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S ommaire Sommaire Sommaire DÉFI JEUNESSE Octobre 2001 1 Mot du comité de la revue Quoi penser de la revue professionnelle Défi jeunesse ? Geneviève Turcotte . . . . . . . . . . . . . . p. 2 Des ateliers stimulants Claudine Laurin, Sophie Poissant . . . . . . . . . . . . . . p. 3 Chronique réflexion Au-delà de ce qui est apparent Jacques Grand’Maison . . . . . . . . . . . . . . p. 7 L’enfer du premier contact Jean-Rosemond Dieudonné . . . . . . . . . . . . . . p. 14 Les Centres jeunesse de Montréal et le Centre de réadaptation Gabrielle Major : une démarche partenariale Michel Doray, Alain Germain . . . . . . . . . . . . . . p. 17 L’expérience des groupes support aux parents pour contrer le phénomène des gangs : des leçons pour l’intervention ? Martin Goyette, Jean Panet-Raymond, Gwénola Van Hille, Nicole Dallaire . . . . . . . . . . . . . . p. 24 Collaboration extérieure Promouvoir une identité masculine saine : un modèle d’intervention de groupe pour adolescents Jean-Pierre Plouffe . . . . . . . . . . . . . . p. 33 S ommaire Volume VIII - Numéro 1 / Octobre 2001

Sommaire - Accueil - le Centre intégré universitaire … Dodson (Paris, 1972) enseignait que «tout se joue avant six ans». Cependant, bien des recherches ont démontré l’importance

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S o m m a i r e

SommaireS o m m a i r e

D É F I J E U N E S S EO c t o b r e 2 0 0 1

1

Mot du comité de la revueQuoi penser de la revue professionnelle Défi jeunesse ?

Geneviève Turcotte . . . . . . . . . . . . . . p. 2

Des ateliers stimulantsClaudine Laurin, Sophie Poissant . . . . . . . . . . . . . . p. 3

Chronique réflexionAu-delà de ce qui est apparent

Jacques Grand’Maison . . . . . . . . . . . . . . p. 7

L’enfer du premier contactJean-Rosemond Dieudonné . . . . . . . . . . . . . . p. 14

Les Centres jeunesse de Montréal et le Centre de réadaptation Gabrielle Major : une démarche partenariale

Michel Doray, Alain Germain . . . . . . . . . . . . . . p. 17

L’expérience des groupes support aux parents pour contrer le phénomène des gangs : des leçons pour l’intervention ?

Martin Goyette, Jean Panet-Raymond,Gwénola Van Hille, Nicole Dallaire . . . . . . . . . . . . . . p. 24

Collaboration extérieurePromouvoir une identité masculine saine :un modèle d’intervention de groupe pour adolescents

Jean-Pierre Plouffe . . . . . . . . . . . . . . p. 33

S o m m a i r eVolume VIII - Numéro 1 / Octobre 2001

À l’occasion de la journée d’échanges professionnels du31 mai dernier, les membres du Comité de la revueprofessionnelle Défi Jeunesse ont fait circuler un

questionnaire maison destiné à sonder l’intérêt des membresdu conseil multidisciplinaire pour la revue. Soixantepersonnes ont gentiment complété le questionnaire. Noussommes bien sûr conscients du fait que leurs réponses ne sontpas représentatives de l’opinion de l’ensemble des membresdu conseil multidisciplinaire mais il nous apparaissait tout demême important d’en rendre compte à nos lecteurs, et d’entirer certaines conclusions.

Après plusieurs années consacrées au travail d’édition dela revue, il est réconfortant pour les membres du comité desavoir que la revue est lue par presque tous les répondants (58).De plus, nous pouvons compter sur des lecteurs très assidus : sixlecteurs sur dix nous affirment en effet avoir lu tous ou presquetous les numéros publiés au cours des deux dernières années.Des lecteurs très intéressés aussi, puisque la moitié d’entre euxnous rapportent avoir déjà discuté du contenu de la revue avecdes collègues et des collaborateurs.

Nos lecteurs sont plus particulièrement intéressés par lesarticles dont le contenu est lié à leur domaine d’activité. Ilspréfèrent les articles qui portent sur des expériences

professionnelles aux articles théoriques et aux compterendus de résultats de recherche. Plusieurs exprimentd’ailleurs le souhait que la revue publie davantage de compterendus d’expériences réussies, de projets novateurs et denouveaux modes d’intervention. L’éditorial est la rubriquequi les intéresse le moins.

Si à peu près tous les lecteurs se disent satisfaits de larevue, certains y vont de leurs suggestions pour en améliorer lecontenu. Outre la suggestion déjà évoquée de publierdavantage d’expériences d’intervenants, plusieurs souhai-teraient que la revue donne davantage de place à lapolémique, à l’échange d’opinions et à la critique sociale. Plusconcrètement, on nous suggère de prévoir une chroniqueopinion où les lecteurs auraient l’opportunité de commenterles articles parus dans l’édition précédente.

Si la tendance se maintient, la revue Défi jeunessedevrait continuer à vous satisfaire en tenant compte de vosrecommandations afin d’être plus près encore desbesoins et des intérêts des lecteurs.

Et vous, avez-vous des commentaires et dessuggestions pour nous aider à améliorer la revue ?Si oui, n’hésitez pas à nous les communiquer.

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Mot du comitéM o t d u c o m i t é

Quoi penser de la revue professionnelle Défi jeunesse ?

Geneviève Turcotte

Erratum…… à l'article de Nicole Dallaire et al. publié dans le numéro de juin 2001 de Défi jeunesse intitulé Le guide

d’accompagnement et d’intervention «usages et abus de drogue».

L'équipe de recherche aimerait rectifier quelques éléments:• L'encadré de la page 31 aurait dû se lire «le pragmatisme reconnaît le fait que les drogues sont là pour rester et qu'il

vaut mieux dès lors s'efforcer de limiter les méfaits liés à leur consommation».• La note bibliographique 7 de la page 36 aurait dû se terminer après la phrase : «Dans un avenir rapproché, la

personne-ressource en toxicomanie du PAC contribuera à la formation d'agents multiplicateurs».

Enfin, si plusieurs intervenants porteurs du projet ont participé à la validation de ce texte, nous signalons que lesauteurs de l'article font partie d'une équipe de recherche portant sur les pratiques partenariales des CJM. Le regard estdonc celui de la recherche sur la pratique du Guide d'accompagnement et d'intervention «usage et abus de drogues» rédigépar Lise Durocher, Pierre Desrosiers, Sylvain Pelletier, Pierrette Trudeau-Leblanc.

AteliersA t e l i e r s

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N otre petite histoire débute il ya près de deux ans, aveccomme base le Projet jeunesse

Montréalais qui suscite la collaborationentre les diverses ressources d’unmême territoire, et comme préoc-cupation les jeunes familles. Ainsi, deconcertation, le CLSC Villeray et lesCJM territoire 3 mettent sur pied desateliers de stimulation.

Depuis plusieurs années, lesateliers de stimulation font partie dudécor de l’intervention auprès desjeunes familles. Le «regretté» CentreRosalie-Jetté avait mis sur pied unguide pratique Intervention auprès dedyades mère-enfant à risque. Cedocument constitue d'ailleurs un desoutils de référence pour la planifi-cation de nos ateliers. À travers larestructuration des CJM et l’éparpil-lement des équipes impliquées,quelques groupes, de façon indépen-dante, ont poursuivi le travail auprèsde ces dyades. Toutefois, dans certainssecteurs, aucune intervention de cetype n'était offerte au client.

Néanmoins, les besoins demeu-rent et sont même criants. Surtoutlorsque l’on côtoie la clientèle deparents ayant des jeunes poupons de 0 à 12 mois. Fitzhugh Dodson (Paris,1972) enseignait que «tout se joueavant six ans». Cependant, bien desrecherches ont démontré l’importancedes premiers mois de vie sur ledéveloppement du lien d’attachementet sur l’importance de la qualité de celien comme premier modèle desrelations futures (Ainswort, 1983).

Ce que l’on reconnaît, c’est qu’uncontexte familial supportant (sensibilitédu parent à reconnaître les besoins del’enfant et la contingence des réponses àces besoins) permet à l’enfant de vivreun sentiment de sécurité. À l’inverse, uncontexte familial imprévisible crée del’insécurité et de l’anxiété chez l’enfant.On peut décrire ce contexte aversifcomme suit : la non-disponibilité duparent, des soins inconsistants etindiscriminés aux besoins et audéveloppement de l’enfant et un affectaversif de la part des parents. Enconséquence, l’insécurité et l’anxiétévécues engendrent souvent des compor-tements provocants, et ce, même chez lejeune bébé. Ce type de comportementfavorise une interaction physique maisnégative, tout en diminuant le lienémotif des deux parties. L’enfant enressent du rejet. L’incapacité de l’enfantà aller chercher les soins qu’il a besoinproduit un sentiment de non-confianceen ses propres capacités. Il devient doncmoins disponible à explorer sonenvironnement, ce qui nuit au dévelop-pement de ses habiletés et produit desdifficultés à engendrer des relationssociales (Ainswort, 1983; Bowlby, 1969;Carlson et Sroufe, 1995). Ces quelqueslignes vous font-elles penser aux jeunesâgés entre 6 et 12 ans qui fréquentent lesCJM et qui agissent leur incapacité ?

En résumé, plus le parent s’occupede son enfant, plus il est en mesure dereconnaître ses besoins, donc plus laréponse est efficace et rapide. Ainsi,l’enfant se reconnaît la capacité de sefaire comprendre, ce qui lui permet dedévelopper de la confiance en lui et unsentiment d’être digne des soins reçus.

Des ateliers stimulantsClaudine Laurin, psychoéducatrice, Sophie Poissant, éducatrice, DSJ

Depuis plusieurs

années, les ateliers

de stimulation font

partie du décor de

l’intervention auprès

des jeunes familles.

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Ce qui lui donne le «goût» d’avoir descomportements agréables, envers sonparent… et, plus il est agréable plus le parent prend plaisir à s’occuper deson enfant.

C’est dans cette optiquepréventive que nous avons fait renaîtreles ateliers de stimulation, dans leterritoire 3. Le but premier étant derenforcer et même parfois de créer unlien d’attachement entre le parent etson enfant (nous employons parents,car les pères sont aussi invités). Au fildes rencontres, nous tentons de créerdes moments agréables entre lesmembres de la dyade. Ainsi, sousforme de jeux, d’exercices, de soins, demassages, de partage, le parentapprend à mieux connaître son enfantet ainsi à mieux répondre à sesbesoins… et le cycle commence ! Avecpour espoir qu’il se généralise à lamaison.

LA CLIENTÈLE

La variété des ressources im-pliquées a permis de regrouper uneclientèle diversifiée. En effet, descentres communautaires La maison desgrands-parents de Villeray lors de lapremière année et la Jouthèque – centrela Jeunesse fournissent un local,s’occupent de l’accueil en plus de faireconnaître leurs ressources pour unefuture utilisation. Les intervenantesproviennent du CLSC Villeray(infirmière) et des CJM Territoire 3(psychoéducatrice). Ainsi, les groupesde parents sont formés de mères duquartier référées par le centrecommunautaire, de celles recevant desservices du CLSC souvent recrutéesparmi les suivis en allaitement ou leprogramme OLO. Finalement, laclientèle de foyer pour mères endifficultés et des parents qui béné-ficient d’une intervention externe desCJM. La majorité des mères quiparticipent sont monoparentales,primipares et sont âgées de moins detrente ans.

LES OBJECTIFS ET LES MOYENS… ENTRE LA

THÉORIE ET LA PRATIQUE

Le but est donc de favoriser unlien d’attachement entre le parent etson enfant. De fait, plusieurs objectifssont proposés :

✓ permettre à l’enfant de vivre unmoment plaisant avec son parent;

✓ permettre à l’enfant de participerà des activités qui stimulent sondéveloppement global;

✓ favoriser, chez l’enfant, la socia-lisation par le jeu (pour les 6-12mois);

✓ permettre au parent de vivre unmoment plaisant avec son enfant;

✓ permettre au parent de s’informeret d’échanger sur son rôle de parent.

Des objectifs parallèles sont aussiidentifiés à savoir permettre des appren-tissages, briser l'isolement et permettre laprévention par de l'information. Pouratteindre ces objectifs, nous tentons decréer un environnement favorable àl'expérimentation de vécus agréablesentre la mère et l'enfant et aussi depermettre à la mère de mieux connaîtreson enfant. Pour ce faire, différentsthèmes sont abordés tels l’alimen-tation, la sécurité, les garderies, ledéveloppement, la santé… L’équipe detravail favorise la participation par desquestions, ce qui amène parfois dessujets imprévus, mais plus près d’unbesoin réel.

Les mères sont interpellées à êtreactives avec leurs poupons. Des activitésqui favorisent le développement globalsont proposées. Quelques exercicesphysiques visant le développement de lacoordination motrice, du tonusmusculaire et favorisant la consciencedu corps. Des petits massages pourapprivoiser le toucher et pour tous lesbienfaits apaisants que cela peut

apporter. En plus, les jeux sont trèsimportants pour le développement desbébés. Peu importe le jeu : agripper,agiter, laisser tomber, cacher, manipuler,écouter, regarder les objets, lescouleurs… ; l’enfant apprend. Il éveilleson intelligence par les jeux. En effet,Piaget mentionne que plus l’enfantmanipule d’objets concrets dans sonjeune âge et plus il aura de la facilité àmanipuler des concepts abstraits plustard. Toutes activités bien adaptées àl’âge de l’enfant favorisent l’appren-tissage des habiletés préparatoires aulangage; elles favorisent le développe-ment visuel, auditif, moteur et cognitif.

Finalement, il est proposé quechaque mère fabrique un «cadeau» pourson enfant dans un atelier «bricolage».Cela semble simple, mais rien de tel qued’occuper les dix doigts pour permettreaux gens de s’exprimer et finalement dese sentir «bonne mère» en remettant àson enfant un objet fait de ses mains.Ainsi, on s’assure qu’à la fin de chaquerencontre, les mères repartent avec unobjet soit le bricolage, une brochured’information, une photo de la mère etson enfant ou un petit cadeau (brosse àdents, céréales pour bébé).

LE DÉROULEMENT DES RENCONTRES

Dans cette partie, il faut biendistinguer la théorie de la pratique ets’assurer que notre sens de l’adaptationest encore malléable… malgré l’âge !Ainsi, il est prévu au départ d’un ordrepréétabli de thèmes à aborder etd’activités à faire, dans un tempsprécis. Une rencontre type devrait sedérouler ainsi : accueil (5 min),discussion et retour sur la semaine (10 min), présentation du sujet avecpériode de questions et remise dedocuments informatifs (30 min),quelques exercices et massages (30 min),une pause goûter (15 min) et finale-ment un temps de bricolage (30 min).Dans la réalité, c’est bien différent. Lesretards sont fréquents, la présence desmères irrégulière. De plus, d’instinct

Ateliers A t e l i e r s

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les mères s’installent sur le tapis,discutent du thème de la semaineprécédente tout en attendant lesretardataires. De fil en aiguille, onaborde le sujet de la semaine et onrépond aux questions. Tout le mondefinit par s’installer pour faire (parfois leterme exact serait regarder faire) lesactivités plus motrices (jeux, massages,exercices). Tout cela entre les pleursd’un bébé, une mère qui allaite, unchangement de couche… ouf ! En plus

du besoin constant pour certaines de sefaire recentrer sur leurs enfants. Et letout se termine par la fabrication d’uncadeau pour bébé (napperon, marion-nette, chapeau…). Parfois il reste peude temps, la pause s’est étirée enbavardage de «trucs pour bébé». Et lebricolage tombe à l’eau !

En ce qui concerne le contenu desateliers, l’intérêt des mères est partagé.Par exemple, celles-ci démontrentbeaucoup d’attention lors de ladémonstration des exercices physiques,mais elles ont besoin d’un accompa-gnement individuel pour les exécuteravec leur enfant. Certaines activités,comme celle du miroir (placer l’enfantdevant un miroir et lui parler), fontréagir les mères par des rires, descommentaires, à un point tel quel’activité se prolonge parfois. Les thèmescomme la santé et le développementsuscitent grandement la participation.

OBSERVATIONS ET BILAN

L'objectif général de développer lelien d'attachement parent-enfant est

difficilement observable. Huit atelierssont insuffisants et échelonnés sur unepériode trop courte. De plus, aucuneobservation dans le milieu naturel desmères n’est effectuée. Ainsi, nous nepouvons évaluer que faiblement si lesacquis sont généralisés. Cependant, lesindicateurs de réussite suivants nouspermettent de croire que certains desobjectifs spécifiques sont atteints :

✓ La présence des mères est assidue.On dénombre une moyenne d’absence de deux ou trois rencontres sur un total de huit.L’avant-dernière rencontre étantcelle où il y a toujours le plus grandnombre d’absences. Malgré notrevolonté d’inviter les pères à sejoindre au groupe, aucun père nese présente, sauf pour reconduire «sa blonde».

✓ La participation aux activités estobservée. L’intérêt est nettementdémontré pour certains sujets,spécialement la santé et le dévelop-pement. En général, les mèresposent beaucoup de questions etreviennent sur les thèmes abordésprécédemment, en lien avec desévénements quotidiens vécus aucours de la semaine. C’est le seulélément qui nous permet de croireque les mères font chez elles cequ’elles ont appris en groupe.

✓ Lorsque l’on questionne lesparticipantes, elles affirment avoirpassé de beaux moments avec leurenfant. Beaucoup d’éclats de rireretentissent lors des activités dejeux et d’exercices.

✓ De plus, quelques-unes mention-nent avoir découvert de nouveauxjeux, de nouvelles activités à faireen «duo».

✓ Un objectif parallèle est aussiatteint soit celui de briser l’isolement. En effet, les mèrespartagent beaucoup entre elles,quelques-unes échangent leurs

numéros de téléphone, parfoisfont des ententes de «gardien-nage ». Le rassemblement peuhomogène des participantes apermis également d'observer debelles alliances. On remarque unpartage informel d'informationsentre les parents «bien équipés»et d'autres plus «fragiles», duquelen découle une déstigmatisationqui suscite une ouverture à laréception des informations.

Cependant, il est impératif dementionner que ces observations neconcernent pas toutes lesparticipantes. En effet, au moins unemère dans chacun des groupess'absente davantage et ne démontrequ'un faible intérêt aux rencontres.Cette dyade requiert beaucoup desupport de la part des intervenantes, cequi parfois, peut nuire au reste dugroupe.

La clientèle diversifiée offre unmodèle de «bonne mère» différent etnon menaçant. C'est parfois plus facilede prendre exemple sur une autre mèreque de suivre les conseils d'uneéducatrice. Le temps passé ensemblepermet du modelage. Les pairages sontbénéfiques. Cependant, les multiplesinteractions entre les clientesdemandent beaucoup d’adaptation etde vigilance de la part des

L'objectif général

de développer le

lien d'attachement

parent-enfant

est difficilement

observable.

AteliersA t e l i e r s

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intervenantes. La différence dans letempérament des enfants amène descomparaisons et c’est tant mieux ! Ondémystifie la différence entre enfants,souvent associée à la qualitématernelle. Ainsi, le sourire d’unejeune mère de 16 ans est éloquentlorsqu’elle observe une «bonne mère»de 26 ans courir après son garçon de 10 mois et le redescendre pour lasixième fois de l’escalier ! Son fils faitla même chose, mais maintenant iln’est plus «tannant», il «explore» etses compétences de mère ne sont pasmenacées. Il y a un soulagement devoir que d'autres mères vivent desproblèmes, ont des questions, sontimpatientes…

VERS L’AVENIR

Après réflexion, il reste, bien sûr,des points à améliorer. L’ouverture àl’adaptation crée un manque destructure dans le déroulement desrencontres qui provoque des oublis etparfois un manque d’attention de lapart des mères. Pour éviter cedésagrément, il serait préférable deprévoir l’arrivée des mères quinzeminutes avant, afin de débuter avec legroupe complet. Après avoir demandél’avis des participantes, conserver unordre précis dans le déroulement seraitapprécié et nous apporterait unestabilité sécurisante pour le groupe.Également, en ce qui concerne l’âgedes enfants, le regroupement 0 à 12mois comporte trop de différences :l’échantillon est trop large, les besoinssont trop variés tant au niveau dudéveloppement que de l’alimentation.Nous en sommes venues à laconclusion de former deux groupes,soit un d’enfants agés de 0 à 6 mois àl’automne et un autre d’enfants de 6 à 12 mois au printemps 2002.Finalement, faut-il mentionner qu’unlocal fixe serait non seulementfacilitant, mais une nécessité, afind’éviter de multiples transports dematériel et de permettre une publicitéconstante et une reconnaissanceaccrue pour les intervenants du

territoire. Ce local pourrait même êtreutilisé pour des activités similaires, pard'autres groupes qui, comme nous, ontle souci de l’intervention préventive.

Un des points forts des ateliersserait une structure souple au niveaudes sujets, ce qui suscite davantage laparticipation et l’intérêt des partici-pantes. Les échanges sont pertinents,les mères répondent d’elles-mêmes àbeaucoup de questions posées par leurspairs. De plus, la combinaison d’unediversité dans la formation desintervenantes est bénéfique et secomplète à merveille (infirmière,psychoéducatrice et psychologue).

Devons-nous le répéter… ladiversité d’une clientèle est un atoutmajeur à l’atteinte des objectifs. De plus,il serait possible d’envisager ce contexted’intervention pour d’autres avenues,comme des visites supervisées oul’évaluation des capacités parentales, parun travail en concertation avec tous lesintervenants impliqués. À chacund’utiliser son imagination pour mettre àprofit ces observations privilégiées de ladyade parent-enfant.

En tant qu'intervenantes, nousprofitons aussi grandement de cesateliers. Cela nous permet de prendreune distance par rapport à nos clientset nous amène à travailler avec uneclientèle différente que celle côtoyéequotidiennement. Notre collaborationavec d'autres professionnels nousouvre sur différentes approches et nouspermet de parfaire nos connaissancesdes sujets connexes à notre expertise.

Il faut toutefois être conscient del'exigence de cette tâche, en surplus denotre lourde charge de travail. Il fautprévoir la planification, l'organisationet la mise en place des rencontres, enplus du trois heures d'animationhebdomadaire. Malgré cela, c'est lepositif qu'apportent ces rencontres,tant aux participantes qu'à nousintervenantes, qui a motivé larédaction de cet article, dans le butpremier de susciter votre intérêt pourcréer de nouveaux projets stimulantstant au niveau professionnel quepersonnel. ✒

R É F É R E N C E S B I B L I O G R A P H I Q U E S

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RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

Ainswort, M.D.S. (1983). «L'attachement mère-enfant», Enfance, 7-18.

Bowlby, J. (1969). Attachment and loss. Vol. 1: Attachment, Londres, Hogart Press.

Carlson, E.A. et L.A. Sroufe, (1995). «Contribution of attachment theory to developmental psychopathology». In D. Cicchetti et D. J. Cohen (sous la direction de), DevelopmentalPsycholopathology. Vol. 1: Theory and methods, New York, John Viley, 581-617.

De plus, il serait possible d’envisager

ce contexte d’intervention pour

d’autres avenues,comme des visites

supervisées ou l’évaluation des

capacités parentales,par un travail en

concertation avec tous les intervenants

impliqués.

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Chronique réflexionC h r o n i q u e r é f l e x i o n

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J e vous invite ce matin à une prisede distance réflexive pour mieuxcomprendre ce qui nous arrive et

pour mieux nous équiper au chapitrede nos pratiques comme parents,comme éducateurs ou commeintervenants dans nos différentschamps professionnels et cela, à partirdes appels qui nous viennent desjeunes eux-mêmes. Mais auparavant,je tiens à souligner dans quel étatd’esprit je suis venu ici.

On vous a fait bien des procès aucours des derniers temps, sans tenircompte du fait que les piètresinvestissements publics en politiquessociales sont les parents pauvres enregard des autres investissements ycompris ceux en santé et en éducation.Les coupures en votre domaine ont eudes effets pervers. Madame LouisianeGauthier n’a pas parlé sans raisonfondées des «civières invisibles» descentres jeunesse et de la DPJ. Cestensions se sont répercutées àl’intérieur de vos murs entre vous,entre les différents acteurs de chezvous, avec le piège de quête interne deboucs émissaires, après les procèsexternes qui ont fait de vous des boucsémissaires.

Engagé moi-même depuis 52 ansauprès des jeunes en difficulté, je saistrop l’importance du travail ardu quevous faites. Je viens ici comme un alliéet aussi comme un aîné qui déjà, à dix-huit ans, animait seul avec de piètresressources des camps d’été pour desadolescents des quartiers défavorisés deMontréal. Pendant les années qui ontsuivi, ce que j’ai pu en baver dans desprojets collectifs ! Comme, par

exemple, avec les jeunes chômeurs àréinsérer dans le monde du travail.

Je sais bien qu’aujourd’hui vous enavez plein les mains avec les problèmesde plus en plus nombreux et de plus enplus profonds sans avoir les ressourcesnécessaires. Je vis cela en particulierdans deux organismes : Le pont entre lesgénérations qui regroupe des aînés etdes jeunes et dans le mouvementForce-Jeunesse qui regroupe plusieursorganisations de jeunes. Il y a quatreans, j’ai quitté l’université, le cœurdéchiré. Dans un de mes derniers coursà l’université, sur 55 étudiants, il y enavait sept qui avaient des tentationssuicidaires.

Dans la recherche-action que jedirige depuis 12 ans sur les orientationssociales, culturelles, morales etspirituelles dans la population, je mesuis rendu compte de la nouvelle classede pauvreté au sein de la jeunesse etdes effets pervers des profondsdéséquilibres démographiques, telcelui d’une société qui va de plus enplus s’organiser en fonction des aînéssurtout avec l’arrivée des baby-boomers à la retraite. Ceux-ci sont letiers de la population. On ne me ferapas accroire qu’il n’y a aucun lien entrele poids démographique d’unegénération et son poids politique. Lecontrat social qui a pris corps dans lesréformes de l’après-guerre était centréprioritairement sur l’avenir de lanouvelle génération du baby-boom. Cecontrat social est en train de s’inverserpar le mouvement contraire d’unesociété vieillissante prioritairementpréoccupée de maintenir ses acquis etpeu encline aux investissements à long

Au-delà de ce qui est apparentJacques Grand’Maison, sociologue

Nous reproduisons

ici le texte intégral

de la conférence

d’ouverture donnée

par monsieur Jacques

Grand’Maison,

sociologue, dans

le cadre de la journée

professionnelle

du conseil

multidisciplinaire

qui a eu lieu

le 31 mai 2001.

Chronique réflexionC h r o n i q u e r é f l e x i o n

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terme pour les jeunes. Beaucoupd’aînés sont généreux avec leursenfants et petits-enfants, mais qu’enest-il des enfants des autres ? Sepourrait-il qu’on se retrouve tantôtavec deux nouvelles classes sociales :les héritiers et les non-héritiers ? Lavague conservatrice qui traverse toutel’Amérique du Nord est en train derenforcer pour longtemps peut-être lesinégalités. Le budget Bush, à titred’exemple, c’est 4 % pour les jeunes et35 % pour les vieux, sans compter unebaisse radicale d’impôts pour les plusriches. On a aussi la politique de sadémographie. Nous ne pouvons pasignorer ce problème politique dansnotre tâche et notre souci de l’avenirdes jeunes.

On est en train de léguer à lagénération montante et aux prochainesgénérations de lourdes dettes et hypo-thèques. Ces enjeux graves m’ont

amené à prioriser dans mon engagementde citoyen aîné le sort de la jeunesse. Jevis cela avec verdeur comme unespérant têtu et entreprenant, avec cettephilosophie sociale que je formule ainsi.

Nous sommes divisés politi-quement, économiquement, culturel-lement, religieusement, mais il nousreste ce lieu humain commun concretqu’est le sort de la jeunesse. Le tiers-monde est peuplé d’une majorité dejeunes et nos sociétés occidentalesconnaissent une minoration croissantedes jeunes. Mais derrière cela, reste ladynamique inestimable locale etplanétaire du dépassement quesuscitent les enfants chez la plupart desadultes, non seulement les parents,mais aussi ceux qui consacrent leur vieaux enfants des autres. Ce qui juge unesociété, c’est le sort des tiers qui n’ontque leur humanité à mettre dans labalance et qui ne sont pas inscrits dansles rapports de force. Ces tiers sont lesenfants, les exclus, les malades et biensûr, le tiers-monde de là-bas et d’ici.

Vous n’êtes pas des marginaux quitravaillez auprès des marginaux.

Vous n’êtes pas desspécialistes de la

misère, ambulanciers des misérables.Vous êtes au cœur, au centre de cetenjeu humain et sociétaire crucial àsavoir les tiers qui nous font entrer enhumanité, en société véritable, encommunauté de destin, en unepolitique vraiment humanitaire.

Dans le contexte de la situationdifficile et éprouvante que vous vivez,dans le climat de tensions internes etexternes que vous venez de vivre, il estextrêmement important que tous lesacteurs se recentrent sur cette missioncommune que je viens d’esquisser.

Au cours des cinq décennies detravail social que j’ai vécues, j’ai apprisque les institutions, les mouvementssociaux, les projets collectifs réussisavaient tous une mise commune aucentre de la table, une philosophie debase commune, un projet commun.

Si je vous parle de monexpérience, ce n’est pas pour levermon petit drapeau. J’ai peut-être unbon passé, mais je n’ai pas d’avenir.C’est vous l’avenir. Quand je pense àla somme de compétences qu’il y a icidans cette salle, je suis bien conscientdes limites de ma parole singulière.Moi aussi, dans mon travail socialactuel, je suis parfois comme cette

Ce contrat social est en train de s’inverser par

le mouvement contraire d’une

société vieillissante prioritairement préoccupée de

maintenir ses acquis et peu encline

aux investissements à long terme pour

les jeunes.

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Chronique réflexionC h r o n i q u e r é f l e x i o n

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vieille dame italienne de ma paroissequi disait à des Témoins de Jéhovah audemeurant fort sympathiques : «Vousperdez votre temps avec moi, je croispas à ma religion, même si c’est la seulevraie !» Mais je n’en suis pas là,rassurez-vous.

Je me dis que comme aîné toujoursengagé et espérant têtu, je peux peut-être vous transmettre un peu de maverdeur de vie, de sens, de consciencehistorique et politique, de visiond’avenir, de foi et d’espérance envers etcontre tout. Je crois profondément ence que vous faites. Et en même tempsje vous presse de vous donner une plussolide base commune. Et la premièreest celle d’un sens partagé. J’ai parlétantôt de philosophie commune, devision commune. Qu’est-ce à dire ? Encore ici, je vais y aller d’uneexpérience concrète.

Je sors d’un mandat de quatre anscomme citoyen à la Régie Régionale demon coin de pays. Pendant ces quatreannées, on n’a pas consacré deux heuresà réfléchir sur le sens de notre travail,au-delà de nos objectifs instrumentaux,sur le sens de ce qui nous arrive, sur cequi se passe dans la tête et la consciencedes gens qui sont objets de nosinterventions. J’avais le sentiment d’êtredans un système dont l’idéologie est sonpropre fonctionnement, pour parlercomme Habermas. Et, ce que nousavons passé de temps dans nos bataillesinternes de pouvoir, de statut, de fric etd’intérêts corporatistes. À un momentdonné, une femme psychiatre atterréepar la lourdeur, l’ampleur et la pro-fondeur des problèmes qu’elle avait àaffronter quotidiennement avec desêtres éclatés, disait ceci : «Y a-t-il untemps, un lieu de sens où je pourraispartager avec d’autres ces défis de sens ?Tant de confusions intérieures chez tantde gens de tous âges finissent par meplonger moi-même dans une confusionintérieure».

Son intervention est tombéecomme un pavé dans la mare. On

n’avait pas de temps pour faire ça, pourréfléchir sur ces questions de sens. Enl’écoutant, je pensais à cette étude del’UNESCO menée par madame JeanneHersch sur les systèmes d’éducation dansle monde. La conclusion de cette étudeest très révélatrice : la plupart dessystèmes d’éducation n’ont aucunefinalité de sens, ils n’ont que desobjectifs instrumentaux et procédurauxdu genre apprendre à apprendre… maisquoi au juste ; c’est ce quoi du sens quioccupe la conscience de bien des gensprésentement. C’est du moins ce quenous avons découvert dans la recherche

que je dirige et que j’ai évoquée plushaut. Que de fois avons-nous entenducette remarque : «On est plus en plusconfus, on ne comprend plus ce qui sepasse, on se sent impuissant»… et desparents ajoutaient : «On ne sait plusquoi transmettre».

Voyez comment l’impuissance estmise ici en relation avec le sens. S’ycachent de profonds appels au sensqu’on trouve aussi chez les jeunes.

N’y a-t-il pas quelque souchecommune, quelque déficit commun desens derrière les problèmes de suicide, dedrogue, de violence, de décrochagescolaire, de comportements asociaux, de

joueurs compulsifs, de taxage, de tantd’autres problèmes qu’on traite tropsouvent à la pièce ? On dépense dessommes fabuleuses pour réparer des potscassés, sans vraiment prendre la mesurede certaines pratiques éducativesinsensées qui ont pu être en bonne partla souche principale de ces effetspervers. Allons-nous mettre dans lesécoles autant de services qu’il y a deproblèmes tels que je viens d’énoncer ?Moi, mon plus grand scandale depuis unbon moment, c’est la rareté de véritablescommunautés de travail dans nosinstitutions sociales qui se doivent d'êtreles plus humaines, les plus conviviales,les plus solidaires de la société. À celas’ajoute le drame de combien d’équipesde travail démantelées lors des coupuresbudgétaires récentes. Nos institutionssociales seraient beaucoup plus fortespolitiquement si elles avaient de plussolides communautés de travail, desacteurs mieux concertés, des projetscommuns, une philosophie communede sens. On y serait plus heureux et plusféconds.

Puisqu’il s’agit, dans ce colloque,des appels des jeunes, de l’implicationdes parents, comment ne pas se rappelerqu'un jeune qui a un problème grave ena en même temps beaucoup d’autres quis’y rattachent. On le promène encoretrop souvent d’une filière à l’autre, d’unservice à l’autre, d’un spécialiste à l’autresans qu’il trouve quelque part une assiseoù il est assumé dans son entièreté. Onne fait que renforcer sa confusionintérieure et sociale. On reconnaît cetenjeu, mais je ne suis pas sûr qu’il y aitsouvent une cohérence institutionnellepour relever ce défi. Mais il y a plus.Dans mon groupe de professionnels etde technocrates à la Régie Régionale, oncherchait à renvoyer sur les organismescommunautaires les coupures budgé-taires. J’étais en beau maudit !

Je ne cherche pas ici des boucsémissaires. Je ne veux pas jouer ici lecommunautaire contre le profes-sionnalisme dont on a autant besoin.Je dirais la même chose des parents que

Nos institutionssociales seraient

beaucoup plus fortespolitiquement si elles

avaient de plussolides communautésde travail, des acteursmieux concertés, des

projets communs,une philosophie

commune de sens.On y serait plus

heureux et plus féconds.

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je me refuse à traiter comme des boucsémissaires alors que je sais très bien que d’autres influences marquent leursenfants.

Cet appel a plus de cohérenceinstitutionnelle. Je le rattache à unvieux proverbe oublié : «Quand lesinstitutions s’affaissent, les êtresdeviennent imprévisibles, incertains etconfus». L’implication des parents etdes jeunes est à tout le moins partiel-lement tributaire de la pertinence, de lacohérence et de l’efficacité de nosinstitutions.

Voyez le paradoxe de notre sociétéà ce chapitre. Nous nous sommesenrichis par en haut d’institutions deplus en plus sophistiquées et de plus enplus lourdes dans leur fonctionnementet nous nous sommes appauvris par enbas. Bravo pour le laser, le scanner,l’ordinateur, mais qu’en est-il despratiques quotidiennes, des petitesboussoles de sens pour les qualifier, lesbonifier, les orienter ?

Comme si on avait besoin d’unBoeing pour traverser la rue. Ce sontles questions les plus simples qui sontsouvent laissées pour compte. À titred’exemple, dans mon travail social, jeme suis rendu compte que les parentsse raidissaient, se sentaient humiliésquand je venais leur parler duproblème grave de leur fils ou de leurfille. Ma relation avec eux a changé dutout au tout quand je leur disais : «Votre fils a telle ou telle qualité, telou tel talent, vous y êtes pour quelquechose, mais il vit actuellement unproblème grave, si vous voulez, on vatravailler ensemble avec lui ».

J’ai aussi appris que noustravaillons trop uniquement à partir denous-mêmes et de notre propreexpertise toute nécessaire soit-elle.J’essaie toujours de repérer le ou lestiers signifiants pour le jeune.L’anthropologie sociale et culturellenous enseigne que le jeune a besoin, àcertains passages de sa vie, de

s’identifier à d’autres adultes que sesparents. Éric décroche de l’école, ça vamal avec ses parents, avec lui-même.Avec les parents, j’apprends qu’il aimebeaucoup un de ses oncles, qui a unatelier de mécanique automobile. Éricest allé travailler chez lui. Avec sononcle, à la fois assez proche et distant,il est à l’aise pour parler de tout, de sesproblèmes, de ses parents, de ses rêves,de ses questions sur la vie, del’expérience de son oncle. Celui-ci lemet au défi devant un problème demécanique : « Tiens, prends cemanuel-là. Je veux la réponse demain,même si tu dois te coucher à deuxheures du matin ». Pour faire unehistoire courte, Éric se rend compte deses difficultés en lecture et enmathématiques et il retourne à l’école.

Nos sociétés occidentales sont lespremières historiquement à avoir perdude vue la démarche initiatique despassages de la vie que pratiquementtoutes les sociétés d’hier se sont données.C’est ça s’appauvrir par en bas.

Combien de suicides sont despassages initiatiques avortés ? Commentignorer que la culture de la drogues’accompagne de démarches initiatiquesperverties ? Il y a des violences sur lesautres et sur soi-même qui recèlent desdéficits initiatiques méconnus, sinon sous-estimés.

Depuis un bon moment dans montravail social et pastoral, j’essaie derepérer un ou des tiers signifiants, nonseulement chez les jeunes en difficulté,mais aussi chez des adultes et des aînés.Que d’autres exemples j’aimeraisdonner ici. Combien de professionnelset d’intervenants gagneraient àdévelopper cette pédagogie sociale etculturelle, au lieu de travailleruniquement à partir d’eux-mêmes ?

Mon deuxième récit initiatiqueest davantage communautaire. Je me réfère à une expertise sociale qui a marqué tout mon itinéraired’intervenant. Il s’agit d’un projet

de recyclage et de reclassement dejeunes chômeurs. Un projet où noussommes passés de la taverne jusqu’auchangement politique. Les premièrespolitiques de réinsertion sociale et enemploi se sont inspirées de cetteexpérience pilote réussie qui a duréquatre ans. Ces jeunes des six régions desBasses-Laurentides en ont été lesprincipaux acteurs. Et pourtant au départ,la plupart d’entre eux vivaient plusieursproblèmes à la fois, et n’avaient prati-quement pas d’encadrement familial,scolaire ou de travail. Je les ai d’abord misau défi d’aller fonder des associations dejeunes chômeurs dans les six pôlesurbains des Laurentides.

Ensemble nous avons développéune pédagogie communautaire quifaisait jouer toutes les dimensions de

Voyez le paradoxe

de notre société à

ce chapitre. Nous

nous sommes

enrichis par en

haut d’institutions

de plus en plus

sophistiquées et de

plus en plus

lourdes dans leur

fonctionnement

et nous nous

sommes appauvris

par en bas.

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leur vie. Ils se sont donné, parexemple, des moyens concretsd’initiation à partir des talents dechacun : talent d’expression, talent de rassembleur, talent de leadership,talent d’interprète des situations,talent d’action efficace. La démarcheinitiatique en était une entre pairs.De plus, ces jeunes ont amené les divers acteurs institutionnels à travailler ensemble : réseaux sociaux, scolaires, économiques etgouvernementaux autour de ce projetcommun de réinsertion. Plusieurs

de ces jeunes sont devenus par la suitedes leaders sociaux.

Dans la dernière phase de cette aventure sociocommunautaire,j’étais devenu complètement inutile. Quand je pense qu’au départ,beaucoup de ces jeunes étaient éclatésde bien des façons.

Troisième récit initiatique.Alexandre, orphelin de père et mère,s’est promené d’une famille d’accueil àl’autre pendant son enfance et sonadolescence. Jeune adulte, il a trouvéun emploi comme préposé à l’hôpital.Un accident de travail le rend invalideet récipiendaire du BES. De plus,Alexandre vit son homosexualitéd’une façon dramatique. Il cumuledonc plusieurs marginalités qui leperturbent profondément. En meracontant son récit de vie, je découvre

ses qualités d’entregent, d’humour etde générosité.

Je lui dis, en m’appuyant sur sesqualités, qu’il peut rendre des servicesformidables au Centre de la famille quiregroupe des gens pauvres ou en grossesdifficultés de tous ordres. J’ai vu sonregard se rallumer. Il m’a dit : « Personne ne m’a fait confiancecomme ça jusqu’ici». «Alors es-tu prêtà risquer ? " «Certainement», me dit-il. Ce gars-là est devenu l’être de grâcedu Centre de la famille pour relancer les

autres dans l’espoir, pour créer des liensentre eux. Par exemple, il a regroupédes jeunes mères monoparentales dansdes projets communs tels un jardincommunautaire. Il a été un initiateurde multiples façons.

Une fois de plus, je me suis renducompte de la portée initiatique dupassage entre un état passif deréception à un statut dynamique dedonneur et d’acteur. Comment ne pasrappeler ici qu’à l’origine laconception du citoyen était celle d’unconstructeur de la cité, et non unsimple receveur. Il arrive comme çaqu’on perde de vue le sens originel, lesens premier des dynamismeshistoriques qui ont fait le meilleur denotre civilisation.

Mon quatrième récit initiatiqueva très bien introduire la dernière

partie de mon exposé qui porte sur lesappels de sens que les jeunes nouslancent à nous parents, éducateurs etintervenants de tous ordres.

Je vais explorer ici quatre lieux desens qui se sont enrichis au cours desdernières années. C’est par l’un oul’autre de ces lieux de sens que desêtres blessés ont pu surmonter leurdétresse.

Le premier est celui de larevalorisation du corps, de la nature etdes assises premières de la vie. Voyonsici un récit parabole qui en est uneéclairante illustration.

Martin a 24 ans et il est fort biencampé dans la vie. Dans son histoirepersonnelle, il raconte qu’il a vécu 16ans de fortes tentations suicidaires.C’est son grand-père qui l’a aidé àsortir de sa nuit. Notez bien ici lelangage du corps et la logique de vie etde sens que le grand-père va utiliser.Celui-ci amène Martin sur la rive de laRivière du Nord comme pour lebrancher sur un courant de vie, à lamanière des Indiens quand un d’entreeux était profondément perturbé. Jeretiens un moment de grâce ducheminement entre ces deux êtres.

«Martin, tu es en train de vivreton deuxième accouchement pour unevie nouvelle. Quand tu es sorti du seinde par ta mère, tu es sorti comme ça lespoings en l’air. Tous les passages de lavie sont difficiles. Tu as besoin devaleurs fortes. Mais un poing fermé çapeut servir à repousser les autres, et unpoing fermé garde ses grains dans lamain et ne sème rien. Si tu veux naîtreà ton humanité, tu dois ouvrir les braset les mains. Des mains ouvertes, çanourrit, ça soigne, ça caresse, çaconstruit, ça unit. Quand tu es venudans le monde, tu as été accueilli dansdes bras d’amour. Tu as à apprendre àaimer comme ça. Tu sais quand j’ai prisma retraite, je suis comme tombé dansle vide. J’ai mis du temps à mereprendre en mains. Je me suis refermé

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sur moi-même, j’ai baissé les bras, maisaussi la tentation de jouer des poingspour refuser toute aide. Les hommes,on est souvent comme ça. Un jour, tuseras père à ton tour, tu auras à initiertes fils ou tes filles à bien prendre lespassages difficiles de la vie. Tu sauras lefaire si tu as toi-même bien assumé tespassages. Tu auras appris que pour voirla lumière au bout du tunnel, il faut letraverser avec ces deux grandes valeursdont je viens de te parler.»

Voici les commentaires de Martinà ce sujet. « Mon grand-père m’adonné des clés pour ouvrir mes propresportes et mes murs, pour apprivoisermes ombres, mes angoisses, mestunnels, pour découvrir mes propreschemins de vie et de sens.»

Je retiens une idée directrice toutesimple et fondamentale. Quand on esten prise sur le sens de ce qu’on vit, dece qu’on fait, de ce qu’on ressent, de cequ’on croit, on est mieux en mesure defaire face aux difficultés ou échecs deparcours, plus en mesure aussi d’allerau bout de ce qu’on entreprend.

Nous sommes des êtres de sens.C’est ce que nous avons de spécifiquecomme humains, mais on n’accède pasau sens sans un travail de déchif-frement. Comment décodons-nous lesappels de sens qui viennent des jeunes ?

Combien de questions de sens sontsouvent marginalisées et parfois objetsd’interdits ? Pourquoi notre sociétérésiste si mal au suicide ? Pourquoi tantdes nôtres sont devenus si fragilespsychiquement ? Que répondons-nous àl’enfant qui demande avec angoisse : «C’est-y vrai que le monde va craqueravant que je sois grand ?». Querépondons-nous à ce petit garçon quidit : «C’est-y vrai que tous les hommessont méchants, qu’ils font toujours dumal aux femmes, comme ils disent à latélé ?». Comment décodons-nous cepropos d’une fille de 16 ans : «Ma plusgrande souffrance c’est qu’il n’y apersonne au-dessus de moi ? ». D’où

viennent ces transferts à l’âge adulte etmême aux aînés, des attributs etprivilèges de l’enfant : demande desécurité avec une avidité sans bornes,surprise permanente et satisfactionillimitée ? Est-ce qu’un jeune peut seconstruire dans une société où tout sejoue à court terme, dans un environ-nement d’adultes qui ne croient plus engrand chose ? Se peut-il que derrièrebien des suicides, il y ait une crisespirituelle de sens et d’espérance ? Undes grands mythes nord-américainscommande d’être à la fois et pourtoujours, jeune, beau, riche, en parfaiteforme et libre de toute contrainte. Sepourrait-il que ce mythe intérioriséstigmatise en même temps ceux qui ensont la caricature et rendent insup-portable la souffrance des autres qu’ellesoit mentale ou physique ?

Comment un adulte qui refusetout sens à la souffrance et qui ne veutmême pas y penser, comment cetadulte peut aider un jeune suicidaire àdéchiffrer le sens de son épreuve etpotentiellement le plus d’être quipourrait émerger du passage qu’il est entrain de vivre ?

Pour contrer les excès depermissivité, on parle de plus en plusd’un meilleur encadrement, souventsans même soupçonner que le plus grandbesoin en est un de sens qui font vivre,aimer, lutter, espérer. Besoin aussi desocle intérieur sans lequel il n’y a pasd’espérance, comme disait Nietzsche.N’est-ce pas là où se logent les ressortsles plus forts de la conscience humaine ?

Tant de choses ont perdu leurfondation, même la politique. Lespécifique de l’être humain, c’est lesens. Sens à chercher à recevoir, àarticuler, à fonder et aussi à faire. Est-ce que la crise de sens n’est pas une dessources majeures de la crise de lasociété ? Nous nous sommes donnéune charte des droits. C’est un progrèsmajeur, même si elle est trop souventobjet de disputes, d’utilisation déviéede ses intentions premières. Peut-être

le temps est-il venu de songer à unecharte de valeurs communes, des senspremiers de la vie, bref, ce au nom dequoi jeunes et parents, éducateurs etintervenants, nous voulons vivre etagir ensemble ? Je vous en propose unequi est à la fin de mon dernier ouvrageintitulé Quand le jugement fout le camp(Fides, 1999).

La vie est une chance, saisis-la.La vie est beauté, admire-la.

La vie est béatitude, savoure-la.

La vie est un rêve, fais-en une réalité.

La vie est un défi, fais-lui face.La vie est un devoir,

accomplis-le.La vie est un jeu, joue-le.

La vie est précieuse, prends-en soin.

Quand on est en

prise sur le sens

de ce qu’on vit,

de ce qu’on fait,

de ce qu’on

ressent, de ce

qu’on croit,

on est mieux en

mesure de faire

face aux difficultés

ou échecs de

parcours, plus en

mesure aussi d’aller

au bout de ce

qu’on entreprend.

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La vie est une richesse, conserve-la.

La vie est amour, jouis-en.

La vie est mystère, perce-leLa vie est une promesse,

remplis-la.La vie est un hymne,

chante-le.La vie est un combat,

accepte-le.La vie est une tragédie,

prends-la à bras-le-corps.La vie est une aventure,

ose-la.La vie est un bonheur,

mérite-le.

En terminant, permettez-moi de résumer cet exposéavec un appel qui m’habitecomme un de vos aînés. Unappel à la fois complice,critique et espérant.

Quand je fais une lectureseconde des expériences deréhabilitation que vous avezréussies dans vos initiatives etdémarches heureuses d’inter-venants comme praticiens,chercheurs ou cliniciens, jedécouvre que des jeunes ontsouvent rebondi lorsqu’ils onttrouvé avec vous un senséclaireur, libérateur etmotivateur. Un sens à leurpassage de vie, un sens à leurépreuve, un sens qui ressusciteleur idéal enfoui, etquelquefois, un sens à leurrévolte porteuse d’uneconscience en friche, enquête de lumière et d’ense-mencement. Ce qui interrogela qualité de nos propresprofondeurs morales etspirituelles où se logent lesressorts les plus décisifs de laconscience et de l’âmehumaine.

Il m’arrive de souhaiter desrecherches sur cette dynamiquefondamentale et existentielle du sens,sur ses différentes formes d’éclosion etde cheminement dans les processus deréhabilitation. Je ne suis pas sûr quenous ayons exploré vraiment lespotentialités de cet ordre dans lenouvel art de vivre au meilleur denotre modernité, ces nouveaux sensqui rehaussent nos consciences, notrehumanité. La pertinence de notretravail est largement tributaire de laqualité de notre propre philosophie dela vie, de notre finesse d’analyseculturelle, de conscience et d’âme.Personne de vous ne peut dire que cen’est pas son créneau. Les appelsactuels des jeunes même les pluspaumés sont marqués par ces nouvelles

sensibilités et ces nouveaux sens tapisdans la conscience moderne àdésenfouir et à cultiver.

Nos technologies de crise et leurstenants me semblent trop pauvresphilosophiquement, culturellement etspirituellement. Pauvres autant auplan d’une solide culture humanistequ’au plan de la culture religieuse.C’est un appel que je vous faisrespectueusement et non unecondamnation. Il y a bien des formesd’analphabétisme. Celle-ci est aussitragique que les autres. Au soir de mavie, c’est là une de mes plus grandespeines qui n’a rien d’une quelconquenostalgie passéiste, moralisatrice ouconfessionnelle. L’âpreté et laprofondeur des problèmes et des défis

que nous pose cette largecohorte fragilisée de lajeune génération ap-pellent en nous-mêmeune meilleure prise sur lessources et ressources dedépassement de l’âmehumaine, sur des horizonsde sens mieux déchiffrés.Erikson, un de nos grandsmaîtres à penser en notredomaine, disait : «Noussommes ce qui nous survit». Dans cettesociété, où tout se joue àcourt terme, nousoccupons stratégique-ment un des rares lieuxhumains concrets de longterme. À ce chapitre,notre responsabilité estaussi politique. Là encore,il nous faut être desespérants lucides, têtus etentreprenants. Les jeunesont besoin de cette fibred’adulte.

À bon entendeur, salut ! ✒

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L’enfer du premier contactJean-Rosemond Dieudonné, agent de relations humaines, DPJ

Premier contactP r e m i e r c o n t a c t

Lors d’un atelier durant la journéeprofessionnelle du

31 mai dernier, nousavons partagé notreréflexion sur notre

approche d’interventiondans le cadre de la Loisur la protection de lajeunesse (LPJ). Nousnous sommes attardéssur l’impact de cette

démarche sur lacompétence parentale,

thème retenu pourcette journée.

Le concept d’autoritéimbriqué dans le

principe de cette diteloi nous questionne

quant à son apport audéveloppement de la

compétence parentale.

La question demeure entière:

«Notre interventionfavorise-t-elle

ou entrave-t-elle la compétence parentale ?».

BREF HISTORIQUE

S ans vouloir faire l’apogée de la loi,nous nous contentons de vous

proposer certaines références etévénements qui ont précédé l’appli-cation de cette loi tel que nous laconnaissons aujourd’hui.

Avant 1951, la famille était connuecomme étant la base de tous les servicesd’entraide. On parlait de la charitéprivée qui, de l’entourage direct estdevenue l’affaire de toute la paroissedonc chasse gardée de l’église. Avecl’avènement de l’ère industrielle,l’autorité civile s’implante en offrantdirectement des services d’assistance à lafamille. Vers 1944, une première loivotée n’a pas pu entrer en vigueur pourdifférentes raisons (changement degouvernement, opposition à l’intrusionde l’état...). Il a donc fallu attendre 1951pour qu’une première loi sur laprotection de la jeunesse reconnaisse àl’état québécois toute la compétencepour intervenir auprès des enfants ditsalors exposés au danger moral etphysique. L'esprit et la lettre de cette loifavorisaient la substitution de l’état auxparents. Ainsi le juge était vu comme unbon père de famille qui devait dicter lafaçon de faire. De 1972 à 1975, plusieurstentatives de modification de la loi ontéchoué. Le 17 juin 1977, le projet de loino 24 a été déposé à l’AssembléeNationale. Cette loi a été adoptée à lahâte, le 24 décembre 1977 et est entréeen vigueur le 15 janvier 1979. Cette loienglobait tous les mineurs âgés de plusde 14 ans qui commettent des infractionsau code criminel.

En 1984, suite à la CommissionCharbonneau, il y a eu une dissociation

entre la Loi sur la protection de la jeunesseet la nouvelle loi sur les jeunescontrevenants. Fait remarquable : c’estla première fois que la question de laprimauté de l’autorité parentale a étémentionnée et reconnue (sur papier).On parle alors de l’interventioncomplémentaire de l’état dans dessituations exceptionnelles.

De 1984 à 1994, la Loi sur laprotection de la jeunesse a connudiverses modifications en lien avecdifférents amendements ou travauxdont les rapports Harvey, Bouchard...La notion de reconnaissance de laresponsabilité parentale a franchitoutes les étapes théoriques.

LA LPJ VERSUS POUVOIRET SON APPLICATION

La Loi sur la protection de la jeunesseaccorde un grand pouvoir au directeurde la Protection de la Jeunesse et à sesmandataires. Comment l’exerce-t-on ?Pour tenter de le comprendre nous noussommes attardés sur deux principesfondamentaux de la loi.

La recherche de l’intérêt de l’enfant

Ce principe est aussi énoncé dansl’article 33 du Code civil du Québecoù il est identifié que la meilleurefaçon de rechercher l’intérêt del’enfant est de favoriser d’une part,l’exercice de la responsabilitéparentale et, d’autre part, de s’im-miscer le moins possible dans la vieprivée de la famille.

Précisons que l’article 3 de la LPJrappelle ce principe. En effet, les

Premier contactP r e m i e r c o n t a c t

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décisions prises en vertu de la loidoivent l’être dans l’intérêt de l’enfantet dans le respect de ses droits. Ainsidoivent être pris en considération lesbesoins physiques, affectifs, intel-lectuels et moraux de l’enfant, et ce, enregard de son âge, de sa santé, de soncaractère et de son origine familiale etethnique.

La primauté de la responsabilité parentale

L’article 2.2 de la LPJ rappelle quela responsabilité d’assumer le soin,l’entretien et l’éducation d’un enfant etd’en assurer la surveillance incombe enpremier lieu à ses parents. Ajoutons quece sont d’abord les parents qui sont viséspar l’article 38 de la LPJ. En ce sens, laprotection des enfants passe parl’interpellation auprès des parents decette responsabilité et sur le soutien àleur accorder pour qu’ils exercent cettedite responsabilité. Nous sommesconscients toutefois que certainessituations nécessitent l’intervention du DPJ lorsqu’il y a «défaillanceparentale». Cependant cette inter-vention n’a pas pour but de se substitueraux parents mais elle doit les sensibiliseraux manquements dans l’exercice deleur rôle parental et les encadrer dansune démarche de correction de lasituation. Car le principe de laresponsabilité parentale nécessitel’implication des parents dans lesmoyens pour mettre fin à la situation decompromission. L’intervention doitpermettre d’agir avec les parents et de nesubstituer à eux que dans des situationsexceptionnelles (incapacité reconnue,abandon, mort d’un parent...).

Il faut se rappeler que la LPJ visela satisfaction minimale des besoinsessentiels d’un enfant. Elle n’a pas pourobjectif la satisfaction de tous lesbesoins d’un enfant mais de corriger lessituations compromettant sa sécuritéet son développement. Une fois cemandat accompli, la LPJ n’a plus saraison d’être. La LPJ est avant tout uneloi curative et non préventive.

LE PREMIER CONTACT ET LA COMPÉTENCE

PARENTALE

Si par sa nature même, la Loi sur laprotection de la jeunesse entre d’autoritédans la vie des familles, dans quellemesure favorise-t-elle la compétenceparentale ?

La réponse débute dès notrepremier contact avec la famille. Elleest liée à prime abord à notreconnaissance de la loi, donc au savoir.Il est donc primordial d’en maîtriserles principes, l’esprit et la lettre de laloi et le cadre de son application…

Le premier contact est le début del’intervention et il détermine la forme etle sens du processus. Nos professeurs à

la rentrée dans leur allocution morale dirait : «Qui veut juin, prépare octobre». C’est la partie la plusimportante de notre intervention. Iln’existe pas de manuel explicite quinous dicte comment établir notrepremier contact. Ceci est souventdéterminé par nos préjugés, l’imagequ’on se fait du client, son milieu,l’image reçue de la communauté... Lecôté humain peut facilement passer dansl’oubli. Notre intervention doit être

capable aussi de confirmer les capacitésparentales. Ne perdons pas de vue quenous sommes en relations humaines…

En ayant en tête la notion deprotection, nous vous lancerions laquestion suivante : «En situation d’ur-gence, qu’est-ce qui différencie unpolicier, un ambulancier et unintervenant DPJ ? ».

Le policier a un outil visible : ununiforme, une arme ou une matraque ;l’ambulancier, une civière, des instru-ments médicaux. L’intervention de cesdeux personnes est souvent souhaitée.Cependant, en tant qu’intervenant,qu’avons-nous comme outil ?

Notre instrument d’intervention,c’est nous ; notre savoir-être, c’est

notre outil et l’utilisation de cet outilc’est le savoir-faire…

En recevant un signalement, nousavons le pouvoir de frapper à la portefermée. Une fois à l'intérieur, cepouvoir peut déterminer l’avenir d’unenfant pour les cinq à dix prochainesannées. Sommes-nous toujoursconscients de ce geste ? C’est là qu’ilfaut se demander si nous sommes ànotre place. Se réfère-t-on à son MBTI

Premier contactP r e m i e r c o n t a c t

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(indicateurs de type psychologiqueselon Myeres-Briges) ? Nous avons ledroit d’être ébranlé, déstabilisé par ceque nous avons vu et perçu. Maissachons que le père, la mère derrière laporte est un être humain avec descraintes, des peurs et aussi des

compétences. En étant juste em-pathique, on peut «arroser les fleurs aulieu des mauvais herbes». Il n’existepas de parents pourris mais des parentsdépassés, désorganisés, paniqués,mêlés. Va-t-on les désorganiserdavantage avec le pouvoir DPJ ? Sepropose-t-on de changer le mondeselon nos propres références ouschèmes de valeurs tandis que le parentest démis au nom de quelle inter-prétation d’expert ? Lafontaine dans Leroi, l’astrologue, le charbonnier et l’âne

nous donne une leçon non moinspertinente. Le roi allait à la chasse sousle conseil de son astrologue qui luiprédit le beau temps. En cours deroute, il rencontre le charbonnier quilui annonce une averse assurée. Celui-ci continue son chemin. À son retourtout trempé, il rencontre à nouveau le charbonnier. Il lui demande : « Comment saviez-vous qu’il allaitpleuvoir ?». Le charbonnier réponditque c’est grâce à son âne ; quand cedernier marche les oreilles penduespresque sur les yeux, c’est signe qu’il vapleuvoir en averses. En colère, le roi dedire qu’un âne est plus intelligent queson astrologue.

Le parent a toujours quelque choseà nous dire et à nous apprendre. Luilaissons-nous le temps de le faire ? Lepremier contact est déterminant danscette démarche. Il faut dépasser lesclichés du genre : montrer commentfaire aux parents. Comment faire dif-féremment, n'est-ce pas plus structurel ?Les expressions telles que «Vous n'êtespas d’accord , on se verra en Cour» sontmortelles à l’intervention. La compé-tence parentale peut être bafouée parl'utilisation inadéquate de notre savoir-faire. Peu importe nos préjugés, pensezque le parent en a aussi et que sadéception sera connue par 20 ou 30autres parents. Lors du premier contact,notre façon d’aborder le client peutchanger la colère en une demanded’aide convaincante. D’ailleurs, notreprésence tributaire de notre statut, adéjà déstabilisé le parent, alors à quoi çasert-il de frapper quelqu’un déjà parterre ? Mettons la loi de côté juste uninstant pour regarder l’humain à traversce parent et cessons de légaliser nos

valeurs individuelles à travers notreintervention DPJ.

Comment faire de la compétenceparentale et de la connaissance profes-sionnelle une expérience positive etrentable ? L’image se crée après cepremier contact. Les parents ontsouvent besoin de temps pour sauver laface, y pensons-nous ? Par exemple, unpère donne une gifle à sa fille, quelleest votre première réaction ? C’est unviolent, direz-vous… Mais pour cepère, c’est peut-être le meilleur moyenqu’il connaît pour faire face à unecrise. C’est sa solution du momentpour arrêter l’impertinence de sa fille,la partagez-vous ? Alors, apprenez-luià faire autrement sans le blâmer àbrûle-pourpoint. Laissez-lui sauver laface surtout devant sa fille en l’aidant àtrouver des options.

Enfin, nous croyons que noussommes le premier outil de notreintervention dans notre aventuresociale de venir en aide aux enfantsdans le besoin et à leur famille. Nousdevons nous questionner et retourner àla source en établissant une relationd’aide qui donne concrètement dupouvoir aux clients. Nous demeureronsun facilitateur et un guide dans ledéveloppement de leur compétenceparentale… Ainsi si votre premiercontact ne se limite pas juste auprésent, 80 % de l’intervention estdéjà une réussite et mieux se porterontnos familles. ✒

N O T E S B I B L I O G R A P H I Q U E SNOTES BIBLIOGRAPHIQUES

1 Manuel de référence sur la protection de la jeunesse, Bibliothèque nationale du Québec, 1998.

2 Loi sur la protection de la jeunesse, Québec, juillet 2000.

Il faut se rappelerque la LPJ vise la satisfactionminimale des

besoins essentielsd’un enfant. Elle n’apas pour objectif lasatisfaction de tous

les besoins d’unenfant mais

de corriger lessituations

compromettant sasécurité et son

développement.Une fois ce mandataccompli, la LPJ n’aplus sa raison d’être.

La LPJ est avanttout une loi curativeet non préventive.

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Les Centres jeunesse de Montréal etle Centre de réadaptation Gabrielle Major :

une démarche partenariale

Michel Doray, conseiller partenariat réseau, DRD

Alain Germain, conseiller à la programmation, Direction de la qualité des services, Centre de réadaptation Gabrielle Major

Depuis plusieursannées, voire plusieursdécennies, le problème

d’arrimage entre lesservices offerts aux

jeunes vivant avec unedéficience intellectuelle

desservis par lesCentres jeunesse deMontréal posaientconstamment des

problèmes.

Les intervenants se butaient àd’importantes

difficultés d’arrimagelors des demandes de

transfert vers lescentres de réadaptation

pour personnesdéficientes

intellectuelles (CRDI)notamment sur

les délais d’attente qui dépassaient souvent un an.

E ntre 1995 et 1998, une trentainede jeunes attendaient dans lesCentres jeunesse de Montréal

des services en CRDI dont quelques-unsavaient plus de dix-huit ans. LaDirection de la protection de la jeunessese voit obligée d’imposer un jeunedéficient afin qu’il reçoive les servicesappropriés à ses besoins. Dans unpremier temps, cette imposition estcontestée pour finalement êtreacceptée. Les relations sont plus tenduesque jamais. La Régie régionale deMontréal-Centre tente de solutionner leproblème en animant une démarcheentre les deux types d’établissement. LesCentres jeunesse et de la famille Batshaw etle CRDI anglophone ont participé auxdiscussions. Un processus conjointd’accès aux services a été élaboré quidevait s’appliquer à tous les jeunes del’île de Montréal vivant avec unedéficience intellectuelle. Il fautsouligner que cinq CRDI se partagent leterritoire de l’île de Montréal.

Malheureusement, dès la premièretentative de mettre en place le processusconjoint, nous avons pu observer quetous les CRDI n’adhéraient pas à cetteentente dite «régionale» et la situationdemeurait inchangée à savoir délaisd’attente très longs, demandesnombreuses de contre-expertise, situa-tions litigieuses arbitrées par la Régierégionale. Il faut cependant souligner

que, pendant cette période, les CRDIavec le concours de la Régie régionale ontfait un effort pour diminuer les listesd’attente et ainsi permettre aux jeunesconcernés de bénéficier des services quicorrespondaient à leurs besoins. Maissans un changement dans les méthodesde travail, la situation allait resurgir ànouveau, les listes d’attente allaient sereconstituer et les relations entre lesétablissements seraient toujours aussidifficiles.

C’est alors que les Centres jeunessede Montréal ont proposé au CRDIGabrielle Major d’élaborer un projetcommun qui permettrait d’expérimenterdans l’est de Montréal1 le processus quiavait été discuté quelques mois plus tôt àla Régie régionale. La direction du CentreGabrielle Major avait représenté lesCRDI aux discussions régionales etpartageait les principes de l’entente diterégionale. Une démarche partenariales’est alors amorcée et on peut constateraujourd’hui qu’elle donne des résultatsnettement supérieurs à ceux anticipés au départ.

UNE DÉMARCHE PARTENARIALE

Cet article vise à relater l’évolutiondu dossier qui a permis de solutionner enpartie les problèmes d’organisation deservice entre deux établissements mais

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18 aussi à comprendre la démarchepartenariale qui a été réalisée. Commeon le voit dans la description ci-dessusles relations entre les CJM et les CRDIsont difficiles, tendues et pour le moinsdistantes. Les intervenants des CJM necroient pas aux capacités des CRDId’assumer la clientèle qui leur estdévolue pas la LSSSS2; ils croient que lesCRDI cherchent à refuser les usagersplutôt que de chercher à les accueillir.De leur côté, les intervenants des CRDIont l’impression que leurs collègues desCJM ne comprennent pas leur réalité ;que les CJM réfèrent à la dernièreminute les jeunes qui vont atteindre 18ans, qu’ils soient volontaires ou non etque les CRDI aient les moyens ou nonde les accueillir. Si on transpose sur lagrille des étapes du développement desrelations partenariales (figure 1), lasituation se situe dans la partieinférieure gauche du graphique où lespréjugés et la méfiance dominentnettement. Alors comment sortir de cetimbroglio ?

Le graphique nous indiqueclairement, que pour dépasser l’étape

des préjugés, il faut augmenter laconnaissance mutuelle des différentsacteurs concernés. Dès l’automne1998, des représentants de la directionde la qualité des services du CRDIGabrielle Major et de la Direction de larecherche et du développement(DRD) des CJM ont décidé depréparer un protocole d’ententeconcernant un processus conjointd’accès et de planification des services.Il faut souligner que les directions desdeux établissements avaient décidé detrouver une solution concrète etdurable aux problèmes d’arrimageentre les deux établissements. Dès lors,cet appui formel constituait unecondition nettement facilitante.

La démarche partenariale a prisdeux formes : la préparation d’un texteformel d’entente et des activités de prisede contact entre différents acteurs.Ainsi, un groupe de travail constitué desservices d’accès de chaque établis-sement, des directions supports etservices directs aux jeunes a permis dediscuter du texte, d’organiser desrencontres d’information et de discuter

des situations de jeunes en attente. Despersonnes qui transigeaient ensembledepuis des années, qui ne s’étaientjamais rencontrées, ont pu échangerdirectement sur la perception desservices. Ainsi, les agents à l’accès deGabrielle Major et les conseillers àl’accès des CJM se sont rencontrés pourmieux connaître les services de l’autreétablissement. Ce type d’activité apermis de diminuer les tensions quiexistaient, de mieux connaître lesréalités de chacun et de développer unecertaine complicité en vue d’unemeilleure coordination des services.

PRÉSENTATION DE L’ENTENTE

Le 20 février 2000, les directeursgénéraux des deux établissementssignent formellement l’entente. Le butvisé par les parties est d’élaborer et d’ex-périmenter un processus conjoint d’accèsaux services dont les objectifs sont :

✓ de développer une visioncommune et complémentaire desservices à offrir aux personnes

2001

1998

2000

1999

Figure 1 : Étapes de développement du partenariat et des relations partenariales

Créativité(conception et réalisation de projets communs)

Collaboration(aide mutuelle, réf. de clientèle, liens de confiance)

Reconnaissance de l’autre(son expertise, son rôle)

Apprivoisement mutuel

Utilitaire et pratique(connaissance formelle)

Reconnaissance

Connaissance

Préjugés

Absence de collaboration, neutralité

Confusion,inquiétude

Zone de conflits(domination, opportunisme)

Méfiance,distance

Attitudedéfensive

utile respectueuse responsable de confiance engagée

Une conception de l’équipe partenariat/réseau

Relation

Le partenariat

2001

Niveau

de

comp

lémen

tarité

1998

1999

2000

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desservies par les CJM etprésentant une déficience intel-lectuelle, et ce, en fonction desservices et ressources spécifiques dechaque établissement ;

✓ de favoriser un accès rapide à desservices adéquats aux personnesdesservies par les CJM et présentantune déficience intellectuelle ;

✓ d’actualiser un processus d’accèsaux services offerts par les CJM etCRDI Gabrielle Major, telqu’illustré à la figure 2, quipermet l’implantation d’un modede collaboration entre les deuxétablissements en harmonisantles procédures de référence, lacoordination des services offertset le transfert des personnes d’unétablissement à l’autre.

Comme le démontre la figure 2,aucun jeune vivant avec une déficienceintellectuelle ne devrait être desservi par

les CJM sans un apport du CRDI. Dèslors pour la clientèle visée par l’entente,s’engageait un processus qui faisait ensorte que les jeunes étaient «clients» desdeux établissements et cela éliminait àlong terme l’étape du transfertinterétablissements.

Les personnes visées par l’ententeétaient les suivantes3 :

✓ des personnes pour lesquelles undiagnostic formel de retard globalde développement (pour lesenfants de moins de cinq ans) oude déficience intellectuelle a étéposé et pour lesquelles ledirecteur de la Protection de lajeunesse a déclaré que la sécuritéou le développement estcompromis en vertu de l’article38 de la LPJ et pour qui, uneorientation vers des interven-tions d’adaptation, de réadap-tation et d’intégration sociale estrequise afin de mettre fin à la

situation qui compromet lasécurité et le développement deces personnes et d’éviter qu’ellene se reproduise ;

✓ des personnes pour lesquelles undiagnostic formel de retard globalde développement (pour lesenfants de moins de cinq ans) oude déficience intellectuelle a étéposé et qui sont prises en chargepar les CJM dans le cadre de laLPJ au moment de la signaturedes présentes pour lesquelles lesCJM offrent uniquement desservices psychosociaux ;

✓ des personnes pour lesquelles undiagnostic formel de déficienceintellectuelle a été posé, desserviespar les CJM sous l’application de laLJC et pour lesquelles le directeurprovincial est impliqué ;

✓ des mères en difficulté d’adapta-tion pour lesquelles un diagnostic

Personnes référées au CJM en vertu de l’article 4 de l’entente

Table d’accèsÉlaboration ou modification d’un plan de services

La première rencontre est convoquée par le conseiller à l’accès des CJM.

Situationurgente

Situation non urgente

Planification concertée del’organisation des servicesdans les 3 jours ouvrables

Évaluation par l’agente à l’accès du CRPDI-GM

Services avechébergementofferts par lesCJM avec la

contribution duCRPDI-GM

Services avechébergementofferts par le

CRPDI-GM avecla contribution

du CJM

Fin des servicesconjoints

Services dans le milieu offertsconjointementpar les CJM et le CRPDI-GM

Évaluation par l’agente à l’accès du CRPDI-GM

Évaluation par l’agente à l’accès du CRPDI-GM

Référence au CRPDI-GM par leconseiller à l’accès des CJM

Figure 2 : Processus conjoint d’accès et de planification des services Centres jeunesse de Montréal/CRPDI Gabrielle-Major

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formel de déficience intellec-tuelle a été posé et desservies parles CJM ou par le CRDI GabrielleMajor.

Les jeunes déjà desservis par lesCJM en réadaptation qui avaient faitl’objet d’une demande de transfertinterétablissements n’avaient pas étéinclus dans l’entente. Nous avionsconvenu de traiter ces situations selonle processus habituel. Par contre, dès lapremière rencontre du comité de suivide l’entente, ces situations ont étédiscutées et dans bien des cas, dessolutions ont été trouvées.

L’entente prévoyait la mise surpied d’un comité de suivi dont lemandat était de :

✓ mettre en place les conditionsnécessaires pour actualiser laprésente entente ;

✓ analyser l’application de l’ententeet recommander aux autoritésconcernées toutes les modificationset mesures devant être apportéesafin d’améliorer la complémen-tarité et la qualité des services ;

✓ favoriser l’élargissement et l’ajuste-ment de la présente entente auxbesoins actuels ou futurs identifiéspar les parties ;

✓ étudier les situations litigieuses etproposer des solutions concrètes.

Le comité était composé de quatrereprésentants par établissement avec lapossibilité d’inviter toute personneconcernée par une situation. Plus d’unan après la signature de l’entente, douzepersonnes font partie du comité : lesservices d’accès (deux personnes parétablissement), les représentants desservices (une personne par établis-sement), les gestionnaires des ressourcesintermédiaires (deux personnes), lesdirections supports (deux personnes), laDPJ et une personne observatrice de laRégie régionale.

Depuis la signature de l’entente,le comité a tenu sept rencontres, atraité 25 situations dont trois se sontavérées de nouvelles demandes, 16 situations ont été réglées à lasatisfaction des parties dont quatrefont l’objet d’une offre de servicesconjoints et neuf dossiers sont enattente de services mais avec un pland’action concerté pour gérer la périoded’attente. Il faut souligner, qu’aucunesituation ne fait l’objet d’un litige.

Lors d’une rencontre bilan ducomité de suivi les constats suivantsont été faits :

✓ Les besoins des jeunes et lesservices requis sont identifiés plusrapidement. Récemment, lorsd’une présentation du bilan del’entente, la coordonnatrice àl’accès de Gabrielle Majoridentifiait un gain important detemps qui se situaient entre quatreet six mois sur les modalitésantérieures.

✓ Il y a une meilleure connaissancedes expertises disponibles danschaque établissement et, danscertains cas, leur mise encommun a permis de trouver dessolutions totalement inacces-sibles sans un partenariat bienstructuré4.

✓ Le travail conjoint a permis dedévelopper une compréhensioncommune des besoins des jeunes eta favorisé une meilleure orien-tation dans les services du Centrede réadaptation Gabrielle Major.

Le climat de travail convivial basésur la confiance et le respect a permisde discuter des situations et de dépasserle cadre de l’entente pour chercher dessolutions originales et novatrices auxproblèmes rencontrés.

Le comité de suivi a cependantdécidé de consulter les personnes dedeux établissements qui, au cours de ladernière année, avaient eu à intervenirauprès de jeunes vivants avec unedéficience intellectuelle. L’objectifétait de vérifier si les personnespercevaient des changements dans lesrelations et les services suite à lasignature de l’entente.

UN SONDAGE «BILAN»

Au total, vingt-deux personnes ontrépondu au questionnaire. Le taux derépondant est de 30 % pour les CJM, soit12 personnes et de 66 % pour le CentreGabrielle Major, soit 10 personnes. Lamajorité (18/22) des répondantstravaillent directement auprès de la

Il faut souligner

que les directions

des deux

établissements

avaient décidé de

trouver une

solution concrète

et durable aux

problèmes

d’arrimage entre

les deux

établissements.

Dès lors, cet appui

formel constituait

une condition

nettement

facilitante.

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clientèle (accès, DPJ, dispensation desservices).

Vingt personnes savaient que lesdeux établissements avaient signé une entente et la grande majorité (72 %) en connaissaient partiellement (7 personnes) ou parfaitement (9 per-sonnes) le contenu.

Les répondants connaissent lesservices de l’autre établissement : unepersonne affirme bien les connaîtretandis que 50 % des répondants lesconnaissent bien et 40 % ne lesconnaissent que partiellement. Le

comité de suivi trouve ces résultatsintéressants ; par contre, il fautnettement augmenter le nombre depersonnes qui connaissent bien lesservices offerts par le partenaire. Desrencontres et des sessions d’informationsont justement à l’ordre du jour.

Outre la connaissance, il fallaitaussi vérifier si les personnes separlaient régulièrement. Alors, nousavons vérifié si depuis février 2000, lesrépondants avaient eu des discussionstéléphoniques ou participé à desrencontres sur la situation d’un ou desjeunes avec les représentants de l’autre

établissement. Tous les répondants(sauf une personne) ont eu descontacts au moins quelques fois parannée et près de 40 % ont des contactstous les mois. Il est difficile decomparer avec le passé mais, l’onconstate que les personnes concernéessont en lien assez régulièrement ce quisemble être une amélioration selon lescommentaires recueillis.

Près de 70 % des répondants ontperçu une amélioration dans lesrelations entre les deux établissementset près de 60 % ont perçu uneamélioration dans les services offerts àsa clientèle par l’autre établissement. Ilssoulignent dans leurs commentaires :

«…un meilleur arrimage des services… »

«…des relations interpersonnellesplus faciles… »

«…des délais plus courts… »«…on se rejoint, se comprend et

s’entraide plus facilement… »«…les jeunes ont accès à des services inconnus

antérieurement… »

L’amélioration des relations et desservices semble se traduire par unebonne ouverture d’esprit, des solutionsconcrètes et des objectifs d’interventioncohérents. Soulignons que les trèsgrandes majorités des répondants sonttotalement d’accord avec les affir-mations suivantes :

✓ De façon générale, lors desdiscussions sur la situation d’unjeune, les partenaires manifestentune bonne ouverture d’esprit(18/22) ;

✓ Lors de discussion, pour favoriserl’accès aux services, les partici-pants proposent des actionsconcrètes (17/22) ;

✓ Lors de discussions sur les servicesà dispenser aux jeunes, lesparticipants s’entendent sur lesobjectifs à poursuivre (17/22).

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Dans leurs commentaires, lesrépondants soulignent la meilleurecompréhension des missions et desservices, l’effort constant de part etd’autre de collaboration et le fait queles discussions soient centrées sur lesbesoins des jeunes et la recherche desolutions. Ce dernier élément estparticulièrement intéressant pour lecomité de suivi car il démontre que lesconsidérations politiques et admini-stratives ne semblent pas s’ingérerdans les discussions d’ordre clinique.

À 80 %, les répondants sonttotalement ou partiellement en accordavec les affirmations suivantes :

✓ Les jeunes déficients intel-lectuels desservis par les CJMreçoivent plus rapidement desservices du Centre GabrielleMajor ;

✓ Les jeunes reçoivent des servicesqui correspondent mieux à leursbesoins ;

✓ Le partenariat entre les deuxétablissements favorise la conti-nuité des services.

Au chapitre de la dispensationdes services, les résultats sont aussi trèsintéressants. Les répondants sont enaccord avec les affirmations suivantes :

✓ Suite aux discussions avec lesreprésentants de l’autre établis-sement sur les services àdispenser aux jeunes, lesinterventions planifiées se sontréalisées (10 totalement enaccord et 9 partiellement) ;

✓ De façon générale, au niveau dela dispensation des services, leséchéanciers prévus ont étérespectés (3 totalement enaccord et 15 partiellement) ;

✓ Je connais bien les attentes desreprésentants de l’autre établis-sement lors des discussions sur les

services à offrir à un jeune (12totalement en accord et 4partiellement) ;

✓ Le partenariat entre les deuxétablissements a permis detrouver des solutions qui étaientinaccessibles avant la signaturede l’entente (11 totalement enaccord et 3 partiellement).

Malgré ce bilan très positif, toutn’est pas solutionné. Il faut préciser quecette entente touche uniquement l’est deMontréal. Les autres territoires ne sontpas touchés. Par contre, pour la régionnord des discussions sont amorcées avecle CRDI L’Intégrale pour établir uneentente de service. Pour la région ouestde Montréal, couverte par le CentreLisette-Dupras, les relations semaintiennent de façon traditionnelle.

Le travail de partenariat a permisune meilleure coordination desservices aux jeunes, notamment pardes délais de réponses plus courts etdes solutions alternatives lorsque leservice demandé n’était pasdisponible. On observe beaucoupmoins de frustration de la part despersonnes impliquées ainsi qu’unclimat de travail exceptionnel. Il yune meilleure compréhension desobstacles rencontrés par lesétablissements. Par contre, il fautsouligner le manque de ressourcesdisponibles pour les jeunes déficientsintellectuels. Les deux établissementsont réussi en deux ans à «assainir leurs relations» pour se centrer sur les besoins des jeunes et ainsi améliorerl’offre de services. Cette nouvellefaçon de faire, ce faire autrement, a deslimites qui sont nettement marquéespar le manque de ressources adéquates.

Le travail du comité de suividépasse le cadre de l’entente pouraborder des sujets importants quibalisent les relations entre différentsétablissements du réseau de la santé etdes services sociaux notammentl’imputabilité des établissements.

UN FONDEMENT :L’IMPUTABILITÉ

La notion d’imputabilité demeurela clé de tout processus d’accès auxservices. Dans toutes les situations, laclarification de l’établissementresponsable des services à offrir à unepersonne permet d’orienter lesdiscussions et les interventions defaçon à répondre plus rapidement etplus efficacement à ses besoins.

Selon ce principe, les Centresjeunesse de Montréal considèrent queles CRDI sont les établissementsresponsables de la dispensation desservices et de l’obtention des servicespour les personnes présentant unedéficience intellectuelle de tout âge.Deux éléments viennent corroborercette prémisse :

Dans son document intitulé LeDéfi de l’Accès5, la Régie régionalereconnaît aux centres de réadaptationen déficience intellectuelle un rôlecentral auprès de ces personnes. Cesderniers sont :

✓ imputables de l’obtention desservices aux personnes ayant unedéficience intellectuelle ainsi quede celles présentant des problé-matiques associées (déficiencesmultiples, perte d’autonomie,santé mentale, justice, troublesenvahissant du développement) ;

✓ responsables en matièred’évaluation globale des besoinsainsi que de dispensation desservices d’adaptation, de réa-daptation et d’intégration socialeen fonction des besoins spéci-fiques de ces personnes ainsi quedes services d’accompagnementet de support à l’entourage de cespersonnes.

Les centres de réadaptation endéficience intellectuelle de Montréalreconnaissent leurs responsabilitésauprès des jeunes de 0 à 18 ans et auprès

des personnes avec des conditions associées, notamment la clientèle ayantune déficience intellectuelle etprésentant des troubles graves ducomportement.6

En ce sens, les Centres jeunesse de Montréal considèrent que laresponsabilité clinique et financière duservice ainsi que l’obligation de rendrele service dans un délai raisonnableconstituent les éléments-clés duconcept d’imputabilité. Les CRDIdoivent être responsables du plan deservices individualisé. Dans la trèsgrande majorité des situations, lesCentres jeunesse de Montréal nedevraient pas assumer la responsabilitéde desservir un jeune déficientintellectuel sans qu’un plan de servicessous la responsabilité d’un CRDI soitélaboré. Dès que la déficience intel-lectuelle est identifiée7 chez un jeuneen besoin de service, il devrait êtredirectement référé au CRDI de sonterritoire afin que celui-ci rende lesservices qui sont sous sa responsabilité.

RELATIONS CJM-CRDI

En lien avec cette orientation,deux situations sont alors possibles. Lapremière, un jeune vivant avec unedéficience intellectuelle dont lasécurité ou le développement a étéjugé compromis par la Direction de laprotection de la jeunesse et ladeuxième, un jeune desservi par lesCJM dont la déficience aurait étéidentifiée en cours de services, le jeuneétant alors sous la responsabilité de laDirection des services à la jeunesse(DSJ) des CJM.

Dans la première situation, laDPJ a la responsabilité de référerl’enfant aux services les plus aptes àlui venir en aide dans le respect desmissions et mandats des établis-sements du réseau de la Santé et desServices sociaux. De façon générale,en fonction de l’expertise spécialiséeet de l’offre de service proposé, lesCRDI demeurent les établissements

les plus appropriés pour répondreaux besoins des jeunes vivant avecune déficience intellectuelle.

En ce qui concerne la deuxièmesituation, dès que la déficience intel-lectuelle est identifiée, une demandede service serait acheminée au CRDIpour que celui-ci prenne en charge leplan de services. Des modalitésdevraient alors être discutées avec leservice d’Accès des CJM pour untransfert de la responsabilité. Lesmodalités devraient prévoir uneévaluation des besoins par le CRDIafin que celle-ci permette dedéterminer le meilleur service à offriraux jeunes concernés.

Dans les deux cas, il faut aussicomprendre que les CJM ontl’obligation d’offrir le suivi psychosocial.Cependant, ils peuvent offrir oumaintenir des services complémentairesde réadaptation dans la mesure où desententes formelles entre les deuxétablissements sont établies sur la basede la règle d’imputabilité.

En guise de conclusion, il convientde mentionner que l’expérience de ladernière année entre les CJM et leCRDI Gabrielle Major démontre qu’il estpossible de mieux orchestrer les servicesdes deux établissements afin derépondre plus rapidement etefficacement aux besoins des jeunes. Lepartenariat développé dans le cadre decette entente qui met en place unprocessus conjoint d’accès et qui aévolué vers un mécanisme deconcertation au niveau de ladispensation des services, oblige lecomité de suivi à clarifier rapidement lanotion d’imputabilité et d’en dégager lesconséquences sur le fonctionnement desservices des deux établissements. Latable est donc mise pour une deuxièmeannée de travail du comité de suivi. ✒

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N O T E S B I B L I O G R A P H I Q U E SNOTES BIBLIOGRAPHIQUES1 Le CRDI Gabrielle Major couvre les territoires des CLSC suivants: Rivière-des-Prairies,

J. Octave Roussin, Mercier-Est/Anjou, Olivier Guimond, Hochelaga-Maisonneuve,Rosemont, St-Léonard.

2 La mission du Centre de réadaptation Gabrielle Major est d’offrir des services de réadaptationaux personnes présentant une déficience intellectuelle et demeurant dans l’est deMontréal.

3 Extrait de l’entente.4 Le partenariat se caractérise notamment par deux éléments: faire ensemble et obtenir des

résultats plus grands que la somme des services des partenaires qui seraient offerts séparé-ment.

5 Régie régionale de la Santé et des Services sociaux Montréal-Centre, Plan d’améliorationdes services de santé et des services sociaux 1998 –2002, Le défi de l’accès, juin 1998, 70.

6 Les centres de réadaptation en déficience intellectuelle de Montréal, L’expertise à votreservice, 37, 39 et 43.

7 Les CJM reconnaissent la définition de l’Association américaine sur le retard mental men-tionnée à la page 23 du document L’expertise à votre service.

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Groupes supportG r o u p e s s u p p o r t

L’expérience des groupes support aux parentspour contrer le phénomène des gangs :

des leçons pour l’intervention ?

Martin Goyette, coordonnateur, recherche sur les pratiques partenariales dans les CJM, IRDS

Jean Panet-Raymond, professeur, École de service social, Université de Montréal

Gwénola Van Hille, agente de recherche, IRDS

Nicole Dallaire, professeure, École de travail social, Université de Sherbrooke

L e phénomène des gangs de rueinterpelle de nombreux acteurs,d'autant que sa médiatisation le

hisse en tête des problématiquesd’intervention. Problématique socialecomplexe s’il en est une, sa résolutionparaît exiger la participation del’ensemble des acteurs sociauxfavorisant le bien-être et l’intégrationdes jeunes dans leur milieu (Hamel etal., 1998). C’est dans cette perspectiveque la recherche sur les pratiquespartenariales aux CJM s’est intéresséeaux pratiques des Groupes support auxparents (GSP1). Ainsi depuis avril1998, un groupe de chercheurs,d’intervenants, de gestionnaires desCJM et leurs partenaires participant àsix projets de partenariat ont formé ungroupe de travail. Une recherche2 aémergé des travaux de ce groupe,recherche dans laquelle chacun desprojets a fait l'objet d'une étude de cas3

(Yin, 1994). Cet article est doncl’adaptation d’une étude de cas réaliséepar l’équipe de recherche, étude de casqui s’appuie sur le point de vue desacteurs de cette intervention.

Le projet Groupe support aux parents (GSP) est une interventionexpérimentée entre 1987 et 1994 à

laquelle collaborent le SPCUM, lesCJM et, selon les territoires, d’autresorganismes communautaires ou institu-tionnels. Le projet GSP était uneformule d’intervention de groupe quivoulait sensibiliser les parents à laproblématique des gangs de rue ; gangsauxquels leurs jeunes étaient associés.Cette sensibilisation des parentssouhaitait leur permettre de reprendreleur autorité.

Contrairement aux autres projetsà l’étude, les GSP n’ont pas donné lieuà une intervention au moment denotre collecte de données4. Malgrécela, il apparaissait intéressant, dans lecontexte du développement d’une « approche milieu », d’envisager lesfacteurs ayant contribué à la mise surpied, à l’absence de continuité et àl’échec de la réimplantation du projet,à partir du point de vue privilégié des intervenants qui réalisent lacollaboration. De plus, au-delà duprocessus de structuration de lacollaboration, nous avons analysé, àl’instar des autres projets à l’étude, lesretombées envisagées du projet surl’intervention dans le domaine de lajeunesse. Ce regard, nous l’espérons,contribuera à la réflexion des différents

intervenants et preneurs de décisionquant aux interventions futures enregard du phénomène des gangs de rue.

GENÈSE ET STRUCTURATION

DU PROJET

Afin de dégager le portrait descollaborations mises en place par lesGSP, nous tracerons l'évolutionhistorique du projet. À l'origine, leprojet GSP a été intimement associé audéveloppement d’un autre projet, lesgroupes-contact (GC) où les policiersont joué un rôle important, à tel pointque l’intervention GC est devenuerapidement la première étape (phase 1)d’une intervention devant se poursuivreen GSP. Il sera donc nécessaire parfoisd’envisager conjointement l’évolutionde ces deux interventions pourcomprendre les enjeux du projet GSP.

Les premiers groupes support auxparents (1987-1992)

Préoccupés par ce qu’ils nomment«l’embrigadement» des jeunes recevantles services des organismes sociaux deLaval, quelques intervenants dévelop-pent des projets s’adressant aux parents

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de jeunes ayant des activités présuméesen lien avec des bandes de jeunes. Deuxprojets ont particulièrement influencél’émergence des GSP.

LES GROUPES DE PARENTS CONFRON-TÉS AU PHÉNOMÈNE DES GANGS

En 1987, des intervenants duBureau de services sociaux de Laval (BSSLaval) développent un projet dontl’objectif est de «travailler avec lesparents pour qu'ils retrouvent leur rôled'autorité », parce que souvent ilsavaient «baissé les bras». «Les parentsmanquaient de structure, de fermetéavec leurs jeunes. Leurs jeunes étaientlaissés à eux-mêmes et ces jeunes-làmanquant de structure, ils enrecherchaient ailleurs», soit dans legang. Dans cette optique, le groupe deparents était exclusivement destinéaux parents et ceux-ci avaient pourconsigne de refuser de répondre auxquestions de leurs jeunes sur leurpropre regroupement, «ce sont desaffaires d'adultes» (Bernier, 1991).

Dans le cadre de ce projet, lesparents ciblés étaient ceux de jeunes quirecevaient des services du BSS (Bureaude services sociaux) identifiés à partir ducase load des intervenants du BSS Laval.L'un d’entre eux convoquait les parentsà une première rencontre où desinformations sur le fonctionnement dela gang, l'implication des jeunes danscelle-ci et les «moyens de vaincre leurimpuissance» face au gang leur étaientdonnées (Laroche et coll., 1992). Cetterencontre était coanimée par l'inter-venant du BSS Laval, responsable de laconvocation, et un intervenant duCLSC. Au terme de cette premièrerencontre, les animateurs ciblaient lesparents qui manifestaient des besoins. Etils leurs proposaient cinq autresrencontres dont l’objectif était deconduire les parents à retrouver leurautorité parentale.

Ce projet aurait rejoint dixparents pour une vingtaine de jeunessur six rencontres5. Selon Laroche et

coll. (1992), «le groupe de jeunes aucentre de la problématique a été“désintégré”» et «le recrutement denouveaux membres à Laval a ainsi prisfin». De même, il est rapporté que leclimat de calme est revenu dans lesquartiers touchés. Cependant, l’idée « d’une nécessaire collaboration »entre BSS, CLSC, organismes commu-nautaires et policiers a émergé de cetteexpérience (Châles, 1995). Cettecollaboration est demeurée toutefoisinformelle, circonscrite à la partici-pation autour de jeunes recevant desservices.

Si ce projet a fait l’objet d'un bilanpositif (Laroche et coll., 1992), une desprincipales difficultés a été la questionde la référence au projet. En effet, siinitialement, les collègues des deuxintervenants-animateurs devaient ciblerdes jeunes faisant partie de gangs, ceprocessus de référence dans la réalité n’apas fonctionné. En outre, bien que ceux-ci aient pu trouver une certaine margede manœuvre auprès de leur supérieurimmédiat, le projet reposait essentiel-lement sur ces deux intervenants dont latâche principale relevait de l’inter-vention psychosociale.

LE GROUPE SUPPORT AUX PARENTSÀ SAINT–EUSTACHE

En s'inspirant du projet qu'il aanimé, un des deux intervenants duBSS Laval supervise (en 1989) plusieursintervenants de l'Accueil Commu-nautaire Jeunesse, du Centre d'accueil des Laurentides et de la Police de Saint-Eustache, lesquels animent desgroupes de parents. À l'instar del’expérience de 1987, «des problèmesde comportement de plus en plus graves» (Laroche et coll., 1992) dejeunes de Saint-Eustache ainsi que leur «embrigadement» dans un mouvementSkinhead sont à l’origine de cetteintervention auprès de leurs parents. «Afin de revaloriser l'autorité parentaleet aider ces parents à reprendre lecontrôle de la situation», une plusgrande place leur est laissée dans la

dynamique du groupe, les animateursagissant également à titre demodérateurs. (Laroche et coll., 1992).Dans le cadre de ce projet, «le groupede parents comprend en moyenne dixadultes. Certains en font partie depuisle début alors que d'autres s'y greffent àmesure qu'ils en entendent parler etréalisent que leur enfant fait partie desskinheads» (Bernier, 1991, p.11). C'estdonc un groupe ouvert. Au total, 17parents de la région de Saint-Eustacheont adhéré à la démarche (Bernier,1991). Le fonctionnement général dugroupe est le même qu’à Laval en 1987sinon que les références provenaientégalement de l’organisme commu-nautaire participant au projet.

Les perceptions des retombées dece projet sont positives (Bernier, 1991 ;Laroche et coll., 1992). Pour lesintervenants, le projet permet unemeilleure concertation dans l'inter-vention individuelle. Pour les jeunes etleur famille, la vigilance des parentspermet de ralentir le recrutement denouveaux membres de gang (Bernier,1991). De plus, les parents seconcertent, se supportent et reprennentleur autorité parentale (Bernier, 1991).Pour le milieu, Laroche et coll., (1992)constatent que le climat de certainsparcs ou lieux publics a pu être «assaini». La cellule initiale deskinheads éclate (Laroche et coll.,1992).

LA STRUCTURATION DE LA PROGRAMMATION

DE ROSE-VIRGINIE PELLETIER POUR CONTRER

L’EMBRIGADEMENT

En 1990, le centre Rose-VirginiePelletier (RVP) et le Centre des servicessociaux du Montréal métropolitain(CSSMM) développent trois voletsd'intervention pour «soutenir lesintervenants, les parents et les adoles-cents impliqués». Ces interventionssupervisées par une conseillère de RVPvisent « la création d'un comitépermanent de soutien et d'information

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Groupes supportG r o u p e s s u p p o r t

aux intervenants [du CSSMM et deRVP] concernant les faits et gestes desgangs et des modes de participation desadolescents dont ils ont la charge», «une intervention spécifique auprèsd'adolescentes (CLSC Montréal-Nord,et RVP)» (Lavallée, 1994), qui prend laforme de plusieurs rencontres de groupesavec des adolescentes jugées aux prisesavec des problèmes de gang afin de lesinciter à «réfléchir sur leur exploitationpar les gangs». Un soutien leur est offertpour les éloigner ou pour qu'elles seretirent de la bande. La collaborationd'un policier de l'escouade gang estessentielle dans ce volet. Un groupe desoutien aux parents est formé et vise à «alerter ces derniers quant à leurméthode éducative» et à favoriser uneentraide naturelle entre les parents dugroupe (Lavallée, 1994 ; Châles, 1995).Le groupe soutien aux parents étaitanimé par trois intervenants6 des deuxorganisations avec le support demembres du SPCUM (Laroche et coll.,1992).

Les trois volets de la progra-mmation conjointe de RVP et duCSSMM sont interreliés, les jeunes fillesciblées pour le volet 2 permettaient desélectionner les parents pour le GSP(qui deviendra GC quelques annéesensuite). Les intervenants qui devaientproposer des services aux jeunes sevoyaient offrir la formation du volet 1.Le volet 3, le GSP, est au cœur de notreanalyse.

Nous avons donc constaté que lespartenaires organisationnels du projetGSP à partir de 1990 sont le centreRVP et le CSSMM. Avant d'aborder laquestion du fonctionnement du projet,attardons-nous brièvement à cespartenaires.

Le Centre de réadaptation Rose-Virginie Pelletier (RVP)

Le centre RVP7, «établissement du système de santé et de servicessociaux, contribue à la réadaptationd'adolescentes en difficulté d'adaptation

en leur permettant de développer leurpotentiel et de devenir des personnesautonomes et responsables» (CentreRose Virginie Pelletier, 1991). Le centreRVP est donc partie prenante du réseaumontréalais de centres de réadaptation,accueillant des adolescentes en «difficulté grave d'adaptation,personnelle, familiale et sociale» âgéesde 12 à 18 ans.

Le Centre de services sociaux du Montréal métropolitain(CSSMM)

Le CSSMM, établissementétatique, offre (à cette époque) desservices sociaux personnalisés auxenfants et à leurs parents et aux person-nes âgées de la région métropolitaine deMontréal. Les intervenants impliquésdans le projet GSP travaillaientspécifiquement auprès des jeunes et deleur famille, dans le cadre de la Loi sur laprotection de la jeunesse et de la Loi sur lesjeunes contrevenants.

Le fonctionnement des GSP

Les objectifs et le fonctionnementde ces GSP demeurent identiques à cequi a été expérimenté à Laval et Saint-Eustache. Il s'agit de sensibiliser lesparents au phénomène, leur redonnerdu pouvoir face à ce dernier et àfavoriser un certain niveau d'entraideentre les parents. Ce projet, à l'instarde ceux présentés, n'est que très peuformalisé, bien qu'il soit réalisé avecun certain support organisationnel.Mais, il s'inscrit dans une vision pluslarge de l'intervention auprès desgangs de rue parce qu'il est intégréavec les autres volets de laprogrammation RVP/CSSMM.

LE PROCESSUS DE COLLABORATIONDANS L'INTERVENTION

Les jeunes du centre RVP sont aucœur du processus d'intervention GSPpuisque ce sont les parents de celles-ciqui sont invités par les intervenants deRVP à participer au GSP. Si la

convocation au groupe est réalisée parles intervenants de RVP par téléphone,la rencontre de groupe est coanimée pardeux intervenants, l'un du CSSMM etl'autre de RVP. Information sur ladynamique des gangs, discussion autourdes moyens pour contrer ce processus «d'embrigadement», soutien audéveloppement de l'autorité parentalesont abordés dans cette intervention degroupe qui donne lieu à quatre ou sixrencontres. Un policier est invité lorsd'une rencontre afin de «partager sonexpertise et proposer sa collaboration»aux parents (Laroche et coll., 1992).

S’il y a peu d'informationdisponible quant à la dynamique et aucontenu de la collaboration à cetteépoque, les informateurs-clés précisentque cette expérience a permis dedévelopper une collaboration afinqu’un «véritable échange » puisses’établir entre les organismes sociauxinstitutionnels et la police : lespoliciers offraient leur vision del’organisation des gangs sur le terrainen ciblant particulièrement les jeunesfilles «embrigadées» pendant que lesintervenants sociaux, fort de ces liensde confiance créés avec les policiers,contribuaient à faciliter le travail despoliciers afin que les jeunes fillesportent plainte. «Sans cet accompa-gnement dans tout le processus quiétait très long (…) les filles avaient àpeu près 10 chances sur 11 de lâcherprise en cours de route parce qu’ellesavaient peur».

Mais quoi qu'il en soit, les GSP àcette époque sont décrits comme uneintervention qu'on peut qualifier derééducative, les intervenants sociauxétant au centre de la dynamique decollaboration dans l'intervention.

Une mutation des Groupes support aux parents vers les premiers groupes-contact (1992-1996)

L’évolution des GSP donne lieu àune dynamique de collaboration

différente tant au niveau des processusd'intervention (référence, admission,intervention…) que dans l'animationdes GSP. Par conséquent, la logiqued'action du projet en collaboration estelle-même transformée8.

À la suite d’affrontements «entremembres de gangs actifs dans le nord-estde Montréal» (Châles, 1995, p.6) en1993, l’esprit de ce projet est « d’intervenir [auprès des parents] avecles policiers dès le premier incident»dans lequel les jeunes sont impliqués engang, et ce, avant que les jeunes soienten centre d’accueil. La problématiqueau centre de ce projet est le phénomènedes gangs de rue et l’augmentation de laviolence associée à leurs agirs(Lavallée, 1994).Les jeunes quicommencent cesviolences ont desparents qui «n’ontpas le contrôle de lasituation actuellede leur enfant»(Châles, 1995).

Le «postulatde base» de cetteintervention est que le renforcementdes attitudes et des compétencesparentales doit «faire vivre des limitesclaires à leur enfant» (Châles, 1995).Cette intervention doit contribuer à «freiner le recrutement des gangs derue» et «éviter que ceux qui en fontpartie ne s’approchent du noyau plusviolent». Les clientèles potentiellessont donc les parents de jeunes qui ontété impliqués dans un événementpolicier, que ce jeune soit suspect,prévenu, victime ou témoin.

Le «programme » se divise endeux interventions : la phase 1, le GCest une rencontre coanimée par unpolicier et un intervenant social encentre de réadaptation, la phase 2, leGSP pour les parents ayant un besoinde support supplémentaire, consiste enune démarche de neuf rencontres à

l’intérieur desquelles les parents sontappelés à «mieux cerner les difficultésqu’ils éprouvent à assumer leur enfantet à identifier les éléments luipermettant de mieux agir (…) »(Châles, 1995, p.11). Il s'agit doncd'une adaptation des GSP présentésprécédemment. Si sur papier la phaseGSP est planifiée, le manque depersonnel formé pour l’animationforce à abandonner l’interventionaprès quelques expérimentationsseulement (Châles, 1995). À partir decette époque, la phase contact est doncla seule à donner des services auxparents, même si plusieurs ontenvisagé une réactualisation de laphase 2. Pendant ce temps, les parents

ayant des besoins supplémentairesétaient «en principe» référés à desservices déjà existants dans d'autresorganisations, notamment les CLSC etcertains organismes communautaires.

La collaboration plus grande avecles policiers permet de résoudre leproblème de recrutement des parentsconnus lors des expérimentations de1987 et 1989. Ainsi les policiersprennent un leadership accru dansl'intervention à partir de cette époque.Ils sont responsables du recrutement desparents, qui est réalisé à partir desdonnées policières (rapports d’évé-nement, fiches d’enquête et observationsprovenant des enquêteurs, des policiers-jeunesse surtout) (Châles, 1995, p.13).Le policier s’assure de la convocation desparents par une lettre, signée ducommandant, qui leur est remise en

mains propres par un policier en service.Par rapport au processus de recrutementdes GSP à RVP, le recrutement par lespoliciers marque une transformationimportante du projet.

La rencontre de groupe a lieu depréférence au poste de police où sontabordées les dimensions suivantes : legang de rue, le rôle parental de contrôle,les ressources d’aide disponibles dans lemilieu. Ce dernier volet est animé parun intervenant social. Le changementde lieux de l'intervention de groupe joueun rôle important dans la dynamiqued'intervention.

Au cours de cette première périoded’expérimentation,Châles (1995)rapporte que 175parents de jeunesont été rencontrés,surtout des parentsde jeunes contre-venants. Devantune évaluationpositive de l’expé-rimentation, lesCJM et le SPCUMprocèdent à l’élar-gissement des GC à

plusieurs autres territoires du SPCUM.Mais, la fusion des centres deréadaptation et du BSS en Centresjeunesse de Montréal occasionneplusieurs mouvements de personnelaugmentant les délais d'implantation duprojet. Après une période de formationdes nouveaux intervenants et l'ajoutd'une personne chargée de l'évaluationà l'équipe, l'intervention GC se met enplace. Ainsi, pendant environ huit moisd’expérimentation, 251 jeunes ont étéciblés. Pour 210 d’entre eux, les parentsont été convoqués par les policiers. Lesparents de 127 jeunes se sont présentés àla rencontre (soit 60 % de ceuxconvoqués) (Lavallée, 1995).

Les GC sont délaissés en 1996,malgré un certain enthousiasme parrapport à ce type d'intervention.Plusieurs motifs sont évoqués (Goyette

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Groupes supportG r o u p e s s u p p o r t

ÉTAPES OBJECTIFS PARTENAIRES

Phase 1 (GC) Sensibilisation et SPCUM en collaboration informer les parents avec le BSS (maintenant CJM)

Phase 2 (GSP) Favoriser l'entraide En principe, CLSC et BSS Supporter l'acquisition (maintenant CJM)des habiletésparentales (autorité)

LES ÉTAPES

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Chronique événementC h r o n i q u e é v é n e m e n tGroupes supportG r o u p e s s u p p o r t

et al., 2001). La grande concertation etconcentration autour de ces projetsrégionaux (Connais-tu ma gang ? etl'Opération Taxage en milieu scolaire)sont « énergivores », leur médiati-sation contribuant à diluer les intérêtspour les GC. Peu à peu, les acteurs aucentre des GC auraient démissionnéparce qu’ils auraient eul’impression de ne pasêtre appuyés par leurdirection. Ensuite, lestransformations majeuresau sein des CJM (Projetvirage milieu) et duSPCUM (démantèle-ment de la policejeunesse) ont déplacé lepersonnel d’une région àl’autre brisant lesconcertations. À cela, ilfaut mentionner que lesCJM n’auraient pasoctroyé suffisamment deressources pour stabiliserle projet, plusieurs intervenants ayantle sentiment de «porter le projet surleurs épaules» sans reconnaissance.

La «fin» des GC dans ce contextesignifie également l'échec des effortspour réimplanter les GSP, malgré lestentatives de formalisation de plusieursintervenants. En effet, à partir de1993-94, moment de la fin des GSP,plusieurs intervenants ont voulu lesformaliser en développant des canevasdétaillés du déroulement de l'inter-vention de groupe. À partir de cescanevas, des démarches politiques ontété réalisées auprès des directions desdiverses organisations. Mais leursefforts n’ont pas donné lieu à uneréelle mobilisation des organisationspour la réimplantation des GSP.

Les GC aujourd'hui

Le GC ont revu le jour en 1998dans le nord, puis dans l'est deMontréal en novembre 2000. Si cesGC s'inspirent de ceux réalisésjusqu'en 1996, les logiques d'action del'est sont quelques peu différentes, en

raison, d'une part, de l'influence d'unCLSC partie prenante du projet et,d'autre part, en raison d’un processusd'intervention laissant plus de place àune intervention de groupe9 (Goyetteet al., 2001). Quelques autresexpérimentations ont été réaliséesdans le secteur ouest de Montréal, mais

la prédominance du collaborateurpolicier est toujours aussi importante,subordonnant en quelque sortel'intervention à l'impératif d'enquêtepolicière. Le Schéma 1 illustre leprocessus d'intervention type des GCdans le nord de Montréal.

Ce schéma illustre le processus deglissement des GC du social au policierdans le rapport partenarial. Ainsi,faute d’intervenants et d’appuisorganisationnels des cadres des CJM,le SPCUM a pris la relève ou combléle vide, malgré sa propre perte depolice jeunesse.

Au travers de ces nouvellesexpérimentations des GC, certainsintervenants, dont plusieurs ayantcôtoyé les GSP, veulent les remettre surpied. Ainsi, un sous-comité de l'équipenord de Jeunesse, violence gang de rue sepenche actuellement sur cette questionafin de déterminer la formule la pluspertinente à réimplanter.

Une des questions centrales est desavoir si les GSP doivent s'inscriredans la continuité des GC et si les

organisations ont la volonté politiqued'investir dans ce type d'intervention.En effet, plusieurs informateurs-cléssont d'avis qu'en l'absence d'inter-vention permettant de combler lesbesoins suscités par l'activité groupe-contact il faut, sinon se questionnersur la manière de recruter les parents, à

tout le moins être «prudents et ne pasêtre trop alarmistes» lors de l’ani-mation des groupes-contact (Goyetteet al., 2001).

L’ANALYSE DES PRATIQUESPARTENARIALES

À L’ÉTUDE

Le processus de structuration du projet

À partir de notre compréhensiondu matériau de recherche, nous feronsressortir les éléments centraux del’évolution des GSP, en considérantégalement la naissance des GCpuisqu’ils sont au cœur de ladynamique menant à l’échec de laréimplantation des GSP.

La documentation abondanteconsultée ainsi que les propos des diversinformateurs-clés mettent en relief quedepuis leur genèse, la stratégie d’inter-vention des GSP et ensuite des GC, atoujours été pertinente du point de vuedes informateurs-clés. Cette stratégieapparaît comme un moyen de combler

Schéma 1 : Reconstitution du processus d'intervention des groupes-contact (tiré de Goyette et al., 2001)

ESPACE D’ACTION POLICIÈRE

ESPACE D’ACTION ENCOLLABORATIONCJM/Police

ESPACE D’ACTIONDES CJM

Plainte(s) à la police enquête policière arrestation ciblage des jeunes Ou décision d’organiser le gcobservations policières

Concertation téléphonique

ACTIVITÉS GC avec les parents

vérification des jeunes ayant un dossier CJM

Transmission de la listeà la coordonnatrice CJM

rencontre préalable (facultative)

Coordination et concertation avecl’intervenant au dossier CJM

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des besoins toujours présents face auphénomène des gangs de rue. Or, sil’esprit de cette intervention est toujoursdemeuré le même, c’est-à-dire informerles parents dans le but de leur redonnerou de soutenir les compétencesnécessaires à leur rôle parental face àleur enfant aux prises avec des gangs derue, le processus d’intervention des GSPainsi que l’activité ont évolué.

Si lors des GSP (de 1987 à 1993-94), le recrutement pour l’activité étaitréalisé par les organismes sociaux, lanaissance des GC (à partir de 1993) a

vu ce rôle davantage confié auxpoliciers, ciblant les jeunes associés àdes événements policiers à partir dedonnées policières.

Cette évolution du projetconstitue un rétrécissement de la ciblede l’intervention, les références étantréalisées par les policiers et non pluscomme dans le projet de Saint-Eustache en 1989, par des organismessociaux, voire communautaires (RVPet l'Accueil communautaire Jeunesse).

De plus, si sur papier les GCdevaient s’accompagner d’une phase 2inspirée des groupes support aux

parents sous la responsabilité desorganismes sociaux, ceux-ci n’ontconnu au mieux que quelques expéri-mentations éphémères.

Or, ces considérations mettent enévidence que les policiers ont joué unrôle accru dans le développement, lamise sur pied et la coordination des GC,orientant ainsi l’action de l’interventionvers une conception policière de laproblématique. Les GC sont donc, dèsleur élaboration, une interventionpolicière à laquelle participent les CJM,cette collaboration étant facilitée par une

vision complémen-taire de la problé-matique gang.

Par cette inter-vention « sur » lesparents (et indirecte-ment sur le jeune)l’objectif ultime étaitla diminution del’implication desjeunes dans desgangs. Mais commel’ont fait remarquerplusieurs infor-mateurs-clés, sansune intervention detype GSP, les GCsont condamnés àagir que dans unelogique coercitived’urgence parce qu’ils

ne sont pas intégrés à l’intérieur d’unplan d’action plus global où les acteursintervenant sur les déterminantsstructurels de la problématique sontprésents. C’est une hypothèse detravail partagée par certainsinformateurs-clés. Ces stratégiescomplémentaires n’ont pu se réaliserconsidérant le manque de temps et deressources disponibles et peut-être devolonté politique. Or, c'est l'étiquettecoercitive collée notamment à la phasede recrutement des GC qui freine,selon plusieurs informateurs-clés,l'élargissement formel des GC en GSPet/ou l'adhésion d'organisations tellesque les CLSC et les organismes

communautaires dans une stratégied'intervention plus préventive.

Enfin, bien qu'un certain supportleur ait été offert, les GSP ont surtoutreposé sur les épaules des intervenantspartenaires. Or, ce support, qu’il ne fautpas négliger par ailleurs, constituaitdavantage une «marge de manœuvre»laissée aux intervenants en particulierceux des CJM, qu’une réelle recon-naissance symbolique et matérielletraduite par un aménagement del’organisation du travail. Au-delà de leurémergence, les projets doivent donc êtresoutenus.

Dans ce contexte, le déplacementdes individus porteurs des GC à la suitedes réorganisations organisationnelles(surtout dans les CJM); et laconcentration accrue des énergies àd’autres projets, a contribué lors de laréforme policière (police commu-nautaire) à ce que le projet soit délaissé,malgré un certain enthousiasme.

Ces difficultés liées à la tropgrande instabilité professionnelle desindividus porteurs des GSP soulignent,pour nous, l'importance de la forma-lisation de la collaboration. Celle-cimet la collaboration à l'abri d'unchangement organisationnel ou d'indi-vidus, et assure ainsi une certainepérennité du projet. Une ententeécrite claire permet également defavoriser l'inscription du projet dansles priorités organisationnelles dechacun des partenaires, ce qui a faitdéfaut dans le cadre du projet à l'étude.Bien évidemment, plusieurs collabo-rations survivent même sans cetteformalisation, mais elles reposent surles épaules d'individus et sont à lamerci du transfert de la mémoireinstitutionnelle d'un projet lorsqu'unporteur du dossier quitte son poste(Goyette et al., 2000b).

Bien que cette formalisation soitessentielle, elle doit être réalisée avecparcimonie dans la mesure où si elle seréalise en réduisant la marge de

Groupes supportG r o u p e s s u p p o r t

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Groupes supportG r o u p e s s u p p o r t

manœuvre des intervenants-terrain, ellerisque de réduire d'autant le potentield'innovation de l'intervention. En effet,nous avons pu souligner que l'instau-ration, d'une part, de lieux deconcertation régionale entourant leprojet Connais-tu ma gang ? et, d'autrepart, la création plus tard par les CJMde plusieurs comités chargés de laprogrammation des interventions gangont été perçues par plusieursinformateurs-clés comme une récupé-ration politique de l’initiative dans lamesure où par la suite les investis-sements en ressources n'ont pas suivi.

Les retombées des pratiquespartenariales sur le modèle d'intervention

Les échanges d'informations dansle processus de collaboration du projetGSP entre les intervenants CJM et lespoliciers permettent, selon lesinformateurs-clés, une plus grandeconnaissance de la situation-problèmedu jeune et de la problématique gangdans le quartier. Ces informationspermettent pour les policiers d'avoirplus d'informations pour concrétiserleur enquête et intervenir dans uneperspective de police communautaire.Pour les intervenants CJM, si ceséchanges d'informations sont réguliers,ils permettent également d'adapter lesinterventions sur les jeunes pris encharge par les CJM dans un contextede LJC, et ce, autant pour les jeunespris en charge avant l'interventionGSP que pour ceux qui seront référés àla suite des GSP. En effet, les GSPpermettent une meilleure cohérencede l'intervention, c'est-à-dire, un plusgrand arrimage entre les interventionspolicières et la prise en chargeLJC/CJM et une plus grandecoordination entre les interventions àl'interne des CJM.

Dans cette optique, les GSPpeuvent favoriser une augmentationde la continuité de l'intervention enpermettant éventuellement unediminution du chevauchement des

interventions, une diminution desinterruptions inopportunes de serviceset l'identification, à partir du point devue du professionnel, du service le plusapproprié pour répondre aux besoinsdu jeune et de sa famille.

Au-delà de la meilleurecoordination entre les intervenantsCJM, il faut mentionner que les GSPvisent directement à associer les parentsà l'intervention de rééducation. Ainsi,en voulant contribuer à leurcompétence parentale, il s'agit pour lesanimateurs de rendre le parent complice

de l'intervention en rééducation, uneforme de «partenaire» de l'interventionen voulant responsabiliser les parentsdans une perspective «autoritaire».Ainsi, l’intervention engage les parentsafin qu’ils assurent de nouveaupleinement leur rôle de contrôle.

Enfin, et ce n'est pas à négliger,une des retombées envisagées dumodèle d'intervention GSP est depouvoir parvenir à une formed'entraide des parents face à lasituation de leur enfant. Or, cetteentraide se construit graduellement aucours des rencontres en groupe. Ainsi,l'entraide ne peut émerger d'une seulerencontre, tel les GC, surtout dans lecontexte du recrutement des parents(Goyette et al., 2001).

L’enracinement des pratiques àl’étude dans une approche milieu

Où se situent les pratiquespartenariales au travers des différentesconceptions de l’approche milieu ? Ledéfunt projet GSP vise un support auxcompétences parentales des parents etveut favoriser l’entraide des parentsface à la participation présumée de leurjeune à des activités liées à un gang.Tel qu’ils ont été expérimentés à partirde 1990 à RVP, les GSP représententune piste d’innovation intéressantepour l’intervention aux CJM,notamment parce qu’ils envisagent legroupe comme étant un nouveau lieud’intervention.

Si on tente de situer les pratiques decollaboration GSP au travers d'uncontinuum vers un modèle idéald'approche milieu, elle se retrouve au-delà des pratiques institutionnellescourantes axées notamment surl'intervention psychosociale indivi-duelle, tout en demeurant dans uneperspective très institutionnelle et plutôtcoercitive. Le modèle d'intervention degroupe dans ce contexte est donc uneavenue d'intervention intéressante, bienque de nombreuses autres pratiques serapprochent davantage d'un modèleidéal d'approche milieu10. De même, lesGSP se situent davantage dans uneperspective de prévention secondaire ettertiaire de la récidive puisquel’intervention cible des jeunes déjàidentifiés par les services de police.

Les pratiques à l'étude envisagées au travers d'un modèle idéal d'approche milieu

Inscrire davantage les GSP dansun modèle idéal signifierait, commeplusieurs informateurs-clés l’ont faitressortir, envisager de manière pluspréventive (voire même promo-tionnelle) le projet, afin qu'il tisse desliens avec des organismes ancrés dansle milieu des jeunes et d'envisagerautrement les solutions à apporter aux situations-problème vécues et

Par cette intervention «sur»

les parents (et indirectement

sur le jeune)l’objectif ultime

était la diminutionde l’implicationdes jeunes dans

des gangs.

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Groupes supportG r o u p e s s u p p o r t

pressenties. Il s’agit ici de transformerdes collaborations complémentairesentre les CJM et le SPCUM, collabo-rations pouvant être qualifiéesd’utilitaires, dans la mesure où ellesvisent à atteindre des objectifsorganisationnels, en collaboration quilaissent une plus grande autonomie etune plus grande place aux différentsacteurs du milieu.

En effet, l'analyse fait ressortir quepour les CJM, la collaboration vised’abord à améliorer la coordination et lacontinuité des interventions afinnotamment de maintenir le jeune dansla communauté et éviter son placement.Pour le SPCUM, la collaboration vise une meilleure gestion de la «dangerosité» des jeunes, peu de placeétant faite aux jeunes et aux organismesde la communauté. Dans cette optique,dans leur devis d'intervention, les co-animateurs semblaient avoir des liens

statiques avec quelques organismes dumilieu, offrant aux parents une listed'organismes, sans plus. Des liens plusdynamiques pourraient être développésavec ces derniers afin par exemple, depouvoir réaliser des référencespersonnalisées voire même unecollaboration à l’animation qui tiennentcompte de la mission des organismes, deleur philosophie d'intervention, de leurfonctionnement… Des expérimen-tations sont réalisées dans ce sens.

En outre, la cible des GSP estclairement le parent qui doit lui-mêmedevenir complice de l’interventioninstitutionnelle des CJM en «intervenant» auprès du jeune dans lacontinuité de la philosophie derééducation du projet. Le fait de vouloirassocier le parent à l’intervention est unaspect novateur qui s'inscrit dans uneapproche milieu. Or, l'implication desparents pourrait se réaliser en leurdonnant une place d'acteurs dans leprocessus des GSP. Ainsi, les GSPenvisagent les parents comme l'objetd'une intervention dont les profes-sionnels demeurent les maîtres-d'œuvre.

Envisager les parents comme dessujets acteurs permet de rompre avec lesstratégies de counselling individuel oùl'intervenant est l'expert, laissant laplace dans cette perspective à unecertaine ouverture quant à d'autres typesde formation que l'acquisition decompétences parentales, commeplusieurs stratégies d'intervention degroupes le prônent (Lindsay, 2000 ;Renaud, 1996). Or cette évolution deparadigme d'intervention constitue unenjeu majeur. Ainsi, bien que, comme lesoulignent Larivière, Bernier et Lapierre(2000), le poids des contraintesjuridiques et sécuritaires limitel'élasticité des pratiques (des CJMnotamment), une évolution desmentalités s'opèrent graduellement,celle-ci appuyée par des changementsstructurels. Par exemple, les projets detransformations des CJM et du SPCUMconstituent une ouverture importante àune plus grande collaboration de ces

organismes institutionnels avec lemilieu, y compris avec les clients etusagers. Ainsi, dans le respect de leurmandat respectif, plusieurs projets, dontles GSP pourraient faire partie,permettent de créer des relais mieuxancrés dans le milieu. Être ouvert à laparticipation à ce type de projet, signifieégalement s'ouvrir à l'idée d'êtrecocontaminé par les organismes dumilieu.

Or, afin de surmonter les blocagesrecensés ayant contribué à l’échec dela remise sur pied des GSP, il faudras’assurer que les intervenants, lesgestionnaires ainsi que la directionappuient le projet. Dans cette optique,un appui politique clair devraits'accompagner de ressources pourmettre en œuvre le projet, sachant queplusieurs initiatives d'intervenantsdéjà impliqués sur le terrain sont enfaveur de l’implantation d’un GSPadapté. Ainsi, quelques questionssoulevées par les informateurs-clés lorsde la collecte de données mériteraientd'être abordées avec les acteurs actuelset les décideurs voulant réimplanter lesGSP. Quelles formules de GSP doit-onenvisager ? Est-ce qu'il y a vraimentune volonté politique de la part desdirigeants du SPCUM et des CJM des'impliquer dans ce type de pratiquesde groupe ? Comment les cadres et lesconseillers peuvent-ils contribuer àcette remise sur pied ? Ont-ils la margede manœuvre nécessaire pour biensupporter les intervenants animateursdes GSP ? L'organisation du travailpermet-elle aux intervenants des'impliquer dans la construction d'unenouvelle intervention ?

On pourrait aussi adresser desquestions aux partenaires commu-nautaires du milieu quant à leurouverture et leur volonté de collaboreravec les services institutionnels. Si lesorganismes se veulent des antennes plusaccessibles pour parents et jeunes,comment peuvent–ils recruter, informeret sensibiliser les jeunes et leurs parentssur les dangers des gangs ? Comment

Dans cette optique,les GSP peuvent

favoriser uneaugmentation de la

continuité del'intervention en

permettantéventuellement une

diminution duchevauchement desinterventions, une

diminution desinterruptions

inopportunes deservices et

l'identification, àpartir du point de vuedu professionnel, du

service le plusapproprié pour

répondre aux besoinsdu jeune et de sa

famille.

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Groupes supportG r o u p e s s u p p o r tN O T E S B I B L I O G R A P H I Q U E S

NOTES BIBLIOGRAPHIQUES1 Dorénavant GSP.2 Cette recherche a été financée par le Conseil québécois de recherche sociale (CQRS) de

septembre 1999 à août 2001 (RS-3365).3 Dans ce cadre, nous avons réalisé cinq entrevues semi-structurées auprès d’informateurs-

clé, intervenants et gestionnaires ayant été au cœur de l’intervention GSP et effectué uneanalyse de la documentation interne se rapportant au projet. De plus, nous avons eu accès(avec l'accord des interviewés concernés) à de la documentation ainsi qu'à des retrans-criptions d'entrevues réalisées dans le cadre de la recherche sur les transformations desCentres jeunesse (Goyette et al., 2000a) et d’un bilan de la participation des CJM auxactivités groupe-contact (Goyette et al., 2001). Au terme de l’analyse, l’étude de cas a étésoumise à un groupe d’informateurs-clé pour assurer sa validité.

4 La sélection de ce projet, dans la phase préliminaire à la rédaction du devis de recherche,a été réalisée par des intervenants des CJM, évaluant qu’il serait réimplanté à l’automne1999, moment de la collecte de données. L'échec de la réimplantation constitue donc icila pertinence directe de l'évaluation.

5 Les parents n'étaient pas tous présents à toutes les rencontres (entrevue no 13).6 L'un d'eux était responsable du GSP à Laval et à Saint-Eustache.7 Le centre RVP est l'un des 12 centres de réadaptation ayant été fusionné en CJM.8 Nous allons aborder cette question plus loin.9 À l'instar des GSP planifiés à RVP à partir de 1990, le GC de l'est avait un projet de GSP

(Gagné et Lachaîne).10 Parmi ces interventions, les pratiques axées sur l'empowerment des individus, sur leur con-

scientisation (Dallaire, 1998 ; Le Bossé, 2000).

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peuvent-ils créer des alternatives auxgangs comme lieux d’identité etd’appartenance pour les jeunes ?Comment les organismes communau-taires peuvent–ils travailler à l’intérieuret à l’extérieur des écoles pour rejoindreces jeunes qui n’y ont pas de sentimentd’appartenance ?

Cet article n’aborde qu’enfiligrane ces questions qui s’adressentdirectement aux acteurs actuels desGC. Dans cette perspective, lesrésultats d’une étude récente (Goyetteet al., 2001) proposent des pistesd’intervention visant les intervenantset les décideurs au centre del’intervention auprès des adolescentsassociés à des groupes de jeunes. ✒

Collaboration extérieurC o l l a b o r a t i o n e x t é r i e u r e

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À l’origine un remue-méningesd’une heure offert une seulefois, aux garçons seulement,

dans les cours de morale, le Boys’Group est maintenant une activitéhebdomadaire se déroulant pendantl’heure du lunch sur une basevolontaire. Il s’agit d’un modèle ouvertet continu qui cible les garçons de 1er et2e secondaire, généralement âgés de 12à 14 ans.

La prémisse est que les adolescentsmasculins ont des besoins spécifiques entermes du développement de leursidentités masculines. Le groupe sepropose d’explorer la gamme de cesbesoins ainsi que des réponses à ceux-ciqui ne posent obstacle ni au bien-êtredes participants ni au bien-être d’autrui.

TOUCHÉ MAIS TOUJOURS EN VIE

Souvent, famille et société ne suffisent plus comme soutien au développement d’une identitémasculine saine, la sorte que noussouhaiterions tous à nos fils. L’identitémasculine est devenue difficile à définir.Le concept est à la dérive dans une merde stéréotypes naufragés et de fragmentsd’une représentation positive del’homme. Il semble y avoir peu de chosesintactes que nous pouvons ou aimerionssauver des eaux.

Quoique le patriarcat n’est pasmort, il a subi d’importantes blessures.

Promouvoir une identité masculinesaine : un modèle d’intervention

de groupe pour adolescents

Jean-Pierre Plouffe, B.S.W, M.Sc. (Service Social), CLSC Saint-Laurent

Lancé au début de

l’année scolaire 1996-

1997, le Boys’ Group

vise à soutenir la

consolidation de

l’identité masculine

adolescente sur une

trajectoire saine et

non violente. Il a élu

domicile à l’Académie

LaurenHill, l’école

secondaire publique

anglophone de Saint-

Laurent, une banlieue

urbaine de Montréal

composée de plus de

quarante ethnies.

À plusieurs niveaux, ceci est de bonaugure. À part les privilèges en termesde pouvoir, le patriarcat n’a jamaisoffert grand chose aux garçons ni auxhommes. David et Brannon (1976) enrésument ainsi les impératifs :

✓ N’avoir rien d’efféminé (no sissy stuff).

✓ Être supérieur aux autres (the big wheel).

✓ Ne compter que sur soi-même(the sturdy oak).

✓ Être téméraire (give ‘em hell).

Cela traduit bien la naturecontraignante du patriarcat et sonincapacité à servir de tremplin à lapersonnalité vers des relations respectu-euses et satisfaisantes autant sur le planinterpersonnel qu’avec soi-même.

Le patriarcat est encore dans unecertaine mesure le château fort desprivilèges masculins. Les attaques de lapart du féminisme demeurent justifiéesautant que le patriarcat persiste àentraver l’évolution de la femme. Leféminisme a réussi à mettre en douteles représentations de la masculinitévéhiculées par le patriarcat. Ceci aaffaibli le patriarcat et a fait de la placepour des modèles masculins plus sains,qui malheureusement tardent à semanifester sur une grande échelle. Enattendant, ce qui occupe le vide laissé

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ollaboration extérieureC o l l a b o r a t i o n e x t é r i e u r e

par le recul du patriarcat, c’est surtoutla confusion et la crise (Bly, 1990).

Le changement est une crisepotentielle, et la crise, une occasion de changement. La majorité desadolescents masculins semblentincertains quant à la façon d’aborder lacrise adolescente et comment changer.Ils ont besoin de modèles masculinspositifs, mais les modèles qui leur sontproposés les laissent ambivalents.Autant qu’ils sont nécessaires afin deleur fournir des éléments identi-ficatoires avec lesquels construire leursmasculinités, ces modèles sontintolérables, car ils sont inacceptablesou méprisés. Un adolescent peutvouloir s’identifier à un tough qu’il voità la télé, mais il sait à quel point oncondamne le machisme. Un autre peutaspirer à un modèle plus rose del’homme, mais hésite d’être relégué àla marge de la société. Il a beauchercher, il trouvera difficilement desmodèles d’hommes qui lui permettront

d’être bien dans sa peau et d’occuperune place vitale dans la société.Beaucoup d’adolescents passent leursvies seuls avec cette ambivalence, quise transforme plus souvent qu’autre-ment en mécanismes de défensemalsains (Brooks, 1998).

SUR LES BANCS DE L’ÉCOLE

La crise de l’identité masculine aun impact tangible. Les données duministère de l’Éducation du Québecdémontrent qu’en 1979-1980 le tauxde décrochage à 19 ans était de 37,2 %chez les femmes et de 43,8 % chez leshommes. En 1999-2000 (donnéesprovisoires), le taux était de 14,7 %chez les femmes et de 24,6 % chez leshommes. Aussi en 1999-2000, 18,1 %des garçons ont redoublé la premièreannée du secondaire versus 11,6 % desfilles. Certaines interprétations de cesstatistiques pointent du doigt la faibleparticipation des pères sur le plan desdevoirs ainsi que le fait que les valeurs

académiques telles que le rationalisme,la socialisation, l’obéissance etl’autodiscipline sont vues de plus enplus comme des valeurs féminines. Enoutre, le manque d’enseignantsmasculins au primaire prive les garçonsde modèles académiques positifs(Erikson, 1959, p. 92).

AU-DELÀ DU VESTIAIRE

Pourquoi mettre sur pied ungroupe pour garçons ? Pourquoi leurfournir une occasion de se parler ? Lesgarçons savent qu’ils sont des garçonset se rassemblent déjà dans descafétérias d’école, des autobus, desterrains de jeu et des vestiaires. Lesgarçons se rassemblent depuis la nuitdes temps. C’est en fait une descaractéristiques de l’adolescencemasculine que de cultiver entre eux unsentiment d’appartenance et deloyauté (Erikson, 1968).

Un observateur averti remarqueraque les propos abordés au sein de telsgroupes ne touchent que peu auxémotions. Ils se côtoient, entre autres,pour se réfugier de la confusion parrapport à l’identité masculine.Toutefois, les dynamiques de leurspersonnalités et du groupe, condi-tionnées et restreintes par les limitesdu développement de leurs identitésmasculines jusque-là, ne facilitent pasnécessairement l’émergence d’uneidentité masculine saine. Ils ont besoinde quelque chose au-delà de la simpleoccasion de se parler.

LE DEVENIR MASCULIN

Avant de nous pencher sur lemodèle d’intervention de groupe, nousallons jeter un coup d’œil sur latrajectoire de l’identité masculine de lanaissance jusqu’à l’adolescence.

Chaque garçon est né d’unefemme. Il est donc né d’une personnedont le corps est sexuellementdifférent du sien. Il dépend habituel-lement d’elle pour sa survie pendant au

Collaboration extérieurC o l l a b o r a t i o n e x t é r i e u r e

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moins les premiers mois de sa viepostutérine. Afin de devenir unindividu à part entière, il devra nonseulement s’individuer d’elle mais aussise différencier sexuellement d’elle.L’identité sexuelle se développe defaçon universelle à partir del’identification aux membres du mêmesexe et de la complémentation vis-à-vis des membres du sexe opposé(Bureau, 1998). En l’absence demodèles masculins positifs, ledéveloppement de l’identité sexuelledu garçon doit s’appuyer davantage surla complémentation. Ainsi, un garçonapprend d’abord ce que c’est de ne pasêtre fille, plutôt que ce que c’est d’êtregarçon (Hartley, 1959).

Pendant les premiers mois de lavie, les garçons sont plus expressifs queles filles (Haviland et Malatesta, 1981).Contrairement aux filles, ils reçoiventde la rétroaction positive surtout pourl’expression d’affects positifs, considérésplus masculins, et sont généralementencouragés à se séparer de leurs mèresau cours des premières années. Lesaffects normaux tels que la tristesse, latendresse ou l’émerveillement sontprésentés aux garçons, de façons plus oumoins subtiles, comme étant fémininset donc inappropriés pour eux. Celaperturbe la relation entre les garçons ettout ce qui est associé au féminin. C’estune relation que les garçons viventcomme de la honte (Pollack, 1998).

La honte est un des principauxaspects de la psychologie masculine(Osherson et Krugman, 1990). Ayantintrojecté les attentes de sonenvironnement (Winnicott, 1960) qu’ilne soit pas féminin, un garçon ressent dela honte à chaque fois qu’il n’est pas à lahauteur de ces attentes. La honte a undouble impact. Non seulement cache-t-elle l’objet de la honte (la féminité) dela conscience du sujet et d’autrui, enoutre, elle coupe le sujet des affectsassociés à l’objet de honte (Lee, 2000).La conséquence est une répressioncroissante des affects et une restrictionde la gamme affective.

Un garçon qui n’est pas encontact avec son côté féminin ne peutpas le projeter sur autrui et est doncincapable d’empathie envers laféminité d’autrui (Jung, 1951). Ceciperturbe ses relations avec les filles etmenacera plus tard ses relations avecles femmes (Corneau, 1989).

LE BOYS’ GROUP : MODE D’EMPLOI

Le groupe est animé par unhomme ou coanimé par deux hommesou un homme et une femme. Quandles garçons arrivent, les animateursleur disent qu’il s’agit d’une occasionde participer à des activités amusantesqui leur permettront d’explorer ce quec’est d’être un gars. On leur dit qu’ilspeuvent dire ce qui leur passe par latête, que presque tout sera considérécomme pertinent et significatif(Malekoff, 1997). L’objectif est dedissoudre le mur de honte qui lessépare de leurs propres affects. Au furet à mesure que se dissout le mur, ilsrefont connaissance avec ces affects,découvrent leurs sens et se les ré-approprient de manière à ne pas les

percevoir comme des menaces à leursmasculinités.

Les reflets, reformulations et autresinterventions des animateurs appro-fondissent l’échange herméneutique.Les dynamiques de groupe y sont aussipour beaucoup. En plus d’exprimerleurs propres idées et affects, lesparticipants témoignent des autres quis’expriment de façon masculine, dansdes corps masculins et avec un langagenon verbal masculin. Ils ont l’occasionde constater qu’il est possibled’exprimer une grande gamme depensées et d’affects sans que cela ne soitcatastrophique pour leurs masculinités.Ce vécu est assimilé comme autant demanières d’être un gars.

Ces phénomènes de miroir et demodelling se produisent également vis-à-vis des animateurs masculins. Quandil s’agit d’un modèle avec unecoanimatrice, la présence d’une femmepeut parfois inhiber l’expression desparticipants, surtout en ce qui concerneles propos sexuels. Par contre, celaprocure aux participants l’occasion devoir une relation homme-femme oùrègne la coopération et de s’habituer àparler de leurs affects en présence d’unefemme (Meunier et Roy, 2000). En fait,certains garçons réagissent de façonpositive à la présence maternelle d’unecoanimatrice.

Le Boys’ Group ne propose pas derecettes quant à l’identité masculine.Les participants suivent leurs propreschemins et en arrivent à leurs propresconclusions. Le modèle est doncheuristique. Voici quelques exemplesd’activités :

✓ remue-méninges sur ce qu’est agircomme un homme, une femme ;

✓ dessin ou sculpture d’un homme,d’un père idéal, d’une femme ;

✓ athlètes d’élite, invités commeconférenciers sur la masculinité ;

La majorité desadolescents

masculins semblentincertains quant à la

façon d’aborder lacrise adolescente etcomment changer.Ils ont besoin de

modèles masculinspositifs, mais les

modèles qui leur sont proposés

les laissentambivalents.

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Collaboration extérieureC o l l a b o r a t i o n e x t é r i e u r e

✓ discussions sur la sexualité, lapornographie, la famille, larésolution de conflits, l’estime de soi ;

✓ choix d’un acteur connu pourjouer le rôle du père idéal ;

✓ jeux de rôle ;

✓ discussions sur des scénes vidéoimpliquant des personnages deleur âge ;

✓ écrire à un autre Boys’ Group fictif ;

✓ comment accueillir les nouveauxélèves masculins à la rentrée ;

✓ cuisine collective ;

✓ levée de fonds pour des causescontre la violence masculine ;

✓ réflexion sur : «Si t’étais une fille,tu serais comment ?», «Si t’étaisune fille, sortirais-tu avec toi ?».

RECRUTEMENT : LE RETOUR AU VESTIAIRE

Le recrutement se doit de fairemiroiter aux garçons les gainsimmédiats et concrets qu’ils pourrontretirer de leur participation au groupe.À LaurenHill, nous mettons l’emphasesur l’aspect ludique et social enessayant de motiver d’abord les leaders.Nous envisageons faire du reachingout auprès d’autres groupes masculinstels que l’équipe de basketball del’école, en mettant l’emphase sur lelien entre la découverte de soi et laperformance athlétique, afin de lesintéresser au Boys’ Group.

Pour faire appel au modeinteractionnel des garçons, fondédavantage sur l’action que surl’expression verbale, ainsi qu’à leuresprit compétitif, nous sommes à mettresur pied un modèle de défis d’initiativequi s’inspire de celui développé par lacommission scolaire de la Beauce-

Etchemin dans leurs groupes père-fils.Les garçons seront rassemblés engroupes de trois. Chaque groupe aura àrelever le même défi. Il y aura des défisphysiques ainsi que des défis deréflexion tels que trouver le plus deréponses appropriées à la question : «Pourquoi deux gars choisiraient-ils dese battre ensemble ?».

Une discussion suivra chaque défid’initiative. Cette discussion porteraautant sur le sujet du défi que sur lesdynamiques de chaque sous-groupe.Afin de promouvoir l’apprentissaged’un vocabulaire affectif, les garçonsseront encouragés à se référer à destotems qui représenteront des valeurs etattitudes. Par exemple, l’aigle pour leleadership et le buffle pour l’espritd’équipe. Ces totems fonctionnerontcomme médiateurs qui permettront auxjeunes de parler d’affects en se sentant

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moins vulnérables et qui leur fournirontun vocabulaire imagé et concret.

L’adolescence est un défid’initiative. Comme Œdipe, chaquegarçon doit résoudre les énigmes quil’interpellent. Blos (1979) décritl’adolescence comme un passage.Aujourd’hui, il y a peu de rituels pourguider les adolescents à travers cepassage. Chaque garçon est le héros desa propre histoire. En ce sens, Campbell(1949, p. 29) a saisi un aspect essentielde l’adolescence : «Le cheminement duhéros mythologique peut se tracer sur lasurface de la terre, incidemment ; defaçon fondamentale, il creuse versl’intérieur, jusqu’au tréfonds, oùd’obscures résistances sont surmontéeset des pouvoirs depuis longtempsoubliés sont ranimés et mis à ladisposition de la transfiguration dumonde» (Traduction de l’auteur). ✒

✒ Comité de la revue :Michel Doray, Christian Fortin, Suzanne

Gagnon, Danièle Gauthier, Louise Hamel, Jean-Luc Secours, Geneviève Turcotte

✒ Ont collaboré à ce numéro :Nicole Dallaire, Jean-Rosemond Dieudonné,

Michel Doray, Alain Germain, Martin Goyette,Jacques Grand’Maison, Claudine Laurin, Jean Panet-Raymond, Jean-Pierre Plouffe,

Sophie Poissant, Geneviève Turcotte, Gwénola Van Hille

✒ Rédactrice en chef :Danièle Gauthier

✒ Graphisme et impression :ACOR

✒ Secrétariat :Murielle Bouchard

✒ Dépôt légal :Bibliothèque nationale du Québec

ISSN 1201-009-XLes Centres jeunesse de Montréal

POLITIQUE ÉDITORIALE

La revue professionnelle Défi jeunesse est publiée par le conseil multidisciplinaire des Centres jeunesse de Montréal à raison de trois numéros par année.

✓ Les objectifs visés par la publication de cette revue sont :

Promouvoir le développement professionnel en lien avec l’intervention et la réflexion.

Dans un contexte multidisciplinaire, assurer et valoriser l’identité professionnelle spécifique à chaque discipline.

Permettre l’intégration des nouvelles orientations des Centres jeunesse de Montréal.

Favoriser l’étendue du rayonnement professionnel.

Accroître le sentiment d’appartenance aux Centres jeunesse de Montréal.

Faire valoir les différentes expériences de partenariat.

✓ Critères de publication :

Contenu • La revue comprendra des articles de fond (théorie, réflexions, études, recherches, recherches-action, analyses...), des textes por-tant sur des expériences professionnelles pratiques (projets, nouveaux modes d'intervention) et diverses chroniques à contenu clinique telles des

notes de lecture, des chroniques juridiques, des chroniques événements et des entrevues.

Manuscrit inédit • La revue ne publie que des manuscrits originaux. Les manuscrits ne doivent pas avoir été publiés dans une autre revue.

Format • Les articles soumis à la revue professionnelle doivent être dactylographiés à double interligne, sur des feuilles 8_" X 11" avec 12caractères au pouce. L'article contient au maximum 10 pages. L’auteur remet au comité de la revue une copie du texte sur disquette, traitement

de texte compatible avec Microsoft ou l’envoie par internet à l’adresse mentionnée plus bas. Un guide pour la présentation des articles estdisponible sur demande.

Évaluation • Tous les articles sont soumis au comité de la revue qui a l'entière responsabilité de décider de publier ou non un article. Lecomité se réserve aussi le droit de changer les titres et les sous-titres des articles sans avis à leur auteur.

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Reproduction • Toute reproduction est autorisée avec mention de la source.

Le comité offre deux exemplaires de la revue aux auteurs des articles publiés.

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