Salut mon pope

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SALUT MON POPE

CHAPITRE PREMIER

DANS LEQUEL ON VOIT PINAUD OPRER SON RETOUR AUX SOURCES

Dans la vie il faut toujours s'attendre tout, et principalement au reste.. Bien se dire que rien n'est immuable, ni les hommes ni la nature !Si un jour vous trouvez les plaines de l'Oural la place du mont Blanc, de la crme fouette dans le carter de votre bagnole ou le vaste front d'un grand penseur sous la visire d'un contractuel, vitez d'tre tonn. Le seul intrt rel de l'existence rside dans ses bouleversements.Lorsque je sonne la porte de Pinuche, en cette frileuse matine de septembre, je m'attends trouver dans l'encadrement; soit Mme Pinuche, soit son cher dbris de mari, soit la rigueur leur femme de mnage. Or c'est Sherlock Holmes qui m'ouvre, en chair, en os et en grande tenue. Sherlock soi-mme, portant le fameux complet carreaux et le bitos double visire. Sherlock tenant une loupe la main (laquelle'loupe est attache autour -de son cou par une chanette d'or).J'ai droit un oeil jaunasse et terne, grossi dix fois. Vite j'escamote ma stupeur en vertu du conseil donn plus haut et je salue cette manation du pass d'un sourire.-Salut, San-A. ! me fait la voix hlante du fossile.Renseignements pris, il s'agit bel et bien de monsieur ' l'Inspecteur Principal Pinaud. Sa moustache roussie par les mgots. ressemble une vieille brosse dents surmene. Il a l'oeil cloaqueux, le nez pendant, la bouche en accent circonflexe et la bouille lgrement de traviole comme si elle avait t modele par un gaucher provisoire...- Tu vas un bal costum ? demand-je- Entre !Je pntre dans son trois-pices sur cour aussi lumineux que la couverture d'un brviaire. Depuis qu'ils ont revendu le caf tenu nagure par Mme Pinaud, les Pinuche ont rintgr leur ancien appartement du boulevard Lvitan, (~ex-Magenta)-.- Je te reois dans mon cabinet de travail ! s'excuse la guenille grise, autrefois c'tait le salon...Ma surprise va croissant, comme disait un ptissier turc.Du salon il ne reste qu'un fauteuil Arouet (note de l'diteur : San-A a sans doute voulu dire un fauteuil Voltaire) constell de taches. Le papier Louis XVI des murs disparat derrire des rayonnages, garnis de grimoires, de cornues (Plus ou moins gentilles et biscornus) de bocaux, de bec Bunsen et d'autres objets non identifiables. Le local tient de la bibliothque et du laboratoire, avec par-dessus le blaud l'atmosphre quivoque d'un antre d'alchimiste.- Pose-toi l ! m'invite Shrlock en me dsignant le fauteuil au dossier duquel est accroche une veste d'intrieur brandebourgs.Eberlu, j'obis.- Y a un peu de dsordre, ;s'excuse Pinaucchio, mais mon pouse est en cure Aix-les-Bains pour ses rhumatismes et notre femme de mnage s'est foul le poignet en encaustiquant les pieds d'une table Louis XIII.- Tu faie des recherches ?- Dans un sens, oui, dclare mon surprenant vis--vis en sortant de sa poche une pipe qu'il se met en devoir de bourrer. Vois-tu, San-A., poursuit-il, il y a quelque temps, ,au cours d'un voyage en chemin de fer; j'ai lu un livre de Conan Doyle et 'a t pour moi une rvlation.- Pas possible ?- Yes, fait-il tourdiment, tant il est plein de son personnage. J'ai compris que les mthodes d'investigation -du hros de Conan Doyle taient les seules valables car elles ne font appel qu' l'intelligence et l'esprit de dduction.Il toussote dans sa main en cornet, allume ~sa pipe et continue.- Nous crevons de la routine, dans la police actuelle. Nous roulons sur des rails et avec des oeillres. Nos principaux otils sont l'indicateur et le passage tabac. Depuis Vidocq, quels perfectionnements avons-nous enregistrs? L'identification par les, empreintes et le portrait-robot? Admets qu'en plus de cent ans c'est maigre !- En effet, conviens-je, cueilli froid par ce rquisitoire.- Le policier actuel, qu'est-il ? enchane -ce dlicat analyste. Il a deux visages, vrai dire: le tien et celui de Bru. C'est ou bien un commissaire instruit, et beau-parleur ou bien un sombre cogneur qui trouve les criminels comme un goret trouve des truffes. Chez ces derniers, c'est l'odorat -qui remplace l'intelligence.Pinaud lche une bouffe bleute et braque le tuyau de sa pipe dans ma direction.- Une troisime catgorie d'enquteurs doit se crer, San-A., celle des vritables cerveaux! Des dductifs ! Ceux qui sauront interprter chaque dtail d'une affaire! Ceux qui sauront traduire les apparences ! Dsormais, dclame le blant, je rejette le matriel policier dont nous usions, pour renouer avec les mthodes du matre. Je jette mon revolver la poubelle pour le remplacer par une loupe, et je laisse mes menottes dans un tiroir afin de ne plus utiliser qu'un mtre de couturire !- C'est a, gouaill-je, tu iras alpaguer Ritons-les-Belles-Noix avec un mtre de couturire, mon biquet ! ,L, Pinaud occulte, hausse ses chtives paules.- Il se trouvera toujours des hommes de main pour matriser les coriaces, ce qui importe c'est de dmasquer les coupables, ensuite, leur arrestation n'est plus qu'une formalit.- Tu m'as l'air vachement en transes, Bonhomme-la-Lune.- Je le suis parce que je travaille bloc. Le sens de l'observation est une chose qu'on affte tout comme la lame d'un couteau, mon petit. Veux-tu une dmonstration ?- J'aimerais ! avou-je.- Je devine ton scepticisme et il me serait agrable de le dissiper. Prenons par exemple le motif de ta venue chez moi...Je rigole urbi et orbi.- C'est a, devine un peu ce qui m'amne !L je me cintre comme un arc-boutant roman. La raison qui m'amne ici est tellement extraordinaire, tellement effarante que la plus lucide des extralucides, celle qui traduit le mieux le marc de caf en franais, ne serait mme pas fichue de la subodorer!Le fossile se livre alors une gymnastique fantastique. Le voil qui se met me tourner autour comme un chien tourne autour d'un bec de gaz. Il se hausse sur la pointe des nougats, ou bien s'accroupit. Il me mate la loupe et l'oeil nu; me palpe, me hume, me grume, m'ausculte; me consulte, me suppute, me gote, me dgote (il sent l'ail), me dtecte, me dbusque, m'investit, me conquiert, m'apprcie, me dmystrise, me ralise, me simplifie, m'aplant, me dnominateurcommunise, m'coute, m'interprte, me restitue.Cela dure, mais je prends patience. Enfin il laisse retomber sa loupe sur sa poitrine, comme la marquise terrifie par une braguette dboutonne laisse retomber son face--main. .- Ma valise n'est pas prte, murmure-t-il enfin.Je frmis.- Et, poursuit le nouveau Sherlock Holmes, ma femme a port mes vtements lgers chez le teinturier. Je n'ai que des costumes d'hiver. En Grce, je vais crever de chaleur !Un qui a le regard en porte de musique c'est bien votre cher San-Antonio, mes poulettes. a se met vaciller autour de moi. Se peut-il que le bon dbris ait rellement dcouvert l'objet de ma visite ! Mais alors il est plus fort que son matre, Pinuchet ! Il pulvrise le mystre. Avec lui l'isoloir de la pense n'est plus qu'une vitrine illumine. Aucun anonymat n'est plus permis !- Continue, halet-je.- Je comprends que le Vieux soit dans tous ses tats, reprend docilement la Gatoche. Une affaire pareille, si elle est connue, risque de faire couler beaucoup d'encre...Je vis dans un rve. Je me dis que tout a n'est pas pensable, que je vais me rveiller- et qu'il n'y aura plus de Sherlock Holmes, plus de Pinaud devin; la blafarde ralit va revenir, morne et quotidienne,sans mystre...- De quoi parles-tu ?- De cette disparition inimaginable, parbleu! me rpondit-il de sson ton tranquille. Le ministre des Beaux-Arts doit- en faire une maladie.Je me dresse et le cramponne aux paules-- Finis tes giries, Pinuche.- Comment, mes giries ! C'est la vrit ou non ?- Justement, a l'est trop pour que tu l'aies devine. .- a n'est pas de la divination, San-A., mais de la dduction !- Trs bien, me calm-je, en ce cas, explique-moi le cheminement de ta pense...Ilopine et tire quelques bouffes de sa pipe en me considrant d'un oeil vasif.- Si tu veux... Je vois que tu sors d'une confrence qui a dur un bon bout de temps ,car ton pantalon fait des pochesaux genoux; or nous sommes le matin et tu n'es jamais parti de chez toi sans avoir un pli impeccable ! La confrence en question a eu lieu chez le Vieux car tu sens son parfum, lequel est, si je ne m'abuse, " Cuir et Poil " de chez Chmugle. Cette confrence fut pre car on a ptri les revers de ton veston. C'est une fantaisie que tu ne pourrais tolrer de quelqu'un d'autre que le Vieux ! Il y a dans ta poche deux billets d'avion pour Athnes ! Tu comptais emmener Brurier avec toi et tu arrives dechez lui. Je le sais car on est en train de regoudronner son trottoir et il y a des particules d'asphalte en fusion tes semelles. Tu ne l'as pas trouv puisqu'il est parti en vacances, hier soir avec Berthe, alors tu t'es rabattu sur moi.Derrire son cran de fumaga il a l'air d'un vieux ouistiti dguis en Sherlock Holmes. Son regard est pareil deux gouttes d'huile figes. Pourquoi, soudain, me sant-je gn par son insolente perspicacit ? Pis que gn: incommod. Il m'entrane vers les frontires indcises de la quatrime- dimension, le Dvast. Gentiment du reste, et sans plastronner. Je lui ai demand - une preuve de son nouveau avoir et il me l'administre, un point c'est tout.- Bravo pour la premire partie de cette dmonstration, fais-je la Vieillasse, il m'intresserait maintenant de savoir ce qui t'a amen me parler de vol et de Beaux-Arts ?Le Dchet se cueille une paupire entre le pouce et l'index et se la remonte de trois centimtres, mettant l'air libre une rtine couleur de pisse d'ne.- La fume m'irrite les yeux, m'explique-t-il.Il se racle misrablement la gorge. Tout ce qu'il fait a quelque chose d'avort: ses gestes seont incertains et ses paroles frisent. On dirait qu'il vit sur de la tle ondule.- Les journaux et l tl n'ont parl que du retour en Grce de la Victoire de Samothrace, San-A. On nous a montr le dpart de la statue du Louvre, son embarquement bord du Kavulom-Kavulos et le bateau en mer avec Les ministres se serrant la pogne. Et puis voil qu'on ne nous fait pas voir son dbarquement Samothrace et qu'on nous apprend que les grandes festivits prvues dans l'le ,sont repousses de quinze jours because le roi de Grce aurait la grippe ! Tout cela ne me parat pas catholique, ni mme orthodoxe. Et j'en tire la conclusion suivante : la Victoire de Samothrace a disparu. La police grecque n'arrive pas remettre la main dessus. et la France dpche l-bas son meilleur limier, en l'occurrence le commissaire San-Antonio. Me suis-je tromp ?Sa petite toux Catarrheuse se fait entendre nouveau.- Pinaud, balbuti-je. Tu es le flic le plus confondant de l'aprs-guerre. Effectivement, tu as devin juste: ON A VOL LA VICTOIRE DE SAMOTHRACE!

CHAPITRE II

DANS LEQUEL EST EXPOS ENDETAIL LE VOL DU SIECLE .

M'est avis, les gars, que si la presse apprend a il va y avoir de drles de manchettes la une. Manchettes ct desquelles celles de Bollet ou de Delaporte ressembleront des caresses d'amoureux: Aprs une histoire pareille, si on tait encore en trois, ou quatrime Rpublique, le ministre des Beaux-Arts (malgr qu'il soit blanc comme neige) serait contraint de dmissionner. Cette manie, aussi, de prter les chefs-d'oeuvre les plus inestimables du patrimoine national comme on prte une turbotire sa voisine de palier ! Tu veux la " Joconde " pour cloquer dans ta salle manger ? Tiens, camarade, la voil ! a te ferait plaisir la " Vnus de Milo " afin de dcorer ton livinge ? Prends, mon pote !T'as besoin de la " Victoire de Samothrace " pour ta kermesse ? Sers-toi, mec,. c'estla moindre des choses. Y a pas de raison qu'elles s'arrtent l, ces prodigalits. Onfourgue dj notre pognon, on expatrie nos putains, on vide nos muses, bientt dsqu'un pays aura besoin d'tre compris, on lui prtera le Gnral, je prvois ! On croitque j'exagre, mais vous verrez ! Il est clairvoyant, San-A. Notez que j'ai pas l'me d'ungrippe-sous, seulement alors que les autres en fassent autant ! Qu'on mette tout en commun une bonne fois ! Mais les copainssont pas si dingues ! Ils nous prtent l'Au Tige, les Grecs, dites voir ? Et les Amerlocks, ils nous la rendent pour gayer la Foire de Paris la statue de la Libert ? Des clous !Les Japonais qui nous gratignent la " Vnus " , vous esprez qu'ils nous enverront le Fuji-Yama l'occasion du salon de Loto ? Vous pouvez toujours attendre ! Marrons, cocus, plums nous sommes ! Ils nous piquent nos profs, ils nous piquent notre or, notre tapioca, notre gloire ! Faudra leur filer la tour Eiffel, la rive gauche du Rhin, notre beaujolais ! Il restera plusque les bouquins de San-Antonio parce qu'ils sont intraduisibles; mais ces vaches-l seront capables d'apprendre l'argomnuche pour les lire ! Donc, la " Victoire de Samothrace " , J'Y reviens, voil que m'sieur le Ministre la propose aux Grecs. Il dcide qu'elle a besoin d'aller renifler l'air du pays, la dame sans tronche ! Se faire dorer les plumes au soleil de la mer Ege. Justement, une grande fte doit avoir lieu dans l'le de Samothrace. Y a pas meilleure occasion! On emballe la " Victoire " dans du coton. Caisse blinde. Scells poss. en grande pompe sous le feu des camras. Le Zitrone traduit du grec le discours de Son Excellence M. l'Ambassadeur Athirlarigos. a marseillaise, a garderpublicainsabrauclaie, a frmit. Tout le monde c'estbeaulafrance en choeur ! On aime les Grecs. de leur faire cette fleur ! On les chouchoute! On les embrasse. On se fait empapadrouter par eux ! Et puis, avec des outils perfectionns tubulure vaginosta'tique surcompense, on charge the Samothrace's victory sur un strader. Des motards en gants blancs ouvrent et ferment la marche. Le camion fonce sur Marseille sans escale. Parvenu dans la cit phocenne, on hisse la " Victoire " bord d'un cargo tout blanc, tout neuf, tout grec: le Kavulom-Kavulos. Foule nombreuse! Re-discours. ReMarseillaise ( Marseille c'est normal). La caisse plombe, scelle, tricolorise, matelasse, cadenasse est descendue dans la cale. On l'arrime (et, la rime est riche). Deux matafs se relaient pour monter la garde. La mer est tellement d'huile que les pcheurs attrapent des botes d'Amieux au lieu de rougets. Le voyage s'effectue sans incident. Une seule escale Athnes. Et puis c'est l'arrive Samothrace. L -on sort la caisse des entrailles du navire. On la drive jusqu'au btiment construit exprs pour hberger la statue. Des techniciens l'ouvrent. Et que trouvent-ils l'intrieur ? Un bloc de fonte pesant sensiblement le mme poids que la " Victoire " . Stupeur ! Calamit! Orage ! Haut dsespoir ! On se frotte les chsses, ! On s'entre-pince pour se prouver qu'on n'entre-rve pas. A la fin on se rend l'vidence en colonne par quatre : la " Victoire " a disparu ! Les Services Secrets grecs sont alerts. Ils~ alertent les services franais. Un expert trace Samothrace et rend son verdict : il ne s'agit plus de l'emballage initial, mais d'une copie d'emballage. Alors on reconstitue le trajet de la fameuse sculpture. O, quand et comment la substitution d'un bloc de marbre pesant plusieurs centaines de kilos s'est-elle opre ? Impossible de le dterminer ! Depuis l'empaquetage au Louvre de la " Victoire " on ne l'a plus quitte! Le commandant du Kavulom-Kavulos est interrog longuement. Cet officier a tellement le sens de l'honneur qu'il tente de se suicider en avalant un presse-papier reprsentant le Parthnon. Pour viter les fuites on consigne l'quipage du barlu et les techniciens ayant procd l'ouverture de la caisse. Le ministre des Beaux-Arts de l'Htel de Ville pique une crise et somme le Vieux de faire le ncessaire. Dans les cas graves, on fait toujours appel San-Antonio, est-il besoin de vous le rappeler? Si yes, voil qui est fait ! Comme l'a dclar Pinuche, l'amer des sagaces, la confrence a t longue et passionne. Le Tondu a effectivement malmen mes revers au cours de ses exhortations. " Mon cher ami, notre poque un vol pareil est inadmissible. Nous pririons sous le ridicule si le public l'apprenait ! Il faut, m'entendez-vous. ? Il faut retrouver la " Victoire de Samothrace " dans les plus brefs dlais et avec le maximum de discrtion, il y va de l'honneur de la France tout entire. " L j'ai referm le ban cause des courants d'air et dfroiss tant bien que mal mes revers. Quand le Vieux cause de l'honneur national, on a le fondement qui fait roue libre. Je me suis; lev, ple, le nez pinc, les yeux braqus sur la ligne bleue des Vosges. " Je vais faire l'impossible, patron. "Vous me connaissez ? Lorsque j'entreprends l'impossible je commence toujours par m'assurer la collaboration de Bru ou, la rigueur celle du blant. Ayant appris que le premier venait de partir en vacances, je me suis donc rabattu sur le second.Sherlock et moi procdons un large tour d'horizon. On se refait mentalement le chemin de la " Victoire ". Ce qu'il est capital de dterminer, c'est partir de quel endroit elle s'est envole, la belle emplume. Il faut dceler quand elle a fait fi des scells la desse aile.- A ton avis, Conanchose de mes deux Doyle, attaqu-je, toi qui ne te nourris plus que de phosphore surchoix, quand la substitution a-t-elle eu lieu?Holmes ferme ses jolis yeux pareils deux crachats de poitrinaire mal soign.- Trois pisodes dans ce vhiculage, marmonne-t-il.- C'est pas du vhiculage de mouche, mais plutt du vhicUlage d'lphant, soulign-je au passage.- Primo, fait l'homme en transes, la partie Louvre... On l'emballe... Deuxio, la partie camion... On la transporte Marseille. Troisio, la partie bateau...Il rflchit si fortement que je peux m'en apercevoir sur s'a bouille dvaste.- Tu dis, qu'une fois mise en caisse, au Louvre, on ne l'a plus quitte ?- Elle tait surveille par les gardiens habituel. Pour l'embarquer il et fallu unmatriel considrable et une main-d'uvre plus considrable encore ! Non, au Louvrele vol n'tait pas possible...Il admet.- Passons maintenant la partie camionnage; poursuit le roi de la matire grise... Tu dis, Paris-Marseille sans escale, qu'appelles-tu sans escale,, San-A ? J'imagine mal des motards et des chauffeurs se cognant les huit cent cinquante kilomtres d'une trame ! Il a bien fallu qu'ils se reposent et s'alimentent- Tout a t vrifi, Pinuche. Le voyage s'est effectu par relais. Il y a eu un changement des motards la prfecture d'Auxerre. Ensuite un changement motards et chauffeur celle de Lyon, et c'est cette dernire quipe qui a termin le trajet.- Combien y avait-il de personnes bord du camion?- Deux : un chauffeur et un garde arm... En dix heures ils ont effectu le parcours total grce aux sirnes des flics ouvrant la route. Le camion s'est rendu directement quai. Il tait cinq heures de l'aprs-midi. Les personnalits l'attendaient en faisant le pied de grue. La grue en question a cueilli la caisse et l'a descendue dans la cale... Le bateau a appareill le soir mme. Deux jours plus tard il atteignait le Pire ou il faisait escale une nuit.- Il y a dcharg des marchandises?- Oui.- Ah ! ah ! fait Pinaud. - Les officiers du bord ont certifi que le fret dbarqu se trouvait dans une autre partie de la cale et que, de toute faon, deux marins veillaient sur la caisse.- Pourquoi cette prcaution?- Pour donner des garanties aux Beaux-Arts de chez nous. Les Grecs voulaient ainsi prouver qu'un curieux ventuel n'avait pas la possibilit d'approcher la caisse.- Et le bateau est reparti le lendemain pour Samothrace ?- Oh il est arriv vingt-quatre heures plus tard environ..- Et une fois l-bas ?- Avant toute chose on a dcharg la " Victoire " ou du moins, ce qu'on pensait tre la " Victoire ". Elle a t de nouveau place l'aide d'une grue sur le plateau d'un camion qui la conduisit dans le hall d'exposition amnag pour la recevoir. On l'a descendue et quatre techniciens ont procd au dcarpillage.- Il y avait la presse?- Un type des actualits grecques, lesquelles s'taient assur l'exclusivit du reportage.- On l'a consign aussi ?- Bien sr! Mais tu te rends compte que le scandale bouillonne comme de l'eau sur le feu. D'une seconde l'autre le couvercle de la casserole va sauter !Sa Pinucherie frottaille sa moustache d'un index jauni par la nicotine.- Une chose est certaine, dcide-t-il.- Laquelle est-ce, messire Pinaud ?- C'est bord du bateau que la substitution a eu lieu.- Votre avis rejoint le mien, chre momie.- Car, poursuit l'infatigable du bulbe, c'est bord du bateau qu'on a eu les moyens de remplacer la bonne caisse par l'autre. Une cale n'est pas un endroit trs frquent, et puis les gens qui ont fait le coup disposaient de grues, ne l'oublions pas. Tu veux que je te dise, San-A ?- Dis-moi-le, doux vieillard !- Sur le bateau, il y avait dj le faux emballage au moment o l'on a charg le vrai.- Possible...- Non: probable !- Soit ! Ensuite ?- Ensuite on a camoufl le vrai pendant la premire partie de la traverse et on l'a dcharg Athnes.- Probable, admets-je.- Non: certain ! Quel tait le fret du cargo ?- Je l'ignore, avou-je.Cette fois, le dducteur soulve ses deux paupires dans un effort surhumain et braque -sur moi son regard teint.- Tu aurais d t'en inquiter, reproche-t-il. Enfin nous allons voir tout cela sur place, maintenant il fout que je me change... Notre ,avion part bien midi trente ?- Tu as devin a aussi ! m'trangl-je, prt accepter de lui dsormais tous les prodiges.- Non, modeistise la vieillasse, je l'ai seulement lu sur les billets.

CHAPITRE III

DANS LEQUEL NOUS ATTEIGNONSLES ATHENIENS !

Depuis l'escale de Rome nous avons retrouv l't. Un chaud soleil illumine lamer, et le ciel est aussi bleu que sur les dpliants des agences de voyage. Dans ce~'"" coucou j'ai un peu l'impression de remonter le temps. Rebrousser les saisons, s'attarder dans des instants retrouvs, affines les sicles, n'est-ce pas le rve de tout homme? Un jour il s'accomplira, je le prdis. On trouvera dans les drugstores des appareils explorer les ges. Pas nous, bien sr, mais nos enfants, comme disait un cur. Nous, on se farcira seulement les premiers pas sur la Lune. Nos lardons iront dans Mars et c'est beaucoup plus tard que la descendance se pointera sur la plante recule au fond de je ne sais quelle galaxie et depuis laquelle on peut encore assister aux galipettes de Franois 1er, au massacre de la Saint-Barthlemy et la mort de Napolon.La voix du commandant de bord nous annonce que l'arrive Athnes est imminente. Je secoue le bras du pre Sherlock. Pinuche dort sitt qu'il est assis. Le menton sur la poitrine, le naze dans la moustache, le bada enfonc jusqu'aux sourcils, il en crase avec un petit bruit de cafetire lectrique.- C'est propos de quoi? balbutie-t-il en se fourbissant les fanaux.- A propos d'Athnes, dis-je. Vise un peu, bonhomme chtif.Par le hublot, je lui montre la ville blanche dans l'blouissante lumire. Sur sa colline, le Parthnon tincelle. On le dirait en sucre.- Je comprends qu'on en fasse des presse-papiers, murmure le fossile. Vu d'ici, il ressemble un presse-papiers. C'est frappant, non ?Ayant rendu ce solennel hommage l'art grec, il se rendort pendant que la Caravelle opre sa manoeuvre d'atterrissage.- Bon, et maintenant? s'inquite la Vieillasse aprs que nous emes souscrit aux formalits douanires.- On file la police, je suis attendu par le commissaire grec charg de l'enqute.Un bahut nous drive tombeau ouvert chez les poulagos.Pinaud somnole sur sa banquette, indiffrent aux rues que nous traversons.. La lumire de ce bel aprs-midi m'enchante. Faut tre truffe, dans le fond, pour subir les mauvaises saisons alors que le mahomed continue de se baguenauder. Les hommes ne pensent pas au fait que l't ne meurt jamais sur le monde. Ils disent qu'il est parti sans songer qu'il est simplement ailleurs et qu'il suffirait de le suivre dans ses prgrinations.A l'htel de police, le comMissaire Kelcchimos nous attend. C'est un homme jeune et soucieux, aux cheveux Coups court, vtu d'un beau complet rayures mauves et bleues et qui parle couramment franais l'aide d'un interprte. Ce dernier accessoire pourrait tre nain s'il ne s'obstinait pas porter des talonnettes. Il n'est donc que nabot, mais, le jour o il sera chauve et en savates, il trouvera aisment de l'emploi chez Bouglione. Sa petite taille ne l'empche pas de manier notre langue impeccablement et sans accent.- Le commissaire Kelcchimos vous souhaite la bienvenue et se met votre disposition! dclare-t-il.Voil qui dmarre bien. On se prsente, on se congratule, on se demande rciproquement des nouvelles du Parthnon et de la tour Eiffel. On enregistre avec satisfaction que ces deux oeuvres d'art n'ont pas encore t voles et on entre dans le vif du sujet. C'est Kelcchimos qui a pris l'affaire en main. Illico je lui pose la question pinaudire propos de la nature du fret transport par le Kavulom-Kavulos. La rponse nous dsenchante : des voitures. Outre la " Victoire ", le bateau ramenait des Renault. Ces dernires ont t dcharges Athnes. Non, elles n'taient pas emballes! Oui, seules les autos furent dcharges. Kelcchimos avait eu la mme ide que nous propos de cette escale au Pire. Mais son enqute dmontre formellement que la dame sans tronche n'a pas mis pied terre ici.Quelle hypothse formule le confrre ? Nous essayons d'interprter sa rponse vhmente, mais il parle trop vite et trop en grec pour que la chose nous soit accessible. Force nous est donc d'attendre la traduction.Selon Kelcchimos la substitution a eu lieu en France et c'est le faux emballage qu'on a hiss bord du Kavulom-Kavulos. Comme a pas de problme pour lui : il rejette les responsabilits.Je le regarde. Il me brandit un dsarmant sourire.- La tentative de suicide du commandant nous semble trange, dis-je, l'interprte, nous aimerions avoir des renseignements propos de cet officier.L'expression de notre confrre se durcit. Il baratine un bon bout de temps en vitant de nous regarder. Le nabot-traducteur semble gn.- Le commissaire dit qu'il s'agit d'un vieil officier irrprochable dont la carrire touche sa fin et fut bien remplie. Par ailleurs on ne saurait suspecter un commandant de la marine grecque.- N'est-ce pas la suite d'un interrogatoire prolong que le-dit commandant a fait cette dpression?Nos partenaires changent une srie de " Z " renverss et de " O " barrs. La rponse arrive enfin- Le commandant n'a pu admettre qu'une oeuvre d'art place sous sa responsabilit disparaisse, son sens de l'honneur aigu, qu'il a cru ne pas pouvoir survivre ce scandale.Le dtritus me tire par la manche:- On perd son temps avec ces gens-l, San-A., m'avertit-il. Ce commissaire est un orgueilleux. La preuve: il est myope et a retir ses lunettes pour nous recevoir, il en a encore la marque sur le nez. Elles dpassent de sa poche suprieure. Tu constateras qu'il cherche les faire passer pour des lunettes de soleil, mais qu'en ralit elles sont doubles verres. Il a dcid de jouer les Ponce Pilate et veut nous persuader que le vol a t commis en France. Son interprte n'est qu'une manire de faire de l'obstruction car lui-mme comprend le franais parfaitement, a se voit ses yeux lorsque tu poses des questions. Il ragit avant que le petit bonhomme ne les ait traduites.L'blouissante sagacit de la Vieillasse ne fait que confirmer mon sentiment personnel. C'est marrant comme les hommes toujours, sont sensibles la rivalit. Ds que deux mecs ayant les mmes occupations sont en prsence ils commencent se faire la gueule et des crocs-en-jambe. Parfois ils essaient la politique du sourire, de la courtoisie... a ne fait que souligner davantage leur antagonisme. Il reste du fiel dans leurs yeux et le pli de la jalousie Mprisante au coin de leur bouche en cul de poule.- O se trouve le commandant? - A l'hpital de Salonique. - J'aimerais le rencontrer d'abord, et ensuite aller Samothrace pour visiter le bateau.La pantomime du traducteur zl et du poulet z'hellne recommence.- Le commissaire Kelcchimos a command un avion particulier pour vos dplacements et me met votre disposition, dclare le minuscule.Autrement dit, le petitout est charg de surveiller mon comportement et d'en rendre compte son patron.Je me dis qu'il pourra nanmoins nous tre utile et que nous aurons toujours la ressource de le larguer le moment venu. Alors j'accepte en feignant une gratitude que je suis loin d'prouver.Salonique est une ville moderne, avec des buildinges pimpants et des artres ares. A priori, c'est tout ce qu'il y a dire sur cette cit d'o notre corps expditionnaire de la 14-18 ramena tant de beaux souvenirs ,sans compter le paludisme !Capitale de la. Macdoine (fruits et lgumes), elle s'amphithtre sur les pentes du mont Khortiatis, comme vous le saviez dj.- C'est ici! dclare notre petit guide (lequel j'allais oublier de vous le dire, ~se nomme Kessaclou).Un drapeau tellement grec qu'il en est bleu et blanc flotte au fronton d'un difice blanc et bleu. Nous gravissons le perron de l'hpital Kelbopubis et un infirmier bronz nous drive jusqu' la chambre du commandant. Ce dernier est un homme d'une cinquante-deuxaine d'annes, gras comme le bac plonge d'un restaurant, avec un nez couvert de points noirs et des sacs tyroliens en guise de paupires. Il a le poil gris et gt au lit avec un pansement autour du cou.- Voici des policiers franais qui ont quelques questions vous poser, commandant! annonce (du moins le suppos-je) notre mentonL'officier hoche la tte. Il ne peut parler que trs bas car, en tentant d'avaler son presse-papiers, il s'est fait une dchirure du corgnolon.- Parlez-vous franais ? demand-je brle-pourpoint.- Un peu, murmure le capitaine du Kavulom-Kavulos.L'interprte palit -quelque peu; marri. Je me tourne vers lui.- Parfait, dis-je, vous pouvez donc aller nous attendre dans le couloir pour y lire Grce-Soir.Un peu suffoqu, il regarde la porte que la Baderne paterne vient de lui ouvrir obligeamment. Il a un temps d'hsitation et sort. Pinaud relourde calmement, puis, en ~ homme d'exprience, te son chapeau et l'accroche au loquet afin d'obstruer le trou de serrure. Satisfait je prends place au chevet du commandant. Lequel, j'allais oublier de vous le dire, se nomme Komtulagros.- Commandant, attaqu-je, ne vous faites pas de mauvais sang cause de notre visite. Je suis persuad que le mystre de cette disparition sera bientt clairci, mais, bien que vous soyez au-dessus de tout soupon, il nous faut prciser certains points...Je lui parle aimablement, en m'efforant de lui sourire.- La statue, poursuis-je, a fort bien pu disparaitre en France, et deux collgues moi enqutent prsentement de Paris Marseille. En ce qui me concerne, je suis charg de la partie grecque du voyage. C'est en procdant par limination que nous remonterons aux sources de la vrit, comprenez-vous ?Bien caus, hein ?L'officier opine. Faut lui apprivoiser le sens de l'honneur ce navigateur ! Il aurait d tre japonais, le cher homme ! a parat dsuet, de nos jours, l'honneur ! C'est comme les cacaotiers., a fait ustensile de revue rtrospective, quoi ! Bravo Maurice ! Mme chez les truands c'est prim. Ils se sont trop embourgeoiss pour en conserver.- Commandant, combien de temps avez-vous pass Marseille ?- Trois jours, fait-il. Pourquoi ?Je m'abstiens de lui rpondre. Si je commence lui expliquer chacune de mes questions, on sera l encore demain !- Vos marins ont dbarqu ?- Deux jours de suite, oui, pourquoi ?- Et vous?- Je suis all jusqu' Nice voir des parents.- Si bien qu'il n'y avait que des effectifs rduits bord durant cette escale ?- En somme oui, pourquoi ?L je me fends d'un bout d'explication- Supposons que certains de vos hommes eussent t soudoys...Mouvement indign de Komtulagros. Je le calme d'un nouveau sourire aussi mielleux que la ptisserie du patelin.- J'ai dit: supposons commandant, car je suis ici pour supposer. Notre mtier l'exige... Donc, supposons que certainsMembres de votre quipage eussent t soudoys, ils auraient pu procder au chargement d'un emballage semblable celui de la " Victoire " ?- DifficileMans possible, A condition qu'un grand nombre soient dans le coup, ce que je vous interdis de penser! gronde Komtulagros.- Pendant vos trois jours quai, vous avez embarqu du fret?- Des automobiles.- Que vous avez dbarques au Pyre ?- Exact, pourquoi ?J'allume une cigarette car le panneau interdisant de fumer est rdig en grec et je ne suis pas susceptible de le lire...- Je vais vous soumettre une hypothse, commandant. Je compte sur votre honneur de marin pour me dire si elle est possible ou non. Est-ce qu'on a pu charger dans la cale, Marseille, un double de la caisse contenant la " Victoire" et dbarquer la vraie caisse, camoufle ou non, au Pyre ? Rflchissez, faites taire votre indignation et rpondez-moi franchement.Effectivement, son raisin mditerranen bouillonne dans ses veines. Son naze en bleuit. V'l qu'il se met ressembler au drapeau hellne, Komtulagros ! Il se contient pourtant et gamberge longuement. Le regard perdu dans une fssure du plaftard. - -Non, fait-il enfin... A la rigueur, on aurait pu charger la fausse caisse Marseille, mais on n'aurait pu dbarquer la vraie au Pire car j'ai surveill personnellement le dbarquement du fret. On n'a descendu au Pire que des voitures...- Et Samothrace, commandant?Il hoche la tte.- Parlez-ent pas. L'accs de l'le est trs difficile, et c'est pourquoi mon bateau a t choisi... Pour descendre la caisse on a d utiliser les moyens du bord car il n'existe aucune grue dans l'le. Il n'y a pratiquement pas de port, mais seulement des mouillages...Il se redresse- sur son oreiller et agite son index sous mon nez.-Vous perdez votre temps, commissaire ! Sur l'honneur j'affirme qu'il a t impossible de dbarquer cette statue depuis qu'elle a t place mon bord ! En conclusion c'est la fausse caisse qui fut charge Marseille et la substitution a eu lieu en France !Je comprends qu'il sera dsormais impossible de lui arracher autre chose.- Mes voeux de prompt et complet rtablissement, commandant, lui dis-je en m'inclinant civilement.

CHAPITRE IV

DANS LEQUEL JE VOUS MENE EN BATEAU !

Nous rcuprons Kessaclou dans le couloir. Il parait drlement hargneux, le chtif interprte; prt m'interprter un enguirlandage de Premire en grec moderne. Il aime pas qu'on le traite comme un pot de rsdas et qu'on le colle sur le balcon. Les hommes, plus ils sont petits, plus ils sont ptardiers.- Vous avez du nouveau ? demande-t-il lorsque nous sommes sortis du centre hospitalier.- Rien, lament-je. J'en arrive penser que les dieux de l'Olympe nous ont fait une blague et ont dguis la mre "Victoire" en bloc de fonte...- Puis-je vous demander ce que vous comptez faire ?- Visiter Samothrace et le KavulomKavulos, -rponds-je.Kessaclou opine.- Nous avons prvu un hlicoptre militaire pour vous conduire directement de Salonique dans l'ile.- Bravo ! vous faites bien les choses...Pinuche marche en lui-mme. Il baigne dans sa propre lumire intrieure. Je devine que des penses sherlock-ho'lmiennes gouttent de sa pauvre matire grise, comme d'un vieux robinet au joint us.- A quoi songes-tu ? demand-je au fan.Il se gratte le bout du lobe, marque un temps et dclare- J'attends d'avoir vu le bateau pour t'en faire part !Un vrai mystre ambulant et dambulant, ce Pinuskos- Tu ne peux pas me dire tout de suite ?- Que non point, je veux me rendre compte de visu.Retour l'aroport. Une banane volante est l qui nous attend. Bientt nous survolons la mer Ege tire de pales. Cettefois, mon honorable, bien que vtuste confrre, s'abstient de pioncer. Ses paupiresbatraciennes font du morse. C'est beau la pense humaine en action ! Quel plus noble spectacle en vrit qu'un homme aux prises avec les acrobaties de son cerveau ? Comme les chutes du Niagara, le grand canon du Colorado, l'esplanade des invalides et deux bras en Y sont peu de chose comparativement ! Comme cela force le respect! Comme cela impressionne ! a craque dans le cervelet de la Vieillasse ; a gondole, a tirebouchonne, a bouillonne.- Aprs ce premier tmoignage, quel est ton sentiment? noble marathonien de la dduction solitaire ?- Faut voir, prudence-t-il.- Mais encore, chre antiquit?- Je ne crois pas, en effet, que la " Victoire " ait t descendue au Pire.- Pourquoi ?- Si le commandant a surveill les oprations. et s'ils n'ont dbarqu- aucune caisse, il n'est gure possible que la statue et t retire clandestinement du bateau, vu son poids considrable...- Ce qui revient dire?- Qu'elle se trouve peut-tre encore dans le "Kavulom-Kavulos ".Je file sur mon camarade et nanmoins ami un coup de priscope vachement aigu.- Tu te figures peut-tre qu'on a pu planquer ce bloc de caillou dans le tiroir cravates d'une des cabines?- Je demande voir le bateau avant de poursuivre cette conversation, doctoriset-il.Impossible de lui en tirer davantage. Le sphinx, il est Pinaud. Tous les SherlockHolmiens ont le culte du secret. -Quelques heures plus tard, notre ami Kessaclou nous dsigne l'immensit bleu ardent. Au loin, une tache ocre est pique sur la mer.- Samothrace ! annonce-t-il.Notre zinzin tournique avec un bruit de turbine au turbin.Les contours de l'le se prcisent A mesure que nous approchons on distingue lesescarpements rocheux, les fouilles, (en bton), le sanctuaire des Cabires, les ctes granitiques et, un peu en retrait dans une anse mal abrite des Vents des Dardanelles, un navire blanc au mt duquel flotte le pavillon grec. Mettez sur tout a un soleil faire bronzer un petit suisse, ajoutez des barres d'cume argente, des reflets d'meraude, une vgtation luxuriante et vous obtiendrez la plus belle illustration pour calendrier des postes jamais ralise.- C'est beau, ble le bon bonze.,Sa pauvre bouille cou-leur de poubelle est embellie par la noble lumire. Lorsque nous descendons de notre bulle de plexiglas, il semble irradi, le radieux.- Bath bled, murmur-je.-Oui, convient mon compagnon, dommage qu'il n'y ait pas de caf dans les environs, je meurs de soif! a doit tre intressant de passer ses vacances ici avec un bon fauteuil de toile et du muscadet frapp...Un canot automobile danse le long du golfe clair.- C'est pour nous conduire bord, avertit Kessaclou.Nous prenons place dans l'embarcation. Un marin vtu de blanc se tient au volant. il nous adresse un hochement de tte (tant donn leur rputation, les Grecs n'osent plus branler le chef) et actionne son dmarreur.Il y a une ambiance d't, de vacances... Je dois faire un effort pour me dire que je suis ici en mission commande. Et quelle mission ! Retrouver la "Victoire de Samothrace " !Le Kavulom-Kavulos est mouill (jusqu' la ligne de flottaison) un quart de mille du rivage. En quelques minutes, nous abordons l'chelle de coupe (destine l'origine aux rabbins) et nous grimpons bord du btiment. Le commandant en second (devenu commandant en premier depuis l'hospitalisation de son suprieur) nousaccueille dans un bel uniforme blanc qui le fait ressembler un yachtman. A l'exception de sa moustache et de ses galons, il est blanc de bas en haut, au point que quand il croise un mur blanchi la chaux on ne peut plus le voir.C'est un homme d'une quarantaine d'annes, svelte, beau gosse et aux gestes harmonieux.- Heureux de vous accueillir, tous les trois, nous fait-il :en franais.Je lui serre la paluche et je me tourne vers Kessaclou.- L encore nous allons pouvoir nous passer de vos services, mon cher, lui dis-je. Vous pouvez donc aller nous attendre dans le canot.Rageur, hum'ili, ulcr, meurtri, baron, refoul, diminu, expuls, dfqu l'interprte redescend l'escalier.- Avant toute chose, fais-je l'officier, nous aimerions visiter la cale...- A votre disposition; messieurs.Et de nous entraner sa suite dans les flancs du barlu. La cale est divise en deux parties, l'une plus petite que la seconde et la seconde beaucoup plus grande que la prcdente. C'est dans cette dernire que nous dbouchons.Il est vide, ce qui le fait paraitre beaucoup plus vaste. Il me fait songer la scne d'un grand thtre lorsqu'elle est dbarrasse de ses dcors.- C'est ici qu'tait arrime la " Victoire" ! nous dit l'officier en dsignant quatre montants de fer boulonns dans le plancher. Nous avions bloqu la caisse entre ces poutrelles mtalliques spcialement fixes pour assurer la statue un quilibre absolu.Des filins d'acier partent des tiges de fer. Le marin nous explique qu'ils ceinturaient la caisse au navire. et la rivaient littralement.- On aurait pu mettre le bateau la renverse sans que la statue ne bascule, prcise-t-il.- J'examine le systme de fixation simple mais efficace. J'imagine mal qu'en-cours de route quelques dgourdoches aient eu la possibilit matrielle de librer le mastar colis et de le remplacer par un autre. Le poids norme de la " Victoire " ne permet pas de la manoeuvrer sans le concours de treuils et de palans, il et fallu qu'une grande partie de l'quipage participt l'opration, ce qui parat impensable.- Combien d'hommes bord ? m'enquis-je.- Trente-quatre, officiers compris,Il a soulev son sourcil gauche, ce qui ne signifie pas premire vue qu'il soit inscrit au parti communiste, mais qui dnote de sa part une certaine surprise.-- .- Avez-vous engag des lments nouveaux en vue de ce transport? Cette fois il lve son sourcil droit, qui n'indique pas. forcment sa sympathie pour maitre Tixier-Vgriancaur, mais bien une progression dans la surprise.- Qu'entendez-vous par-l?Je lui suave du Colgate de la banane cuve.- Ma question est pourtant fort simple. Au moment de quitter votre port d'attache pour Marseille avez-vous engag de nouveaux marins?- Sans doute, rpond l'officier Les quipages se dfont et se refont Je pense que nous avons d enrler une demi-douzaine d'hommes Patras avant de prendre la mer.- Il me serait agrable de m'entretenir avec eux !Cette fois, l'officier ouvre toute grande sa bouche, ce qui ne veut pas dire qu'Il souffre des vgtations, mais qui dmontre que sa surprise arrive son paroxysme.- Je ne comprends pas pourquoi? finit-il par murmurer, profitant de ce qu'il a le bec ouvert.Je lui rpondrais bien que son incomprhension me laisse aussi froid: qu'un nez de chien, qu'une main de femme, qu'un coeur de contractuel, que le bec verseur d'un esquimau souffrant de la prostate, qu'un souvenir professionnel de Paul-Emile Victor ou qu'une panne de chauffage dans la Galerie des glaces ,seulement je suis un garon bien lev (merci la Bldine Jacquemaire) et qui reprsente la France tern'elle en terre trangre. ' Je suis un ancien footballeur et c'est pourquoi quand en gnral des goals viennent se faire voir chez les Grecs, ils ne font pas comme chez eux, mais comme chez Zeus.- Simple formalit, lud-je.- Si vous voulez bien me suivre, je vais consulter le livre de bord !J'o-k-je.- Tu viens ? demand-je Pinuche.Ce dernier est quatre pattes l'autre bout de la cale.- Un moment, dit-il d'une voix chevrotante, je procde au relev de certains indices.Retenant mon dbut d'hilarit, j e suis le commandant en second jusqu' s'a cabine. Le Kavulom-Kavulos est un barlu moderne, magnifiquement quip. On n'a rien nglig pour le confort de l'quipage en gnral et pour celui du commandant en (simple) particulier. Son appartement comprend: un salon avec vue sur la mer pourvu de sofas profonds comme des fosses marines et d'un piano aqueux; un bureau plein de cartes (bridge et tarot) et orn d'une boussole, d'un sextant et d'un compas (ce dernier tant sous verre car le commandant qui est myope se le collait rgulirement dans l'oeil) ; enfin, d'une chambre coucher possdant tout le confort et jusqu' un lit.C'est dans le bureau que l'officier m'introduit. J'vite de le prcder car tre introduit par un Grec est toujours un instant dlicat.- Asseyez-vous, monsieur le commissaire. Que puis-je vous offrir? Whisky, punch, porto ?Connaissant les marins comme je les mconnais je me hte d'opter pour le punch ce qui me vaut un sourire satisfait.Il presse sur un timbre deux drachmes et un mataf surgit. Le personnage est assez singulier pour solliciter mon attention. Je me demande s'il s'agit d'un matelot ou d'une matelote (d'anguille car il trmousse du- sac miches). Il est mince, avec des formes au deuxime et au rez-de-chausse. Il a les yeux faits, un soupon de rouge lvres, des souliers talons hauts et ses tifs sont si longs qu'il les noue sur sa nuque au moyen d'un ruban de velours.-Sertkuis, prparez-nous deux punchs; ! ordonne mon mentor, lequel est un peu cuit. - Avec du Citron vert, chri ? roucoule le mataf.-Le commandant lui fait les gros yeux et opine. Il a envie d'opiner ds qu'il voit .S~kui~s;Tandis que la matelote opre, l'officier compulse le livre de bord. Il feuillette lentement les pages car elles sont entirement cries en grec, or, long nabot tre grec soi-mme de pre en fils des caractres de cet alphabet Sont difficiles lire.Il s'arrete au troisime alina de la page 12f et "murmure- Nauzivlo (ce que malgr votre inculture notoire, vous aurez traduit par " nous y voil ".-C ontrairement mon estimation, ditil; nous avons engag quatre marins et non six.- Leurs noms, je vous prie.- Ffissa, Sakaplos, Olimpakokatris et Tdonksikon.- Cela vous ennuierait-il, de convoquer ces hommes ici tour de rle? - Du tout !Sertkuis, la jolie marine, nous sert un punchs qui flanqueraient de l'nergie nuclaire dans un camembert point. -- Ctikcbon ? demande-t-il en grec et en minaudant son commandant. --- Parfait! approuve celui-ci. Lors, l'officier crit les blazes des marins prcits sur une feuille de bloc et enjoint la ravissante matelote de convoquer les intresss. Je regarde partir Sertkuis. Comment qu'il tortille du valseur ! Le commandant a les yeux braqus sur les hanches de son steward. Il y a de la nostalgie dans ses prunelles marines. Il saperoit que je l'observe, rougit un peu sous sa casquette et murmure- Un charmant petit mousse.:Il y en a qui prennent la bire sans mousse et d'autres qui prfrent prendre le moussesans bire. .,,- Il vous sert d'ordonnance ? demand-je, histoire de cacher la mre. - Voil ! fait-il soulag.M'est avis que cette ordonnance c'est plutt un remde! Nous trinquons et, par magie, le bruit de nos verres entrechoqus provoque l'arrive inopine de Pinaud. Le dmantel parat survolt; entendez par-l que ses paupires sont lgrement souleves et que sa moustache tombe moins bas.- Alors,, Duchenock-Holmes, le cueill-je froid, a cambuse selon le plan trac l'avance, par Conan Doyle?- Mieux que tu ne penses, San-A. Mieux que tu ne penses !- Raconte !- Prmatur, hermtique le Pantelant. Je voudrais poser une question monsieur l'officier.- Je vous coute ! s'empresse l'intress,Pinaud se racle le corgnolon.- Nous avons vu le commandant Komtulagros Salonique. A un moment donn il nous a dit que l'accs de Samothrace tait difficile aux bateaux et que c'tait cause de cela qu'on avait choisi le Kavulom-Kavlos pour y transporter la " Victoire " . Qu'a-t`_il donc de particulier?Dix sur dix pour la Vieillasse. La question est pertinente. Si le Sagace se met faire fonctionner sa matire grise outrance, m'est avis qu'on va se l'arracher la Maison Poultok.- Notre bateau appartient au duc de Coquil-Saint-Jacques, rpond l'officier, comme si cette rvlation devait constituer une explication.- Et alors? insist-je, sans crainte d'taler mon non-savoir.Au passage je voudrais attirer votre attention sur l'intrt qu'il y a avouer son ignorance. Trop de gens jouent les savants, les affranchis, les documents alors qu'ils ignorent de fond en comble (si, j'ose dire) la question largue sur le tapis vert de la conversation. Il existe toute une panoplie d'homme inform: hochements de tronche entendus, raclements de gorge doctoraux et surtout bouts de phrases qui laissent accroire que ; tels que, deux points ouvrez les guillemets: o est-elle ?Il rouvre ses paupires et ses yeux brllant de fivre refltent les merveilleux petits nuages de ce matin neuf.- Quelle "Victoire" ? Qu'est-ce que vous voulez dire?Ma parole, il n'a pas l'air au courant. a m'tonnerait qu'il cherche me blouser en ce moment. En pleine agonie, qu'il est, Julot Ma bastos lui a drlement compost le tiroir-caisse! Vous pensez, du 9 millimtres, faut une sacre cuillere de bicarbonate de soude pour digrer cet aliment-l !Mon humanisme se rempare (de Carcassonne) de moi. S'agit de le convoyer jusqu' un poste de secours. Je me baisse pour le prendre dans mes bras, mais cet instant il soupire "rrrh " et lche la rampe.Je lui fais le test de la paluche 'sur le battant. On annonce relche pour rptition. Mort qu'il est, le tireur de mademoiselle Polis. Je l'abandonne et me redresse, dconcert. Un bruit me fait tourner le chou. Deux pcheurs qui radinaient, lests de filets viennent de rebrousser chemin. Ils ont largu leur matriel sardineux et ils courent comme des rats drats qui auraient des rats. C'est pas le moment de contempler l'infini pour voir si le Bon Dieu a flanqu assez de lessive dans la mer pour que la maison Kodak y trouve son compte ! Je saute au volant de la Rolls et j'embraye.C'est la premire fois que je pilote un carrosse commak, mes lapins. J'ai l'impression de driver the queen d'Angleterre ! A ce propos, a me rappelle une blague que mon ami Robinson Friday de l'abb-baiss m'a raconte: " Une Rolls et une Bentley se trouvent " nez nez > dans une ruelle de London. Aucun des deux chauffeurs n'accepte de reculer. A la fin, y a le conducteur de la Bentley qui descend et s'approche du chauffeur de la Rolls. < J'aime mieux vous prvenir tout de suite que c'est Mon sieur Bentley lui-mme qui se trouve dams ma voiture et qu'il n'est pas question que je recule >, dclame-t-il. Alors le pote de laRolls descend son tour et ouvre la portire arrire. Et a, fait-il, en montrant la reine d'Angleterre, c'est de la m... ? (1) >Je remonte toute vibure le chemin qui conduit la nationale. Ma dcision est prise; Maintenant je dois me placer sous la protection du commissaire Klecchimos, sinon il va m'arriver un turbin. Je fonce en direction d'Athnes. Une premire pancarte rdige en caractres grecs me fout dedans et j'atterris dans la cour d'une usine, au moment o les ouvriers rappliquent. Je fais sensation. Il s'agit d'une fabrique de cageot et tous les caissiers (puisqu'ils font des caisses) me lancent des quolibets aigres-doux, comme quoi " Vivement que le communisme arrive qu'on puisse dguiser les Rolls en brasiers et leurs conducteurs en bonzes non ignifugs. > A quelques mots prs, a doit tre a qu'ils me virgulent, les frileux de la nouille l'eau.Je manoeuvre au milieu des manoeuvres et je fais demi-tour droite, droite ! Cette fois c'est du nacht Athnes !Maintenant, il fait tout fait jour. Un sommeil de plomb me brle les paupires.Je remise le contre-torpilleur des Polis dans un champ et j'en crase. Je fixe dsesprment la " Victoire de Samothrace " modle rduit qui parait s'lancer l'avant du capot. Elle guide mes pas. Me conduira-t-elle jusqu' la vraie?Tout fait entre nous et la Cordillre des (happy) Andes, c'est pas du tout de suite, mes mignons, vu qu'un barrage de police se dresse au bout de la route.Je flanque un coup de patin. Cette volaille, c'est srement pour mes pinceaux ! Que faire? Rebrousser chemin ? A quoi bon? Je joue perdant. Le mieux est d'aborder le problme de front.Je continue d'avancer petite allure. Il y a des poulets casqus avec des mitraillettes plein les brandillons qui se htent de me coucher (moi qui ai si sommeil) en joue.- Bonjour messieurs. Je leur dclame,, justement je cherchais un poste de police..,L'un d'eux ouvre la lourde et me fait signe de descendre. J'obis. Un coup de crosse morfle en pleine gaufre me fait rater les seize marches du perron de la Rolls. Je vois la victoire du radiateur qui s'envole et je me prends un billet d'orchestre.

CHAPITRE X

DANS LEQUEL JE ME COMPORTE DAVANTAGE COMME UN MALFRAT QUE COMME UN COMMISSAIRE !

Vachement teigneux, qu'il est le collgue Klecchimos ! L'eusses-tu cru que a n'tait pas une bonne pte?Les mains croises dans le dos, la bouche en guidon de course, la cravetouze noue la diable, il marche dans le commissariat de grande banlieue o l'on m'a conduit, va, vient, jette son venin, rouvre la bouche et recommence et je mdite, obscur tmoin.- Vous ne pensez pas que votre qualit de fonctionnaire tranger va suffire vous tirer de ce mauvais pas ! bave-t-il, ayant retrouv comme par miracle l'usage de ma langue maternoche. Vous n'esprez pas que je vais claquer des doigts et dire qu'on vous relche aprs que vous avez viol la petitefille d'un haut diplomate et assassin son chauffeur ?- coutez, Klecchimos...- Appelez-moi monsieur le commissaire ! barrit-il.C'est vous dire si la situation est mocharde pour votre ravissant San-A., mes trsors ! Quand un poulaga renie un autre poulaga, ce dernier peut se faire inscrire l'Arme du salut.Je ronge mon frein jusqu' l'os, je fais contre mauvaise fortune bon coeur, je me dis que rien ne sert de courir et qu'il faut partir point, que l'apptit est le meilleur cuisinier; que tant va la cruche l'eau qu' la fin elle se casse; qu' bon entendeur salut -et qu'il faut qu'une morte soit toute verte ou enferme, et je mets mon mouchoir par-dessus ces maximes.- Ecoutez, monsieur le commissaire. (Je rfute.) Polis s'est donne moi, comme vin dans la " Veille des Chaudires ", et j'ai abattu son larbin en tat de lgitime dfense !Il ragit et rugt- Elle s'est tellement donns vous qu'on l'a retrouve ficele et billonne dans une baignoire ! Et des pcheurs dignes de foi (de morue) vous ont vu tirer sur le chauffeur !- Je maintient mes dires, monssieur le commissaire ! insist-je. Et je vais mme plus loin: les Polis ont tremp dans l'affaire du vol de la " Victoire ".Il bondit.- Quoi !- C'est la vrit. Deux marins du Kvulom-Kavulos se sont fait dbarquer Athnes sous des prtextes fallacieux. Ils ont pass vingt-quatre heures l'hpital et ont tlphon chez Polis pour qu'on vienne les y chercher. C'est Alexandra Polis et le chauffeur qui se sont chargs du transfert. De plus, vous avez d trouver dans le coffre de la Rolls un fusil lunette. Il sera facile de prouver qu'il a servi au cours de la nuit< Est-ce un objet qu'on a l'habitude de trouver, dam une auto de maitre ?Mes dclarations n'branlent pas Klecchimos.- Parce que Mlle Polis connait deux marins du Kavulom-Kavulos, vous croyez devoir la violer et la garrotter? Parce qu'il y a un fusil destin la chasse au chamois dans le coffre de l'auto, vous croyez devoir abattre le chauffeur? Je regrette, mais je ne puis rien pour vous, l'affaire doit suivre son cours, !- Et la " Victoire > aussi, ;suit son cours ?a le file en renaud.- Nous la retrouverons ! affirme-t-il.- Alors vous feriez bien de vous remuer le panier, parce que lorsque le monde apprendra la chose, votre rputation ressemblera une poubelle!- Ne vous inquitez pas pour ma rputation et songez d'abord la vtre! riposte-t-il. Moi, du moins, je ne suis pas inculp de viol et d'assassinat!L-dessus il s'en va. Oh, ce vilain temps, mes cocottes! Quand le Vieux va savoir a, il attrapera la jaunisse, c'est certain.Je me trouve dans une grande salle puante, enfume, noire, pleine de poulets, en civil et en uniforme. Ces carmes m'ont pass les menottes et, par excs de prcautions, au moyen d'une seconde paire de cabriolets ils m'ont enchain un grand vilai pas beau mal ras qui sent l'ail, les pieds ,et le poste de police.Je ne sais pas ce qu'on attend, mais on attend.Epuis, ulcr, coeur, dlabr, dmantel, je finis par m'endormir, la joue appuye contre le mur poisseux. Je suis nauseux, catastroph, mcontent de vivre. Ce matin, l'existence me parait non conforme. Je la mprise, la hais, la hais ! Sur le mur d'en face, la bouille du nouveau roi me dfrime dans son cadre administratif. En v'l un qui a bien ses soucis et qui doit en louced prparer ses sacs de golf pour partir en voyage...Tout se brouille, tout s'embrouille et je me dbrouille pour perdre conscience !Une voix familire, une voix aime, une voix que j'affectionne, une voix aux sonorits riches et fortes, une voix timbre au barme de l'amiti m'arrache aux vapes.Elle dit, cette voix, avec vhmence, avec bonne volont- Alors personne cause franais dans cette turne, les mecs? Quand un touriste veut dposer une plainte en bon uniformefaut qu'il allasse chercher un inter-prtre ?- Do you speiak english ? demande l'un des employs du commiss~ariat.- Couci-coua, rpond la voix aime. Je suis pas tellement dou pour les langues., part la langue de boeuf braise et la langue fourre princesse. Je vais vous expliquer. Je suis un confrre to you. My name is Brurier, Alexandre-Benoit et j'ai venu in Grce whith my bonne-femme pour passer unes hollidays. You pigez? Tout l'heure, v'l que Yorganisse qui drive us travers the ville nous emmne au muse. Au muse ! Je vous demande un peu, comme si y aurait pas mieux branler quand t'est-ce qu'on excursionne dans une capitale. Brfle, pendant que la gonzesse qui nous pilotait expliquait comme quoi un bout de ferraille bouff aux charanons remontait des j'sais plus combien, before Jsus-Christ, moi je m'sit down sur un banc, manire de m'enlever une targette. Je porte des chaussures neuves et je blesse d'un panard, you see ? Il m'tait venu une Wonder mahousse comme mon poing au talon d'Eschyle. La visite se poursuit et qu'est-ce que je m'aperois ? J'avais laiss mon appareil-photo sur le banc ! Je galope le rcuprer: tintin ! Un foie blanc me l'avait secou vite fait, je veux dire quickly ! Un kodak pustule photo hyginique -testace dans le corps de l'appareil !Si j'coutais l'Adagio d'Albinoni, la Cinquime de Beethoven ou la Flte Enchante-de-vous-connatre de Mozart, mes oreilles ne seraient pas davantage charmes.Bru ici ! Bru Athnes ! Bru au commissariat! Mais c'est du rve grand spectacle ! C'est du miracle l'tat pur ! Ou qui sait,, peut-tre du mirage, non? Des fois que je rve ? Faudrait savoir... Je me pince, comme il est recommand de le faire dans ces cas-l. Pas d'erreur, i am lucide.- Salut, Grasse Pomme, je murmure entre mes chailles.Le Bru, il a l'entendement branch sur le retard.- En tant que confrre of you, poursuit-il, j'espre que vous allez vous maniez la rondelle et que... Et puis, brusquement, il ralise qu'on vient de lui causer franais et il sursaute. Il m'avise, doute de ses cinq sens, de Camille Saint-Sans et s'arrondit intgralement tous les orifices pour bien affirmer sa stupeur.Je me mets chantonner, comme si je ne m'adressais pas lui, sur l'air de " Si tu ne lat veux pas, je la remets dans la capote >.- Fais pas c'te bouille, Gravos." Sinon je l'ai dans le dos." A la suite d'un coup fourr" Me voil enchan" Prviens tout de suite le Vieux " Qu'y a du mou dans la corde noeuds " Dis-lui que je suis sur la trace" D'la Victoire de Samothrace " Et fais fissa, mon gars " Fais fissa, fais fissa !Il a vachement le contrle du self, Brurier. Il renifle un grand coup, remonte ses chaussettes vertes sur ses grosses cannes poilues, tire sur les bords de son Bermuda rayures bleues et rouges, passe ensuite la main par l'chancrure de son polo jaune orn d'une raquette orang, et enfin soulve sa casquette de toile violette longue visire verte qui le ferait ressembler un jockey s'il pesait quatre-vingts kilos de moins. - Bon, now, messieurs and gentelmans, je vous laisse le soin de faire le ncessaire pour retrouver my Kodak. Vous savez ce que c'est ? Un touriste sans Kodak, c'est une tte de veau sans vinaigrette ! On a beau se faire tirer la vitrine par les professionnels, a vaut pas le clich d'armateur. Remember ,de my name : Brurier, B- b, r-u rier ! Je suis l'htel d'Antigone et d'Anouilh runis. Bons baisers aux enfants et la revoyure !Il fait une sortie enleve qui laisse la flicaille dans l'tonnement,. le trouble et l'indcision.Du coup, il se sent mieux, San-A. Quand le hasard se met vous faire risette, vous vous sentez drlement costaud. Sa Majest va illico tuber au Tondu, lequel remuera ciel, terre, eau, gaz et lectricit tous les tages pour me tirer de la mouscaille peu glorieuse dans laquelle je me suis flanqu.Je coule un regard la pendule du commissariat. Son cadran n'est pas rdig en chiffres grecs et annonce dix plombes. Combien de temps encore va-t-il falloir poireauter dans ce local sinistre?Ma somnolence a t rparatrice. Je me sens un peu mieux, l'esprit combatif, sans lequel il n'est pas de vie possible, ,m'habite (en bandoulire) nouveau.Vingt minutes s'coulent encore, goutte goutte. Le gros mchant auquel je suis uni par les liens nickels des menottes bille en dcrocher la mchoire d'un crocodile.Soudain un coup de patin retentit au-dehors. Je vois, travers les grilles de la fentre, un fourgon noir et austre. Pas d'erreur, c'est le panier salade qui va me conduire en prison ! Vous parlez d'un honneur pour la famille !San-Antonio embastill comme le premier malfrat venu ! Dcidment on aura tout vu: les poils de mes bras et les poils de mon ami Luc ! De quoi se frotter le dargif sur une banquise jusqu' ce que l'un des deux s'enflamme.Deux gardes pntrent dans le poste. Mon gorille se dresse et tire sur la chaine, comme on tire sur la laisse d'un clbart pour l'emmener balader.

CHAPITRE XI

DANS LEQUEL BERU SE HISSE AU NIVEAU DES PLUS GRANDS !

Une foule considrable cerne l'entre du poste de police. Les badauds regardent la Rolls et le fourgon noir avec curiosit; sensibles l'anachronisme que constitue la runion de ces deux vhicules. Lorsque je parais, enchain mon king-kong, un murmure tout hasard hostile monte de la populace. L'un des gardes ouvre la porte arrire du fourgon. Avant que je n'escalade les degrs du marchepied, le gorille me dchaine because les cellules individuelles du fourgon ne peuvent hberger plus d'une personne, la rigueur une personne et demie, la fois. Comme il n'y a pas de gardes cul-de-jatte, force leur est donc de M'isoler. Ds qu'il me dchane des lments mystrieux en font autant. Une explosion retentit : de hautes flammes jaillissent sous le fourgon, le lchent, l'enveloppent. Le feu se met serpenter dans la foule qui se dbine une allure supersonique et en produisant des " bangs " galement supersoniques. Une traine de poudre, les mecs ! Les passants, les nonpassants, les flics en uniforme et les z'encivil, tous prennent la direction de leur choix et essaient de battre le record du monde des dix mille mtres.Je reste plant sur le marchepied me demander ce qui arrive. Comme je me le demande au milieu d'un brasier, mes rflexions revtent vite un intrt brllant.- T'attends le mtro ou d'tre cuit point ? rugit l'organe bruren:Mort de mes os ! Je pige que cet incendie surprenant est une manoeuvre de mon ami Alexandre-Benot En voil un qui tombe pique..Je saute du fourgon. La bagnole du Gravos est l, portire ouverte. Je me prcipite l'intrieur sans rflchir qu'en agissant de la sorte j'aggrave drlement mon Cas.- T'es dingue, Gros, j'halte. Un coup pareil c'est la Bastille pour toi, je suis inculp de viol et de meurtre !- Et ta sister, elle est inculque de tapinage sur la voie biblique? riposte le Mahousse.Sa Majest, je vous l'ai souvent dit, mais dans les grands instants, elle est sublime ! Vous le verriez au volant de sa vieille traction ravaude, vous en prendriez des vapeurs.- T'as eu le temps de tubophoner au vieux ?- Je suis tt au bureau de poste, ils m'ont renseign comme quoi y avait une plombe d'attente pour Pantruche ! Les bigophones, a devient plus praticable, maintenant ! C'est presque aussi duraille de causer d'Athnes Paris que de Meulun Paris ! Alors je m'ai dit que j'avais meilleur compte de t'estirper de ce gourbi par mes moyens privs. Qu'est-ce tu voulais qu'ilfasse, le Dabe, depuis son burlingue, qu'il t'envoie une boite de crottes en chocolat?- Et qu'est-ce que tu as fait?- J'avais une nourrice de rserve dans ma guinde. Quand le fourgon cellulaire s'es annonc, j'ai rpandu ma tisane dessous en laissant des traines jusqu' la lourde de mon poste. Une petite alloufe au bon moment et t'as vu le rsultat?- Tu aurais d te faire artificier, approuv-je. Seulement fais-leur confiance aux poulardins grecs, on va les avoir au paniei dans pas longtemps et peut-tre avant. Sur tout qu'avec ton os., pour passer inaperu; faudrait que toute la population hellne soi devenue aveugle et sourde !Il volante brillamment, prenant des virages angle aigu, la lvre infrieure bloque dans son rtelier incomplet.- Tu crois que c'est le moment d'insulter Agathe? lache-t-il avec seulement un coin de sa bouche.Agathe, c'est sa Citron carolingienne Il y tient comme la prunelle de ses yeux Elle part en copeaux, en lambeaux, en ftus en poussire. Il y a du carton la place des vitres et une photo de fille poil la place du rtroviseur. Le capot tient avec du fil de fer et il bouche les trous de ses pneus harasss avec du chouingue-gomme machouill, mais Agathe tient toujours la route. Elle perd son huile, ses boulons, sa tubulure, ses ressorts, sa courroie de ventilateur, ses vis platines, ses bougies, mais elleroule encore ! Elle n'a plus d'essuie-glace; ce qui est sans importance puisque le parebrise est absent, ses phares pendent au bout de leurs fils comme deux poires blettes, et elle est cabosse comme une bote conserve ayant servi de ballon de foot des coliers, mais elle roule toujours. Elle donne de for bonds, vu qu'il lui manque des lames de ressort, les rouescrivent dix-huit en tournant, les coussins ressemblent des fourchetes de fumier, sespare-chocs, sont des fers de lance, mais elle absorbe les kilomtres comme une grande !Le cercle du volant tient l'aide d'une cl de boite sardines, le levier de vitesse a t remplac par un tisonnier de cuivre, mais le Bru continue de manier son automobile avec brio, et de la conduire vive allure sur ses chemins tortueux de la gloire et de l'honneur.- O me conduis-tu, m'enquiers-je, frapp par la dtermination de mon ami.En effet, il roule sans la moindre hsitation; tournant gauche ou droite en homme sachant o il veut aller et sachant y aller ! - a serait indiscret de te deMander ?- Ocupe-toi pas du chapeau de la gamine, j'ai' mon plan.- On va la Cropole, bougonne-t-il.Comme muet de surprise,, je ne ragis pas. il rcite- La Cropole est une citadelle de l'ancienne Athnes, sur un rocher haut de 270 mtres. Cette vieille forteresse, avait encore son palais, fut ravage par les Perses, lors des guerres mdiques. Au V'e sicle avant Jsus-Christ, la Cropole, consacre Athna, fut orne demagique monuments...Il se tait.- J'avais appris tout le blaud sur mon.. guide, mais aprs jsais plus.- Qu'est-ce qu'on va foutre l'acropole, Gros ?- On va carrer ma chiote dans le lot et se prendre un bus touristique. Souviens-toi,- que c'est toujours dans la foule qu'on se pla'nque le mieux.,- Tu m'as l'air de connaittre le coin fond.- Espre un peu, moi et Berthe, on y va tous les jours. J'sais pas ce qu'a pris ma bonne femme, mais le partez-donc, c'est son vice depuis notre arrive ici. Elle s'y trouve en ce moment que je te cause.Il trouve le moyen de boutader, alors qu'il cogne le cent dix sur son tas de rouille- Je savais qu'elle aimait la graisse, mais ce point, a me fait comme le fameux radeau: a me mduse !Ayant de la sorte apport son tribut l'humour, il se consacre la difficile conduite d'Agathe. Je me retourne sans arrt, m'attendant voir dbouler des motards, mais tout est tranquille: Ma fuite dans la panique a magnifiquement russi.Dix minutes plus tard, nous sommes au pied de l'Acropole. Bru se faufile travers la mer de chignoles remiss-l. Il dgauchit une place, s'y range, et saute de voiture.- tu vas m'aider ! ordonne-t-il en dgageant la chane qui ferme sa malle.- 'A quoi faire ?- On va mettre Agathe son prservatif, dit-il en sortant une bche bleu mtallis. D'abord a la camouflera, ensuite comme je sais pas combien de temps la pauvrette va moisir ici, au~ cas qu'il pleuvrait a lui tiendra le nez au sec !Nous couvrons donc le bolide, avec les soins minutieux que peuvent apporter les mcaniciens de l'quipe Ferrari leurs coursiers engags aux 24 plombes du Mans.Ensuite, le Gravos me drive vers le parking rserv aux cars.- On va aller se planquer dans mon bus habituel, je commence connatre le chauffeur, un mec tout ce qu'il y a de charmant, je lui expliquerai que t'es un aminche de rencontre et j'y glisserai quelques braquemards (c'est la mornifle du patelin) pour qu'il acceptasse de te vhiculer.Le Puissant passe en revue les bus bleus ou rouges rangs au bas du Parthnon.- Le ntre, c'est le bleu bande crme, l-bas ! dit-il.On s'y dirige. Il n'avise pas le Chauffeur.- Attendons le l'intrieur, recommande mon vaillant complice.Il ourvre la lourde du vhicule, escalade le marchepied et devient muet de saisissement. Je vois friser les poils de ses mollets.- Eh bien, ppre ? Je demande.Comme il ne rpond pas, je le pousse et me hisse prs de lui. Un spectacle d'unerare qualit artistique me saute aux lucarnes. Figurez-vous que, contrairement ce qu'on pouvait croire de l'extrieur, le car n'est point vide. Deux personnes s'y trouvent. Ces deux passagers discrets sont allongs dans le couloir du vhicule. L'une est une Passagre qui a nom Berthe B, l'autre est le chauffeur du car. Vu l'troitesse de l'alle, ces dignes gens ont d se superposer. C'est le chauffeur qui occupe la position suprieure. On dirait qu'il fait de l'hbertisme et qu'il tente, en rampant, d'escalader le vigoureux promontoire constitu par l'acadmie berthienne. Il se trmousse vilain ! Il vient, il va, il geint. Et la brave Berthy, toujours soucieuse d'assister son prochain, l'en-courage du geste et de la voix.- Berthe, nom de Zeus ! jure le Gravos en franco-grec.La douce pouse pousse une exclamation supplmentaire (de surprise celle-l) et relve sa tte boursoufle et rouge de volupt.- Alexandre-Benot ! balbutie-t-elle.Au lieu de faire jouer son diffrentiel pivot surcompens, le chauffeur de la compagnie Grce-Azur (C'est crit sur sa casquette.) met au contraire le grand dveloppement, et il a une bonne excuse celapuisque en argot athnien, " alec zandrebenoas " signifie: plus vite chri. C'est un Consciencieux, un obissant. Et puis il a conscience d'treindre la France ternelle et il se veut la hauteur de sa lourde tche. Il sait qu'elle en a vu d'autres, la France. Des vertes, des pas mres, des en couleurs, des en scope, des en tlescope, des en priscope, des vigoureuses, des vibrantes, des dmentielles, des artificielles, des pompidiennes, des trmoliennes, des mollessiennes, des dix-huitjuillennes, des hitlriennes, des ma~housses, des chtives, des renforces, des autoritaires, des majoritaires, des vellitaires, des astreuses et des dsastreuses.- C'est fini, ce branle-bas ! tonne le bermud. Vous pourriez vous arrter quand je vous cause !Du coup (si j'ose dire) le chauffeur interrompt son mange enchant et remet Polux la niche. Il se dresse sur les genoux, tels les Pompiens fuyant la colre du Vsuve.- Salopard ! mugit le Courrouc. Un mec que j'y offrais des cigarettes tout va et que j'y cloquais des pourliches royals !Il tend les deux mains son pouse pour l'aider retrouver la verticale sans laquelle l'homme ne serait qu'un quadrupde parmi tant d'autres.- Pour Berthy, y a des circonstances extnuantes, dclare-t-il mon intention, la pauvrette supporte pas le climat. La chaleur y porte la peau, c'est physionomiste chez elle, a on le sait ! Mais ce vilain macaque n'a pas d'excuses, lui! Il le connat son climat, non, quoi, merde !Bru cramponne le chauffeur par le collet, il le soulve, lui file de sa main libre une torgnole fracassante. L'autre se met glavioter ses chailles comme des grains de riz. C'est un type d'une trentaine d'annes, beau et frisott. Il est mort de frousse.Berthe renfile son propre Bermuda qui gt sur une banquette. Elle me prend tmoin.- Ces gens-l, me dit-elle en montrant son complice, ils ont total les culots, je vous jure... J'tais venue m'asseoir un moment ici pendant la visite, et puis voil monsieur qui me saute dessus,comme a, vous parlez d'un aplomb ! Moi, que voulez-vous, faible femme, quoi bon lutter?- Ma pauvre biquette ! lamente Sa Majest en chicornant l'autre de plues belle. On va lui faire casquer les dommages ce ouistiti. Se permettre des principauts de brute en blanc sur une innocente touriste infecte par la chaleur ! Si je m'couterais, je le conduirais au commissariat par les oreilles !- Tu crois que c'est le moment ? demand-je.- Non, exact, consent le Gros. Oh ! mais,, ajoute-t-il, il me vient une ide.Il propulse le Casanova de l'Acropole sur son sige.- Dmarre, mec !Comme le zig pige pas, je le lui dis en anglais. Il me zozote travers ses brches qu'il est oblig d'attendre sa caravane de parthni'ens.- Elle rentrera pinces ! lui assur-je, en route, on te dit.- O vais-je ?Je gamberge.- Tu connais l'adresse d'un fripier?- Ben... oui.- Alors, tu nous y mnes !Quelques minutes plus tard, l'norme vhicule se range devant une choppe du Pyre. C'est plutt minable, comme endroit, mais nous n'avons pas le luxe de faire la fines bouche.Fort heureusement, les poulets ne m'ont pas vid les vagues et j'ai mon fric intgral. - Je vais louer des frusques pour nous deux, Gros, dclar-je. Ton tour de taille oscille toujours dans les 120-140 ?- Toujours, affirme le Mastar. Surtout en ce moment que la boustifaille grecque me ballonne !J'entre chez le fripier et je lui achte deux tenues de pope. Comme, en outre, il fait dans la postiche, je -choisis deux barbes angoresques, noires, longues et carres comme des tabliers de sapeur.- C'est quoi t'est-ce ? demande Bru.- Je te ferai la surprise. Gras-double !Je m'empare d'un Guide bleu perdu dans le filet bagages. Je le feuillette jusqu' ce que je trouve la notice consacre au monastre du mont Phoscaos. Celui-ci se trouve dans l'ile d'Adamos, non loin d'Athnes. Il a t fond au XIIie sicle par sainte Bldine-la-Miracule qui fut la jacquemaire supriieure d'un couvent pendant la premire partie de sa vie, mais qui se consacra aux difices bibliques pendant la seconde. De nos jours, le monastre est occup pares des moines ayant fait le voeu de silence. Une fois la porte franchie, plus aucune syllabe ne passe leurs lvres. Voil qui arrange mes pinards. IL est galement prcis dans le guide que n'importe quel religieux peut sonner la grille du monastre. Il est reu sans avoir fournir le moindre mot d'explication, Beaucoup de popes, dus -dans leur apostolat ou ayant eu des maux avec leur mtropolite, se retirent ainsi au mont Phoscaos.- Chre Berthe, dis-je, puis-je vous confier une mission dlicate ?- Si c'est dans mes moyens, accepte-t-elle.- Nous allons nous faire conduire jusqu' un certain embarcadre. Une fois l, nous ligoterons et banderons les yeux du chauffeur; puis, Alexandre-Benot et moi-mme nous dguiserons en pope. Lorsque nous aurons pris le bateau; vous dlivrerez le chauffeur et vous vous ferez reconduire en ville. Tchez d'obtenir de lui qu'il ne dise rien...- comptez sur moi. Sa Majest toussote.- Aprs les Primauts de ce voyou, tu crois que je vais le laisser seul, avec Berthe?- N'oublie pas qu'une femme prvenue en vaut trois, le rassur-je. Berthe sait maintenant qui elle a affaire et tu penses bien qu'elle se tiendra sur ses gardes, !- Tu penses bien ! renchrit l'pouse. Il ne m'y prendra plus, le petit misrable.Tout en parlant, elle coule un regard nostalgique au chauffeur. Ses yeux tombentsur un criteau rdig en plusieurs langues Usuelles, telles que le sanscrit,, le franais, lecolombin, l'arachnen moderne, le nomdgau'gnafi, l'hpastol, le durlan, l'anglais. L'criteau recommande de ne pas parler au conducteur. Berthe est en train-de se dire que cet interdit vise la parole mais non les actes.Et des actes en puissance, il y en a autant en' elle que dans l'tude d'un notaire !

CHAPITRE XII

DANS LEQUEL ON EMPRUNTE A DOS D'ANE LES CHEMINS DE LA PROVIDENCE

A bord de la barque qui nous mne l'ile d'Adamos, je fais le tour, le point de la situation avec le Gros. Il m'a cout sans Mot dire. Chaque fois que je le regarde, j'ai un clat de rire qui me file le tube. Brurier en pope, c'est une vision qui ne disparatra pas de sitt de mon souvenir. Avec sa robe noire, son chapeau carr du dessus, sa barbouze frise et son naze rougeoyant, il vous en donne pour votre argent !- Qu'est-ce t'espres en allant chez ces moines ? demande-t-il.- Bdame : retrouver les deux mari'ns du Kavulam-Kavulos ! Aprs un coup pareil, ils taient soucieux de se planquer dans une cachette sure, sachant qu'une fois le vol connu il allait faire du ptard.- Mais comment qu'on va les reprer, on n'a pas le droit de moufter ?- Je sais bien, l'essentiel est de s'introduire dans la place, mon pope !- Tu crois qu'on fait vrai? Incrdulise-t-IL- Plus vrai que nature, mec. J'ai' jamais rencontr un pope ayant plus l'air pope que toi.Le cher cornard hoche la calbombe.- Exact, fait-il, j'ai toujours z'eu le sens du dguisement, dj, la ferme, je me foutais une paire de cornes pour ressembler un taureau, c'est chez moi !On aborde dam l'aimable petit port d'Adamos. Je file un bif au gondolier et je sors de l'embarcation, Bru idem, mais il n'a pas pris la prcaution de relever sa robe, et se prends un pinceau dans les longs plis de son vtement Inhabituel, voil l'inspecteur qui se ramasse un bifton, sur les dalles du mole (lesquelles dalles, elles, ne sont pas souples du tout. Je l'aide se relever. Dans la culbute sa barbouze est remonte jusqu' ses sourcils et il glapit qu'il n'y voit que tchi !Les pcheurs adamiens se cintrent.- a commence bien, ronchonn-je en tirant sur son ersatz de systme pileux pour le ramener un niveau normal, faut toujours que tu fasses des entres de cirque quand on part en dplacement. Le jour ou Zavatta cherchera un partenaire dmarqu, annonce-toi sans hsiter, Gars, ton heure de gloire sera venue.- T'es marrant, bougonne Sa Majest, j'ai pas l'habitude d'tre loqu en gonze, moi ! La dmarche soutanne, faut l'acqurir !- Ta bouche ! N'oublie pas qu'on part pour une cure de silence.- Justement, je lche la vanne avant d'entrer au monastre o qu'on va se conScrater dsormais la gloire de not'Seigneur qu'tait fils de Dieu, par son pre et de bonne famille par sa mre.Le monastre, il se dresse tout l-haut, sur les contreforts du Mont Phoscaos. Il est en pierres ocres qui tincellent au soleil ardent de leurs mille et mille et mile paillettes de quartz. Il a la forme d'un immense ,soutien-gorge bien rempli. Ses deux dmes, pareils deux gnreuses mamelles, sont termins chacun, par une sorte d'espce de bton fraiseux qui complte admirablement l'illusion.- Y'a pas de forniculaires Pour grimper l-haut? se lamente Brurier.- O te crois-tu, paule-hauss-je, c'est pas parce que a ressemble un peu au Sacr-Coeur qu'on a droit la place d'Anvers !- Ils auraient tout de mme pu pendre la crmaillre ! dplore le Valeureux. Les hommes de Dieu ont bien droit l'ascenseur quand t'est-ce qu'ils se rapprochent du patron, non ?Un zig comme un berger arcadien nous aborde. Il nous cause en grec, naturliche, mais je pige ce qu'il nous vent car j'ai l'oreille qui commence se familiariser, et puys ,ses gestes sont explicites. En effet, il tient trois nes par leur longe et nous les dsigne. Tantt il montre Bru;, tantt il montre un ne. Ce brave homme est un loueur de bourriques ,qui assure le service port-monastre. Mais Bru voit dans son mange une allusion outrageante. Avant que je n'ai eu le temps d'intervenir, il a claqu le museau du pauvre gars, lequel se retrouve le derche dans la poussire avec ses nes qui lui soufflent dessus comme dans la crche de Bethlem.- T'es pas louf ! m'indign-je.- Je tolrerai jamais qu'un enviand de Grec me traite d'ne sur la place publique ! mugit le mwgicien.Il devrait au moins avoir le respect de mon complet de pope, vu que c'est sa religion que je personnifie !- Mais il loue des nes pour grimper au monastre !Le Gravos se tripote les poils de sa barbouze.- T'es certain ?- Bien sr, le voil, ton funiculaire, h, fesses de singe !- C'est pas de bol, soupire le Pre Brurier en tendant la main sa victime pour l'aider se relever. Excuse-moi du peu bonhomme, mais j'eusse cru une alluvion malveillante. Turellement qu'on va se payer une partie de dada, biscotte avec mon soulier qui blesse je me vois pas fait pour la grimpette.Ce disant, le chevalier de Julinas s'approche de l'alibaron qu'il juge tre le plus fort et l'enfourche comme une motocyclette.- Hue Cocotte ! lui dit-il.L'ne ne bronche pars. J'enfourche le mien, le loueur le sien et nous dmarrons, mais on a beau exhorter la monture du Gros, elle refuse absolument de dcoller. Les nes, vous savez comment ils sont, les gars? Cabochards en diable ! Ils ont leurs ttes, leurs humeurs !Le grand manitou des transports publics d'Adamos-City passe derrire son vhicule et lui file un coup de fouet.L'ne rpond par une ruade qui envoie Monseigneur Bruros dame. Furieux, le Mastar se redresse et se prcipite sur son bourricot.- Ecoute, petit, lui vocifre-t-il dans les manches air, c'est pas une bourrique grecque qui va me couillonner ! Le dgourdi' qui veut faire l'ne avec moi n'a pas gagn. Et je te prviens charitablement que 'si tu. te prends pour le gagnant du Prix de l'Arc de Triomphe, je me charge de te rabaisser la gamberge !Le Matre de l'animal tend son fouet- Bru, lequel refuse.- Laisse-moi manoeuvrer, j'ai ma technique, assure-t-il.Il retrousse sa soutane, explore les poches de son bermuda (ce qui abasourdit l'Adamien) et en retire un tui de cigares et ,un briquet. Rallume un cigare, tire quelques goules pour en incandscenter le bout et enfourche son ne, l'envers. Il lui empoigne alors la queue, soulve celle-ci et, d'un geste premptoire enfonce le bout allum du cigare dans le figned de sa monture en dclarant:- Les passagers sont pris d'attacher leur ceinture !Il n'a pas le temps d'achever la phrase. L'ne vient de pousser un cri terrible et il dtalle fond de train. Bru se cramponne :sa~ croupe, ses poils, sa queue. Il le serre entre ses jambes; lui mord le Pelage, se plaque la bte. Bientt monture et cavalier disparaissent sous un nuage de poussire.- Je regarde le loueur. Il est tout renfrogn, mais pas soucieux outre-mesure. Du geste il me montre le mont Phoscaos pour me faire comprendre que son pensionnaire 's'y dirige.Effectivement, nous retrouvons, le Gravos, une heure plus tard, devant la porte du monastre. Il gt sous un olivier en se massant l'chine tandis que l'ne; revendicatif, lui braie des injures nires nez portant.- Tu es tomb ? m'inquit-je.- A l'arrive -seulement, cette sombre carne s'est roule par terre pour me dbarquer.- Bravo pour le rodo. Gros ! Je te jure que si les frres Bouglione voyaient ce numro ils te signeraient un contrat en blanc. C'est a le vritable pope-art !L-dessus je douille la croisire au reprsentant de la R.A.T.P. locale.- File-z'y une subvention pour qu'il offre des suppositoires adoucissants Gelinotte, recommande cette grande me brurenne.Ainsi est fait. Nous nous rajustons pour sonner la lourde lourde du monastre. Trs loin, dans les profondeurs du btiment, le tintement d'une cloche retentit. C'est le seul bruit qui nous parvienne. Tout est paix et silence. Tout est calme et repos. Tout est mditation et prire muette. La nature elle-mme ;semble abme dans des dvotions.- A partir de dornavant, chuchot-je, on joue bouche-cousue guichet ferm, hein, Gros?- Ne t'occupe !- Et souviens-toi qu'ici, le signe de croix se fait l'envers...- Comme la fondue savoyarde, souligne mon compagnon. On tourne la- cuillre l'envers.Un bruit grinant du verrou qu'on dverrouille. Le volet d'un judas s'ouvre et nous apercevons un oeil et un haut de barbouze. Bruit de verrou qu'on reverrouille, aussitt suivi d'un grand bruit de grand verrou qu'on dverrouille. C'est la porte qui s'carte. Nous sommes en face d'un vieux pope chenu, poil blanc, rides grises, qui a eut l'ail et la crasse accumule. Sa soutane est verdtre, rapice, lime. Ses yeux bords de rouge larmoient.Il nous dvisage, puis trace dans l'air un signe de croix. J'y rponds par un autre signe de croix. Gagn par la contagion, Bru s'excute son tour.- Si on se fait pas escommunier avec tout a, me chuchote-t-il, on aura de la veine; pour peu que le patrioche d'antiarche ait des accointances avec Paul VI, on est bonnard pour se carrer nos extraits de baptme dans les cagoinsses...Je lui file un coup de savate dans les montants afin de le faire taire. Le vieux pope (c'est avec les vieux popes qu'on fait les meilleurs poupes) prend une ponge humde dans la poche de sa soutane et s'efface pour nous laisser entrer. Nous pntrons dans un jardin d'assez vastes dimensions, plein de buis et de lauriers. L'endroit est d'une srnit virgilienne. Des colombes jouent au Saint-Esprit, de branche en branche. Une source murmure dans une vasque de marbre blanc. Le pope- portier nous prcde vers la rception. Chemin faisant, nous croisons le pope picier (autrement dit le, pope Pothin) et nous changeons une rapide bndiction.Bru parait s'accoutumer son nouvel tat.Tout en dambulant, je pense mes Alexandra de la nuit dernire. Celle de l'hpital doit tre un tantinet dpasse par les vnements. Pauvre gamine ! Une petite bien doue pour gesticuler l'horizontale ! M'est avis que cette aventure lui' servira de leon et qu'elle vivra dsormais dans le culte de son fianc (fin de citation).On entre dans un long couloir frais aux votes planturo-romanes volutes pernicieuses, et le pope portier nous fait entrer dans une pice frache, meuble d'un seul bureau sur lequel ,se trouve un norme registre reli de cuir noir. Un encrier, une plume. Il trempe la plume dans l'encrier et me la tend. Avec terreur j'examine les noms qui prcdent. Tous -sont rdigs en grec.Mine de rien, je pique une pochette d'allumettes in my pockett et je recopie le nom du fabricant. Puis je passe la plume Bru en lui virgulant un clin d'oeil. Pourvu que cette patate ne signe pas de son vrai blaze ! C'est mconnatre la sagacit du Gros. Il ligotait par-dessus ma soutane et il a bien vu que je traais des caractres grecs. D'un geste noble il prend la plume, la replonge dans l'encrier, tourne un instant avant d'apposer son paraphe, comme le font les incultes, ce qui permet de lcher unesrie de taches sur la plage du registre. Enfin, lentement, laborieusement, il crit un mot grec et pose la plume. Sa large manche balaie l'encrier qui se renverse sur le burlingue. Heureusement qu'on fait la grve du silence, sinon,, le vieux pope lui dirait la prire des agoniss, faits confiance. A son regard sanguinolent, on pige son sentiment, Vue imprenable sur son intime, mes tourterelles !Tandis qu'il ponge le dsastre, j'entraine le Gros dans le couloir.- T'as sign comment, Mec ? lui demand-je avec une vaste inquitude.- Heureusement, je m'ai rappel de l'orthographe d'un mot crit dans l'hall de mon htel.- Et quel est ce mot ?- Aphrodite, m'apprend le pope Bru.

CHAPITRE XIII

DANS LEQUEL ON JOUE A TENNIS-BARBE

QUI n'a pas Vu cents popes d'ans une chapelle n'a rien vu: Faudrait flmer a en noir et blanc (vu que la couleur n'ajouterait rien la chose).On nous dsigne des prie-Dieu, et nous voil partis dans la posture-prire, les mains jointes, la mine recueillie. C'est le silence, peine troubl par le lger bruit humide des lvres qui, muettement, rclament au cielle pain, la paix, la rdemption, l'eau sur l'vier, le gaz tous les tages, l'abattement fiscal, des places de parking, la suppression de la vignette, la fin du communisme, la mort des Chinois, moins de malheurs pour les pauvres, plus de pognon pour les riches, des hivers doux, du vin en abondance, la recette des paupiettes de veau, la perptuit du Gaullisme, celle de la royaut, des rsultats dans les chasses courre, la multiplication des classes de neige, la fertilisation du Sahara, une censure accrue de la presse, une propagation Intensifie du racisme, quelques miracles d'entretien, le rattachement de Chypre la Grce, l'extermination des Turcs, des remdes contre l'eczma d'autres contre les hmorrodes, la batification de Pie XII, une baisse sur l'essence, la retraite anticipe, un dcouvert bancaire, l'largissement de la Cte d'Azurjusqu'au caNari, la fin des haricots, !Tout en priant, je mate la mer de popes. Avec les barbouzettes, comment diffrencier ? ls sont uniformes comme un troupeau de moutons noirs !On reste commak une plombe, en plan. Le silence est rompu parfois par une petite toux ou par un borborygme.Sa Batitude Bru se met faire des soupirs qui ressemblent de plus en plus des typhons sur la Jamaque.- a finit par bien faire, me chuchote-t-il, je commence morfler la crampette du prieur, mec. J'ai les rotules qui font ventouses ! Je lui intime un " chut " premptoire, mais qui ne le jugule pas pour autant. Aprs trois autres soupirs dsabuss, il reprend- Comment veux-tu reprer tes matafs dans ce pot de caviar? On dirait tous des frangins siamois !- Attendons, intim-je. .- C'est gai, la vie de monastre ! Y a de quoi prendre un couteau pour se raser les os des jambes !A la fin, un pope-chef actionne un claquoir dont le ~ bruit sec vibre longuement sous les votes de la chapelle. Tout le monde se lve. On se fout en rang et on gagne le rfectoire, ce qui n'est pas pour dplaire Bru.Un petit signe de croix devant nos assiettes en guise d'apro, et on s'attable. La pitence est maigrelette: tomates en salade, courgettes l'huile, pches. Le Boulimique est ulcr jusqu'en ses profondeur. Il me virgule des froncements de sourcils de plus en plus mauvais.- Et le gigot? souffle-t-il.- On est vendredi, ripost-je, a sera pour demain !- En attendant je vais avoir l'estom' comme le soufflet d'un Kodak !Quelques visages svres se tournent vers nous. Si on continue se tutoyer des messages, nos actions vont chuter, je le renifle. C'est pourquoi je file un coup de pompe, dans la cheville de mon rvrend frre. Il est surpris, et pousse un cris.- Oh la vache !Cent quatre-vingt-dix-huit barbes se tournent vers Sa Rondeur. Un silence horrible succde. Je devine qu'il va se passer quelque chose. Effectivement, l'adjupope de service : un grand rouquin qui pue la mnagerie s'avance vers le Gravos, arm d'une longue badine de bretellier gant (dont le bois est rput pour son lasticit). Il fait signe Bru de quitter la table, puis, lorsque mon ami s'est excut, il lui fait signe de s'agenouiller. Alexandre Benoit est vachement plot sous sa fausse barbouze. Je l'exhorte d'un regard perdu. Alors, tout comme