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UNIVERSITÉ DU QUÉBEC À MONTRÉAL SÉMIOTIQUE ET THÉORIE DE L'ÉCRITURE: LE CAS DU SYSTÈME D'ÉCRITURE JAPONAIS MÉMOIRE PRÉSENTÉ COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN PHILOSOPHIE PAR GWENNAËL BRICTEUX DÉCEMBRE 2007

Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

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Page 1: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

UNIVERSITEacute DU QUEacuteBEC Agrave MONTREacuteAL

SEacuteMIOTIQUE ET THEacuteORIE DE LEacuteCRITURE

LE CAS DU SYSTEgraveME DEacuteCRITURE JAPONAIS

MEacuteMOIRE

PREacuteSENTEacute

COMME EXIGENCE PARTIELLE

DE LA MAIcircTRISE EN PHILOSOPHIE

PAR

GWENNAEumlL BRICTEUX

DEacuteCEMBRE 2007

UNIVERSITEacute DU QUEacuteBEC Agrave MONTREacuteAL Service des bibliothegraveques

Avertissement

La diffusion de ce meacutemoire se fait dans le respect des droits de son auteur qui a signeacute le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles supeacuterieurs (SDU-522 - Reacutev01-2006) Cette autorisation stipule que laquoconformeacutement agrave larticle 11 du Regraveglement no 8 des eacutetudes de cycles supeacuterieurs [lauteur] concegravede agrave lUniversiteacute du Queacutebec agrave Montreacuteal une licence non exclusive dutilisation et de publication de la totaliteacute ou dune partie importante de [son] travail de recherche pour des fins peacutedagogiques et non commerciales Plus preacuteciseacutement [lauteur] autorise lUniversiteacute du Queacutebec agrave Montreacuteal agrave reproduire diffuser precircter distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche agrave des fins non commerciales sur quelque support que ce soit y compris lInternet Cette licence et cette autorisation nentraicircnent pas une renonciation de [la] part [de lauteur] agrave [ses] droits moraux ni agrave [ses] droits de proprieacuteteacute intellectuelle Sauf entente contraire [lauteur] conserve la liberteacute de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possegravede un exemplaireraquo

Remerciements

Je remercie grandemenl Monsieur Fr8n((ois LalraverSc direcleur de mes eacutetudes

cl de Illa conscience seacutemiotique qui dirigea la reacutedaction de cc meacutemoire avec

enthousiasme ct mis geacuteneacutereusement les ressources du I)rojet deacutedition Peirce (LJQM)

il ma disposition le suis aussi reconnaissant envcrs les Illembres du comiteacute qui

Illoctroya unc bourse daccueil au doctorat en seacutemiologie Agrave Xavicr Call1US mOl1

camarade en philosophie depuis des anneacutees ie salue sa vertu intellectuelle et le

remercie de sa chegravere amitieacute puisse-t-il lctudiscr pleinement le omn()wnccedil en lui le

deacutedie cc meacutemoire ugrave mes plrents

Ta ble des matiegraveres

I~eacutesumeacute IV

Introduction

1 Seacutemiotique rllilosorhique X

11 Le rragillatisme X

12 Le systegraveme des scienccs 17

13 Les sciences rllilosorlliques 21

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegories 24

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes 40

1321 Seacutemiotique cnotation logique 51

2 Seacutemiotique ct theacuteOlie de lmiddoteacutecriture Cl 1

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise 62

22 Arrroeile seacutemiotique de leacutecriture jaronaise ClX

22Ilheacuteorie geacuteneacuterale de leacuteeriture comme signe Ml

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture iaronaise 73

223 Critique de 1lIleacutellyse seacutemiotique 93

Cmiddotoncilision 99

Acircnnce 1 Ies graplles eislellticls 104

AcircnnCe 2 Le S) stegraveme deacutecriture ilponlis 109

13ibliographie 112

Reacutesumeacute

Le bul de cc meacutemoire est de deacuteterminer quelle pourrait 0tre 11 porteacutee de la

seacutemiotique philosophique de Chlrles Sanders lirce sur la theacuteorie de leacutecriture en

prenant pour cas (leacutetude le systegraveme deacutecriture japonais Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lltlpplication de la seacutemiotique comme theacuteoric geacuteneacuteralc des signcs ml

sciences speacuteciales tout en eacuteclairant- par conversc leacutetudc de leacutecriturc japonaise en

tltlnt que systegravemc graphique Il lst structureacute cn dell chapitrcs principaux portant sur

1) les principes de la seacutemiotique philosophique ct 2) le licn cntrc la seacutemiotiquc ct lltl

theacuteorie dl leacutecriture

Dans le premicr chapitrc la meacutethodologic du meacutemoirc est tout dabord eacutetablie

par leamen du pragmat isme de Peirce consideacutereacute eomlne unc doctrine meacutelhodeul ique

ayant pour principe directeur la croissance La seacutemiotique ct la logique de mecircme que

la linguistique Cl leacutetmle de leacutecriture sonl situeacutees dans le systegraveme pcirceacutecn des

scicnces lcs principes de 11 phlIleacutelOscopic ct dl 1lt1 seacutemiotique sont eacutegalement

exposeacutes I~a philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise cOlnme

point de deacutepltlrt pour une eacutelude de leacutecritllle du point de vue seacutemiotique

DlIls le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comlne signe est

eacutelaboreacutee il pnrtir de la seacutemiotique peirceacuteenne La theacuteorie seacutemiotique est appliqueacutee plus

speacuteciliquement au systegraveme deacutecrilure iaponais cl agrave lanalyse de ses translormalIcircons

actuelles le retour reacutelkif et critique sur lanalyse ellectueacutee permet par la suite de

iuger de ladeacutequation des concepts seacutemiotiques dans leur application ugrave leacutetude de

leacutecriture japona ise

Le meacutemoire sc conclut par une consideacuterltion des liens que la seacutemiotique de

eacutecriture entretient avec les autres sciences philosophiques normatives soit eacutethique

et lestheacutetique

Mols chs Seacutemiotique Igthilosophie du langlge lgthilosophie des sciences (eritllle

(Systegraveme graphique) laponais (Iangue) Peirce Charles S (Charles

S(1Jl(lers) 1X39-1 lt) 14

Introduction

i t has never been 1n my power to stucy

anything-mathematics ethics metaphysics gtmiddotavitation

thermoclynamics optics chemistry comparative anatomy

astronomy psychology phonetics economic the history of

science whist men and women wine metrology except as a

study o~ sel11eiotic (SampS 85-86 1908)

Seacutem iotique de la culture 1itteacuter8 ire visuelle ou des p8SSlons le cham p

cl8pplic8tion de la seacutemiotique peut sembler v8ste m8is le caractegravere indeacutetermineacute de son

fondement nous troublera davantage Peirce deacutejagrave le tondateur de 18 discipline

contempor8ine dun point de vue philosophique donne une extension large agrave la

seacutemiotique dans Id citation bien connue mais peut-ecirctre par un emportement

eacutepistolaire (ici dans une lettre agrave Lady Welby) il fait porter la seacutemiotique aussi bien sur

les matheacutematiques et la philosophie que sur les sciences speacuteciales De plus il illustre

souvent 18 seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative en lappliquant agrave des

exem pies concrets et eacutelabore mecircme agrave partir de cette theacuteorie la preuve du pragmatisme

La seacutemiotique peirceacuteenne se veut donc une theacuteorie geacuteneacuterale des signes applicable

entre dLltres agrave chacune des sciences speacuteciales Toutetois Peirce effectue aussi un

eX8men systeacutematique des fondements de la seacutemiotique consideacutereacutes pour eux-mecircmes La

seacutemiotique peirceacuteenne est de la sorte proprement philosophique et indeacutependante des

sciences speacuteciales Le deacutefi lorsquon tente de tirer la seacutemiotique de Peirce vers des

applications theacuteoriques devient alors de franchir 18 distance eacutepisteacutemologique entre

seacutemiotique philosophique ct seacutemiotique appliqueacutee 8UX sciences speacuteciales et deacuteviter de

traiter superficiellement des concepts de la theacuteorie Ce nest en effet que reacutecemment

que la seacutemiotique peirceacuteenne sest vue exposeacutee systeacutem8tiquement dans son ensemble

(Carontini 1984 Savan 1988 Fisette 1990 Liszka 1996) et un examen appro londi de

ses fondements saveacuterant toujours difficile agrave effectuer lapplication de ses concepts

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

30

fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

31

mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

32

Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

33

modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

34

et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

35

A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

36

cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

37

champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

38

le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

39

Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

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dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

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ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

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complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

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particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

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exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

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ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

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traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

9IJM~F6~JEfrœf9euroI~flifiumlil~~g~IIcirc~~jjijA~~tirlwJ[~ampfJffi~tJ~ji1Jicircjg~~~ritIff~

~~7eumlJr7eacute7t5t~bRW-A~1tt~~~JlJ F9 pg ffiI~n~J11~EtUfLJl~ [I] tJ eacuteJlJ JJ tJJ7NJJ~jIJfIJ

Jfl] 91HtJ JJIJ ~IJ ~IJ~IJ$IJilJlJ~IJ MlIJiIJ~IJj)fljgIJJIIJilIJ11lIJ~IJIJ 1J ~D r]j sectiJ~JjJiJ9J~MiJ iJ ~ 1It1tlJl1J~UiJ~~ucircJJ~l-5JJ ~

~ta~~sectE~~+~~m$~~rn~~WM~W~~S~~~x~~amp~n~~U7~~D

~~EB3~~~~~~~~fig~~ bullbull~~~~~~~~~~~~~~u~~~~~~~~~

~~~W~~R~~~~H~~~~~~~~OO~~plusmnffrrmM~~~~~~~~~~gB~~

m~~w~œ~~~~~~mŒ~~oo~~~œœplusmntt~~~~~~~~n~a~~~~fi

~~gi1~~~~mR~5t~~~~~JlIH9D~29HJj~j~ili~eacutel~99l19lHJN9~9ft9IHffl91i~9i9iU~~HL~rP~~

m~~~~~g~œ~~~~~H~~~gamm~bullbull~~~bullbullbull~~~WM~~

~HHiumlWJj3(ij5tjm~MHtRfEuml~~-~~ram~~~~UJIJ~~g~IJIIIiI~iIJ~~~~iiJjJIIHIIIljtt

~BM~fi~~U~~~~~~~M~~fi~~~Œ~~~~~bullbull8~

g~~rt ~~ ~ 1ij 5f5tmm 5lta sN 5jj iWiJf~ ~rn~~~~i~il~ iiE ~iampm~ilt i~iii1l-iiumlIJl imi~~i~rei~~ z TE~ ~

~~~~ffia~~tt~ffl~~~~~~~~~m~~~~~~~ill~illili~~~~ill~~ill~ill~

ill~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~sect~fi~m~~~~~~~bullbull ~~iJ~gl~~~~isect~rlI~m~[ll)~Ii~iJ~~~~icircf~5t~ftlx~flWg~m~~~~g~mLir08z~SZ~~B~2tI~~

~~~~~~~bullbull~~g~~~~=~ampM~~~tt~W~tt~llimmffiregWmm~~m~mmmm

1mIIt~1$$i~iXftiiti(~UJ~pfi~~m=Fif~1j1f~atnjLtlkjRj1itjjJljRj9jEjsJHjjJ111jljljjHtbJecircj91jlijffi

j~jElecircjEliJtUH~jm~jH3j~j~mjjjeurojjUJIHSlj~jmmt(tj~j~j1i5ampmj~j~m~j~jMEcircIcircijJiumlW~j~mj~j~HlH~j~

Jfj~j~j~jfi~j~jjlitj~3Z~QrQ1i5i55~lijH9~~5i1~j9~~9~9HlY+n~jFfffIIUfi1J1rtiIIcircIcircIIcirc~)j~1IcircJtB IBi3Jf ~m~ bullbull~_ampbullbull~ bullbullubullbull~~~~~~~lItq~~~~~UftU~fi~~M~~~~~~

1im~~icircilicircg~miml~TIlY~EMmicirc~3trPJmJjicircij~~ij[i]~mlltIlijialiilijn~~ij~ijUi15k~~~

~~~~Wi~~1t1L1Jl1lj1~111~H~j~~jJlHj~j5j~t5ffjjljijnffi~j~ljjRfiumlji~Ujijjij~jfoJH~~jllJl~

~WR~jflij~jj~jiHH~lmjfrHrfl~R~~euml~~xlx~xiXLtiumlE~tiicircJiiuml9E~HIltsectliJM~~t~~H~1)l18m~tt=tEU=

~~ffJ~A~R~~~~~~~~~~~~~~~$~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~~~M~~~~~~n~~~~~m~~bullbull~~~~~~~MAA~~~~

~~~tlffl~mmH~~~m~~œlli~~~~~~~~M~m~~MgX~~fflffi~$~~

mWm~~Mft~bullbulla~amp~~amp~~~~bullbullbull~e~~H~~m~sect~~~Esect~~~

~ffi~mmm~bullbull~m~~~ffl~raquo~~~~~m~~g~~~M~ntlm~m~mn~bull bull ~~N~n~m~~nffi~nti~mmm~~œ~~~~~~~~~nbullbull~u~amp~~ampmUh~

~~~~~~~~~m~~~m~M~n~ffiffiM~mMg~~~~~g~~m~n~m~

~W~~ftWe~~~m~~~~~m~m~mbullbullbull~Mbullbullbullbullbullbullbullbull~bullbull~mmbullbullbullbull ffi $ bullbullbullTI~a~G~~~~mn~~~œsect~B~mAA~~~amp~~~~~~~AA~~~~M

~ft~iliffi~~~~~Bampti~~m~~~M~bullbullbull~m~N~mm~~U~~M~~m

middot~Hn~egrave~j1I~t~i~f~~Il~jj~R~t~~ii]~iE~g~~m~f~~ta8~8iumlt8~8~W~2i~g8~8t~~Ti~r~~~~~~mj~8ill~~~rn8~8SU

~~bullbull~mmbullbull~~sect~~M~~fta~bullbullbullaRbullbullbullbullbulla~M~~~AAg~m

~~O~li~Œm~~mHm~a~bullbullnft~~tiQ~bullbullbullbullbullW~~~~B~~n

MW~bullbullfflm~D~~~tl~~ffi~~UnmftHrt~nm~~mgmmmamp~Mm~

re M~ fMliumll rm 1HI~~iumli~1i1lllI~lilaiUll Ffisecti~tj~~~~~~ijJmiddot~u ~~fP~F~~iID fItgi~~iamp~mIJJIL~ii1iraquoij

ftUHabullbullgHUMDmam~~~D~n5~bullbull~gu~~gfta~~MR~~D

~p~~Jff~~~iMicirc~~

110

~Vllob((ires hiragana (katakana) lrunsilleacuterolion en rocircmaji

iYgt (7) a L(-1)i 3 (rJ)u X (I) e d3 pt) a

fJ) CfJ) ka ~ (~) ki lt () ku ft (7) ke (J) ka

~ (~) sa ~ () shi 9 (A) su tt ct) se -t- ()) sa

t ($7) t8 - (=-) chi J()tsu -c CT) te C ( t-- ) ta

tJ ct) na 1 (=) ni ttd C~) nu td (7) ne 0) (J) no

li () ha O(t)hi 5 (7) lu ( ) he IJ (Ii-) ho

() ma Jj(2)mi ltt (b) mu (J) (j ) me t(-r)mo

-(~)a ~ (=1) yu et (3) )0

G (5) ra L) (1)) ri o (J[) ru n (v) re ~(D)ro

b () wa ~ (3) a

Signes diacritiques 0

Signe remplaccedilant le kon(( reacutepeacuteteacute ~

Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

IC systegraveme Je tnlnslilleacutenltion Ilcpbulll llloJilieacute qui rcn oie ugrave la prononciation anglaise esl utiliseacute

III

LClrails de lexIe

sX~ B (J)~1J(J)$euml ilraquo ~o -A(J)--r A IJ~ mEr~ (J)--rTffi~JJ ~1~-gt TL fo

Jt L r~ (J) --r 1 It (J) ~ (J) 9 1 ~jH) L tJ L0 lIjt PJTq R-~ (J)~IJ 11f- ~ tJ fIl UI- ~j$

IJ~-QcTL~o m~r~IJ (g~IS~ULrL (J)~(J)9It m~JJ~9~m

ftn ~j~~~~IJ~ t ==A 11 ilraquo U-t tJ t(J)T ilraquo ~ 0 -thIJ~ (J)~0)9 I(I~ t LtJ

L 0

fiiJl51IJ) C L C (J) ==$ j1f~ 1 11 plusmnth~ C IJ) dm C IJ) $ C IJ) ~JUi C IJ) L J( L

IJ~=rj LTJtCcedil t- o -t euml~ rtJ (J) ~ lfh1J 11 -im Ueuml 1tfJ L0 Im2l cl ~ C lld~ ~fb~ ~

n~m L T -t(J)R-IJ~-JL t- l) ~icircN(J)8IJ~-JL t- U LJ- ~ ~ IjJ- 1 -JJJmuT fIT (J)4

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ttiTTRi~JJ ~ IJ~tJIJ)-gt t- o 9 ~ C -t(J)mh~ Tt-(J)~ cl L$1 L T ~J1IIIJ~~~to ~A

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mEr~ laquoRashocircmonraquo in Akutagawa 1969 (1915) (extrait dun conte)

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Page 2: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

UNIVERSITEacute DU QUEacuteBEC Agrave MONTREacuteAL Service des bibliothegraveques

Avertissement

La diffusion de ce meacutemoire se fait dans le respect des droits de son auteur qui a signeacute le formulaire Autorisation de reproduire et de diffuser un travail de recherche de cycles supeacuterieurs (SDU-522 - Reacutev01-2006) Cette autorisation stipule que laquoconformeacutement agrave larticle 11 du Regraveglement no 8 des eacutetudes de cycles supeacuterieurs [lauteur] concegravede agrave lUniversiteacute du Queacutebec agrave Montreacuteal une licence non exclusive dutilisation et de publication de la totaliteacute ou dune partie importante de [son] travail de recherche pour des fins peacutedagogiques et non commerciales Plus preacuteciseacutement [lauteur] autorise lUniversiteacute du Queacutebec agrave Montreacuteal agrave reproduire diffuser precircter distribuer ou vendre des copies de [son] travail de recherche agrave des fins non commerciales sur quelque support que ce soit y compris lInternet Cette licence et cette autorisation nentraicircnent pas une renonciation de [la] part [de lauteur] agrave [ses] droits moraux ni agrave [ses] droits de proprieacuteteacute intellectuelle Sauf entente contraire [lauteur] conserve la liberteacute de diffuser et de commercialiser ou non ce travail dont [il] possegravede un exemplaireraquo

Remerciements

Je remercie grandemenl Monsieur Fr8n((ois LalraverSc direcleur de mes eacutetudes

cl de Illa conscience seacutemiotique qui dirigea la reacutedaction de cc meacutemoire avec

enthousiasme ct mis geacuteneacutereusement les ressources du I)rojet deacutedition Peirce (LJQM)

il ma disposition le suis aussi reconnaissant envcrs les Illembres du comiteacute qui

Illoctroya unc bourse daccueil au doctorat en seacutemiologie Agrave Xavicr Call1US mOl1

camarade en philosophie depuis des anneacutees ie salue sa vertu intellectuelle et le

remercie de sa chegravere amitieacute puisse-t-il lctudiscr pleinement le omn()wnccedil en lui le

deacutedie cc meacutemoire ugrave mes plrents

Ta ble des matiegraveres

I~eacutesumeacute IV

Introduction

1 Seacutemiotique rllilosorhique X

11 Le rragillatisme X

12 Le systegraveme des scienccs 17

13 Les sciences rllilosorlliques 21

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegories 24

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes 40

1321 Seacutemiotique cnotation logique 51

2 Seacutemiotique ct theacuteOlie de lmiddoteacutecriture Cl 1

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise 62

22 Arrroeile seacutemiotique de leacutecriture jaronaise ClX

22Ilheacuteorie geacuteneacuterale de leacuteeriture comme signe Ml

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture iaronaise 73

223 Critique de 1lIleacutellyse seacutemiotique 93

Cmiddotoncilision 99

Acircnnce 1 Ies graplles eislellticls 104

AcircnnCe 2 Le S) stegraveme deacutecriture ilponlis 109

13ibliographie 112

Reacutesumeacute

Le bul de cc meacutemoire est de deacuteterminer quelle pourrait 0tre 11 porteacutee de la

seacutemiotique philosophique de Chlrles Sanders lirce sur la theacuteorie de leacutecriture en

prenant pour cas (leacutetude le systegraveme deacutecriture japonais Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lltlpplication de la seacutemiotique comme theacuteoric geacuteneacuteralc des signcs ml

sciences speacuteciales tout en eacuteclairant- par conversc leacutetudc de leacutecriturc japonaise en

tltlnt que systegravemc graphique Il lst structureacute cn dell chapitrcs principaux portant sur

1) les principes de la seacutemiotique philosophique ct 2) le licn cntrc la seacutemiotiquc ct lltl

theacuteorie dl leacutecriture

Dans le premicr chapitrc la meacutethodologic du meacutemoirc est tout dabord eacutetablie

par leamen du pragmat isme de Peirce consideacutereacute eomlne unc doctrine meacutelhodeul ique

ayant pour principe directeur la croissance La seacutemiotique ct la logique de mecircme que

la linguistique Cl leacutetmle de leacutecriture sonl situeacutees dans le systegraveme pcirceacutecn des

scicnces lcs principes de 11 phlIleacutelOscopic ct dl 1lt1 seacutemiotique sont eacutegalement

exposeacutes I~a philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise cOlnme

point de deacutepltlrt pour une eacutelude de leacutecritllle du point de vue seacutemiotique

DlIls le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comlne signe est

eacutelaboreacutee il pnrtir de la seacutemiotique peirceacuteenne La theacuteorie seacutemiotique est appliqueacutee plus

speacuteciliquement au systegraveme deacutecrilure iaponais cl agrave lanalyse de ses translormalIcircons

actuelles le retour reacutelkif et critique sur lanalyse ellectueacutee permet par la suite de

iuger de ladeacutequation des concepts seacutemiotiques dans leur application ugrave leacutetude de

leacutecriture japona ise

Le meacutemoire sc conclut par une consideacuterltion des liens que la seacutemiotique de

eacutecriture entretient avec les autres sciences philosophiques normatives soit eacutethique

et lestheacutetique

Mols chs Seacutemiotique Igthilosophie du langlge lgthilosophie des sciences (eritllle

(Systegraveme graphique) laponais (Iangue) Peirce Charles S (Charles

S(1Jl(lers) 1X39-1 lt) 14

Introduction

i t has never been 1n my power to stucy

anything-mathematics ethics metaphysics gtmiddotavitation

thermoclynamics optics chemistry comparative anatomy

astronomy psychology phonetics economic the history of

science whist men and women wine metrology except as a

study o~ sel11eiotic (SampS 85-86 1908)

Seacutem iotique de la culture 1itteacuter8 ire visuelle ou des p8SSlons le cham p

cl8pplic8tion de la seacutemiotique peut sembler v8ste m8is le caractegravere indeacutetermineacute de son

fondement nous troublera davantage Peirce deacutejagrave le tondateur de 18 discipline

contempor8ine dun point de vue philosophique donne une extension large agrave la

seacutemiotique dans Id citation bien connue mais peut-ecirctre par un emportement

eacutepistolaire (ici dans une lettre agrave Lady Welby) il fait porter la seacutemiotique aussi bien sur

les matheacutematiques et la philosophie que sur les sciences speacuteciales De plus il illustre

souvent 18 seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative en lappliquant agrave des

exem pies concrets et eacutelabore mecircme agrave partir de cette theacuteorie la preuve du pragmatisme

La seacutemiotique peirceacuteenne se veut donc une theacuteorie geacuteneacuterale des signes applicable

entre dLltres agrave chacune des sciences speacuteciales Toutetois Peirce effectue aussi un

eX8men systeacutematique des fondements de la seacutemiotique consideacutereacutes pour eux-mecircmes La

seacutemiotique peirceacuteenne est de la sorte proprement philosophique et indeacutependante des

sciences speacuteciales Le deacutefi lorsquon tente de tirer la seacutemiotique de Peirce vers des

applications theacuteoriques devient alors de franchir 18 distance eacutepisteacutemologique entre

seacutemiotique philosophique ct seacutemiotique appliqueacutee 8UX sciences speacuteciales et deacuteviter de

traiter superficiellement des concepts de la theacuteorie Ce nest en effet que reacutecemment

que la seacutemiotique peirceacuteenne sest vue exposeacutee systeacutem8tiquement dans son ensemble

(Carontini 1984 Savan 1988 Fisette 1990 Liszka 1996) et un examen appro londi de

ses fondements saveacuterant toujours difficile agrave effectuer lapplication de ses concepts

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

30

fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

31

mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

32

Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

33

modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

34

et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

35

A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

36

cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

37

champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

38

le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

39

Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

74

dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

76

ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

79

complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

81

particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

82

exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

83

ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

84

traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

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~p~~Jff~~~iMicirc~~

110

~Vllob((ires hiragana (katakana) lrunsilleacuterolion en rocircmaji

iYgt (7) a L(-1)i 3 (rJ)u X (I) e d3 pt) a

fJ) CfJ) ka ~ (~) ki lt () ku ft (7) ke (J) ka

~ (~) sa ~ () shi 9 (A) su tt ct) se -t- ()) sa

t ($7) t8 - (=-) chi J()tsu -c CT) te C ( t-- ) ta

tJ ct) na 1 (=) ni ttd C~) nu td (7) ne 0) (J) no

li () ha O(t)hi 5 (7) lu ( ) he IJ (Ii-) ho

() ma Jj(2)mi ltt (b) mu (J) (j ) me t(-r)mo

-(~)a ~ (=1) yu et (3) )0

G (5) ra L) (1)) ri o (J[) ru n (v) re ~(D)ro

b () wa ~ (3) a

Signes diacritiques 0

Signe remplaccedilant le kon(( reacutepeacuteteacute ~

Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

IC systegraveme Je tnlnslilleacutenltion Ilcpbulll llloJilieacute qui rcn oie ugrave la prononciation anglaise esl utiliseacute

III

LClrails de lexIe

sX~ B (J)~1J(J)$euml ilraquo ~o -A(J)--r A IJ~ mEr~ (J)--rTffi~JJ ~1~-gt TL fo

Jt L r~ (J) --r 1 It (J) ~ (J) 9 1 ~jH) L tJ L0 lIjt PJTq R-~ (J)~IJ 11f- ~ tJ fIl UI- ~j$

IJ~-QcTL~o m~r~IJ (g~IS~ULrL (J)~(J)9It m~JJ~9~m

ftn ~j~~~~IJ~ t ==A 11 ilraquo U-t tJ t(J)T ilraquo ~ 0 -thIJ~ (J)~0)9 I(I~ t LtJ

L 0

fiiJl51IJ) C L C (J) ==$ j1f~ 1 11 plusmnth~ C IJ) dm C IJ) $ C IJ) ~JUi C IJ) L J( L

IJ~=rj LTJtCcedil t- o -t euml~ rtJ (J) ~ lfh1J 11 -im Ueuml 1tfJ L0 Im2l cl ~ C lld~ ~fb~ ~

n~m L T -t(J)R-IJ~-JL t- l) ~icircN(J)8IJ~-JL t- U LJ- ~ ~ IjJ- 1 -JJJmuT fIT (J)4

1-gt TL t- C L $c ilraquo ~ 0 ecircrtJ IJ~-t(J)9ireuml ilraquo ~ IJ) G mEr~ (J)f~~tJ euml 11 5icl l) ~

ttiTTRi~JJ ~ IJ~tJIJ)-gt t- o 9 ~ C -t(J)mh~ Tt-(J)~ cl L$1 L T ~J1IIIJ~~~to ~A

IJ~~~to c C L L 1 11 ~ 11fJ( l) -F(J)tJ L9EA~ (J)r~ j~ TT mTTii ltC

L sectt~ ~ Z te t-o -t euml B (J) EIIJ~~Z tJ lttJ ~ C ~euml t ~o ~ gIJ~-gt T (J) r~ (J)

ilIumlpJT IIJEuml~~JJ~ L tJ L$ItJ TL t- (J)euml ilraquo ~ 0

mEr~ laquoRashocircmonraquo in Akutagawa 1969 (1915) (extrait dun conte)

~ffl11HIl tJ -5 tJ j- ~ ~ 11 1 0 9 sectlJ ~ secttEacute1 (J) 4 ffl 3iffl~= sect1sect (J)PJTf~~ajL1i~IIjij~iumlIDeumltJ -5 tJ j- ~ ~IJ~ El n -J 0 rt-7deg tJ~Mplusmn~ J 1

r~J~-~3 (~~sect) O)~~J C~~9~cI~ ~~~~ftgElO)rtbl)~tJ

~tJj-~~~~m9~Ceuml ~fiWrtJ~ j-~7euml-)~9~mLtilraquo~)-tt0 LIJ)L

r~ L Lg] BJ ~j~11 f~1t~lM 31 ~mtll9 ~fiegrave(J)sect Lpg g Itt~ ~ C gt lt11 lt tJ Ell~ t~iY)tJ L0

PJT~~Bjjfl~~T8 3 0 ~o Ecircl t~J~J~~jHeumlWlZt-jij~i~famp~l(J) pgg ~~m811~l) i6lvt s~ tfffampfJJ(J)1i~c L TII~sectM5iecircHsect(J) 4 9 8 2~ IJjUiJi-ecirc~~IcircJ~1sect(J) 6 4 5 2 ~

clU~Lo

(J)rtJTtJ~tJT~~II 2-lf~ )~~TDtJeumlmiddotB~euro[illIuml-e-~ZIlt Lt(J)~ g](J)~jjicircjtJ

euml(J)~1f~~~~acirciY)~ C 0 9 ] tM~o tJ ~ tJ T~i~pJT ~ ~~9-gt t-J~jjicircjecircHsect(J)tff

BifJi~Itt~r-J 4 fg(J)51~to

f9JJ~11~ C r Ecircl ~c(J)fplusmn$~ Pf~~I= 9 ~T v 7 -7 J ~ r BIJ~77 C tW(J)~(t~~ C

tJ~ ~77 7- r- l ~ ~famp~l] (J)miiJ r I=[ecirc] Itt-~fi L L B (J) ~tJ r- 1) - 7 ~

TT1T1-] J cLt-~-g-o

mi L t- t Iteuml 11 t C tJ L tgt 0) t ~ lt ~ m (J)~1J~ 1 IHHiH tgtfi -e- -t t o Dl~EcircX]

B~M 2006$g~2gB 3~38~

Mainichi Shilllbull 2006929 (article de journal)

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appiying the theories o~middot Saussure and Peirce to a new speacutelce of meaningJ Meacutemoire de maicirctrise de lUniversiteacute Keiagrave Tagravekyagrave Universiteacute [(eiagrave 85 p Je nai

113

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lvllaning Honolulu University of H3waiumli Press 196 p

Page 3: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

Remerciements

Je remercie grandemenl Monsieur Fr8n((ois LalraverSc direcleur de mes eacutetudes

cl de Illa conscience seacutemiotique qui dirigea la reacutedaction de cc meacutemoire avec

enthousiasme ct mis geacuteneacutereusement les ressources du I)rojet deacutedition Peirce (LJQM)

il ma disposition le suis aussi reconnaissant envcrs les Illembres du comiteacute qui

Illoctroya unc bourse daccueil au doctorat en seacutemiologie Agrave Xavicr Call1US mOl1

camarade en philosophie depuis des anneacutees ie salue sa vertu intellectuelle et le

remercie de sa chegravere amitieacute puisse-t-il lctudiscr pleinement le omn()wnccedil en lui le

deacutedie cc meacutemoire ugrave mes plrents

Ta ble des matiegraveres

I~eacutesumeacute IV

Introduction

1 Seacutemiotique rllilosorhique X

11 Le rragillatisme X

12 Le systegraveme des scienccs 17

13 Les sciences rllilosorlliques 21

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegories 24

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes 40

1321 Seacutemiotique cnotation logique 51

2 Seacutemiotique ct theacuteOlie de lmiddoteacutecriture Cl 1

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise 62

22 Arrroeile seacutemiotique de leacutecriture jaronaise ClX

22Ilheacuteorie geacuteneacuterale de leacuteeriture comme signe Ml

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture iaronaise 73

223 Critique de 1lIleacutellyse seacutemiotique 93

Cmiddotoncilision 99

Acircnnce 1 Ies graplles eislellticls 104

AcircnnCe 2 Le S) stegraveme deacutecriture ilponlis 109

13ibliographie 112

Reacutesumeacute

Le bul de cc meacutemoire est de deacuteterminer quelle pourrait 0tre 11 porteacutee de la

seacutemiotique philosophique de Chlrles Sanders lirce sur la theacuteorie de leacutecriture en

prenant pour cas (leacutetude le systegraveme deacutecriture japonais Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lltlpplication de la seacutemiotique comme theacuteoric geacuteneacuteralc des signcs ml

sciences speacuteciales tout en eacuteclairant- par conversc leacutetudc de leacutecriturc japonaise en

tltlnt que systegravemc graphique Il lst structureacute cn dell chapitrcs principaux portant sur

1) les principes de la seacutemiotique philosophique ct 2) le licn cntrc la seacutemiotiquc ct lltl

theacuteorie dl leacutecriture

Dans le premicr chapitrc la meacutethodologic du meacutemoirc est tout dabord eacutetablie

par leamen du pragmat isme de Peirce consideacutereacute eomlne unc doctrine meacutelhodeul ique

ayant pour principe directeur la croissance La seacutemiotique ct la logique de mecircme que

la linguistique Cl leacutetmle de leacutecriture sonl situeacutees dans le systegraveme pcirceacutecn des

scicnces lcs principes de 11 phlIleacutelOscopic ct dl 1lt1 seacutemiotique sont eacutegalement

exposeacutes I~a philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise cOlnme

point de deacutepltlrt pour une eacutelude de leacutecritllle du point de vue seacutemiotique

DlIls le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comlne signe est

eacutelaboreacutee il pnrtir de la seacutemiotique peirceacuteenne La theacuteorie seacutemiotique est appliqueacutee plus

speacuteciliquement au systegraveme deacutecrilure iaponais cl agrave lanalyse de ses translormalIcircons

actuelles le retour reacutelkif et critique sur lanalyse ellectueacutee permet par la suite de

iuger de ladeacutequation des concepts seacutemiotiques dans leur application ugrave leacutetude de

leacutecriture japona ise

Le meacutemoire sc conclut par une consideacuterltion des liens que la seacutemiotique de

eacutecriture entretient avec les autres sciences philosophiques normatives soit eacutethique

et lestheacutetique

Mols chs Seacutemiotique Igthilosophie du langlge lgthilosophie des sciences (eritllle

(Systegraveme graphique) laponais (Iangue) Peirce Charles S (Charles

S(1Jl(lers) 1X39-1 lt) 14

Introduction

i t has never been 1n my power to stucy

anything-mathematics ethics metaphysics gtmiddotavitation

thermoclynamics optics chemistry comparative anatomy

astronomy psychology phonetics economic the history of

science whist men and women wine metrology except as a

study o~ sel11eiotic (SampS 85-86 1908)

Seacutem iotique de la culture 1itteacuter8 ire visuelle ou des p8SSlons le cham p

cl8pplic8tion de la seacutemiotique peut sembler v8ste m8is le caractegravere indeacutetermineacute de son

fondement nous troublera davantage Peirce deacutejagrave le tondateur de 18 discipline

contempor8ine dun point de vue philosophique donne une extension large agrave la

seacutemiotique dans Id citation bien connue mais peut-ecirctre par un emportement

eacutepistolaire (ici dans une lettre agrave Lady Welby) il fait porter la seacutemiotique aussi bien sur

les matheacutematiques et la philosophie que sur les sciences speacuteciales De plus il illustre

souvent 18 seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative en lappliquant agrave des

exem pies concrets et eacutelabore mecircme agrave partir de cette theacuteorie la preuve du pragmatisme

La seacutemiotique peirceacuteenne se veut donc une theacuteorie geacuteneacuterale des signes applicable

entre dLltres agrave chacune des sciences speacuteciales Toutetois Peirce effectue aussi un

eX8men systeacutematique des fondements de la seacutemiotique consideacutereacutes pour eux-mecircmes La

seacutemiotique peirceacuteenne est de la sorte proprement philosophique et indeacutependante des

sciences speacuteciales Le deacutefi lorsquon tente de tirer la seacutemiotique de Peirce vers des

applications theacuteoriques devient alors de franchir 18 distance eacutepisteacutemologique entre

seacutemiotique philosophique ct seacutemiotique appliqueacutee 8UX sciences speacuteciales et deacuteviter de

traiter superficiellement des concepts de la theacuteorie Ce nest en effet que reacutecemment

que la seacutemiotique peirceacuteenne sest vue exposeacutee systeacutem8tiquement dans son ensemble

(Carontini 1984 Savan 1988 Fisette 1990 Liszka 1996) et un examen appro londi de

ses fondements saveacuterant toujours difficile agrave effectuer lapplication de ses concepts

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

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fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

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mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

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Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

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modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

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et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

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A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

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cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

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champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

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le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

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Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

74

dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

76

ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

79

complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

81

particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

82

exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

83

ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

84

traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

9IJM~F6~JEfrœf9euroI~flifiumlil~~g~IIcirc~~jjijA~~tirlwJ[~ampfJffi~tJ~ji1Jicircjg~~~ritIff~

~~7eumlJr7eacute7t5t~bRW-A~1tt~~~JlJ F9 pg ffiI~n~J11~EtUfLJl~ [I] tJ eacuteJlJ JJ tJJ7NJJ~jIJfIJ

Jfl] 91HtJ JJIJ ~IJ ~IJ~IJ$IJilJlJ~IJ MlIJiIJ~IJj)fljgIJJIIJilIJ11lIJ~IJIJ 1J ~D r]j sectiJ~JjJiJ9J~MiJ iJ ~ 1It1tlJl1J~UiJ~~ucircJJ~l-5JJ ~

~ta~~sectE~~+~~m$~~rn~~WM~W~~S~~~x~~amp~n~~U7~~D

~~EB3~~~~~~~~fig~~ bullbull~~~~~~~~~~~~~~u~~~~~~~~~

~~~W~~R~~~~H~~~~~~~~OO~~plusmnffrrmM~~~~~~~~~~gB~~

m~~w~œ~~~~~~mŒ~~oo~~~œœplusmntt~~~~~~~~n~a~~~~fi

~~gi1~~~~mR~5t~~~~~JlIH9D~29HJj~j~ili~eacutel~99l19lHJN9~9ft9IHffl91i~9i9iU~~HL~rP~~

m~~~~~g~œ~~~~~H~~~gamm~bullbull~~~bullbullbull~~~WM~~

~HHiumlWJj3(ij5tjm~MHtRfEuml~~-~~ram~~~~UJIJ~~g~IJIIIiI~iIJ~~~~iiJjJIIHIIIljtt

~BM~fi~~U~~~~~~~M~~fi~~~Œ~~~~~bullbull8~

g~~rt ~~ ~ 1ij 5f5tmm 5lta sN 5jj iWiJf~ ~rn~~~~i~il~ iiE ~iampm~ilt i~iii1l-iiumlIJl imi~~i~rei~~ z TE~ ~

~~~~ffia~~tt~ffl~~~~~~~~~m~~~~~~~ill~illili~~~~ill~~ill~ill~

ill~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~sect~fi~m~~~~~~~bullbull ~~iJ~gl~~~~isect~rlI~m~[ll)~Ii~iJ~~~~icircf~5t~ftlx~flWg~m~~~~g~mLir08z~SZ~~B~2tI~~

~~~~~~~bullbull~~g~~~~=~ampM~~~tt~W~tt~llimmffiregWmm~~m~mmmm

1mIIt~1$$i~iXftiiti(~UJ~pfi~~m=Fif~1j1f~atnjLtlkjRj1itjjJljRj9jEjsJHjjJ111jljljjHtbJecircj91jlijffi

j~jElecircjEliJtUH~jm~jH3j~j~mjjjeurojjUJIHSlj~jmmt(tj~j~j1i5ampmj~j~m~j~jMEcircIcircijJiumlW~j~mj~j~HlH~j~

Jfj~j~j~jfi~j~jjlitj~3Z~QrQ1i5i55~lijH9~~5i1~j9~~9~9HlY+n~jFfffIIUfi1J1rtiIIcircIcircIIcirc~)j~1IcircJtB IBi3Jf ~m~ bullbull~_ampbullbull~ bullbullubullbull~~~~~~~lItq~~~~~UftU~fi~~M~~~~~~

1im~~icircilicircg~miml~TIlY~EMmicirc~3trPJmJjicircij~~ij[i]~mlltIlijialiilijn~~ij~ijUi15k~~~

~~~~Wi~~1t1L1Jl1lj1~111~H~j~~jJlHj~j5j~t5ffjjljijnffi~j~ljjRfiumlji~Ujijjij~jfoJH~~jllJl~

~WR~jflij~jj~jiHH~lmjfrHrfl~R~~euml~~xlx~xiXLtiumlE~tiicircJiiuml9E~HIltsectliJM~~t~~H~1)l18m~tt=tEU=

~~ffJ~A~R~~~~~~~~~~~~~~~$~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~~~M~~~~~~n~~~~~m~~bullbull~~~~~~~MAA~~~~

~~~tlffl~mmH~~~m~~œlli~~~~~~~~M~m~~MgX~~fflffi~$~~

mWm~~Mft~bullbulla~amp~~amp~~~~bullbullbull~e~~H~~m~sect~~~Esect~~~

~ffi~mmm~bullbull~m~~~ffl~raquo~~~~~m~~g~~~M~ntlm~m~mn~bull bull ~~N~n~m~~nffi~nti~mmm~~œ~~~~~~~~~nbullbull~u~amp~~ampmUh~

~~~~~~~~~m~~~m~M~n~ffiffiM~mMg~~~~~g~~m~n~m~

~W~~ftWe~~~m~~~~~m~m~mbullbullbull~Mbullbullbullbullbullbullbullbull~bullbull~mmbullbullbullbull ffi $ bullbullbullTI~a~G~~~~mn~~~œsect~B~mAA~~~amp~~~~~~~AA~~~~M

~ft~iliffi~~~~~Bampti~~m~~~M~bullbullbull~m~N~mm~~U~~M~~m

middot~Hn~egrave~j1I~t~i~f~~Il~jj~R~t~~ii]~iE~g~~m~f~~ta8~8iumlt8~8~W~2i~g8~8t~~Ti~r~~~~~~mj~8ill~~~rn8~8SU

~~bullbull~mmbullbull~~sect~~M~~fta~bullbullbullaRbullbullbullbullbulla~M~~~AAg~m

~~O~li~Œm~~mHm~a~bullbullnft~~tiQ~bullbullbullbullbullW~~~~B~~n

MW~bullbullfflm~D~~~tl~~ffi~~UnmftHrt~nm~~mgmmmamp~Mm~

re M~ fMliumll rm 1HI~~iumli~1i1lllI~lilaiUll Ffisecti~tj~~~~~~ijJmiddot~u ~~fP~F~~iID fItgi~~iamp~mIJJIL~ii1iraquoij

ftUHabullbullgHUMDmam~~~D~n5~bullbull~gu~~gfta~~MR~~D

~p~~Jff~~~iMicirc~~

110

~Vllob((ires hiragana (katakana) lrunsilleacuterolion en rocircmaji

iYgt (7) a L(-1)i 3 (rJ)u X (I) e d3 pt) a

fJ) CfJ) ka ~ (~) ki lt () ku ft (7) ke (J) ka

~ (~) sa ~ () shi 9 (A) su tt ct) se -t- ()) sa

t ($7) t8 - (=-) chi J()tsu -c CT) te C ( t-- ) ta

tJ ct) na 1 (=) ni ttd C~) nu td (7) ne 0) (J) no

li () ha O(t)hi 5 (7) lu ( ) he IJ (Ii-) ho

() ma Jj(2)mi ltt (b) mu (J) (j ) me t(-r)mo

-(~)a ~ (=1) yu et (3) )0

G (5) ra L) (1)) ri o (J[) ru n (v) re ~(D)ro

b () wa ~ (3) a

Signes diacritiques 0

Signe remplaccedilant le kon(( reacutepeacuteteacute ~

Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

IC systegraveme Je tnlnslilleacutenltion Ilcpbulll llloJilieacute qui rcn oie ugrave la prononciation anglaise esl utiliseacute

III

LClrails de lexIe

sX~ B (J)~1J(J)$euml ilraquo ~o -A(J)--r A IJ~ mEr~ (J)--rTffi~JJ ~1~-gt TL fo

Jt L r~ (J) --r 1 It (J) ~ (J) 9 1 ~jH) L tJ L0 lIjt PJTq R-~ (J)~IJ 11f- ~ tJ fIl UI- ~j$

IJ~-QcTL~o m~r~IJ (g~IS~ULrL (J)~(J)9It m~JJ~9~m

ftn ~j~~~~IJ~ t ==A 11 ilraquo U-t tJ t(J)T ilraquo ~ 0 -thIJ~ (J)~0)9 I(I~ t LtJ

L 0

fiiJl51IJ) C L C (J) ==$ j1f~ 1 11 plusmnth~ C IJ) dm C IJ) $ C IJ) ~JUi C IJ) L J( L

IJ~=rj LTJtCcedil t- o -t euml~ rtJ (J) ~ lfh1J 11 -im Ueuml 1tfJ L0 Im2l cl ~ C lld~ ~fb~ ~

n~m L T -t(J)R-IJ~-JL t- l) ~icircN(J)8IJ~-JL t- U LJ- ~ ~ IjJ- 1 -JJJmuT fIT (J)4

1-gt TL t- C L $c ilraquo ~ 0 ecircrtJ IJ~-t(J)9ireuml ilraquo ~ IJ) G mEr~ (J)f~~tJ euml 11 5icl l) ~

ttiTTRi~JJ ~ IJ~tJIJ)-gt t- o 9 ~ C -t(J)mh~ Tt-(J)~ cl L$1 L T ~J1IIIJ~~~to ~A

IJ~~~to c C L L 1 11 ~ 11fJ( l) -F(J)tJ L9EA~ (J)r~ j~ TT mTTii ltC

L sectt~ ~ Z te t-o -t euml B (J) EIIJ~~Z tJ lttJ ~ C ~euml t ~o ~ gIJ~-gt T (J) r~ (J)

ilIumlpJT IIJEuml~~JJ~ L tJ L$ItJ TL t- (J)euml ilraquo ~ 0

mEr~ laquoRashocircmonraquo in Akutagawa 1969 (1915) (extrait dun conte)

~ffl11HIl tJ -5 tJ j- ~ ~ 11 1 0 9 sectlJ ~ secttEacute1 (J) 4 ffl 3iffl~= sect1sect (J)PJTf~~ajL1i~IIjij~iumlIDeumltJ -5 tJ j- ~ ~IJ~ El n -J 0 rt-7deg tJ~Mplusmn~ J 1

r~J~-~3 (~~sect) O)~~J C~~9~cI~ ~~~~ftgElO)rtbl)~tJ

~tJj-~~~~m9~Ceuml ~fiWrtJ~ j-~7euml-)~9~mLtilraquo~)-tt0 LIJ)L

r~ L Lg] BJ ~j~11 f~1t~lM 31 ~mtll9 ~fiegrave(J)sect Lpg g Itt~ ~ C gt lt11 lt tJ Ell~ t~iY)tJ L0

PJT~~Bjjfl~~T8 3 0 ~o Ecircl t~J~J~~jHeumlWlZt-jij~i~famp~l(J) pgg ~~m811~l) i6lvt s~ tfffampfJJ(J)1i~c L TII~sectM5iecircHsect(J) 4 9 8 2~ IJjUiJi-ecirc~~IcircJ~1sect(J) 6 4 5 2 ~

clU~Lo

(J)rtJTtJ~tJT~~II 2-lf~ )~~TDtJeumlmiddotB~euro[illIuml-e-~ZIlt Lt(J)~ g](J)~jjicircjtJ

euml(J)~1f~~~~acirciY)~ C 0 9 ] tM~o tJ ~ tJ T~i~pJT ~ ~~9-gt t-J~jjicircjecircHsect(J)tff

BifJi~Itt~r-J 4 fg(J)51~to

f9JJ~11~ C r Ecircl ~c(J)fplusmn$~ Pf~~I= 9 ~T v 7 -7 J ~ r BIJ~77 C tW(J)~(t~~ C

tJ~ ~77 7- r- l ~ ~famp~l] (J)miiJ r I=[ecirc] Itt-~fi L L B (J) ~tJ r- 1) - 7 ~

TT1T1-] J cLt-~-g-o

mi L t- t Iteuml 11 t C tJ L tgt 0) t ~ lt ~ m (J)~1J~ 1 IHHiH tgtfi -e- -t t o Dl~EcircX]

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Mainichi Shilllbull 2006929 (article de journal)

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ocircyocirc kara hunka kocircrY1Icirc nojissen mode j- X-0)~2i~RHi7f~ ) =t - )-5 et U-AII~RliO)tfflt))GX1txmO)~JIumlC [Semiotic analysis of Challtlcters

appiying the theories o~middot Saussure and Peirce to a new speacutelce of meaningJ Meacutemoire de maicirctrise de lUniversiteacute Keiagrave Tagravekyagrave Universiteacute [(eiagrave 85 p Je nai

113

malheureusement pas pu consulter ce texte Kant Emmanuel 2001 (1781 1787) Critique de la raison pure 2 eacutecl Trad de

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Page 4: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

Ta ble des matiegraveres

I~eacutesumeacute IV

Introduction

1 Seacutemiotique rllilosorhique X

11 Le rragillatisme X

12 Le systegraveme des scienccs 17

13 Les sciences rllilosorlliques 21

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegories 24

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes 40

1321 Seacutemiotique cnotation logique 51

2 Seacutemiotique ct theacuteOlie de lmiddoteacutecriture Cl 1

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise 62

22 Arrroeile seacutemiotique de leacutecriture jaronaise ClX

22Ilheacuteorie geacuteneacuterale de leacuteeriture comme signe Ml

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture iaronaise 73

223 Critique de 1lIleacutellyse seacutemiotique 93

Cmiddotoncilision 99

Acircnnce 1 Ies graplles eislellticls 104

AcircnnCe 2 Le S) stegraveme deacutecriture ilponlis 109

13ibliographie 112

Reacutesumeacute

Le bul de cc meacutemoire est de deacuteterminer quelle pourrait 0tre 11 porteacutee de la

seacutemiotique philosophique de Chlrles Sanders lirce sur la theacuteorie de leacutecriture en

prenant pour cas (leacutetude le systegraveme deacutecriture japonais Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lltlpplication de la seacutemiotique comme theacuteoric geacuteneacuteralc des signcs ml

sciences speacuteciales tout en eacuteclairant- par conversc leacutetudc de leacutecriturc japonaise en

tltlnt que systegravemc graphique Il lst structureacute cn dell chapitrcs principaux portant sur

1) les principes de la seacutemiotique philosophique ct 2) le licn cntrc la seacutemiotiquc ct lltl

theacuteorie dl leacutecriture

Dans le premicr chapitrc la meacutethodologic du meacutemoirc est tout dabord eacutetablie

par leamen du pragmat isme de Peirce consideacutereacute eomlne unc doctrine meacutelhodeul ique

ayant pour principe directeur la croissance La seacutemiotique ct la logique de mecircme que

la linguistique Cl leacutetmle de leacutecriture sonl situeacutees dans le systegraveme pcirceacutecn des

scicnces lcs principes de 11 phlIleacutelOscopic ct dl 1lt1 seacutemiotique sont eacutegalement

exposeacutes I~a philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise cOlnme

point de deacutepltlrt pour une eacutelude de leacutecritllle du point de vue seacutemiotique

DlIls le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comlne signe est

eacutelaboreacutee il pnrtir de la seacutemiotique peirceacuteenne La theacuteorie seacutemiotique est appliqueacutee plus

speacuteciliquement au systegraveme deacutecrilure iaponais cl agrave lanalyse de ses translormalIcircons

actuelles le retour reacutelkif et critique sur lanalyse ellectueacutee permet par la suite de

iuger de ladeacutequation des concepts seacutemiotiques dans leur application ugrave leacutetude de

leacutecriture japona ise

Le meacutemoire sc conclut par une consideacuterltion des liens que la seacutemiotique de

eacutecriture entretient avec les autres sciences philosophiques normatives soit eacutethique

et lestheacutetique

Mols chs Seacutemiotique Igthilosophie du langlge lgthilosophie des sciences (eritllle

(Systegraveme graphique) laponais (Iangue) Peirce Charles S (Charles

S(1Jl(lers) 1X39-1 lt) 14

Introduction

i t has never been 1n my power to stucy

anything-mathematics ethics metaphysics gtmiddotavitation

thermoclynamics optics chemistry comparative anatomy

astronomy psychology phonetics economic the history of

science whist men and women wine metrology except as a

study o~ sel11eiotic (SampS 85-86 1908)

Seacutem iotique de la culture 1itteacuter8 ire visuelle ou des p8SSlons le cham p

cl8pplic8tion de la seacutemiotique peut sembler v8ste m8is le caractegravere indeacutetermineacute de son

fondement nous troublera davantage Peirce deacutejagrave le tondateur de 18 discipline

contempor8ine dun point de vue philosophique donne une extension large agrave la

seacutemiotique dans Id citation bien connue mais peut-ecirctre par un emportement

eacutepistolaire (ici dans une lettre agrave Lady Welby) il fait porter la seacutemiotique aussi bien sur

les matheacutematiques et la philosophie que sur les sciences speacuteciales De plus il illustre

souvent 18 seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative en lappliquant agrave des

exem pies concrets et eacutelabore mecircme agrave partir de cette theacuteorie la preuve du pragmatisme

La seacutemiotique peirceacuteenne se veut donc une theacuteorie geacuteneacuterale des signes applicable

entre dLltres agrave chacune des sciences speacuteciales Toutetois Peirce effectue aussi un

eX8men systeacutematique des fondements de la seacutemiotique consideacutereacutes pour eux-mecircmes La

seacutemiotique peirceacuteenne est de la sorte proprement philosophique et indeacutependante des

sciences speacuteciales Le deacutefi lorsquon tente de tirer la seacutemiotique de Peirce vers des

applications theacuteoriques devient alors de franchir 18 distance eacutepisteacutemologique entre

seacutemiotique philosophique ct seacutemiotique appliqueacutee 8UX sciences speacuteciales et deacuteviter de

traiter superficiellement des concepts de la theacuteorie Ce nest en effet que reacutecemment

que la seacutemiotique peirceacuteenne sest vue exposeacutee systeacutem8tiquement dans son ensemble

(Carontini 1984 Savan 1988 Fisette 1990 Liszka 1996) et un examen appro londi de

ses fondements saveacuterant toujours difficile agrave effectuer lapplication de ses concepts

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

30

fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

31

mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

32

Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

33

modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

34

et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

35

A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

36

cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

37

champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

38

le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

39

Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

74

dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

76

ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

79

complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

81

particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

82

exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

83

ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

84

traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

9IJM~F6~JEfrœf9euroI~flifiumlil~~g~IIcirc~~jjijA~~tirlwJ[~ampfJffi~tJ~ji1Jicircjg~~~ritIff~

~~7eumlJr7eacute7t5t~bRW-A~1tt~~~JlJ F9 pg ffiI~n~J11~EtUfLJl~ [I] tJ eacuteJlJ JJ tJJ7NJJ~jIJfIJ

Jfl] 91HtJ JJIJ ~IJ ~IJ~IJ$IJilJlJ~IJ MlIJiIJ~IJj)fljgIJJIIJilIJ11lIJ~IJIJ 1J ~D r]j sectiJ~JjJiJ9J~MiJ iJ ~ 1It1tlJl1J~UiJ~~ucircJJ~l-5JJ ~

~ta~~sectE~~+~~m$~~rn~~WM~W~~S~~~x~~amp~n~~U7~~D

~~EB3~~~~~~~~fig~~ bullbull~~~~~~~~~~~~~~u~~~~~~~~~

~~~W~~R~~~~H~~~~~~~~OO~~plusmnffrrmM~~~~~~~~~~gB~~

m~~w~œ~~~~~~mŒ~~oo~~~œœplusmntt~~~~~~~~n~a~~~~fi

~~gi1~~~~mR~5t~~~~~JlIH9D~29HJj~j~ili~eacutel~99l19lHJN9~9ft9IHffl91i~9i9iU~~HL~rP~~

m~~~~~g~œ~~~~~H~~~gamm~bullbull~~~bullbullbull~~~WM~~

~HHiumlWJj3(ij5tjm~MHtRfEuml~~-~~ram~~~~UJIJ~~g~IJIIIiI~iIJ~~~~iiJjJIIHIIIljtt

~BM~fi~~U~~~~~~~M~~fi~~~Œ~~~~~bullbull8~

g~~rt ~~ ~ 1ij 5f5tmm 5lta sN 5jj iWiJf~ ~rn~~~~i~il~ iiE ~iampm~ilt i~iii1l-iiumlIJl imi~~i~rei~~ z TE~ ~

~~~~ffia~~tt~ffl~~~~~~~~~m~~~~~~~ill~illili~~~~ill~~ill~ill~

ill~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~sect~fi~m~~~~~~~bullbull ~~iJ~gl~~~~isect~rlI~m~[ll)~Ii~iJ~~~~icircf~5t~ftlx~flWg~m~~~~g~mLir08z~SZ~~B~2tI~~

~~~~~~~bullbull~~g~~~~=~ampM~~~tt~W~tt~llimmffiregWmm~~m~mmmm

1mIIt~1$$i~iXftiiti(~UJ~pfi~~m=Fif~1j1f~atnjLtlkjRj1itjjJljRj9jEjsJHjjJ111jljljjHtbJecircj91jlijffi

j~jElecircjEliJtUH~jm~jH3j~j~mjjjeurojjUJIHSlj~jmmt(tj~j~j1i5ampmj~j~m~j~jMEcircIcircijJiumlW~j~mj~j~HlH~j~

Jfj~j~j~jfi~j~jjlitj~3Z~QrQ1i5i55~lijH9~~5i1~j9~~9~9HlY+n~jFfffIIUfi1J1rtiIIcircIcircIIcirc~)j~1IcircJtB IBi3Jf ~m~ bullbull~_ampbullbull~ bullbullubullbull~~~~~~~lItq~~~~~UftU~fi~~M~~~~~~

1im~~icircilicircg~miml~TIlY~EMmicirc~3trPJmJjicircij~~ij[i]~mlltIlijialiilijn~~ij~ijUi15k~~~

~~~~Wi~~1t1L1Jl1lj1~111~H~j~~jJlHj~j5j~t5ffjjljijnffi~j~ljjRfiumlji~Ujijjij~jfoJH~~jllJl~

~WR~jflij~jj~jiHH~lmjfrHrfl~R~~euml~~xlx~xiXLtiumlE~tiicircJiiuml9E~HIltsectliJM~~t~~H~1)l18m~tt=tEU=

~~ffJ~A~R~~~~~~~~~~~~~~~$~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~~~M~~~~~~n~~~~~m~~bullbull~~~~~~~MAA~~~~

~~~tlffl~mmH~~~m~~œlli~~~~~~~~M~m~~MgX~~fflffi~$~~

mWm~~Mft~bullbulla~amp~~amp~~~~bullbullbull~e~~H~~m~sect~~~Esect~~~

~ffi~mmm~bullbull~m~~~ffl~raquo~~~~~m~~g~~~M~ntlm~m~mn~bull bull ~~N~n~m~~nffi~nti~mmm~~œ~~~~~~~~~nbullbull~u~amp~~ampmUh~

~~~~~~~~~m~~~m~M~n~ffiffiM~mMg~~~~~g~~m~n~m~

~W~~ftWe~~~m~~~~~m~m~mbullbullbull~Mbullbullbullbullbullbullbullbull~bullbull~mmbullbullbullbull ffi $ bullbullbullTI~a~G~~~~mn~~~œsect~B~mAA~~~amp~~~~~~~AA~~~~M

~ft~iliffi~~~~~Bampti~~m~~~M~bullbullbull~m~N~mm~~U~~M~~m

middot~Hn~egrave~j1I~t~i~f~~Il~jj~R~t~~ii]~iE~g~~m~f~~ta8~8iumlt8~8~W~2i~g8~8t~~Ti~r~~~~~~mj~8ill~~~rn8~8SU

~~bullbull~mmbullbull~~sect~~M~~fta~bullbullbullaRbullbullbullbullbulla~M~~~AAg~m

~~O~li~Œm~~mHm~a~bullbullnft~~tiQ~bullbullbullbullbullW~~~~B~~n

MW~bullbullfflm~D~~~tl~~ffi~~UnmftHrt~nm~~mgmmmamp~Mm~

re M~ fMliumll rm 1HI~~iumli~1i1lllI~lilaiUll Ffisecti~tj~~~~~~ijJmiddot~u ~~fP~F~~iID fItgi~~iamp~mIJJIL~ii1iraquoij

ftUHabullbullgHUMDmam~~~D~n5~bullbull~gu~~gfta~~MR~~D

~p~~Jff~~~iMicirc~~

110

~Vllob((ires hiragana (katakana) lrunsilleacuterolion en rocircmaji

iYgt (7) a L(-1)i 3 (rJ)u X (I) e d3 pt) a

fJ) CfJ) ka ~ (~) ki lt () ku ft (7) ke (J) ka

~ (~) sa ~ () shi 9 (A) su tt ct) se -t- ()) sa

t ($7) t8 - (=-) chi J()tsu -c CT) te C ( t-- ) ta

tJ ct) na 1 (=) ni ttd C~) nu td (7) ne 0) (J) no

li () ha O(t)hi 5 (7) lu ( ) he IJ (Ii-) ho

() ma Jj(2)mi ltt (b) mu (J) (j ) me t(-r)mo

-(~)a ~ (=1) yu et (3) )0

G (5) ra L) (1)) ri o (J[) ru n (v) re ~(D)ro

b () wa ~ (3) a

Signes diacritiques 0

Signe remplaccedilant le kon(( reacutepeacuteteacute ~

Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

IC systegraveme Je tnlnslilleacutenltion Ilcpbulll llloJilieacute qui rcn oie ugrave la prononciation anglaise esl utiliseacute

III

LClrails de lexIe

sX~ B (J)~1J(J)$euml ilraquo ~o -A(J)--r A IJ~ mEr~ (J)--rTffi~JJ ~1~-gt TL fo

Jt L r~ (J) --r 1 It (J) ~ (J) 9 1 ~jH) L tJ L0 lIjt PJTq R-~ (J)~IJ 11f- ~ tJ fIl UI- ~j$

IJ~-QcTL~o m~r~IJ (g~IS~ULrL (J)~(J)9It m~JJ~9~m

ftn ~j~~~~IJ~ t ==A 11 ilraquo U-t tJ t(J)T ilraquo ~ 0 -thIJ~ (J)~0)9 I(I~ t LtJ

L 0

fiiJl51IJ) C L C (J) ==$ j1f~ 1 11 plusmnth~ C IJ) dm C IJ) $ C IJ) ~JUi C IJ) L J( L

IJ~=rj LTJtCcedil t- o -t euml~ rtJ (J) ~ lfh1J 11 -im Ueuml 1tfJ L0 Im2l cl ~ C lld~ ~fb~ ~

n~m L T -t(J)R-IJ~-JL t- l) ~icircN(J)8IJ~-JL t- U LJ- ~ ~ IjJ- 1 -JJJmuT fIT (J)4

1-gt TL t- C L $c ilraquo ~ 0 ecircrtJ IJ~-t(J)9ireuml ilraquo ~ IJ) G mEr~ (J)f~~tJ euml 11 5icl l) ~

ttiTTRi~JJ ~ IJ~tJIJ)-gt t- o 9 ~ C -t(J)mh~ Tt-(J)~ cl L$1 L T ~J1IIIJ~~~to ~A

IJ~~~to c C L L 1 11 ~ 11fJ( l) -F(J)tJ L9EA~ (J)r~ j~ TT mTTii ltC

L sectt~ ~ Z te t-o -t euml B (J) EIIJ~~Z tJ lttJ ~ C ~euml t ~o ~ gIJ~-gt T (J) r~ (J)

ilIumlpJT IIJEuml~~JJ~ L tJ L$ItJ TL t- (J)euml ilraquo ~ 0

mEr~ laquoRashocircmonraquo in Akutagawa 1969 (1915) (extrait dun conte)

~ffl11HIl tJ -5 tJ j- ~ ~ 11 1 0 9 sectlJ ~ secttEacute1 (J) 4 ffl 3iffl~= sect1sect (J)PJTf~~ajL1i~IIjij~iumlIDeumltJ -5 tJ j- ~ ~IJ~ El n -J 0 rt-7deg tJ~Mplusmn~ J 1

r~J~-~3 (~~sect) O)~~J C~~9~cI~ ~~~~ftgElO)rtbl)~tJ

~tJj-~~~~m9~Ceuml ~fiWrtJ~ j-~7euml-)~9~mLtilraquo~)-tt0 LIJ)L

r~ L Lg] BJ ~j~11 f~1t~lM 31 ~mtll9 ~fiegrave(J)sect Lpg g Itt~ ~ C gt lt11 lt tJ Ell~ t~iY)tJ L0

PJT~~Bjjfl~~T8 3 0 ~o Ecircl t~J~J~~jHeumlWlZt-jij~i~famp~l(J) pgg ~~m811~l) i6lvt s~ tfffampfJJ(J)1i~c L TII~sectM5iecircHsect(J) 4 9 8 2~ IJjUiJi-ecirc~~IcircJ~1sect(J) 6 4 5 2 ~

clU~Lo

(J)rtJTtJ~tJT~~II 2-lf~ )~~TDtJeumlmiddotB~euro[illIuml-e-~ZIlt Lt(J)~ g](J)~jjicircjtJ

euml(J)~1f~~~~acirciY)~ C 0 9 ] tM~o tJ ~ tJ T~i~pJT ~ ~~9-gt t-J~jjicircjecircHsect(J)tff

BifJi~Itt~r-J 4 fg(J)51~to

f9JJ~11~ C r Ecircl ~c(J)fplusmn$~ Pf~~I= 9 ~T v 7 -7 J ~ r BIJ~77 C tW(J)~(t~~ C

tJ~ ~77 7- r- l ~ ~famp~l] (J)miiJ r I=[ecirc] Itt-~fi L L B (J) ~tJ r- 1) - 7 ~

TT1T1-] J cLt-~-g-o

mi L t- t Iteuml 11 t C tJ L tgt 0) t ~ lt ~ m (J)~1J~ 1 IHHiH tgtfi -e- -t t o Dl~EcircX]

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113

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Page 5: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

Reacutesumeacute

Le bul de cc meacutemoire est de deacuteterminer quelle pourrait 0tre 11 porteacutee de la

seacutemiotique philosophique de Chlrles Sanders lirce sur la theacuteorie de leacutecriture en

prenant pour cas (leacutetude le systegraveme deacutecriture japonais Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lltlpplication de la seacutemiotique comme theacuteoric geacuteneacuteralc des signcs ml

sciences speacuteciales tout en eacuteclairant- par conversc leacutetudc de leacutecriturc japonaise en

tltlnt que systegravemc graphique Il lst structureacute cn dell chapitrcs principaux portant sur

1) les principes de la seacutemiotique philosophique ct 2) le licn cntrc la seacutemiotiquc ct lltl

theacuteorie dl leacutecriture

Dans le premicr chapitrc la meacutethodologic du meacutemoirc est tout dabord eacutetablie

par leamen du pragmat isme de Peirce consideacutereacute eomlne unc doctrine meacutelhodeul ique

ayant pour principe directeur la croissance La seacutemiotique ct la logique de mecircme que

la linguistique Cl leacutetmle de leacutecriture sonl situeacutees dans le systegraveme pcirceacutecn des

scicnces lcs principes de 11 phlIleacutelOscopic ct dl 1lt1 seacutemiotique sont eacutegalement

exposeacutes I~a philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise cOlnme

point de deacutepltlrt pour une eacutelude de leacutecritllle du point de vue seacutemiotique

DlIls le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comlne signe est

eacutelaboreacutee il pnrtir de la seacutemiotique peirceacuteenne La theacuteorie seacutemiotique est appliqueacutee plus

speacuteciliquement au systegraveme deacutecrilure iaponais cl agrave lanalyse de ses translormalIcircons

actuelles le retour reacutelkif et critique sur lanalyse ellectueacutee permet par la suite de

iuger de ladeacutequation des concepts seacutemiotiques dans leur application ugrave leacutetude de

leacutecriture japona ise

Le meacutemoire sc conclut par une consideacuterltion des liens que la seacutemiotique de

eacutecriture entretient avec les autres sciences philosophiques normatives soit eacutethique

et lestheacutetique

Mols chs Seacutemiotique Igthilosophie du langlge lgthilosophie des sciences (eritllle

(Systegraveme graphique) laponais (Iangue) Peirce Charles S (Charles

S(1Jl(lers) 1X39-1 lt) 14

Introduction

i t has never been 1n my power to stucy

anything-mathematics ethics metaphysics gtmiddotavitation

thermoclynamics optics chemistry comparative anatomy

astronomy psychology phonetics economic the history of

science whist men and women wine metrology except as a

study o~ sel11eiotic (SampS 85-86 1908)

Seacutem iotique de la culture 1itteacuter8 ire visuelle ou des p8SSlons le cham p

cl8pplic8tion de la seacutemiotique peut sembler v8ste m8is le caractegravere indeacutetermineacute de son

fondement nous troublera davantage Peirce deacutejagrave le tondateur de 18 discipline

contempor8ine dun point de vue philosophique donne une extension large agrave la

seacutemiotique dans Id citation bien connue mais peut-ecirctre par un emportement

eacutepistolaire (ici dans une lettre agrave Lady Welby) il fait porter la seacutemiotique aussi bien sur

les matheacutematiques et la philosophie que sur les sciences speacuteciales De plus il illustre

souvent 18 seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative en lappliquant agrave des

exem pies concrets et eacutelabore mecircme agrave partir de cette theacuteorie la preuve du pragmatisme

La seacutemiotique peirceacuteenne se veut donc une theacuteorie geacuteneacuterale des signes applicable

entre dLltres agrave chacune des sciences speacuteciales Toutetois Peirce effectue aussi un

eX8men systeacutematique des fondements de la seacutemiotique consideacutereacutes pour eux-mecircmes La

seacutemiotique peirceacuteenne est de la sorte proprement philosophique et indeacutependante des

sciences speacuteciales Le deacutefi lorsquon tente de tirer la seacutemiotique de Peirce vers des

applications theacuteoriques devient alors de franchir 18 distance eacutepisteacutemologique entre

seacutemiotique philosophique ct seacutemiotique appliqueacutee 8UX sciences speacuteciales et deacuteviter de

traiter superficiellement des concepts de la theacuteorie Ce nest en effet que reacutecemment

que la seacutemiotique peirceacuteenne sest vue exposeacutee systeacutem8tiquement dans son ensemble

(Carontini 1984 Savan 1988 Fisette 1990 Liszka 1996) et un examen appro londi de

ses fondements saveacuterant toujours difficile agrave effectuer lapplication de ses concepts

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

30

fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

31

mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

32

Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

33

modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

34

et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

35

A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

36

cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

37

champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

38

le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

39

Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

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dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

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ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

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complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

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particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

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exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

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ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

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traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

9IJM~F6~JEfrœf9euroI~flifiumlil~~g~IIcirc~~jjijA~~tirlwJ[~ampfJffi~tJ~ji1Jicircjg~~~ritIff~

~~7eumlJr7eacute7t5t~bRW-A~1tt~~~JlJ F9 pg ffiI~n~J11~EtUfLJl~ [I] tJ eacuteJlJ JJ tJJ7NJJ~jIJfIJ

Jfl] 91HtJ JJIJ ~IJ ~IJ~IJ$IJilJlJ~IJ MlIJiIJ~IJj)fljgIJJIIJilIJ11lIJ~IJIJ 1J ~D r]j sectiJ~JjJiJ9J~MiJ iJ ~ 1It1tlJl1J~UiJ~~ucircJJ~l-5JJ ~

~ta~~sectE~~+~~m$~~rn~~WM~W~~S~~~x~~amp~n~~U7~~D

~~EB3~~~~~~~~fig~~ bullbull~~~~~~~~~~~~~~u~~~~~~~~~

~~~W~~R~~~~H~~~~~~~~OO~~plusmnffrrmM~~~~~~~~~~gB~~

m~~w~œ~~~~~~mŒ~~oo~~~œœplusmntt~~~~~~~~n~a~~~~fi

~~gi1~~~~mR~5t~~~~~JlIH9D~29HJj~j~ili~eacutel~99l19lHJN9~9ft9IHffl91i~9i9iU~~HL~rP~~

m~~~~~g~œ~~~~~H~~~gamm~bullbull~~~bullbullbull~~~WM~~

~HHiumlWJj3(ij5tjm~MHtRfEuml~~-~~ram~~~~UJIJ~~g~IJIIIiI~iIJ~~~~iiJjJIIHIIIljtt

~BM~fi~~U~~~~~~~M~~fi~~~Œ~~~~~bullbull8~

g~~rt ~~ ~ 1ij 5f5tmm 5lta sN 5jj iWiJf~ ~rn~~~~i~il~ iiE ~iampm~ilt i~iii1l-iiumlIJl imi~~i~rei~~ z TE~ ~

~~~~ffia~~tt~ffl~~~~~~~~~m~~~~~~~ill~illili~~~~ill~~ill~ill~

ill~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~sect~fi~m~~~~~~~bullbull ~~iJ~gl~~~~isect~rlI~m~[ll)~Ii~iJ~~~~icircf~5t~ftlx~flWg~m~~~~g~mLir08z~SZ~~B~2tI~~

~~~~~~~bullbull~~g~~~~=~ampM~~~tt~W~tt~llimmffiregWmm~~m~mmmm

1mIIt~1$$i~iXftiiti(~UJ~pfi~~m=Fif~1j1f~atnjLtlkjRj1itjjJljRj9jEjsJHjjJ111jljljjHtbJecircj91jlijffi

j~jElecircjEliJtUH~jm~jH3j~j~mjjjeurojjUJIHSlj~jmmt(tj~j~j1i5ampmj~j~m~j~jMEcircIcircijJiumlW~j~mj~j~HlH~j~

Jfj~j~j~jfi~j~jjlitj~3Z~QrQ1i5i55~lijH9~~5i1~j9~~9~9HlY+n~jFfffIIUfi1J1rtiIIcircIcircIIcirc~)j~1IcircJtB IBi3Jf ~m~ bullbull~_ampbullbull~ bullbullubullbull~~~~~~~lItq~~~~~UftU~fi~~M~~~~~~

1im~~icircilicircg~miml~TIlY~EMmicirc~3trPJmJjicircij~~ij[i]~mlltIlijialiilijn~~ij~ijUi15k~~~

~~~~Wi~~1t1L1Jl1lj1~111~H~j~~jJlHj~j5j~t5ffjjljijnffi~j~ljjRfiumlji~Ujijjij~jfoJH~~jllJl~

~WR~jflij~jj~jiHH~lmjfrHrfl~R~~euml~~xlx~xiXLtiumlE~tiicircJiiuml9E~HIltsectliJM~~t~~H~1)l18m~tt=tEU=

~~ffJ~A~R~~~~~~~~~~~~~~~$~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~~~M~~~~~~n~~~~~m~~bullbull~~~~~~~MAA~~~~

~~~tlffl~mmH~~~m~~œlli~~~~~~~~M~m~~MgX~~fflffi~$~~

mWm~~Mft~bullbulla~amp~~amp~~~~bullbullbull~e~~H~~m~sect~~~Esect~~~

~ffi~mmm~bullbull~m~~~ffl~raquo~~~~~m~~g~~~M~ntlm~m~mn~bull bull ~~N~n~m~~nffi~nti~mmm~~œ~~~~~~~~~nbullbull~u~amp~~ampmUh~

~~~~~~~~~m~~~m~M~n~ffiffiM~mMg~~~~~g~~m~n~m~

~W~~ftWe~~~m~~~~~m~m~mbullbullbull~Mbullbullbullbullbullbullbullbull~bullbull~mmbullbullbullbull ffi $ bullbullbullTI~a~G~~~~mn~~~œsect~B~mAA~~~amp~~~~~~~AA~~~~M

~ft~iliffi~~~~~Bampti~~m~~~M~bullbullbull~m~N~mm~~U~~M~~m

middot~Hn~egrave~j1I~t~i~f~~Il~jj~R~t~~ii]~iE~g~~m~f~~ta8~8iumlt8~8~W~2i~g8~8t~~Ti~r~~~~~~mj~8ill~~~rn8~8SU

~~bullbull~mmbullbull~~sect~~M~~fta~bullbullbullaRbullbullbullbullbulla~M~~~AAg~m

~~O~li~Œm~~mHm~a~bullbullnft~~tiQ~bullbullbullbullbullW~~~~B~~n

MW~bullbullfflm~D~~~tl~~ffi~~UnmftHrt~nm~~mgmmmamp~Mm~

re M~ fMliumll rm 1HI~~iumli~1i1lllI~lilaiUll Ffisecti~tj~~~~~~ijJmiddot~u ~~fP~F~~iID fItgi~~iamp~mIJJIL~ii1iraquoij

ftUHabullbullgHUMDmam~~~D~n5~bullbull~gu~~gfta~~MR~~D

~p~~Jff~~~iMicirc~~

110

~Vllob((ires hiragana (katakana) lrunsilleacuterolion en rocircmaji

iYgt (7) a L(-1)i 3 (rJ)u X (I) e d3 pt) a

fJ) CfJ) ka ~ (~) ki lt () ku ft (7) ke (J) ka

~ (~) sa ~ () shi 9 (A) su tt ct) se -t- ()) sa

t ($7) t8 - (=-) chi J()tsu -c CT) te C ( t-- ) ta

tJ ct) na 1 (=) ni ttd C~) nu td (7) ne 0) (J) no

li () ha O(t)hi 5 (7) lu ( ) he IJ (Ii-) ho

() ma Jj(2)mi ltt (b) mu (J) (j ) me t(-r)mo

-(~)a ~ (=1) yu et (3) )0

G (5) ra L) (1)) ri o (J[) ru n (v) re ~(D)ro

b () wa ~ (3) a

Signes diacritiques 0

Signe remplaccedilant le kon(( reacutepeacuteteacute ~

Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

IC systegraveme Je tnlnslilleacutenltion Ilcpbulll llloJilieacute qui rcn oie ugrave la prononciation anglaise esl utiliseacute

III

LClrails de lexIe

sX~ B (J)~1J(J)$euml ilraquo ~o -A(J)--r A IJ~ mEr~ (J)--rTffi~JJ ~1~-gt TL fo

Jt L r~ (J) --r 1 It (J) ~ (J) 9 1 ~jH) L tJ L0 lIjt PJTq R-~ (J)~IJ 11f- ~ tJ fIl UI- ~j$

IJ~-QcTL~o m~r~IJ (g~IS~ULrL (J)~(J)9It m~JJ~9~m

ftn ~j~~~~IJ~ t ==A 11 ilraquo U-t tJ t(J)T ilraquo ~ 0 -thIJ~ (J)~0)9 I(I~ t LtJ

L 0

fiiJl51IJ) C L C (J) ==$ j1f~ 1 11 plusmnth~ C IJ) dm C IJ) $ C IJ) ~JUi C IJ) L J( L

IJ~=rj LTJtCcedil t- o -t euml~ rtJ (J) ~ lfh1J 11 -im Ueuml 1tfJ L0 Im2l cl ~ C lld~ ~fb~ ~

n~m L T -t(J)R-IJ~-JL t- l) ~icircN(J)8IJ~-JL t- U LJ- ~ ~ IjJ- 1 -JJJmuT fIT (J)4

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mEr~ laquoRashocircmonraquo in Akutagawa 1969 (1915) (extrait dun conte)

~ffl11HIl tJ -5 tJ j- ~ ~ 11 1 0 9 sectlJ ~ secttEacute1 (J) 4 ffl 3iffl~= sect1sect (J)PJTf~~ajL1i~IIjij~iumlIDeumltJ -5 tJ j- ~ ~IJ~ El n -J 0 rt-7deg tJ~Mplusmn~ J 1

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appiying the theories o~middot Saussure and Peirce to a new speacutelce of meaningJ Meacutemoire de maicirctrise de lUniversiteacute Keiagrave Tagravekyagrave Universiteacute [(eiagrave 85 p Je nai

113

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Page 6: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

Introduction

i t has never been 1n my power to stucy

anything-mathematics ethics metaphysics gtmiddotavitation

thermoclynamics optics chemistry comparative anatomy

astronomy psychology phonetics economic the history of

science whist men and women wine metrology except as a

study o~ sel11eiotic (SampS 85-86 1908)

Seacutem iotique de la culture 1itteacuter8 ire visuelle ou des p8SSlons le cham p

cl8pplic8tion de la seacutemiotique peut sembler v8ste m8is le caractegravere indeacutetermineacute de son

fondement nous troublera davantage Peirce deacutejagrave le tondateur de 18 discipline

contempor8ine dun point de vue philosophique donne une extension large agrave la

seacutemiotique dans Id citation bien connue mais peut-ecirctre par un emportement

eacutepistolaire (ici dans une lettre agrave Lady Welby) il fait porter la seacutemiotique aussi bien sur

les matheacutematiques et la philosophie que sur les sciences speacuteciales De plus il illustre

souvent 18 seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative en lappliquant agrave des

exem pies concrets et eacutelabore mecircme agrave partir de cette theacuteorie la preuve du pragmatisme

La seacutemiotique peirceacuteenne se veut donc une theacuteorie geacuteneacuterale des signes applicable

entre dLltres agrave chacune des sciences speacuteciales Toutetois Peirce effectue aussi un

eX8men systeacutematique des fondements de la seacutemiotique consideacutereacutes pour eux-mecircmes La

seacutemiotique peirceacuteenne est de la sorte proprement philosophique et indeacutependante des

sciences speacuteciales Le deacutefi lorsquon tente de tirer la seacutemiotique de Peirce vers des

applications theacuteoriques devient alors de franchir 18 distance eacutepisteacutemologique entre

seacutemiotique philosophique ct seacutemiotique appliqueacutee 8UX sciences speacuteciales et deacuteviter de

traiter superficiellement des concepts de la theacuteorie Ce nest en effet que reacutecemment

que la seacutemiotique peirceacuteenne sest vue exposeacutee systeacutem8tiquement dans son ensemble

(Carontini 1984 Savan 1988 Fisette 1990 Liszka 1996) et un examen appro londi de

ses fondements saveacuterant toujours difficile agrave effectuer lapplication de ses concepts

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

30

fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

31

mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

32

Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

33

modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

34

et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

35

A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

36

cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

37

champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

38

le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

39

Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

74

dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

76

ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

79

complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

81

particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

82

exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

83

ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

84

traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

9IJM~F6~JEfrœf9euroI~flifiumlil~~g~IIcirc~~jjijA~~tirlwJ[~ampfJffi~tJ~ji1Jicircjg~~~ritIff~

~~7eumlJr7eacute7t5t~bRW-A~1tt~~~JlJ F9 pg ffiI~n~J11~EtUfLJl~ [I] tJ eacuteJlJ JJ tJJ7NJJ~jIJfIJ

Jfl] 91HtJ JJIJ ~IJ ~IJ~IJ$IJilJlJ~IJ MlIJiIJ~IJj)fljgIJJIIJilIJ11lIJ~IJIJ 1J ~D r]j sectiJ~JjJiJ9J~MiJ iJ ~ 1It1tlJl1J~UiJ~~ucircJJ~l-5JJ ~

~ta~~sectE~~+~~m$~~rn~~WM~W~~S~~~x~~amp~n~~U7~~D

~~EB3~~~~~~~~fig~~ bullbull~~~~~~~~~~~~~~u~~~~~~~~~

~~~W~~R~~~~H~~~~~~~~OO~~plusmnffrrmM~~~~~~~~~~gB~~

m~~w~œ~~~~~~mŒ~~oo~~~œœplusmntt~~~~~~~~n~a~~~~fi

~~gi1~~~~mR~5t~~~~~JlIH9D~29HJj~j~ili~eacutel~99l19lHJN9~9ft9IHffl91i~9i9iU~~HL~rP~~

m~~~~~g~œ~~~~~H~~~gamm~bullbull~~~bullbullbull~~~WM~~

~HHiumlWJj3(ij5tjm~MHtRfEuml~~-~~ram~~~~UJIJ~~g~IJIIIiI~iIJ~~~~iiJjJIIHIIIljtt

~BM~fi~~U~~~~~~~M~~fi~~~Œ~~~~~bullbull8~

g~~rt ~~ ~ 1ij 5f5tmm 5lta sN 5jj iWiJf~ ~rn~~~~i~il~ iiE ~iampm~ilt i~iii1l-iiumlIJl imi~~i~rei~~ z TE~ ~

~~~~ffia~~tt~ffl~~~~~~~~~m~~~~~~~ill~illili~~~~ill~~ill~ill~

ill~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~sect~fi~m~~~~~~~bullbull ~~iJ~gl~~~~isect~rlI~m~[ll)~Ii~iJ~~~~icircf~5t~ftlx~flWg~m~~~~g~mLir08z~SZ~~B~2tI~~

~~~~~~~bullbull~~g~~~~=~ampM~~~tt~W~tt~llimmffiregWmm~~m~mmmm

1mIIt~1$$i~iXftiiti(~UJ~pfi~~m=Fif~1j1f~atnjLtlkjRj1itjjJljRj9jEjsJHjjJ111jljljjHtbJecircj91jlijffi

j~jElecircjEliJtUH~jm~jH3j~j~mjjjeurojjUJIHSlj~jmmt(tj~j~j1i5ampmj~j~m~j~jMEcircIcircijJiumlW~j~mj~j~HlH~j~

Jfj~j~j~jfi~j~jjlitj~3Z~QrQ1i5i55~lijH9~~5i1~j9~~9~9HlY+n~jFfffIIUfi1J1rtiIIcircIcircIIcirc~)j~1IcircJtB IBi3Jf ~m~ bullbull~_ampbullbull~ bullbullubullbull~~~~~~~lItq~~~~~UftU~fi~~M~~~~~~

1im~~icircilicircg~miml~TIlY~EMmicirc~3trPJmJjicircij~~ij[i]~mlltIlijialiilijn~~ij~ijUi15k~~~

~~~~Wi~~1t1L1Jl1lj1~111~H~j~~jJlHj~j5j~t5ffjjljijnffi~j~ljjRfiumlji~Ujijjij~jfoJH~~jllJl~

~WR~jflij~jj~jiHH~lmjfrHrfl~R~~euml~~xlx~xiXLtiumlE~tiicircJiiuml9E~HIltsectliJM~~t~~H~1)l18m~tt=tEU=

~~ffJ~A~R~~~~~~~~~~~~~~~$~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~~~M~~~~~~n~~~~~m~~bullbull~~~~~~~MAA~~~~

~~~tlffl~mmH~~~m~~œlli~~~~~~~~M~m~~MgX~~fflffi~$~~

mWm~~Mft~bullbulla~amp~~amp~~~~bullbullbull~e~~H~~m~sect~~~Esect~~~

~ffi~mmm~bullbull~m~~~ffl~raquo~~~~~m~~g~~~M~ntlm~m~mn~bull bull ~~N~n~m~~nffi~nti~mmm~~œ~~~~~~~~~nbullbull~u~amp~~ampmUh~

~~~~~~~~~m~~~m~M~n~ffiffiM~mMg~~~~~g~~m~n~m~

~W~~ftWe~~~m~~~~~m~m~mbullbullbull~Mbullbullbullbullbullbullbullbull~bullbull~mmbullbullbullbull ffi $ bullbullbullTI~a~G~~~~mn~~~œsect~B~mAA~~~amp~~~~~~~AA~~~~M

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110

~Vllob((ires hiragana (katakana) lrunsilleacuterolion en rocircmaji

iYgt (7) a L(-1)i 3 (rJ)u X (I) e d3 pt) a

fJ) CfJ) ka ~ (~) ki lt () ku ft (7) ke (J) ka

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tJ ct) na 1 (=) ni ttd C~) nu td (7) ne 0) (J) no

li () ha O(t)hi 5 (7) lu ( ) he IJ (Ii-) ho

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G (5) ra L) (1)) ri o (J[) ru n (v) re ~(D)ro

b () wa ~ (3) a

Signes diacritiques 0

Signe remplaccedilant le kon(( reacutepeacuteteacute ~

Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

IC systegraveme Je tnlnslilleacutenltion Ilcpbulll llloJilieacute qui rcn oie ugrave la prononciation anglaise esl utiliseacute

III

LClrails de lexIe

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Jt L r~ (J) --r 1 It (J) ~ (J) 9 1 ~jH) L tJ L0 lIjt PJTq R-~ (J)~IJ 11f- ~ tJ fIl UI- ~j$

IJ~-QcTL~o m~r~IJ (g~IS~ULrL (J)~(J)9It m~JJ~9~m

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IJ~~~to c C L L 1 11 ~ 11fJ( l) -F(J)tJ L9EA~ (J)r~ j~ TT mTTii ltC

L sectt~ ~ Z te t-o -t euml B (J) EIIJ~~Z tJ lttJ ~ C ~euml t ~o ~ gIJ~-gt T (J) r~ (J)

ilIumlpJT IIJEuml~~JJ~ L tJ L$ItJ TL t- (J)euml ilraquo ~ 0

mEr~ laquoRashocircmonraquo in Akutagawa 1969 (1915) (extrait dun conte)

~ffl11HIl tJ -5 tJ j- ~ ~ 11 1 0 9 sectlJ ~ secttEacute1 (J) 4 ffl 3iffl~= sect1sect (J)PJTf~~ajL1i~IIjij~iumlIDeumltJ -5 tJ j- ~ ~IJ~ El n -J 0 rt-7deg tJ~Mplusmn~ J 1

r~J~-~3 (~~sect) O)~~J C~~9~cI~ ~~~~ftgElO)rtbl)~tJ

~tJj-~~~~m9~Ceuml ~fiWrtJ~ j-~7euml-)~9~mLtilraquo~)-tt0 LIJ)L

r~ L Lg] BJ ~j~11 f~1t~lM 31 ~mtll9 ~fiegrave(J)sect Lpg g Itt~ ~ C gt lt11 lt tJ Ell~ t~iY)tJ L0

PJT~~Bjjfl~~T8 3 0 ~o Ecircl t~J~J~~jHeumlWlZt-jij~i~famp~l(J) pgg ~~m811~l) i6lvt s~ tfffampfJJ(J)1i~c L TII~sectM5iecircHsect(J) 4 9 8 2~ IJjUiJi-ecirc~~IcircJ~1sect(J) 6 4 5 2 ~

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(J)rtJTtJ~tJT~~II 2-lf~ )~~TDtJeumlmiddotB~euro[illIuml-e-~ZIlt Lt(J)~ g](J)~jjicircjtJ

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BifJi~Itt~r-J 4 fg(J)51~to

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tJ~ ~77 7- r- l ~ ~famp~l] (J)miiJ r I=[ecirc] Itt-~fi L L B (J) ~tJ r- 1) - 7 ~

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mi L t- t Iteuml 11 t C tJ L tgt 0) t ~ lt ~ m (J)~1J~ 1 IHHiH tgtfi -e- -t t o Dl~EcircX]

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appiying the theories o~middot Saussure and Peirce to a new speacutelce of meaningJ Meacutemoire de maicirctrise de lUniversiteacute Keiagrave Tagravekyagrave Universiteacute [(eiagrave 85 p Je nai

113

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Page 7: Sémiotique et théorie de l'écriture : le cas du système d

2

dans le cadre dune compreacutehension globale du systegraveme et non seulement de concepts

isoleacutes en est encore agrave ses deacutebuts (notamment avec Everaert-Desmedt 1990 et Fisette

1996) Degraves lors la question se pose de la leacutegitimiteacute des applications de la seacutemiotique

peirceacuteenne une theacuteorie dont on tente toujours de saisir les fondements

Probleacute lIot ique

La voie dentreacutee dans la probleacutematique sera la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie Max

Fisch en 1983 se demandait Just how general is Peirce s theOy ofsigns (in Fisch

1986 356-61) et clans sa reacuteponse il sappliquait agrave deacuteterminer lextension de la theacuteorie

des signes agrave retracer les eacutetapes du deacuteveloppement de la theacuteorie dans le sens de la

geacuteneacutera 1iteacute et agrave en deacutegager la perti nence pou r la recherche scienti fique A fi n de bien

cerner le problegraveme qui nous preacuteoccupera dans ce meacutemoire je reformulerai la question

de la maniegravere suivante en quoi la theacuteorie geacuteneacuterale des signes de Peirce est-elle geacuteneacuterale

Cette question vague se laisse diviser en trois questions plus preacutecises Premiegraverement

quest-ce que la geacuteneacuteraliteacute Ce qui est rechercheacute ici est une deacutefinition de la geacuteneacuteraliteacute

proprement dite comme conception logique Deuxiegravemement quelles sont les

conditions de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie des signes Le questionnement porte ici sur la

relation de la geacuteneacutera liteacute avec dautres conceptions qu i la deacuteterm inent lorsquelle se

trouve agrave qualifier actuellement une theacuteorie Troisiegravemement quelles sont les conditions

de la relation impliqueacutee par la geacuteneacuteraliteacute entre la theacuteorie des signes et dautres theacuteories

La porteacutee de la seacutemiotique sur les sciences speacutecia les en vertu de son caractegravere geacuteneacuteral

est ici questionneacutee Cest le moment producteur du questionnement celui qui

permettra de reacutesoudre le problegraveme speacutecifique de ce meacutemoire Dans lesprit scientifique

expeacuterimental de la philosophie peirceacuteenne je tacirccherai de mieux saisir le problegraveme en

examinant une application particuliegravere agrave la theacuteorie linguistique de leacutecriture et en

prenant pour cas deacutetude deacutetermineacute le systegraveme graphique de la langue japonaise eacutecrite

La leacutell1guejaponaise fait face en ce moment agrave une situation de contact des langues qui

]

affecte son systegraveme deacutecriture engendrant un problegraveme seacutemiotique qui donnera chair

au deacuteveloppement de ce meacutemoire Il convient de Iexposer briegravevement ici

La langue japonaise contemporaine utilise un systegraveme deacutecriture complexe

com poseacute de plusieurs ty pes deacutecriture dont un ensem ble de caractegraveres dorigine

chinoise (les konji) deux syllabaires de creacuteation japonaise (les hirogono et katokono)

Ialphabet latin (le rlIcircl71oji) les chiffres indo-arabes et diffeacuterents signes de ponctuation

Ce systegraveme deacutecriture est particuliegraverement inteacuteressant en ce que la langue japonaise

assimile actuellement de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere (surtout de

langlais ameacutericain) eacutecrits dans un syllabaire particulier les kotokono Ces mots eacutecrits

en kotokono occupent de plus en plus despace graphique dans reacutecriture jusque

maintenant domineacutee par les konji tout en remplissant des fonctions grammaticales

sinon attribueacutees agrave ces derniers Nous assistons donc agrave une modification importante de

laspect externe ainsi que de la structure interne de leacutecriture japonaise suite au

contact de la langue japonaise avec dautres langues aux eacutecritures diffeumlrentes Le

problegraveme seacutemiotique consiste agrave deacuteterminer comment les relations de signification

propres au systegraveme deacutecriture japonais sont modifieacutees dans la situation actuelle de

contact des langues Ce problegraveme permettra de preacuteciser davantage le questionnement

de ce meacutemoire et de mieux en comprendre le sens en lui donnant un point dancrage

dans la reacutealiteacute actuelle 1 se retrouvera lui-mecircme eacuteclairci par notre enquecircte

Le but de ce meacutemoire est donc de deacuteterminer quele pourroit ecirctre la porteacutee de

10 seacutemiotique philosophique de Chorles Sonders Peirce sur 10 theacuteorie de leacuteeriture en

prenont pour cos deacutetude le vstegraveme dmiddoteacutecriturejoponois Le meacutemoire questionne ainsi

la leacutegitimiteacute de lapplication de la seacutemiotique comme theacuteorie geacuteneacuterale des signes aux

sciences speacutec ia les tou t en eacutec lai rant par converse leacutetude de leacutecriture japonaise en

tant que systegraveme graphique Il suit pour cela un questionnement sur la geacuteneacuteraliteacute de la

theacuteorie seacutem iotique

4

Slmclure du meacutell70ire

La structure du meacutemoire sinspire du motif architectonique de la philosophie

de Peirce sauf en ceci que la meacutethodologie philosophique de Iauteur est preacutesenteacutee en

premier Dun point de vue seacutemiotique le deacuteveloppement du meacutemoire consiste en

lexpeacuterimentation sur un diagramme le systegraveme des sciences de Peirce et en particulier

sa science des signes telle quappliqueacutee agrave leacutetude de leacutecriture japonaise Le meacutemoire

est donc structureacute en deux chapitres principaux portant sur 1) les principes de la

seacutemiotique philosophique et 2) Je lien entre la seacutemiotique et la theacuteorie de leacutecriture

Dans le premier chapitre la meacutethodologie du meacutemoire est tout dabord eacutetablie

par lexamen clu pragmatisme cie Peirce consideacutereacute comme une doctrine de la

meacutethodologie philosophique des sciences la meacutethodeutique ayant pour principe

directeur la croissance La meacutethodeutique est situeacutee dans le systegraveme des sciences en

tant que paltie de la logique une science philosophique normative Elle est mise en

lien avec la seacutemiotique qui inteacuteresse plus palticuliegraverement ce meacutemoire

La seacutemiotique et la logique de mecircme que la linguistique et Ieacutetude de leacutecriture

sont ensuite situeacutees dans le systegraveme peirceacuteen des sciences Le lien entre la seacutemiotique

et la logique est effectueacute plusieurs acceptions de ces deux termes eacutetant distingueacutees

Cependant les diverses deacutefinitions de ces deux disciplines en tant que sciences

saccordent pour les situer au niveau de la troisiegraveme science normative La linguistique

est ensuite deacutefinie comme une science idioscopique psychique et leacutetude de leacutecriture

comme Iune de ses branches Ce dernier point constitue une speacuteculation raisonnable

concernant la porteacutee du systegraveme des sciences de Peirce sur une science non deacutesigneacutee

comme telle par Imiddotauteur

Les principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sont eacutegalement exposeacutes

La phaneacuteroscopie est mise en lien avec la theacuteorie des cateacutegOlies dans le deacuteveloppement

5

historique de la penseacutee de lauteur puis un exposeacute syntheacutetique des deu theacuteories est

proposeacute Les cateacutegories universelles de lepeacuterience sont distingueacutees des cateacutegories

particul iegraveres lexposeacute eacutetant appro fond i par lexamen des cateacutegories particul iegraveres de la

modaliteacute et de la signification La conception de la geacuteneacuteraliteacute est ainsi deacutetinie comme

une cateacutegorie particuliegravere de la signification La seacutemiotique eacutetant surtout deacuteveloppeacutee

dans les eacutecrits tardifs de Peirce de sa peacuteriode phaneacuteroscopique la phaneacuteroscopie est

ensuite mise en lien avec la seacutemiotique par la preacutesentation du passage du phaneacuteron au

signe Un exposeacute syntheacutetique de la seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative est

proposeacute qui se deacuteveloppe jusquaux autres parties de la seacutemiotique soit la critique

des arguments ou logique critique et la meacutethodeutique La preuve logique selon les

conceptions seacutemiotiques du pragmatisme est par la suite consideacutereacutee agrave la lumiegravere des

exposeacutes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique

La philosophie de la notation logique de lauteur est ensuite prise comme point

de deacutepart pour une eacutetude de leacutecriture du point de vue seacutemiotique La notation logique

des graphes existentiels constitue un modegravele par excellence pour lillustration suivante

de lapplication de la seacutemiotique aux sciences speacuteciales puisquelle a elle-mecircme pour

fonction de repreacutesenter le langage formel de la logique peirceacuteenne dont la seacutemiotique

en tant que grammaire speacuteculative est une partie fondamentale La notation des

graphes existentiels exploite ainsi de faccedilon explicite diffeacuterents aspects du signe

distingueacutes par la theacuteorie seacutemiotique et leur examen constitue donc la leccedilon de deacutepal1

pour leacutetude du cas de leacutecriture japonaise

Dans le second chapitre une synthegravese des theacuteories linguistiques de leacutecriture

japonaise est proposeacutee puis une theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe est

eacutelaboreacutee agrave parti l de la seacutem iotique pei rceacuteenne La theacuteorie seacutem iotique de leacutecriture

eacutelaboreacutee est ensuite appliqueacutee plus speacutecifiquement au systegraveme deacutecriture japonais et agrave

lanalyse de ses transformations actuelles Lappl ication commence par la

consideacuteration de quelques points de grammaire menant graduellement agrave la

6

probleacutematique de leacutecriture Lanalyse a recours non seulement agrave la grammaire

speacuteculative mais aussi agrave la logique des relations et aux graphes existentiels Durant

lanalyse du cas speacutecifique envisageacute une deacuteJ-inition du signe eacutecrit de la langue

japonaise est formuleacutee agrave travers lexamen de ses composantes puis les principaux

types de signe pmpres agrave cette eacutecriture sont distingueacutes suivant la leccedilon de la

grammaire speacuteculative Lanalyse logique critique suivante permet de juger de

ladeacutequation des signes de leacutecriture japonaise dans la repreacutesentation de leurs objets et

fait ressortir un argument de la transformation de leacutecriture dans le sens de

laugmentation des kaakana

Lexposeacute deacuteveloppe ensuite une critique eacutepisteacutemologique de lapplication de la

seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture venant parachever lapproche seacutemiotique La

reacute tlexion eacutepisteacutemologique distingue dabord les concepts ph i losoph iques de la

seacutemiotique des concepts idioscopiques de la science de leacutecriture puis deacutetermine le

type dinfeacuterence qui est utiliseacute lors de la transformation dun type de concept en un

autre ainsi que largument qui justifie ce passage dans un cas speacutecifique servant

dexemple Le retour reacuteflexif et critique sur la theacuteorie seacutem iotique permet de la sOlie de

juger de ladeacutequation de ses concepts dans leur application agrave leacutetude de leacutecriture

japonaise

Lanalyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise est finalement ouverte sur le reste

du systegraveme des sciences peirceacuteen en eacutetant relieacutee aux autres sciences philosophiques

normatives soit leacutethique et lestheacutetique Il ny pas sur ce point dapplication

speacutecifique mais une bregraveve reacutetlexion dordre philosophique sur la relation quentretien

la seacutemiotique avec leacutethique et lestheacutetique lorsque cette premiegravere est appliqueacutee aux

sciences speacuteciales Le lien solidaire entre les sciences dans le systegraveme peirceacuteen est

souligneacute lien montrant le sens ultime de larchitectonique peilTeacuteenne la continuiteacute de

la penseacutee ou syneacutechisme

7

Texes SOllces e iliraure secondaire

rai utiliseacute dans mes recherches les sources standards des eacutetudes peirceacuteennes

soit principalement leacutedition theacutematique des Colleced Papen (abbr CP) leacutedition

chronologique des Wriings (W) en cours de publication et les seacutelections des Esseniol

Peirce (EP) de mecircme que la correspondance de Peirce avec Lady Welby compileacutee

dans louvrage intituleacute Semioics and Signifies The Correlpondence between Charles

S Peirce ond Victoria Lady Welby (SampS) et quelques fiagments que lai eu le bonheur

daller repecirccher dans loceacutean des manuscrits de Peirce en eacutedition microfilm The

Poper1 of Chorles S Peirce Microfilm Ediion (MS) Pratiquement mes recherches

ont surtout consisteacute en une meacuteditation des ESlenial Peirce ensemble amplement

suffisant pour une maicirctrise egraves signes bien que plusieurs autres eacutecrits maient eacuteclaireacute

sur de nombreux points Je privileacutegie donc dans mes reacutefeumlrences les seacutelections des

Essenlial Peirce tout en renvoyant agrave loccasion agrave certains textes des autres eacuteditions Je

reacutefegravere aux textes sources selon lusage en ajoutant lanneacutee de reacutedaction ou de

publication lorsque connue (par exemple EP 1 132 1878) Les commentaires qui

mont eacuteteacute de la plus grande aide sont ceux de Max Fisch pour une vision densemble

de lœuvre de Peirce Andreacute De Tienne pour la phaneacuteroscopie el la theacuteorie des

cateacutegories initiale et James Liszka pour la seacutemiotique philosophique Jindique toutes

les reacutefeacuterences dans le corps du texte et reacuteserve les notes en bas de page pour quelques

digressions et scolies

1 Seacutemiotique philosophique

En quoi la seacutemiotique de Peirce est-elle philosophique Une reacuteponse simple agrave

cette question serait tout dabord que la seacutemiotique possegravede le caractegravere geacuteneacuteral de la

philosophie cest une science positive qui rend compte des faits de expeacuterience

commune Cette deacutefinition se preacutecise lorsque lon considegravere la situation de la

seacutemiotique dans le systegraveme peirceacuteen des sciences en tant que troisiegraveme science

philosophique normative Plusieurs sens du terme laquoseacutemiotiqueraquo sont aussi agrave

distinguer et expliquer Dans ce premier chapitre je montrerai en quoi la seacutemiotique de

Peirce est philosophique en suivant le motif architectonique du systegraveme peirceacuteen des

sciences sauf que je preacutesenterai la meacutethodologie philosophique de lauteur la doctrine

meacutethodeutique du pragmatisme en premier le deacutefinirai chaque fois davantage la

seacutemiotique en la situant dans le systegraveme des sciences de faccedilon de plus en plus preacutecise

jusquagrave une application theacuteorique dans lexposeacute de la notation logique des graphes

existentiels Jaborderai par la mecircme occasion la question de la geacuteneacuteraliteacute de la theacuteorie

seacutemiotique dont la consideacuteration permettra deacuteclaircir le problegraveme speacutecitique du

meacutemoire dans le second chapitre Lexposeacute tacircchera de rentrer meacutethod iquemenl dans

lesprit de continuiteacute de la penseacutee peirceacuteenne auquel aboutit ultimement le

pragmatisme

11 Le pragmatisme

Le pragmatisme est une doctrine meacutethodologique des sciences de la deacutecouverte

ayant pour principe directeur la croissance II consiste essentiellement agrave reconnaicirctre la

porteacutee possible de la rationaliteacute sur la reacutealiteacute actuelle en particulier dans laction

controcircleacutee et conseacutequente au raisonnement Le sens de cette porteacutee ou de cette

conseacutequence est celui du deacuteveloppement de lordre rationnel dans la reacutealiteacute Le

pragmatisme sinteacuteressant plus speacutecifiquement agrave la recherche scientifique il preacuteconise

9

la reconnaissance des conseacutequences pratiques possibles du raisonnement comme

meacutethode de recherche dans les sciences La recherche scientifique doit donc consister agrave

deacutecouvrir les lois neacutecessaires de la nature en observant et en envisageant leurs

conseacutequences pratiques non seulement actuelles mais aussi possibles

Cette formulation peut eacutevoquer le deacuteveloppement de la Raison et son

identification au Reacuteel dans la philosophie de Hegel Il ny a cependant pas de

Aufhebung dans la penseacutee peirceacuteenne le deacuteveloppement de lordre rationnel eacutetant

plutocirct une prise de conscience des diffeacuterents aspects omnipreacutesents de la reacutealiteacute dont

chacun conserve son importance propre quune absorption de stades infeumlrieurs de la

conscience en un stade rationnel supeacuterieur Peirce qui est tout agrave fait probe

intellectuellement ne se reconnaicirct dailleurs pas dinfluence directe de la part de

heacutegeacutelianisme Il admet bien certaines affiniteacutes de sa penseacutee avec celle de Hegel mais

en retrace une tout autre origine immeacutediate de faccedilon geacuteneacuterale dans lœuvre des

hommes de science et de tagraveccedilon plus speacutecifique dans les philosophies de divers

auteurs meacutedieacutevaux (Duns Scot et les reacutealistes scolastiques) et modernes (Reid et les

philosophes du sens commun eacutecossais) et avant tout dans celles de Kant et Aristote

Atin dapprofondir notre compreacutehension de la doctrine du pragmatisme jen

retracerai agrave preacutesent sommairement le deacuteveloppement dans lœuvre de Peirce Je

retiendrai trois moments principaux du deacuteveloppement de la doctrine correspondant agrave

1) la formulation initiale de la maxime clu pragmatisme dans la seacuterie du Populor Science

illonhly de 1877-78 2) la reprise et Ieacutelaboration de la doctrine lors de la seacuterie de

confeacuterences donneacutee agrave Harvard en 1903 et 3) la tentative finale de formulation dune

preuve du pragmatisme dans une seacuterie darticles en partie publieacutee dans la revue The

Monis en 1905-7 Ces trois moments neacutepuisent pas lhistoire de la doctrine du

pragrhatisme de Peirce mais en repreacutesentent lessentiel du deacuteveloppement

Jeacutevoquerai par ailleurs le questionnement des limites du pragmatisme dans les

derniers eacutecrits de Iauteur

10

Le premier moment du deacuteveloppement de la doctrine du pragmatisme consiste

en la formulation de la maxime pragmatiste suite agrave leacutelaboration dune theacuteorie

psychologique de la croyance dans les articles intituleacutes laquoThe Fixation of Beliefraquo (EP 1

109-231877) et laquoHow to Make Our Ideas Cleangt (EI)I 124-41 1878) Lapproche

psychologique rend la teneur de la doctrine eacutevidente iusquagrave un celtain point mais la

compreacutehension du pragmatisme se montre alors insuffisante pour rendre compte de sa

porteacutee reacuteelle telle quenvisageacutee par lauteur La psychologie ne sert en fait quagrave

lillustration de la doctrine en facilitant un premier abord car le pragmatisme est une

doctrine de la logique et cette derniegravere une science plus fondamentale que la

psychologie Peirce illustrera parfois encore Je pragmatisme dans ses eacutecrits ulteacuterieurs agrave

laide de faits psychologiques mais il soulignera alors linsuftisance de cette meacutethode

et tacircchera de deacutevelopper une approche plus proprement logique La maxime du

pragmatisme est formuleacutee initialement comme suit

Consider what effects which might conceivably have practical bearings we

conceive the object of our conception to have Then our conception of these

effects is the whole of our conception of the object (EPI 132 1878)

Consideacuterer quels sont les effets pratiques que nous pensons pouvoir ecirctre produits par

lobjet de notre conception La conception de tous ces effets est la conception

complegravete de lobjet (version franccedilaise de Peirce W3 365 1879)

La theacuteorie psychologique de la croyance sur laquelle se fonde la maxime

pragmatiste sert de base dans les articles subseacutequents de la seacuterie agrave une explication de

la logique de la science Dans cette theacuteorie le raisonnement est consideacutereacute comme une

enquecircte de la penseacutee visant agrave faire cesser le doute par la fixation de la croyance ce qui

implique leacutetablissement dune regravegle daction sous la forme dune prise dhabitude

Peirce y distingue de plus trois degreacutes de clarteacute de la penseacutee atteints respectivement

dans la deacutefinition des ideacutees par lusage familier la distinction abstraite et

lexpeacuterimentation scientifique La maxime pragmatiste est ainsi preacutesenteacutee comme une

regravegle meacutethodologique inspireacutee de la meacutethode scientifique expeacuterimentale permettant

datteindre le troisiegraveme degreacute de clarteacute de la penseacutee

Il

La meacutethode scientifique est selon Peirce reacutealiste et faillible cest-agrave-dire que le

scientifique admet quiumll y a des choses reacuteelles dont le caractegravere ne deacutepend pas de ce

quun individu quelconque peut penser et que la confrontation avec les faits de la

reacutealiteacute actuelle par laquelle il cherche agrave connaicirctre ces choses reacuteelles peut le mener agrave

douter de certaines de ses croyances jusque-lagrave preacutesupposeacutees comme vraies La

meacutethode la plus adeacutequate dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute est donc de consideacuterer

lensemble des conseacutequences pratiques possibles et non seulement actuelles des

conceptions concernant cette reacutealiteacute La consideacuteration des diffeacuterents aspects de la

reacutealiteacute augmente la probabiliteacute dune adeacutequation de la croyance avec leacutetat des choses

reacuteel et donc latteinte de la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute La meacutethode

scientifique a de plus la proprieacuteteacute de se corriger elle-mecircme lorsque le scientifique en

v ient agrave recon naicirctre 1iumlnadeacutequation de certa ines de ses repreacutesentations su ite agrave leur

confrontation avec la reacutealiteacute actuelle

Une faccedilon de distinguer les difteumlrents aspects de la reacutealiteacute consiste nous le

percevons deacutejagrave agrave consideacuterer les modes decirctre dont leacutetude est avant tout propre agrave la

logique et agrave la meacutetaphysique La porteacutee logique de la maxime est dailleurs le mieux

entrevue dans Jutilisation de la modaliteacute de la possibiliteacute (ltltmight conceivablyraquo ou

laquoque nous pensons pouvoir ecirctreraquo) alors que les faits psychologiques servant agrave

lillustration sont tireacutes de lexpeacuterimentation psychologique qui consiste agrave accumuler

des faits par la confrontation des croyances de lexpeacuterimentateur avec la reacutealiteacute

actuelle seulement La doctrine du pragmatisme donne un principe meacutethodologique au

scientifique consideacuterant lensemble des modaliteacutes decirctre qui caracteacuterisent la reacutealiteacute

tout en accentuant celle de la possibiliteacute tandis que les sciences speacuteciales lui

fournissent des donneacutees factuelles compileacutees lors dexpeacuterimentations constituant des

confrontations avec la reacutealiteacute actuelle Peirce illustre sa doctrine en appliquant la

maxime agrave la deacutefinition de plusieurs conceptions scientifiques dont lune la dureteacute

dans linterpreacutetation de laquelle il ne semble pas comprendre la reacutealiteacute de la possibiliteacute

Il reviendra plus tard sur cet exemple pour en rectifier liumlnterpleacutetation (EP2 354

12

1905 455-57 1911) mais il est vrai quen ce moment initial du deacuteveloppement de la

doc tri ne du pragmatisme il n en sais issa it sans doute pas tou te la porteacutee pou ltant deacutejagrave

clairement envisageacutee dans la maxime

11 est agrave noter que lors du premier deacuteveloppement de la doctrine Peirce

nemploie pas encore le terme laquopragmatismeraquo quil aurait toutefois utiliseacute degraves les

anneacutees 1870 dans des discussions avec ses camarades du laquoMetaphysical Clubraquo de

Cambridge Cest William James qui relancera publiquement en 1898 la notion de

pragmatisme et puis la popularisera tout en accordant le creacuteclit cie sa premiegravere

expression agrave son ami de toujours Peirce recommencera par la suite agrave sy inteacuteresser

explicitement dans ses eacutecrits et consacrera une seacuterie de confeumlrences donneacutee agrave Harvard

en 1903 agrave son sujet Il deacuteveloppe dans ces confeacuterences une approche

pheacutenomeacutenologique et logique expliquant le pragmatisme agrave partir de sa theacuteorie de la

perception et faisant le lien de cette derniegravere avec la logique des relations et la theacuteorie

de liumlnfeumlrence Le pragmatisme est alors preacutesenteacute sous la ~orme cIun theacuteoregraveme

philosophique dont lauteur cherchera agrave plOuver la veacuteriteacute Ce theacuteoregraveme relie le sens du

pragmatisme aux modes grammaticaux et le rapproche ainsi du thegraveme de la

repreacutesentation

Praglllatism is the principle that every theoretical jllclgment expressibJe in a

sentence ln the inclicative moocl is a confllsed form of lhollght whose only

meaning if il has any lies in ils tenclency to enforce a corresponding practical

Illaxim expressible as a conclitional sentence having its apoclosis in the illlpelative

Illood (EP 134-51903)

Peirce considegravere que lutiliteacute de la maxime est deacutejagrave suHisamment apparente

dans sa formulation initiale et cherche plutat dans sa nouvelle approche une preuve

cie la doctrine Cette preuve consistera agrave approfondir la compreacutehension clu

pragmatisme par le moyen cie la theacuteorie de la perception et plus tard de la theacuteorie des

signes et agrave en speacutecifier la porteacutee au niveau logique Lauteur rejette tout daborcl

lapproche psychologique qui caracteacuterisait sa premiegravere formulation laquoMy original

13

article carried this back to a psychological principle 1 do not think it satisfclctory to

reduce such fundamental things to tclcts of psychology ail attempts to ground the

fundamental facts of logic on psychology are seen to be essentially shallowraquo (EP2

140 1903)11 explique sa position antipsychologiste en exposant sa conception de la

hieacuterarchie des sciences selon laquelle la logique est plus fondamentale que la

psychologie et se fonde entre autres sur la pheacutenomeacutenologie dont le thegraveme speacutecifique

de la perception donne une nouvelle voie agrave lapprofondissement de la doctrine

Dans laquoThe nature ofMeaningraquo (EP2 208-25 1903) puis laquoPragmatism as the

Logic of Abductionraquo (EP2 226-7 1903) dont les exposeacutes repreacutesentent

laboutissement de lapproche baseacutee sur la theacuteorie de la perception Peirce deacutegage

ensuite trois propositions appuyant la maxime du pragmatisme premiegraverement rien

nest dans lintellect qui ne soit dabord dans les sens deuxiegravemement les jugements

perceptuels contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux troisiegravemement liumlnteumlrence abductive

se confond avec un certain niveau du jugement perceptuel Le pragmatisme tclit suite agrave

ces trois propositiollS car nous pouvons en les examinant effectuer un lien entre la

perception et la logique de jabduction mode dinteumlrence hypotheacutetique propre au

pragmatisme Par la premiegravere proposition Peirce entend plus preacuteciseacutement quil ny a

pas de conception qui ne soit donneacutee autrement que dans des jugements perceptuels

Ainsi Je premier eacuteleacutement de la perception est un jugement servant de fondement au

reste du processus cognitif qui en deacutecoule Les jugements perceptuels constituant de

plus une forme dappreacutehension de laspect rationnel de la reacutealiteacute par la raison

individuelle ils contiennent des eacuteleacutements geacuteneacuteraux propres agrave la fois agrave la reacutealiteacute

exteacuterieure et agrave la reacutealiteacute inteacuterieure qui se confrontent en lindividu La lclculteacute abductive

tire finalement son origine de la perception puisque le mode dinteumlrence de labduction

repreacutesente une gradation du processus cognitif deacutebutant avec le jugement perceptuel

Labduction et le jugement perceptuel jouent dailleurs un lole semblable au sein du

processus cogn itif en y apporta nt de nouveaux eacuteleacutements de base preacutem isses logiques

ou donneacutees factuelles

1 Scloll l~ldagc scolastiquc Vihil lsi in inielleeII (lIinJlillljileJil in se)SIl (IY2 2261903)

14

Pour ce qui inteacuteresse plus particuliegraverement le pragmatisme lanalyse du

processus cognitif au niveau du jugement perceptuel et de labduction montre que le

dessein de la cognition est daccroicirctre linformation concernant la reacuteal iteacute Le jugement

perceptuel diffegravere cependant de labduction en ce que ce premier est acritique et non

controcircleacute par la raison contrairement au second Labduction repreacutesente un stade

avanceacute du processus initieacute par le jugement perceptuel qui ouvre sur les autres modes

dinfeacuterence subseacutequents de la deacuteduction et de linduction et montre ainsi que le

processus cognitif fait ultimement retour sur la reacutealiteacute actuelle afin de confirmer

linformation communiqueacutee Le pragmatisme en tant que doctrine meacutethodologique

baseacutee sur la logique de labduction met laccent sur le premier moment du

raisonnement logique critique et auto-controcircleacute soit le deacutecegravelement des conseacutequences

possibles dune conception mais en comprend aussi la suite logique qui consiste en la

deacuteduction des conseacutequences pratiques neacutecessaires selon le cas actuel envisageacute et leur

confirmation par induction cest-agrave-dire par la confrontation avec la reacutealiteacute actuelle et

le retour sur le raisonnement Le pragmatisme preacuteconise ainsi laccord de la raison

individuelle avec laspect rationnel de la reacutealiteacute et identifie le dessein ultime de la

cognition agrave celui de la reacutealiteacute tout entiegravere soit la croissance de lordre rationnel agrave

travers les diffeacuterents aspects de la reacutealiteacute ici compris du point de vue des modaliteacutes

Peirce revient sur cette ideacutee au deacutebut de la prochaine seacuterie darticles au sujet du

pragmatisme

Now quite the most striking feature of the new theory was its recognition of an

inseparable connection between rational cognition and rational purpose and that

consideration il was which determined the preference for Ihe na me pragmalism

(EP2 333 1905)

Le dern ier moment importa nt de 1 eacutelaboration de la doctri ne du pragmatisme

est la reacutedaction en 1905-07 dune seacuterie darticles dans laquelle Peirce adopte une

approche seacutemiotique et donc proprement logique la logique eacutetant comprise par

lauteur en un sens large comme la theacuteorie de la penseacutee deacutelibeacutereacutee opeacuterant par signes Il

renomme sa doctrine laquopragmaticismeraquo pour la distinguer des autres pragmatismes

15

eacutemergeant agrave leacutepoque et divergeant du sien mais il continuera plus tard dutiliser le

terme dorigine Il nomme aussi deacutesormais sa pheacutenomeacutenologie laquophaneacuteroscopieraquo atin

den souligner la speacutecificiteacute La maxime du pragmatisme est reformuleacutee

conseacutequemment en termes seacutem iot iq ues comme su it

The entire intellectual purport of any symbol consists in the total of elll generell

modes of rationClI concluct which conclitionally upon ClII the possible different

circul1lstances Clnd c1esires would ensue upon the Clcceptance of the symbol (EP2

346 1905)

Peirce reconnaicirct de plus explicitement les limites du pragmatisme ddini par rapport agrave

la porteacutee des symboles dans la citation preacuteceacutedente et clairement limiteacute aux concepts

intellectuels dans lextrait suivant

1 unclerstclllcl pragmatislll to be a method of Clscertaining the meanings not 01 ail

ideas but only of such elS 1 term intellectuell concepts that is to say of those

upon the structure of which argulllents concerning objective tclct may hinge (EP2

421 1907)

La nouvelle preuve seacutemiotique du pragmatisme consiste agrave suivre le deacuteveloppement du

processus interpreacutetatif des signes cest-agrave-dire leur transtormation dun aspect de la

repreacutesentation en un autre afin de confirmer la concordance de ce processus avec la

meacutethode deacutecrite par la maxime Le pragmatisme est alors soutenu par largument selon

lequel liumlnterpreacutetant logique ultime est une habitude le reviendrai dans des sections

subseacutequentes aux exposeacutes de la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique mais il convient deacutejagrave

de don ner le sens geacuteneacuteral de 18 nouvelle preuve L iuml nterpreacutetant logique d un signe est

une appreacutehension intellectuelle de la signification de ce signe sous son aspect

triadique Lorsque nous saiSissons laspect triadique de nos repreacutesent8tions qui

concorde lui-mecircme avec la triadiciteacute de la reacutealiteacute sous ses diffeacuterents aspects cest alors

que notre raison s8ccorde le mieux 8vec la raison reacuteelle L iumlnterpreacutet8nt logique ultime

fait porter cet accord agrave un autre niveau de la reacutealiteacute lnctualiteacute puisquil consiste en

une conduite reacutegleacutee de nos actions une habitude Nous retrouvons donc encore une

fois le thegraveme de laccord de la raison individuelle avec la raison geacuteneacuterale de la reacutealiteacute

qu i constitue le moti f essentiel du pragmatisme

16

De 1908 agrave sa mOlt en 1914 Peirce continue de reacuteviser la doctrine du

pragmatisme sans la deacutevelopper davantage mais en la critiquant Il reacuteitegravere ainsi la

critique de sa compreacutehension initiale du reacutealisme dont il avait limiteacute la porteacutee agrave

lactualiteacute des concepts geacuteneacuteraux alors que la reacutealiteacute comprend aussi des possibiliteacutes

reacuteelles li speacutecifie aussi agrave nouveau la porteacutee du pragmatisme qui seacutetend au domaine

de la logique en introduisant cette fois deux nouveaux concepts la seacutecuriteacute et la

feumlconditeacute (ltherly) du raisonnement Le pragmatisme serait une doctrine qui seacutecurise le

raisonnement mais le rend peu feumlcond

1 think logicians should have two aims lirst to bring out the amount and kind of

seclIrily (approach to certainty) of each kind of reasoning and second to bring out

the possible and esperable lIberly or value in productiveness of each kind (EP2

553 note 7 IYI3)

[PIagmatism] certainly aicls OUI approximation to the securily of reasoning But il

does Ilot contribute to the lIberly of reasoning which far more calls for solicitous

care the maxil11 of Pragmatism does not bestow a single smile upon beltluty upon

moral virtue or upon abstract truth-the three things that alone laise Humanity

above Animltllity (EP2 465 1913)

Cette assertion tardive surprend puisque Peirce avait tait plus tocirct de la croissance

lideacutee la plus importante que la philosophie ait produite (explicitement en EP2 373

1905) et par extension le principe directeur de la meacutethodeutique dans la doctrine du

pragmatisme Il sagit en fagraveit de bien comprendre le rocircle speacutecifique du pragmatisme

son caractegravere nonnati f en tant que doctrine meacutethodeutique La meacutethode preacuteconiseacutee par

le pragmatisme seacutecurise le raisonnement en lui donnant une voie speacuteci fique agrave suivre

mais elle ne le rend pas feumlcond puisquelle ne stimule pas elle-mecircme la production de

raisonnement La doctrine du pragmatisme est un tuteur sur lequel il faut fagraveire croicirctre

le raisonnement par dautres moyens Elle prend la croissance pour principe mais ne

lactualise pas elle-mecircme ne deacutecelant avant tout que les possibiliteacutes du raisonnement

les gennes de croissance

Je term inerai cette section en revenant sur le lien de la seacutem iotique avec le

pragmatisme Nous avons vu quau cours du deacuteveloppement de la doctrine du

17

pragmatisme la maxime initiale ne subit pas de changement majeur mais que divers

points de vue sont pris sur la doctrine qui tentent den ameacuteliorer la compreacutehension et

den speacutecifier la porteacutee La seacutemiotique donne ainsi le point de vue le plus authentique

sur le pragmatisme Peirce cherchait un point de vue encore plus propre agrave exprimer

lessence du pragmatisme avec les graphes existentiels une meacutethode de repreacutesentation

graphique de la logique deacuteductive Ce dernier traceacute est resteacute inacheveacute et peut-ecirctre cela

est-il duuml au fait que le pragmatisme preacutetend plutocirct faire appel agrave une logique de

labduction La seacutem iotique reste dans œuvre de Peirce le poin t de vue le plus

compreacutehensif sur le pragmatisme la logique de labduction n ayant pas eacuteteacute formai iseacutee

de faccedilon satisfaisante par lauteur auquel il manquait peut-ecirctre les outils conceptuels

neacutecessaires pour le faire Plus fondamentalement que labduction le pragmatisme

pointe cependant aussi vers la doctrine de la continuiteacute de la penseacutee le syneacutechisme

qui constitue Jultime theacuteoregraveme philosophique que Peirce cherchait agrave prouver

] 2 Le systegraveme des sciences

Peirce conccediloit la sCience comme une activiteacute des ecirctres humains en vue

datteindre la veacuteriteacute dans la repreacutesentation de la reacutealiteacute cest-agrave-dire ladeacutequation

eacuteventuelle des repreacutesentations aux o~jets deacutetude des scientifiques La science nest

ainsi quune des activiteacutes culturelles humaines celle qui fait appel au raisonnement

neacutecessaire Peirce deacuteveloppe de plus une classification des sciences au sein de laquelle

les matheacutematiques occupent la place la plus fondamentale suivies de la philosophie

puis des sciences speacuteciales (deacutenommeacutees idioscopiques) soit les sciences physiques et

psychiques Cette premiegravere trichotomie de sciences constitue la grande classe des

sciences de la deacutecouverte (ou heuristiques) elle-mecircme suivie de deux autres grandes

classes des sciences reacutetrospectives et des sciences pratiques Dans laquoAn Outline

Classiication of the Sciencesraquo (EP2 258-62 1903) lauteur preacutesente la classification

agrave laquelle il aboutit apregraves maintes anneacutees de recherches et dont il retiendra par la suite

18

en ses traits essentiels le modegravele Le scheacutema de cette classification peut ecirctre

reconstitueacute pour ce qui nous inteacuteresse comme suit

3 Science

31 Sciences de la deacutecouverte

311 Matheacutematiques

3111 Matheacutematiques de la logique

3112 Matheacutematiques des seacuteries discregravetes

313 Matheacutematiques des continua et pseudo-colltillua

312 Philosophie

3121 Pheacutenomeacutenologie

3122 Sciences normatives

31221 Estheacutetique

31222 Eacutethique

31223 Logique

312231 Grammaire speacuteculative

312232 Critique

312233 Meacutetllocleutique

3123 Meacutetaphysique

313 Idioscopie

3131 Sciences physiques

3132 Sciences psychiques

32 Sciences reacutetrospectives

33 Sciences pratiques

La classification des sciences suit un ordre selon lequel les sciences deacutependent

de sciences plus fondamentales pour leurs principes auxquelles elles fournissent en

retour des donneacutees Cette ideacutee dune classification des sciences selon le motif de la

deacutependance non reacuteciproque au niveau des principes proviendrait de la philosophie

dAuguste Comte (EP2 258 1903) Je deacutevelopperai agrave preacutesent lexposeacute du systegraveme

des sc iences en y si tuant les dise ipl ines qui nous concernent so it la seacutem iotique ct la

logique de mecircme que la 1ingu istique et leacutetude de leacutecriture

19

Il Y a deux sens du terme laquoseacutem iotiq ueraquo qu i peu t deacutesigner te 1 que Peirce

lutilise la theacuteorie geacuteneacuterale des signes ou selon lacception contemporaine une partie

de la seacutemiotique au sens peirceacuteen la grammaire speacuteculative agrave laquelle est alors

restreinte la theacuteorie des signes Peirce identifie la seacutemiotique en tant que theacuteorie

geacuteneacuterale des signes agrave la logique eacutegalement comprise en un sens large Il suffira pour le

moment de preacutesenter les diffeacuterents sens de la logique la seacutemiotique que nous avons

maintenant situeacutee dans le systegraveme eacutetant preacutesenteacutee en deacutetail dans une prochaine

section

La logique est une sCIence philosophique normative En tant que sCIence

philosophique elle cherche agrave repreacutesenter adeacutequatement la reacutealiteacute actuelle telle

quexpeacuterimenteacutee dans lexpeacuterience commune Les matheacutematiques opegraverent plutocirct par

raisonn~ment hypotheacutetique ou conditionnel portant sur des possibiliteacutes qui ne sont

pas neacutecessairement actualiseacutees mais dont la conseacutequence serait neacutecessaire si les

preacutemisses du raisonnement sactualisaient (menant neacutecessairement au conseacutequentf

Les sciences physiques et psychiques cherchent quant agrave elles les repreacutesentations

neacutecessaires de la reacutealiteacute par lexpeacuterimentation et lobservation speacutecialiseacutees afin de

rendre le savoir productif

Mathematics studies vllat is and wllat is not logically possible without making

itself responsible for its actual existence Philosophy is positive science in the

sense of discovering what really is true but it lilllits itself to sa much of trutll as

can be inferred from comlllon experience Idioscopy embraces ail the special

sciences which are principally occupied wilh the accumulation of new facts (EP2

259 1903)

Peirce conccediloit ainsi les matheacutematiques et la logique comme deux sciences distinctes

mais ordonneacutees poursuivant la veacuteriteacute chacune agrave sa maniegravere lune fondant la seconde

Il considegravere eacutegalement la logique comme plus fondamentale que les sciences rhysiques

et psychiques Il soppose donc agrave la fois au logicisme (agrave Jeacutepoque de Dedekind CP

4239 1902) et au psychologisme fort (entre autres de John Stuart Mill CP 433 91

1893)

La conseacutequcncc csl bien ln chaIcircnc dinleacutelcncc mcnant dcs preacutemisscs au conseacutequcnt

20

En tant que science normative la logique distingue les bons raisonnements des

mauvais Elle tire ses pliumlnClpes de la pheacutenomeacutenologie (aussi deacutenommeacutee

phaneacuteroscopie) science dont lactiviteacute consiste agrave deacutecrire tout ce qUI apparalt agrave

lesprit La description pheacutenomeacutenologique consiste agrave effectuer des seacuteparations

mentales mettant en eacutevidence les eacuteleacutements universellement pleacutesents agrave lesprit La

logique fournit par ailleurs des principes agrave la meacutetaphysique la dirigeant dans ses

raisonnements speacuteculatifs sur la nature de la reacutealiteacute La logique ainsi comprise en un

sens large est une theacuteorie du raisonnement deacutelibeacutereacute et le raisonnement seffectuant par

signes elle correspond agrave la seacutemiotique en tant que theacuteorie geacuteneacuterale des signes

constitueacutee de la grammaire speacuteculativegt la logique critique et la meacutethodeutique Elle

tire ses principes des matheacutematiques et de la pheacutenomeacutenologie mais eacutegalement de

lestheacutetique et de leacutethique En un sens restreint la logique effectue seulement la

critique des arguments en les classifiant et en jugeant leur validiteacute

Logic is the theory of self-controlled or deliberate thought ancl as such must

appeal to ethics fOI its principles It also (Iepends upon phenomenology and upon

mathematics Ail thought being performed by means of signs Logic may be

regarcled as the science of the general laws of signs It has three branches (1)

Speculative CraIl1J7Jar or the general theory of thc nature and Illeanings of signs

whether they be ieons indices or symbols (2) Crije which classitiumles arguments

and determines the validity and degree of force of each kind (3) Methodeuic

which studies the methods that ought to be pursued in the investigation in the

exposition ancl in the application of truth Each division depencls on that which

precedes il (EP2 260 1903)

La logique deacuteductive lormelle une logique matheacutematique selon lacception courante de

la logique contemporaine repreacutesenterait un autre sens restreint de la logique

correspondant agrave une partie de la meacutethodeutique la theacuteorie de la deacuteduction par lemploi

de modegraveles matheacutematiques La meacutethodeutique comprise en ce sens serait une theacuteorie

de la production de raisonnements valides par application dalgorithmes logiques

rapprochant la logique de la technique La logique matheacutematique nest pas agrave confondre

avec les matheacutematiques de la logique qu ineffectuent pas de retour reacuteflexif sur

laquoSpeacutecul~ltiiraquo U sens Je laquotheacuteoreacutetiqucraquo (U)2 128 190lt1)

21

largument mais fournissent le diagramme eacuteleacutementaire servant agrave lanalyse logique

deacuteductive (cf laquoThe Simplest Mathematicsraquo CP 4227-323 1902 en particulier CP

4227-8 CP 4240 et CP 4244)

Peirce classe la linguistique toujours dans le mecircme article de 1903 parm i les

sciences idioscopiques psychiques Plus exactement il sagit dune science psychique

classificatoire En tant que science psychique classificatoire la linguistique tire ses

principes de la psychologie la science psychique nomologique quelle applique lt1

leacutetude des langues Peirce nidentifie pas leacutetude de leacutecriture comme sujet speacutecifique

dune des branches dela linguistique mais il est eacutevident que sa deacutefinition geacuteneacuterale de la

linguistique comprend cette eacutetude que nous pouvons maintenant isoler suite au

progregraves des sciences du langage La science de leacutecriture ici envisageacutee peut ecirctre

caracteacuteriseacutee au moins comme une science psychique classiticatoire tirant ses principes

immeacutediats de la psychologie Elle se base aussi sur la pheacutenomeacutenologie la logique (ou

seacutemiotique) et la meacutetaphysique de mecircme que la biologie sur lesquelles Peirce fonde la

psychologie Il faudrait par ailleurs distinguer la science de leacutecriture des theacuteories de

leacutecriture La science est une activiteacute des ecirctres humains leacutetude dun objet de la reacutealiteacute

actuelle par le biais de lexpeacuterience et la construction conseacutequente de repreacutesentations

concernant cette reacutealiteacute alors que la theacuteorie est plutocirct une chaicircne darguments

concernant la repreacutesentation de la reacutealiteacute La science sengage dans la reacutealiteacute sous tous

ses aspects en prenant pour point de vue la rationaliteacute la theacuteorie est davantage limiteacutee

au raisonnement agrave laspect rationnel de la reacutealiteacute Nous pourrions dire que la theacuteorie

est une repreacutesentation paradigmatique dans le travail continu des sciences

J3 Les sciences philosophiques

Afin dintroduire lt1 une eacutetude plus approfondie des sciences philosophiques

Je l11opposc Cil cela au illlcrpntatIcircolls dc Kcnt (19t7) clliszka (1996) qui situclltlllogiquc

1()liumlllCllc 8U scin dcs 111ecirc1theacuteI118tiqucs

1

22

telles que les concevait Peirce je commencerai par esquisser en quelques traits sa

meacutetaphysique La meacutetaphysique est en quelque sorte la partie productive de la

philosophie peirceacuteenne elle interpregravete en une vision densemble les diffeacuterents aspects

de la reacutealiteacute tels quiumlntuitionneacutes et analyseacutes par les autres sciences philosophiques et

fait le lien avec les sciences idioscopiques De ce point de vue englobant et speacuteculatif

sur la reacutealiteacute Peirce reconnaicirct les diffeacuterents sens et la valeur de la repreacutesentation le

monde comme repreacutesentation est organiseacute selon un ordre hieacuterarchique solidaire la

triade Ces diffeacuterents sens des trois points de vue tondamentaux de la triade et cette

valeur accordeacutee selon lordre hieacuterarchique solidaire transparaicirctront dans lexamen des

principes de la phaneacuteroscopie et de la seacutemiotique sciences auxquelles nous aurons

plus speacutecifiquement affaire dans lexamen de la cateacutegorie de la geacuteneacuteraliteacute Leacutethique et

lestheacutetique nous inteacuteresseront aussi mais pas en ce qui concerne le problegraveme

speacutecifique du meacutemoire et je ny reviendrai donc quagrave la conclusion dans une tentative

douverture de largument par-delagrave son niveau logique

Les principales doctrines de la meacutetaphysique peirceacuteenne sont le reacutealisme

scolastique et la ph i losoph ie du sens commun critique que lauteur preacutesente dans

laquoIssues of Pragmaticismraquo (EP2 346-59 1905) comme des conseacutequences du

pragmatisme Nous pourrions aussi compter au nombre des doctrines meacutetaphysiques

originales de Peirce le tychisme lagapisme et le syneacutechisme de mecircme que lideacutealisme

objectif (deacuteveloppeacutes surtout dans la seacuterie meacutetaphysique de la revue The Aifonisl de

1891-93 (EPI 285-371 )) maisje ne les aborderai pas directement Le reacutealisme a deacutejagrave

eacuteteacute preacutesenteacute comme une caracteacuteristique de la meacutethode scientifique expeacuterimentale de

laquelle sinspire le pragmatisme Il consiste essentiellement agrave reconnaicirctre quiumll ya des

objets dans le monde reacuteel qui ne deacutependent pas de ce quun individu quelconque

puisse en penser Il est aussi traditionnellement compris comme sappliquant aux

concepts geacuteneacuteraux deacuteterminant des objets singuliers Peirce entend toutefois eacutelargir

cette conception de la reacutealiteacute et cest ce qui caracteacuterise son propre reacutealisme inspireacute du

reacutealisme scolastique (de Duns Scot) Selon Peirce il ny a pas que des objets geacuteneacuteraux

)_J

ou deacutetermineacutes qUI soient reacuteels meacutellS eacutegalement toujours du point de vue de la

signilication des repreacutesentations des objets vagues et mecircme du point de vue des

modaliteacutes des objets possibles La reacutealiteacute seacutetend sur trois aspects fondamentaux tels

que diffeacuterencieacutes par la phaneacuteroscopie et la seacutemiotique La notion de reacutealiteacute soppose agrave

celle de fiction ou plutocirct inclut cette derniegravere puisque la fiction est une repreacutesentation

possible de la reacutealiteacute deacutependante de lindividu qui la cree mais elle-mecircme reacuteelle dans

S3 situation particuliegravere au sein de la reacutealiteacute

L3 philosophie du sens commun critique eacutegalement en germe dans le

faillibilisme caracteacuteristique de la meacutethode du pragmatisme et deacuteriveacutee de la philosophie

du sens commun eacutecossaise (avant tout de Reid) est agrave son tour une doctrine

meacutet3physique dont le principe essentiel consiste agrave reconnaicirctre quil y a des inleumlrences

indubitables en ce sens quelles sont acritiques qui constituent le fondement de la

connaissance Ces inleumlrences sont indubitables mais extrecircmement vagues ce qui les

rend facilement sujettes au doute degraves quelles sont circonscrites et que des deacutetinitions

plus preacutecises en sont rechercheacutees La doctrine est de la sOlte critique parce quelle

reconnaicirct ecirctre elle-mecircme fondeacutee sur des croyances non critiqueacutees mais pouvant ecirctre

reacutevoqueacutees en doute non par la simple volonteacute du sujet connaissant mais par leur

confrontation aux faits de la reacutealiteacute actuelle La philosophie du sens commun critique

reconnaicirct donc sa propre faillibiliteacute Les deux doctrines repreacutesentent finalement des

conseacutequences du pragm3tisme une doctrine meacutethodeutique de la seacutemiotique en ce

quelles se fondent sur les analyses de la phaneacuteroscopie pm la prise en compte des

di f1eumlrents aspects de la reacutealiteacute et de la seacutemiotique par la critique du raisonnemento Il

conven3it cependant de preacutesenter 13 meacutetaphysique avant la ph3neacuteroscopie et la

On pourrait sc dcmandcr siumllne sagit pas lil plutocirct dc doctrincs eacutepisteacutemologiques Cl non

meacutelaphysiqucs mais leilcc nuli 1isc (oui simplement pas le terme d laquoeacutepisteacutenwlogicraquo Leacutepisteacutemologie en tant que theacuteorie ue la euumlnnaiss~lncc semble ecirctle pour lui une bl~lnehe de la meacutelltlrh) sique ct nous pouons rcnsel qUII elasser~lit la philosophic des sciences dans les sciences reacutetmspeelives ou mecircl11e CIleore 11 meacutetaph)siquc Il dit une il1is au sujet de Imiddoteacutepisteacutemologie en inlroduisantla gnll11maire speacuteCLilatic eomlllc rrcmiegravere seienec logique

Other logiciI1s clldeorillg to steel elear or psyclwlog) as lal ilS rossibk lhillk thal this Jirst blI1ch olIogic I11lsl relne 10 lhe posibilily or knolcdgc or Ihe lcal Vorld alld liron the sellse in hieh il is Inle Ihal Ihe lcal orlll eall be kno n This bran ch 01 rhiloso[Jh) clilcd epistel11gy 01

rkelliJIl7isehre is ncccssarily jltJrgely I11claphysicill (112 257 1(()3)

24

seacutemiotique afin de donner agrave ces derniegraveres un horizon envisageacute dans le sens de leur

app 1ication

131 Phaneacuteroscopie theacuteorie des cateacutegolies

La phaneacuteroscopie peut ecirctre preacutesenteacutee dans un but heuristique selon deux

approches diffeumlrentes lune allant dans le sens formel des principes et lautre dans le

sens mateacuteriel des donneacutees 1 ny a toutefois pas de solution de continuiteacute entre la

forme et la matiegravere car selon la doctrine de lideacutealisme objectif la matiegravere nest quune

forme contrainte par lhabitude laquomatter is effete mind inveterate habits becoming

physical lawsraquo (EP 1 293 1891) ou encore laquomatter is merely mind deadened by the

development of habitraquo (CP 8318 1891) Peirce deacuteveloppe la phaneacuteroscopie agrave partir

de sa theacuteorie des cateacutegories dabord conccedilue comme une theacuteorie de la cognition dont

les conceptions reacuteduisant la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle de lEcirctre

sont la Repreacutesentation la Relation la Qualiteacute (EP 1 6 1867) Il propose dans sa

theacuteorie cognitive des cateacutegories une approche psychologisante de la logique illustreacutee

par mais non fondeacutee sur la psychologie selon laquelle il deacutecrit Je processus

dabstraction qui permet la cateacutegorisation dans un exposeacute meacutelangeant les aspects

formel et mateacuteriel Peirce qui deacutefend au moment de sa theacuteorie initiale une ontologie

reacutealiste comprenant des eacuteleacutements nominalistes adoptera eacuteventuellement un reacutealisme

dur Les cateacutegories seront alors deacutetinies comme des eacuteleacutements universellement preacutesents

agrave lesprit et seront nommeacutees dans leur plus grande geacuteneacutera 1iteacute Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute

Troisiegraverneteacute Cest cette derniegravere approche phaneacuteroscopique que je retiendrai surtout

ici puisque cest delle que procegravede la seacutemiotique peirceacuteenne pleinement deacuteveloppeacutee

qui rera lobjet de la prochaine section

Selon lapproche la plus proprement formelle de la phaneacuteroscopie les

cateacutegories sont deacuteriveacutees des intuitions matheacutematiques exposeacutees dans les

25

matheacutematiques de la logique (CP 4250-323 1902 laquoThe Simplest Mathematicsraquo) Le

matheacutematicien deacutecouvre il travers ses raisonnements sur les formes hypotheacutetiques de

la reacutealiteacute la triadiciteacute des structures formelles primitives authentiques (genlline) et leur

dyadiciteacute dans une forme deacutegeacuteneacutereacutee (degeneroe) La dyade constitue un point de

deacutepart dans la reacutealiteacute actuelle et est donc la premiegravere structure analyseacutee mais avec le

deacuteveloppement de la reacuteflexion matheacutematique cest la triade qui fait loi Peirce

distingue eacutegalement selon une approche moins essentiellement tonnelle mais plus

proprement philosophique puisque logique trois modes de seacuteparation dans la penseacutee

la dissociation la preacutescission et la discrimination (cf laquoSundry Logical Conceptionsraquo

EP2 267-72 1903) La description phaneacuteroscopique consiste alors agrave effectuer ces

diffeacuterents types de seacuteparation mentale afin de mettre en eacutevidence les eacuteleacutements

un iversellement preacutesen ts agrave lesprit Les tro is cateacutegories sont om nipreacutesen tes dans la

penseacutee mais les modes de seacuteparation qui sappliquent agrave chacune dentre elles

diffegraverent A insi la d issoc iation est une opeacuteration de Prem iegravereteacute selon laquelle on peut

imaginer un eacuteleacutement sans un autre la preacutescission est une opeacuteration de Deuxiegravemeteacute

selon laquelle on peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer et la

discrimination est une opeacuteration de Troisiegravemeteacute selon laquelle on peut repreacutesenter un

eacuteleacutement sans un autre mais non Je supposer ni limaginer La diffeacuterence entre les

modes de seacuteparation deacutecoule de lordre de genegravese des cateacutegories et du lien de

deacutependance non reacuteciproque qui les unit La Premiegravereteacute se suffit agrave elle-mecircme la

Deuxiegravemeteacute deacutepend de la Premiegravereteacute mais non de la Troisiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute

deacutepend agrave la tais de la Premiegravereteacute et de la Deuxiegravemeteacute Le scheacutema suivant preacutesente les

diffeacuterents aspects tormels de la structure

Niveaux cOleacutegoriels des l1odes de seacuteparolion

1deg Dissociation seacuteparation de Premiegravereteacute

2deg Preacutescission seacuteparation de Deuxiegravemeteacute

3deg Discrimination seacuteparation de Troisiegravemeteacute

26

Deacutefinitions en termespllJs intuitifs

1deg On peut imaginer un eacuteleacutement sans un autre

2deg On peut supposer un eacuteleacutement sans un autre mais non limaginer

3deg On peut repreacutesenter un eacuteleacutement sans un autre mais non liumlmaginer ni le

supposer

(Par exemple 1deg on peut imaginer une couleur sans une autre 2deg on peut

supposer quune couleur nait pas dintensiteacute speacutecij~que (ainsi lorsquon parle

du rouge en geacuteneacuteral la rougeur (rednessraquo mais on ne peut limaginer 3deg on peut

repreacutesenter lintensiteacute dune couleur sans cette couleur (lorsquon donne une

formule matheacutematique repreacutesentant lintensiteacute) mais on ne peut la supposer ni

1iumlmagi ner)

Porteacutee des modes de seacutejJorotion

1deg On peut

- dissocier un Premier dun autre Premier

2deg On peut

- preacutescinder un Deuxiegraveme dun autre Deuxiegraveme

- preacutescinder un Premier dun Deuxiegraveme mais non un Deuxiegraveme dun Premier

3deg On peut

- discriminer un Troisiegraveme dun autre Troisiegraveme

- discriminer un Premier dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun Premier

- discriminer un Deuxiegraveme dun Troisiegraveme mais non un Troisiegraveme dun

Deux iegraveme

De plus selon lordre de genegravese et le lien de deacutependance non reacuteciproque qui unit les

cateacutegories le scheacutema peut se complexifier si lon considegravere la dissociation possible de

la Premiegravereteacute avec la Deuxiegravemeteacute dun Deuxiegraveme la dissociation possible de la

Premiegravereteacute avec la Premiegravereteacute dun Troisiegraveme etc Remarquons finalement que la

Premiegravereteacute ofije le plus de possibiliteacutes de seacuteparation mais que son propre niveau

requiert la plus grande seacuteparation Les possibiliteacutes de seacuteparation de la Troisiegravemeteacute

sont quant agrave elles plus restreintes mais le niveau propre de celle-ci requiert une plus

27

petite seacuteparation En dautres termes la seacuteparation au niveau de la Premiegravereteacute requiert

une plus grande implication logique et ontologique quune seacuteparation au niveau de la

Troisiegravemeteacute

Selon lapplOche mateacuterielle de la phaneacuteroscopie les cateacutegories sont plutocirct

deacutecrites agrave partir des donneacutees immeacutediates de la philosophie les faits de lexpeacuterience

commune en tant qu eacuteleacutements pheacutenomeacutenaux invariablement preacutesents dans la penseacutee

tels que la qualiteacute pour la Premiegravereteacute le fait brut pour la Deuxiegravemeteacute et la loi pour la

Troisiegravemeteacute Cest cette approche que Peirce utilise le plus souvent afin dillustrer sa

theacuteorie Les sens formel et mateacuteriel sont tous deux distingueacutes implicitement dans les

deacutefinitions suivantes

Categoly the First is the Idea of that which is such as it is regardless of

anything else That is to say it is a Qiality of Feeling

Category the Second is the Idea of that which is such as it is as being Second

to SOllle First regardless of anything else and in particular regardless of any 011

although it Illay conforlll to a law That is to say it is Reaction as an eleillent of

the Phenomenon

Category the Third is the Idea of that which is such as it is as being a Third

or Medium between a Second and its First That is to say it is Representation as an

element of the Phenomenon

(EP2 160 1903)

Dans sa formulation initale de la theacuteorie des cateacutegories Peirce considegravere aussi

deux cateacutegories suppleacutementailes lEcirctre et la Substance Les trois cateacutegories

intermeacutediaires correspondant lt1 la Premiegravereteacute la Deuxiegravemeteacute et la Troisiegravemeteacute sont

alors nommeacutees Qualiteacute Relation et Repreacutesentation Les cinq cateacutegories sont deacutefinies

cOl11me des conceptions universelles servant agrave reacuteduire la diversiteacute des impressions

sensibles en une uniteacute Les trois cateacutegories intermeacutediaires sont consideacutereacutees comme des

accidents reacuteduisant progressivement la diversiteacute de la Substance agrave luniteacute conceptuelle

pure de I~Ecirctre Dans le langage cette reacuteduction seffectue au sein de la proposition

luniteacute conceptuelle geacuteneacuterale comprenant les diffeacuterents niveaux de la reacuteduction Peirce

28

reacutesume les cateacutegories dans le scheacutema suivant

Being

Quality (Reference to a Ground)

Relation (Reference to a Correlate)

Representation (Reference to an Interpretant)

Substance

(EPI 61867)

Peirce fait de plus la distinction aussi bien dlI1s ses premiers eacutecrits menant agrave la

formulation de la theacuteorie des cateacutegories initiale que dans les eacutecrits sur la

pheacutenomeacutenologie entre les cateacutegories universelles jusquici preacutesenteacutees et quil a

surtout deacuteveloppeacutees et les cateacutegories paliiculiegraveres dont il na pas termineacute leacutetude

mais quil em ploie largement dans son œuvre Les cateacutegories un iverselles sont

organiseacutees selon un ordre hieacuterarchique solidaire et sont preacutesenteacutees dans la liste courte

de la triade fondamentale Prem iegravereteacute Deuxiegravemeteacute Troisiegravemeteacute Les cateacutegories

particuliegraveres sont plutocirct organiseacutees selon un modegravele ternaire une seule agrave la fois eacutetant

preacutesente ou du moins preacutedominante dans un pheacutenomegravene (EP2 148 1903) Ces

cateacutegories se multiplient en un nombre indeacutetermineacute et repreacutesentent une longue liste

que Peirce na pas compleacuteteacutee Nous pouvons toutefois en suivant ses eacutecrits classer

quelques-unes de ces cateacutegories en tables selon laspect de la reacutealiteacute sur lequel elles

portent de la maniegravere suivante

Aspect de la reacutealiteacute Cateacutegories particuliegraveres

modaliteacute possibiliteacute actualiteacute neacutecessiteacute (EP2 491)

qualiteacute neacutegation aftiumlnnation infiniteacute dintermeacutediaires (EP2

353)

relation monade dyade triade (EP2 424-7)

[sign if~cat ion] vagueur (laglleness) deacutetermination geacuteneacuteraliteacute (EP2

350-52)

quantiteacute particulariteacute singulariteacute universaliteacute (EI)2 353)

Les principaux aspects de la reacutealiteacute ici distingueacutes selon un scheacutema inspireacute des tables

29

kantiennes auxquelles sajoute la signification (je la deacutesigne comme telle) semblent

correspondre aux cinq cateacutegories de la theacuteorie des cateacutegories initiale la modaliteacute eacutetant agrave

relier agrave lEcirctre (Peirce en discute aussi en termes de laquomodes decirctreraquo (EP2 269 1903))

la signification agrave la Repreacutesentation la Relation et la Qualiteacute se retrouvant telles quelles

et la quantiteacute se reliant agrave la Substance Les cateacutegories universelles se complexifieraient

de la sorte selon le motif de la quantiteacute en cateacutegories particuliegraveres suivant un modegravele

ternaire La modaliteacute et la quantiteacute encadreraient theacuteoriquement les cateacutegories

universelles philosophiques la Qualiteacute la Relation et la Repreacutesentation qUI

sappliquent plus speacutecifiquement agrave la reacutealiteacute telle que perccedilue dans lexpeacuterience

commune Peut-ecirctre pourrions-nous consideacuterer la modaliteacute et la quantiteacute comme des

cateacutegories laquomeacuteta-philosophiquesraquo propres agrave un autre point de vue au sein des

sciences reacutetrospectif sans doute Toujours est-il que je me limiterai ici agrave lexamen de

deux ensembles de cateacutegories particuliegraveres lune soi-disant meacuteta-philosophique les

modaliteacutes qui permettront dapprofondir la compreacutehension du motif de la

cateacutegorisation peirceacuteenne et lautre proprement philosophique et mecircme logique les

cateacutegories de la signification qui inteacuteressent plus speacutecifiquement le problegraveme envisageacute

dans ce meacutemoire

Ainsi les exemples que Peirce utilise pour deacutelinir ses cateacutegories tant appel aux

modaliteacutes Certaines notions modales sont mecircme lieacutees agrave des cateacutegories speacutecifiques Les

modaliteacutes eacutetant des notions logiques assez intuitives il est inteacuteressant dexaminer le

lien queffectue Peirce entre ces derniegraveres et les cateacutegories en revenant sur les

illustrations concregravetes des cateacutegories et leurs exp 1ications formelles La Prem iegravereteacute est

illustreacutee le plus souvent par une qualiteacute de sensation (qllolilyojjegraveeling) telle le rouge

Avant mecircme quon prenne conscience de la qualiteacute et quon lui accorde une intensiteacute

elle est sous son aspect le plus authentique une simple possibiliteacute ce que Peirce

considegravere comme de la Prel11 iegravereteacute sans Deuxiegravemeteacute La Prel11iegravereteacute la pl us En suivant le motilues cateacutegories rltlrliculiegravetes dc la lJuantiteacute on pcut se dcmanuelnugravelmiddotemenl siumlln) ltlurait pas des cateacutegolies singuliegraveres I)cilcc ne scmole rIS eonsiJeacutenr ec cl1emin de renseacutee (il nest S[II

que ue cc quiumll Joit) lloil deu ordns (lY2 148 1J(3)) Imis on peut imaginer lJuiumll sagilltlil selon son systegraveme de cateacutegolies (d hoc cest-tl-dire que pOlll tel CIS il y uuraillelle laquocateacutegorieraquo lei un nOI11 rlOrlC

30

fondamentale des cateacutegories est donc associeacutee agrave la modaliteacute de la possibi liteacute

laquoPossibility the mode of being ofFirstness is the embryo ofbeing It is not nothing

It is not existenceraquo (EP2 269 1903) La Deuxiegravemeteacute est le plus souvent illustreacutee par

un fait brut tel la compulsion par exemple leffort provoqueacute soudainement

lorsquune porte quon sapprecircte agrave ouvrir nous reacutesiste La modaliteacute qui lui est associeacutee

est lactualiteacute laquoSecondness only is while it actually is The same thing can never

happen tVice As Heraclitus said one cannot cross the same river twice raquo (EP2

268 1903) Cest donc aussi la cateacutegorie de lexistence et de lindividualiteacute de la

situation dans un espace-temps La Troisiegravemeteacute peut quant agrave elle ecirctre illustreacutee entre

autres par Lin ensemble discursif mettant plusieurs propositions singuliegraveres en

relation cest-agrave-dire un argument Cest la cateacutegorie meacutediatrice de la penseacutee de la loi et

de la finaliteacute entendue comme raison ou but La modaliteacute qui lui est associeacutee est la

neacutecessiteacute

On the other hand Necessiy is an idea 01 Thirdness This word is equivocal it is

here taken in the sense of rational ie general necessity It is not a mere cJenial of

Possibility For Possibility in the sense of Firstness is not a subject of denial The

absence of any given possibility is 01 course a possibility but to leave a character

st8ncling and rcmovc From it its possibility is nonsense unJess one means ta speak

of a representamen of the quality in which case the element of Thirclness is the

predominant one (EP2 271 1903)

La relation de deacutependance non reacuteciproque propre aux cateacutegories universelles

sapplique aussi aux modaliteacutes qui leur sont associeacutees La neacutecessiteacute ne nie pas la

possibiliteacute mais limplique Cependant tout comme la Troisiegravemeteacute peut dominer et

laisser la Premiegravereteacute inapparente la neacutecessiteacute peut aussi dominer et laisser la

possibiliteacute sembler seffacer comme caracteacuteristique modale Nous remarquons aussi

que la Troisiegravemeteacute est la cateacutegorie dont la deacutefinition est la plus tagravecile agrave eacutelaborer

discursivement que la Deuxiegravemeteacute est la cateacutegorie la plus tagravecile agrave illustrer par

lexpeacuterience que nous en faisons dans le monde et que la Premiegravereteacute est tout

simplement la cateacutegorie la plus difficile agrave saisir bien que la plus fondamentale La

deacutefinition agrave laide dillustrations recoupe leacutelaboration formelle preacutesenteacutee plus haut

31

mais implique les modaliteacutes de faccedilon plus eacutevidente La structure deacutegageacutee dans

lexposition formelle se reflegravete donc aussi sur les modaliteacutes

Le lien queffectue Peirce entre les cateacutegories et le langage dans la theacuteorie des

cateacutegories in itiale nOLIs informe eacutegalement au sujet des modal iteacutes Les cateacutegories

opegraverent une unification conceptuelle au sein de la proposition qui consiste en la mise

en relation clu preacutedicat et de ses sujets culminant clans la conception dmiddotEcirctre Or la

modaliteacute est dans sa deacutefinition canonique une notion moditiant la relation diumlnheacuterence

subsistant entre le sujet et le preacutedicat Les modaliteacutes sont donc des notions tregraves

semblables aux cateacutegories universelles Peirce dit lui-mecircme dans sa preacutesentation plus

tardive et pheacutenomeacutenologique des cateacutegories laquoA Possibility and a Firstness are pretty

nearly identicalraquo (EP2 271 1903) Et il preacutecise ailleurs dans le mecircme article nous

lavons vu plus haut laquoPossibility the mode of being of Firstness is the embryo of

beingraquo (EP2 269 1903) Si nous faisons le lien entre laftinnation selon laquelle laquola

possibiliteacute [est] le mode decirctre de la Premiegravereteacuteraquo et la liste initiale des cateacutegories nous

pouvons comprendre le mode decirctre comme eacutetant une modification de luniteacute

conceptue Ile pure de la cateacutegorie dEcirctre par des accidents Les cateacutegories

intermeacutediaires sont les accidents graduels de la conception dEcirctre et la modaliteacute est la

qualitication de ces accidents Les modaliteacutes indiquent donc la maniegravere dont les

cateacutegories accidentelles opegraverent la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute imparfaite

par rapport agrave luniteacute pure de lEcirctre qui na pas de modaliteacute En nous reacutereumlrant

eacutegalement agrave la liste initiale des cateacutegories nous pouvons aussi comprendre

latlirmation selon laquelle laquola possibiliteacute est lembryon de lecirctreraquo puisque la

cateacutegorie universelle dont la possibiliteacute est la modaliteacute correspondante la qualiteacute est la

derniegravere conception avant luniteacute conceptuelle pure de lEcirctre Nous tirons de ces

consideacuterations le scheacutema reacutecapitulatif su ivant

32

Ecirctre mode decirctre

Qualiteacute possible

Relation accidents qualifieacutes de actuel

Repreacutesentation neacutecessaire

Substance

La modaliteacute est de plus abordeacutee en logique dans la partie modale des graphes

existentiels mais celle-ci est resteacutee largement inacheveacutee et reste inaccessible sans une

introduction agrave la meacutethode des graphes existentiels La modaliteacute est sinon mentionneacutee

par Peirce lorsquil eacutetudie les propositions dans le cadre de sa theacuteorie des signes Mais

il ne fait alors que suivre la tradition scolastique et kantienne en en reprenant les

deacutefinitions Toutefois cela nous indique que sa conception devrait pour lessentiel

saccorder avec cette tradition quil a eacutetudieacutee en profondeur et dont il sest

certainement inspire Honn is les deacutefinitions de dictionnaire eacutecrites par Peirce la

principale occurrence dune deacutefinition des modaliteacutes dans le cadre de leacutetude

seacutemiotique des propositions est la suivante

ln the fiumlrst place accordillg to Ivodalily [ J or Mode [ J a prOposition is either

de inesse [ ] or modal A proposition de inesse contemplates ollly the existing

state of things-existing that is in the logical ulliverse of c1iscourse A modal

proposition takes account of a whole range of possibility According as it asserts

something to be true or fnlse throughout the whole range of possibility it is

necessary [ J or impossible According as it asserts something to be true or false

within the range of possibility (not expressly including or excluding the existent

state of things) it is possible [ ] or conlingenl (EP2 283 1903)

La conception de la modaliteacute formuleacutee ici correspond exactement agrave celle entrevue

jusque maintenant dans lexamen de la phaneacuteroscopie Selon la modaliteacute une

proposition est soit de inesse ou modale Le de inesse correspond agrave la modaliteacute cie

lactualiteacute La possibiliteacute est aussi reconnue comme un aspect fondamental des

Le long article encyclopeacutedique sur lu modoliteacute que leircc a eacutecril pour le dictionnaire de lames Mark 13uldin reacutesume les conceptions ue ces deux lraditions (CI 2382-90 1902) Les parenthegraveses omises dons la citation suivante lonl dailleurs reacuteleumlrcnec au lermes uorigine el il leurs au leurs (I~()egravece

Iheacutel)Id Kal1l)

33

modaliteacutes Les modaliteacutes sont ensuite classeacutees selon le champ de possibiliteacute consideacutereacute

la modaliteacute qui englobe tout le champ du possible est la neacutecessiteacute si la proposition est

positive et limpossibiliteacute si la proposition est neacutegative et la modaliteacute qui ne

considegravere quune partie du champ du possible est la possibiliteacute si la proposition est

positive et la contingence si la proposition est neacutegative Il est inteacuteressant de noter

que lactualiteacute est consideacutereacutee comme une modaliteacute et que la phaneacuteroscopie ne

consideacuterait en plus de lactualiteacute que les modaliteacutes positives de la neacutecessiteacute et la

possibiliteacute La deacutefinition de la philosophie citeacutee plus tocirct preacutecise bien quelle est laquoune

science jJOsiive en ce sens quelle deacutecouvre ce qui est reacuteellement vrairaquo La seconde

occurrence significative des modaliteacutes dans un contexte seacutemiotique est le postshy

scriptum dune lettre agrave Lady Welby La modaliteacute y sert agrave caracteacuteriser les diffeacuterents

types de signes

1 signifies the Possible Modality that of an Idea

2 signifies the Actual Modality that of an Occurrence

3 signilies the Necessary Moclality that of a Habit

(EP2 4911908)

Les chiffres (1 2 3) deacutecrivent chacun un aspect du signe dans un scheacutema de

combinntoires deacutefinissant les dix classes de signes Lactualiteacute est agrave nouveau reconnue

comme modaliteacute tandis que seules les modaliteacutes positives de ln possibiliteacute et la

neacutecessiteacute sont eacutegalement retenues dans le cadre dune description phaneacuteroscopique

servnnt agrave caracteacuteriser les dineumlrents types de signes

Les cateacutegories particuliegraveres de la signification ne sont pas preacutesenteacutees

explicitement dans les tables de Kant mais Peirce les fait remonter agrave ce demier (EP2

352 1905) Lexposeacute le plus complet des cateacutegories de la signification se trouve dans

larticle de 1905 intituleacute laquoIssues ofPragl11aticisl11raquo (EP2 346-59) auquel peuvent ecirctre

ajouteacutees les deacutefinitions du LenlIry Dicio1mJ el du dictionnaire de Baldvin le

deacute1inirai tout dabord chacune des trois conceptions puis les aliiculerai les unes avec

les autres pour finalement me concentrer sur la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le systegraveme

des sciences Il sera plus commodc dc prcndrc pour point de deacutepart la reacutealiteacute actuelle

34

et de deacutefinir en premier I() cateacutegorie particuliegravere de la signitication qui lui correspond la

deacutetermination La signification dun terme est dite deacutetermineacutee lorsque la Deuxiegravemeteacute

domine la repreacutesentation La relation entre le terme et ses objets est alors actuelle

quelle soit affirmeacutee ou nieacutee les qualiteacutes de lun eacutetant attribueacutees agrave lautre Ainsi un

nom commun deacutesigneacute par un adjectif deacutemonstratif est un exemple de terme dont la

signification est deacutetermineacutee Les cateacutegories du vague et du geacuteneacuteral sont toutes deux

indeacutetermineacutees Peirce donne la deacutetinition suivante de la deacutetermination

A subject is delerminale in respect ta any character which inheres ln it or is

(universally and ltlt1iliumlllatively) predicated of il as weil as in respect ta the negative

of such character these being the very saille respect In ail other respecls it is

indelerlllil1ole (EP2 350 1905)

La sign ificeacuteltion d un tcrmc est plutocirct dite lagile lorsque son caractegravere de Prcm iegravercteacute

esl preacutepondeacuteranl La relation entre le terme et les objets auxquels il est altribuable

nest alors que possible elle reste agrave deacuteterminer dans le processus interpreacutetatif Le

champ dapplication du terme neacutelant pas initialement entrevu la signification est dite

non seulement indeacutetermineacutee mais eacutegalement indeacutefinie Un mot agrave la signification

inconnue dans son premier abord mais speacutecitiable par la suite esl un exemple de

terme vague La deacutefinition du vague que donne Peirce est la suivante

A sign that is objectively indetenninate in any respect is objectively vague in sa

far as it reserves further determination ta be made in saille other conceivable sign

or nt least does not appo int the interpreter as its deputy in this office (EP2 351

1905)

La signification dun terme est finalement dite geacuteneacuterale lorsque cest la Troisiegravel11eteacute

qui domine la repreacutesentation La relation entre le terme et les objets auxquels il est

imputable eSl alors neacutecessaire car bien quelle soit indeacutetermineacutee elle reste limiteacutee agrave

une porteacutee bien deacutefinie La signification du terme geacuteneacuteral est pour cette raison dite

deacutefinie par opposition agrave lautre cateacutegorie indeacutetermineacutee du vague La conception

dEcirctre implicite agrave toute proposition constitue la signification geacuteneacuterale par excellence

exprimant la relation d iumldenti teacute propre agrave tous les objets eacutemergeant d un mecircme

continuum phaneacuteronique et repreacutesenteacutes aussi dans un mecircme continuum seacutemiotique

Peirce deacutetinit le geacuteneacuteral cOmme suit

35

A sign (under which designation 1 place every kind of thoughL and not alone

external signs) that is in any respect objectively indetenninate (ie whose object

is undeterlllined by the sign itself) is objectively genera in so far as it extends to

the interpreter the privilege of carrying its deterlllination fmtheL (EP2 350

1905)

Agrave un niveau plus speacutecifiquement logique Peirce donne une cleacute suppleacutementaire agrave

linterpreacutetation des deux cateacutegories indeacuteterlll ineacutees en di san t que le princ ipe du tiers

exclu ne sapplique pas agrave ce qui est geacuteneacuteral tandis que le principe de contradiction ne

sapplique pas il ce qui est vague (FP2 351 1905) Nous pouvons en deacuteduire que la

cateacutegorie de la deacutetermination implique les deux principes agrave la fois eacutetant la plus

contrainte dans le cadre de la reacutealiteacute actuelle Peirce nomme aussi preacutecision lacte de

deacutetermination pouvant ecirctre accompli par un interpregravete celui qui effectue la relation de

signification (EP2 352 1905)

les trois cateacutegories particuliegraveres de la signification sont ordonneacutees entre elles

selon le mecircme ordre hieacuterarchique que les cateacutegories universelles agrave cette diffeumlrence pregraves

que lordre des premiegraveres nest pas solidaire cest-agrave-dire quil nest pas triadique

mais ternaire L ordre de genegravese reste le mecircme le vague eacutetant la conception la plus

eacuteleacutementaire suivie de la deacutetermination et de la geacuteneacuteraliteacute dans le deacuteveloppement du

processus de signification laquoLooking upon the course of logic as a who le vve see that it

proceeds from the question to the answer-from the vague to the definite And so

likewise ail the evolution we know of proceeds from the vague to the definiteraquo (CP

6191 1898 un autre exemple psychologique cette fois en CP 3160 1880)

Toutefois la preacutesence dune cateacutegorie n iuml mpl ique pas neacutecessa irement celle des deux

autres Cela sexplique si Ion considegravere quau sein des cateacutegories de la quantiteacute lautre

ensemble de cateacutegories meacuteta-phi losoph iques en compleacutement de la modaliteacute la

particulariteacute fait figure de Premier et luniversaliteacute de Troisiegraveme La particulariteacute

nimplique donc que chacune des cateacutegories pour elle-mecircme tandis que luniversaliteacute

implique lensemble des relations de deacutependance non reacuteciproque entre les diffeumlrentes

Ane pas cont()JlJrc ~lee lopeacutel~ltion Jabstraction preacuteseission qui consisk Ugrave cleacutecl Ull ens llIlionis

par exemple la noilcellr (illckness) de tous les obiets Iloirs

36

cateacutegories Le lien entre les cateacutegories est de la sorte bien reconnu mais leur mise en

preacutesence nest pas neacutecessaire Notons cependant que les cateacutegories particuliegraveres de la

modaliteacute semblaient impliquer le lien de cleacutependance non reacuteciproque de lagraveccedilon plus

explicite et quelles se rapprochaient en cela des cateacutegories universelles Disons agrave ce

sujet que dans le systegraveme continu de Peirce tout est affaire de degreacute et que mecircme au

sein des diffeacuterents ensembles de cateacutegories la caracteacuterisation ne simpose que

graduellement Peirce ne propose pas cette expl ication lui-mecircme et n eacuteta it pas

satisfagraveit du moins en 1903 de la distinction entre les deux modegraveles celui ternaire des

cateacutegories particuliegraveres et celui triadique des cateacutegories universelles (EP2 148 1903)

mais cette explication entendue de faccedilon nuanceacutee eacutetant coheacuterente avec son systegraveme je

ladopterai pour la suite cie mon argumentation Peirce reconnaicirct cie plus une certaine

polariteacute entre la Premiegravereteacute et la Troisiegravemeteacute qui semblent ainsi graviter autour cie la

Deuxiegravemeteacute comme si l actua 1iteacute consti tuai t un po int de vue central sllr les deux

alitres aspects de la reacutea 1iteacute Il alticule souvent les cateacutegories Premiegraveres et Troisiegravemes

ensemble tel que clans cet extrait reacuteveacutelateur laquopossibility being the denial of a

necessity which is a kind of generality is vague like any other contradiction of a

generatraquo (EP2 354 1905) La Troisiegravemeteacute entretient donc un certain lien privileacutegieacute

avec la Prem iegravereteacute de mecircme que la geacuteneacuteral iteacute avec la vagueur

A fin de deacuteterminer maintenant quelle est la porteacutee de la geacuteneacuteraliteacute dans le

systegraveme des sciences revenons au scheacutema classificatoire preacutesenteacute dans la section

preacuteceacutedente La classification cles sciences suit le motifcles cateacutegories et chaque science

possegravede de la sorte un aspect cateacutegoriel preacutepondeacuterant qui se combine agrave dautres

aspects lors de lapprofondissement de la structure du systegraveme La science est la plus

geacuteneacuterale des activiteacutes humaines et cest la Troisiegravemeteacute qui la marque de ce point de

vue Au sein mecircme des sciences heuristiques Premiegraveres des sciences les

matheacutematiques sont Premiegraveres et vagues on peut les appliquer dans plusieurs sens

qui restent agrave lorigine indeacutefinis Les sciences idioscopiques sont plutocirct Troisiegravemes et

geacuteneacuterales leurs applications eacutetant multiples mais deacutefinies en fonction de certains

37

champs dapplication speacutecifiques La philosophie est quant agrave elle la science

heuristique la plus actuelle et deacutetermineacutee partant dans ses recherches de

lappreacutehension de la reacutealiteacute agrave travers lexpeacuterience commune On accentue souvent le

caractegravere geacuteneacuteral de la philosophie mais il sagit sans doute de la geacuteneacuteraliteacute de toutes

sciences qui devient plus marqueacutee suivant la concordance de notre propre point de

vue actuel avec lobjet de la philosophie les fagraveits de lexpeacuterience commune Parmi les

sciences philosophiques mecircmes la phaneacuteroscopie se reacutefegravere vaguement agrave la reacutealiteacute dans

leacutetude de sa man i festation prem iegravere les sciences normati ves proposent dordonner

selon des principes deacutetermineacutes notre relation au reacuteel tandis que la meacutetaphysique

efrectue un retour reacutellexif geacuteneacuteral sur la reacutealiteacute comprise comme un tout deacute1ini mais

saisissable de difteumlrentes faccedilons

La science normative qui inteacuteresse le meacutemoire est la seacutemiotique ou logique

geacuteneacuterale identifieacutee agrave la theacuteorie des signes La seacutemiotique est Troisiegraveme et geacuteneacuterale elle

eacutetudie la penseacutee qui permet de saisir en un tout coheacuterent la reacutealiteacute mais elle leacutetudie

avant tout dans le but de proposer des principes dilecteurs agrave la penseacutee tireacutes de

lexamen mecircme de la structure de la reacutealiteacute Ultimement dans la doctrine du

pragmatisme le but de la logique sous son aspect meacutethodeutique est de montrer le

chemin menant agrave ladeacutequation de la penseacutee avec la reacutealiteacute En indiquant la voie agrave suivre

dans la confrontation agrave la reacutealiteacute actuelle la seacutemiotique reste Deuxiegraveme mais possegravede

neacuteanmoins un aspect Troisiegraveme important en ce quelle porte sur leacuteleacutement meacutediateur

de la reacutealiteacute la penseacutee La seacutemiotique fournit donc des principes normatifs geacuteneacuteraux

aux sciences qui en deacutependent y compris les sciences idioscopiques et plus

speacutecifiquement la linguistique et la science de leacutecriture Ces principes sont geacuteneacuteraux

en ce quils concernent leacuteleacutement meacutediateur de la penseacutee qui ne reflegraveterait ultimement

que la structure de la reacutealiteacute comprise de faccedilon adeacutequate ce qui rend les principes de la

seacutemiotique deacutefinis mais qui comprend lensemble des repreacutesentations possibles de la

reacutealiteacute ce pour quoi la signification des principes demeure indeacutetermineacutee

38

le terminerai cette section en examinant comment seffectue le passage du

phaneacuteron au signe question que jaborderai en consideacuterant le problegraveme exeacutegeacutetique du

lien entre la phaneacuteroscopie et la theacuteorie des cateacutegories initiale Le passage de la

Substance agrave lEcirctre dans la theacuteorie in i tia le peut ecirctre rapprocheacute de ce 1ui du phaneacuteron au

signe dans la theacuteorie tardive Le phaneacuteron comprend les trois aspects fondamentaux de

la reacutealiteacute au premier abord indiffeacuterencieacutes tandis que la substance est une conception

permettant de saisir lensemble des impressions sensibles Ceci nous rappelle par

ailleurs les trois propositions qui venaient appuyer la doctrine du pragmatisme et

selon lesquelles le point de deacutepart du processus cognitif faisant sens des impressions

sensibles est un jugement perceptuel qui contient des eacuteleacutements geacuteneacuteraux Le passage

du phaneacuteron au signe consiste ensuite en une prise de conscience explicite graduelle

des trois aspects de la reacutealiteacute qui se preacutesentent dabord agrave la conscience sans se

diffeacuterencier de celle-ci jusquagrave leur repreacutesentation par des signes au sein de la

conscience repreacutesentative la cognition seacutemiotique Ce passage est caracteacuteriseacute par une

geacuteneacuteralisation croissante des eacuteleacutements distingueacutes ou plus exactement par leur

deacutetermination allant dune preacutepondeacuterance de la Premiegravereteacute du phaneacuteron agrave celle de sa

Deuxiegravemeteacute Les eacuteleacutements sont extraits du phaneacuteron qui se preacutesente agrave la conscience

par le biais dune coalescence perceptuelle puis se distinguent de la conscience et la

confrontent en tant que faits perceptuels et sont finalement saisis dans le jugement

perceptuel Ils peuvent alors ecirctre repreacutesenteacutes et se deacutevelopper en tant que signes dans

le sens de la geacuteneacuteralisation croissante de la repreacutesentation

Le problegraveme du lien des cateacutegories phaneacuteroscopiques avec les cateacutegories

initiales consiste en ceci que lordre de cateacutegorisation nest pas le mecircme dans les deux

theacuteories Dans la theacuteorie initiale lordre de passage des cateacutegories intermeacutediaires de la

Substance agrave lEcirctre est de la Repreacutesentation (Troisiegraveme) agrave la Relation (Deuxiegraveme) puis

la Qualiteacute (Premiegravere) tandis que selon la phaneacuteroscopie lordre de passage du

phaneacuteron au signe duumlmentconstitueacute est de la Premiegravereteacute agrave la Deuxiegravemeteacute puis agrave la

le Illinspire ici Je Imiddotcposeacute JnJeacute I)e Tienne (2000) Illnis ne lais ljuefJ1euITI ln surlilCC Je son eacutelrgulllenl

39

Troisiegravemeteacute toutes trois cateacutegories eacutetant preacutesentes mais chacune devenant

preacutepondeacuterante selon leur ordre de genegravese Toutelois la porteacutee des cateacutegories de la

theacuteorie initiale est limiteacutee agrave la cognition alors que la phaneacuteroscopie comprend comme

son objet la totaliteacute du pheacutenomegravene preacutesent ft lmiddotesprit La Substance serait donc agrave situer

au niveau seacutemiotique de la description phaneacuteroscopique et la phaneacuteroscopie serait de

la sorte plus englobante que la theacuteorie des cateacutegories in itiale Il en serait ainsi de mecircme

que pour labduction qui repreacutesente un niveau avanceacute du processus cognitif deacutebutant

agrave un niveau plus fondamental avec le jugement perceptuel Il reste malgreacute cette

distinction ft expliquer le problegraveme de linversion des cateacutegories dune theacuteorie agrave

lautre Je propose comme explication que le deacuteveloppement des cateacutegories de la

theacuteorie initiale dans le sens de la reacuteduction du divers sensible en une uniteacute est le cas

limite de la cognition par signes Dans le cours de lunification de lexpeacuterience par la

repreacutesentation il vient un moment ougrave le processus allant dans le sens dune

domination toujours croissante de la raison sur la reacutealiteacute seacutepuise La seule issue agrave une

seacutemiose infinie est alors le retour aux eacuteleacutements plus fondamentaux de la reacutealiteacute un

retour qui nest toutefois pas une reacutegression puisque chaque aspect de la reacutealiteacute

demeure important et nest que mieux valoriseacute Le retour consiste donc agrave passer de la

repreacutesentation de la reacutealiteacute la conception de lunivers comme un symbole agrave la

consideacuteration des relations constitutives de cette reacutealiteacute et puis de ses qualiteacutes jusquagrave

lunification ultime de lexpeacuterience en lEcirctre qui lui-mecircme nest pas un signe La

conception decirctre est bien un signe geacuteneacuteral le plus geacuteneacuterd qui soit mais lEcirctre luishy

mecircme est au-delagrave de la cateacutegorisation propre au domaine phaneacuteronique Cette

speacuteculation sur le sens du procegraves de la reacutealiteacute chez Peirce serait agrave tout le moins

appuyeacutee par la doctrine du pragmatisme qui preacuteconise le retour agrave lactualiteacute degraves lors

que la structure de la reacutealiteacute a eacuteteacute saisie par la raison Ce problegraveme nous megravene au

champ de la meacutetaphysique qui deacutepasse le cadre de ce meacutemoire et je ne

lapprofondirai donc pas mais la solution suggeacutereacutee devrait permettre douvrir le

systegraveme de Peirce en lui donnant de nouvelles possibiliteacutes de penseacutee

40

132 Seacutemiotique theacuteorie des signes

La seacutemiotique ou logique de Peirce est une science des signes cherchant les

conditions formelles de la signification vraie de la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute

par des signes La penseacutee seffectuant par signes la seacutemiotique occupe une place

centrale dans lordre des sciences heuristiques Elle comporte trois branches la

grammaire speacuteculative qui deacutecrit la constitution mecircme du signe distingue ses

diffeacuterents types et organise ceux-ci en classes la logique critique qui analyse plus

speacutecitiquement les arguments et permet ainsi de juger de leur validiteacute ou leur degreacute de

force et la meacutethodeutique qui eacutetudie les conditions de la production de signes Je

preacutesenterai dans cette section la seacutemiotique en me concentrant sur la grammaire

speacuteculati ve qu i en consti tue la partie la plus inteacuteressante en ce qui concerne leacutetude de

leacutecriture mais je la relierai tout de mecircme par la suite agrave la logique critique et la

meacutethodeutique en palticulier agrave la doctrine du pragmatisme

Quest-ce quun signe La seacutem iotique en tan t que grammaire speacuteculative

reprend le motif structurel des cateacutegories et sa deacutetinition du signe est donc triadique

cest-agrave-dire quelle distingue trois termes interdeacutependants et irreacuteductibles de la relation

de signification authentique soit le signe proprement dit lobjet et linterpreacutetant Une

structure est dite laquoauthentiqueraquo lorsquelle respecte lordre hieacuterarchique solidaire sous

tous ses aspects et est de la sorte purement triadique tandis quune structure dont au

moins un aspect quelconque nentre pas dans lordre de la triade est qualifieacutee de

laquodeacutegeacuteneacutereacuteeraquo Peirce dans une de ses formules les plus claires deacutetinit le signe

formellement comme suit

A Sign or Representomen is a First which stands in such a genuine triadic relation

ta a Secancl called its Object as ta be capable of detennining a Third called its

Interpretant ta assume the same triadic relation to its Object in which it stands

itself ta the same Object The triadic relation is genlline that is its three members

are bauncl tagether by it in a way that does nat consist in any complexus of dyadic

le base pour lessentiel mon c-poseacute de la seacutemiotique sur celui dc Liszka (1996) mais cn deacuteveloppe eacute1utremenlla panic meacutelhoc1eutique que je relie plus direclenleacutenl ugrave la doctrine du pragmatisme

41

relations (EP2 272-3 1903)

Dans ses premiers eacutecrits seacutemiotiques Peirce distingue le signe de son

fondement (grollnd degraves la laquoNew List of Categoriesraquo EP 1 1-10 1867) Le fiJndel7len

du signe est une forme abstraite qui ne retient que certaines caracteacuteristiques de lobjet

celles agrave partir desquelles la signification se construit Une chose devient donc le

fondement dun signe lorsquelle preacutesente un certain aspect dune autre chose lo~jet

Le signe lui-mecircme peut ecirctre pris dans un sens plus large comprenant linstantiation

mateacuterielle et la relation aux autres composantes de la signitication Le tenlle

laquofondementraquo nest plus employeacute dans les derniers eacutecrits mais la preacutesentation dune

forme particuliegravere de lobjet est toujours sous-entendue ainsi dans cet extrait dune

lettre agrave Lady Welby laquo1 use the word --Sign-- in the widest sense for any medium for

the communication or extension of a Form (or feature)) (SampS 196 1906) Le terme

laquorepreacutesentamenraquo est utiliseacute quant agrave lui par lauteur agrave une certaine eacutepoque (voir la

citation ci-dessus de 1903) dans un sens plus large que le signe non limiteacute agrave la

repreacutesentation mentale La deacutefinition du signe tinira cependant par englober ce sens

eacutelargi lillustration par la reacutefeacuterence agrave la repreacutesentation mentale humaine servant

seulement agrave faire comprendre la conception (ce nest quun laquopot de vin agrave Cerbegravereraquo dit

Peirce EP2 478 1908) Lobjet est dautre paria chose correacuteleacutee avec le signe ce dont

le signe tient lieu dans la reacutealiteacute La lieutenance est laspect central de la relation de

sign ification consti tuant le signe dugrave agrave son mode decirctre actuel cest bien parce que

deux choses existant individuellement dans la reacutealiteacute actuelle occupent des positions

deacutetermineacutees et ne peuvent sidentitier parfaitement lune agrave lautre que lune le signe

tient lieu de lautre Iobjet atin de la repreacutesenter tagravece agrave une troisiegraveme chose

(linterpreacutetant) Toutefois des possibiliteacutes et des lois neacutecessaires peuvent aussi servir

dobjets en ce sens quelles deacuteterminent alors de leur propre point de vue modal la

repreacutesentation que le signe en donne au sein de la reacutealiteacute actuelle De faccedilon geacuteneacuterale

une chose devient donc lobjet dun signe lorsquelle est repreacutesenteacutee par ce signe le

signe eacutetant laquoagrave proposraquo de lobjet et deacuteterm ine la repreacutesentation la torl11e de lobjet

42

contraignant la forme du signe Dans la seacutemiotique plus tardive de Peirce lobjet en

tant quil est repreacutesenteacute par le signe est dit illlllleacutediol et en tant quil deacutetermine la

repreacutesentation dYl1olJ7iqllc L inlcrpreacutelol11 est quant agrave lui ce qui est deacutetermineacute par le

signe une autre chose qui devient agrave son tour signe Linterpreacutetation dun signe en un

autre est agrave la Iois un produit un nouveau signe un processus la transformation de la

troisiegraveme chose en signe (la seacutemiose) et un elTet sur lltltinterpregravete)) qui comprend le

signe Linterpreacutetant peut aussi ecirctre consideacutereacute de faccedilon geacuteneacuterale comme une regravegle de

transformation dune chose en un nouveau signe puisque le processus de seacutemiose vise

une certaine tin Une chose devient donc linterpreacutetant dun signe lorsquelle est

deacutetermineacutee par ce signe agrave se transformer en un autre signe repreacutesentant le mecircme objet

selon le mecircme point de vue formel de preacutesentation initiale la production de ce

nouveau signe ayant pour effet dinfluencer un agent interpreacutetant Dans ses derniers

eacutecrits de seacutemiotique Peirce qualifie linterpreacutetant en tant que produit dilJ7l11eacutediul en

tant que processus de dYl1olJ7iqlle et en tant queffet defll1o

Afin dillustrer ces deacutefinitions prenons lexemple suivant de Peirce

Two men are standing on the seashore looking out ta sea One of them says ta the

other That vesser there carries no freighl at ail but only passengers Now if the

other himselL sees no vessel the first information he derives lrom the remark has

for its abject the part of the sea that he c10es see and informs him that a persan

with sharper eyes than his or more trainecl in looking for such things can see il

vesser there and then (hat vesser having been thus introducecl ta his acquaintance

he is prepalecl ta receive the information about it that it carries passengers

exclusively But the sentence as a whole has for the persan supposed no other

abject than that Vith which it tinds him alreacly acquainted (CP 2232 1910)

Le signe dans cet exemple est la proposition eacutechangeacutee entre les deux personnes qui en

son tondement deacutecrit certaines caracteacuteristiques de lobjet repreacutesenteacute dans le discours

cest un navire situeacute agrave tel endroit qui ne transporte nulle cargaison mais seulement

des passagers Lobjet immeacutediat pour celui qui eacutecoute est la partie de la mer quil

entrevoit dans la direction indiqueacutee par le locuteur tandis que lobjet dynamique pour

le mecircme interpregravete est le navire que son compagnon distingue effectivement et au

43

sujet duquel il asserte une proposition L interpreacutetant immeacutediat est agrave son tour lideacutee

du navire que se fait lauditeur alors que linterpreacutetant dynamique est le processus

dinfOlmation auquel est sujet cet interpregravete et que linterpreacutetant [iumlnal est peut-ecirctre

supposons-le la reconnaissance de leacuterudition en matiegravere de navires que le locuteur

espegravere susciter chez son camarade

La grammaire speacuteculative deacuteveloppe aLlSSI une typologie des signes qui [ut

eacutelaboreacutee chez Peirce en plusieurs moments Je nexaminerai ici que la typologie de

1903 (EP2 267-88 et 289-99 1903) qui est la mieux deacuteveloppeacutee et dont je pourrai

par conseacutequent preacutesenter un exposeacute plus coheacuterent Le signe peut prendre diffeacuterents

aspects selon quil est consideacutereacute en soi (en son fondement) dans sa relation agrave lo~iet

ou dans sa relation agrave linterpreacutetant Lanalyse typologique de ces aspects permet de

distinguer trois trichotomies de signes que Peirce distingue de la faccedilon suivante

Signs are divisible by three trichotomies fi lst according as the sign in itself is a

mere quality is an actual existent or is a general law secondly according as the

relation of the sign to its Object consisls in the signs having some character in

itself or in some existential relation to that Object or in its relation to an

Interpretant thirdly according as its Interpretant represents il as a sign of

possibility or as a sign of fact or a sign of reason (EP2 291 1903)

Les aspects que prend le signe lorsque consideacutereacute pour lui-mecircme sont le

qualisigne le sinsigne et le leacutegisigne Ces aspects font reacutefeacuterence agrave des caractegraveres du

signe preacutesents en son fondement qui permettent la construction de la signification Le

signe qui preacutesente avant tout en son fondement une qualiteacute formelle est un qualisigne

Il se maniteste forceacutement dans la reacutealiteacute actuelle agrave travers une existence singuliegravere meacutelis

cest un aspect qualitatifqui domine son fondement et rend la repreacutesentation possible

Par exemple une chose qui devient un signe pour la simple raison quelle possegravede telle

qualiteacute disons decirctre bruyante est un qualisigne (cest bien le type de signe le plus

dinicile agrave illustrer) Le signe dont le fondement preacutesente comme aspect dominant Lin

existant actuel est nommeacuteinsignc Il a forceacutement des qualiteacutes qui rendent sa

44

preacutesentation possible mais cest la manifestation de son fondement dans la reacutealiteacute

actuelle qui importe et permet la repreacutesentation Le tic ou le tac dun meacutetronome en

ce quil marque un temps preacutecis est un sinsigne Si laspect le plus important que le

fondement preacutesente a le caractegravere dune loi une convention ou une habitude alors le

signe est nommeacute leacutegisigne Ce type de signe possegravede aussi des qualiteacutes et se preacutesente

eacutegalement dans un existant actuel mais ce qui importe en son fondement est 1 aspect

conventionnel ou habituel rendant la repreacutesentation possible La manifestation

singuliegravere du leacutegisigne est un sinsigne appeleacute reacuteplique Le tic-tac reacutegulier du

meacutetronome en ce quil donne la cadence agrave suivre dans linterpreacutetation dun morceau

de musique est un leacutegisigne Chacun de ces aspects peut ecirctre preacutesent dans le signe

laspect dominant en son fondement deacuteterminant cependant de quel type de signe il

sagit

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave lobjet sont licocircne lindex et

le symbole Cette division est la plus utile car en lien avec la repleacutesentation du signe

dans la reacutealiteacute actuelle Les trois aspects font ainsi reacutefeacuterence agrave une capaciteacute

repreacutesentative du signe actualiseacutee dans sa mise en relation avec lobjet Nous

retrouvons ici les approches formelle et mateacuterielle dans diffeacuterentes deacutetinitions de ces

types de signe

An con is a Representamen whose Representative Qualily is a Firstness of il as a

First Thal is a CJuality that it heacutelS qlla thing renclers il fit to be Cl Representarnen

An index or Seille (Olwa) is a RepresentClmen whose Representative cheacutelracter

consists in its being an inclividueacutell Seconcl A SymJo is Cl Representarneri whose

Representative Cheacutelrltlcter consists precisely in its being a rule that will delermine its

Interpretant (EP2 273-4 1903)

There are Ihree kincls ofsigns Firstly Ihere are likenesses or icons which serve 10

convey icleas of the lhings lhey represent simply by imitating them Secondly

there are indicatiol1s or indices which show sornething abOlit things on accollnt of

their being physically connected with them Thirclly there are symbos or

general signs which have becoille associated with their rneanings by usage (EP2 5

1894)

4S

Un signe est une icocircne lorsquil preacutesente en son fondement des caractegraveres

similaires agrave des caractegraveres de lobjet Liumlcocircne possegravede ces caractegraveres peu importe

quelle soit mise en relation avec lobjet ou non Toutefois la signification de liumlcocircne

reste vague dans la seule preacutesentation de son tondement et ne se preacutecise que dans la

repreacutesentation actuel le de lobjet Pour que licocircne devienne eHegravectivement le signe de

lobjet leur mise en relation doit donc ecirctre actuelle bien quelle demeure mecircme sans

correacutelation le signe potentiel de lobjet Par exemple une peinture de paysage en ce

quelle ressemble eHegravectivement au paysage quelle deacutepeint est une icocircne Peirce

distingue par ailleurs des sous-types diumlcocircne ou hypoicocircnes selon le genre de

caractegraveres que le signe partage avec lobjet soit liumlmage le diagramme et la meacutetaphore

Limage ressemble agrave son objet en vertu dune similariteacute de qualiteacutes le diagramme

dune similariteacute de relations entre eacuteleacutements de lobjet et de relations entre eacuteleacutements du

signe et la meacutetaphore dune mise en parallegravele avec un troisiegraveme terme non expliciteacute

Un signe est un index lorsquiumll entretient une relation de contiguiumlteacute avec lobjet

Lindex est aussi essentiellement un individu sa signification est deacutetermineacutee et il ne

peut par conseacutequent que montrer lobjet sans rien dire agrave son sujet Un signe ne peut

ecirctre un index que dans sa mise en re lation actuelle avec lobjet Un pronom

deacutemonstratif dans sa fonction deacuteictique en est un exemple dans la langue usuelle Un

signe est finalement un symbole lorsque sa relation agrave lobjet est eacutetablie par une loi une

convention ou une habitude Le symbole donne une signification geacuteneacuterale de lobjet en

appelant agrave linterpreacutetation de la repreacutesentation de lobjet par le signe dans les limites

de la regravegle qui eacutetablit leur relation Pour quun signe soit un symbole il doit donc ecirctre

interpreacuteteacute comme tel et sa mise en relation avec lobjet doit ecirctre actuelle Un mot est

un symbole en ce que sa signification est eacutetablie conventionnellement Peirce

concevait aussi lUnivers comme eacutetant un symbole car il sagit bien dune

interpreacutetation de la reacutealiteacute par sa propre raison

Les aspects que prend le signe dans sa relation agrave linterpreacutetant sont le rhegraveme

le dicisigne (ou proposition) et largument Ces aspects tont reacute1eumlrence au pouvoir que

46

le signe possegravede de deacuteterminer en vue dune certaine fin linterpreacutetation de lobjet en

un nouveau signe linterpreacutetant Le rhegraveme est un signe qui tend agrave deacuteterminer

linterpreacutetation selon des caractegraveres qualitatifs La compreacutehension du rhegraveme est

preacuteciseacutee mais son extension reste indeacutetermineacutee La signitication du rhegraveme est par

conseacutequent vague Le rhegraveme peut veacutehiculer de linformation mais nest pas interpreacuteteacute

comme tel Il nest ni vrai ni faux ne faisant que preacutesenter des caractegraveres possiblement

attribuables agrave lobjet Cest donc un signe compris comme repreacutesentant seulement des

caractegraveres de Imiddotobjet Un exemple de rhegraveme serait un preacutedicat logique ou plus

exactement chez Peirce une proposition dont a enleveacute les sujets logiques reacutefeacuterant agrave

des objets dans le monde Le dicisigne est un signe qui veacutehicule dans la reacutealiteacute actuelle

de linformation vraie ou fausse par rapport agrave lobjet 1 relie la compreacutehension du

signe agrave une extension deacutetermineacutee dans lactualiteacute indiquant de la sorte seacutepareacutement quel

est son objet (EP2 308 1904) Cest donc un signe compris comme repreacutesentant

lobjet dans la reacutealiteacute actuelle Le paradigme du dicisigne est une proposition telle que

laquoSocrate est un hommeraquo Largument est quant agrave lui un signe qui fournit une regravegle

dinterpreacutetation agrave dautres signes JI montre seacutepareacutement quel est son interpreacutetant tinal

celui qui est viseacute par la repreacutesentation (EP2 308 1904) 1 peut toutefois ecirctre

appliqueacute agrave diffeumlrents signes La signification veacutehiculeacutee par largument est de la sorte

geacuteneacuterale puisque lextension agrave donner agrave ce signe sa porteacutee sur dautres signes reste

indeacutetermineacutee bien que limiteacutee par la regravegle dinterpreacutetation Largument est donc un

signe compris comme repreacutesentant lobjet en tant que signe sujet agrave linterpreacutetation Un

argument constitueacute de plusieurs propositions conjointes dans une chaicircne dinteumlrence

en est un exemple commun

Les types ou aspects du signe regroupeacutes dans les trois trichotomies

preacuteceacutedentes peuvent de plus ecirctre combineacutes en difleumlrentes classes Deux regravegles

formelles de combinaison sappliquent une regravegle de composition selon laquelle

lordre triadique du signe doit ecirctre respecteacute ainsi chaque classe doit comporter un

type de chaque lrichotomie correspondant chacune agrave une composante de la relation de

47

signification et une regravegle de qualification selon laquelle le principe de deacutependance non

reacuteciproque des cateacutegories correspondant aux trois trichotomies doit aussi ecirctre

respecteacute La combinaison des types selon ces deux regravegles formelles permet de produire

dix classes de signes qui sont (EP2 296 1903)

1 les qUCllisignes iconiques rheacutematiques

2 les sinsignes icuniques rheacutematiques

3 les sinsignes indexicCl7lx rheacutel1lotiques

4 les Imiddotinsignes indexicau dicents

5 les leacutegisignes iconiques rheacutematiques

6 les Leacutegisignes indexicCl7lx rheacutematiques

7 les leacutegisignes indexicoux dicenls

8 les leacutegisignes sY7boliques lheacutematiques

9 les leacutegisignes IYlllboliques dicents

10 les leacutegisignes symboliques urgulllenls

Cette classification doit toutefois ecirctre nuanceacutee Comme partout ailleurs dans le

systegraveme de Peirce tout dans la classification est une alTaire de degreacute de point de vue

et certains aspects du signe (indiqueacutes en italiques) dominent par conseacutequent chaque

classe Les dix classes de signe sont aussi contraintes par leur situation dans la reacutealiteacute

actuelle Tout signe se manifeste actuellement en tant quindividu et donc dans un

sinsigne quil sagisse dun de ses aspects dominants ou non Chaque aspect inclut de

plus le ou les aspects qui lui sont pheacutenomeacutenologiquement anteacuterieurs selon ordre des

cateacutegories Les classes de rang supeacuterieur (vers 10) incluent par conseacutequent

directement ou indirectement les classes de rang infugraveieur (vers 1) La classification

demeure ainsi lloue dans son application car elle ne seacutelectionne agrave travers ses

opeacuterations c1abstraction que certains traits du signe et conserve degraves lors toujours une

part d opaci teacute d aspects non repreacutesen teacutes ou repreacutesenteacutes de faccedilon inadeacuteq uate

Jillustrerai certai nes de ces classes lorsq ueiumlappl iq uera i la leccedilon de la seacutelll iotique agrave la

science de leacutecriture au second chapitre

48

La logique critique analyse le raisonnement ou plus preacuteciseacutement les signes qui

informent la penseacutee cest-agrave-dire les leacutegisignes les symboles les dicisignes et les

arguments Elle sinteacuteresse aux signes en tant quils veacutehiculent la signification vraie La

veacuteriteacute appartient proprement aux propositions des symboles dicents mais nest

eacuteventuellement atteinte que dans largumentation la convergence de linfeumlrence valide

vers la repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute alors que la pleine conseacutequence des

arguments valides baseacutes sur des propositions vraies est ultimement comprise La

logique critique soccupe donc avant tout de linreumlrence valide et repreacutesente en cela

une theacuteorie de linteumlrence Elle distingue trois types dinfeumlrence eacuteleacutementaires

labduction l i nd uction et la deacuted uction qui entrent en com posi tion dans le processus

du raison nement

Labduction et linduction sont des types dinfeacuterence ampliatifs en ce quelles

augmentent la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee par les signes La deacuteduction est plutocirct

un type dinfeacuterence explicatif elle modifie lextension ou la compreacutehension des signes

sans changer la quantiteacute dinformation veacutehiculeacutee La notion dabduction est lune des

contributions les plus originales de Peirce agrave la logique bien quil la fasse remonter agrave

Aristote (EP2 205 1903) Il a dabord lui-mecircme deacuteveloppeacute cette notion sous le nom

dlaquohypothegraveseraquo puis eacuteventuellement sous les noms de laquoreacutetroductionraquo et

dlaquoabductionraquo Lahdllclio1 est essentiellement ladoption dune hypothegravese Elle

suggegravere que quelque chose puisse ecirctre le cas selon certains reacutesultats qui deacutecouleraient

alors dune certaine regravegle Elle est donc le seul type dinfeacuterence eacuteleacutementaire qui

introduit une nouvelle ideacutee dans le raisonnement Elle nest aussi que provisoire

devant ensuite ecirctre confirmeacutee par expeacuterimentation Peirce en reconstruit largument

comme suit en deux formulations diffeumlrentes

RlIle-AII the beans From this bag are while

Reslllt-These beans are white

Case-These beans are From this bag

(EPI 1881878)

49

The surprising ~act c is observed

But if ri were true C woulcl be a matter of course

Hence there is reason 10 suspect that A is true

(EP2 2311903)

Linduction donne plutocirct de la valeur agrave un ensemble de signes deacutejagrave perccedilus Elle eacutetablit

de la sOlte une regravegle permettant de rendre compte de certains reacutesultats observeacutes dans

un celtain cas Elle montre que cette regravegle est actuellement opeacuterante dans le cas

consideacutereacute selon les reacutesultats observeacutes Elle donne donc torce de loi agrave la reacutegulariteacute

Peirce fournit pour illustrer linduction lexemple suivant

Case-These beans are From this bag

Result-These beans are white

middotRule-AII the beans from this bag are white

(EP 1 188 1878)

La deacuteduction eacutelabore quant agrave elle les conseacutequences neacutecessaires dune hypothegravese Elle

prouve que certains reacutesultats doivent neacutecessairement deacutecouler dun certain cas en

vertu dune celtaine regravegle Peirce illustre la deacuteduction agrave raide de lexemple suivant

RuJe-AIl the beans frolll this bag are white

Case-These beans are From this bag

middotResult-These beans are white

(EP 1 188 1878)

Le processus du raisonnement est essentiellement composeacute de ces trois types

dinfeumlrence Le raisonnement scientifique en particulier commence typiquement par

une abduction qui est justifieacutee lorsquagrave peacutelrtir de lhypothegravese suggeacuteleacutee la deacuteduction

peut tirer des preacutedictions qui seront agrave leur tour veacuterifieacutees dans lexpeacuterience par

induction (EP2 216 1903) Il Y dautres types de raisonnement par exemple

lextension la restriction la geacuteneacutereacutell isation (ou oscent) et leacutel speacutec ification (ou descent)

mais ceux-ci sont deacuteriveacutes des trois types eacuteleacutementaires Jy reviendrai dans le second

chapitre lorsque janalysereacuteli Iappliceacuteltion des concepts seacutemiotiques agrave la science de

eacutecriture

50

La meacutethodeutique sinteacuteresse agrave la production de signes el trouve sa

rormulation paradigmatique dans la doctrine du pragmatisme Le retour sur cene

doctrine peut maintenant compleacuteter lexamen de la seacutemiotique et permettre den

approfondir davantage la compreacutehension La seacutemiotique se deacuteveloppe

systeacutematiquement en une meacutethodologie de la recherche Elle c10it alors indiquer au

scientifique commellt faire pour penser avec les signes quel type de processus

diumlnfeacuterence engager Mais nous avons vu par ailleurs quau niveau de la signification

mecircme dans le processus de seacutemiose une fin ultime est aussi envisageacutee

Semblablement la meacutethodeutique doit suggeacuterer un dessein geacuteneacuteral au processus

diumlnfeacuterence qui lui serve de principe directeur et en constitue leffet eacuteventuel Le

pragmatisme suggegravere par conseacutequent lhypothegravese selon laquelle la signiliumlcation c1un

signe reacuteside dans lensemble de ses effets env isageables Il propose de su ivre une

abduction al1n dengager le raisonnement dans une chaicircne diumln~eumlrences qui en tant que

meacutethode proprement scientifique puisse reacuteellement mener agrave la veacuteriteacute agrave ladeacutequation

de la raison au reacuteel Il repreacutesente donc le couronnement de la seacutemiotique qui en vient agrave

controcircler ses raisonnements selon ses propres principes constitutifs Le preacutecepte du

pragmatisme nen demeure pas moins tagraveillible et agrave veacuteritier dans lactualiteacute ce qui fait

de la seacutemiotique une veacuteritable science expeacuterimentale et philosophique une activiteacute qui

confronte la reacutealiteacute actuelle telle que repreacutesenteacutee dans lexpeacuterience commune Cest

bien la leccedilon de la seacutemiotique qui prouve ultimement le pragmatisme car cest sur elle

quiumll se tonde

The word pragillatism was invented ta express a certain Illaxim of logie whieh as

was shawn at its tirst enouneel1lent invoives a who1e system of phiiosophy This

maxim is put forth neilher as a hancly tool to serve so far as it may be found

serviceable nor as a self-eviclent truth but as a far-reaching theorem solidly

grounded upon an elaborate study of the nature ofsigns (CP 81911904)

51

1321 Seacutemiotique et notation logique

Le deacuteveloppement de la logique peirceacuteenne prend son point de deacutepart dans

algegravebre logique de Boole et la logique des relations de De Morgan Peirce propose

dans ses premiers articles publieacutes des ameacuteliorations agrave lalgegravebre booleacuteenne et applique

celle-ci agrave la logique des relations (CP 31-191867 CP 345-1491870) dans une

version quil nomme laquologique des relatifsraquo Lors de ses travaux en tant que maicirctre de

confeacuterence agrave luniversiteacute Johns Hopkins de 1879 agrave 1883 il introduit avec son eacutelegraveve

Oscar Mitchell (et indeacutependamment de Frege) la quantification dans la logique des

propositions produisant un systegraveme de logique eacutequivalent agrave la logique des preacutedicats

du premier ordre avec identiteacute (CP 3328-58 1883 CP 3359-403 1885) Il eacutelabore

ensuite un nouveau systegraveme de notation graphique les graphes existentiels

permettant lextension de sa logique aux preacutedicats du deuxiegraveme ordre et aux modaliteacutes

(CP 3456-552 1897 CP 4347-584 1903-1906) Il favorise degraves lors la notation

graphique de la logique sur laquelle il travaillera jusquagrave la fin de sa vie deacuteveloppant

une logique philosophique en continuiteacute avec la seacutemiotique et le pragmatisme

Plusieurs autres deacuteveloppements de la logique de Peirce confirment son rocircle de

pionnier de la logique moderne bien quils soient resteacutes inaperccedilus jusquagrave reacutecemment

dont notamment la conception dune logique agrave trois valeurs de veacuteriteacute et dune logique agrave

opeacuterateur unique (barre de SchefTer) de mecircme que la deacutecouverte du lien agrave la base de la

computation en informatique entre les fonctions de veacuteriteacute et le fonctionnement des

circuits eacutelectriques La preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels eacutevoque par

ailleurs la seacutemantique des jeux contemporaine et la theacuteorie des modegraveles par son

utilisation de personnages conceptuels en dialogue clans un univers du discours

alteacuterable Je minteacuteresserai cependant avant tout dans cette section aux graphes

existentiels et ce quils repreacutesentent comme deacuteveloppement de la notation logique un

type de systegraveme deacutecriture propre au langage formel de la logique

L eacutelaboration des graphes existentiels repreacutesente lin deacuteveloppement majeur

52

dans lhistoire de la logique de Peirce que nous poulTlons appeler son laquotournant

seacutem iotiqueraquo Il 1nsatisfa it par laspect sym bol iq ue de la notation a19eacutebrique de la

logique Peirce cherche agrave eacutelaborer une notation qui soit davantage iconique refleacutetant le

mode de repreacutesentation le plus eacuteleacutementaire de linfeacuterence logique Degraves 1882 il

commence agrave deacutevelopper une notation diagrammatique sinspirant probablement des

travaux de ses collegravegues agrave Johns Hopkins James J Sylvester et William K Clifford

qui utilisaient deacutejagrave des diagrammes chimiques pour repreacutesenter des invariants

algeacutebriques Un essai similaire par Alfred Bray Kempe publieacute en 1886 le pousse agrave

poursuivre ses recherches sur la notation diagrammatique surtout de 1889 agrave 1896 ce

qui megravenera agrave la publication en 1897 dun article sur la logique des relatifs utilisant

une notation diagrammatique (CP 3456-552 1897) quil appellera plus tard

reacutetrospectivement les laquographes dentiteacuteraquo (enlilolive grophI) Certaines caracteacuteristiques

cie la logique algeacutebrique rendaient lexpression des propositions existentielles difficile

et la quantification universelle seacutetait alors imposeacutee naturellement comme plus

fondamentale la quantification existentielle eacutetant deacutefinie par deacuterivation Dans les

graphes dentiteacute les deux types de quantification prennent une importance eacutegale leur

deacutefinition reacuteciproque eacutetant rendue plus explicite par la repreacutesentation graphique Les

signes deacutesignent clairement des propositions et non des classes et lopeacuteration de

disjonction avec la neacutegation remplace la relation transitive dinclusion utiliseacutee dans la

logique algeacutebrique La juxtaposi tion de termes su r une feu iIle d asseltion repreacutesen te la

disjonction lencerclement dun terme sa neacutegation et un point ou une ligne relieacutee agrave

des termes la relation entre ceux-ci Peirce ne resta cependant pas longtemps satisfait

par les graphes dentiteacute el rapidement apregraves la publication de larticle de 1897 la

duale de ce systegraveme les graphes existentiels simposa constituant la base deacute1initive

de la notation diagrammatique que Pe irce deacuteve loppa et ra tli na jusquagrave la fin de sa vie

Les graphes existentiels prennent ainsi pour connecteur primitif la conjonction avec la

neacutegation et pour quantification implicite et fondamentale la quantification

existentielle agrave partir de laquelle la quantification universelle est deacuteriveacutee La

juxtaposition de termes en vient agrave repreacutesenter la conjonction et lexistence est

Il I)es exemples de grlphcs S0l11 ()Uliumllis iJ 1I1ncc

53

reconnue implicitement par la seule preacutesence de la feuille dassertion comme univers

du discours agrave deacuteterminer par des inscriptions

Peirce preacutesenta dabord Je systegraveme des graphes existentiels en parties Alpha

Beta et Gamma correspondant respectivement agrave la logique des propositions la

logique des preacutedicats du premier ordre et leurs extensions dans la logique des preacutedicats

du deuxiegraveme ordre et la logique modale (CP 4394-5291903) Il deacuteveloppa par la suite

une approche unifieacutee ou les parties ne sont plus distingueacutees les principes

fondamentaux de la logique deacuteductive eacutetant les mecircmes dans les di fleumlrentes versions

deacuteveloppeacutees et ne faisant que se complexifier (CP 4530-72 1906) le retiendrai

lapproche par parties puisque cest celle que les commentateurs ont deacuteveloppeacutee en

la torrilalisant dans le sens de laxiomatisation de la logique contemporaine La

preacutesentation du systegraveme des graphes existentiels chez Peirce suit un ordre semblable agrave

celui de l ax iomatisation de la logique moderne Elle n est pas agrave proprement dit

axiomatiseacutee mais su it un ord re rigoureux deacutemontrant un certa in degreacute de forma 1isation

Un vocabulaire est tout dabord eacutetabli puis des regravegles de formation (deacutefinitions) sont

formuleacutees de mecircme que des regravegles de transformation (regravegles diumlnfeumlrence) Il ny a pas

vraiment daxiome dans les graphes existentiels si ce nest que la teuille dassertion

sert de point de deacutepart agrave lanalyse cest-agrave-dire quune inscription Sur la feuille de

travail repreacutesente une assertion dans lunivers du discours quantifieacutee existentiellement

de fagraveccedilon implicite Le travail danalyse consistera agrave traduire les arguments du discours

dans la notation des graphes existentiels deacutecouvrant ainsi les inteumlrences les plus

simples du raisonnement puis agrave etfectuer des transformations sur les graphes pour en

tirer des conclusions quant aux conseacutequences possibles du raisonnement

La partie Alpha repreacutesente la logique des propositions non analyseacutees Il est

inteacuteressant de noter que la quantitication implicite par la situation dans un univers du

discours vague agrave deacuteterminer par des assenions implique eacutegalement lanalyse

l ~I preacutesenl8tion lorl11elle de 1~I s nllse d 1 1phu et ~3et1 selon Sh in (2002) l110d i lieacutee est lltllIrn ie en lnncse

54

potentielle des propositions Alpha megravene agrave Beta et les deux parties sont mecircme

eacuteventuellement unifieacutees en un seul systegraveme Le voceacutelbulaire dAlpha est composeacute de

symboles propositionnels de leacutel coupure (C1I1 symbolique) et implicitement de la

juxtaposition (quasi-iconique) Les regravegles de transformation comprennent trois

opeacuterations possibles portant sur le vocabulaire eacuteleacutementaire qui repreacutesentent les

opeacuterations rondamenteacutelles de la logique deacuteductive Ces trois eacutetapes du raisonnement

sont deacutefinies dans Ialticle laquoSymbolic Logicraquo du dictionneacutelire Baldwin comme eacuteteacutelnt la

reacuteunion (Coligoliol1) liteacuteration et leffacement (CP 4372-93 1902) Elles sont

ailleurs deacutefinies sommairement comme suit

[Deductive reasoning] 1 have ascertainecl can be reduced to three kinds of steps

The first consists in copulating separate propositions into one compound

proposition The seconcl consists in omitting something Irom a proposition

withollt possibility of introdllcing errol The third consists in inserting something

into a proposition witholll introdllcing error (EP2 213 1903)

La partie Beteacutel du systegraveme repreacutesente leacutel logique des propositions analyseacutees ou

logique des preacutedicats du premier ordre et constitue une extension dAlpha dont

Iajout principal du point de vue notationnel est la ligne didentiteacute La preacutesentation

formelle du systegraveme doit donc en plus treacuteliter des modifications de graphes avec ligne

d identi teacute Le voceacutelbuleacutelire de Beta est com poseacute de sym bo les de sujets de la coupu re

(symbolique) de la ligne didentiteacute (iconique) et implicitement de la juxtaposition

(quasi-iconique) Les regravegles de transformeacuteltion sont modifieacutees afin de comprendre la

ligne didentiteacute mais comportent toujours les trois opeacuterations fondeacutelmentales Les

opeacuterations suppleacutementeacutelires consistent agrave joindre ou disjoindre les lignes didentiteacute agrave en

dessiner ou en effacer et agrave les eacuteliionger ou les reacutetracter agrave travers les aires deacutefinies par les

cou pures ce qui ne consti tue quune extension des trois opeacuterations fondamenta les

Les commentateurs (Roberts 1973 Shin 2002) interpregravetent les symboles de

Beta comme des preacutediceacutelts (Shin les nomme prcdicolcSYl1lbos) mais il sagit bien

plutocirct de sujets alors que la ligne didentiteacute repreacutesente le preacutediceacutelt geacuteneacutereacutell de la

55

proposition analyseacutee en ses eacuteleacutements les plus simples la relation didentiteacute Cette

ideacutee essentielle agrave la logique de Peirce est une innovation de sa logique des relations

(voir entre autres CP 3467 1897 CP 4403-8 1903 EP2 208-25 J903) Lanalyse

logique par les graphes existentiels est sous cet aspect la duale visuelle de lanalyse

seacutemiotique plus informelle en termes de rhegraveme proposition et argument (le rhegraveme

eacutetant alors une proposition dont les sujets logiques sont remplaceacutes par des espaces

vides ne montrant ainsi que la relation preacutedicative subsistante)

Les deux principaux aspects seacutem iotiques de la notation algeacutebrique sont sa

symboliciteacute soit que la signification est deacutetermineacutee par convention et sa lineacuteariteacute qui

repreacutesente une surdeacutetermination de la notation dun point de vue iconique Lalgegravebre

est constitueacutee dune seacuterie de symboles dont il faut apprendre le sens qui leur a eacuteteacute

assigneacute de faccedilon arbitraire La compreacutehension de la notation algeacutebrique demande donc

un investissement suppleacutementaire de la part de linterpregravete dont la propre intention

de mecircme que celle du signe ne sufiisent pas De plus 18 quanti fication existentielle est

plus ditlicile agrave repreacutesenter que luniverselle dans lalgegravebre logique agrave cause du caractegravere

symbolique de la notation D8ns lalgegravebre de la logique la signification est assigneacutee par

convention aux termes de la notation exprimant lideacutee que la regravegle impose la

signification avec necessiteacute La quantification universelle en deacuteterminant lextension

entiegravere dune variable implique de faccedilon analogue que la signific8tion soit assigneacutee agrave la

variable neacutecessairementVx (Fx) F(x) 1 1 F(x) La symboliciteacute du symbole l 1

repreacutesente en quelque sorte un diagramme de luniversaliteacute de la quantification

universelle La quantification existentielle implique plutocirct quil puisse y avoir

plusieurs significations possibles assigneacutees agrave la variable dont au moins une satisfait agrave

la proposition 3x (Fx) F(x) V V F(x) La deacutefinition reacuteciproque nest pas non=1 n

plus eacutevidente dans la notation algeacutebrique car la porteacutee des quanti [icateurs en tant que

symboles est deacutetermineacutee de faccedilon arbitraire par convention Laspect symbolique

bien queacutetant peu eacuteconomique au niveau cognitit~ permet toutefois une assignation

preacutecise de la signi fication aux termes de la notation

56

La notation algeacutebrique comporte aussi dans sa lineacuteariteacute un aspect iconique

contingent qui impose des contraintes suppleacutementaires agrave liumlnterpreacutetation Lordre

syntaxique surdeacutetennine la seacutemantique et il faut par conseacutequent la corriger en ajoutant

des regravegles diumlnfeacuterence suppleacutementaires Par exemple dans le cas de lopeacuteration de

conjonction (p A q) lordre lineacuteaire de la formule imposeacute par la notation constitue

une contrainte non neacutecessaire quil faut corriger en ajoutant une regravegle dinfeumlrence

explicitant la commutativiteacute de lopeacuteration (p A q) (q A p) Il en est de mecircme

pour la reacuteiteacuteration des variables dans les formules quantifieacutees Par cxemple dans la

formule existentiellement quantifieacutee 3x (Fx A Gx) la notation algeacutebrique lineacuteaire

contraint agrave reacutepeacuteter dans une Illecircmeformule plusieurs occurrences de la variable x qui

ne deacutesigne dans les fagraveits quun seul type de variable La regravegle implicite consiste ici agrave

distinguer les occurrences particuliegraveres de la variable de leur type geacuteneacuteral

Sous laspect symbolique fort et la surdeacutetermination iconique se trouvent

cependan t c1es aspects diagrammatiques plus fondamentaux qu i partic ipent de lagraveccedilon

adeacutequate agrave la signification Le deacutecoupage visuel opeacutereacute par lalgegravebre est plus net que

clans le langage informel de la langue usuelle et repreacutesente de faccedilon plus adeacutequate la

structure logique du langage Les preacutedicats F et G sont ainsi nettement distingueacutes du

sujet logique repreacutesenteacute par la variable x ce qui permet lanalogie entre les relations

propres agrave la structure logique de la proposition analyseacutee et les relations entre termes

de la not3tion logique Laspect iconique simplifie la mise en relation dela notation et

du langage et augmente en ce sens lefficaciteacute de la notation dans sa fonction de

repreacutesentation

Compareacutee agrave la notation algeacutebrique la notation logique des graphes existentiels

exploite plus agrave fond les difteumlrents aspects de la repreacutesentation distingueacutes par la

seacutemiotique en tant que grammaire speacuteculative Le systegraveme des graphes existentiels est

un systegraveme de repreacutesentdtion heacuteteacuterogegravene cest-agrave-dire quiumll fait appel agrave plusieurs

aspects clu signe dans sa relation agrave lobjet il est agrave la fois iconique et symbolique Dans

57

le deacuteveloppement de sa not8tion logique et mecircme dans le passage des graphes dentiteacute

aux gr8phes existentiels Peirce transform8 des eacuteleacutements symboliques en eacuteleacutements

iconiques mais non Jinverse Il tendait donc vers une repreacutesentation davant8ge

iconique de 18 logique

Certains aspects des graphes existentiels sont imparJagraveitement iconiques La

juxtaposition de propositions sur une feuille d8ssertion repreacutesente la conjonction de

ces propositions Elle ressemble fortement il 18 conjonction de deux objets dans le

monde actuel mais le caractegravere neacutecessaire de la conjonction comme opeacuteration logique

nest pas repreacutesenteacute et la notation par juxt8position est donc 8umieux quasi iconique

La notation de la neacutegation par encerclement est suggestive dune discontinuiteacute par

rapport au reste de lunivers du discours surtout dans son interpreacutet8tion comme

laquocoupureraquo mais reste principalement symbolique car le lien effectueacute avec la neacutegation

logique demeure contingent Liconiciteacute est surtout preacutesente dans la notation du

preacutedicat logique par une ligne didentiteacute dans 18 notation dune 8ssertion quantifieacutee

existentiellement de faccedilon implicite au sein de lunivers du discours par linscription

dun graphe sur la feuille dassertion et dans lexpression de la porteacutee des

quantificateurs soit leur ordre dapplication dans la notation algeacutebrique

Les relations sont plus difficiles agrave repreacutesenter dans un systegraveme graphique que

les proprieacuteteacutes Les diagrammes de Venn par exemple ne permettent pas de

repreacutesenter des relations mais seulement des proprieacuteteacutes Peirce a donc creacuteeacute le signe de

la ligne didentiteacute afin de repreacutesenter gr8phiquement des relations La relation

didentiteacute dun individu 8vec lui-mecircme est repreacutesenteacutee de faccedilon iconique par la

continuiteacute de la ligne didentiteacute Luniciteacute de lune renvoie agrave luniciteacute de lautre Cette

caracteacuteristique permet deacuteviter la reacuteiteacuteration des variables tcl que le neacutecessite

inadeacutequ8tement lalgegravebre logique I~a quantific8tion existentielle est repreacutesenteacutee

implicitement de fagraveccedilon iconique par la seule p-eacutesence dune fcuille dassertion dont

lespace deacutecriture est agrave deacuteterminer par des inscriptions de la mecircme faccedilon que

S8

lunivers du discours est agrave deacuteterminer par des assertions et des mises en relation

Lordre de porteacutee des ditTeacuterents quantiticateurs est repreacutesenteacute iconiquelllent ugrave laide

dune proprieacuteteacute topologique de la notation graphique moins la partie exteacuterieure dune

1igne didentiteacute est encerc leacutee p lus large est la porteacutee de la 1igne Il sensu it un princ ipe

de lecture laquoendoporeutiqueraquo de lexteacuterieur du graphe vers linteacuterieur de la ligne

didentiteacute de plus grande porteacutee ugrave celle de moindre porteacutee

La lecture endoporeutique peut ecirctre lourde car elle sapplique agrave tous les

deacutetails rencontreacutes dans la lecture elle-mecircme contrainte par un ordre imposeacute Elle est

simplifieacutee par une lecture de forme normale neacutegative qui reacuteduit la formule ugrave des

neacutegations de propositions et non dopeacuterations et par la lecture des rouleaux (scro)

comme conditionnels (voir lannexe 1) Peirce ne cherche cependant pas ugrave eacuteliminer des

eacutetapes dans la lecture et favorise lapproche endoporeutique car il conccediloit la logique

comme une analyse du raisonnement et non un calcul La logique doit analyser le

raisonnement en ses plus petits eacuteleacutements des arguments aux propositions aux termes

eacuteleacutementaires de linfeacuterence (les rhegravemes) La notation logique la plus adeacutequate

repreacutesente le raisonnement ugrave laide des signes les plus simples les icocircnes et non

seulement des indices ou des symboles Le caractegravere principal du raisonnement comme

processus actuel eacutetant de plus la relation lhypoicocircne le plus adeacutequat est donc le

diagramm e

En tin de com pte le mei lieur systegraveme de repreacutesen tation sera it heacuteteacuterogegravene

Ainsi liconiciteacute permet une repreacutesentation agrave un niveau plus intuitif et rend le

systegraveme de repreacutesentation plus efticace Elle laisse cependant une possibiliteacute derreur

dans linterpreacutetation car lassignation intuitive de la signitication est vague impreacutecise

La symboliciteacute permet une plus grande preacutecision car la relation de signification est

tixeacutee par des conventions arbitraires (stipulation) qui contrecarrent nos intuitions

pouvant fausser la repreacutesentation La symboliciteacute permet de la sOlte une geacuteneacuteralisation

rigoureuse de linterpreacutetation Le langage symbolique est eacutegalement plus tagravecile agrave

59

formaliser pUisque les regravegles syntaxiques et seacutemantiques sont stipuleacutees Il felUt

toutefois apprendre les symboles ce qui implique un plus grand investissement de 13

p8rt de linterpregravete Le jeu est agrave faire entre lintuition de liconique et ]3 preacutecision du

symbolique dans un systegraveme de repreacutesent3tion f3isant 3ppel aux deux 3spects du

signe selon les buts que on assigne au systegraveme de repreacutesentation Un examen des

aspects mod3ux de la signification est eacutegalement eacuteclairant Dans le passage de lalgegravebre

logique 3UX gr3phes existentiels Peirce a eacutelimineacute les regravegles suppleacutement3ires

contingentes du symbole inadeacutequat (lalgegravebre ineacute3ire) pour ne gmder que les regravegles

neacutecessaires du symbole adeacutequat (le voc3bulaire eacuteeacutement3ire des graphes) La

contingence du symbole in3deacutequ3t deacutecoulait plus fondamentalement de limpossibiliteacute

de son aspect iconique sous-jacent (les contr3intes de la lineacuteariteacute limpossibiliteacute de

repreacutesenter des qualiteacutes de lobjet par ces qualiteacutes clu signe) La repreacutesentation la plus

adeacutequate dun objet 3ctuel exploite donc les mod31iteacutes positives regravegles neacutecessaires du

symbole qU31iteacutes possibles de licocircne et cherche agrave eacuteviter les modaliteacutes neacutegatives

regravegles contingentes du symbole qualiteacutes impossibles de licocircne l

Dans le cadre de la logique peirceacuteenne la notation logique doit permettre de

deacutecomposer les arguments en leurs termes eacuteleacutementaires et laspect iconique est donc le

plus important cm il permet de fagraveire ressortir le niveau le plus intuitif du

raisonnement Le diagr3l11me en p3rticulier permet de repreacutesenter les relations

eacuteleacutementaires agrave la base du processus dinfeacuterence Toutefois il est inteacuteress3nt de noter

que les graphes existentiels se precirctent 3ussi bien au calcul logique Avec peu ou pas

daxiomes un certain nombre de regravegles de translormation pouvant ecirctre reacuteinterpreacuteteacutees

Un ltlutrc cClllrlc hors UU cnurc UC la notation logiquc rcut conlirlllcr plus alanllintuition UCS Illoualileacutes Disons gue ie IllC legravevc cc Illatin cl que const~l~lnt ln tcmreacuteraturc hivermllc UC Montreacute81jc uisc laquol1nT il lilit lroidiraquo Iinterjection middotlhIT lCUL sClllhlcr contingente CZlI iumlai ~lrlllis uans Illa rrOlllC culturc Ugrave cplil11cr Zlinsi Illa lcncontrc avec le [miu (rm cc )IIhoe) et il ncst ras neacutecessaire guune autre relsonne ue culture Liilleacutelcnte ilronaise uisons ScplilllC ainsi VIais celtc erlCssion nest ras que contingClltc ellc est ~Iussi uZlns son caraelegravelC llus ()nualllentai dOIlOIllZltOreacutee (iconiqlle) une rossibiliteacute rhoneacutetique uc Illa langue que lmltrc rerSOllnC Iaromise Ilaurait ru pmllollcel ualls SI rmrre langue le 1 lr~illccedillis (UI ulairc lOuleacutee) n) cistant PIS (plutocirct unc ail eacuteolaire lihlIlte ou

hittue G~) Q tt ~) Lie Illecircllle que la concateacutenation consonncconsonlle (lcnchaIcircnemCllt nOliumllli1 est

(voycllc) consollnCIO) clic saul pour la nasale Iv ct 1IITecirct glotal J)

GO

de mecircme que la possibiliteacute de plusieurs lectures formaliseacutees en algorithme les graphes

existentiels ressemblent agrave un systegraveme de deacuteduction naturelle appliqueacute au calcul Leur

vocabulaire limiteacute permet de saisir facilement lessence du raisonnement par

lexploitation des divers aspects seacutemiotiques de la notation graphique et donc de

reacutefleacutechir agrave la fois sur la logique et de lutiliser Lheacuteteacuterogeacuteneacuteiteacute du systegraveme assure sa

polyvalence Finalement que diverses lectures des graphes permettent de retracer

plusieurs chaicircnes dinfeacuterence et de mieux saisir toute la signification dune proposition

ou dun argument va dans le sens du pragmatisme bien que ce ne soit pas labduction

mecircme qui soit repreacutesenteacutee mais une seacuterie de deacuteductions possibles

2 Seacutenliotique et theacuteorie de leacutecriture

The author (though with no pretension ta being a iinguist)

has fumbled the grammars of many languages in the search

ror a language constructecl at ail in the way in which the

logicians go out or their way ta teach that ail men think

(rOI even if they do sa that has reall) nothing ta cio with

logic) (EP2 285 1903)

Les manuscrits de Peirce contiennent de nombreuses eacutetudes linguistiques (MS

1135-1261) ainsi sur le vocabulaire de la philosophie lorthographe anglaise la

ponctuation etc ce qui teacutemoigne de linteacuterecirct que lauteur portait agrave leacutetude des langues

Sa logique eacuteventuellement deacuteveloppeacutee en seacutem iotiq ue fou rn it aussi des pri nc ipes

tondamentaux aux sciences du langage et constitue en cela une philosophie du langage

Peirce fait lui-mecircme le lien entre la seacutemiotique et leacutetude des langues en illustrant la

premiegravere agrave laide dexemples tireacutes de la seconde tels que des points de grammaire Il

ne siumlnteacuteresse cependant pas au thegraveme de leacutecriture proprement dit bien que ses

consideacuteralions sur lorthographe anglaise sen rapprochent et il revient donc agrave

1iuml nterpregravete de deacuteve lopper dans son travai 1exeacutegeacutetique la seacutem iotique dans le sens d une

science de leacutecriture L application de la seacutemiotique agrave leacutetude de leacutecriture

constituerait dans son moment paradigmatique une theacuteorie de leacutecriture et cest ce

passage dune science agrave lautre que janalyserai et critiquerai dans ce chapitre en tant

que problegraveme speacutecitlque du meacutemoire Lhypothegravese de deacutepart est que la theacuteorie

geacuteneacuterale cles signes fou lIl it les pri nc ipes directeurs cIune eacuteventuelle theacuteorie de

Imiddoteacutecriture Il sagira alors de preacuteciser cette assertion en cherchant les nuances agrave accorder

agrave la geacuteneacuteraliteacute cie la seacutemiotique clans le contexte envisageacute Je tacirccherai pour cela de

deacuteterminer quels concepts cie la grammaire speacuteculative seraient les plus teumlconds pour

une eacutetude de leacutecriture en examinant le cas de leacutecriture japonaise quels types

diumlnteumlrence seraient utiliseacutes dans lapplication de ces concepts agrave lobjet speacutecil-Ique

eacutetuclieacute et en quoi le pragmatisme peut fournir le principe directeur geacuteneacuteral de cette

recherche

62

21 Theacuteories linguistiques de leacutecriture japonaise

La langue japonaise utilise un systegraveme deacutecriture traditionnellement composeacute

de trois types de caractegraveres soit un ensemble de caractegraveres dorigine chinoise les

konji et deux syllabaires de creacuteation japonaise les hirogono et kOlokono nommeacutes

geacuteneacuteriquement kono La langue eacutecrite contemporaine a aussi assimileacute les chiffres arabes

et lalphabet latin le rOcircJ71oji La richesse dans la diversiteacute de ce systegraveme deacutecriture en

fait un objet seacutemiotique particuliegraverement inteacuteressant agrave eacutetudier par la complexiteacute des

relations de signification qui peuvent sy deacutevelopper Je preacutesenterai reacutecriture

JaponaIse en me concentrant selon rapproche geacuteneacuterale de la linguistique sur son

aspect orthographique entendant par la notion dorthographe agrave la fois la construction

des graphegravemes et leur disposition textuelle selon un ensemble de conventions

Lexposeacute fera ressorti l certaines des re lations de sign i lication rendues possi bles par

laspect graphique de leacutecriture japonaise ce qui megravenera agrave lanalyse seacutemiotique

critique de la prochaine section

Le statut des caractegraveres dorigine chinoise en japonais nommeacutes konji fait

lobjet dune poleacutemique aupregraves des linguistes Il sagit de comprendre ce que ces

caractegraveres repreacutesentent exactement mais comme nous le verrons leur signification en

est plutocirct une agrave multiples visages Les caractegraveres dorigine chinoise utiliseacutes dans la

langue japonaise peuvent ainsi ecirctre consideacutereacutes agrave la fois comme des logogrammes

deacutesignant des mots entiers des phonogrammes deacutesignant des uniteacutes de son et des

morphogrammes deacutesignant des morphegravemes La notion dIdeacuteogramme selon laquelle

les caractegraveres repreacutesenteraient chacun une ideacutee est maintenant rejeteacutee (DeFrancis

1984 Unger 2004) r uti 1iserai ic i le terme konji car il possegravede une sign i lication moins

deacutetermineacutee qui renvoie agrave lhistoire plutocirct quagrave la logique de repreacutesentation

II existe quatre grands groupes de konji pictographiques diagrammatiques

63

seacutemantiques composeacutes et phoneacutetico-seacutemantiques Les caractegraveres pictographiques

repreacutesentent leur objet en vertu dune ressemblance graphique avec ce dernier Ils onl

eacuteteacute de plus en plus styliseacutes avec leacutevolution de leacutecriture tout en conservant un lien

eacutetymologique avec leur origine Des exemples de ce type de caractegravere sont ~ ko

enfant 0 kIchi bouche LJ yal71a montagne Les caractegraveres diagrammatiques

lepreacutesentent leur objet dune Faccedilon similaire au premier groupe par une ressemblance

de la relation entre leurs eacuteleacutements graphiques avec les relations propres il la notion

repreacutesenteacutee Des exemples de ce type de caractegravere sont t Ile en haut T lhia en

bas Ces deux groupes de kan)i primitifs sont les moins nombreux de la langue

Japonaise Les kan)i seacutemantiques composeacutes sont quant agrave eux constitueacutes deacuteleacutements

simples dont la combinaison de sens donne la signification de la notion repreacutesenteacutee

par exemple B hi soleil et ~ luki lune donnent BEj mei lumiegravere Les caractegraveres

les plus nombreux sont cependant les kan)i phoneacutetico-seacutemantiques qui comportent agrave

la fois un eacuteleacutement donnant Je son et un ou plusieurs eacuteleacutements donnant le sens Par

exemple le caractegravere repreacutesentant la langue (tIcircanccedilaise japonaise etc) ~g go est

composeacute des eacuteleacutements seacutemantiques sect k mot et 0 kwhi bouche et de leacuteleacutement

phoneacutetique Ji go (cinq mais seul le son est retenu et non le sens)

Les kan)i complexes sont construits par lajout dun ou plusieurs eacuteleacutements

secondaires deacuteterm inants en geacuteneacutera 1les eacuteleacutements seacutemantiq ues il un eacuteleacutemen t pri nci pa 1

deacutetermineacute en geacuteneacuteral leacuteleacutement phoneacutetique Les ditleumlrents types deacuteleacutements

correspondent il difleumlrents lieux dinsertion dans la structure des caractegraveres La

composition des eacuteleacutements secondaires avec leacuteleacutement principal est ainsi reacutegleacutee de fagraveccedilon

il respecter des contraintes dmiddoteacutequidimensionaliteacute Ces contraintes assurent lharmonie

des proportions de leacutecriture Une autre contrainte deacutecriture de tous les types de

Ccttc clilssiliumlciltion contcmroraille est deacuteriveacutec dune CI~lssiliumleltioll traditionnelle chinoise Cil si classes ue earaetegraveles ueacuteiugrave rreacutesellc dalls le 51110 11e17 jie~i dietionll~lilc eacutetymologiquc Jc Xu Shcn Cl8tlllt du Jcuiegraveme siegraveelc ue Ilotre egraverc (Coull11JS 1080 Kcss ct Miyal11oto 10(9) LI lislc ues j()45

k(l7ji usucls dont lcmploi cst lccommJndeacute par le goucrllemclltiapollais cst ()urnic ugrave ImiddotAllncc 2

64

kanji mais aussi des kana est lordre de traccedilage des traits des caractegraveres en geacuteneacuteral de

haut en bas de gauche agrave droite et de lexteacuterieur vers linteacuterieur Finalement les kani

possegravedent deux types de lectures possibles par le son et par le sens chacun pouvant

ecirctre unique ou multiple La lecture par le son eacutequivaut dans une prononciation

japoniseacutee aux mots chinois dorigine chaque caractegravere repreacutesentant une syllabe

chinoise (souvent en mots composeacutes tels que ILjjij hinzocirc lorgane du cœur) tandis

que la lecture par le sens correspond aux mots japonais exprimant ce sens (IL kokoro

cœur esprit acircme) La lecture par le son est particuliegraverement utiliseacutee atin de

construire cie nouveaux mots les mots composeacutes cie plusieurs kani (par exemple tfu

Ficirc~ chi-ka-lelU (chemin de) fer souterrain cest-agrave-dire le meacutetro) qui permettent de

deacutevelopper le lexique de la langue par les ressources graphiques de leacutecriture

Toutefois les diffeumlrentes combinaisons cie lecture (aussi bien que de types deacutecriture)

possibles se retrouvent actuellement dans la langue japonaise eacutecrite Les multiples

lectures possibles contribuent donc agrave la difficulteacute dutilisation de leacutecriture japonaise

tout aussi bien quagrave sa richesse propre en tant queacutecriture lexicalement productive

La difliculteacute de deacuteterm iner exactement ce que deacutesignent les Iwni est eacutegalement

due aux diffeacuterentes possibiliteacutes de lecture Les caractegraveres chinois sont dans leur langue

dorigine des caractegraveres morphosyllabiques cest-agrave-dire des caractegraveres repreacutesentant le

plus souvent agrave la fois un morphegraveme pouvant ecirctre indiqueacute par un eacuteleacutement seacutemantique

et une syllabe pouvant ecirctre indiqueacutee par un eacuteleacutement phoneacutetique Cependant les

eacuteleacutements seacutemantiques nindiquent parfois que tregraves vaguement le sens quils ont pour

fonction de preacuteciser Le sens de la structure interne des caractegraveres nest alors

reconstruit que de faccedilon tregraves speacuteculative Dans dautres cas au cours cie assimilation

des caractegraveres dans une lecture par le son japoniseacutee la prononciation a changeacute agrave un

point tel que leacuteleacutement phoneacutetique en est clevenu insignifiant Par ailleurs certains

caractegraveres sont aussi des logogrammes puisque leurs lectures japonaises correspondent

agrave des mors complets pouvant ecirctre deacutecomposeacutes en plusieurs morphegravemes (par exemple

65

~~ honoshi converseacuteltion tandis que le verbe ~~9 honoS1l parler distingue la

terminaison 9 -Sil) Dautres ne repreacutesentent mecircme pas des morphegravemes (~laquo ~

lobeu manger le premier morphegraveme eacutetant ~laquo 10fJe- et non ~ 10-) mais seulement

des sons (un ou plusieurs phonegravemes)

Les syllabaires nommeacutes kono sont des creacuteations speacutecifiumlquementjaponaises

Ils ont tous les deux eacuteteacute formeacutes agrave partir de leacutecriture chinoise les kOlokona eacutetant de

forme plus angulaire deacuterivant chacun dune partie de caractegravere chinois et les hirogono

de forme plus cursive deacuterivant de caractegraveres chinois eacutecrits en style cursif Les

kOlokono ont eacuteteacute creacuteeacutes agrave lorigine a1iumln dannoter les textes eacutecrits en caractegraveres chinois

en leur ajoutant des eacuteleacutements grammaticaux preacutesents dans la langue japonaise et non

dans la langue chinoise tandis que les hirogono servirent plutocirct au deacutebut agrave lusage

quotidien tel la correspondance ainsi que dans la production de la premiegravere grande

litteacuterature j-eumlminine japonaise

Les kono correspondent en fait agrave des mores et non des syllabes ce dernier

terme eacutetant plutocirct la deacutesignation retenue par lusage en Occident La more est agrave la fois

un eacuteleacutement rythmique et un segment phoneacutetique donc une uniteacute de longueur alors que

la syllabe correspond plutocirct agrave une seule eacutemission de voix Chaque more a normalement

la mecircme dureacutee ce qui nest pas neacutecessairement le cas pour les syllabes Par exemple

le mot japonais pour journal L1v )~1v shillbun lorsqueacutecrit en kono ici en

hirogono est composeacute de quatre mores (L shi Iv nt )~ m Iv n) alors que nous ne

compterions que deux syllabes (Llvlhill )~Iv blln qui correspondent toutefois aux

konji du mecircme mot ~JTM) Les quatre mores cie L1v )~1v sont prononceacutees avec

presque la mecircme longueur tandis quun mot tel que syllabe il la double consonne se

deacutecompose en syllabes de dureacutees ineacutegales (syl- la- b(e)) La more comme eacuteleacutement

rythmique et segment phoneacutetique est de la sorte luniteacute de son conventionnelle de la

l UlltahlcClll des i0110 cie hase Cilmiddot cc Icm tllIlsiitleacutetatioll Cil r(jlJwji cst [()umi ugrave 1-illllcc 2

66

langue japonaise agrave laquelle correspond un kono Elle servira par ailleurs de mesure

prosodique agrave la poeacutesie

Dans la langue eacutecrite contemporaine Iusage des konji et kono est tixeacute selon

des fonctions propres Les konji logographiques sont utiliseacutes pour les mots et parties

de mots signifiants ou agrave contenu tixe tels les noms propres et communs et les racines

des verbes des adjectifs et des adverbes Leur alternance avec les deux syllabaires rend

le deacutecoupage du texte plus eacutevident et lespacement des mots non neacutecessaire le texte

japonais eacutetant continu et nayant recours quaux marques de ponctuation

Les kk(w servent agrave un usage similaire agrave celui des italiques de la langue

franccedilaise soit pour eacutecrire des mots dorigine eacutetrangegravere sauf les mots (surtout dorigine

chinoise) deacutejagrave eacutecrits en konji ou pour mettre de lemphase sur un ou plusieurs mots

dans une phrase Beaucoup de mots eacutetrangers sont en effet utiliseacutes dans une version

japoniseacutee par exemple ~9- nekllNi neckie ou I)J posocon persona

computer Les noms propres dorigine eacutetrangegravere sont eacutegaJementjaponiseacutes et eacutecrits en

koakono 1 middot1)[-1 Jan BOlIjon Jean Valjean Les kkono ont

comme particulariteacute de se ressembler fortement dans lems tormes angulaires J

Les hirogono sont quant agrave eux employeacutes pour le reste de leacutecriture de la langue

japonaise soit principalement les parties deacuteclineacutees des verbes des adjectifs et des

adverbes les particules enclitiques les inteljections et les conjonctions par exemple

la terminaison -219 kil710su dans W-2K9 kokil71oslI eacutecrire ou la particule

theacutematisante ft ho (prononceacutee exceptionnellement 10) dans ~ B [t konnichillo

bonjour Tous les konji peuvent ecirctre eacutecrits en hirugono bien que lutilisation cles

logogrammes teacutemoigne du niveau de richesse cie la langue eacutecrite Des hirogono

Voir Ic~ eltail~ dc IClc IllLlmis illnncc 2

67

minuscules placeacutes parallegravelement ltlUX kOl1ji les filrigono sont dailleurs utiliseacutes al-in

dindiquer la lecture phoneacutetique des textes destineacutes agrave lapprentissage scolaire ou de

certains caractegraveres peu communs des autres textes Les hirogono sont plus distincts

dans leurs formes cursives (pour les mecircmes mores que dans le paragraphe preacuteceacutedent)

Leacutecriture latine le n)lJ7oji a finltllement eacuteteacute introduite dans le contete de

linternationalisation du Japon moderne surtout commerciale et touristique Elle est

ainsi utiliseacutee dans la signalisation routiegravere laffichage publicitaire les noms de

compagnies commerciales etc Elle ltl pour particulariteacute de ressortir en tant queacutecriture

eacutetrangegravere au sein de leacutecriture ind igegravene japonaise

Pour conclure cette section je remarquerai que la complexiteacute de leacutecriture

japonaise pousse le lecteur agrave utiliser une multitude de voies daccegraves au sens des mots

eacutecrits (agrave ce sujet Kess et Miyamoto 1999) Liumlnformation peut ainsi ecirctre transmise

par les voies phonologique grapheacutemique kineacutetique ou directement seacutemantique Lune

et lautre de ces voies qui sont sans doute communes agrave toutes les langues eacutecrites sont

plus ou moins utiliseacutees selon le type deacutecriture et son contexte dutilisation Laspect

phonologique peut ecirctre favoriseacute dans la lecture de kono et des eacuteleacutements phoneacutetiques

de keJnji la voie grapheacutemique dans la lecture de cltlractegraveres pictographiques et

diagrammltltiques lltl voie kineacutetique dans la reconnaissance de lordre de traccedilage et lltl

voie seacutemantique dltlns lassociation du sens agrave la composante seacutemantique du caractegravere

non familier lors de lanalyse de ce dernier Un ensemble important de facteurs en

rapport au contete dutilisation est finalement la familiariteacute du lecteur et scripteur

avec les caractegraveres la reacutegulltlriteacute de correspondance de ces derniers au sens et au son

viseacutes ainsi que leur ti-eacutequence dans les tetes lus et eacutecrits trois points lieacutes agrave

lhabitude

68

22 Approche seacutemiotique de leacutecriture japonaise

L eacutecriture est pal10ut preacutesente dans notre socieacuteteacute contemporaine de lettreacutes el

nous y sommes habitueacutes Si bien quelle paraicirct seffacer dans Jexpeacuterience commune

que nous faisons du monde environnant et quelle ne semble pas se manifester pour

elle-mecircme Hormis les effets estheacutetiques explicites de la calligraphie lorsque nous

rencontrons un texte eacutecrit nous ne tenons pas compte le plus souvent de la lettre

traceacutee mais seulement du message veacutehiculeacute Leacutecriture tend en ce sens agrave la

transparence car nous ne prenons pas conscience de ses propres particulariteacutes bien

quelle en recegravele et nous en impose implicitement La science de leacutecriture cherchera ft

faire ressortir cet implicite par lequel leacutecriture structure la penseacutee lorsque cette

dern iegravere en fa it lexpeacuterience r abordera i dans cette section 1 eacutecriture en tant que

systegraveme de repreacutesentation grltlphique dont le but est de repreacutesenter le langage informel

de la langue usuelle Leacutecriture ainsi comprise sera contrasteacutee avec la notation logique

des graphes existentiels comme systegraveme de repreacutesentation graphique du langage

formel de la logique deacuteductive Mais tout dltIbord je deacutefinirai leacutecriture de lagraveccedilon

geacuteneacuterale afin de guider la caracteacuterisation suivante de leacutecriture ordinaire et plus

speacutecifiquement de leacutecriture japonaise par contrltlste avec la notation logique Le

retour critique sur lapplication theacuteorique effectueacutee permettra en dernier instant de

juger du bien-fondeacute de cette applic8tion de la seacutemiotique par une reacuteflexion eacutelaboreacutee agrave

partir des cateacutegories particuliegraveres de la signification

221 Theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

Quest-ce que eacutecriture La reacuteponse agrave cette question prendra pour point de

deacutepart la deacutetermination des caractegraveres essentiels de leacutecriture agrave partir desquels cette

derniegravere sera mise en lien avec le langltlge compris de ragraveccedilon geacuteneacuterale et les diffeacuterents

types speacutecifiques deacutecriture pour ensuite faire place ft une analyse de la ronction

69

1

interpreacutetative du signe eacutecrit Selon le linguiste Florian Coulmas leacutecriture comporte

trois caracteacuteristiques fondamentales (Coulmas J 989 17)

it consists of artificial graphical marks on a durable surl~1ce

2 its purpose is to commullicate something

3 this purpose is achieved by virtue of the meacutelrks conventional relation to

langueacutelge

Nous reconnaissons ici les constituants essentiels du signe soit le signe pris en son

fondement lobjet et linterpreacutetant chaque constituant eacutetant toutetois compris dune

faccedilon nuanceacutee caracteacuteristique du signe speacutecifique quest leacutecriture Au fondement de

leacutecriture en tant que signe se trouve sa preacutesence mateacuterielle condition formelle de la

repreacutesentation dun objet par le signe eacutecrit La signification est contrainte par la

preacutesence mateacuterielle du signe eacutecrit la matiegravere neacutetanl elle-mecircme rappelons-le quune

loliumlne contrainte par lhabitude L objet de leacuteCliture est pour sa parl agrave communiquer

et sa forme tient donc du langage et de tout ce que ce dernier permet dexprimer

(sentiment jugement argumcnt etc) Linterpreacutetant du signe consiste finalement en

une convention reliant les traces mateacuterielles de leacutecriture au langage repreacutesenteacute

La philosophie du langage contemporaine dexpression franccedilaise fait la

distinction entre le langage et la langue Dans une approche seacutemiotique de leacutecriture le

langage serait le systegraveme de signes tel que caracteacuteriseacute par la grammaire speacuteculative

tandis que la langue serait la langue usuelle dont leacutecriture serait un mode dexpression

deacutetermineacute Toutefois un approfondissement de lanalyse du cas de leacutecriture permet

de constater toute une gradation allant de la grammaire speacuteculative aux eacutecritures

speacutecifiques et finalement agrave la langue Selon Coulmas dun point de vue linguistique il

sied de distinguer le systegraveme deacutecriture du lype c1eacutecriture (script) el de lorthographe

de la maniegravere suivante (Coulmas 1989 38-9)7

- Le lCIiuml11C langlage Jeacutesigne ici la leacutell1gUC lmgllis ne laisltlnl pas la dilTeacutelcncc cnlre les Licu nolions

70

Writing system

Every writing system

selection of the linguistic

to be graphically re

(not language specifie)

makes

pres

un its

ented

a Word writing

Morpheille writing

Syllable writing

Phoneille writing

Phonetic writing

Script

Every script Illakes a speci lie Chinese script

selection of the possibilities of a Arabie script

given system in accordance with Greek script

the structu ra 1 conditions of a

given language

Orthograph

Every orthography Illakes a Ch ineseTa iwanese

speci fic selection of the orthography

possibilities of a script ~or Standard German

writing a particular language in a Swiss-Gellnan

uni ~orlll and standardized way ortho gra phy

Dun point de vue seacutemiotique plus englobant la gradation passant du langage formel agrave

la langue informelle comprendrait la logique en tant que grammaire speacuteculative la

deacutefinition geacuteneacuterale de leacutecriture en tant que signe le systegraveme deacutecriture le type

deacutecriture lorthographe la langue eacutecrite la langue parleacutee usuelle La logique en tant

que grammaire speacuteculative repreacutesente la forme du langage le plus geacuteneacuteralement

possible Les autres aspects du signe eacutecrit preacutecisent la signification en fonction du cas

actuel de leacutecriturc La deacute1inition de leacutecriture en tant que signe sapplique toujours au

niveau geacuteneacuteral du langage mais la distinction du type de systegraveme deacutecriture est deacutejagrave

propre agrave un niveau geacuteneacuteral de la langue deacutecoulant de lanalyse laquopar le basraquo des uniteacutes

linguistiques composant les langues des donneacutees propres agrave la science idioscopique de

la linguistique Les nivcaux suivants du type deacutecriture et de lorthographe son plus

speacuteci1iques aux langues eacutetudieacutees et leur distinction permet de deacutefinir plus exactement

71

les particulariteacutes dune eacutecriture Lorthographe repreacutesente ainSI la convention dune

eacutecriture propre agrave une langue speacutecifique

Cette analyse ne tient cependant compte que dun seul type dobjet du signe

eacutecritmiddot soit la langue parleacutee usuelle Leacutecriture peut aussi repreacutesenter dautres types

dobjet et une classification des types deacutecriture selon le type dobjet repreacutesenteacute

devrait distinguer au moins les trois types tondamentaux suivants formel tel que la

notation logique ou matheacutematique informel utilitaire repreacutesentant la langue parleacutee

usuelle et informel estheacutetique tel que dans la calligraphie Leacutecriture de type lormel

fait ressortir explicitement la forme geacuteneacuterale du langa~e agrave travers le 1ondement du signe

eacutecrit et permet ainsi de prendre conscience de la fonction repreacutesentative du langage

Elle engendre une interpreacutetation consciente du langage preacutecisant de faccedilon geacuteneacuterale la

signification Leacutecriture de type informel utilitaire fait ressortir implicitement la lorme

du langage propre agrave une langue deacutetermineacutee dans le fondement du signe eacutecrit Son but

premier nest pas de faire reacutefleacutechir sur le langage mais de communiquer le message

veacutehiculeacute par celui-ci Linterpreacutetation est alors dirigeacutee dans un sens deacutetermineacute par

leacutecriture sa tonction de repreacutesentation de la langue Leacutecriture de type informel

estheacutetique provoque pour sa part un sentiment agrave leacutegard de la forme de la

repreacutesentation le fondement du signe eacutecrit mais na pas pou l fonction prem iegravere de

faire reacutefleacutechir sur lobjet repreacutesenteacute Elle renvoie inconsciemment linterpreacutetation au

fondement du signe et reste vague quant au sens agrave lui donner

La consideacuteration du type dobjet repreacutesenteacute megravene agrave lanalyse de la fonction

interpreacutetative de Jeacutecriture Linterpreacutetant immeacutediat du signe eacutecrit le produit de

l eacutecri ture est une repreacutesen tation cie la langue usuelle moda1iseacutee se Ion les possi bi 1iteacutes

offertes par le tondement du signe soit la langue eacutecrite En tant quinterpreacutetant

dynamique leacutecriture preacutesente eacutegalement laspect dun processus qUI a cette

particulariteacute de mettre en lien plusieurs niveaux de la leacutealiteacute plusieurs eacutetats de la

lorme du langage Le signe eacuteClit est un acte psychique et physique laissant une trace

72

mateacuterie Ile in lormeacutee pa rune forme speacutecifiq ue du langage la langue usue Ile ou les

expressions matheacutematiques etc Linterpreacutetant final le troisiegraveme aspect de la lonction

interpreacutetative de leacutecriture est son but son effet viseacute Agrave ce sujet on consiclegravere

souvent leacutecriture comme secondaire par rapport agrave la langue parleacutee comme si elle

deacutependait en tout de cette derniegravere Le but de leacutecriture serait de la sorte de repreacutesenter

la langue de la faccedilon la plus transparente possible en seffaccedilant elle-mecircme comme

moyen de la repreacutesentation Mais nous pouvons aussi renverser le point de vue et

faire remarquer que leacutecriture est dune aide des plus preacutecieuse agrave la repreacutesentation du

langage plus fondamental que la langue deacuteterminant mecircme par converse celle-ci

jusquagrave un certain point Le signe eacutecrit par les particulariteacutes de son fondement

permet dactualiser dans une langue eacutecrite certaines possibiliteacutes du langage que la

langue parleacutee usuelle a laisseacutees pour compte Ainsi Coulmas dit-il dans sa conclusion

laquoThe invention of writing is the answer to the limitations of speech to the here and

now Thus by acquiring a vritten form the expressive power of a language is realized

to a greater extent than it is in speech onlyraquo (Coulmas 1989 272) La perdurabiliteacute du

message eacutecrit ou sa transmission agrave distance en sont les avantages les plus

communeacutement eacutevoqueacutes mais son utiliteacute pour analyse formelle clans le cas de la

logique ou des matheacutematiques de mecircme que son pouvoir expressif estheacutetique dans le

cas de la calligraphie sont c1autres aspects que la formulation dune theacuteorie geacuteneacuterale de

leacutecriture comme signe permet de mettre en eacutevidence

Leacutecri ture sJisie en sync hlon ie nest pas un Jrgument car elle ne don ne pJS la

cleacute de sa propre interpreacutetation et son analyse dJns cette section sest donc limiteacutee agrave

une cmacleacuterisJtion geacuteneacuterale du signe eacutecrit dans les termes de la grJmmJire speacuteculative

Toutetoisle signe eacutecrit en ce quil preacutetend retleacuteter la structure du langage et plus

speacutec ifiq uement de la IJngue usue Ile com porte certJi ns Jspects sym bol iques et d icents

qui le rendent informatif et en appellent il une analyse logique critique Cest vers cette

critique logique que se dirigera lexamen de cas speacutecitiques dans la prochJine section

critique qui sera redoubleacutee pm la critique eacutepisteacutemologique suivante

73

222 Analyse seacutemiotique de leacutecriture japonaise

Leacutecriturejaponaise na pas le mecircme objet et ne poursuit pas le mecircme but que

la notation logique des graphes existentiels preacutesenteacutee au chapitre preacuteceacutedent Le but

principal de leacutecriture dune langue intonnelle telle que la langue parleacutee usuelle est de

communiquer efficacement linformation agrave distance dassurer la transparence du signe

eacutecrit et non de sarrecircter sur la repreacutesentation eacutecrite pour Imiddotanalyser alors que celui de

la notation du langage tormel de la logique est de permettre lanalyse du raisonnement

par le retour reacuteflexif sur le systegraveme de signes et la critique subseacutequente Les graphes

existentiels serviront dans cette section de point de repegravere et doutil agrave leacutelaboration

dune theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise Le contraste entre les deux types

deacutecriture permettra aussi de mieux tagraveire ressortir les particulariteacutes de cette derniegravere le

deacutebuterai par lexamen de quelques points de grammaire pour ensuite deacuteterminer les

caractegraveres essentiels de reacutecriture japonaise L exposeacute passera ainsi dune analyse de la

gram mai re japonaise repreacutesentant la structu re de la langue usue Ile par l app 1ication de

la logique des relations agrave lanalyse de la grammaire telle que la langue eacutecrite la tagraveit

ressortir par lapplication de la meacutethode des graphes existentiels agrave labstraction de la

forme du langage propre agrave reacutecriture japonaise par lapplication de la theacuteorie

seacutemiotique au cas consideacutereacute Japprotondirai lanalyse jusquau niveau des dix classes

de signes et passerai au moment critique de la logique tout en gardant en vue les

principes directeurs du pragmatisme

La languejaponaise a ceci de particulier que le sujet grammatical peut ecirctre omis

de la phrase sa preacutesence implicite eacutetant alors reconnue par la situation dans le

contexte de leacutenonciation La grammaire japonaise dans la tradition de Mikami Akira

deacutefinit la structure eacuteleacutementaire du japonais selon un moti f diffeacuterent de la structure

sujet-verbe-objet typique du tranccedilais ou de Imiddotanglais La langue japonaise est plutocirct leacuteeri~ le~ noms japonais selon lusage soit le nOIll Je IUumlllli11c aClnt le pleacutenolllJe tiens les exelllpics selltlnt ~ liumlllustrltltion Jes points lie gralllllllire Jes courS Je langue iaponaise Jonneacutes pal Kana) a Takehi 10 il l LJ ni clsi leacute Je VIontreacutea 1 auquel je Jo is Iussi 1Cl leyon sur 18 glalll1ll8i le Je lvI ik81ll i ikira la pn~senlation de la grlllllllailC jlponaise Jlns celle ~eetion relegraveve eepenJlnl de Illlt pmplc interpreacutetation clu co llIS

74

dite structureacutee selon un ordre thegraveme-commentaire OLI le sujet grammatical plutocirct

nommeacute laquothegravemeraquo pou l en distinguer la fonction na pas l im portance quon 1ui precircte

dans notre langue franccedilaise Cest que le japonais nest pas une langue du laquotaireraquo ct

~ sulu) comme le franccedilais mais une langue du laquoil y araquo (~~ (111) Les faits ( C

kaa) repreacutesenteacutes ne deacutependent pas neacutecessairement de choses (t 0) mono) qui les

accomplissent lis peuvent aliumliver par eux-mecircmes eacutetant alors seulement constateacutes par

le locuteur Le thegraveme nest pas neacutecessairement un agent il est plus essentiellement une

partie de la phrase mise en eacuteviclence (par la particule fJ ho prononceacutee 110) tel un

soleil levant (80)11 hi 10 l1Jolu -le roncl clu jour) eacuteclairant le reste de la phrase Il

peut ecirctre omis leacuteclaircissement venant alors du contexte de leacutenonciation Le

commentaire quant agrave lui se construit autour clu verbe clans les phrases verbales ce

centre restant v icle clans les phrases nom ina les sans la laquocopu leraquo C ~ ~ de 011 ou C

9 desu La phrase japonaise est clonc construite autour cie la base clu verbe situeacute agrave la

fin cie la phrase par lajout cIeacuteleacutements clont la fonction est speacuteci fieacutee par cles

particules cest une phrase en forme cie bonsaiuml (~t(X bonsoi bun) clans laquelle les

com mentai res-branches cl irigeacutes clans le sens cles particu les-tuteurs seacutelaborent agrave parti l

clu verbe-pot qui contient les racines cie la phrase Tanclis que la phrase franccedilaise est

construite agrave partir clu couple sujet-verbe clont le sujet est mis en eacuteviclence tel un arbre

cie Noeumll avec son eacutetoile-sujet au sommet son tronc-verbe et ses branches-objets ( 1)

A 7( A Y 1) - X kllli111l1l0SII IIIIii IWI1) Cest que le locuteur japonais ne prencl pas

clans le contexte cie sa langue un point de vue du dieu sur le moncle (f$0) El kmlli 10

me) slIb ljJecie oeemiois pourrions-nous dire le point de vue du grand architecte

celui qui construit le monde mais un point de vue de linsecte (RO) El lJ1ushi no JJle)

la petite becircte qui voyage sans lin agrave travers la surface de la terre Cette construction par

le bas de la grammaire sera agrave preacutesent formaliseacutee par la rencontre avec les principes

directeurs de la logique peirceacuteenne

75

La logique des relations de Peirce et son deacuteveloppement par la meacutethode des

graphes existentiels seraient en effet particuliegraverement adapteacutes agrave lanalyse de la

grammaire japonaise que le modegravele de la grammaire anglaise a tendance agrave brutaliser

Notons par ailleurs que lutilisation dune grammaire speacutecifique cOl11me modegravele dune

autre grammaire procegravede dune mauvaise meacutethodeutique La grammaire des langues

speacutecifiques doit plutocirct se fonder sur la grammaire pure ou speacuteculative de la logique La

meacutethodeutique bien penseacutee dun point de vue peirceacuteen implique que lon fasse se

rencontrer les principes de la logique et les donneacutees de la linguistique en tant que

scientifique-philosophe confrontant dans son expeacuterience ordinaire de la reacutealiteacute le

pheacutenomegravene de la langue japonaise

Chez Peirce il ny a ultimement dans lanalyse logique meneacutee agrave fond quun

preacutedicat geacuteneacuteral par proposition (repreacutesentant luniteacute conceptuelle de lEcirctre) et

plusieurs sujets qUI constituent des points dancrage dans la reacutealiteacute actuelle

(repreacutesentant le divers de la Substance) (EP2 208 1903 EP2 275-88 1903) Un

sujet peut aussi ecirctre laisseacute pour implicite seul le contexte de leacutenonciation permettant

alors la mise en situation (EP2 281-82 1903) Semblablement dans la langue

japonaise il ny a pas neacutecessairement de sujet actif se deacute1narquant le laquosujet

grammaticalraquo en tant que thegraveme du commentaire qui constitue le reste de la phrase

pouvant ecirctre omis Prenons comme exemple la phrase inaugurale du roman de

Kawabata (~OO Yllkigllni Pays de neige in Kawabata 1974 (1935) 7)

kllnizokoi rO rogoi orneII 110 nllkelIo ykigri de ullu

liontiegravere (particule 0) de) long tunnel (part ~ laquoobjet directraquo) eacutemerger de

(parI C lorsque) pays de neige (ltltcapu leraquo -r 17gt ) t laquoc eacuteta itraquo)

Le thegraveme de la premiegravere proposition nest pas un agent mais un contemplateur de

leacutetat de choses duquel il fagraveit paltie Il est laisseacute pour implicite dans le contexte de

leacutenonciation La distance entre leacutenonciateur et lobjet de son eacutenonceacute nest pas

76

ressentie de faccedilon aussi grande que dans nos eacutenonceacutes de langue franccedilaise ou anglaise

Des tentatives de traduction de cette phrase sans sujet actif seraient

laquoUne fois eacutemergeacute du long tunnel frontalier ceacutetait le pays de neigeraquo

(le plus litteacuteralement possible mais je dis tout de mecircme laquocea eacutetaitraquo ce qui nous

distancie de lobjet le pronom deacutemonstratif eacutetant toutefois un index agrave la fois

plus direct et discret plus transparent quun pronom personnel ou un nom

commun)

laquoUn long tunnel entre les deux reacutegions et voici quon eacutetait dans le pays de

neigeraquo

(trad Fujimori Bunkichi et Annel Guerne (1960) eacuteliminant le verbe mikeli

eacutemerger et utilisant le pronom indeacutefini lt(011 eacutetaitraquo)

laquoThe train came out of the long tunnel into the snov countryraquo

(trad Edward Seidensticker (1986) qui rajoute un sujet (troil1) et embrouille les

deux propositions)

Dans la phrase japonaise la copule peut eacutegalement ecirctre omise La logique de

Peirce permet de mieux expliquer ce que lon entend ici par laquocopuleraquo Prenons agrave ce

sujet la phrase-exern pie de M ikam i

~ fjll1J l 0

ZOcirc 110 hOl1o go l10gai

eacuteleacutephant (particule) trompe (particule) longue (deacuteclinaison de ladjectit)

laquoLeacuteleacutephant-lagrave [sa] trompe [est] longueraquo

Lanalyse de cette phrase selon la meacutethode des i Sdonne le diagramme suivant

1 est clair que la repreacutesentation de la relation didentiteacute implicite ne cause pas de

problegraveme puisque nous la retrouvons dans la quantification existentielle eacutegalement

implicite exprimeacutee par linscription mecircme de la ligne didentiteacute sur la feuille

77

dassertion La copule nest pas lagrave pourjoi nd re les eacuteleacutements de la ph rase mais pou l

speacutecitier la relation du terme qui la preacutecegravede avec les autres eacuteleacutements la relation

diumldentiteacute eacutetant plus fondamentale que toute expression speacutecitique telle quexprimeacutee

par la copule Elle servira plutocirct dindicateur du niveau de langage (honoritique C

~~ 9 de gozoil1loslI poli Cg desu style eacutecrit Cc10 Q de OlI neutre Uamilier)

t do) compleacutetant le commentaire Elle est omise au style neutre apregraves les adjectifs

situeacutes agrave la base du commentaire qui ont eux-mecircmes une fonction qualitative

prononceacutee Nous pourrions dailleurs lappeler plus justement un marqueur

dexistence quune copule Il faut dire agrave ce sujet que les grammairiens actuels (tels que

Shimamori 1997) distinguent plutocirct deux fonctions de Cg delu qui sont soit en tant

que copule de laquotransformer le nom preacuteceacutedent en eacutenonceacute minimal completraquo

(Shimamori 1997 17) dans lequel cas leacuteleacutement est indispensable soit devant un mot

qualitatif japonais (adjectif en ~ i) de laquosituer leacutenonceacute au niveau poliraquo (Shimamori

1997 27) dans lequel cas leacuteleacutement est tacultatif Linterpreacutetation ici proposeacutee eacutevite

le deacutedoublement de fonction du marqueur dexistence en expliquant lomission de

leacuteleacutement apregraves ladjectif dorigine japonaise par la marque de seconde intention la

fonction qualitative prononceacutee deacutejagrave preacutesente dans la tlexion adjectivale et ne

neacutecessitant donc pas de surenchegravere au style neutre (la notion de seconde intention

relative agrave la flexion est preacutesenteacutee ci-apregraves) Par ailleurs dans la logique des relations

non plus la copule explicite nest pas un eacuteleacutement du vocabulaire primitif il sagit

mecircme selon Peirce dune notion grammaticale latine tardive datant du Moyen Acircge le

verbe neacutetant pas dans le grec ancien ou le latin classique une composante essentielle

de la phrase (EP2 221 282 1903)

Le thegraveme est aussi convenablement deacutecentreacute par cette analyse cest-agrave-dire

situeacute comme un sujet de la proposition parm i dautres la fonction speacutecitique de

chaque eacuteleacutement eacutetant indiqueacutee par la particule qui lui est associeacutee (rd 1 0 et 1J go) ou

sa tlexion adjectivale (~ i) toutes eacutecrites en hirogol1( Une certaine structure

78

grammaticale est donc mise en eacutevidence par lalternance de deux types deacutecriture les

kan et les hirogano Dans le cas des adjectifs et des verbes un morphegraveme vient

moditier le sens dun autre morphegraveme plus fondamental au sein dun mecircme mot La

fonction grammaticale de chaque morphegraveme (racine et deacuteclinaison base connective et

terminaison) est de la sorte distingueacutee par leacutecriture Dans le cas des particules et du

marqueur dexistence leur fonction est encore plus abstraite puisquil sagit de termes

distincts donnant un sens aux termes auxquels ils se rapportent mais dont la

signification reste incomplegravete sans ces termes (ce sont des laquosyncateacutegoregravemesraquo EP2

286 1903) Ils deacuteterminent le sens de la proposition au niveau des rhegravemes proprement

dits et non de linteacuterieur de ceux-ci par deacuterivation agrave partir des morphegravemes Selon la

logique des relations de Peirce nous voyons surgir dans ces deux cas la seconde

intention aussi repreacutesenteacutee dans les -Jocirc par des signes nommeacutes Potentiels (CI) 5524shy

6 1903) Peirce donne les deacutefinitions suivantes de la seconde intention

The smt of idea wllich an icon embodies if it be such that it can convey any

positive information being applicable to some things but not to others is called a

jirst intention The idea embodied by an icon which cannot of itself convey any

information being applicable to everything or to nothing but which may

nevertheless be useful in modifying other ieons is ealled a second il1lenion (CP

3433 1896)

Every rhemn whose blnnks may be filled by signs of orclinary individunls but which

signifies only what is true of symbols of those individuals without any reference to

qualities of sense is termed n rhema 01 second intention For second intention is

thought about thought as symbol (CP 4465 1903)

Il is by menns of reuiles of second intention thnl the general method of logicnl

representation is to find eompletion (CP 3490 1897)

Dans les deux cas qui nous inteacuteressent les particules Id 110 et tJ~ go et la llexion l i

sont des signes de seconde intention en ce quils viennent preacuteciser la signitication agrave

accorder agrave la proposition en modalisant la relation didentiteacute fondamentale qui joint

les diffeacuterents termes de premiegravere intention Ce sont des signes qui agissent sur les

relations entre dautres signes au sein dune mecircme repreacutesentation Par la preacutecision

quils apportent agrave la sign ification au niveau des re lations fondamentales ils

79

complegravetent Ianalyse logique implicite agrave la langue japonaise L alternance entre les

types deacutecriture fait donc ressortir la structure de la phrase en mettant en eacutevidence le

rapport entre la premiegravere et la seconde intention

Le problegraveme speacutecifique qui nous permettra dapprolondir plus avant lanalyse

seacutemiotique de leacutecriture japonaise est le changement actuel de proportions entre les

difteumlrents types deacutecriture utiliseacutes dans la langue japonaise eacutecrite La langue japonaise

assimile en ce moment de faccedilon croissante des mots dorigine eacutetrangegravere surtout de

langlais ameacutericain eacutecrits en kolokol1o Ces mots eacutecrits en kOlokona occupent de plus

en plus despace graphique dans leacutecriture jusque maintenant domineacutee par les kanjl

tout en remplissant des fonctions grammaticales sinon attribueacutees il ces derniers

Laspect externe ainsi que de la structure interne de Ieacutecriture japonaise se trouvent

donc fortement modifieacutes suite au contact de la langue japonaise avec dautres langues

aux eacutecritures difteumlrentes Le problegraveme consiste agrave deacuteterminer quels aspects seacutemiotiques

fondamentaux de Ieacutecriture japonaise sont modifieacutes par ce changement de proportions

dans les types deacutecriture utiliseacutes Construisons tout dabord un exemple de

transformation dune phrase dans le sens de laugmentation des kalokono La phrase

suivante servira agrave lillustration

Nihongo no kihon bun wa bonsaiuml bun desu gajilransligo wa klifisumasli twlii bUll

c1esu

laquoLa phrase eacuteleacutementaire du japomlis est une phrase bonsaiuml mais en franccedilais cest

une phrClse arhr de Noeumlf [Christmas tree]raquo

Certains kan)l tels que 8 111110n Japon sont dune importance culturelle

m~ieure et il est agrave parier que les Japonais ne les abandonneront pas cie si vite parce

que ces caractegraveres leur sont chers au cœur Dautres sont tregraves simples ou tregraves

tamiliers tels que ~g go langue et )( blll1 phrase et ils seront conserveacutes parce

quils sOl1l deacutejagrave ancreacutes clans Jhabitude et ne causent pas de problegraveme Mais il est aussi

80

des mots dorigine chinoise aux caractegraveres plus complexes ou moins familiers dans la

phrase-exemple ~~ hO1soi bonsaiuml qui sont bien ancreacutes dans la langue parleacutee

usuelle mais dont on souhaitera peut-ecirctre il lavenir simplifier la repreacutesentation eacutecrite

en les eacutecrivant en koloko1o (puisque dorigine eacutetrangegravere) ainsi honsoi deviendrait 1f 1 Finalement le nouveau vocabula ire techn ique eacutetant sou ven t anglo-ameacuterica in

dorigine le vocabulaire anglo-ameacutericain japoniseacute simposera aussi de lui-ll1ecircme en

comblant les vides de la langue technique 1) A A Y 1) - kulisll710SI IIii

Chrilll1los Iree en est un exemple ou en remplaccedilant avec sa nouvelle saveur les

anciens lllotS dorigine chinoise deacutesormais deacutesuets ainsi dans notre phrase

supposons que ~ kiho1 fondement subisse ce dernier sort et soit remplaceacute par le

terme anglo-japonais Acirc-~ hecsliiku )olie y a dautres raisons favorisant la

prolifeumlration de mots eacutecrits en kolokol1o surtout en lien avec lapport culturel

eacutetranger par exemple dans les modes engendreacutees par la musique la litteacuterature Ie

discours politique etc mais la preacutesente illustration seacutepuise dans les deux cas mis de

lavant La phrase-exemple transformeacutee devient alors en reprenant dabord loriginal

pour effet de comparaison

B ~gO)~gtzIj~~gtZT9tJ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) -gtZT9o

B ~gO) 0( - gtz1j ~ -1 gtzT9tJ~ 77 Agrave~glj 1) Agrave Agrave ) 1) - gtzT9 0

Nihongo no heeshiku bun Wl hO7sai bun c1esu ga li1runsllgo wa kllislll11allI 1lIlii

bun desu

laquoLa phrase ileacutell7ltnluire [hLsic] du japonais est une phrase hOl1sui mais enfiu7ccediluis

cest L1ne phrase urhre de Noeumllraquo

Une analyse grammaticale donnera une premiegravere ideacutee de la structure de ces

phrases Les phrases sont composeacutees chacune de deux propositions lieacutees par la

cc suiet le dcuiegravelllc lelc dc lannec 2 donllc un ecl1lple dnrlicle dciourJlltJ1 urilisnnl de nomlxcu lllolS 0crits Cil kU(fw7u dans ce cas-Iugrave pour cn eriliquer lulilisltJtion ccessi e llm le rrcl1licr Illinislre l1e Shinll Jans son discours inaugural Cc lcte contrasle mcc Ic premicr clrail de lanncc rcrrcnanl le d011ul dun conte de Ikutngaa le famcu 1eacute1shocircIllOIlraquo eacutecrit en 1915 dans unc languc litteacuteraire au Sl Ic laquogothiqucraquo ulilisant quelques kl7ji cOl1lrlcCS ou inusil0s el aucun kalakrlu

81

particule conjonctive IJIcirc go mais qui introduit dans la deuxiegraveme proposition une ideacutee

constrastant avec celle exprimeacutee dans la prem iegravere Dans la prem iegravere phrase le thegraveme

de la premiegravere proposition est B ~gO)~)( l1iho1go 110 kihon )((n la phrase

eacuteleacutementaire de la langue japonaise mis en eacutevidence par la particule theacutematisante fj

wa en ce qui concerne et son commentaire est ~~)( honsai )1(1 phrase bonsaiuml

dont le rapport avec le reste de la proposition est souligneacute par le marqueur dexistence

de style poli C9 desu il y a ou cest tandis que le thegraveme de la seconde

proposition est 77 Agrave~g fltral1sugo langue franccedilaise et son commentaire est

1) Agrave x Agrave J 1) -)( kurisulllosu ISlIii blll1 phrase arbre de Noeumll indiqueacutes par la

mecircme particule theacutematisante et le mecircme niarqueur dexistence La phrase transformeacutee

reprend exactement la mecircme structure grammaticale mais remplace ~ kihun par le

terme anglo-japonais I-~ beeshikll basic eacutecrit en kolakana et les kan)i de ~

~ bonsoi par les kalakano de mecircme lecture tT - La transformation du type

deacutecriture naffecte donc en rien la structure grammaticale de la phrase japonaise dans

tous les cas du pheacutenomegravenc actuel qui nous concerne Mecircme dans le cas extrecircme de

lassimilation dun mot eacutetranger comme verbe base de la phrase bonsaiuml japonaise le

nouveau mot prend une forme grammaticale deacutejagrave preacutevue par la langue soit celle des

verbes dorigine chinoise construits par lajout du morphegraveme 9 g SlIU fnire (ici en

style neutre eacuteventuellement conjugueacute) agrave la base connective sino-japonaise par

exemple le verbe anglo-japonais 7 euml-)[9g apiiuslIlI to appeal a une forme

identique agrave un verbe sino-japonais tel que ~fff9 ~ JlIl1sekisuu analyser Le

contact des langues peut bien provoquer des transformations de la grammaire mais la

cause nen est pas alors le changement de type d eacutecri ture

Lanalyse seacutemiotique proprement dite commencera par deacutegager les

composantes du signe eacutecrit de la langue japonaise tel quillustreacute par la phraseshy

82

exemple Lefondemen de leacutecriture japonaise comme signe est lapparence mateacuterielle

quelle offre dont on peut deacutegager une structure logique deacutetermineacutee par lobjet que le

signe repreacutesente la langue parleacutee usuelle et deacuteterminant agrave son tour un interpreacutetant la

langue eacutecrite Leacutecriture japonaise ne saisit en son fondement que certains aspects de la

langue parleacutee soit certains lexegravemes morphegravemes syllabes et mores et une certaine

structure syntaxique de ces eacuteleacutements 211 bull Elle fait ressortir ces aspects dune faccedilon plus

preacutecise que la langue parleacutee mais en neacuteglige cIautres clans sa seacutelection (par exemple la

tonaliteacute) Elle est donc une abstraction de la langue parleacutee qui nen retient que certains

traits Ces traits sont inscrits et fixeacutes dans la matiegravere de leacutecriture une forme davantage

contrainte par lhabitude que la langue parleacutee Dans lexemple on peut reprendre les

deux phrases en ne siumlnteacuteressant quagrave leur aspect graphique et en consideacuterant quelles

uniteacutes linguistiques chaque signe de la phrase repreacutesente ainsi que quelle syntaxe

lensemble fail graphiquement ressortir Le fondement des deux phrases est une

alternance de kani D hiragw1( kafakana 0 et ponctuation selon ordre suivant

B80)~Xfl~)CC91JIcirc 75 Agrave81l 1) AgraveAgrave 1) -XT90

DUO 0 000bullbullbull 00000000000000bullbull0

B ~O)I-S-XIl -if-1 XC91f) 75 Agrave~gll 1) Agrave Agrave 1) -XC90

0000000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

Sur le support mateacuteriel cie la feuille dassertion leacutecriture est tout daborcl

contrainte par la lineacuteariteacute de la phrase inscrite semblable agrave leacutecoulement temporel de la

parole La ponctuation donne ensuite les limites hors tout ainsi quune certaine

structure interne cie la phrase Dans lexel1lj1le le j1ointmiddot o marque la tin de la phrase

et la virgule seacutepare la premiegravere proposition de la seconde Les morphegravemes et

syllabes repreacutesenteacutes par des kan) 0 sont aussi distingueacutes des mores repreacutesenteacutees par

des kan(f 0 ce qui est L1ne abstraction de leacutetude cie la langue eacutecrite la langue parleacutee

Il nesl ras eacutevident que leacuteelillllc lcwenne caetclllcntla stluelure S) nwiquc de I~I langue ralmiddotke Ia languc japonaise el8ssique Je SI) le klllbllll en olile un eelllrie pal eeellcncc leacutecrilulC sc lilisanl dans joldle sYlitaique du chinois rouI ensuite ecirclle inlelpleacuteleacutee au eouls Je la ledule en lceonslruisanl lnrdre S) nlltliqlle JlIjaponais

83

ne les distinguant pas Avec une connaissance un peu plus profonde de la grammaire

eacuteleacutementaire du japonais on reconnaicirct de plus dans lalternance entre konji U (ou

katakona 0) et hiragano bull une structure syntaxique correspondant agrave la structure

thegraveme-comnientaire On constate ainsi dans lexemple que la transformation de

leacutecriture dans le scns de laugmentation des kotakono ne change pas la structure

syntaxique de la phrase ponctueacutee dune phrase agrave lautre de la mecircme faccedilon par les

hiragana bull le point et la virgule Les lectures speacutecifiques des signes eacutecrits renvoient

finalement de diverses maniegraveres agrave la prononciation de la langue padeacutee Telle est donc la

forme geacuteneacuterale du signe eacutecrit pris en son fondement qui contraste avec la torme plutocirct

vague de la langue parleacutee

Lobjet de eacutecriture japonaise la langue parleacutee usuelle est plus fluide et

eacutepheacutemegravere que son support eacutecrit qui tixe les paroles dans lespace et les fait perdurer

dans le temps Il peut ecirctre deacutecomposeacute pour chaque kanji ou groupe de konji en mots

morphegravemes ou phonegravemes repreacutesenteacutes et pour chaque kono en mOIes repreacutesenteacutees Il

peut aussi ecirctre saisi en un tout comme dans la repreacutesentation diagrammatique de la

structure syntaxique de la phrase et du texte Lobjet immeacutediat de leacutecriture japonaise

est la parole penseacutee ou entendue en langue japonaise La phrase-exemple peut ainsi

repreacutesenter une penseacutee immeacutediate du scripteur ou un eacutenonceacute entendu par ce dernier

Lobjet c1I1amiqlle est lideacutee vague que lon cherche agrave repreacutesenter en la preacutecisant dans

cette langue et ces phrases deacutetermineacutees mais qui pourrait ecirctre exprimeacutee autrement en

dautres phrases et dans dautres langues Cest la proposition logique du grammairien

sous-tendant vaguement la phrase-eemple inscrite par le scripteur

Linterpreacutetant clu signe eacutecrit japonais la langue eacutecrite est une forme davantage

contrainte que son objet car preacuteciseacutee par la repreacutesentation Linterpreacutetant ill1l1leacutediot

est le message transmis au lecteLll en langue japonaise Cest ce que le lecteur

comprencl effectivement cie la Poposition inscrite sur la teuille cIassertion La phraseshy

exemple est ainsi un eacutenonceacute de la grammaire qui permet au lecteur cie saisir certains

84

traits de la langue japonaise dans sa comparaison agrave la langue fi-anccedilaise Linterpreacutetant

c0mamiqlle est le processus deacutecriture et de lecture du signe sa traduction en parole et

en penseacutee Il ne sagit pas seulement dun processus psychologique et physique car

on peut aussi lanalyser logiquement en tant que processus seacutemiotique de construction

dune signification la seacutemiose Le scripteur et le lecteur sont conditionneacutes par la torme

de leacutecriture son fondement et le processus dinterpreacutetation du signe eacutecrit est donc

dirigeacute dans un certain sens il sactualise dune maniegravere deacutetermineacutee Linterpreacutetant

f7nal leffet viseacute est la compreacutehension du message japonais dorigine telle que deacutesireacutee

par le scripteur mais aussi par le lecteur Cest la signification deacutetermineacutee que la

repreacutesentation adeacutequate de lobjet construirait eacuteventuellement une proposition

logique speacutecifique dans le cas dune phrase ou une langue eacutecrite ideacuteale dans le cas de

la langue usuelle La proposition logique qui sous-tend la phrase-exemple lorsque

ideacutealement preacuteciseacutee en constituerait linterpreacutetant tlnal Le grammairien eacutenonccedilant

cette proposi tion en partagera it donc avec le seri pteu r et le lecteur la sign i lication

exacte dans un contexte similaire Ces demiers se feraient une repreacutesentation adeacutequate

de la proposition logique reacuteelle celle que le grammairien a lintention dexprimer

La prochaine eacutetape de lanalyse consiste agrave deacuteterminer quels types de signes

sont opeacuterants dans leacutecriture japonaise et dans le cas speacutecillque des kalakana qui nous

inteacuteresse Les signes de la langue parleacutee ou eacutecrite sont avant tout en leur fondement

des leacutegiigne car ils ont eacuteteacute institueacutes par convention explicitement ou non Les kani

et les kana tant ainsi lobjet de recommandations de la part du gouvernement japonais

les formes des kana ont eacuteteacute standardiseacutees et des listes de kani ont eacuteteacute publieacutees afin

den limiter le nombre communeacutement en usage Ces leacutegisignes se manifestent

actuellement en tant que sinsignes leurs occurences mateacuterielles Cependant dans leur

composition et par leur alternance au sein de la phrase les signes eacutecrits font ressortir

une certaine structure syntaxique et tOrll1ent en cela un diagramlle de la langue un

signe icon ique qu i epreacutesente son objet en vertu dune si 111 i lari teacute en tre les re lations de

sa propre tonne (son tondement) et les relations de la tonl1e de lobjet Leacutecriture

85

japonaise en tant que diagramme de la langue japonaise est donc un leacutegisigne iconique

rheacutematique Dans le cas de la phrase-exemple la diagrammaticiteacute du signe eacutecrit est

manifeste si lon considegravere la structure thegraveme-commentaire indiqueacutee par lalternance

des konji 0 (ou kotakono 0) et des hirogono bull La transformation de konji en

kotokono naffecte en rien laspect diagrammatique de leacutecriture pour autant que lon

sache diffeacuterencier les deux types de kano La distinction entre la premiegravere et la

seconde intention qui fonde cette diagrammaticiteacute est quand mecircme un peu embrouilleacutee

car les deux types de kono sont moins distincts entre eux dans leur forille graphique

et leur fonction repreacutesentative (moraiumlque et non morpheacutemique) quils ne le sont des

konji I~e passage du terme B gg nihongo agrave la particule conjonctive 0) no puis au

terme laquo-~ beeshikll dans le thegraveme B~gO)(-~)(Ij niJongo no beeshikll

blln Vo lillustre bien

Dun point de vue agrave la fois grammatical et graphique les termes de seconde

intention eacutecrits en hirogono tels que les particules les flexions et les marqueurs

dexistence en ponctuant la phrase et en rendant sa structure syntaxique manifeste

possegravedent un certain aspect indexical tels des leacutegisignes indexicollx rheacutematiqlles mais

en modalisant les relations logiques de la proposition de maniegravere plus fine quun

simple index qui ne fait quindiquer son objet ils jouent un rocircle davantage

conventionnel et se rapprochent en cela du leacutegisignc middot)YIIIJoiqlle rheacutel11otique Dans

lexemple la particule conjonctive 0) no de se fond syntaxiquement dans le thegraveme de

la premiegravere proposition la particule conjonctive tJ go mais unit les deux

propositions en exprimant un certain sentiment dopposition la distance syntaxique

entre les propositions devant tout de mecircme ecirctre souligneacutee par la virgule et la copule

Tt desli marque lexistence du rapport entre le terme quelle deacutetermine et le reste de

la plOposition selon un certain niveau de politesse tel un emballage rendant la

plOposition mieux preacutesentable La compreacutehension de la nuance que chacun de ces

termes apporte agrave la phrase demande une plus grande connaissance de la grammaire

86

japonaise quun simple index Seule la particule Ij ]la en theacutematisant le terme auquel

elle est adjointe cest-agrave-dire en le mettant agrave distance et en le pointant du doigt agit

principalement comme un index et constitue en cela un eacutegisignc indcxicol rheacutellloiquc

Les termes de premiegravere intention tels les noms et les bases connectives des verbes ou

des adjectifs sont quant agrave eux des leacutegisigncs ~Yl77b()liqucs rheacutel77oiqllcs plus

authentiques car cest peacutelr eux que la proposition acquiert sa compreacutehension fis

comportent neacuteanmoins un certain aspect indexical puisque cest eux qui ancrent la

proposition dans la reacutealiteacute eacutelctuelle La complexiteacute de leur forme grarhique en konji

compeacutelreacutee aux autres eacuteleacutements en kano rellegravete aussi sous un aspect iconique cette

fois limportance de leur cheacutelrge seacutemantique Ceci nous conlirme bien que les

symboles peuvent impliquer des index et des icocircnes et mecircme que les termes de

seconde intention eacutecrits en kanji participent de la sorte agrave la diagrammaticiteacute de

leacutecriture

Les konji et les kono en tant que graphegravemes abstraits de leur fonction

grammaticale se distinguent aussi dans leurs aspects seacutemiotiques Les konosont des

signes phoneacutetiques repreacutesentant des mores et sont donc de purs leacutegisignes

~ymb()liqucs rheacutemaiques Ils se lisent directement mecircme si lon ne comprend pas le

sens des mots ni de la ph rase Il nest pas neacutecessai re de les mettre en re lation avec

dautres signes dans le contexte de la phrase pour les lire Les kanji sont pour leur part

des signes plus complexes et leur composition interne est exploiteacutee afin de

reconstruire leur signification Ils peuvent ecirctre analyseacutes en eacuteleacutements plus petits

entretenant entre eux des relations signi liantes (des ensembles de traits ou de

radicaux) Ils constituent en cela des leacutegisigne~ ~Ylllb()liqllcS diccns bien que dans leur

fonction normale de repreacutesentation lorsquils sont immeacutediatement reconnus et

demeurent transparents leur aspect symbolique dominant reste lheacutematique Ces

leacutegi~igncs symholiqlles rheacutellCIiqllcl sont toutefois imparfaits car leur interpreacutetation

correcte neacutecessite une mise en contexte plusieurs lectures eacutetant possibles En tant que

rhegravemes ils deacuteterm inent linterpreacutetation en vertu de caractegraveres rlOpres agrave leur objet

87

relatifs au sens et au son des mots repreacutesenteacutes mais offrent plusieurs possibiliteacutes agrave

cet eacutegard et sont donc des signes lheacutematiques geacuteneacuteraux plutocirct que deacutetermineacutes

Laspect dicent secondaire mais pertinent agrave lanalyse des kon)i est perdu dans

leur trlIlsformation en kolokono alors quils se trouvent en quelque sorte aplanis (et

allongeacutes) Les kona de Z- J beeshiku basic ne sanalysent pas plus avant que

les mores quils repreacutesentent mais les kanji de ~$ kihon fondement ont chacun

plusieurs lectures possi bles qu i permettent den reeonstru ire le sens de Li iverses

maniegraveres par exemple ~ peut aussi se lire 171010 signifiant base et donnant entre

autres le verbe ~j lt IIIOloczukll baseacute sur tirant son origine de tandis que $ peut

eacutegalement se lire de la mecircme faccedilon molo origine tous autant dindices il la lecture et

la com preacutehension du mot ~$ Laspect rheacutematiq ue des kOlokono est cependant plus

eacutevident que pour les kunji la phoneacutetisation faisant plus directement reacutefeacuterence agrave son

objet la more

Leacutecriture mixte konji-kono est quant agrave elle le eacutegisigne vmboiqlle dicenl le

plus authentique du systegraveme Elle est composeacutee de quasi-propositions graphiques

(des dicisignes) qui donnent accegraves au sens de leurs objets des phrases de la langue

japonaise Les signes de leacutecriture mixte informent le lecteur et scripteur quant au son

et au sens il accorder aux termes par leur symboliciteacute lheacutematique et aux propositions

par leur diagral1lmaticiteacute Les sujets logiques dela quasi-proposition graphique

B~gO)~XIj~aUZC91J~ 75 A~gfjQ 1) AYA Y 1) -XC9o

sont les signes de premiegravere intention eacutecrits en kanji et en kolawno B ~~j ~

X l1~x 75A~~f QI)AYAYI)-X tandis que son preacutedicat logique

geacuteneacuteral est la relation repreacutesenteacutee par le diagramme de lalternance entre wnji kona et

ponctuation

DDOnOOooobullbullbull 00000000000000bullbull0

Il est rendu deacutetermineacute par les signes de seconde intention eacutecrits en hirogano 0)

88

r~r Ct IF f~r Ct Le preacutedicat logique ne change pas avec la

transformation en kalakona seuls les sujets logiques eacutetant aHecteacutes lancrage dans la

reacutealiteacute actuelle est moclaliseacute par de nouvelles fmmes speacutecifiques de leacutecriture aux

aspects seacutemiotiques diffeacuterents Ainsi la transformation de eacutecriture japonaise ne

change pas sa structure syntaxique mais bien son rapport agrave la langue usuelle et au

monde sa seacutemantique Nous comprenons eacutegalement agrave preacutesent que leacutecriture saisie en

diachronie dans sa transformation historique puisse constituer un argument une

quasi-proposition se transformant en une autre Les nuances seacutemantiques laissent

perdurer une certaine structure syntaxique qui se constitue par lhabitude en regravegle

syntaxique Une certaine tendance eacutevolutive dans le sens de la phoneacutetisation de

leacutecriture peut aussi ecirctre perccedilue dun autre point de vue Lexamen pl us appro fond i de

ces arguments sera le propre de 111 critique logique

Lanalyse logique critique de leacutecriture japonaise cherche agrave deacuteterminer jusquagrave

quel point le signe eacutecrit constitue une repreacutesentation adeacutequate de son objet cest-agraveshy

dire de la langue japonaise et du langage logique qui lui est sous-jacent Elle critique

liumlnformation veacutehiculeacutee par le signe et ne soccupe donc que des signes qui informent

tels que les leacutegisignes symboles dicisignes et arguments Lmiddoteacutecriture au premier abord

ne montre pas de faccedilon explicite quel est son interpreacutetant final et elle ne semble donc

pas un argument mais lanalyse seacutemiotique en a distingueacute au niveau de la grammaire

speacuteculative des aspects informati fs tout signe eacutecrit est en son fondement un leacutegisigne

et peut ecirctre dans son rapport agrave lobjet un symbole et dans son rapport agrave

liumlnterpreacutetant un dicisigne Toutefois eacutegalement dans sa transformation historique

reacutecriture constitue bien un argument implicite que lanalyse critique classera selon les

types diumlnfeacuterence et dont elle jugera de la validiteacute Il sagit donc de critiquer chaque

type de signe informatif distingueacute dans leacutecriture japonaise et de voir si la

transformation de eacutecri ture dans le sens de augmentation des kaloko1o la rend pl us

apte agrave repreacutesenter son objet la langue japonaise usuelle La comparaison avec les

sera ici utile faisant contraster les objets et buts speacutecifiques cie chaque eacutecriture

89

Le but principal de leacutecriture japonaise est de transmettre le message en langue

japonaise le plus fidegravelement possible afin de permettre la communication effective de

l information du scri pteu l au lecteur Le signe eacutecrit do i t pour cela tendre agrave la

transparence il ne doit pas se man ifester pour lu i-mecircme mais seulement pou l son

objet La notation des p$ cependant a pour fonction plincipale de permettre

lanalyse logique par le retour reacuteflexif sur le signe et la critique subseacutequente La

logique qui est sous-jacente agrave sa repreacutesentation graphique est tout aussi fondamentale

que celle que le logicien tente de deacutecouvrir dans dautres pheacutenomegravenes Lanalyse de la

notation partic ipe donc agrave janalyse logique quelle su pporte Les signes de leacutecriture

japonaise et des graphes existentiels lepreacutesentent-ils leur objet de maniegravere adeacutequate

Forceacutement ces signes sont contraints par la forme de leur tondement et ne peuvent

sidentitier parfaitement agrave leur objet Mais ils visent un certain but et sils permettent

de latteindre alors on peut consideacuterer quils constituent des repreacutesentations

adeacutequates de leur objet Ladeacutequation de la repreacutesentation est relative agrave leffet viseacute Le

but du signe est son interpreacutetant final le processus qui megravene au nouveau signe son

interpreacutetant dynamique et le nouveau signe effectivement produit linterpreacutetant

immeacutediat Lanalyse logique critique doit eacutevaluer ladeacutequation de linterpreacutetant

immeacutediat agrave son objet en vertu de linterpreacutetant final La consideacuteration de linterpreacutetant

dynamique permet quant agrave elle de comprendre comment sopegravere cette mise en relation

Dans le cas des graphes existentiels lanalyse portera sur le vocabulaire

eacuteleacutementaire de la notation Le vocabulaire eacuteleacutementaire des 5 en leur partie Seta est

composeacute de symboles de sujets de la coupure (symbolique) de la ligne didentiteacute

(iconique) et implicitement de la juxtaposition La symboliciteacute des sujets et de la

coupure de mecircme que liumlconiciteacute de la ligne didentiteacute sont-elles les aspects

seacutemiotiques les plus appmprieacutes agrave fagraveire ressoltil lors de la repreacutesentation de la logique

des propositions analyseacutees Les sujets logiques sont des index des termes agrave la

signification deacutetermineacutee qui ancrent la proposition dans la reacutealiteacute actuelle Les signes

repreacutesentant ces sujets seraient donc ideacutealement des index ou plus exactement des

90

leacutegisignes indexicaux lheacutematiques Peirce donne le plus souvent dans ses exemples de

graphes des sujets tels que laquoest un hommeraquo et laquoest mortelraquo (CP 4407 1903) donc

des leacutegisignes symboliques lheacutematiques mais larcheacutetype du sujet logique en tant que

leacutegisigne indexical lheacutematique serait plutocirct un pronom deacutemonstratif tel que laquoceciraquo ou

laquocelaraquo ou mecircme une simple lettre de lalphabet telle quutiliseacutee dans la notation de la

logique formelle contemporaine (les exemples de graphes donneacutes dans la

correspondance agrave Lady Welby utilisent de telles lettres cf SampS 94-130 J909)

Lillustration commune par des symboles nest donc pas la plus adeacutequate mais

poursuit sans doute un but peacutedagogique secondaire agrave lanalyse du raisonnement

proprement dite et rend agrave cet effet la notation plus familiegravere cn utilisant des mots de la

langue usuelle Lemploi plus technique des lettres de lalphabet est cependant tout agrave

fagraveit apte agrave repreacutesenter les sujets logiques en leur caractegravere essentiel dindex La

neacutegation est quant agrave elle une cateacutegorie particuliegravere de la qualiteacute et la neacutegation logique

modalise donc la qualiteacute dun terme ou dune proposition Son signe serait ideacutealement

un leacutegisigne iconique lheacutematique La coupure est suggestive de cette modalisation

ma is ne lopegravele pas sans une cOllVention exp 1ic ite son 1ien avec la neacutegation restant

contingent Un changement de couleur des signes nieacutes aurait peut-ecirctre eacuteteacute plus

adeacutequat La coupure permet cependant la lecture endoporeutique de lexteacuterieur vers

linteacuterieur du graphe une convention fagravecilitant linterpreacutetation La relation didentiteacute

constituant le preacutedicat geacuteneacuteral de la proposition est finalement lexpression la plus

simple de lessence de la proposition Son signe le plus adeacutequat serait donc une icocircne

la plus authentique possible La ligne didentiteacute par la continuiteacute de son trait reliant

les symboles de sujets est un signe iconique lheacutematique des plus adeacutequats dans le

cadre dune analyse logique neacutecessitant lemploi dune notation conventionnelle en

son fondement un leacutegisigne La ligne didentiteacute est de la sorte un leacutegisigne iconique

lheacutematique le pJus approprieacute des signes vu les contraintes formelles imposeacutees par le

type de notation servant il lanalyse du raisonnement Les graphes existentiels font

donc ressortir dans la composition graphique de leurs signes explicites la structure

logique des propositions et arguments quils repreacutesentent en exploitant divers aspects

91

seacutemiotiques du signe qui correspondent aux divers aspects de la reacutealiteacute

Dans le cas de leacutecritule japonaise lanalyse portera sur les principaux signes

distingueacutes dans lexamen de la grammaire speacuteculative soit leacutecriture mixte konji-kona

et largument de la transformation en kalakano La quasi-proposition graphique de

leacutecriture mixte est com poseacutee de sujets logiques et dun preacuted icat logique geacuteneacuteral Les

sujets logiques sont comme dans lesif des index et leurs signes ideacuteaux dans une

repreacutesentation conventionnelle servant agrave lanalyse du raisonnement seraient des

leacutegisignes indexicaux rheacutematiques Mais le but de leacutecriture japonaise est de

repreacutesenter une langue usuelle servant avant tout agrave la communication effective entre

interlocuteurs et les leacutegisignes symboliques lheacutematiques que sont les kanji el

kalakana repreacutesentant les sujets logiques de leacutecriture jouent convenablement leur

rocircle ils ancrent la proposition dans une langue conventionnelle et non seulement dans

le monde actuel Les konji sont mecircme agrave ce sujet un peu plus approprieacutes que les

kalokana car ils tendent agrave la symboliciteacute dicente leur interpreacutetation interne ou en

contexte eacutetant plus complexe tandis que les kana tendent agrave lindexicaliteacute rheacutematique

indiquant chacun tel son deacutetermineacute Dans un contexte sociolinguistique ougrave la

connaissance de la convention de leacutecriture tagraveit deacutetagraveut les kOlokono sont cependant

preacutefeumlrables un but diffeacuterent daccessibiliteacute agrave Jinformation eacutetant alors poursuivi Le

preacutedic8t logique geacuteneacuteral repreacutesenteacute par leacutecriture mixte est pour sa part la syntaxe de la

langue japonaise lorganisation des relations logiques propre agrave cette langue Le

diagramme un sous-type de leacutegisigne iconique rheacutematique en est le type de signe

ideacuteal relleacutetant en son fondement la structure relationnelle propre agrave la syntaxe Le

diagramme de lalternance entre types deacutecriture en indiquant la structure

fondamentale thegraveme-commentaire est un signe de la syntaxe japonaise des plus

adeacutequats Il est quelque peu embrouilleacute par lutilisation des hiragafo dans la

structuration interne et non seulement externe du thegraveme et du commentaire mais Ilen

demeure pas moins un signe explicite de la syntaxe japonaise dans son ensemble

Leacutecriture mixte par le jeu entre ses deux composantes logiques repreacutesente donc

92

adeacutequatement la nature propositionnelle de la langue japonaise

Les transformations actuelles de leacutecriture japonaise preacutesentent un certain

aspect argumentatif Lobjet de cet argument est le contact des langues auquel est

actuellement sujette la langue japonaise Lassimilation de mots eacutetrangers principal

effet du contact des langues ne moditiumle pas la structure syntaxique fondamentale de la

langue mais change bien la coloration le ton la nLiance de ses termes un certain

aspect qualitatif de la langue est transformeacute La langue japonaise en tant que signe

deacuteterm ine son interpreacutetant en vertu de nouvelles quai iteacutes prem iegraveres de son fondement

la forme des mots dorigine eacutetrangegravere assimileacutes Sa rheacutematiciteacute est donc affecteacutee La

repreacutesentation de ces mots par des katakal10 et laugmentation sign ifiumlcative du nom bre

de katakano dans le texte japonais sont un signe adeacutequat de la transformation de la

langue japona ise Les katokana otfren t un aspect qua 1itatif d i lteumlrent de cel uides konji

qui transforme la rheacutematiciteacute des termes de la quasi-proposition En quoi consiste

largument Largument de la transformation actuelle de leacutecriture japonaise est L1ne

infeacuterence deacuteductive dont la regravegle reste implicite Cette regravegle eacutenonceacutee de faccedilon geacuteneacuterale

est que si seuls les sujets logiques de la quasi-proposition sont moditiumleacutes et non son

preacutedicat logique geacuteneacuteral alors la structure fondamentale de la langue japonaise reste la

mecircme car cest la relation didentiteacute du preacutedicat qui fonde sa syntaxe Eacutenonceacutee de

maniegravere speacutecifique agrave leacutecriture japonaise cette regravegle devient si seuls les leacutegisignes

symboliques lheacutematiques des termes de premiegravere intention sujets de la quasishy

propos i tion sont mod i fieacutes alors le diagramme fondamenta 1 de leacutecriture le preacuted icat

geacuteneacuteral reste le mecircme Le cas actuel observeacute est une transformation de la rheacutematiciteacute

des termes de premiegravere intention cie leacutecriture japonaise Le reacutesultat perccedilu agrave travers la

diachronie est que le diagramme de leacutecriture reste le mecircme de mecircme que la syntaxe

de la langue Nous pouvons tiumlnalement illustrer et reacutesumer largument de la maniegravere

suivante

93

B~~(J)~9It~~9T9tlmiddot 77- z~~It1J I)zz Y 1) -9T90

B~~(J) 1(- IJ 91t--j- - YT9tJ 77- z~~lt IJ 1) z z 1) -YT90

000000000bullbullbull 00000000000000bullbull0

0000000000000bullbullbull OOUOOOOOOOOOOObullbullo

Regravegle-Si seule la rheacutematiciteacute cles termes de premiegravere intention de leacutecriture

japonaise est modifieacutee alors son diagramme reste le mecircme

Cas-Seule la rheacutematiciteacute des termes cie premiegravere intention cie leacutecriture japonaise

est Illodi fieacutee

Reacutesultat-Le diagramme de leacutecriture japonaise reste le mecircme

223 Critique de lanalyse seacutemiotique

Le retour reacuteflexif et critique sur lanalyse seacutemiotique permettra agrave preacutesent de

mieux saisir les aspects eacutepisteacutemologiques de Iapplication de la theacuteorie seacutemiotique agrave

leacutetude de Ieacutecriture La reacuteflexion sera eacutelaboreacutee agrave partir des cateacutegories particuliegraveres de la

signification et de la modaliteacute et permettra de juger du bien-fondeacute de lapplication de la

seacutemiotique Le retour se fera dabord sur la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe

eacutelaboreacutee puis sur lapplication speacutecifique agrave leacutecriture japonaise et le problegraveme de sa

transformation actuelle Jexaminerai plus speacutecifiquement les concepts et les types

dinfeumlrence utiliseacutes en deacutefinissant les concepts philosophiques de la seacutemiotique et les

concepts idioscopiques de la linguistique et en deacuteterminant comment seffectue la

transformation dun type de concept en Iautre Je ferai ainsi ressortir Iargument qui

justifie le passage de la seacutemiotique agrave la science de jeacutecriture

Les concepts philosophiques de la seacutemiotique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant de normes au raisonnement Prenons par exemple les concepts seacutemiotiques de

fondelllent en tant que constituant du signe et de diogrUlllllle en tant que type de signe

Ces deux concepts reacutefegraverent agrave une certaine structure de la reacutealiteacute que la seacutemiotique

94

philosophique cherche il repreacutesenter Ce sont des concepts philosophiques en ce

quils sappliquent agrave lexpeacuterience commune de la reacutealiteacute actuelle Ce sont aussi des

concepts seacutemiotiques en ce quils sappliquent plus speacutecifiquement agrave la penseacutee qui se

deacuteveloppe de signe en signe Ils servent finalement de normes au raisonnement en ce

quils constituent des principes directeurs pour toute reacuteflexion systeacutematiquement

ulteacuterieure SUI les lepreacutesentations neacutecessaires de la reacutealiteacute propres agrave la science Le

fondement repreacutesente ainsi un eacuteleacutement de la structure du signe laspect selon lequel le

signe en soi deacuteterm ine la repreacutesentation que lon se doit de consideacuterer dans toute

repreacutesentation adeacutequate de la reacutealiteacute Le diagramme en repreacutesentant un type de signe

rend quant agrave lui explicite laspect selon lequel le signe repreacutesente un ensemble de

re lat ions reacuteelles ce que lon se doit eacutegalement de consideacuterer dans la repreacutesentation

particuliegravere de la reacutealiteacute en vertu des relations propres agrave un objet La seacutemiotique

inaugure donc le mouvement reacuteflexif et critique de la penseacutee qui fait alors retour sur

ses propres repreacutesentations et sert en cela de fondement agrave toute repreacutesentation

scientifique Le concept seacutemiotique exprime de la sorte une relation possible en voie

dactualisation dans la repreacutesentation dun objet reacuteel par son signe

Les concepts idioscopiques de la linguistique sont des concepts geacuteneacuteraux

servant agrave la classification des langues et de leurs eacuteleacutements En classifiant des

propositions qui peuvent se constituer en arguments la linguistique tend aussi agrave

repreacutesenter les lois du langage Par exemple les regravegles grammaticales sont des

propositions pouvant composer des arguments dune theacuteorie de la syntaxe Ces regravegles

lorsque duumlment justifieacutees par les 8rguments quelles composent deviennent

effectivement des lois de la langue il laquelle elles sappliquent Les regravegles

grammaticales ordinaires sont cependant des propositions constitutives dune theacuteorie

linguistique construite par le bas il partir des donneacutees factuelles accumuleacutees dans les

recherches de cette science idioscopique attacheacutee agrave lobservation des fagraveits propres aux

langues speacutecifiques Les concepts linguistiques qui nous inteacuteressent sont plutocirct ceux

deacuteriveacutes de la seacutemiotique tels queacutelaboreacutes dans lanalyse de leacutecriture des sections

95

preacuteceacutedentes Prenons ainsi pour exemple les concepts defocircndelJent de leacutecriture tel

que deacuteveloppeacute dans la theacuteorie geacuteneacuterale de leacutecriture comme signe el de diogroJJJJI1e de

eacutecriture tel que deacuteveloppeacute dans lanalyse de leacutecriture japonaise et de ses

transformations actuelles Ces concepts eacutelaboreacutes agrave partir de la seacutemiotique rentrent euxshy

mecircmes dans la composition dune theacuteorie de la syntaxe et de la seacutemantique graphiques

de leacutecriture Le fondement de leacutecriture est la forme speacutecifique dun signe deacutetermineacute

leacutecriture qui deacutetermine la repreacutesentation de la reacutealiteacute par ce signe Le concept

linguistique de fondement de leacutecriture est donc agrave la fois mieux deacutelinIcirc el plus geacuteneacuteral

que le concept seacutemiotique de fondement tout court car sa compreacutehension et son

extension sont preacuteciseacutees il ne sagit plus du signe mais de leacutecriture un ensemble

speacutecifique de signes comprenant toutefois plusieurs types deacutecriture eux-mecircmes

deacutefinissables plus avant Le diagramme de leacutecriture est de la mecircme faccedilon un aspect de

lo~jet reacuteel plus preacutecis de fa langue rendu explicite par leacutecriture dont plusieurs

langues et eacutecritures peuvent cependant ofTrir des formes diffeumlrentes Les sciences

idioscopiques achegravevent donc le mouvement reacuteflexif de la penseacutee en le faisant porter

dans un retour pragmatique sur des objets speacutecifiques de la reacutealiteacute actuelle dont la

consideacuteration megravenera ultimement agrave certaines conduites controcircleacutees par la raison Le

concept idioscopique exprime ainsi une relation neacutecessaire entre la repreacutesentation et la

reacutealiteacute repreacutesenteacutee une loi de la nature ou du deacuteveloppement naturel de lactiviteacute

humaine

Leacutepisteacutemologie suite agrave la distinction et la deacutefinition des dif1eumlrents types de

concepts geacuteneacuteraux peut aussi effectuer un retour critique sur la transtormation de

certains concepts en autres concepts tel que leffectue la logique crilique au sujet des

signes infonnatifs Lobjet seacutemiotique plus preacutecis de leacutepisteacutemologie est la

connaissance qui est deacutetlnie classiquement comme une croyance vraie justifieacutee Cette

croyance est une proposition constitueacutee de rhegravemes Elle est consideacutereacutee vraie lorsque

les sujets de ces rhegravemes reacuteduits agrave la relation didentiteacute fondamentale de mecircme que la

structure repreacutesenteacutee par ces rhegravemes en tant que preacutedicats geacuteneacuteraux saccordent avec

96

la reacutealiteacute actuelle Elle est de plus justifieacutee par un argument qui la relie logiquement agrave

dautres propositions vraies lui donnant de la sorte des points dancrage

suppleacutementaires dans la reacutealiteacute actuelle qui viennent assurer sa propre adeacutequation au

reacuteel Quel est largument qui justifie la transformation des concepts seacutemiotiques en

concepts linguistiques Le principal type diumlnfeumllence par lequel les concepts

philosophiques de la seacutemiotique sont transformeacutes en concepts idioscopiques de la

linguistique est la deacuteduction Dans le cas du diagramme par exemple largument

deacuteductifspeacutecifique qui justifie son application agrave Ieacutecriture prend pour regravegle le principe

directeur de la seacutemiotique suivant si un signe entretient sous un celtain aspect avec

son objet une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lobjet et au signe

alors ce signe est un diagramme Le cas auquel il sapplique est le fagraveit constateacute que

leacutecriture est un signe qui sous un certain aspect entretient avec son objet speacutecifique

la langue usuelle une relation de similitude en vertu de relations propres agrave lui-mecircme et

agrave ce dernier Le reacutesultat en est que dans la reacutellexion du linguiste sur la repreacutesentation

de lobjet reacuteel de la langue usuelle quest leacutecriture ce dernier signe est interpreacuteteacute

comme un diagramme La seacutemiotique fournit de la sorte une regravegle agrave linterpreacutetation

dun cas speacuteci1ique de la linguistique interpreacutetation qui produit un concept

linguistique Les concepts seacutemiotiques sont donc des termes de la proposition servant

de regravegles qui sont repris dans une version plus preacutecise et geacuteneacuteralisable agrave un ensemble

dobjets actuels en tan t que conce pts id ioscop iq ues L infeumlrence effectueacutee nest pas

en cela une simple deacuteduction mais un type diumln1eumlrence deacuteductive plus preacutecis

comprenant un certain aspect abductir la speacutecification (descent) du concept de

diagramme La peacutecJjicoioJ1 est un type diumlnfeacuterence qui augmente la compreacutehension

dun concept tout en en diminuant lextension et augmente globalement linformation

veacutehiculeacutee (sa parI abductive) Cest agrave la fois une deacutetermination (augmentation de la

compreacutehension) et une restriction (diminution de lextension) (CP 2422-29 1867

1893) Dans le cas de la transformation du concept de diagramme un nouveau concept

est produit le diagramme de leacutecriture suite agrave une augmentation de la compreacutehension

lacquisition de la qualiteacute deacutecriture et une diminution de lextension du concept la

97

limitation aux seuls signes eacutecrits Largument peut finalement ecirctre scheacutematiseacute de la

fagraveccedilon suivante

Regravegle-Si un signe entretien avec son objet une relation de similitude en vertu de

relations propres agrave lobjet et au signe alors ce signe est un c1iagreacutellnme

CilS speacutecitique-Leacutecriture est un signe qui entretien avec son objet la langue

usuelle une relation ck similitude en vertu de reliltions propres agrave lui-mecircme e

agrave ce dernier

Reacutesultill-Leacutecriture est un diagramme de la langue usuelle

Le dernier moment de la reacuteflexion dordre eacutepisteacutemologique est liumlnterpreacutetation

geacuteneacuterale de largument distingueacute replaccedilant ce dernier clans lensemble du systegraveme

peirceacuteen et allant dans le sens du pragmatisme Les concepts seacutemiotiques ont eacuteteacute dits

fonder la reacuteflexion systeacutematiquement ulteacuterieure sur les repreacutesentations de la science

mais le systegraveme peirceacuteen renvoie en fait agrave toute une ontologie Chaque niveau du

systegraveme est caracteacuteriseacute par un ensemble de cateacutegories qui speacuteci fient le point de vLle

que ce premier prend sur la reacutealiteacute La transformation des concepts scientifiques

correspond donc agrave un changement de niveau ontologique ainsi les concepts

seacutem iotiq ues extra its de leur si tuation particul iegravere au se in des sc iences ph i losoph iques

normatives ont-ils eacuteteacute appliqueacutes agrave leacutetude de leacutecriture une science idioscopique

psychique La reacuteflexion agrave ce sujet seffectuant par les signes du langage on se rend

aussi compte que le point de vue seacutemiotique sur lactiviteacute scientifique implique quau

langage soit confeacutereacute un statut particulier parmi les objets constituant la reacutealiteacute le

langage occupe plusieurs niveaux de la reacutealiteacute et permet de passer dun niveau agrave

lautre Ce serait son aspect meacutediateur en tant que signe triadique qui ressortirait ici et

le caracteacuteriserait avant tout

En quoi la reacuteflexion eacutepisteacutemologique sappuie-t-elle sur la doctrine du

pragmatisme Leacutepisteacutemologie est une science meacutetaphysique faisant retour sur les

connaissances deacuteveloppeacutees par le raisonnement Le pragmatisme est quant agrave lui une

doctrine de la meacutethodeutique science anteacutelieule agrave la meacutetaphysique et ayant des

98

conseacutequences sur cette dell1iegravere La conseacutequence la plus proprement eacutepisteacutemologique

est le faillibilisme ou plus geacuteneacuteralement le sens commun critique Nous reconnaicirctrons

ces conseacutequences du pragmatisme en mettant en lien deux aspects de la transformation

des signes constateacutes dans la critique logique et la critique eacutepisteacutemologique Dans

lana lyse logique critiq ue nous avons pu remarquer 1iuml mportance de certains types de

signe du point de vue de la seacutemiose Un signe qui ne nous inlorme pas qui ne

deacuteveloppe pas son aspect de Troisiegravemeteacute ne nous affectera que momentaneacutement en

tant que Deuxiegraveme ou inconsciemment en tant que Premier ce sont donc les signes

informatifs et ultimement les arguments qui nous affectent le plus en prenant controcircle

de notre vie et de notre monde comme repreacutesentation Cependant les arguments se

deacuteveloppent et sajustent selon que la contiontation avec la reacutealiteacute actuelle vienne les

confirmer ou non En faisant ressortir cet aspect de la seacutemiose la critique logique vient

fonder le faillibilisme Dans la critique eacutepisteacutemologique nOLIs avons aussi vu que les

concepts se deacuteveloppent systeacutematiquement dans le sens du retour sur la reacutealiteacute

actuelle en tant que principes directeurs de repreacutesentations deacutetermineacutees cie la reacutealiteacute

puis densembles de repreacutesentations speacutecifiques Cette constatation est baseacutee sur des

principes de la logique la deacuteduction et plus preacuteciseacutement la speacutecification rendus

explicites par la critique logique Le principe du pragmatisme est donc opeacuterant dun

point de vue eacutepisteacutemologique dans le deacuteveloppement de la connaissance au sein du

systegraveme des sciences mais se fonde sur une logique deacutegageacutee par lanalyse seacutemiotique

Finalement lanalyse seacutemiotique ne nous a pas fait deacutecouvrir la structure logique de la

langue que la grammaire distinguait deacutejagrave dans son travail de reacutellexion theacuteorique agrave partir

de donneacutees lagravectuelles mais a permis en explicitant les principes directeurs de la

repreacutesentation par signes de fonder lanalyse grammaticale et de rendre ses

explications plus claires moins opaques plus conformes agrave leur objet Cest ce que la

critique eacutepisteacutemologique nous fait constater

Conclusion

Lapplication de la seacutemiotique philosophique agrave leacutetude de leacutecriture est

leacutegitimeacutee par une certaine logique de la transformation des concepts au moyen dune

inrerence valide qui prend la forme dClrguments speacutecifiques Cette application sous

son aspect logique se 10nde donc sur la seacutem iotique en tant que science normative

donnant les principes directeurs du raisonnement La seacutemiotique se base quant agrave elle

sur la phaneacuteroscopie qui lui tournit agrave son tour les cateacutegories universelles et

particuliegraveres de lexpeacuterience repreacutesentant la structure de la reacutealiteacute et permettant

deacutelaborer la reacuterlexion sur les r-ormes geacuteneacuterales de la reacutealiteacute que sont les signes Le

deacuteveloppement des cateacutegories et plus preacuteciseacutement des signes suit de plus un certain

ordre dont le but viseacute du retour sur la reacutealiteacute actuelle atin de reacutealiser ladeacutequation

entre la raison individuelle et le monde est rendu explicite par un mouvement

reacutetrospectif dans le principe du prClgmatisme Ladeacutequation de la raison au reacuteel est le

motif mecircme de lapproche seacutemiotique de leacutecriture qui a pour but de rendre les

repreacutesentations de la science idioscopique de leacutecriture plus conronnes agrave la structure

reacuteelle du langage repreacutesenteacute

Linterpreacutetation de la philosophie peirceacuteenne et son application agrave leacutetude de

leacutecriture proposeacutees dans ce meacutemoire possegravedent quelques particulariteacutes les

deacutemarquallt de lexeacutegegravese traditionnelle Tout dabord la meacutethodeutique (le

pragmatisme) et la meacutetaphys iq ue on t eacuteteacute preacutesenteacutees en prem ier alors quelles son t

toutes deux les derniegraveres sciences (Troisiegravemes) de leurs branches respectives alin de

donner degraves le deacutepart le but viseacute des sciences philosophiques dans le premier chapitre

qui repreacutesente somme toute un exposeacute reacutetrospectif du systegraveme peirceacuteen Lexposeacute de

la phaneacuteroscopie a ensuite eacuteteacute eacutelClboreacute en preacutesentant non seulement les cateacutegories

universelles mais aussi les cateacutegories particuliegraveres comme r-ondamentales agrave la penseacutee

peirceacuteenne en mettant toutefois laccent sur les cateacutegories particuliegraveres de la modaliteacute

et de la signirication Lexposeacute suivant de la seacutemiotique ne sest pas de la mecircme faccedilon

100

limiteacute agrave la preacutesentation de la grammaire speacuteculative mais sest eacutetendu jusquagrave la

logique critique pour faire finalement retour sur la doctrine du pragmatisme preacutesenteacutee

en deacutebut de chapitre La notation logique des graphes existentiels a quant agrave elle servi

dexemple privileacutegieacute dun systegraveme deacutecriture deacuteveloppeacute agrave partir des principes de la

seacutemiotique

Lapplication agrave leacutetude de leacutecriture et au cas speacutecifique de leacutecriture japonaise

a permis au second chapitre de deacuteterminer la porteacutee de la seacutemiotique philosophique

sur une science idioscopique plus preacutecise Le motif structurant de lexposeacute a plutocirct

eacuteteacute dans ce chapitre de partir agrave chaque fois dun exemple lagravemilier les theacuteories

linguistiques de leacutecriture japonaise et la graml11airejaponaise pour ensuite deacutevelopper

lanalyse seacutemiotique Lapproche seacutemiotique a permis entre autres de formuler une

interpreacutetation originale de la structure syntaxique eacuteleacutementaire de la langue japonaise et

de la fonction signifiante de son eacutecriture La reacuteflexion eacutepisteacutemologique a finalement

permis deffectuer un retour critique et global sur lapplication quelle a justifieacutee en

faisant ressortir largument par lequel seffectue le passage dun type cie concept agrave un

autre La critique eacutepisteacutemologique a eacutegalement permis une premiegravere ouverture

meacutetaphysique de Janalyse seacutemiotique par le retour reacutellexif sur cette derniegravere

Jaimerais suggeacuterer en conclusion de ce meacutemoire deux autres pistes permettant

douvrir lana lyse seacutem iotiq ue plus avant mais cette fois-ci au se in des sciences

normatives du systegraveme peirceacuteen soit celles de leacutethique et de lestheacutetique

Deux ouvertlires eacutethiq1le et estheacutetiq1le

Peirce a peu eacutecrit sur leacutethique et lestheacutetique maIs on retrouve dans son

œuvre plusieurs passages qui permettent de reconstruire agrave peu pregraves sa penseacutee agrave ce

sujet Dans le domaine de leacutethique Peirce suit avant tout la tradition kantienne qui

met laccent sur lautonomie du sujet moral et limportance du devoir Il fonde de plus

101

leacutethique sur lestheacutetique tel que nous lavons vu dans la preacutesentation du systegraveme des

sciences La maicirctrise de soi est lultime moment eacutethique de la vie et son but doit ecirctre

de rendre cette vie belle et admirable La libre volonteacute est elle-mecircme dirigeacutee vers ce but

propre et rien dautre si ce nest que par deacuterivation (une rdlexion cie Peirce explicite agrave

ce sujet dans une lettre agrave Lady Welby en SampS 112 1909)

Quel lien peut entretenir la theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture japonaise avec

leacutethique La theacuteorie seacutemiotique de leacutecriture pourrait ici fonder le retour pragmatiste

de la raison sur une dimension eacutethique plus vaste cie la reacutealiteacute actuelle le controcircle clu

deacuteveloppement de la culture En comprenant mieux les eHets cles transformations

actuelles de leacutecriture dun point de vue seacutemiotique on serait plus apte agrave juger du

bien-fondeacute dune intervention normative agrave ce sujet et on pourrait ainsi fonder une

veacuteritable politique de leacutecriture Peirce lui-mecircme a reacutefleacutechi agrave un problegraveme analogue agrave la

transformation de leacutecriture dans le sens de laugmentation des kalakana soit la

reacuteforme de lorthographe anglaise dans le sens de sa phoneacutetisation Il eacutetait sur ce point

plutocirct conservateur sont motif eacutetant en cela cie sauver lltltesprit)) de la langue anglaise

le monde de signification auquel participe et que fonde dun cel1ain point de vue non

neacutegligeable lorthographe de la langue anglaise Cette position est illustreacutee dans la

citation suivante qui pourrait servir cie leccedilon agrave une reacutellexion ulteacuterieure sur le cas de

leacutecriture japonaise et sa reacuteforme

1 remember in Rome in 1870 lt111 Egyptian obelisk covered Vitll hieroglyphics

surmounted by a gilt cross and resting on eacutel base Vith eacuteln inscription of Trsjltln This

monument pleased me greeacuteltly as eacuteln epitome o~ Rome Probably ere tllis tlle cross

Ilas been removed by tllose wllom it seemecl barbmously unllistoriceacutell They were

unconscious theacutelt il WeacutelS their own proceeding thsl wss barbmously oblivious of

Ilistory But 1 woulcl not have il restored for its removal bespeaks the spirit of s

new historicsl phase or the eternal city English spelling is like Rome it is a

historical composite of the most heterogeneous elements Il is onen absurcl but

that very absurclity is of value to us To raze Rome and have it rebuilt by Cl

Chazago architect would be less detrimental to the higher interests of the human

race than to reform English spclling sa as ta Illake it ljuite phanetic The one

102

would not only do terrible violence ta our sentiments but woulcL [no doubt alleet

the lesthetic development of the worlcl But even this would not be sa bacl as ta

deprive English-writing thought-we will not say of its clolhing for that would be a

most inaclequate meta phare Ta attem pt ta revo 1ution ize Engl ish spell ing whi le

leaving Anglo-saxon thought intact would be like trying ta burn up the cellulose of

the rose while leaving its color ancl beauty ancl significance (MS 1181 laquoThe

Eclitors Manual English Spellingraquo c 1886-9 1901)

Lestheacutetique agrave son tour ne consiste pas en une pure contemplation de la

Premiegravereteacute car il sagit dune science posseacutedant une part importante de Troisiegravemeteacute

un certain type de raisonnement neacutecessaire De toute faccedilon en tant quactiviteacute

humaine il sagit aussi dun type dexpression prenant le point de vue du phaneacuteron

sur lui-mecircme et ses trois aspects fondamentaux omnipreacutesents et irreacuteductibles Le

jugement estheacutetique consiste en un retour agrave un certain degreacute de Premiegravereteacute mais reste

en tant que repreacutesentation de la reacutealiteacute toujours soumis agrave lineacutevitable triadiciteacute du

monde phaneacuteronique De ce point de vue la calligraphie lun des arts majeurs de la

culture japonaise bien quelle tend le plus souvent agrave reacutegresser agrave un stade qualitatif

plus eacuteleacutementaire nen reste pas moins un art de leacutecriture un produit de la culture et

de son mode conventionnel dexpression Seulement lart de la calligraphie donne un

point de vue qualitatif sur le phaneacuteron et se distingue en cela de la science de

lestheacutetique qui tend agrave interpreacuteter rationnellement le pheacutenomegravene de la contem p lation

des qualiteacutes La reacuteflexion suivante de Peirce rend explicite cette cleacute de la

com preacutehens ion de lart

and ignorant as 1 am of Art 1 have a lair share of capacity for esthetic

enjoyment and it seems ta me that while in esthetic cnjoymenl we attend ta the

totality of Feeling-ancl especially to the totll resultanl Quality of Feeling

presentecl in the work of art we are contemplating-yet it is a sort of intellectual

sympathy a sense thal here is a feeling that one can comprehencl a reasolleacutelble

feeling 1 do not succeed in saying exactly what it is but it is a consciousness

belongi ng to the category a l Representa tion though representi ng someth ing in the

Category of Quality of Feeling (EP2 190 1903)

103

Ainsi Ianalyse seacutemiotique en plus de sensibiliser aux diverses perspectives

du signe eacutecrit peut eacutegalement souvrir aux multiples dimensions du phaneacuteron ce qui

est sans aucun doute la plus importante marque attestant du caractegravere philosophique

de la seacutemiotique peirceacuteenne De mecircme que pour les conceptions universelles qui bien

quelles ne puissent ecirctre davantage analyseacutees en soi le sont toujours dans leur mise en

relation contextuelle (ce qui serait selon Peirce lune des leccedilons essentielles de la

logique des relations EP2 219 1903) lorsque lanalyse seacutem iotique se parachegraveve

inteacuterieurement la reacuteflexion philosophique qui la soutient peut toujours souvrir et se

deacutevelopper dans le sens des autres sciences philosophiques des autres sciences

heuristiques et mecircme du reste de lactiviteacute humaine Au terme ultime de cette odysseacutee

de la conscience seacutemiotique agrave travers le systegraveme peirceacuteen des sciences nous

reconnaissons donc tinalement le motif Je plus fondamental de ce systegraveme la

continuiteacute de la penseacutee

Annexe 1 Les graphes existentiels (parties Alpha et Geta)

Alpha

Il tonne Il tonne

Il pleut

Il tonne et il pleut Il tonne ou il pleut Siumll tonne alors il pleut

(serail)

Le modus ponenl (selon Roberts 1973 45 avec les regravegles de Shin 2002)

P p

l Preacutem isses

p

2 Erlacement de P en aire non-encercleacutee

3 EHacement de P car P exteacuterieur en l

4 Q Effacement de la double coupure

lOS

Jeta

Cest beau Cest beau

est bon

est bon

Quelque chose est beau et bon Il nest pas le cas que quelque chose soit beau et

bon

est beau( ~

Quelque chose est beau mais pas bon Tout ce LJui est beau est bon

(II nest pas le cas que quelque chose soit

beau

mais pas bon)

EYOkO

donne une 1legraveul

John John donne une neul agrave Yoko (ligature)

106

Syntaxe dAlpha (selon Shin 2002 37-8 84-5)

Vocahulaire

symboles propositionnels (senence symhols)

coupure (cut) [symbolique]

(juxtaposition [quasi-iconique])

Regravegles de formaion

Un ensemble de graphes Alpha c esl le plus petit ensemble satisfaiseacutelnt les

cond i tions su i vantes

1 Un espeacutelce vide est clans r

2 Un symbole propositionnel est dans

3 Fermeture pm juxtaposition Vuxaposilion colure) Si G est dans lt et G

est dans c alors la juxtaposition de ces n graphes cesl-agrave-dire G G est

aussi dans (

4 Fermeture par coupure (CUi cfosure) Si G est dans lt alors une seule coupure cie

G est aussi clans _

Regravegles de ransjOrmaion

1 Dans une aire encercleacutee de faccedilon paire (ou non encercleacutee) disons iaire a

(a) on peut ellagravecer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner un graphe X sil ya une occurence cie X

(i) clans la mecircme eacutelire cest-agrave-clire laire a ou

(ii) clans leacutel prochaine eacutelire exteacuterieure agrave aire a

2 Dans une aire encercleacutee cie faccedilon ill1paire clisons iaire a

(a) on peut elcrcer un graphe X sil ya une eacute1Lltre occurence cie X

(i) dans la mecircme aire cest-agrave-dire iaire a ou

(ii) dans la prochaine aire exteacuterieure 21 laire a et

(b) on peut dessina nimporte quel graphe

3 Une COUPl( couhle peut ecirctre effeacutelceacutee ou dessineacutee autour cie nimporte quelle

partie (Jun graphe

107

Synfaxe de [Jefa (selon Shin 2002 39-41 139-42 modifieacutee)

Vocabulaire

symboles de sujets

coupure [symbolique]

ligne didentiteacute (fine ojideJ1lity) abbr LI [iconique]

(iux taposition [qUeacutelsi- iconique])

Regravegles dl formation

Un ensemble de graphes Beta est le plus petit ensemble salisfeacutelisanl les

conclitions suivantes

l Un espace vide est cleacutelnsC Il

2 Une ligne cIidentiteacute est clans (

J Fermeture par juxtaposition Si G est dans r et G est clans ( alors leacutel bull 1 lt Il Il

juxtaposition de ces n graphes cest-agrave-dire G G est aussi clans (

4 Fermeture par sujet Si G est dans C~ alors un graphe avec un symbole cie sujet 11shy

aire eacutecrit agrave la jonction cie 11 extreacutemiteacutes libres dans G est aussi dans ltshy5 Fermeture par coupure Si G est dans lt alors un graphe cleacutelns lequel une seule

coupure est dessineacutee dans nimporte quelle sous-partie de G sans croiser un

symbole de sujet est eacutelussi dans etI

6 Fermeture par branche Si G est dans ltgt alors un graphe clans lequel une LI dans

G se branche est aussi deacutelns r

Regravegles dl tJOl1sjoll7(tiol1

l Dans une aile encercleacutee cie faccedilon poire (ou non encercleacutee) clisons laire a

(a) on peut elCreer nimporte quel graphe et

(b) on peut dessiner une LI ou un graphe X sil y eacutel une occulence de X

(i) clans la mecircme aire cest-agrave-dire laire 0 ou

(ii) dans la procheacuteline eacutelire exteacutelieure agrave laire o

2 Dans une aile encercleacutee cie faccedilon iJJljJoire clisons leacutelire 0

(a) on peut elagravecer un graphe X sil y eacutel une autre occurence cie X

(i) cleacutelns la mecircme eacutelire cest-agrave-dire leacutelire 0 ou

(ii) deacutelns la prochaine aire exteacuterieure agrave laire 0 et

(b) on peut dessiner nimporte quel graphe

108

J On peut allonger une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers linteacuterieur agrave travers une ou des coupures et

(b) vers lexteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-I agrave L1ne aire- ou

(iii) dune aire-P agrave une aire-P agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sujets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que lon deacutesire allonger et

(C) dont la pal1ie la plus exteacuterieure soit dans une aire-P

4 On peLit reacutemcler une extreacutemiteacute libre dune LI

(a) vers l inteacuterieur

(i) dune aire-I agrave L1ne aire-P

(ii) dune aire-P agrave une aire-P ou

(iii) dune aire-I agrave une aire-I agrave moins quil ny ait une autre LI

(A) qui soit attacheacutee aux mecircmes sUIcircets

(B) dont la porteacutee soit plus grande que la LI que Ion deacutesire allonger et

(C) dont la partie la plus exteacuterieure soit dans L1ne aire-P et

(b) vers lexteacuterieur agrave travers une ou des coupures

5 On peut joindre deux extreacutemiteacutes libres de lignes didentiteacute

(a) dans une aire-l ou

(b) dans une aire-P si les sous-graphes agrave joindre sont des occurences du mecircme

type

6 On peut disjoindre une ligne didelititeacute

(a) dans une aire-I si les sous-graphes agrave disjoindre sont des occurences du mecircme

type ou

(b) dans une aire-P

7 Une cOlfJlre dOlhie peut ecirctre effaceacutee ou dessineacutee autour de nimporte quelle

partie dL1n graphe

8 On peut dessiner ou effacer nimporte quelle hmnche dune ligne didentiteacute sans

traverser une coupure

9 On reut formel OLi briser un clcfe (courbe fermeacutee) dune branche dune LI dans la

pal1ie la plus inteacuterieure dune jonction

Annexe 2 Le systegraveme deacutecriture japonais

Lisle des 19-15 kanji lIslels (jocircyocirc kanji)

-tTT~~~~~~ftfi~~~~nR~~amp~~~h~amp~=E~~~~~AgraveU~~~

~~~~~$ftC~frM~KM~~~~ffiffuuml~m~~~~mtt~~mmw~~~m~~œm

9IJM~F6~JEfrœf9euroI~flifiumlil~~g~IIcirc~~jjijA~~tirlwJ[~ampfJffi~tJ~ji1Jicircjg~~~ritIff~

~~7eumlJr7eacute7t5t~bRW-A~1tt~~~JlJ F9 pg ffiI~n~J11~EtUfLJl~ [I] tJ eacuteJlJ JJ tJJ7NJJ~jIJfIJ

Jfl] 91HtJ JJIJ ~IJ ~IJ~IJ$IJilJlJ~IJ MlIJiIJ~IJj)fljgIJJIIJilIJ11lIJ~IJIJ 1J ~D r]j sectiJ~JjJiJ9J~MiJ iJ ~ 1It1tlJl1J~UiJ~~ucircJJ~l-5JJ ~

~ta~~sectE~~+~~m$~~rn~~WM~W~~S~~~x~~amp~n~~U7~~D

~~EB3~~~~~~~~fig~~ bullbull~~~~~~~~~~~~~~u~~~~~~~~~

~~~W~~R~~~~H~~~~~~~~OO~~plusmnffrrmM~~~~~~~~~~gB~~

m~~w~œ~~~~~~mŒ~~oo~~~œœplusmntt~~~~~~~~n~a~~~~fi

~~gi1~~~~mR~5t~~~~~JlIH9D~29HJj~j~ili~eacutel~99l19lHJN9~9ft9IHffl91i~9i9iU~~HL~rP~~

m~~~~~g~œ~~~~~H~~~gamm~bullbull~~~bullbullbull~~~WM~~

~HHiumlWJj3(ij5tjm~MHtRfEuml~~-~~ram~~~~UJIJ~~g~IJIIIiI~iIJ~~~~iiJjJIIHIIIljtt

~BM~fi~~U~~~~~~~M~~fi~~~Œ~~~~~bullbull8~

g~~rt ~~ ~ 1ij 5f5tmm 5lta sN 5jj iWiJf~ ~rn~~~~i~il~ iiE ~iampm~ilt i~iii1l-iiumlIJl imi~~i~rei~~ z TE~ ~

~~~~ffia~~tt~ffl~~~~~~~~~m~~~~~~~ill~illili~~~~ill~~ill~ill~

ill~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~sect~fi~m~~~~~~~bullbull ~~iJ~gl~~~~isect~rlI~m~[ll)~Ii~iJ~~~~icircf~5t~ftlx~flWg~m~~~~g~mLir08z~SZ~~B~2tI~~

~~~~~~~bullbull~~g~~~~=~ampM~~~tt~W~tt~llimmffiregWmm~~m~mmmm

1mIIt~1$$i~iXftiiti(~UJ~pfi~~m=Fif~1j1f~atnjLtlkjRj1itjjJljRj9jEjsJHjjJ111jljljjHtbJecircj91jlijffi

j~jElecircjEliJtUH~jm~jH3j~j~mjjjeurojjUJIHSlj~jmmt(tj~j~j1i5ampmj~j~m~j~jMEcircIcircijJiumlW~j~mj~j~HlH~j~

Jfj~j~j~jfi~j~jjlitj~3Z~QrQ1i5i55~lijH9~~5i1~j9~~9~9HlY+n~jFfffIIUfi1J1rtiIIcircIcircIIcirc~)j~1IcircJtB IBi3Jf ~m~ bullbull~_ampbullbull~ bullbullubullbull~~~~~~~lItq~~~~~UftU~fi~~M~~~~~~

1im~~icircilicircg~miml~TIlY~EMmicirc~3trPJmJjicircij~~ij[i]~mlltIlijialiilijn~~ij~ijUi15k~~~

~~~~Wi~~1t1L1Jl1lj1~111~H~j~~jJlHj~j5j~t5ffjjljijnffi~j~ljjRfiumlji~Ujijjij~jfoJH~~jllJl~

~WR~jflij~jj~jiHH~lmjfrHrfl~R~~euml~~xlx~xiXLtiumlE~tiicircJiiuml9E~HIltsectliJM~~t~~H~1)l18m~tt=tEU=

~~ffJ~A~R~~~~~~~~~~~~~~~$~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~B~~~~~~~~~~~~~~~

~~~~~~~M~~~~~~n~~~~~m~~bullbull~~~~~~~MAA~~~~

~~~tlffl~mmH~~~m~~œlli~~~~~~~~M~m~~MgX~~fflffi~$~~

mWm~~Mft~bullbulla~amp~~amp~~~~bullbullbull~e~~H~~m~sect~~~Esect~~~

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Signe remplaccedilant le konji reacutepeacuteteacute ~

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