250
Notes techniques duMAB 15 Recherche et aménagement en milieu forestier tropical humide: le Projet Taï de Côte-d'Ivoire Préparé en coopération avec le PNUE, l'ORSTOM et l'lET

Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Notes techniquesduMAB 15

Recherche et aménagement en milieuforestier tropical humide:le Projet Taïde Côte-d'Ivoire

Préparé en coopérationavec le PNUE, l'ORSTOM et l'lET

Page 2: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Dans cette collection:

1. Le Sahel: bases écologiques de l'aménagement

2. Forêts et maquis méditerranéens: écologie, conservation et aménagement

3. Les populations humaines dans la biosphère: problèmes et propositionsde plans de recherche

4. Les changements dynamiques dans les écosystèmes terrestres: modalitéstechniques d'étude et applications à l'aménagement

5. La perception de l'environnement: lignes directrices méthodologiquespour les études sur le terrain.

6. Développement des régions arides et semi-arides: obstacles et perspectives

7. Carte de la répartition mondiale des régions arides

8. L'irrigation des terres arides dans les pays en développement et sesconséquences sur l'environnement

9. Aménagement des ressources naturelles en.Afrique : stratégies traditionnelleset prise de décision moderne

10. Tendances en matière de recherche et d'application de la science et de latechnique pour le développement des zones arides

11. L'aménagement des feux et des produits combustibles dans les écosystèmesà climat méditerranéen: priorités et programmes de recherche

12. Une approche écologique intégrée pour l'étude des établissements humains

13. Population-environment relations in tropical islands : the case ofEastern Fiji

14. Approaches to the study of the environmental implications ofcontemporary urbanization

15. Recherche et aménagement en milieu forestier tropical humide: le Projet Taïde Côte d'Ivoire

Page 3: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Recherche et aménagement en milieuforestier tropical humide :le Projet Taïde Côte-d'Ivoire

Directeurs de la publication:Jean-Louis Guillaumet,Guy Couturier etHenri Dosso

Page 4: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Programme intergouvernemental sur l'bomme et la biospbère (MAB), lancé par l'Unescoen 1970, a pour objectif de développer, avec l'apport des sciences naturelles et sociales,une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des ressources de la biosphère et pour "améliorationdes relations entre l'homme et l'environnement. Afin d'atteindre ce but, le MAB a adoptéune approche écologique intégrée pour ses activités de recberche et de formation,qui sont axées autour de quatorze thèmes internationaux et orientées vers la solution de problèmesconcrets de gestion dans les différents types d'écosystèmes,

Publié cn 1984 par l'Organisation des Nations Uniespour l'éducation, la science et la culture,7, place de Fontenoy, 75700 ParisImprimerie Floch, Mayenne

ISBN 92-3-202264-8

© Unesco 1984

Page 5: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Préface

Cette Note Technique présente un bilan des ré­sultats d'un projet pilote sur la recherche etl'aménagement en milieu forestier tropical humi­de : le projet Taï de Côte d'Ivoire.

La zone tropicale humide d'Afrique, d'Amé­rique Latine et d'Asie du Sud-Est est caractériséepar une couverture végétale naturelle de forêtstropicales ombrophiles, qui sont les communautésvégétales les plus riches par leurs essences ainsique les plus complexes par leur structure. L'ex­ploitation judicieuse des terres actuellementou anciennement couvertes de forêts constitue,pour de nombreux pays tropicaux, la base mêmede leurs stratégies nationales de développementéconomique.

Les régions tropicales ont une longue etriche tradition en matière d'exploitation desterres boisées. Cependant, l'intensité de l'ac­tivité humaine telle qu'elle s'exerce actuellementa des répercussions écologiques inconnues aupara­vant. Les raisons qui expliquent ces répercussionssont multiples: croissance rapide de la populationet besoin en terre pour l'agriculture, exploitationintensive des ressources pour assurer une crois­sance économique rapide, recherche de nouvellesréserves en bois par les pays développés desrégions tempérées et déboisement excessif pourla satisfaction des besoins en bois de feu.

Ces pressions font que les forêts tropicalessont défrichées et transformées à un rythmejamais atteint jusqu'à présent. Si la tendanceactuelle se poursuit, pratiquement toutes lesforêts tropicales ombrophiles primaires situéesdans les plaines vont disparaître dans le mondeavant la fin du siècle. Exception faite des ré­gions à sols fertiles, les efforts entrepris pourélaborer des systèmes d'exploitation permettantd'assurer la production de bois et d'alimentsn'ont pas encore donné de résultats satisfaisantsà long terme. L'intensification de l'exploitationa souvent été accompagnée de baisses de rende­ment, d'un appauvrissement conduisant à l'aban­don du sol.

Le défi posé consiste donc à élaborer dessystèmes d'agro-sylviculture assurant des rende­ments élevés et soutenus et à établir des struc­tures socio-économiques adaptées aux caracté­ristiques culturelles et écologiques des paysconcernés. Prenant conscience de l'i mportancedu problème et de ces dimensions multiples,ainsi que des conséquences des tendances etdes rythmes de changement actuels, la commu­nauté scientifique a manifesté au niveau nationalet international un regain d'intérêt pour les zonestropicales humides.

C'est sur la base de cette problématiqueque l'Unesco a développé dans le cadre de sonprogramme sur l'homme et la biosphère (MAS)différentes actions sur les forêts tropicales.En effet, un des quatorze thèmes de recherchede ce program me (Projet 1) traite des effetsécologiques de l'accroissement des activitéshumaines sur les écosystèmes des forêts tropi­cales et subtropicales. Ce projet a com me prin­cipal objectif l'établissement de bases scientifiquespour l'utilisation rationnelle des ressources natu­relles et pour l'aménagement intégré des éco­systè mes dans les zones forestières tropicaleset subtropicales du monde. Un autre objectifimportan( consiste à développer les capacitésdes pays des régions tropicales et subtropicaleshumides dans le domaine de la recherche et dela gestion et à encourager les divers élémentsde la collectivité à participer activement auxrecherches et à l'aménagement des ressourcesnaturelles de ces zones.

La stratégie adoptée pour l'exécution duProjet 1 du MAS a comporté une phase de plani­fication globale, régionale et nationale. A ceteffet, une série de réunions régionales a étéorganisée en 1974-1975, en coopération avecle PNUE, pour les pays de l'Asie du Sud-Est,de l'Amérique latine, de l'Afrique occidentaleet centrale, et de l'Asie du Sud. Les rapportsconcernant ces réunions sont reproduits dansla série des rapports du MAS (nO 26, 28, 33 et35).

Page 6: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

Des rapports sur l'état des connaissancesrelatives aux écosystèmes forestiers tropicauxont été établis (voir Recherches sur les Ressour­ces naturelles, Nos XIV et XIX) et deux réunionstechniques sur l'étude des écosystèmes de forêtsombrophiles tropicales, ont été organisées encoopération avec l'Union internationale des Insti­tuts de Recherches forestières (IUFRO) pourcompléter la synthèse des connaissances et pourélaborer les bases d'ordre méthodologique.

L'aboutissement de cette planification logis­tique et méthodologique est la mise en placedans les différentes régions tropicales de réseauxde projets pilotes destinés à améliorer les fonde­ments scientifiques de l'aménagement du terri­toire dans ces régions. Les projets du MAB dansles zones tropicales humides et subhumides sontcaractérisés par la diversité des approches etdes conditions de mise en œuvre. Les réseauxétablis couvrent non seulement une assez grandevariété d'écosystèmes naturels, mais aussi touteune gamme d'écosystèmes modifiés par l'homme.Par exemple, en Afrique occidentale et centrale,les types d'écosystèmes vont des forêts semi­décidues de la Basse-Lobaye (République centra­fricaine) aux forêts tropicales humides à feuillespersistantes de Tai'. (Côte d'Ivoire). Le réseaupermet également de couvrir une série de modesd'utilisations des sols et de mouvements de popula­tion. En Asie du Sud-Est, l'étude de l'utilisationdu sol porte sur : la mise en valeur intégrée dubassin de la rivière Agno (Philippines) j les coupesblanches sélectives à Gogol (Papouasie Nouvelle­Guinée) j les transmigrations et l'exploitationcommerciale des grumes dans le Kalimantanoriental (Indonésie) j la transformation de l'éco­système forestier en plusieurs endroits en Malai­sie j la colonisation forestière à Sakaerat(Thaîlande). En outre, toute une série de méthodeset de techniques sont en train d' être lancéeset mises à l'essai dans le cadre du réseau. Parexemple, en Amérique latine, le projet de SanCarlos de Rio Negro (Venezuela) comprend desétudes approfondies sur les mécanismes deconservation et d'accumulation des élémentsnutritifs. Au Mexique, des études sont en courspour déterminer corn ment un système agricoletraditionnel (le système des "chinampas") peutêtre combiné à de petites industries localesagricoles et sylvicoles. Au Pérou, le projet Iquitosest axé sur l'étude du potentiel de la fauneforestière et son intérêt sur le plansocio-économique.

Dans leur ensemble les divers projets ontcontribué à répondre à une grande partie desprincipales questions scientifiques qui sous-tendentl'amélioration de l'aménagement du territoiredans les tropiques, par exemple: quelle est la

productivi té biologique propre à chacune dessous-régions tropicales et subtropicales etcomment cette productivité est-elle influencéepar différents facteurs de l'environnement?Quelle est l'importance de la diversité biologiqueet sociale dans les tropiques? Comment lesdifférents habitants des régions tropicalesperçoivent-ils et utilisent-ils leur environnement,et dans quelles conditions ces perceptions etutilisations peuvent -elles changer? Commentles habitants des régions tropicales ont-ils géréleurs ressources en terres dans le passé et leurstechniques sont-elles utiles aujourd'hui? Commentdes techniques de gestion des terres qui ont faitleurs preuves dans une région peuvent-elles êtreadaptées à une autre région? Comment lesforêts et les sols tropicaux réagissent-ils auxperturbations et comment se régénèrent-ils?

Outre leurs buts scientifiques, les projetsont aussi fourni des informations utiles pourles planificateurs et les populations locales etont constitué des points focaux pour la forma­tion au niveau tant régional que national ainsique pour la participation des scientifiques deplusieurs pays.

La planification, le financement et l'exécu­tion des projets pilotes relèvent de la responsabi­lité des institutions nationales des pays participantau Programme MAB. Un appui technique etparfois financier est accordé par l'Unesco, souventen association avec le Programme des NationsUnies pour l'Environnement (PNUE), et l'Organi­sation des Nations Unies pour l'Alimentationet l'Agriculture (FAO) ou d'organisations non­gouvernementales comme le Conseil internationaldes Unions scientifiques (CIUS), l'Union inter­nationale pour la ConsE;!rvation de la Natureet de ses Ressources (UIC N) et l'Union interna­tionale des Instituts de Recherches forestières(IUFRO). Les projets pilotes sur les forêts tropi­cales ont bénéficié en particulier de l'appui fournidans le cadre d'une action coopérative de l'Unescoet du PNUE pour le développement de projetspilotes sur les écosvstèmes de forêt tropicale(Projet du PNUE 1102-76-01).

La présente Note Technique dresse un bilandes activités conduites dans l'un des projets pilotesdu MAB. Celui-ci se localise dans la forêt deTai' dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Cetteforêt, en grande partie inhabitée jusqu'à uneépoque récente, la fin des années 1960 et ledébut des années 1970, a vue sa population aug­menter de façon considérable. En 1965, le gouver­nement de la Côte d'Ivoire a décidé d'inclurecette zone dans ses plans de développement.Des projets de développement ont été alors lancéssur une grande échelle. Les activités entreprisesont naturellement contribué à attirer vers lesud-ouest beaucoup de personnes venant d'autres

Page 7: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Preface

parties de la Côte d'Ivoire et des pays avoisinants,à la recherche de possibilités nouvelles et surtoutde terres pour y établir des fermes et de petitesplantations.

Le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire a connude ce fait une transformation accélérée, cetterégion illustre parfaitement les changementset les problèmes qui affectent de nombreusesrégions tropicales humides et semi-humides :

déplacements des populations sur une grandeéchelle;- passage d'une agriculture paysanne de sub-sistance à une économie de marché;

aménagement des terres sur une grandeéchelle;

conflits croissants entre les exploitationsentrant en compétition;- grands investissements locaux et étrangers;

liens plus étroits avec l'économie mondiale.C'est aussi une région où la recherche scien­

tifique doit précéder ou accompagner l'activitéhumaine et aider à modeler le développementéconomique. C'est dans ce contexte particulière­ment favorable que le Ministère de la Recherch~

scientifique de la Côte d'Ivoire a été ame~e

à concevoir en 1973 le projet MAB de la foretde Taï qui constitue la zone la plus étendue deforêt tropicale ombrophile encore intacte enAfrique occidentale.

Le projet Taï a été axé sur huit thèmesde recherche visant à mettre au point des solu­tions à des problèmes spécifiques d'i mpact desactivités de l'homme sur l'environnement dansla zone étudiée. Son objectif ultime est de con­cilier la conservation de la diversité génétiquea vec les besoins du développement économique.Le projet comporte un ensemble d'études deterrain entreprises par des scientifiques ivoirienset étrangers appartenant à un grand nombrede disciplines (anthropologie, botanique, hydrolo­gie, pédologie, etc.) et dont les travaux sontcoordonnés par l'Institut d'écologie tropicale(lET) d'Abidjan. Parmi ces institutions étrangères,il y a lieu de mentionner notam ment l'Officede la Recherche Scientifique et Technique Outre­Mer (ORSTOM) de France, l'Université d'Agri­culture de Wageningen, le Laboratoire deMycologie de l'Université de Rome, l'Institutde Zoologie de l'Université de Neuchâtel, etc.

La présente Note Technique a été préparéedans le cadre d'une collaboration très étroiteentre l'Unesco, l'lET et d'autres institutions ivoiri­ennes ainsi qu'avec l'aide du PNUE ct del'ORSTOM. Elle est destinée à présenter un résumédes résultats de près de dix ans de recherchesentreprises dans le cadre du projet ivoirien intitulé"Effet de l'accroissement des activités humainessur la forêt du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire",

plus connue sous le nom abrégé de "Projet Tai".Initié en 1973 par le Ministère de la Recherchescientifique de Côte d'Ivoire, ce projet a étéeffectivement mis en place en 1975. Dix ansaprès, il fallait faire le point, rassembler toutesles données, publiées ou non, pour les mettreà la disposition des scientifiques et des autresutilisateurs: aménageurs et preneurs de décision.Il est donc clair que ceci n'est pas une synthèsemais le bilan de ce que l'on doit considérer commeune première étape.

Cette présentation générale est précédéede l'avant-propos de M. Balla Keita, Ministrede l'Education nationale et de la Recherche scien­tifique, Président du Comité national du MABde la Côte d'Ivoire et Président du Conseil inter­national de coordination du Programme surl'Homme et la Biosphère (MAB), qui souligned'autres aspects d1l projet Taï. Les rés~ltats

des recherches ont été regroupés suivant lesthèmes majeurs du projet : le milieu physique;l'homme et ses activités; le champ cultivé etses contraintes; la structure et le dynamismede la végétation; la santé humaine; le parcnational et la protection de la nature; l'expressioncartographique des résultats. Un dernier chapitreprésente une analyse critique des résultats etune ébauche sur les perspectives du projet, ycompris des suggestions destinées à lui donnerune nouvelle impulsion. La liste intégrale destravaux publiés à partir de recherches effectuéesdans le cadre du Projet Taï sont rassemblés,à la fin du document suivant l'ordre alphabétiquedes auteurs. On s'y rapportera pour toutes lescitations qui figurent dans le texte. Les autresréférences, signalées par un astérisque, sontcitées en fin de chapitre.

Les différents chapitres du document ont étéredlges par des chercheurs qui furent ou sontencore associés aux activités du projet. Laprésentation en est, de ce fait, quelque peuhétérogène; dans certains cas, les auteurs s'ap­puient sur des travaux déjà publiés définitive­ment, dans des revues, périodiques ou ouvragesà large diffusion, ou sous une forme provisoirede rapports et documents de travail; dans d'autrescas, il a été nécessaire de présenter des résultatsnon encore publiés.

Il est clair que l'unité de cet ouvrage s'enressent, mais, répétons-le, ce n'est pas une syn­thèse mais un bilan d'une importante étape quirassemble des informations utiles, non seule­ment aux chercheurs du projet et aux institutionsintéressées de Côte d'Ivoire, mais aussi à d'autreséquipes chargées de l'étude de la forêt denseet humide des zones tropicales.

A l'occasion de la publication de cette NoteTechnique, l'Unesco tient à remercier l'Institutd'Ecologie tropicale d'Abidjan, le PNU E et

Page 8: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

l'ORSTOM pour leur aide et leur coopération.Ces quatre institutions tiennent à leur tour àexprimer leurs remerciements à tous ceux quiont participé aux études effectuées à Tai eten particulier à ceux qui ont apporté leur concourspour la préparation de cette Note Technique.Ces remerciements s'adressent tout particulière­ment à Jean-Louis Guillaumet et Guy Couturier,chercheurs à l'ORSTOM, qui ont assuré l'harmo­nisa tion de la rédaction de cette Note, ainsiqu'à Monsieur Henri Dosso, ancien directeurde. l'Institut d'Ecologie tropicale à Adbidjan etMonsieur Denis Vivet, gérant de la station de

Tai et leurs différents collaborateurs qui ontparticipé aux activités du projet. Nos remercie­ments vont également à Mesdames François,Gillon et Vidican qui ont assuré les illustrationsgraphiques et la dactylographie de cette NoteTechnique.

Il convient de souligner par ailleurs queles points de vues expri més dans cette publica­tion ne reflètent pas nécessairement ceux del'Unesco et du PNUE ou ceux des autres institu­tions associées à ce travail, ils appartiennentaux auteurs des différentes contributions.

Page 9: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Remerciements

Nous remercions tous ceux, assistants, préparateurs,commis, chauffeurs, ... qui, sur le terrain comme

dans les laboratoires d'Abidjan, ont œuvré avecefficacité et conscience à la réalisation de cettepremière étape du Projet Taï. Nous aimerionssouligner tout particulièrement le rôle de DenisVivet, premier gérant de la Station de Tai, dansla mise en œuvre des recherches en forêt et

remercier aussi les habitants et les représentantsdes autorités administratives du Sud-Ouest ivoirienqui nous ont toujours apporté leur concours,enfin Jean Levieux qui fut, comme Directeurde l'Institut d'Ecologie tropicale et Professeurde Zoologie à l'Université d'Abidjan, le premierresponsable scientifique du Projet.

Jean-Louis GuillaumetGuy Couturier

Henri Dosso

Mai 1984

Page 10: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 11: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 12: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 13: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

ces impératifs du développementnational devaient rompre l'équilibre

profit d'un nouvel équilibre à

Avant-propos

Cette Note technique se fonde sur les résultatsdu projet pilote qui se déroule dans la forêt deTaï, dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Ceprojet est probablement l'un des projets les plusavancés parmi ceux qui ont été entrepris sousl'égide du Programme sur l'Homme et la Biosphère(MAB) sur les écosystèmes de forêts tropicaleshumides

Le Sud-Ouest ivoirien se présentait, il ya moins de 20 ans, sous l'aspect d'un grand massifforestier, limité à l'ouest et à l'est par les fleuvesCavally et Sassandra, encore à peine touchépar l'emprise humaine sur ses franges. Mais àpartir des années 60, ce "vide du territoire ivoirien"allait faire l'objet d'une pression croissante dela part des exploitants forestiers d'abord, puisdes cultivateurs venus des zones de savanes àla recherche de terres vierges ensuite. Dansle même temps, la construction du pont de Soubrédevait symboliser l'ouverture de ce Sud-Ouestivoirien au développement. Dès lors, deux con­traintes antagonistes apparaissaient: le nécessairedéveloppement économique et social du Sud­Ouest; la conservation de l'environnement primitif.

Le gouvernement allait répondre à ces deuxcontraintes par la mise en place d'une doublepolitique:

Une politique de développement régionalqui s'est affirmée dès 1965 d'une part, par lamise en place d'une structure administrativeparticulière l'Autorité pour l'Aménagementde la Région du Sud-Ouest (ARSO), chargée demettre en valeur cette région, et par la réalisationd'importants investissements permettant dedésenclaver le Sud-Ouest et de développer leport de San-Pédro, d'autre part.

Une politique de conservation de l'environne­ment dont la manifestation concrète demeurele classem.ent, autour du parc national de Taï,d'une série de forêts destinées à servir d'écran­tampon à la pénétration humaine dans un soucide protection des richesses naturelles du patrimoinenational et des potentialités forestières.

13

Ainsi,régional etancien audéterminer.

La réponse de la recherche scientifiqueivoirienne à cette demande du développementdevrait donc accompagner, si elle ne pouvaitles précéder, les diverses phases de l'actionhumaine afin "de guider cette action, de lacanaliser en dégagean t grâce aux connaissancesscientifiques et techniques acquises, quelquesprincipes simples et rationnels d'aménagementou d'utilisation de l'espace",

Dans ce sens, le Ministère de la RechercheScientifique élaborait, en 1973, un projet d'étudedes caractéristiques de l'écosystè me forestiertropical et de leurs transformations selon lesmodes d'utilisation qu'en ferait l'homme, envue d'en dégager des règles d'exploitationrationnelle. Le "projet Tai" devait donc permettrede comparer la structure et le fonctionnementd'un écosystème naturel primitif, forêt denseombrophile préexistante, à ceux d'écosystèmestransformés, parce qu'aménagés selon les objectifsde différents systèmes d'exploitation du milieunaturel, correspondant aux nécessités desactivités humaines à implanter dans cette zonejusqu'alors peu touchée.

Les efforts ainsi entrepris par leGouvernement ivoirien pour la connaissance,la conservation et la protection de l'écosystèmeforestier du Sud-Ouest ivoirien, intégrant leParc National de Taï, se sont traduits par lamise en place, dès 1976, d'un programme derecherches pluridisciplinaires associant plusieursorganismes et dont l'objectif est d'étudier leseffets des activités humaines sur la forêt deTaï.

Il convient de rappeler que le Parc Nationalde Taï, d'une superficie de plus de 300.000hectares, représente la plus importante reliquede forêt humide primaire de toute l'Afriquede l'Ouest. Important régulateur des conditions

Page 14: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tar; recherche et aménagement

bioclimatiques à l'échelon régional, le massifforestier de Taï constitue un véritable laboratoireprivilégié de recherches et de formation surl'écosystème forestier tropical humide, à desfins d'élaboration de schémas d'aménagementrégionaux intégrés.

Les premiers résultats obtenus dans lecadre de ces recherches, leur portée scientifiquetant au plan national qu'international, ont conduitl'Unesco à retenir le "Projet Tai" comme projetpilote dans le cadre du Programme sur l'Hommeet la Biosphère (MAB/Unesco) et à inscrire leParc National de Taï comme partie intégrantedu réseau international de réserves de la biosphèreet plus récemment comme partie du Patrimoinemondial, et ont valu au Projet Taï d'être choisicomme site de formation sur le terrain, d'écologuesforestiers et autres scientifiques et techniciensde Côte d'Ivoire et d'autres pays de l'Afriquede l'Ouest et du Centre.

Les recherches à Taï ont visé à dégagerles lignes directrices de gestion de l'écosystèmeforestier et à définir un système d'exploitationqui permette la récolte régulière de bois touten protégeant les richesses naturelles et lespotentialités de la forêt. L'écosystème exploitédevrait donc conserver les fonctions etcaractéristiques de la forêt d'origine, notammentses réserves génétiques, ses' pouvoirsconservateurs du sol, ses propriétés régulatricesdans le bilan hydrique, ses aptitudes à la fixationde dioxyde de carbone, ses ressources ensubstances alimentaires et médicinales et sesdivers produits forestiers non-ligneux. Ce n'estqu'en exigeant cela que la double fonction dela forêt, à la fois protectrice écologique etproductrice économique, pouvait être sauvegardéepour l'avenir non seulement proche, maiségalement lointain. Ceci n'est réalisable qu'enadaptant les méthodes sylvicoles aux caractèresspécifiques de l'écosystème au lieu d'adapterà l'inverse la forêt aux méthodes. Le problèmeprincipal est finalement le suivant : commentmaintenir le caractère auto-régulateur de laforêt tout en réalisant une récolte de boisrégUlière, dont l'intensité et la périodicitépermettent de rentabiliser l'opération '?

La mise en oeuvre d'activités de recherchescomme celles de Tai fait une large place àla coopération scientifique régionale etinternationale, à la formation et à la concertationpermanente entre décideurs, planificateurset hommes de science. S'agissant de lacoopération scientifique régionale et

)4

internationale, il convient de signaler les liaisonsétablies entre la communauté scientifiqueivoirienne et celle des pays de la région quise trouvent situés dans la même zone écologiqueou qui se trouvent confrontés à des problèmessimilaires. Cette coopération scientifique s'établitégalement au niveau des échanges d'informationset de chercheurs travaillant sur des projetsMAB d'autres continents, en particulier dansle domaine tant des écosystèmes forestiersque des systèmes savanicoles et lagunaires.Dans ce sens, l'Institut d'Ecologie Tropicale,coordinateur du Projet Taï, entretient des liaisonsscientifiques fructueuses avec les MAB brésilien,mexicain, allemand, italien et français pourne citer que ceux-là.

Les programmes de recherches écologiquesivoiriens constituent également un creusetpour la formation des chercheurs, a ussi biensur le plan national qu'international. La formationscientifique demeure une des priorités de lapolitique de développement de la Côte d'Ivoire."L'avenir est à la science et à la technologie"aussi bien dans les pays développés que dansles pays en développement. En effet, le transfertde technologies non maîtrisées par lesbénéficiaires n'atteint pas, dans la majoritédes cas, les résultats escomptés. C'est cequ'exprimait éloquemment le Directeur généralde l'Unesco dans le Courrier de l'Unesco consacréà l'Homme et la Biosphère en disant "Pour mieuxservir le progrès des peuples, la science et latechnologie doivent pouvoir s'intégrer à la culturede chaque pays et les efforts accomplis s'accorderaux caractères qui lui sont propres".

C'est la raison pour laquelle le Ministèrede la Recherche Scientifique de la Républiquede Côte d'Ivoire accorde une attentionparticulière à la formation d'équipes dechercheurs nationaux et à leur participationaccrue dans la gestion et l'exécution desprogram mes de recherches écologiques. L'Institutd'Ecologie Tropicale de Côte d'Ivoire en estune illustration vivante et assume cette fonction,non seulement sur le plan national mais encoresur le plan régional africain. La Station écologiquede Taï reçoit chaque année des chercheurs etdes stagiaires en provenance de l'Afrique etdes autres continents, soit pour participerdirectement aux recherches en cours, soit poursuivre des séminaires ou des cours de formationa vec l'assistance de l'Unesco, du PN UE ou duPNUD. La côte d'Ivoire, pays de dialogue, paressence et par conviction, souhaite développeret renforcer les relations scientifiques avec

Page 15: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Avant-propos

tous les pays aux zones écologiques similairesaux siennes. Elle est prête à s'ouvrir dans lamesure de ce qui est vulgarisable au-delà deses frontières et d'échanger des expérienceset -des technologies avec tous les pays du mondepour une meilleure intégration de l'homme ivoirienen particulier, et de l'homme africain en général,dans son environnement.

Je formule l'espoir que cette Note- technique,publiée dans le cadre du Programme

15

intergouvernemental de l'Unesco sur l'Hommeet la Biosphère (M AB), offre à tous ceux quis'intéressent aux problèmes de fonctionnementet de gestion rationnels des écosystèmesforestiers tropicaux en général, et africainsen particulier, une source d'informations etde données scientifiques utiles. Il est bienprobable également que les informationsprésentées ici constitueront une base pour lapoursuite et le développement des activitésà Taï comme ailleurs dans le monde tropical.

Balla KeitaMinistre de l'Education Nationaleet de la Recherche Scientifique

Président du Comité ivoirienpour le Programme sur l'Homme

et la Biosphère (MAB)Président du

Conseil International de Coordinationdu Programme sur l'Homme

et la Biosphère (MAB)

Page 16: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 17: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projetJean-Louis GuillaumetFrancis KahnPhilippe Léna

LES MOTIVATIONS

Pour présenter la genèse du Projet Taïl, nousne saurions mieux faire que retranscrire les motsmêmes du Ministre de la Recherche Scientifiquede Côte d'Ivoire de l'époque, J. Lorougnon Guédé(1976), Professeur de Botanique à la Facultédes Sciences d'Abidjan.

"A l'époque de l'Indépendance, vers 1960,la région Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire pouvaitêtre décrite com me un très grand massifforestier, entre les fleuves Cavally et Sassan­dra, à peine peuplé sur ses franges; mais,dès cette date, ce vide du territoire ivoiriencommençait à fait l'objet d'une pressioncroissante de la part des exploitants fores­tiers, dont les coupes du Centre et de l'Ests'appauvrissaient en bois d'œuvre et, dela part des cultivateurs des savanes sèchesou d'autres ré'gions, migrants spontanésattirés par des terres libres, propices auxriches cultures de rente et rendues acces­sibles par les trouées initiales des fores­tiers.

Quelques années plus tard, vers 1965,se précisait au niveau du Gouvernementivoirien l'une des options majeures d'aména­gement du territoire de la décennie: elleconsistait à peupler et à mettre en valeurla région vide du Sud-Ouest pour rééquilibrerla façade maritime du pays et contrebalan­cer la polarisation intense qui s'exerçaitsur la capitale et sur les régions orientales.

Cette politique volontariste se tradui­sait, très rapidement, par la mise en placed'un cadre administratif approprié, l'Auto-

l Le Projet Tai' tire son nom de la Sous-Préfecture deTai', petite localité sise à l'Ouest de lu limite du ParcNational et à proximité du fleuve Cavally qui marque lafrontière avec le Libéria. Ce village porte le nom de sonfondateur qui, venu de l'Ouest, le créa à la fin du siècledernier. La prononciation local est en deux syllabes distinctes"Ta-i", comme l'indique formellement la graphie française.

17

rité pour l'Aménagement de la Région Sud­Ouest (ARSO), par des investissements massifset par un ensemble de projets d'une ampleurinégalée.

Ci tons seulement parmi les réalisationsen cours: le port et la ville de San pédro,le désenclavement routier, les complexesagro-industriels d'hévéas, de palmiers àhuile, de cocotiers et les premiers périmètresde colonisation paysanne; la liste n'est pasencore close et, d'ici à 1980-1985, sontprévus: un barrage hydro-électrique surle Sassandra, un réseau de villes secondaires,un complexe de production de pâte à papier,un axe ferroviaire appelé à desservir le"Grand Ouest" ivoirien, depuis la côte jus­qu'aux gisements de fer de Man et aux com­plexes sucriers de Touba-Borotou.

La di mension de CéS entreprises justifi­ait à elle seule une mise à contribution per­manente des scientifiques nationaux, qui,par leur connaissance du milieu ou des tech­nologies, pouvaient éclairer les choix desresponsables ou appuyer les phases techni­ques des réalisations.

Mais d'autres motivations, d'ordre plusscientifique, ont renforcé cet intérêt initial.

En premier lieu, les quelques connaissan­ces déjà rassemblées montraient les carac­tères scientifiques d'un milieu natureljusqu'alors préservé, isolat forestier dontla flore et la faune constituaient des domainesd'investigation particulièrement riches pourles sciences de la terre, les sciences natu­relles et biologiques.

En second lieu, l'espace du Sud-Ouestlivré aux actions spontanées ou prog;am­mées des hommes scientifiques represen­tait pour les sciences humaines et économiquesun champ d'observation privilégié, une oc­casion rare de suivre en quelques annéesdes processus de peuplement, de structura­tion, de mise en place d'ûne économierégionale.

Page 18: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

FIGURE 1. Situation générale

"Le Nord de l'interfluve ••• , jusqu'à la latitudede Tai, où prédominent des surfaces granitiquesaplanies, gravillonnaires, souvent arénacées,indiquant des retouches dans le système desglacis".

A partir de Tai, une .•• "plaine essentielle­ment granitique .•• , mamelonnée, assezuniforme, confuse, sillonnée de nombreux coursd'eau très ramifiés ; ••• (qui) s'incline, d'altitudesvariant entre 175 m et 150 m vers Taï à unealtitude de 80 m vers Grabo.

L,­J11 N'1 Iger

-_/

o10Equateur

Enfin, l'ampleur même des projets et desperspectives à long terme suscitait auprèsdes chercheurs ivoiriens, au moment oùla communauté scientifique internationaledénonçait les agressions abusives de l'hommesur son milieu, une réflexion qui pouvaitêtre résumée en quelques mots.

Dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire,les chercheurs pouvaient encore soit pré­céder, soit accompagner les différentesphases de l'action humaine; aussi, sans l'en­traver - car la transformation de cette régionest à la fois inéluctable et indispensablepour la Côte d'Ivoire de demain - était-ilpossible de guider cette action, de la cana­liser, en dégageant, grâce aux connaissanceset aux techniques acquises, quelques prin­cipes simples et rationnels d'aménagementou d'utilisation de l'espace. Il va de soi quele problème de recherche ainsi posé ne pou­vait être abordé que par l'effort coordonnéde nombreuses disciplines et selon une ap­proche aussi bien fondamentale qu'appliquée.

Telles ont été les motivations imbri­quées et complémentaires qui ont provoquéla mise en œuvre du Projet Tai, en 1973"(J. Lorougnon Guede, 1976).

LE MILIEU NATUREL ET HUMAIN

LE MILIEU PHYSIQUE

Entre 'Sassandra et Cavally, depuis les contrefortsdu massif de Man jusqu'au littoral, la régionSud-Ouest recouvre successivement du Nord au Sudtrois zones morphologiquement distinctes.

Il serait vain de discuter sur une définition precisedu Sud-Ouest. Les Figures 1 et 2 montrent ledomaine d'application de l'ARSO, c'est une con­ception arbitraire mais guère plus que cellesqui [?ourraient se baser sur des critères physiques,biotiques ou humains pris séparément.

Disons que celui du Projet Tai est pour desraisons d'homogénéité que nous verrons résulterde la réunion des différentes caractéristiquesdu milieu, essentiellement constitué par l'inter­fluve Sassandra-Cavally jusqu'à la limite suddu pays Guéré.

Cette définition n'a rien de rigoureux etsouvent les études ont débordé ce cadre.

On trouvera dans le travail de Léna (197ge)une présentation détaillée du milieu naturelet des conditions humaines dont on ne peut querappeler ici les grands trai ts.

18

Page 19: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

SOkm!

Route à viabi lité permanente

Route à viabi lité incertaine par temps de pluie

Piste

Limite du parc national de Taï

Zone de protection du parc

Point de marquage•o!

,/'-"',J....

/ ......../ ,

//

7

..........., ",.-~

""'_ .....".... ,;/ \19) \

1 \( ,) ,

( ,1 \

l "1 ~" /-, /, -~~1 .,,'"\ ", //1 .", r

( ,\ /..---,.........--\ t

" ...... 1., ""t,.-" ',.' "., -,

S

6

FIGURE 2. Le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire

19

Page 20: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tai' : recherche et aménagement

"La région de Grabo constitue le pôle pluvio­métrique du Sud-Ouest.••" (Léna, 197ge). Il ya une diminution générale et progressive quandon s'en éloigne et tout particulièrement versle nord, où, au-delà de la ligne Toulepleu-Guiglo,on est tenu d'envisager d'autres zones climatiques(Eldin, * 1971).

Dans ces conditions d'uniformité morpholo­gique et climatique, avec des roches-mères essen­tielle ment grani tiques et schisteuses et de ra resmassifs, entre San rédro et Sassandra, de sablestertiaires (continental termina}), on ne peutque s'attendre à une grande homogénéïté dansla couverture pédologique, essentiellement consti­tuée de sols rerrallitiques rortement dénaturéset, en quelques rares points sur roches basiques,moyennement désaturés (Perraud,* 1971).

Quelques passées schisteuses aux vallonne­ments plus accentués apportent des nuancesdans le détail, comme par exemple les dépressionsdrainées par deux tributaires du Cavally : laHana et la Méno.

Enfin, une lanière de roches vertes relaieles Monts granitiques du Nienokoué et se prolongejusqu'aux abords du Cavally pour séparer cetteplaine des petits bassins côtiers".

En dernière part, "le socle••• parvient jusqu'àla côte en une série de bas plateaux finementdisséqués par l'érosion : les fleuves côtiers sefraient des passages difficiles entre des seuilssoulignés par des rapides et quelques plainesintérieures remblayées. Ils forment des élargisse­ments en arrière des sables littoraux qui barrentplus ou moins leurs embouchures ••• Le restede la côte est rocheux à l'ouest du Sassandra"(Avenard,* 1971).

Le climat y est de type "équatorial" avecqua tre saisons, grande et petite saison des pluies,grande (2 à 4 mois) et petite "saison sèche","terme(s) .•• parfaitement impropre(s), car l'humi­dité de l'air reste très élevée en Basse Côted'Ivoire, même en saison "sèche". Il faudraitparler de "saison non pluvieuse" ou "moins plu­vieuse" (Eldin,* 1971) ; l'harmattan, l'alizé conti­nental boréal sec et chaud, peut se faire sentirjusque pendant un mois.

Les caractéristiques cli ma tiques donnéespar Eldin* (1971) sont rappelées ici:

pluviométrie moyenne annuelledéficit hydrique cumulédurée annuelle d'insolationmoyenne annuelle de températurevaleurs annuelles limites c1es tempé­ratures minimales et maximalesmensuelles moyennesmoyenne annuelle de tension devapeur d'eauvaleurs annuelles limites desmoyennes mensuelles de tensionde vapeur d'eau

,1600-2500 mm150-250 mm

1800-2100 heures26-27°C

27 - 30 mbar

25 - 31 mbar

LA VEGETATION ET LA FAUNE

De ces grands traits physiques vont se dégagerles caractéristiques essentielles de la végétation.Le climax climatique général du Sud-Ouest ivoirienest typiquement une forêt dense humide semper­virente caractérisée floristiquement par laprésence d'arbres à échasses du genre Uapacade la fa mille des Euphorbiacées (Mangenot,*1955).

Il n'est pas utile d'en rappeler les caracté­ristiques physionomiques et structurales, sinonpour noter l'importance des dimensions des arbres,qui peuvent dépasser 40 m de hauteur, et la valeurde la biomasse qui se si tue entre 360 et 560 tonnesde matière sèche à l'hectare (Huttel, 1977).

Deux variantes floristiques, les plus ombro­philes, ont été reconnues ; la première s'étendde Taï à Tabou avec un optimum dans le massifde Grabo, la seconde couvre sensiblement lereste du territoire.

Au nord et au nord-est jusqu'à Soubré, laforêt tend vers des types moins hygrophiles sansjamais pour autant atteindre la forêtsemi-déciduemais en acceptant certains éléments de celle-ci.

C'est dans la zone géomorphologique des"plaines intérieures" que la forêt présente saplus grande richesse floristique et sa plus grandecomplexité structurale. La frange littorale,une bonne cinquantaine de kilomètres par endroit,est com para tivement appauvrie.

Notons les deux groupements édaphiquessuivants forêts marécageuses (souvent d'unecertaine importance) et formations littorales(y compris la mangrove). A noter la présenced'une petite savane relictuelle aux environs deGrand Béréby.

Par ailleurs, et ce n'est pas le moinsimportant, le Sud-Ouest est marqué par unegrande originalité floristique : pas moins de 180espèces en sont caractéristiques dont près d'unevingtaine strictement endémiques de l'arrièrepays de Tabou. Quelque 75 trouvent là leursultimes extensions orientales (Guillaumet, 1967 ;et Adjanohoun*, 1971).

"Le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire constituele dernier bastion refuge de la faune forestière•••(elle y) revêt une importance certaine .•• depar son intégration à l'économie de subsistanceet aux circuits économiques parallèles" (Léna,197ge).

Les mammifères forestiers y sont encoreabondants: éléphants, buffles, panthères, diversesantilopes, bongos, guib harnaché et céphalophes,hylochères, potamochères, huit espèces de singes,chi mpanzés, trois espèces de pangolins, nombreuxpetits carnivores, chauves-souris, rongeurs tantterrestres qu'arboricoles, etc.

Plusieurs mammifères n'existent en Côted'Ivoire que dans cette région hippopotame

20

Page 21: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

nain, trois céphalophes sur sept (dont le rarecéphalophe de Jentink), des rongeurs, plusieurssous-espèces de singes, des chauves-souris, etc.

L'OCCUPATION HUMAINE

Les cadres physiques et biotiques ainsi esquissés,qu'en était-il du peuplement humain avant ladécision de "mise en valeur", soit avant 1970?

"Une région aux potentialités économiquesconsidérables .•• mais une région enclavée ...à peine effleurée par le réseau routier existant- et peu peuplée - elle ne compte que 120.000habitants pour 37.000 km 2 , soit une densité globalelégèrement supérieure à 3 habitants au km 2(Schwartz, 1979b) 1.

Cette population se partage entre les quatrepetites villes situées à la périphérie Tabou, Guiglo,Soubré et Sassandra, les quelques axes routiers,la région littorale et le haut San Pédro. L'intérieurest vide, il ne l'avait pas toujours été mais lesadministrations successives s'étaient évertuéesà regrouper les villages le long des routes ; un"Parc refuge" y fut créé en 1926 dont les limitesfurent modifiées et la superficie portée à 425.000ha en 1956. Il sera définitivement érigé en ParcNational le 28 août 1972 2 •

Cultivateurs de riz sur essart 3, les paysansdu Sud-Ouest exploitent très largement la forêt,qui leur fournit produits de cueillette, matériaux,gibier, poissons, etc. Les cultures de rente,caféier et cacaoyer, bien qu'introduites depuislongtemps, sont peu pratiquées. L'activité despopulations littorales est en partie tournée versla navigation marchande dans le golfe de Guinée.

Jusque vers 1965, l'exploitation forestièrereste relativement modeste eu égard à l'étenduede la région. Les citations suivantes servirontde conclusion à cette trop rapide présentation

1 A. Schwartz fait référence à la région couverte parl'ARSO. Les chiffres du recensement de 1955 donnent lamême densité globale de 3 habitants au km 2 pour les 28.000km2 compris entre Tabou, Toulepleu, Guiglo, Duékoué,Sassandra (Inventaire économique de la Côte d'Ivoire1947-1956 cit. in Guillaumet,* 1967).

2 Il ne faut pas confondre Parc National de Tai' et ProjetTai'. Le projet n'a pas pour but l'étude du Parc National.Il se trouve que celui-ci a été créé bien avant le Projet,que dans une gestion rationnelle de l'espace il est normald'en prévoir la protection intégrale et que la station écolo­gique a été implantée à sa proximité pour des raisons éviden­tes.

3 A propos du terme "essartage" et de ses dérivés, essarter,essart, etc., on consultera Barrau* (1979). L'essartage,défrichement par brûlage et longue jachère forestière, n'estpas à confondre avec écobuage (UNESCO, PNUE, FAO*,1979).

21

du milieu et de l'occupation humaine du Sud­Ouest, de la Côte d'Ivoire:

"L'impression d'homogénéité que donne larégion dans son ensemble est en partie contreditepar l'examen attentif du milieu. Cependantl'influence de cette diversité ne peut qu'avoirété modeste sur l'organisation économique etsociale des populations. Elle aurait certainementété plus décisive dans un contexte de forte densitéhumaine et prendra sans doute une plus grandeimportance dans l'avenir.

Jusqu'à ces dernières années le trait fonda­mental (en) était le sous-peuplement. Il s'agitde la région de Côte d'Ivoire où se rencontrentencore les plus faibles densités et surtout lesplus vastes espaces vides. Région marginalepar rapport aux grands empires et royaumesafricains, marginale également par rapport auxpolarisa tions de l'espace créées par la colonisa­tion, la région Sud-Ouest a d'autre part connuun type d'économie qui favorisait l'émigrationet l'absentéisme, avec des conséquences démo­graphiques et économiques graves" (Léna, 197 ge).

C'est ainsi que jusqu'à une date récente,le Sud-Ouest se trouve être resté en marge du"miracle ivoirien" (Schwartz, 1979b). Peu après1960, la région s'ouvre à l'exploration forestièrequi va prendre un essor considérable avec l'ouver­ture des routes, Soubré-Sassandra dès 1966,puis le rattachement de San Pédro et enfin laréalisation du pont sur le Sassandra à Soubréen 1970.

En 1968, la Côte d'Ivoire entreprend l'opéra­tion San pédro avec la réalisation d'une partà l'embouchure du petit fleuve de ce nom à 350km à l'ouest d'Abidjan. Pour ce faire, en 1969,le Gouvernement met en place une société d'Etat,l'ARSO, Autorité pour l'Aménagement de laRégion Sud-Ouest, chargée d'assurer la programma­tion, la coordination et le contrôle de l'entreprise.

Pour faire face à la colonisation tant dirigéeque spontanée, pour préserver non seulementce qui devait l'être de nature vierge mais aussile maximum de potentialités du milieu naturel,la Côte d'Ivoire se devait d'entreprendre desrecherches dans cette région.

LA PROBLEMATIQUE

"La principale caractéristique du Projet Taiest (son) interdisciplinarité. Il intègre différentsprogrammes regroupant eux-mêmes un nombrevariable d'opérations de recherches •••

L'inconvénient des programmes de cegenre, pluridisciplinaires et ambitieuK, est dene jamais produire de véritable interdisciplinarité.Les résultats apparaissent comme la simple juxta-

Page 22: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

[!fèsition d'études sans liens dont la synthèse estdifficile, voire impossible. Le meilleur moyend'éviter cet écueil paraît être l'élaboration d'uneproblématique commune. Mais comment y parvenirlorsque l'écart entre les disciplines concernéesva de l'ethnosociologie des populations autochtonesà la pédologie en passant par l'archéologie etl'étude du ruissellement? En fait il a suffi d'ap­profondir la problématique incluse dans le titremême du projet : "Effets de l'accroissementdes activités humaines•••". Toutes les recherchesvont donc porter sur l'aspect dynamique desphénomènes et privilégier les modifications in­duites par l'hom me (d'où le terme "évolution"accolé à chacun des programmes). L'espacenaturel ne sera pas étudié en soi, il constitueraseulement un cadre de référence (de même pourla société autochtone).

Cette problématique a pour conséquenced'accorder aux recherches de sciences humainesune place stratégique, à l'amont des autres opé­rations. Elles doivent en effet apporter un certainnombre de données sur la structure et les motiva­tions des populations migrantes, leurs effectifs,leur origine, leur rythme d'arrivée et leur moded'occupation de l'espace, mais aussi sur lessystèmes de production (rythme de défrichements,cultures pratiquées, techniques culturales, tempsde travaux, main-d'œuvre, commercialisationdes produits, etc.).

Les autres disciplines peuvent ainsi connaîtrela nature et l'intensité des activités humaineset programmer des expériences comportant desparamètres aussi proches que possible de cequi est pratiqué dans la région. Des parcellesexpérimentales ont été délimitées sur des pentesmoyennes où des défrichements ont été réaliséssuivant les techniques traditionnelles. Le ruissel­lement ainsi que la quantité de matière solideemportée seront calculés pour chaque type deculture. L'évolution de la composition chimiquedes sols et la migration des éléments minérauxseront également enregistrés. Tout ceci afinde mettre au point des améliorations techniquespermettant de conserver les potentialités dumilieu.

L'opération (intitulée "structures spatialesdes communautés rurales", c'est-à-dire moded'occupation de l'espace et système de production)réunit les conditions pour intégrer nombre d'élé­ments des autres recherches de sciences humaines.En effet, au sein du projet Taï, dont l'objet estl'espace forestier, les études portant sur l'aspectspatial des phénomènes sociologiques et économi­ques (c'est-à-dire l'approche géographique) permet­tent d'effectuer une intégration, certes sélectiveet orientée, mais correspondant bien, dans cecas précis, au but recherché.

22

Si l'on considère que l'espace humanisé estle produit de l'histoire et des techniques, l'expres­sion d'un certain 1I0mbre de caractéristiquessociales et économiques des sociétés étudiées,la végétation apparaît, de son côté, comme larésultante de nombreux facteurs biotiques etabiotiques. La géographie humaine et la botaniquejouent par conséquent le rôle de carrefours disci­plinaires et constituent par leur rencontre l'objetmême du projet d'étude, c'est-à-dire ni le milieu,ni les sociétés mais l'espace humanisé dans sonévolution sous l'impact des mutations socio­économiques rapides que connaît la région depuisdix ans. Les autres disciplines, tout aussiimportantes pour l'équilibre du projet ne devaientpas, du fait de l'orientation choisie, jouer unrôle intégrateur.

Outre cette problématique d'ensemble assurantla cohérence de la recherche, chaque discipline,chaque étude a développé une problématiquespécifique permettant l'interprétation des résultatsà leur propre niveau de signification.

La transformation rapide de l'espace ruralsur la rive ouest du Sassandra ne peut êtrecomprise que replacée dans son contexte historiqueet géographique. La colonisation agricole duSud-Ouest est l'aboutissement logique de cinquanteannées d'expansion continue de l'économie deplantation qui a désormais conquis l'intégralitéde la Côte d'Ivoire forestière•••".

Il est donc apparu indispensable d'étendrele champ de l'enquête à l'ensemble de l'interfluve(tant du point de vue du milieu que des phénomènessociaux) afin de replacer les résultats obtenusau sein d'un ensemble significatif.

".•• Le cadre naturel n'est homogène qu'enapparence, et le but du Projet Taï est l'extrapola­tion à l'ensemble du Sud-Ouest des résultatsobtenus dans la région de Taï,' or il n'existaitencore aucune approche régionale susceptiblede servir de cadre de référence. En outre cetteapproche a permis de répondre à un certain nombrede questions soulevées par les réponses et commen­taires des paysans interrogés, notamment dupoint de vue climatique (diminution et irrégula­rité des pluies) et morpho-pédologie (certainspaysans affirment, par exemple, que la régionde Sassandra est peu propice à la culture ducacao). Enfin ces données permettent de déter­miner, de façon spatialement différenciée, lespotentialités et contraintes qui forment le cadreavec lequel interfèrent les phénomènes soumisà l'analyse. Elles permettent également d'expli­quer les choix d'implantation des opérationsagro-industrielles et la localisation des périmètreslaissés au peuplement spontané.

L'histoire du peuplement de la région etl'étude de l'organisation socio-spatiale autochtone

Page 23: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

permettent de rendre compte à la fois de larépartition actuelle de la population autochtoneet de son emprise spatiale. Or ceci est trèsimportant pour la compréhension de la colonisationagricole et du développement de véritables frontspionniers (fait dont l'ampleur est unique au seinde la Côte d'Ivoire forestière).

Mais c'est naturellement avec l'étude del'immigration que s'est faite sentir avec le plusd'acuité la nécessité d'intégrer les résultats àun cadre historique et géographique plus vaste.On ne peut rendre compte des comportementséconomiques et spatiaux des immigrés (à l'échellelocale) ou du développement dans l'espace dela colonisation agricole (échelle régionale) quepar une approche à la fois historique et struc­turelle" (Léna, 197ge).

QUELQUES DATES

1973 Mise en œuvre du Projet par le Ministèrede la Recherche Scientifique de Côted'Ivoire.

1974 Février - Participation de la Côte d'Ivoireau Groupe de Travail du MAB sur le Projetsur les Forêts tropicales humides (Riode Janeiro, Brésil).Mars - Première commission de I?rogramme.Octobre - Graphe de comparaison du Sud­Ouest 1.

Décembre Présentation officielle du

l "Pour passer d'une programmation sectorielle de larecherche à une programmation régionale, une méthoded'aide à la prise de décision a été mise au point: c'est legraphe.

Il s'agit d'un instrument de comparaison des program­mes basé sur le principe de la structuration des choix collec­tifs. Il est défini comme image graphique du cheminementdes programmes de recherches dans la réalité.

Construire un graphe revient donc à relier les program­mes de recherches à des projets précis de développementqu'on relie à des axes de développement. Trois classesd'objets (ou niveaux) sont définies : niveau supérieur (I),axe de développement ; niveau moyen (II), projet de déve­loppement ; niveau inférieur (III), programme de recher­ches.

Les objets d'un même niveau contribuent à l'obtentiond'objets situés au niveau immédiatement supérieur. Chaqueobjet est défini par les liaisons entre le niveau dont il estl'origine et par un certain nombre de -critères. La notationporte sur la détermination des liaisons, l'intensité des liai­sons et sur les critères.

23

Projet au siège de la Commission Nationa­le ivoirienne pour l'Unesco. Constitutiondu Comité MAB ivoirien. Inscriptiondu Projet par le Comité MAB français.

1975 Définition précise des objectifs de recher­che et mise en place des chercheurs desdifférents organismes.Août-sept. - Réunion de Kinshasa, Zaïre,lors de laquelle l'Institut Universitaired'Ecologie Tropicale fut retenu corn mecentre de formation en écologie pourl'Afrique Occidentale Francophone et leProjet Taï corn me projet pilote.Novembre-décembre Participation dela Côte d'Ivoire à la 4ème session du Con­seil de coordination du MAB à Paris.

1976 Février-mars Mission d'un consultantUnesco pour l'évaluation financière.Avril - Mission d'un membre de l'Unescode la division des établissements humainset de l'environnement socio-culturel.Mise au point d'un Projet pilote: "Ac­croissement des activités humaines surla forêt de Taï. Sud-Ouest de la Côted'Ivoire". Signature de l'accord en août.

1977 Mars - Début de la construction de lastation écologique de Taï.Avril - Visite d'un membre de l'Unescode la Division des Sciences écologiques.Août - Consultant Unesco : mise au pointdes résultats du projet pilote.

1978 Février - Mission d'un membre de l'Unescode la Division des Sciences écologiques.

... L'ensemble des graphes régionaux devrait aboutirà la réalisation de tout le graphe national, objectif queles responsables de la recherche ivoirienne veulent atteindreen vue de permettre des choix décisifs pour un développe­ment intégré.

De ce fait, les méthodes de recherches définies etutilisées par le Ministère de la Recherche Scientifiquedoivent, grâce à leur rigueur scientifique et à leur soup­lesse, permettre d'adapter et d'orienter les travaux desdifférentes structures en fonction des nouveaux objectifsde développement". N'Guessan Kanga* (1976).

Page 24: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

~~db~~~~~~db~~~~~~"~ ©1J"1 Organisation des Nations Unies t~ pour l'éducation, la science et la culture ~~ M":ï ~~ ~C>"~ Programme sur l' Homme et la Biosphère ~oo'"~ 00

"~ Par décision du Bureau du Conseil international G ;0

~ de coordination du programme sur l' homme L"i[@ et la biosphère, autorisé à cet effet par le Conseil, 00"'"~ il est certifié que ~

~ 00"'":ï @aAe @/foümnl dR~ ~~~ ~~ fait partie intégrante ~oo"~ G '"~ du réseau international de Réserves de la Biosphère. 00

C>"~ Ce réseau, constitué par ~~ des zones protégées représentant ~oo"~ G '"~ les principaux types d'écosystèmes mondiaux, 00

C>"~ a pour objectif la conservation ~;o~ de la nature et la recherche scientifique 00

"~ G '"~ au service de l'homme. 00

C>"~ Il servira de système de référence pour mesurer ~~ les impacts de l' homme sur ~oo"~ G '"~ son enVlfonnemen t. 00:. ~~"~ AhA'1J.rw t~ Date 28affti11918 Directeur général ~~ de l'Unesco 00"o"~ ~~~~~~~~~~~~~~~~~

FIG URE 3. Le Parc national de Taï érigé en Réserve de la Biosphère

24

Page 25: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

Visite à la Station écologique Taï et tournéedans le Sud-Ouest.28 avril - Erection du Parc National deTaï en réserve de la Biosphère. MA B ­Unesco (di Castri et Loope*, 1977) (Fig.3).Finition de la Station écologique de Taï:infrastructures d'accueil et de recherches,installations expérimentales.

1980 14 janvier-15 février - Cours post-universi­taire régional en écologie de la forêttropicale humide organisé par l'Unesco,en collaboration avec le PNUE, le ComitéNational MAB et le Ministère de la Re­cherche Scientifique de Côte d'Ivoireet avec l'appui de l'Institut d'Ecologietropicale d'Abidjan.Participants des pays suivants: Benin,Burundi, Centrafrique, Congo, Côte d'Ivoire,Gabon, Rwanda, Togo et Zaïre.Présence du Secrétaire du Conseil Inter­national de Coordination du ProgrammeIntergouvernemental de l'Unesco, MAB etd'un membre du Bureau régional de l'Unescopour la Science et la Technologie enAfrique.Avril - Exposition Unesco à Abidjan (par­ticipation du Projet Taï).19-28 novembre - Participation de laCôte d'Ivoire au Conseil Internationalde Coordination du Programme sur l'Hommeet la Biosphère (MAB), 6ème session,Paris.

1981 22-29 septembre: Participation de la Côted'Ivoire à la Conférence exposition scienti­fique internationale "L'écologie en action"pour le 1Dème anniversaire du projetMAB - Paris. Intervention de M. Bala Keita,Ministre de la Recherche Scientifique deCôte d'Ivoire, suivie par un accord entrel'Unesco et l'lU ET.

1982 25 octobre - 1er novembre: Réuhion régio­nale d'évaluation des projets MAB forêts.Abidjan.Décembre: Inscription du Parc Nationalde Taï sur la liste du Pa tri moi ne Mondial.

L'ORGANISATION

Le Ministère de la Recherche Scientifique adminis­tre et gère le Projet.

L'Institut Universitaire d'Ecologie Tropicaleen assure la coordination scientifique.

Les participants relèvent de quatre catégo­ries l :

Organismes de recherches ivoiriens,- Institut Universitaire d'Ecologie Tropicale

(IUET)

25

- Institut de Géographie Tropicale (IGT)- Institut d'Histoire et d'Art Africains (IHAA)- Centre National de Floristique (CNF)- Institut Pasteur de Côte d'Ivoire (IPCI)- Faculté des Sciences:

Laboratiore de BotaniqueLaboratoire de GéologieLaboratiore de Zoologie

Organismes étrangers en Côte d'Ivoire,- Office de la Recherche Scientifique et

Technique Outre-Mer (ORSTOM), France:Centre d'AdiopodouméCentre de Petit Bassam

- Centre Néerlandais (en liaison avec l'Univer­sité de Wageningen)

- Centre Suisse (en liaison avec l'Universitéde Neufchâtel)

- Mission de l'Allemagne Fédérale auprèsdes Parcs nationaux.

Organismes inter-régionaux en Côte d'Ivoire,- Organization de Coordination et de Coopé­

ra tion pour la Lutte contre les GrandesEndémies (OCCGE) - Institut de Recher­ches sur l'Onchocercose (IRO)

Organismes étrangers,- Faculté des Sciences de Rome - Italie

Laboratoire de Botanique- Faculté des Sciences d'Orléans - France

Laboratoire de Zoologie- Faculté des Lettres - Paris X - Laboratoire

de Géographie.

Les participants se partagent entre chercheurs.à temps plein, enseignants chercheurs, étudiantsstagiaires, techniciens supérieurs et chercheursassociés.

En 1978, les différentes catégories se ré­partissaient ainsi: 26, 6, 3, 10 et 1, non comprisl'effectif de la Mission fédérale allemande etdu Laboratoire de Botanique de Rome.

Le Ministère de la Recherche Scientifiqueassure et gère l'investissement et l'équipementainsi que le fonctionnement du personnel quien dépend.

Les autres structures de recherches four­nissent le fonctionnement de leur personnel.

ANIMATION ET COORDINATIONSCIENTIFIQUES

L'animation et la coordination scientifique sontassurées par un système de responsabilité à diffé-

1 Il est à noter aussi que les recherches n'entrant pasdans les objectifs du Projet Taï peuvent recevoir l'accueilde l'lU ET et de la Station de Taï après accord du Ministèrede la Recherche Scientifique.

Page 26: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï" : recherche et aménagement

rents niveaux. Chaque responsable étant lui­même un chercheur ayant en charge une opérationde recherche ou y participant.

Le système n'est pas formel et doit pouvoirse modifier suivant l'évolution et les exigencesde la si tua tion.

Le problème majeur dans un tel projet restela coordination au niveau des objectifs, de laméthodologie, de l'exécution et de la diffusiondes résultats. Nous devons constater qu'ellen'a pas toujours été suffisante.

L'APPROCHE SCIENTIFIQUE

Le but étant défini, l'approche scientifique devaitêtre axée sur l'étude des modifications du milieu,en l'occurence la forêt dense humide sempervi­rente.1° Il fallait choisir les types de transformationen fonction de ce qui était et pouvait être pratiquédans le Sud-Ouest.

Il ne fallait pas que ce soit seulement uninventaire des activités en cours et certainesétudes porteront sur des projets d'aménagement,tout en devant rester très réalistes.2° La forêt n'est considérée que com me letémoin, la référence de base, à partir de laquelleil est possible d'évaluer et de quantifier les modi­fications.

Ceci signifie donc qu'il ne sera pas procédéà une étude synécologique de l'écosystèmeforestier, si intéressante et si tentante soit­elle pour des scientifiques.3° Il n'est pas envisageable de tout étudierdu fonctionnement des divers types d'aménage­ment. La réflexion préalable permet de ne retenir,en premier lieu, que les mécanismes essentiels.Ils sont toujours considérés en termes dynamiques.

C'est ainsi que, en biologie des sols, ne furentretenus que les points suivants:

a) deux opérations du ressort de la pédolo­gie stricte visant des aspects importantsde la fertilité des sols:

Caractéristiques physiquesModification et réorganisation de lastructure (macro et micro) et de latexture.

Matière organique et éléments minérauxEvolution quantitative et qualitativede la matière organique du sol. Rôlede l'humus sur les propriétés chimiques,physiques et biotiques du sol.

b) une série d'opérations sur des aspectsbiologiques considérés plus en termesde fonctionnement qu'en termes d'in­ventaires, c'est-à-dire que l'étude sys­têmatique des groupes animaux et

26

végétaux retenus ne doit être ni unpréalable, ni un obstacle.

Activités microbiologiques bactérieset champignonsRôle des bactéries et des champignonsdans les cycles de la matière organiqueet des éléments minéraux.

c) trois groupes zoologiques ont été re­tenus à des titres divers:Termites, vers de terre, diplopodesqui ont un rôle important dans la trans­formation des débris végétaux et surla physique, la chimie et la biologiedes sols. Les diplopodes, importantgroupe de myriapodes, ont non seule­ment une action sur la matière organiquemais peuvent devenir en Côte d'Ivoiredes parasi tes de certaines cultures.Enfin, acariens et collemboles furentretenus leurs proportions relativespouvant servir à caractériser le degréd'évolution d'un milieu.L'étude de l'ensemble de la faune dusol et de son niveau d'action globalefait l'objet d'une opération de synthèseintitulée: Remontées biologiques.

L'ensemble même de ce programme a étérestructuré au cours du déroulement du Projetlui-même.4° La localisation du Projet Taï étant l'espacegéographique du Sud-Ouest ivoirien, les étudesdoivent envisager cet ensemble et les résultatspouvant y être applicables.

Mais beaucoup de recherches sur le milieuphysique et vivant doivent s'appuyer sur uneexpérimentation rigoureuse qui permet les com­paraisons, en réduisant autant que faire se peutles facteurs de variations et· leurs amplitudes.Il était donc nécessaire de créer une installationde terrain, la Station Ecologique de Taï~(Annexe 1).

Ce point ne fut pas facile à résoudre, etc'est ainsi que le choix de la station fut l'objetd'une controverse entre sciences de la terreet de la vie et sciences de l'homme. Les unsvoulaient se situer en plein cœur du front pionnier,"là où il se passait quelque chose au point devue humain", sur la marge est du Parc National,les autres exactement à l'opposé dans une régionoù l'activité humaine restait la plus tradition­nelle possible et ce faisant la végétation peualtérée.

Par ailleurs, autant les sciences humainesont l'habitude de travailler au niveau régional,autant il est tentant et sécurisant pour les dis­ciplines relatives au milieu de se localiser àune station, à des méthodes et des protocolesgénéralement bien connus et susceptibles d'êtredéveloppés dans les meilleures conditions.

Page 27: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

En fait, les solutions s'imposèrent d'elles­mêmes suivant les opérations.

Il est indéniable que le Projet Taï a exigéet devrait continuer à exiger un effort d'imagi­nation et de réalisme.5° Le Projet Tai est résolument orienté versl'application, les chercheurs ne doivent pas secontenter d'analyser les phénomènes mais doiventdégager les contraintes, proposer des règlesde suivis et des alternatives d'aménagement.6° La localisation géographique ne doit pasêtre prise dans son sens étroit. Ainsi, pour desraisons évidentes de facilité, des méthodologiesd'échantillonnage furent étudiées aux environsd'Abidjan, à proximité des laboratoires.

Une des premières opérations, intitulée"Effet de lisière" et qui consistait en l'analyseclimatique d'une zone déforestée adjacente àune lisière forestière fut réalisée près d'Abidjanà la lisière d'une plantation d'hévéas. Une tellelisière par son homogénéité pouvait servir demodèle de base.

Les méthodologies d'étude des diplopodeset des plantes adventices furent développéesaux environs d'Abidjan et donnèrent lieu à unethèse d'état et une thèse de spécialité avantd'être appliquées à Taï.7° L'approche scientifique devait être envisagéeavec la plus grande souplesse en fonction desobjectifs et comme le permet la programmationdu Ministère de la Recherche Scientiîique.8° Enfin, les résultats doivent être fournisau fur et à mesure de leur obtention.

L'EVOLUTION DU PROJET

Ces principes fondamentaux ne sont pas apparusaussi clairement dès le départ mais vont peuà peu se cLarifier et s'affiner. Les développementsapparus en cours de réalisation s'y conformerontet ne feront que les renforcer.

Un retour rapide sur l'évolution du projetde 1973 à 1982 montrera la marche des idéesdans le temps.

LES PREMIERS ELEMENTS

Le premier projet reposait sur les études com­parées entre trois objets:

a) La forêt naturelle en tant que témoin.Son étude n'est pas considérée com me unefin en soi, mais elle servira de référencepour évaluer la nature des modificationsapportées par l'hom me. D'autre part, laforêt de Taï est le modèle de base pour

27

les autres types de forêt susceptibles d'êtrerencontrés dans le Sud-Ouest.

b) La forêt naturelle soumise à l'exploitationforestière extensive.Il était projeté de faire une exploi ta tionde 50 m3 ha -1 soit cinq fois la moyennede la Côte d'Ivoire. Ce traitement étaitdestiné à mettre en évidence l'importancedes effets sur le milieu, en particulier régimedes eaux de surface et à évaluer la reconsti­tution du potentiel de productivi té naturelled'une forêt.

c) La clairière.- Ouverture dans la forêt abritant culturesvivrières traditionnelles, suivies de vergersde caféiers et de cacaoyers, et certainstypes de cultures industrielles.Une attention toute particulière devaitêtre rattachée à l'étude des gradients cli­matiques et biotiques dus à la lisière afinde permettre de définir les normes à respecterlors d'un défrichement pour obtenir le rende­ment optimal : dimensions et espacementdes clairières, procédure de coupe, etc.La clairière devait avoir une superficiecomprise entre 25 et 100 ha.

Enfin, il était prévu de maintenir une parcellenue Oa parcelle de Wieschemeyer), pour quelquesétudes de pédologie, qui constituait le contraireabsolu de la forêt.

La climatologie était envisagée corn meune recherche d'appui.

Dès ce moment, les études étaient prévuespour 5 ans et il était envisagé qu'au terme destrois premières années, on puisse mettre enévidence de nouvelles orienta tions de recherche.

Etait également évoquée la possibilité d'yinclure des recherches complémentaires:

écologie des vecteurs de maladies hu­maines,étude de l'adaptabilité de l'homme aumilieu forestier transformé,recensement et écologie des gros mammi­fères et éventuellement oiseaux, reptileset batraciens en vue de leur protectionet de l'exploitation touristique du ParcNational de Taï.

L'INCLUSION DES SCIENCES HUMAINES

C'est pour le groupe de travail du MA B sur lesforêts tropicales de Rio de Janeiro en février1974, qu'une importante partie relative à l'étudede l'homme fut incluse dans le Projet : santéhumaine et relations de l'homme avec son milieu.Quelque peu auparavant, la Côte d'Ivoire avait

Page 28: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEAU 1. Programmes, opérations et niveaux ~'intégration. Situation en 1975.

PROGRAMMES SYNTHE SES

EVOLUTION DU MILIEUPHYSIQUE

II

EVOLUTION DES SOLS

III

EVOLUTION DE LAVEGETATION

IV

EVOLUTION DESPEUPLEMENTS ANIMAUX

V

EVOLUTION DEL'EMPRISE HUMAINE

Niveau: unités fonc­tionnelles

Niveau: Obtention duproduit final

Programme VI: EVOLUTIONDU PAYSAGE FORESTIER

01. Caractéristi­ques physiques

01. Inventaire02. Structure04. Régénération

de quelquesespècesforestières

---------_o__ OS. Reconstitutionglobale

06. Adventices

Unités naturellesécosystématiques etleur agenc emen tdans l'espace

Structure et dynamiquedu couvert végétal

Cadres géomorpholo3i- 01.ques et climatiques

II. 05. Remontéesbiologiques

Structures spatialesde l'espace anthropisé

Bilan hydrique et ca- 1ractêristiques physi­ques des sols

Maladies parasitairesde l'homme, vecteurset réservoirs

Cycle de la matièreorganique et des élé­ments minéraux

Ravageurs des cul tures 1Parasites et prédateurs

Il. 03. Composantes durendement

Effets des élémentsbiotiques sur la dyna­mique des sols

!

Structuresspatiales descommunautésEspace anthro­pisé pré-exis­tantLe dynamismepionnierEffets desgrands projetsd'aménagement

02.

01.

03.

04.

NématodesInsectes etrégénérationdes essencesforestièresRongeurs

Singes etdamansMoustiques etSimulies

FourmisTermitesAcariens etCollembolesVersDiplopodes

07.10.

09.

[

02,

01.

Matière orga- 03. Stock et flux

nique et élé- Lments minéraux

~ Q3.+ 04.

Activités mi- 05.crobiologiques: _ •bactéries et 06.mycorhizes 08.

04.

L02.

Un facteur micro­climatique: l'in­terception de lapluieEaux souterrainesHydrométrie desurfaceEaux et pédogé­nèse actuelle

Systén:arlque etdynamique des.formesClimat régionalEffet de lisière

01.

07.

02.03.

05.06.

04.

N00

1

Page 29: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

adhéré au Programme MAS de l'Unesco initiéen 1971.

Le titre du projet devenait, pour s'accorderavec le Projet MAS N° 1 : "Effets de l'accrois­sement des activités humaines sur la forêt duSud-Ouest de la Côte d'Ivoire", plus connu main­tenant sous le nom de "Projet Taï".

En Côte d'Ivoire, les chercheurs étaientdéjà à l'œuvre.

LA FORME DEFINITIVE (975)

Sans rien perdre de son contenu, le Projet étaitentièrement restructuré pour satisfaire aux normesde la programmation du Ministère de la RechercheScientifique (N'Guessan Kanga*, 1976).

C'est ainsi qu'étai en t hiérarchisés six pro­grammes de recherche et 34 opérations 1 dont10 restaient sans chercheurs (Tableau 1).

LES REMANIEMENTS SUCCESSIFS

Au fur et à mesure de l'achèvement de certainesopérations, de l'apparition de certains besoinset d'une meilleure définition générale, la présen­tation s'est trouvée modifiée sans que le schémainitial ne soit altéré.

En 1979, l'inventaire des programmes etopérations est présenté dans le Tableau 2.

On voit, par comparaison, que le programme"Evolution des populations animales" s'est scindéen deux selon qu'il s'agit de la faune du sol, "Evo­lution de la biologie des sols", ou des parasitesdes plantes, "Evolution des populations animaleset végétales parasites des cultures".

Un nouveau programme est apparu, "Evolu­tion des populations de grands animaux", prisen charge par les chercheurs de la Mission deCoopération technique de la République Fédéraled'Allemagne (Fgu-Kronberg*, 1979).

Les opérations relatives au climat ont étéentièrement repensées et, d'une activité de ser­vice, on est passé à une recherche originale etbien définie malheureusement non encore solide­ment mise en place.

l Une opération est une unité d'activité scientifique,elle débouche sur un produit homogène et est exécutéepar un ou plusieurs chercheurs et/ou techniciens. Des étu­diants peuvent y être inclus.

Un programme regroupe des opérations liées entreelles par un objectif commun. 11 est en général composéd'opérations simultanées ou échelonnées dans le temps.11 peut n'en compter qu'une seule quand il est dans sa phasede démarrage.

29

Le program me "Evolution de l'emprisehumaine" s'est vu considérablement élargi, commeil le devait (Tableau 3).

Le programme "Evolution de la végétation"a progressé en fonction de l'obtention des résul­tats acquis au fur et à mesure des recherches(Tableau 4).

En 1980, l'opération "Dynamisme internede la forêt" était reprise par de nouvelles recher­ches visant à la mise au point d'un système d'ex­ploitation forestière préservant la richessenaturelle et les potentialités de la forêt (ProjetOldeman-Vooren du Centre Néerlandais) et unenouvelle opération assurée par des chercheursdu Centre ORSTOM d'Adiopodoumé était créée,"Aspects quantitatifs de la reconstitution dela forêt".

Deux nouvelles opéra tions de pédologievoyaient le jour. L'une, dans le programme"Evolution du milieu physique", avec le titre"Recherche méthodologique sur la caractérisationet la représentation des sols en milieu forestier";l'autre dans le programme "Evolution des sols"s'intitulait "Evolution des sols sous recrû forestieraprès mise en culture traditionnelle".

Tous ces différents program mes et opéra­tions ont des liens étroits que matérialise laFigure 4.

LA FORMATION

Une attention toute particulière a été portéeà la formation, qui a toujours été au centre despréoccupations des promoteurs et des exécutantsdu Projet Tar.

L'encadrement des jeunes chercheurs quidépendent de la programmation scientifiquedu Ministère est réalisé à différents niveauxde responsabili tés à l'intérieur du Projet. Laformation a été assurée sous la responsabilitéd'un animateur de programme et en relationétroite avec les chercheurs responsables de l'opé­ra tion, ou d'opérations voisines lorsque le stagiaireétait responsable de sa propre opération.

Cette formation a pris différents aspects:stages de sensibilisation à la recherche

organisés par le Ministère de la RechercheScientifique pour des étudiants désirant s'initierà la recherche. Ces stages sont, en général, decourte durée, un à deux mois, ils ont lieu durantles vacances scolaires;

stages de courte durée, en général moinsd'un an mais quelquefois renouvelés, s'adressantà des chercheurs, ivoiriens <JU non, dans le cadred'une formation universitaire. Ces stages sontessentiellement consacrés à des études de terraindestinées à l'obtention d'un diplôme universitaire(Diplôme d'Etudes Supérieures, Diplôme d'Etudes

Page 30: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

TABLEAU 2. Inventaire des programmes et opérations en 1979.

01 - EVOLUTION DU MILIEU PHYSIQUE

01. Systématique et dynamique des formes durelief

02. Climatologie et pluviométrie03. Echanges radiatifs et bilan énergétique de

la forê t04. Eaux souterraines05. Hydrométrie de surface06. Eau et pédogenèse actuelle

02 - EVOLUTION DE LA VIE DANS LES SOLS

01. Caractéristiques physiques02. Matière organique et éléments mlneraux03. Activités microbiologiques: bactéries

et mycorhizes04. Termites05. Acariens et Collemboles06. Oligochètes07. Diplopodes08. Remontées biologiques

03 - EVOLUTION DE LA VEGETATION

01. Inventaire floristique02. Régionalisation03. Dynamisme interne04. Reconstitution globale05. Adventices

04 - EVOLUTION DES POPULATIONS ANIMALES ETVEGETALES PARASITES DES CULTURES

01. Rongeurs forestiers02. Régimes alimentaires des rongeurs forestiers03. Fourmis terricoles04. Nématodes .05. Prédateurs animaux et régénération des

essences forestières06. Arthropodes07. Pourridiés

Approfondies, etc.). Le sujet répond à une de­mande formulée dans le cadre du Projet. C'estainsi que furent accueillis plusieurs chercheursivoiriens, des chercheurs français, deux ingénieurs­forestiers vénézuéliens et un équatorien;

plusieurs stagiaires du Centre néerlandaisde Recherche en Côte d'Ivoire ont obtenu leurdiplôme à partir de travaux effectués dans leProjet Taï;

en dehors de la formation sensu stricto,on signalera les thèses, de 3ème cycle ou d'état,soutenues tant en Côte d'Ivoire qu'en France;

Enfin, du 14 janvier au 15 février 1980,un cours post-universitaire régional fut organisépar l'Unesco, en collaboration avec le Pnue,le Comité national MAB et le Ministère de laRecherche Scientifique de Côte d'Ivoire.

30

05 - EVOLUTION DES POPULATIONS ANIMALES ET SANTE

01. Chimpanzés02. Autres Simiens &t Prosimiens03. Arthropodes vecteurs d'arboviroses04. Vecteurs et hôtes intermédiaires divers

d'endémies tropicales05. Virus06. Ectoparasites07. Serpents

06 - EVOLUTION DES POPULATIONS DES GRANDS ANIMAUX

01. Eléphants02. Buffles03. Hippopotames nains04. Céphalophes05. Crocodiles

07 - EVOLUTION DE L'EMPRISE HUMAINE

01. Structures spatiales des Communautés rurales02. L'espace anthropisé préexistant03. Le dynamisme pionnier04. Impact d'une société d'aménagement sur

l'espace rural: l'exemple de l'ARSO05. Les effets de la création de San Pédro et

de son développement sur la structurationde l'espace

06. Etude de la place de Soubré dans la région07. Sensibilisation des populations au problème

de l'environnement08. Contraintes agronomiques dans les systèmes

de culture traditionnels09. Préhistoire: paléoethnologie et paléoécologie

08 - EVOLUTION DU PAYSAGE FORESTIER

01. Unités naturelles géosystématiques et leuragencement dans l'espace

LES BILANS

Les exposés qui vont suivre ne reprennent pasintégralement le découpage de la programmationdu Ministère de la Recherche Scientifique précé­demment relaté. Il nous a paru intéressant deregrouper les résultats des thèmes qui furentles préoccupations majeures du Projet Taï:

Le milieu physique, ses caractéristiquesessentielles au niveau régional ou stationnelen l'absence de toute action humaine importante.Elles sont essentiellement d'ordre climatique,pédologique et hydrologique et correspondenten partie au "potentiel abiotique" de' Bertrand*(1975).

L'homme, sa mise en place et ses activitéspassées, récentes et actuelles. Dans un Projet

Page 31: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

TABLEAU 3. Evolution du programme: "Evolution des populations humaines".

1975 1977 1978 1979

STRUCTURES SPATIALESDES COMMUNAUTESRURALES

ESPACE ANTHROPISEPRE-EXISTANT

-----------------------------------------1.._ FIN

_____________________________________----1.._ FIN

DYNAMISME PIONNIER

EFFETS DES GRA1rJSPROJETSD'AMENAGEMENT

_-==================================Fin de l'étude des

Etrangers

Poursu~te de l'étudedes Baoulé

IMPACT DE L'ARSO ..._

~EFFETS DE LA CREATIONDE SAN PEDRO ------------------------------..-

ETUDE DE LA PLACE .. FINDE SOUBRE

SENSIBILISATION AUPROBLEME DE - - - - - - - - - - --

L'ENVIRONNEMENT

Opération transférée. CONTRAINTES AGRONOMIQUES----------:----:-:-.,----------......- DANS LES SYSTEMES DE ---------------...

Programme d'origine: CULTURES TRADITIONNELSEvolution des sols

Préhis toire:paléoethnologie et

paléoécologie

-------------------------------------------------

MAB, "Homme et Biosphère", on aurait pu s'at­tendre à voir d'abord figurer l'homme, mais lemilieu physique est imposé à l'homme et cetordre nous a semblé plus logique. Les termesde l'activité humaine seront étudiés au niveaude l'utilisation et de l'aménagement de l'espaceà différents niveaux de la région à la communautévilla geoise. Le Sud-Ouest ivoirien ouvert àune colonisation, planifiée ou non, relativementrécente est un terrain de choix pour l'étude des"fronts pionniers" et cet aspect a été privilégié.

Le champ cultivé. Il s'agit là de l'étudede l'agriculture traditionnelle ou agriculturenomade, dans l'un ou l'autre cas, si mal nom mée.Il est inutile de rappeler les polémiques à sonsujet. Notons seulement qu'elle est le résultat

31

d'une connaissance intime du milieu et qu'ellen'est nullement figée, qu'elle profite sans cessed'innova tions, introduction d'outils, de plantes,de techniques. Le choix de privilégier ce typed'exploitation a été fait dès l'origine du Projetpar les scientifiques comme par les autoritéspolitiques. A partir de la connaissance des méca­nismes, il fallait déceler les contraintes et pointsfaibles susceptibles de recevoir, compte tenudes réalités socio-économiques, des solutionscapables de l'améliorer. On notera que c'estcet aspect du Projet qui a réuni le plus de dis­ciplines différentes.

Structure et dynamisme de la végétation. Dansune région entièrement forestière soumise àl'exploitation com merciale des bois, la

Page 32: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tai: recherche et aménagement

TABLEA U 4. Evolution du programme: "Evolution de la végétation".

1975 1979 1980 1983

INVENTAIRE ~.. • FLIONVREINSTTAIQIUEREFLORISTIQUE

STRUCTURE DELA VEGETATION

Résultats disponiblesTransfert aux autres opérations

STOCK ET FLUX" - - ­, , , , ,..

------REGENERATIONDE QUELQUESESSENCESFORESTIERES

DYNAMISME- - - - ~ INTERNE ~

R."n;;'::":"~:f:"iO" ~d'ès p~miers résultats obtenus 1 BIOMASSE

" " 1-_ " 1- ,-- "-

--~RECONSTITUTION_..__--------- ~.RECONSTITUTION

GLOBALE GLOBALE

Mise au point de la méthodologiePLANTES dans la région d'Abidjan et PLANTESADVENTICES ~.._---=.::.:.:..:-=.~~~~..:....-----::.-..:.:-.::..----.ADVENT ICES

application au Sud-Ouest

POURRIDIES---Rattachement à un autre programme--- ...._POPULATIONS ANIMALESET VEGETALESPARASITES DES

CULTURES

REGIONAL l SATION

connaissance de la phytocoenose s'avèrefondamentale pour la compréhension et l'évaluationdes transformations auxquelles elle est soumise.La tentation fut grande, nous l'avons ditprécédemment, d'étudier en lui-même l'écosystèmeforestier naturel. Nous avons toujours tenu àle considérer com me le témoin a uquel on seréfère à tout instant et ceci apparaîtraconstam ment dans ces bilans. Ces résultats quel'on pourrait croire fragmentaires constituentune contribution importante à la connaissancede la forêt Jropicale humide. Le second aspect,non moins important, est axé sur l'étude ducomportement des espèces végétales dont laconnaissance devrait contribuer à promouvoirune silviculture naturelle au sens des forestiers.

La santé humaine. Les perturbations affec­tant la couverture végétale du Sud-Ouest

entraînent ou entraîneraient à brève échéancedes modifications profondes en termes de santérurale. Une attention toute particulière a étéapportée à l'étude du cycle et de la conservationdu virus de la fièvre jaune. Sur d'autres endémiestropicales ou risques divers, les données encorepréliminaires, justifieraient une reprise importantedes recherches.

Le Parc national et la protection de la nature.Si l'étude du Parc national de Taï n'a pas étéau centre des préoccupations du Projet, il estbien évident Que le Parc lui-même est un pôled'intérêt majeur du Sud-Ouest ivoirien. La pré­sentation sera ici quelque peu différente desprécédentes puisqu'elle tiendra largement comptedes résultats de la Mission de Coopérationtechnique de la République Fédérale d'Allemagneobtenus avant même que celle-ci soit intégrée

32

Page 33: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Présentation du projet

EVOLUTION DUPAYSAGE fORESTIER

fIG UnE 4. Liaisons en tre les programmes et les opérations

33

Page 34: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

au Projet Tai. Cette intégration a eu pour effetd'associer aux autres travaux de recherche desétudes particulières sur quelques groupes degrands animaux dont l'intérêt n'est plus àdémontrer.

L'expression cartographique. Il s'agit d'unetentative de synthèse à l'échelle régionale ayantpour ambi tion de décrire et comparer les paysagesà partir d'un ensemble de diagnostics typologiques.Cette démarche sera illustrée de quelquesexemples précis.

Des études non directe ment associées au

Projet Tai, mais effectuées à la Station écologique,ont collecté des données importantes pour laconnaissance de la forêt ; des spécialistesextérieurs, à partir de matériel en provenancede la région de Tai, ont apporté leurs trèsprécieuses contributions. Les références de cestravaux sont données dans la liste bibliographiquedu Projet.

Le dernier point, d'une très grande importance,est celui de la formation. Il a toujours été aucentre des préoccupations des promoteurs etdes exécutants du Projet Tai.

BIBLIOGRAPHIE

AVEN ARD, J-M., 1971. Aspect de la géomorphologie. ln: Lemilieu naturel de la Côte d'Ivoire. Mémoire ORSTOM 50,p. 7-72.

BARRAU, J., 1979. Culture itinérante, culture sur brûlis, cul­ture nomade, écobuage ou essartage? Un problème determinologie agraire. Et. rurales,45, p. 99-104.

BERTRAND, G., 1973. Pour une histoire écologique de laFrance rurale. ln: G. Duby et A. Wallon (Eds), Histoirede la France rurale, l, p. 34-111. Le Seuil, Paris.

CASTRI, F. di; LOOPE, L.P., 1977. Réserves de la biosphère:théorie et pra tique. Nature et Ressources, 13(1), p. 2-8.

ELDIN, M., 1971. Le climat. ln: Le milieu naturel de la Côted'lvoire.Mémoire ORSTOM 50, p. 73-108.

FG U-K RONBERG, 1979. Etat actuel des porcs nationaux dela Comoe' et de Taï ainsi que de la réserve d'Azagny etpropositions visant à leur conservation et à leur dévelop­pement aux fins de promotion du tourisme. III: Parc Na­tional de Tat. Office allemand de la Coopération techni­que, SARL (GTZ), Eschborn/Ts., Allemagne fédérale.

GUILLAUMET, J-L., 1967. Recherches sur la végétation et laflore du Bas-Cavally (Côte d'Ivoire). Mémoire ORSTOM20.

34

GUILLAUMET, J-L., ADJANOHOUN, E., 1971. La végétation.ln: Le milieu naturel de la Côte d'Ivoire. MémoireORSTOM 50, p. 157-263.

N'GUESSAN KANGA, 1976. Le Ministère de la Recherchescientifique en Côte d'Ivoire. Nature et Ressources, 12(2), p. 6-9.

MANGENOT, G., 1955. Etude sur les forêts des plaines etplateaux de la Côte d'Ivoire. Etudes éburnéennes, [FAN,5, p. 5-61 ; et Notices botaniques et itinéraires commen­tés, 8ème Congrès int. Botanique, Paris-Nice,p. 3-56.

PERRAUD, A., 1971. Les sols. ln: Le milieu naturel de laCôte d'Ivoire. Mémoire ORSTOM 50, p. 265-391-

UNESCO, 1979. Ecosystèmes forestiers tropicaux. Recher-ches sur les ressources naturelles. XIV. Unesco, Paris.

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se référera à la liste des publications du Projet enfin d'ouvrage (Annexe 2).

Page 35: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physiqueJean CollinetBruno MontenyBernard Pouyaud

La programmation scientifique du Ministèrede la Recherche Scientifique regroupait sousle titre "Evolution du milieu physique" six opé­rations de recherche destinées à faire le bilandes conditions du milieu physique pré-existantet à en évaluer les modifications sous l'effetdes transformations dues aux activités humaines.

La présentation que nous retenons ici etles fortunes diverses des opérations nous amènentà rassembler les principaux résultats relatifsau milieu physique pré-existant sous la formede trois exposés synthétiques, consacrés, l'unà une présentation bioclimatique générale dusud-ouest ivoirien, et plus particulièrement d~

la région de Tai, l'autre à une étude de la couver­ture pédologique des bassins versants de la stationde Tai, le dernier enfin à une présentation descaractéristiques hydrologiques des rivières dusud-ouest ivoirien et plus particulièrement obtenussur les trois bassins versants expéri mentaux.

DESCRIPTION PREALABLE DE LA GEOLOGIE,DE LA GEOMORPHOLOGIE ET DU RESEAUHYDROGRAPHIQUE

La Côte d'Ivoire appartient à la plate-formeépi -éburnéenne dans le socle de laquelle l'ana­lyse structurale permet de distinguer deuxanciennes chaînes orogéniques superposéesles Libérianides d'âge archéen (3.000.000-2.300.000années) et les Eburnéides d'âge protérozoïqueinférieur (2.300.000-1.700.000 années). LesEburnéides sont partiellement constituées pardes laves et sédiments plus ou moinsmétamorphisés connus dans l'Ouest africain sousle nom de birrimien.

L'ensemble de la Côte d'Ivoire est découpélongitudinalement en éléments structuraux orientésNNE - SSW. Sur la carte de Tagini* (1972) onpeut voir que le sud-ouest ivoirien comportesuccessivement des blocs appartenant aux oro­génies libérienne et éburnéenne Dans le sud-ouest,le métamorphisme a été de basse pression variant

3S

du faciès amphibolite au sous faciès granuliteà hornblende. Les migmatites sont largementreprésentées. Le complexe charnockitique deTabou reste très discret et l'assemblage orogéniquelibérien, représenté par des gneiss, amphibolites,pyroxénites et quartzites ferrugineux, ne subsistele plus souvent que sous la forme de lambeaux.Mais les observations de terrain menées dansle périmètre des bassins versants de Tai se rat­tacheraient plutôt à des roches de type mica­schistes. Le réseau hydrographique, biendéveloppé, exploite les directions structuralesou tcctoniques (failles) de la région. Fortementhiérarchisé dans ses parties aval, ce réseau estrelayé en son amont par un réseau arborescentplus ramifié sans orientation préférentielle dûà une reprise d'érosion moderne par lesravinements.

Les paysages de la région de Taï sont organisésen grands interfluves allongés dont les diversesformes pédomorphologiques par leurs différencespermettent d'appréhender le passage des plateauxsouvent cuirassés du Nord aux classiquesdemi-oranges du Sud de la région.

La couverture pédologique présente desformations anciennes (cuirasses, lithosols, cara­paces) reliques de périodes climatiques vraisem­blablement plus sèches (dernière période "sèche":- 30.000 ans). Ces formations occupent les posi­tions hautes du modelé et s'étagent sur <1euxniveaux successifs. Le plus ancien et le plusdégradé est constitué de quelques sommets nette­ment convexes culminant à 195 m d'altitude.Un second niveau moins dégradé situé à 170m d'altitude environ est soit représenté par despréplats sur les pentes des som mets précédents,soit isolé dans le paysage (som mets plan convexe).Ces formations sont nettement en déséquilibreavec l'altération ferrallitique du climat équatorialactuel. C'est ainsi que la couverture pédologiquerouge kaolinitique s'approfondit, que les cuirassesou carapaces se démantèlént en donnant desnodules observés sur la plupart des som metset en épandage sur les versants.

Page 36: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

Les trois études spécifiques qui suiventpréciseront chacune dans son domaine les résultatsdéjà obtenus.

BIOCLIMATOLOGIE

DETERMINISME GENERAL

Le mécanisme de la circulation climatique at­mosphérique générale en Afrique de l'Ouest esten relation avec la quantité d'énergie solairereçue. Avec le soleil passant au zénithà l'équateur le 21 mars et le 23 septembre, lesrégions tropicales et équatoriales ont, tout aulong de l'année, un bilan radiatif positif. Lestempératures observées restent relativementconstantes d'une année à l'autre. Cet état d'équi­libre provient, au niveau du continent, du transfertdu surplus d'énergie calorifique par les massesd'air.

Dans les régions subtropicales, les massesd'air sont chaudes et généralement sèches. Elles

proviennent de la circulation, à haute altitude,d'un gigantesque flux d'air "jet stream" qui s'écouleà grande vitesse (100 à 200 km h-1 ) au-dessusdes tropiques et qui rabat l'air de haut en bas,créant à basse altitude des zones de haute pres­sion.

Les masses d'air, en s'accumulant au sol,se compriment, se réchauffent et s'assèchent.Elles sont responsables de déserts tropicauxde part et d'autre de l'Equateur. Ces centresde haute pression subtropicale émettent desvents au sol : les alizés boréal (N) et austral(S) qui soufflent vers les zones de basse pression,en particulier vers les zones équatoriales. Ilstransportent avec eux les caractéristiques desécheresse sur une certaine distance. Toutefois,l'alizé austral, en passant sur des étendues océani­ques, se charge au fur et à mesure de vapeurd'eau et, arrivé dans la région équatoriale, l'airest très humide. La convergence des alizés boréal(N) et austral (S) venant des deux hémisphères,explique l'ascension généralisée de l'air au niveaude la zone équatoriale. Le contact entre la

~~18";1E"....,016oK

o-g 14

cQ)

~ 12cco>­o

œ 101---LT"""T--r-T1---r-T1+Tï---r-T1rrTï-rTl-+,...,rrTïrr'-rT-,-rl--'--rT-'--Tï-'--ITTrl:-'--0---'Tl~T';:-~A J A 0 D FA J A 0 D FA J A 0 D FA J A 0 D F A J A OD

--1978----- .....---1979 ......---1980-----1.- ......_--1981 .......---1982--~.-

3

2

EEo 1S?xQ)

::>

a...o-L,r-r-r-r-"'IT.-i~TI-"'IT,..,rr"'-+,.-,-,,-r"'----'--r:r.---J~~:~---r;~:co---t"'I-f~:-'~T~-O;!AJAODFAJAODFAJAODFAJAODFAJAOD

--1978_ .....t----1979 .......---1980 .........---1981-----1..- .......---1982 •

fiGURE 5. Evolution du rayonnement global (moyenne mensuelle) et de la pluviosité cLrantla période considérée pour la région de ToT (d'après Monteny, J983)

36

Page 37: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

M A M J

200

1001

<tE'-E

.5a>::>

10 Cl...DNS 0

1

o ~$'Rayonnement

AJ

•••

FJ

c:a>Ea>c:c:o>-

~ 1000

o.a

-5, 1500

'i.:.,-2000

1

Eu,

FIGURE 6. Moyennes mensuelles du rayonnement global et des précipitations pourla période de 1978 à 1982 à la Station de Taï (d'après f,fonteny, 1983)

1 1 1 1Température maximaleà 2 m du sol sous obri

35

III 30a>ou

0C,

c:a>uIII.~

25'" T,mp'"'''' d

f'"' d, ,,,',a>

ouc: ..cr -<:r -0- -0.. ±l ~r'a> -cr "0cr "0- -<:r-0

~.....t... ••a> .~.,. ··t... ..1··' .' ...•...ou 20 • •~ Indice actinathermiq ue::>

•....

1~ •

'a>a.Ea>

1-J F A S 0 N D

FIGURE 7. Températures minimales et maximales à 2 m (Tm et TM), température du point de rosée (Tr), indiceactinométrique (Ts) pour la période de 1978 à 1982, à la Station de Taï (Monteny, 1983)

3275 0 0 0

.a

0 Humidité Ëminimale 30

c:a>

0 .l a>C> • c:·0 50

c:a>>-

(; • 0

a. • Ea. Tension 28 ::>~ • 0

de vapeur a>0 • =0a. :;a> • a>> 25 a.0 26 0

>

~ a>ou

.~ c:ou 0

"iiiE c:::> 24 a>

l 1-

J F M A M J J A S 0 N D

FIGURE B. Humidité relative moyenne (HRm) et tension de vapeur d'eau moyenne (ë) mensuellespour la période de 1978 à 1982 à la Station de TaT (Monteny, 1983)

37

Page 38: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

masse d'air sec venant du continent et la massed'air humide d'origine océanique appelé zonede convergence intertropicale (ZCIT) n'a pasde limite précise. C'est une vaste zone deconvergence à caractère diffus où les pressionssont basses et instables, l'atmosphère est quasi mentsaturée en vapeur d'eau et la convection thermiqueest généralisée. Les vents y sont faibles etirréguliers. Toutefois, la position des zonesde basses pressions équatoriales est davantagedécalée vers l'hémisphère nord en été en liaisonavec l'importance des masses de terre au nordde l'équateur.

La confluence des alizés de cette zone équa­toriale est compensée par une divergence enaltitude liée aux courants ascendants qu'ilsengendrent. Ces courants, par détente,refroidissent l'air et le rapprochent de son pointde saturation, entraînant la formation de massesnuageuses avec d'importantes condensations,qui entraînent des pluies abondantes souventorageuses.

Le balancement de l'axe terrestre, en relationavec un déplacement apparent du soleil et l'al­ternance des zones de basses pressions équatorialeset des hautes pressions subtropicales induisentun mouvement alterné général de la zone deconvergence intertropicale sur l'ensemble del'Afrique de l'Ouest. Le déplacement saisonnierde la ZClT détermine le climat pour une régiondonnée.

On signalera l'enquête préliminaire effectuéesur les postes et données cli matiques de la régionenvironnant le massif forestier de TaT (Cardon,1978).

LES DONNEES CLIMATIQUES DE LA STATIONDE TAI

Nous distinguerons deux périodes au cours del'année basées sur la répartition des pluies etdu rayonnement solaire, en relation directe avecle mouvement de va-et-vient de la zone de con­vergence intertropicale (Fig. 5, 6, 7,8).

Ainsi, entre novembre et mi-mars la quantitéd'énergie solaire atteignant la région ne représentequ'une fraction de l'énergie solaire extra-terrestre(près de 50 %). Cette atténuation est liée enpartie à la déclinaison solaire, à la présencede vapeur d'eau atmosphérique et d'aérosols:poussières en suspension et nuages de brouillards.S'il y a présence de l'alizé boréal (harmattan),il modifie les conditions climatiques habituelles,en relation directe avec la concentration envapeur d'eau de la masse d'air : les amplitudesthermiques sont plus importantes du faitprincipalement du bilan radiatif nocturne trèsnégatif (Fig. 7). Cette période de novembre

38

à mi-mars se caractérise par la faiblesse dela pluviosité. Les pluies occasionnelles sont trèslocalisées (Fig. 5, 6).

De mi-mars à octobre, le mouvement dela zone de convergence intertropicale vers lenord puis son retour vers le sud entraîne unesuccession de différentes masses nuageuses.Celles-ci, non seulement donnent la pluie, maisoccultent également le rayonnement solairedurant une partie de la journée (64 % de l'énergiesolaire extra-terrestre aux mois de juin, juilletet août). Par ailleurs, l'augmentation de la tensionde vapeur d'eau de l'air au-dessus de la zoneforestière de mars à mai et d'octobre à novembrefavorise la formation de brouillard et de rosée,en relation avec le refroidissement par rayonne­ment (Fig. 3, 4). La température de l'air estsouvent égale à la température du point de roséepeu après le coucher du soleil. Contrairementà d'autres régions du sud-ouest de la Côte d'Ivoire,la répartition moyenne mensuelle inter-annuelledes précipitations ne permet pas de distinguerla "petite saison sèche" intermédiaire situéeen août dans d'autres sites. Seule l'évolutiondu rayonnement global permettrait de la distinguer(Fig. 5, 6).

Compte tenu de la hauteur du couvert fores­tier et de la difficulté de disposer d'appareillagesde mesure à 60 m de haut, une surface de 2 haa été défrichée au sol. C'est à ce niveau quele parc météorologique a été installé (Cardon,1979a).

Nous attirons l'attention du lecteur sur lefait que ces données climatiques représententla résultante des échanges qui se produisentdans une clairière de 2 ha entourée d'une forêtde 50 à 55 m de haut, et qu'elles. ne sont doncpas représentatives ni de la situation climatiquesous forêt, ni de celle régnant au-dessus de lavoûte végétale de la canopée (Photo 1).

L'INTERCEPTION DE LA PLUIE

Lorsqu'on veut réaliser le bilan énergétique oule bilan hydrique d'une forêt on ne saurait ignorerla quantité d'eau interceptée par la végétation.

Un dispositif expérimental de 33 pluviomètreslinéaires a été installé sur trois lignes de Ildans le sous-bois de la forêt à proximité du parcmétéorologique, qui comportait lui-même Ilpluviomètres identiques, à découvert cette fois,étalonnées avec le pluviomètre association. Cespluviomètres furent ensuite permutés succes­sivement avec les trois premières séries. L'expé­rimentation a duré une année (Cardon, 1979b).

La première impression est celIe d'uneextrême dispersion des résultats. Cette dispersion

Page 39: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

Photo 1. Le parc météorologique installé dans une clairière de 2 hectares

est imputable à l'hétérogénéité du couvert végétal,aux imprécisions de lecture des faibles pluies,à la médiocre précision dans le cas de fortespluies et aux différences de précipitations surl'ensemble du dispositif. Les imperfections instru­mentales ont un effet totalement négligeablesur le résultat.

Le Tableau 5 donne les précipitations men­suelles, les quantités interceptées correspondanteset le pourcentage qu'elles représentent.

Les différences inter-mensuelles asseznotables s'expliquent par les conditions de pré­cipitations. Ainsi l'interception mesurée enmars 1979 fut anormalement faible lors de deuxgrosses pluies consécutives, en juin-juillet-août1978 les précipitations sont arrivées sous formede crachins intermittents permettant au feuillagede se ressuyer fréquem ment, ces précipita tionsrestant d'un faible poids dans le total annuel.

Pour remédier à l'imperfection du disposi­tif expérimental, il est possible à partir des infor­ma tions disponibles de proposer un modèled'interception. Seul un modèle logarithmique(Jackson*, 1975) donne des résultats acceptables.S'il est d'une grande simplicité d'emploi et s'ilne nécessite que l'usage d'un pluviographe onse permettra de rappeler que, pour une partau moins, "les modèles ont été appliqués surles données ayant permis de les établir" (Cardon,1979b).

39

DlSCUSSION

L'évolution de certaines caractéristiques desmasses d'air - température, tension de vapeurd'eau - résulte du bilan radiatif de la surfaceet de la répartition de l'énergie absorbée.

En effet, au-dessus de la forêt, le bilanradiatif Rn correspond aux divers échanges parrayonnement se produisant entre la surface fores­tière et l'atmosphère, les apports au systèmeétant positifs, les pertes négatives:

Rn = Rg - Rr + Ra - EoTs 4

Rn : rayonnement net (0,25 IJm < Rn < 100 IJm)Rg : rayonnement solaire global

(0,25 IJm < Rg < 3 IJm)Rr : rayonnement réfléchi par la surface

(0,25 IJm < Rr < 3 IJm)Ra : rayonnement atmosphérique ( >3 IJm)EoTs 4 : rayonnement émis par la surface fores­

tière, fonction de sa température moyenneTs (>3 IJm)

Il ressort de cette équation que le paramètredéterminant du bilan radiatif est le rayonnementsolaire global. Toute variation de ce dernierinfluencera donc les quantités d'énergie absorbéespar le système.

Les varia tions des moyennes mensuelles

Page 40: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tar: recherche et aménagement

TABL EA U 5. Précipitations mensuelles, pluies interceptées et pourcentage d'interceptions sur douze mois, de mai 1978 àavril 1979.

Années 1978 1979Total

Mois Mai Juin Juil. Août Sept. Oc t. Nov. Déc. Jan. Fév. Mars Avr.

Précipi tations (en mm) 221,1 68,8 35,4 29,7 229,8 180,5 47,9 203,6 55,3 21,4 116,7 272,0 1.483,2

Interceptions (en mm) 24,8 18,0 13,8 10,9 28,0 28,5 12,6 14,3 5,9 4,1 8,0 28,9 197,8

Pourcentage Il,2 26,2 39,0 36,7 12,2 15,8 26,3 7,0 10,7 19,2 6,9 10,6 13,3

du rayonnement solaire global peuvent atteindre30 à 40 % (Fig. 6) en relation avec l'état de trans­parence de l'atmosphère et de la déclinaisonsolaire. Les moyennes présentent deux maxima(mars-avril et octobre-novembre) et deux minima(juillet-août et décembre-janvier). C'est laposition de la zone de convergence intertropicale(ZCIT) qui influence les caractéristiques optiquesdes masses d'air:

Dans sa limite australe (décembre-janvier),la ZCIT est caractérisée soit par la superpositiondes deux masses d'air océaniques au sol et conti­nentales en altitude, soit par la présence dela masse d'air continentale. Les refroidissementsnocturnes liés au bilan radiatif (Ra - EoTs 4 <0)de la masse d'air entraînent la condensationde la vapeur d'eau avec formation de brouillardau-dessus des zones forestières et de rosée. Lesmasses d'air continentales sont généralementchargées de poussières et de fumées. Les aéro­sols et brouillards atténuent fortement lesquantités d'énergie du rayonnement solaire arrivantau sol.

Avec la remontée vers le nord de la ZCITc'est l'i mportance de la couverture nuageusequi déterminera la fraction d'énergie transmiseau sol. Les plus fortes valeurs de la transmissionde l'énergie solaire par l'atmosphère ont étérelevées après des périodes d'orages importants(mai et novembre) qui lessivent l'atmosphèrede ses aérosols,

Elles correspondent à 60-62 % de l'énergieextra-terrestre. Les plus faibles valeurs traduisentpar contre l'importance de l'ennuage ment etne représentent que 15 % de la fraction horsatmosphère.

La valeur moyenne annuelle de la quantitéd'énergie solaire atteignant le sol dans la région

40

de TaI représente 41 % de la fraction d'énergiesolaire reçue au sommet de l'atmosphère, com­parée à 44 % pour la région d'Abidjan, 48 % pourKinshasa (Zaj're) et 58 % à Samaru (Nigéria)(Monteny et Lhomme, 1981).

Quant à l'énergie absorbée, Rn, par le système,elle est répartie selon les différents échangesqui s'établissent entre la surface végétale etle milieu:

Rn = LE + S + G + P + l'>S

Rn : rayonnement netLE : flux de chaleur latenteS : flux de chaleur sensibleG : flux conductif de chaleur dans le solP : assimilation photosynthétiqueAS : variation du stock énergétique de la masse

végétale.

Pour une période de 24 h, P et l'>S ont desvaleurs très faibles comparativement aux autrestermes du bilan d'énergie et peuvent donc êtrenégligées.

Le flux de chaleur latente, LE, correspondantaux échanges de vapeur d'eau entre la com munautévégétale et l'atmosphère, influence la concentra­tion de vapeur d'eau de la masse d'air et doncles caractéristiques com me la pression réellede vapeur d'eau et l'humidité relative de l'air.

Le flux de chaleur sensible correspond auxéchanges convectifs de chaleur entre la végéta­tion et l'air et influence donc la températurede la masse d'air. Quant au flux conductif dechaleur dans le sol, il influence la températuredu sol.

Ainsi, la mise en place d'un pa.rc météoro­logique doit tenir compte de ces bilans et de

Page 41: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

CLAIRIERE (2 ho) CLAIRIERE (40 ho)

II>

o.0

36 Ecal

:Joal

28'0:Jala.o>

20 al-0

II>Co

12 ~al

1-

242016

......... :.

128

__. Tension de vapeur d'eau (moyennes)

.....

25

II>

~20

eCl>

CalU

II> 15'al

0>al

-0

Cal

II> 10~.2~

'ala.

~ 51-

4Heures

du point de rosée

II>

[;..0

36 Ecal

:Joal

28=0

30

35

:Jala.o>

20 al-0

II>Co

12 ~al

1-

242016

....... T.empérature

128

30

35

25

II>

~20o0>CalU

,~ 150>al

-0

Cal

~ 10

4Heures

_ Température de l'air

FIGURE 9. Comparaison des températures de l'air (Ta), des températures du point de rosée (Tr) et de la tension devapeur d'eau (e) dans deux clairières de 2 et 40 ha au cours de la journée du 26 janvier 1981

CLAIRIERE (2ha) CLAIRIERE (40ha)

4 8 12Heures

point de rosée __ Tension de•••• _•• Température du

40 Ecal

:Joal

36 =0

~o

..0

~

:Jala.

32 ~al

"UII>Co

28 ;;;cal

1-

242016

vapeur d'eau (moyennes)

II> 30al

-0o0,

35

c~ 25II>

'al

0>al

-0

C 20al

~.2o,t~ 15al

1-

:Jala.

32 ~al

-0II>Co

28 .;;;cal

1-

40 Ecal

::>oal

36 =0

II>

[;..0

2420168 12

de l'air

II> 30al

-0

eCl>

35

~ 25uII>

'~Cl>al

-0

C 20al

al

~~

'ala. 15Eal

1-

4Heures

__ Température

folGURE 10. Id. Fig. 9 au cours de la journée du 6 mars 1981

41

Page 42: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Ta"[: recherche et aménagement

l'importance de l'effet des caractéristiques dessurfaces où s'établissent les échanges.

En effet, globalement, la suppression dela couverture forestière entraîne un changementdes caractéristiques de la surface réceptricequi modifie les bilans:

au niveau des échanges radiatifs, l'albédode la défriche sera plus élevé que celui de laforêt et la fraction d'énergie émise (EoTs 4) parla surface du sol sera plus importante. Lerefroidissement radiatif que cela entraîne provoqued'abondantes condensations de vapeur d'eau (rosée).

au niveau des échanges d'énergie, la déper­dition du rayonnement absorbé se fera principale­ment sous forme thermique (flux de chaleursensible élevé, flux conductif dans le solimportanÜ. Le flux de chaleur latente sera faibleen relation avec le bilan hydrique du sol et ledéveloppement de la couverture végétale dansla défriche.

Ces remarques, concernant les changementssusceptibles de modifier certaines caractéristiquesdes masses d'air prennent une importance parti­culière dans l'échelle plus générale de la région.

Dans ce cadre, il est intéressant de comparerl'évolution de certains paramètres des massesd'air dans la défriche de 2 ha, qui aurait dû fournirles caractéristiques climatiques de la région,avec celle d'une autre clairière dont la super­ficie est d'environ 40 ha. On considérera deuxpériodes distinctes selon les caractéristiquesdes masses d'air:

en janvier, en présence des masses d'aircontinentales (Fig. 9) ;

en mars, avec la présence des masses d'airplus océaniques (Fig. 10).

29 janvier (Fig. 9)La réduction progressive de la température

de l'air (bilan radiatif négatif) dans la clairièrede 2 ha jusqu'au lever du soleil provoque unecondensation de la vapeur d'eau avec formationde rosée entraînant une diminution de la pressionpartielle de vapeur d'eau de l'air (e). L'état d'équi­libre est atteint beaucoup plus rapidement dansla clairière de 40 ha.

La réduction rapide de la pression partiellede vapeur d'eau, observée vers 10 h, provientdu passage des masses d'air continentales au-dessusde la zone forestière. Son maintien au-dessusdu site est temporaire, la poussée des massesd'air océaniques se manifeste dès 14 h, la tensionde vapeur.. d'eau augmente. Quant à la tempéra­ture de l'air, elle est plus élevée de plusieursdegrés dans la petite clairière durant la périodediurne, le flux de chaleur sensible est important;inversement en période nocturne en relationavec le refroidissement radiatif, elle est inférieureà celle de la grande clairière.

42

Mars (Fig. 10)Le refroidissement radiatif nocturne est

ici aussi plus important dans la clairière de 2ha que dans celle de 40 ha avec abondance derosée. L'apport d'énergie solaire le matin provoqueune élévation rapide de la température de l'air,entraînant une évaporation de la rosée, ce quise traduit par une augmentation de la pressionpartielle de la vapeur d'eau. Ce phénomèneest nettement moins marqué dans la grandeclairière en raison de l'importance de la massed'air et des échanges par turbulence existantau niveau de la canopée forestière.

Remarquons la différence dans la diminutionde la te r.Jpérature de l'air vers 12 h : s'il està peine r.Jarqué dans une masse d'air importante,le phénomène est amplifié au niveau d'une clairièrede faible superficie. Les variations de températurede l'air sont en relation directe avec les passagesnuageux. L'occultation de l'énergie solaire inter­vient au niveau des bilans, en particulier au niveaudes échanges d'énergie. La masse d'air n'estplus "chauffée" par le flux de chaleur sensible.Ce phénomène est beaucoup plus amorti dansun grand volume compte tenu de la possibilitéd'homogénéisation des masses d'air par le vent.Il en est de même pour la tension de vapeur d'eaude l'air qui augmente légèrement au cours dela journée dans la grande clairière ce qui estbien différent de ce qui se passe dans la petiteclairière où est situé le parc météorologique.

CONCLUSION

La clairière de 2 ha où est installé le parc météo­rologique agit comme une cuvette où l'effetde serre est très marqué. Dans ces conditions,les données climatiques doivent être considéréescomme valables uniquement pour ce qu'ellesreprésentent et ne peuvent être utilisées à l'échellerégionale (Monteny, 1983).

LA COUVERTURE PEDOLOGlQUEDES BASSINS DE L'AUDRENISROU

Les relevés topographiques des quarante transectsétudiés dans le bassin de l'Audrenisrou seregroupent en six grands types d'interfluves (Fig.11) qui se différencient par leur dénivelée relativeet la forme de leur versant.

Les versants sont, par rapport à la lignede crêtes, presque toujours dissymétrique. Ladistribution des deux grands types de versantsobéit à une règle générale: les versants de "typeconcave" se situent le plus souvent à l'amontdes axes de draînage principaux, ceux de "typeconvexe", généralement plus courts, sont localisés

Page 43: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

VERSANT DE "TYPE CONCAVE" A VERSANT DE "TYPE CONVEXE" B

Bas fond

1

1

1

l ,u~ 0.>

l':;'" ­1 ë!! 5

1

1

1 1

Convexité 1 1

~ 1 1~I

81 1

1 11 1

! 1

11,

Convexité

Variante 1

dans le modelér Replat, convexe

1 ~- concave puis rectiligne

Bas fond Sommet (sI) VersantlI3 1 Sommet (ss) + FP lI3 lI3 1/3

inférieur 1 supérieur médiant inférieur1

1

1

1

1

1

1

1

1

1

1

1

1

1

0.>>no 0.> 1g§c.: ~ 1 l:g,g;" ~ 1 1 CD

~ a 1 .gi~ 1 ~1 ~ 5 Lai ~

I·~·~1 Ense Ilemen t

1avec ou sans

. ravine à l'aval......~

Ilégér _ c6;i~ave

Sommet (si) VersantSommet (ss) + FP 113 1 lI3

i supérieur 1 médiant

1 1

1 1

1

1

1

Convexité

Convexité 1

1

1

1 1

1 1

1 1

1 1

1 1

[1

1

1 1Variante 1 Replat 1

dans le modelé 1 11 0.>1 ~§ I~I

1g~ I~IB ~ 18

V>1..LJ>w-'UJ0::

~V>W>=-'Le..0::Wf­z:

I o.>'e> 0.>

1no":::'~.~

18 à

Bas fond

Versant Bas fond

sup méd inf

1

1

1

l 'u

l 'g;" ~1

-0.> =>- 0

1

11

Sommet (si) Versant

Sommet (SS) + FP lI3 1/3 lI3

supérieur médiant inférieur 1

1 i i 1

1 1

1 1

1

1

Convexité

Bas fond

0.>1

~ l'81 1

IlIlIlIlIl

1

Il

~~:~I~~mseannts Variante 1

~al dans le modele 1 1

R~Convexité -, - ro}--- convexe

--rectiligne: concave

Versant Bas fond

sup méd inl

1 1 1

1 1

~ 1 0.> 1 Convexité~ 1~I 0.>:3 È: Sbu 101'-

u -= 1 ~ (l}

I,~ ~ g~I,~ ::lI Sn_ 0 0.>1 l ,ai ~

I~'?l

_ 1 Ensellement~ avec ou sans

Replat 1 ' ••~avlne a l'aval1····-

rectiligne 1 1 concave

Sommet (sI) Versant

Sommet (SS) + FP lI3 113 lI3

1 Isupérieurl médiant 1 inférieur 1

1 1 1 11 1 1

1 1 1

1 1 1

1 1

1 1

1

Convexi té 1

~I 1~I 18/1IlIlIlIlIlIl

Variante 1 1dans le modelé 1

R~Il1

Convexité rectiligne convexe

Convexité

f­z:w:::i:wf­f­Wz:V>wS Variante~ dans le modelé0::wf-z:

--V>1..LJV>V>

~co~ ConvexilêV>

FIG U" E 11. Les six grands types d'interfluves (Fritsch, 1980)

43

Page 44: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet ToT: recherche et aménagement

::x:lŒX Induration de bas de pente(cuirasse, carapace)

0J' Nodules ou blocs issusdu démantèlementde s indurations de basde pente

Extension du bas fond---.

lATête de thalwegdes confluents d'ordre 1

Extension du bas fond---.ProximitéAudren i srou

lA

Extension latérale du bas fond

Tête de tha Iweg

de l'amont vers l'avalde l'axe de drainage

Proximité confluent

FIGURE 12. Evolution du modelé dans l'espace et dans le temps

44

Page 45: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

soit à proximité de l'Audrenisrou, soit plus àl'amont des principaux axes de drainage maisaboutissent alors à des ravines (Fritsch, 1980).

L'évolution dans l'espace et le temps desbas de versants due pour une grande part à unereprise d'érosion par les ravines, s'accompagned'une évolution des organisations internes dusol, particulièrement celle des indurations (Fig.12).

Les premières reconnaissances pédologiques,effectuées par de Blic, Collinet, Moreau etAsseline en 1976, ont permis de s'assurer del'homogénéité et de la représentativité de lazone d'étude.

Les interfluves atteignent en moyenne 1000 in

d'extension latérale et 40 à 50 m de dénivelée,leur profil est convexo-concave avec des sommetsparfois plans où subsistent quelques lambeauxde cuirasse très fragmentée. Les bas-fondssont plats, larges de quelque 100 à 150 m, maré­cageux et de pente longitudinale faible.

La différenciation séquentielle des solss'y présente de la façon suivante:

du sommet jusqu'à la mi-versant (pentede 0 à 20 %) on trouve sur 70 cm une accurnula­tion gravillonna ire (SO % en volume) dans unematrice argileuse rouge de structure biendéveloppée polyédrique fine à moyenne, de 70à 180 cm on observe des argiles meubles (55à 60 % d'argile) rouges, à structure polyédriqueet grenue fine et très fine ; les altérationsferrallitiques du granite apparaissant vers 180,200 cm et se poursuivant très profondément.Il s'agit de "sols ferrallitiques fortement désaturés,remaniés, modaux" (CPCS*, 1967).

de la mi-versant jusqu'au tiers inférieur,soit sur environ 100, 150 m, et sur des pentespassant de 20 à 5 %, on observe une diminutiondes affleurements gravillonnaires. Ceux-ci serecouvrent de quelque 10, 20 cm de sables argileuxpassant ensuite à des argiles sableuses jaunes.A l'horizon gravillonnaire qui ne fait plus que20, 30 cm d'épaisseur succède un horizonlégèrement tacheté argilo-sableux à argileux(40 à 50 % d'argile). Les phases altéritiquesn'apparaissent que vers 200 cm. Il s'agit de solsferrallitiques fortement désaturés, remaniés,à recouvrement, appauvris (CPCS*, 1967).

du tiers inférieur jusqu'en limite du bas­fond, sur environ 100, 120 m l'horizon gravillon­naire disparaît. Depuis la surface jusqu'à 100cm on découvre des horizons sableux puisargilo-sableux (40 % d'argile) jaune pâle, massifs,à faible porosité fine mais traversés par de grosdrains d'origine biologique. En limite inférieureon retrouve un horizon fortement tacheté ettrès souvent induré en carapace à partir de 120cm. Les altérites sont rarement situées à moinsde 200 cm. Il s'agit de "sols ferrallitiques fortement

45

désaturés, appauvris, indurés" (CPCS*, 1967).les bas-fonds sont occupés par des sols hydro­

morphes minéraux à gley d'ensemble (CPCS*,1967) souvent de textures très hétérogènes (sablesgrossiers blancs à intercalations argilo-limoneusesgrise~).

La surface du sol est plane, à affleurementde gravillons jusqu'à la mi-versant ; à partirde là, un micromodelé plus ou moins ample canalisele ruissellement en chenaux anastomosés dequelque 30 à 50 cm de large et de plus en plusencaissés vers l'aval (10 à 30 cm de dénivelée).

L'étude pédologique de Fritsch (1980) présente,entre autres objectifs, "une méthode de représenta­tion cartographique et de caractérisation des solsfacilement utilisables par les personnes intéresséesau Projet Tai". Les horizons distingués à partirdes descriptions de profil sont regroupés en"volumes structuraux" qui correspondent àl'extension spatiale d'un horizon majeur définipar une association de caractères macroscopiques.

A partir de ces "volumes structuraux", dixensembles sont distingués dont le type de super­posi tion et les caractéristiques respecti vesdéfinissent les unités pédologiques cartographiques.L'ensemble gravillonna ire a une grande importancedans les sols et il en détermine également, dansune large mesure, la possibilité de mise en culture,ses variations dépendent étroitement de la positiontopographique. La dynamique de l'eau dans lesol permet de distinguer deux grands domainesselon que la dynamique prédominante y estverticale ou qu'elle y est superficielle et latérale.

L'HYDROLOGIE

Le Sud-Ouest ivoirien est délimité à l'est età l'ouest par deux fleuves puissants, le Sassandraet le Cavally (Fig. 13). Le Cavally qui prendsa source en Guinée au nord du Mont Ni mbaest long de 700 km et sert de frontière entrele Libéria et la Côte d'Ivoire dans son cours moyenet inférieur. Le bassin versant a une superficiede 28.800 km 2 il Taté, station la plus prochede l'embouchure (60 km). Le cours du Cavallyest haché de rapides, surtout dans son coursinférieur à partir de Taï. Son module moyenannuel doi t être d'environ 600 m 3 ç 1.

Le Sassandra prend sa source beaucoup plusau nord, également en Guinée, et son bassincouvre approximativement 75.000 km 2• A Soubré,le bassin est déjà de 62.000 kmL. Com me leCa vally, le Sassandra se caractérise égale mentpar de très nombreux rapides et petites chutes.Compte tenu cependant de la situation plusnordique du bassin versant à des latitudes déjà sou­daniennes son module moyen annuel est inférieur àcelui du Cavally et n'atteint pas 600 m 3 çl.

Page 46: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

RESEAU HYDROGRAPHIQUE

ET BASSINS VERSANTS

Limites de bassins versants

grands bass ins

- - - petits bassins

o 50 km1 1

FIGURE 13. Le réseau hydrographique du Sud-Ouest ivoirien (d'après Léna, 1979)

46

Page 47: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

Mais ces deux fleuves, qui, lorsqu'ilsparviennent dans le sud-ouest ivoirien, ont déjàdraÎné chacun près de la moitié de leurs bassinsversants, n'e peuvent caractériser pleinementl'hydrologie du sud-ouest ivoirien. A cet égard,la Hana et la Nzé, affluents du Cavally, le Nzo.affluent du Sassandra, ou encore le San pédroou le Tabou, petits fleuves côtiers, paraissentde meilleurs représentants des zones médianes,nord et sud de cette région de la Côte d'Ivoire.

Dans cette même partie centrale les bassinsversants hydrologiques de Taï (1 à 40 km 2) surla rivière Audrenisrou peuvent fournir des ren­seignements intéressants sur l'hydrologie deces régions forestières.

PLUVIOMETRIE ET HYDROLOGIEREGION ALES DU SUD-OUEST

Pluviométrie

Le gradient pluviométrique est très nettementdécroissant de l'ouest vers l'est et, quoique moinsnettement, du sud au nord. Le sud-ouest ivoirienest assez bien encadré par les stations de Tabouau sud-ouest, Sassandra au sud-est, Guiglo aunord, Taï à l'ouest et Soubré à l'est (Tableau6). Ainsi les pluviométries moyennes annuelles(calculées sur des périodes de référence

TABLEAU 6. Pluviométries moyennes annue II es de cinqstations du Sud-Ouest

PluviométrieCoefficient Ecart

Loca lités d' irrégu 1ari té typemoyenne

interannue II e crK3

Tabou 2343 (2,0) 552,5Sassandra 1740 (2,02 ) 349,9Guiglo 1722 1,49 270,0Tai' 1885 1,62 338,0Soubré 1631 1,45 249,7

différentes) sont très significatives. On vérifieégalement que l'irrégularité interannuelle diminueégalement de l'ouest vers l'est et surtout dela côte vers l'intérieur.

Ces précipitations correspondent à une reglmeéquatorial de transition caractérisé par:

une première saison des pluies d'avril à juillettoujours la plus importante;

une petite saison sèche de juillet à septembreplus ou moins bien marquée;

une seconde saison des pluies plus irrégulièrede septembre à novembre;

une grande saison sèche de décembre à mars.Ce climat équatorial de transition s'atténue

vers le nord. Les pluies mensuelles aux stationssuivantes donnent une idée des diverses facettesde cette pluviométrie régionale (Tableau 7).

TA BLEA U 'Z. Pluies mellsuelles moyennes de quatre stations du Sud-Ouest.

Localités Jan. Fév. Mars Avr. Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Déc.

Tabou 53 48 88 134 416 533 156 83 221 203 195 145

Sassandra 23 24 74 104 295 511 157 23 48 100 142 87

Taï 21 65 148 170 216 269 124 132 293 240 108 47

Soubré 33 56 139 166 173 245 107 100 220 191 120 54

TA BLEA U 8. Fréquence d'apparition des pluies jouma lières (hauteur d'eau en mm), n' ayant une probabi lité d'êtredépassée qu'une fois toutes les n années, à Soubré et TaT. Par exemple, à Soubré, il y aurait unepluie de 157,1 mm tous les 100 ans.

Nombre nNbre années

MoyenneLoca 1ités années l/an 1/2 ans 1/5 ans 1/10 ans 1/20 ans 1/50 ans 1/100 ansobserva tions annuelle

Soubré 25 74,7 86,9 103,1 115,5 128,0 144,5 157,1 1631

Tai' 13 88,1 102,6 121,9 136,6 151,4 171,0 185,9 1885

47

Page 48: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï" : recherche et aménagement

TABLEAU 9. Débits moyens mensuels en m 3 S-I,

Rivière Cavally Nzé Nzo Tabou Audrenisrou

Station TaI TaI Guigl0 Yaka Tiéouléoula

Superficie2

13.750 1.240 6.410 810 106en km

Janvier 68,1 9,0 18,4 Il,5 0,157

Février 39,9 5,6 8,4 10,9 0,144

Mars 67,5 13 ,8 10,6 13,5 0,309

Avril 74,9 7,9 15,6 15,9 0,640

Mai 107 12,8 20,7 30,5 1,45

Juin 216 37,1 51,7 74,3 2,88

Juillet 248 44,9 99,4 58,7 1,23

Août 259 35,0 153 31,0 1,37

Septembre 517 86,6 299 29,7 3,07

Octobre 622 97,5 250 41,8 2,93

Novembre 301 37,3 91,0 33,3 1,69

Décembre 160 15,0 42,0 24,5 0,586

Moyenneannuelle

Nbre d'années

224

10

33,7

10

48

88,3

12

31,4

10

1,39

8

Page 49: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

Les stations pluviométriques du sud-ouestivoirien n'ont généralement pas une longue périoded'observation et sont souvent de qualité trèsmédiocre. Aussi ne pouvons-nous présenter derésultats à peu près corrects, en ce qui concerneles hauteurs de pluies journalières de fréquencesdonnées, que pour les stations de Tai et de Soubré(Tableau 8).

Sur la frange littorale (20 km de largeur),il semble que les hauteurs de pluies journalièrespuissent être beaucoup plus élevées mais leurapproche statistique est assez décevante. Onpeut néanmoins avancer des hauteurs de pluiesjournalières décennales comprises entre 200et 230 mm.

Hydraulicité

Nous avons vu que nous disposions de fort peude données statistiques caractéristiques de l'hy­draulicité du sud-ouest ivoirien. Longtempsdifficiles d'accès, les stations n'ont en généralpas de périodes d'observations disponibles suffi­santes ou présentent des relevés ou des étalon­nages déficients. Nous pouvons néanmoins nousappuyer à peu près valablement sur les stationsdu Cavally à Tai, de la Nzé à Tai, du Nzo à Guiglo,de la Tabou à Yaka et de l'Audrenisrou àTiéouléoula. Certains résultats partiels de laHana ou du San pédro complèteront ces résultatssta tistiques.

Ecoulements annuels et répartitions mensuelles

Appartenant tous au reglme équatorial detransition, éventuellement "atténué", ces fleuveset rivières présentent tous deux périodes dehautes ea ux annuelles plus ou moins importanteset séparées selon les années. Les minima sonten général obtenus en février, alors que les maximas'observent en septembre-octobre pour les stationsdu nord ou en juin poür les fleuves côtiers, con­formément à la répartition pluviométrique annuelle(Tableau 9).

Uirrégularité saisonnière est relativementfaible (rapport du débit du mois le plus fort audébit mensuel le plus faible). Elle est de 15,6pour le Cavally à Tai, de 17,4 pour la Nzé à Tai,de 35,6 pour le Nzo à Guiglo, de 3,8 pour le Tabouà Yaka et de 21,3 pour l'Audrenisrou à Tiéouléoula.

A l'examen des résultats figurant dans leTableau 10, on voit que les modules spéCifiquessont plutôt forte:; compris entre 15 à 30 1s-l km- 2 •

Les coefficients d'irrégularités interannuellesK3 sont dans l'ensemble assez faibles, caracté­ristiques de régimes équatoriaux de transition,à l'exception du Nzo où le régime équatorialest déjà nettement atténué.

Comparés aux pluviométries moyennes surles bassins versants correspondants, ces modulesspécifiques conduisent à des déficits d'écoulementde l'ordre de 1500 à 1600 mm par an qui traduisentl'influence déterminante de l'omniprésente forêtéquatoriale sur l'ensemble de ces bassins.

TABLEAU 1O. Ecoulement annuel. (Module: débit moyen journalier annuel; K3 : rapport valeur décennale humide/valeurdécennale sèche)

Module annuel Coefficient Module LameDéc. Inter- Déc. Ecart de irrégu- spéci- écoulée

Rivière Station sec annuel hum. type variation larité fiQue inter-

m 3 s-I m3 çl m3 çl m j s-I Cv K3 inter- annuelleannuel mm an- 1

1s-I km 2

Cavally Taï 13O 224 310 77 0,343 2,4 16,3 514Nzé Taï 15 34 55 14,5 0,426 3,6 27,4 865Nzo Guigl0 30 88 15O 39,0 0,443 5,0 13,8 435Tabou Yaka 19 31 45 9,4 0,301 2,4 38,8 1.207Audrenisrou Tiéouléoula 0,58 1,4 2,2 0,48 0,342 3,7 13,1 416

Les débits de crues

Nous rappellerons les débits de crues du Cavallyet du Sassandra, quoique ces débits soient enfait constitués en grande partie hors de la régionqui nous intéresse, où seuls les débits de cruesdu Nzo et du Nzé sont assez connus pour permettreune étude statistique.

49

On peut voir (Tableau 11) que si l'irrégularitéinterannuelle est faible 0,5 à J), les débits spé­cifiques des crues annuelles médianes évoluentde 70 à 80 1 s-l km- L pour les bassins du Cavallyet du Nzo à plus ùe 130 1 s-l km- 2 pour les bassinsmoyens entièrement compris dans la zone dusud-ouest.

Page 50: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

TABLEAU 11. Crues

Débit de crue m3 S-l Débit spécifiqueen année 1 çl km 2 en année

Rivière Station Déc. Médiane Déc. Déc. Médiane Déc. K3sec hum. sec hum.

Cavally Taï 500 800 1250 36,4 58,2 90,9 2,5Nzé Taï 87 170 270 70,1 137,0 218,0 3,1Sassandra Guessabo 1100 1500 1900 31,8 43,5 55,0 1,73Nzo Guiglo 300 480 620 47,0 75,0 97,0 2,06

Débitcrue

centenna lem3 çl

(1700 )(420 )25001100

Surfacedu bassin

versanten km2

13.7501.240

35.4006.410

TABLEAU 12. Etiages

Etiage m 3 s-I Etiage spécifique Surfaceannée 1 s-I km 2 en année du bassin

Rivière Station Déc. Moyenne Déc. Déc. Moyenne Déc. K3 versantsec hum. sec hum. en km 2

Cavally Taï 3,8 12,8 30,0 0,27 0,93 2,18 7,9 13.750Nzé Taï 0,30 1,04 1,80 0,24 0,84 1,45 6,0 1.240Sassandra Guessabo 16,0 32,0 50,0 0,45 0,90 1,41 3,1 35.400Nzo Guiglo (0,4) 2,6 5,7 (0,07) 0,40 0,69 (14,0) 6.410

Les débits maxi ma observés sur les rivièresdu sud-ouest, pendant des données encore tropcourtes pour permettre une étude statistique,donnent des modules spécifiques de crues quipeuvent être beaucoup plus élevés. C'est ainsique l'on note:

90 1 çl km- 2 pour la Hana à Niébépour 4230 km 2

98 1 s-I km- 2 pour le San pédro à San pédropour 3300 km 2

395 1 çl km- 2 pour le Tabou à Yakapour 810 km 2

Dans le cas particulier du San Pédro, mieuxconnu par une étude hydrologique particulière,on peut estimer la crue médiane à 315 m 3 çl(05 1 çl km- 2 ) et la crue décennale à 440 m 3çl (133 1 çl km-2).

Les tarissements et les étiages

Le Sud-Ouest ivoirien est assez arrosé (et lasaison sèche en général trop courte) pour queles rivières drainant les bassins versants suffi­sants soient permanentes. Avec les mêmesréserves que précédem ment sur la représentativité

50

du Sassandra et même du Cavally, nous avonsrassem blé quelques données dans le Tableau12. Les étiages moyens sont donc compris entre1 et 0,4 1 çl km- 2 , avec un coefficientd'irrégularité K3 nettement plus élevé traduisantl'influence de la durée de la saison sèche trèsvariable d'une année à l'autre en climat équatorialde transition.

Nous avons relevé pour quelques rivières,à la période d'observation trop courte pouralimenter une étude statistique, les étiages absolusobservés à ce jour:

Hana à Niébé 0,67 m3 çlsoit 0,161 çl km- 2 pour 4230 km 2

San pédro à San pédro 0,80 m3 S-l

soit 0,241 çl km- 2 pour 3300 km 2

TabouàYaka 3,50m 3 çlsoit 4,321 çl km- 2 pour 810 km 2

Le cas de la Tabou est donc très particulieret caractéristique de l'abondance pluviométriquede cette extrême pointe sud-ouest de la Côted'Ivoire.

En résumé on peut dire qu'à part le Cavallyet le Sassandra qui sont maintenant relativementbien connus, il n'en va pas de même de nos con­naissances sur le reste du réseau hydrographique

Page 51: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

Photo 2. Station de jaugeage aménagée sur un affluent de l'Audrenisrou, bassinnO 1 ; on distingue le déversoir en V, l'échelle li mnimétrique et leli mnigraphe à flot teur

Photo 3. La station de jaugeage aménagée du bassin nO 2 ; vue extérieure duchenal d'écoulement avec accès à la plateforme de lecture

51

Page 52: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TM: recherche et aménagement

TABLEAU 13. Ecoulements mensuels

Bassin 1 - Année 1980

Paramètres Jan. Fév. Mars Avr. Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Déc.

Pm 45,0 89,8 238,9 161,5 270,0 146,2 165,2 223,8 36i,3 173;5 86,4 41,2

He 7,1 6,4 32,6 29,5 64,5 47,2 33,5 75,2 137,4 54,5 35,5 14,5

Ke 15,8 7,1 13,6 18,3 23,9 32,3 20,3 33,6 38,0 31,4 41,1 35,2

Hr 0,8 2,5 21,3 17,0 37,3 15,9 15,7 30,2 75,2 18,3 6,4 2,0

Kr l,Il 2,8 8,9 10,5 13,8 10,9 9,5 13,5 20,8 10,5 7,4 4,9

Hb 6,3 3,9 11 ,3 12,5 27,2 31,3 17,8 45,0 62,2 36,2 29,1 12,5

Kb 14,0 4,3 4,7 7,7 10,1 21,4 10,8 20,1 17,2 20,9 33,7 30,3

0 37,9 83,4 206,3 I:'~,o 205,5 99,0 131,7 148,6 223,9 119,° 50,9 26,7

Bassin 2 - Année 1980

Paramètres Jan. Fév. Mars Avr. Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Déc.

Pm 23,8 65,4 228,1 182,9 264,5 149,8 170,9 225,1 388,8 179,3 68,4 39,0

He 11,° 7,3 29,7 31,7 58,1 52,5 42,1 83,4 171,7 76,7 36,3 22,2

Ke 46,2 11,2 13,0 17,3 22,0 35,0 24,6 37,1 44,2 42,8 53,1 56,9

Hr 0,4 1,8 16,3 15,6 27,4 11 ,8 14,1 19,8 85,0 19,6 2,0 1,4

Kr 1,7 2,8 7,1 8,5 10,4 7,9 8,3 8,8 21,9 10,9 2,9 3,6

Hb 10,6 5,5 13,4 16,1 30,7 40,7 28,0 63,6 86,7 57,1 34,3 20,8

Kb 44,5 8,4 5,9 8,8 Il,6 27,2 16,4 28,3 22,3 31,8 50,1 53,3

0 12,8 58,1 198,4 151,2 206,4 97,3 128,8 141. 7 217,1 102,6 32,1 16,8

Bassin 3 - Année 1980

Paramètres Jan. Fév. Mars Avr. Mai Juin Juil ~ Août Sept. Oct. Nov. Déc.

Pm 37,4 64,3 255,1 173 ,4 255,6 158,9 179,3 230,8 387,7 171,4 82,5 33,0

He 9,4 5,0 31,7 30,2 51,6 40,0 80,0 166,3

Ke 25,1 7,8 12,4 17,4 32,5 22,3 34,7 42,9

Hr 0,6 1,2 18,8 14,9 12,4 17,4 18,7 84,1

Kr 1,6 1,9 7,4 8,6 7,8 9,7 8,1 21,7

Hb 8,8 3,8 12,9 15,3 39,2 22,6 61,3 82,2

Kb 23,5 5,9 5,1 8,8 24,7 12,6 26,6 21,2

0 28,0 59,3 223,4 143,2 107,3 139,3 150,8 221,4

52

Page 53: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu physique

du sud-ouest. Cela est dû bien naturellementà l'isolement de cette partie de la Côte d'Ivoirerestée jusqu'à une époque récente inaccessibledurant une partie importante de l'année. Ledésencla vement du sud-ouest ivoirien permettramaintenant d'améliorer considérablement notreconnaissance hydrologique de cette région.

LES BASSINS VERSANTSHYDROLOGIQUES DE TAT

Dans le cadre du Projet Taï, la section hydrolo­gique du Centre ORSTOM d'Adiopodoumé instal­lait, à partir de 1978, un dispositif de bassinsversants expérimentaux et représentatifs, des­tinés à évaluer les effets des transformationsde l'écosystème originel sur les phénomènesd'écoulement et d'érosion. Ce dispositif comprendun grand bassin versant représentatif de 40 km 2 ,

aux résultats extrapolables à la région, et deuxpetits bassins versants expérimentaux (1,4 et1,2 km 2) susceptibles de mettre en évidenceles modifications du milieu dues à la déforesta­tion. Ce dispositif complète à une échelle plusgrande celui mis en place par la section de pédo­logie (parcelles d'environ 250 m 2 et bassinsversants de 3 et 7 ha), permettant ainsi la mesuredes phénomènes sur une large gam me de surfaces(Photos 2 et 3).

Un protocole d'essai avait été adopté, quitenait compte de la nécessité d'entreprendred'abord des recherches comparatives sur lesbassins expérimentaux afin de caractériser lesphénomènes dans l'écosystème originel. A cettefin une étude préliminaire a été effectuée pendantdeux ans sous forêt naturelle. Cette phase de"calibrage" a permis de définir l'aptitude auruissellement de chacun des bassins.

Les résultats complets des mesures faitessur ces bassins figurent dans les publicationscitées en annexe. Nous présentons toutefoiscertains résultats synthétiques à titre indicatif.

Ecoulements mensuels et annuels

Dans le Tableau 13 figurent les valeurs en mmou en % des paramètres suivants:

Pm Pluie moyenne sur le bassinHe Lame écouléeKe Coefficient d'écoulement en % == He/PmHr Lame ruisseléeKr Coefficient de ruissellement en % == Hr/PmHb Lame correspondant à l'écoulement de baseKb Coefficient d'écoulement de base en %

= Hb/PmD Déficit d'écoulement = Pm - He.

53

Ces résultats, complétés de ceux des annéesprécédentes, ont permis de mettre en évidenceune corrélation entre les lames écoulées mensuelleset la pluviométrie moyenne mensuellecorrespondante. Dans le cas du bassin 1, maisaussi ces bassins 2 et 3, il existe deux corrélationsdistinctes pour les pluies mensuelles inférieuresou supérieures à un seuil compris entre 250 et280 mm.

Parmi les facteurs correctifs traduisantle mieux l'état d'humectation des sols, c'est lapluviométrie cumulée des deux mois précédantle mois étudié qui permet la meilleure correction.Il en va de même pour la lame ruisselée et l'écoule­ment de base qui dépendent aussi de la pluvio­métrie mensuelle, corrigée par la pluie cumuléedes deux mois précédents.

Analyse du ruissellement

L'étude du ruissellement a été faite sur les cruesindividualisées des trois bassins versants.

Une première étude a permis de définirles précipitations limites des trois bassins quel'on peut définir comme la hauteur de pluie qu'uneaverse doit dépasser pour qu'il y ait ruissellement.Cette pluie limite est bien sûr fonction de l'étatd'humectation initial du sol, que l'on peut carac­tériser par le débit de base initial au début del'averse. On peut remarquer que si les pluieslimites sont fortes sur les sols secs, elles diminuenttrès rapidement, particulièrement sur les bassins2 et 3, mettant ainsi en évidence une aptitudede ces sols à se saturer très vite.

Les lames ruisselées de l'ensemble des cruesqui ont donné lieu à un ruissellement supérieurà 1 mm ont été étudiées en fonction de la pluiemoyenne correspondante. Une dispersionimportante des points apparaît autour d'une courbemoyenne. Le débit de base initial Qo, quireprésente l'état d'humectation des sols, a étéutilisé là encore corn me facteur correctif. Cettecorrection permet de resserrer de façon assezsatisfaisante les points représentatifs des cruesnotamment en début de saison des pluies.

Nous donnons ci-joint à titre indicatif lesgraphes des relations lames ruisselées/pluiesmoyennes et coefficient de ruissellement/pluiesmoyennes et de leur corrélation grâce auparamètre Qo pour le bassin 1 (Fig. 14, 15, 16,17). Les bassins 2 et 3 ont également donnédes résultats assez satisfaisants.

Comparaison entre les bassins 2 et 3

On peut noter toutefois une aptitude auruissellement du bassin 3 nettement moins forte

Page 54: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Hr mm

40

30

20

10

10 25

Le Projet Taï": recherche et a 'menagement

12

442329

~45

175

o

~52

.1979

01980

Pmmm

FIGURE 14. Tor: bassin 1 - R 1 .e ollOn lame ruisselée-pluie moyenne

54

Page 55: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

V1V1

-20

o 250 500 7fI:J1000;--------:~--

12fI:J

.1979

01980

1500

00 I/s

FIGURE 15 -• TQl . b. assin 1 - Correction de la 1orne ruisselée en {onction du d' .eblt initial

Page 56: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Pr .oJet Ta··'1 • recherche et 'amenagement

.1979

01980

~52

50

21

25

FIGURE 16. T.. 75" . ",,'" 1 • . Pm mm

Varwtion de la 1arne ruisselée corrig'ee en {onction de la .pluIe moyenne

56

13

. ~.~ ~..

3 •

~' ~"~O•• ~~"

"D~." ·0 00~\~ " ~ ..~.,.-00 ~~~~~.~~ .... ~~~ ..~ n~=---...:.~......•:==~ 68 47 '59 66 22

Page 57: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le milieu phys'lque

Pmmm

.197901980

o

"" 52

l ï•

5025

FIGURE 17. T,"" 751 • bassin 1 - .Varzation du coefficient de r .Ulssellement en fane tian de la .plUIe maye

57 '"

0--

Page 58: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

que celle du bassin 2 pour les faibles valeursde Pm. Cette différence a tendance à s'atténuerquand Pm augmente. Il semblerait même quepour les fortes valeurs de Pm (Pm > 100 mm)le bassin 3 ruisselle un peu plus que le bassin2.

Des corrélations ont donc été établies entreles ruissellements des bassins 2 et 3 :

Au niveau de l'averse

Pour Pm < 50 mm Hr BV2 = 1,215 Hr BV3 + 1,627Kr BV2 = 1,017 Kr BV3 + 6,791

Qo = 20 1 S-l Hr BV3 = 0,823 Hr BV2 - 1,336Kr BV3 = 0,982 Kr BV2 - 6,655

Pour Pm > 50 mm Hr BV2 = 0,887 Hr BV3 + 4,458Kr BV2 = 0,720 Kr BV3 + 11,548

Qo = 20 1 s-l Hr BV3 = 1,127 Hr BV2 - 5,019Kr BV3 = 1,389 Kr BV2 - 16,033

Pour comparer exactement lescaractéristiques du ruissellement de ces deuxbassins, il a fallu les ramener à une même humiditéinitiale des sols, c'est-à-dire à un même Qo.Nous avons choisi une valeur moyenne de Qoégale à 20 1 S-l et effectué les correcti()nsnécessaires faisant apparaître une doublecorrélation pour les valeurs de Pm inférieureset supérieures à 50 mm.

Au niveau des moyennes mensuelles

Les 17 mois d'observations communes permet­tent de dégager une corrélation unique entreles coefficients d'écoulement ou les coefficientsde ruissellement des deux bassins qui ont étépréférés aux la mes ruisselées pour s'affranchirde l'influence possible de pluviométries mensuellesdifférentes.

Ke BV3 = 0,882 Ke BV2Ke BV2 = 1,134 Ke BV3

Kr BV3 =0,953 Kr BV2Kr BV2 = 1,050 Kr BV3

Hydrogramme unitaire

L'hydrogramme unitaire est l'hydrogramme ré­sultant d'un ruissellement généralisé et homogènedu bassin à la suite d'une averse homogène etde courte durée. A partir des différentshydrogram mes uni taires, on peut reconstituerun hydrogramme unitaire type caractéristiquedu bassin qui permet, par affinité, translationet composition, de reconstituer les crues nonunitaires observées sur le bassin et de construireles hydrogrammes correspondants à des aversesde différentes récurrences.

Par cette méthode sont déterminés les hydro­grammes unitaires des trois bassins versantsde Tai:

BV1 BV2 BV3

Hr/T'lm 1 1 1Vr/m 3 37.750 1170 1426Qmax 1çl 841 161 157Tm/h/mm 10.00 1. 30 2.00Tn/h/mm 26.00 5.45 6.30

qui, compte tenu des valeurs de l'averse de récur­rence décennale par exemple, parmettent lecalcul des débits de crues de récurrence décennale.

CONCLUSION

Les données de base sur l'hydrologie de surfacede trois bassins représentatifs en conditionsnaturelles, c'est-à-dire non modifiés par l'actionhumaine sont actuellement réunies.

BIBLIOGRAPHIE

GI'CS, 1967. Classification des sols. ENSA-Grignon. 87 p.multigr.

JACKSON, I.J., 1975. Relationships between fain fall para-meters and interception by tropical forests. Journal ofHydrology, 14 : 215-238.

TAGINI, B., 1972. Carte géologique de la Côte d'Ivoire. In:Atlas de la Côte d'Ivoire (Carte A2). ORSTOM-IGT,Abidjan.

58

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se référera à la liste des publications du Projet en find'ouvrage (Annexe 2).

Page 59: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humajnesPhilippe Léna

AVERTISSEMENT

Les recherches en sciences humaines au seindu Projet Tai avaient pou:, but d'analyser lestransformations sociales et économiques en coursdans la région du Sud-Ouest, afin d'en déterminerles modalités et l'intensité. L'arrivée de nombreuxim migrants, la transformation de l'économieautochtone, la mise en place de grandes plantationset de projets d'aménagements officiels conduisaientà privilégier les dynamiques par rapport auxstructures, l'évolution plutôt que lefonctionnement. Chaque discipline a conduitses recherches selon ses propres méthodes,l'intégration étant réalisée au niveau des thèmesde recherche, choisis en com mun pour leurcohérence et leur complémentarité. On peutdire cependant qu'il y a eu un accord tacite pourrejeter certaines approches théoriques de plusen plus largement utilisées dans les vastesprogrammes pluridisciplinaires. Nous voudrionsjustifier ce choix en exposant succinctementles raisons qui nous ont fait préférer une approcheapparemment plus classique. Nous nous limiteronsà critiquer les écoles qui ont le plus d'influenceactuellement en sciences sociales pour tout cequi touche au problème des rapports entre lessociétés et leurs milieux.

Bien qu'elle cherche à comprendre la société,son histoire (d'un point de vue souvent évolution­niste) et les rapports entre les hommes, l'écologieculturelle part de ce qu'elle considère com mele pivot central de la société (le "cœur culturel")c'est-à-dire tout ce qui, au sein de la culture,est lié à la reproduction matérielle du groupeet donc à son adaptation à l'environnement danslequel il vit. Un trait culturel n'est maintenuque parce qu'il présente un avantage adaptatif,soit directement (technique agricole), soit indi­rectement (organisation sociale), et contribueà conserver un équilibre entre la société et sonmilieu.

Cette approche devrait permettre de saisirles éléments forts des systèmes de production

59

et par conséquent les problèmes liés à l'adaptationd'un groupe étranger à un milieu donné ou ceuxqui proviennent de l'introduction d'innovationséconomiques et sociales (comme c'est le casdans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Maispour pouvoir affirmer que tel ou tel trait estadaptatif il faut, d'une part, comparer plusieurscultures possédant le même trait dans des envi­ronnements semblables et, d'autre part, queces cultures soient comparables du point de vuede leur niveau d'intégration socio-culturel(Steward*, 1963). On aurait en effet beau jeude montrer, comme le fait d'ailleurs le fondateurde l'école lui-même, que certains groupes ontchangé d'organisation socio-politique sans changerde mode de subsistance (ibid.), ou que dans desenvironnements semblables des cultures se sontdéveloppées de façon différente. Ceci dépassaitnotre projet. Certes, l'écologie culturelle a connudes succès remarquables qu'il convient de saluerau passage. Elle pose cependant un certain nombrede problèmes, et tout d'abord celui des variablesà prendre en compte. Steward défend l'idéequ'il ne faut prendre en compte que les traitsde l'environnement qui sont pertinents. Ainsi,des sociétés de niveau technologique comparablepeuvent avoir des organisations sociales similairesdans des environnements très différents selonle type de gibier chassé (isolé ou en troupeau;migrateur ou non, etc.). Un seul trait del'environnement paraissant responsable du moded'organisa tion sociale (ibid.). Le problème estcependant plus complexe lorsqu'il s'agit de sociétéspaysannes.

Etant donné qu'il est pratiquement impossibled'analyser tous les aspects du milieu et de laculture, il y aura toujours une part d'arbitrairedans la désignation des faits culturels primairesou secondaires, ceux qui seraient déterminantset les autres. Ainsi Rappaport* (1968) a montrél'importance des rituels religieux pour le maintiend'un équilibre entre une société et son milieu;ceci est un aspect de la culture que l'écologieculturelle ne prenait pas en compte. D'autre

Page 60: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

part, comme le soulignent Vayda et Rappaport*(1968), même si la méthode comparative relèvedes coïncidences, le problème de leur interpré­tation reste posé : est-ce le trait culturel quia déterminé un certain mode d'adaptation oul'inverse ? Il s'agit en fait d'une relation (ibid.).Mais la principale faiblesse de la théorie nousparaît être ailleurs. Raisonner en termes d'adap­tation présente le vice de toute explication aposteriori et apparaît de surcroît tautologique:"Dès qu'une société existe, elle fonctionne, etc'est une banalité que de dire qu'une variableest adaptative parce qu'elle a une fonction dansun système" (Godelier*, 1974). La démarcheprésente un caractère réducteur en ce qu'ellene rend pas compte de la complexité des rapportssociaux et de la place des différentes structuresau sein du système social. Les aspects adaptatifs(du point de vue de l'environnement) sont, certes,très importants mais le fait qu'ils "fonctionnent"ne préjuge en rien de leur origine ni de leur lienavec le reste de la structure sociale. Mettrel'accent d'emblée sur l'adaptation risque de fairepartir l'analyse sur des bases non essentielles,l'explication de la société, dans sa structurecom me dans sa durée, pourrait bien être ailleurs.Dans ce cas l'approche des rapports société­environnement s'en trouverait modifiée. L'éco­logie culturelle a eu cependant l'i mmense mérited'en finir avec les interprétations linéaires desrela tions société/environnement (déterminisme,possibilisme) et d'introduire une vision "écologi­que", plus complexe, où l'interdépendance desfacteurs devient l'objet d'une analyse approfondie.

Nous ne parlerons guère de l'ethno-écologiedont l'apport est de toute façon indispensable,tant au point de vue linguistique/taxonomiqueque pour l'étude des pratiques. Son seul défautest de se 'li miter à ce que la société en questionpeut dire de son propre vécu. Le regard extérieur,la connaissance scientifique du milieu sont toutaussi importants et une approche pluridisciplinaire,bien conduite, doit pouvoir remédier à cettecarence.

L'analyse en termes de systèmes peut donnerl'illusion d'être la panacée pour traiter les thèmescomplexes à caractère pluridisciplinaire. Lavolonté d'aborder le sujet de façon globale, enprivilégiant l'interdépendance des différentséléments, leurs relations, devrait permettred'élaborer des modèles suffisamment fidèlespour détecter les déséquilibres actuels ou pré­visibles ainsi que les solutions à apporter. Unesophistication de la même approche serait larecherche des modes de transformation du systèmedans le temps, ce qui permettrait en principed'échapper à une vision trop étroitementmécaniste-fonctionnaliste.

Dans la même veine, nous trouvons l'anthro­pologie écologique qui représente une tentative

d'intégrer les recherches anthropologiques àcaractère écologique au cadre théorique de l'éco­logie générale (Vayda et Rappaport*, 1968).Les faits de culture, sous leur aspect adaptatif,sont alors considérés com me des traits particuliersdu comportement animal permettant une meilleureadaptation. L'histoire, qui avait encore quelqueplace au sein de l'écologie culturelle, tend icià disparaître. Cette approche revient à refusertoute singularité à une science de la culture,mais aussi à nier l'existence d'un processushistorique anthropologique autonome Wieneret Robkin*, 1978). Là encore, comme pourl'analyse systémique, le danger est de se laisserentraîner à un positivisme par trop réducteur.On est conduit à prendre en c-ompte essentielle­ment les données sociales qui se traduisent pardes effets quantifiables, laissant de côté lesrapports de force, les stratégies, les enjeux,etc. Cette approche nous conduit en fait à uneécologie de la population. En effet, la nécessitéde prendre en compte les seules données objec­tives et quantifiables impose de ne pas fairedes cultures l'objet de l'analyse, mais de considérerdes populations, des groupements d'êtres concrets,car ce sont ces derniers qui interfèrent avecle milieu (Vayda et Rappaport* 1968). Outreles problèmes théoriques et épistémologiquessoulevés par ce type d'analyse, on se heurte icià la difficulté méthodologique d'assigner desli mites à une population vu que l'échange(aujourd'hui le marché) est omniprésent et enaugmentation constante. Les approches"écologiques" à prétention globalisante semblentdonc ne pouvoir s'appliquer avec quelque succèsqu'à de petits groupes isolés dont les échangessont peu développés.

POUL" Vayda et Rappaport* (1968) le principed'économie doit conduire à utiliser les mêmesprincipes et les mêmes concepts en anthropolo­gie qu'en écologie animale et végétale. Cependantil ne s'agit pas là d'une sorte de méta-langagequi permettrait de rendre compte de deux proces­sus différents en préservant l'autonomie de chacunmais bien d'ull glissement sémantique, d'uneannexion des sciences anthropologiques par levocabulaire et les concepts des sciences biolo­r,iques.

Comme le souligne Spooner* (1982) à proposdu concept d'adaptation, nous ne savons toujourspas pourquoi les sociétés humaines s'adaptentou ne s'adaptent pas et dans ces conditions, leterme "adapta tion" issue des sciences biologiquesest plus gênant qu'autre chose. Nous ne voyonspas, en effet, l'intérêt qu'il y aurait à "biologiser"le vocabulaire afin de rendre l'approche homogène.On court le risque d'une perte de sens d'un côtésans pour autant gagner en pouvoir explicatif.Cette démarche ne facilite pas non plus unevéritable intégration des disciplines car elle

60

Page 61: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

laisse s'instaurer un flou conceptuel qui a pourrésultat d'émousser la pertinence des probléma­tiques. Ainsi., au terme d'adaptation, nous pré­férons celui de "stratégie" qui a le mérite defaire référence à un sujet, des forces, des intérêtset des processus sociaux identifiables, suscep­tibles d'intégrer et de dépasser largement ceque l'on entend habituellement par "adaptation".A celui de "population" (qui ne fait souvent réfé­rence qu'au nombre, d'où la dérive vers des étudesde "capacité de charge", etc.), nous préféreronscelui de société qui inclut le genre de vie, laculture, et c'est bien cette dernière, plus encoreque les caractéristiques numériques, qui modèleun paysage. Certes, l'augmentation du nombredes hommes modifie le genre de vie, mais pasde façon mécanique.

Les quantifications et les bilans réaliséspar une approche écologiste trop positive sontsouvent voués à l'échec dans leur tentative decomprendre les articulations déterminantes d'unesociété ; ceci est vrai également de ce que l'ona coutume d'appeler "l'économisme vulgaire".Il apparaît indispensable d'étudier ce que leshommes pensent de leurs problèmes, commentils les vi vent et les ressentent car c'est à partirde là qu'ils se déterminent et non en fonctiond'une vérité scientifique abstraite qui peut êtresensiblement différente (cf. par ex. Johnson*,1982). Louable effort pour aborder le complexe,la théorie des systèmes, l'écologie de la population,l'anthropologie écologique ont souvent l'effetinverse du fait qu'elles ne peuvent intégrer lecorpus des hypothèses et théories de chaquediscipline mais seulement le squelette, les effetsconcrets, afin de permettre l'intégration desdifférentes approches qui se trouvent, de cefait, coupées de leur champ interprétatif propreet intégrées à un ensemble dont la théorie, ilfaut bien le dire, est encore loin d'être au point.

D'autre part, "les enchai'nements complexesde causes et d'effets liés aux activités humainesn'ont jamais été contenus dans les limites d'unécosystème" (Spooner*, 1982). Les relationssociétés/environnements dépendent de plus enplus de forces sociales qui échappent aux sociétéslocales (internationalisation du marché, accultu­ration, etc.). Si l'on veut aller au fond des choses,on est obligatoirement conduit à prendre encompte de plus en plus de variables exogènes,ce qui a pour effet de faire éclater le systèmeétudié et de repousser ses limites théoriquesà l'infini. Nous avons vu par ailleurs la nécessitéd'intégrer des variables non quantifiables. Cesdeux exigences ont pour conséquence de rendrel'analyse en termes de système ou d'écologiegénérale non testable. Quant à l'analyse destransformations du système dans la durée, elletend à réduire l'histoire à une suite

61

d'enchai'nements écologico-fonctionnels (Dieneret Robkin*, 1978) qui laissent échapper les causesprofondes des transformations des rapportssociétés/milieux.

Plus qu'un milieu, les sociétés habitent leurhistoire (Gourou*, 1982) et puisque la plupartdes auteurs reconnaissent qu'il n'y a pas de lienmécanique entre les caractéristiques du milieuet les systèmes sociaux, autant aller à l'essentielet mettre l'accent sur la société et ses capacitésd'intégration, de transformation et de création.

Certains auteurs ont développé ce pointde vue au sein même de l'écologie culturelle.Bennett* (l976) en est certainement le meilleurexemple. Face à l'emprise toujours croissantede la civilisation technicienne sur le milieu dit"naturel", l'auteur nous convie, pour l'analysedes relations société/milieu, à effectuer un glisse­ment, non vers les sciences biologiques maisbien vers le vocabulaire et les systèmes d'inter­prétation propres aux sciences sociales. L'auteursouligne que l'univers physique est à ce pointincorporé au monde cognitif et aux actionshumaines que le concept même d'écologie humainedevient un mythe. Il ne restera bientôt plusque la société humaine, ses désirs et les moyensde les satisfaire (ibid.). D'où la nécessité d'intégrerles faits de nature au sein d'un schéma communde type social afin de cerner les problématiquespertinentes.

Com me l'ont montré les travaux de Yengoyan(cf. Lee et Devore*, 1968) l'adaptation au milieurequiert une certaine flexibilité de la structuresociale qui doit se transformer pour optimiserl'exploitation des ressources ou faire face à unesituation nouvelle. Mais l'application de la loibiologique générale du succès reproductif etde la transmission (culturelle) des comportementsqui ont réussi (qui sont donc adaptés) est beaucouptrop réductrice. L'évolution des rapports entreles sociétés et leur milieu n'est pas prédictible.Une pratique peut être socialement et économique­ment satisfaisante mais nuisible écologiquementou l'inverse. Et ce n'est pas toujours l'écologiequi décide en dernier ressort car les sociétésont le pouvoir de transformer toujours davantagele milieu pour l'adapter aux besoins sociaux.C'est bien souvent au niveau social et à lui seulque l'on doit avoir recours pour rendre comptedes succès ou des échecs des sociétés à se repro­duire sur place de façon continue. C'est Je cas,par exemple, de deux ethnies touaregs, de mêmeculture et situées dans un milieu comparable,qui ont été décimées à la suite de guerres. L'unea modifié ses comportements matrimoniaux(entre autres) et se retrouve aujourd'hui en ex­pansion, alors que l'autre a presque complètementdisparu.

L'approche dite "paysagique" (étude des

Page 62: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

paysages produits par les activités humaines)constitue une entrée intéressante mais doitêtre menée conjointement avec l'étude socialeet économique, c'est en effet la société quiexplique le paysage et non l'inverse (Gourou*,1982).

Est-ce à dire que renoncer à un systèmeglobal et homogénéisant d'interprétation ramènetoute démarche à une simple juxtaposition desétudes qui seraient alors dans l'impossibilitéde recueillir les bienfaits qu'une approche réelle­ment interdisciplinaire est censée apporter?Nous ne le pensons pas.

Si l'interdisciplinarité est bien indispensablepour comprendre les modalités de transformationdes milieux, elle doit être réelle, c'est-à-direqu'elle doit tout d'abord être centrée sur unmême objet scientifique. Nous sommes enaccord avec Brookfield* (1982) lorsqu'il soulignequ'étudier d'un côté les écosystèmes dits"naturels" et de l'autre les systè mes d'utilisationrevient à séparer de fait les deux approcheset rend presque impossible une interfécondationdes différentes disciplines. Tout change sion prend comme objet d'étude le milieu produitpar les activités humaines, ses dynamiqueset ses transformations au cours du temps. Enun même lieu, plusieurs systèmes d'utilisation(et donc plusieurs paysages) peuvent sesuperposer, se combiner de façon variable avecdes effets différents sur les systèmes naturels.Cela peut être à la fois le reflet de stratificationssociales présentes et la survi vance de systè mesd'utilisation passés. Seule une approchediachronique peut alors rendre compte desrègles de transformation du milieu qui sontd'origine sociale dans leur quasi totalité.

D'autre part, aucune théorie générale nepourra remplacer le dialogue entre chercheursde disciplines différentes et l'acquisition d'unesensibilité aux questions posées dans d'autreschamps scientifiques. Mais pour ce faire, ilnous paraît essentiel que les recherches soientcentrées autour de problématiques bien définiesmettant en jeu un appareil théorique éprouvé.Ainsi les données concrètes ne sont pas recueilliesau hasard mais en fonction de leur significationau sein d'un champ interprétatif. Chaquediscipline ayant, au cours de son histoire, élaborédes outils conceptuels susceptibles de rendrecompte de l'es.$entiel de son champ d'expérience,il devient possible à un non spécialiste, à partirde sa propre problématique, de comprendrele sens et la portée des questions posées parles autres sans avoir besoin de se perdre dansla multiplicité de faits qui lui paraîtraient dénuésde signification. En même temps, des pointsde convergence et de recoupement entre lesdifférentes problématiques apparaissent. En

62

effet, au cours de leur développement les diffé­rentes problématiques confèrent des significationsparticulières et en général différentes, à unmême fait. Dès lors, il devient capital, pourune discipline donnée, de savoir quel statut,quelles significations sont accordées à ce faitpar les autres disciplines afin d'en épuiser lesmultiples perceptions. A l'occasion de cettedémarche, une modification du statut d'un faitou d'un objet peut intervenir au sein d'une disciplineou d'une problématique, rendant parfois nécessaireune reformulation des hypothèses et des interpré­tations.

Il semble donc que ce soit au travers d'unsouci de cohérence et d'exactitude méthodologi­que et théorique au sein de chaque disciplineque l'on rencontre l'interdisciplinarité. Celle-cin'est pas alors imposée "d'en haut" ou "d'ailleurs"mais surgit comme une nécessité au sein mêmed'une problématique à l'origine disciplinaire,tant il est vrai que les coupures disciplinairessont souvent arbitraires alors que les probléma­tiques sont beaucoup moins limitatives.

INTRODUCTION

"En 1968, la Côte d'Ivoire entreprend la plusimportante des opérations de développementde la première décennie de son indépendancenationale, l'opération San Pédro. Il s'agit demettre en valeur une région restée jusqu'alorsen marge du "miracle" ivoirien, le Sud-Ouestdu pays. Une région aux potentialités économiquesconsidérables - elle est couverte par une forêtde type équatorial pratiquement i'ntacte, sessols se prêtent plutôt bien à une agriculturearbustive de rente ; mais une région enclavée- elle fait frontière avec le Libéria à l'ouest,elle est bordée par l'océan Atlantique au sud,ses périphéries orientale et septentrionale sontà peine effleurées par le réseau routie-r existant- et peu peuplée - elle ne compte que 120.000habitants pour 37.000 km 2 , soit une densitéglobale légèrement supérieure à 3 habitantsau km 2 • Le moteur de l'opération : un port,qui est créé de toutes pièces à San Pédro, à quelque350 km à vol d'oiseau à l'ouest d'Abidjan. Sonmaître d'œuvre : l'ARSO, Autorité pour l'Amé­nagement de la Région du Sud-Ouest, une sociétéd'Etat dont les structures sont mises en placeen 1969, et qui est chargée d'assurer la program­mation, la coordination et le contrôle de l'entre­prise. Fin 1976, les seuls investissements publicsréalisés dans la région s'élèvent à 72 milliardsde FCFA "(Schwartz, 1979b).

Cette intégration d'une reglon jusqu'alorsmarginale au processus économique central revêt,au ni vea u de l'espace rural, deux aspects étroi te-

Page 63: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

ment liés qui nous occuperont plus particulière­ment:

la généralisation de la plantation autochtoneet sa réorientation vers une commercialisationaccrue l ;

la création et le développement rapide deplantations allochtones qui s'accroissent plusvite que les premières, en nombre comme ensuperficie.

L'ampleur de l'immigration va créer unesituation de compétition foncière entre les petitsplanteurs individuels et l'aménagement de l'espaceprévu par les pouvoirs publics: grandes plantationsréalisées par des sociétés d'Etat ou d'économiemixte (hévéa, palmier à huile ..•), projet papetier,parc national, forêts classées pour l'exploitationdu bois, aménagement d'un espace réservé auxgrands planteurs privés, etc. Ainsi, très vite,l'espace, sans être réellement occupé, se trouvepresque totalement attribué et des conflits fonciersinterviennent au sein d'un espace apparem mentvide (Fig. 18).

Bien que l'étude des grands projets d'aménage­ment et leurs conséquences écologiques ainsique celle des changements sociaux et économiquesqui ont affecté la petite ville de Soubré, carr~­

four de l'immigration, aient été programméesau sein du Projet Tai, nous nous bornerons àexaminer ici les dynamiques qui ont le plus affectél'espace rural à l'époque du Projet, modifié lavie de milliers d'hommes et profondément trans­formé les paysages sur de vastes surfaces ; ils'agit du développement d'un vaste front de colo­nisa tion agricole basé sur une économ ie de planta­tion.

Cette pénétration de l'économie de plantationvillageoise dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoireest l'aboutissement d'un long processus qui apris son essor au début du siècle en pays agni(Sud-Est) et n'a cessé depuis de s'étendre versl'ouest, soutenu par une forte immigrationnationale et étrangère. Ce front d'expansionne se présente pas comme la simple extensiond'une culture véritablement nouvelle puisquetoutes les régions touchées par ce front connaissentdéjà la plantation depuis longtemps. Ce n'estpas non plus la simple diffusion géographiqued'un système de production introduit par lesimmigrés (dans la majeure partie de la zoneforestière les colons sont d'abord employés surles plantations autochtones avant de pouvoir

1 Bien souvent, seuls les aînés étaient détenteurs de plan­tations; la généralisation signifie l'extension du phénomèneà tous les individus en âge de se marier, la famille nucléairedevenant l'unité économique de base.

63

travailler à leur compte). En fait, le développe­ment de l'économie de plantation villageoiseest le fruit de la rencontre entre plusieurs fac­teurs parmi ceux-ci, l'accroissement de lapression monétaire sur les populations rurales,le jeu de l'offre et de la demande sur le marchédu travail et les disponibilités foncières sontdéterminants. Pour être compris, ce vastemouve ment doit donc être replacé dans le cadreplus général du développement économiqueivoirien.

Nous parlerons de "phase pionnière" ou de"fpont pionnier" pour caractériser les débutsdu phénomène à un moment ou en un lieu précis(pour le Sud-Ouest l'expression convient d'autantmieux qu'une partie de l'expansion se dérouleau sein d'espaces inoccupés2 ). C'est durant cettepériode décisive que se nouent les rapports autoch­tones/allochtones et que se mettent en placeles grandes lignes de l'occupation de l'espace.Il serai t cependant abusif de réduire le frontd'expansion à la seule phase pionnière, on doity inclure également la période de consolidationdes implantations et des rapports sociaux dansle cadre des nouvelles structures. C'est d'ailleursbien souvent durant ce deuxième temps que lapopula tion et les superficies plantées augmententle plus en chiffre absolu, c'est dire sonimportance~. C'est là que s'élaborent les conditionsde progression du front par la réduction desdisponibilités foncières (réelle ou stratégique)et l'accumulation sur les plantations existantesde candidats potentieis au statut de chef d'ex­ploitation. Fonctionnellement et dynamiquementces deux phases sont donc étroitement liées.

A petite échelle le phénomène apparaîtsous forme de front, il est géographiquementlocalisé et son orientation peut être aisémentdéterminée. Par contre, à moyenne ou grandeéchelle il présente un aspect plus confus : larareté des progressions frontales, les comblementsintersticiels, l'i mportance stratégique des

2 Ceci ne veut pas dire que ces espaces soient libres.Bien que parfois fort éloignés des villages autochtones,ils n'en sont pas moins soumis à leur juridiction dans ledroit familial.

3 Il est bien entendu très difficile d'établir une limitenette entre ces deux stades. Elle ne peut être questatistique. Mais il est possible, dans un premier temps,de proposer les deux critères suivants pour caractériserla seconde phase : 10

- la majeure partie des nouveauxarrivants s'installe au sein de campements déjà existants;2° la proportion d'aides familiaux tend à augmenterau détriment des chefs d'exploitation. D'autres différencesseront évoquées plus loin, en particulier au niveau du travailsalarié.

Page 64: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

o1

100 km1

§ Périmètres papetiers

m Forêts classées

Plantations de type industriel(palmiers à huile, hévéas), etplantations villageoises (palmiers à huile)

Projet de plantations

IIIIIIIJ] Forêt s à vocat ion de reboi sement k.·,..:::1 Périmètre de peuplement

FIGURE 18. Carte d'affectation des sols - Situation en 1977 (d'après Léna, 1979)

64

Page 65: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

"domaines" constitués par les premiers immigrantsrendent difficile l'usage d'une terminologie uni­voque. Nous préférons par conséquent réserverl'expression "front d'expansion" au processusobservé à petite échelle, étant entendu qu'elleintègre à la fois la phase pionnière (qui peutse manifester sous forme de front) et la périodede consolidation. Dans l'i nterfluve Sassandra/Cavally les conditions locales permettent unesuccession rapide des deux phases que les autresrégions n'avaient pas connue.

L'apparente continuité de cette progressiondes plantations de l'est vers l'ouest ne doit doncpas masquer sa complexité. D'une part, les poli­tiques visant l'intégration du monde rural auprocessus économique décidé au centre (métropo­litain puis na tionaI) ont beaucoup évolué durantla période considérée, d'autre part les régionsconcernées ont elles-mêmes une histoire parti­culière qui leur confère une originali té certainedans leur façon d'aborder l'économie de planta­tion. Ceci nous interdit de considérer les événe­ments qui se déroulent dans le Sud-Ouest commela simple reproduction d'un modèle ancien ayantaffecté d'autres régions. Mais le danger estalors de favoriser l'analyse des particularismesrégionaux au détriment de mécanismes générauxplus déterminants.

Verser dans le régionalisme serait prêteraux sociétés autochtones un pouvoir et une auto­nomie qu'elles n'ont pas face au modèle dominant.Elles sont en effet dépendantes de lois et d'orien­tations étrangères à leurs caractéristiques his­toriques et sociologiques propres (prix à laproduction, vulgarisation technique, mais aussi:code foncier, politique en matière d'immigration,etc.). Ce sont ces facteurs externes qui produisentle cadre général (et contraignant) de l'économiede plantation villageoise. Ils sont, à un momentdonné, le reflet du développement économiqueivoirien et de ses options. L'époque à laquellese déroule le phénomène revêt donc une trèsgrande importance dans la production descaractéristiques régionales. C'est certainementle facteur le plus déterminant en dernière analyse.

La situation pionnière a sa propre originalité(notamment au niveau du marché du travail)mais elle doit nombre de ses traits les plus in­téressants aux caractéristiques du moment etdu lieu où elle se développe. Elle n'en restepas moins un objet d'étude privilégié car ellecrée des situations nouvelles et met à jour leslignes de clivage. Largement dépassée pourla plupart des autres régions forestièresivoiriennes, la phase pionnière n'est plus observableque dans l'interfluve Sassandra/Cavally (avecun maximum d'intensité dans la région de Soubré)et, à un moindre degré, sur la rive gauche duSassandra.

65

Dans un milieu de faible dénsité humainetel que le Sud-Ouest, elle se développe avecun minimum d'entraves et permet une bonneobservation des stratégies foncières, ethniqueset individuelles. Chaque groupe développe sonemprise sur l'espace selon des modalités et finalitésqui lui sont propres et qui déterminent en grandepartie les futures possibilités d'extension dessurfaces plantées.

La recherche d'avantages monétaires parle biais de la plantation est naturellement ledénominateur commun l , mais les moyens dontdisposent les planteurs pour réaliser leurs objectifssont extrêmement variables, tant du point devue du capital de départ que des ressources enmain d'œuvre. En peu d'années les différenceséconomiques entre colons deviennent très i mpor­tantes. Si elles sont encore peu observablesau niveau du genre de vie et des objets consommés,le relevé des superficies plantées et récoltéesest par contre tout à fait édifiant. Il permetd'établir, à partir d'un échantillon représentatif,une typologie des planteurs qui sera utiliséecomme référence pour la description et, dansla mesure du possible, l'explication du processusde stratification économique qui se développeà la fois entre groupes ethniques et au sein d'unemême ethnie.

D'autre part, devant une colonisation agricoled'une telle ampleur et face aux mutationsprofondes qu'elle entraîne (en particulier auniveau foncier) la réaction de la société autochtoneest loin d'être univoque : stratégies collectiveset individuelles s'opposent dans la recherched'a vantages à court ou moyen terme. L'analysede ces contradictions et l'étude de l'évolutionrécente des superficies plantées sur un terroirautochtone témoin viendront compléter ladescription des principales caractéristiques dufront d'expansion dans cette partie du Sud-Ouest.

UNE REGION HISTORIQUEMENT MARGINALE

CARACTERES ORIGINAUX DE L'INTERFLUVESASSANDRA-CAVALLY

La région administrative (Sud-Ouest) déli miteun espace relativement homogène, bien indivi-

Pourtant tous les immigrés n'ont pas planté, certains,peu nombreux, se satisfont du statut de chef d'exploitationvivrière qu'ils n'auraient pu atteindre que beaucoup plustard au pays d'origine ; d'autres mènent des activitésparallèles, parfois illicites (ivoire, or, etc,), Toutefois,il s'agit là d'un phénomène marginal, ils sont en généralcontraints d'occuper le terrain (fut-ce au moyen d'uneplantation clairsemée et mal entretenue) afin de coupercourt aux revendications des voisins.

Page 66: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tai: recherche et aménagement

\.~r- 15

.~ ......-~" ;lc,

~,',,-~

Limiu d. Pref.ctun

Li"'i!. d. SOM'· P,Îhctur.

• Prélectur•

• Sou.~ Préf.ctur•

mm 0,9 i 4,9

~ 5 à 'S, 9

m 9 i 15,9

~ 16 i 24,9

III 25 8t plus

LI. d.nailis Ollt ité ulnli.s • ,.Uir

d'I don ni•• du rlc.nl'lII.nt Il.tion.r d.

1976. ~O.U'""I p,o.ito;"

SA~SANO~A

.5S.. -P6d,o

,d .6,6by

ECHELLE 1/2000000

?~======",5:!.,0=====;;;;;;;;I.:lqokm

FIGURE 19. Carte des densités rurales par sous-préfectures, 1975 (Léna, 1979)

66

Page 67: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

dualisé par rapport aux reglons VOISines. Pourtantla zone ainsi définie recoupe des espaces dontl'histoire récente est différente. Le résultatest cependant significatif à plus d'un titre: ainsi,en 1965, cette région Sud-Ouest, qui représente11,5 % du territoire national, n'abritait pas 3 %de la population (la proportion n'avait pas changéen 1970). En 1966, elle ne participait que pour1,43 % au PIS ivoirien J • Vers la même époque,le département de Sassandra (c'est-à-dire les3/4 du Sud-Ouest et son pôle le plus actif) pro­duisait 1,9 % du café 0,3 % en 1970) et 3 %de la banane plantain.

L'opposition serait certainement encore plusmarquée si on ne considérait que l'interfluveSassandra/Cavally qui, en 1965, avait plus de90 % de sa superficie couverts par une forêten majeure partie inexploitée. Malheureusementles données existantes ne permettent pas cecalcul.

Une des causes principales de cette stagnationest le faible poids démographique de la région(Tableaux 14 et 15, Fig. 19). Le contraste estnet avec le reste de la zone forestière ivoiriennedont la population, même autochtone, est beaucoupplus importante. Ceci est vrai pour les groupesAkan et Mandé du sud mais aussi pour les ethnieskrou extérieures à l'interfluve. Quelques chiffresvont permettre de mesurer cet écart. Notonsque la Sous-Préfecture de Soubré est, de ce pointde vue, un indicateur très iritéressant car elleest divisée en deux par le Sassandra : le cantonbété se trouve sur la rive gauche et le cantonbakwé sur la rive droite Z, c'est-à-dire dans l'inter­fluve.

Les autres Sous-Préfectures de l'interfluveprésentent au niveau de la population autochtoneun aspect proche de celui du canton bakwé (àpart la petite Sous-Préfecture de Tabou qui atoujours concentré une population plus importantedu fait de ses activités liées à la mer), cependant,en 1971, aucune d'entre elles n'a autant d'immigrés.

Le Sassandra représente bien une ligne departage significative:

sur la rive gauche, des populations autochtonesplus nombreuses, soumises depuis longtempsà une immigration forte, encore active prèsdu fleuve (comme le montre l'évolution du cantonbété entre 1971 et 1975) relativement stabiliséeplus à l'est où les allochtones sont souvent domi­nants ;

sur la rive droite, un vide démographique

"La Côte d'Ivoire en chiffres", 1977*.

2 Des remaniements administratifs sont en cours :élévation de Soubré au rang de Préfecture, création denouvelles Sous-Préfectures dans l'interfluve.

67

que l'immigration vient combler de façon sensibledans le canton bakwé mais encore discrètementpartout ailleurs.

Les densités rurales diminuent selon ungradient est-ouest en forme d'hémicycle dontle foyer serait le pays baoulé. Les cinq Sous­Préfectures les plus orientales (Daloa, Issia,Ouragahio, Oumé et Divo) dépassent toutes25 h km- Z 3. Puis les densités baissentréf,'ulièrement pour atteindre finalement0,9 h km- z à Grabo, près de la frontière du Libéria.Un gradient similaire existe également dansle sens nord-sud, contribuant à faire du Sud­Ouest un cas particulier dans l'ensemble de laforêt ivoirienne. En outre, au sein même del'interfluve, la majeure partie de la populationest localisée sur la périphérie (littoral, Sassandra,Cavally) laissant ainsi de vastes espaces inoccupés.

La dimension des villages n'est pas homugènesur l'ensemble de la région. Les plus importantssont si tués dans la Sous-Préfecture de Tabou(quelques-uns atteignent 300 habitants) et, d'unefaçon générale, le long de la côte. Les plus petitssont certainement ceux des Bakwé, mais la varia­bilité est très importante au sein d'une mêmeethnie aussi les valeurs moyennes sont-ellespeu significatives. On peut cependant soulignerqu'au sud d'une ligne Soubré/Tai (partie de l'inter­fluve qui nous intéresse ici) la taille moyennedes villages varie entre 30 et 80 habitants ; lescampements de culture sont également de petitedimension (9 à 10 habitants) (Schwartz, 1971*et 1972*). Là encore, on observe un contrastea vec les villages de la ri ve gauche: dans le cantonbété de Soubré la moyenne est supérieure à 200habitants.

D'autre part, si la forte émigration des jeunesactifs masculins est un trait commun à l'ensembledu groupe culturel krou de part et d'autre duSassandra, elle est encore plus sensible dansl'interfluve où elle amoindrit considérablementla capacité de travail des unités familiales.

Enfin, la faiblesse de la population et l'en­clavement de la région ont contribué à maintenirune économie proche de la simple subsistancealors que le reste de la zone forestière étaitdepuis longtemps voué au marché. L'agriculturesur brûlis à très longue jachère est basée surle riz et, très secondairement, le manioc, lemaïs et la banane. La chasse et la cueilletteont conservé une place très importante et

La Sous-Préfecture d'Ouragahio atteint 40 h km- 2 •

De telles densités, en agriculture itinérante sur brûlis etéconomie de plantation extensive, laissent entrevoir desérieux problèmes fonciers, même si, dans la plupart descas, il n'y a pas encore saturation réelle.

Page 68: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

TABLEAU 14. Donrlées démographiques, 1971\

Uni té Population rurale Densité Population rurale Dens i téadministrative autochtone h km- 2 allochtone h km- L

Canton bété 21.604 8,73 8.472 3,42

Canton bakwé 2.034 0,62 1.450 0,44

Recensements effectués par A. Schwartz, sociologue de l'ORSTOM, (971)*.

TABLEAU 15. Population rurale du Sud-Ouest et du Centre-Ouest en 1975. Ces chiffres pOlll' 1975 1 permettent unecomparaison entre les deux régions citées

Unité administrative Population rurale Densité Population rurale Densitéautochtone (h km- 2 ) allochtone (h km- 2 )

Sous-Préf. de SoubréCanton Bété 21.445 8,66 19.718 7,96Canton Bakwé 2.161 0,66 9.868 3,02

Guiglo 12.493 3,94 4.177 1,32

Tabou 8.387 5,55 2.990 1,98N

Ô Sassandra + 6.518 1,43 21. 524 4,73rI)

0::« Gueyo * 3.233 5,nS 6.RRR 10,76tlQ)

San Pédro 3.169 0,74 7.237 1,69::l0," Grand- Béréby 6.299 2,38 5.562 2,10::lrI)

Grabo 2.632 0,67 746 0,19

Taï 3.648 0,84 3.133 0,72

Buyo + 5.235 2,06 8.309 3,28

Fresco * 4.885 2,65 6.782 3,68

Daloa 35.363 9,30 81.838 21,53

Va voua 8.434 1,36 51.930 8,43

Issia 47.798 13,31 43.167 12,02

~ Ouragahio 33.794 28,39 14.522 12,20<fJQ)::l0 Oumé 22.913 9,54 48.424 20,171Q)....~

Divo 31.161 9,76 74.503 23,35t:Q)

UGuiberoua 17.391 13,48 11.011 8,53

Gagnoa 30.148 14,92 17.012 8,42

Lakota 49.734 18,21 14.129 7,27

12

*+

Sources: Schwartz, 1976 et Recensement National de Côte d'Ivoire, données provisoires*, 1979. Abidjan.Périmètre administré par l'Autorité pour la Région du Sud-Ouest (ARSO).Sous-Préfecture extérieure à l'interfluve.Sous-Préfecture dont la majeure partie est située à l'extérieur de l'interfluve.

68

Page 69: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

permettent un équilibre alimentaire satisfaisant.Cette place est d'autant plus grande que lesvillages sont petits et la densité de populationfaible. Chez les Bakwé, dont le territoire estle moins peuplé, une utilisation de l'espace parti­culièrement extensive maintient un territoirede chasse et de cueillette considérable et encoretrès productif.

Cette société bakwé est, semble-t-il(Schwartz, 1979b), la seule société politique detype minimal existant à l'heure actuelle en Côted'Ivoire, les groupes "sont tous fondés sur laparenté. Nulle trace, en effet, de groupementsbasés SUI' l'alliance" (ibid.). Outre l'intérêt durapprochement entre faible densité, groupementsde petite taille, mode de production extensifet société de type minimal, il est significatifde relever que c'est dans ce contexte que vase développer le front pionnier avec un maximumd'intensité.

Ajoutons pour terminer que contrairementà l'interfluve jusqu'à une période récente, larive gauche du Sassandra a quelque peu participéde la dynamique développée dans le reste dela Côte d'Ivoire forestière. On y trouve parconséquent quelques grandes plantations de caféet de cacao (héritières des plantations européennes)ainsi que des plantations industrielles de palmierà huile. Pourtant la rupture n'est pas brutale,les confins occidentaux du pays bété ressemblentà bien des égards au pays bakwé ; mais si onconsidère l'ensemble des caractères, le Sassandraapparaît incontestablement comme une frontière.

LES DONNEES DE L'HISTOIRE

Les documents archéologiques (haches et picsen pierre, polissoirs, etc.) attestent l'anciennetéd'une occupation humaine qui devait alors êtrele fait de petits groupes peu nombreux.

Plus tard, la région va se trouver à l'écartdes grands mouvements de population (tels quela "poussée mandé") tout com me de la formationdes empires des savanes qui surent, dans le passé,fixer des populations denses (Schwartz*, 1972).Par contre, une partie du peuplement doit sansdoute son origine aux conséquences de ces événe­ments extérieurs (migrations secondaires,popula tions réfugiées, etc.) (Scwhartz*, 1973).Il n'y a donc pas continuité entre le peuplementancien et la population actuelle. Ceci est attestépar les dates relativement récentes d'installationdans la région que fournissent les traditions orales l •

Des vagues successives peu nombreuses ont dûabsorber les populations plus anciennes selonun rythme très lent. Schwartz* (1973) acartographié les parcours migratoires des onze"grigbe" bakwé 2 de la Sous-Préfecture de Soubré,

69

faisant ressortir une grande diversité d'origine.Il en est vraisemblablement de même pour unegrande partie de la population du Sud-Ouest.Ce mouvement brownien (du moins à l'échelledu siècle) n'évoque pas une phase de peuplementbien caractérisée mais plutôt la migration degroupes restreints (segments de lignage) sanslien entre eux, sans doute à la recherche d'espaceslibres où ils pourraient obtenir la maîtrise dela terre (cette maîtrise est reconnue au premierinstallé dans un espace donné).

A cette faiblesse numérique de la populationvient s'ajouter une inégale répartition, fruitdes contacts historiques des habitants avec l'ex­térieur. A l'origine, les populations clairseméesqui occupèrent progressivement la région serépartirent le long des fleuves et rivières defaçon sans doute homogène 3• Très vite, cependant,alors même que le processus de peuplement étaiten cours, la côte va devenir un pôle d'attraction:les premiers contacts avec les navigateursportugais ont lieu en 1471 et des échangescommerciaux sont instaurés avec les Krou 4

habitant la côte. Ceux-ci venaient vendre lepoivre, l'huile de palme, l'ivoire aux bateauxeuropéens et organisaient le trafic des esclaves,les acheminant et aidant à leur embarquement(Behrens*, 1974). C'est là l'originé de la pratiquequi se perpétue encore aujourd'hui et qui consisteà embarquer des Kroumen sur les bateaux pourleur confier divers travaux, en particulierl'arrimage des grumes, tâche pour laquelle ilssont très appréciés (Schwllrtz*, 1972).

Dans la seconde moitié du 19ème siècle, lesAnglais vont établir cinq factoreries sur la côtedu Sud-Ouest (Schwartz*, 1972), contribuantainsi à accroître et institutionnaliser les échangessans en modifier les principes. Les produitssont alors transportés tant bien que mal parles fleuves, la présence de nombreux rapidesrendant l'opération difficile. A la fin du siècle

1 Il va de soi que la forêt n'était pas en elle-même unobstacle. Il se trouve simplement que la région n'a jamaisété intégrée à un ensemble plus structuré. Les populationsne se sont pas non plus trouvées devant la nécessité d'éla­borer un système d'alliances qui aurait pu être le germed'une organisation politique plus complexe.

Patrilignage, souvent identifié au village.

3 Mises à part les collines de la Haute-Dodo (centresud de l'interfluve).

Les ressortissants de l'ethnie krou sont appelés Kroumen(terme utilisé par les Anglais pour désigner les Krou qu'ilsemployaient) ceci évite toute confusion avec le groupeculturel Krou dont font partie toutes les ethnies du Sud­Ouest (Schwartz*, 1972).

Page 70: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

dernier le caoutchouc vient s'ajouter à la liste.Il est collecté essentielle ment par des étrangersà la région (Fanti et Haoussa pour la plupart)(Schwartz*, 1972) et dirigé vers la côte.

Mais à partir du com mencement de la périodecoloniale proprement dite (1893), le reste dela Côte d'Ivoire va suivre un processus nettementdifférent (implantation permanente de colonseuropéens, aménagement d'infrastructures, créa­tion de plantations de café et de cacao, etc.).C'est la politique de "mise en valeur", dont leSud-Ouest sera tenu à l'écart (excepté Sassandraoù quelques plantations seront installées). Pourtantles premiers plants de café et de cacao y sontintroduits dès la fin du siècle dernier, c'est-à-direà peu près en même temps qu'à l'est ; mais l'en­clavement de la région maintiendra les culturespérennes dans un rôle marginal jusqu'à cesdernières années.

De plus, l'intérieur de l'interfluve resteralongtemps mal connu. Les premières missionsd'exploration qui se déroulent entre 1897 et 1902connaîtront d'ailleurs un certain nombre de més­aventures qui n'amélioreront pas la réputationde la région (Schwartz*, 1972) . Toujours est-ilque ces tentatives de pénétration militaireaboutiront à la création de deux pistes nord-sudparallèles au cours des deux principaux fleuves.Elles étaient en principe destinées à rendre letransport des produits plus facile, mais leurmauvais état permanent, leur orientation versla mer (donc absence de liaison avec le Centre,l'Est et les principaux marchés) sont autant defacteurs qui leur ont interdit de jouer un rôleéconomique réel. Par contre, elles vont accentuerla localisation périphérique de la populationdont une partie va être déplacée autoritairementle long des nouveaux tracés (Schwartz*, 1972).D'anciens sites de villages sont abandonnés etle centre de l'interfluve s'enfonce dans l'oubli.A tel point que les autorités lui octroient lafonction de réserve de flore et de faune : en1926 est créé le "Parc refuge de la régionforestière" ; rebaptisé "Réserve de faune de Tai"en 1956, ses limites sont alors portées à 425.000ha (Bousquet*, 1977). Ce n'est qu'en 1972 qu'undécret érigera l'ensemble en Parc National (auprix d'une nouvelle modification de superficie).Cette accentuation artificielle du videdémographique sera d'ailleurs à l'origine d'uneconfigura tion particulière du développementéconomiquë ivoirien.

Pendant ce temps l'exploitation forestière,qui débute en 1920 le long de la côte, va conquérirl'intérieur, poussée par la nécessité de cherchertoujours plus loin les essences précieuses dontl'Est est de. moins en moins riche 1. C'est engrande partie à cause de cette activité que cer­tains travaux d'infrastructure vont être réalisés

70

(pont sur le fleuve à Sassandra en 1940, bac àSoubré en 1955, réaménagement, avec l'aidedes forestiers, de la piste Sassandra/Soubré selonun nouveau tracé (Schwartz, 1979b). C'estindéniablement l'activité économique la plusimportante (environ un million de tonnes paran) mais elle ne rejaillit sur le Sud-Ouest quepar l'intermédiaire de la consommation courantedes employés de chantiers, eux-mêmes étrangersà la région dans leur immense majorité.

LES MECANISMES DE L'INTEGRATION

L'interfluve paraissait donc voué à la fois à l'ex­tractivisme et à l'agriculture de subsistance,deux types d'activités tout à fait étrangèresl'une à l'autre.

Mais l'économie ivoirienne ne pouvait sedésintéresser longtemps de ces vastes espacesimproductifs que le modèle de croissance adoptéet l'augmentation des possibilités d'investissementrendaient désormais attractifs. La région pré­sentait les conditions idéales pour Pi mplantationd'opéra tions agro-industrielles de grande envergureque la relative saturation des espaces forestiersrendait de plus en plus difficile dans le Centreet l'Est (saturation due en grande partie audéveloppement spectaculaire de l'économie deplantation villageoise). Ainsi sont projetés desplantations de palmier à huile, de cocotier, d'hévéa,un immense périmètre destiné à la productionde pâte à papier, un centre d'étude et dedéveloppement de l'Arabusta 2 et un espaceconsacré aux grandes plantations privées (Fig.19).

Le développement des activités et leuréloignement d'Abidjan exigeaient la créationd'infrastructures locales pour faciliter le transportet évacuer les produits. Ce furent: la créationdu port et de la ville de San pédro (commencésen 1968); l'achèvement de la première transversale(c'est-à-dire la piste côtière Tabou/Sassandra)et la construction du pont de Soubré, en 1970;l'asphaltage des routes Soubré/San pédro etGagnoa/Soubré en 1977 et 1978. 11 est doncpossible de se rendre d'A bidjan à San pédro parla route à partir de cette dernière date.

Parallèlement à cette vaste opération volon­tariste, sans lien apparent avec la société et

1 En 1973, on estime que plus de la moitié des réservesde bois ivoiriennes se trouvent dans le Sud-Ouest (Bousquet*,1977).

2 Café hybride obtenu à partir des espèces d'arabicaet de robusta (= canephora).

Page 71: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

l'économie locale, va se développer un mouvementd'im migration dont la rapidité et l'intensité sontsans commune mesure avec les courantsmigratoires du passé. Depuis l'indépendance,le slogan "la terre appartient à ceux qui lacultivent" avait favorisé l'installation définitived'allochtones en zone forestière. Si la migrationde travail avait toujours été liée à la possibilitéd'acquérir le statut de chef d'exploitation (Raulin*,1957), à partir de cette da te le phénomène vas'amplifier et gagner de nouveaux territoires.

Selon un processus déjà classique, le manœuvretravaille pour un planteur durant un certain nombred'années et reçoit ou achète ensuite une portionde forêt qui lui permet de pratiquer pour soncompte les cultures de rente. Ce procédé estpour l'autochtone le moyen de s'attacher unemain-d'œuvre qui, sans cette perspective,chercherait du travail ailleurs. Plantationsautochtones et allochtones ont toujours entretenudes rapports étroits, les différents formes deces rapports étant dues à des variantes localesou historiques. Bien souvent c'est la réussitede certains immigrés qui incite les autochtonesà développer leurs propres plantations. Ils vontalors tirer parti de la force de travail desimmigrants avant de contribuer, par don ou ventede terre, au développement des plantations deleurs ex-employés. Parfois, c'est l'extension desplantations autochtones qui crée un appel de main­d'œuvre l .

Localement, le processus qui conduit à l'ac­croissement du nombre des immigrants est simple:le nouveau planteur va d'abord faire venir lesactifs familiaux dont il a besoin pour démarrersa plantation ; plus tard, à partir des premièresrécoltes, de prestataire occasionnel de travailil va devenir demandeur, se plaçant ainsi ensituation de concurrence vis-à-vis des autochtones.

1 En fait, il n'y a pas si mple recherche d'espaces libresde la part des colons (du moins jusqu'à une période récente)le processus est plus complexe et une analyse rapide desdensités rurales et de la dynamique migratoire montreque les vides démographiques ne sont pas les plus attractifs(Léna,197ge). Des régions où la population autochtoneétait très dense ont pu connaître de forts taux d'immigration(grand besoin de main-d'œuvre), d'autres, quasiment vides,ont été longtemps ignorées. On peut trouver à cela plusieursraisons, mais il est plus que probable que le rôle desdifférences dans le droit foncier local soit important. Lesconditions d'accessibilité doivent être égalementdéterminantes, outre le fait qu'un immigrant hésite às'installer dans un espace vide de tout signe culturel, uncertain degré d'activi té préalable est nécessaire pour quel'économie de plantation démarre rapidement avec lescaractéristiques qu'on lui connaît (extension des surfaces,colonisation, recours à la main-d'œuvre salariée, etc.).En particulier doivent exister des conditions suffisantesd'évacuation des produits. Enfin, les noyaux de peuplemental1ochtone anciens jouent un rôle certain dans le processusmigratoire (Raison*, 1973).

71

D'autre part, le retour périodique au lieu d'origineva diffuser la nouvelle de sa réussite et inciterd'autres candidats à tenter l'aventure.

Mais il faut également compter avec un dé­placement est-ouest de la migration du travail:ceux qui n'ont pu accéder à la terre là où ils étaient,vont chercher un endroit plus propice et se dirigervers les terroirs où l'économie de plantation esten développement. L'afflux des im migrés va intro­duire un déséqUilibre dans le rapportmain-d'œuvre/terre disponible qui tendra à faireaugmenter le temps passé comme salarié au pointde le rendre peu attractif face aux possibilitésdes régions situées plus à l'ouest. La terre étantl'axe des rapports autochtones/i mmigrants, sararéfaction sera à l'origine du phénomène du frontpionnier tout com me la rareté relative de lamain-d'œuvre salariée 2 • Ceci est bien sûr typiqued'une situation de frontière agricole ouverte,dans le cas contraire il y aurait augmentationdu nombre de manœuvres en quête d'emploi.

Cet aspect mécanique de la reproductiondu front est subordonné aux condi tions poli tiqueset économiques globales ainsi qu'à un certainnombre de facteurs conjoncturels.

Il y eut tout d'abord l'abandon du droit fonciertraditionnel à partir de l'indépendance, décisionqui devait faciliter l'installation d'allochtoneset permettre au gouvernement d'augmenter laproduction caféière et cacaoyère par l'extensiondes surfaces et la "stimulation" générale del'économie de plantation. C'est cette tendancequi préside à l'immigration dans le Centre-Ouest.

Puis, une série d'événements va contribuerà grossir le nombre de candidats planteurs aumoment même où le désenclavement du Sud­Ouest commençait:

Les pays de savane vont connaître entre 1966et 1973 une suite de mauvaises récoltes, duesà la sécheresse, dont l'incidence est certaine surle volume du flux migratoire nord-sud.

En 1971, un décret va ratifier l'abolitiondes droits coutumiers sur la terre et ouvrir offi­ciellement l'accès à la propriété aux étrangers.Désormais la migration de travail ne sera plus,pour nombre d'entre eux, qu'un mal nécessaireavant de pouvoir accéder à la terre. L'immigrationchange de finalité, de saisonnière ou temporaireelle tend à devenir définitive : en 1961, 37 %des immigrants mossi faisaient venir leur famille,ils seront 84 % en 1973 (Boutiller et al.*, 1977).

Dès la fin des années soixante, le Sud-Ouestva tenir une place importante dans les discoursofficiels. La politique de mise en valeur maisaussi le projet d'installation des 60.000 Baoulé

2 Rareté particulièrement ressentie par les autochtones.

Page 72: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

délogés par la mise en eau du barrage de Kossou(Centre) l, vont le désigner com me une nouvellefrontière à conquérir.

Le prix d'achat du cacao au producteur vaconnaître des augmentations successives en 1972,1973,1974 et 1976.

Au niveau local, deux événements majeursvont permettre à ces tendances de se concrétiser:C'est, en premier lieu, la construction du pontsur le Sassandra à Soubré qui vient remplacerl'ancien bac. Ce pont revêt une importancecapitale pour l'époque à laquelle il est ouvert(1970) et par sa situation, au débouché des deuxprincipaux courants migratoires (N-S et E-O)correspondant aux principales pistes. Soubréétait désigné, topologiquement, pour être unnœud particulièrement important de la migration.Les exigences de l'exploitation forestière etde l'agro-industrie ont donc favorisé sans levouloir un déferlement de la vague d'i mmigrantssur le canton bakwé.

D'autre part, l'exploi ta tion forestière, quiattaque le canton bakwé vers le milieu des annéessoixante, aura deux conséquences:

Elle va créer un lacis de pistes forestièresdense, carrossable, qui facilitera la pénétrationrapide des pionniers et leur permettra d'assurerl'écoulement de leurs récoltes. La bordure depiste, lieu d'installation recherché, est ainsimise à la portée du plus grand nombre.

Elle va contribuer à la divulgation des possi­bilités foncières du Sud-Ouest par le biais desemployés de chantiers qui vont eux-mêmes,parfois, former le noyau des futurs foyers depeuplement immigrés.

Si aucun des éléments ici rapportés ne peutà lui seul rendre compte du caractère exception­nel de l'immigration dans la région, leurconjonction à un moment donné est, par contre,tout à fait éclairante. C'est cette configurationparticulière qui fait l'originalité de l'interfluvepar rapport aux zones de colonisation plusanciennes.

Un des aspects les plus importants de cetteconfiguration est certainement l'interventionmassive des pouvoirs publics dans la région(création d'infrastructures, programmesagro-industriels, mais aussi "promotion dupaysannat" - intitulé d'un des programmes del'ARSO).

Le décret annonçant l'abolition des droitscoutumiers sur la terre devait permettre à l'Etatde s'approprier de vastes espaces. A peine ouverte,la nouvelle frontière va être fermée de l'intérieurpar les différents programmes d'aménagement;

1 Dont 3500 seulement accepteront la proposition(Schwartz, 1979b).

72

environ 75 % de la superficie de l'interfluve (ausud d'une ligne Tai/Soubré) est ainsi interditeau petit paysan. Mais la mise en valeur de cesespaces réservés étant plus lente que le mouvementde colonisation, le planificateur et le colon vontse trouver en situation de concurrence : le ParcNational, le CEDAR (Centre d'étude et de recherchesur l'Arabusta) puis le péri mètre papetier sontsuccessivement envahis, contraignant les autoritésà pratiquer l'expulsion. Parfois, cependant, laprésence de colons en trop grand nombre obligeles responsables à modifier les périmètres deleurs program mes (ce fut le cas du projet papetier).L'absence d'une politique foncière nettementdéfinie, les hésitations, les retards des pouvoirspublics, s'expliquent en partie par les contradictionsliées aux objectifs d'aménagement. Qu'il y aiteu sous-estimation de l'ampleur de l'immigrationde la part des autorités, cela est certain ; maisil faut également remarquer que ce processusde peuplement était, jusqu'à un certain point,favorable au développement de la région tel qu'ilétait conçu : il permettait la constitution de l'in­frastructure paysanne indispensable pour laproduction des denrées ali mentaires destinéesà l'approvisionnement de San pédro et des nombreuxchantiersL • En outre, ces immigrés représentaientune réserve de main-d'œuvre potentielle pourles entreprises étatiques et privées. Parallèlementau développement du marché intérieur régional,une augmentation sensible de la productioncacaoyère était attendue. Vu le coût dudéfrichement, il était intéressant pour les pouvoirspublics que cette tâche soit assumée par l'économiedomestique.

Enfin, com me partout ailleurs, l'existencede terres à coloniser permettait d'apaiser un certainnombre de tensions : engorgement des terroirs,expulsions, sécheresse des dernières années quia endommagé les plantations de café et de cacaodans le Centre, etc.

Mais le dynamisme même de l'immigrationrisquait de perturber sérieusement ces prévisionsoptimistes. Outre d'empiéter sur les territoiresréservés, les colons sont accusés d'utiliser l'espacede façon trop extensive ainsi que de créer desréserves foncières qui contraignent les nouveauxarrivants· à aller toujours plus loin. Ces réserves,trop petites et enclavées, sont perdues pour l'amé­nageur, d'où un gaspillage de l'espace du pointde vue de la rationalité technicienne. Le contrôledu flux migratoire étant quasiment impossible,les autorités vont orienter leurs efforts vers lafixation et l'intensification de l'agriculture.

2 De nombreux colons sont plus habitués à commercialiserune part de leu production que les populations local.zs(de toute façon très peu nombreuses).

Page 73: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

A partir de 1978 l'ARSO va réaliser desblocs de cultures pérennes (principalement descacaoyers sur la rive droite du Sassandra) afinde regrouper les plantations. Des lots de 1,5à 3 ha sont prévus dans un premier temps. Lasélection des terres utilisées doit permettrede meilleurs rendements et la limitation dessurfaces des soins appropriés. Une aide financièreest également fournie afin que le planteur puisseutiliser des insecticides en quantité suffisanteet procéder aux désherbages en temps voulugrâce au recrutement d'une main-d'œuvreextérieure. La réunion d'un grand nombred'exploitations dans un même lieu devrait faciliterl'assistance technique, le contrôle de la qualitédes produits et la commercialisation. Ces blocssont installés à proximité des villages autochtones l

qui sont ainsi les premiers à recevoir cetencadrement.

Un système de rotation des cultures annuellesest également à l'essai ; chaque chef d'exploita­tion devrait recevoir 2,5 ha pour sa productionvivrière, répartis en six ou sept soles de culturesdifférentes (riz, igname, maïs, stylosanthès,etc.). Ainsi l'apparition de campements de culturedans des lieux inattendus ne viendrait pas perturberles aménageurs et l'occupation de l'espace seconfondrait avec la surface agricole réellementexploitée, permettant une rationalisation del'affectation des sols. L'organisation de la pro­duction vivrière selon ces nouvelles normes pré­sentera certainement des difficultés outrequ'elle modifie profondément la pratique desagriculteurs, elle pose avec acuïté le problèmede la superficie des terroirs et du statut desréserves foncières. Pourtant les deux programmessont complémentaires : si le défrichement d'unenouvelle parcelle chaque année n'est pas enrayé,cela aura de sérieuses répercussions sur les culturespérennes encadrées. En effet, en agriculturede plantation extensive, défrichement annuelet plantation sont liés, le travail nécessaire audéfrichement est rendu doublement profitablesi des cultures de rente succèdent aux culturesannuelles. On peut donc tenir pour certain quede nombreux planteurs mèneront parallèlementdeux plantations, l'une extensive2 , l'autre inten­sive ; cette dernière souffrira donc d'un détourne­ment du temps de travail qui lui est normalement

1 En fait auprès des "plate-formes villageoises" en coursde création. Ces plate-formes regroupent chacune plusieursanciens villages considérés comme trop petits pour pouvoirbénéficier d'une assistance technique, sanitaire, scolaireet administrative. Mais les débuts de cette opérationmontrent que l'ancien habitat n'est pas abandonné pourautant (il est en effet plus proche des anciennes plantationsextensives). Des contradictions ne tarderont donc pas àapparaître.

73

nécessaire pour pouvoir maintenir des rendementsélevés.

D'autre part, l'encadrement des immigrés(c'est-à-dire de la majeure partie de la population)va se heurter à un certain nombre de difficultésdues aux modalités de l'occupation de l'espacedans la frange pionnière ainsi qu'aux dynamismesqui sous-tendent le processus migratoire.

L'IMMIGRATION

"••• La migration ne peut être étudiéeen tant que telle. Elle renvoie à desmécanismes sous-jacents. Elle estsoumise à des déterminations majeuresqui sont celles du développement del'économie marchande. Le procès migra­toire est inclus dans le procès de déve­loppement de cette économie.

Autrement dit, c'est l'ensemblezones de départ-zones d'arrivée qu'ilfaut prendre en considération, ensemblehistoriquement constitué par la contraintecoloniale - qui a joué le rôle essentielde "déclencheur" des migrations (recrute­ment militaire, travaux forcés,imposition) - et par la mise en placed'un pôle de développement en basseCôte d'Ivoire.

Les besoins en main-d'œuvre intro­duits par le système nouveau deproduction sont à l'origine des courantsmigratoires actuels. La Côte d'Ivoiren'est pas un cas isolé. L'im migrationdans la zone forestière est à replacerdans le mouvement général des migrationsouest-africaines, qui sont pour l'essentieldes migrations de travail •.• Cette immi­gration a été, et est encore, le moteurdu développement de l'économie deplantation •••"

"On distingue généralement deuxtypes de migration:10 La migration de travail ("demain-d'œuvre") proprement dite.20

- La migration agricole ("rurale","pionnière") de planteurs indépendants.

Il nous semble qu'il n'y a pas lieude les opposer radicalement. La frontière

2 En plus d'un temps de travail par unité de surfacefaible, la plantation extensive présente l'avantage d'occuperl'espace et de se prêter aux différentes stratégies foncières.Or c'est là une préoccupation fondamentale pour le paysanà une époque où il perçoit de mieux en mieux le changementde statut de la terre (privatisation, introduction du droitsuccessoral moderne, etc.).

Page 74: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

ËCHELLE: 1/2000000

~,o

Demi ce~cle

superieur

Baoüleutres Ivoiriens

Autres Krciü

Autochtones

Demi cercleinlerieur

Veil taïquesMaliens

-1 GuineensDivers

--~

lOOltm!

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

G 0 L F E o E GUINÉE

FIGURE 20. Répartition proportionnelle des principaux groupes ethniques (Ivoiriens et Etrangers)par sous-préfectures - Situation en 1971 (Léna, 1979)

74

Page 75: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

est souvent floue entre ces deux typesparticulièrement dans les zones d'im­plantation nouvelles (Sud-Ouest) oùle passage de l'un à l'autre se fait aisé­ment (accès facile à la terre, maisinversement embauche du planteur,au statut encore incertain, commemanœuvre temporaire)..•" (Martinet,1978).Comme le souligne Martinet, des immigrants

qui se consacraient auparavant à la migration"de travail" se tournent de plus en plus vers lescultures spéculatives. Ce mouvement, moinsrapide dans la région Centre-Ouest, où les autoch­tones tendaient à maintenir les allochtones com memanœuvres le plus longtemps possible, s'accélèredans la période récente, à mesure que lemouvement gagne vers l'ouest.

"Si la Côte d'Ivoire y perd des manœuvres,elle y gagne des pionniers" (Martinet, 1978) maisces pionniers, à mesure que leur plantation grandiraferont appel à d'autres manœuvres, alimentantainsi le circuit de la main-d'œuvre.

"Cette migration agricole est avant toutun transfert de main-d'œuvre vers le secteurdes cultures industrielles. On a pu observerle même phénomène s'agissant des migrationsrurales mossi vers les zones cotonnières de l'ouestvoltaïque (pays Bwa). "Paysans tradi tionnels"(Haute-Volta) attirés par les cultures de rente,colons du Sud-Ouest, "débauchés" prématurémentde la migration de travail, manœuvres (Côte­d'Ivoire), tous participent au même mouvementqui n'est en som me qu'un vaste transfert deplus-value et forme un système unique desmigrations" (Martinet, 1978).

LES PRINCIPAUX GROUPES D'IMlVIIGRANTS.CARACTERISATION ET DYNAMIQUE

La variété des ethnies et sous-groupes ethniquesoblige à des regroupements l . Trois groupesapparaissent suffisamment différenciés et numé­riquement comparables : les Baoulé (Ivoiriens),les Autres Ivoiriens et les Etrangers. Une analyseplus fine étant parfois nécessaire, les Etrangersseront alors divisés en trois catégoriescorrespondant aux trois nationalités les plusreprésentées (Haute-Volta, Mali, Guinée) j cestrois pays fournissant à eux seuls plus de 95 %de l'immigration étrangère. Pour les Baoulé (ethniedu centre de la Côte d'Ivoire) il sera intéressant de

Dans l'ensemble la classification utilisée est celleque Schwartz. avait définie pour les recensements de 1971 et1975.

75

savoir s'ils viennent d'une région forestière, dela savane ou du contact forêt/savane. Au seindu groupe Autres Ivoiriens il est également utilede distinguer les ethnies de forêt et celles desavane 2 • Ces dernières sont souvent appelées"dioula" par les autochtones car les Malinké(Musulmans parlant le dioula) y sont largementmajoritaires.

Ces trois groupes n'ont pas com mencé às'installer à la même date et ne se sont pas répartisde la même façon (Fig. 20, 21). 11 existe en outreune grande différence quantitative et qualitativeentre les premiers mouvements migratoires etla dynamique récente.

Les premières installations d'allochtonesdans le Sud-Ouest sont liées pour la plupart auxvilles, petites villes, chantiers et plantations.Elles sont en relation avec les besoins enmain-d'œuvre et leur petit nombre ne fait querefléter la faiblesse des activités économiquesrégionales. A des dates variables suivant lesdifférents groupes l'i mmigration va connaîtreun accroissement considérable et deveniressentiellement rurale, constituant le frontd'expansion proprement dit.

D'après les dates d'installation déclinéespar les intéressés lors des recensements de 1971(Schwartz, 1971*,1972*) on peut constater quedans l'ensemble les premiers arrivés sont lesIvoiriens autres que Baoulé (ceci dès la périodecoloniale). Il s'agit essentiellement de manœuvresdan, guéré, voire malinké. On trouve égalementquelques commerçants et agriculteurs. L'augmen­tation du nombre des arrivées ne sera sensiblequ'à partir de 1967, date à laquelle la migrationrurale deviendra dominante.

L'immigration étrangère est à peu près aussiancienne mais le nombre de manœuvres est encoreplus grand que chez les Autres Ivoiriens. Avant1960, les Etrangers planteurs sont exceptionnels,le mouvement ne com mencera progressivementqu'après 1965 et subira une brusque accélérationà partir de 1970.

L'arrivée des Baoulé est également tardive.Rares sont les installations antérieures à 1965,encore sont-elles le fait de migrants originairesdu Sud-Ouest du "V" baoulé qui, d'après Etienneet Etienne* (1968) partent plus souvent à larecherche d'emplois urbains que les autres Baoulé.On les trouve principalement près de Sassandra.Par contre, dès 1971, les ruraux seront largementmajoritaires puisqu'ils totaliseront 90 % des

2 Pour plus de détails, voir Schwartz, 1976, 1979b. Ne sontutilisées ici que les distinctions qui ont une signification enrapport avec l'analyse des faits fonciers et économiques en­visagés.

Page 76: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tar: recherche et aménagement

ËCHELLE. '/2000000

S?

Demi cerclesuperieur

Bàoüleulres Ivoi riens

Autres Krou

Autochtones

Vol taïques

Maliens

GuineensDivers

100 km1

G 0 L F E o E G U N t E

FIG U RE 21. Répartition proportionnelle des principaux groupes ethniques (Ivoiriens et Etrangers)par sous-préfectures - Situation en 1975 (Léna, 1979)

76

Page 77: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

FIGURE 22. Parcours migratoires - Etrangers et Autres Ivoiriens (Léna, 1979)

77

Page 78: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

FIGURE 23. Parcours migratoires - Baoulés (Léna, 1979)

78

Page 79: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développemeitt des activités humaines

migrants. A la même date, les ruraux des groupesAutres Ivoiriens et Etrangers réunis nereprésenteront que 53 % des effectifs.

D'autre part, toujours d'après les recensementsde 1971, on peut constater que les Autres Ivoirienset Etrangers, du fait de leur participation auxcircuits de la main-d'œuvre, se trouvent répartisdans l'interfluve de façon plus homogène queles Baoulé. Ces derniers, qui ne sont pas passéspar le stade d'employés, s'installent directementen zone rurale et progressent "en tache d'huile"à partir du pays baoulé. En 1971, leur mouvementne fait qu'aborder l'est de l'interfluve (cantonbakwé) ce qui explique leur très faible présencepartout ailleurs. Les parcours migratoires suivispar les Etrangers et Autres Ivoiriens, et parles baoulés sont montrés sur les Figures 22 et23.

Le recensement national de 1975 confirmedans l'ensemble cette répartition. Ainsi 64,6 %des Baoulé de l'interfluve se trouvent dans lesSous-Préfectures de Sassandra et San pédroainsi que dans le canton bakwé de Soubré qui,à lui seul, en compte 39 %.

La distribution proportionnelle des principauxgroupes varie selon les circonscriptions adminis­tratives. Pour saisir ces nuances, quatre ensemblessignificatifs ont été isolés:

1. Les départements de Divo, Gagnoa, Daloa.Ils correspondent à la région Centre-Ouest etsont des foyers d'immigration anciens en voiede stabilisation (voire même de saturation pourcertaines Sous-Préfectures) ; les densités ruralesautochtones y sont en moyenne assez élevées.2. Le département de Guiglo. Si l'on exceptela minuscule Sous-Préfecture de Toulepleu (dontla densité est exceptionnelle pour la région)il se situe, du point de vue des densités ruralesautochtones, à mi-chemin entre la régionCentre-Ouest et le département de Sassandra.Encore très peu atteint par l'actuelle vaguemigra toire, sa population allochtone corresponden grande partie aux anciens schémas de lamigration de travail.3. Le département de Sassandra. L'immigrationatteint là son maximum d'intensité, particulière­ment dans sa partie est (Sous-Préfecture deBuyo, Sassandra, San Pédro, Soubré). La proportiond'allochtones y est déjà plus forte que dans leCentre-Ouest, sans atteindre pour autant desvaleurs absolues comparables.4. Le canton bakwe de Soubré. Véritable carre­four de la migration, il est peut être lapréfiguration de la future évolution d'une grandepartie du Sud-Ouest.

TABLEAU 16. Répartition des principaux groupes d'immigrants au sein des quatre ensembles

Départements de Divo, Département de Département de Canton Bakwé de laGagnoa, Daloa Guiglo Sassan<1ra Sous-Préf. de Soubré

PopulationsNombre % Nombre % Nombre % Nombre %

d' habi tants d' habitants d' habitants d' habitants

Population rural e total e 705.075 100 108.033 100 141.921 100 12.029 100

Population allochtone 410.639 58,2 28.148 26 82.838 58,4 9.868 82100 100 100 100

Krou allochtone 1 17.349 4,2 1.645 5,8 9.174 11,1 305 3,1

Baoulé 145.220 35,4 2.064 7,3 27.393 33,1 5.526 56

Autres Ivoiriens 94.311 23 14.567 51,8 14.921 18 1.148 11 ,6

Etrangers 153.759 37,4 9.872 35,1 31.350 37,8 2.889 29,3

J Les Krou allochtones sont les Krou originaires d'uneSous-Préfecture qui n'est pas celle dans laquelle ils ontété recensés. Ces chiffres mettent en évidence une assezgrande mobilité interne au monde Krou. La plupart sontdes Guéré-Wobé ou des Uété originaires de zones où les

79

densités rurales sont fortes ; les planteurs, interrogés surles raisons de leur déplacement, répondent souvent quechez eux il n'y avai t plus de terre. Beaucoup sont égalementattirés par des perspectives d'emplois (Sassandra etGrand-l3éréby nota m ment).

Page 80: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

La distribution des Etrangers (Tableau 16)est relativement homogène, bien que le cantonbakwé accuse un léger retard. Jusqu'à présentsa population peu nombreuse, le faible développe­ment de ses plantations et de son activitééconomique en général ne lui ont pas permisd'attirer la main-d'œuvre étrangère. Il en vade même pour la catégorie des Autres Ivoiriens.L'alignement apparent des valeurs du Départementde Sassandra sur celles du Centre-Ouest estdû au poids démographique du canton bété deSoubré et des Sous-Préfectures de Gueyo etSassan(jra (donc de la rive gauche).

Le Département de Guip;lo est encore très peuatteint par l'avance baoulé. Ses immigrants(Autres Ivoiriens et Etrangers pour l'essentiel)ne suivent pas le flux migratoire est-ouest maisviennent directement du pays malinké ou duMali par Man ou Odienné. La rencontre desflux nord-sud et est-ouest n'a lieu que dansle canton bakwé de Sout>ré et la Sous-Préfecturede Buyo durant la période 1971-1975.

Centre-Ouest, Département de Sassandraet Département de Guiglo représentent donctrois époques de la migration : passée, actuelleet en voie de développement.

Il serait par conséquent très intéressantde connaître l'évolution de ces trois ensemblesdurant la période 1971-1975. Malheureusementce n'est possible que pour les Sous-Préfecturesdu Département de Sassandra et la Sous- Préfecturede Taï du Département de Guiglo l .

Les taux d'accroissement annuels ne sontportés dans le Tableau 17 qu'à titre indicatif.Les plus forts se trouvent bien sûr le plus souventlà où les immigrés étaient les moins nombreuxau départ. Des taux plus faibles peuvent repré­senter un nombre d'i mmigrants beaucoup plusimportant (cf. canton bété, Sassandra, etc.).Ce qui parait néanmoins intéressant dans la rapi-

Pour rendre comparables les deux recensements nousavons dû faire entrer dans la catégorie "ruraux" nombred'habitants considérés comme "urbains" par Schwartz lorsde ses recensements de 1971 (habitants de Grabo ou deTaï par ex.). En effet, les critères ~'etenus pour lerecensement national de 1975 sont les suivants : sontconsidérées com me rurales les agglomérations inférieuresà 4000 habitants ou bien celles qui se situent entre 4000et 10.000 habitants mais dont plus de la moitié des chefsde ménage exerce une activité agricole. Le résident estun individu installé depuis plus de six mois ou qui à l'intentionde rester pour une longue période. Ainsi il n'est pas possible

80

dité de l'accroissement (quel que soit le volumede départ) c'est q!J'à partir d'un certain degréles nouveaux arrivés ne sont plus liés, mêmeindirectement, aux plus anciens qui ne peuventplus les héberger et difficilement les utiliser.

Ce sont incontestablement les Etrangersqui présentent l'augmentation générale la plusimportante. Il faut 'cependant souligner queceux de la Sous-Préfecture de Tabou sont essen­tiellement des Libériens (53 %) et des Ghanéens(20,7 %). Ces derniers (principalement despêcheurs) sont encore 15 % dans la Sous-Préfecturede Grand-Béréby dont la composition est cependantplus conforme à celle des autres Sous-Préfectures(61 % de Voltaïques).

Si l'agro-industrie (Grand-Béréby et l'hévéa),les chantiers (barrage de Buyo), l'exploitationforestière (San Pédro) et les scieries (Gueyo)continuent à attirer la main-d'œuvre, le recrute­ment tend à devenir insuffisant. Il y a ceuxqui quittent leur emploi pour ouvrir une planta­tion mais surtout, et de plus en plus, ceux quiviennent directement à partir du pays d'originesans passer par la migration de travail, mêmesur des planta tions.

L'augmentation de la catégorie des AutresIvoiriens est la plus faible, malgré un doublementen quatre ans. Elle est surtout importante dansles Sous-Préfectures où se trouvait déjà un nombreélevé de ressortissants du même groupe ou biendans les Sous-Préfectures "neuves" où existentd'importants chantiers. Dans le second cas lenombre des immigrés part de très bas pour at­teindre des valeurs moyennes. En valeur absolue,l'immigration est la plus forte dans le cantonbété (1852 individus) où elle ne correspond pourtantqu'à 1,2 nouveau migrant par ancien installé.Dans la Sous-Préfecture de Sassandra, qui vienten second (1216) cette proportion n'est que de0,35. On peut avancer l'hypothèse qu'il s'agit

de distinguer la migration réellement rurale de celle quise dirige vers les petites villes non plus que d'estimer lapart respective des chefs d'exploitation et des manœuvres.Seules les données concernant les catégories socio-profes­sionnelles (non encore disponibles à la date de notredépouillement) permettront de lever des imprécisions.

Toutefois, vue l'imbrication souvent étroite de lamigration de travail et de la migration agricole ainsi quela prédominance de cette dernière durant les années quiprécè.dent le recensement national, les chiffres ci-dessussont, dans l'ensemble, révélateurs.

Page 81: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

TABLEAU 17. Accroissement de population selon les différents groupes

BAOULE AUTRES IVOIRIENS ETRANGERSSous- Préfectures

1971 1975 Taux 1971 1975 Taux 1971 1975 Taux

Sassandra 2.760 3.800 8,3 3.522 4.738 7,7 4.078 8.883 21,5

Soubré :Canton Bakwé 819 5.526 61,2 322 1.148 37,4 177 2.869 101

• Canton Bété 3.354 7.521 22,4 1.557 3.409 21,6 3.091 7.670 25,5

Gueyo 1.211 1.601 8,5 1.171 1.914 13,1 1.588 2.779 15,2

Buyo 2.919 4.771 13,1 244 737 31,8 524 2.247 43,9

Taï 270 766 29,8 207 758 38,3 285 1.282 45,6

Grabo 15 20 7,5 153 276 15,9 99 277 29,3

Tabou 30 126 43,2 285 553 18,0 907 1.389 Il,2

Grand Béréby 43 314 64,4 172 1.041 56,8 528 3.081 55,4

San Pédro 206 3.634 88,8 134 1.105 69,5 41 1.915 161,4

TOTAL Il.627 28.079 24,5 7.767 15.679 19,2 11.318 32.392 30,3

principalement ici d'aides familiaux et que lamigration proprement colonisatrice est faible,alo.rs que dans le canton bété elle fait preuved'un certain dynamisme. Les Sous-Préfecturesqui arrivent en troisième et quatrième positionssont Grand- Béréby et San pédro qui ont vu arriverrespectivement 5 et 7,2 nouveaux migrants parancien installé 1. Ici le débordement est manifesteet il serait indispensable de connaître la répar­tition socio-professionnelle pour en apprécierles conséquences sur l'espace rural.

Mais l'immigration la plus spectaculaire(Fig. 24) est celle des Baoulé car nous savonsqu'elle correspond à 90 % (pour le moins) à unecolonisa tion agricole. Encore localisée dansla partie est de l'interfluve, elle n'enregistrepas de forte poussée dans les anciens lieux d'im­migration (Gueyo, Sassandra) comme si l'appeldes espaces libres était le plus fort. Par contre,le canton bété est encore une zone d'immigration

1 Schwartz (l979b) a souligné le rôle des employés dechantiers dans le démarrage de bon nombre de plantations.Beaucoup mènent parallèlement les deux activités jusqu'àce que la plantation com mence à produire (généralementavec l'aide d'un proche parent).

81

très active durant la période 1971-1975. Le maxi­mum est atteint dans le canton bakwé (4707individus en quatre ans) com 'ne il était à prévoir.Le sud 2 et l'ouest ne sont pas encore touchéspar le gros de la vague bien que celle-ci com menceà contourner le Parc National et aborder la Sous­Préfecture de Taï.

Ce sont donc au total 45.678 immigrants 3qui se sont installés dans le Département deSassandra et la Sous-Préfecture de Taï durantces quatre années (ceci seulement en zone rurale).Ce chiffre peut paraître élevé, pourtant il estcertain (bien que nous n'en ayons pas la preuvedirecte) que durant la même période la régionCentre-Ouest a connu des chiffres absolus enmoyenne supérieurs par unité d'espacecomparable. Il lui suffisait, pour ce faire, que

2 Le score élevé de San pédro est dû aux 3000 Baouléoriginaires de la zone inondée du barrage de Kossou etrelève par conséquent d'une migration de type dirigé.

3 En fait davantage car il faudrait ajouter une partiedes autres Krou (Guéré- Wobé et Bété) originaires deSous-Préfectures extérieures à l'ensemble ici considéré.

Page 82: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï" : recherche et aménagement

7574

Au tres 1voi ri ens

Baoulés

6260 61Années

111111/

// Etrangers

/1/

// ...../.... '

··f...... /. ..-/

..... ..---...~ 'i=~''::',:",'~~S~~':":",;,·_·-;-----,------,---.------j----.----r---j-----r---~.,.,,'==.=':;:=:::;;''"",-;=-==--=?-,.:.'':...:'.:...:"j~~ ..

63 64 65 66 67 68 69 70 71 n 73

300

200

100

\Il

~ 50

.~ 40

"c: 30

"QI 20...0E 10o

Z

FIGURE 24, Rythme annuel d'arrivée des migrants - Valeur absolue pondérée(portant sur l'ensemble des Chefs d'exploitation) (Léna, 1979)

82

Page 83: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

1005j

o

1975•

• AIfTOCHTIIIES*ALLOCHTOIIES

10 KIl5,o

1971

E t-'(1)

CL(1),

<(1)

5"'tl'tl(1)

3(1)::sc-+-

00CL(1)

VI CI.>

0(')c-+-

<!'c-+-(1),CI.>;:s~

30S'(1)CI.>

FIG URE 258 Evolution du peuplement du canton Bakwé de la sous-préfecture de Soubré.Janvier 1971 - avril 1975 (Kahn, 1982, d'après Schwartz, 1978)

Page 84: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

1

2

1971

...· ..... . . . .. . . . . .• • • 10 •••

.. :.... :-:-:-:-:..-:-:-:-:-:.:-:-:-.........· .. . . . . . . . . .· .. . . . . . . . . .• •• lOlO ••••

• •• lOlO

1975

.. '· ..... . . . . . .. . . . . . .·-::::::::::::::::.........

1 Répartition proportionnelle de la population du canton Bakwé deSoubré selon son origine

2 Répartition de la population à "intérieur de la zone d'étude

O Bakwés l====I ITIJAutres ~autochtones t:::=:::j Baoulés Ivoiriens ~ Etrangers

FIGURE 25b Evolution du peuplement du canton Bakwé de la sous-préfecture de Soubré.Janvier 1971 - avril 1975. Même information que dans la Figure 25a (Léna, 1979)

sa population allochtone augmente de 18 %1.Notons que le canton bété, unité administrativela plus proche de cette région Centre-Ouest,a vu sa population immigrée augmenter de 132 %;on ne peut cependant pas le prendre comme

1 15 % seulement si on ne tient pas compte de la superficiedans le calcul.

84

base pour une extrapolation car sa situationde carrefour de la migration et de tête de pontde l'avance baoulé en font sans doute un casparticulier. D'autre part, il est probable quedes Sous-Préfectures d'immigration ancienneoù commencent à se poser de sérieux problèmesfonciers (telles que Oumé, Ouragahio, Divo)aient vu leur contingent migratoire diminuersensiblement. Mais il ne faut pas oublier quede vastes Sous-Préfectures aux faibles densités

Page 85: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

autochtones se trouvaient également dans l'axede migration. Ce sont en particulier Vavoua,sur la principale route nord-sud (empruntée parles Etrangers et les Ivoiriens des savanes) etGuitryl, à ·la fois aire d'expansion baoulé etaboutissement d'une des voies nord-sud(Bouaké-Oumé-Divo). Ces deux Sous- Préfecturesprésentaient des conditions quelque peu comparablesà celles de l'interfluve et il semble bien que làaussi de véritables fronts pionniers se soientdéveloppés. Il ne paraît donc pas exagéré de situerautour de 25 % l'augmentation du nombre desallochtones dans le Centre-Ouest au cours deces quatre années, ce qui, en valeur absolue,représente près du double du contingent del'interfluve (Fig. 25).

Sur la rive droite, c'est le canton bakwé quia accueilli le plus d'immigrants (8418). C'estégalement là qu'il est possible d'étudier lamorphologie et l'évolution du front pionnier avecle plus de précision vue l'abondance de documentsdémographiques2 • La comparaison des deuxrecensements permet, entre autres, ne dégagerles rythmes d'installation des trois grands groupes.En premier lieu on peut constater une augmentationannuelle du nombre des arrivées pour toutes lescatégories. Il y a donc accélération manifestedu rythme d'installation. Ainsi ce n'est que versla fin de l'année 1973 que la moitié des chefsd'exploitation recensés en 1975 seront arrivés 3•

Le doublement s'est produit en un peu plus d'unan et demi. Ce sont principalement les Baouléet les Etrangers qui en sont responsables.

L'immigration baoulé démarre vraiment en1967 selon un rythme très rapide, avec seulementdeux légères ruptures, l'une en 1969, l'autre en1974. Pour les quatre premiers mois de 1975le nombre des arrivées est nettement supérieurau "sommet" de 1973.

Les Etrangers ne com mencent à s'installermassivement qu'à partir de 1971 mais le nombred'arrivées ne cesse de croître à un ryth me accéléréet régulier.

Les Autres Ivoiriens voient leur nombre

Guitry (1975) : densité rurale autochtone =3 Il km- 2 ;29.973 immigrants dont 42,6 % de Baoulé,14,8 % d'Autres Ivoiriens, 34,6 % d'Etrangers et 8 % d'autresKrou.

Vavoua (1975): densité rurale autochtone: 1,37 h km-2 ;51.930 immigrants dont 24,7 % de Baoulé, 35,7 % d'AutresIvoiriens, 37,2 % d'Etrangers et 2,4 % d'autres Krou.

2 Les résultats détaillés du recensement na tional de1975 sont disponibles pour ce canton (et pour lui seulement)car le sociologue Schwartz y a supervisé les opérations.

3 -Encore faut-il préciser que le recensement de1975 ne comptabilise que les quatre prer.1iers moisde l'année.

85

augmenter de façon significative à partir de1967, avec une accélération en 1972. Mais l'ac­croissement n'est ni aussi rapide ni aussi régulierque pour les deux autres groupes. Pourtant lesautre premiers mois de 1975 enregistrent unnombre d'installations sans précédent. Ceciest peut-être l'indice que, malgré une réactionplus tardive, les Ivoiriens du nord se trouventà leur tour et de plus en plus devant une si tua tionoù l'émigration définitive vers la zone forestièreet ses potentialités représente la seule solutionpour se procurer les disponibilités monétairesque leur système de production ne peut leurfournir.

Pour évaluer le nombre d'immigrants quise sont installés dans le canton entre 1975 et1979, il serait absurde de poursuivre ces courbesquasi exponentielles qui correspondent à unesituation bien particulière. Nous avons donccomptabilisé les arrivées au sein de quelquesca mpements anciens et enregistré les créationsde nouveaux campements sur des pistes témoins.Les chiffres obtenus sont naturellement toutà fait approximatifs et sont proposés à titred'hypothèse (Tableau 18).

TABLEA U 18. Accroissement de la population allochtonedans le canton BakWé de 1975 à 1979

1975 1979

Baoulé 5.526 8.500Autres Ivoiriens 1.453 2.500(Krou inclus)Etrangers 2.889 5.000

TOTAL 9.868 16.000

Cependant, ceci est l'hypothèse basse j dufait que certains campements sont disséminésau sein des massifs forestiers, et donc accessiblesseulement à une démarche systématique, onpeut être conduit à une hypothèse "haute" d'environ20.000 allochtones 4 • Ces valeurs représentent,compte tenu des autochtones, des densités ruralesde 7 à 8 h km- 2 • Il est intéressant de constaterque ces faibles densités amènent malgré toutun déplacement rapide du front de colonisation

4 Il faut également souligner que les arrlvees d'aidesfamiliaux sont beaucoup plus difficiles à saisir. Ceux­ci vont en effet directement dans leur famille, sans passerpar les chefs de campement.

Page 86: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

TABLEAU 19, Comparaison des densités rurales dans leSud-Ouest et le Centre-Ouest (habitantskm- 2)

L'extrapolation à l'ensemble de l'interfluvedes projections faites pour le canton bakwé estnéanmoins impossible. Les espaces réservésaux projets agro-industriels ont en effet consi­dérablement réduit les potentialités foncières.Les seules Sous-Préfectures qui disposent encored'espace "colonisable" en quantité appréciablesont celles de San pédro et Taï. Il y a trop d'in-

qui, dès 1978, déborde sur le nord de la Sous­Préfecture de San pédro. Pourtant on ne peutparler de saturation ; rappelons que le cantonbété de Soubré avait une densité rurale supérieureà 12 h km- 2 en 1!J71 et qu'il a encore accueilli11.246 allochtones durant la période 1971-1975,portant sa densité à 16,6. Il Y a deux raisonsà cela: d'une part le canton bakwé voit se déroulerla phase pionnière proprement dite, phase durantlaquelle le nombre des chefs d'exploitation esttrès grand par rapport au nombre des dépendants;d'autre part les modalités de la colonisationont permis la création de réserves foncièresethniques et individuelles. Il n'en reste pas moinsque le canton possède encore d'importantescapacités d'accueil ; ne serait-ce que parl'étoffement des unités familiales l , un doublementde la population est à prévoir pour les prochainesannées. .

La difficulté est encore plus grande lorsquel'on cherche à évaluer le nombre d'immigrantsqui se sont installés dans l'ensemble de l'inter­fluve entre 1975 et 1979.

Les possibilités d'accueil des Départementsde Guiglo et Sassandra paraissent très fortessi on prend pour base de comparaison la régionCentre-Ouest (Tableau 19).

1975

Centre-OuestDép. de GuigloDép, de SassandraCanton Bakwé

Densitésrurales

autochtones

9,05,62,30,66

Densitésrurales

allochtones

12,52,03,43,0

connues pour que l'on puisse prédire l'avenir(réaction des sociétés autochtones, politiquefoncière de l'ARSO, rôle de l'encadrement dupaysannat, évolution des rapports de force entrecolons et entreprises agro-industrielles, etc.).Quoiqu'il en soit, en 1979, le nombre total desimmigrants ruraux du Département de Sassandra(plus la Sous-Préfecture de Tai) devai t être comprisentre 110.000 et 130.000 (soit un accroissementde 28 à 51 % en quatre ans).

STRUCTURES DES POPULATIONS IMMIGREES

Le recensement de 1975 apporte d'importantesprécisions sur la nature des différences entreles groupes d'im migrants. La répartition socio­professionnelle des actifs masculins âgés deplus de quinze ans du canton bakwé 2 fait apparaîtrele caractère purement agricole de l'immigrationet l'aspect fortement individualisé de la planta­tion (Tableau 20).

On doit noter la situation privilégié desBaoulé chez qui le nombre de cultivateurs devivriers et de manœuvres est insignifiant. Letaux de manœuvres agricoles est encore le plushaut chez les Etrangers bien qu'il soitcertainement, pour ce groupe, le plus faiblede toute la Côte d'Ivoire forestière. Parmi eux,les Voltaïques ont le meilleur rapportplanteur/actif. Mis à part le fait qu'ils sontrarement manœuvres, les Autres Ivoiriensprésentent un profil plus proche des Baoulé quedes Etrangers, soulignant ainsi l'originalité deces derniers.

Pour toutes les catégories le rapportplanteur/population active masc\.lline est plusélevé que dans les autres départements forestiersoù les planteurs ne représentent que 29 à 40% de la population active masculine âgée deplus de quinze ans. Ceci traduit à la fois la petitedimension des plantations (parce que récentes)3et l'aspect pionnier des installa tions.

Cet aspect pionnier est particulièrementmis en relief par la structure de la pyra midedes âges et le rapport hommes/fem mes (Tableau21). Les différences entre les groupes sont parfoistrès accusées comme il est également possible

2 Calculés d'après Schwartz, 1976 (Recensement National,canton bakwé de Soubré).

Par l'appel de membres de la famille (élargie) restésau village d'origine, mais également par une forte natalitédue à la jeunesse des migrants.

86

3 Le chiffre de 29 % correspond au Départementd'Abengourou (Est) où les plantations sont les plus vasteset la main-d'œuvre fa miliale la plus étoffée (ce qui n'exclutpas le recours à une importante main-d'œuvre extérieurerémunérée),

Page 87: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEAU 20.

Groupe

Baoulé

Autres Ivoiriens

Etrangers

Guinéens

Maliens

Vol taïques

Le développement des activités humaines

Répartition socio-professionnelle des actifs r.lOSCU lins âgés de p lus de 15 ans

Planteur Cultivateur Aide Manœuvre Diversvivrier familial agrico 1e

96 % % % %

82,47 0,41 16,82 0,24 0,06

64,97 6,43 26,16 1,33 1,11

60,43 7,40 19,83 12,09 0,25

57,81 9,38 25,00 6,25 l,56

57,65 9,02 19,70 13,21 0,42

62,62 6,07 19,33 Il,98

TA BLEA U 21. Sex-ratio, âge, structure familiale

Sex-ratio global20 à 59 ans

% d' hom mes mariés 20-29 ans30 ans et +

BAOULE AUTRES IVOIRIENS ETRANGERS

123 114 164154 150 277

35,7 37 28,876 84 69

Poids de différentes tranchesd'âge au sein de la populationtotale (en %)

20-29 ans30-39 ans40 ans et +

Aides familiaux de + de 15 anspar chef d'exploitation

Dépendants par actif mascu 1inde + de 15 ans

Tai II e moyenne de l'uni téfamiliale

19,8 18,5 33,216,4 19,3 19,812,7 15,2 8,6

0,2 0,37 0,29

2,3 2,16 l,7O

4 4,51 3,62

de s'en rendre compte au niveau de la compositiondes unités familiales l .

La tranche d'âge des 20 à 29 ans regroupeles individus susceptibles d'effectuer la migration

1 Les normes ici utilisées pour définir les acti fs et lesdépendants sont naturellement tout à fait arbitraires etcontestables, particulièrement le fait de n'intégrer dansla catégorie des aides familiaux que les individus de sexemasculin et âgés de plus de quinze ans (voir à ce sujetAncey*, 1968). Elles ne sont utilisées qu'aux fins decomparaison entre ~roupes.

87

pour leur propre compte. Vue la différence d'âgeentre mari et femme, le sex-ratio ne peut pré­tendre représenter la situation matrimonialed'une tranche d'âge donnée, c'est pourquoi, pourcertaines d'entre elles, la proportion d'hom mesmariés est indiquée.

Sachant que le sex-ratio des autochtones est84 (forte émigration), il est possible d'appré­cier le caractère pionnier des autres groupes.Cependant la structure de la population n'a riend'immuable, elle évolue dans le temps à mesure

Page 88: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet ToT: recherche et aménagement

que le noyau familial s'agrandit grâce aux nouveauxarrivants. Ainsi le sex-ra tio fortement déséquilibrédes Etrangers 1 est-il dû en grande partie à leurdate d'arrivée récente, phénomène auquel vients'ajouter leur plus grande jeunesse et un tauxde célibat élevé. La taille moyenne de l'unitéfamiliale et le rapport dépendants/actifs sontune résultante des trois facteurs précédents.

Le taux de célibat est naturellement beau­coup plus élevé chez les aides fam iliaux quepour les chefs d'exploitation, comme l'enquêtea pu le révéler. 11 est en effet exceptionnelqu'un couple marié apparenté au chef d'exploita­tion travaille pour ce dernier durant une périodesupérieure au minimum requis pour ouvrir uneplantation personnelle. Dès qu'un homme atteintune vingtaine d'années, et a fortiori s'il se marie,il accède facilement à la propriété grâce auximportantes disponibilités foncières. C'est ce­pendant chez les Ivoiriens des savances que cephénomène est le moins prononcé.

L'aspect relativement équilibré de la caté­gorie des Autres Ivoiriens (unité familiale moyenne:4,51 2 et sex-ratio = 114) masque en fait dessituations très diverses. Les populations dessavanes paraissent avoir un sex-ratio légèrementplus élevé, en particulier les Senoufo (176 pourla Sous-Préfecture de Soubré, 156 pourl'interfluve). Les Guéré-Wobé et les Bété sont,par contre, peu déséquilibrés ; ceci peut êtredû en partie aux dates d'arrivée mais plusprobablement aux modalités de l'immigration:la proximité géographique, l'utilisation d'unelangue très voisine et la similitude des pratiquesculturales facilitent le déplacement et l'installationrapide de la famille 3• Le processus est donc

l Parmi eux, les Guinéens (dont la structure est ende nombreux points comparable à celle des Autres Ivoiriens)sont les plus âgés et possèdent la famille la plus étendue.Les migrants voltaïques sont, de tous, les plus jeunes.Ceci explique en partie leur petit nombre de dépendants,mais dès que l'on a affaire avec un sujet d'âge mûr lesfamilles sont très comparables pour tous les groupes.Les Etrangers représentent un stade intermédiaire entremigration de travail et migration agricole. Dans lespremiers temps, ils pratiquent la seconde de la mêmefaçon qu'il s'adonnaient à la première.

2 Environ 5,2 pour les autochtones, malgré l'émigra tion.

3 Notons que si l'on considérait les sex-ratios des Krouimmigrés sur l'ensemble de l'interfluve, il faudrait séparerla migration purement agricole de celle qui part à larecherche d'emplois. Cette division recouvre d'ailleursen partie la distinction migration ancienne/récente. Ainsidans la Sous-Préfecture de Sassandra on trouve un sex­ratio de 92, c'est dire qu'ils participent déjà de l'émigrationpropre au monde Krou. Le sex-ratio est de 145 dans laSous-Préfecture de Grand-Béréby.

88

très différent de celui des gens de savane pourqui il existe toujours une part d'aventure.

D'une façon générale, le rythme d'installationplus lent et plus régulier des Autres Ivoiriensa eu pour effet d'atténuer les déséquilibres.L'accélération du rythme des arrivées dans lespremiers mois de 1975 laisse cependant prévoirune modification dont il est difficile d'évaluerl'ampleur en l'absence de recensement plus récent.

Chez les Autres Ivoiriens, le déséquilibreest surtout sensible à partir de 30 ans alors quechez les Baoulé il intervient dix ans plus tôt.Ces derniers se situent, du point de vue de l'âgedes migrants, entre les Ivoiriens et les Etrangers.Le nombre d'aides familiaux masculins de plusde 15 ans est le plus faible des trois groupesmalgré une unité familiale raisonnablement étofféet un taux de célibat élevé dans les tranchesd'âge les plus actives (20 à 34 ans). On retrouvelà les facilités d'accès au statut de chef d'ex­ploitation indiquées dans le tableau précédent.Il est déjà possible d'en déduire que les principalescauses du "dynamisme baoulé" devront êtretrouvées ailleurs que dans la cellule familiale.

QUELQUES ASPECTS DU PROCESSUSMIGRATOIRE

Globalement, il est certain que le mode deproduction dominant, en favorisant les mécanismesde marché, provoque le déplacement despopulations vers les régions où abondent lesfacteurs de production. Mais les stratégies etcomportements observés dépendent en grandepartie des conditions existant en milieu d'origineet du passé des individus. Ainsi, tout en s'écartantde la problématique zone de départ/zone d'appel,qui risque de laisser de côté des points essentiels,et sachant que le but de tout migrant estl'obtention de biens monétaires, il est intérerssantd'interpréter la migration dans ses rapports avecl'origine ethno-géographique des migrants. Parcontre, il paraît nécessaire de se rappeler queles causes éventuellement mises en évidencene sont déterminantes qu'en fonction d'un étatdonné des rapports sociaux et économiques danscette région de l'ouest africain. Il s'agit doncen quelque sorte de causes secondaires.

L'enquête portant sur les motifs du départet les conditions de la migration a été réaliséeà partir d'un échantillon de 170 planteurs 4 •

100 Baoulé, 30 Autres Ivoiriens et 40 Etrangers (dont 20Voltaïques, 12 Maliens et 8 Guinéens). Ce même échantillona également été utilisé pour l'analyse des systèmes deproduction et de la genèse des inégalités économiques (Léna,197ge) .

Page 89: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

La biographie des chefs d'exploitation révèled'importantes différences quant aux activitésexercées dans le passé : 78 % des Baoulé onttravaillé, à un titre ou à un autre, dans les plan­ta tions contre 58 % des Etrangers et 10 % desAutres Ivoiriens. Mais 67 % l'ont fait en tantque chef d'exploitation alors que le fait est ex­ceptionnel pour les deux autres groupes. Parcontre, 45 % des Etrangers ont travaillé com memanœuvres sur des plantations et 15 % sur deschantiers agro-industriels et forestiers. LesAutres Ivoiriens étaient pour la plupart chefsd'exploitation vivrière ou aides familiaux (13 %seulement de manœuvres sur des plantations).

A partir de ces données apparaîssent troisfaisceaux de motivations assez individualisés:les Baoulé étaient, en majorité, déjà planteurs l

et il convient donc de savoir pourquoi ils ontdû s'expatrier pour continuer à reproduire leursystème de production. Les Autres Ivoirienssont à la recherche d'un système plus lucratifet les Etrangers veulent obtenir un statut dechef d'exploitation qui leur permette de pratiquerpour leur propre compte une activité pour laquelleils ont déjà acquis de l'expérience.

Les Ivoiriens du Nord ont depuis longtempsl'habitude de s'expatrier pour "trouver de l'argent".Les cultures vivrières pratiquées en savane dansle cadre familial permettent de vivre mais nedonnent pas la possibilité de faire face à la moné­tarisation croissante des échanges. Le Sud­Ouest de la Côte d'Ivoire leur offre une opportunitéd'accéder au statut de chef d'exploitation plustôt qu'en zone de départ et d'échapper ainsi àla tutelle des aînés. Le désir des jeunes de fuirune structure sociale contraignante n'apparaîtpas en tant que tel dans leur discours, il s'agitplutôt d'acquérir immédiatement un statut socialcomparable à celui des aî'nés (accès aux épouses,contrôle du produit, etc.) et ceci grâce à l'argent.Mais ce nouveau statut ne peut être vécu pleine­ment qu'à l'extérieur, aussi le colon necherchera-t-il guère à revenir au village : Ilsur 18 manifestent l'intention de s'installerdéfinitivement; les autres pensent éventuellementrentrer au village lorsqu'ils seront âgés (statutd'aînesse) et qu'ils ne pourront plus s'occuperde leur plantation. Les rapports du colon avecson milieu d'origine sont donc très lâches ; lesretours, peu fréquents, sont dus essentiellementà des événements sociaux majeurs (funérailles).

1 Du moins au sein de cet échantillon. Ce n'estcertainement plus vrai à l'échelle du canton. Cetteproportion dépend de l'origine géographique et sociale dumigrant, deux facteurs qui évoluent dans le temps (cf.infra).

89

Certains ne sont pas rentrés une seule fois encinq ou six ans. Par contre, il n'est pas rarequ'un aîné fasse le voyage jusqu'à la plantationde son cadet afin de réclamer de l'argent, leplanteur est alors contraint de faire face à cettedemande et l'un des rares cas de vente de planta­tion que nous ayons enregistré est dû à une diffi­culté de ce genre. On comprendra par conséquentle désir de l'immigrant de cacher son niveaude vie à ses parents et amis restés au village.L'image qu'il tentera d'accréditer est celle d'unhomme qui travaille durement, dans des conditionsdifficiles, pour un faible profit (cela correspondd'ailleurs assez bien à la situation réelle èurantles premières années).

Dans ces conditions, les retombéeséconomiques de la plantation sur le milieu d'originesont semble-t-il très faibles.

A l'échelle des Sous-Préfectures on ne trouvepas de corrélation significative entre la densitérurale de la zone de départ et l'émigration. Lesdensités relativement faibles du pays malinkémasquent cependant des portions de territoirebeaucoup plus denses où la saturation du terroirpourrait représenter une incitation supplémentaire.Ceci serait enccre plus vrai du pays senoufo.Pourtant aucun èes chefs d'exploitation interrogésn'a invoqué cette raison, même lorsqu'elle luiétait suggérée. Il ne s'agit donc pas tant del'impossibilité de reproduire un système de produc­tion que du besoin d'en changer afin d'accéderà un genre de vie qui, en se répandant, produitses élus et ses laissés pour compte.

La migration des gens de forêt est à la foisplus réduite et plus complexe. Cette fois lesdensités rurales jouent un rôle indéniable ;nombreux sont les migrants (Wobé, Bété) quiproviennent de régions où la densité ruralemoyenne est supérieure à 30 h km- 2 2. Or lasegmentation et la création de campementsproches du lip-u de culture sont rendus difficilespar l'existence de telles densités. Les planteursinterrogés (échantillon et questionnaire de sondage)invoquent tous le manque de forêt dans leurrégion, qu'il s'agisse de la création ou de l'extensiond'une plantativn. Mais si les plantations en zone

L Certains Bété, nota mment, sont originaires de régions(environs de Gagnoa) où, localement, la densité rurale peutatteindra 100 h km- 2 du fait d'une forte et anciennecolonisation allochtone. Les cessions de terres abusiveseffectuées depuis vingt ans interdisent dans ce cas la simplereproduction du système socio-économique bété. La seulesolution est alors l'émigration, principalement vers lesvilles, mais aussi vers les espaces libres. Les revenus detype urbain ainsi obtenus paraÎssent avoir un impact beaucoupplus grand sur le milieu d'origine que ceux qui proviennentdes plantations extérieures. La plantation est, là aussi,la conquête de l'indépendance.

Page 90: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

et les envois d'argent sont exceptionnels 3.Les Maliens appartiennent à trois groupes

ethniques : Malinké (les plus anciens immigrésde la région), Bambara (au sex-ratio le moinsdéséqUilibré) et Senoufo qui, arrivés à partir de1972, présentent encore èes caractéristiques pion­nières affirmées (d'ailleurs partagées avec lanouvelle vague de migrants malinké).

La majorité de ces immigrants avait déjàparticipé à une migration de travail et parccnsÉquent effectué des étapes d'une durée variabledans d'autres régions forestières de Côte d'Ivoire.Ces épisc.des ne sont pas toujours immédiatementantérieurs à leur arrivée èans le Sud-Ouest.

L'installation dans la région de Soubré estperçue com me définitive mais les liens dE meurentavec le pays d'origine. Durant les premières années,retours et expéditions d'argent sont très rares;plus tard les contacts reprennent mais, là encore,il semblerait que les flux monétaires vers le paysd'origine aient été souvent surestimés 4 • L'entréeen prodL:ction de la plantation coïncide, en effet,avec la reconstitution de la cellule familiale,si bien qu'il reste peu ou pas du tout de parentsdirects à entretenir au villageS. Certains déclarentavoir fait parvenir beaucoup plus d'argent chezeux lorsqu'ils étaient salariés que depuis leur ac­cession au statut de planteur.

Mais ce sont les migrants voltaïques, et par­ticulièrement mossi, qui illustrent le mieux lacomplémentarité ou, plus exactement, ladépendance d'une économie de savane vis-à-visde la zone forestière où se trouvent à la fois lespotentialités naturelles, le capital et le travail.La migration mossi est de loin la plus spectaculaire:entre 15 et 34 aps, 45 % des hommes vont chercherdu travail à l'extérieur 6. Or cette migration,si elle leur rap~orte de l'argent, ne leur permetpas d'acquérir un statut social car la dot et laterre, n'étant pas monétarisées, restent sous lecontrôle des anciens. Il y a donc contradiction,d'après Ancey* (1977) entre le pouvoir monÉtairedétenu par les classes cadettes et l'usage qu'ellespeuvent en faire. L'autonomie ne peut donc être

Du moins ceux qui sont issus des plantations.

de colonisation ont une superficie légèrementsupérieure à celles du pays d'origine, elles neparaissent pas capables de retenir la totalitéde la main-d'œuvre familiale dont une partiepréfère se diriger vers des emplois salariés, souventde type urbain l, provoquant ainsi un déséquilibredans le sex-ratio. Il ne s'agit donc pas là d'uneentreprise à caractère spéculatif, ou, tout aumoins, les conditions ne sont pas réunies pourqu'elle s'affirme com me telle.

L'immigration étrangère relève des mêmesschémas que les déplacements nord-sud des popu­lations de la savane ivoirienne. Les frontièresont ici peu d'importance.

Numériquement la plus faible parmi les troisprincipaux groupes étrangers, la migrationguinéenne est aussi la plus difficile à enfermerdans une description univoque. Certains Guinéensmigrent depuis déjà fort longtemps. Ainsi plusieursd'entre-eux disent avoir quitté le pays à causede l'échec du café; or l'épidémie de trachéomycosequi a ruiné l'essor de la production caféièreremonte tout de même aux années 1958-59.Depuis, la culture du café a repris en pays kissicomme au sud de Kankan (savane). n existemême un plan pour le développement de la culturedu cacaoyer. Il faut donc voir ces réticensesà créer une plantation en Guinée com me la consé­quence des conditions à la production (prix d'achatau producteur, part de la production réquisitionnéepar les pouvoirs publics, etc.) qui s'avèrent parti­culièrement désavantageuses pour le paysancomparées à la situation ivoirienne. Si la Guinéeest le seul des trois grands pays entretenantun courant migratoire avec la Côte d'Ivoire àprésenter des conditions écologiques permettantla culture du café et du cacao, cette dernièrene revêt pas une importance et des caractéristiquessuffisantes pour drainer les courants migratoires(Peulhs du Fouta Djalon surpeuplé, Malinké àla recherche d'argent, etc.). Or Ce sont ces gensde savane qui émigrent. Les populations de forêt(Kissi, Loma, Guerzé) ne représentent pas 3 %des Guinéens du canton bakwé2•

De tous les immigrants, les Guinéens, dansleur ensemble, paraissent être les moins engagÉsdans l'économie de plantation. Pourtant, la ruptureavec le milieu d'origine est particulièrementaccentuée (les difficultés rencontrées pour lepassage de la frontière n'y sont pas étrangères)

3 Le nombre de Guinéensinsuffisant pour permettre dement sur ce point.

entrevus estse prononcer

cependantdéfinitive':'

1 Dans ce dernier cas la scolarisation élevée du mondekrou et l'absence de débouchés dans la région sont lesprincipaux responsables.

2 Apparentés aux Dan et Gouro, ils possèdent le mêmegenre de vie que les ethnies du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire.

90

5 Cet aspect dépend bien évidemment du statut familialet social du planteur.

6 Ancey*, 1977. La pénurie de terres en pays mossijoue un rôle certain j elle conduit d'ailleurs au développe­ment de véri tables fronts pionniers à l'intérieur mêmede la Haute-Volta.

Page 91: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

acquise que par l'émigration et pleinement vécueseulement à l'extérieur. Ceci explique cetteforte tendance de la migration temporaire detravail à devenir définitive. C'est, dans ce cas,le mariage qui conditionne en grande partie lafréquence et, éventuellement, la cessation desretours. Mais l'ouverture d'une plantation joueégalement un grand rôle : le migrant qui saitqu'il va pouvoir s'installer à son compte dansun avenir proche choisira de ne pas rentrer aupays cette année là afin de conserver le fruitde son épargne et le consacrer à son propre entre­tien dans l'attente de la première récolte vivrière.De plus, il ne pourra retourner en Haute-Voltaque muni d'un certain pécule, gage de réussite.Or ceci est impossible durant les premiers temps;ce sont donc au moins cinq années qui sont ainsisoustraites aux habituels transferts monétaires.Par contre, ce changement de statut, et particu­lièrement ces cinq années, sont tout profit pourla Côte d'Ivoire.

Lorsque le migrant part à la recherche d'unemploi agricole, il a en outre la perspectived'accéder au statut de chef d'exploitation plustôt qu'en Haute-Volta : 28 ans dans le cantonbakwé contre 34 en zone de départ (Martinetin Léna et al., 1977). L'avantage est donc certain,non seulement par rapport au pays d'origine,mais aussi vis-à-vis des régions forestières d'immi­gration ancienne où, parfois, l'accès à la terren'est même plus envisageable.

Si, au départ, le rôle des chantiers forestiersa été important pour l'installation des premiersMossi, tel n'est plus le cas aujourd'hui où prèsde 43 % des migrants viennent directement deHaute-Volta (Schwartz, 1979b). Il s'agit doncd'un "transfert indirect de la migration de travailà la migration agricole" (Martinet in Léna etal., 1977). Mais l'influence de ce mouvementsur le volU'me global de la migration de travailparaît encore peu sensible.

Les Mossi considèrent également leur installa­tion com me définitive, mais ils craignent unchangement d'attitude à leur égard de la partdes pouvoirs publics. Peut - être leur brusquechangement de statut (pas toujours bien acceptépar les planteurs ivoiriens 1) et leur réussi te même,en sont-ils responsables. Toujours est-il quecette crainte constitue un stimulantsupplémentaire pour beaucoup d'entre eux. Ils'agira dès lors de posséder rapidement une

1 Connus depuis des dizaines d'années com me manœuvres,ils deviennent soudain propriétaires, allant jusqu'à recrutereux-mêmes des salariés. D'où un certain nombre derésistances de la part de leurs ex-employeurs.

91

fuperficie suffisamment importante pour êtreà l'abri de toute contestation et de tirer lemaximum de revenus de la plantation le plustôt possible en prévision de lendemains incertains.C'est peut-être là une des causes du "dyna mismemossi". Ajoutons que, bien placés pour apprécierl'efficacité du travail pour le compte d'autrui,ils s'y appliquent avec d'autant plus dedétermination qu'ils en sont cette fois les seulsbénéficiaires.

Le cas des Baoulé est quelque peu à part.Leur territoire ethnique s'étend à la fois surla forêt et la sa vane, certains terroirs "de contact"comprenant les deux types de formation végétale.Du fait que les immigrants proviennent de troismilieux écologiques différents on peut penserque les motifs invoqués pour expliquer le départvont varier en fonction de leur origine géographi­que.

Ceux qui sont originaires de savane n'avaientpas la possibilité de pratiquer les cultures derente ou bien exploitaient une petite plantationde caféiers souvent peu rentable. Seuls ceuxqui viennent de terroirs de contact ou de forêtpouvaient s'adonner à la culture du caféier etdu cacaoyer (avec un bonheur variable suivantles régions). On devrait donc s'attendre à trouverune grande majorité d'habitants de la savaneparmi les immigrants. Mais tel n'est pas le cas.A l'échelle du canton bakwé, un peu plus de lamoitié des Baoulé est originaire de régions deforêt ou de contact (Schwartz, 1976) ; ce chiffres'élève à 74 % au sein de notre échantillon (Léna,197ge). Or nous avons vu que parmi ces derniers,67 % étaient déjà en possession d'une plantationau village d'origine. Il s'agit donc de cumulateurs.Sur ces 67 planteurs, neuf créent leur troisièmeplantation et deux leur quatrième.

Cette forte représentation des cumulateursau sein de l'échantillon est due à une majoritéde planteurs originaires de la Sous-Préfecturede Bocanda, précisément située au contact dela forêt et de la savane. Mais d'après nos sondagesle canton bakwé comporte également une forteproportion de cumulateurs parmi les immigrantsarrivés avant 1973. Depuis, cette proportiona tendance à diminuer rapidement. Dans leszones de colonisation encore plus récentes (entrele Parc de Taï et le Libéria) il semblerait mêmeque les cumulateurs soient l'exception 2 • Ce

2 Ruf*, 1979. Il serait intéressant de savoir s'il s'agiten majorité de migrants originaires de savane ou si lesgens de forêt sont toujours bien représentés. Dans ce derniercas, cela signifierait émigration directe des jeunes en âgede planter.

Page 92: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

ne seraient donc plus les mêmes couches de lapopula tion qui émigrent. On remarquera, unefois de plus, l'absence d'homogénéité du phénomènedans le temps.

Les raisons invoquées par les planteursinterrogés sont de deux sort('s : 73 % parlenten premier lieu de la sécheresse qui, de la findes années soixante au début des années soixantedix, aurait détruit leurs plantations ousérieusement affaibli les rendements 1 24 %évoquent d'abord le manque de terre. Les deuxraisons sont en fait souvent évoquéesconjointement.

Mais la détérioration des potentialitéscacaoyères et caféières du pays baoulé, si elleconstitue bien une importante cause de départ,ne peut être à l'origine de l'émigration dans sonensemble puisque celle-ci avait commencé avantla période de sécheresse. Les facteurs écologiquesn'interviendraient alors que pour accentuer unphénomène en cours. Ils n'expliquent pas quedès 1968 un quart de la population baoulé setrouve à l'extérieur du territoire ethnique.

Le manque de terre paraît plus déterminant 2

à condition de le resituer à l'intérieur du systèmeéconomique baoulé et de son évolution.

Ceux qui invoquent la saturation des terroirssont presque tous originaires de la zone de contactforêt/savane du sud-est du "V" baoulé où lesdensités rurales moyennes atteignent 40 h km- 2 ,

laissant présager l'existence de terroirs beaucoupplus fortement peuplés. Dans cette région, lesystème cultural pratiqué (Blanc-Pamard*, 1975)ne consacre aux cultures de rente que la partiedes terroirs qui portent un couvert forestier.Or cet espace, déjà restreint, a subi depuis long­temps l'impact d'une migration interne au terri­toire ethnique. Cette migration vers les zonesforestières du pays baoulé est aujourd'hui arrêtéepar manque de terres disponibles. Elle s'estdonc réorientée vers les espaces libres extérieurs.Ce même manque de terre conduit ceux qui avaitdéjà une plantation à rechercher ailleurs des possi­bilités d'extension qu'ils n'ont plus sur place.

Il ne faut pourtant pas confondre l'effetavec la cause. La saturation des terroirs baouléde forêt et l'expansion remarquable de cetteethnie à l'extérieur de son territoire originelne sont que la conséquence d'autres facteursplus difficiles à cerner. Ainsi il est toujoursmalaisé de rendre compte du caractère largement

Vallat (1979) donne l'évolution des rendements surune exploitation baoulé de 1968 à 1973. La baisse estrégulière et drama tique.

spéculatif de la plantation, révélé, entre autres,par l'extension du cumul. Pourtant, bien qu'ilne puisse être question de fournir ici l'explicationd'un phénomène qui affecte l'ensemble de lasociété baoulé 3 il est utile d'évoquer quelques-unesdes caractéristiques historiques et sociales sus­ceptibles d'éclairer les comportements observés.

Pour Etienne et Etienne* (1968) "l'aptitudeau mouvement" des Baoulé serait un prolongementdirect des migrations de l'époque pré-coloniale.Leur histoire est en effet marquée par lechangement guerres de Samori, intégrationde populations locales, etc. Ainsi la structuresociale n'aurait jamais eu le temps de secristalliser, laissant beaucoup d'initiative àl'individu et au petit groupe. D'autre part, lesBaoulé, originellement matrilinéaires, pratiquentune bilinéarité de fait qui les rendmulti-dépendants et paradoxalement plus libres.Cet état de chose va donner lieu à un phénomènede "clientèle", construit sur la base des rapportsde parenté, dans lequel vont intervenirmarchandage et concurrence pour la récupérationdes actifs.

Plus déterminant cependant nous paraît le rôlejoué par la richesse (trésor familial, statut social)dans le fonctionnement de la société baoulé 4 •

Celle-ci aurait besoin, pour se reproduire, d'avoiraccès à une source de richesse (captifs, or, etmaintenant plantation). Cette particularitérendrait compte du caractère spéculatif de laplantation comme de la finalité non exclusivementagricole de leur migrationS.

Le prestige lié à l'argent, la mobilité spatiale,l'absence d'encadrement contraignant, vont con­tribuer à promouvoir l'expérience individuelle.Celle-ci trouvera tout naturellement à s'employersur les premières plantations agni (Etienne etEtienne*, 1968), donnant ainsi le départ à unemigration de travail d'un genre particulier (les"six mois") qui n'a jamais cessé depuis. Cettemigration permettait de se procurer l'argentqui manquait au village. Mais très vite, les Baoulévont créer leurs propres plantations pour échapper

3 Etienne .et Etienne (1968) remarquait que vers 1930ce sont les descendants de captifs qui se montraient lesplus dynamiques du point de vue de la création de planta­tions extérieures. Mais très vite le processus va gagnertoutes les couches de la société. Tous ne partent cependantpas avec des chances égales car la capacité à attirer dela main-d'œuvre dépend dans une grande mesure du statutsocial.

4 Chauveau* (1978) a décrit la structuration de l'espacebaoulé par les échanges, et notamment le rôle des minesd'or, durant l'époque pré-coloniale.

2 Du moins lorsqu'on prend en considération une échellede temps plus vaste.

92

5 Suggéré également par Raison* (1968).

Page 93: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

à la situation de salarié. D'après Etienne etEtienne* (1968), ils considèrent le salariat com meun état de dépendance analogue à la captivité,or, dans leur système de valeurs, le captif estau "degré zéro de l'existence sociale". La migra­tion de travail va d'abord se retourner vers lesplanta tions du pays baoulé puis vers les planta­tions (baoulé) extérieures. Le travail rémunéréne sera pas considéré comme un rapport de sala­riat puisque le recrutement est effectué surla base des liens de parenté.

D'autre part, le travail sur les plantationsextérieures est pour le jeune "six mois" beaucoupplus attirant que le travail sur une plantationau village ; celle-ci est souvent moins productive,le salaire versé moins intéressant. Les plantationsextérieures auront donc une plus grande facilitéà se procurer de la main-d'œuvre, elles serontplus vastes et mieux entretenues, rendant lesplantations au village encore moins attirantes.

Ce courant de main-d'œuvre à l'usage exclusifdes Baoulé va favoriser l'enrichissement de ceuxqui sont en position de le drainer. On voitl'extrême souplesse de la société baoulé qui fournitune "réponse" on ne peut mieux adaptée auxcontraintes économiques actuelles. En ce senson ne peut parler d'un prolongement direct desmouvements de l'époque pré-coloniale mais plutôtde la reproduction d'une logique sociale. Lamigration baoulé n'est pas une aventure, elleest portée par l'ensemble du pays baoulé. Lemigrant, malgré son individualisme, est toujoursune excroissance de sa société, les contactssont étroits avec le pays d'origine et laconcrétisation de la réussite sera bien souventl'édification d'une maison "en dur" au village.

Ces quelques remarques portant sur lesdifférents processus migratoires permettentd'apprécier l'importance que peut revêtir laconnaissance du milieu de départ pourl'interprétation des données recueillies en zoned'arrivée.

LA QUESTION FONCIERE ET L'OCCUPATIONDE L'ESPACE

L'originalité du Sud-Ouest par rapport aux zonesde colonisation plus anciennes est l'abondancedes espaces inoccupés. Pourtant, ces vastesterritoires appartiennent sans exception à l'unou l'autre des patrilignages bakwé. Au premierabord, la situation apparaît donc peu différentede celle que l'on rencontre ailleurs, si ce n'estque le droit foncier est resté beaucoup plus tra­ditionnel, faute d'avoir été confronté à desproblèmes relevant d'une autre conception dela terre. Comme le décrit Schwartz (l979b):"(la terre) est, en premier lieu, inaliénable, ce

93

qui•••entraine l'exclusion, dans les transactionsfoncières, de tout recours aux espèces monétairesdont l'utilisation aurait pour conséquenceinéluctable d'entraîner l'appropriation de la terre;ce n'est donc en principe qu'un usufruit quel'autochtone cède au migrant". Cette autorisationde cultiver est délivrée par le chef du pat ri lignage(ou d'un segment de patrilignage)l au cours d'unepetite cérémonie symbolique. Les cessionsfoncières sont si peu considérées comme définitivesque de nombreux Bakwé estiment avoir un droitsur une partie de la récolte des immigrés. Eneffet, celle-ci n'est pas seulement le produitdu travail mais aussi le fruit de la terre qui,elle, leur appartient de par l'antériorité de leurinstallation 2 •

Dans les conditions particulières du Sud­Ouest, ces principes vont se révéler incapablesde maintenir un contrôle foncier satisfaisant.

L'immensité et la situation privilégiée duterritoire du village Niamagui vont en faire leprincipal foyer d'immigration 3• Les premiersarrivés y bénéficieront de conditions exception­nelles "Les Bakwé, longtemps isolés, ...sontplutôt contents de voir venir à eux des allochtonesqui sont enfin pour eux une garantie d'ouverturesur l'extérieur. Dans ce climat d'enthousiasmeles limites fixées aux terrres attribuées sontplus que floues. Le plus souvent on n'accompagnemême pas le migrant sur le terrain. On lui ditsimplement "vas dans telle direction etinstalle-toi!". Résultat les premiers arrivéss'arrogent des espaces considérables (le fondateurd'Amaradougou, Amarafofana, revendiqueaujourd'hui la propriété de 1200 ha - 12 km 2

- sur le terroir de Niamaguj)" (Schwartz, 1979b).Bien souvent, les limites ne sont fixées que dansune seule direction, le long de la piste. Lapénétration "en profondeur" n'étant limitée quepar la rencontre d'un autre front de défrichement,progressant en sens inverse à partir d'une autrepiste. De véritables "domaines" (principalementdioula et baoulé) vont ainsi voir le jour 4 et former

1 Il s'agit en général d'un chef de village, or celui-cicorrespond parfois à un segment de patrilignage (Schwartz*,1973).

2 Si cette ponction ne s'est pas généralisée, elle existecependant sous diverses formes atténuées (mais seulementavec les immigrés que les autochtones ont eux-mêmeaccueillis et placés).

3 Les autres villages, Galéa excepté, se montrerontsouvent plus réticents. Certains ont même refusé d'accepterdes immigrants jusqu'en 1978.

4 Le phénomène a été grandement facilité par ladistribution linéaire (nord-sud) de l'habitat autochtone.Les territoires s'étendent de part et d'autre de cette lignesur de grandes distances sans rencontrer (en particuliervers l'ouest) d'autres espaces habités.

Page 94: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Ta'! : recherche et aménagement

la structure de base de l'espace de colonisation,déterminant les grandes lignes de sa morphologieet de son évolution jusqu'à aujourd'hui.

Ce morcellement du contrôle de l'espaceva amener le développement de véritables féo­dalités qui, si elles ne se posent pas vraimenten rivales de droit des "grigbe" bakwé, n'en ontpas moins empiété peu à peu sur leurs prérogatives.Ainsi, dans leur grande majorité, les immigrantsarrivés après 1970 ne se sont plus adressés auxBakwé mais directement aux chefs des colonsde leur propre ethnie l • Même la simple présen­ta tion du nouveau planteur aux autochtones,par un colon plus ancien, n'est plus systématique­ment pratiquée. Lorsque cette coutume estencore respectée elle n'a qu'un caractère sym­bolique car l'emplacement et la superficie octroyésont bien souvent été décidés à l'avance entreallochtones.

Les immigrants qui ont le plus longtempscontinué à s'adresser aux Bakwé sont les Mossi;mais une grande partie de l'espace étant déjàpolitiquement occupé, les autochtones se sontvus contraints de leur céder des terres éloignées,favorisant ainsi l'avance du front. Une foisatteintes les limites du Parc National cet exutoirea vu ses possibilités sensiblement diminuées.

En outre, les immigrants doivent obtenirde la Sous-Préfecture une autorisation de miseen culture (qui n'est pas un titre de propriété,com me le croient certains colons). La superficie,limitée à 50 ha, dépend des possibilités de miseen valeur du planteur (compte tenu des dimensionsde la cellule familiale). Cette formalité a étéinstaurée par l'administration à la seule fin decontrôler tant bien que mal les installationset veiller à ne pas laisser se constituer de vastesdomaines improductifs. Mais là aussi, la commis­sion d'attribution des terres débordée, se trouvele plus souvent devant le fait accompli.

Cette dépossession progressive du contrôlepolitique de l'espace représente une différencefondamentale par rapport aux zones de colonisa­tion plus anciennes où les densités rurales, lastructure de l'habitat et l'organisationpolitique-territoriale plus complexe nepermettaient pas une telle main-mise sur l'espacerura1 2 •

l Celui-ci est, en général, le premier installé sur unterritoire autochtone donné.

2 Dans les autres régions forestières, les immigrés ontle plus souvent développé des quartiers ethniques à l'intérieurou aux abords des villages autochtones. Mais vu l'importancedes cessions de terres opérées dans certaines régions, lerésultat final est parfois peu différent quant au fond CDozon*,1975 pour le pays Bé té).

94

Le débordement total des autochtones etl'absence d'avantages réels apportés par cetteimmigration 3 vont conduire peu à peu vers unevénalisation des transactions foncières 4 • En1979, le prix de l'hectare de forêt variait entre5.000 et 15.000 FCFA selon les villages. Maiss'agit-il bien d'une vente? De l'aveu de nombreuxBakwé ce ne serait qu'une redevance donnantle droit de cultiver (sorte de rente foncière).Si ces "ventes" sont encore loin d'être généraliséesen 1979, le danger est néanmoins clairementperçu par les anciens qui cherchent à éviterà tout prix la privatisation du phénomène.

Si, dans le système traditionnel autochtone,une même famille cultive souvent une mêmepartie du terroir, il n'y a pas appropriation, lesterres restent un bien commun symboliquementgéré par le chef du lignage. L'introduction del'agriculture de plantation représente, certes,par le biais de l'héritage, un grand pas vers laconstitution de domaines privés, mais il ne s'agitencore que d'un droit d'usage indéfiniment prolongéqui ne vient pas rompre l'harmonie du terroir.Par contre, la cession de terres contre espècesmonétaires par un membre du lignage représen­terait une aliénation du patrimoine communet un désordre social inacceptable. C'est pourquoi,dans la plupart des cas, un consensus a été obtenuau sein des villages bakwé pour ne céder quedes terres éloignées du terroir cultivé actuel

3 En particulier, l'i mpossibilité dans laquelle se trouventles Bakwé de détourner à leur profit une partie de la forcede travail des immigrés en échange de la terre, commecela s'est fait plus à l'est.

.. Le phénomène existe depuis plus de 20 ans chez leursvoisins Bété et Dida (Raulin*, 1957). Ici, l'aveu d'unetransaction financière est très difficile à obtenir. L'absenced'un statut de la terre homogène pour toute la région, lamultiplication des cas particuliers et l'attitude hostiledes pouvoirs publics (le Préfet a interdit pour plusieursmois toute cession de terre en 1979 afin de ne pas entraverla délimitation des différents projets agro-industriels)ont contribué à établir une conspiration du silence. Eneffet, l'abolition des droits coutumiers sur la terre parla circulaire du Ministère de l'Intérieur de 1968 a fait glisserla tenure de la terre entre les mains de l'Etat. Cettecirculaire stipule que le propriétaire coutumier ne peutexiger le paiement d'une redevance de la part du détenteurde droits d'usage accordés par l'Etat. La vente est doncen principe illicite, de même que toute sorte de rentefoncière, puisque le migrant reçoit théoriquement uneautorisation de mise en valeur de la Sous-Préfecture. Cecaractère illicite est d'autant plus évident que les terrescédées sont plus éloignées du terroir proprement dit. Unecertaine ambiguïté est cependant maintenue par les retardsdans la procédure d'attribution des autorisations de miseen valeur et par les caractéristiques mêmes du systèmede production (campements de culture éloignés, très longuesjachères, etc.).

Page 95: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

et placer le produit des ventes (ou plutôt desredevances) sur un compte bancaire unique dontla jouissance est commune. Malgré cesprécautions, un certain nombre d'individus onteffectué des cessions de terres pour leur bénéficepersonnel durant ces dernières années.

L'intérêt scientifique du débordementnumérique et politique des autochtones par lavague d'immigration réside dans la possibilitéd'observer ce phénomène exceptionnel en Côted'Ivoire forestière l'organisation quasi sanscontraintes de leur espace par les colons. 11est en effet très intéressant de voir comment,à partir d'une situation très permissive, ce nouveaumilieu social hétérogène va rapidement engendrerson ordre propre et ses contraintes. Chaque groupeva exercer à sa façon la maîtrise foncière.

La répartition des unités de résidence ducanton bakwé est la suivante, autochtones inclus(Recensement National*, 1975 et Schwartz, 1976).

L'espace est donc essentiellement partagéentre deux types d'habitat : l'un, très groupé,composé de gros ca mpements, l'autre disperséen petites unités inférieures à 50 habitants. Lepremier sera responsable d'une occupation del'espace en cercles concentriques, le secondd'une colonisation de type linéaire. De plus,la distribution des immigrants selon ces formesd'habitat correspond en partie à des différencesethniques. Ainsi, seulement 28,5 % des Baoulé(donc l'habitat est largement mono-ethnique)se répartissent au sein des quinze unités derésidence de leur ethnie qui comportent plusde soixante-quinze habitants alors que c'estla situation inverse pour les Autres Ivoirienset Etrangers : 71,8 % d'entre eux vivent dansdes ca mpements supérieurs à soixante-quinzehabitants.

Les Baoulé ont 104 implantations de moinsde 20 ha contre 18 pour les Autres Ivoiriens et25 pour les Etrangers (principalement des Mossi).Les gros campements (dont le plus importantest Amaradougou avec près de 1000 habitants)sont toujours poly-ethniques et mêmepluri-nationaux. On y trouve très peu de Baouléou de ressortissants de régions forestières, ils'agit presque uniquement de migrants originairesde la savane ; le critère de rassemblement estavant tout la religion musulmane; partagée parIvoiriens du Nord, Guinéens, Maliens et certainsVoltaiques. La présence d'une mosquée et la

- de 10 h10 à 40 h50 à 99 h

100 à +

= 87 unités, soit environ 500 personnes=170 3800 personnes

39 2700 personnes= 21 5000 personnes

95

pratique de la prière en commun ont conduità la concentration de l'habitat. Le domaineprimitif ne s'est donc pas limité, pour ces groscampements, à l'ethnie ou la nationalité du premierarrivé. Pourtant, au sein même de ces campe­ments, des clivages subsistent qui sont dus auxdifférentes origines des migrants; ils sont révéléspar l'existence de quartiers correspondants auxnationalités. Des regroupements par ethnieont également été observés mais, en général,tout rassemblement systématique a été interditpar la rapidité même de la constitution des campe­ments qui n'a pas permis à ces divisions de marqueren profondeur la trame de l'habitat. Par contre,au niveau du fonctionnement de l'entité sociale,ces distinctions restent valides. Chaque groupeest représenté auprès du chef de campementpar son ressortissant le plus anciennement installé.Celui-ci défend les intérêts de son groupe lorsdes conflits fonciers et arbitre les dissensionsinternes. D'autre part, l'organisation du travailest souvent établie sur des bases ethniques ounationales.

Mais c'est le chef de campement qui estle véritable maître de la terre. C'est lui qui fixela superficie attribuée et décide de la localisationde la future exploitation. Cette tâche réclameune bonne connaissance du terrain com me dessuperficies déjà attribuées afin de ne pas interféreravec la future extension des lots en cours d'ex­ploitation. Les sentiers, ruisseaux, ravins etarbres remarquables seront utilisés comme limitesnaturelles et points de repère.

Le modèle théorique de la structure du terroirest à peu près le suivant: l'ancienneté de l'installa­tion s'inscrit dans l'espace selon une successionde couches concentriques ; ainsi les premiersarrivés occupent les cercles les plus prochesdu campement et les derniers se voient octroyerles parcelles les plus excentrées. La divisiondu terroir selon l'appartenance nationale ouethnique s'effectue, quant à elle, suivant le rayondes cercles ainsi définis (en "parts de gâteau").La progression des défrichements suit, en principe,une direction centrifuge. Par conséquent, lamise en valeur du lot étant progressive, il y auraune alternance de forêt et de zones cultivéesjusqu'à la périphérie du terroir l (les couchesforestières étant plus minces près du centreoù l'ancienneté de la mise en valeur a permisd'importants défrichements). Mais cette organisa-

) Nous confondons sous ce terme le terroir d'utilisation,c'est-à-dire les surfaces réellement cultivées, et le terroir(l'appropriation (parcelles attribuées mais non défrichées).Nous conservons le terme "territoire" pour désigner l'espacesur lequel la communauté a obtenu le droit d'usage maisqui n'a pas encore fait l'objet d'attributions individuelles.

Page 96: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï" : recherche et aménagement

tion idéale a dû composer avec les réalités existan­tes (pistes forestières, ravins, bas-fonds inondables,etc.) et avec les contraintes que sa propreévolution a engendrées.

Les composantes naturelles du paysage etla localisation des pistes forestières entraînentl'irrégularité de la forme et de la qualité deslots. Autrement dit, quand bien même les super­ficies octroyées seraient strictement égales(ce qui n'est pas le cas) il n'y aurait pas de progres­sion régulière. De plus, les pistes forestièresoffrent une grande facilité de colonisation etun avantage considérable pour la circulationet l'évacuation des produits; par conséquent,lorsque la progression centrifuge rencontre unepiste, elle cède momentanément la place à unecolonisation linéaire rapide qui peut enserrerdes espaces non encore attribués. Dans ce casil sera possible d'observer, sur certaines portions,une progression centripète des défrichements.Les tentatives de regroupement foncier (ethniqueou par nationalité) sont ainsi tenues en échecpuisque les lignes de progression centrifugessont en quelque sorte court-circuitées.

Toutes ces altérations apportées au schémainitial font que la reconstitution chronologiquede l'occupation de l'espace est souvent malaisée.

Enfin, de nombreux planteurs opèrent unchoix stratégique dans la mise en valeur de leurlot. Au lieu de progresser linéairement, ils pré­fèrent défricher d'abord les parties les plus mena­cées par l'extension d'autres concessions afinque nul ne puisse contester leur droit. Le butest toujours d'encercler les portions restant àmettre en culture et de présenter, sur tous lesfronts externes, des parcelles déjà mises en valeur.En fait, le lot étant attribué nominalement,le planteur ne devrait pas ressentir avec autantd'acuité le besoin de protéger sa propriété l .

On peut trouver à cela plusieurs raisons: d'unepart, les autorités publiques précisent qu'un colonne doit pas prétendre à plus de terre qu'il nepeut en mettre en valeur, or cette notion resteparfaitement abstraite et laisse tout loisir àun voisin "expansionniste" de contester les terresincultes de l'intéressé; d'autre part il y a sansdoute là une survivance du droit traditionnel,il est en effet d'usage qu'un cultivateur ne puissefaire valoir ses droits sur une terre que dansla mesure où celle-ci porte, ou a porté, des tracesde son travail. Le système de la réserve foncièreleur paraît donc précaire. L'i mportance accordéepar les paysans à la marque concrète qu'ils doiventimprimer dans l'espace conduit certains à planter

1 Les nombreux conflits fonciers semblent en tout caslui donner raison.

96

quelques pieds de cacaoyers sur les terres quileur sont attribuées alors même qu'ils ne pourrontles mettre en valeur que beaucoup plus tard.Cette marque est souvent utilisée pour arbitrerles conflits lorsqu'une portion de forêt estcontestée. La parcelle n'étant pas défrichée,les cacaoyers sont difficilement repérables,seul celui qui les a plantés sait combien il y ena et où ils se trouvent. Le contestataire ne peutjamais être sûr de les avoir tous découverts etrisque donc d'être confondu. Cette pratiquea un caractère fortement dissuasif.

Ces différentes stratégies donnent un aspectanarchique à la mise en valeur des lots et peuventmême déterminer certains aspects de l'organisa­tion du terroir: la mise en culture apparemmenterratique de parcelles éloignées les unes desautres entraîne la création, chaque année, denouveaux sentiers entre le point d'entrée surle lot et la parcelle de l'année. Ces sentiersvont être, à leur tour, utilisés par les planteursdont le lot est situé au-delà, multipliant ainsiles voies d'accès et les choix stra tégiques, induis­ant dans l'ordre des défrichements un détermi­nisme étranger à la progression géométrique.

Toujours est-il que les conditions ne sontpas les mêmes pour l'immigrant suivant la dateà laquelle il s'est installé. L'augmentation dunombre des colons et la complexité croissantedu terroir ont rendu nécessaire une délimitationde plus en plus précise des lots attribués, cecin'a pas été le cas pour les premiers colons quin'étaient li mités, au départ, que par des direc­tions de défrichement. Lorsqu'ils se sont vuscontraints d'installer de nouveaux arrivants au­delà de leurs plantations et dans la même directionils ont encore eu la possibilité de se réserverd'importantes superficies. Dans la plupart descas, ces nouveaux colons étaient eux-mêmespeu limités, seules les limites situées le longdes pistes (très convoitées) étaient bornées avecprécision et accordées avec parcimonie, pourle reste le planteur avait tout le loisir de faireprogresser ses défrichements com me il l'enten­dait dans la direction qui lui avait été indiquée.Lorsque son front de défrichement risquait d'in­terférer à brève échéance avec celui d'un autreplanteur, il était procédé à une délimitationen présence du chef de campement et des deuxpartis.

Mais cette relative anarchie a dû peu àpeu céder le pas devant un certain nombre decontraintes: il s'agit, bien sûr, des limites duterritoire (frontières, souvent floues, du "domaineprimitif", mais aussi pression foncière des campe­ments environnants qui en rendent l'extensiondifficile) et, surtout, de l'augmentation des tempsde parcours impliquée par le maintien de l'habitatgroupé. Cette dernière contrainte agit dans

Page 97: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

le sens d'une limitation des superficies réservées.La pression eut sans doute été trop faible pourprovoquer une réduction significative de la dimen­sion des lots attribués si le rythme des arrivéesétai t resté lent, mais son accéléra tion considéra­ble a entraîné une modification de la politiquefoncière. Ainsi, de flou qu'il était au départ,le statut du lot s'est peu à peu affirmé, précisé,tout en prenant des proportions plus modestesqui l'identifient aujourd'hui aux normes des autori­sations sous-préfectorales.

Dès 1978, à Amaradougou, la saturationest complète, les limites du terroir venant coïn­cider avec celles du territoire. A la même date,les autres gros campements dioula disposaientencore de quelques possibilités d'extension quiallaient s'amenuisant rapidement.

Ce mode de colonisation de l'espace està l'origine des plus fortes densités rurales detout le front pionnier. Ainsi, sur un premier terri­toire de 69,25 km 2 nous trouvons, en 1975, 2110habitants, soit une densité de 30,47 h km- 2 •

D'après échantillon, on peut estimer à 4,27personnes la cellule d'exploitation qui disposealors de 14,02 ha.

Un second territoire (Kolobadougou) compte600 habitants sur environ 15 km 2 , soit 40 h km- 2

et 10,7 ha par cellule d'exploitation.Si l'on tient compte des terres improductives

(espace bâti, pistes, ravins, marigots, etc.) ceschiffres peuvent paraître faibles pour une régiondont la réputation est d'avoir d'importantes dispo­nibilités foncières.

C'est au sein de ces campements que l'ontrouve la plus forte proportion de planteurs quise sentent limités par rapport à leur capacitéde mise en valeur. Certains ont déjà achevéle défrichement de leur lot et cherchent de laterre ailleurs; d'autres se plaignent de ne pouvoirfaire venir leurs frères ou leurs fils sur la plantationfaute de possibilités d'extension. Ces problèmessont naturellement aggravés par la saturation abso­lue des territoires qui interdit l'attribution denouvelles terres. Dans l'ensemble, cependant, lescolons se déclarent satisfaits d'avoir pu accéder austatut qui est désormais le leur l •

Le mode d'occupation de l'espace des Baouléest tout à fait différent. Etienne et Etienne*(1968) avait déjà souligné leur propension à occu­per l'espace en habitat dispersé dans les zonesde colonisation; mais nulle part jusqu'à présent

1 Une fois la totalité de leur lot mise en valeur, lasuperficie moyenne de leurs plantations sera supérieureà celle de la plus grande partie du monde krou. La différenceréside dans le fait que les autochtones de l'interfluve nesont pas encore )imités.

cette tendance n'avait pu s'exercer avec unetelle liberté.

L'avantage de l'habitat dispersé n'est plusà démontrer dans le cas d'un front pionnier prati­quant un système de culture extensif. La distan­ce entre le lieu de travail et l'habitation étantpratiquement inexistante, les temps de travaux,la surveillance et l'entretien de la plantations'en trouvent considérablement améliorés. Maisce qui fait sa force pourrait également fairesa faiblesse, car la dispersion ne favorise ni lepoids socio-économique ni l'efficacité sociale.Dans ce cas précis, les conditions de l'efficacitérésident dans l'application d'une technique demaîtrise de l'espace basée sur une organisationsocio-spatiale hiérarchisée qui fonctionne jusqu'àprésent au mieux des intérêts du groupe. Ainsi,au lieu d'être concentrée en un lieu, la hiérarchiesociale est éclatée dans l'espace.

Cette hiérarchie est essentiellement baséesur l'antériorité de l'installation et le découpageadministratif de la région d'origine. Commele souligne Vallat* (1979): "c'est la préséanced'installation qui confère la dignité: plus unémigrant est anciennement installé, plus il ad'ascendant sur ses congénères". Si, pour lesgros ca mpe ments dioula, c'est l'appartenancereligieuse qui joue comme cadre d'appropriationde l'espace, pour les Baoulé, c'est l'ethnie etla communauté d'origine.

Lesourd (1982) souligne qu'il n'y a pas derelation vrai ment étroite entre di mension dulot attribué par les autochtones et unciennetéde l'installation; en fait les situations sont trèsvariables: les premiers Baoulé arrivés ont reçuentre 125 et 1200 ha suivant la proximité auvillage autochtone et les liens qu'ils avaienttissés avec les Bakwé. Ce sont !.es "chefs histo­riques" auxquels les Bakwé ont délégué leur pouvoirde distribuer la terre afin de ne "pas être constam­ment dérangés par des partages à effectuer surdes terroirs particulièrement étendus".

Outre -cette fonction de "maître de la terredélégué", les premiers arrivés exercent leurautorité sur les ressortissants de leur Sous- Préfec-­ture d'origine. Spatialement, ces deux typesde fonction ne coïncident pas, la seconde estexercée sur un espace en général beaucoup plusvaste et morcelé. Viennent ensuite, les clTefsde campement dont l'importance est varil1ble(ancienneté d'installation, importance du domaineaccordé, situation de commandement - carrefour,piste -); puis les chefs d'exploitation. A ceschéma pyramidal il convient d'apporter quelquesnuances: d'une part "les territoires des chefferiessont rarement homogènes: la multiplicationdes arrivées et les installations "là où il y avaitde la place" ont réuni des gens de Sous- Préfec-

97

Page 98: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

tures di fférentes" (Lesourd, 1982). Il existeégalement des campements qui font preuve d'unegrande autonomie ainsi que quelques chefs d'ex­ploitation isolés. Enfin, tant au niveau des airesde commandement que des campements, lesregroupements "ne reproduisent qu'imparfaite­ment les divisions sous-préfectorales des régionsde départ. Elles correspondent plutôt à des re­groupements de membres d'une même tribu,d'une fraction de tribu, voire d'un même village.••Les vieilles divisions tribales du Baoulé se recons­tituent partiellement dans les zones pionnières:cela n'est pas sans conséquence sur les paysagesagraires et les relations sociales".

"Les chefs de terre baoulé ont, en général,procédé à des partages de terre dans le cadredu campement avec un souci manifeste d'équité.Remarquons toutefois qu'ils ont gardé pour eux­mêmes des domaines largement supérieurs àceux offerts à leurs dépendants" (Lesourd, 1982).Selon l'auteur, les vastes domaines ont, en général,été répartis entre les immigrants baoulé sansque le lien de parenté soit particulièrement pré­pondérant. Les domaines moyens ont été redis­tribués dans un cadre familial mais non exclusif,alors que les petits domaines sont tous de typefamilial ou amical.

Les Baoulé ont presque éliminé toute concur­rence, dans leur secteur, de la part d'autres immi­grants. L'espace de colonisation baoulé est,en effet, quasiment mono-ethnique.

Un immigrant non baoulé a très peu de chancesde voir sa candidature agréée; d'une part aucunresponsable de communauté allochtone ne serisquera à installer un immigrant en dehors deson secteur, d'autre part il n'y a pas de "candidatlibre", chacun doit être introduit par un colonplus ancien ayant acquis un droit d'usage sur]a terre.

Le paysage est ainsi traversé par des fron­tières aussi invisibles qu'infranchissables baséessur ce principe fondamental qu'est le respectde la maîtrise foncière acquise par l'antérioritéde l'i nstalla tion.

Mais la technique baoulé permet d'acquérircette maîtrise sur un espace considérable. Outrele contrôle des pistes par l'annexion des carre­fours, les chefs baoulé s'assurent des réservesfoncières en installant les immigrants, non passuivant l'ordre de leur arrivée, mais de façonà occuper "immédiatement une grande longueurde piste. Il sera procédé ensuite à un com ble­ment interstitiel. Ainsi les dates d'arrivée deschefs de campement le long d'une piste ne sesuivent pas; bien souvent, au contraire, le pluséloigné est parmi les premiers installés. Cettetactique correspond également au désir des immi­grés d'avoir autour de leur campement suffisam-

98

ment d'espace libre pour pouvoir faire venirparents ou amis. De cette façon, chaque chefde campement bénéficie d'un statut privilégiépar rapport à son village d'origine en ayant lapossibilité d'attirer des personnes de son choix.

Dans ces attributions foncières l'espacesitué perpendiculairement à la piste n'est prati­quement pas pris en compte. On s'explique dèslors la progression linéaire extrêmement rapidedu front baoulé (plusieurs kilomètres par moisen 1976) et l'importance des massifs forestiersvierges enserrés entre les pistes 1.

La méthode baoulé de colonisation de l'espaceobtient les plus faibles densités humaines dela zone pionnière: le territoire baoulé le plusdensément peuplé compte 720 habitants pour38,5 km 2 soit 18,7 h km- 2 • La cellule moyenneétant estimée à 4,04 personnes, on aura 21,6 hapar exploi ta tion.

Cette moyenne n'est donnée qu'à titre indica­tif. En fait, il y a une très grande variabilitédans la dimension des tenures. Au sein d'un échan­tillon de quarante planteurs baoulé, Lesourdtrouve une variation "de 9,33 à 158,86 ha, soitun écart de 1 à 17, la moyenne s'établissant à37,48 ha. Si l'on comptabilisait les petits lotsdes dépendants familiaux d'une exploitation (noncomptés dans l'enquête) la plus petite superficieserait 2 ha. L'inégalité est flagrante selon quel'on tient sa terre d'un autochtone ou d'un chefde terre baoulé, ou d'un parent dont on dépend"(1982). Sur un échantillon de 55 planteurs lesmoyennes se répartissent comme suit: 46 hapour les domaines directement concédés parles autochtones, 23,88 ha lorsque la cession futeffectuée par un chef de terre ~aoulé, 12,87 haquand il s'agit d'un parent. "Les dons autochtonesde vastes domaines à redistribuer semblent avoirfavorisé la naissance de grandes exploitationsdont ont profité les chefs de terre ainsi quequelques dépendants parmi les premiers arrivés".Par la suite, l'accueil de nouveaux arrivants,le morcellement des domaines familiaux ontà la fois réduit la dimension des exploitations,créé une situation de blocage foncier, et multi­plié les conflits. Tant et si bien que les Baoulé,dont la situation par rapport à la terre étaitla plus favorable, se trouvent désormais confrontés

Un important facteur de disparition de ces réservesest l'ouverture de nouvelles pistes par les exploitantsforestiers qui offrent ainsi de nouvelles perspectives àla colonisation. D'autre part, il convient de ne pas suresti merces réserves, Lesourd rappelle opportunément (I982) quetoutes ces terres sont attribuées et que l'on se trouve doncen situation de blocage foncier, mis à part quelques divisionsde domaines familiaux encore envisageables.

Page 99: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

à la perspective d'une nouvelle émigration afinde trouver des terres disponibles.

L'habitat dispersé n'est pas le propre desBaoulé. On trouve également quelques campe­ments dioula de petite dimension; ils correspon­dent à une phase plus tardive, sont trèsindépendants (ils ne reconnaissent que le chefdioula de Soubré) et sont principalement situéssur les territoires des villages bakwé qui n'ontfait aucune cession globale comme Niamaguiou Galéa en 1964-67. Les campements d'immi­grés de ces villages sont restés de petite di men­sion quelle que soit l'ethnie. Aucune tentativede regroupement de l'habitat ou d'obtention d'undroit sur un territoire n'a été relevée. Les formesde la colonisation sont donc très adaptables etdépendent étroitement des rapports avec lesautochtones l • Ainsi, plus au Sud, les immigrésont, com me dans le Centre-Ouest, souvent créédes quartiers allochtones au sein (ou juste à côté)des villages bakwé (ex.: Oupoyo, Krohon, etc.).Une exception cependant: quelles que soientles conditions, les Baoulé sont, dans leur grandemajorité, restés fidèles à leur mode de coloni­sa tion.

Les ethnies ivoiriennes de forêt (Guéré,Wobé, Bété) pratiquent le campement de culturemono-familial exactement com me au pays d'ori­gine. La démarche reste individuelle et aucuneorganisation territoriale n'apparaît.

Martinet (1975) avait remarqué que les Mossiétaient responsables de la majeure partie desca mpements mono-ethniques des Etrangers etqu'ils se répartissaient volontiers en unités derésidence petites et moyennes 2 • L'importanceaccordée à la piste et la rapidité des défriche­ments rappellent le système baoulé. C'est parfoisle lignage qui semble jouer comme cadre d'appro­priation de l'espace 3 mais en moyenne, le mono­ethnisme est plus difficilement maintenu quechez les Baoulé; d'autre part ce type de coloni­sation est trop peu répandu pour que l'on puissese prononcer. Les stratégies ne paraissent concer­ner jusqu'à présent Que la famille étendue et

l On peut pourtant se demander si le maintien d'unerela tive maîtrise de leur espace par certains villagesautochtones eut été possible sans la polarisation del'immigration que les importantes cessions de terre deNiamagui et Galéa ont entraînée.

2 Bien qu'ils présentent à peu près tous les typesd'i mplantation possibles (avec autochtones, avec Baoulé,Etrangers et Autres Ivoiriens).

3 Plusieurs campements au Sud de la piste de Nibi 1appartiennent à des ressortissants d'un même lignage(Martinet, 1979).

99

de faibles espaces. Il est probable que les regrou­pements constatés sont pour une large part l'effetd'une contrainte/stratégie autochtone plutôtqu'une tactique mise au point par les intéressés.

Il y a souvent un contraste étonnant entrel'exiguïté du campement mossi (une ou deuxcases) et la rapidité de la progression des défri­chements alentour. Ceci est une conséquencedirecte du taux de célibat élevé des nouveauxcolons dont les campements comptent parfoisautant de chefs d'exploitation que de résidents.

Sur les marges de la zone pionnière, le con­trôle foncier échappe à la fois aux autochtoneset aux chefs des "domaines primitifs". La luttepour l'espace y est parfois âpre et les conflitsviolents 4 • Ces derniers (essentiellement entreBaoulé et Mossi) sont en général le fait de doublesattributions de terres, soit volontaires (certainsBakwé cherchant à bloquer l'avance baoulé enimplantant des Mossi aux bons endroits), soitinvolontaires.

Quoiqu'il en soit, il semble que les tempsde l'immigration policée et contrôlée soientbien terminés dans certains secteurs. Les facili­tés offertes à la première vague d'immigrantsont peu à peu disparu et l'arrivée de nouveauxchefs d'exploitation a maintenant lieu dans unclimat social modifié. Seuls les aides familiauxcontinuent d'affluer sans problème. Après cettephase à la fois anarchique et auto-organiséeil est fort probable que le contrôle de la terrepasse de plus en plus aux mains des pouvoirspublics.

LES ACTIVITES ECONOMIQUES

LES SYSTEMES DE PRODUCTION

Bakwé

"Avec une densité démographique de 0,5 h km- L

et des unités de résidence de 55 habitants, l'ag­gression que les Bakwé font subir à leur espacepour assurer leur survie matérielle ne peut êtrequ'infime. Si leur mode de production tradition­nel, fondé sur la cueillette et une agriculturevivrière très peu diversifiée, est par définitiongrand consommateur d'espace, il n'est cependantnullement destructeur d'espace" (Schwartz, 1979b).

Ramassage, chasse et pêche fournissentaujourd'hui encore une part non négligeable del'alimentation ainsi qu'un grand nombre de pro­duits d'utilisation courante (plantes médicinales,

En 1979, il Y a eu (jeux décès consécutifs à un conflitfoncier.

Page 100: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

feuilles de palmier pour confectionner les toitures,etc.). Schwartz a relevé en 1976 à Niamaguiplus de 20 produits de ramassage qui entrentdans la composition des repas ou sont consomméspar les chasseurs, les enfants, etc., au coursde leurs déplacements 1 • La graine de palmierà huile est également un produit de cueillettede première importance. Les escargots de forêt(achatines) ainsi qu'une espèce de tortue terres­tre font aussi l'objet d'un ramassage occasionnel.

Tous ces produits sont destinés à l'auto-consommation. Seule la noix de cola (les colatierssont systématiquement préservés lors des défriche­ments) fait parfois l'objet d'une petite com mercia­lisation.

En période de soudure alimentaire on peutconstater une sensible augmentation des activitésde cueillette et, par conséquent, de la placede ces produits dans l'ali mentation quotidienne.

La chasse à l'arc a totalement disparu audébut des années soixante (alors qu'elle subsisteencore chez leurs proches voisins les Guéré).Parfois, les petits ani maux sont encore chassésla nuit avec une lance en bois; mais c'est lachasse au piège qui, parmi les techniques ar­chai'ques, est la plus pratiquée et la plus produc­tive. La chasse collective ayant pratiquementdisparu, c'est la chasse individuelle au fusil quiprend la plus grande importance. Avec le défriche­ment de la parcelle de l'année et la récolte duvin de palme il s'agit là d'une des trois principa­les activités des hommes et certainement laplus prisée. Singes et biches sont les animauxles plus couramment consommés. Appoint ali­mentaire important, l'approvisionnement enviande de chasse est cependant irrégulier. D'autrepart, depuis l'arrivée en masse des immigrants,la productivité de la chasse a, semble-t-il, consi­dérablement diminué. C'est sans doute en partiepour cette raison que les Bakwé se retournentde plus en plus vers la pêche qui est, en fait,perçue par eux comme la véritable sécurité ali­mentaire (Schwartz, 1979b). La pêche au filetou à la ligne est individuelle mais périodiquementle village se regroupe pour la traditionnelle pêcheau poison (fruits de palmier raphia broyés) prati­quée la nuit à la lueur des torches et à laquellepeuvent participer des membres des communautésvillageoises voisines (hom mes et fem mes). Ala suite des regroupements villageois effectuéspar l'administration coloniale, certains villagesbakwé n'ont plus de débouché sur un fleuve ou

1 Ce sont plus de 40 espèces de ramassage qui sont encoreutilisées par les Bété de Soubré (Zadi Koubi, 1979) et parles Guéré et Oubi (GnésioTéhé, 1980).

100

une rivière suffisamment important. Ils s'allientdonc pour l'occasion aux villages riverains.

L'élevage ne peut être véritablement consi­déré com me une activité économique. Les bœufs,qui constituaient traditionnellement la compensa­tion matrimoniale, ont presque totalement disparudu fait de la monétarisation de la dot. Le nombredes caprins, ovins et volailles est extrêmementvariable d'un village à l'autre, ou même d'unindividu à l'autre. On trouve ainsi, tantôt l'accu­mulation "collective", non dirigée, d'animauxconsommés uniquement lors des grandes occa­sions (mariages, deuils, etc.) durant lesquellesle village reçoit des personnes extérieures (c'estl'aîné du lignage qui autorise la consommation),tantôt une appropriation par les unités de pro­duction (famille restreinte) avec vente occasion­nelle à d'autres villages bakwé plus démunisdevant les exigences de la vie sociale. Générale­ment aucune technique particulière n'est miseen œuvre, si ce n'est l'édification de quelquesrares barrières destinées à protéger quelqueschamps parmi les plus proches du village. Lenombre de volailles est faible (à peine plus impor­tant que le nombre d'habitants!) mais ceci estdû, en partie, à une épidémie qui a sévi dansle Sud-Ouest peu avant l'enquête. Quant auxovins et caprins, leur nombre varie entre dixet trente têtes dans les quelques villages en­quêtés. L'aspect économ ique de cet élevagenous paraît donc entièrement subordonné à sonrôle social.

L'agriculture proprement dite n'était pas,pour les hommes, l'activité principale. "Jadis,affirment les vieux, l'hom me bakwé ne consacraitguère plus de 15 jours de l'année à l'agriculture.Ce temps allait exclusivement à l'abattage desarbres..•" (Schwartz, 1977). L'entretien du champet la récolte étaient effectués par les femmeset les enfants. L'introduction des cultures derente a sensiblement modifié cet état de chosescar le café et le cacao étant des produits exclu­sivement destinés au marché et représentantune source de revenus potentiellement importante,leur culture a été en grande partie monopoliséepar les hommes.

L'agriculture de plantation s'est introduitesans grand bouleversement au sein des activitésproductives traditionnelles grâce à la pratiqued'un défrichement quasi annuel. Ainsi il n'y apas rupture, il ne s'agit que de prolonger indéfini­ment la période productive d'une parcelle grâceà une nouvelle culture nécessitant peu de soins(la plantation bakwé a un caractère très extensif,avec des rendements faibles).

Néanmoins, l'adoption des cultures de rentea eu un certain nombre de conséquences; toutd'abord au niveau de l'organisation des terroirs.

Page 101: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

TABLEAU 23. Age des plantations et progression del'économie de plantation à Nibi II

sur la forêt représentent 45,5 % des parcellesdéfrichées mais 54,2 % de la superficie (Léna,1981).

Les cultures de rente ont eu égalementun certain effet sur les cultures vivrières dansla mesure où le planteur dispose d'un plus grandchoix pour la dissémination des plantes cultivées(banane, taro, arbres frui tiers, ananas•••). Uneautre conséquence a été de rendre quasipermanents un certain nombre de campementsde culture temporaires (autrefois annuels).

L'âge des plantations sur le terroir de Nibi IItraduit le ryth me de progression de l'économiede plantation dans ce village (Tableau 23). Les

Le village de Nibi II a 88 habitants répartis ensix familles étendues (22 chefs d'exploitation).L'ensemble des terres productives (vivriers inclus)représentait en 1976, 86,7 ha dont près de 56 haplantés en cacao (53,5 ha) et en café (2,4 ha).Il y a donc immobilisation progressive d'une partiedu terroir, et comme il s'agit en majorité deszones les plus proches de la route ou des pistes(facilité d'évacuer les produits) une certainerépartition de l'espace a dû être organisée entreles six groupes familiaux afin que chacun puissebénéficier de parcelles proches 1• L'espace, qui,en agriculture vivrière traditionnelle, était utilisécollectivement, tend à se privatiser de plus enplus à cause de la relative pérennité des nouvellescultures et des problèmes d'héritage.

Si dans de nombreuses régions tropicalesle défrichement est effectué plutôt aux dépensd'une brousse secondaire (Conklin (1975) a vancele chiffre de 44 champs sur 48 sur un terroirHanunoo aux Philippines), l'adoption des culturesde rente entraîne ici un comportement différent(extension de l'espace utile du terroir, choixdes sols les plus propices, modification des straté­gies d'occupation de l'espace, etc.). Pour lesannées 1975-76 les chiffres sont donnés dansle Tableau 22.

ClasseAge des Superficie Moyenne

plantations totale annuelle

o à 4 ans 10,69 ha 2,67 ha

5 à 12 ans 14,10 ha 1,76 ha

13 ans et + 21,50 ha (0,83 ha)

De plus, les parcelles défrichées dans l'inten­tion de planter du cacao ou du café après larécolte de vivrier (pratique qui tend à se généra­liser) sont prises sur la forêt dans 92 % des caset présentent une di mension légèrement supé­rieure: pour les deux années, les parcelles prises

1 Notons que l'arrivée des immigrants et la pressionfoncière consécuti ve ont conduit les Bakwé à effectuerdes défrichements stratégiques, à la périphérie de leurterroir afin de protéger leur espace. Dans le cas qui nousoccupe la superficie réservée est estimée à 1500 ha. Mêmeavec une jachère de 12 ans et une augmentation rapidedes superficies plantées, le village serait encore pourlongtemps à l'abri de tout blocage foncier.

TABLEAU 22. Origine des surfaces défrichées en1975 et 1976

Année

1975

1976

ha défrichés

23,54

30,00

Forêt

11 ,69

17,34

Brousse

Il,85

12,66

101

classes présentées ont été choisies en fonctionde leur signification. Ainsi la classe n01 repré­sente à la fois les plantations pas ou peu producti­ves et celles qui ont été créées durant la phased'immigration intensive. La classe n02 est forméepar des plantations en pleine production qui ontété ouvertes depuis l'arrivée des premiers immi­grants dans le canton. La troisième représentel'héritage du passé, les deux parcelles les plusanciennes ayant respectivement 38 et 34 ansOa moyenne annuelle a, dans ce cas, peu de signi­fication).

Pour la seule année 1976, les superficiesplantées s'élèvent à 9,64 ha (soit presque autantque durant les quatre années précédentes). En1977, neuf chefs d'exploitation ont agrandi leurplantation; ils seront douze en 1978.

Les raisons de ce développement rapidesont nombreuses. D'une part, il y a l'exempledes allochtones qui apportent la preuve de larentabilité des plantations; les Bakwé se sententdominés sur leur propre terrain. D'autre part,l'augmentation du prix du cacao a permis unemeilleure rentabilité du travail du planteur etl'emploi de manœuvres contractuels. Enfin lerôle des organismes d'encadrement rural, diffi­cile à évaluer, ne doit pas être négligé, non plusque les facilités offertes à la commercialisation

Page 102: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

du produit. Cette augmentation des surfacesplantées autochtones est une conséquence directede l'intégration économique du Sud-Ouest.

Contrairement à la plupart des plantationsallochtones, limitées par la dimension des lots,les plantations bakwé, grâce aux réserves foncièresde leurs terroirs, ont de très grandes capacitésd'accroissement. Les Bakwé pourraient mêmese classer parmi les plus grands planteurs duSud-Ouest si ce n'était le problème crucial dumanque de main-d'œuvre et la tentation de gainsimmédiats par la cession de terres de plus enplus proches du village.

Dioula

Leurs cultures sont à peu près les mêmes quecelles des Bakwé, notons cependant que certainscultivent l'igname ainsi qu'arachide et patatedouce en très petites quantités. L'élevage n'estpas, en moyenne, plus développé, mais certainsDioula sont réputés pour leur cheptel ovin quileur permet des ventes importantes lors desfêtes musulmanes.

Souvent installés dans des campements densé­ment peuplés, les Dioula ont parfois diversifiéle champ de leurs activités productives au pointd'inclure le peti t artisanat et le com merce pourfaire face à une demande croisf:ante. Ainsi l'ontrouve des tisseurs de "papo" l, des fabricantsde mortiers, des menuisiers, des réparateursde bicyclettes, des forgerons et des com merçants.Leur clientèle dépasse le cadre du ca mpementdioula et s'étend aux Baoulé et Bakwé du voisina­ge (il n'est pas rare de voir ces derniers acheterdu "papo" n. Ces artisans et commerçantsabandonnent de ~lm en plus la plantation.

Com me c'est le cas pour la grande majoritédes migrants, le Dioula ne peut choisir la parcellequ'il va défricher, il cultivera la portion qu'onlui a attribuée jusqu'à ce qu'il n'ait plus de terre(mis à part les pentes trop fortes et les bas­fonds inondés). Tous les sols ne convenant pasaux cultures de rente, la réussite de la plantationsera très variable. Mais une sélection des surfa­ces (qui nécessiterait l'intervention massivede conseillers) réduirait considérablement ladimension des plantations car les portions attri­buées sont actuellement de la à 15 ha seulement.La surface plantée représenterait entre 3 et5 ha. De l'avis des planteurs, l'espace restant,consacré aux cultures vi vrières avec jachère,serait contesté par les nouveaux arrivants qui

1 Type de couverture d'habitation réalisée à partir defolioles de raphia.

ont soif de terres. Mais là n'est pas la vraiemotivation, encore une fois, aucun planteur dela région n'est attiré par les performance à l'hect­are. Une parcelle d'un hectare qui rapporteannuellement 100 kg de cacao, sans effort niinvestissement, sera toujours préférable à uneparcelle de 1000 m2 produisant la même quantitéavec beaucoup de soins (du moins tant qu'il ya de l'espace disponible).

Le défrichement proprement dit est effectuéselon la méthode bakwé, avec une très grandediversité dans les résultats. Certaines planta­tions portent encore un nombre important degrands arbres, d'autres, pas du tout. Ceci dépendde la force de travail dont dispose le planteurau moment du défrichement et traduit l'hétéro­généité des conditions économiques.

Traditionnellement les Dioula cultivent le rizde deux façons: soit en semant à la volée dans lechamp après brûlis, ce qui donne un assez grand es­pacement des pieds et des récoltes encore in­férieures à celles des Bakwé; soit en plantant leriz en pépinière et en le repiquant dans les bas­fonds. La deuxième méthode nous a semblé trèsrare dans le front pionnier. Ceci explique sansdoute que presque partout les soudures soient diffi­ciles et que le maïs (plus abondant que chezles Bakwé) serve d'aliment de remplacementen a ttendant la récolte de paddy.

Ne connaissant pas les aptitudes des sols,les Dioula plantent fréquem ment un mélangede cacao et café en espérant qu'une des espècesréussira. Les jeunes plants sont ensuite abandon­nés deux ans au recrû naturel puis, par la suite,le planteur s'efforcera d'effectuer au moins undésherbage par an avant la récolte.

Les insecticides connaissent un succès certainmalgré leur prix. Certains planteurs possèdentdes pulvérisateurs et louent leurs services àla raison de 2000 francs CFA l'hectare (choseinconnue au village bakwé étudié).

La répartition des tâches et les périodesd'activité sont sensiblement les mêmes que chezles Bakwé. Par contre l'homme participe plusactivement à la récolte du paddy au point queparfois la fem me en est exemptée. La scolarisa­tion des enfants étant moins poussée (ou plussouple du point de vue des horaires dans les écolescoraniques), ceux-ci participent davantage auxtâches agricoles.

Les arbres fruitiers (plus nombreux dansle nord de la Côte d'Ivoire et les pays limitro­phes) sont plantés systématiquement par lesDioula en vue de la com mercialisation. Malgréla faible ancienneté de leur installation, ils sontresponsables d'une grande partie de l'approvision­nement de Soubré en oranges, citrons et avocats.Les manguiers, mandariniers et corossoliers

102

Page 103: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

sont également rencontrés fréquem ment autourdu campement ou au sein des plantations. Surun échantillon de dix planteurs, nous avons compté11,4 arbres fruitiers par planteur. Il s'agit làd'une importante innovation régionale.

Les femmes, de leur côté, entretiennent,lorsque c'est possible, un minuscule jardin prèsde la case. On y trouve: canne à sucre, piment,citrouilles, feuilles pour la sauce, papayers etananas. Les autres cultures vivrières de la fem me(gombo, tomate, aubergine.••) se retrouverontavec les précédents dans le champ de l'année.Ce sont elles, le cas échant, qui cultivent l'ara­chide.

Cette production fait l'objet d'une commercia­lisation, soit au campement, soit à Soubré. Dansce dernier cas, le trajet (qui peut dépasser 15 km)est parcouru à pied (au besoin en partant denuit ou en dormant en route dans un campement)à la fois parce que les "taxi-brousses" sont rareset bondés et également pour éviter une dépensequi entamerait sérieusement le produit de lavente (un trajet aller-retour avec un panier peutcoûter 700 Francs CFA).

D'une manière générale, les enquêtes effec­tuées chez les Dioula ont montré que le volumedes ventes est, en moyenne, cinq à six fois plusélevé que chez les Bakwé et les achats de pro­duits vivriers plus faibles. Les activités producti­ves sont plus variées, la production agricoleplus diversifiée. Mais tout ceci est très inégalsuivant les individus considérés et la réussitefinancière repose, en définitive, sur la plantationet donc sur la quantité de travail qu'une unitéde production peut mobiliser.

La société d'entraide est la formule la plusutilisée par les planteurs modestes. Les campe­ments dioula importants étant divisés en quartiersqui regroupent des planteurs de même nationalité,c'est au sein de groupes nationaux (ou ethniques)que se forment ces sociétés. Elles peuvent com­porter 20 ou 30 membres qui travaillent à lademande sur les terres d'un d'entre eux. A charge,pour le bénéficiaire, de fournir la nourrituredu jour et une somme de 2 à 3000 FCFA quisera versée dans une caisse com mune et servirad'assurance contre la maladie. Le fonctionnementde ces sociétés n'est pas très satisfaisant, ellesse font et se défont d'une année sur l'autre auhasard des conflits de personne ou d'intérêt.

La forte autorité de l'aîné sur les cadetschez les Dioula permet à certains de détournerune partie. de la force de travail familiale à leurprofit et résoudre ainsi en partie leurs problèmes.Nous avons vu l'exemple d'un planteur qui a faitvenir de Guinée ses six frères (dont trois sontmariés et ont des enfants) et leur a fait obtenirà chacun une portion de forêt sensiblement égale

103

à la sienne (20 ha). Ils sont donc considérés commeplanteurs et chefs d'exploitation, mais ils doiventà leur aîné (dont le statut se trouve encore renfor­cé du fait qu'il est le premier arrivé, le bienfaiteurpour ses cadets et le chef du petit campementqu'il a constitué) un temps de travail considéra­ble : trois journées, du lever du soleil à 15 heures,sur les cinq jours de travail hebdomadaire.

En outre, ce même planteur utilise huitmanœuvres salariés et leur famille à l'année.Ils sont autorisés à cultiver pour eux-mêmes,sont nourris les jours de travail, dorment dansses propres bâtiments et touchent 20.000 francsCFA par an. Ce type de main-d'œuvre est, engénéral, réservé aux planteurs aisés, les autresrecrutent des contractuels pour des tâches préci­ses au prorata de leurs disponibilités du moment.

Malgré cette force de travail considérable,la plantation de l'aîné n'est ni très vaste ni entre­tenue de façon satisfaisante. Outre une organisa­tion déficiente, nous voyons à cela plusieursraisons, en particulier, l'absentéisme et surtoutles envois fréquents d'argent au village. Cemême planteur a encore un frère aîné resté enGuinée et le même système qui lui permet d'ex­torquer du travail à ses frères joue égalementcontre lui, il est tenu d'envoyer des sommesimportantes comme l'indique la vente l'an dernierde 3 ha de cacaoyers de deux ans à raison de30.000 francs CFA ha- 1 pour faire face auxexigences familiales. Ainsi l'autorité sur lessalariés, mal rémunérés, s'en trouve-t-elle dimi­nuée.

Les exploitations dioula couvrent un largespectre qui va, de la plantation qualitativementet quantitativement inférieure aux réalisationsbakwé, jusqu'à une réussite comparable aux meil­leurs planteurs baoulé. Cependant les planta­tions donnent l'impression que la quantité detravail investie est insuffisante. Dans bien descas, cela provient des débuts difficiles dus àun trop faible apport de départ, d'où résulteun endettement suivi d'un remboursement entravail qui se trouve ainsi détourné de la planta­tion personnelle.

Mossi

Le planteur mossi aura tendance à reproduireles cultures de ses anciens employeurs ou bien,s'il n'a pas encore exercé d'activité agricoleen Côte d'Ivoire, il imitera ses plus proches voi­sins. S'il s'agit de Baoulé, il cultivera l'igname,si ce sont des Dioula ou l3akwé, il s'adonneraà la culture du riz. Pourtant la première année,c'est le riz qui aura presque toujours sa préférenceen vertu de la brièveté de son cycle végétatif.

Page 104: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

Ce riz sera, là encore, associé au mais. Environ80 % des Mossi continueront à cultiver le rizpar la suite. Les arbres fruitiers sont présents,mais en moins grande quantité que chez les Dioula.

L'originalité des Mossi est leur organisationdu travail. Les jeunes immigrants constituentdes sociétés d'entraide qui leur permettent ungain de temps dans l'accomplissement des tâches.Souvent célibataires, ils se contentent de peuau départ et ne sont pas absorbés par la famille.Leur vie sociale est réduite à sa plus simpleexpression et leurs temps de travaux sont trèsélevés. A tour de rôle, ils vendent leur forcede travail contre de l'argent, de la nourritureou des semences.

La situation des planteurs d'âge mûr estquelque peu différente, leur pécule de départest, en général, plus élevé et leur statut socialleur permet d'accueillir sur leur exploitationun ou plusieurs jeunes garçons de leur famillepour un temps variable. Néanmoins, ceci estloin d'être systématique et, là encore, forceest de constater que le planteur mossi paye desa personne. L'emploi de main-d'œuvre rémuné­rée est très rare.

La production est moins diversifiée quechez les Dioula et la commercialisation faible.Souvent installés dans des lieux reculés, céliba­taires, ils ne se trouvent pas dans des conditionsfavorables pour acheminer leurs produits versle marché. Pourtant, à l'inverse des autres groupesqui consom men t la quasi -totali té de leur cultureprincipale, les Mossi célibataires, ou ayant peude famille à charge, dégagent un fort surplusvivrier. La com mercialisation portera doncsur le riz (parfois l'igname) alors que chez lesBakwé et les Dioula, elle porte sur les cultureshorticoles. Des ventes de 350 et même 400 kgde riz ne sont pas rares. Des commerçants venusde Soubré, .voire même de San pédro, passenten voiture dans les campements isolés. L'absenced'autre moyen de commercialisation leur permetd'acheter aux meilleurs prix. Malgré cette situa­tion désavantageuse, les Mossi en retirent lessom mes nécessaires à leur entretien.

En moyenne plus jeunes que les autres immi­grants, les Mossi ont le souci de valoriser auplus vite une situation que leur statut d'étranger(traditionnellement considérés comme manœuvresen Côte d'Ivoire forestière) rend, à leurs yeux,précaire.

Baoulé

Le système de production baoulé a ceci d'origi­nal qu'il est une importation complète, totale,de ce qui est pratiqué en pays baoulé. Le planteurbaoulé transporte en particulier avec lui lesvariétés d'ignames qu'il cultivait au pays. Elles

104

varient selon les planteurs, mais on retrouveles quatre grands groupes principallY :

Dioscorea alata : N'zaBété Bété

Dioscorea cayenensis : LokpaKrenglé

Mais les noms donnés par les planteurs auxvariétés qu'ils reconnaissent sont en très grandnombre (comme pour le riz chez les Bakwé):N'gban (Bété Bété), Sahué (Krenglé), Assaoua(Lokpa ?), etc. D'infimes variations morphologi­ques séparent certaines de ces variétés, aussiest-il plus simple d'avoir recours aux quatregrandes subdivisions.

Le paysan cultive en général, en même temps,plusieurs variétés et ceci pour deux raisons.D'une part, cela lui permet une diversificationdes chances au cas où une variété s'avéreraitpeu adaptée, d'autre part, il s'assure ainsi d'unepériode de récolte étalée grâce à des époquesde maturation différentes.

Les variétés Lokpa sont des ignames précocesplantées en mars ou en avril, elles donnent unepremière récolte en août et une deuxième endécembre 1. Les Krenglé sont également précoces,mais ne portent qu'une seule récolte. Les Diosco­rea alata sont des ignames tardives.

On aurait pu s'attendre à trouver uniquementdes ignames tardives (Bété Bété et N'za) carelles ont la réputation d'être des ignames deforêt (les autres étant, semble-t-il, mieux adap­tées à la savane). Or il n'en est rien. Le systèmese perpétue sans modifications par rapport aupays baoulé, et il s'en trouve fort bien.

Les Baoulé entament leur défrichementpar un nettoyage du sous-bois; ils coupent, àl'aide de la machette, toutes les plantes basseset la plupart des arbustes, laissant toutefoisun nombre suffisant de ces derniers pour servirde tuteurs aux ignames précoces (Lokpa). Ilsréunissent ensuite la matière sèche en fagotsqu'ils disposent aux pieds des arbres et arbustesrestants, puis mettent le feu. Cela ne suffitpas pour abattre les arbres, mais a pour effetde les dessécher; en quelques jours toutes lesfeuilles tombent, laissant passer la lumière.Seuls restent debout les troncs dénudés. Lepaysage qui en résulte présente un aspect parti­culièrement désolé 2 qui a pu faire dire à certainsque l'agriculture baoulé était dévastatrice, pour­tant ces surfaces sont toutes utilisées et le résul-

Utilisée comme semence pour l'année suivante.

Vu d'avion ou sur photo aérienne, ce paysage est trèsreconnaissable, il nous a permis d'identifier ainsi une coloniebaoulé dont nous ignorions l'existence.

Page 105: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

tat final, lorsque les arbres morts sont tombés,n'est pas vraiment différent d'un défrichementclassique un peu poussé. Un des principaux in­convénients de cette technique est que les arbrescontinuent à tomber durant plusieurs années,endom mageant parfois les cacaoyers.

La troisième et dernière opération est lebalayage des feuilles et brindilles destiné à mettrela terre à !lU pour l'édification des buttes. C'est,en général, une tâche effectuée par les femmes.Puis, les hom mes, à l'aide de la houe, vont râclerla superficie du sol pour confectionner les buttes.C'est un travail pénible qui est cependant effectuéavec une surprenante rapidité (certains paysansparviennent à réaliser jusqu'à vingt buttes enune heure). Cette opération détruit le systèmeracinaire de surface et rend la parcelle parti­culièrement sensible à l'érosion lors des premièrespluies (dans le système autochtone, aucun travaildu sol n'est effectué et un important matériauligneux résiduel empêche l'activité érosive).Il est d'autant plus surprenant de voir les Baoulécoloniser des pentes de 30 % suivant la mêmeméthode.

Le nombre de buttes varie suivant la naturedu sol et la technique du paysan. D'une façongénérale, les intéressés se plaignent du grandnombre de racines qui ne leur permet pas deretourner en profondeur. La quantité de terredisponible au mètre carré sera donc faible. Dansce cas, le paysan sera amené à faire des buttesplus petites ou bien à les espacer. En moyenne,il y a 71 buttes pour 100 m2 (écarts maximums:62 à 86) ; leur hauteur varie en fonction du nom­bre (45 à 65 cm). Cette opération commenceavec les premières pluies, lorsque la terre estplus facile à travailler (mars-avril) et peut s'ache­ver tard dans la saison. En fait beaucoup deBaoulé effectuent simultanément plusieurs opé­rations culturales sur la même parcelle, ainsiune extrémité du champ peut déjà porter lesboutures d'igname alors que l'autre n'en est encorequ'au stade du brûlis.

Les différentes variétés d'igname sont plan­tées sur la même parcelle mais l'igname précoce(particulièrement appréciée) sera planté en pre­mier et les variétés tardives en dernier. Lapremière récole de l'igname précoce a lieu enaoût-septembre, l'extrémité basale du tuberculeest immédiatement replantée pour donner unedeuxième récolte en décembre-janvier au momentoù produisent à leur tour les ignames tardives.On atteint ainsi une production de 8 à 12 t ha- l

dont un tiers sert de semence.Les cultures associées sont les mêmes que

chez les Bakwé, seules les proportions et lestechniques culturales changent. Elles sont dis-

105

posées, soit entre les buttes (banane, café, cacao l ),soit au pied des buttes (taro, gombo, aubergines,tomates, pi ments, mals). Les buttes qui portentun pied de taro n'accepteront pas d'autres plantes,par contre, gombo, aubergine, piment, peuventêtre associés. Le maïs n'occupe en premièreannée qu'un espace restreint (quand il est pré­sent). Planté à raison de deux ou trois grainespar trou au sein de chaque butte (soit un piedpar mètre carré environ) sa récolte n'est destinéequ'à l'autoconsommation.

Les Baoulé ont également apporté une Cucur­bitacée grimpante (Cucumeropsis edulis) quidonne une fois par an, au moment de la récoltede l'igname tardive. Pour la consommer, onouvre le fruit et on laisse pourrir une semaine.Il faut alors retirer les graines encore muniesde leur gangue et les mettre dans l'eau; lesmauvaises graines flottent et sont jetées, lesautres sont séchées et conservées, elles servirontà faire la sauce accom modant le "foutou"d'igname 2•

Dans un espace restreint, su!' le côté de laparcelle, les femmes cultivent arachide et oignonsur de peti tes buttes lorsque le sol n'est pas assezprofond. Le long de la piste et en bordure deparcelle, du manioc est planté mais rarementconsom mé (seulement lorsque l'igname vientà manquer).

En deuxième année, après la récolte d'igname,le champ porte encore bananiers et taro auxquelsviennent s'ajouter, mais seulement sur une portionde la parcelle, maïs et arachides. L'arachideest cultivé sur de petites buttes (7 ou 8 m- 2 )

édifiées indifféremment par les hommes ou parles femmes.

Les planteurs baoulé disent ne pas recon­naître les aptitudes des sols car ils ne sont paschez eux; pourtant ils modulent l'emplacementdes différentes plantes selon des critères quisont bien écologiques (quoique moins diversifiéssans doute qu'en pays baoulé). Ainsi un certainordre se dégage, bananiers, taro ne sont pasdisposés régulièrement mais groupés dans leszones où le sol est le plus humide. Café et cacao,souvent mélangés (80 % de cacao, 20 % de caféenviron) sont répartis suivant la profondeur dusol, sa texture superficielle (sableux, argileux)et sa position par rapport aux bas-fonds. Les

1 Notons à ce propos que le système cultural baoulébasé sur l'igname présente un avantage sur le riz du pointde vue des cultures com merciales. Celle-ci peuvent êtremises en place en même temps que la culture principalesans la gêner.

2 Préparation habituelle de l'igname chez les Baoulé.

Page 106: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

sols les plus lourds et les plus humides suppor­teront les cacaoyers. Ceci n'est d'ailleurs pastoujours une réussite car nous avons observénombre de cacaoyers morts dans les zones lesplus basses. Le mélange des deux plantes a pourbut d'éviter une perte totale en cas d'échec.

La portion du champ qui porte une deuxièmeculture a droit à un nettoyage mais, bien souvent,le reste est abandonné au recrû forestier. Enthéorie, le planteur devrait effectuer au moinsun nettoyage annuel, en fait le premier désherb­age n'est pratiqué bien souvent que pour la récoltedes premières cabosses. Ceci n'est d'ailleurspas forcément négatif car ainsi les cacaoyers(en particulier) jouissent d'un certain ombrage.Les portions du champ qui portent taro, bananiers(voire piments ou ananas) peuvent être sommaire­ment entretenues.

Parmi tous les immigrants ce sont incontesta­blement les Baoulé qui produisent le moins dejachère. Sur un échantillon de quarante planteursayant mis en valeur 639 ha, Lesourd (1982) trouve22,4 ha de jachère soit 3,51 % de l'espace cultivé.Ceci illustre l'exceptionnelle rapidité de la crois­sance des plantations baoulé.

La commercialisation de l'igname varieentre zéro et un tiers de la récolte suivant lerapport entre le nombre de bouches à nourriret le nombre d'actifs masculins. Les ignames,qui sont disposées sur des claies verticales (en"V" retourné) dans le champ de l'année, sontvendues par bâton comportant un nombre vari­able de tubercules (1500 à 1800 francs CFA lebâton).

Au sein d'un même campement les Baoulése connaissent, sont des parents ou des amis,aussi l'entraide est-elle fréquente. Néanmoinsleur grande originalité est un recrutement parti­culier et individuel d'une main-d'œuvre baouléqui vient spécialement du pays pour la périodedu nettoyage, de la récolte et du défrichementde la nouvelle parcelle. Ce sont les fameux"six mois", en général jeunes, dont la rémunéra­tion est fixée en accord avec les parents. Ils'agit donc d'un contrat personnalisé. Us sontlogés et nourris pendant les six mois, reçoiventen moyenne 50.000 francs CF A et parfois quel­ques vêtements en supplément. C'est une formede contrat qui, malgré son prix, est très avanta­geux pour le planteur, par sa régularité et laquantité de travail qu'il autorise.

La journée du planteur comporte une périoded'activité aux champs qui se situe entre 7 et16 heures, c'est-à-dire inférieure au temps detravail moyen'· des Mossi, mais supérieure à cellede beaucoup de Dioula.

Globalement, c'est la plantation baouléqui donne l'impression d'avoir à sa dispositionla plus grande quantité de travail. Pourtant

les débuts sont parfois difficiles. Beaucoup deBaoulé ne peuvent rém unérer une main-d'œuvred'appoint suffisante les premières années. D'au­tant plus que les "six mois" n'interviennent engénéral qu'à partir de la première récolte (lepaysan compte sur celle-ci pour les rémunérer).Les premières années de la plantation sont doncdifficiles pour la plupart des planteurs, eUessont décisives pour l'avenir de l'exploitation,aussi chacun doit-il faire face en utilisant aumieux les ressources dont il dispose. Les résul­tats obtenus sont extrêmement variables, aussifaut-il tenter de mettre en lumière les causesde cette inégalité.

LE PROCESSUS DE DIFFERENCIATIONECONOMIQUE

Au bout de quelques années une stratificationéconomique apparaît dans les zones pionmeres,elle est à la fois inter- et intra-ethnique. Dupoint de vue de la différenciation économique,ce sont les quatre premières années de l'instal­lation qui sont décisives et révélatrices (c'est­à-dire avant les prem ières récoltes de culturespérennes qui permettront éventuellement derémunérer une main-d'œuvre d'appoint). Lecolon doit alors vivre grâce à sa production vi­vrière ou en fonction de revenus d'une autre pro­venance.

A moins d'avoir un apport personnel suffisantou une source de revenus extérieurs, le nouveauplanteur dépendra, avant sa première récoltevivrière, de la personne qui l'aura hébergé (souventun parent ou ami). En contrepartie, il consacreraun temps de travail variable à la plantation deson hôte. Mais ce rapport, réversible et nonmonopolisé, ne peut être à l'origine d'une diffé­renciation économique.

Par contre, le fossé va se creuser entreceux qui, durant ces quatre années, vont devoirtravailler pour le compte d'autrui et ceux quipeuvent s'en passer (soit qu'ils bénéficient desrevenus d'une autre plantation - cas de nombreuxBaoulé dans ce secteur - de revenus urbainsou d'économies personnelles). C'est le groupeformé par les immigrés se trouvant dans l'obli­gation de vendre leur force de travail qui Vil

constituer la forme de main-d'œuvre la plusrépandue (les facilités d'accès à la terre ontamené la quasi extinction de toute forme desalariat impliquant une dépendance prolongée 1).

l On trouve cependant quelques travailleurs permanentsou mensuels.

106

Page 107: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le déve Zappe ment des activités humaines

Les contrats seront principalement de deux types:à la tâche ou à la journée.

Quoiqu'il en soit, ce temps passé à travaillerpour les autres représente un manque à gagnercertain pour la plantation de l'intéressé et un

gain pour le bénéficiaire. Or nous constatonsque face à cette situation tous les planteursne sont pas à égalité, certains groupes sont plusfournisseurs de main-d'œuvre, d'autres plus uti­lisa teurs 1 :

BAOULE (100)

DlOULA ( 41)

MOSSI (20)

Planteurs ayant"fait le contrat"

7 (7 %)

33 (80 %)

28 (90 %)

Employeurpréférentiel

Baoulé

Baoulé/Dioula

Mossi/Baoulé

Nombre de chefs d'entrepriseàyant été à" la fois

emp 1oyeurs et emp 1oyésdurant ces 4 ans

6 (6 %)

11 (27 %)

3 (15 %)

C'est donc le double statut transitoire deplanteur/manœuvre qui va constituer la formefondamentale du marché du travai1 2 • Dans l'en­semble on peut dire que grâce aux disponibilitésfoncières et aux facilités d'accès à la terre,la main-d'œuvre ne s'est pas constituée en classe,la spécialisation fonctionnelle des ethnies n'estpas durable. Notons également la tendance desgroupes (en particulier baoulé et mossi) à tra­vailler chez un employeur de même ethnie. Celaest dû en partie aux relations personnelles quiprécèdent ou suivent immédiatement l'instal­lation, en partie à la constitution de territoiresethniques à peuplement homogène (d'autre part,le rapport de salariat est peut-être mieux accep­té de cette façon, surtout chez les Baoulé).

La recherche de cri tères si mples permettantd'évaluer les performances économiques desplanteurs nous a paru devoir tenir compte del'originalité que présente une zone pionnière(entre 30 et 80 % de la superficie des exploita­tions n'était pas encore entrée en production).Nous avons donc rejeté l'analyse en termes derevenus car ils sont difficiles à connaître avecprécision et dépendent trop étroitement de l'an­cienneté des parcelles. Il fallait alors se limiter

Ceci confirme, bien que dans un cadre différent, ceque Chauveau* (1979) appelle la "différenciationfonctionnelle des ethnies", Mais les Mossi ne sont pas"marginalisés" pour autant corn me le prouvent les résultatséconomiques.

2 L'autre forme est représentée par les "six mois", Maisceux-ci sont exclusivement des Baoulé, utilisés par desBaoulé. Ils sont en quelque sorte "abstrai ts" de laproblématique locale de par leur mode de recrutement(au village d'origine) et leur prise en charge totale parle planteur (transport, nourriture et même vêtements).

à des exploit&tions d'une même année ou bienrendre l'analyse plus complexe. Or il était duplus grand intérêt de pouvoir comparer des plan­tations d'âge différent et surtout leurs dynamis­mes. Les critères suivants ont donc été retenus:

la superficie moyenne plantée par "annéeefficace" (c'est-à-dire une année pour laquellele défrichement a été suivi de la plantationde la parcelle) ;

l'accroissement annuel de la plantation (super­ficie plantée divisée par le nombre d'annéesécoulées depuis l'installation).

Ceci permet de rendre les résultats aisémentcomparables (Tableau 24), éludant le problèmeposé par les exploitations non encore producti vesou faiblement productives. A ces critères nousavons ajouté un "indice d'efficacité" qui, étantle produit des deux séries de données, mesurela régularité du rythme de plantation. Ainsipour les Baoulé de l'échantillon, chez qui défri­chement et plantation se succèdent sans rupture(la totalité de la superficie défrichée chaqueannée est plantée) cet indice est le plus élevé3.

Cette méthode ne permet pas d'évaluerun éventuel report de travail sur les parcellesdéjà défrichées. Elle privilégie l'aspect dynami­que des exploitations, autrement dit la quantitéde travail appliquée à l'extension de la plantation.Il s'agit d'évalüer la rapidité avec laquelle seconstitue un capital qui ne prendra toute sa valeur

3 Au sein de cet échantillon se trouve une forte majoritéde planteurs cumulateurs dont les facilités pour recruterde la main-d'œuvre sont bien supérieures. Lesourd (l982),sur un échantillon plus nombreux et plus hétérogène deplanteurs baoulé, trouve un rythme d'accroissement annuelnettement inférieur (l,45 ha). Ces plantations sontégalement plus anciennes et il est avéré que la superficieplantée annuellement baisse avec le temps.

107

Page 108: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

TABLEAU 24. Dynamismes des différents types d'exploitation

Nombre d'individus Dimension de Actifs masc. Superficie Année efficace AccroissementEfficacité

échanti Il onnés l'unité familiale 15 ans et + moyenne (ha) (ha) annuel (ha)

Vol taîques 3,25 l,50 8,63 2,32 2,01 4,66(Mossi) (8)

Ma liens (11) 3,64 1,27 6,64 1,92 1,49 2,86

Guinéens (3) 5,33 1,33 5,27 1,75 0,87 l,52

Total Etrangers 3,73 1,36 7,73 2,18 l,53 3,33

Ivoiriens 4,25 1,33 5,84 1,72 1,37 2,36(non Baoulé) (12 )

Baoulé 4,18 1,27 19,11 2,89 2,89 8,35

que des années plus tard. Il semble bien quele critère de la rapidité de la mise en valeursoit un excellent révélateur dans cette partiedu front pionnier. Outre l'aspect spécula,tif decertaines plantations (nota mment baoule) .lesplanteurs cherchent à éviter toute contestatIOnfoncière et à rendre irréversible une situationque certains jugent pré,caire. (en pa:ticulier l~s

étrangers). Toutes les energles paraissent mo.bl­lisées dans le but d'ouvrir une nouvelle portionchaque année. . .

Les différences dans la compositIOn de lamain-d'œuvre familiale sont beaucoup trop faiblespour rendre compte des écarts observés. ., .

C'est donc la main-d'œuvre salariee qUIaura le rôle décisif, et tout particulièrementdurant les quatre premières années. Or, surles 22 Baoulé de l'échantillon, deux seulementont utilisé des "six mois" pendant cette périOde,tous les autres ont eu recours à des contrac­tuels et (ou)'à leur propre travail. Assez curieuse­ment, les surfaces défrichées annuellementn'augmentent pas sensiblement lorsque les "sixmois" commencent à intervenir, leur travail estsurtout focalisé sur la récolte, la préparationdes cabosses et le désherbage. Ils substituentcependant en partie les contractuels pour lestravaux de défrichement. Du fait que ce sontbien les contrats qui sont responsables d'unegrande partie de l'extension des plantations àleurs débuts, il convient de s'interroger sur laposition des planteurs à leur arrivée.

Apport moyen de départ selon les groupes(1976) :

Haoulé = 90.000 francs CF AVoltaïques = 34.500 francs crAMaliens = 32.800 francs CFA

lOS

Guinéens = 21.700 francs CFAIvoiriens autres que

Baoulé = 22.600 francs CF A

(seule la différence entre les Baoulé et les autresest considérée comme significative vue la dimen­sion de l'échantillon).

Les Baoulé paraissent donc nettement avan­tagés par rapport aux autres. Cet apport initialleur permettant en général de ne pas travailleren attendant la première récolte vivrière. D'autrepart, 18 d'entre eux sont des cumulateurs puis­qu'ils possédaient déjà une plantation au pays.Bien que celle-ci soit déclarée peu rémunérat.r,ice,elle joue un rôle certain durant les premieresannées : les quatre planteurs non cumulateursont un rythme de défrichement annuel de 1,96 ha,la performance reste élevée mais légèrementinférieure à la moyenne mossi.

Le "dynamisme mossi" est plus difficile­ment explicable puisqU'ils atteignent des perfor­mances élevées malgré une quantité de travailimportante réalisée au bénéfice d'autrui. Cedynamisme paraît reposer sur les facteurs suiv­ants:

un temps de travail important (le plus fortque nous ayons enregistré dans la région). Ceciexplique sans doute en partie par la faiblessede la vie sociale des intéressés dont beaucoupsont des célibataires groupés dans des campe­ments isolés;

une famille très réduite au départ (sex-ratiole plus déséquilibré de tous les immigrants),facteur qui, joint aux temps de travaux, induitune faible consommation et une commerciali­sation relativement importante de produits vivri­ers. Ainsi, contrairement à beaucoup de planteursqui épuisent leur pécule de départ, les Mossi

Page 109: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

paraissent s'en constituer un avant même lespremières récoltes pérennes. S'ils sont presquetous contraints de travailler à leur arrivée, beau­coup parviennent·à s'en passer par la suite;

un bon fonctionnement des sociétés d'entraideau niveau du travail comme de l'assistance despersonnes en difficulté.

Ils resteront néanmoins (en tant que groupe)les plus faibles utilisateurs de main-d'œuvre.

Ces différences inter-ethniques sont certesimportantes mais si l'on considère l'ensembledes planteurs (autochtones exceptés) on s'aper­çoit que l'on trouve des ressortissants de toutesles ethnies à tous les niveaux économiques. Ils'agit donc de mettre en évidence, toutes eth­nies confondues, les facteurs fondamentaux dudynamisme.

La dimension du défrichement annuel estliée aux besoins en produits vivriers de l'unitéd'exploitation et varie donc peu autour d'unevaleur moyenne pour une unité donnée. Toutdéfrichement exceptionnel, repéré grâce à unereconsti tution de l'histoire de chaque exploi ta­tion, doit donc être expliqué. Chez les étrangers(en particulier les Mossi), une augmentationdes superficies défrichées est souvent due àun étoffe ment de la cellule familiale d'exploita­tion. Arrivés célibataires, ces planteurs accèdentau mariage grâce à leur tout récent statut dechef d'exploitation, ou bien font venir leur famillelorsque leur plantation est en bonne voie. Enfait, le volume des défrichements n'augmentequ'en fonction de l'arrivée d'actifs masculinsde plus de quinze ans. Cette augmentation desdéfrichements par étoffement de la cellule familia­le se vérifie moins chez les Baoulé et AutresIvoiriens qui migrent plus souvent avec leur familledès le départ et dont l'âge moyen est légèrementsupérieur.

Tous les défrichements annuels supérieursaux besoins et capacités de la cellule familialeont pu être mis en relation de façon préciseavec une plus grande quantité de travail disponi­ble. C'est dire que la main-d'œuvre et la capacitéà la mobiliser constituent bien le moteur del'économie de plantation.

Les voies par lesquelles cette main-d'œuvrepeut être obtenue sont variées. Les plus signifi­catives sont les suivantes:

ancienneté de l'installation, possession d'un"domaine" octroyé par les autochtones ou unancien migrant. Le planteur peut ainsi attirerdes dépendants qui travailleront pour lui en échan­ge de l'accès à la terre durant les premiers temps;

âge et statut social du planteur dans la régionde départ. Les planteurs d'âge mûr qui ont uneposition privilégiée au sein de leur groupe fami­lial en zone de départ (aîné, chef de cour) se

109

trouvent en position de mobiliser une main- d'œuvrefamiliale parfois importante;

un apport monétaire extérieur. Revenusd'une précédente plantation. Salaire d'un procheparent habitant la ville, etc.

Ces facteurs peuvent naturellement se com­biner et prendre un caractère permanent. Ainsiun certain nombre de planteurs ont à la foisbénéficié d'une importante main-d'œuvre fami­liale et pu rémunérer une main-d'œuvre contrac­tuelle importante.

Des performances exceptionnelles sont par­fois dues au bon fonctionnement d'une sociétéd'entraide ou à des temps de travaux exception­nellement élevés. De même les rythmes de dé­frichement les plus bas sont souvent dus à lamaladie, à un veuvage, etc. Mais globalementc'est la disponibilité en main-d'œuvre qui restele critère le plus pertinent, largement suffisantpour rendre compte des différences observéestout com me de la construction d'un certain nom­bre de grandes planta tions.

Les immenses disponibilités foncières dela région, l'attitude permissive des autochtonesvis-à-vis des immigrants (ces,sion de grandsdomaines, etc.) ne leur ont pas permis de tirerparti de la force de travail des immigrants enla détournant à leur profit un certain tempsavant d'autoriser l'installation sur leur territoire(comme cela s'est fait dans d'autres régions dela Côte d'Ivoire).

Au niveau des superficies plantées, les Bakwésont donc très en retard par rapport à la moyennedes immigrants.

Au niveau des revenus, les différences enregis­trées à Nibi II vont de 1 à 6,4 et les superficiesréellement récoltées varient entre 1 et 8,27.

L'exploitation moyenne a 2,55 ha de culturespérennes mais les surfaces s'échelonnent entre0,21 ha et 4,19 ha.

Pour des superficies aussi faibles, et vuque les habitants ne se retournent que depuispeu de temps vers la plantation, cela n'auraitpas grand sens d'établir une hiérarchie sur cesbases. Les superficies les plus faibles s'expliquentd'ailleurs par des facteurs personnels (absence,santé, veuvage) qui n'ont pas permis de prendrepart à la vague de plantation des dernières années.Si l'on ne tient compte que des chefs d'exploitationayant planté durant les quatre dernières années(1976) la différence n'atteint pas un facteurde un à trois.

Plus intéressante est la comparaison dessuperficies moyennes des "anciens" avec cellesdes jeunes. Les six chefs de famille étendue(qui sont, globalement, les plus âgés) ont unesuperficie plantée moyenne de 2,96 ha (le chefdu village, aîné du segment de lignage, n'ayant

Page 110: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tar: recherche et aménagement

d'ailleurs pas la plus importante); les quatreplanteurs les plus jeunes atteignent, quant àeux, 4,24 ha. On ne peut, dans ce cas, parlerde détournement de travail au bénéfice desanciens.

D'une façon générale les rares plantationsimportantes (maximum 20 ha) trouvées dansla région (notamment à Galea) relèvent de deuxphénomènes: héritage de la plantation d'un frèreou revenus urbains ayant permis d'entretenirdes manœuvres permanents (cas de quelquesplanteurs absentéistes). Mais ces plantationsse sont toutes constituées il y a déjà assez long­temps. Aujourd'hui, les planteurs absentéistesrencontrés se plaignent du coût élevé de la vieen ville (nourriture, scolarisation) qui ne leurpermet pas de payer des contractuels. Leursplantations récentes sont, en effet, plutôt petiteset mal entretenues.

Les immigrants ne sont pas égaux au départ,ils le sont encore moins après quelques annéespassées en zone pionnière. L'absence d'un vérita­ble marché foncier et les disponibilités en terresont laissé ouverte la voie de l'enrichissement.Nulle classe de salariés ne s'est constituée defaçon définitive et les différentes classes économi­ques de planteurs ne sont pas closes (bien quele passé du colon soit largement déterminant).Un certain nombre d'indices semble pourtantindiquer que le système de l'économie de planta­tion, qui était resté très ouvert dans la régionà la faveur de circonstances exceptionnelles,est en voie de se refermer sur lui-même. Leblocage foncier vers lequel on s'achemine rapide­ment va modifier totalement les conditions dela mobilité sociale et créer une classe de paysanssans terre, salariés temporaires ou permanentsdes détenteurs de terre. On en perçoit déjàles prémisses. Il est cependant difficile de prévoirl'évolution de la région car la disponibilité enmain-d'œuvre (essentielle pour l'entretien etla récolte des plantations existantes) dépendtrop du contexte politique et économique nationalet international (évolution du flux des migrationsMossi, par exemple).

Le succès des politiques d'encadrementdu paysannat (qui visent toutes l'intensificationpar une amélioration des conditions techniques)est également aléatoire dans un milieu aussidiversifié qui a su engendrer ses propresdynamiques.

CONCLUSION

L'ampleur exceptionnelle de l'im migration danscette région du Sud-Ouest est exprimée par lesdensités rurales (l,34 h km - 2 dans le canton

bakwé en 1971, 4,64 en 1975, sans doute 7,72en 1979) mais plus encore par l'occupation réellede l'espace. Il est possible, compte tenu du nom­bre d'immigrants, du rythme d'arrrivée, de lataille moyenne de la cellule d'exploitation etde l'accroissement moyen des superficies plantéespar année et par groupe, d'estimer approximative­ment les surfaces plantées.

Le canton, forêt classée exclue, totalise259.100 ha, or, en 1971, 0,83 % de cette superficieétait occupée par des cultures de rentes, soit0,40 % pour les Bakwé et 0,43 % pour les alloch­tones (dont 0,25 % pour les Baoulé). En 1975,les chiffres sont les suivants : Autochtones:::0,45 %; Allochtones::: 7,26 % (dont 5,33 % pourles seuls Baoulé). Pour l'année 1979 l'estimationest moins précise car les chiffres de populationne sont pas connus. On peut cependant esti merque l'espace réellement occupé par les autochtonesreprésente 0,64 % contre 11,19 % pour les alloch­tones (8,49 % pour les Baoulé).

Ainsi en huit ans les superficies plantéessont passées de 0,83 % à près de 12 % de la super­ficie du canton. Le mouvement continue carles superficies déjà attribuées représentent prèsde 60 % du canton. Dans l'état actuel, les super­ficies plantées représentent déjà un potentielde production (café et cacao) de Il.000 tonnes(soit 2.750.000.000 francs CF A aux producteurs).

L'économie de la région s'en trouve boule­versée. Naturellement une bonne partie de cessommes va quitter le Sud-Ouest pour alimenterle pays d'origine des immigrants, mais il estfort probable que cette tendance s'efface progres­sivement. Chez certains colons (Malinké, Ivoiriens,Etrangers) la rupture avec le milieu d'originetend à s'accentuer.

Ce bouleversement n'apparaît pas seulementau niveau de la masse monétaire, il s'agit enfait d'une profonde mutation:

la principale activité économique du Sud­Ouest, l'exploitation forestière, a été prise devitesse par l'ampleur et la rapidité de l'immigra­tion. Des milliers d'hectares ont été brûlés (cha­que hectare représentant, en moyenne, une pertede 200.000 francs CF A) avant que les forestiersaient pu les exploiter. Comble de l'ironie, cesont eux qui, par l'édification d'un réseau riepistes carrossables, ont favorisé (bien involon­tairement) la pénétration des colons au cœurdes massifs forestiers;

la poussée migratoire a obligé les responsa­bles à modifier leurs prévisions concernant l'affec­tation des sols. Cette savante planificationtient compte des aptitudes culturales des sols,des facteurs topographiques et climatiques, etprévoit la localisation idéale pour chaque typede culture (blocs agro-i ndustriels). Mais le [acteur

110

Page 111: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le développement des activités humaines

humain, imprévisible et difficile à saisir, estvenu perturber quelque peu l'ordonnance. Lesprogrammes doivent maintenant pratiquer l'expro­priation lorsqu'ils veulent maintenir leurs péri­mètres, avec l'augmentation des coûts que celasuppose;

les aires de distribution des principales plantescultivées se sont trouvées modifiées par unenouvelle répartition des hom mes. La régionpossède maintenant autant de parcelles d'ignameque de parcelles de riz. Les arbres fruitiersse sont multipliés, ajoutant à la diversité croissan­te de l'approvisionne ment vivrier des marchéslocaux. Plus importants encore sont les empruntsculturaux, la modification des pratiques agricolesdue aux relations de voisinage. Les comporte­ments ne sont pas figés, juxtaposés; ils s'inter­pénètrent, se diversifient, témoins d'un milieunouveau en cours d'édification. C'est peut-êtrelà l'effet d'une immigration trop rapide, tropdébordante, qui n'a pu trouver le temps de fixerses comportements;

l'Islam, enfin, véhiculé par les Dioula, aeffectué une poussée remarquable vers le sud,au cœur d'un pays à la fois animiste et harriste l

où il était très peu représenté. Il ne s'agit pasencore de conversions, mais seulement du déborde­ment d'une aire culturelle: près de 30 % de lapopula tion du canton bakwé est aujourd'hui musul­mane. Avec elles, ces populations apportenttoute une gamme de savoir-faire artisanauxet de vocations commerciales, stimulant leséchanges et la diversification des activités.

Mais l'aspect le plus fondamental est untransfert de mentalités lié à la diffusion de l'éco­nomie de plantation et à ses pratiques.

L'économie de marché, avec son idéologieet le système de besoins qu'elle sous-tend, estresponsable d'une ruée à caractère spéculatifvers les zones forestières. Elle agit com merévélateur des contradictions et difficultés deslieux de départ (problèmes écologiques, sociologi­ques ou économiques) et draine les populationsvers les lieux où se trouvent les facteurs de pro­duction.

Son influence grandissante, omniprésente,a multiplié le nombre des départs, touchant descouches de population jusqu'alors peu affectées.Tous ces hommes et femmes en quête de revenusmonétaires que ne pouvait leur procurer leur

1 Religion syncrétique fortement implantée dans lesud de la Côte d'Ivoire.

111

activité au pays vont là où la terre est libre,où les cultures de rente sont possibles. Grâceà la complémentarité vivriers/cultures de rente,les plantations peuvent grandir et dégager unrevenu (à partir de 2 ha en moyenne). Ensuite,le réinvestissement des revenus sous forme demain-d'œuvre d'appoint permet l'accroissementde la plantation.

Ce système aboutit à une stratificationprononcée et à l'émergence d'élites (ceci étantvalable au niveau des groupes comme des indi­vidus). Certaines ethnies (Mossi et Baoulé princi­palement) sont familiarisées avec les mécanismesde l'économie monétaire et sont, de ce fait,mieux armées pour l'entreprise spéculative.

La très grande complexité des facteurséconomiques, politiques, culturels qui sont misen jeu dans ce processus de colonisation et d'in­tégration du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire, lecaractère non localisé et difficilement quantifia­ble des facteurs les plus déterminants, rendentdifficile, sinon impossible, toute tentative demodélisation ou de prédiction. La fluctuationdes prix du cacao sur le marché international(entre autres) peut avoir des répercussions impor­tantes et difficilement prévisibles sur la région.Dans ces conditions on ne peut que tenter dedégager les matrices sociales d'organisationet d'utilisation de l'espace ainsi que les tendancesdes différentes dynamiques qui concourent àcréer un nouveau paysage agraire.

Le Projet Tai' a été, pour nous, une illustra­tion convaincante de la validité limitée des ana­lyses en termes de systèmes ou de modèlesprétendant à l'exhaustivité. L'étroite dépendancede ce petit territoire du Sud-Ouest de la Côted'Ivoire vis-à-vis du contexte national etinternational, la richesse même des phénomènessocio-culturels en cause (voir en particulierM. Lesourd, op. cit., pour la migration baoulé)ne peuvent être enfermés dans un cadre aussiréducteur et montrent que l'idéal d'un systèmefermé dont on maîtriserait toutes les variablesest, en fait (au moins pour les sciences sociales),la poursuite d'un idéal sans doute irréalisable.

Le danger serait alors d'orienter d'éventuellesprises de décision en fonction d'un cadre conceptu­el qui refléterait plus une construction mentalad hoc que la réalité vécue par les sociétés enquestion.

Page 112: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

BIBLIOGRAPHIE

ANON.,1977. La Côte d'Ivoire en chiffres. Abidjan.ANON., 1979. Recensement national cie Côte d'Ivoire - Don­

nées provisoires. Abidjan.ANCEY, G., 1968. Les notions d'activité et d'actifs à l'inté-

rieur d'une exploitation agricole. ORSTOM, Abidjan,multigr. 22 p.

ANCEY, G., 1977. Variation mossi sur le thème: reproduc-tion des milieux ruraux mis en contact avec le capitalis­me extérieur. Travaux et Documents de l'ORSTOM, 64,p.l-13.

BEHRENS, C., 1974. Les Kroumen de la Côte occidentaled'Afrique. Travaux et Documents de Géographie Tropi-cale, N° 18, CEGET, 243 p.

BENNETT, J.W., 1976. The ecological transition. PergamonPress, London.

BLANC-PAMARD, C., 1975. Un jeu écologique différentiel:les communautés rurales du contact forêt-savane aufond du "V" baoulé, EHESS-CNRS, Paris.

BOUSQUET, B., 1977. Le Parc National de TaT. Ministère desEaux et Forêts, Direction des Parcs Na tionaux, Abidjan,multigr. 372 p.

BOUTILLER, J.L. ; QUESNEL, A.; VAUGELADE, J., 1977.Systèmes sociaux-économiques Mossi et migrations.Cahiers ORSTOM, série Sc. Hum., 14(4).

BROOKFIELD, H., 1982. L'homme et les écosystèmes. RevueInternationale des Sciences Sociales, 34(3), p. 397-498.

CHAUVEAU, J.P., 1978. Note sur les échanges dans le Bauléprécolonial. Cahiers d'Etudes africaines, 16(3-4), p. 567­602.

CHAUVEAU, J.P., 1979. Economie de plantation et "nouveauxmilieux sociaux". Cahiers ORSTOM. Sc. Hum., 16 (1 -2).

CONKLIN, H.C., 1975. Hanunoo agriculture. PAO ForestryDevelopment Paper 12. Elliot's Books, Northford Con­necticut, 209 p.

DIENER, P. ; ROBKIN, E.E., 1978. Ecology, evolution and thesearch for cultural origins : the question of Islamicpig prohibition. Current Anthropology,19(3), p. 493-540.

ETIENNE, P. ; ETIENNE, M., 1968. L'émigration baoulé ac-tuelle. Cahiersd'Outre-Mer,21ème'année, S2, p.155-195.

GODELIER, M., 1974. Anthropologie et biologie: vers unecoopération nouvelle. Revue Internationale des SciencesSociales, 24(4), p. 666-690.

GOUROU, P., 1982. Terres de bonne espérance. Le mondetropical. "Terre humaine". Plon, Paris.

JOHNSON, A., 1982. Reductionism in cultural ecology : theAmazon case. Current Anthropology, 23(4), p. 413-428.

LEE, R.B. ; DEVORE, J. (Eds), 1968. Man the Hunter. Chi-cago. Aldine.

RAISON, J.P., 1968. La colonisation des Terres neuves inter­tropicales. Etudes rurales, 31, p. 5-112.

RAISON, J.P., 1973. La colonisation des Terres neuves inter­tropicales d'après les Travaux français. Cah. ORSTOM,Sc. Hum., 10(4), p. 371-403.

RAPPAPORT, R.A., 1968. Pigs for the Ancestors. NewHaven L Conn., Yale Univ. Press.

RAULIN, H., 1957. Problèmes fonciers dans les régions deGagnoa et Daloa. Travaux de la mission d'étude desgroupements immigrés en Côte d'Ivoire. ORSTOM, Paris142 p.

RUF, F., 1979. Travail et stratification sociale en économiede plantation. Cahiers du CIRES, Abidjan, 23, p. 47-88.

SCHWARTZ, A., 1971. Recensement démographique du can-ton bakWé de la Sous-Préfecture de Soubré. ORSTOM,Abidjan, multigr.

SCHWARTZ, A., 1972. Histoire de la Côte des dents.ORSTOM, Abidjan, multigr. 23 p.

SCHWARTZ, A., 1973. Peuplement autochtone et immigra-tion dans le Sud-Ouest ivoirien. ARSO-ORSTOM-BNEDT,Abidjan, multigr. 145 p.

SPOONER, B., 1982. Regard sur l'écologie: La rechercheécologique et son contexte humain. Revue internationaledes Sciences sociales, 34(3), p. 419-438.

ST EWARD, J., 1963. The methodology of multilinear evolu-tion. University of Illinois Press, Urbana.

VAYDA, A.P.; RAPPAPORT, R.A., 1968. Ecology, culturaland non cultural. In: J.A. Clifton (Ed.), Introduction tocultural anthropology. Hougton Mifflin, Boston.

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se reférera à la liste des publications du Projet enfin d'ouvrage (A nnexe 2).

112

Page 113: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintesJean CollinetGuy CouturierJean-Louis GuillaumetFrancis KahnRoland MoreauYaya Sangaré

LA CULTURE VlVRIERE

LA PREPARATION DU CHAMP

Le système agricole traditionnel du Sud-Ouestde la Côte d'Ivoire est basé sur la pratique del'essartage: coupe de la forêt (Photo 4), brûlis,semis du riz (Oryza sativa et beaucoup plus rare­ment O. glaberrima), plantes d'importance second­aire (manioc, taro, banane, aubergine, etc.),puis abandon à la jachère (de Rouw, 1979 ; Léna,197ge; Moreau et de Namur, 1978). La Figure 26montre les différentes étapes des cycles culturauxtraditionnels chez les Oubis.

L'emplacement du champ est choisi enfonction des caractéristiques de la végétation(présence de gros arbres, densité du sous-bois)et du sol (couleur et texture de l'horizonsuperficie}). La superficie du champ ne dépassepas 2 ha au maximum, surface qu'une femmepeut entretenir seule.

La défrichement se fait en fin de saisonsèche, il est rapidement suivi du brûlis. Tousles arbres ne sont pas abattus, les paysans bakouésdisent laisser les plus gros ou les plus durs (Léna,197 ge), mais ils gardent aussi des espèces utiles,comme le font les Oubis (de Rouw, 1979 ; Moreauet de Namur, 1978). L'action du feu n'est pasuniforme, il en résulte une mosaïque de situationsdont le paysan tire parti: ainsi le tabac serasemé aux endroits où les cendres s'accumulent.Cette hétérogénéité entraîne, évidemment, unegrande variabilité dans la plantation.

LES PLANTES CULTIVEES

La plante domestique par excellence est le riz,Oryza sativa qui a pris la place du riz africaino. glaberrima. Sans riz, l'habitant du Sud-Ouest"souffre de la fai mil et il traduira la pénuriede riz par le mot français "famine".

Léna (197ge) note plus de 30 variétés l deriz, de 4 à 6 mois, dans le canton Bakoué, Kahnet Zadi Koubi (1979) en ont relevé .105 dans leSud-Ouest (41 chez les Bétés de Soubré, 21 chezles Bakwé, 15 chez les Guéré et six chez lesKrous) et la liste n'est pas exhaustive! Les semen­ces sont propagées par les femmes à traversles relations matrimoniales. Les qualités gusta­tives sont, en général plus appréciées que lesrendements et la sélection se fait essentiellementsur ce critère.

La seule autre céréale est le maïs, d'importan­ce variable mais toujours mineure.

Le manioc est largement cultivé, bien qu'iln'ait pas une place très importante dans l'ali men­tation où il se substitue au riz quand celui-cimanque. Les autres tubercules, taro, patatedouce, ignames (D. bulbifera, D. alata et complexecayennensis-rotundata) toujours présents dansles cultures ne jouent qu'un rôle mineur (Buffard­Morel et Zadi Koubi*, 1979).

Le bananier-plantain, planté en groupesà la périphérie du champ, est toujours assezimportant et persistera longtemps dans la jaChère.

Pi ment, gombo, aubergine (Solanum anoma­lum), courge, indispensables à la cuisine locale, ,sont pl~ntes en assez grand nombre. Papayer,canne a sucre, haricot (Vigna sinensis), sésamesont toujours assez faiblement représentés (deRouw, 1979), ils ne font pas l'objet de soins parti­culiers ou, au contraire, sont cultivés près del'abri de culture.

SEMIS ET PLANTATIONS

Semis et plantations sont réservés aux femmes.A partir de mars et jusqu'à la fin mai, le riz

1 En fait, il serait plus correct de parler d'appellation.L'étude des variétés a été entreprise par la Côte d'Ivoireà l'ORS1üM et à l'INRA.

113

Page 114: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

l ère année 2ème année 3ème année 4ème année

DJ FMAMJJASOND JFMAMJJASONDJFMAMJJASONDJFMAMJJASON

a attage

__ lbr6TiSI --

semisr--f---t--l

RIZ r--~--1plantati on--~--

--~--

idem

abattage, brûlis

l ère année de riz

1Culture avec longue jachère.

semist--t---.,

RIZ ~_~_-Irecol te

2Rotation réduite. La durée de la jachère est variable.

1

2

3

3Culture de riz sur deux cycles "champ de veuve"

FIGURE 26. Trois exemples de cycles culturaux pratiqués par les Oubis (d'après de Rouw, 1979)

Page 115: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Photo 4. L'abattage des arbres en vue de la mise en culture

115

Page 116: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

Photo 5. Paysanne guéré semant le riz en poquet à l'aide d'un bâton pointu -les semences sont contenues dans une coquille d'achatine. On noteraqu'une abondante litière de feuilles mortes et brindilles recouvre le sol

est semé en poquets avec un bâton, la pointede la machette ou un plantoir en fer (Moreauet de Namur, 1978) (Photo 5).

Le mais est quelquefois semé avant (deRouw, 1979) ou en même temps (Léna, 197ge),l'important étant que les trois mois nécessairesà la production des grains reçoivent des précipita­tions importantes. Mais le mais peut aussi êtreplanté après la récolte du riz (Léna, 197ge).

Les boutures de manioc sont mises en placeen juin-juillet, voire en mai si la variété de rizutilisée était suffisamment précoce. Il fautéviter que celui-ci soit étouffé. Les "agoutis"risquent de causer des dom mages importants,surtout si le champ est envahi de mauvaisesherbes (de Rouw, 1979). Pour s'en protéger lecultivateur est quelquefois obligé d'établir unepalissade tout autour du champ, ce qui empêchede trop agrandir celui-ci.

Les autres plantes seront mises en placeselon les disponibilités en temps, de préférenceà proximité de l'abri de culture ou dans des condi­tions particulières de sol (bananiers).

Léna (l97ge) donne quelques densités quin'ont qu'une valeur comparative:

mais: 25 à 30 pieds dispersés dans la parcelleet 7 pieds par mL en cas de culture pure;

manioc: très variable selon le cas, certainscultivateurs ont près de 1000 mL plantés de façonhomogène;

116

bananiers et taro: 0 à 28 plantes par hect­are.

ENTRETIEN

11 n'y a pas à proprement parler d'entretien duchamp, quelques désherbages se font à l'occasionde nouvelles plantations ou de récoltes.Cependant, dans la région de Tai, depuis 1975,les paysans observent une invasion de mauvaisesherbes qu'ils attribuent à la densité des champset des chemins, et qui rendent nécessaires lessarclages (de Rouw, 1979) (Photos 6,7 et 8).

L'entretien des champs après la moissondu riz entraî"ne un travail supplémentaire dévoluaux fem mes qui préfèrent aménager en jardinune faible portion de la parcelle (Léna, 197ge).

LA RECOLTE ET LES RENDE~IENTS

La moisson du riz s'échelonne sur les mois dejuin à août, c'est un travail féminin mais enfantset hom mes y participent souvent. Quelquefois,une deuxième récolte peut avoir lieu à partirde nouvelles tiges qui se développeront. Elleest toujours très faible (Moreau et de Namur,1978). Les autres produits seront récoltés aufur et à mesure de la maturation et des besoins,

Page 117: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

(R. Moreau)Photo 6. Etat du champ de riz trois semaines après le semis. On notera la

présence des plantules de riz groupées en poquets. La litière estencore abondante

ceci jusqu'à une date avancée de l'année suivante(mai-juin). Très souvent le surplus reste surle champ et bananes, papayes, pi ments sont ré­coltés au hasard des allées et venues.

11 est difficile d'avoir une idée des rendementsétant donné la dispersion des plantes. Le riz,n'entrant pas dans les circuits commerciaux,échappe aux statistiques. Les évaluations despropres cultivateurs sont faites en fonction desbesoins. Une récolte de 2 t ha -1 se mble êtreesti mée suffisante pour l'ali menta tion d'unefamille (de Rouw, 1979).

Léna (197ge) insiste sur les difficultés d'es­timer les rendements, la variation entre champsest importante, de 0,92 à 1,59 t ha- 1• 11 donnepour le terroir étudié, une production globale(théorique) de 41,5 t, soit 470 kg disponiblespar individu, quel que soit l'âge, ou 1,29 kg parjour, tout en faisant remarquer "•••que ce chiffrea peu de chances d'être exact".

117

Les temps de travaux

De Rouw (1979) a tenté une estimation des joursde travail par individu et pour un hectare:

abattis: 26-48 (9-16 seulement dans le casd'une brousse secondaire) ;

semis (riz et maIs): 6-14 (jusqu'à 24 si lechamp n'a pas été bien brûlé) ;

plantation des bananiers: 2-4 ;désherbage: 12-18 ;moisson: 50-70.

Ces chiffres ne peuvent être qu'indicatifs,le désherbage, quand il est pratiqué, se fait enmême temps que d'autres tâches de plantationset de récoltes, la moisson s'étend sur 50 à 70jours sans occuper à plein temps toutes ces jour­nées.•• En fait, on dit généralement qu'une fem mepeut s'occuper d'un champ de riz et des culturesassociées, du semis à la récolte, à l'exclusion

Page 118: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï recherche et aménagement

Photo 7. Etat du champ au moment de la récolte. On remarque la 'préswce denombreux rejets et adventices parmi les pieds de riz

Photo 8. Abri provisoire dans le champ de riz pour la durée de la culture. Leriz est stocké dans le grenier avant d'être ramené au village

118

Page 119: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

de l'abattage et de la préparation, travaux mas­culins.

Pour résumer, les caractéristiques d'un champdans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire sont lessuivantes:

travail du sol réduit au minimum;mélange de plantes et de variétés d'une

même espèce afin de mettre à profit l'hétéro­généité du champ, d'empêcher les pullulationsde parasites et de préda teurs, d'étaler les travauxd'entretien et de récolte;

superficie adaptée à une force de productionrelativement réduite.

L'ABANDON DU CHAMP

La moisson est terminée, le propriétaire continueà venir chercher les tubercules de manioc, lesrégi mes de bananes, les pi ments, etc. L'entre­tien se fait de plus en plus irrégulier puis cessedéfinitivement. Il est rare qu'une seconde culturede riz lui succède, c'est alors un "cha mp devieille": on n'a pas besoin de défricher doncpas besoin d'homme et une femme seule, uneveuve, pourra à la rigueur procéder ainsi (Moreauet de Namur, 1978).

Cet abandon est parfaitement compris commenécessaire par le cultivateur: les qualités dusol, faiblement altérées par la mise en culture,doivent se reconstituer, les parasites s'éloigner,les mauvaises herbes disparaître. Si la jachèredoit être reprise, ce ne sera qu'au bout de 15à 20 ans en l'absence de pressions démographiques.En tout état de cause, il faut au moins attendre8 ans, mais si la récolte du riz fut particulièrementabondante sur une parcelle, on pourra y reveniraprès 4 ans (de Rouw, 1979). Autrefois, on laissaitsouvent définitivement se réinstaller la forêt,ce fait esf prouvé par l'existence d'une jachèrede 60 ans étudiée par Kahn (1982).

LES VERGERS DE CAFEIERS ETDE CACAOYERS

Une spéculation de plus en plus pratiquée estla culture des caféiers et cacaoyers. Elle estl'objecti f majeur des allochtones, alors que lesautochtones ne s'y intéressent que modérément.

Ceux-ci plantent ou sèment cacaoyers etcaféiers en même temps que le riz, après larécolte ou encore après un an ou deux de jachère.Les plantations sont assez hétérogènes: arbresd'âges variés dus aux remplacements des sujetsmorts, présence de bananiers et arbres fruitiers,d'ananas et de taro, mélange de caféiers et decacaoyers (Léna, 197ge). L'entretien réduit au

119

minimum, consiste essentiellement en un oudeux désherbages annuels. Il n'y a pas d'applica­tion d'insecticides, cependant les arbres n'ontpas l'air d'en souffrir (Léna, 197 ge).

Sur le front pionnier de Soubré, trois groupesde cultivateurs allochtones numériquement impor­tants se côtoient: Dioulas du Mali et de Guinée,Mossis de Haute-Volta et Baoulés du Centrede la Côte d'Ivoire.

Les Dioulas cultivent ignames, arachide,patate douce et riz qui est soit semé à la volée,d'où une production plus faible que les culturesbakwé , soit planté en bas-fond après semisen pépinière. Ces cultivateurs mêlent volontaire­ment caféiers et cacaoyers en espérant que l'unedes deux espèces réussisse. L'entretien est trèsréduit, mais l'usage des insecticides est assezrépandu. Les arbres fruitiers sont plantés systé­matiquement pour la commercialisation desfruits.

"Le planteur mossi aura tendance à reproduireles cultures de ses anciens employeurs ou biens'il n'a pas encore exercé d'activité agricoleen Côte d'Ivoire, il imitera ses plus proches voisins"(Léna, 197ge). Quoi qu'il en soit, le riz associéau mals aura presque toujours sa préférencela première année. Caféiers et cacaoyers sontplantés en mélange avec un net avantage pource dernier.

L'impact des paysans baoulés est beaucoupplus important que celui des autres migrants,d'abord par leur importance numérique et leurprésence quasi-générale dans le Sud-Ouest, ensuitepar la force de leur tradition agricole. "Le sys­tème de production baoulé a ceci d'original qu'ilest une importation complète, totale, de ce quiest pratiqué en pays baoulé" (Léna, 197ge).

Le défrichement baoulé est total, à l'excep­tion de quelques arbustes conservés pour tuteurerles ignames, les grands arbres sur pied sont tuéspar le feu. La plantation des ignames, plusieursespèces et cultivars en mélange, exige le net­toyage préalable du sol et la confection des buttes,ce qui entraî"ne la destruction du système racinairesuperficiel de la végétation précédente, qui,alars, ne joue plus son rôle protecteur à l'égardde la structure du sol. Bananiers, caféiers etcacaoyers sont cultivés entre les buttes, taros,gombos, aubergines, tomates, piments, malsà la base de celles-ci. "Défrichement et planta­tion se succèdent régulièrement, la jachère étantabsolument inexistante" (Léna, 197ge) et les pro­priétés baoulés se convertissent en vergers decaféiers et, surtout, de cacaoyers. Dans la régionde TaI, pour la production de plantes alimentaireson observe une rotation avec jachère de 2 ans(de Rouw, 1979 et Pig. 27).

De Rouw (1979) estime ainsi les tempsconsacrés aux travaux des champs:

Page 120: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

1ère année 2ème année 3ème année 4ème année Sème année

J F M J JAS 0 N DIJ F M A M J JAS 0 N

L _MANIOC MANIOC

idem1ère année

idem1ère année

VERGERS DE CAFEIERS et/ ou CACAOYERS

RIZ

t=============cul tures pérennescultures vivrières

t _

t L ___IGNAMES---

TARO ----

CAFE-CACAO

RIZ L ___-- -TARO ---

CAFE-CACAO

RIZ ---TARO --

CAFE·CACAOIGNAMES

CAFE·CACAO -- -

<Cl>

-Ea-Q.l

""0

U1

-<::J

...0

N0;

0 Cl>Cl

~a

...0

<!

FIGURE 27. Quelques types de successions baoulés (d'après de Rouw, 1979)

Page 121: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

défrichement: 30 jours (12-18 dans le casd'une brousse secondaire) ;

nettoyage, buttage et plantation d'ignames:36-56 ;

récolte: 6-20 jours en fonction de la tailledes ignames.

Pour la constitution des vergers:

préparation du sol et plantation: 14 jours;entretien: 25-29 jours;récolte des cabosses: 24 jours.

LE PEUPLEMENT ANIMAL

INTRODUCTION

Les profondes perturbations apportées au milieunaturel par la mise en place d'un champ en forêtentraînent des modifications très importantesdu peuplement animal originel. Afin de mieuxcomprendre les problèmes d'infestation des culturesil a été nécessaire, tout en caractérisant cepeuplement dans les champs vivriers, les planta­tions de cacaoyers, les cultures industriellesparfois, de se référer au milieu naturel afin dedéterminer le rôle de la forêt comme réservoirde ravageurs et d'apprécier l'importance de cesmodifications.

Dans ce paragraphe on a regroupé toutesles études portant sur les différents groupesd'animaux pouvant avoir un impact sur le milieucultivé. Tous ne sont pas des déprédateurs descultures et si l'on connaît par exemple des espècesde termites déprédatrices de certaines cultures,leur rôle portera ici essentiellement sur leremaniement du sol ainsi que sur l'humification.

L'action des fourmis est a priori pluscomplexe; outre un rôle certain dans les remontéesbiologiques pour les fourmis terricoles étudiéesici, elles ont un rôle important dans l'équilibrede la biocoenose. Elles sont souvent prédatrices,plus ou moins spécialisées; certaines "élèvent"des colonies d'Homoptères favorisant ainsi leurdissémination; il s'agit le plus souvent de coche­nilles et de pucerons.

Quant aux diplopodes, leur étude à Taï n'estpas suffisamment avancée actuellement pouren relater ici les résultats obtenus. Nous enparlerons cependant car l'impact de ces arthro­podes sur l'humification est important en régionforestière. Il faut signaler par ailleurs quequelques espèces sont connues pour être nuisiblesà certaines cultures (cotonnier, arachide) dansd'autres pays d'Afrique et l'on ne doit pas exclurece risque potentiel. Une étude préalable a été

121

réalisée en forêt de Téké et les résultats obtenusdans cette zone très semblable sur le planbotanique apportent de précieuses indicationssur l'évolution du peuplement après défriche.

Certains rongeurs, insectes, nématodes,peuvent devenir en région forestière de Taï desdéprédateurs non négligeables et ces différentscas seront évoqués particulièrement.

Pour la rédaction du sous-chapitre traitantdu peuplement ani mal nous nous som mes référésaux travaux de Akossi Aouti, Guy Couturier,Tiémoko Diomandé, Henri Dosso, Renaud Fortuner,Bafémory Koyaté et Yaya Sangaré. On sereportera utilement à la liste des travaux citésdans l'annexe du présent ouvrage.

LES RONGEURS

L'écologie du peuplement en rongeurs de l'écosys­tème forestier de Taï était peu connue jusqu'en1974. Cependant en Côte d'Ivoire, nombre d'étu­des consacrées aux savanes et à certaines culturesindustrielles ont été conduites par Bellier* (1964)et Gautun* (1977).

Toute étude écologique, si intéressantesoit-elle, ne saurait être envisagée seulementdans la perspective d'une analyse des mécanis­mes de fonctionnement d'un écosystème forestier.Les rongeurs sont connus pour la rapidité deleur multiplication et par les dégâts qu'ils peuventcauser aux productions agricoles ou par leurrôle d'hôtes intermédiaires dans la transmissionde certaines maladies. Ceci renforce l'intérêttout particulier qui s'attache à leur connaissance.

L'échantillonnage a été réalisé par plusieursméthodes complémentaires notam ment les lignesde piégeages et les quadrats de 'défrichements.Les résultats exposés ici concernent donc enfait la totalité des captures effectuées par cesdifférentes méthodes, et ne peuvent être rappor­tées à une surface prospectée strictement définie.

L'organi!>ation de la recherche s'est articuléeautour des trois principaux axes:

connaissance du dynamisme et du comporte­ment des populations de rongeurs dans le milieuforestier originel et leur évolution en fonctiondes modifications de ce milieu.

écologie des populations déprédatrices dedifférentes productions agricoles (riz, cn['é,cacao, ••• ) et leur impact sur la productivité;

mise au point de bases méthodologiquesde lutte intégrée contre les espèces nuisibles.

Inventaire des espèces

De mars 1974 à décembre 1981, des séries depiégeages mensuels et bimensuels permettent

Page 122: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

9· Crocidura spp.

8· Hybomys trivirgatus

4· Hybomys planifrons

2· Praomys tullbergi

7· Mus minutoides muscoloides

1 • Hylomyscus simus

6 • Dephomys defua

3 • Mal acomys edwards i

S· Lophuromys sikapusi

19 • Hylomyscus oeta

20 - Hylomyscus baeri

17. Lemniscomys striatus

18· Dasymys incomtus

16 • Xerus erythropus

14 - Thamnomys rutilons

lS • Mastomys erythroleucus + M. huberti

11 • Cricetomys emini

10 - Malacomys longipes

12 - Graphiurus huet;

13 - Graphiurus murinus

Espèces présentes

17 18152 5 6 7 8

Espèces présentes

r-

Palmeraie (Bolo)r--- ......

J1... ,....,

30

Forêt dense (Taï)20

10

01 2 3 4 5 6 7 8 9 1011 121314

50 r-

40

30 -Cultures vivrières (Taï)

20r--

10

0 1"""'1 n -1 2 5 7 11 1516171819

60

40

30

Forêt dense (Bolo)20

10

01 2 3 17 18 20

40

30

'#.20cQ)

VI

~1O

.=a.Jo

FIGURE 28. Rongeurs: importance des captures exprimées en % des espèces à TaT ({orêts et culturesvivrières) et à Bolo ({orêt et plantation industrielle)

122

Page 123: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

d'établir une liste complète des espèces de ron­geurs de la région de TaI. La classification baséesur celle de Rosevear* (1969) permet de la répar­tir en 17 genres et 22 espèces:

SClURIDAE, GRAY (1821)

Xerus erythropus, DESMAREST (1817)

CRICETOMYIDAE

Cricetomys emini, WROUGHTON (1910)

MURIDAE, GRAY (1921)

Mus minutoides musculoides, TEMMINCK(1853)Rattus rattus, LINNAEUS (1758)Lophuromys sikapusi, TEMMINCK (1853)Dasymys incomtus, MILLER (1900)Malacomys longipes, MILNE EDWARDS(1853)Malacomys edwardsi, ROCHEBRUNE (1885)Lemniscomys stria tus, LINNAEUS (1758)Thamnomys rutilans, PETERS (1876)Hybomys trivirgatus, TEMMINCK (1853)Hybomys planifrons, MILLER (1900)Praomys tullbergi, THOMAS (1894)Mastomys erythroleucus, TEMMINCK (1853)Mastomys huberti, WROUGHTON (1908)Dephomys defua, MILLER (1900)Hylomyscus aeta, THOMAS (1894)Hylomyscus simus, G.M.A. ALLEN etCOOLIDGE (1930)

GLIRIDAE, THOMAS (1817)

Graphiurus murinus, DOLLMAN (1912)Graphiurus hueti, ROCHEBRUNE (1883)

HYSTRICIDAE, BURNETT (1830)

Atherurus africanus, GRA Y (1842)

THRYONOMYIDAE, BOBOCI< (1922)

Thryonomys swinderianus, TEM MINCI<(1827)

Evolution du peuplement

Milieu originel

Des 1379 rongeurs capturés dans la région deTaï, 562 proviennent de la forêt hygrophile. Lepeuplement typiquement forestier se composede treize espèces réparties en dix genres et troisfamilles.

Du point de vue de l'abondance, l'importancerelative des effectifs par espèces est expriméeen pourcentage de l'effectif total capturé (Tableau25 et Pig. 28). L'analyse du tableau montre que

123

deux espèces abondent en forêt: Hylomyscussimus (30 % des captures) et Praomys tullbergi(26 %). Malacomys edwardsi et Hybomys plani­frons viennent respectivement en troisième etquatrième position, avec 14,6 % et 10,5 % deseffectifs. Hybomys trivirgatus, très abondantedans les formations forestières secondaires,n'apparaît que de manière épisodique (2,5 %des captures) en forêt non dégradée.

Peuplement des milieux anthropisés

Le peuplement de deux types de cultures a étéexaminé, d'une part les cultures vivrières, rizpluvial, manioc, arachide, maïs, d'autre partles cultures industrielles de palmier à huile.Ces cultures succèdent dans tous les cas au dé­frichement de la forêt.

Peuplement des cultures vivrères

Dans l'ensemble des cultures vivrières prospec­tées, 817 rongeurs capturés se répartissent enneuf genres et onze espèces (Tableau 25). Dupoint de vue des effectifs, les Mus sont les plusabondants (45 % des captures) suivis de Praomystullbergi (26,6 %) et Hylomyscus simus (14,3 %).

Dans le cas précis du riz pluvial, suivantl'état de àégradation de la forêt environnanteet le stade phénologique de croissance du riz,l'évolution du peuplement est très caractéristi­que avec la dominance de quatre espèces: Musminutoides musculoides, Mastomys erythroleucus,Hylomyscus simus et Praomys tullbergi.

Dans les rizières de forêt fortement dégradée,cultivées plusieurs années de suite, le peuplementdes rongeurs muridés se réduit le plus souventà une ou deux populations présentant des densitésimportantes qui, par le fait des dégâts commis,entraînent d'importantes pertes de récoltes (ré­gion de Zagné).

Peuplement des cultures industrielles

L'inventaire du peuplement de l'agrosystèmede Bolo (forêt + plantation de palmier à huile)a permis la collecte de 1988 rongeurs en planta­tion et 1405 en forêt. Les espèces les plusabondantes sont (Tableau 25) : Lophuromys sikapusi(37,1 %), Dasymys incomtus (21,2 %), Lemniscomysstriatus (17,7 %), Praomys tullbergi (17,4 %).

Comparaison des peuplements

De l'analyse des captures de rongeurs des forêtshygrophiles ([3010, Taï) et de celles des cultures

Page 124: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

TABLEAU 25. Importance relative des effectifs de rongeurs par espèces dans la région de Taï.

Espèces capturées en NI % Espèces capturées en NI %forêt primaire de Taï cul tures vivrières

Hylomyscus simus 169 30,0 Hylomyscus simus 130 15,9

Praomys tu llbergi 146 26,0 Praomys tu llbergi 242 29,6

Ma lacomys edwardsi 82 14,6 Lophuromys sikapusi 11 1,3

Hybomys planifrons 59 10,5 Mus minutoides musculoides 407 49,8

Lophuromys sikapusi 24 4,3 Cricetomys emini 14 1,7

Dephomys defua 21 3,7 Mastomys erythro leucus

3,3+ M. huberti 7 0,8Mus minutoides muscu loides 19Xerus erythropus 3 0,3Hybomys trivirgatus 14 2,5Lemniscomys stria tus 0,1Crocidura spp. 12 2,1

5 1,0 Dasymys incomtus 0,1Malacomys lo.lgipes

4 0,7 Hylomyscus aeta 0,1Cricetomys emini

Graphiurus hueti 3 0,5TOTAL 817

Graphiurus murinus 2 0,4

Thamnomys rutilans 2 0,4

TOTAL : 13 espèces de 562rongeurs (+ insectivoresCrocidura spp. )

Nl : Nombre d'individus; %: Pourcentages. Les Crocidura spp. (InsectivorE's) sont cités ici pour mémoire.

vivrleres ou industrielles dans les mêmes régions,trois situations sont à envisager lorsque les culturessuccèdent au défrichement de forêts: les espècesqui restent en place après le défrichement etla mise en culture, les espèces qui disparaissentet les espèces qui apparaissent.

Dans le cas des cultures vivrières (Fig. 28),sept espèces sont présentes après le défriche­ment: Cricetomys emini, Mus minutoides muscu­loides, Lophuromys sikapusi, Praomys tullbergi,Hylomyscus simus, Xerus erythropus, Mastomyserythroleucus.

Dix espèces disparaissent: Malacomys longi­pes, Malacomys edwardsi, Thamnomys rutilans,Hybomys trivirgatus, Hybomys planifrons, Depho­mys defua, Hylomyscus baeri, Graphiurus murinus,Graphiurus hue~i, Graphiurus crassicaudatus.

Deux espèces apparaissent: Lemniscomysstriatus et Dasymys incomtus, qui sont lesrongeurs des milieux ouverts. Leur présencedans les cultures vivrières n'est guère surprenante.Elles ont été probablement introduites dans cescultures par suite de la déforestation liée àl'exploitation forestière le long des axes routiersou à l'élargissement de ces mêmes axes.

124

Dans le cas des cultures industrielles (Bolo)(Fig. 28), les espèces restant après le défrichementdes forêts incluent: Mus minutoides musculoides,Lophuromys sikapusi, Hybomys trivirgatus, Prao­mys tullbergi, Dephomys defua (D. ebumea),Mastomys erythroleucus.

Les espèces qui disparaissent incluent:Cricetomys emini, Malacomys longipes, Malaco­mys edwardsi, Thamnomys rutilans, Hybomysplanifrons, Hylomyscus baeri, Hylomyscus simus,Graphiurus murinus, Graphiurus hueti, Graphiu­rus crassicaudatus, Xerus erythropus.

Les espèces qui apparaissent sont: Dasymysincomtus, Lemniscomys st ria tus.

Conclusion

L'établissement d'une culture dans des milieux"primaires" ou remaniés par l'homme se traduitpar une profonde modification du peuplementdes rongeurs. Le peuplement d'origine, d'unerichesse spécifique remarquable - 21 espècesen forêt - se réduit à quelques espèces seulementlors de la mise en culture: sept espèces dans

Page 125: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

l'ensemble des cultures vivrières, deux au maximumdans les rizières cultivées plusieurs années desuite; il en est de même pour les cultures industri­elles de palmier à huile. Seules les espèces fores­tières capables de s'adapter au milieu ouvertrestent en place.

En rapport avec l'i mportance croissanteque prennent les cultures dans la région de Taïdont la population humaine s'accroît rapidement,les peuplements de rongeurs, notamment desmuridés, subissent en ce moment une évolutionse traduisant particulièrement par une fortediminution de leur richesse spécifique. Plusieursespèces strictement forestières disparaissent.En revanche il y a une augmentation de l'abondanceglobale des rongeurs.

LES FOURMIS

L'étude détaillée des peuplements en fourmisterricoles du sol de deux forêts denses humidessempervirentes du sud de la Côte d'Ivoire a permisde mettre en évidence la grande diversité duspectre spécifique composant ces peuplements.Ainsi, 120 espèces de fourmis appartenant à35 genres ont-elles été récoltées. Il est à soulignerque cet ordre de grandeur est très comparableà celui dénombré dans les savanes humides àrâniers (Borassus aethiopum) du centre du pays(Levieux*, 1973).

Ces fourmis occupent dans le milieu diverssites de nidification (le sol, la litière, la végéta­tion basse) dont l'étagement traduit les étapesde l'évolution d'une vie souterraine à une viede plus en plus dégagée de l'emprise du sol. Cettestratification induit à chaque étape un modede vie et des structures de nid plus ou moinsconvergents. Le sol par exemple abrite des fourmisterricoles vivant dans le sol et à sa surface.Malgré la diversité spécifique, l'architecturedes structures élaborées (loges et galeries) peutêtre regroupée autour de t1'ois types essentiels:diffus, concentré et à galeries labyrinthiques.Les espèces qui chassent dans le sol et à sa surfaceévident des galeries particulières, souventsuperficielles, réservées à la chasse et pourvuesde nombreuses issues secondaires permettantà l'ouvrière de gagner aisément les aires de chasseà l'abri des intempéries climatiques: Pachycondylabrunoi, Pachycondyla si lvestrii, Pachycondylacaffraria et Paltothyreus tarsatus illustrentbien ce 'Cas.

Dans l'espace horizontal, les nids occupentdes aires variables allant de quelques mm 2 à15 m2 environ selon l'espèce et l'âge de la société.Dans Pespace vertical, ils s'enfoncent peu enforêt; la grande majorité des fourmis rencontranten effet des conditions thermohydriques stables

125

dans les 15 premiers centimètres du sol en saisonsèche. Seul PaltothYl'eus tarsatus peut quelquefoisdescendre jusqu'à -40 cm. En saison de pluie,les nids remontent de 5 cm environ. On retrouvelà encore un comportement saisonnier déjà signaléchez des fourmis de savane et qui traduit uneadaptation des insectes de cette famille auxfluctuations climatiques saisonnières (Levieux*,1972).

Pour construire leurs nids, les fourmis dusol n'élaborent pas de matériaux spéciaux à lamanière de certaines espèces arboricoles (Crema­togaster, Polyrhachis). Elles se contentent decreuser des galeries ou d'aménager celles déjàexistantes. La plupart des espèces vivant dansla litière ou au-dessus se comportent de façonanalogue mais usilisent aussi des débris végétauxmorts et plus ou moins décomposés (feuilles,brindilles, branches, troncs suspendus ou gisantau soI). On note cependant, chez Technomyrmexandrei (Dolichoderinae), qu'une substance éla­borée à partir de débris végétaux sert de ci mentlors de la confection du nid. Dans l'ensemble,les fourmis de litière occupent des nids à struc­ture simple, d'autant moins typiques qu'il s'agitsouvent du réaménagement de galeries précé­demment occupées par des termites ou des larvesxylophages de coléoptères.

Le peuplement forestier

Les fourmis du sol ont été étudiées de mamerecomparative dans deux stations (Taï et Téké)distantes de 500 km. Le spectre faunistiqueobservé est pratiquement le même; cela suggèreque la forêt ombrophile de Côte d'Ivoire abriteen divers points la même faune myrmécologique(Tableau 26) (Diomandé, 1981).

Les peuplements étudiés sont dominés parun lot de sept espèces com munes (constanceau moins égale à 25 %); ce sont Technomyrmexandrei,Centromyrmex sellaris, Pachycondylabrunoi, Pheidole sp.1, Pachycondyla caffraria,Tetramorium ataxium et Paltothyreus tarsatus.D'autres espèces peuvent s'ajouter à cette listelorsque leur fréquence est localement plus élevée,par exemple Pseudolasius sp, Pachycondyla gabon­ensis, Pheidole groupe minima à Taï ou Pachy­condyla silvestrii, Tetramorium jugatum, Ph('idolebucholzi à Téké.

Les espèces de Myrmicinae et de Ponerinaereprésentent plus de 85 % du spectre faunistiqueet constituent le fond du peuplement. Par suite,les Dolichoderinae et Formicinae sont bien plusfaiblement représentés.

Ces résultats comparés à ceux obtenus dansla forêt mésophile mettent en lumière la simili­tude du spectre spécifique des représentants

Page 126: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

TABLEA U 26. Densités de nids à l'hectare de quelques fourmis dans les forêts de raT et de réké

Espèces Nombre denids/ha

Espèces Nombre denids/ha

MYRMICINAE

Oligomyrmex sp. 1Pheidole sp. 1Pheidole sp. 3-!bTriglyphothrix brevispinosaOligomyrmex (Pae)Pheidole sp. 3-3aTriglyphothrix furtivaTetramorium diomandeiTetramorium ataxiumPheidole sp. 2 groupe aurivilliiCrematogasterCalyptomyrmex sp.Tetramorium jugatumTetramorium guineenseDacamorium uelenseOligomyrmex sp. 2Pheidole sp. 3-2aPheidole bucholziSerrastruma groupe ludoviciSerrastruma groupe lujaePheidole sp. 3-1aPristomyrmex sp. 3Oligomyrmex sp. 3Tetramorium pullulumTetramorium flavithoraxPheidole sp. 3-3bStrumigenys sp. rogeriPristomyrmex orbicepsPristomyrmex sp. 2Monomorium sp.Oligomyrmex sp. 5Tetramorium invictumTetramorium muraltiPheidole sp. 3-3cTriglyphothrix menkauraMiccostruma tigrillaMicrodaceton sp.Smithistruma sp.Pheidole sp. 3-2bPheidole sp. 3-2cOligomyrmex sp. 3bOligomyrmex sp. 4Oligomyrmex sp.ab

DOL ICHODERINAE

Technomyrmex andreiTechnomyrmex sp.

DORYLINAE

Aenictus spp.Rhogmus sp.

Tai

150120110908080706050504040303030303030303030202020201510101010101010

5

550120

3030

Téké

60120130

80

40106070601010

200

1020

90303020

10

4010

3020501010201010101010101010

17030

1020

PONERINAE

Centromyrmex sellarisPachycondyla brunoiHypoponera spp.Pachycondyla caffrariaAnochetus bequaertiLeptogenys guineensisPachycondyla scolopaxPaltothyreus tarsatusAnochetus punctatusCerapachys sp. 2Leptogenys nuserraLeptogenys steropsPachycondyla weberiAsphinctopone silvestriiSphinctomyrmex sp. 2Cerapachys sp. 1Anochetus africanusProbolomyrmex guineensisDiscothyrea spp.Odontomachus assiniensisCerapachys sp. 3Sphinctomyrmex sp. 1Pachycondyla gabonensisPlectroctena crypticaPlectroctena ugandensisPachycondyla pachydermaAmblyopone muticaPachycondyla silvestriiLeptogenys princepsLeptogenys n.sp.Plectroctena subterraneaPsalidomyrmex foveolatusLeptogenys elegansLeptogenys ergatogynaLeptogenys mastaxAnochetus n. sp. 1Anochetus n. sp. 2Pachycondyla soror

FORMICINAE

Pseudolasius sp.Para trechina sp:Acropyga sp.Camponotus sp.Acantholepis sp. 1Acantholepis sp. 2

126

Tai

17015010090908060403030303020202020201010101010101010

555

9030302015

5

Téké

16060

140404040107010

103010

10

2030

20

101070702020101010101010

5

20

2020

Page 127: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

TABLEAU 27. Les fourmis - Peuplement d'une rizière après la récolte (Prélèvements de 150 mL - Région de Taï)

Espèces constantes

Paratrechina sp.

Rhogmus sp.

Tetramorium arf. zapyrum

Espèces accidente Il es

Pheidole sp. 3-1b

Tetramorium ataxium

Pachycondyla weberi

Pachycondyla brunoi

Acantho lepis canescens

Aenictus sp.

Crematogaster spp.

Constance(%)

100

50

50

17

17

17

17

17

17

+

% dupeuplement

67

11

7

4

2

2

2

2

2

des Ponerinae. En revanche, la très faible repré­sentation quantitative des Myrmicinae pose unproblème qui ne pourra être résolu plus tardque par une prospection plus étendue.

La stabilité relative du spectre spécifiqueévoqué autorise à penser que les blocs forestiersde type ombrophile des pays voisins (Ghana,Guinée, Libéria) abritent aussi la même faune(dans la mesure où ils n'ont pas été trop détruits).L'hypothèse reste cependant à vérifier.

L'étude quantitative du peuplement situela densité globale de nids entre 3000 et 3500nids ha- l soit 30 à 35 nids 100 m- 2 • Cette forteconcentra tion observée n'est pas particulièreaux milieux tropicaux; quelques biotopes d'Europeet d'Amérique du nord présentent la mêmerichesse.

Les effectifs des populations adultes ocsille'1tde 100 à 2500 individus en moyenne par nidchez les représentants des Ponerinae dont quelquessociétés, celles de Paltothyreus tarsatus et d'Odon­tomachus assiniensis peuvent atteindre 800 indi­vidus par nid. Chez la plupart de ces fourmis,le nombre d'individus habitant un nid est du mêmeordre de grandeur que celui des formes voisinespaléo- ou néoarctiques.

La population globale de la forêt, à l'excep­tion des Do rylinae , se situe entre 1 et 3 millionsd'individus à l'hectare. Ces valeurs relativementpeu élevées indiquent que le peuplement de laforêt de l'ouest africain se caractérise plus parsa richesse en espèces de fourmis terricoleset la forte densité de nids à l'hectare qui enrésulte, que par l'i mportance des populationsvivant dans les nids. Un tel fait traduit d'abordla présence des Ponerinae dans ces peuplements.Les biomasses estimées sont très variables d'uneespèce à l'autre. La plus élevée, celle de Palto­thyreus tarsatus, correspond à 0,079 g m- 2 depoids sec (soit 80 mg m- L ) ; les autres estimationsplus faibles s'élèvent à 5 mg m- z pour Pachy­condyla caffraria et à 3,5 mg m- 2 pour Tetra­morium ataxium ou Triglyphothrix brevispinosa.

Les cycles de développement sont générale­ment courts, caractéristiques des faunes de zoneschaudes; ils varient de trois semaines à deuxmois. Seules les Ponerinae de grande taille,Plectroctena minor, Pachycondyla pachydermaont des durées de développement plus longues(3 à 4 mois).

Les sociétés se renouvellent par essai mageune ou deux fois par an selon les espèces. Ces

127

Page 128: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï recherche et aménagement

TABLEAU 28. Les fourmis - Peuplement d'une jachère de trois ans (prélèvement de 150 m 2 - Région de Taï)

Espèces constantes

Tetramorium ataxium

Pheidole sp. groupe megacephala

Pheidole sp. 3-1b

Paratrechina sp. (G)

Trachymesopus brunoi

Rhogmus sp.

Espèces accessoires

Technomyrmex andrei

Crematogaster sp.

Odontomachus trog lodytes

Espèces accidentelles

Camponotus acvapimensis

Pheidole specuUfera

Acantho lepis canescens

Camponotus so Ion

Pheidole bucholzi

Smithistruma sp.

Anochetus n.sp.2

Leptogenys sterops

P lectroctena minor

Pachycondyla si lvestrii

Paratrechina sp. (P)

128

Constance(%)

83

67

50

50

50

50

33

33

33

17

17

17

17

17

17

17

17

17

17

17

% dupeuplement

7

21

13

9

5

4

3

2

2

9

8

4

2

1

1

1

1

1

1

1

Page 129: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

périodes de vol nuptial coïncident avec la finde la saison sèche et se poursuivent durant lasaison pluvieuse suivante.

Action de l'anthropisation sur le peuplement

Après la présentation générale des caractéristi­ques quantitatives d'un peuplement forestier,l'analyse des modifications faunistiques duesà l'impact des activités humaines révèle quela déforestation suivie de la mise en cultureprovoque la dispari tion provisoire des deux tiersenviron des espèces du milieu originel. L'étudedu peuplement des différentes parcelles depuisla jachère jeune jusqu'à la forêt reconstituéepermet de suivre l'évolution de la faune. Dansle champ de riz, le peuplement est considérable­ment réduit (Tableau 27).

Dans les jeunes friches, les espèces savani­coles typiques comme Camponotus acvapimensis,Acantholepis canescens, Pheic10le groupe mega­cephala s'installent en abondance avec leur cortèged'Homoptères parasitecde plantes à côté d'espècesautochtones à large valence écologique commeTetramorium ataxium, Pachycondyla brunoi(Tableau 28). A mesure que la végétation grandit,certains savanicoles sont remplacés par des sylvi­coles du secteur mésophile: Pheidole speculi­{era, Apomyrma stygia. Le vieillissement dela jachère entraîne la disparition progressivedes espèces allogènes dont la plus caractéristiqueest Pheidole sp. groupe megacephala régulière­ment présente dans toutes les friches jeunes.L'élimination totale de cette faune allogènese situerait vers dix ans d'âge car leur pourcent­age dans le peuplement, déjà faible à 5 ans, de­vient nulle à 21 ans. A 32 ans, la compositionet la structure du peuplement redeviennent typi­ques de la forêt ombrophile climacique.

Il convient de souligner le rôle primordialtenu au cours de cette évolution par les voiesd'accès (routes et pistes) qui permettent l'inva­sion des zones boisées conservées par les espècesétrangères à la forêt. Les modifications desfacteurs du milieu (végétation, microclimat)jouent alors un rôle déterminant dans l'installa­tion des espèces. C'est ainsi que la végétationparticulière de la palmeraie de 15 ans crée unmicroclimat au niveau du sol qui présente biendes analogies avec celui du secteur mésophile.Elle abrite ainsi une faune composée pour partiede fourmis de savane et pour partie de fourmisde forêt mésophile.

La succession de faunes observée dans lesdifférents milieux en liaison avec la flore etle microclimat suggère que le triptyque "végétal­microcli ma t-fourm i terricole" peut permettre

129

de caractériser divers biotopes terrestres ivoiriens.La fourmi, dépendante des deux autres paramè­tres, peut alors une fois la méthode affinée,servir d'indicateur de milieu.

Conclusion

Les fourmis sont des prédateurs d'invertébrés,notamment d'insectes. Les proies les plus recher­chées sont les termites, les collemboles, leslarves de diptères. L'apport glucidique dansleur alimentation à l'inverse des observationseffectuées en savane par Levieux* (1967) estassez limité: l'exploitation du miellat des homop­tères et des fruits n'étant qu'occasionnelle etfonction de l'environnement. La diversité desrégimes met en lumière l'utilisation judicieusedes ressources disponibles pour satisfaire aumieux les exigences trophiques d'un nombre élevéd'espèces. Ainsi, certains régimes sont trèsspécialisés: les termites pour Centromyrmexsel/aris, Decamorium uelense, les isopodes ter­restres pour Leptogenys sterops, Leptogenysprinceps, les collemboles pour Serrastruma spp.

D'autres sont plus variés et comprennentplusieurs types d'ali ments; c'est le cas de lamajorité des fourmis terricoles de forêt. L'in­dividualisation des espèces se manifeste alorsdans la composition du spectre ali mentaire quipeut comprendre une, deux ou trois proies prin­cipales (collemboles, termites, nématodes) géné­ralement abondantes dans le milieu et une sérieplus ou moins longue d'aliments complémentaires.Il en résulte une multitude de régi mes possiblesparmi lesquels chaque espèce trouve à satisfaireses besoins et à assurer sa survie.

Au total, la coexistence d'un grand nombred'espèces est rendue possible par le jeu de l'utili­sation différente de l'espace et du temps et parune diversification des régimes alimentaires.

L'analyse des interactions entre espècesa permis de préciser que la compétition naturel­le se manifeste surtout à l'occasion de la capturede grosses proies attirant diverses fourmis poly­phages. Dans ce contexte, Paltothyreus tarsatusapparaît com me l'espèce dominante de forêt,capable de retirer les proies à presque toutesles autres.

Cette conception semble également régirles rapports inter-strates. En effet, les fourmisarboricoles interfèrent fort peu avec les espècesterricoles; il n'existe donc pas de compétitionentre ces deux faunes. Cette observation estaussi valable pour les fourmis endogées, isoléestant par un système clos de nidification quepar l'étroitesse de leurs régimes alimentaires.

J\u plan myrmécologique, la forêt ombrophile

Page 130: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

Photo 9. Collecte d'insectes dans un champ mis en culture un an auparavant. Lesplantes cultivées ont laissé place à une végétation herbacée et de sous ligneux

cllmacique se présente comme un écosystèmecomposé de trois strates: la strate des endogées,celle des terricoles, celles des arboricoles; cestrois composantes peuvent être considérées com mefonctionnant de manière quasi indépendanteles unes des autres.

Il est cependant courant d'observer dansles milieux secondarisés et dans les savanes boi­sées, la descente au sol de fourmis arboricoles(Oecophylla, Crematogaster, Polyrhacis, Campo­notus) qui exercent une pression évidente surles espèces terricoles; ces phénomènes méritentd'être étudiés, car ils laissent entrevoir quel'hom me en détruisant la forêt favorise l'instal­lation d'un milieu différent par sa flore, sa fauneet son fonctionnement écologique. De tellestransformations d'un milieu en équilibre sontsouvent néfastes lorsqu'elles sont conduites en

130

vue d'une exploitation orientée d'une ressourcedu milieu sans tenir toujours compte du fonction­nement du système biologique naturel.

LES INSECTES DEPREDATEURS

Le champ cultivé traditionnel, par sa situation,son environnement, pose le problème du rôlede la forêt comme réservoir éventuel de ravageurspour les cultures. Le thème principal qui a étédéveloppé est donc l'étude des modificationset de l'implantation de l'entomofaune dans lesmilieux défrichés et mis en culture. Les recher­ches ont été orientées sur la connaissance desprocessus de pénétration des insectes et surleur origine.

Il a pour cela été nécessaire de se référer

Page 131: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

constam ment au milieu environnant, c'est pour­quoi un protocole d'échantillonnage régulier(Photo 9) a été mis au point en tenant comptedes milieux de référence suivants:

le milieu naturel, une distinction étant faiteentre:

· le sous-bois• la canopée· les châblis

Toutes les collectes effectuées dans le milieunaturel l'ont été, en fait, dans la forêt primaire;

les milieux remaniés:les cultures. Le choix des cultures deréférence sIest porté sur:

le champ de rizle verger de cacaoyer

les milieux "secondarisés": pistes, friches,clairières (anciens parcs à bois), stadearbustif pionnier (brousses à Marantaceae,à Macaranga).

Le champ de riz

La mise en place d'un champ de riz en forêtcrée d'importantes perturbations sur le peuple­ment préexistant. L'abattage des arbres puisle brûlis entraînent la disparition totale de lafaune d'origine.

Nous avons donc cherché à définir la naturedu nouveau peuplement et les processus d'infes­tation. Plusieurs démarches ont été engagées:

caractérisation du peuplement entomolo­gique dans le champ;

différenciation d'une faune inféodée auriz par rapport au peuplement global;

connaissance de l'origine des insectes.

Le riz est semé à partir de mars, à l'arrivéedes premières pluies. Dès l'apparition des pre­mières plantules de riz, on constate que denom breuses espèces d'insectes s'installent dansle nouveau champ. La présence de plantesadventices appartenant à plusieurs famillesbotaniques favorise dans les semaines qui suiventla mise en place d'une faune très diversifiée.

De nombreux sondages effectués dans lemilieu naturel forestier (canopée, sous-bois)et sur les pistes d'accès à certains champs, lors­qu'elles existent, ont permis de montrer quele peuplement forestier est différent de celuiqui s'installe dans le champ de riz.

Ce fait est montré par l'identification auniveau spécifique de quelques groupes d'insectespotentiellement nuisibles à l'agriculture. Quel­ques exemples sont donnés dans le Tableau 29pour les Acridoidea, Pentatomoidea et Coreoidea.

L'étude des insectes vivant sur le riz acependant retenu l'essentiel des activités. Lastructure des populations a été analysée dansplusieurs champs situés dans des conditionsécologiques très différentes les unes des autres.

Les champs "inclus". Parcelles de surfacevariable selon l'exploitant mais dont l'originalitéréside dans le fait qu'elles sont ouvertes en forêtprimaire, le plus souvent à plusieurs kilomètresdu moindre défrichement plus ancien, et de cefait incluses. L'accès en est un simple sentieroù la végétation ne subit aucune perturbationni aucun apport.

Ce type de défrichement permet de disposerde parcelles exemptes de contamination entomo­logique terrestre.

Les champs implantés dans des zones tradi­tionnellement cultivées depuis de nombreusesannées aux abords des villages, et dans lesquellesla contamination est évidente.

L'inventaire des ravageurs, leur successiondans le temps ainsi que leur importance relativeont mis en évidence la présence de foreurs detiges, défoliateurs et insectes piqueurs.

Foreurs de tiges

Ce sont pour la plupart des lépidoptères avecSesamia calamistis, MaUarpha separatella, Eldanasaccharina, Chilo aleniellus et C. di{{usilineus.Les peuplements relatifs ont été évalués avecprécision. Le parasitisme existe.

Deux espèces de diptères Diopsidae occasion­nent de rares dégâts.

Défoliateurs

Différents groupes sont présents. En premièreannée il n'a pas été constaté de dégâts impor­tants. Parmi les lépidoptères il se trouve deuxespèces de Satyridae, un Hesperidae, deux Noctu­idae et Pyralidae; la plupart ont été identifiéset sont connus pour ~tre des ravageurs second­aires du riz.

Les Orthoptères comprennent une espècede grillon (Euscyrtus bivittatus) dont les dégâtspeuvent par places et dès la première anneede culture être importants. Le limbe est alorsparfois dévoré aux deux tiers. Un ensifère, Homo­rocorypha nitidulus, pond dans les gaines foliaireset plusieurs espèces d'acridiens colonisent lechaomp dès les premières semaines.

EpiZachna similis (Coccinellidae) est présenteen début de végétation et disparaît en juillet.

131

Page 132: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEA U 29. Quelques exemples d'espèces d'insectes caractéristiques dans les principaux milieux prospectés

GENRE, ESPECE

ACRIDOIDEA

Anacatantops nota tus

Badistica lauta

Badistica omata

Chirista compta

Duviardia oubitai

Gastrimargus procerus

Ho lopercna gerstackeri

Heteroptemis thoracica

Mabacris guillaumeti

Mastachopardia zougueana

Oxya hyla

Stenocrobylus {estivus

Taiacris couturieri

COR EOIDEA

Anoplocnemis curvipes

Anoplocnemis tristator

Di lycoctha tenuicomis

Erbu la southwoodi

Ko 1!erie lia miro

Forêtdense

xX*

X

X

X

X

x

x

Lisièrespistes

xX

X**

x

xX

X

Cul turesen forêt

X

X

X

X

X

X

X

X

GENRE, ESPECE

Leptog 1ossus membranaceus

n. g. sp.

Omytus elongata n. var.

Pl ectropoda ob longipes

Plectropodoides n. sp.

PENTA TOMOIDEA

Aethemenes chloris

Agonosce 1is ga mbiensis

Aspavia armigera

Aspavia hastator

Aspavia ingens

Bathycoe lia tha lassina

Canthecona disco 1or

Carbu la capito

Carbula esca lerai

Catadipson aper

Cyc logastridea ma rgina 1is

Dorycoris pavoninus

Forêtdense

X

X

X

X

X*

x***

X

X

X

X

Lisièrespistes

X

X**

X**

X

Cu 1turesen forêt

x

X

X

X

X

X

X

X

***

***

présence, - : absenceuniquement dans les bas-fonds éclairés à Marantaceaevivent sur les Gramineaepeut de retrouver dans les plantations de cacaoyers ouelle devient un ravageur

Page 133: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Insectes piqueurs

Un Cercopidae (Locris macula ta) et plusieursespèces de Pentatomidae, Lygaeidae et Coreidaesont les représentants les plus remarquablesde ce groupe. Le Pentatomidae Aspavia armigeraest très com mun durant la plus grande partiedu cycle, A. hastator beaucoup plus rare.

A partir du stade "grain laiteux" apparais­sent en grand nombre le Coreidae Mirperus jacu­lus et les Lygaeidae Dieuches albostriatus etPachybrachius sp. R iportus dentipes et Erbulasouthwoodi (Coreidae) sont beaucoup plus rares.

Quatre espèces de pucerons sont représentés:Hysteroneura setanae, Rhopalosiphum rufiabdo­minalis et R. maidis, Tetraneura nigriabdomina­lis, cette dernière espèce, radicicole, est trèsabondante. Les autres paraissent bien contrôléespar les prédateurs, notamment Coccinellidaeavec Scymnus senegalensis et rubiginosus.

Une espèce de cochenille a été trouvéeen fin de végétation (Planococcus sp.).

Il s'avère donc que beaucoup de ravageursclassiques sont présents dès la première annéede culture.

Aucun de ces insectes, malgré des sondagesapprofondis, n'a été trouvé en forêt. La rapiditéde leur installation est cependant surprenantepuisque quelques jours après la levée des premièresplantules, certains défoliateurs sont déjà enactivité.

Le riz emmagasiné sous forme de gerbesdans les greniers subit d'importantes attaquesde la part d'un microlépidoptère, Sitotroga ce­realella. La méthode de protection par la fuméeest certainement très efficace, malheureusementelle n'est pas toujours pra tiquée, surtout lorsquele grenier est situé dans le champ, loin des habi­tations. Des méthodes plus rationnelles de pro­tection devraient être recherchées.

Parmi les prédateurs, on a noté l'abondancedes Reduviidae; généralement non ou peu spé­cialisés, ces hémiptères sont représentés parune centaine d'espèces. Certaines, en particu­lier parmi les espèces forestières, sont nouvellespour la science. Une dizaine d'espèces sont trèsfréquentes dans les champs cultivés. On peutciter parmi celles-ci Sphedanolestes picturel­lus, Rhinocoris nitidulus et R. obtusus; l'espèceVestula lineaticeps est par contre ubiquiste.D'autres espèces sont strictement inféodéesà la forêt dense.

Il ne fait aucun doute que ce groupe contri­bue activement à l'équilibre des populationsde ravageurs.

Les araignées, autre groupe important deprédateurs, n'ont malheureusement pas encoreété étudiées. D'importantes collectes ont été

133

effectuées mais on se heurte dans ce cas auproblème de l'identification des échantillons.

La biocénose du champ est d'une grandecomplexité et, s'il est possible d'analyser le peu­plement avec une certaine précision, les inter­actions des très nombreux facteurs en causedans ce type de milieu ne permettent pas depréjuger leur rôle dans la productivité du champde riz.

Les insectes dans le verger de cacaoyers

Comme cela a déjà été évoqué auparavant, laculture du cacaoyer s'étend rapidement dansle Sud-Ouest ivoirien. Dans les environs de Tai',des traitements sont appliqués avec plus ou moinsde régularité.

Il a été, néanmoins, constaté la présenced'un certain nombre de déprédateurs classiques,bien connus, tels que Earias biplaga et E. insu­lana, Anomis leona, Tyora tessmanni, différentesespèces de cochenilles, Distantiella theobroma.•.Il a été constaté que cette dernière espèce pro­voque parfois des dégâts importants dans lesjeunes plantations.

Une espèce nouvelle d'homoptère Membra­cidae, Eumonocentrus villiersi, a été découvertedans une plantation incluse en forêt dense. Leslarves et adultes vivent à l'extrémité des bran­ches des cacaoyers (Boulard et Couturier, 1984).

11 convient de signaler que les échantillon­nages effectués en forêt primaire ont révéléla présence de plusieurs espèces d'insectes poten­tiellement nuisibles au cacaoyer; parmi celles-ci,on peut citer: Bathycoelia thalassina, considérécomme important ravageur au Ghana, Ceratitispunctata, Odoniella rubra, Bryocoropsis laticol­lis et Pochazia fasciata.

Par ailleurs, deux espèces nouvelles du genreHelopetlis (Miridae) non encore décrites, ontété collectées, l'une dans la canopée, l'autredans un défrichement en forêt. 11 convient derappeler que beaucoup des espèces connues jus­qu'à présent dans ce genre sont parasites deplantes cultivées en Afrique (cacaoyer, coton­nier, thé, aubergine••• ).

Les cultures en région de Taï subissent lesattaques de nombreux insectes dont la plupartsont des déprédateurs classiques (Photo 10).

Il est apparu que les insectes nuisibles auriz sont plutôt d'origine extérieure au milieuforestier et proviennent, soit de milieux déjàanthropisés, soit de milieux savaniens où l'onretrouve les plantes-hôtes naturelles de cesespèces.

L'éloignement des champs de riz par rapportaux zones infestantes ne modifie pas les processus

Page 134: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

Photo 10. Recherche des insectes déprédateurs du Gombo

d'envahissement; néanmoins on a pu constaterque les parasites et prédateurs de ces ravageurss'installaient, eux aussi, rapidement dès la pre­mière année de culture. Il semble donc se créertrès rapidement une situation d'équilibre du moinstant que le champ est entretenu.

L'abandon après un an, parfois deux ans,de la culture du riz sur une même parcelle nepermet pas de connaître l'évolution à long termedu peuplement en ravageurs dans le champ tradi­tionnel. On peut dire cependant que dès l'appari­tion du stade arbustif pionnier la faune se modifie,et après trois ans d'abandon apparaissent déjàquelques espèces typiquement forestières (Fig. 29,Photos 11, 12).

Concernant les cacaoyers, il est plus vrai­sem blable de considérer la forêt dense com meun réservoir potentiel de ravageurs. Cela peuts'expliquer par la présence de nombreuses Malvalesforestières.

D'une façon générale, il a été constaté queles paysans connaissent assez mal les insectesqui endommagent leurs cultures. Il s'ensuit uneapplication non rationnelle des produits phyto­sanitaires lorsque ceux-ci sont utilisés (cacao­yers). Le cas des Miridae du cacaoyer est typique.Dans la région de TaI com me dans toute la zonecacaoyère africaine, ces insectes peuvent causer

134

d'importants dommages. Des traitements ontété mis au point pour les détruire. Les planteursreçoivent donc périodiquement des pesticidespour lutter contre ces insectes, mais, ne lesconnaissant pas, ils ne savent pas les atteindrecorrectement. Le rendement en est affectéd'autant et est compensé par de plus grandessurfaces aménagées.

Une utilisation rationnelle et judicieusedes techniques devrait donc permettre l'écono­mie de beaucoup de terres pour un rendementéquivalent.

LES TERMITES

Dans les sols forestiers équatoriaux, la dégrada­tion des matériaux est rapide et l'apport organiquetrès important sous l'action de nombreux organis­mes vivant dans et sur le sol; cette action sepoursuit tout au long de l'année et la faune dusol s'avère être un facteur très actif de la dispa­rition des matériaux végétaux. C'est le cas enparticulier des termites qui agissent sur la miné­ralisation des végétaux mais contrecarrent leplus souvent les processus d'humification et même,pour certaines espèces, contribuent à détruireles substances humiques déjà formées. Par ailleurs,

Page 135: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Photo 11. Un acridien de forêt, Mastachopardia zougueana, localisé à la ca nopée,et qui disparaît totalement lors de la mise en culture

Photo 12. Eucoptacra basidens est un acridien strictement localisé à la lisière forestière

135

Page 136: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

Forêt primaire

Fauneforestièreoriginelle

VI

C4>E4>

...l:U

111 4>*1 ou ~1 VI ::>

o 0,a...~

1

N

;;>~:2::>

U

1Faune ,non fores t ière

(apport exté"rieurl

11

co

VICou 0

~ ~4> 0

"U 04> U

"U 0E::E

Forêt sernndaire

pUIS reconstitutionclimacique

A

Recon s ti tuti on <1" 1a faune fores li ère

co

VI

2u4>VIC

--------------------...... --.. -- .... ,~(;,

'4>>

N

VI~

Forêt primaire CI ~..0 ,4>

Qi ;;>c

4> ~E :24>...l: :>u

U:Q;0 1 1

1 1Faune 4>* 1 Faune 1"U 4> 1forestière ~ § 1 non forestièreoriginelle a.....E 1 (apport ext~rieur)

1 1, 1

Cultures de rente

Café. Cacao

B

Adaptation de quelques élémentsde la faune forestière au nouveaumilieu arbustif.Persistance d'une partie de lafaune allochtone

Vieillissement

de la

plantali on?

?

co

VI

2-u4>VIC

't< exception faite de quelques erratique~

FIGURE 29. Evolution de la faune entomologique après suppression de la forêt pour la mise en culture. A) Lorsque le défriche­ment est abandonné après 1 an, parfois 2 ans, de culture de riz. B) Lorsque la culture de riz est suivie d'une planta­tion pérenne: caféiers ou cacaoyers. (Exception faite de quelques erratiques.) Les indications en abscisses et enordonnées n'ont aucune valeur chiffrée ni dans le temps, ni dans l'espace, et n'ont pour objet que de matérialisergraphiquement les transformations d'une façon très schématique

136

Page 137: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Photo 13. Termitières épigées à la base d'un tronc d'arbre mort

l'action des termites sur la morphologie des solsest connue par les remontées spectaculairesde matériaux qu'effectuent certains de ces insec­tes, les enrichissements chimiques qui en découlentet les recouvrements auxquels ils ont pu donnerlieu (Bachelier*, 1978).

L'objectif de l'étude entreprise en forêtde Tai est de définir l'importance des termitesdans la biocénose forestière et leur impact surla flore et le sol. Ultérieurement, les modifica­tions du peuplement lors de la mise en culturedevront être étudiés, ainsi que les dégâts qu'ellespourraient éventuellement commettre.

Il a donc été nécessaire d'établir un inven­taire préalable qui révèle la présence de 44espèces, réparties en 30 genres. Cette listen'est pas exhaustive et ne tient pas compte desgenres dont les sociétés sont dépourvues de sol­da ts. La liste des espèces est présentée dans

137

le Tableau 30. Les échantillonnages ont étéréalisés sur des quadrats de 625 m2 et 2500 m2 •

La localisation des nids a été précisée par rap­port au sol (nids épigés, nids hypogés, voir Photo13), et par rapport aux constructions appartenantà d'autres espèces (inquilinisme).

Le régime alimentaire a été défini pourchaque espèce inventoriée et l'on se reporteraau Tableau 30. Il apparaît que les espèces xylo­phages (14 espèces sur 44), phytophages (12 es­pèces) et les humivores (18 espèces) sontreprésentées presque également. Aucune présencede termites moissonneuses n'a été mise enévidence.

Les espèces vivant dans le bois ont été dis­tinguées de celles construisant des nids, ceux-cipouvant être construits en carton de bois, ensable et argile cimentés par la salive, en excré­ments mêlés de sable et argile.

Page 138: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taz: recherche et aménagement

TABLEA U 30. Classification des espèces de termites récoltées en fonction du régime alimentaire

XYLOPHAGES PHYTOPHAGESESPECES HUMIVORES

Sec - Humide Champignonnis tes

Neotermes aburiensis +

Schedorhinotermes lamanianus +

Schedorhinotermesputorius +

Coptotermes intermedius +

Acanthotermes acanthothorax +

Macro termes ivoriensis +

Megaprotermes giffardii +

Proterme minutus +

Odontotermes pauperanus +

Odon to termes smea thmani i +

Odon to termes badius +

Odon termes sp. +

Ancis trotermes guineensis +

Mi cro termes subhyalinus +

Micro termes thoracalis +

Micro termes sp. +

Allognathotermes hypogeus +

Rostrotermes cornu tus + +

Ami termes evuncifer + +

Ami termes sp. + +

Microcerotermes fusotibialis + +

Microcerotermes edentatus + +

Cephalotermes rectangularis +

Foraminitermes tllbifrons +

Thoracotermes macro thorax +

Cubitermes subcrenulatus +

Cubitermes gagei +

Cubitermes severus +

Ophiotermes grandilabrus +

cuchilotermes acutidens +

No ti dermes aburiensis +

Ungui termes sp. +

Basi den ti termes potens +

Basidenti termes mactus +

Ortho termes depressifrons +

Termes hospes +

Peri capri termes urgens

Pericapritermes appellans

Fulleri termes tenebricus +

Leptomyxotermes doriae +

Nasuti termes diabolus +

Nasu ti termes schou tedeni +

Mimeutermes giffardii +

Nasutitermes latifrons +

138

Page 139: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

En fonction de ces critères, on a constatéque:

les espèces de termites constructeurs denids hypogés sont les plus nombreuses et repré­sentent 54,5 % des espèces inventoriées. Lesnids épigés, rares, appartiennent à dix espècesseulement. L'inquilinisme est assez largementrépandu car 34,1 % des espèces fréquententsecondairement un autre nid;

les genres Neotermes et Schedorhinotermes,étant des xylophages vivant et se nourrissantdans les bois humides, sont les plus abondants.Le genre Coptotermes décrit comme xylophageet affectionnant les milieux secs, s'il figure dansl'inventaire, n'a été récolté que sous forme d'ailés.Son habitat est soit extérieur à la forêt soitlocalisé en lisière;

les matériaux utilisés pour les constructionssont dans 50 % des cas des excréments.

LES DlPLOPODES

L'étude du peuplement en diplopodes dans laforêt de Taï et de ses modifications lors de lamise en culture est en cours de réalisation. Lesrésultats n'en sont pas encore connus. C'estpourquoi, compte tenu de l'importance de cegroupe d'arthropodes dans l'humification de lalitière, et parfo.is comme déprédateurs des cul­tures, il a paru utile de faire figurer ici les résul­tats acquis en forêt de Téké. Cette forêt estsituée à 30 km au nord d'Abidjan et appartientau type de forêt à Diospyros et M(Jpania ; elleest très proche botaniquement de la forêt deTaï et il est tout à fait vraisemblable que l'onretrouvera des caractéristiques de peuplementen Diplopodes semblables dans la région de Tai.

Les échantillonnages ont été effectués surune surface totale de quadrats de 1500 m2 etsur une surface identique dans une plantationd'hévéas proche (La Mé).

Tous les diplopodes ont été récoltés au niveaudu sol, dans l'humus, puis dans la terre jusqu'àune profondeur de 10 cm. Les troncs abattusse trouvant sur les quadrats d'échantillonnageont aussi été inventoriés.

Dans plusieurs cas les identifications n'ontpu être faites au niveau spécifique (Habrodesmus,Duseviulisoma, Spirostreptus); de plus, troisdes genres cités regroupent chacun deux espècesqu'il n'est pas possible de séparer avec certitude(Aporodesmus, Diopsiulus, Peridontopyge). Lesrésultats sont exposés dans le Tableau 31.

Comparaison des différents peuplements

Dans la forêt, plus de 3000 diplopodes, apparte-

139

nant à plus de 22 espèces, ont été collectés surune surface totale de 1500 m2 et dans différentestypes de biotopes (lignes de crêtes, bas-fonds).La densité à l'hectare est donc de plus de 20.000individus et il n'a pas été tenu compte des espècesarboricoles, qui n'ont pas été recherchées. ,

L'espèce Tonkouibolus levieuxi y est tresnettement dominante et disparaît totalementdans le milieu cultivé en hévéas, où l'on ne re­trouve plus que Il des espèces de la !orêt. .Dis­paraissent aussi, parmi les plus representatlv~s,

Diopsiulus albicollis et D. aoutll, MardonlUsaculeatus et Guviogonus libifer.

Très peu d'espèces présentent des effectifssemblables entre la forêt et la plantation etbeaucoup d'espèces disparaissent entièrement.

La plantation d'hévéas montre donc un peu­plement très différent, appauvri en nombre d'es­pèces comme en nombre d'individus puisque ladenstté y est de 8000 individus à l'hectare. Dansce milieu, Pachybolus laminatus devient dominantet représente 77 % des échantillons.

Lorsque les plantations d'hévéas succèdentà la forêt, de profondes modifications affectentaussi bien la densité que la répartition des espèces.La moitié de celles-ci ne peuvent survivre dansle milieu transformé; quelques espèces augmen­tent en nombre mais aucune nouvelle espècen'apparaît.

LES NEMATODES

L'objectif de cette opération est la reconnais­sance du peuplement nématologique présentsous forêt ses potentialités com me réservoird'agents p~thogènes des cultures, son. évolutionà la suite du défrichement et de la mise en cul­ture des terres.

L'évolution des peuplements nématologi­ques de quatre parcelles a été suivie mensuelle­ment pendant un an. Deux des parcelles sontrestées constamment sous forêt, les deux autresont été défrichées au début de l'expérience etcultivées la même année.

Aucune nouvelle espèce n'a été observéeet, parmi les espèces identifiées, seules six (Aphas­matylenchus nigeriensis, Helicotylenchus nigerien­sis, Discocriconemella limitanea, Hemicyclio­phora lutosa, Xiphinema brasiliense et X. elonga­tum) n'avaient pas encore été signalées en Côted'Ivoire, quatre de ces six espèces étant d'ailleursconnues dans des pays proches (Guinée et Nigeria).Seuls Xiphinema elongatum et Hemicycliophoralutosa sont donc des espèces vraiment nouvellespour la région.

Parmi les vingt-quatre espèces identifiéescertaines appartiennent à un habitat bien parti­culier: les forêts primaires de pays tropicaux;

Page 140: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

TABLEA U 31. Peuplements comparés de diplopodes de la forêt de Téké et de la plantation d'hévéas de La Mé

Espèces récoltées

Aporodesmus gabonicus et A. ivorensis

Vi 11 iersie Il ina tekeensis

The lydesmus dispar

Diceratodesmus mimicus

Oxydesmus granu losus

Cordy loporus quadri lobatus

Tylodesmus studeri

Pa 1tophorus yapoensis

Duseviu lisoma spp.

Habrodesmus spp.

DiopsiuluS albicollis et D. aoutii

Mardonius aculeatus

Guviogonus lobifer

Peridontopyge co lombi et P. vachoni

Tonkouibolus levieuxi

Pachybolus laminatus

Onychostreptus assiniensis

Invo 1ve rostreptus i mp licatus

Spirostreptus spp.

ainsi en est-il de Rotylenchoides intermedius,Criconemella yapoense, Xiphinema yapoenseet X. douceti découverts dans la forêt de Yapo,en Côte d'Ivoire, Hylonema ivorense dans celledu Banco. Leur présence dans la forêt pri mairede Tai" est donc loin d'être inattendue.

A l'inverse, Meloidogyne incognita est unparasite de plantes cultivées. Sa découvertedans une forêt qui n'a semble-t-il jamais étéexploitée pourrait surprendre. Cependant,M. incognita a été observé en Côte d'Ivoire

sur racines de· riz de plateau semé dans les régionsforestières dès la première année de cultureaprès la défriche (Fortuner*, 1981). Il est doncconfirmé que ce parasite était déjà présent dansle sol avant toute intervention humaine.

Entre ces deux extrêmes (nématodes présentsdans les seules forêts et ceux capables de coloni­ser des milieux très divers) existent à Tai tousles intermédiaires possibles. Certaines espècessont connues à la fois en forêt primaire et surdes arbres cultivés telle Helicotylenchus para-

Stations

Forêt de Téké Plantation Hévéas de La Mésup. 1500 m~ sur 1500 m2

606 34

290 8

94

2 0

17 144

26 2

22 0

31 10

104 Il

10

351 0

236 0

60 0

141 157

771 0

213 1217

9 0

17 0

43 0

cana lis découvert dans des forêts primaires deMalaisie com me au Banco, mais aussi sur poivrieraux Iles Fidji. D'autres espèces paraissent unique­ment parasiter des arbres tropicaux cultivésHelicotylenchus nigeriensis, associé au cacaoyer.D'autres nématodes parasites d'arbres tropicauxpeuvent de plus attaquer des plantes herbacéesmais pérennes, comme Xiphinema elongatumassocié au bananier et à la canne à sucre. Ilexiste enfin des espèces que l'on peut qualifierde mixtes: Helicotylenchus erythrinae et Para­trichodorus minor dont la liste d'hôtes se partagepresque également entre cultures arbustiveset cultures annuelles herbacées. Heteroderasacchari, parasite de la canne à sucre et du riz,Aulosphora oostenbrinki, associé au bananier,à l'ananas et au riz.

On voit donc que le peupl.ement naturelde la forêt de Tai en l'absence de toute interven­tion humaine, est loin d'être restreint aux espècesstrictement adaptées à ce biotope particulierqu'est la forêt sempervirente, mais qu'il comprend

140

Page 141: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

étudié l'évolutiongroupes d'animaux,est fort différenteLes modifications

CONCLUSION SUR LE PEUPLEMENTANIMAL

tation (cultivée ou adventice) qui s'y développe.Dans l'exemple de la forêt de Tai, et proba­

blement dans bien d'autres forêts tropicales,les espèces parasites que l'on observera sur lescultures après défriche n'ont pas été introduitesdans une zone précédem ment indemne lors desopérations de mise en culture, mais étaient aucontraire déjà présentes avant toute action del'homme.

Cependant, on constate souvent une régres­sion du nombre d'espèces. C'est le cas en particu­lier pour les rongeurs et les nématodes chezlesquels, dans les situations extrêmes, on netrouve plus dans la culture que deux, parfoisune espèce ayant pu s'adapter au milieu trans­formé.

Dans le cas des insectes, dont la mobilitéest plus grande, la réduction du nombre d'espècesne peut apparaître aussi nettement, en effetle nombre inconnu, et incalculable, d'espècesforestières, nécessite de se limiter a l'étudede quelques groupes bien caractérisables. Pources groupes (fourmis, acridiens, hétéroptères,etc.) on assiste en fait, à quelques exceptionsprès, à un remplacement de la faune originellepar une faune allochtone.

Enfin, nous ne pouvons passer sous silencela présence des -grands vertébrés. Leur impactn'a pas été étudié en particulier; il convientcependant de signaler que, dans certaines condi­tions d'isolement, le champ peut subir des dépré­dations importantes de la part des buffles etdes éléphants; ces derniers arrachent les touffesde riz, n'en consommant qu'une faible partieet le gardiennage du champ peut devenir néces­saire.

Les singes, les céphalophes dans une moindrepart, peuvent aussi, et cela à proximité mêmedu village, provoquer des dégâts.

Par ailleurs, dans certaines plantations baouléde la région, situées en limite de la "zone tampon",nous avons pu constater que les chimpanzés pré­lèvent des cabosses sur les cacaoyers et endom­magent les arbres.

Compte tenu des nombreux facteurs favora-

aux

Nous avons vu après avoirdu peuplement pour différentsque la faune du champ cultivéde celle du milieu naturel.se traduisent par:

l'adaptation d'espèces préexistantesnouvelles conditions écologiques;

l'installation d'une .faune allochtone.

également des espèces déjà connues com meparasites de plantes cultivées.

Entre le milieu cultivé et la forêt, les princi­pales différences dans la composition spécifiquen'apparaissent que tardivement, plusieurs moisaprès le défrichement.

Les espèces forestières disparaissent progres­sivement et ce n'est que six mois après le brûlisque trois espèces deviennent notablement plusabondantes que les autres: Helicotylenchus nigeri­ensis et Aulosphora oostenbrinki et Hete roderasacchari. Ces trois espèces sont connues commeparasites des plantes cultivées.

En fin de culture, on constate que, dansl'une des parcelles plantées, Aulo~phora oosten­brinki devient l'unique espèce phytoparasiteprésente. Dans l'autre parcelle, Helicotylenchusnigeriensis et Heterodera sacchari deviennentdominants.

Il s'est donc produit une sélection des espècesprésentes avant défriche qui a fait disparaîtretoutes les espèces typiques de la forêt pri maireet qui, parmi les espèces susceptibles de parasiterles plantes cultivées, a permis à de rares espècesde s'établir en position dominante. Ces espècessont différentes d'une parcelle à l'autre, commesont différentes les plantes herbacées installéesaprès la défriche. On remarque la disparitiond'autres parasites de plantes cultivées et enparticulier Meloidogyne incognita, Helicotylen­chus erythrinae et Paratrichodoris minor quisont parmi les espèces les plus fréquem mentobservées associées au riz de plateau cultivéaprès défriche de la forêt en Côte d'Ivoire(Fortuner, 1981). Cette disparition peut s'expli­quer si l'on note que le riz, cultivé selon les métho­des traditionnelles, a été rapidement envahipar les adventices. Il est probable que les condi­tions locales, et en particulier la compositionde la flore qui se développe après le défrichement,jouent dans chaque occasion pour favoriser telleou telle des espèces présentes.

Le peuplement de nématodes de la forêtprimaire de la Station de Tai comporte à la foisdes espèces bien connues comme parasites deplantes cultivées et des espèces qui semblentrestreintes aux forêts primaires des régions tro­picales.

Le défrichement et la mise en culture fontdisparaître ce dernier type d'espèces ainsi quela plupart des espèces parasites de plantes an­nuelles, laissant la possibilité à deux ou troisespèces de développer fortement leurs popula­tions et de s'établir dans le sol en position domi­nante.

La nature de ces espèces est déterminéed'une part par la nature du peuplement de néma­todes qui était présent sur la parcelle avantdéfriche et d'autre part par la nature de la végé-

]4]

Page 142: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

Photo 14. Cuve à partiteurs destinée à recueillir les eaux et les charges solidesà l'aval de la parcelle d'érosion

bles ou défavorables intervenant dans la produc­tivité des cultures paysannes forestières, il estpratiquement impossible d'avoir une notion, mêmeapproximative, des pertes de rendement duesaux divers déprédateurs.

L'amélioration de certaines méthodes tradi­tionnelles de protection, une meilleure applica­tion des techniques modernes, lorsqu'elles sontutilisées, devraient permettre d'améliorer sensi­blement les rendements.

HYDRODYNAMIQUE SUPERFICIELLEET EROSION

METHODOLOGIE - LOCALISATION DESESSAIS

L'hydrodynamique superficielle et l'érosion dessols ont été suivies dans le temps et dans l'espaceà l'aide de parcelles expéri mentales de ruisselle­ment et d'érosion installées sous la forêt naturelleconsidérée com me le milieu de référence etsous les cultures traditionnelles et ceci pendanttrois années. Les observations ont porté égale­ment sur différentes échelles spatiales depuisla parcelle de quelques dizaines de mètres carrésjusqu'au bassin versant kilo métrique, cette dé­marche devant permettre, d'une part de localiser

142

dans le paysage les zones les plus sensibles àla dégradation et d'autre part de recueillir desinformations sur l'articulation des comportementsponctuels des multiples unités naturelles consti­tuant ce paysage. Ceci pose le problème del'extrapolation des données lors des différentsfranchissements d'échelles de mesure qui nesera cependant pas traité dans ce premier bilan.

La différenciation des sols et son influencesupposée sur leur hydrodynamique a permis depositionner six sites expérimentaux dont troissous forêt naturelle et trois sous cultures tradi­tionnelles. Au niveau d'un versant les sites ontété positionnés à faible distance sous le som met(sols gravillonnaires), à la mi-versant (sols argilo­sableux sur gravillons), en bas de versant (solssabIo-argileux sur zone tachetée et carapace).

Les parcelles de ruissellement et d'érosionrecevant des pluies naturelles font 250 m2 (25 mx 10 m) et sont munies à leur partie aval d'undispositif permettant de récupérer les eaux deruissellement et les terres erodées (canal deruissellement et 2 à 3 cuves de 1 m3 muniesde systèmes partiteurs).

Sous forêt et sous cultures, deux ensellementsde versant ont également été aménagés avecun seuil de jaugeage collectant les eaux de 7,3 hasous forêt et 3,2 ha sous cultures (Photo 14).

Ces deux ensembles de dispositifs ont fonc­tionné de 1978 à 1981.

Des essais de simulation de pluies ont égale-

Page 143: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

ment été effectués fin 1978 et début 1979 surdes couples de parcelles de 50 m2 ce qui a perm is :

d'augmenter rapidement le nombre de donnéesen ce qui concerne les effets des caractéristiquespluviométriques (intensité, hauteur, temps deressuyage entre deux pluies consécutives) ;

de tester le comportement de sols soumisà d'autres traitements et notamment de déter­miner l'érodibilité maximum des trois types desols, de tester l'effet de couverts végétaux diffé­rents et de connaître aussi les effets d'autrestechniques culturales pratiquées par des ethniesallochtones migrant dans le Sud-Ouest ivoirien.

Les données et interprétations qui suiventne concernent que les résultats de campagnes1978-1979 et 1980 provenant des parcelles "pluiesnaturelles" aussi que ceux des ca mpagnes 1978­1979 de simulation de pluies. L'évaluation dufacteur "échelle de mesure" nécessi tant destraitements de données plus complexes ne seradonc pas abordé ici.

PARCELLES PLUIES NATURELLES

Résultats

TA BLEA U 32. Ruissellement, infiltration, érosion cumulés sur les sites forêt (F) et culture (C) en 1978, 1979, 1980.

Parcelles 2 3 4 5

Années F forêt SP SL SW Kr E:

C : cu 1ture mm mm mm % kg ha- I

1978 FI amont 1308,7 1,0 1307,7 0,08 (18,2)

Forêt tropica leF2 médian 1308,7 122,6 1186,1 9,36 693,9F3 aval 1308,7 13,4 1295,3 1,02 155,7

Riz pluvial Cl amont 1401,1 76,0 1325,1 5,42 256,2sur défriche C2 médian 1401,1 37,8 1363,3 2,70 187,2

C3 aval 1401,1 76,7 1324,4 5,47 302,0

1979 FI amont 2211,3 13,4 2197,9 0,60 21,6

Forêt tropica 1e F2 médian 2211,3 405,1 1806,2 18,32 1300,4F3 aval 2211,3 79,0 2112,0 3,57 115,8

Riz pluvial Cl amont 2073,6 149,4 1924,2 7,20 177,6sur défriche C2 médian 2073,6 43,2 2030,4 2,08 75,3

C3 aval 2073,6 145,6 1928,0 7,02 320,3

1980 FI amont 2042,1 18,3 2023,8 0,89 13,3

Forêt tropicaleF2 médian 2042,1 188,3 1853,8 9,22 783,9F3 aval 2042,1 46,2 1995,9 2,26 178,0

Ignames sur buttes Cl amont 2079,3 113,2 1966,1 5,44 259,7C2 médian 2079,3 162,9 1916,4 7,83 1503,4C3 aval 2079,3 225,9 1853,4 10,86 2485,3

valeur peu sûre.

Colonne 1 : SP hauteurs de pluies cumulées par année2: SL lames ruisselées cumulées par année3:SW lames infiltrées cumulées par année4: Kr coefficient de ruissellement = 100 SL %

SP

5:E érosions cumulées en kg ha- 1 comprenantles suspensions et terres de cuves et cane'lX.

143

Page 144: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï·: recherche et aménagement

SWmm

FORET

f2 0

f3 0

CUfJURF,

2000.r--------t-------+--------l--------1----

1500+---------+--------+------

1000+--------+-----

500t------

o 500 1000 1500 2000 SPmm

FIGURE 30. Relation entre hauteurs de pluies (SP) et lames infiltrées (SW) sur 3 parcelles de forêt (amont F1, médian F2, aval F3)et 3 parcelles cultivées (amont Cl, médian C2, aval C3) pour l'année 1978 (Collinet et Valentin, 1979)

144

Page 145: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

TABLEA U 33. Moyenne des coefficients de ruissellement sur les différents sites

Kr %

FI

0,52

F2

12,30

F3

2,28

Cl

6,315,44

C2

2,397,83

C3

6,24 (riz)10,86 (igname)

Interprétations

Ruissellement (Tableaux 32, 33 etet Fig. 30, 31, 32)

Sous forêt les ruissellements restent peu abondantssur les sites amont et aval et correspondentaux valeurs généralement trouvées en forêt tro­picale humide. On note par contre des valeursnettement plus élevées sur les sols légèrementhydromorphes à partir de 15-25 cm jusqu'à35-40 cm ; sans être systématique, cettedifférenciation est susceptible d'apparaître plusou moins haut sur le versant et ce, de façondiscontinue. L'influence de cet horizon decomportement ne se manifeste qu'à partir desfortes précipitations des mois de mars et avril(SP = 500 à 700 mm selon les années) à partirdesquels les horizons superficiels poreux sontsaturés et au-delà desquels le régime d'infiltrationsera surtout com mandé par la conductibilitéde cet horizon de comportement d'où une influencetrès nette des fortes intensités de précipitation.Ce double régime de la parcelle F2 apparaîtassez nettement sur la Figure 31 (SW = f(SP)).Cette particularité se traduit sur la surfacedu sol par une hiérarchisation plus accentuéedu ruissellement en chenaux anastomosésremontant parfois jusqu'à la mi-versant alorsqu'ils apparaissent plus généralement vers lesbas de pente.

Les sols gravillonna ires de som mets sont,par contre, extrêmement perméables, ce queleur différenciation morphologique permettaitde prévoir: en 1978 seules six pluies d'intensitéssupérieures à 20 mm h- 1 pendant 30' ont donnélieu à des ruisselle ments, pour les années 1979et 1980 plus pluvieuses on note en moyenne unevingtaine de ruissellements par année dont seulesquelques dix pluies ont fourni des coefficientssupérieul's à 1 %.

145

Le défrichement traditionnel rétablit assez rapide­ment un nouveau couvert végétal qui protègele sol de l'impact direct des pluies.

Un autre conséquence de la mise en cultureest une modification rapide et importante dela microtopographie du sol: sous forêt et surla plus grande partie du versant, celle-ci se pré­sente sous la forme d'une juxtaposition de micro­reliefs couverts d'abondants rejets biologiqueslocalisés au niveau des jeunes arbres et de micro­dépressions dépourvues de végétation et plusou moins abondamment comblées par des sablesclairs déliés. Des observations saisonnières ontpermis de constater que cet ensemble est enéquilibre dynamique: extension des zones ensabléespar ruissellement et microcolluvionnement enpleine saison des pluies, extension des micro­reliefs en saisons transitoires du fait d'une aug­mentation de l'activité biologique (termites etsurtout vers). Dès la mise en culture on observeun effacement de cette microtopographie avecextension générale des zones ensablées, l'activitébiologique semble moins intense tout au moinsse manifeste-t-elle plus profondément, les rejetsbiologiques sont plus rares aussi les porosites"ouvertes en surface" diminuent-elles fortement.

Ceci peut suffire à expliquer l'augmentation,relativement modeste par ailleurs, des ruisselle­ments sous culture: Kr FI/Kr Cl " 12 en sommetet :: 3 vers les bas de versant.

Après deux années de culture en riz pluvial,les trois parcelles ont été préparées pour uneculture d'igname. La technique, pratiquée parles migrants baoulés, consiste à lever à la houedes buttes non cloisonnées de quelque 25 à 30 cmde haut, 70 cm de base et disposées en lignetous les 110 :: 120 cm. Il s'ensuil un remaniementdes 15'" 20 premiers centimètres du sol avecextirpa tion des racines moyennes et grossières.L'effet, immédiatement bénéfique pour l'infiltra­tion, est assez fugace avec cependant unedifférence de comportement entre les sols

Page 146: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

SWmm~~

FORET CULTURE

F, • Cl )t

F2 0 C2 +2000

F3 0 C3 *

1500-J--------1-----------i-------

1000-1-------1--------

500-t-------

+

o 500 1000 1500 2000 SPmm

FIGURE 31. Relation entre hauteurs de pluies (SP) et lames infiltrées (SW) sur 3 parcelles de forêt (amont FI, médian F2, aval F3)et 3 parcelles cultivées (amont Cl, médian C2, aval C3) pour l'année 1979 (Collinet et Valentin, 1979)

146

Page 147: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

SW mmFORET CULTURE e:,<l

FI CI Il~//

e:,

F2 0 C2 -+•

2000 F3 0 C3 *

15001-------+-------+-------

1000+--------1------

500+------

o 100200 300 400 500 1000 1500 2000 SPmm

FIGURE 32. Relation entre hauteurs de pluies (SP) et lames infiltrées (SW) sur 3 parcelles de forêt (amont F1, médian F2, aval F3)et 3 parcelles cultivées (amont Cl, médian C2, aval C3) pour l'année 1980 (Collinet et Valentin, 1979)

147

Page 148: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

gravillonnaires des som mets et les sols meublesdes versants: le système lianescent de l'ignameprotège mal la surface du sol, la pluie désagrègerapidement les mottes, des micro-colluvionnementscomblent et imperméabilisent les interbuttesqui vont constituer un micro-réseau deruissellement très actif. En sommet, les buttesdont les gravillons déliés constituent rapidementun mulch superficiel, vont se comporter en zonesde drainage préférentiel tandis que celles desversants se détruisent et se colmatent. Au bilanannuel les sols de sommet ont des comportementshydrodynamiques à peu près identiques quelleque soit la technique culturale, par contre ceuxdes versants ruisselleront de façon plus importantesous ce buttage.

Erosion (cf. Tableaux 32 et 34)

La culture du riz pluvial sur défriche n'amènepas d'augmentation importante de l'érosion, lesturbidités restent voisines, les différences forêt­culture sont dues aux ruissellements sensiblementplus volumineux sous culture. Sous igname lesturbidités sont équivalentes à celles des solscultivés en riz, l'interception de l'énergie despluies par le mulch gravillonnaire est aussi efficaceque celle d'un couvert végétal continu pour lessols du som met, par contre, la quasi dénudationdu sol butté des versants se traduit par des turbi­dités de 2,8 à 4,6 fois supérieures à cellesobservées sous le riz.

Une analyse plus poussée de l'érosion etde l'érodibilité des sols n'a été rendue possibleque par l'utilisation du simulateur de pluie.

UTILISATION D'UN SIMULATEUR DE PLUIE

Cet appareil permet de réaliser des pluiesde 25 à 120 mm h- 1 d'intensité sur une couronnecirculaire de 200 m2 à l'intérieur de laquellesont installées deux parcelles de 50 m2 (l0 x 5 m)munies à leur aval d'un canal de ruissellement.Le ruissellement est connu sur chaque parcellepar les volumes écoulés, enregistrés dans unecuve calibrée, au moyen d'un limnigraphe. Laprise d'échantillons pour mesures de turbiditésest réalisée dans des récipients calibrés par pré­lèvements directs au niveau du déversoir ducanal.

En intervenant à deux périodes de l'annéeil a été possible de tester les effets du couvertvégétal sur le ruissellement et l'érosion:

riz à maturité et recrûs ligneux et herbacéslors de la première campagne de fin de saisondes pluies (averses TH•••sur le Tableau 34) ;

sols dénudés à la suite de la récolte, dudésherbage et du brûlis en saison sèche (aversesTS•••).

Enfin, nous avons testé en saison sèche deuxpratiques culturales:

un labour après extirpation du systèmeracinaire de l'ancienne forêt et du champ deriz ;

un buttage non cloisonné identique à celuiqui est réalisé par l'ethnie baoulé migrant actuel­lement dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire.

Parmi les nombreuses données dépouillées,seules ont été retenues celles permettant lemieux d'illustrer les différences de comporte­ment entre les sols argileux gravillonna ires desom met et les sols argilo-sableux appauvris,meubles de bas de versant.

Afin de multiplier les situations expérimentales, Les effets du couvert végétalun simulateur de pluie a été utilisé sur les solsdu versant cultivé, en fin de saison des pluies Les Figures 33 à 36 et le Tableau 35 résument(novembre-décembre 1978) et en fin de saison les données obtenues, sous intensité de 60 mm h- 1 ,

sèche (mars 1979). pour les situations expérimentales suivantes:

TA BLEA U 34. Turbidités comparées des différents sites (en g Z-l)

1978 1979 1980(C en riz) (C en riz) (C en ignames) moyennes

FI 0,16 0,07 0,11

F2 0,56 0,32 0,42 0,43

F3 1,16 0,15 0,38 0,56

Cl 0,33 0,12 0,22 0,22 ( riz)

C2 0,49 0,17 0,92 0,33 (riz)

C3 0,27 0,22 l,1O 0,24 (riz)

148

Page 149: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

C gll R mm /h

1, TS 321

l, TH 321

~.- -./ iîf' --l' V-I

,

~,

1 )..;:1 1\

\.r ~\" l \ ,

~" ,'"" \ .'" 1 \

........ ..........

.... / ... ,

60

0,5 50

0,4 40

0,3 30

0,2 20

0,1 10

oo 10 20 30 40 50 60 70

T mn

Cg/ICg/IR mm/h

FIGURE 33. Effets du couvert végétal sur le ruissellement (R mm/hl et la turbidité (C glU. Bas de versant, sol faiblementhumecté cultivé en riz (TH 321) et dénudé (TS 321) (Collinet et Valentin, 1979)

1111

0,4 40

0,3 30

1111

1111 l, TS 3261

11 l,TH 3182

---..(j). '/ \.-- ;(,,

~

"-1 \

1 \

j1 J~ j .... ....

~ ...c::-.,..c:: ~.-\->~':':.>' ~,.".--.- ---<j).-:

0,2

0,1

60

0,3 50

0,2

20

10

0,1

oo 10 20 30 40 50 60 T mn

FIGURE 34. Effets du couvert végétal sur le ruissellement (R mm/hl et la turbidité (C glU. Bas de versant, sol fortementhumecté cultivé en riz (TH 3182) et dénudé (TS 3261) (Collinet et Valentin, 1979)

149

Page 150: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

U1o

TABLEAU 35. Hydrodynamique superficielle et érosion des sols sous culture à l'aide d'Wl simulateur de pluies

1 : LES EFFETS DU COUVERT VEGETAL (-) paliers non atteints

1 2 3 4 5 6 7 8 9 \0 Il 12 13 14 15 16

Réf. Traitement ta lm Pu SPu Pi L Dr W Kr Rx FN E Cs Cx

TS.I.3.1. 1. nat. 7,0 2,9 0,6 27,7 9,6 ( 14) (47,2) 13,9 1,29 0,12TH.I.3.1. 2. riz 18H 60 30 200 8,5 3,4 0,6 25,9 Il,6 ( 14) (44,5) 6,4 0,52 0, Il

2/1 1,18 J ,1 1,2 0,46 0,40 0,92

TS. 1. 14.1 1. nat 6,3 5,4 0,3 55,6 8,9 (13,5) (47,S) 37,S 1,32 ?TH. 1.19.2 2. riz 20H 60 60 800 7,7 7,1 0,3 53,4 Il,7 10,5 50,0 2,0 0,08 0,04

2/1 1,22 1,3 1,3 0,05 0,06

TS.3.2.1 1. nat 2,7 13,7 0,8 44,8 23,5 (20,0) (38,0) - - -TH. 3.2.1 2. riz 20H 60 60 200 2,9 15,7 1,0 48,1 24,6 (23,7) (40,S) - 0,18 (0,05)

2/1 1,07 1,1 1,0 1,06

TS.3.26.1 1. nat 1000 3,2 19,3 1,1 42,3 31,5 24,5 36,6 17,1 1,40 0,05TH. 3.18.2 2. riz 20H 60 60 800 2,7 14,3 1,1 47,0 23,3 25,5 35,3 4,2 0,15 0,02

2/1 0,84 0,7 0,7 0,25 0, Il 0,25

2 : INFLUENCE DE LA DIFFERENCIATION DES SOLS

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Il 12 13 14 15 16

Réf. Traitement ta lm Pu SPu Pi L Dr W Kr Rx FN E Cs Cx

TS. 1. 14.1 1. grav. 6,3 0,9 0,3 24,5 3,4 (4.5) (56,5) 2,0 - 0,2TS. 3.14.1 2. meuble 20H 60 25 800 2,8 4,2 0,7 21,3 16,5 ( 15 ,5) (45,7) 12,0 0,47 0,2

2/1 0,44 4,8 4,8 0,8 5,9

TS.I. 26.1 1. grav. 3,3 14,3 1,4 51,0 21,8 (26) (20,3) 38,0 ? 0,2TS.3.26.1 2. meuble 20H 60 65 1000 3,2 21,3 1,1 45,4 32,0 (25) (36,6) 18,2 1,4 0,05

2/1 0,98 1,5 1,5 0,48 0,2

Page 151: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

3 : EFFETS DU LABOUR

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Il 12 13 14 15 16

Réf. Traitement ta lm Pu SPu pi L Dr W Kr Rx FN E Cs Cx

TS. 1.2.1 1. nat 19,6 12,2 0,8 98,6 1) ,0 (21,0) (42,3) Il, J 0,21 0,05TS.1.2.2 2. labo 90H 60 105 200 38,S 1,6 0,08 109,2 1,5 ( 4,0) (59,3) 4,1 0,35 0,25

2/1 1,96 0,1 1,1 0,1 1,4 0,37 1,7 5,0

TS.!.14.1 1. nat 6,3 5,4 0,3 55,6 8,9 ( 13,5) 47,5 1 37,S 1,3 ?TS. 1. 14.2 2. lab. 20H 60 60 800 2,1 21,3 0,6 39,7 35,0 25,0 36,0 252,4 1,7 1,2

2/1 0,33 3,9 0,7 3,9 1,8 0,8 6,73 1,3

TS.3.20.1 1. nat 2,4 6,9 0,9 19,1 26,5 (23,0) (39,4) 9,9 0,9 0,6TS.3.20.2 2. labo 15H 60 25 850 0,9 18,7 0,7 7,3 71,8 48,S 13,9 1503 12,1 8,0

2/1 0,37 2,7 0,8 0,4 2,7 152

4 : EFFETS DU BUTTAGE

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 II 12 )3 14 15 16

Réf. Traitement ta lm Pu SPu Pi L Dr W Kr Rx FN E Cs Cx

TS. 1.26.1 1. nat 3,3 45,1 1,4 75,S 37,4 (40,0) (20,3) 112,7 0,3 ?TS.1.26.2 2. buttes 20H 60 120 1000 23,0 34,S 0,8 86,1 28,6 31,S 28,8 806,1 4,6 2,5

2/1 7,0 0,8 0,6 1,1 0,8 7,15 15,3

TS.3.26.1 1. nat 3,2 21,3 1,1 45,4 32,0 (25,0) (36,6) 18,2 1,4 0,05TS.3.26.2 2. buttes 20H 60 65 1000 15,9 26,4 1,9 40,3 39,7 46,2 15,4 87) ,7 5,8 3,0

2/1 4,9 1,2 1,7 1,1 1,2 47,9 4,1 60

1. Réf: numéro de référence de la parcelle2. Traitement subi par la parcelle3. ta temps de ressuyage entre deux averses (heures)4. lm: intensité de l'averse(mmh- 1 )

5. Pu : hauteur de la pluie utile (mm)6. SPu: hauteur cumulée des pluies depuis le début des essais (mm)7. Pi hauteur de la pluie d'imbibition (mm)8. L hauteur de la lame ruisselée (mm)

9. Dr10. WIl. Kr

12. RxJ 3. FN14. E15. Cs16. Cx

hauteur de la détention superficielle récupérable (mm)hauteur de la lame infiltrée (mm) 100Lcoefficient de ruissellement (%) = -pu-intensité maximum du ruissellement en palier (mm h- 1

)

intensité minimale de l'infiltration en palier (mm h- 1)érosion globale (kg ha- 1)

maximum de turbidité (gr l )

palier de la turbidité (g 1- 1).

Page 152: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

C g/l R mm/h•~

1,0

60

50

40

'1, 1, 1, 1, 1

,,,,,1,,,

1•,

1: T8131

2: TH131

--0-- turbidigramme (cl

hydrogramme (R l-0-

l---R~----f----+---~rl:--------'~T ••o

30

10

20

0,1

0,5

o 10 20 30

FIGURE 35. Effets du couvert végétal sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g/l). Haut de versant, sol faiblementhumecté cultivé en riz (TH 131) et dénudé (TS 131) (Collinet et Valentin, 1979)

Sol de haut de versant (affleurement degravillons, matrice argileuse, pente 17 %).

Semé en riz (80 % de recouvrement végétalsur 120 cm)

Sol faiblement humecté: TH 1.3.1Sol fortement humecté: TH 1.14.2

Dénudé (15 % de couvert végétal sousla forme d'Îlots de jeunes pousses)

Sol faiblement humecté: TS 1.3.1Sol fortement humecté: TS 1.14.1

Sol de bas de versant (sables argileux ensurface, pente 8 %).

Semé en riz (95 % de recouvrement végé­tal sur 120 cm)

Sol faiblement humecté: TH 3.2.1Sol fortement humecté: TH 3.18.2

Dénudé (15 % de couvert végétal sousla forme d'Îlots d'adventices herbacées)

Sol faiblement humecté: TS 3.2.1Sol fortement humecté: TS 3.26.1

Les temps de ressuyage oscillent entre 18 et20 heures.

Sols à affleurements gravillonnaires de hautde versant

Dans des conditions de faible humectation (com­paraison TH 1.3.1/TS 1.3.1) on constate que lecouvert végétal modifie peu la hauteur de lalame ruisselée qui reste d'ailleurs faible dansles deux cas: L = environ 3 mm et L2/L1 = 1,1.Celle-ci résulte de hauteurs d'imbibitions voisi­nes et d'intensités d'infiltration à l'arrêt de l'aver-se respectivement égales à 47,2 (nu) et44,5 mm h- 1 (riz). Bien que les paliers deruissellement n'aien~ pas été atteints, on constate,sur les hydrogram mes de la figure 4, une évolutionsimilaire des deux phases transitoires. En cequi concerne l'érosion, on note cette fois uneinfluence nette du couvert végétal puisque lespertes en terres sont environ deux fois plus fortessur sol dénudé (E2/E1 = 0,46). Cependant, pourune pluie utile de 30 mm, cette érosion resteinsignifiante dans les deux cas. D'une façongénérale on peut retenir que sur le sol planté,l'énergie des gouttes se dissipe à deux niveaux:

152

Page 153: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

C 9/1 C gl 1 Rmm/h

0,1 0,05

0,5 0,05

.1 \.

\"1 \1 \, \

1 \1 \,

",1 1 1 TS 1141

fi ,,I ,Z1 TH 1142

1

! P

1 , ,1

,1

1\ ,

1,

~, ,, ,, , 1 J

1, , 1, L __

/\ 1 <$,,/, ~'\j 1 1

~1 l , \, ,".. , .. , 1....

" ' ..

~! ~ ==----- ....,

p:- ~ ~q-,-...~

- Tmn605040302010o

50

40

60

30

20

o

10

0,11,0

FIGURE 36. Effets du couvert végétal sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g/l), Haut de versant, sol fortementhumecté cultivé en riz (TH 1142) et dénudé (TS 1141) (Collinet et Valentin, 1979)

celui du couvert végétal et celui des affleurementsd'éléments grossiers, cette seconde formed'interception agissant seule sur le sol dénudé.Ceci est illustré par le rapport des pics de turbiditéCs2/Cs1 = 0,40 qui rend bien compte de ces deuxniveaux de dissipation de l'énergie.

Dans ces conditions de plus forte humecta­tian (comparaison TH 1.14.2/TS 1.14.1): peude changement par rapport au cas précédent,on note si mplement une légère augmentationde l'infiltrabilité sur la parcelle riz (Kr = 8,9 %au lieu de 9,6 % dans le cas précédent). On obser­ve par contre une accentuation de la différencedes érosions (E2/E1 = 0,05) qui est liée essentiel­lement aux différences de turbidité et au décalagede leurs pics Cs. Une protection accrue surla parcelle semée en riz a probablement étéassurée par la verse des nombreux plants détrem­pés, protégeant dès lors la surface du sol à lafaçon d'un mulch.

En résumé, les lames infiltrées sont importan-

tes (90 % des pluies), l'érosion est très faiblemais malgré cela l'effet favorable du couvertse manifeste déjà.

Sols meubles de bas de versant

Dans des conditions de faible humectation (com­paraison TH 3.2.l/TS 3.2.1 ; Fig. 35), les infiltra­tions sont remarquablement voisines, tant auniveau des hauteurs de pluies d'imbibition (Pi2/Pi1= 1,07) que celui des intensités minimales d'infiltra­tion en fin de pluies (Fn2/Fn1 = 1,06). En valeurabsolue ces sols sont moyennement perméables.A ce niveau d'humectation, leur identité de com­portement peut s'expliquer par une influenceprépondérante de la pellicule de ba ttance consti­tuée avant la levée du riz et peu remaniée parune technique culturale succincte (semis en poquettous les 30'" 40 cm). Nous ne disposons pasde données concernant l'érosion.

153

Page 154: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

C gll CglI R mm/h

1,0 0,5 50

iJ 1, TS 1141

1 TS0,4 40

Z, 3141

11

1

0,5 30.1,

.'"0.5

0,2 20

0,1 10

0.1

l-_~-:f=-----1--.L-"=",,"",-_--<~ T mno 10 20

FIGURE 37. Effets des affleurements gravillonna ires sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g/I). Comparaison entresols fortement humectés, l'un gravillonna ire et argileux de haut de versant (YS 1141), l'autre meuble argilo-sableuxde bas de versant (TS 3141) (Collinet et Valentin, 1979)

Cg/I Cg/IR mm/h

T mn70605040302010

1

1 : TS 1261

z: TS 3261

,. /\

"/ \ ~

l ' / '\/?1 \ '"\ ~,

J. --- /

vY 1".- _-,,"i~'---V~ \, /.... /....,/~

1 .---

j ~- ....~.--

,............- .... __ e __

' ..,- --To

0.3 30

0,4 _ 40

0,1 10

0,2 20

0,1

1.0 1 0.5 50

0,5

FIGURE 38. Effets des affleurements gravillonna ires sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g/I). Comparaison entresols très fortement humectés, l'un gravillonna ire et argileux de haut de versant (YS 1261), l'autre meuble argilo­sableux de bas de versant (YS 3261) (Collinet et Valentin, 1979)

154

Page 155: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Dans des conditions d'humectation plusimportantes (comparaison TH 3.18.2/TS 3.26.1;Fig. 36) les infiltrations sous riz sont devenueslégèrement plus importantes, pas tellement dufait de différences dans les hauteurs de pluiesd'imbibition (les 4 minutes de ruissellementparasites sur TH 3.18.1 ne sont pas à prendreen compte) mais surtout à cause d'une phasetransitoire du ruissellement beaucoup plus longuesous le riz (environ 40' contre 15'). On remarqueral'apparition d'un pseudo-palier du ruissellementà 7 mm h- 1 jusqu'à 27' correspondant au stockagede l'eau dans un horizon superficiel ameubli parle développement du système racinaire du riz.

En ce qui concerne l'érosion, la structureinterceptrice du riz intervient nettement auniveau des turbidités, d'où un rapport E2/E1 = 0,25.Comme en sommet de versant, les modificationsportent cependant sur des niveaux d'érosion faiblesdans les deux cas.

Les effets de la différenciation des sols

Considérons maintenant plus strictement leseffets des affleurements gravillonnaires dessols de sommet comparés aux sols meubles debas de versant, identiquement dénudés, et cetoujours pour des averses à 60 mm h- 1 •

Les situations testées sont les suivantes(Fig. 37 et 38 et Tableau 36) :

Sol fortement humecté (14ème averse, 800 mmde pluies cumulées (SPu).

Gravillonnaire et argileux de haut deversant: TS 1.14.1Meuble argilo-sableux de bas de versant:TS 3.14.1

Sol très fortement humecté (26ème averse,SPu = 1000 mm).

Gravillonnaire et argileux de haut deversant: TS 1.26.1Meuble argilo-sableux de bas de versant:TS 3.26.1

La quatorzième averse a duré 25 minutesdans les deux cas (cor.lparaison TS 3.14.1/TS 1.14.1). Les infiltrations sont nettementplus importantes sur le sol gravillonnaire tantau point de vue d'une augmentation de la pluied'imbibition: Pi2/Pi1 = 0,44 que par une intensitéd'infiltration plus forte en fin d'averse Ftu2/Ftu1=0,8. Il en résulte un rapport Kr2/Kr1 = 4,8mais on remarquera qu'à ce stade des essaiset pour une pluie utile de 25 mm, les coefficientsde ruissellement restent modérés. Les horizonsdu site amont possèdent et maintiennent uneconductivité hydraulique élevée: ceux du siteaval se saturent par paliers révélant les diffé-

rences de conductivité aux limites d'horizons,les deux pseudo-paliers de ruissellement vers15' et 30' sur TS 3.1.41 sont caractéristiquesà cet égard. L'érosion reste faible dans les deuxcas et les différences, peu significatives, sontuniquement dues aux ruissellements car les pluiesde turbidité sont identiques.

La vingt-sixième averse a duré 65 minutes(comparaison TS 3.26.1/TS 1.26.1).

L'infiltration dans les deux types de solest plus faible que précédemment (Kr 1 = 32,0et 21,8 %). On remarquera que l'atténuationdes différences de comportement entre les deuxsites est surtout due à une diminution, vers 35',de l'infiltrabilité de la parcelle amont traduisantune saturation des horizons gravillonna ires etun contrôle de la conductivité de plus en plusassuré par les horizons argileux meubles sous­jacents moins perméables. Les niveaux d'éro­sion restent faibles mais, curieusement, les éro­sions sont inversées (E2/E1 = 0,48) en liaisonavec une inversion des paliers de turbidité. Bienqu'il s'agisse de valeurs très faibles, la pelliculede battance constituée. sur les sols meubles debas de versant serait devenue moins érodibleque la surface des sols gravillonnaires de som met.

En résumé, pour des conditions de fortehumectation, les comportements hydrodynamiqueset érosifs des sols amont et a val sont susceptiblesde se rejoindre pour des raisons di fférentes :

influence des réorganisations superficiellesprédominantes à l'aval;

influence des différenciations pédologiquesinternes à l'amont où les possibilités de stockagede l'eau dépendront des caractéristiques de l'hori­zon gravillonna ire (épaisseur taux d'élémentgrossier, porosité de la matière argileuse inter­sti tielle).

Les effets de deux techniques culturales

Le labour

Sur chaque site expéri mental, soumis aux essaisde simulation de pluies, l'une des deux parcellesest toujours l'objet d'une traitement de référencepermettant de caractériser l'érodibilité maxi­male du sol (facteur KUS de l'équation deWischmeier): labour sur 15 à 20 cm, planage,extirpation du système racinaire, le sol soumisaux averses reste donc entièrement dénudé pendanttoute la durée des essais.

Nous avons reproduit sur le Tableau 35 lesdonnées permettant la comparaison des si tua­tions suivantes:

155

Page 156: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Cg/I R mm / h

0,6 60

0.3 30

0,5 50 1 : TS 121

2 : TS 122

1f----.

\/

/ \/........ -- -.--..- -.......

.-"'"n,\

/rJf " <!>'"/ \ J" \

~1

""-- ~---- .......... 1 \ / ....-----.-~

\ --- .,;' .::::.2)- ~o

10

40

20

0,1

0.2

0,4

o 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 T mn

FIGURE 39. Effets du labour sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C gll). Comparaison entre deux sols de haut de versant, gravillonna ireset argileux, peu humectés non labouré (TS 121) et labouré (TS 122) (Collinet et Valentin, 19.79)

Page 157: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Sol de haut de vel'6ant, gravillonnaire etargileux.

Sol peu humecté (SPu = 200 mm et 90 hde ressuyage)

Sol dénudé non labouré (témoin) : TS 1.2.1Sol dénudé labouré: TS 1.2.2

Sol fortement humecté (SPu = 800 mm,20 h de ressuyage)

Sol dénudé non labouré: TS 1.14.1Sol dénudé labouré: TS 1.14.2

Sol de bas de versant, meuble, argilo-sableux.Sol fortement humecté (SPu = 850 mmet 15 h de ressuyage)

Sol dénudé non labouré: TS 3.20.1Sol dénudé labouré: TS 3.20.1

Les intensités d'averse sont toujours de 60 mm h- 1•

Labour du sol gravillonna ire de haut deversant. A l'issue de la seconde averse(comparaison TS 1.2.2/TS 1.2.1) les infiltrationsrestent importantes sur les deux sols (Fig. 39).Les gains à l'infiltration consécutifs au labourapparaissent nettement, tant au niveau des pluiesd'imbibition: Pi2/Pi = 1,9 que des intensitésd'infiltration finales: Ftu 2/Ftu 1 = 1,4. Cepen-dant, étant donné les fortes hauteurs de pluiesutiles, les lames infiltrées restent comparables:W2/W1 = 1,1. On note que les turbidités moyen­nes sont nettement plus fortes sur le labour oùl'érosion n'est limitée que par la faiblesse desruissellements.

A partir de 650 mm de pluies cumulées (dou­zième averse), on assiste à une inversion des pro­cessus : les infiltrations sur le sol labouré finissentpar devenir nettement inférieures à celles dusol témoin, c'est particulièrement ce qui se con­firme pour la quatorzième averse, avec 300 mmde pluies cumulées (comparaison: TS 1.14.1/TS 1.14.1 de la figure 11) où l'on a : Pi2/Pi1 = 0,3et Ftu2/Ftu1 = 0,8. Il en résulte un ruissellementquatre fois plus important sur le labour maison remarque aussi que le palier de ruissellements'établit à un niveau modeste: Rx = 25 mm h- 1

(d'où Fn= 36 mm h- 1), alors que sur le témoinnon labouré il se manifeste, vers 50 minutesde pluie, une nouvelle inflexion des intensitésde ruissellement. Les érosions sont 6,7 fois plusimportantes sur le labour du fait de la conjonc­.tion de fortes turbidités et d'un ruissellementdevenu plus important qu'en début d'essai (Fig. 40).

Labour sur sol meuble, argUo-sableux, debas d~ versar:t. Alors que le labour du sol gravil­lon~alre amene un gain d'infiltration jusqu'à~n.vlron ~50 mm de pluies cumulées, on observeICI et des la première averse des ruissellements3,5 fois plus importants sur le labour que sur

157

le témoin dont les mottes se désagrègent presquetotalement au bout de 30 mm de hauteur depluie utile (observation de terrain) (Fig. 41).Au bout de 850 mm de pluies cumulées, la situa­tion n'a pas changée (cf. les hydrogram mesTS 3.20.1 et 2 de la Figure 12), et Kr2/Kr1 = 2,7;l'on note une érosion 150 fois plus importantesur le labour qui cède, pour seulement 25 mmde pluie utile, 1500 kg ha- 1 de terre. On nepeut donc plus invoquer dans ce cas une actionprotectrice de la pellicule de battance. La faiblehauteur d'imbibition (PI = 0,9 mm) est une preuvede la saturation immédiate de toute l'épaisseurdu sol remanié par le labour (15 à 18 cm) et del'entraînement incessant des éléments de surfaceayant perdu toute cohésion. Cette explicationest vérifiée aussi par la très faible rétentionsuperficielle (D r = 0,7 mm) qui implique la pré­dominance d'un ruissellement hypodermiquenon collecté par le canal de ruissellement. Ace stade, le sol n'est donc que peu protégé parla lame d'eau ruisselante et l'effet "spash" peuts'y exercer de façon continue.

En résumé, le labour est favorable aux solsgravillonnaires en ce qui concerne l'infiltration.Si le couvert végétal ne s'installe pas rapidementles risques d'érosion deviennent sérieux. Lelabour a des effets néfastes sur les sols de basde versant par la conjonction rapide de fortsruissellements et de fortes turbidités, sa protec­tion par le couvert végétal est difficile à réalisercar les pertes en terres sont immédiates.

Le buttage

En fin de campagne, après ressuyage du sol unbuttage traditionnel, non cloisonné, a été réalisésur les sols de haut et de bas de versant. Nousproposons, comme précédemment, d'évaluerson effet par comparaison avec le témoin nonre manié. Les situations expéri mentales sontdonc les suivantes:

Sol de haut de versant gravillonnaire etargileux, fortement humecté (SPu = 1000 mm,20 h de ressuyage, averse à 60 mm h- 1)

Sol dénudé non labouré (témoin): TS 1.26.1• Sol dénudé butté: TS 1.26.2

Sol de bas de versant, meuble, argilo-sableuxfortement humecté (SPu = 1000 mm, 20 h d~ressuyage, averse à 60 mm h- 1 )

Sol dénudé, non labouré (témoin) : TS 3.26.1. Sol dénudé, butté: TS 3.26.2.

Buttage sur sol gravillonna ire de haut deversant. La comparaison des deux hydrogra m mes(Fig. 42) amène les constatations suivantes:

Page 158: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

Cg/IR mm/h

•'\

/\

'\

"\1 \1 \

l '1 \1 \

1 à>, ~l ,

\,\,,,\\.,,,• \ .', .., ........ ...... '" 1 / \ "

\ ~, ,. '" . / \, .. -. ..... '" .... .. .... .,./ \

1 \, \ 1: TS 11411 \1 \

2 : TS 11421 •1,

11

1

~

1 11

1~ CV

....... j...---"" <l)

V,1

/. 1

~.',/,, ' .// ,/ ,1

('O- • .

V-L---- '\.~I--Q)

J -

20

o

30

60

10

40

0,5

0.1

'.0 50

1 5

30o 10 20 40 50 60 T mn

FIGURE 40. Effets du labour sur le ruissellement (T mm/h) et la turbidité (C g!h). Comparaison entre deux sols de haut deversant, gravillonna ires et argileux, fortement humectés non labouré (TS 1141) et labouré (TS 1412) (Collinet etVa lentin, 1979)

Les comportements des deux sols restentdifférents jusqu'à environ 35 mm de pluies utiles.Sur le témoin, après 3,3 mm de pluies d'i mbibi­tion, s'est instauré un régime permanent deruissellement correspondant au pseudo-palierRx 1 : 11,5 mm h- 1 • Sur le sol butté, après uneimbibition plus importante (P12 = 23 mm) cecourt palier du régime de ruissellement n'ap­paraît pas (cf. Tableau 7).

Au-delà de 35 mm de pluie utile, les com­portements deviennent remarquablement voisins.On observe des phases de transition identiquement

longues et des paliers réels de ruissellementatteints dans les deux cas vers 115 minutes(l15 mm de pluies utiles) avec Rx (butte) =30 mm h- 1 et Rx (témoin) = 40 mm h- 1•

Le buttage amène donc un léger gain auniveau de la phase d'imbibition et de l'intensitéminimale d'infiltration, il en résulte un rapportKr 2/Kr 1 = 0,8. En ce qui concerne l'érosion,ses effets sont négatifs du fait de turbiditésmoyennes environ 10 fois plus importantes quecelles du témoin alimentant un débit solide suf-

158

Page 159: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Cg/ICg/1 R mm/h

T mn40302010o

0,1 1,0

1,11

1,0 10.0 50

3201

40 3202

20

10

0,5 5,0

30

FIGURE 41. Effet du labour sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g/l). Comparaison entre deux sols meubles,argilo-sableux fortement humectés de bas de versant non labouré (TS 3201), et labouré (TS 3202).(Collinet et Valentin, 1979)

fisant pour exporter 7 fois plus de terres (E2 :806 kg ha-; pour 120 mm de pluies utiles). Cesfortes turbidités sont dues à l'épuisement enterre fine des 50 buttes sans possibilité de stock­age de ces sédiments sur la parcelle du fait del'immédiate canalisation du ruissellement entreles rangées de buttes. On décèle en outre surle turbidigram me un début d'érosion ravinanteà partir de 85 minutes.

Buttage sur sols meubles de bas de versant(Fig. 43). On retrouve, comme pour les solsde haut de versant, un gain intéressant au niveaudes pluies d'imbibition: Pi2/Pi1 = 5. Par contre,après une montée rapide du régime de ruisselle­ment, on atteint vers 30 minutes des paliers(ou pseudo-paliers d'infiltration) très défavora­bles à l'utilisation de cette technique culturale:Fn2/Fn1 = 0,4. Pour des averses de courtes duréesles différences d'infiltrabilité ne sont pas encoreconsidérables: Kr2/Kr1 = 1,2 mais il est évidentque des averses ultérieures confirmeraient ceteffet négatif. Ceci est encore plus flagranten ce qui concerne les érosions considérablement

plus importantes sur buttes: E2/E1 = 48 avecdes causes recevant les mêmes explications queprécédemment: maintien de fortes turbidités:Cs =6 g 1- 1 et Cx =3 g 1- 1 et débits solidesimportants du fait de fortes intensités de ruis­sellement.

Pour ce qui concerne le rôle, supposé, dubuttage sur l'hydrodynamique des sols, il appa­raît ici que c'est une technique inefficace pourl'amélioration des infiltrations et dangereusepour l'érosion. Le stockage de l'eau n'est passensiblement amélioré par rapport au sol nontravaillé. Les pertes en terres sont très élevées,voisines de celles du simple labour sur les solsde bas de versant. Tout dépendra de la vitessed'installation du couvert végétal et de la naturedes précipitations naturelles la précédant. Dam:le cas de l'igname le développement des organesaériens est lent, d'autre part ceux-ci, de structurelianescente, protègent mal le sol d'où le paillagede buttes parfois pratiqué dans le Nord, maisce mulching est, à notre connaissance, peu uti­lisé dans le Sud-Ouest ivoirien.

159

Page 160: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Tar: recherche et aménagement

C g/I

1,5

Cg/I R mm/h

•1

1111

1 1,0 la11

O"ia

<î> ~

6,0 60

2,0 20

4,0 'la

T mn706050'la3020la

1

1I~, 1 : TS 3261

1 1 \1 1 \1 2: TS 3262

1 • 1 \1 " \•

/1 \1 \1 ""1 ~, ~-11 l-/\ ".,~11 • r..

\ " "'. --_.- -.-

L....--<T

~~

V )

) 1

"-......... _.-bi __.4"' ,....- " , - - ......... --,

./ "'.'1

a

50

3,0 1 30

5,01,0

0,5

FIG URE 42. Effet du buttage sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g//). Comparaison entre deux sols gravillonna ireset argileux fortement humectés de haut de versant, l'un dénudé non labouré (TS 1261) et l'autre dénudé butté(rS 1262) (C6llinet et Valentin, 1979)

CONCLUSION

La comparaison des comportements de sols sousforêt et sous culture traditionnelle fait apparaî­tre une influence prépondérante de leurs carac­téristiques pédologiques qui l'emporte sur celledes couverts végétaux pourtant fondamentale­ment différents.

Ceci est dû à la vitesse de reconstitutiond'un recrû herbacé. Accompagnant, ou parfoisdépassant, la croissance des plantes cultivées,ce couvert végétal peut en effet assurer uneprotection voisine de celle de la forêt. Le volumeporal superficiel décroît sensiblement pendant

la premlere année à cause de modifications dela microtopographie; il en résulte des ruisselle­ments légèrement plus importants sous culturemais cet effet est fl'gace du fait de l'augmenta­tion de l'activité de la micro- et mésofaune dusol s'exerçant, les années suivantes, aux dépensd'une abondante nécromasse.

Au niveau d'un versant, il apparaît que lessols gravillonnaires des sommets sont les plusperméables et permettent un drainage verticalvraisemblablement très profond. Vers l'aval,au fur et à mesure que se différencient d'autreshorizons aux perméabilités souvent contrastées,des composantes latérales du drainage se mani-

160

Page 161: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

9/19/1

C C R mm/h

60

1 : TS 126150

1 2 : TS 1262

/!

40

V,, -,~ --,....... - ~-. --30 .,...- ~

,. \ /

~:---- >'.:..............

"1\, .- .,"

, ..'o. 0, / -m; '.1 \ .\.. ,,- _..-"'", , 10------1 \ >: '~ -<3>-° " ........." -/ - ,,- ...-+ ----

'./ " "---.---

~r>(, 0 ',', .... '.'---- Il

~

l1-'""'" -'"10

VV/.-/-0

0,5 5,0

0,4 _,0

o 3 4 5 6 8 9 100 110 120 130

T mn

FIGURE 43. Effet du buttage sur le ruissellement (R mm/h) et la turbidité (C g/l). Comparaison entre deux sols de bas de versant, meubles, argilo­sableux, fortement humectés, l'un dénudé non labouré (TS 3261) et l'autre dénudé butté (TS 3262). (Collinet et Valentin, 1979)

Page 162: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEA U 36. Exemple d'articulation des systèmes-sols en zone tropicale humide forestière (Taï)et dispositifs expérimentaux utilisés pour la connaissance de leurs fonctionnements

a b c d e f g h

Echelle étudiée et Volume < 1 mm 0.01 à 1 m2 10 à 50m2!

100 à 1 à 10 ha 100 à

hal

> 5000 ha

A 1

morphopédologique corres- 0.05m2j 1000 m2

1

200pondant assemblages

horizonsprofil de pédon pédon ou segment ou paysage ou

élémentaires solpaysage

segment paysage région

- maille -plusieurspaysagique 1 mailles(sommet + paysagiquesversant + I-Plusieursbas -fond) types demosaïque de couverts

- ensellementde versant,

1

ravines- 1 chélllp

1

- le plussouventido "d"

- macro etmégaporosi ­té (racinesfi ssures.terrie rs.termitières]

-microagréga-l-méSOagréga- - ido "b" +

tion tion ,-1 organisa-

I

-microporo- -méso. macro- tiansité porosité structu-

- cutanes -eau libre 1 raIe dueau liée saturante sol

Organisations naturellesétudiées (systèmes)

Etat du fluide,

B 1

1

-

1--

- eau libre plusieurs champs végétaux

1

(détention

1

organisa-

I1 1

superfi - tians su-

I1

cielle l perficiel-

1

les

-eau libre : lame - eau libre : lame ruisselante etruisselante écoulement de réseau

1

Processus se manifestant -altération - infiltra- I- désagréga-

I~érosion - ido "d" +

1~ 'y"miq" 11

!- pédoplasma- tian sous tion nappe - i ntercep- de versant

1

tion charge

1-(splash l détecttl.on tian par ravinement

1

- tension du cisail- une strate - intercep- 1i cppillaire- submersion intercep-

1; lement ou une for-écoulement de bassins

tian parC

1 1

tian parune forma- 1

versants

1

- phaseune struc- intercep-

1

mation

1

vapeur ture végé- tion par végétale tion végé- 1une strate tale

1 1

tale végétale1

~- engorgement - nappes semi-permanen~- nappes suspendues tempor. - résurgences bas-versant i

Dispositifs expérimentaux

1

- analyse - Müntz - infiltrOmè-

l- simul ateur - parcelles

1D physique - Pioger tre à de pluies pluies - bassins versants équipés

1des sols - Porchet aspersion 1 naturelles

1

1- micromor- etc ..1 1

iphoscopie

1 1

Page 163: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

festent du fait des différences de conductibilitéhydraulique entre les horizons superposés. Ceux­ci se saturent progressivement en saison de pluies,l'intensité limite des pluies provoquant leruissellement dépendra dès lors de la positiondans le profil d'un "horizon de comportement"dont les seules caractéristiques commanderontle comportement hydrodynamique de la totalitédu profil de sol.

Tout remaniement des horizons supérieursconsécutifs à la mise en œuvre de techniquesculturales plus élaborées (labour à plat, buttage,etc••• ), dont les effets ont été testés sous simula­tion de pluie, modifient considérablement. lesrègles énoncées précédem ment. Ces horizonsremaniés acquièrent des caractériqtiques physi­ques totalement différentes de celles des horizonséquivalents non remaniés; Peffet bénéfiquedu travail du sol sur l'infiltration est toujourstrès court, il se manifeste pendant les deux àtrois premières averses sur les sols de som metmais seulement pendant quelques millimètresde pluie sur les sols des versants; la désagréga­tion des mottes est également rapide d'où desérosions 7 fois (amont) à 150 fois (aval) olusimportantes que celles des sols "cultivés" tra­ditionnellement du fait de la conjonction defortes turbidités et de ruissellement plus im­portants.

L'étude du facteur "échelle" de mesure n'apas été abordée dans ce premier bilan, elle seracependant faite ultérieurement. Son intérêtréside dans une évaluation de la fiabilité desdonnées fournies par des dispositifs de mesurede dimensions croissantes et par les possibilitésd'extrapola tion offertes par chacun d'entre euxqui sont:

infiltromètre à aspersion: 1 m2

simulation de pluies: 50 m2

parcelles pluies naturelles: quelquescentaines de m2

ensellement de versant aménagé:quelques habassins versants expéri mentaux:quelques centaines à quelques milliersd'ha.

Les limites de cohérence des résultats cor­respondent en fait aux limites d'organisationsnaturelles fonctionnant comme des systèmesindividuels (Tableau 36). Ceux-ci s'articulenten systèmes plus vastes où, à chaque franchisse­ment d'échelle, la juxtaposition ou la combinaisonde processus élémentaires génèrent d'autresprocessus compatibles avec les dimensions dunouveau système. La nature et la dimensiondes dispositifs expérimentaux doivent donc êtreadaptés à ce degré de complexité des systèmespour pouvoir être efficaces.

EVOLUTION DES SOLS

Le traumatisme du défrichement et de l'exploita­tion agricole qui affecte l'écosystème forestierse répercute également sur les solsl, bien quele travail mécanique de la terre soit réduit àson strict minimum dans les systèmes culturauxtradi tionnels sur brûlis.

A Taï, Pévolution des caractéristiques dessols (Tableau 37) sous Peffet de la mise en culture(en particulier les paramètres classiques de ferti­lité) a fait l'objet d'études suivies sur des couplesde parcelles cultivées et témoins sous forêt,à partir de l'année 1978. Deux modes de culturetraditionnelle ont été expérimentés:

Mode oubi: semis du riz en poquets, aprèsbrûlis, sans travail du sol. La densité de semencesétait de 28 kg ha- l •

Mode yacouba L: semis du riz à la volée,après brûlis, suivi d'un léger binage du sol(3-4 cm) ; 44 kg de semences à l'hectare.

Au total six parcelles de 1470 mL répartiessur deux catégories de sol en situation topographi­que différente ont été implantées et suivies,à partir de décembre 1977. Parmi ces parcelles,quatre d'entre elles: Ph P2 et P4' P5' furentdéfrichées et cultivées en riz en 1978 et 1979,puis abandonnées à la jachère forestière les annéessuivantes:

1 Parallèlement à l'étude du sol, nous avons égalementessayé d'apprécier les conséquences du défrichement surles conditions de restitution végétale, au moins en ce quiconcerne les litières fines, puisqu'il s'agit de la fractionqui se décompose le plus rapidement à l'état naturel, etqui brûle aussi le plus facilement au passage du feu. Desprélèvements de litière au sol ont accompagné à certainespériodes les prélèvements de terre.

Une estimation de la quantité de cendres résultantdu brûlis a été tentée, après le brûlis en première année,sur deux parcelles défrichées (Pl et P2). Les valeurs ob­tenues sont de 242 et 208 kg ha- 1 de cendres.

Il subsistait à la même époque (après brûlis) de l'ordrede 0,5 kg m- 2 de litière fine sur les défriches, et 0,25 kg m- l

sous forêt. La quantité de litière diminue ensuite rapide­ment au cours de la saison des pluies. La litière disparaîtpresque totalement au bout de 3 ou 4 mois sur défriche.Sous forêt, le renouvellement est suffisant pour maintenirune centaine de gramme m- 2 ; puis la quantité de litières'accroît de nouveau à la faveur de la saison sèche suivante.

La composition chimique de la litière au sol, en coursde disparition sur défriche et partiellement renouveléesous forêt, reste comparable. Par contre, la quantité d'élé­ments solubles à l'eau et susceptibles d'être lessivés accusecertaines différences bien marquées: les solutions de lixi­viations des litières s'appauvrissent davantage au coursde la saison humide sur défriche que sous forêt, en carbonetotal, azote total et ammoniacal. La concentration desautres éléments solubilisés: P, Ca, Mg, K et Na, restebeaucoup plus comparable.

2 Les Yacoubas ou Dans occupent la région au nord desGuérés. Ce sont aussi des cultivateurs de riz.

163

Page 164: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEAU 37. Caractéristiques des sols à l'état naturel

Parce Il es et Fraction fine ls Agrégats Capacité Somme Taux de pH Carbone Carbone Azote P205 Phospha taseProfondeur , 20 >1 (Hénin) benzène d'échange bases saturation eau total minéralisable total total (>1 g

(%) :j: (%) 6né 100 g-l) échangeables (%) (%) (Q.M.) (%0) %0 phénol g-l )(mé 100 g-l)

t-<CIl

Pl - P2 "1:1-;0......CIl

0 - 10 cm 13.9 0.3 6.3 4,44 0,71 16,0 4,8 11,60 0,85 0,79 0,15 108 No

10 - 20 21,9 1,3 2,2 4,27 0,23 5,4 4,8 6,88 0.86 D,53 0,14 62 '-lcm 1:)

"""':20 - 30 cm 25,3 2.1 1.0 4,21 0,22 5,2 5,0 5,56 0,72 0,42 0,13 42

-;CIl(')- ;:sCIl

0'\ P4 - P5 -;~ (')

;:sCIl

0 - 10 cm 14,3 0,3 8,7 4.90 2,04 41,6 5,2 13,12 1,32 0,95 0,23 129 CIlNo

10 - 20 cm 19,8 1,0 3,2 3,51 0,92 26,2 5,1 8,33 1,05 0,59 0,22 73 1:)

20 - 30 24.3 2,2 1,2 3,08 0,40 13,0 5,2 6,09 0,90 0,48 0,19 45;3

cm CIl,;:l1:)

COCIl

;3:j: de la terre tamisée à 2 mm CIl

;:lNo

Page 165: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

L Les données concernent les prélèvements réalisésen début de cycle cultural: après défrichement et brûlageen 1978 et 1979, puis en début d'année (saison sèche) sousjachère forestière les années suivantes.

1 Les plus petites différences significatives ont étéestimées à partir des résultats obtenus sur les prélèvementsréalisés en deux puis en quatre répétitions, en décembre1977 et en décembre 1979, sur les parcelles.

Sur chaque parcelle un échantillonnage com po­site (30 prises élémentaires à 0-10, 10-20,20-30 cm, parfois 30-50 et 50-70 cm) a été réalisé,d'abord mensuellement, puis tous les mois etdemi au cours des deux premières années: 1978et 1979, et tous les trois mois la troisième année:1980 (première année de jachère). Ensuite, troisséries de prélèvements ont été effectuées en1981, et seulement une en 1982 et en 1983. Autotal 24 séries de prélèvements ont été réaliséesjusqu'en mars 1983.

L'exploita tion des données se poursuitactuellement. Les grands traits d'évolution quis'en dégagent montrent que la mise en culturetraditionnelle pratiquée à Tai entraîne desmodifications du sol beaucoup moins importantesque d'autres systèmes de culture plus intensifsqui ont été étudiés par ailleurs, en Côte d'Ivoireforestière et pré forestière (Moreau, 1982).

On n'évoquera ici que les caractéristiquesdu sol dont les variations apparaissent les plussignificatives l , en s'appuyant essentiellementsur une interprétation graphique des résultats.Pour alléger la présentation de l'étude, on neretiendra que quelques séries de données de façonà retracer l'évolution du sol à intervalle annuel 2 :1978, 1979, 1980, 1981 et, lorsque cela est pos­sible, 1982, aux trois niveaux de profondeur:0-10, 10-20 et 20-30 cm. (Seules les annéesde culture 1978 et 1979 concernent ce paragraphe.Les années de jachère: 1980, 1981 et 1982 seronttraitée plus tard dans ce chapitre.) Pour le mêmesouci de simplification, on considérera les valeursmoyennes obtenues sur les parcelles Pl et P2'd'une part, P4 et P5 d'autre part: les traitementsen fonction du mode d'exploitation ("oubi et

Sol ferrallitique fortementdésa turé appauvri sur col­luvion, en bas de versant.

Sol ferrallitique fortementdésaturé remanié (gravil­lonnaire) à recouvrement(ZO-30 cm), à la mi­versant

(PI: culture de riz, type oubi(PZ: culture de riz, type

yacouba(P3 : forêt témoin

(P4 : culture de riz, type oubi(P5 : culture de riz, type

yacouba(P6 : forêt témoin

165

yacouba rr ) n'ayant pas, en effet, induit de différen­ce marquante entre les parcelles concernées.

L'effet de la mise en culture est appréciépar comparaison des caractéristiques du sol entreparcelle cultivée et témoin forestier d'un cou­pie: valeur parcelle cultivée - valeur parcelletémoin, déduction faite de l'~cart éventuel àl'état initial. Les résultats rùnt exprimés soiten valeur absolue: (), v.a (Tableau 38, Fig. 44),soit en pourcentage par rapport au témoin (), %(Fig. 45).

A l'état naturel, on constate, d'après leTableau 37, que les sols de bas de pente (PbP2) sont plus pauvres que les sols de mi-pente(P4 P5), particulièrement en ce qui concerneles 'bases échangeables, le pH et, dans une moin­dre mesure, le carbone, l'azote, le phosphoreet l'activité phosphatasique. On note égalementque les différences se réduisent beaucoup avecla profondeur. La granulométrie de la terrefine est tout à fait comparable, mais il existedans les sols de mi-pente une forte proportiond'éléments grossiers (gravillons) généralementà partir de 15-20 cm (20 à 30 % de l'échantillontotal).

CARACTERISTIQUES MORPHOLOGIQUESET PHYSIQUES

Les observations de terrain réalisées au coursdes deux années de culture (1978 et 1979) ontpermis de constater la permanence des modifica­tions à la surface du sol: disparitions de grosturricules, aplanissement du micro-relief. Toute­fois, dans les zones de recrû bien développé,quelques turricules frais sont encore déposésà la surface du sol.

Les racines forestières les plus fines etsuperficielles ayant en grande partie disparuau cours de la 1ère année, ce sont les racinesles plus grossières et profondes qui tendent àdisparaître à leur tour en deuxième année. Unnouveau système d'enracinement, associant plusou moins régulièrement, selon l'état de la végé­tation, des racines herbacées et ligneuses, sedéveloppe dans les horizons humifères. Il s'agitd'un système racinaire plus lâche et moins bienorganisé que sous forêt.

La dégradation de la structure apparaîtde façon plus nette dans les horizons supérieurs.Le développement de la structure s'atténue pouraboutir à une structure fondue. Toutefois, l'hori­zon superficiel qui était essentiellement sablo­organique et grumeleux sous forêt, devient plutôtparticulaire. Malgré cette dégradation de lamacro-structure, on n'observe pas de forte com­paction. La culture ne paraît pas devoir entraîner

Page 166: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEAU 38. Evolution des bases échangeables (Ca, Mg, K) sous l'effet de la mise en culture (t:. mé par 100 g)

Parce Iles et 1 9 7 8 1 9 7 9 1 9 8 0 1 9 8 1profondeur Ca Mg K Ca Mg K Ca Mg K Ca Mg K

Pl - P2 +0,17 * +1,41 * +1,08 * +1,62 *+0,05 * +0,17 * +0,05 * +0,12 *

+0,05 +0,08 * +0,03 +0,07 *o - 10 cm

+0,11 * +0,18 * +0.19 * +0.48 *10 - 20 cm +0,04 +0,02 -0.04 +0.03

+0,03 +0,02 +0,01 +0,05

+0,07 +0,09 +0,15 * +0,29 *20 - 30 cm +0,01 +0,01 -0,03 -0.02

+0,03 +0,04 +0,04 +0.03

P4 - P5 +0,57 * +0.74 * +0,90 * +0,74 *+0,34 * +0,15 * +0,09 +0,18 *

+0,14 * +0,00 +0,03 -0,010- 10 cm

+0.12 +0,14 +0,13 +0.2410-20cm +0,16 +0,12 +0.13 +0,10

+0,06 +0,03 +0,01 +0,02

+0,04 -0,02 +0,06 +0,0520 cm +0,09 +0,09 +0,12 +0,05

+0,02 +0,02 -0,01 0,00

* :valeur significative (P = 0,05)

Page 167: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

~ ----......... -=~?~1

f- 1~1/1 0

1978 1979 1980 1981 1982

1

1982

..--.-------- .. -­ "--0_.

",-/

,/,/

/,-/

/

"--.--... - .. ----- -...:..~---._~:::::>--e::::::_-

"-'-

'-'­

'­'-

'-'-

'­'-

//

//

//

//

//

---

1

0__ 1 0--

1 ----t---I----I1978 1979 1980 1981

400 A

300

200

150

100

80

60

40

20

0

10

<!'. 20<l

30

'"Cl

2c:

'"l.J5aQ.

c: B'"U>

'" 60''''Eli)(

'".!: 40aE

'1!

"0 20(;Q.Q.

~

(; 0Q.

U> 10c:a

'2 20

030J2-

Somme des bases échangeables (E bases)

Taux de saturation (S/T)

Coefficient de minéralisation

_._-- pH

Azote total

••----... Carbone Total

o 0 Agrégats benzene

0--- --<> Activité phosphatas ique

FIGURE 44. Evolution comparée des caractéristiques du sol entre 0 et 10 cm de profondeur.A: sur les parcelles Pl - P2; B: sur les parcelles P4 - Ps

167

Page 168: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

3 2 1 0 1+ 4 3 2 1 0 765'432101 5432101 54~2101

0·10

10·20

20·30

_ 0 0.5 1 + o 0.5 1 1.5 o 0.5 1 o 0.5 1 1,5

__ 0 L Agrégats i>enzéne %

,_,J~~

0, .1bo

0·10

10·20

20·30

D,. L bases échangeables en me/l00 g

0·10

10·20

20·30

0·10

10·20

20·30

o 10 20

o 0.5

+

+

o Ip 20

o 0.5 1 1.5

o 10 20

o 0,5 1

o 10 20 30

o 0.5 1

D,. S/T x 100

taux de saturation en %

o 0.5 1 1.5Çlr;:~6 D,. pH eau

2 1 0

0.10 1 ,,\...10·20 l.J

20·30

+ 2 1 o 1 0 2 1 o 1

D,. C total %.

o 0.5

0·10

10·20

20·30

0.10 0 0.10

0·10

10·20

20·30

+

+

0,5

0.10 0 0.10

o 0,5

/10.10 0 0.,10

o 0.5

vd

D,. QM - C, minéralisé x 100- C total

D,. N total %.

50 30 10 0 10+ 50 30 10 0 10 50 30 100 30 100 30 1001p

0·10

10·20

20·30

Profondeurcm

1978 1979 1980 1981

q-~

&p, D,. Phosphatase

ci I-Ig phénol/ g de sol

1982

FIGURE 45. Evolution des caractéristiques du sol après la mise en culture. Parcelles Pl - P2 : 0( •.• : différence significative, P =0,05)

168

ParcellesP4-PS 0

Page 169: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

de modification sensible de la porosité (Fritsch,1982).

L'indice d'instabilité structurale: Is (Héninet al. *, 1969) l, dont l'augmentation traduit une di­minution de la stabilité structurale, ne présentepas de variations bien significatives. On notecependant une tendance à l'élévation de ls à0-10 cm sur les parcelles P1-P2' A Tai, oùl'horizon supérieur des sols est pauvre en élémentsfins (~20 ]J), le pourcentage d'agrégats résistantà l'eau après prétraitement au benzène (agrégatsbenzène), qui entre pour partie dans le calculde l'indice ls, s'avère plus sensible à la mise enculture que celui-ci. Ce paramètre paraît mieuxrefléter les modifications morphologiques quiont pu être observées et c'est lui qui a été retenusur les graphiques des Figures 45 et 46.

Les agrégats benzène diminuent de façonsignificative dès la mise en culture sur les par­celles P1-P2, au niveau 0-10 cm; les variationsdemeurent toutefois assez faible « 5 % en valeurabsolue). Il n'y a pas de variation significativesur les parcelles P4-P5, mais une tendance àla diminution se manifeste également à 0-10 cmla deuxième année sur ces parcelles.

CARACTERISTIQUES CHIMIQUES

On enregistre une élévation des bases échange­ables et du pH sous l'effet du brûlis 2 • L'actiondu feu est plus ou moins régUlière et son résultatest en relation avec les conditions météorologi­ques plus ou moins favorables au dessèchementde la végétation. Les conditions de brûlage peu­vent donc être différentes d'une année à l'autre.A l'échelle de la parcelle, l'action du feu apparaît

15 = 0: fractions agrégées eau, alcool, benzène ~ 200 ~)x 0,9 sables grossiers

2 L'augmentation simultanée des bases échangeableset du pH est à mettre en relation avec la restitution ac­crue d'éléments minéraux issus des litières. On peut sedemander si la litière non brûlée se décomposant à la sur­face du sol, d'une part, et les cendres résultant d'une miné­ralisation rapide sous l'action du feu, d'autre part, jouentun rôle comparable vis-à-vis du complexe adsorbant etdu pH du sol. Pour tenter de répondre à cette questionon a comparé la concentration des éléments minéraux etla composition ionique des solutions de lixiviation des cen­dres et des litières en cours de décomposition. Après filtra­tion sur les cendres les solutions sortent avec un pH de10 à 11; dans les mêmes conditions, les, solutions ayantfiltré sur les litières ont un pH acide de 5 a 6. Les cendresfournissent des solutions plus concentrées à pH alcalin:ce qui favorise la fixation des cations sur le complexe ad­sorbant des sols acides.

égale ment com me un facteur d'hétérogénéi téspatiale en fonction de la répartition des cendresen surface.

L'enrichissement minéral se manifeste surtoutà la partie supérieure du sol. Com me on le voitsur la Figure 44 où la som me des bases échange­ables (S) et le pH sont en augmentation nette,particulièrement au niveau 0-10 cm, 11 S peutatteindre et dépasser + l méf100 g et 11 pH =+ 1 à 2 unités.

L'augmentation de ces paramètres apparaîtsensiblement plus importante en deuxième année(1979), surtout sur les parcelles Pl - P2 (basde pente) où les variations atteignent le doublede celles obtenues sur les parcelles P4 - P5 (mi­pente). (Alors que l'élévation avait été sensible­ment plus importante sur ces parcelles P4 - P5la première année: 1978.)

Le calcium fournit la part la plus importantedans l'augmentation de la somme des bases échan­geables (Tableau 38), mais dans des proportionsdifférentes en première et en deuxième annéede culture. 11 Ca échangeable représente environ60 % de 11 S en 1978 et 80 % en 1980. Cettedernière valeur se maintiendra ensuite sous jachèreforestière. A l'inverse, la part relative du ma­gnésium et du potassium dans 11 S diminue de1978 à 1979.

La capacité d'échange (T) ne manifesteaucune variation significative et le taux de satura­tion (SfT x 100) s'accroît en relation avec lesbases échangeables (Fig. 45). Ces deux para mètres(S et SfT) présentent les plus fortes variationsrelatives par rapport au témoin parmi toutesles caractéristiques étudiées (Fig. 46).

L'enrichisse ment en bases échangeableset l'élévation du pH résultant de la mise en culturesubsistent en fin de culture, mais avec des valeursplus élevées en Pl - P2 qu'en P4 - P5' Le solde bas de pente, le plus pauvre à l'état initial,a davantage bénéficié des effets de la mise enculture. En fait, l'enrichissement du complexeadsorbant à la partie supérieure du sol, sousbrûlis, dépend de l'efficacité du brûlage et celaexplique que l'on puisse avoir des résultats assezdifférents d'un endroit à l'autre, surtout si laphase de culture est de courte durée, com mecela est généralement le cas. Cependant, nosrésultats laissent penser que les caractéristiquesnaturelles des sols peuvent également jouer unrôle dans la dynamique des bases et leur accumu­lation dans le sol.

n n'apparaît pas de variation significativedu phosphore sous brûlis. On enregistre cepen­dant une tendance à l'augmentation des valeursde P205 total dans l'horizon 0-10 cm. Les valeursde P205 assimilable (méthode Olsen) restenttrès faibles (0,01 à 0,02 %).

169

Page 170: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

CARACTERISTIQUES ORGANO-BIOLOGIQUES

Le carbone total, donc la matière organique,diminue de façon significative dès la mise enculture à la partie supérieure du sol sur les par­celles Pl - PZ. La diminution apparaît moinssignificative en deuxième année, mais se mani­feste encore de façon très nette les deux annéessuivantes sous jachère (Fig. 44). L'abaissementdu taux de carbone est plus faible et peu signifi­catif en P4 - Ps sur les sols de mi-pente. Danstous les cas, la di minution du carbone total resteassez faible (Fig. 4S): moins de ZO % en Pl - Pzet moins de la % en P4 - PS.

L'étude des fractions organiques nécessiteune exploitation approfondie des données, enraison des variations de faible amplitude et souventréversibles qui se manifestent. On note si mple­ment, pour le moment, comme résultat le moinsincertain, l'augmentation du taux d'humine (frac­tion non extractible de la matière organique)sous l'effet de la mise en culture.

Le coefficient de minéralisation: QM =(C minéralisélC total) x 100, où C minéralisé =C du COZ dégagé en sept jours d'incubation àZ8°C, exprime la proportion rapidement minéra­lisable de la matière organique. Ce coefficientaugmente de façon significative, bien que modérée,à la partie supérieure du sol uniquement surles parcelles Pl - Pz (Fig. 44). Par rapport auxparcelles P4 - PS sur sol de mi-pente, il apparaîtdonc sur les parcelles Pl - PZ, en bas de pente,un ensemble de faits concordants: élévationplus importante des bases échangeables et dupH, augmentation de QM, diminution plus netteet significative de la matière organique et enfindes agrégats benzène (stabilité structurale).

Les variations de l'azote total suivent cellesdu carbone (Fig. 44, 4S) et il n'apparaît pas, dece fait, d'évolution significative du rapport C/N.S'agissant des formes minérales de l'azote, onn'enregistre pas, sur les parcelles suivies Pl - Pzet P4 - PS' d'évolution significative de l'azotenitrique ni de l'azote ammoniacal. Ces deuxparamètres fournissent d'ailleurs, assez fréquem­ment des résultats de sens opposé à des inter­valles de temps rapproché. On peut toutefoisnoter, sur les parcelles Pl - PZ, une tendanceà l'augmentation de l'azote nitrique et, au con­traire, à la diminution de l'azote ammoniacal;la tendance serait plutôt d'ordre inverse surles parcelles P4 - PS.

L'activité phosphatasique, mesurée par laquantité de phénol produite par hydrolyse duphényl phosphate à pH 5, en trois heures d'incuba­tion à 30°C, est un des paramètres représentatifsde l'activité enzymatique liée à l'activité biologi­que globale. L'activité phosphatasique diminuede façon significative sur toutes les parcelles

à 0-10 cm, dès la mise en culture en 1978 (Fig. 44,4S). La diminution de phosphates s'accroît endeuxième année avec des valeurs négatives signi­ficatives aux trois niveaux 0-10, 10-Z0 etZO-30 cm. C'est sur les parcelles P4 - PS' oùelle était initialement la plus élevée, que l'activitéphosphatasique a diminué le plus fortement ladeuxième année.

En conclusion, les modifications les plusimportantes des caractéristiques physiques,chi iniques et organo-biologiques, sous l'influencede la culture traditionnelle sur brûlis, restentessentiellement superficielles. Dans les casd'évolution défavorables, par rapport au sol fores­tier, la dégradation apparaît généralement assezlimitée (Fig. 4S), surtout si on la compare à cellequi se produit avec des modes d'exploitationmécanisés plus intensifs. On enregistre égalementdes cas d'amélioration très nets pour certainescaractéristiques: bases échangeables et pH,principalement liés à l'effet du brûlis. Cetteamélioration apparaît ici comme le trait d'évolu­tion déterminant par rapport à toutes les varia­tions enregistrées sur les deux types de sol, maisdavantage en Pl - Pz qu'en P4 - Ps (Fig. 4S).Il semble qu'elle puisse subsister plusieurs années,même dans le cas de culture prolongée: on aconstaté qu'après cinq années (deux ans de culturesuivis d'une plantation caféière) le pH se trouveau voisinage de la neutralité et le complexeadsorbant pratiquement saturé, au niveau a­la cm d'un sol de bas de pente, analogue à celuides parcelles Pl - Pz (Moreau, 198Z).

Le système de culture traditionnelle surbrûlis s'avère, dans l'ensemble, peu perturbateur.La fertilité du sol n'est que faiblement dégradée,sinon améliorée lorsque le terrain est abandonnéà la jachère forestière. Ces conditions sontfavorables au développement rapide du recrûligneux devant assurer, pour le sol, le retourd'une ambiance forestière dans des délais rela­tivement courts.

EVOLUTION DE LA MYCOFLORE

Parmi les composantes de l'écosystème, les cham­pignons jouent un rôle important dans le maintiendes équilibres biologiques. Les champignonssaprophytes contribuent à la décomposition età la minéralisation des matières organiques,libérant les éléments minéraux qui enrichissentle sol et assurent la nutrition des plantes. Leschampignons symbiotiques font office d'organesabsorbant les substances nutritives; en améliorantl'efficacité du système racinaire, ils favorisentl'exploitation des nutriments du sol et les condi­tions de nutrition des plantes. L'étude du peuple­ment fongique s'avère donc indispensable com me

170

Page 171: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

paramètre à l'impact de l'activité humaine surle milieu forestier, en relation avec la fertilitédu sol et les possibilités de reconstitution dela forêt après exploitation agricole.

Après des études préli minaires dans la régionde Taï à partir de l'année 1976, le laboratoirede mycologie de l'Université de Rome étudiedepuis 1979 l'évolution de la mycoflore du solet de la litière sur deux couples de parcelles(défriche - témoin forestier) à la Station de Taï.Les deux couples de parcelles se situent, égalementdans le cas de cette étude suivie, en deux posi­tions topographiques sur deux types de sols diffé­rents : sol remanié (gravillonnaire) à recouvrement,à mi-versant, et sol profond à caractères d'hydro­morphie bien développés, en bas de versant,à proximité de PAudrenisrou.

Sur chaque parcelle de 1420 m2 , l'étudeporte sur trente échantillons de litière régulière­ment répartis et sur un échantillon composite(30 prises élémentaires) de l'horizon superficieldu sol (0-5 cm). Une culture traditionnelle deriz sur brûlis a été pra tiquée en 1979 sur lesdeux parcelles défrichées qui ont été abandon­nées à la jachère forestière l'année suivante.Six séries de prélèvements ont été réaliséesde janvier 1979 à janvier 1980, pour étudier l'in­fluence de la culture traditionnelle sur la myco­flore du sol et de la litière. Les données ainsiobtenues viennent de faire Pobjet d'une importantepublication (Rambelli et al., 1983) à laquelleil conviendra de se reporter pour avoir une in­formation plus complète que les quelques indi­cations données ci-dessous.

L'ensemble des études mycologiques réali­sées dans la région de Tai a permis de découvrir,jusqu'à présent, sept genres (Bovetia, Chryseida,Danaea, Dendryphiosphera, Guedea, Helicoubisiaet Talekpea) et 24 espèces de champignons nou­veaux (Bartoli et Maggi, 1978; Caneva etRambelli, 1981; Lunghini et Rambelli, 1978;Lunghini et Rambelli, 1979; Lunghini et Onofri,1980; Lunghini et al., 1982 ; Onofri et al., 1981 ;Persiani et Onofri, 1982; Rambelli et Bartoli,1978; Rambelli et al., 1981). Le nombre déjàélevé de genres et d'espèces nouvellement re­connus va très certainement encore s'accroîtreavec la poursuite des recherches sur l'évolutionde la mycoflore à TaÏ.

A l'état naturel sous forêt, on n'observepas de différence importante dans la mycofloreentre les deux types de sols étudiés. La diversitédes espèces fongiques apparaît élevée dans lalitière corn me dans le sol et c'est là une carac­téristique des forêts tropicales semi-humideségalement riches en espèces végétales. Malgrédes difficultés techniques délicates à résoudre,on peut conclure à Pexistence d'une mycoflore

de composition assez différente dans la litièreet dans le sol. La prédominance des Dematiaceaeà mycéliums pigmentés, dans la litière, d'unepart, et celle des Mucedinaceae, à mycéliumshyalins, dans le sol, d'autre part, paraissent bienconstituer un fait réel. Ce fait se trouve cer­tainement en relation avec l'état qualitatif dela matière organique, qui détermine les possibili­tés de décomposition de cette matière, et peutainsi jouer un rôle sélectif vis-à-vis de certainescatégories de microorganismes.

L'importance des mycorhizes a pu être miseen évidence par l'étude des racines. Ce travailne concerne que 21 échantillons de plantes connuesprélevées en mai 1980 sur les quatre parcellesétudiées. En raison du nombre restreint d'échan­tillons par rapport au grand nombre d'espècesvégétales existant sur les parcelles, les résultatsobtenus ne peuvent avoir qu'un caractère indica­tif; ils sont néamoins suffisamment éloquentsici. Parmi les 21 échantillons étudiés, 19 s'avèrentfortement ou très fortement (48-83 %) infestéspar les mycorhizes: il s'agit exclusivement d'endo­mycorhizes. Corn me cela a vai t déjà été constatésur d'autres échantillons dans la forêt de Taï(où des ectomycorhizes ont été parfois reconnues),la symbiose mycorhizienne semble donc trèsimportante.

En ce qui concerne Pinfluence de la miseen culture, on peut dire que la mycoflore setrouve affectée par la culture traditionnellesur brûlis, mais de façon très inégale selon lesespèces. Il existe plusieurs cas de figure aussibien pour la litière que pour le sol:

des espèces non affectées par la culture,des espèces stimulées,des espèces inhibées, qui diminuent de densitéou disparaissent,des espèces nouvelles qui n'apparaissentqu'avec la mise en culture,après un an, en début de jachère, certainesespèces peuvent rester inhibées, d'autresparaissent stimulées, enfin de nouvellesespèces, jamais observées auparavant, peuventapparaître à ce moment.

En définitive, il n'est guère possible de carac­tériser un peuplement fongique particulier pourle milieu cultivé. Il est pourtant évident quel'existence d'espèces végétales nouvelles à lasuite du défrichement peut stimuler le dévelop­pement de certaines espèces fongiques qui sontrares ou même absentes sous forêt. Il s'agitd'une sorte de spécialisation, comme cela a notam­ment été observé avec Rhinocladiella shulzeriiqui se développe presque exclusivement sur litièrede riz.

A quelques exceptions près, on peut dire

171

Page 172: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

Evolution structurale et floristique

Reconstitution par chablis

FORETCLIMAX

J 1 2

Préparation du champ

7

Reconstitution par stades

12-15 ans 30- 40 ans

------

?

FORETCLIMAX

Champ cultivé 1 Stade herbacé

Il Stade sous·ligneux

Jachère III Stade arbustif pionnier

IV Stade préclimocique

FIG U RE 46. Représentation schématique du processus de reconstitution

que la mise en culture traditionnelle sur brûlis(conduite pendant un an) ne provoque pas le déve­loppement d'une mycoflore nouvelle. Des modifi­cations quantitatives se produisent, mais la densitédu peuplement fongique reste toujours élevée.L'équilibre microbien n'a pas été réellementrompu et cela permet de penser que le retourà la mycoflore typique du milieu forestier pourrarapidement se réaliser dès que celui-ci sera ré­tabli, après l'abandon de la culture. Cette évolu­tion de la mycoflore à plus long terme sous jachèreforestière fait l'objet des recherches qui se pour­suivent actuellement sur les deux couples de

172

parcelles suivies depuis 1979 à la station écolo­gique de TaI.

LA JACHERE

Il est évident que la reconstitution de la forêthumide tropicale, jusqu'à l'hypothétique retourau climax originel (Fig. 46), doit s'étaler surplusieurs décennies et défier l'observation humaine.

Deux méthodes ont été utilisées à Tai:

mise en place d'un champ expérimentalle plus proche possible des conditions locales,

Page 173: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

TABLEA U 39. Chronologie, localisation et histoire agricole des jachères étudiées

Ta! : 1 cycle cultural Tai : 2 cycles Ta! : 6 cycles Soubré-Guéyo Soubré-Sassandra Grabo

1 mois Bi

6 mois Ba

1 Ba Pe 1(1)

an an

14 mois Bi

18 mois Bo

26 mois Bi

2-3 ans Ba Pe 2 ans 2 ans

3 ans B0 3 ans 3 ans

4 ans Pe 4 ans

5 ans Bi

6 1/2ans Bi Pe 6 ans

7 ans Bo

8 ans

10 ans Ba Bi

II ans

13 ans Bo

15 ans Ba Bi Pe 15 ans

18-19 ans Bo 19 ans

29 ans 28 ans

32 ans Bo

38 ans Pe(2)

38 ans

40 ans Bi 40 ans

45 ans

55 ans

Bo - Botanique générale (Alexandre, Guillaumet, Kahn et de Namur, 1978 ;de Namur, 1978a et b; Kahn, 1978 b et C, 1982).

Bi - Biomasse végétale (Jaffré et de Namur, 1982).

Pe - Pédologie (Fritsch, 1982).

Les autres parcelles n'ont été l'objet que d'études de botanique générale(Taï: de Namur, 1978a et b - Autres localités: Kahn, 1982)

(1). Parcelle située sur un sol alluvionnaire et défrichée à partir d'uneforêt secondaire (de Namur, 1978a et b).

(2). Cette parcelle s'écarte légèrement des autres par son sol. Son choixrésulte de la rareté des recrûs très anciens dans la région (Fritsch, 1982).

173

Page 174: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

39 'ans

B

40 ans

Gr;) til0

8 ans

15 ans

A

FIGURE 47. Reconstitution normale (A) et Blocage (B). On voit le rôle des Myrianthus (M) qui, s'ils se développent sous despeuplements arbustifs plurispécifiques (15 ans), constituent un premier sous-bois favorisant l'installation puis ledéveloppement des espèces sciaphiles (40 ans). Au contraire, s'ils se développent sous des peuplements quasi mono­spécifiques (19 ans), ils sont voués à s'affaisser et disparaître favorisant le développement des lianes et empêchanttoute régénération (39 ans) (Kahn, 1982)

Page 175: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

abattage en partie manuel, en partie avec l'aided'une scie à moteur, brûlis, semis de variétéslocales de riz, entretien minimal, récolte manuel­le. On fera remarquer cependant que la super­ficie du champ, 7 ha, excédait largement lamoyenne locale, 1 à 2 ha, et que le champ futabandonné à la jachère sitôt la moisson. Maisil fallait concilier les différents objectifs etcette surface correspondait à un bassin versantqui fut équipé pour les études d'hydrodynamiquesuperficielle et d'érosion;

choix de parcelles en jachère dans la régionde Tai' par enquêtes auprès des paysans sur l'âge,le type de forêt pré-existant, les façons culturales,le temps de culture. Il fut possible d'établirune séquence de parcelles d'âges connus dansdes conditions de sol et de climat que l'on peutestimer équivalentes. D'autres parcelles diffé­rentes, par le traitement agricole ou situéesdans d'autres régions avec des sols et des climatsdifférents, permettent de compliquer le schémade base (Tableau 39).

EVOLUTION DU PEUPLEMENT VEGETAL

La première approche des processus de reconsti­tution était du ressort des botanistes l : descrip­tion et analyse des stades successifs sur descritères floristiques, structuraux et biologiques.Il s'agissait de proposer une typologie utilisablepour les chercheurs des autres disciplines.

Nous considérons la succession secondaireainsi réalisée dans son ensemble, c'est-à-direà partir de la mise en place des premières plantes,cultivées ou non.

Le processus général de reconstitution

La forêt se reconstitue selon une série de stadessuccessifs (Fig. 47, Photos 15 et 16):

le stade herbacé qui correspond à la culturedu riz;le stade sous-ligneux essentiellement consti­tué par les Solanum torvum et Solanumverbascifolium dans le Sud-Ouest ivoirien,avec les plantes cultivées associées.

1 Observations sur les premiers stades de reconsti tutionde la forêt (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire), Cahiers ORSTOM,sér. Biologie, 13(3), 1978. Une série d'articles traitentdes points suivants: Grands traits de la reconstitutiondans le Sud-Ouest ivoirien (de Namur et Guillaumet) ; Ana­lyse floristique des premiers stades de reconstitution (deNamur) ; Analyse structurale des peuplements de Macarangahurifolia (de Namur, Kahn) ; L'écologie d'un arbuste pionnier,Trema guineensis (Alexandre); Caractéristiques des pre­miers stades de reconstitution (Alexandre et aL).

175

Ces deux premiers stades sont étroitementliés au cycle agricole et leur durée ne dépasseque peu la première année. L'essentiel de laflore est constitué par les plantes cultivées,riz et espèces associées, auxquelles viennents'adjoindre des plantes issues de graines préexistan­tes dans le sol, les rejets de souches et de racinesencore vivantes, enfin un contingent allogèneapporté par les différents agents propagateurs,vent, animaux, homme 2 •

le stade arbustif pionnier s'installe dès l'aban­don de la parcelle et s'étend sur une dizained'années;le stade pré-climacique aboutit à la réali­sation d'une forêt qui présente les structuresde la forêt climacique mais qui en diffèrepar sa composition floristique et son dyna­misme.

Le stade arbustif pionnier et le stade pré­climacique, qui sont les deux principaux stadesde la reconstitution de la forêt, seront particu­lièrement développés ici.

Le stade arbustif pionnier

Le stade arbustif pionnier est particulièrementcomposé d'espèces comme Macaranga hurifolia,Macaranga barteri, Harungana madagascariensisqui constituent des peuplements denses souventquasi-monospécifiques, avec également d'autresespèces arbustives plus éparses mais fréquentescomme Anthocleista nobilis (Photo 17) ou leparasolier, Musanga cecropioides.

De Namur et Guillaumet (1978) ont précisela composition du stade arbustif pionnier enfonction des climax potentiels:

"La friche à Macaranga hurifolia sembleêtre la forme la plus caractéristique des stadesde reconstitution dans l'ensemble du Sud-Ouestet correspondrait au type fondamental de laforêt dense humide à Eremospatha macrocarpaet Diospyros mannii.

Dans l'extrême Sud-Ouest, la friche s'enrichiten Musanga cecropioides et Harungana madagas­cariensis et correspond approximativement auxzones les plus arrosées de la forêt à Diospyrosspp. et Mapania spp.

2 On signalera que l'étude des mauvaises herbes dansles cultures paysannes n'a été qU'esquissée mais qu'unerecherche extrêmement précise a été faite, dans le cadredu Projet, sur les plantations industrielles proches d'Abidjan(A. Kadio, 1978, 1979), qui devra être prolongée dans leSud-Ouest.

Page 176: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

Photo 15. Première année de jachère, stade sous-ligneux

Photo 16. Quatrième année de jachère, stade arbustif pionnier. Les deux photos 15 et 16ont été prises au même endroit, comme l'indique la présence du palmier à droitesur les photos

176

Page 177: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Photo 17. Peuplement d'Anthocleista nobilis présent dans la jachère, et particulièrem~nt

en bord de piste.

A Macaranga hurifolia s'associerait le Solanumverbascifolium dans les premiers stades de laforêt à Uapaca esculenta, U. guineensis etChildowia sanguinea.

Macaranga hurifolia se retrouve avec Musangacecropioides et Trema guineensis dans la régionà climax du type à Tarrietia utilis et Chryso­phyllum perpulchrum.

Trema guineensis est manifestement liéà un climat déjà plus sec et à saison plus contras­tée. 11 semble donc correspondre aux premièresformes de reconstitution de la forêt dense humidesemi-décidue."

Ces arbustes s'installent dès l'abandon dela parcelle par le cultivateur. Leur croissanceest très rapide, Macaranga et Harungana réalisentleur développement optimal vers 7 ans, les para-

177

soliers, vers 10-12 ans. La croissance des para­soliers est plus rapide et, en deux ans, ils surcimentles Macaranga et Harungana.

Ces peuplements arbustifs dépérissent entre8 et 12 ans, selon leur composition floristique(Kahn, 1982) :

Les peuplements à Macaranga et Harunganasont initialement très denses et, dès 3 ans, lacompétition intra- et interspécifique, due à latrès forte densité initiale du peuplement, entrainela mort de nombreux individus. Entre 7 et 10ans, tous les individus dépérissent et s'affaissent.Les lianes héliophiles sont présentes dès les jeunesstades, elles se développent à la faveur de l'effon­drement des arbustes et constituent d'inextrica­bles massifs qui envahissent la parcelle.

Les parasoliers sont épars et constituent

Page 178: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

des îlots parmi les peuplements de Macarangaet Harungana qu'ils surci ment précocement.Sous ces parasoliers, d'autres plantes plus scia­philes ont pu s'installer et constituer l'ébauched'un premier sous-bois. Musanga cecropioidesest une espèce plus longévive qui dure entre12 et 15 ans, et, c'est ainsi que, parmi l'i mbro­glio des massifs lianescents, résultat de l'affais­sement des Macaranga et Harungana, semaintiennent des îlots de végétation où lareconstitution se poursuit.

Notons que, contrairement à l'affaissementmassif des Macaranga et Harungana, le dépérisse­ment des parasoliers ne perturbe que très légère­ment les végétaux sous-jacents. En effet, lesparasoliers sont peu nombreux et ils dépérissentsur pied, branches et troncs se cassant par mor­ceaux. Lorsque les peuplements sont quasi­monospécifiques, essentiellement composés deMacaranga hurifolia dans la région de Taï, ilsaboutissent, vers 7-8 ans, après affaissementdes arbustes, à la formation de véritables fourrésde lianes.

La comparaison de l'évolution de peuplementsquasi-monospécifiques à des peuplements com­posés de plusieurs espèces de différentes longé­vité et vitesse de croissance montre que dansle second cas, la phase de dépérissement estplus progressive, sans affaissement massif desarbustes sur l'ensemble de la parcelle et sansl'extension corrélative des massifs lianescen ts.

Les causes du dépérissement des peuplementsarbustifs pionniers ont particulièrement étéenvisagées chez les peuplements quasi-monospé­cifiques de Macaranga hurifolia (Kahn et deNamur, 1978). Tout d'abord, ces peuplementsne régénèrent pas sous eux-mêmes et sont donccondamnés à dépérir. Ensuite, dès leur instal­lation, la densité des peuplements est très im­portante ce qui entraîne une forte compétitionentre les individus. Cette compétition est deplus accusée par la formation d'anastomosesracinaires entre les macrorhizes des Macarangahurifolia. L'utilisation de marqueurs radioactifsa permis de montrer que ces anastomoses inter­viennent dans la compétition entre les individusdans la mesure où certains arbustes draînentles racines de leurs voisins et provoquent leurdégénérescence.

Enfin, le système racinaire de cette espèceenvahit rapidement l'espace-sol et limite ainsiles possibilités d'accroissement de la rhizosphère.La stratégie d'enracinement du Macaranga huri­folia comprend deux phases complémentaires:

la production, à partir du pivot, d'axes plagio­tropes en quantité réduite (4 à 5). Ces axescroissent et éloignent les zones d'exploitationdu tronc sans qu'il y ait de nouveaux axes pro­duits;

178

la production secondaire de racines échassesqui conquièrent l'espace proximal du tronc dé­laissé et l'envahissent par une importante pro­duction de fines racines.

La production racinaire de cette espèces'avère ainsi rapidement limitée:

par le faible nombre d'axes latéraux produitsà partir du pivot;

par l'intense production racinaire des pre­mières échasses qui saturent l'espace proximaldu tronc et interdisent l'épanouissement denouvelle racine échasse.

Absence de régénération, forte compétition,saturation rapide de l'espace-sol, autant de faitsqui condamnent les peuplements arbustifs pion-­niers à dépérir.

Le stade préclimacique

Le déroulement de ce stade à particulièrementété étudié par Kahn (1982). Les jeunes arbresdu quatrième stade sont des espèces héliophiles :elles s'installent à la lumière parmi les arbustespionniers et persistent dans cette situation jus­qu'à la réalisation de la forêt climacique. Ellesont une croissance rapide, sont généralementanémochores et ne régénèrent pas sous un cou­vert végétal.

Parmi les plus fréquentes dans le Sud-Ouestivoirien, nous citerons: Fagara macrophylla,Albizia zygia, Terminalia superba, Terminaliaivorensis, Ceiba pentandra, toutes ces espècesdonnant des bois utiles. Ce sont des arbres pion­niers qui constitueront la première formationarborée à laquelle succédera la formation clima­cique. Ils sont originaires des forêts semi­décidues plus septentrionales et soumises à unesaison sèche plus marquée. A la mort des arbustespionniers, ces jeunes arbres, lorsqu'ils ne sontpas trop gravement traumatisés, vont dominerla parcelle et réaliser de grands arbres vers 40ans qui constitueront la charpente de la forêtpré-cli macique.

La mise en place des ensembles arbustifset arborescents moyens sera plus complexe etlargement conditionnée par la phase de dépéris­sement des arbustes pionniers:

à 15 ans, existence d'une discontinuité laté­rale sur l'ensemble de la parcelle avec persistancedes massifs lianescents qui résultent de la phasede dégénérescence des arbustes pionniers;

à 29 ans, la continuité latérale des niveauxinférieurs est établie sur l'ensemble de la par­celle;

Page 179: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

à 40 ans, le sous-bois est latéralement homo­gène jusqu'à la hauteur de 5 m.

Par ailleurs, à 15 ans, les Microdesmis pube­rula et Myrianthus libericus, arbustes très fré­quents au cours du stade pré-climacique,constituent des coupoles de feuillages respective­ment vers 4 et 7 m. Ces arbustes supportentde nombreuses lianes et réalisent un couvertvégétal dense qui permet l'installation des espècessciaphiles forestières, mais qui, en réduisantla lumière, empêchent le développement desjeunes arbres et arbustes sous-jacents. La situa­tion est bloquée tant que la densité de l'écranvégétal n'a pas diminuée, ce qui ne se produitque lorsque le peuplement arborescent supérieurassure un couvert suffisant pour faire régresserles lianes héliophiles ou que les arbustes meurent.Les espèces arbustives et arborescentes en atten­te peuvent alors se développer et s'épanouirà un niveau supérieur établissant un nouvel écranvégétal:

à 29 ans, un niveau supplémentaire apparaîtvers 9 m,

et à 40 ans, nous trouvons des niveaux vers7, 9, 14 et 18 m.

Et tandis que les "coupoles" s'élèvent, lesniveaux inférieurs, de l'un à l'autre, s'homogé­néisent latéralement.

Une telle évolution se poursuit jusqu'à laforêt pré-climacique. Les ensembles arbustifset arborescents moyens sont en place, la structureen coupoles étagées a disparu, la répartitionlatérale des végétaux est homogène.

L'évolution du peuplement arborescent supé­rieur qui, à 40 ans, ne constitue qu'un seul ensem­ble d'arbres, aboutit à la réalisation de deuxensembles supérieurs d'arbres. Les trois parcellesde forêt pré-climacique étudiées (de 45, 55 et60 ans) présentent une même architecture avecdeux ensembles supérieurs du présent et un en­semble d'avenir sous-jacent l . Cet ensembled'avenir est remarquable, car dans les trois par­celles, il est composé, tout com me les ensemblesdu présent qui le domine, d'espèces pré-clima­ciques.

Quel est le devenir de la forêt pré-clima­cique? Dans la parcelle de 60 ans, certainsarbres de l'ensemble supérieur du présent montrentde nets signes de dégénérescence. Il s'agit surtoutde Fagara macrophylla et Albizia zygia qui ontdes branches cassées, quelquefois même les troncs,d'où la formation de nombreuses trouées dansla parcelle.

Par ailleurs, l'ensemble arborescent supérieurcomprend également des espèces du climax quin'ont pas encore atteint leur expansion maximale

179

et qui vont remplacer les arbres dégénérescentset constituer les premiers grands arbres de laforêt reconstituée. Ainsi, la forêt pré-climaciqueva progressivement se transformer en, forêt ,Sli­macique par la cicatrisation des trouees creeespar la chute des arbres précédents et par le déve­loppement des essences forestières déjà en placeà 60 ans. L'acquisition du dynamisme de régéné­ration par chablis, lorsque les arbres du quatrièmestade com mencent à dégénérer, met fin auxprocessus de reconstitution par stades successifs.

Le blocage de la reconstitution

Les processus de reconstitution peuvent êtreconsidérablement ralentis. Kahn (1982) a analyséla dynamique qui mène à ces blocages. La com­paraison d'une parcelle de 39 ans - peuplementarborescent atteignant 20 m, peuplement arbustifne dépassant pas 7 m, présence de nombreuxmassifs lianescents - à la parcelle de 40 ans­peuplement arborescent atteignant 40 m, peuple­ment arbustif étagé entre 7, 9, 14 et 18 m ­montre bien que la reconstitution s'est dérouléedifféremment dans les deux cas (Fig. 47).

Par ailleurs, une parcelle de 19 ans, comparéeà celle de 15 ans, se distingue par la surabondancedes Myrianthus qui, par îlots, sont traumatiséset recouverts d'un inexplicable réseau lianescent.Il fallait donc s'attacher plus attentivementau rôle de ces Myrianthus.

Une parcelle de 8 ans marque l'a morce dudépérissement des arbustes pionniers. Elle estconstituée de zones dominées par des parasoliersoù les structures se mettent en place et de zonescomposées exclusivement de Macaranga et Harun­gana qui commencent à s'affaisser massivement.

Si les Myrianthus apparaissent sous les pre­mières zones, ils se développent sans perturba­tion et constituent un premier sous-bois favorisantle développement des espèces sciaphiles sous­jacentes. Par contre, s'ils sont apparus sousles peuplements à Macaranga et Harungana,ils vont subir l'affaissement de ces arbustes,en seront traumatisés, et surtout être envahispar les massifs de lianes développés lors de ladégénérescence des arbustes pionniers.

1 L'ensemble des arbres du présent est constitué desarbres ayant acquis leur plein développement, un ensembled'avenir des arbres en cours de croissance (Oldeman*, 1974).

Page 180: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

STADE

ARBUSTIF

nombre d'espècesforestières de 0 à Sm

(225m2)

• STADE PRE - CLI M ACIQUE

forêtpré-c1imacique

50

10

dépérissementdes arbustes pionniers...

! "1 " .// '0

----cl '" \ // •0./.---------

34 a 11 1519•

384039•

45 55 &0 ANS5051

1 I BLOCAGE

FIG URE 48. Variation du nombre d'espèces forestières au cours de la reconstitution (Kahn, 1982)

Lorsque ces Myrianthus dépériront à leurtour, ils permettront une nouvelle extensiondes massifs lianescents, bloquant à nouveau toutereconstitution. A 39 ans, l'état de la parcelleest, en fait, semblable à celui qui résulte dela phase de dépérissement des arbustes pionniersvers 10 ans, mais c'est ici 30 ans plus tard.

Les massifs de lianes sont l'agent directdu blocage, leur développement tient d'une partà la nature des peuplements arbustifs pionniers­tendance quasi-monospécifique, dépérissementmassif -, d'autre part à l'installation d'un peuple­ment de Myrianthus sous-jacent à ces arbustespionniers.

Des peuplements arbustifs pionniers diversi­fiés - c'est-à-dire différentes vitesses de crois-

180

sance et longévité - permettraient d'éviter unaffaissement massif sur l'ensemble de la parcelleet limiteraient corrélativement le développementdes lianes. Le rôle des MyManthus ne pourraitêtre alors que positif dans l'élaboration d'unpremier sous-bois.

Si l'on suit l'évolution du nombre des espècesforestières, lors de la phase de dépérissementdes arbustes pionniers, c'est-à-dire lors de laformation des nombreux massifs lianescents,l'on constatera une diminution de la richessefloristique; de même les parcelles de 19 à 39ans sont remarquables par leur pauvreté quimarque bien une réelle stagnation des processusde reconstitution (Fig. 48).

Page 181: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

L'accroissement de la biomasse

"L'évolution de la biomasse épigée et de sesprincipales composantes au cours de la reconsti­tution de la forêt rend assez bien compte desétapes de l'évolution floristique et structuraletelle qu'elle a été décrite précédemment"•••(Jaffré et de Namur, 1983). Cette évolutionest marquée dans un premier temps par un déve­loppement rapide et une prédominance de l'espècepionnière grégaire Macaranga hurifolia qui s'instal­le et croît rapidement après une courte phasedurant laquelle les rejets de souches constituentla part la plus importante de la biomasse. A6,5 ans le dépérissement du peuplement pionnierà Macaranga hurifolia est déjà bien amorcé,il se poursuit jusqu'à sa disparition qui est totaleà 15 ans. Corrélativement au dépérissementdu peuplement pionnier, on assiste à un dévelop­pement des espèces diverses plus longévivesque les espèces pionnières, principalement desespèces secondaires capables d'atteindre de fortsdiamètres. A 10 ans, ces dernières constituentla majeure partie de la biomasse et à 40 ansla presque totalité de celle-ci.

Les lianes, les Marantacées et les Zingibéra­cées, sont plus sujettes que les Macaranga etles espèces diverses à des fluctuations station­nelles. Néanmoins, les lianes ont au cours despremiers stades de la reconstitution une évolu­tion parallèle à celle des espèces diverses, età 10 ans leur importance diminue, ce qui semblelié au dépérissement du peuplement à Macaranga.Les Marantacées et les Zingibéracées qui consti­tuent l'élément herbacé ont une importancerelative qui décroît au fur et à mesure que lavégétation ligneuse devient plus haute et créedes conditions de moins en moins favorablesaux espèces héliophiles.

La forte prédominance puis la disparitiontotale du peuplement de Macaranga hurifoliaqui constitue l'essentiel de la biomasse épigéeau cours des premières années après l'abandonde la culture pose le problème du rôle de cetteespèce dans le processus de régénération dela forêt. Si le stade à Macaranga constitue unstade utile à la reconstitution de la fertilitedu sol et à l'installation de certaines espècesde forêts, sa disparition entre 6 et 15 ans n'enconstitue pas moins une perte de biomasse quipeut apparaître comme un frein momentanéà l'évolution progressive vers la forêt. "Dansl'hypothèse d'un accroissement linéaire jusqu'austade de maturité de la forêt, une biomasse de450 t ha- l (moyenne des chiffres donnés parHuttel, 1977, pour la forêt de Taï) serait atteinte80 années après l'abandon de la culture. Il estvraisemblable cependant qu'un fléchissementde la courbe d'accroissement de la biomasse

intervienne avant que le stade d'équilibre dela forêt ne soit atteint. Quatre-vingt annéesreprésenteraient donc le temps minimum requispour que la forêt secondaire atteigne une bio­masse de 450 t ha-l" (Jaffré et de Namur, 1982).

EVOLUTION DES SOLS

Deux types d'étude permettent d'apprécier l'évo­lution des sols sous jachère forestière: l'étudesuivie des six parcelles défrichées depuis 1978à la Station de Taï (Moreau, non publiée), d'unepart, et l'étude réalisée sous recrû forestierd'âge différent dans la région de Taï (Fritsch,1982) d'autre part. Rappelons, également, quese poursuit actuellement l'étude sur l'évolutionannuelle de la mycoflore de la litière et du solsous recrû forestier, sur les deux couples deparcelles suivies depuis 1979 à la Station de Taï.Ce travail fera l'objet d'une publication ultéri­eure en complément de l'étude consacrée à l'évo­lution sous culture traditionnelle de riz en 1979(Rambelli et al., 1983).

Etude suivie sur six parcelles depuis 1978

Après l'abandon de la culture sur les parcellesP1-P2 (bas de versant) et P4 et P5 (mi-versant)à la Station de Taï, on observe une réactivationde la production de turricules dès la premièreannée sous jachère, avec formation de grumeauxterreux d'origine biologique (surtout vers deterre) dans l'horizon superficiel dont la structuretend à s'améliorer. Le phénomène se manifes­tait cependant de façon assez irrégulière d'unendroit à l'autre et restait, dans l'ensemble,encore assez discret à la fin de l'année 1980,au moment des dernières observations sur leterrain.

Les données analytiques prolongent cellesqui ont été obtenues au cours de deux annéesde culture en 1978 et 1979 et ne portent, pourle moment, que sur les trois premières annéesde jachère forestière: 1980, 1981 et 1982; maisavec des ré5ultats encore très incomplets pourla dernière année 1982 (Fig. 45, 46 ; Tableau 38).

On peut considérer deux ensembles de donnéesselon l'évolution enregistrée au cours des pre­mières années sous jachère forestière: cellesdont les modifications résultant de la mise enculture tendent à disparaître assez rapidement,et celles dont les variations paraissent devoirsubsister au-delà des toutes premières annéessous recrû forestier.

La diminution significative du carbone totalet de l'azote total sur les parcelles P1-P2 per­siste pendant les deux premières années de

181

Page 182: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

jachère: 1980 et 1981, mais s'atténue beaucoupet n'apparaît plus significative en troisième année:1982 (Fig. 45). Ce résultat devra cependantêtre confirmé. Notons que sur les parcellesP 4-P5, /':, C total et /':, N total deviennent posi­tifs en 1981 et 1982, mais restent, toutefois,insuffisants pour être significatifs.

L'augmentation du coefficient de minéra­lisation QM, à la partie supérieure du sol surles parcelles P1-P2, persiste également de façonsignificative en 1980 et 1981. Il faut attendreles résultats ultérieurs pour savoir si les valeursde /':, QM vont se réduire en 1983, en relationavec l'évolution du carbone total.

La diminution de l'activité phosphatasiqueconserve en 1980 le même ordre de grandeurqu'en 1979 : elle est significative aux trois niveaux,mais plus importante en PÇP 5 qu'en P1-P2'/':, phosphatase diminue en deuxième année dejachère: 1981, puis encore davantagè en trois­ième année: 1982, où les valeurs n'apparaissentplus significatives.

Le rétablissement de ces caractéristiquesbiologiques paraît donc déjà bien engagé dèsla troisième année de jachère. Le retour à l'am­biance forestière et son microclimat particulier,sous l'effet d'un développement rapide de recrûforestier, et l'existence de débris végétaux encours de décomposition, troncs et gros brancha­ges, persistant encore en grande quantité surles parcelles en début de jachère, sont d'autantd'éléments susceptibles de favoriser l'améliora­tion rapide de ces paramètres. (Il n'est pas im­possible que l'évolution puisse conduire, danscertains cas, à une amélioration par rapportau niveau des valeurs existant à l'état initialen raison de conditions particulières à la jachère:accroissement des restitutions organiques, acti­vation de certaines processus biologiques•••).

L'abaissement significatif du taux d'agrégatsbenzène au niveau supérieur du sol sur les par­celles P1-P2 se maintient au cours des troisannées de jachère 1980, 1981 et 1982. Malgréune certaine reprise de l'acti vi té biologique (versde terre), les trois années de jachère ne paraissentdonc pas suffisantes pour rétablir le taux d'agré­ga ts benzène après une dégradation très modéréesous culture (variation peu significative de lastabilité structurale sur la seule considérationde l'indice d'instabilité structurale Is).

L'effet bénéfique de la culture sur brûlisvis-à-vis des bases échangeables, du taux desaturation et du pH subsiste encore de façonsignificative au cours des deux premières annéesde culture. L'augmentation de ces paramètresest plus importante sur les parcelles P1-P2 etse manifeste également en profondeur: 10-20et 20-30 cm en 1981. Le phénomène est parti­culièrement net avec le pH en troisième année

182

de jachère: 1982, dans les sols de bas de pente(P1-P2) ou /':, pH s'est réduit et n'apparaît plussignificatif sur le sol de mi-pente (P4-P5)' Lesvaleurs de pH sont alors du même niveau degrandeur sur les deux groupes de parcelles Pl - P2et P4-P5' Le sol de bas de pente (P1-P2), initia­lement le plus acide, semble donc bénéficierdavantage et pendant plus longtemps de l'effetfavorable du brûlis. Cet effet représente ungain de 1,5 unité pH à 0-10 cm, en troisièmeannée de jachère (1982) et il serait intéressantd'en connaître l'évolution ultérieure.

En ce qui concerne chacune des bases échan­geables: Ca, Mg et K, on constate d'après lesrésultats portant sur les deux premières annéesde' jachère: 1980 et 1981 (Tableau 38) que lasituation n'évolue pas de façon importante parrapport à la deuxième année de culture. Lecalcium reste l'élément dominant et représenteenviron 85 % du gain en bases échangeables auniveau 0-10 cm. C'est avec cet élément quel'enrichissement en profondeur apparaît de façonla plus nette, en 1980 et en 1981 : /':, Ca échoest significatif aux trois niveaux de profondeur:0-10, 10-20 et 20-30 cm, sur les parcelles P1-P2'

Etude du sol sous recrûs forestiers d'âge différent

Cette étude concerne sept jachères forestièresdans la région de Taï datées depuis l'abandonde la culture (0, 1, 2, 4, 7, 15, 38 ans) et deuxtémoins forestiers. Les sites se répartissentdans la région de Taï sur des sols remaniés àrecouvrement, à mi-versant sur les interfluves.Dans chaque cas, une parcelle de 625 m2 a servide support à l'étude conjointe du sol (Fritsch,1982) et de la végétation, avec déterminationde biomasse (Jaffré et de Namur, 1983). Lestravaux de Fritsch mettent notamment en lumièrel'importance de l'activité des vers de terre quiparaît être stimulée sous recrû forestier: produc­tion annuelle de rejets en surface de l'ordre de39 t ha- 1 sous forêt, 166 t ha- 1 sur recrû de1 an et 90 t ha- 1 sous celui de 7 ans. En mêmetemps, l'activité d.e fouissage modifie l'aspectde surface du sol et se répercute ainsi sur laporosité et l'état structural de l'horizon super­ficiel.

Le stock organique se trouve déjà équivalentà celui du sol forestier dans les jeunes recrûsde un et deux ans. Il apparaît même nettementsupérieur au témoin forestier dans les rejetsbiologiques du recrû de 7 ans où se produit ledépérissement du peuplement pionnier à Maca­ranga. L'humine (partie non extractible de lamatière organique) serait globalement moinsévoluée sous recrûs que sous forêt (C/N plusélevé, accroissement relatif du taux d'humine).

Page 183: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le système cultural et ses contraintes

Bases échangeables, taux de saturation etpH présentent un bilan nettement positif parrapport à la forêt, particulièrement sous le recrûd'un an et sous celui de sept ans. Par contrele stock en cations minéraux (le calcium notam­ment) apparaît sensiblement plus faible sur laparcelle de fin de culture (Po) que sous forêt.L'effet dépressif de la culture sur brûlis, quiapparaît ici, diverge donc des résultats enregis­trés sur les parcelles suivies à la Station de Taï(Moreau, 1982; Rambelli el al., 1983). C'estprobablement là une conséquence de l'inégaleefficacité du brûlage dont il a déjà été questionplus tôt, peut-être amplifié par la variabiliténaturelle entre parcelles.

En résumé, le système traditionnel de culturesur brûlis, tel qu'il est pratiqué dans la régionde Taï, n'entraîne que des modifications relative­ment modérées du sol, et celles-ci s'avèrentdans l'ensemble rapidement réversibles dès lespremières années de jachère forestière. Desarrières-effets bénéfiques de la mise en culture(complexe adsorbant, éventuellement matièreorganique) peuvent encore exister dans le solsous recrû forestier de sept ans. C'est l'âgede dépérissement de Macaranga et qui est égale­ment indiqué, par les paysans, comme un stadefavorable à une nouvelle mise en culture.

CONCLUSIONS GENERALES

Au terme de cette longue présentation du systèmecultural pratiqué généralement dans le Sud­Ouest de la Côte d'Ivoire et tout particulièrementdans la région de Taï, à partir des étudesprésentées brièvement ci-dessus, on reprendraquelques grandes conclusions:

le travail du sol, minimal, ne perturbe quetrès peu les caractéristiques physiques, chimiqueset microbiologiques du sol;

Paction du brûlis est positive quant auxbases échangeables, au taux de saturation etau pH. Cependant, l'hétérogénéité du brûlispeut amener des diminutions locales en cationsminéraux;

pour ce qui est de l'hydrodynamique superfi­cielle et l'érosion, la présence du recrû entraînetrès rapidement une protection voisine de cellede la forêt;

les différences entre les sols jouent un rôleplus important que celles entre couverts végétauxaussi différents que la forêt et la culture;

certains rongeurs, insectes et nématodespeuvent devenir des déprédateurs des culturesnon négligeables. Rongeurs et né matodes pro­viennent d'une faune forestière profondément

183

modifiée où seules les espèces capables de s'adap­ter restent en place.

Les insectes déprédateurs sont, pour unepart, fondamentalement différents de la fauneinitiale et essentiellement, pour les groupesétudiés, d'origine allochtone. Amenés vraisem­blablement par la voie aérienne, ils disparaissentprogressivement lors de la reconstitution dèsle stade sous ligneux;

les peuplements de diplopodes, plus liésaux sols et à l'humification, sont d'origine autoch­tone par appauvrisse ment et prolifération dequelques espèces;

si on peut estimer à 30-40 ans la durée néces­saire à la reconstitution d'une forêt structurale­ment identique à la forêt préexistante, il n'enreste pas moins cependant que cette nouvelleforêt présente une indéniable pauvreté floristi­que par rapport à celle-ci, en particulier avecl'absence des essences à croissance lente et dehaute valeur commerciale.

En définitive, il s'avère que le système culturalbasé sur l'essartage, que nous n'appellerons pastraditionnel puisqu'il évolue et se transformesans arrêt, présente un niveau d'équilibre etjoue un rôle de protection du milieu tout à faitsatisfaisant. Ce système peut et doit être amé­lioré : introduction de variétés nouvelles en tenantle plus grand compte des désirs et besoins desutilisateurs, conditions de brûlage, protectioncontre les grands déprédateurs, techniques d'abat­tage, pratique de la transformation en verger,etc.

La jachère, partie intégrante et fondamentalede la pratique de l'essartage, reste cependantpeu utilisée et peu valorisée pour d'autres usages.Une perspective intéressante est l'aménagementsilvicole de ces jachères pour la reconductionde leurs potentiali tés économiques (Kahn, 1982).Pour ce faire, il faut:

d'une part, connaître et exploiter le compor­tement naturel des essences utiles au cours dela reconstitution;

d'autre part, connaître les mécanismes dela reconstitution afin de pouvoir utiliser au mieuxles conditions naturelles pour un enrichissementdes recrûs.

C'est ainsi que Ceiba pentandra (fromager),Fagara macrophylla (bahé), Terminalia superba(fraké) et Canarium schweinfurthii (aiélé) s'instal­lent et se développent dans le stade arbustifen situation héliophile puis surciment les arbustespionniers pour former le peuplement arborescentsupérieur du stade préclimacique (Fig. 49). Ladurée de vie de ces espèces est différente, Fagara.macrophylla disparaît vers 50 ans alors que les

Page 184: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

2 3

Forêt

3

IVStade pré-cl imacique

IIIStade arbustif1

11

Il 1Siode sous-ligneux 1

1

1 1Stade

herbacé I.~±~_ 1

~ 1 =rt....LJ.:É. 1 ----'------..J"'---------..J_-"---_121 23213 3

1 Ceiba pentondrc 2 Terminalia superbe 3 Piptodeniastrum africanum

FIGURE 49. Comportement naturel de trois essences commerciales (d'après Carrero, 1979)

danstrois autres peuvent persister longtempsla forêt climacique.

Le dabéma, Piptadeniastrum africanum,germe et s'accroît sous un couvert déjà formé.Il n'atteint la voûte que lorsque les premiersarbres héliophiles disparaissent.

Combretodendron africanum, l'abalé, fré­quent dans les stades de reconstitution, présenteun tempérament sciaphile, une croissance lenteet n'atteint son plein épanouissement que tar­divement (Carrero, 1979).

BIBLIOGRAPHIE

BACHELIER, G., 1978. La faune des sols, son écologie et sonaction. Initiations/documentations techniques. ORSTOM,Paris.

BELLIER, L., 1964. Le problème des rongeurs dans les planta­tions de palmiers à huile. ORSTOM, Adiopodoumé, mul­tigr. 6 p.

BUFFARD-MOREL, J.; ZADI KOUBI, P., 1979. Les ignameset leur place dans les cultures vivrières du Sud-Ouest dela Côte d'Ivoire. ORSTOM, Adiopodoumé, multigr. 10 p.

FORTUNER, R., 1981. Les nématodes associés au riz pluvialen Côte d'Ivoire. Agronomie tropicale, 36, p. 70-77.

GA UTUN, J.C., 1977. Contribution à l'étude des rongeursnuisibles aux palmeraies industrielles de la zone fores­tière ivoirienne. Rapport de convention. ORSTOM, Adio­podoumé et SODEPALM, Vol. 1 : 69 p. multigr., Vol. II :51 p. (annexes).

HENIN, S.; GRAS, R.; MONNIER, G., 1969. Le profil cul­tural, 2ème éd., Masson, Paris.

LEVIEUX, J., 1967. Recherches écologiques dans la savanede Lamto : données préliminaires sur le peuplement enfourmis terricoles. La Terre et la Vie, 21, p. 259-296.

LEVIEUX, J., 1972. Le microclimat des nids et des aires dechasse de Camponotus acvapimensis Mayr. Insectes so­ciaux, 19(2), p. 63-79.

LEVIEUX, J., 1973. Etude du peuplement en fourmis ter­ricoles d'une savane pré-forestière de Côte d'lvoire.Rev.Ecol. Biol. Sol, 10(3), p. 379-428.

OLDEMAN, R.A.A., 1974. L'architecture de la forêt guya-naise. Mémoire ORSTOM, 73. ORSTOM, Paris.

ROSEVEAR, D.R., 1969. The rodents of West Africa. Trus­tees of the British Museum (Natural History), London.

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se référera à la liste des publications du Projeten fin d'ouvrage (Annexe 2).

184

Page 185: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Structure quantitative, architecture et dynamique de la forêtFrancis Kahn

La forêt du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire avaitfait l'objet de quelques études générales, fIoris­tiques, écologiques (Guillaumet*, 1967) et struc­turales (Huttel*, 1975). La plupart des étudesdont les résultats sont brièvement rapportéesci-dessous ont été menées dans le bassin de Taï,à la Station écologique.

STRUCTURE QUANTITATIVE: SURFACETERRIERE, BIOMASSE, DENSITE

L'ensemble des travaux effectués ont pris com mebase d'échantillonnage la toposéquence. Lesrelevés sont disposés selon les situations topogra­phiques suivantes: sommet, haut de pente, mi­pente, bas de pente et bas-fond. Le Tableau40 présente les principales données de la structuredu peuplement arborescent forestier en fonctiondes différents sites topographiques (Huttel, 1977).Comme le souligne l'auteur, "la disparité deschiffres par site est très grande". Les différencesne sont significatives qu'entre les valeurs obtenuessur les hauts de pente et les bas de pente etcelles du bas-fond. De ces valeurs, la biomassedéduite (poids sec) varie de 350 à 560 t ha-l.

La densité est d'environ 260 arbres ha- l

et varie peu à l'intérieur d'un même site topo­graphique. Les différences entre les sites sontpeu sensibles et on note que les densités sontsignificativement plus fortes dans les deux posi­tions topographiques extrêmes, sommets et bas­fonds, et dans les sites de fortes pentes. Ledénombrement des lianes a été effectué surplusieurs séquences topographiques. Les lianesinférieures à 1 m représentent, en nombre d'in­dividus, 36 % de l'ensemble de la végétation,elles passent par un minimum jusqu'à 15 m puisatteignent 30 % au-dessus (de Namur, 1980).La photo 18 présente un aspect du sous-boisà partir d'un layon.

"DYNAMISME INTERNE"

Sous la rubrique "Dynamisme interne" sont inclu­ses des opérations de recherche articulées dansune constante relation système-individu. Dansun premier temps, le cadre architectural estétabli: sa variation dans l'espace en fonctiondu cycle silvigénétique (répartition et quantifi­cation des chablis) et de la topographie; sonévolution au cours du temps par l'analyse desprocessus de cicatrisation du chablis. Dans unsecond temps, des études plus écophysiologiquesdéfinissent le tempérament des essences utiles,d'autres analysent le comportement des lianesqui peuvent interférer sur le développementdes essences arborées.

ARCHITECTURE DE LA VEGETATION:METHODE DE DESCRIPTION 1\1ORPHO­STR UCTURALE

La forêt est une mosaïque architecturale oùchaque not correspond à un stade de cicatrisa­tion du chablis (Oldeman*, 1974a et b, 1978,1979; Whitmore*, 1975, 1978 ; Torquebiau, 1981,etc.). La méthode morpho-structurale s'appliqueà deux volumes de végétation (Richard et al,1977; Kahn, 1978a; Kahn et Guillaumet, 1978 ;Beaudou et al.*, 1978; Guillaumet et Kahn,1979 ; Kahn, 1983) :

le volume de végétation dont l'architectureest latéralement homogène: le phytoplexion.La dimension latérale de ce volume diminuede la voûte forestière au sous-bois. La photo19 montre un aspect de la répartition des volumesvégétaux. Selon les forêts primaires, l'architecturedu niveau arborescent supérieur est homogènesur 600 à 1200 m 2 • Dans les forêts secondaires,au stade pré-c1imacique, le niveau arborescentest latéralement homogène sur l'ensemble de

185

Page 186: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

Photo 18. Aspect de l'intérieur de la forêt à partir d'un layondestiné à l'observation des singes

la parcelle; la mort des premiers arbres hétéro­généisera l'architecture, plusieurs phytoplexionspourront être distingués et décrits. Le phyto­plexion peut être défini comme l'architectureà un moment donné de la silvigénèse;

l'unité de stratification du phytoplexion:l'hoplexol l qui sera le volume observé.

1 On doit ce terme à J-F. Richard (Richard et aIl *,1977).Il présente l'intérêt d'unifier les terminologies se rapportantaux "couches" décrites dans les diverses disciplines et desouligner ainsi l'organisation fondamentale du paysage.Qu'il s'agisse du pédologue (les horizons), du botaniste (les

186

La stratification "à l'échelle du phytoplexion"est démontrée par de nombreux travaux: Oldeman*(1974a)* en dévoile la signification silvigénétique,plus largement exposée par Hallé et al. * (1978) ;Kira* (1978; arrive aux mêmes conclusions, Kahn(1983) réconcilie les partisans de la strate etses opposants dans la compréhension du cyclesilvigénétique et de ses manifestations archi­tecturales.

L'hoplexol peut être présenté corn me unniveau horizontal et continu du phytoplexion,d'épaisseur variable de la litière à la voûte, quisera identifié par la nature et l'importance spa­tiale des éléments végétaux le constituant (Fig.50). Nous ne présenterons pas ici les élémentsvégétaux retenus pour la description et renvoyonsà Kahn et Guillaumet, 1978 ; Guillaumet et Kahn,1979. Chaque hoplexol fait l'objet de trois diag­noses:

diagnose majeure: reconnaissance et quanti­fication relative des éléments végétaux;

diagnose structurale: description de la distri­bution des éléments végétaux au sein de l'hoplexol(établie par le rapport des volumes végétauxau volume de l'air ambiant) ;

diagnose complémentaire: relevé floristiqueau sein de chaque hoplexol, données quantitatives•••

Cette méthode appliquée en forêt de Taïa permis de vérifier et d'affiner le modèle fores­tier défini par Oldeman* (1974) en Guyane fran­çaise (Vooren, 1979; Bourgeron et Guillaumet,1982; Kahn, 1983).

PARTIE SOUTERRAINE DES VEGETATIONS

Une nette relation existe entre les comportementsracinaires et aériens des arbres et arbustes fores­tiers (Kahn, 1978c, 1980). Une deuxième vaguede production d'axes racinaires plagiotropes

strates, interstrates, sous-strates), voire le géologue, ilsprocèdent tous, en décrivant le milieu naturel, par observa­tion de couches horizontales. Cette méthode morphostruc­turale a été conçue dans le cadre d'une réflexion pluridisci­plinaire (Beaudou et al., 1978).

Page 187: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Structure quantitative, architecture et dynamique de la forêt

TABLEAU 40. Structure du peuplement arborescent (arbres de circonférence supérieure à 10 cm)

Hauts de Milieu de Bas deForteSommets

pente pente pente Bas-fondspente

Arbres de plus de 40 cmde circonférence

Surface inventoriée (ha) 2,02 2,05 2,06 2,02 2,16 0,81

Densité (arbres ha- 1)253moyenne 269 250 252 252 293

extrêmes 235-318 224-284 224-301 208-299 222-404 199-320

Aire basa 1e (mL ha-ilmoyenne 26,0 29,3 30,7 27,8 27,4 27,6extrêmes 19,6-36,2 22,8-36,6 18,1-52,8 19,1-41,0 13,6-34,8 22,6-30,7

Arbres de plus de 120 cmde circonférence (%)

moyenne 16,5 22 21,5 24 20,5 19extrêmes 12-25 15-34 14-27 16-33 11-31 9-27

Cubage de bois fort(m 3 ha-il

414 513moyenne 539 662 538 394extrêmes 265-764 328-1301 270-746 206-617 95-782 378-680

Nombre d'espèces parrelevé (0,25 ha)

28 19 25moyenne 22 26 26extrêmes 18-24 23-30 21-30 24-31 13-25 21-28

Arbres de 11 à 40 cmde circonférence

Surface inventoriée (are) * 42-54 44-53 45-54 45-53 45-54 21-27

Densité moyenne par are 17,5 19,6 18,6 18,7 17,9 20,1

Aire basale (m 2 ha-Il 5,0 5,9 5,2 5,4 5,6 5,1

Nombre moyen d'espèces31 31 31 33par relevé (600 m 2 ) 33 38

* Le premier chiffre correspond aux surfaces dans lesquelles on a compté les individus de 11 à 40 cm de cir-conférence ; 1e deuxième chiffre comprend ces premières surfaces plus quelques carrés dans lesquels on n'ainventorié que 1es individus de 21 à 40 cm de circonférence.

semble liée à la "réitération adaptative" del'appareil aenen. L'absence de cette deuxièmevague racinaire et des processus réitéra tifs aériens,constatée chez certaines espèces arborescenteset arbustives, conduit à plusieurs considérationssur l'évolution des plantes ligneuses au sein dumassif forestier.

187

VARIATIONS LIEES A LA TOPOSEQUENCE

Vooren (I979) souligne que les sites de som metsupportent généralement une forêt moins déve­loppée dans l'espace. L'analyse des toposéquencesdes zones de Tai' et Grabo (Kahn, 1983) montreque les parcelles de som met ne présentent, au-

Page 188: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

Photo 19. La réparti tion des volumes végétaux, feuillage ettroncs, vus du sommet de la tour de 24 m

dessous de 15 m, qu'un à deux ensembles du présenttandis que les parcelles sur pente en ont générale­ment trois. Cette architecture plus perturbéevers le sommet doit être reliée à la nature plusgra villonnaire du sol, à des enracinements plussuperficiels et à une plus grande exposition auvent.

AUTOREGENERATION PAR CHABLIS

La dynamique d'autorégénération de l'écosystèmeforestier par chute naturelle des arbres et cica­trisa tion de la trouée créée est le système derégénération de la forêt et, en ce sens, constitueune voie de recherches prioritaires: d'une partconnaître les modalités de cicatrisation des trouéesnaturelles, d'autre part comprendre le comporte­ment des différentes essences qui s'y développent,

évaluer leur démographie, enfin, étudier la répar­tition des chablis en forêt et tenter d'établirune typologie des différents chablis.

Vooren (1979) décompose les processus decicatrisation de la trouée naturelle due à la chutenaturelle des arbres selon quatre stades.

Le stade chablis

Il existe une grande variété de chablis dépendantdu nombre et des di mensions des arbres complè­tement ou partiellement tombés. En forêt deTaï, la surface des chablis rencontrés n'excèdepas 0,2 ha.

La population de jeunes individus dans ceschablis est principalement formée par des espècesayant germé sous forêt antérieurement et redé­marrant avec l'amélioration des conditions decroissance - changement qualitatif et quanti­tatif de la lumière, augmentation de la tempé­rature, diminution temporaire de la compétition

i' racina ire.•• - ainsi que de semis qui se sont instal­8 lés après la formation du chablis. En plus d'une~ croissance rapide au centre du chablis, les individus2 en bordure, sortant de la pénombre, profitent

également de l'amélioration de ces conditions.Les petits chablis causés par la chute d'une grandebranche se referment uniquement par la crois­sance de cès bordur'es.

Le stade transitoire 1

La population de jeunes individus du stade pré­cédent forme une couche dense d'arbres en coursde croissance qui s'élèvent vigoureusement. Unecompétition sévère existe entre les individus.Nombreux sont ceux qui sont surcimés et la gammedes différentes hauteurs 'augmente, ce qui cor­respond à un accroissement en épaisseur de lamasse feuillée. En-dessous, les arbustes ontdéjà atteint leur hauteur définitive et s'étendent

188

Page 189: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Structure quantitative, architecture et dynamique de la forêt

FIGURE 50. Représentation schématique d'un phytoplexion (Kahn, 1983)

189

Page 190: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

_--4

100 ans30 ans10 ans3 ansl an

~_---3

l mois 4 mois

30

10

60

III

~:0;Ec:::

'"

FIGURE 51. Les quatre groupes d'espèces "potentiellement dominantes" dans la régénération d'une trouée naturelleen forêt (se référer au texte pour explications) (Alexandre, 1976)

latéralement. Au sol s'installe un tapis de plan­tules et jeunes plants.

Le stade transitoire 2

Les espèces arborescentes poursuivent leur crois­sance et prennent leur place définitive dansla voûte. Elles dominent des arbres de plus faibletaille qui tendent déjà vers leur expansion maxi­male. De haut en bas, on trouve alors des indivi­dus de plus en plus développées parmi lesquelsse faufilent des arbres d'avenir.

Le stade en équilibre

Il se caractérise par la présence, aux différentsniveaux, d'individus présentant leur expansionmaximale.

L'auteur donne la surface relative occupéepar chaque stade de régénération:

stade chablis 12,5 ± 5,2 %stade transitoire 1 22,6 ± 6,5 %stade transitoire 2 35,2 ± 7,3 %stade en équilibre 29,7 ± 7,0 %

Il apparaît que seules les variationstopographiques majeures sont susceptibles d'induiredes changements notables dans la fréquencedes chablis. La composition floristique de ceux­ci est indépendante de leur taille; mais les espècespionnières seront d'autant plus nombreuses quela trouée est plus grande (Bonnis, 1980).

L'essentiel de la flore des chablis est consti­tué des éléments préexistants (Nierstrasz, 1975).Alexandre (1977b) propose un modèle si mplifiéde régénération des espèces "potentiellementdominantes", applicable dès l'ouverture du milieu.Il distingue quatre groupes principaux (Fig. 51)

190

Page 191: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Structure quantitative, architecture et dynamique de la forêt

Mons

SOins

2ans1 00Temps

OL---__----r -.-- " ----"

3 ans 4 ans

50

% de jeunes plants100

LE TEMPERAMENT DES ESPECESET LEUR ECOLOGIE

FIGURE 52. Le devenir des germinations en forêt(A lexandre, 1982a)

elle est caractéristique d'une forêt dense humideà saison sèche marquée, présente "une rythmiciténette mais complexe" (Alexandre, 1980a).

La majorité des graines ne présentent pasde dormance et trouvent dans le sous-bois, cons­tamment humide de la forêt dense, des condi­tions favorables à la germination. On y trouveaussi bien des plantules d'espèces peu adaptéesau manque de lumière, et qui disparaîtront aussi­tôt leurs réserves épuisées, que des petits plantsd'espèces mieux adaptées. Ceux-ci, profitantsans doute des taches de soleil, parviendrontà un bilan photosynthétique positif qui leur per­mettront de survivre et parfois même de croîtresensible ment. La moindre agression leur estcependant fatale et la mortalité est donc élevée.

La composition floristique de la régénéra­tion dépend du hasard des fructifications, dela dispersion et de la mortalité, elle est en per­pétuel changement (Fig. 52). Mais, une foisencore, si le microclimat est modifié à l'occasiond'un chablis la croissance peut être très rapide,jusqu'à plus de 2 m en un an. "Ces performancesétonnantes" soulèvent d'importants problèmesphysiologiques dont la connaissance est indis­pensable à une silviculture rationnelle (Alexandre,1982aetd).

Briceno (1979) a tout particulièrement considéréle tempérament du niangon (Tarrietia utilis).L'auteur analyse la répartition de l'espèce enfonction de la topographie, et pour chaque indivi-

LA REGENERATION DES ESPECES

Vooren (1979) montre que le nombre moyen dessemis dans les premiers stades de cicatrisationdes chablis, immédiatement après la formationde la trouée, ne diffère pas du nombre moyenqui se trouve en forêt intacte et équilibrée. Parailleurs, il ne semble pas y avoir de corréla­tion entre la composition floristique de la voûteforestière et les ensembles de germinations sous­jacents. Ceci est à mettre en relation avecles différentes modes de dissémination des fruitset graines. Alexandre (1978a) souligne l'impor­tance des éléphants dans la dissémination desgraines, surtout de grosse taille, des espècesde la voûte dans le massif forestier de Taï.

Ces espèces zoochores fructifient préféren­tiellement en décembre-janvier, c'est-à-direen saison sèche. Les maximums de fructifica­tion des espèces anémochores et autochoresse trouvent décalés en fin ou en début de saisonsèche. Il s'ensuit que la fructification globaledes arbres forestiers dans la région de Taï, si

dont il precIse un certain nombre de caractéris­tiques: herbacées héliophiles (1), arbustes hélio­philes (2), arbres héliophiles (3) et arbres sciaphiles(4).

Selon l'état de perturbation du sol, la longueurde la phase sciaphile précédente et la compositionde la végétation précédente, l'un ou l'autre pourradominer:

la trouée de chablis n'affecte ni le sol, niles plantules: les plantules du quatrième groupe,arbres sciaphiles, démarrent et gagnent la voûte;

le sol est décapé superficiellement, les racinesdisparaissent, la végétation précédem ment enplace était ancienne: le groupe 2, arbustes hélio­philes, s'installe et domine temporairement,le groupe des arbres héliophiles s'installe enmême temps puis dominera tardivement;

le sol est entièrement décapé: le groupedes grands arbres héliophiles s'installe et domine.

Les espèces végétales apparaissant dansces trouées naturelles, comme dans les champsabandonnés, proviennent de trois sources: lepotentiel végétatif, ensemble des individus déjàprésents avant la perturbation, le potentiel séminalédaphique, constitué à partir des graines viablesprésentes dans le sol avant ladite perturbation,leur germination est conditionnée par le change­ment du spectre lumineux et l'état pédologique,enfin le potentiel advectif ou ensemble des dias­pores venues de l'extérieur dépendant, pour unepart, de l'environnement floristique (Alexandre,1979).

191

Page 192: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

5 6 7 8

~l, __---J MILIEU PENTEl rilnL-- _

~=6 ---,n---,-_---,[h.,__---In..........LSO_M_M_E_T

6 9 10 11 15

+++

++

+111

1IlIV

1. Les essences totalement héliophiles.Il. Les essences qui germent à l'ombre mais

croissent et se développent à la lumière.1Il. Les essences qui ne sont héliophiles que

dans la phase ultime de leur développement.IV. Les essences totalement sciaphiles.

Une fois achevée la phase de germinationoù le jeune plant a une existence relativementautonome, généralement sciaphile, c'est l'énergielumineuse qui devient le facteur primordial.Alexandre (1982) au terme d'une étude sur l'é­clairement relatif diffus du sous-bois, l'importan­ce des taches de lumière, leur évolution au coursde la journée et l'interaction entre la structuredu couvert et la pénétration de la lumière, con­clut que l'éclairement diffus relatif dans le visi­ble, voisin de 0,5 %, suggère que "...les espècesqui survivent longtemps dans ces conditions sontsans doute à l'extrême limite des possibilitésd'adaptation physiologique". La croissance nepeut être reprise que par rupture de la structureforestière supérieure.

Parallèlement à l'étude du tempéramentdes essences arborescentes, l'écologie des formeslianescentes a été abordée par de Namur (1979).Le rôle des lianes est important dans la cicatri­sation des trouées forestières naturelles et ellesinterfèrent sur le développement des arbres.La très grande majorité des grandes lianes lig­neuses présentent un stade jeune sciaphile.

En fonction de la lumière, Vooren (1979)distingue quatre tempéraments:

germination croissance développement

BAS PENTE

1314

4 5 6 7

2345678

6

42-

30

8:2~L--- r-fl,~PENTE

du décrit la végétation sus-jacente. La fréquenceet la distribution en classes de diamètres sontrégulières dans les différentes situations topo­graphiques. Mais l'abondance et la densité aug­mentent du sommet au bas-fond où la distributionverticale, en classe de hauteur, est plus régulière(Fig. 53, Photo 20). L'analyse architecturalede la végétation montre cependant que la lumière,plus que la position topographique, est le facteurdéterminant, cette espèce se situant de préférenceet se développant dans des zones bien éclairées.

BAS FOND

20

18

16

Vl 14:::>~ 12.~ 10"U

.c 8"U 6

Q)

...0 4-

~ 2Z L..JL..JL..JL..JL....II--I---l---l---l---l---l---l---l.--L--L--L--L-.J

2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 1314 15 16 17 18Numéro des hoplexols

FIGURE 53. Répartition du niangon (Tarrieta utilis (Sprague)Sprague) en {onction de la topographie et situa­tion dans les hoplexols (Briceno, 1979)

EXPLOITATION ET AMENAGEMENT

On a vu au fil des lignes précédentes se dégagerquelques voies qui devraient intéresser la recher­che et l'application en silviculture: utilisationdes chablis, création de trouées artificielles,aménagement facilitant la réception d'énergielumineuse dans le sous-bois pour favoriser lacroissance des espèces latentes.

Selon Alexandre et Gnésio Téhé (1981) l'ex­ploitation forestière modifie essentiellementl'éclairement et la surface du sol. Telle qu'elleest pratiquée actuellement, elle ne perturberaitpas assez le milieu pour qu'il puisse s'en suivreune véritable régénération des arbres d'intérêtcommercial. Un enrichissement par implanta­tions de jeunes sujets dans les recrûs de 3 ans,

192

Page 193: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Structure quantitative, architecture et dynamique de la forêt

le long des pistes forestières et chemins de tirage,dans l'espace structuralement vacant sous leniveau foliaire supérieur, est possible. Il serait"..•plus intéressant si le volume de bois exploitéatteignait le chiffre potentiel et souhaitablede 50 m 3 ha- l (dix fois le volume moyen actuel)".

~of-, Photo 20. Végétation caractéristique oes bas fonds. On notera~ l'abondance des Marantaceae et la présence d'un jeune palmie!"2 du genre Raphia

BIBLIOGRAPHIE

BEAUDOU, A.G.; BLIC, Ph. de ; CHATELIN, J. ;COLLINET, J. ; FILLERON, J-C. ; GUILLAUMET, J-L. ;KAHN, F. ; KOLI BI, Z. ; RICHARD, J-F., 1978. Re-

cherche d'un langage transdisciplinaire pour l'étude dumilieu naturel. Travaux et Documents 91, ORSTOM,Paris.

GUILLAUMET, J-L., 1967. Recherches sur la végétation et laflore du Bas-Cavally (Côte d'Ivoire). Mémoire ORSTOM,20 ORSTOM, Pâris.

HALLE, F. ; OLDEMAN, R.A.A. ; TOMLINSON, P.B., 1978.Tro[;>ical trees and forest. An architectural analysis.Springer Verlag, Berlin, Heidelberg, New York.

HUTTEL, Ch., 1975. Recherches sur l'écosystème de la forêtsubéquatoriale de basse Côte d'Ivoire. Ill. Inventaire etstructure de la végétation ligneuse. La Terre et la Vie,29, p. 178-191.

KIRA, T., 1978. Community architecture and organic matterdynamics in tropical lowland rain forest of SoutheastAsia, with special reference to Pasoh forest, West Malay­sia. ln: Tomlinson and Zimmerman (Eds) Tropical treesand living systems, p. 561-590. Cambridge Univ. Press,Cambridge.

OLDEMAN, R.A.A., 1974a. L'architecture de la forêt guya-naise. Mémoire ORSTOM, 73. ORSTOM, Paris.

OLDEMAN, R.A.A., 1974b. Ecotopes des arbres et gradientsécologiques verticaux en forêt guyanaise. La Terre et laVie, 28, p. 487-520.

OLDEMAN, R.A.A., 1978. Architecture and energy exchangeof dicotyledonous trees in the forest. ln: Tomlinson andZimmerman (Eds) Tropical trees as living systems, p.535­560, Cambridge Univ. Press, Cambridge.

OLDEMAN, H.A.A., 1979. Quelques aspects quantifiables del'arborigenèse et de la siivigenèse. Oecol. Plant., 14(3),p. 289-312.

TORQUEBlAU, E., 1981. Analyse architecturale de la forêtde Los Tuxtlas (Veracruz) Mexique. Thèse, USTL, Mont­pellier.

WHITMORE, T.C., 1975. Tropical rain forests of the Far East.Clarendon Press, Oxford.

WHITMORE, T.C., 1978. Gaps in the canopy. ln: Tomlinsonand Zimmerman (Eds), Tropical trees as living systems,p. 639-655. Cambridge Univ. Press, Cambridge.

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se référera à la liste des publications du Projeten fin d'ouvrage (Annexe 2).

193

Page 194: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 195: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

La santé humaineRoger Cordellier

Lors de l'élaboration du projet, devant les risquessanitaires soulevés par l'ouverture et le peuple­ment d'un espace forestier jusqu'alors sous peuplé,il est apparu rapidement nécessaire d'incluredes recherches relatives à la santé humaine.Tous les problèmes abordés dans cette étudeprésentent un intérêt direct en santé rurale,immédiatement en ce qui concerne les frontspionniers, et à plus longue portée pour toutesles zones de forêt en voie de peuplement.

Sept opérations avaient été définies. Uneopération relative à l'étude des chimpanzés estplus du ressort de la "Protection de la nature"et apparaîtra au chapitre qui suit. Trois opéra­tions isolées relatives aux vecteurs et hôtesintermédiaires divers d'endémies tropicales,aux ectoparasites et aux serpents. Elles n'ontfait l'objet que d'enquêtes limitées dans le tempset dans l'espace. Les trois autres, simiens (autresque chimpanzés) et prosimiens, arthropodes vec­teurs d'arboviroses, virus, avaient pour but depréciser les modalités du maintien et de la circu­lation du virus amaril parmi les populations devertébrés sauvages, dans une zone où les possi­bilités de transmission sont permanentes. Cesopérations, et pour une petite partie l'opération"Ectoparasites" constituent un ensemble cohérent,véritablement multidisciplinaire et pluriorgani­sationnel, ayant pour but une étude approfondiedu cycle silvatique de la fièvre jaune, accessoire­ment d'autres arbovirus, et l'incidence de l'an­thropisation sur ces cycles.

Le groupe des opérations "Fièvre jaune"présente en outre un intérêt fondamental, avecapplication immédiate, puisqu'il se propose l'étu­de des mécanismes permettant le maintien duvirus amaril dans sa phase de transmission inter­animale et partant, la pérennité de la fièvrejaune, ses émergences endémiques et ses épi­démies.

L'approche des problèmes zoologiques, lors­qu'ils ne se limitent pas à de simples inventaires,nécessite toujours beaucoup de temps et donc

de patience. Les études de comportement etde relations avec le milieu imposent un suiviminimum sur deux années consécutives, et unegrande fréquence des enquêtes. En forêt, milieusans frontières internes nettes, les populationsanimales, vertébrés ou invertébrés, sont diluéesen raison des multiples p.ossibilités de déplace­ments qui s'offrent à elles. Il en résulte un risqueaccru de ne pas rencontrer les populations recher­chées, et les ayant détectées de n'avoir à étudierqu'un nombre réduit d'individus.

Ceci étant dit, et sans mettre en jeu lesdifficultés indépendantes du milieu silvatique,on comprendra mieux que six ans après le coupd'envoi des études les plus anciennes, on ne puisseencore proposer que des résultats partiels.

Il n'est bien évidem ment pas question derépéter ici les résultats consignés dans les diversdocuments parus ou à paraître sous la signaturedes équipes de recherches qui ont contribuéou contribuent encore à la réalisation du Program­me. Nous nous bornerons à mettre en évidenceles points forts de ces données ainsi que, éven­tuellement, leur incidence pratique.

VECTEURS ET ROTÉS INTERMEDIAIRESDIVERS D'ENDEMIES TROPICALES

Cette opération est elle-même un agrégat d'ac­tions de recherches sans liaisons entre elles,mis à part le fait d'avoir été conduites par deschercheurs de l'OCCGE, pour la plupart entomo­logistes médicaux de l'ORSTOM.

Une série d'enquêtes sur les simulies etl'onchocercose a été effectuée par l'IRTO (OCCGE)de Bouaké, au cours des années 1979 et 1980(Traoré et Phillipon, 1980 ; Traoré et Hébrard,1981). C. Laveissière et J-P. Kienou du centreMuraz (OCCGE) de Bobo-Dioulasso ont effectuéen 1979 une enquête sur les glossines et la try­panosomiase (1979). La même année, B. Sellinet E. Simonkovich sont venus du Centre Muraz

195

Page 196: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

pour situer le problème des mollusques hôtesintermédiaires des schistosomes en forêt primaire(1980). Enfin et toujours en 1979, J-P. Hervy,C. Ouedraogo et J. Brengues ont effectué unemission préliminaire, à partir du Centre Muraz,concernant la transmission du paludisme et lesanophèles en forêt primaire et sur un front pion­nier (1980).

Toutes ces enquêtes concluent, sans excep­tion, à la nécessité d'une surveillance de la défo­restation, en raison de la très forte augmentationdes risques de transmission de ces diverses mala­dies qu'elle entraîne. Ce risque semble particu­lièrement élevé en ce qui concerne le paludismecar l'anthropisation favorise la proliférationdes vecteurs et en même temps accroît l'im­portance du réservoir de parasites.

Les auteurs des rapports souhaitent touspouvoir approfondir leurs études préliminaires,mais ne disposent pas des moyens pour le faire,à l'exception de S. Traoré qui a pu développersont étude sur les simulies et l'onchocercose,sans toutefois pouvoir couvrir, et de loin, leprogramme proposé dans le rapport préliminaire.

ECTOPARASITES par Jean-François Graf

Durant la première partie de ce travail, desprélèvements mensuels de tiques ont été effec­tués dans la région de Taï, notamment dans lesvillages de l'axe Guiglo-Djiroutou. Parallèlement,les micromammifères capturés dans le cadrede l'opération "Rongeurs forestiers terrestres"ont été examinés et déparasités. Enfin, diffé­rents chercheurs rattachés au Projet Taï ontcontribué à la bonne marche de cette opérationen fournissant régulièrement les tiques qu'ilsa ttrapaient lors de leurs séjours en brousse.Ce premier travail a permis d'établir une listeprovisoire des principales espèces de tiques dela région, comprenant des données sur leur écolo­gie, leur abondance, les fluctuations saisonnièresde leurs populations et leur spécificité parasi­taire. La systématique de certains genres (notam­ment Rhipicephalus) devra être complétée. Lestiques des micromammifères, pratiquement toutesimmatures, n'ont pour la plupart pu êtredéterminées que jusqu'au genre.

La deuxième partie du travail porte surla recherche de microorganismes pathogènes(en particulier rickettsies et babésies) transmispar les tiques de ce pays. Cette recherche estréalisée en relation avec l'Institut de Zoologiede l'Université de Neuchâtel. Une rickettsiedu groupe R. conorii, déjà signalée en Côte d'Ivoire(Graf et al.*, 1981), a été trouvée sur des Am­blyomma variegatum de bétail de la région deGuiglo (Graf et al., 1981).

196

Enfin a débuté, en décembre 1979, en colla­boration avec l'Institut Pasteur de Côte d'Ivoire,un programme sur le rôle des tiques dans la trans­mission d'arboviroses en Côte d'Ivoire, programmepartiellement réalisé dans la région de Taï.

LISTE DES TIQUES DE LA REGIONDE TAI

Genre Amblyomma

Ce genre comprend six espèces en Côte d'Ivoire,dont trois ont été récoltées dans la région deTaï dans le cadre de ce travail. Deux autresespèces font partie normalement de la faunelocale, mais n'ont pu être récoltées.

Amblyomma compressum. Cette espèce estspécifique des pangolins, se fixant sous les écail­les de ces animaux. Les trois stades se trouventsur les mêmes hôtes. Tous les pangolins examinés(19), appartenant à deux espèces L'Janis longi­caudata et Manis tricuspis), étaient parasitéspar cette tique. Notons la capture d'une tiqueadulte à l'état libre, sur des broussailles en forêt.

Amblyomma paulopunctatum et A. splendidum.Ces deux espèces, quoique faisant normalementpartie de la faune de cette région, n'ont pasété retrouvées lors des captures. Ceci est àrattacher au fait que leurs hôtes (respectivementles suidés sauvages et le buffle nain) n'ont étéque peu ou pas du tout examinés dans ce travail.

Amblyomma tholloni. L'hôte normal des adultesde cette espèce est l'éléphant. Un éléphanteauprovenant de la région de Lozoua et examinéau zoo d'Abidjan en portait plus de 200. Lesimmatures, et surtout les larves, s'attaquentvolontiers à l'hom me. La plupart des chercheurstravaillant en forêt en sont régulièrement para­sités, et parfois massivement. Au dire des habi­tants des villages de la région, ceux-ci sontégalement fréquem ment attaqués par cette es­pèce lorsqu'ils se rendent "en brousse". Desadultes, et parfois des nymphes, se rencontrentà l'état libre sur des herbes et dans des brous­sailles.

Notons ici qu'une autre espèce de ce genre,Amblyomma nuttali, avait été signalée dansla région de Taï, et notam ment sur l'homme(Aeschlimann*, 1967). Cette espèce n'a pasété retrouvée en forêt pour l'instant (mais unepartie de la collection n'est pas encore déter­minée).

Amblyomma variegatum. Il s'agit de la tiquedu bétail la plus abondante de Côte d'Ivoire.Cette espèce vit normalement en savane, maispénètre en zone forestière avec le bétail et s'y

Page 197: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

La santé humaine

établit. Elle a été trouvée jusqu'au sud de Zagné,et elle est assez abondante dans la région deGuiglo.

Cette espèce peut jouer un certain rôlesur le plan économique, d'une part en infestantmassivement les bovins, et d'autre part en leurtransmettant une rickettsie (du groupe R. conorii).Cette rickettsie a été trouvée chez des Ambly­omma variegatum de nombre de régions de Côted'Ivoire et en particulier dans la région de Guiglo.

Genre Boophilus

Ce genre, spécifique du bétail, est représentéen Côte d'Ivoire par deux espèces, B. annula tuset B. geigyi. Elles se gorgent sur les mêmeshôtes et ont des exigences écologiques apparem­ment semblables. Alors que vers 1960, ces deuxespèces étaient aussi fréquentes l'une que l'autre(Aeschliman*, 1967), il apparaît maintenantque B. geigyi domine très largement l'espècevoisine. La distinction entre les deux espècesn'a pas été faite pour ce travail.

Après Ambylomma variegatum, les repré­sentants du genre Boophilus constituent le deux­ième groupe important de tiques de bétail. CommeA. variegatum, ce sont des tiques de savanes,ayant pénétré en zone forestière avec le bétail,et elles ont également été trouvées jusqu'ausud de Zagné. Dans le nord de la Côte d'Ivoire,les espèces de ce genre transmettent une babésieau bétail (Graf et al., 1981). Cette babésien'a pas été trouvée pour l'instant dans le sud­ouest du pays.

Genre Dermacentor

Ce genre est représenté en Côte d'Ivoire parune seule espèce, Dermacentor circumguttatus,connue pour parasiter uniquement l'éléphant,du moins à l'état adulte. Les captures font ce­pendant état de deux mâles trouvés sur l'homme,en forêt à proximité de Tai'.

Genre Haemaphysalis

Ce genre est composé de cinq espèces ivoIrIen­nes, dont trois récoltées dans la région de Tai'.

Haemaphysalis hoodi. Cette espèce, qui para­sitait primitivement les Galliformes sauvageset les Cuculiformes, est actuellement complète­ment "domestiquée" dans le sud-ouest du payset parasite presque exclusivement les poules

197

dans les villages. Pratiquement toutes les poulesexaminées dans tous les villages de Guiglo àDjiroutou sont parasitées par cette tique, etce tout au long de l'année. Si l'on compte géné­ralement quelques dizaines de ce parasite parhôte, des infestations de plusieurs centainesde tiques par poule ne sont pas rares.

Aux dires des villageois, ces tiques provoquentde fréquentes maladies (probablement surtoutanémies) et une certaine mortalité chez la vol­laille. Les tiques gorgées se détachent de nuit,dans les poulaillers, et c'est là qu'elles séjournent(dans les fissures des murs et surtout dans lestoits), le temps d'effectuer leur mue ou de pon­dre. On constate que dans les villages ne possédantpas de poulaillers, ou utilisant des poulaillerssurélevés au plancher à claire-voie, les infesta­tions sont nettement moins abondantes que dansles villages à poulaillers traditionnels, accoléscontre les cases. Lorsque les poules couventà l'intérieur des cases, on trouve fréquemmentdes tiques gorgées ou fraî'chement muées surle sol ou dans les fissures des murs de celles­ci. Parmi les autres hôtes de cette espèce, onpeut citer le chien, certains micromammifèreset l'homme. Le chien et l'homme s'infestentprobablement en vivant à proximité de la volail­le dans certaines cases, mais restent des hôtesaccidentels. Cinq cas d'infestations pour le chienet trois pour l'homme, tous par des tiques adultesfurent rencontrés.

Des micromammifères appartenant auxgenres Leggada, Praomys, Hylomyscus et Mala­comys ont été troùvés porteur d'immatures etd'adultes de cette tique à deux reprises.

Haemaphysalis leachii. On distingue générale­ment deux sous-espèces, H. leachii leachii etH. leachii muhsami, dont le statut systématiquen'est pas établi avec certitude, et qui ne sontpas différenciées dans le cadre de cette liste.H. leachii fait partie des tiques "domestiquées"et se gorge principalement sur le chien. Prati­quement tous les chiens examinés sont parasitéspar cette espèce, mais elle n'est jamais trèsabondante. Il n'a jamais été trouvé plus d'unedizaine de tiques par hôte. Les immatures segorgent surtout sur micromammifères, et parmieux principalement sur Leggada, Praomys etHylomyscus.

Parmi les autres hôtes des adultes, le mouton,la chèvre naine et l'aulacode (Thryonomys swin­derianus) constituent des hôtes nouveaux pourla Côte d'Ivoire, ainsi que l'homme, trouvé para­sité à quatre reprises.

Haemaphysalis parmata. Il s'agit d'une espèceparticulière aux forêts humides, se gorgeantprincipalement sur les antilopes forestières.Cette tique a été collectée à plusieurs reprises

Page 198: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : r'echerche et aménagement

TABLEAU 41. Liste des espèces de serpents collectés

Espèces

TYPHLOPIDAE

Typh lops punctatus liberiensis

LEPTOTYPHLOPIDAE

Leptotyphlops spp.

BOIDAE

Ca labaria reinhardti

COLUBRIDAE (aglyphes)

Natrix anoscopusNatriciteres variegatusGonionotophis k 1ingiBothrophtha 1mus 1ineatusBoaedon virgatumLycophidion spp.Hormonatus modestusMehe lya poensisPhilothamnus semivariegatus nitidusPhi lothamnus heterodermus heterodermusPhi lothamnus heterodermus carinatusGastropyxis smaragdinaHapsidophrys 1ineatusThrasops occidenta lisRhamnophis aethiopicaGrayia smithi

COLUBRIDAE (opisthoglyphes)

Boiga b landingiBoiga pulverulentaDipsadoboa duchesnei guineensisDipsadoboa spp.The lotomis kirt landiMiodon acanthiasPo lemon barthiApara llactus modestus

ELAPIDAE

Naja me lanD leucaDendroaspis viridis

ATRACTASPIDAE

Atractaspis corpulenta

VIPERIDAE

Atheris chloroechisBitis gabonicaCausus lichtensteiniCausus macu latus

TOTAL

198

Forêt

11

61111

151312

113

104122

131

1312

211

42

105

14

157

Clairière

3

12

2

12

11

26

Page 199: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

La santé humaine

par les villageois, provenant d'antilopes donton n'a généralement pas pu connaître l'espèceavec certitude. En outre, la tique a été trouvéeà une reprise sur un mouton, sur un chien etsur un hom me.

(probablement Cercocèbe) et le rat de Gambie(Cricetomys gambianus). L'espèce est égalementsignalée sur le daman des arbres (Dendrohyraxdorsalis ou arboreus) et sur les petites antilopesforestières.

Genre Ixodes Genre Rhipicephalus

PEUPLEMENT DE PORET

Il n'est pas possible de comparer les effectifsdes différentes espèces, les récoltes n'étantpas le résultat de prospections systématiques.La richesse qualitative de ce premier inventaire(29 genres) est caractéristique d'un peuplementde forêt. Cette liste n'est pas exhaustive, en

En conclusion, on notera l'existence de 18espèces de tiques, appartenant à six genres,dont sept sont anthropophiles sans cependantqu'ait été isolé de virus ayant un intérêt enpathologie humaine. Plusieurs espèces de tiquessont des parasites habituels des animaux domes­tiques.

Cette opération n'a véritablement fonctionnéqu'au cours de l'année 1978, son responsable,B. Courtois, Institut Pasteur de Côte d'Ivoire,n'étant plus présent dès la fin du premier semes­tre 1979. Cette trop courte activité a cependantpermis d'établir un premier inventaire des 183individus dont 157 proviennent de forêt et 26des clairières de Taï et Pauléoula (Tableau 41).Sur 33 espèces, huit présentent un danger pourl'homme.

par Bernard CourtoisSERPENTS

La systématique de ce genre présente encorede grandes difficultés, et la détermination dela collection est en cours. Une seule espèceest vraiment abondante et importante, il s'agitde Rhipicephalus sanguineus. C'est la tique laplus répandue de la Côte d'Ivoire, et qui para­site presque exclusivement le chien. L'espècepeut être considérée comme "domestiquée" etne se rencontre pratiquement que dans les vil­lages ou les campements. A l'état libre, ellevit surtout dans les cases et les maisons, qu'ellepeut envahir massivement.

Les animaux domestiques vivant au contactavec les chiens, ainsi que les animaux sauvageset en captivité peuvent être occasionnellementparasités par cette espèce. Des cas de parasitis­me humain ont été rencontré régulièrementtout au long de ce travail.

Ce genre regroupe principalement des tiquesforestières et sur les sept espèces recenséesen Côte d'Ivoire, six ont été trouvées dans larégion de Taï lors des captures. Les immaturesdes différentes espèces de ce genre se nourissentprincipalement sur micromammifères.

Ixodes aulacodi. L'hôte spécifique des adultesest l'aulacode (Thryonorr:ys swinderianus). Lesimmatures se rencontrent surtout sur les insecti­vores du genre Crocidura. L'espèce a été cap­turée une fois dans la région de Taï sur unaulacode.

Ixodes cumulatimpunctatus. Cette espèce a ététrouvée à quatre reprises sur des aulacodes,et à notre connaissance, il s'agit là d'un nouvelhôte pour cette espèce. Les autres capturesproviennent d'un potamochère (Potamochoerusporcus), de céphalophes non identifiées, d'unchien et d'un homme. La tique a égalementété trouvée une fois à l'état libre.

Ixodes more li. Espèce propre à la Côte d'Ivoire,cette tique se gorge principalement sur les petitesantilopes forestières. Elle a été capturée à sixreprises durant ce travail, toujours sur un hôtenaturel (Cephalophus dorsalis, C. niger et antilopesnon identifiées).

Ixodes muniensis. C'est une espèce aux hôtesnombreux et variés, que l'on peut rencontreraussi bien sur des ruminants que sur certainscarnivores. Dans le cadre de cet inventaire,elle fut trouvée sur un aulacode (nouvel hôtepour l'espèce), sur des céphalophes non identi­fiées, et dans les villages sur mouton et sur chien.

Ixodes oldi. A l'origine tique de petits carnivores,cette espèce semble bien s'adapter aux chienset aux chats dans les villages. Elle ne fut capturéequ'à deux reprises, sur un aulacode et sur unchien.

I:xodes rasus. Il s'agit de l'espèce d'I:xodes laplus fréquente rencontrée lors des captures,de celle également qui offre l'éventail d'hôtesle plus large. Dans les villages, on la trouvesur les chiens et parfois sur les poules (nouvelhôte pour l'espèce), occasionnellement sur leschèvres naines, ainsi que sur l'homme. Parmiles hôtes sauvages, on citera la mangouste brune(Crossarchus obscurus), un singe non identifié

199

Page 200: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

particulier nous pouvons noter l'absence du BoidaePython sebae et du Viperidae Bitis nasicomiscertainement présents dans cette région.

Quelques remarques peuvent être faitesquant à la présence de certaines espèces:

Causus lichtensteini. La récolte de 14 exemplaires,tous capturés au hasard des rencontres, est sansnul doute le résultat le plus important. Cetteespèce, jusqu'alors considérée comme rare enAfrique occidentale, semble au contraire êtrerelativement abondante en forêt primaire (10 %des récoltes). Son absence en zone de clairièreet forêt dégradée démontre sont caractère stric­tement sciaphile.Gonionotophis klingi. Cette espèce, égalementpeu mentionnée en Afrique occidentale, a faitl'objet de recherches particulières après la dé­couverte, par hasard, de son biotope: intérieurdes troncs d'arbres en décomposition.

D'un point de vue systématique, la présencedes deux sous-espèces de Philothamnus hetero­dermus dans un même biotope, permet de mettreen doute la valeur de la division subspécifiqueétablie sur le nombre de rangées d'écailles dorsa­les (15 pour la sous-espèce type, 13 pour la sous­espèce Carinatus).

De même, les exemplaires d'Atractaspiscorpulenta, autre espèce rare en Afrique occi­dentale, ne justifient pas la distinction d'unesous-espèce différente de la sous-espèce nomina­tive corpulenta à laquelle il paraît plus prudentde les rattacher en l'absence d'exemplaires plusnombreux (Courtois, 1979).

PEUPLEMENT DE CLAlRIERES

L'échantillon recueilli, 26 exemplaires, ne permetpas de faire de nombreuses observations. Toute­fois il apporte un fait intéressant: la présenceet abondance de Causus maculatus comparéesà son absence en forêt. Cette donnée apporteun élément en faveur de l'origine savanicolede l'espèce, de son incroyable pouvoir de pénétra­tion à l'intérieur du bloc forestier par l'intermé­diaire des clairières artificielles (débroussementen bordure des pistes, villages, etc.) et son in­féodation aux milieux anthropisés.

"PIEVRE JAUNE"

L'importance de la dynamique de cette circulationdu virus amaril ne fait aucun doute si l'on saitqu'elle conditionne, dans le nouveau schémaépidémiologique de la fièvre jaune, l'apparitionde cas endémiques et secondairement d'épidé­mies, dans les zones de savanes humides, semi­humides et sèches.

200

La chaîne de transmission étant constituéepar des moustiques d'une part, et des singes d'autrepart, dans l'état actuel de nos connaissances,les laboratoires d'Entomologie médicale (ORSTOM/IPC!) et de Mammalogie (ORSTOM) sont inter­venus dans leurs domaines respectifs pour déter­miner, par des études écologiques, où ?, quand?,et comment?, quels moustiques? rencontraientet piquaient quels singes?

La présence effective du virus amaril n'étaitpas nécessaire pour mener à bien cette étude,mais la collaboration des arbovirologistes (IPC!)devait permettre de le mettre éventuellementen évidence, en cas de présence, aussi bien chezles singes que chez les moustiques. Dans la pra­tique, pour l'instant, seuls ces derniers ont faitl'objet du criblage virologique, avec quelqueslots de tiques fournis par l'opération "Ectopara­sites".

Comme il a été précisé dans la présentationgénérale, le recueil de données sur le comporte­ment des espèces animales forestières pose desproblèmes méthodologiques complexes dont lasolution souvent onéreuse constitue un freinindiscutable aux recherches. C'est ainsi quela nécessité de quadriller un vaste secteur parun layonnage serré permettant de suivre lesbandes de singes, et l'acquisition du matérielde télédétection, ont assez sensiblement retardéla mise en œuvre des études sur les simiens.De même, c'est l'impérieuse nécessité d'unetour atteignant au moins le som met de la canopée,dent la non édification a bloqué les recherchesentomologiques, qui a conduit à "bricoler" unéchafaudage pour atteindre, dans une étude pré­liminaire, la strate infra-canopéenne à 24 mètresde hauteur.

Indirectement, les virologistes sont soumisaux contraintes qui pèsent sur les opérationsde recherche écologique, dans la mesure où ilsne traitent que du matériel récolté dans le cadrede celles-ci.

MAMMALOGIE

La première préoccupation a bien entendu consistéà établir un inventaire faunistique des si miensde la forêt de Taï.

Outre le chi mpanzé, Pan troglodytes verus,huit espèces ont été observées dent sept sontprésentes en permanence sur le site d'étude prin­cipal; il s'agit de Cercocebus atys, Cercopithecuscampbelli, C. diana, C. nictitans, C. petaurista,Colobus badius, C. polykomos, C. verus.

En ce qui concerne les Cercopithécidés,les premières questions auxquelles il était urgEntd'apporter des réponses concernaient d'une partl'abondance relative des bandes des différentes

Page 201: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

La santé humaine

espèces et d'autre part les relations que celles­ci ont entr'elles ainsi que, le projet de référenceprécisant l'étude de l'évolution sous l'influencede l'hom me, les variations de ces deux para mètresen fonction des différents degrés d'anthropisation.Cette première étude était un préliminaire néces­saire pour permettre de déterminer quelles étaientles espèces présentes, et parmi celles-ci quellesétaient les plus importantes, soit par leur abond­ance, soit par l'étendue de leur répartition. Lesrésultats de cette étude (Galat, 1978 ; Galat­Luong et Galat, 1978) nous ont montré que Coloèusbadius et Cercopithecus diana étaient à la foisparmi les espèces les plus fréquem mentrencontrées en forêt prim9ire et les premièresà disparaître au contact de l'hom me. Le secondfait important mis en évidence au cours de cetteétude est que toutes les espèces, et ce dans 80 %des troupes, vivent en association plurispécifiquefavorisant ainsi la circulation du virus amaril(voir aussi Galat-Luong, 1979).

Le deuxième point a été la mesure de cer­tains paramètres écologiques jouant un rôle dansle cycle de la fièvre jaune et dont les principauxsont les effectifs des bandes et les taux d'i mma­tures (le taux d'immunité des jeunes étant apriori moins élevé que celui des adultes). L'étudeWalat, 1979) a mis deux points en évidence:

Colobus badius et Cercocebus spp. sontles seules espèces à vivre en bandes très nom­breuses de plus de 50 individus, alors que lesautres espèces ont généralement moins de 20membres au sein de leur bande;

le taux d'immatures apparaît plus élevéchez les cercopithèques que chez les colobes,facteur qui viendrait s'opposer, du point de vuede la transmission des virus, à la plus longuevirémie des colobes.

La troisième étape porte sur l'étude desfacteurs spatio-temporels favorisant les contactsavec les vecteurs arthropodes: hauteur et locali­sation dans la végétation, horaires des phasesde repos propices aux piqûres d'insectes, choixdes micro-milieux et proximité du feuillage.La récolte des données pour cette étude de longuehaleine implique plusieurs cycles annuels. Unpremier échantillon de 35.000 observations ex­trait des données recueillies depuis 1977 a étéanalysé (Galat, 1983 ; Galat-Luong, 1983).

La quatrième phase prévoit l'étude des dé­placements et des domaines vitaux, ainsi quela caractérisation des sites de sommeil nocturne(Fig. 54). Cette partie du travail est à la foisl'une des plus importantes et des plus difficiles.Les relevés effectués par observation directedepuis le début de l'étude, s'ils donnent des in­dications précieuses, manquent toutefois defiabilité. L'échantillon est de plus trop hétéro-

20\

gène pour une exploitation statistique. Seulesles techniques de radio-pistage, en facilitantle repérage d'animaux munis de radio-émetteursminiaturisés et dont l'identité ne saurait être miseen doute, permettraient, par triangulation àl'aide d'au moins deux récepteurs, d'obtenir aisé­ment des relevés de déplacements simultanésà la fois précis et en quantité permettant l'ana­lyse statistique.

Les difficultés à surmonter pour termineravec succès la quatrième et dernière phase del'étude entreprise, à savoir les modalités du dé­placement, les domaines vitaux, les sites desommeil nocturne, et l'influence de l'anthropisa­tion sur ces caractéristiques, sont suffisammentgrandes pour interdire le moindre pronostic surles chances de succès à court terme. Aucunedonnée concernant cet aspect des recherchesne peut actuellement être vulgarisée.

Des éléments actuellement disponibles,il ressort que trois espèces risquent de présenterun intérêt particulier dans l'étude de l'épidémio­logie de la fIèvre jaune, en raison de leur fortepropension à se maintenir à proximité des vil­lages et des cultures, montrant par là qu'ellesredoutent moins que les autres espèces la proxi­mité de l'homme et son action destructrice dumilieu naturel. Nous verrons que leur présenceen lisières est, au regard de l'écologie des vec­teurs, du plus haut intérêt.

ENTOMOLOGIE MEDICALE

Aucune étude bio-écologique des vecteurs poten­tiels de fièvre jaune en forêt primaire intacten'avait précédé celle entreprise à Tai, en 1978.En revanche, nombreuses sont les données quise rapportent à la forêt seconda risée ou à laforêt pri maire anthropisée.

Dans un premier temps il est apparu néces­saire d'êtalonner la forêt primaire, au niveaudu sol, dans l'échelle des risques de contamina­tion amarile. Dans le milieu naturel intact,ce risque est proche de zéro, quelques très raresfemelles d'Aedes africanus étant occasionnelle­ment récoltées au cours de la période crépus­culaire, sur l'hom me. Pour cette zone, ce sontles lisières forêt/cultures qui présentent le risquele moins faible et qui cumulent la présence d'A.africanus et d'A. aegypti. Par rapport au risqueencouru en forêt secondaire, déjà faible, celuique l'homme court en pénétrant en forêt primaireest plus de cent fois plus faible (Cordellier etAkoli Ba, 1981).

Les études réalisées antérieurement, notam­ment en Ouganda et au Cameroun, ayant montréque les vecteurs de fièvre jaune tels qu'A. afri­canus effectuaient des migrations verticales,

Page 202: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

ESPËCES PRËSENCE DANSAIRE DU EFFECTIFL ES HAUTES STRA TESDOMAINE VITAL (ha) DES BANDES

Le Colabe Bai::~:'.:'::~:;.;:::',,:(Calabus badius) 92%

La Diane 90(Cercapithecus diana)

..:::......Le Magistrat 85(Calabus palykamas)

t-'CIl

'"I:l...,0'-.Le Calobe de Van BenedenCIl75No(Colobus verus)....,0~:La Mone 68 ...,(Cercopithecus campbell;)CIl();:;rIVCIl0 ...,()

IV Le Pétauriste 63 ;:;r(Cercopithecus petaurista)CIl

CIlNo

~ 0

a~ ~ ;3~r. CIl,r'g :::J

,~ 0ri...CO

1 CIl'Cre;3G"r;~~'f:CIl""'5,\,,~,:::J'if.~ ~ NoW

~C';!~

Le Mangabey 24 .'~(Cercocebus atys)

(: '.::::::'::. ':~ :,:: 36

.;,,"

FIGURE 54. Stratification, domaines vitaux et effectifs des bandes de Cercopithécidés de Taï(G. Calot, 1983; A. Ca/at-Luong, 1983).

Page 203: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Photo 21. La tour de 24 mètres destinée spécialement à l'étudedes moutiques vecteurs de la fièvre jaune

l'essentiel des recherches s'est porté sur uneétude comparative de l'agressivité des mousti­ques pour l'homme, en montant du sol vers lacanopée. Comme le singe est actuellement leseul vertébré connu comme relais du virus amaril,une étude parallèle et simultanée a porté surle contact singes/moustiques.

Malheureusement, la tour de 55 mètresqui nous aurait permis d'effectuer intégralementcette étude n'est toujours pas édifiée, et ce n'estqu'une tour de 24 mètres (Photo 21), arrivantjuste sous la canopée, qui a permis de récolterdes données préliminaires, certes importantes,mais qui ne permettent pas de conclure.

Trois espèces d'Aedes piquent l'homme etle singe de manière notable, au-dessus de 16mètres (Photos 22 et 23). Entre ce niveau et24 mètres, l'accroissement de l'agressivité esttrès net. Ces espèces sont, par ordre d'i mpor­tance décroissante, A. africanus, A. tayloh etA. flavicollis. Ces deux dernières appartiennentau même sous-genre, mais tandis qu'A. flavicollisse trouve bien dans son biotope, A. taylori passaitjusqu'alors pour une espèce des savanes semi­humides.

Bien que plus petits que l'homme, les singesattirent deux à cinq fois plus de femelles deces espèces que l'homme, entre 16 et 24 mètres.

L'activité de ces moustiques se concentre, comme~ au niveau du sol, au cours de la période crépus­G culaire. Les variations saisonnières de la dynami­0:: que des populations sont, contrairement au clichéQ communément admis pour la région forestière

équatoriale, très nettes, et présentent deux ac­centuations environ un mois après les périodesde fortes précipitations.

Afin de ne pas courir le risque de laisserpa~ser une circulation virale, amarile ou autre,entretenue par des vecteurs non pri ma tophiles,de très nombreuses captures au filet ont étépratiquées dans la végétation basse. Tous lesmoustiques, femelles ou mâles, récoltés parquelque méthode que ce soit, ont été remis auxvirologistes pour criblage.

Il est certain que, si une émergence endémi­que de fièvre jaune paraît hautement improbableen région forestière primaire, et une épidémieimpensable, l'entretien d'une circulation silvati­que inter-simienne est parfaitement compatibleavec les niveaux d'agressivité observés à 24 mètresde hauteur. Il n'est hélas pas possible de fairela moindre supposition au sujet de l'évolutionde cette agressivité aux divers niveau de la strateintra-canopéenne. De ce fait, la confrontationdes résultats éco-éthologiques relatifs aux ver­tébrés et aux invertébrés impliqués dans la chaîne

203

Page 204: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

Photo 22. Des singes destinés à attirer les moustiques sontplacés dans des cages puis disposés à différentsniveaux de la tour

Photo 23. Les moustiques prenant leur repas de sang sur lesinge sont collectés par aspiration pour étudeultérieure

204

Page 205: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

La santé huma ine

de transmission épizootique de la fièvre jaunedemeure pour l'instant impossible.

VIROLOGIE

En trois années, les virologistes n'ont isolé que15 souches d'arbovirus. Aucune souche de virusamaril, mais quatre souches se rapportant àtrois virus nouveaux, montrent une fois encorela difficulté du travail en milieu forestier, etle degré de méconnaissance où il est demeuré.Il eut fallu un miracle pour que, sur une tourérigée presque au hasard, soit interceptée unecirculation erratique d'un virus bien précis. Cemiracle ne s'est pas produit.

En revanche, le virus ORUNGO, qui se mani­feste souvent en même temps que celui de lafièvre jaune, a pu être isolé d'un lot d'Aedesgr. taylori. Le fait qu'il s'agisse de mâles permetde conforter la thèse de la transmission verticalepar la voie transovarienne chez les moustiques,de virus divers. On notera enfin que d'un lotd'A. a{ricanus capturé à 24 mètres de hauteur,a été isolé le virus ZIKA, du groupe des Flavi­virus, comme la fièvre jaune, mais plus fréquem­ment rencontré que ce dernier. Ce même virusa également été isolé d'un lot d'Aedes non pri­matophiles capturés au niveau du sol.

Ce sous-programme qui a mobilisé, ou mobiliseencore, les énergies de 12 chercheurs et techni­ciens, dans une étroi te collaboration pluridisci­plinaire et multiorganisme, a déjà apporté uneimportante moisson de données scientifiquesde toute première importance (Lhuillier et al.,1982).

Nos regrets n'en sont que plus grands dene pouvoir les valoriser sur le plan des applicationsen santé rurale, débordant largement le cadreforestier du Projet Taï, et même celui de la

seule Côte d'Ivoire, du fait de l'absence de tour,qui aurait permis une étude complète d'un profilforestier.

CONCLUSIONS

La rupture des équilibres naturels dont l'hom mes'est fait une spécialité, peut avoir des conséquen­ces dans bien des domaines. En recherchantles effets de la pénétration de l'hom me en forêtprimaire intacte, le Programme "Populationsanimales et Santé" se proposait de situer lesrisques en matière de Santé, non seulement pourles populations immédiatement au contact desrégions fraî'chement transformées, mais aussipour celles qui vivent dans des zones où le dé­boisement est sans cesse poursuivi. Dans laquasi-totalité des situations abordées, il a fallucommencer par étudier le milieu naturel intact,tant il est vrai que très peu d'études n'y ont jamaisété faites.

Malgré les difficultés inhérentes au milieului-même, et particulièrement son caractère"diluant" des populations animales, aussi bieninvertébrés que vertébrés, et les problèmes deméthodologie parfois ardus, toutes les opérationsont apporté leur contingent de données souventoriginales, parfois inattendues, qui permettenttoutes de conclure au danger d'une déforestationincontrôlée. Pour toutes les endémies qui ontfait l'objet d'une étude à Tai, qu'elle soit préli­minaire, partieIJe ou complète, il ne fait aucundoute que la transformation du milieu forestiernaturel favorise le développement des populationsde vecteurs, et augmente le risque de mise encontact de ces vecteurs avec l'homme. N'aurait­il apporté que cette certitude, ce Progra mmedu Projet Tai aurait prouvé sa nécessité.

BIBLIOGRAPHIE

AESCHLIMANN, A., 1967. Biologie et écologie des tiques deCôte d'Ivoire. Acta Tropica, 24(4), p. 281-405.

GRAF, J-F.; PETER, O. ; BURGDORFER, W.; AESCH­LIMAN, A., 1981. Présence d'une Rickettsie du groupe"spotted fever" chez Amblyomma variegatum de Côted'Ivoire. Ann. Univ. Abidjan, Série C, 17, p. 135-140.

205

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se référera à la liste des publications du Projeten fin d'ouvrage (Annexe 2).

Page 206: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 207: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le parc national et la protection de la natureJean-Louis Guillaumet

Christophe Boesch

A la suite d'une série d'avatars successifs, essen­tiellement des réductions de superficie, le ParcNational se trouve confirmé en 1972 sur 3.300 km 2 •

En 1978, il fut érigé en Réserve de la Biosphèrepuis inscrit sur la liste du Patrimoine interna­tional en 1982.

Cette vaste région entre Sassandra et Cavallyétait, avant les événements que nous avonsrappelées dans les chapitres précédents et quien amenèrent l'ouverture puis la colonisation,les parcours de chasse et de cueillette des com­munautés villageoises installéE's sur son pourtour.Elle fut habitée sporadiquement il n'y a que quel­ques dizaines d'années, les traces en sont €ncorevisibles, et parcourue par de nombreuses voiesreliant les différents centres de peuplement.Depuis le début du siècle, les villages furentregroupés à la périphérie du massif et les voiesde com muni cation anciennes abandonnées auprofit des routes nouvelles.

C'est dire que jusque vers 1965 environ,le massif forestier entre Sassandra et Cavallyétait pratiquement désert et abritait une fauneprotégée naturellement des convoitises exté­rieures.

Comme nous l'avons annoncé plus tôt danscet ouvrage, l'exposé suivant est essentiellementbasé sur les travaux de la Mission de Coopéra­tion technique de l'Allemagne fédérale auprèsdu Ministère des Eaux et Forêts de la Côte d'Ivoire(Fgu-Kronberg*, 1979) avant qu'elle soit intégréeau Projet Tai avec pour objectif d'étudier lespeuplements de grands animaux, et sur l'opéra­tion "Chimpanzés" menée par un chercheur duFonds National de la Recherche de Suisse.

ORIGINALITE FLORISTIQUE ETFAUNISTIQUE DU PARC NATIONALDE TAT

FLORE

Pour ce qui est de la flore du Parc National,nous renverrons à Aké Assi et Pfeffer* (1975).

207

Nous rappellerons simplement que le Parc re­couvre une partie du centre d'endémisme etrefuge de cette extrémité du' massif forestierhumide africain et qu'il recélerait plus de 80de ces espèces "sassandriennes" (Guillaumet*,1967) et enfin qu'il est le dernier bastion de forêtde l'Ouest africain. Essentiellement recouvertde forêt dense humide sempervirente, le Parcn'en offre pas moins quelques groupements as­sociés, marécageux, riverains et rupicoles.

"Le maintien de milieux floristiques parti­culiers tels que celui de la région de Tai'est non seulement fondamentalement im­portant pour la science mais peut avoirégale ment des conséquences matériellesdirectes. Nous expliciterons à l'aide dedeux exemples qui concernent la zone quenous avons étudiée: Au sein du Parc Nationalde Tai', il existe quatre espèces de caféierssauvages, à savoir: Coffea canephora, Coffealiberica, Coffea rupestris et Coffea humilis.Cette dernière espèce est même endémiquepour la zone et a ici, entre autres, ses der­nières implantations. Il n'est pas possibled'évaluer l'importance de ce potentiel géné­tique en espèces de caféiers sauvages entant que ressource pour la future culturede caféiers. On pourrait établir presqueà volonté de longues listes de plantes dela région de Tai' qui pourraient jouer unrôle à l'avenir, par exemple, dans la méde­cine: la phamacologie ivoirienne autochtonetraditionnelle qui est extrêmement dévelop­pée a pleinement conscience de ces faits.Nous citerons comme second exemple directles bois d'œuvre du groupe des Caesalpinia­cées Gilbertiodendron: une espèce endémi­que pour la région de Tai' (Gilbertiodendrontaiense Aubréville) jouit sous la dénomina­tion commerciale de "limbali" d'une voguecroissante en tant que bois d'œuvre; il s'agitde l'une des rares essences qui résistentpresque absolument aux termites pour laconstruction dans les régions tropicales.L'utilisation du Gilbertiodendron est forte-

Page 208: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEAU 42. Liste des espèces de mammifères dont la présence a été constatée ou signalée dans le Parc National de Tar

RONGEURSEcureuil à pattes rouges

11 Ecureuil géant 1

1

1

*1

Ecureuil des palmiers 1

!1 Anomalure de Fraser* 1

Anomalure de1

Pel ,1

Beechcroft~1

Anomalure de,ii

Rat de Gambie 1

Aulacode1Porc-épie !

Athérure i

CARNIVORESRatelLoutre à cou tacheté~

Loutre à joues blanchesNandinie

l'Vo00

Nom scientifique

PRIMATESGalago demidovii demidoviiPerodicticus potto pottoCercopithecus petauristabuettikoferiCercopithecus campbellicampbelliCercopithecus diana dianaCercopithecus nictitansmartiniCercocebus torquatus atysColobus verusColobus badius badiusColobus polykomospolykomosPan troglodytes verus

PHOLIIXJTAManis giganteaManis tricuspis tricuspis

Manis tetradactyla

RODENTIAFUnisciurus pyrrhopusleonisProtoxerus stangeritemminckiiEpixerus ebii jonesiAnomalurus derbianusAnomalurus peli(anzembergeri)Anomalurops beechcroftilanigerCricetomys eminiThrionomys swinderianusHystrix cris tataAtherurus africanus

CARNIVORAMellivora capensis cottoniLutra maculicollismaculicollisAonyx capensis capensisNandinia binotata binotata

Nom français

PRIMATESGalago de Demidoff%Potto de Bosman*Cercopithèque pétauriste

Cercopithèque mone

Cercopithèque dianeCercopithèque hocheur

Cercocèbe à collier blancColobe de van BenedenColobe baiColobe magistrat

Chimpanzé

PHOLIDOTESPangolin géantPangolin à écailles tri­cuspidesPangolin à longue queue

Nom scientifique

Poiana richardsoniliberiensisGenetta pardinavi verra ci vetta ci vettaCrossarchus obscurusAtilax paludinosus plutoHerpestes ichneumonHerpestes sanguineus

1

Felis aurata celidogaster1 Panthera paz dus leopardus

PROBOSCIDEALoxodonta africana cyclotis

HYRACOIDEADendrohyrax dorsalissylvestris

SIRENIATrichecus senegalensis

ARTIODACTYLAPotamochoerus porcus porcusHylochoerus meinertzhageniivoriensisChoeropsis liberiensisliberiensisHyemoschus aquaticusNeotragus pygmaeusTragelaphus scriptusscriptusLimnotragus spekei gratusBoocercus eurycerosCephalophus maxwelliliberiensisCephalophus zebraCephalophus dorsalisdorsalisCephalophus nigerCephalophus sylvicultorsylvicultorCephalophus jentinkiCephalophus ogilbyiSyncerus caffer nanus

Nom français

Poianex

d" ~Genet te par ~ne

CivetteMangouste bruneMangouste des maraisMangouste ichneumon (7)Mangouste rouge (7)Chat doréPanthère

PROBOSCIDIENSEléryhant de forêt

HYRACOIDESDaman d'arbres

SIRENIENSLamantin (7)

ARTIODACTYLESPotamochèreHylochère

Hippopotame nain

Chevrotain aquatiqueAntilope royaleGuib harnaché (7)

Sitatunga (7)BongoCéphalophe de Maxwell

Céphalophe zébréCéphalophe à bandedorsale noireCéphalophe noirCéphalophe à dos jaune

Céphalophe de JentinkCéphalophe d'OgilbyBuffle nain

~ Espèces signalées par les habitants - (7) signalées mais douteuses.

Page 209: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Parc National et la protection de la nature

ment intensifiée: cette plante est grave­ment en péril et elle aura peut-être bientôtses derniers habitats dans la région de Taïoù elle pourrait constituer un potentiel debase pour un reboisement futur" (Fgu­Kronberg*, 1979).Il est vraisemblable que des découvertes

sont encore à faire comme le prouve celle d'uneAracée jusqu'ici collectée une fois seulementau Cameroun en 1895, Amorphophallus staudtii(Engl.) N.E.Br. (Fgu-Kronberg*, 1979).

FAUNE

L'étendue du massif, sa faiole fréquentationpar Phomme, la richesse de ses formations végé­tales liées à l'histoire récente de Pensembleforestier africain, font que l'interfluve Sassandra­Cavally, et tout particulièrement le Parc National,conserve pour ce qui est de la faune forestièreune situation privilégiée et unique dans l'Ouestafricain.

Les e~pèces de mammifères et d'oiseauxdont la presence a été constatée par la Missionallemande dans le Parc National de Taï entreseptembre 1976 et mars 1978 sont énuméréesdans les Tableaux 42 et 43. Elles ne sont pasexhaustives, pour qu'elles le fussent il auraitété nécessaire de procéder à des études spécialesqui auraient débordé du cadre de la mission.Les animaux observés par Bousquet* (1977, 1978)ont été repris dans ces listes.

Les mammifères

La liste des mammifères est complète pour lesPrimates (voir aussi chapitre sur "La Santéhumaine"), les pholidotes, les carnivores, lesproboscidiens, les hyracoïdes, les siréniens etles artiodactyles, incomplète pour les rongeursmais on pourra consulter le chapitre sur "Lesystème cultural et ses contraintes" et Dosso,1975b. Il n'y a aucune donnée sur les insectivoreset les chiroptères (voir Tableau 42).

Il n'est pas possible ici de relater toutesles observations faites sur l'écologie, la fréquenceet la biologie de tous ces animaux, on fera seule­ment état de quelques résultats de rechercheobtenus sur le chi mpanzé, l'éléphant, le buffle,l'hippopotame nain et les céphalophes.

Le chimpanzé

Régime alimentaire. Les chimpanzés sont omni­vores dans toutes les régions d'A frique où ils

209

furent étudiés. Ceux de la forêt de Taï ne fontpas exception. 152 espèces de plantes et d'es­pèces animales consommées par les chimpanzés,comprenant 72 % de frui ts, 13 % de feuilles,6 % de champignons, fleurs et bois, 4 % d'insec­tes et 5 % de mammifères furent identifiées.Parmi les mammifères chassés le plus fréquem­ment se trouve le colobe bai (Colobus badius),le magistrat (Colobus polykomos) et le cerco­pithèque diane (Cercopithecus diana).

Comportements endémiques. Les chimpanzésde Taï, population de la forêt primaire, présen­tent de nombreux comportements originaux quine furent ja mais observés dans d'autres régionsd'Afrique. Une attention particulière fut con­sacrée au cassage de noix à l'aide d'outils, couram­ment pratiqué par les chimpanzés (Boesch andBoesch, 1981, 1983). Ces études ainsi que cellessur d'autres comportements tels la chasse, lepartage de la nourriture et la division sexuellede travail soulignent l'importance capitale deschi mpanzés de Taï pour une meilleure compré­hension de ces singes, ainsi que de l'évolutionde comportements comme l'utilisation d'outilset la division du travail au cours de l'évolutiondes premiers humains.

Démographie. La communauté de chimpanzésétudiée vit dans une zone tout à fait intactede la forêt de Tai sans contact significatif avecdes populations humaines. Dans ces conditionsidéales, la population des chimpanzés est saine.La densité est voisine de 1,33 chimpanzés aukm L• La taille des communautés est d'environ40 individus, vivant sur un territoire de 25 à30 km L , ayant un taux sexuel chez les adultesmâles/femelles de 0,58. Ces chiffres ne sontatteints que dans des régions ne subissant aucuneperturbation. Toute influence humaine affectedramatiquement la population et la santé deschimpanzés.

L'éléphant

L'habitat de la sous-espèce du Parc Nationalde Taï, Loxodonta africana cyclotis (éléphantde forêt), s'étend sur la ceinture ouest-africaineet central-africaine de forêts ombrophiles duSénégal jusqu'au bassin du Congo (jusqu'à l'ouestde l'Ouganda).

A quelques exceptions près, l'éléphant deforêt est un habitant caractéristique de la forêtqu'il contribue dans une mesure considérableà régénérer en disséminant un certain nombred'espèces arborées. Les graines - expulsées avecles crottins - des fruits que l'éléphant absorbe

Page 210: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

comme nourriture germent fréquemment beau­coup plus rapidement que les graines qui ne sontpas passées par l'intestin; toutefois, l'effet dé­cisif de l'éléphant de forêt réside dans le trans­port des graines à partir de l'endroit où se retrouvel'arbre reproducteur. L'éminente efficacitéde ce mécanisme de dissémination est démontréeavec évidence dans le petit Parc National duBanco situé près d'Abidjan et dans lequel oncons ta te l'absence des catégories d'arbres corres­pondantes de certaines espèces arborées depuisque l'éléphant a disparu, il y a environ 80 ansde cette région. Selon Alexandre (1973), 30 %des plantes ligneuses sont disséminés par l'élé­phant dans la région forestière de Taï.

L'espèce peuple la forêt ombrophile primaireainsi que les formations secondaires en manifes­tant une légère préférence pour ces dernières,comme le démontrent les études de biologiede nutrition de Merz* (1977). Quelques arbrescaractéristiques de la forêt secondaire tels que:Alchomea floribunda, Anthocleista nobilis,Musanga cecropioides et Macaranga barteri ontdes feuilles qui constituent une nourriture deprédilection pour l'éléphant, et ces arbres sonttoujours couchés en grand nombre par celui­ci le long des pistes. Le long des cours d'eau,on a constaté que l'éléphant consommait depréférence un arbrisseau, le Neosloetiopsiska me runensis.

D~s perturbations d'origine anthropiqueà l'extérieur de la zone périphérique de protec­tion aboutissent vraisemblablement dès à présentà une forte migration des éléphants vers le terri­toire du Parc National de Taï; cette évolutions'amplifiera indubitablement étant donné queles activités d'abattage du bois, de peuplementavec défrichement par le feu et, surtout, decoupes à blanc-étoc croissent au sud du Parc.En particulier, le développement envisagé d'uneindustrie de la cellulose et les livraisons de boisnécessaires à cette fin à partir du "péri mètrepapetier" devraient réduire radicalement le bio­tope de l'éléphant en dehors du Parc Nationalde Taï. L'éléphant lui-même est menacé parun braconnage extrême j les prix croissants del'ivoire ont fait s'accroître la chasse illégaledans une proportion effrayante et ce phénomèneest favorisé par l'absence presque complète d'unelutte contre le braconnage.

On ne sait que très peu de choses sur legenre de vie de l'éléphant de forêt. Les observa­tions directes, qui ne sont pas très nombreuses,font penser que les animaux vivent en solitairesou en petits groupes (qui ne comptent guèreplus que quatre ou cinq individus). Les éléphantssont actifs aussi bien pendant la journée, égale­ment quand il pleut, que pendant la nuit. Dans

le cadre de la présente étude, il n'a pas été pos­sible de déterminer si et dans quelle mesuredes migrations s'effectuent, mais celles-ci consti­tuent l'objet d'une étude scientifique spécialeplus poussée en cours.

Les effectifs d'éléphants de forêt dans larégion de Taï paraissent être sérieusement menacéspar le braconnage.

Le buffle

Les buffles du Sud-Ouest ivoirien appartiennentà la sous-espèce nanus de Syncerus caffer. L'es­pèce manifeste une nette préférence pour lesbas-fonds marécageux à sous-bois dense ainsique pour les formations secondaires le long desanciennes pistes forestières. Les buffles se rendentvolontiers sur les plateaux rocheux du Mont Niéno­koué pour y brouter.

Le buffle de forêt vit la plupart du tempsen petits groupes qui ne comptent souvent quetrois à quatre individus mais qui peuvent parfoisavoir dix individus et même davantage. L'espècea été observée fréquem ment dans le Pal'c Nationalde Taï aussi bien le jour qu'au crépuscule etpendant la nuit j en l'occurrence, il n'a pas étépossible, jusqu'à présent, d'analyser avec précisionla composition des troupeaux.

L'hippopotame nain

L'habitat de l'hippopotame nain se limite, sousune forme sporadique, aux zones de forêts pro­fondes d'Afrique occidentale de la Sierra Leone,de Guinée, du Libéria et de la Côte d'Ivoire.

L'hippopotame nain est un habitant des forma­tions forestières denses à proximité des rivièreset des ruisseaux ainsi que, notam ment,des régionsmarécageuses. Il est actif essentiellement aucrépuscule et pendant la nuit mais on peut égale­ment l'observer à l'occasion pendant la journée;dans ce dernier cas, il est toutefois presque tou­jours en fuite. L'absorption de nourriture paraîtse borner aux heures nocturnes pendant lesquellesles hippopotames traversent leur territoire surdes pistes bien tracées. On peut reconnaîtreaisément celles-ci par les excréments qui sontdéposés le long des plantes. Contrairement àl'hippopotame aquatique, l'hippopotame nainne vit jamais en troupeaux mais seul ou ,.par cou­ples. Il ai me passer sa journée dans l'eau mais,en cas de danger, il se réfugie sur la terre pourse cacher dans un fourré. Son attachement àl'eau est moins marqué que celui de l'hippopotameaquatique mais est quand même net. En l'occur­rence, il convient toutefois de noter que de petits

210

Page 211: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Parc National et la protection de la nature

points d'eau paraissent suffisants pour le séjourde l'hippopotame nain; c'est ainsi, par exemple,qu'on a trouvé partout très régulièrement destraces de l'hippopotame nain -le long de l'en­semble du parcours de contrôle dans la partieseptentrionale qui n'est pas très riche en eaudu Parc National de Taï. B. Bousquet a surprisun hippopotame nain dans un petit bief sur lesommet du Mont Niénokoué. On ne connaît encoreabsolument aucun détail sur son genre de vieen liberté.

Bien que la Mission allemande n'ait vu qu'uneseule fois un jeune, qu'un nouveau-né fut observépar Galat-Luong (1981) et qu'on n'ait guère vude traces d'individus juvéniles, l'hippopotamenain fait partie des espèces relativement fréquen­tes du Parc National de Taï. Ses effectifs sem­blent relativement importants et ne paraissentpas directement menacés.

Les céphalophes

Le groupe d'antilopes le plus nombreux et leplus remarquable pour le Parc National de Taïest constitué par les céphalophes. En raisondes difficultés de différenciation des traces,on ne peut déterminer si et dans quelle mesureles différentes espèces sont réparties sur le ter­ritoire du Parc. Sur l'ensemble du territoiredu Parc et en particulier sur les parcours decontrôle à pied (layons) au milieu de la forêtprimaire, on a pu constater régulièrement etfréquemment des traces et des crottes des pe­tites espèces de céphalophes (essentiellementle céphalophe de Maxwell et le céphalophe noirdont les traces peuvent être distinguées si l'ondispose d'une certaine pratique).

Si l'on tient compte en outre du genre devie des céphalophes en général, on peut supposerque les petits céphalophes peuplent d'une façonrelativement homogène l'ensemble du ParcNational de Taï. A en juger par les observationsdirectes, le céphalophe de Maxwell et lecéphalophe noir séjournent également volontiersdans les habitats secondaires, même à proximitédes peuplements humains. En revanche, on n'apu observer que de façon isolée et relativementrare les traces des deux grandes espèces (lecéphalophe à dos jaune et le céphalophe deJentink).

Les céphalophes de Maxwell présents dansla région de Taï appartiennent à la sous-espèceliberiensis de Cephalophus maxwelli qui peuplele secteur partant du Libéria en direction del'est. Il n'est pas rare de pouvoir observer pendantla journée cette espèce qui vit seule ou par cou­ples bien qu'il soit plus facile de l'observer aucrépuscule ou un peu avant le crépuscule. Elle

211

peuple non seulement la forêt ombrophile maisaussi des formations plus ouvertes allant jusqu'auxsavanes dans la mesure où il y a à proximitédes forêts en galeries ou des îlots forestiers.Le céphalophe de Maxwell se mble être l'espècela plus fréquente de céphalophes dans le ParcNational de Taï.

Le céphalophe zébré n'a été que rarementobservé, trois fois de septembre 1976 à mars1978, ses effectifs ne paraissent cependant pasimmédiatement en danger. On ne dispose pasde connaissances précises sur la vie en libertédu céphalophe à bande dorsale noire. Dans larégion de Taï, il paraît faire partie des espècesréellement rares.

Avec le céphalophe de Maxwell, le céphalophenoir constitue l'espèce la plus fréquemment ob­servée dans la région de Taï; il n'a pas été rared'apercevoir des céphalophes noirs égalementpendant la journée aussi bien dans le Parc Nationallui-même y compris sa zone de protection quebien en dehors sur les pistes. Il s'agissait toujoursd'individus solitaires ou de groupes comptantdeux ou, plus rarement, trois individus.

Le céphalophe à dos jaune qui est trèsfarouche et a tendance à se cacher vitmanifestement seul ou par couples. Nous nel'avons observé que deux fois et B. Bousquetune fois dans le Parc National de Taï et il se mblefaire partie des espèces de céphalophesrelativement rares.

L'habitat très limité du céphalophe de Jentinkcomprend le Libéria et, très vraisemblablement,seulement l'ouest de la Côte d'Ivoire. Les informa­tions annonçant sa présence en Sierra Leonesont manifestement erronées. 11 n'a pas étédécrit de sous-espèces.

Le céphalophe d'Ogilby est un habitant carac­téristique de la forêt ombrophile primaire; iln'a été observé qu'une fois par B. Bousquet. Onne sait rien sur son genre de vie. Bien qu'onpuisse facilement confondre le céphalophe d'Ogilbyavec le céphalophe à bande dorsale noire et queleurs traces ne soient pas différenciables, cetteespèce semble très rare. Pendant nos investiga­tions, on ne l'a vue qu'une seule fois, dans lazone périphérique occidentale de protectiondu Parc. On ne sait rien du genre de vie de cetteespèce; il s'agit d'un ani mal qui peuple uniquementles forêts ombrophiles.

Les oiseaux

L'avifaune est représentée dans le Parc Nationalde Taï et est très riche. Les espèces dont laprésence certaine a pu être observée pendantla période d'observation n'en représente na turel­lement qu'une partie (Tableau 43). En particulier,

Page 212: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

TABLEAU 43. Liste des espèces d'oiseaux dont la présence a été constatée ou signalée dans le Parc National de Taï

CHARADRIIDESVanneau à tête blanche

N-N

Nom scientifique

ARDEIDAEEgretta albaArdea purpurea

THRESKIORNITHIDAEBostrychia hagedash

ANATIDAEPteronetta hartlaubii

ACCIPITRIDAEGypohierax angolensisStephanoaetus corona tusHaliaetus vocifer

PHASIANIDAEFrancolinus lathamiGuttera edouardiAgelastes meleagrides

RALLIDAECanirallus oculeus

HELIORNITHIDAEPodica senegalensis

CHARADRIIDAEXiphidiopterus albiceps

COLUMBIDAETreron australis(Virago calva)

PSITTACIDAEPoicephalus gulielmiPsittacus erithacus

MUSOPHAGIDAETauraco persaCorythaeola cristata

STRIGIDAECiccaba woodfordi(Strix)

APODIDAEChaetura cassini

Nom français

ARDEIDES - REIHERGrande aigretteHéron pourpré

THRESKIORNITHIDESIbis Hagedash

ANATIDESCanard de Hartlaub

ACCIPITRIDESVautour palmisteAigle couronnéAigle pêcheur

PHASIANIDESFrancolin de LathamPintade bleuePintade à poitrine blanche

RALLIDESRâle à gorge grise

CAURALES SOLEILGrébifoulque

1

1

COLUMBIDES

1 Pigeon vert à front nu

PERRUCHESPerroquet vert à calottePerroquet gris du Gabon

TOURACOSTouraco vertTouraco géant

STRIGIDESHulotte africaine

MARl'INETSMartinet épineux à ventreblanc

1 Nom scientifique

ALCEDINIDAECeryle maximaAlcedo quadribrachysAlcedo cristataCeyx pictaHalcyon senegalensisHalcyon malimbicus

MEROPIDAEMerops albicollisMelittophogus gularisMerops muelleri

CORACII DAEEurystomus gularis

BUCEROTI DAETockus semifasciatusTropicranus albocristatusCeratogymna atrataCeratogymna elataBycanistes fistulatorBycanistes cylindricusBycanistes subcylindricus

CUCUL I DAEcentropus senegalensis

PITTIDAEPitta angolensis

HIRUNDINIDAEHirundo nigrita

DICRURIDAEDicrurus adsimilis

MUS CICAPI DAETersiphone rufiventer

PLOCEIDAEMalimbus malimbicusPloceus cuculla tus

Nom français

ALeEDINIDESMartin-pêcheur géantMartin-pêcheurMartin-pêcheur huppéMartin-pêcheur pygméMartin-pêcheur du SénégalMartin-pêcheur à poitrinebleue

MEROPIDESGuêpier à gorge blancheGuêpier noirGuêpier à tête bleue

CORACI AD IDESRollier à gorge bleue

BUCEROTIDESCalao petit à bec jauneCalao à huppe blancheGrand calao à casque noirGrand calao à casque jauneCalao siffleurCalao à joues brunesCalao à joues grises

COUCOUSCoucal du Sénégal

PITTI DES (BREVES)Brève à poitrine fauve

HIRONDELLESHirondelle noire

DRONGOSDrongo brillant

MUSCICAPIDESMoucherolle à ventre roux

PLOCEIDESMalimbe huppéTisserin gendarme

r-.(1)

'1:1..,0'-.

i(1).....

1

'-l0..... i

..,1

(1)()

:::s(1)..,()

:::s(1)

(1).....0;3(1),;:,0

CO(1)

;3(1);:,.....

Page 213: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Parc National et la protection de la nature

les petits oiseaux n'ont pu être recensés quede façon très sporadique. Les espèces sont pres­que exclusivement à répartition éthiopienne(c'est-à-dire des espèces qui ont un habitat plusou moins étendu en Afrique au sud du Sahara);dans la plupart des cas, on trouve une espècetypique de l'Afrique occidentale. En revanche,pour les espèces qui ont été constatées jusqu'alors,il n'yen a aucune qui soit strictement limitéeà cette région (espèce endémique).

Aux côtés des Accipitridae, ce sont surtoutles Alcedinidae et particulièrement les Bucero­tidae qui se distinguent par une richesse importanteen espèces. La même remarque devrait s'appliquerégalement à d'autres familles mais, dans ce con­texte, il convient de rappeler les lacunes quenous avons déjà mentionnées à propos des données.

Les reptiles

A un point encore plus marqué que la liste desoiseaux, il était fatal que la liste des reptilesobservés dans le Parc National de Taï présentedes lacunes si l'on veut bien considérer que cesanimaux ont la plupart du temps un genre devie très caché. Sur les trois espèces de croco­diles présentes en Côte d'Ivoire, deux espèces­le crocodile à long museau (Crocodylus cataphrac­tus) et le crocodile cuirassé (Osteolaemustetraspis) - sont représentées dans les coursd'eau du Parc National Taï; la troisième espèce,le crocodile du Nil (Crocodylus niloticus) esttrès rare, sa présence n'a été constaté que parune seule observation directe (Waitkuvait, 1983).

Parmi les tortues, Kinixys erosa, K. homeana,Trionyx triungis et diverses espèces de Pelome­dusidae sont fréquentes. Un inventaire desserpents a été fait par B. Courtois (voir chapitresur "La Santé humaine" et Tableau 41).

Conclusion

Pour conclure, nous citerons l'essentiel des appré­ciations portées dans le rapport de la Missiond'Allemagne fédérale (Fgu-Kronberg*, 1979).

Le Parc National de Taï constitue une zoneparticulièrement intéressante dont l'importancescientifique dépasse l'échelon national pour at­teindre une portée internationale. Cinq desgrandes espèces de mammifères vivant dansle Parc National de Taï sont inscrites sur la listerouge (Red Data Book) de l'Union Internationalede Protection de la Nature (VICN) avec le statutsuivant:

Céphalophe de Jentink (Cephalophus jentinkO:"En péril d'extinction". Selon les connaissances

213

dont nous disposons, cette espèce n'existe quedans le Parc National de Taï et dans les environsde ce dernier jusqu'à l'est du Libéria. Selon nosconstatations, elle est très rare également surle territoire du Parc. On ne dispose pratiquementpas de connaissances scientifiques sur cetteespèce ani male.

Colobe de Van Beneden (Colobus verus) : "Rare".L'habitat de cette espèce est très limité. Al'intérieur de cette zone, cette espèce est liéeà des conditions spécifiques et a donc une propaga­tion beaucoup plus faible que d'autres espècesde colobes, ce que nos études dans le Parc Nationalde Taï ainsi que dans la Réserve d'Azagny ontconfirmé.

Hippopotame nain (Choeropsis liberiensis) : "Rare".Les effectifs d'hippopotames nains qui viventdans le Parc National de Taï· constituent vrai­semblablement la plus grande population encoreexistante et non menacée de cette espèce dontla propagation est très limitée et sporadique.Le Parc National de Taï offre une occasion uniqueen son genre d'étudier en liberté cette espècepour laquelle on ne dispose jusqu'à présent qued'observations de vie en captivité.

Chimpanzé (Pan troglodytes): "En danger". Leseffectifs de chimpanzés ont enregistré une forterégression dans l'ensemble de leur habitat, enraison de la chasse et de leur capture à des finsscientifiques. En Afrique occidentale, il n'existeque peu de zones protégées où vivent d'assezgrands effectifs de cette espèce animale. Com menous avons pu le" constater, le Parc Nationalde Taï est doté d'une population particulièrementdense de chimpanzés et convient très bien àdes études en liberté de cette espèce, alors qu'onne dispose absolument d'aucune étude de ce genrepour la forme ouest-africaine.

Panthère (Panthera pardus): "En danger". Alorsqu'elle a disparu dans de vastes régions de sonhabita t pri mi tif, cette espèce, qui est en soiapte à l'adaptation et très répandue, est trèspourchassée. Le Parc National de Taï renfermedes effectifs relativement importants qui sontrelativement mieux protégés que dans d'autreszones naturelles réglementées, en raison de l'in­accessibilité de la forêt primaire.

De même le lamantin (Trichechus senegalensis)est "en danger" mais sa présence dans le ParcNational de Tai est sujette à caution.

Les trois espèces de crocodiles existantdans le Parc National de TaI (Crocodylus niloti­cus, Crocodylus cataphractus, Osteolaemustetraspis) sont considérées comme "en péril d'ex­tinction" ou "en danger".

Page 214: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

LA PROTECTION DU PARC NATIONAL

En 1977, Bousquet* traitait en détail de l'influencedes activités humaines à l'extérieur du territoiredu Parc sur le Parc National de Taï. Ces activitéscomprenaient alors:

l'exploitation forestière de bois précieuxdans les zones périphériques du Parc et les con­flits d'intérêts qui en résultent de la part desconcessionnaires, la future culture sur grandessurfaces d'espèces ligneuses à croissance rapidedans le sud et le sud-est du Parc National auxfins de production de cellulose pour l'industrieenvisagée du papier;

le développement agro-industriel et unerapide colonisation agricole des zones périphéri­ques du Parc National à l'est, au nord-est età l'ouest;

le braconnage professionnel;la construction d'un barrage sur le Sassandra

aux fins de production d'électricité;la mise en valeur du littoral et de l'intérieur

de la région (richesses folkloriques), intéressantepour le tourisme international.

Si le projet papetier n'a guère de chanced'être réalisé, il n'en reste pas moins que lestransformations de milieu et de paysage du Sud­Ouest auront des conséquences importantes surle Parc.

Dans la perspective à moyen terme et àlong terme, il ne subsistera finalement com meunique zone forestière cohérente en dehors duParc National de Taï que la zone forestière clas­sée de la Haute Dodo qui est limitrophe au sud­ouest de la nouvelle limite du Parc Nationalou de la zone de protection du Parc National.

Il est difficile de prévoir les conséquencesécologiques d'une aussi vaste destruction del'habitat naturel de la faune pour le Parc Nationalainsi que pour la conservation future de ces espècesanimales dans un ''Îlot'' relativement petit (lapartie méridionale essentiellement concernéedu Parc National n'a qu'un diamètre d'environ25 km); il est nécessaire de toute urgence deprocéder à une étude scientifique de ces consé­quences. Toutefois, on peut affirmer dès à pré­sent en se basant sur les études de biologie etd'écologie qu'une forêt pri maire de caractèrepur ne constitue pas un biotope optimum pourde nombreuses espèces animales qui sont si carac­téristiques du Parc National de Taï; on se rendcompte ainsi de l'éminente importance des forêtssecondaires des zones périphériques de protectiondu Parc pour la conservation d'effectifs relative­ment importants d'éléphants, de buffles et autresespèces.

Pour ce qui est des éléphants et buffles,on doit s'attendre, dans le cas de la réalisation

214

du périmètre papetier, à une forte immigrationvers le Parc entraînant une surpopulation géné­ratrice de dégâts et déséquilibres analoguesà ceux qui se sont produits dans de nombreuxparcs nationaux d'Afrique orientale.

Quant au braconnage, nous citerons encoreune fois textuellement le rapport de la Missiond'Allemagne fédérale (Fgu-Kronberg*, 1979) :

"Dans la plupart des parcs refuges de lafaune dans le monde entier, la destructionou la modification de l'habitat constituentla plus importante influence anthropiquesur la faune. En revanche, dans le ParcNational de Taï, la faune est actuellementmoins menacée par des modifications del'habita t que par le braconnage. Le bracon­nage dans le Parc concerne essentiellementles éléphants qui sont abattus presque ex­clusivement pour l'ivoire, même loin à l'in­térieur du Parc. La chasse des plus petitsanimaux pour leur viande ne s'effectue qu'àla périphérie du Parc et essentiellementà proximité des peuplements humains. Pendantnos investigations dans le Parc Nationalde Taï, nous avons rencontré fortuitementtrois fois des braconniers.

Nous avons trouvé fréquemment desdépouilles ou des squelettes d'éléphantsdans le sud-est du Parc ainsi que de nom­breux campements de braconniers dont unepartie était aménagée de façon semi-perma­nente. L'existence que nous avons constatéede traces de pieds humains dans le centredu Parc fait entrevoir que l'on pratiquele braconnage en fait sur l'ensemble du terri­toire du Parc, qu'il existe ou non des pistesou des sentiers. Bousquet* (1977) décriten détail, dans le chapitre V de son ouvrage,les itinéraires et les endroits que les bra­conniers fréquentent de préférence. Selonles indications des exploitants forestiersqui opèrent entre le fleuve Cavally (c'est­à-dire la frontière avec le Libéria) et leParc National et selon les expériences re­cueillies par le Cantonnement de Taï, ilexiste un fort trafic nocture d'armes etde munitions du Libéria sur la région deTai et d'ivoire du territoire du Parc en direc­tion du Libéria. A partir du Libéria, l'ivoirepeut alors être réimporté de façon trèslégale comme ivoire "travaillé" et venduà Abidjan à des prix qui dépassent12.000 FCFA le kilogramme (en 1979).

La chasse aux éléphants et le traficde l'ivoire (Photo 24) constituent, notammentdans la région du sud-ouest, des entreprisescom merciales bien organisées dont on nepourra finalement venir à bout que par laconclusion d'une convention internationale,

Page 215: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Parc National et la protection de la nature

comme nous l'avons indiqué. Ceci n'exclutnaturellement pas qu'une meilleure surveil­lance du Parc National selon les recommanda­tions (du rapport) apporterait une contributionessentielle à la conservation future deseffectifs d'éléphants qui sont sérieusementmenacés par le braconnage".

Photo 24. Défenses d'éléphants saisies par le chef de brigadedu cantonnement des eaux et forêts de Taï

CONCLUSION

Quatre ans après la publication du rapport tech­nique de la Mission d'Allemagne fédérale surle Parc National de Taï, alors que le Parc estdevenu "Réserve de Biosphère" et plus récemmentinscrit sur la liste du Patrimoine mondial, onne peut que bien augurer de l'avenir de ce grandrefuge forestier ouest-africain.

Outre sa valorisation touristique et sonrôle éducatif et formateur, le Parc de Tai' doitrester un haut lieu de la recherche scientifiqueen Afrique de l'Ouest forestière. En 1979, lesauteurs du rapport technique déploraient quele Projet Taï n'ait pas inclus de recherches axéessur l'étude de la biologie des grands mam mifères,sur leur place et leur rôle dans l'écosystèmeforestier, sur l'influence des activités humainesSUl' leurs populations. La question était double:comment vivent ces grands animaux'? - Peuvent­ils cohabiter avec l'homme et comment?-

La souplesse de la programmation scientifi­que ivoirienne a permis, nous l'avons rappelé,de remédier à cette lacune, qui n'était que dansl'exécution puisque le Projet en avait fait dèsle début, en incluant toute l'équipe du ProfesseurH. Roth dans un nouveau programme "Evolutiondes populations de grands animaux".

Mais il n'y a pas que ces animaux spectacl.:­laires et, plus ou moins, menacés, il reste aussitoutes les faunes plus discrètes de vertébréset d'invertébrés, toute la flore également qui,si l'inventaire en est complet ou presque pourles plantes supérieures, reste encore bien mécon­nue pour des groupes importants l . Au-delà desinventaires, un très large champ de recherchereste ouvert sur les comportements spéci fiQues,la dynamique des populations, les utilisations,etc.

Pour conclure, nous citerons textuellementle rapport de la Mission de l'Allemagne fédérale:"Le Parc National de Taï offre vraisemblablement,sur le plan international, l'une des meilleureset plus vastes possibilités d'étudier seientifique­ment les conditions zoo-écologiques de la forêtombrophile tropicale; il s'agit là d'une recherchequi trouve un vaste domaine d'application dansle secteur de l'agriculture tropicale, de la silvi­culture tropicale ainsi que dans la médecine".

1 Aké Assi et Pocs (1983) soulignent comment "en Côted'Ivoire, malgré leur abondance, les mousses et les hépati­ques ont toujours été négligées dans les études floristi­ques".

215

Page 216: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taz: recherche et aménagement

BIBLIOGRAPHIE

AKE ASSI, L.i PFEFFER, P., 1975. Parc National de Taï­Inventaire de la flore et de la faune. BDPA-Paris.

BOUSQUET, B., 1977. Le Parc National de Tai. Ministère desEaux et Forêts, Abidjan.

BOUSQUET, B., 1978. Un parc de forêt dense en Afrique: LeParc National de Taï (Côte d'Ivoire). Bois et forêts destropiques, 179, p. 27-46 i 180, p. 23-37.

FGU-KRONBERG, 1979. Etat actuel des Parcs Nationaux dela Comoë et de Taf ainsi que de la Réserve d'Azagny etpropositions visant à leur conservation et à leur dévelop­pement aux fins de promotion du tourisme. !Il. Parc Na­tional de Taï. Coop. tech. République de Côte d'Ivoire ­République fédérale d'Allemagne.

GUILLAUMET, J-L., 1967. Recherches sur la végétation et laflore de la région du Bas-Cavally (Côte d'Ivoire). Mémoi­re ORSTOM, 20. ORSTOM, Paris.

* Pour les références citées sans astérisque dans le texte,on se référera à la liste des publications du Projeten fin d'ouvrage (Annexe 2).

216

Page 217: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

L'expression cartographiqueZueli Kolibi

MOTIVATION ET OBJECTIF

Il s'agit ici de la présentation d'un exemple d'ap­plication à la Côte d'Ivoire forestière d'uneméthode d'analyse du milieu naturel mise aupoint par Richard et al. * en 1977 et développéedans plusieurs travaux (Filleron et ~ichard*,

1982; Koli Bi et Filleron, 1978; Kone et al.,1976 ; Beaudou et al.*, 1978).

Cette démarche se veut synthétique ence qu'elle utilise une méthode axée sur l'identi­fication structurale des organisations paysagi­ques, ses aspects méthodologiques et techniqueset la restitution cartographique qui peut en ré­sulter.

Le secteur étudié à l'échelle 1/50.000 (coupureIGN SOUBRE NB-29-XII-3a) est situé entre laville de Soubré et le Parc National de Taï; ils'étend entre 5°30 et 5°45 de latitude nord, etentre 6°15 et 7°00 de longitude ouest; il couvreenviron 760 km 2, c'est un milieu encore trèspeu modifié par les activités humaines, maisoù s'est développé un "front pionnier spontané"très actif (voir chapitre sur "Le développementdes activités humaines").

Avant d'aborder les résultats, la démarchegénérale appliquée pour cette analyse des milieuxforestiers découle des choix méthodologiqueseffectués au départ. Une première partie aété consacrée à l'étude de quelques facteursd'individualisation des paysages, car nous avonsconsidéré que le milieu naturel forestier s'insèredans un ensemble de relations qui l'engendrentet qui peuvent l'expliquer. La deuxième partiea été consacré à l'analyse et à la typologie desmilieux et des paysages.

FACTEURS D'INDIVIDUALISATIONDES PAYSAGES FORESTIERS

Les facteurs qui organisent le paysage et indivi­dualisent notre secteur d'étude interviennentde façon conjointe, rarement individuellement.

Leur impact a été jugé aux échelles régionaleet locale, à partir des données déjà présentéesaux chapitres sur "Le milieu physique" et "Ledéveloppement des activités humaines" et quenous représentons très rapidement dans le cadrede notre étude:

A l'échelle régionale, le climat est constam­ment chaud et humide. Il est caractérisé parun gradient pluviométrique NE-SW. Si les varia­tions interannuelles des précipitations sont trèsmarquées pour chaque station climatique, lesvariations saisonnières demeurent, par contre,assez légères. Le bilan hydrique reste néanmoinspeu connu bien que le climat local soit générale­ment crédité d'une forte capacité érosive théo­rique.

Cependant, sur le plan de la dynamiquedes milieux, la structure quasi-répétitive dela forêt traduirait une tendance à l'homogénéisa­tion des conditions de la dynamique superficielleactuelle. Mais, ce n'est qu'une tendance, cardes traces d'érosion superficielle très nette s'ob­servent sous couvert forestier. Cette érosionse manifeste par un déchaussement des racines,par une réorganisation des litières et par la créa­tion d'un micro-modelé en marches d'escalier.

Le gradient cIi ma tique détermine deux grandstypes de milieux forestiers, de l'extrême sud­ouest au nord-est: un type de forêt sempervirenteet un type de forêt semi-caducifoliée ; l'ensemblede la forêt est caractérisé par une grande richessefloristique et par l'exubérance de l'activité biolo­gique et faunistique.

Sur le plan géologique, deux grands ensemblesde roches se partagent le sud-ouest, les granitesqui occupent les trois-quarts en superficie etles schistes. Dans le secteur étudié, on retrouveces deux grands ensembles juxtaposés, la rivièreHana servant de charnière centrale. C'est doncun substrat peu varié dont l'influence est forte­ment oblitérée dans le paysage. Cependant,la tectonique semble avoir eu une influence surle tracé du réseau hydrographique. La tramegéomorphologique du paysage s'appuie sur des

217

Page 218: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

niveaux d'applanissement anciens et hérités etsur des modelés de dissection soumis à une érosionlinéaire et/ou aréolaire, et dont les manifesta­tions sont actuellement très actives.

Sur le plan socio-économique, l'action humainedéfinit des organisations paysagiques actuellesqui s'accompagnent certainement de modifica­tions globales du milieu naturel. Ces modifica­tions sont induites par les pratiques et lestechniques culturales caractéristiques des groupesethniques qui se projettent sur l'espace. Deuxgroupes socio-culturels se partagent l'espacedu Sud-Ouest, les autochtones (Bakwé, Néyo,Krou, Oubi) et les allochtones (Baoulé, Mossi•••).

A l'échelle locale, la géomorphologie a étéétudiée par le biais d'analyses morpho métriques.Le réseau hydrographique est régulier, hiérar­chisé et organisé de façon homogène. Diversindices morpho métriques permettent d'opposer,ou plus simplement de différencier dans le secteurd'étude, le Nord plus organisé, à modelés faible­ment disséqués, le Sud plus confus, sans lignedirectrice et où l'érosion tant linéaire qu'aréolaireest très poussée, le Centre enfin présentantdes caractéristiques intermédiaires.

Cette organisation nord-sud du paysageest renforcée par l'étude des pentes moyennes.Celle-ci montre trois planchers d'évolution étagésgrossièrement nord-sud: un plancher élevé carac­térisé par des formes anciennes aux pentes fortes,un plancher bas où prédominent des formes plusactuelles aux pentes faibles et entre les deux,un plancher intermédiaire.

Ces observations ont pu être vérifiées parl'étude des bassins versants. Une similitudemorphologique et dynamique a été établie entrel'organisa tion des bassins-versants d'ordre troiset l'organisation du paysage, les bassins-versantsayant été considérés com me des épures d'uneorganisa tion réelle.

Au niveau humain, le fait principal est ledéveloppement d'un front pionnier. Ce frontpionnier est mis en place par la succession dedeux phénomènes: d'abord l'immigration spon­tanée qui démarre timidement et va en s'ampli­fiant considérablement, alimenté par des Baouléet des Mossi; ensuite le développement et l'ex­tension d'un réseau dense de pistes forestièresqui ont pour rôle essentiel de canaliser et deredistribuer tout cet afflux de population. Lefront pionnier est caractérisé par une occupationanarchique de l'espace. Dans l'espace, la coloni­sation pionnière s'attache à créer des structuresnouvelles liées aux façons culturales: elles de­viennent de plus en plus simples (par rapportà la structure de la forêt naturelle) en raisoninverse de l'augmentation et de la permanencedu travail humain. Conséquence extrême, à

218

l'échelle du terroir ou de la région, on tend versune homogénéisation physionomique et structu­rale des paysages forestiers.

L'ORGANISATION DES MILIEUXNATURELS FORESTIERS

Dans un premier temps, il a été réalisé une typo­logie des composantes du milieu, c'est-à-direde la totalité des corps naturels composant lemilieu naturel. Cette typologie a été réaliséedans cinq grands ensembles d'hoplexols l •

Les résultats de l'analyse factorielle montrentque, dans le milieu forestier, il y a 28 types fonda­mentaux d'hoplexols qu'on a définis:

pour la végétation ligneuse haute et moyenne,six hoplexols fondamentaux se dégagent depuisla strate du sous-bois caractérisée par de trèsjeunes arbres à architecture diffuse jusqu'auxémergents les plus grands et les plus isolés. Deux"surfaces d'inversion" (Oldeman, 1974) apparais­sent: la première sépare les volumes végétauxen cours de croissance des volumes végétauxplus complexes regroupant dans des proportionsvariées les feuillages d'arbres jeunes et d'arbresadultes des mêmes espèces; la seconde surfacesépare les volumes végétaux précédents et lesvolumes végétaux dont les arbres sont arrivésau stade ul ti me de leur développement;

pour la végétation ligneuse basse et lesrares herbacées, les oppositions sont plus nettesentre strate humifuse d'une part et les herbacéessub-ligneuses et premiers stades de la germinationligneuse d'autre part. Cette strate basse estle volume végétal le plus significatif, le plusdiscriminant. lei, cinq hoplexols ont été définis;

au niveau de la surface du sol, cinq typesd'hoplexols ont été définis. Ici aussi, les opposi­tions sont nettes entre les hoplexols d'origineminérale liés à la mise en affleurement des pre­miers centi mètres du sol et les autres hoplexolscaractérisés par des accumulations superficiellesorganiques et organo-m inérales. A ces deuxtermes s'ajoutent des atterrissements sableuxou de gravillons et de graviers qui résultent trèsprobablement d'une érosion superficielle diffuseet d'une accumulation relative ou absolue;

au niveau du sol, la discrimination la plusnette se voit entre les horizons hydromorphes

"C'est l'unité qui correspond à l'horizon pédologiqueet à la strate botanique. Un hoplexol ne comporte qu'unminimum de matériaux différents. Ses composantes sontessentiellement latérales". Richard et 01.*,1977.

Page 219: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

L'expression ca rtographique

et les horizons bien drainés; entre les deuxgroupes, se trouve un horizon sableux sûrementdû à un colluvionnement. Dans le groupe deshorizons bien drainés, l'opposition la plusimportante se fait entre les matériaux plus oumoins humifères (présence de matière organique)et les matériaux exclusivement minéraux, leshorizons meubles, colorés et ayant une structurepédologique nette;

au niveau des formations superficielles, troisgroupes d'organisation se distinguent et jouentun rôle presque égal dans la typologie desformations superficielles: la proximité de laroche en place, le cuirassement et le colluvion­nement permettent d'individualiser huit grandstypes d'hoplexols.

D'une manière générale, lorsqu'on compareles résultats obtenus dans la typologie des hop­lexols, on se rend compte que les types d'hoplexolsau niveau de la végétation ligneuse haute s'orga­nisent pour former une structure forestière nette­ment stratifiée.

L'analyse factorielle permet de discriminerdes types d'hoplexols continus répartis, dansle plan des deux premiers axes, sur une ellipseincurvée autour d'un noyau central, représentatived'un fai t structural (Benzecri *, 1973). Cela revientà dire que la forêt a tendance à montrer unestructure unique, pratiquement répétitive, danslaquelle les hoplexols sont si mplement présentsou absents.

Par contre, les hoplexols du sol et des forma­tions superficielles s'ordonnent selon deux facteursorthogonaux, c'est-à-dire qu'ils sont totalementindépendants et s'excluent mutuellement. Lestypes d'hoplexols, dans ce cas, se remplacent.Leurs modalités d'apparition augmentent leurpouvoir discriminant. Ce sont donc le sol etles formations superficielles qui règleront lesmodalités d'organisation des milieux. On retrou-'vera cette propriété dans la définition des typesde milieux, présentée plus loin, où les caractèressusceptibles de définir les critères d'organisationsont ceux qui sont liés au sol et aux formationssuperficielles et secondairement à la surfacedu sol. Les caractères liés à la végétation inter­viennent très discrètement dans la typologie.Sans que l'on puisse cependant conclure qu'ilsn'interviennent pas du tout dans la définitiondu paysage.

La deuxième étape a consisté en une typolo­gie des milieux, organisations naturelles d'ordresupérieur. Les types de milieux sont des combi­naisons variées des types d'hoplexols et précisentle contenu des paysages. Huit types et sous­types de milieux ont été définis, qui se regroupenten deux grands types ou classes, celui des mi­lieux hydromorphes (trois types) et celui des

219

milieux drainés (cinq types). Ces huit typesont été définis: en fonction principalement desformations superficielles et du sol, et secondaire­ment de la surface du sol. En fait, cinq grandsfacteurs d'organisation expliquent en grandepartie les milieux forestiers: hydromorphie,induration, pédoplasmation et colluvionnement,altération.

La taxinomie des milieux garde néanmoinsun contenu descriptif et structural: les typeset sous-types de milieux s'ordonnent du complexeau simple, du plus développé au moins dévelop­pé, selon le nombre des types d'hoplexols consti­tutifs et le développement du "profil vertical".

Classe 1 : Les milieux forestiers bien drainés

a - type sur rochers découverts:structures complexes et développéessols discontinus, montrant parfoisdes signes d'hydromorphievoûte forestière continue sans émer­gents

b - type sur altérites peu profondes:structures complexes et développéessols plus homogènes que ceux du typeprécédentstrate humifuse bien développée. Déve­loppement et expansion maximale de laforêt

c -les milieux cuirassés et/ou gravillonnairesse subdivisent en deux sous-types:c/1. sur cuirasses:

structures très complexes et très dé­veloppéesprofil forestier très ~omplexe et bienéquilibré. Emergents particulièrementabondants

c/Z. sur horizons gravillonna ires épais:• structures peu complexes et peu déve­

loppéesdynamique érosive ou trans-érosivede la surface du solforêt structurale ment équilibrée avecprédominance des arbres en coursde croissance

d - types sur horizons gravillonnaires discon-tinus

structures complexes et développéessol meuble et peu épaisstrates d'arbustes développés. Dominan­ce d'arbres adultes

e - type sur sols meubles épaisstructures complexes et développéesprédominance des processus d'accumula­tion superficielleabondance des arbres adultes.

Classe II : Les milieux hydromorphes

a - type faiblement hydromorphe. structures si mples et développées

Page 220: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï: recherche et aménagement

altérites à moins de 25 cmstrates herbacées fréquentes maisdiscontinues. Rares émergents

b - type moyennement hydromorphestructures complexes et développées

• horizons alluvio-colluvionnaires, sableux,épais. Horizons minéraux fréquentsvégétation herbacée bien développée

c - type très hydromorphestructures simples et peu développéesalluvions sableuses épaisses. Horizonsminéraux profondsvégéta tion herbacée abondante.

L'ORGANISATION DES PAYSAGESNATURELS FORESTIERS

La troisième étape de la démarche insiste surl'extension spatiale des organisations naturelles.Les unités retenues sont issues du découpagetopographique. Quatorze types de facettes topo­graphiques ont été délimités, qui se combinententre eux pour former 13 types de versants.Ce découpage qui exprime, de fait, la principaletrame d'organisation des paysages constituele fond de carte, le support des milieux.

D'une manière générale, le cadre topographi­que retenu s'inscrit dans un schéma d'évolutiongéomorphologique dont la trame est constituéepar une suite gé'nétiquement liée de modelésà som mets plans cuirassés, de modelés de croupessub-aplanies et/ou plan-convexes très gravillon­naires et de paysages d'interfluves convexesfaiblement gravillonnaires et graveleux. Onpeut inclure dans ce schéma d'ensemble deuxtypes de modelés particuliers, l'un lié à des col­lines rocheuses, l'autre lié à la plaine alluvialedéveloppée autour du drain principal, la Hana.

Ce schéma géomorphologique s'apparentebeaucoup aux conditions du nord ou du centrede la Côte d'Ivoire, de savanes soudanaises oupré forestières.

L'inadéquation entre la structure de la végé­tation forestière et les sols fait penser que lesrapports établis entre l'enveloppe topographiqueet le contenu-milieu sont influencés par deshéri tages géomorphologiques. Cela est plausibledans le milieu que nous avons étudié. Cettepartie de la forêt du Sud-Ouest peut être comprisecom me la juxtaposition d'une forêt de type équa­torial sur un ensemble modelés/sols de type tropi­cal. On peut donc supposer une dynamiquede reconquête forestière dans des conditionsbiocli matiques qui ont dû être différentes decelles qui règnent actuellement. Cela explique­rait que l'on ait des types de milieux curieusementtrès développés et très complexes sur cuirasse.

Cela expliquerait sans doute aussi que nous n'ayonspas rencontré de modelés typiquement forestierstels qu'ils sont abonda mment décri ts dans lestravaux de recherche sur le milieu forestier.

Disposant d'une typologie des milieux àplusieurs niveaux et d'un fond de carte à plusieurséchelles, le stade final de la démarche a consistéà projeter les premiers résultats sur le fond decarte: chaque type de milieu reçoit des limitesspatiales et chaque facette est affectée d'uncontenu. Facettes et milieux définissent dessegments de paysages; une suite de segmentsdéfinit une séquence de paysages. La légendede la carte obtenue exprime donc deux sériesde données, le contenu milieu et le contenantfacette.

Les segments de paysages sont définis pardes caractères morphologiques (liés à la topo­graphie) et par des caractères paysagiques (liésau milieu). Les séquences de paysages sont dé­crites par la forme des facettes de som met etpar la nature des formations superficielles lesplus importantes. Il types de segments de paysa­ges ont été identifiés dans 13 types de séquencesde paysages. Les 13 types de séquences peuventêtre regroupés en six grandes ensembles:

Ensemble 1

Cet ensemble regroupe des séquences paysagi­ques des modelés de collines convexes à affleure­ment rocheux sur versants convexes ou convexes­rectilignes; les sommets les plus importantsculminent à 240 m; les bas-fonds sont accusésmais l'entaille est peu accusée; l'altitude laplus basse des thalwegs avoisine 140 m.

Cet ensemble est caractérisé par la juxta­position de formes analogues représentant seule­ment 3 % de la superficie de la zone étudiée.Le développement du versant varie entre 350et 170 m; la dénivelée relative varie entre 100et 60 m.

L'ensemble 1 est disséqué par un systèmede drainage de formes très variées: la mailledu paysage est hétérogène avec néanmoins pré­dominance d'une maille arrondie irrégulière àtendance polygonale; cette maille est liée àun tracé contourné des axes de drainage. Ledrainage est assuré par un réseau hydrographi­que dense à dissection globale poussée; l'ensem­ble peut être classé dans le groupe des bassins­versants contrastés à dissection forte.

L'organisation de cet ensemble est miseen évidence par un type de paysage caractéristi­que; on observe une variante essentiellementmorphologique, où le replat de mi-versant cor­respond à un important fauchage latéral de bancsverticbux de schistes.

220

Page 221: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

L'expression cartographique

Ensemble II

Cet ense mble regroupe les séquences paysag~­

ques des modelés à sommets plans cuirassesou fortement gravillonnaires avec réindurationdu mi-versant. Les sommets d'interfluve plansont une altitude générale comprise entre 275et 210 m. Les versants ont un profil générale­ment concave-rectiligne mais peuvent être entre­coupés d'un ou deux replats à mi-versant. Lessommets se raccordent aux versants par unepente de raccord convexe puis concave ou recti­ligne. Les bas-fonds plans et dissymétriquesont des altitudes variant entre 130 et 180 met s'élargissent dans des thalwegs d'ordre supé­rieur ou égal à trois. Les replats remarquéscorrespondent soit à une réinduration en carapace,soit simplement à un cuirassement de pente.

Cet ensemble est une suite de formes identi­ques occupant Il,5 % de la superficie de la zone.Le développement des séquences varie de 150à 700 m, avec une dénivelée comprise entre105et80m.

L'ensemble II est disséqué par un systèmede drainage à mailles larges, relativement allon­gées, de type quadrangulaire à tendance rectangul­aire ou parallèle. Il est drainé par un réseauhydrographique de densité moyenne, localementfaible; l'indice de dissection utile est nulle,celle de dissection globale est moyenne. Ainsi,l'ensemble II peut être classé dans le groupedes bassins-versants monotones avec, localement,un faciès à dissection forte.

L'organisation de cet ensemble uniformeest mise en évidence par trois types de séquencesde paysages. Ces types de séquences ont unedisposition particulière,. ils s'alignent selon deuxlignes de direction NNE-SSW : la première ligneest continue et proche de la rivière Hana, elles'inscrit sur substratum schisteux faciès à chlo­rite et séricite; la deuxième ligne, plus à l'est,est plus discontinue et s'inscrit sur schistes,faciès quartzeux ou gréseux.

Ensemble III

Cet ense mble regroupe les séquences paysagi­ques des modelés de croupes plan-convexes iso­métriques gravillonna ires ou sub-aplanies cuiras­sées. Les sommets d'interfluve gravillonna iresont une forme arrondie et sont très isolés. Leuraltitude générale proche de celle de l'ensembleII varie de 220 à 240 m. Les sommets se raccor­dent à un versant, souvent important, par unepente de raccord rectiligne. Le versant se sub­divise en deux ou trois sections rectilignes puisconcaves dont les limites correspondent locale­ment à des indurations actuelles en carapace.Les bas-fonds plats et larges et les bas de versant(entailles dans le versant) ont des altitudes com­prises entre 160 et 180 m.

Les som mets d'interfluve cuirassés ont desaltitudes variant de 200 à 220 m. Ils ont uneforme allongée et un modelé plan ou sub-aplani.Les versants dissymétriques se raccordent auxsommets soit par une pente de raccord très dis­continue à limite amont nette cuirassée, soitpar une inflexion de pente progressive.

Cet ensemble est formé par l'associationde formes différentes mais spatialement et géné­tiquement liées. Ces formes occupent 9 % dela superficie de la zone. Les développementsvarient de 200 à 780 m, avec des déniveléescomprises entre 20 et 50 m.

L'ensemble est disséqué par un réseau hydro­graphique de densité moyenne. Ce réseau déve­loppe un système de drainage à mailles allongéesà tendance parallèle et à contours légèrementarrondis. L'indice de dissection utile est moyen,la dissection globale est moyenne à poussée.On peut classer cet ensemble dans le groupede bassins-versants monotones.

Du point de vue de l'organisation, l'ensemble IIIcomporte deux types de séquences paysagiquesqui se différencient essentiellement par la naturedes formations superficielles et par la morpho­logie du sommet d'interfluve. Une autre carac­téristique réside dans sa localisation au sud­est du secteur étudié; en outre ces types depaysages sont entièrement inscrits dans le bassin­versant régional du San-Pédro.

Ensemble IV

Cet ensemble regroupe deux types de séquencesde paysages morphologiquement différents maisspatialement et génétiquement liés:

type de séquences paysagiques à modelésconvexes, localement plan-convexes très gravil­lonnaires et à versants rectilignes-concavesen pente moyenne. Ils se localisent surtout surl'interfluve entre les bassins versants de la Hanaet de la Nanié. Les sommets étalés et isométri­ques ont des contours irréguliers. Les altitudesvarient de 200 à 212 m. Les versants se raccor­dent progressivement à un bas-fond large, déve­loppé et dont l'altitude avoisine 140 m. Lesbas de versants sont le siège d'un important col­luvionnement ;

type de séquences paysagiques à modelésplan-convexes gravillonna ires et à versantsconvexes-rectilignes en pente moyenne à faible.Les altitudes des sommets varient de 190 à 210 m.Les sommets· ont une forme grossièrement arron­die. Le raccord du sommet au versant se faitpar l'intermédiaire d'une pente moyenne à forte.Les versants se raccordent à un bas de penterectiligne en pente variable et correspondantà une incision du versant. Ce type de séquencespaysagiques se localise exclusivement dans lapartie sud-ouest de la carte. En inclusion dans

221

Page 222: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

cet ensemble, surtout dans certaines séquencespaysagiques, des unités à som met plan très étroitet à forte dénivelée, assurent la liaison avecles ensembles Il et Ill. Leur contenu paysagiquefait qu'elles peuvent être classées dansl'ensemble IV. L'ensemble IV occupe 13 % dela superficie totale. Les développements desséquences varient de 200 à 700 m. Les déniveléessont comprises entre 35 et 50 m.

L'ensemble est disséqué par un systèmede drainage à mailles variées: au nord de lazone et sur l'interfluve Hana-Nanié, la mailleest allongée, large à tendance parallèle; ausud, la maille est plus petite, arrondie à tendancepolygonale. Le drainage revêt aussi des carac­tères variés; dans le premier type de séquences,la densité de drainage et l'indice de dissectionsont moyens à faibles, la dissection globale estmoyenne; on peut classer le nord de ce typede séquences dans le groupe des bassins-versantsmonotones. Au centre, l'indice de dissectionutile croît fortement; les séquences peuventêtre classées dans le groupe intermédiaire, aveclocalement un faciès à dissection forte. Dansle second type de séquences, la densité du drain­age augmente avec un indice de dissection utilefort et une dissection globale poussée; les séquen­ces se classent alors dans le groupe des bassins­versants contrastés. Ici, l'incision linéaire estprédominante. Du point de vue de l'organisation,"les deux types de séquences comportent 4 ou5 types de segments de paysages.

Ensemble V

Cet ensem ble regroupe des séquences paysagi­ques de modelés à interfluve convexe faiblementmarqué en pente longue, de forme allongée,faiblement gravillonnaires et graveleux. Lesinterfluves en pente faible à moyenne ont desaltitudes comprises entre 160 et 200 m, avecun maximum à 180 m. Ces interfluves passentsans accident topographique notable à des ver­sants étirés et laniérés rectilignes ou convexes­rectilignes en pente moyenne, plus ou moinsréguliers; cependant localement, ces versantssont convexo-concaves et courts: dans ce cas,le versant se raccorde par une nette rupturede pente à un bas-fond ennoyé et étroit. Lesaltitudes des thalwegs varient entre 170 et 140 m.

Cet ensemble, moins bien organisé et auxunités paysagiques peu différenciées est consti­tué par une juxtaposition de formes identiqueset occupe 34,5 % de la surface étudiée; les déve­loppements varient entre 300 et 600 m ; les dé­nivelées varient entre 18 et 33 m.

L'ensemble V est disséqué par un systèmede drainage à mailles variées: au nord, la mailleest allongée à tendance rectangulaire; au centreelle est plus petite, arrondie irrégulièrement

à tendance hexagonale; au sud, la maille estallongée à tendance parallèle ou arrondie feston­née. L'ensemble est drainé par un réseau hydro­graphique de densité variable, l'indice de dissectionutile est moyen à fort, localement très fort;la dissection globale est extrême, localementmoyenne à poussée. On peut classer cet ensembledans le groupe des bassins-versants intermédi­aires, localement contrastés, à dissection forte.

Du point de vue de l'organisation, de cettejuxtaposition se dégagent quatre types de paysa­ges qui se différencient par l'extension de l'inter­fluve, par le développement (lié à l'ordre del'axe de drainage) et par le raccord du versantau thalweg. D'une façon générale, ces typesde paysages occupent toute la partie est et lecentre-ouest de la zone; quelques unités peuétendues se localisent au sud.

Ensemble VI

Sur la marge ouest du secteur étudié, l'ensembleIV est constitué par la plaine alluviale de la rivièreHana. C'est un ensemble linéaire se développantsur un système de "flats alluviaux" autour dudrain principal. Les sommets et versants sontceux des paysages continus, principalement lespaysages de l'ense mble V.

Le modelé général de la plaine alluvialeest plan. Il est caractérisé par la grande extensiondu lit majeur (entre 800 et 2000 m) dans lequella Hana s'encaisse assez facilement. La méso­topographie est complexe: les cuvettes de décan­tation, les levées de berge, les bras divagantsfonctionnels sont fréquents. Les rares élémentsde diversité majeure dans le modelé sont consti­tués par les interfluves convexes des paysagesde l'ensemble V. Les som mets passent progressi­vement à des versants rectilignes qui se raccordentau "flat" par une pente très douce plan-concave.Les altitudes de la plaine alluviale décroissentdu nord au sud, dans le sens de l'écoulement:140 m au nord, 120 m au centre, 110 m au sud.L'ensemble occupe 8 % de la superficie totale.Le système de drainage est axé sur la Hana,drain principal; il est difficile à caractériser.D'une manière générale, il se compose d'axesparallèles définissant une maille allongée à ten­dance parallèle. La densité globale est faible;mais ceci reste peu significatif. Du point devue de l'organisation, l'ensemble VI est composéd'un seul paysage constitué par la plaine alluviale.

CONCLUSION - PROSPECTIVE

Cette approche permet de ne privilégier aucunecomposante du milieu naturel. Dans l'exercicedu traitement des données, les critères d'organisa­tion se dégagent d'eux-mêmes et viennent étayer

222

Page 223: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

L'expression cartographique

les vertus de l'intuition. Dans cet ordre d'idée,le géographe devient en grande partie autonomeet peut élaborer ses propres données.

Du point de vue cartographique, cette méthodefournit des unités de paysage emboîtées. Ledécoupage cartographique traduit l'essentielde la dynamique actuelle du milieu naturel:bilan de l'eau, érosion et accumulation superfi­cielles, lessivage et transfert de matière, tousces processus déjà mis en évidence par Rougerie*(1960) et d'autres auteurs changent de valeuret de sens dans chaque segment de paysage.

Sur cette même carte, des études station­nelles réalisées par des spécialistes dans desconditions de milieu connues peuvent trouverun support pour l'extension de leurs résultats.Nous pensons nota mment aux études sur le ruissel­lement réalisées à la station de Tai.

En fait, telles quelles, la carte et la légendene sont pas destinées directement à l'aménageur.L'ésotérisme apparent de la terminologie renddifficile une utilisation directe. Les informationscontenues dans chaque type de milieu, dans chaquesegment de paysage peuvent néanmoins êtretradui tes en variables susceptibles de définiret préciser des normes d'utilisation. La cartedes segments de paysage est l'étape préliminairequi définit des états d'équilibre localisés.

La VISIOn globale du milieu que nous avonsadopté est pour l'instant descriptive. L'objetd'étude nécessairement complexe impose d'exa­miner celui-ci comme une structure. Notreétude s'inscrit dans la ligne des études globalesentreprises par une équipe de géographie physi­que en Côte d'Ivoire. Elle a pour valeur d'abordde proposer un mode explicite de découpagedu milieu naturel pour faire ressortir les disconti­nuités et les critères qui l'organisent.

Enfin, on peut ajouter ceci l'analyse etla définition des paysages réalisées dans ce tra­vail avaient pour but de reconstituer l'étudedu milieu naturel. Il faut examiner le paysagenon plus comme une collection d'objets maiscomme un tout cohérent. Une conséquence decette approche nouvelle du milieu naturel estde redéfinir le rôle du géographe dans le concertdes naturalistes. Une hyperspécialisation l'avaitpeu à peu écarté de sa vocation originelle: celled'une vision synthétique des faits naturels ethumains telle qu'elle apparaît dans les grandesétudes régionales. Disposant d'un outil adaptépermettant d'intéger plus facilement l'ensembledes connaissances, le géographe redevient legénéraliste qu'il aurait dû rester.

BIBLIOGRAPHIE

I3EAUDOU, A.G.; BL1C, P. de; CHATELIN, Y. ;COLLINET, J. ; FILLERON, J-C. ; GUILLAUMET, J-L.;KAHN, F.; KOLI BI, Z. ; RICHARD. J-F., 1978. Re-

cherche d'un langage transdisciplinaire pour l'étude dumilieu naturel (Tropiques humides).ORSTOM, Trav. Doc.,91,143 p.

BENZECRI, J.P., 1973. L'analyse des données. 2 vol. Dunod,Paris.

FILLERON, J-C. ; RICHARD, J-F., 1981. Une méthode d'ana­lyse des milieux naturels tropicaux. IGT, Abidjan, N° 45,56 p.

OLDEMAN, R.A.A., 1974. L'architecture de la forêt guyanaise.Mém. ORSTOM, N° 74, 204 p.

RICHARD, J-F.; KAHN, F.; CHATELlN, Y.; 1977. Vocabulairepour l'étude du milieu naturel (Tropiques humides). Cah.ORSTOM, Sér. Pédol., 15C, 43-62.

ROUGERIE, G., 1960. Le façonnement actuel des modelés enCôte d'Ivoire forestière. Mémoires IFA N, Dakar.

* Pour les références ci té es sans astérisque clans le texte,on se référera à la liste des publications du Projeten fin d'ouvrage (Annexe 2).

223

Page 224: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 225: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Critiques et perspectivesJean-Louis GuillaumetGuy Couturier

Arrivé au terme de ces huit années d'activité,il serait présomptueux de prétendre que l'ensem­ble des buts fixés aient été atteints. Nous ten­terons dans les lignes qui suivent d'en dégagerles raisons et d'émettre quelques suggestionspour y parvenir.

LES FACTEURS LIMITANTS

FACTEURS PREEXISTANTS ET SOUS-ESTIMES

l'éloignement et la difficulté d'accès dela zone de recherche (la Station écologique deTaï est à près de 700 km d'Abidjan) ont accruconsidérablement les coûts de fonctionnementdes équipes de recherche;

les difficultés de pénétration, l'écran végétalcontinu et la quasi-permanence d'un plafondnuageux n'ont pas permis jusqu'à maintenantune utilisation satisfaisante des photographiesaériennes ou de l'imagerie-satellite et ont conduità des approches méthodologiques lourdes etcoûteuses.

FACTEURS FINANCIERS

Le financement malgré l'effort soutenu du gouver­nement ivoirien et des organismes de rechercheparticipants, reste insuffisant.

Nous citerons pour exemple la contributionremarquable du Ministère de la recherche ivoirien:les immobilisations acquises en 1979 et anté­rieures à 1979 s'élèvent à un montant total de106.534.267 FCFA. Cette somme fut celle al­louée au Projet Taï, pour la construction de laStation d'écologie, l'achat des véhicules, l'équi­pement scientifique.

A ceci il faut ajouter les dépenses de fonc­tionnement : près de 20.000.000 FCF A en moyennesont attribués annuellement. Ce qui pour unepériode de 6 ans donne un coût total de fonction­nement de 120.000.000 FCFA. De 1976 à 1982

l'intervention de la Côte d'Ivoire s'élève doncà 226.534.267 FCFA.

La participation de l'Unesco et du PNUEau Projet Tai fut de 55.000 dollars (lI millionsde francs CFA) pour le complément d'équipementscientifique. On note qu'une 404 bâchée, deuxToyota tout terrain ont été offerts au ProjetTai pour un montant global de 5.000.000 environ.Soit donc depuis en 6 ans, 16.000.000 pour leProjet Tai. Bien sûr il faut y ajouter les dépensesconsacrées aux experts venant visiter le ProjetTai, ou allant visiter d'autres projets similaires.(Document de travail pour la réunion régionaled'évaluation des projets MA B - Forêts - 25 oc­tobre-1er novembre 1982 - Abidjan. MRS - ComitéMAB.)

A tout ceci, il faut donc encore ajouterles dépenses de fonctionnement, parfois fortimportantes, assurées par toutes les Institutionsayant participé, ou participant, au Projet.

On pourrait suggérer une évaluation a for­tiori des coûts totaux du Projet comme avaitété faite une estimation en 1977 (Huet, 1977).

LES CONSEQUENCES

OPERATIONS NON REALISEES

Six opérations prévues dès le début ou en coursde projet n'ont pu être réalisées, soit qu'aucunspécialiste ne fut disponible, soit que le cher­cheur pressenti ait été absorbé par d'autres tâches.Ce sont les opérations suivantes:

Systématique et dynamique des formes durelief;Eaux souterraines;Acariens et collemboles;Oligochètes;Prédateurs animaux et régénération desessences forestières;Préhistoire: palethnologie et paléoécologie.

Pour deux de ces opérations des missions

225

Page 226: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï': recherche et aménagement

préliminaires ont été effectuées mais n'ont pasété suivies de compte-rendu.

L'opéra tion "Echanges radia tifs et bilanénergétique de la forêt" n'a pu être entrepriseen l'absence de la tour surplombant la forêt etdont la construction prévue a toujours été repous­sée.

La mise au point des technologies à utiliserau-dessus de la forêt avait été commencée (Cardonet Chefson, 1979).

Outre que le programme prévu était originalet d'une grande importance pour la connaissancedes conditions cli matiques forestières, cettetour présentait un intérêt certain pour d'autresétudes régionales, telle celle de la mousson enAfrique occidentale en partie commanditée parl'OMN.

Elle devait servir également à d'autres re­cherches com me il sera dit dans le paragraphesuivant.

OPERATIONS INTERROMPUES

L'ajournement de la construction de la tour ainterrompu les recherches relatives à la fièvrej aune à Taï. Ces recherche~ seront poursuiviesà proximité d'Abidjan. Si cette solution peutfaciliter les conditions matérielles, transport,entretien, etc., on regrettera cependant de voirs'échapper la possibilité de considérer le cyclede la fièvre jaune dans son ensemble tel qu'ilest susceptible d'exister à Taï.

Notons aussi que l'érection de cette touraurait rendu possible un certain nombre d'étudessupplémentaires dans plusieurs disciplines biolo­giques dont celles relatives aux insectes dépréda­teurs.

Comme il a été dit au chapitre sur "Le milieuphysique", le protocole d'essai adopté pour lesétudes d'hydrométrie de surface prévoyai t lanécessité d'entreprendre des recherches compa­ratives sur les bassins expérimentaux en forêtna turelle j après deux années, l'un d'entre euxaurait dû être déforesté. Des mesures sur lesmodifications entraînées par cette déforestationet au cours de la phase de reconstitution auraientalors été effectuées pendant une nouvelle périodede deux ans.

L'autorisa tion de procéder à la coupe prévuen'ayant pu être obtenue, l'étude s'est trouvéeréduite à la caractérisation de trois bassins repré­sentatifs sous forêt naturelle.

Or, une autorisation de principe avait étédonnée par le Ministère de la Protection de laNature qui, lorsqu'il fallut passer à l'action, avaitdisparu depuis plusieurs années.

Enfin, nombre d'opérations n'ont vu qu'undébut de réalisation et nous n'en citerons que

226

deux qui nous paraissent d'une extrême impor­tance: "Contraintes agronomiques dans les sys­tèmes de culture traditionnels" et "Sensibilisationdes populations au problème de l'environnement".

LA COORDINATION DES ACTIVITES

Même si, aux différents niveaux, les participantsont sans cesse tenté d'établir et de maintenirune bonne coordination de leurs activités, ilest indéniable que tout n'a pas été parfait, enparticulier dans la mise en place et le suivi con­certé des dispositifs expérimentaux.

Il ne faut pas pour autant se leurrer et s'ilaurait été souhaitable d'entreprendre l'étudedu champ cultivé avant même sa mise en culture,était-ce réalisable? Les chercheurs auraient­ils pu se trouver sur le terrain avec les cultiva­teurs au moment même du choix de celui-làpar ceux-ci? Auraient-ils matériellement pu,comme dans leur démarche conceptuelle et métho­dologique, maintenir cette présence commune?

Il ne fait nul doute qu'avec l'expérienceactuelle, on voit mieux comment aborder mainte­nant une telle entreprise. Mais il fallait acquérircette expérience et on ne saurait trop recomman­der la plus grande attention aux équipes désireusesde mener à bien des recherches similaires.

LA DIVULGATION DES RESULTATS

La liste bibliographique montre l'importancede la production scientifique du Projet. D'autrespublications verront le jour dans les prochainesannées et un effort particulier sera porté à larédaction de synthèses ou d'ensembles de travauxappliqués à un projet particulier: l'agriculturetraditionnelle, le dynamisme forest.ier, ;tc. Ilest toutefois regrettable que certaInS resultatsn'aient pas été divulgués, ne serait-ce que sousforme de notes brèves j il est peu vraisemblablequ'ils le seront maintenant.

LA FORMATION DES CHERCHEURSIVOIRIENS

Les chercheurs ivoiriens restent trop peu nombreuxdans ce projet. Il conviendrait de mettre l'accentsur la formation de chercheurs nationaux capablesde combler les lacunes du projet initial et deremédier, quand il en est besoin, au départ deschercheurs étrangers. Il faut utiliser pour celaau maximum le potentiel d'encadrement quiexiste dans les structures de recherche en Côted'Ivoire.

Page 227: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Critiques et perspectives

ETAT ACTUEL ET SUGGESTIONS POURUNE NOUVELLE ETAPE

Il faut se rendre à l'évidence, deux des objectifsessentiels du Projet Tai, la régionalisation, c'est­à-dire l'extension des études faites localementà l'ensemble du Sud-Ouest et le passage des in­formations aux utilisateurs, preneurs de décisionet aménagistes, n'ont été atteints que partielle­ment ou pas du tout.

Après cette première phase d'inventaireet de connaissance des processus, un redéploie­ment des activités de recherche devrait êtreenvisagé en :

s'appuyant sur les résultats obtenus afinde ne pas procéder à des recherches qui feraientdouble emploi;

tenant compte de l'évolution du Sud-Ouestet des problèmes nouveaux qui peuvent se poser;

définissant de nouvelles problématiquespermettant d'utiliser différemment les donnéesexistantes et combler ainsi les secteurs moinsapprofondis.

La première étape dont les résultats princi­paux sont exposés dans cette "Note technique"fut utile en ce sens que la définition de thèmeset la localisation de nouvelles recherches devraientmaintenant être plus faciles. Deux démarchessont possibles: 'étude en un point précis d'unproblème qui n'a pas été approfondi; extensionà la région Sud-Ouest, à partir d'un échantillon­nage judicieux, d'une recherche déjà faite defaçon approfondie mais dans une région limitée.

EVOLUTION DU MILIEU PHYSIQUE

Ce program me est arrêté, d'une part en raisondes ajournements de la construction de la tour,et de l'absence d'autorisation de défrichementdes bassins versants expérimentaux et, d'autrepart du fait que des opérations importantes n'ontpas été pourvues en personnel.

L'opération "climatologie et pluviométrie"avec le poste météorologique est en fait uneactivité de service.

Dans l'ensemble, les résultats, importants,acquis à la Station de Tai n'ont pas été appliquésà la région.

Les difficultés rencontrées dans l'étudeméthodologique de la caractérisation et la repré­sentation des sols en milieu forestier amènentà suggérer que, si la cartographie des sols duSud-Ouest devait être réalisée, le travail devraits'effectuer à deux niveaux: au premier niveau,avec une cartographie détaillée d'un ou deuxbassins versants élémentaires représentatifs

de chaque zone distinguée par la combinaisonde facteurs naturels, le second consisteraiten une cartographie plus synthétique à échelleplus peti te.

On peut par ailleurs regretter que l'étudede l'évolution des composants chimiques du solaprès cultures sur brûlis n'ait pas été poursuivieau-delà des quatre premières années sur les par­celles témoins.

EVOLUTION DE LA VIE DANS LES SOLS

Il reste encore des lacunes dans cet importantprogramme et, même si les résultats déjà acquissont conséquents, beaucoup reste à faire, tantsur le plan des "Remontées biologiques" quesur celui de l'humification. L'étude des collem­boles et des acariens n'a pas été abordée; l'étudepréliminaire des vers de terre avec une missiond'un chercheur étranger n'a pas été poursuivie;celle des termites est à continuer; celle desdiplopodes est à effectuer dans le Sud-Ouest,à partir de la méthodologie et des résultats ob­tenus en forêt du Téké.

La poursuite de ce programme demande,outre du personnel, une collaboration et uneconcertation accrues. Certaines opérations,"Acariens et collemboles" entre autres, pourraientêtre allégées en fonction de ce que l'on connaîtdu rôle de ces organismes dans des milieux si mi­laires et à partir de la méthodologie qui y futmise au point.

EVOLUTION DE LA VEGETATION

Le programme dit "Evolution de la végétation"s'est modifié au fur et à mesure de l'obtentiondes résultats. La meilleure tentative de régionali­sation a été faite avec l'étude de Kahn (1982)sur la reconstitution après essartage. Il resteencore beaucoup à faire cependant au niveaurégional.

Les études furent poursuivies avec les recher­ches entreprises par le Laboratoire de Silviculturede l'Université agronomique de Wageningen auxPays-Bas et coordonnée~ par un chercheur ayantdéjà travaillé dans le Projet. La finalité du projet"Silviculture durable et coupes sélectives enbasse Côte d'Ivoire" répond très exactementà celle du Projet Tai:

"L'étude vise à définir un système silvicolequi permet la récolte régulière de bois tout enprotégeant les richesses naturelles et les poten­tialités de la forêt. L'écosystème exploité devraitdonc conserver les fonctions et caractéristiques

227

Page 228: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Photo 25. U.L.M. muni d'un équipement photographique et d'une correction de dérive

Page 229: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

0:J.,...E·~Cl)(/,)

Cl)

N,...

N "0'-0 Cl)...,

(/,)

"0Cl)(),...:2.Cl)(/,)

(A. Vooren)Photo 26. Couple d'i mages stéréoscopiques d'une parcelle d'étude de l'érosion en forêt de

Taï (Collinet et Valentin, 1979). Leur disposition permet leur étude par unstéréoscope à miroirs. Altitude de vol: 600 m ; émulsion type Kodak plusX 2402; filtres Hasselblad 1,5 x Y (jaune) et UV ; date: 22 décembre 1982.Echelle 1:4000

Page 230: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet TaT: recherche et aménagement

de la forêt d'origine, tels ses réserves génétiques,ses pouvoirs conservateurs du sol, ses propriétésrégulatrices dans le bilan hydrique, sa fixationde dioxyde de carbone, ses ressources naturellesen substances alimentaires et médicinales etses plantes fournissant d'autres produits fores­tiers non ligneux. Tout cela devrait contribuerà faire partie du patrimoine national. Ce n'estqu'en exigeant cela que la double fonction dela forêt, à la fois protectrice écologique et pro­ductrice économique, pourrait être sauvegardéepour l'avenir non seulement proche, mais égale­ment lointain. Ceci n'est réalisable qu'en adaptantles méthodes silvicoles au caractère initial del'écosystème au lieu d'adapter inversement laforêt aux méthodes" (Projet proposé parR.A.A. Oldeman et A.P. Vooren).

Les travaux en cours permettent tous lesespoirs dans ce domaine. Actuellement, diffé­rents types d'inventaires sont réalisés, leur fina­lité est de caractériser exactement la notiond'arbre exploitable (Offermans et Vooren, enpréparation). Par ailleurs, le nombre et la fré­quence maxi males de chablis tolérables sansmodifier les processus de croissance et de succes­sion, sont étudiés (Bech, 1982).

Une étude a aussi porté sur le rôle des chabliset des troncs morts couchés, sur les mammifèresforestiers. En effet, l'exploitation forestièreclassique provoque la diminution des gîtes naturelsque sont les troncs creux (de Leeuw et Sinoo,1982).

De plus, la mise au point d'un procédé originalde photographie aérienne, à l'aide d'un "ULM"(Ultra Léger Motorisé, Photo 25) permet la réali­sation de clichés à des échelles allant de 1:200à 1:2000.

Ces photographies, stéréoscopiques, permet­tent de reconnaître les particularités individuellesdes arbres et leur état de vieillissement, notam­ment par la visualisation et la perte des branchesprincipales (Photo 26).

La géométrie des photographies réaliséesest vérifiée à partir d'un réseau de points ausol et, actuellement, des expérimentations sonteffectuées sur une parcelle d'étude de 17 haen forêt de Taï.

Le fait que la même personne soit en mêmetemps le pilote, le photographe et l'écologisteassure à cette méthode d'évaluation des arbresune grande fiabilité et un prix de revient peuélevé (Vooren et Offermans, 1984).

EVOLUTION DES POPULATIONS ANIMALESET VEGETALES PARASITES DES CULTURES

Toutes les opérations de ce programme sontachevées ou arrivent à leur terme sur le terrain

230

à l'exception de celle qui est intitulée "Préda­teurs animaux et régénération des essences fores­tières". Il est évident qu'il reste beaucoup àfaire, tant sur le plan de l'exploitation des résul­tats que sur celui des prolongements possibles:déprédateurs des plantations de type industriel,contrôle permanent des risques, étude de la re­constitution de la faune forestière qui, sauf dansle cas des fourmis, n'a pas été poursuivie au­delà du stade arbustif pionnier de 3 ans.

Des sondages plus généralisés sur jachèresanciennes permettraient d'obtenir des informa­tions tout à fait complémentaires, sur le planzoologique, des résultats déjà publiés par lesbotanistes dans le domaine de la reconstitutiondu milieu naturel.

EVOLUTION DES POPULATIONSANIMALES ET SANTE

R. Cordellier a souligné dans le chapitre sur"La santé humaine" l'hétérogénéité apparente,ou plus exactement les regroupements internes,dans ce programme essentiellement voué à lasanté rurale.

L'intérêt des opérations portant sur l'étudedes conditions du virus amaril est considérable­ment réduit à cause du retard dans l'édificationde la tour.

Simulies et onchocercose, glossines et try­panosomiase, mollusques et schistosomes, anophè­les et paludisme n'ont donné lieu qu'à des enquêtespréliminaires qui devraient être suivies d'étudesapprofondies et d'autant plus urge,ntes que lacolonisation du Sud-Ouest, le developpementdes centres urbains, la création du barrage surle Sassandra accroissent l'importance des risques.

EVOLUTION DES POPULATIONSDE GRANDS ANIMA UX

Ce sont les grands animaux qui avec l'amenuise­ment de leur habitat sont actuellement les plusmenacés; les études de populations, biologie,écologie doivent être poursuivies et renforcées.Sur le plan pratique, il existe un personnel d'en­cadrement et de gestion qui sait utiliser les ré­sultats de recherche et poser des questions auxchercheurs.

Nul doute que tous les animaux, vertébréset invertébrés, devraient être étudiés et on rejointlà une voie qui devra être privilégiée par la suite,celle de l'étude des composants et des fonction­nements de l'écosystème forestier.

Page 231: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Critiques et perspectives

EVOLUTION DE L'EMPRISE HUMAINE

Les opérations destinées à traiter des bases del'occupation humaine et du dynamisme pionniersont arrivées à leur terme et furent sanctionnéespar de nombreux travaux. Les études des nouvel­les structures mises en place par le Gouverne­ment ivoirien n'ont portées que sur certains aspectsde celles-ci, elles devraient être diversifiéespour en couvrir la totalité.

On ne peut que regretter que les étudesdu peuplement historique et de la sensibilisationdes populations au problème de l'environnementn'aient pas pu se faire. L'opération "Contrainteagronomique dans les systèmes de culture tradi­tionnels" devrait, à notre avis, être réorientéeen fonction des résultats acquis par les diversesdisciplines (voir chapitre sur "Le système culturalet ses contraintes").

A l'issue du Projet de recherche interdiscipli­naire pilote intitulé "Le dynamisme pionnierdans le Sud-Ouest ivoirien. Ses effets sur lemilieu forestier" (Léna, Martinet, Richard etSchwartz, 1977) ses auteurs expri maient lesrecommandations suivantes:

"L'étude qui précède a été volontairementfocalisée sur une des modalités d'occupationde l'espace parmi d'autres: La colonisation dela forêt par des planteurs inorganisés. Maisce type d'i mplanta tion ali menté par un importantflux migratoire se trouve déjà circonscrit etlimité puisque de nombreux projets d'aménage­ment économique ont déjà défini leur périmètred'action, ne laissant que peu d'espace libre. Ilest donc maintenant nécessaire d'étudier lesautres formes d'occupation de l'espace forestieret pour cela nous devrons considérer le Sud­Ouest dans son ensemble en procédant cependantà des analyses ponctuelles qui permettront d'affinerla qualité de l'information dans un but de com­paraison.

Il conviendrait, dans cette optique, d'exami-ner les systèmes de production suivants:

les plantations encadrées par la SATMACI ;les blocs cacaoyers;les systèmes mis en place par les effortsde restructuration rurale (synonyme d'intensi­fication) ;les plantations villageoises aSSOClees auxplantations des Sociétés d'Etat;les plantations industrielles.

Le fil conducteur devrait être le rapportentre le niveau technologique requis (et doncl'investissement), la qualité et la forme de travailnécessaires ainsi que les revenus assurés parles différents types d'activité. Nous pourronsainsi, grâce à la mise en lumière des disparités,cerner les futures tendances au niveau de larégion.

231

Nous tenons également à souligner l'impor­tance de deux approches qui nous paraissentessentielles pour rnener à bien cette étude:

la photographie aérienne, qui permet deresituer les réalisations économiques dans lecontexte plus général du milieu naturel et demettre ainsi en évidence le rapport entre lesformes d'occupation de l'espace et les contrain­tes différentes que le milieu oppose à chacundes types de mise en valeur (qui sont l'expressionde niveaux technologiques et d'organisation dutra vail disti ncte) ;

la collaboration de naturalistes afin de dé­finir locale ment les contraintes et potentialitésque le milieu peut offrir à telle ou telle innova­tion et par conséquent les formes de travailqui seraient les mieux appropriées".

En 1979, les chercheurs du programme "Evo­lution de l'emprise humaine" suggéraient d'effec­tuer un recensement régional afin de connaîtrel'évolution de la population entre 1975 et 1980complétant ainsi l'étude des dynamismes quin'avaient porté que sur la période 1970-1975.Fallait-il souligner l'intérêt de cet apport pourla planification du développement de la régiondu Sud-Ouest?

EVOLUTION DU PAYSAGE FORESTIER

La cartographie intégrée du milieu naturel estune des opérations qui devrait permettre d'expri­mer de façon synthétique les données relativesau milieu. Elle pourrait constituer une bonnevoie d'approche vers la régionalisation d'unepart, vers les utilisateurs d'autre part.

Il est impératif qu'une telle approche sefasse en liaison étroite avec les disciplines dumilieu et qu'elle utilise leurs résultats.

LES RECHERCHES HORS DESPROBLEMATIQUES DU PROJET

Nous ne pouvons présenter les résultats de toutesles recherches exécutées hors du Projet Taï,mais qui furent menées à partir de matérielcollecté par les chercheurs attachés au Projetou qui ont, avec l'accord du Ministère de la Re­cherche Scientifique de Côte d'Ivoire et du Co­ordonnateur scientifique du Projet, bénéficiédes structures scientifiques et techniques enplace. Nous ne donnerons que quelques exemples.

Inventaire des batraciens, dont les résultatsne sont pas encore publiés, ou étude des droso­philes (Lachaise et al., 1981 ; Rio et al., 1983;Tsacas et Chassagnard, 1981), ces recherchessont des contributions importantes à la connais-

Page 232: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

sance de la forêt dense humide sempervirentede la Côte d'Ivoire et des organismes qui le consti­tuent.

Par ailleurs, la présence de la Station écolo­gique dans une région qui, grâce à l'existencedu Parc National, reste peu ou pas affectée parles activités humaines, a été mise à profit pourdes recherches sur la pollution atmosphérique,Taï représentant le témoin indemne de pollution.

Curieusement, l'atmosphère de Taï, com mecelle des autres sites forestiers de Côte d'Ivoire,recèle une teneur en anhydre sulfureux et autresdérivés du soufre, généralement considérés comme"polluants", élevée et très largement supérieureà celle des régions agricoles françaises. Ceciserait dû à la décomposition des matières orga­niques dans un milieu pauvre en oxygène (Del maset al., 1978 et 1979).

Même si l'on considérait que les objectifsdu Projet Taï avaient été atteints et qu'il étaitde ce fait inutile de continuer celui-ci, la présencede la Station écologique à proximité du Parcnational dans un cadre forestier unique en Afriquede l'Ouest devrait être maintenue et valorisée.

La Station écologique, dont le Ministèrede la Recherche scientifique assure le fonctionne­ment à travers ses différentes structures derecherche, a déjà accueilli des activités de recher­che variées; il faut en inc:iter et encouragerde nouvelles.

Nous ne citerons en exemple que le dévelop­pement du programme de l'ECOTROP (CNRS­FRANCE) "Interface plantes-insectes en milieuforestier tropical: relations entre les stratégiesadaptatives des figuiers et celles des insectesdes figues", associant des chercheurs de diversesnationalités et celui qui est lié au précédent"Variabilité génétique intra et interspécifiquedans le sous-groupe Melanogaster (Drosophila)associée à différents habitats d'une forêt tropicalede Côte d'Ivoire" mené par le Laboratoire deBiologie et Génétique évolutives du CNRS.

Les populations de Drosophila indigènesà Taï semblent avoir évolué sur place depuisfort longtemps, à l'abri de "contaminations"extérieures. Il n'est pas exclu d'ailleurs queD. melanogaster soit à Taï dans l'un de ses habi­tats "historiques"; hypothèse qui, si elle devaitse confirmer, conférerait à la population deD. melanogaster de Taï un intérêt exceptionnel.

Les références de ces travaux, hors Projet,sont citées dans la bibliographie figurant à l'Annexe2. Ils sont d'une grande importance pour la con­naissance du milieu forestier africain et ontvalorisé, s'il en était besoin, l'effort consentipar la Côte d'Ivoire et les différents organismesparticipants dans la mise en œuvre du ProjetTaï.

LA FORMATION

L'Unesco avait envisagé la possibilité d'un stagedestiné à assurer un complément de formationaux chercheurs, ingénieurs ou techniciens sespécialisant en entomologie générale ou agricole.

Le projet présenté par G. Couturier à lademande de 1\1. Kabala prévoyait une formationpratique au laboratoire et sur le terrain recou­vrant, outre un rappel indispensable des connais­sances, les problèmes d'inventaire, la conceptionet l'établissement de collections de référenceet les techniques de collectes. La durée d'untel stage devrait être de six à huit semaines.

Ce type de formation pratique devrait êtredéveloppé et ouvert sur d'autres disciplines auxchercheurs, ingénieurs et techniciens de diffé­rents pays. On a vu le succès du stage organiséen 1980 à Abidjan.

Ainsi l'Institut d'Ecologie tropicale rempliraitson rôle de Centre de formation décidé en 1975à la réunion de Kinshasa.

L'UTILISATION DES RESULTATS

Ce dernier point reste le plus important et leplus délicat. Les structures de la RechercheScientifique en Côte d'Ivoire permettent ce dia­logue nécessaire entre la recherche et ses utili­sateurs. Encore faut-il que les différentes partiesfassent un effort de compréhension mutuelle,que les utilisateurs sachent poser les questionset les chercheurs formuler leurs résultats enfonction de celles-ci.

Nul doute que dès maintenant, les partici­pants du Projet Taï ne puissent clairement expri­mer un certain nombre de recommandationsen termes de contraintes et d'alternatives etproposer aux organismes techniques des schémasd'observations continues. Mais pour aller plusloin, et c'est une des voies que nous recom man­dons pour la poursuite de la tâche commencée,il faut prévoir confrontations et discussions entreles différents partenaires, y compris les utilisa­teurs directs que sont les habitants du Sud-Ouest.

CONCLUSION

En guise de conclusion, nous voudrions seulementrappeler le désir de tous les participants du ProjetTaï de voir leur expérience aider d'autres équipestravaillant dans des conditions identiques etles résultats de leurs travaux servir aux hommesdu Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire.

232

Page 233: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Annexe 1La station écologique de Taï

La Station écologique de l'Institut d'EcologieTropicale (Fig. 55) est située dans la zone deprotection du Parc National de Taï à sa périphé­rie ouest. On y accède par une route de 12 kmsituée entre Gouléako et Pauléoula à 22 km ausud de la ville de Taï (Photo 27).

Les bâtiments sont construits sur la rivedroite de l'Audrenisrou, affluent du Cavally.Le réseau de routes, ouvert par les exploitantsforestiers avant la mise en place de la Station,a été mise à profit pour desservir les installationsscientifiques.

LOGEMENT

1 maison gérant: 2 chambres à usage person­nel et 1 chambre de passage indépendante;2 maisons de chercheurs: capacité maxi malede 20 lits;1 bâtiment personnel permanent: 3 apparte­ments et 2 chambres;1 maison personnel permanent: 1 apparte­ment;1 maison personnel de passage: capaci témaximale de 16 lits;1 paillotte à usage de salle à manger etde réunion.

Dispersées sur le péri mètre de la station:

1 case destinée à l'entomologie médicale;1 case sur la bassin versant à l'usage deshydrologues ;1 case sur le réseau d'observation des singes.

LABORATOIRES (Photo 28)

1 laboratoire climatisé équipé de matérield'optique (l microscope et 1 loupe binocu­laire Wild), de pesage (balances), de séchage(étuves) ;1 laboratoire ouvert destiné aux tris et lavages.

233

AUTRES CONSTRUCTIONS

château d'eau, abris pour groupes électro­gènes;bureau, magasin, garage;4 cages à singes.

INSTALLATIONS EXPERIMENTALES

On ne peut citer que les installations permanentesou celles qui ont été maintenues plusieurs annéeset sont encore utilisables. On trouvera dansles différents rapports et publications des donnéesprécises sur les dispositifs qui se sont succédéssur la Station:

poste météorologique;bassins versants équipés pour l'étude del'hydrologie de surface (Photos 29 et 30);bassins versants sous forêt naturelle (7,3 ha)comprenant 3 cases d'érosion;bassin versant cultivé (3,3 ha) comprenant3 cases d'érosion et un pluviomètre;réseau de layons sur 4 km L pour l'observa­tion dE:S singes.

VEHICULES

1 Toyota tout terrain;di vers véhicules de service.

PERSONNEL PERMANENT

1 gérant;1 adjoint;1 chauffeur;4 à 5 commis.

REMARQUE: Une partie de Péquipement dela Station a été fournie par l'Unesco.

Page 234: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï": recherche et aménagement

---0-­14

Cours d'eau

Limites de bassin versant

Pistes carrossables

Sentiers

Layons

1 - Bassi n versant III : ba rrage et seu il de jaugeage2 • Bassin versant Il : si te prévu pour le barrage3 • Bassin versant 1: sous forêt naturelle4 - Parcelles expérimentales comparatives en forêt et cultivées5 - Batteries de pluviomètres linéaires6 - Poste météorologique7 - Parcelles cultivées clôturée et non clôturée8 . Bassin versant cultivé en riz9 • Parcelles expérimentales en forêt

10 • Tranchée de capture11 - Dispositif de jaugeage12 - Périmètre d'observation13 - Parcelles pour mesures de croissance et de mortal ité

forestières14 - Emplacement prévu pour tour météo15 • Station16 - Case-entomologie médicale17 • Case-hydrologie18 - Case-observation des singes19 - Tour d'observation

234

Page 235: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Limiteet layon périphérique

du parc national

N

t

".........'

······Limi te ouest dela zone d'affectntion

............

~..

Annexe 1 La Station écologique de TaT

-----... ..:...

,,......,'

' .

..\:;:".

12

a 2 3km

FIGURE 55. La Station écologique de Ta'f (Institut d't;cologie tropicale d'Abidjan)

235

Page 236: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

Photo 27. Vue générale de la station écologique

Photo 28. Le laboratoire climatisé

236

Page 237: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Annexe 1 : La Station écologique de Taï'

Photo 29. Case permanente installéesur le bassin versant nO 1 à l'usatge deshydrologues. On notera la présence d'unNiangon (Tarrietia utilis) au premier plan

Photo 30. Bas-fond aménagé sur la pistedesservant un des bassins versants

237

Page 238: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 239: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Annexe IIPublications, rapports, thèses et communications

Certaines publications n'ont pas été réalisées dans le cadre du Projet Taï, mais ont bénéficié des installations matérielles ouutilisé des collections, échantillons et données provenant de la région. Ce sont, par exemple, des travaux méthodologiqiles, desanalyses bibliographiques, les études sur les composants de l'atmosphère, les descriptions de nouvelles espèces animales, des tra­vaux généraux utilisant en tout ou en partie des données acquises grâce à l'existence du Projet.

***

ANON.1980. Rapport final sur le cours régional en écologieforestière tropicale. Projet Taï, IUET, Abidjan, 71 p. mul­tigr.

AKE ASSI, L., POCS, Th.; 1983. Hépatiques de Côte d'Ivoire.Cryptogamie, Bryol. Lichénol., 4(1), p. 65-70.

ALEXANDRE, D.Y., 1977a. Essai de définition morphologiquede la plantule. ORSTOM, Adiopodoumé. 9 p. multigr.

ALEXANDRE, D.Y., 1977b. Essai d'approche schématique desphénomènes de compétition au cours de la régénération etson application au problème des adventices dans le sys­tème agricole traditionnel. ORSTOM, Adiopodoumé. 17 p.multigr.

ALEXANDRE, D.Y., 1978a.Le rôle disséminateur des éléphantsen forêt de Taï, Côte d'Ivoire. La Terre et la Vie, 32,p.47­72.

ALEXANDRE, D.Y., 1978b. Observations sur l'écologie deTrema guineensisen Basse Côte d'Ivoire. ln: Observationssur les premiers stades de reconstitution de la forêt densehumide (sud-ouest de la Côte d'lvoire).Cah.'ORSTOM, sér.Biol., 13(3), p. 261-266.

ALEXANDRE, D.Y., 1979. De la régénération naturelle à lasylviculture en forêt tropicale. ORSTOM, Adiopodoumé,33 p. multigr.

ALEXA NDRE, D. Y., 1980a. Caractère saisonnier de la fructi-fication dans une forêt hygrophile de Côte d'Ivoire. LaTerre et la Vie, 34(4), p. 335-350 + tabl. h.t.

ALEXANDRE, D.Y., 1980b. Le régime des éléphants du centrede la Côte d'Ivoire. La Terre et la Vie, 34(4), p. 655-'-657.

ALEXANDRE, D.Y., 1981. L'indice foliaire des forêts tropica-les. Analyse bibliographique. Acta Oecologica, Oecol.gener., 2(4), 'p. 299-312.

ALEXANDRE, D.Y., 1982a. Aspects de la régénération na­turelle en forêt dense de Côte d'Ivoire. Candollea, 37(2),p. 579-588.

ALEXANDRE, D.Y., 1982b. La dispersion de Solanum verba­scifolium en Côte d'Ivoire: role des Céphalophes. La Terreet la Vie, 36(2), p. 293-295.

ALEXANDRE, D.Y., 1982c. Pénétration de la lumière au ni-veau du sou-bois d'une forêt dense tropicale.Ann. Sc. For.,49(4), p. 103-122.

ALEXANDRE, D.Y., 1982d. Etude de l'éclairement du sous­bois d'une forêt dense humide sempervirente (Taï, Côted'Ivoire). Acta Oecologica,oecol. gener., 3(4), p. 407-447.

ALEXANDRE, D.Y., 1984. Croissance et démographie dessemis naturels en forêt de Taï (Côte d'Ivoire). ln: Verté-

239

bréset forêts tropicales humides d'Afrique et d'Amé­rique. Entretiens du Muséum (décembre 1982).Mém.Mus.nat. Hist. nat. (sous presse).

ALEXANDRE, D.Y.; GNESIO TEHE, H.; 1981. Le recrû aprèsexploitation forestière dans la région de Taï. In : Trans­actions 6° Congrès IUFRO Salonique, Athènes, 1980,p. 349-366.

ALEXANDRE, D.Y.;.GUILLAUMET, J-L.; KAHN,F.; NAMUR,Ch. de, 1978. Conclusion: caractéristiques des premiers sta­

des de reconstitution. ln: Observations sur les premiersstades de la reconstitution de la forêt dense humide (sud­ouest de la Côte d'Ivoire). Cah. ORSTOM,sér.Biol., 13(3),p. 267-270.

AMAN KA DIO, G., 1978. Principaux groupes indicateurs dansla {lore des advantices de l'hévéaculture de la Station ex­périmentale de l'Anguédédou (Côte d'ivoire). Ann. Univ.Abidjan, série E (Ecologie), Il, p. 101-120.

AMAN KADlO, G., 1980. Effets conjugués du déboisementet de la lumière solaire sur la germination des semencescontenues dans les sols sous forêts : premiers résul­tats expérimentaux. Transactions sixième Colloque in­ternational sur l'écologie, la biologie et le systématiquedes mauvaises herbes, 1, 35-46. Montpellier.

AOUTI, A., 1977. Données écologiques biologiques'et histolo­giques sur le diplopode Spirobolidae Pachybalus lumina­tus. Thèse d'Etat, Univ. Abidjan, 7 mai 1977. 1_56 p.

AOUTI, A., 1978. Etude comparée des peupfements de Myria­podes Diplopodes d'une forêt hygrophile et d'une planta­tion d'Hévéas en Basse Côte d'Ivoire. Ann. Univ. Abidjan,sér. E (Ecologie), Il, p. 7-32.

BARTOLI, A.; MAGGI, O., 1978. Four new species of Asper­gillus from Ivory Coast soi!. Trans. Brit. Mycol. Soc., 71(3), p. 383-394.

BARTOLl, A.; MAGGI, O. ; FANELLI, C. ; PUPPI, G. ;ALBONETTI, S.G.; MASSARI, G. ; RAMBELLI, A., 1978. In­

dagini micologiche preliminari nella foresta di Taï inCosta d'Avorio. Note su Aspergillus longivesica Huang etRaper. Giorn. Bot. ital., 112(3), p. 197-208.

BECH, N.J., 1982. La durée du cycle sylvigénétique en forêtde Taï, Côte d'1voire. Thèse, Univ. agr. Wageningen, 74 p.multigr.

BOESCH, Ch., 1978. Nouvelles informations sur les chimpan­zés de la forêt de Taï (Côte d'Ivoire). La Terre et la Vie,32(2), p. 195-202.

BOESCH, Ch.; BOESCH, H., 1981. Sex differences in the use

Page 240: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï' : recherche et aménagement

of natural hammers by wild chimpanzees: a preliminaryreport. Joum. Hum. Evo!., 10, p. 585-593.

BOESCH, Ch.; BOESCH, H., 1983. Optimisation of nut-crack­ing with natural hammers by wild chimpanzees. Be­haviour, 83(3-4}, p. 265-286.

BONNIS, G., 1980. Etude des chablis en forêt dense humidesempervirente naturelle de Taï (Côte d'Ivoire). ORSTOM,Côte d'Ivoire, 29 p. multigr.

BOULARD, M., 1984. Hylora villiersi, cigale nouvelle del'ouest africain (Hom. Tibicinae). Revue fr. Ent., (N.S.),6(2} (sous presse).

BOULARD, M.; COUTURIER, G. ,1984. Eumonocentrus vil­liersi, nouveau Membracidae de Côte d'Ivoire (HomopteraAuchenorhyncha). Revue fr. Ent., (N.S.), 6 (2), (souspresse).

BOURGERON, P.S., 1978. Etude quantitative de la structurede la forêt de Taï (Côte d'Ivoire).Thèse de 3° cycle, Univ.de Paris VII.

BOU RGERON, P.S., 1983. Spatial aspects of vegetationstructure. ln: F.B. Golley (Ed.), Tropical rain forestecosystems, p. 29-47, Elsevier, Amsterdam.

BOURGERON, P.S. Vegetation of the Taï forest (Ivory Coast):a multivariate approach. Joum. Afr. Ecol. (sous presse).

BOURGERON, P.S. ; GUILLAUMET, J-L. , 1982. Verticalstructure of trees in the Taï forest (Ivory Coast) : a mor­phological and structural approach. Candollea, 37 (2),p. 565-577.

BRICENO P. 1979. Le statut naturel d'une essence commer­cialis~e ~n forêt (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Tarrie­tia utilis (Sprague) Sprague.ORSTOM, Côte d'Ivoire, 24 p.multigr.

CANEVA, G.; RAMBELLI, A., 1981. Danaea nuovo generedi ifale demaziaceo. Micologia Italiana, 1, p. 47-49.

CARDON, D., 1978. Etat des connaissances climatiques dansle Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Projet Taï. IUET,Abidjan, 56 p., multigr.

CARDON, D., 1978. Etat des connaissances climatiques dansle Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Projet Taï. IUET,Abidjan, 56 p. multigr.

CARDON, D., 1979a. Quinze mois de mesures météorologi-ques en forêt de Taï. Projet Taï. IUET, Abidjan, 28 p.multigr.

CARDON, D., 1979b. Un an de mesures de l'interception de lapluie. Projet Taï, IUET, Abidjan, 18 p. multigr.

CARDON, D. ; CHEFSON, G. , 1979. Mise au point d'un appa­reil permettant d'inverser et d'humecter automatique­ment deux psychromètres au-dessus d'une forêt tropicale.Projet Taï. IUET, Abidjan, 15 p. multigr.

CARRERO, 0.,1979. Comportements naturels de trois essen­ces commercialisées dans les stades de reconstitution dela forêt (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Ceiba pentandra(L.) Gaertn. Piptadeniastrum africanum Brenan. Termi­nalia superba Engl. et Diels. ORSTOM, Adiopodoumé,27 p. multigr.

CASEN AVE, A., 1981. Etude des crues décennales des petitsbassins forestiers en Afrique tropicale. Rapport final.CIEH-ORSTOM, Adiopodoumé, 59 p. mlutigr.

CASENAVE, A.; FLORY, J. j GUIGUEN, N. ; RANC, N. ;SIMON, J-M. ; TOILLIEZ, J.; TOURNE, M. ,1980. Etude hy­

drologique des bassins de Tat Campagnes 1978-1979.ORSTOM, Adiopodoumé, 78 p. multigr.

CASENAVE, A.; FLORY,J.; RANC, N.; SIMON, J-M., 1981.Etude hydrologique des bassins de Taï: Campagne 1980.ORSTOM, Adiopodoumé, 37 p. multigr.

CASENAVE, A. ; GUIGUEN, N., 1978. Etude des crues décen­nales des petits bassins forestiers en Afrique tropicale.Détermination des caractéristiques hydrodynamiques dessols forestiers. Campagne 1977. ORSTOM, Adiopodoumé,multigr.

CASENAVE, A. , GUIGUEN, N. ; SIMON, J-M. ,1979. Etude

240

des crues décennales des petits bassins forestiers enAfrique tropicale. Détermination des caractéristiques hy­drodynamiques des sols forestiers. Campagne 1978. CIEH­ORSTOM, Adiopodoumé, 64 p. multigr.

COLLINET. J., 1979.Compte-rendu de deux campagnes de si­mulation de pluies sur le bassin cultivé de la station éco­logique de Taï. Projet Taï. ORSTOM, Abidjan, multigr.

COLLIN ET, J., 1983". Hydrodynamique superficielle et éro-sion comparées sur sols représentatifs des sites forestierset cultivés de la station écologique de Taï' (Sud-Ouestivoirien). ORSTOM, Adiopodoumé, 15 p. multigr.

COLLINET, J. ; VALENTIN, C., 1979a. Un schéma des inter­relations hydrodynamiques dans les milieux naturelset cultivés, valorisation des données morphologiques.ORSTOM, Adiopodoumé, 22 p. multigr.

COLLINET, J. ; VALENTIN, C. ,1979b. Analyse des diffé-rents facteurs intervenant sur l'hydrodynamique superfi­cielle. Nouvelles perspectives.Applications agronomiques.Cah. ORSTOM, sér. Pédologie, 17(4}, p. 283-328.

CORDELLIER, R. ; AKOLIBA, P. , 1981. Les moustiques de laforêt sempervirente du Sud-Ouest ivoirien. 1. Etude ducontact entre l'hom me et les vecteurs ~otentjels

de fièvre jaune au niveau du sol. Cah. ORSTOM, sér. Ent.Méd. et Parasito!., 19(4}, p. 297-301.

COURTOIS, B., 1979. A propos de deux nouveaux spécimensd'A tractaspis corpulenta (Hallowell) trouvés en Côted'Ivoire. Bull.IFAN, 41(1}, p. 206-209.

COUTU RIER, G., 1983. Les hétéroptères vivant au pied desFicus en Côte d'Ivoire. ECOTROP/CNRS et ORSTOM,Paris, 13 p. multigr.

COUTURIER, G., 1984. L'action dépréda trice des insectes surles fruits et graines de Chrysophyllum taiense (SaIJota­ceae) en forêt de Taï (Côte d'Ivoire). Note sur le rôle dela forêt com me réservoir d'l déprédateurs des cacaoyers.Ann. Univ. Abidjan, sér. E (Ecologie) (sous presse).

COUTURIER, G.; DONSKOFF, M. ; DUVIARD, D.; LE"CORDIER, Ch. , 1984. Influence de la pénétration humaine

sur les peuplements entomologiques en forêt de Taï (Côted'Ivoire). II. Les peuplements Acridiens. Ann. Univ. Abid­jan, sér. E (Ecologie) (sous presse).

COUTURIER, G. ; LACHAISE, D. ,1982. Le peuplement d'in­sectes en forêt de Taï (Côte d'Ivoire) : 1. Modifications dupeuplement dues à l'intervention humaine. II. Les in­sectes associés aux figuiers en forêt de Taï : le té­moignage d'une longue histoire commune. Bull. Soc. Ent.France,87(9-10}, p. 384-388.

COUTURIER, G. ; PERRIN, H., 1982. Alcidodes è>revirostrisspp. simus Chevr. (Col. Curculionidae), un important dé­prédateur du Gombo dans la région de Taï, en Côted'Ivoire. Agronomie tropicale, 37(2}, p. 195-202.

DAN DAN, P., 1983. Etude hydropluviométrique des bassinsversants expérimentaux de Taï dans leur contexte régio­nal. (Mémoire de fin d'études.) ORSTOM, Adiopodouméet Ministère des Travaux Publics et Transports/ENSI,40 p. multigr.

DELMAS, R. ; BAUDET, J. ; SERVANT, J. , 1978.Mise en évi­dence des sources naturelles de suifa te en milieu tropicalhumide. Tellus, 30(2}, p. 158-168.

DELMAS, R. ; BAUDET, J.; SERVANT, J.; BAZIARD, Y. ,1979. Emissions and concentrations of hydrogen sulfidein the air of the tropical forest of the Ivory Coast and oftemperate regions of France. Comm. à la 4ème Conf. In­tern. de la Comm. sur la Chimie atmosph. et la Pollution(12-19 août 1979. Univ. du Colorado, Boulder).

DE ROUW, A., 1979. La culture traditionnelle dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire (Région de Taï) : le sys­tème Oubi confronté aux pratiques agricoles des Baoulésimmigrés. ORSTOM, Côte d'Ivoire, 41 p. multigr.

DIOMANDE, T., 1980. Les fourmis terricoles de forêt. Peu-plement de la forêt de Téké. Ann. Univ. Abidjan, sér. E(Ecologie), 13, p. 111-130.

Page 241: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Annexe 2 Publications, rapports, thèses et communications

OIOMANOE, T., 1981. Etucte du peuplement en fourmis terri­coles des forêts ombrophiles climaciques et des zones an­thropisées de la Côte d'lvoire méridionale. Thèse d'Etat,Univ. Abidjan, 12 mars 1981.

OONSKOFF, M., 1984. Les Acridiens de la forêt africaine.Il. Genres et espèces nouveaux de la forêt de Taï (Côted'Ivoire). Revue fr. Ent. (N.S.) (sous presse).

OOSSO, H., 1973. Technique d'étude des rongeurs. Applica­tions pratiques (rapport de stages, sept. 1973), 12 p. mul­tigr.

OOSSO, H., 1975a. Données préliminaires sur l'écologie desrongeurs de forêts à Adiopodoumé. Ann. Univ. Abidjan,sér. C, 12, p. 51-55.

OOSSO, H., 1975b. Liste préliminaire sur l'écologie des ron­geurs de la forêt de Taï(5053'N 7°23'W)en Côte d'Ivoire.Mammalia, 39, p. 111-149.

OOSSO, H., 1976a. Données sur les expériences de marquageset recaptures chez les rongeurs forestiers en Côted'lvoire. lUET, Abidjan, 86 p. multigr.

OOSSO, H., 1976b. Caractéristiques de quelques rongeurs deszones forestières cultivées. Projet Taï, IUET, Abidjan,23 p. multigr.

OOSSO, H., 1977. Territoire de Praomys et Hylomyscus (Mu­ridés de Basse Côte d'lvoire). Projet Taï. IUET, Abidjan,34 p. multigr.

OOSSO, H., 1981. Le développement et la conservation desterres dans les tropiques humides. Exemple du Sud-Ouestivoirien: Le Projet Taï: Comm. Conf. exp. scient. intern."L'écologie en action: établissement d'une base scienti­fique pour l'aménagement du territoire". Paris, 22-29sept. 1981,24 p. multigr.

OOSSO, H., 1983. Etude des rongeurs de forêts hygrophilesconservées et de zones anthropisées de la Côte d'Ivoireméridionale. Thèse d'Etat, Univ. Abidjan, Abidjan.

OOSSO, H., 1984. Large-scale development and conservatio~

in the Taï forest region of the Ivory Coast. ln: F. dlCastri, F.W.G. Baker, M. Hadley (Eds), Ecology in Prac­tice, Vol. f, Ecosystem management, p. 127-143. Ty­cooly, Dublin &. Unesco, Paris.

OOSSO, H.; GUILLAUMET. J-L. ,1977. "Projet Tai". Moti­vations, finalités, méthodologie. ln: E.F. Brünig (Ed.),Transactions Intemational MAB/lUFRO Workshop onTropical Rainforest Ecosystems, Hamburg-Reinbek, 12­17 May 1977, p. 95-103. Institute of World Forestry,Hamburg-Reinbek.

OOSSO, H.; GUILLAUMET, J-L,; HAOLEY, M., 1981. TheTaï Project : Land Use Problems in a Tropical RainForest. Ambio, 10(2-3), p. 120-125.

OOSSO, H. ; PETTER, F. ,1975. Présence d'Hylomyscus aeta(rongeurs, Muridés) en Côte d'Ivoire. Mammalia, 39(1),p. 515-517.

OUARTE ROORIGUES, P., 1983. African Tingidae, XXIX:Lacebugs from the fore st of Taï, Ivory Coast withdescription of one new genus and three new species (He­te ropte ra). Revue Fr. Ent., (N.S.), 5(1), p. 39-44.

OUVIARO, O. ; COUTURIER, G. ; OONSKOFF, M. , 1982. Im­pact of human penetration of the rain forest on in­sect communities : the case of acridids in the TaT ra inforest. "r oster" présenté pour le Symposium "The Tro­pical Rain Forest, Ecology and Resource Management".Leeds, 14-19 avril 1982, Univ. of Leeds, Leeds, U.K.

OUVIARO, O. ; COUTURIER, G. ; ROTH, M. , 1984. Influencede la pénétration humaine sur les peuplements entomo­logiques en forêt de Tai'(Côte d'Ivoire). 1. Milieux pros­pectés et méthodes d'étude. Ann. Univ. Abidjan, sér. E(Ecologie) (sous presse).

FORTUNER, R. ; COUTURIER, G. ,1983. Les nématodes pa­rasites de plantes de la forêt de Taï (Côte d'Ivoire). Re­vue Nématol., 6(1), p. 3-10.

FRITSCH, E., 1980. Etude pédologique et représentation car­tolographique à 1150.000 d'une zone de 1600 ha, représen-

241

tative de la région forestière du Sud-Ouest ivoirien. Rap­port d'élève, ORSTOM, Adiopodoumé, 137 p. multigr.

FRITSCH, E., 1982. Evolution des sols sous recrû forestieraprès mise en culture traditionnelle dans le Sud-Ouest dela Côte d'Ivoire. ORSTOM, Adiopodoumé, 74 p. multigr.

GALAT, G., 1978. Comparaison de l'abondance relative etdes associations plurispécifiques des primates diumes dedeux zones du Parc National de Taï (Côte d'Ivoire).ORSTOM, Adiopodoumé, 38 p. multigr.

GALAT, G., 1979. Effectifs et structures des bandes de pri­mates diurnes du Parc National de Taï, Côte d'Ivoire.(Communication au Symposium sur la Biologie des Cerco­pithèques, Oxford, 24 novembre 1978.) ORSTOM, Adio­podoumé, 9 p. multigr. + ann.

GALAT, G., 1983. Sodo-écologie du singe vert (èrcopithecusaethiops) en référence de quatre Cercopithecinés fores­tiers sympatriques (Cercocebus atys, Cercopithecuscampbelli,C. diana et C. petaurista) cf Afrique de l'Ouest.ORSTOM, 280 p. multigr. Thèse d'Etat, Univ. Paris VI,5 nov. 1983.

GALAT, G. ; GALAT-LUONG, A., 1982. Domaines vitaux,densités et stratification de sept Cercopithécidés fores­tiers d'un même. site du Parc National de Taï, Côted'Ivoire: Premiers résultats. Communication aux Entre­tiens du Muséum "Vertébrés en forêts tropicales humidesd'Afrique et d'Amérique". 14-16 décembre 1982, Paris,26 p. multigr.

GALAT-LUONG, A., 1979. lnteractions interspécifiques chezles primates diumes du Parc National de Taï; Côted'Ivoire. (Communication au Symposium sur la Biologiedes Cercopithèques, Oxford, 24 novembre 1978.) ProjetTaï. IUET, Abidjan, 19 p. multigr.

GALAT-LUONG, A., 1981. Quelques observations sur un hip­popotame pygmé nouveau-né (Choeropsis liberiensis) enforêt de Taï, Côte d'Ivoire. Mammalia,45(1), p. 39-41,1 pl.

GALAT-LUONG, A., 1983. Socio-écologie de trois Colobes(Colobus badius, C. polykomos et C. verus) sympatriquesdans le Parc National de Taï, Côte d'Ivoire. ORSTOM,226 p. multigr. Thèse d'Université, Univ. Paris VI, 5 nov.1983.

GALAT-LUONG, A. ; GALAT, G. ,1978. Abondances relati­ves et associations plurispécifiques des primates diumesdu Parc National de Taï, Côte d'Ivoire. ORSTOM, Adio­podoumé, 39 p. multigr.

GALAT-LUONG, A. ; GALAT, G. ,1979. Conséquences com­portementales de perturbations sociales répétées dansune troupe de Mones de Lowe, Cercopithecus campbellilowei de Côte d'Ivoire. La Terre et la Vie, 33(1), p. 49-58.

GNESIO TEHE, H., 1980. Compréhension et utilisation dumonde végétal chez les Guérés et les Oubis (Sud-Ouest dela Côte d'Ivoire). ORSTOM, Adiopodoumé, 33 p. multigr.

GOLLEY, F. ; HAOLEY, M. ,1981. Les métamorphoses de laforêt. Le Projet Taï, Côte d'Ivoire. In: Grandeur et fra­gilité des forêts tropicales. Le Courrier de l'Unesco, 34,p. 17.

GRAF, J.F.; NIEDER ER, A.; AESCHLIMANN, A. ; BURG­OORFER, W. ,1981. Presence of micro-organisms in ticks

from the Ivory Coast. In: Proceedings of IntemationalConference on Ticks Biology and Control (27-29 janv.1981, Grahamtown (Rhodes University) South Africa),p.151-155.

GRONNER, J., 1982. Les Bété de Soubré et le développementrégional (sud-ouest de la Côte d'Ivoire). Thèse de 3èmecycle. EHESS/ORSTOM, Paris, 574 p. multigr.

GUlL LA UMET, J-L., 1976. Le projet de la forêt de Taï enCôte d'Ivoire. 2. Programme de recherches, progrès etperspective. Nature et Ressources, 12(2), p. 3-5.

GUILLAUMET, J-L., 1978. Présentation. In : Observations surles premiers stades de la reconstitution de la forêt dense

Page 242: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï" : Recherche et aménagement

humide (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Cah. ORSTOM,sér. Biol., 13(3), p. 189-190.

GUILLAUMET, J-L.; KAHN, F. ,1979. Description des végé­tations forestières tropicales, approche morphologique etstructurale. Candollea, 34(1), p. 109-131.

HENTSCHEL, K.,1983. Etudes sur l'écologie de l'Hippopo-tame nain (Choeropsis liberiensis) (en langue allemande).Thèse Univ. Technique de Braunschweig, Braunschweig.

HERVY, J.P. ; OUEDRAOGO, C. ; BRENGUES, J. , 1980. Ef­fets de l'accroissement des activités humaines sur laforêt du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Enquêtes sur lesAnophèles, en relation avec la transmission du paludisme,et sur certains autres Culicidae. Centre Muraz et MissionORSTOM auprès de l'OCCGE, Bobo-Dioulasso, 33 p. mul­tigr.

HUET, J., 1977. Effets de l'accroissement des activitéshumaines sur la forêt du Sud-Ouest. Evaluation bud­gétaire. Côte d'Ivoire. Rapport technique pp/1975-76/2.212.5. Unesco, Paris.

HUTTEL, Ch., 1977. Etude de quelques caractéristiquesstructurales de la végétation du bassin versant del'Audrénisrou.. ORSTOM, Adiopodoumé, 23 p. multigr.

JAFFRE, T., 1983. Etude de la composition minérale et dustock de bioéléments dans la masse épigée de recrûs fo­restiers du Sud-Ouest de la Côte-d'Ivoire. ORSTOM,Adiopodoumé, 23 p.

JAFFRE, T. ; FRITSCH, E. ; NAMUR, Ch. de, 1983. Etudede la biomasse végétale et du stock de carbone dans lavégétation, la litière et le sol au cours de la successionsecondaire dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Com­mun. au Premier Colloque de l'action incitative MRI/PIREN sur le cycle du carbone. Meudon, 10-11 mars1983. 15 p. multigr.

JAFFRE, T. ; NAMUR, Ch. de , 1983. Evolution de la bio­masse végétale épigée au cours de la succession secon­daire dans le Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Acta Oecolo­gica, Oecol. Plant., 4(3), p. 259-272.

JAFFRE, T.; NAMUR, Ch.de; FRITSCH, E.; MONTENY,B.A.;BARBIER, J-M.; OMONT, 1., 1983. Contribution à l'étude de

l'influence de la déforestation en zone équatoriale surl'évolution de la concentration en gaz carbonique de l'at­mosphère. Projet interéquipes-Forêt ivoirienne. PIREN/ORSTOM. ORSTOM, Adiopodoumé, 31 p. multigr.

JAFFRE, T; NAMUR, Ch. de; MONTENY, B.; FRITSCH, E. ,1982. Etude de l'influence de la déforestation en zoneéquatoriale sur l'évolution de la concentration en gazcarbonique de l'atmosphère. (Etat d'avancement.) Abid­jan, ORSTOM, Adiopodoumé, 45 p. multigr.

KAHN, F., 1978a. Etude dynamique des végétations fores­tières tropicales. Application aux friches du Sud-Ouestivoirien. ln: Recherche d'un langage transdisciplinairepour l'étude du milieu naturel. Coll. Travaux et Docu­mentsde l'ORSTOM, 91, p.1l7-126.

KAHN, F., 1978b. Evolution structurale du peuplement deMacaranga hurifolia. ln: Observations sur les premiersstades de la re·constitution de la forêt dense humide (Sud­Ouest de la Côte d'Ivoire). Cah. ORSTOM, sér. Biol., 13(3), p. 223-238.

KAHN, F., 1978c. Occupation spatiale du sol par les peuple­ments de Macaranga hurifolia. ln: Observations sur lespremiers stades de la reconstitution de la forêt densehumide (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Cah. ORSTOM,sér. Biol., 13(3), p. 238-254.

KAHN, F., 1979. Architecture et dynamique spatiale ra-cinaires chez les plantes ligneuses des zones forestièrestropicales humides. Projet Taï, IUET, Abidjan, 17 p. mul­tigr.

KAHN, F., 1980a. Comportements racinaires et aériens chezles plantes ligneuses de la forêt tropicale humide (Sud­Ouest de la Côte d'Ivoire). Adansonia, sér. 2,19(4),p.413­427.

242

KAHN, F., 1980b. Considérations pour un aménagement sylvi­cole des stades de reconstitution de la forêt tropicaledense humide (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Thessalo­niki, Greece, 25-09-1980/3-10-1980 : 461-475.

KAHN, F., 1982. La reconstitution de la forêt tropicale humi­de après culture traditionnelle (Sud-Ouest de la Côted'Ivoire). Mémoire ORSTOM, 97. ORSTOM, Paris.

KAHN, F., 1983. Architecture comparée de forêts tropicaleshumides et dynamique de la rhizosphère. Thèse d'Etat,Univ. Montpellier, Montpellier.

KAHN, F.; GUILLAUMET, J-L. ,1978. Les diagnoses de lavégétation. ln: Recherche d'un langage transdisciplin­aire pour l'étude du milieu naturel (Tropiques humides).Travaux et documents de l'ORSTOM, 91, p. 43-53.

KAHN, F. ; NAMUR, Ch. de, 1978. Le stade à Macarangahurifolia : installation, développement et disparition. ln:Observations sur les premiers stades de la reconstitutionde la forêt dense humide (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire).Cah. ORSTOM, sér. Biol., 13(3), p. 255-259.

KAHN, F. ; ZADI KOUBI, P. ,1979. Inventaire des variétésde riz reconnues par les ethnies du Sud-Ouest de la Côted'Ivoire. ORSTOM, Adiopodoumé, rapport préliminaire,12 p. multigr.

KOLI BI, Z. ; FILLERON, J.C. ,1978. Deux exemples de car­tographie intégrée du milieu na turel. In: Recherche d'unlangage transdisciplinaire pour l'étude du milieu naturel(Tropiques humides). Trav. et Doc. de l'ORSTOM, ORS­TOM, 91, 143 p.

KONE, M. ; DJAMAT-DUBOIS, M. ; KOLI BI, Z. ,1976. Géo­systèmes de la région de Soubré (Sud-Ouest ivoirien),étude descriptive. IGT, Abidjan, mém. maîtrise, 403 p.muitigr.

KOY ATE, B., 1976. Analyse bibliographique de la méthodolo­gie utilisée dans l'étude du régime alimentaire des mam­mifères et particulièrement des rongeurs. Projet Taï,IUET, Abidjan, 24 p. multigr.

KOY ATE, B., 1977 a. Données préliminaires sur le transit sto­macal du riz chez deux Muridae de cultures : Prao­mys tullbergi et Mus (Leggada) minutoides musculoides.IUET, Abidjan, 12 p. multigr.

KOYATE, B., 1977b. Données sur quelques techniques de calTture des rongeurs de rizières villageoises (Région de Taï).Essai de caractérisation des régimes alimentaires des es­pèces les plus abondantes. Projet Taï, IUET, Abidjan,13 p. muitigr.

KOYATE, B., 1978a. Peuplement en rongeurs des friches etdes rizières villageoises sous défriches forestières dans leParc National de Taï(5° 53'N, 7° 25'W).Côte d'Ivoire. Pro­jet Taï, IUET, Abidjan, 55 p. muitigr.

KOYATE, B., 1978b. Données préliminaires sur l'écologie desrongeurs des jachères et des plantations villageoises decaféier, cacaoyer dans la région de Ta·r (5° 53'N, 7° 25'W)Côte d'Ivoire. Projet Taï, lUET, Abidjan, 25 p. multigr.

KOYATE, B.; DOSSO, H., 1981. Données sur le peuplementdes rongeurs Muridés des champs de riz pluvial dansla région de Taï (Côte d'Ivoire). Ann. Univ. Abidjan, sér.E (Ecologie), 14, p. 119-134.

LACHAISE, D. ; TSACAS, L. ; COUTURIER, G. ,1982. TheDrosophilidae associated with tropical African figs. Evo­lution, 36(1), p. 141-151.

LACHAISE, D. ; TSACAS, L., 1983. Breeding sites in tropicalAfrican Drosophilids. ln: ~1. Ashburoer, M.L. Carson,I.N. Thompson (Eds), The genetics and biology of Droso­phila, vol. 3d, Academic Press, P.' 221-332, London.

LACHAISE, D., 1983. Reproductive allocation in tropicalDrosophilidae: further evidence on the role of breeding­site choice. Am. Nat., 122, p. 132-146.

LAVEISSIERE, C. ; KIENOU, J-P. ,1979. Effets de l'accrois­sement des activités humaines sur la forêt du Sud-Ouestde la Côte d'Ivoire. Enquête sur les Glossines de la forêt

Page 243: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Annexe 2: Publications, rapports, thèses et communications

de Taï (juillet 1979). Centre Muraz et Mission ORSTOI\1auprès de l'OCCGE, Bobo-Dioulasso, 8 p. multigr.

LEEUW, L.M. de; SINOO, R.P•• 1982. Het belang van dode,omgevallen stammen voor de fauna in het regenwoud vanIvoorku.st (West Africa). (L'importance des troncs mortscouchés pour la faune en forêt dense humide de Côted'Ivoire.) Thèses, Univ. agr. Wageningen, Wageningen.

LEGRAND, J., 1980. Nouvelles additions aux représentantsafrotropicaux du genre Elattoneura; groupe acuta-vrij­daghi (Odonata protoneuridae). Revue fr. Ent., (N.S.), 2(2), p. 153-161.

LEGRAND, J. ; COUTURIER, G. , 1984. Les odonates de laforêt de Taï (Côte d'Ivoire). Premières approches: fau­nistique, associations d'espèces et répartition écologique.Rev. Hydrobiol. trop. (sous presse).

LENA, Ph., 1976. Strnctures spatiales des communautés rura­les du canton Bakwé de Soubré. ORSTOM, Abidjan, 43 p.multigr.

LENA, Ph., 1978. Economie de plantation et consommationd'espace dans la région du Sud-Ouest. ln: Le dynamismefoncier et l'économie de plantation.CIRES,IGT,GERDAT,ORSTOM, Abidjan, 100 p. multigr.

LEN A, Ph., 1979a. Perspectives de l'aménagement de l'espacerural dans le Sud-Ouest ivoirien. Actes du colloquede Ouagadougou "Maîtrise de l'espace agraire et dévelop­pement". Mémoire ORSTOM, 89, p. 155-158. ORSTOM,Paris.

LENA, Ph., 1979b. Comportements socio-économiques et dé­veloppement du monde rural, l'exemple du Sud-Ouestivoirien. Séminaire de la FAO pour la formation d'anima­teurs ruraux. FAO, Rome, 20 p. multigr.

LEN A, Ph., 1979c. Le Projet Taï, méthodologie de la recher­che géographique. ln: Etudes du centre ORSTOM dePetit Bassam, p. 34-41. ORSTOM, Abidjan.

LEN A, Ph., 1979d. Le problème de la main-d'œuvre en zonepionnière, quelques points de repère. Cahiers du CIR ES,Abidjan, 23, p. 89-98.

LEN A, Ph., 197ge. Transformation de l'espace rural dans lefront pionnier du Sud-Ouest ivoirien. Documents AfriqueN° 79 222 291 ; Institut d'Ethnologie Muséum d'HistoireNaturelle (Ed. Micro-fiches) Paris. ORSTOM, Abidjan.

LEN A, Ph., 1981. Quelques aspects du processus de différen­ciation économique en zone de colonisation récente. Ca­hiers du CIRES, Abidjan, 30, p. 65-95.

LENA, Ph. ; MARTINET,F.; RICHARD,J.F.; SCHWARTZ,A. ,1976a. Projet de recherche interdisciplinaire sur les ef­fets de l'accroissement des activités humaines sur laforêt Taï du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Guide de re­cherche et calendrier de travaux. Ministère de la Recher­che scientifique, Abidjan, 10 p. multigr.

LENA, Ph.; MARTINET,F.; RICHARD,J-F.; SCHWARTZ,A.,1976b. Projet de recherche interdisciplinaire sur les ef­fets de l'accroissement des activités humaines sur laforêt TM du Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Rapport in­térimaire. Ministère de la Recherche scientifique, Abid­jan, 158 p. multigr.

LENA, Ph. ; MARTINET, F. ; RICHARD, J-F., 1976. Projet derecherche interdisciplinaire pilote sur les effets de l'ac­croissement des activités humaines sur la forêt de ToT duSud-Ouest de la Côte d'Ivoire. Projet de rapport final.Ministère de la Recherche Scientifique, Abidjan, 158 p.multigr.

LENA, Ph. ; MARTINET,F.; RICHARD,J-F.; SCHWARTZ, A.,1977. Le dynamisme pionnier dans le Sud-Ouest ivoirien,ses effets sur le milieu forestier (région de Soubré). Pro­jet Taï, IUET, Abidjan, 256 p. multigr. (La synthèse de cetravail a été publiée comme rapport N° 55-77/WS 15,N° 4 de la série "Etablissements humains et environne­ment socio-culturel" et "Human settlements and socio­cultural environ ment" (Unesco, Paris, oct. 1977).)

LESOURD, M., 1982. L'émigration baoulé vers le Sud-Ouest

de la Côte d'Ivoire. Thèse Univ. Paris X, Inst. de Géogra­phie, Paris.

LHUILLIER,M.; SARTHOU,J-L.; MONTENY,N.; GERSUYDA­MEY,G-M.; AKRAN, V. ; CORDELLIER, R. ; GALAT, G. ;BOUCHITE, B. , 1982. Report from the arboviruses labora-

tory, Institut Pasteur Abidjan. Rural epidemic of yeIIowin Ivory Coast. ln: Arthropod bom Viruses InformationExchange, 43, p. 84-86, Chappell CDC, Atlanta.

LOROUGNON, J-G., 1976. Le Projet de la forêt Taï enCôte d'Ivoire. 1. Recherche et développement écologi­que. Nature et Ressources, 12(2), p. 2-3.

LUCOTTE, G.; GAUTREAU, C. ; GALAT, G.; GALAT­LUONG, A. , 1982. Polymorphisme électrophorétique des dif-

férentes sous-espèces de Cercopithecus aethiops. Folioprimatol., 38, p. 183-195.

LUNGHINI, D. ; ONOFRI, S. ,1980. Craspedodidynum abi­gianense sp. nov., a new dematiaceous hyphomycete fromIvory Coast forest litter. Trans. Brit. Mye. Soc., 74 (1),p. 208-211.

LUNGHINI, D. ; RAMBELLI, A. ,1978. Ifomiceti nuovi 0 rarerinvenuti nella foresta tropicale africana. Giorn. Bot.Ital., 112(3), p. 175-195.

LUNGHINI, D. ; RAMBELL1, A. ,1979. Helicoubisia e Talek­pea, due nuovi generi di ifali demaziacei. Mycol. ltaliana,l, p. 21-24.

LUNGHINI, D. ; RAMBELLI, A.; ONOFRI, S. , 1982. New Co-dinaea species from tropical forest !itter. Mycotaxon,14, p. 116-124.

MARTINET, F., 1975. L'immigration étrangère dans la régionde Souhré (Sud-Ouest ivoirien). Premiers résultats. Cen­tre ORSTOM de Petit-Bassam, Abidjan, 68 p. multigr.

MARTINET, F., 1978. Immigration étrangère et économie deplantation. Communication au Séminaire inter-institutssur les aspects fonciers de l'économie de plantation,CIRES, Abidjan, 22 fév. 1978. Ir.: Le dynamisme foncieret l'économie de plantation. CIRES, IGT, GERDAT,ORSTOM, Abidjan.

MERZ, G., 1982. Untersuchungen über Lebensraum und Ver­halten des afrikanischen Waldelephanten im Taï-Natio­nalpark der Republik Elfenbeinküste under dem Ein(lussder regionalen Entwicklung. Dissertation, UniversitiitHeidelberg.

MONTEN Y, B.A., 1983. Observations climatiques à la stationécologique de Taï dans le Sud-Ouest ivoirien, 1978-1982.Importance de la superficie de la défriche sur les para­mètres climatiques mesurés.ORSTOM-MRS, Abidjan, 9 p.multigr.

MONTENY, B.A. j LHOMME, J.P. ,1981. Etude du climat ra­diatif de la région Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire (ZoneTaï). ORSTOM, Adiopodoumé, 16 p. multigr.

MOREAU, R., 1979. Sur l'origine des éléments charbonneuxobservés dans les sols de la région de Taï.ORSTOM, Adio­podoumé, 5 p. multigr.

MOREA U, R., 1982. Evolution des sols sous différents modesde mise en culture en Côte d'Ivoire forestière et préfo­restière. Comm. Intern. Symp. Land Clearing and De­velopment in relation to environmental protection in thehumid and sub-humid regions. 23-26 nov. 1982. liTA,Ibadan, Nigeria, 14 p. multigr.

MOREAU, R. ;.NAMUR, Ch. de, 1978. Le système culturaldes Oubis de la région de Taï. ln: Observations sur lespremiers stades de reconstitution de la forêt (Sud-Ouestde la Côte d'Ivoire). Cah. ORSTOM, sér. Biol., 13(3),p.191-196.

NAMUR, Ch. de, 1978a. Etude floristique. ln: Observationssur les premiers stades de reconstitution de la forêt den­se humide (Sud-Ouest de la Côte d'lvoire).Cah. ORSTOM,sér. Biol., 13(3), p. 203-210.

NAMUR, Ch. de, 1978b. Quelques caractéristiques du déve-loppement d'un peuplement de ligneux au cours d'une suc­cession secondaire. ln: Observations sur les premiersstades de reconstitution de la forêt dense humide (Sud-

243

Page 244: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Le Projet Taï" : recherche et aménagement

Ouest de la Côte d'Ivoire). Cah. ORSTOM, sér. Biol.,13(3), p. 211-233.

NAMUR, Ch. de, 1979. Etude de la régénération des lianes enforêt de Taï (Côte d'Ivoire). ORSTOM,Adiopodoumé, 23 p.multigr.

NAMUR, Ch. de, 1980. Rapport de stage. A. Etude des lianesen forêt non perturbée. B. Etude des lianes dans les vé­gétations secondaires. ORSTOM, Adiopodoumé,16 p. mul­tigr.

NAMUR, Ch. de; GUfLLAUMET, J-L. ,1979. Grands traitsde la reconstitution dans le Sud-Ouest ivoirien. ln: Ob­servations sur les premiers stades de la reconstitution dela forêt dense humide (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire).Cah. ORSTOM, sér. Biol., 13(3), p. 197-201.

NEVEU, C., 1976. Essai sur l'immigration b(1oulé en paysbakwé. Univ. de Paris X, Nanterre. ORSTOM, PetitBassam, 47 p. multigr.

N'GUESSAN, An., 1976. Planteurs immigrés dans le cantonbakwé de Soubré. Etude de quelques exploitations. Rap­port de stage nov. 1976, ORSTOM, Petit Bassam, 21 p.multigr.

NIERSTRASZ, E., 1975. Clairières et chablis en forêt natu-relle. ORSTOM, Adiopodoumé, 21 p. multigr.

ONOFRI, S. ; LUNGHINI, D. ; RAMBELLI,A.; LUSTRATI, L. ,1981. New dematiaceous hyphomycetes from tropical rainforest litter. Mycotaxon, 13, p. 331-338.

PERSIANI, A.M.; MAGGI, O., 1982. New considerations basedon light and electron microscopie investigation of Trian­gularia batistae. Mycotaxon, 14, p. 107-115.

PERSIANI, A.M.; ONOFRI, S., 1982. A new genus of synnema­tous hyphomycetes from tropical rain forest. Mycotaxon,15, p. 254-260.

POSS, R., 1979. Infiltration-ressuyage sur un sol de basde pente (Tuf, 2-9 décembre 1978). ORSTOM, Adiopodou­mé, 8 p. multigr.

PUPPI, G., 1978. Microbiological researches in Taï forest(Ivory Coast>. 1. Litter. mycoflora. Canadion Journ. Bot.

PUPPI, G., 1981. Occurrence of microfungi on leaf litter in atropical forest (Taï, Ivory Coast>. Revue d'Ecologie et deBiologie du Sol, 18(4), p. 459-472.

RAMBELLI, A.; BARTOLl, A. , 1978. Guedea, a new genus ofdematiaceous hypllOmycetes. Trans. Brit. Myc. Soc., 71(3), p. 340-342.

RA MBELLI, A. ; LU NGHINI, D. ,1979. Chaetopsina speciesfrom tropical forest litter. Trans. Brit. Myc. Soc., 72(3),p. 491-494.

RAMBELLI, A. ; ONOFRI, S. ; LUNGHINI, D. ,1981. New de­matiaceous hyphomycetes from Ivory Coast forest litter.Trans. Brit. Mye. Soc., 76(1), p. 53-58.

RAMBELLI, A. ;PERSli\NI,A.M.; MAGGI, O.; LUNGHINI,D.;ONOFRI, S. ; RIESS, S. ; DOWGIALLO, G. ; PUPPI, G. , 1983.

Comparative studies on microfungi in tropical ecosys­tems. Mycological studies in South Estern Ivory Coast fo­l'est. Chair of Mycology, University of Rome, Rome.

RAMBELLI, A.; PUPPI, G. ; BARTOLI. A. ; MAGGI,O. ;ALBONETTI, S.G.;FANELLI,C.; LUNGHINI,D.; MASSARI, G.;RIESS, S. , 1977. Ai ms and methods of microbiological studies

in MAB-research projects. In: E.F. Brünig (Ed.), Trans­actions International MAB-IUFRO Workshop on Tropi­cal Rainforest Ecosystems, Hamburg-Reinbek, 12-17 May1977, p. 216-221. Institute of World Forestry, Harnburg­Reinbek.

RICHARD, J-J. ; KAHN, F. ; CHATELIN, Y. ,1977. Vocabu­laire pour l'étude du milieu naturel (Tropiques humides).Cah. ORSTOM, sér. Pédol., 15(1), p. 43-62.

RiESS, S. ; RAMBELLI, A. , 1978. Mycorrhizae in natural tro­pical forest. In: Proceedings International Workshop onTropical Mycorrhiza Research, Ghana, p.159-166.

RIESS, S.; RAMBELLI, A.; 1980. Preliminary notes on my-corrhizae in a natural tropical rain forest. In: P. Mikola

244

(Ed.), Tropical mycorrhiza research, p. 143-145. OxfordUniversity Press, Oxford.

RIO, B.; COUTURIER, G. ; LEMEUNIER, F.; LACHAISE, D.,1983. Evolution d'une spécialisation sai sonnière chezDrosophila erecta Tsac. et Lach. (Dipt. Drosophilidae).Annls. Soc. ent. France (N.S.), 19(2), p. 235-248.

RIO, B.; GALAT, G. ,1982. Locomotion arboricole d'un Den­drohydrax dorsalis (Temminck 1853). Mammalia, 46(3),p.449-456.

ROTH, II.H., 1982. Rapport sur la répartition et l'état actueldes grandes espèces de mammifères en Côte d'Ivoire.Fgu-Kronberg-GmbH, 43 p. multigr.

ROTH, H.H., 1983. Rapport sur la répa~tition et !'état actueldes grandes espèces de mammiferes en Cote d'Ivoire.Fgu-Kronberg-GmbH, 34 p. muItigr.

ROTH, H.H.; DOUGLAS-HAMILTON, 1. , 1982. Distributionand conservation status of elephants in West Africa.Biol. Conservation.

SANGARE, Y. ; BODOT, P. ,1980. Données préliminaires surla faune des termites en forêt tropicale humide (Régionde Taï, Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Inventaire, clas­sification éthologique et biologique des genres et espècesrépertoriés. Ann. Univ. Abidjan, sér. E (Ecologie), 13,p.131-141.

SCHWARTZ, A., 1976. Le peuplement du canton Bakwé deSoubré en mai 1975. ORSTOM, Betit-Bassam. 20 p. muI­tigr.

SCHWARTZ, A., 1978a. La dimension humaine des grandesopérations de développement. L'exemple de l'opérationSan Pedro (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Espace Géo­graphique, 1, p. 65-70.

SCHWARTZ, A.1978b. l<rou et Bakwé face à l'opération SanPedro (Sud-Ouest ivoirien). In: Maîtrise de l'espace ag­raire et dévéloppement en Afrique tropicale. Logiquepaysanne et rationalité technique. Actes du Colloque deOuagadougou (4-8 décembre 1978), p. 491-496. ORSTOM­CNRST, Ouagadougou.

SCHWARTZ, A., 1979a. Images de la femme krou à traversune cérémonie de funérailles (Côte d'Ivoire). ln: Gens etparoles d'Afrique. Ecrits pour Denise Paul me. Cahiersd'Etudes Africaines, 19(1-4), p. 323-327.

SCHWARTZ, A., 1979b. Colonisation agricole spontanée etémergence de nouveaux milieux sociaux dans le Sud-Ouestivoirien: l'exemple du canton Bakwé de la sous-préfectu­re de Soubré. Cahiers ORSTOM, sér. Sc. Hum., 16(1-2),p.83-101.

SCHWARTZ, A., 1979c. Quelques repères dans l'histoire desKroumen. Revue Française d'Histoire d'Outre-Mer, 67(246-247), p. 151-155.

SCHWARTZ, A., 1982a. Grands projets de développement etpratique foncière en Côte d'Ivoire. L'exemple de l'opéra­tion San Pedro. In: Enjeu foncier en Afrique noire,p. 293-300. ORSTOM/I<arthala, Paris.

SCHWARTZ, A., 1982b. Un trésor à sauver ... L'irréversibledégradation d'un milieu naturel unique au monde, la forêtde Taï (Sud-Ouest de la Côte d'Ivoire). Communication àla'1nternational conference on land clearing and develop­ment in the tropics", Internationallnstitute of TropicalAgriculture, Ibadan, 22-26 novembre 1982. 12 p. multigr.

SCHWARTZ, AI., BUFFARD-MOREL, J-M.; MARTINET, F.;SCHWARTZ, An. , 1975.Carte ethno-démographique par point

au 1/50.000 du canton Bakwé de la sous-préfecture deSoubré. ORSTOM, Petit Bassam. (Réédition 1/200.0001979.)

SELLlN, B. ; SIMONKOVICH, E. ,1980. Les mollusques hôtesintermédiaires desschistosomes dans les régions de Taï etde Soubré. OCCGE, Centre Muraz, Bobo-Dioulasso.

TSACAS, 1.; CHASSAGNARD, M-T., 1981. Nouvelles espècesde Lissocephala Malloch de la forêt de Taï, Côte d'Ivoire(Dipt., Drosophilidae). Diagnose préli minaire. Annls Soc.Ent. Fr. (N.S.), 17(2), p. 259-264.

Page 245: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

Annexe 2 Publications, rapports, thèses et communications

TSACAS, L.; LACHAISE, D., 1981. Les espèces au second ar­ticle tarsal modifié du groupe afrotropical Drosophila fi­ma (Diptera, Drosophilidae). Annls. Soc. Ent. Fr. (N.S.),17(3), p. 395-415.

TRA NI ER, M. ; DOSSO, H. ,1979. Recherches caryotypiquessur les rongeurs de Côte d'Ivoire; résultats préliminairespour les milieux fermés. Mammalia, 43(2), p. 254-256.

TRA NIER, M. ; GA UTIN, J-C. ,1979. Recherches caryotypi­ques sur les rongeurs de Côte d'Ivoire: résultats prélimi­naires pour les milieux ouverts. Le cas d'Oenomys hypo­xanthus omotus. Mammalia, 43(2), p. 252-254.

TRAORE, S. ; HEBRARD, G. ,1981. ~s capacités vectricesnaturelles des femelles du complexe S. damnosum (Dipt.Simuliidae). Institut de Recherche sur la Trypanosomiaseet l'Onchocercose, Bouaké, multigr.

TRAORE, S.; PHiLIPPON, B. , 1980. Rapport préliminaire desenquêtes réalisées dans la région du Parc National de ToT.1. Le Moyen Cavally (Station Ecologique Village de Taï).Insti tut de Recherche sur l'Onchocercose, OCCG E,Bouaké, 17 p. multigr.

VALLAT, C., 1979. L'immigration Baoulé en pays Bakwé.Etude d'un front pionnier. Cah. ORSTOM, sér. Sc. Hum.,15(1-2), p. 103-110.

VAN STALLE, J., 1984. Les Cixiidae (Homoptera, Fulgoroi­dea) de la forêt de Taï (Côte d'Ivoire) avec la descriptionde neuf espèces nouvelles. Revue fr. ent. (sous presse).

VILLIERS, A., 1982a. Hémiptères Reduviidae africaines. Lo-calisations et descriptions. Il. Emesinae. Rev. Fr. Ent.(N.S.), 4(1), p. 27-39.

VILLIERS, A., 1982b. Hémiptères Reduviidae africaines. Lo-

245

calisations et descriptions. III. Harpactocorinae Rhino­corini. Rev. Fr. Ent. (N.S.), 4(3), p. 126-136.

VOOREN, A.P., 1979. Essai sur la voûte forestière. Analysestructurelle et numérique d'une toposéquence en forêt deTM, Côte d'Ivoire. Maîtrise Université agronomique deWageningen, Pays-Bas. ORSTOM, Adiopodoumé, 89 p.,multigr.

VOOREN, A.P.; OFFERMANS, D.M.J., 1983. Photographieaérienne par avion ultra léger motorisé (ULM). Posterprésenté à : International symposium on strategies anddesigns for afforestation, reforestation and tree planta­ting, Hinkeloord, Wageningen, 19-23 septembre 1983. Wa­geningen Agricultural University, Wageningen.

VOOREN, A.P. ; OFFERMANS, D.M.J., 1984. An ultra Iightaircraft forlow-cost, large-scale stereoscopic aerial pho­tographs. Biotropica (sous presse).

VOOREN, A.P.; OLDEMAN, R.A.A., 1984. Rapport techni-que - Etat d'avancement, janvier 1981-janvier 1984, duprogramme de recherches sylvicoles: "Sylviculture dura­ble et coupes sélectives en Basse Cô"te d'Ivoire". Centrenéerlandais/ORSTOM, Abidjan et Université Wageningen,8 p. + ann., multigr.

WAITKUWAIT, W.E., 1983. Investigations into the bredingbiology of the slender snouted crocodile Crocodylus cata­phractus. Fgu-Kronberg-G mbH, 8 p. multigr.

YORO G'BALLOU, 1979. Aperçu sur les modifications dumilieu naturel sous l'effet des pratiques culturales.ORSTOM, Adiopodoumé, 23 p. multigr.

ZADI KOU BI, P., 1979. Compréhension et utilisation dumonde végétal chez les Bétés de Soubré. ORSTOM,Adiopodoumé, 22 p., 13 ann. multigr.

Page 246: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 247: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

publications de l'unesco: agents de vente

Algérie: Institut pedagogique na­tional, Il, rue Ali-Haddad, AL­GER. Ol1icedes publications uni­versitaires (OPU), place centraleBen Aknoun, ALGER. Pour lespublications seulement. ENAL,3, boulevard Zirout-Youcef, AL­GER. POUl' les periodiques seule­ment: ENAMEP, 20, rue de laLiberté, ALGER.

Allemagne (Rép. réd.): S. KargerGmbH. Karger Buchhandlung.AngerhofSlrasse 9, Postfach 2,D-8034, GERMERING-MON­CHEN. « u:~ Courrier,> : M. Her­bert Baum. Deutscher Unesco­KurierVertrieb. BesalLslrasse 57,5300 BONN 3. Pour les cariesscirnfijiquf>s seulemellf GeoCenter, Postfaeh 800830, 7000STUTTGART 80.

Antilles françaises; Librairie « AuBoul'Mich », l, rue Perrinon et66, avenue du Parquet. 97200FORT-DE-fRANCE (Martinique).Librairie Carnot. 50. rue Barbés,97100 POINTE-A-PITRE (Guade­loupe).

Argentine: Libreria El Correo de laUnesco, EDILYR S_R.L., Tueu­mân 1685. 1050 DUENOS AI­RES.

AUlriche: Duchhandlung Geroldand Co_, Graben 31, A-IOIIWIEN.

Belgique: Jean De Lannoy. 202,avenue du Roi, 1060 BRUXEL­LES, CCP 000-0070823-13.

Bénin; Librairie nationale, B.P.294, PORTO Novo. Ess. RondjoG. Joseph, B.P. 1530, COTO­NOL'

Brésil: Fundaçào Getùlio Vargas,Scrviço. de Publicaçôes, caixapostal 9.052-ZC-02, Praia de Bio­tafogo 188, RIO DE JANEtRO(GB).

Bulgarie: Hemus. Kanlora Lilcra­tura, bd. Rousky 6, SOFIJA.

Canada: Editions Renouf Limitée,2182. rue Sainte·CatherineOuest, MONTREAL. Que. H3HIM7.

Chili: Bibliocentro Llda., Consti­tucion n.' 7, easi"a 13731. SAN­TIAO{) 21. Librena La Biblioteea.Alejandro 1 867. casi"a 5602,SANTIAGO 2.

Congo: Librairie populaire, D.P.577, BRAZZAVILLE. Librairiespopulaires â POINTE-NOIRE.LOUBOMO. NKAYI. MAKABA­NA. OWEN DO. OUESSO ct IMP­FONDO. Commission nationalecongolaise pour l'Unesco. D.P.493, BRAZZAV 1LLE.

Côte-d'hoire: Librairie des Pressesde l'Unesco, Commission natio­nale ivoirienne pour l'Unesco,D.P. 2871, ABIDJAN.

Cuba: EDICIONES CUDANAS,O'Reilly n.' 407, LA HABANA.Pour (( Le Courrier ,> seulemen! :Empresa COPREFIL, Dragonesn.' 456 e/Lealtad y Campanario,LA HABANA 2.

Égypte: Uneseo Publications Cen­tre, 1 Talaat Harb Street, CAI­RO.

Espagne: Mundi-Prensa LibrosS.A., apartado 1223, Castello 37,MADRID-1. Edieiones Liber,apartado 17_ Magdalena 8. ON­DÀRROA (Vizcaya). DONAl RE,Ronda de Outeiro 20, apartadodecorreos341, LACORUNA. Li­breria A1-Andalus. Roldana 1 y 3,SEViLLA 4. Libreria Castells,Ronda Universldad 13, BARCE­LONA 7.

Éthiopie: Elhiopian NationalAgeney for Unesco, P.O. Box2996. ADDIS AUAUA.

France; Librairie de l'Unesco, 7,place de Fontenoy, 75700 PA­RIS; CCP Paris 12598-48.

Gabon: Librairie Sogalivre â li­BREVILLE, PORT-GENTIL etFRANCEVILLE. Librairie Ha­chette, D.P. 3923, LiUREVILLE.

Ghana: Presbylerian BookshopDepot L1d., P.O. Box 195, AC­CRA. Ghana Book Suppliers Lld.,P.O. Box 7869, ACCRA. The Uni­versity Bookshop of Cape Coast.The University Bookshop of Le·gon, P.O. Box l, LEGON.

Grèce: Grandes librairies d'Athé·nes (Eleftheroudakis, Kauffman.CIC.)_ John Mihalopoulos & SonS.A., International Booksellers,75 Hermov Stree,. P.O. B. 73,THESSALONIKI.

Guinée; Commission nalionaleguinéenne pour l'Unesco, I3.P.964. CONAKRY.

Haïti; Librairie « A la Cara velle ».26. rue Roux. B.P. III. PORT­AU-PRINCE.

Haute-Volta: Librairie Allie, B.P.64. OUAGADOUGOU. Librairiecatholique « Jeunesse d'Afri­que », OUAGADOUGOU.

Hongrie: Akadémiai Kiinyvesbolt.Vàci u. 22. BUDAPESTV. A.K.V.Kiinyvtârosok Bohja. Népko'l­tàrsasâg utja 16, BUDAPEST VI.

Iran: Commission nalionale ira­nienne pour l'Unesco, Seyed Ja·mal Eddim Assad Abadi av ..64th St., Bonyad Bdg.. P.O. Box1533. TÉHERAN. Kharazmie Pu­blishingand Distribulion Co., 28Vessai Shirazi Street, EnghélabAve., P.O. Box 314/1486, TEHÉ­RAN.

Israël: A.D.C. Bookstore Lld., P.O.Box 1283,71 Allenby Road, TELAVlv 61000.

Italie: L1COSA (Libreria Com­missionaria Sansoni S. p. A.). viaLamarmora 45. easella postale552, 50121 FIRENZE. Agenl nonexclusif de mlle: FAO Book­shop. ~ia delle Terme de Cara­calla, 00100 ROME.

Jamahiri)'a arabe libyenne: Agen­ey for Development of Publica­lion and Distribution, P.O. "ox34-35, TRIPOLI.

Koweït: The KuwaitBookshop Co.Lid., P.O. Box 2942. KUWAIT.

Liban: Librairies Antoine A. Nau­fal et Fréres. B.P. 656. BEY­ROUTH.

Liechtenstein; Eurocan Trust Reg.,P.O. Box 5. SCHAAN.

Luxembourg: Librairie PaulBruck, 22, Grand-Rue, LUXEM­BOURG.

Madagascar: Commission natio­nalede la Républiquedémocrati.que de Madagascar pour l'Unes­co, B.P. 331, ANTANANARIVO.

Mali: Librairie populaire du Mali.. B.P. 28, BAMAKO.lVIaroc: Toutes les publiealions

Librail"ic « Aux belles images »,282, avenue Mohammed·V. RA­BAT (CCP 68-74). Librairie desécoles, 12. a venue Hassan II. CA­SABLANCA. (( Le Courrier" seu­lement (pour les ('nsf'ignal1fs):Commission nationale marocai·ne pour l'education. la science ctla culture, 19, rue Oqba.Il.P. 420.AGDAL-RABAT (CCP 324-45).

Maurice: Nalanda Co. Lld., 30Bourbon Streel, PORT-LOUIS.

Mauritanie: GRA.L1.CO.MA.. 1.rueduSouk X. avenue Kennedy.NOUAKCHOTT.

Mexique: SABSA. Insurgentes Surn.' 1032-401, MEXICO 12 D.F.Libreria « El Correo de la Unes­co ». Aetipàn 66. Colonia deiValle. MEXICO 12 D.F.

Monaco: British Library. 30, bou­levard des Moulins. MONTE­CARLO.

i\1ozambique: lnsliwto Nacionaldo Livro e do Disco (INLD). ave­nida 24 de Julho 1921, rlc cl:andar. MAPUTO.

Niger: Librairie Mauclert, B.P.868. NIAMEY.

Nou\lellc-Calêdonie : ReprexSARL. B.P. 1572, NOUMEA

Pays-Bas: Pour les publICationsseulentent: Keesing Bœken B.V., Postbus 1118, 1000 BC AMS­TERDAM. Pour les périodiquess('ul('mel1l. D. & N. FAXONB.V.. P.O. Box 197, 1000 ADAMSTERDAM.

Pologne: Ars Polo na - Ruch. Kra­kowskie Pr/.edmiescie 7, 00-068WARSZAWA. ORPAN - Impon.Palae Kultury. 00-901 WARSZA­WA.

Porto Rico: Libreria « Alma Ma­ten> Cabrera 867. Rio Piedras.PUERTO RICO 00925.

Porhlgal: Dias & Andrade Llda ..Livraria Portugal. rua do Garmo70. liSBOA.

Rép. arabe s)'rienne; LibrairieSayegh. Immeuble Diab. rue duParlement. B.P. 704. DAMAS.

Rép. dém. allemande: Librairiesinternationales ou Buchhaus­Leipzig. Postfaeh 140_ 701 LEiP­ZIG.

Rép_-Unie du Cameroun: Le Secré­taire général de la Commissionnationale de la République-Uniedu Cameroun pour l'Unesco.B.P. 1600. YAOUNDE. Librairiedes Editions Clé, B.P. 1501,YAOUNDE. Librairie Saint·Paul,B.P. 763, YAOUNDE. LibrairieAux Messageries. avenue de laLiberté. B.P. 5921, DOUALA. Li­brairie Aux Frères réunis. B.P.5346, DOUALA.

Roumanie: ILEXIM. Import-Ex­port, 3 Calea 13 Deeembrie. P.O.Box 1-136/1-137. BUCURESTI.

Senegal: Librairie C1airafrique.B.P. 2005. DAKAR. Librairie desquatre vents, 91. rue Blanchot.B.P 1820, DAKAR.

Suisse: Europa Vcrlag, Rnmistras­se 5. 8024 ZÜRICH. LibrairiePayot à GENEVE. LAUSANNE.BÂLE. BERNE. VEVEY. MON­TREUX. NEUCHÂTEL et ZU­RICH.

Tchécoslovaquie: SNTL, Spalena,51, PRAHA 1(Exposi/ion penna­nente). Zahranicni literatura, IlSoukenicka, PRA HA 1. POlir laSiovaqu;r seulemenl . Alfa Ver­lag, Publishers. Hurbanovo nam.6,89331 BRATISLAVA.

Togo: Librairie évangélique, B.P.378, LOMÉ. Librairie du Bon Pas­teur, B.P. 1164. LOME. Librairieuniversitaire. B.P. 3481, LOME.

Tunisie: Sociélé lunisienne de dif­fusion. 5. avenue de Carthage,TUNIS.

Turquie: Haset Kitapevi A.S.. Isti­khil Caddesi n' 469. Posta Kutu­su 219. Ileyoglu. ISTANBUL.

URSS: Mezhdunarodnaja Kniga.MOSKVA G-200.

Yougoslavie: Jugoslovenska KniJ~

ga, Trg. Republike 5/8. P.O.B. 36.11·001 DEOGRAD. Drznvna Za­lozba Siovenije. Titova C. 25.P.OB. 50-1. 61-000 LJUBWA­NA.

Zaïre: Librairie du CIDEP. B.P.2307, KtNSHASA 1. Commissionnationale zaïroise pour l'U nesco.Commiss~riat d'Etat chargé del'éducation nationale. B.P. 32.KINSHASA.

Page 248: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 249: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des
Page 250: Recherche et aménagementen milieu forestier …horizon.documentation.ird.fr/exl-doc/pleins_textes/divers11-11/... · une base rationnelle pour l'utilisation et la conservation des

\/'

Cette Note technique présente un bilan des activités conduites dans l'un des projets pilotesdu MAB dans les régions tropicales humides, celui de la forêt de Taï au Sud-Ouest de laCôte-d Ivoire.

. Inhabité depuis très longtemps, le Sud-Ouest de la Côte-d'Ivoire se présente maintenantcomme un microcosme de changements de possibilités et de problèmes qui apparaissent dansbien des régions tropicales humides: déplacement de populations; transformation desterres; conflits entre usages; investissements financiers considérables; liens plus étroits avecl'économIe mondiale. C'est aussi une région où les scientifiques ont eu la possibilitéd'approfondir les connaissances sur le foncticnnement de la forêt tropicale en même tempsque d'apporter une contribution au développement de la forêt tropicale dans lecontinent africain.

Le bilan des résultats exposés dans cette Note technique est présenté suivant lespréoccupations majeures du projet de recherche de Taï: le milieu physique; l'homme et sesactivités; le champ cultivé et ses contraintes; la structure et le dynamisme de la végétation;la santé humaine; le parc national et la protection de la nature; l'expression cartographiquedes résultats. Un dernier chapitre offre des critiques et des perspectives sur le projet,y compris des suggestions pour une nouvelle pha e de travail à Taï.

.: l,;"~ . ".t .,

Une stylisation du c a.nkh ~. signe de la vic

dans l'ancienne Egypte. a été introduitedans le sigle du Programme sur l'hommeet la biosphère (MAD) ISBN 92-3-202264