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Renou Fillozat.1953.L'Inde.classique.ii

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  • L'IN E el SSI UE MANUEL DES TUDES INDIENNES

    par

    Louis RENOU et Jean FILLIOZAT Membre de l'lnstitut Professeur au College de France Professeur 11 la Sorbonne et 11 l'cole Pratique des Hautes tudes

    Paul DEMIVILLE Membre de l'lnstitut

    Professeur au College de France

    Tome 11 avec le concours de

    Olivier LACOMBE Pierre MElLE Professeur 11 l'Universit Professeur 11 l'cole Nationale

    de Lille et 11 l'cole Pratique des Langues Orientales des Hautes tudes Vivan tes

    PARIS - IMPRIMERIE NATIONALE

    COLE FRANC;AISE D'EXTR~ME-ORIENT HANOI

    1953

  • Le tome premler de cet ouvrage a paru aux tditlons Payot, Paris

    1947-1949

    TABLE DES MATrERES

    CnAPITRE VII. LA PHILOSOPHIE BRAHMANIQUE. LES DARsANA. LE MAT-RIALISME. LES SPCULATIONS GRAMMATICALES (3 1358-1516).

    :1. Introduction. J. FiIliozat La notion de dal'sana 1358. Le groupe des dadana brahma-niques 1 359. Leurs origines 1360. Synthese des six darsana 1361. Porte philosophique et religieuse des dariana 1362. La pense des dadana etla culture indienne 1363. Descriptions indiennes des darsana 1364. Les darsana et la pense occidentale 1365. L 'interprta-tion de la pense des darSana par les Occidentaux 1366-1367. Intret gnral de la philosophie des darsana 1368-1369.

    2. Les six darsana. a. La Mimamsa. L. Renou. Origine de la MimaIpsa 1370. Position de la MimaIpsa 1371. Les textes : les Mimamsastra 1372. Les commen-taires 1373-1375. Les doct~ines : le dharma 1376. Le sabda 1377. L'injonction (vidhi) 1378. Les divisions du Veda 1379-1382. La thorie de la connaissance 1383. Les catgories 1384. Le transcendantal (aprva) 1385. La dlivrance (mokfa) 1386. Conclusion 1387. b. Le Vediinta. Origine du Vedanta 1388. Position du Vedanta 1389-1391. Les VedantaO ou Brahma-stra 1392-1393. Les commentaires. SailkaraI1394-1396. La littrature sailka-rienne 1397. Ramanuja 1398. Nimbarka 1399. Madhva 1400. Yallabha 140'1. Autres commentateurs 1402. Textes divers 1403. Doctrine de Sailkara et de l'Advaita en gnral 1404-1405. La maya 1406. Le non-savoir (avidya) 1407. La dlivrance 1408. Thorie de la connais-sanee et psychologie 1409. Rapports avec le bouddhisme 1410. Doctrine de Ramanuja 1411-1412. Doctrine de la Dipika 1413. Doctrine de Nimbarka 1414-1415. Doc-trine de Madhva 1416-1417. Doctrine de Vallabha 1418-1420. c. Le SaIpkhya. Origine du SaIpkhya 1421. SaIpkhya et bouddhisme 1422. SaIpkhya anCen et pique 1423-1424. Schma de la doc-trine 1425. Les Sar;akhyakarika et leurs commentaires 1426-1428. Les Sar;akhyastra 1429. Auires textes 1430. La prakrti 1431. Les gura 1432. L'volution (parirama) 1433. Le puru~a 1434. Les ttvolus" : buddhi, ahar;akara, manas, indriya, tanmatra, bhta 1435-1438. Le corps subtil 1439. La dlivrance 1440. La causalit 1441. La tlorie de la connaissance 1442. L'athisme du SaIpkhya 1443. Conclusions 1444. d. Le Yoga. J. FiUiozat. Dfinition du Yoga 1445. Origine du Yoga 1446. Posi-tion du Yoga 1447. Les textes 1448-1450. Les doc-

  • VlU TADLE DES MATJllRES.

    trines 1451. Le hut du Yoga 1452. Les conditions du Yoga 1453. Les huit articles du Yoga 1454-1455. Les pouvoirs extraordinaires (vibhti) 1456. La conception de l'esprit 1457. Le pessimisme et le Yoga 1458. Yoga et houddhisme 1459.

    Appendice. Le Ha~hayoga : a. Textes de Hathayoga; b. 9aracteres du Ha (hayoga ; c. Techniques du Ha(hayoga; d. Sodhana; e. Asana; f. Mudra; [J. Technique du souffle. e. Le Nyaya. Dfinition du Nyaya 1460. Origines du Nyaya 1461-1462. Position du Nyaya 1463-1464. L68 textes. Les Nyayastra et leurs commentaires 1465-1466. Ouvrages de Nyaya-Vais'e~ika 1467. Le Navyanyaya 1468. Les doc-trines 1469. Les pramara 1470. Les prameya 1471-1472. Le raisonnement a cinq membres 1473-1475. Les dveloppements du Nyaya 1476-1478. f. Le Vaisesika. Origine du 'Vaise~ika 1479. Position du Vaise~ika 1480-1481. Les textes. Les VaiSe~ikastra 1482-1484. Ouvrages de Nyaya-Vais'e~ika 1485. Les doctrines, les catgories 1486. Les substances 1487. Les proprits 1488. Les activits 1489. Les autres catgories 1490. Thorie de l'tman 1491. Thorie de la connaissance 1492-1493. Thorie de la causalit 1494. L'atomisme du Vais'esika 1495-1496. .

    3. Le matrialisme : les Nastika, Lokayatika et Carvaka. Sources 1497. Gnralits 1498. Les Nastika 1499. Le lokayata et Carvaka 1500. Les barhaspatya 1501. Le bhtavda 1502. Payasi 1503. Kambalasvatara et Kesa-kambali 15 04. Les doctrines 15 05. Le svabhlJalJda 1506-1507.

    4. Les spculations sur le langage. Origines vdiques 1508. La thorie des mots nitya 1509. La thorie du spho(a 1510. Les tapes de la paro le 1511. Le bindu et la Jakti 1512. Les thories grarnmaticales. Le mot 1513-1514. La phrase 1515. Les fonctions grammaticales 1516.

    CHAPITRE VIII. L'RUDITION (S 1517-1612). Gnralits 1517-1518.

    i. Grarnmaire. a. Les grammairiens sanskrits. Les origines 1519. Patini : date et lieu 1520. L'A~tadhyayi 1521-1522. Les recueils annexes 1523. Impor-tance de la grammaire de Pa;ini 1524. L'interprtation de Pa;ini 1525. Le Mahbh~ya 1526-1527. La KJik 1528. Pa1iinens ultrieurs 1529. coles non-pii;inennes 1530-1531. Philosophie grammaticale 1532. b. Les grarnmairiens moyen-indiens. Les grammairiens prakrits 1533-1535. Les grarnmairiens palis 1536. c. Les grammairiens dravidiens [par J. Filliozat. etP. Meile]. Gnralits 1537. Grarnmaires tamoules (T iJlkppiyam) 1538-1541. Granimaireskannara 1542. Grarnmaires telugu 1543. Grarnmaires malaya'!am 1544.

    1. Silburn.

    1. Renou.

    L. Renou

    TADLE DES MATIIlRES.

    2. Lexicographie. a. Les lexicographes sanskrits, prakrits et palis. Gnralits 1545. Amara 1546. Autres lexiques 1547. Lexiques spcialiss 1548. Lexiques vulgaires et moyen-indiens 1549. b. Les lexicographes dravidiens [par J. Filliozat]. Dictionnaires tamouls 155 O. Dictionnaires kann8ra 1551. Dictionnaires telugu 1552. .

    3. Mtrique. a. Les mtriciens sanskrits et prakrits. Pingala 1553. Autres traits 1554. b. Les mtriciens tamouls [par J. Filliozat] 1555.

    4. Potique. Les origines 1556-1557. Bharata et Bhamaha 1558. Dandin et Vmana 1559. Udbhata et Rudrata 1560.

    n~ndavardhana et Mamma~a 156'1. La potique entre les IX' et XII' s~cles 1562. Les compilations rcentes 1563. Les manuels spcialiss 1564-1565. Le domaine de la potique 1566. Les ala1Jlkra 1567-1569. Les [Jua et les dosa 1570-1571. Les rlti 1572. Le rasa 1573-1575. Le dhvdni 1576-1578.

    5. Dramaturgie. . Bharata (Na(yasastra) 1579-1580. Les textes postneurs 1581-1582. Le drame (n(ya) 1583. Le sujet du drame 1584. Les personnages 1585. Les sentiments (rasa) 1586. Style et langue 1587. Danse, chant, musique 1588. Les prliminaires 1589. Les genres dramatiques 1590.

    6. 1, 'ArthaJstra et ses dpendances. Gnralits 1591-1592. Kautilya. Sommaire de l'amvre 1593-1596. Le caractere de'l'muvre et sa date.1597-1598. Autres textes 1599-1600. Traits divers dpendant de I'Arthasiistra 1601. L'architecture : textes 1602-1603. La musique : textil s 1604-1605. La mimique (abhinaya) 1606.

    7. rotique (kmaJstra). Gnralits 1607. Sommaire du Kmastra 1608. Autres manuels d'rotique 1609. La thorie 1610-1611. Catucteres gnraux de l, rotique indienne 1612.

    IX

    CHAPITRE IX. LES SCIENORS (S 1613-1746). J. Filliozat. 1. Introduction 1613-1615. 2. Mdecine.

    L 'hygiene dans la civilisation de Mohan-jo-I)aro 1.616. Les donnes indo-iraniennes 1 61 7. Les donnes vdlques 1618. Pathologie 1619. Thrapeutique 1620. An~tomie 1621. Physiologie 1622. Mdecins a l'poque vd-que 1623. a. Les traits de Susruta et Caraka 1624. Lgende des origines de la Su~rutasa1Jlhita ~ ~.~ 5. LgeIl;d_e des origines de la Carakasa1Jlhtt 1626. DlVlSlOns de 1 A-yurveda 1627. Analyse de la Susrlftasa1Jlhita 1628. Stra-sthna1629. Nidnasthna 1630. Sarirasthna 1631. Cikt-sasthna 1632 Kalpasthana 1633. Uttaratan/ra 1634. , Composition et age de la ~usrutasalf!hita 1635. Langue de la SuJrutasa1Jlhita 1636. Age des donnes de la SuSruta-

  • x TABI,E DES MATrFmES.

    ,al)thita 1637. Analyse de la Caraka

  • XII TABLE DES MATJlmES.

    3. Le thAtre. a. Gnralits. Origines. Origines: le Veda 1845-1848. Influenee greeque 1849-1850. Les langues 1851. La pratique 1852-1853. b. Des dbuts a Kalidiisa. Asvagho~a 1854-1856. Le probleme de Bhiisa 1857-1858. Les OlUvres de Bhiisa 1859-1863. La Ml'cchakatikii 1864- 1866. Le MlIdriirak?asa 1867-1868. Le Devicanru-g~pta 1869-187 O. Kali,diisa : M iilavikagnmitru 1871. Vkramorvasya 1872. Sakllntalli 1873-1874. Speimen 1875-1876. Apprciation d'ensemble 1877. . . c. Les successeurs de Kiilidisa. Har~a 1878. Priyadarsikii et Rutnavali 1879. Nagananda 1880. Bhavabhuti 1881-82. Miilatimiidhava 1883. Les drames riimaites de Bhavabhti 1884-1885. Spcimens 1886. Le Ve'!Isa'l!1ara 1887. Riijasekhara 1888-1889. Autres drames riimai'tes 1890. Le Mahaniilaka 1891-1892. La Gopiilakelicandrika 1893. Drames ultrieurs 1894-1896. Pieees "historiques" 1897-1898. Les mono-logues comiques 18\)9-1900. Les prahasana 1901. Remarques gnrales 19 O 2-1 90 3.

    B. L'ancienne littratureltamoule (non religieuse) [S~ 1904-1928]. ' Gnralits 1904. Les Huit Recueils. Gnralits 1905-1907, Les Dix IdyUes 1908. PuRaniiNRu 1909-1910. Poemes d'Agam 1911-1912. PadiRRuppattu 1913. Don-nes chronologiques 1914. Les poetes 1915. Agapporul et PuRapporu 1916. Le SaJ1gam 1917. Les Dix-huit Recueils 1918. Le KuRa11920. Les Cinq Poemes 1921. Le Lai de l'Anneau 1922. Ma,!imegalei 1923-1924. Cindiimani 1 925. (:liima,!i 1 926. Perll1i-kade 1927. OEuvres diversas 1928.

    CHAPITRE XI. LE BOUDDHISME (S 1929-2386). i. Les sourees.

    Gnralits 1 929. a. Sources archologiques.

    Importa~ee des monuments bouddhiques 1930. Piliers bouddhIques 1931. SWpa 1932. Monasteres 1933-1934. Monuments divers 1935. Statues et figurations 1936. Reliques et reliquaires 1 937. b. Sourees numismatiques et pigraphiques. Monnaies 1938. Inscriptions 1 939. c. Sources philologiques. Les textes 1940. Les littratures bouddhiques indiennes. Les canons ~ 941. T~aditions sur les langues des canons 1942. AutorIt des dIverses langues bouddhiques i 943. 10 Littrature bouddhique en pli. A. Littrature canonique paji. Le canon pli. e.t .sa langue 1944 .. Le canon pli et son cole 1945. D.lVlslOns ducanon piih 1946. Table gnerale

    d~ canon ph 1947. Vinaya 1; le Stittavibhatiga 1948. Vtnaya Il; les Khandhaka 1949. Vinaya IIl; le Pariviira 1950. Les Butta 1951. Style des sutta 1952. Les Nikiiya

    P. Meile.

    J. Filliozat.

    I I

    ==i I

    TABiE DES MATIERES.

    1953. Suttapitaka 1; le Dlghanikiiya 1954. Principaux sutta 1955-1956. Suttapiaka 1I; Majjhimanikiiya 1957. Suttapitaka llI; Sa1rtyuttanikiya 1958. Suttapiaka 1 V; Atigultaranikiiya 1959. Suttapiaka V; Khuddakanikiyu 1960. Dhammapada 1961. Udiina 1962. ltivuttaka 1963. Suttanipiita 1964. Viminavatthu et Pe/avatthu 1 965 . Thera- et Thergiitlui 1966. lataka 1967. Niddesa 1968. Patisalrtbhidiimagga 1969. Apudilna 1970. Buddhavarlsa 1971. Cariyipiaka 1972. Abhidhammapitaka 1; Dhamma-sutiga',i 1973. Abhidhummupitaka JI; Vibhmigu 1974. Abhi-dhammapi{aka llI; Kathivatthu 1975. Abhidhammapiaka IV; Puggalapuatti 1976. Abhidhammapitaka V- VII; Dhii-iukatlui, Yamaka, PaHhina 1977. Formation du canon pli 1978-1979. B. Littrature pali paracanonique 1980. Piitimokkha et Kammavica 1981. Paritta 1982. Milinda-pafiha 1983. Nettipakara,!a, Pe(akopadesa et Suttasatigaha 1984. C. Littrature pali non-canonique 1985. Les commentaires perdus du canon 1986. Les commen-taires classiques 1987. Buddhadatta 1988. Buddhaghosa 1989. Authenticit 1990.0Euvres 1991. Dhammapiila 1992. liitakaHhava,!,!ani et Dhammapadatlhakatlui 1993. Commentaires divers 1994. Manuels et poemes religieux 1995. Chagatidipani et Lokapaatti 1996. 20 Littrature bouddhique en sanskrit. Gnralits 1 997. a. Littrature canonique et paracanonique en sanskrit. Fragments du canon des Sarvstivdin 1998. Fragments du canon des Mlasarvstivdin 1990. Avadinalataka 2000. Divyiivadana 2001. Fragments des canons des Mah-sghika. Mahivastu 2002. Textes du Mahyna 2003. Principaux SiUra. Lalitavistara 2004. Saddharmapu'!1arika-stra 2005-2006. Lmikiivatirastra 2007. Samiidhiraja 2008. Suvar,!a1wabhii.'la 2009 Stra sur Amitbha, Ava-lokitesvara, etc., 2 O 1 O. Ratnak{a 2 O 11. Buddluivatmll-saka 2012. Prajiipiiramitii 2013. Stra divers et dluira,!i 2014. Majurmlakalpa 2015. Littrature tantrique cano ni que 2016-2017. b. Littrature non-canonique en sanskrit et autres langueb indiennes. Gnralits 2 O 18. Commentaires et traits d'exposition de doctrines (Abhi-dharmakola, Abhisamayilmpkira) 2 O 1 9. Textes mdhyamika Ngarjuna 2020. Auteurs mdhyamika divers 2021. Textes des Vijnaviidin 2022. cole de Dignga et des logiciens 2023. Textes de caractere littraire 2024. Littrature hymnique 2025-2026. Littrature narrative 2027. Textes tantriques 2028-2029. Textes en apa-bhraIpsa et vieux-bengali 2030. Critiques d'authenticit et d'interprtation dans le bouddhisme 2031. C. Sources non-bouddhiques 2032. 3 Littrature bouddhique en traductions tibtaines. Les traductions tibtaines des textes bouddhiques 2033. Les interprtations tibtaines et la philologie boud-dhique 2034. Les colletions tibtaines de traductions

    1111

  • XIV TABLE DES MATIERES.

    2035. Le Bl,a'-'gyur 2036. Contenu des sections 2037. Mdo. Mahyanasfttra 2038. Sfttra des coles andennes 2039. Rgyud 2040. Bstan-'gyur 2041-2043. Mdo-ma et sources diverses 2 O 44. 4' Les sources chinoises. P.DemivilIe. Remarques prliminaires 2045. Importance des sources chinoises 2 O 4 6. Donnes historiques 2 047. A. Pelerins et traducteurs chinois. L;s premiers peIerins 2048-2050. Dbut des grands pelermages 2051-2052. tudes de Yoga bouddhique au Kasmr 2053. Fa-hien 2054. Song Yun 2055. Chouei-king tchou 2056. Hiuan-tsang 2057-2061. La route du Tibet 2062. Yi-tsing 2063. PeIerins du VIII' siMe 2064-2065. Les derniers pelerins 2066. B. Propagandistes et traducteurs indiens. Gnralits sur les traductions chinoises 2067-2069. Les traducteurs du n' siecle ap. J.-C. (Chine du Nord)

    20~0-2072. Les traducteurs du m' siecle ap. J.-C. (Chme du Sud) 2073. Dharmarak~a 2074. Kumarajva et Buddhabhadra 2075. Kumarajva 2076-2079. Buddha-bhadra 2080. Traduction des ouvrages canoniques du Petit Vhicule (v' s.) 2081-2084. Introduction de l'cole Yogacara 208,5. Paramartha 2086-2087. Le Tantra 2088-2090. SubhakarasiIpha 2091. Vajrabdhi 2092. Amoghavajra 2093-2095. Les derniers traducteurs 2096-2100. C. Aperyu du canon chinois. a. Historique du Canon: Constitution du Canon 2101-2102. Classification 210 3. ditions manuscrit~s et impri-mes 2104-2106. b. Contenu du Canon actuel. Gnralits 210 7. 1. Section des gama 2108. II. Section des Donnes ant-rieures 210 9. 111. Section de la Guose 211 O. ,IV. Section du "Lotus de la [vraie] Loi" 2111. V. Section de 1 Orne-mentationfleurie" 2112. VI. Ser.tion del'Amas de Joyauu 2113. VII. Section du Grand Parinirvana" 2114-2118. VIII. Section de la Grande Assemble; 211 9. IX. Sec-tion intitule Collection de Stra" 2120-2121. X. St'c-tion du Tantra 2122-2,23. XI. Section du Vinaya 212f 2128. XII. Section des Sastra commentant des Stra 2129 2130. XIII. Section de l'Abhidharma 2131-2136. XIV Section Madhyamika 2~37.-2~40. XV. Sec~ion d~ Yoga 2141-2146. XVI. SectlOn mtItule "CollectlOn de Sastra" 2147-2149. XXI. Section des ouvrages historiques 2150-2154. XXII. Section des recueils de matriaux 2155-2156. XXIII. Section des doctrines extrieures 2157. XXIV. Section des catalogues 2158-2162. c. Instruments de travail modernes labors au Japon 2163-2169.

    2. La ve du Bucldha. L 'interprtation des sources 217 O. Interprtation phi-losophico-symbolique 2171. Interprtahon mytholo-gique 2172. Interprtation vhmriste 2173-2174. Confrontation des sources2175. Criteres d'authenticit des traits biographiques 2176. Pays.et famille du Buddha

    J. Fillioza I

    TABLll DES ~fATIERES. 2177. Conception, gestation et naissance 2178. Prdiction d'Asita2179. Enfance 2180. Mariage etvie princiere 2181. Les quatre rencontres et le dgolit clu monde 2182. Le Grand Dpart 2183. Premiers travaux religieux 2184. Les austrits et leur abandon 2185. La prparation 11 l'veil 2186. L'assaut et la tentation de Mara 2187. L'veil 2188. Les sept premieres semaines 2189. Offrande

    Trapu~a et Bhallika 2190. Hsitations et rsolution 2191. Sermon de Bnares 2192. Les premiers disciples 2193.

    Conversi?~s 11 Uruvilva 2194. Conversions 11 Rajagrha 21 95. V~s~te aa, pays natal 2196. Retour 11 Rajagrha 2197. VlSlte 11 SravastI 2198. Visites a Vaisali et Kapila-vastu 2199. ~uttes contre les six maitres rivaux 2200. Miracles de SravastI et SaI!lkasya 2201. Calomnies et dboires 2202. Prgrinations et retraites 2203. Influence lointaine 2204. Forfaits de Devadatta 2205. Ajatasatru et Virqhaka. Ruine des Sakya 2206. Derniers sermons 22 O 7. Le rejet de la vie et les dernieres semaines 2208. La totale extinction 2209. Funrailles 2210. Partage des reliques 2211.

    3. L'histoire du boudclhisme. La Communaut a la mort du Buddha 2212. Mahakasyapa 2213. Concile de Rajagrha 2214-2215. La Communaut apres le concile de Rajagrha 2216. Concile de Vaisal! 2217. La communaut apres le concile de Vaisal 2218. Le bouddhisme sous A:oka le Maurya 2219. Concile de Pa\aliputra 2220. Propagation du bouddhisme sous Asoka 2221. Les dbuts du boudclhisme 11 Ceylan 2222. Rdaction des textes canoniques pali et schismes 11 Ceylan 2223. Le boucldhisme apres les Maurya 2224. Le bouddhisme des Indo-Grecs 11 Kaniska 2225. Le bouddhisme sous Kaniska. Concile du 'Kasmr 2226-2227. Le bouddhisme de Kaniska 11 Harsa 2228. Trans-formations du bouddhisme 2229. Le bouddhisme au temps de Har~a 2230-2231. Dveloppement du tan-trisme 2232. Dclin et disparition du bouddhisme 2233. L'action des coles du Vedinta 2234. L'action des inva-sions musulmanes 2235. Dernieres traces du boud-dhisme dans rInde 2236.

    4. Les doctrines boudclhiques. Le milieu prbouddhique 2237. Opinions anonymes 2238. Sectes diverses 2239. Les maUres du bodhisattva 2240. Les six maUres rivaux 2241-2242. Croyances religieuses dans le milieu prbouddhique 2243. A, Les doctrines des coles anciennes du bouddhisme (

  • XVI TABLE DES MATIllRES.

    cement synthtique des choses 2258. Cosmologie 2259. Le domaine du dsir 2260. Le domaine des apparences 2261. Le domaine de l'absence d'apparences 2262. La matiere du monde 2263. Le temps 2264. Divisions calen-driques et cosmiques 2265. Les etres 2266. Les damns, les trpasss et les animaux 2267. Les Asura 2268. Les dieux 2269-2270. Les dieux de mditation 2271. Les hommes. Le roi cakkavattin 2272. Bodhisattva et Buddha 2273. Le Buddha Tathagata 2274. Caracteres physiques des Buddha 2275. Caracteres moraux des Buddha 2276. Les avenikadhamma 2277. Les dasa bala 2278. Autres caractere's 2279. L'enseignement essentiel du Blddha 2280. Les Buddha successifs 2281. n. Le jeu des choses. 2282. L'enchainement des conditions de la douleur 2283-2284. Renaissances et transmigration 2285. Les actes 2286. L'existence intermdiaire 2287. La nature de l'etre transmigrant 2288. Les facteurs d'existence 2289. III. Les conditions de l'arret de la douleur. Conditions gnrales 2290. Conditions morales 2291. Conditions psychophysiologiques et intellectuelles 2292. Les conditions de l'veil, Bodhi 2293. L'extinction, Nir-Valla 2294. Thories diverses 2295. Nature du Nirvana 2296. . IV. Le chemin de l'arret de la douleur. a. Les moyens de la marche dans le Chemin 2297. La technique du comportement 2298. Les techniques psychiques 2299. Les dispositions de l'activit 2300. Les crations psychiques 2301. Les mditations 2302. Les positions du psychisme 2303-2304. Les affranchis-sements" et les stages de dominateur" 2305. But des exercices psychiques 230 6. . b. La marche des etres vers l'arret de la douleur 2307. Le convert. Sotapanna 2308. Le sakadagamin et l'anaga-min 2309. Le sant, Arahant 2310. Le bodhisatta 2311. B. Les divisions des coles anciennes 2312. Sthavira. MahIRasaka 2313. Dharmaguptaka 2314. Haimavata 2315. Kasyaplya 2316. Vatslputrlya. Sarpmitlya 2317. Maha-sanghika 2318. Bahusrutlya 231 9. Call1ya 232 O. Sar-vastivadin 2321. Vaibhasika-Sautrantika 2322-2323. C. Les doctrines du Gran'd Moyen de progression (Maha-yana). Origines du Mahayana 2324. Caracteres principaux du Mahayana 2325. Bouddhologie 2326. La doctrine des corps du Buddha 2327-2328. Caracteres de l'tat de Buddha 2329. Les divers Buddha 2330. Amitabha 2331. Ak~obhya. Bhai~ajyaguru 2332. Les bodhisattva et les conditions de leur tat 2333. Les dix tapes de la carriere 2334. Les dix extremes de vertus 2335. Principaux bodhisattva 2336. Maitreya 2337. Avalo-kitesvara 2338. ManjusrI 2339. Divinits 2340. Doc-trines des stra mahayaniques 2341-2342. Thories des Madhyamika 2343. Critique de 1 apparence des choses 2344. Dialectique et logique 2345. Thories des Viji-navadin-Yogacara 2346. Psychologie des Vijanavadin 2347. Les choses et la ralit 2348. Le salut d'apres les

    TAllLE DES MA'fIEIms.

    Vijanaviidin 2349. Logique bouddhique 2350. Dignaga 2351-2353.L'cole de Dignaga 2354. D. Les doctrines du Mahiiyana tardif et des Tantra. Origine des Tantra 2 355. Les tendances ritualistes et spcu-latives du bouddhisme tardif 2356-2357. Les Buddha et les Bodhisattva 2358-2260. Formes diverses des Buddha, Bodhisattva et Sakti 2361. Divinits 2362. Doctrines tantriques 2363. Symbolisme et Yoga tantrique 2364. Conceptions et mthodes du Yoga tantrique 2365. Rejet de la honte et du dgot 2366. Sectes ou coles diverses 2367.

    5. 'Discipline boudhique. - La Communaut. Les fideIes lalcs 2368. Les mones 2369. NovicIat et ordi-nation 2370. Les devoirs du moine 2371. quipement des moines 2372. Vie des moines 2373. Hirarchie et personnel des couvents 2374. Crmonies de la Commu-naut 2375. L'numration des pchs 2376. Actes disci-plinaires 2377. Pnitences 2378. Les regles des nonnes 2379. Discipline communautaire mahiiyanique 238 O.

    6. Cultes bouddhiques. Les reliques du Buddha 2381. Culte des reliques, monu-menta et figurations 2382. Pompes, louanges et largesses 2383. Rituels accessoires dans les coles anciennes 2384. Cultes mahiiyiiniques 2385. Cultes tantriques 2386.

    CUAPITRE XII. LE JAINISME (S 2387-2493).

    XVII

    1.. Les sources. L. Renou. Gnralits 2387. Les pilrva (puvva) 2388. Les Aliga 2389-2396. Les Upanga (UvaJiga) 2397-2400. Les dix Pra-kirTJaka 2401. Les Cheda(stra) 2402. Autres traits canoniques 2403-2404. Le Canon des Digambara 2405. Les commentaires de Canon 2406. Caractris-tiques du Canon 2407-2408. Chronologie du Canon 2409. Sources post..canoniques 2410 Sources en guj-ratI, etc., 2411. Sources en dravidien 2!d2. popes 2413. Biographies lgendaires 2414-2416. Rcits histo-riques 2417. Romans 2418-2419. Contes 2420-2421. Drames et lyrique 2422. Posie didactique 2423-2424. Philosophie 2425-2427. Littrature rudite et scienti-fique 2428. Sources littraires brahmaniques 2429. Souroes bouddhiques 2430. Autres sources littraires 2431. Sources pigraphiques 2432. Sources archo-logiques 2433.

    2. L 'histoire de l'glise. Les Tirthakara 2434-2435. Piirsva 2436. Mahvlra 2437-2438. Relations avec le bouddhisme 2439. Les premiers disciples 2440. Bhadrabahu et le premier ConcRe 2441. La scission 2442-2443. L'expansion vers l'Ouest 2444. L'expansion vers le Sud 2445. Suhdivisions 2446.

    3. Rites et coutumes. . Situation actuelle 2447. Inlluences hindouistes 2448. Continuit de la tradition 2449. La regle monastique (kalPf1" samaciir) 2450-2453. Les lalcs (upasak4) 2454. Doctrmes. O. Lacombe. 2455. Thorie de la connaissance 2456-2463. Nayavda

  • XVIII TABLE DES MATlRES.

    4264. Syadvada 2465. Les catgories 2466-2467. L'Ame 2468. La matiere 2469. L'espace 2470. Le temps 2471. Les substances conditionnant le mouvement et le repos (dharma et adharma) 2472. Cosmologie 2473. Eons, phases et Ages du monde 2474. Classification des Ames 2475. Structure du compos Ame-corps 2476-2479. La servitude (bandha) 2480-2484. La morale des VQlUX 2485. La morale des laics 2486. La morale des religieux ou discipline de libration 2487-2490. Les quatorze stades de qualification spiritueHe (fu(wsthiina) 2491-2492. Logique jaina. Siddhasena Divakara [par J. Filliozat] 2493-2494.

    ApPENDIGE 1. P ALOGRAPHIE. criture de Mohan-jo-J)aro, p. 665. Caracteres gnraux des critures de l'Inde ancienne, p. 665. Formation des critures indiennes, Origine du nom de hrahmr. Origine du nom de kharo~thI, p. 667. Origine de la hl'ahmr, p. 668. Origine de la kharo~~hr, p. 669. volution de l'aramo-indien, p. 670. Brahmr d'Asoka, p. 672. criture de BhaHiprolu, p. 673. critures septen-trionales antrieures 11 l'ere chrtienne, p. 673. critures du Nord et de rOuest 11 partir de l'.ere chrtienne. Inscriptions des Saka et des Ku~al).a, p. 673. Inscriptions des Andhrabhrtya, K~aharata et K~atrapa d'Ujjayinr, p. 674. crJtures gupta, p. 674. critures gupta proprement dites, p. 675. Manuscrits gupta en Asie centrale, p. 675. critures d'Asie centrale empruntes aux types gupta, p. 676. critures drives des types gupta 4e l'Inde, p. 676. NiigarI, p. 677. NgarI jaina, p. 678. Siirada, p. 679. critures npalaises, p. 679. critures . hengalies, p. 679 critures modernes du Nord-Ouest et de l'Ouest, p. 680. critures du Sud : Caracteres gn-ram, p. 680. Inscriptions des Pallava et des Calukya, p. 681. Principaux types dfinitifs, p. 681. critures ~annara et telugu, p. 682. critures tamoules, p. 682. Ecritures import es du Nord, p. 682. criture singhalaise, p. 683. critures d'Indochine et d'Indonsie, p. 683. Chiffres. Chiffres aramo-indiens,p. 683. Chiffres indiens anciens, p. 702. Chiffres dcimaux sans zro, p. 703. Chiffres dcimaux avec zro, p. 703. Origine des chiffres, p. 704. Notations numriques en lettres, p. 704. Princi-paux mots reprsentant les chiffres, p. 708. Notions sur les manuscrits. Matiere des manuscrita, p. 709. criture des manuscrits, p. 712. Titres et colophons p. 712.

    ApPENDIGB 2. NOTIONS DB MTRIQUE. Mtrique vdique, p. 713. Le loka, p. 713. Les autres vers syllabiques, p. 715. Les vers a mores, p. 716. Les vers prakrits, p. 717. Notions de mtrique tamoule [par J. FiHiozat], p. 717.

    ApPBNDIGB 3. NOTIONS DB GHRONOLOGIE. Divisions du temps, p. 720. Repares clestes, p. 721.

    Nak~atra, p. 721, Rasi, p. 721. a. Divisions lunaires, p. 722. Mois lunaires, p. 722. Jours lunaires, tithi, 722.

    J. FiIliozat.

    L. Renou.

    J. Filliozat.

    j I

    1 I l!

    l

    TABLE DES MATIIlRES.

    b Divisions solaires, p. 722. Annes et mois solaires, p. 722. Concordance des divisions lunaires et solaires, p. 725. Yoga, p. 725. c. Divisions joviennes, p. 725. Cycle duodnaire de Brhaspati, p. 725. Cycb sexagnaire de Brhaspati, p. 726. Cycles acces-soires, p. 727. Calendrier, p. 727. Datations. p.727. Liste gnrale des nak~atl'a [par L. Renou], p. 729 Signes du zodiaque, p. 731. Saisons et mois, p. 732. Noms des Tithi, p. 734. Noms des Karal!a, p. 734. Jours de la semaine, p. 734. Nak~at1'a et Yoga corres-p'ondants, p. 734. Subdivision dujour civil (siivanadivasa) , p. 735. Partes du jour, p. 735. Tableau du cycle duodnaire de Brhaspati, p. 735. Tableau du cycle sexagnaire de"Brhaspati, p. 735. Eres usites dans !'Inde p.736.

    ApPENDIGE 4. LES RFORMES RELIGIRUSES GONTEMPORAINES. Rammohan Ray, p. 739. Keshab Candra Sen, p. 740. Dayananda SarasvatI, p. 741. Satyananda Agnihotrl, p. 741. Shivadayal Singh, p. 742. Riimakr~;ta, p. 743. Vivekananda, p. 743. Ramana et Aurohindo, p. 744.

    ApPENDIGE 5. TERMES USUELS DE LA GRAMMAIRE SANSKRITE, p. 746. ApPENDIGE 6. Les 39 avatara de Vi~l).u d'apres l'Ahirbudhnyasal!l-

    hit, p. 750. ApPENDIGE 7. Liste des langues (bh~ii), p. 75 L ApPENDIGE 8. Liste des Smrti, p. 752. ApPENDICE 8 bis. Liste des Agama, p. 752. ApPENDICE 9. Listes des Upapural.la, p. 753. ApPENDIQ 10. Doctrines (mata) rfutes dans le Safikaravijaya

    d'Anandagiri, p. 754. ApPENDIGE 11. Liste des 64 arts (kala, aligavidyii) d'apres le

    Kamastra, p. 75&. ApPBNDIGE 12. Liste des 108 Upani,ad (liste de la Muktika-up.)

    p.757. ApP:NDICB 13. PRINCIPALES MESURES DE POIDS, p. 758.

    1

    XIX

    1. Renou.

    J. Filliozat.

  • CHAPITRE VII

    LA PHILOSOPHIE BRAHMANIQUE

    LES DARSANA

    -- - --- ---~----- -~,

    LE MATRIALISME. LES SPCULATIONS GRAMMATICALES 1. INTRODUCTION

    1358. La notion de darsana. La philosophie en tant que disci-pline inteBectueBe spciale a t tout d'abord con.ue dans l'Inde comme une mthode d'enqute. Les mots qui la dsignent semblent le prouver. On l'a appele d'abord tarka ou nyiiya, mots qui dnotent la conduite de l'esprit, et plus souvent iinvTlc~iki ((enqute", driv de la racinelkf-((regarder", avec le prverbe anu ((a la suite, en suivant". On a appel les thories philosophiques spciales mata ((opinions", c'est-a-dire ce qui est pens, ou vada ((doctrine", ce dont on parle, ce qu'on expose et ce qu'on discute. Mais c'est finalement dar ;ana, nom driv comme iinvk-

    :~ik d'une racine ((voir" (drs-), qui a t adopt a partir de l'pope tardive pour dsigner les diverses branches de la philosophie indienne.

    Strictement, darsana veut dire ((vue", toutefois on le traduit commu-nment par ((systeme". Les deux interprtations se justifient. Les dariana sont bien des ((vues" sur les divers points du domaine philo-sophique. Ce sont aussi des systemes en tant qu'ils constituent des grou-pements coordonns de notions. Ce sont encore des coles car le plus souvent ceux qui les suivent en transmettent successivement de maitre a disciple, de guru a sifya, l'enseignement traditionnel (para1!lparii). Surtout, les auteurs qui s'y rattachent composent rarement des livres originaux, ils commentent des textes reconnus pour fondamentaux ou des commentaires de ces textes. Ce faisant, ils interpretent et enseignent des thories classiques, ils font vritablement un travail d'cole. n est vrai qu'ils innovent parfois audacieusement mais ce n'est qu'en prten-dant mieux restituer la vritable doctrine primitive des textes dont ils partent. Ces textes mmes sont souvent des textes d'coles, des siitra ou ((aphorismes", des lciirikii ou vers mnmoniques OU les doctrines sont exprimes en formules condenses a l'extrme pour tre mieux gardes dans la mmoire. De pareils sommaires a retenir devaient de toute nces-sit tre complts par des explications orales.

    ;Les vues, systemes ou coles qui ont re.u dans l'Inde le nom de dadana ~ Int tres varis. Certains mme sortent du domaine de la philosophie. (lest ainsi que le philosophe Madhava compte au nombre des dar 'ana l\cole du grammairien Piil)ini et ceUe des alchimistes (5 1364). n s'ensuit que la philosophie indienne traite de omni re scibili ou plus exactement que le nom de darsana signifie ((vue" en un sens gnral et non pas strictement ((vue philosophique" selon la nomenclature occi-dentaie.

  • 2 LA PHILOSOPHIE BRAHMANIQUE. 1.359. Le groupe des darsana brahmaniques. Les doctrines

    bouddhistes ou jaina, les thories matrialistes sont ventuellement considres comme des dar,~ana (5 1364) mais ce nom ~'applique tout particulierement a six courants d'enquete philosophique qui sont rap-prochs par ce trait commun j ils sont brahmaniques et reconnaissent, au moins thoriquement, l'autorit du Veda, des BriihmaJ.1a et des

    Upani:~ad. Ils sorrt de ce fait des darBrtna orthodoxes par opposition aux dar:ana htorodoxes, bouddhistes, jaina ou matrialistes. On les dsigne parfois en bloc sous le nom d'iistikya croyance en l'existence de la divinit et du but SUpreme" en les opposant au niistikya, a rincl'oyance.

    1.360. Leurs origines. Les darBana orthodoxes semblent s'etre codifis entre le u et le v siecle de notre ere (Jacohi) dans la grande priode d'activit spirituelle et littraire commence par une raction de la culture indienne contre les invasions (5 463) et poursuivie avec clat a la grande poque des Gupta. Il est certain que les origines des spculations alors constitues en systemes sont'.Jien plus anciennes. Beaucoup, dont quelques-unes sont essentielles, remontent a l'poque des Upani~ad, sinon plus haut. Si l'Arthasiistra attribu a Kautilya donne une ide exacte de la philosophie, a l'poque de Candragupta le Maurya, a la fin du IV' siecle ay. J.-C., deux darBana orthodoxes, le Siil!lkhya et le Yoga et un htrodoxe constituaient dja la philosophie (iinvik~iki). La psychologie et les spculations de logique venaient de s'laiJorer, au moins en parte, dans les coles mdieales. Les lments qui devaient eonstituer les darBana taient runis, e'est alors qu'ils ont t eoordonns et exposs dan s des textes seolastiques, eonstituant la philosophie clas-sique du brahmanisme. Il est tres probable que l'aetivit du bouddhisme a la meme poque a eontribu indirectement a la codification de eette philosophie, par la raetion qu'elle a suseite dans la soeit et plus prcisment dans la caste brahmanique.

    1.361.. Synthse des six darsana. Sans doute originellement distinctes, celles des vues sur le monde qui appartenaient aux brahmanes ont tendu a etre harmonises. Elles ne l'ont pas t systmatiquement ni completement. Elles sont loin de s'aceorder quand elles arrivent devant les memes problemes par des achemnements diffrents. Mais les diffrences memes de leurs directions de recherches les conduisent sou-vent sur des terrains distincts OU elles se spcialisent et leurs rsultats spcaux peuvent se complter. La somme des vues partielIes est un tableau total de l'Univers.

    Le Sar.lkhya dnombre les lments constitutifs du monde tant spiri-tuel que matriel et dcouvre deux plans, l'un phnomnal, celui de la prakrti, l'autre transcendant, celui du purUfa. Le Yoga joue des lments rvls par cette analyse pour obtenir pratiquement une maitrise tant physiologique que psychologique et le passage d'un plan a l'autre. Le

    Vaise~ika s'attache a l'analyse subtile de la matiere et des catgories notionnelles, le Nyaya a celIe des dmarches rationnelles de l'esprit. La Mimaf).lsa examine" ce qui n'est ni esprit, ni matiere et ne ressortit par consquent a aucun des autres darBana, le Veda qui enjoint l'acte rituel ralisateur de 1' Ordre, du dhm'ma. Enfm le Veclallta regarde au-

    INTRODUCTION. 3 dela meme' de cette ralit supreme qu'est le Veda et atteint l'Etre absolu. On voit que les darsana se completent deux a deux : le SaI}lkhya et le Yoga paree qu'iIs sont comme une thorie et son applieatioll pratique, le Vaise~ika et le Nyaya parce qu'ils allalysent la matiere et l'esprit, la Mlmal)1sa et le Vedanta en ce qu'ils coneernent le Veda et l'au-dela du Veda. A eux six les dadana brahmaniques englobent tout. Dans les coles brahmaniques ils sont tudis en eommellant par le Nyaya-vaise~ika, on passe ensuite au SaI}lkhya-yoga pour tudier en dernier leu la MlmaI}lSa et le Veuanta, on passe ainsi graduellement de la eonnaissanee la plus immdiate a la seience de l'absolu (Ballantyne).

    1.362. Porte philosophique et religieuse des darsana. En dehors de leur earactere philosophique les six darsana brahmaniques ont un caractere religieux preisment paree qu'ils sont brahmaniques et surtout paree que la connaissanee a laquelIe ils conduisent est salvatrice. Ils sont en effet les hritiers des Bl'iihmaJ.1a et des Upanifad pour qui le souverain bien s'acquiert par un savoir. Dans l'esprit des Bl'lhmaJ.1a celui qui sait les formules et connait les rites a atteint le but supreme, a plus forte raison le disciple de la Mlmalpsa qui pnetre les secrets de l'efficience des formules. Dans l'esprit des Upani:~ad, celui qui eonnait le brahman et l' iitman va plus loiIl: encore, sa connaissanee lui donne le sentiment de sa participation a 1'1':tre absolu. Ainsi par le chemin de la connaissance, le jlr7namr7rga, on s'leve au-dessus de la conscience humaine vulgaire, on s'affranchit des illusions qui l'garent, on fait son salut. C'est pourquoi la philosophie des darsana sauve en meme temps qu'elle claire et paree qu'elle claire.

    Les darBana ne constituent pourtant pas des systemes plus religieux que philosophiques j leur caractere de vues promenes sur le monde reste essentieL Celui des daIBana, le Yog'a, qui peut passer pour le moins philosophique, 1'est en ralit presque au meme titre que Ise antres. Ce Yoga par 1'emploi qu'il fait d'exereices spirituels et pltysiologiques parait en effet constituer bien plus une discipline technique qu'une philo-sophie. Il est pourtant une mthode d'exploration et de domination du psychisme inconscient. Les tats psychiques qu'il ralise sont des exp-riences dans le domaine qui chappe aux sens et a la pense ordinaire. Le yogadarsana est une vue" gui complete les autres et porte la ou elles n'atteindraient pas. Le darBanarput le plus "mystique~ est bien plutt un systeme d'enquete et d'action psycho-physiolog'iques.

    1.3ij;:r.:J. pense des darsana et la culture indienne. Non seulement les dadana eonstituent bien la philosophie brahmanique mais leur tude s'impose pour connaitre profondment la culture indienne, meme en ses aspects non philosophiques. L'influence de la pense des dariana n'a pas t limite dan s nnde au milieu spcial des philosophes. L'tude du Nyaya fait partie du bagage indispensable ala formation de tout pandit. La Mimaf).lsa a influ largement sur la jurisprudence. La religion est en grande partie la cration des philosophes. Tous les textes clas-siques supposent le vocabulaire et les ides du Sal!lkhya et du Vedanta familiers aux lecteurs. Enfin la diffusion universelle d'ides issues des spculations des darl:ma a prpar l'Inde entiere a l'acceptation courante de eoncepts qui nous paraissenttranges et qui chez elle sont ordinaires .

  • 4 LA PHILOSOPHIE BRAHMANIQUE.

    L'tude des dariana est done indispensable a l'inteBigence de la mentalit indienne en gnral.

    C'est ainsi qu'un des traits frappants de cette mentalit est la facilit avec laqueBe elle accepte l'ide de l'inexistence du monde matriel. L'ide que le monde extrieur n'est qu'un rve bien li apparait a pre-miere vue comme tout a fait trange a l'Occidental. Son origine est sou-vent pour luiinexplicable. L'tude de la thorie indienne de la perception en donne pourtant la ci. Nous alions voir que, selon les lndiens, les sens ne sont pas des rcepteurs passifs d'impressions venues de l'extrieur, mais des force s actives qui fa~onnent les perceptins en en prenant les lments au monde extrieur. Ces forees peuvent aussi entrer en jeu d'eBes-mmes, sans prendre aueun lment au monde extrieur, pour produire les rves. Des lors on peut se demander-et c'est ce qu'onL fait les idalistes indiens - si, apres tout, leur jeu n'est pas constamment indpendantde tout monde extrieur existant; s'il ne dpend pas exclu-sivement d'une maya, d'une puissance d'illusion qui mettrait seule en branle les forces alimentant la conscience. L'idalisme absolu n'apparait plus alors comme une monstrueuse production, spontane et inexpli-cable, du gnie indien, mais on voit que l'esprit indien est prpar a la ngation des objets des sens par la thorie de la perception que les dariana ont rendue classique, on con~oit aisment comment il aceepte sans rvolte les consquences extrmes de la philosophie de l' atman-brahman.

    1364. Descriptions indiennes des darsana (brahmaniques et autres). Un certain nombre d'ouvrages tardifs dcrivent les dadana. La plupart se bornent a l'expos de certains d'entre eux et font d'ordi-naire cet expos dan s des buts de polmique .. Ce ne sont done pas des ouvrages d'histoire de la philosophie mais plut6t des examens contra dic-toires des systemes philosophiques. Frquemment, a c6t des dariana classiques, les dariana les plus divers sont envisags.

    Le Sarvadarianasiddhanta~aI!graha, attribu a Sakara, tudie non seulement le Vaise~ika, le Nyaya, la PUI'vamlmarpsa, le Sarpkhya, le systeme de Patafjali et le Verlallta, mais encore les systemes des matria-listes, des jaina, plusieurs systemes bouddhistes et celui du Mahlibharata. A la fin du IX siecle, l'auteur jaina Haribhadra Suri a crit un $a{ldariana-samuccaya, ~Collection des six dariana, mais il compte parmi ces dariana le bouddhisme et le jainisme a l'exclusion du Vedanta et du Yoga. En 906, son disciple Siddhar~i a derit sommairement les six darlana dans son Upamitibhavaprapalcakatha en prilkrit. Ver s 16 O O, Appaya DIk~ita a compos un Caturmatasarasal!/graha qui traite spciale-ment des doctrines des coles vedi\ntiques dvaita, visi?'!iidvaita, advaita et lividvaita et une Viidanaksatramilika contenant surtout des controverses relatives a la l"IIma~lsa. Un BahuvidhamataSal!lgraha est une rfutation de toutes sortes de doctrines. n est de date inconnue mais peu ancienne. L'auteur, galement inconnu, tait un advaitavedantin. Mais le plus impor-tant des exposs des darana est le SarvadarianasaIgraha par Madhava (XIV' siecle). n en dcrit quinze, rangs dans un ordre de valeurs, a son point de vue, croissantes. n commence par le systeme des matria-listes qui est ainsi donn pOUr le pire. n comprend des systemes que

    INTRODUCTION. 5 no~s. ne co~si~rerion~ pas ~o~me philosophiques : celu du gram-maIfle~ Pal,lml et celm, alchImIque, du ~Seigneur des essences l-mentan'es (raseivaradariana). Mais, du point de vue indien la science ~u Ag~ammairien, gui est ce~le du jeu de la parole, se classe natureBement a cote d,e ce He ~u Jeu du raIso~nement, le Nyaya. D'autre part, l'alchimie du rasesvaradarsana est une SCIence salvatrice, par la eHe se rapproche des autres dariana et, d'ailleurs, la science de la matiere de l'Univers a autant de ti~res que l'atomisme Vaise~ika a tre classe dan s la philo-sophe.

    D'a~tres exposs plus rcents des darSana ont encore t rdigs en sansknt, tels le Sarval/latasa1!lgraha d'auteur ineonnu et le Saddariana-si~dhlintaSalJ1gr~ha, compos pa~ Ramabhadradlk~ita et, ~n' groupe d auteurs sur 1 ordre du souveram marathe de Tajavur SahjI (1685-1711). D'intressantes donnes doctrinales sur les da1'l(:l1a se trouvent dan s le poeme tamoul ancien Ma(limegalei (S 1223).

    1365. Les darsana et la pense occidentale. Des que les doctrines des dariana,ont t eonn~es en Europe, surtout par les travaux de Colebrooke, au debut du XIX' sIecle, on s'est aper~u qu'elles taient co~parab~es. a ceHes ~e .Ia philosophie. greeque. Certains, eroyant alors qu e~les et,aent prodIgIeusement anCIennes et que toute civilisation venaIt de 1 lnde, en firent les modeles de ceHes de la Grece. D'autres par rac,tion, .soutinr~nt qu:eBes ne pouvaient tre que modernes et qu~ la pensee phIlosophIque n ayant pu naitre qu'en Grece, elles taient ~mJ;lruntes au monde heHnique. En fait, les spculations grecques et mdennes, m~e. pa~~Heles, app~~aissent comme gnralement ind6-pendantes en depIt d mfluences recIproques sporadiquement dcelables

    q~e nous tudierons au tome III en mme temps que les rapports des dIVerses formes de la pense indienne, aussi bien bouddhique que brahmanique avec la pense greeque. Dans tous les eas, l'appartenance relle des darlana a la philosophie 3 t tablie. Victor Cousin jugeait

    m~m~ que les darian~ correspondaient par leur contenu et leur ordre theor~que de succeSSIOn aux systemes philosophiques gnraux qu'il eroyaIt retrouver dans l'histoire de la philosophie oceidentale en un ench~b;ement rgulier, toujours le mme : sensualisme, idalisme, seeptICIsme et mysticisme. La loi qu'il prtendait dcouvrir dans le dvelo.pp~ment des systemes occidentaux devenait gnrale des qu'eBe se vnfiaIt aussi pour les systemes indiens.

    La conception de Cousin tait trop arbitraire, mais il avait raison de re~ourir a l'tude eom~are ~es. do?trines philosophiques greeques et onentales. n est toutefOIs reste dlfficIle pour beaucoup d'historiens de la ~hilo.sophie d'uti~ise~ les. opini?ns indiennes en parallele avec ceBes de 1 OCCIdent. Certams mclment a admettre que lespenses indienne et occidentale sont irrductibles l'une a l'autre. En fait il n'est pas rare qu'.une mme ~xplicati~nparaisse c?J;tvaincante a un philosophe indien et Illsuffisante. a un OccIdental ou reCIproquement. Pourtant les dmar-ches de l'espnt sont les mmes dan s le monde indien et dan s le monde occidental; ce qui ~iff~re ce sont ~es notions prtablies sur lesquelles se fondent les exphcatIOJ;ts. Les. dIscordances en~re les philosophies de ces deux mondes sont bIen mOIllS entre ces phIlosophies elles-mmrs

  • 6 LA PHlLOSOPHTE BRAHMANIQUE. qu'entre les donnes re~ues dan s les cultures traditionneHes OU eBes puisent.

    1366. L'interprtation de la pense des darsana par les Occidentaux. La pntration de la pense indienne par les Occidentaux exige d 'eux une connaissance pralable de la culture indienne, particu-lierement des ides religieuoos, cosmologiques et scientifiques qui ont form le fonds du savoir des philosophes indiens. Elle exige aussi de grandes prcautions dans l'usage et l'tablissement des traductions qui supposent ncessairement l'interprtation des termes philosophiques employs par les textes originaux.

    La dtermination des quivalences entre termes philosophiques indiens et europens est tres dlicate. On comprend la signification des tflrmes indiens par les dfinitions qui en sont donnes et par leur emploi dans les textes, mais on s'aper~oit frquemment, une fois qu'on les a com-pris, qu'on ne pos sede pas de terme europen adquat pour les exprimer. En ce cas, beaucoup de traducteurs renoncent a rendre le terme sanskrit et le conservent tel quel apres l'avoir dfini. D'autres forgent un terme europen nouveau qu'ils sont obligs d'expliquer et qui impose au lecteur un effort de mmoire superfluo D'autres ene ore se contentent d'une traduction approximative. Le procd de ces derniers donne des phrases plus claires mais qui sont la source d' erreurs d 'interprtation et de jugements injustes. II faut ajouter que, m~me lorsqu'un terme indien trouve un quivalent exact dans une langue europenne, cet quivalent n'est pas toujours exact dans toutes les acceptions, les mots europens, malheureusement pour le langage philosophique europen lui-m~me, n'ayant pas toujours une valeur unique et dtermine.

    1367. Le mot manas, par exemple, est parfois laiss sans traduction, parfois rendu par le mot mentab dont on fait alors un substantif, sans que cela puisse le rendre plus apte a signifier manas, enfin on utilise volontiers pour quivalents esprit (a cause de la parent de manas avec mens du latin) et sens commun" (

  • 8 LA PHILOSOPHIIl BRAHMANIQUE. philosophiques autres que ceHes qui nous satisfont communment sans pourtant tre exactes. Ceci peut amen el', le cas chant, a des elforts utiles de rvision de nos ides et a une plus juste conscience de leur caractere subjectif.

    D'autre part il est vident que, puisqu'il existe des solutions indiennes originales pour des problemes philosophiques, l'histoire de la philo-sophie ne peut Mre gnrale qu'a condition d'en tenir compte et de ne pas rester spcialise dans l'tude des systemes d'Occident.

    2. LEs SIX DARSAlI'J

    a. La Mfmarpsa 1370. Origine de la Mimfupsa. Le terme de mima/!Isa ttinvesti-

    gation (proprement ttait de vouloir intensment penser) se rencontre dans toute la littrature, depuis l'Atltarva- et le Yajur- Veda. n exprime l'intrt qu'on prenait des une haute antiquit a ttrecherchen les points du rituel ou de la spculation qui pouvaient prter a un doute, et le soud qu'on avait dans les milieux scolastiques d'tablir une hermneutique rationneHe des textes sacrs.

    L'objet de la MIm1psa est double, selon qu'il porte sur le dharma (ttdevoir ritueh et ttmrite qui en rsulte) ou sur le brahman. De la deux formes de MIma1).lSa, la pl'VamimarlSa investgation premiere, qu concerne les rites et qui est la MImaI)1Sa par exceHence - on dit aussi Karmamlmal)ISa ttinvestigation des actes (rituels)>> - et l'uttaramimal.1sa ou Vedanta (mlma1).lSa), dont il sera question 1388 et suivants. Ce n'est pas un hasard si ces deux disciplines se trouvent ainsi rapproches : l'une et l'autre plongent par leurs racines dan s le vieux fonds vdique, eHes s'opposent l'une a l'autre et en mme temps se completent comme s'opposent et se completent BriihmaJ.1a et Upani?ad, et on peut imaginer une Mlmal)lSa rudimentaire, labore peut-tre dan s les milieux sama-vdiques, qui aurait group une systmatique ritueHe et une systma-tique ontologique.

    L'usage du mot mimarISa se poursuit dan s les Dharmasristra, soulignant les liens qui s'tabliront au Moyen Age entre la (Purva)Mlma1).lSa et la pense juridique (S 878, 1387). Pal)ini connait le terme, et le Maha-bha?ya parle des Mimal)lSaka comme de gens dont les traditions sont bien assises : l'argumentation grammaticale d'autre part n'est pas sans rapport avec la Mlma1).lsa : on a not (Paranjpe, Jacobi) que les V(trttika de Katya-yana (me ou n e siecle avantl'ere) concordent sur certains points de forme et de fond avec la phrasologie des Mimal{lsristra. Enfin le ralisme de la Mrmal)lSa et certains procds de sa dialectique permettent de la rappro-cher du Nyaya-Vaise~ika (Strauss) -le mot nyaya lui-mme est synonyme de mImaqlsa - en sorte que, malgr son extrme originalit, la Mlma1).lSa se tient au carrefour de la spculation brahmanique.

    Aucun de ces rapprochements ne donne de date slire pour la consti-tution du Mimiil!lsridariana. On peut admettre qu'il se serait fix a la fin de l'poque vdique, si du moins il a jamais rpondu 11 ce qui a dli Mre son objet pratique originel, a savoir donner les regles pour l'tablisse-

    LES SIX DARSANA. 9

    roent d'un Kalp~s~tra et d'un prayoga rituel. Mai~ l~ ~ImalJlS~, tel~e q~e l'expose son traite le plus anClen, les Stra de Jalmml, est dJa onentee vers de& fins thoriques tout autant que pratiques. Peut-tre a ~et. ~ar~ ces Stra ont-ils subi l'influence des Satra de Badarayal)a : Jalmml faIt appel a l'autorit. d~ Badara~aJ}a, qui r~ci~roquem,eI!-t cite les opi~io.ns de Jaimini une dlzame de fOlS. n est dlfficIle de declder sur la pnont de l'un ou de l'autre recueil, d'autant que, si les vues des deux auteurs coincident dans les Mimaqlsastra, dans les Brahmastra la moiti des passages compars les opposent.

    La date des Stra de Jaimini est eHe-mme incertaine : se fondant sur les p~raHeles de la tra~ition des gr~mmairiens, J~cobi pose 3~O-200 ay. J.-C., tandis que KeIth ne les estIme pas antneurs au me slede de notre ere.

    1371, Position de la Mim.aIpsa. y~bjetdel_aMImalJlSa .est d'exa-miner les versets (mantra) et les mterpretatlOns (brahmaJ.w) qm forment la trame du rituel vdique, afin de poser des regles gnrales, de fixer dans tous les cas douteux la ttjurisprudence rituelle et d'assurer une pratique correcte. C'est la le dveloppement naturel des vieux recueils de regles interprtatives, les paribha:~iistra qui taient attests de m~niere sommaire et ingale dans les Kalpastra. La MImal)lsa procede a l'mves-tigation du dharma, dont le contenu est dtermin par les ,rinjonctions (codan) du Veda; elle donne la thorie de ces injonctions, les classe et les exemplifie. Le probleme de la dlivrance n'est pas plus effieur par la Mrmal)lsa primitive qu'il ~e ~'tait par le Veda: comme d~ns le cas d'autres dariana, Nyaya, Vaule(>ika, Sa1).lkhya, on yerra certams textes tardifs baucher une technique du salut, indiquer par exemple le rsuitat transcendantal que produit le mrite ?u .le dmrite. rituels. Mais a l'origine la Mrmamsa est rsolument realIste et techmque : un corps autonome de regles, autour desquelles viendra se grouper peu a peu, parfois artificieHement, tout l'appareil spculatif que comporte un darsana, une pistmologie, des essais de psychologie, de mtaphysique et de sotriologie.

    1372. Les textes : Les MimaIpsastra. Ce recueil se divise en 12 adhyiiya (il existe un supplment, le Sal!lkal'~a(l.la)kiil.l4a, ~n style diff-rent et d'authenticit conteste, V. A. Ramasvami Sastrl) et compte environ 2.7 O O slra : chaque adhyiiya se dcompose en plusieurs p!lda ou ttquartiers", gnrale~ent au ~ombre de ~, qui t~aitent. c~acun d'un ou de plusieurs suJe~s (adhlkara_1Ja. Q~Olque mOl~s e~hptIques que les Brahmastra, ~es Sutra de la MlmaI!lSa ,~ont .to~t a faIt compa-rables a ceux-ci pour 1 arrangement; la t~neur, 1 IllsplratlOn : cet!e ana-logie confirme l'hypothese que la redactlOn des Stra a pu se falre des deux cts vers la mme poque. Sur la personnalit de Jaimini, on ne sait rien d'authentique. Tout invite a croire que, comme les autres fondateurs de darsana, le nom de Jaimini est, sinon mythique, du moins gnrique et conventionnel, et que les Stra rsultent d'une compila-tion d'cole.

    Au premier adhyaya, les Stra dfinissent le dharma, exposent la rela-tion entre le root et le sens, entre le vidhi et l'arthav!lda, traitent de la valeur des mantra, du conflit ventuel entre smrti et sruti, etc. L'adhyiiya

    1

  • 10 LA PHILOSOPHIE BRAmUNIQUE. 2 dfinit l'injonction et son signe grammatical, le verhe, l'efficience propre du verhe; il dtermine les diffrentes sortes d'action verbale. L'adhyiiya 3 est consacr au Se~a, c'est-a-dire aux lments (
  • M , ,

    12 LA PHILOSOPHlB BRAHMANIQUE. n'y a production ou dissolution de la matiere. On voit assez clairement comment sur tous ces points la Mlma~lsa dveloppe les theses implicites des Brahmal.la.

    1.377. Le sabda. L'ternit du Veda a pour cause et pour contre-partie l'ternit des signes phoniques qui le composent. Le sabda, a la fois son" etmot", est comme l'espace (akiilia) indfiniment prsent en puissance : c'est la un des postulats essentiels du systeme, qu'on soutient en rfutant les theses adverses du Nyaya-Vaise~ika et du boud-dhisme. Le son ternel est au son empirique ce qu'est l'tre a sa manifes-tation : il est un et immodifiable. L'apparence seule st cause qu'il varie, augmente ou diminue avec le nombre de ceux qui parlent, qu'il cesse et prend naissance, qu'il est per~u par plusieurs ,personnes a la fois. En fait, il n'y a pas de modification du phoneme, mais un nouveau phoneme qui prend la place du premier j l'accroissement ou la diminution du bruit n'est que l'accroissement ou la diminution des conjonctions et des disjonctions de l'air. Comme arguments de l'ternit du sabda, Kumarila allegue que d'une partle son communique une signification dtermine, d'autre part qu'on le reconnalt (pratyabhi:ji1) lorsqu'on l'a une fois entendu (Abegg).

    Les mots ont une aptitude inne a susciter les reprsentations j il existe une connexion inne entre le mot et ce qu'il signifie, sans que la convention humaine ni l'intervention divine jouent un rOle. Le mot dsigne l'espece (kl'ti,jati) et non l'individu (dravya) [S 15131; l'espece est elle aussi une entit transcendante, ternelle, ayant une ralit objec-tive dans les individus (Glasenapp). Sur tous ces points la pense mlmarpsaka se heurte soit au Nyaya, soit a la philosophie grammaticale. C'est a celle-ci qu'elle a pu emprunter enfin sa description sur l'inter-prtation des mots par le yoga (mthode tymologique et grammaticale) et la r{thi (mthode fonde sur la valeur traditionnelle du mot) j la r(lhi en principe prvaut sur le yoga.

    1.378. L'injonction. Au centre de la structure linguistique du sacrifice, il y a l'injonction (codana) ou prescription (vidhi) : c'est la le creur mme du Veda. L'injonction s'exprime par une forme verbale, un verbe Itinjonctif" qui est ou un optatif, ou une forme a valeur d'opta-tif (liliartha). Prenons le mot yajeta il doit sacrifier" : l'lment final -(e)ta porte en lui une efficience (bhavana) - proprement le fait d'amener a l'existence" - qui se marque a la fois par une valeur gnrale de ver-balit" - c'est l'arth! bhavana (ou phalabhrcvanrc) l'efficience relative a un bU - et par une valeur particuliere d'optativit - c'est la sabd bhavana l'efficience dpendant du mO : ceHe-ci est la plus importante, c'est celle qui Itamene a l'existence" l'autre bhavana, laquelle a son tour amlme a l'existence" l'action dsigne par le verbe : yajeta par exemple signifie littralement il doit (optativit) amener a l'tre (verbalit) quelque chose par un sacrifice" (Edgerton). Enfin chaque bhavana com-porte trois lments, la fin ou l'objet produit, l'instrument ou le moyen, le mode d'excution : ainsi dans agnihotra/[I juhuyat svargakama(! celui qui dsire le ciel doit offrir l'oblation au Feu", la fin est le cel, le moyen est l' agnihotra, le mode d' excution consiste en les aiga ou lments sub si-diaires de ce rite .

    - -----~ ----- ~----..

    LES SIX DAR SANA. 13 1.379. Les divisions du Veda. Des les Satra le Veda a t con~u

    comme comportant cinq divisions : les injonctions (vidhi), les formules sacres (mantra), les noms (namadheya) , les prohibitions (prati~edha), les descriptions (arthavada).

    a. L'injonction est tout d'abord primaire, secondaire (ou accessoire, guuavidhi), qualifie (visi~!a) - celle-ci valant la OU ni le rite ni ses acces-soires n'ont t tablis par une injonction antrieure. Mais la classifi-cation importante est ceHe qui distingue: l' les injonctions d'origine (utpatti), qui indiquent la nature gnrale d'un rite (ex. il offre l'agni-lwtra") - c'est la portion essentielle de la sruti, et on en compte environ 7 O au total j 2' les injonctions d'application (viniyoga), qui marquent la relation entre un acte principal et un acte subsidiaire (ex. il fait oblation avec du lait caiU,,) j 3' les injonctions d'emploi (prayoga) qui commandent l'ordre (krama) dans lequel se suivent les parties du rite - l'ordre tant soumis a six criteres (pamalola) qui, du plus puissant au plus faible, sont l'nonc direct, le sens, la teneur, la position, la primaut et la procdure; ' enfin, les injonctions de qualification (adhikara), qui fixent les conditions dans lesqueHes Pagent est en mesure d'obtenir les fruits de l'acte rituel qu'il a entrepris; l'adhikara pose en particulier le probleme de la participation au rite des sdra et des femmes. On parle enfin des niyamavidhi ou injonctions restrictives", des pari-saJ]lkhyavidhi ou injonctions de spcification exclusive".

    Comme le krama, la relation entre Pacte essentiel (pradhana) et Pacte subsidiaire (moga) se dtermine par six criteres qui sont, par ol'dre d'im-portance dcroissante, Pnonc direct (sruti), le pouvoir inhrent (lbiga) (a un mot de noter telle chose, ce qui revient a : l'implication), la relation syntaxique (viikya), le contexte (prakaraJ.1a), la position (sthana) , la dno-mination (samiikhyii). On appelle tenailles" (saJpdmlsa) quelque chose qui est enjoint entre deux actes sub sidiaire s , eux-mAmes enjoints par rfrence a un autre subsidiaire.

    1.380. b. Les formules. Elles ont pour objet d'voquer a la mmoire ce qui a trait au sacrifice : c'est la leur effet direct et visible, qu'il y a lieu d'assumeretderechercherpartout ou il peut se trouver. Lorsqu'aucun effet visible (d!'fta) n'est reconnaissable, alors seulement on admet - cal' les mantra ne sauraient Atre dpourvus d'objet (anarthaka) - qu'il y a un effet invisible (adNta), immatriel, qui confine a ce qui sur le plan mtaphysique sera l'aprva(S 1385). Ce prncipe de l'ad!'~t(ltva, que la MlmiJpsa partage avec le Nyaya-Vaise~ika, n'est utilis qu'avec parcimo-nie, sinon, comme l'observe Thibaut, le rituel entier se rsoudrait en un faisceau d'actes dont personne ne pourrait comprendre la combi-naison.

    1.381.. c. Les noms. Il s'agit des termes techniques qui servent a dsigner les rites : leur objet est de dfinir la chose enjointe. Quelles sont les raisons qui font qu'un mot est considr comme un nom? La Mlma~lsa distingue 4 (ventuellement 5) motifs : la crainte d'impli-quer une valeur possessive, la crainte de scinder une proposition, la dclaration faite dans un autre passage de la sTuti, la ressemblance avec tel autre passage. Le principe du vakyabheda, la scission de proposition", qui consiste en bref a poser qu'une seule chose peut Atre enjointe en un

  • 14 LA PHILOSOPHIE BRAHUANIQUE. meme temps, autrement dit que chaque proposition du l'ituel doit traiter d'une seule et meme chose, a pass de la MlmaI)ISa a l'argumentation grammaticale et juridique (Kane).

    1382. d. Les prohibitions. Elles ont pour effet d'empecher un acte, ce sont des injonctions ngatives. La ngation qu'elles comportent se constr)lit en gnral avec la portion optative de la forme verbale, non avec la racine ou avec un autre moto Toutefois il y a certains cas OU il paralt expdient de ne pas utiliser ce mode de prohibition, mais de donner une injonction positive ac.compagne d'une ngation qui port soit sur la racine verbale - done accomplir tel acte oppos a 1'acte not par le verbe" - soit sur un nom, done accomplir 1'acte en relation avec quelque chose d'autre que le nom" : c'est le paryudiisa ou exclu-sion" (Edgerton). La raison principale qui fait prfrer le paryudiisa a la prohibition normale est que cette derniere entrainerait une option" (vikalpa), en ce sens que le Veda se trouverait enjoindre et interdire une meme chose. La proccupation des MlmaI)1Sa~a est d'viter l'option, qui passe pour impliquer huit vices logiques (Apadeva); ils admettent toutefois que la prohibition est parfois ncessaire, meme s'il doit en rsulter une option (Edgerton). Enfin, ils achevent cette subtile dmons-tration en dlimitantl'exclusion" d'avecla restriction" (upasmphara).

    e. La derniere division du Veda est 1'arthavadaJ c'est-a-dire les parties descriptives ou explicatives : ces parties accessoires, qui complmentent soit des injonctions, soit des prohibitions, ont aussi leur objet propre, qui est d'inciter a agir ou a s'abstenir d'agir, ou bien, dit-on encore, de glorifier les actes adjoints et de fltrir les actes prohibs. On distingue les gUl.lavrida J ex. de soleil est le pilier sacrificieb, les anuviida J ex. de feu est un remede contre le froid", les bhtarthaviidaJ ex. Indra lanc;a le foudre sur Vrtra".

    1383. La thorie de la connaissance. Toute connaissance, except la mmoire, est valide et consiste en la claire notion de l' objeto Seule la mmoire, qui dpend d' expriences antrieures, ne comporte pas de validit immdiate. n ya six moyens de connaissance, pramiilJa (pro-prement des mesures-criteres, mesures-pro[totypes],,) : la perception (pratyakfa) et l'infrence (anumana) , reconnues par toutes les coles brahmaniques; puis l'analogie (upamana), que la MllaI)ISa partage avec le Nyaya; le verbe ou tradition sacre (iabda), auquel les MlmaI)1saka comme les Vedantin conferent une autorit exceptionnelle; enfin la sup-position aBant de soi (arthapatti) etl'abhava ~absence, ngation " , ou anupa-labdhi non perception" (sorte de raisonnement par 1'absurde, ((pe:r-ception du nant [Stcherbatsky]) que le Vedanta a pu emprunter a la MlmaI)1sa de Kumarila (Prabhakara ignore l'abhava) : 1'absence est quel-que chose de rel (vastuta), suppose un substrat extrieur. Quant a la perception, elle comporte deux formes, l'une lmentaire et purement sensible, qui donne des images vagues, l'autre a laquelle pa:rticipe la pense et qui donne des images nettes, qui a un objet dfini : doctrine emprunte au bouddhisme et qui se propage:ra dans tous les autres systemes (Stcherbatsky).

    En contre-partie de la connaissance correcte, 1'erreur demande a etre dmontre pour teBe : elle consiste, non a affirmer une chose autrement

    LES SIX DARSANA. 15 qu'elle n'est, mais a ne pas affirmer : dans l'exemple classique de la corde prise pour un serpent, c'est le serpent qui est la ralit pour celui qui parle, il n'y a pas de corde.

    ~ 1384. Les catgories. Sur la question des catgories, la Mlmfupsa suit fideIement le Nyaya-Vaise~ika et 'tandis que Kumarila conserve 5 catgories (substance, qualit, mouvement, gnralit, non-etre), Prabhakara en tend la liste a 8, remplacant le non-etre par l'inhrence et ajoutant la capacit (a produire un effet) , la ressemblance et le nombre. Trois substances sont terneBes, le temps, l'espace, les atomes : on a vu toutefois que la substance rsonante" est galement concue comme ternelle. Enfin, comme le Vaise~ika, la Mlmfupsa reconnait 1 'importance du concept de genre (jati) oppos au concept d'individu. Chez elle le genre" est ternel en ce qu'il continue d'exister chez d'autres individus lorsque ceux OU on l'avait observ d'abord ont disparu; lorsque parait ou disparait un individu, un lien d'inhrence se trouve produit ou aboli, mais lajatipoursuit son existence propre. Toutefois la Mlmfupsa se refuse a considrer le genre" comme entierement spar des individus. La thorie a eu quelque incidence dans les cercles de philosophes de la grammaire, pour dterminer si le mot dsigne le genre ou l'individu.

    Rappelons enfin que la mthode de prsentation qui prvaut dans la MrmaI)1sa, et que le Vedanta a cultive a sa suite, consiste en cinq moments : on pose la question a traiter (vi~aya), on exprime le doute qu'elle comporte (sm!1Saya ou viiaya) , on dveloppe une vue prliminai:re possible (prvapaka) , qui sera combattue par la vue ultrieure" (uttarapakfa), laquelle coincide gnralement avec la rfutation dfinitive et la conclusion (siddhanta); l'uttarapaka est parfois remplac par la sa'Y(lgati qui consiste a poser des connexions avec le contexte.

    1.385. Le transcendantal. On s'tonne qu'une mtaphysique ait pu s'introduire dans cet immense ensemble de discussions a base ritualiste. Du moins est-ce une mtaphysique limite, qui ne comporte guere de spculations sur la divinit cratrice (laquelle est nie), sur le monde extrieur (dont avec le Nyaya-Vaise~ika la Mrmfupsa affirme la ra-lit, en combattant radicalement l'idalisme bouddhique), sur le principe spirituel : Kumarila et Prabhakara se bornent a poser des Ames multiples, distinctes du corps et de la conscience (buddhi), omniprsentes et ter-nelles.

    En revanche, la MrmaI)1sa connait une force suprasensible, qui com-mande l'action : c'est l'apiirva J proprement ce qui est sans prcdenh, sorte d'nergie, aspect transcendant de l'injonction" , qui se dve-loppe quand le sacrifice est accompli dan s les conditions requises, qui dclanche l'obtention du f:ruit et dure apres que Pacte est achev : substance existant en soi, sans etre fonction d'aucun support matriel. Affinant la conception de l' adnta (S 138 O), avec lequel l' aprva se confond d'ailleurs partiellement, la doctrine est certainement Pune des plus originales du systeme (G. Jha).

    1.386. La dlivrance (moka) n'est' aborde explicitement que par les Prabhakara : le corps est dlivr de rena1tre par la destructlOn du mrite et du dmrite rituels; qui veut etre dlivr doit done se

  • 16 LA PIULOSOPHIE BRAHMANIQUE. dtourne;r non seuIement des actes prohibs, mais m~me de ceux qui ont pour f;ruit I'acces a l'autre monde; iI doit viser a puiser le karman. Il s'agit la d'ides hanales, qui confirment que la th~orie est venue se greff~r secondairement dans la Mlmiilpsa, peut-~tre slmplem~nt pour lui confrer la dignit d'un darsana, ou pour munir ce systeme athe (anlsvaraviida) d'une maniere d'alibi.

    ~ 1387. Conclusion. n serait injuste de considrer la M1mal!lSa comme une simple casuistique du rituel, plus injuste encore comme un dserh (Barth). Elle est riche en enseignements : mthodologie rigoureuse, dialectique souple, discussions serres en matiere d'exgese, de vocabulaire, de grammaire, elle est parmi les disciplines indiennes un modele de,P!ci~ion. O~ con~oit qu'e~le ait pu agir sur d'autres sys-temes, sur le sankansme qm en est nourn, sur la philosophie grammati-cale, sur le Dkarmasiistra surtout, qui adapte avec ardeur, durant tout le moyen rlge, les prceptes mlm8Jpsistes a la critique juridique et m~me a la procdure (Kane) : dja Manu (XII. 111) signalait la prsence d'un MImal]lSaka dans les cours de justice.

    La MImii.I]1sa a t assurment entra1ne dan s le dclin qui, Ved anta except, a frapp toute la spculation indienne. De m~me qu'eIle n'a pas par~n ses adversair~s, e~le a, t en~-m~me violemment attaqu.e : on Ile 1m a pas mnag llrome, 1 accusatlOn d'etre une doctrine athe voire l'injure supr~me d'~tre un bouddhisme dguis. '

    b. Le Vediinta

    1388. Origine du Vedanta. Le Vedanta est avec la Mlmamsa le se~~ d~r~ana ]!a~f~itement ~rthodoxe, ce~ui dont on ne peut concevoir qu Il alt J~mals ete autre ~u orthodoxe : c est au premier chef une exgese des Upant~ad au ~~me tItre que la Mlmal]1sa est une exgese des Brfih-m.aI.1a. n. porte d'aIlleurs le nom de ttMlmalJlsa seconde", (S 1370) - on dlt aUSSI Brahmamfmrtl1Srt Investigation du brakman", Siirirakamfmfimsrt Investigation d~ (Soi) incarn" - et consiste dan s le principe a appli-~l~er a .un doma.lll~ nouveau les mt~odes ~ui ont t tablies pour les lllJonctlOns sacnfiClelles (Strauss). C est dlre que l' UttaramfmrtllSrt n'a pu se former qu'apres - ou tout au plus: en liaison troite avec -la MImii.I]1sa premiere et que sa mise en forme ne saurait avoir t tres ancienne.

    Le mot Vedanta signifie fin du Veda" et d signe en propre les TJp~nifad en tant qu'elles parachevent l'difice vdique : c'est le sens que Sank~ra, par exemple, donne constamment a ce terme. L'emploi qui en est faIt pour noter le darsana repose sur une abrviation de Vedrtntaml-rnrtllsii. Dans le langage courant Ved anta dsigne le systeme" de philo-sophie t~ologique tel qu'il a t difi par les cinq grands commenta-teurs" (Sa~ara, Ramanuja, Nimbarka, M~dhva, VaUabha) et souvent

    m~me, abuslvement, la seule doctrine de Salmra, considr comme le Vedantin par excellence.

    Du point de vue orthodoxe, le Vedanta comporte une triple route (prasthc7natra.'la) : le~ Upanifad reprsentant la fruti ou ttrvlation", la Bhagavadgltii reprsentant la smrti (les auteurs post-ramanujiens se

    !

    LES SIX DARSANA. 17 rfereront aussi au Bhc7gavatapUrrtl.1a, Ramanuja lui-m~me au Vifl,lUpUrrtl.la, tous ventuellement aux SaIzhitrt vdiques), les Brahrnastra enfin, comme le texte qui sert de hase a l'exgese littrale. n s'agit d'interprter

    ce~ trois textes en un dogme unique, dnu de contradictions internes.

    1389. Position du Vedanta. Le Vedanta re ven dique a bon droit de prolonger la pense upani~adique : bien que d'autres dal'lfana. notamment le Sal]1khya, utilisent aussi les Upani;~ad, ils se fondent beau~ coup plutt sur le raisonnement. Dans le Vedanta, au contraire, chaque point de la doctrine a sa source dan s la sruti : la fruti est la plus haute autorit, le critere de la vrit par excellence. Mais les Upanifad ont une spculation dilfuse, peu systmatique et qui n'est pas exempte de contradictions, a l'intrieur parfois d'un m~me trait. Il y a peut-etre eu de bonne heure des essais divergents pour les ramener a un ensei-gnement synthtique, et de fait les Brahrnastra portent les traces de doctrines non conformes, attribues a une srie de docteurs, parmi lesquels figure le maltre meme de la Prvarnlrnrtl!1sii, Jaimini. Quoiqu'il en soit, le seul essai qui ait survcu est celui prcisment que circon-scriventles Brakmastra. Ces Siitra formaient l'ossature d'un enseigne-ment oral qui s'est perdu : les plus anciens commentaires que nous en ayons datent de nombreux siecles plus tard, mais a travers leurs vues personnelles ils ont dti garder les lignes gnrales de cet enseignement, et les ttmaitres" qu'ils citent eux-m~mes (les vrttilcrt et autres) rve!ent encore qu'une longue tradition exgtique les a guids. Les Brahmastra sont les plus concs de tous les textes du m~me genre ayant prsid aux divers dariana; sur bien des points ils se bornent a des mots reperes, sans connexion apparente. C'est cette prsentation nigmatique qui a autoris l'extraordinaire multiplicit de vues qui marque le Vedanta classique : chaque commentateur a interprt les Stra a sa maniere, enseignant telle valeur pour tel mot, telle maniere de joindre ou de disjoindre deux stra successifs, de suppler les lments qui font dfaut.

    Cette situation explique qu'il soit malais de dfinir globalement la position du Vedanta. La doctrine repose sur la notion de l'unit de la ralit spiritueHe, sous son double aspect du Soi indi~iduel ou iitrnan (qu'on prcise enjiviitrnan ttSoi vivant ou, brievement,ji'va), et du Soi supr~me ou brahman (pararnabrahman, pararnrttrnan). On peut la dfinir comme un monisme, encore que le monis me absolu (le terme sanskrit est advaita, littralement tt.non dualit,,) ne se prsente que chez Sa-kara, l'elfort des commentateurs ultrieurs ayant tendu a attnuer cette vision unitaire, a la concilier avec la pluralit des phnomenes; chez Madhva m~me, on aboutira a un dualisme caractris. Mais dan s l'en-semble, c'est la recherche de l'unit qui dfinit le systeme; les formules

    upani~adiques qui en donnent la elef sont les fameux rnakiiviik.'la : tat tvarn asi tu es cela" de la CMndogya, akal!l brakmiisrni ttje suis le brah-man" de la Brhadc7ral.yaka. On a souvent parl de panthisme a pro pos du Vedanta : mais une doctrine suivant laqueHe le monde serait brah-rnan, en ce sens que l'tat de brahman serait une fonction du monde, est trangere au Vednta, qui reconnatt bien plutt que le brakman est l.a seule ralit, et que l'univers n'en est qu'une fonction secondaire : c'est ce que Otto propose de dsigner par le terme de thopanisme.

  • 18 LA PHILOSOPHIE BRAmIANIQUE. .1.390. La question de la ralit du monde extrieur a t cruciale

    dans le Vedanta classique, sans qu' on voie clairement les vues qu'avaient sur ce point les Stra. lci en90re il y a divergence totale entre l'acos-misme et l'illusionnisme de Sakara, qui pousse a ses consquences extrmes les prmissesctthopanistes", et le relatif ralisme des autres commentateurs.

    A queBes fins est imparti cet enseignement? Comme les autres dariana, mais de maniere plus linaire, plus ctauthentique" qu'aucun d'eux, le Vedanta prtend conduire a la dlivrance, laquelle ralise l'unit de l'tre dfinitivement et en pleine conscience, rsorbant le jlva en le brahman, abolissant l'avidyii ctle non-savoir" et le karman.

    La mthode pratique qui y mene n'est pas les oJUvres, comme dans la Mlmal~lsa : c'est affaire de connaissance (vidyii) autant que d'intuition (anubhava), c'est la mditation (dhyiina), ou, comme on dit a l'origine, upasanii, c'est-a-dire ctapproche", une rflexion fervente ayant port d'abord sur les quivalences sotriques des Upanifad.

    1391.. Apres Sa:kara, la connaissance cede la place a des valeurs affectives, l'attitude du sujet aspirant a la ralisation s'emplit d'moti-vit et le Vedanta, d'abstraite ontologie, s'engagera de plus en plus dan s la religion. Q'a t le grand tournant de la doctrine, et ce qui explique son retentissement : elle est devenue le support dogmatique du sivai'sme et plus encore du vi~T,luisme. Le probleme d~ Dieu suprme personnel, exclu des Upanifad et des StraJ relgu par Sa:kara au rang de ctsavoir ipJrieur", devient le centre du nouveau Veda~ta : il s'agit de dfinir 1'!Svara, de dcider s'il a forme de Vi~I)u ou de Siva, d'ensei-gner les moyens d'y accder et si la grAce seule ou le synergisme y sont requis (Glasenapp). Ces aspects thologiques du Vedanta sectaire ont t sommairement dcrits au chapitre des Sectes : on se limitera ici a l'aspect philosophique.

    Exagrment admir par les uns, honni par d'autres (qui y ont vu une rgression de la pense), le Vedanta considr dans son ensemble rsume en ses tonnantes vicissitudes toutes les tendances de l'esprit mtaphysique indien. Tres pauvre de substance premiere, sommaire quant a la terminologie, il a drain a son profit croyances et doctrines, en sorte que, plus pleinement qu'aucun autre dadanaJ il s'est approch d 'une philosophie totale; la mystique chrtienne y a trouv des appa-rentements immdiats (Otto, Dandoy); tous les mouvements spcu-latifs dans l'Inde contemporaine y puisent leur inspiration.

    1.392. Les Vedantastra. Les Vediinta- ou Brahmastra (ctAphorismes sur le brahman,,) - on dit encore UUaramfmrtl!ISastra,

    Srrakamlml!lsa.~tra - sont attribus au ffi Badarayal,la, qu'une tra-dition relativement rcente identifie a Vya~a, l'auteur fabuleux de l'po-pe et des Purfil./a. On ne sait naturellement rien de la date de ces Stra .. sinon qu'ils doivent tre contemporains ou de peu postrieurs aux Stra de Jaimini, eux-mmes mal datables (S 1370). La polmique latente qu'engagent quelques Stra avec le Mahyna semble interdire d'ail-leurs de les situer au-dela du m' siecle (Jacobi). On a rappel les parti-cularits de leur teneur (S 1389). lIs forment un groupe de 555 apho-rismes qui s'enchainent de fa~on serre, dcrivent, rfutent, jalonnent

    LES SIX DAR SANA. 19 une vasta polmique dirige essentiellement contre le SalJlkhya, puis contre le bouddhisme : les termes topiques des systemes critiqu s sont d'aiHeurs omis, et mme pour les Upani~adJ dont c'est l'affaire par excellence des Stra' de fournir une interprtation a la fois ctphi-lologique" et philosophique, les passages cruciaux sont donns par voie aHusive.

    L'ensemble se divise en adhyya et chacun d'eux en pada comp-tant de 20 a 50 siitraj a l'intrieur d'un mme pada, lesstra se groupent en ctsujets" (adhikarm./a), dont les dimensions sont susceptibles de varier selon les commentateurs.

    1.393. Le premier chapitre ou samanvayadhyya ctde l'enchaine-men dfinit le brahmanJ pose les these~ fondamentales qui le con-cernent, puis enseigne qu'une srie de termes des Upanifad (noms d'lments, organes des sens, etc.) se rapportent au brahman : c'est l'introduction exgtique de l'reuvre. Le ' pada institue une controverse contre les SalJlkhya. La tAche de la premiere moiti du second chapitre ou avirodhadhyaya ct de la non-contradiction est de rfuter les objections el'ordre spculatif contre le Ve danta , en montrant que sur ce terrain mme ni Sal}lkhya, ni Nyaya, ni bouddhisme ou toute autre doctrine, ne peut tre dmontre. Le 3' pada discute la question si le monde phnomnal est ou non produit (c'est-a-dire est ou non co-ternel au brahman); le ' traite des priiIJa. Le chapitre 3 (sadhanadhyya ctde la ralisation) expose les imperfections de l'Ame individueBe, les rapports de celle-ci au brahman, enfin les moyens d'atteindre le brahman, notam-ment par la mditation; le ' pada traite de la connaissance du bmhman. Enfin, le phaladhyya ctdu fruih, apres avoir poursuivi la description de la mditation, enseigne la condition de celui qui saih apres la mort, le chemin par lequell'Ame dlivre monte au brahman et les rapports de cette Ame au brahman. f,l On a rappel qu'il tait impossible de restituer la pense exacte des

    . Siitra sur une srie de points capitaux. 1I ne semble pas que cette abs-traite exposition rende compte de la richesse des Upanifad (Thibaut); BadarayaT,la a sans doute voulu fixer des jalons pour une synthese. En tout cas, s'il faBait choisir parmi les commentateur~ ceux: qui ont chance d'avoir le mieux approch les Stra, ce seraient les tenants du bhedabheda qui soutiennent que les Ames individueBes, quoique essen-tieBement unes avec le brahmanJ conservent lors de la dlivrance une existence ternelle distincte (Jacobi, Ghate).

    D'apres Belvalkar, le noyau des Stra serait une exgese des textes ChandogyaJ reuvre de Jaimini. La Chiindogya joue, en effet, un rOle privilgi au premier adhyiiyaJ et comme le nom de Jaimini se rattache a l'une des coles du SiimavedaJ il y a peut-Hre la un fait a retenir.

    1.394. Les commentaires. Sankara. Le premier commenta-teur des Stra dont le texte ait t conserv, celui dont la traditi9n est la mieux fixe, la plus popul$lire et a peu pres la seul~ vivante, est Sa~ara, communment appel Sa:karacarya ct Maitre Sakara. On sltue, en gnral, son activit entre la seconde moiti du VIII' et le dbut du IX' siecle; on a voulu prciser ces dates (par exemple 788-820) que certains auteurs ont rcemment contestes (on a t jusqu'a poser

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    22 LA PHILOSOPHIE BRAHMANIQUE. celle de Sakara eut pour chef Ramanuja, qui fut la personnalit pr-minente du Srlvai~J)avisme (S 132ft et ,suiv.). Son commentaire ~ur les Brahmasiitra, q~i porte le !lOm de Srtbhiifya Le, ~o~mentaI~~ en l'honneur de SrI (lemot sr! rappelle les noms de Sr'lvalfl,1aVa, SI'ISU/(I-pradiiya, attachs a la secte), est une reuvre de dialectique magist~ale, men e avec une sorte de passion qui contraste avec la srnit de Sa-kara. Le commentaire au stra initial forme a lui seul un trait complet qui expose avec ampleur les theses adverses et leur rfutation et. qu'o~ appelle par ,abrg le Siddhiinta. D',a~t:res ouvrag~s, d? Raman~j~ ~Ul, comme le Srbhiifya, mettent en eVldence la polemlque antI-iiallka-rienne, sont le commentaire de la Bhagavadgltii (Gltiibhiifya), le Vediir-thasaqlgraha, expos gnral de la doctrine, le r:ediintasiira, abrg du

    ~rlbhiifya, et plusieurs autres. La Dpikli de S:IllIvasa (S : 327) repo~e sur cette cole, dont l'un des promoteurs, maIt:re du maItre de Rama-nuja, avait t Yamunacarya (S 132ft).

    1399. Nimbarka. Contrairement aux autres chefs d'cole vedan-tin, Nimbarka (S 1310) n'a laiss que de brefs :rsums doctrinaux, dont une glose sur les Siitra intitul e le Vediilltapiir'ijata,sau~abha. Le m~nuel important de la secte est le Vediintakaustubha de SrIllIvasa, XIII slecle, distinct de l'auteur prcit de la Dipikii. Cf. encorela Kaustubhaprabhii de Kesavakasmlrin.

    1400. Madhva. Au cont:raire, la production de Madhva (S 1308) fut considrable : on lui doit des commentaires sur la plupart des textes a tendances vdantiques, la GUa, les 10 Upanipad anciennes, le Bhiiga-vatapur'iit/a (Bhiigavatatc7tparyanirl,1aya) , les Brahmastra (Brahmasiitra-bhsya et sa suite versifie, l'Anuvyiikhyiina) et m8me le Mahiibhiirata. A Madhva succd:rent une srie imposante de thologiens jusqu'aux confins de l'poque contemporaine; on trouvera quelques noms S 1308.

    1401.. Vallabha. Une vaste littrature est so:rtie galement d~ cinquieme grand commentateur des Si/tra, VaUabha (S 1~1!). 0!1IUl attribue l'important Atmbhiifya (proprement Br'~hmaslltr'(l1.lu~ha:~ya), ainsi qu'un expos versifi .arrang en paraphrase ~Ibre du Bhalfavata-puriit/a (le TattviirthadP?~,bandha), un c~mment~Ire plus strIct du m8me Puriina la Subodhlnl, enfin un recueIl de selZe tracts (prakar'aJ,za) qui traitent' du dogme. ou de l'hymnologie. L'reuvre est mal transmise et connue fragmentalrement.

    1402. Autres commentateurs. Voici la liste des autres commen-tateurs des Si/tra, dan s l'ordre chronologique prsum : Bhaskara, IX-X~ siecle, auteur du texte appel de son nom Bhaskarabhiifya, vo~si~ de Nimbarka et comme lui de tendances bhediibheda (S 1ft 1ft) - l,a dIlfe-rence tant dans le lien, l'identit dans la dlivrance -;- hostile a, Saka:ra et sans nuance sectaire. Vi~J}usvamin (S 1309). SrIkaJ}tha Sivac~rya (probablement du ,X~II siecle, quoique la ~rad,~ti~~ le ~lace avant S~~kara) , auteur du Salvabhiifya co~me~.~alre sI~aIte, a tendances VISI-

    :~riidvaita tres pro ches de Ramanuja. Vljl~anabhlk~~.' le docteur connu du Salpkhya-Yoga (S lft29.~_~ft_50), q~I tenta d.mfiltrer des ~hese~ Salpkhya dans le Vedanta (Vljtlanamrta). Suka, XVI slecle, auteUr presume

    .a m

    LES SIX DARSANA. 23 ~u texte appel de son nom Sukabhiifya, a tendances visifliidvaita. Srlpati (S 13 O 5), siv~'ite comme Srlka9tha, a tendances bhediibheda

    ~omme Bhaskara : le Sr'lkarabhiifya est peut~8tre un remaniement par Srlkara d'un commentalre plus ancien de Srlpati (Srikantha Sastri). Enfin, Baladeva, XVIII siecle, dont le Govindabhelfya est un trait caita-nyiste a tendances (acintya)bhediibheda.

    1403. Textes diverso n est a peine besoin de rappeler que les ides vdantiques ~ont parses dan s une foule de textes littraires ou religieux, du Mahelbharata (sous un rev8tement SaI)1khyayoga) aux kvya les plus rcents, aux textes ~e bhakti les plus spciaux, en passant par les Puriil,/a, Tantra, SU/llhitii, Agama, etc. Jusqu'a un trait de gram-maire comme le Velkyapadlya laisse dceler l'influence du systeme.

    n faudrait teni:r compte enfin des langues indiennes autres que le sanskrit : on aurait la un nouvel indice de l'extraordinaire popularit du Vedanta. Qitons au moins des recueils mi-thologiques, mi-philoso-phiques de Siva'ites tamouls tels que le Vedndacii!iimaJ,li (S 919), le Tattuviimirdam de TattuvarayaN (nettement sakarien), le Kaivalyana-vanidam de Tal/\lavamrti (XVII' ou XVIII siecle). On a aussi des reuvres vigmites, celles notamment de PilJai Lokacarya (XIII' siecle), adepte de Ramanuja, dont I'Arthapacaka (portion des 18 Rahasya el crits secrets), texte de bhakti vdantisante, mrita d'8tre traduit en sanskrit. En marathe, des poemes de Vaman PaJ}Qit (Yathrthadpikel, Nigamasra), de Ramdas, de Sohiroba (XVIII' siecle) [S 983]; bien antrieurement, la fameuse Jianesvar (S 979) iHustrait de bout en bout les theses de la miiyii. En hindi, la populaire Vicelramellel La guirlande des penses d'Anathadasa (XVII' siecle). En gujrati, les ppsies de l'orfevre Akha (S 975), fervent advaitin; cf. encore 905,LV9, 927.

    1404. Doctrine de SaIikara et de l'Advaita en ynral. Dveloppant unilatralement les tendances monistes des Upani~ad et

    systmati~ant, non sans violences (Ghate, Thibaut), la pense des Brah-mastra, Sakara pose que toute la ralit des choses rside en le brah-man, c'est-a-dire en un principe (neutre) absolu (telle est a tout pren-dre la traduction la moins inadquate du terme, bien qu'elle n'en rende nullement la rsonance primitive), qui reprsente 1'8tre (sat) au-dela des contingences et qui est identique au el Soi (iitman) des 8tres vivants. Hors de la, tout n'est qu'apparence ou vue imparfaite. C'est ce qu'exp:rime la formule populaire brahma satyalp jagan mithyii el le brahman est la ralit, le monde est l'erreur". L'objet du Vedanta, qui d'apre,s les Stra est l'investigation du brahman, sera plus prcisment pour Salcara et son cole la connaissance de l'identit brahman-iitman et des cons-quences qui en rsultent. Le Vedanta sakarien se dfinit donc comIlle un non-dualisme" (advaita) intgral (kevala) ou, comme on dit ene ore sans spcification (nirvisefa).

    Comment atteindre ~ette connaissance? Parmi les pramiitla reconnus par les autres coles, SaIcara met hors de pair l'criture rvle ou, comme il dit, le Vedanta : c'est l'criture qui est la source infaillible de connaissance dans le domaine qui est le sien, a savoir l'exposition du brahman. Les autres moyens ne sont que des adjuvants. La rvla-tion est ternelle et exempte de contradictions. Mais il faut savoir la

    T J

  • 24 LA PHILOSOPHlE BRAHMANIQUE. comprendre, et c'est la que l'initiative exgtique deSakara, part considrable de son reuvre, s'emploiera, en accord avec les mthodes de la MrmaI!lsa et du Nyaya, a dfinir le sens de tel passage vdique, a retenir telle rfrence, telie valeur, plutot que telle autre. .

    Le contenu du brahman est ineffable : essence infinie, omnisciente, omniprsente, ternellement pure (suddha) , veille (budJha) et libre (mukta), ternellement immuable (klastha) , dnue de formes, de parties, d'attributs (nirvise?a, nirgutla : l'expression milsa des Brahmastra, II, 3, 43 est a entendre mtaphoriquement). Le brahman est l'identit de l'tre, du sentir et du jouir souverainement, ce que le Vedanta ult rieur rsumera en la formule connue saccidananda.

    n est, avons-nous rappel, identique a l'atman, terme qui combine la notion de Clpersonne" et celle, rfiexive et quasiment grammaticale, de Clsoi" : le brahman n'est autre que de Soi suprme" (paramatman). L'atman n'est pas la somme des ClAmes" individuelles, mais une essence infinie, une comme le brahlllan, foncierement spirituelle, ni agissante ni souffrante. C'est une conscience absolue, qui n'est pas l'objet de la notion du moi, mais en est le tmoin (slik~in). L'quationupani~adique tat tvam as est a entendre, non littralement, mais avec une implication : tat = tvam quand on a rejet du tvam tout ce qui est de l'ordre contingento

    1405. Ce que l'atman est a nous, le brahman l'est au monde. Le monde n'a pas de ralit au sens transcendant (pliramartltika) , il n'a de ralit qu'au sens pragmatique (vylivahlirika). C'est ici qu'appa-ratt la distinction - l'une des originalits du systeme - entre les deux sortes de Clsavoir" (vidya) , le savoir suprieur (para) qui conclut a l'irralit du monde, le savoir infrieur (apara) qui nous fait sentir le monde comme rrl. n ya la deux plans de connaissance, ou l'on ne sera pas tent de distinguer avec Deussen une doctrine sotrique et une doctrine exotrique, mais bien plut6t deux degrs d'approche vers le brahman. ,

    De quelle nature est cette irralit? Sakara combattra les theses du nihilisme bouddhique, qu'admettait implicitement Gau9apada, suivant lesquelles le monde est une simple construction forge (kalpita) par l'esprit, un nant : theses que reprendra l'Advaita ultrieur (Siddhan-tamuktlivali) lorsqu'il pose qu'en dehors du rel absolu (brahman) il n'y a que du per~u-pour-rel (prlitftika), et que les objets ne sont que des projections (v~kalpa) ou des modifications (vikara) de la substance spirituelle. Pour Sakara, le monde, fond sur des perceptions, n'e~t pas une simple perception (upalabdhimlitra) : il se distingue par sa COOr-dination des images du rve, et l'illusion qu'il cre persiste jusqu'au jour ou l'identit suprme sera reconnue; encore moins est-il semblable a l'hallucination, qui n'a qu'une ralit d'apparence (prlitibhlisikasatya). Il eme peut tre dfini ni en tant que cela (= qu'tre), ni en tant que non-cela (= que non-tre)". il est inexplicable (anirvacanIya), these que l'Advaita ultrieur tendra en un agnosticisme illimit. Car le monde, . dit-on encore, est un effet, et tout effet est impensable (acintya).

    Mal}(lanamisra distinguera deux tendances, l'une a laquelle iI adhere, le bhlivadvaita ou ladadvaita Itnon-dualisme ontologique" qui admet,

    w .. 10. p

    LES SIX DARSANA. 25 a cot du brahman, ralit positive, des ralits ngatives (ngation du monde, annulation de l'avidyli), l'autre qu'il rejette, l'abhliviidvaita q