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RÉPONSE AU DERNIER MÉMOIRE DE M. ÉTIENNE QUATREMÈRE, SUR LES TOMBEAUX DES ROIS. Revue archéologique (numéro de juin 1852) Author(s): F. de Saulcy Source: Revue Archéologique, 9e Année, No. 1 (15 AVRIL AU 15 SEPTEMBRE 1852), pp. 229-240 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/41746155 . Accessed: 19/05/2014 07:31 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue Archéologique. http://www.jstor.org This content downloaded from 194.29.185.223 on Mon, 19 May 2014 07:31:43 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

RÉPONSE AU DERNIER MÉMOIRE DE M. ÉTIENNE QUATREMÈRE, SUR LES TOMBEAUX DES ROIS. Revue archéologique (numéro de juin 1852)

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RÉPONSE AU DERNIER MÉMOIRE DE M. ÉTIENNE QUATREMÈRE, SUR LES TOMBEAUX DESROIS. Revue archéologique (numéro de juin 1852)Author(s): F. de SaulcySource: Revue Archéologique, 9e Année, No. 1 (15 AVRIL AU 15 SEPTEMBRE 1852), pp. 229-240Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/41746155 .

Accessed: 19/05/2014 07:31

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RÉPONSE

AU DERNIER

MÉMOIRE DE M. ÉTIENNE QUATREMÈRE,

SUR LES TOMBEAUX DES ROIS.

Reçue archéologique (numéro de juin 1852).

J'avais promis à M. Etienne Quatremère de ne plus lui répondre avant que sa critique de mon travail ne fût imprimée: j'ai fidèlement tenu cet engagement ; mais je lui ai promis, d'un autre côté, de ne plus m'incliner devant ses jugements, sans prendre la peine de les contrôler. Je vais donc, le plus brièvement possible examiner le Mé- moire tout récent qu'il a pensé devoir insérer dans la Revue archéo- logique, afin de compléter ce qu'il regarde comme une démonstration contre mon opinion sur les Qbour-el-Molouk.

Et d'abord, je dirai que ces additions étaient parfaitement inutiles, vu quelles ne renferment absolument que des redites, et qu'elles of- frent une simple paraphrase du premier Mémoire que M. Étienne Quatremère a inséré dans la Reçue. Comme je désire avant tout ne pas fatiguer le lecteur de la répétition de ce que j'ai déjà dit, que ce soit bon ou mauvais, je ferai en sorte de n'apporter que des argu- ments que j'avais tenus en réserve et qui, je le crains, dérangeront quelque peu les idées si fermement arrêtées de mon docte adversaire. Je sais bien qu'il passe dédaigneusement sous silence les objections auxquelles il n'y a rien à opposer; mais peu m'importe; comme en définitive c'est le public qui jugera entre nous, je suis loin de me plaindre de voir mon savant critique user de ce silence, qui doit tour- ner infailliblement à mon profit. Mes objections laissées sans réponse restent donc debout, et le lecteur se chargera de deviner pourquoi M. Étienne Quatremère n'a pas môme essayé de les ébranler en passant.

M. Quatremère revient avec complaisance sur l'obstination avec laquelle je persiste à prononcer Aïr Daoud, ou Daouid, ce qu'il pro-

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230 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. nonce Ir-David, en vertu de quoi, suivant lui, je lis l'âne ou l'ânon de David, là où je croîs lire la ville de David. A quoi tient donc cet amour de M. Quatremère pour ces points massorétiques qui ne re- présentent guère que des erreurs, en fait de prononciation, et qui ont à tout le moins, le triste mérite da rendre obscur ce qui est d'ordi- naire parfaitement clair sans eux? Peut-être à l'ennui qu'il lui a fallu affronter pour étudier cette méthode de lecture, et aussi à la conviction intime qu'on peut s'en passer; car s'en passer, c'est, j'en suis convaincu , le moyen le plus sûr d'arriver vite et bien à lire le texte hébraïque de la Bible.

Donc, quand je vois le groupe de lettres TW, dont une gutturale essentiellement prononçable forme l'initiale, je suis tout décidé à me passer des points et à lire Aïr, qu'il s'agisse d'une forteresse ou d'un ânon. Ce qui est fort remarquable, c'est l'assurance avec laquelle M. Quatremère nous affirme que le mot IV appartient au dialecte en usage chez les Moabites. Certes, personne n'est plus que moi prêt à reconnaître le profond savoir de M. Étienne Quatremère; mais j'avoue que j'ignorais qu'il sût le dialecte en usage chez les Moabites. Et puisqu'il entendait établir des principes de prononciation, il aurait bien dû nous apprendre comment le même mot IV, précisément avec le même point-voyelle, signifie à la fois ville et ennemi. N'en déplaise à M. Quatremère, est de l'hébreu de la bonne roche, tout aussi bien que TV; seulement la lettre fugace iod a disparu, parce qu'elle pou- vait disparaître sans inconvénient, tandis que la gutturale aïn n'a pu s'évanouir aussi aisément. Mais passons; une discussion pareille est oiseuse.

Suivant M. Quatremère, ce qui dans le récit de Josèphe est em- prunté aux livres saints, est admissible, mais partout où celui-ci ajoute aux faits contenus dans ces écrits respectables, son récit ne repose sur aucun monument national, puisque les Hébreux n'en possédaient pas d'autres que ceux qui sont sous nos yeux; il ajoute que les Mé- moires originaux, dont le livre des Rois et les chroniques sont de simples extraits, avaient été perdus à la destruction de Jérusalem par les Chaldéens. Or, comme ces deux livres racontent cette des- truction, apparemment ils ont été extraits des Mémoires en question ailleurs qu'à Jérusalem, et naturellement pendant la captivité. Ces Mémo res ne furent donc pas perdus au sac de Jérusalem, et les as- sertions de Josèphe peuvent très-bien avoir été basées sur mieux en- core que des "traditions fort respectables. De ce que les livres saints

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SUR LES TOMBEAUX DES ROIS. 231 ne disent pas un mot des trésors enterrés avec les rois de Jada, M. Quatremère conclut que l'assertion de Josèphe est complètement erronée. D'abord, puisque nous sommes en face de simples. extraits des mémoires originaux, M. Quatremère a-t-il le droit de dire que tout en a été extrait, et si par hasard le fait dont il s'agit était de règle, n'est-il pas évident que l'écrivain chargé de faire ces extraits, a pu et dû négliger la mention d'un fait que personne n'était tenté de révoquer en doute? Quelle étrange préoccupation du reste fait prendre à M. Quatremère un argument dans un te*te qui n'a rien à faire absolument dans la question? Le verset 51 du chapitre vii du livre des Rois dit simplement que Salomon, une fois le temple achevé, apporta ce que David son père avait consacré, l'argent, l'or et les ustensiles ; et le plaça dans les trésors de la maison de l'Éternel. Le verset 1 du chapitre v des Chroniques dit la même chose, ni plus ni moins. M. Etienne Quatremère pense-t-il que le roi David avait consacré tout ce qu'il y avait d'or et d'argent dans son royaume? Si cest là son avis, je lui demande la permission de ne pas le partager.

M. Quatremère en appelle aux bons sentiments du souverain pon- tife Hyrcan pour affirmer que ce personnage n'aurait pas voulu se rendre coupable d'un acte odieux qui eût été une sorte de sacrilège. M. Quatremère n'oublie qu'une chose, c'est que le pontife était très- rudement assiégé par Antiochus Eusèbes, et que, pressé de se dé- barrasser de ses ennemis, il lui fallût payer è l'assiégeant la somme de 500 talents ďargent, dont il ne put donner qiie 200 en à-compte, tant qu'il fut bloqué, mais qu'il put parfaire après la levée du

siège, lorsqu'il eut spolié le caveau royal. J'ai conclu de ce fait

que le caveau n'était pas dans la ville; et puisque M. Quatremère n'a pas répondu à cette objection, c'est qu'elle lui semble bonne sans doute.

M. Quatremère a bien raison de dire qu'il ne fait aucun cas des récits de Josèphe, pas plus que des traditions juives. En effet, il est bien clair que dans le système de M. Quatremère les tombeaux

royaux ayant été violés, bouleversés, saccagés par les Chaldéenset un peu par les Philistins (M. Quatremère oublie de nous dire quand et comment) , tous les récits de Josèphe sur ces tombeaux sont bons à mettre au rebut. Quel menteur devait être ce Josèphe, qui ra- contait imperturbablement, devant des milliers de Juifs emmenés à Rome, des histoires controuvées de violation de tombeaux, datant de

soixante-quinze ansà peine, quand depuis sept cents ans ces mêmes

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232 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. tombeaux avaient été dépouillés par les soldats de Nabou-Cadr-Atzar ! Ceci ne gêne en rien M. Quatremère, e sempre bene !

A prçpos dece fait, M. Etienne Quatremère fait usage d'un fort curieux mode d argumentation. Le voici: a il est probable que le fait de l'enterrement des richesses avec les rois, n'aurait pas eu l'approbation de Dieu , et certes , les prophètes placés comme des sentinelles vigi- lantes pour rappeler les rois et le peuple au sentiment de leur devoir, leur inculquant un respect profond pour les volontés du Très-Haut, et une horreur invincible pour toutes les pratiques qui avaient un rapport plus ou moins intime avec les idées et les actes des peuples idolâtres, n'auraient pas manqué de faire entendre leur voix pour condamner cet emploi de sommes énormes qui eussent pu et du re- cevoir une destination plus en harmonie avec les besoins de la religion et de l'État. » D'abord , il est un peu présomptueux , ce me semble , de tracer à Dieu et à ses prophètes la ligne de conduite qu'ils auraient dû suivre. Ensuite, il paraît que les prophètes n'étaient pas toujours écoutés, puisque tant de rois et Salomon en tète, n'ont pas eu cette horreur invincible pour des pratiques qui avaient un rapport par trop intime avec les idées et les actes des peuples idolâtres. M. Quatre- mère a sans doute pensé qu'il écrivait pour des gens qui n'avaient pas lu et qui ne liraient jamais la Bible.

M. Quatremère ajoute ici : « j'ai dit, en outre, que la nation juive n'étant pas riche, il eût été peu convenable d'enlever à la circulation un grand nombre de millions d'une manière si peu fructueuse. On m'a opposé que durant le règne de Salomon, suivant le témoignage de l'Écriture, l'or était dans la Judée plus commun que les pierres. J'avais prévu cette objection en faisant observer que cette opulence n'existait pas pour les Juifs à l'époque de la mort de David. » Quoi! pas riche! C'est M. Quatremère qui ledit! David lui-même disait toute autre chose. Lisons ses paroles à son fils (Chroniques, I, xxn, 14): « Et voici que, dans ma détresse, j'ai préparé pour la maison de, Jéhova, de l'or cent mille talents, de l'argent mille fois mille talents ; l'airain et le fer ne peuvent être pesés, car ils sont trop considérables; j'ai préparé du bois et des pierres; tu y ajouteras.» Cent mille talents d'or et un million de talents d'argent ! Certes, si David avait destiné de pareilles sommes au temple, sans que le pays en souffrît, Salomon pouvait bien enterrer avec son père la millième partie de ce trésor, sans que personne y trouvât à redire!

Poursuivons. « Les travaux exécutés par David, et ensuite par Sa- lomon, ne prouvent nullement que sous les règnes de ces monarques

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SUR LES TOMBEAUX DES KOIS. 233

Jes arts en Judée eussent fait des progrès notables, etc.» A mon tour à me servir des expressions de M. Quatremère; j'avais prévu cette objection ; aussi j'avais eu le soin de transcrire le verset suivant ( Chroniques , I, xxn,l5), qui dit (cest toujours David qui parle à son fils Salomon) : a Tu as avec toi en quantité des ouvriers, des tailleurs de pierres et des ouvriers en pierres , et des charpentiers et toute espèce d'hommes intelligents en chaque ouvrage. » M. Quatremère se garde bien de se souvenir de ce verset que je lui ai cité ; pourquoi donc cela?

M. Quatremère veut à toute force que les tombeaux de la nécro- pole de Jérusalem aient été violés par les Chaldéens; il lui faut pour cela établir que tous les peuples de l'antiquité étaient des violateurs de sépultures. Aussi tout raisonnement lui est-il bon. En voici un qui a du moins le mérite de la nouveauté : « Les lois des Visigoths dé- cernaient (sic) des peines sévères contre les violateurs des tombeaux. Ce qui prouve que ces spoliations étaient alors fort communes! » J'aurais cru, moi, que cela prouvait qu'un pareil crime était en exé- cration aux Visigoths et voila tout. Avant 89, on écartelait les régi- cides, est-ce que cela prouve qu'on assassinait les rois toutes les fois qu'on les rencontrait? A propos des protestants, M. Quatremère ajoute que « ceux-là après tout étaient Français ! Et on ne peut pas soupçonner qu'ils eussent voulu renverser les tombeaux de leurs rois. Un pareil scandale était réservé aux féroces jacobins de 1793.» Est- ce que les jacobins de 1793 étaient Visigoths? Vient ensuite une phrase sentimentale, à mon adresse, sur les Européens qui vont en Orient violer la cendre des morts. Je déclare que les Européens, qui peuvent, à l'heure qu'il est, violer des tombeaux antiques en Orient, ont la main heureuse, car s'il en reste, il n'en reste guère, et les bons Orientaux n'ont pas le moins du monde besoin qu'on leur ap- prenne comment cela se fait. En ce genre ils sont passés maîtres.

M. Quatremère a la malencontreuse idée de revenir sur le passage de Jérémie, qui atteste formellement, à ce qu'il dit, que les Chaldéens, au moment où ils prirent et saccagèrent Jérusalem, violèrent les tombeaux, en arrachèrent )es ossements des rois, des princes, des prophètes, des prêtres, et en couvrirent le sol.

Conclure toutes ces belles choses d'un verset de prophétie , c'est aller un peu vite en besogne, je crois. Et qui dit à M. Quatremère que la prophétie de Jérémie s'applique à la prise de Jérusalem par les Chaldéens, plutôt qu'à la destruction de cette ville par les Ro- mains? Ce n'est pas un fait accompli que mentionne le prophète, car

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234 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. voici la teneur du verset ( Jérémie , vili, 1) : « En ce temps, dit Jéhova, on tirera de leur sépulture les ossements des rois de Juda et les ossements de ses chefs, et les ossements des Cohenim, et les osse- ments des prophètes, et les ossements des habitants de Jérusa- lem, etc. »

La prophétie s est accomplie, sans doute, mais à quelle époque? mais par qui? S'agit-il bien des Chaldéens, puisque nous lisons (chap, v, vers. 15): «J'amènerai contre vous une nation de loin, ô maison d'Israël, dit Jéhova; c'est une nation forte, cest une nation antique, nation dont tu ne comprendras pas le langage ; tu ne compren- dras pas ce qu'elle dira . » Et plus loin (vers. 17): « Elle mangera ta moisson et ton pain , mangera tes fils et tes filles , mangera tes brebis et tes bœufs, mangera ta vigne et ton figuier, démolira par le fer tes villes fortes, dans lesquelles tu te confies. »

Certes, il y a dans ce verset beaucoup plus de poésie que de pro- phétie à prendre à la lettre. Les Chaldéens n'ont mangé ni garçon, ni fille à Jérusalem, et dans ce verset 17, aussi bien que dans le ver- set 1 du chapitre vin, il est permis de ne voir que la menace for- mulée sous la forme la plus terrible, comme la plus poétique.

M. Quatremère , pour se décider à accorder un fond de vérité au récit de Josèphe, imagine une combinaison de chambre extérieure du tombeau de David, devenue la succursale du trésor royal, chambre vidée plus d'une fois, avant la venue des Chaldéens et définitivement par ceux-ci; remplie de nouveau par les Asmoméens, malgré l'affreuse profanation que les Chaldéens avaient fait subir au tombeau royal, bien longtemps avant Hyrcan, profanation qui, par parenthèse, avait dû mettre le caveau en fort mauvais état ; et enfin vidée par Hyrcan, pour se délivrer de l'ennemi qui l'assiégeait. Cette explication ex- trêmement ingénieuse, sans doute, n'est pas de mon goût, j'éprouve le vif regret ďen devoir convenir.

J'éprouve un regret non moins vif à voir M. Quatremère se trom- per souvent, quand il fait, du fond de son cabinet, de la topographie hiérosolymitaine. Si du moins, n'ayant pas visité les lieux, il pre- nait la peine de visiter les plans exacts de la ville, il ne serait pas exposé à commettre des erreurs comme la suivante : « La colline de Millo, sur laquelle Salomon avait fait élever le palais de la reine, se trouvait placée vis-à-vis de la colline de Sion ; par conséquent, pour y arriver il fallait d'abord descendre dans la vallée, puis monter la colline de Millo. » Il n'y a pas moyen de trouver une colline de Millo à Jérusalem ; donc , pas de vallée entre la prétendue colline de Millo

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SUR LES TOMBEAUX DES ROIS- 235 et le mont Sion. II y a plus , qu'était-ce que le lieu nommé Meloua par l'écrivain sacré, et Millo par les inventeurs de la belle pronon- ciation hébraïque qui tient si fort au cœur de M. Quatremère? Meloua était une VALLÉE, bien loin d'être une colline; c'était une pnrliedu Tyropœon, et pas autre chose (t). (Voy. Samuel (II, 5, 9) ; lìois, I, ix, 15; I, xi, 27; II, xii, 21; Chroniques, I, ii , 8; II, 32, 5.)

Un mot à propos du dernier verset cité ( Chron ., II, 32, 5); nous y lisons « Et il fortifia Meloua, cité de David, etc. »

Tn Tjr Nitan-nN ptrm

Comment accorder ceci avec le verset (Samuel ,11, 5, 9), où il est dit : «David demeura dans la forteresse qu'il appela ville de David? »

Prenons tout à la lettre une bonne fois pour toutes , je le veux bien ; mais alors nous aurons bien de la peine à nous tirer d'affaire et à nous comprendre. Ainsi , la cité de David, c'est, dit M. Quatre- mère, la forteresse de Sion ; la fille de Pharaon, femme de Salomon, sort de la cité de David, pour aller habiter à Meloua; Meloua est donc hors de la cité de David. - Mais, d'un autre côté, Meloua est la cité de David, appelée ailleurs la cité de Judal

Tout ceci me paraît fort embrouillé, et j'attendrai que M. Quatre- mère, qu'aucune difficulté ne saurait arrêter, veuille bien nous don- ner le mot de cette ériigmd si compliquée. Je me hâte, du reste, de prévenir M. Quatremère que je ne suis pas seul d'un avis diamétra- lement opposé au sien, quant à ce qu'il appelle malencontreusement une colline. Dutripon , qui peut bien passer, j'imagine, pour avoir lu et compris la Bible, dit au mot Millo : « Vallis erat sive vorago, « inter montem Sion in quo erat arx David et montem Moriah « in quo structnm est templům. » Williams , le savant auteur du livre intitulé : The holy city, livre qu'il n'a écrit qu'après avoir très- longuement étudié sur place tous les problèmes qu'offrait la topo- graphie de l'ancienne Jérusalem , Williams identifie le Tyropœon et

(1) Une des plus singulières inventions topographiques de M. Quatremère se trouve dans son premier Mémoire inséré dans la Revue archéologique : les maisons occupées par la population de Jérusalem, dit-il, étaient construites principalement dans la vallée qui s'étendait au nord de Sion, dans la direction des collines de Moriah et d'Akra! Or il suffît de regarder un plan de Jérusalem pour voie que le mont Moriah est à l'orient de Sion , que Akra est au nord de Sion et du Moriah, et que par conséquent la vallée en question ne pouvait pas être au nord de Sion dans la direction des collines de Moriah et d'Akra. A tout le moins, M. Quatremère a mal dit ce qu'il voulait dire.

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236 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. Meloua (t. II, p. 41), comme l'identifiaient, avant lui, Brocardus, Adrichomius et Lightfoot. Voilà donc une vallée devenue colline pour M. Quatremère. Nous allons le voir tout à l'heure, en manière de compensation, d'une vraie colline faire un village.

Je ne m'arrêterai pas à l'histoire du renvoi de la reine à Meloua , histoire que M. Quatremère raconte avec une conviction exemplaire, en faisant encore intervenir un prophète anonyme dont la présence lui est commode pour étayer sa narration.

M. Quatremère tient à répéter que je n ai pas compris le passage de Josèphe, relatif à la ville de Tibériade, passage dont je me suis servi pour démontrer l'invraisemblance de la situation de tombeaux quel- conques a l'intérieur de la citadelle de Sion. Mais mon docte adversaire tient beaucoup moins à prouver que je me suis trompé; il l'affirme: pour lui, peut-être, cela vaut une démonstration , pour moi et pour beaucoup d'autres sans doute, cette démonstration n'est pas suffi- sante; on va voir que j'ai raison de penser ainsi.

Comme il peut arriver que le lecteur n'ait pas le temps de recourir au texte et aux traductions proposées par M. Quatremère et par moi, je n'hésite pas à reproduire traductions et texte, afin que l'on appré- cie, en connaissance de cause, la valeur d'une assertion pareille sous la plume de M. Quatremère. Josèphe dit ( Antiquités judaïques , livre XVIII, chap, n, par. 3) :

.... Avayxaajxa tou (jl-Jj a7roXet^siv r))v noXiv e7UtiÔeiç xaxaaxsuaTç te oïxvfaetov teXeiock; tyjç ocutou xal -pjc airoSoaei, etow; Trapávojxov tov oixi<T[/.òv ovxa xal arcò tou 'louSaioiç TOXTptou, Sia to I71I (xv^aaiv , a xoXXà tt,$£ r,v , ávTrprjixsvoiç TTjv iSpuaiv TičeptáSt y£V£(j0at , [xtocpoùç Se g-rci £jit3c 7)[/.£paç gžvai tou; oix^Topaç, wç ayopEust jjjjiiv to vofxtfx^v.

Voici ma traduction , que je n'ai pas eu la prétention de rendre littérale, mais dans laquelle j'ai voulu donner le sens exact du texte :

(( .... Et pour les décider à] habiter dans cette ville.... il fit bâtir leurs maisons et leur donna des terres, parce qu'il savait qu'il était contraire aux lois et aux mœurs judaïques d'habiter une ville pareille. En effet, en construisant Tibériade on avait détruit un certain nombre de sépultures qui se trouvaient sur son emplacement, et notre loi déclare impur , pendant sept jours , quiconque habite un lieu semblable. »

M. Quatremère affirme que je n'ai pas entendu ce passage, et, pour le prouver, il donne à son tour la traduction suivante ;

« Il réunit un grand nombre de Juifs, auxquels il enjoignit de ne

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SUR LES TOMBEAUX DES ROIS. 237

plus quitter la ville; il leur assigna des terres et l'argent nécessaire pour bâtir leurs maisons, sachant bien que leur séjour en ce lieu était contraire aux lois judaïques, attendu que pour les travaux de construction on avait enlevé un grand nombre de tombeaux, et que ceux qui habitent dans le voisinage doivent, d'après nos lois, subir une souillure de sept jours. »

Franchement, si je n'ai pas compris ce passage, M. Quatremère ne la pas compris non plus , puisque nous y trouvons exactement la même chose ; ce n est qu a partir des conclusions que nous divergeons.

Quant aux Qbour-el-Molouk, M. Quatremère a dit d'abord quii ne pensait pas que les ornements qui décorent l'entrée de ces grottes pussent offrir des caractères d'une haute antiquité. Dans son dernier Mémoire , cette opinion a , comme tant d'autres, passé à l'état de dé- monstration , et nous trouvons cette expression modeste : j'ai prouvé, je crois, que les ornements, etc., etc. Que M. Quatremère prenne la peine de le prouver encore une fois, ce ne sera pas de trop.

M. Quatremère est l'homme du moment , et pour les besoins de la cause il sait prestement modifier ses propres opinions; té- moin le passage suivant : «Au reste, il ne faut pas non plus se faire illusion en exagérant les dépenses énormes que dut réclamer un monument tel que celui qui porte le nom de Tombeaux des rois. » Dans son premier Mémoire, je lis la phrase suivante : « D'un autre côté, ce ne fut pas dans les temps qui suivirent la captivité de Baby- lone que les Juifs, en butte aux attaques et à la jalousie des peuples voisins, soumis successivement aux Perses et aux Séleucides, aux rois d'Egypte, purent se livrer à des constructions si dispendieuses. »

Lequel des deux avis, en définitive, adopte M. Quatremère? il devrait au moins le dire, pour n'avoir par l'air de ne croire que ce

qu'il a besoin de croire à un moment donné. Je nose plus, en vérité, me citer moi-même quand il s'agit de

discuter un point de la topographie de Jérusalem. M. Quatremère la connaît si bien, et je la connais si mal, que j'aime mieux mettre mes

opinions personnelles à l'abri derrière les opinions de ceux qui, comme moi, ont eu l'idée de se donner la peine, fort superflue, d'étu- dier à fond un terrain que l'on connaît bien mieux, quand on ne l'a pas vu; c'est ainsi que je me trouve très-heureux d'être de l'avis de MM. Schulz, Robinson et Williams quant à la situation du (/.v^etov eHpoSou. Il est vrai que M. Quatremère ne saurait partager cette opi- nion, et voici pourquoi: «Josèphe raconte que Titus avait placé son

camp au village de Scopus (le village de Scopus, c'est la colline

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238 REVUE ARCHÉOLOGIQUE.

qui domine au nord la vallée de Josaphat, cest la colline que l'on gravit, immédiatement après avoir longé la cour carrée des Qbour- el-MoIouk, quand on s'éloigne de Jérusalem. Je prie M. Quatremèrc de relire plus attentivement les passages de Josèphe où il est question du Scopus, et il sera d'accord avec moi , j'espère, pour biffer le nom Scopus de la liste des villages de Judée. Titus donc, «voulant se rapprocher des murs de Jérusalem , fit aplanir par ses soldats tout l'espace qui s'étendait depuis Scopus (sic) jusqu'au monument d'Hé- rode. Comme le village indiqué se trouvait au nord de Jérusalem , le travail des soldats romains dut se diriger vers le lieu où existaient les tombeaux des rois. »

Ceci implique que les soldats de Titus ont comblé la vallée de Josaphat, et rien de plus, puisque sur le revers opposé au Scopus est immédiatement placé le tombeau des rois. Voilà encore une explica- tion topographique fort neuve, j'en conviens, mais malheureusement moins possible que neuve.

M. Quatremère ajoute que plus tard, Titus, voulant inspecter par lui-même les remparts de Jérusalem, en fit le tour. J'ai vainement cherché trace de cette promenade de Titus au lieu indiqué par M. Qua- tremère , je n'ai trouvé que la description des travaux de circonval- lation que Titus fit établir pour resserrer la place. M. Quatremère met le camp de Titus à l'orient de la ville : cette fois encore c'est l'occident qu'il aurait fallu dire; mais ceci est un détail, et nous commençons à être habitués à ces modifications de la carte du pays, mise à l'usage de M. Quatremère. Je n'ajouterai plus qu'un mot, c'est que le cHpóSou (¿vy^etov était placé à l'extrémité du terrain sur lequel Ti- tus pouvait diriger ses attaques contre Jérusalem et près de la Piscine des serpents; cest Josèphe qui le dit (Bell. jud., V, m, 2). Or, de l'avis de tout le monde, la Piscine, des serpents, c'est le Birket •Mamillah, placé bien réellement au point extrême que Titus devait occuper militairement, avant de commencer ses attaques contre la place , et le Birket Mamillah est précisément a côté des caves funé- raires et des ruines dans lesquelles Schulz a le premier reconnu le {/.v7)|a£Tov cHpo)Sou ; c'est donc bien là la Piscine des serpents.

Un mot encore et j'ai fini. A propos de Néhémie, j'avais répondu à ce que j'avais entendu lire par M. Quatremère, dans le sein de l'Aca- démie ; à l'impression, les idées de mon savant critique se sont modi- fiées , et malheureusement elles ne se sont modifiées que pour nous offrir une grosse erreur topographique de plus. Je dois donc aujour- d'hui renoncer à ce que j'ai dit dans ma première réponse, à savoir que

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SUR LES TOMBEAUX DES ROIS. 239

j 'étais charmé de voir qu'on expliquât, à peu près comme je l'avais fait beaucoup plus longuement moi-même, dans le Mémoire que l'on attaquait, la promenade nocturne de Néhémie autour des murailles de Jérusalem. Sans doute cet accord dont je me félicitais pour ma part, n'a pas été longtemps du goût de M. Quatremère, car après avoir pris d'abord le nord pour le midi, tout en disant, à cela près, ce que j'avais dit moi-même, le savant académicien a mieux aimé se mettre en opposition bien plus nette avec moi, en arrangeant cette fois une promenade impossible pour Néhémie. Ceci , je ne me borne- rai pas à le dire , je vais le prouver. Voici en eflet ce que je lis dans le premier Mémoire imprimé de M. Quatremère.

« Néhémie sortit par la porte qui débouchait sur la vallée de Hin- nom, côtoya le midi de la montagne de Sion, se dirigea vers le grand réservoir appelé Piscine du Roi ; après avoir contourné une partie de la ville , il s'engagea dans le lit du torrent de Cédron et arriva au lieu d'où il était parti. »

Or cet itinéraire, de quelque côté qu'on le prenne, n'est pas pos- sible; voilà Néhémie sorti par la porte qui débouche sur la vallée de Hinnom, c'est-à-dire par un point quelconque placé au sud de la colline de Sion, puisque la vallée de Hinnom est formée par l'escarpe- ment sud de Sion et vient recouper perpendiculairement la vallée du Cédron, au point même ou finit l'escarpement est de Sion. Néhémie côtoie donc réellement le midi de la montagne de Sion, en marchant forcément à l'ouest, puisqu'il se dirige vers le grand réservoir appelé Piscine du Roi: c'est le Birket-es-Soulthan, placé au bas de la pointe sud-ouest de Sion, juste au-dessous de la citadelle de David. Il con- tourne ensuite une partie de la ville, c'est-à-dire forcément toute la partie occidentale, puis toute la partie septentrionale, puis une portion de la partie orientale ; il s'engage enfin dans le lit du Cédron

( ce qui était assez mal imaginé, puisqu'il s'agissait de vérifier l'état de murailles placées en moyenne à deux cents mètres de là et à deux cents pieds au-dessus) ; mauvais moyen, on en conviendra, d'appré- cier dans l'obscurité de la nuit l'état des murs d'enceinte. Mais que dit le texte? «Et je montai pendant la nuit par le torrent. » Si donc Néhémie a monté par le torrent, il n'a pas descendu par là ; donc au lieu de marcher du nord au sud, il a dû de toute nécessité marcher du sud au nord. Schulz place la porte de la vallée sur la vallée de Jehosaphat, à l'angle sud-est de l'enceinte du temple, bien loin, par conséquent, de la vallée de Hinnom; je la place moi-même sur la vallée de Jehosaphat, mais à l'emplacement actuel de la porte Saint-

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240 REVUE ARCHÉOLOGIQUE. Ětienne, c'est-à-dire à quelques centaines de mètres plus au nord. Toutefois, je ne prétends pas affirmer que j'ai raison ; je n'affirme qu'une chose, c'est que M. Quatremère a tort sur ce point. L'explica- tion de M. Quatremère ne peut plus être examinée si Néhémie, sorti par la porte de la vallée , marche à l'orient, car tout le reste de cet itinéraire se trouve alors au rebours de ce que le terrain présente en réalité. Je prends donc la liberté de persister dans l'explication que j'ai donnée de l'inspection nocturne de Néhémie, en rejetant formelle- ment maintenant celle que présente M. Quatremère.

Le reste du Mémoire de M. Quatremère est à l'adresse de mon savant confrère, M. Raoul Rochette ; je n'ai donc pas à m'en occu- per. Cette fois encore je terminerai en promettant à M. Êtienne Quatremère de ne reculer désormais devant aucun de ses jugements critiques, et de leur faire subir la discussion minutieuse queje viens de faire subir à son dernier Mémoire.

F. de Saulcy.

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