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Numéro 105, Février 2018 BILAN DE LA TROISIÈME RENCONTRE DU RÉSEAU SYNDICAL INTERNATIONAL Du jeudi 25 au dimanche 28 janvier, près de 300 syndicalistes représentant une cinquantaine d'organisations de différents continents retrouvé-e- près de Madrid. Le Réseau syndical international y tenait sa troisième rencontre plénière, après Saint- Denis en 2013 et Sao Paulo en 2015. L'appel du Réseau a été actualisé ; une journée de travail était consacrée aux femmes : violences sexistes, machisme dans le mouvement syndical, 8 mars, avortement, économie féministe, précarité et inégalités, etc. Ont également été abordées les discriminations envers les LGBT. Nous avons aussi poursuivi les réflexions sur différents thèmes transversaux : autogestion et contrôle ouvrier, migrations, répression envers les mouvements sociaux et colonialisme. Diverses motions de soutiens à des luttes syndicales et populaires ont été adoptées (Kurdistan, Turquie, Iran, Sahara, Catalogne, Syrie, Soudan, Mexique...). 1

RÉSEAU SYNDICAL INTERNATIONALmanifestation pacifique organisée par le Snategs à Alger le 20 janvier. On ne peut que constater un durcissement de l'attitude du pouvoir algérien

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Numéro 105, Février 2018

BILAN DE LA TROISIÈME RENCONTRE DU

RÉSEAU SYNDICAL INTERNATIONALDu jeudi 25 au dimanche 28 janvier, près de 300 syndicalistes représentant unecinquantaine d'organisations de différents continents retrouvé-e- près de Madrid.

Le Réseau syndical international y tenait satroisième rencontre plénière, après Saint-Denis en 2013 et Sao Paulo en 2015.L'appel du Réseau a été actualisé ; unejournée de travail était consacrée auxfemmes : violences sexistes, machismedans le mouvement syndical, 8 mars,avortement, économie féministe, précaritéet inégalités, etc. Ont également étéabordées les discriminations envers les

LGBT. Nous avons aussi poursuivi lesréflexions sur différents thèmestransversaux : autogestion et contrôleouvrier, migrations, répression envers lesmouvements sociaux et colonialisme.Diverses motions de soutiens à des luttessyndicales et populaires ont été adoptées(Kurdistan, Turquie, Iran, Sahara,Catalogne, Syrie, Soudan, Mexique...).

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Ces troisièmes rencontres ont permisde passer un cap dans le travail parsecteurs professionnels ; dans certainscas, c'est la suite d'un travail entamédepuis des années, dans d'autres c'est ledébut, mais de nombreuses réunionssectorielles se sont tenues : Réseau railsans frontières, éducation, fonctionpublique, santé, commerce, centresd'appel, métallurgie/automobile, transportaérien, etc.

Notre Réseau international sera utile si nousle faisons vivre, et notamment dans chacunde nos secteurs professionnels ; c'est lamême logique qu'au plan local ou national,nous voulons un syndicalisme qui reposesur les collectifs de base !

La délégation de l'Union syndicaleSolidaires était d'une constituée d'unetrentaine de camarades, issu-e-s defédérations et syndicats nationauxdivers : Sud éducation, SUD-Rail, SUDIndustrie, SUD PTT, Sud Santé sociaux, SUDCommerces et services, Solidaires Financespubliques, SUD Culture Solidaires ;le Secrétariat national et la commission

Femmes étant aussi représentés en tantque tels. L'implication dans les échanges etle travail de ces quatre jours permettentd'envisager la suite avec optimisme. Resteà concrétiser les engagements pris danschaque secteur.

Un important travail reste à réaliserpour les traductions de tous les textesen différentes langues. Il faut aussivérifier quelles organisations déjà membresdu Réseau mais absentes à ces rencontresconfirment leur engagement, et quellesorganisations jusque-là non membres maisprésentes à Madrid le rejoignent (certainesl’ont d’offres et déjà signalé).

Au plan interprofessionnel, le Réseau adécidé de convergences internationalesà plusieurs dates : 8 mars, 24 avril (datede l'incendie du Rana plaza au Bengladeshen 2013), 1er mai, 15 mai en solidaritéavec le peuple palestinien... Le soutien à lacampagne BDS est réaffirmé ; de mêmepour la participation à la journée desolidarité avec les migrant-e-s. Deuxcampagnes sont mises en avant : contre lesmultinationales d'une part, pour laréappropriation des services publics parcelles et ceux qui y travaillent et celles etceux qui les utilisent d'autre part. Nousorganiserons aussi une action syndicaleinternationale dirigée contre lerassemblement des dirigeants capitalistesqui se tient chaque année à Davos.

A l'issue de cette rencontre, un Appelinternational du Réseau a été produit. Onpeut y lire : « Nous décidons de renforcer,élargir, rendre plus efficace, un réseau dusyndicalisme offensif, de luttes,démocratique, autonome, indépendant despatrons et gouvernements, écologiste,internationaliste, construisant lechangement par les luttes collectives,combattant contre toutes formesd’oppression (machisme, racisme,homophobie, xénophobie) ».

Alors … actions !

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ALGÉRIE : DURCISSEMENT DE LA RÉPRESSIONKaddour Chouicha, coordonnateur national duSESS (Syndicat des enseignants du supérieursolidaires) organisation syndicale adhérente àla CGATA (Confédération générale autonomedes travailleurs en Algérie) a été assigné àcomparaître le 6 février dernier pour s'estêtre simplement rendu à une audition par unjuge d'instruction de Maître Salah DABOUZ,président du bureau de la LADDH (ligueAlgérienne de défense des droits de l'homme)en juillet 2016 à Ghardaïa. KaddourCHOUICHA est également le viceprésident dela LADDH.

Avec d'autres militant-es, K. Chouicha s'étaitrendu à Ghardaïa pour exprimer sa solidaritéavec Salah Dabouz. Alors qu'ils attendaientdans un café la fin de l'audience, la police lesa arrêtés au motif de « rassemblement illégalnon armé ». L'incident qui ne relevait alorsque d'un coup de pression habituel de la partde la police algérienne (dont l'une desfonctions principales est de harceler lesmilitant-es dans le pays), s'est transformé enune assignation à comparaître 17 mois plustard pour 6 personnes, dont K. Chouicha, aumotif d'« incitation à un rassemblement nonautorisé, atteinte à corps constitué et nonrespect d'une décision administrative ».Le pouvoir algérien utilise une fois de plus desprétextes à la limite du plus grand ridiculepour harceler des membres de la CGATA et dela LADDH parce qu'ils osent exprimer leuropposition au régime. Cette technique esthabituelle, elle vise à contraindre, à écrasersous des procédures longues et coûteuses lesmilitant-es et désormais, elle peut aussi servirà justifier un licenciement de syndicalistes etde défenseurs des droits de l'homme

considérés comme gênants par le pouvoir.C'est ainsi que la justice continue à s'acharnercontre des syndicalistes de la Snategs, lesyndicat autonome de la Sonalgaz, entreprisenationale de l'exploitation du gaz en Algérie.Après les procès de son président, RaoufMellal, et sa condamnation à une forteamende et à 6 mois de prison fermes, dont levéritable motif est la dénonciation par cedernier d'un scandale aux fausses factures del'entreprise et le fait qu'il ait participé àmonter un syndicat digne de ce nom dansl'entreprise, c'est le tour d'Abdelkader Kawafi,secrétaire général de ce même syndicat,d'être harcelé par le justice algérienne auxordres du pouvoir, pour motif de «harcèlement ».En mai 2017, le SNATEGS a vu son statutlégal révoqué et le Ministère du travail. Cedernier a fabriqué un faux d'assemblée dusyndicat prétendant annoncer sa dissolution.Des centaines de syndicalistes, de délégué-e-s et de représentant-e-s ont été renvoyé-e-s,harcelé-e-s et persécuté-e-s sous de faussesaccusations légales et ce pour avoir exercéleurs droits fondamentaux. Ainsi, près d'unmillier de manifestant-es ont été arrêtés et/ouviolenté-es par la police lors d'unemanifestation pacifique organisée par leSnategs à Alger le 20 janvier.On ne peut que constater un durcissement del'attitude du pouvoir algérien face auxopposant-es qui s'expriment pourtant par desmoyens légaux et pacifiques. Le 04 février, lesautorités administratives d'Alger ont interditla tenue d'une assemble constitutive dusyndicat algérien des éditeurs de la presseélectronique (SAEPE), montrant par là mêmeleur volonté de tuer dans l’œuf la constitutiond'un syndicat indépendant du pouvoir.Les membres du Réseau syndical internationalde solidarité et de luttes exigent l'arrêtimmédiat de poursuites contre les militant-esvictimes de différentes formes de harcèlementet d'entraves à l'exercice de leurs droits. Lepouvoir algérien doit cesser de se comporterde la même façon qu'une dictature grossièrequi réprime, emprisonne et tente de fairetaire par tous les moyens les oppositionsdémocratiques dans le pays.

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AUTODETERMINATION DES PEUPLES :

KANAKY LIBRE ET INDEPENDANTESouvenez-vous, en 1983 des négociations ont lieu en Nouvelle-Calédonie autour desmodalités d'un référendum d'autodétermination prévu pour 1989. Alors que lesKanaks, les habitants de l'île (47% de la population), sont au départ les seuls quidoivent être consultés, les colons français refusent de signer l'accord.

C'est le début alors de 5 ans de violence, avecen particuliers plusieurs massacres demilitants Kanaks qui culminent, il y a bientôt30 ans, le 5 mai 1988, avec l'assaut du GIGNcontre la grotte d'Ouvéa et tue 19 militantsKanaks. L'affaire sera amnistiée dès le moisde juin par les accords de Matignon ; Le 4 mai 1989 à Ouvéa, les dirigeantsindépendantistes Jean-Marie Tjibaou etYeiwéné Yeiwéné sont assassinés.Les accords de Matignon, approuvés parréférendum en 1988, prévoyaient une périodeintérimaire de 10 ans. Ils ont été suivis desaccords de Nouméa (1998), qui repoussent leréférendum d'autodétermination au plus tarden novembre 2018. Nous y sommes.35 ans ont passé, et la question resteexactement la même qu'en 1983: qui aura ledroit de voter? Comment constituer la listeélectorale? Combien d'années de présence enNouvelle-Calédonie justifient le droit dedécider de l'avenir de cette île? Qui peuttrancher les cas litigieux quand on sait que lesCommissions administratives spéciales sontcomposés d'une majorité d'anti-indépendantistes? Plusieurs fois l'ONU arappelé à l'ordre la France sur ces questions...L'USTKE (Union syndicale des travailleurskanaks et des exploités) mène la campagnepour le référendum et estime que la façondont sera traitée cette question des corpsélectoraux sera décisive, notamment pour laparticipation des un-es et des autres. Ellerappelle aussi à toutes fins utiles que lesKanaks n'ont obtenu le droit de vote que 104ans après la colonisation en 1853. Ainsi LesKanaks ne représentent maintenant plus que39% de la population totale de l'île, mais lecorps électoral devait être "gelé" en 1988. Deplus, on estime qu'un quart des Kanaks n'estpas inscrit sur les listes électorales, alorsqu'ils auraient dû y figurer automatiquement.A l'inverse, il existe 10% de cas frauduleux oulitigieux. Bref, le scrutin s'annonce serré. Tôt ou tard, la Kanaky sera indépendante.

L'Ustke, à son niveau, se bat pour cela depuislongtemps. Tout le monde le sait, même lescolons français qui ont déjà prévu que si leréférendum rejette l'accession àl'indépendance, une 2ème consultation peutêtre organisée, puis une 3ème. Ce qui se joueen ce moment, outre les questions d'orgueilpatriotique, est une tentative de gagner dutemps. Temps pendant lequel une grandepartie des profits générés en Nouvelle-Calédonie bénéficie aux colons et à lamétropole. Temps pendant lequel Parischerche à conserver une souverainetémonétaire et militaire dans l'océan Pacifique.Temps pendant lequel les Kanaks sonttoujours maltraités par la puissanceoccupante (par exemple, ils sont beaucoupplus pauvres, plus discriminés à l'embaucheou à l'accès au logement, et plus souvent misen prison, déchus de leurs droits civiques et...privés du droit de vote!).

Il est temps d'admettre qu'en Kanaky, lesKanaks sont chez eux, et que la France n'arien à faire depuis 165 ans à 17.000 kilomètrede sa métropole. Il est temps que leshabitants de cette région du monde gèrent etprofitent de ses ressources. Il est tempssurtout d'arrêter de tergiverser, d'accordindigne en accord fumeux. Kanakyindépendante. Kanaky Libre.

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MAROC : LES DAMNES DE LA MINEDepuis fin décembre 2017, la population de la ville de Jérada (Nord-Estmarocain) manifeste quotidiennement dans les rues, suite à la mort de deux mineursen décembre puis un autre en février. Un drame qui n'a fait que révéler la grogne quicouvait dans cette région pauvre que l'on appelle communément le "Maroc oublié".

Ils s’appelaient Houcine et Jedouane, deuxfrères âgés respectivement de 23 et 30 ans.Vendredi 22 décembre, ils ont trouvé la mortdans une mine désaffectée de Jérada. Lamine est fermée depuis 1998, mais leshabitant-e-s de la région continuent d’yextraire du charbon d’une façon clandestineet artisanale, sans aucune mesure desécurité, risquant ainsi leur vie.

Ces mines sauvages, on les appelle là-bas les"descenderies" ou encore les "cendriers". Cesont des trous, creusés à la main, des puitsqui donnent à la colline une allure de gruyère.Et quand le trou devient profond, parfoisjusqu’à 100 mètres, les gars descendent avecun treuil animé par un groupe électrogène. Ilsont une corde à la taille, et ils y vont enrappel. Et ils en remontent des sacs decharbon. Et parfois, les tunnels cèdent. Le 22décembre dernier, les deux frères ont éténoyés sous terre, par un torrent soudain. Etjeudi dernier un autre mineur clandestin de32 ans est mort dans un éboulement. Troisvictimes des "cendriers" en 40 jours.

La gronde couvait depuis longtemps. Ce n’estpas la première fois que des mineursclandestins périssent dans cette "mine de lamort". Depuis sa fermeture, sur l’injonctiondu FMI, plus d’une centaine de personnes yavaient laissé leur vie, selon le représentantde l’AMDH (l'Association marocaine des Droits

de l'Homme). Cette fois-ci, avec ce terrainfavorable, les contestations ont pris del’ampleur. Une révolte populaire qui fait échoà d'autres mouvements de protestation ici etlà au Maroc. De novembre 2016 à juillet2017, Al Hoceima, la ville voisine (à 270 kmdans le nord), avait marché en masse suiteau décès tragique d'un poissonnier qui s'étaitretrouvé broyé par le camion poubelle quidétruisait sa pêche, saisie par la Police . Eten octobre dernier, c'est Zagora, au sud duMaroc, qui a répliqué par « les marches de lasoif ». Victimes de la sécheresse, seshabitant-e-s avaient protesté contre la raretéde l’eau.

Promesses non tenueset mobilisation syndicale

Pourtant, afin d'enrayer la misère endémiquedans ce "Maroc oublié" où se situe Jérada, lespouvoirs publics avaient promis d'y investirplusieurs milliards de dirhams. En mars 2003,le roi du Maroc, Mohamed VI, alors endéplacement à Oujda, avait même initié uneimportante politique de développement danstoute la région de l’Oriental. Aux frontièresavec l’Algérie, cette région a longtemps vécude la contrebande. Mais depuis la fermeturedes frontières en 1994 et le durcissement descontrôles qui s’en est suivi, la précarité aaugmenté. Elle a été aggravée par l’arrêt del’activité minière à Jérada et les sécheressesrépétitives. Des promesses sans effet sur laqualité de vie d'une population survivant depetits boulots et de ces descentesquotidiennes de jeunes et moins jeunes poury soustraire pour quelques misérablesdirhams des sacs de charbon. En appui à lamobilisation populaire, le 29 décembre,quatre organisations syndicales ( UMT -Confédération générale du travail – CDT -Fédération générale du travail, FDT, et laFédération nationale de l’Enseignement, FNE)

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ont appelé à une grève générale. À l’instar dela population, qui est descenduespontanément dans la rue, ils demandent« une alternative économique » à cette régionmarginalisée. Pour les syndicats qui ontappelé à cette grève, Jérada n’est passeulement une ville déshéritée. C’est tout unsymbole. « C’est dans cette ville minière quefût créé, en 1946, le premier bureau syndical

au Maroc, sous la houlette de la CGTfrançaise », explique un responsable syndical.Parmi les revendications urgences mises enavant par l'intersyndicale : l’exigence d'unemploi pour les jeunes de la ville, la baissedes factures d'eau et de l'électricité et letraitement pour les anciens mineurs victimesde silicose. Mobilisation à suivre donc. Unemobilisation qui n'est pas prête, en tout cas,de s'essouffler tant la colère est profonde.

PALESTINE : INITIATIVE SYNDICALELe réseau syndical européen est une plate-forme européenne transnationale desolidarité avec le peuple palestinien. Il permet de mutualiser les campagnesréalisées au niveau national en soutien au peuple palestinien. Fort de plusieursmillions de syndicalistes d'une quinzaine de pays , il s'est récemment doté d'un siteinternet d'une newsletter et réalise du matériel sur différents points.

Les prochaines rencontres du réseau syndical européen pour la justice en Palestine auront lieu les 18 et 19 mai à Barcelone. Quelques mois après la sortie de la liste de l'ONU des entreprises qui interviennent dans les colonies (normalement prévue pour mars), les objectifs de ces deux journées de rencontre sont de travailler à une campagne visant la complicité de l'Union européenne vis-à-vis de la colonisation israélienne et de voir comment , sur nos lieux de travail, nous pouvons agir pourfaire pression dans nos entreprises, mais aussi

sur nos gouvernements respectifs afin d'obtenir des désinvestissements et des sanctions contre Israël qui ne respecte pas ledroit international.Pour cela, un rapport détaillé sur les conditions de travail des salarié-e-s palestinien-ne-s est en cours de rédaction, il permettra de faire le point sur divers aspects : Gaza, les colonies, lestravailleurs-euses arabes d’Israëletc.... Traduit en 5 langues, ce sera un outilqui nous permet tra d'aller rencontrer etsensibiliser nos collègues sur ces questions. 'Union syndicale Solidaires est investie dansla construction de ce réseau. Depuis lespremières rencontres qui ont eu lieu ennovembre 2016 à Bruxelles et ont permisd'échanger avec des syndicalistes palestinien-ne-s et européen-ne-s, nous avonscontinué à participer à la construction desdifférentes campagnes pour mettre fin à acomplicité européenne des violationsisraéliennes du droit international. Nous relaierons dans les prochaines semainesle travail fait dans le réseau et l'unionsyndicale SOLIDAIRES sera présente auxrencontres de mai.

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VERS UNE GREVE SOCIALE TRANSNATIONALEUne centaine de participantes et participants activistes au sein des mouvementssociaux, d’Allemagne, Italie, Grande Bretagne, Pologne, Suède, Grèce, État espagnol,Slovénie, Roumanie et France ont participé aux débats 10, 11 et 12 novembre 2017 àBerlin.

La rencontre était organisée par le collectif« Berlin Migrants Strikers », qui est uncollectif d’italiens vivant à Berlin et qui sonten lien avec les centres sociaux, notammentESC à Rome.Cette fois ci également, les échanges entreactivistes de l’ouest l’est et le sud de l’Europese situaient au centre de la rencontre, commeà Poznan en octobre 2015, Paris en octobre2016, Londres en Février 2017 et Ljubljanaen mai. Parmi les invités aussi, un camaradede l'entreprise VioMe de Thessalonique et uncamarade du syndicat SAT d'Andalousie, desconnexions entre la plate forme et destravailleurs vivant des expériences d'auto-gestion se construisent. Le week-end aégalement confirmé qu’Amazon et la« logistique » dans son ensemble étaient unthème central, un livret (en anglais pourl’instant) comprenant différentes contributionsayant été édité au nom de la plate forme.Le vendredi en fin d’ après midi étaitorganisée une discussion entre les membresdu réseau de coordination de la plate formeafin d’échanger autour des perspectives etaussi des différents points de vue« politique » qui s’expriment lors desdifférents échanges à propos des objectifs etdu fonctionnement.Un accueil-table ronde était ensuite organiséau sein d’un centre social berlinois, avec unrepas préparé par un collectif de femmesoriginaires du Cameroun vivant à Berlin, dontune cuisinière professionnelle et qui tout lelong du week end s’est occupé de larestauration.Le samedi, différents ateliers étaientorganisés: “The logistic turn of repression: asociety under authoritarian control”,“Challenge the logistics of exploitation”,“Freedom of movement across theSmartBorder”, “Precarity, self-organization,strike: connecting labor struggles on atransnational scale”, “Data mining, algorithmicprofiling, cyber security and automation: Howto virtualize the revolution”, “The globalwomen’s strike: a feminist perspective ofstruggle.”De mon côté, en tant que mandaté de SUDCommerce, j’ai participé avec Magda (AmazonPoznan, syndicat de base OZZ-IP) à l’atelier« Challenge the logistics of exploitation » où

nous avons évoqué les problématiques destravailleurs d’Amazon, les différentesrencontres transnationales des travailleurs« amazoniens » ainsi que la nécessité de secoordonner à travers les frontières.J’ai ensuite participé à l’atelier « Precarity,self organization, strike » où j’ai parlé de lamobilisation des bikers de Deliveroo de finaoût-début septembre (j’avais apporté avecmoi des textes en anglais et italien) ainsi quede l’expérience du collectif de soutiens auxsalariés du McDonald’s des Champs Elysées.En début de soirée, avec Magda et Carsten(Amazon Berlin, syndicat Ver.di) noussommes intervenus lors d’une rencontreautour de l’initiative « Block black Friday,make Amazon pay », rencontre organiséedans un café alternatif par l’organisationautonome Ums Ganz! et le syndicat de baseFAU de Berlin.

Le dimanche, de 13h à 18h s’est déroulée ausein d’un squat auto-géré une réunion debilan et de coordination afin d’échanger àpropos du week end et d’élaborer desperspectives, avec la décision d’organiser descommissions thématiques (Amazon etlogistique, migrants et liberté de circulation etd’installation, travailleurs précaires et auto-organisation, féminisme et grève desfemmes). Les discussions au sein de laplateforme ont donc confirmé des dynamiquesautour de thématiques communes, pour nousc’est évident, la construction d’un mouvementd'une grève à la fois sociale et transnationalepeut être possible et est nécessaire.

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IRAN : VIOLATION DES DROITS DE L'HOMMELes organisations syndicales (Solidaires, CGT, CFDT, FSU, UNSA) signataires de cetexte dénoncent les violations répétées des droits et des libertés en Iran, etparticulièrement celles qui se sont abattues sur les personnes qui participent depuisle 28 décembre à un vaste mouvement de protestation : répression violente desmanifestations et des grèves, arrestations arbitraires, usage de la torture, etc. Cesatteintes récurrentes aux droits fondamentaux et cette répression continue deslibertés indignent de nombreux syndicats dans le monde, dont ceux affiliés à laConfédération Syndicale Internationale (CSI).

Nous, syndicalistes, sommes particulièrementpréoccupés par l'aspect massif de cetterépression. Fin décembre et début janvier descentaines de milliers de personnes - hommeset femmes-, dont une importante proportionde travailleurs, de chômeurs, de jeunes,d’étudiants, ont manifesté dans plus de 80villes du pays. Elles protestaient avant toutcontre la cherté de la vie, le chômage, lacorruption, la discrimination envers lesfemmes. Ces manifestant-e-s se sont trouvé-e-s confronté-e-s à une répression de masse.Parmi eux/elles, pourtant, se trouvait unepartie de la population que le régime aimait àprésenter, jusqu'alors, comme sa basepopulaire. Avant même la naissance de cemouvement, les syndicalistes étaient déjàpourchassés et emprisonnés. Car en Iran, lesyndicalisme indépendant est interdit, ce quiest contraire aux normes de l’OrganisationInternationale du Travail (OIT), dont laRépublique islamique d'Iran est pourtantmembre. Les conditions de détention desprisonnier-e-s d’opinion et des syndicalistessont effroyables dans les prisons de ce paysoù le recours à la torture est courant. Depuisplusieurs années, les organisations syndicalessignataires de ce texte ont mené desinitiatives à différents niveaux pour dénoncerces situations inacceptables, mettre en œuvredes actions de solidarité afin d’exercer despressions pour obtenir la libération desyndicalistes emprisonnés. Divers syndicatseuropéens ont protesté maintes fois contreces atteintes, en s'adressant aux instancesinternationales, aux autorités iraniennes etaux gouvernements européens, ainsi quedernièrement - en ce qui concerne lessyndicats français- au président Le discoursrécent des autorités iraniennes laisseentendre qu’elles prévoient de réagir ausoulèvement d’une manière de plus en plusimpitoyable.

Le ministère de l’Intérieur a déclaré que lesmanifestations étaient illégales et que lespersonnes qui continueraient d’y participerrisquaient de graves sanctions. Il a menacéd’inculper les dirigeants et organisateurs demanifestations d’« inimitié à l’égard deDieu », une infraction passible de la peine demort. Les organisations signatairesdemandent que les revendications portées parles Iraniens qui se sont exprimés dans lesrues ces dernières semaines soient entenduespar les autorités. Elles exigent par ailleurs,notamment :

- la libération de toutes les personnesarrêtées pendant et après les manifestationsde janvier, le nombre total d'arrestationsayant été estimé début janvier à 3 700.

- la libération des prisonniers d'opinion et dessyndicalistes,

- l’interdiction effective de la torture et lerespect des droits humains pour lespersonnes emprisonnées

- l'ouverture d'une enquête concernant lespersonnes mortes en prison à la suite de larépression des récentes manifestations (12cas ont été recensés au 24 janvier)

- le respect par les autorités iraniennes desprincipes fondateurs de l'ONU et de l'OIT,organisations internationales dont elles sontmembres.

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IRAN : LES FEMMES DEFIENT LE POUVOIR RELIGIEUXLe 27 décembre 2017, à la veille du déclenchement des protestations populaires

auxquelles de nombreuses femmes ont par ailleurs participé, Vida Movahéd est

montée dans la rue sur un coffret électrique à quelques encablures de l’Université de

Téhéran, sans voile et avec un tissu blanc accroché au bout d’une perche. (1)

Selon la législation de la République islamique

d'Iran, le juge peut infliger à une femme

apparaissant en public sans hijab soit une

amende symbolique de l'ordre de 10 euros, soit

une peine de prison allant de 10 jours à 2 mois.

Âgée de 31 ans, et mère d’un enfant de 19

mois, cette jeune femme a été arrêtée tout de

suite et transférée à la prison d’Evin. Elle a été

finalement relâchée un mois plus tard à la suite

des efforts de l'avocate Nasrin Sotoudeh,

militante des droits de l’Homme ayant elle-

même passé trois ans en prison entre 2010 et

2013. Mais il lui a fallu toutefois verser une

caution d'un montant équivalent à 50 fois le

salaire mensuel minimum. Cet acte héroïque a

été repris par d'autres femmes de la capitale,

puis dans d'autres villes. La deuxième femme

ayant osé retirer son voile a pour nom

Narguesse Hosseini. Agée de 32 ans, et

originaire du centre de l'Iran, elle est étudiante

en mastère de sociologie. Elle a été aussi

arrêtée, puis emprisonnée à la prison de

Ghartchak, très connue pour son mauvais état

sanitaire. La même avocate a accepté de la

défendre et a notamment déclaré que, même si

elle avait le moyen de le faire, sa cliente

refuserait de payer la caution d'un montant

équivalent à 90 000 euros qui lui était

demandée. Toujours selon son avocate,

Narguesse Hosseini est accusée de

consommation de drogue ainsi que

"d'incitation à la corruption", ce qui en Iran

est équivalent à l'ouverture d'une maison close !

L’invention d'accusations de ce genre n’est pas

nouvelle, car le régime est expert en ce

domaine. D'autres femmes, à Téhéran et dans

d'autres villes, ont franchi le même interdit.

Elles se sont également présentées en public

sans foulard, et avec un tissu blanc au bout

d’une perche. Selon la police iranienne, 29

femmes avaient été arrêtées au 1er février

(information confirmée par Amnesty

international).

Une radio persanophone basée au Pays-Bas a

interviewée une des participantes à ce

mouvement : « Quand je suis sortie de chez

moi pour aller sur ce banc, mon cœur battait

très fort. Bien sûr que j’avais peur, parce que je

ne savais pas ce que je deviendrai. Quand je

suis arrivée, j’ai mis mon foulard sur la perche

et le moment était très fort ». Le 29 janvier, elle

est restée 30 minutes sur le banc. Elle raconte

entre autres : « mon acte ne se réduit pas

seulement à enlever mon foulard. Quand je

réfléchis bien, je constate qu’un Etat qui ne

respecte pas la façon dont je veux me vêtir,

intervient dans tous nos choix personnels,

publics, sociaux et politiques, c’est une

dictature, la pire des dictatures. ».

Cette nouvelle manière audacieuse de défier

publiquement le régime ne se limite pas aux

femmes jeunes. Alors que le climat était glacial,

on a par exemple vu une très vieille femme au

dos voûté, se hisser à l’aide de sa canne sur une

hauteur et faire le même geste. Tous ces actes

courageux sont un symbole du refus de

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nombreuses iraniennes de continuer à supporter

ce que subissent les femmes depuis près de 40

ans. .Juste avant le geste de Vida Movahéd,

cette femme auparavant inconnue, le drapeau

blanc était certes le signe et le symbole de la

paix, mais aussi celui de la

reddition et de la capitulation. Désormais, il

signifie également l’insoumission, le défi, la

désobéissance et l’audace. Notons qu'à

l’étranger, des tentatives ont bien sûr eu lieu

pour tenter de récupérer de tels actes

héroïques. C'est notamment le cas d'une

journaliste d'origine iranienne, anciennement

"réformatrice", et qui sur Voice of America, (2)

milite pour la restauration de la monarchie du

Chah, balayée par la révolution de 1979.

_______________________________________________________SOLIDAIRES AU CONGRES DE LA CGT ESPAGNOLELe XVIIIéme congrès de la CGT s’est tenu à Valencia, du 15 au 18 février. Commetoujours depuis la création de Solidaires, nous y étions présent-e-s.

Pour les 250 congressistes qui représentaientles syndicats confédérés au sein de la CGT, cefut l'occasion de confirmer, actualiser etapprofondir les orientations de leurorganisation. La préparation de la grèvegénérale à laquelle la confédération appelle le8 mars a été au coeur de plusieursinterventions. La nécessité de construire unlarge mouvement pour des services publicsrépondant aux besoin de la population etdirectement gérés par celles et ceux qui ytravaillent et celles et ceux qui les utilisent estaussi un des axes de travail prioritaires de laCGT.Objets de débats au sein de la CGTCatalunya, l'avenir institutionnel de laCatalogne ne fut pas un sujet de discussionretenu par le congrès confédéral : lespositions divergent quant à la nécessité ounon de l'indépendance, mais l'accord estcomplet sur le droit de tous les peuples àdécider de leur avenir et, bien sur, sur larésistance à la répression. Le débat sur l'unitén'est pas absent du contexte syndicalespagnol : si un cadre collectif rassemblantles diverses organisations alternatives, deluttes, etc., de l’État espagnol existe, il estfragile ; l'absence d'invitations à ces autresorganisations pour ce congrès l'illustre.Concernant le Secrétariat permanent de laconfédération, l’équipe actuelle (en partierenouvelée et composée de 40% de femmeset 60% d’hommes) est largement élue. Anoter, que notre camarade Angel Bosqued,avait décidé de ne pas solliciter de nouveau

mandat de secrétaire aux relationsinternationales : il a joué un rôle importantdans le travail commun mené entre CGT etSolidaires depuis très longtemps, etnotamment dans la création du Réseausyndical international de solidarité et deluttes. La transmission s'organise avec cellequi lui succède : Sandra Irriarte. Nombre decamarades de la CGT qui avaient contribué àla réussite de la récente troisième rencontredu Réseau syndical international de solidaritéet de luttes, étaient présents et présentes àce congrès : occasion d'entretenir lescontacts... L'Union syndicale Solidaires était laseule organisation syndicale françaiseprésente. La CNT-SO avait envoyé unmessage de salutations.

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MOBILISATIONS EN TUNISIEComme très souvent en Tunisie, le mois de janvier a connu une série demobilisations. L'étincelle en a été la loi de finances 2018, qui se traduit notammentpar de nouvelles hausses de prix. Les premierEs à réagir ont été des jeunes qui ontorganisé, dès le 3 janvier, une série de manifestations dont certaines ont été suiviesde heurts violents.

Tel est le nom pris par un collectif de jeunescherchant contribuer au surgissement demobilisations à la hauteur de la gravité de lasituation. S'y retrouvent à la fois des jeunessans appartenance organisationnelle, et desmilitantEs ou ex-miltantEs de divers partis etassociations.

En grande partie grâce à leur action, desmanifestations ont pour une fois démarréesde façon synchronisée, et cela danspratiquement l'ensemble du pays.

Le pouvoir, dirigé par des notables de l'ancienrégime (Nidaa Tounès) et les islamistesd'Ennahdha a violemment réagi, causantnotamment la mort d'un manifestant dans lagrande banlieue de Tunis. En trois jours ettrois nuits, 773 personnes ont été arrêtées(dans un pays comptant six fois moinsd'habitants que la France !). Un certainnombre ont été immédiatement déférées enjustice.Pas étonnant que dans ces conditionsque le mouvement se soit rapidement ralenti.

Casser le thermomètre n'a jamaisguéri la fièvre

La poursuite et même l'accentuation desorientations néo-libérales en vigueur sous BenAli a des effets catastrophiques.

Depuis 2011, le niveau de vie des Tunisiens abaissé de 35 %. Pour la seule année 2017, lahausse des prix a été officiellement de 6,4%.

Suite à la loi de finances 2018, cette tendanceva en s'amplifiant avec par exemple uneaugmentation des transports de 2,7 % pour leseul mois de janvier.

Le taux de chômage atteint 15 %, dont 23 %pour les femmes, 25 % dans certainesrégions de l'intérieur et 30 % pour lesdiplômés du supérieur.

Que fait l'UGTT ?

Depuis la crise majeure de l'été 2013, où lepays avait failli sombrer dans la guerre civile,l'UGTT s'est donnée pour mission principalede favoriser un consensus entre les principauxpartis politiques, elle-même et le patronat.Dans cette logique, la direction de l'UGTT acherché ensuite à ne rien faire qui puissegêner les gouvernements néo-libéraux ayantrésulté de ce "dialogue national".

En 2014-2015, par exemple, la directionnationale a d'abord cherché à dissuader lessecteurs les plus combatifs de l'UGTT de partiren grève. Elle les a même parfois désavoués.

Mais l'orientation impulsée par ces courants afini par l'emporter au sein de l'UGTT. Ladirection nationale a donc fini par soutenir lesgrèves en cours, et même à les structurerlorsqu'elles se sont étendues au secteur privé.Il en a résulté une série d'avancées.

Par la suite, la centrale est fondamentalementrevenue à son orientation précédente derecherche de consensus avec le patronat et legouvernement.

Vers une généralisation des luttes ?

Le problème de l'emploi n'étant toujours pasréglé, des jeunes chômeurs de la région deGafsa bloquent une fois de plus la productionet le transport du phosphate. A l'heure où ceslignes sont écrites, le bassin minier et les

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usines chimiques qui en dépendent sontparalysés depuis le 20 janvier.

Diverses structures de l'UGTT participent parailleurs à des conflits sectoriels dans dessecteurs aussi variés que l'enseignementprimaire, secondaire et supérieur, l'industriedu ciment, la Poste, la médecine hospitalo-universitaire, la CPG, le Ministère destransports, les services de la présidence de laRépublique (!), l'instance chargée d'organiserles élections, les étudiants en médecine et lesinternes, etc.

A l'occasion de la renégociation prochaine desaccords conclus suite à la vague de luttes de2014-2015, il devrait être possible d'avoir uneidée de l'état des rapports de forces au seinde l'UGTT entre deux grandes sensibilités :

- celle voulant organiser des luttes pouvantdéboucher sur la satisfaction desrevendications,

- celle cherchant trouver un consensus avec lepatronat et le pouvoir néo-libéral.

________________________________________________________CONTRE LES VIOLENCES D’ÉTAT AU MEXIQUE

Deux exemples de luttes : contre les disparitions forcées et le projet d’aéroportd’Atenco.

Des hommes, des femmes, des enfantsdisparaissent, de plus en plus nombreux, auxmains des autorités mexicaines, dans le plusgrand déni de ces dernières. Un projetd’aéroport près de la capitale, abandonnésuite à une forte mobilisation des paysan-ne-squi ont réussi à défendre leur terre, reprendaujourd’hui de plus belle. Araceli Salcedo etGrace Fernandez, membres du Mouvementpour les Disparus du Mexique (Movimientopor nuestros desaparecidos en México) etTrinidad Ramirez, militante du Front desPeuples pour la Défense de la Terre (Frente delos Pueblos en Defensa de la Tierra), sontvenues présenter à Paris et à la ZAD deNotre-Dame-des-Landes leurs luttes contreun État Mexicain corrompu, répressif etassassin, et lancer un cri d’appel à lasolidarité internationale.

Araceli Salcedo, à la recherche sa fille Rubídepuis septembre 2012, et Grace Fernandezqui recherche son frère Dan Jarameel depuisdécembre 2008, sont membres du« Mouvement pour nos disparus auMexique », association qui regroupe près de70 collectifs locaux de familles de disparu-e-set 32 ONG. Leur combat s’articule autour dedeux axes :- Le premier est l’accompagnement et l’organisation collective des familles dans larecherche de leurs proches disparus.- Le second consiste à se battre sur le planjuridique pour la création d’une loi quireconnaisse le délit de disparition forcée etharmonise les pratiques de recherche par lesautorités au niveau national.La disparition forcée, c’est à dire organiséepar les autorités (polices, militaires, ou crimeorganisé), concerne plus de 32000 personnesselon les chiffres officiels fournis par lesautorités mexicaines, 57 000 selon laCommission Nationale des Droits de l’Homme.En considérant que seule une famille sur sixira porter plainte lors d’une disparition parpeur des représailles, nous obtenons ce que lecollectif nomme le « chiffre noir » de 180000disparu-e-s, pour un pays considéré comme« démocratique » qui n’est pas en guerred’après les autorités internationales. Cesreprésailles peuvent aller des menaces demort à leur exécution, de demandes derançons organisées par la police ou

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l’enlèvement d’un autre proche pour ceux quis’aventurent trop loin dans leurs démarches. Les familles recherchent les personnesvivantes (dans les prisons par exemple),mortes (dans les services légistes) et dans lesfosses clandestines. La mise à jour de resteshumains dans de nombreux cimetièresillégaux met en exergue une réalité que lesautorités ne peuvent plus nier ou minimiser.L’intervention des experts est alorsindispensable, et le travail d’identificationpeut ainsi commencer. Mais, là aussi, lesfamilles rencontrent à nouveau des difficultés,et font face au manque de moyens(techniques, économiques) et surtout aumanque de volonté des autorités. Toutcomme les dossiers de plainte dans lescommissariats, les restes humainss’accumulent et ne sont pas identifiés. Araceliinsiste donc sur le fait que leurs proches sontvictimes d’une double disparition. Pour pallierà ces manquements, les familles se sontauto-formées à un travail digne de médecinslégistes. Elles ont organisé elles-mêmes lesprélèvements d’ADN des familles afin de créerdes banques de données pour faciliter lesrecoupements. Elles collectent également desfonds pour se procurer le matériel quipermettra d’identifier les fragments osseuxcalcinés ou détruits à l’acide, non identifiablesen suivant le procédé ordinaire. Bref, ellesfont le travail que ne fait pas l’État, ensurmontant tant bien que mal la douleurimmense que cela induit.Les disparitions ont été de plus en plusnombreuses à partir de la « guerre contre ladrogue » déclenchée par F. Calderón pendantson mandat présidentiel (2006-2012). Avec E.Peña Nieto, son successeur (2012-2018), lephénomène se poursuit et s’élargit : lesdisparu-e-s sont de plus en plus jeunes et l’ondénombre de plus en plus de femmes etd’enfants. La puissance du crime organisé etla corruption dans toutes les sphères dupouvoir font que le problème dépasse le traficde drogue. Les disparitions alimententaujourd’hui les réseaux de traite des femmespour la prostitution, les enfants pour la vented’organe…Le « Mouvement pour les Disparus » insistedonc sur le fait que les personnes quidisparaissent ne sont pas en lien avec lecrime organisé, contrairement à ce que

proclame sans cesse le gouvernement. Sastratégie consiste à criminaliser les familles des disparu-e-s afin de protéger son image auniveau international et de dissimuler sacomplicité avec le crime organisé.La lutte commune des familles de disparu-e-spaie. Ils sont parvenus a faire promulguerune loi contre la disparition forcée ennovembre 2017, comme un outil face àl’impunité. Elle consiste à faire reconnaître lestatut de « disparu », suite à une disparitionforcée. Elle permet la création d’uneCommission Nationale de Recherche, ainsique de commissions locales dans tous lesÉtats fédérés du Mexique afin de mettre enplace des lignes d’action communes dès lespremières heures de la disparition. Elle vise àharmoniser les pratiques d’exhumation desfosses et de collecte d’ADN afin de faciliter lesrecoupements au niveau national, ce quijusqu’alors était impossible. Elle oblige lesautorités à rendre des comptes aux familles.Elle engage la responsabilité des hautsfonctionnaires, jusqu’à présent jamaisinquiétés. Leur combat continue maintenantpour faire en sorte que cette loi soitappliquée. Cela a des effets puisque de hautsresponsables de la Sécurité Publique de l’Étatde Veracruz, face à la pression des familles,vont pour la première fois être jugés pourdisparition forcée. Une victoire en demi-teinte, car en parallèle la loi de SécuritéIntérieure vient d’être promulguée endécembre 2017. Cette loi ouvre la porte à lamilitarisation du pays puisqu’elle permet auprésident d’ordonner l’intervention des forcesarmées en cas de « menaces à la sécuritéintérieure ». Ceci laisse craindre le pirelorsque l’on sait que l’armée n’est pas enreste dans de nombreux cas de disparition,comme cela a été le cas à Ayotzinapa, caslargement médiatisé mais qui ne doit pasocculter les cas quotidiens de disparitions. Letexte est si opaque qu’il est probabled’imaginer que toute mobilisation sociale oumouvement de protestation pourraient êtresujets à une intervention.

Des disparus à la lutte contre l’aéroport

L’actuel président, E. Peña Nieto, gouverneurde l’État de Mexico de 2005 à 2011, n’avait

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d’ailleurs pas attendu cette loi pour envoyer àSan Salvador Atenco en mai 2006 une opération de police massive afin de réprimerla mobilisation contre la construction d’un nouvel aéroport, qui s’est terminée par denombreux blessés, 300 arrestations, la mortde 2 personnes, la torture et le viol de 47femmes.

Trinidad Ramirez est venue présenter la lutteactuelle contre ce mégaprojet, commencé en2001, abandonné en 2002 et réactivé en2014 par E. Peña Nieto, devenu entre-tempsprésident de la République. Considéré commenon viable par des scientifiques puisqueconstruit sur une zone humide, en plus d’êtreun désastre écologique, ce projet brisesocialement les populations locales, qui viventde ces terres communales pour s’alimenter.Conçu sans aucune concertation avec lespopulations, les décrets d’expropriationsobligent les populations à quitter leurs terres,sans solutions. Menaces, harcèlement, tousles moyens sont mis en œuvre par lesautorités. Aujourd’hui, une autoroute a déjà étéconstruite, contournant ainsi à nouveau lalégalité en initiant les travaux sans mêmeavoir publié le projet. Une fois de plus sevérifie la collusion entre le gouvernement et

les grandes entreprises qui n’hésitent pas àcontourner la réglementation pour parvenir à leurs fins. Trinidad est donc venu transmettrele message du Front des Peuples en Défensede la Terre. S’ils sont parvenu à faire libéreren 2010 les prisonniers (qui encouraient despeines de prison allant jusqu’à 112 ans), c’estgrâce à la mobilisation au Mexique et auniveau international. En novembre 2017, soit11 ans après la terrible opération répressive,la Cour Interaméricaine des Droits del’Homme étudie le cas des viols commis par lapolice mexicaine. Mais la justice n’est toujourspas rendue, aucun responsable n’a encore étécondamné. La lutte continue sur le planjuridique pour obtenir réparation, et surtout,elle continue contre le projet. Machette enmain, Trinidad s’adresse à celles et ceux quicélèbrent l’abandon du projet d’aéroport surla ZAD de Notre Dame des Landes : « si ça aété possible à NDDL, c’est possible à Atenco,et c’est ensemble qu’on obtiendra la victoirecontre tous les projets de mort. La luttecontinue pour la défense de la terre, à NDDLcomme à Atenco !».Trinidad, Araceli, Grace, dénoncent aussi ladésinformation qui règne au Mexique, etinsistent sur l’importance de la mobilisationinternationale, qui exerce un réel impact : lesaccords commerciaux de la coopérationinternationale entre la France, l’Europe et leMexique ne peuvent avoir lieu que si legouvernement mexicain respecte les droits del’homme. Or, ces dernières années, il lui est de plus enplus difficile de maintenir une image de paysdémocratique aux yeux du monde.Institutions, entreprises multinationales,crime organisée, les frontières sont toujoursplus étroites, les crimes de plus en plusnombreux. Ensemble, aidons-les à fairetomber complètement le masque…

http://sinlasfamiliasno.org/http://atencofpdt.blogspot.fr/

________________________________________________________________Vous pouvez retrouver les informations de la commission internationalede Solidaires sur notre site à l’adresse suivante :www.solidaires.org/article12420.html

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