placettes de 3 600 m². Il a ainsi été montré que parmi les 50 espèces d’arbres et d’arbustes recensés dans l’agroforêt de type 1-a, 41 espèces sont des espèces de forêt dense humide, 8 sont des espèces de recru forestier (espèces de forêt secondaire) et 1 est une espèce de savane. En revanche, dans les agroforêts de type 1-b, la proportion d’espèces de forêt secondaire est plus

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importante, avec parmi les 45 espèces répertoriées, 12 espèces qui sont des espèces de forêt dense humide, 25 qui sont des espèces de recru forestier et 8 qui sont des espèces de savane. Tableau 2:Principales caractéristiques de la végétation dans les systèmes agroforestiers de Guinée Forestière (extrait de Diabaté et al, 2007):

Type de système

agroforestiers 2

(1-a) Agroforêt (1-b) Agroforêt (2)Parc à Elaeis Nombre de

strates 3 3 2

Principales espèces composant la strate supérieure

Danielila thurifera, Piptadeniastrum africanum, Nauclea diderrichii, Antiaris africana, Chlorophora excelsa, Terminalia ivorensis, Pycnanthus angolensis, Albizia ferruginea, Parkia bicolor, Khaya ivorensis, Elaeis guineensis

Elaeis guineensis et de nombreuses espèces héliophiles comme Albizia zygia, Albizia adianthifolia, Albizia dinklagei, Milletia zechiana, Myrianthus arboreus, Terminalia ivorensis, Terminalia superba

Elaeis guineensis et quelques espèces héliophiles comme Phyllanthus discoideus, Solanum verbascifolium, Albizia adianthifolia

Principales espèces composant la strate intermédiaire

Cola nitida, Coffea canephora, (Theobroma cacao prés des cours d’eau et anciens sites de village), Mangifera indica, Persea americana, Piper guineensis

Coffea canephora, (Theobroma cacao prés des cours d’eau et anciens sites de village) Piper guineensis

Pas de strate intermédiaire

Principales espèces composant la strate inférieure

Geophila obvallata, Costus afer, Aframomum spp.

Andropogon gayanus, Pennisetum spp. and Ctenium elegans

Oriza sativa, Manihot utilissima, Hibiscus esculenta, Solanum spp, Caspicum esculenta, Vigna spp, Zea maïs

Nombre moyen d’espèces d’arbres et d’arbustes identifies sur 3600 m²

50 (n = 2; Boussédou)

45 (n = 2; Boussédou)

2 dans les champs de riz désherbé (n=2, Boussédou) 7,5 dans les champs de riz enherbé (n=2, Boussédou) 19 dans les jachères de 4 ans (n =2, Boussédou) 30 dans les jachère de 7 ans (n =2, Boussédou)

Afin de représenter plus précisément la structure du peuplement sur les parcelles de type 1-b, un profil architectural a été établi. Il permet d’appréhender de manière visuelle la structure d’un type de système agroforestier de type 1-b (agroforêt à base de café et de palmier Elaeis).

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Ces résultats sur les différents types de systèmes agroforestiers et la structure de la végétation qui leur est associées sont encore préliminaires. Ils doivent être complétés par une description systématique de la structure du peuplement sur les parcelles agroforestières. Pour cela, il sera nécessaire d’identifier un jeu de variables de structure, simples et rapides à mesurer afin de pouvoir caractériser un nombre important de situations et ainsi de couvrir la diversité existante dans la région. Néanmoins, ces premières observations ont permis de repérer les types de systèmes agroforestiers. Des enquêtes auprès des personnes les plus âgées des villages (conseil des sages et personnes ressources choisies pour leur connaissance de l’histoire du village) ont permis d’appréhender les dynamiques à l’origine des types actuellement observables sur le terrain.

Dynamiques d’implantation des différents types de systèmes agroforestiers Les dynamiques d’implantation qui sont à l’origine des 2 grands types de systèmes agroforestiers actuellement observables sur le terrain, ont été reconstruites, et sont en cours de discussion et validation avec les agriculteurs des villages de Guinée Forestière. Les premiers résultats sont rapidement présentés au cours de cet exposé. a) La dynamique d’installation du parc à Elaeis, où de la palmeraie sub-spontanée (Madelaine, 2005), est dépendante de la culture de riz sur coteau dans un système d’abattis brûlis avec des durées de jachère variables (suivant les villages, et les moyens de production des exploitations).

Figure 4 : Profil architectural d’une agroforêt à base de café et de palmier Elaeis (type 1-b) en Guinée Forestière. Les nombres correspondent à la liste d’espèces suivantes : 1, 17 and 23: Elaeis guineensis; 2: Chlorophora excelsa; 3 and 15:Pancovia bijuga; 4, 8 and 10: Coffea canephora; 5:Musa sinensis; 6: Persea americana; 7: Chlorophora excelsa; 9 and 25: Albizia zygia; 11: Pseudospondias microcarpa; 12 and 19: Dialium dinklagei,; 13 and 14: Ficus capensis; 16: Funtumia elastica; 18 and 20: Pycnanthus angolensis; 21: Antiaris africana; 22: Albizia adianthifolia; 24: Sterculia

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Figure 5: Le processus d’installation du parc à Elaeis dans les villages de Guinée Forestière b) La dynamique d’installation des agroforêts : La dynamique d’installation des agroforêts de type 1-a, qui constitue la ceinture la plus proche du village est schématisée figure 6. Les villages de Guinée Forestière ont toujours été entourés d’une mince bande de forêt qui servait de lieux sacrés (initiation) et de protection au village (des feux de brousses et des attaques), hormis dans les lieux sacrés, cette ceinture a été progressivement enrichie en espèces utiles en particulier en colatiers, dont la noix est un produit culturellement important dans toute l’Afrique de l’Ouest. La dynamique d’implantation des caféiers dans cette mince bande de forêt et dans les anciennes zones de cultures vivrières a débuté avant l’Indépendance. Vers les années 1950, la plantation de café dans les anciennes friches débute, mais reste encore relativement marginale. L’entrée en production et la commercialisation des premières récoltes de café motivent les agriculteurs qui étendent leurs plantations et en installent de nouvelles, en implantant de jeunes plants de caféiers dans les anciennes zones de culture et dans les zones de forêt (après nettoyage plus ou moins important de la friche, selon les stratégies des agriculteurs). Après l’Indépendance, et la mise en place d’une politique et économie de type socialiste, beaucoup d’agriculteurs délaissent leurs plantations, soit du fait de leur départ « à l’aventure » dans les pays voisins, soit du fait de disponibilité limitée lié à leurs réquisitions pour des travaux collectifs. A cela, s’ajoute la fermeture économique du pays (prix du café imposé par l’Etat) et l’impôt en nature (norme de 400kg/ha/an à fournir à l’Etat) qui démotivent les planteurs. Le nettoyage des plantations n’est plus effectué et un recru arboré se

La parcelle de friche (entre 2 et 10 ans) est nettoyée et la végétation coupée est brûlée, seuls sont conservés les arbres difficiles à couper et les palmiers Elaeis guineensis dura dont la récolte permet la production d’huile rouge. L’huile rouge participe de façon considérable au revenu des exploitations agricoles de Guinée Forestière et un soin tout particulier est apporté aux plants de palmiers issus de la germination spontanée des noix de palmiste tombées à terre. La parcelle est exploitée pendant deux années consécutives pour la culture de riz en association avec de nombreuses plantes alimentaires puis retourne à la jachère. Depuis les années 1990, Chromolaena odorata est fortement présente en Guinée Forestière et domine les premières années de jachère, dominant rapidement les autres mauvaises herbres. D’après les dires des agriculteurs, après 4 années de jachère, le recru forestier étoufferait Chromolaena odorata. Suite à la période de friche (de durée variable selon les exploitations agricoles) la parcelle est à nouveau nettoyée, et la végétation brûlée tout en préservant les jeunes plants de palmiers, et le riz est alors à nouveau semé en association avec des cultures alimentaires pour deux années consécutives. Ainsi, le nombre de palmiers sub-spontanés augmente au fil des cycles de culture sur la parcelle, un véritable parc à Elaeis se forme dans les zones dédiées à la culture du riz et des plantes alimentaires (figure 5).

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développe dans les plantations. En une dizaine d’années environ d’abandon des plantations (durant lesquelles seul un peu de café est récolté et vendu en contrebande dans les pays voisins), le recru arboré se développe de façon importante, de nombreuses espèces de forêts secondaires à croissance rapide prennent le dessus, surcîmant les palmiers Elaeis qui jusqu’ici appartenaient à la strate supérieure ombrant les caféiers. L’ouverture économique du pays, à partir des années 1979 -1980, le changement de régime en 1984 s’accompagnant du retour de nombreux guinéens dans les années 1990 conduisent à une nouvelle dynamique autour des plantations de café. Les anciennes plantations sont nettoyées. Une grande part du recru est éliminé, seuls les arbres jugés d’intérêt par les agriculteurs pour leur production ou pour l’ombrage qu’ils apportent au café sont conservés. Les caféiers, les plus anciens sont recépés ou éliminés et remplacés par de jeunes plants conduisant ainsi à une augmentation de la densité de café dans ces anciennes plantations (figure 1-a). Les espèces de bois d’œuvre sont prélevées pour couvrir les besoins accrus en bois pour l’habitat. Figure 6:Processus d'implantation des agroforêts à base de caféiers et de colatiers (type 1-a) La dynamique d’extension des agroforêts, débutée au cours des années 1980 et se poursuivant encore de nos jours est schématisée figure 7. Ces extensions d’agroforêts correspondent au type 1-b décrit plus haut : agroforêts où le café est cultivé sous ombrage d’une strate associant Elaeis et diverses espèces de forêts secondaires. Les plantations de café sont installées sur des anciennes zones de cultures vivrières (riz et condiments sous une strate plus ou moins dense de palmiers Elaeis) ou dans des zones de friche sous couvert arboré essentiellement composé d’espèces du recru forestier (héliophiles). Le matériel végétal de type tout venant ou

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« sauvageons » est généralement récolté au stade plantule ou de jeunes plants d’une année sur les caféières en production, puis transplanté soit directement soit après un passage en pépinière (selon les villages et les stratégies des agriculteurs). Les jeunes plants de café sont entretenus avant leur entrée en production. L’ombrage des caféiers est géré par les agriculteurs (selon leurs objectifs et moyens de production), une sélection des arbres constituant la strate supérieure est réalisée au moment de l’implantation du café ou selon les exploitants à l’entrée en production des caféiers. Une fois les caféiers en production, le cernage (écorçage sur une bande circulaire) des arbres est le moyen le plus utilisé pour réguler l’ombrage sur les parcelles, en bloquant la montée de sève conduit à la mort progressive de l’arbre et au séchage sur pied de l’arbre et à sa décomposition progressive. . Figure 7: Dynamique d'installation des agroforêts de type 1-b L’installation des différents systèmes agroforestiers semble globalement relever de processus comparables dans les différents villages étudiés. Des nuances existent cependant selon les spécificités de chaque village (par exemple, à proximité de la zone de la SOGUIPAH, les paysans installent des plantations parfois quasi-mono-sépcifique de palmiers à huile améliorés ou tout venant (selon l’accès au matériel végétal), et de jeunes hévéas en association avec les espèces héliophiles dans les anciennes friches. Par ailleurs, à Boussédou, des cas de conversion de zones de savanes en agroforêt où le café est cultivé en association avec des agrumes sous ombrage d’espèces de savane et de forêt secondaire ont été reportés et sont en cours d’étude. Les restitutions auprès des agriculteurs permettent de valider et d’affiner la compréhension de ces dynamiques, de discuter des déterminants de ces dynamiques et des voies d’évolution probables de ces systèmes. Ces restitutions sont actuellement en cours de réalisation dans les différents villages et les premières restitutions (Nienh, Ouéta, Léapéléta) ont validé les dynamiques présentées ci-dessus.

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Les dynamiques d’implantation des agroforêts et leur extension montrent l’adaptation des agriculteurs de Guinée Forestière à l'économie de marché, et leur capacité à renforcer leurs intégrations dans cette économie tout en cherchant à diversifier les sources de revenus et en améliorant la gestion des ressources naturelles de manière durable. Les agroforêts mises en place par les agriculteurs de Guinée Forestière apparaissent en effet comme un système de culture permettant l’obtention de nombreux produits (café, cola, huile de palme, bois, produits médicinaux) et services (protection du village, ombrage du café, etc….), tout en conservant une grande diversité d’espèces arborées dont des espèces d’intérêt pour la production de bois d’œuvre. Mais quelle sont les déterminants des performances de ces systèmes et quelles sont les conditions de leur durabilité ? Peut-on valoriser ces systèmes de culture comme un moyen de production durable, notamment de bois d’œuvre ?

Les déterminants de la durabilité des systèmes agroforestiers L’évaluation des performances des systèmes agroforestiers de Guinée Forestière est actuellement en cours de réalisation, conjointement par l’équipe du programme Agroforesterie et par l’équipe du projet DURAS –Forêt en Guinée Forestière. Le projet DURAS- Forêt intitulé « Innovation et savoirs paysans dans les pratiques de gestion des écosystèmes forestiers humides d’Afrique de l’Ouest (Ghana, Guinée) et du Centre (Cameroun) : diversification des systèmes associant cultures pérennes et vivrières », travaille dans les villages de Boussédou et de Nienh en Guinée Forestière. Dans le cadre de ce projet, une première typologie basée sur l’importance du revenu et la combinaison des productions d’exploitation agricole a été réalisées à partir d’un large échantillon (62 exploitations enquêtées à Boussédou (Haba et al, 2007), et 192 à Nienh (Kolié, 2007). A partir de cette première typologie 18 exploitations-types à Boussédou et 15 exploitations-types à Nienh ont été retenues et sont actuellement enquêtées plus finement pour comprendre de manière approfondie le fonctionnement de chacun des types d’exploitations agricoles identifiés et leurs trajectoires. La description de la structure de la végétation et l’analyse des pratiques et des stratégies paysannes, concernant la gestion des agroforêts, sont donc réalisées sur des parcelles appartenant aux exploitations agricoles enquêtées dans le cadre du projet DURAS-Forêt. Cela a pour objectif de mettre en lien les pratiques avec le fonctionnement selon le type et la position sur la trajectoire des exploitations agricoles enquêtées. Les premières études montrent l’importance de la disponibilité en foncier et en main d’œuvre dans la gestion des agroforêts. Les agroforêts constituent a priori un système durable dont sont issues de nombreuses productions, tout en permettant la conservation d’un nombre important d’espèces arborées. Ce système qui pourrait constituer un système durable pour diverses productions, et notamment pour la production de bois d’œuvre. Cependant, le code foncier actuel (1999) en ne reconnaissant pas de façon juridique, le rôle des agriculteurs dans la mise en place et dans la gestion durable de ces agroforêts (notamment dans la préservation des espèces de bois d’œuvre) ne garantit donc pas aux agriculteurs le bénéfice de la plantation et de la préservation des espèces de valeur dans leurs agroforêts. Sans reconnaissance juridique du rôle des agriculteurs de Guinée Forestière dans la préservation de la ressource bois, les agroforêts apparaissent donc menacées à court terme par des prélèvements de bois et ne profitant que peu à ceux qui les ont préservés.

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Perspectives de recherche sur l’agroforesterie en Guinée

En Guinée Forestière : Mieux connaître et faire reconnaitre les systèmes agroforestiers de Guinée Forestière. A travers les résultats des projets : - « Caractérisation et évaluation des performances des agroforêts de Guinée Forestière : cultiver la diversité pour accompagner le développement local» conduit par programme agroforesterie de l’IRAG - DURAS –Forêt, Guinée Forestière. Le projet DURAS- Forêt intitulé « Innovation et savoirs paysans dans les pratiques de gestion des écosystèmes forestiers humides d’Afrique de l’Ouest (Ghana, Guinée) et du Centre (Cameroun) : diversification des systèmes associant cultures pérennes et vivrières », qui associent les acteurs du développement local pour des pratiques de recherche-action en partenariat. En Guinée :

- Capitalisation des différentes études entreprises sur les systèmes agroforestiers dans les différentes régions de la Guinée

- Création et animation d’un théme transversal (inter-régionnal) sur l’agrobiodiversité, l’agroforesterie » à l’IRAG

- Création d’un réseau pluri-disciplinaire de personnes- ressources issues de différentes institutions, ONG, etc ….sur l’agroforesterie

En Afrique de l’Ouest Depuis le séminaire du Coraf à Accra (Ghana) en avril 2007, la Guinée est éligible aux appels d’offre du CORAF sur la thématique de l’agrobiodiversité. Cet exposé tout en présentant rapidement les premiers résultats du projet de recherche « Caractérisation et évaluation des performances des agroforêts de Guinée Forestière : cultiver la diversité pour accompagner le développement local» conduit par le programme agroforesterie de l’IRAG est un appel à la collaboration des différents acteurs travaillant sur la thématique agroforesterie pour une capitalisation des acquis, pour une reconnaissance des pratiques agroforestières mises en œuvre par les agriculteurs de Guinée , pour proposer des pratiques rentables pour les agriculteurs tout en maintenant une exploitation des ressources naturelles de manière durable

Merci à Mélanie Canet et Claire Wagler pour la relecture !

Réferences : Bort V., Camara A. and Konomou F.M.. 2003. GIS Environnement & Refugiés. Analyse spatiale et aide à la décision. CIRAD, IRAG, HCR ad FFEM [CD non distribué].

Camara A. 2007. Dynamiques régionales et systèmes ruraux en Guinée Forestière. Vers la conception d’un observatoire pour le développement. Thèse de Géographie. Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse. 250 pp + annexes [non publié].

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de Foresta H., Michon G and Kusworo A. 2000. Complex Agroforests. Lecture Notes n°1. ICRAF-SE Asia, Bogor, Indonesia. 21p.

J. Delarue. 2007. Mise au point d’une méthode d’évaluation systèmique d’impact des projets de développement agricoles sur le revenu des producteurs. Etude de cas en région Kpele (Republique de Guinée). 414 pp.

Diabaté M. Lamanda N, Wagler C, Malézieux E et de Foresta H. 2007. Farmers’ contribution to the conservation of biodiversity: the coffee based agroforestry systems in“Guinée Forestière” (Guinea , West Africa). Poster à presenter au Symposium “Agroforestery with Perennial Crops : Making Ecosystem services count for farmers, consumers and the environment” .17 au 21/09/ 2007 au CATIE à Turrialba, Costa-Rica. Diabaté M. et Dreyfus B. 2002. Utilisation des symbioses microbiennes pour la restauration des forêts et de l’agroforesterie. Rapport final du projet FAC (1999-2002) Gestion des forêts tropicales humides de Guinée Forestières. 35 pp

Diabaté M. 2003, Dreyfus B, Ba A., Eyssartier G (2003). Guide des champignons ectomycorhiziens de Guinée Forestière. IRD et Muséum d’Histoire Naturelle de Paris. 47 pp

Diabaté M. (2004). Guide de détermination des principales espèces légumineuses de Guinée Forestière. Rapport de Mastere de Foresterie Rurale Tropicale, ENGREF, 151 pp.

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Haba et al., (version provisoire, avril 2007). Etude des pratiques de gestion des écosystèmes cultivés et de leurs déterminants à Boussédou. 98 pp.

Keillabach et Duer, 2001. Etude sur les systèmes d’exploitation sylvo-agricole en Guinée. GFA Terra systems.

Kolié, 2007. Analyse des agrosystèmes villageois de Nienh et leur durabilité. 66 pp.

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Lamanda N , Camara A, Diabaté M, Kolié D ? Kalms JM, Malezieux E, de Foresta H, Cheylan JP. (2007) Spatio-temporal extension of agroforestry systems in “Guinée Forestière” (Guinea, West Africa).Poster à présenter au Symposium “Agroforestery with Perennial Crops : Making Ecosystem services count for farmers, consumers and the environment” .17 au 21/09/ 2007 au CATIE à Turrialba, Costa-Rica. Madelaine C. 2005. Analyse du fonctionnement et de la dynamique de la palmeraie sub-spontanée en Guinée forestière. Cas du village de Nienh. Mémoire de stage de fin d’étude. Ensam-Engref. Montpellier. 82 pp [unpublished].

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