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Renaissance des savoirs scientifiques et techniques? une Introduction Author(s): Laurent Pinon, Antonella Romano and Hélène Vérin Source: Nouvelle Revue du XVIe Siècle, Vol. 20, No. 1, Renaissance des savoirs scientifiques et techniques? (2002), pp. 7-18 Published by: Librairie Droz Stable URL: http://www.jstor.org/stable/25598956 . Accessed: 14/06/2014 18:38 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Librairie Droz is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Nouvelle Revue du XVIe Siècle. http://www.jstor.org This content downloaded from 91.229.229.44 on Sat, 14 Jun 2014 18:38:14 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Renaissance des savoirs scientifiques et techniques? || Renaissance des savoirs scientifiques et techniques? une Introduction

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Renaissance des savoirs scientifiques et techniques? une IntroductionAuthor(s): Laurent Pinon, Antonella Romano and Hélène VérinSource: Nouvelle Revue du XVIe Siècle, Vol. 20, No. 1, Renaissance des savoirs scientifiques ettechniques? (2002), pp. 7-18Published by: Librairie DrozStable URL: http://www.jstor.org/stable/25598956 .

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Nouvelle Revue du Seizieme Siecle - 2002 - N? 20/1, pp. 7-18

RENAISSANCE DES SAVOIRS SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES ?

UNE INTRODUCTION

Le present recueil s'inscrit dans un programme de recherche qui a vu le

jour au Centre Alexandre Koyre1, en 1998 et qui portait sur ? Composition et recomposition des savoirs scientifiques et techniques, xvie-xxc siecles ?.

II s'agissait d'etudier comment, dans la longue duree de la modernite euro

peenne, se definissent des champs disciplinaires, comment certains emer

gent a un moment donne, d'autres en viennent a dominer ou structurer le domaine des connaissances, comment d'autres encore definissent ou non

des regimes de scientificite, comment enfin ces regimes de scientificite ins taurent ou deplacent la coupure entre sciences et techniques.

C'est dans ce contexte precis qu'est ne le projet d'organiser une table ronde sur la Renaissance, periode particulierement feconde pour cette

reflexion, comme ces breves pages d'introduction voudraient le suggerer. D'emblee, la mise en ceuvre de cette rencontre a aussi vise un second objec tif, reunir des specialistes provenant de differents horizons disciplinaires, de

maniere a confronter les historiens traditionnels des sciences, philosophes et

scientifiques, a ceux qui aujourd'hui en abordent l'etude dans le cadre d'autres approches, culturelles, litteraires, sociologiques, afin de croiser dif ferents points de vue actuels sur la ? Renaissance des savoirs scientifiques et

techniques? dans l'Europe de la seconde moitie du xvi6 siecle. C'est en coherence avec cet objectif que nous avons propose a la Nouvelle revue du seizieme siecle d'accueillir les textes qui suivent. Ceux-ci apportent, chacun a sa maniere, une contribution a cette reflexion. II nous revient de preciser pourquoi nous avons choisi cette periode, pourquoi il nous a paru pertinent de reunir des travaux et des perspectives ainsi diversifies sur la configura tion des sciences dans les annees 1550-1610. Nous souhaitons a cette occa sion degager un certain nombre de questions plus generales et evoquer, en

rappelant les grands schemas interpretatifs de 1'historiographie recente,

1 Le centre Koyre' est une units' mixte de recherche (UMR 8560), sous la triple tutelle du

CNRS, de l'EHESS et du MNHN, centre' sur l'histoire des sciences et des techniques entre xvf et xx* siecles.

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quelques-uns des problemes auxquels nous sommes confrontes, par dela la diversite des approches et des objets d'etude.

Dans l'histoire des sciences, Alexandre Koyre a joue un role majeur parmi ceux qui ont vu la Renaissance comme une periode de rupture, en la caracterisant par le passage du monde clos a l'univers infini2. Au terme de ce passage pouvait se deployer la ?revolution? par laquelle le paradigme physico-mathematique ouvrait la voie a une comprehension rationnelle du monde et de la nature. Victoire des discontinuistes sur les continuistes3, mais victoire aussi d'une vision qui permettait de designer un pantheon de savants illustres, une hierarchie de sciences legitimes et porteuses et des

problematiques ? centrales ?: Copernic et Galilee pour les grands hommes, astronomie et mathematiques pour les disciplines, crise de l'aristotelisme et nouveaux lieux de production des savoirs, pour les problematiques.

Apres Koyre, ses eleves, disciples et aussi contradicteurs ont poursuivi l'elaboration de la notion de revolution scientifique qui demeure aujour d'hui une categorie constitutive de l'histoire des sciences et qui continue d'alimenter debats et controverses4. En centrant ce numero sur les annees

1550-1610, en decidant de reflechir sur les configurations des sciences qui s'y dessinent, nous posons la question de la revolution scientifique, tres pre cisement au niveau ou Alexandre Koyre prit les positions radicales que l'on sait. Mais les apports des sciences sociales, l'importation, dans le champ de l'histoire des sciences, des questionnements de la nouvelle histoire, les

developpements recents de l'histoire des techniques dessinent un monde autrement plus complexe que celui que nos predecesseurs etudiaient. En abordant les annees 1550-1610 dans leur polysemie, c'est-a-dire aussi dans leurs contradictions apparentes par rapport aux discours et aux pratiques decretes a posteriori legitimes, ce sont des enjeux centraux de l'histoire des sciences a la Renaissance que nous souhaitons mettre a 1'epreuve, avec tous ceux qui aujourd'hui contribuent a l'approfondissement de nos connais sances sur la Renaissance des savoirs scientifiques et techniques.

2 Pour un bilan global de son oeuvre, voir Alexandre Koyri. Actes du colloque internatio

nal, Paris, 10-14 juin 1986, dans History and Technology, an International Journal, vol. 4,1987.

3 Voir l'analyse de Luce Giard, ? S'il faut conclure ?, dans Sciences et religions de Coper

-

nic a Galilie (1560-1610), actes du colloque international de Rome, 12-14 decembre

1996, Rome, Ecole frangaise de Rome, 1999. 4

Steven Shapin, La Revolution Scientifique, trad, frangaise, Paris, Flammarion, 1998; Roy Porter et Mikulas Teich ed., The Scientific Revolution in National Context, Cambridge, 1992; Pietro Redondi, ?La revolution scientifique du xvii* siecle: perspectives nou

velles?, Impact: Science et Sociiti, n? 160 (1991), p. 405-415; Roy Porter, ?The scien tific Revolution and Universities ?, Hilde de Ridder-Symoens dir., A history of University in Europe, vol. 2: Universities in Early Modern Europe, 1500-1800, Cambridge Univer

sity Press, 1996, p. 531-564.

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UNE INTRODUCTION 9

Le premier de ces enjeux est celui de la periodisation qui, par la maniere dont elle produit ou configure les objets d'etudes, engage necessairement

des interpretations des phenomenes interroges. Pendant longtemps, la defi nition chronologique de la Renaissance a ete empruntee a l'histoire de l'art, sans mise en relation des differents champs du savoir, et dans la poursuite d'une tradition, vite devenue topos, qui a exalte la rupture liberatrice par

rapport aux temps obscurs du Moyen Age. L' exaltation atteint en France son

plus haut degre de formalisation avec Michelet, mais on trouvera une meme

logique de valorisation en Italie ou la periode xrve-xvie siecles apparait comme le creuset de formation de l'identite italienne, autour du modele venitien d'abord, florentin ensuite.

Force est de constater que la Renaissance, en tant que periode historique, n'a plus beaucoup la faveur des recherches, notamment en France: sur la notion pesent trop d'indeterminations qui in vi tent a porter un regard critique sur l'heritage glorieux du xixe siecle qui, de Michelet a Burckart, l'avait identifiee a une ?civilisation? aux contours precis, et aux productions

majeures. Que recouvre aujourd'hui le terme pour les litteraires specialistes du xvi* siecle et pour les historiens qui se concentrent sur les ? early modern studies ?? La Renaissance est-elle cette periode qui se definit par le passage de l'humanisme aux humanites5? Si c'est le cas, alors quelle place y faire aux sciences, aux projets de diffusion des arts que promeuvent les inge nieurs de la periode ?

De ces questions decoule un deuxieme enjeu, relatif aux rapports entre sciences et humanisme. On trouve, dans le recent repertoire L'Europe des

humanistes, une definition de l'humanisme qui, laissant de cote une preten due philosophic anthropocentriste, est centree sur l'essentiel, un projet de formation encyclopedique, fonde sur la maitrise des traditions tex tuelles: ?Ce projet culturel, pedagogique au sens large, a pour fin de s'ap proprier ou de se reapproprier les textes perdus ou mal compris de toutes les traditions dont participe l'humaniste puis de celles des autres peuples pour les assimiler, les actualiser en une nouvelle synthese et les transmettre a son tour?6. Si l'on peut considerer l'humanisme comme une culture du livre, comment est-il compatible avec les productions et les pratiques scienti

fiques et techniques de la Renaissance? L'historien des sciences George Sarton n'hesitait pas, dans les annees

1950, a fustiger les humanistes, accuses d'avoir neglige le ?grand livre de

5 Pour reprendre une expression de Lisa Jardine et Anthony Grafton: voir la bibliographie selective infra.

6 L'Europe des humanistes (xiV-xvrf siecles), repertoire ?tabli par J.-F. Maillard, J. Kecs kem&i et M. Portalier, CNRS et Brepols, 1995, p. 5.

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la Nature ?7. Paul Oskar Kristeller abondait dans ce sens en definissant stric tement l'humanisme comme un programme d'enseignement construit autour de quelques matieres privilegiees: grammaire, rhetorique, poetique, histoire et philosophie morale8. Sans exclure une influence entre huma nisme et pensee scientifique, cette definition resserree en fait deux mouve

ments, au mieux, separes, au pire, opposes. Eugenio Garin est l'un des pre miers a refuser 1'opposition et apres lui, d'autres travaux montrent les liens entre science et humanisme, notamment dans les methodes9. Les exemples abondent a present des liens qui se sont tisses, notamment dans la seconde moitie du xvr6 siecle, entre les hommes de la culture ecrite et ceux de la pro duction materielle, entre humanistes, savants, ingenieurs et artistes. Dans le domaine des mathematiques, le vaste chantier editorial engage des la fin du xve siecle, pour ?restaurer les Anciens? prend incontestablement ses sources dans la plus grande veine humaniste: il culmine avec la mise en cir culation d'Euclide dans la seconde moitie du xvf siecle, mise en circulation sans laquelle n'aurait pas ete possible le grand debat sur la methode et la cer titude des mathematiques10. Pour les mathematiques mixtes,

- perspective,

geometrie pratique, instruments de mesure, fortification, mecanique... -, on

assiste a une confrontation systematique des experiences et des acquis recents de la technique avec les ecrits des Anciens qu'on entend, ce faisant, restaurer11. Cette demarche implique la traduction et l'edition commentee des mecaniciens grecs et des administrateurs romains. Ce travail d'ecriture, les contraintes de l'expose livresque, sont constitutifs d'une integration sys

tematique des arts de la production dans les arts liberaux. Des lors qu'il est

ecrit, le discours sur les arts peut s'enseigner et il n'est plus seulement trans

missible sur les chantiers et dans les ateliers; il est largement diffuse par des livres imprimes en langues vernaculaires. L'exemple de Georg Agricola, qui contribue a l'edition aldine des oeuvres de Galien et qui participe a l'ex

7 George Sarton, The appreciation of ancient and medieval science during the Renaissance

(1450-1600), Philadelphia University of Pennsylvania Press, 1953. 8

Paul Oskar Kristeller, Renaissance thought, New York, Harper, 1961, p. 10. 9

Eugenio Garin, ?Gli humanisti e la scienza?, L'eta nuova. Ricerche di storia della cul tura dal xu al xvi secolo, Naples, 1968, p. 451-475. Cette question a et^ particulierement travaillde dans les annees 1970. On en trouvera un bilan dans le dossier rassemble' sous la

direction d'Ann Blair et d'Anthony Grafton dans ? Reassessing humanism and science ?, Journal of the History of Ideas, vol. 53,1992, p. 535-540.

10 Neal Gilbert, Renaissance Concepts of Method, New York, 1960; Anna De Pace, Le matematice e il mondo. Ricerce su un dibatitto in Italia nella seconda meta del Cinque cento, Milan, 1993.

1 x Luisa Dolza et Helene Venn, ? Dal Livre al Theatrum di Jacques Besson ?, introduction a

Jacques Besson, Theatrum instrumentorum et machinarum..., Lyon, 1582, fac-simile\ Rome, Edizioni dell'Elefante, 2001, p. 1-49.

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UNE INTRODUCTION 11

ploitation d'une mine en Boheme, est probant a cet egard. Son celebre De re

metallica, publie en 1556, est indubitablement le fruit de cette double expe rience12. Le projet humaniste de restauration s'etend ainsi a tous les

domaines, qu'ils soient theoriques ou pratiques, ce dont rend compte le retournement historiographique des deux dernieres decennies sur les rap

ports entre science et humanisme.

Ainsi, le livre se trouve au cceur des mutations dont les annees 1550

1610 sont le cadre, ce qui renvoie au troisieme enjeu historiographique, un

debat toujours ouvert sur l'impact pour l'histoire des sciences de l'invention de 1'imprimerie, et plus generalement une histoire culturelle des sciences

qui, des livres aux lecteurs et aux lieux de science, a revele la fecondite de ses approches. George Sarton n'hesite pas a faire de rimprimerie le princi pal facteur de rupture entre le Moyen Age et la Renaissance, distinguant bien deux inventions, la typographic et l'estampe13. Mais il insiste aussi sur

l'impact negatif de la divulgation par rimprimerie de textes anciens souvent

errones, vision etayee par l'ecrasante proportion de vieux textes publies sous forme d'incunables. Le succes de vieux textes ou d'oeuvres medievales

vulgarisees donne en effet l'impression que rimprimerie contribue surtout a diffuser des pensees anciennes. La comparaison des premiers imprimes et

des manuscrits disponibles au xvc siecle va dans le meme sens: loin d'ef

fectuer un tri dans les oeuvres disponibles, rimprimerie semble les diffuser

toutes, dans des livres qui se distinguent peu des manuscrits. Malgre cette forte restriction, Sarton presente la standardisation des textes et des images comme l'innovation majeure de l'imprime, mettant en avant l'uniformite des exemplaires d'une meme edition. C'est une position proche que defen dent Lucien Febvre et Henri-Jean Martin, dans une etude devenue exem

plaire, L'apparition du livre; ils introduisent cependant une nuance de taille en soulignant l'importance particuliere de 1'illustration dans certaines sciences descriptives comme l'histoire naturelle ou l'anatomie14.

Dans The printing press as an agent of change, publie en 1979, Eliza beth Einsenstein soutient une position beaucoup plus tranchee. Elle invoque les consequences revolutionnaires de rimprimerie qui aurait permis en

12 Marco Beretta,? Humanism and the emergence of early modern chemistry: the spread of

Georgius Agricola's metallurgical writings?, Fundamental concepts of early modern

chemistry in the context of the operational and experimental practice, Max-Plank-Insti tut fur Wissenschaftsgeschichte, preprint 25, juin 1995, p. 23. Agricola, De re metallica, Bale, Froben, 1556, in-fol.

13 George Sarton, op. cit., 1953.

14 Lucien Febvre et Henri-Jean Martin, L'apparition du livre, Paris, Albin Michel, 1971, ch. 2 et p. 386; Henri-Jean Martin, ?La revolution de rimprim??, dans Histoire de l'edi tion frangaise, sous la dir. de Roger Chartier & Henri-Jean Martin, tome 1, Le livre

conquirant, Paris, Promodis, 1982, p. 153-161,

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science le tri des donnees disponibles et surtout un meilleur enregistrement des observations15. Elle oppose ainsi une culture de rimprime et une culture du manuscrit, dont les valeurs seraient fondamentalement differentes. Notant l'approche asymetrique qui est faite de rimprimerie a propos des

questions religieuses, en soulignant son role pour la propagation des idees

protestantes et en le minorant pour le maintien de l'orthodoxie, Elizabeth Eisenstein se demande si on ne neglige pas aussi son importance dans les

pratiques savantes normales. Insistant sur l'astronomie, la cartographie ou

les sciences naturelles, elle conclut que rimprimerie permet a plus de Nature d'entrer dans les livres.

Ce livre a suscite de nombreuses critiques, portant notamment sur la faible prise en compte du maintien d'une culture manuscrite apres 1'inven tion de rimprimerie, une surestimation des modifications formelles du livre liees a la typographic et une presentation mythique de l'atelier d'imprimeur, comme lieu de rencontre des differentes couches de la societe. De fait, on trouve deja bien avant rimprime des bibliotheques remplies, des livres tres

diffuses, des instruments paratextuels elabores, des figures d'auteurs bien constitutes et des formes de publication fondees sur un archetypum manus crit. Ces critiques attenuent, sans les discredited des conclusions qui sem

blent plus solides pour le livre scientifique que pour d'autres domaines. Dans celui des arts mecaniques, le debat sur le role de rimprimerie a pris

de l'ampleur a partir des annees 1970, avec les travaux de Ladislao Reti et Alexandre Keller sur les ?theatres de machines ?, recueils de planches, sou vent de grande qualite graphique, representant des machines et des instru

ments, dans lesquels le texte tient une place restreinte16. Ces ouvrages pre sentent-ils des ?machines sur papier? ou des machines fonctionnelles17?

S'agit-il de ?press-books ?, ouvrages de promotion pour les experts meca

15 Elizabeth Eisenstein, The printing press as an agent of change, Cambridge, University Press, 1979. Voir sur ce livre la revue critique de Roger Chartier, ?U ancien regime typo

graphique: reflexions sur quelques travaux regents ?, Annales E.S.C. (1981), p. 191-209 et le compte rendu d'Anthony Grafton, ?The importance of being printed?, Journal of interdisciplinary History, vol. 11, 1980, p. 265-286.

16 Ladislao Reti, ?Leonardo and Ramelli?, Technology and Culture, vol. 13, n? 4, 1972,

p. 577-603; Alexander Keller, ? Mathematical technologies and the growth of the idea of Technical Progress in the sixteenth century?, Science, Medecine, and Society in the Renaissance. Essays to honor Walter Pagel, ed. by Allen G. Debus, vol. I, New York, 1972, p. 11-27; Id., ? A manuscript version of Jacques Besson's Book of Machines ?, On

PreModern Technology and Science, A Volume in Honor of Lynn White Jr., ed. by Bert S. Hall and Delno C. West, Malibu, Undena Publication, U. of California, Los Angeles, 1976, p. 75-103.

17 Eugene S. Ferguson,? The Mind Eye: non verbal Thought in Technology ?, Science, aout

1977, vol. 197, n? 4306, p. 827-836.

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UNE INTRODUCTION 13

niciens, de ?coffee table books?, destines aux plaisirs des Grands18? Ou

bien alors, faut-il y voir des instruments de travail pour l'invention de nou

veaux dispositifs ? Ces questions restent ouvertes.

Plus generalement l'histoire des sciences et des arts mecaniques a pu beneficier d'un autre apport recent de l'histoire du livre: une plus grande attention accordee a l'objet lui-meme. II parait difficile, a present, de consi derer un texte, quel qu'il soit, independamment de son support. C'est a la croisee des chemins entre support materiel et texte ou images que se

construit un sens, lors de lectures necessairement plurielles. II semble done

important, pour analyser un texte scientifique ou technique, de preter atten

tion a la forme sous laquelle il se presente. Parmi les etudes importantes faites dans cet esprit, une des premieres

peut-etre est celle d'Owen Gingerich sur le De revolutionibus de Coper nic19. Un recensement de toutes les editions connues a travers le continent

europeen, l'etude de leur localisation, l'examen de leur etat physique et

notamment des traces de censure et de lecture conduisent a une apprehen sion bien plus fine de la realite materielle d'un tres grand texte scientifique et des conditions de sa reception. II met par exemple en evidence la rarete

des lectures approfondies du texte de Copernic, d'un abord particulierement difficile. Les enquetes d'Ann Blair sur differentes editions du Theatre de la Nature de Jean Bodin, et notamment l'analyse de traces manuscrites, ont de la meme maniere permis d'evaluer plus finement le statut de ce texte20.

Dans la prise en compte de cette materialite du livre, des specialistes de litterature ont apporte de remarquables contributions a l'etude des oeuvres

scientifiques. Dans l'edition critique du Traite des monstres et prodiges d'Ambroise Pare par Jean Ceard, la patiente reconstitution des sources de l'auteur conduit a un discours neuf sur la composition de l'oeuvre et sur la

maniere dont textes et images importes permettent la construction d'un nou veau livre21. Elle offre une comprehension plus forte de la signification du livre de Pare. De la meme maniere, l'edition critique du Messager Celeste de Galilee assuree par Isabelle Pantin montre de maniere exemplaire l'inte

18 Samuel Y. Edgerton Jr., The Heritage of Giotto's Geometry. Art and Science on the Eve of the Scientific Revolution, Cornell U. Press, Ithaca, and London, 1991, p. 187.

19 Owen Gingerich, ?Copernicus's De revolutionibus: an exemple of Renaissance Scienti fic Printing?, Print and Culture in the Renaissance. Essays on the advent of Printing in

Europe, Gerlad P. Tyson & Sylvia S. Wagonheim ed., Newark, University of Delaware

Press, 1986, p. 55-73. 20

Ann Blair, The Theater of Nature. Jean Bodin and Renaissance Science, Princeton Uni

versity Press, 1997. Voir aussi les autres travaux de cette historienne dans la bibliogra phie, infra.

21 Ambroise Pare\ Des monstres et prodiges, ed. critique et commented par Jean C6ard, Geneve, Droz, 1971.

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14 L. PINON - A. ROMANO - H. VERIN

ret d'une etude materielle du livre22. La chronologie de la composition, eta blie grace aux alterations des titres courants, aux changements de vocabu

laire, a la reconstitution fine de la structure typographique du livre et a la confrontation des exemplaires conserves, apporte de nouveaux elements sur le sens du texte, mais aussi sur ce que Galilee a pu attendre de ce livre, piece

maitresse d'une recherche de nouveaux soutiens patronaux. En proposant recemment une nouvelle edition du Dialogo sopra i due massimi sistemi del

mondo, Ottavio Besomi et Mario Helbing ont eux aussi tire un tres riche parti de l'histoire materielle du livre, notamment par la confrontation de quatre vingt-quinze exemplaires de l'editionprinceps de Florence, en 1632, et l'ana

lyse des complements autographes du volume personnel de Galilee, conserve a Padoue23. Cette problematique a aussi fortement marque 1'historiographie des theatres de machines. Ces ouvrages se presentant comme des recueils

d'inventions, on s'est efforce, a la suite des travaux de Ladislao Reti24, de rele ver des plagiats de dessins manuscrits ou imprimes, voire, la reutilisation de

gravures. Au point que Ton a pu assister a un veritable demembrement de ces

livres, chaque gravure etant traitee sans relation a l'ensemble du livre. Les renditions fac-similees tendent a rectifier ce que ces approches avaient de reducteur. Mais c'est pour beaucoup aux travaux sur l'histoire de la gravure, des graveurs, des ateliers et des reseaux du livre, que Ton doit l'actuel renou vellement de notre perception de ces ouvrages techniques.

Ce type d'approche est l'un de ceux par lesquels histoire du livre et his toire culturelle se sont croisees pour construire une analyse des pratiques, en

histoire des sciences, attentive a montrer ?comment des pratiques plus humbles sont la condition meme de Felaboration theorique et constituent le

quotidien du travail des savants ?25. Analyser la presence des auteurs dans les ateliers d'imprimerie, reconstituer leurs cabinets de travail ou les moda lites des echanges qu'ils instaurent entre eux permet de contribuer a cet

effort de comprehension plus complete de l'activite savante de la Renais

sance26. Des conditions de la fabrication du livre a celles de sa diffusion et

22 Galilee, Le messager cileste, texte, trad, et notes 6tablis par Isabelle Pantin, Paris, Les Belles Lettres, 1992, p. xxvi-xxxi.

23 Galileo Galilei, Dialogo sopra i due massimi sistemi del mondo tolemaico e copernicano, edizione critica e commentario a cura di Ottavio Besomi e Mario Helbing, Editrice Ante

nore, Padoue, 1998, 2 vol. 24

Voir la bibliographie en fin de volume. 25

Le Museum au premier siecle de son histoire, coordonne' par Claude Blanckaert, Claudine

Cohen, Pietro Corsi et Jean-Louis Fischer, Paris, MNHN, 1997, introduction ge'n&ale de

Roger Chartier, p. 11. 26

Voir en particulier Andrew Pickering ed., Science as Practice and Culture, Chicago, The

University of Chicago Press, 1992. Les orientations r^centes de l'histoire des sciences sont prdsent^es dans Dominique Pestre, ?Pour une histoire sociale et culturelle des

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UNE INTRODUCTION 15

de sa reception, c'est toute la question des identites individuelles et collec tives des savants, avec ses corollaires,

- processus de formation, constitu

tion d'identites professionnelles, mecenat -, qui se trouve engagee. On le voit de maniere exemplaire a travers les nouvelles approches que suscitent les ouvrages de perspective, entre mathematique et peinture, entre savants, artisans et artistes27. Les vastes chantiers ouverts dans ces differentes direc tions ont pu prendre appui plus generalement sur des questionnaires d'his toire sociale et intellectuelle des pratiques culturelles, ainsi que sur 1'impor tation de certains des concepts cles de la sociologie.

Les travaux, nombreux en Italie et en Angleterre, sur l'histoire des ensei

gnements, ont permis de mieux saisir les contours institutionnels assignes aux champs disciplinaires, notamment les mathematiques et la philosophic de la nature, dans le cadre de la crise des universites, tout au long de la seconde moitie du xvi* siecle: de Padoue a Oxford, en passant par Bologne et les principaux centres universitaires europeens de la periode, la mise en discussion de l'aristotelisme et les debats sur la medecine et l'anatomie ont

participe de la renaissance des savoirs scientifiques et techniques28. De meme que les appartenances institutionnelles, les clivages religieux et les

logiques confessionnelles ont fait l'objet d'enquetes qui ont permis de ques tionner a nouveaux frais les rapports entre science, technique et religion dans la culture post-tridentine29: si ces travaux ont particulierement profite a la Compagnie de Jesus, ils ont aussi mis en circulation de nouvelles

enquetes sur la censure ou la constitution de logiques ?nationales? de la

production scientifique30.

sciences. Nouvelles definitions, nouveaux objets, nouvelles pratiques?, Annales HSS, vol. 50, 1995, p. 487-522. Sur la periode qui nous occupe ici, on renverra au dossier the

matique ?Les r?seaux de la culture scientifique romaine a la Renaissance?, MEFRIM, 2002, sous presse, qui accueille les contributions de Luisa Dolza, Andrea Carlino, Pascal

Dubourg Glatigny et Laurent Pinon. 27

On renverra d'une part au travail de Jeanne Peiffer a propos de DUrer: Albrecht Dttrer, Giometrie, presentation, trad, de l'allemand et notes par J. Peiffer, Paris, 1995, et a Pascal

Dubourg Glatigny, Egnatio Danti: un matematico tra gli artisti, Bologne, Minerva, sous

presse; Egnatio Danti, Traite* de la perspective, edition critique et traduction par Pascal

Dubourg Glatigny, CNRS-editions, sous presse. 28

Au sein de la tres riche bibliographie disponible, on soulignera 1'importance des travaux de Charles B. Schmitt sur les mises en discussion d'Aristote. Sur les mathematiques, voir Morderchai Feingold, The Mathematician's Apprenticeship. Science, Universities and

Society in England 1560-1640, Cambridge / Londres, 1984. 29

Voir Science in Context, vol. 3, 1989/1, numero thematique ?'After Merton': Protestant and Catholic Science in Seventeenth-Century Europe?, dirige par R. Feldhay et Y. Elkana. Pour une mise en perspective recente de ces questions, a l'echelle europeenne, Sciences et religions de Copernic a Galilee, op. cit.

30 Pierre-Antoine Fabre, Antonella Romano (dir), ?Les jesuites dans le monde moderne. Nouvelles approches historiographiques?, Revue de Synthese, 1999, 2/3; Roy Porter et Mikulas Teich ed., The Scientific Revolution in National Context, Cambridge, 1992.

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16 L. PINON - A. ROMANO - H. VERIN

Nombre de ces investigations croisent ou developpent des problema tiques sur les sociabilites ?savantes? rapportees au proces de civilisation31, notamment les procedures de civilite de la preuve, par lesquelles les savoirs sont valides, et insistent sur le passage de Tobservation singuliere a l'uni versalite recherchee du savoir. L'insertion sociale des savants, les relations de cour qu'ils entretiennent, sont desormais mises en avant par de nom breuses etudes, qui portent principalement sur TItalie32. Mais a mesure que ces travaux se multiplient, ils revelent un monde de la Renaissance ou les sociabilites scientifiques sont loin de se reduire au monde des cours et aux

logiques d'appropriation d'un ethos aristocratique33. Ce sont des mondes meles que ceux de l'invention de nouveaux instruments de mesure, de la mise en place de cabinets ou de bibliotheques et s'y croisent des artisans, des ingenieurs, des curieux: a mesure que l'enquete progresse sur la construction navale, rartillerie, les fabricants de lentilles, ce sont les liens entre sciences et arts qui se redessinent, a travers le projet de restauration

humaniste, dans le domaine des arts mecaniques34. Tous ces travaux ne cessent d'apporter de nouveaux eclairages sur les

quelques decennies que nous avons choisi d'aborder dans ce numero et, s'il fallait evoquer ici un dernier argument en faveur de cette periode, on pour rait assurement la designer comme phase de naissance de l'histoire des sciences. Concomitante de la naissance de la discipline historique au xvi* siecle35, la reprise d'un genre particulierement prise dans l'Antiquite, celui des vies illustres - qui trouve son degre d'expression le plus acheve dans le travail de Vasari sur l'histoire de l'art -, concerne aussi les sciences.

31 Nombre de ces travaux sont dus a Norbert Elias: voir 1'introduction de Roger Chartier a La societe de cour, Paris, Flammarion, 1985 et Roger Chartier,? Norbert Elias, interprete de l'histoire occidentale?, Le dibat, 5/1980.

32 Sur les collections en Italie, voir Giuseppe Olmi, L'inventario del mondo. Catalogazione della natura e luoghi del sapere nella prima eta moderna, Bologne, II Mulino, 1992; Paula Findlen, Possessing Nature. Museums, Collecting and Scientific Culture in Early Modern Italy, Berkeley & Londres, University of California Press, 1994. Pour une lecture

critique, Sylvia de Renzi, ?I1 drago di Aldrovandi e le vipere di Redi. A proposito di musei e storia naturale nell'Italia del tardo Rinascimento ?, Intersezioni, vol. 17, 1997/1,

p. 123-130. 33

Voir, par exemple, Mario Biagioli, ?Scientific Revolution and Aristocratic Ethos. Federico Cesi and the Accademia dei Lincei?, dans Alexandre Koyre, I'avventura intel

letuale, a cura di Carlo Vinti, Naples, Edizioni Scientifiche italiane, 1994, p. 279-295. 34

Henry Heller, Labour, science and technology in France, 1500-1620, Cambridge Univer

sity Press, 1995. Schemmel Matthias, ? A view on Galileo's Ricordi Autograft. Galileo

practitioner in Padua?, Largo campo di filosofare, Eurosymposium Galileo 2001, Jose Montesinos y Carlo Solis ed., Fondation Canaria Orotava de Historia de la Ciencia, La

Orotava, 2001 p. 281-292. 35

Voir Claude-Gilbert Dubois, La conception de l'histoire en France au xvf siecle (1560 1610), Paris, A. G. Nizet, 1977; voir aussi les analyse de Carlo Ginzburg, dans la preface a l'edition de Lorenzo Valla, La donation de Constantin, Paris, Les Belles Lettres, 1993.

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UNE INTRODUCTION 17

Ainsi, Bernardino Baldi, acteur a part entiere du mouvement de ?renais sance des mathematiques?, redige une serie de vies de mathematiciens

depuis l'Antiquite et fonde un genre dans lequel se constitue l'histoire des sciences36. Ce travail fondateur introduit et legitime une hierarchie des dis

ciplines scientifiques, dans laquelle les mathematiques occupent une place centrale, celle-la meme que l'on retrouve au cceur des analyses posterieures sur la ?revolution scientifique?. Un travail corollaire d'? histoire raison nee? affecte les sciences pratiques, mathematiques mixtes et mecanique. L'effort general de reinterpretation de l'heritage antique auquel ces disci

plines contribuent implique une histoire des connaissances mieux avertie des ? origines ? et des ? commencements ?. On voit ainsi apparaitre, a 1'oc casion de la reduction en art des mecaniques, des introductions historiques qui precedent a deux niveaux: revocation des travaux des Anciens, avec des chronologies et la mise en evidence de filiations et de temps forts. Ces

derniers, symbolises par de grands noms (Euclide, Archimede, Vitruve,

Vegece) sont des moments de recomposition et de remise en ordre de savoirs herites. L'autre niveau de rationalisation de l'histoire des arts meca

niques substitue a la simple succession des solutions a un probleme tech

nique, la vision d'un perfectionnement, sinon d'une logique de progres, dans la maitrise des effets. C'est particulierement vrai pour la fortification, confrontee a la necessite de substituer des bastions aux anciennes tours, de venues obsoletes face a rartillerie, et de proceder a un complet remode

lage des formes et des dispositions des parties fortifiees. Les premiers cours

de fortification, y compris ceux de Galilee ou de Simon Stevin, rationalisent cette transition en justifiant des successions chronologiques par une neces site logique. On voit ici se mettre en place l'histoire raisonnee des sciences et des arts que pronera Diderot dans Y Encyclopedic31.

Les articles rassembles dans ce numero devraient apporter leur part a une meilleure appreciation des travaux actuels portant sur ces decennies char nieres. Ils devraient contribuer a faire voir comment differents domaines du savoir se sont trouves a quelque titre affectes par des modifications, des

redefinitions, voire des mutations, a caractere epistemologique, methodolo

gique, culturel, social ou politique. Aucun de ces criteres ne doit etre privi legie, et il nous semble que faire oeuvre d'historien des sciences consiste

precisement a proposer une articulation contextualisee de ces criteres, ce qui a pour enjeu une redistribution des rapports entre artes et scientiae. C'est sans doute dans les difficultes d'une saisie globale de ces criteres,

- qui

36 Bernardino Baldi, Le vite de' matematici, edizione annotata e commentata della parte medievale et rinascimentale, a cura di E. Nenci, Milan, 1998.

37 Helene Verin, La gloire des ingenieurs, Paris, Albin Michel, 1993.

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18 L. PINON - A. ROMANO - H. VERIN

serait attentive a redonner sa place propre a chacun d'entre eux tout en en

analysant 1'impact sur tous les autres, a des echelles et dans des temporali tes differentes -, que reside 1'impossibility presente a mettre en oeuvre des histoires generales des sciences et des techniques, comme nos aines en

avaient produites. Les etudes de cas qui s'accumulent aujourd'hui, favori sees par la multiplication des revues specialises, en empruntant souvent leurs concepts aux differentes sciences sociales, proposent des schemas

interpretatifs differents; surtout, elles en appellent d'autres, notamment en

revelant l'inegal niveau de nos connaissances en termes d'espaces etudies. A ce titre, le present volume est representatif de son epoque.

Dans un paysage epistemologique et methodologique contemporain pro fondement transforme, ou les producteurs de l'histoire des sciences ne sont

plus uniquement les scientifiques ou les philosophes, ce volume peut nour rir le debat sur les sciences, les savoirs et les pratiques scientifiques a la

Renaissance, a l'aune de contributions qui abordent des aspects varies, selon des questionnaires distincts, et avec des objectifs differents, d'un

monde en recomposition.

Ecole normale superieure. Laurent Pinon CNRS-Centre Alexandre Koyre. Antonella Romano CNRS-Centre Alexandre Koyre. Helene Verin

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