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"S? RECHERCHE ET FORMATION QUELLE FORMATION PEDAGOGIQUE POUR LES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR ? 15 - 1994 Institut National de Recherche Pédagogique Département "Poutiques, pratiques et acteurs de l'éducation" "S? RECHERCHE ET FORMATION QUELLE FORMATION PEDAGOGIQUE POUR LES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR ? 15 - 1994 Institut National de Recherche Pédagogique Département "Poutiques, pratiques et acteurs de l'éducation"

revue RECHERCHE ET FORMATIONife.ens-lyon.fr/publications/edition-electronique/... · 2012-01-27 · Recherche et Formation fait désormais paraître trois numéros par an (dont un

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RECHERCHEET

FORMATION

QUELLE FORMATION PEDAGOGIQUE

POUR LES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR ?

N° 15 - 1994

Institut National de Recherche Pédagogique

Département "Poutiques, pratiques et acteurs de l'éducation"

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RECHERCHEET

FORMATION

QUELLE FORMATION PEDAGOGIQUE

POUR LES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR ?

N° 15 - 1994

Institut National de Recherche Pédagogique

Département "Poutiques, pratiques et acteurs de l'éducation"

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Recherche et Formation fait désormais paraîtretrois numéros par an (dont un numéro hors thème)

Vous pouvez écrire dans « Recherche et Formation ».

Envoyez-nous vos articles. Ceux-ci devront être dactylographiéset ne pourront dépasser 15 pages (65 signes x 30 Ugnes par page).Veuillez joindre une disquette en indiquant son formatage, le typed'ordinateur et le traitement de textes utilisés.Joindre enfin un résumé de 10 lignes.Les faire parvenir à :

Recherche et FormationÀ l'attention de Raymond BOURDONCLE

INRP - 29, rue d'Ulm - 75230 Paris cedex 05

Pour tous renseignements complémentaires : (1) 46.34.91.19

N°N°

17

18

Thèmes retenus el dates limites de réceptionpour les prochains numéros

- La recherche comme outil de forLes enseignants et l'Europe

mation

des

25

articles

lfirjuinnovembre

19941994

Couverture : J. SACHS - INRP

Composition P.A.O. - MaqiittllR : N. PELLIEUX

© INRP, 1994ISBN: 2-7342-0413-2

Recherche et Formation fait désormais paraîtretrois numéros par an (dont un numéro hors thème)

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Envoyez-nous vos articles. Ceux-ci devront être dactylographiéset ne pourront dépasser 15 pages (65 signes x 30 Ugnes par page).Veuillez joindre une disquette en indiquant son formatage, le typed'ordinateur et le traitement de textes utilisés.Joindre enfin un résumé de 10 lignes.Les faire parvenir à :

Recherche et FormationÀ l'attention de Raymond BOURDONCLE

INRP - 29, rue d'Ulm - 75230 Paris cedex 05

Pour tous renseignements complémentaires : (1) 46.34.91.19

N°N°

17

18

Thèmes retenus el dates limites de réceptionpour les prochains numéros

- La recherche comme outil de forLes enseignants et l'Europe

mation

des

25

articles

lfirjuinnovembre

19941994

Couverture : J. SACHS - INRP

Composition P.A.O. - MaqiittllR : N. PELLIEUX

© INRP, 1994ISBN: 2-7342-0413-2

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SOMMAIRE DU N° 15

QUELLE FORMATION PÉDAGOGIQUEPOUR LES ENSEIGNANTS DU SUPERIEUR ?

EDITORIAL : AnnieBIREAUD 5

ÉTUDES ET RECHERCHES

Marie-Françoise FAVE-BONNET : Le métier d'enseignant-chercheur : des missions contradictoires ? H

Marguerite ALTET : Le cours magistral universitaire :

un discours scientifico-pédagogique sans articulationenseignement-apprentissage

Renée SIMONET : Le monitorat d'enseignement supérieur ... 45

Bernard DUMONT : Nouvelles technologies et formation des

enseignants du supérieur

Jean DEMAL : Quels enseignants pour une universitéen mutation ?

Brigitte BERENDT : La formation des enseignants du supé¬rieur à la didactique : informations sur des actions en Europe 91

ENTRETIEN : avec Pierre LENA 101

AUTOUR DES MOTS : Enseignement supérieur et UniversitéAnnieBIREAUD 113

Compléments bibliographiques 126

SOMMAIRE DU N° 15

QUELLE FORMATION PÉDAGOGIQUEPOUR LES ENSEIGNANTS DU SUPERIEUR ?

EDITORIAL : AnnieBIREAUD 5

ÉTUDES ET RECHERCHES

Marie-Françoise FAVE-BONNET : Le métier d'enseignant-chercheur : des missions contradictoires ? H

Marguerite ALTET : Le cours magistral universitaire :

un discours scientifico-pédagogique sans articulationenseignement-apprentissage

Renée SIMONET : Le monitorat d'enseignement supérieur ... 45

Bernard DUMONT : Nouvelles technologies et formation des

enseignants du supérieur

Jean DEMAL : Quels enseignants pour une universitéen mutation ?

Brigitte BERENDT : La formation des enseignants du supé¬rieur à la didactique : informations sur des actions en Europe 91

ENTRETIEN : avec Pierre LENA 101

AUTOUR DES MOTS : Enseignement supérieur et UniversitéAnnieBIREAUD 113

Compléments bibliographiques 126

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4 Recherche et Formation

NOTES CRITIQUES

Alternance et formation : deux positions (Annette Gonnin-Bolo)

Marie-Laure CHALX : Se former en alternance. Le cas del'enseignement agricole ;

Antonio MONACO : L'alternance école-production

Professeurs ou enseignants : deux visions différentes(Raymond Bourdoncle)

Yves DUTERCQ : Les professeurs ;

Monique HIRSCHHORN : L'ère des enseignants

J. CHARTIER, A. DEVlNEAU-MALBEC, N. FAINGOLD,M.-F. FAVE-BONNET, G. FERRY, D. VILLERS : Initier aux savoirsde la pratique (F. Grduszak)

André CHERVEL : Histoire de l'Agrégation. Contribution à

l'histoire de la culture scolaire (Jean-Paul Martin) 127

ACTUALITE*

Actualité générale1 . Rencontres et colloques 1472. Prochaines rencontres 1603. Thèses concernant les professions de l'éducation

et la formation qui s'y rapporte, soutenues en Franceen 1992 161

* Exceptionnellement la rubrique IUFM Actualités ne paraîtrapas dans cette livraison.

4 Recherche et Formation

NOTES CRITIQUES

Alternance et formation : deux positions (Annette Gonnin-Bolo)

Marie-Laure CHALX : Se former en alternance. Le cas del'enseignement agricole ;

Antonio MONACO : L'alternance école-production

Professeurs ou enseignants : deux visions différentes(Raymond Bourdoncle)

Yves DUTERCQ : Les professeurs ;

Monique HIRSCHHORN : L'ère des enseignants

J. CHARTIER, A. DEVlNEAU-MALBEC, N. FAINGOLD,M.-F. FAVE-BONNET, G. FERRY, D. VILLERS : Initier aux savoirsde la pratique (F. Grduszak)

André CHERVEL : Histoire de l'Agrégation. Contribution à

l'histoire de la culture scolaire (Jean-Paul Martin) 127

ACTUALITE*

Actualité générale1 . Rencontres et colloques 1472. Prochaines rencontres 1603. Thèses concernant les professions de l'éducation

et la formation qui s'y rapporte, soutenues en Franceen 1992 161

* Exceptionnellement la rubrique IUFM Actualités ne paraîtrapas dans cette livraison.

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Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

EDITORIAL

Que Recherche et Formation consacre, ne serait-ce qu'en vertu deson nom, un numéro entier aux enseignants-chercheurs n'étonnera per¬sonne. Par contre que ce numéro porte sur leur formation, non à larecherche, mais à l'enseignement, voilà qui peut passer pour une gageuretant on sait que la pédagogie ou même la didactique sont étrangères auxpréoccupations des universitaires.

A l'Université, la pédagogie est, le plus souvent, envisagée sous laforme de l'organisation des flux étudiants, des emplois du temps, desexamens ou encore sous celle de l'élaboration d'une demande d'habilita¬tion de diplômes ou de création de diplômes d'Université et il ne s'agitpas d'aspects mineurs... loin de là. Cependant les questions concernantle processus enseigner-apprendre, l'organisation des situations pédago¬giques, les procédures de contrôle des connaissances, pour ne citer quequelques exemples, sont très largement ignorées.

La notion même de formation renvoie à celle de métier et les universi¬taires ne considèrent pas majoritairement l'exercice de leur professioncomme celui d'un métier et encore moins comme celui du métier d'ensei¬gnant. Ils sont très attachés aux libertés académiques, gages de libertéd'esprit et de critique mais qui permettent aussi d'organiser temps etespace de travail à sa guise. Toutefois, les transformations actuelles del'enseignement supérieur et tout spécialement pour les universités, lamassification et la diversification des filières professionnalisées modifientquelque peu les termes du problème.

La recherche se complevifie et se spécialise de plus en plus dans desmicro domaines du savoir pendant que la formation d'un grand nombred'étudiants de premier et même de second cycle reste forcément plusgénéraliste et que les formations professionnalisées sont nécessairementpluridisciplinaires. Dans ces conditions les enseignants-chercheurs sont

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

EDITORIAL

Que Recherche et Formation consacre, ne serait-ce qu'en vertu deson nom, un numéro entier aux enseignants-chercheurs n'étonnera per¬sonne. Par contre que ce numéro porte sur leur formation, non à larecherche, mais à l'enseignement, voilà qui peut passer pour une gageuretant on sait que la pédagogie ou même la didactique sont étrangères auxpréoccupations des universitaires.

A l'Université, la pédagogie est, le plus souvent, envisagée sous laforme de l'organisation des flux étudiants, des emplois du temps, desexamens ou encore sous celle de l'élaboration d'une demande d'habilita¬tion de diplômes ou de création de diplômes d'Université et il ne s'agitpas d'aspects mineurs... loin de là. Cependant les questions concernantle processus enseigner-apprendre, l'organisation des situations pédago¬giques, les procédures de contrôle des connaissances, pour ne citer quequelques exemples, sont très largement ignorées.

La notion même de formation renvoie à celle de métier et les universi¬taires ne considèrent pas majoritairement l'exercice de leur professioncomme celui d'un métier et encore moins comme celui du métier d'ensei¬gnant. Ils sont très attachés aux libertés académiques, gages de libertéd'esprit et de critique mais qui permettent aussi d'organiser temps etespace de travail à sa guise. Toutefois, les transformations actuelles del'enseignement supérieur et tout spécialement pour les universités, lamassification et la diversification des filières professionnalisées modifientquelque peu les termes du problème.

La recherche se complevifie et se spécialise de plus en plus dans desmicro domaines du savoir pendant que la formation d'un grand nombred'étudiants de premier et même de second cycle reste forcément plusgénéraliste et que les formations professionnalisées sont nécessairementpluridisciplinaires. Dans ces conditions les enseignants-chercheurs sont

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6 Recherche et Formation

de plus en plus souvent amenés à assurer des enseignements dans des sec¬

teurs qui, bien qu'appartenant à leur discipline, ne correspondent pasdirectement à leurs intérêts de recherche. Leur situation a tendance à se

rapprocher de celle des autres enseignants : ils ne se consacrent plus seu¬lement à la formation de jeunes chercheurs mais ils doivent faireapprendre les étudiants, les aider à apprendre et donc s'intéresser àleurs difficultés : ils entrent dans la pratique du métier d'enseignant et se

pose alors la question de la formation à ce métier, nouveau à bien deségards.

La question ne s'est posée, en France, que récemment, il y a unedizaine d'années environ, à la différence du monde anglo-saxon et nordaméricain qui considère depuis plus longtemps la fonction enseignantecomme une des tâches essentielles des professeurs d'Université et quiprévoit souvent formation à l'enseignement et évaluation des pratiquespédagogiques. Les associations et les organisations internationales jouentun rôle non négligeable dans la sensibUisation à ce problème et dans leséchanges concernant les pratiques existantes.

Néanmoins, il n'existe toujours pas de consensus sur la nécessitéd'une formation à l'enseignement pour les enseignants du supérieur etcertains universitaires y sont tout à fait hostiles, préférant le recrutementpour les premiers cycles universitaires, d'enseignants à temps plein, d'unstatut différent de celui des enseignants-chercheurs ou la création d'éta¬blissements non universitaires pour dispenser des formations post bacca¬lauréat, notamment des formations professionnalisées. Toutefois, ledébat s'est un peu déplacé, dans la mesure où majoritairement le corpsuniversitaire reste attaché, semble-t-il, à l'unicité du métier mais dans lamesure aussi où la fonction d'enseignement est devenue manifestementplus importante, ne fut-ce qu'en raison de l'afflux d'étudiants. On dis¬cute donc, maintenant, peut-être plus sur les contenus et les modaUtés decette formation que sur sa nécessité.

À cet égard, l'entretien que nous a accordé Pierre Lena est très inté¬ressant et éclaire bien la problématique dans laquelle s'inscrit cette ques¬tion. Professeur de physique, universitaire à la carrière classique, il s'estintéressé à la formation des enseignants-chercheurs à l'enseignement et ila piloté, dans les années 1983-1986, une commission dont les travaux ontinspiré en grande partie la création du monitorat. Dans cet entretien,Pierre Lena souligne l'importance de l'enseignement, fonction majeurede l'Université, et il estime indispensable pour l'exercer une connais¬sance de « l'entreprise Université ». Par contre, il demande : « Est-ceque la pédagogie s'apprend ? » et se dit « sceptique » ; il envisage plutôt

6 Recherche et Formation

de plus en plus souvent amenés à assurer des enseignements dans des sec¬

teurs qui, bien qu'appartenant à leur discipline, ne correspondent pasdirectement à leurs intérêts de recherche. Leur situation a tendance à se

rapprocher de celle des autres enseignants : ils ne se consacrent plus seu¬lement à la formation de jeunes chercheurs mais ils doivent faireapprendre les étudiants, les aider à apprendre et donc s'intéresser àleurs difficultés : ils entrent dans la pratique du métier d'enseignant et se

pose alors la question de la formation à ce métier, nouveau à bien deségards.

La question ne s'est posée, en France, que récemment, il y a unedizaine d'années environ, à la différence du monde anglo-saxon et nordaméricain qui considère depuis plus longtemps la fonction enseignantecomme une des tâches essentielles des professeurs d'Université et quiprévoit souvent formation à l'enseignement et évaluation des pratiquespédagogiques. Les associations et les organisations internationales jouentun rôle non négligeable dans la sensibUisation à ce problème et dans leséchanges concernant les pratiques existantes.

Néanmoins, il n'existe toujours pas de consensus sur la nécessitéd'une formation à l'enseignement pour les enseignants du supérieur etcertains universitaires y sont tout à fait hostiles, préférant le recrutementpour les premiers cycles universitaires, d'enseignants à temps plein, d'unstatut différent de celui des enseignants-chercheurs ou la création d'éta¬blissements non universitaires pour dispenser des formations post bacca¬lauréat, notamment des formations professionnalisées. Toutefois, ledébat s'est un peu déplacé, dans la mesure où majoritairement le corpsuniversitaire reste attaché, semble-t-il, à l'unicité du métier mais dans lamesure aussi où la fonction d'enseignement est devenue manifestementplus importante, ne fut-ce qu'en raison de l'afflux d'étudiants. On dis¬cute donc, maintenant, peut-être plus sur les contenus et les modaUtés decette formation que sur sa nécessité.

À cet égard, l'entretien que nous a accordé Pierre Lena est très inté¬ressant et éclaire bien la problématique dans laquelle s'inscrit cette ques¬tion. Professeur de physique, universitaire à la carrière classique, il s'estintéressé à la formation des enseignants-chercheurs à l'enseignement et ila piloté, dans les années 1983-1986, une commission dont les travaux ontinspiré en grande partie la création du monitorat. Dans cet entretien,Pierre Lena souligne l'importance de l'enseignement, fonction majeurede l'Université, et il estime indispensable pour l'exercer une connais¬sance de « l'entreprise Université ». Par contre, il demande : « Est-ceque la pédagogie s'apprend ? » et se dit « sceptique » ; il envisage plutôt

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Editorial 7

une « sensibilisation aux problèmes de la communication » et à laformule : « formation pédagogique » il préférerait une expressioncomme : « sensibilisation à la difficulté pédagogique ». Quant aux moda¬lités, il reste fidèle à la tradition universitaire du « compagnonnage quifait passer progressivement des bancs au tableau noir » et il pense quel'apprentissage du métier d'enseignant doit se faire sur le terrain, à

l'intérieur d'une équipe où peuvent se confronter les expériences.

Devant une question aussi vaste et aussi controversée, à laquelle peude chercheurs se sont intéressés, nous avons essayé de faire le point del'existant et de situer, pour éclairer les problèmes posés, la formationpédagogique des enseignants du supérieur dans le contexte de la mutationde l'enseignement supérieur et de la professionnalisation du métierd'enseignant.

Marie Françoise Fave-Bonnet, à partir des résultats de l'enquêtequ'elle a conduite, en 1990 et 1991, sur le métier d'enseignant-chercheur,auprès de plus de 1 000 enseignants de toutes disciplines, et à partir desrésultats de l'enquête de Jean Michel Berthelot, nous introduit dans lesréalités du métier et dans les opinions qu'en ont les intéressés eux-mêmes. Elle souligne les contradictions entre les obligations statutairesdéfinies exclusivement en charge d'enseignement, les missions aussi nom¬breuses que générales et les critères de recrutement et de promotion quiportent principalement sur les activités de recherche. Les situations sontextrêmement diverses : discipline, statuts, sexe, âge, établissementd'exercice, mais, au delà de cette diversité, les enseignants-chercheurs(ou les universitaires ?) ressentent une dégradation de leurs conditions detravail qui va de pair avec la multiplication des tâches et notamment destâches administratives. Cependant, les enseignants-chercheurs ne se sen¬

tent concernés ni par la formation ni par la réflexion pédagogique ;

Marie Françoise Fave-Bonnet avance plusieurs hypothèses pour com¬prendre ce fait : outre la prépondérance accordée à la recherche par plusde la moitié de son échantillon, elle pense que l'expérience acquise - laplupart ont quinze ou vingt ans de carrière -, l'absence de « difficultéspédagogiques » face à un public « otage » et peut-être le souci de préser¬ver, au nom de la liberté pédagogique, l'idée que les professeurs« savent » et que l'enseignement est efficace, sont des éléments qui peu¬vent permettre de comprendre cette indifférence.

Pourtant, les résultats de la recherche de Marguerite Altet sur lecours magistral universitaire montrent qu'une formation pédagogique neserait peut-être pas absolument inutile ; en effet, le cours magistral peutse caractériser comme : un « discours qui dit », une « intervention

Editorial 7

une « sensibilisation aux problèmes de la communication » et à laformule : « formation pédagogique » il préférerait une expressioncomme : « sensibilisation à la difficulté pédagogique ». Quant aux moda¬lités, il reste fidèle à la tradition universitaire du « compagnonnage quifait passer progressivement des bancs au tableau noir » et il pense quel'apprentissage du métier d'enseignant doit se faire sur le terrain, à

l'intérieur d'une équipe où peuvent se confronter les expériences.

Devant une question aussi vaste et aussi controversée, à laquelle peude chercheurs se sont intéressés, nous avons essayé de faire le point del'existant et de situer, pour éclairer les problèmes posés, la formationpédagogique des enseignants du supérieur dans le contexte de la mutationde l'enseignement supérieur et de la professionnalisation du métierd'enseignant.

Marie Françoise Fave-Bonnet, à partir des résultats de l'enquêtequ'elle a conduite, en 1990 et 1991, sur le métier d'enseignant-chercheur,auprès de plus de 1 000 enseignants de toutes disciplines, et à partir desrésultats de l'enquête de Jean Michel Berthelot, nous introduit dans lesréalités du métier et dans les opinions qu'en ont les intéressés eux-mêmes. Elle souligne les contradictions entre les obligations statutairesdéfinies exclusivement en charge d'enseignement, les missions aussi nom¬breuses que générales et les critères de recrutement et de promotion quiportent principalement sur les activités de recherche. Les situations sontextrêmement diverses : discipline, statuts, sexe, âge, établissementd'exercice, mais, au delà de cette diversité, les enseignants-chercheurs(ou les universitaires ?) ressentent une dégradation de leurs conditions detravail qui va de pair avec la multiplication des tâches et notamment destâches administratives. Cependant, les enseignants-chercheurs ne se sen¬

tent concernés ni par la formation ni par la réflexion pédagogique ;

Marie Françoise Fave-Bonnet avance plusieurs hypothèses pour com¬prendre ce fait : outre la prépondérance accordée à la recherche par plusde la moitié de son échantillon, elle pense que l'expérience acquise - laplupart ont quinze ou vingt ans de carrière -, l'absence de « difficultéspédagogiques » face à un public « otage » et peut-être le souci de préser¬ver, au nom de la liberté pédagogique, l'idée que les professeurs« savent » et que l'enseignement est efficace, sont des éléments qui peu¬vent permettre de comprendre cette indifférence.

Pourtant, les résultats de la recherche de Marguerite Altet sur lecours magistral universitaire montrent qu'une formation pédagogique neserait peut-être pas absolument inutile ; en effet, le cours magistral peutse caractériser comme : un « discours qui dit », une « intervention

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8 Recherche et Formation

scientifique spécialisée que l'enseignant fait ... en dotant (son public)d'une double compétence scientifique et cognitive ». Et le sondage faitauprès de presque 300 étudiants de licence, montre que plus de la moitiééprouve des difficultés à suivre le cours. La nécessité d'une réflexion surles pratiques ne fait aucun doute ; Marguerite Altet évoque un dispositifde formation continue qu'elle a proposé à des enseignants-chercheursvolontaires : un atelier pédagogique d'analyse des pratiques pédago¬giques qui permet aux participants de s'approprier des outils d'analysequ'ils peuvent ensuite utiliser pour l'analyse de leurs propres cours.

La création du monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur, en1989, veut répondre à des besoins de recrutement accrus par l'augmenta¬tion du nombre d'étudiants et par les prévisions de départs massifs à laretraite des enseignants du supérieur recrutés dans les années 70. RenéeSimonet nous expUque comment fonctionne ce monitorat et queUe forma¬tion professionnelle reçoivent les moniteurs. L'initiation au métier se faitd'abord par la pratique, puisque les moniteurs doivent assurer 1/3 deservice d'enseignement dans l'Université où ils sont affectés, sous ladirection d'un tuteur qui ne peut pas être leur directeur de thèse ; mais,l'initiation se fait aussi par une « formation professionneUe » , organiséepar les CIES (Centre d'initiation à l'Enseignement supérieur) et dont ladurée est au minimum de 10 jours par an (le monitorat dure 3 ans).Renée Simonet nous conduit à travers les 14 CIES et nous montre les dif¬férences qui existent entre les politiques de formation : stages par disci¬plines ou pluridisciplinaires, conférences ou ateUers, contenus très variésqui associent didactique des disciplines entendue de façon très diverse,connaissance des groupes, techniques d'expression, problèmes d'évalua¬tion, méthodes, outils et techniques de formation... Mais toujours, ils'agit d'une initiation au milieu universitaire, et Renée Simonet souUgnecombien le choix de ce terme est significatif : on considère que « le métierd'enseignant-chercheur implique, à l'instar des pratiques du compa¬gnonnage, que l'« apprenti » soit introduit par un « maître » dans laconfrérie ».

Bernard Dumont, en envisageant les relations entre les nouvellestechnologies et la formation des enseignants du supérieur, pose le pro¬blème sous un autre angle. Les difficultés que les Universités rencontrentdu fait de l'augmentation du nombre d'étudiants, de leur hétérogénéité,peuvent trouver des éléments de solution avec le développement de for¬mules de pédagogie différenciée, de soutien... que rendent plus faciles àmettre en �uvre les nouvelles technologies de formation. Or, actuelle¬ment, comme il résulte d'une étude effectué par l'auteur, en 1992, lesenseignants-chercheurs n'utilisent que très peu ces nouveUes techniques

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scientifique spécialisée que l'enseignant fait ... en dotant (son public)d'une double compétence scientifique et cognitive ». Et le sondage faitauprès de presque 300 étudiants de licence, montre que plus de la moitiééprouve des difficultés à suivre le cours. La nécessité d'une réflexion surles pratiques ne fait aucun doute ; Marguerite Altet évoque un dispositifde formation continue qu'elle a proposé à des enseignants-chercheursvolontaires : un atelier pédagogique d'analyse des pratiques pédago¬giques qui permet aux participants de s'approprier des outils d'analysequ'ils peuvent ensuite utiliser pour l'analyse de leurs propres cours.

La création du monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur, en1989, veut répondre à des besoins de recrutement accrus par l'augmenta¬tion du nombre d'étudiants et par les prévisions de départs massifs à laretraite des enseignants du supérieur recrutés dans les années 70. RenéeSimonet nous expUque comment fonctionne ce monitorat et queUe forma¬tion professionnelle reçoivent les moniteurs. L'initiation au métier se faitd'abord par la pratique, puisque les moniteurs doivent assurer 1/3 deservice d'enseignement dans l'Université où ils sont affectés, sous ladirection d'un tuteur qui ne peut pas être leur directeur de thèse ; mais,l'initiation se fait aussi par une « formation professionneUe » , organiséepar les CIES (Centre d'initiation à l'Enseignement supérieur) et dont ladurée est au minimum de 10 jours par an (le monitorat dure 3 ans).Renée Simonet nous conduit à travers les 14 CIES et nous montre les dif¬férences qui existent entre les politiques de formation : stages par disci¬plines ou pluridisciplinaires, conférences ou ateUers, contenus très variésqui associent didactique des disciplines entendue de façon très diverse,connaissance des groupes, techniques d'expression, problèmes d'évalua¬tion, méthodes, outils et techniques de formation... Mais toujours, ils'agit d'une initiation au milieu universitaire, et Renée Simonet souUgnecombien le choix de ce terme est significatif : on considère que « le métierd'enseignant-chercheur implique, à l'instar des pratiques du compa¬gnonnage, que l'« apprenti » soit introduit par un « maître » dans laconfrérie ».

Bernard Dumont, en envisageant les relations entre les nouvellestechnologies et la formation des enseignants du supérieur, pose le pro¬blème sous un autre angle. Les difficultés que les Universités rencontrentdu fait de l'augmentation du nombre d'étudiants, de leur hétérogénéité,peuvent trouver des éléments de solution avec le développement de for¬mules de pédagogie différenciée, de soutien... que rendent plus faciles àmettre en �uvre les nouvelles technologies de formation. Or, actuelle¬ment, comme il résulte d'une étude effectué par l'auteur, en 1992, lesenseignants-chercheurs n'utilisent que très peu ces nouveUes techniques

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Editorial 9

et ne sont pas formés à le faire. Si l'on observe par exemple les moniteursde Paris 6 et 7, on constate qu'ils peuvent suivre des cours sur les appli¬cations éducatives des nouvelles technologies mais qu'il s'agit plutôtd'une sensibUisation que d'une véritable formation ; de même, la quasiinexistence des thèses et des recherches en didactique de l'enseignementsupérieur et tout particuUèrement des recherches portant sur les nou¬veUes technologies, ne rend pas facUe le développement d'une formationdes enseignants-chercheurs dans ces domaines. Et Bernard Dumont cite,à titre de contre-exemple, le cas de l'École Polytechnique de Montréalqui a rendu obligatoire pour les nouveaux enseignants, une formationpédagogique d'environ 100 heures réparties sur la première annéed'exercice.

C'est précisément le propos de Jean Demal que de nous donner desexemples extérieurs. ïl situe la récente évolution en France avec la créa¬tion des CIES, dans un contexte international ; il évoque les initiativesaustraUennes qui remontent aux lendemains de la seconde guerre et quiont essaimé dans l'ensemble du continent nord-américain et du mondeanglo-saxon, et les problèmes spécifiques des pays en voie de développe¬ment. L'exemple, décrit en détaU, de l'Université de Louvain est particu¬lièrement intéressant car il montre comment, dans cette ancienne etprestigieuse université, après les événements de 1968, une lente transfor¬mation s'est opérée dans le sens d'une revalorisation de la missiond'enseignement. Des actions de sensibUisation et de formation pédago¬gique étaient engagées tandis que se développait un système d'évaluationdes enseignements par les étudiants. En même temps le statut du « per¬sonnel académique » évoluait, avec la création d'un dossier d'apprécia¬tion pédagogique qui sert maintenant de base pour l'attribution ou lerenouveUement des « charges d'enseignement ». Cet exemple montre bienque la prise en compte de la pédagogie par les universitaires passe parune reconnaissance institutionnelle de son importance.

Enfin Brigitte Berendt complète notre information sur les actions deformation pédagogique pour les enseignants du Supérieur, telles qu'eUesexistent en AUemagne et dans le cadre de la coopération internationale.

Nous avons l'espoir que cette tentative pour faire le point de cettequestion et ouvrir des pistes de réflexion contribuera à susciter des voca¬tions de chercheur dans ce domaine.

Annie BIREAUDRédacteur en chef invité

Professeur à l'Université de Paris XIII

Editorial 9

et ne sont pas formés à le faire. Si l'on observe par exemple les moniteursde Paris 6 et 7, on constate qu'ils peuvent suivre des cours sur les appli¬cations éducatives des nouvelles technologies mais qu'il s'agit plutôtd'une sensibUisation que d'une véritable formation ; de même, la quasiinexistence des thèses et des recherches en didactique de l'enseignementsupérieur et tout particuUèrement des recherches portant sur les nou¬veUes technologies, ne rend pas facUe le développement d'une formationdes enseignants-chercheurs dans ces domaines. Et Bernard Dumont cite,à titre de contre-exemple, le cas de l'École Polytechnique de Montréalqui a rendu obligatoire pour les nouveaux enseignants, une formationpédagogique d'environ 100 heures réparties sur la première annéed'exercice.

C'est précisément le propos de Jean Demal que de nous donner desexemples extérieurs. ïl situe la récente évolution en France avec la créa¬tion des CIES, dans un contexte international ; il évoque les initiativesaustraUennes qui remontent aux lendemains de la seconde guerre et quiont essaimé dans l'ensemble du continent nord-américain et du mondeanglo-saxon, et les problèmes spécifiques des pays en voie de développe¬ment. L'exemple, décrit en détaU, de l'Université de Louvain est particu¬lièrement intéressant car il montre comment, dans cette ancienne etprestigieuse université, après les événements de 1968, une lente transfor¬mation s'est opérée dans le sens d'une revalorisation de la missiond'enseignement. Des actions de sensibUisation et de formation pédago¬gique étaient engagées tandis que se développait un système d'évaluationdes enseignements par les étudiants. En même temps le statut du « per¬sonnel académique » évoluait, avec la création d'un dossier d'apprécia¬tion pédagogique qui sert maintenant de base pour l'attribution ou lerenouveUement des « charges d'enseignement ». Cet exemple montre bienque la prise en compte de la pédagogie par les universitaires passe parune reconnaissance institutionnelle de son importance.

Enfin Brigitte Berendt complète notre information sur les actions deformation pédagogique pour les enseignants du Supérieur, telles qu'eUesexistent en AUemagne et dans le cadre de la coopération internationale.

Nous avons l'espoir que cette tentative pour faire le point de cettequestion et ouvrir des pistes de réflexion contribuera à susciter des voca¬tions de chercheur dans ce domaine.

Annie BIREAUDRédacteur en chef invité

Professeur à l'Université de Paris XIII

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Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

11

ETUDES ET RECHERCHES

Quelle formation pédagogiquepour les enseignants du supérieur ?

LE METIER D'ENSEIGNANT-CHERCHEURDES MISSIONS CONTRADICTOIRES ?

Marie-Françoise FAVE-BONNET*

Sommaire. Pourquoi la formation à l'enseignement a-t-elle si peu de place à l'Université ?

Le statut et les missions des enseignants-chercheurs, la situation de l'Université aujourd'huiet l'opinion des universitaires sur leur « métier « peuvent aider à comprendre cette absence.En effet, la variété des situations des enseignants-chercheurs, due en particulier à la diffé¬

rence entre les disciplines, entraîne des perceptions spécifiques des missions d 'enseigne¬

ment et de recherche.Cette tentative d'analyse se fonde d'une part sur un certain nombre de textes réglementaireset officiels, d'autre part sur des articles et des livres sur l'Université, et enfin sur les résul¬

tats de deux enquêtes auprès d'enseignants-chercheurs de différentes disciplines (1j.

Summary. Why does teacher training play such a minor role in universities?The status and role of teaching researchers, the situation of universities today and theopinion of academics on their "job" may help us understand this deficiency. Indeed, thevariety of situations among teaching researchers, mainly due to the difference betweensubject matters, entails specific views of teaching and research missions.This attempt to analyse the situation is based first on a number of official rules andregulations, then on articles and books about universities and finally on the results of twosurveys of teaching researchers in various subjects.

* Maître de Conférences de Sciences de l'Éducation, Université Paris X, Nanterre.(1) Il s'agit :

- d'une part, de l'enquête que j'ai menée en collaboration avec Manuel CRESPO del'Université de Montréal, grâce aux subventions de la DESUP 13 (France) et surtout duConseil des Recherches en Sciences Humaines du Canada. Elle s'étaye sur 32 entretiensapprofondis menés en 1990 auprès d'historiens et de physiciens et sur 1 048 réponses à unquestionnaire (1991) portant sur le « métier » d'enseignant-chercheur dans différentesdisciplines. On trouvera une présentation détaillée de l'enquête et de sa méthodologie dansle livre Les enseignants-chercheurs physiciens, Paris, INRP/SFP, 1993, pages 117 à 140 ;

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

11

ETUDES ET RECHERCHES

Quelle formation pédagogiquepour les enseignants du supérieur ?

LE METIER D'ENSEIGNANT-CHERCHEURDES MISSIONS CONTRADICTOIRES ?

Marie-Françoise FAVE-BONNET*

Sommaire. Pourquoi la formation à l'enseignement a-t-elle si peu de place à l'Université ?

Le statut et les missions des enseignants-chercheurs, la situation de l'Université aujourd'huiet l'opinion des universitaires sur leur « métier « peuvent aider à comprendre cette absence.En effet, la variété des situations des enseignants-chercheurs, due en particulier à la diffé¬

rence entre les disciplines, entraîne des perceptions spécifiques des missions d 'enseigne¬

ment et de recherche.Cette tentative d'analyse se fonde d'une part sur un certain nombre de textes réglementaireset officiels, d'autre part sur des articles et des livres sur l'Université, et enfin sur les résul¬

tats de deux enquêtes auprès d'enseignants-chercheurs de différentes disciplines (1j.

Summary. Why does teacher training play such a minor role in universities?The status and role of teaching researchers, the situation of universities today and theopinion of academics on their "job" may help us understand this deficiency. Indeed, thevariety of situations among teaching researchers, mainly due to the difference betweensubject matters, entails specific views of teaching and research missions.This attempt to analyse the situation is based first on a number of official rules andregulations, then on articles and books about universities and finally on the results of twosurveys of teaching researchers in various subjects.

* Maître de Conférences de Sciences de l'Éducation, Université Paris X, Nanterre.(1) Il s'agit :

- d'une part, de l'enquête que j'ai menée en collaboration avec Manuel CRESPO del'Université de Montréal, grâce aux subventions de la DESUP 13 (France) et surtout duConseil des Recherches en Sciences Humaines du Canada. Elle s'étaye sur 32 entretiensapprofondis menés en 1990 auprès d'historiens et de physiciens et sur 1 048 réponses à unquestionnaire (1991) portant sur le « métier » d'enseignant-chercheur dans différentesdisciplines. On trouvera une présentation détaillée de l'enquête et de sa méthodologie dansle livre Les enseignants-chercheurs physiciens, Paris, INRP/SFP, 1993, pages 117 à 140 ;

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12 Recherche et Formation

INTRODUCTION

Analyser la place que les enseignants-chercheurs accordent à leurpropre formation ne peut se faire qu'en situant précisément les diffé¬rentes missions qu'ils doivent assurer. Comme pour toutes les profes¬sions, les demandes et les besoins de formation sont en effet étroitementUés à la définition et à la pratique du métier, mais aussi à l'importanceque les individus ou le milieu reconnaissent à tel ou tel aspect desactivités.

En ce qui concerne les enseignants-chercheurs, le statut définit desmissions d'enseignement, de recherche et de responsabiUtés administra¬tives. Mais nous aUons voir que la réaUté de la profession ne traite pas,pour des raisons diverses, ces différentes tâches sur le même plan.

DEFINITION STATUTAIRE DE LA PROFESSION

1. Le cadre formel

Les textes réglementaires ne posent que trois obUgations :

un service en présence des étudiants de 192 heures annueUes (de128 à 288 heures selon la nature des enseignements : travaux pratiques,travaux dirigés et cours magistraux) ;

la soumission aux règles générales de la fonction pubUque ;

l'obUgation de résidence (susceptible de dérogation) (2).

Mais les missions, fort nombreuses, sont détaiUées à l'article 3 dumême décret. « Les enseignants chercheurs concourent à l'accompUsse-ment des missions de service pubUc de l'enseignement supérieur (...). Rsparticipent à l'élaboration et assurent la transmission des connaissancesau titre de la formation initiale et continue. Hs assurent la direction, leconseil et l'orientation des étudiants. Ils organisent leurs enseignementsau sein d'équipes pédagogiques et en Uaison avec les milieux profession¬nels (...). Ils ont également pour mission le développement de la

- d'autre part, de l'enquête menée par Jean-Michel Berthelot et Sophie Ponthieux dans lecadre du CERC à partir d'entretiens guidés auprès d'enseignants-chercheurs de différentesdisciplines : « Les enseignants-chercheurs de l'enseignement supérieur : revenus profession¬nels el conditions d'activités », Documents du CERC (Centre d'études des revenus et descoûts), n° 105, Paris, La Documentation Française, 1992.

(2) Décret 84-431 du 6 juin 1984, articles 5, 6 et 7.

12 Recherche et Formation

INTRODUCTION

Analyser la place que les enseignants-chercheurs accordent à leurpropre formation ne peut se faire qu'en situant précisément les diffé¬rentes missions qu'ils doivent assurer. Comme pour toutes les profes¬sions, les demandes et les besoins de formation sont en effet étroitementUés à la définition et à la pratique du métier, mais aussi à l'importanceque les individus ou le milieu reconnaissent à tel ou tel aspect desactivités.

En ce qui concerne les enseignants-chercheurs, le statut définit desmissions d'enseignement, de recherche et de responsabiUtés administra¬tives. Mais nous aUons voir que la réaUté de la profession ne traite pas,pour des raisons diverses, ces différentes tâches sur le même plan.

DEFINITION STATUTAIRE DE LA PROFESSION

1. Le cadre formel

Les textes réglementaires ne posent que trois obUgations :

un service en présence des étudiants de 192 heures annueUes (de128 à 288 heures selon la nature des enseignements : travaux pratiques,travaux dirigés et cours magistraux) ;

la soumission aux règles générales de la fonction pubUque ;

l'obUgation de résidence (susceptible de dérogation) (2).

Mais les missions, fort nombreuses, sont détaiUées à l'article 3 dumême décret. « Les enseignants chercheurs concourent à l'accompUsse-ment des missions de service pubUc de l'enseignement supérieur (...). Rsparticipent à l'élaboration et assurent la transmission des connaissancesau titre de la formation initiale et continue. Hs assurent la direction, leconseil et l'orientation des étudiants. Ils organisent leurs enseignementsau sein d'équipes pédagogiques et en Uaison avec les milieux profession¬nels (...). Ils ont également pour mission le développement de la

- d'autre part, de l'enquête menée par Jean-Michel Berthelot et Sophie Ponthieux dans lecadre du CERC à partir d'entretiens guidés auprès d'enseignants-chercheurs de différentesdisciplines : « Les enseignants-chercheurs de l'enseignement supérieur : revenus profession¬nels el conditions d'activités », Documents du CERC (Centre d'études des revenus et descoûts), n° 105, Paris, La Documentation Française, 1992.

(2) Décret 84-431 du 6 juin 1984, articles 5, 6 et 7.

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Études et recherches 13

recherche fondamentale, appUquée, pédagogique ou technologique ainsique la valorisation de ses résultats (...). Ils participent aux jurys d'exa¬men et de concours. Ds participent également aux instances prévues parla loi sur l'enseignement supérieur, par la loi d'orientation et de pro¬grammation pour la recherche (...) ou par les statuts des établisse¬ments. »

La profession se définit donc par une obligation statutaire d'un ser¬vice d'enseignement (192 heures annueUes « d'équivalent TD »), et parune Uste de « missions » très générales. Or, et c'est là le paradoxe de cetteprofession, les enseignants-chercheurs sont formés à la recherche (etgénéralement pas à l'enseignement), recrutés sur des critères scienti¬fiques (et non pédagogiques), évalués sur leurs activités de recherche (etnon d'enseignement), et souvent plus gratifiés par une notoriété de cher¬cheur que par une popularité d'enseignant...

Si plus des trois-quarts des personnes interrogées dans notre enquêteaffirment que « le recrutement et la promotion ne devraient pas êtrefondé uniquement sur des productions de recherche », il n'en est pasmoins vrai que recherche, enseignement et responsabiUtés coUectivesn'ont pas la même place dans la définition de la profession.

On peut comprendre ainsi pourquoi la question de la formation péda¬gogique, tant initiale que continue, a si peu de place à l'Université.

2. Les missions évoluent-elles ?

Si l'on veut répondre à cette question, U faut d'abord constater queles mots désignant la profession ont changé dans les textes officiels : onest passé du terme de professeur à celui d'enseignant-chercheur. Cecipourrait être la marque d'un changement de missions. Le terme d'ensei¬gnant-chercheur, en effet, n'apparaît dans les textes officiels qu'à l'occa¬sion de la loi Savary. Auparavant, la loi du 12 novembre 1968 (dite loiEdgar Faure) dans ses articles 4, 5, 8 et surtout 32, utilise les termes« d'enseignants exerçant les fonctions de professeurs, maîtres de confé¬rences et maîtres-assistants ». Le rapport Lena (septembre 1983, nonpubUé...) porte sur la formation des enseignants-chercheurs (avec tiret).La loi Savary du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur parle« d'enseignants-chercheurs permanents » ou « des enseignants-cher¬cheurs, des enseignants et des chercheurs » (art. 27 et 28). Notons quequelques mois plus tard, dans le décret du 6 juin 1984 sur le statut, U n'ya plus de tiret..., et que le rapport Durry (en janvier 1988, non publié...)

Études et recherches 13

recherche fondamentale, appUquée, pédagogique ou technologique ainsique la valorisation de ses résultats (...). Ils participent aux jurys d'exa¬men et de concours. Ds participent également aux instances prévues parla loi sur l'enseignement supérieur, par la loi d'orientation et de pro¬grammation pour la recherche (...) ou par les statuts des établisse¬ments. »

La profession se définit donc par une obligation statutaire d'un ser¬vice d'enseignement (192 heures annueUes « d'équivalent TD »), et parune Uste de « missions » très générales. Or, et c'est là le paradoxe de cetteprofession, les enseignants-chercheurs sont formés à la recherche (etgénéralement pas à l'enseignement), recrutés sur des critères scienti¬fiques (et non pédagogiques), évalués sur leurs activités de recherche (etnon d'enseignement), et souvent plus gratifiés par une notoriété de cher¬cheur que par une popularité d'enseignant...

Si plus des trois-quarts des personnes interrogées dans notre enquêteaffirment que « le recrutement et la promotion ne devraient pas êtrefondé uniquement sur des productions de recherche », il n'en est pasmoins vrai que recherche, enseignement et responsabiUtés coUectivesn'ont pas la même place dans la définition de la profession.

On peut comprendre ainsi pourquoi la question de la formation péda¬gogique, tant initiale que continue, a si peu de place à l'Université.

2. Les missions évoluent-elles ?

Si l'on veut répondre à cette question, U faut d'abord constater queles mots désignant la profession ont changé dans les textes officiels : onest passé du terme de professeur à celui d'enseignant-chercheur. Cecipourrait être la marque d'un changement de missions. Le terme d'ensei¬gnant-chercheur, en effet, n'apparaît dans les textes officiels qu'à l'occa¬sion de la loi Savary. Auparavant, la loi du 12 novembre 1968 (dite loiEdgar Faure) dans ses articles 4, 5, 8 et surtout 32, utilise les termes« d'enseignants exerçant les fonctions de professeurs, maîtres de confé¬rences et maîtres-assistants ». Le rapport Lena (septembre 1983, nonpubUé...) porte sur la formation des enseignants-chercheurs (avec tiret).La loi Savary du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur parle« d'enseignants-chercheurs permanents » ou « des enseignants-cher¬cheurs, des enseignants et des chercheurs » (art. 27 et 28). Notons quequelques mois plus tard, dans le décret du 6 juin 1984 sur le statut, U n'ya plus de tiret..., et que le rapport Durry (en janvier 1988, non publié...)

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14 Recherche et Formation

sur la condition des enseignants de l'enseignement supérieur utiliseencore le plus souvent le terme « universitaires ».

Y a-t-il, dans ce changement de termes, la marque de l'accentuationde l'importance de la recherche ? Est-ce, plus simplement, le désir detrouver un mot commun pour désigner à la fois les professeurs et lesmaîtres de conférences, ces derniers représentant aujourd'hui 40 % desuniversitaires ?

Dans la communauté universitaire, U n'existe pas aujourd'hui de motcommun pour désigner la profession : dans son enquête, Berthelot (1992)(3) constate une ambivalence significative face aux appeUations d'ensei¬gnant-chercheur et d'universitaire, termes qui sont refusés par le tiers dela population interrogée : certains acceptent l'appellation « d'enseignant-chercheur » : « Ces deux mots, ça me plaît ensemble, vraiment » (maîtrede conférences, physique, Paris), mais d'autres la rejettent : « C'est dujargon administratif» (professeur, économie, ville moyenne), « C'estpompeux, c'est un mélange bizarre » (professeur, lettres, ville moyenne).

L'absence d'un mot commun dans les textes officiels ou le vocabulairecouramment utUisé peut être interprétée comme un symptôme de la pro¬fonde ambivalence ressentie dans la fonction.

Les changements les plus fondamentaux concernant les missions del'Université prennent en fait leurs sources dans les années soixante (cf.Passeron, 1986). Est-ce dû aux conséquences de l'instauration de la thèsede 3e cycle entre 1954 et 1958 ? Est-ce le triplement du nombre d'étu¬diants entre 1960 et 1970 ? (4) Est-ce l'augmentation, par vagues succes¬sives selon les discipUnes, du nombre de professeurs et de maîtres-assis¬tants ? (5) Est-ce la création des premières filières professionnaUsées, lesBUT, en 1966 ? Ou est-ce seulement mai 68 ... ?

(3) BERTHELOT J.-M. (1992) : opus cité, pages 109 à 154.(4) L'Université accueillait 214 000 étudiants en 1960 et 637 000 en 1970. (Source :

DEP, MEN.)(5) BOURDIEU P. (1984) avance l'idée que « l'accroissement de la population des

étudiants et l'accroissement corrélatif de la population des enseignants ont profondémentmodifié les rapports de force au sein du champ universitaire et au sein de chaque faculté,notamment les rapports entre les « grades » et entre les disciplines, elles-mêmesinégalement touchées par les transformations des rapports hiérarchiques. (...) Tandis queles facultés des sciences ont connu leur accroissement maximum vers les années 55-60 etcommencent à se refermer autour de 1970, les facultés des lettres n'ont commencé àrecruterfortement des enseignanU qu'après 1960 et les facultés de droit autour de 1965. »

14 Recherche et Formation

sur la condition des enseignants de l'enseignement supérieur utiliseencore le plus souvent le terme « universitaires ».

Y a-t-il, dans ce changement de termes, la marque de l'accentuationde l'importance de la recherche ? Est-ce, plus simplement, le désir detrouver un mot commun pour désigner à la fois les professeurs et lesmaîtres de conférences, ces derniers représentant aujourd'hui 40 % desuniversitaires ?

Dans la communauté universitaire, U n'existe pas aujourd'hui de motcommun pour désigner la profession : dans son enquête, Berthelot (1992)(3) constate une ambivalence significative face aux appeUations d'ensei¬gnant-chercheur et d'universitaire, termes qui sont refusés par le tiers dela population interrogée : certains acceptent l'appellation « d'enseignant-chercheur » : « Ces deux mots, ça me plaît ensemble, vraiment » (maîtrede conférences, physique, Paris), mais d'autres la rejettent : « C'est dujargon administratif» (professeur, économie, ville moyenne), « C'estpompeux, c'est un mélange bizarre » (professeur, lettres, ville moyenne).

L'absence d'un mot commun dans les textes officiels ou le vocabulairecouramment utUisé peut être interprétée comme un symptôme de la pro¬fonde ambivalence ressentie dans la fonction.

Les changements les plus fondamentaux concernant les missions del'Université prennent en fait leurs sources dans les années soixante (cf.Passeron, 1986). Est-ce dû aux conséquences de l'instauration de la thèsede 3e cycle entre 1954 et 1958 ? Est-ce le triplement du nombre d'étu¬diants entre 1960 et 1970 ? (4) Est-ce l'augmentation, par vagues succes¬sives selon les discipUnes, du nombre de professeurs et de maîtres-assis¬tants ? (5) Est-ce la création des premières filières professionnaUsées, lesBUT, en 1966 ? Ou est-ce seulement mai 68 ... ?

(3) BERTHELOT J.-M. (1992) : opus cité, pages 109 à 154.(4) L'Université accueillait 214 000 étudiants en 1960 et 637 000 en 1970. (Source :

DEP, MEN.)(5) BOURDIEU P. (1984) avance l'idée que « l'accroissement de la population des

étudiants et l'accroissement corrélatif de la population des enseignants ont profondémentmodifié les rapports de force au sein du champ universitaire et au sein de chaque faculté,notamment les rapports entre les « grades » et entre les disciplines, elles-mêmesinégalement touchées par les transformations des rapports hiérarchiques. (...) Tandis queles facultés des sciences ont connu leur accroissement maximum vers les années 55-60 etcommencent à se refermer autour de 1970, les facultés des lettres n'ont commencé àrecruterfortement des enseignanU qu'après 1960 et les facultés de droit autour de 1965. »

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Etudes et recherches 15

Quelles qu'en soient les causes, un changement radical de la situationet des perspectives de l'Université a eu Ueu depuis trente ans et n'a faitque s'accentuer ces dernières années et les différentes missions des uni¬versitaires ont, de ce fait, également changé.

À Ure ceux qui écrivent sur l'Université aujourd'hui, l'articulationentre mission de recherche et mission d'enseignement est au c�ur desproblèmes actuels de l'Université. Claude AUègre (6), ancien conseUlerspécial de Lionel Jospin, dénonce l'écart entre l'intérêt pour la recherchedes universitaires et les demandes des étudiants : « Le divorce moderneentre l'imaginaire savant du professeur et l'ambition essentiellementprofessionnelle de l'étudiant est sans doute l'une des causes importantesdu malaise de l'Université Française ». Alain Carpentier, le célèbre car¬diologue, propose (7) de « donner à chaque enseignant la possibiUté de se

définir selon ses préférences et ses compétences » plus comme chercheur-enseignant, ou comme enseignant-chercheur ou enfin comme gestion¬naire. « Ces dispositions permettraient de mettre un terme à la polé¬mique sur les faux chercheurs. Elles atténueraient sensiblement lemanque d'enseignants et rendraient possible une évaluation plus justedes activités de tous. Elles rétabliraient l'enseignement à la place qu'iln'aurait jamais dû quitter, la première, et la recherche à son plus hautniveau d'efficacité. » Jean-Jacques Payan (8), ancien directeur desenseignements supérieurs, s'insurgeait, en 1982, contre « l'impudencedes représentants de certaines disciplines qui dénonçaient publiquementl'alourdissement des charges d'enseignement "au détriment de la missionde reclierclie" sans s'inquiéter du préjudice que subit celle-ci lorsque cer¬tains de leurs collègues consacrent la majorité de leur temps à des acti¬vités lucratives d'enseignement ou de conseil sans lien avec leur univer¬sité. » On peut citer encore, parmi les innombrables prises de positionsur le sujet, celles d'un groupe d'universitaires (9), qui, proposant unprogramme pour « l'alternance » politique de 1986, veulent « rétablir lecouple enseignement supérieur recherche », réaffirment « la dualité dela double fonction d'enseignement et de recherche » et s'insurgent contrela « création d'un corps de cherclxeurs du CNRS titulaires à vie ».

(6) ALLEGRE C. (1993) : L'âge des savoirs, Paris, Gallimard.(7) CARPENTIER A. (1988) : Le mal universitaire, diagnostic et traitement, Paris,

R. Laffont, page 173.(8) PAYE-JEANNENEY L., PAYAN J.-J. (1988) : Le chantier universitaire : bâtir

l'avenir, Paris, Beauchesnc, page 73.(9) Sous le nom générique de Pierre CAMPUS (1986) : Reconstruire l'Université,

Paris, Albatros, pages 69 à 76.

Etudes et recherches 15

Quelles qu'en soient les causes, un changement radical de la situationet des perspectives de l'Université a eu Ueu depuis trente ans et n'a faitque s'accentuer ces dernières années et les différentes missions des uni¬versitaires ont, de ce fait, également changé.

À Ure ceux qui écrivent sur l'Université aujourd'hui, l'articulationentre mission de recherche et mission d'enseignement est au c�ur desproblèmes actuels de l'Université. Claude AUègre (6), ancien conseUlerspécial de Lionel Jospin, dénonce l'écart entre l'intérêt pour la recherchedes universitaires et les demandes des étudiants : « Le divorce moderneentre l'imaginaire savant du professeur et l'ambition essentiellementprofessionnelle de l'étudiant est sans doute l'une des causes importantesdu malaise de l'Université Française ». Alain Carpentier, le célèbre car¬diologue, propose (7) de « donner à chaque enseignant la possibiUté de se

définir selon ses préférences et ses compétences » plus comme chercheur-enseignant, ou comme enseignant-chercheur ou enfin comme gestion¬naire. « Ces dispositions permettraient de mettre un terme à la polé¬mique sur les faux chercheurs. Elles atténueraient sensiblement lemanque d'enseignants et rendraient possible une évaluation plus justedes activités de tous. Elles rétabliraient l'enseignement à la place qu'iln'aurait jamais dû quitter, la première, et la recherche à son plus hautniveau d'efficacité. » Jean-Jacques Payan (8), ancien directeur desenseignements supérieurs, s'insurgeait, en 1982, contre « l'impudencedes représentants de certaines disciplines qui dénonçaient publiquementl'alourdissement des charges d'enseignement "au détriment de la missionde reclierclie" sans s'inquiéter du préjudice que subit celle-ci lorsque cer¬tains de leurs collègues consacrent la majorité de leur temps à des acti¬vités lucratives d'enseignement ou de conseil sans lien avec leur univer¬sité. » On peut citer encore, parmi les innombrables prises de positionsur le sujet, celles d'un groupe d'universitaires (9), qui, proposant unprogramme pour « l'alternance » politique de 1986, veulent « rétablir lecouple enseignement supérieur recherche », réaffirment « la dualité dela double fonction d'enseignement et de recherche » et s'insurgent contrela « création d'un corps de cherclxeurs du CNRS titulaires à vie ».

(6) ALLEGRE C. (1993) : L'âge des savoirs, Paris, Gallimard.(7) CARPENTIER A. (1988) : Le mal universitaire, diagnostic et traitement, Paris,

R. Laffont, page 173.(8) PAYE-JEANNENEY L., PAYAN J.-J. (1988) : Le chantier universitaire : bâtir

l'avenir, Paris, Beauchesnc, page 73.(9) Sous le nom générique de Pierre CAMPUS (1986) : Reconstruire l'Université,

Paris, Albatros, pages 69 à 76.

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16 Recherche et Formation

Chacun voit donc dans la duaUté enseignement-recherche une des rai¬sons de la crise de l'Université, avec des sensibiUtés variables selon lesopinions et les choix poUtiques. Pour la plupart, la recherche serait gra¬vement menacée par l'augmentation des tâches administratives etd'enseignement.

Mais ces constats ne sont pas nouveaux : déjà, en 1964, U y a trenteans, plusieurs universitaires, dans un numéro de la revue Esprit, déplo¬raient cette situation. « Il est souhaitable que la vieille conception duprofesseur qui unit recherche et enseignement soit remise à l'honneur. »

(10) « La recherche, tout le monde en est bien d'accord, n'a pas du toutla place qu'elle mérite à l'Université », renchérissait Michel Crozier (11).Même affirmation, déjà à l'époque, chez Laurent Schwartz (12) : « Larecherche n'a toujours pas la place qu'eUe mérite dans l'organisationactueUe, non pas pour des raisons théoriques, mais parce que les univer¬sitaires sont surmenés par leurs actueUes tâches d'enseignement. »

R semble donc que la tension entre les différents aspects du métier nesoit pas une situation nouveUe : eUe s'inscrit dans la définition même dela profession. Elle expUque en partie le fait que la formation à l'enseigne¬ment n'ait jamais trouvé sa place à l'Université. Nous allons voir quecette situation ne fait que s'exacerber aujourd'hui en examinant d'unepart des faits, et, d'autre part, l'opinion des enseignants-chercheurs surcette situation.

REALITES DE LA PROFESSION

1. Une extrême diversité des situations

Les différentes activités, en particuUer l'enseignement et la recherche,se combinent de multiples façons, au point qu'U est impossible de généra-User sur les activités des enseignants-chercheurs.

La discipline est peut-être la variable qui détermine les plus fortesdisparités : elle induit des pratiques, des situations spécifiques, maisaussi une perception des missions différentes. En ce qui concerne l'ensei¬gnement, le fait d'être dans une discipline surchargée (ou pas) est

(10) WILL E. (1964). Esprit, Faire l'Université, n° 5-6, mai-juin 1964, page 784.(11) Ibid., page 783.(12) Ibid., page T71.

16 Recherche et Formation

Chacun voit donc dans la duaUté enseignement-recherche une des rai¬sons de la crise de l'Université, avec des sensibiUtés variables selon lesopinions et les choix poUtiques. Pour la plupart, la recherche serait gra¬vement menacée par l'augmentation des tâches administratives etd'enseignement.

Mais ces constats ne sont pas nouveaux : déjà, en 1964, U y a trenteans, plusieurs universitaires, dans un numéro de la revue Esprit, déplo¬raient cette situation. « Il est souhaitable que la vieille conception duprofesseur qui unit recherche et enseignement soit remise à l'honneur. »

(10) « La recherche, tout le monde en est bien d'accord, n'a pas du toutla place qu'elle mérite à l'Université », renchérissait Michel Crozier (11).Même affirmation, déjà à l'époque, chez Laurent Schwartz (12) : « Larecherche n'a toujours pas la place qu'eUe mérite dans l'organisationactueUe, non pas pour des raisons théoriques, mais parce que les univer¬sitaires sont surmenés par leurs actueUes tâches d'enseignement. »

R semble donc que la tension entre les différents aspects du métier nesoit pas une situation nouveUe : eUe s'inscrit dans la définition même dela profession. Elle expUque en partie le fait que la formation à l'enseigne¬ment n'ait jamais trouvé sa place à l'Université. Nous allons voir quecette situation ne fait que s'exacerber aujourd'hui en examinant d'unepart des faits, et, d'autre part, l'opinion des enseignants-chercheurs surcette situation.

REALITES DE LA PROFESSION

1. Une extrême diversité des situations

Les différentes activités, en particuUer l'enseignement et la recherche,se combinent de multiples façons, au point qu'U est impossible de généra-User sur les activités des enseignants-chercheurs.

La discipline est peut-être la variable qui détermine les plus fortesdisparités : elle induit des pratiques, des situations spécifiques, maisaussi une perception des missions différentes. En ce qui concerne l'ensei¬gnement, le fait d'être dans une discipline surchargée (ou pas) est

(10) WILL E. (1964). Esprit, Faire l'Université, n° 5-6, mai-juin 1964, page 784.(11) Ibid., page 783.(12) Ibid., page T71.

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Études et recherches 17

déterminant. Comment comparer, par exemple, la situation pédagogiqued'un enseignant en sciences et ceUe d'un enseignant en droit ? Le tauxd'encadrement est de 9 étudiants par enseignant (en 1991) dans les disci¬pUnes scientifiques, û est de 13 à 14 pour les discipUnes de la santé, de 28en lettres et de... 45 en droit (13). Dans notre enquête, 85 % des juristesont enseigné à plus de trois cents étudiants dans l'année, essentieUementen cours magistraux, alors que plus d'un tiers des scientifiques font lamoitié de leur temps de service en TP, c'est à dire en petits groupes.

La discipline entraîne aussi des situations différentes en ce quiconcerne la recherche : si seulement 48,1 % des enseignants de languesdisent faire partie d'un laboratoire de recherche, le pourcentage s'élèveà plus de 95 % chez les scientifiques, qui travaUIent essentieUement dansdes laboratoires associés au CNRS (14). Les types de recherche condui¬sent ainsi à un travaU au sein d'une équipe ou à une grande soUtude,dans des lieux spécifiques ou ailleurs (en laboratoire, chez soi, en bibUo-thèque ou sur le terrain), avec des gestions du temps très diverses.

Notons enfin que les champs discipUnaires (sciences, lettres...) n'ontpas la même reconnaissance sociale et économique dans notre société :

cela impUque des financements différents, et probablement des investis¬sements individuels en recherche variables selon la discipUne d'originedes enseignants-chercheurs.

La deuxième série de variables qui différencient les enseignants-cher¬cheurs est plus classique : U s'agit des statuts, du sexe, et de l'âge.

Le statut implique des tâches quelque peu différentes : les maîtres deconférences sont plus nombreux à effectuer leur temps de service en TPou en TD, et surtout en 1er et 2e cycle (cf. notre enquête). Ce sont eux quieffectuent le plus d'heures complémentaires (cf. enquête CERC). Es sontles plus nombreux à être directeurs de département ou de service com¬mun. Les professeurs effectuent majoritairement leur temps de service enTD ou en cours magistral en 2e et 3e cycle (sauf les scientifiques). Ilsassurent plus fréquemment les fonctions de directeurs d'UFR ou de labo¬ratoire (cf. notre enquête). Tous ces éléments déterminés par la naturemême des statuts entraînent des relations à l'enseignement et à larecherche différentes.

(13) JALLADE (J.-P.). (1991) : L'enseignement supérieur en Europe : vers uneévaluation comparée des premiers cycles, Paris, La Documentation Française, page 102.

(14) FAVE-BONNET M.-F. (1993) : Les enseignants-chercheurs physiciens, INRP /SFP, page 44.

Études et recherches 17

déterminant. Comment comparer, par exemple, la situation pédagogiqued'un enseignant en sciences et ceUe d'un enseignant en droit ? Le tauxd'encadrement est de 9 étudiants par enseignant (en 1991) dans les disci¬pUnes scientifiques, û est de 13 à 14 pour les discipUnes de la santé, de 28en lettres et de... 45 en droit (13). Dans notre enquête, 85 % des juristesont enseigné à plus de trois cents étudiants dans l'année, essentieUementen cours magistraux, alors que plus d'un tiers des scientifiques font lamoitié de leur temps de service en TP, c'est à dire en petits groupes.

La discipline entraîne aussi des situations différentes en ce quiconcerne la recherche : si seulement 48,1 % des enseignants de languesdisent faire partie d'un laboratoire de recherche, le pourcentage s'élèveà plus de 95 % chez les scientifiques, qui travaUIent essentieUement dansdes laboratoires associés au CNRS (14). Les types de recherche condui¬sent ainsi à un travaU au sein d'une équipe ou à une grande soUtude,dans des lieux spécifiques ou ailleurs (en laboratoire, chez soi, en bibUo-thèque ou sur le terrain), avec des gestions du temps très diverses.

Notons enfin que les champs discipUnaires (sciences, lettres...) n'ontpas la même reconnaissance sociale et économique dans notre société :

cela impUque des financements différents, et probablement des investis¬sements individuels en recherche variables selon la discipUne d'originedes enseignants-chercheurs.

La deuxième série de variables qui différencient les enseignants-cher¬cheurs est plus classique : U s'agit des statuts, du sexe, et de l'âge.

Le statut implique des tâches quelque peu différentes : les maîtres deconférences sont plus nombreux à effectuer leur temps de service en TPou en TD, et surtout en 1er et 2e cycle (cf. notre enquête). Ce sont eux quieffectuent le plus d'heures complémentaires (cf. enquête CERC). Es sontles plus nombreux à être directeurs de département ou de service com¬mun. Les professeurs effectuent majoritairement leur temps de service enTD ou en cours magistral en 2e et 3e cycle (sauf les scientifiques). Ilsassurent plus fréquemment les fonctions de directeurs d'UFR ou de labo¬ratoire (cf. notre enquête). Tous ces éléments déterminés par la naturemême des statuts entraînent des relations à l'enseignement et à larecherche différentes.

(13) JALLADE (J.-P.). (1991) : L'enseignement supérieur en Europe : vers uneévaluation comparée des premiers cycles, Paris, La Documentation Française, page 102.

(14) FAVE-BONNET M.-F. (1993) : Les enseignants-chercheurs physiciens, INRP /SFP, page 44.

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18 Recherche et Formation

Les femmes constituent 33,2 % du corps des enseignants-chercheurset vivent, pour la plupart, la situation des maîtres de conférences ou desassistants : il n'y a, en effet que 11,94 % de femmes professeurs. Lesmaîtres de conférences et maîtres-assistant(e)s comptent 33,73 % defemmes. On trouve 33,2 % de femmes parmi les assistantes qui sonttitulaires depuis 1983, mais qui ne sont plus recruté(e)s depuis. Notonsque la place des femmes varie considérablement selon les discipUnes :

près de 8 % seulement de femmes professeurs dans les disciplines scienti¬fiques ou de santé, contre près de 24 % en lettres et sciences humai¬nes (15).

Une spécificité du corps des enseignants-chercheurs est la pyramidedes âges. En effet, le recrutement massif des années 60/70, suivi d'unepériode de faible recrutement jusque dans les années 85, a plusieursconséquences : d'une part, eUe entraîne un vieiUissement actuel du corpsenseignant. « L'âge moyen des enseignants est de 51 ans et 7 mois pourun professeur, de 46 ans et 1 mois pour un maître de conférences, de41 ans et 7 mois pour un assistant. Cette structure par âge est variableselon les disciplines : l'âge moyen est globalement plus élevé en lettres eten sciences humaines » (16). Cette situation a des conséquences sur larelation pédagogique avec les étudiants, car l'écart d'âge se creuse entreles enseignants et les étudiants qui, eux, font toujours partie de la mêmegénération... Ce vieiUissement du corps des enseignants-chercheurs aaussi des effets aujourd'hui dans les équipes souvent composées d'unemajorité ayant dépassé la cinquantaine et de quelques jeunes coUèguesnouvellement nommés. En effet, un nombre important d'enseignants-chercheurs arrivant aujourd'hui à l'âge de la retraite, on procède à nou¬veau à des recrutements, et ce phénomène devrait s'accentuer dans l'ave¬nir. Il y a quelques années déjà, le CNE annonçait : « en excluant lesdisciplines de santé, 53 % des enseignants-chercheurs quitteront leuremploi entre 1988 et 2007 » (17). Ce sont les lettres et sciences humainespuis les sciences qui seront les premières touchées, comme le montre clai¬rement l'enquête du CERC (18).

(15) Ministère de l'Éducation nationale et de la Culture : note d'information 93.11,mars 1993.

(16) Ministère de l'Éducation nationale et de la Culture : note d'information n° 93.02sur les personnels de l'enseignement supérieur en 1991-1992, janvier 1993.

(17) Comité National d'Évaluation (1989) : Priorités pour l'Université, rapport auPrésident de la RépubUque (1985-1989), Paris, La Documentation Française, page 182.

(18) PONTHIEUX S. (1992) : Les enseignants-chercheurs de l'enseignement supérieur :

revenus professionnels et conditions d'activités, opus cité, pages 27 à 30.

18 Recherche et Formation

Les femmes constituent 33,2 % du corps des enseignants-chercheurset vivent, pour la plupart, la situation des maîtres de conférences ou desassistants : il n'y a, en effet que 11,94 % de femmes professeurs. Lesmaîtres de conférences et maîtres-assistant(e)s comptent 33,73 % defemmes. On trouve 33,2 % de femmes parmi les assistantes qui sonttitulaires depuis 1983, mais qui ne sont plus recruté(e)s depuis. Notonsque la place des femmes varie considérablement selon les discipUnes :

près de 8 % seulement de femmes professeurs dans les disciplines scienti¬fiques ou de santé, contre près de 24 % en lettres et sciences humai¬nes (15).

Une spécificité du corps des enseignants-chercheurs est la pyramidedes âges. En effet, le recrutement massif des années 60/70, suivi d'unepériode de faible recrutement jusque dans les années 85, a plusieursconséquences : d'une part, eUe entraîne un vieiUissement actuel du corpsenseignant. « L'âge moyen des enseignants est de 51 ans et 7 mois pourun professeur, de 46 ans et 1 mois pour un maître de conférences, de41 ans et 7 mois pour un assistant. Cette structure par âge est variableselon les disciplines : l'âge moyen est globalement plus élevé en lettres eten sciences humaines » (16). Cette situation a des conséquences sur larelation pédagogique avec les étudiants, car l'écart d'âge se creuse entreles enseignants et les étudiants qui, eux, font toujours partie de la mêmegénération... Ce vieiUissement du corps des enseignants-chercheurs aaussi des effets aujourd'hui dans les équipes souvent composées d'unemajorité ayant dépassé la cinquantaine et de quelques jeunes coUèguesnouvellement nommés. En effet, un nombre important d'enseignants-chercheurs arrivant aujourd'hui à l'âge de la retraite, on procède à nou¬veau à des recrutements, et ce phénomène devrait s'accentuer dans l'ave¬nir. Il y a quelques années déjà, le CNE annonçait : « en excluant lesdisciplines de santé, 53 % des enseignants-chercheurs quitteront leuremploi entre 1988 et 2007 » (17). Ce sont les lettres et sciences humainespuis les sciences qui seront les premières touchées, comme le montre clai¬rement l'enquête du CERC (18).

(15) Ministère de l'Éducation nationale et de la Culture : note d'information 93.11,mars 1993.

(16) Ministère de l'Éducation nationale et de la Culture : note d'information n° 93.02sur les personnels de l'enseignement supérieur en 1991-1992, janvier 1993.

(17) Comité National d'Évaluation (1989) : Priorités pour l'Université, rapport auPrésident de la RépubUque (1985-1989), Paris, La Documentation Française, page 182.

(18) PONTHIEUX S. (1992) : Les enseignants-chercheurs de l'enseignement supérieur :

revenus professionnels et conditions d'activités, opus cité, pages 27 à 30.

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Études et recherches 19

Un autre facteur de différenciation est certainement l'étabUssementd'exercice : être à Paris ou en province, dans une université ancienne ounouveUe, une petite ou une énorme... détermine des conditions d'ensei¬gnement et de recherche différentes. Une récente enquête (19) montreque si le taux d'encadrement moyen en France est de 23,2 étudiants parenseignant, ce taux varie de 9 étudiants à Paris VI à 40 étudiants parenseignant à l'Université du Littoral (Dunkerque). Même si ces moyennesne rendent pas complètement compte de la réaUté puisqu'eUes « Ussent »

les disparités entre discipUnes à l'intérieur de chaque université, qu'eUesomettent les postes détachés du second degré (15 % des personnes ensei¬gnant dans le supérieur en France (20)) et le nombre d'heures complé¬mentaires, eUes permettent toutefois de prendre conscience de la dispa¬rité des conditions de travaU selon l'étabUssement.

2. Un accroissement de§ charges

Avant d'entendre les opinions, souvent apocalyptiques, des ensei¬gnants-chercheurs à ce sujet, examinons les chiffres officiels concernantl'augmentation des effectifs des étudiants : si l'on prend comme basel'année 1987-1988 (indice 100), les effectifs globaux se retrouvent àl'indice 134 cinq ans plus tard, en 1992-1993, ce qui signifie une augmen¬tation de plus d'un tiers des effectifs. Mais U faut constater une disparitéentre les disciplines : les sciences se trouvent à l'indice 156 en 1992-1993(soit un doublement des effectifs), les lettres à l'indice 140, le droit àl'indice 140 et la médecine à l'indice 96, c'est à dire en régression (21).

Le dernier rapport du Comité National d'Évaluation (22) constateque « les quatre dernières années ont été marquées par un accroissementremarquable des effectifs étudiants (+ 18,2 % entre 1988-1989 et 1991-1992) qui a été globalement couvert par une augmentation des effectifsen enseignants du supérieur (+ 20 % entre 1988-1989 et 1991-1992). »

L'examen par discipUnes de l'évolution comparée des effectifs des étu¬diants et des enseignants nuance cette affirmation. En droit, alors que lenombre d'étudiants augmentait de 15,1 %, celui des enseignants n'aug¬mentait que de 9,4 %. En sciences, hausse de 33,6 % des effectifs des

(19) Publiée dans Le Monde, du 25 novembre 1993.(20) Ministère de l'Éducation nationale et de la Culture : note d'information nQ 93.02

sur les personnels de l'enseignement supérieur en 1991-1992, janvier 1993.(21) Ministère de l'Éducation nationale : note d'information 93.11, mars 1993.(22) Comité National d'Évuluation (1993) : Universités : la recherche des équilibres,

1989-1993, Puris, La Documentation Française, pages 101 et 102.

Études et recherches 19

Un autre facteur de différenciation est certainement l'étabUssementd'exercice : être à Paris ou en province, dans une université ancienne ounouveUe, une petite ou une énorme... détermine des conditions d'ensei¬gnement et de recherche différentes. Une récente enquête (19) montreque si le taux d'encadrement moyen en France est de 23,2 étudiants parenseignant, ce taux varie de 9 étudiants à Paris VI à 40 étudiants parenseignant à l'Université du Littoral (Dunkerque). Même si ces moyennesne rendent pas complètement compte de la réaUté puisqu'eUes « Ussent »

les disparités entre discipUnes à l'intérieur de chaque université, qu'eUesomettent les postes détachés du second degré (15 % des personnes ensei¬gnant dans le supérieur en France (20)) et le nombre d'heures complé¬mentaires, eUes permettent toutefois de prendre conscience de la dispa¬rité des conditions de travaU selon l'étabUssement.

2. Un accroissement de§ charges

Avant d'entendre les opinions, souvent apocalyptiques, des ensei¬gnants-chercheurs à ce sujet, examinons les chiffres officiels concernantl'augmentation des effectifs des étudiants : si l'on prend comme basel'année 1987-1988 (indice 100), les effectifs globaux se retrouvent àl'indice 134 cinq ans plus tard, en 1992-1993, ce qui signifie une augmen¬tation de plus d'un tiers des effectifs. Mais U faut constater une disparitéentre les disciplines : les sciences se trouvent à l'indice 156 en 1992-1993(soit un doublement des effectifs), les lettres à l'indice 140, le droit àl'indice 140 et la médecine à l'indice 96, c'est à dire en régression (21).

Le dernier rapport du Comité National d'Évaluation (22) constateque « les quatre dernières années ont été marquées par un accroissementremarquable des effectifs étudiants (+ 18,2 % entre 1988-1989 et 1991-1992) qui a été globalement couvert par une augmentation des effectifsen enseignants du supérieur (+ 20 % entre 1988-1989 et 1991-1992). »

L'examen par discipUnes de l'évolution comparée des effectifs des étu¬diants et des enseignants nuance cette affirmation. En droit, alors que lenombre d'étudiants augmentait de 15,1 %, celui des enseignants n'aug¬mentait que de 9,4 %. En sciences, hausse de 33,6 % des effectifs des

(19) Publiée dans Le Monde, du 25 novembre 1993.(20) Ministère de l'Éducation nationale et de la Culture : note d'information nQ 93.02

sur les personnels de l'enseignement supérieur en 1991-1992, janvier 1993.(21) Ministère de l'Éducation nationale : note d'information 93.11, mars 1993.(22) Comité National d'Évuluation (1993) : Universités : la recherche des équilibres,

1989-1993, Puris, La Documentation Française, pages 101 et 102.

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20 Recherche et Formation

étudiants et seulement 19,3 % d'enseignants supplémentaires. Dans ledomaine de la santé, diminution du nombre d'étudiants (- 3,7 %) et stag¬nation du nombre d'enseignants. Quant aux lettres, le chiffre de 49,9 %d'augmentation du nombre d'enseignants (au regard de 22,2 % dunombre d'étudiants) n'est atteint que parce que ces disciplines ontaccueiUi un nombre important d'enseignants du second degré, en parti¬cuUer des IUFM : sinon, les effectifs enseignants n'auraient crû que de14,7 %... Bref, l'effort de recrutement a été annilulé par la poussée deseffectifs étudiants et n'a pas comblé le retard pris antérieurement.

Cette augmentation du nombre d'étudiants a accentué la dégradationdes conditions de travaU. Déjà, en 1988, le rapport Durry (23) dénonçaitla situation : « les moyens mis à la disposition du corps enseignant desUniversités sont très insuffisants dans l'ensemble (...) que ce soit le per¬sonnel, les locaux, l'équipement. » Manque d'appariteurs, de documen¬tation, de secrétaires, absence de bureaux personnels, de salles deréunion, état déplorable des halls d'accueil et des saUes d'enseignement,équipement bureautique insuffisant... La description était déjà alar¬miste.

En 1989, le CNE constatait les mêmes carences (24) : « Qu'il s'agissedes locaux, des moyens en personnel ou de l'équipement, les conditionsde travail des enseignants du supérieur en France sont globalementinsuffisantes. Rares sont les professeurs, surtout dans les disciplinesjuridiques et littéraires, qui disposent personnellement d'un bureau,d'un téléphone et d'un secrétariat. Rares sont les universités dotées demoyens suffisants en documentation et équipements informatiques (trai¬tement de textes, micro-ordinateurs...) ainsi qu'en personnels quaUfiés(techniciens, documentalistes, bibliothécaires). TravaUler dans une uni¬versité, ce n'est pas seulement travailler dans des locaux peu entretenus,c'est également souvent ne pas disposer des moyens permettant de menerses activités scientifiques et pédagogiques dans des conditions conve¬nables. »

Un des points le plus souvent dénoncé concerne le personnel adminis¬tratif : « Les secrétaires font déplus en plus défaut alors que le foisonne¬ment des formalités administratives diverses et l'augmentation dunombre des étudiants multiplient les travaux (...) Le faible niveau de

(23) DURRY G. (1988) sous la direction de : La condition des enseignants del'enseignement supérieur, rapport au ministre chargé de la recherche et de l'enseignementsupérieur. Non publié, pagesll à 15.

(24) Comité National d'Évaluation (1989) : opus cité, page 196.

20 Recherche et Formation

étudiants et seulement 19,3 % d'enseignants supplémentaires. Dans ledomaine de la santé, diminution du nombre d'étudiants (- 3,7 %) et stag¬nation du nombre d'enseignants. Quant aux lettres, le chiffre de 49,9 %d'augmentation du nombre d'enseignants (au regard de 22,2 % dunombre d'étudiants) n'est atteint que parce que ces disciplines ontaccueiUi un nombre important d'enseignants du second degré, en parti¬cuUer des IUFM : sinon, les effectifs enseignants n'auraient crû que de14,7 %... Bref, l'effort de recrutement a été annilulé par la poussée deseffectifs étudiants et n'a pas comblé le retard pris antérieurement.

Cette augmentation du nombre d'étudiants a accentué la dégradationdes conditions de travaU. Déjà, en 1988, le rapport Durry (23) dénonçaitla situation : « les moyens mis à la disposition du corps enseignant desUniversités sont très insuffisants dans l'ensemble (...) que ce soit le per¬sonnel, les locaux, l'équipement. » Manque d'appariteurs, de documen¬tation, de secrétaires, absence de bureaux personnels, de salles deréunion, état déplorable des halls d'accueil et des saUes d'enseignement,équipement bureautique insuffisant... La description était déjà alar¬miste.

En 1989, le CNE constatait les mêmes carences (24) : « Qu'il s'agissedes locaux, des moyens en personnel ou de l'équipement, les conditionsde travail des enseignants du supérieur en France sont globalementinsuffisantes. Rares sont les professeurs, surtout dans les disciplinesjuridiques et littéraires, qui disposent personnellement d'un bureau,d'un téléphone et d'un secrétariat. Rares sont les universités dotées demoyens suffisants en documentation et équipements informatiques (trai¬tement de textes, micro-ordinateurs...) ainsi qu'en personnels quaUfiés(techniciens, documentalistes, bibliothécaires). TravaUler dans une uni¬versité, ce n'est pas seulement travailler dans des locaux peu entretenus,c'est également souvent ne pas disposer des moyens permettant de menerses activités scientifiques et pédagogiques dans des conditions conve¬nables. »

Un des points le plus souvent dénoncé concerne le personnel adminis¬tratif : « Les secrétaires font déplus en plus défaut alors que le foisonne¬ment des formalités administratives diverses et l'augmentation dunombre des étudiants multiplient les travaux (...) Le faible niveau de

(23) DURRY G. (1988) sous la direction de : La condition des enseignants del'enseignement supérieur, rapport au ministre chargé de la recherche et de l'enseignementsupérieur. Non publié, pagesll à 15.

(24) Comité National d'Évaluation (1989) : opus cité, page 196.

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Etudes et recherches 21

rémunération du personnel de secrétariat entraîne ici encore plusqu'aUleurs sa faible qualification ou safaible motivation » (25). En 1993,le CNE reconnaît qu'alors que les effectifs des étudiants ont globalementaugmenté pendant la période 1989-1992 de 18,2 %, ceux des enseignantsde 20 % (26), « le personnel non enseignant rémunérés par l'Etat (àl'exclusion des personnels des bibliothèques) ne s'est accru que de 10 %(27) ». Les enseignants-chercheurs sont donc de plus en plus souventobUgés d'assumer des tâches de secrétariat pour continuer à travaUler.

3. Une diversification des missions

Dans la réalité de la profession d'universitaire aujourd'hui, U y a,comme nous venons de le voir, une augmentation du nombre d'étudiants,des charges d'enseignement et d'un certain nombre de tâches qui endécoulent, mais U y a aussi d'autres activités, que l'on qualifie générale¬ment de « responsabilités coUectives » ou « administratives » qui se sontconsidérablement développées ces dernières années. Deux exemplesparmi d'autres.

La loi d'orientation de 1984 (dite loi Savary), en accroissant l'autono¬mie des universités, a considérablement augmenté la participation desenseignants-chercheurs à la gestion de leur université, et, de ce fait, lenombre d'instances de concertation et de décision : réunions de départe¬ment, jurys de diplômes, conseUs d'UFR, commissions de spéciaUstes,conseUs de laboratoire, voire conseU des études, conseU d'administrationou conseil scientifique..., les semaines sont jalonnées de réunions denatures diverses, aux enjeux plus ou moins importants et d'un intérêttrès inégal. Elles sont pourtant nécessaires à la coordination pédago¬gique, au fonctionnement de la recherche, mais aussi à la défense desintérêts particuliers des multiples micro-structures qui composentl'Université. Car « la logique du fonctionnement de l'Université et desrapports entre ses membres implique des centres multiples de pouvoir.Ceux-ci, dans la vie quotidienne, entretiennent des conflits ou cherchentdes arrangements faits de concessions alternatives ou réciproques » (28).

(25) Rapport DURRY (1988), opus cité, page 12.(26) Voir plus haut les nuances à apporter à ce chiffre qui comptabilise les enseignants

du second degré.(27) Comité National d'Évaluation (1993) : opus cité, page 34.(28) LEROY P. (1992) : Contribution à une réflexion sur le pouvoir dans les Univer¬

sités françaises à partir de la réalité grenobloise, in Le gouvernement des Universités,perspectives comparatives, sous la direction de E. Friedberg et C. Musselin, Paris, L'Har¬mattan.

Etudes et recherches 21

rémunération du personnel de secrétariat entraîne ici encore plusqu'aUleurs sa faible qualification ou safaible motivation » (25). En 1993,le CNE reconnaît qu'alors que les effectifs des étudiants ont globalementaugmenté pendant la période 1989-1992 de 18,2 %, ceux des enseignantsde 20 % (26), « le personnel non enseignant rémunérés par l'Etat (àl'exclusion des personnels des bibliothèques) ne s'est accru que de 10 %(27) ». Les enseignants-chercheurs sont donc de plus en plus souventobUgés d'assumer des tâches de secrétariat pour continuer à travaUler.

3. Une diversification des missions

Dans la réalité de la profession d'universitaire aujourd'hui, U y a,comme nous venons de le voir, une augmentation du nombre d'étudiants,des charges d'enseignement et d'un certain nombre de tâches qui endécoulent, mais U y a aussi d'autres activités, que l'on qualifie générale¬ment de « responsabilités coUectives » ou « administratives » qui se sontconsidérablement développées ces dernières années. Deux exemplesparmi d'autres.

La loi d'orientation de 1984 (dite loi Savary), en accroissant l'autono¬mie des universités, a considérablement augmenté la participation desenseignants-chercheurs à la gestion de leur université, et, de ce fait, lenombre d'instances de concertation et de décision : réunions de départe¬ment, jurys de diplômes, conseUs d'UFR, commissions de spéciaUstes,conseUs de laboratoire, voire conseU des études, conseU d'administrationou conseil scientifique..., les semaines sont jalonnées de réunions denatures diverses, aux enjeux plus ou moins importants et d'un intérêttrès inégal. Elles sont pourtant nécessaires à la coordination pédago¬gique, au fonctionnement de la recherche, mais aussi à la défense desintérêts particuliers des multiples micro-structures qui composentl'Université. Car « la logique du fonctionnement de l'Université et desrapports entre ses membres implique des centres multiples de pouvoir.Ceux-ci, dans la vie quotidienne, entretiennent des conflits ou cherchentdes arrangements faits de concessions alternatives ou réciproques » (28).

(25) Rapport DURRY (1988), opus cité, page 12.(26) Voir plus haut les nuances à apporter à ce chiffre qui comptabilise les enseignants

du second degré.(27) Comité National d'Évaluation (1993) : opus cité, page 34.(28) LEROY P. (1992) : Contribution à une réflexion sur le pouvoir dans les Univer¬

sités françaises à partir de la réalité grenobloise, in Le gouvernement des Universités,perspectives comparatives, sous la direction de E. Friedberg et C. Musselin, Paris, L'Har¬mattan.

Page 22: revue RECHERCHE ET FORMATIONife.ens-lyon.fr/publications/edition-electronique/... · 2012-01-27 · Recherche et Formation fait désormais paraître trois numéros par an (dont un

22 Recherche et Formation

L'Université, comme l'a écrit René Rémond, ancien président del'Université Paris X Nanterre, est une « société conflictuelle », faite de« hiérarchies, de corporatismes et d'idéologies » (29). Défendre ses inté¬rêts et ceux de son groupe pour obtenir postes et financements fait partieaujourd'hui des multiples activités des enseignants-chercheurs.

Un deuxième exemple concerne ceux qui ont développé ou qui s'inves¬tissent dans les filières professionneUes. Cela nécessite des contacts avecles mUieux professionnels, une adaptation des contenus d'enseignement,des recherches de financements, le suivi des stages... bref, des tâchesdiverses auxqueUes les universitaires sont peu préparés, qui prennentbeaucoup de temps, et qui ne sont pas vraiment reconnues dans les car-

Ce panorama rapide des multiples facettes de la réaUté de la profes¬sion aujourd'hui permet de mieux comprendre ce qu'en disent les ensei¬gnants-chercheurs .

OPINIONS DES ENSEIGNANTS-CHERCHEURSSUR LEUR PROFESSION

Les situations professionneUes, comme nous venons de le voir, sontextrêmement variables, en particuUer selon les discipUnes. Il y a pour¬tant un fond commun d'opinions, des questions sur lesquelles tous se

retrouvent.

1. Une éthique commune ?

Jean-Michel Berthelot (30) la définit comme un « civisme critique etindividualiste ». Ce civisme s'Ulustre dans l'attachement à l'articulationentre enseignement et recherche « prônée pour des raisons de cohérenceinterne et de fécondation réciproque », mais aussi « pour sa valeurd'universalité » : dans notre enquête, 93,3 % affirment qu'à l'Univer¬sité, « il faut être à lafois enseignant et chercheur ».

(29) REMOND R. (1979) : La règle et le consentement : gouverner une société, Paris,Fayard.

(30) BERTHELOT J.-M. (1992) : opus cité, page 140.

22 Recherche et Formation

L'Université, comme l'a écrit René Rémond, ancien président del'Université Paris X Nanterre, est une « société conflictuelle », faite de« hiérarchies, de corporatismes et d'idéologies » (29). Défendre ses inté¬rêts et ceux de son groupe pour obtenir postes et financements fait partieaujourd'hui des multiples activités des enseignants-chercheurs.

Un deuxième exemple concerne ceux qui ont développé ou qui s'inves¬tissent dans les filières professionneUes. Cela nécessite des contacts avecles mUieux professionnels, une adaptation des contenus d'enseignement,des recherches de financements, le suivi des stages... bref, des tâchesdiverses auxqueUes les universitaires sont peu préparés, qui prennentbeaucoup de temps, et qui ne sont pas vraiment reconnues dans les car-

Ce panorama rapide des multiples facettes de la réaUté de la profes¬sion aujourd'hui permet de mieux comprendre ce qu'en disent les ensei¬gnants-chercheurs .

OPINIONS DES ENSEIGNANTS-CHERCHEURSSUR LEUR PROFESSION

Les situations professionneUes, comme nous venons de le voir, sontextrêmement variables, en particuUer selon les discipUnes. Il y a pour¬tant un fond commun d'opinions, des questions sur lesquelles tous se

retrouvent.

1. Une éthique commune ?

Jean-Michel Berthelot (30) la définit comme un « civisme critique etindividualiste ». Ce civisme s'Ulustre dans l'attachement à l'articulationentre enseignement et recherche « prônée pour des raisons de cohérenceinterne et de fécondation réciproque », mais aussi « pour sa valeurd'universalité » : dans notre enquête, 93,3 % affirment qu'à l'Univer¬sité, « il faut être à lafois enseignant et chercheur ».

(29) REMOND R. (1979) : La règle et le consentement : gouverner une société, Paris,Fayard.

(30) BERTHELOT J.-M. (1992) : opus cité, page 140.

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Études et recherches 23

Cette dimension fondamentale de la profession explique la réticenced'une grande majorité des enseignants-chercheurs à l'instauration desprimes (pédagogiques, d'encadrement doctoral et de recherche, ou deresponsabiUtés administratives) : pour 78,2 % des personnes interrogées,« le système des primes risque de diviser le corps des enseignants-cher¬cheurs ».

Pourtant, à titre personnel, la majorité des enseignants-chercheurssont insatisfaits de leur salaires (59,5 %), et si 24,6 % s'en contentent,seuls 16 % en sont satisfaits. L'écart avec les autres professions, « entreun niveau de compétences reconnu et socialement utUisé, et un déficit derémunération est unanimement ressenti comme une dévalorisation, undéni, voire une humiliation, même si une minorité s 'efforce de relativiserla situation par un argumentaire sur le prix de la Uberté ou sur les plusmalheureux qu'eux. » (31)

Une autre valeur commune est, en effet, l'attachement à la libertédans le travail. Elle est liée aux libertés académiques et scientifiques,fondements du statut universitaire. Les réponses au questionnaire mon¬trent un consensus sur cette question : 81 % s'accordent à dire que « leprincipal attrait de ce métier, c'est la grande liberté laissée aux ensei¬gnants-chercheurs ». C'est eUe qui permet de supporter une rémunéra¬tion jugée dérisoire et des conditions de travaU difficiles.

2. Perceptions de la « massification »

Près de 66 % des enseignants-chercheurs interrogés dans notreenquête affirment : « la taille des groupes d'étudiants a beaucoup aug¬menté dans l'ensemble de mes cours », mais cette montée des effectifssemble beaucoup plus fortement ressentie en sciences humaines (85 %)qu'en sciences (58 %). Pourtant les scientifiques n'ont pas été épargnéspar la montée des effectifs, au contraire : les effectifs en sciences ont subila plus forte augmentation avec un doublement du nombre d'étudiants en6 ans (entre 1988 et 1993) (32). Peut-être que les scientifiques, dont letaux d'encadrement était le plus faible, pouvaient supporter cette pous¬sée des effectifs...

(31) BERTHELOT J.-M. (1992), opus cité, page 114.(32) Ministère de l'Education nationale et de la Culture : note d'information 93.11,

mars 1993.

Études et recherches 23

Cette dimension fondamentale de la profession explique la réticenced'une grande majorité des enseignants-chercheurs à l'instauration desprimes (pédagogiques, d'encadrement doctoral et de recherche, ou deresponsabiUtés administratives) : pour 78,2 % des personnes interrogées,« le système des primes risque de diviser le corps des enseignants-cher¬cheurs ».

Pourtant, à titre personnel, la majorité des enseignants-chercheurssont insatisfaits de leur salaires (59,5 %), et si 24,6 % s'en contentent,seuls 16 % en sont satisfaits. L'écart avec les autres professions, « entreun niveau de compétences reconnu et socialement utUisé, et un déficit derémunération est unanimement ressenti comme une dévalorisation, undéni, voire une humiliation, même si une minorité s 'efforce de relativiserla situation par un argumentaire sur le prix de la Uberté ou sur les plusmalheureux qu'eux. » (31)

Une autre valeur commune est, en effet, l'attachement à la libertédans le travail. Elle est liée aux libertés académiques et scientifiques,fondements du statut universitaire. Les réponses au questionnaire mon¬trent un consensus sur cette question : 81 % s'accordent à dire que « leprincipal attrait de ce métier, c'est la grande liberté laissée aux ensei¬gnants-chercheurs ». C'est eUe qui permet de supporter une rémunéra¬tion jugée dérisoire et des conditions de travaU difficiles.

2. Perceptions de la « massification »

Près de 66 % des enseignants-chercheurs interrogés dans notreenquête affirment : « la taille des groupes d'étudiants a beaucoup aug¬menté dans l'ensemble de mes cours », mais cette montée des effectifssemble beaucoup plus fortement ressentie en sciences humaines (85 %)qu'en sciences (58 %). Pourtant les scientifiques n'ont pas été épargnéspar la montée des effectifs, au contraire : les effectifs en sciences ont subila plus forte augmentation avec un doublement du nombre d'étudiants en6 ans (entre 1988 et 1993) (32). Peut-être que les scientifiques, dont letaux d'encadrement était le plus faible, pouvaient supporter cette pous¬sée des effectifs...

(31) BERTHELOT J.-M. (1992), opus cité, page 114.(32) Ministère de l'Education nationale et de la Culture : note d'information 93.11,

mars 1993.

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24 Recherche et Formation

Cependant, à peine un tiers (29,7 %) des personnes interrogées se

disent insatisfaites de leur temps de service ou du temps de travaU Ué àl'enseignement (32,6 %). Notons la différence d'appréciation sur cedeuxième aspect entre les scientifiques (jusqu'à 44,1 % d'insatisfaitschez les biologistes) et les juristes (seulement 12,9 % d'insatisfaits).

Malgré cela, les enseignants-chercheurs restent relativement satisfaits(62 %) de leur relation pédagogique avec leurs étudiants : seuls 20,2 % se

disent insatisfaits (17,8 %, ni satisfaits, ni insatisfaits...). Toutefois, lemilieu est partagé sur le « niveau » des étudiants actuels : 50,6 % (contre49,4 %) affirment que « le niveau de connaissance des étudiants a dimi¬nué depuis cinq ans », avec une plus grande sévérité de jugement enlettres (63,8 %) et en langues (67,6 %).

QueUe que soit la discipline, le consensus est général (92,2 %) pourdire que « l'Université n'est pas prête à accueilUr une plus grande massed'étudiants ». Mais les mesures adoptées ces dernières années face à cettemontée des effectifs ne recueUlent pas un assentiment général.

Pour fuir la masse des DEUG, certains tentent, quand ils le peuvent,de se « réfugier » en deuxième et troisième cycle. C'est ce qui se passeparfois dans la réaUté, mais un quart seulement prônent « l'abandon »

du premier cycle : 25,5 % seulement des répondants de l'enquête disentque « l'Université devrait concentrer ses efforts sur les 2e et 3e cycles ».

Car la plupart s'inquiètent de cette dérive, comme ce physicien : « Onnous pousse à une secondarisation de l'enseignement supérieur. Cela nepeut que renforcer l'infantUisme des étudiants et pousser les enseignantsà se replier sur quelques "planques" qui leur permettent de garder uneaire de recherche, ou à abdiquer et augmenter la distance vis-à-vis deleurs étudiants. »

Une autre solution, préconisée par certains à cette augmentation deseffectifs, consiste à « mettre ailleurs » ces DEUG trop nombreux, àdécharger les universités sur les antennes : mais près de 59 % estimentque « le développement des antennes risque de compromettre la qualitéde l'enseignement universitaire ». Les enseignants-chercheurs sont par¬tagés sur cette question, parce que les antennes présentent de nombreuxinconvénients que le Comité National d'Évaluation a nettement soulignés(33) : prolifération anarchique, absence de lien avec la recherche,

(33) Comité National d'Évaluation (1991) : Universités : les chances de l'ouverture,rapport au Président de la République, La Documentation Française, pages 37 à 39.

24 Recherche et Formation

Cependant, à peine un tiers (29,7 %) des personnes interrogées se

disent insatisfaites de leur temps de service ou du temps de travaU Ué àl'enseignement (32,6 %). Notons la différence d'appréciation sur cedeuxième aspect entre les scientifiques (jusqu'à 44,1 % d'insatisfaitschez les biologistes) et les juristes (seulement 12,9 % d'insatisfaits).

Malgré cela, les enseignants-chercheurs restent relativement satisfaits(62 %) de leur relation pédagogique avec leurs étudiants : seuls 20,2 % se

disent insatisfaits (17,8 %, ni satisfaits, ni insatisfaits...). Toutefois, lemilieu est partagé sur le « niveau » des étudiants actuels : 50,6 % (contre49,4 %) affirment que « le niveau de connaissance des étudiants a dimi¬nué depuis cinq ans », avec une plus grande sévérité de jugement enlettres (63,8 %) et en langues (67,6 %).

QueUe que soit la discipline, le consensus est général (92,2 %) pourdire que « l'Université n'est pas prête à accueilUr une plus grande massed'étudiants ». Mais les mesures adoptées ces dernières années face à cettemontée des effectifs ne recueUlent pas un assentiment général.

Pour fuir la masse des DEUG, certains tentent, quand ils le peuvent,de se « réfugier » en deuxième et troisième cycle. C'est ce qui se passeparfois dans la réaUté, mais un quart seulement prônent « l'abandon »

du premier cycle : 25,5 % seulement des répondants de l'enquête disentque « l'Université devrait concentrer ses efforts sur les 2e et 3e cycles ».

Car la plupart s'inquiètent de cette dérive, comme ce physicien : « Onnous pousse à une secondarisation de l'enseignement supérieur. Cela nepeut que renforcer l'infantUisme des étudiants et pousser les enseignantsà se replier sur quelques "planques" qui leur permettent de garder uneaire de recherche, ou à abdiquer et augmenter la distance vis-à-vis deleurs étudiants. »

Une autre solution, préconisée par certains à cette augmentation deseffectifs, consiste à « mettre ailleurs » ces DEUG trop nombreux, àdécharger les universités sur les antennes : mais près de 59 % estimentque « le développement des antennes risque de compromettre la qualitéde l'enseignement universitaire ». Les enseignants-chercheurs sont par¬tagés sur cette question, parce que les antennes présentent de nombreuxinconvénients que le Comité National d'Évaluation a nettement soulignés(33) : prolifération anarchique, absence de lien avec la recherche,

(33) Comité National d'Évaluation (1991) : Universités : les chances de l'ouverture,rapport au Président de la République, La Documentation Française, pages 37 à 39.

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Études et recherches 25

nombre important de vacataires ou d'enseignants du second degré, pré¬carité du personnel administratif, absence de bibliothèques conve¬nables...

L'augmentation du nombre d'enseignants « à plein temps », essentiel¬lement des enseignants détachés du secondaire, n'est pas non plus unesolution souhaitée : seuls 31,5 % des personnes interrogées se résignent à

cette solution.

3. La dégradation des conditions de travail

Ce qui fait réagir les enseignants-chercheurs est plutôt dans cedomaine : 80,1 % sont insatisfaits des conditions matérieUes d'enseigne¬ment, avec peu de différences selon la discipline, mais un peu plusd'exaspération chez les femmes (86 %). Sur ces questions, le pourcentagede ceux qui estiment qu'U y a eu dégradation depuis cinq ans l'emportetoujours sur ceux qui constatent une améUoration. Dégradation dans lesbibUothèques : 37,1 % ; dans l'entretien des locaux : 51 % ; dans leursecrétariat : 46,4 % ; dans le matériel pédagogique : 42,2 %. Seul l'infor¬matique s'est améUorée pour 86,2 % des personnes interrogées.

Dans les entretiens revient souvent la question du manque debureaux. Ils expliquent souvent l'absence de contacts avec les coUègueset avec les étudiants. Mais les conditions architecturales sont trèsdiverses selon les universités. Si certains, en effet, sont fort mal lotis,pour d'autres, c'est un alibi pour être très peu présents dansl'Université. Il s'agit d'un « mode de fonctionnement organisationalconstruit », comme le montre E. Friedberg et C. MusseUn (34).

Les problèmes matériels ne sont pas seulement mal vécus pour leursdésagréments quotidiens. R s'agit, pour certains, d'un indicateur visiblede la dégradation et de la dévalorisation de la profession.

4. L'articulation enseignement-recherche

Malgré la place importante de la recherche dans la carrière, les ensei¬gnants-chercheurs sont partagés sur cette question. Seuls 56,5 % des

(34) FRIEDBERG E., MUSSELIN C. (1989) : En quête d'Universités : étude comparéedes Universités en France et en RFA, Paris, L'Harmattan.

Études et recherches 25

nombre important de vacataires ou d'enseignants du second degré, pré¬carité du personnel administratif, absence de bibliothèques conve¬nables...

L'augmentation du nombre d'enseignants « à plein temps », essentiel¬lement des enseignants détachés du secondaire, n'est pas non plus unesolution souhaitée : seuls 31,5 % des personnes interrogées se résignent à

cette solution.

3. La dégradation des conditions de travail

Ce qui fait réagir les enseignants-chercheurs est plutôt dans cedomaine : 80,1 % sont insatisfaits des conditions matérieUes d'enseigne¬ment, avec peu de différences selon la discipline, mais un peu plusd'exaspération chez les femmes (86 %). Sur ces questions, le pourcentagede ceux qui estiment qu'U y a eu dégradation depuis cinq ans l'emportetoujours sur ceux qui constatent une améUoration. Dégradation dans lesbibUothèques : 37,1 % ; dans l'entretien des locaux : 51 % ; dans leursecrétariat : 46,4 % ; dans le matériel pédagogique : 42,2 %. Seul l'infor¬matique s'est améUorée pour 86,2 % des personnes interrogées.

Dans les entretiens revient souvent la question du manque debureaux. Ils expliquent souvent l'absence de contacts avec les coUègueset avec les étudiants. Mais les conditions architecturales sont trèsdiverses selon les universités. Si certains, en effet, sont fort mal lotis,pour d'autres, c'est un alibi pour être très peu présents dansl'Université. Il s'agit d'un « mode de fonctionnement organisationalconstruit », comme le montre E. Friedberg et C. MusseUn (34).

Les problèmes matériels ne sont pas seulement mal vécus pour leursdésagréments quotidiens. R s'agit, pour certains, d'un indicateur visiblede la dégradation et de la dévalorisation de la profession.

4. L'articulation enseignement-recherche

Malgré la place importante de la recherche dans la carrière, les ensei¬gnants-chercheurs sont partagés sur cette question. Seuls 56,5 % des

(34) FRIEDBERG E., MUSSELIN C. (1989) : En quête d'Universités : étude comparéedes Universités en France et en RFA, Paris, L'Harmattan.

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26 Recherche et Formation

répondants affirment : « ce qui m'intéresse le plus dans ce métier, c'estfaire de la recherche ». Contrairement à ce que l'on pourrait attendre,ce ne sont pas les scientifiques, mais les juristes (71,4 %) et les écono¬mistes (66 %) qui disent avoir le plus d'intérêt pour la recherche. Cetteaffirmation est peut-être un indicateur de l'image que l'on voudrait don¬ner de la recherche dans sa discipline et de la place que l'on accorde à

l'enseignement.

La première difficulté de cette articulation entre enseignement etrecherche consiste à gérer le temps entre les deux activités : 68,7 % se

disent « tiraillés entre l'enseignement et la recherche ». Le temps consa¬cré à la recherche, généralement moins cadré, est souvent celui qui se fait« manger » par les autres activités : 45,6 % des enseignants-chercheursinterrogés sont insatisfaits de la part de travaU en recherche, et 32,6 %seulement sont insatisfaits de leur temps de travaU Ué à l'enseignement.

Certains tentent de vivre enseignement, recherche, et tâches coUec¬tives en périodes successives, et non en périodes simultanées, réservantles responsabiUtés coUectives en fin de carrière. Mais les opportunités etles aléas de la vie viennent contrer cette planification : c'est souvent enmiUeu de carrière qu'il faut produire beaucoup en recherche pour passerson doctorat d'État (ou aujourd'hui l'habUitation), c'est parfois à cettepériode qu'on est soUicité pour des tâches coUectives, et il y a toujours leservice d'enseignement à assurer... Pour beaucoup, il faut être sur tousles fronts à la fois : « Il y a une difficulté à tenir l'êquiUbre entre lestâches d'enseignement, les tâches collectives et la recherche : on estjamais complètement à l'un ou à l'autre. On se dit « dans mon enseigne¬ment, si j'étais sérieux, je ferais ceci, je ferais cela, oui, mais si je faisça, je n'ai plus le temps défaire mon labo, donc, je laisse tomber. (...)Alors on est constamment partagé, encore plus quand on a des tâchescollectives. C'est pour ça que cet équilibre de vie est difficile. »

(Professeur, physique.)

Pour certains, cette tension est difficilement vécue : « Il y a desdéprimes, ce n'est pas rare. Il y aies difficultés de vie dans notre société,les problèmes personnels... Mais Uy a aussi cet aspect schizophréniquede notre vie entre l'enseignement et la recherche, c'est à dire qu'on esttoujours coupable vis-à-vis de l'un ou vis-à-vis de l'autre. » (Femme,maître de conférences.)

Les femmes accordent, dans les entretiens, beaucoup d'importanceaux questions d'horaires et d'emplois du temps : « J'ai, pendant plus dedeux ans, été absente plus de 12 heures par jour de chez moi pour faire

26 Recherche et Formation

répondants affirment : « ce qui m'intéresse le plus dans ce métier, c'estfaire de la recherche ». Contrairement à ce que l'on pourrait attendre,ce ne sont pas les scientifiques, mais les juristes (71,4 %) et les écono¬mistes (66 %) qui disent avoir le plus d'intérêt pour la recherche. Cetteaffirmation est peut-être un indicateur de l'image que l'on voudrait don¬ner de la recherche dans sa discipline et de la place que l'on accorde à

l'enseignement.

La première difficulté de cette articulation entre enseignement etrecherche consiste à gérer le temps entre les deux activités : 68,7 % se

disent « tiraillés entre l'enseignement et la recherche ». Le temps consa¬cré à la recherche, généralement moins cadré, est souvent celui qui se fait« manger » par les autres activités : 45,6 % des enseignants-chercheursinterrogés sont insatisfaits de la part de travaU en recherche, et 32,6 %seulement sont insatisfaits de leur temps de travaU Ué à l'enseignement.

Certains tentent de vivre enseignement, recherche, et tâches coUec¬tives en périodes successives, et non en périodes simultanées, réservantles responsabiUtés coUectives en fin de carrière. Mais les opportunités etles aléas de la vie viennent contrer cette planification : c'est souvent enmiUeu de carrière qu'il faut produire beaucoup en recherche pour passerson doctorat d'État (ou aujourd'hui l'habUitation), c'est parfois à cettepériode qu'on est soUicité pour des tâches coUectives, et il y a toujours leservice d'enseignement à assurer... Pour beaucoup, il faut être sur tousles fronts à la fois : « Il y a une difficulté à tenir l'êquiUbre entre lestâches d'enseignement, les tâches collectives et la recherche : on estjamais complètement à l'un ou à l'autre. On se dit « dans mon enseigne¬ment, si j'étais sérieux, je ferais ceci, je ferais cela, oui, mais si je faisça, je n'ai plus le temps défaire mon labo, donc, je laisse tomber. (...)Alors on est constamment partagé, encore plus quand on a des tâchescollectives. C'est pour ça que cet équilibre de vie est difficile. »

(Professeur, physique.)

Pour certains, cette tension est difficilement vécue : « Il y a desdéprimes, ce n'est pas rare. Il y aies difficultés de vie dans notre société,les problèmes personnels... Mais Uy a aussi cet aspect schizophréniquede notre vie entre l'enseignement et la recherche, c'est à dire qu'on esttoujours coupable vis-à-vis de l'un ou vis-à-vis de l'autre. » (Femme,maître de conférences.)

Les femmes accordent, dans les entretiens, beaucoup d'importanceaux questions d'horaires et d'emplois du temps : « J'ai, pendant plus dedeux ans, été absente plus de 12 heures par jour de chez moi pour faire

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Études et recherches 27

une reconversion thématique quand je suis arrivée dans ce laboratoire.Je n'aurais pas pu le faire si mes quatre enfants avaient été encorepetits. (...) Maintenant je lève un peu le pied. (...) Il est probable quemon investissement en recherche s'en ressent, je voudrais faire plus. »

(Femme, maître de conférences.) On retrouve ici la culpabilité desfemmes partagées entre les activités professionneUes et leurs responsabi¬lités et tâches familiales. En ce qui concerne plus spécifiquement lesfemmes qui font de la recherche, cette culpabUité est renforcée, selon uneenquête menée au CNRS (35), par le fait qu'eUes « se conforment aumodèle du chercheur que l'institution scientifique a pour finalité de pro¬mouvoir, notamment pour les modes d'organisation du travail scienti¬fique lui-même ». La même enquête montre que les femmes chercheurs auCNRS travaiUaient 43,4 heures contre 48,4 heures pour les hommes en1981. Pour un certain nombre de femmes en poste à l'Université, on peutfaire l'hypothèse que la situation est exacerbée : U y a la tension entre viefamiliale et vie professionneUe (36), et à l'intérieur de ceUe-ci, la tensionentre enseignement et recherche.

Pourtant, une des physiciennes interviewées semble suggérer qu'U y aaussi une question d'organisation et de priorités dans la gestion du tempsentre enseignement et recherche. Le temps n'a en effet que peu de choseà voir avec l'efficacité.

Une autre difficulté d'articulation entre enseignement et recherchepourrait être le hiatus entre thèmes de recherche et thèmes d'ensei¬gnement : la situation, nous l'avons vu, est, en effet, différente entrecelui qui enseigne essentiellement en 1er cycle et celui qui enseigne en 3ficycle. Mais seulement 35,7 % des enseignants-chercheurs de notreenquête disent qu'il n'y a « pas de lien entre l'enseignement et larecherche, sauf en 3e cycle ».

Les enseignants interviewés développent de nombreux argumentspour expliquer leur attachement à cette articulation enseignement /recherche. Ils affirment qu'être chercheur est déterminant pour la qua¬lité et le niveau de l'enseignement à l'Université. Les raisons qu'ils évo¬quent sont toutefois quelque peu différentes. Pour certains, il s'agitd'enseigner la science qui est en train de s'élaborer : « on ne peut pasfaire un enseignement intéressant et vouloir préparer des gens à faire de

(35) Commission Femmes dans la Recherche (1981) : La recherche des femmes,Syndicat National des Chercheurs Scientifiques.

(36) Pour celles qui sont mariées avec des enfants. Notons que la même enquêteconstate que le taux de femmes célibataires au CNRS est très supérieur à la moyennenationale : 18 % au lieu de 10 %.

Études et recherches 27

une reconversion thématique quand je suis arrivée dans ce laboratoire.Je n'aurais pas pu le faire si mes quatre enfants avaient été encorepetits. (...) Maintenant je lève un peu le pied. (...) Il est probable quemon investissement en recherche s'en ressent, je voudrais faire plus. »

(Femme, maître de conférences.) On retrouve ici la culpabilité desfemmes partagées entre les activités professionneUes et leurs responsabi¬lités et tâches familiales. En ce qui concerne plus spécifiquement lesfemmes qui font de la recherche, cette culpabUité est renforcée, selon uneenquête menée au CNRS (35), par le fait qu'eUes « se conforment aumodèle du chercheur que l'institution scientifique a pour finalité de pro¬mouvoir, notamment pour les modes d'organisation du travail scienti¬fique lui-même ». La même enquête montre que les femmes chercheurs auCNRS travaiUaient 43,4 heures contre 48,4 heures pour les hommes en1981. Pour un certain nombre de femmes en poste à l'Université, on peutfaire l'hypothèse que la situation est exacerbée : U y a la tension entre viefamiliale et vie professionneUe (36), et à l'intérieur de ceUe-ci, la tensionentre enseignement et recherche.

Pourtant, une des physiciennes interviewées semble suggérer qu'U y aaussi une question d'organisation et de priorités dans la gestion du tempsentre enseignement et recherche. Le temps n'a en effet que peu de choseà voir avec l'efficacité.

Une autre difficulté d'articulation entre enseignement et recherchepourrait être le hiatus entre thèmes de recherche et thèmes d'ensei¬gnement : la situation, nous l'avons vu, est, en effet, différente entrecelui qui enseigne essentiellement en 1er cycle et celui qui enseigne en 3ficycle. Mais seulement 35,7 % des enseignants-chercheurs de notreenquête disent qu'il n'y a « pas de lien entre l'enseignement et larecherche, sauf en 3e cycle ».

Les enseignants interviewés développent de nombreux argumentspour expliquer leur attachement à cette articulation enseignement /recherche. Ils affirment qu'être chercheur est déterminant pour la qua¬lité et le niveau de l'enseignement à l'Université. Les raisons qu'ils évo¬quent sont toutefois quelque peu différentes. Pour certains, il s'agitd'enseigner la science qui est en train de s'élaborer : « on ne peut pasfaire un enseignement intéressant et vouloir préparer des gens à faire de

(35) Commission Femmes dans la Recherche (1981) : La recherche des femmes,Syndicat National des Chercheurs Scientifiques.

(36) Pour celles qui sont mariées avec des enfants. Notons que la même enquêteconstate que le taux de femmes célibataires au CNRS est très supérieur à la moyennenationale : 18 % au lieu de 10 %.

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28 Recherche et Formation

la recherche en n'en faisant pas soi-même ». La recherche est ainsinécessaire pour ce qu'elle apporte à l'enseignant en démarche et enméthode. Pour d'autres, U en va de la définition même de l'Université :

« le maintien du lien recherche enseignement est le seul garant d'unenseignement qui ne se sclérose pas » .

Pour les étudiants, le fait de ne pas être seulement enseignant « donnede l'ouverture, donne de l'air ». « Raconter quelque chose que l'on vit,pas les expériences qu'on fait, mais de petits morceaux qu'on connaîtbien parce qu'on est plongé dedans, ça donne quelque chose de vivant àl'enseignement, parce qu'on a du recul, que c'est quelque chose qu'onpossède bien, et que ce n'est pas livresque. » (Professeur, physique expé¬rimentale.) Cette ouverture est aussi rendue possible par les contacts duchercheur avec l'extérieur, « dans la vie sociale, dans le monde indus¬triel, avec les métiers, ce qui manque dans les enseignements du lycée ».

L'enseignement est aussi présenté comme une nécessité pour le cher¬cheur, une occasion de sortir de la tension de la recherche. Certains par¬lent du désir de transmettre pour les chercheurs. « il y a une espèce deprosélytisme chez l'enseignant-chercheur : il a envie de faire partagerson amour pour la matière dans laqueUe il recherche ». D s'agit aussi,dès le second cycle, de recruter de futurs thésards.

Un des avantages de ce double métier, et qui n'est certainement pas lemoindre, est la possibilité de compensation psychologique que permet ceva et vient. « Ces deux métiers qui s'opposent, se tiraiUent l'un l'autre,finalement se stimulent l'un l'autre, en particulier dans les périodes oula recherche n'avance pas : on a toujours le sentiment défaire quelquechose avec les étudiants, et ça c'est un équiUbre psychologique, même sic'est une tension à gérer dans la vie quotidienne. » (Femme, maître deconférences.) Car la recherche est parfois une rude épreuve personneUe.L'enseignement devient alors décompression.

5. La multipUcation des tâches et responsabUités administratives

Plus de 17 % des répondants de notre enquête disent être (ou avoirété) directeur (-trice) de département. Mais la question ouverte montreque 33 % sont chargées d'autres tâches qui ne font pas partie des ins¬tances officielles de concertation ou de décision que nous avons vu plushaut, mais qui n'en sont pas moins importantes : responsabiUté d'annéeou de cycle, de fUières, de diplômes, organisation des TP, gestion des cré¬dits, des stages, direction de services communs (formation continue,

28 Recherche et Formation

la recherche en n'en faisant pas soi-même ». La recherche est ainsinécessaire pour ce qu'elle apporte à l'enseignant en démarche et enméthode. Pour d'autres, U en va de la définition même de l'Université :

« le maintien du lien recherche enseignement est le seul garant d'unenseignement qui ne se sclérose pas » .

Pour les étudiants, le fait de ne pas être seulement enseignant « donnede l'ouverture, donne de l'air ». « Raconter quelque chose que l'on vit,pas les expériences qu'on fait, mais de petits morceaux qu'on connaîtbien parce qu'on est plongé dedans, ça donne quelque chose de vivant àl'enseignement, parce qu'on a du recul, que c'est quelque chose qu'onpossède bien, et que ce n'est pas livresque. » (Professeur, physique expé¬rimentale.) Cette ouverture est aussi rendue possible par les contacts duchercheur avec l'extérieur, « dans la vie sociale, dans le monde indus¬triel, avec les métiers, ce qui manque dans les enseignements du lycée ».

L'enseignement est aussi présenté comme une nécessité pour le cher¬cheur, une occasion de sortir de la tension de la recherche. Certains par¬lent du désir de transmettre pour les chercheurs. « il y a une espèce deprosélytisme chez l'enseignant-chercheur : il a envie de faire partagerson amour pour la matière dans laqueUe il recherche ». D s'agit aussi,dès le second cycle, de recruter de futurs thésards.

Un des avantages de ce double métier, et qui n'est certainement pas lemoindre, est la possibilité de compensation psychologique que permet ceva et vient. « Ces deux métiers qui s'opposent, se tiraiUent l'un l'autre,finalement se stimulent l'un l'autre, en particulier dans les périodes oula recherche n'avance pas : on a toujours le sentiment défaire quelquechose avec les étudiants, et ça c'est un équiUbre psychologique, même sic'est une tension à gérer dans la vie quotidienne. » (Femme, maître deconférences.) Car la recherche est parfois une rude épreuve personneUe.L'enseignement devient alors décompression.

5. La multipUcation des tâches et responsabUités administratives

Plus de 17 % des répondants de notre enquête disent être (ou avoirété) directeur (-trice) de département. Mais la question ouverte montreque 33 % sont chargées d'autres tâches qui ne font pas partie des ins¬tances officielles de concertation ou de décision que nous avons vu plushaut, mais qui n'en sont pas moins importantes : responsabiUté d'annéeou de cycle, de fUières, de diplômes, organisation des TP, gestion des cré¬dits, des stages, direction de services communs (formation continue,

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Études et recherches 29

ceUule d'information, centre de publications, télé-enseignement, activitéscultureUes...), relations avec les entreprises ou l'étranger, etc.

Ces responsabUités sont parfois très lourdes et ne bénéficient qued'une reconnaissance institutionneUe Umitée : 68 % des personnes inter¬rogées disent même que « les tâches administratives freinent la carrière ».

C'est ce qui expUque probablement que près de 75 % affirment que « lesenseignants-chercheurs sont de moins en moins prêts à assumer la tâchede directeur de département et/ou d'autres tâches administratives ».Pourtant, une forte majorité (64,7 %) estiment que « les tâches adminis¬tratives font partie du métier d'enseignant-chercheur », même si certainsdoutent des compétences des enseignants-chercheurs dans un certainnombre d'activités pour lesquels Us n'ont pas été formés : 37,5 % desrépondants affirment, par exemple, que « les enseignants-chercheurs nesont pas de bons gestionnaires » .

Comme pour l'enseignement, on trouve ici une ambivalence par rap¬port aux responsabUités coUectives, car eUes peuvent être considérées,comme le dit Pierre Bourdieu, comme un substitut de pouvoir au regardde la notoriété scientifique :

« Pouvoir temporel dans un univers qui n'est ni enfait ni en droit voué àcette espèce de pouvoir, U tend toujours à apparaître, peut-être mêmeaux yeux de ses possesseurs les plus assurés, comme une forme inférieurede pouvoir, comme un substitut ou un prix de consolation. On comprendaussi la profonde ambivalence des universitaires qui se dévouent àl'administration à l'égard de ceux qui se consacrent, et avec succès, à larecherche, surtout dans une tradition universitaire où le patriotismed'université est faible et peu récompensé. » (37)

6. Le « climat » induit par l'institution

L'importance de la recherche dans les carrières, comme nous l'avonsvu, a des incidences sur les relations à l'intérieur de l'institution. Larecherche peut être conduite coUectivement (27,7 % seulement des per¬sonnes interrogées disent que la recherche est pour eux une activitéessentieUement soUtaire), mais eUe est évaluée individueUement pour lacarrière. De plus, même si la recherche est effectuée à l'extérieur del'Université, dans un laboratoire du CNRS, par exemple, c'est sur lanotoriété en tant que chercheur que se fonde l'essentiel d'une réputation.Le fait que les pairs, par le biais des commissions de spéciaUstes, sont

(37) BOURDIEU P. (1984) : opus cité, page 132.

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ceUule d'information, centre de publications, télé-enseignement, activitéscultureUes...), relations avec les entreprises ou l'étranger, etc.

Ces responsabUités sont parfois très lourdes et ne bénéficient qued'une reconnaissance institutionneUe Umitée : 68 % des personnes inter¬rogées disent même que « les tâches administratives freinent la carrière ».

C'est ce qui expUque probablement que près de 75 % affirment que « lesenseignants-chercheurs sont de moins en moins prêts à assumer la tâchede directeur de département et/ou d'autres tâches administratives ».Pourtant, une forte majorité (64,7 %) estiment que « les tâches adminis¬tratives font partie du métier d'enseignant-chercheur », même si certainsdoutent des compétences des enseignants-chercheurs dans un certainnombre d'activités pour lesquels Us n'ont pas été formés : 37,5 % desrépondants affirment, par exemple, que « les enseignants-chercheurs nesont pas de bons gestionnaires » .

Comme pour l'enseignement, on trouve ici une ambivalence par rap¬port aux responsabUités coUectives, car eUes peuvent être considérées,comme le dit Pierre Bourdieu, comme un substitut de pouvoir au regardde la notoriété scientifique :

« Pouvoir temporel dans un univers qui n'est ni enfait ni en droit voué àcette espèce de pouvoir, U tend toujours à apparaître, peut-être mêmeaux yeux de ses possesseurs les plus assurés, comme une forme inférieurede pouvoir, comme un substitut ou un prix de consolation. On comprendaussi la profonde ambivalence des universitaires qui se dévouent àl'administration à l'égard de ceux qui se consacrent, et avec succès, à larecherche, surtout dans une tradition universitaire où le patriotismed'université est faible et peu récompensé. » (37)

6. Le « climat » induit par l'institution

L'importance de la recherche dans les carrières, comme nous l'avonsvu, a des incidences sur les relations à l'intérieur de l'institution. Larecherche peut être conduite coUectivement (27,7 % seulement des per¬sonnes interrogées disent que la recherche est pour eux une activitéessentieUement soUtaire), mais eUe est évaluée individueUement pour lacarrière. De plus, même si la recherche est effectuée à l'extérieur del'Université, dans un laboratoire du CNRS, par exemple, c'est sur lanotoriété en tant que chercheur que se fonde l'essentiel d'une réputation.Le fait que les pairs, par le biais des commissions de spéciaUstes, sont

(37) BOURDIEU P. (1984) : opus cité, page 132.

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ceux qui « jugent » le travaU pour les promotions renforce l'idée d'êtreconstamment sous le regard des autres : cette situation fait que 29,4 %des répondants disent « Je me sens continuellement évalué(e) par mescoUègues. »

Or, le niveau à atteindre en recherche dans certaines disciplinesdevient inaccessible. « Pour faire de la bonne recherche, il faut êtrequelqu'un de très fort, il y en a peu. (...) Je crois que la grande difficultéde ce métier, c'est ça. C'est qu'on se rend compte qu'on n'est pas suffi¬samment fort pour l'idéal qu'on s'est proposé. Et ça, je crois que c'esttrès dur, et Uy a des gens qui sont complètement névrosés et qui ne sontpas bien dans leur peau. C'est un métier difficile de ce point de vue là. »

(Femme, professeur, physique.)

Cette physicienne, en parlant de « névrose » décrit ce que NicoleAubert et Vincent de Gaulejac appellent une maladie de l'excellence,c'est à dire une maladie du narcissisme (38) : l'Université, comme lesentreprises, n'est plus aujourd'hui une organisation autoritaire et hié¬rarchique, mais plutôt une organisation individuaUste et narcissique. Lesstructures sociales « sont affaiblies, et l'accomplissement par chacun deson "moi" dans toutes ses dimensions figure au premier plan des préoc¬cupations ». Cette mutation sociologique et psychologique entraîne denouveaux types de pathologies dont « l'angoisse de dépression. Elle sur¬vient dès que le sujet imagine que son objet anacUtique risque de lui fairedéfaut. (...) L'objet anacUtique, c'est l'objet sur lequel on s'appuie, surlequel on s'étaie : dans les cas jusqu'à présent étudiés par la psychana¬lyse, cet objet est une personne - parent ou compagnon , mais dans lescas dont nous parlons, c'est l'organisation qui joue ce rôle d'étayage dela personnalité, qui lui fournit un cadre et un projet de développement,un soutien ou une reconnaissance, des gratifications, enfin, qui lui per¬mettent de vivre et de se conforter. » (39)

Pour y échapper, certains se désinvestissent ou se contentent de faire« un peu » de recherche. La plupart ne peuvent s'y résoudre : 73,5 %des enseignants-chercheurs interrogés disent que « depuis cinq ans, leurinvestissement dans le travaU a augmenté » .

L'institution universitaire est aussi « individuaUste » au niveau desstructures d'enseignement : si 53 % des enseignants-chercheurs trouventque le climat de leur département est agréable, il y a toutefois 21 % qui le

(38) AUBERT N., DE GAULEJAC V. (1991) : Les coûts de l'excellence, Paris, Seuil.(39) Ibid., page 204.

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ceux qui « jugent » le travaU pour les promotions renforce l'idée d'êtreconstamment sous le regard des autres : cette situation fait que 29,4 %des répondants disent « Je me sens continuellement évalué(e) par mescoUègues. »

Or, le niveau à atteindre en recherche dans certaines disciplinesdevient inaccessible. « Pour faire de la bonne recherche, il faut êtrequelqu'un de très fort, il y en a peu. (...) Je crois que la grande difficultéde ce métier, c'est ça. C'est qu'on se rend compte qu'on n'est pas suffi¬samment fort pour l'idéal qu'on s'est proposé. Et ça, je crois que c'esttrès dur, et Uy a des gens qui sont complètement névrosés et qui ne sontpas bien dans leur peau. C'est un métier difficile de ce point de vue là. »

(Femme, professeur, physique.)

Cette physicienne, en parlant de « névrose » décrit ce que NicoleAubert et Vincent de Gaulejac appellent une maladie de l'excellence,c'est à dire une maladie du narcissisme (38) : l'Université, comme lesentreprises, n'est plus aujourd'hui une organisation autoritaire et hié¬rarchique, mais plutôt une organisation individuaUste et narcissique. Lesstructures sociales « sont affaiblies, et l'accomplissement par chacun deson "moi" dans toutes ses dimensions figure au premier plan des préoc¬cupations ». Cette mutation sociologique et psychologique entraîne denouveaux types de pathologies dont « l'angoisse de dépression. Elle sur¬vient dès que le sujet imagine que son objet anacUtique risque de lui fairedéfaut. (...) L'objet anacUtique, c'est l'objet sur lequel on s'appuie, surlequel on s'étaie : dans les cas jusqu'à présent étudiés par la psychana¬lyse, cet objet est une personne - parent ou compagnon , mais dans lescas dont nous parlons, c'est l'organisation qui joue ce rôle d'étayage dela personnalité, qui lui fournit un cadre et un projet de développement,un soutien ou une reconnaissance, des gratifications, enfin, qui lui per¬mettent de vivre et de se conforter. » (39)

Pour y échapper, certains se désinvestissent ou se contentent de faire« un peu » de recherche. La plupart ne peuvent s'y résoudre : 73,5 %des enseignants-chercheurs interrogés disent que « depuis cinq ans, leurinvestissement dans le travaU a augmenté » .

L'institution universitaire est aussi « individuaUste » au niveau desstructures d'enseignement : si 53 % des enseignants-chercheurs trouventque le climat de leur département est agréable, il y a toutefois 21 % qui le

(38) AUBERT N., DE GAULEJAC V. (1991) : Les coûts de l'excellence, Paris, Seuil.(39) Ibid., page 204.

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Études et recherches 31

jugent inexistant et 26 % conflictuel. Les réunions « pédagogiques » exis¬tent, mais eUes se Umitent le plus souvent à gérer des aspects techniquesd'horaires, d'emplois du temps ou d'organisation de jury. Les pratiquespédagogiques sont rarement abordées parce qu'elles sont considéréescomme de l'ordre de la responsabiUté individueUe : en parler serait uneatteinte à la Uberté de l'autre, ce que l'on se garde bien de faire afin depréserver sa propre autonomie pédagogique. Lorsqu'un problème estposé, par exemple l'inadéquation entre le cours en amphithéâtre et unTD, la question se règle à l'amiable entre les intéressés : « il vaut mieuxs'arranger entre nous », dit un physicien, « plutôt que d'étaler çadevant tout le monde ». Cette gestion individuelle des questions d'ensei¬gnement empêche toute réflexion d'équipe, ce qui aurait pu favoriserl'émergence d'un désir de formation pédagogique.

À l'individuaUsme qui règne dans la plupart des structures d'ensei¬gnement (département ou UFR), viennent s'ajouter parfois dans les rela¬tions des enjeux de pouvoir et de statuts au point que 19,3 % traitent lefonctionnement de leur département de « mandarinal ». Près d'un tiers(32,2 %) disent même : « dans mon travail, il m'est plus difficilequ'avant d'avoir des initiatives personneUes ».

Dans ce cUmat, que certains semblent vivre comme tendu, près desdeux tiers (64,7 %) ont le sentiment de ne pouvoir développer leurs com¬pétences et déclarent : « je n'ai pas l'impression de pouvoir utilisertoutes mes capacités ».

Le besoin de reconnaissance n'est pas seulement individuel : fairepartie d'une profession socialement reconnue est aussi important. Or,sur cette question, beaucoup sont déçus : 54,8 % (contre 45,2 %) se

disent insatisfaits de l'image de la profession dans la société. Nous avonsvu que le niveau de salaire est un signe, pour les enseignants-chercheurs,de cette dévalorisation de la profession. C'est aussi l'image globale del'Université qui est en cause : la concurrence des Grandes Ecoles, l'aug¬mentation du nombre d'étudiants, les difficultés de financement deslaboratoires dans certaines disciplines, etc., tout cela fait dire à certainsinterviewés qu'on leur en demande trop par rapport à ce qu'on leurdonne.

C'est pourquoi, lorsqu'Us sont interrogés sur l'ensemble des aspectsde leur travail, 43,1 % s'estiment satisfaits, 28,5 % ni satisfaits ni insa¬tisfaits, et 28,5 % insatisfaits. Plus de la moitié d'entre eux (55,5 %)disent qu'Us sont de plus en plus pessimistes sur l'avenir de leur métier,et 23,4 % déclarent que s'Us avaient le choix, vu la situation, Us quitte¬raient l'Université.

Études et recherches 31

jugent inexistant et 26 % conflictuel. Les réunions « pédagogiques » exis¬tent, mais eUes se Umitent le plus souvent à gérer des aspects techniquesd'horaires, d'emplois du temps ou d'organisation de jury. Les pratiquespédagogiques sont rarement abordées parce qu'elles sont considéréescomme de l'ordre de la responsabiUté individueUe : en parler serait uneatteinte à la Uberté de l'autre, ce que l'on se garde bien de faire afin depréserver sa propre autonomie pédagogique. Lorsqu'un problème estposé, par exemple l'inadéquation entre le cours en amphithéâtre et unTD, la question se règle à l'amiable entre les intéressés : « il vaut mieuxs'arranger entre nous », dit un physicien, « plutôt que d'étaler çadevant tout le monde ». Cette gestion individuelle des questions d'ensei¬gnement empêche toute réflexion d'équipe, ce qui aurait pu favoriserl'émergence d'un désir de formation pédagogique.

À l'individuaUsme qui règne dans la plupart des structures d'ensei¬gnement (département ou UFR), viennent s'ajouter parfois dans les rela¬tions des enjeux de pouvoir et de statuts au point que 19,3 % traitent lefonctionnement de leur département de « mandarinal ». Près d'un tiers(32,2 %) disent même : « dans mon travail, il m'est plus difficilequ'avant d'avoir des initiatives personneUes ».

Dans ce cUmat, que certains semblent vivre comme tendu, près desdeux tiers (64,7 %) ont le sentiment de ne pouvoir développer leurs com¬pétences et déclarent : « je n'ai pas l'impression de pouvoir utilisertoutes mes capacités ».

Le besoin de reconnaissance n'est pas seulement individuel : fairepartie d'une profession socialement reconnue est aussi important. Or,sur cette question, beaucoup sont déçus : 54,8 % (contre 45,2 %) se

disent insatisfaits de l'image de la profession dans la société. Nous avonsvu que le niveau de salaire est un signe, pour les enseignants-chercheurs,de cette dévalorisation de la profession. C'est aussi l'image globale del'Université qui est en cause : la concurrence des Grandes Ecoles, l'aug¬mentation du nombre d'étudiants, les difficultés de financement deslaboratoires dans certaines disciplines, etc., tout cela fait dire à certainsinterviewés qu'on leur en demande trop par rapport à ce qu'on leurdonne.

C'est pourquoi, lorsqu'Us sont interrogés sur l'ensemble des aspectsde leur travail, 43,1 % s'estiment satisfaits, 28,5 % ni satisfaits ni insa¬tisfaits, et 28,5 % insatisfaits. Plus de la moitié d'entre eux (55,5 %)disent qu'Us sont de plus en plus pessimistes sur l'avenir de leur métier,et 23,4 % déclarent que s'Us avaient le choix, vu la situation, Us quitte¬raient l'Université.

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32 Recherche et Formation

CONCLUSION

Il faut rappeler ici qu'il est difficile de généraliser sur les conditionsde travaU et les opinions des enseignants-chercheurs au regard de la trèsgrande diversité des situations. Quelques aspects cependant de ce quenous venons d'examiner peuvent éclairer les raisons pour lesqueUes lesquestions de formation pédagogique ne préoccupent guère le miUeu uni¬versitaire.

Il y a d'abord le fait que pour une partie d'entre eux, la recherche estle pôle essentiel du métier, qu'ils y ont été formés et continuent à s'y for¬mer. Comme dans l'enseignement secondaire, un haut niveau de forma¬tion scientifique amène souvent à l'idée que « savoir, c'est savoir trans¬mettre ». Pourtant, 69,1 % d'entre eux reconnaissent qu'Us n'ont pas étéformés pour enseigner : les agrégés qui sont passés par l'enseignementsecondaire expUquent, dans les entretiens, que cette formation « sur letas » leur a été profitable. Ils restent cependant généralement rétifs àl'idée d'une formation pédagogique tant initiale que continue. Ils ne se

sentent pas concernés et considèrent que cela ne peut être utile que dansle primaire et le secondaire.

La plupart des enseignants-chercheurs ne comprennent généralementrien aux recherches pédagogiques et s'en méfient. « La recherche pédago¬gique, ça peut être très sérieux, ça peut être aussi très bidon. (. . .) Moi, jevois le meiUeur et le pire : Uy a des choses très sérieuses, il y a des genstrès valables quifont avancer les choses, et puis à côté, Uy a des trucs...Il y a des gens qui se noient, on ne comprend plus ce qu'ils disent. Alors jereste un peu méfiant. » (Professeur, physique.) H faut remarquer aussique les recherches pédagogiques et didactiques concernant l'enseignementsupérieur sont peu développées, particuUèrement en France.

Dans cette réticence à la formation et à la réflexion pédagogique, U nefaut peut-être pas négUger le poids de l'expérience et de l'âge de la majo¬rité des enseignants-chercheurs : quand on a 15 ou 20 ans de carrière,comme c'est le cas pour la plupart d'entre eux, la formation n'est plusune question.

D'autant plus que la grande majorité n'a pas de « difficultés » péda¬gogiques : le public n'est pas un pubUc astreint comme au lycée et U estrarement chahuteur. Si l'enseignant n'est pas « bon », les étudiants s'envont dans un autre cours. Les étudiants, comme le note Alain Carpentier(40) « sont des otages » : l'enjeu du diplôme est trop fort en ces temps de

(40) Opus cité, page 15.

32 Recherche et Formation

CONCLUSION

Il faut rappeler ici qu'il est difficile de généraliser sur les conditionsde travaU et les opinions des enseignants-chercheurs au regard de la trèsgrande diversité des situations. Quelques aspects cependant de ce quenous venons d'examiner peuvent éclairer les raisons pour lesqueUes lesquestions de formation pédagogique ne préoccupent guère le miUeu uni¬versitaire.

Il y a d'abord le fait que pour une partie d'entre eux, la recherche estle pôle essentiel du métier, qu'ils y ont été formés et continuent à s'y for¬mer. Comme dans l'enseignement secondaire, un haut niveau de forma¬tion scientifique amène souvent à l'idée que « savoir, c'est savoir trans¬mettre ». Pourtant, 69,1 % d'entre eux reconnaissent qu'Us n'ont pas étéformés pour enseigner : les agrégés qui sont passés par l'enseignementsecondaire expUquent, dans les entretiens, que cette formation « sur letas » leur a été profitable. Ils restent cependant généralement rétifs àl'idée d'une formation pédagogique tant initiale que continue. Ils ne se

sentent pas concernés et considèrent que cela ne peut être utile que dansle primaire et le secondaire.

La plupart des enseignants-chercheurs ne comprennent généralementrien aux recherches pédagogiques et s'en méfient. « La recherche pédago¬gique, ça peut être très sérieux, ça peut être aussi très bidon. (. . .) Moi, jevois le meiUeur et le pire : Uy a des choses très sérieuses, il y a des genstrès valables quifont avancer les choses, et puis à côté, Uy a des trucs...Il y a des gens qui se noient, on ne comprend plus ce qu'ils disent. Alors jereste un peu méfiant. » (Professeur, physique.) H faut remarquer aussique les recherches pédagogiques et didactiques concernant l'enseignementsupérieur sont peu développées, particuUèrement en France.

Dans cette réticence à la formation et à la réflexion pédagogique, U nefaut peut-être pas négUger le poids de l'expérience et de l'âge de la majo¬rité des enseignants-chercheurs : quand on a 15 ou 20 ans de carrière,comme c'est le cas pour la plupart d'entre eux, la formation n'est plusune question.

D'autant plus que la grande majorité n'a pas de « difficultés » péda¬gogiques : le public n'est pas un pubUc astreint comme au lycée et U estrarement chahuteur. Si l'enseignant n'est pas « bon », les étudiants s'envont dans un autre cours. Les étudiants, comme le note Alain Carpentier(40) « sont des otages » : l'enjeu du diplôme est trop fort en ces temps de

(40) Opus cité, page 15.

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Études et recherches 33

chômage. Hs n'osent revendiquer sur les méthodes pédagogiques, et ne se

font entendre parfois que sur les conditions de travaU...

Quelles qu'en soient les causes, on ne peut qu'être étonné del'absence de discours sur les pratiques pédagogiques dans les entretiens,alors que, par aUleurs, la plupart des enseignants-chercheurs s'inquiè¬tent de la quaUté de l'enseignement à l'Université. Dans les départe¬ments, toute discussion sur ces questions est évitée au nom de la Ubertépédagogique. Ne s'agirait-U pas d'un système de défense coUectif mis enplace afin de préserver, d'une part, l'idée que les enseignants-chercheurssavent (et n'ont donc rien à apprendre), et, d'autre part, la convictionque l'enseignement dispensé est efficace et pertinent (et donc qu'il nefaut rien y changer) . . .

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALLEGRE C. (1993). L'âge des savoirs, Paris, Gallimard.AUBERT N., DE GAULEJAC V. (1991). Les coûts de l'excellence, Paris,

Seuil.BERTHELOT J.-M. (1992). Les enseignants-chercheurs de l'enseigne¬

ment supérieur : revenus professionnels et conditions d'activités,Documents du CERC (Centre d'études des revenus et des coûts),n° 105, Paris, La Documentation Française.

BOURDIEU P. (1984). Homo Academicus, Paris, Minuit.CAMPUS P. (1986). Reconstruire l'Université, Paris, Albatros.CARPENTIER A. (1988). Le mal universitaire, diagnostic et traitement,

Paris, R. Laffont.Comité National d'Évaluation (1989). Priorités pour l'Université, rap¬

port au Président de la RépubUque (1985-1989), Paris, La Documen¬tation Française.

Comité National d'Évaluation (1991). Universités : les chances del'ouverture, Paris, La Documentation Française.

Comité National d'Évaluation (1993). Universités : la recherche deséquilibres, 1989-1993, Paris, La Documentation Française.

Commission « Femmes dans la Recherche », (1981). La recherche desfemmes, Syndicat National des Chercheurs Scientifiques.

Études et recherches 33

chômage. Hs n'osent revendiquer sur les méthodes pédagogiques, et ne se

font entendre parfois que sur les conditions de travaU...

Quelles qu'en soient les causes, on ne peut qu'être étonné del'absence de discours sur les pratiques pédagogiques dans les entretiens,alors que, par aUleurs, la plupart des enseignants-chercheurs s'inquiè¬tent de la quaUté de l'enseignement à l'Université. Dans les départe¬ments, toute discussion sur ces questions est évitée au nom de la Ubertépédagogique. Ne s'agirait-U pas d'un système de défense coUectif mis enplace afin de préserver, d'une part, l'idée que les enseignants-chercheurssavent (et n'ont donc rien à apprendre), et, d'autre part, la convictionque l'enseignement dispensé est efficace et pertinent (et donc qu'il nefaut rien y changer) . . .

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALLEGRE C. (1993). L'âge des savoirs, Paris, Gallimard.AUBERT N., DE GAULEJAC V. (1991). Les coûts de l'excellence, Paris,

Seuil.BERTHELOT J.-M. (1992). Les enseignants-chercheurs de l'enseigne¬

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BOURDIEU P. (1984). Homo Academicus, Paris, Minuit.CAMPUS P. (1986). Reconstruire l'Université, Paris, Albatros.CARPENTIER A. (1988). Le mal universitaire, diagnostic et traitement,

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Comité National d'Évaluation (1993). Universités : la recherche deséquilibres, 1989-1993, Paris, La Documentation Française.

Commission « Femmes dans la Recherche », (1981). La recherche desfemmes, Syndicat National des Chercheurs Scientifiques.

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34 Recherche et Formation

DURRY G. sous la direction de (1988). La condition des enseignants del'enseignement supérieur, rapport au ministre chargé de la rechercheet de l'enseignement supérieur. (Non pubhé.)

FAVE-BONNET M.-F. (1992). L'opinion des enseignants-chercheurs surles évolutions actuelles de l'Université. Savoir, éducation, formation,n° 1, janvier-mars 1992, éd. Sirey.

FAVE-BONNET M.-F. (1992). L'opinion des enseignants-chercheurs surleur profession. Savoir, éducation, formation, n° 2, avril-juin 1992,éd. Sirey.

FAVE-BONNET M.-F. (1993). Les enseignants-chercheurs physiciens,Paris, INRP/ SFP.

FRIEDBERG E., MUSSELIN C. (1989). En quête d'Universités : étudecomparée des Universités en France et en RFA, Paris, L'Harmattan.

FRIEDBERG E., MUSSELIN C. sous la direction de (1992). Le gouver¬nement des Universités, perspectives comparatives, Paris, L'Har¬mattan.

GIROD DE L'AIN B. (1993). « La crise des universités d'élite améri¬caines : quand la recherche détruit l'enseignement », Savoir, éduca¬tion, formation, n° 4, octobre-décembre 1993, éd. Sirey, pages 643-648.

JALLADE J.-P. (1991). L'enseignement supérieur en Europe : vers uneévaluation comparée des premiers cycles, Paris, La DocumentationFrançaise.

PAYE-JEANNENEY L., PAYAN J.-J. (1988). Le chantier universitaire :

bâtir l'avenir, Paris, Beauchesne.

PASSERON J.-C. (1986). 1950-1980 : l'Université mise à la question :

changement de décor ou changement de cap ? in VERGER J. :

Histoire des Universités en France, Toulouse, Privât.REMOND R. (1979). La règle et le consentement : gouverner une société,

Paris, Fayard.

34 Recherche et Formation

DURRY G. sous la direction de (1988). La condition des enseignants del'enseignement supérieur, rapport au ministre chargé de la rechercheet de l'enseignement supérieur. (Non pubhé.)

FAVE-BONNET M.-F. (1992). L'opinion des enseignants-chercheurs surles évolutions actuelles de l'Université. Savoir, éducation, formation,n° 1, janvier-mars 1992, éd. Sirey.

FAVE-BONNET M.-F. (1992). L'opinion des enseignants-chercheurs surleur profession. Savoir, éducation, formation, n° 2, avril-juin 1992,éd. Sirey.

FAVE-BONNET M.-F. (1993). Les enseignants-chercheurs physiciens,Paris, INRP/ SFP.

FRIEDBERG E., MUSSELIN C. (1989). En quête d'Universités : étudecomparée des Universités en France et en RFA, Paris, L'Harmattan.

FRIEDBERG E., MUSSELIN C. sous la direction de (1992). Le gouver¬nement des Universités, perspectives comparatives, Paris, L'Har¬mattan.

GIROD DE L'AIN B. (1993). « La crise des universités d'élite améri¬caines : quand la recherche détruit l'enseignement », Savoir, éduca¬tion, formation, n° 4, octobre-décembre 1993, éd. Sirey, pages 643-648.

JALLADE J.-P. (1991). L'enseignement supérieur en Europe : vers uneévaluation comparée des premiers cycles, Paris, La DocumentationFrançaise.

PAYE-JEANNENEY L., PAYAN J.-J. (1988). Le chantier universitaire :

bâtir l'avenir, Paris, Beauchesne.

PASSERON J.-C. (1986). 1950-1980 : l'Université mise à la question :

changement de décor ou changement de cap ? in VERGER J. :

Histoire des Universités en France, Toulouse, Privât.REMOND R. (1979). La règle et le consentement : gouverner une société,

Paris, Fayard.

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Etudes et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

35

LE COURS MAGISTRAL UNIVERSITAIRE :

UN DISCOURS SCIENTIFICO-PÉDAGOGIQUESANS ARTICULATION ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE

Marguerite ALTET*

Sommaire. De plus en plus les universitaires sont amenés à s'interroger sur les objectifs et l'efficacitédu cours magistral.L'évolution du public étudiant met en effet en évidence la carence d'un processus interactifentre enseignement et apprentissage réel des étudiants.

Si l'intérêt pour les questions pédagogiques se développe à l'Université, il est nécessaire de

trouver des outils appropriés qui permettent aux universitaires de réfléchir sur la façon dontils transmettent les savoirs originaux issus de la recherche. Par exemple, des ateliers péda¬

gogiques qui offrent la possibilité d'analyser les fonctions qu'ils remplissent, les structuresde communication qui s'établissent et les opérations cognitives exigées des étudiants peu¬

vent constituer un premier pas vers une meilleure connaissance des universitaires sur leurs

propres pratiques pédagogiques.

Summary. University professors are more and more led to wonder about the aims and efficiency oflecturing.Indeed, the evolution of the student audience brings out the lack of an interactive processbetween the teaching and the students' actual learning.

If an interest in teaching develop in universities, it is then necessary to find adequate toolsallowing professors to reflect on the way they transmit the original knowledge born fromresearch. For instance, teaching workshops providing them with the opportunity to analyse

their own role, the communication patterns which are established, as well as the cognitiveprocesses expected from the students, could constitute a first step towards universityprofessors' better knowledge of their own teaching practices.

L'augmentation massive des étudiants à l'Université, la présence depublics de plus en plus différenciés qui suivent les mêmes cours, leconstat des échecs et des abandons fréquents qui en découlent, soulèventde façon nouvelle et cruciale pour les Universitaires le problème desobjectifs et de l'efficacité de leurs cours.

Dans une recherche sur les pratiques pédagogiques des enseignantsdu Secondaire, nous avions défini l'enseignement comme « un processusinteractif, interpersonnel, intentionnel, qui utUise le discours pédago¬gique finalisé pour provoquer, favoriser, faire réussir l'apprentissage »

et montré que nous ne pouvions pas dissocier l'enseignement del'apprentissage : Us constituent pour nous un processus interactif dont

* Professeur de sciences de l'éducation. Université de Nantes.

Etudes et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

35

LE COURS MAGISTRAL UNIVERSITAIRE :

UN DISCOURS SCIENTIFICO-PÉDAGOGIQUESANS ARTICULATION ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE

Marguerite ALTET*

Sommaire. De plus en plus les universitaires sont amenés à s'interroger sur les objectifs et l'efficacitédu cours magistral.L'évolution du public étudiant met en effet en évidence la carence d'un processus interactifentre enseignement et apprentissage réel des étudiants.

Si l'intérêt pour les questions pédagogiques se développe à l'Université, il est nécessaire de

trouver des outils appropriés qui permettent aux universitaires de réfléchir sur la façon dontils transmettent les savoirs originaux issus de la recherche. Par exemple, des ateliers péda¬

gogiques qui offrent la possibilité d'analyser les fonctions qu'ils remplissent, les structuresde communication qui s'établissent et les opérations cognitives exigées des étudiants peu¬

vent constituer un premier pas vers une meilleure connaissance des universitaires sur leurs

propres pratiques pédagogiques.

Summary. University professors are more and more led to wonder about the aims and efficiency oflecturing.Indeed, the evolution of the student audience brings out the lack of an interactive processbetween the teaching and the students' actual learning.

If an interest in teaching develop in universities, it is then necessary to find adequate toolsallowing professors to reflect on the way they transmit the original knowledge born fromresearch. For instance, teaching workshops providing them with the opportunity to analyse

their own role, the communication patterns which are established, as well as the cognitiveprocesses expected from the students, could constitute a first step towards universityprofessors' better knowledge of their own teaching practices.

L'augmentation massive des étudiants à l'Université, la présence depublics de plus en plus différenciés qui suivent les mêmes cours, leconstat des échecs et des abandons fréquents qui en découlent, soulèventde façon nouvelle et cruciale pour les Universitaires le problème desobjectifs et de l'efficacité de leurs cours.

Dans une recherche sur les pratiques pédagogiques des enseignantsdu Secondaire, nous avions défini l'enseignement comme « un processusinteractif, interpersonnel, intentionnel, qui utUise le discours pédago¬gique finalisé pour provoquer, favoriser, faire réussir l'apprentissage »

et montré que nous ne pouvions pas dissocier l'enseignement del'apprentissage : Us constituent pour nous un processus interactif dont

* Professeur de sciences de l'éducation. Université de Nantes.

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36 Recherche et Formation

l'articulation est essentieUe. C'est pourquoi, dans une recherche pédago¬gique que nous avions menée sur 23 enseignants du secondaire, nousavions analysé l'articulation du processus enseignement-apprentissage,la relation fonctionneUe enseignant-élèves en classe, la transformation del'Information en Savoir par les échanges cognitifs et relationnels mis enplace par les enseignants au travers des interactions pédagogiques. Nousavions construit des outils conceptuels descripteurs des pratiques péda¬gogiques pour « restituer le fonctionnement pédagogique réel des ensei¬

gnants observés ».

Nous avons utilisé ces outils dans l'analyse de cours universitaires,pour pouvoir identifier la spécificité des cours à l'Université, de cettetransmission de connaissances spéciaUsées, faite dans un discours scienti-fico-pédagogique monologué, autocentré, cohérent mais qui, en raison del'importance des effectifs de son public, ne prend pas en compte lesapprenants et leurs feed-backs, et s'appuie rarement sur les interactionsou le dialogue lors de la transmission en amphithéâtre, par exemple.

1. LA SITUATION ACTUELLE :

UNE ANALYSE DE COURS UNIVERSITAIRES

À partir d'un questionnaire passé à 283 étudiants à l'issue de leurtroisième séance de cours de licence (à 121 étudiants en Sciences del'Éducation, 132 en Sociologie, 30 en Grec classique), en début d'annéeuniversitaire, sur la compréhension du cours suivi, on relève un certainnombre de difficultés rencontrées par les étudiants pour suivre un coursuniversitaire :

63 % d'étudiants trouvent le cours trop rapide ;

52 % y voient trop de connaissances nouveUes ;

56 % notent qu'U y a trop de références inconnues ;

40 % rencontrent des problèmes de vocabulaire ;

38 % disent méconnaître les auteurs cités ;

49 % disent avoir des problèmes de prise de notes.

En résumé, près de la moitié disent avoir des lacunes de connais¬sances sur les thèmes abordés, parfois aucune connaissance préalable,des difficultés à suivre pendant le cours et à prendre des notes, des pro¬blèmes à s'approprier seuls les contenus après le cours : ils ont donc à lafois des problèmes de connaissances et de méthodologie.

À la question ouverte « que souhaiteriez-vous pour ameUorer l'efficacitépédagogique du cours ? » , les étudiants formulent les demandes suivantes :

58 % demandent plus d'expUcations pour les points nouveaux ;

36 Recherche et Formation

l'articulation est essentieUe. C'est pourquoi, dans une recherche pédago¬gique que nous avions menée sur 23 enseignants du secondaire, nousavions analysé l'articulation du processus enseignement-apprentissage,la relation fonctionneUe enseignant-élèves en classe, la transformation del'Information en Savoir par les échanges cognitifs et relationnels mis enplace par les enseignants au travers des interactions pédagogiques. Nousavions construit des outils conceptuels descripteurs des pratiques péda¬gogiques pour « restituer le fonctionnement pédagogique réel des ensei¬

gnants observés ».

Nous avons utilisé ces outils dans l'analyse de cours universitaires,pour pouvoir identifier la spécificité des cours à l'Université, de cettetransmission de connaissances spéciaUsées, faite dans un discours scienti-fico-pédagogique monologué, autocentré, cohérent mais qui, en raison del'importance des effectifs de son public, ne prend pas en compte lesapprenants et leurs feed-backs, et s'appuie rarement sur les interactionsou le dialogue lors de la transmission en amphithéâtre, par exemple.

1. LA SITUATION ACTUELLE :

UNE ANALYSE DE COURS UNIVERSITAIRES

À partir d'un questionnaire passé à 283 étudiants à l'issue de leurtroisième séance de cours de licence (à 121 étudiants en Sciences del'Éducation, 132 en Sociologie, 30 en Grec classique), en début d'annéeuniversitaire, sur la compréhension du cours suivi, on relève un certainnombre de difficultés rencontrées par les étudiants pour suivre un coursuniversitaire :

63 % d'étudiants trouvent le cours trop rapide ;

52 % y voient trop de connaissances nouveUes ;

56 % notent qu'U y a trop de références inconnues ;

40 % rencontrent des problèmes de vocabulaire ;

38 % disent méconnaître les auteurs cités ;

49 % disent avoir des problèmes de prise de notes.

En résumé, près de la moitié disent avoir des lacunes de connais¬sances sur les thèmes abordés, parfois aucune connaissance préalable,des difficultés à suivre pendant le cours et à prendre des notes, des pro¬blèmes à s'approprier seuls les contenus après le cours : ils ont donc à lafois des problèmes de connaissances et de méthodologie.

À la question ouverte « que souhaiteriez-vous pour ameUorer l'efficacitépédagogique du cours ? » , les étudiants formulent les demandes suivantes :

58 % demandent plus d'expUcations pour les points nouveaux ;

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Études et recherches 37

53 % des clarifications des points obscurs pendant le cours ;

57 % insistent, eux, sur la nécessité que le professeur fasse le pointavec eux sur le cours précédent qu'Us ont essayé d'assimUer seuls par untravaU personnel, une fois la transmission terminée ;

43 % demandent que le plan du cours et les objectifs soient annon¬cés clairement ;

et 77 % plus d'échanges entre le professeur et le groupe des étudiants.

On constate actuellement des difficultés de compréhension desconnaissances dispensées dans les cours magistraux classiques, le mêmepour tous en amphithéâtre, et des problèmes méthodologiques de prise denotes et de travail personnel pour l'appropriation de ces cours, ainsiqu'un manque de relations enseignant-étudiants, aspect relevé avec forcepar les trois-quarts des étudiants.

En analysant des cours universitaires réels enregistrés au magnéto¬phone ou au caméscope, nous avons essayé de mieux comprendre ce querecouvrait cette crise pédagogique.

2. LES CARACTERISTIQUES DU COURS UND7ERSITAIRE

Les cours magistraux universitaires que nous avons analysés, présen¬tent les caractéristiques suivantes : ce sont tous des monologues expositifsqui informent, citent, donnent des références bibliographiques, retracentdes recherches reconnues par la communauté scientifique ou très récentes,proposent des synthèses personneUes, originales sur une question, intè¬grent les toutes dernières recherches ou connaissances puhhées, présen¬tent une recherche spécifique, transmettent des savoirs rationnels, savoirssynthétisés personneUement par l'enseignant-chercheur qui les dispense ;

cette transmission de savoirs « originaux » est faite sans échanges véri¬tables avec les étudiants, c'est un « CM », un cours magistral.

Il s'agit d'un discours qui dit, un corps d'assertions qu'on ne discutepas, qui est articulé de façon interne par le raisonnement de l'énoncia-tcur, la logique de l'enseignant. C'est un discours qui informe sans com¬munication réelle avec l'auditoire, parce que seul l'enseignant-chercheurqui a conduit la recherche, sait ; lorsque l'enseignant pose des questionsaux étudiants, ce sont des questions rhétoriques, car U s'agit avant toutde dire ce qui a été recherché et trouvé, pour comme l'écrit fortjustement Annie Bireaud « assurer la reproduction de la communautéscientifique ».

Études et recherches 37

53 % des clarifications des points obscurs pendant le cours ;

57 % insistent, eux, sur la nécessité que le professeur fasse le pointavec eux sur le cours précédent qu'Us ont essayé d'assimUer seuls par untravaU personnel, une fois la transmission terminée ;

43 % demandent que le plan du cours et les objectifs soient annon¬cés clairement ;

et 77 % plus d'échanges entre le professeur et le groupe des étudiants.

On constate actuellement des difficultés de compréhension desconnaissances dispensées dans les cours magistraux classiques, le mêmepour tous en amphithéâtre, et des problèmes méthodologiques de prise denotes et de travail personnel pour l'appropriation de ces cours, ainsiqu'un manque de relations enseignant-étudiants, aspect relevé avec forcepar les trois-quarts des étudiants.

En analysant des cours universitaires réels enregistrés au magnéto¬phone ou au caméscope, nous avons essayé de mieux comprendre ce querecouvrait cette crise pédagogique.

2. LES CARACTERISTIQUES DU COURS UND7ERSITAIRE

Les cours magistraux universitaires que nous avons analysés, présen¬tent les caractéristiques suivantes : ce sont tous des monologues expositifsqui informent, citent, donnent des références bibliographiques, retracentdes recherches reconnues par la communauté scientifique ou très récentes,proposent des synthèses personneUes, originales sur une question, intè¬grent les toutes dernières recherches ou connaissances puhhées, présen¬tent une recherche spécifique, transmettent des savoirs rationnels, savoirssynthétisés personneUement par l'enseignant-chercheur qui les dispense ;

cette transmission de savoirs « originaux » est faite sans échanges véri¬tables avec les étudiants, c'est un « CM », un cours magistral.

Il s'agit d'un discours qui dit, un corps d'assertions qu'on ne discutepas, qui est articulé de façon interne par le raisonnement de l'énoncia-tcur, la logique de l'enseignant. C'est un discours qui informe sans com¬munication réelle avec l'auditoire, parce que seul l'enseignant-chercheurqui a conduit la recherche, sait ; lorsque l'enseignant pose des questionsaux étudiants, ce sont des questions rhétoriques, car U s'agit avant toutde dire ce qui a été recherché et trouvé, pour comme l'écrit fortjustement Annie Bireaud « assurer la reproduction de la communautéscientifique ».

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38 Recherche et Formation

II s'agit, en fait, d'une intervention scientifique spécialisée quel'enseignant fait en attribuant a priori certaines connaissances à sonpubUc, et en le dotant d'une double compétence scientifique et cognitive :

l'étudiant est censé d'abord être capable, en cours, de connaître quelquepeu le sujet et de suivre le raisonnement de l'enseignant pour pouvoirprendre correctement des notes. Il est aussi censé avoir certaines compé¬tences cognitives pour saisir, intégrer ces nouveUes connaissances pen¬dant le cours, avant de pouvoir, dans un second temps, reprendre seulpersonneUement ce cours pour le comprendre et l'apprendre, avec l'aideparfois de TD ou TP, travaux dirigés ou travaux pratiques qui sont uneapplication des cours devant faciUter la compréhension.

Dans son cours, l'Universitaire n'intervient pas sur l'étudiant X maissur les connaissances qu'il attribue à X. Dans un amphithéâtre d'unecentaine ou plus d'étudiants, l'enseignant ne se donne pas les moyens devérifier les acquis de son auditoire et fixe a priori le niveau de son dis¬cours scientifique.

Bien sûr, tout universitaire use dans son discours d'éléments narra¬tifs pour faciUter la compréhension des éléments assertifs, en utilisant enplus l'emploi de nombreux marqueurs discursifs : c'est l'aspect pédago¬gique du cours universitaire.

A. Bouacha (1981) a très bien montré que les marqueurs discursifs« alors, bon alors », les connecteurs linguistiques « puis, eh bien, d'ail¬leurs, maintenant » sont très employés dans le cours magistral universi¬taire pour « attaquer le discours, couper le flux discursif, permettre desdécrochements discursifs, relancer le discours ».

En fait, ces marqueurs permettent essentieUement d'articuler le dis¬cours oral de façon cohérente. Et s'Us ont longtemps suffi pour un audi¬toire homogène qui avait les éléments de base pour comprendre le dis¬cours préalablement structuré par l'enseignant, U n'en est plus de mêmeavec un groupe d'étudiants très hétérogènes qui ne possèdent pas lesconnaissances indispensables à la compréhension des éléments informa-tifs de base du discours.

Or comme dans sa transmission magistrale, l'Universitaire n'a aucunfeed-back de ses étudiants, il fait, comme tout conférencier, « comme si »

son auditoire suivait son exposé et sa logique, les comprenait et réussis¬sait à transformer immédiatement dans « l'ici et maintenant » de soncours, l'information transmise en Savoir, ce qui n'est actuellement plusle cas par exemple, pour la moitié des étudiants présents dans les troisséances que nous avons enregistrées et analysées.

38 Recherche et Formation

II s'agit, en fait, d'une intervention scientifique spécialisée quel'enseignant fait en attribuant a priori certaines connaissances à sonpubUc, et en le dotant d'une double compétence scientifique et cognitive :

l'étudiant est censé d'abord être capable, en cours, de connaître quelquepeu le sujet et de suivre le raisonnement de l'enseignant pour pouvoirprendre correctement des notes. Il est aussi censé avoir certaines compé¬tences cognitives pour saisir, intégrer ces nouveUes connaissances pen¬dant le cours, avant de pouvoir, dans un second temps, reprendre seulpersonneUement ce cours pour le comprendre et l'apprendre, avec l'aideparfois de TD ou TP, travaux dirigés ou travaux pratiques qui sont uneapplication des cours devant faciUter la compréhension.

Dans son cours, l'Universitaire n'intervient pas sur l'étudiant X maissur les connaissances qu'il attribue à X. Dans un amphithéâtre d'unecentaine ou plus d'étudiants, l'enseignant ne se donne pas les moyens devérifier les acquis de son auditoire et fixe a priori le niveau de son dis¬cours scientifique.

Bien sûr, tout universitaire use dans son discours d'éléments narra¬tifs pour faciUter la compréhension des éléments assertifs, en utilisant enplus l'emploi de nombreux marqueurs discursifs : c'est l'aspect pédago¬gique du cours universitaire.

A. Bouacha (1981) a très bien montré que les marqueurs discursifs« alors, bon alors », les connecteurs linguistiques « puis, eh bien, d'ail¬leurs, maintenant » sont très employés dans le cours magistral universi¬taire pour « attaquer le discours, couper le flux discursif, permettre desdécrochements discursifs, relancer le discours ».

En fait, ces marqueurs permettent essentieUement d'articuler le dis¬cours oral de façon cohérente. Et s'Us ont longtemps suffi pour un audi¬toire homogène qui avait les éléments de base pour comprendre le dis¬cours préalablement structuré par l'enseignant, U n'en est plus de mêmeavec un groupe d'étudiants très hétérogènes qui ne possèdent pas lesconnaissances indispensables à la compréhension des éléments informa-tifs de base du discours.

Or comme dans sa transmission magistrale, l'Universitaire n'a aucunfeed-back de ses étudiants, il fait, comme tout conférencier, « comme si »

son auditoire suivait son exposé et sa logique, les comprenait et réussis¬sait à transformer immédiatement dans « l'ici et maintenant » de soncours, l'information transmise en Savoir, ce qui n'est actuellement plusle cas par exemple, pour la moitié des étudiants présents dans les troisséances que nous avons enregistrées et analysées.

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Études et recherches 39

Le problème de la prise de notes est donc crucial aujourd'hui pourl'efficacité du cours magistral à l'Université, si l'on veut que l'étudiantpuisse assinûler le contenu des cours par un travaU personnel après laséance. Ceci soulève la question incontournable des compétences cogni¬tives et méthodologiques à développer chez les étudiants si l'on vise leurréussite universitaire.

Encore faut-il que l'enseignant du Supérieur prenne d'abordconscience que le cours magistral est devenu inadapté au public étudiantactuel et qu'U pose aujourd'hui des problèmes pédagogiques graves qu'Udevient urgent de traiter faute d'augmenter l'échec à l'Université. Or cesquestions pédagogiques ont jusqu'à présent été souvent secondes pour unenseignant du Supérieur, par rapport à ses problèmes de recherche, quieux font ou défont sa carrière d'universitaire, qui est ceUe d'un ensei¬gnant-chercheur, d'abord recruté et quaUfié par ses recherches.

Cependant l'intérêt pour les questions pédagogiques se développeavec l'arrivée à l'Université de deux nouveaux types d'enseignants sensi-biUsés à ces questions, les PRAG et les moniteurs.

Avec le recrutement important des PRAG, professeurs agrégés del'enseignement secondaire, recrutés pour répondre aux besoins d'ensei¬gnement dans le premier cycle, de nouveUes pratiques pédagogiques se

développent avec la mise en place d'un tutorat pour les étudiants.

De plus avec la création des Moniteurs, étudiants en Doctorat chargésd'un semi-service d'enseignement en TD ou TP, on assiste aux débuts dela mise en uvre d'une formation pédagogique des jeunes enseignants-chercheurs de l'enseignement Supérieur. Cette formation, initiation àl'enseignement dans le Supérieur, consiste en quelques journées de for¬mation théorique générale et est basée sur le Tutorat d'un enseignant-chercheur titulaire, volontaire pour encadrer l'enseignant débutant.Avec cette fonction de Tuteur qui émerge à l'Université, l'enseignementprend une nouvelle dimension. L'enseignant-chercheur qui accepted'être le Tuteur d'un jeune Moniteur, signe avec lui un contrat d'aide,reconnaît son rôle pédagogique et se définit comme « une personne char¬gée par son niveau de compétence et son goût certain pour la pédagogie,d'aider un enseignant-débutant en l'accueUlant, la conseUlant et l'accom¬pagnant pendant sa formation (1) ». Devenu formateur, par sa nouveUe

(1) Définition donnée par des enseignants-chercheurs-tuteurs lors d'un bilan avec des

moniteurs, Université de Nantes, juin 1993.

Études et recherches 39

Le problème de la prise de notes est donc crucial aujourd'hui pourl'efficacité du cours magistral à l'Université, si l'on veut que l'étudiantpuisse assinûler le contenu des cours par un travaU personnel après laséance. Ceci soulève la question incontournable des compétences cogni¬tives et méthodologiques à développer chez les étudiants si l'on vise leurréussite universitaire.

Encore faut-il que l'enseignant du Supérieur prenne d'abordconscience que le cours magistral est devenu inadapté au public étudiantactuel et qu'U pose aujourd'hui des problèmes pédagogiques graves qu'Udevient urgent de traiter faute d'augmenter l'échec à l'Université. Or cesquestions pédagogiques ont jusqu'à présent été souvent secondes pour unenseignant du Supérieur, par rapport à ses problèmes de recherche, quieux font ou défont sa carrière d'universitaire, qui est ceUe d'un ensei¬gnant-chercheur, d'abord recruté et quaUfié par ses recherches.

Cependant l'intérêt pour les questions pédagogiques se développeavec l'arrivée à l'Université de deux nouveaux types d'enseignants sensi-biUsés à ces questions, les PRAG et les moniteurs.

Avec le recrutement important des PRAG, professeurs agrégés del'enseignement secondaire, recrutés pour répondre aux besoins d'ensei¬gnement dans le premier cycle, de nouveUes pratiques pédagogiques se

développent avec la mise en place d'un tutorat pour les étudiants.

De plus avec la création des Moniteurs, étudiants en Doctorat chargésd'un semi-service d'enseignement en TD ou TP, on assiste aux débuts dela mise en uvre d'une formation pédagogique des jeunes enseignants-chercheurs de l'enseignement Supérieur. Cette formation, initiation àl'enseignement dans le Supérieur, consiste en quelques journées de for¬mation théorique générale et est basée sur le Tutorat d'un enseignant-chercheur titulaire, volontaire pour encadrer l'enseignant débutant.Avec cette fonction de Tuteur qui émerge à l'Université, l'enseignementprend une nouvelle dimension. L'enseignant-chercheur qui accepted'être le Tuteur d'un jeune Moniteur, signe avec lui un contrat d'aide,reconnaît son rôle pédagogique et se définit comme « une personne char¬gée par son niveau de compétence et son goût certain pour la pédagogie,d'aider un enseignant-débutant en l'accueUlant, la conseUlant et l'accom¬pagnant pendant sa formation (1) ». Devenu formateur, par sa nouveUe

(1) Définition donnée par des enseignants-chercheurs-tuteurs lors d'un bilan avec des

moniteurs, Université de Nantes, juin 1993.

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40 Recherche et Formation

fonction de tuteur, l'enseignant-chercheur est donc amené à s'interrogersur le processus enseigner-apprendre à l'Université et sur sa spécificité.

Cette prise de conscience par les Universitaires, de la spécificité deleurs cours, centrés sur des contenus structurés par eux et transmis telsquels sans échanges avec leur auditoire, et cette mise en évidence de lanon prise en considération de la manière dont l'étudiant s'approprie cescontenus et des problèmes méthodologiques qu'U rencontre, nous sem¬blent pouvoir être le point de départ d'une plus grande efficacité pédago¬gique possible.

C'est pourquoi, nous avons proposé dans le cadre d'une recherchesur la pédagogie dans l'Enseignement supérieur, de mettre à la disposi¬tion des enseignants du Supérieur, des AteUers Pédagogiques présentantdes outils d'analyse de leurs pratiques réelles pour développer leurréflexivité pédagogique sur ce qu'Us font, par une auto-formation plus oumoins assistée selon leur demande.

H s'agissait d'un dispositif de formation pédagogique pour des univer¬sitaires volontaires : UN ATELIER PÉDAGOGIQUE consistant en untravail d'appropriation d'outils descripteurs des pratiques sur la com¬munication, les actes pédagogiques, les opérations cognitives, les situa¬tions mises en uvre. Ces outils ont pour objectif d'aider à mieux com¬prendre les décalages et problèmes d'ajustement enseignant-étudiants encours, les difficultés causées par le manque de relation fonctionnelleenseignement-apprentissage dans un cours universitaire. C'est une teUeprise de conscience, réalisée à partir d'une formation à l'analyse de pra¬tiques réelles, auto-formation assistée (cours enregistré au magnéto¬phone ou au caméscope puis analysé) , qui nous semble pouvoir per¬mettre une amélioration de l'efficacité pédagogique de l'EnseignementSupérieur et développer la professionnalité de l'Enseignant universitairecomme pédagogue et pas seulement comme chercheur.

3. UN ATELIER PEDAGOGIQUE POUR DECRffiEET ANALYSER LES PRATIQUES PÉDAGOGIQUES

D s'agit, dans le cadre d'un CUFEF, de mener une analyse de pra¬tiques réelles d'enseignants-chercheurs, enregistrées sur bandes audio ouvidéo. La formation pédagogique consiste en une sensibUisation au pro¬cessus interactif enseignement-apprentissage et en une identification desinteractions pédagogiques à l'aide d'outils conceptuels qui mettentl'accent sur l'articulation enseignement-apprentissage. Partant de

40 Recherche et Formation

fonction de tuteur, l'enseignant-chercheur est donc amené à s'interrogersur le processus enseigner-apprendre à l'Université et sur sa spécificité.

Cette prise de conscience par les Universitaires, de la spécificité deleurs cours, centrés sur des contenus structurés par eux et transmis telsquels sans échanges avec leur auditoire, et cette mise en évidence de lanon prise en considération de la manière dont l'étudiant s'approprie cescontenus et des problèmes méthodologiques qu'U rencontre, nous sem¬blent pouvoir être le point de départ d'une plus grande efficacité pédago¬gique possible.

C'est pourquoi, nous avons proposé dans le cadre d'une recherchesur la pédagogie dans l'Enseignement supérieur, de mettre à la disposi¬tion des enseignants du Supérieur, des AteUers Pédagogiques présentantdes outils d'analyse de leurs pratiques réelles pour développer leurréflexivité pédagogique sur ce qu'Us font, par une auto-formation plus oumoins assistée selon leur demande.

H s'agissait d'un dispositif de formation pédagogique pour des univer¬sitaires volontaires : UN ATELIER PÉDAGOGIQUE consistant en untravail d'appropriation d'outils descripteurs des pratiques sur la com¬munication, les actes pédagogiques, les opérations cognitives, les situa¬tions mises en uvre. Ces outils ont pour objectif d'aider à mieux com¬prendre les décalages et problèmes d'ajustement enseignant-étudiants encours, les difficultés causées par le manque de relation fonctionnelleenseignement-apprentissage dans un cours universitaire. C'est une teUeprise de conscience, réalisée à partir d'une formation à l'analyse de pra¬tiques réelles, auto-formation assistée (cours enregistré au magnéto¬phone ou au caméscope puis analysé) , qui nous semble pouvoir per¬mettre une amélioration de l'efficacité pédagogique de l'EnseignementSupérieur et développer la professionnalité de l'Enseignant universitairecomme pédagogue et pas seulement comme chercheur.

3. UN ATELIER PEDAGOGIQUE POUR DECRffiEET ANALYSER LES PRATIQUES PÉDAGOGIQUES

D s'agit, dans le cadre d'un CUFEF, de mener une analyse de pra¬tiques réelles d'enseignants-chercheurs, enregistrées sur bandes audio ouvidéo. La formation pédagogique consiste en une sensibUisation au pro¬cessus interactif enseignement-apprentissage et en une identification desinteractions pédagogiques à l'aide d'outils conceptuels qui mettentl'accent sur l'articulation enseignement-apprentissage. Partant de

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Études et recherches 41

l'hypothèse de l'importance de la « clarté cognitive » de l'étudiant pourla réussite de son apprentissage (compréhension de l'objectif, possibiUtéde cadrage, décodage des messages, identification des cadres de réfé¬rence... ), nous proposons une griUe de lecture permettant de repérer lesproblèmes d'ajustement de l'enseignant aux étudiants et les décalagesrencontrés (Altet, 1991, schéma 1).

Cette grUle d'analyse aide à repérer les effets des questions posées,des choix stratégiques, de la communication et à dégager le nécessaireeffort d'ajustement permanent de l'enseignant dans les interactions.

Les enseignants du Supérieur volontaires s'approprient des outilsd'analyse des pratiques en les faisant fonctionner avec le formateur surdes séquences de cours universitaires enregistrées ; il s'agit de menerl'analyse :

- des fonctions qu'ils rempUssent en regroupant leurs actes d'ensei¬gnement autour de leur intention dominante (information, stimulation,régulation, évaluation, gestion... ) et en dégageant ce que ce que ces fonc¬tions déclenchent chez les étudiants (réception passive d'informations,réflexion ou production active de savoirs) (Recherches M. Postic, 1977 etM. Altet, 1991) ;

- des structures de communication que leurs actes induisent ensituation de cours, position haute du conférencier, subordination del'étudiant ou relation d'écoute et d'échange ;

- et des opérations cognitives qu'ils demandent aux étudiants demettre en uvre à partir de leur exposé magistral ; l'analyse est menée à

l'aide d'un répertoire d'opérations cognitives que nous avons construitdans notre dernière recherche sur les interactions pédagogiques d'ensei¬gnants de collège (M. Altet, 1991, schéma 2). Ces opérations sont inféréesà partir du discours de l'enseignant et des réponses des étudiantslorsqu'U y a des échanges.

Le formateur met en évidence dans l'analyse, les articulations entreles processus d'enseignement et d'apprentissage : comment selon la stra¬tégie d'information retenue dans un scénario préalablement construit,selon la présence ou non de conditions d'apprentissage mises en �uvre encours pour développer réflexion et interactions, s'enclenchent chez lesétudiants des opérations cognitives différentes : soit une automatisationdes savoirs exposés, soit la mise en uvre d'hypothèses ou encore uneintégration des nouveaux savoirs aux anciens. Puis le formateur déve¬loppe leur réflexivité sur les processus d'apprentissage des étudiants etsur leurs stratégies.

Études et recherches 41

l'hypothèse de l'importance de la « clarté cognitive » de l'étudiant pourla réussite de son apprentissage (compréhension de l'objectif, possibiUtéde cadrage, décodage des messages, identification des cadres de réfé¬rence... ), nous proposons une griUe de lecture permettant de repérer lesproblèmes d'ajustement de l'enseignant aux étudiants et les décalagesrencontrés (Altet, 1991, schéma 1).

Cette grUle d'analyse aide à repérer les effets des questions posées,des choix stratégiques, de la communication et à dégager le nécessaireeffort d'ajustement permanent de l'enseignant dans les interactions.

Les enseignants du Supérieur volontaires s'approprient des outilsd'analyse des pratiques en les faisant fonctionner avec le formateur surdes séquences de cours universitaires enregistrées ; il s'agit de menerl'analyse :

- des fonctions qu'ils rempUssent en regroupant leurs actes d'ensei¬gnement autour de leur intention dominante (information, stimulation,régulation, évaluation, gestion... ) et en dégageant ce que ce que ces fonc¬tions déclenchent chez les étudiants (réception passive d'informations,réflexion ou production active de savoirs) (Recherches M. Postic, 1977 etM. Altet, 1991) ;

- des structures de communication que leurs actes induisent ensituation de cours, position haute du conférencier, subordination del'étudiant ou relation d'écoute et d'échange ;

- et des opérations cognitives qu'ils demandent aux étudiants demettre en uvre à partir de leur exposé magistral ; l'analyse est menée à

l'aide d'un répertoire d'opérations cognitives que nous avons construitdans notre dernière recherche sur les interactions pédagogiques d'ensei¬gnants de collège (M. Altet, 1991, schéma 2). Ces opérations sont inféréesà partir du discours de l'enseignant et des réponses des étudiantslorsqu'U y a des échanges.

Le formateur met en évidence dans l'analyse, les articulations entreles processus d'enseignement et d'apprentissage : comment selon la stra¬tégie d'information retenue dans un scénario préalablement construit,selon la présence ou non de conditions d'apprentissage mises en �uvre encours pour développer réflexion et interactions, s'enclenchent chez lesétudiants des opérations cognitives différentes : soit une automatisationdes savoirs exposés, soit la mise en uvre d'hypothèses ou encore uneintégration des nouveaux savoirs aux anciens. Puis le formateur déve¬loppe leur réflexivité sur les processus d'apprentissage des étudiants etsur leurs stratégies.

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42 Recherche et Formation

A l'issue de cette sensibUisation pédagogique de trois jours, les uni¬versitaires volontaires enregistrent leurs propres cours et les analysentavec, selon leur choix, l'aide ou non du formateur.

Cet Atelier pédagogique a été proposé à tous les enseignants-cher¬cheurs de l'Université (Caen, 1991) ; quinze d'entre eux, de toutesdiscipUnes, sont venus se former ; les deux-tiers ont trouvé que cette ana¬lyse les aidait à se décentrer de leur contenu et à s'interroger sur les pro¬cessus d'apprentissage des étudiants ; ils ont demandé une poursuite decette formation.

Cet atelier d'analyse proposé n'est qu'un moyen, il reste aussi àmettre en place des stratégies qui incitent davantage les universitaires àréfléchir sur leur efficacité pédagogique et les sensibiUsent à la questionde leur formation pédagogique et de la construction de leur professionna¬Ute enseignante à côté de leurs compétences professionnelles de cher¬cheur.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALTET, M. (1991). « Le cours universitaire : un discours scientifico-pédagogique sans articulation enseignement-apprentissage, proposi¬tion d'Ateliers et d'outUs descripteurs des pratiques » in CoUoqueADMES « L'efficacité pédagogique dans l'enseignement supérieur »,Paris.

ALTET, M. (1993). La formation professionnelle des enseignants, Paris,PUF.

ALTET, M. (1991). Analyse séquentielle et systémique de l'articulationdu processus enseignement-apprentissage, HDR, CERSE, Caen.

BIREAUD, A. (1990). Les méthodes pédagogiques dans renseignementsupérieur, Éditions d'Organisation, Paris.

BOUACHA, A. (1981). « Alors » dans le discours pédagogique : épiphé-nomène ou traces d'opérations discursives, BELC, Paris.

POSTIC, M., DE KETELE, J.-M. (1988). Observer les situations éduca¬tives, PUF, Paris.

POSTIC, M. (1977). Observation et formation des enseignants, PUF,Paris.

42 Recherche et Formation

A l'issue de cette sensibUisation pédagogique de trois jours, les uni¬versitaires volontaires enregistrent leurs propres cours et les analysentavec, selon leur choix, l'aide ou non du formateur.

Cet Atelier pédagogique a été proposé à tous les enseignants-cher¬cheurs de l'Université (Caen, 1991) ; quinze d'entre eux, de toutesdiscipUnes, sont venus se former ; les deux-tiers ont trouvé que cette ana¬lyse les aidait à se décentrer de leur contenu et à s'interroger sur les pro¬cessus d'apprentissage des étudiants ; ils ont demandé une poursuite decette formation.

Cet atelier d'analyse proposé n'est qu'un moyen, il reste aussi àmettre en place des stratégies qui incitent davantage les universitaires àréfléchir sur leur efficacité pédagogique et les sensibiUsent à la questionde leur formation pédagogique et de la construction de leur professionna¬Ute enseignante à côté de leurs compétences professionnelles de cher¬cheur.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALTET, M. (1991). « Le cours universitaire : un discours scientifico-pédagogique sans articulation enseignement-apprentissage, proposi¬tion d'Ateliers et d'outUs descripteurs des pratiques » in CoUoqueADMES « L'efficacité pédagogique dans l'enseignement supérieur »,Paris.

ALTET, M. (1993). La formation professionnelle des enseignants, Paris,PUF.

ALTET, M. (1991). Analyse séquentielle et systémique de l'articulationdu processus enseignement-apprentissage, HDR, CERSE, Caen.

BIREAUD, A. (1990). Les méthodes pédagogiques dans renseignementsupérieur, Éditions d'Organisation, Paris.

BOUACHA, A. (1981). « Alors » dans le discours pédagogique : épiphé-nomène ou traces d'opérations discursives, BELC, Paris.

POSTIC, M., DE KETELE, J.-M. (1988). Observer les situations éduca¬tives, PUF, Paris.

POSTIC, M. (1977). Observation et formation des enseignants, PUF,Paris.

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Etudes et recherches 43

MODES D'AJUSTEMENT DE L'ENSEIGNANTAUX ÉLÈVES EN CLASSE

Schéma 1

SUR LES PLANS CORRESPONDANCE OU DECALAGE

Cognitif

QuestionnementFormes des questionsFonctions des questionsNiveau cognitif question/réponseRaisonnementsCadres de référence

PÉDAGOGIQUE

Communication

Affectif

par rapport à la Stratégiepar rapport à l'Objectifpar rapport à la Consignepar rapport aux critères de la Tâche

Traits de surface / Compréhension profondRépertoireRegistre de savoirRegistre de formulation

Présence Affectivité positivePrésence Affectivité négative

Etudes et recherches 43

MODES D'AJUSTEMENT DE L'ENSEIGNANTAUX ÉLÈVES EN CLASSE

Schéma 1

SUR LES PLANS CORRESPONDANCE OU DECALAGE

Cognitif

QuestionnementFormes des questionsFonctions des questionsNiveau cognitif question/réponseRaisonnementsCadres de référence

PÉDAGOGIQUE

Communication

Affectif

par rapport à la Stratégiepar rapport à l'Objectifpar rapport à la Consignepar rapport aux critères de la Tâche

Traits de surface / Compréhension profondRépertoireRegistre de savoirRegistre de formulation

Présence Affectivité positivePrésence Affectivité négative

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44 Recherche et Formation

REPERTOIRE DES OPERATIONS COGNITIVES UTILISEESDANS LE PROCESSUS DE TRAITEMENT DE L'INFORMATION

Schéma 2

FONCTIONSDES OPÉRATIONS

1. Opérations de saisied'encodage

EnregistrementReconnaissance

2. Opérations detransformation

Compréhension

3. Opérations demémorisation

Restitutionappucation

4. Opérationsd'inférences

Raisonnement

5. Opérations deproduction

RésolutionJugement

6. Opérations demétacognition

MECANISMESD'APPRENTISSAGE

AttentionDécodageIdentificationCodificationinterprétationCadrage

DiscriminationCatégorisationInstantiationComparaisonClassificationMise en relationAnticipation

RappelRécupérationStockageAppariementAutomatisationSélectionTransfert

AnalogieInductionDéductionHypothèsesAnalyseExplicationSynthèse

ArgumentationDivergenceIntégrationGénéralisationDifférenciationJustificationÉvaluation

Prise de conscienceRéflexion

ORGANISATIONEN MÉMOIRE

RÉSEAU SÉMANTIQUE :

création de n:uds,d'associations,concepts,propositions

SchémasScripts

Interfacemémoire de travailmémoire a long terme

Système d'utilisationProduction de recles

Systèmed'abstraction,de création

Système de rétro¬action

44 Recherche et Formation

REPERTOIRE DES OPERATIONS COGNITIVES UTILISEESDANS LE PROCESSUS DE TRAITEMENT DE L'INFORMATION

Schéma 2

FONCTIONSDES OPÉRATIONS

1. Opérations de saisied'encodage

EnregistrementReconnaissance

2. Opérations detransformation

Compréhension

3. Opérations demémorisation

Restitutionappucation

4. Opérationsd'inférences

Raisonnement

5. Opérations deproduction

RésolutionJugement

6. Opérations demétacognition

MECANISMESD'APPRENTISSAGE

AttentionDécodageIdentificationCodificationinterprétationCadrage

DiscriminationCatégorisationInstantiationComparaisonClassificationMise en relationAnticipation

RappelRécupérationStockageAppariementAutomatisationSélectionTransfert

AnalogieInductionDéductionHypothèsesAnalyseExplicationSynthèse

ArgumentationDivergenceIntégrationGénéralisationDifférenciationJustificationÉvaluation

Prise de conscienceRéflexion

ORGANISATIONEN MÉMOIRE

RÉSEAU SÉMANTIQUE :

création de n:uds,d'associations,concepts,propositions

SchémasScripts

Interfacemémoire de travailmémoire a long terme

Système d'utilisationProduction de recles

Systèmed'abstraction,de création

Système de rétro¬action

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Études et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

45

LE MONITORATD'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Renée SIMONET*

Sommaire. Le monitorat d'initiation à l'enseignement Supérieur est une institution nouvelle - octobreiggg _ et reSfe enme m\ connue des milieux universitaires. Il repose sur un double para¬

doxe :- celui de confier, à titre d'initiation, des fonctions d'enseignant (64h/année en 1er cycle) à

de jeunes doctorants, allocataires de recherche ou ex-normaliens, alors que ceux-ci sont

encore étudiants ;- celui de former ces moniteurs au métier d'enseignant sans leur donner l'assurance dunrecrutement, la recherche étant toujours le seul critère reconnu par le milieu universitaire.Nous avons tenté, dans cet article, de présenter l'institution dans sa complexité, de faire lepoint des expériences de formation actuellement développées sur l'ensemble des 14 CIES

(Centres d'Initiation à l'Enseignement Supérieur) et d'explorer le sens de cette démarche

« d'initiation » pour les différents acteurs.

Summary. Training to be an instructor teaching in a university is a new institution - October 1989 -and still remains little known in academic circles. It rests on a double paradox:- entrusting, on a training basis, young doctorate students, research grant-holders, orformer students of the École Normale Supérieure, with teaching responsibilities (64 hours a

year in the 1st and 2nd years), even though they are still students;- training these instructors for a teaching job without securing them a post, research stillbeing the only criterion recognized by academic circles.This article attempts to present the institution in its complexity, to review the trainingexperiments now, carried out in all of the 14 CIES (training centres to university education)

and to explore the meaning of this "initiation " process for the various people concerned.

* Maître de conférences. Université de Paris Dauphine.

Études et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

45

LE MONITORATD'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Renée SIMONET*

Sommaire. Le monitorat d'initiation à l'enseignement Supérieur est une institution nouvelle - octobreiggg _ et reSfe enme m\ connue des milieux universitaires. Il repose sur un double para¬

doxe :- celui de confier, à titre d'initiation, des fonctions d'enseignant (64h/année en 1er cycle) à

de jeunes doctorants, allocataires de recherche ou ex-normaliens, alors que ceux-ci sont

encore étudiants ;- celui de former ces moniteurs au métier d'enseignant sans leur donner l'assurance dunrecrutement, la recherche étant toujours le seul critère reconnu par le milieu universitaire.Nous avons tenté, dans cet article, de présenter l'institution dans sa complexité, de faire lepoint des expériences de formation actuellement développées sur l'ensemble des 14 CIES

(Centres d'Initiation à l'Enseignement Supérieur) et d'explorer le sens de cette démarche

« d'initiation » pour les différents acteurs.

Summary. Training to be an instructor teaching in a university is a new institution - October 1989 -and still remains little known in academic circles. It rests on a double paradox:- entrusting, on a training basis, young doctorate students, research grant-holders, orformer students of the École Normale Supérieure, with teaching responsibilities (64 hours a

year in the 1st and 2nd years), even though they are still students;- training these instructors for a teaching job without securing them a post, research stillbeing the only criterion recognized by academic circles.This article attempts to present the institution in its complexity, to review the trainingexperiments now, carried out in all of the 14 CIES (training centres to university education)

and to explore the meaning of this "initiation " process for the various people concerned.

* Maître de conférences. Université de Paris Dauphine.

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46 Recherche et Formation

LE MONITORAT D'INITIATION À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR :

UNE INSTITUTION PARADOXALE

Réfléchir sur la formation ou plutôt sur « l'initiation » au métierd'enseignant du supérieur impUque de prendre en compte la spécificitéde cette institution encore nouveUe qu'est le « monitorat » d'enseigne¬ment supérieur et de comprendre le fonctionnement des CIES Centresd'Initiation à l'Enseignement Supérieur. Nous nous sommes souventconfrontée à la méconnaissance de ce système par ceux-mêmes qui sontcensés le faire fonctionner, directeurs de DEA, responsables d'université ;nous avons également souvent entendu exprimer le rejet d'une teUe insti¬tution, à partir de l'idée selon laqueUe les enseignants du supérieur seforment « sur le tas » et qu'U n'est pas besoin de les materner.

Notre sentiment est que mis à part les « tuteurs » chargés d'encadrerles moniteurs dans leurs fonctions pédagogiques, et les universitaires quiinterviennent dans la formation, le milieu des enseignants-chercheursreste assez peu informé de l'ensemble des mécanismes de fonctionnementde cette nouvelle institution.

C'est pourquoi nous avons conçu cet article à la fois comme un docu¬ment d'information, de synthèse et de réflexion sur la situation actueUedu monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur.

LE « MONITORAT » D'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR :

UNE PRÉPARATION AUX FONCTIONSD'ENSEIGNANT-CHERCHEUR... SANS ASSURANCE DE POSTE

Le « monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur » voit le jourpar le décret 89/794 du 30 octobre 1989. Il a pour but de former « parl'enseignement et la recherche » les étudiants doctorants qui se destinentà l'enseignement supérieur aux fonctions d'enseignant-chercheur.

Dans la préface du document d'information pubUé par le Ministèred'Education nationale et la Direction de la Recherche et des Études Doc¬torales (DRED), M. Vincent CourtUlot, alors directeur de la DRED, expli¬que que, vu l'augmentation des besoins d'encadrement des universités,« ce sont au moins 1 500 et peut-être 2 000 jeunes docteurs qu'U faudrachaque année recruter comme maîtres de conférences ». Par la créationdu monitorat, les autorités de tuteUe ont pour but « d'inciter ces jeunesdoctorants à rejoindre l'enseignement supérieur après leur thèse ».

46 Recherche et Formation

LE MONITORAT D'INITIATION À L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR :

UNE INSTITUTION PARADOXALE

Réfléchir sur la formation ou plutôt sur « l'initiation » au métierd'enseignant du supérieur impUque de prendre en compte la spécificitéde cette institution encore nouveUe qu'est le « monitorat » d'enseigne¬ment supérieur et de comprendre le fonctionnement des CIES Centresd'Initiation à l'Enseignement Supérieur. Nous nous sommes souventconfrontée à la méconnaissance de ce système par ceux-mêmes qui sontcensés le faire fonctionner, directeurs de DEA, responsables d'université ;nous avons également souvent entendu exprimer le rejet d'une teUe insti¬tution, à partir de l'idée selon laqueUe les enseignants du supérieur seforment « sur le tas » et qu'U n'est pas besoin de les materner.

Notre sentiment est que mis à part les « tuteurs » chargés d'encadrerles moniteurs dans leurs fonctions pédagogiques, et les universitaires quiinterviennent dans la formation, le milieu des enseignants-chercheursreste assez peu informé de l'ensemble des mécanismes de fonctionnementde cette nouvelle institution.

C'est pourquoi nous avons conçu cet article à la fois comme un docu¬ment d'information, de synthèse et de réflexion sur la situation actueUedu monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur.

LE « MONITORAT » D'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR :

UNE PRÉPARATION AUX FONCTIONSD'ENSEIGNANT-CHERCHEUR... SANS ASSURANCE DE POSTE

Le « monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur » voit le jourpar le décret 89/794 du 30 octobre 1989. Il a pour but de former « parl'enseignement et la recherche » les étudiants doctorants qui se destinentà l'enseignement supérieur aux fonctions d'enseignant-chercheur.

Dans la préface du document d'information pubUé par le Ministèred'Education nationale et la Direction de la Recherche et des Études Doc¬torales (DRED), M. Vincent CourtUlot, alors directeur de la DRED, expli¬que que, vu l'augmentation des besoins d'encadrement des universités,« ce sont au moins 1 500 et peut-être 2 000 jeunes docteurs qu'U faudrachaque année recruter comme maîtres de conférences ». Par la créationdu monitorat, les autorités de tuteUe ont pour but « d'inciter ces jeunesdoctorants à rejoindre l'enseignement supérieur après leur thèse ».

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Etudes et recherches 47

Pour organiser et gérer ce monitorat sont créés 14 Centres d'Ini¬tiation à l'Enseignement Supérieur (CIES) répartis sur toute la France,chacun d'eux regroupant plusieurs universités selon des critères géogra¬phiques et éventueUement disciplinaires.

Pour mieux comprendre le sens que peut prendre le processus de for¬mation des moniteurs, il est utUe d'apporter quelques clarifications sur lefonctionnement de ce système dans les subtUités duquel bien des universi¬taires se perdent... au détriment des moniteurs effectifs.

LE STATUT DE MONITEUR : PLUS VRAIMENT ETUDIANT...PAS VRAIMENT ENSEIGNANT-CHERCHEUR

Le monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur dure trois ans etn'est accessible qu'à des doctorants bénéficiant d'une allocation derecherche attribuée par le Ministère de la Recherche et de la Techno¬logie, ou d'un régime comparable, et aux anciens élèves des ÉcolesNormales Supérieures à la sortie de l'ENS (exception faite pour les nor¬maliens accomplissant leur service national).

Notons que les normaliens sont en général agrégés et que le Ministèrede la Recherche attribue de plus en plus d'aUocations à des agrégés nonnormaliens qui sollicitent le statut de moniteur moins rémunéré que celuide leur corps d'origine. Il convient de préciser que le monitorat a étéétendu aux normaUens qui, auparavant, bénéficiaient du statut de AND(Assistant Normalien Doctorant) impliquant un service complet d'ensei¬gnement.

Il y a eu volonté politique de la part du Ministère de l'Educationnationale, alors dirigé par M. Jospin, d'éviter que les doctorants ne fus¬sent répartis dans deux corps.

Ainsi, les normaliens et les aUocataires de recherche purent postulerpour le même statut de moniteur. Et le statut de AND fut supprimé etremplacé par celui d'ATER (Attaché Temporaire d'Enseignement et deRecherche) ouvert à tous les candidats, normaUens ou non.

La nomination même des moniteurs relève de commissions organiséesau sein de l'étabUssement d'accueU et regroupant des présidents de com¬missions de spéciaUstes, de responsables des DEA, des directeurs de pre¬mier cycle autour du chef d'étabUssement et du directeur du CIES.

Etudes et recherches 47

Pour organiser et gérer ce monitorat sont créés 14 Centres d'Ini¬tiation à l'Enseignement Supérieur (CIES) répartis sur toute la France,chacun d'eux regroupant plusieurs universités selon des critères géogra¬phiques et éventueUement disciplinaires.

Pour mieux comprendre le sens que peut prendre le processus de for¬mation des moniteurs, il est utUe d'apporter quelques clarifications sur lefonctionnement de ce système dans les subtUités duquel bien des universi¬taires se perdent... au détriment des moniteurs effectifs.

LE STATUT DE MONITEUR : PLUS VRAIMENT ETUDIANT...PAS VRAIMENT ENSEIGNANT-CHERCHEUR

Le monitorat d'initiation à l'enseignement supérieur dure trois ans etn'est accessible qu'à des doctorants bénéficiant d'une allocation derecherche attribuée par le Ministère de la Recherche et de la Techno¬logie, ou d'un régime comparable, et aux anciens élèves des ÉcolesNormales Supérieures à la sortie de l'ENS (exception faite pour les nor¬maliens accomplissant leur service national).

Notons que les normaliens sont en général agrégés et que le Ministèrede la Recherche attribue de plus en plus d'aUocations à des agrégés nonnormaliens qui sollicitent le statut de moniteur moins rémunéré que celuide leur corps d'origine. Il convient de préciser que le monitorat a étéétendu aux normaUens qui, auparavant, bénéficiaient du statut de AND(Assistant Normalien Doctorant) impliquant un service complet d'ensei¬gnement.

Il y a eu volonté politique de la part du Ministère de l'Educationnationale, alors dirigé par M. Jospin, d'éviter que les doctorants ne fus¬sent répartis dans deux corps.

Ainsi, les normaliens et les aUocataires de recherche purent postulerpour le même statut de moniteur. Et le statut de AND fut supprimé etremplacé par celui d'ATER (Attaché Temporaire d'Enseignement et deRecherche) ouvert à tous les candidats, normaUens ou non.

La nomination même des moniteurs relève de commissions organiséesau sein de l'étabUssement d'accueU et regroupant des présidents de com¬missions de spéciaUstes, de responsables des DEA, des directeurs de pre¬mier cycle autour du chef d'étabUssement et du directeur du CIES.

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48 Recherche et Formation

Tout moniteur, encadré par un « tuteur » qui ne peut pas être sondirecteur de thèse, doit accomplir 1/3 du service d'un enseignant-cher¬cheur (soit 64 h de TD. ou 98 h de TP) en premier cycle ou, sur déroga¬tion accordée par le directeur du CIES, en deuxième cycle.

L'université d'exercice du monitorat peut-être différente de ceUe où lemoniteur fait sa thèse.

Un des « éléments centraux » de ce dispositif réside dans la fonctiondes tuteurs, définis par le législateur comme des « enseignants-cher-clieurs qui acceptent de guider ceux qui sont potentiellement leurs jeunescollègues dans leurs premiers pas dans l'enseignement supérieur » : nousverrons ultérieurement que la réaUté n'est pas aussi poétique !

Cette « initiation » à l'enseignement supérieur se fait à la fois par lapratique du métier et par une « formation professionnelle » dont « ladurée annuelle ne peut être inférieure à dix jours ». Cette formation estorganisée au sein du CIES.

Le moniteur se trouve donc à la rencontre de plusieurs instances,entre lesquelles il est souvent tiraiUé : son directeur de thèse, son tuteur,le directeur du CIES auquel U est rattaché. Et c'est souvent ce dernierqui se voit soUicité pour paUier les carences que les deux autres ont géné¬

rées ! Or cela ne relève pas de son autorité que de prendre en charge laformation à la recherche ou les difficultés pédagogiques Uées à une situa¬tion particulière. Ce multiple rattachement génère, en outre, des pro¬blèmes d'organisation qui ont une répercussion sur la formation. Deschevauchements d'emploi du temps amènent souvent le moniteur àdevoir renoncer à une journée de stage pour assurer ses TD, le tuteurn'ayant pas intégré le fait qu'il doit le « libérer » pour répondre auxconvocations du CIES.

La préparation de la thèse, l'enseignement et la « formation profes¬sionnelle » représentent des enjeux différents et face à ceux-ci le moni¬teur est amené à développer une stratégie où la formation est en généralsacrifiée. Car il importe de préciser que le monitorat n'est en aucunefaçon une assurance d'obtenir un poste en fin de thèse. Le documentd'information, voire d'incitation publié par le Ministère d'Éducationnationale, insiste sur le fait que le recrutement, à l'issue du monitorat,« n'est ni un droit, ni une obUgation ». Dernier point : le moniteur per¬çoit une indemnité de monitorat de 2 200 francs qui ajoutés à l'aUocationde recherche lui assure un revenu brut de 9 600 francs par mois.

48 Recherche et Formation

Tout moniteur, encadré par un « tuteur » qui ne peut pas être sondirecteur de thèse, doit accomplir 1/3 du service d'un enseignant-cher¬cheur (soit 64 h de TD. ou 98 h de TP) en premier cycle ou, sur déroga¬tion accordée par le directeur du CIES, en deuxième cycle.

L'université d'exercice du monitorat peut-être différente de ceUe où lemoniteur fait sa thèse.

Un des « éléments centraux » de ce dispositif réside dans la fonctiondes tuteurs, définis par le législateur comme des « enseignants-cher-clieurs qui acceptent de guider ceux qui sont potentiellement leurs jeunescollègues dans leurs premiers pas dans l'enseignement supérieur » : nousverrons ultérieurement que la réaUté n'est pas aussi poétique !

Cette « initiation » à l'enseignement supérieur se fait à la fois par lapratique du métier et par une « formation professionnelle » dont « ladurée annuelle ne peut être inférieure à dix jours ». Cette formation estorganisée au sein du CIES.

Le moniteur se trouve donc à la rencontre de plusieurs instances,entre lesquelles il est souvent tiraiUé : son directeur de thèse, son tuteur,le directeur du CIES auquel U est rattaché. Et c'est souvent ce dernierqui se voit soUicité pour paUier les carences que les deux autres ont géné¬

rées ! Or cela ne relève pas de son autorité que de prendre en charge laformation à la recherche ou les difficultés pédagogiques Uées à une situa¬tion particulière. Ce multiple rattachement génère, en outre, des pro¬blèmes d'organisation qui ont une répercussion sur la formation. Deschevauchements d'emploi du temps amènent souvent le moniteur àdevoir renoncer à une journée de stage pour assurer ses TD, le tuteurn'ayant pas intégré le fait qu'il doit le « libérer » pour répondre auxconvocations du CIES.

La préparation de la thèse, l'enseignement et la « formation profes¬sionnelle » représentent des enjeux différents et face à ceux-ci le moni¬teur est amené à développer une stratégie où la formation est en généralsacrifiée. Car il importe de préciser que le monitorat n'est en aucunefaçon une assurance d'obtenir un poste en fin de thèse. Le documentd'information, voire d'incitation publié par le Ministère d'Éducationnationale, insiste sur le fait que le recrutement, à l'issue du monitorat,« n'est ni un droit, ni une obUgation ». Dernier point : le moniteur per¬çoit une indemnité de monitorat de 2 200 francs qui ajoutés à l'aUocationde recherche lui assure un revenu brut de 9 600 francs par mois.

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Études et recherches 49

LE CIES : LE C DU SYSTÈME

Dirigé par un enseignant chercheur nommé pour deux ans, renouve¬lable une fois, par le Ministre chargé de l'enseignement supérieur, aprèsavis des présidents des universités concernées et des responsables desautres étabUssements d'enseignement supérieur, le CIES a pour fonctionsessentielles :

- d'affecter les allocations de monitorat aux étabUssements ;

- de former et de suivre les moniteurs ;

- de coordonner l'action des tuteurs.

Le CIES n'est pas géographiquement un Ueu de formation ; celui de laSorbonne tient dans deux minuscules bureaux, celui du directeur et celuide la secrétaire, et dispose d'une petite saUe de réunion... et U n'est pasexclu qu'il soit privUégié !

Le directeur du CIES est assisté d'un conseil de direction où siègentles recteurs, les présidents d'universités et responsables d'établissementsrattachés et d'un comité pédagogique qui réunit autour des questions deformation des représentants des étabUssements et des moniteurs élus.

Quelques données chiffrées

L'État attribue chaque année ce qu'U est convenu d'appeler les « cha¬peaux » de moniteurs, financés conjointement à l'origine par le Ministèrede la Recherche et le Ministère de l'Éducation nationale. Les modifica¬tions actuelles dans l'organisation de ces instances vont dans le sensd'une simplification, cette attribution étant effectuée désormais par leMinistère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

C'est la Direction Générale de la Recherche et de la Technologie quiassure la répartition des « chapeaux » en fonction de la géographie et desdisciplines. Chaque directeur de CIES se voit donc attribuer son lot de« chapeaux » à distribuer.

Selon M. Bouchet, Responsable du bureau de la formation à l'ensei¬gnement supérieur et des ENS (DGRT 31), « on compte actuellementenviron 5 000 moniteurs répartis sur trois ans, dont 780 allocatairesmoniteurs normaliens ; plus du tiers de ce contingent est renouveléchaque année. Il faut, selon ce responsable, considérer que ces effectifssont appelés à rester en stagnation dans les années à venir. Le plus petitCIES compte environ 180 moniteurs, le plus gros dépasse les 500. »

Études et recherches 49

LE CIES : LE C DU SYSTÈME

Dirigé par un enseignant chercheur nommé pour deux ans, renouve¬lable une fois, par le Ministre chargé de l'enseignement supérieur, aprèsavis des présidents des universités concernées et des responsables desautres étabUssements d'enseignement supérieur, le CIES a pour fonctionsessentielles :

- d'affecter les allocations de monitorat aux étabUssements ;

- de former et de suivre les moniteurs ;

- de coordonner l'action des tuteurs.

Le CIES n'est pas géographiquement un Ueu de formation ; celui de laSorbonne tient dans deux minuscules bureaux, celui du directeur et celuide la secrétaire, et dispose d'une petite saUe de réunion... et U n'est pasexclu qu'il soit privUégié !

Le directeur du CIES est assisté d'un conseil de direction où siègentles recteurs, les présidents d'universités et responsables d'établissementsrattachés et d'un comité pédagogique qui réunit autour des questions deformation des représentants des étabUssements et des moniteurs élus.

Quelques données chiffrées

L'État attribue chaque année ce qu'U est convenu d'appeler les « cha¬peaux » de moniteurs, financés conjointement à l'origine par le Ministèrede la Recherche et le Ministère de l'Éducation nationale. Les modifica¬tions actuelles dans l'organisation de ces instances vont dans le sensd'une simplification, cette attribution étant effectuée désormais par leMinistère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.

C'est la Direction Générale de la Recherche et de la Technologie quiassure la répartition des « chapeaux » en fonction de la géographie et desdisciplines. Chaque directeur de CIES se voit donc attribuer son lot de« chapeaux » à distribuer.

Selon M. Bouchet, Responsable du bureau de la formation à l'ensei¬gnement supérieur et des ENS (DGRT 31), « on compte actuellementenviron 5 000 moniteurs répartis sur trois ans, dont 780 allocatairesmoniteurs normaliens ; plus du tiers de ce contingent est renouveléchaque année. Il faut, selon ce responsable, considérer que ces effectifssont appelés à rester en stagnation dans les années à venir. Le plus petitCIES compte environ 180 moniteurs, le plus gros dépasse les 500. »

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50 Recherche et Formation

Tel est le contexte institutionnel dans lequel s'inscrit le processus deformation au métier d'enseignant du supérieur.

UNE FORMATION DECENTRALISEE

La loi du 17 juillet 1992 relative à l'organisation des CIES prévoit que« le comité pédagogique doit notamment être consulté sur l'organisation,le contenu et l'évaluation des stages » ainsi que sur la « désignation destuteurs ». Cette instance est le Ueu de rencontre et d'échange des diffé¬rents acteurs de la formation (directeurs du CIES, représentants des uni¬versités, moniteurs élus) ; c'est là que s'élaborent les programmes desstages et autres modaUtés de formation destinés aux moniteurs.

Chacun des quatorze CIES a l'initiative de son orientation en matièrede formation et la comparaison des programmes proposés à travers laFrance laisse apparaître des points de convergence, certes, mais aussiune grande diversité sur l'organisation, les contenus, la nature des inter¬venants, les modaUtés d'évaluation.

En effet, certains conçoivent un programme unique de formation, parannée, obUgatoire pour tous les moniteurs, queUe que soit leur discipUne.

D'autres procèdent par enseignements ou ateUers optionnels, d'autrescombinent des séquences imposées à tous et des options.

Les uns prônent le brassage pluridisciplinaire, les autres la formationpar groupes monodisciplinaires. Certains CIES privilégient le grandgroupe et multiphent les conférences, d'autres misent sur le petit groupeet favorisent les ateUers, la majorité combinant les deux formules.

Quant au choix des intervenants eux-mêmes, U dépend de la poUtiquede formation définie par le CIES ; Us peuvent ou non faire partie des uni¬versités de rattachement, ceUes-ci n'ayant pas toujours dans leur corpsd'enseignants-chercheurs les spéciaUstes recherchés.

Tous les CIES ont recours à des responsables administratifs, soit del'université, soit de l'administration centrale, pour présenter aux moni¬teurs les rouages de la « machine » enseignement supérieur. Mais, en cequi concerne les discipUnes de rattachement des enseignants-chercheurschargés de former, ou plutôt « d'initier », les moniteurs, eUes sont l'objetde débats entre les directeurs de CIES, comme cela a pu être exprimé aucoUoque de l'ADMES (1).

(1) Association pour le Développement des Méthodes de l'Enseignement Supérieur.Pour le rapport s'adresser à A. Bireaud - Université Paris XIII.

50 Recherche et Formation

Tel est le contexte institutionnel dans lequel s'inscrit le processus deformation au métier d'enseignant du supérieur.

UNE FORMATION DECENTRALISEE

La loi du 17 juillet 1992 relative à l'organisation des CIES prévoit que« le comité pédagogique doit notamment être consulté sur l'organisation,le contenu et l'évaluation des stages » ainsi que sur la « désignation destuteurs ». Cette instance est le Ueu de rencontre et d'échange des diffé¬rents acteurs de la formation (directeurs du CIES, représentants des uni¬versités, moniteurs élus) ; c'est là que s'élaborent les programmes desstages et autres modaUtés de formation destinés aux moniteurs.

Chacun des quatorze CIES a l'initiative de son orientation en matièrede formation et la comparaison des programmes proposés à travers laFrance laisse apparaître des points de convergence, certes, mais aussiune grande diversité sur l'organisation, les contenus, la nature des inter¬venants, les modaUtés d'évaluation.

En effet, certains conçoivent un programme unique de formation, parannée, obUgatoire pour tous les moniteurs, queUe que soit leur discipUne.

D'autres procèdent par enseignements ou ateUers optionnels, d'autrescombinent des séquences imposées à tous et des options.

Les uns prônent le brassage pluridisciplinaire, les autres la formationpar groupes monodisciplinaires. Certains CIES privilégient le grandgroupe et multiphent les conférences, d'autres misent sur le petit groupeet favorisent les ateUers, la majorité combinant les deux formules.

Quant au choix des intervenants eux-mêmes, U dépend de la poUtiquede formation définie par le CIES ; Us peuvent ou non faire partie des uni¬versités de rattachement, ceUes-ci n'ayant pas toujours dans leur corpsd'enseignants-chercheurs les spéciaUstes recherchés.

Tous les CIES ont recours à des responsables administratifs, soit del'université, soit de l'administration centrale, pour présenter aux moni¬teurs les rouages de la « machine » enseignement supérieur. Mais, en cequi concerne les discipUnes de rattachement des enseignants-chercheurschargés de former, ou plutôt « d'initier », les moniteurs, eUes sont l'objetde débats entre les directeurs de CIES, comme cela a pu être exprimé aucoUoque de l'ADMES (1).

(1) Association pour le Développement des Méthodes de l'Enseignement Supérieur.Pour le rapport s'adresser à A. Bireaud - Université Paris XIII.

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Études et recherches 51

En effet, si nous nous attachons aux spécialistes des Sciences del'Éducation, ils sont systématiquement rejetés par un petit nombre dedirecteurs de CIES, fortement sollicités par quelques autres qui leurconfient quasiment la conception des programmes de formation et utiUsésdans le cadre de leurs compétences spécifiques par les autres.

Nombreux sont les directeurs de CIES qui insistent sur la nécessité deconfier les moniteurs à des spéciaUstes de la discipUne qu'Us enseignent ;

parmi ceux-là, l'une des responsables d'un CIES qui recrute des scienti¬fiques, a fait appel à des spécialistes des Sciences de l'Education pourformer à l'animation de stages les enseignants chercheurs de mathéma¬tiques, physique, chimie chargés d'intervenir auprès des moniteurs.

Une teUe hétérogénéité permet de comprendre que l'on ne puisse pasparler de « la » formation des moniteurs mais de politiques de formation.Une analyse comparée des divers programmes élaborés par les CIESnous permet de dégager des points de convergence en matière decontenu. Par delà la diversité nous avons donc pu mettre en évidence degrandes tendances que nous présentons ci-après.

A LA DECOUVERTE DU SYSTEME UND/ERSITAIRE

Sous des intitulés tels que « le système universitaire français »

(Alsace), « l'Institution universitaire » (Toulouse - Paris Sorbonne), « lefonctionnement des universités » (Lyon), « Organisation administrative etfinancière des universités », tous les CIES se proposent de famUiariserles moniteurs avec le contexte institutionnel de leur futur métier.

Cette approche globale est complétée localement par la présentationde l'université d'accueil.

À l'intérieur de ce système, un sous-ensemble donne Ueu, dans tousles CIES, à plusieurs interventions : « la carrière de l'enseignant-cher¬cheur » (Lyon). Cela inclut « le statut juridique de l'enseignant du supé¬rieur » (Toulouse), mais également une information sur « l'organisationde la recherche » (Grenoble) et le CNRS (Lyon). A cela s'ajoutent desconférences sur « le monitorat » et « le rôle des tuteurs ». En troisièmeannée, les moniteurs reçoivent sous forme de conférences ou d'ateUers lesindications susceptibles de les aider à passer du monitorat aux fonctionsd'ATER (Attaché Temporaire d'Enseignement et de Recherche) ou demaître de conférences. Cela va jusqu'à inclure une approche pratique

Études et recherches 51

En effet, si nous nous attachons aux spécialistes des Sciences del'Éducation, ils sont systématiquement rejetés par un petit nombre dedirecteurs de CIES, fortement sollicités par quelques autres qui leurconfient quasiment la conception des programmes de formation et utiUsésdans le cadre de leurs compétences spécifiques par les autres.

Nombreux sont les directeurs de CIES qui insistent sur la nécessité deconfier les moniteurs à des spéciaUstes de la discipUne qu'Us enseignent ;

parmi ceux-là, l'une des responsables d'un CIES qui recrute des scienti¬fiques, a fait appel à des spécialistes des Sciences de l'Education pourformer à l'animation de stages les enseignants chercheurs de mathéma¬tiques, physique, chimie chargés d'intervenir auprès des moniteurs.

Une teUe hétérogénéité permet de comprendre que l'on ne puisse pasparler de « la » formation des moniteurs mais de politiques de formation.Une analyse comparée des divers programmes élaborés par les CIESnous permet de dégager des points de convergence en matière decontenu. Par delà la diversité nous avons donc pu mettre en évidence degrandes tendances que nous présentons ci-après.

A LA DECOUVERTE DU SYSTEME UND/ERSITAIRE

Sous des intitulés tels que « le système universitaire français »

(Alsace), « l'Institution universitaire » (Toulouse - Paris Sorbonne), « lefonctionnement des universités » (Lyon), « Organisation administrative etfinancière des universités », tous les CIES se proposent de famUiariserles moniteurs avec le contexte institutionnel de leur futur métier.

Cette approche globale est complétée localement par la présentationde l'université d'accueil.

À l'intérieur de ce système, un sous-ensemble donne Ueu, dans tousles CIES, à plusieurs interventions : « la carrière de l'enseignant-cher¬cheur » (Lyon). Cela inclut « le statut juridique de l'enseignant du supé¬rieur » (Toulouse), mais également une information sur « l'organisationde la recherche » (Grenoble) et le CNRS (Lyon). A cela s'ajoutent desconférences sur « le monitorat » et « le rôle des tuteurs ». En troisièmeannée, les moniteurs reçoivent sous forme de conférences ou d'ateUers lesindications susceptibles de les aider à passer du monitorat aux fonctionsd'ATER (Attaché Temporaire d'Enseignement et de Recherche) ou demaître de conférences. Cela va jusqu'à inclure une approche pratique

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52 Recherche et Formation

teUe que « comment se présenter devant une commission de spécialiste »

(Lyon).

Plus ou moins développée selon les CIES, l'introduction aux systèmesuniversitaires étrangers, apporte un éléments de comparaison (Mulhouseannonce « les systèmes universitaires étrangers : allemand, américain,britannique, japonais »).

Enfin, cette ouverture est complétée par des informations sur « lesprogrammes européens d'échanges d'étudiants ».

A LA REDECOUVERTE DU PUBLIC ETUDIANT

Les moniteurs en première année de thèse sont entrés à l'université(ou en classe préparatoire) cinq années plus tôt au minimum. Encoreproches du statut d'étudiant, car doctorants, Us sont toutefois éloignésdu bacheher entrant à l'université ; d'autant que nombre d'entre eux,anciens khâgneux ou taupins n'ont connu l'université qu'au niveau de laUcence. C'est pourquoi certains CIES ont prévu des formations centréessur la « connaissance du pubUc étudiant » (la Sorbonne), « les étudiantsface à leurs études » (Lyon), « les pubUcs de premier cycle en Uaison avecl'échec » (Aquitaine), « les situations de détresse chez les étudiants »

(Lyon), « la santé des étudiants » (Mulhouse). Ces contenus sont en géné¬ral inscrits dans les apports de la sociologie de l'éducation.

Initiés aux mécanismes de l'institution universitaire et à la connais¬sance du pubUc étudiant, les moniteurs sont formés à ce que nombre deCIES appellent « la pratique du métier » .

LE METIER D'ENSEIGNANT-CHERCHEUR

Au-delà des multiples intitulés de stages, de conférences, d'ateliersque nous avons recensés dans les programmes des différents CIES, nouspouvons dégager deux grandes rubriques :

la didactique des disciplines ;

la pratique enseignante : l'enseignant face à un groupe.

52 Recherche et Formation

teUe que « comment se présenter devant une commission de spécialiste »

(Lyon).

Plus ou moins développée selon les CIES, l'introduction aux systèmesuniversitaires étrangers, apporte un éléments de comparaison (Mulhouseannonce « les systèmes universitaires étrangers : allemand, américain,britannique, japonais »).

Enfin, cette ouverture est complétée par des informations sur « lesprogrammes européens d'échanges d'étudiants ».

A LA REDECOUVERTE DU PUBLIC ETUDIANT

Les moniteurs en première année de thèse sont entrés à l'université(ou en classe préparatoire) cinq années plus tôt au minimum. Encoreproches du statut d'étudiant, car doctorants, Us sont toutefois éloignésdu bacheher entrant à l'université ; d'autant que nombre d'entre eux,anciens khâgneux ou taupins n'ont connu l'université qu'au niveau de laUcence. C'est pourquoi certains CIES ont prévu des formations centréessur la « connaissance du pubUc étudiant » (la Sorbonne), « les étudiantsface à leurs études » (Lyon), « les pubUcs de premier cycle en Uaison avecl'échec » (Aquitaine), « les situations de détresse chez les étudiants »

(Lyon), « la santé des étudiants » (Mulhouse). Ces contenus sont en géné¬ral inscrits dans les apports de la sociologie de l'éducation.

Initiés aux mécanismes de l'institution universitaire et à la connais¬sance du pubUc étudiant, les moniteurs sont formés à ce que nombre deCIES appellent « la pratique du métier » .

LE METIER D'ENSEIGNANT-CHERCHEUR

Au-delà des multiples intitulés de stages, de conférences, d'ateliersque nous avons recensés dans les programmes des différents CIES, nouspouvons dégager deux grandes rubriques :

la didactique des disciplines ;

la pratique enseignante : l'enseignant face à un groupe.

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Études et recherches 53

Des stages de « didactique » des disciplinesà regroupement monodisciplinaire

La didactique des discipUnes est nommée dans presque tous les pro¬grammes des CIES, sans informations complémentaires sur les contenusqui sont dispensés dans ce cadre. Elle est dominante dans certainsautres, les directeurs estimant qu'eUe répond plus aux attentes et besoinsdes moniteurs ; l'un d'entre eux expUque que ceux-ci présentent « desappétences très modérées pour les généralités » et considèrent « laréflexion sur la discipline plus motivante ». Les débats du colloque del'ADMES et les témoignages que nous avons recueiUis nous apprennentque cette formation est confiée soit à de véritables didacticiens, soit, cequi est le plus fréquent, à des « spécialistes des discipUnes qui s'intéres¬sent aux problèmes pédagogiques ». R y a de ce fait une hétérogénéitédans la population des intervenants, d'autant que les recherches endidactique sont à un stade d'évolution inégale selon les universités et lesdisciplines. Ainsi, l'un des intervenants au colloque précité fait remar¬quer que « si les didacticiens existent dans les disciplines des sciencesdites dures, dans des disciplines comme le droit ça n'existe pas ».

Ainsi, selon les lieux, l'approche peut être scientifique ou empirique.Dans ce dernier cas, la formation peut se limiter à une transmissiond'expériences, voire de « recettes », qui, si elles sont rassurantes et trèsdemandées par les moniteurs, risquent de jouer une fonction de repro¬duction dans les méthodes d'enseignement. Se pose également le pro¬blème de l'articulation de cette approche avec les responsabilités dututeur qui est, institutionneUement, chargé de conseiller le moniteur enmatière d'enseignement de sa discipline.

L'initiation au métier de « prof » : un brassage pluridisciplinaire

Une des caractéristiques des formations centrées sur la didactique desdisciplines est qu'elles rassemblent des moniteurs dans une perpectivemonodisciplinaire. Rares sont toutefois les CIES qui se Umitent à cetteapproche ; l'ensemble des directeurs, notamment ceux de province quiont en charge des moniteurs relevant de plusieurs discipUnes, mettent enavant l'enrichissement que peut générer un brassage pluridiscipUnaire.

M. Etienne Trocmé directeur du CIES de Strasbourg lors du col¬loque de l'ADMES, énonce ainsi les bienfaits d'une teUe expérience :

« Je pense que les CIES contrUment à préparer un avenir de dialogueentre les discipUnes dans les universités de la façon la plus concrète, la

Études et recherches 53

Des stages de « didactique » des disciplinesà regroupement monodisciplinaire

La didactique des discipUnes est nommée dans presque tous les pro¬grammes des CIES, sans informations complémentaires sur les contenusqui sont dispensés dans ce cadre. Elle est dominante dans certainsautres, les directeurs estimant qu'eUe répond plus aux attentes et besoinsdes moniteurs ; l'un d'entre eux expUque que ceux-ci présentent « desappétences très modérées pour les généralités » et considèrent « laréflexion sur la discipline plus motivante ». Les débats du colloque del'ADMES et les témoignages que nous avons recueiUis nous apprennentque cette formation est confiée soit à de véritables didacticiens, soit, cequi est le plus fréquent, à des « spécialistes des discipUnes qui s'intéres¬sent aux problèmes pédagogiques ». R y a de ce fait une hétérogénéitédans la population des intervenants, d'autant que les recherches endidactique sont à un stade d'évolution inégale selon les universités et lesdisciplines. Ainsi, l'un des intervenants au colloque précité fait remar¬quer que « si les didacticiens existent dans les disciplines des sciencesdites dures, dans des disciplines comme le droit ça n'existe pas ».

Ainsi, selon les lieux, l'approche peut être scientifique ou empirique.Dans ce dernier cas, la formation peut se limiter à une transmissiond'expériences, voire de « recettes », qui, si elles sont rassurantes et trèsdemandées par les moniteurs, risquent de jouer une fonction de repro¬duction dans les méthodes d'enseignement. Se pose également le pro¬blème de l'articulation de cette approche avec les responsabilités dututeur qui est, institutionneUement, chargé de conseiller le moniteur enmatière d'enseignement de sa discipline.

L'initiation au métier de « prof » : un brassage pluridisciplinaire

Une des caractéristiques des formations centrées sur la didactique desdisciplines est qu'elles rassemblent des moniteurs dans une perpectivemonodisciplinaire. Rares sont toutefois les CIES qui se Umitent à cetteapproche ; l'ensemble des directeurs, notamment ceux de province quiont en charge des moniteurs relevant de plusieurs discipUnes, mettent enavant l'enrichissement que peut générer un brassage pluridiscipUnaire.

M. Etienne Trocmé directeur du CIES de Strasbourg lors du col¬loque de l'ADMES, énonce ainsi les bienfaits d'une teUe expérience :

« Je pense que les CIES contrUment à préparer un avenir de dialogueentre les discipUnes dans les universités de la façon la plus concrète, la

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54 Recherche et Formation

plus empirique qui soit. Comment les moniteurs se découvrent les uns lesautres, les gens des sciences expérimentales découvrent les juristes et lesgens de sciences humaines et inversement... »

A cette appréciation font écho les propos des moniteurs. « Un despoints les plus remarquables des stages déformation, fait remarquer unemonitrice, c'est la rencontre qu'U y a entre les sciences dites "humaines"et les sciences dites "inhumaines". Nous avons eu des discussions et desrencontres assez remarquables entre mathématiciens, juristes, psycho-pathologistes... »

Et Bruno Py président d'une association de moniteurs voit dansce brassage un facteur de transformation des cUvages discipUnaires desrecherches universitaires : « Nous voulons croire, dit-il, que les ren¬contres interdisciplinaires feront naître demain des recherches croiséesassociant le philosophe à l'économiste, le gestionnaire au matheux, lechimiste au pharmacologue, le juriste au physicien ».

Vision optimiste ou utopique... ? H n'en reste pas moins que cette inter-disciphnarité préside à l'ensemble des stages sur le métier d'enseignant.

L'initiation au « métier d'enseignant » d'université, conçue indépen¬damment des disciplines de rattachement des moniteurs, est organiséeautour de savoirs et de pratiques dont un grand nombre est commun àtous les CIES. Une étude comparée de tous les programmes de formationpermet de mettre en évidence certains axes que nous présenterons ci-après en indiquant les contenus qu'ils couvrent ici et là :

connaissance des groupes et gestion d'un groupe d'étudiantsla connaissance des phénomènes de groupe,enjeux de pouvoir et de séduction dans un groupe,le moniteur face à un groupe,la relation enseignant/enseigné,la gestion des phénomènes de groupe,l'animation d'un groupe,l'attitude d'écoute,l'enseignant à l'écoute d'un groupe,l'enseignant face à des situations extrêmes ;

les techniques d'expressionl'expression orale,techniques de l'exposé,la voix, le corps,l'enseignant comme acteur;les conditions de construction, transmission, réception d'un mes¬sage ;

54 Recherche et Formation

plus empirique qui soit. Comment les moniteurs se découvrent les uns lesautres, les gens des sciences expérimentales découvrent les juristes et lesgens de sciences humaines et inversement... »

A cette appréciation font écho les propos des moniteurs. « Un despoints les plus remarquables des stages déformation, fait remarquer unemonitrice, c'est la rencontre qu'U y a entre les sciences dites "humaines"et les sciences dites "inhumaines". Nous avons eu des discussions et desrencontres assez remarquables entre mathématiciens, juristes, psycho-pathologistes... »

Et Bruno Py président d'une association de moniteurs voit dansce brassage un facteur de transformation des cUvages discipUnaires desrecherches universitaires : « Nous voulons croire, dit-il, que les ren¬contres interdisciplinaires feront naître demain des recherches croiséesassociant le philosophe à l'économiste, le gestionnaire au matheux, lechimiste au pharmacologue, le juriste au physicien ».

Vision optimiste ou utopique... ? H n'en reste pas moins que cette inter-disciphnarité préside à l'ensemble des stages sur le métier d'enseignant.

L'initiation au « métier d'enseignant » d'université, conçue indépen¬damment des disciplines de rattachement des moniteurs, est organiséeautour de savoirs et de pratiques dont un grand nombre est commun àtous les CIES. Une étude comparée de tous les programmes de formationpermet de mettre en évidence certains axes que nous présenterons ci-après en indiquant les contenus qu'ils couvrent ici et là :

connaissance des groupes et gestion d'un groupe d'étudiantsla connaissance des phénomènes de groupe,enjeux de pouvoir et de séduction dans un groupe,le moniteur face à un groupe,la relation enseignant/enseigné,la gestion des phénomènes de groupe,l'animation d'un groupe,l'attitude d'écoute,l'enseignant à l'écoute d'un groupe,l'enseignant face à des situations extrêmes ;

les techniques d'expressionl'expression orale,techniques de l'exposé,la voix, le corps,l'enseignant comme acteur;les conditions de construction, transmission, réception d'un mes¬sage ;

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Etudes et recherches 55

les techniques, méthodes, outils au service de l'enseignantle système des bibUothèques,les moyens modernes de documentation,l'information scientifique et technique,méthodologie d'accès aux banques de données,l'informatique au service de la pédagogie,l'EAO,nouvelles techniques éducatives multimédia,le rétroprojecteur,le traitement de texte,la lecture rapide,les techniques audiovisuelles ;

la conception d'un coursles objectifs en pédagogie,réflexions sur les contenus à enseigner,la transposition didactique,transférabiUté des savoirs et construction des compétences

les processus d'apprentissageintroduction aux sciences cognitives ;

l'évaluationl'évaluation normative,la docimologie,les techniques d'évaluation ;

réflexion sur la pratique du métier(le groupe de moniteurs est conçu comme un lieu d'écoute et d'analysecollective du vécu de la pratique enseignante).

Tels sont les axes, qui sous des modalités différentes, sont pris encompte par les différents CIES. Localement, d'autres thèmes de forma¬tion sont inscrits dans les programmes. Certains CIES assument une for¬mation à la recherche même si ceUe-ci relève du directeur de thèse ou del'école doctorale. D'autres proposent des conférences sur des grandesquestions économiques nationales ou internationales, sur le tissu indus¬triel local, voire sur des questions de « culture générale ». Enfin, danscertains CIES, comme celui de Paris Sorbonne, des groupes de travailgérés par les moniteurs eux-mêmes se constituent autour de thèmes liés à

une discipline particulière ou relatifs à la fonction d'enseignant-cher¬cheur en général.

L'évaluation peut relever du « pointage », reposer sur la remise demémoires ou n'être pas.

Etudes et recherches 55

les techniques, méthodes, outils au service de l'enseignantle système des bibUothèques,les moyens modernes de documentation,l'information scientifique et technique,méthodologie d'accès aux banques de données,l'informatique au service de la pédagogie,l'EAO,nouvelles techniques éducatives multimédia,le rétroprojecteur,le traitement de texte,la lecture rapide,les techniques audiovisuelles ;

la conception d'un coursles objectifs en pédagogie,réflexions sur les contenus à enseigner,la transposition didactique,transférabiUté des savoirs et construction des compétences

les processus d'apprentissageintroduction aux sciences cognitives ;

l'évaluationl'évaluation normative,la docimologie,les techniques d'évaluation ;

réflexion sur la pratique du métier(le groupe de moniteurs est conçu comme un lieu d'écoute et d'analysecollective du vécu de la pratique enseignante).

Tels sont les axes, qui sous des modalités différentes, sont pris encompte par les différents CIES. Localement, d'autres thèmes de forma¬tion sont inscrits dans les programmes. Certains CIES assument une for¬mation à la recherche même si ceUe-ci relève du directeur de thèse ou del'école doctorale. D'autres proposent des conférences sur des grandesquestions économiques nationales ou internationales, sur le tissu indus¬triel local, voire sur des questions de « culture générale ». Enfin, danscertains CIES, comme celui de Paris Sorbonne, des groupes de travailgérés par les moniteurs eux-mêmes se constituent autour de thèmes liés à

une discipline particulière ou relatifs à la fonction d'enseignant-cher¬cheur en général.

L'évaluation peut relever du « pointage », reposer sur la remise demémoires ou n'être pas.

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56 Recherche et Formation

En effet, l'obUgation de formation est prise en compte différemmentselon la poUtique des directeurs de CIES.

Le contrôle de la présence aux différentes activités peut être effectifou non. La « vaUdation » des travaux effectués ou des stages suivis peutconsister en la remise d'un mémoire portant sur des questions pédago¬giques : mais cela varie d'un CIES à l'autre. Au CIES de la Sorbonne, leDirecteur délivre aux moniteurs dont le parcours de formation a étéconforme aux engagements, une attestation le vaUdant. La perspectived'une véritable évaluation, voire sanction, se heurte à la réaUté du tra¬vaU du moniteur : la préparation de la thèse, les heures d'enseignement,les stages de formation rendent peu envisageable la prise en charge detravaux annexes exigés par le CIES.

UNE FORMATION AU METIER D'ENSEIGNANT POURUNE CARRIÈRE DÉTERMINÉE PAR LA RECHERCHE

« Il y a fondamentalement dans l'université, ce qu'on n'ose pas tropdire aux moniteurs, c'est que l'université, c'est un univers de reclierche,et que l'enseignement, on s'en fout. » Telle est la conclusion de l'interven¬tion d'un universitaire du CIES d'Aquitaine, dont la véhémence a ren¬contré un vif écho auprès des participants au colloque de l'ADMES.

Quelque radicale que soit cette analyse, elle traduit la réalité dumonitorat telle que la vivent à la fois les moniteurs et les enseignants-chercheurs qui sont partie prenante dans cette institution. En effet,quelqu'investissement personnel qu'Us manifestent à l'égard de la forma¬tion, et quelques compétences qu'ils démontrent dans la pratique del'enseignement, ils ne seront recrutés que sur la qualité de leurs travauxde recherche. Et, au regard des commissions de spécialistes, le monitoratne constitue pas, actuellement, un atout de poids dans la prise en comptedes candidatures. C'est une réalité, dont les moniteurs sont dûmentinformés dès leur recrutement, mais qu'ils ont des difficultés à accepterau fur et à mesure que l'échéance de la fin de leur contrat se rapproche.Certains de leurs délégués ont proposé que le monitorat donne lieu àl'élaboration d'un mémoire centré sur l'expérience pédagogique des troisans. Ce document, joint au dossier de recherche adressé aux commissionsde spécialistes, témoignerait de l'investissement du moniteur dansl'apprentissage du métier d'enseignant, complémentaire de celui duchercheur.

56 Recherche et Formation

En effet, l'obUgation de formation est prise en compte différemmentselon la poUtique des directeurs de CIES.

Le contrôle de la présence aux différentes activités peut être effectifou non. La « vaUdation » des travaux effectués ou des stages suivis peutconsister en la remise d'un mémoire portant sur des questions pédago¬giques : mais cela varie d'un CIES à l'autre. Au CIES de la Sorbonne, leDirecteur délivre aux moniteurs dont le parcours de formation a étéconforme aux engagements, une attestation le vaUdant. La perspectived'une véritable évaluation, voire sanction, se heurte à la réaUté du tra¬vaU du moniteur : la préparation de la thèse, les heures d'enseignement,les stages de formation rendent peu envisageable la prise en charge detravaux annexes exigés par le CIES.

UNE FORMATION AU METIER D'ENSEIGNANT POURUNE CARRIÈRE DÉTERMINÉE PAR LA RECHERCHE

« Il y a fondamentalement dans l'université, ce qu'on n'ose pas tropdire aux moniteurs, c'est que l'université, c'est un univers de reclierche,et que l'enseignement, on s'en fout. » Telle est la conclusion de l'interven¬tion d'un universitaire du CIES d'Aquitaine, dont la véhémence a ren¬contré un vif écho auprès des participants au colloque de l'ADMES.

Quelque radicale que soit cette analyse, elle traduit la réalité dumonitorat telle que la vivent à la fois les moniteurs et les enseignants-chercheurs qui sont partie prenante dans cette institution. En effet,quelqu'investissement personnel qu'Us manifestent à l'égard de la forma¬tion, et quelques compétences qu'ils démontrent dans la pratique del'enseignement, ils ne seront recrutés que sur la qualité de leurs travauxde recherche. Et, au regard des commissions de spécialistes, le monitoratne constitue pas, actuellement, un atout de poids dans la prise en comptedes candidatures. C'est une réalité, dont les moniteurs sont dûmentinformés dès leur recrutement, mais qu'ils ont des difficultés à accepterau fur et à mesure que l'échéance de la fin de leur contrat se rapproche.Certains de leurs délégués ont proposé que le monitorat donne lieu àl'élaboration d'un mémoire centré sur l'expérience pédagogique des troisans. Ce document, joint au dossier de recherche adressé aux commissionsde spécialistes, témoignerait de l'investissement du moniteur dansl'apprentissage du métier d'enseignant, complémentaire de celui duchercheur.

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* ^Études et recherches S5?\|

Quant aux enseignants-chercheurs qui assurent le recrutement cu> "^leurs « jeunes collègues », ils souhaitent, semble-t-U, que le monitoratn'imphque pas le recrutement, craignant de ce fait que la qualité de larecherche ne décline. D'autant que le monitorat n'étant pas obUgatoire,et les allocations de recherche étant inférieures aux besoins, une telleprocédure pénaliserait de jeunes chercheurs de qualité.

Notre propos n'est pas de prendre position dans ce débat qui estinévitable compte tenu des enjeux et responsabUités des acteurs concer¬nés. Il importe toutefois de noter que la plupart des moniteurs se sont vuoctroyer des postes d'ATER (Attachés Temporaires d'Enseignement et deRecherche) à l'issue de leurs trois ans : cette année supplémentaire leurpermet de finir leur thèse dans de bonnes conditions matérieUes. La voieest alors ouverte vers la qualification et les postes de maîtres de confé¬rence... Les directeurs de CIES, soucieux de l'avenir de leurs moniteurs,interviennent autant que faire se peut auprès des autorités compétentes,pour que ceux-ci ne se retrouvent pas sans solution à l'issue du monito¬rat. Ainsi, en 1993, l'administration centrale a prêté pour un an 150postes d'ATER, affectés nominalement à des moniteurs pour qu'ils finis¬sent leur thèse.

L'INITIATION AU « MILIEU » UNIVERSITAIRE

Le terme « d'initiation » choisi par le législateur n'est pas neutre. Sil'on s'en tient à son sens premier il traduit le passage d'un état à unautre état par l'accomplissement de certains rites permettant d'accéder à

un univers inconnu du profane. Il ne s'agit pas de donner à l'universitéla caractéristique du « sacré » auquel l'initiation permettrait d'accéder,mais plutôt de considérer que le métier d'enseignant-chercheur impliqueque, à l'instar des pratiques du compagnonnage, « l'apprenti » soit intro¬duit par un « maître » dans la confrérie. À ce titre, les termes employéstant par le législateur que par les acteurs eux-mêmes ne sont pas neutres.Le terme de « tuteur » implique à la fois la surveUlance, la protection, etla responsabilité. Et, lorsque l'une des intervenantes du CIES de Jussieuparle des enseignants-chercheurs impliqués dans la formation elleemploie, à dessein, le terme « d'anciens ». Cette « initiation » comprendla découverte d'un milieu dont les règles du jeu ne sont pas toujoursexplicites et qui est d'autant plus difficile à démystifier que le moniteur,en tant que doctorant, est encore « étudiant ».

* ^Études et recherches S5?\|

Quant aux enseignants-chercheurs qui assurent le recrutement cu> "^leurs « jeunes collègues », ils souhaitent, semble-t-U, que le monitoratn'imphque pas le recrutement, craignant de ce fait que la qualité de larecherche ne décline. D'autant que le monitorat n'étant pas obUgatoire,et les allocations de recherche étant inférieures aux besoins, une telleprocédure pénaliserait de jeunes chercheurs de qualité.

Notre propos n'est pas de prendre position dans ce débat qui estinévitable compte tenu des enjeux et responsabUités des acteurs concer¬nés. Il importe toutefois de noter que la plupart des moniteurs se sont vuoctroyer des postes d'ATER (Attachés Temporaires d'Enseignement et deRecherche) à l'issue de leurs trois ans : cette année supplémentaire leurpermet de finir leur thèse dans de bonnes conditions matérieUes. La voieest alors ouverte vers la qualification et les postes de maîtres de confé¬rence... Les directeurs de CIES, soucieux de l'avenir de leurs moniteurs,interviennent autant que faire se peut auprès des autorités compétentes,pour que ceux-ci ne se retrouvent pas sans solution à l'issue du monito¬rat. Ainsi, en 1993, l'administration centrale a prêté pour un an 150postes d'ATER, affectés nominalement à des moniteurs pour qu'ils finis¬sent leur thèse.

L'INITIATION AU « MILIEU » UNIVERSITAIRE

Le terme « d'initiation » choisi par le législateur n'est pas neutre. Sil'on s'en tient à son sens premier il traduit le passage d'un état à unautre état par l'accomplissement de certains rites permettant d'accéder à

un univers inconnu du profane. Il ne s'agit pas de donner à l'universitéla caractéristique du « sacré » auquel l'initiation permettrait d'accéder,mais plutôt de considérer que le métier d'enseignant-chercheur impliqueque, à l'instar des pratiques du compagnonnage, « l'apprenti » soit intro¬duit par un « maître » dans la confrérie. À ce titre, les termes employéstant par le législateur que par les acteurs eux-mêmes ne sont pas neutres.Le terme de « tuteur » implique à la fois la surveUlance, la protection, etla responsabilité. Et, lorsque l'une des intervenantes du CIES de Jussieuparle des enseignants-chercheurs impliqués dans la formation elleemploie, à dessein, le terme « d'anciens ». Cette « initiation » comprendla découverte d'un milieu dont les règles du jeu ne sont pas toujoursexplicites et qui est d'autant plus difficile à démystifier que le moniteur,en tant que doctorant, est encore « étudiant ».

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58 Recherche et Formation

Au coUoque de l'ADMES, Bruno Py, alors président d'une associa¬tion de moniteurs, insiste sur la nécessité d'accéder aux « informationsofficieuses ». Et il précise le sens que revêt pour les moniteurs le terme« d'initiation ».

« Si certains ont pu quahfier l'université de monde impitoyable, voirede jungle, U est important que le moniteur puisse très tôt bénéficier d'unmanuel de survie destiné à lui donner des rudiments de son adaptationau milieu, et à luifaire connaître les gestes et attitudes qui sauvent !

Chacun se plaît à rappeler l'importance de règles non écrites, desusages et autres folklores dans le monde universitaire. C'est pourquoi ilnous fallait souligner le rôle initiateur du CIES en la matière. »

Cette « initiation » réside donc à la fois dans le passage à l'acted'enseigner, première rupture avec l'état d'étudiant et dans l'engage¬ment d'un parcours de recherche, nécessaire au changement d'état défi¬nitif. D s'agit en fait d'une double initiation, que ne connaissent pas lesétudiants d'IUFM orientés vers l'enseignement primaire ou secondaire.Cette spécificité a une incidence sur la pratique même de l'activitéd'enseignement ; en effet, la démarche intellectuelle que nécessite larecherche met les moniteurs en état de fragilité par rapport au savoirconstitué qu'ils sont censés transmettre, surtout en premier cycle, dansla mesure où leur travail de thèse les confronte surtout au questionne¬ment.

Cette position inconfortable est accentuée par la séparation institu¬tionneUe entre les instances chargées de les former à la recherche direc¬teur de thèse ou école doctorale - et ceUes chargées d'assumer la forma¬tion au métier d'enseignant tuteur, formateurs dépendant du directeurdu CIES. On peut alors se demander si « l'initiation » ne prend pas sonsens dans l'apprentissage de l'articulation de cette double fonction del'enseignant et du chercheur. Cette initiation est d'autant plus complexequ'eUe se vit dans une situation paradoxale où le moniteur, déjà ensei¬gnant, électeur en tant que tel dans les renouveUements des conseils del'université, est encore étudiant, soumis à une évaluation dont dépendrason recrutement.

58 Recherche et Formation

Au coUoque de l'ADMES, Bruno Py, alors président d'une associa¬tion de moniteurs, insiste sur la nécessité d'accéder aux « informationsofficieuses ». Et il précise le sens que revêt pour les moniteurs le terme« d'initiation ».

« Si certains ont pu quahfier l'université de monde impitoyable, voirede jungle, U est important que le moniteur puisse très tôt bénéficier d'unmanuel de survie destiné à lui donner des rudiments de son adaptationau milieu, et à luifaire connaître les gestes et attitudes qui sauvent !

Chacun se plaît à rappeler l'importance de règles non écrites, desusages et autres folklores dans le monde universitaire. C'est pourquoi ilnous fallait souligner le rôle initiateur du CIES en la matière. »

Cette « initiation » réside donc à la fois dans le passage à l'acted'enseigner, première rupture avec l'état d'étudiant et dans l'engage¬ment d'un parcours de recherche, nécessaire au changement d'état défi¬nitif. D s'agit en fait d'une double initiation, que ne connaissent pas lesétudiants d'IUFM orientés vers l'enseignement primaire ou secondaire.Cette spécificité a une incidence sur la pratique même de l'activitéd'enseignement ; en effet, la démarche intellectuelle que nécessite larecherche met les moniteurs en état de fragilité par rapport au savoirconstitué qu'ils sont censés transmettre, surtout en premier cycle, dansla mesure où leur travail de thèse les confronte surtout au questionne¬ment.

Cette position inconfortable est accentuée par la séparation institu¬tionneUe entre les instances chargées de les former à la recherche direc¬teur de thèse ou école doctorale - et ceUes chargées d'assumer la forma¬tion au métier d'enseignant tuteur, formateurs dépendant du directeurdu CIES. On peut alors se demander si « l'initiation » ne prend pas sonsens dans l'apprentissage de l'articulation de cette double fonction del'enseignant et du chercheur. Cette initiation est d'autant plus complexequ'eUe se vit dans une situation paradoxale où le moniteur, déjà ensei¬gnant, électeur en tant que tel dans les renouveUements des conseils del'université, est encore étudiant, soumis à une évaluation dont dépendrason recrutement.

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Études et recherches 59

LES CIES AUJOURD'HUI : UNE INSTITUTION DE PLUSEN PLUS PRÉSENTE MALGRÉ DE FORTES RÉSISTANCES

Si l'on essaie aujourd'hui de faire le bUan de ces quelques années dedémarrage on peut constater que les CIES ont désormais une existenceincontestable et que leurs directeurs sont des partenaires reconnus desresponsables d'université et d'étabUssements d'enseignement supérieur.

La formation est sortie du stade du balbutiement et tous les CIES pro¬posent désormais des programmes « d'initiation » modifiés au fil des anspar l'analyse antérieure des expériences entreprises. Tous les ans, 1 500jeunes doctorants sont recrutés comme moniteurs et les nouvelles autori¬tés de tutelle n'ont pas mis en cause ce système. Mais ne donnons pasdans un optimisme béat, même si les perspectives sont plutôt encoura¬geantes : de nombreux obstacles perdurent tant dans le mUieu universi¬taire que dans la population même des moniteurs. Tout d'abord, U est à

craindre que la finalité du monitorat n'ait pas été perçue par tous les res¬ponsables universitaires : nombre d'entre eux « réclament » des moni¬teurs comme un dû, avec pour attente prioritaire, l'octroi d'enseignantsplus motivés et au moins aussi compétents que des vacataires. Ils lesemploient souvent en deuxième cycle, position que certains moniteurs ontdu mal à assumer mais qu'ils n'ont pas le pouvoir de mettre en question,sauf à en appeler à l'arbitrage du directeur du CIES... démarche qui ris¬querait d'être mal accueilUe des tuteurs.

Si les universités souhaitent se voir attribuer le maximum de moni¬teurs, elles se soucient inégalement de leur sort à l'issue des trois ans« d'initiation ». Le risque est que ne s'engage une sorte de chantage entreles directeurs de CIES et les universités, voire les discipUnes ou UFR,l'octroi de « chapeaux » étant fonction des débouchés assurés aux moni¬teurs en place.

Tels sont les gros problèmes que l'ambiguïté de l'institution ne peutque générer ; Us sont plus ou moins présents selon les CIES et les univer¬sités.

Quant aux moniteurs eux-mêmes, pris dans le double paradoxe del'enseignant-étudiant, et de « l'initié » sans assurance de recrutement, Us

conjuguent toutes leurs activités avec une priorité donnée à la recherche,puis à l'enseignement. Les dix jours de stage annuels de formation aumétier d'enseignant sont, semble-t-U, vécus plus comme une contrainteinstitutionnelle que comme la réponse à un besoin... même si, dans lesgroupes se manifeste un intérêt certain vis-à-vis des activités proposées.

Études et recherches 59

LES CIES AUJOURD'HUI : UNE INSTITUTION DE PLUSEN PLUS PRÉSENTE MALGRÉ DE FORTES RÉSISTANCES

Si l'on essaie aujourd'hui de faire le bUan de ces quelques années dedémarrage on peut constater que les CIES ont désormais une existenceincontestable et que leurs directeurs sont des partenaires reconnus desresponsables d'université et d'étabUssements d'enseignement supérieur.

La formation est sortie du stade du balbutiement et tous les CIES pro¬posent désormais des programmes « d'initiation » modifiés au fil des anspar l'analyse antérieure des expériences entreprises. Tous les ans, 1 500jeunes doctorants sont recrutés comme moniteurs et les nouvelles autori¬tés de tutelle n'ont pas mis en cause ce système. Mais ne donnons pasdans un optimisme béat, même si les perspectives sont plutôt encoura¬geantes : de nombreux obstacles perdurent tant dans le mUieu universi¬taire que dans la population même des moniteurs. Tout d'abord, U est à

craindre que la finalité du monitorat n'ait pas été perçue par tous les res¬ponsables universitaires : nombre d'entre eux « réclament » des moni¬teurs comme un dû, avec pour attente prioritaire, l'octroi d'enseignantsplus motivés et au moins aussi compétents que des vacataires. Ils lesemploient souvent en deuxième cycle, position que certains moniteurs ontdu mal à assumer mais qu'ils n'ont pas le pouvoir de mettre en question,sauf à en appeler à l'arbitrage du directeur du CIES... démarche qui ris¬querait d'être mal accueilUe des tuteurs.

Si les universités souhaitent se voir attribuer le maximum de moni¬teurs, elles se soucient inégalement de leur sort à l'issue des trois ans« d'initiation ». Le risque est que ne s'engage une sorte de chantage entreles directeurs de CIES et les universités, voire les discipUnes ou UFR,l'octroi de « chapeaux » étant fonction des débouchés assurés aux moni¬teurs en place.

Tels sont les gros problèmes que l'ambiguïté de l'institution ne peutque générer ; Us sont plus ou moins présents selon les CIES et les univer¬sités.

Quant aux moniteurs eux-mêmes, pris dans le double paradoxe del'enseignant-étudiant, et de « l'initié » sans assurance de recrutement, Us

conjuguent toutes leurs activités avec une priorité donnée à la recherche,puis à l'enseignement. Les dix jours de stage annuels de formation aumétier d'enseignant sont, semble-t-U, vécus plus comme une contrainteinstitutionnelle que comme la réponse à un besoin... même si, dans lesgroupes se manifeste un intérêt certain vis-à-vis des activités proposées.

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60 Recherche et Formation

L'avenir même des actions « d'initiation » qui reposent sur les tuteurset les « formateurs », reste flou. Seul le volontariat préside à leur mise enplace ; en effet, le tutorat n'est pas une obUgation et la formation estassurée par des universitaires en plus de leurs obUgations, selon ce queleurs autres responsabUités leur permettent d'y consacrer. La perspec¬tive de créer des postes « fléchés » CIES semble, pour l'instant, n'êtrepas à l'ordre du jour. Cela nous semble toutefois être la seule solution quipuisse assurer, dans l'avenir, le bon fonctionnement des CIES. Il nes'agit pas dans notre esprit de développer au sein de l'université un corpsd'enseignants chercheurs spécialisés dans la seule formation des moni¬teurs, le désengagement de la formation initiale pouvant rendre, à terme,les intervenants étrangers aux pratiques du « terrain » .

Mais la dotation, aux universités, de postes budgétaires permettraitde répartir les services au mieux des intérêts de chacun des pubUcs.

Un bilan certes nuancé, mais n'oublions pas que cette institution n'avu le jour qu'à la rentrée de l'année universitaire 1989/1990. Il fautattendre qu'eUe soit mieux connue des universités et que les autorités detutelle aient pris la mesure des problèmes de fonctionnement.

Le monitorat toutefois suscite au sein de la communauté universitaire,un autre débat aux échos de polémique : celui de l'opportunité de formerau métier d'enseignant les « enseignants-chercheurs ».

60 Recherche et Formation

L'avenir même des actions « d'initiation » qui reposent sur les tuteurset les « formateurs », reste flou. Seul le volontariat préside à leur mise enplace ; en effet, le tutorat n'est pas une obUgation et la formation estassurée par des universitaires en plus de leurs obUgations, selon ce queleurs autres responsabUités leur permettent d'y consacrer. La perspec¬tive de créer des postes « fléchés » CIES semble, pour l'instant, n'êtrepas à l'ordre du jour. Cela nous semble toutefois être la seule solution quipuisse assurer, dans l'avenir, le bon fonctionnement des CIES. Il nes'agit pas dans notre esprit de développer au sein de l'université un corpsd'enseignants chercheurs spécialisés dans la seule formation des moni¬teurs, le désengagement de la formation initiale pouvant rendre, à terme,les intervenants étrangers aux pratiques du « terrain » .

Mais la dotation, aux universités, de postes budgétaires permettraitde répartir les services au mieux des intérêts de chacun des pubUcs.

Un bilan certes nuancé, mais n'oublions pas que cette institution n'avu le jour qu'à la rentrée de l'année universitaire 1989/1990. Il fautattendre qu'eUe soit mieux connue des universités et que les autorités detutelle aient pris la mesure des problèmes de fonctionnement.

Le monitorat toutefois suscite au sein de la communauté universitaire,un autre débat aux échos de polémique : celui de l'opportunité de formerau métier d'enseignant les « enseignants-chercheurs ».

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Études et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

61

NOUVELLES TECHNOLOGIESET FORMATION DES ENSEIGNANTSDU SUPÉRIEUR

Bernard DUMONT*

Sommaire. Le lien est très étroit entre une réforme possible de l'enseignement supérieur et l'introduc¬

tion des nouvelles technologies dans la formation de ses enseignants.Ces dernières interviennent en effet doublement : sur le contenu des disciplines enseignées

et sur les modalités d'apprentissage et les accès à la connaissance.Bien que la formation professionnelle des enseignants du supérieur soit désormais assurée,

rien ne permet d'affirmer que l'intérêt des nouvelles technologies ait été bien entendu.C'est pourquoi il est souhaitable, d'une part, de se faire une idée précise des conditionsactuelles de l'enseignement, notamment en ce qui concerne les modifications de contenuset de méthodes liées aux nouvelles technologies et, d'autre part, de réfléchir sur la compé¬

tence professionnelle, pédagogique et technique des enseignants.

Summary. There is a very close link between a possible reform of university education and theintroduction ofnew technological devices in the training of its professors.

These devices have indeed a double effect: on the contents of the subjects that are taught,

and on the learning methods and the access to knowledge.Although university professors are now provided with a professional training, nothing proves

that the interest of these new devices has been understood.That is why it is worth getting a precise idea of the present teaching conditions, particularlyas far as the changes in contents and methods linked to new technological devices areconcerned, and, on the other hand, considering the teaching and technical skills ofprofessors.

* Professeur en Sciences de l'Éducation ; Directeur du LID (Laboratoire d'IngénierieDidactique), Université Paris 7 Denis Diderot.

Études et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

61

NOUVELLES TECHNOLOGIESET FORMATION DES ENSEIGNANTSDU SUPÉRIEUR

Bernard DUMONT*

Sommaire. Le lien est très étroit entre une réforme possible de l'enseignement supérieur et l'introduc¬

tion des nouvelles technologies dans la formation de ses enseignants.Ces dernières interviennent en effet doublement : sur le contenu des disciplines enseignées

et sur les modalités d'apprentissage et les accès à la connaissance.Bien que la formation professionnelle des enseignants du supérieur soit désormais assurée,

rien ne permet d'affirmer que l'intérêt des nouvelles technologies ait été bien entendu.C'est pourquoi il est souhaitable, d'une part, de se faire une idée précise des conditionsactuelles de l'enseignement, notamment en ce qui concerne les modifications de contenuset de méthodes liées aux nouvelles technologies et, d'autre part, de réfléchir sur la compé¬

tence professionnelle, pédagogique et technique des enseignants.

Summary. There is a very close link between a possible reform of university education and theintroduction ofnew technological devices in the training of its professors.

These devices have indeed a double effect: on the contents of the subjects that are taught,

and on the learning methods and the access to knowledge.Although university professors are now provided with a professional training, nothing proves

that the interest of these new devices has been understood.That is why it is worth getting a precise idea of the present teaching conditions, particularlyas far as the changes in contents and methods linked to new technological devices areconcerned, and, on the other hand, considering the teaching and technical skills ofprofessors.

* Professeur en Sciences de l'Éducation ; Directeur du LID (Laboratoire d'IngénierieDidactique), Université Paris 7 Denis Diderot.

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62 Recherche et Formation

La place de plus en plus grande des NouveUes Technologies dans latransmission et l'acquisition de connaissances à tous les niveaux d'ensei¬gnement, et plus encore en dehors du système éducatif, conduit à posersous un angle différent le problème de la formation des enseignants duSupérieur. Après avoir présenté le rôle joué (ou pouvant l'être) par ces

nouveaux outils dans l'Enseignement Supérieur, nous tenterons, avecquelques exemples de formations et de recherches, de comprendre lasituation en France. Puis nous ferons diverses propositions concrètessusceptibles de favoriser l'amélioration de l'enseignement et l'intégrationdes NouveUes Technologies dans le Supérieur.

I. ROLE DES NOUVELLES TECHNOLOGIESDANS L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

L'intégration des NouveUes Technologies dans les enseignements supé¬rieurs passe, pour la plupart des étudiants de 1er cycle, par l'apprentis¬sage d'outils informatiques élémentaires comme les traitements de texteet les tableurs. Ces enseignements sont le plus souvent intégrés aux cur¬sus officiels des DEUG même pour les littéraires. Cette situation peutêtre sans doute considérée comme une conséquence positive du plan« Informatique pour tous » qui a permis, en particuUer dans les universi¬tés non scientifiques, la création de salles équipées et de postes pourl'encadrement et la maintenance. Cet élan s'est généralement maintenu,d'autant plus facUement que les matériels initialement acquis étaient desmicro-ordinateurs de type P.C., compatibles avec la plupart des appa-reUs du commerce contrairement à ceux qui équipèrent les établisse¬ments secondaires, comme les célèbres T07.

Mais la situation est fort différente pour les disciplines enseignées.Comme notre étude (2) l'a vérifié, nous sommes encore loin de la généra-Usation de ces pratiques dites « innovantes ». Or l'informatique, inté¬grant d'ailleurs de plus en plus d'images fixes ou animées, issuesd'images analogiques ou de synthèses, devient un outil de premier ordre,tant dans les laboratoires de recherche, que dans l'industrie, les PME-PMI, et encore plus dans tous les domaines de l'information, de la docu¬mentation et de l'édition.

(2) « Étude sur l'utilisation des nouvelles technologies dans les premiers cycles univer¬sitaires », DESUP, ministère de l'Éducation nationale (tirage limité), septembre 1992.

62 Recherche et Formation

La place de plus en plus grande des NouveUes Technologies dans latransmission et l'acquisition de connaissances à tous les niveaux d'ensei¬gnement, et plus encore en dehors du système éducatif, conduit à posersous un angle différent le problème de la formation des enseignants duSupérieur. Après avoir présenté le rôle joué (ou pouvant l'être) par ces

nouveaux outils dans l'Enseignement Supérieur, nous tenterons, avecquelques exemples de formations et de recherches, de comprendre lasituation en France. Puis nous ferons diverses propositions concrètessusceptibles de favoriser l'amélioration de l'enseignement et l'intégrationdes NouveUes Technologies dans le Supérieur.

I. ROLE DES NOUVELLES TECHNOLOGIESDANS L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

L'intégration des NouveUes Technologies dans les enseignements supé¬rieurs passe, pour la plupart des étudiants de 1er cycle, par l'apprentis¬sage d'outils informatiques élémentaires comme les traitements de texteet les tableurs. Ces enseignements sont le plus souvent intégrés aux cur¬sus officiels des DEUG même pour les littéraires. Cette situation peutêtre sans doute considérée comme une conséquence positive du plan« Informatique pour tous » qui a permis, en particuUer dans les universi¬tés non scientifiques, la création de salles équipées et de postes pourl'encadrement et la maintenance. Cet élan s'est généralement maintenu,d'autant plus facUement que les matériels initialement acquis étaient desmicro-ordinateurs de type P.C., compatibles avec la plupart des appa-reUs du commerce contrairement à ceux qui équipèrent les établisse¬ments secondaires, comme les célèbres T07.

Mais la situation est fort différente pour les disciplines enseignées.Comme notre étude (2) l'a vérifié, nous sommes encore loin de la généra-Usation de ces pratiques dites « innovantes ». Or l'informatique, inté¬grant d'ailleurs de plus en plus d'images fixes ou animées, issuesd'images analogiques ou de synthèses, devient un outil de premier ordre,tant dans les laboratoires de recherche, que dans l'industrie, les PME-PMI, et encore plus dans tous les domaines de l'information, de la docu¬mentation et de l'édition.

(2) « Étude sur l'utilisation des nouvelles technologies dans les premiers cycles univer¬sitaires », DESUP, ministère de l'Éducation nationale (tirage limité), septembre 1992.

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Études et recherches 63

L'Enseignement Supérieur se doit d'offrir, dès les premiers cycles, desenseignements prenant en compte l'évolution actueUe des contenus et desméthodes dans chacune des discipUnes fondamentales. La recherche desolutions à apporter à l'accueil des nouveaux flux d'étudiants issus del'enseignement secondaire ou de la formation continue n'est pas suffi¬sante. Les établissements d'enseignement supérieur, les décideurs locauxet nationaux et les commissions de spécialistes ont des responsabUitésquant à ce qui est enseigné et au bagage inteUectuel qui est proposé auxjeunes d'aujourd'hui pour qu'ils soient à même de comprendre lesconnaissances de demain et d'y accéder rapidement et efficacement.

L'un des problèmes posés par l'accroissement des effectifs dansl'Enseignement Supérieur, est l'hétérogénéité de ces étudiants en termesde connaissances et en termes de méthodes de travaU.

L'enseignant doit pouvoir adapter son enseignement à ces diffé¬rences ; or les lacunes et les incompréhensions des étudiants sont diffici¬lement accessibles de manière individueUe. Des travaux menés en RégionParisienne, dans le cadre d'une collaboration inter-étabUssements (3),ont pour objectifs de créer des outUs d'auto-formation pour les étudiantsdes premiers cycles. Mais nous sommes parfaitement conscients que cesoutils ne seront performants que dans la mesure où Us seront intégrés à

des activités banalisées, proposées et encadrées par les enseignants res¬ponsables au sein des divers établissements. R faut donc que ceux quienseignent au premier cycle, mais aussi que ceux qui ont la responsabiUtédes cursus, et ceux qui sont en position de décideurs dans ces étabUsse¬ments, soient prêts à une telle intégration et aux modifications fondamen¬tales que de telles démarches d'auto-formation ne manqueront pas desusciter.

Il est temps que l'on passe d'engagements individuels de quelquesenseignants-chercheurs à des choix collectifs impUquant, en particuUer,des formations de personnels.

L'arrivée d'une chaîne de télévision dédiée à la connaissance, à la for¬mation et à l'emploi peut être une nouveUe chance à saisir pour trouverd'autres formes d'enseignement ou donner le goût de se former à

(3) Des groupes de travail ont été mis en place depuis plus d'un an et sont à l'origine del'ADESUDIF (Association pour le Développement de l'Enseignement Supérieur à Distanceen Ile-de-France). Siège social : Université Paris 5 - René Descartes. Président : PhilippeARDANT, Président de l'Université Paris 2.

Études et recherches 63

L'Enseignement Supérieur se doit d'offrir, dès les premiers cycles, desenseignements prenant en compte l'évolution actueUe des contenus et desméthodes dans chacune des discipUnes fondamentales. La recherche desolutions à apporter à l'accueil des nouveaux flux d'étudiants issus del'enseignement secondaire ou de la formation continue n'est pas suffi¬sante. Les établissements d'enseignement supérieur, les décideurs locauxet nationaux et les commissions de spécialistes ont des responsabUitésquant à ce qui est enseigné et au bagage inteUectuel qui est proposé auxjeunes d'aujourd'hui pour qu'ils soient à même de comprendre lesconnaissances de demain et d'y accéder rapidement et efficacement.

L'un des problèmes posés par l'accroissement des effectifs dansl'Enseignement Supérieur, est l'hétérogénéité de ces étudiants en termesde connaissances et en termes de méthodes de travaU.

L'enseignant doit pouvoir adapter son enseignement à ces diffé¬rences ; or les lacunes et les incompréhensions des étudiants sont diffici¬lement accessibles de manière individueUe. Des travaux menés en RégionParisienne, dans le cadre d'une collaboration inter-étabUssements (3),ont pour objectifs de créer des outUs d'auto-formation pour les étudiantsdes premiers cycles. Mais nous sommes parfaitement conscients que cesoutils ne seront performants que dans la mesure où Us seront intégrés à

des activités banalisées, proposées et encadrées par les enseignants res¬ponsables au sein des divers établissements. R faut donc que ceux quienseignent au premier cycle, mais aussi que ceux qui ont la responsabiUtédes cursus, et ceux qui sont en position de décideurs dans ces étabUsse¬ments, soient prêts à une telle intégration et aux modifications fondamen¬tales que de telles démarches d'auto-formation ne manqueront pas desusciter.

Il est temps que l'on passe d'engagements individuels de quelquesenseignants-chercheurs à des choix collectifs impUquant, en particuUer,des formations de personnels.

L'arrivée d'une chaîne de télévision dédiée à la connaissance, à la for¬mation et à l'emploi peut être une nouveUe chance à saisir pour trouverd'autres formes d'enseignement ou donner le goût de se former à

(3) Des groupes de travail ont été mis en place depuis plus d'un an et sont à l'origine del'ADESUDIF (Association pour le Développement de l'Enseignement Supérieur à Distanceen Ile-de-France). Siège social : Université Paris 5 - René Descartes. Président : PhilippeARDANT, Président de l'Université Paris 2.

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64 Recherche et Formation

d'autres pubUcs (4). Cette création peut accompagner de façon très posi¬tive l'actuel plan de restructuration de l'enseignement à distance univer¬sitaire, qui, une fois accepté comme un type d'enseignement flexible,complémentaire et non concurrentiel de l'enseignement présentiel.

Les NouveUes technologies dans l'Enseignement Supérieur intervien¬nent à la fois sur les contenus enseignés, sur les modaUtés d'apprentis¬sage et sur les accès à la connaissance. Ces trois facettes doivent êtreprises en compte globalement car elles se complètent et répondent à desexigences différentes mais tout aussi légitimes de la société. Les technolo¬gies de l'information et de la communication peuvent permettre des accèsdélocalisés à des ressources distantes, eUes peuvent aussi faciliter despédagogies différenciées, mais de toute façon, elles requièrent des habUe-tés inteUectueUes, des savoir faire pratiques aussi bien chez les étudiantsque chez les enseignants et les documentaUstes.

Ces NouveUes Technologies nécessitent des investissements financiersen matériel, mais aussi, et principalement, en ressources humaines. Lepremier volet est hélas plus médiatique que le second.

IL PLACE DES NOUVELLES TECHNOLOGIESDANS LA FORMATION DES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR

1. Éléments d'analyse de la situation en France

Depuis la création des CIES (5) et du monitorat, la question de la for¬mation professionnelle des enseignants du Supérieur paraît en partierésolue, au moins pour ce qui est de la formation initiale Ainsi, parexemple, les moniteurs de Paris 6 et Paris 7 ont-ils la possibilité desuivre, parmi de nombreux cours de 3e cycle, des enseignements sur lesapplications éducatives des Nouvelles Technologies (6). Ces formations,

(4) ITEM-SUP organisera à l'Université de Bordeaux 2, en juillet 1994, un symposiumsur « Télévision, Enseignement Supérieur et Formation des enseignunts : stratégies pourune synergie ». La Fédération ITEM-SUP regroupe ù la fois des associations et des indivi¬dus uvrant pour l'intégration des Nouvelles Technologies dans l'Enseignement Supérieur.ITEM-SUP, association loi de 1901. Siège social : ENS de Saint-Cloud Fontenay-uux-Roses.

(5) Centres d'Initiation à l'Enseignement Supérieur.(d) Parmi les cours ainsi offerts par le LID, on peut citer, par exemple, des formations

sur les applications éducatives d'HyperCard (cours à distance, en collaboration avec, laTélé-université du Québec), la conception d'enseignements multimédias ù distance,

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d'autres pubUcs (4). Cette création peut accompagner de façon très posi¬tive l'actuel plan de restructuration de l'enseignement à distance univer¬sitaire, qui, une fois accepté comme un type d'enseignement flexible,complémentaire et non concurrentiel de l'enseignement présentiel.

Les NouveUes technologies dans l'Enseignement Supérieur intervien¬nent à la fois sur les contenus enseignés, sur les modaUtés d'apprentis¬sage et sur les accès à la connaissance. Ces trois facettes doivent êtreprises en compte globalement car elles se complètent et répondent à desexigences différentes mais tout aussi légitimes de la société. Les technolo¬gies de l'information et de la communication peuvent permettre des accèsdélocalisés à des ressources distantes, eUes peuvent aussi faciliter despédagogies différenciées, mais de toute façon, elles requièrent des habUe-tés inteUectueUes, des savoir faire pratiques aussi bien chez les étudiantsque chez les enseignants et les documentaUstes.

Ces NouveUes Technologies nécessitent des investissements financiersen matériel, mais aussi, et principalement, en ressources humaines. Lepremier volet est hélas plus médiatique que le second.

IL PLACE DES NOUVELLES TECHNOLOGIESDANS LA FORMATION DES ENSEIGNANTS DU SUPÉRIEUR

1. Éléments d'analyse de la situation en France

Depuis la création des CIES (5) et du monitorat, la question de la for¬mation professionnelle des enseignants du Supérieur paraît en partierésolue, au moins pour ce qui est de la formation initiale Ainsi, parexemple, les moniteurs de Paris 6 et Paris 7 ont-ils la possibilité desuivre, parmi de nombreux cours de 3e cycle, des enseignements sur lesapplications éducatives des Nouvelles Technologies (6). Ces formations,

(4) ITEM-SUP organisera à l'Université de Bordeaux 2, en juillet 1994, un symposiumsur « Télévision, Enseignement Supérieur et Formation des enseignunts : stratégies pourune synergie ». La Fédération ITEM-SUP regroupe ù la fois des associations et des indivi¬dus uvrant pour l'intégration des Nouvelles Technologies dans l'Enseignement Supérieur.ITEM-SUP, association loi de 1901. Siège social : ENS de Saint-Cloud Fontenay-uux-Roses.

(5) Centres d'Initiation à l'Enseignement Supérieur.(d) Parmi les cours ainsi offerts par le LID, on peut citer, par exemple, des formations

sur les applications éducatives d'HyperCard (cours à distance, en collaboration avec, laTélé-université du Québec), la conception d'enseignements multimédias ù distance,

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Etudes et recherches 65

néanmoins, n'étant évaluées que par l'assiduité, sont peut-être plus desmoments de sensibUisation et d'information que d'apprentissage à pro¬prement parler. Rien ne permet d'assurer que ces cours les convaincrontde l'intérêt d'introduire les Nouvelles Technologies dans leurs futursenseignements, ni leur donneront les moyens (inteUectuels) de réussir untel projet. En 1993, la quasi totaUté des étudiants de première année del'ENS Saint-Cloud - Fontenay-aux-Roses, tous « non scientifiques », ontreçu une formation d'introduction à l'informatique et au traitement detexte (7). CeUe-ci sera complétée, en seconde année, par des formationsportant, pour chaque discipline, sur les impacts de l'informatique.

Néanmoins, le problème de fond ne me semble pas résolu.Contrairement à ce qui est institutionnaUsé dans les concours de recrute¬ment des enseignants des premier et second degrés (8), il n'existe pasd'épreuve portant sur les aspects professionnels dans les concours derecrutement des enseignants du Supérieur. Les critères restent ceux Ués à

l'évaluation d'une production de chercheur : thèse, habUitation, pubUca-tion dans revues avec comité de lecture, participation à des congrès, ... Hen est souvent de même des promotions. Notre étude a révélé de trèsnombreux exemples de carrières bloquées par un investissement tropimportant dans la création et la mise en place d'outils ou de dispositifs deformation destinés à améliorer la qualité d'un enseignement, à

augmenter un taux de réussite, à faciliter la compréhension d'unconcept, ... Dans certains cas, ces blocages se sont avérés même pour descollègues ayant mené de véritables travaux de recherche en didactique deleur discipUne.

Quelques cas heureux viennent éclaircir le tableau, exceptions confir¬mant la règle, soit au sein des disciplines mères, soit par l'intermédiairede sections transversales comme la 70e (Sciences de l'Education), ou la71e (Information et Communication).

Il faut néanmoins souligner que, depuis quelques années, avec lacréation des « contrats pédagogiques », l'évolution de carrière peut êtreUée aux activités d'enseignement (9).

l'exploitation didactique d'images animées, l'Intelligence Artificielle et les SciencesCognitives appliquées à la formation.

(7) Sous la responsabilité d'André Poly, cette formation de 15 heures vise unecompréhension "techno-logique" de l'informatique. Les étudiants avaient été "fortementconseillés" à suivre cet enseignement. C'est ce que firent 97 d'entre eux, sur 112.

(8) A l'exception de l'agrégation.(9) II serait intéressant d'analyser les différences de comportement des commissions de

spécialistes sur ce sujet.

Etudes et recherches 65

néanmoins, n'étant évaluées que par l'assiduité, sont peut-être plus desmoments de sensibUisation et d'information que d'apprentissage à pro¬prement parler. Rien ne permet d'assurer que ces cours les convaincrontde l'intérêt d'introduire les Nouvelles Technologies dans leurs futursenseignements, ni leur donneront les moyens (inteUectuels) de réussir untel projet. En 1993, la quasi totaUté des étudiants de première année del'ENS Saint-Cloud - Fontenay-aux-Roses, tous « non scientifiques », ontreçu une formation d'introduction à l'informatique et au traitement detexte (7). CeUe-ci sera complétée, en seconde année, par des formationsportant, pour chaque discipline, sur les impacts de l'informatique.

Néanmoins, le problème de fond ne me semble pas résolu.Contrairement à ce qui est institutionnaUsé dans les concours de recrute¬ment des enseignants des premier et second degrés (8), il n'existe pasd'épreuve portant sur les aspects professionnels dans les concours derecrutement des enseignants du Supérieur. Les critères restent ceux Ués à

l'évaluation d'une production de chercheur : thèse, habUitation, pubUca-tion dans revues avec comité de lecture, participation à des congrès, ... Hen est souvent de même des promotions. Notre étude a révélé de trèsnombreux exemples de carrières bloquées par un investissement tropimportant dans la création et la mise en place d'outils ou de dispositifs deformation destinés à améliorer la qualité d'un enseignement, à

augmenter un taux de réussite, à faciliter la compréhension d'unconcept, ... Dans certains cas, ces blocages se sont avérés même pour descollègues ayant mené de véritables travaux de recherche en didactique deleur discipUne.

Quelques cas heureux viennent éclaircir le tableau, exceptions confir¬mant la règle, soit au sein des disciplines mères, soit par l'intermédiairede sections transversales comme la 70e (Sciences de l'Education), ou la71e (Information et Communication).

Il faut néanmoins souligner que, depuis quelques années, avec lacréation des « contrats pédagogiques », l'évolution de carrière peut êtreUée aux activités d'enseignement (9).

l'exploitation didactique d'images animées, l'Intelligence Artificielle et les SciencesCognitives appliquées à la formation.

(7) Sous la responsabilité d'André Poly, cette formation de 15 heures vise unecompréhension "techno-logique" de l'informatique. Les étudiants avaient été "fortementconseillés" à suivre cet enseignement. C'est ce que firent 97 d'entre eux, sur 112.

(8) A l'exception de l'agrégation.(9) II serait intéressant d'analyser les différences de comportement des commissions de

spécialistes sur ce sujet.

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66 Recherche et Formation

Certains collègues obtiennent de leur étabUssement une reconnais¬sance sous forme d'achat de matériel ou d'heures de décharge afin depouvoir mettre en place des formations « innovantes » .

R n'en reste pas moins vrai que la professionnalisation du « metier »

d'enseignant-chercheur réside principalement dans sa moitié « cher¬cheur ». Tout bon chercheur est donc considéré comme bon enseignant.Celui-ci n'a aucun besoin de formation préalable à son intégration, n'aaucune raison de devoir prouver son aptitude à l'enseignement aumoment de son recrutement, n'aura jamais à rendre compte de sa capa¬cité à s'adapter à son public, de sa performance au transfert de connais¬sances ou de savoir faire, ne pourra jamais prétendre à bénéficier d'unequelconque formation continue pour ameUorer ou faire évoluer sa pra¬tique professionneUe.

À partir d'une teUe Utanie de postulats, on comprend aisément qu'endehors d'une prise de conscience collective, d'une volonté politiqueferme des acteurs institutionnels (CNU (10), Ministère, CA des universi¬tés et des grands établissements...) et d'une analyse approfondie de lasituation des premiers cycles, on ne fera que des replâtrages locaux etsuperficiels à défaut d'une véritable réforme (ou révolution) de l'Ensei¬gnement Supérieur.

Si l'on en juge par la teneur du rapport d'orientation (11) présentépar le Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche dans lecadre de la consultation nationale organisée au printemps 1994, les pou¬voirs pubUcs semblent prêts à aborder des problèmes structurels pro¬fonds. Le chapitre V est entièrement consacré aux structures et auxmétiers des « formations supérieures et organismes de recherche ». Onconstate que, bien que soient mentionnées à plusieurs reprises des « com¬pétences pédagogiques » des enseignants(-chercheurs), U n'est fait men¬tion ni de l'origine de ceUes-ci, ni de la nécessité d'une formation profes¬sionnelle à ces « métiers ». En revanche l'analyse des conditions derecrutement et de déroulement de carrière des enseignants-chercheursrejoint sur plusieurs point celle présentée ici.

Les auteurs du rapport notent en particuUer que :

[il faut] favoriser (au moins ne pas pénaliser !) la carrière et larémunération des chercheurs-enseignants et ingénieurs du secteur pubUc

(10) Conseil national des universités.(11) "Consultation nationale sur les grands objectifs de la recherche française".

Rapport d'orientation. MESR. Janvier 1994. 77 p.

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Certains collègues obtiennent de leur étabUssement une reconnais¬sance sous forme d'achat de matériel ou d'heures de décharge afin depouvoir mettre en place des formations « innovantes » .

R n'en reste pas moins vrai que la professionnalisation du « metier »

d'enseignant-chercheur réside principalement dans sa moitié « cher¬cheur ». Tout bon chercheur est donc considéré comme bon enseignant.Celui-ci n'a aucun besoin de formation préalable à son intégration, n'aaucune raison de devoir prouver son aptitude à l'enseignement aumoment de son recrutement, n'aura jamais à rendre compte de sa capa¬cité à s'adapter à son public, de sa performance au transfert de connais¬sances ou de savoir faire, ne pourra jamais prétendre à bénéficier d'unequelconque formation continue pour ameUorer ou faire évoluer sa pra¬tique professionneUe.

À partir d'une teUe Utanie de postulats, on comprend aisément qu'endehors d'une prise de conscience collective, d'une volonté politiqueferme des acteurs institutionnels (CNU (10), Ministère, CA des universi¬tés et des grands établissements...) et d'une analyse approfondie de lasituation des premiers cycles, on ne fera que des replâtrages locaux etsuperficiels à défaut d'une véritable réforme (ou révolution) de l'Ensei¬gnement Supérieur.

Si l'on en juge par la teneur du rapport d'orientation (11) présentépar le Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche dans lecadre de la consultation nationale organisée au printemps 1994, les pou¬voirs pubUcs semblent prêts à aborder des problèmes structurels pro¬fonds. Le chapitre V est entièrement consacré aux structures et auxmétiers des « formations supérieures et organismes de recherche ». Onconstate que, bien que soient mentionnées à plusieurs reprises des « com¬pétences pédagogiques » des enseignants(-chercheurs), U n'est fait men¬tion ni de l'origine de ceUes-ci, ni de la nécessité d'une formation profes¬sionnelle à ces « métiers ». En revanche l'analyse des conditions derecrutement et de déroulement de carrière des enseignants-chercheursrejoint sur plusieurs point celle présentée ici.

Les auteurs du rapport notent en particuUer que :

[il faut] favoriser (au moins ne pas pénaliser !) la carrière et larémunération des chercheurs-enseignants et ingénieurs du secteur pubUc

(10) Conseil national des universités.(11) "Consultation nationale sur les grands objectifs de la recherche française".

Rapport d'orientation. MESR. Janvier 1994. 77 p.

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Etudes et recherches 67

travaUlant avec les entreprises, en évitant que l'évaluation de leurs résul¬tats ne se restreigne aux seuls critères académiques, (p. 37)

Traditionnellement, le concept humboldtien d'Université deRecherche est considéré comme la pierre de touche d'un « vrai » ensei¬gnement supérieur. On définit un poste universitaire par les possibUitésde recherche qu'il offre, et par les charges d'enseignement qu'ilimplique. Cette hiérarchie des tâches est accusée par la tendance debeaucoup de commissions nationales d'évaluation à régler le déroulementdes carrières des enseignants-chercheurs par l'évaluation exclusive deleurs activités de recherche (notamment parce qu'aucun consensus nes'est dégagé pour définir des indicateurs « objectifs » permettant l'éva¬luation des activités d'enseignement, bien que l'évaluation par les étu¬diants, sous une forme appropriée, ait été mise au point, non seulement àl'étranger, mais aussi dans diverses institutions françaises, et parexemple à l'École Polytechnique), (p. 53)

Il faut aussi noter que, dans bien des cas, l'exigence ressentie demaintenir une activité de recherche pour avoir des chances de promotionconduit à des résultats qui ne sont même pas satisfaisants pour les inté¬ressés, conscients de ne pas contribuer réellement aux progrès de laScience, mais de faire de la « recherche de seconde division » ; il pourraitêtre bien plus satisfaisant pour tous que l'efficacité d'un enseignantpuisse être récompensée (y compris financièrement) pour la qualité deson enseignement, plutôt que pour une recherche qui ne le satisfait paslui-même. (p. 53)

2. Recherches en didactique pour l'Enseignement Supérieur

Nous pouvons essayer de repérer dans la production actuelle desrecherches en didactique ou en pédagogie, celles qui concernentl'Enseignement Supérieur. A défaut d'avoir une vue complète de la situa¬tion nationale, je me suis penché sur la Formation Doctorale deDidactique des Disciplines de l'Université Paris 7 (12). Les statistiquessont très claires : 27 thèses, sur 158 en cours, portent sur l'enseignementsupérieur (13) (dont 4 incluent «les aspects « nouvelles technologies »).

(12) Co-linbililé avec le CNAM, Paris XI, Paris 6 et l'ENS de Cachan.(l.'{) Un liilminloir.- i-xl à citer comme l'un des rares à se consacrer pi-esqu'entièrement

à In didactique d'une discipline ilaus le Supérieur : le LDPES (Laboratoire de Didactiquede la Physique dans l'Enseignement Supérieur). Responsable : Laurence VIENNOT,Professeur à l'Uliiversilé Paris 7.

Etudes et recherches 67

travaUlant avec les entreprises, en évitant que l'évaluation de leurs résul¬tats ne se restreigne aux seuls critères académiques, (p. 37)

Traditionnellement, le concept humboldtien d'Université deRecherche est considéré comme la pierre de touche d'un « vrai » ensei¬gnement supérieur. On définit un poste universitaire par les possibUitésde recherche qu'il offre, et par les charges d'enseignement qu'ilimplique. Cette hiérarchie des tâches est accusée par la tendance debeaucoup de commissions nationales d'évaluation à régler le déroulementdes carrières des enseignants-chercheurs par l'évaluation exclusive deleurs activités de recherche (notamment parce qu'aucun consensus nes'est dégagé pour définir des indicateurs « objectifs » permettant l'éva¬luation des activités d'enseignement, bien que l'évaluation par les étu¬diants, sous une forme appropriée, ait été mise au point, non seulement àl'étranger, mais aussi dans diverses institutions françaises, et parexemple à l'École Polytechnique), (p. 53)

Il faut aussi noter que, dans bien des cas, l'exigence ressentie demaintenir une activité de recherche pour avoir des chances de promotionconduit à des résultats qui ne sont même pas satisfaisants pour les inté¬ressés, conscients de ne pas contribuer réellement aux progrès de laScience, mais de faire de la « recherche de seconde division » ; il pourraitêtre bien plus satisfaisant pour tous que l'efficacité d'un enseignantpuisse être récompensée (y compris financièrement) pour la qualité deson enseignement, plutôt que pour une recherche qui ne le satisfait paslui-même. (p. 53)

2. Recherches en didactique pour l'Enseignement Supérieur

Nous pouvons essayer de repérer dans la production actuelle desrecherches en didactique ou en pédagogie, celles qui concernentl'Enseignement Supérieur. A défaut d'avoir une vue complète de la situa¬tion nationale, je me suis penché sur la Formation Doctorale deDidactique des Disciplines de l'Université Paris 7 (12). Les statistiquessont très claires : 27 thèses, sur 158 en cours, portent sur l'enseignementsupérieur (13) (dont 4 incluent «les aspects « nouvelles technologies »).

(12) Co-linbililé avec le CNAM, Paris XI, Paris 6 et l'ENS de Cachan.(l.'{) Un liilminloir.- i-xl à citer comme l'un des rares à se consacrer pi-esqu'entièrement

à In didactique d'une discipline ilaus le Supérieur : le LDPES (Laboratoire de Didactiquede la Physique dans l'Enseignement Supérieur). Responsable : Laurence VIENNOT,Professeur à l'Uliiversilé Paris 7.

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68 Recherche et Formation

On trouve une situation du même type au sein de l'INRP (14), pourtantrattaché au Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche.Sur 130 recherches en cours, 17 ont trait à l'enseignement supérieur(dont 9 incluent des aspects « nouveUes technologies »).

En regardant les pubUcs étudiés (thèses de didactique et recherchesINRP), on constate qu'en fait la quasi totaUté de ces travaux porte sur laformation des enseignants du primaire et du secondaire. On peut sansdoute y voir une retombée indirecte de la création des IUFM et de leurmode de recrutement (remplacement des professeurs d'Ecole Normalepar des enseignants chercheurs de rang universitaire). Il n'y a donc qua¬siment pas, en particulier, de recherches qui étudient directement lespremiers cycles universitaires (avec ou sans « technologies »), même si lespubUcs concernés sont très vastes et posent des problèmes de formationévidents. Comment expUquer cette situation ? Sans doute par l'origineprofessionneUe des chercheurs. Les doctorants sont, pour la très grandemajorité d'entre eux, soit des enseignants du secondaire, soit des forma¬teurs en HJFM (détachés du Secondaire). Hs choisissent principalementdes sujets d'étude en liaison avec leurs pubUcs. Les recherches de l'INRPreposent principalement sur des enseignants du secondaire détachés par¬tieUement pour participer à des équipes pUotées par des chercheurs decet Institut (et/ou des universitaires locaux), en prenant pour terrainsd'expérimentation leurs classes et leurs établissements scolaires. Lechangement récent de statut de l'INRP n'a pas encore conduit à desmodifications des pubUcs visés, si ce n'est vers les IUFM.

De fait, la structure centralisée de l'enseignement secondaire, et lerôle particuUer joué par l'Inspection Générale, se sont souvent montrésdes moteurs efficaces pour introduire des changements profonds dans lesprogrammes officiels et la réaUté des étabUssements scolaires. Les mathé¬matiques, les sciences physiques, la biologie peuvent être citées enexemple au Secondaire. Des situations analogues ont pu être mise enplace dans les classes préparatoires aux Grandes Écoles sur des basesorganisationnelles et hiérarchiques identiques. Dans les deux cas lesenseignants sont tenus d'appUquer un programme précis, sur lequel ilspeuvent d'aUleurs être évalués, et à partir desquels les concours et exa¬mens nationaux sont construits. Ces contraintes n'existent pas au niveaude l'Enseignement Supérieur où les enseignements sont plus « personnaU-sés », c'est-à-dire Ués aux enseignants et à leurs spéciaUtés.

(14) Institut National de Recherche Pédagogique, 29, rue d'Ulm, Paris (5").Renseignements aimablement communiqués pur Annette BON.

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On trouve une situation du même type au sein de l'INRP (14), pourtantrattaché au Ministère de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche.Sur 130 recherches en cours, 17 ont trait à l'enseignement supérieur(dont 9 incluent des aspects « nouveUes technologies »).

En regardant les pubUcs étudiés (thèses de didactique et recherchesINRP), on constate qu'en fait la quasi totaUté de ces travaux porte sur laformation des enseignants du primaire et du secondaire. On peut sansdoute y voir une retombée indirecte de la création des IUFM et de leurmode de recrutement (remplacement des professeurs d'Ecole Normalepar des enseignants chercheurs de rang universitaire). Il n'y a donc qua¬siment pas, en particulier, de recherches qui étudient directement lespremiers cycles universitaires (avec ou sans « technologies »), même si lespubUcs concernés sont très vastes et posent des problèmes de formationévidents. Comment expUquer cette situation ? Sans doute par l'origineprofessionneUe des chercheurs. Les doctorants sont, pour la très grandemajorité d'entre eux, soit des enseignants du secondaire, soit des forma¬teurs en HJFM (détachés du Secondaire). Hs choisissent principalementdes sujets d'étude en liaison avec leurs pubUcs. Les recherches de l'INRPreposent principalement sur des enseignants du secondaire détachés par¬tieUement pour participer à des équipes pUotées par des chercheurs decet Institut (et/ou des universitaires locaux), en prenant pour terrainsd'expérimentation leurs classes et leurs établissements scolaires. Lechangement récent de statut de l'INRP n'a pas encore conduit à desmodifications des pubUcs visés, si ce n'est vers les IUFM.

De fait, la structure centralisée de l'enseignement secondaire, et lerôle particuUer joué par l'Inspection Générale, se sont souvent montrésdes moteurs efficaces pour introduire des changements profonds dans lesprogrammes officiels et la réaUté des étabUssements scolaires. Les mathé¬matiques, les sciences physiques, la biologie peuvent être citées enexemple au Secondaire. Des situations analogues ont pu être mise enplace dans les classes préparatoires aux Grandes Écoles sur des basesorganisationnelles et hiérarchiques identiques. Dans les deux cas lesenseignants sont tenus d'appUquer un programme précis, sur lequel ilspeuvent d'aUleurs être évalués, et à partir desquels les concours et exa¬mens nationaux sont construits. Ces contraintes n'existent pas au niveaude l'Enseignement Supérieur où les enseignements sont plus « personnaU-sés », c'est-à-dire Ués aux enseignants et à leurs spéciaUtés.

(14) Institut National de Recherche Pédagogique, 29, rue d'Ulm, Paris (5").Renseignements aimablement communiqués pur Annette BON.

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Études et recherches 69

Les programmes actuels ne prennent pas tous en compte les modifica¬tions intervenues récemment ou non dans les contenus enseignés ou dansles méthodes de résolution de problème, dans les raisonnements, au seindes sciences. L'écart risque de s'agrandir entre la vision d'une discipUnedonnée aux étudiants et la réaUté de cette même discipUne dans les labo¬ratoires, l'industrie ou l'entreprise.

Si l'on considère qu'U est souhaitable d'associer des modificationsfondamentales des programmes et des démarches pédagogiques à desréflexions didactiques préalables, et même que de teUes études peuventêtre génératrices d'innovation, on peut voir ici un élément d'expUcationà la situation des Nouvelles Technologies dans l'Enseignement Supérieur.

3. Exemple d'une formation d'enseignants du Supérieur au Québec

L'École Polytechnique de Montréal est un établissement universitaireautonome qui, depuis plus d'un siècle, forme des ingénieurs. Actuel¬lement, eUe compte environ 3 500 étudiants de premier cycle et un mUlierd'étudiants en maîtrise et doctorat. Le corps enseignant comprend 220professeurs à temps plein.

Depuis 1984, l'École Polytechnique a mis en place un programme deformation pédagogique, obligatoire, destiné aux nouveaux enseignants(15). Cette formation est d'environ 100 heures réparties sur la premièreannée d'exercice. La formation est fortement individualisée. Elle estconfiée aux deux conseillers pédagogiques du Service Pédagogique del'École.

Le programme « vise trois objectifs : faciliter l'intégration du nou¬veau professeur à la vie de l'étabUssement, lui fournir des connaissancesde base en pédagogie universitaire et enfin, l'aider à concevoir et implan¬ter son premier cours. » (16)

Les activités de formation, adaptées aux besoins et aux acquis anté¬rieurs des nouveaux enseignants, sont variées : rencontres individueUesd'une heure à une heure et demie deux fois par mois avec un conseiUerpédagogique, observations de classes, évaluations de l'enseignement par

(15) Note DG-160 du Directeur de l'Ecole, 14 février 1984.(16) DULUDE, Jean, Directeur du Service Pédagogique de l'École Polytechnique "La

formation pédagogique des enseignants à l'Ecole Polytechnique", Allocution prononcée à

l'UQAM, 31 octobre 1990.

Études et recherches 69

Les programmes actuels ne prennent pas tous en compte les modifica¬tions intervenues récemment ou non dans les contenus enseignés ou dansles méthodes de résolution de problème, dans les raisonnements, au seindes sciences. L'écart risque de s'agrandir entre la vision d'une discipUnedonnée aux étudiants et la réaUté de cette même discipUne dans les labo¬ratoires, l'industrie ou l'entreprise.

Si l'on considère qu'U est souhaitable d'associer des modificationsfondamentales des programmes et des démarches pédagogiques à desréflexions didactiques préalables, et même que de teUes études peuventêtre génératrices d'innovation, on peut voir ici un élément d'expUcationà la situation des Nouvelles Technologies dans l'Enseignement Supérieur.

3. Exemple d'une formation d'enseignants du Supérieur au Québec

L'École Polytechnique de Montréal est un établissement universitaireautonome qui, depuis plus d'un siècle, forme des ingénieurs. Actuel¬lement, eUe compte environ 3 500 étudiants de premier cycle et un mUlierd'étudiants en maîtrise et doctorat. Le corps enseignant comprend 220professeurs à temps plein.

Depuis 1984, l'École Polytechnique a mis en place un programme deformation pédagogique, obligatoire, destiné aux nouveaux enseignants(15). Cette formation est d'environ 100 heures réparties sur la premièreannée d'exercice. La formation est fortement individualisée. Elle estconfiée aux deux conseillers pédagogiques du Service Pédagogique del'École.

Le programme « vise trois objectifs : faciliter l'intégration du nou¬veau professeur à la vie de l'étabUssement, lui fournir des connaissancesde base en pédagogie universitaire et enfin, l'aider à concevoir et implan¬ter son premier cours. » (16)

Les activités de formation, adaptées aux besoins et aux acquis anté¬rieurs des nouveaux enseignants, sont variées : rencontres individueUesd'une heure à une heure et demie deux fois par mois avec un conseiUerpédagogique, observations de classes, évaluations de l'enseignement par

(15) Note DG-160 du Directeur de l'Ecole, 14 février 1984.(16) DULUDE, Jean, Directeur du Service Pédagogique de l'École Polytechnique "La

formation pédagogique des enseignants à l'Ecole Polytechnique", Allocution prononcée à

l'UQAM, 31 octobre 1990.

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70 Recherche et Formation

les étudiants, réalisation d'un projet pédagogique (avec possibiUté desubvention interne à l'Ecole). Un ouvrage, écrit par l'initiateur de cetteformation, sert de base documentaire (17).

« Le programme de formation pédagogique que nous avons mis aupoint n'a rien de "scolaire" ; ce n'est surtout pas un « cours de pédago¬gie », et nous croyons qu'il est important qu'un tel programme ne soitperçu comme tel. Il s'agit plutôt d'un encadrement pédagogique assurépar des professionnels et propre à faciUter le développement de diversesfacettes du travaU d'enseignement d'un nouveau professeur. » (18)

Parmi les sujets le plus fréquemment abordés, on peut citer : le designpédagogique d'un cours, l'exposé en classe, le plan de cours, la dyna¬mique du premier cours, l'emploi de moyens audiovisuels, l'emploi del'informatique dans l'enseignement, la rédaction d'un polycopié et sonutiUsation en classe, les objectifs d'apprentissage, le développement del'esprit de synthèse, la préparation des examens, l'évaluation de l'ensei¬gnement, ...

Un bilan réaUsé en 1992 sur 83 nouveaux professeurs ayant suivi cetteformation, fait ressortir les points intéressants suivants :

1. le Plan de formation a exercé des influences institutionneUes trèspositives ;

1.1. les évaluations de l'enseignement des nouveaux professeurs sontles meiUeures de l'Ecole ;

1.2. les nouveaux enseignants estiment que la formation reçue les arendus confiants et efficaces ; la plupart d'entre eux affirment éprou¬ver du plaisir à enseigner ;

2. sur le plan de l'innovation pédagogique : 45 % des nouveaux pro¬fesseurs ont recouru à des fonds d'innovation de l'École ;

3. les Directeurs de Département disent avoir observé « des compor¬tements tangibles révélateurs d'efficacité pédagogique chez leurs nou¬veaux professeurs » (19).

R est sans doute important de préciser que la nature même des ensei¬gnements offerts à l'École Polytechnique de Montréal peut avoir une

(17) PRÈGENT Richard "La préparation d'un cours", Montréal, Édition de l'ÉcolePolytechnique de Montréal, 1990, 272 p.

(18) In PRËGENT Richard "Programme de formation pédagogique des nouveauxprofesseurs : un investissement institutionnel rentable. Bilan du programme implantédepuis huit ans à l'École Polytechnique de Montréal.", Août 1992. p. 6

(19) Idem, p. 3.

70 Recherche et Formation

les étudiants, réalisation d'un projet pédagogique (avec possibiUté desubvention interne à l'Ecole). Un ouvrage, écrit par l'initiateur de cetteformation, sert de base documentaire (17).

« Le programme de formation pédagogique que nous avons mis aupoint n'a rien de "scolaire" ; ce n'est surtout pas un « cours de pédago¬gie », et nous croyons qu'il est important qu'un tel programme ne soitperçu comme tel. Il s'agit plutôt d'un encadrement pédagogique assurépar des professionnels et propre à faciUter le développement de diversesfacettes du travaU d'enseignement d'un nouveau professeur. » (18)

Parmi les sujets le plus fréquemment abordés, on peut citer : le designpédagogique d'un cours, l'exposé en classe, le plan de cours, la dyna¬mique du premier cours, l'emploi de moyens audiovisuels, l'emploi del'informatique dans l'enseignement, la rédaction d'un polycopié et sonutiUsation en classe, les objectifs d'apprentissage, le développement del'esprit de synthèse, la préparation des examens, l'évaluation de l'ensei¬gnement, ...

Un bilan réaUsé en 1992 sur 83 nouveaux professeurs ayant suivi cetteformation, fait ressortir les points intéressants suivants :

1. le Plan de formation a exercé des influences institutionneUes trèspositives ;

1.1. les évaluations de l'enseignement des nouveaux professeurs sontles meiUeures de l'Ecole ;

1.2. les nouveaux enseignants estiment que la formation reçue les arendus confiants et efficaces ; la plupart d'entre eux affirment éprou¬ver du plaisir à enseigner ;

2. sur le plan de l'innovation pédagogique : 45 % des nouveaux pro¬fesseurs ont recouru à des fonds d'innovation de l'École ;

3. les Directeurs de Département disent avoir observé « des compor¬tements tangibles révélateurs d'efficacité pédagogique chez leurs nou¬veaux professeurs » (19).

R est sans doute important de préciser que la nature même des ensei¬gnements offerts à l'École Polytechnique de Montréal peut avoir une

(17) PRÈGENT Richard "La préparation d'un cours", Montréal, Édition de l'ÉcolePolytechnique de Montréal, 1990, 272 p.

(18) In PRËGENT Richard "Programme de formation pédagogique des nouveauxprofesseurs : un investissement institutionnel rentable. Bilan du programme implantédepuis huit ans à l'École Polytechnique de Montréal.", Août 1992. p. 6

(19) Idem, p. 3.

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Etudes et recherches 71

influence sur la situation décrite ci-dessus. En effet, U s'agit d'un écoled'ingénieurs à la pointe des technologies industrielles, en particulierinformatiques. L'équipement des saUes de travaux pratiques et même dessalles de cours incite les enseignants à intégrer « naturellement » cesoutUs dans leur enseignement. L'absence de problèmes de logistique per¬met de mieux comprendre l'importance accordée aux problèmes didac¬tiques et pédagogiques.

Mais U me semble encore plus important de souligner le rôle du choixpoUtique de la direction de l'École Polytechnique, qui a décidé de rendreobUgatoire cette formation. L'évaluation de huit ans d'appUcation a misen évidence que l'effet est double : d'une part, la plupart des enseignantsreconnaissent que sans cette contrainte ils ne l'auraient pas suivie, fautede temps, d'autre part, « la direction de l'École transmet un messageclair aux nouveaux professeurs : l'enseignement, au même titre que larecherche, compte dans l'édification d'une carrière de professeur à

l'École Polytechnique » (20).

III. PROPOSITIONS

Nous avons souhaité ouvrir ici un débat dont les enjeux nous sem¬

blent importants quant à l'avenir de l'Enseignement Supérieur enFrance et à notre responsabilité envers ceux qui viennent y chercher unepréparation à une vie professionnelle.

Nous proposons deux pistes de réflexion. La première vise la mise enplace d'un plan national de recherche sur des thèmes permettant unevision précise des conditions actueUes de l'Enseignement et des perspec¬tives d'évolution à moyen et long termes, en particulier en ce quiconcerne les premiers cycles universitaires. On pourrait, à titre d'exem¬ple, proposer les sujets suivants :

pratiques des enseignants, pratiques des étudiants ;

analyse, discipUne par discipUne, des modifications de contenus etde méthodes Uées aux Nouvelles Technologies ; répercussions sur l'ensei¬gnement ;

analyse didactique des problèmes principaux rencontrés par lesétudiants, discipUne par discipline, et propositions d'améUoration desapprentissages, éventueUement en ayant recours à des outils d'auto-for¬mation ;

(20) Idem, p. 22.

Etudes et recherches 71

influence sur la situation décrite ci-dessus. En effet, U s'agit d'un écoled'ingénieurs à la pointe des technologies industrielles, en particulierinformatiques. L'équipement des saUes de travaux pratiques et même dessalles de cours incite les enseignants à intégrer « naturellement » cesoutUs dans leur enseignement. L'absence de problèmes de logistique per¬met de mieux comprendre l'importance accordée aux problèmes didac¬tiques et pédagogiques.

Mais U me semble encore plus important de souligner le rôle du choixpoUtique de la direction de l'École Polytechnique, qui a décidé de rendreobUgatoire cette formation. L'évaluation de huit ans d'appUcation a misen évidence que l'effet est double : d'une part, la plupart des enseignantsreconnaissent que sans cette contrainte ils ne l'auraient pas suivie, fautede temps, d'autre part, « la direction de l'École transmet un messageclair aux nouveaux professeurs : l'enseignement, au même titre que larecherche, compte dans l'édification d'une carrière de professeur à

l'École Polytechnique » (20).

III. PROPOSITIONS

Nous avons souhaité ouvrir ici un débat dont les enjeux nous sem¬

blent importants quant à l'avenir de l'Enseignement Supérieur enFrance et à notre responsabilité envers ceux qui viennent y chercher unepréparation à une vie professionnelle.

Nous proposons deux pistes de réflexion. La première vise la mise enplace d'un plan national de recherche sur des thèmes permettant unevision précise des conditions actueUes de l'Enseignement et des perspec¬tives d'évolution à moyen et long termes, en particulier en ce quiconcerne les premiers cycles universitaires. On pourrait, à titre d'exem¬ple, proposer les sujets suivants :

pratiques des enseignants, pratiques des étudiants ;

analyse, discipUne par discipUne, des modifications de contenus etde méthodes Uées aux Nouvelles Technologies ; répercussions sur l'ensei¬gnement ;

analyse didactique des problèmes principaux rencontrés par lesétudiants, discipUne par discipline, et propositions d'améUoration desapprentissages, éventueUement en ayant recours à des outils d'auto-for¬mation ;

(20) Idem, p. 22.

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72 Recherche et Formation

analyse des besoins transversaux aux discipUnes des étudiants dansune perspective d'une plus grande autonomie dans l'accès à la connais¬sance et dans la construction de représentations opératoires.

Le second thème de réflexion concerne directement le recrutement etla formation des enseignants du Supérieur. Comment intégrer la notionde compétence professionnelle d'enseignant ? Comment donner le goûtpuis les moyens d'une formation pédagogique et didactique aux ensei¬gnants en poste ? Comment fournir à tous ceux qui souhaitent développerdes outils ou des systèmes d'enseignement non présentiel (EAO, EAD,enseignement flexible, ...), les moyens de se former et d'acquérir descompétences professionneUes que leur expérience de chercheurs ne leura, en général, pas donné ?

Ces deux pistes sont à explorer simultanément car eUes convergent,de fait, vers une amélioration de l'Enseignement Supérieur et unemeilleure intégration des NouveUes Technologies.

72 Recherche et Formation

analyse des besoins transversaux aux discipUnes des étudiants dansune perspective d'une plus grande autonomie dans l'accès à la connais¬sance et dans la construction de représentations opératoires.

Le second thème de réflexion concerne directement le recrutement etla formation des enseignants du Supérieur. Comment intégrer la notionde compétence professionnelle d'enseignant ? Comment donner le goûtpuis les moyens d'une formation pédagogique et didactique aux ensei¬gnants en poste ? Comment fournir à tous ceux qui souhaitent développerdes outils ou des systèmes d'enseignement non présentiel (EAO, EAD,enseignement flexible, ...), les moyens de se former et d'acquérir descompétences professionneUes que leur expérience de chercheurs ne leura, en général, pas donné ?

Ces deux pistes sont à explorer simultanément car eUes convergent,de fait, vers une amélioration de l'Enseignement Supérieur et unemeilleure intégration des NouveUes Technologies.

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Ilccherclic et Formation N° ] 5 Avril 1994

Études et recherches 73

QUELS ENSEIGNANTSPOUR UNE UNrVERSITÉ EN MUTATION ?

« Le but de l'instruction est lajin de l'instruction,c'est-à-dire l'invention. »

(M. Serres)

Jean DEMAL*

Sommaire. Il ne fait aucun doute que l'université actuelle, sous l'action de différents facteurs, est en

profonde mutation. Pour rester fidèle à sa mission ancestrale de centre de formation de qua¬

lité, elle doit remettre en question ses méthodes pédagogiques et en convaincre ses ensei¬

gnants.Diverses tentatives sont effectuées dans ce sens dans la plupart des universités du monde,

un examen panoramique en est réalisé.Le cas de l'Université catholique de Louvain, dont l'auteur a présidé la commission de

l'enseignement, est analysé. Il est montré comment les enseignants y ont été progressive¬

ment sensibilisés à la pédagogie universitaire, quelles structures pédagogiques ont étécréées, comment on y procède à l'évaluation des enseignements, et quels critères présidentau recrutement et à la promotion des enseignants.

Summary. There is no doubt that today's university is changing thoroughly under the influence ofvarious factors. To remain true to its ancestral mission as a quality training centre, it mustbring its teaching methods back into question and convince its professors about it.

Different attempts have been made to that effect in most universities in the world of these

attempts.The case of the Catholic university of Louvain whose education committee was chaired bythe author is analysed. We are shown how the professors in Louvain have gradually been

made alive to university teaching methods, which teaching structures have been created,

how the assessment of the teaching is conducted and which criteria prevail in the recruitingand promotion ofprofessors.

Vice-Recteur honoraire de l'Université catholique de Louvain.

Ilccherclic et Formation N° ] 5 Avril 1994

Études et recherches 73

QUELS ENSEIGNANTSPOUR UNE UNrVERSITÉ EN MUTATION ?

« Le but de l'instruction est lajin de l'instruction,c'est-à-dire l'invention. »

(M. Serres)

Jean DEMAL*

Sommaire. Il ne fait aucun doute que l'université actuelle, sous l'action de différents facteurs, est en

profonde mutation. Pour rester fidèle à sa mission ancestrale de centre de formation de qua¬

lité, elle doit remettre en question ses méthodes pédagogiques et en convaincre ses ensei¬

gnants.Diverses tentatives sont effectuées dans ce sens dans la plupart des universités du monde,

un examen panoramique en est réalisé.Le cas de l'Université catholique de Louvain, dont l'auteur a présidé la commission de

l'enseignement, est analysé. Il est montré comment les enseignants y ont été progressive¬

ment sensibilisés à la pédagogie universitaire, quelles structures pédagogiques ont étécréées, comment on y procède à l'évaluation des enseignements, et quels critères présidentau recrutement et à la promotion des enseignants.

Summary. There is no doubt that today's university is changing thoroughly under the influence ofvarious factors. To remain true to its ancestral mission as a quality training centre, it mustbring its teaching methods back into question and convince its professors about it.

Different attempts have been made to that effect in most universities in the world of these

attempts.The case of the Catholic university of Louvain whose education committee was chaired bythe author is analysed. We are shown how the professors in Louvain have gradually been

made alive to university teaching methods, which teaching structures have been created,

how the assessment of the teaching is conducted and which criteria prevail in the recruitingand promotion ofprofessors.

Vice-Recteur honoraire de l'Université catholique de Louvain.

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74 Recherche et Formation

Les universités ont, de tous temps, revendiqué l'autonomie et uneentière liberté académique. Dans l'éditorial du rapport 1989-1993 auPrésident de la République Française, René Mornex, Président duComité National d'Évaluation, souUgne que l'autonomie des universitésimpUque inéluctablement une évaluation a posteriori de la quaUté de laformation donnée aux étudiants. Trois notions importantes et évocatricessont ainsi énoncées de prime abord : l'autonomie, l'évaluation, la forma¬tion. Si l'on y ajoute l'orientation au début des études, on obtient unensemble d'éléments pédagogiques totalement inusités U y a une vingtained'années.

La plupart des universités modifient progressivement leurs premierscycles en les rénovant. La formation se veut au départ polyvalente pourpermettre une meUleure orientation et une spéciaUsation progressive. Ledébut des premiers cycles inclut une initiation à la méthode de travaUuniversitaire. Un tutorat est destiné à fournir un encadrement initial auxjeunes étudiants.

Par aUleurs, la population estudiantine s'est considérablement accrueau cours des deux ou trois dernières décennies. L'origine sociale des étu¬diants s'est fortement élargie. Nombreux sont les jeunes universitairesdont les parents n'ont aucune expérience de cette vie particuUère. Lesformations préalables des étudiants entrant à l'université sont très diver¬sifiées. H en résulte une physionomie sociologique toute nouveUe de lapopulation étudiante.

Nous pouvons donc affirmer que l'Université actueUe subit une pro¬fonde mutation. Notre propos est d'envisager, à la lumière de l'expé¬rience d'un praticien, les problèmes pédagogiques qu'entraîne cettemutation, de jeter un coup d'il panoramique sur les réactions d'adap¬tation d'un certain nombre d'universités dans le monde ; enfin, de procé¬der à une étude de cas sur une université, ceUe de Louvain.

1. UNE INSTRUCTION POUR MENER A L'INVENTION

L'université actuelle est souvent mise en question dans l'opinionpubUque. Le grand nombre d'échecs au début des études, une formationqui ne paraît pas en rapport avec les nécessités du marché de l'emploi,l'absence de débouchés professionnels pour certaines fUières universi¬taires, la pénurie d'infrastructures académiques et sociales malgré unbudget très important, tels sont les principaux problèmes qui inquiètent.

74 Recherche et Formation

Les universités ont, de tous temps, revendiqué l'autonomie et uneentière liberté académique. Dans l'éditorial du rapport 1989-1993 auPrésident de la République Française, René Mornex, Président duComité National d'Évaluation, souUgne que l'autonomie des universitésimpUque inéluctablement une évaluation a posteriori de la quaUté de laformation donnée aux étudiants. Trois notions importantes et évocatricessont ainsi énoncées de prime abord : l'autonomie, l'évaluation, la forma¬tion. Si l'on y ajoute l'orientation au début des études, on obtient unensemble d'éléments pédagogiques totalement inusités U y a une vingtained'années.

La plupart des universités modifient progressivement leurs premierscycles en les rénovant. La formation se veut au départ polyvalente pourpermettre une meUleure orientation et une spéciaUsation progressive. Ledébut des premiers cycles inclut une initiation à la méthode de travaUuniversitaire. Un tutorat est destiné à fournir un encadrement initial auxjeunes étudiants.

Par aUleurs, la population estudiantine s'est considérablement accrueau cours des deux ou trois dernières décennies. L'origine sociale des étu¬diants s'est fortement élargie. Nombreux sont les jeunes universitairesdont les parents n'ont aucune expérience de cette vie particuUère. Lesformations préalables des étudiants entrant à l'université sont très diver¬sifiées. H en résulte une physionomie sociologique toute nouveUe de lapopulation étudiante.

Nous pouvons donc affirmer que l'Université actueUe subit une pro¬fonde mutation. Notre propos est d'envisager, à la lumière de l'expé¬rience d'un praticien, les problèmes pédagogiques qu'entraîne cettemutation, de jeter un coup d'il panoramique sur les réactions d'adap¬tation d'un certain nombre d'universités dans le monde ; enfin, de procé¬der à une étude de cas sur une université, ceUe de Louvain.

1. UNE INSTRUCTION POUR MENER A L'INVENTION

L'université actuelle est souvent mise en question dans l'opinionpubUque. Le grand nombre d'échecs au début des études, une formationqui ne paraît pas en rapport avec les nécessités du marché de l'emploi,l'absence de débouchés professionnels pour certaines fUières universi¬taires, la pénurie d'infrastructures académiques et sociales malgré unbudget très important, tels sont les principaux problèmes qui inquiètent.

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Études et recherches 75

Et cette inquiétude est d'autant plus générale que toutes les couches de lasociété sont concernées, puisque l'éventail sociologique des étudiantss'est diversifié. Si l'on se place au plan macro-économique, on peut se

demander si la part considérable du budget de l'Etat consacrée aux uni¬versités s'accompagne suffisamment de retombées sociales favorables.L'efficacité de l'enseignement universitaire, en tant que service pubUc,peut être évaluée. J.-M. Albertini, qui fut à l'origine du CEDES (Centred'Etudes et de Documentation sur l'Economie des Services) suggérad'appUquer à l'éducation les concepts de l'économie des services. Certes,l'efficacité d'un service public, et surtout de l'enseignement, ne peut êtreévaluée en fonction des mêmes critères que ceux qui s'appUquent à uneentreprise industrielle, mais l'évaluation de son efficacité ne peut êtrepurement et simplement évacuée, et nous rejoignons ainsi l'opinion duComité National d'Évaluation.

Les problèmes qui se posent sont, d'une part, d'examiner la validitéde la formation fournie par l'université actueUe ; d'autre part, de véri¬fier si les artisans principaux de cette formation, les enseignants, sont à

même de la fournir adéquatement.

La spécificité de l'enseignement universitaire réside dans son Uen avecla recherche. Historiquement, ce caractère spécifique a eu pour consé¬quence d'accorder une importance primordiale à la fonction rechercheassumée par les enseignants universitaires. Les critères de valeur scienti¬fique du chercheur président à la sélection et au recrutement de ce per¬sonnel. Leur activité de recherche, au sein de l'institution, est leur souciprimordial, elle conditionnera d'ailleurs leur accès à une promotion.Autour de ces enseignants gravitent les étudiants qui, en nombre réduit,assistent, puis participent, après une période d'initiation, au travail derecherche. C'est ainsi qu'ils acquièrent progressivement des connais¬sances, mais que, surtout, ils s'imprègnent des qualités humaines etscientifiques propres à un bon chercheur.

Actuellement le côtoiement de la recherche n'est plus possible pour lamajorité des trop nombreux étudiants universitaires, si ce n'est en find'études, pour une partie d'entre eux. Comment alors remplacer lapédagogie basée sur la recherche par une autre pédagogie adaptée à unenseignement de masse ? Comment fournir une formation universitairevalable autrement que par la pratique de la recherche ? Les enseignantsen sont ils tous vraiment conscients, et y sont-Us préparés ?

Une réflexion critique sur les programmes d'études et sur les activitésd'enseignement devrait vérifier dans quelle mesure l'enseignement

Études et recherches 75

Et cette inquiétude est d'autant plus générale que toutes les couches de lasociété sont concernées, puisque l'éventail sociologique des étudiantss'est diversifié. Si l'on se place au plan macro-économique, on peut se

demander si la part considérable du budget de l'Etat consacrée aux uni¬versités s'accompagne suffisamment de retombées sociales favorables.L'efficacité de l'enseignement universitaire, en tant que service pubUc,peut être évaluée. J.-M. Albertini, qui fut à l'origine du CEDES (Centred'Etudes et de Documentation sur l'Economie des Services) suggérad'appUquer à l'éducation les concepts de l'économie des services. Certes,l'efficacité d'un service public, et surtout de l'enseignement, ne peut êtreévaluée en fonction des mêmes critères que ceux qui s'appUquent à uneentreprise industrielle, mais l'évaluation de son efficacité ne peut êtrepurement et simplement évacuée, et nous rejoignons ainsi l'opinion duComité National d'Évaluation.

Les problèmes qui se posent sont, d'une part, d'examiner la validitéde la formation fournie par l'université actueUe ; d'autre part, de véri¬fier si les artisans principaux de cette formation, les enseignants, sont à

même de la fournir adéquatement.

La spécificité de l'enseignement universitaire réside dans son Uen avecla recherche. Historiquement, ce caractère spécifique a eu pour consé¬quence d'accorder une importance primordiale à la fonction rechercheassumée par les enseignants universitaires. Les critères de valeur scienti¬fique du chercheur président à la sélection et au recrutement de ce per¬sonnel. Leur activité de recherche, au sein de l'institution, est leur souciprimordial, elle conditionnera d'ailleurs leur accès à une promotion.Autour de ces enseignants gravitent les étudiants qui, en nombre réduit,assistent, puis participent, après une période d'initiation, au travail derecherche. C'est ainsi qu'ils acquièrent progressivement des connais¬sances, mais que, surtout, ils s'imprègnent des qualités humaines etscientifiques propres à un bon chercheur.

Actuellement le côtoiement de la recherche n'est plus possible pour lamajorité des trop nombreux étudiants universitaires, si ce n'est en find'études, pour une partie d'entre eux. Comment alors remplacer lapédagogie basée sur la recherche par une autre pédagogie adaptée à unenseignement de masse ? Comment fournir une formation universitairevalable autrement que par la pratique de la recherche ? Les enseignantsen sont ils tous vraiment conscients, et y sont-Us préparés ?

Une réflexion critique sur les programmes d'études et sur les activitésd'enseignement devrait vérifier dans quelle mesure l'enseignement

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76 Recherche et Formation

universitaire peut dépasser la pure transmission des connaissances, dansqueUe mesure l'évaluation des étudiants peut dépasser la pure restitutiondes connaissances acquises. Au delà de ceUes-ci, c'est, en effet, une for¬mation en profondeur de l'étudiant qui doit être visée : celui-ci doitacquérir une réeUe maîtrise de l'esprit, des quaUtés de créativité, d'in¬vention, de rigueur et d'objectivité. L'objectif primordial doit être de luiinculquer une véritable éthique universitaire : quête de la vérité, Ubertéd'expression, volonté de rationalité, d'objectivité, d'exactitude, de préci¬sion, capacité d'exercer une véritable analyse critique basée sur des cri¬tères objectifs et définis. L'adaptabUité, l'aptitude au travaU en groupe,la capacité d'innovation et éventueUement de reconversion sont autantde qualités, autrefois assimilées par la pratique de la recherche, quel'étudiant universitaire devra acquérir dans l'université de massed'aujourd'hui.

Les institutions, comme le personnel enseignant, ont-Us les moyens,les capacités et la formation pour viser ces objectifs d'enseignement dansnos universités ? Au préalable, une double inertie est à vaincre. D'abordla lourdeur administrative et le poids des traditions des universités, ainsique leur lenteur à s'adapter aux besoins d'une société en mutation,ensuite l'individuaUsme des enseignants et la persistance dans leur men¬talité d'un souverain respect de la Uberté académique et de la primautéde leur recherche. Des spéciaUstes en science de l'éducation, se penchantsur le problème de la formation des enseignants universitaires, ontconstaté, jusqu'il y a peu, que les universités et les universitaires nemanifestaient que de l'indifférence, voire du dédain, quand ce n'était pasdu mépris pour toute formation à l'enseignement qui ne se limiterait pasà la formation par les connaissances et par les recherches dans leur disci¬pUne (R. LaUez, 1982).

2. ESSAIS D'ADAPTATIONS PEDAGOGIQUES

H faut reconnaître que le monde universitaire anglophone a, le pre¬mier, pris conscience de l'urgence d'aborder le problème de la formationdes enseignants. C'est plus précisément en AustraUe, à l'université deMelbourne, que fut créé, en 1948, un service audiovisuel ; suivi, en 1958,par la création d'un « Educational Research Office » et d'un « UniversityTeaching Office » en 1961. Les domaines d'action de ces deux dernièresstructures étaient la recherche, la technologie éducationneUe ainsi quel'améUoration de l'acte pédagogique à l'université. H leur incombe d'exa¬miner les structures de l'université et les objectifs qui y sont poursuivis,

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universitaire peut dépasser la pure transmission des connaissances, dansqueUe mesure l'évaluation des étudiants peut dépasser la pure restitutiondes connaissances acquises. Au delà de ceUes-ci, c'est, en effet, une for¬mation en profondeur de l'étudiant qui doit être visée : celui-ci doitacquérir une réeUe maîtrise de l'esprit, des quaUtés de créativité, d'in¬vention, de rigueur et d'objectivité. L'objectif primordial doit être de luiinculquer une véritable éthique universitaire : quête de la vérité, Ubertéd'expression, volonté de rationalité, d'objectivité, d'exactitude, de préci¬sion, capacité d'exercer une véritable analyse critique basée sur des cri¬tères objectifs et définis. L'adaptabUité, l'aptitude au travaU en groupe,la capacité d'innovation et éventueUement de reconversion sont autantde qualités, autrefois assimilées par la pratique de la recherche, quel'étudiant universitaire devra acquérir dans l'université de massed'aujourd'hui.

Les institutions, comme le personnel enseignant, ont-Us les moyens,les capacités et la formation pour viser ces objectifs d'enseignement dansnos universités ? Au préalable, une double inertie est à vaincre. D'abordla lourdeur administrative et le poids des traditions des universités, ainsique leur lenteur à s'adapter aux besoins d'une société en mutation,ensuite l'individuaUsme des enseignants et la persistance dans leur men¬talité d'un souverain respect de la Uberté académique et de la primautéde leur recherche. Des spéciaUstes en science de l'éducation, se penchantsur le problème de la formation des enseignants universitaires, ontconstaté, jusqu'il y a peu, que les universités et les universitaires nemanifestaient que de l'indifférence, voire du dédain, quand ce n'était pasdu mépris pour toute formation à l'enseignement qui ne se limiterait pasà la formation par les connaissances et par les recherches dans leur disci¬pUne (R. LaUez, 1982).

2. ESSAIS D'ADAPTATIONS PEDAGOGIQUES

H faut reconnaître que le monde universitaire anglophone a, le pre¬mier, pris conscience de l'urgence d'aborder le problème de la formationdes enseignants. C'est plus précisément en AustraUe, à l'université deMelbourne, que fut créé, en 1948, un service audiovisuel ; suivi, en 1958,par la création d'un « Educational Research Office » et d'un « UniversityTeaching Office » en 1961. Les domaines d'action de ces deux dernièresstructures étaient la recherche, la technologie éducationneUe ainsi quel'améUoration de l'acte pédagogique à l'université. H leur incombe d'exa¬miner les structures de l'université et les objectifs qui y sont poursuivis,

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Études et recherches 77

d'effectuer des recherches empiriques sur l'enseignement et l'apprentis¬sage, enfin de susciter les changements pédagogiques jugés souhaitables.

A peu près au même moment l'université de New South Wales créa un« service pédagogique » pour répondre à une campagne de presse viru¬lente stigmatisant les échecs et le gaspillage à l'université. Le grandnombre d'échecs était attribué à la mauvaise quaUté de l'enseignement.Ces initiatives se généralisèrent pour aboutir, en 1981, à la définition parles recteurs austraUens d'une poUtique institutionneUe de formation dupersonnel enseignant universitaire d'envergure nationale. Cette poUtiquede formation professionneUe comprend :

1. un programme d'initiation pour chaque nouveau membre du corpsenseignant qui débutera au moment de son arrivée en poste et continueraau cours de la première année de service. La participation à ce pro¬gramme est une condition d'engagement ;

2. une diminution significative des fonctions d'enseignement etd'administration pour tout personnel enseignant au cours de la premièreannée de probation ;

3. des procédures formeUes pour informer le personnel en probationsur la qualité du travail accompli au terme de chaque année de pro¬bation ;

4. un programme d'évaluation formel pour tout le personnel ensei¬gnant, impUquant un examen systématique et régulier de la performancedans chacun des rôles. L'évaluation devra être faite à des fins de forma¬tion et d'appréciation ;

5. l'introduction d'un programme incitatif, ou encore la réorganisa¬tion du modèle actuel de distribution des récompenses afin d'encouragerle personnel enseignant à améliorer la qualité de ses prestations, surtoutdans sa fonction d'enseignement (Gagnon, 1982).

Cette description des initiatives austrahennes pour réaliser une pro¬fessionnalisation de la fonction enseignante universitaire se justifie par lefait que leurs promoteurs furent des pionniers dans ce domaine. L'exem¬ple australien s'est progressivement répandu à l'ensemble du inondeanglo-saxon. Des universités américaines, puis canadiennes, emboîtèrentle pas. Une formation pédagogique est organisée au profit des doctorantsou des nouveaux professeurs : eUe concerne la planification des cours,l'évaluation des apprentissages, les caractéristiques des étudiants, lesthéories de l'apprentissage, les nouveUes techniques d'enseignement, etc.L'expérience des universités nord-américaines semble indiquer que lespratiques les plus efficaces de formation pédagogiques sont les suivantes :

1. les ateUers et séminaires sur les méthodes d'enseignement ;

2. l'existence de services de support à l'enseignement ;

Études et recherches 77

d'effectuer des recherches empiriques sur l'enseignement et l'apprentis¬sage, enfin de susciter les changements pédagogiques jugés souhaitables.

A peu près au même moment l'université de New South Wales créa un« service pédagogique » pour répondre à une campagne de presse viru¬lente stigmatisant les échecs et le gaspillage à l'université. Le grandnombre d'échecs était attribué à la mauvaise quaUté de l'enseignement.Ces initiatives se généralisèrent pour aboutir, en 1981, à la définition parles recteurs austraUens d'une poUtique institutionneUe de formation dupersonnel enseignant universitaire d'envergure nationale. Cette poUtiquede formation professionneUe comprend :

1. un programme d'initiation pour chaque nouveau membre du corpsenseignant qui débutera au moment de son arrivée en poste et continueraau cours de la première année de service. La participation à ce pro¬gramme est une condition d'engagement ;

2. une diminution significative des fonctions d'enseignement etd'administration pour tout personnel enseignant au cours de la premièreannée de probation ;

3. des procédures formeUes pour informer le personnel en probationsur la qualité du travail accompli au terme de chaque année de pro¬bation ;

4. un programme d'évaluation formel pour tout le personnel ensei¬gnant, impUquant un examen systématique et régulier de la performancedans chacun des rôles. L'évaluation devra être faite à des fins de forma¬tion et d'appréciation ;

5. l'introduction d'un programme incitatif, ou encore la réorganisa¬tion du modèle actuel de distribution des récompenses afin d'encouragerle personnel enseignant à améliorer la qualité de ses prestations, surtoutdans sa fonction d'enseignement (Gagnon, 1982).

Cette description des initiatives austrahennes pour réaliser une pro¬fessionnalisation de la fonction enseignante universitaire se justifie par lefait que leurs promoteurs furent des pionniers dans ce domaine. L'exem¬ple australien s'est progressivement répandu à l'ensemble du inondeanglo-saxon. Des universités américaines, puis canadiennes, emboîtèrentle pas. Une formation pédagogique est organisée au profit des doctorantsou des nouveaux professeurs : eUe concerne la planification des cours,l'évaluation des apprentissages, les caractéristiques des étudiants, lesthéories de l'apprentissage, les nouveUes techniques d'enseignement, etc.L'expérience des universités nord-américaines semble indiquer que lespratiques les plus efficaces de formation pédagogiques sont les suivantes :

1. les ateUers et séminaires sur les méthodes d'enseignement ;

2. l'existence de services de support à l'enseignement ;

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78 Recherche et Formation

3. la possibilité de pouvoir consulter des professionnels de lapédagogie ;

4. l'existence de procédures systématiques d'évaluation de l'ensei¬gnement (Dalceggio, 1988).

Aux États-Unis, ce sont les secteurs d'études médicales et techniquesqui ont montré l'exemple, aiguillonnés par les exigences de quaUté de for¬mation des corporations professionneUes et des agences d'accréditation.Des programmes de formation pédagogique sont organisés pour les « tea¬ching assistants » qui réaUsent l'essentiel de l'encadrement didactiquedes étudiants (Hughes, 1991).

En Angleterre, le « Committee of Vice ChanceUors and Principals » acréé en 1972, une commission permanente chargée des problèmes d'amé-Uoration des méthodes d'enseignement et d'acquisition des connaissancesdans l'enseignement supérieur, ainsi que des méthodes d'évaluation sys¬

tématique des enseignants (Matheson, 1981).

Les pays du Nord de l'Europe ont également suivi le mouvement : lesPays-Bas, la Suède, l'Allemagne, l'Autriche.

Dans l'ex-URSS, le ministère de l'Enseignement supérieur a créé desinstituts pour le perfectionnement des professeurs : entre 60 et 80 % desenseignants du supérieur fréquentent des conférences et séminaires orga¬nisés sur les sujets suivants : les problèmes philosophiques des sciences,les éléments de pédagogie et de psychologie de l'enseignement à l'écolesupérieure, l'utUisation des moyens techniques de l'enseignement, lesméthodes d'activation du processus cognitif, la maîtrise oratoire du pro¬fesseur, l'exploitation des ordinateurs (Rakobolskaya, 1986).

Les pays latins ont abordé très tard le problème de la formation péda¬gogique des enseignants du supérieur. Des initiatives isolées ont vu le jourdans certaines universités françaises, précédées d'ailleurs par lesGrandes Écoles. CeUes-ci ont créé, en 1977, un « Groupe de recherchespédagogiques » ; son programme comprend :

1. une réflexion approfondie sur les disciplines enseignées ;

2. un travaU critique sur certaines méthodologies ;

3. une assistance à l'enseignement ;

4. le développement de l'enseignement individuaUsé ;

5. le rôle des Grandes Écoles dans la production d'audiovisuels deformation et dans la création de bases et de banques de données (Michel,1981).

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3. la possibilité de pouvoir consulter des professionnels de lapédagogie ;

4. l'existence de procédures systématiques d'évaluation de l'ensei¬gnement (Dalceggio, 1988).

Aux États-Unis, ce sont les secteurs d'études médicales et techniquesqui ont montré l'exemple, aiguillonnés par les exigences de quaUté de for¬mation des corporations professionneUes et des agences d'accréditation.Des programmes de formation pédagogique sont organisés pour les « tea¬ching assistants » qui réaUsent l'essentiel de l'encadrement didactiquedes étudiants (Hughes, 1991).

En Angleterre, le « Committee of Vice ChanceUors and Principals » acréé en 1972, une commission permanente chargée des problèmes d'amé-Uoration des méthodes d'enseignement et d'acquisition des connaissancesdans l'enseignement supérieur, ainsi que des méthodes d'évaluation sys¬

tématique des enseignants (Matheson, 1981).

Les pays du Nord de l'Europe ont également suivi le mouvement : lesPays-Bas, la Suède, l'Allemagne, l'Autriche.

Dans l'ex-URSS, le ministère de l'Enseignement supérieur a créé desinstituts pour le perfectionnement des professeurs : entre 60 et 80 % desenseignants du supérieur fréquentent des conférences et séminaires orga¬nisés sur les sujets suivants : les problèmes philosophiques des sciences,les éléments de pédagogie et de psychologie de l'enseignement à l'écolesupérieure, l'utUisation des moyens techniques de l'enseignement, lesméthodes d'activation du processus cognitif, la maîtrise oratoire du pro¬fesseur, l'exploitation des ordinateurs (Rakobolskaya, 1986).

Les pays latins ont abordé très tard le problème de la formation péda¬gogique des enseignants du supérieur. Des initiatives isolées ont vu le jourdans certaines universités françaises, précédées d'ailleurs par lesGrandes Écoles. CeUes-ci ont créé, en 1977, un « Groupe de recherchespédagogiques » ; son programme comprend :

1. une réflexion approfondie sur les disciplines enseignées ;

2. un travaU critique sur certaines méthodologies ;

3. une assistance à l'enseignement ;

4. le développement de l'enseignement individuaUsé ;

5. le rôle des Grandes Écoles dans la production d'audiovisuels deformation et dans la création de bases et de banques de données (Michel,1981).

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Études et recherches 79

Une étude approfondie a été, par aiUeurs, réalisée en 1981, sous ladirection d'André De Peretti, à la demande d'Alain Savary, Ministre del'Éducation nationale. Des propositions précises ont été faites pour lesecteur de l'enseignement supérieur. Dans une première catégorie : pourles personnels qui ont enseigné avant d'être recrutés dans l'enseignementsupérieur, il est proposé une formation courte de cinq semaines. Pour lespersonnels qui n'ont jamais enseigné, la commission propose une forma¬tion d'un trimestre, soit seize semaines à temps plein, comprenant plu¬sieurs stages. Si le mode de recrutement du personnel était modifié à

l'avenir, et introduisait autant de critères pédagogiques que de critèresscientifiques, la formation devrait se prolonger sur une période de trois

Pour faire face au besoin aigu de renouveUement du personnel ensei¬gnant universitaire, accentué par l'accroissement du nombre des étu¬diants, le ministère français de l'Education nationale a créé récemmentles Centres d'Initiation à l'Enseignement Supérieur (CIES ) qui offrent à

des étudiants de troisième cycle, acceptant de participer à l'encadrementdes jeunes étudiants, la possibUité d'acquérir une formation pédago¬gique.

En Suisse, l'Ecole polytechnique de Lausanne a fait figure de précur¬seur en créant une chaire de pédagogie et de didactique. Des programmesde formation pédagogique de base y sont proposés pour tous les ensei¬gnants, conçus d'après une approche systémique : analyse des besoins,analyse des contenus, définition des objectifs, choix des méthodes etmoyens didactiques, évaluation des apprenants, évaluation de l'enseigne¬ment, révision. En plus une poUtique et une organisation institutionneUesse sont avérées indispensables pour soutenir ces programmes de forma¬tion (Goldschmid, 1990).

Pour ce qui concerne les pays en voie de développement, les travauxdu « Conseil International pour le Développement de l'Éducation » sontévoqués par Coombs (1989) dans son livre sur la « Crise mondiale del'Education ». Cette crise est particulièrement tragique pour ces payscar, comme le disait déjà Fourastié, l'éducation est à la base du dévelop¬pement. L'aide des pays développés devrait porter, en priorité, sur laformation des enseignants et l'améUoration d'un enseignement supérieuradapté à la culture propre et aux besoins socio-économiques spécifiquesdes pays en développement. Pour la formation des futurs cadres et diri¬geants de ces pays, l'enseignement supérieur s'avère un moyen de pro¬grès indispensable.

Études et recherches 79

Une étude approfondie a été, par aiUeurs, réalisée en 1981, sous ladirection d'André De Peretti, à la demande d'Alain Savary, Ministre del'Éducation nationale. Des propositions précises ont été faites pour lesecteur de l'enseignement supérieur. Dans une première catégorie : pourles personnels qui ont enseigné avant d'être recrutés dans l'enseignementsupérieur, il est proposé une formation courte de cinq semaines. Pour lespersonnels qui n'ont jamais enseigné, la commission propose une forma¬tion d'un trimestre, soit seize semaines à temps plein, comprenant plu¬sieurs stages. Si le mode de recrutement du personnel était modifié à

l'avenir, et introduisait autant de critères pédagogiques que de critèresscientifiques, la formation devrait se prolonger sur une période de trois

Pour faire face au besoin aigu de renouveUement du personnel ensei¬gnant universitaire, accentué par l'accroissement du nombre des étu¬diants, le ministère français de l'Education nationale a créé récemmentles Centres d'Initiation à l'Enseignement Supérieur (CIES ) qui offrent à

des étudiants de troisième cycle, acceptant de participer à l'encadrementdes jeunes étudiants, la possibUité d'acquérir une formation pédago¬gique.

En Suisse, l'Ecole polytechnique de Lausanne a fait figure de précur¬seur en créant une chaire de pédagogie et de didactique. Des programmesde formation pédagogique de base y sont proposés pour tous les ensei¬gnants, conçus d'après une approche systémique : analyse des besoins,analyse des contenus, définition des objectifs, choix des méthodes etmoyens didactiques, évaluation des apprenants, évaluation de l'enseigne¬ment, révision. En plus une poUtique et une organisation institutionneUesse sont avérées indispensables pour soutenir ces programmes de forma¬tion (Goldschmid, 1990).

Pour ce qui concerne les pays en voie de développement, les travauxdu « Conseil International pour le Développement de l'Éducation » sontévoqués par Coombs (1989) dans son livre sur la « Crise mondiale del'Education ». Cette crise est particulièrement tragique pour ces payscar, comme le disait déjà Fourastié, l'éducation est à la base du dévelop¬pement. L'aide des pays développés devrait porter, en priorité, sur laformation des enseignants et l'améUoration d'un enseignement supérieuradapté à la culture propre et aux besoins socio-économiques spécifiquesdes pays en développement. Pour la formation des futurs cadres et diri¬geants de ces pays, l'enseignement supérieur s'avère un moyen de pro¬grès indispensable.

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80 Recherche et Formation

Quelques exemples, repris en Afrique francophone, Ulustreront cer¬tains efforts entrepris. Le Conseil d'Administration de l'UniversitéNationale du Zaïre a créé, en 1975, la « Commission permanente desétudes » et lui a confié la mission de donner des avis et de formuler despropositions relatives à l'organisation de la vie académique, surtout del'enseignement, afin que celui-ci soit de haut niveau et correspondemieux aux besoins du pays. L'année suivante, le même ConseU créa un« Diplôme d'Études Supérieures » (DES), grade intermédiaire entre lesecond cycle et le doctorat. Ce diplôme comprend une composante péda¬gogique d'au moins 90 heures d'enseignement en psychologie de l'adulte(30 h.), techniques de communication pédagogiques (45 h.) et informa¬tions psychopédagogiques spéciaUsées (15 h.). De même, une action futentreprise pour ameUorer la quaUté pédagogique des enseignants déjà enfonction par l'organisation de séminaires et de journées de réflexion enpédagogie universitaire, par la pubUcation d'un « Bulletin de PédagogieUniversitaire », et la création, en 1979, d'un « Service de PédagogieUniversitaire ». Les séminaires organisés par l'Université Nationale duZaïre ont accueUU des délégués des universités du Rwanda, du Burundi,du Congo Brazzaville, de l'université du Bénin (Togo), (Plevoets, 1986).

La conviction du Ministre de l'Éducation Nationale et de l'Enseigne¬ment Supérieur du Sénégal a été exprimée à l'ouverture du CoUoque del'Association Internationale de Pédagogie Universitaire à Dakar en1985 : « En définitive, c'est dans la mesure où l'université saura faire laplace qu'ils méritent aux problèmes pédagogiques et qu'elle sauras'ouvrir aux réaUtés du monde du travail, qu'elle pourra être le lieu decréativité sociale qui est au fond sa véritable vocation. En prenant encompte toutes les dimensions de l'acte d'enseigner, qui ne se réduisentpas à la seule transmission des savoirs mais englobent également lescomposants sociologiques et psychologiques de leur réception, l'univer¬sité sera davantage capable de mobiUser toutes les énergies des profes¬seurs et des étudiants et de les appeler à se dépasser toujours plus auservice de la nation. » (Rja Der Thiam, 1986).

Pour ameUorer la formation pédagogique, déficiente, des enseignantsdu supérieur, la Côte-d'Ivoire créa, en 1977, un « Service Universitairede Pédagogie », son objectif était l'animation, l'aide pédagogique, latenue d'ateUers et de séminaires, la rédaction de documents de travaU.En 1980, le SUP fut transformé en IREEP : Institut de Recherche,d'Expérimentation et d'Enseignement en Pédagogie ; ceci pour entre¬prendre des recherches et dispenser un enseignement : deux objectifsnouveaux. Un journal « ASSEMPE », trimestriel, publié à 1 000 exem¬plaires et diffusé à tous les enseignants, joue un rôle précieux

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Quelques exemples, repris en Afrique francophone, Ulustreront cer¬tains efforts entrepris. Le Conseil d'Administration de l'UniversitéNationale du Zaïre a créé, en 1975, la « Commission permanente desétudes » et lui a confié la mission de donner des avis et de formuler despropositions relatives à l'organisation de la vie académique, surtout del'enseignement, afin que celui-ci soit de haut niveau et correspondemieux aux besoins du pays. L'année suivante, le même ConseU créa un« Diplôme d'Études Supérieures » (DES), grade intermédiaire entre lesecond cycle et le doctorat. Ce diplôme comprend une composante péda¬gogique d'au moins 90 heures d'enseignement en psychologie de l'adulte(30 h.), techniques de communication pédagogiques (45 h.) et informa¬tions psychopédagogiques spéciaUsées (15 h.). De même, une action futentreprise pour ameUorer la quaUté pédagogique des enseignants déjà enfonction par l'organisation de séminaires et de journées de réflexion enpédagogie universitaire, par la pubUcation d'un « Bulletin de PédagogieUniversitaire », et la création, en 1979, d'un « Service de PédagogieUniversitaire ». Les séminaires organisés par l'Université Nationale duZaïre ont accueUU des délégués des universités du Rwanda, du Burundi,du Congo Brazzaville, de l'université du Bénin (Togo), (Plevoets, 1986).

La conviction du Ministre de l'Éducation Nationale et de l'Enseigne¬ment Supérieur du Sénégal a été exprimée à l'ouverture du CoUoque del'Association Internationale de Pédagogie Universitaire à Dakar en1985 : « En définitive, c'est dans la mesure où l'université saura faire laplace qu'ils méritent aux problèmes pédagogiques et qu'elle sauras'ouvrir aux réaUtés du monde du travail, qu'elle pourra être le lieu decréativité sociale qui est au fond sa véritable vocation. En prenant encompte toutes les dimensions de l'acte d'enseigner, qui ne se réduisentpas à la seule transmission des savoirs mais englobent également lescomposants sociologiques et psychologiques de leur réception, l'univer¬sité sera davantage capable de mobiUser toutes les énergies des profes¬seurs et des étudiants et de les appeler à se dépasser toujours plus auservice de la nation. » (Rja Der Thiam, 1986).

Pour ameUorer la formation pédagogique, déficiente, des enseignantsdu supérieur, la Côte-d'Ivoire créa, en 1977, un « Service Universitairede Pédagogie », son objectif était l'animation, l'aide pédagogique, latenue d'ateUers et de séminaires, la rédaction de documents de travaU.En 1980, le SUP fut transformé en IREEP : Institut de Recherche,d'Expérimentation et d'Enseignement en Pédagogie ; ceci pour entre¬prendre des recherches et dispenser un enseignement : deux objectifsnouveaux. Un journal « ASSEMPE », trimestriel, publié à 1 000 exem¬plaires et diffusé à tous les enseignants, joue un rôle précieux

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Études et recherches 81

d'animation pédagogique ; il est apprécié aussi à l'étranger. Desrecherches-action ont été entreprises à l'IREEP sur six thèmes : l'améUo¬ration du service d'évaluation, la carrière des enseignants dans le supé¬rieur, le rôle d'un service de pédagogie dans une université africaine, uneenquête sur le travaU intellectuel des étudiants, une analyse de la péda¬gogie africaine traditionneUe : impUcation pratique pour l'enseignementsupérieur (Tahiri, 1982).

Un nombre croissant d'universitaires africains établissent une rela¬tion étroite entre formation et développement. Cette conviction, si eUe se

généraUse chez les enseignants, rendra les objectifs éducatifs en généralet les pratiques pédagogiques plus évidentes et plus expUcites. Une for¬mation pour le développement implique donc le changement, à la foispour lui donner une impulsion et pour s'y adapter ; eUe doit préparerl'individu à affronter nombre de situations inconnues et imprévisibles,eUe doit lui donner les clés de l'auto adaptation aux situations nouveUeset de l'initiative, de la créativité et de l'induction du nouveau (Mahjoub,1987). Cette opinion reflète une option partagée par un certain nombred'universitaires tunisiens.

Malheureusement, et ce fut constaté au séminaire de l'AIPU auBurundi en 1989, tous les professeurs d'université n'ont pas forcémentconscience de l'importance et du poids que représentent leurs responsa¬bilités dans leurs activités d'enseignement. On ne saurait faire l'amal¬game entre le niveau de formation scientifique, généralement très élevéchez le professeur d'université, et la compétence pédagogique permettantde transmettre le savoir et le savoir-faire. Dans un métier comme celuid'enseignant, les capacités de gérer les rapports humains sont aussiimportantes que les connaissances dont on dispose dans son domaine(Ndayisala, 1989).

De cet examen panoramique d'un certain nombre d'initiatives, deprise de position, de réformes institutionneUes, U faut conclure que, mal¬heureusement, d'une façon générale, la majorité des enseignants soutien¬nent très peu les mesures officielles prises en vue de perfectionner l'ensei¬gnement universitaire. L'inertie est considérable et la tradition fortlourde. L'OCDE constate, en 1987, que dans aucun pays les enseignantsdes universités ne sont obUgés d'acquérir une qualification pédagogiquespéciale avant d'être engagés, ni pour être maintenus dans leur poste,alors que c'est exigé au niveau de l'enseignement primaire et secondaire.

L'accord est d'ailleurs difficile à réaUser sur le contenu des program¬mes de formation pédagogique pour les enseignants du supérieur. Il

Études et recherches 81

d'animation pédagogique ; il est apprécié aussi à l'étranger. Desrecherches-action ont été entreprises à l'IREEP sur six thèmes : l'améUo¬ration du service d'évaluation, la carrière des enseignants dans le supé¬rieur, le rôle d'un service de pédagogie dans une université africaine, uneenquête sur le travaU intellectuel des étudiants, une analyse de la péda¬gogie africaine traditionneUe : impUcation pratique pour l'enseignementsupérieur (Tahiri, 1982).

Un nombre croissant d'universitaires africains établissent une rela¬tion étroite entre formation et développement. Cette conviction, si eUe se

généraUse chez les enseignants, rendra les objectifs éducatifs en généralet les pratiques pédagogiques plus évidentes et plus expUcites. Une for¬mation pour le développement implique donc le changement, à la foispour lui donner une impulsion et pour s'y adapter ; eUe doit préparerl'individu à affronter nombre de situations inconnues et imprévisibles,eUe doit lui donner les clés de l'auto adaptation aux situations nouveUeset de l'initiative, de la créativité et de l'induction du nouveau (Mahjoub,1987). Cette opinion reflète une option partagée par un certain nombred'universitaires tunisiens.

Malheureusement, et ce fut constaté au séminaire de l'AIPU auBurundi en 1989, tous les professeurs d'université n'ont pas forcémentconscience de l'importance et du poids que représentent leurs responsa¬bilités dans leurs activités d'enseignement. On ne saurait faire l'amal¬game entre le niveau de formation scientifique, généralement très élevéchez le professeur d'université, et la compétence pédagogique permettantde transmettre le savoir et le savoir-faire. Dans un métier comme celuid'enseignant, les capacités de gérer les rapports humains sont aussiimportantes que les connaissances dont on dispose dans son domaine(Ndayisala, 1989).

De cet examen panoramique d'un certain nombre d'initiatives, deprise de position, de réformes institutionneUes, U faut conclure que, mal¬heureusement, d'une façon générale, la majorité des enseignants soutien¬nent très peu les mesures officielles prises en vue de perfectionner l'ensei¬gnement universitaire. L'inertie est considérable et la tradition fortlourde. L'OCDE constate, en 1987, que dans aucun pays les enseignantsdes universités ne sont obUgés d'acquérir une qualification pédagogiquespéciale avant d'être engagés, ni pour être maintenus dans leur poste,alors que c'est exigé au niveau de l'enseignement primaire et secondaire.

L'accord est d'ailleurs difficile à réaUser sur le contenu des program¬mes de formation pédagogique pour les enseignants du supérieur. Il

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existe des écoles qui définissent les programmes de formation des maîtresen fonction des compétences attendues (Anderson, 1986). Certains vontjusqu'à recenser 3 000 compétences (HUbert, 1982) !

Certes, on peut ne pas souscrire à une pareiUe conception behavio¬riste de la formation pédagogique, U n'empêche que le profil de l'ensei¬gnant idéal est à prendre en compte dans l'élaboration de tout pro¬gramme de formation à l'enseignement (on pourrait citer, à ce propos, lesdifférentes enquêtes faites en Europe, en Amérique et en Afrique sur lesqualités attendues d'un bon professeur). Ce qui importe finalement(Harris, 1986) n'est pas de savoir si un programme de formation portel'étiquette « en fonction des compétences attendues » mais si la pratiqued'un tel modèle concourt à l'amélioration de la quaUté des maîtres et del'enseignement en général.

UNE ETUDE DE CAS : L'UNIVERSITE DE LOUVAIN

Après cet aperçu sommaire de la situation de la pédagogie universi¬taire en général, et de la formation des enseignants en particuUer, nousnous proposons de présenter une étude de cas concernant les préoccupa¬tions de la promotion de l'enseignement dans une université belge :

l'Université CathoUque de Louvain à Louvain la Neuve. Les démarcheset expériences qui seront décrites, volontairement Umitées à la formationdes enseignants et à leur statut, constituent, en quelque sorte, unerecherche-action ; eUes pourront à la fois encourager ceux qui souhaitentrénover l'enseignement, et réconforter ceux qui, ayant entrepris cetteaction, se heurtent à des obstacles.

Comme les premières tentatives de rénovation de l'enseignement, uni¬versitaire en AustraUe ont été provoquées par une large campagne depresse sur la médiocrité de l'enseignement, l'action pédagogique à l'uni¬versité de Louvain s'est instaurée à la suite des événements de mai 1968.L'université, créée en 1425, a subi, à ce moment, une profonde mutation.

Les autorités universitaires ont, en effet, constitué des « commissionsde réforme », dont la « Commission de réforme de l'enseignement ».Cette commission bénéficiait de plusieurs avantages au départ. D'abord,le statut de l'université, Ubre, jouit d'une grande autonomie par rapportà l'État, y compris dans le recrutement et la promotion des enseignants.Ensuite, la commission était largement interdisciplinaire et formée depraticiens de l'enseignement. Ses membres appartenaient à l'instance de

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existe des écoles qui définissent les programmes de formation des maîtresen fonction des compétences attendues (Anderson, 1986). Certains vontjusqu'à recenser 3 000 compétences (HUbert, 1982) !

Certes, on peut ne pas souscrire à une pareiUe conception behavio¬riste de la formation pédagogique, U n'empêche que le profil de l'ensei¬gnant idéal est à prendre en compte dans l'élaboration de tout pro¬gramme de formation à l'enseignement (on pourrait citer, à ce propos, lesdifférentes enquêtes faites en Europe, en Amérique et en Afrique sur lesqualités attendues d'un bon professeur). Ce qui importe finalement(Harris, 1986) n'est pas de savoir si un programme de formation portel'étiquette « en fonction des compétences attendues » mais si la pratiqued'un tel modèle concourt à l'amélioration de la quaUté des maîtres et del'enseignement en général.

UNE ETUDE DE CAS : L'UNIVERSITE DE LOUVAIN

Après cet aperçu sommaire de la situation de la pédagogie universi¬taire en général, et de la formation des enseignants en particuUer, nousnous proposons de présenter une étude de cas concernant les préoccupa¬tions de la promotion de l'enseignement dans une université belge :

l'Université CathoUque de Louvain à Louvain la Neuve. Les démarcheset expériences qui seront décrites, volontairement Umitées à la formationdes enseignants et à leur statut, constituent, en quelque sorte, unerecherche-action ; eUes pourront à la fois encourager ceux qui souhaitentrénover l'enseignement, et réconforter ceux qui, ayant entrepris cetteaction, se heurtent à des obstacles.

Comme les premières tentatives de rénovation de l'enseignement, uni¬versitaire en AustraUe ont été provoquées par une large campagne depresse sur la médiocrité de l'enseignement, l'action pédagogique à l'uni¬versité de Louvain s'est instaurée à la suite des événements de mai 1968.L'université, créée en 1425, a subi, à ce moment, une profonde mutation.

Les autorités universitaires ont, en effet, constitué des « commissionsde réforme », dont la « Commission de réforme de l'enseignement ».Cette commission bénéficiait de plusieurs avantages au départ. D'abord,le statut de l'université, Ubre, jouit d'une grande autonomie par rapportà l'État, y compris dans le recrutement et la promotion des enseignants.Ensuite, la commission était largement interdisciplinaire et formée depraticiens de l'enseignement. Ses membres appartenaient à l'instance de

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décision de l'université en matière académique : le ConseU académique ;

eUe était présidée par un membre du ConseU d'administration.

C'est dire que les travaux et propositions de la Commission étaientlargement appuyés par le pouvoir de l'Université. Le principal problèmeétait de recueUUr et de tenir compte de l'opinion de la base. Par aUleursdes psychopédagogues fonctionnaient, au cas par cas, en tant qu'experts.

Des études sur différents problèmes de pédagogie universitaire, et,parallèlement, une large action de sensUtUisation du corps enseignant,ont été menées au sein de la commission, devenue entre-temps « Commis¬sion de l'enseignement ». Le principal obstacle à surmonter, comme danstoutes les universités du monde, est une résistance du corps enseignantbasée sur les vieilles habitudes, la sacro-sainte liberté académique, laprééminence de la recherche et... une véritable aUergie vis-à-vis des psy¬chopédagogues de la part des praticiens d'autres discipUnes.

Cette action de sensibilisation s'est effectuée par une série d'opéra¬tions convergentes. D'une part, l'organisation de cinq séminaires sur dessujets en rapport avec l'enseignement universitaire et le soutien accordéà cinq ateliers animés par des enseignants de différentes disciplines, par¬ticulièrement motivés par la pédagogie universitaire. D'autre part, laconception et la diffusion à tous les enseignants de l'université de vingtdocuments : ils traitent des rapports enseignants-étudiants, des examens,de l'adaptation de l'étudiant au travail universitaire, de l'orientation desétudiants, de l'évaluation des enseignements, d'expériences pédagogiquesconcrètes au sein des facultés, de l'évaluation des programmes d'études,de l'aide psychopédagogique en 1ère année, de l'avis pédagogique sur lesenseignants, de l'audiovisuel comme instrument pédagogique. Un fichiercomprenant des initiatives pédagogiques dans toutes les discipUnes a éga¬

lement été largement diffusé. De multiples réunions ont été tenues avecdes enseignants et des étudiants.

Toutes ces initiatives ont, au cours des années, permis une lente matu¬ration des esprits, et une ouverture progressive aux problèmes pédago¬giques. Malheureusement c'étaient toujours les plus motivés qui se mon¬traient les plus assidus aux activités libres et attentifs aux documents.Comment agir sur ceux dont l'enseignement était le plus déficient et quise montraient rebeUes à toute sensibUisation ? Il faUait passer à de nou¬veUes modaUtés d'action.

Forte de son influence sur l'autorité académique, la Commission del'enseignement fit prendre une série de décisions pédagogiques par le

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décision de l'université en matière académique : le ConseU académique ;

eUe était présidée par un membre du ConseU d'administration.

C'est dire que les travaux et propositions de la Commission étaientlargement appuyés par le pouvoir de l'Université. Le principal problèmeétait de recueUUr et de tenir compte de l'opinion de la base. Par aUleursdes psychopédagogues fonctionnaient, au cas par cas, en tant qu'experts.

Des études sur différents problèmes de pédagogie universitaire, et,parallèlement, une large action de sensUtUisation du corps enseignant,ont été menées au sein de la commission, devenue entre-temps « Commis¬sion de l'enseignement ». Le principal obstacle à surmonter, comme danstoutes les universités du monde, est une résistance du corps enseignantbasée sur les vieilles habitudes, la sacro-sainte liberté académique, laprééminence de la recherche et... une véritable aUergie vis-à-vis des psy¬chopédagogues de la part des praticiens d'autres discipUnes.

Cette action de sensibilisation s'est effectuée par une série d'opéra¬tions convergentes. D'une part, l'organisation de cinq séminaires sur dessujets en rapport avec l'enseignement universitaire et le soutien accordéà cinq ateliers animés par des enseignants de différentes disciplines, par¬ticulièrement motivés par la pédagogie universitaire. D'autre part, laconception et la diffusion à tous les enseignants de l'université de vingtdocuments : ils traitent des rapports enseignants-étudiants, des examens,de l'adaptation de l'étudiant au travail universitaire, de l'orientation desétudiants, de l'évaluation des enseignements, d'expériences pédagogiquesconcrètes au sein des facultés, de l'évaluation des programmes d'études,de l'aide psychopédagogique en 1ère année, de l'avis pédagogique sur lesenseignants, de l'audiovisuel comme instrument pédagogique. Un fichiercomprenant des initiatives pédagogiques dans toutes les discipUnes a éga¬

lement été largement diffusé. De multiples réunions ont été tenues avecdes enseignants et des étudiants.

Toutes ces initiatives ont, au cours des années, permis une lente matu¬ration des esprits, et une ouverture progressive aux problèmes pédago¬giques. Malheureusement c'étaient toujours les plus motivés qui se mon¬traient les plus assidus aux activités libres et attentifs aux documents.Comment agir sur ceux dont l'enseignement était le plus déficient et quise montraient rebeUes à toute sensibUisation ? Il faUait passer à de nou¬veUes modaUtés d'action.

Forte de son influence sur l'autorité académique, la Commission del'enseignement fit prendre une série de décisions pédagogiques par le

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ConseU académique ainsi que l'instauration de structures pédagogiquesfacultaires. Entre autres la création d'instances bipartites (enseignants-enseignes) compétentes en matière pédagogique au sein des facultés, etmême des « comités d'année » dans les deux premières années d'études.Ces structures qui avaient suscité, au départ, la méfiance chez certainsenseignants, se sont avérées à l'usage extrêmement fructueuses, et leséchanges francs entre étudiants et enseignants furent toujours trèsconstructifs.

Ces diverses actions de la Commission de l'enseignement se sont pour¬suivies, avec des succès variés et une audience progressivement crois¬sante, jusqu'à ce qu'un large consensus se développe au sein de l'univer¬sité, tant au niveau des autorités que des enseignants, pour la promotionde la fonction enseignante et le progrès de la pédagogie universitaire. Lestatut contractuel du personnel enseignant doit être amendé dès que desmesures notables l'affectent, et ce pour autant qu'une majorité du per¬sonnel l'accepte. C'est pourquoi il a fallu une lente maturation desesprits, pendant une douzaine d'années, pour que la Commission de l'en¬seignement puisse proposer des modifications d'ordre pédagogique austatut du personnel académique. Enfin, des critères pédagogiques, à côtédes critères scientifiques, furent retenus pour le recrutement et les car¬rières du personnel enseignant. L'évaluation de tous les enseignements dupremier cycle, par les étudiants, fut également rendue obUgatoire. Cetteopération affecte tous les enseignants, sans exception, qu'ils soient ounon motivés par la pédagogie.

R va de soi que l'évaluation des enseignements a été longuement pré¬parée par des études et par des expérimentations. De Landsheere (1976)distinguait déjà trois voies principales pour l'évaluation dans l'enseigne¬ment supérieur : auto évaluation, l'évaluation par les collègues, l'évalua¬tion par les étudiants. L'auto-évaluation devrait s'effectuer continueUe-ment, au moins de façon pragmatique, par tout enseignant doté deconscience professionneUe et soucieux d'efficacité ; il devrait, pour cefaire, bénéficier de documentation et d'éventuels conseils. L'évaluationpar les pairs s'effectue, habituellement, dans les structures facultaires etuniversitaires, soit occasionneUement, soit pour la prise de décision envue de l'attribution d'une charge d'enseignement ou en vue d'une pro¬motion. Encore faut-U que des critères précis et valables soient définis etqu'une vaUdité de jugement soit atteinte par la concordance de l'avis deplusieurs coUègues. L'évaluation par les étudiants pose encore plus deproblèmes. Il est évident que les étudiants ne possèdent nullement lacapacité d'évaluer un programme d'études ni même la pertinence desobjectifs d'un enseignement. Mais par ailleurs, si l'enseignement est

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ConseU académique ainsi que l'instauration de structures pédagogiquesfacultaires. Entre autres la création d'instances bipartites (enseignants-enseignes) compétentes en matière pédagogique au sein des facultés, etmême des « comités d'année » dans les deux premières années d'études.Ces structures qui avaient suscité, au départ, la méfiance chez certainsenseignants, se sont avérées à l'usage extrêmement fructueuses, et leséchanges francs entre étudiants et enseignants furent toujours trèsconstructifs.

Ces diverses actions de la Commission de l'enseignement se sont pour¬suivies, avec des succès variés et une audience progressivement crois¬sante, jusqu'à ce qu'un large consensus se développe au sein de l'univer¬sité, tant au niveau des autorités que des enseignants, pour la promotionde la fonction enseignante et le progrès de la pédagogie universitaire. Lestatut contractuel du personnel enseignant doit être amendé dès que desmesures notables l'affectent, et ce pour autant qu'une majorité du per¬sonnel l'accepte. C'est pourquoi il a fallu une lente maturation desesprits, pendant une douzaine d'années, pour que la Commission de l'en¬seignement puisse proposer des modifications d'ordre pédagogique austatut du personnel académique. Enfin, des critères pédagogiques, à côtédes critères scientifiques, furent retenus pour le recrutement et les car¬rières du personnel enseignant. L'évaluation de tous les enseignements dupremier cycle, par les étudiants, fut également rendue obUgatoire. Cetteopération affecte tous les enseignants, sans exception, qu'ils soient ounon motivés par la pédagogie.

R va de soi que l'évaluation des enseignements a été longuement pré¬parée par des études et par des expérimentations. De Landsheere (1976)distinguait déjà trois voies principales pour l'évaluation dans l'enseigne¬ment supérieur : auto évaluation, l'évaluation par les collègues, l'évalua¬tion par les étudiants. L'auto-évaluation devrait s'effectuer continueUe-ment, au moins de façon pragmatique, par tout enseignant doté deconscience professionneUe et soucieux d'efficacité ; il devrait, pour cefaire, bénéficier de documentation et d'éventuels conseils. L'évaluationpar les pairs s'effectue, habituellement, dans les structures facultaires etuniversitaires, soit occasionneUement, soit pour la prise de décision envue de l'attribution d'une charge d'enseignement ou en vue d'une pro¬motion. Encore faut-U que des critères précis et valables soient définis etqu'une vaUdité de jugement soit atteinte par la concordance de l'avis deplusieurs coUègues. L'évaluation par les étudiants pose encore plus deproblèmes. Il est évident que les étudiants ne possèdent nullement lacapacité d'évaluer un programme d'études ni même la pertinence desobjectifs d'un enseignement. Mais par ailleurs, si l'enseignement est

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centré sur l'étudiant, c'est celui-ci qui sera le récepteur du messageénoncé. H sera, comme un client, le mieux placé pour indiquer si le mes¬sage lui est bien parvenu. Ceci limite donc nettement, tout en le préci¬sant, la quaUté et la validité réelle que peut atteindre une évaluation parles étudiants. Il faut, par aUleurs, insister sur le fait, fondamental auplan psychologique, que les étudiants n'auront pas à évaluer la personnequi enseigne, mais bien l'activité d'enseignement teUe qu'ils la perçoi¬vent.

A l'université de Louvain plusieurs enseignants avaient spontanémenteu recours, pour leur information personnelle, à l'évaluation de leurcours par les étudiants. L'opération était également organisée régulière¬ment par les étudiants de la faculté polytechnique. Cela, sans problème.

Pour tenir compte du fait qu'U était encore prématuré de rendre obU¬

gatoire une formation pédagogique pour les enseignants universitaires, etque, d'autre part, les activités libres de formation pédagogiques étaientsurtout suivies par les meiUeurs enseignants, une autre voie fut suivie parla Commission de l'enseignement. Sur sa proposition, le Conseil acadé¬mique décida d'attribuer, dorénavant, les charges d'enseignement pourune période de six années, renouvelable.

L'attribution, ou le renouvellement de la charge dépend, notamment,du « dossier d'appréciation pédagogique » (DAP) du candidat ou del'enseignant ; un élément important de ce dossier est le résultat significa¬tif de l'évaluation des enseignements par les étudiants.

Les autorités de l'université ont décidé que l'évaluation des enseigne¬ments par les étudiants serait obligatoire pour tous les enseignants, aumoins tous les deux ans au 1er cycle, et recommandée au 2e cycle. Lequestionnaire normal comporte cinq rubriques : la matière enseignée, lesméthodes utUisées, le comportement de l'enseignant, l'évaluation des étu¬diants, la demande d'une évaluation plus détaillée pour cet enseigne¬ment. II est en effet prévu que lorsqu'un enseignement pose des pro¬blèmes pédagogiques particuliers, une évaluation plus détaUlée de cetenseignement sera décidée par l'autorité responsable.

Le Doyen de Faculté constituera et conservera pour chaque ensei¬gnant un dossier d'appréciation pédagogique (DAP), constitué des résul¬tats des évaluations des enseignements, des extraits des procès-verbauxdes réunions des structures bipartites compétentes au plan pédagogique,d'un avis sur le respect du cahier des charges de l'enseignement, deséventuelles remarques du Doyen, des réactions éventuelles de

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centré sur l'étudiant, c'est celui-ci qui sera le récepteur du messageénoncé. H sera, comme un client, le mieux placé pour indiquer si le mes¬sage lui est bien parvenu. Ceci limite donc nettement, tout en le préci¬sant, la quaUté et la validité réelle que peut atteindre une évaluation parles étudiants. Il faut, par aUleurs, insister sur le fait, fondamental auplan psychologique, que les étudiants n'auront pas à évaluer la personnequi enseigne, mais bien l'activité d'enseignement teUe qu'ils la perçoi¬vent.

A l'université de Louvain plusieurs enseignants avaient spontanémenteu recours, pour leur information personnelle, à l'évaluation de leurcours par les étudiants. L'opération était également organisée régulière¬ment par les étudiants de la faculté polytechnique. Cela, sans problème.

Pour tenir compte du fait qu'U était encore prématuré de rendre obU¬

gatoire une formation pédagogique pour les enseignants universitaires, etque, d'autre part, les activités libres de formation pédagogiques étaientsurtout suivies par les meiUeurs enseignants, une autre voie fut suivie parla Commission de l'enseignement. Sur sa proposition, le Conseil acadé¬mique décida d'attribuer, dorénavant, les charges d'enseignement pourune période de six années, renouvelable.

L'attribution, ou le renouvellement de la charge dépend, notamment,du « dossier d'appréciation pédagogique » (DAP) du candidat ou del'enseignant ; un élément important de ce dossier est le résultat significa¬tif de l'évaluation des enseignements par les étudiants.

Les autorités de l'université ont décidé que l'évaluation des enseigne¬ments par les étudiants serait obligatoire pour tous les enseignants, aumoins tous les deux ans au 1er cycle, et recommandée au 2e cycle. Lequestionnaire normal comporte cinq rubriques : la matière enseignée, lesméthodes utUisées, le comportement de l'enseignant, l'évaluation des étu¬diants, la demande d'une évaluation plus détaillée pour cet enseigne¬ment. II est en effet prévu que lorsqu'un enseignement pose des pro¬blèmes pédagogiques particuliers, une évaluation plus détaUlée de cetenseignement sera décidée par l'autorité responsable.

Le Doyen de Faculté constituera et conservera pour chaque ensei¬gnant un dossier d'appréciation pédagogique (DAP), constitué des résul¬tats des évaluations des enseignements, des extraits des procès-verbauxdes réunions des structures bipartites compétentes au plan pédagogique,d'un avis sur le respect du cahier des charges de l'enseignement, deséventuelles remarques du Doyen, des réactions éventuelles de

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l'enseignant concerné. Le Doyen informe la personne, dont l'enseigne¬ment a été évalué, des résultats. La confidentiaUté de ces résultats doitêtre sauvegardée. Lors de l'attribution d'une première charge d'ensei¬gnement, le dossier d'appréciation pédagogique, ou les formations et réa-Usations pédagogiques antérieures entrent en Ugne de compte.

Lorsque ces décisions ont été prises, un effet induit important s'estimmédiatement manifesté : nombre d'enseignants, auparavant peumotivé pour la quaUté de l'enseignement, se sont informés soigneusementdes cahiers des charges des enseignements, des objectifs à poursuivre, del'ensemble des contraintes à respecter dans leur enseignement.

D'autre part, une attribution des charges d'enseignement pour unepériode de six ans, renouvelable, permet à un enseignant, tout au long desa carrière, d'effectuer des tâches d'enseignement pour lesquelles il a leplus d'attrait et est le plus qualifié. En début de carrière, lorsqu'U estencore fortement immergé dans la recherche scientifique, il sera plusapte à enseigner en troisième et en second cycle ; plus tard, lorsque sonengagement dans la recherche sera moins absolu et que son expériencehumaine se sera enrichie, U pourra développer des aptitudes humanisteset pédagogiques plus en rapport avec un enseignement de premier cycle.L'expérience montre d'ailleurs que, souvent, lorsqu'un enseignant a desenfants ayant atteint l'âge universitaire, il s'ouvre plus facilement auxproblèmes caractéristiques de cet âge !

Enfin, U prévoit la nomination, dans le personnel enseignant, pour unterme de trois ans, non renouvelable, de personnes nommées à titred'invité, qui porteront le titre de professeur-adjoint ; leurs qualitésd'enseignants pourront ainsi être testées pendant cette période, avant unéventuel engagement définitif. U faut signaler, pour finir, qu'un groupede travaU présente à l'autorité de l'université un programme de forma¬tion pédagogique pour tous les nouveaux enseignants, comportant uneformation initiale courte (40 h.), suivie d'une formation continuée.

Telle est l'expérience vécue au sein d'une université pendant unepériode d'environ vingt années qui démontre que la promotion de lapédagogie universitaire au sein d'une institution d'enseignement supé¬rieur est une euvre de longue haleine, qui peut s'Ulustrer par le pro¬verbe chinois :

qui pense en semaines, plante de l'herbequi pense en années, plante des arbresqui pense en siècles êduque des hommes.

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l'enseignant concerné. Le Doyen informe la personne, dont l'enseigne¬ment a été évalué, des résultats. La confidentiaUté de ces résultats doitêtre sauvegardée. Lors de l'attribution d'une première charge d'ensei¬gnement, le dossier d'appréciation pédagogique, ou les formations et réa-Usations pédagogiques antérieures entrent en Ugne de compte.

Lorsque ces décisions ont été prises, un effet induit important s'estimmédiatement manifesté : nombre d'enseignants, auparavant peumotivé pour la quaUté de l'enseignement, se sont informés soigneusementdes cahiers des charges des enseignements, des objectifs à poursuivre, del'ensemble des contraintes à respecter dans leur enseignement.

D'autre part, une attribution des charges d'enseignement pour unepériode de six ans, renouvelable, permet à un enseignant, tout au long desa carrière, d'effectuer des tâches d'enseignement pour lesquelles il a leplus d'attrait et est le plus qualifié. En début de carrière, lorsqu'U estencore fortement immergé dans la recherche scientifique, il sera plusapte à enseigner en troisième et en second cycle ; plus tard, lorsque sonengagement dans la recherche sera moins absolu et que son expériencehumaine se sera enrichie, U pourra développer des aptitudes humanisteset pédagogiques plus en rapport avec un enseignement de premier cycle.L'expérience montre d'ailleurs que, souvent, lorsqu'un enseignant a desenfants ayant atteint l'âge universitaire, il s'ouvre plus facilement auxproblèmes caractéristiques de cet âge !

Enfin, U prévoit la nomination, dans le personnel enseignant, pour unterme de trois ans, non renouvelable, de personnes nommées à titred'invité, qui porteront le titre de professeur-adjoint ; leurs qualitésd'enseignants pourront ainsi être testées pendant cette période, avant unéventuel engagement définitif. U faut signaler, pour finir, qu'un groupede travaU présente à l'autorité de l'université un programme de forma¬tion pédagogique pour tous les nouveaux enseignants, comportant uneformation initiale courte (40 h.), suivie d'une formation continuée.

Telle est l'expérience vécue au sein d'une université pendant unepériode d'environ vingt années qui démontre que la promotion de lapédagogie universitaire au sein d'une institution d'enseignement supé¬rieur est une euvre de longue haleine, qui peut s'Ulustrer par le pro¬verbe chinois :

qui pense en semaines, plante de l'herbequi pense en années, plante des arbresqui pense en siècles êduque des hommes.

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À côté de cette étude de cas, U importe de signaler l'action importantequ'accompUssent, en faveur de la promotion de l'enseignement universi¬taire, des organismes comme l'ADMES (Association pour le Dévelop¬pement des Méthodes dans l'Enseignement Supérieur), EARDHE(European Association for Research and Development in Higher Educa¬tion), l'AIPU (Association Internationale de Pédagogie Universitaire)couvrant tout le monde francophone, l'UNESCO, dont la division« Enseignement Supérieur et Recherche » tente d'organiser des réseauxaméricains, africains et européens pour la promotion du personnel ensei¬gnant des universités, ainsi que l'ACCT (Agence de CoopérationCultureUe et Technique).

En conclusion, on peut se demander si, dans l'hypothèse où les uni¬versités actueUes sont, destinées à fournir une instruction pour mener àl'invention, leurs enseignants sont préparés à cette tâche.

Jusqu'U y a vingt-cinq ans, la possession de la connaissance et l'apti¬tude à la recherche conféraient automatiquement la capacité d'enseigner.On peut aujourd'hui en douter depuis que des critiques fondées et unesérieuse réflexion se sont largement exercées à propos des exigencespropres à la fonction enseignante à l'université.

Une recherche approfondie doit porter sur la définition des objectifsUés à une réelle formation universitaire, en complémentarité avec le restede l'enseignement supérieur. Une action doit ensuite être menée auxniveau des institutions et du personnel, pour faire en sorte que des activi¬tés pédagogiques, adaptées au pubUc estudiantin actuel, soient mises enuvre pour offrir une formation spécifique et de qualité.

Les efforts dans ce sens, entrepris dans différents pays, démontrentque cette poUtique universitaire exige une formation pédagogique appro¬priée pour les enseignants.

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À côté de cette étude de cas, U importe de signaler l'action importantequ'accompUssent, en faveur de la promotion de l'enseignement universi¬taire, des organismes comme l'ADMES (Association pour le Dévelop¬pement des Méthodes dans l'Enseignement Supérieur), EARDHE(European Association for Research and Development in Higher Educa¬tion), l'AIPU (Association Internationale de Pédagogie Universitaire)couvrant tout le monde francophone, l'UNESCO, dont la division« Enseignement Supérieur et Recherche » tente d'organiser des réseauxaméricains, africains et européens pour la promotion du personnel ensei¬gnant des universités, ainsi que l'ACCT (Agence de CoopérationCultureUe et Technique).

En conclusion, on peut se demander si, dans l'hypothèse où les uni¬versités actueUes sont, destinées à fournir une instruction pour mener àl'invention, leurs enseignants sont préparés à cette tâche.

Jusqu'U y a vingt-cinq ans, la possession de la connaissance et l'apti¬tude à la recherche conféraient automatiquement la capacité d'enseigner.On peut aujourd'hui en douter depuis que des critiques fondées et unesérieuse réflexion se sont largement exercées à propos des exigencespropres à la fonction enseignante à l'université.

Une recherche approfondie doit porter sur la définition des objectifsUés à une réelle formation universitaire, en complémentarité avec le restede l'enseignement supérieur. Une action doit ensuite être menée auxniveau des institutions et du personnel, pour faire en sorte que des activi¬tés pédagogiques, adaptées au pubUc estudiantin actuel, soient mises enuvre pour offrir une formation spécifique et de qualité.

Les efforts dans ce sens, entrepris dans différents pays, démontrentque cette poUtique universitaire exige une formation pédagogique appro¬priée pour les enseignants.

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RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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du supérieur. Pédagogiques, VIII, 2, pp. 365-376.

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Training Programs for Teaching Assistants. Innovative HigherEducation, 1 6, 1, pp. 79-89.

D3A DER THIAM (1986). Conférence inaugurale du coUoque de Dakarde l'Association Internationale de Pédagogie Universitaire. Dakar,pp. 11-17.

LALLEZ R. (1982). La formation des formateurs d'enseignants. Paris,UNESCO.

MAHJOUB A. (1987). Les finaUtés de l'enseignement supérieur ou lescontraintes du changement et du développement. Actes du séminairede Tunis de l'Association Internationale de Pédagogie Universitaire.Tunis, pp. 101-103.

88 Recherche et Formation

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

ALBERTINI J.-M. (1991). La pédagogie n'est plus ce qu'elle sera. Paris,Le Seuil/CNRS

ANDERSON L. V. (1986). La formation des Maîtres en fonction descompétences attendues. In « L'Art et la Science de l'enseignement »

Hommage à G. De Landsheere. Liège, Labor.COOMBS P. H. (1989). La crise mondiale de l'éducation. BruxeUes, De

Boeck Université.DALCEGGIO P. (1988). Une formation pédagogique pour les enseignants

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Training Programs for Teaching Assistants. Innovative HigherEducation, 1 6, 1, pp. 79-89.

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MAHJOUB A. (1987). Les finaUtés de l'enseignement supérieur ou lescontraintes du changement et du développement. Actes du séminairede Tunis de l'Association Internationale de Pédagogie Universitaire.Tunis, pp. 101-103.

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Etudes et recherches 89

MATHESON C. (1981). Staff development matters. Londres, CCTUT(Coordination Comitee for the Training of University Teachers).

MICHEL J. (1981). Les Grandes Écoles françaises et la Pédagogie.Pédagogiques 1, 3, pp. 33-37.

NDAYISABA J. (1989). Quelques difficultés inhérentes à la démarchepédagogique à l'université. Actes du séminaire de l'AssociationInternationale de Pédagogie Universitaire. Bujumbura, pp. 29-34.

OCDE (1987). Quel avenir pour les universités ? Paris, OCDE.

PLEVOETS M. (1986). La promotion de la pédagogie universitaire auZaïre. Pédagogiques, 6, 2, pp. 73-92.

RAKOBOLSKAYA I. (1986). Perfectionnement de la qualification desprofesseurs des écoles supérieures à l'université d'Etat de Moscou.Cahiers sur l'Enseignement supérieur. Paris, Unesco, pp. 87-148.

SERRES M. (1991). Le Tiers-Instruit. Paris, Bourin.TAHIRI CL. (1982). QueUe structure adéquate pour la pédagogie dans

les universités africaines. Pédagogiques, II, 3-4, pp. 19-28.

Etudes et recherches 89

MATHESON C. (1981). Staff development matters. Londres, CCTUT(Coordination Comitee for the Training of University Teachers).

MICHEL J. (1981). Les Grandes Écoles françaises et la Pédagogie.Pédagogiques 1, 3, pp. 33-37.

NDAYISABA J. (1989). Quelques difficultés inhérentes à la démarchepédagogique à l'université. Actes du séminaire de l'AssociationInternationale de Pédagogie Universitaire. Bujumbura, pp. 29-34.

OCDE (1987). Quel avenir pour les universités ? Paris, OCDE.

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RAKOBOLSKAYA I. (1986). Perfectionnement de la qualification desprofesseurs des écoles supérieures à l'université d'Etat de Moscou.Cahiers sur l'Enseignement supérieur. Paris, Unesco, pp. 87-148.

SERRES M. (1991). Le Tiers-Instruit. Paris, Bourin.TAHIRI CL. (1982). QueUe structure adéquate pour la pédagogie dans

les universités africaines. Pédagogiques, II, 3-4, pp. 19-28.

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Études et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

91

LA FORMATION DES ENSEIGNANTSDU SUPÉRIEUR À LA DIDACTIQUE :

informations sur des actions en Europe

Dr Brigitte BERENDT*

Sommaire. La mutation des tâches affectées à l'Université et l'évolution du rôle du professeur ontentraîné dans de nombreux pays européens une réflexion sur la nécessité d'améliorer l'effi¬cacité de l'enseignement.Cet article donne des informations sur les programmes de formation à la didactique initiésdans un certain nombre de pays européens ou suscité par des associations internationales.Il indique les facteurs qui pourraient favoriser l'introduction de ces programmes.

Summary. The transformation of the tasks assigned to the University and the evolution of theprofessors' role have led in many European countries to a reflection on the need to improve

teaching efficiency.This article gives information on the training to didactics programs initiated in a fewEuropean countries or induced by international organizations. The factors which might favourthe introduction of these programs are pointed out.

Dans le débat actuel sur l'efficacité des Universités, dans le domainede l'enseignement, l'évaluation est à l'ordre du jour mais il est clairqu'elle n'a de sens que si elle conduit à des améliorations et ces améUora-tions passent, notamment, par le développement de la didactique del'Enseignement Supérieur (1).

C'est ainsi que des programmes de formation du personnel de l'ensei¬gnement supérieur ont été initiés depuis 1965 et ont donné lieu à uneimportante coopération internationale.

Nous allons, ci-après, donner un aperçu de ces programmes et despoUtiques qui les sous-tendent.

* Président de l'EARDHE (European Association for Research and Development inHigher Education).

(1) Didactique, en Allemand, a un sens très large : il signifie à la fois ce que nousmettons sous didactique et ce que nous mettons sous pédagogie (Note du traducteur).

Études et recherches

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

91

LA FORMATION DES ENSEIGNANTSDU SUPÉRIEUR À LA DIDACTIQUE :

informations sur des actions en Europe

Dr Brigitte BERENDT*

Sommaire. La mutation des tâches affectées à l'Université et l'évolution du rôle du professeur ontentraîné dans de nombreux pays européens une réflexion sur la nécessité d'améliorer l'effi¬cacité de l'enseignement.Cet article donne des informations sur les programmes de formation à la didactique initiésdans un certain nombre de pays européens ou suscité par des associations internationales.Il indique les facteurs qui pourraient favoriser l'introduction de ces programmes.

Summary. The transformation of the tasks assigned to the University and the evolution of theprofessors' role have led in many European countries to a reflection on the need to improve

teaching efficiency.This article gives information on the training to didactics programs initiated in a fewEuropean countries or induced by international organizations. The factors which might favourthe introduction of these programs are pointed out.

Dans le débat actuel sur l'efficacité des Universités, dans le domainede l'enseignement, l'évaluation est à l'ordre du jour mais il est clairqu'elle n'a de sens que si elle conduit à des améliorations et ces améUora-tions passent, notamment, par le développement de la didactique del'Enseignement Supérieur (1).

C'est ainsi que des programmes de formation du personnel de l'ensei¬gnement supérieur ont été initiés depuis 1965 et ont donné lieu à uneimportante coopération internationale.

Nous allons, ci-après, donner un aperçu de ces programmes et despoUtiques qui les sous-tendent.

* Président de l'EARDHE (European Association for Research and Development inHigher Education).

(1) Didactique, en Allemand, a un sens très large : il signifie à la fois ce que nousmettons sous didactique et ce que nous mettons sous pédagogie (Note du traducteur).

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92 Recherche et Formation

1. FORMER À LA DIDACTIQUE POUR AMÉLIORERLA QUALITÉ DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Depuis 1965, en Europe Occidentale, l'améUoration de la quaUté del'enseignement supérieur est un thème privilégié dans les discussionsconcernant les réformes de l'enseignement supérieur.

L'EARDHE et des associations nationales, comme l'AHD ou la SRHE(2), se sont intéressées aux différents aspects de ce problème et ont effec¬tué de nombreuses pubUcations. Par exemple, de 1969 à 1991, l'associa¬tion allemande a pubUé 160 volumes et une revue trimestrieUe. La raisonde cet intérêt est à chercher dans la mutation des tâches des Universités :

au lieu de former une éUte U s'agit de donner à la masse une formationqui prépare à une activité professionneUe.

En Allemagne, cette finaUté figure, en RFA, dans les lois des années70 qui régissent l'enseignement supérieur : le professeur n'est plus exclu¬sivement un chercheur qui fait participer les étudiants à la recherche demanière responsable et autonome, mais aussi un « professeur d'univer¬sité » hé à un programme d'études et au système des examens.

L'Association fédérale pour la didactique de l'Enseignement supé¬rieur, fondée en RFA en 1968, mentionne, dans le mémorandum deBielefeld (novembre 1990) sur l'améUoration de l'enseignement dans lesétabUssements d'enseignement supérieur, la participation à la formationen didactique en tant que mesure à prendre sur le plan individuel.L'État, quant à lui, recommande de reconnaître comme un investisse¬ment personnel la participation à une formation en didactique (AHD1990). Pendant PhabiUtation, la coUaboration scientifique à une forma¬tion de didactique est exigée.

Les ministres de quelques États fédéraux tels que le Nord de laRhénanie-WestphaUe, le Bade-Wurtemberg en 1991, ont tenu compte dumémorandum de Bielefeld dans leurs recommandations.

Dans une des dernières pubUcations du Ministère fédéral de la For¬mation et de la Science, une étude de V. Queis sur la promotion d'unenseignement d'excellence, recommande « d'inciter (à l'exemple d'uni¬versités étrangères), les candidats à l'Habilitation à acquérir une qualifi¬cation pédagogique » (RMBW 1991).

(2) AHD : Arbeitsgemeinschaft fur Hochschuldidaktik. SRHE : Society Resarch anddevelopment in Higher Education.

92 Recherche et Formation

1. FORMER À LA DIDACTIQUE POUR AMÉLIORERLA QUALITÉ DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Depuis 1965, en Europe Occidentale, l'améUoration de la quaUté del'enseignement supérieur est un thème privilégié dans les discussionsconcernant les réformes de l'enseignement supérieur.

L'EARDHE et des associations nationales, comme l'AHD ou la SRHE(2), se sont intéressées aux différents aspects de ce problème et ont effec¬tué de nombreuses pubUcations. Par exemple, de 1969 à 1991, l'associa¬tion allemande a pubUé 160 volumes et une revue trimestrieUe. La raisonde cet intérêt est à chercher dans la mutation des tâches des Universités :

au lieu de former une éUte U s'agit de donner à la masse une formationqui prépare à une activité professionneUe.

En Allemagne, cette finaUté figure, en RFA, dans les lois des années70 qui régissent l'enseignement supérieur : le professeur n'est plus exclu¬sivement un chercheur qui fait participer les étudiants à la recherche demanière responsable et autonome, mais aussi un « professeur d'univer¬sité » hé à un programme d'études et au système des examens.

L'Association fédérale pour la didactique de l'Enseignement supé¬rieur, fondée en RFA en 1968, mentionne, dans le mémorandum deBielefeld (novembre 1990) sur l'améUoration de l'enseignement dans lesétabUssements d'enseignement supérieur, la participation à la formationen didactique en tant que mesure à prendre sur le plan individuel.L'État, quant à lui, recommande de reconnaître comme un investisse¬ment personnel la participation à une formation en didactique (AHD1990). Pendant PhabiUtation, la coUaboration scientifique à une forma¬tion de didactique est exigée.

Les ministres de quelques États fédéraux tels que le Nord de laRhénanie-WestphaUe, le Bade-Wurtemberg en 1991, ont tenu compte dumémorandum de Bielefeld dans leurs recommandations.

Dans une des dernières pubUcations du Ministère fédéral de la For¬mation et de la Science, une étude de V. Queis sur la promotion d'unenseignement d'excellence, recommande « d'inciter (à l'exemple d'uni¬versités étrangères), les candidats à l'Habilitation à acquérir une qualifi¬cation pédagogique » (RMBW 1991).

(2) AHD : Arbeitsgemeinschaft fur Hochschuldidaktik. SRHE : Society Resarch anddevelopment in Higher Education.

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Etudes et recherches 93

En Grande-Bretagne, l'ouvrage de Cave et al. (1989) montre que lerecours systématique à la didactique est considéré comme un moyen demaintenir l'enseignement à un niveau élevé.

Le « code of practice » du CVCP (3) (1981), donne des directivesconcrètes aux universités qui n'ont encore aucune formation en didac¬tique de l'enseignement supérieur ; notamment U donne des indicationssur le contenu, les méthodes et l'organisation de ce genre de formation etapporte des exemples de cours.

D'après le rapport Brown (1989), les universités et les grands coUègessont en train d'appliquer ces dispositions.

2. LA COOPERATION INTERNATIONALE

EUe est le fait d'associations et d'organismes internationaux. Citonsquelques exemples.

L'Association européenne pour la recherche et le développement dansl'enseignement supérieur (EARDHE) a mis, lors de sa 6e conférence enoctobre 1990, l'accent sur la formation didactique, à partir de l'exempledes réseaux existants en Europe et en Afrique (Berendt, Stary, 1991). Laconférence a eu des prolongements et on peut indiquer, notamment, undébut de mise en place d'une formation en didactique, dans le cadre d'unprogramme Tempus), dans les universités de Budapest, Llublyana etRijelka avec la coopération du Staff development unit of CVCP et desuniversités de Barcelone, Louvain la Neuve et de l'université Ubre deBerlin.

La Communauté européenne a favorisé des échanges entre les univer¬sités d'Aix la ChapeUe, BerUn, Copenhague, Londres et Utrecht dans lecadre d'un projet portant sur « la mobilité des enseignants » (1978-81).De là sont nés, à l'initiative de D.W. Piper, les « Ateliers européens pourla formation du corps enseignant dans l'enseignement supérieur » quiorganisent tous les deux ans des séminaires de formation en didactiquepour les formateurs.

(3) CVCP : Comitter of Vice Chancellors and Principals.

Etudes et recherches 93

En Grande-Bretagne, l'ouvrage de Cave et al. (1989) montre que lerecours systématique à la didactique est considéré comme un moyen demaintenir l'enseignement à un niveau élevé.

Le « code of practice » du CVCP (3) (1981), donne des directivesconcrètes aux universités qui n'ont encore aucune formation en didac¬tique de l'enseignement supérieur ; notamment U donne des indicationssur le contenu, les méthodes et l'organisation de ce genre de formation etapporte des exemples de cours.

D'après le rapport Brown (1989), les universités et les grands coUègessont en train d'appliquer ces dispositions.

2. LA COOPERATION INTERNATIONALE

EUe est le fait d'associations et d'organismes internationaux. Citonsquelques exemples.

L'Association européenne pour la recherche et le développement dansl'enseignement supérieur (EARDHE) a mis, lors de sa 6e conférence enoctobre 1990, l'accent sur la formation didactique, à partir de l'exempledes réseaux existants en Europe et en Afrique (Berendt, Stary, 1991). Laconférence a eu des prolongements et on peut indiquer, notamment, undébut de mise en place d'une formation en didactique, dans le cadre d'unprogramme Tempus), dans les universités de Budapest, Llublyana etRijelka avec la coopération du Staff development unit of CVCP et desuniversités de Barcelone, Louvain la Neuve et de l'université Ubre deBerlin.

La Communauté européenne a favorisé des échanges entre les univer¬sités d'Aix la ChapeUe, BerUn, Copenhague, Londres et Utrecht dans lecadre d'un projet portant sur « la mobilité des enseignants » (1978-81).De là sont nés, à l'initiative de D.W. Piper, les « Ateliers européens pourla formation du corps enseignant dans l'enseignement supérieur » quiorganisent tous les deux ans des séminaires de formation en didactiquepour les formateurs.

(3) CVCP : Comitter of Vice Chancellors and Principals.

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94 Recherche et Formation

L'UNESCO a lancé à Prague, en 1985, le réseau européen pour la for¬mation du personnel de l'Enseignement supérieur. Tous les deux ans, unséminaire est organisé qui permet aux coordonnateurs nationaux, dési¬gnés par les Etats membres, de se rencontrer (Unesco, Prague 1985,Aveiro 1987, Bucarest, 1989, Paris 1991) (4).

3. QUELQUES PROGRAMMES EN DIDACTIQUEDE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUREN EUROPE OCCIDENTALE

Les programmes de formation en didactique de l'enseignement supé¬rieur se sont développés de façon indépendante les uns des autres enRFA, en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas et ici ou là en Autriche, enSuisse et dans les Pays Scandinaves (5), souvent à l'initiative d'institu¬tions en didactique.

Une coordination nationale existe en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas depuis la fin des années 70. En RFA, un réseau national s'est mis enplace, avec les encouragements du Ministère de l'Éducation et de laScience en 1983.

Les cours et les ateliers sont proposés par discipline ou en groupesinterdiscipUnaires ; Us durent de une demi-journée à quatre jours.

Objectifs

- Dans le domaine cognitif, acquérir des connaissances sur le proces¬sus d'apprentissage, sur l'interdépendance entre objectifs, contenus,méthodes et évaluation et sur les moyens d'améUorer le processus ensei¬gner/apprendre.

Dans le domaine affectif, adopter une attitude positive à l'égard desétudiants et des partenaires du processus enseigner/apprendre, se moti¬ver à appUquer ses connaissances à sa pratique.

(4) Le dernier atelier du réseau s'est tenu à Paris et a été couplé avec le colloque del'ADMES sur l'efficacité pédagogique dans l'enseignement supérieur (nov. 1991, compterendu dans les cahiers de l'ADMES n° 6) (N du T).

(5) En ce qui concerne la France voir ci-dessus pages 47 à 62 « le monitorat d'initiationà l'enseignement supérieur une institution paradoxale » de R. Simonet el pour l'Amériquedu Nord « Quels enseignants pour une université en mutation ? » de J. Demal pages 75 à 92.(N. du T.)

94 Recherche et Formation

L'UNESCO a lancé à Prague, en 1985, le réseau européen pour la for¬mation du personnel de l'Enseignement supérieur. Tous les deux ans, unséminaire est organisé qui permet aux coordonnateurs nationaux, dési¬gnés par les Etats membres, de se rencontrer (Unesco, Prague 1985,Aveiro 1987, Bucarest, 1989, Paris 1991) (4).

3. QUELQUES PROGRAMMES EN DIDACTIQUEDE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUREN EUROPE OCCIDENTALE

Les programmes de formation en didactique de l'enseignement supé¬rieur se sont développés de façon indépendante les uns des autres enRFA, en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas et ici ou là en Autriche, enSuisse et dans les Pays Scandinaves (5), souvent à l'initiative d'institu¬tions en didactique.

Une coordination nationale existe en Grande-Bretagne et aux Pays-Bas depuis la fin des années 70. En RFA, un réseau national s'est mis enplace, avec les encouragements du Ministère de l'Éducation et de laScience en 1983.

Les cours et les ateliers sont proposés par discipline ou en groupesinterdiscipUnaires ; Us durent de une demi-journée à quatre jours.

Objectifs

- Dans le domaine cognitif, acquérir des connaissances sur le proces¬sus d'apprentissage, sur l'interdépendance entre objectifs, contenus,méthodes et évaluation et sur les moyens d'améUorer le processus ensei¬gner/apprendre.

Dans le domaine affectif, adopter une attitude positive à l'égard desétudiants et des partenaires du processus enseigner/apprendre, se moti¬ver à appUquer ses connaissances à sa pratique.

(4) Le dernier atelier du réseau s'est tenu à Paris et a été couplé avec le colloque del'ADMES sur l'efficacité pédagogique dans l'enseignement supérieur (nov. 1991, compterendu dans les cahiers de l'ADMES n° 6) (N du T).

(5) En ce qui concerne la France voir ci-dessus pages 47 à 62 « le monitorat d'initiationà l'enseignement supérieur une institution paradoxale » de R. Simonet el pour l'Amériquedu Nord « Quels enseignants pour une université en mutation ? » de J. Demal pages 75 à 92.(N. du T.)

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Études et recherches 95

Dans le domaine des savoir-faire, acquérir des habiletés (skUls)pour appliquer des méthodes diverses, être capable d'examiner demanière critique son propre comportement.

Thèmes

Nous pouvons citer, par exemple, les sujets réunis dans le programmecommun du réseau national qui regroupe en Allemagne seize organisa¬tions.

Ils sont répartis en trois rubriques : organisation de l'enseignement,communication et rôle des professeurs d'université.

Le premier ensemble comporte tout ce qui concerne la planification etl'organisation des unités d'enseignement, la mise en place de situationsd'apprentissage telles que le travaU en petits groupes ou l'apprentissageautonome, l'évaluation des enseignements et la participation des étu¬diants à l'organisation, la planification et l'évaluation de l'enseignement.

Les cours et ateUers sur la communication concernent des méthodesd'exposés, d'argumentation, un entraînement à la conduite d'entretiensavec les étudiants et tout particulièrement avec des étudiants en diffi¬culté, des discussions de cas...

Le troisième ensemble aborde les missions des enseignants du supé¬rieur, la difficulté de conciUer la rigueur scientifique, les tâches d'ensei¬gnement et les intérêts de carrière...

Cette formation à la didactique prend, en général, la forme d'ateliersoù se combinent diverses situations d'enseignement : discussions sur lespratiques, en vue de faire surgir les problèmes essentiels, apports d'in¬formation, préparation en groupe d'une unité d'enseignement, évalua¬tion en groupe des travaux. . .

Études et recherches 95

Dans le domaine des savoir-faire, acquérir des habiletés (skUls)pour appliquer des méthodes diverses, être capable d'examiner demanière critique son propre comportement.

Thèmes

Nous pouvons citer, par exemple, les sujets réunis dans le programmecommun du réseau national qui regroupe en Allemagne seize organisa¬tions.

Ils sont répartis en trois rubriques : organisation de l'enseignement,communication et rôle des professeurs d'université.

Le premier ensemble comporte tout ce qui concerne la planification etl'organisation des unités d'enseignement, la mise en place de situationsd'apprentissage telles que le travaU en petits groupes ou l'apprentissageautonome, l'évaluation des enseignements et la participation des étu¬diants à l'organisation, la planification et l'évaluation de l'enseignement.

Les cours et ateUers sur la communication concernent des méthodesd'exposés, d'argumentation, un entraînement à la conduite d'entretiensavec les étudiants et tout particulièrement avec des étudiants en diffi¬culté, des discussions de cas...

Le troisième ensemble aborde les missions des enseignants du supé¬rieur, la difficulté de conciUer la rigueur scientifique, les tâches d'ensei¬gnement et les intérêts de carrière...

Cette formation à la didactique prend, en général, la forme d'ateliersoù se combinent diverses situations d'enseignement : discussions sur lespratiques, en vue de faire surgir les problèmes essentiels, apports d'in¬formation, préparation en groupe d'une unité d'enseignement, évalua¬tion en groupe des travaux. . .

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I. rPlanification - Organisation -Evaluation de l'Enseignement

Supérieur

1. Préparation didactique d'une unitéd'enseignement

2. Formes d'organisation de l'enseigne¬ment (insister sur la transmission del'information, les conversationsconcernant l'enseignement -motivation pour élaborer des textes)

3. Manifestation de réels problèmes etéléments de solutions.

4. Méthodes de travail en petits groupes5. Aide à l'apprentissage autonome des

étudiants (stratégie d'étude ettechnique de travail)

6. Concepts et formes d'élaborationd'étude de la pratique scolaire dansla formation continue des maîtres.

7. Formes d'évaluation et de critiquede l'enseignement.

8. Evaluation des cours comme base dela planification commune del'enseignement supérieur par lesenseignants et les enseignés.

9. Le « prise en compte du futur »

et la participation des étudiantsà la planification, l'organisationet l'évaluation de l'enseignement

rV. Didactique à l'institut technique supérieur(Fachhochschule)

II. Communication (coopérationdans l'enseignement supérieur)

1. Amélioration et plus grande efficacitédu comportement lors del'enseignement et lors des examens

2. Rhétorique 1 retour concernant lesingénieurs et les naturalistes.

3. Rhétorique 2Méthodes d'argumentation et demémoire pour les ingénieurs et lesnaturalistes

4. Entretien avec les étudiants etguidage (conseil)

5. Conduite d'entretien avec des« Etudiants à problèmes »

6. Situations susceptibles de susciter desproblèmes lors des enseignements etpossibilité de solution (groupe quiveut se centrer sur les discussions decas).

III. Rôle - Profession - Statutdes professeurs d'Université

1. Le rôle des enseignants du supérieurtiraillés entre la rigueur scientifique,les tâches d'enseignement et lesintérêts personnels

2. Influences du devenir et de ladiscipline sur l'enseignant dusupérieur lui-même et sur sonenseignement

3. Situations de conflit dans lequotidien et solutions possibles.

Formation de base en didactique des(Tutoren)

Tuteurs ;

saaosrmiosrn

3a.o13

I. rPlanification - Organisation -Evaluation de l'Enseignement

Supérieur

1. Préparation didactique d'une unitéd'enseignement

2. Formes d'organisation de l'enseigne¬ment (insister sur la transmission del'information, les conversationsconcernant l'enseignement -motivation pour élaborer des textes)

3. Manifestation de réels problèmes etéléments de solutions.

4. Méthodes de travail en petits groupes5. Aide à l'apprentissage autonome des

étudiants (stratégie d'étude ettechnique de travail)

6. Concepts et formes d'élaborationd'étude de la pratique scolaire dansla formation continue des maîtres.

7. Formes d'évaluation et de critiquede l'enseignement.

8. Evaluation des cours comme base dela planification commune del'enseignement supérieur par lesenseignants et les enseignés.

9. Le « prise en compte du futur »

et la participation des étudiantsà la planification, l'organisationet l'évaluation de l'enseignement

rV. Didactique à l'institut technique supérieur(Fachhochschule)

II. Communication (coopérationdans l'enseignement supérieur)

1. Amélioration et plus grande efficacitédu comportement lors del'enseignement et lors des examens

2. Rhétorique 1 retour concernant lesingénieurs et les naturalistes.

3. Rhétorique 2Méthodes d'argumentation et demémoire pour les ingénieurs et lesnaturalistes

4. Entretien avec les étudiants etguidage (conseil)

5. Conduite d'entretien avec des« Etudiants à problèmes »

6. Situations susceptibles de susciter desproblèmes lors des enseignements etpossibilité de solution (groupe quiveut se centrer sur les discussions decas).

III. Rôle - Profession - Statutdes professeurs d'Université

1. Le rôle des enseignants du supérieurtiraillés entre la rigueur scientifique,les tâches d'enseignement et lesintérêts personnels

2. Influences du devenir et de ladiscipline sur l'enseignant dusupérieur lui-même et sur sonenseignement

3. Situations de conflit dans lequotidien et solutions possibles.

Formation de base en didactique des(Tutoren)

Tuteurs ;

saaosrmiosrn

3a.o13

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Études et recherches 97

Un modèle en a été développé par l'auteur à l'Université libre deBerlin (Berendt 1980).

y

//s

Pratiqueenseignantedespai-ticipants

Enseignement deappliqué à

I. Phase initiale

1 '

II. PhaseA d'information"

didactique de l'ESla discipline

V. Phase de transfert

trV. Phase

d'évaluation

tIII. Phase

d'application del'information

Pratiqueenseignantedesparticipants

VI. Phase d'expérimentationdans la pratique des participants

VII. Phase de recombinaison (pour une nouvelle élaboration)

La phase initiale est fondée sur l'analyse de la pratique des partici¬pants, la phase II consiste en un apport d'information, au cours de laphase III, on applique l'information, le travail est évalué pendant laphase IV, la phase V est une phase de transfert suivie d'une phased'expérimentation dans la pratique des participants (phase VI) et d'unephase de recombinaison en vue d'une nouvelle élaboration (phase VU).

Il existe d'autres dispositifs qui associent les enseignements en didac¬tique à d'autres activités teUes que le conseU aux enseignants, l'élabora¬tion de matériel pour le travaU autonome, l'évaluation des cours en sui¬vant diverses méthodes...

4. POUR FAVORISER L'INTRODUCTION DE PROGRAMMESDE DIDACTIQUE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

En Europe occidentale, contrairement aux pratiques en vigueur enEurope de l'Est, la participation des enseignants aux programmes de for¬mation en didactique repose sur le volontariat. Elle n'apporte aucunavantage ni lors du dépôt des candidatures, ni lors d'une nomination oud'une promotion ; elle n'est prise en compte ni dans le calcul des primes

Études et recherches 97

Un modèle en a été développé par l'auteur à l'Université libre deBerlin (Berendt 1980).

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Pratiqueenseignantedespai-ticipants

Enseignement deappliqué à

I. Phase initiale

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V. Phase de transfert

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d'évaluation

tIII. Phase

d'application del'information

Pratiqueenseignantedesparticipants

VI. Phase d'expérimentationdans la pratique des participants

VII. Phase de recombinaison (pour une nouvelle élaboration)

La phase initiale est fondée sur l'analyse de la pratique des partici¬pants, la phase II consiste en un apport d'information, au cours de laphase III, on applique l'information, le travail est évalué pendant laphase IV, la phase V est une phase de transfert suivie d'une phased'expérimentation dans la pratique des participants (phase VI) et d'unephase de recombinaison en vue d'une nouvelle élaboration (phase VU).

Il existe d'autres dispositifs qui associent les enseignements en didac¬tique à d'autres activités teUes que le conseU aux enseignants, l'élabora¬tion de matériel pour le travaU autonome, l'évaluation des cours en sui¬vant diverses méthodes...

4. POUR FAVORISER L'INTRODUCTION DE PROGRAMMESDE DIDACTIQUE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

En Europe occidentale, contrairement aux pratiques en vigueur enEurope de l'Est, la participation des enseignants aux programmes de for¬mation en didactique repose sur le volontariat. Elle n'apporte aucunavantage ni lors du dépôt des candidatures, ni lors d'une nomination oud'une promotion ; elle n'est prise en compte ni dans le calcul des primes

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98 Recherche et Formation

ni dans les diverses obhgations des enseignants. C'est dire l'importancede la motivation des enseignants du supérieur pour la participation à detels programmes ; c'est pourquoi les solutions adoptées doivent être fon¬dées sur une analyse de la situation, correspondre aux besoins de chaqueinstitution et des enseignants qui y travaUIent et présenter un certainnombre de caractéristiques qu'ont mis en évidence les expériences réaU¬sées en Europe Occidentale et en Afrique Noire.

Leur donner un ancrage universitaire

Pour que les enseignants du Supérieur soient motivés à participer àdes formations en didactique, il convient que ces programmes soientscientifiquement légitimés ; Us doivent répondre aux mêmes exigences dequaUté que n'importe quel autre enseignement universitaire et être por¬tés par des institutions spécialisées constituant des unités autonomesdans une faculté ou un département, ce qui signifie un équipement debase en personnel et en matériel pour la formation, la recherche et leconseU.

Adapter les projets aux besoins

Les offres de formation en didactique doivent correspondre auxbesoins individuels de qualification des enseignants du supérieur et detous les participants. Ces offres ne peuvent prescrire une suite détermi¬née de situations obligatoires mais doivent être organisées comme descurricula ouverts selon le principe du jeu de construction dont le profes¬seur choisit lui-même les pierres. C'est bien ce que montrent les expé¬riences des universités de BerUn (FU) et de Bochum, ainsi que les curri¬cula développés de manière pragmatique aussi bien en Grande-Bretagnequ'en Suisse ou aux Pays-Bas.

Disposer de formateurs en didactique, compétents

L'expérience montre que lorsque les formateurs possèdent, outre uneformation en Sciences de l'Education et en psychologie, une formationdans une autre discipline, Us sont mieux acceptés et plus à même d'amor¬cer une didactique des disciplines. S'ils ont seulement une formationdans une discipline, un complément d'études supérieures en didactiqueleur permet d'acquérir la compétence nécessaire (6). De même est très

(6) Il existe des diplômes en didactique de l'enseignement supérieur dans lesuniversités de Londres, Manchester et du Surrey. A l'université de Klagenfurt, on peutchoisir en dominante « formation à l'enseignement supérieur » dans le cadre des étudespour le diplôme de Pédagogie.

98 Recherche et Formation

ni dans les diverses obhgations des enseignants. C'est dire l'importancede la motivation des enseignants du supérieur pour la participation à detels programmes ; c'est pourquoi les solutions adoptées doivent être fon¬dées sur une analyse de la situation, correspondre aux besoins de chaqueinstitution et des enseignants qui y travaUIent et présenter un certainnombre de caractéristiques qu'ont mis en évidence les expériences réaU¬sées en Europe Occidentale et en Afrique Noire.

Leur donner un ancrage universitaire

Pour que les enseignants du Supérieur soient motivés à participer àdes formations en didactique, il convient que ces programmes soientscientifiquement légitimés ; Us doivent répondre aux mêmes exigences dequaUté que n'importe quel autre enseignement universitaire et être por¬tés par des institutions spécialisées constituant des unités autonomesdans une faculté ou un département, ce qui signifie un équipement debase en personnel et en matériel pour la formation, la recherche et leconseU.

Adapter les projets aux besoins

Les offres de formation en didactique doivent correspondre auxbesoins individuels de qualification des enseignants du supérieur et detous les participants. Ces offres ne peuvent prescrire une suite détermi¬née de situations obligatoires mais doivent être organisées comme descurricula ouverts selon le principe du jeu de construction dont le profes¬seur choisit lui-même les pierres. C'est bien ce que montrent les expé¬riences des universités de BerUn (FU) et de Bochum, ainsi que les curri¬cula développés de manière pragmatique aussi bien en Grande-Bretagnequ'en Suisse ou aux Pays-Bas.

Disposer de formateurs en didactique, compétents

L'expérience montre que lorsque les formateurs possèdent, outre uneformation en Sciences de l'Education et en psychologie, une formationdans une autre discipline, Us sont mieux acceptés et plus à même d'amor¬cer une didactique des disciplines. S'ils ont seulement une formationdans une discipline, un complément d'études supérieures en didactiqueleur permet d'acquérir la compétence nécessaire (6). De même est très

(6) Il existe des diplômes en didactique de l'enseignement supérieur dans lesuniversités de Londres, Manchester et du Surrey. A l'université de Klagenfurt, on peutchoisir en dominante « formation à l'enseignement supérieur » dans le cadre des étudespour le diplôme de Pédagogie.

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Études et recherches 99

souhaitable une formation de base en communication interpersonneUe eten dynamique de groupe.

Le plus important sans doute est que le formateur agisse comme ilrecommande de le faire et conduise des recherches scientifiques dans sondomaine.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

AHD (1990). (Arbeitsgemeinschaft fur Hochschulohdactik) : BielefelderMemorandum zur Starkung der Lehre an den Hochschulen. In :

Mitteilungdes Hochschulverbandes, Heft 6.

BERENDT, B. (1980). Hochsduldidaktische Fortbildung der Lehrendenim Baukastensystem-Veranstaltungsmodelle, Strukturelemente.Arbeitsgemeinschaft fur Hochschuldidaktik, HochschuldidaktischeMaterialen 78. Hamburg.

BERENDT, B. (1989). Staff Development in the federal Republic ofGermany. A survey prepared for the UNESCO-Project "Esta¬blishment of an European Network Staff Development in HigherEducation », Berlin.

BERENDT, B. STARY, J. (Hg) (1991). Advanced Study Programmes forKey Persons and Cross-cultural Dialogue : Proceedings of the 6thEARDHE Conference, Frankfurt/Main, Bern, New York, Paris,Peter Lang.

BLIGH, D.A. (1991). What's the use of lectures? Harmondworth,Middlesex, Penguin.

BMBW (Hrsg.) (1991). Zum Stellenwert von Hochschullehrer 4/91 v.Queis, D. Eine Untersuchung zur Fôrderung excellenterLehrleistungen am Beispiel auslandischer Universitàten, Bonn.

BROWN, G.A. (1989). The CVCP Code of Practice on Academic StaffTraining. The responses of the universities. A report submitted to theCommittee of Vice-ChanceUors and Principals. Sheffield, Routledge.

BROWN, G.A., ATKINS, M. (1990). Effective Teaching in HigherEducation, London, SRHE and Open University.

CAVE, M., HANNEY, N., KOGAN, M., TREVETT, G., (1989). The Useof Performance Indicators in Higher Education. London, JessicaKingsley.

Études et recherches 99

souhaitable une formation de base en communication interpersonneUe eten dynamique de groupe.

Le plus important sans doute est que le formateur agisse comme ilrecommande de le faire et conduise des recherches scientifiques dans sondomaine.

REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

AHD (1990). (Arbeitsgemeinschaft fur Hochschulohdactik) : BielefelderMemorandum zur Starkung der Lehre an den Hochschulen. In :

Mitteilungdes Hochschulverbandes, Heft 6.

BERENDT, B. (1980). Hochsduldidaktische Fortbildung der Lehrendenim Baukastensystem-Veranstaltungsmodelle, Strukturelemente.Arbeitsgemeinschaft fur Hochschuldidaktik, HochschuldidaktischeMaterialen 78. Hamburg.

BERENDT, B. (1989). Staff Development in the federal Republic ofGermany. A survey prepared for the UNESCO-Project "Esta¬blishment of an European Network Staff Development in HigherEducation », Berlin.

BERENDT, B. STARY, J. (Hg) (1991). Advanced Study Programmes forKey Persons and Cross-cultural Dialogue : Proceedings of the 6thEARDHE Conference, Frankfurt/Main, Bern, New York, Paris,Peter Lang.

BLIGH, D.A. (1991). What's the use of lectures? Harmondworth,Middlesex, Penguin.

BMBW (Hrsg.) (1991). Zum Stellenwert von Hochschullehrer 4/91 v.Queis, D. Eine Untersuchung zur Fôrderung excellenterLehrleistungen am Beispiel auslandischer Universitàten, Bonn.

BROWN, G.A. (1989). The CVCP Code of Practice on Academic StaffTraining. The responses of the universities. A report submitted to theCommittee of Vice-ChanceUors and Principals. Sheffield, Routledge.

BROWN, G.A., ATKINS, M. (1990). Effective Teaching in HigherEducation, London, SRHE and Open University.

CAVE, M., HANNEY, N., KOGAN, M., TREVETT, G., (1989). The Useof Performance Indicators in Higher Education. London, JessicaKingsley.

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100 Recherche et Formation

Committee of Vice-ChanceUors and Principals (1981). Code of Practice.Sheffield.

KOGAN, M. (Ed.) (1989). Evaluating Higher Education. London,Jessica Kingsley.

Landtag von Baden Wurttemberg, Drucksache 1014190, 1991.

Ministerium fiir Wissenschaft und Forschung des Landes Nordrhein-Wesffalen (1991). Qualitàt der Lehre. Aktionsprogramm. Diisseldorf.

UNESCO-CEPES (1985). Working Papers for the Aveiro Workshop onEtablishment of a European Network Staff Development in HigherEducation. Bucarest.

UNESCO (Ed.) Establishment of a European Network StaffDevelopment in Higher Education. Reports Prague (1985), Aveiro(1987), Budapest (1989), Paris (1991).

100 Recherche et Formation

Committee of Vice-ChanceUors and Principals (1981). Code of Practice.Sheffield.

KOGAN, M. (Ed.) (1989). Evaluating Higher Education. London,Jessica Kingsley.

Landtag von Baden Wurttemberg, Drucksache 1014190, 1991.

Ministerium fiir Wissenschaft und Forschung des Landes Nordrhein-Wesffalen (1991). Qualitàt der Lehre. Aktionsprogramm. Diisseldorf.

UNESCO-CEPES (1985). Working Papers for the Aveiro Workshop onEtablishment of a European Network Staff Development in HigherEducation. Bucarest.

UNESCO (Ed.) Establishment of a European Network StaffDevelopment in Higher Education. Reports Prague (1985), Aveiro(1987), Budapest (1989), Paris (1991).

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Recherche el Formation N° 15 Avril 1994

ENTRETIEN

Dans cette rubrique, il s'agit de recueillir le point de vue de

personnalités qui, par leurs travaux, leurs itinéraires, leursdémarches et analyses, ont à témoigner de la façon dontelles vivent l'articulation entre la Recherche et la Formation.

ENTRETIEN AVEC PIERRE LENA

Propos recueillis par Annette Gonnin-Bolo et Bernard-A. Bolo

A. G.-B. Pourriez vous présenter votre trajectoire professionnelleà nos lecteurs, en indiquant la place que vous avez faite à la recherche, à

l'enseignement et l'articulation entre les deux... Finalement, votre métierd'enseignant, comment l'avez-vous conçu ?

P. L. - Ma carrière est entièrement universitaire. J'ai commencé en1960, après l'agrégation, par un premier poste à l'Université d'Orsay(alors faculté des Sciences de Paris), et - sauf quelques séjours à l'étran¬ger qui, cumulés, représentent quand même plusieurs années j'ai tou¬jours enseigné, comme Assistant, Maître-assistant, Chargé de cours, puisProfesseur. C'est donc un choix que j'ai fait et qui, je le savais, n'étaitpas un choix très facUe car U a faUu concUier recherche, enseignement et,aujourd'hui, beaucoup d'administration de la recherche (dont la prési¬dence des deux Conseils de l'INRP).

Alors, pourquoi ce choix ? Par intérêt, par plaisir ; j'aime bien ensei¬gner, j'ai toujours bien aimé. Ce n'est donc pas un choix de raison, maisun choix de cur, et ce sont probablement les meiUeurs choix !

En fait, dans ma vie professionneUe, j'ai privUégié tantôt la recher¬che, tantôt l'enseignement, par périodes de cinq à six ans, la difficultéétant de concilier cela avec des obligations statutaires qui sont les mêmeschaque année. J'ai pratiqué de cette façon en faisant porter mon effort

Recherche el Formation N° 15 Avril 1994

ENTRETIEN

Dans cette rubrique, il s'agit de recueillir le point de vue de

personnalités qui, par leurs travaux, leurs itinéraires, leursdémarches et analyses, ont à témoigner de la façon dontelles vivent l'articulation entre la Recherche et la Formation.

ENTRETIEN AVEC PIERRE LENA

Propos recueillis par Annette Gonnin-Bolo et Bernard-A. Bolo

A. G.-B. Pourriez vous présenter votre trajectoire professionnelleà nos lecteurs, en indiquant la place que vous avez faite à la recherche, à

l'enseignement et l'articulation entre les deux... Finalement, votre métierd'enseignant, comment l'avez-vous conçu ?

P. L. - Ma carrière est entièrement universitaire. J'ai commencé en1960, après l'agrégation, par un premier poste à l'Université d'Orsay(alors faculté des Sciences de Paris), et - sauf quelques séjours à l'étran¬ger qui, cumulés, représentent quand même plusieurs années j'ai tou¬jours enseigné, comme Assistant, Maître-assistant, Chargé de cours, puisProfesseur. C'est donc un choix que j'ai fait et qui, je le savais, n'étaitpas un choix très facUe car U a faUu concUier recherche, enseignement et,aujourd'hui, beaucoup d'administration de la recherche (dont la prési¬dence des deux Conseils de l'INRP).

Alors, pourquoi ce choix ? Par intérêt, par plaisir ; j'aime bien ensei¬gner, j'ai toujours bien aimé. Ce n'est donc pas un choix de raison, maisun choix de cur, et ce sont probablement les meiUeurs choix !

En fait, dans ma vie professionneUe, j'ai privUégié tantôt la recher¬che, tantôt l'enseignement, par périodes de cinq à six ans, la difficultéétant de concilier cela avec des obligations statutaires qui sont les mêmeschaque année. J'ai pratiqué de cette façon en faisant porter mon effort

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102 Recherche et Formation

sur l'un des trois cycles de l'enseignement supérieur car on ne peut pasêtre présent sur tous les créneaux à la fois.

S'agissant de l'enseignement de la physique, du point de vue pédago¬gique, je me suis intéressé à la formation des maîtres (longtemps), à larénovation des premiers cycles (longtemps aussi), puis à l'enseignementde troisième cycle (beaucoup), et à la réforme du doctorat à laquelle j'aicontribué comme Chargé de Mission au ministère de l'Éducation natio¬nale, sous Alain Savary.

Quand on enseigne dans le troisième cycle, on est en permanence à lafrontière entre recherche et enseignement : on ne peut pas assumer desfonctions de directeur de DEA sans avoir à la fois une activité derecherche personnelle et un intérêt pour tout ce qui se fait dans le champdisciplinaire que recouvre une formation doctorale.

Il n'y a guère que le second cycle dans lequel je n'ai jamais beaucoupinvesti, alors que les deux autres cycles ont été pour moi des investisse¬ments lourds, et j'ai tenté, par des livres, de mettre au net mon enseigne¬ment...

A. G.-B. - Est-ce un hasard ou est-ce, là aussi, un choix ?

P. L. - D'une part l'urgence m'a paru être la rénovation du premiercycle ainsi que le troisième cycle parce c'est là l'interface entre larecherche et l'enseignement. ; d'autre part le second cycle (licence, maî¬trise) est un niveau que les universitaires en général aiment bien et qui, àParis 7, est très bien couvert par d'excellents collègues ! (Si j'avais dixans devant moi, je m'y intéresserais peut être, ).

A. G.-B. - Pensez-vous que la formation des enseignants du supé¬rieur à l'enseignement soit un problème ?... en France plus qu'ailleurs ?...

P. L. - C'est une chose à laquelle je me suis intéressé très tôt. J'aiconstaté au début des années 80, lorsqu'on mettait en place la réformedu doctorat, qu'on allait faire disparaître les postes d'Assistants et que,ce faisant, on allait priver beaucoup de jeunes, après leur propre sortiedu monde étudiant, du contact immédiat avec de jeunes étudiants. Or,cette espèce de compagnonnage qui fait passer progressivement des bancsau tableau noir est une très vieille tradition - et une force - de l'Univer¬sité. Cela risquait de faire perdre des vocations d'enseignants-cher¬cheurs.

Pensant à ce qui allait se passer dans les années 1995-2015 (le départmassif d'universitaires à la retraite), j'avais le sentiment qu'il fallait s'ypréparer en inventant un système qui permettrait de préserver lesmeilleures vocations. Par ailleurs, bien que cela n'ait pus été mon

102 Recherche et Formation

sur l'un des trois cycles de l'enseignement supérieur car on ne peut pasêtre présent sur tous les créneaux à la fois.

S'agissant de l'enseignement de la physique, du point de vue pédago¬gique, je me suis intéressé à la formation des maîtres (longtemps), à larénovation des premiers cycles (longtemps aussi), puis à l'enseignementde troisième cycle (beaucoup), et à la réforme du doctorat à laquelle j'aicontribué comme Chargé de Mission au ministère de l'Éducation natio¬nale, sous Alain Savary.

Quand on enseigne dans le troisième cycle, on est en permanence à lafrontière entre recherche et enseignement : on ne peut pas assumer desfonctions de directeur de DEA sans avoir à la fois une activité derecherche personnelle et un intérêt pour tout ce qui se fait dans le champdisciplinaire que recouvre une formation doctorale.

Il n'y a guère que le second cycle dans lequel je n'ai jamais beaucoupinvesti, alors que les deux autres cycles ont été pour moi des investisse¬ments lourds, et j'ai tenté, par des livres, de mettre au net mon enseigne¬ment...

A. G.-B. - Est-ce un hasard ou est-ce, là aussi, un choix ?

P. L. - D'une part l'urgence m'a paru être la rénovation du premiercycle ainsi que le troisième cycle parce c'est là l'interface entre larecherche et l'enseignement. ; d'autre part le second cycle (licence, maî¬trise) est un niveau que les universitaires en général aiment bien et qui, àParis 7, est très bien couvert par d'excellents collègues ! (Si j'avais dixans devant moi, je m'y intéresserais peut être, ).

A. G.-B. - Pensez-vous que la formation des enseignants du supé¬rieur à l'enseignement soit un problème ?... en France plus qu'ailleurs ?...

P. L. - C'est une chose à laquelle je me suis intéressé très tôt. J'aiconstaté au début des années 80, lorsqu'on mettait en place la réformedu doctorat, qu'on allait faire disparaître les postes d'Assistants et que,ce faisant, on allait priver beaucoup de jeunes, après leur propre sortiedu monde étudiant, du contact immédiat avec de jeunes étudiants. Or,cette espèce de compagnonnage qui fait passer progressivement des bancsau tableau noir est une très vieille tradition - et une force - de l'Univer¬sité. Cela risquait de faire perdre des vocations d'enseignants-cher¬cheurs.

Pensant à ce qui allait se passer dans les années 1995-2015 (le départmassif d'universitaires à la retraite), j'avais le sentiment qu'il fallait s'ypréparer en inventant un système qui permettrait de préserver lesmeilleures vocations. Par ailleurs, bien que cela n'ait pus été mon

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Entretien 103

premier souci, cela rejoignait une autre approche plus « économiste » duproblème : les Assistants étaient une main-d'uvre commode pourl'Université (beaucoup d'heures de cours pour peu de salaire), et pourencadrer les foules d'étudiants nous avons besoin d'un maximum degens.

Dans les années 1983-1986, à la demande des ministres de l'époque(M. Savary, puis M. Chevènement), nous avions réuni une commission detravail, avec les syndicats et des personnaUtés scientifiques, pour voirquels étaient les systèmes qui permettraient de résoudre ce problème(ce fut le « rapport Lena »). L'alternance politique a interrompu le pro¬cessus ; puis L. Jospin et C. AUègre ont repris le projet en instituant lapossibiUté optionneUe pour tous les allocataires de recherche de choisirun statut de moniteur qui leur procure, outre un complément de salaire,une tâche d'enseignement égale au tiers d'un service d'un universitaire,donc une tâche raisonnable par rapport à leur obligation principale etcontractueUe qui est d'achever leur thèse. Le système s'est bien engagé,avec les CIES (Centre d'Initiation à l'Enseignement Supérieur) ; U s'estgénéraUsé à toute la France entre 1990 et 1993. VoUà pour l'histoire.

Mais sur le fond : a-t-on besoin d'une formation dans l'enseignementsupérieur ?

L'Université est aujourd'hui une très grande entreprise (50 000 ensei¬gnants-chercheurs et plus de 2 mUUons d'étudiants), or dans n'importequeUe entreprise, il y a des métiers.

On a mis très longtemps à accepter que la recherche soit un métier ;

c'était exclusivement un don (qu'on avait ou que l'on n'avait pas) ; il a

faUu attendre les années 60 pour qu'on mette en place les formations detroisième cycle, les DEA, et qu'on ait un dispositif de formation aumétier de chercheur ; ce dispositif s'est imposé dans les années 80.Chemin faisant, on s'est aperçu qu'U existait des composantes du métierde chercheur et qu'eUes ne s'apprennent pas exclusivement par osmose.

J'avais donc (et j'ai toujours) la conviction que pour ce qui est del'enseignement, autre fonction majeure de l'Université, U faut plus qu'undon, mais aussi une connaissance de « l'entreprise Université » : dansquel cadre exerce-t-on ? Par exemple, moi-même (et pourtant je ne suispas spécialement aveugle ou inintéressé), j'ai mis très longtemps à com¬prendre les enjeux des processus de sélection, et je ne les ai saisis que parle biais des jurys auxquels j'ai participé. Quand on devient membre d'unconseU ou président d'une Université on a une vision d'ensemble, maisl'enseignant de base met peut-être cinq ou dix ans à l'acquérir. Je croisqu'il est bon d'essayer (ce que font les CIES aujourd'hui) de la trans¬mettre à des jeunes pour lesquels l'Université est une énorme machinedans laqueUe ils ne se retrouvent pas forcément.

Entretien 103

premier souci, cela rejoignait une autre approche plus « économiste » duproblème : les Assistants étaient une main-d'uvre commode pourl'Université (beaucoup d'heures de cours pour peu de salaire), et pourencadrer les foules d'étudiants nous avons besoin d'un maximum degens.

Dans les années 1983-1986, à la demande des ministres de l'époque(M. Savary, puis M. Chevènement), nous avions réuni une commission detravail, avec les syndicats et des personnaUtés scientifiques, pour voirquels étaient les systèmes qui permettraient de résoudre ce problème(ce fut le « rapport Lena »). L'alternance politique a interrompu le pro¬cessus ; puis L. Jospin et C. AUègre ont repris le projet en instituant lapossibiUté optionneUe pour tous les allocataires de recherche de choisirun statut de moniteur qui leur procure, outre un complément de salaire,une tâche d'enseignement égale au tiers d'un service d'un universitaire,donc une tâche raisonnable par rapport à leur obligation principale etcontractueUe qui est d'achever leur thèse. Le système s'est bien engagé,avec les CIES (Centre d'Initiation à l'Enseignement Supérieur) ; U s'estgénéraUsé à toute la France entre 1990 et 1993. VoUà pour l'histoire.

Mais sur le fond : a-t-on besoin d'une formation dans l'enseignementsupérieur ?

L'Université est aujourd'hui une très grande entreprise (50 000 ensei¬gnants-chercheurs et plus de 2 mUUons d'étudiants), or dans n'importequeUe entreprise, il y a des métiers.

On a mis très longtemps à accepter que la recherche soit un métier ;

c'était exclusivement un don (qu'on avait ou que l'on n'avait pas) ; il a

faUu attendre les années 60 pour qu'on mette en place les formations detroisième cycle, les DEA, et qu'on ait un dispositif de formation aumétier de chercheur ; ce dispositif s'est imposé dans les années 80.Chemin faisant, on s'est aperçu qu'U existait des composantes du métierde chercheur et qu'eUes ne s'apprennent pas exclusivement par osmose.

J'avais donc (et j'ai toujours) la conviction que pour ce qui est del'enseignement, autre fonction majeure de l'Université, U faut plus qu'undon, mais aussi une connaissance de « l'entreprise Université » : dansquel cadre exerce-t-on ? Par exemple, moi-même (et pourtant je ne suispas spécialement aveugle ou inintéressé), j'ai mis très longtemps à com¬prendre les enjeux des processus de sélection, et je ne les ai saisis que parle biais des jurys auxquels j'ai participé. Quand on devient membre d'unconseU ou président d'une Université on a une vision d'ensemble, maisl'enseignant de base met peut-être cinq ou dix ans à l'acquérir. Je croisqu'il est bon d'essayer (ce que font les CIES aujourd'hui) de la trans¬mettre à des jeunes pour lesquels l'Université est une énorme machinedans laqueUe ils ne se retrouvent pas forcément.

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104 Recherche et Formation

A. G.-B. - Cette connaissance du système et de l'institution sembleune dimension relativement nouveUe et essentieUe dans la professionna¬lité enseignante (et elle a d'ailleurs été introduite dans le rapportBancel). Mais pour beaucoup d'enseignants du premier ou du seconddegré, je ne suis pas sûre que ce soit le fondement de leur métier et deleur professionnaUte ; Us se réfèrent plutôt à la transmission d'un savoir,ce qu'on appeUe la pédagogie...

P. L. - n y a les deux aspects. Si j'insiste sur le premier et si j'en aiparlé d'abord, c'est que - au moins en ce qui concerne les premierscycles, c'est à dire les gros flux d'étudiants - le problème est autant unproblème de gestion de foule qu'un problème d'ordre pédagogique :

devant l'échec, ou ce que je préfère appeler les difficultés Uées à l'orien¬tation, le problème n'est pas d'abord pédagogique, mais plutôt de savoirquels sont les objectifs de l'institution, quel est son rendement, quels sontles moyens qu'eUe se donne pour atteindre ses objectifs. Ce n'est pas leseul aspect des choses, mais c'est très important, car, si le problème n'estpas posé, malgré une grande bonne volonté on produit un système quiglobalement est très inefficace.

A. G.-B. Je trouve intéressant que vous le citiez en premier...

P. L. - C'est intentionnellement : on ne conçoit pas qu'un jeuneingénieur ou un gestionnaire entre dans une entreprise sans avoir lu uncertain nombre de Uvres sur l'entreprise, sans connaître comment fonc¬tionne une entreprise, quels sont les processus de décision, où se trouvele pouvoir, et comment éventuellement il peut être contesté, sur quoi estjugé le travail... J'ai toujours été très frappé de voir que cette préoccu¬pation était peu présente à l'Université, ce qui rendait très difficUe leséchanges sur les mauvais fonctionnements du système... Pourtant on estlà pour le faire fonctionner, et aussi pour corriger ce qui ne marche pasbien ou pour l'adapter. Je me dis qu'U ne serait peut-être pas mauvaisd'aider les plus jeunes à comprendre.

En ce qui concerne la pédagogie, d'une certaine manière c'est à la foisplus simple (tout le monde admet que quand on a appris une discipline,la façon de l'enseigner mérite discussion), mais c'est également compU¬qué, parce qu'une grande question se pose : est-ce que la pédagogies'apprend ? Peut-on faire un cours expliquant comment enseigner ? Là,je suis assez sceptique ; je ne suis pas sûr qu'on puisse enseigner à desétudiants de CIES par exemple comment il faut enseigner la physique(pour parler de ce que je connais), et les expériences que je connais nesont pas très réussies ! Je crois, en revanche, qu'on peut sensibiliser lesjeunes enseignants aux problèmes de la communication : cela va de

104 Recherche et Formation

A. G.-B. - Cette connaissance du système et de l'institution sembleune dimension relativement nouveUe et essentieUe dans la professionna¬lité enseignante (et elle a d'ailleurs été introduite dans le rapportBancel). Mais pour beaucoup d'enseignants du premier ou du seconddegré, je ne suis pas sûre que ce soit le fondement de leur métier et deleur professionnaUte ; Us se réfèrent plutôt à la transmission d'un savoir,ce qu'on appeUe la pédagogie...

P. L. - n y a les deux aspects. Si j'insiste sur le premier et si j'en aiparlé d'abord, c'est que - au moins en ce qui concerne les premierscycles, c'est à dire les gros flux d'étudiants - le problème est autant unproblème de gestion de foule qu'un problème d'ordre pédagogique :

devant l'échec, ou ce que je préfère appeler les difficultés Uées à l'orien¬tation, le problème n'est pas d'abord pédagogique, mais plutôt de savoirquels sont les objectifs de l'institution, quel est son rendement, quels sontles moyens qu'eUe se donne pour atteindre ses objectifs. Ce n'est pas leseul aspect des choses, mais c'est très important, car, si le problème n'estpas posé, malgré une grande bonne volonté on produit un système quiglobalement est très inefficace.

A. G.-B. Je trouve intéressant que vous le citiez en premier...

P. L. - C'est intentionnellement : on ne conçoit pas qu'un jeuneingénieur ou un gestionnaire entre dans une entreprise sans avoir lu uncertain nombre de Uvres sur l'entreprise, sans connaître comment fonc¬tionne une entreprise, quels sont les processus de décision, où se trouvele pouvoir, et comment éventuellement il peut être contesté, sur quoi estjugé le travail... J'ai toujours été très frappé de voir que cette préoccu¬pation était peu présente à l'Université, ce qui rendait très difficUe leséchanges sur les mauvais fonctionnements du système... Pourtant on estlà pour le faire fonctionner, et aussi pour corriger ce qui ne marche pasbien ou pour l'adapter. Je me dis qu'U ne serait peut-être pas mauvaisd'aider les plus jeunes à comprendre.

En ce qui concerne la pédagogie, d'une certaine manière c'est à la foisplus simple (tout le monde admet que quand on a appris une discipline,la façon de l'enseigner mérite discussion), mais c'est également compU¬qué, parce qu'une grande question se pose : est-ce que la pédagogies'apprend ? Peut-on faire un cours expliquant comment enseigner ? Là,je suis assez sceptique ; je ne suis pas sûr qu'on puisse enseigner à desétudiants de CIES par exemple comment il faut enseigner la physique(pour parler de ce que je connais), et les expériences que je connais nesont pas très réussies ! Je crois, en revanche, qu'on peut sensibiliser lesjeunes enseignants aux problèmes de la communication : cela va de

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Entretien 105

choses très simples (comment placer un transparent, poser sa voix) à deschoses plus subtUes qui sont de l'ordre de l'utUisation des manuels ou destypes d'exercice qu'on peut proposer, ou de l'utiUsation des expériences(très important en physique).

Il y a là une compétence qui est du même ordre que ceUe que nousdonnons aux chercheurs, pendant la préparation de leur thèse, pourapprendre à s'exprimer. Je constate, d'ailleurs que nous faisons plusd'efforts pour former un jeune chercheur à bien s'exprimer qu'un jeuneenseignant à bien enseigner... mais la réputation d'un laboratoiredépend des communications dans des coUoques, des articles pubUés, desrapports présentés pour obtenir de l'argent et la carrière d'un chercheurdépend beaucoup de la manière dont il présente son travaU devant lescommissions qui vont le recruter... Donc, un labo mise sur ses « pou¬lains », en les formant (il n'est pas rare que dans un laboratoire, on fasserépéter la présentation d'une thèse, par exemple, cinq ou six fois pourque le jour du jury ce soit parfait). Dans mon laboratoire nous avons ce

souci constant d'apprendre aux jeunes à présenter leur travaU, et Us fontdes progrès immenses en trois ou quatre ans parce qu'ils sont accompa¬gnés dans cette démarche et non Uvrés à eux-mêmes. Or je ne vois pastout à fait le symétrique pour les jeunes enseignants, qu'on « balance »

face aux étudiants, en les laissant se débrouiUer. De fait je crois que c'esten partie grâce à l'entraînement qu'Us ont comme jeunes chercheurs queleurs quaUtés d'enseignants s'améliorent.

A. G.-B. - Mettez-vous aussi dans cet entraînement l'analyse desdifficultés que l'interlocuteur a à vous comprendre, ce qui fait partie dela communication mais qui est sans doute plus difficile dans un processusd'enseignement que dans un coUoque, par exemple ?

P. L. C'est plus difficUe parce que dans un colloque, on se situesur un micro-sujet où tout le monde sait de quoi on parle ; la distanceentre celui qui parle et ceux qui reçoivent n'est pas très grande. C'estbien différent avec des étudiants de premier cycle auxquels s'adresse unjeune thésard, même si la proximité d'âge joue dans le bon sens.

Mais l'analyse des difficultés spécifiques des étudiants prend énormé¬ment de temps ; cela m'a beaucoup intéressé et j'y ai passé du temps dansmes premières années d'enseignement. C'est plus difficUe aujourd'hui enraison du volume des étudiants. Mais c'est absolument essentiel, surtoutdans le premier cycle où le choc culturel entre la façon dont les connais¬sances sont présentées au lycée et la façon dont eUes le sont à l'Universitéest le plus grand. Dans le second cycle, bien qu'U soit important de bienréaUser où « se trouvent » les étudiants c'est déjà moins grave. Dans letroisième cycle, on considère qu'Us ont acquis leur autonomie, et qu'U

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choses très simples (comment placer un transparent, poser sa voix) à deschoses plus subtUes qui sont de l'ordre de l'utUisation des manuels ou destypes d'exercice qu'on peut proposer, ou de l'utiUsation des expériences(très important en physique).

Il y a là une compétence qui est du même ordre que ceUe que nousdonnons aux chercheurs, pendant la préparation de leur thèse, pourapprendre à s'exprimer. Je constate, d'ailleurs que nous faisons plusd'efforts pour former un jeune chercheur à bien s'exprimer qu'un jeuneenseignant à bien enseigner... mais la réputation d'un laboratoiredépend des communications dans des coUoques, des articles pubUés, desrapports présentés pour obtenir de l'argent et la carrière d'un chercheurdépend beaucoup de la manière dont il présente son travaU devant lescommissions qui vont le recruter... Donc, un labo mise sur ses « pou¬lains », en les formant (il n'est pas rare que dans un laboratoire, on fasserépéter la présentation d'une thèse, par exemple, cinq ou six fois pourque le jour du jury ce soit parfait). Dans mon laboratoire nous avons ce

souci constant d'apprendre aux jeunes à présenter leur travaU, et Us fontdes progrès immenses en trois ou quatre ans parce qu'ils sont accompa¬gnés dans cette démarche et non Uvrés à eux-mêmes. Or je ne vois pastout à fait le symétrique pour les jeunes enseignants, qu'on « balance »

face aux étudiants, en les laissant se débrouiUer. De fait je crois que c'esten partie grâce à l'entraînement qu'Us ont comme jeunes chercheurs queleurs quaUtés d'enseignants s'améliorent.

A. G.-B. - Mettez-vous aussi dans cet entraînement l'analyse desdifficultés que l'interlocuteur a à vous comprendre, ce qui fait partie dela communication mais qui est sans doute plus difficile dans un processusd'enseignement que dans un coUoque, par exemple ?

P. L. C'est plus difficUe parce que dans un colloque, on se situesur un micro-sujet où tout le monde sait de quoi on parle ; la distanceentre celui qui parle et ceux qui reçoivent n'est pas très grande. C'estbien différent avec des étudiants de premier cycle auxquels s'adresse unjeune thésard, même si la proximité d'âge joue dans le bon sens.

Mais l'analyse des difficultés spécifiques des étudiants prend énormé¬ment de temps ; cela m'a beaucoup intéressé et j'y ai passé du temps dansmes premières années d'enseignement. C'est plus difficUe aujourd'hui enraison du volume des étudiants. Mais c'est absolument essentiel, surtoutdans le premier cycle où le choc culturel entre la façon dont les connais¬sances sont présentées au lycée et la façon dont eUes le sont à l'Universitéest le plus grand. Dans le second cycle, bien qu'U soit important de bienréaUser où « se trouvent » les étudiants c'est déjà moins grave. Dans letroisième cycle, on considère qu'Us ont acquis leur autonomie, et qu'U

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106 Recherche et Formation

faudrait qu'un enseignant soit vraiment très mauvais pour que sa mau¬vaise quaUté occulte l'importance de ce qu'U a à dire !

Il y a cinq ans, à la Société française de Physique que je présidaisalors, nous avions fait une enquête, menée par Jean Bornarel (vice-président de Grenoble 1, à l'époque), sur la façon dont les enseignantsvoyaient les problèmes de l'enseignement de la physique en premiercycle ; c'était très intéressant parce que les gens avaient essayé d'expU-quer pourquoi cela se passait mal, pourquoi les échecs et Us avaient tentéde dégager les facteurs auxquels U fallait faire attention. Ce sont deschoses très simples : un jeune enseignant, par exemple, a naturellementtendance à reproduire les cours qu'U a reçu et comme U est encore toutprès du moment où lui-même était de l'autre côté, U se souvient de ses

difficultés s'U n'est pas sot. Il n'en fera peut être pas la théorisation à lamanière des chercheurs en pédagogie, car U n'a pas encore la distancenécessaire.

B.-A. B. - Pensez-vous que la difficulté d'apprécier les difficultésdes étudiants de premier cycle soit plus grande ou moins grande dans les« sciences dures » que dans les disciplines littéraires ou les scienceshumaines, discipUnes dans lesqueUes les enseignants soulignent volon¬tiers l'hétérogénéité de leur pubUc ?

P. L. Je ne pourrais pas vous répondre parce que je ne connaispas assez les discipUnes Uttéraires mais les scientifiques soulignent aussil'hétérogénéité des étudiants et eUe ne fait que renforcer la difficulté. AuUeu, donc, de dire « formation pédagogique » des enseignants du supé¬rieur, je dirais plutôt « sensibilisation à la difficulté pédagogique », à ladifférence qu'il y a entre ce qu'on veut dire et ce qui peut être reçu parles étudiants ; cela éviterait de laisser faire sur le tas, de manière trèsartisanale, sans méthode, sans réflexion.

A. G.-B. - Vous avez, tout à l'heure, déploré que dans les années 80ait un peu disparu une tradition de « compagnonnage », qui est précisé¬ment un modèle artisanal. . . est-ce le modèle de formation que vous pro¬posez ?

P. L. Oui, et l'ambition des CIES ne peut être qu'assez Umitée ; envolume horaire, d'abord : on ne peut pas demander aux étudiants depasser un jour par semaine au CIES toute l'année ; le reste du temps, Us

vont être sur le terrain et Us ne s'améUoreront sur le terrain que si Us

sont dans une équipe d'enseignants où Us pourront confronter les expé¬riences. C'est dans ce travaU en équipe que joue à plein le compagnon¬nage...

106 Recherche et Formation

faudrait qu'un enseignant soit vraiment très mauvais pour que sa mau¬vaise quaUté occulte l'importance de ce qu'U a à dire !

Il y a cinq ans, à la Société française de Physique que je présidaisalors, nous avions fait une enquête, menée par Jean Bornarel (vice-président de Grenoble 1, à l'époque), sur la façon dont les enseignantsvoyaient les problèmes de l'enseignement de la physique en premiercycle ; c'était très intéressant parce que les gens avaient essayé d'expU-quer pourquoi cela se passait mal, pourquoi les échecs et Us avaient tentéde dégager les facteurs auxquels U fallait faire attention. Ce sont deschoses très simples : un jeune enseignant, par exemple, a naturellementtendance à reproduire les cours qu'U a reçu et comme U est encore toutprès du moment où lui-même était de l'autre côté, U se souvient de ses

difficultés s'U n'est pas sot. Il n'en fera peut être pas la théorisation à lamanière des chercheurs en pédagogie, car U n'a pas encore la distancenécessaire.

B.-A. B. - Pensez-vous que la difficulté d'apprécier les difficultésdes étudiants de premier cycle soit plus grande ou moins grande dans les« sciences dures » que dans les disciplines littéraires ou les scienceshumaines, discipUnes dans lesqueUes les enseignants soulignent volon¬tiers l'hétérogénéité de leur pubUc ?

P. L. Je ne pourrais pas vous répondre parce que je ne connaispas assez les discipUnes Uttéraires mais les scientifiques soulignent aussil'hétérogénéité des étudiants et eUe ne fait que renforcer la difficulté. AuUeu, donc, de dire « formation pédagogique » des enseignants du supé¬rieur, je dirais plutôt « sensibilisation à la difficulté pédagogique », à ladifférence qu'il y a entre ce qu'on veut dire et ce qui peut être reçu parles étudiants ; cela éviterait de laisser faire sur le tas, de manière trèsartisanale, sans méthode, sans réflexion.

A. G.-B. - Vous avez, tout à l'heure, déploré que dans les années 80ait un peu disparu une tradition de « compagnonnage », qui est précisé¬ment un modèle artisanal. . . est-ce le modèle de formation que vous pro¬posez ?

P. L. Oui, et l'ambition des CIES ne peut être qu'assez Umitée ; envolume horaire, d'abord : on ne peut pas demander aux étudiants depasser un jour par semaine au CIES toute l'année ; le reste du temps, Us

vont être sur le terrain et Us ne s'améUoreront sur le terrain que si Us

sont dans une équipe d'enseignants où Us pourront confronter les expé¬riences. C'est dans ce travaU en équipe que joue à plein le compagnon¬nage...

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Entretien 107

Je pense que ce compagnonnage risque de jouer beaucoup moins avecun recrutement massif de professeurs à plein temps dans le premier cycle(les PRAG), qui enseignent avec un service lourd et qui ne sont pas obU-gés statutairement de faire de la recherche. Une vision qui reviendrait àleur donner les premiers cycles pour réserver exclusivement les second ettroisième cycles aux enseignants-chercheurs serait, je crois, catastro¬phique pour l'Université. Cela reviendrait à faire une Université post¬lycée, qui serait totalement coupée de la recherche, où d'un côté, U yaurait des professeurs agrégés (on en a déjà) avec une formationpédagogique plus importante que celle des enseignants-chercheurs for¬més par la voie de la thèse, mais qui ne se seraient pas du tout frottés à larecherche ; et puis, de l'autre côté, U y aurait des enseignants du supé¬rieur, qui ont une pratique de la recherche (au moins une expérience deplusieurs années) mais aucune formation pédagogique. Le mélange desdeux peut être très intéressant s'U se traduit par un compagnonnage ;

mais si cela ne se fait pas, je suis très inquiet pour le premier cycle.

A. G.-B. - Mais la notion de labo, lieu de formation, où on s'en¬traîne à préparer des communications ou des soutenances de thèses (for¬mation qui se répercute sur l'enseignement), pensez-vous qu'elle soitgénérale dans toute l'université ?

P. L. Je ne parle que des sciences « dures » ; je ne parlerai pas dessciences humaines que je ne connais pas. En physique, c'est tout à faitgénéral, en chimie aussi, en biologie, en sciences de la terre aussi, pource que j'en connais, en tous cas. C'est au labo que peut se réaliserl'essentiel du compagnonnage ; mais U est centré autour de la rechercheet il faut en centrer un autre autour des tâches d'enseignement : c'est lerôle de l'équipe d'enseignement.

Mais une des difficultés porte sur les outils d'évaluation des progrès,sur une possibilité d'évaluation externe de l'équipe ; les évaluateurspourraient être les étudiants, mais les étudiants n'ont pas toujours unecritique construite sur la manière dont on enseigne ; or il n'y a pasd'autres évaluateurs externes. Pour ma part j'ai essayé partout demettre en uvre, une évaluation par les étudiants, mais construite : dansnotre troisième cycle, à la fin de chaque année, les étudiants rempUssentchacun un questionnaire mis au point par les enseignants dans lequel lesétudiants s'expriment, de manière libre ; ils peuvent même, pour quel'anonymat soit préservé, le traiter entièrement sur ordinateur. Nous fai¬sons circuler les évaluations parmi tous nos coUègues. C'est une pratiquequi est courante dans les grande écoles et qui en Amérique est obUga¬toire ; dans l'Université française, on en est encore loin. Je l'ai toujourspratiqué : même avec des amphis de 200 étudiants, à la fin de l'année, je

Entretien 107

Je pense que ce compagnonnage risque de jouer beaucoup moins avecun recrutement massif de professeurs à plein temps dans le premier cycle(les PRAG), qui enseignent avec un service lourd et qui ne sont pas obU-gés statutairement de faire de la recherche. Une vision qui reviendrait àleur donner les premiers cycles pour réserver exclusivement les second ettroisième cycles aux enseignants-chercheurs serait, je crois, catastro¬phique pour l'Université. Cela reviendrait à faire une Université post¬lycée, qui serait totalement coupée de la recherche, où d'un côté, U yaurait des professeurs agrégés (on en a déjà) avec une formationpédagogique plus importante que celle des enseignants-chercheurs for¬més par la voie de la thèse, mais qui ne se seraient pas du tout frottés à larecherche ; et puis, de l'autre côté, U y aurait des enseignants du supé¬rieur, qui ont une pratique de la recherche (au moins une expérience deplusieurs années) mais aucune formation pédagogique. Le mélange desdeux peut être très intéressant s'U se traduit par un compagnonnage ;

mais si cela ne se fait pas, je suis très inquiet pour le premier cycle.

A. G.-B. - Mais la notion de labo, lieu de formation, où on s'en¬traîne à préparer des communications ou des soutenances de thèses (for¬mation qui se répercute sur l'enseignement), pensez-vous qu'elle soitgénérale dans toute l'université ?

P. L. Je ne parle que des sciences « dures » ; je ne parlerai pas dessciences humaines que je ne connais pas. En physique, c'est tout à faitgénéral, en chimie aussi, en biologie, en sciences de la terre aussi, pource que j'en connais, en tous cas. C'est au labo que peut se réaliserl'essentiel du compagnonnage ; mais U est centré autour de la rechercheet il faut en centrer un autre autour des tâches d'enseignement : c'est lerôle de l'équipe d'enseignement.

Mais une des difficultés porte sur les outils d'évaluation des progrès,sur une possibilité d'évaluation externe de l'équipe ; les évaluateurspourraient être les étudiants, mais les étudiants n'ont pas toujours unecritique construite sur la manière dont on enseigne ; or il n'y a pasd'autres évaluateurs externes. Pour ma part j'ai essayé partout demettre en uvre, une évaluation par les étudiants, mais construite : dansnotre troisième cycle, à la fin de chaque année, les étudiants rempUssentchacun un questionnaire mis au point par les enseignants dans lequel lesétudiants s'expriment, de manière libre ; ils peuvent même, pour quel'anonymat soit préservé, le traiter entièrement sur ordinateur. Nous fai¬sons circuler les évaluations parmi tous nos coUègues. C'est une pratiquequi est courante dans les grande écoles et qui en Amérique est obUga¬toire ; dans l'Université française, on en est encore loin. Je l'ai toujourspratiqué : même avec des amphis de 200 étudiants, à la fin de l'année, je

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108 Recherche et Formation

demandais un retour d'évaluation ; c'est intéressant pour soi, c'est inté¬ressant pour l'équipe parce que cela donne une base un tout petit peuobjective aux discussions pédagogiques ; quand trois-quarts des étu¬diants disent n'avoir rien compris à teUe notion de thermodynamique, onse dit qu'U y a un problème. Cet aUer-et-retour manque beaucoup dans lemétier, et un jour l'évaluation par les étudiants deviendra obUgatoire...

A. G.-B. - La carrière dans le supérieur se fait surtout sur des cri¬tères de recherche ; peut-U y avoir une prise en compte de l'enseignementdonné et comment ? ...

P. L. - VieUle question ! Quand je suis entré à l'université, les syn¬dicats déploraient déjà ce fait et trente ans après, peu de choses se sontmodifiées. Pourtant en ce qui concerne les activités vers le pubUc (livresou émissions de télévision, par exemple), la situation a complètementchangé : on juge nécessaire de rendre compte de la science au grandpublic. Et, aujourd'hui, dans une commission du CNRS, si quelqu'un ades activités vers le pubUc, c'est un plus et on l'y encouragera. Mais ladémarche est différente vis-à-vis des activités d'enseignement : les com¬missions promeuvent, jugent largement sur le quaUtatif pour la recher¬che et sur le quantitatif pour l'enseignement (a-t-U fait ses heures, a-t-Upris un peu de chaque cycle ? ).

Les ouvrages sont quand même pris en compte ; quelqu'un qui écritdes Uvres à l'usage des étudiants est considéré rempUr une fonction utile.Les primes pédagogiques mises en place qui, malheureusement sont ennombre insuffisant, sont une autre façon de valoriser les activitésd'enseignement. . .

B.-A. B. - Dans mon université, l'offre de primes pédagogiques estsupérieure à la demande et les gens sous contrat « pédagogique » sontjugés sur leurs travaux de recherche. . .

P. L. Il est possible que ce soit un cas général, que, par un détour¬nement majuscule des textes, les vieUles habitudes universitaires repren¬nent le dessus ; pourtant les primes ont été instituées pour permettre lapromotion d'exceUents animateurs d'équipes d'enseignement alors mêmequ'Us feraient peu de recherches...

En dehors de cette mesure, qui ne devrait pas être détournée, quepeut-on faire ? H semble que certaines commissions du CNU, aient prismaintenant comme principe de ne qualifier comme Maître de Confé¬rences que des gens ayant déjà enseigné : U y a là une certaine confusionentre l'aptitude et l'ancienneté ; quelqu'un peut avoir été moniteur,avoir donc une certaine pratique de l'enseignement, et être un très

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demandais un retour d'évaluation ; c'est intéressant pour soi, c'est inté¬ressant pour l'équipe parce que cela donne une base un tout petit peuobjective aux discussions pédagogiques ; quand trois-quarts des étu¬diants disent n'avoir rien compris à teUe notion de thermodynamique, onse dit qu'U y a un problème. Cet aUer-et-retour manque beaucoup dans lemétier, et un jour l'évaluation par les étudiants deviendra obUgatoire...

A. G.-B. - La carrière dans le supérieur se fait surtout sur des cri¬tères de recherche ; peut-U y avoir une prise en compte de l'enseignementdonné et comment ? ...

P. L. - VieUle question ! Quand je suis entré à l'université, les syn¬dicats déploraient déjà ce fait et trente ans après, peu de choses se sontmodifiées. Pourtant en ce qui concerne les activités vers le pubUc (livresou émissions de télévision, par exemple), la situation a complètementchangé : on juge nécessaire de rendre compte de la science au grandpublic. Et, aujourd'hui, dans une commission du CNRS, si quelqu'un ades activités vers le pubUc, c'est un plus et on l'y encouragera. Mais ladémarche est différente vis-à-vis des activités d'enseignement : les com¬missions promeuvent, jugent largement sur le quaUtatif pour la recher¬che et sur le quantitatif pour l'enseignement (a-t-U fait ses heures, a-t-Upris un peu de chaque cycle ? ).

Les ouvrages sont quand même pris en compte ; quelqu'un qui écritdes Uvres à l'usage des étudiants est considéré rempUr une fonction utile.Les primes pédagogiques mises en place qui, malheureusement sont ennombre insuffisant, sont une autre façon de valoriser les activitésd'enseignement. . .

B.-A. B. - Dans mon université, l'offre de primes pédagogiques estsupérieure à la demande et les gens sous contrat « pédagogique » sontjugés sur leurs travaux de recherche. . .

P. L. Il est possible que ce soit un cas général, que, par un détour¬nement majuscule des textes, les vieUles habitudes universitaires repren¬nent le dessus ; pourtant les primes ont été instituées pour permettre lapromotion d'exceUents animateurs d'équipes d'enseignement alors mêmequ'Us feraient peu de recherches...

En dehors de cette mesure, qui ne devrait pas être détournée, quepeut-on faire ? H semble que certaines commissions du CNU, aient prismaintenant comme principe de ne qualifier comme Maître de Confé¬rences que des gens ayant déjà enseigné : U y a là une certaine confusionentre l'aptitude et l'ancienneté ; quelqu'un peut avoir été moniteur,avoir donc une certaine pratique de l'enseignement, et être un très

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Entretien 109

mauvais enseignant, tandis qu'U n'est pas prouvé que quelqu'un qui n'apas été moniteur, faute de poste de moniteur, fera plus tard un mauvaisuniversitaire. Il serait désastreux pour l'Université que se pérennisecette idée de juger de l'aptitude à l'enseignement uniquement par le faitqu'on en a déjà fait... U faut bien commencer un jour.

Alors, on retrouve la difficulté de l'évaluation : je crois que la seulemesure raisonnable c'est le jugement par les étudiants, qui ne doit pasêtre un jugement guillotine mais plutôt un aUer-et-retour...

A. G.-B. Je voudrais revenir sur les contenus de cette initiation-formation à l'enseignement. Vous avez parlé en premier (et volontaire¬ment) d'une connaissance du fonctionnement de l'institution, d'une sen¬

sibilisation à la difficulté pédagogique, de notions de communication.Que voyez-vous comme autres contenus ?

P. L. La formation au travail d'équipe est très importante. Lespremières années de recherche et d'enseignement sont des années trèslourdes et on a tendance à aller au plus pressé ; si dans un labo derecherches, on ne peut pas travailler tout seul (quelqu'un qui ne vien¬drait pas aux réunions de travaU du laboratoire serait vite sur la touche),dans l'enseignement, la tendance est plus naturellement de travaUler seulet de ne pas percevoir l'intérêt de l'équipe. Il faut donc faire en sorte quele travail d'équipe se fasse bien dès le début, parce que, après, une fois lepli pris, et surtout une fois l'intérêt reconnu, on le pratique toute sa car¬rière.

J'ajouterais encore une formation à l'histoire des sciences : j'aitoujours fait attention à inscrire la connaissance contemporaine dans undéroulement de la pensée, et je crois que c'est une sensibUisation didac¬tique utUe à donner aux jeunes enseignants.

La théorisation de la didactique, eUe, vient chez les gens plus âgés ;

c'est l'animateur d'une équipe d'enseignement qui devrait pousser laréflexion plus loin pour savoir comment construire tel cours, commentorganiser les travaux pratiques, comment ne pas transmettre desconcepts inadéquats ou faux...

A. G.-B. Vous faites une différence entre didactique et pédagogie ?

P. L. Oui. La pédagogie, c'est, selon l'étymologie du mot, prendreles disciples par la main pour les mener quelque part ; dès qu'onenseigne, c'est ce qu'on fait. La didactique, c'est la science de la trans¬mission du savoir, c'est-à-dire un discours tenu sur la façon dont on s'yprend, discours qui peut être très savant, et selon le cas intéressant outrès ennuyeux, parfois les deux d'ailleurs. Tout le monde n'est pas

Entretien 109

mauvais enseignant, tandis qu'U n'est pas prouvé que quelqu'un qui n'apas été moniteur, faute de poste de moniteur, fera plus tard un mauvaisuniversitaire. Il serait désastreux pour l'Université que se pérennisecette idée de juger de l'aptitude à l'enseignement uniquement par le faitqu'on en a déjà fait... U faut bien commencer un jour.

Alors, on retrouve la difficulté de l'évaluation : je crois que la seulemesure raisonnable c'est le jugement par les étudiants, qui ne doit pasêtre un jugement guillotine mais plutôt un aUer-et-retour...

A. G.-B. Je voudrais revenir sur les contenus de cette initiation-formation à l'enseignement. Vous avez parlé en premier (et volontaire¬ment) d'une connaissance du fonctionnement de l'institution, d'une sen¬

sibilisation à la difficulté pédagogique, de notions de communication.Que voyez-vous comme autres contenus ?

P. L. La formation au travail d'équipe est très importante. Lespremières années de recherche et d'enseignement sont des années trèslourdes et on a tendance à aller au plus pressé ; si dans un labo derecherches, on ne peut pas travailler tout seul (quelqu'un qui ne vien¬drait pas aux réunions de travaU du laboratoire serait vite sur la touche),dans l'enseignement, la tendance est plus naturellement de travaUler seulet de ne pas percevoir l'intérêt de l'équipe. Il faut donc faire en sorte quele travail d'équipe se fasse bien dès le début, parce que, après, une fois lepli pris, et surtout une fois l'intérêt reconnu, on le pratique toute sa car¬rière.

J'ajouterais encore une formation à l'histoire des sciences : j'aitoujours fait attention à inscrire la connaissance contemporaine dans undéroulement de la pensée, et je crois que c'est une sensibUisation didac¬tique utUe à donner aux jeunes enseignants.

La théorisation de la didactique, eUe, vient chez les gens plus âgés ;

c'est l'animateur d'une équipe d'enseignement qui devrait pousser laréflexion plus loin pour savoir comment construire tel cours, commentorganiser les travaux pratiques, comment ne pas transmettre desconcepts inadéquats ou faux...

A. G.-B. Vous faites une différence entre didactique et pédagogie ?

P. L. Oui. La pédagogie, c'est, selon l'étymologie du mot, prendreles disciples par la main pour les mener quelque part ; dès qu'onenseigne, c'est ce qu'on fait. La didactique, c'est la science de la trans¬mission du savoir, c'est-à-dire un discours tenu sur la façon dont on s'yprend, discours qui peut être très savant, et selon le cas intéressant outrès ennuyeux, parfois les deux d'ailleurs. Tout le monde n'est pas

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110 Recherche et Formation

forcément amené à le développer ; tout enseignant ne s'y intéresse pasforcément. Les grands manuels qui ont marqué la science sortent de gensqui ont réfléchi, mais qui n'ont pas forcément théorisé une construction.

A. G.-B. Mais alors, cette formation, qui la ferait ?

P. L. - C'est une question. Dans l'état actuel du système des CIES,je ne sais pas très bien comment cela se passe, qui fait des cours. Si j encrois ceux qui ont subi les cours, U y a le meUleur et le pire. . .

A. G.-B. - QueUe place voyez-vous, dans ces formations, pour lessciences de l'éducation ?

P. L. - Je n'ai pas d'avis très tranché. Je crois qu'il faut voir à

l'Auvre, voir ce qu'elles ont à proposer et voir ce qu'en pensent lescUents ; on est sur un terrain trop neuf pour pouvoir trancher tant qu'onn'a pas d'expérience. Peut être, dans un département de physique, ilpeut y avoir un spéciaUste des sciences de l'éducation qui accompagne lephysicien qui enseigne la physique ; alors le dialogue peut être intéres¬sant.

À Paris 7, certains coUègues ont monté, en seconde année, une UVqui avait comme seul but d'apprendre aux étudiants à s'exprimer correc¬tement ; c'est un problème, même en troisième cycle, d'obtenir uneréponse où la phrase ait un sujet, un verbe et un complément (je ne parlepas d'une relative ou a fortiori d'une proposition au conditionnel ou ausubjonctif) ! C'est une UV qui marche maintenant très bien, mais je nesais pas précisément à qui ils ont fait appel.

A. G.-B. - Que penseriez vous d'une formation commune àl'ensemble des enseignants, de l'élémentaire au supérieur... ?

P. L. - C'est un peu : « l'éducation de la materneUe à l'université,même combat. » Ça n'est pas sérieux ! Si c'est pour dire des choses trèssympathiques du genre « U faut aimer ses élèves, U faut aimer ses étu¬diants », d'accord ! Mais le problème de transmission de la science à desélèves de materneUe n'a rien à voir avec le même problème pour des étu¬diants d'université. Il y a une spécificité de celui qui est en face de nous,dont U faut tenir compte. . .

A. G.-B. Vous ne concevez pas qu'un enseignant d'université nesoit pas chercheur ; est-ce qu'un chercheur doit obUgatoirement êtreenseignant ?

110 Recherche et Formation

forcément amené à le développer ; tout enseignant ne s'y intéresse pasforcément. Les grands manuels qui ont marqué la science sortent de gensqui ont réfléchi, mais qui n'ont pas forcément théorisé une construction.

A. G.-B. Mais alors, cette formation, qui la ferait ?

P. L. - C'est une question. Dans l'état actuel du système des CIES,je ne sais pas très bien comment cela se passe, qui fait des cours. Si j encrois ceux qui ont subi les cours, U y a le meUleur et le pire. . .

A. G.-B. - QueUe place voyez-vous, dans ces formations, pour lessciences de l'éducation ?

P. L. - Je n'ai pas d'avis très tranché. Je crois qu'il faut voir à

l'Auvre, voir ce qu'elles ont à proposer et voir ce qu'en pensent lescUents ; on est sur un terrain trop neuf pour pouvoir trancher tant qu'onn'a pas d'expérience. Peut être, dans un département de physique, ilpeut y avoir un spéciaUste des sciences de l'éducation qui accompagne lephysicien qui enseigne la physique ; alors le dialogue peut être intéres¬sant.

À Paris 7, certains coUègues ont monté, en seconde année, une UVqui avait comme seul but d'apprendre aux étudiants à s'exprimer correc¬tement ; c'est un problème, même en troisième cycle, d'obtenir uneréponse où la phrase ait un sujet, un verbe et un complément (je ne parlepas d'une relative ou a fortiori d'une proposition au conditionnel ou ausubjonctif) ! C'est une UV qui marche maintenant très bien, mais je nesais pas précisément à qui ils ont fait appel.

A. G.-B. - Que penseriez vous d'une formation commune àl'ensemble des enseignants, de l'élémentaire au supérieur... ?

P. L. - C'est un peu : « l'éducation de la materneUe à l'université,même combat. » Ça n'est pas sérieux ! Si c'est pour dire des choses trèssympathiques du genre « U faut aimer ses élèves, U faut aimer ses étu¬diants », d'accord ! Mais le problème de transmission de la science à desélèves de materneUe n'a rien à voir avec le même problème pour des étu¬diants d'université. Il y a une spécificité de celui qui est en face de nous,dont U faut tenir compte. . .

A. G.-B. Vous ne concevez pas qu'un enseignant d'université nesoit pas chercheur ; est-ce qu'un chercheur doit obUgatoirement êtreenseignant ?

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Entretien 111

P. L. Je n'ai pas prononcé d'exclusion ; les PRAG sont très utUesparce que, étant donné ce que sont aujourd'hui les jeunes à la sortie dulycée, on ne peut plus envoyer la moitié d'une classe d'âge sur les bancsde l'enseignement supérieur sans qu'une fraction des enseignants soittotalement disponible pour ce travail. C'est trop difficile pour ne pas êtrefait comme un métier à plein. De leur côté, les conditions d'exercice de larecherche se sont complexifiées ; il faut beaucoup voyager, ce qui est dif¬ficilement compatible avec une présence constante auprès des étudiants ;

le travail en laboratoire, qu'il soit informatique ou expérimental est trèsastreignant ; la compétition est forte ; U y a beaucoup de congrès, et si onn'y va pas, on n'est plus à jour. La pression sur l'activité de rechercheest donc très forte. Or, U faut augmenter la disponibilité des enseignantsauprès des étudiants.

A. G.-B. - Mais est-ce que tout chercheur doit ou devrait être ensei¬gnant ? Est-ce utUe ? ...

P. L. - C'est un grand débat. Un chercheur qui ne communique pasne se satisfait pas lui-même et se stérilise très vite. Mais communiquer,c'est une chose, et enseigner en est une autre. On peut se limiter à com¬muniquer à ses pairs ou à ceux qui vont appliquer sa recherche. Pour ce

qui est du troisième cycle et des formations doctorales, ce n'est pas unproblème, mais pour mobiliser les chercheurs autour du premier cycle,c'est plus compUqué...

Je n'ai pas de doctrine là dessus, mon seul point de vue c'est qu'on nepeut pas forcer à enseigner quelqu'un qui n'aime pas cela, parce que lerésultat serait désastreux. Si des chercheurs, pour des raisons de pyra¬mide d'âge ou de taux d'encadrement sont amenés à enseigner en pre¬mier cycle et si cela n'est pas un choix professionnel de leur part, ce seraun échec : s'il est un métier qu'on ne peut pas faire en traînant les pieds,c'est l'enseignement, car c'est le moyen le plus sûr pour dégoûter lesjeunes.

Les chercheurs doivent enseigner mais sans y être contraints. Lemétier d'enseignant-chercheur est un métier choisi : je ne connais pas unde mes collègues qui le fasse parce qu'on l'y oblige ; certains, que celaennuyait, sont passés au CNRS, ou dans un endroit où ils se sententmieux, et ont laissé la place à d'autres qui avaient envie de le faire...C'est une réponse très empirique, pas du tout doctrinale...

A. G.-B. Pour revenir à l'aspect institutionnel de la question, lesCIES vous paraissent-Us « faire le tour de la question » ou sont-Us seule¬ment un premier pas ? ...

Entretien 111

P. L. Je n'ai pas prononcé d'exclusion ; les PRAG sont très utUesparce que, étant donné ce que sont aujourd'hui les jeunes à la sortie dulycée, on ne peut plus envoyer la moitié d'une classe d'âge sur les bancsde l'enseignement supérieur sans qu'une fraction des enseignants soittotalement disponible pour ce travail. C'est trop difficile pour ne pas êtrefait comme un métier à plein. De leur côté, les conditions d'exercice de larecherche se sont complexifiées ; il faut beaucoup voyager, ce qui est dif¬ficilement compatible avec une présence constante auprès des étudiants ;

le travail en laboratoire, qu'il soit informatique ou expérimental est trèsastreignant ; la compétition est forte ; U y a beaucoup de congrès, et si onn'y va pas, on n'est plus à jour. La pression sur l'activité de rechercheest donc très forte. Or, U faut augmenter la disponibilité des enseignantsauprès des étudiants.

A. G.-B. - Mais est-ce que tout chercheur doit ou devrait être ensei¬gnant ? Est-ce utUe ? ...

P. L. - C'est un grand débat. Un chercheur qui ne communique pasne se satisfait pas lui-même et se stérilise très vite. Mais communiquer,c'est une chose, et enseigner en est une autre. On peut se limiter à com¬muniquer à ses pairs ou à ceux qui vont appliquer sa recherche. Pour ce

qui est du troisième cycle et des formations doctorales, ce n'est pas unproblème, mais pour mobiliser les chercheurs autour du premier cycle,c'est plus compUqué...

Je n'ai pas de doctrine là dessus, mon seul point de vue c'est qu'on nepeut pas forcer à enseigner quelqu'un qui n'aime pas cela, parce que lerésultat serait désastreux. Si des chercheurs, pour des raisons de pyra¬mide d'âge ou de taux d'encadrement sont amenés à enseigner en pre¬mier cycle et si cela n'est pas un choix professionnel de leur part, ce seraun échec : s'il est un métier qu'on ne peut pas faire en traînant les pieds,c'est l'enseignement, car c'est le moyen le plus sûr pour dégoûter lesjeunes.

Les chercheurs doivent enseigner mais sans y être contraints. Lemétier d'enseignant-chercheur est un métier choisi : je ne connais pas unde mes collègues qui le fasse parce qu'on l'y oblige ; certains, que celaennuyait, sont passés au CNRS, ou dans un endroit où ils se sententmieux, et ont laissé la place à d'autres qui avaient envie de le faire...C'est une réponse très empirique, pas du tout doctrinale...

A. G.-B. Pour revenir à l'aspect institutionnel de la question, lesCIES vous paraissent-Us « faire le tour de la question » ou sont-Us seule¬ment un premier pas ? ...

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112 Recherche et Formation

P. L. Non, ils ne « font pas le tour », puisqu'on a évoqué undeuxième point important qui est l'évaluation des activités d'enseigne¬ment. Les CIES n'apportent rien en ce domaine, mais c'est au moins unpas dans la bonne direction. Les jeunes que je vois autour de moi saventque le monitorat existe et se précipitent pour y être candidats (et poureux U ne s'agit pas seulement d'un bonus financier). C'est donc une voiepour la formation des jeunes, et c'est la reconnaissance institutionneUequ'il y a un problème à résoudre. Il faudra, dans cinq ans peut-être,faire un bilan.

112 Recherche et Formation

P. L. Non, ils ne « font pas le tour », puisqu'on a évoqué undeuxième point important qui est l'évaluation des activités d'enseigne¬ment. Les CIES n'apportent rien en ce domaine, mais c'est au moins unpas dans la bonne direction. Les jeunes que je vois autour de moi saventque le monitorat existe et se précipitent pour y être candidats (et poureux U ne s'agit pas seulement d'un bonus financier). C'est donc une voiepour la formation des jeunes, et c'est la reconnaissance institutionneUequ'il y a un problème à résoudre. Il faudra, dans cinq ans peut-être,faire un bilan.

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Recherche et Formation N° J5 Avril 1994

AUTOUR DES MOTS

Comment inviter à une réflexion pluraliste ? Quels raccour¬

cis, quels stimulants trouver pour faciliter quelque peu lecheminement de la pensée ? Ne risque-t-on pas de se perdredans la forêt épaisse des thèses, des ouvrages, des articlesscientifiques et des magazines ? A-t-on encore le couraged'ouvrir un traité de pédagogie, lorsque l'on sait que le che¬

min de patience est à perte d'horizon, que les bibliographiesdeviennent exponentielles, que l'effort supposé n'est pas àla mesure d'une vie de parent, d'enseignant ou de forma¬teur ?

Un nouveau regard, une autre manière d'explorer le présentsont à inventer. Pour cela, il nous faut des outils, des outilspour penser les changements qui s'opèrent sous nos yeux etdes outils pour changer nos manières de les penser.

Osons l'admettre, le temps d'une rubrique : la réflexion estparfois plus stimulée par des formulations brèves que par de

longs discours. Aussi est-ce au travers d'un choix de cita¬

tions significatives, empruntées à des époques, des lieux etdes horizons différents, que nous proposons ici, dans unesorte de face à face interactif de points de vue et de défini¬tions, une halte pensive autour de quelques mots.

Recherche et Formation N° J5 Avril 1994

AUTOUR DES MOTS

Comment inviter à une réflexion pluraliste ? Quels raccour¬

cis, quels stimulants trouver pour faciliter quelque peu lecheminement de la pensée ? Ne risque-t-on pas de se perdredans la forêt épaisse des thèses, des ouvrages, des articlesscientifiques et des magazines ? A-t-on encore le couraged'ouvrir un traité de pédagogie, lorsque l'on sait que le che¬

min de patience est à perte d'horizon, que les bibliographiesdeviennent exponentielles, que l'effort supposé n'est pas àla mesure d'une vie de parent, d'enseignant ou de forma¬teur ?

Un nouveau regard, une autre manière d'explorer le présentsont à inventer. Pour cela, il nous faut des outils, des outilspour penser les changements qui s'opèrent sous nos yeux etdes outils pour changer nos manières de les penser.

Osons l'admettre, le temps d'une rubrique : la réflexion estparfois plus stimulée par des formulations brèves que par de

longs discours. Aussi est-ce au travers d'un choix de cita¬

tions significatives, empruntées à des époques, des lieux etdes horizons différents, que nous proposons ici, dans unesorte de face à face interactif de points de vue et de défini¬tions, une halte pensive autour de quelques mots.

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114 Recherche et Formation

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR / UNIVERSITÉ

Entre les deux mots : « enseignement supérieur » et »université » ilexiste une différence d'âge. L'un : «Université » est très ancien, puisqueles premières universités sont nées à la fin du XIIe siècle, l'autre :

« Enseignement supérieur » est une expression relativement récente etdont l'usage s'est répandu avec l'organisation de l'enseignement en sys¬

tème hiérarchisé par niveaux.Que l'Université ait une longue histoire n'est pas indifférent au sens

actuel du mot. Au cours des siècles et à travers de nombreuses métamor¬phoses, U s'est élaboré une représentation complexe de cette institutionqui, à bien des égards, est devenue un mythe.

Les mutations actueUes de l'enseignement supérieur et notamment samassification et la diversification professionneUe des fiUères, modifientles caractéristiques des universités.

Ainsi, la confrontation de l'attachement aux traditions et du souci desatisfaire aux exigences des récentes évolutions permet de comprendreque l'on observe, actuellement, des emplois très variés de ces deuxtermes ; parfois, Us sont utilisés indifféremment, parfois on les oppose.Que signifie cette incertitude dans les usages ? En quoi est-elle révélatricedes problèmes qui se posent à ce niveau d'enseignement et à ce typed'institutions ?

Les différences de sens que l'on introduit dans l'usage de ces mots se

placent dans des registres différents : elles vont de simples distinctionsinstitutionnelles jusqu'à des divergences concernant les missions desUniversités.

Actuellement et de plus en plus souvent, les deux mots sont accolés etmême employés l'un pour l'autre. Comment interpréter ce phénomène ?

Quelles relations établir entre ce rapprochement plus ou moins systéma¬tique, l'évolution du métier des enseignants du Supérieur et leur éven¬tuelle formation pédagogique ?

Telles sont, à travers une brève analyse des usages de ces deux mots,les questions que nous allons aborder.

Les mots ont une histoire

« La jeune université de Paris (début du XIII'' siècle) représentait déjàtrois choses essentielles. C'était d'abord une confrérie, une associationde défense et d'entraide mutuelle... elle donnait à ses membres la garan¬tie d'une assistance charitable... L'Université c'était aussi un métierorganisé et que l'on peut à cet égard, malgré la spécificité du statut de ses

114 Recherche et Formation

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR / UNIVERSITÉ

Entre les deux mots : « enseignement supérieur » et »université » ilexiste une différence d'âge. L'un : «Université » est très ancien, puisqueles premières universités sont nées à la fin du XIIe siècle, l'autre :

« Enseignement supérieur » est une expression relativement récente etdont l'usage s'est répandu avec l'organisation de l'enseignement en sys¬

tème hiérarchisé par niveaux.Que l'Université ait une longue histoire n'est pas indifférent au sens

actuel du mot. Au cours des siècles et à travers de nombreuses métamor¬phoses, U s'est élaboré une représentation complexe de cette institutionqui, à bien des égards, est devenue un mythe.

Les mutations actueUes de l'enseignement supérieur et notamment samassification et la diversification professionneUe des fiUères, modifientles caractéristiques des universités.

Ainsi, la confrontation de l'attachement aux traditions et du souci desatisfaire aux exigences des récentes évolutions permet de comprendreque l'on observe, actuellement, des emplois très variés de ces deuxtermes ; parfois, Us sont utilisés indifféremment, parfois on les oppose.Que signifie cette incertitude dans les usages ? En quoi est-elle révélatricedes problèmes qui se posent à ce niveau d'enseignement et à ce typed'institutions ?

Les différences de sens que l'on introduit dans l'usage de ces mots se

placent dans des registres différents : elles vont de simples distinctionsinstitutionnelles jusqu'à des divergences concernant les missions desUniversités.

Actuellement et de plus en plus souvent, les deux mots sont accolés etmême employés l'un pour l'autre. Comment interpréter ce phénomène ?

Quelles relations établir entre ce rapprochement plus ou moins systéma¬tique, l'évolution du métier des enseignants du Supérieur et leur éven¬tuelle formation pédagogique ?

Telles sont, à travers une brève analyse des usages de ces deux mots,les questions que nous allons aborder.

Les mots ont une histoire

« La jeune université de Paris (début du XIII'' siècle) représentait déjàtrois choses essentielles. C'était d'abord une confrérie, une associationde défense et d'entraide mutuelle... elle donnait à ses membres la garan¬tie d'une assistance charitable... L'Université c'était aussi un métierorganisé et que l'on peut à cet égard, malgré la spécificité du statut de ses

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Autour des mots 115

membres, rapprocher des autres métiers urbains... Enfin l'Universitéétait ce que nous appellerions aujourd'hui un "pouvoir inteUectuel". EUeéchappait totalement au cadre strictement diocésain jusque-là assignépar l'Eglise à l'activité scolaire. Son rayonnement s'étendait à toutl'Occident... »

(Histoire des Universités de France, sous la direction de J. Verger ;

Privât, Toulouse, 1986 ; p. 31-32)

En effet, l'Université de Paris est née autour de l'association desmaîtres es Arts et Théologie. Quant aux Facultés, il s'agissait de laréunion des maîtres de chaque discipUne, c'est-à-dire : les Arts (les 7 artslibéraux : grammaire, rhétorique, dialectique, géométrie, arithmétique,musique, astronomie) et les trois facultés supérieures : droit, médecine etthéologie.

Le premier sens du mot est bien celui de « communauté ». Si l'on se

reporte au Grand Dictionnaire encyclopédique Larousse, l'une des défi¬nitions données à « Université » est :

« Ensemble du personnel enseignant et administratif des Universitésfrançaises. »

Le deuxième modèle est celui de l'Université impériale :

« Art. 1er. II sera formé, sous le nom d'Université impériale, un corpschargé exclusivement de l'enseignement et de l'éducation pubUque danstout l'Empire. »

(Décret-loi du 10 mai 1806)

Cette université, dotée du monopole d'enseigner à tous les niveaux,réunissait tous les étabUssements d'enseignement qui existaient ; le fleu¬ron en était les Lycées, héritiers des collèges d'Ancien Régime. Parcontre, les Facultés qui, à l'époque moderne, avaient souffert de laconcurrence des collèges et de l'intervention royale, deviennent, dumoins les Facultés dites « Académiques », Lettres et Sciences, des appen¬dices des Lycées et sont réduites à la collation des grades ; à côté d'eUescontinuent de se développer des Écoles supérieures professionnelles etl'ENS pour la formation des enseignants des Lycées.

Nous retrouvons trace de cette conception dans une autre définitiondu Grand Larousse encyclopédique :

« Ensemble des membres de l'enseignement public des divers degrésdépendant de l'Éducation nationale. »

C'est à la fin du XIXe siècle que renaissent les Universités qui, parAcadémie, regroupent les Facultés. La Troisième République consent desefforts budgétaires considérables qui permettent l'essor de la recherche

Autour des mots 115

membres, rapprocher des autres métiers urbains... Enfin l'Universitéétait ce que nous appellerions aujourd'hui un "pouvoir inteUectuel". EUeéchappait totalement au cadre strictement diocésain jusque-là assignépar l'Eglise à l'activité scolaire. Son rayonnement s'étendait à toutl'Occident... »

(Histoire des Universités de France, sous la direction de J. Verger ;

Privât, Toulouse, 1986 ; p. 31-32)

En effet, l'Université de Paris est née autour de l'association desmaîtres es Arts et Théologie. Quant aux Facultés, il s'agissait de laréunion des maîtres de chaque discipUne, c'est-à-dire : les Arts (les 7 artslibéraux : grammaire, rhétorique, dialectique, géométrie, arithmétique,musique, astronomie) et les trois facultés supérieures : droit, médecine etthéologie.

Le premier sens du mot est bien celui de « communauté ». Si l'on se

reporte au Grand Dictionnaire encyclopédique Larousse, l'une des défi¬nitions données à « Université » est :

« Ensemble du personnel enseignant et administratif des Universitésfrançaises. »

Le deuxième modèle est celui de l'Université impériale :

« Art. 1er. II sera formé, sous le nom d'Université impériale, un corpschargé exclusivement de l'enseignement et de l'éducation pubUque danstout l'Empire. »

(Décret-loi du 10 mai 1806)

Cette université, dotée du monopole d'enseigner à tous les niveaux,réunissait tous les étabUssements d'enseignement qui existaient ; le fleu¬ron en était les Lycées, héritiers des collèges d'Ancien Régime. Parcontre, les Facultés qui, à l'époque moderne, avaient souffert de laconcurrence des collèges et de l'intervention royale, deviennent, dumoins les Facultés dites « Académiques », Lettres et Sciences, des appen¬dices des Lycées et sont réduites à la collation des grades ; à côté d'eUescontinuent de se développer des Écoles supérieures professionnelles etl'ENS pour la formation des enseignants des Lycées.

Nous retrouvons trace de cette conception dans une autre définitiondu Grand Larousse encyclopédique :

« Ensemble des membres de l'enseignement public des divers degrésdépendant de l'Éducation nationale. »

C'est à la fin du XIXe siècle que renaissent les Universités qui, parAcadémie, regroupent les Facultés. La Troisième République consent desefforts budgétaires considérables qui permettent l'essor de la recherche

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116 Recherche et Formation

universitaire, surtout dans les Facultés de Sciences, les Facultés deLettres restant plus exclusivement en relation avec l'enseignement secon¬daire. On commence à parler d'« enseignement supérieur » ainsi LouisLiard, directeur de l'enseignement supérieur, pubUe en 1890 un ouvrageintitulé : « L'enseignement supérieur en France, 1789-1889 ».

Avec les modifications apportées par la loi Faure qui, notamment,supprime les facultés pour les remplacer par des UER (Unités d'Ensei¬gnement et de Recherche) destinées à être pluridiscipUnaires et qui veutfaire glisser le pouvoir des Doyens de Facultés aux Présidents et auxConseUs d'Université, nous retrouvons cette organisation dans le GrandLarousse (édition de 1985 qui ne prend pas en compte la loi Savary qui atransformé les UER en UFR : Unités de Formation et de Recherche) :

« Ensemble d'établissements scolaires relevant de l'enseignement supé¬rieur (UER, instituts, écoles) regroupés dans une circonscription admi¬nistrative. »

La Faculté, en tant qu'institution, n'a donc plus d'existence légale etpourtant le mot en entier ou en abrégé (« fac ») continue d'être employé.Ainsi, Pierre Bourdieu, dans son ouvrage Homo Academicus (1984) l'em¬ploie constamment à la place d'UER ; U intitule même le chapitre 2 « leconflit des Facultés ». La Lettre du journal l'Étudiant titre, dans sonnuméro 105 (4 février 1991) : « les facs vers la professionnaUsation »,voulant ainsi désigner plutôt les Universités. Il est inutile de multipUerles exemples, sans doute les habitudes de langage ont-eUes la vie dure etle mot « Faculté » a-t-il l'énorme avantage d'autoriser l'usage d'uneabréviation. Pourtant, dans certains cas, la pérennité de ce terme,comme de celui de Doyen qui lui est associé, montre que les nouveUesformes d'organisation issues de mai 68 ne sont pas encore complètementpassées dans les moeurs.

Cette brève incursion dans le temps permet de comprendre que lesdifférences que l'on apporte au sens donné aux deux termes : « enseigne¬ment supérieur » et « université » se situent dans des registres distincts etappeUent des interprétations différentes.

DU SENS DES DIFFERENCES DE SENS

La définition qui consiste à faire des Universités une catégorie d'éta-bUssements d'enseignement supérieur est d'ordre structurel ; c'est sansdoute celle sur laqueUe on s'accorde le plus facilement.

Tel est d'aUleurs le point de vue des organisations internationales, etnotamment de l'UNESCO qui emploie systématiquement l'expression

116 Recherche et Formation

universitaire, surtout dans les Facultés de Sciences, les Facultés deLettres restant plus exclusivement en relation avec l'enseignement secon¬daire. On commence à parler d'« enseignement supérieur » ainsi LouisLiard, directeur de l'enseignement supérieur, pubUe en 1890 un ouvrageintitulé : « L'enseignement supérieur en France, 1789-1889 ».

Avec les modifications apportées par la loi Faure qui, notamment,supprime les facultés pour les remplacer par des UER (Unités d'Ensei¬gnement et de Recherche) destinées à être pluridiscipUnaires et qui veutfaire glisser le pouvoir des Doyens de Facultés aux Présidents et auxConseUs d'Université, nous retrouvons cette organisation dans le GrandLarousse (édition de 1985 qui ne prend pas en compte la loi Savary qui atransformé les UER en UFR : Unités de Formation et de Recherche) :

« Ensemble d'établissements scolaires relevant de l'enseignement supé¬rieur (UER, instituts, écoles) regroupés dans une circonscription admi¬nistrative. »

La Faculté, en tant qu'institution, n'a donc plus d'existence légale etpourtant le mot en entier ou en abrégé (« fac ») continue d'être employé.Ainsi, Pierre Bourdieu, dans son ouvrage Homo Academicus (1984) l'em¬ploie constamment à la place d'UER ; U intitule même le chapitre 2 « leconflit des Facultés ». La Lettre du journal l'Étudiant titre, dans sonnuméro 105 (4 février 1991) : « les facs vers la professionnaUsation »,voulant ainsi désigner plutôt les Universités. Il est inutile de multipUerles exemples, sans doute les habitudes de langage ont-eUes la vie dure etle mot « Faculté » a-t-il l'énorme avantage d'autoriser l'usage d'uneabréviation. Pourtant, dans certains cas, la pérennité de ce terme,comme de celui de Doyen qui lui est associé, montre que les nouveUesformes d'organisation issues de mai 68 ne sont pas encore complètementpassées dans les moeurs.

Cette brève incursion dans le temps permet de comprendre que lesdifférences que l'on apporte au sens donné aux deux termes : « enseigne¬ment supérieur » et « université » se situent dans des registres distincts etappeUent des interprétations différentes.

DU SENS DES DIFFERENCES DE SENS

La définition qui consiste à faire des Universités une catégorie d'éta-bUssements d'enseignement supérieur est d'ordre structurel ; c'est sansdoute celle sur laqueUe on s'accorde le plus facilement.

Tel est d'aUleurs le point de vue des organisations internationales, etnotamment de l'UNESCO qui emploie systématiquement l'expression

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Autour des mots 117

« enseignement supérieur » dans les publications, les intitulés de col¬loques... La division qui, au siège de l'UNESCO, est chargée de ces ques¬tions s'appeUe : « Division de l'enseignement supérieur et de la Recher¬che » et comporte une section « Enseignement supérieur ». La situationextrêmement hétérogène de ce niveau d'enseignement dans les Étatsmembres n'autorise guère d'autre solution.

Toutefois, cela ne signifie pas que la définition de cette expression soitaisée et qu'eUe soit la seule à être utiUsée. Dans son numéro 246 janvier-mars 1988), le Bulletin du BIE (Bureau international d'Éducation)publie une bibliographie annotée sur l'Enseignement Supérieur en vue depréparer la 41e session de la Conférence internationale de l'Éducationdont le thème était : « La diversification de l'enseignement post secon¬daire par rapport à l'emploi ». Dans l'introduction à cette bibUographie,l'auteur examine le sens du terme « enseignement supérieur » et sonextension ; il observe que se développent de nouveaux secteurs ce qui enélargit l'appUcation :

« Le concept d'enseignement supérieur se limitait traditionneUement auxuniversités et à quelques grandes écoles prestigieuses de formation pro¬fessionnelle ou artistique. Les changements contextuels intervenus aucours de ces dernières décennies nécessitaient soit un élargissement duconcept soit l'introduction de nouveaux termes. »

A côté d'« enseignement supérieur » dont l'UNESCO a convenu, en1962, qu'il « est constitué des enseignements de tous types (académique,professionnel, technique ou normal) dispensés dans des institutions teUesque les universités, les écoles supérieures, les instituts techniques et lesécoles normales pour lesquelles :

a) la condition essentielle d'admission est une éducation secondairecomplète,

b) l'âge d'admission habituel est de 18 ans environ,c) les cours conduisent à l'octroi d'un titre (grade, diplôme ou certifi¬

cat d'enseignement supérieur). »

... sont utilisés des mots comme enseignement « post secondaire »,« tertiaire », « post obligatoire ». En effet, la prise en compte de laFormation Continue et de certaines procédures de vaUdation d'acquispouvaient rendre difficUes à remplir les conditions posées par la défini¬tion de 1962.

Ce sont des définitions de ce genre qu'adoptent aussi bien la loiSavary de 1984 que la loi d'orientation sur l'Éducation de 1989. Cettedernière parle « des écoles, coUèges, Lycées et établissements d'ensei¬gnement supérieur », tandis que la loi Savary affirme :

Autour des mots 117

« enseignement supérieur » dans les publications, les intitulés de col¬loques... La division qui, au siège de l'UNESCO, est chargée de ces ques¬tions s'appeUe : « Division de l'enseignement supérieur et de la Recher¬che » et comporte une section « Enseignement supérieur ». La situationextrêmement hétérogène de ce niveau d'enseignement dans les Étatsmembres n'autorise guère d'autre solution.

Toutefois, cela ne signifie pas que la définition de cette expression soitaisée et qu'eUe soit la seule à être utiUsée. Dans son numéro 246 janvier-mars 1988), le Bulletin du BIE (Bureau international d'Éducation)publie une bibliographie annotée sur l'Enseignement Supérieur en vue depréparer la 41e session de la Conférence internationale de l'Éducationdont le thème était : « La diversification de l'enseignement post secon¬daire par rapport à l'emploi ». Dans l'introduction à cette bibUographie,l'auteur examine le sens du terme « enseignement supérieur » et sonextension ; il observe que se développent de nouveaux secteurs ce qui enélargit l'appUcation :

« Le concept d'enseignement supérieur se limitait traditionneUement auxuniversités et à quelques grandes écoles prestigieuses de formation pro¬fessionnelle ou artistique. Les changements contextuels intervenus aucours de ces dernières décennies nécessitaient soit un élargissement duconcept soit l'introduction de nouveaux termes. »

A côté d'« enseignement supérieur » dont l'UNESCO a convenu, en1962, qu'il « est constitué des enseignements de tous types (académique,professionnel, technique ou normal) dispensés dans des institutions teUesque les universités, les écoles supérieures, les instituts techniques et lesécoles normales pour lesquelles :

a) la condition essentielle d'admission est une éducation secondairecomplète,

b) l'âge d'admission habituel est de 18 ans environ,c) les cours conduisent à l'octroi d'un titre (grade, diplôme ou certifi¬

cat d'enseignement supérieur). »

... sont utilisés des mots comme enseignement « post secondaire »,« tertiaire », « post obligatoire ». En effet, la prise en compte de laFormation Continue et de certaines procédures de vaUdation d'acquispouvaient rendre difficUes à remplir les conditions posées par la défini¬tion de 1962.

Ce sont des définitions de ce genre qu'adoptent aussi bien la loiSavary de 1984 que la loi d'orientation sur l'Éducation de 1989. Cettedernière parle « des écoles, coUèges, Lycées et établissements d'ensei¬gnement supérieur », tandis que la loi Savary affirme :

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118 Recherche et Formation

« Le service pubUc de l'enseignement supérieur comprend l'ensemble desformations post secondaires relevant des différents départements minis¬tériels. »

(Loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 ; Art. 1er)

Cette loi a été vivement critiquée par de nombreux universitaires etpour ce qui nous intéresse ici, on peut citer :

« ... la loi dite Savary repose sur (la) notion... de "service public del'enseignement supérieur" ... On y cherche vainement une indicationrelative à ce qui, dans ce service public, spécifie l'Université relativementà ce que la loi appelle les autres "types d'étabUssements pubUcs à carac¬tère scientifique, culturel et professionnel" ... L'Université est ainsi fon¬due dans un ensemble flou, dont la seule caractéristique est d'être "postsecondaire" c'est-à-dire étroitement appareillée à un cursus scolaire.C'est cette réduction de l'Université à une part du « post secondaire »

qui fonde sa mission d'accueU. ... Passe ainsi à la trappe la spécificité dela mission universitaire qui consiste à assurer le progrès et la transmis¬sion des connaissances dans tous les champs du savoir. »

(Alain Supiot « Sur l'ouverture de l'Université » ;

Savoir, Education, Formation, n° 41 989 ; pp. 658-659)

Avec cette remarque nous entrons dans un autre registre ; la diffé¬rence là est située non pas au niveau structurel des étabUssements maisau niveau des missions respectives des universités et de l'enseignementsupérieur.

Dans cette perspective on considère que les Universités se distinguentdes autres établissements d'enseignement supérieur d'une part en raisonde l'association qu'elles établissent entre enseignement et recherche(notons que, dans le dernier gouvernement, a été créé de nouveau unministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche), en donnant lapriorité à cette dernière et d'autre part en raison du caractère plus cul¬turel que professionnel qu'elles donnent à leurs enseignements du faitmême de leurs activités de recherche. Pour bien mettre en lumière cesdifférences, certains auteurs utilisent l'expression : « l'idée d'Univer¬sité » :

« Nous confondons, à tort, l'idée d'Université avec l'enseignement supé¬rieur... L'idée d'Université se définit comme école d'humanité, lieu de« haute culture », centre de recherche libre et désintéressée, commu¬nauté humaine préoccupée par la recomposition d'un savoir émietté, lieud'exercice critique de la pensée... Son rôle propre réside dans laconstante recherche du vrai, le rejet du faux et l'éducation du discerne¬ment.

118 Recherche et Formation

« Le service pubUc de l'enseignement supérieur comprend l'ensemble desformations post secondaires relevant des différents départements minis¬tériels. »

(Loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 ; Art. 1er)

Cette loi a été vivement critiquée par de nombreux universitaires etpour ce qui nous intéresse ici, on peut citer :

« ... la loi dite Savary repose sur (la) notion... de "service public del'enseignement supérieur" ... On y cherche vainement une indicationrelative à ce qui, dans ce service public, spécifie l'Université relativementà ce que la loi appelle les autres "types d'étabUssements pubUcs à carac¬tère scientifique, culturel et professionnel" ... L'Université est ainsi fon¬due dans un ensemble flou, dont la seule caractéristique est d'être "postsecondaire" c'est-à-dire étroitement appareillée à un cursus scolaire.C'est cette réduction de l'Université à une part du « post secondaire »

qui fonde sa mission d'accueU. ... Passe ainsi à la trappe la spécificité dela mission universitaire qui consiste à assurer le progrès et la transmis¬sion des connaissances dans tous les champs du savoir. »

(Alain Supiot « Sur l'ouverture de l'Université » ;

Savoir, Education, Formation, n° 41 989 ; pp. 658-659)

Avec cette remarque nous entrons dans un autre registre ; la diffé¬rence là est située non pas au niveau structurel des étabUssements maisau niveau des missions respectives des universités et de l'enseignementsupérieur.

Dans cette perspective on considère que les Universités se distinguentdes autres établissements d'enseignement supérieur d'une part en raisonde l'association qu'elles établissent entre enseignement et recherche(notons que, dans le dernier gouvernement, a été créé de nouveau unministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche), en donnant lapriorité à cette dernière et d'autre part en raison du caractère plus cul¬turel que professionnel qu'elles donnent à leurs enseignements du faitmême de leurs activités de recherche. Pour bien mettre en lumière cesdifférences, certains auteurs utilisent l'expression : « l'idée d'Univer¬sité » :

« Nous confondons, à tort, l'idée d'Université avec l'enseignement supé¬rieur... L'idée d'Université se définit comme école d'humanité, lieu de« haute culture », centre de recherche libre et désintéressée, commu¬nauté humaine préoccupée par la recomposition d'un savoir émietté, lieud'exercice critique de la pensée... Son rôle propre réside dans laconstante recherche du vrai, le rejet du faux et l'éducation du discerne¬ment.

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Autour des mots 119

Ainsi définie, l'idée d'Université ne gouverne que très partieUement nosenseignements supérieurs, en France tout particuUèrement. »

(Alain Bienaymé, L'enseignement supérieur et l'idée d'Université ;

Economica ; 1986 ; pp. 2-3)

La conséquence pour les enseignants des universités c'est qu'ils sontd'abord des chercheurs, que les enseignements qu'ils donnent se situenten priorité dans le cadre de leurs recherches et que leur indépendance à

l'égard de l'institution qui les emploient est très grande (le ConseilConstitutionnel a confirmé leur inamovibiUté par une décision du 20 jan¬vier 1984).

Dans le même ouvrage, Alain Bienaymé note, p. 5 :

« Les libertés académiques comme les loisirs académiques sont mal com¬pris à une époque qui relègue sa "vaisseUe d'or" dans les musées ou lescoffres forts. La Ubre alliance d'une recherche nécessairement critique etd'un enseignement suffisamment assuré dans ses conclusions résulte enoutre d'une alchimie mystérieuse et dérangeante. »

Certains pensent qu'il est impossible de préserver cet état d'espritdans une université de masse et donc qu'il convient de restreindre l'accèsà l'Université quitte à créer d'autres étabUssements pour des enseigne¬ments dont l'articulation étroite avec la recherche fondamentale n'estpas nécessaire.

D'autres, favorables à l'extension de l'Université, conçue comme lapièce maîtresse de l'enseignement supérieur, souhaitent préserver cetétat d'esprit même dans une université de masse.« Depuis quelques années, 1985 environ... l'effectif des étudiants quis'était stabilisé a recommencé à croître, par dizaines de mUUers... Il fautréagir. . . Le développement universitaire est désormais un des leviers dudéveloppement local, économique bien sûr, mais aussi social et culturel...[Mais] U faut ici tenir compte de la nature particulière de l'enseignementsupérieur, qui réside dans son Uen à la recherche. R serait totalementdéraisonnable de vouloir créer dans chaque chef-lieu de départementune université complète de niveau européen. Ce serait absurde parce quece serait impossible. Une Université n'est pas un Lycée supérieur, et U

n'y a pas d'université digne de ce nom sans bibUothèque et sans labora¬toire. »

(Michel Rocard. « Universités 2000. Quelle Universitépour demain ? » ; la Documentation française ; 1991 ;

séance d'ouverture des Assises nationalesde l'enseignement supérieur, p. 13)

Autour des mots 119

Ainsi définie, l'idée d'Université ne gouverne que très partieUement nosenseignements supérieurs, en France tout particuUèrement. »

(Alain Bienaymé, L'enseignement supérieur et l'idée d'Université ;

Economica ; 1986 ; pp. 2-3)

La conséquence pour les enseignants des universités c'est qu'ils sontd'abord des chercheurs, que les enseignements qu'ils donnent se situenten priorité dans le cadre de leurs recherches et que leur indépendance à

l'égard de l'institution qui les emploient est très grande (le ConseilConstitutionnel a confirmé leur inamovibiUté par une décision du 20 jan¬vier 1984).

Dans le même ouvrage, Alain Bienaymé note, p. 5 :

« Les libertés académiques comme les loisirs académiques sont mal com¬pris à une époque qui relègue sa "vaisseUe d'or" dans les musées ou lescoffres forts. La Ubre alliance d'une recherche nécessairement critique etd'un enseignement suffisamment assuré dans ses conclusions résulte enoutre d'une alchimie mystérieuse et dérangeante. »

Certains pensent qu'il est impossible de préserver cet état d'espritdans une université de masse et donc qu'il convient de restreindre l'accèsà l'Université quitte à créer d'autres étabUssements pour des enseigne¬ments dont l'articulation étroite avec la recherche fondamentale n'estpas nécessaire.

D'autres, favorables à l'extension de l'Université, conçue comme lapièce maîtresse de l'enseignement supérieur, souhaitent préserver cetétat d'esprit même dans une université de masse.« Depuis quelques années, 1985 environ... l'effectif des étudiants quis'était stabilisé a recommencé à croître, par dizaines de mUUers... Il fautréagir. . . Le développement universitaire est désormais un des leviers dudéveloppement local, économique bien sûr, mais aussi social et culturel...[Mais] U faut ici tenir compte de la nature particulière de l'enseignementsupérieur, qui réside dans son Uen à la recherche. R serait totalementdéraisonnable de vouloir créer dans chaque chef-lieu de départementune université complète de niveau européen. Ce serait absurde parce quece serait impossible. Une Université n'est pas un Lycée supérieur, et U

n'y a pas d'université digne de ce nom sans bibUothèque et sans labora¬toire. »

(Michel Rocard. « Universités 2000. Quelle Universitépour demain ? » ; la Documentation française ; 1991 ;

séance d'ouverture des Assises nationalesde l'enseignement supérieur, p. 13)

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120 Recherche et Formation

Le développement des formations professionnalisées paraît aussi encontradiction avec « l'idée d'université ».« L'idée d'Université a toujours évolué dialectiquement entre l'Universitépour la science et la recherche de la vérité d'une part et l'UniversitéfonctionneUe en relation avec la société poUtique ou économique d'autrepart.Certes l'Université a toujours eu une fonction professionnalisante pourles cadres érudits : clercs, médecins et juristes, mais elle a toujours tenuà être garante de la science et de son développement. »

(Claude PAGES « L'Université écartelée :

pour une gestion des ressources humaines » ;

Savoir, Éducation, Formation ; n° 2, 1992 ; p. 262)

On sent bien pourtant que, de ce point de vue il existe une différenceentre ces « cadres érudits » et les professions industrielles et commer¬ciales dont les cadres étaient traditionneUement formés par les GrandesÉcoles et pour lesqueUes les Universités sont désormais invitées à créerdes fiUères nouveUes. Comme l'écrit le CNE (Comité National d'Evalua¬tion) : « les formations juridiques et médicales, la formation des profes¬seurs étaient tout naturellement imprégnées de culture » (« Prioritéspour l'Université » ; la Documentation française ; 1989 ; p. 27), mais,comme le souligne d'aUleurs aussitôt le rapport du CNE, pourquoi lesnouveUes professions seraient-eUes dépourvues de culture ? encore quel'opposition entre l'Université-culture et l'Université-professionnaUsa-tion soit toujours présente dans certains discours. La différence est peut-être à chercher du côté de l'indépendance en tant que garantie de l'espritcritique ; médecins et juristes exercent, du moins traditionneUement, desprofessions libérales, les magistrats comme les professeurs sont inamo¬vibles ; par contre les cadres de l'industrie et du commerce sont, dans laplupart des cas, soumis aux contraintes du système de production. Lesmédecins comme les juristes sont aussi des professeurs : on est entre soi ;

par contre, la création et l'animation de formations pour les nouvellesprofessions impUquent des relations avec l'industrie et le commerce avecles dangers que cela suppose pour l'esprit universitaire.

Certains, par contre voient dans la tradition cultureUe et critique,dans l'habitude que les Universités ont de la recherche, des atouts pources nouveUes formations professionneUes.«... l'Université peut ici jouer de son articulation à la recherche. La for¬mation par la recherche me paraît, en effet, l'une des meilleures façonsde favoriser l'adaptation professionnelle, tout en apportant aux entre¬prises des ressources d'innovation essentieUes. »

(Michel Rocard ; op. cit., p. 12)

120 Recherche et Formation

Le développement des formations professionnalisées paraît aussi encontradiction avec « l'idée d'université ».« L'idée d'Université a toujours évolué dialectiquement entre l'Universitépour la science et la recherche de la vérité d'une part et l'UniversitéfonctionneUe en relation avec la société poUtique ou économique d'autrepart.Certes l'Université a toujours eu une fonction professionnalisante pourles cadres érudits : clercs, médecins et juristes, mais elle a toujours tenuà être garante de la science et de son développement. »

(Claude PAGES « L'Université écartelée :

pour une gestion des ressources humaines » ;

Savoir, Éducation, Formation ; n° 2, 1992 ; p. 262)

On sent bien pourtant que, de ce point de vue il existe une différenceentre ces « cadres érudits » et les professions industrielles et commer¬ciales dont les cadres étaient traditionneUement formés par les GrandesÉcoles et pour lesqueUes les Universités sont désormais invitées à créerdes fiUères nouveUes. Comme l'écrit le CNE (Comité National d'Evalua¬tion) : « les formations juridiques et médicales, la formation des profes¬seurs étaient tout naturellement imprégnées de culture » (« Prioritéspour l'Université » ; la Documentation française ; 1989 ; p. 27), mais,comme le souligne d'aUleurs aussitôt le rapport du CNE, pourquoi lesnouveUes professions seraient-eUes dépourvues de culture ? encore quel'opposition entre l'Université-culture et l'Université-professionnaUsa-tion soit toujours présente dans certains discours. La différence est peut-être à chercher du côté de l'indépendance en tant que garantie de l'espritcritique ; médecins et juristes exercent, du moins traditionneUement, desprofessions libérales, les magistrats comme les professeurs sont inamo¬vibles ; par contre les cadres de l'industrie et du commerce sont, dans laplupart des cas, soumis aux contraintes du système de production. Lesmédecins comme les juristes sont aussi des professeurs : on est entre soi ;

par contre, la création et l'animation de formations pour les nouvellesprofessions impUquent des relations avec l'industrie et le commerce avecles dangers que cela suppose pour l'esprit universitaire.

Certains, par contre voient dans la tradition cultureUe et critique,dans l'habitude que les Universités ont de la recherche, des atouts pources nouveUes formations professionneUes.«... l'Université peut ici jouer de son articulation à la recherche. La for¬mation par la recherche me paraît, en effet, l'une des meilleures façonsde favoriser l'adaptation professionnelle, tout en apportant aux entre¬prises des ressources d'innovation essentieUes. »

(Michel Rocard ; op. cit., p. 12)

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Autour des mots 121

On voit donc que les différences que l'on étabUt entre Université etEnseignement supérieur et l'emploi de tel ou tel mot de préférence à telautre, par exemple « Faculté » pour « UFR », n'est pas forcément inno¬cent mais indique souvent des conceptions différentes du rôle des étabUs¬sements d'enseignement supérieur et des universités, des structures desétabUssements, de la nature des enseignements et, en fin de compte, destâches des universitaires ou enseignants-chercheurs.

Or, actuellement, et plus particulièrement en France, on peut obser¬ver une tendance accrue à employer « enseignement supérieur » ou « uni¬versité », sans étabUr vraiment de différence entre les termes, du moinsen apparence.

Vers un emploi indifférencié ?

Lors des Assises nationales de l'Enseignement supérieur (juin 1990),Michel Rocard, alors Premier Ministre aussi bien que Lionel Jospin,ministre de l'Education nationale, ont dans leurs allocutions, employéindifféremment les deux termes l'un pour l'autre. Ainsi Michel Rocard,développant l'idée qu'il convient d'utiliser efficacement les créditsouverts :

« Le succès même de cette poUtique ambitieuse exige qu'elle se traduisepar des améliorations visibles dans le fonctionnement et l'efficacité del'Enseignement Supérieur. C'est dire qu'une réflexion qualitatives'impose, sinon U manquerait au schéma de développement des universi¬tés un élément essentiel. »

Et Lionel Jospin :

« Pendant longtemps, l'accès à l'Université a été une chance ou un privi¬lège. Il est aujourd'hui de plus en plus perçu par les jeunes et par leurfamiUe comme un droit... Les jeunes demandent aussi à notre enseigne¬ment supérieur de répondre à leurs exigences d'égalité, de justice, deprogrès. »

(Op. cit. pp. 10-11 et 18)

De même, le dernier rapport du CNE au Président de la RépubUque,s'intitule : « Universités : la recherche des équilibres - 1989-1993 ». (LaDocumentation française ; 1993) et développe, dans sa deuxième partie,les « réflexions et propositions du Comité concernant la situation del'enseignement supérieur. »

Dans le même ordre d'idées, observons le titre d'une étude récente dela Documentation française : L'Europe des Universités. L'enseignementsupérieur en mutation (1992).

Autour des mots 121

On voit donc que les différences que l'on étabUt entre Université etEnseignement supérieur et l'emploi de tel ou tel mot de préférence à telautre, par exemple « Faculté » pour « UFR », n'est pas forcément inno¬cent mais indique souvent des conceptions différentes du rôle des étabUs¬sements d'enseignement supérieur et des universités, des structures desétabUssements, de la nature des enseignements et, en fin de compte, destâches des universitaires ou enseignants-chercheurs.

Or, actuellement, et plus particulièrement en France, on peut obser¬ver une tendance accrue à employer « enseignement supérieur » ou « uni¬versité », sans étabUr vraiment de différence entre les termes, du moinsen apparence.

Vers un emploi indifférencié ?

Lors des Assises nationales de l'Enseignement supérieur (juin 1990),Michel Rocard, alors Premier Ministre aussi bien que Lionel Jospin,ministre de l'Education nationale, ont dans leurs allocutions, employéindifféremment les deux termes l'un pour l'autre. Ainsi Michel Rocard,développant l'idée qu'il convient d'utiliser efficacement les créditsouverts :

« Le succès même de cette poUtique ambitieuse exige qu'elle se traduisepar des améliorations visibles dans le fonctionnement et l'efficacité del'Enseignement Supérieur. C'est dire qu'une réflexion qualitatives'impose, sinon U manquerait au schéma de développement des universi¬tés un élément essentiel. »

Et Lionel Jospin :

« Pendant longtemps, l'accès à l'Université a été une chance ou un privi¬lège. Il est aujourd'hui de plus en plus perçu par les jeunes et par leurfamiUe comme un droit... Les jeunes demandent aussi à notre enseigne¬ment supérieur de répondre à leurs exigences d'égalité, de justice, deprogrès. »

(Op. cit. pp. 10-11 et 18)

De même, le dernier rapport du CNE au Président de la RépubUque,s'intitule : « Universités : la recherche des équilibres - 1989-1993 ». (LaDocumentation française ; 1993) et développe, dans sa deuxième partie,les « réflexions et propositions du Comité concernant la situation del'enseignement supérieur. »

Dans le même ordre d'idées, observons le titre d'une étude récente dela Documentation française : L'Europe des Universités. L'enseignementsupérieur en mutation (1992).

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122 Recherche et Formation

H est vrai que l'organisation de l'enseignement supérieur ne distinguepas toujours nettement l'enseignement supérieur non universitaire etl'enseignement supérieur universitaire qui associe étroitement l'enseigne¬ment et la recherche ; certains pays, comme la Belgique, le font mais cen'est pas le cas de la France où les Universités englobent des établisse¬ments de formation professionneUe : les IUT (Instituts Universitaires deTechnologie) qui forment en deux ans des techniciens supérieurs ; eUesenglobent de nombreuses écoles d'ingénieurs comme les INSA (InstitutNational de Sciences AppUquées) ou des écoles du concours ENI (EcoleNationale d'ingénieurs) ... les IUFM, les IUP (Institut UniversitaireProfessionnalisé) sans parler des fUières professionnalisées existant àl'intérieur des UFR. Le secteur extra universitaire de l'enseignementsupérieur est assez réduit : les Écoles d'ingénieurs, y compris ceUes quirelèvent d'autres ministères que celui de l'Enseignement supérieur et dela Recherche, ont de petits effectifs, puisqu'eUes exercent une sélectionrigoureuse ; U en va de même des Ecoles supérieures privées notamment,les écoles supérieures de commerce. Les seuls gros bataUlons sont ceuxdes STS (Sections de Techniciens supérieurs) et des CPGE (ClassesPréparatoires aux Grandes Écoles) qui dépendent les unes et les autresdes Lycées.

La complexité de l'organisation est teUe que l'on recule parfois devantles longues périphrases qu'U conviendrait d'employer pour être parfaite¬ment exact.

Néanmoins, il est certain que le rapprochement systématique desdeux termes est un signe de la mutation de l'Université vers uneUniversité de masse ; l'accent est mis d'une part sur la mission d'accueildes jeunes bacheUers dont le nombre est en croissance rapide et d'autrepart sur la diversification des fUières de formation pour conduire cesjeunes à une insertion professionnelle. Cette mutation s'accompagned'une autonomie croissante des universités qui pour être des partenairescrédibles à l'extérieur, doivent pouvoir exister autrement que comme unconglomérat d'UFR, de laboratoires, ou d'instituts.

122 Recherche et Formation

H est vrai que l'organisation de l'enseignement supérieur ne distinguepas toujours nettement l'enseignement supérieur non universitaire etl'enseignement supérieur universitaire qui associe étroitement l'enseigne¬ment et la recherche ; certains pays, comme la Belgique, le font mais cen'est pas le cas de la France où les Universités englobent des établisse¬ments de formation professionneUe : les IUT (Instituts Universitaires deTechnologie) qui forment en deux ans des techniciens supérieurs ; eUesenglobent de nombreuses écoles d'ingénieurs comme les INSA (InstitutNational de Sciences AppUquées) ou des écoles du concours ENI (EcoleNationale d'ingénieurs) ... les IUFM, les IUP (Institut UniversitaireProfessionnalisé) sans parler des fUières professionnalisées existant àl'intérieur des UFR. Le secteur extra universitaire de l'enseignementsupérieur est assez réduit : les Écoles d'ingénieurs, y compris ceUes quirelèvent d'autres ministères que celui de l'Enseignement supérieur et dela Recherche, ont de petits effectifs, puisqu'eUes exercent une sélectionrigoureuse ; U en va de même des Ecoles supérieures privées notamment,les écoles supérieures de commerce. Les seuls gros bataUlons sont ceuxdes STS (Sections de Techniciens supérieurs) et des CPGE (ClassesPréparatoires aux Grandes Écoles) qui dépendent les unes et les autresdes Lycées.

La complexité de l'organisation est teUe que l'on recule parfois devantles longues périphrases qu'U conviendrait d'employer pour être parfaite¬ment exact.

Néanmoins, il est certain que le rapprochement systématique desdeux termes est un signe de la mutation de l'Université vers uneUniversité de masse ; l'accent est mis d'une part sur la mission d'accueildes jeunes bacheUers dont le nombre est en croissance rapide et d'autrepart sur la diversification des fUières de formation pour conduire cesjeunes à une insertion professionnelle. Cette mutation s'accompagned'une autonomie croissante des universités qui pour être des partenairescrédibles à l'extérieur, doivent pouvoir exister autrement que comme unconglomérat d'UFR, de laboratoires, ou d'instituts.

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Autour des mots 123

Quelles conséquencespour les enseignants-chercheurs ?

Notons tout d'abord que l'accent est mis sur leur mission d'enseigne¬ment dont l'importance s'accroît ; la création du monitorat souligne net¬tement cette évolution.« ... la création du monitorat met nettement l'accent sur l'enseignementsupérieur plutôt que sur la carrière de chercheur et encourage uneinsertion dans l'université. »

(CNE « Universités : la recherche des équilibres ».Rapport au Président de la RépubUque ; 1989-1993 ; p. 107)

Or, comme on le sait, les critères de recrutement et de promotionconcernent principalement les activités de recherche d'une part etd'autre part les universités ont, face au CNU et malgré les mesuresrécentes, peu de pouvoirs pour gérer leur personnel. Devant la multipU-cation de leurs tâches, les enseignants-chercheurs sont amenés à faire deschoix et on peut penser que l'on s'achemine vers une séparation des fonc¬tions d'enseignement et de recherche, sinon par la création de deux caté¬gories de personnel du moins par des déroulements de carrière variés. Lesystème de primes différenciées selon que l'on se consacre plus à larecherche, à l'enseignement ou à des tâches administratives est un pasdans ce sens ainsi que la création de promotions spécifiques pour lesenseignants-chercheurs qui se consacrent principalement aux activitéspédagogiques.

Une teUe orientation apparaissait, en tant que possibiUté d'évolution,dans le rapport du CNE de 1989 (« Priorités pour l'Université »).Depuis, les positions ont un peu changé ; en effet, en trois ans (de 1989 a

1992) les effectifs des enseignants du supérieur ont augmenté de 20 %,mais la proportion d'enseignants du second degré détachés dans TES estpassée de 4,5 % en 1988-89 à 16,1 % en 1991-92 (Rapport du CNE 1989-93 ; op. cit.). On voit que l'on s'oriente non pas vers la création de deuxcorps d'enseignants du supérieur, les uns plutôt enseignants, les autresplutôt chercheurs mais vers une diversification des catégories de person¬nels enseignant.«... (le) brassage d'enseignants de différentes origines... peut atteindrele coeur du dispositif : sa culture au sens de « culture d'entreprise »,valeurs de référence... Que donnera ce mélange dans dix ans.. ? Unesecondarisation ou une professionnalisation comme certains le dénoncentdéjà, ou bien un mélange polyvalent plus ouvert, plus apte à répondreaux ambitions que la loi a fixées pour les universités. »

(Claude PAGES ; op. cit., p. 274)

Autour des mots 123

Quelles conséquencespour les enseignants-chercheurs ?

Notons tout d'abord que l'accent est mis sur leur mission d'enseigne¬ment dont l'importance s'accroît ; la création du monitorat souligne net¬tement cette évolution.« ... la création du monitorat met nettement l'accent sur l'enseignementsupérieur plutôt que sur la carrière de chercheur et encourage uneinsertion dans l'université. »

(CNE « Universités : la recherche des équilibres ».Rapport au Président de la RépubUque ; 1989-1993 ; p. 107)

Or, comme on le sait, les critères de recrutement et de promotionconcernent principalement les activités de recherche d'une part etd'autre part les universités ont, face au CNU et malgré les mesuresrécentes, peu de pouvoirs pour gérer leur personnel. Devant la multipU-cation de leurs tâches, les enseignants-chercheurs sont amenés à faire deschoix et on peut penser que l'on s'achemine vers une séparation des fonc¬tions d'enseignement et de recherche, sinon par la création de deux caté¬gories de personnel du moins par des déroulements de carrière variés. Lesystème de primes différenciées selon que l'on se consacre plus à larecherche, à l'enseignement ou à des tâches administratives est un pasdans ce sens ainsi que la création de promotions spécifiques pour lesenseignants-chercheurs qui se consacrent principalement aux activitéspédagogiques.

Une teUe orientation apparaissait, en tant que possibiUté d'évolution,dans le rapport du CNE de 1989 (« Priorités pour l'Université »).Depuis, les positions ont un peu changé ; en effet, en trois ans (de 1989 a

1992) les effectifs des enseignants du supérieur ont augmenté de 20 %,mais la proportion d'enseignants du second degré détachés dans TES estpassée de 4,5 % en 1988-89 à 16,1 % en 1991-92 (Rapport du CNE 1989-93 ; op. cit.). On voit que l'on s'oriente non pas vers la création de deuxcorps d'enseignants du supérieur, les uns plutôt enseignants, les autresplutôt chercheurs mais vers une diversification des catégories de person¬nels enseignant.«... (le) brassage d'enseignants de différentes origines... peut atteindrele coeur du dispositif : sa culture au sens de « culture d'entreprise »,valeurs de référence... Que donnera ce mélange dans dix ans.. ? Unesecondarisation ou une professionnalisation comme certains le dénoncentdéjà, ou bien un mélange polyvalent plus ouvert, plus apte à répondreaux ambitions que la loi a fixées pour les universités. »

(Claude PAGES ; op. cit., p. 274)

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124 Recherche et Formation

Ainsi, la différenciation des tâches et la diversification des métiers àl'intérieur du corps des enseignants chercheurs, s'opère, à travers la dif¬férenciation des étabUssements et, à l'intérieur des étabUssements, à tra¬vers la multipUcation des filières, comme le note le CNE :

« Les principaux facteurs de différenciation entre les tâches et les étabUs¬sements sont souvent Ués à l'intensité des charges d'encadrement pédago¬gique et au caractère professionnaUsé des formations. Les contacts avecles milieux professionnels, le suivi des stages, la participation à desétudes qui intéressent les entreprises, sans pour autant fournir directe¬ment des éléments pour la recherche, contribuent grandement à la réus¬site des fUières...Cette situation (où le développement de la recherche ne résulte pas d'unevolonté de l'établissement) semble en train de changer et pourrait abou¬tir à différencier les étabUssements selon leurs exigences et leurs objectifsen matière de recherche. »

(CNE op. cit., p. 119)

Ces établissements méritent-Us le nom d'universités ? et leur person¬nel le nom d'enseignant-chercheur ?

Cette évolution est sans doute en contradiction avec l'idée d'univer¬sité teUe qu'eUe est traditionneUement définie et des voix se sont élevéespour le dire.« L'enseignement post bac de masse, qui figure maintenant dans la plu¬part des programmes poUtiques... devrait être dispensé dans des centresnouveaux, avec des enseignants à temps plein. Je crois que sa valeur etson originaUté viendraient de son aspect pluridisciplinaire. »

(Pierre-GUle de Gennes ; « L'université est-elle réformable ? »,Le Débat, n° 45 mai-septembre 1987 ; p. 67)

La prépondérance de la fonction d'enseignement suppose que les acti¬vités d'enseignement soient prises en compte pour les promotions et queles compétences pédagogiques pèsent dans les recrutements. Commentapprécier les compétences pédagogiques d'un futur enseignant ? Com¬ment évaluer son efficacité pédagogique ? Une instance comme le CNUn'est peut-être pas la mieux placée pour le faire. Le renforcement del'autonomie des universités, la responsabilisation consécutive à lacontractuaUsation impUquent des pouvoirs accrus dans le domaine de lagestion du personnel. Mais alors, que vont devenir les libertés acadé¬miques ?

« On peut dire que plus l'étabUssement acquiert d'autonomie, devientapte à définir une politique, et plus l'autonomie des enseignants seraorientée, canaUsée, voire réduite. »

(CNE op. cit., p. 120)

124 Recherche et Formation

Ainsi, la différenciation des tâches et la diversification des métiers àl'intérieur du corps des enseignants chercheurs, s'opère, à travers la dif¬férenciation des étabUssements et, à l'intérieur des étabUssements, à tra¬vers la multipUcation des filières, comme le note le CNE :

« Les principaux facteurs de différenciation entre les tâches et les étabUs¬sements sont souvent Ués à l'intensité des charges d'encadrement pédago¬gique et au caractère professionnaUsé des formations. Les contacts avecles milieux professionnels, le suivi des stages, la participation à desétudes qui intéressent les entreprises, sans pour autant fournir directe¬ment des éléments pour la recherche, contribuent grandement à la réus¬site des fUières...Cette situation (où le développement de la recherche ne résulte pas d'unevolonté de l'établissement) semble en train de changer et pourrait abou¬tir à différencier les étabUssements selon leurs exigences et leurs objectifsen matière de recherche. »

(CNE op. cit., p. 119)

Ces établissements méritent-Us le nom d'universités ? et leur person¬nel le nom d'enseignant-chercheur ?

Cette évolution est sans doute en contradiction avec l'idée d'univer¬sité teUe qu'eUe est traditionneUement définie et des voix se sont élevéespour le dire.« L'enseignement post bac de masse, qui figure maintenant dans la plu¬part des programmes poUtiques... devrait être dispensé dans des centresnouveaux, avec des enseignants à temps plein. Je crois que sa valeur etson originaUté viendraient de son aspect pluridisciplinaire. »

(Pierre-GUle de Gennes ; « L'université est-elle réformable ? »,Le Débat, n° 45 mai-septembre 1987 ; p. 67)

La prépondérance de la fonction d'enseignement suppose que les acti¬vités d'enseignement soient prises en compte pour les promotions et queles compétences pédagogiques pèsent dans les recrutements. Commentapprécier les compétences pédagogiques d'un futur enseignant ? Com¬ment évaluer son efficacité pédagogique ? Une instance comme le CNUn'est peut-être pas la mieux placée pour le faire. Le renforcement del'autonomie des universités, la responsabilisation consécutive à lacontractuaUsation impUquent des pouvoirs accrus dans le domaine de lagestion du personnel. Mais alors, que vont devenir les libertés acadé¬miques ?

« On peut dire que plus l'étabUssement acquiert d'autonomie, devientapte à définir une politique, et plus l'autonomie des enseignants seraorientée, canaUsée, voire réduite. »

(CNE op. cit., p. 120)

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Autour des mots 125

On voit donc bien actuellement s'affronter deux conceptions des uni¬versités et de la relation Université/enseignement supérieur ainsi quedeux conceptions du métier d'universitaire. L'une se rattache aux plusvieUles traditions de notre université, l'autre aux évolutions requises parle contexte socio-économique contemporain. L'existence, la nature et lesmodalités d'une formation pédagogique des enseignants du Supérieur estun des éléments de cet affrontement.

La communauté universitaire est très attachée à son indépendancemais les profondes transformations en cours dans les universités mon¬trent qu'un grand nombre de ses membres est sensible aux exigences dunouveau métier dont se dessinent les contours tels que les a décrits leCNE.

Demeurent pourtant des interrogations sur les moyens de concilierchangement et tradition.

Annie BIREAUD

Autour des mots 125

On voit donc bien actuellement s'affronter deux conceptions des uni¬versités et de la relation Université/enseignement supérieur ainsi quedeux conceptions du métier d'universitaire. L'une se rattache aux plusvieUles traditions de notre université, l'autre aux évolutions requises parle contexte socio-économique contemporain. L'existence, la nature et lesmodalités d'une formation pédagogique des enseignants du Supérieur estun des éléments de cet affrontement.

La communauté universitaire est très attachée à son indépendancemais les profondes transformations en cours dans les universités mon¬trent qu'un grand nombre de ses membres est sensible aux exigences dunouveau métier dont se dessinent les contours tels que les a décrits leCNE.

Demeurent pourtant des interrogations sur les moyens de concilierchangement et tradition.

Annie BIREAUD

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126 Recherche et Formation

COMPLÉMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

On peut ajouter aux références bibliographiques données par les auteursdes différents articles, les compléments suivants :

BERTRAND D. (1991). Le travail professoral démystifié. Québec,Presses de l'Université du Québec.

BIENAYMÉ A. (1986). L'enseignement supérieur et l'idée d'université.Paris, Economica.

BOURDIN A. (1990). L'université de masse : un modèle d'organisation.Actions et recherches sociales. Vol. 4, n° 1, pp. 65-82.

CEFI. Guide des formations d'ingénieurs. Paris, (mise à jour réguUère).

CROZIER M. (sous la présidence de) (1990). L'évaluation des perfor¬mances pédagogiques des établissements universitaires. Paris, LaDocumentation Française.

FLORY M. (1993). Étudiants d'Europe. Paris, La Documentation Fran¬çaise.

MASSIT-FOLLEA F. et ÉPINETTE F. (1992). L'Europe des Universités.L'Enseignement Supérieur en mutation. Paris, La DocumentationFrançaise.

OECD. (1993). The Development of performance indicators for HigherEducation. Paris, OECD.

PAGES C. (1992). L'Université écartelée : pour une gestion des res¬sources humaines. Savoir, Education, Formation. N° 2. pp. 259-279.

Planning & Management for ExceUence & Efficiency of Higher Educa¬tion (1991). Caracas, UNESCO.

SALIFOU A., LUSTIN D., RAKOBOLKAYA I. (1986). Trois études decas sur Information pédagogique des enseignants d'enseignementsupérieur. Paris, UNESCO.

SUPIOT A. (1989). Sur l'ouverture de l'Université. Savoir, Éducation,Formation. N° 4. pp. 652-669.

Universités 2000. Quelle université pour demain ? (1991). Paris, LaDocumentation Française.

Université : le bateau ivre (1998). Pour. N° 113.

L'Université est-elle réformable ? (1987). Le Débat. N° 45. pp. 59-89.

126 Recherche et Formation

COMPLÉMENTS BIBLIOGRAPHIQUES

On peut ajouter aux références bibliographiques données par les auteursdes différents articles, les compléments suivants :

BERTRAND D. (1991). Le travail professoral démystifié. Québec,Presses de l'Université du Québec.

BIENAYMÉ A. (1986). L'enseignement supérieur et l'idée d'université.Paris, Economica.

BOURDIN A. (1990). L'université de masse : un modèle d'organisation.Actions et recherches sociales. Vol. 4, n° 1, pp. 65-82.

CEFI. Guide des formations d'ingénieurs. Paris, (mise à jour réguUère).

CROZIER M. (sous la présidence de) (1990). L'évaluation des perfor¬mances pédagogiques des établissements universitaires. Paris, LaDocumentation Française.

FLORY M. (1993). Étudiants d'Europe. Paris, La Documentation Fran¬çaise.

MASSIT-FOLLEA F. et ÉPINETTE F. (1992). L'Europe des Universités.L'Enseignement Supérieur en mutation. Paris, La DocumentationFrançaise.

OECD. (1993). The Development of performance indicators for HigherEducation. Paris, OECD.

PAGES C. (1992). L'Université écartelée : pour une gestion des res¬sources humaines. Savoir, Education, Formation. N° 2. pp. 259-279.

Planning & Management for ExceUence & Efficiency of Higher Educa¬tion (1991). Caracas, UNESCO.

SALIFOU A., LUSTIN D., RAKOBOLKAYA I. (1986). Trois études decas sur Information pédagogique des enseignants d'enseignementsupérieur. Paris, UNESCO.

SUPIOT A. (1989). Sur l'ouverture de l'Université. Savoir, Éducation,Formation. N° 4. pp. 652-669.

Universités 2000. Quelle université pour demain ? (1991). Paris, LaDocumentation Française.

Université : le bateau ivre (1998). Pour. N° 113.

L'Université est-elle réformable ? (1987). Le Débat. N° 45. pp. 59-89.

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Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

NOTES CRITIQUES

ALTERNANCE ET FORMATION : DEUX POSITIONS

CHAIX, Marie-Laure (1993). Se former en alternance. Le cas del'enseignement agricole. Paris, L'Harmattan, 254 p.

MONACO, Antonio (1993). L'alternance école-production. Paris, PUF,277 p.

Aucun formateur ne peut plus exclure la notion d'« alternance » duchamp de ses interrogations ; cette notion, autour de laqueUe se retrou¬vent à la fois les réflexions sur les processus d'articulation entre théorieet pratique dans la construction des savoirs et les problèmes institution¬nels de gestion de Ueux de formations différents est en effet, depuis unevingtaine d'années, devenue une notion centrale et famiUère de l'universdes formateurs.

À travers deux approches différentes quant à leur démarche scienti¬fique et quant aux secteurs économiques étudiés, Marie-Laure Chaix etAntonio Monaco contribuent à faire progresser les réflexions qui se sontinstaurées autour des dispositifs d'alternance et des poUtiques de déve¬loppement (qui en font parfois la panacée) dont Us font l'objet. Peut-ondire qu'Us sont formateurs et en quoi ?

Les conclusions auxquelles arrivent les auteurs peuvent paraîtrecontradictoires ; pourtant, s'U existe, nous semble-t-U, quelques diver¬gences de fond, les convergences sur quelques points essentiels marquentbien la complexité de la situation et les champs de recherche qui restentencore à développer dans ce secteur.

Marie-Laure Chaix a analysé des dispositifs d'alternance dans l'en¬seignement agricole et, en particulier, dans les domaines de l'agriculture-élevage, de l'horticulture option « floriculture » et « jardins espacesverts » paysagisme, de la commercialisation des fruits et des légumes, etdes laboratoires d'analyse.

Chacun des ces secteurs présente des spécificités profondes qui vontle positionner par rapport au lycée et aux savoirs qu'il dispense, et

Recherche et Formation N° 15 Avril 1994

NOTES CRITIQUES

ALTERNANCE ET FORMATION : DEUX POSITIONS

CHAIX, Marie-Laure (1993). Se former en alternance. Le cas del'enseignement agricole. Paris, L'Harmattan, 254 p.

MONACO, Antonio (1993). L'alternance école-production. Paris, PUF,277 p.

Aucun formateur ne peut plus exclure la notion d'« alternance » duchamp de ses interrogations ; cette notion, autour de laqueUe se retrou¬vent à la fois les réflexions sur les processus d'articulation entre théorieet pratique dans la construction des savoirs et les problèmes institution¬nels de gestion de Ueux de formations différents est en effet, depuis unevingtaine d'années, devenue une notion centrale et famiUère de l'universdes formateurs.

À travers deux approches différentes quant à leur démarche scienti¬fique et quant aux secteurs économiques étudiés, Marie-Laure Chaix etAntonio Monaco contribuent à faire progresser les réflexions qui se sontinstaurées autour des dispositifs d'alternance et des poUtiques de déve¬loppement (qui en font parfois la panacée) dont Us font l'objet. Peut-ondire qu'Us sont formateurs et en quoi ?

Les conclusions auxquelles arrivent les auteurs peuvent paraîtrecontradictoires ; pourtant, s'U existe, nous semble-t-U, quelques diver¬gences de fond, les convergences sur quelques points essentiels marquentbien la complexité de la situation et les champs de recherche qui restentencore à développer dans ce secteur.

Marie-Laure Chaix a analysé des dispositifs d'alternance dans l'en¬seignement agricole et, en particulier, dans les domaines de l'agriculture-élevage, de l'horticulture option « floriculture » et « jardins espacesverts » paysagisme, de la commercialisation des fruits et des légumes, etdes laboratoires d'analyse.

Chacun des ces secteurs présente des spécificités profondes qui vontle positionner par rapport au lycée et aux savoirs qu'il dispense, et

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128 Recherche et Formation

influer sur l'accueU des jeunes dans les dispositifs d'alternance : l'imagede la profession, l'image de son devenir, l'identification des pointsd'appui à partir desquels eUe pourra se réorganiser, vont déterminer lemodèle professionnel auquel le jeune est censé se référer.

L'auteur semble se méfier de toute affirmation rapide, générale et glo-baUsante et c'est avec une extrême finesse qu'eUe va « décortiquer », cequi se passe dans ces dispositifs d'alternance en intégrant des dimensionspersonneUes des élèves dans les dimensions institutionnelles et écono¬miques, en montrant bien les interactions qui se créent entre les acteurset entre les institutions, avec le jeux subtil des attentes réciproques, lerôle des images que chacun construit et des images qu'il projette surl'autre...

Dans une première partie eUe démontre qu'il y a du savoir en entre¬prise, et que les stages contribuent à faire expliciter ces savoirs ; maisl'articulation avec les lycées va varier selon les professions. L'explicita¬tion de ces savoirs de travaU, différents de ceux dispensés au lycée, vontcontribuer à l'élaboration d'images professionneUes acceptables ; un cli¬vage existe entre des images passéistes (regrets) et des images progres¬sistes résolument tournées vers l'avenir. Le lycée est perçu comme devantcontribuer à la construction des nouveUes professions en émergence.

Dans une deuxième partie l'auteur analyse la façon dont se déroule lestage, la fonction des « maîtres de stage » et les conditions requises pourque ces savoirs existant dans l'entreprise soient véritablement appropriépar les jeunes, c'est-à-dire pour qu'un « champ pédagogique » (l'auteurse réfère là à la notion construite par C. Rabant, 1968 et reprise parJ. FiUoux, 1974) soit crée. « Y-a-t-il des modes d'accès au savoir quisoient spécifiques aux situations professionnelle et aux professions ? »

Le parcours dans l'entreprise revêt la forme d'un parcours initia¬tique, car, même si le maître de stage remplit bien son rôle, les savoirs del'entreprise ne sont pas tous identifiables et formaUsables, et l'appren¬tissage se fera en partie par observation, imitation, relations interperson-neUes fortes.

Cependant deux formes se dessinent :

- une correspondant au sens anthropologique de l'initiation ; le jeuneparcourt toute la hiérarchie des métiers de l'entreprise, parcours interneà la culture professionneUe, U subit l'autorité (avant de l'exercer), U gra¬vit donc les échelons de l'organisation sociale du travail « selon une éco¬

nomie de succession de génération » ;

- l'autre consistant à « occuper une diversité de positions autour dela position future », c'est à dire qu'U sera considéré tour à tour commeétudiant, observateur, travailleur dans des rôles différents, il devrachanger de place et prendre différents points de vue sur l'entreprise.

128 Recherche et Formation

influer sur l'accueU des jeunes dans les dispositifs d'alternance : l'imagede la profession, l'image de son devenir, l'identification des pointsd'appui à partir desquels eUe pourra se réorganiser, vont déterminer lemodèle professionnel auquel le jeune est censé se référer.

L'auteur semble se méfier de toute affirmation rapide, générale et glo-baUsante et c'est avec une extrême finesse qu'eUe va « décortiquer », cequi se passe dans ces dispositifs d'alternance en intégrant des dimensionspersonneUes des élèves dans les dimensions institutionnelles et écono¬miques, en montrant bien les interactions qui se créent entre les acteurset entre les institutions, avec le jeux subtil des attentes réciproques, lerôle des images que chacun construit et des images qu'il projette surl'autre...

Dans une première partie eUe démontre qu'il y a du savoir en entre¬prise, et que les stages contribuent à faire expliciter ces savoirs ; maisl'articulation avec les lycées va varier selon les professions. L'explicita¬tion de ces savoirs de travaU, différents de ceux dispensés au lycée, vontcontribuer à l'élaboration d'images professionneUes acceptables ; un cli¬vage existe entre des images passéistes (regrets) et des images progres¬sistes résolument tournées vers l'avenir. Le lycée est perçu comme devantcontribuer à la construction des nouveUes professions en émergence.

Dans une deuxième partie l'auteur analyse la façon dont se déroule lestage, la fonction des « maîtres de stage » et les conditions requises pourque ces savoirs existant dans l'entreprise soient véritablement appropriépar les jeunes, c'est-à-dire pour qu'un « champ pédagogique » (l'auteurse réfère là à la notion construite par C. Rabant, 1968 et reprise parJ. FiUoux, 1974) soit crée. « Y-a-t-il des modes d'accès au savoir quisoient spécifiques aux situations professionnelle et aux professions ? »

Le parcours dans l'entreprise revêt la forme d'un parcours initia¬tique, car, même si le maître de stage remplit bien son rôle, les savoirs del'entreprise ne sont pas tous identifiables et formaUsables, et l'appren¬tissage se fera en partie par observation, imitation, relations interperson-neUes fortes.

Cependant deux formes se dessinent :

- une correspondant au sens anthropologique de l'initiation ; le jeuneparcourt toute la hiérarchie des métiers de l'entreprise, parcours interneà la culture professionneUe, U subit l'autorité (avant de l'exercer), U gra¬vit donc les échelons de l'organisation sociale du travail « selon une éco¬

nomie de succession de génération » ;

- l'autre consistant à « occuper une diversité de positions autour dela position future », c'est à dire qu'U sera considéré tour à tour commeétudiant, observateur, travailleur dans des rôles différents, il devrachanger de place et prendre différents points de vue sur l'entreprise.

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Notes critiques 129

Mais ce sont les échanges qui vont s'établir entre le maître de stage etle stagiaire qui seront déterminants sur la possibUité ou non de créer unchamp pédagogique, et de construire des savoirs formaUsés.

Il est tout d'abord indispensable que le maître de stage accepte unefonction de « représentation du savoir », c'est à dire qu'U accepte d'ex-pUquer ce qu'U fait et pourquoi. Cette distance par rapport à une pra¬tique quotidienne n'est pas toujours simple et certains s'y refusent.

Ensuite U est nécessaire qu'il dépasse un modèle d'échanges utili¬taires, pour établir un modèle d'échanges symboliques ; les échangesne se posent pas seulement en terme de services rendus et de bénéficesmatériels, mais en terme de reconnaissance de compétences, de recon¬naissances de la place de la formation dans la structuration de la profes¬sion.

La troisième partie place « le stagiaire comme acteur décisif de l'al¬ternance ». Les conditions liées à l'entreprise et à la fonction de maîtrede stage, si elles sont nécessaires ne sont pas suffisantes ; un certainnombre d'attitudes, de comportements de la part du stagiaire vont êtredéterminantes .

En effet l'arrivée en entreprise, la confrontation au marché du travaUest un moment essentiel de la construction identitaire des jeunes (l'auteurse réfère ici aux travaux de C. Dubar), et « l'assise psychologiquedevient un élément important de sa capacité à se former ».

C'est l'existence d'un projet de devenir qui va permettre ou non austagiaire de se situer dans l'alternance, de la faire fonctionner.

L'existence ou la non existence de ce projet vont engendrer desattentes et des attitudes profondément différentes face au lycée et face austage ; l'auteur met en évidence deux types d'attitudes chez les jeunes(type étant conçu bien entendu par rapport à des comportements à unmoment donné et non pas comme des caractéristiques immuables de lapersonnaUté...), les jeunes déterminés et les indéterminés.

Chez le jeune déterminé, un projet existe, U va lui permettre d'inté¬grer les différents savoirs acquis et de construire sa pratique en son nompropre, en fonction de l'avenir qu'U projette : U construira le sens del'ensemble du dispositif.

Chez le jeune indéterminé, U n'y a pas de projet clair ou réaUste (sesprojets ont échoué pour différentes raisons), et U aura tendance à disso¬cier, voire à opposer les Ueux de formation, U refusera cette « épreuve dela réaUté » qu'est le stage et aura tendance à fuir les contradictions endésinvestissant les différents Ueux d'études...

L'existence ou la non existence de ce projet relève certes de donnéesobjectivables (trajectoire socio-scolaire, expériences professionnelles,mode d'orientation dans l'enseignement agricole, marché de l'emploi etreconnaissances des diplômes, prestige des professions...), mais eUes ne

Notes critiques 129

Mais ce sont les échanges qui vont s'établir entre le maître de stage etle stagiaire qui seront déterminants sur la possibUité ou non de créer unchamp pédagogique, et de construire des savoirs formaUsés.

Il est tout d'abord indispensable que le maître de stage accepte unefonction de « représentation du savoir », c'est à dire qu'U accepte d'ex-pUquer ce qu'U fait et pourquoi. Cette distance par rapport à une pra¬tique quotidienne n'est pas toujours simple et certains s'y refusent.

Ensuite U est nécessaire qu'il dépasse un modèle d'échanges utili¬taires, pour établir un modèle d'échanges symboliques ; les échangesne se posent pas seulement en terme de services rendus et de bénéficesmatériels, mais en terme de reconnaissance de compétences, de recon¬naissances de la place de la formation dans la structuration de la profes¬sion.

La troisième partie place « le stagiaire comme acteur décisif de l'al¬ternance ». Les conditions liées à l'entreprise et à la fonction de maîtrede stage, si elles sont nécessaires ne sont pas suffisantes ; un certainnombre d'attitudes, de comportements de la part du stagiaire vont êtredéterminantes .

En effet l'arrivée en entreprise, la confrontation au marché du travaUest un moment essentiel de la construction identitaire des jeunes (l'auteurse réfère ici aux travaux de C. Dubar), et « l'assise psychologiquedevient un élément important de sa capacité à se former ».

C'est l'existence d'un projet de devenir qui va permettre ou non austagiaire de se situer dans l'alternance, de la faire fonctionner.

L'existence ou la non existence de ce projet vont engendrer desattentes et des attitudes profondément différentes face au lycée et face austage ; l'auteur met en évidence deux types d'attitudes chez les jeunes(type étant conçu bien entendu par rapport à des comportements à unmoment donné et non pas comme des caractéristiques immuables de lapersonnaUté...), les jeunes déterminés et les indéterminés.

Chez le jeune déterminé, un projet existe, U va lui permettre d'inté¬grer les différents savoirs acquis et de construire sa pratique en son nompropre, en fonction de l'avenir qu'U projette : U construira le sens del'ensemble du dispositif.

Chez le jeune indéterminé, U n'y a pas de projet clair ou réaUste (sesprojets ont échoué pour différentes raisons), et U aura tendance à disso¬cier, voire à opposer les Ueux de formation, U refusera cette « épreuve dela réaUté » qu'est le stage et aura tendance à fuir les contradictions endésinvestissant les différents Ueux d'études...

L'existence ou la non existence de ce projet relève certes de donnéesobjectivables (trajectoire socio-scolaire, expériences professionnelles,mode d'orientation dans l'enseignement agricole, marché de l'emploi etreconnaissances des diplômes, prestige des professions...), mais eUes ne

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suffisent pas à comprendre la construction identitaire de chacun quirelève aussi de composantes psychologiques profondes.

En conclusion, l'auteur insiste sur la nécessaire rupture entre lesdeux milieux, le lycée et l'entreprise, rupture formatrice car elleconfronte le jeune à des réaUtés différentes dont U doit construire le senspar rapport à son propre projet de devenir. L'alternance est un momentimportant de passage vers l'état adulte, et de remaniement identitaire.

De nombreuses conditions sont requises pour que cette constructionidentitaire se fasse, mais « au delà de l'inventaire des savoirs réalisésavec les référentiels professionnels, c'est l'inventaire des parcours deformation et des attitudes des professionnels à l'égard de la formationdes jeunes qui est àfaire pour construire l'alternance ».

Antonio Monaco, quant à lui, dans une tradition sociologique clas¬sique, semble au contraire se méfier des cas particuhers et fait reposerson analyse sur des données statistiques et historiques afin de restituerles dispositifs en alternance dans tout un mouvement social (économiqueet scolaire) ; U considère ces pratiques et les poUtiques visant à les déve¬lopper, comme de nouveaux processus de « mobiUsation » des jeunes.

C'est donc sur l'ensemble des secteurs économiques qu'U fera porterses analyses, en travaUlant sur un échantillon diversifié (en veUlant à res¬pecter les caractéristiques d'ensemble des dispositifs) : des petites et desgrandes entreprises, du secteur industriel, mécanique, du commerce, dubâtiment...

R se centre sur les formations CAP BEP, et en particuUer les stagesdes dispositifs d'insertion des 16-18 ans, car pour eux l'alternance « esttoujours apparue comme un problème social et économique urgent » .

Dans une première partie Antonio Monaco critique un certain nom¬bre de cadres conceptuels utUisés couramment pour penser l'alternance.

L'approche en terme d'adéquation formation-emploi repose surl'hypothèse que l'école étant mal adaptée aux besoins et aux évolutionsdes entreprises, l'alternance permettra de mieux former les jeunes, deleur donner une quaUfieation d'un plus haut niveau technique et plusadaptée aux entreprises.

Cette conception de l'alternance comme remède pédagogique ne tientpas compte de la variété des entreprises (ni même des secteurs au seind'une même entreprise) ; eUe amène souvent à une position normative oùl'entreprise devient un modèle auquel U convient de se conformer.

La notion même de qualification est posée de façon statique (à unposte de travaU correspondrait une quaUfieation), or la quaUfieation estau c d'une tension entre salariés et patrons et se construit en perma¬nence grâce aux capacités relationneUes et transactionneUes de chacun.

130 Recherche et Formation

suffisent pas à comprendre la construction identitaire de chacun quirelève aussi de composantes psychologiques profondes.

En conclusion, l'auteur insiste sur la nécessaire rupture entre lesdeux milieux, le lycée et l'entreprise, rupture formatrice car elleconfronte le jeune à des réaUtés différentes dont U doit construire le senspar rapport à son propre projet de devenir. L'alternance est un momentimportant de passage vers l'état adulte, et de remaniement identitaire.

De nombreuses conditions sont requises pour que cette constructionidentitaire se fasse, mais « au delà de l'inventaire des savoirs réalisésavec les référentiels professionnels, c'est l'inventaire des parcours deformation et des attitudes des professionnels à l'égard de la formationdes jeunes qui est àfaire pour construire l'alternance ».

Antonio Monaco, quant à lui, dans une tradition sociologique clas¬sique, semble au contraire se méfier des cas particuhers et fait reposerson analyse sur des données statistiques et historiques afin de restituerles dispositifs en alternance dans tout un mouvement social (économiqueet scolaire) ; U considère ces pratiques et les poUtiques visant à les déve¬lopper, comme de nouveaux processus de « mobiUsation » des jeunes.

C'est donc sur l'ensemble des secteurs économiques qu'U fera porterses analyses, en travaUlant sur un échantillon diversifié (en veUlant à res¬pecter les caractéristiques d'ensemble des dispositifs) : des petites et desgrandes entreprises, du secteur industriel, mécanique, du commerce, dubâtiment...

R se centre sur les formations CAP BEP, et en particuUer les stagesdes dispositifs d'insertion des 16-18 ans, car pour eux l'alternance « esttoujours apparue comme un problème social et économique urgent » .

Dans une première partie Antonio Monaco critique un certain nom¬bre de cadres conceptuels utUisés couramment pour penser l'alternance.

L'approche en terme d'adéquation formation-emploi repose surl'hypothèse que l'école étant mal adaptée aux besoins et aux évolutionsdes entreprises, l'alternance permettra de mieux former les jeunes, deleur donner une quaUfieation d'un plus haut niveau technique et plusadaptée aux entreprises.

Cette conception de l'alternance comme remède pédagogique ne tientpas compte de la variété des entreprises (ni même des secteurs au seind'une même entreprise) ; eUe amène souvent à une position normative oùl'entreprise devient un modèle auquel U convient de se conformer.

La notion même de qualification est posée de façon statique (à unposte de travaU correspondrait une quaUfieation), or la quaUfieation estau c d'une tension entre salariés et patrons et se construit en perma¬nence grâce aux capacités relationneUes et transactionneUes de chacun.

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Notes critiques 131

Enfin l'approche en terme d'accès et de tenue d'emploi renvoie égale¬ment à un raisonnement linéaire et à une conception statique du fonc¬tionnement social alors que l'alternance participe à la redéfinition desrapports sociaux dans les entreprises et dans la société ; l'emploi est uneconstruction sociale et c'est donc en terme de stratégies de mobilisationdes jeunes sur le plan professionnel mais également social qu'il fautinterroger les dispositifs.

Dans une deuxième partie l'auteur après avoir Usté les grandes étapesde la constitution des formations en alternance de 1959 à 1989 ainsi queles différentes dispositifs mis en place, distingue trois phases en montrantcomment progressivement l'entreprise devient un acteur à part entière deces formations ; les différentes politiques d'alternance s'inscrivent à lafois dans les évolutions du système scolaire et les transformations tech¬niques et économiques des entreprises. C'est dans un jeu de tensions per¬manentes entre l'état et le patronat que se construisent ces poUtiques,mais ces deux entités sont traversées à l'intérieur d'elles-mêmes par desenjeux et des intérêts différents pouvant varier selon les lieux et lesmoments.

* C'est principalement l'ensemble des transformations de la scolarisa¬tion et de l'emploi qui entraînent, l'émergence de périodes d'alternanceen entreprise comme substitut à des formes anciennes de mobilisation dela main-d'�uvre et comme support au développement des nouvelles ».

Dans la troisième partie ce sont les entreprises et l'emploi qui sont enquestion : queUes sont les entreprises qui prennent des jeunes en stage,dans quelles politiques de main d'uvre et de formation cela s'insère-t-il,quel est le contenu des stages, quel est le rôle du centre de formation, etquelles sont les retombées de ces stages sur l'insertion des jeunes (surl'emploi) ?

Les entreprises qui acceptent des jeunes en stage dans le cadre de for¬mations en alternance sont de petites entreprises, souvent en difficulté,dans des secteurs particuliers (bâtiment, commerce de détail, servicesmarchands, commerce de gros, hôtellerie et restauration, réparation etcommerce automobile), et à forte instabilité d'emploi ; il ressort que,pour ces entreprises, l'alternance n'est pas véritablement un moyen pourmieux former des jeunes mais plus un moyen de contrôler les flux main-d'�uvre (ce qui est autre chose, de plus complexe, que la seule utilisationd'une main-d'�uvre à bon marché).

Les jeunes sont globalement très satisfaits des périodes en entreprise,mais l'auteur émet des doutes sur leur capacité de formation. En effet lesstagiaires sont le plus souvent cantonnés dans des taches d'exécution, depréparation, d'aide, qui ne réclament pas de connaissances techniques,et ils ne sont que rarement mis en situation de responsabiUté, Us acquiè¬rent pas ou peu de connaissances techniques (une des premières finaUtés

Notes critiques 131

Enfin l'approche en terme d'accès et de tenue d'emploi renvoie égale¬ment à un raisonnement linéaire et à une conception statique du fonc¬tionnement social alors que l'alternance participe à la redéfinition desrapports sociaux dans les entreprises et dans la société ; l'emploi est uneconstruction sociale et c'est donc en terme de stratégies de mobilisationdes jeunes sur le plan professionnel mais également social qu'il fautinterroger les dispositifs.

Dans une deuxième partie l'auteur après avoir Usté les grandes étapesde la constitution des formations en alternance de 1959 à 1989 ainsi queles différentes dispositifs mis en place, distingue trois phases en montrantcomment progressivement l'entreprise devient un acteur à part entière deces formations ; les différentes politiques d'alternance s'inscrivent à lafois dans les évolutions du système scolaire et les transformations tech¬niques et économiques des entreprises. C'est dans un jeu de tensions per¬manentes entre l'état et le patronat que se construisent ces poUtiques,mais ces deux entités sont traversées à l'intérieur d'elles-mêmes par desenjeux et des intérêts différents pouvant varier selon les lieux et lesmoments.

* C'est principalement l'ensemble des transformations de la scolarisa¬tion et de l'emploi qui entraînent, l'émergence de périodes d'alternanceen entreprise comme substitut à des formes anciennes de mobilisation dela main-d'�uvre et comme support au développement des nouvelles ».

Dans la troisième partie ce sont les entreprises et l'emploi qui sont enquestion : queUes sont les entreprises qui prennent des jeunes en stage,dans quelles politiques de main d'uvre et de formation cela s'insère-t-il,quel est le contenu des stages, quel est le rôle du centre de formation, etquelles sont les retombées de ces stages sur l'insertion des jeunes (surl'emploi) ?

Les entreprises qui acceptent des jeunes en stage dans le cadre de for¬mations en alternance sont de petites entreprises, souvent en difficulté,dans des secteurs particuliers (bâtiment, commerce de détail, servicesmarchands, commerce de gros, hôtellerie et restauration, réparation etcommerce automobile), et à forte instabilité d'emploi ; il ressort que,pour ces entreprises, l'alternance n'est pas véritablement un moyen pourmieux former des jeunes mais plus un moyen de contrôler les flux main-d'�uvre (ce qui est autre chose, de plus complexe, que la seule utilisationd'une main-d'�uvre à bon marché).

Les jeunes sont globalement très satisfaits des périodes en entreprise,mais l'auteur émet des doutes sur leur capacité de formation. En effet lesstagiaires sont le plus souvent cantonnés dans des taches d'exécution, depréparation, d'aide, qui ne réclament pas de connaissances techniques,et ils ne sont que rarement mis en situation de responsabiUté, Us acquiè¬rent pas ou peu de connaissances techniques (une des premières finaUtés

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de l'alternance serait en fait de les « soumettre à des normes comporte¬mentales »).

Le centre de formation ne joue pas pleinement son rôle et, à la limite,ne le peut pas : l'entreprise a le pouvoir d'accepter ou refuser des jeunes(si les formateurs posent des conditions trop précises, les entreprisesrefuseront leur stagiaire...) et trouver un lieu de stage pour les jeunesdevient l'unique objectif.

La formation en entreprise ne donne pas Ueu à une construction com¬mune entre les différentes institutions ; peu d'échanges ont Ueu (souvententre les seuls responsables), l'ensemble de la formation n'est pas forma-Usée entre les différents Ueux ; le période en entreprise est souvent peuexploitée et évaluée par les formateurs...

Enfin dans l'entreprise eUe même, le personnel est peu impliqué, s'U ya un tuteur sa désignation repose sur des critères propres à l'entreprise(et pas forcément sur ses quaUtés d'encadrement de jeunes), et seules desquaUtés personneUes fortes feront que parfois U prendra sa tâche de for¬mateur à c

Enfin l'auteur montre que alternance et emploi ne sont pas directe¬ment en relation ; si l'existence des stages fait baisser momentanément leschiffres du chômage, cela ne s'inscrit pas dans le long terme, et ce sont lesjeunes les plus en difficulté qui se retrouvent encore exclus ; l'alternancene joue donc pas un rôle d'insertion et ne remet pas en cause les processusde division du travaU qui traversent la société dans son ensemble.

Cependant certaines entreprises et certains dispositifs phares mettenten évidence qu'une véritable formation peut être mise en place ; pourcela il faut que l'accueU des jeunes s'intègre dans une organisation géné¬rale de la formation continue et même s'insère dans un plan de redéfini¬tion des contenus de formations et de définition des qualifications.Autrement, et c'est la majorité des cas, les formations en alternances'apparentent à des formations sur le tas, et « U s'agit davantage d'unprocessus de conformation morale régissant les emplois peu ou pas qua¬lifiés ».

Antonio Monaco démontre dans cet ouvrage que le discours développéautour de l'alternance ne correspond pas aux pratiques mises en �uvreet que, donc, les véritables enjeux dont eUe est l'objet sont aUleurs, àsavoir dans la mise en place de dispositifs aptes à canaliser les jeunespour les mobiUser professionneUement, dispositifs à situer dans les trans¬formations éducatives et économiques qui n'échappent pas aux tensionset conflits d'intérêts qui traversent toute société.

Est ce que l'alternance contribue à mieux former les jeunes ounon ? Apparemment les deux auteurs arrivent à des conclusions diffé¬rentes ; pour Antonio Monaco c'est majoritairement non, les enjeux réelsétant aiUeurs, mais pour Marie Laure Chaix, il y a du savoir dans les

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de l'alternance serait en fait de les « soumettre à des normes comporte¬mentales »).

Le centre de formation ne joue pas pleinement son rôle et, à la limite,ne le peut pas : l'entreprise a le pouvoir d'accepter ou refuser des jeunes(si les formateurs posent des conditions trop précises, les entreprisesrefuseront leur stagiaire...) et trouver un lieu de stage pour les jeunesdevient l'unique objectif.

La formation en entreprise ne donne pas Ueu à une construction com¬mune entre les différentes institutions ; peu d'échanges ont Ueu (souvententre les seuls responsables), l'ensemble de la formation n'est pas forma-Usée entre les différents Ueux ; le période en entreprise est souvent peuexploitée et évaluée par les formateurs...

Enfin dans l'entreprise eUe même, le personnel est peu impliqué, s'U ya un tuteur sa désignation repose sur des critères propres à l'entreprise(et pas forcément sur ses quaUtés d'encadrement de jeunes), et seules desquaUtés personneUes fortes feront que parfois U prendra sa tâche de for¬mateur à c

Enfin l'auteur montre que alternance et emploi ne sont pas directe¬ment en relation ; si l'existence des stages fait baisser momentanément leschiffres du chômage, cela ne s'inscrit pas dans le long terme, et ce sont lesjeunes les plus en difficulté qui se retrouvent encore exclus ; l'alternancene joue donc pas un rôle d'insertion et ne remet pas en cause les processusde division du travaU qui traversent la société dans son ensemble.

Cependant certaines entreprises et certains dispositifs phares mettenten évidence qu'une véritable formation peut être mise en place ; pourcela il faut que l'accueU des jeunes s'intègre dans une organisation géné¬rale de la formation continue et même s'insère dans un plan de redéfini¬tion des contenus de formations et de définition des qualifications.Autrement, et c'est la majorité des cas, les formations en alternances'apparentent à des formations sur le tas, et « U s'agit davantage d'unprocessus de conformation morale régissant les emplois peu ou pas qua¬lifiés ».

Antonio Monaco démontre dans cet ouvrage que le discours développéautour de l'alternance ne correspond pas aux pratiques mises en �uvreet que, donc, les véritables enjeux dont eUe est l'objet sont aUleurs, àsavoir dans la mise en place de dispositifs aptes à canaliser les jeunespour les mobiUser professionneUement, dispositifs à situer dans les trans¬formations éducatives et économiques qui n'échappent pas aux tensionset conflits d'intérêts qui traversent toute société.

Est ce que l'alternance contribue à mieux former les jeunes ounon ? Apparemment les deux auteurs arrivent à des conclusions diffé¬rentes ; pour Antonio Monaco c'est majoritairement non, les enjeux réelsétant aiUeurs, mais pour Marie Laure Chaix, il y a du savoir dans les

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Notes critiques 133

entreprises et elle démontre comment et dans queUes conditions U y a« champ pédagogique » , donc formation.

La nature des secteurs étudiés éclaire en partie cette divergence (lesdeux auteurs soulignent d'aUleurs la nécessité de ne pas globaUser, uni¬fier « l'entreprise », mais de cerner les particularités) : l'enseignementagricole a un Uen fonctionnel avec la profession agricole ; intégré à laprofession, U contribue étroitement à son renouveUement et à la créationde nouveUes images ; dans le secteur industriel c'est beaucoup plus dis¬tendu, le Uen entre l'enseignement technique et professionnel et le mondede la production ne s'est pas du tout construit de la même façon ni sur lesmêmes bases ; le cas de l'agriculture correspondrait à la logique des rarescas favorables soulignés par A. Monaco où la formation est intégrée dansla poUtique de développement de l'entreprise.

Cependant la divergence de fond nous semble être autour du statutd'acteur que Marie Laure Chaix accorde au jeune (acteur décisif ! ...),alors que chez Antonio Monaco le jeune est au centre d'enjeux sociauxqui le dépassent et ne semble avoir aucune marge de manuvres. H s'agitlà de deux positions épistémologiques différentes qui traversent le champde la recherche en sciences humaines et ce n'est pas le Ueu pour entamerun débat, mais la confrontation des deux points de vue sur un objetproche, sinon commun, nous semble éclairante sur l'intérêt et les Umitesde chacun des modèles sous-jacents.

Cela donne encore plus de poids aux convergences. Nous en souligne¬rons deux. Les deux auteurs remettent en question une conceptionclassique de la pédagogie, en montrant ses insuffisances. Il est nécessairede travaUler sur d'autres objets que l'acquisition de contenus techniqueset professionnels (en particulier la prise en compte des projets indivi¬duels des jeunes, et la construction de leur identité future), et U est néces¬saire de penser les dispositifs de formation en alternance comme inscritsdans des mouvements sociaux et économiques et donc de situer le rôle deformateur parmi celui d'autres acteurs.

Ils rejettent, en fait, une conception restrictive de la formation enalternance ; Us la posent en terme de sociaUsation. Antonio Monaco parlede transition professionneUe (se référant à J. Rose), c'est-à-dire de phaseentre l'inactivité et l'emploi, c'est pour lui un processus d'intégrationsociale (avec tout le déterminisme du fonctionnement social), et MarieLaure Chaix parle de construction identitaire : l'alternance serait unmoment privilégié de cette démarche du jeune vers le statut adulte, etvers son devenir professionnel (avec le cadre des enjeux idéologiquesautour de la formation).

Finalement c'est aux processus de sociaUsation des jeunes que cesdispositifs en alternance renvoient, aussi bien dans leurs composantessociales que psychologiques.

Annette GONNIN-BOLOINRP

Notes critiques 133

entreprises et elle démontre comment et dans queUes conditions U y a« champ pédagogique » , donc formation.

La nature des secteurs étudiés éclaire en partie cette divergence (lesdeux auteurs soulignent d'aUleurs la nécessité de ne pas globaUser, uni¬fier « l'entreprise », mais de cerner les particularités) : l'enseignementagricole a un Uen fonctionnel avec la profession agricole ; intégré à laprofession, U contribue étroitement à son renouveUement et à la créationde nouveUes images ; dans le secteur industriel c'est beaucoup plus dis¬tendu, le Uen entre l'enseignement technique et professionnel et le mondede la production ne s'est pas du tout construit de la même façon ni sur lesmêmes bases ; le cas de l'agriculture correspondrait à la logique des rarescas favorables soulignés par A. Monaco où la formation est intégrée dansla poUtique de développement de l'entreprise.

Cependant la divergence de fond nous semble être autour du statutd'acteur que Marie Laure Chaix accorde au jeune (acteur décisif ! ...),alors que chez Antonio Monaco le jeune est au centre d'enjeux sociauxqui le dépassent et ne semble avoir aucune marge de manuvres. H s'agitlà de deux positions épistémologiques différentes qui traversent le champde la recherche en sciences humaines et ce n'est pas le Ueu pour entamerun débat, mais la confrontation des deux points de vue sur un objetproche, sinon commun, nous semble éclairante sur l'intérêt et les Umitesde chacun des modèles sous-jacents.

Cela donne encore plus de poids aux convergences. Nous en souligne¬rons deux. Les deux auteurs remettent en question une conceptionclassique de la pédagogie, en montrant ses insuffisances. Il est nécessairede travaUler sur d'autres objets que l'acquisition de contenus techniqueset professionnels (en particulier la prise en compte des projets indivi¬duels des jeunes, et la construction de leur identité future), et U est néces¬saire de penser les dispositifs de formation en alternance comme inscritsdans des mouvements sociaux et économiques et donc de situer le rôle deformateur parmi celui d'autres acteurs.

Ils rejettent, en fait, une conception restrictive de la formation enalternance ; Us la posent en terme de sociaUsation. Antonio Monaco parlede transition professionneUe (se référant à J. Rose), c'est-à-dire de phaseentre l'inactivité et l'emploi, c'est pour lui un processus d'intégrationsociale (avec tout le déterminisme du fonctionnement social), et MarieLaure Chaix parle de construction identitaire : l'alternance serait unmoment privilégié de cette démarche du jeune vers le statut adulte, etvers son devenir professionnel (avec le cadre des enjeux idéologiquesautour de la formation).

Finalement c'est aux processus de sociaUsation des jeunes que cesdispositifs en alternance renvoient, aussi bien dans leurs composantessociales que psychologiques.

Annette GONNIN-BOLOINRP

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134 Recherche et Formation

PROFESSEURS OU ENSEIGNANTS :

DEUX VISIONS DIFFÉRENTES

DUTERCQ, Yves (1993). - Les professeurs. Paris : Hachette, 190 p.

HIRSCHHORN, Monique (1993). - L'ère des enseignants. Paris : PUF,301p.

Voici deux ouvrages que plusieurs choses rapprochent et qui sontpourtant bien différents. Ils portent apparemment, si l'on en croit leurtitre, sur le même sujet, traité sur la même période, les années 80. Ilssont parus à quelques semaines d'intervalle et sont issus du même typed'exercice académique, la thèse, nouveUe pour le premier, d'état pour lesecond. Leurs auteurs ont sans doute eu l'occasion de se rencontrer, carUs ont tous les deux contribué aux travaux d'une équipe de l'ENRP.

Mais tout le reste les différencie. Leurs sujets réels, au delà du titre,sont bien distincts. R s'agit, pour le premier, des relations sociales entrecoUègues professeurs d'un même coUège et, pour le second, du systèmede contraintes auquel sont soumis les enseignants, de la maternelle àl'université, et comment Us y réagissent. Leurs inspirations théoriques etméthodologiques divergent : l'École de Chicago et son utilisation privilé¬giée des méthodes descriptives et interprétatives, sinon même ethnogra¬phiques, d'un coté et de l'autre, l'individualisme méthodologique deRaymond Boudon et sa prédilection pour l'utiUsation, au besoin aprèsanalyse secondaire, de matériaux déjà existants, que l'on met en uvredans un schéma explicatif très logiquement construit. On ne pourraguère s'étonner si ces orientations générales très éloignées donnent desouvrages très différents. Sont-ils pour autant contradictoires ? Nous ne lepensons pas, car Us s'attachent à des réaUtés si éloignées qu'eUes ne leurlaissent guère de possibiUté de se contredire. Voyons cela.

Yves Dutercq se propose de « décrire un étabUssement scolaire sousl'angle des relations sociales qu'U génère » (p. 13), espérant ainsi mettreà jour ses modes de fonctionnement. Pour ce faire, U a privilégié lesenseignants, acteurs qui, par leur nombre et leur place centrale dans lamission de l'établissement, lui semblent avoir une influence détermi¬nante. R a observé et analysé leurs relations entre collègues et avec lechef d'étabUssement, mais aussi, de manière moindre, avec les autrescatégories de personnel et les élèves. Les groupes d'activité des ensei¬gnants, leurs cercles de sociabUité et leurs réseaux plus larges connectantces groupes et cercles divers constituent pour l'auteur une des dimen¬sions importantes de l'identité de l'étabUssement et un facteur essentielde ses capacités d'action et de mobilisation. Pour le nouveau venu, parti¬ciper à ces groupes n'est pas spontané. Cela nécessite une « compétence

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PROFESSEURS OU ENSEIGNANTS :

DEUX VISIONS DIFFÉRENTES

DUTERCQ, Yves (1993). - Les professeurs. Paris : Hachette, 190 p.

HIRSCHHORN, Monique (1993). - L'ère des enseignants. Paris : PUF,301p.

Voici deux ouvrages que plusieurs choses rapprochent et qui sontpourtant bien différents. Ils portent apparemment, si l'on en croit leurtitre, sur le même sujet, traité sur la même période, les années 80. Ilssont parus à quelques semaines d'intervalle et sont issus du même typed'exercice académique, la thèse, nouveUe pour le premier, d'état pour lesecond. Leurs auteurs ont sans doute eu l'occasion de se rencontrer, carUs ont tous les deux contribué aux travaux d'une équipe de l'ENRP.

Mais tout le reste les différencie. Leurs sujets réels, au delà du titre,sont bien distincts. R s'agit, pour le premier, des relations sociales entrecoUègues professeurs d'un même coUège et, pour le second, du systèmede contraintes auquel sont soumis les enseignants, de la maternelle àl'université, et comment Us y réagissent. Leurs inspirations théoriques etméthodologiques divergent : l'École de Chicago et son utilisation privilé¬giée des méthodes descriptives et interprétatives, sinon même ethnogra¬phiques, d'un coté et de l'autre, l'individualisme méthodologique deRaymond Boudon et sa prédilection pour l'utiUsation, au besoin aprèsanalyse secondaire, de matériaux déjà existants, que l'on met en uvredans un schéma explicatif très logiquement construit. On ne pourraguère s'étonner si ces orientations générales très éloignées donnent desouvrages très différents. Sont-ils pour autant contradictoires ? Nous ne lepensons pas, car Us s'attachent à des réaUtés si éloignées qu'eUes ne leurlaissent guère de possibiUté de se contredire. Voyons cela.

Yves Dutercq se propose de « décrire un étabUssement scolaire sousl'angle des relations sociales qu'U génère » (p. 13), espérant ainsi mettreà jour ses modes de fonctionnement. Pour ce faire, U a privilégié lesenseignants, acteurs qui, par leur nombre et leur place centrale dans lamission de l'établissement, lui semblent avoir une influence détermi¬nante. R a observé et analysé leurs relations entre collègues et avec lechef d'étabUssement, mais aussi, de manière moindre, avec les autrescatégories de personnel et les élèves. Les groupes d'activité des ensei¬gnants, leurs cercles de sociabUité et leurs réseaux plus larges connectantces groupes et cercles divers constituent pour l'auteur une des dimen¬sions importantes de l'identité de l'étabUssement et un facteur essentielde ses capacités d'action et de mobilisation. Pour le nouveau venu, parti¬ciper à ces groupes n'est pas spontané. Cela nécessite une « compétence

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Notes critiques 135

sociale » qui s'acquiert sur le tas, après un apprentissage permettant demaîtriser les conventions impUcites, l'histoire et les codes qui les régu¬lent.

Pour dresser la carte de ces groupes et mettre à jour l'implicite deleur fonctionnement, l'auteur a mis en uvre une méthode d'« observa¬tion très participante » (p. 18), dans la mesure où U était lui même ensei¬gnant dans le collège observé. Mais quelques précautions méthodolo¬giques empruntées à la méthode ethnographique lui ont permis de« garder ses distances ». L'auteur achève cette première partie introduc¬tive en présentant un état des Ueux, le collège principalement étudié,quatre autres utUisés à l'occasion, la commune d'implantation, les locauxdu collège et leurs occupants, auxquels sont consacrés plusieurs « por¬traits ».

La seconde partie, la plus novatrice, est consacrée à l'observation dela saUe des professeurs, lieu privilégié de la vie sociale des enseignant.EUe a certes ses contraintes : entrevues limitées par le temps d'une inter¬classe, moment de détente et de réconfort avant d'affronter à nouveaules classes, et donc le plus souvent conversations informeUes et chaleu¬reuses, entre soi. Elle n'en manifeste pas moins, par la distribution desgens dans son espace, les réseaux de sociabiUté. Ainsi, dans le collège étu¬dié, les professeurs se répartissent en deux endroits, le distributeur decafé et le coin thé. Est-ce une amitié préalable qui amène à une consom¬mation commune (le groupe d'amis qui a organisé le coin thé) ou un goûtcommun qui fournit l'occasion de développer des échanges ? En fait der¬rière l'arbitraire des goûts et des amitiés, l'auteur voit le poids des affini¬tés sociales (mariés et plus âgés, habitant dans le voisinage pour le cointhé, certifiés ou agrégés plus jeunes et célibataires, souvent parisiens etplutôt SNES pour le coin café. Entre ces deux pôles, un no man's land,prolongé au mur par le tableau d'affichage, où les professeurs mal inté¬grés peuvent préserver une certaine contenance en Usant les informationset échangeant à leur propos. Y. Dutercq décrit de manière très sugges¬tive, à partir d'exemples concrets, les différents Ueux et moments de lasociabilité professorale, de la salle des professeurs de 8 h 15 à 8 h 30, auxdéparts de 16 h en passant par la cantine et le bistrot de midi et les posesaux interclasses principales. R expUcite aussi les codes de conduite et lesrôles en analysant le matin les salutations, la formation des petitsgroupes et le rôle du déclencheur d'une sociabilité plus générale surl'ensemble de la saUe.

La troisième partie répertorie les seize cercles de sociabUité existant,les connecte en deux réseaux relativement distincts, symboUsés par lesbuveurs de café et ceux de thé. Pour comprendre cela, U remonte dansl'histoire de l'établissement et de ses personnels successifs et soulignel'instabilité de ces groupes, qui disparaissent ou se recomposent au gré

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sociale » qui s'acquiert sur le tas, après un apprentissage permettant demaîtriser les conventions impUcites, l'histoire et les codes qui les régu¬lent.

Pour dresser la carte de ces groupes et mettre à jour l'implicite deleur fonctionnement, l'auteur a mis en uvre une méthode d'« observa¬tion très participante » (p. 18), dans la mesure où U était lui même ensei¬gnant dans le collège observé. Mais quelques précautions méthodolo¬giques empruntées à la méthode ethnographique lui ont permis de« garder ses distances ». L'auteur achève cette première partie introduc¬tive en présentant un état des Ueux, le collège principalement étudié,quatre autres utUisés à l'occasion, la commune d'implantation, les locauxdu collège et leurs occupants, auxquels sont consacrés plusieurs « por¬traits ».

La seconde partie, la plus novatrice, est consacrée à l'observation dela saUe des professeurs, lieu privilégié de la vie sociale des enseignant.EUe a certes ses contraintes : entrevues limitées par le temps d'une inter¬classe, moment de détente et de réconfort avant d'affronter à nouveaules classes, et donc le plus souvent conversations informeUes et chaleu¬reuses, entre soi. Elle n'en manifeste pas moins, par la distribution desgens dans son espace, les réseaux de sociabiUté. Ainsi, dans le collège étu¬dié, les professeurs se répartissent en deux endroits, le distributeur decafé et le coin thé. Est-ce une amitié préalable qui amène à une consom¬mation commune (le groupe d'amis qui a organisé le coin thé) ou un goûtcommun qui fournit l'occasion de développer des échanges ? En fait der¬rière l'arbitraire des goûts et des amitiés, l'auteur voit le poids des affini¬tés sociales (mariés et plus âgés, habitant dans le voisinage pour le cointhé, certifiés ou agrégés plus jeunes et célibataires, souvent parisiens etplutôt SNES pour le coin café. Entre ces deux pôles, un no man's land,prolongé au mur par le tableau d'affichage, où les professeurs mal inté¬grés peuvent préserver une certaine contenance en Usant les informationset échangeant à leur propos. Y. Dutercq décrit de manière très sugges¬tive, à partir d'exemples concrets, les différents Ueux et moments de lasociabilité professorale, de la salle des professeurs de 8 h 15 à 8 h 30, auxdéparts de 16 h en passant par la cantine et le bistrot de midi et les posesaux interclasses principales. R expUcite aussi les codes de conduite et lesrôles en analysant le matin les salutations, la formation des petitsgroupes et le rôle du déclencheur d'une sociabilité plus générale surl'ensemble de la saUe.

La troisième partie répertorie les seize cercles de sociabUité existant,les connecte en deux réseaux relativement distincts, symboUsés par lesbuveurs de café et ceux de thé. Pour comprendre cela, U remonte dansl'histoire de l'établissement et de ses personnels successifs et soulignel'instabilité de ces groupes, qui disparaissent ou se recomposent au gré

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136 Recherche et Formation

des départs et des arrivées de coUègues. Puis il examine la dynamiqueparfois conflictueUe qu'engendrent ces réseaux, avec leurs appréciationsréciproques sans tendresse, et la manière dont ils investissent ou déser¬tent les poUtiques d'action de l'étabUssement. R analyse enfin à partir dequelques cas comment s'établit ou plutôt se défait la réputation d'unenseignant lorsque les informations venant des saUes de classe (élèves etpersonnels de service) recoupent ceUes de la saUe des professeurs concer¬nant les compétences relationneUes, celles des instances administratives,qui donnent parfois l'écho de la parole des parents, ceUes enfin des ins¬tances de concertation pédagogique, conseUs de classe notamment, où setrahissent dans les comportements les faiblesses des compétences profes¬sionnelles.

La dernière partie enfin traite de l'évolution des rôles et de la renégo¬ciation des identités dans le cadre des poUtiques ministérieUes de rénova¬tion des coUèges et de réforme de l'orientation en seconde. Cela est fait àpartir des relations entre le chef d'étabUssement et les enseignants, avecce qui reste de leurs syndicats. Au total, voUà un Uvre qui fait découvrirle domaine encore peu exploré en France de la sociabUité des enseignantset en donne des analyse très fines et suggestives. Certes, on pourras'étonner des nombreux titres et sous-titres qui fonctionnent de manièrebien httéraire à l'aUusion et au jeu de mot mais qui le plus souvent ontun rapport lointain avec le contenu du texte. On pourra aussi s'interro¬ger sur la vaUdité de certaines analyses, qui certes sonnent juste, maisn'indiquent pas leurs principes de construction et nous font regretterl'absence d'une élaboration plus expUcitement conceptuelle. Mais l'intui¬tion analytique de l'auteur est si grande qu'on peut largement lui faireconfiance.

L'ouvrage de Monique Hirschhorn a une ambition beaucoup plusvaste. Comme l'indique son titre, il traite de tous les enseignants, del'institutrice de materneUe au professeur d'université, en passant par lesprofesseurs du secondaire. Pourquoi l'usage générique du terme ensei¬gnant s'est -U imposé à tous à partir des années 60 ? Pourquoi « l'affir¬mation des différences statutaires a[-eUe] reculé au profit d'une déno¬mination unitaire » (p. 19) ? C'est en partant de cette question quel'auteur engage son travaU.

Les mots ne sont jamais innocents. Le fait que l'un s'impose au détri¬ment des autres est un signe, ici un indicateur des transformations dumonde enseignant et de la massification de l'institution scolaire, avec leschangements résultant dans son public, ses missions (la réussite de tous),ses structures et ses valeurs. QueUes que soient par aUleurs leurs diffé¬rences, tous les enseignants du secteur pubUc partagent une même « com¬munauté de destin » (p. 25) faite à la fois des conséquences de la massifi¬cation, qu'Us ont subies, et de leur statut commun de fonctionnaire. Cela

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des départs et des arrivées de coUègues. Puis il examine la dynamiqueparfois conflictueUe qu'engendrent ces réseaux, avec leurs appréciationsréciproques sans tendresse, et la manière dont ils investissent ou déser¬tent les poUtiques d'action de l'étabUssement. R analyse enfin à partir dequelques cas comment s'établit ou plutôt se défait la réputation d'unenseignant lorsque les informations venant des saUes de classe (élèves etpersonnels de service) recoupent ceUes de la saUe des professeurs concer¬nant les compétences relationneUes, celles des instances administratives,qui donnent parfois l'écho de la parole des parents, ceUes enfin des ins¬tances de concertation pédagogique, conseUs de classe notamment, où setrahissent dans les comportements les faiblesses des compétences profes¬sionnelles.

La dernière partie enfin traite de l'évolution des rôles et de la renégo¬ciation des identités dans le cadre des poUtiques ministérieUes de rénova¬tion des coUèges et de réforme de l'orientation en seconde. Cela est fait àpartir des relations entre le chef d'étabUssement et les enseignants, avecce qui reste de leurs syndicats. Au total, voUà un Uvre qui fait découvrirle domaine encore peu exploré en France de la sociabUité des enseignantset en donne des analyse très fines et suggestives. Certes, on pourras'étonner des nombreux titres et sous-titres qui fonctionnent de manièrebien httéraire à l'aUusion et au jeu de mot mais qui le plus souvent ontun rapport lointain avec le contenu du texte. On pourra aussi s'interro¬ger sur la vaUdité de certaines analyses, qui certes sonnent juste, maisn'indiquent pas leurs principes de construction et nous font regretterl'absence d'une élaboration plus expUcitement conceptuelle. Mais l'intui¬tion analytique de l'auteur est si grande qu'on peut largement lui faireconfiance.

L'ouvrage de Monique Hirschhorn a une ambition beaucoup plusvaste. Comme l'indique son titre, il traite de tous les enseignants, del'institutrice de materneUe au professeur d'université, en passant par lesprofesseurs du secondaire. Pourquoi l'usage générique du terme ensei¬gnant s'est -U imposé à tous à partir des années 60 ? Pourquoi « l'affir¬mation des différences statutaires a[-eUe] reculé au profit d'une déno¬mination unitaire » (p. 19) ? C'est en partant de cette question quel'auteur engage son travaU.

Les mots ne sont jamais innocents. Le fait que l'un s'impose au détri¬ment des autres est un signe, ici un indicateur des transformations dumonde enseignant et de la massification de l'institution scolaire, avec leschangements résultant dans son public, ses missions (la réussite de tous),ses structures et ses valeurs. QueUes que soient par aUleurs leurs diffé¬rences, tous les enseignants du secteur pubUc partagent une même « com¬munauté de destin » (p. 25) faite à la fois des conséquences de la massifi¬cation, qu'Us ont subies, et de leur statut commun de fonctionnaire. Cela

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Notes critiques 137

les a placé devant le même système de contraintes, qui les a conduits aconstruire certains types de pratiques professionneUes et à développerun certain nombre d'insatisfactions. Rendre compte de ce sentimentrépandu que l'on appeUe le malaise enseignant et retrouver le sens qu'Usconfèrent à leurs pratiques professionneUes, tel est finalement le projetde l'auteur. Faut-U pour cela se mettre à la place des gens, s'identifier àeux et sentir comme Us sentent ? C'est possible et légitime, c'est même ceque fait la Uttérature. Mais depuis Weber, une autre voie proprementsociologique est possible. Il suffit de reconstruire le sens qu'un acteurrationnel donne à son action dans une situation de contraintes donnée,en précisant qu'U s'agit d'un acteur rationnel du point de vue sociolo¬gique et non économique, c'est à dire rationnel par rapport à ses valeurset pas seulement dans ses calculs d'utilité. C'est cette voie que choisitMonique Hirschhorn.

Elle le fait en analysant dans une première partie le système descontraintes qui s'imposent à tous les enseignants. Et d'abord ceUes duesau statut des enseignants, que l'on a voulu rendre indépendants de toutesles pressions, qu'eUes viennent des politiques, des usagers et même dansune certaine mesure, de l'administration, avec des inspecteurs lointains,des chefs d'étabUssement au pouvoir pédagogique Umité, et un systèmede gratification-sanction pratiquement inexistant. Certes, les rémunéra¬tions sont faibles, mais U faut nuancer cela selon le sexe et la catégorie.Quant à la hiérarchie interne, fondée sur l'inégale difficulté desconcours, elle a beaucoup perdu de sa pertinence fonctionnelle. Desenseignants de statuts divers dispensent les mêmes enseignements et accè¬dent aux mêmes fonctions directoriales, notamment dans les collègesjadis différenciés et dans les universités. Dès lors, pas besoin d'avoirrecours pour expliquer des comportements comme l'incapacité à tra¬vailler en équipe ou la résistance au changement à une hypothétique« nature enseignante » faite d'individuaUsme ou de corporatisme. Ce sontlà des effets de position : l'indépendance voulue par le statut favorisel'individuaUsme ; la défense des avantages statutaires (sécurité, indépen¬dance, faiblesse du temps de travaU contraint) pousse au corporatisme.

Le poids du nombre d'enseignants, 700 000 en 1985, n'est pas sanseffet. D'abord, U dévalorise leur statut : la disparition de la rareté, laleur et celle d'un de leur trait distinctif, le niveau de formation, mainte¬nant plus fort dans la population, entraîne ceUe du prestige. Ensuite Uréduit la cohésion des différents corps, en ouvrant de larges voies d'accèsdérogatoire pour répondre à la croissance exceptionneUe des besoins derecrutement. Cela empêche la sociaUsation commune que fournissent lesétablissements de formation professionnelle. En outre les assez fortespossibiUtés de promotion ouvertes alors engendrent, comme U est habi¬tuel, plus de frustration que de satisfaction, car si tout le monde peutespérer, quelques uns seulement sont satisfaits.

Notes critiques 137

les a placé devant le même système de contraintes, qui les a conduits aconstruire certains types de pratiques professionneUes et à développerun certain nombre d'insatisfactions. Rendre compte de ce sentimentrépandu que l'on appeUe le malaise enseignant et retrouver le sens qu'Usconfèrent à leurs pratiques professionneUes, tel est finalement le projetde l'auteur. Faut-U pour cela se mettre à la place des gens, s'identifier àeux et sentir comme Us sentent ? C'est possible et légitime, c'est même ceque fait la Uttérature. Mais depuis Weber, une autre voie proprementsociologique est possible. Il suffit de reconstruire le sens qu'un acteurrationnel donne à son action dans une situation de contraintes donnée,en précisant qu'U s'agit d'un acteur rationnel du point de vue sociolo¬gique et non économique, c'est à dire rationnel par rapport à ses valeurset pas seulement dans ses calculs d'utilité. C'est cette voie que choisitMonique Hirschhorn.

Elle le fait en analysant dans une première partie le système descontraintes qui s'imposent à tous les enseignants. Et d'abord ceUes duesau statut des enseignants, que l'on a voulu rendre indépendants de toutesles pressions, qu'eUes viennent des politiques, des usagers et même dansune certaine mesure, de l'administration, avec des inspecteurs lointains,des chefs d'étabUssement au pouvoir pédagogique Umité, et un systèmede gratification-sanction pratiquement inexistant. Certes, les rémunéra¬tions sont faibles, mais U faut nuancer cela selon le sexe et la catégorie.Quant à la hiérarchie interne, fondée sur l'inégale difficulté desconcours, elle a beaucoup perdu de sa pertinence fonctionnelle. Desenseignants de statuts divers dispensent les mêmes enseignements et accè¬dent aux mêmes fonctions directoriales, notamment dans les collègesjadis différenciés et dans les universités. Dès lors, pas besoin d'avoirrecours pour expliquer des comportements comme l'incapacité à tra¬vailler en équipe ou la résistance au changement à une hypothétique« nature enseignante » faite d'individuaUsme ou de corporatisme. Ce sontlà des effets de position : l'indépendance voulue par le statut favorisel'individuaUsme ; la défense des avantages statutaires (sécurité, indépen¬dance, faiblesse du temps de travaU contraint) pousse au corporatisme.

Le poids du nombre d'enseignants, 700 000 en 1985, n'est pas sanseffet. D'abord, U dévalorise leur statut : la disparition de la rareté, laleur et celle d'un de leur trait distinctif, le niveau de formation, mainte¬nant plus fort dans la population, entraîne ceUe du prestige. Ensuite Uréduit la cohésion des différents corps, en ouvrant de larges voies d'accèsdérogatoire pour répondre à la croissance exceptionneUe des besoins derecrutement. Cela empêche la sociaUsation commune que fournissent lesétablissements de formation professionnelle. En outre les assez fortespossibiUtés de promotion ouvertes alors engendrent, comme U est habi¬tuel, plus de frustration que de satisfaction, car si tout le monde peutespérer, quelques uns seulement sont satisfaits.

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138 Recherche et Formation

La crise de la relation pédagogique sous la double forme de mise encause de l'autorité du maître et de contestation de la légitimité de l'écoleest certes atténuée par le pouvoir qu'a l'école d'attribuer un bien devenuindispensable, le diplôme. Mais outre que sa rentabihté diminue, il nepeut engager dans le jeu scolaire que les élèves qui l'espèrent, non ceuxen échec, qui y ont renoncé. La mise en cause du savoir est manifestedans l'instabUité des programmes, dans leur rédaction même, qui montreplus de compromis que de certitudes, et dans certaines conceptionsd'ordre pédagogique (non directivité rodgerienne, constructivisme piagé-tien) et phUosophique (épistémologie anarchisante de Feyerabend). Orcela atteint l'enseignant au cur de sa pratique professionneUe, car U nepeut y avoir de pédagogie sans contenu ni de pédagogie cynique, qui neprête pas foi à ce qu'eUe enseigne.

L'ensemble de ces contraintes, qui permettent de comprendre lemalaise des enseignants, ne suffit toutefois pas à expUquer leur pratique.R faut ajouter aux effets de positions les effets de disposition, les modèlesnormatifs qu'adopte l'enseignant pour guider sa pratique. MoniqueHirschhorn en a repéré trois dans ses propres enquêtes sur six coUèges etdeux lycées. Le modèle du magistère, le plus ancien, a pour valeur cen¬trale le savoir. Dans sa version élitiste, le savoir n'est accessible qu'à unpetit nombre, ce qui amène à regretter l'enseignement de masse et l'atté¬nuation de la fonction de transmission patrimoniale, qui l'accompagne.Sa version démocratique postule que le savoir est accessible à tous sil'éducation se donne les moyens nécessaires. Le modèle du pédagogue,qui s'est beaucoup développé avec la crise de la relation pédagogique, estcentré sur l'élève et la prise en compte de ses besoins. Il s'agit ici plusd'éduquer que d'instruire. Le dernier modèle proposé, le modèle del'animateur, récent et minoritaire, a pour valeur central l'étabUssementet valorise les compétences de participation et d'animation locale.Adhérer à chacun de ces modèles, et particuUèrement au premier, a uncoût, étant donné le système de contraintes, la résistance des élèves,l'instabilité des savoirs et la faible rentabilité de leur plus grandemaîtrise, puisque d'autres l'enseigneront avec une bien moindre forma¬tion. On peut certes tenter de réduire ces coûts, notamment en changeantd'établissement et donc de public. On peut aussi n'adhérer à aucunmodèle, étant donné leur multipUcité et leur coût. Mais ceci amène audésarroi, à la perte de sens de son travaU, ou à l'utUitarisme, à l'efface¬ment de la rationaUté axiologique au profit d'une rationalité purementinstrumentale, l'essentiel de sa vie étant situé aUleurs que dans sa pra¬tique professionnelle. L'auteur constate que les enseignants recrutésaprès 1975 sont plutôt utilitaristes, que ceux qui sont passés par desconcours difficiles adoptent plutôt le modèle du magistère, tandis queceux qui ont eu des parcours difficUes préfèrent le modèle du pédagogueou parfois connaissent le désarroi.

138 Recherche et Formation

La crise de la relation pédagogique sous la double forme de mise encause de l'autorité du maître et de contestation de la légitimité de l'écoleest certes atténuée par le pouvoir qu'a l'école d'attribuer un bien devenuindispensable, le diplôme. Mais outre que sa rentabihté diminue, il nepeut engager dans le jeu scolaire que les élèves qui l'espèrent, non ceuxen échec, qui y ont renoncé. La mise en cause du savoir est manifestedans l'instabUité des programmes, dans leur rédaction même, qui montreplus de compromis que de certitudes, et dans certaines conceptionsd'ordre pédagogique (non directivité rodgerienne, constructivisme piagé-tien) et phUosophique (épistémologie anarchisante de Feyerabend). Orcela atteint l'enseignant au cur de sa pratique professionneUe, car U nepeut y avoir de pédagogie sans contenu ni de pédagogie cynique, qui neprête pas foi à ce qu'eUe enseigne.

L'ensemble de ces contraintes, qui permettent de comprendre lemalaise des enseignants, ne suffit toutefois pas à expUquer leur pratique.R faut ajouter aux effets de positions les effets de disposition, les modèlesnormatifs qu'adopte l'enseignant pour guider sa pratique. MoniqueHirschhorn en a repéré trois dans ses propres enquêtes sur six coUèges etdeux lycées. Le modèle du magistère, le plus ancien, a pour valeur cen¬trale le savoir. Dans sa version élitiste, le savoir n'est accessible qu'à unpetit nombre, ce qui amène à regretter l'enseignement de masse et l'atté¬nuation de la fonction de transmission patrimoniale, qui l'accompagne.Sa version démocratique postule que le savoir est accessible à tous sil'éducation se donne les moyens nécessaires. Le modèle du pédagogue,qui s'est beaucoup développé avec la crise de la relation pédagogique, estcentré sur l'élève et la prise en compte de ses besoins. Il s'agit ici plusd'éduquer que d'instruire. Le dernier modèle proposé, le modèle del'animateur, récent et minoritaire, a pour valeur central l'étabUssementet valorise les compétences de participation et d'animation locale.Adhérer à chacun de ces modèles, et particuUèrement au premier, a uncoût, étant donné le système de contraintes, la résistance des élèves,l'instabilité des savoirs et la faible rentabilité de leur plus grandemaîtrise, puisque d'autres l'enseigneront avec une bien moindre forma¬tion. On peut certes tenter de réduire ces coûts, notamment en changeantd'établissement et donc de public. On peut aussi n'adhérer à aucunmodèle, étant donné leur multipUcité et leur coût. Mais ceci amène audésarroi, à la perte de sens de son travaU, ou à l'utUitarisme, à l'efface¬ment de la rationaUté axiologique au profit d'une rationalité purementinstrumentale, l'essentiel de sa vie étant situé aUleurs que dans sa pra¬tique professionnelle. L'auteur constate que les enseignants recrutésaprès 1975 sont plutôt utilitaristes, que ceux qui sont passés par desconcours difficiles adoptent plutôt le modèle du magistère, tandis queceux qui ont eu des parcours difficUes préfèrent le modèle du pédagogueou parfois connaissent le désarroi.

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Notes critiques 139

En conclusion l'auteur constate que plusieurs faits concourent àl'adoption de l'attitude utiUtariste et à la limitation de l'investissementprofessionnel : l'autonomie de l'enseignant en classe, la quasi absenced'évaluation et de gratification sanction, la sécurité du statut de fonc¬tionnaire et le comportement même des usagers, leur absence d'exi¬gences, coûteuses pour eux aussi. Du coup, le progrès de l'école reposesur le volontarisme et le dévouement de ceux qui adhèrent à un modèlenormatif. Aussi l'auteur passe-t-eUe en revue deux mesures destinées àUmiter l'utilitarisme et ses effets, la revalorisation, engagée sans contre¬partie et du coup sans effet, et la formation, qui devrait contribuer àtransformer l'enseignement en un métier pleinement reconnu,s'appuyant sur des savoirs d'application solidement établis, ce quin'existe guère malgré l'existence depuis 25 ans des sciences de l'éduca¬tion dans les universités. Puis l'auteur nous quitte sur ce constat relati¬vement pessimiste.

Cet ouvrage n'en manifeste pas moins une tentative de grandeampleur par son objet et par les matériaux mobUisés, pour construire lesystème de contraintes qui s'est imposé à tous les enseignants du pubUcdans les années 80 et pour en déduire l'économie psychique qu'entraînel'adhésion à tel ou tel modèle de conduite. Mais le fonctionnement psy¬chique est-U entièrement déductible d'un système de contraintes et d'uncalcul des coûts ? On peut certes en douter. Force est cependant dereconnaître l'envergure et l'originaUté de l'expUcation ici proposée dumalaise enseignant. On peut aussi contester la prise en charge sous lemême mot de tous ceux qui ont des fonctions d'enseignement. Les univer¬sitaires n'ont-Us pas cherché à se distinguer dès la loi Savary en se fai¬sant appeler enseignants-chercheurs ? Mais U est vrai qu'Us connaissentdes contraintes semblables aux autres sur certains points. Au moment oùelle fut entreprise, dans les années 1986-87, cette thèse était prémoni¬toire, car elle anticipait sur un événement, la création des IUFM.Aujourd'hui elle reste très éclairante, car les conditions décrites n'ontpas encore fortement changé. Mais demain, le rapprochement des ensei¬gnants du primaire et du secondaire qu'instaure les IUFM et par contrecoup la plus forte différenciation d'avec les universitaires ne risquent-ilpas d'interrompre cette phase de 30 ans que Monique Hirschhorn a

appelé l'ère des enseignants ? L'avenir le dira.

Raymond BOURDONCLEUniversité de LUle 3

Notes critiques 139

En conclusion l'auteur constate que plusieurs faits concourent àl'adoption de l'attitude utiUtariste et à la limitation de l'investissementprofessionnel : l'autonomie de l'enseignant en classe, la quasi absenced'évaluation et de gratification sanction, la sécurité du statut de fonc¬tionnaire et le comportement même des usagers, leur absence d'exi¬gences, coûteuses pour eux aussi. Du coup, le progrès de l'école reposesur le volontarisme et le dévouement de ceux qui adhèrent à un modèlenormatif. Aussi l'auteur passe-t-eUe en revue deux mesures destinées àUmiter l'utilitarisme et ses effets, la revalorisation, engagée sans contre¬partie et du coup sans effet, et la formation, qui devrait contribuer àtransformer l'enseignement en un métier pleinement reconnu,s'appuyant sur des savoirs d'application solidement établis, ce quin'existe guère malgré l'existence depuis 25 ans des sciences de l'éduca¬tion dans les universités. Puis l'auteur nous quitte sur ce constat relati¬vement pessimiste.

Cet ouvrage n'en manifeste pas moins une tentative de grandeampleur par son objet et par les matériaux mobUisés, pour construire lesystème de contraintes qui s'est imposé à tous les enseignants du pubUcdans les années 80 et pour en déduire l'économie psychique qu'entraînel'adhésion à tel ou tel modèle de conduite. Mais le fonctionnement psy¬chique est-U entièrement déductible d'un système de contraintes et d'uncalcul des coûts ? On peut certes en douter. Force est cependant dereconnaître l'envergure et l'originaUté de l'expUcation ici proposée dumalaise enseignant. On peut aussi contester la prise en charge sous lemême mot de tous ceux qui ont des fonctions d'enseignement. Les univer¬sitaires n'ont-Us pas cherché à se distinguer dès la loi Savary en se fai¬sant appeler enseignants-chercheurs ? Mais U est vrai qu'Us connaissentdes contraintes semblables aux autres sur certains points. Au moment oùelle fut entreprise, dans les années 1986-87, cette thèse était prémoni¬toire, car elle anticipait sur un événement, la création des IUFM.Aujourd'hui elle reste très éclairante, car les conditions décrites n'ontpas encore fortement changé. Mais demain, le rapprochement des ensei¬gnants du primaire et du secondaire qu'instaure les IUFM et par contrecoup la plus forte différenciation d'avec les universitaires ne risquent-ilpas d'interrompre cette phase de 30 ans que Monique Hirschhorn a

appelé l'ère des enseignants ? L'avenir le dira.

Raymond BOURDONCLEUniversité de LUle 3

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140 Recherche et Formation

CHARTIER, J., DEVINEAU-MALBEC, A., FAINGOLD, N.,FAVE-BONNET, M.-F., FERRY, G., VILLERS, D. (1993).Initier aux savoirs de la pratique. - Nanterre : Université de Paris 10.

Les Instituteurs Maîtres Formateurs (I.M.F.) sont chargés de la for¬mation « sur le terrain » des étudiants professeurs d'école. Une équipeassociant des praticiennes de terrain et des enseignants-chercheurs dudépartement des Sciences de l'Éducation de l'Université Paris X a menéune réflexion théorique et exposé quelques exemples de pratiques concer¬nant cette catégorie de formateurs : « Initier aux savoirs de la pratique »

traite du problème des processus de formation basés sur l'alternancethéorie et pratique.

Comme le souUgne Gilles Ferry au début de l'ouvrage, la pratique del'alternance en formation professionneUe impUque, pour être efficace,plus qu'une simple succession de temps de formation, se déroulant tantôtdans les centres de formation, tantôt sur les Ueux professionnels : l'alter¬nance trouve son sens dans un projet reposant sur une véritable Uaisonthéorie-p r atique .

L'analyse des textes officiels, menée par D. VUlers, révèle une évolu¬tion des attentes de l'Institution à l'égard des formateurs de terrain. Du« maître d'appUcation » rattaché aux écoles normales, dont les compé¬tences se fondaient sur l'expérience, on attendait des « leçons modèles ».Le CAEAA (cerfiticat d'aptitude à l'enseignement dans les écoles annexeset d'appUcation) exigé à partir de 1962 reconnaît aussi à ceux qui se des¬tinent à cette fonction des connaissances théoriques et des capacitésd'observation et d'analyse de pratiques. Le CAFIMF (certificat d'apti¬tude aux fonctions d'instituteur maître formateur) mis en place en 1985marque enfin la reconnaissance de la nécessité d'une double compétencepour l'exercice de la fonction : compétence professionnelle et compétencede formation.

On ne parle plus de « maître d'application » mais « d'instituteurmaître formateur ».

L'analyse terminologique réaUsée fait apparaître dans les deux appel¬lations la position de supériorité et la fonction de transmission de savoir-faire du maître, mais U ne s'agit plus seulement de montrer un modèle àimiter. Il s'agit d'accompagner les stagiaires pour qu'Us acquièrent cer¬taines aptitudes ou compétences professionneUes, en les aidant dans leursobservations et leurs analyses. L'évolution de l'appellation peut corres¬pondre à une transformation des pratiques de formation.

Cependant, si les IMF sont titulaires du CAEAA ou du CAFIMF, Us

n'ont souvent reçu aucune formation spécifique pour se préparer à leurfonction. L'expérience pratique de formation « sur le tas » relatée parJ. Chartier montre combien le manque de referents a été ressenti, lorsdes tentatives de réflexion dans l'action et sur l'action. Comment cette

140 Recherche et Formation

CHARTIER, J., DEVINEAU-MALBEC, A., FAINGOLD, N.,FAVE-BONNET, M.-F., FERRY, G., VILLERS, D. (1993).Initier aux savoirs de la pratique. - Nanterre : Université de Paris 10.

Les Instituteurs Maîtres Formateurs (I.M.F.) sont chargés de la for¬mation « sur le terrain » des étudiants professeurs d'école. Une équipeassociant des praticiennes de terrain et des enseignants-chercheurs dudépartement des Sciences de l'Éducation de l'Université Paris X a menéune réflexion théorique et exposé quelques exemples de pratiques concer¬nant cette catégorie de formateurs : « Initier aux savoirs de la pratique »

traite du problème des processus de formation basés sur l'alternancethéorie et pratique.

Comme le souUgne Gilles Ferry au début de l'ouvrage, la pratique del'alternance en formation professionneUe impUque, pour être efficace,plus qu'une simple succession de temps de formation, se déroulant tantôtdans les centres de formation, tantôt sur les Ueux professionnels : l'alter¬nance trouve son sens dans un projet reposant sur une véritable Uaisonthéorie-p r atique .

L'analyse des textes officiels, menée par D. VUlers, révèle une évolu¬tion des attentes de l'Institution à l'égard des formateurs de terrain. Du« maître d'appUcation » rattaché aux écoles normales, dont les compé¬tences se fondaient sur l'expérience, on attendait des « leçons modèles ».Le CAEAA (cerfiticat d'aptitude à l'enseignement dans les écoles annexeset d'appUcation) exigé à partir de 1962 reconnaît aussi à ceux qui se des¬tinent à cette fonction des connaissances théoriques et des capacitésd'observation et d'analyse de pratiques. Le CAFIMF (certificat d'apti¬tude aux fonctions d'instituteur maître formateur) mis en place en 1985marque enfin la reconnaissance de la nécessité d'une double compétencepour l'exercice de la fonction : compétence professionnelle et compétencede formation.

On ne parle plus de « maître d'application » mais « d'instituteurmaître formateur ».

L'analyse terminologique réaUsée fait apparaître dans les deux appel¬lations la position de supériorité et la fonction de transmission de savoir-faire du maître, mais U ne s'agit plus seulement de montrer un modèle àimiter. Il s'agit d'accompagner les stagiaires pour qu'Us acquièrent cer¬taines aptitudes ou compétences professionneUes, en les aidant dans leursobservations et leurs analyses. L'évolution de l'appellation peut corres¬pondre à une transformation des pratiques de formation.

Cependant, si les IMF sont titulaires du CAEAA ou du CAFIMF, Us

n'ont souvent reçu aucune formation spécifique pour se préparer à leurfonction. L'expérience pratique de formation « sur le tas » relatée parJ. Chartier montre combien le manque de referents a été ressenti, lorsdes tentatives de réflexion dans l'action et sur l'action. Comment cette

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Notes critiques 141

IMF, confrontée à la nécessité d'expliciter et de justifier sa pratiqued'enseignante, a été amenée à la « théoriser ». Comment s'est construite,dans l'effort d'analyse des expériences successives, la compétence de for¬mateur.

La démarche de formation proposée par les maîtres formateurs auxstagiaires prévoit des phases d'observation, d'action et de réflexion surl'action. N. Faingold, met en évidence, au cours d'un entretien d'expUci-tation, la difficulté pour le formateur de « ne pas dire » et de laisser se

construire le savoir dans la mise en uvre de cette démarche.Le dispositif de formation sur le terrain prévoit des stages « sous

tutelle » et un stage « en responsabilité » pour les étudiants : l'IMFchargé du suivi de stages exercera successivement les fonctions d'acteur,d'observateur et d'évaluateur.

A. Devineau-Malbec pose quant à eUe le problème de la Uaison théo¬rie-pratique. EUe analyse les représentations de maîtres formateurs et destagiaires et repère plusieurs éléments pouvant expUquer les difficultésd'articulation rencontrées :

les repères théoriques acquis au centre de formation sont rarementen phase avec les besoins apparaissant dans la pratique, et leur inscrip¬tion dans une situation particulière d'enseignement nécessite toujoursdes adaptations. La faiblesse des échanges entre l'Institution de forma¬tion et les terrains de stage est évoquée. Les maîtres formateurs semblentcependant très demandeurs d'une relation avec les professeurs. Chacuns'accorde à dire qu'une réflexion commune est indispensable, mais lestemps et modaUtés de travaU sont-Us définis pour constituer ces équipespédagogiques élargies ?

la théorie apprise au sein des cours se révèle peu opérationnellelorsqu'il s'agit de passer à l'action, car elle ne rend pas compte del'ensemble de ses caractéristiques.

Afin d'améUorer l'efficacité de la formation terrain et de reconnaîtrela spécificité de l'IMF, il s'agira d'approfondir les recherches : pourrepérer d'une part la nature des savoirs pratiques qu'Us sont suscep¬tibles de transmettre aux étudiants, d'autre part les modes de transmis¬sion de ces savoirs.

Marie-Françoise Fave-Bonnet souligne dans la construction del'ouvrage que la mise en place d'une véritable formation des IMF consti-tuterait par aUleurs l'indicateur d'une reconnaissance institutionneUe.De toute façon, on s'en doutait, le Uen théorie-pratique reste toujoursaussi difficile à appréhender. La mise en place des InstitutsUniversitaires de Formation des maîtres n'a rien changée.

F. GRDUSZAKUniversité de LUle 3

Notes critiques 141

IMF, confrontée à la nécessité d'expliciter et de justifier sa pratiqued'enseignante, a été amenée à la « théoriser ». Comment s'est construite,dans l'effort d'analyse des expériences successives, la compétence de for¬mateur.

La démarche de formation proposée par les maîtres formateurs auxstagiaires prévoit des phases d'observation, d'action et de réflexion surl'action. N. Faingold, met en évidence, au cours d'un entretien d'expUci-tation, la difficulté pour le formateur de « ne pas dire » et de laisser se

construire le savoir dans la mise en uvre de cette démarche.Le dispositif de formation sur le terrain prévoit des stages « sous

tutelle » et un stage « en responsabilité » pour les étudiants : l'IMFchargé du suivi de stages exercera successivement les fonctions d'acteur,d'observateur et d'évaluateur.

A. Devineau-Malbec pose quant à eUe le problème de la Uaison théo¬rie-pratique. EUe analyse les représentations de maîtres formateurs et destagiaires et repère plusieurs éléments pouvant expUquer les difficultésd'articulation rencontrées :

les repères théoriques acquis au centre de formation sont rarementen phase avec les besoins apparaissant dans la pratique, et leur inscrip¬tion dans une situation particulière d'enseignement nécessite toujoursdes adaptations. La faiblesse des échanges entre l'Institution de forma¬tion et les terrains de stage est évoquée. Les maîtres formateurs semblentcependant très demandeurs d'une relation avec les professeurs. Chacuns'accorde à dire qu'une réflexion commune est indispensable, mais lestemps et modaUtés de travaU sont-Us définis pour constituer ces équipespédagogiques élargies ?

la théorie apprise au sein des cours se révèle peu opérationnellelorsqu'il s'agit de passer à l'action, car elle ne rend pas compte del'ensemble de ses caractéristiques.

Afin d'améUorer l'efficacité de la formation terrain et de reconnaîtrela spécificité de l'IMF, il s'agira d'approfondir les recherches : pourrepérer d'une part la nature des savoirs pratiques qu'Us sont suscep¬tibles de transmettre aux étudiants, d'autre part les modes de transmis¬sion de ces savoirs.

Marie-Françoise Fave-Bonnet souligne dans la construction del'ouvrage que la mise en place d'une véritable formation des IMF consti-tuterait par aUleurs l'indicateur d'une reconnaissance institutionneUe.De toute façon, on s'en doutait, le Uen théorie-pratique reste toujoursaussi difficile à appréhender. La mise en place des InstitutsUniversitaires de Formation des maîtres n'a rien changée.

F. GRDUSZAKUniversité de LUle 3

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142 Recherche et Formation

CHERVEL, André (1993). - Histoire de l'Agrégation. Contribution àl'histoire de la culture scolaire. INRP. - Éditions Kime, 289 p.

Jusqu'ici, on soupçonnait bien l'agrégation d'être une institutiontypiquement nationale, ayant quelque affinité profonde avec la spécifi¬cité de notre système d'enseignement secondaire. Le grand mérite du der¬nier livre d'A. Chervel est d'en apporter la démonstration précise etrigoureuse. Celui-ci ne se contente pas en effet de retracer l'histoire insti¬tutionnelle - en eUe-même fort passionnante, car complètement inédite -de ce prestigieux concours en ses multiples dimensions : extension desmatières concernées, évolution quantitative des candidats et des lauréats,modalités des épreuves, fonctionnement des jurys etc. Il s'efforce ausside comprendre les raisons profondes de sa longévité ainsi que son rôlestructurant dans la formation du corps enseignant et dans l'évolution dela culture scolaire. En somme l'agrégation est prise ici comme une sorted'analyseur, et une telle démarche, qui remet sans cesse les données enperspective, s'avère particuUèrement féconde.

Créé en 1766 pour combler le vide laissé dans le recrutement desenseignants des coUèges par l'expulsion des Jésuites, le premier concourspubUc de l'agrégation marque d'emblée une rupture avec le système uni¬versitaire de l'Ancien Régime « incapable de réformer ses propres exa¬mens ». Il esquisse une première professionnaUsation du corps professo¬ral (doublée d'une laïcisation) et pose le principe durable de la sélectionpar le mérite. Ensuite, la tourmente révolutionnaire fait disparaîtretoute référence aux distinctions corporatives. Mais le titre d'agrégé réap¬paraît avec l'Empire dans le cadre du décret de 1808 qui jette les basesde l'Université impériale et crée l'École Normale pour former les ensei¬gnants des lycées. L'attribution du titre d'« agrégé-professeur » demeurecependant quelque peu incertaine avant 1821, date où curieusement laRestauration, qui vient de fermer (temporairement) l'École Normale,rétabUt le concours. Plus exactement, U existe alors trois concours (pourles sciences, les classes supérieures de lettres, les classes de grammaire) etles épreuves, assez analogues à celles de l'Ancien Régime, sont égalementde trois types : à l'écrit des « compositions », à l'oral un « exercicepubUc » et une « leçon » où le candidat est à chaque fois opposé à ses

concurrents. Ces concours ne sont pas nationaux, mais académiques, Us

sont organisés à l'initiative des recteurs et en fonction des besoins.Pourtant une institution est née, qui sauf pendant les guerres (et durantune partie de l'Empire autoritaire), fonctionnera sans interruption jus¬qu'à nos jours.

Avec la Monarchie de Juillet, ceUe-ci trouve son rythme de croisière.Le concours devient national et « dans une France dépourvue de facul¬tés, (il) est désigné comme le haut Ueu de la formation supérieure des

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CHERVEL, André (1993). - Histoire de l'Agrégation. Contribution àl'histoire de la culture scolaire. INRP. - Éditions Kime, 289 p.

Jusqu'ici, on soupçonnait bien l'agrégation d'être une institutiontypiquement nationale, ayant quelque affinité profonde avec la spécifi¬cité de notre système d'enseignement secondaire. Le grand mérite du der¬nier livre d'A. Chervel est d'en apporter la démonstration précise etrigoureuse. Celui-ci ne se contente pas en effet de retracer l'histoire insti¬tutionnelle - en eUe-même fort passionnante, car complètement inédite -de ce prestigieux concours en ses multiples dimensions : extension desmatières concernées, évolution quantitative des candidats et des lauréats,modalités des épreuves, fonctionnement des jurys etc. Il s'efforce ausside comprendre les raisons profondes de sa longévité ainsi que son rôlestructurant dans la formation du corps enseignant et dans l'évolution dela culture scolaire. En somme l'agrégation est prise ici comme une sorted'analyseur, et une telle démarche, qui remet sans cesse les données enperspective, s'avère particuUèrement féconde.

Créé en 1766 pour combler le vide laissé dans le recrutement desenseignants des coUèges par l'expulsion des Jésuites, le premier concourspubUc de l'agrégation marque d'emblée une rupture avec le système uni¬versitaire de l'Ancien Régime « incapable de réformer ses propres exa¬mens ». Il esquisse une première professionnaUsation du corps professo¬ral (doublée d'une laïcisation) et pose le principe durable de la sélectionpar le mérite. Ensuite, la tourmente révolutionnaire fait disparaîtretoute référence aux distinctions corporatives. Mais le titre d'agrégé réap¬paraît avec l'Empire dans le cadre du décret de 1808 qui jette les basesde l'Université impériale et crée l'École Normale pour former les ensei¬gnants des lycées. L'attribution du titre d'« agrégé-professeur » demeurecependant quelque peu incertaine avant 1821, date où curieusement laRestauration, qui vient de fermer (temporairement) l'École Normale,rétabUt le concours. Plus exactement, U existe alors trois concours (pourles sciences, les classes supérieures de lettres, les classes de grammaire) etles épreuves, assez analogues à celles de l'Ancien Régime, sont égalementde trois types : à l'écrit des « compositions », à l'oral un « exercicepubUc » et une « leçon » où le candidat est à chaque fois opposé à ses

concurrents. Ces concours ne sont pas nationaux, mais académiques, Us

sont organisés à l'initiative des recteurs et en fonction des besoins.Pourtant une institution est née, qui sauf pendant les guerres (et durantune partie de l'Empire autoritaire), fonctionnera sans interruption jus¬qu'à nos jours.

Avec la Monarchie de Juillet, ceUe-ci trouve son rythme de croisière.Le concours devient national et « dans une France dépourvue de facul¬tés, (il) est désigné comme le haut Ueu de la formation supérieure des

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Notes critiques 143

professeurs » (p. 87), du moins ceux des lycées (ou coUèges royaux), carceux des coUèges communaux échappent complètement au système. Lapratique de l'admissibilité est instaurée, tandis que la spécialisations'accroît avec la création des concours de philosophie, histoire-géogra¬phie (1831), aUemand et anglais (1849) et le dédoublement du concoursdes sciences (mathématiques d'un côté, sciences physiques et natureUesde l'autre). Unique lieu de préparation officiel, l'Ecole Normale réou¬verte (et désormais baptisée « Supérieure ») verrouiUe largement le sys¬

tème, en assurant la nette prépondérance de ses propres élèves parmi lesreçus ; seuls les concours de grammaire (véritable « agrégation dupauvre ») et de langues vivantes, boudés par les normaUens jusqu'à la findu siècle, sont véritablement accessibles aux enseignants de base déjà enfonction. Ce qui témoigne, au dire d'A. Chervel, d'une capacité d'« auto¬formation » entretenue par les revues pédagogiques (p. 119) et d'une« tradition d'entraide » au sein même des étabUssements secondaires. Lasymbiose entre les enseignants de l'ENS et les jurys renforce par aiUeursle caractère élitiste et centralisé d'un concours, dont jusqu'en 1855toutes les épreuves (même à l'écrit) ont Ueu à Paris, ce qui en écarte pourdes raisons matérieUes de nombreux provinciaux.

Après l'échec des réformes de Fortoul, qui voulaient changer l'espritdu système en insistant notamment sur la dimension pédagogique audétriment de la culture « de haut niveau », c'est la IIIe RépubUque quifait entrer l'agrégation dans la « deuxième phase de son histoire », enélargissant sa base de recrutement aux jeunes étudiants des Facultés delettres et de sciences réorganisées à partir de 1880. On passe alors del'élitisme à la meritocratic républicaine. A. Chervel insiste sur le rôlecapital joué par la création des bourses de Ucence et d'agrégation, entraî¬nant une série de conséquences en chaîne : abaissement de l'âge moyendes reçus, création du stage pédagogique pour tous les agrégés (1904)dont la majorité est maintenant dépourvue d'expérience professionneUe,et surtout participation effective de l'enseignement supérieur à la prépa¬ration du concours. L'agrégation tend à devenir la clé de voûte de l'ensei¬gnement secondaire, lorsque des concours s'ouvrent, en dehors des cur¬sus classiques, pour l'enseignement spécial et celui des jeunes fiUes.

On aurait pu penser que le XXe siècle bouleverserait tout cela, avecl'explosion scolaire et l'enseignement de masse. Or U n'en a rien été, mal¬gré la contestation soixante-huitarde. Le nombre de spéciaUtés prolifère :

U a doublé de 1960 à 1980 et atteint aujourd'hui vingt-neuf. La créationdu CAPES (1952) montre sans doute l'impossibUité d'identifier l'agréga¬tion à l'enseignement secondaire. Mais U en aUait largement de même audébut du siècle puisqu'U faUut alors se résoudre à titulariser les ensei¬gnants de lycée détenteurs de la seule Ucence. Au demeurant, le CAPESn'est rien d'autre qu'une « sous-agrégation » (p. 210) ; la fonction de

Notes critiques 143

professeurs » (p. 87), du moins ceux des lycées (ou coUèges royaux), carceux des coUèges communaux échappent complètement au système. Lapratique de l'admissibilité est instaurée, tandis que la spécialisations'accroît avec la création des concours de philosophie, histoire-géogra¬phie (1831), aUemand et anglais (1849) et le dédoublement du concoursdes sciences (mathématiques d'un côté, sciences physiques et natureUesde l'autre). Unique lieu de préparation officiel, l'Ecole Normale réou¬verte (et désormais baptisée « Supérieure ») verrouiUe largement le sys¬

tème, en assurant la nette prépondérance de ses propres élèves parmi lesreçus ; seuls les concours de grammaire (véritable « agrégation dupauvre ») et de langues vivantes, boudés par les normaUens jusqu'à la findu siècle, sont véritablement accessibles aux enseignants de base déjà enfonction. Ce qui témoigne, au dire d'A. Chervel, d'une capacité d'« auto¬formation » entretenue par les revues pédagogiques (p. 119) et d'une« tradition d'entraide » au sein même des étabUssements secondaires. Lasymbiose entre les enseignants de l'ENS et les jurys renforce par aiUeursle caractère élitiste et centralisé d'un concours, dont jusqu'en 1855toutes les épreuves (même à l'écrit) ont Ueu à Paris, ce qui en écarte pourdes raisons matérieUes de nombreux provinciaux.

Après l'échec des réformes de Fortoul, qui voulaient changer l'espritdu système en insistant notamment sur la dimension pédagogique audétriment de la culture « de haut niveau », c'est la IIIe RépubUque quifait entrer l'agrégation dans la « deuxième phase de son histoire », enélargissant sa base de recrutement aux jeunes étudiants des Facultés delettres et de sciences réorganisées à partir de 1880. On passe alors del'élitisme à la meritocratic républicaine. A. Chervel insiste sur le rôlecapital joué par la création des bourses de Ucence et d'agrégation, entraî¬nant une série de conséquences en chaîne : abaissement de l'âge moyendes reçus, création du stage pédagogique pour tous les agrégés (1904)dont la majorité est maintenant dépourvue d'expérience professionneUe,et surtout participation effective de l'enseignement supérieur à la prépa¬ration du concours. L'agrégation tend à devenir la clé de voûte de l'ensei¬gnement secondaire, lorsque des concours s'ouvrent, en dehors des cur¬sus classiques, pour l'enseignement spécial et celui des jeunes fiUes.

On aurait pu penser que le XXe siècle bouleverserait tout cela, avecl'explosion scolaire et l'enseignement de masse. Or U n'en a rien été, mal¬gré la contestation soixante-huitarde. Le nombre de spéciaUtés prolifère :

U a doublé de 1960 à 1980 et atteint aujourd'hui vingt-neuf. La créationdu CAPES (1952) montre sans doute l'impossibUité d'identifier l'agréga¬tion à l'enseignement secondaire. Mais U en aUait largement de même audébut du siècle puisqu'U faUut alors se résoudre à titulariser les ensei¬gnants de lycée détenteurs de la seule Ucence. Au demeurant, le CAPESn'est rien d'autre qu'une « sous-agrégation » (p. 210) ; la fonction de

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144 Recherche et Formation

l'agrégation a donc évolué, mais c'est l'ensemble du système de formationdes maîtres « qui a été réorganisé à son image » .

Comment expliquer la prégnance et le succès d'un tel modèle ? Parses quaUtés propres de probité, d'exigence inteUectueUe et de régularité,répond d'abord A. Chervel. Ainsi que par la « constante jacobine de lavie nationale » (p. 250) qui a fait prévaloir un « schéma centralisateur ».Mais cela ne suffit pas. La vraie raison est ailleurs : « U n'y a pas, il n'y ajamais eu, en face de lui, de véritable concurrence » (p. 251). Autrementdit, les carences récurrentes du système universitaire, son incapaciténotoire depuis plus de deux siècles à répondre de lui-même et valable¬ment à la formation des enseignants auraient amené à étabUr un systèmeplus fiable. Même depuis qu'U participe à la préparation des concours,l'enseignement supérieur n'a jamais donné l'impulsion. Au contraire, les« consignes imposées par les jurys » influencent « de nos jours encoretoute une partie de l'enseignement qu'on appeUe universitaire » (p. 243).Si l'on ajoute que l'agrégation a contribué de manière décisive à orienterle développement des discipUnes et des exercices scolaires, on aura uneidée de la position inexpugnable que détient cette institution. Telle est endéfinitive la thèse, dans l'ensemble assez convaincante, de l'auteur.

Jean-Paul MARTINUniversité de LUle 3

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l'agrégation a donc évolué, mais c'est l'ensemble du système de formationdes maîtres « qui a été réorganisé à son image » .

Comment expliquer la prégnance et le succès d'un tel modèle ? Parses quaUtés propres de probité, d'exigence inteUectueUe et de régularité,répond d'abord A. Chervel. Ainsi que par la « constante jacobine de lavie nationale » (p. 250) qui a fait prévaloir un « schéma centralisateur ».Mais cela ne suffit pas. La vraie raison est ailleurs : « U n'y a pas, il n'y ajamais eu, en face de lui, de véritable concurrence » (p. 251). Autrementdit, les carences récurrentes du système universitaire, son incapaciténotoire depuis plus de deux siècles à répondre de lui-même et valable¬ment à la formation des enseignants auraient amené à étabUr un systèmeplus fiable. Même depuis qu'U participe à la préparation des concours,l'enseignement supérieur n'a jamais donné l'impulsion. Au contraire, les« consignes imposées par les jurys » influencent « de nos jours encoretoute une partie de l'enseignement qu'on appeUe universitaire » (p. 243).Si l'on ajoute que l'agrégation a contribué de manière décisive à orienterle développement des discipUnes et des exercices scolaires, on aura uneidée de la position inexpugnable que détient cette institution. Telle est endéfinitive la thèse, dans l'ensemble assez convaincante, de l'auteur.

Jean-Paul MARTINUniversité de LUle 3

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Notes critiques 145

NOUS AVONS REÇU

BARTH, Britt-Mari (1993). - Le savoir en construction. Former à unepédagogie de la compréhension. Paris : Retz, 208 p.

GARDES-TAMINE, Joëlle, HUBERT, Marie-Claude (1993). -Dictionnaire de critique Uttéraire. Paris : A. CoUn, 231 p.

HESS, Rémi, AUTHIER, Michel (1994). - L'analyse institutionnelle.Paris : PUF, 130 p.

LE BOUFFANT, Michel (dir.) (1993). - Littérature contemporaine. Lesactes de la VUlette. Paris : Nathan, 192 p.

MAUGER, Gérard, BENDIT, René, Von WOLFERSDORFF, Christian(1994). Jeunesses et sociétés. Perspectives de la recherche en France eten Allemagne. Paris : A. CoUn, 355 p.

MONIOT, Henri (1993). - Didactique de l'histoire. Paris : Nathan,254 p.

TAPERNOUX, Patrick (1994). - Comprendre La Garanderie. Toulouse :

Privât, 162 p.

THELOT, Claude (1993). - L'évaluation du système éducatif. Paris :

Nathan, 160 p.

TOURNIER, Michèle (1994). La formation des instituteurs à l'univer¬sité et ses conséquences : le cas de la République fédérale d'AUemagne.Paris : INRP, 117 p.

Notes critiques 145

NOUS AVONS REÇU

BARTH, Britt-Mari (1993). - Le savoir en construction. Former à unepédagogie de la compréhension. Paris : Retz, 208 p.

GARDES-TAMINE, Joëlle, HUBERT, Marie-Claude (1993). -Dictionnaire de critique Uttéraire. Paris : A. CoUn, 231 p.

HESS, Rémi, AUTHIER, Michel (1994). - L'analyse institutionnelle.Paris : PUF, 130 p.

LE BOUFFANT, Michel (dir.) (1993). - Littérature contemporaine. Lesactes de la VUlette. Paris : Nathan, 192 p.

MAUGER, Gérard, BENDIT, René, Von WOLFERSDORFF, Christian(1994). Jeunesses et sociétés. Perspectives de la recherche en France eten Allemagne. Paris : A. CoUn, 355 p.

MONIOT, Henri (1993). - Didactique de l'histoire. Paris : Nathan,254 p.

TAPERNOUX, Patrick (1994). - Comprendre La Garanderie. Toulouse :

Privât, 162 p.

THELOT, Claude (1993). - L'évaluation du système éducatif. Paris :

Nathan, 160 p.

TOURNIER, Michèle (1994). La formation des instituteurs à l'univer¬sité et ses conséquences : le cas de la République fédérale d'AUemagne.Paris : INRP, 117 p.

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Recherche et Formation N° 15 AvrU 1994

ACTUALITE

Nous prions les lecteurs de bien vouloir collaborer à l'élabo¬ration de cette rubrique en signalant l'information ou enproposant un compte rendu à Michèle TOURNIER (Actualitégénérale) ou Annette BON (lUFM-Actualités).

ACTUALITE GENERALE

1. RENCONTRES ET COLLOQUES

LA PROFESSIONNALISATION DES ENSEIGNANTS

Un séminaire de trois jours organisé par l'ATEE (Association ForTeacher Education in Europe) a eu lieu en juillet 1993 à Barcelone(Espagne) (1). Une centaine de formateurs d'enseignants du premier etdu second degré, provenant de dix-sept pays de l'Union européenne, del'Europe centrale et orientale, de la Scandinavie et de l'Amérique duNord, investis dans la formation initiale et continue, ont pris part à ceséminaire. Les discussions s'organisèrent autour des conférences desexperts et de l'étude de cas dans douze pays selon quatre thèmes.

Du métier à la profession

Une exploration de la terminologie en usage « profession », « profes¬sionnel », « professionnalisation » montre que la signification de cestermes diffère d'une culture, d'une langue à l'autre et même d'un groupesocial et d'un individu à l'autre. Par ses origines « profession » (cf. pro¬fession de foi) renvoie à une déclaration pubUque concernant un point devue, des croyances, tandis que le mot « métier » rappeUe encore un peules secrets qui au Moyen Age accompagnaient la transmission d'un

(1) L'essentiel des travaux et communications paraîtra en 1994 dans un numéro du« Journal for Teacher Education in Europe ».

Recherche et Formation N° 15 AvrU 1994

ACTUALITE

Nous prions les lecteurs de bien vouloir collaborer à l'élabo¬ration de cette rubrique en signalant l'information ou enproposant un compte rendu à Michèle TOURNIER (Actualitégénérale) ou Annette BON (lUFM-Actualités).

ACTUALITE GENERALE

1. RENCONTRES ET COLLOQUES

LA PROFESSIONNALISATION DES ENSEIGNANTS

Un séminaire de trois jours organisé par l'ATEE (Association ForTeacher Education in Europe) a eu lieu en juillet 1993 à Barcelone(Espagne) (1). Une centaine de formateurs d'enseignants du premier etdu second degré, provenant de dix-sept pays de l'Union européenne, del'Europe centrale et orientale, de la Scandinavie et de l'Amérique duNord, investis dans la formation initiale et continue, ont pris part à ceséminaire. Les discussions s'organisèrent autour des conférences desexperts et de l'étude de cas dans douze pays selon quatre thèmes.

Du métier à la profession

Une exploration de la terminologie en usage « profession », « profes¬sionnel », « professionnalisation » montre que la signification de cestermes diffère d'une culture, d'une langue à l'autre et même d'un groupesocial et d'un individu à l'autre. Par ses origines « profession » (cf. pro¬fession de foi) renvoie à une déclaration pubUque concernant un point devue, des croyances, tandis que le mot « métier » rappeUe encore un peules secrets qui au Moyen Age accompagnaient la transmission d'un

(1) L'essentiel des travaux et communications paraîtra en 1994 dans un numéro du« Journal for Teacher Education in Europe ».

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148 Recherche et Formation

savoir-faire dans les corporations et nécessitaient une initiation. Danscette acception « professionnaUsation » ferait référence à un savoir expU-cité, rationaUsé. En allemand le terme « Beruf » correspondant à profes¬sion a une connotation plus religieuse : c'est l'activité à laqueUe on estappelé, la vocation.

Dans la plupart des pays on distingue traditionneUement le maître etle professeur, celui-ci désignant à coup sûr le professeur d'université etdans certains pays l'enseignant du second degré conduisant les élèves aubaccalauréat et à l'université.

Le terme « professionnalisation » est très souvent accompagné decelui d'universitarisation, ce qui impUque une formation orientée vers lescritères scientifiques, la théorie, la recherche et comportant un vocabu¬laire moins accessible aux non initiés. Ce concept tend donc à valoriserl'expert au détriment du simple enseignant.

Pour beaucoup ce concept est à rattacher aux « professions libé¬rales », en particuUer à ceUe de médecin, dont on vante l'organisation,l'autonomie, les statuts, la place occupée par la formation continue. N'ya-t-il pas là un modèle pour les enseignants et leur formation ? D'autres,plus critiques, apprécient l'approche par la résolution des problèmes,l'impUcation des praticiens dans la planification et la formation maisémettent des réserves sur le rapport d'autorité qui s'étabUt avec le cUent,l'excessive liberté d'initiative et l'indépendance des professions libérales,ce qui ne peut être le fait des professions enseignantes. L'autonomie nepeut être séparée de la responsabUisation et de la transparence. R fau¬drait une « professionnalisation plus ouverte sur l'extérieur » ce quipour d'aucuns caractérise les semi-professions.

« Professionnel » renvoie aussi aux niveaux, aux valeurs, auxconduites. C'est ainsi que toute activité peut être exercée en « profession¬nel » (en « pro » dit-on couramment) ou non.

La professionnalisation va de pair avec des structures institution¬nelles adéquates, un contenu, l'acquisition d'une expérience pratique,des modèles de rôle qui facUitent et consoUdent l'apprentissage tout aulong de la carrière.

La formation des enseignants

Partisans de la formation à l'université et partisans de la formationen étabUssements scolaires se sont affrontés. En Angleterre et au Pays deGalles les deux-tiers de la formation initiale est effectuée dans les écoles,en partenariat avec l'Université. Les Etats-Unis tendent à transformercertaines écoles en centres de formation des praticiens et de recherches(Professional Development Schools). Les Pays-Bas n'encouragent pas laformation à l'Université (10 % seulement des enseignants). En RFA, la

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savoir-faire dans les corporations et nécessitaient une initiation. Danscette acception « professionnaUsation » ferait référence à un savoir expU-cité, rationaUsé. En allemand le terme « Beruf » correspondant à profes¬sion a une connotation plus religieuse : c'est l'activité à laqueUe on estappelé, la vocation.

Dans la plupart des pays on distingue traditionneUement le maître etle professeur, celui-ci désignant à coup sûr le professeur d'université etdans certains pays l'enseignant du second degré conduisant les élèves aubaccalauréat et à l'université.

Le terme « professionnalisation » est très souvent accompagné decelui d'universitarisation, ce qui impUque une formation orientée vers lescritères scientifiques, la théorie, la recherche et comportant un vocabu¬laire moins accessible aux non initiés. Ce concept tend donc à valoriserl'expert au détriment du simple enseignant.

Pour beaucoup ce concept est à rattacher aux « professions libé¬rales », en particuUer à ceUe de médecin, dont on vante l'organisation,l'autonomie, les statuts, la place occupée par la formation continue. N'ya-t-il pas là un modèle pour les enseignants et leur formation ? D'autres,plus critiques, apprécient l'approche par la résolution des problèmes,l'impUcation des praticiens dans la planification et la formation maisémettent des réserves sur le rapport d'autorité qui s'étabUt avec le cUent,l'excessive liberté d'initiative et l'indépendance des professions libérales,ce qui ne peut être le fait des professions enseignantes. L'autonomie nepeut être séparée de la responsabUisation et de la transparence. R fau¬drait une « professionnalisation plus ouverte sur l'extérieur » ce quipour d'aucuns caractérise les semi-professions.

« Professionnel » renvoie aussi aux niveaux, aux valeurs, auxconduites. C'est ainsi que toute activité peut être exercée en « profession¬nel » (en « pro » dit-on couramment) ou non.

La professionnalisation va de pair avec des structures institution¬nelles adéquates, un contenu, l'acquisition d'une expérience pratique,des modèles de rôle qui facUitent et consoUdent l'apprentissage tout aulong de la carrière.

La formation des enseignants

Partisans de la formation à l'université et partisans de la formationen étabUssements scolaires se sont affrontés. En Angleterre et au Pays deGalles les deux-tiers de la formation initiale est effectuée dans les écoles,en partenariat avec l'Université. Les Etats-Unis tendent à transformercertaines écoles en centres de formation des praticiens et de recherches(Professional Development Schools). Les Pays-Bas n'encouragent pas laformation à l'Université (10 % seulement des enseignants). En RFA, la

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ActuaUté 149

formation théorique (avec une part plus ou moins grande de formationdiscipUnaire et de formation pédagogique selon les catégories d'ensei¬gnants) a Ueu à l'Université et la formation, essentieUement pratique, endeux ans dans les établissements.

La sociaUsation

On discuta de l'évolution de l'image de l'enseignant au cours de sacarrière, de l'importance de la formation continue mais qui souvent estmal suivie parce qu'elle demande un investissement en temps et quel'enseignant ne reçoit pas de compensation financière ou n'est pas inté¬ressé.

La professionnaUsation suppose l'autonomie des enseignants et ceUedu système scolaire local. En fait l'autonomie des enseignants est souventUmitée à la classe. Rs pourraient l'accroître en développant le travaU enéquipe, en fixant pour l'école des objectifs qui rencontrent un largeconsensus, en accroissant leur formation, en développant leurs contactsavec les parents ou les élèves démotivés.

Dans de nombreux pays les enseignants sont des fonctionnaires del'État, ce qui impUque d'une part la sécurité financière et d'autre partun contrôle plus ou moins lourd de l'État empêchant la professiond'exercer un contrôle et entraînant l'exploitation de l'éducation à desfins poUtiques.

La professionnalisation

Les réflexions qui ont précédé devaient aboutir à cerner le moyenpour les enseignants d'acquérir une plus grande professionnalisation.

En ce qui concerne leur formation U leur faut des bases théoriquessoUdes sur lesqueUes bâtir leur pratique et des bases pratiques acquisespar l'intermédiaire de stages. Rs ont donc à la fois besoin de l'aide deschercheurs en sciences de l'éducation et de ceUe de praticiens possédantune expérience longue et diversifiée. Ils doivent surtout être aidés dansl'intégration de ces deux sources de leur pratique, de leur propre réfle¬xion et de leur identité, ce qui impUque une coordination entre départe¬ments discipUnaires à l'université, institution de formation pédagogique(ou faculté pédagogique) et écoles.

Les associations professionneUes sont indispensables pour fixer lesniveaux, informer les enseignants, ouvrir des forums de discussion. Lesenseignants doivent en outre avoir plus de responsabilité, investir davan¬tage dans la recherche et le développement, avoir plus de contact avec lemonde hors de la classe et hors de l'école.

ActuaUté 149

formation théorique (avec une part plus ou moins grande de formationdiscipUnaire et de formation pédagogique selon les catégories d'ensei¬gnants) a Ueu à l'Université et la formation, essentieUement pratique, endeux ans dans les établissements.

La sociaUsation

On discuta de l'évolution de l'image de l'enseignant au cours de sacarrière, de l'importance de la formation continue mais qui souvent estmal suivie parce qu'elle demande un investissement en temps et quel'enseignant ne reçoit pas de compensation financière ou n'est pas inté¬ressé.

La professionnaUsation suppose l'autonomie des enseignants et ceUedu système scolaire local. En fait l'autonomie des enseignants est souventUmitée à la classe. Rs pourraient l'accroître en développant le travaU enéquipe, en fixant pour l'école des objectifs qui rencontrent un largeconsensus, en accroissant leur formation, en développant leurs contactsavec les parents ou les élèves démotivés.

Dans de nombreux pays les enseignants sont des fonctionnaires del'État, ce qui impUque d'une part la sécurité financière et d'autre partun contrôle plus ou moins lourd de l'État empêchant la professiond'exercer un contrôle et entraînant l'exploitation de l'éducation à desfins poUtiques.

La professionnalisation

Les réflexions qui ont précédé devaient aboutir à cerner le moyenpour les enseignants d'acquérir une plus grande professionnalisation.

En ce qui concerne leur formation U leur faut des bases théoriquessoUdes sur lesqueUes bâtir leur pratique et des bases pratiques acquisespar l'intermédiaire de stages. Rs ont donc à la fois besoin de l'aide deschercheurs en sciences de l'éducation et de ceUe de praticiens possédantune expérience longue et diversifiée. Ils doivent surtout être aidés dansl'intégration de ces deux sources de leur pratique, de leur propre réfle¬xion et de leur identité, ce qui impUque une coordination entre départe¬ments discipUnaires à l'université, institution de formation pédagogique(ou faculté pédagogique) et écoles.

Les associations professionneUes sont indispensables pour fixer lesniveaux, informer les enseignants, ouvrir des forums de discussion. Lesenseignants doivent en outre avoir plus de responsabilité, investir davan¬tage dans la recherche et le développement, avoir plus de contact avec lemonde hors de la classe et hors de l'école.

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150 Recherche et Formation

Étant donné la place qu'a pris l'éducation dans nos sociétés les for¬mateurs d'enseignants doivent viser la professionnalisation c'est-à-direse sentir concernés par la quaUté de la formation dispensée en général etparticiper à des associations qui visent à maintenir ce niveau. Rs ne peu¬vent se désintéresser non des conditions de travail qui permettent derecruter des étudiants de valeur et de maintenir leur dynamisme. Notonstoutefois que les priorités favorisant la quaUté de la formation et ceUesvisant à l'amélioration du travail ne sont pas identiques et peuvententraîner des conflits.

Mireïa MONTANE, CoUegi de Doctors i Llicenciats de CatalunyaAdaptation et traduction de M. TOURNIER, INRP

FORMATIONS PRÉPROFESSIONNELLE ET PROFESSIONNELLEDES ENSEIGNANTS : CONTINUITÉ ET DYNAMIQUESLa question de l'individualisation

CoUoque national GTI-ARCUFEF, sur la formation des enseignants,organisé à l'université Pierre Mendès-France le 3 décembre 1993.

Le 3 décembre dernier se trouvaient réunis pour la première fois,dans un petit amphithéâtre convivial de l'Université Pierre Mendès-France à Grenoble quatre-vingts universitaires et responsables d'IUFM,venus de toute la France pour réfléchir ensemble sur un thème original :

la continuité entre les deux moments du parcours que peut suivre main¬tenant un futur enseignant. En amont de l'IUFM : la pré professionnaU¬sation, qui lui est proposée à l'Université pendant ses trois premièresannées d'études ; puis, lorsqu'il décide de présenter le concours derecrutement, le temps de la professionnaUsation, pendant les deux ansqu'U passe à l'IUFM.

Cette rencontre avait Ueu à l'initiative conjointe de deux structures :

le groupe de travaU inter universitaire (GTI) qui coordonne les actionsde pré professionnaUsation menées dans les trois universités greno¬bloises, et l'ARCUFEF, assemblée qui fédère depuis 1986 la cinquantainede responsables des services communs (généralement désignés par le sigleCUFEF - Centre universitaire de formation des enseignants et des forma¬teurs), chargés de la formation des enseignants dans la plupart des uni¬versités françaises.

Le site de Grenoble n'avait pas été choisi au hasard. À l'ouverture ducoUoque, la parole était donnée à Claude Comiti, aujourd'hui directrice-adjointe de l'IUFM de Grenoble, mais fondatrice dès 1982 de l'IFM

150 Recherche et Formation

Étant donné la place qu'a pris l'éducation dans nos sociétés les for¬mateurs d'enseignants doivent viser la professionnalisation c'est-à-direse sentir concernés par la quaUté de la formation dispensée en général etparticiper à des associations qui visent à maintenir ce niveau. Rs ne peu¬vent se désintéresser non des conditions de travail qui permettent derecruter des étudiants de valeur et de maintenir leur dynamisme. Notonstoutefois que les priorités favorisant la quaUté de la formation et ceUesvisant à l'amélioration du travail ne sont pas identiques et peuvententraîner des conflits.

Mireïa MONTANE, CoUegi de Doctors i Llicenciats de CatalunyaAdaptation et traduction de M. TOURNIER, INRP

FORMATIONS PRÉPROFESSIONNELLE ET PROFESSIONNELLEDES ENSEIGNANTS : CONTINUITÉ ET DYNAMIQUESLa question de l'individualisation

CoUoque national GTI-ARCUFEF, sur la formation des enseignants,organisé à l'université Pierre Mendès-France le 3 décembre 1993.

Le 3 décembre dernier se trouvaient réunis pour la première fois,dans un petit amphithéâtre convivial de l'Université Pierre Mendès-France à Grenoble quatre-vingts universitaires et responsables d'IUFM,venus de toute la France pour réfléchir ensemble sur un thème original :

la continuité entre les deux moments du parcours que peut suivre main¬tenant un futur enseignant. En amont de l'IUFM : la pré professionnaU¬sation, qui lui est proposée à l'Université pendant ses trois premièresannées d'études ; puis, lorsqu'il décide de présenter le concours derecrutement, le temps de la professionnaUsation, pendant les deux ansqu'U passe à l'IUFM.

Cette rencontre avait Ueu à l'initiative conjointe de deux structures :

le groupe de travaU inter universitaire (GTI) qui coordonne les actionsde pré professionnaUsation menées dans les trois universités greno¬bloises, et l'ARCUFEF, assemblée qui fédère depuis 1986 la cinquantainede responsables des services communs (généralement désignés par le sigleCUFEF - Centre universitaire de formation des enseignants et des forma¬teurs), chargés de la formation des enseignants dans la plupart des uni¬versités françaises.

Le site de Grenoble n'avait pas été choisi au hasard. À l'ouverture ducoUoque, la parole était donnée à Claude Comiti, aujourd'hui directrice-adjointe de l'IUFM de Grenoble, mais fondatrice dès 1982 de l'IFM

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ActuaUté 151

(Institut de Formation des Maîtres), dont la mission était déjà, au sein del'Université Joseph Fourier (Grenoble I), de préparer les étudiants scien¬tifiques au métier d'enseignant pendant leur Ucence.

Rappelons aussi que c'est à Grenoble qu'a ouvert en 1990 l'un destrois HJFM pUotes, dont le directeur, Bernard Cornu, était présent pourinaugurer les travaux de cette rencontre, en posant notamment cettequestion : « En France, est-ce qu'on forme les enseignants en deux ansaprès la Ucence ou en cinq ans après le Bac ? » Où s'arrête en effet le« pré professionnel », si l'adjectif sert maintenant à qualifier comme lerappelait Madame Beigbeder, représentant la Direction des Enseigne¬ments Supérieurs - la nouveUe épreuve sur dossier des CAPES ? Où com¬mence la formation véritablement professionnelle ? Cette distinction a-t-eUe même une pertinence : les savoirs discipUnaires ne sont-Us pas partieintégrante de la professionnaUsation, comme le montrait dès 1989 le rap¬port de la Commission Bancel (1) ?

Une circulaire adressée aux Présidents d'Université par la Directionde l'Enseignement Supérieur en mars 1993 avait d'aUleurs insisté sur lanécessaire complémentarité entre les deux moments de la formation.Commentant la progression spectaculaire du nombre de projets d'ensei¬gnements pré professionnels qui lui avaient été transmis par les universi¬tés en réponse à son appel d'offres (+ 225 % par rapport à 1991-92),ainsi que son engagement financier (141 projets soutenus pour une enve¬loppe de 4,4 mUUons de francs, soit 66 % d'augmentation par rapport àl'année précédente), le Ministère de l'Enseignement Supérieur affirmait :

« il est plus que jamais nécessaire de concevoir la cohérence de laforma¬tion initiale des futurs enseignants sur plusieurs années (DEUG, Ucence,IUFM ) (...) Plutôt que d'opérer une distinction catégorique entre préprofessionnaUsation et professionnaUsation, U vaudrait donc mieux rai¬sonner en terme de formation initiale progressive à un métier sur plu¬sieurs années » .

Décembre 1993 était donc une bonne date pour faire le point. LesIUFM sont instaUés dans le paysage français, en dépit des critiques qu'ilsont pu susciter. Aucun doute, en tout cas, sur leur succès en termesquantitatifs : 50 % de candidats en plus à cette rentrée pour devenir pro¬fesseurs du second degré, plus d'académie déficitaire pour le professoratdes écoles. On fait le plein partout et l'on commence même à se demandersi on ne devrait pas trouver un moyen de « réguler les flux ».

De leur côté, les modules pré professionnels proposés par la plupartdes universités dès le DEUG connaissent le même afflux d'inscriptions(plus de 2 500 pour les 3 universités grenobloises sur les trois années du

(1) Créer une nouveUe dynamique de la formation des maîtres (10 juillet 1989). Lesous-titre du rapport était : « Quelles compétences professionnelles faire acquérir et quels

ActuaUté 151

(Institut de Formation des Maîtres), dont la mission était déjà, au sein del'Université Joseph Fourier (Grenoble I), de préparer les étudiants scien¬tifiques au métier d'enseignant pendant leur Ucence.

Rappelons aussi que c'est à Grenoble qu'a ouvert en 1990 l'un destrois HJFM pUotes, dont le directeur, Bernard Cornu, était présent pourinaugurer les travaux de cette rencontre, en posant notamment cettequestion : « En France, est-ce qu'on forme les enseignants en deux ansaprès la Ucence ou en cinq ans après le Bac ? » Où s'arrête en effet le« pré professionnel », si l'adjectif sert maintenant à qualifier comme lerappelait Madame Beigbeder, représentant la Direction des Enseigne¬ments Supérieurs - la nouveUe épreuve sur dossier des CAPES ? Où com¬mence la formation véritablement professionnelle ? Cette distinction a-t-eUe même une pertinence : les savoirs discipUnaires ne sont-Us pas partieintégrante de la professionnaUsation, comme le montrait dès 1989 le rap¬port de la Commission Bancel (1) ?

Une circulaire adressée aux Présidents d'Université par la Directionde l'Enseignement Supérieur en mars 1993 avait d'aUleurs insisté sur lanécessaire complémentarité entre les deux moments de la formation.Commentant la progression spectaculaire du nombre de projets d'ensei¬gnements pré professionnels qui lui avaient été transmis par les universi¬tés en réponse à son appel d'offres (+ 225 % par rapport à 1991-92),ainsi que son engagement financier (141 projets soutenus pour une enve¬loppe de 4,4 mUUons de francs, soit 66 % d'augmentation par rapport àl'année précédente), le Ministère de l'Enseignement Supérieur affirmait :

« il est plus que jamais nécessaire de concevoir la cohérence de laforma¬tion initiale des futurs enseignants sur plusieurs années (DEUG, Ucence,IUFM ) (...) Plutôt que d'opérer une distinction catégorique entre préprofessionnaUsation et professionnaUsation, U vaudrait donc mieux rai¬sonner en terme de formation initiale progressive à un métier sur plu¬sieurs années » .

Décembre 1993 était donc une bonne date pour faire le point. LesIUFM sont instaUés dans le paysage français, en dépit des critiques qu'ilsont pu susciter. Aucun doute, en tout cas, sur leur succès en termesquantitatifs : 50 % de candidats en plus à cette rentrée pour devenir pro¬fesseurs du second degré, plus d'académie déficitaire pour le professoratdes écoles. On fait le plein partout et l'on commence même à se demandersi on ne devrait pas trouver un moyen de « réguler les flux ».

De leur côté, les modules pré professionnels proposés par la plupartdes universités dès le DEUG connaissent le même afflux d'inscriptions(plus de 2 500 pour les 3 universités grenobloises sur les trois années du

(1) Créer une nouveUe dynamique de la formation des maîtres (10 juillet 1989). Lesous-titre du rapport était : « Quelles compétences professionnelles faire acquérir et quels

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152 Recherche et Formation

cursus, soit 29 % d'augmentation par rapport à la rentrée 1993). Criseéconomique et meUleure Usibilité du parcours pour accéder au métierd'enseignant se combinent pour expUquer cette explosion des effectifs.

Mais, paradoxalement, les responsables de formation réunis àGrenoble ne se penchaient pas sur les causes ou les inconvénients - dece succès. Rs avaient préféré s'intéresser à la quaUté plutôt qu'à l'aspectquantitatif du problème, puisqu'Us s'interrogeaient sur leur capacité às'adapter aux attentes et à la spécificité de ce nouveau pubUc en fournis¬sant une réponse individuaUsée aux différents niveaux de la formation.

Comme le soulignait Jacqueline Lacotte, porte-parole de l'ARCUFEF,en justifiant le sous-titre de la rencontre (« La question de l'individuaU-sation ») et en introduisant les travaux des trois ateUers qui abordaientchacun un aspect de cette question (individuaUsation et dispositifs de for¬mation / et évaluation / et alternance), les candidats qui se pressent pourentrer à l'IUFM sont caractérisés par leur diversité : cursus discipU¬naires différents, passage ou non par des modules pré professionnels(eux-mêmes de contenus divers), par une vie professionneUe, etc.

Les formateurs des futurs enseignants se trouvent donc en face d'unpubUc d'adultes auquel U est nécessaire de proposer une « modulation »,voire une « personnalisation » de leur formation professionnelle, quitienne à la fois compte de leurs acquis et des objectifs autant que descontraintes de l'institution de formation. Il s'agit donc d'amener étu¬diants et formateurs à raisonner non plus selon une logique égaUtaire deréduction des écarts entre apprenants, mais en terme de progression dechaque individu par rapport à lui-même, de réussite individueUe. Ce quedu reste l'enseignant sera invité à faire plus tard avec ses propresélèves...

C'est d'aUleurs pourquoi la circulaire du 2 juUlet 1991 qui aidait lesIUFM à concevoir leur projet de formation introduisait la notion de« démarche contractuelle » et l'idée d'un processus continu de formationappuyé sur un travaU de bilan initial et d'étabUssement de parcours indi¬viduel, qu'eUe jugeait alors « indispensable » (2). En termes de concep¬tion des dispositifs, en termes de pratiques des formateurs, l'individuaU-sation était donc fortement encouragée, à l'image des stages de formationd'adultes où eUe était connue depuis longtemps.

Seulement voilà, les participants du colloque issus des IUFM l'ontreconnu tout au long des deux journées : individuaUser, c'est plus facUe àdire qu'à faire. Les formateurs d'enseignants, qu'ils soient universi¬taires, anciens professeurs d'école normale ou formateurs du seconddegré, sont peu rompus à ces pratiques. Les effectifs d'élèves-professeurs

(2) Circulaire sur le Contenu et validation des formations organisées par les IVFM Au2 juillet 1991.

152 Recherche et Formation

cursus, soit 29 % d'augmentation par rapport à la rentrée 1993). Criseéconomique et meUleure Usibilité du parcours pour accéder au métierd'enseignant se combinent pour expUquer cette explosion des effectifs.

Mais, paradoxalement, les responsables de formation réunis àGrenoble ne se penchaient pas sur les causes ou les inconvénients - dece succès. Rs avaient préféré s'intéresser à la quaUté plutôt qu'à l'aspectquantitatif du problème, puisqu'Us s'interrogeaient sur leur capacité às'adapter aux attentes et à la spécificité de ce nouveau pubUc en fournis¬sant une réponse individuaUsée aux différents niveaux de la formation.

Comme le soulignait Jacqueline Lacotte, porte-parole de l'ARCUFEF,en justifiant le sous-titre de la rencontre (« La question de l'individuaU-sation ») et en introduisant les travaux des trois ateUers qui abordaientchacun un aspect de cette question (individuaUsation et dispositifs de for¬mation / et évaluation / et alternance), les candidats qui se pressent pourentrer à l'IUFM sont caractérisés par leur diversité : cursus discipU¬naires différents, passage ou non par des modules pré professionnels(eux-mêmes de contenus divers), par une vie professionneUe, etc.

Les formateurs des futurs enseignants se trouvent donc en face d'unpubUc d'adultes auquel U est nécessaire de proposer une « modulation »,voire une « personnalisation » de leur formation professionnelle, quitienne à la fois compte de leurs acquis et des objectifs autant que descontraintes de l'institution de formation. Il s'agit donc d'amener étu¬diants et formateurs à raisonner non plus selon une logique égaUtaire deréduction des écarts entre apprenants, mais en terme de progression dechaque individu par rapport à lui-même, de réussite individueUe. Ce quedu reste l'enseignant sera invité à faire plus tard avec ses propresélèves...

C'est d'aUleurs pourquoi la circulaire du 2 juUlet 1991 qui aidait lesIUFM à concevoir leur projet de formation introduisait la notion de« démarche contractuelle » et l'idée d'un processus continu de formationappuyé sur un travaU de bilan initial et d'étabUssement de parcours indi¬viduel, qu'eUe jugeait alors « indispensable » (2). En termes de concep¬tion des dispositifs, en termes de pratiques des formateurs, l'individuaU-sation était donc fortement encouragée, à l'image des stages de formationd'adultes où eUe était connue depuis longtemps.

Seulement voilà, les participants du colloque issus des IUFM l'ontreconnu tout au long des deux journées : individuaUser, c'est plus facUe àdire qu'à faire. Les formateurs d'enseignants, qu'ils soient universi¬taires, anciens professeurs d'école normale ou formateurs du seconddegré, sont peu rompus à ces pratiques. Les effectifs d'élèves-professeurs

(2) Circulaire sur le Contenu et validation des formations organisées par les IVFM Au2 juillet 1991.

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ActuaUté 153

à former, les coûts d'une gestion individuaUsée des parcours, le tempslimité de la formation, les difficultés d'accès aux ressources sans les¬quelles aucune autonomie ne peut être véritablement acquise : autantd'obstacles que les deux ou trois premières années de fonctionnement desIUFM n'ont pas encore permis de lever.

Les conditions étaient jusqu'ici meiUeures en amont de l'HJFM, danstous les modules pré professionnels où, en petits groupes, un travaU pro¬gressif pouvait être mené avec l'étudiant pour qu'U confirme son orienta¬tion et confronte les exigences du métier, teUes qu'eUes lui apparaissaientnotamment lors des stages d'observation effectués auprès d'enseignants,avec ses propres capacités. Pour tous ceux qui ont suivi une pré profes¬sionnalisation, l'analyse individuelle des besoins de formation, laréflexion sur l'évaluation, la prise de conscience de ce qu'est une disci¬pUne d'enseignement peuvent être amorcées avant l'entrée à l'HJFM.

Mais les responsables universitaires des pré professionnalisations,notamment par l'action de l'ARCUFEF, voudraient ameUorer leur effica¬cité. Certains redoutent que l'accueU de tous les étudiants qui veulents'inscrire dans ces modules pré professionnels parce qu'Us en ont com¬pris l'intérêt, ne se fasse au détriment de leur qualité. Il faut encoretravailler, en liaison avec les responsables des plans de formation desIUFM, à l'harmonisation des contenus de pré professionnalisation pro¬posés dans les différentes universités. Enfin, et surtout, le passé de l'étu¬diant, ce qu'il a pu acquérir en amont n'est encore que très mal pris encompte dans le parcours qu'on lui fait suivre à l'IUFM, y compris dansla conception des stages.

Les échanges au sein des ateliers ont ainsi montré que beaucoup deréponses aux questions abordées début décembre à Grenoble ont déjà étéapportées ici ou là, mais qu'il est nécessaire maintenant de privilégierl'harmonisation et la concertation, au plan local d'abord entre universi¬tés et IUFM, puis au plan national. Rôle de l'évaluation dans les modulespré professionnels, temps prévu pour le bilan individuel et le tutoratdans les dispositifs, progression dans la conception de l'alternance entreterrain et institutions de formation, conception d'un « Uvret de forma¬tion » qui accompagnerait l'étudiant jusque dans ses premières annéesd'enseignement : autant de thèmes de travaU pour de futures rencontresdont les participants ont ressenti la nécessité.

Une chose est sûre pour eux : le temps est trop court en IUFM pouracquérir ces « compétences clés » , nécessaires à l'enseignant aujourd'huiet évoquées par GiUes Ferry en conclusion du coUoque. R faut commen¬cer avant à se préparer au métier, notamment en travaillant sur la repré¬sentation qu'on en a. Jacques Rousvoal, exposant les résultats d'unerecherche effectuée en Alsace en liaison avec une équipe de l'INRP,avait d'aUleurs montré, statistiques à l'appui, au cours de la première

ActuaUté 153

à former, les coûts d'une gestion individuaUsée des parcours, le tempslimité de la formation, les difficultés d'accès aux ressources sans les¬quelles aucune autonomie ne peut être véritablement acquise : autantd'obstacles que les deux ou trois premières années de fonctionnement desIUFM n'ont pas encore permis de lever.

Les conditions étaient jusqu'ici meiUeures en amont de l'HJFM, danstous les modules pré professionnels où, en petits groupes, un travaU pro¬gressif pouvait être mené avec l'étudiant pour qu'U confirme son orienta¬tion et confronte les exigences du métier, teUes qu'eUes lui apparaissaientnotamment lors des stages d'observation effectués auprès d'enseignants,avec ses propres capacités. Pour tous ceux qui ont suivi une pré profes¬sionnalisation, l'analyse individuelle des besoins de formation, laréflexion sur l'évaluation, la prise de conscience de ce qu'est une disci¬pUne d'enseignement peuvent être amorcées avant l'entrée à l'HJFM.

Mais les responsables universitaires des pré professionnalisations,notamment par l'action de l'ARCUFEF, voudraient ameUorer leur effica¬cité. Certains redoutent que l'accueU de tous les étudiants qui veulents'inscrire dans ces modules pré professionnels parce qu'Us en ont com¬pris l'intérêt, ne se fasse au détriment de leur qualité. Il faut encoretravailler, en liaison avec les responsables des plans de formation desIUFM, à l'harmonisation des contenus de pré professionnalisation pro¬posés dans les différentes universités. Enfin, et surtout, le passé de l'étu¬diant, ce qu'il a pu acquérir en amont n'est encore que très mal pris encompte dans le parcours qu'on lui fait suivre à l'IUFM, y compris dansla conception des stages.

Les échanges au sein des ateliers ont ainsi montré que beaucoup deréponses aux questions abordées début décembre à Grenoble ont déjà étéapportées ici ou là, mais qu'il est nécessaire maintenant de privilégierl'harmonisation et la concertation, au plan local d'abord entre universi¬tés et IUFM, puis au plan national. Rôle de l'évaluation dans les modulespré professionnels, temps prévu pour le bilan individuel et le tutoratdans les dispositifs, progression dans la conception de l'alternance entreterrain et institutions de formation, conception d'un « Uvret de forma¬tion » qui accompagnerait l'étudiant jusque dans ses premières annéesd'enseignement : autant de thèmes de travaU pour de futures rencontresdont les participants ont ressenti la nécessité.

Une chose est sûre pour eux : le temps est trop court en IUFM pouracquérir ces « compétences clés » , nécessaires à l'enseignant aujourd'huiet évoquées par GiUes Ferry en conclusion du coUoque. R faut commen¬cer avant à se préparer au métier, notamment en travaillant sur la repré¬sentation qu'on en a. Jacques Rousvoal, exposant les résultats d'unerecherche effectuée en Alsace en liaison avec une équipe de l'INRP,avait d'aUleurs montré, statistiques à l'appui, au cours de la première

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154 Recherche et Formation

matinée, l'influence de la pré professionnalisation sur ces représenta¬tions sociales que l'on construit depuis l'enfance et qui sont parfois trèséloignées de la réalité actueUe de l'exercice de la profession.

Que la transformation de l'étudiant en enseignant se fasse par « matu¬ration », « exploration » ou « métamorphose » les trois « schemes ima¬ginaires » que Jean-Pierre Obin a retrouvés en étudiant les métaphoresutiUsées dans le langage de la formation professionneUe , eUe nécessiteun accompagnement dont les modalités sont difficiles à adapter auxbesoins de chaque individu. C'est pourquoi la professionnalisation de cesecteur mérite qu'on lui consacre encore beaucoup de temps et d'énergie.C'était la conclusion qui s'imposait en écoutant Gilles Ferry (3), qui avaitsuivi l'ensemble des travaux de cette rencontre, porter en fin de sessionun regard distancié sur ce qu'U y avait entendu et proposer une analyseapprofondie de l'individualisation comme noyau central du conceptmême de formation.

La construction de la compétence professionneUe des enseignants estun véritable enjeu social à l'aube du XXIe siècle. Les étudiants l'ont com¬pris, Us en redemandent. Osera-t-on les décevoir ?

J. LACOTTE (Université d'Avignon)et Gérard LAPIERRE (Université P. Mendès-France, Grenoble)

FORMATION DES FORMATEURS D'ENSEIGNANTSDANS LES PAYS FRANCOPHONES,en Sciences Appliquées et DiscipUnes Techniquesau niveau Supérieur, Secondaire el Professionnel

Le colloque organisé par l'École Normale Supérieure de Cachan aréuni, pendant quatre jours, du 13 au 16 décembre 1993, une centainede participants de 18 pays francophones.

Les représentants de chaque pays ont présenté les institutions quiassurent la formation et la recherche pour les enseignants de l'enseigne¬ment technique et professionnel de leurs pays. Partant pour un certainnombre du modèle français de l'ENSET, U est intéressant de noter lesévolutions ducs aux spécificités économiques, industrieUes et cultureUes

(3) Ces deux interventions, ainsi que toutes celles évoquées dans cet article, figurentdans les Actes de ce colloque, à paraître très prochainement. Pour se les procurer,contacter Gérard LAPIERRE, Université Pierre Mendès-France, Service des AffairesPédagogiques et de lu Formation des Maîtres, 151 rue des Universités, B.P. 47 38040Grenoble Cedex 9 - Tél. 76 82 58 65 - Télécopie 76 82 56 54.

154 Recherche et Formation

matinée, l'influence de la pré professionnalisation sur ces représenta¬tions sociales que l'on construit depuis l'enfance et qui sont parfois trèséloignées de la réalité actueUe de l'exercice de la profession.

Que la transformation de l'étudiant en enseignant se fasse par « matu¬ration », « exploration » ou « métamorphose » les trois « schemes ima¬ginaires » que Jean-Pierre Obin a retrouvés en étudiant les métaphoresutiUsées dans le langage de la formation professionneUe , eUe nécessiteun accompagnement dont les modalités sont difficiles à adapter auxbesoins de chaque individu. C'est pourquoi la professionnalisation de cesecteur mérite qu'on lui consacre encore beaucoup de temps et d'énergie.C'était la conclusion qui s'imposait en écoutant Gilles Ferry (3), qui avaitsuivi l'ensemble des travaux de cette rencontre, porter en fin de sessionun regard distancié sur ce qu'U y avait entendu et proposer une analyseapprofondie de l'individualisation comme noyau central du conceptmême de formation.

La construction de la compétence professionneUe des enseignants estun véritable enjeu social à l'aube du XXIe siècle. Les étudiants l'ont com¬pris, Us en redemandent. Osera-t-on les décevoir ?

J. LACOTTE (Université d'Avignon)et Gérard LAPIERRE (Université P. Mendès-France, Grenoble)

FORMATION DES FORMATEURS D'ENSEIGNANTSDANS LES PAYS FRANCOPHONES,en Sciences Appliquées et DiscipUnes Techniquesau niveau Supérieur, Secondaire el Professionnel

Le colloque organisé par l'École Normale Supérieure de Cachan aréuni, pendant quatre jours, du 13 au 16 décembre 1993, une centainede participants de 18 pays francophones.

Les représentants de chaque pays ont présenté les institutions quiassurent la formation et la recherche pour les enseignants de l'enseigne¬ment technique et professionnel de leurs pays. Partant pour un certainnombre du modèle français de l'ENSET, U est intéressant de noter lesévolutions ducs aux spécificités économiques, industrieUes et cultureUes

(3) Ces deux interventions, ainsi que toutes celles évoquées dans cet article, figurentdans les Actes de ce colloque, à paraître très prochainement. Pour se les procurer,contacter Gérard LAPIERRE, Université Pierre Mendès-France, Service des AffairesPédagogiques et de lu Formation des Maîtres, 151 rue des Universités, B.P. 47 38040Grenoble Cedex 9 - Tél. 76 82 58 65 - Télécopie 76 82 56 54.

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ActuaUté 155

de chaque pays, soulignant bien le Uen fonctionnel qui existe entre lessystèmes de formation en matière d'enseignement technique et profes¬sionnel et le tissu industriel local. Par aUleurs, l'articulation étroite quiexiste entre formation et recherche au sein des mêmes institutions peutinterroger les Uens plus distendus qui existent en France.

Le coUoque s'est déroulé autour de cinq thèmes, chaque thème don¬nant Ueu à une conférence faite par une personnaUté, une tables rondecomprenants plusieurs intervenants et des débats.

1 . Objectifs et besoins de la formation de formateur d'enseignants

Si un consensus se dégage sur le fait que tout programme de forma¬tion doit répondre à un besoin, le terme de besoins se révèle vite trèsambigu ; besoins de qui ? exprimés comment ? analysés avec quellesméthodes ? ... Des recherches, menées au Maroc sur l'analyse desbesoins ont montré différentes stratégies possibles, et un exemple mis enplace par le Groupe de Recherche et d'Echanges Technologiques, dansdifférents pays d'Afrique a montré comment ces approches devraientpermettre à la formation professionnelle de mieux jouer son rôle dans ledéveloppement artisanal et industriel.

2. Les contenus de la formation

Les questions autour des contenus de formation se posent dans diffé¬rentes directions :

- quels contenus pour les disciplines techniques (techniques depointes, techniques plus anciennes mais encore en �uvre dans les entre¬prises), quelles didactiques (et dans ce domaine la réflexion est encore àdévelopper) ;

- quelles connaissances pédagogiques, queUe articulation avec lescontenus et dans quels cadres institutionnels ;

- queUes « autres connaissances » ?

Un consensus s'est fait autour de l'idée qu'enseigner est un métier(donc qui s'apprend), que le métier est en pleine évolution (on demandeplus de choses à l'enseignant et des choses différentes), et que la notiond'Identité des professeurs de l'enseignement technique et professionnel(les deux n'étant pas forcément identiques) reste à construire.

3. La relation recherche-formation

Un certain nombre de recherches et réflexions sur des formationsexistantes ont été proposées, ainsi que des tentatives de modéUsation desystèmes ou d'approches de formation (une expérience de formations de

ActuaUté 155

de chaque pays, soulignant bien le Uen fonctionnel qui existe entre lessystèmes de formation en matière d'enseignement technique et profes¬sionnel et le tissu industriel local. Par aUleurs, l'articulation étroite quiexiste entre formation et recherche au sein des mêmes institutions peutinterroger les Uens plus distendus qui existent en France.

Le coUoque s'est déroulé autour de cinq thèmes, chaque thème don¬nant Ueu à une conférence faite par une personnaUté, une tables rondecomprenants plusieurs intervenants et des débats.

1 . Objectifs et besoins de la formation de formateur d'enseignants

Si un consensus se dégage sur le fait que tout programme de forma¬tion doit répondre à un besoin, le terme de besoins se révèle vite trèsambigu ; besoins de qui ? exprimés comment ? analysés avec quellesméthodes ? ... Des recherches, menées au Maroc sur l'analyse desbesoins ont montré différentes stratégies possibles, et un exemple mis enplace par le Groupe de Recherche et d'Echanges Technologiques, dansdifférents pays d'Afrique a montré comment ces approches devraientpermettre à la formation professionnelle de mieux jouer son rôle dans ledéveloppement artisanal et industriel.

2. Les contenus de la formation

Les questions autour des contenus de formation se posent dans diffé¬rentes directions :

- quels contenus pour les disciplines techniques (techniques depointes, techniques plus anciennes mais encore en �uvre dans les entre¬prises), quelles didactiques (et dans ce domaine la réflexion est encore àdévelopper) ;

- quelles connaissances pédagogiques, queUe articulation avec lescontenus et dans quels cadres institutionnels ;

- queUes « autres connaissances » ?

Un consensus s'est fait autour de l'idée qu'enseigner est un métier(donc qui s'apprend), que le métier est en pleine évolution (on demandeplus de choses à l'enseignant et des choses différentes), et que la notiond'Identité des professeurs de l'enseignement technique et professionnel(les deux n'étant pas forcément identiques) reste à construire.

3. La relation recherche-formation

Un certain nombre de recherches et réflexions sur des formationsexistantes ont été proposées, ainsi que des tentatives de modéUsation desystèmes ou d'approches de formation (une expérience de formations de

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156 Recherche et Formation

professeur de Chimie, et une réflexion sur le rôle de l'expérimentationdans la formation de enseignants de physique à l'ENS de Cachan, unmodèle pédagogique d'orientation constructiviste et systémique pourl'enseignement en sciences appliquées et disciplines technologiques auCanada, une analyse sur la position de la recherche en didactique...).

Deux préoccupations communes aux participants nous semblents'être dégagées : mettre en cohérence des programmes et des exigencesinstitutionnelles avec les besoins réels de formation, et arriver à unmodèle intégrateur de l'ensemble des facettes de la formation.

4. La relation Formation ProfessionneUePratique ProfessionneUe de l'Entreprise

Dans les domaines techniques et professionnels la place des entre¬prises dans la formation des enseignants et des élèves paraît uneévidence ; U s'agit donc de l'organiser (de nombreux exemples de stages,visites, cours spéciaUsés, conférences de professionnels, études de projetscommuns... ont été fournis), et d'articuler pédagogiquement les diffé¬rents lieux et moments d'apprentissage (un modèle d'analyse et de miseen ²uvre de l'alternance a été présenté).

Cependant le problème du cursus de formation des enseignants resteposé : faut il des enseignants que l'on initie à l'entreprise, ou des profes¬sionnels que l'on initie à la pédagogie ? Enfin, quels degrés d'autonomieet de dépendance doivent exister entre les établissements de formation etles entreprises, institutions aux logiques différentes ?

5. La relation Formation contexte local

La prise en compte du local ne doit pas être posé comme une adapta¬tion passive de la formation au contexte local mais comme un deséléments de ce contexte, capable d'anticipation et contribuant à la dyna¬mique de cet environnement local. Ceci implique une certaine autonomiedes étabUssements et des enseignants et, dans le domaine de la formation,une véritable « professionnalité » enseignante.

À l'issue de ces journées, U a été décidé de créer un réseau entre lesdifférents pays francophones afin de poursuivre le travail d'échanges etde réflexion dans le domaine des formations techniques et professionnels.Repérer les besoins de formation, analyser les modes de réponses etd'organisation à ces besoins, se demander qu'est-ce que le métier d'ensei¬gnant ? quelles compétences techniques pour les enseignants ? quelsoutils didactiques ? pourraient être des premières pistes de travaU.

156 Recherche et Formation

professeur de Chimie, et une réflexion sur le rôle de l'expérimentationdans la formation de enseignants de physique à l'ENS de Cachan, unmodèle pédagogique d'orientation constructiviste et systémique pourl'enseignement en sciences appliquées et disciplines technologiques auCanada, une analyse sur la position de la recherche en didactique...).

Deux préoccupations communes aux participants nous semblents'être dégagées : mettre en cohérence des programmes et des exigencesinstitutionnelles avec les besoins réels de formation, et arriver à unmodèle intégrateur de l'ensemble des facettes de la formation.

4. La relation Formation ProfessionneUePratique ProfessionneUe de l'Entreprise

Dans les domaines techniques et professionnels la place des entre¬prises dans la formation des enseignants et des élèves paraît uneévidence ; U s'agit donc de l'organiser (de nombreux exemples de stages,visites, cours spéciaUsés, conférences de professionnels, études de projetscommuns... ont été fournis), et d'articuler pédagogiquement les diffé¬rents lieux et moments d'apprentissage (un modèle d'analyse et de miseen ²uvre de l'alternance a été présenté).

Cependant le problème du cursus de formation des enseignants resteposé : faut il des enseignants que l'on initie à l'entreprise, ou des profes¬sionnels que l'on initie à la pédagogie ? Enfin, quels degrés d'autonomieet de dépendance doivent exister entre les établissements de formation etles entreprises, institutions aux logiques différentes ?

5. La relation Formation contexte local

La prise en compte du local ne doit pas être posé comme une adapta¬tion passive de la formation au contexte local mais comme un deséléments de ce contexte, capable d'anticipation et contribuant à la dyna¬mique de cet environnement local. Ceci implique une certaine autonomiedes étabUssements et des enseignants et, dans le domaine de la formation,une véritable « professionnalité » enseignante.

À l'issue de ces journées, U a été décidé de créer un réseau entre lesdifférents pays francophones afin de poursuivre le travail d'échanges etde réflexion dans le domaine des formations techniques et professionnels.Repérer les besoins de formation, analyser les modes de réponses etd'organisation à ces besoins, se demander qu'est-ce que le métier d'ensei¬gnant ? quelles compétences techniques pour les enseignants ? quelsoutils didactiques ? pourraient être des premières pistes de travaU.

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ActuaUté 157

L'ENS de Cachan a accepté de prendre la responsabilité de ceréseau ; un buUetin d'information et d'échanges devrait être crée. Unprochain coUoque sera organisé au Maroc dans deux ou trois ans.

Les actes du coUoque sont prévus pour avrU 1994 (ENS de Cachan).

Annette GONNIN-BOLO, INRP

LES CIES : CENTRES D'INITIATIONÀ L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Une journée d'étude consacrée aux CIES a eu Ueu le 12 juin 1992 àl'initiative de l'ADMES (Association pour le Développement desMéthodes de Formation dans l'Enseignement Supérieur) (1). L'ADMES apour objectif d'être un Ueu de rencontre pour tous ceux qui, dans l'en¬seignement supérieur, s'intéressent aux questions d'enseignement et deformation.

Cette rencontre avait pour objectif, après trois ans de fonctionne¬ment, de rassembler les différents « acteurs » des CIES (directeurs,formateurs, moniteurs) pour permettre une réflexion sur le dispositif etses finalités, par un échange d'informations et une confrontation desexpériences en France. Car les CIES sont une nouveauté sans précédentà l'Université puisqu'il s'agit de former les futurs enseignants-cher¬cheurs.

Il est difficUe de rendre compte de la richesse des communications etdes interventions des participants de cette journée rassemblant une cen¬taine de personnes : le fait que directeurs, formateurs et moniteurs seretrouvent dans un Ueu « neutre », le cadre d'une association, a permisau débat de s'installer et d'aUer au fond des questions.

Roland Bouchet (2) a d'abord présenté les objectifs des CIES et unhistorique de leurs mises en place. La question qui se pose aujourd'huiest de savoir si les commissions de spéciaUstes tiendront compte de cestage lors des recrutements de maîtres de conférences...

La première table ronde portait sur les objectifs et les contenus desstages à partir de comptes-rendus d'expériences menées à MontpeUier, àGrenoble, à Toulouse, et par l'URFIST (3) de Paris.

(1) Les actes de cette journée d'études sont parus dans le cahier de l'ADMES n° 1

(septembre 1993) On peut se les procurer auprès de Roger Rivet, INSA, laboratoire deMathématiques, 20, avenue des Buttes de Coësmes, 35043 Rennes Cedex.

(2) Bureau de la Formation à l'enseignement Supérieur et des Allocataires, Directionde la Recherche et des études Doctorales, Ministère de l'Education nationale.

(3) Unité Régionale de Formation à l'Information Scientifique et Technique.

ActuaUté 157

L'ENS de Cachan a accepté de prendre la responsabilité de ceréseau ; un buUetin d'information et d'échanges devrait être crée. Unprochain coUoque sera organisé au Maroc dans deux ou trois ans.

Les actes du coUoque sont prévus pour avrU 1994 (ENS de Cachan).

Annette GONNIN-BOLO, INRP

LES CIES : CENTRES D'INITIATIONÀ L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Une journée d'étude consacrée aux CIES a eu Ueu le 12 juin 1992 àl'initiative de l'ADMES (Association pour le Développement desMéthodes de Formation dans l'Enseignement Supérieur) (1). L'ADMES apour objectif d'être un Ueu de rencontre pour tous ceux qui, dans l'en¬seignement supérieur, s'intéressent aux questions d'enseignement et deformation.

Cette rencontre avait pour objectif, après trois ans de fonctionne¬ment, de rassembler les différents « acteurs » des CIES (directeurs,formateurs, moniteurs) pour permettre une réflexion sur le dispositif etses finalités, par un échange d'informations et une confrontation desexpériences en France. Car les CIES sont une nouveauté sans précédentà l'Université puisqu'il s'agit de former les futurs enseignants-cher¬cheurs.

Il est difficUe de rendre compte de la richesse des communications etdes interventions des participants de cette journée rassemblant une cen¬taine de personnes : le fait que directeurs, formateurs et moniteurs seretrouvent dans un Ueu « neutre », le cadre d'une association, a permisau débat de s'installer et d'aUer au fond des questions.

Roland Bouchet (2) a d'abord présenté les objectifs des CIES et unhistorique de leurs mises en place. La question qui se pose aujourd'huiest de savoir si les commissions de spéciaUstes tiendront compte de cestage lors des recrutements de maîtres de conférences...

La première table ronde portait sur les objectifs et les contenus desstages à partir de comptes-rendus d'expériences menées à MontpeUier, àGrenoble, à Toulouse, et par l'URFIST (3) de Paris.

(1) Les actes de cette journée d'études sont parus dans le cahier de l'ADMES n° 1

(septembre 1993) On peut se les procurer auprès de Roger Rivet, INSA, laboratoire deMathématiques, 20, avenue des Buttes de Coësmes, 35043 Rennes Cedex.

(2) Bureau de la Formation à l'enseignement Supérieur et des Allocataires, Directionde la Recherche et des études Doctorales, Ministère de l'Education nationale.

(3) Unité Régionale de Formation à l'Information Scientifique et Technique.

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158 Recherche et Formation

La question des formateurs en CIES (qui intervient en CIES ?, com¬ment former ? ) fut le thème de la deuxième table ronde : le problème descompétences (enseignants-chercheur « expérimentés » ou formateursextérieurs à l'Université ? ), l'absence de statut des intervenants en CIESet le manque de disponibUité des enseignants-chercheurs, furent, entreautres, analysés.

Enfin, la troisième table ronde se centra sur les moniteurs : d'unepart, sur les origines sociales et trajectoires scolaires des moniteurs (àpartir d'une enquête menée par des moniteurs du CIES Sorbonne) ; et,d'autre part sur leurs demandes de formation, grâce aux interventionsde président(e) s d'associations de moniteurs.

Un débat riche, animé... à poursuivre.

Marie-Françoise FAVE-BONNETSciences de l'Éducation

Université Paris 10 Nanterre

DEVELOPPEMENT CURRICULAIREET DIDACTIQUE DES DISCIPLINES

Les 19 et 20 novembre 1993 a eu Ueu à la faculté de psychologie et dessciences de l'éducation de l'Université de Lisbonne (Portugal) le qua¬trième colloque national de la section portugaise de l'AFIRSE (Associa¬tion francophone internationale de recherche en sciences de l'éducation),organisé à l'initiative de A. Estrela, doyen de la faculté et L. Marmoz,professeur à l'université de Caen, sur le thème « Développement Curri-culaire et Didactique des DiscipUnes ». Ce coUoque a réuni plus de 300participants principalement français et portugais, mais aussi espagnols,algériens, roumains, mexicains, brésUiens ou québécois. Les thèmes detravaU s'inscrivaient dans une réflexion générale actueUement menée parles Portugais sur leur système éducatif, réflexion qui porte tout à la foissur les programmes, sur leur mise en forme pédagogique et didactique etsur la formation des enseignants.

Le colloque était organisé en tables rondes et ateliers. Les tablesrondes ont travaiUé les relations entre curriculum et didactique, entredidactique et formation des enseignants, entre didactique et sciences del'éducation, entre savoirs savants et savoirs enseignés. Les communica¬tions des ateliers ont principalement porté sur les différentes didacti¬ques : didactique des langues, didactique des sciences exactes et natu-reUes, didactique de la langue materneUe, didactique de l'histoire et de laphUosophie, didactique de l'éducation physique, didactique et situationsd'enseignement-apprentissage .

158 Recherche et Formation

La question des formateurs en CIES (qui intervient en CIES ?, com¬ment former ? ) fut le thème de la deuxième table ronde : le problème descompétences (enseignants-chercheur « expérimentés » ou formateursextérieurs à l'Université ? ), l'absence de statut des intervenants en CIESet le manque de disponibUité des enseignants-chercheurs, furent, entreautres, analysés.

Enfin, la troisième table ronde se centra sur les moniteurs : d'unepart, sur les origines sociales et trajectoires scolaires des moniteurs (àpartir d'une enquête menée par des moniteurs du CIES Sorbonne) ; et,d'autre part sur leurs demandes de formation, grâce aux interventionsde président(e) s d'associations de moniteurs.

Un débat riche, animé... à poursuivre.

Marie-Françoise FAVE-BONNETSciences de l'Éducation

Université Paris 10 Nanterre

DEVELOPPEMENT CURRICULAIREET DIDACTIQUE DES DISCIPLINES

Les 19 et 20 novembre 1993 a eu Ueu à la faculté de psychologie et dessciences de l'éducation de l'Université de Lisbonne (Portugal) le qua¬trième colloque national de la section portugaise de l'AFIRSE (Associa¬tion francophone internationale de recherche en sciences de l'éducation),organisé à l'initiative de A. Estrela, doyen de la faculté et L. Marmoz,professeur à l'université de Caen, sur le thème « Développement Curri-culaire et Didactique des DiscipUnes ». Ce coUoque a réuni plus de 300participants principalement français et portugais, mais aussi espagnols,algériens, roumains, mexicains, brésUiens ou québécois. Les thèmes detravaU s'inscrivaient dans une réflexion générale actueUement menée parles Portugais sur leur système éducatif, réflexion qui porte tout à la foissur les programmes, sur leur mise en forme pédagogique et didactique etsur la formation des enseignants.

Le colloque était organisé en tables rondes et ateliers. Les tablesrondes ont travaiUé les relations entre curriculum et didactique, entredidactique et formation des enseignants, entre didactique et sciences del'éducation, entre savoirs savants et savoirs enseignés. Les communica¬tions des ateliers ont principalement porté sur les différentes didacti¬ques : didactique des langues, didactique des sciences exactes et natu-reUes, didactique de la langue materneUe, didactique de l'histoire et de laphUosophie, didactique de l'éducation physique, didactique et situationsd'enseignement-apprentissage .

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ActuaUté 159

Sous leur diversité, U est possible de faire apparaître quelques axescentraux des réflexions.

L'importance pour l'efficacité des activités d'enseignement-apprentis¬sage des facteurs Ués aux élèves (âge, appartenance socio-culturelle,motivation...), à leurs représentations des contenus discipUnaires et desfacteurs inhérents aux situations mêmes d'enseignement : apprentissageindividuel ou de groupe, pédagogie de la découverte, mise en forme péda¬gogique de la théorie du confUt socio-cognitif (influence des interactionsentre pairs sur les apprentissages conceptuels...).

La question des enseignements de méthodologie concernant le travaUet l'apprentissage des élèves ainsi que la place de la métacognition ontfait l'objet de communications. Ont été ainsi évoqués les apports pos¬sibles des sciences cognitives dans la connaissance et la modéUsation desprocessus d'apprentissage et leur utilisation dans l'enseignement.

L'apport des concepts de la pragmatique Unguistique et des théoriessociolinguistiques de la communication à l'enseignement de la languematerneUe et des langues secondes. On a pu observer que les référencesaux savoirs savants, en particuUer dans le domaine des didactiques deslangues (materneUe et secondes) visent aussi à la légitimation de ces disci¬pUnes ; U s'agit de les constituer comme appui premier de l'enseignementet de donner à l'enseignement des langues une place plus importantedans le système éducatif portugais. Dans ce domaine d'enseignement, ledéveloppement de l'influence des savoirs concernant les différents genresdiscursifs semble général.

Les relations entre les contenus discipUnaires et les fonctions mêmesde l'enseignement des disciplines (finalités de l'enseignement dessciences, en particulier) et au-delà du système éducatif lui-même : ensei¬gnement de connaissances, formation de la personne ; cette réflexionpose ceUe de l'élaboration des contenus des programmes. Les communi¬cations ont également porté sur l'organisation même des cursus de forma¬tion aux différents niveaux du système scolaire et universitaire.

La question de FinterdiscipUnarité, en particuUer dans le domaine del'enseignement de l'histoire et de la philosophie.

La question de l'enseignement en situation multicultureUe.La question des savoirs devant constituer la formation des ensei¬

gnants ; l'intégration des savoirs didactiques et curriculaires dans la for¬mation.

Dans ces différents domaines, on peut remarquer les tentatives deconstruction de modèles et de taxinomies visant à prendre en considéra¬tion les différentes variables de l'acte d'enseignement. Mais peut-êtrefaut-il voir aussi dans cette démarche de prise en compte de la multipU¬cité de facteurs composant la situation pédagogique (sans pouvoir de

ActuaUté 159

Sous leur diversité, U est possible de faire apparaître quelques axescentraux des réflexions.

L'importance pour l'efficacité des activités d'enseignement-apprentis¬sage des facteurs Ués aux élèves (âge, appartenance socio-culturelle,motivation...), à leurs représentations des contenus discipUnaires et desfacteurs inhérents aux situations mêmes d'enseignement : apprentissageindividuel ou de groupe, pédagogie de la découverte, mise en forme péda¬gogique de la théorie du confUt socio-cognitif (influence des interactionsentre pairs sur les apprentissages conceptuels...).

La question des enseignements de méthodologie concernant le travaUet l'apprentissage des élèves ainsi que la place de la métacognition ontfait l'objet de communications. Ont été ainsi évoqués les apports pos¬sibles des sciences cognitives dans la connaissance et la modéUsation desprocessus d'apprentissage et leur utilisation dans l'enseignement.

L'apport des concepts de la pragmatique Unguistique et des théoriessociolinguistiques de la communication à l'enseignement de la languematerneUe et des langues secondes. On a pu observer que les référencesaux savoirs savants, en particuUer dans le domaine des didactiques deslangues (materneUe et secondes) visent aussi à la légitimation de ces disci¬pUnes ; U s'agit de les constituer comme appui premier de l'enseignementet de donner à l'enseignement des langues une place plus importantedans le système éducatif portugais. Dans ce domaine d'enseignement, ledéveloppement de l'influence des savoirs concernant les différents genresdiscursifs semble général.

Les relations entre les contenus discipUnaires et les fonctions mêmesde l'enseignement des disciplines (finalités de l'enseignement dessciences, en particulier) et au-delà du système éducatif lui-même : ensei¬gnement de connaissances, formation de la personne ; cette réflexionpose ceUe de l'élaboration des contenus des programmes. Les communi¬cations ont également porté sur l'organisation même des cursus de forma¬tion aux différents niveaux du système scolaire et universitaire.

La question de FinterdiscipUnarité, en particuUer dans le domaine del'enseignement de l'histoire et de la philosophie.

La question de l'enseignement en situation multicultureUe.La question des savoirs devant constituer la formation des ensei¬

gnants ; l'intégration des savoirs didactiques et curriculaires dans la for¬mation.

Dans ces différents domaines, on peut remarquer les tentatives deconstruction de modèles et de taxinomies visant à prendre en considéra¬tion les différentes variables de l'acte d'enseignement. Mais peut-êtrefaut-il voir aussi dans cette démarche de prise en compte de la multipU¬cité de facteurs composant la situation pédagogique (sans pouvoir de

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160 Recherche et Formation

toutes manières prétendre à l'exhaustivité) et des différents savoirsdidactiques un objectif de plus grande professionnalisation des ensei¬gnants par le biais d'une plus grande technicisation des activités ensei¬gnantes. Cette évolution ne peut être sans relation avec la réflexionactuelle sur la crise d'identité professionnelle souvent évoquée par lesenseignants, sur leur sentiment d'une véritable mutation de leur métier.

Ce colloque a permis de faire le point sur les questions actueUes desrelations entre didactique et enseignement, sur les incidences desdémarches d'intégration des didactiques dans les curricula comme surl'influence des savoirs savants discipUnaires ou de ceux qui relèvent de lapsychologie des apprentissages sur la conception de l'enseignement et dusystème éducatif.

Les actes de ce colloque, qui paraîtront dans l'année, seront à deman¬der auprès de la section portugaise de l'AFIRSE, à Monsieur leProfesseur Albano Estrela, Falcudade de Psicologia e de Ciencias daEducaçao, Alameda da Universidade, 1600 Lisboa, Portugal. Tél.7934554, Fax 7933408.

Elisabeth BAUTIERUniversité de Paris 8

2. PROCHAINES RENCONTRES

12e séminaire international annuel pour la formation des enseignants.

Organisé par l'université de Limburg et le collège d'enseignementsupérieur à Maastricht (Pays-Bas) du 9 au 16 avrU 1994.

Contact : Wynard WIJNER, University of Limburg, Postbus 616 -6200 MD Maastricht (Pays-Ras).

160 Recherche et Formation

toutes manières prétendre à l'exhaustivité) et des différents savoirsdidactiques un objectif de plus grande professionnalisation des ensei¬gnants par le biais d'une plus grande technicisation des activités ensei¬gnantes. Cette évolution ne peut être sans relation avec la réflexionactuelle sur la crise d'identité professionnelle souvent évoquée par lesenseignants, sur leur sentiment d'une véritable mutation de leur métier.

Ce colloque a permis de faire le point sur les questions actueUes desrelations entre didactique et enseignement, sur les incidences desdémarches d'intégration des didactiques dans les curricula comme surl'influence des savoirs savants discipUnaires ou de ceux qui relèvent de lapsychologie des apprentissages sur la conception de l'enseignement et dusystème éducatif.

Les actes de ce colloque, qui paraîtront dans l'année, seront à deman¬der auprès de la section portugaise de l'AFIRSE, à Monsieur leProfesseur Albano Estrela, Falcudade de Psicologia e de Ciencias daEducaçao, Alameda da Universidade, 1600 Lisboa, Portugal. Tél.7934554, Fax 7933408.

Elisabeth BAUTIERUniversité de Paris 8

2. PROCHAINES RENCONTRES

12e séminaire international annuel pour la formation des enseignants.

Organisé par l'université de Limburg et le collège d'enseignementsupérieur à Maastricht (Pays-Bas) du 9 au 16 avrU 1994.

Contact : Wynard WIJNER, University of Limburg, Postbus 616 -6200 MD Maastricht (Pays-Ras).

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ActuaUté 161

3. THÈSES CONCERNANT LES PROFESSIONSDE L'ÉDUCATION ET LA FORMATION

QUI S'Y RAPPORTE, SOUTENUESEN FRANCE EN 1992

BENOIST (Jean-Claude). Projet et prise de décision dans des insti¬tutions deformation. Etude du management participatif d'associationséducatives en Ille-et-Vilaine. Doctorat en sciences de l'éducation, Uni¬versité de Tours. Directeur de thèse : Gaston Pineau.

BOUYSSIERES (Patrice). La représentation sociale du métier, lieud'expression stratégique dans la construction socio-cognitive du projetprofessionnel. Un exemple : les étudiants et la représentation sociale desmétiers de l'enseignement. Doctorat en sciences de l'éducation, Uni¬versité de Toulouse 2. Directeur de thèse : Michel BataiUe.

CROSET (Laurent). Des écoles normales aux IUFM. Etude descoûts de formation. Doctorat en sciences de l'éducation, Université deBourgogne. Directeur de thèse : Jean-Claude Eicher.

LECONTE-BEAUPORT (Marie-Flore). - Évaluation des savoir-faire, évaluation des savoir-être dans la formation des infirmières.Doctorat en sciences de l'éducation, Université d'Aix-Marseille 1.Directeur de thèse : Jean-Jacques Bonniol.

MOREL (Henri). L'école à la fin du XIXe siècle jusqu'aux années1950 à Port-Saint-Louis du Rhône, Fos-sur-Mer, Port-de-Bouc, Mar-tigues et dans l'arrondissement d'Arles. Doctorat en histoire,Université d'Aix-MarseUle 1. Directeur de thèse : PhiUppe Joutard.

MOURIER-LACROSAZ (Marie-Claude). - Les paradoxes de l'injonc¬tion au changement : la formation continue des instituteurs de l'ensei¬gnement public, dans le département du Rhône, de 1969 à 1988.Doctorat en sciences de l'éducation, Université de Lyon 2. Directeur dethèse : PhiUppe Meirieu.

NICOLAS (Gilbert). L'école normale primaire de Rennes et la pre¬mière génération des normaUens en Bretagne (1831 - 1852). Doctoratd'histoire, Université de Paris 4. Directeur de thèse : Françoise Mayeur.

SIMON (André). Stratégies associatives et systèmes personnels deformation. De l'animateur à l'agent de développement dans les associa¬tions famUiales rurales. Doctorat en sciences de l'éducation, Universitéde Tours. Directeur de thèse : Georges Lerbet.

ActuaUté 161

3. THÈSES CONCERNANT LES PROFESSIONSDE L'ÉDUCATION ET LA FORMATION

QUI S'Y RAPPORTE, SOUTENUESEN FRANCE EN 1992

BENOIST (Jean-Claude). Projet et prise de décision dans des insti¬tutions deformation. Etude du management participatif d'associationséducatives en Ille-et-Vilaine. Doctorat en sciences de l'éducation, Uni¬versité de Tours. Directeur de thèse : Gaston Pineau.

BOUYSSIERES (Patrice). La représentation sociale du métier, lieud'expression stratégique dans la construction socio-cognitive du projetprofessionnel. Un exemple : les étudiants et la représentation sociale desmétiers de l'enseignement. Doctorat en sciences de l'éducation, Uni¬versité de Toulouse 2. Directeur de thèse : Michel BataiUe.

CROSET (Laurent). Des écoles normales aux IUFM. Etude descoûts de formation. Doctorat en sciences de l'éducation, Université deBourgogne. Directeur de thèse : Jean-Claude Eicher.

LECONTE-BEAUPORT (Marie-Flore). - Évaluation des savoir-faire, évaluation des savoir-être dans la formation des infirmières.Doctorat en sciences de l'éducation, Université d'Aix-Marseille 1.Directeur de thèse : Jean-Jacques Bonniol.

MOREL (Henri). L'école à la fin du XIXe siècle jusqu'aux années1950 à Port-Saint-Louis du Rhône, Fos-sur-Mer, Port-de-Bouc, Mar-tigues et dans l'arrondissement d'Arles. Doctorat en histoire,Université d'Aix-MarseUle 1. Directeur de thèse : PhiUppe Joutard.

MOURIER-LACROSAZ (Marie-Claude). - Les paradoxes de l'injonc¬tion au changement : la formation continue des instituteurs de l'ensei¬gnement public, dans le département du Rhône, de 1969 à 1988.Doctorat en sciences de l'éducation, Université de Lyon 2. Directeur dethèse : PhiUppe Meirieu.

NICOLAS (Gilbert). L'école normale primaire de Rennes et la pre¬mière génération des normaUens en Bretagne (1831 - 1852). Doctoratd'histoire, Université de Paris 4. Directeur de thèse : Françoise Mayeur.

SIMON (André). Stratégies associatives et systèmes personnels deformation. De l'animateur à l'agent de développement dans les associa¬tions famUiales rurales. Doctorat en sciences de l'éducation, Universitéde Tours. Directeur de thèse : Georges Lerbet.

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162 Recherche et Formation

S (Marie-Claude). - Contribution à une approche critique del'identité du formateur. Le cas de personnes intervenant dans un sys¬tème déformation par alternance. - Doctorat en sciences de l'éducation,Université de Tours. Directeur de thèse : Georges Lerbet.

SOUCI (Michel). - Formes d'intégration d'instituteurs. Instituteursd'école élémentaire en Eure-et-Loir : leurs pratiques de contact, leursreprésentations des familles. - Doctorat en sociologie, Université deParis 8. Directeur de thèse : Paul de Gaudemar.

TRINQUIER (Marie-Pierre). - Devenir enseignant ? Etude ducaractère consensuel et différentiel de la représentation sociale del'enseignement. - Doctorat en sciences de l'éducation, Université deToulouse 2 Directeur de thèse : Michel BataiUe.

Imprimé par INSTAPRINT S.A. - 1-2-3, levée de la Loire - LA RICHE - B.P. 5927 - 37059 TOURS Cedex - Tél. 47 38 1 6 04

Dépôt légal 2' trimestre 1994

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S (Marie-Claude). - Contribution à une approche critique del'identité du formateur. Le cas de personnes intervenant dans un sys¬tème déformation par alternance. - Doctorat en sciences de l'éducation,Université de Tours. Directeur de thèse : Georges Lerbet.

SOUCI (Michel). - Formes d'intégration d'instituteurs. Instituteursd'école élémentaire en Eure-et-Loir : leurs pratiques de contact, leursreprésentations des familles. - Doctorat en sociologie, Université deParis 8. Directeur de thèse : Paul de Gaudemar.

TRINQUIER (Marie-Pierre). - Devenir enseignant ? Etude ducaractère consensuel et différentiel de la représentation sociale del'enseignement. - Doctorat en sciences de l'éducation, Université deToulouse 2 Directeur de thèse : Michel BataiUe.

Imprimé par INSTAPRINT S.A. - 1-2-3, levée de la Loire - LA RICHE - B.P. 5927 - 37059 TOURS Cedex - Tél. 47 38 1 6 04

Dépôt légal 2' trimestre 1994

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Recherches sur la communication et l'apprentissagedes sciences et des techniques

Face au défi que représente, aujourd'hui, la formation scientifique et technique

une nouvelle revue

3 pour contribuer au développement de la recherche en didactique,

3 pour permettre la diffusion, en langue française, de rechercheset d'innovations menées dans le monde entier,

3 pour favoriser la communication entre les chercheurs,les enseignants et les formateurs.

Créée à l'initiative d'universitaires francophones,DIDASKAL1A est éditée par :

Institut National ^^^ et RôR universitéde Recherche &?&nD Eo3 LAVALPédagogique j9pB*l¤r QoQ (Québec)

DIOASKALIA : 3 numéros par an, 128 pages environ par parution,format 16,5 x24,5 cm.

Diffusion : INRP - Publications. 29, rue d'Ulm, 75230 Paris cedex 05Téléphone : (1) 46 34 90 80 - Télécopie : (1) 43 54 32 01

Abonnement : France et Québec : 400 lianes ttc. Autres pays : 500 francs.

Le numéro : France et Québec : 140 trancs ttc. Autres pays : 146 francs.

Joindre le règlement à l'ordre de l'agent comptable de l'INRP

Recherches sur la communication et l'apprentissagedes sciences et des techniques

Face au défi que représente, aujourd'hui, la formation scientifique et technique

une nouvelle revue

3 pour contribuer au développement de la recherche en didactique,

3 pour permettre la diffusion, en langue française, de rechercheset d'innovations menées dans le monde entier,

3 pour favoriser la communication entre les chercheurs,les enseignants et les formateurs.

Créée à l'initiative d'universitaires francophones,DIDASKAL1A est éditée par :

Institut National ^^^ et RôR universitéde Recherche &?&nD Eo3 LAVALPédagogique j9pB*l¤r QoQ (Québec)

DIOASKALIA : 3 numéros par an, 128 pages environ par parution,format 16,5 x24,5 cm.

Diffusion : INRP - Publications. 29, rue d'Ulm, 75230 Paris cedex 05Téléphone : (1) 46 34 90 80 - Télécopie : (1) 43 54 32 01

Abonnement : France et Québec : 400 lianes ttc. Autres pays : 500 francs.

Le numéro : France et Québec : 140 trancs ttc. Autres pays : 146 francs.

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HISTOIRE DE L'AGREGATIONContribution à l'histoire de la culture scolaire

André CHERVEL

Apparu en 1766, sous Louis XV, rétabli après laRévolution dans les années les plus noires durègne de Louis XVIII, le concours d'agrégation,

marqué du sceau de l'élitisme et de la culture la plustraditionnelle, semblait ne pas devoir survivre auxévolutions démocratiques et modernistes du XIXe siècle.Tirant parti de la situation d'infériorité dans laquelle stagnelongtemps l'enseignement supérieur français, il réussitcependant à s'adapter aux circonstances et à sediversifier suffisamment pour assumer toutes les tâchesnouvelles qui s'imposent à l'Instruction publique, puis àl'Éducation nationale. Longtemps, les jurys du concourscontrôleront à la fois l'enseignement secondaire et celuiqui est dispensé dans les facultés des lettres et dessciences ; et c'est en grande partie autour de lui ques'opère l'évolution des disciplines enseignées.Caractéristique du système d'enseignement français, leconcours d'agrégation peut être considéré comme l'unedes pièces importantes de la "spécificité française".

ÉDITIONS1 993 - 289 pages - format 14 x 24 cm <: i\/i é

France (TVA 5,5%) : 170 F. - Corse, DOM : 169,22 F.

Guyane, TOMI: 161 ,14-F.- Etranger : 177 F.

Toute commande d'ouvrages doit être accompagnée d'un titre de paiementlibellé à l'ordre de l'agent comptable de l'INRP

INRP - Service des Publications - 29, rue d'Ulm 75230 Paris Cedex 05

HISTOIRE DE L'AGREGATIONContribution à l'histoire de la culture scolaire

André CHERVEL

Apparu en 1766, sous Louis XV, rétabli après laRévolution dans les années les plus noires durègne de Louis XVIII, le concours d'agrégation,

marqué du sceau de l'élitisme et de la culture la plustraditionnelle, semblait ne pas devoir survivre auxévolutions démocratiques et modernistes du XIXe siècle.Tirant parti de la situation d'infériorité dans laquelle stagnelongtemps l'enseignement supérieur français, il réussitcependant à s'adapter aux circonstances et à sediversifier suffisamment pour assumer toutes les tâchesnouvelles qui s'imposent à l'Instruction publique, puis àl'Éducation nationale. Longtemps, les jurys du concourscontrôleront à la fois l'enseignement secondaire et celuiqui est dispensé dans les facultés des lettres et dessciences ; et c'est en grande partie autour de lui ques'opère l'évolution des disciplines enseignées.Caractéristique du système d'enseignement français, leconcours d'agrégation peut être considéré comme l'unedes pièces importantes de la "spécificité française".

ÉDITIONS1 993 - 289 pages - format 14 x 24 cm <: i\/i é

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Sous la direction deJean HASSENFORDER

LECTEURSET LECTURES

EN ÉDUCATION

avec la collaboration deM. ABDALLAH-PRETCEILLEJean AUBA etPaule ARMIER,Carmel CAMILLERI,Louis CROS,Maurise DEBESSE,Gilbert de LANDSHEERE,Joffre DUMAZEDIER,Jean-Claude FORQUIN,Frédéric GAUSSEN,Victor HOST,Michaël HUBERMAN,Louis LEGRAND,Philippe MEIRIEU,GastonS.Louis

REUCHLIN,SOETARD,

Jacques WITTWER

Quels sont les livres qui comptent dans la réflexion surl'éducation ? Comment entrer dans la recherche à partirdes ouvrages qui la jalonnent ?Pour effectuer des choix de lecture, il est bon de pouvoirtrouver conseil auprès de lecteurs qui exposent leursquestionnements et qui montrent comment ils ont putrouver des réponses dans tel ou tel ouvrage. A traversleurs témoignages, on pourra situer les livres dans leurcontexte et connaître le climat dans lequel ils ont rejointles interrogations de leurs lecteurs.Issus d'une revue de l'INRP, Perspectives Documentairesen Éducation, les Itinéraires de lecture présentés dansce recueil proviennent de professeurs et de chercheursayant acquis une grande familiarité avec la pensée et larecherche concernant l'éducation. Ces personnalitéspartagent avec nous leur expertise dans une grandevariété de parcours. Ce recueil nous introduit dans lemouvement de la pensée relative à l'éducation au coursdes dernières décennies. Il éclaire l'histoire dessciences de l'éducation.Cet ouvrage suscite également en nous un sentimentconvivial. En partageant avec les auteurs leurexpérience du travail intellectuel, nous pouvons noussentir appelés nous-mêmes à les imiter, à notre mesure,dans une démarche d'auto-formation.Ainsi, cet ouvrage peut-il jouer le rôle d'un guide, par lecompagnonnage qu'il nous propose, comme par la miseen évidence des ressources qui sont mises à notredisposition.

1993 - 358 p. - 16 x 24 cm - Ref : BB 031INRP / L'Harmattan, coll. Éducation & Formation

France fJVA 5,5 %) : 180 F. - Corse, DOM : 174,20 F.Guyane, TOM : 170,62 F. - Étranger : 187,70 F.

Toute commande d'ouvrages doit être accompagnée d'un titre de paiementlibellé à l'ordre de l'agent comptable de l'INRP

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Sous la direction deJean HASSENFORDER

LECTEURSET LECTURES

EN ÉDUCATION

avec la collaboration deM. ABDALLAH-PRETCEILLEJean AUBA etPaule ARMIER,Carmel CAMILLERI,Louis CROS,Maurise DEBESSE,Gilbert de LANDSHEERE,Joffre DUMAZEDIER,Jean-Claude FORQUIN,Frédéric GAUSSEN,Victor HOST,Michaël HUBERMAN,Louis LEGRAND,Philippe MEIRIEU,GastonS.Louis

REUCHLIN,SOETARD,

Jacques WITTWER

Quels sont les livres qui comptent dans la réflexion surl'éducation ? Comment entrer dans la recherche à partirdes ouvrages qui la jalonnent ?Pour effectuer des choix de lecture, il est bon de pouvoirtrouver conseil auprès de lecteurs qui exposent leursquestionnements et qui montrent comment ils ont putrouver des réponses dans tel ou tel ouvrage. A traversleurs témoignages, on pourra situer les livres dans leurcontexte et connaître le climat dans lequel ils ont rejointles interrogations de leurs lecteurs.Issus d'une revue de l'INRP, Perspectives Documentairesen Éducation, les Itinéraires de lecture présentés dansce recueil proviennent de professeurs et de chercheursayant acquis une grande familiarité avec la pensée et larecherche concernant l'éducation. Ces personnalitéspartagent avec nous leur expertise dans une grandevariété de parcours. Ce recueil nous introduit dans lemouvement de la pensée relative à l'éducation au coursdes dernières décennies. Il éclaire l'histoire dessciences de l'éducation.Cet ouvrage suscite également en nous un sentimentconvivial. En partageant avec les auteurs leurexpérience du travail intellectuel, nous pouvons noussentir appelés nous-mêmes à les imiter, à notre mesure,dans une démarche d'auto-formation.Ainsi, cet ouvrage peut-il jouer le rôle d'un guide, par lecompagnonnage qu'il nous propose, comme par la miseen évidence des ressources qui sont mises à notredisposition.

1993 - 358 p. - 16 x 24 cm - Ref : BB 031INRP / L'Harmattan, coll. Éducation & Formation

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Les enseignants-chercheursphysiciens

Marie-Françoise FAVE-BONNET

Préface de Pierre LENA

En quoi consiste le métier d'enseignant-chercheur à l'Université,et particulièrement pour les physiciens ?

Dans "Les enseignants-chercheurs physiciens", Marie-FrançoiseFAVE-BONNET observe le fonctionnement universitaire au plusprès du terrain, rompant avec la "langue de bois" des discourshabituels sur l'Université. Enseignant-chercheur de Sciences del'Éducation, l'auteur réfère son enquête à différentes disciplines"avec une rigueur qui mérite bien l'adjectif de «scientifique».L'ouvrage tend aux physiciens un miroir. Ce miroir ne cherchepas à plaire, mais à donner l'image de femmes et d'hommesenfermés dans leur passions et leur contradictions" (PierreLENA, extrait de la préface). Passion de recherche, mais aussiinquiétude pour l'enseignement.

L'enquête se fonde sur une enquête plus globale par entretienset questionnaires auprès d'enseignants-chercheurs dedifférentes disciplines : l'opinion des physiciens est ainsi référéeà ce qui se vit dans d'autres secteurs. Cela permet de mesurerla spécificité des physiciens et de la physique dans l'Université.

1993 - 140 pages - format 16 x 24

France (TVA 5,5%) : 85 F. - Corse, DOM : 82,26. FGuyane, TOM : 80,57 F. - Etranger : 88,60 F.

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Les enseignants-chercheursphysiciens

Marie-Françoise FAVE-BONNET

Préface de Pierre LENA

En quoi consiste le métier d'enseignant-chercheur à l'Université,et particulièrement pour les physiciens ?

Dans "Les enseignants-chercheurs physiciens", Marie-FrançoiseFAVE-BONNET observe le fonctionnement universitaire au plusprès du terrain, rompant avec la "langue de bois" des discourshabituels sur l'Université. Enseignant-chercheur de Sciences del'Éducation, l'auteur réfère son enquête à différentes disciplines"avec une rigueur qui mérite bien l'adjectif de «scientifique».L'ouvrage tend aux physiciens un miroir. Ce miroir ne cherchepas à plaire, mais à donner l'image de femmes et d'hommesenfermés dans leur passions et leur contradictions" (PierreLENA, extrait de la préface). Passion de recherche, mais aussiinquiétude pour l'enseignement.

L'enquête se fonde sur une enquête plus globale par entretienset questionnaires auprès d'enseignants-chercheurs dedifférentes disciplines : l'opinion des physiciens est ainsi référéeà ce qui se vit dans d'autres secteurs. Cela permet de mesurerla spécificité des physiciens et de la physique dans l'Université.

1993 - 140 pages - format 16 x 24

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RECHERCHE ET FORMATION

BULLETIN D'ABONNEMENT

à retourner à

INRP - Publications -29, rue d'Ulm, 75230 PARIS CEDEX 05

Nom ou établissement

Adresse :

Localité : Code postal :

Payeur s'il est différent :

Adresse :

Localité : Code postal :

Date Cachet et signature :

3 numéros par anformat 15x21 cm - 160 pages environ par numéro

Abonnement - tarif jusqu'au 31 juillet 1994France (IVA 5.5 % ) : 200 F ttc - Corse. DOM : 1 93.55 F ttc

Guyane, TOM : 189,57 F ttc - Étranger : 255 F

Abonnements couplésSi vous souscrivez un abonnement à Recherche et Formation et un autresoit à Perspectives documentaires soit à la Revue Française de Pédagogie,vous bénéficiez d'une remise de 10% sur le montant des abonnements ;

dans le cas où vous seriez déjà abonné à I' une de ces revues, merci derappeler votre référence d'abonnement pour justifier la remise.

Toute souscription d'abonnement doit être obligatoirement accompagnée d'un titre depaiement correspondant à son montant, libellé à l'ordre de l'agent comptable de l'INRP.Le décret du 29 décembre 1962 (instruction générale M9. 1) Article 169 (extrait)'...certaines dérogations à la règle du service fait ont été acceptées, notamment en matière de : (...)abonnements à des revues et périodiques'.

Une facture proforma sera émise pour toute demande. Seul, le paiement préalable de sonmontant entraînera l'exécution de la commande .

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Toute souscription d'abonnement doit être obligatoirement accompagnée d'un titre depaiement correspondant à son montant, libellé à l'ordre de l'agent comptable de l'INRP.Le décret du 29 décembre 1962 (instruction générale M9. 1) Article 169 (extrait)'...certaines dérogations à la règle du service fait ont été acceptées, notamment en matière de : (...)abonnements à des revues et périodiques'.

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Nom ou établissementAdresseLocalité Code postal

RECHERCHE ET FORMATION Nb. d'ex, prix total

N°2(1987) RR002

N°3(1988) RR003

N°4(1988) RR004

N°5(1989) RR005

N°6(1989) RR006

N°7(1990) RR007

N°9(1991) RR009

N°10(1991)RR010

N°11 (1992)RR011

N°12(1992)RR012

N°13(1993)RR013

N°14(1993)RR014

N°15(1994)RR015

Total

Prix au numéro (tarif jusqu'au 31 juillet 1994)France (TVA 5,5 %) : 70 F. ttc - Corse DOM : 67,74 F.

Guyane, TOM : 66,35 F. - Étranger : 73 F.Toute commande doit être obligatoirement accompagnée d'un titre de paiement correspondant a son montant, libellé àl'ordre de l'agent comptable de l'INRP.Le décret n°S0-393 du 2 juin 19B0, complété par l'arrêté du 27 lévrier 1989, dispense, aux termes de la nouvelle réglementation,de la production de mémoire ou de tactures pour le paiement des travaux, loumllures ou services elfectués pour le compte del'étal, des départements, des communes et des établissments publics, pour les dépenses qui n'excèdent pas 1500 Irancs dansleur totalité.Pour la Corse, les DOM-TOM et rétranger, une facture proforma sera émise pour toute demande Seul, le paiement préalable deson montant entraînera Texécution de la commande .

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Total

Prix au numéro (tarif jusqu'au 31 juillet 1994)France (TVA 5,5 %) : 70 F. ttc - Corse DOM : 67,74 F.

Guyane, TOM : 66,35 F. - Étranger : 73 F.Toute commande doit être obligatoirement accompagnée d'un titre de paiement correspondant a son montant, libellé àl'ordre de l'agent comptable de l'INRP.Le décret n°S0-393 du 2 juin 19B0, complété par l'arrêté du 27 lévrier 1989, dispense, aux termes de la nouvelle réglementation,de la production de mémoire ou de tactures pour le paiement des travaux, loumllures ou services elfectués pour le compte del'étal, des départements, des communes et des établissments publics, pour les dépenses qui n'excèdent pas 1500 Irancs dansleur totalité.Pour la Corse, les DOM-TOM et rétranger, une facture proforma sera émise pour toute demande Seul, le paiement préalable deson montant entraînera Texécution de la commande .

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ft 5

Quelle formation pédagogique '

pour les enseignantsdu supérieur ?

N° 15 - 1994

>vv

/>X. \ N K

Jf?P

IMSTITnTMATinNAI RF RFPHFRHHE PEDAGOGIQUE

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Quelle formation pédagogique '

pour les enseignantsdu supérieur ?

N° 15 - 1994

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/>X. \ N K

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IMSTITnTMATinNAI RF RFPHFRHHE PEDAGOGIQUE

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EQUIPE REDACTIONNELLE

Raymond BOURDONCLE : rédacteur en chef.Gérard SAUVION : secrétaire de rédaction.

Simone BAILLAUQUES : rubrique Études e.t recherches.Annette BON' : rubrique Actualité des IUFM.Raymond BOURDONCLE : rubrique Notas critiques.Roland FENEYROU : rubrique Autour des mots.Annette GONNIN-BOLO : rubrique Entretien.Andrée LOUVET : rubrique Études et recherches.Michèle TOURNIER : rubrique Actualité générale.

COMITE DE REDACTION

J.-M. BARBIER : Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers. Paris.J. BERBAUM : Professeur de Sciences de l'Education. Université de Sciences

Sociales. Grenoble.C. BERGER : Professeur de Sciences de l'Education. Université de Paris VI 11.

F. BEST : Inspecteur général. Paris.A. BOUVIER : Directeur. IUFM de Lyon.M.-L. CHA1X : Professeur. Ecole Nationale Supérieure des Sciences Agronomi¬

ques Appliquées. Dijon.L. DEMAILLY : Professeur. IUFM de Lille.J.-C. EICHER : Professeur d'Université. Institut de Recherche sur l'Economie

de l'Education. Dijon.J. FENEU1LLE : Inspecteur général. Paris.G. FERRY : Professeur émérite de Sciences de l'Éducation. Université de Paris X.J. GUGLIEMI : Directeur. IUFM de Caen.J. HASSENFORDER : Directeur du Déparlement Ressources et Communica¬

tion. INRP.W. HORNER : Chercheur. Ruhr Universitat Bochum. Allemagne.M. HUBERMAN : Professeur de Pédagogie. Massachussets. États-Unis.H. JUDGE : Professeur. Université d'Oxford. Royaume-Uni.G. de LANDSHEERE : Professeur émérite. Université de Liège. Belgique.L. LEGRAND : Professeur émérite de Sciences de l'Education. Université de

Strasbourg.N. LESELBAUM : Maître de conférences. IUFM de Versailles.C. LESSARD : Professeur d'Éducation Comparée el de Fondements de l'Éduca

tion. Université de Montréal. Québec. Canada.L. MARMOZ : Professeur de Sciences de l'Éducation. Université de Caen.A. de PERETTI : Directeur de Programme honoraire. INRP.M. REGUZZONI : Directeur de Recherche;. Centre pour l'innovation éducative.

Milan. Italie.F. VANISCOTTE : Consultante : « Dimension européenne » Eurydice. Bruxelles.M. VIAL : Professeur d'Université. INRP.W. TULAS1EWICZ : Senior lecturer. Université de Cambridge. Royaume-Uni.D. ZAY : Maître de conférences. Université de Paris VIII.J. WEISS : IRDP. Neuchâtel. Suisse.

Directeur de la publication : J.-F. BOTREL

EQUIPE REDACTIONNELLE

Raymond BOURDONCLE : rédacteur en chef.Gérard SAUVION : secrétaire de rédaction.

Simone BAILLAUQUES : rubrique Études e.t recherches.Annette BON' : rubrique Actualité des IUFM.Raymond BOURDONCLE : rubrique Notas critiques.Roland FENEYROU : rubrique Autour des mots.Annette GONNIN-BOLO : rubrique Entretien.Andrée LOUVET : rubrique Études et recherches.Michèle TOURNIER : rubrique Actualité générale.

COMITE DE REDACTION

J.-M. BARBIER : Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers. Paris.J. BERBAUM : Professeur de Sciences de l'Education. Université de Sciences

Sociales. Grenoble.C. BERGER : Professeur de Sciences de l'Education. Université de Paris VI 11.

F. BEST : Inspecteur général. Paris.A. BOUVIER : Directeur. IUFM de Lyon.M.-L. CHA1X : Professeur. Ecole Nationale Supérieure des Sciences Agronomi¬

ques Appliquées. Dijon.L. DEMAILLY : Professeur. IUFM de Lille.J.-C. EICHER : Professeur d'Université. Institut de Recherche sur l'Economie

de l'Education. Dijon.J. FENEU1LLE : Inspecteur général. Paris.G. FERRY : Professeur émérite de Sciences de l'Éducation. Université de Paris X.J. GUGLIEMI : Directeur. IUFM de Caen.J. HASSENFORDER : Directeur du Déparlement Ressources et Communica¬

tion. INRP.W. HORNER : Chercheur. Ruhr Universitat Bochum. Allemagne.M. HUBERMAN : Professeur de Pédagogie. Massachussets. États-Unis.H. JUDGE : Professeur. Université d'Oxford. Royaume-Uni.G. de LANDSHEERE : Professeur émérite. Université de Liège. Belgique.L. LEGRAND : Professeur émérite de Sciences de l'Education. Université de

Strasbourg.N. LESELBAUM : Maître de conférences. IUFM de Versailles.C. LESSARD : Professeur d'Éducation Comparée el de Fondements de l'Éduca

tion. Université de Montréal. Québec. Canada.L. MARMOZ : Professeur de Sciences de l'Éducation. Université de Caen.A. de PERETTI : Directeur de Programme honoraire. INRP.M. REGUZZONI : Directeur de Recherche;. Centre pour l'innovation éducative.

Milan. Italie.F. VANISCOTTE : Consultante : « Dimension européenne » Eurydice. Bruxelles.M. VIAL : Professeur d'Université. INRP.W. TULAS1EWICZ : Senior lecturer. Université de Cambridge. Royaume-Uni.D. ZAY : Maître de conférences. Université de Paris VIII.J. WEISS : IRDP. Neuchâtel. Suisse.

Directeur de la publication : J.-F. BOTREL

Page 171: revue RECHERCHE ET FORMATIONife.ens-lyon.fr/publications/edition-electronique/... · 2012-01-27 · Recherche et Formation fait désormais paraître trois numéros par an (dont un

RECHERCHE ET FORMATION

Dans chaque numéro vous trouverez une série d'articles consacrés à un grandthème, les rubriques "Entretien", "Autour des mots", "Actualités", des informationset des notes critiques.

Au sommaires des numéros disponibles

N°2 - 1 987. La recherche-action et la formation. Entretien avec Pierre Laderrière.Autour des mots : approches de la recherche.

N°3 - 1988. Les enseignants débutants. Entretien avec Gilbert De Landsheere.Autour du mot : la recherche-action .

N°4 - 1 988. Sociologie des enseignants et de leur formation.Entretien avec Antoine Prost. Autour du mot : évaluation.

N°5 - 1 989. La rénovation des collèges. Entretien avec D. Lenarduzzi.Autour des mots : la pédagogie différenciée .

N°6 - 1 989. L 'enseignement professionnel et la professionnalisation.Entretien avec Bertrand Schwartz.

N°7 - 1 990. Didactique et formdtion des enseigndnts. Entretien avec PhilippeMeirieu. Autour des mots : innovation, changement, réforme, rénovation.

N°9 - 1991 . Le journal de classe. Entretien avec Jean Cardinet.Autour des mots : le journal de formation et de recherche .

N°l 0 - 1 991 . Tendances nouvelles de la formation des enseignants :

communications du colloque de Versailles de Recherche et Formation.Autour des mots : la formation des enseignants .

N° 1 1 - 1992. Théorie et pratique. Entretien avec Gérard Malglaive.Autour des mots : théorie et pratique.

N° 12 - 1992. Le mémoire professionnel. Entretien avec Henri Desroches.Autour des mots : le mémoire professionnel

N° 13 - 1993. Quelle formation en commun pour les enseignants ?

Entretien avec Viviane Isambert-Jamati.Autour des mots : instituteur, professeur, IUFM, Formation continue.

N° 14 - 1994. La direction d'établissement scolaire,Entretien avec André Hussenet. Autour du mot : chef.

N° 1 5 - 1 994. Quelle formation pédagogique pour les enseignants du supérieur ?Entretien avec Pierre Lena. Autour des mots : enseignement supérieuret université

RECHERCHE ET FORMATION

Dans chaque numéro vous trouverez une série d'articles consacrés à un grandthème, les rubriques "Entretien", "Autour des mots", "Actualités", des informationset des notes critiques.

Au sommaires des numéros disponibles

N°2 - 1 987. La recherche-action et la formation. Entretien avec Pierre Laderrière.Autour des mots : approches de la recherche.

N°3 - 1988. Les enseignants débutants. Entretien avec Gilbert De Landsheere.Autour du mot : la recherche-action .

N°4 - 1 988. Sociologie des enseignants et de leur formation.Entretien avec Antoine Prost. Autour du mot : évaluation.

N°5 - 1 989. La rénovation des collèges. Entretien avec D. Lenarduzzi.Autour des mots : la pédagogie différenciée .

N°6 - 1 989. L 'enseignement professionnel et la professionnalisation.Entretien avec Bertrand Schwartz.

N°7 - 1 990. Didactique et formdtion des enseigndnts. Entretien avec PhilippeMeirieu. Autour des mots : innovation, changement, réforme, rénovation.

N°9 - 1991 . Le journal de classe. Entretien avec Jean Cardinet.Autour des mots : le journal de formation et de recherche .

N°l 0 - 1 991 . Tendances nouvelles de la formation des enseignants :

communications du colloque de Versailles de Recherche et Formation.Autour des mots : la formation des enseignants .

N° 1 1 - 1992. Théorie et pratique. Entretien avec Gérard Malglaive.Autour des mots : théorie et pratique.

N° 12 - 1992. Le mémoire professionnel. Entretien avec Henri Desroches.Autour des mots : le mémoire professionnel

N° 13 - 1993. Quelle formation en commun pour les enseignants ?

Entretien avec Viviane Isambert-Jamati.Autour des mots : instituteur, professeur, IUFM, Formation continue.

N° 14 - 1994. La direction d'établissement scolaire,Entretien avec André Hussenet. Autour du mot : chef.

N° 1 5 - 1 994. Quelle formation pédagogique pour les enseignants du supérieur ?Entretien avec Pierre Lena. Autour des mots : enseignement supérieuret université

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Les universitaires, enseignants-chercheurs, ont-ils besoind'une formation à l'enseignement ? En quoi la mutationactuelle de l'enseignement supérieur et tout particulièrementdes universités met cette question à l'ordre du jour ?

Est-il possible de mettre davantage l'accent sur la missiond'enseignement des universitaires sans courir le risque derendre de plus en plus difficile le travail de recherche et decompromettre la mission qu'a l'Université de constituer lesavoir ?

La tradition universitaire du compagnonnage qui, ainsique l'évoque Pierre Lena, « fait passer progressivement desbancs au tableau noir » suffit-elle ? ou bien une véritableformation, didactique et pédagogique, aux outils, méthodeset techniques d'enseignement est-elle nécessaire ? Qu'en est-il, à cet égard du monitorat ? Comment fonctionnent lesCIES (Centres d'initiation à l'enseignement supérieur) ?

Que se passe-t-il, dans ce domaine, à l'extérieur de nosfrontières ?

Ce numéro de Recherche et Formation essaie de faire lepoint d'une question difficile, controversée, mal connue dumilieu même qu'elle concerne d'abord.

INSTITUT NATIONALDE RECHERCHE PEDAGOGIQUE29 rue d'Ulm, 75230 PARIS CEDEX 05Téléphone : 46.34.90.00ISBN 2-7342-0413-4

Les universitaires, enseignants-chercheurs, ont-ils besoind'une formation à l'enseignement ? En quoi la mutationactuelle de l'enseignement supérieur et tout particulièrementdes universités met cette question à l'ordre du jour ?

Est-il possible de mettre davantage l'accent sur la missiond'enseignement des universitaires sans courir le risque derendre de plus en plus difficile le travail de recherche et decompromettre la mission qu'a l'Université de constituer lesavoir ?

La tradition universitaire du compagnonnage qui, ainsique l'évoque Pierre Lena, « fait passer progressivement desbancs au tableau noir » suffit-elle ? ou bien une véritableformation, didactique et pédagogique, aux outils, méthodeset techniques d'enseignement est-elle nécessaire ? Qu'en est-il, à cet égard du monitorat ? Comment fonctionnent lesCIES (Centres d'initiation à l'enseignement supérieur) ?

Que se passe-t-il, dans ce domaine, à l'extérieur de nosfrontières ?

Ce numéro de Recherche et Formation essaie de faire lepoint d'une question difficile, controversée, mal connue dumilieu même qu'elle concerne d'abord.

INSTITUT NATIONALDE RECHERCHE PEDAGOGIQUE29 rue d'Ulm, 75230 PARIS CEDEX 05Téléphone : 46.34.90.00ISBN 2-7342-0413-4