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Bernard Loiseau Marie-Brigitte Winter Jacques Mazier Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale In: Statistiques et études financières. Numéro 25, 1976. pp. 4-42. Citer ce document / Cite this document : Loiseau Bernard, Winter Marie-Brigitte, Mazier Jacques. Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale. In: Statistiques et études financières. Numéro 25, 1976. pp. 4-42. doi : 10.3406/ecop.1976.2123 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ecop_0338-4217_1976_num_25_1_2123

Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

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Page 1: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Bernard LoiseauMarie-Brigitte WinterJacques Mazier

Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai decomparaison internationaleIn: Statistiques et études financières. Numéro 25, 1976. pp. 4-42.

Citer ce document / Cite this document :

Loiseau Bernard, Winter Marie-Brigitte, Mazier Jacques. Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai decomparaison internationale. In: Statistiques et études financières. Numéro 25, 1976. pp. 4-42.

doi : 10.3406/ecop.1976.2123

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ecop_0338-4217_1976_num_25_1_2123

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Avertissement méthodologique

Un certain nombre d'indicateurs statistiques, les uns très usuels, les autres moins répandus, sont utilisés dans les deux articles qui suivent: ils le sont, en général, avec de larges précautions; l'expérience montre, cependant, que l'on n'insiste jamais suffisament sur la fragilité de ces indicateurs, qu'il s'agisse de leur mesure ou de leur signification conceptuelle, ni sur les difficultés d'interprétation auxquelles ils peuvent donner lieu. Il n'est donc pas inutile de rappeler les points suivants: Toutes les séries construites à partir de séries de «capital» sont étroitement liées au mode de l'élaboration et de valorisation de ce «capital». Construites par sommation de flux d'investissements bruts à durée de vie constante, ces séries de «capital» impliquent des hypothèses qui ne sont pas toujours acceptées. Elles supposent, tout d'abord, qu'il est possible d'attribuer une signification à des séries de capital fixe productif (parc d'équipements) en volume ; elles supposent également (et c'est la façon dont elles sont utilisées par la suite) qu'il est possible de mesurer ce parc à son «coût de renouvellement» et que ceci a un sens économique. Aucune de ces hypothèses n'est une évidence, loin de là ; il suffit, pour s'en convaincre, de se référer à l'abondante littérature traitant de la controverse sur la théorie du capital, controverse qui porte précisément sur la possibilité de définir et de mesurer un capital global et sur l'utilisation de ce concept dans le cadre des théories de la production et de la répartition (cf. en particulier G.C. Harcourt «Some Cambridge controversies in the theory of capital» Journal of Economie Littérature n° 2 juin 1969; J. Robinson «Capital theory up to date» The Canadian Journal of Economics n° 2 mai 1970). Il faut donc voir, dans l'utilisation de ces séries de capital, une méthode parmi d'autres, discutable mais commode, de lecture d'informations statistiques passées. Sont plus particulièrement soumises à ces restrictions, les séries de taux d'accumulation, de taux de profit, de productivité apparente du capital. Soulignons, enfin, qu'il serait très trompeur d'utiliser ces données d'une façon isolée, et indépendamment de leur contexte (cette remarque étant particulièrement vraie pour la «productivité du capital»); le partage de la valeur ajoutée donne lieu à une correction attribuant fictivement un salaire aux entrepreneurs individuels en vue de tenir compte de la sala- risation croissante des actifs qui perturbe les données sur la répartition entre revenus salariaux et non salariaux, cette correction peut, en particulier lorsque le mouvement de salarisation est ample, être très discutable. Plus généralement, la connaissance des revenus non salariaux est souvent imparfaite, ce qui accroît les incertitudes portant sur la répartition des revenus.

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L'étude au plan macroéconomique des principales caractéristiques de la répartition des revenus, de la rentabilité et de l'accumulation du capital dans les plus importants pays occidentaux peut s'avérer féconde pour interpréter certains traits de la situation économique actuelle: rentabilité du capital ayant tendance à décroître sur moyenne période en Allemagne, aux Etats-Unis et en Angleterre, le phénomène s'accentuant fortement depuis 1973 ; situation au contraire plus favorable en France et au Japon, tout au moins jusqu'en 1969-1970; endettement croissant des entreprises dans l'ensemble des pays occidentaux; taux d'accumulation s'élevant par grandes vagues au Japon et en France mais présentant des caractéristiques plus fluctuantes dans les autres pays; part salariale sensiblement décroissante sur moyenne période en France, en Allemagne et surtout au Japon.

Il ne s'agit cependant pas d'étudier la répartition et l'accumulation dans leur généralité mais, plus simplement, d'en dégager les grandes tendances, de confronter ces tendances en terme de comparaisons internationales et d'en déduire quelques liaisons macroéconomiques essentielles nous aidant à comprendre la dynamique des enchaînements qui se sont déroulés depuis vingt ou vingt-cinq ans. Quatre pays seront principalement examinés; le Japon, la

France, l'Allemagne et les Etats-Unis (mais nous intégrerons également à ce travail l'Angleterre pour laquelle des études déjà réalisées fournissent quelques renseignements utiles [3] [9]). (L'encart n° 1 rappelle les problèmes posés par toute comparaison internationale et indique les sources statistiques qui ont été utilisées; l'encart n° 2 définit brièvement l'ensemble des grandeurs et des indicateurs utilisés). En fait l'origine de cette recherche ne se réduit pas aux objectifs un peu abstraits qui viennent d'être définis; ce travail résulte également des interrogations nées lors de l'élaboration à la direction de la prévision du modèle macroéconomique Star [4]. Dans quelle mesure peut-on retrouver dans le fonctionnement d'autres économies capitalistes développées, les mécanismes inscrits dans ce modèle: sensibilité de la part salariale au caractère plus ou moins capitahstique de la croissance, aux gains de productivité, à l'état du rapport de force entre entrepreneurs et salariés; mise en évidence d'un «cycle de l'emploi » avec effet de « thésaurisation de la main- d'œuvre» et influence de l'intensification du capital; détermination des investissements des entreprises en fonction du taux de profit et de la structure d'endettement; relation décrivant la formation du profit en fonction des conditions de mise en valeur physique du capital. De telles relations macroéconomiques peuvent-elles servir à analyser l'évolution de l'accumulation et de la répartition dans les grands pays occidentaux et, par là, peuvent-elles nous guider dans la compréhension du contexte économique des années 1 970-1975 ? Il convient de souligner que les ajustements économétriques qui sont livrés dans cet article ne sont pas tous de bonne qualité. Certaines relations sont présentées, malgré leur qualité médiocre, pour ordre et par souci de symétrie.

Les sources statistiques utilisées Dans cette étude de la répartition, de la rentabilité et de l'accumulation du capital dans les grands pays occidentaux il a paru préférable d'utiliser comme sources statistiques les données de comptabilité nationale propre à chaque pays plutôt que de s'appuyer sur des comptes normalisés type Onu ou Ocde L'utilisation de tels comptes s'avère en effet impossible dans la mesure où des données essentielles pour notre étude (stock de capital, encours de crédit notamment) sont souvent manquantes. A l'opposé, le fait même que ces comptes soient normalisés facilite les comparaisons internationales puisque l'on travaille sur des agrégats directement comparables Le point de vue retenu dans cet article est donc sensiblement différent, l'utilisation des données de comptabilité nationale d'origine permet une meilleure maîtrise de l'information statistique de base et une plus grande richesse dans la collecte des données Inversement, les séries utilisées dans les différents pays pourront s'avérer hétérogènes si bien que les comparaisons internationales en terme de niveau des données et des indicateurs retenus ne devront être faites qu'avec la plus extrême prudence et en tenant compte des définitions précises adoptées dans chaque pays (particulièrement pour les ratios part salariale, structure d'endettement, taux de rentabilité) Les comparaisons en terme d'évolution chronologique seront par contre plus fiables Les sources statistiques utilisées sont en définitive les suivantes: pour le Japon la plupart des statistiques proviennent de la comptabilité nationale japonaise à l'exception des séries d'effectifs et d'endettement tirées du Monthly Statistics of Japon) et des séries de capital (communiquées par C Sautter que nous tenons à remercier pour l'ensemble des renseignements qu'il nous a fournis) , pour la France les données utilisées ont été regroupées à l'occasion de l'élaboration du modèle Star et sont issues de la comptabilité nationale base 1962 ; les séries d'endettement des entreprises proviennent toutefois de nouvelles estimations (H Goldet, F Nicolas, M Séruzier, Economie et Statistique, décembre 1975), les séries de capital sont issues des travaux de J Mairesse («Evaluation du capital fixe productif» Collections de l'Inséé C18-19),

pour l'Allemagne toutes les statistiques sont tirées du fichier de données du modèle de Bonn (W Krelle, «Modèle de prevision pour l'Allemagne Fédérale» Mathematical System in Economies n° 12. 1974) cependant les séries de capital brut sont issues de I office fédéral de statistique, le modèle de Bonn n'utilisant qu un concept de capital net Nos remerciements vont à P Buffet et à P Naudet de la Direction de la Prévision pour les très utiles conseils qu'ils nous ont donnés dans ce domaine, pour les Etats-Unis l'Economie Report of the president a été utilisé d'une manière générale, les séries de capital étant tirées elles d'une étude de J Musgrave «New estimates of fixed non residential business capital in the Usa 1925-1973 «(Survey of Current Business mars 1974) L'aide de Monique Fouet de la direction de la prévision a été précieuse en ce qui concerne la collecte et l'analyse des données pour les Etats-Unis, pour la Grande Bretagne enfin les séries ont simplement été reprises dans les deux études déjà citées [3] et [9] , elles proviennent de la Comptabilité nationale britannique «National Income Expenditure» et «Annual abstracts of statistics» D'une manière générale les sources statistiques utilisées correspondent à des données en «ancienne base» alors que des révisions de comptes nationaux se sont produites dans de nombreux pays au cours des deux dernières années, au Japon et aux Etats- Unis en particulier Sous réserve d'une étude approfondie c'est dans ce dernier pays que les différences, bien qu'assez mineures, paraissent les plus sensibles le partage salaires-profits aurait été quelque peu modifié à partir de 1965 au détriment des sociétés tandis que le taux d'investissement (part des investissements dans le Gnp) serait plus faible, les nouvelles estimations de séries de capital, également en baisse, devraient aussi être prises en compte (voir Review of economic and financial developments, 11 february 1976, the 1958-75 economy what the revised national accounts show)

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L'article s'ordonne alors autour du plan suivant: les principaux traits des économies étudiées en matière de croissance, d'inflation et d'accumulation sont tout d'abord présentés (introduction) ; l'analyse des conditions physiques de la croissance (productivités du travail et du capital en liaison avec l'intensification du capital fait apparaître que celles-ci tendent à devenir plus défavorables (première partie). De même des tensions accrues se développent, particulièrement depuis la fin des années soixante, au niveau de la répartition des revenus appréhendée à la fois en termes de part des salaires dans la production et en termes de taux de profit (deuxième partie). L'étude des déterminants du taux d'accumulation met en évidence un phénomène frappant par sa généralité, la dégradation de la structure d'endettement des entreprises et l'on explicite une double liaison croisée existant entre accumulation et taux de rentabilité (troisième partie).

En conclusion quelques enseignements sont tirés des analyses précédentes pour éclairer la situation économique de la période récente; on ne prétend pas pour autant livrer un schéma explicatif de la crise et il convient de souligner les limites de notre travail : les phénomènes étudiés se trouvent bien au cœur des déséquilibres actuels et permettent de poser certains des problèmes majeurs mais le modèle complet sous-jacent n'est pas entièrement explicité; il se situe d'autre part à un niveau d'agrégation très élevé qui est commode et fort utile pour une première analyse mais qui appelle des approfondissements en terme de déséquilibres sectoriels. Il se limite enfin aux caractéristiques des économies internes étudiées en tant que telles sans prendre en compte les interdépendances multiples existant au plan international (rapports de concurrence et effet de domination existant entre pays capitalistes développés, rôle des firmes multinationales, crise du système monétaire international, rapports avec les pays en voie de développement producteurs ou non de matières premières).

Croissance et inflation : un tournant dans les années récentes

Une donnée banale doit être rappelée: l'ensemble des pays occidentaux a connu au cours des dernières décennies une période de croissance pratiquement continue de la production en volume. Cette croissance ne s'est pas faite sans à-coup et des phases d'expansion rapide ont alterné avec des phases de ralentissement, les périodes de récession, c'est-à- dire de baisse de la production réelle étant cependant rares. En ce sens, il est possible de parler de «cycles économiques» dont la durée, bien que variable, est d'environ cinq à six ans (elle est en fait plus longue au Japon et plus courte en Grande-

Bretagne). L'amplitude des fluctuations est d'autre part variable d'un pays à l'autre, le record dans ce domaine étant détenu par le Japon. De même d'un secteur à l'autre les écarts sont importants; lorsque l'industrie a pu être isolée dans certains pays (Etats- Unis, Japon, France) les fluctuations y sont toujours apparues d'une plus grande ampleur (graphiques 1).

S'agissant de la présentation de l'ensemble des graphiques de cet article, il importe de noter que pour rendre ces derniers plus lisibles, les échelles retenues ne sont pas toutes identiques ; des précautions devront donc être prises dans la comparaison secteur par secteur ou pays par pays, des différentes évolutions. D'une manière plus générale, il serait assez souvent incorrect de vouloir attribuer une signification à des comparaisons en niveau entre pays, les niveaux résultant de conventions de comptabilité nationale souvent différentes).

Graphiques I : Taux de croissance de la production en volume (y)

2 0

-2

25 20 15 10 5 0

-5

secteur industriel

i , I

entreprises non agricoles France

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6 4 2 0

-2

Etats-Unis A titre d'illustration, les résultats suivants sont indiqués : Tableau 1 : Taux de croissance de la production en volume (par année)

Japon Japon France Rfa Ind.

Taux minimal

Usa Usa Ind. 4% -1% 2%

Uk

0% -1% -8% -2% 1965 1971 1953 1967 1958 1958 1953

17% 24% 8,5% 9% 9% 12% Taux maximal

7% 1960 1960 19PLJ 1960 1955 1959 1964

Tableau 2 : Années de récession

0 - 1

1,11,1,1., 1960 1965 1970 1975

0 -1

Allemagne

Grande-Bretagne entreprises non agricoles

_L

Japon

1958 1965

1971

France 1952-53 1958-59

1967

Rfa

1958 1963 1967 1971

Usa 1954 1958 1961 1967 1970

Uk 1952 1958 1962 1967 1971

Les années de récession font apparaître une certaine similitude entre les différents pays bien que la France et le Japon semblent plus «autonomes».

La France apparaît remarquable par la régularité de sa croissance en volume, régularité qui a souvent frappé les observateurs étrangers et qui a fait dire à certains d'entre eux que les «ajustements» se faisaient en France plus volontiers par le biais de l'inflation... Dans le palmarès de la croissance de 1950 à 1973, le Japon arrive largement en tête, suivi de la France et de l'Allemagne, puis des Etats-Unis, l'Angleterre venant loin derrière avec une croissance lente marquée par ses célèbres «stop and go». Cette période de croissance presque continue est marquée (interrompue?) depuis 1974-1975 par une recession profonde qui touche l'ensemble des pays.

Tableau 3 : Taux de croissance de la production en volume dans les années récentes

1973 1974 1975 (prévision)

Japon (Pnb)

9.9 -1.8 -0.7

France (Pib)

5.7 3.5

-2.5

Rfa (Pnb)

5.3 0.4

-4.5

Usa (Pnb)

5.9 -2.1 -4.7

Uk (Pnb

5.2 -0.2 -0.5

Si l'on se tourne maintenant du côté de l'inflation, c'est-à-dire du côté du taux de croissance du niveau général des prix, des différences plus notables se dégagent entre les pays étudiés au cours des deux dernières décennies (graphiques 2).

Aux Etats-Unis le taux d'inflation demeure toujours inférieur à 5 % de 1 952 à 1 972 avec un sommet à près de 4% en 1957 et une accélération progressive de 1 965 à 1 970 passant de 2 % à 5 %. En Allemagne le taux de croissance des prix oscille légèrement autour de 3% de 1956 à 1969; il augmente depuis 1969 pour atteindre 7,5% en 1971 et se maintenir autour de 6% depuis lors. Au Japon, le taux d'inflation

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Graphiques II: Taux de croissance du niveau général des prix (p)

2 0

-2

16 14 12 10

8 6 4 2 0

prix du Pnb Japon

1970 1975

France

est très fluctuant en début de période passant pratiquement de 0% à 7% d'une année à l'autre; depuis 1 960 il se stabilise autour de 5 % avec deux sommets avoisinant 7% en 1961 et 1970. En Angleterre, le taux de croissance des prix a une apparence cyclique assez prononcée, les taux les plus élevés, qui n'excèdent jamais 6%, correspondant aux années de ralentissement les plus marquées (1952, 1956, 1962, 1965, 1970). Enfin, il semble à peine nécessaire de rappeler les tendances principales de l'inflation en France; flambée des prix à près de 15% de taux de croissance en 1951-1952, inflation des années 1957-1958, tensions sur les prix en 1963 qui sont freinées dès 1964, accélération à nouveau en 1969 avec cependant un début de pause en 1971 -72.

L'évolution des prix apparaît assez contrastée d'un pays à l'autre sur la période 1950-1972. Depuis 1973 (et même dans une certaine mesure depuis 1970) l'accélération de l'inflation introduit une certaine homogénéité mais des différences substantielles n'en persistent pas moins.

Tableau 4 : Taux de croissance du prix de la Pib (en %) ou du Pnb dans les années récentes

Japon France Rfa Usa Uk 1973 1974 1975

11,4 21,1 9,0

7,2 11,2 12

5,9 6,5 9,0

5.6 10.3 9,7

7,7 12.5 30,9

I . ■ . . I

prix du Pnb Allemagne

i . ■ ■ . i 1970 1975

Accumulation du capital: une croissance soutenue mais des différences sensibles par pays

4 2 0

18 16 14 12 10

prix du Pnb Etats-Unis

Grande-Bretagne

Grande-Bretagne

. ■ I . ■ ■ ■ I

Les cinq pays étudiés ont connu dans l'ensemble des rythmes d'accumulation soutenus (à l'exception de la Grande-Bretagne) mais ils présentent dans ce domaine des caractéristiques propres qui reflètent à bien des titres l'état de leurs structures économiques. Ceci incite à établir une classification sommaire de ces pays qui sera adoptée dans toute la suite de l'article et qui se justifiera progressivement : le Japon d'un côté et la Grande-Bretagne de l'autre apparaîtront en quelque sorte comme les deux pôles extrêmes, l'Allemagne occupant quant à elle une position médiane (graphiques 3, page 9).

Le Japon en effet est marqué par trois grandes vagues successives d'accumulation (1953-57, 1959- 61, 1966-70) qui font passer le taux d'accumulation (pl/p_, K) d'environ 6-7% en 1953 à près de 18% en 1970. Cette croissance du taux d'accumulation est interrompue par des périodes de pause, par

ticulièrement sensibles dans les secteurs industriels, et durant lesquelles pl/p_nK fléchit (1958 et surtout 19*62-65). Ces vagues successives ont été analysées

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Graphiques III: Taux d'accumulation (pl/p ,K)

Japon

secteur privé

, ■ I ■ ■ ■ ■ I ■ ■ ■ ■ I ■ ■ . ■ I ■ . 1955 1960 1965 1970

secteur industriel

France

Allemagne

entreprises Grande-Bretagne non agricoles

100 95 90 85 80 75 70

15 14 13 12 11 10

9

Etats-Unis

l , ,

. i . i i . i , i I i . . i 1970 1975

comme des cycles de suraccumulation assez typés ; le retard technologique important au début des années cinquante et l'existence d'un marché potentiel intérieur considérable ont incité les entrepreneurs japonais à se lancer dans des investissements massifs, et ceci d'une manière simultanée. Mais les apparitions périodiques de surcapacités ont nécessité le développement de phases de rationalisation, de pause dans l'accumulation, durant lesquelles les équipements anciens étaient mis au rebus d'une manière accélérée ce qui dégageait ainsi des possibilités d'investissements ultérieurs dans des techniques plus performantes (C. Sautter [15]. Il est regrettable que l'on ne dispose pas de séries de capital au-delà de 1970; la période 1971-1975 apparaîtrait sans doute comme une «période de pause» d'une grande ampleur, l'économie japonaise devant faire face durant cette période à des difficultés importantes. Il convient enfin de souligner les écarts sensibles existant entre les différents secteurs industriels: ce sont en fait les secteurs moteurs, les plus concentrés et les plus dynamiques qui ont connu l'accumulation la plus rapide (acier, pétrochimie, biens d'équipement, biens de consommation durables) par opposition aux secteurs traditionnels où se concentrent près des trois quart des petites entreprises de moins de 300 salariés (produits alimentaires, textiles, biens de consommation non durables, industries diverses).

La France présente, toute proportion gardée, une certaine analogie avec le cas japonais, le taux d'accumulation, après une croissance rapide durant la période de reconstruction et une baisse de 1952 à 1954, connaît trois grandes vagues de croissance et passe ainsi de 6,3% en 1954 à plus de 11 % en 1970 pour l'ensemble des entreprises non agricoles. Ce mouvement recouvre là aussi des disparités sectorielles notables au sein de l'industrie, disparités que l'on ne pourra évoquer que brièvement ici. Dès 1955 des «secteurs dynamiques» sont à même d'incorporer des progrès techniques importants à travers leurs nouveaux investissements (automobiles, chimie, construction mécanique et électrique, sidérurgie) alors que des «secteurs plus traditionnels» connaissent une moindre accumulation (matériaux

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de construction, textiles, habillement, cuir, bois, papier, bâtiment et travaux publics (Btp). De 1960 à 1964 un mouvement d'investissement se développe à nouveau (à la suite, pour partie, de l'ouverture des frontières) mais il touche d'une manière plus uniforme l'ensemble des secteurs (et s'accompagne de nombreuses opérations de concentration notamment dans les secteurs déjà les plus regroupés). Plus paradoxalement, les investissements des secteurs moteurs stagnent en valeur réelle de 1963 à 1967 (tandis que la concentration financière se développe) et ce n'est qu'à partir de 1969 qu'ils connaissent une nouvelle accélération qui les place cette fois-ci nettement en avant des autres secteurs.

L'Allemagne offre des traits sensiblement différents des précédents pays en matière d'accumulation ; le taux d'accumulation présente une allure plus cyclique autour d'une moyenne d'environ 8 % pour l'ensemble du secteur privé. Ces observations qui peuvent sembler surprenantes compte tenu de la position dominante occupée par l'économie allemande doivent être rapprochées de la situation de celle-ci au lendemain de la deuxième guerre mondiale: l'Allemagne a réalisé des investissements très importants sous le régime nazi, de 1933 à 1945, entraînant une forte croissance du stock de capital ; on mesure ainsi le fossé qui s'est creusé en l'espace de quinze ou vingt ans entre l'industrie allemande et l'industrie française qui, durant cette période, stagnait ou connaissait des arrêts de production. Par la suite l'Allemagne a connu des destructions importantes durant la guerre mais son potentiel productif n'était pas profondément atteint. Pendant les années de reconstruction (1950-54) elle a donc pu atteindre des niveaux de croissance très élevés; pour les taux de croissance de la production en volume, les résultats sont les suivants : 1951: 12%, 1952: 19%; 1953. 9%, 1954. 8%, 1955 13%

L'Allemagne a reconstitué ainsi un prodigieux potentiel productif qui a fonctionné à plein de 1 955 à 1 975. Par la suite les taux d'accumulation n'ont fait que se maintenir avec des modulations suivant l'état de la conjoncture et en fléchissant d'une manière sensible en fin de période, ce qui, on le verra, ne va pas sans poser de problèmes.

Les Etats-Unis offre un profil assez proche de celui de l'Allemagne en matière d'évolution des investissements; les taux d'accumulation semblent fluctuer avec une période d'environ six-sept ans autour d'une valeur moyenne (8,5% pour le secteur privé, 11,5% pour l'industrie). Les interprétations de cette évolution ne sont d'ailleurs pas simples et dépendent en particulier du sens qui est donné à la grande période d'expansion de 1961 à 1966 (durant laquelle pl/p_,K passe environ de 7% à 10% pour le secteur privé). Peut-on parler de mécanismes régulateurs venant relancer périodiquement le taux d'accumulation dans une économie qui serait proche de la saturation? Une analyse sur une plus longue période serait nécessaire pour pouvoir porter un jugement plus assuré. Il faudrait également tenir compte de l'importance des investissements américains à l'étranger [2] : ces derniers ont représenté de 1946 à 1970, en montant cumulé, environ 66 milliards de dollars (dont 44 d'i

nvestissements directs) soit environ 1 6,6 % du montant cumulé des investissements industriels durant la

même période (398,4 milliards de dollars). Il faut de plus tenir compte que ces sorties de capitaux ne représentent qu'une partie du total des investissements réellement effectués à l'étranger: ainsi de 1950 à 1970 elles n'ont financé que 36,2% du total des investissements directs, le restant étant financé par des emprunts et des subventions obtenus à l'étranger (40,9%) et par des profits de filiales réinvestis (22,9 %).

Ces quelques chiffres ne sont indiqués que pour rappeler l'ampleur du phénomène qui tempère quelque peu les jugements pouvant être porté sur l'accumulation du capital aux Etats-Unis stricto-sensu.

La Grande-Bretagne présente enfin une situation assez extrême, le taux d'accumulation y est très faible; il croît de 4% environ en 1957 à 5,5% en 1967 pour décroître ensuite jusqu'à 4,6% en 1974. Cette faiblesse des investissements ne peut être que rapprochée des difficultés de l'économie britannique sur lesquelles nous reviendrons. Elle est évidemment très liée aux exportations de capitaux qui tiennent une place importante depuis plus de cinquante ans.

Au delà des divergences notables qui ont été mises en évidence entre les pays étudiés au cours de la période passée, les années 1969-70 semblent marquer un tournant dans l'évolution des taux d'accumulation : celui-ci se stabilise et fléchit en France à partir de 1971-72; un mouvement identique s'observerait sans aucun doute au Japon ; une décroissance sensible apparaît en Allemagne et s'accélère en Angleterre, seuls les Etats-Unis apparaissent quelque peu à part avec un léger redressement en 1 972-73 qui prendrait fin en 1 974.

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2 - Les grandeurs et les indicateurs utilisés Définition des notations et des ratios On s'est efforcé dans les différents pays de construire des indicateurs à partir des mêmes conventions bien que l'hétérogénéité des séries de base ne les rende pas directement comparables en termes de niveaux. Les séries utilisées Au Japon et aux Etats-Unis, trois secteurs emboîtés ont pu être distingués : le secteur privé, le secteur privé non agricole, le secteur industriel ; leur importance respective peut être évaluée à l'aide du pourcentage du Pnb réalisé par chacun d'entre eux.

Privé Privé non agricole Industriel

Etats-Unis 1950 89,9 % 84,1 % 29,7 %

1973 91,3% 87,9 % 32,4%

Japon 1952 96,4% 72,4% 28,5 %

1972 96,3 % 90,6 % 33,0%

Pour la France la plupart des données portent, sauf mention particulière, sur le champ des entreprises non agricoles En Allemagne Fédérale l'analyse n'a pu être menée qu'au niveau de l'ensemble du secteur privé. Pour la Grande-Bretagne enfin les séries tirées des études déjà citées concernent l'ensemble des entreprises non agricoles (privées et publiques). Y = valeur ajoutée brute à prix constants (en yens 1965 au Japon, en francs 1959 en France, en Deutschmark 1962 en Allemagne, en dollars 1958 aux Etats-Unis). I = formation brute de capital fixe des entreprises à prix constants K = stock de capital fixe brut des entreprises à prix constants au 1er janvier de l'année (dans le cas de la France on a rajouté aux séries de capital productif de J. Mairesse une évaluation du capital logement des entreprises). p = indice des prix de la production (base 100 en 1965 au Japon, en 1959 en France, en 1962 en Allemagne, en 1958 aux Etats- Unis). pK = indice des prix de la Fbcf des entreprises (même base). p.J = formation brute de capital fixe des entreprises à prix courants i\ (notée pi par la suite pour alléger les notations). p^ K = stock de capital fixe des entreprises au 1er janvier de l'année et au coût de renouvellement, c'est-à-dire revalorisé avec l'indice des prix de la Fbcf de l'année précédente (noté p_,K par la suite). pY = valeur ajoutée brute à prix courants N = effectifs totaux employés. NS = effectifs salariés employés. HS = durée hebdomadaire du travail, en moyenne sur l'année, incluant l'allongement des congés annuels W = charges salariales à prix courants, incluant l'ensemble des salaires bruts versés par les entreprises ainsi que les cotisations sociales et autres coûts salariaux à la charge des employeurs (toutefois dans le cas de la France on s'est limité aux seuls salaires bruts). Profits = profits bruts avant impôts directs et avant distribution à prix courants, incluant les profits des sociétés et les revenus des entrepreneurs individuels mais excluant les intérêts nets versés. Il n'a pas été possible en général de choisir une clef de répartition simple des revenus des entrepreneurs individuels en salaires fictifs et en profits (sauf en France où l'on a retenu conven- tionnellement comme profits des entrepreneurs individuels leur Ffcei). Les séries de profits ont été utilisées avec ou sans correction de la réévaluation des stocks ; ne pas tenir compte de cette dernière aboutit à surestimer les profits en période d'accélération de l'inflation mais ne modifie pas d'une manière radicale les jugements qui peuvent être portés sur l'évolution des profits sur moyenne période. Aut = autofinancement (après impôts directs, après distribution) seulement pour les Etats-Unis (secteur privé) et la France (épargne brute des sociétés + Ffcei + labc) avec la même remarque concernant la réévaluation des stocks. Dettes = encours d'endettement au 31 décembre de l'année Ces séries sont très hétérogènes d'un pays à l'autre: au Japon elles ne remontent au-delà de 1963 que pour le seul secteur privé et elles ne concernent que les sociétés; il s'agit du total des dettes à court-moyen-long terme et obligations En France on dispose de nouvelles séries d'encours d'endettement et d'encours de passif (y compris les actions) pour l'ensemble des entreprises En Allemagne on s'est limité à un indicateur très sommaire représentant le total des crédits bancaires distribués à l'économie. Aux Etats-Unis, enfin, on a construit un encours d'endettement (au sens strict) de l'ensemble du secteur privé à partir de celui des sociétés, des agriculteurs et d'un partage de l'endettement des agents non agricoles non constitués en sociétés (une clef de répartition très stable entre les différents postes pouvant être calculés de 1961 à 1973).

Seuls les indicateurs les plus courants sont définis ; lorsque des notations particulières seront retenues, leur signification sera explicitée dans le corps du texte. Y, p, pK. N, NS, etc représentent les taux de croissance annuels de la production en volume, du prix de la production, du prix de la Fbcf des entreprises, des effectifs totaux et des effectifs salariés etc. pl/p_,K = taux d'accumulation, rapport de l'investissement brut des entreprises en valeur au stock de capital brut en début d'année évalué au coût de renouvellement |/K - NI = taux mesurant l'intensification du capital et égal au taux de croissance du capital par tête (aux sorties du capital près), le capital étant mesuré à prix constants Y - r>l = taux de croissance de la productivité apparente du travail. Y/K = indicateur de la productivité du capital, rapport de la valeur ajoutée brute au stock de capital brut en début de période, les deux grandeurs étant mesurées à prix constants W/pY = part des salaires dans la production. NS/N = taux de salansation, rapport des effectifs salariés aux effectifs totaux W*/pY = part des salaires dans la production, corrigée de la salansation croissante (W* = W x N/NS). Cette convention revient à attribuer un salaire fictif aux entrepreneurs individuels égal au salaire moyen par tête; elle est nécessaire pour corriger le biais du à la salansation croissante et redresser ainsi l'évolution de la part salariale. J7 = Prof its/p.., K = taux de profit avant impôts directs avant distribution, rapport des profits bruts au stock de capital brut en début d'année mesuré au coût de renouvellement. Aut/p_,K = taux de profit retenu, rapportant l'autofinancement (après impôts après distribution) au stock de capital revalorisé Dettes/p_,K = structure d'endettement des entreprises en terme de bilan, rapportant l'encours des dettes à la valeur du stock de capital au coût de renouvellement (ce ratio rapproche donc deux variables de stocks) Dettes/Aut = structure d'endettement des entreprises en terme de durée de remboursement, rapprochant une variable stock (encours de dettes) à une variable flux (autofinancement) Elle correspond à un indicateur qui indique le nombre d'années fictives nécessaires pour rembourser le total des dettes à l'aide de l'autofinancement de l'année (lorsque cette dernière variable n'était pas disponible), on s'est contenté du ratio plus approximatif Dettes/profits). Limites et insuffisances des indicateurs retenus Les insuffisances des indicateurs qui viennent être définis sont nombreuses et ne peuvent être rappelées que brièvement dans le cadre de cet article; elles concernent aussi bien la mesure statistique des séries de base (mauvaise connaissance des revenus non salariaux, conventions utilisées pour la construction des séries de capital à prix constants, etc.) que la définition même des ratios et des concepts utilisés. Trois remarques seront simplement faites sur ce dernier point: La notion de part salariale (W*/pY) qui sert d'indicateur de partage salaires-profits ou de taux de marge, est quelque peu simpliste et présente l'inconvénient de ne pas être très cohérente avec les hypothèses faites par ailleurs sur les profits des entrepreneurs individuels (que ce soit en France ou dans d'autres pays) , Les indicateurs de rentabilité (J7, Aut/p_,K), de taux d'accumulation (pl/p_,K), de structure d'endettement (Dettes/p_,K) bien qu'ils aient servi abondamment dans des travaux récents, paraissent assez fragiles principalement en raison des ambiguïtés pesant sur le concept de capital au coût de renouvellement Ce dernier est sensé recouvrir une notion de «capital avancé» sous son «aspect financier» que les entreprises chercheraient à mettre en valeur Force est de reconnaître que p_,K, capital revalorisé aux prix de l'année précédente, est assez loin de correspondre à cet objectif Un travail tout à fait exploratoire utilisant dans le cas de la France une notion de «capital aux coûts d'acquisition» (dont l'élaboration statistique est encore mal assurée) livre d'ailleurs des évolutions différentes en matière de rentabilité, d'accumulation et de structure d'endettement des entreprises ; Les ambiguïtés précédentes apparaissent avec encore plus de force dans le concept de productivité du capital (Y/K) qui cherche à appréhender les conditions de mise en valeur physique du capital. On connaît l'apreté des controverses sur la théorie du capital dont l'un des enjeux est précisément la difficulté de mesure d'un capital global sous son «aspect physique» Ces remarques montrent combien la description des «conditions physiques de la croissance» à l'aide du couple productivité du travail (Y/N), productivité du capital (Y/K) doit être faite avec précaution. Malgré ces insuffisances qui devaient être soulignées, les indicateurs proposés paraissent utiles pour éclairer certaines des tendances des grands pays capitalistes développés en matière de répartition, de rentabilité et d'accumulation du capital.

11

Page 10: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Les conditions physiques de la croissance

deviennent plus défavorables

Les conditions physiques de la croissance sont appréhendées malgré leurs ambiguités et leurs imperfections (encart n° 2) par deux indicateurs principaux la productivité apparente du travail (Y/N) et la productivité apparente du capital (Y/K).

La croissance de la productivité du travail a été rapide mais tend à se ralentir dans certains pays

La productivité du travail est croissante dans tous les pays étudiés, et suit en cela des fluctuations en phases avec celles de la production (graphiques 4). Ceci renvoie à la liaison existant entre les taux de croissance de l'emploi et de la production, liaison formalisée dans le « cycle de l'emploi » et sur laquelle nous reviendrons.

Graphiques IV : Taux de croissance de la productivité du travail (Y - N)

France

secteur privé Allemagne

— — secteur privé ___ secteur privé non agricole

12

Page 11: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Grande-Bretagne

i ■

Le Japon a connu des gains de productivité très élevés, voire considérables si on s'attache à l'étude du seul secteur industriel (jusqu'à 20% en taux de croissance annuel). Il semble cependant que les taux des dernières années soient en léger recul par rapport à ceux du début de période ; ceci peut être relié, on le verra, aux caractéristiques particulières de l'emploi dans ce pays. En France, sans que l'on puisse parler de gains notables, on observe un maintien du rythme moyen de croissance de la productivité du travail, tout au moins jusqu'en 1973 (aussi bien au niveau de l'industrie que de l'ensemble des entreprises non agricoles). Ce phénomène mérite d'autant plus d'être souligné que l'on note plutôt le mouvement inverse dans d'autres pays: ainsi en Allemagne, le taux de croissance de la productivité du travail, tout en restant élevé (5% en moyenne) accuse une certaine tendance au ralentissement; de même aux Etats-Unis, après les gains très importants réalisés au début des années soixante, un phénomène identique paraît s'esquisser (et à partir d'un niveau moyen plus faible, 2,5% environ). En Angleterre, enfin, partant d'un très bas niveau une amélioration sur moyenne période du taux de croissance de la productivité du travail semble se dessiner (malgré la faiblesse du taux d'accumulation) et ceci grâce à une réduction de plus en plus prononcée des effectifs employés. Pour terminer, le ralentissement de la croissance de la productivité du travail observé dans tous les pays en 1974-1975 mériterait une réflexion approfondie: s'agit-il, somme toute, d'un phénomène «conjoncturel» lié à la gravité de la récession? S'agit-il au contraire d'un mouvement plus profond s'inscrivant dans une baisse de plus longue durée?

Dans tous les pays, sauf au Japon, on observe une liaison importante entre les taux de croissance de la productivité du travail et de la production qui correspond à un comportement bien connu des entrepreneurs en matière d'embauché. Lors de la reprise, ceux-ci préfèrent utiliser d'une manière plus intensive leur main-d'œuvre (augmentation des cadences, allongement de la durée du travail) plutôt que d'embaucher immédiatement; d'où des gains de productivité. La poursuite de l'expansion entraîne cependant une détérioration des conditions de production et un recours accru à l'emploi qui se traduisent à terme par de moindres gains de productivité. Lorsque s'amorce la récession, le phénomène inverse s'observe, les entrepreneurs ne voulant pas ou ne pouvant pas licencier tout de suite une main-d'œuvre devenue excédentaire (phénomène de

tion de la main-d'œuvre»). Ce n'est qu'en période de ralentissement prolongé que l'on procède à de nombreux licenciements en vue de rationaliser les processus de production.

Ces enchaînements peuvent être formalisés graphiquement dans le plan (?, N, taux de croissance de la production en volume, taux de croissance de l'emploi). Dans ce plan, les points obtenus pour les différentes années révèlent dans un premier temps une liaison positive. Une analyse plus poussée permet de mettre en évidence une structure dynamique particulière qui peut être schématisée par un parallélogramme décrit dans le sens trigonométrique (voir graphiques 5). Cette disposition se retrouve avec certes des spécificités, en France, en Allemagne, aux Usa et en Grande-Bretagne. Il est par contre impossible de la mettre en évidence dans le cas du Japon. Ceci peut être attribué à l'évolution très particulière de la structure des emplois au Japon qui se caractérise par la présence au début de la période d'un gros excédent de main-d'œuvre, sous la forme d'aides familiaux improductifs dans les secteurs archaïques, spécialement l'agriculture («chô-

Graphiques V: Cycle de l'emploi

2 0

-2

5 4 3 2

1 0 -1 2

secti 5 4 3 2 1 0

-1 -2 -3 -4 -5

secteur industriel Japon

_ i i i -20 -15 -10 -5 0 5 10 15 20 25 30 35 40

NS Taux de croissance des effectifs salariés entreprises non agricoles France

Taux de croissance de la production en volume Y I I I

iur privé NS

Allemagne

j i i i l i i i i i -10 1 9 10 11

13

Page 12: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Etats-Unis

Grande-Bretagne 60

_ I I I -3-2-10123456789

0 12 3 4 5

Allemagne secteur privé

r NS secteur industriel EtatS-UniS

0 4 b 12

Graphiques V bis : Détail des cycles de l'emploi, correction faite de la durée de travail.

N secteur industriel

0 4 8 12 16 20

Japon

-20 10 0 10 20 30

mage déguisé»), par la résorption progressive de cet excédent dû au transfert des secteurs archaïques vers les secteurs modernes qui se développent au cours de la période et, enfin, par l'apparition vers le milieu des années soixante d'une relative «pénurie» de main d'œuvre (C. Sautter- [15] 4). Il ne paraît donc pas possible de trouver une explication de l'évolution à court terme de l'emploi au Japon tant les facteurs structurels paraissent dominants. On peut noter toutefois que si l'on se limite au seul secteur industriel des résultats beaucoup plus proches de ceux des autres pays peuvent être obtenus.

Des analyses précédentes, il résulte que les gains de productivité du travail peuvent être en premier lieu expliqués par le taux de croissance de la production, phénomène qui recouvre l'utilisation plus ou moins intensive qui peut être faite de la main-d'œuvre (cadences, durée du travail) suivant l'état de la conjoncture. Une telle explication conjoncturelle est cependant insuffisante, les entrepreneurs pouvant améliorer la productivité du travail grâce à la mise en place d'équipements plus performants et grâce aux développements de techniques plus capita- listiques.

3 5 7 9 11

14

Page 13: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

3 - Cycle de l'emploi et évolution de la productivité du travail à court terme En France, les travaux menés lors de l'élaboration du modèle Star ont permis de mettre en évidence, dans le plan (Y, N), une forme très particulière de la liaison emploi-production Celle-ci peut être schématisée par un processus en quatre phases auquel correspond un schéma théorique en forme de parallélogramme

Taux de croissance de l'emploi

Taux de croissance de la production en volume

Ces quatre phases s'analysent comme suit: Reprise, Surchauffe et détérioration des conditions de production. Ralentissement, Rationalisation des processus de production. Au niveau économétrique, on constate une corrélation positive entre INI et Y, les résultats étant améliorés par la prise en compte des phases d'accélération ou de décélération de la croissance de la production On obtient ainsi sur le champ des entreprises non agricoles (1953-1972) N = 0,615 Y - 0,186 A Y - 0,0229 T = 8,1 T = - 3,0 T = - 5,0 R2 = 0,79 DW = 2,13 A = opérateur de différenciation : A Y = Y — Y_, , Y., désignant le taux de croissance de la production en volume de l'année précédente Ces résultats se transposent sans modification dans le cas de l'Allemagne où l'on observe un cycle assez proche du cycle théorique. Comme cela est logique, les ajustements sont moins bons pour l'ensemble des effectifs N que pour les seuls salariés NS. Ces derniers sont en effet plus sensibles aux variations conjoncturelles à travers, en particulier, la main d'œuvre immigrée Secteur privé (1957-74) N = 0,38 Y + 0,21 Y , - 0,0299 T = 6,4 T = 3,3 T = - 6,9 R2 = 0,79 - DW = 1,54 (1957-74) NS = 0,507 Y = 0,275 Y , - 0,033

T = 7,3 T = 3,7 T = - 6,5 R2 = 0,84 - DW = 1,51 Remarquons que l'effet de «thésaurisation de la main-d'œuvre» peut également être illustré en prenant en compte la liaison entre NÛS (croissance du nombre hebdomadaire d'heures de travail, correction faite de l'allongement des congés) p et Y. On constate que le cycle de l'emploi est beaucoup plus «aplati» dans le plan (NHS, Y) puisque les entrepreneurs jouent en premier heu sur la durée hebdomadaire de travail suivant les différentes phases de la conjoncture (voir graphiques V bis).

L'étude des Etats-Unis permet de retrouver des phénomènes assez semblables , on note toutefois une différence, les phases 2 et 3 étant confondues et le ralentissement de la croissance intervenant simultanément avec la période de détérioration des conditions de production Les ajustements économétriques portant soit sur l'emploi (salarié NS ou total N) soit sur la productivité du travail (Y - N) sont les suivants : Secteur privé 1952-1972 NS = 0,678 Y + 0,263 Y , - 0,018 T = 7,6 T = 2,9 T = - 3,1 R2 = 0,77 - DW = 1,35 1952-1972 Y - N = 0,543 Y - 0,126 Y , + 0,009 T = 7,4 T = - 1,7 T = 2,1 R2 = 0,79 - DW = 1,45 Des ajustements très proches sont obtenus pour le secteur privé non agricole Dans l'industrie des résultats légèrement meilleurs se dégagent Toutefois, faute de disposer de la série d'emploi total industriel, nous n'avons pas pu utiliser l'indicateur habituel de la productivité (Y — N) Nous avons donc du nous contenter de (Y — NS), approximation qui est suffisante dans la mesure où le taux de salansation de l'industrie est très élevé depuis longtemps et apparaît assez stable (1952-72) NS = 0,633 Y + 0,229 Y_, - 0,024 T = 10,9 T = 3,9 T = - 5,1 R2 = 0,87 - DW = 1,4 (1952-72) (Y - NS) = 0,367 Y - 0,229 Y., + 0,024 T = 6,3 T = - 4,0 T = 5,1 R2 = 0,82 - DW = 1 ,40 Aux Etats-Unis également la prise en compte de la durée du travail «aplatit» le cycle de l'emploi et permet à titre d'exemple d'obtenir les résultats suivants dans le secteur industriel (1952-72) N^S = 0,820 Y + 0,157 Y , - 0,028

T = 15,7 T = 3,0 T = - 6,6 R2 = 0,93 - DW = 1,41 Au Japon, l'étude de la liaison emploi-production s'avère très intéressante: en effet, à la différence de la plupart des autres pays occidentaux, on ne trouve aucune corrélation entre emploi et production Le coefficient de corrélation (R2) n'est que 0,10 entre N et Y, et ceci pour les trois secteurs étudiés Les résultats sont du # même ordre pour le taux de croissance des effectifs salariés NS. D'autre part on observe qu'au moins pour les secteurs privé et privé non agricole, il est impossible de mettre en évidence un schéma cyclique comme nous avions pu le faire dans les pays précédents Au niveau économétrique on obtient : Secteur privé : (1954-72) N = 0,118 Y+ 0,016 Y , T = 2,6 T = 0,4 R2 = 0,08 - DW = 1,37 Seul le secteur industriel permet de retrouver un peu mieux un cycle typique du couple emploi-production, au moins pour certaines périodes (1954-58, 1958-65) (1954-72) N = 0,107 Y+ 0,196 Y , T = 2,4 T = 4,7 R2 = 0,44 - DW = 1,35 (Les résultats sont sensiblement les mêmes quand on s'attache à la croissance des effectifs salariés) Ainsi au Japon l'explication de l'évolution de l'emploi doit être recherchée même pour le court terme dans une autre direction que la simple liaison emploi-production, tout au moins pour les secteurs non industriels

0 2 4 6

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Page 14: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Croissance plus capitalistique et gains de productivité

Etats-Unis

Un effort considérable d'investissements a été réalisé, on l'a vu, par les entreprises au cours de la période passée. La croissance du capital par tête (intensification du capital) recouvre sur bien des points celle du taux d'accumulation et est un phénomène général dans les pays étudiés (graphiques 6).

Graphiques VI: Taux de croissance du capital par tête ( /„ ,,) K - N'

Japon

secteur prive

1955 1960

secteur industriel

I ■ . ■ ■ I

(I/K - N) lissé sur trois ans entreprises non agricoles France

i . , , , i

11 10 9 8 7 6 5

- % - - - -

1 1950

Allemagne

secteur industriel

entreprises non agricoles par tête Grande-Bretagne

i . .

Au Japon, la croissance du capital par tête s'accélère fortement entre 1953 et 1970. Des nuances importantes existent néanmoins entre les secteurs : dans les secteurs non industriels, et particulièrement dans l'agriculture, l'intensification du capital est très forte dès le début grâce à la résorption d'un important chômage déguisé. Dans l'industrie au contraire des i

nvestissements extensifs s'appuyant sur l'abondance de la main-d'œuvre sont d'abord réalisés ; ce n'est qu'à partir de 1960, et d'une manière très brutale, que la croissance du capital par tête connaît une accélération marquée et que des économies de main- d'œuvre sont recherchées. La France présente une évolution assez proche mais d'une ampleur plus limitée; I/K - N passe en trois bonds successifs d'environ 5,5% au début des années cinquante à plus de 9% à la fin des années soixante pour l'ensemble des entreprises non agricoles. Une analyse plus fine au niveau sectoriel serait utile [6] avec, en particulier, une croissance beaucoup plus capitalistique depuis 1957 dans les secteurs non industriels (Btp, services, commerce). L'économie allemande a également réalisé des efforts particulièrement importants pour développer des techniques plus capitalistiques. L'un de ses traits spécifiques est, on le sait, une relative pénurie de main- d'œuvre accentuée en outre par la construction du mur de Berlin ; à l'opposé le capital apparaît comme un «facteur assez abondant». D'où l'ampleur des efforts réalisés. Un rythme aussi soutenu n'a cepen-

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dant pu être maintenu d'une manière durable, la croissance du capital par tête s'est très sensiblement ralentie depuis 1968.. Aux Etats-Unis, on retrouve en matière d'intensification du capital, certaines des caractéristiques du taux d'accumulation : I/K - N est fluctuant autour d'une valeur moyenne, 7 % environ pour le secteur privé, 10% pour l'industrie. En Angleterre, par contre, on ne retrouve pas au niveau de la croissance du capital par tête les évolutions du taux d'accumulation en raison des économies de main- d'œuvre importantes qui sont réalisées durant les périodes de ralentissement.

Les effets de cette intensification du capital sur la croissance de la productivité du travail paraissent inégaux d'un pays à l'autre : apparemment importants au Japon, en France, en Allemagne et même en Grande-Bretagne, ils jouent d'une manière plus limitée aux Etats-Unis. Le cas du Japon, très spécifique, sera examiné en dernier.

La croissance rapide du capital par tête en France et son impact sur la productivité du travail se dégagent nettement mais appellent un approfondissement au niveau sectoriel [6] : l'accélération très sensible après 1957 puis 1964 de l'intensification du capital dans les secteurs non industriels (Btp, services, commerces) n'a pas entraîné de gains notables de productivité du travail ; en revanche, la situation paraît plus favorable surtout à partir de 1967 dans les secteurs industriels (notamment biens d'équipement et biens intermédiaires) alors même que l'on n'observe pas d'accélération de la croissance du capital par tête dans ces secteurs après 1964... Les économies de main-d'œuvre à travers le développement de techniques plus capitalistiques ont été une préoccupation constante des entrepreneurs allemands et ce mécanisme semble bien avoir joué d'une manière importante, tout au moins au niveau du secteur privé dans son ensemble. Il convient toutefois de rappeler que le rythme de croissance du capital par tête, a sensiblement fléchi en fin de période; ceci peut être rapproché des gains plus limités qui ont progressivement été observés en matière de productivité du travail. Aux Etats-Unis, l'influence de l'intensification du capital, dont les caractéristiques sont beaucoup plus cycliques qu'ailleurs, se fait sentir d'une manière assez nuancée; elle paraît difficile à mettre en évidence pour l'ensemble des secteurs privé et privé non agricole; des résultats plus favorables peuvent être obtenus dans le cas de l'industrie. En Grande-Bretagne, enfin, la croissance de la productivité du travail part d'un niveau très bas mais tend à s'accélérer principalement grâce aux réductions souvent importantes des effectifs employés qui sont réalisées durant les phases de rationalisation.

Le Japon mérite un examen particulier: nous avons vu plus haut que l'on n'y trouvait pas de trace du «cycle de l'emploi» comme dans les autres pays. L'explication principale des gains de productivité au niveau global se trouvent en fait dans la résorption progressive de l'excédent de main-d'œuvre de l'agriculture et des secteurs traditionnels et dans la restructuration de ces derniers au profit et en partie sous le contrôle des secteurs industriels les plus dynamiques. Ce mouvement de réorganisation peut, en toute première approximation, être saisi à travers le taux de croissance du capital par tête mais celui-ci recouvre alors une autre réalité que, par exemple, dans le cas de l'Allemagne. D'autre part, le secteur industriel paraît bien exercer un rôle directeur dans le déroulement des cycles au Japon étant donné le mode d'organisation de la production et les rapports de sous traitance existants. Durant les périodes d'expansion et de croissance rapide des taux de profit, l'industrie fait travailler d'une manière active les secteurs gravitant autour d'elle; au contraire, durant les phases de stabilisation où le taux de profit industriel baisse, les commandes passées à ces secteurs doivent ralentir fortement d'où des diminutions importantes des effectifs employés. Ce type de mécanisme est illustré par l'influence positive du taux de profit industriel sur la croissance des effectifs des secteurs privé et privé non agricole.

Deux phénomènes ont, en définitive, joué d'une manière décisive au Japon : d'une part, l'articulation entre l'industrie et les secteurs non industriels à structure assez archaïque ; d'autre part, au sein même de l'industrie, une restructuration autour des secteurs et des entreprises les plus modernes s'appuyant sur des rapports de domination et de sous traitance vis-à-vis des autres secteurs à structure plus morcelée et plus artisanale. Cependant, si l'on se limite à la seule industrie japonaise stricto- sensu, on observe, en matière d'emploi et de productivité, un certain nombre de points communs avec les autres systèmes industriels déjà étudiés, points communs qui ne se retrouvent nullement au niveau de l'ensemble de l'économie, les périodes de rationalisation 1962 à 1965, 1970 à 1972... 1975 (?) se dégagent en particulier assez clairement, périodes durant lesquelles le système productif japonais s'est réorganisé en tenant compte à la fois des effets de la suraccumulation passée et des nouvelles contraintes en matière de compétitivité et de main- d'œuvre devenue plus rare et plus chère. Toute proportion gardée, un rapprochement peut être effectué avec la France dont le système productif s'est pr

ofondément restructuré depuis 1958 et où le clivage entre secteurs moteurs et secteurs traditionnels paraît avoir une certaine pertinence.

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Page 16: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

4 - Croissance plus capitalistique, emploi et gains de productivité: les estimations économétriques France (Entreprises non agricoles) (1954-71) _[Y-Â - 0,0462] = 0,39 (Y-Y) + 0,16 (I/K - N - 0,0764) T = 6,2 T = 1 ,4 - 0,97 (CONGRE + H) R2 = 0,83 - T = - 8,0 DW = 2,8 On donne simplement la détermination de la productivité horaire du travail (Y — Â) telle qu'elle figure dans le modèle Star. Y = moyenne mobile sur trois ans du taux de croissance de la production en volume Y/l/K — N = taux moyen sur trois ans de la croissance du capital par tête, CONGRE + ^ = variable servant à corriger l'activité pour tenir compte de l'allongement des congés, des grèves et de la réduction de la durée hebdomadaire du travail Allemagne (secteur privé) 1959-1974N = 0,41 Y + 0,16 Y , - 0,25 (K - N) , - 0,0150 T = 8,3 T = 2,9 T=1,8 T = 1,6 R2 = 0,88 - DW = 2,55 1959-1974Y - N = 0,30 Del + 0,394 Y + 0,58 (K - N) , + 0,0181 T = 2,7 T = 5,8 T = 2,1 T = 1,1 R2 = 0,80 DW = 1,5 Del indicateur du degré d'utilisation des capacités de production Un indicateur de croissance du capital par tête (K — N)_, lissé sur trois ans et décalé d'une période a été utilisé dans les deux cas, il semble bien que la mise en place de techniques plus capitalistiques ait joué un rôle important en Allemagne pour économiser la main d'oeuvre et réaliser des gains de productivité Etats-Unis (secteur privé non agricole) (1952-72) NH'S = 0,86 Y + 0,20 Y , - 0,39 (I/K - N)_,

T = 10,4 T = 2,4 T = - 4,7 R2 = 0,85 - DW = 1,63 Secteur industriel (1952-72) NS = 0,65 Y - 0,36 (I/K NS ,) + 0,018 T = 10,2 T = - 3,5 T = 1,8 R2 = 0,85 - DW = 1,5 (1952-72) (Y - NS) = 0,35 Y + 0,36 (I/K - NS) , - 0,018

T = 5,4 T = 3,5 T = - 1,8 R2 = 0,80 - DW = 1,50 L'influence de l'intensification du capital ne se dégage pas d'une manière évidente au niveau de l'ensemble du secteur privé; des résultats plus concluants peuvent être obtenus pour le secteur industriel et, dans une certaine mesure, pour le secteur privé non agricole.

Grande-Bretagne (entreprises non agricoles) (1960-1972) Y - N = 0,57 (Y-Y) + 0,39 (I/K-N) , + 0,0129 T = 3,5 T = 1,4 R2 = 0,83 - DW = 1,9 Cette relation est issue des travaux précédents [3], [9] Japon (secteur privé) (1955-1969) NS = - 0,41 (K - NS) + 0,069 T = - 6,8 T = 19,5 R2 = 0,78 - DW = 2,6 (1954-1970) Y - N = 0,90 Y + 0,18 (I/K-N) - 0,022

T = 16,9 T = 3,4 T = - 3,6 R2 = 0,97 - DW = 1,99 Des résultats très proches sont obtenus pour le secteur privé non agricole Secteur industriel (1955-1969) NS = 0,12 Y + 0,306 Y , - 0,496 (K-NS) + 0,04 T=1,8 T = 4,5 T = - 4,3 T = 3,1 R2 = 0,74 - DW = 2,13 (1954-1970) Y-N = 0,91 Y - 0,18 Y_, + 0,27 (I/K-N) - 0,032 T = 16,3 T = - 3,7 T = 2,5 T = - 2,9 R2 = 0,97 - DW = 1,3

La résorption progressive de l'excédent de main d'eeuvre et les efforts de rationalisation qui se reflètent dans l'accélération de la croissance du capital par tête apparaissent comme des facteurs explicatifs déterminants, particulièrement dans les secteurs privé et privé non agricole où les effets conjoncturels étaient, comme on l'a vu, non significatifs. Par contre, dans ces deux secteurs le rôle dominant joué par l'industrie se dégage clairement avec l'influence positive du taux de profit industriel sur la croissance des effectifs salariés

Secteur privé (1,954-1970) NS = - 0,533 (K - NS) + 0,347 n ind T = - 8,7 T = 18,7 R2 = 0,74 - DW = 1,86 Secteur privé non agricole (1956-1970) NS = - 0,53 (K - NS) + 0,37 n ind

T = 5,5 T = 11,6 R2 = 0,49 - DW = 1,3 On peut souligner en outre que les taux de croissance de la production industrielle en volume ou de la valeur ajoutée des secteurs concernés n'interviennent pas d'une manière significative

Retournement de la productivité du capital

Graphiques VII: Productivité du capital (Y/K)

La productivité apparente du capital (Y/K) rapport de la production en volume au capital en volume, (tous les deux évalués à prix constants), n'est pas un concept exempt d'ambiguité. Elle n'en fournit pas moins d'utiles indications sur les conditions physiques de la croissance dans les différents pays (voir graphique 7).

Ainsi au Japon la productivité du capital est croissante jusqu'en 1960, décroissante depuis, avec un léger redressement en 1966-1967, ceci pour tous les secteurs (privé, privé non agricole et industriel).

Japon I xy secteur privé non agricole

18

Page 17: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

80 78 76 74 72 70 68 66 64 62 60 58

56 54 52 50 48 46 44 42 40

secteur industriel (Y/K en yens 1965) Japon

, , , . i

France

Allemagne

28 L ' ' I I I I — I I — I- I I I I I I I I — I — 1 — l — I 1950 1955 1960 1965 1970 1975

82 80 78 76 74 72 70 68 66

120 115 110 105 100 95 90 85 80

Etats-Unis secteur privé non agricole^ / /

I , , , , I , , , , I . , , . I , , , , I , , , , I

secteur industriel (Y/K en dollars 1958)

i 1 . ■ ■ ■ I ■ ■ ■ ■ I . ■ ■ . I '970 1975

Cependant, du fait des vagues de suraccumulation qui ont déjà été décrites, Y/K est marquée par d'assez amples fluctuations autour des tendances qui viennent d'être décrites. Ce phénomène, valable quelque soit le niveau d'agrégation retenu, est particulièrement net dans l'industrie: les baisses de 1957- 1958 et surtout de 1961-1965 sont plus prononcées et le «redressement» de 1966-67 apparaît très faible (de 59 % à 62 % après une chute de 79 % à 59 %).

En France également, la productivité du capital est croissante en début de période mais connaît un renversement à une date qui varie d'un secteur à l'autre: 1964 pour l'ensemble des activités non agricoles, 1963-64 aussi pour les commerces, les services, les industries de consommation, 1959 pour les bâtiments, Travaux publics, 1969 pour les laa. Il est intéressant de noter que Y/K se maintient dans les industries de biens intermédiaires et continue à progresser jusqu'en 1971-72 dans les biens d'équipement (et également l'énergie et les transports).

De même en Allemagne la productivité du capital connaît un renversement à la baisse en 1960, renversement qui fait suite aux efforts d'accumulation du début des années cinquante.

Les Etats-Unis présentent enfin une physionomie tout à fait particulière (au regard des autres pays). La productivité du capital paraît suivre une évolution cyclique d'une période assez longue, qui rejoint avec un léger décalage celle du taux d'accumulation. Tout se passe comme si les mouvements d'investissement venaient périodiquement se heurter à des limites se concrétisant par la baisse de la productivité apparente du capital. Là encore une étude sur plus longue période serait nécessaire pour pouvoir porter un jugement plus assuré et mieux analyser les modes de régulation auxquels paraît être soumise l'économie américaine.

Au terme de cette analyse des conditions physiques de la croissance se précise la classification des pays étudiés; la France, et surtout le Japon, en seraient encore (ou en auraient encore été) au stade la structuration et de l'émergence des secteurs moteurs et dominants; c'est à ce stade que correspondraient les mouvements d'accumulation et de concentration observés plus haut (avec, à l'évidence, des différences notables entre les économies françaises et japonaises). L'Allemagne occuperait, quant à elle, une situation intermédiaire: depuis 1955, elle aurait tiré profit de la puissance de ses entreprises leaders dans les secteurs clefs (sidérurgie, constructions mécanique et électrique, chimie, automobile). L'évolution des différents indicateurs étudiés jusqu'ici inciterait pourtant à penser que l'économie allemande s'achemine vers une nouvelle étape; ce qui ne signifie nullement que son système productif demeure figé: on observe au contraire que le poids des entreprises leaders s'accroît dans la plupart des secteurs et que le mouvement de concentration se poursuit de 1960 à 1970 [6], [10], [13]. Les Etats- Unis, quant à eux, correspondraient à une économie beaucoup plus mûre, structurée depuis longtemps déjà où l'accumulation serait relancée périodiquement. Cette brève analyse des conditions physiques de la croissance doit maintenant être complétée par une étude des modalités de la répartition des revenus.

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Page 18: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Partage salaire-profit et rentabilité du eapital

des tensions accrues

L'étude de la répartition des revenus se fera en plusieurs temps: une première analyse de l'évolution de la part salariale sera suivie d'un examen de la rentabilité du capital ; on envisagera ensuite comment ces deux notions peuvent s'articuler notamment à travers le jeu des prix relatifs.

Graphiques VIII: Taux de salarisation (NS/N)

La part salariale tend à décroître mais se redresse en fin de période dans tous les pays

La part des salaires dans la production peut être exprimée par W/pY, rapport des charges salariales à la valeur ajoutée. L'inconvénient de cet indicateur est qu'il présente une tendance croissante due à l'augmentation de la salarisation, phénomène qui

biaise les résultats et que l'on ne souhaite donc pas prendre en compte (graphiques 8). On y remédie en utilisant la part des salaires corrigée de la salarisation croissante : W/pY = W/pYx N/NS N : effectifs totaux, NS : effectifs salaires Cette correction, puremeent conventionnelle et qui n'es as sans poser des problèmes, revient attribuer aux entrepreneurs individuels un salaire fictif égal au salaire moyen par tête (graphique 8).

La part des salaires corrigés W*/pY évolue d'une manière sensiblement différente d'un pays à l'autre: ellees présente néanmoins une tendance assez générale à la baisse jusqu'à la fin des années soixante et, à une date variable suivant les pays, on observe un retournement de cette tendance en fin de période (graphiques 9 p. 21 et 9bis p. 22).

Au Japon, W*/pY est régulièrement et fortement décroissant jusqu'en 1971, si l'on s'attache à l'ensemble du secteur privé, une légère remontée étant sensible en 1971-72. Toutefois l'examen de la situation du secteur privé non agricole et surtout du secteur industriel strict incite à penser qu'il ne s'agit pas là d'un phénomène conjoncturel. Pour ce dernier, en effet, la remontée est plus ample et se dessine dès 1961, pour s'accélérer nettement en 1970.

86 84 82 80 78 76 74

84 82 80 78 76 74 72 70

96 94 92 90 88 86 84 82 80 78

I . .

Japon •••'secteur industriel

^ _• ''secteur privé non agricole

I ■ .

""secteur privé

I , . , , I . , I , ■ . , I

entreprises non agricoles France

1975

Allemagne

i.ii.l i ■ ■ ■ ■ i .

secteur privé non i igncoli •

t

/sectet ir privé

Etats-Unis

I .... I .... I .... I ■ ... I

20

Page 19: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Graphiques IX : Part des salaires dans la production corrigée de la salarisation croissante (W*pY) 105 100 95 90 85 80 75 70 65 60 55 l_i_

I . ,

I , ,

Japon

^secteur privé

. . I 1955 1960 1965

secteur industriel

I , , , , I , , , , I , . . i ■ I 1970 1975

entreprises non agricoles Fr3r"IC6

■ I I ■ ■ , ■ . , I . ■ , i 1970 1975

secteur pnvé Allemagne

I I , , ■ I ■ . ■ . I . . 1970 1975

Etats-Unis

secteur privé non agricole,'

I , . | .... I .... 1 , , I

La détermination de la part des salaires est le résultat de la confrontation de deux agents principaux: les salariés et les entreprises; à ce titre, elle est le reflet de processus contradictoires que l'on peut ramener à deux déterminants essentiels. D'une part, les entreprises tendent à diminuer la part du travail salarié dans la production, en développant des techniques plus capitalistiques, en restructurant leurs processus de production, en augmentant la productivité du travail. Mais cet effort n'est pas effectué d'une manière continue parce que ces entreprises ne réalisent pas que des investissements de productivité mais cherchent aussi à étendre leur capacité de production. D'autre part, les salariés s'opposent à cette réduction de leur part dans le partage du revenu et ils réussissent à renverser la tendance précédente lorsqu'ils se trouvent dans un «rapport de force» favorable. Ces mécanismes très généraux paraissent s'appliquer à l'ensemble des pays mais avec d'importantes nuances quant à l'influence respective des deux facteurs envisagés.

Au Japon, ce schéma explicatif est particulièrement intéressant, car il recouvre bien les mutations profondes traversées par l'économie japonaise; résorption de la main-d'œuvre excédentaire dans les secteurs traditionnels et notamment dans l'agriculture, salarisation très rapide, forte croissance du capital par tête, liée à la fois aux restructurations sectorielles et au développement de techniques plus capitalistiques à partir du milieu des années soixante. Une certaine «pénurie de main-d'œuvre» apparaît en effet à cette date et va en s'accentuant comme peuvent en témoigner les graphiques ues taux de salarisation et l'évolution des taux de croissance des effectifs salariés (graphiques 8). Le rapport de forces entre entrepreneurs et salariés a ainsi évolué de façon sensible durant la période étudiée et on a essayé de rendre compte de ce phénomène en utilisant le taux de salarisation (plus celui-ci est élevé, plus est faible le réservoir de main-d'œuvre et plus les salariés se trouvent en position favorable).

En France, la part des salaires est remarquablement plus stable qu'au Japon, elle connait des phases successives de hausse et de baisse qui la conduisent cependant, sur l'ensemble de la période 1950- 1973, à une tendance à la baisse et qui recouvrent pour partie l'évolution en sens inverse de l'augmentation du capital par tête. On observe, d'autre part depuis 1970, une remontée sensible, particulièrement accentuée en 1 974.

L'évolution de W*/pY en Rfa n'est pas sans rappeler celle de la France, y compris dans les phases conjoncturelles: alternance de hausse et de baisse avec une tendance décroissante, puis très forte remontée à partir de 1970. Cependant la liaison avec l'intensification du capital apparaît moins évidente alors que la sensibilité à la conjoncture et la liaison négative avec l'évolution de la productivité du travail semblent assez prononcées. Enfin les effets d'une relative rareté de la main-d'œuvre peuvent se faire sentir à travers l'évolution, là aussi, du taux de salarisation. Le redressement de la part des salaires après 1969 s'expliquerait en définitive à la fois par les moindres gains de productivité observés à partir de cette date, par une tension plus vive sur le marché du travail et par les limites auxquelles se heurte le développement de techniques plus capitalistiques.

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Page 20: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Graphiques IX bis : Part des salaires dans la production non corrigée de la salarisation (W/pY)

37 36 35 34 33 32 31

51 50 49 48 47 46 45 44 43 42

70 68 66 64 62 60 58 56 54

68 67 66 65 64 63 62

/ Japon secteur privé *non agricole

\ A 'v V' \ / \ r i i i i

.. \ \ \ y W

i I I 1 i i J I / 1 /

• secteur industriel

, , , , I , . . , I 1970 1975

entreprises non agricoles rTanCe

■ , ■ i i ■ ■ i ■ i

Allemagne

■ I .... I

secteur industriel EtatS'UniS

Grande-Bretagne entreprises non agricoles

Aux Etats-Unis, la part salariale, après avoir crû en moyenne jusqu'en 1960, décroît depuis lors avec une amélioration très sensible de 1967 à 1970 surtout dans le secteur privé. Le lien ne s'établit pas clairement avec l'évolution cyclique de la croissance du capital par tête mais la sensibilité à l'évolution de la productivité du travail paraît grande. Enfin, on peut souligner qu'aucun indicateur de l'état du rapport de force ne paraît intervenir d'une manière significative.

L'Angleterre fournit enfin une dernière illustration intéressante: la part des salaires présente une tendance nettement croissante entre 1952 et 1972 avec des fluctuations conjoncturelles prononcées, qui sont corrélées négativement à la productivité du travail (on se doit de signaler que, pour l'Angleterre, on n'a pu disposer que d'un indicateur non corrigé W/pY; toutefois, on peut penser que la salarisation est très avancée au Royaume-Uni et qu'elle est, par conséquent, assez stable). Cette croissance de W/pY peut être rapprochée d'une part de la chute du taux d'accumulation et de la faiblesse des gains de productivité, et d'autre part, d'un rapport de force assez favorable aux salariés, si l'on en juge, par exemple, par l'évolution très fortement croissante du nombre de conflits (graphiques 9ter).

Graphiques IX ter: Conflits

24 000 22 000 20 000 18 000 16 000 14 000 12 000 10 000 8 000 6 000 4 000; 2 000

j— nombre de journées perdues pour faits de grève Grande-Bretagne

oL i 1950 I ■ ■ ■ ■ I , ■ . ■ I

r* nombre de conflits ésolus dans I année 9 000 8 000 7 000 6 000 5 000 4 000 3 000 2 000 1 000

France

oL i 1950

En définitive, le partage salaires - profits s'effectue suivant des modalités qui, bien qu'assez voisines, présentent des nuances d'un pays à l'autre : le rythme d'accumulation et les efforts pour mettre en place

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Page 21: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

des techniques plus capitalistiques permet d'opposer d'une part le Japon et la France, d'autre part, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis, l'Allemagne occupant une situation intermédiaire. La sensibilité à l'évolution de la productivité du travail paraît

s'observer dans la plupart des pays. Enfin, l'influence du «rapport de force» entre entrepreneurs et salariés peut être mis en évidence, soit en terme de rapports conflictuels (France, Angleterre), soit en terme de «rareté de la main-d'œuvre» (Japon, Allemagne).

5 - Les déterminants du partage salaires-profits: les estimations économétriques Japon (secteur privé) (1956-1970)W/pY = - 0,564 (Y - NS) - 0,777 (I/K - ISIS) ,

T = - 6,8 T = - 4,2 + 1,332 NS/N + 1,830 T = 7,3 T = 14,7 R2 = 0,99 - DW = 2,37 Secteur privé non agricole (1956-70) . ,_ W/pY = - 0,27 (Y - NS) - 0,30 (K-NS)., + 0,554 NS/N + 1 ,058

T = - 2,6 T = -1,2 T = 2,2 T = 6,15 R2 = 0,87 DW = 0,81 Secteur industriel (1956-70) ,_ W»/pY = -0,19(Y-NS)-0,12(l/K-NS)+ 0.810NS/N+ 1,17

T = - 2,4 T = - 0,5 T = 3,5 T=6,6 R2 = 0,78 - DW = 1 ,4 On peut s'étonner que la croissance au capital par tête n'intervienne pas d'une manière plus significative dans le secteur industriel Une explication est cependant envisageable: les efforts de modernisation ont particulièrement touché les secteurs agricoles et non industriels où existait un important chômage déguisé qui a été résorbé progressivement d'où une forte accélération de la croissance du capital par tête et une baisse rapide de W*/pY. Dans l'industrie au contraire les efforts de rationalisation ont sans doute moins porté sur l'élimination d'une main- d'œuvre excédentaire; au contraire, les industriels japonais ont plutôt mis l'accent sur des techniques modernes à main-d'œuvre abondante et ont dans un premier temps procédé à une embauche extensive, ce qui pourrait expliquer les résultats observés écono- métnquement. L'importance des efforts d'investissement et de restructuration dans la torsion du partage salaires - profits au niveau 'de l'ensemble du secteur privé peut être illustrée par la régression suivante: (1956-70) WVpY = - 2,236 (I/K - NS) , + 0,907 T = - 9,1 T = 53,7 R2 = 0,87 - DW = 1,13 France (entreprises non agricoles) (1953-72) WVpY = - 0,82 (I/K - N) + 0,098 (Conflits) + 0,4837 T = - 8,5 T = 1,9 T = 70,2 R2 = 0,81 - DW = 1,4 Conflits = nombre de conflits résolus dans l'année (graphique IX ter). Allemagne (secteur privé) (1960-74) WVpY = - 0,39 (Y - N) - 0,51 (K - N)_2 + 0,6305

T = - 3,4 T = - 2,5 T =49,7 R2 = 0,62 - DW = 1,22 La part salariale paraît assez sensible aux variations de la productivité du travail mais l'influence de l'intensification du capital est moins prononcée.

(1960-74)WVpY = - 0,35 (Y - N) - 0,56 (K - N)_2 T = - 2.9 T = - 2,7 + 0,09 NS/N + 0,5575 T = 1,0 T = 7,6 R2 = 0,66 - DW = 1 ,30 Cette relation permet de saisir les effets d'une relative pénurie de main-d'œuvre à travers l'évolution du taux de salansation NS/N. Etats-Unis (secteur privé) Une transposition brutale des formulations initiales donne de très mauvais résultats (1952-72) r WVpY = - 0,509 (I/K - N) - 0,00000 Grèves + 0,663

T = - 1,0 T = - 0,6 T = 18,5 R2 = 0,09 - DW = 0,47 Grèves = nombre de journées de grèves La prise en compte de l'influence conjoncturelle des variations de la productivité du travail et du capital par tête au cours du cycle, livre des résultats plus encourageants pour expliquer la variation de la part salariale (1952-72) A WVpY = - 0,451 (Y - N) - 0,265 (I/K - N) + 0,03 T = - 5,1 T = - 2,2 T = 2,9 R2 = 0,59 - DW = 2,76 Secteur industriel (1952-72) A W/pY = - 0,502 (Y - NS) - 0,128 (I/K - NS) + 0,026

T = - 9,4 T = - 2,6 T = 4,2 R2 = 0,86 - DW = 1,1 (Pour les raisons indiquées plus haut, la correction de la salansation croissante n'a pu être effectuée dans le secteur industriel américain, ce qui, dans le cas présent, ne biaise pas trop les résultats) Grande-Bretagne (entreprises non agricoles) (1960-72) W/pY = - 0,30 Y + 0,0725 (Conflits) + 0,6612 T = - 4,1 T = 1,7 T = 16,7 R2 = 0,85 - DW = 2,3 Conflits = nombre de journées perdues pour faits de grève Cette réaction, issue des travaux antérieurs [3], [9] donne malgré son caractère un peu incomplet des indications intéressantes : aspect contracyclique très marqué de l'évolution de W/pY et influence de l'état du «rapport de force» (graphique IX ter).

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Page 22: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Hausse de la rentabilité en France et au Japon jusqu'en 1969, baisse ailleurs

Au Japon et en France, les taux de profit sont croissants entre 1953 et 1969, le mouvement étant beaucoup plus prononcé au Japon : dans ce dernier pays, le taux de profit brut avant impôt, avant distribution passe environ de 20% à près de 32 % dans le secteur privé non agricole; des périodes de pause, voir de baisse, s'observent, bien entendu, en liaison avec les «cycles de suraccumulation», particulièrement dans l'industrie où les évolutions sont plus heurtées. En France, le taux de profit avant impôt, avant distribution, croît de 7,8 % en 1 954 à 1 1 ,1 % en 1 969 pour les entreprises non agricoles ; il en est de même pour le taux de profit retenu (Aut/p_, K) dont la croissance entre les mêmes dates est nettement plus soutenue (de 6,3% à 10,1 %), phénomène qui reflète les effets à la fois de la politique de distribution des profits et des transferts Etat-entreprises (graphiques 10).

Dans ces deux pays on doit souligner que ce mouvement de croissance des taux de profit paraît prendre fin en 1969: en France, l'indicateur de rentabilité avant impôt baisse de 11.1% à 7,6% en 1975; la chute étant plus forte encore si l'on déduit les appréciations sur stocks. Un retournement paraît également se produire au Japon en 1968-1969 mais l'on ne peut que regretter l'absence, pour ce pays, de séries de capital allant au-delà de 1 970.

Graphiques X: Taux de profit

32 31 30 29 28 27 26 25 2* 23 22 21 20

Japon

secteur industriel

-^— * = taux de profit avant impôt avant distribution - — — — Aut/p-1 K = taux de profit retenu (Aut-As)/p-1 K = taux de profit retenu hors appréciation sur stocks

entreprises non agricoles France

. ... 1 . !

Allemagne

_ i j. 1950

Etats-Unis

t avec ajustement de stocks n sans ajustement de stocks Aut/p-1 K

L I L 1950 i ■ i ■ ■ .••!••;•'. . . I

I960

taux de profit ' net sans ajustement de stock . taux de profit ' net avec ajustement de stock

1975

.... I .... ''I--;"!'. ■ I 1970 1975

Grande-Bretagne entreprises non agricoles

. ... I ........ I .... I

— — — n corrigé de la réévaluation des tocks

1970 1975

24

Page 23: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Ces premiè. es constatations devraient être prolongées par une analyse sectorielle plus fine : ainsi, en France, la rentabilité nominale est sensiblement différente suivant les secteurs, les secteurs les plus efficients et les plus moteurs n'étant pas les plus rentables (le palmarès revenant, sur ce point, aux Bâtiments- travaux publics et aux Commerces, suivis par les industries de biens de consommation et d'équipement [6]. Il n'en demeure pas moins que le trait caractéristique essentiel en France et au Japon est la croissance des taux de rentabilité nominale de 1953 à 1969. Dans les autres économies étudiées, on n'observe pas, en effet, le même phénomène.

En Allemagne le taux de profit brut in) après s'être maintenu aux alentours de 13% de 1955 à 1960 connaît jusqu'en 1 974 une baisse prononcée à peine interrompue durant les périodes d'expansion.

Aux Etats-Unis, les différents indicateurs de rentabilité utilisés présentent une tendance nettement décroissante de 1950 à 1974, avec, cependant, des périodes de restauration plus ou moins notables : 1955, 1961 à 1966, 1972-1973. Pour les secteurs privé et privé non agricole, le taux de profit brut (avant impôt, avant distribution) décroît de plus de 28% en 1950 à environ 17% en 1974. La prise en compte des ajustements de stocks apporte des corrections non négligeables en période inflationniste (années soixante-dix) mais ne modifie pas d'une manière radicale les jugements que l'on peut porter sur l'évolution de la rentabilité à moyen terme. C'est pourquoi, on s'est principalement attaché à l'étude du taux de profit brut avant impôt, avant distribution et sans ajustement de stocks. La tendance décroissante des taux de rentabilité aux Etats-Unis avait déjà été analysée dans de précédentes études : voir notamment C. Goux [8], Monique Fouet [7] et M. Aglietta [1]. Il est à noter que si l'on se restreint à une notion de taux de profit brut retenu (après impôt, après distribution) la tendance décroissante disparaît entre 1950 et 1973 dans le secteur privé pour laisser place à des oscillations en phase avec celles de la production, autour d'une valeur moyenne de 9,5%. Cette constatation permet de penser que la fiscalité et la politique de distribution des profits exercent des effets de stabilisation importants.

Remarquons, d'autre part, que les taux de rentabilité aux Etats-Unis sont calculés en incorporant les profits rapatriés des filiales étrangères qui représentent une somme importante: ainsi, à titre d'exemple [2], de 1946 à 1970 les revenus rapatriés et provenant d'investissements à l'étranger se sont élevés en montants cumulés à 101 milliards de dollars soit, au total, 7,8% de l'ensemble cumulé des profits avant impôt, avant distribution des sociétés américaines.

En Grande-Bretagne, les taux de profits bruts avant impôt sont faibles et décroissants de 1956 à 1972 (malgré quelques brèves périodes de redressement durant les phases d'expansion); ils passent en moyenne de 12% en 1956 à 6,5% en 1972 (4,9% si raisonne hors ajustement sur stocks). On peut noter qu'en Angleterre également, la fiscalité et les subventions sont intervenues pour atténuer la baisse des taux de profit: ainsi, pour les seules entreprises privées, le taux de profit brut avant impôt (moins ajustements de stocks) chute de 17,2% à 6,4% entre 1955 et 1972; après impôt et après

tion d'investissements, il ne passe plus que de 13% en 1 956 à 9,8 % en 1 972 (Y. Barou [3]. Pour comprendre comment s'articulent comptablement le partage salaires-profits, la rentabilité et la productivité du capital, il est nécessaire d'examiner maintenant la manière dont intervient le jeu du prix relatif des biens d'équipement.

La baisse du prix relatif des biens d'équipement ne se produit pas dans tous les pays

Au Japon, le prix relatif des investissements par rapport au niveau général des prix (p^/p) part, sans doute, d'un niveau élevé en 1952 à m suite de la guerre de Corée et ne fait pas apparaître de tendances marquées jusqu'en 1957. Le trait le plus caractéristique est la chute de Pi</p entre 1957 et 1972 qui passe de 130 environ à moins de 75 (base 100 en 1965). En France, une évolution de même nature s'observe mais dans des proportions beaucoup plus modestes; on note de plus que la baisse de P«/p est assez irrégulière et se fait à partir d'un point haut (en 1952) consécutif à la guerre de Corée. Il est intéressant de relever qu'une telle tendance ne s'observe pas en Allemagne; au contraire, sur la période 1955-1974 p^/p est croissant en moyenne avec des périodes de baisse sensible (1967-68, 1974) correspondant aux phases de récession suivies de reprise (graphiques 1 1 page suivante).

Le fait que le prix des biens d'équipement augmente en Allemagne plus rapidement que le niveau général des prix a un effet négatif sur la rentabilité nominale (à répartition des revenus et à productivité du capital inchangée). A l'opposé, il est frappant de constater que la baisse de p^/p s'accentue en 1960 au Japon et en 1965 en France, précisément aux dates où on observe au niveau global un retournement à la baisse de la productivité du capital. Ce jeu des prix relatifs a bien pour effet, en France et au Japon, de redresser la rentabilité du capital alors même que les «conditions physiques de la croissance» se détériorent.

Il faut, cependant, se garder d'une explication trop mécaniste qui ferait des entreprises des agents tous puissants dans ce domaine: la fiscalité peut venir moduler l'évolution des prix relatifs ; les réévaluations successives du deutsch-mark ont pu avoir une influence sensible dans le cas de l'Allemagne. Plus fondamentalement, la structure des prix relatifs recouvre, sans doute, une dynamique sectorielle complexe et reflète certaines caractéristiques structurelles des systèmes productifs: ainsi, la hausse (ou la non détérioration) de p^/p en Allemagne consacrerait la relative domination des entreprises productrices des biens d'équipement sur l'ensemble

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Page 24: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Graphiques XI : Prix relatif des investissements (p/k/p) 130 125 120 115 110 105 100 95 90 85 80

Japon

115 110 105 100 95 90

France

102 100 98 96 94 92 90

1970 1975

Allemagne Allemagne

Etats-Unis 100 98 96 94 92 90 1970 1975

de l'économie (et ceci depuis une période datant des années 1935-1945). En sens inverse, les machines seraient davantage perçues en tant que « coûts d'équipement» en France et au Japon : l'émergence progressive du secteur des biens d'équipement comme «secteur moteur» de l'économie serait un phénomène plus récent dans ces deux pays.

Remarquons enfin qu'aux Etats-Unis P|//p augmente de 1950 à 1960 pour se stabiliser ensuite jusqu'en 1972 avec, semble-t-il, l'amorce d'une baisse en 1974.

Une articulation comptable entre part salariale, productivité et rentabilité du capital

On s'appuie, pour cela, sur l'équation comptable de base. Voir sur ce point M. Bénard [6].

Y - W* Taux de profit = fi =■

Dans les lignes qui suivent une analyse plus systématique aurait dû être faite en matière de fiscalité et de transferts Etat-entreprises pour mieux relier entre elles les différentes notions de «profit». Nous nous sommes, en fait, limité à quelques remarques ponctuelles pour la France, l'Angleterre et les Etats- Unis, montrant comment la fiscalité avait pu être utilisée pour atténuer la baisse des taux de rentabilité. Au Japon, la hausse de Y/K associée à une baisse rapide de W*/pY a créé un contexte propre à une croissance des taux de rentabilité durant les années cinquante; à partir de 1960, au contraire, la dégradation des conditions de mise en valeur physique du capital accompagnée d'un ralentissement puis d'un arrêt de la baisse de W*/pY ont rendu plus difficile la réalisation de taux de profit croissants malgré le jeu des prix relatifs. Enfin, depuis 1970, la hausse sensible de W*/pY et la poursuite de la dégradation de Y/K n'ont fait qu'accroître les tensions au niveau du partage du produit.

Des traits assez semblables se dégagent dans le cas de la France: la baisse de la productivité du capital est «compensée» à partir de 1965 par une diminution de W*/pY et par le mécanisme des prix relatifs (et ceci d'autant plus aisément que la diminution de Y/K ne se fera sentir qu'en 1 970 dans le secteur des biens d'équipement). Là aussi, les années 1969-1970 marquent un tournant avec le relèvement de W*/pY et l'aggravation de la baisse de la productivité du capital qui induisent une baisse de la rentabilité du capital et des tensions croissantes au niveau de la répartition.

Aux Etats-Unis, les évolutions apparaissent moins linéaires dans la mesure où la grande expansion 1960-1966 est à l'origine d'un renversement intéressant. La baisse de la rentabilité au cours des années cinquante s'explique principalement par une tendance à l'augmentation de W*/pY et par une baisse de la productivité physique du capital (ainsi que par une augmentation du prix relatif des biens d'équipement). Les années 1959-1960 constituent un tournant d'un triple point de vue: les conditions de mise en valeur physique du capital s'améliorent, la part salariale connaît une baisse importante et

/ commence à décroître. Le redressement de la rentabilité ne dure néanmoins que jusqu'en 1 966 puisqu'on observe, à cette date, un nouveau renversement des tendances précédentes; il en résulte, là- aussi, des tensions croissantes au niveau du par-

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tage du produit. On doit cependant souligner que, à la différence des autres pays étudiés, une amélioration sensible se dessine de 1971 à 1973 tant en matière de productivité que de rentabilité du capital (les conjoncturistes avaient d'ailleurs relevé, à cette époque, une nette atténuation des tensions inflationnistes aux Etats-Unis). Cette pause ne semble avoir été que de courte durée puisqu'en 1974- 75 la crise s'approfondit à nouveau.

En Allemagne, la baisse assez régulière du taux de profit depuis 1960 s'explique à titre principal par celle de la productivité du capital. Durant les périodes d'expansion, la stabilisation, voire le redressement des niveaux de rentabilité, sont cependant facilités par la baisse de W*/pY. Comme cela a déjà été signalé, le jeu des prix relatifs n'intervient pas pour redresser les taux de rentabilité. Enfin, la très forte hausse de la part salariale de 1971 à 1974 accélère la chute des taux de profit et des tensions croissantes au niveau de la répartition peuvent également être relevés dans ce pays.

Pour la Grande-Bretagne, nous n'avons pas présenté un ensemble complet de séries ; la très forte poussée de la part salariale, la baisse rapide des taux de rentabilité et l'accélération de l'inflation permettent cependant de se faire une idée sur les fortes tensions qui, là aussi, doivent exister.

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Page 26: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Endettement, rentabilité et accumulation

du capital : deux liaisons croisées

Les analyses précédentes ont permis de dégager les principales caractéristiques macroéconomiques concernant l'évolution des conditions physiques de la croissance, de la rentabilité et de l'accumul

ation du capital ; des mécanismes explicitant l'évolution de la productivité et les modalités du partage salaires-profits ont pu être esquissés et l'on a montré comment des tensions accrues semblaient apparaître ■ au niveau du partage des revenus. Il convient, maintenant, de pousser plus loin l'analyse, d'une part, en dégageant les facteurs explicatifs du taux d'accumulation ; l'accent sera mis, non seulement, sur les taux de profit présent et escompté mais, plus généralement, sur les conditions de financement et sur la structure d'endettement des entreprises qui, dans tous les pays, s'est profondément modifiée au cours des vingt dernières années. D'autre part, on recherchera quelles peuvent être les lois de formation du profit, approche qui complétera l'analyse de la répartition des revenus appréhendés jusqu'ici seulement en terme de part salariale.

Les taux de profit comme déterminant principal du rythme d'accumulation

La liaison taux d'accumulation - taux de rentabilité s'est trouvée vérifiée avec une grande robustesse dans tous les pays étudiés. Elle renvoie à une détermination des investissements des entreprises qui — bien que très «classique» — est rarement utilisée sous cette forme au plan macroéconomique ; les taux de profit présent et passé sont considérés comme des indicateurs, à la fois, de la rentabilité attendue du capital et des possibilités de financement interne. Un aspect dynamique est introduit puisque le taux de profit intervient souvent avec un décalage d'un an et dans tous les cas sous la forme d'un « accélérateur de profit».

Suivant les économies et suivant le champ retenu, les spécifications peuvent présenter quelques particularités: ainsi, aux Etats-Unis et en France, il est apparu utile de faire intervenir une notion de «taux de profit retenu» Aut/p.., K, après impôt, après distribution) conjointement ou non avec une notion de

taux de profit au sens habituel (17, avant impôts directs, avant distribution) ; mais, dans tous les cas, le taux de profit apparaît bien comme le déterminant essentiel du rythme d'accumulation. Une remarque doit être faite en ce qui concerne le Japon : dans ce dernier pays, l'importance des vagues de suraccumulation a déjà été soulignée; les effets de celles-ci peuvent être prises en compte d'une manière sans doute trop simpliste à travers une sensibilité du taux d'accumulation à la productivité apparente du capital (Y/K).

6 - La liaison accumulation-rentabilité: les estimations économétriques japon Secteur privé : 1957-70 A (pl/p , K) = 0,91 An - 0.45 A2 n + 0,40 A Y/K T = 4,0 T = - 2,0 T = 3,4 R2 = 0,70 - DW = 2,34 Secteur industriel : 1957-70 A (pl/p,, K) = 1,31 A n - 0,41 A2 7i+ 0,30 A Y/K T = 6,0 « = - 2,5 T = 3,1 R2 = 0,86 - DW = 2,16 La qualité des ajustements est sensiblement améliorée en prenant en compte la productivité du capital; celle-ci diminue à la suite des vagues de suraccumulation, ce qui rend nécessaire des phases de répit dans le développement des investissements (Les ajustements ci-dessus sont donnés en différences premières: AGX = Gt - Gt_, A2Gt = (G, - Gt_,) - (G,., - Gt_2) France (Entreprises non agricoles) 1953-1972 A (pl/p , K) = 1,16 A (Aut/p., K) + 0,73 A2 <Aut/p_, K) T = 6,0 T = 5,0 R2 = 0,66 - DW = 1,21 Allemagne (Secteur privé) 1958-74 A (pl/p , K) = 0,84 A n , - 0,53 A2 n T = 4,0 T = 3,4 R2 = 0,64 DW = 0,95 Etats-Unis (Secteur privé) 1951-66 pl/p , K = 0,20 7i+ 0,81 (Aut/p , K)_, - 0,038 T = 6,6 T = 6,7 T = - 3,2 R2 = 0,90 1951-73 pl/p_, K = 0,07 n + 0,73 (Aut/p , K)_, T = 1,6 T = 6,5 R2 = 0,45 - DW = 0,70 Deux périodes d'ajustement sont données pour les Etats-Unis car la qualité de la régression se dégrade fortement au delà de 1966 , ceci recouvre, on le verra, une rupture très significative au niveau des conditions de financement de l'accumulation aux Etats-Unis Grande-Bretagne (entreprises non agricoles) 1957-72 pl/p , K = 0,35 n - 0,31 A 7t+ 0,0172 T = 7,2 T = - 3,3 T = - 3,6 R2 = 0,89 - DW = 1 ,2 Cette relation est tirée des travaux précédents (3), (9)

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Cette première liaison entre accumulation et rentabilité, même si elle est essentielle, ne peut rendre compte à elle seule du rythme très soutenu, auquel ont crû les investissements dans la plupart des pays. Les crédits et, plus généralement, les possibilités de financement externe, sont intervenus d'une manière très active; la structure financière des entreprises s'est trouvée par là même sensiblement détériorée.

Un phénomène général: la dégradation de la structure d'endettement des entreprises

Les différents pays étudiés présentent une analogie frappante en matière de structure d'endettement des entreprises : celle-ci s'est, au cours de la période passée, détériorée dans des proportions plus ou moins importantes. Derrière cette première constatation très globale une analyse plus fine est nécessaire. Il convient, tout d'abord, de distinguer structure d'endettement «en termes de bilan» (Dettes/p,, K) rapprochant un encours d'endettement et un stock de capital mesuré au coût de renouvellement) et structure d'endettement «en termes de durée de remboursement» (Dettes/Aut ou Dettes/profit rapprochant un encours d'endettement et un flux d'autofinancement ou de profit).

Le ratio Dettes/p., K est croissant d'une manière assez continue entre 1950 et 1974 au Japon, en France, en Allemagne et aux Etats-Unis. On observe cependant des nuances entre les différents pays : au Japon et aux Etats-Unis cette croissance s'accélère et devient plus régulière au début des années soixante; en Allemagne, l'évolution de ce ratio est plus continue et en France une pause semble se dessiner depuis 1969 (graphiques 12).

L'interprétation de ce ratio d'endettement est cependant délicate, en particulier dans la mesure où le capital est estimé au coût de renouvellement; en cela, il s'écarte sensiblement des ratios d'analyse financière utilisés au niveau des données individuelles d'entreprises. Dans le cas de la France, l'utilisation d'une série de capital au coût d'acquisition livre une appréciation différente sur la structure d'endettement des entreprises en terme de bilan : le ratio en cours d'endettement sur capital au coût d'acquisition apparaît remarquablement stable en France de 1955 à 1974 (mais se situe bien entendu à un niveau plus élevé). C'est donc avec une certaine prudence qu'il faut considérer les ratios de structure de bilan utilisés dans cet article; ils paraissent néanmoins recouvrir un alourdissement de la structure financière des entreprises que d'autres études ont déjà mis en évidence, notamment au Japon et aux Etats-Unis (C. Sautter [15], M. Aglietta [1], J. Putois [14], Monique Fouet [7].

Graphiques XII: indicateur d'endettement des entreprises «en termes de bilan» (dettes/p ,K)

150 140 130 120 110 100 90 80 70 60 50 I ■ .

sociétés privées Japon

I ■ ■ . ■ I ■ ■ ■ ■ i

France ensemble des entreprises

PAS/p-1 K Dettes/p-1 K

I i , i , , I , , , i 1955 1960 1965 1970 1975

Allemagne

secteur privé Etats-Unis

i . . . i 1975

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Page 28: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Quelques enseignements peuvent enfin être tirés des comparaisons de niveaux d'endettement observés dans les différents pays, malgré les réserves que doit susciter l'hétérogénéité des séries utilisées. Le ratio Dettes/p_.,K paraît, en effet, atteindre des niveaux très élevés au Japon: il passe de 60% en 1954 à 140% en 1970 alors qu'il débute seulement à 20% pour atteindre 40% environ en Allemagne et en France et qu'aux Etats-Unis il croît de 50% à 90%. Ces observations incitent à penser que l'endettement des entreprises japonaises est beaucoup plus massif que celui de leurs homologues françaises, américaines ou allemandes, ce qui paraît confirmé par l'étude des données individuelles d'entreprises. L'information supplémentaire qu'apportent les séries utilisées dans cette étude est qu'en dépit d'un niveau de départ très élevé la structure de bilan des entreprises japonaises n'a cessé de s'alourdir sur une période assez longue.

Les structures d'endettement en «termes de durée de remboursement» (Dettes/Aut) ont également cru dans les différents pays au cours de la période passée. Des nuances assez sensibles se dégagent pourtant d'un pays à l'autre (Graphiques 1 3).

Aux Etats-Unis et en Allemagne les ratios Dettes/ Profit augmentent d'une manière continue avec une très nette accélération aux Etats-Unis à partir de 1965 (et une certaine stabilisation depuis 1970). Ces ratios sont également croissants en tendance au Japon et en France mais l'on relève des améliorations sensibles (c'est-à-dire des baisses de Dettes/ Profit) durant les phases d'expansion et donc de croissance du profit (1958-59, 1960-61, 1966-69 pour le Japon; 1960,. 1963-64. 1966. 1969, 1973, pour la France). Enfin, il semble qu'en France, au Japon et peut-être aux Etats-Unis la durée de remboursement ait atteint une sorte de plafond supérieur au début des années soixante-dix. Mais les données pour 1974 et 1975 remettraient peut-être en cause cette observation provisoire. Enfin, l'examen des niveaux atteints par le ratio Dettes/Profits dans les économies étudiées confirme s'il en était besoin, la particularité du Japon (toujours avec les mêmes réserves que précédemment) : la « durée de remboursement» culmine à moins de 5 ans aux Etats-Unis en 1970, à 3,5 ans en Allemagne en 1974, à 4,4 en France en 1973 mais s'élève à près de 7,4 ans au Japon en 1965 (il est vrai que de 1966 à 1970 une amélioration très sensible s'est dessinée dans ce dernier pays).

Au-delà des différences souvent notables qui ont été relevées entre les pays étudiés, on peut avancer que, dans l'ensemble, les entreprises des grands pays occidentaux ont vu leur structure financière s'alourdir dans des proportions importantes au cours des vingt dernières années. Pour mieux en mesurer la portée, cette évolution devrait être rapprochée des transformations souvent récentes subies par la plupart des systèmes bancaires occidentaux, notamment aux Etats-Unis, en France et en Angleterre ; dans ces pays des liaisons plus étroites entre banques et entreprises semblent, en particulier, se développer. Ce recours accru à l'endettement a, dans bien des cas, constitué une tentative de réponse de la part des entreprises face à la dégradation de la productivité et de la rentabilité du capital. Le simple examen des graphiques est, de ce point de vue, très instructif:

Graphiques XIII: Structure d'endettement des entreprises en termes de capacité de remboursement (Dettes/profit)

4.4 4.2 4 3.8 3.6 3.4 3.2 3 2» 2j6

35 30 2,5 20 15 1.0

5 45 4 35 3 25 2 1,5

10 9,5 9 85 8 7,5 7 6£ 6 55 5

sociétés privées Japon

I I , I I ,,1,1,1 I

ensemble des entreprises France

PAS/Aut

, , , , I , , i i I ■ ■ ■ ,

secteur privé

Dettes/profit brut secteur privé

Dettes/Aut secteur privé

1970 1975

Allemagne

T ■ I .... i .... i .... i

Etats-Unis

. i

I , 1 ■ ■ I ■ ■ , ■ I ■ ■ ■ ■ I ■ ■ ■ ■ I

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en France, et surtout au Japon, les vagues successives d'accumulation ont, pour une large part, été financées sur des fonds externes; en Allemagne, le recours à l'endettement a été constamment utilisé pour relancer l'accumulation face à un taux de profit en baisse; aux Etats-Unis enfin la rupture apparaît très nette en 1965.

Le financement externe comme soutien de l'accumulation

Si les crédits jouent un rôle majeur dans le soutien de l'accumulation dans tous les pays, ils interviennent suivant des modalités différentes d'une économie à l'autre.

Au Japon, les entreprises sont très fortement endettées et, de ce point de vue, les crédits constituent un moyen de financement complémentaire essentiel à côté d'un autofinancement relativement modeste. Cependant, lorsque la capacité de remboursement des entreprises est trop dégradée, celles-ci sont contraintes de limiter leur appel aux fonds externes : d'un point de vue économétrique ceci se traduit par un effet négatif de la structure d'endettement sur le taux d'accumulation. Autrement dit, le système financier japonais, particulièrement sous l'impulsion de la Banque centrale, bien qu'autorisant un endettement massif, paraît exercer des contraintes sur le rythme d'accumulation. Ce résultat est intéressant car il diffère de ce que l'on observe dans d'autres économies et on aurait pu intuitivement attendre le contraire.

Ainsi, en France, où les taux d'autofinancement sont «moyens», bien que plus élevés qu'au Japon, la structure d'endettement, également en terme de durée de remboursement, influence positivement le taux d'accumulation et ceci d'une manière importante et très significative. Un financement externe accru joue donc un rôle de relais actif et permet de soutenir le rythme d'investissement. Un phénomène analogue peut être relevé en Allemagne, bien que l'endettement semble y intervenir dans des proportions plus limitées qu'en France.

Le cas des Etats-Unis doit être nettement distingué : jusqu'en 1965, en effet, les entreprises américaines n'avaient guère recours au financement externe pour développer leurs investissements (sur la période 1951-1966 la structure d'endettement ne joue pas d'une manière significative ou exerce une contrainte négative sur le taux d'accumulation et ce dernier s'explique aisément à partir des seuls taux de profit

présent et passé). Depuis 1965, au contraire, les entreprises américaines ont dû, face à la dégradation de leur rentabilité, avoir recours d'une manière accrue à l'endettement pour poursuivre leur accumulation : d'un point de vue économétrique la rupture apparaît très nettement puisque, sur l'ensemble de la période 1951-1973, la structure d'endettement intervient maintenant d'une manière positive et très significative, que ce soit en «termes de bilan» ou de «durée de remboursement».

En ce qui concerne la période récente (1970-1975) il semble que la baisse des taux d'accumulation qui s'observe actuellement dans tous les pays puisse s'expliquer à la fois par la chute des taux de rentabilité observés et escomptés et par le degré très élevé de l'endettement des entreprises qui appelle une période de stabilisation et interdit un nouveau recours massif au financement externe.

Pour conclure sur la relation investissement-financement externe, il est intéressant d'observer que, pour les quatre pays étudiés, on a débouché sur des formulations où l'influence de l'endettement se fait en terme de volume de crédit et de structure financière des entreprises. L'influence des variables monétaires sur l'investissement ne doit pas pour autant être réduite à ces seuls mécanismes et il est probable que dans les économies où le rationnement du crédit est moins marqué (Etats-Unis, Allemagne) les entreprises sont également sensibles au coût du crédit; de même le poids des charges financières intervient au niveau de la formation du profit. Il n'en demeure pas moins qu'au delà des spécificités des différents pays, il est assez satisfaisant d'avoir pu retrouver des relations d'accumulation se rattachant à un même type de mécanisme. Cette étude de l'investissement des entreprises, où la rentabilité du capital associée aux possibilités d'endettement joue un rôle essentiel, appelle une analyse complémentaire. Quels sont, en sens inverse, les facteurs explicatifs de cette rentabilité? Peut-on expliciter des lois de formation du profit?

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7 - La liaison accumulation-rentabilité-endettement: les estimations économétriques L'étude de l'effet de l'endettement sur l'investissement ne peut être menée que sur un champ assez large (secteur privé en général) par suite de contraintes statistiques; on constate une amélioration sensible par rapport aux estimations précédentes où seuls les taux de profit intervenaient comme variable explicative Japon (secteur privé) 1956-70 A (pl/p_, K) = 0,64 A n - 0,57 A2 n - 0,06 A (Dettes Prof.L,

T = 2,6 T = 2,5 T = - 1,8 + 0,45 A (Y/K) T = 2,5 R2 = 0,79 - DW = 1,65 France (entreprises non agricoles) 1953-72 A (pl/p_, K) = 1,67 A (Aut/p , K) , + 1,41 A2 (Aut/p , K) T = 10,4 T = 9,1 + 1,64 A (PAS/AUT) T = 5,4 R2 = 0,86 - DW = 1,64 PAS = ensemble du passif, en encours = Dettes + obligations + actions Allemagne (secteur privé) 1958-74 A (pl/p_, K) = 0,62 A n - 0,33 A2 n + 0,33 A (Cred/p , K) T = 4,7 T = - 2,5 T = 2,8 R2 = 0,67 - DW = 1,21 Cred = ensemble des encours de crédits à l'économie La structure d'endettement «en termes de bilan» ne donne pas des résultats très significatifs au Japon et en France, les entreprises semblent plus sensibles à la «capacité de remboursement» En Allemagne, on observe un phénomène inverse, l'indicateur de structure financière des entreprises utilisé étant, il est vrai, très sommaire dans ce dernier cas Etats-Unis (Secteur privé) 1951-66 pl/p , K = 0,233 n+ 0,564 (Aut/p ,K),+ 0,034 (Dettes/p , K) , T = 6,6 T = 2,8 T = 1,5 - 0,041 T = - 3,5 R2 = 0,91 - DW = 2,13 1951-73 pl/p , K = 0,254 T = 8,8 - 0,037 T = - 4,2 R2 = 0,91 - DW = 1,60

0,297 (Aut/p_, K)+ 0,065 (Dettes/p , K)_, T = 3,4 T = 10,1

Des résultats aussi significatifs sont obtenus en utilisant la «capacité de remboursement» Dans les deux cas on vérifie que si l'influence de la rentabilité varie peu entre les deux périodes retenues, le rôle de l'endettement devient à partir de 1966 beaucoup plus décisif comme soutien de l'accumulation (à la fois en grandeur et en caractère significatif) (1952-66) pl/p_, K = 1,30 (Aut/p , KL, + 0,69 A (Aut/p , K) T = 10,9 T = 5,1 - 0,008 (Dettes/Prof.) - 0,022 T = - 4,0 T = - 2,0 R2 = 0,92 - DW = 2,40 (1952-73) pl/p., K = 0,90 (Aut/p , K) , + 0,20 A (Aut/p , K) T = 5,4 T = 1 ,0 + 0,004 (Dettes/Prof.) - 0,014 T = 3,1 T = - 0,8 R2 = 0,66 - DW = 0,89 Cette spécification ne retenant que le seul autofinancement comme indicateur de profit donne des résultats légèrement moins bons mais met en évidence un phénomène intéressant qui rejoint les observations précédentes: sur la période 1952-1966, c'est-à-dire avant la forte dégradation de la structure financière des entreprises américaines, la «durée de remboursement» Dettes/Profits intervient avec un signe négatif dans la détermination du taux d'accumulation. Les contraintes imposées par le système bancaire apparaissent donc fortes et, face à un alourdissement de la structure d'endettement, les entreprises doivent réduire leurs investissements. Il est intéressant de noter que ce phénomène semble disparaître à partir de la seconde moitié des années soixante, ce qui pourrait traduire une modification de l'état des rapports banques-entreprises.

La formation du profit et les conditions de mise en valeur physique du capital

La formation du profit ne donne en général pas lieu à une étude explicite: dans de nombreux schémas macroéconomiques on se contente d'une détermination du profit par solde à partir de l'étude d'une part de la demande en valeur, d'autre part de la masse salariale et des autres revenus redistribués; en contrepartie le niveau général des prix donne lieu à une équation spécifique où divers facteurs explicatifs du taux d'inflation sont retenus (coûts salariaux unitaires, pression de la demande, prix des produits importés, etc.). La démarche inverse peut s'avérer tout aussi, sinon plus, fructueuse et c'est celle qui est suivie dans la présente étude : renonçant à l'équation de prix, ce sont les facteurs explicatifs de la formation du profit que l'on s'efforce de décrire directement replaçant de la sorte le profit au cœur de l'analyse. L'étude de la répartition des revenus, appréhendée jusqu'ici en terme de part salariale, se trouve ainsi complétée : les deux pôles salaires et profits sont déterminés simultanément par deux relations distinctes ; le niveau général des prix résulte alors d'une détermination implicite qui peut livrer une explication plus synthétique des facteurs de l'inflation. Sur cette question, on pourra se reporter à [4], [12] ; un exemple récent se trouve également dans [5]. L'étude des lois de formation du profit n'en est cependant qu'à ses débuts et les formulations proposées présentent encore un caractère exploratoire.

Une première idée directrice se dégage tout d'abord : le taux de rentabilité attendu est le déterminant essentiel du rythme d'accumulation et, une fois le capital accumulé, les entreprises cherchent à atteindre ce taux de profit escompté mais elles ne sont nullement assurées d'y parvenir: tout dépend de l'état des débouchés, le profit ne pouvant se réaliser qu'à travers la vente effective des marchandises. La formation du taux de profit est ainsi reliée d'une part au niveau de rentabilité, attendu et recherché par les entreprises, d'autre part à l'état des débouchés et aux conditions de mise en valeur physique du capital qui peuvent être appréhendées en première approximation à l'aide de la productivité apparente du capital (Y/K) ou simplement de la production en volume (Y). Cette première relation, relation profit-croissance au sens strict, est vérifiée pour tous les pays étudiés dans des conditions satisfaisantes, à l'exception peut être du Japon où elle apparaît moins nette (sans doute en raison de l'ampleur des phénomènes de suraccumulation dans ce dernier pays).

Les efforts qui ont été tentés pour compléter les lois de formation du profit ont par contre donné des résultats plus inégaux d'un pays à l'autre. Au Japon, en France et aux Etats-Unis, il a été possible de mettre en évidence l'influence d'un endettement accru dans le redressement du taux de profit; les

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8 - La formation du profit: les estimations économétriques La réalisation du profit apparaît liée aux conditions de mise en valeur physique du capital (relation profit-croissance au sens strict), le cas du Japon étant le moins favorable particulièrement pour le secteur industriel , les estimations sont données en différence première Japon (secteur privé non agricole) 1954-70 A n = 0,274 Y - 0,024

T = 4,6 T = - 3,1 R2 = 0,54 - DW = 1,75 (Secteur industriel) 1954-70 A n = 0,069 Y T = 2,0 R2 = 0,21 - DW = 2.30 France (entreprises non agricoles) 1953-72 A (Aut/p , K) = 0,29 Y - 0,0158 T = 5,2 T = - 4,7 R2 = 0,64 - DW = 1,97 Allemagne (secteur privé) 1957-74 A n = 0,63 A Y/K T = 7,2 R2 = 0,72 - DW = 1,5 Etats-Unis (Secteur privé; des ajustements très proches sont obtenus pour le secteur privé non agricole) (1951-73) A n = 0,63 A (Y/K) - 0,0036

T = 7,1 T = - 1,9 R2 = 0,70 - DW = 1,60 L'influence de la structure d'endettement passée apparaît significative au Japon, en France et aux Etats-Unis Japon (secteur privé) 1956-70 A n = 0,24 Y + 0,004 (Dettes/Profit) , - 0,045 T = 3,8 T = 1,6 T = - 2,9 R2 = 0,63 - DW = 2,2 France (entreprises non agricoles) 1 953-72 A (Aut/p , K) = 0,24 A (Y/K) + 0,01 1 (PAS/Aut)_, - 0,006 T = 5,9 T = 5,5 T= - 5,6 R2 = 0,83 - DW = 1,24 Etats-Unis (secteur privé) 1951-73 A n - 0,62 A (Y/K) + 0,004 (Dettes/Profit)., - 0,016 T= 7,4 T = 2,0 T = - 2,5 R2 = 0,75 - DW = 1,91 Une réaction des entreprises face à une dégradation de leur taux de profit ou face à une accumulation excessive peut être mise en évidence en Allemagne et dans le secteur industriel japonais Allemagne (secteur privé) 1958-74 A n = 0,65 A (Y/K) - 0,32 A n , - 0,0019 T = 7,7 T = 2,4 T = 2,5 R2 = 0,81 DW = 1,1 1958-74 A n = 0,59 A (Y/K) - 0,40 A (pl/p ,K) , - 0,0016 T = 8,6 T = 3,7 T = 2,5 R2 = 0,86 DW = 1,8 Japon (secteur industriel) 1957-70 A n = 0,1 1 Y - 0,75 [A n , + A 7t_2) 2 T = 3,2 T = - 2,4 R2 = 0,49 - DW = 1,69

entreprises ont en effet recours au financement externe pour restaurer leur rentabilité ou compenser la baisse de celle-ci sur longue période et pouvoir ainsi maintenir leur rythme d'accumulation. L'alourdissement de la structure d'endettement va alors exercer une influence positive sur la formation du profit et ceci de plusieurs manières: d'une part, assez mécaniquement en permettant par le jeu de l'« effet levier» d'améliorer la rentabilité des fonds propres (cet effet ne pouvant être saisi qu'imparfaitement avec l'indicateur de taux de profit n utilisé) ; d'autre part en fournissant aux entreprises un financement complémentaire pour mettre en place des équipements plus performants et donc plus productifs; enfin en incitant les entreprises à faire des efforts pour tenter de redresser leur structure financière et éviter un « alourdissement» trop marqué de celle-ci.

Par ailleurs, on a cherché à décrire plus directement une réaction des entreprises dans le cas ou celles-ci, face à une dégradation de leurs taux de profit passés ou face à une accumulation excessive, sont poussées à restaurer leur rentabilité durant les périodes ultérieures. De ce point de vue des résultats ont été dégagés dans le cas de l'Allemagne et dans celui du secteur industriel japonais.

Malgré leur caractère encore imparfait les formulations proposées fournissent une première tentative d'explicitation des lois de formation du profit. L'étude des déterminants de l'accumulation est ainsi complétée et l'on met en évidence deux liaisons croisées entre taux de rentabilité, endettement et taux d'accumulation. La répartition des revenus est quant à elle appréhendée à travers les deux pôles, évolution de la part salariale d'une part et formation du profit d'autre part. Un schéma s'esquisse donc où une double détermination du profit est obtenue: celui-ci résulte à la fois du mécanisme de partage salaires-profits (en supposant connue la production en valeur à partir de la demande finale) et d'une relation décrivant les conditions de réalisation du profit. Une des principales variables d'ajustement de cette double détermination du profit réside dans le partage volume-prix et l'on débouche ainsi sur une explication implicite de l'inflation. Le diagramme ci-contre résume les diverses interactions qui ont été prises en compte (voir schéma p. 34).

L'ensemble de ces résultats, l'examen des spécificités et des points communs observés dans les différents pays peuvent être utilisés dans une brève conclusion pour éclairer certains aspects de la crise économique actuelle.

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Diagramme d'ensemble

endettement des entreprises

légende :

variable macroéconomique F 1

[ j

étudiée dans cet article non étudiée dans cet article

relations / N ^ décrite {) " dans c cette étude

non décrite "dans cette étude

investissements des entreprises

profits

production en volume

système financier

production en valeur „ J

! dépenses A des / 1 ménages / I

autres éléments de la demande i I

productivité du travail

I

salaires I

34

Page 33: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Quelques enseignements

pour la crise économique actuelle

Les analyses précédentes suggèrent que de fortes tensions se trouvent en germe dès le milieu des années soixante dans toutes les économies étudiées. Ces symptômes sont cependant loin de prendre le même aspect dans tous les cas. Le fait de retrouver certains mécanismes essentiels dans les différents pays (liaison taux d'accumulation - taux de rentab

ilité, partage salaires-profits, relation profit-croissance) n'implique nullement que toutes les économies se trouvent (ou tendent à se trouver) dans une situation identique. Ce que souligne au contraire cette étude, c'est que les cinq économies examinées (Japon, France, Allemagne, Etats-Unis, Grande- Bretagne) sont à des «stades de développement» sensiblement différents et affrontent par conséquent la crise avec, à terme, des possibilités d'évolution assez distinctes.

De fortes tensions semblent en germe dès le milieu des années soixante

Cette affirmation (ou cette hypothèse de travail) repose sur la convergence des phénomènes qui peuvent être observés dans chaque pays. Deux remarques préliminaires doivent d'abord être rappelées: l'objet de cet article n'est pas de donner un schéma explicatif de l'inflation ou de la stagflation contemporaine. Aussi ne faut-il pas attendre une argumentation rigoureuse dans ce sens. Tout au plus sou- haite-t-on suggérer un certain type d'enchainement et mettre l'accent sur l'importance des tensions qui se sont développées au niveau de la répartition des revenus. Par ailleurs, les précautions méthodologiques qui ont été soulignées à plusieurs reprises et qui concernent l'insuffisance des indicateurs utilisés ne doivent pas être oubliées; elles visent particulièrement les concepts de capital global qui sont retenus. Ces précautions étant prises, la lecture de ces séries passées s'avère néanmoins assez fructueuse.

Les conditions physiques de la croissance deviennent dans la plupart des cas plus défavorables au cours des années soixante : la croissance de la productivité du travail semble marquer, sur moyenne période,

une tendance au ralentissement, en Allemagne et aux Etats-Unis; cette tendance s'accentue (ou apparaît) avec le freinage de la croissance sensible depuis 1970 dans tous les pays et ce mouvement est aggravé par l'ampleur de la récession actuelle. De ce point de vue on mesure aisément les limites des déterminants proposés pour l'explication de la productivité du travail et qui correspondent aux schémas les plus couramment avancés. Ceux-ci ne nous éclairent notamment que d'une manière imparfaite sur l'évolution de la productivité depuis 1970 et sur l'interprétation que l'on doit en donner: s'agit-il, somme toute, d'un phénomène de nature «conjoncturelle» lié à la gravité de la récession ou au contraire d'un mouvement plus profond s'inscrivant dans une baisse de plus longue durée? Les quelques observations faites ci-dessus nous invitent à une réponse nuancée suivant les pays. La productivité du capital au niveau global retourne à la baisse dès 1960 au Japon et en Allemagne, dès 1965 en France; si aux Etats-Unis, elle paraît obéir à un mode de régulation plus global, elle n'en connaît pas moins une chute marquée depuis 1965 malgré le redressement des années 1972-1973.

Les problèmes de rentabilité, liés à la détérioration des conditions de mise en valeur physique du capital, débutent le plus souvent bien avant les années soixante-dix: le taux de profit présente une tendance prononcée à la baisse depuis 1955 en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, depuis 1960, en Allemagne; seule la France et le Japon ont réussi à maintenir et à faire croître leur taux de rentabilité jusqu'en 1 969- 1970. La relative spécificité de ces deux pays sera examinée plus loin ; dès maintenant il est possible, en simplifiant à l'extrême, de comprendre pourquoi les problèmes de rentabilité ont pu y être repoussés jusqu'en 1970: principalement grâce au jeu des prix relatifs et grâce à une modification du partage salaires-profits au détriment des premiers. Une baisse sensible de la part salariale a en effet été réalisée dans les années cinquante et soixante en France et surtout au Japon grâce à une profonde restructuration du système productif, à un renouvellement du capital fixe, au développement de techniques plus capitalistiques, aux gains de productivité qui en ont résulté (et, au Japon, également grâce à l'utilisation d'un abondant réservoir de main- d'œuvre).

Toujours en simplifiant, on peut avancer que les entreprises ont tenté au cours des années soixante de faire face aux difficultés rencontrées en recourant d'une manière accrue à l'endettement. La rupture sans doute la plus apparente se produit de ce point de vue aux Etats-Unis en 1965; mais, la dégradation presque continue des structures financières des entreprises des grands pays occidentaux étudiés

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est un phénomène très frappant par sa généralité. Le recours au financement externe apparaissait aux entreprises comme un moyen pour tenter de redresser (et compenser) leur taux de profit et pour poursuivre une accumulation accrue (en France et au Japon) ou maintenir un rythme d'investissements élevés (Allemagne, Etats-Unis). Cette accumulation devait à terme permettre des gains de productivité et une torsion du partage salaires-profits; mais dans l'immédiat, elle pesait sur les taux de profit.

Par ailleurs, les problèmes de rentabilité du capital se sont trouvés aggravés dans la plupart des pays par une assez forte poussée de la part des salaires dans la production depuis 1965 en Grande-Bretagne, 1967 aux Etats-Unis, 1970 en Allemagne, en France et au Japon. Trois éléments peuvent être avancés pour tenter d'expliquer la remontée de la part salariale: d'abord la baisse de la croissance de la productivité du travail qui vient d'être évoquée, puis les limites auxquelles se heurtent les recours à des techniques plus capitalistiques (France, Allemagne) et à des opérations de restructuration des secteurs traditionnels vers les secteurs modernes (France et surtout Japon) et, enfin, un rapport de force qui deviendrait plus favorable aux salariés soit en terme de «combativité» plus grande (France, Angleterre), soit en terme de «rareté de la main-d'œuvre» (Japon, Allemagne).

La présentation schématique qui vient d'être faite donne peut-être trop l'impression que des enchaînements identiques s'appliquent d'une manière uniforme aux différents pays même si l'on a pris soin de souligner les particularités caractérisant telle ou telle économie. Une explicitation plus détaillée, pays par pays, serait nécessaire de ce point de vue, la situation de la Grande-Bretagne apparaissant notamment assez spécifique. Mais cette présentation a l'avantage de souligner l'importance des tensions qui se développent au niveau de la répartition des revenus et de la rentabilisation d'un stock de capital accru. On est ainsi conduit à voir dans ces tensions l'une des origines internes du développement actuel de l'inflation, puis de celui de la stagflation.

Les analyses précédentes devraient par ailleurs être prolongées dans au moins trois directions: d'abord au niveau des concepts utilisés, les notions de rentabilité et de productivité du capital étant en particulier très ambiguës, ensuite au niveau sectoriel et au niveau des structures des systèmes productifs, de manière à mieux cerner quel a été (et quel sera) l'impact des mouvements de restructuration et à faire éclater les concepts souvent trop globaux qui ont été utilisés; enfin, au niveau d'une étude sur plus longue période afin de resituer les évolutions observées ici sur vingt ou vingt cinq ans dans une perspective historique plus large. En particulier il semble, d'après les travaux de Kuznets, que la productivité du capital ait connu alternativement dans le long terme des phases ascendantes et descendantes autour d'une valeur sensiblement constante. Ce dernier point nous amène à replacer les différents pays examinés dans le contexte de leur propre développement.

Les cinq économies étudiées se trouvent à des stades de développement sensiblement différents

Cette constatation, banale en apparence, est sans doute essentielle pour ne pas biaiser les interprétations faites dans chacun des pays. Les années 1950-1965 sont profondément marquées par les situations de départ très inégales où se trouvent les différentes économies, même si par la suite on voit se développer une relative convergence.

Le Japon apparaît, à l'évidence, bien à part et il est à peine nécessaire de rappeler ses spécifités: articulation d'un secteur moderne (acier, pétrochimie, biens d'équipement et biens de consommation durable) et de secteurs plus archaïques (dont l'agriculture) en voie de rationalisation et fournissant une main d'œuvre abondante jusque vers 1960- 1965; organisation originale du marché du travail avec la distinction entre des travailleurs privilégiés bénéficiant d'avantages importants et des travailleurs se trouvant dans une situation plus précaire; organisation d'un système de sous-traitance autour des plus grandes entreprises ; existence en en début de période d'un marché interne potentiel considérable et d'un retard technologique à combler, facteurs essentiels pour comprendre les vagues successives de suraccumulation. Les années 1970 apparaissent marquer une étape à bien des égards: «pénurie» de main-d'œuvre, limites dans les mouvements de réorganisations sectorielles, problèmes liés à l'insuffisance des équipements collectifs,... L'enjeu de la crise actuelle renvoie à l'aptitude de l'économie japonaise à faire face à ces nouvelles données. La France n'est pas sans présenter, toutes proportions gardées, certaines analogies avec le cas japonais : exode rural, présence de secteurs traditionnels et retardataires, émergence progressive à travers une lente mutation de l'industrie d'un secteur moteur (construction mécanique et électrique, automobile, chimie). Là aussi, les années 1970 représentent une étape ou un palier: ces industries motrices qui se sont renforcées depuis 1958 accélèreront-elles leur développement ou marqueront-elles le pas?

L'Allemagne se situe à un stade différent. Durant l'après-guerre et jusqu'en 1955, elle a apparemment reconstitué un prodigieux potentiel productif, concentré sur des secteurs et des techniques très performants (sidérurgie, chimie, biens d'équipement) et tirant profit de l'effort d'accumulation considérable réalisé sous le régime nazi. De 1955 à 1975 elle a bénéficié d'une incontestable supériorité. Mais les analyses précédentes suggèrent qu'elle semble converger progressivement vers une situation plus «moyenne» si l'on en juge par les évolutions de l'accumulation, de la productivité et de la rentabilité du capital. Au delà de remarquables performances actuelles, quel est son avenir? Une partie de l'appareil productif ne doit-elle pas être renou-

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velée? Ces questions, qui rejoignent les préoccupations des «planificateurs allemands», mériteraient une étude minutieuse.

Les Etats-Unis (et a fortiori la Grande-Bretagne) se trouvent à une étape nettement plus avancée : l'économie américaine, qui bénéficiait au départ d'une supériorité économique écrasante, paraît obéir à un mode de régulation beaucoup plus global, notamment si l'on se réfère à l'évolution du taux d'accumulation et de la productivité du capital. Les phénomènes d'intensification du capital et de restructuration sectorielle y interviennent d'une manière peu significative. L'économie américaine peut-elle dès lors être considérée comme une économie très développée, voisine de la saturation et qui serait relancée périodiquement par de nouvelles occasions d'investir? Se limiter en fait à l'étude de la seule économie américaine risque de conduire à des appréciations biaisées compte tenu de l'importance des firmes multinationales au niveau de la formation du profit et de la stratégie d'accumulation. De ce point de vue la Grande-Bretagne semble être dans une situation voisine mais la situation interne de l'économie britannique n'en paraît pas moins particulièrement critique, compte tenu, notamment, de l'insuffisance des investissements, elle même liée à la faiblesse des profits réalisés et attendus.

Bibliographie

Ces considérations sont bien entendu trop brèves et il convient de se garder de raisonnements trop linéaires en termes de «stades de développement à la Rostow» qui ignoreraient les interdépendances et les rapports de domination existant entre les différentes économies au niveau international. Ces analyses n'en paraissent pas moins importantes pour pouvoir porter un jugement plus précis sur la situation économique actuelle dont un reflet au plan macroéconomique a été donné dans la présente étude. En dehors des remèdes ou des palliatifs éprou

vés pour sortir ou pour supporter la crise économique (hausse des prix, endettement, fiscalité et transferts de l'Etat, main-d'œuvre immigrée, travail posté,...) les différentes économies disposeront de «ressorts» sans doute profondément distincts.

[I] M. Aglietta «Accumulation et régulation du capitalisme en longue période: l'exemple des Etats-Unis» -Thèse Paris 1(1974). [2] Banque Jordaan Bulletin d'information « les investissements directs des Etats-Unis à l'étranger» -janvier 1972 - Reproduit dans Problèmes économiques n° 1 264 (mars 1972). [3] Y. Barou - «Répartition des revenus et croissance au Royaume-Uni» note interne. Direction de la prévision, D.E.I. n° 127 (juin 1974). [4] R. Boyer, J. Mazier et G. Olive: «Un nouveau modèle de prévision macroéconomique. Star». Economie et Statistique, n° 61, novembre 1974. Statistiques et études financières - Série orange,- n° 1 974/1 5 . [5] R. Boyer, J. Mistral - «Accumulation, inflation et prix relatifs depuis 1968» - Economie et Statistiques n° 77 (avril 1974). [6] Division Etude des Entreprises Inséé - «La Fresque Historique du Système Productif»- Collections de l'Inséé E 27 ; Economie et Statistique, octobre 1974 ; Economie et Statistique, «Spécial Redéploiement», juin 1975. «La mutation industrielle de la France» - Collections de l'Inséé, 31-32, (1975). [7] Monique Fouet. « Croissance et répartition de la valeur ajoutée aux Usa» - Statistiques et Etudes financières n° 1975/20 - «Inflation et endettement des entreprises aux Usa». Note interne. Direction de la Prévision, Dei - n° 135 (juillet 75). [s] C. Goux - «La rentabilité du capital aux Etats-Unis» - Revue Fron tière ( 1 9 7 5 ) . [9] F. Hoffher, R. Leruste, J. Mazier - «Essai de comparaison des fluctuations économiques dans quelques grands pays occidentaux» Projet Ensta, n° 37, juin 1974). [10] A. Jacquemin «Size structure and performance of the largest European firms»- Three Banks Review, june 1974. A. Jacquemin et L. Phlips - «Concentration, size and performance of European firms» -Congrès de la Société Européenne d'Econométrie Grenoble, septembre 1974). [II] W. Krelle - «Modèle de prévision pour l'Allemagne Fédérale » Mathematical system in Economies. n° 1 2 , 1 974 . [12] J. Mazier - «Les prix dans les modèles macroéconomiques appliqués : détermination implicite ou explicite» - Revue économique, mai 1975. [13] Prospective et Aménagement, Industries en Europe», Travaux et Recherche de Prospective n° 46 (mars 1 974 ). [14] J. Putois - «Endettement et crise des liquidités aux Usa », Revue Banque n° 334 et 335, nov. et déc. 1 974. [15] C. Sautter - «L'expansion Japonaise» - Economie et statistique n° 45, mai 73 - Japon : le prix de la puissance - Ed. du Seuil, mai 1973.

Voir en annexe: page 38 à 42, les séries de chiffres publiées dans cette annexe correspondent aux données de base utilisées pour la construction des graphes.

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Années Secteur 1952 privé 1953

1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 !ù-è 1968 1969 1970 1971 1972

12 3 4 8 968.3 5 345.1 2 135.8 2 899

10 287.3 6 542.7 2 585.6 3 228 11122.1 7 396.2 2 855.5 3 727 12 181,7 8 173.9 3 146.9 4006 13 050.8 9 135.6 3 591,5 4 341 14473.2 10695.7 4 135.5 5 077 15 190.9 11074.2 4 532.0 4 978 16 638.2 12 462.0 5 063.8 5 455 19465.0 15319,0 5915.7 6 878 21857.5 18360,3 7 009,1 8 200 23 968.4 20 972.4 8 404.9 9 085 26580.6 24268.1 9817,5 10248 29 531,7 28 055.1 11373.8 11864 30526.2 30587,3 13221,9 12 818 33 786.3 35 374,3 15 261,7 14 694 38 722.6 42 285.1 17 570,6 17 820 42 711.9 48 435.3 20 576,7 21930 48 073.0 56 731,7 23 974,5 25 334 53 413.3 67 300.8 28 894,3 29 913 55 289.7 72 871.9 34 059,6 31296 59 377,6 82 178.7 39 514.8 36 246

5 6 7 8 9 955

1105 14062 38180 17713,4 3 408 1152 14920 38610 18522,6 4 945 1114 15710 40000 19969.8 5 485 1550 17 050 40 790 20 559.8 6 187 1940 18410 41870 22 196,1 8 119 1848 19 280 42 020 23 668.2 9 542 2 159 20 270 42 370 25 430,1 11351 3 040 21450 43 330 27 915.1 15 294 4 160 22 450 43 840 31374.2 18 922 4 298 23 600 44 380 35 023,4 24 676 4 530 24 330 44 680 38 632.6 28 502 5 436 25 230 45 270 43 098.8 35 744 5 086 26 380 46 030 47 073.7 42 352 5 664 27 600 47 050 51349.7 48 029 7 194 29 140 47 630 57 224.6 55 633 9 149 29 940 48 480 64 630,7 66 872

11055 30 430 48 840 73 474.3 75 500 12761 31450 49330 84316.3 98714 13 163 32 390 49 470 114 769

10 11 12 59,6 75.5 434,5 63.6 78,0 552,8 66.5 79.1 701.5 67,1 79,7 790,5 70,0 88.6 934.0 73,9 95.7 1 054,1 72,9 93.0 1 129,3 74.9 93.5 1 301.2 78.7 95.7 1 589,7 84.0 98.6 2 037,2 87,5 98.6 2 412,7 91,3 98.3 2 855.0 95.0 99,1 3 512,5

100 100 3 989.4 104.7 103.0 4 647.2 109.2 105.3 5 383.1 113.4 105.9 6 346.6 118.1 108.5 7 665.2 126.0 112.3 9 233.5 132.8 112.5 10 346.4 138.4 115.5 13 175.3 13 936 32 770 49 340

(1) Gdp, milliards de Yens 1965 (2) Gdp, milliards de Yens courants. (3) Coûts salariaux, milliards de Yens courants (4) Profits bruts avant impôts, milliards de Yens courants, incluant provisions pour amortissements. (5) Investissement brut en équipement, milliards de Yens 1965 (6) Emploi salarié, milliers de personnes (7) Emploi total, milliers de personnes. (8) Capital brut au 1 er janvier de l'année, milliards de Yens 1 965. (9) Encours de dettes des sociétés, milliards de Yens courants (10) Prix du Gnp, base 100 en 1965 (1 1) Prix des investissements des entreprises, base 100 en 1965. (12) Amortissements. Yens courants Japon : Secteur privé non agricole

Années 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971

1 ? 6 836 4 074.2 8 160 5 189,6 8 873 5 900.6 9 503 6 376.6

10 592 7 414,7 11963 8 841,1 12 656 9 226.7 14038 10514,6 16 803 13 224,3 19 050 16 002,0 21040 18 410.8 23 677 21 617,4 26 498 25 173.8 27 389 27 444,4 30 408 31 837,7 34 855 38 062.4 38 885 44 095.6 44 207 52 208.6 49 789 62 734.8 51 825 68 306,1

3 2 031

4 1 790.6

6 8 9 354,3

2 465 2 020,2 898.5 14 062 22 110 12 923.1 447,1 2 704 2 299,2 904.6 14 447 22 940 13 540,5 563,2 2 993 2 397.5 871,9 15 271 23 960 14204,6 642,5 3 426 2 803,1 1325.0 16 554 25 180 15 236.4 776.8 3945 3410.8 1745.7 17851 26 660 16743,2 890.5 4 324 3 357.0 1570,7 18 780 27 310 18 005,0 964,8 4 859 3 733,4 1872,8 19 690 28 300 19 545,7 1122,2 5 694 5 044,8 2 730.7 20 800 29 420 21787,0 1393,9 6 783 6 190,9 3 779,5 21900 30 310 24 943,5 1824,8 8 117 6 910,0 3 890,7 23 140 31270 28 257,6 2 155.8 9 519 7 888.6 4 093,7 23 940 32 570 31513.6 2 547,1 11038 9 410.4 4 958,9 24 840 33 300 35 593,7 3 174,6 12 856 9 947.9 4 579,6 25 970 34 490 39 157,2 3 520,6 14854 11594,1 5056,1 27210 35910 43 942,5 4237,3 17 113 14011,6 6434,9 28 680 37 930 48 161,7 4895.9 20084 17910.1 8 174.6 29 600 39 140 54713.8 5814,2 23 470 21251,6 10049,4 30130 39850 62664,7 7056.8 28341 25623,8 11775,3 31160 40910 72 600,6 8 539,5 33 472 27 039,9 32 140 41790 9 511,4

1972 55 821 77 257,4 38 885 31373.2 32 510 42 290 12 203,1 (1) Gdp. milliards de Yens 1965 (2) Gdp, milliards de Yens courants. (3) Coûts salariaux, milliards de Yens. (4) Profits bruts avant impôts incluant provisions pour amortissements, milliards de Yens courants. (5) Investissements bruts en équipement, milliards de Yens 1965. (6) Emploi salarié, milliards de personnes. (7) Emploi total, milliards de personnes. (8) Capital brut au 1er janvier de l'année, milliards de Yens 1965. (9) Amortissements, Yens courants

38

Page 37: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Japon : Secteur industriel

Années 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972

1 2 654 3 197 3271 3 531 4 208 4 658 4 580 5 538 6 865 7 866 8 285 9 423

10264 10314 11 455 13 369 15 128 17 889 20 073 19831 20 377

2 1 581,8 2 033,0 2 175,0 2 369.5 2 945.9 3 442.0 3 339.1 4 148.0 5 402.5 6 607.7 7 249.8 8 603.2 9 750.8

10 335.0 11 993.7 14 598,6 17 155.2 21 127.4 25 291.8 26 137.2 28 202,1

3 728 832 934

1 008 1 216 1 388 1 486 1 720 2 070 2 553 3 032 3 495 4 024 4 520 5 086 5 970 7 157 8 530

10 242 11 755 13518

4 533 611 748 720 846

1 235 1 196 1 367 2016 2 502 2 666 3 008 3 523 3 546 4 113 5 235 7 103 7 877 9 321 9517

10254

5

341,3 343.5 326,3 542,d 782,6 661,1 870,8

1 498.8 2 076,4 1 979.9 2 013,7 2 427,9 2 003,5 2 097,5 3 132,0 4 220.0 4 978,1 6 067,4

6

5 261 5 406 5515 o 182 6 774 7 171 7 337 7911 8 536 9 092 9 470 9 770

10010 10 156 10554 10 906 11 157 11 415 11 510 11 501

7

7 190 7 440 7 560 8 050 8 530 9 000 9010 9510

10 160 10720 11 120 11 370 11 570 11 870 12 520 13 050 13 450 13 770 13810 13 780

8

4 643 4 885 5 114 5 532 6 186 6718 7415 8 691

10472 12 230 13931 16 002 17 560 19014 21 635 25255 29 351 34 600

9

83.2 85.2 85,1 92.3 99.0 97.8 97,5 98.6

100.6 100 99.4 99.4

100 102,5 104,5 104,9 106,6 107,6

10 101,7 134,8 176,9 206.3 236.8 301,1 345.6 426.7 555,6 766,1 910.8

1 063.7 1 337.8 1 449.4 1 633,3 1 873,1 2 217,7 2 776,4 3 329,6 3 700.9 4 310.4

(1) Gdp, milliards de Yens 1965. (2) Gdp, milliards de Yens courants. (3) Coûts salariaux, milliards de Yens courants (4) Profits bruts avant impôts, incluant les provisions sans amortissements, milliards de Yens courants (5) Investissement brut en équipement, milliards de Yens 1965 (6) Emploi salarié, milliers de personnes (7) Emploi total, milliers de personnes. (8) Capital brut au 1 er janvier de l'année, milliards de Yens 1 965 (9) Prix de la Fbcf. base 100 en 1965 (10) Amortissements, Yens courants Allemagne : Secteur privé

Années 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973

8 9 10 11 12 1 2 3 4 5 6 7 220.5 75.9 61.4 14,1 39.9 16.1 22.29 634 62,4 81,4 77,3 237.0 85.0 66.6 15.9 44.1 16,7 22.90 674 72.2 83.4 79.1 3.8 250.5 92.9 72.5 17.9 45.3 17,2 23,34 718 80,9 85,8 81,6 2.3 258.8 100.1 76.2 19.8 48.8 17,3 23,46 762 91,7 88,7 84,1 1,0 278.6 107,8 84,3 21,7 55,0 17,5 23.63 807 109.1 90.1 86.3 3.0 304.1 121,2 94.2 24,6 63.2 18.0 23.98 858 129.0 92.3 89.8 2.5 321,1 136.0 99.3 28.0 72.8 18.4 24.21 914 149.3 96.0 94,6 0.4 333.6 150,6 101,9 32.0 79,8 18,5 24,19 976 170,1 100,0 100,0 0,1 344.7 160,8 107.2 35.6 82.8 18,7 24.15 1040 192.3 102.8 103,1 0,6 369.1 176.2 118,1 39,3 94,0 18,8 24,08 1 104 217.4 105.4 105,7 -0,7 390,3 193,6 127,8 44,1 102,1 19,0 24,14 1 174 246,6 108.7 108.0 0.3 401,0 207,0 131,9 48,3 105,3 18,9 23,98 1247 276,0 112,2 111,4 -1,2 399,0 204,6 130,7 51,3 96.0 18,1 23,04 1319 294,8 113.3 110.2 -5.7 428.6 220.2 152,4 54.7 104,2 18,3 23,04 1381 324.1 114.9 111,3 0,8 465.7 248,0 162.2 60,9 122,8 18,8 23,38 1448 369.0 118,4 116.3 2.9 493.5 292.8 178.4 71,1 151,6 19,2 23.59 1 525 424.9 126.4 129.2 1,7 507,0 328.7 187,1 80.8 171.8 19.2 23.55 1612 481.1 135,6 138.7 -0.7 523.2 358.9 201.5 88.6 186.4 19,1 23,35 1 703 560.7 143.3 144.5 -2.3 551.5 406,1 219.7 97,7 195,8 19.2 23.33 1 798 645.2 151.0 151,2 -0,4

1974 554,0 441,0 206.3 114.0 184.5 18.7 22.81 1892 704,2 159,4 161,0 -3,6 (1) Gnp. milliards Dm 1962 (2) Coûts salariaux, milliards Dm courants (3) Profits bruts avant impôts, milliards Dm courants (4) Amortissements, milliards Dm (5) Investissements bruts, milliards Dm courants (6) Nombre de salariés, millions de personnes (7) Emploi total, millions de personnes (8) Capital brut, milliards Dm 1962 au 1er janvier de l'année (9) Encours de crédits bancaires à l'ensemble de l'économie, milliards Dm courants (10) Indice du prix du Pnb, base 100 = 1962. (1 1) Indice du prix des investissements des entreprises, base 100= 1962 (12) Nombre d'heures travaillées par semaine, en taux de croissance L'ensemble des séries utilisées pour l'Allemagne sont issues du modèle du Professeur Krelle [11], à l'exception de la série de capital brut qui provient de l'office fédéral de statistique et qui nous a été communiqué par P. Buffet et P. Naudet de la Direction de là Prévision

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Page 38: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Etats- Unis: Secteur privé

Etats- Unis: Secteur privé non agricole

Années 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974

12 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 319.4 131,0 89,2 27,9 29,4 - 5.2 41,52 52,89 436,9 162,3 81,4 74,4 339.5 150,2 95,5 31,8 33,1 - 0,6 43,70 53,57 456,6 185,3 87,3 80,4 347,9 160,4 91,3 31,6 35,1 2,2 44,36 53,65 476,8 196,5 89,0 82,6 365,7 173,1 95,0 34,2 36,1 - 1,7 45,68 54,54 494,5 208,0 89,6 84,0 360,9 171,4 92,8 33,6 39.2 0,2 44.35 53.36 513.1 213,7 90,8 84,8 392,0 186,0 107,7 38,1 46,3 - 1,7 45,80 55,26 530,6 246,4 91,6 86,1 399.9 202,2 111,3 43,7 47,3 - 3.6 47,08 56,52 550,5 268,7 94.5 92.4 405.6 207.3 111.8 46.4 49.8 - 1,3 47,22 56,46 573.8 286,2 97,3 97,9 400,0 211,1 109.2 41.6 49.4 0.5 45,51 55,20 594,9 304,0 100,0 100,0 428,0 229,8 122,3 45,1 56,8 - 0,6 47,18 56,55 610,2 330,9 101,4 102,2 438.5 241,3 120,5 48,4 56,8+ 0,5 47,77 446.6 245.8 124,5 47.0 58,7 0,4 47,34 477.2 262.4 134,3 51,7 66,3 1.6 48.53 497.1 275,8 141,4 54.3 68.8 0.3 49.26 525.0 295.2 154.0 61,1 76,2 - 1.5 50.34 559.8 317.8 170,6 71.3 84.7 - 0,9 52,22 596.3 349,7 185,4 81,6 91,3 - 2,2 54,52 609.7 372.5 184.4 83.3 93,0 - 0.6 55.71 638.0 408.7 199.3 88.8 95.4 - 4,0 57,32 655.0 450.4 204.6 98.5 97,0 - 5,7 59,42 652,5 475.6 197.6 100,6 97.0 - 5.5 59,53 676.0 504,0 212.2 104.6 110.2 - 3.9 59,49

57.42 626,3 353,8 102.8 102.9 57,15 646.1 380.4 103,7 103,4 57,81 664,3 410.3 104,7 104.1 58.54 685.7 445.2 105.8 104,5 59,71 707,5 485,5 107,0 105,7 61.01 734,5 537,4 108,8 107,5 62,10 769,6 596,2 111,6 110.2 62.97 811.6 652,8 114.8 113,8 64,07 851,3 738,3 118,9 117,5 65,70 892,9 849.2 124.3 123.0 66.07 937,7 922.3 130.3 130.2 66.23 976.9 1007.6 135.7 136,3 68,36 1013.5 1 132.9 139.6 139.6 721.7 554.8 241,5 116,8 125,9 - 7,1 61,52

766.5 619.4 287,9 136,8 136,5 -15,5 64,26 70.67 1055.4 1287,5 147,6 144,9 674.8 311,6 149,6 136,5 -36,5 65,23 71,65 1104,2 163,3 159,0

(1) Gnp (milliards de dollars 1958). (2) Coûts salariaux (milliards de dollars courants). (3) Profits bruts avant impôts en milliards de dollars courants (sans ajustements de stocks). (4) Investissement brut (milliards de dollars courants). (5) Autofinancement brut (milliards de dollars courants). (6) Ajustement de stocks (milliards de dollars courants). (7) Nombre de salariés (millions de personnes). (8) Emploi total (millions de personnes). (9) Capital brut, milliards de dollars 1958 au 1er janvier de l'année. (10) Encours d'endettement (milliards de dollars courants) (11) Indice des prix du Pnb (base 100 = 1958) (12) Indice des prix des investissements des entreprises (base 100 en 1958)

Années 1950 1951 1952 1953 1954 1955 1956 1957 1958 1959 1960 1961 1962 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974

1 299.0 320.0 327,7 344.5 339.3 369,9 377.9 384.1 378.0 405.7 415.4 425.2 453.9 473.1 501.4 534.8 572.6 584.5 613.0 629.9 626.3 648,3 694,3 737,6 723.4

2 116.0 132,5 141,8 154,1 152,6 166.0 180.1 189,7 188,5 205.8 226,5 220.9 236.1 248.3 265.8 286.3 315.3 336.9 369,3 406,1 428,1 453,0 449,8 557,6 608.2

3 76,5 80,7 77,3 81,4 80,9 96,5 99,5

101.1 96,6

110,9 108.9 112,1 122,6 129,1 141.0 157,0 169.3 170.4 184.7 188,0 180,7 196,7 221,5 253,7 282.4

(1) Gnp (milliards de dollars 1958). (2) Coûts salariaux (milliards de dollars courants). (3) Profits avant impôts (milliards de dollars courants). Sans ajustement de stocks.

Etats-Unis : Les coûts salariaux représentent l'ensemble des charges salariales (salaires bruts versés plus cotisations sociales versées par les employeurs) Pour les secteurs privé non agricole et industriel, les charges sociales ont été calculées en supposant qu'elles représentaient un certain pourcentage des salaires versés, ce pourcentage ayant été calculé pour le secteur privé Les profits bruts avant impôts sans ajustement de stocks sont la somme des profits avant impôts des sociétés, des provisions pour amortissements des so

ciétés, du revenu brut des entrepreneurs individuels. Ces derniers ont été entièrement considérés comme des profits. Des études menées aux Etats-Unis, notamment à l'Office of Management and Budget aboutissent en effet à la conclusion paradoxale suivante : si l'on attribue à l'entrepreneur un salaire fictif, le profit résiduel rapporté au capital fait apparaître un taux de profit dérisoire ne justifiant pas la survie de l'entreprise Si par contre on calcule un profit à l'aide du taux de profit moyen, le salaire restant ne permet pas à l'entrepreneur de vivre en tant qu'individu Cf. M Fouet [7] On a considéré que les socié-

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Page 39: Répartition, rentabilité et accumulation du capital : un essai de comparaison internationale

Etats- Unis: Secteur industriel

4 5 6 7 8 9 10 - 6,1 24.2 39.2 45.7 395.6 39.8 150.0 - 1.5 28,1 41,5 46,8 412,3 39,9 171,6

1,2 28,1 42.2 47,1 429,7 39,9 181,3 - 1,2 30,5 43.6 48.3 445.3 39.6 191.2 - 0.3 30.3 42.3 47.1 461,5 39,1 196,2 - 1,9 34,8 43.8 48.8 477,2 39,6 227,7 - 3,2 40,7 45,1 50.2 495.3 39,3 249,2 - 1,8 43,1 45,3 50,5 517,5 38.8 265.9 - 0,4 37,8 43,5 49,6 537.7 38,5 280,7 - 0,6 41,3 45,2 51,0 551,7 39,0 307,1

0,2 45.1 45,9 51,9 567,1 38.6 328.7 - 0.1 43,5 45,4 51,9 558,7 38,6 352,9

0,3 48,0 46.7 52,9 604,7 38.7 380,1 - 0,5 50.0 47,5 53.8 625.9 38.8 412,0 - 0,6 56,8 48,7 55.2 646.9 38,7 449,5 - 2,1 66.5 50,7 56,6 673,3 38,8 498.1 - 2,2 76,2 53,1 58.1 707,2 38,6 553,8 - 1.4 77.3 54,4 59,1 747,7 38,0 604,5 - 4,0 83,2 56,1 60,2 785,5 37,8 686,5 - 5,9 92,7 58.2 62,1 825.6 37,7 793,7 - 5,7 94.2 58.3 62.6 868.8 37,1 863,6 - 5,6 98,2 58,3 62.8 906,4 37,0 944,4 - 8,0 109,8 60.4 64,9 941,5 37.1 1065.1 -19.8 127,1 63,1 67.2 981.3 37,1 1210,2 -35,6 137,1 64,0 68,1 1029,3 36,6 (4) Ajustement de stocks (milliards de dollars). (5) Investissements bruts (milliards de dollars courants). (6) Nombre de salariés (milliards de personnes). (7) Emploi total (milliards de personnes). (8) Capital brut au 1er janvier de l'année (milliards de dollars 1958) (9) Durée hebdomadaire de travail (nombre d'heures). (10) Encours d'endettement (milliards de dollars).

Années 12 3 4 5 6 7 8 1950 105,5 53,0 33.4 - 2,8 7,4 15,2 104,8 40,5 1951 116,2 62,8 34,1 - 0.7 10.7 16.4 108.2 40.6 1952 118,7 67.8 28.6 0,5 11.4 16,6 114.0 40.7 1953 128.6 75,1 32.3 - 0.6 11,8 17.5 119,2 40,5 1954 119,5 71.6 29.8 - 0.2 11.2 16.3 124.4 39.6 1955 133.6 78.5 39.4 - 0.9 11.9 16,9 129.7 40,7 1956 134.1 84,8 39.5 - 1.4 15.4 17,2 134,8 40,4 1957 134,6 88.5 38.3 - 0.8 16.5 17.2 141,7 39,8 1958 123,7 84,6 31,5 - 0,1 12.4 15.9 148,4 39,2 1959 138,9 93,9 40,8 - 0,3 12,8 16,7 152,0 40,3 1960 140,9 97.4 38.2 - 0,1 15.1 16.8 154,3 39,7 1961 140,4 97,7 37.3 0 14.3 16.3 157.5 39.8 1962 154,6 105.7 42,7 0,1 15.1 16,8 160/5 40,4 1963 162,4 110,3 4è,6 - 0.2 16.2 17,0 163,6 40,5 1964 173,7 117.5 51,7 - 0,2 19,3 17,3 166,9 40,7 1965 190.5 126,8 61,9 - 0,9 23,4 18,1 171.7 41.2 1966 205.7 141,4 67,0 - 0,9 28,2 19.2 179.1 41.3 1967 205.4 148.2 63.1 - 0,6 28,5 19,4 189,2 40,6 1968 219,2 161.5 70,0 - 1,6 28,4 19.8 199.3 40.7 1969 228,6 175,0 66,8 - 2,3 31,7 20,2 207,9 40,6 1970 217.5 176.4 55.8 - 1.9 31,9 19,3 217,1 39.8 1971 223.0 180.1 62.7 - 2,0 30,0 18.6 224.6 39,9 1972 245,4 198,4 78,4 - 3,1 31.3 19,1 230,0 40.6 1973 272.4 223,4 98.0 - 7,9 38.0 20.1 236.0 40.7 1974 240.7 114.5 -15.8 35,8 20,0 244,6 40,0 (1) Valeur ajoutée brute en milliards de dollars 1958 (2) Coûts salariaux en milliards de dollars courants (3) Profit avant impôts (milliards de dollars) (4) Réévaluation de stocks (milliards de dollars (5) Investissement brut en milliards de dollars courants (6) Nombre de salariés en millions de personnes (7) Capital brut en milliards de dollars 1958 au 1er janvier de l'année (8) Durée hebdomadaire de travail (nombre d'heures)

tés faisaient uniquement partie du secteur privé non agricole. Au profit brut du secteur privé non agricole on a ajouté pour obtenir celui du secteur privé, le revenu des agriculteurs Les séries de capital proviennent d'une étude de J Musgrave publiée dans le Survey of Current Business (mars 1974) , elles ont été établies sur la base d'un déflateur élaboré par l'auteur lui-même pour éliminer les biais des séries issus des comptes nationaux Les biens de capital adressés par le secteur privé au secteur public, ont été comptabilisés aux prix d'occasion Les séries d'encours d'endettement ont été calculées à partir de l'endettement des sociétés et des agriculteurs On disposait d'autre part d'une série d'endettement de l'ensemble des agents non agricoles non constitués en sociétés La répartition de cet endettement entre les différents agents est donnée pour la période 1961-1973 dans le Survey of Current Business La part relative des entrepreneurs individuels croît durant cette période d'une façon remarquablement linéaire (la régression sur le temps donne un R2 = 0,988). On a donc pensé qu'il était possible de rétropoler cette série pour évaluer l'endettement des entrepreneurs individuels non agricoles. Le coefficient ainsi obtenu pour chaque année, a été appliqué à la série disponible pour donner l'endettement des entrepreneurs individuels.

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France : (entreprises non agricoles)

1 145,0 153,1 156,8 159,9 168,2 179,6 192,7 206,3 213.4 219,8 235,7 251,7 269,8 289,2 311,3 325,9 347,5 364,2 381,3 414,3 439.1 465,4 494.8 523.1 543.2

2 23,1 29,7 35.7 36.9 40.0 44.2 49,3 56,1 64,3 69,4 76,2 84.5 95,1

108,8 122,2 131.7 142,5 152,6 168.3 193.6 218.9 244.6 274.6 317,3 380,7

3

20,1 21,3 21,4 23,0 25,8 28,7 32,0 36,5 42.9 46.0 48.9 54.0 61.5 63.3 72.3 76.7 86,6

110,7 120,8 131,7 148,6 168,3 208,9

4 12,6 16,0 17,4 17,0 17,6 20,1 23,2 28,0 32.3 35.5 39,7 46,2 52,6 59,0 66,6 71.0 79.5 87,3 94.1

112.2 127,7 142.9 160.5 178.9 212,8

5 8,42 8.65 8,73 8.72 8.77 9,03 9,18 9.51 9.65 9.61 8.42 8.65 8,73 8,71 8.77 9.03 9,18 9,51 9,65 9,61 9,77 9.93

10,16 10,56 10,93

6 11.10 11.31 11,34 11,26 11,29 11.53 11.65 11,95 12,03 11,96 12,12 12,24 12.44 12.81 13,17 13.34 13.54 13.67 13,70 14,06 14.38 14,52 14,68 14,99 15,24

7

283,8 295,2 316,6 344,8 354,6 361,6 375,4 393,3 419.3 445,6 467,0 494,0 524,3 559.1 599,6 637,6 681,5 726.9 779,5 836,7 893.5

1 068.4 1 165,2 1 356,3

8

50,1 56,7 67,7 78,4 88,9

103,8 122,4 142,1 164,2 184,8 209,4 233.5 264.1 300.8 340.0 368.2 419,1 482,1 555,8 627.2 724,0

9

56,3 64,2 76,5 90,0

102,5 120,5 141,6 164,6 190.7 215.5 244.7 274.8 310.2 351.6 395.7 432.2 492,2 560.8 644.7 726,0 832.0

10

305.4 371.1 365.1 375.9 391.3 424,6 466.9 532,1 581,1 620,7 674,5 737,8 822,0 904,5 978,4

1 058.6 1 152.0 1 253.1 1 418.9 1 613.5 1 798.6 2 007,4 2 289,8

11 64,6 74,3 73,2 75,1 75,7 76,4 79,4 84,2 92.8

100 103,2 106,1 109,9 115,4 120,5 123,5 126,6 130,3 136,1 144,7 151,9 160,1 168,7 180,3 202.8

12 59.5 74.2 84,7 79,6 79,5 81,0 84,2 91,0 96,1

100 102,8 106,1 109,9 114.8 118,1 120,5 122.8 126.0 127.4 135.1 145.5 152.6 159,0 168,2 193,8

13

107,6 112,6 118,6 127,7 142,2 161,7 185,1 205,8 226,9 248,5 274,9 308,6 346,6 371,4 405,1 435,9 477,0 558,9 622,1 690,9 774,1 878,0

1 044,4

14 12,7 14,5 16,7 17.6 17.3 18.6 20.6 22,9 24,9 28,4 33,8 37,1 40.7 46.3 54,3 56.4 66.3 70,1 79,5

100,5 107.8 116.6 131,7 147,1 179.1

15

4.0 1.9 1.5 0,6 3,2 2.4 1.0 2.1 0.6 0.6

10.4 11.8 8.9 9.4

17.7 43,7

16 100,9 100,7 99,3 99.8

100.9 100,4 100,7 100.7 99,1 99,8

100.6 100,5 100.4 99.8 99.9 99.6

100.2 99.3 99.3 99.8 99,1 99.1 98.9 98.9 98.8

(1) Production intérieure brute, milliards de francs 1959. (2) Salaires bruts versés par les entreprises, milliards de francs courants (3) Profits bruts avant impôts, avant distribution, milliards de francs courants (4) Investissements bruts, milliards de francs courants (5) Nombre de salariés, millions de personnes (6) Effectifs totaux, millions de personnes. (7) Capital brut au 1er janvier de l'année, milliards de francs 1959 (8) Encours de crédits à l'ensemble des entreprises, milliards de francs courants). (9) Encours de passif de l'ensemble des entreprises, milliards de francs courants. (10) Capital brut au coût de renouvellement au 1er janvier de l'année de l'ensemble des entreprises, milliards de francs courants. (1 1) Indice du prix de la valeur ajoutée non agricole (12) Indice de prix de la Fbcf des entreprises, base 100 en 1959. (13) Valeur ajoutée brute, milliards de francs courants (14) Autofinancement brut, milliards de francs dourants (15) Appréciation sur stocks, milliards de francs courants (16) Durée hebdomadaire du travail, base 100 l'année précédente

Les séries de capital sont issues des travaux de J. Mairesse pour le capital productif. Deux estimations différentes ont par contre été utilisées pour le capital logement des entreprises, l'une tirée des études menées lors de l'élaboration du modèle Star, l'autre issue de travaux plus récents de M Bénard (Cette dernière série n'a été retenue que pour le calcul des ratios d'endettement). Il convient de souligner que les séries (8), (9), (10) couvrent le champ de l'ensemble des entreprises alors que les autres sont limitées aux seules entreprises non agricoles.

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