38
Pas de formation citoyenne sans action sur le réel, le Budget Participatif de Porto Alegre Réseau Capacitation Citoyenne Etude-Action pour la formation des habitants à la gestion urbaine et sociale de la ville Réseau Capacitation Citoyenne Le Budget Participatif de Porto Alegre

Réseau Capacitation Citoyennebase.socioeco.org/docs/budget_participatif_guide.pdf · orto Alegre est une ville de 1 500 000 habitants du sud du Brésil. En 1988, le Parti des Travailleurs

  • Upload
    others

  • View
    2

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

  • Pas de formationcitoyenne sansaction sur le réel,

    le Budget Participatif de Porto Alegre

    Réseau Capacitation CitoyenneEtude-Action pour la formation des habitants à la gestion urbaine et sociale de la ville

    Rés

    eau

    Cap

    acit

    atio

    n C

    itoy

    enne

    Le

    Bud

    get

    Par

    tici

    pati

    f de

    Po

    rto

    Ale

    gre

  • Préambule 1

    Le Budget Participatif de Porto Alegre 5

    Le Budget Participatif et le réseau Capacitation Citoyenne 9

    Sujets abordés 11Santé, Culture, Développement de la ville…,le Budget Participatif touche tous lesdomaines de la vie en ville

    Publics 13Une démarche qui s’adresse à tous les habitants

    Echelles de territoire 16Une pratique démocratique qui, partant duquartier, permet peu à peu à l’habitant de se sentir concerné par l’ensemble de la ville

    Règles 21Co-élaborées par les habitants et le maire,elles sont révisables chaque année

    Sommaire

  • Influence sur l'action publique 23Le Budget Participatif bouscule profondémentles relations maire - habitants - services

    Transformation des participants 27La transformation des conditions de viequotidienne des plus pauvres s’accompagned’une transformation psychologique et sociale

  • 1

    Réseau CapacitationCitoyenne

    Préambule

    C e livret fait partie d’une série. Il est une descartes d’identité du réseau constitué dansle cadre de notre étude-action. Celle-cimet en relation, pour qu’elles se fécondent récipro-quement, des expériences de formation à la gestionurbaine et sociale de la ville, menées au Brésil, auSénégal et en France.

    A Fortaleza au Brésil, en réponse à une demanded’organisations de base, le “Cearah Periferia”, uneONG locale, a mis en place une formation de leadersde quartiers populaires pour leur permettre de deve-nir des interlocuteurs crédibles sur les questionsurbaines.

  • 2

    Au Sénégal, des associations, notamment les“Associations Sportives et Culturelles”, qui ont prisen charge une part importante des responsabilitésqui devraient être assumées par l’action publique, seregroupent pour créer autour du “CERPAC” uncentre de ressources, de formation et d’échanges.

    En France, les populations engagées dans des pro-cessus collectifs ne formulent que rarement desdemandes explicites de “formation”. En revanche, cer-taines s’interrogent sur les moyens qui favorisent etaméliorent leurs capacités à intervenir et participerà l’action collective, sur les chemins qui permettentà l’individu isolé d’être mieux armé pour pouvoirintervenir avec d’autres dans un projet social.

    Nous n’avons pas trouvé dans la terminologie fran-çaise le mot qui corresponde à ce type de proces-sus.Mais les Brésiliens et les Sénégalais utilisent pourcela le terme de “capacitation citoyenne”, c’est-à-direune démarche qui permet aux gens de renforcer etdévelopper leurs capacités à exercer leur rôle decitoyen.

  • 3

    C’est donc à partir de cette notion que nous avonsquestionné des dispositifs de participation et de for-mation au Brésil, au Sénégal et en France pour révé-ler ce qui, dans leur mode d’action, contribue à une“capacitation citoyenne” pour améliorer les capaci-tés des participants à transformer leur rapport per-sonnel à l’implication dans des projets collectifs, voiremême dans la gestion urbaine globale.

    Des travaux préalables nous ont permis d’élaborerune série de questions :- rencontres avec des dispositifs dans l’agglomération

    grenobloise et dans le Nord-Pas-de-Calais ;- séminaire à Guédiawaye dans la banlieue de Dakar,

    avec des acteurs du Nord-Pas-de-Calais, de l’ag-glomération de Grenoble, de Fortaleza, de PortoAlegre ;

    - auto-évaluations de “Ville et ParticipationCitoyenne” à Dunkerque et de “l’Atelier de TravailUrbain” à Grande-Synthe.

    Nous avons ensuite rencontré les différents disposi-tifs deux ou trois fois, sur la base de cette liste dequestions. La série de livrets est le résultat de ce tra-vail mené par chacun des groupes rencontrés.

  • 4

    Après une présentation succincte de leur expérience,son contexte, son origine, son fonctionnement, lepublic touché…, une seconde partie restitue leursdébats à partir de la grille de lecture, sans interpré-tation.

    Les participants à l’élaboration de ces livrets sont dif-férents selon les dispositifs étudiés. Ce sont parfoistous les participants du dispositif, plus souventquelques volontaires. Ils rassemblent quelques foisaussi des élus ou des professionnels, mais plus sou-vent seulement des “habitants” ou des membres d’as-sociations.

    Un livret final, élaboré après une rencontre généralede représentants de tous les dispositifs étudiés, pro-pose une synthèse et une interprétation concluantl’étude-action.

    La coordination de l’étude-action

    ���

  • 5

    Le Budget Participatif de Porto Alegre

    P orto Alegre est une ville de1 500 000 habitants du sud duBrésil. En 1988, le Parti desTravailleurs (PT) se présente aux élec-tions municipales, avec un double mes-sage politique, en direction des pluspauvres :« On veut améliorer vos conditions devie, mais on le fera avec vous. C’est vousqui nous direz ce que vous voulez. »

    Dès que le nouveau maire du PT,OlivioDutra, est élu, les communautés debase font le siège de la mairie, récla-mant les investissements indispen-sables pour leurs quartiers. La nouvelleéquipe au pouvoir à la mairie, qui n’aaucune expérience de gestion,découvre une situation financièrecatastrophique, puisque 98% du budgetsont absorbés par les salaires des fonc-tionnaires, ne laissant aucune marge demanœuvre pour d’autres choix, en par-ticulier pour intervenir en directiondes plus pauvres. Devant ces grandesdifficultés, le maire joue cartes sur

  • 6

    table avec les communautés de base. Illeur expose les difficultés budgétaireset ensemble ils cherchent à sortir decette impasse. La première urgencepour la mairie ne consiste pas à répar-tir les miettes disponibles, mais àaccroître de manière substantielle lesrecettes, tout en restant fidèle à sapriorité politique qui est de gérer laville au profit des classes pauvres.C’estce premier travail en commun avec lapopulation qui jette les bases de ce quideviendra le Budget Participatif.

    Le Budget Participatif, qui s’est rôdédepuis douze ans, consiste en l’élabo-ration du budget de la ville par les habi-tants, en lien avec le maire et ses ser-vices. Le déroulement de l’exerciceprésente d’une année à l’autre lesmêmes caractéristiques.

    En mars, le maire fait le tour de cha-cun des 16 grands quartiers de la villeet rencontre la population au cours degrandes réunions qui regroupent sou-

  • 7

    vent chacune plus de mille personnes.Il présente l’état d’avancement des réa-lisations, les prévisions de travauxpour l’année. Chaque habitant qui leveut peut prendre la parole, l’interpel-ler et lui demander pourquoi telle réa-lisation qui avait été prévue a pris duretard.

    D’avril à juin, les habitants s’organisententre eux, se réunissent, débattent, etavec l’aide de délégués qu’ils élisent,définissent les besoins de leur quartier.C’est une phase assez intense, au boutde laquelle ils doivent avoir déterminéleurs priorités. Elles sont ensuite trans-mises à la mairie.

    De juillet à octobre, les services de lamairie travaillent à partir de cesdemandes pour bâtir le budget de laville. Ils les chiffrent, étudient leur fai-sabilité technique et, à partir de là, éla-borent une première hypothèsebudgétaire. Au cours de cette phase,les habitants sont représentés par des

  • 8

    “conseillers du Budget Participatif”.Chaque quartier élit en juillet, pour unan, deux habitants avec un mandat trèsclair : veiller à ce que les choix deshabitants soient respectés lors del’établissement du budget. Ces nou-veaux conseillers du Budget Participatifsuivent, en août, une formation sur lesfinances publiques communales, quileur permet de discuter technique-ment avec les services. En septembreet octobre, de fréquents allers-retoursentre les services et ces conseillersaboutissent au budget final qui est offi-ciellement présenté au vote de lachambre municipale, fin novembre.

    En décembre, les habitants et le mairecorrigent éventuellement les règles duprocessus si cela s’avère utile.

  • 9

    Le Budget Participatif et le réseau Capacitation Citoyenne

    I l a paru intéressant de faire unlivret “Capacitation Citoyenne”sur le Budget Participatif dePorto Alegre, même si le travail sur celivret prend une forme un peu diffé-rente des autres. En effet, il ne nous apas été possible de l’écrire sur placeavec un aller-retour avec les habitants.Cependant, il nous a paru indispensablede le faire d’une autre manière, car lesresponsables du Budget Participatifont fortement contribué à l’élabora-tion de nos principaux concepts :

    Crèche obtenue par le Budget Participatif dans la favelaSanta Teresa au Brésil.

  • 10

    d’une part, en février 99 lors des ren-contres “Capacitation Citoyenne” àDakar auxquelles ils ont participé ;d’autre part, en novembre 99, lors duvoyage à Porto Alegre de deuxmembres de l’équipe de recherche,Martine Toulotte et Sidiki Daff, qui ontpu, avec les habitants, mesurer l’impactdu Budget Participatif.

    Il serait vain de vouloir plaquer ceschéma en France, car les données ins-titutionnelles sont très différentes. AuBrésil, le pouvoir est concentré entreles mains du maire qui représentel’exécutif. Le conseil municipal repré-sente le législatif. Les élections munici-pales qui ont lieu tous les 4 ans se pas-sent avec la présentation de deux listesdistinctes, l’une pour l’élection dumaire, l’autre pour l’élection du conseilmunicipal. Néanmoins des principesclés qui sont expérimentés à PortoAlegre peuvent être repris ici.

  • 11

    Sujets abordés Santé, Culture, Développement de la ville…, le Budget Participatif touche tous les domaines de la vie en ville

    L a mairie de Porto Alegre avaitconscience d’être dans unedémarche innovante, qui avaitbesoin de se corriger au fur et àmesure. Ainsi, au début, l’élaborationdu budget ne procédait que de laconsultation des quartiers, ce quiengendrait des effets pervers, la priseen compte des besoins élémentairesdes bidonvilles se faisant au détrimentd’une planification sur l’ensemble de laville, la participation des classesmoyennes étant très faible, et les thé-matiques transversales quasimentabsentes. Pour remédier à ces dérives,en 1994, la mairie créa en plus desseize commissions géographiques, cinqcommissions thématiques, ouvertes àtous les habitants de Porto Alegre :transports et circulation, santé et assis-tance sociale, éducation et culture,développement économique et fisca-lité, organisation de la cité et dévelop-pement urbain. Ces commissions thé-matiques comme les commissionsgéographiques élisent chacune deux

  • 12

    conseillers du Budget Participatif. Denouvelles couches sociales sont ainsivenues participer : étudiants, intellec-tuels, syndicalistes, artisans, commer-çants.

    De plus, en dehors de la démarcheBudget Participatif, la mairie a ouvertde nombreux autres espaces de parti-cipation, sur la planification, sur la cul-ture, sur la petite enfance, contre laviolence, contre les discriminations etle racisme, etc.

    À Porto Alegre, les habitants sontappelés à débattre de l’ensemble de lapolitique de la ville et à peser encontinu sur son orientation d’unemanière significative.

  • 13

    PublicsUne démarche qui s’adresse à tous les habitants

    L e Budget Participatif est ouvertà tout habitant à partir de 16ans, jeune, vieux, mère defamille, étudiant, chômeur, cadre, syn-dicaliste, etc. La première réunion plé-nière de l’année a lieu lorsque le mairevient sur le quartier et dans les com-missions thématiques, en mars. Cesassemblées de plus de mille personnessont très animées. On y débat vigou-reusement.

    La population d’un quartier réunie en séance plénière duBudget Participatif. - in “Quand les habitants gèrentvraiment leur ville”Tarso Genro, Ubiratan de Souza -

  • 14

    Les habitants votent aussi pour dési-gner leurs délégués, (un pour dix) quicoordonneront les discussions, et lesaideront à définir leurs demandes.

    Une personne égale une voix, que lapersonne soit “simple habitant” ouorganisée au sein d’un parti, d’un syn-dicat ou d’une association. Il n’y aaucune voix prépondérante… Si quel-qu’un veut obtenir un type de travaux,il doit faire venir ses voisins auxréunions et les convaincre du bienfondé de sa demande pour avoirquelque chance qu’elle soit retenue auterme du processus. Cette dispositionsuscite une importante mobilisationchez les habitants et la question de laparticipation ne se pose plus.

    Une enquête réalisée en 1998 recen-sait 118 000 personnes présentes auxplénières.Cette étude assez fine dressele profil des participants selon la com-mission fréquentée ; ce qui corroboreles différences selon le type de com-

  • 15

    missions dans lesquelles chacun s’in-vestit. Dans les quartiers, il y a plus depersonnes ayant un faible niveau derevenus, un niveau d’instruction dupremier degré, plus de travailleursmanuels sans qualification. Dans lacommission thématique Education etCulture, par exemple, on trouve plusde 50% de personnes ayant un niveaud’instruction élevé. Cette tendancen’est cependant pas un réel clivage.

  • 16

    Echelles de territoireUne pratique démocratique qui, partant du quartier, permet peu à peu à l’habitant de se sentir concerné par l’ensemble de la ville

    A u début ceux qui viennentspontanément sont souventlà pour résoudre leur propreproblème personnel, installation del’électricité dans leur maison, légalisa-tion foncière de leur terrain, asphaltagede leur rue pour sortir de la boue…Le mécanisme du Budget Participatifqui donne droit à un délégué pour dixpersonnes présentes les incite forte-ment à discuter avec leurs voisins et àles encourager à venir à la réunion. Ily a déjà à ce stade un début de socia-lisation de son problème personnel, quis’approfondit dans la phase suivante oùle quartier doit définir ses priorités. Enargumentant, chacun peut expliqueraux autres le bien fondé de sesattentes, en écoutant, chacun découvreles besoins des autres. Cette mise encommun s’effectue au niveau du quar-tier.

    Mais c’est surtout dans la phase ulté-rieure de discussion du budget detoute la ville que se fait le plus grand

  • 17

    apprentissage de la citoyenneté. Lesdemandes issues des quartiers et quiont toute leur légitimité interne ontété recueillies en juillet par les servicesde la mairie. En septembre, au momentoù est élaborée une hypothèse budgé-taire à partir de ce recueil dedemandes, il apparaît clairement queles recettes budgétaires ne peuventcouvrir la totalité des demandes. Il fautdonc dégager des priorités dans cettepremière liste.

    Livre sur le processus écrit par Tarso Genro et Ubiratande Souza, maire et responsable du Budget Participatif

  • 18

    Ce n’est pas le maire tout seul quieffectue ce travail de choix. Les critèresde priorité ont été arrêtés au cours dediscussions qui ont eu lieu endécembre de l’année précédente, entrela mairie et les conseillers du BudgetParticipatif, représentant les habitants.Ce sont ces critères qui sont appliqués.Francisco, délégué de quartier, venuprésenter l’expérience de Porto Alegredans plusieurs villes françaises, mon-trait très fièrement, dans le cahier desinvestissements retenus pour l’année1999, la page où était inscrite la réfec-tion de la place de son quartier, etajoutait :« ça fait dix ans que nous la demandons,mais nous avons découvert qu’il y avaitdes habitants plus dans le besoin quenous, nous avons dû attendre notre touret nous avons fini par obtenir gain decause »

    On passe ainsi d’une revendicationlégitime personnelle à la découvertedes besoins de l’entourage, puis à la

  • 19

    prise de conscience de la relativité deces besoins par rapport à ceux desautres citadins.

    Pour que les conseillers du BudgetParticipatif élus chaque année par lesassemblées populaires puissent effec-tuer leur mission, en dépassant lasimple vision de leur propre territoire,dès leur élection, en juillet, le “bus duBudget Participatif” les emmène danstoute la ville à la rencontre de ceuxqu’ils ne connaissent pas. Zelda,nouvelle conseillère du BudgetParticipatif du quartier Parténon :« Je suis mère de famille nombreuse, jen’étais jamais sortie de mon quartier. J’aidécouvert ma ville avec le BudgetParticipatif. Maintenant, par exemple, si jevois en ville un arbre tombé dans une rue,je me sens concernée et j’avertis la mairiepour qu’elle l’enlève. »

    Mais, il y a plus. Les habitants de PortoAlegre, d’une manière assez para-doxale sont amenés à travers ce

  • 20

    processus à se situer dans le systèmesocio-économique global par-delà lesfrontières de la ville. Martine Toulotteet Sidiki Daff ont pu plusieurs fois levérifier en novembre. Sur le terrainavec des habitants qui leur montraientcomment leur bidonville (favela) avaitété transformé par le BudgetParticipatif, ils ont découvert que cesderniers supportaient d’autant plus malleur situation de misère, sans boulot,sans ressources, que leur environne-ment immédiat s’était amélioré.À la finde cette visite, ces habitants ont tenuà les emmener à une manifestationdénonçant la politique néo-libéraled’Enrique Cardoso (président duBrésil) qu’ils accusent d’être respon-sable de leur misère.

    Le processus du Budget Participatifimplique directement que les habitantsse situent à plusieurs niveaux de terri-toire, voisinage, quartier, ville,mais indi-rectement développe un niveau deconscience plus global.

  • 21

    RèglesCo-élaborées par les habitants et le maire,

    elles sont révisables chaque année

    L a démarche mise en œuvre àPorto Alegre passe toujourspar de longs débats avec lapopulation, en décembre, et chaquepoint d’accord est codifié, écrit. Cesrègles, coproduites par la mairie et lapopulation représentée par lesconseillers du Budget Participatif, éluschaque année, sont exposées dans uneplaquette : “Règlement du BudgetParticipatif”.Y sont décrits les modesde désignation des délégués et desconseillers du Budget Participatif, et lescritères de priorité des investisse-ments retenus. Par exemple, pour2000, ces critères étaient : la popula-tion du quartier, la carence en équipe-ments, la priorité choisie par le quar-tier.

    En mars, lorsque le maire se rend danschaque quartier, il présente ces nou-velles règles à l’assemblée plénièred’habitants et remet à chacun la pla-quette. Ces règles sont valables pourun an, durée au cours de laquelle elles

  • 22

    sont strictement applicables, et ne peu-vent être contestées ni par les habi-tants, ni par la mairie. En fin d’année, cecadre contraignant est revu en fonc-tion des critiques des uns et desautres.

    D’autres documents écrits permettentaux habitants d’exercer leur fonctionde contrôle, en particulier le cahierdes investissements. Chaque année,après l’adoption du Budget ennovembre, les services de la mairieétablissent un cahier qui détaille parquartier d’une manière lisible et pré-cise les chantiers programmés, le coûtprévu, l’échéance. Ce cahier est aussiremis à chaque participant par lemaire, en mars, lors de la réunion plé-nière. C’est en se fondant sur ce docu-ment que les habitants peuvent inter-peller le maire lorsque lesengagements ne sont pas respectés.

  • 23

    Influence sur l'action publique

    Le Budget Participatif bouscule profondément les relations maire - habitants - services

    L a décision de mettre en placele Budget Participatif part dumaire qui, lors de sa campagnemunicipale, s’est engagé à gérer la villeavec les habitants.Dès son élection, lesassociations d’habitants,échaudées parles promesses non tenues du précé-dent maire, se sont manifestées pourl’obliger à tenir ses engagements. Lavolonté municipale prend appui surcette forte organisation des commu-nautés de base.Néanmoins, elle trouve

    Transfert de Vila Cai-Cai. Cette photo montre l'état de laVila, une des plus misérables de la ville, dans le quartierde Guaîba …/…

  • 24

    sa source dans la pensée politique duParti des Travailleurs de Porto Alegre,qui a comme objectif principal de revi-vifier la démocratie. Le maire va donccréer peu à peu divers outils qui pla-cent les citoyens au centre des choix,son rôle étant d’assurer que les ser-vices de la mairie fonctionnent en res-pectant leurs volontés.

    Selon les phases du budget, les habi-tants, le maire, les services sont dansdes rapports différents.

    En mars, lorsque le maire vient sur lesquartiers avec les responsables muni-cipaux, il vient rendre des comptes auxhabitants.

    Pendant les trois mois qui suivent, leshabitants, pour définir leurs priorités,se réunissent entre eux, sans per-sonne de la mairie. En revanche ilspeuvent ponctuellement inviter lesservices pour avoir un certainnombre d’informations.

  • 25

    Fin juin, lorsqu’ils se sont mis d’accordsur leurs priorités pour l’année, ilsremplissent une feuille type, surlaquelle ils indiquent précisément cequ’ils veulent et la remettent à la mai-rie qui la dispatche dans les services.Ces derniers ne construisent le bud-get qu’à partir de ces demandes quiremontent de la base. C’est un moded’élaboration du budget complète-ment nouveau.

    En septembre, il faut faire des choix àl’intérieur d’une première hypothèsebudgétaire, qui dépasse les recettesdisponibles.Ces choix ne sont pas faitspar le maire ou les services munici-paux,mais par l’application des critèresbudgétaires déterminés l’année précé-dente par la population, après débatavec le maire. Les conseillers du BudgetParticipatif, représentants des assem-blées populaires qui ont établi les pre-mières demandes, veillent au respectde cette règle par les services.

  • 26

    Les relations maire - habitants - ser-vices sont complètement bouleverséespar rapport à un schéma classique.Comme le dit Teresa dans une vidéotournée en 1998 :« Maintenant, c’est nous qui définissons cequi doit être réalisé. C’est moi, en tant queconseillère du Budget Participatif de monquartier, qui ai surveillé la manière dontle camion de la mairie faisait les trottoirschez nous ».

    Les représentants des habitants fontmême partie avec le maire, le secré-tariat général et le syndicat desemployés municipaux d’une commis-sion de gestion du personnel qui dis-cute de la création et de la répartitiondes postes au sein de la mairie. Etcomme l’a dit Marila, en novembre :« Certains petits chefs, qui autrefois nequittaient pas leur bureau et nous regar-daient de haut, sont maintenant présentsdans les favelas pour discuter avec nous dece que nous voulons ».

  • 27

    Transformation des participantsLa transformation des conditions de vie quotidienne des plus pauvres

    s’accompagne d’une transformation psychologique et sociale

    L es habitants participent, parcequ’au fil des années ils ont putester la crédibilité de ladémarche. Au début, en 1988, ilsétaient environ 700 pleins d’enthou-siasme, vite refroidis par l’étroitesse dela marge financière disponible enregard de l’importance de leursbesoins.

    …/… Les habitants de Vila Cai-Cai ont été transférésvers le quartier de Cavalhada, dans un secteur déjàurbanisé : les nouvelles constructions. - in “Quand leshabitants gèrent vraiment leur ville” Tarso Genro,Ubiratan de Souza -

  • 28

    Aussi, les deux années suivantes, cechiffre est tombé à 400, puis à 200.Unefois de plus, ils ont eu l’impressiond’avoir été bernés. Ce n’est que pro-gressivement, en voyant sortir de terrece qu’ils avaient demandé, qu’ils ontcommencé à venir de plus en plusnombreux, 10 000, 20 000, puis plus de100 000…

    Sur le terrain, on découvre que le pre-mier moteur de leur engagement est latransformation de leurs conditions devie. Les habitants rencontrés ennovembre, faisant visiter leur quartier,ancienne “favela” (bidonville) édifiéesur les collines, ont montré fièrementaux deux membres de l’équipeCapacitation Citoyenne les améliora-tions obtenues par le BudgetParticipatif. La rue asphaltée qui a rem-placé le chemin boueux dégringolantjusqu’à la ville, le camion d’ordures quivient vider les poubelles, le facteur quipasse et leur porte du courrier, la

  • 29

    crèche avec ses enfants et leur petittablier de couleur.

    Mais ce serait une grave erreur desous-estimer les profonds change-ments psychologiques que ce proces-sus a aussi provoqué chez les habitantsde Porto Alegre. La première chose quisaute aux yeux et qui s’entend partout,c’est la dignité retrouvée. Felipe :« Avant, nous nous sentions comme desmendiants, chaque fois que nous allionsréclamer quelque chose à la mairie.Maintenant, nous sommes respec-tés… Dans mon quartier, l’autre jour, il ya une vieille dame, analphabète, qui s’estlevée et qui a dit au maire “aujourd’hui, jesuis quelqu’un”. Cela m’a beaucoup ému.Si une personne éprouve le besoin de diretout fort, dans une grande assemblée, unetelle chose, cela veut dire qu’il se passepour elle quelque chose de trèsimportant ».

    Par-delà ce sentiment de fierté parta-gée par beaucoup, le Budget Participatif

  • 30

    a rendu les habitants citoyens et direc-tement concernés par la gestion de laville :

    « Aujourd’hui, nous savons comment fonc-tionne la machine budgétaire. Ce qui étaitavant pour nous un mot barbare estdevenu une réalité… Nous avons comprisque nos impôts servent à financer les tra-vaux dans nos quartiers… Le BudgetParticipatif est à nous. Nous ne laisseronspersonne nous l’enlever. »

    ���

  • 31

    Participants rencontrés qui ont permis laproduction de ce livret :Andre, Angelica, Felipe, Luciano, Marila, Sérgio, Teresa,Zelda.

    Rédaction du livret : Martine Toulotte

    Contacts : Sidiki Abdoul DaffTél./Fax: (00) 221 837 12 10

    Réseau e mail : [email protected]“Démocratiserradicalement Jean Blaise Picheralla démocratie” Tél./Fax: 33(0)3 28 65 17 99

    e mail : [email protected]

    Martine ToulotteTél./Fax: 33(0)4 76 51 85 88

    e mail : [email protected]

    livre : “Quand les habitants gèrent vraiment leur ville”Tarso Genro, Ubiratan de Souza. 35f + frais d’envoi 18fEdition Charles Léopold Mayer 35 rue St Sabin 75011 Paris

    vidéo : “Nous, habitants de Porto Alegre,décidons ce qui est bon pour notre ville”se la procurer auprès de Martine Toulotte

  • 32

    L’équipe du réseau Capacitation Citoyenne :

    AGUR (Agence d’Urbanisme Jean Ysebaertde la Région Flandres Dunkerque) 38, quai des Hollandaise-mail : [email protected] 59 140 DunkerqueTél. : 33(0)3 28 58 06 30 Fax : 33(0)3 28 59 04 27

    arpenteurs Pierre Maheye-mail : [email protected] 9, place des EcrinsTél. : 33(0)4 76 53 19 29 38 600 FontaineFax : 33(0)4 76 53 16 78

    AURG (Agence d’Urbanisme Martine Toulottede la Région Grenobloise) 21, rue Lesdiguièrese-mail : [email protected] 38 000 GrenobleTél. : 33(0)4 76 28 86 00 Fax : 33(0)4 76 28 86 12

    CERPAC (Centre d'Etudes et de Recherches Populaires pour l'Action Citoyenne) Sidiki Abdoul DaffTél : (00)22/18 37 12 10 e-mail : [email protected]

    Periferia Patrick Bodarte-mail : [email protected] 45, rue de HollandeTél./Fax: (00)32/2 544 07 93 B-1060 BRUXELLES

    Conception graphique et réalisation : © « arpenteurs » 2000Toute reproduction autorisée sous réserve de citer la source.

  • Réseau Capacitation CitoyenneEtude-Action pour la formation des habitants à la gestion urbaine et sociale de la ville

    Financement de l’Etude-Action :Délégation Interministérielle à la Ville, UNESCO, RégionNord-Pas-de-Calais, Communauté Urbaine de Dunkerque.

    Financement de l’impression :Région Nord-Pas-de-Calais, Communauté Urbaine de Dunkerque,Agence d’Urbanisme de la Région Flandres Dunkerque.