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POUR EN FINIR AVEC LE PÉRIURBAIN Jean-Michel Roux Editions Esprit | Esprit 2013/3 - Mars/Avril pages 109 à 120 ISSN 0014-0759 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-esprit-2013-3-page-109.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Roux Jean-Michel, « Pour en finir avec le périurbain », Esprit, 2013/3 Mars/Avril, p. 109-120. DOI : 10.3917/espri.1303.0109 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Editions Esprit. © Editions Esprit. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Laval - - 132.203.235.189 - 11/07/2013 07h53. © Editions Esprit Document téléchargé depuis www.cairn.info - Université de Laval - - 132.203.235.189 - 11/07/2013 07h53. © Editions Esprit

Roux Jean-Michel, « Pour en finir avec le périurbain »

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POUR EN FINIR AVEC LE PÉRIURBAIN Jean-Michel Roux Editions Esprit | Esprit 2013/3 - Mars/Avrilpages 109 à 120

ISSN 0014-0759

Article disponible en ligne à l'adresse:

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Roux Jean-Michel, « Pour en finir avec le périurbain »,

Esprit, 2013/3 Mars/Avril, p. 109-120. DOI : 10.3917/espri.1303.0109

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Distribution électronique Cairn.info pour Editions Esprit.

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TOUS URBAINS !

Pour en finir avec le périurbain

Jean-Michel Roux*

EN 1938 est paru aux États-Unis un long article de Louis Wirth,« Le phénomène urbain comme mode de vie1 » qui, très résumé,disait à peu près ceci : les seuils de dimension et de densité adoptéspour définir les limites des villes sont arbitraires, d’autant qu’ilsdiffèrent selon qu’on considère les vies diurnes et nocturnes desmigrants alternants ; inversement, une famille munie d’une maison,d’un téléphone et d’une voiture peut être parfaitement urbaine enmatière de vie collective, communication et consommation. N’endéplaise aux limites administratives existantes. On voit ce que cesobservations gardent d’actualité, avec les nouvelles technologies decommunication.

Wirth rassemblait des observations bien antérieures sur unesuburbia2 faite de formations urbaines à faible densité. Comme lesvoiries et réseaux campagnards outre-Atlantique étaient très lâches,les nouvelles organisations relevaient tout de même d’opérationsd’aménagement planifiées, le plus souvent en continuité avec lesprécédentes (urban sprawl, étalement urbain), d’autres délibérémentséparées, mais alors plus ambitieuses : l’histoire américaine descités-jardins commence ainsi dès la seconde moitié du XIXe siècle3.

Mars-avril 2013109

* Consultant urbaniste. Voir son dernier article dans Esprit, « Vert et brun, jusqu’où ira lepériurbain ? », juin 2012.

1. Louis Wirth, “Urbanism as a Way of Life”, traduit dans Marcel Roncayolo et ThierryPaquot (sous la dir. de), Villes et civilisation urbaine. XVIIe XXe siècle, Paris, Larousse, 1992.

2. Voir l’article de Cynthia Ghorra-Gobin dans ce numéro, p. 121.3. Pour rester dans la fraîcheur des débuts, voir Frederick Law Olmsted, Civilising

American Cities. Writing in City Landscape, Boston, MIT Press, 1971. C’est un recueil detextes du grand paysagiste et urbaniste américain, actif dans cette période. Ou encore, concer-nant la Grande-Bretagne, Ebenezer Howard, les Cités-jardins de demain (1898), trad. fr., Paris,Sens & Tonka, 1998.

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À l’est du pays, on pouvait encore confondre le phénomène avec desbanlieues d’un centre historique préexistant. Ailleurs, la suburbiafaisait la consistance même des villes, au point qu’il a fallu plus tard,dans la seconde moitié du XXe siècle, synthétiser des downtownspour éviter, par exemple, que des visiteurs puissent traverser SanDiego, c’est-à-dire une agglomération de plus de deux millionsd’habitants… sans s’en rendre compte.

L’Europe n’est pas exempte des mêmes évolutions. Elle n’ad’ailleurs pas été en retard, puisque des quartiers anglais décentrés,plus ou moins planifiés, sont apparus en grande quantité avec lapremière industrialisation et le chemin de fer. Seulement, au lieu deconquérir un territoire vierge, les suburbia européennes se sontdisséminées, non sans conflits avec des organisations rurales plusanciennes.

En simplifiant à l’excès : nos villes furent autrefois servantes del’économie et de la société agricoles, pour des fonctions adminis-tratives et commerciales. Le Tableau économique de FrançoisQuesnay (1758), ancêtre de la comptabilité nationale, regroupait lapopulation urbaine et ses activités sous la dénomination peu indul-gente de « classes stériles ». Or, non seulement les rapports deprééminence se sont inversés, mais c’est le rural tout entier qui vientà manquer.

Un vocabulaire international abondant (suburbanisation, péri-urbanisation, périphéries, rurbanisation, alter urbain, etc.), maisimprécis, essaie désormais d’embrasser à la fois l’urbanisationsociale galopante, la prolifération et la persistance de formes d’oc-cupation du sol peu denses et discontinues et le débordementpermanent des organisations politiques par les constructions et lacroissance démographique. Autrement dit, les mêmes termespeuvent rendre compte de faibles densités d’habitat et d’emploi, dediscontinuités territoriales, de production immobilière, d’outils deplanification et de pratiques quotidiennes. Si le territoire concernéest en continuité avec de grandes villes, il participe d’un dévelop-pement métropolitain. Mais si l’existence même de ces phéno-mènes est à la fois niée et dénoncée, comme c’est le cas en France,il s’ensuit que la discussion est confuse.

Je ne m’aventure pas dans des querelles de mots. Assurément,une vue planétaire de ces phénomènes s’impose, mais les compa-raisons internationales chiffrées, même simplement européennes,butent sur une grande hétérogénéité des circonscriptions et desdénominations : dans bien des cas, il faut se fier à ce qu’on voit à l’œil

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nu. On gagne donc en clarté en acceptant d’entrer dans l’histoire, ledroit et les institutions de chaque pays, en l’occurrence du nôtre.

Tous urbains

Pour le recensement de 1954, l’Insee a proposé une définition dumilieu rural, appliquée rétroactivement sur les recensements anté-rieurs, et toujours en vigueur depuis : les communes dont l’agglomération principale est inférieure à 2 000 habitants. Ce tracéde frontière (qui évolue sans cesse) était inspiré par des recom-mandations internationales, mais il était aussi facilité par la minia-turisation des communes françaises. Faute d’une carte administrativeaussi minutieuse, nos voisins européens l’ont assorti de seuils diffé-rents, du moins ceux d’entre eux qui ont gardé cette distinctionstatistique.

De la sorte, en 1946, le rural (alors 19 millions d’habitants)hébergeait 47 % de la population de France métropolitaine, ce quirecoupait les 7,5 millions d’actifs agricoles et leur famille, plus desartisans et commerçants de villages. C’était encore la réalité vivanted’une société paysanne, avec ce qu’elle contenait de particula-rismes locaux, de travail familial, de troc et d’autoconsommation.

Puis, en moins de trente ans, la population active agricole a étédivisée par quatre. Une porosité est apparue entre urbain et rural,visible dans les mouvements migratoires, la nature des emplois etles modes de vie. L’Insee a donc inventé en 1975 les Zones depeuplement industriel et urbain (ZPIU)… et les a abandonnées en1990, parce que la population était devenue de moins en moinsindustrielle, mais urbaine (non agricole) dans la proportion de97 %. Quant aux paysans comme classe sociale originale, leurdisparition était concomitamment annoncée par les intéressés eux-mêmes et les sciences sociales4 : ils étaient devenus exploitants agri-coles. Depuis, l’Insee s’inspire plutôt des flux de déplacementspour mesurer une intensité urbaine.

Quel que soit le sentiment qu’on a de ces changements, ilconviendrait d’en donner acte : nous sommes tous urbains. LaConfédération paysanne, dont José Bové fut longtemps porte-parole,n’est rien d’autre qu’un syndicat de petits producteurs soucieux

Pour en finir avec le périurbain

4. Par la profession agricole, Michel Debatisse, la Révolution silencieuse, Paris, Calmann-Lévy, 1963. Par les sciences sociales, Henri Mendras, la Fin des paysans, Arles, Actes Sud, coll.« Babel », 1992 (1re éd. 1967).

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d’écologie et de rentabilité décente. Les paniers des Associationspour le maintien d’une agriculture paysanne (AMAP) conduisent deslégumes bio jusqu’au cœur des grandes villes. Ces organisations nesont en rien des résurgences d’anciennes pratiques.

L’urbanisation sociale se vautre donc librement dans le territoire.C’est un constat. Un progrès ? Développement durable et luttecontre l’étalement urbain sont désormais rituellement associés dansle discours officiel et même dans la loi5. Mais cette proscription de« l’étalement » ignore à la fois une situation acquise (l’urbain géné-ralisé) et le caractère résolument disséminé des constructions et deséquipements.

L’enjeu de la politique urbaine est de s’approprier cet espaceélargi, sans hésiter à y inclure l’agriculture et les espaces naturels,qui participent du même ensemble de fonctions, des mêmes airesde communication, des mêmes modes de consommation, de lamême économie globalisée. La ville est sortie de ses murs, celaoblige en particulier à considérer la notion de consommation deterrain avec plus de flegme qu’il n’est d’usage, plus d’ambitionaussi. Les données les plus alarmistes sont les plus courammentcitées pour la France métropolitaine : 79 000 hectares « artificia-lisés » par an (2006-2010), plus d’un département tous les dixans6 ! Mais il faut entendre que la moitié environ de cette consom-mation apparente est faite de sols « revêtus ou stabilisés », c’est-à-dire principalement consacrées aux réseaux de circulation (route,fer, air), stationnement compris, et le quart de terrains « enherbés »(jardins). C’est l’ensemble qu’il faut considérer, avant de crimina-liser telle ou telle pratique. Décrire avec sérieux n’est pas toutapprouver.

Décrire le chaos

Le périurbain a mauvaise presse, chez les universitaires, parmiles professions de l’urbanisme, et même dans les médias grandpublic. Mais c’est un périurbain réduit à des objets emblématiques.

Jean-Michel Roux

5. « Le projet d’aménagement et de développement durables […] fixe des objectifs demodération de la consommation de l’espace et de lutte contre l’étalement urbain » (article L123-1-3 du Code de l’urbanisme).

6. Source Agreste, Teruti-Lucas. Noter que les intervalles de confiance sont assez larges.Le sol « artificialisé » dans son ensemble couvre 11 % du territoire recensé en 2010. Il existed’autres bases de données, mais plus locales ou partielles : sociétés d’aménagement foncier etd’établissement rural (Safer), recensements généraux de la population Insee, Sit@del2, inven-taires régionaux.

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Par exemple, sous un titre parlant, « Comment la France est devenuemoche », Télérama publiait le 13 février 2010 une enquête deXavier de Jarcy et Vincent Rémy, amplement illustrée. Bien desréalisations neuves et visibles, et des plus citadines, auraient puparticiper de ce constat, mais l’article ne mentionnait que lecommerce périphérique et le « rêve pavillonnaire ». Il dénonçait unmode de développement « suintant l’ennui » et « seriné, depuisValéry Giscard d’Estaing, par tous les gouvernements ». Et seconcluait, comme il est d’usage, par l’annonce d’une faillite proche,grâce, si j’ose dire, à l’augmentation du prix du pétrole et à laréduction obligée des déplacements automobiles. L’acte d’accusa-tion s’est encore enrichi récemment, lors des dernières électionsprésidentielles et législatives, puisque les pavillons ont été soup-çonnés de voter Front national7.

Il est certain que l’aménagement du périurbain français estindigne, et que le territoire ainsi façonné est chaotique. Je déplorecomme d’autres les trop faibles efforts de conception et de réalisa-tion consentis pour les périphéries. Tout de même, il ne faudrait pasque les critiques transpirent trop visiblement la haine du peuple,convaincu de mauvais goût et d’exercice irresponsable de seslibertés. Ni qu’elles tournent en boucle : les arguments de Téléramaétaient déjà entendus il y a quarante ans, à ceci près que leurs ciblesétaient encore, en France, à l’état naissant. Ni que le périurbainserve de bouc émissaire aux impuissances des politiques publiques,devant la crise économique et sociale qui nous frappe.

Il y a quelques semaines a eu lieu un colloque important : « Lesmobilités durables dans le périurbain, est-ce possible ?8 » La ques-tion n’était pas nouvelle. La forme interrogative elle-même entre-tenait l’espoir d’oublier le phénomène comme un mauvais rêve. Lesintervenants étaient principalement des universitaires. Les acteursdu territoire (élus, opérateurs immobiliers, urbanistes) étaient raresdans la salle. Néanmoins, il m’a semblé qu’un consensus nouveauémergeait sur le caractère inévitable des formations urbaines peudenses et discontinues, et sur l’attention qu’elles justifient. Faisonsrapidement un état des lieux, en reprenant la « nomenclatureTélérama ».

Pour en finir avec le périurbain

7. Voir J.-M. Roux, « Vert et brun, jusqu’où ira le périurbain ? », art. cité. Voir également,dans ce numéro, l’entretien avec Laurent Davezies et Christophe Guilluy et l’article de JeanRivière p. 23 et 34.

8. Deuxièmes rencontres internationales du Forum vies mobiles, 24-25 janvier 2013. LeForum est animé par la SNCF.

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Le commerce en arrière-cour

Il convient de préciser : les centres commerciaux sont implantésen périphérie, mais pas spécialement destiné aux périphéries. Dansles agglomérations françaises, tout le monde, centre-ville compris,fréquente les hypermarchés (invention nationale) et les galeriesmarchandes attenantes. Peut-être à l’exception notable des Parisiensintrapériphériques, puisque les grandes surfaces ont été proscritesdans la ville, et que le périurbain en est vraiment lointain. Je nem’étendrai pas sur la guerre pleine d’hypocrisie que se livrentdepuis de longues décennies défenseurs du petit commerce etgrandes centrales d’achat. Les gens du terrain savent que les auto-risations d’implantation ont été difficiles à obtenir, mais que laréglementation complexe a beaucoup incité à la corruption, celle-ci impliquant élus, administrations et commissions ad hoc. Lemoins qu’on puisse dire est que cette dérive n’a pas favorisé l’émer-gence d’un urbanisme commercial soigné. On peut même affirmer,preuves à l’appui, que les aspects qualitatifs des implantations ontété froidement ignorés, et qu’ainsi a été rompu le voisinage histo-rique de la boutique et des logements.

Nous savons d’autre part que les surfaces commerciales ontglobalement atteint un pic, dans les conditions actuelles de consom-mation. Il existe des surcapacités de vente dans les surfaces demagasin existantes, cette observation générale méritant naturelle-ment des corrections locales. En gros, les créations ici impliquentdes fermetures ailleurs. De plus, les modèles de grandes surfacesgénéralistes sont en crise, comme l’indiquent les multiples signauxd’alerte lancés par les groupes de distribution. Ce qui s’imposedésormais, c’est donc de créer des magasins plus proches, plusdiversifiés, mieux implantés dans le tissu urbain9. Mais c’est ausside traiter le déclin de zones commerciales existantes10, sans trops’attarder sur les déplorables conditions de leur naissance.

Élargissons la vue. Le commerce périphérique, avec ses bâti-ments négligés, ses enseignes disparates, ses parkings envahissants,s’est trouvé relégué dans les arrière-cours de la ville, au même titreque la logistique, les stations d’autoroutes, les traitements de

Jean-Michel Roux

9. Pascal Madry, « La fin de l’urbanisme commercial », Études foncières, novembre-décembre 2012, et du même auteur, « Le commerce est entré dans sa bulle », Études foncières,mai-juin 2011.

10. Question abordée, bien sûr partiellement, par un programme d’étude « Territoireséconomiques » du ministère de l’Équipement, des Transports et du Logement, lui-même conclupar un séminaire sur « L’urbanisme commercial à la croisée des chemins », 22 octobre 2012.

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déchets… et les zones d’activités, seules capables d’accueillir l’in-dustrie dont on nous dit tant de bien. S’agissant de fonctions aussiindispensables, ce n’est pas le périurbain qui est en cause dans cesdécors chaotiques, mais l’absence d’une politique périurbainecapable d’organiser les implantations et leurs évolutions. Il vafalloir y mettre des moyens importants, parce que les entreprises,comme les employés et les clients, ont besoin d’un cadre plusaccueillant ; et aussi parce que les zones de déshérence se multi-plient. Il faut les rénover, d’autant qu’elles sont parfois situées àl’emplacement de nouveaux projets urbains. Or tous ces terrains,même en friche, sont fortement appropriés par des propriétaires auxaguets, publics comme privés. La négociation sera dure.

Le pavillon

C’est ce qu’on appelle une maison, dans des milieux sociauxélevés. C’est aussi le plus souvent un mode de production : lepropriétaire d’une parcelle à bâtir « fait construire » par une entre-prise. Tordons le cou à des lieux communs. Il n’y a guère de promo-teurs dans les zones pavillonnaires. Il n’y a pas non plus beaucoupde lotissements, et de moins en moins11. Le plus grand nombre seréalise en « diffus » c’est-à-dire dans les zones classées urbaines desPLU (plan local d’urbanisme)… quand il existe un PLU12. Des règlesdonc, et en quantité, mais peu d’organisation. C’est du coup parcoup.

Les praticiens connaissent la ligne virtuelle de partage du terri-toire entre les promoteurs (majoritairement producteurs d’immeublescollectifs) et les constructeurs (pour les pavillons). C’est purementcoutumier. Or les promoteurs travaillent à découvert, sur desprogrammes assez consistants et relativement complexes. En plusde satisfaire leur légendaire rapacité, ils doivent donc assumer descoûts de construction relativement élevés, des frais de montage etdes couvertures de risques. Il s’ensuit que le prix du mètre carréhabitable en pavillon est sensiblement inférieur à celui des appar-tements les plus proches, avec un jardin en plus, quoique le coût

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11. Par exemple, en 2009, à peu près un quart des maisons mises en chantier au niveaunational (source Syndicat national des aménageurs lotisseurs).

12. Ce qui n’est le cas que dans la moitié des communes, et bien plus rarement dans lespetites communes. Mais il existe alors, tout de même, des règles pour borner les zones construc-tibles.

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du terrain dans ce mètre carré final y soit plus élevé (en raison dela moindre densité de construction). Ainsi, pour expliquer l’ampleurdu phénomène pavillonnaire, il suffit de considérer le portefeuilledes acquéreurs. Comme tout choix économique, il est fait souscontrainte, mais ce n’est pas un pis-aller. Ajoutons que le pavillons’adapte mieux aux temps de crise, parce que les constructeurs sontde taille artisanale et peuvent rogner sur leur prix de revient, et aussiparce que la rétention du foncier est moindre sur un très large terri-toire : le prix moyen des parcelles à bâtir a diminué depuis 200713.

Cette forme d’habitat a reçu des encouragements politiques dela voix, mais très peu du geste, sauf un à ma connaissance. En 1969,Albin Chalandon, alors ministre de l’Équipement, a lancé unConcours international de la maison individuelle, ouvert aux grandsgroupes du BTP dont on craignait, non sans raison, qu’ils fussentexclus de ce marché. Les maisons étaient très bon marché. Lespromoteurs les ont souvent bâclées, engendrant des conflits gravesavec les accédants. Il y eut 65 000 logements ainsi fabriqués, bienmoins de six mois de la production actuelle. Et pourtant, cesmalheureuses « chalandonnettes », dont on peut constater qu’ellesont tout de même bien vieilli, avec des espaces collectifs où lesarbres ont poussé, sont encore citées comme preuve d’un complotattentatoire à un urbanisme régulé.

Au reste, comme presque tous les logements français occupésaujourd’hui par leurs propriétaires (58% des ménages), les pavillonssont les conséquences des prêts individuels d’accession à lapropriété, apparus par étapes à la fin des années 1960. Les mêmesque pour les immeubles en copropriété. Dans l’estimation la plusétroite, en ne comptant que cette production récente d’individuelsdiffus, on peut assurer qu’aujourd’hui 20 % des résidences princi-pales françaises sont périurbaines, et en proportion croissante.Périurbaines ? Ces constructions peuvent être édifiées hors de touteréférence à un centre urbain notable. Ainsi, les communes dulittoral français (4 % du territoire, peu fourni en grandes villes)reçoivent 15 % de la construction de logements14.

Jean-Michel Roux

13. Enquête sur le prix des terrains à bâtir, ministère de l’Équipement, des Transports etdu Logement, 2011. Accessoirement, on observe que le périurbain tempère ainsi les haussesspéculatives du marché immobilier, liées en France aux envolées dérégulées de terrains à bâtircentraux.

14. Entre 1986 et 2006. Voir Cristina Garcez (sous la dir. de), le Littoral en projets,Marseille, Parenthèses, 2009.

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Les emplois et les activités suivent, mais de loin seulement.Après quatre décennies, on attend toujours les opérations d’amé-nagement d’une certaine ampleur, pouvant servir de modèles à unurbanisme de maisons, c’est-à-dire de quartiers jardins dotés deservices de proximité et d’espaces collectifs, aptes à d’éventuellesdensifications à long terme.

La mobilité et son prix

Bien des urbanistes centripètes placent des espoirs dans unpétrole cher, conséquence de la raréfaction des ressources et de lalutte contre le réchauffement climatique. Je dois m’aventurer horsde ma compétence directe, mais comprenons qu’il n’y a pas sur cesujet d’expertise globale : pas plus pour l’énergie que pour l’éco-nomie tout entière, il n’existe d’arrangement optimum du territoire.Et encore : pour qui et pour quoi un optimum ?

Toutefois, il me semble qu’un consensus émerge, au fil d’obser-vations quotidiennes et de synthèses savantes, nationales et inter-nationales. J’énonce avec prudence : 1) les mobilités et lesconsommations énergétiques doivent être examinées tous motifs etmodes confondus ; 2) les habitants et les entreprises savent mettreen place des stratégies pour limiter leurs dépenses en temps et enargent, quelle que soit leur localisation dans l’espace urbain ; 3) lespratiques de déplacement sont fortement liées aux catégories derevenus et aux comportements socioculturels ; 4) la chronologie despolitiques énergétiques n’est pas celle des politiques urbaines.Autrement dit, il faut se garder d’analogies simples entre distanceau centre-ville et intensité des contraintes. Comme je ne peuxcouvrir des sujets aussi complexes, j’invite les lecteurs à se penchersur une bibliographie qui enfle constamment, et dont une desmissions est d’endiguer les idées reçues15.

On peut au moins esquisser le portrait-robot du ménage sub -urbain pavillonnaire. Il a fait un choix qu’il estime raisonnable. Sonvoisinage est assez homogène, mais il existe toutes sortes de voisi-nages, qui s’organisent en même temps qu’ils se pérennisent. Sesdéplacements contraints (habitat/travail) augmentent très lente-ment en distance, et sont presque stables en temps (depuis 1994).Il a beaucoup recours à sa (ses) voiture(s), mais le prix de l’essence

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15. Par exemple, sur les mérites comparés de la voiture et des transports en commun. VoirJean-Pierre Orfeuil, Une approche laïque de la mobilité, Paris, Descartes & Cie, 2008.

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n’augmente pas au regard de ses revenus malgré des oscillationsinquiétantes, tandis que la consommation des véhicules diminue. Ilse déplace beaucoup en semaine, mais il reste chez lui le dimanche,de sorte que le kilométrage se rééquilibre partiellement, entrecentraux et périurbains. Sa maison se prête à des transformationsqui ailleurs mobiliseraient les lourdes mécaniques des copropriétésou des grands bailleurs. Il peut envisager de travailler chez lui, àdistance de son employeur. Il peut même cultiver son jardin… Etil souffre d’un lourd déficit d’équipements et d’espaces collectifs,dans une urbanisation faite au rabais. Rien qui l’incite vraiment àse recentrer, sinon dans le parcours résidentiel d’une vie. Mais dequoi réclamer. Ajoutons que les rôles respectifs des territoiresurbains, et leurs complémentarités, sont parfaitement visibles dansles données démographiques et d’emplois : les périphériesaccueillent les familles avec enfants et les activités encombrantes,dont l’industrie.

Nulle part en Europe ce constat n’est apaisé, parce qu’il met àmal un modèle urbain multiséculaire. Nulle part on ne trouve derecettes parfaitement satisfaisantes pour gérer le périurbain. Maisc’est en France qu’on mélange exécration et déni de réalité, au pointde s’interdire à la fois le laisser faire et l’élaboration d’une politique.Quand nous cessons de maudire l’étalement urbain, nous prêtonsattention, savoir faire et financement aux projets centraux des agglo-mérations qui lui sont parfaitement étrangers.

Si on passe la frontière (plutôt au nord et à l’est pour êtrehonnête) le paysage change, dans des conditions socio-économiquesqui ne sont guère différentes : de grands projets périphériques, uncontrôle et un aménagement des périmètres inconstructibles, desmodèles de production du nouveau tissu urbain, sous forme deplans guides à l’échelle de quartiers, des produits immobiliers à basede maisons, des équipements adaptés aux faibles densités, unefiscalité, une meilleure maîtrise des prix fonciers… Une énuméra-tion technique d’exemples localisés serait fastidieuse, mais chacunpeut trouver, en voyageant, des signes d’une participation collectiveà la gestion du nouvel espace urbain, c’est-à-dire du caractèrepotentiellement démocratique de la suburbia16.

Visitons l’Allemagne, puisque c’est la mode : ce n’est pas seule-ment le règlement qui maîtrise l’affichage dans les entrées de villes,

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16. Mentionné depuis longtemps aux États-Unis. Voir par exemple Herbert Gans, Peopleand Plans, New York, Basic Books, 1968.

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ni qui impose des fleurs aux balcons des maisons, ni qui oblige lescultivateurs à gérer leur paysage jusqu’au ras des maisons. Etd’ailleurs, il est facile de combiner, dans un pays aussi ordonné quela Suisse, des constructions très disséminées (tout se voit bien enmontagne), avec une campagne traitée spontanément comme unparc. Et la lutte de villages anglais contre le passage de l’Eurostaraurait dû être observée avec moins de ricanements. D’où provientcette spécificité française ? Il faut je crois revenir en arrière.

La fin des Temps modernes

Pendant les trois décennies d’après-guerre, la France a vécusous deux régimes : ministère de la Reconstruction puis de l’Équi-pement pour les villes, de l’Agriculture pour les campagnes. LaDatar et le Commissariat au Plan liaient le tout. On a oublié que desministres ou des hauts fonctionnaires, relevant de gouvernementstout à fait modérés, déclaraient la guerre aux rues et aux places desvilles historiques, ou aux toits en pente, ou aux haies dans leschamps, ou vantaient au contraire une complète standardisation deslogements. Pourtant la chose s’est vue, communément. Les TrenteGlorieuses, c’est le plein-emploi, mais aussi la campagne passée ausarcloir par le remembrement, et encore les grands ensembles d’ha-bitation (les ZUP), fruits du croisement entre inventions financières(les prêts HLM), industrialisation lourde (les grands du BTP) etarchitectes du Mouvement moderne (les tours et les barres). Ilconvenait alors d’éradiquer le territoire du passé. De telles poli-tiques ne sont pas inconnues ailleurs, mais elles ont été appliquéesen France avec une ampleur particulière.

Au début des années 1970, les grands réseaux d’infrastructuresétaient à peu près dessinés, sinon réalisés. La politique agricolecommune était en place. La politique industrielle publique allait êtreébranlée par les chocs pétroliers. Le malaise des quartiers neufsdevenait patent, alors que leur construction n’était même pasachevée17. L’influence de l’État central déclinait lentement, dumoins en ce qui concerne l’Aménagement du territoire. Il fallait

Pour en finir avec le périurbain

17. On surestime aujourd’hui l’état de grâce et l’unanimité dont auraient bénéficié lesgrands ensembles, rassemblant dans le même idéal des classes sociales variées. La sarcellitecomme maladie est diagnostiquée par la grande presse avant 1960, et ce qui n’était pas encorela région Île-de-France lance un programme de recherche sur le sujet en 1971. Quelques quar-tiers emblématiques (la Ville Neuve de Grenoble, la Grande Borne à Grigny) eurent leurs habi-tants militants, mais pour peu de temps. Voir Thibault Tellier, le Temps des HLM. 1945-1975,Paris, Autrement, 2008.

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changer. Alors, les phénomènes qu’on nomme périurbains sontapparus, non pas hors contrôle (le droit réglementaire des sols étaitrespecté), mais sans permission. Les planificateurs boudent encore.

Il n’y aura pas de reconcentration des villes, du moins dans unavenir prévisible. Tous les pays d’Europe ont réformé leurs collec-tivités locales pour en tenir compte. En pratique, ils ont créé degrandes communes, pour organiser des pondérations techniques,financières et fiscales entre centres et périphéries. On peut avoirraison contre tous, mais en l’occurrence la France est simplementattardée. La décentralisation de 1982 a saupoudré des pouvoirs surune carte gelée. De là, beaucoup de confusion dans les responsa-bilités, comme chacun sait, mais surtout des principautés querel-leuses et jalouses de leur autorité. Une association de voisinagedevient dangereuse. La participation des simples citoyens aux déci-sions est suspecte. Les intercommunalités restent faibles, à denotables exceptions près. Et l’État, ayant abandonné le territoire ily a trente ans, y revient sans projet, mais simplement pour mettrede l’ordre. Quelques dossiers brûlants, par exemple le Grand Paris(qui a aussi sa périphérie), devraient être l’occasion de revenir surles institutions.

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