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Pauvres, mais honnêtes, nous paraissons quand nous pouvons, et notamment le vendredi 14 avril 2017 Année 2017, numéro 14 Numéro spécial Afrique : kleptocratie et corruption Sommaire Introduction… page 1 La piste du scandale des passeports biométriques mène au clan Kabila… page 2 Comment l'Administration Trump peut aider à combattre la Kleptocratie en Afrique… page 11

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Pauvres, mais honnêtes, nous paraissons quand nous pouvons, et notamment le vendredi 14 avril 2017

Année 2017, numéro 14

Numéro spécialAfrique : kleptocratie et

corruption

SommaireIntroduction… page 1

La piste du scandale des passeports biométriques mène au clan Kabila… page 2Comment l'Administration Trump peut aider à combattre la Kleptocratie en Afrique…

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Introduction

Le premier des documents repris ici est sans doute déjà connu de certains de nos lecteurs,puisqu’il s’agit d’un reportage de Reuters Investigations qui a déjà été repris, en français, parle journal Le Monde.

Ce que démontre ce reportage, c’est un hold-up simple et direct dans les poches desCongolais, les détournements d'actifs miniers dénoncé par ailleurs sont plus complexes àréaliser mais ont les mêmes fonctions, s'enrichir au profit de quelques-uns mais au détriment detous, le budget de l'état est affecté et les conséquences sur les dépenses sociales, éducation,santé et infrastructures sont dramatiques.

Ce hold-up est celui du passeport biométrique congolais, l’un des plus chers du monde,et en suivant la piste du scandale des passeports biométriques, on s’aperçoit qu’elle mène auclan Kabila

Tout cela dans un contexte politique ou les droits élémentaires énoncés par la constitutionsont bafoués avec un cynisme rare et sous les formes les plus grossières.

On aurait envie de dire « Une affaire de plus concernant la corruption et lakleptocratie ! », une actualité qui, en Afrique, est hélas ! d’une banalité quotidienne ( LaKleptocratie est ce type de corruption dans lequel le gouvernement ou les fonctionnairesrecherchent un gain personnel au détriment de ceux qui sont gouvernés).

Le second a pour auteurs trois chercheurs américains. John Campbell et Ralph Bunchesont tous deux chercheurs principaux pour les études politiques en Afrique, et Allen Grane,chercheur associé, zgzleùennt pour les études politiques en Afrique.

Ils invitent Donald Trump à agir, précisément, contre la kleptocratie en Afrique. Et, faitrafraîchissant, ils ne le font pas au nom des droits de l’homme et de la démocratie, mais toutsimplement parce qu’ils estiment que cela nuit aux intérêts américains dans la région.

Un indice de plus que l’impérialisme est à la recherche d’auxiliaires africains moinsgourmands…

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La piste du scandale des passeports biométriques mène au clan Kabila

Le passeport congolais est l’un des plus chers au monde. Une partie des recettes s’évaporedans une société offshore détenue par un proche du président, révèle Reuters.

Le président Joseph Kabila, lors du lancement du nouveau passeport biométrique, en novembre 2015.

Une enquête de David Lewis (Reuters)1

Le président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, est en visiteau ministère des affaires étrangères. Il esquisse un large sourire lorsqu’un ordinateur prend unephoto de lui, puis ses empreintes digitales, pour le lancement du nouveau passeport biométriqueéquipé d’une puce, qui permet d’avoir plus de détails sur son identité.

Le président Kabila et ses conseillers ont vanté les mérites de ce passeport, affirmantofficiellement qu’il allait permettre à chacun de circuler librement dans un monde de plus enplus préoccupé par la sécurité. Mais en privé, les instigateurs de ce nouveau système ont uneautre raison de se réjouir : c’est l’occasion d’empocher des centaines de millions de dollars surle dos des plus pauvres.Ce passeport est l’un des plus chers au monde. Il coûte à chaque Congolais qui en fait lademande 185 dollars (soit près de 175 euros). A titre de comparaison, le passeport français pourun adulte coûte 86 euros. Mais d’après les documents consultés par Reuters, le gouvernementde la RDC ne recevrait que 65 dollars sur les 185 payés pour chaque demande, soit 35 % duprix.

1 Publiée par Le Monde.fr le 13.04.2017 à 16h43 Version complète en anglais du document Reuters avecgraphiques et illustrations http://www.reuters.com/investigates /special-report/congo-passports/ Nous avonsrepris la traduction du Monde, mais en y incorporant des documents photos repris à la version anglaise

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Une société établie aux Emirats arabes unis

L’essentiel des sommes versées par lecitoyen congolais va directement à Semlex,une entreprise, basée en Belgique, quiproduit des documents de voyage(passeports, cartes d’identité…), et à unepetite société basée aux Emirats arabes unis(EAU). Cette société du Golfe, LRPS, reçoit60 dollars pour chaque passeport fourni,d’après les documents officiels du marchéconclu entre le gouvernement congolais etSemlex. LRPS est enregistrée à Ras al-Khaïmah, aux EAU, mais les détailsconcernant son propriétaire ne sont pasconsultables.

D’après une source proche du dossier,une certaine Marie Makolo Wangoi, prochedu président Kabila, serait propriétaire deLRPS. Cette même source affirme que MmeWangoi est allée aux EAU en juin 2015 afinde finaliser le transfert des parts de LRPS àson nom. Des documents relatifs à ce voyageet au transfert des parts montrent que Mme Wangoi détient LRPS, mais les preuves ne sont pasconcluantes.

Reuters a envoyé ses questions à propos de LRPS directement à Mme Wangoi par e-mail,mais elles sont restées sansréponse. La présidencecongolaise n’a pas répondunon plus aux sollicitations àpropos du montage sur lespasseports et de l’identité dupropriétaire de LRPS. Deson côté, la société Semlexn’a pas souhaité faire decommentaire.

A la suite desdifférentes requêtes envoyées, un haut responsable de la sécurité congolaise a contacté Reuterset a affirmé qu’il communiquerait des réponses au nom de Joseph Kabila, de Makie MakoloWangoi et des autres personnes déjà contactées. Il s’est ensuite ravisé et a préconisé d’envoyertoutes les questions au PDG de Semlex, Albert Karaziwan, sans donner plus d’informations.

Albert Karaziwan n’a pas répondu aux e-mails ni aux SMS qui lui ont été adressés. Sesavocats se sont refusé à tout commentaire, invoquant d’éventuelles poursuites judiciaires contretoute personne qui chercherait à diffuser des informations trompeuses dans l’affaire despasseports.

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Reuters a donné la possibilité à Joseph Kabila et aux autres protagonistes présumés del’affaire de réagir aux informations recueillies. Ils ne l’ont pas fait.

Des centaines de millions de dollars

Le prix étonnamment élevé du passeport congolais est pourtant démontré par une offreconcurrente d’une entreprise belge sans rapport avec Semlex, Zetes. Dans ce document dontReuters a pu prendre connaissance, Zetes souligne qu’en 2014, le plan gouvernemental de miseen place des passeports biométriques allait coûter 28,50 dollars pièce. Zetes a confirmé avoirfait cette offre.

Au fil du temps, les passeports biométriques à 185 dollars pourraient rapporter descentaines de millions de dollars aux sociétés LRPS et Semlex, détournant ces ressources d’unEtat instable et miné par la pauvreté. D’après l’ONU, le revenu annuel moyen en RDC n’excèdepas 680 dollars par habitant.

L’État congolais a donc besoin de tous les fonds que le pays est capable de mobiliser,mais il s’est déjà privé dans le passé de ressources au profit de grandes entreprises. Un rapportpublié par l’Africa Progress Panel en 2013 montre que la RDC aurait perdu près de 1,3 milliardde dollars de recettes dans cinq contrats miniers depuis 2010, car les entreprises publiques ont« systématiquement » sous-évalué des actifs lors de la vente de concessions à des investisseurs.Ces contrats impliquent des transactions complexes entre grandes entreprises, mais dansl’affaire des passeports, l’État se prive de revenus prélevés directement sur des citoyenscongolais.

Durant le règne de Kabila, certains de ses plus proches collaborateurs se sont beaucoupenrichis grâce aux intérêts détenus dans de nombreuses affaires dans le pays, d’après l’ONGanticorruption Global Witness. En décembre, Bloomberg avait dévoilé une liste de 70entreprises – dont LRPS ne faisait pas partie – qui avaient, selon l’agence de presse, des liensavec les membres de la famille de Kabila, dont Mme Wangoi.

Joseph Kabila n’a pas réagi à ces révélations, mais certains de ses proches collaborateursont nié le fait que la RDC ait pu avantager certains fonctionnaires ou hommes d’affaires réputésproches du président. Ils ont aussi justifié l’implication de membres de sa famille dans lesaffaires, expliquant qu’ils sont des citoyens comme les autres, en droit d’avoir des activitéscommerciales.

Joseph Kabila aurait dû quitter le pouvoir au mois de décembre dernier, mais les électionsont été retardées et ses opposants lui dénient toute autorité.

Des courriers directement adressés à M. Kabila

Au cours des vingt dernières années, Semlex est devenu le principal fournisseur de piècesd’identité et de passeports pour de nombreux pays africains. Depuis son siège social, unbâtiment situé sur l’avenue Brugmann, à Bruxelles, l’entreprise a servi des clients aussi bien enGuinée-Bissau qu’au Kenya ou à Madagascar. La signature d’un contrat avec la RDC – l’undes pays les plus peuplés du continent, avec quelque 70 millions d’habitants – étaitparticulièrement intéressante pour l’entreprise. La signature d’un contrat avec le Congo – l’un despays les plus peuplés du continent, avec quelque 70 millions d’habitants – était particulièrementintéressant pour l’entreprise.

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Les documents consultés par Reuters – dont ceux concernant les accords entre Semlex etle gouvernement, ainsi que les accords entre des individus et des entreprises impliqués dansl’opération– montrent comment la signature d’un tel contrat a été organisée.

L’un des personnages clés dans cette affaire est le PDG de Semlex, Albert Karaziwan,qui a fondé l’entreprise en 1992 et qui la contrôle avec sa famille quasi intégralement.

Le président congolais, Joseph Kabila, et le PDG de la société Semlex, Albert Karaziwan,en novembre 2015 au moment du lancement du nouveau passeport biométrique.

Albert Karaziwan est un Belge d’origine arménienne, né à Alep, en Syrie. Il possède unchâteau en Belgique et des intérêts dans l’immobilier et l’hôtellerie. Il intervient principalementdans les domaines des technologies et de la sécurité pour des gouvernements, en particulier enAfrique. Entre octobre 2014 et juin 2015, M. Karaziwan a eu divers échanges avec les autoritéscongolaises, y compris à travers des courriers directement adressés à M. Kabila, d’après lesdocuments consultés par Reuters.

Le 16 octobre 2014, M. Karaziwan a envoyé une première expertise de ce que pouvaitcoûter un passeport biométrique : entre 21,50 euros et 43 euros, précisant que sa société pouvaitmême les faire fabriquer dans sa propre usine, en Lituanie. Cinq jours plus tard, M. Karaziwana envoyé une autre lettre à M. Kabila. Cette fois-ci, il a invité deux hauts dirigeants proches duprésident congolais, Moïse Ekanga Lushyma et Emmanuel Adrupiako, à Dubaï pour discuterdes termes du contrat.

M. Ekanga a dirigé l’organe gouvernemental chargé du programme de coopération sino-congolais portant sur plusieurs milliards de dollars. M. Adrupiako est, lui, un importantconseiller financier qui travaille avec Joseph Kabila depuis 2001. Un responsable au fait del’organisation de la présidence de M. Kabila décrit Adrupiako comme son « trésorier »officieux.

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« Le contrat aurait dû être rendu public »

Au début du mois de novembre 2014, Semlex a affirmé qu’il pouvait fournir despasseports pour 50 dollars pièce, d’après des documents consultés par Reuters. Dans une lettreenvoyée à M. Kabila le 13 novembre, le prix est pourtant passé à 120 dollars.

En mars 2015, M. Karaziwan était invité à Kinshasa par le ministre des affaires étrangèresafin de finaliser l’accord. A la fin du mois de mai, Semlex s’est vu proposer un contrat pourcinq ans par le ministère du budget. En ju in 2015, M. Karaziwan, le ministre congolais desaffaires étrangères, Raymond Tshibanda, et le ministre des finances, Yav Mulang, ont finalisél’accord..

La boîte postale de la société Semlex, à Bruxelles.

Le jour de la mise en service de ce nouveau passeport, M. Karaziwan, M. Tshibanda etdes employés de Semlex ont pris la pose pour une photo que Reuters a pu voir : au milieu trônele président Kabila, esquissant un large sourire.

Quelques semaines plus tard, le premier ministre congolais de l’époque, Mapon MatataPonyo, a écrit au ministre des affaires étrangères afin de se plaindre d’avoir appris la signaturedu contrat pour les passeports à travers la presse. Dans ce courrier – dont Reuters a pu prendreconnaissance –, M. Matata Ponyo réclame plus de détails sur le contrat afin de vérifier s’ilrespecte les exigences de transparence. Il n’a jamais eu de réponse, a dit l’un de ses porte-parole.

Un haut fonctionnaire de l’Autorité congolaise de régulation des marchés publics affirmeque le contrat pour les passeports aurait dû passer par un appel d’offres. « Cela ne s’est pasproduit, a-t-il dit. C’était directement géré par le ministère des affaires étrangères. Le contrataurait dû être rendu public. »

A chacun sa part

Le contrat signé le 11 juin 2015 mentionne que 65 dollars sur les 185 dollars que coûteun passeport seront reversés à l’Etat congolais. Les 120 dollars restants seront reversés à unconsortium – dont font partie Semlex Europe, basé à Bruxelles, Semlex Monde, installé auxEAU, l’imprimerie Semlex en Lituanie et l’entité enregistrée aux EAU, LRPS.

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Ces 120 dollars ont été de nouveau répartis, selon les termes de deux autres contratségalement datés du 11 juin. D’après l’un de cescontrats, une entreprise basée à Kinshasa – MantengaContacto Trading Limited – s’est vu attribuer 12dollars pour chaque passeport délivré, en échange dela mise à disposition du personnel nécessaire pour lamise en œuvre du projet. Mantenga a pris acte desenquêtes de Reuters mais s’est refusé à toutcommentaire.

Les trois entreprises Semlex qui ont signé cesaccords ont, elles, reçu 48 dollars pour chaquepasseport délivré. Les 60 dollars restants sont allésdans les caisses du consortium. D’après un documentconsulté par Reuters, cet argent a été perçu par LRPS.En échange, l’entreprise devait contribuer aux tâchesadministratives, logistiques et aux relations avec legouvernement congolais. Lors des négociations,LRPS était représenté par M. Karaziwan, le patron deSemlex, d’après le contrat conclu entre Semlex et legouvernement congolais.

Des habitants de Kinshasa chantent des slogans hostiles au président Joseph Kabila dont le mandat s’estachevé le 19 décembre 2016.

Reuters n’a pas été en mesure de vérifier les statuts actuels de la société LRPS. Mais lesstatuts déposés devant les autorités de Ras al-Khaïmah, aux EAU, montrent que l’entreprise aété créée le 14 janvier 2015, pendant que Semlex était en pleine négociation avec lesreprésentants de M. Kabila sur les passeports biométriques. Le document ne dit pas qui était lepropriétaire de l’entreprise au moment de sa création.

Mais un second document – relatif au transfert des actions – indique qu’au cours del’année 2015, LRPS appartenait à un Français installé à Dubaï, Cédric Fevre, un partenaire enaffaires de M. Karaziwan. Ce document informatisé n’est pas signé, mais les métadonnées qu’ilcontient montrent qu’il a été créé aux EAU en 2015 et imprimé le 25 juin de la même année.

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Le jour même où Cédric Fevre a transféré l’intégralité des 10 000 parts de LRPS à MmeWangoi, d’après une source au fait du dossier.

Mme Wangoi, une proche de la famille Kabila

Une deuxième source, qui était aucourant du contrat sur les passeports sansen avoir une connaissance de premièremain, a confirmé que Mme Wangoi étaitdevenue la propriétaire de LRPS aprèscette transaction.

La première personne, qui était enlien direct avec le dossier des passeportsbiométriques, affirme que les seulescopies signées du transfert d’actions deLRPS sont entre les mains de M. Fevre etde Mme Wangoi. Reuters n’a pas pu voirune copie signée. M. Fevre et MmeWangoi n’ont pas répondu auxsollicitations de l’agence.

Le nom de Makie Makolo Wangoin’est pas très connu en dehors de lafamille de Joseph Kabila. Des registres desociété montrent qu’elle est actionnairede plusieurs sociétés, avec d’autresmembres de la famille Kabila. Dans deux

de ces sociétés basées en RDC – Shaba ImpexSPRL et Shaboil SPRL –, Mme Wangoi utilise unautre nom, celui de Makolo wa Ngoy Kabila,d’après les registres.

Deux proches du président Kabila affirmentque Mme Wangoi est l’une des nombreuses sœursdu président congolais. Elle a été présentée commetelle dans l’enquête de Bloomberg sur les intérêtséconomiques de la famille du président. Une autresource – spécialiste de la RDC et de la familleKabila – a dit que Mme Wangoi pourrait aussi êtreune nièce du président.

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Un opposant à Joseph Kabila muni d’un carton rouge, un symbole appelant au départ du président.

Le contrat pour les passeports a une durée de cinq ans. Il ne stipule pas combien depasseports seront délivrés, mais, ces dernières années, la RDC a délivré environ 2,5 millions deses anciens modèles de passeport par an.

Une source en prise directe avec les opérations de Semlex a affirmé que l’entreprise belgeavait produit environ 145 000 nouveaux passeports biométriques à la fin janvier 2017, ce quipermettrait à LRPS d’empocher près de 9 millions de dollars.

Dans un autre document consulté par Reuters, Semlex reconnaît qu’elle pourrait fournirà la RDC près de 2 millions de passeports par an en rythme de croisière. Ce qui signifie quel’entreprise belge pourrait recevoir jusqu’à 100 millions de dollars par an, et LRPS 120 millionsde dollars.

Joseph Kabila s’accroche au pouvoirLa RDC se trouve dans une impasse politique depuis le 19 décembre 2016, date à laquelle

le président Joseph Kabila a achevé son mandat mais a décidé de se maintenir au pouvoir.L’élection présidentielle a été repoussée, officiellement en raison de difficultés logistiques etfinancières, et la Cour constitutionnelle a validé la décision de Kabila.

L’opposition congolaise se trouve grandement affaiblie depuis le décès de son chef defile, Etienne Tshisekedi, qui devait présider un conseil de transition chargé de veiller à ce queM. Kabila quitte effectivement ses fonctions avant la fin de l’année. La formation de ce conseilavait été approuvée dans un accord conclu le 31 décembre sous l’égide de l’Eglise catholique.

Joseph Kabila a nommé la semaine dernière l’opposant Bruno Tshibala à la tête d’ungouvernement de transition chargé d’organiser une élection présidentielle à la fin de cette année.Cette décision pourrait raviver les tensions au sein de l’opposition au chef de l’Etat, aprèsl’échec d’une médiation visant à mettre en œuvre l’accord du 31 décembre dernier sur lesmodalités de son départ.

Que M. Kabila reste ou non à la tête du pays, cela n’empêchera pas LRPS de poursuivreson enrichissement grâce aux passeports délivrés par la RDC. L’article 14 du contrat mentionneque l’accord ne deviendra pas caduc, même en cas de « changement institutionnel » dans lepays.

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Comment l'Administration Trump peut aider à combattre la Kleptocratieen Afrique

Par John Campbell , Ralph Bunche, et Allen Grane

La Kleptocratie - un type de corruption dans lequel le gouvernement ou les fonctionnairesrecherchent un gain personnel au détriment de ceux qui sont gouvernés - porte atteinte auxintérêts américains en Afrique subsaharienne. En favorisant une mauvaise gouvernance, lakleptocratie affaiblit la démocratie et la sécurité. La colère populaire et le désespoir sur lacorruption alimentent souvent les mouvements et les insurrections radicaux qui sontprofondément antagonistes aux États-Unis et mettent en cause la croissance de la démocratie etla primauté du droit dans les pays qui sont des partenaires américains réels ou potentiels.

Une politique de lutte contre la kleptocratie en Afrique subsaharienne renforcerait lasécurité nationale des États-Unis et l'administration Donald J. Trump devrait commencer avecle Nigeria et l'Afrique du Sud. Ce sont les deux plus grandes économies d'Afrique, et chaquepays est apparemment démocratique, bien que certaines institutions soient encore fragiles. Lesrôles de leadership régional des deux pays sont largement reconnus ailleurs en Afrique.Réfléchissant l'importance des deux pays aux États-Unis, le président Trump a téléphoné auprésident nigérian Muhammadu Buhari et au président sud-africain Jacob Zuma lors de sapremière quinzaine de jours, faisant de Buhari et Zuma les seuls dirigeants d'Afriquesubsaharienne avec lesquels il a été en contact personnel. Des campagnes nationales de luttecontre la corruption sont en cours dans les deux pays, menées au Nigeria par le gouvernementde Buhari et en Afrique du Sud par l'opposition politique et la société civile, y compris lesmédias et les organisations non gouvernementales anticorruption (ONG). L'administrationTrump a maintenant une occasion spéciale d'aider ces deux hégémonies régionales à luttercontre la corruption sur le continent africain.

Contexte

Le Nigeria et l'Afrique du Sud sont à la fois contestés par la corruption kleptocratique,mais il existe des différences dans la nature et l'ampleur du problème. La kleptocratie a

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historiquement dominé l'économie politique du Nigéria. En Afrique du Sud, la kleptocratie estmoins institutionnalisée et moins susceptible de fausser la politique.

La kleptocratie nigériane a des racines profondes, précoloniales et des régimes successifset les administrations l'ont utilisée comme instrument de contrôle politique. Après la guerrecivile de 1967 à 1970, ceux du gouvernement - militaires et civils - se sont appropriés pour leurusage personnel des recettes pétrolières qui, en vertu de la loi, appartenaient au peuple nigérian.Les dirigeants du Nigéria ont priorisé l'industriepétrolière sur d'autres industries et contrôlé demanière centralisée les recettes pétrolières,permettant aux hauts fonctionnaires de voler desmilliards. Cela a détruit une tradition de vold'Etat qui a duré jusqu'à ce jour. Les kleptocratesnigériens ont déplacé une grande partie de cetargent volé hors du pays par le biais du systèmefinancier international, y compris les institutionsfinancières sud-africaines. Le désespoirpopulaire engendré par la corruptionkleptocratique a miné la confiance dans les gouvernements et a été un moteur del'acquiescement ou du soutien populaire pour Boko Haram et d'autres mouvements djihadistes.Buhari est le premier candidat nigérian qui n'est pas du parti au pouvoir à être élu président àtravers des élections crédibles, et il a un fort soutien du public (sinon des classes politiques)pour ses efforts sans précédent pour mettre fin à la gouvernance par les kleptocrates.

Les institutions de l'Afrique du Sud sont fondées sur la règle de droit et fournissent uneprophylaxie contre les pires conséquencesdomestiques de la corruption. Pourtant, lakleptocratie entraîne une baisse de l'économie etporte atteinte à la légitimité démocratique. Grâce àses communications avancées et à soninfrastructure financière, l'Afrique du Sud sertégalement de facilitateur des transactionsfinancières illicites d'autres pays africains, dont leNigéria. L'échec de certaines autorités locales enAfrique du Sud à fournir des services promis lorsdu vol de fonds publics a déclenché des

manifestations du canton et a contribué au déclin du soutien au Congrès national africainresponsable (ANC). La corruption kleptocratique à grande échelle est particulièrement associéeà l'administration Zuma. Il est devenu une question partisane; Les partis d'opposition harcèlentla prétendue corruption du président, de ses associés personnels et de la partie supérieure del'ANC. Zuma a été censuré par des institutions constitutionnellement établies et les tribunauxpour avoir dépensé de l'argent public sur son domaine privé, Nkandla. Il est également confrontéà des allégations répétées de son opposition politique et des médias pour faciliter ou ignorer lacorruption de son cercle intérieur.

Parfois, le lien kleptocratique entre le Nigeria et l'Afrique du Sud est manifeste. Lespoliticiens nigériens corrompus ont trouvé un havre-fort en Afrique du Sud et y conservent desatouts importants, et de nombreux Nigérians riches ont des maisons dans les banlieues deJohannesburg. À leur tour, certains Sud-Africains profitent de fournir des services financierssophistiqués qui facilitent les flux financiers illicites du Nigeria.

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Par exemple, entre 2014 et 2015, dans deux épisodes, les fonctionnaires de la frontièresud-africains ont intercepté environ 15 millions de dollars en espèces auNigeria.L'administration de Buhari allègue de manière crédible que cet argent faisait partie d'unschéma de l'ancien conseiller en sécurité nationale et d'autres personnes pour voler des milliardsdestinés à la lutte du Nigéria contre Boko Haram. L'argent volé était probablement en routepour être lavé à travers le système financier de l'Afrique du Sud.

Les initiatives anticorruption sont au centre du discours politique dans les deux pays. AuNigéria, l'administration Buhari mène l'effort. En Afrique du Sud, c'est l'opposition politique,le pouvoir judiciaire indépendant, la presse libre et la société civile qui gardent la corruption àl'avant-garde du dialogue national, alors que l'administration de Zuma ne fait que payer de lalutte contre la corruption. Buhari a lancé un appel en faveur d'une assistance internationale.Demême, ont des parties de la société civile sud-africaine et des parlementaires. Cependant,comme ailleurs sur le continent africain, les bénéficiaires de la corruption caractérisent lesinitiatives anticorruption en tant qu'entreprises néocoloniales qui imposent des valeursoccidentales aux Africains.

Recommandations

L'administration Trump devrait faire de la lutte contre la kleptocratie une prioritéinterinstitutions dans le cadre de sa plate-forme de sécurité et devrait revigorer les outilsadministratifs et législatifs qu'elle possède déjà. En Afrique, l'administration Trump devraitcommencer ces efforts avec le Nigeria et l'Afrique du Sud, en utilisant des tactiques qui reflètentles différences de corruption dans les deux pays.

Au Nigéria, les États-Unis devraient s'associer à l'administration Buhari car il cherche àrécupérer les biens volés de l'étranger et, à long terme, à transformer la culture politique dupays. En Afrique du Sud, où la corruption est à la fois moins intégrée et plus associée à desindividus particuliers, les États-Unis devraient soutenir les efforts des groupes de la sociétécivile et des partis politiques qui travaillent pour exposer et punir la corruption par les tribunaux.

Le Conseil de sécurité nationale devrait créer un groupe de travail interinstitutions pourutiliser pleinement les politiques et les procédures anticorruption américaines déjà en place pourpoursuivre des stratégies spécifiques au pays au Nigeria et en Afrique du Sud. Tout d'abord, legroupe de travail devrait veiller à ce qu'une stratégie anticorruption soit partagée par l'ensembledu gouvernement, y compris les départements d'État, de trésorerie, de justice et de sécuritéintérieure, et la Securities and Exchange Commission. Une telle approche devrait utiliser desoutils de lutte contre la corruption tels que l' Initiative de recouvrement d'actifs de Kleptocracyet la Loi sur les pratiques de corruption courante (FCPA) , qui confèrent aux pouvoirs exécutifset judiciaires américains la compétence sur l'argent illicite qui traverse le système financieraméricain, quelle que soit son origine, sa destination , Ou les bénéficiaires. Le groupe de travaildevrait collaborer étroitement avec l'administration Buhari car il cherche à rapatrier les fondsvolés qui sont protégés à l'étranger. En Afrique du Sud, le groupe de travail devrait mettre sonexpertise sur la poursuite du blanchiment d'argent et d'autres crimes de col blanc dans unenvironnement financier sophistiqué disponible pour les ONG anticorruption, les tribunaux etles parlementaires. Le groupe de travail devrait veiller à ce que les efforts américains dans lesdeux pays soient coordonnés mais reflètent les différences nationales importantes; Uneapproche unique devrait être évitée.

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Avec les conseils du groupe de travail, les ambassades américaines à Abuja et Pretoriadevraient révoquer les visas des Nigérians et des Sud-Africains corrompus . Le but de cetteaction serait de souligner que la corruption a des conséquences personnelles même pour lespersonnes dans les classes politiques précédemment protégées. À cette fin, l'administrationTrump devrait s'efforcer d'accélérer la lente et inefficace procédure de révocation de visa. Lesambassades des États-Unis dans les deux pays devraient publier la politique de révoquer lesvisas de ceux qui sont soupçonnés de criminalité. (La loi de confidentialité des États-Unisinterdit d'identifier par nom les personnes dont les visas sont révoqués). L'identification de ceuxdont les visas devraient être annulés sera plus facile au Nigeria, où la corruption est répandueet ouverte. En Afrique du Sud, où la corruption est plus petite et plus sophistiquée, les médiaslibres et la société civile active du pays peuvent aider à identifier les auteurs. L'administrationTrump devrait être prête à accepter le retour des responsables politiques puissants - au Nigéria,où une partie importante de la classe politique pourrait être affectée, et en Afrique du Sud, oùau moins certains des auteurs présumés sont proches du président Zuma.

Le Bureau des affaires africaines du Département d'État des États-Unis devraitencourager les gouvernements africains, en commençant par le Nigéria et l'Afrique du Sud, àfaire appliquer les protocoles panafricains de lutte contre la corruption à laquelle ils ont déjàaccepté. Trente-quatre pays ont ratifié la Convention de l' Union africaine sur la prévention etla lutte contre la corruption . Les États-Unis devraient aider l'Union africaine à responsabiliserses membres. Cela devrait inclure la sensibilisation aux organisations non gouvernementales,telles que les associations de barre et faciliter les échanges avec les organisations nongouvernementales de lutte contre la corruption.

Une campagne de Trump contre la kleptocrate au Nigéria et en Afrique du Sudsoutiendrait les intérêts démocratiques, réduirait l'acquiescement domestique ou le soutien auxinsurrections en Afrique subsaharienne et combattrait les réseaux criminels internationaux. Ilrenforcerait et étendrait également une culture panafricaine de la lutte contre la corruption,encourageant ainsi un engagement régional durable à long terme en faveur de la bonnegouvernance et de la primauté du droit.

Les auteurs

John Campbell est le collègue senior de Ralph Bunche pour les études de politiques en Afriqueau Conseil des relations extérieures. Son livre le plus récent, Morning in South Africa , a été publié enmai 2016. Il est également l'auteur du Nigeria: Dancing on the Brink , publié à l'origine en 2010 et suivid'une deuxième édition en 2013. Il écrit le blog Africa in Transition and Modifie à la fois le SecurityTracker du Nigeria et le Security Tracker subsaharien sur CFR.org. De 1975 à 2007, Campbell a serviau département d'État américain. Il a servi deux fois au Nigéria, en tant que conseiller politique de 1988à 1990 et en tant qu'ambassadeur de 2004 à 2007. Les autres publications à l'étranger de Campbellincluent Lyon, Paris, Genève et Pretoria. Campbell a obtenu un baccalauréat et une maîtrise del'Université de Virginie et un doctorat en histoire du français du xvne siècle de l'Université duWisconsin-Madison.

Allen Grane est un associé de recherche pour les études de politiques en Afrique au Conseil desrelations extérieures. Grane est également capitaine des affaires civiles dans la réserve de l'arméeaméricaine. Il est titulaire d'un baccalauréat en anthropologie de l'Université St. John's