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sont la propriété de - ekladata.comekladata.com/_jWh0iIA9zWfhVKcMs5DogVPyM4/Driven_Saison_1_-_pi… · 1 Je soupire de soulagement, heureuse d’avoir pu m’échapper – ne serait-ce

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Celivreestunouvragedefiction.Lesnoms,personnages,lieuxetévénementssontleproduitdel’imaginationdel’auteurouutilisésdefaçonfictive.Touteressemblanceavecdesfaitsréels,deslieuxoudespersonnagesexistantsouayantexistéseraittotalementfortuite.

Titredel’éditionoriginaleDrivendeK.BrombergCopyright©2013K.Bromberg

DrivendeK.Bromberg

Tousdroitsréservésycomprisledroitdereproduction,totaleoupartielle,sousquelqueformequecesoit,sansleconsentementpréalabledel’éditeuroudel’auteur.

ToutereproductionconstitueraituneviolationduCodedelapropriétéintellectuelle.

Misàpartletexteoriginalécritparl’auteur,toutesleschansons,titresetparolesmentionnésdansleromanDrivensontlapropriétédeleursauteursrespectifsetdesdétenteursdesdroitsd’auteur.

Photographiedecouverture:©A.Green/Corbis

OuvragedirigéparIsabelleSolal

CollectionNewRomancedirigéeparHuguesdeSaintVincent

©2015,ÉditionsHugoRoman

DépartementdeHugo&Cie38,rueLaCondamine

75017Pariswwwhugoetcie.fr

ISBN:9782755625059

CedocumentnumériqueaétéréaliséparNordCompo.

ÀB,B&CPuissiez-voustoujourssuivrevosrêves.

Lecheminneserapasaiséetilsepourraitquevousayezàlespoursuivrependantdesannées.

Vousdevrezsurmonterdesobstaclesetignorerlescritiques.Vousrencontrerezdespériodesdedouteetdesmomentsd’insécurité.

Maisvousyarriverez.Etquandvoustoucherezfinalementaubut,

Peuimportevotreâgeetl’endroitoùlavievousauramenés,accrochez-vousfermement–savourezcesentimentd’accomplissement–etnelâchezrien.

Jamais.

1

Jesoupiredesoulagement,heureused’avoirpum’échapper–neserait-cequ’uninstant–duflotdebavardages futilesqui règnede l’autrecôtéde laporte.D’accord,c’estmoiquiai invitécesgens,mais pour autant je ne suis pas tenue de les apprécier ni même de me sentir à l’aise avec eux.Heureusement,Daneacomprismonbesoindeprendrel’airetilm’alaisséeluirendreceserviceetm’échapperpourrésoudreceproblèmededernièreminute.

Tandisquejetrouvemonchemindansledédaledescoulissesdésertesduvieuxthéâtrequej’ailouépourl’événementdecesoir,seulleclaquementdesmeshautstalonsaccompagnemespenséeséparses. Quelques secondes plus tard, je récupère les listes que Dane a oubliées dans le vieuxvestiaire, dans notre précipitation à faire le ménage avant la réception. Alors que je m’apprête àrebrousser chemin, je refais mentalement le point sur la soirée d’enchères de ce soir, tellementattendue.J’ailasensationd’oublierquelquechose.Machinalement,jeportelamainàmahanchepourattrapermontéléphonequicontientenpermanencela listedecequejedoisfaire.Maistoutcequej’attrape,c’estunepoignéedelasoiecouleurcuivredemarobedecocktail.

–Merde.Jem’immobilisepouressayerdecheckercequejepeuxbienoublier.Jem’adosseaumur, le

corsagefroncédemaroberendimpossibletoutetentativedepousserunsoupirdefrustration.Elleabeau être superbe, cette robe aurait dû être accompagnée d’un avertissement : ne permet pasnécessairementderespirer.

Réfléchis,Rylee, réfléchis !Les omoplates appuyées contre lemur, jemebalance d’avant enarrière, sans me soucier d’élégance, pour alléger la pression qui s’exerce sur mes orteilsdouloureusementcompressésdansmesstilettosdedixcentimètres.

Lestablettesd’affichagepourlesenchères!C’estça!Quandjepenseaustressauquelj’aiétésoumise dernièrement en tant qu’unique organisatrice de la soirée, le bon fonctionnement demoncerveaume tire un large sourire de satisfaction. Soulagée, jem’écarte dumur et jem’avance dequelquespas.Etc’estlàquejelesentends.

Lesgloussementsséducteursd’unevoixfémininetraversentlesilence,suivisdutimbreprofondd’un gémissementmasculin. Jem’immobilise instantanément, choquée par l’audace de certains denos invités, quand le son reconnaissable entre tous d’une fermeture Éclair, suivi d’un halètementfémininfamilier–«Ohoui!»–meprovientdepuisuncoinsombre,àquelquespasdevantmoi.

Tandis que mes yeux s’accoutument à l’obscurité, je distingue une veste de smoking jetéenégligemmentsurunvieuxfauteuilpoussédansuncoinetunepaired’escarpinsabandonnésdessous,auhasard.

Ilfaudraitmepayercherpourfaireçaenpublic.Mespenséessontinterrompuesparlesouffled’unerespirationsifflante,suivid’unevoixmasculine.

–DouxJésus!Jefermelesyeux,indécise.J’aiabsolumentbesoinpourlesenchèresdesardoisesquisontdans

le localauboutducouloir.Malheureusementpouryaccéder, jedoisnécessairementpasserdevantl’alcôvedesAmants.Jen’aipaslechoix.Jefaisuneprière,aussivainequesilencieuse,enespérantréussiràmefaufilersansattirerl’attention.

Je fonce, en détournant la tête et sur la pointe des pieds, pour éviter quemes talons hauts neclaquentsurleplancher.Ilnemanqueraitplusquejemefasseremarqueretquejemeretrouvefaceàfaceavecquelqu’unquejeconnais.Jepousseunsoupirdesoulagementsilencieuxenatteignantsansencombrelelocalderangement,toutenmedemandantoùj’aidéjàentendulavoixdelafemme.Jemebagarre avec la poignée de la porte quime résistemais que je finis par ouvrir, et j’allume lalumière.Lesaccontenantlestablettesd’affichagesetrouvesurl’étagèredufond.J’entredanslelocalsanspenseràbloquer laporteouverte.Àpeineai-je saisi lesansesdusacque laportese refermedansmon dos en claquant, faisant trembler les étagères bonmarché. Jeme retourne brusquementpourrouvrirlaporte,maisjevoisquelebrasdelafermetureautomatiques’estdécroché.J’enlâchelesac.Lesardoisess’éparpillentbruyammentsurlesolenbétondecetespaceclos.Jemeprécipitesurlapoignéedelaporte,elletourne,maislaporteelle-mêmenebougepasd’unpouce.Refusantdecéderàlapaniquequicommenceàmegagner,jepousselaportedetoutesmesforces.Sanssuccès.

–Merde!Merde,merdeetre-merde!Jeprendsuneprofondeinspirationetsecouelatête,frustrée.J’aiencoreuntasdechosesàfaire

avantledébutdesenchères.Et,biensûr,jen’aipasmontéléphonesurmoipourappelerDaneàmonsecours.

Aumomentoùjefermelesyeux,maNémésism’apparaîtbrusquement.Leslongsdoigtsdelaclaustrophobie commencent à monter lentement le long de mon corps et menacent de s’enroulerautourdemagorge.

Pourserrer.Metourmenter.M’étouffer.Lesmurs de la petite pièce semblent se rapprocher peu à peu pour se refermer surmoi. Ils

m’emprisonnent,jesuffoque.Jeluttepourrespirer,maislesbattementsdemoncœurs’affolenttandisquej’essaiederepousserlapaniquequimeserrelagorge.Marespirationsaccadéerésonneàmonoreille.Ellemedévoreetannihiletoutecapacitéàteniràdistancemessouvenirscauchemardesques.

Je tambourine sur la porte, la peur prend le pas sur le peu de self-control quime reste et jecommence à perdre pied. Un filet de sueur me coule dans le dos. Les murs ne cessent de serapprocher. Je n’ai qu’une chose en tête, sortir d’ici. Je tambourine de plus belle en hurlantfrénétiquementdansl’espoirquequelqu’unpasseparlàetm’entende.

Enfermantlesyeux,jem’appuiecontrelemur,m’efforçantdereprendremonsouffle,maisjerespiredifficilement,pire,unétourdissementmegagne.Prisedenausée,jemelaisseglissercontrelemur, appuyant involontairement sur l’interrupteur. Aussitôt je me retrouve plongée dans uneprofondeobscurité.Jepousseuncrietcherchefrénétiquementleboutond’unemaintremblante.Lalumière revient, renvoyant lesmonstres à leur cachette.Mon soulagement est de courte durée, enbaissant les yeux, je vois mes mains couvertes de sang. Je cligne des yeux pour me sortir de cecauchemar,maisimpossibledeledissiper.Jesuisreplongéedansunautrelieu,àuneautreépoque.Tout autour de moi exhale la puanteur aigre de la destruction. Du désespoir. De la mort. Sarespiration saccadée me dit qu’il agonise. Je comprends que c’est la fin. J’éprouve cette douleurinsupportablequis’enfoncesiprofondémentdansvotreâmequevousavezpeurdeneplus jamaispouvoirluiéchapper.Mêmedanslamort.Jehurle.Mescrismetirentdemonsouvenir,maisjesuissidésorientéequejenesaispass’ilsproviennentdupasséouduprésent.

Reprends-toi,Rylee!Dudosdelamain,j’essuieleslarmesquicoulentsurmesjouesetjemerappellelapremièreannéedemathérapiepouressayerdetenirmaclaustrophobieàdistance.Jemeconcentre surunpointdumuren facedemoi, j’essaiede régulerma respiration. Jem’appliqueàrepousserlesmursetàéloignerlessouvenirsinsupportables.Jecomptejusqu’àdixlentement,cequimeredonneunminimumdemaîtrise,maisledésespoirnelâchepasprise.JesaisbienqueDanenevapastarderàvenirmechercher,ilsaitoùjesuis.Maiscetteidéenesuffitpasàavoirraisondemapanique.

Finalement,mon besoin de sortir reprend le dessus et jeme remets à tambouriner contre laporte, tout en hurlant et en jurant de toutesmes forces. Je supplie qu’onvienneouvrir cette porte.Qu’onvienneàmonsecours,cettefoisencore.

Incapable de penser rationnellement, je perds peu à peu la notion du temps ; les secondesdeviennent des minutes et les minutes des heures. J’ai l’impression d’être enfermée depuis uneéternitédanscelocalquinecessederétrécir.Découragée,jecrieunedernièrefoisenreposantmesavant-bras contre la porte. Laissant libre cours àmes larmes, je pose la tête surmes bras, faisantpesertoutmonpoidssurlaporte.Delongssanglotssaccadéssecouentmoncorpsavecviolence.

Soudain,j’ail’impressionquejetombe.De fait, je tombe en avant, percutant le corps compact d’un homme qui se trouve sur mon

chemin.Jemerattrapeenentourantdemesbrasuntorsefermeetpuissanttandisque,derrièremoi,mesjambesseplient,formantunangleinhabituel.Instinctivement,l’hommelèvelesbrasetlespasseautourdemoipourmesoutenir.Ilmetientcontreluienabsorbantlechoc.

Enlevantlesyeux,j’enregistreunemassedecheveuxnoirsébouriffés,lehâled’unepeau,unebarbe naissante… et c’est là que nos regards se croisent. Une décharge électrique – une énergie

palpable–crépitequandmesyeuxrencontrentdesyeuxméfiantsaux irisd’unvert translucide.Unéclairdesurprise les traversebrièvement.Lacuriositéet l’intensitéavec lesquelles ilme jaugemedéconcertent,endépitdelaréactionimmédiatedemoncorpsàsaprésence.Unsimplecontactavecceregardfaitresurgirenmoidesflotsd’enviesetdesdésirsenfouisdepuislongtemps.

Commentcethommequejevoispourlapremièrefoisréussit-ilàmefaireoublierlapaniqueetlesentimentdedésespoirquimesubmergeaientilyaquelquesinstantsàpeine?

Je commets alors l’erreur de détourner les yeux pour regarder sa bouche. Il m’étudie avecattention, ses lèvres charnues et bien dessinées se retroussent pour s’étirer lentement en unimpertinentsourireencoin.

Oh,comme jevoudraisquecettebouchesepose surmoi–n’importeoùetpartoutenmêmetemps!BonDieu!Qu’est-cequimeprend?Cethommenejouepasdanslamêmecourquemoi.Ilestàdesannées-lumièredemonmonde.

Aumomentoùjerelèvelesyeux, jevoisqu’ilmeregardeavecamusement,commes’il lisaitdansmespensées.Jesenslerougememonterauxjoues,gênéeaussibienparmasituationfâcheusequeparmespenséessalaces.Jeresserremaprisesursesbicepsdéveloppéstoutenbaissantlesyeuxpourévitersonregardévaluateuretjetentederecouvrermonsang-froid.Enramenantmesjambesàla verticale, sans le vouloir, jeme presse encore plus contre lui, mon équilibre est fâcheusementcompromis parmon inexpérience enmatière de talons aiguille. Je recule brusquement quandmesseins effleurent sa poitrine musclée, mettant le feu à mes terminaisons nerveuses. De minusculesdétonationsdedésircrépitentdanslestréfondsdemonventre.

–Oh…hum…jesuisterriblementdésolée.J’agitelesmainsenungested’excuse.L’hommeestencoreplusdésarmantmaintenantquejele

voisdanssatotalité.Parfaitdanssonimperfectionetredoutablementsexyavecsonsourirearrogantetsonairdebadboy.

Ilhausseunsourcil,conscientquejelejaugeduregard.–Vousn’avezpasàvousexcuser.J’ail’habitudequelesfemmesmetombentdanslesbras.Savoixrâpeuseauxintonationscultivées,avecjustecequ’ilfautdetension,évoquedesimages

de rébellionetde sexe. Je relève la têtebrusquement. J’espèrequ’ilplaisante,mais sonexpressionénigmatiquen’en laisse rienparaître. Ilm’observeavecperplexitéetsonsourire insolents’élargit,faisantapparaîtreunefossetteuniquesursamâchoirevolontaire.

J’ai beau avoir fait un pas en arrière, je suis encore très près de lui. Trop pour parvenir àrassemblermesespritsmaisassezpoursentirsonsoufflesurmajoue.Pourquelemélangesubtildel’odeurdesavonetdesoneaudetoiletteterreuseparvienneàmesnarines.

–Merci.Merci.J’ailesoufflecourt.Ilmescrute,unmuscletressautesursamâchoireserrée.Qu’est-cequime

rendsinerveuseetmepousseàmejustifier?–Laportes’estreferméesurmoi.Elles’estbloquée.J’aipaniqué…–Vousallezbien?Mademoiselle…?

Sans me laisser le temps de répondre il me prend par la nuque et m’attire vers lui enm’immobilisant.Desamain libre, ilexploremonbrasnu, j’imaginequ’ilveuts’assurerque jenesuispasblessée.Leboutdesesdoigtsfaitcourirunegerbed’étincellessurmapeauetj’éprouveuneconscienceaiguëdesabouchesensuelleàunsouffledelamienne.Samainremontelelongdemoncou,meslèvress’entrouvrentetmarespirations’arrêtequandilmecaresselajouedudosdelamain.Jen’aipasletempsd’analyserl’étatdeconfusionmêléd’unesolidepousséededésirquim’envahit,jel’entendsmurmurer:

–Etmerde!Etsaboucheseretrouvesurlamienne.Stupéfaite,jeretiensmonsouffle,meslèvress’écartent

unefractiondeseconde, iln’enfautpasplusàsalanguepourlescaresserets’insinuerentreelles.Les mains sur sa poitrine, je le repousse en essayant de me soustraire au baiser imposé par cetinconnu. J’essaie de faire ce que me dicte ma raison. J’essaie d’ignorer ce que mon corps meréclame.C’est-à-diredemedésinhiberetdem’autoriseràme laisserallerauplaisirdecet instantfugace.C’estlaraisonquil’emportedanslecombatquim’agiteentredésiretprudence,etjeréussisàlerepousseruninstant.Nosbouchesseséparent,nousnousfaisonsface,haletants.Sesyeuxbrûlantsd’envienelâchentpaslesmiens.Ilm’estdifficiled’ignorerledésirquis’épanouitaucreuxdemonventre.Laprotestationvéhémentequihurledansma têtevientmourirensilencesurmes lèvresaumomentoùj’acceptel’idéequej’aienviedecebaiser.Jeveuxressentircedontj’aiététantprivée– ceque jeme suisvolontairement interdit. J’ai envied’oublier touteprudence et dem’offrir «LEbaiser»–celuidontonparledanslesromans,celuiquivousrévèlelegrandamouretquivousfaitrenonceràvotrevertu.

–Décidez-vous,chérie.Ilyadeslimitesàmonself-control.Cetavertissement,cetteidéefollequ’unesimplefillecommemoipuissefaireperdresonself-

controlàunhommecommelui,mesidèreetmeperturbetellementquejenetrouvemêmepaslesmotspourprotester.Ilprofitedemonsilenceetc’estavecunsourirelascifqu’ilresserresonétreintesurmanuque.Enunsouffle,ilécraseseslèvressurlesmiennes,sondant,goûtant,exigeant.

Ma résistancenedurequequelques secondesavantque je rende lesarmes. Instinctivement, jepasselesdoigtssursamâchoiremalraséepourallertirerlesmèchesquibouclentdanssoncou,au-dessusdesoncol.Ungémissementsourds’échappedufonddesagorge,etjem’enhardisàluiouvrirmeslèvres.Malangues’enroulesurlasiennepourunepetitedanseintime.Unlentballetdeséductionaccompagnédesoupirsetdegémissementshaletants.

Sabouchealegoûtduwhisky.Sonassurancefrôlelarébellion.Soncorpsprojetteuneondededésirquimevadroit au sexe.Unecombinaisonenivrante suggérantqu’il est lebadboyque toutejeunefillesagedevraitéviteràtoutprix.Sonempressementetsonhabiletélaissentpeudedoutesurcequipourrait suivre.Des imagesde sexeme traversent l’esprit , jemevois ledosarc-bouté, lesorteils tenduset lesmainsagrippant lesdraps,oùilseraitprobablementaussidominateurquedanssonbaiser.

J’aibeaumelaisserfaire,jesaisquec’estuneerreur.Maconsciencemeditquejedoisarrêter.Quejenefaispascegenredechoses.Quejenesuispascegenredefille.QuejetrahisMaxàchaquecaresse.

MaisDieuquec’estbon!Jelaissemaraisoncéderàmondésirquisubmergetoutetenflammelamoindredemesterminaisonsnerveuses.Lamoindredemesrespirations.

Ilmecaresselanuqued’unemain,tandisquel’autredescendjusqu’àmahanche,déclenchantdesétincelles sur son passage. Il étale ses doigts sur mes reins et me colle contre lui, d’un gesteautoritaire.Jesenssonérectiongonflercontremonventre,envoyantunedéchargeélectriqueàmonentrejambe, moite de désir et d’excitation. Il presse une jambe entre les miennes, augmentant latension au point de rencontre de mes cuisses et y provoquant une sensation de plaisir presquedouloureuse.Jemepresseencorepluscontrelui,exprimantmondésirgrandissantparunfeulementsourd.

Jemenoieetpourtantjerésisteàlanécessitédem’écarterdeluipourreprendremonsouffle.Ilmordillemalèvreinférieuretandisquesamaincontinuededescendrepourallerpétrirlebas

demondos.Uneondedeplaisirmeparcourtdelatêteauxpieds.Jeréagisenluigriffantlanuquepourreprendrelecontrôle.

–BonDieu,j’aienviedeteprendre,làtoutdesuite.Ilditcelaentredeuxbaisers,d’unevoixrauqueethaletantequiintensifielatensionquitaraude

lesmusclesdemonbas-ventre.Samainquittemanuquepourseglisserlelongdemonbusteetvenirse mouler sur mon sein. Un petit gémissement m’échappe quand ses doigts en frottent la pointedresséeàtraverslefintissudemarobe.

Moncorpsestprêtàaccéderàsesexigencesparcequejedésirecethomme.J’aienviedesentirlepoidsdesoncorpssurlemien,leglissementdesapeaunuesurlamienneetlemouvementrythmédesonsexeenmoi.

Corpsemmêlés,nousreculonsdanslerenfoncementducouloir.Ilmecollecontrelemur,nousnousdécouvronsàtâtons,nousnousembrassons,nousnousétreignonsfiévreusement.Samainglissejusqu’àl’ourletdemarobedecocktailetnes’arrêtequelorsqu’iltouchelabandededentelledemesbas.

–DouxJésus.Sonmurmurefrôlemeslèvrestandisquesesdoigtssedirigentsurmacuisse,avecunelenteur

calculée,versleminusculetrianglededentellequimesertplusdedécorationquedeculotte.Quoi?Cesmots.Quandjefinisparlesintégrer,jemerétractecommesousl’effetd’uncoupde

fouetetjelerepoussedesdeuxmains.Cesontlesmêmesmotsquimesontparvenusunpeuplustôtdepuisl’obscuritédel’alcôve.C’estcommeunedouchefroidesurmalibido.C’estquoicetruc?Etqu’est-cequejefouslàmoi,aufait,àmelaisserpeloterparlepremiervenu?Etenplus,pourquoichoisirdefaireçaaubeaumilieud’undesévénementslesplusimportantsdel’annéepourmoi?

–Non,non…jenepeuxpasfaireça.

Je recule en trébuchant et je couvre d’une main tremblante mes lèvres gonflées. Il plantebrusquementdanslesmienssesyeuxd’unvertémeraudeassombriparledésir.Unéclairdecolèrelestraversefugitivement.

–Cesscrupulessemblentunepeutardifs,chérie.Vousnecroyezpas?Cecommentairesardoniquememetenrage.Jenesuispasidioteaupointdenepascomprendre

que je viens deme rajouter sur la liste de ses conquêtes de la soirée. Je le regarde et son souriresuffisantmedonneenviedelecouvrird’injures.

–Vousvousprenezpourqui,putain,pourprofiterdelasituationetmepelotercommeça?Jemesersdelacolèrepourécarterl’humiliation.Jenesaispascequimecontrarieleplus,de

m’êtrelaisséfaireouqu’ilaitprofitédemonétatdepaniquepourabuserdemoi.Àmoinsquecenesoitlahonted’avoirsuccombéàsonbaiserétourdissantetàsesdoigtshabilessansmêmeconnaîtresonnom.

Ilcontinueàm’observer,lesyeuxbrillantsdecolère.–Ahbon?Il incline la tête etme regarde d’un air condescendant en se passant lamain sur le visage en

faisantunbruitderâpe.–Vousleprenezcommeça?Vousneparticipiezpasilyaquelquesinstants,peut-être?Vous

n’êtiezpasliquéfiéedansmesbras?Ilaunpetitrirenarquois.–Cen’estpaslapeinedevousraconterdeshistoires,mapetite.Çavousaplu,vousenvouliez

mêmeplus.Il avance d’un pas, avec un regard amusé au fond duquel j’entrevois quelque chose de plus

sombre.Illèvelamainetdessined’undoigtlecontourdemonvisage.Jetressailleetlachaleurdesoncontactrallumelefeuquicouvaitaufonddemonventre.Jemorigènesilencieusementcecorpsquimetrahit.

–Que leschosessoientbienclaires,chérie. Jen’aipaspourhabitudedeprendrecequ’onnem’offrepas.Etnoussavonstouslesdeux,quevousvousêtesofferte.Et,clairement,devotrepleingré.

Ilsouritd’unairexaspérant.Jedégagemonmentond’ungestebrusque.Jevoudraisfairepartiedecesgensquiontlesensde

larépartie.Maiscen’estpaslecas.Aulieudeça,c’esttoujoursdesheuresplustardquejetrouveuneréponsebiensentieetquejeregrettedenepasl’avoirtrouvéesurlemoment.Jesaisquec’estcequivasepasserparcequelà,toutdesuite,jenetrouverienàdirepourremettrecethommearrogantàsaplace,mêmes’ilrestetrèscorrect.Ilm’aréduiteàunebouledenerfsquimeurtd’enviedeletoucherencore.

– Ce baratin pathétique marche peut-être avec votre petit ami qui vous traite probablementcomme une poupée de porcelaine, fragile et belle à regarder… et qui ne sert pas souvent…maisreconnaissezquec’estplutôtennuyeux.

Jehausselesépaules.–Monpetitami…Jenesuispasfragile!–Vraiment?Ilreprendmonmentondanssamainpourmeregarderdroitdanslesyeux.–Onlecroiraitpourtant,àlafaçondontvousvousconduisez.–Allezvousfairefoutre!Jedégageànouveaumonmentond’ungestebrusque.– Oh, mais c’est qu’on ne se laisse pas faire. Ça me plaît, chérie. Je ne vous en désire que

davantage.Connard ! Je m’apprête à lui balancer qu’il n’est qu’un dragueur. Que je sais qu’il « faisait

connaissance»avecquelqu’und’autredanscecouloiriln’yapassilongtemps,justeavantdepasserà moi. Je le regarde fixement, j’ai vaguement l’impression qu’il me rappelle quelqu’un, mais jen’arrivepasàmettreledoigtdessus.Jelaissetomber.Jesuistroublée,c’esttout.Aumomentoùjevaisdirequelquechose,j’entendslavoixdeDanequim’appelle.Lesoulagementm’envahitquandjeme retourne et que je le vois au bout du couloir, en train de me regarder bizarrement. Il estprobablementdéconcertéparledésordredematenue.

–Rylee?J’aivraimentbesoindeceslistes.Tulesastrouvées?JelanceunregardàmonsieurArrogantquisetientderrièremoi.–J’aiétédistraite.J’arrive.Je…attends-moi,ok?Daneacquiesced’unmouvementdetêteetjeretournedanslelocalderangementpourramasser

aussi gracieusement que possible les ardoises éparpillées sur le sol et les fourrer dans le sac. JeressorsdulocalenévitantsonregardetjemedirigeversDane.Aumomentoùjerespire,heureusedemeretrouverenterrainplusfamilier,j’entendssavoixderrièremoi.

–Nousn’enavonspasfini,Rylee.–Vouspouveztoujourscourir,Ace1!Enmedisantquecetitreluivacommeungant,jepresselepasdanslecouloir,lesépaulesetla

tête haute pour garder ma fierté. Je rejoins rapidement Dane, mon confident et mon ami le plusproche au boulot. Son visage enfantin reflète son inquiétude quand je le prends par le bras pourl’entraînerretrouvernosinvités.Unefoisfranchielaportedescoulisses,jerelâchemarespiration,jenem’étaismêmepasrenducomptequejelaretenais.Jem’appuiecontrelemur.

–Putain,qu’est-cequit’estarrivé,Rylee?Tuestoutedébraillée!Ilmeregardedelatêteauxpieds.–Çaaquelquechoseàvoiravecl’Adonislà-bas?J’aienviedeluiconfierqueçaatoutàvoiravecl’Adonis,maisjenesaispaspourquoijenedis

rien.–Nerispas,laportedulocals’estbloquéeetj’étaisenferméeàl’intérieur.Ilréprimeunrireenlevantlesyeuxauplafond.–Iln’yaqu’àtoiqueçapeutarriver!

Jeluidonneunetapesurl’épaule.–Vraiment,cen’estpasdrôle.J’aipaniqué.Crisedeclaustro.Lalumières’estéteinteetçam’a

renvoyéeàl’accident.L’inquiétudeselitdanslesyeuxdeDane.–J’aiflippé,cetypem’aentenduehurleretilestvenum’ouvrir.C’esttout.–C’esttout?Ilhausseunsourcil.Visiblementilnemecroitpas.Jehochelatête.–Oui.J’aijusteperdulespédalesuninstant.Jem’en veux de luimentir, mais c’estmieux pour lemoment.Moins j’en dirai, plus vite il

laisseratomberlesujet.–Ehbien,c’estdommagepourtoi,parcequ’ilestsuper,cemec.Jerisetilmeserredanssesbrasbrièvement.–Vaterafraîchirunpeuetprendrel’air.Maisjecomptesurtoipourrevenirpapoteravecles

invités.Oncommencelesenchèresdansunedemi-heure.

*

Jemeregardedanslaglace.Danearaison.J’aiunemineaffreuse.J’airéduitànéantletravaild’Haddie,macoloc,quim’aaidéeàmecoifferetàmemaquiller.J’essaiederéparerlesdégâtsavecuneservietteenpapier.Mesyeuxaméthyste sont rougispar les larmeset jen’aipasbesoindemedemanderpourquoimonrougeàlèvresacoulé.Desmèchesdemescheveuxauburns’échappentdelabarrettequilesretenaitetleborddemarobeestcomplètementdetravers.

Lesbassesrésonnentàtraverslemur.Lamusiqueestdominéeparlebrouhahadecentainesdevoix–cellesdesdonateurspotentiels.J’inspireprofondémentenm’appuyantsurleborddulavabo.

Cen’estpasétonnantqueDanesesoitposédesquestionssurcequis’estréellementpasséetsurlerôledemonsieurArrogantdanstoutça.Jesuiscomplètementéchevelée!

Je remetsmon jolidécolletéenplaceet rajuste lecorsagedemarobe.Jepasse lesmainssurmeshanchesoùletissusoulignemescourbes.Jecommenceàrattacherlesmèchesdecheveuxquisesontlibérées,maisjesuspendsmongeste.Lesfrisottisontreprisleurtendancenaturelleetjedécidequecelaadoucitmonalluregénérale,etçameplaîtbien.

J’attrapemonsacàmain,queDanem’aapporté,etjeretouchemonmaquillage.Jerajouteunecouchedemascaraàmescilsnaturellementépaiset jeretraceletraitd’eye-linerquiacoulé.C’estmieux.Cen’estpasfantastique,maisc’estmieux.J’avanceleslèvrespourappliquerdenouveaudurouge sur leur forme rebondie. Jene faispas ça aussibienqu’Haddie,mais ça ira. Je suisprête àrejoindrelesfestivités.

1.Ace:As,champion,expert.(NdT)

2

Danslafouledesvedettes,despeopleetdesphilanthropesprésentsdanslevieuxthéâtre,lessujetsde conversation tournent principalement autour des bijoux, des robes de grands couturiers et despotinsmondains.Cettesoiréemarquelepointculminantdetousleseffortsquej’aidéployésdepuisunan–unévénementdestinéàrécolterlaplusgrandepartiedesfondsdontnousavonsbesoinpourlancerlaconstructiondenosnouvellesinstallations.

Etjesuistrèsloind’êtredansmonélément.Dane me lance un regard compatissant depuis l’autre côté de la pièce. Il sait bien que je

préférerais de beaucoup être à la Maison de l’Enfance avec les gamins, en jeans et les cheveuxattachés en queue de cheval. Je lui réponds par un semblant de sourire en hochant la tête avant desiroterunegorgéedechampagne.

J’ensuisencoreàessayerdecomprendrepourquoijen’airienfaitpourempêchercequis’estpassé dans les coulisses, etmon humiliation quand jeme suis rendu compte que je n’étais pas lapremièreàm’êtrefaitdraguerparMonsieurArrogantcesoir.Jen’enrevienstoujourspasdem’êtreconduite d’une façon quime ressemble si peu, et enmême temps je ne comprends pas ce quimeblesseàcepoint. Il est évidentqu’onnepeutpasattendred’unhommequichercheà tirerunpetitcoupvitefaitqu’ilaitd’autresintentionsquedesatisfaireunegosurdimensionné.

–Ah,tueslà,Rylee.Mespenséessontinterrompuesparlavoixdemonboss.Cecolosseaucœurplusgrandquetous

lesgensque jeconnaisa toutd’ungrosnounours. Ilmepasse lebrasautourdesépauleset jemelaisseallercontreluipourunebrèveembrassade.

–Teddy!Ondiraitqueçasepasseplutôtbien,non?–Grâceà tout lemalque tu t’esdonné.D’aprèscequ’onm’adit, les chèquescommencentà

arriver.Etlesenchèresn’ontpasencorecommencé.Seslèvress’étirentenunlargesourirequiluifaithausserlessourcils.–Cen’estpasparcequeçamarchequejesuisd’accord.

J’essaie de ne pas avoir l’air trop coincée. C’est un débat que nous avons eu un nombreincalculable de fois au cours des derniersmois.Mêmepour uneœuvre de charité, je ne peux pascomprendre que des femmes acceptent de se vendre au plus offrant. J’ai dumal à croire que lesenchérisseursvont secontenterd’unsimple rendez-vousenéchangedesquinzemilledollarsde lamiseàprix.

–Rylee,àt’entendre,oncroiraitquenousdirigeonsunbordel.Sonregardestsoudainattiréparuninvitéquisetrouvederrièremoi.–Ah,voiciquelqu’unquejevoudraisteprésenter.Cettecauseluitientbeaucoupàcœur.C’estle

filsd’undesmembresdenotreconseild’administrationetil…Ils’interromptpourappelerlapersonnequis’approchedenous.–Donavan!C’estgentild’êtrevenu.Il serre chaleureusement la main de la personne à qui je tourne le dos. Je me retourne,

m’apprêtantà faireunenouvelleconnaissance.Au lieudeça,c’est le regardstupéfaitdeMonsieurArrogantlui-mêmequiplongedanslemien.

Etmerde!Cen’estpasvrai!Àvingt-sixans,voilàquejemesenstoutàcoupaussimalàl’aisequ’uneadoprépubère.Lademi-heurequej’aipasséeloindeluin’arienfaitpouratténuerl’effetqueson physique ultra-sexy exerce sur ma libido. Sonmètre quatre-vingt-dix est parfaitement mis envaleurparunsmokingnoirtaillésurmesurequinelaisseaucundoutesursasituationfinancière,etlesouvenirdu torsemuscléquise trouvesous lavestemepousseàmemordre la lèvre inférieurepourréprimermondésirinopportun.Cependantsonmagnétismenemefaitpasoubliermafureur.

Jeluitrouveunairfamilier,ilressembleàquelqu’unquejeconnais,maislechocdelerevoirfaitpassercettepenséeaudeuxièmeplan.Visiblementamusé,ilmesouritd’unairnarquois.Aussitôtme revient à l’esprit le souvenir de ses lèvres sur les miennes. De la sensation de ses doigts,maintenantposéssurunverre,etquitoutàl’heuresebaladaientsurmapeaunue.Desoncorpstoutentierpressécontrelemien.

Et de la façon très libertine dont il a fait la connaissance d’une autre femme juste quelquesinstantsavantd’entreprendredem’avilir.

–Jevoudraisteprésenterquelqu’un.Cetévénementn’auraitpasvulejoursanselle.Unsouriredeconvenanceplaquésurlevisage,jefusilleDonavanduregard,tandisqueTeddy

setourneversmoientouteinnocenceenposantunemainsurmataille.–RyleeThomas,voici…–Nousnoussommesdéjàrencontrés,maisjeseraisraviequetunousprésentes.J’aiparlésuruntondesplusmielleuxensouriant.Teddymelanceunregardperplexe,jen’ai

paspourhabitudedemanquerdesincérité.Je tourne les yeux vers Donavan en lui tendant la main comme s’il n’était qu’un donateur

potentiel comme les autres. Teddy semble renoncer à décrypter mon attitude anormale pour seconcentrersurMonsieurArrogant.

–Est-cequetut’amuses?

–Énormément.Donovangardemamaindanslasiennepluslongtempsquenécessaire.Jeréprimeunsarcasme.

Sûrqu’il ne s’ennuiepas, ce salaud arrogant ! Jedevrais peut-êtremonter sur la scène et faireunsondageauprèsdesfemmesprésentesicicesoirpourvoirlaquelleiln’apasencoredébauchée.

– Tu as pu t’approcher du buffet ? Rylee a réussi à convaincre un des chefs les plus courusd’Hollywooddenousoffrirsesservicesàtitregracieux.

Donavanmeregarde,lesyeuxpétillantsd’humour.–J’enaieuunpetitaperçuquandjemebaladaisencoulisse.L’impertinencedesonsous-entendumecoupelesouffle.–C’étaitassezinattendu,maistoutàfaitexquis,jeteremercie.Quelqu’un appelle Teddy qui me lance un nouveau regard empreint de curiosité avant de

prendrecongé.–Sivousvoulezbienm’excuser,onm’appelle.Mercid’êtrevenu,Donavan,çam’afaitplaisir

deterevoir.Noushochonsla têtedeconcertalorsqueTeddys’éloigne.Lessourcilsfroncés, je tourneles

talonspourm’éloignerdeDonavan.Ilmetardedel’effacerdemamémoireetdemasoirée.Maisilm’attrapeparlebrasetm’attirevivementcontreluidetellefaçonquelebasdemondosseretrouveen contact avec son sexe durci.Avec un hoquet de surprise, je jette un coup d’œil autour demoi,rassuréedevoirquetoutlemondeesttropabsorbéparsaconversationpourfaireattentionànous.LementondeDonavanmefrôlel’épaulequandseslèvress’approchentdemonoreille.

–Qu’est-cequivouscontrarieàcepoint,MademoiselleThomas?Le tonglacial de savoixme fait penser que c’est le genred’hommequ’il vautmieuxnepas

contrarier.– Est-ce parce que vous n’arrivez pas à vous départir de vos manières d’intellectuelle et à

admettrequequoiquevousdictevotreraison,votrecorpsaenviedegoûterànouveauàcerebellevenudumauvaiscôtédelabarrière.

Ilpousseunlonggrognementcondescendantdanslecreuxdemonoreille.–Àmoinsquevousn’ayezunetellepratiquedelafrigiditéquevousvousinterdisieztoujours

cequevousdésirez?Toutcedontvousavezbesoin?Toutcequevousressentez?Je me secoue, pour essayer de dégager mon bras qu’il tient d’une main ferme. C’est quoi

l’expressionquiparled’unloupdéguiséenagneau,déjà?Jem’immobilisequandunautrecouplepassedevantnousennousregardantavecattention.Pour

donnerlechange,Donavanmelâchelebrasetlecaressedelamaincommeferaitunamoureux.Etmalgré la colère quim’anime, ou peut-être à cause d’elle, son contact déclenche unemyriade desensationspartoutoùpassentsesdoigtsquimedonnent lachairdepoule.Denouveau, jesenssonsoufflesurmajoue.Eneffleurantduboutdesdoigtslapeaunuedemonépaule,ilmurmure:

–C’esttrèsexcitant,Rylee,devoussentirsiréactiveàmoncontact.Trèsgrisant.Vousvoulezcomprendre la façon dont votre corps a répondu au mien. Vous croyez peut-être que je n’ai pas

remarquécommentvousmedéshabilliezduregard,etquevousmebaisiezdelabouche?J’ai le soufflecoupéquand ilpose lamainsurmonventreetmeserrecontre luipourque je

sentesonérectionpresséecontremesreins.Jesuisfurieuse,d’accord!N’empêche,c’estgrisantdesavoirquejepeuxluifaireautantd’effet.

Enmêmetemps,ilestplusqueprobablequ’ilréagitdelamêmefaçonauxnombreusesfemmesquinedoiventpasmanquerdesejeteràsespieds.

–Estime-toiheureusequejenetetraînepasdenouveaudansceplacardoùjet’aitrouvée,pourprendrecequetum’offrais.Pourtefairecriermonnom.

Ilmemordillelelobedel’oreilleetj’aidumalàretenirungémissementdedésir.–Pourtebaiser,tesortirdemonespritetpasseràautrechose.Onnem’ajamaisparlécommeça.Jenel’auraisjamaisaccepté.Mais,curieusement,cesmotset

lavigueuraveclaquelleillesprononcem’excitent.J’enragecontremoncorpspourlafaçoninappropriéedontilréagitàcethommesuffisant.Qui

est visiblement tout à fait conscient de l’emprise qu’il peut avoir sur le corps d’une femme, etmalheureusementpourmoi,c’estdumienqu’ils’agitencemoment.

Jeme retourne lentementpour lui faire faceet je le regardeenplissant lesyeux.Mavoixestglaciale.

–C’estunpeuprésomptueux,non,Ace?J’imaginequec’estvotretechniquehabituelle,baiseretlarguer?

Ilouvredegrandsyeuxàmasoudainevulgarité.Àmoinsqu’ilnesoitjustesurprisquejel’aiepercéàjoursifacilement.Jesoutienssonregard,tremblantedecolère.

–Combiendefemmesavez-voustentédeséduirecesoir?Jehausselessourcils,dégoûtée.Unéclairdeculpabilitépassesursonvisage.–Quoi?Vousnesaviezpasquejevousaisurpris,vousetvotrepremièreconquêtedelasoirée,

danslapetitealcôvedanslescoulisses?Donavanécarquillelesyeux.Sonairétonnémeravit.Alorsjecontinue:–Est-cequ’ellevousaprisàvotreproprejeu,Ace,etvousalaisséenplan?Frustrédenepas

pouvoirprouverquelhommevousêtesparcequevousn’avezpaspulasatisfaire?Àtelpointquevousavezdûvousrabattresurcettefemmeaffolée,enferméedansunplacard,etensuiteprofiterdelasituation?Jeveuxdire,sérieusement,surcombiendefemmesavez-voustestévotrebaratincesoir?Surcombienavez-vousessayéd’imprimervotremarque?

Ilhausselessourcilsensouriantavecarrogance.– Jalouse, chérie ? Nous pouvons toujours terminer ce que nous avons commencé, et vous

pourrezmemarquerdelafaçonquivousplaira.Je passe lamain doucement sur sa poitrine pour le repousser. J’adorerais effacer ce sourire

narquoisdesonvisage.Ceseraitunefaçondelaissermamarque.– Désolée, je n’ai pas de temps à perdre avec des connards misogynes dans votre genre.

Trouvez-vousquelqu’un…

Ilm’attrapeparlepoignet,l’airmenaçant.–Méfiez-vous,Rylee.Jenemelaissepasinsultersansréagir.J’essaie de dégager mon poignet, mais il me retient fermement. Pour tout le monde dans la

pièce,jedonnel’impressiondeposerlamainsursoncœurenungesteaffectueux.Ilsnepeuventpassentir la force dominatrice de sa poigne. Je suis fatiguée de ce petit jeu et de mes émotionscontradictoires.C’estlacolèrequiprendledessus.

––Jevaisvousdireuntruc…Vousmevoulezuniquementparcequejesuislapremièrefemmequiditnonàvotresuperbevisageetvotrecorpsd’étalonsexy.Vousavez tellement l’habitudequetoutes les femmes tombent à vos pieds, au sens littéral du terme et sans jeu de mots, que vousconsidérez comme un défi qu’une femme soit insensible à votre charme ! Et vous ne savez pascommentréagir.

Ilabeausourirenonchalammentenlâchantmonpoignet,jevoisbienquejel’irrite.–Quandjevoisquelquechosequimeplaît,jeleprends.Ilnesemblepaséprouverlemoindreremords.Jelèvelesyeuxaucielensecouantlatête.–Non,enfait,vousavezbesoindevousprouveràvous-mêmequevouspouvezavoirtoutesles

fillesquicroisentvotrechemin.Votreegoenprenduncoup.Jecomprends.Jeluitapotelebrasaveccondescendance.–Allez,nesoyezpasinquiet,Ace,jemeretiredelacourse.Il hausse un sourcil et un semblant de sourire effleure ses lèvres.Unmuscle tressaute sur sa

mâchoire serrée tandis qu’ilme regarde unmoment avant de répondre. Il se penche versmoi, sabouchetoutprèsdelamienne,avecunéclatdansleregardquimeprévientquejesuisalléetroploin.

–Soyonsbienclairs.Sijevousveux,jevousaurai,oùetquandjelevoudrai,chérie.Je renâcle d’une façon aussi peu distinguée que possible, stupéfaite de son aplomb, tout en

essayantd’ignorerl’accélérationdemonpoulsàcettesimpleévocation.–Jeneparieraispaslà-dessussij’étaisvous.Jetentedepasserrapidementdevantlui.Ilm’attrapeparlebrasdenouveau,m’obligeàpivoter

pour lui faire face et je me retrouve beaucoup trop près de lui. Je vois son pouls battre sous samâchoire.Jesensletissudesavestefrôlermonbrasquandsapoitrinemonteetdescend.Jeregardesamainsurmonbraspuisjeluilanceunregardd’avertissement,maisilnerelâchepaslapressiondesesdoigts.Ilpenchelatêteversmoi,jesenssonsoufflesurmajoue.Jerelèvelementon,peut-êtrepourledéfier,àmoinsquecenesoitdansl’attentedesonbaiser.

–Vousavezdelachance,Rylee,jesuisjoueur.Iln’estpasfauxquej’appréciedereleverunbondéfidetempsentemps.

Sontonprovocateurs’accompagned’unsouriremalicieux.Ilmelâchelebrasmaislecaresseparesseusementduboutdesdoigts.Cedouxmouvementsurmapeaunuemefaitcourirunfrissondansledos.

–Alors,onvafaireunpari.

Il s’interromptpour faireun signede tête àunede ses connaissances, cequime ramèneà laréalitédelapièceoùnousnoustrouvons,aumilieud’unefouledegens.

–Votremèrenevousapasapprisquequandunedameditnon,c’estqu’elleveutdirenon,Ace?Jehausseunsourcildédaigneux.Sonsourirenarquoisrevientenforceetilhochelatêted’unair

entendu.–Si,maisellem’aaussiapprisquequandjedésirequelquechose,jenedoisjamaisrenoncerà

l’obtenir.Super.Maintenant, ilnevaplusme lâcher. J’aigagnéunharceleur, séduisant, sexy,mais très

agaçant.Il tend lamainpour joueravecunedesbouclesqui tombentdansmoncou. J’essaiede rester

impassibleetderésisteràmonenviedefermerlesyeuxetdem’abandonneràladoucecaressedesesdoigtssurmapeau.Sonsouriremeditqu’ilsaitexactementl’effetqu’ilproduitsurmoi.

–Alors,Rylee,onparie?Sapropositionmehérisse,àmoinsquecesoitl’effetqu’ilasurmoi.–C’estcomplètementstupide…Ilm’interromptenlevantlamain.–Jepariequ’avantlafindecettesoirée,j’aurairendez-vousavecvous.J’éclatederireenm’écartantdelui.–Ca,çanerisquepas,Ace!Ilprendunelonguegorgéedesonverre,impassible.–Dequoiavez-vouspeur?Denepaspouvoirmerésister?Jelèvelesyeuxauciel,cequilefaitsourired’unaircoquin.–Ditesoui,alors.Qu’est-cequevousavezàperdre?–Unrendez-vousavecmoietvotreegoseraguéri?Jehausselesépaules,jen’aipasenviedejoueràça.–Etqu’est-cequej’ygagne,moi?–Sivousgagnez…–Vousvoulezdire,sijenesuccombepasàvotrecharmeincomparable.–Jereformule.Sivousnesuccombezpasàmoncharmeincomparableavantlafindelasoirée,

alorsjeferaiunedonation.Disons,vingtmilledollarspoursoutenirvotrecause.Lesoufflecoupé,jeleregardeavecstupéfaction.Danscesconditions,oui,jepeuxêtred’accord.

Jesaisquejen’aiaucunrisquedesuccomberàDonavanouàsesrusesperversesdesalaudarrogant.D’accord,jemesuislaisséprendredanssatoileunmoment,maisc’étaitjusteparcequ’ilyavaitsilongtemps que je n’avait pas ressenti ça. Que je n’avais pas été embrassée comme ça. Caresséecommeça.

Enyrepensant,jecroisbienquecelanem’étaitmêmejamaisarrivé,deressentirça.Maisjesaisaussiqu’aucunhommenem’ajamaisembrasséealorsqueseslèvresconservaientlachaleurdecellesd’uneautrefemme.

Jeleregardesansrienlaisserparaître,enessayantdedécelerlepiège.Peut-êtrequ’iln’yenapas,aprèstout.Peut-êtreest-iltellementimbudesapersonnequ’ilsecroitvraimentirrésistible.Toutcequejevois,c’estquejevaisaugmenternotrerecettedelasoiréedevingtmilledollars.

– Ce pari ne risque-t-il pas de compromettre votre recherche d’autres partenaires de jeupotentiellespourcesoir?

Jeparcourslapièceduregard.–Çasembleplutôtmalparti,Ace,surtoutsionpensequevosdeuxpremièrestentativessesont

soldéespardeséchecs.Iléclatederire.–Jecroisquejedevraism’ensortir.Nevousinquiétezpaspourmoi.Jesuismultitâche.Etpuis

lasoiréenefaitquecommenceret,d’aprèsmescomptes,lescoreestdeunàzéropourl’instant.Ladeuxièmetentativeesttoujoursencours.Arrêtezdevoustorturerl’esprit,Rylee.C’estjusteunpari.Niplusnimoins.

Jecroiselesbras.Ladécisionn’estpasdifficileàprendre,jeferaistoutpourmesgamins.–Vousferiezbiendepréparervotrecarnetdechèques,Ace.Riennemefaitplusplaisirquede

prouverauxsalaudsarrogantsdansvotregenrequ’ilssetrompent.Ilavaleunenouvellegorgée,sansmequitterdesyeux.–Voussemblezbiensûredevous.–Disonssimplementquejesuisassezfièredemonself-control.Donavanserapprochedemoietmeregarded’unairdedéfi.–Self-control,hein?Ilmesemblequenousavonsdéjàmiscettethéorieàl’épreuve.Etellen’a

passemblétenirlaroute.Maisjenedemandepasmieuxquedelatesterdenouveau…Mes muscles les plus intimes se contractent à l’évocation de cette possibilité, y ravivant un

lancinementquiréclamed’êtresoulagé.Qu’est-cequimeprend?Jemeconduiscommeunegaminequin’ajamaisconnud’homme.C’estpeut-êtrequejen’aipasconnucethomme-là.

Jeluitendslamain.–Ok.Onparie.Maisjepréfèrevousprévenir,jeneperdsjamais.Il tend lamainpourserrer lamienne,un largesourireéclairesonvisage,sesyeuxémeraude

brillentd’unéclatbravache.–Moinonplus,Rylee.Moinonplus.Noussommesinterrompusparunevoixderrièremoi.–Excuse-moi,Rylee,ilfautabsolumentquetuviennes.Jemeretourne,Stellaal’airtotalementpaniquée.JeregardeDonavan.–Sivousvoulezbienm’excuser,onabesoindemoi.Jesuismalàl’aise,jenesaispasquoidireoufaired’autre.Ilhochelatête.–Nousreprendronscetteconversationplustard.Enm’éloignant,jem’aperçoisquejenesaispassic’estunemenaceouunepromesse.

3

Assisedanslescoulisses,aumilieuduchaosquisuitlafindesenchères,jemeremémorelasoirée.Lesdernièresquatre-vingt-dixminutessontpasséesdansungrandflou.Uneréussite,enfait,maisàquelprix!Celuidemadignité,rienqueça.

Au toutderniermoment,unedesparticipantesànos«rendez-vous»auxenchèresest tombéemalade.Commeiln’yavaitpersonnepourlaremplaceretquelesprogrammesimprimésindiquaientunnombreprécisdeparticipantes, j’aisuppliéetmêmetentédesoudoyerchacunedesmembresdemonéquipepourlesconvaincredeprendresaplace.Peineperdue!Touteslespersonnesdisponiblesquin’étaientpasrequisesparlabonnemarchedesenchèresétaientsoitmariéessoitdansunerelationsérieuse.Toutes,saufmoi,biensûr.

J’aieubeaugémir,conjurer,plaider,parunretourironiquedeschosesquiasemblébeaucoupamuserlesautresorganisateurs,jemesuisretrouvéemiseauxenchèressouslenumérovingt-deux.J’aidûmefaireuneraisonetmesacrifierenfaisanttaireunepetitevoixintérieurequimedisaitquequelquechoseclochait,sansquejesachevraimentquoi.

Jedoisdirequej’aidétestéfaireça!Dudémarragedushowquifaisaitpenseràunconcoursdebeauté,àlaparadesurlascèneoùilm’asembléêtreexhibéecommeuntrophée,sousleshuéesetlessifflements de l’assistance, jusqu’aux montants en dollars prononcés sur un ton monocorde parl’annonceur.Leslumièresaveuglantesm’empêchaientdedistinguerdanslepublicautrechosequedevague silhouettes. Tout le temps passé sous les projecteurs a été synonyme pourmoi d’une gêneintense,moncœurbattaitàserompreetj’avaispeur,souslachaleurdeslampes,d’avoirdesauréolesdetranspirationsouslesbras.

Jesuissûrequesij’avaisétédel’autrecôté,j’auraistrouvétrèsplaisantslescommentairesducommissaire-priseur, la participation de l’assistance chaleureuse, et les singeries de certainesfemmes,quiessayaientdefairemonterlesenchères,amusantes.J’auraissurveillélaprogressiondumontantdescontributionsetj’auraisétéfièredelaréussitedemonéquipe.

Aulieudeça,jesuisassisedanslescoulissesàessayerdemecalmeretd’analysercequivientdeseproduire.

–Bienjoué,Ry!MontristesortabienamuséDane,jel’entendsdanssavoixtandisqu’ilvientmerejoindredans

lescoulissesaumilieudesvingt-quatreautresfemmesqui,elles,étaientd’accordpourprendrepartauxenchères.Endescendantdescène,ellesrécupèrentlessacsdecadeauxquenousavionsprévusenremerciementdeleurparticipation.

Je le fusille du regard sans cacher mon agacement. Il me gratifie d’un large sourire quidécouvretoutessesdents,toutenmeprenantdanssesbrassansattendremapermission.Jesuisd’unehumeurmassacrante.Tuparles d’une soirée !Après avoir été enferméedans unplacard, j’ai jouésanslesavoir lessecondscouteauxsurlalistedesconquêtesdeMonsieurArrogant,pourfinirparsubirl’humiliationd’êtremiseenventecommeunepiècedebœufsurlemarché.

Je n’arrive pas à comprendre l’excitation des femmes qui m’entourent. Elles discutent avecanimationdeleurpassagesouslesprojecteursetchacunesevantedelasommequ’ellearemportée.Jeleursuisreconnaissantedeleurparticipation,enchantéedelaréussitedel’opération,maisjesuisaussicomplètementahuriedeleurenthousiasme.

Ilmerevientàl’espritqu’ilm’aaccuséed’êtrecoincéetoutàl’heure,maisj’écartecettepensée.–C’étaithorrible,putain!JesecouelatêteetDanepartd’unrirecompatissantenentendantmontonplaintif.– Tout ce que je veux, c’est un grand verre… non, une bouteille de vin, du chocolat, sous

n’importequelleforme,etenlevercettefichuerobeetcestalons,dansn’importequelordre.– S’il suffisait de ça pour te voir nue, il y a longtemps que je t’aurais apporté du vin et du

chocolat.Jenetrouvepasçadrôleetjeluijetteunregardfurieux.–Désolée,maisjenesuispaséquipéepourtesatisfaire.Ilsemordleslèvrespournepasrire.–Oh, chérie, cela a dû être épouvantable pour toi qui ferais n’importe quoi pour rester dans

l’ombre!Regarde-moiça!Ils’assieddanslefauteuilàcôtédemoiet,enmeprenantparlesépaules,ilm’attirecontrelui.

Jeposelatêtesursonépaule,réconfortéeparcegested’amitié.–Aumoinstuasréussiàfairemonterlesenchères,c’estdéjàça!–Espècedeconnard!Jemereculevivementquandilpartd’unrirepuéril,contentd’appuyerlàoùçafaitmal.Àvrai

dire,jen’aipaslamoindreidéedumontantdel’enchèrequej’airemportéeparcequejen’entendaisriend’autrequelesbattementsaffolésdemoncœur.Direquemonegosefichedelasommepourlaquelle j’ai été vendue est un doux euphémisme. Même si j’ai détesté le procédé, quelle femmen’aimeraitpassavoirquequelqu’un la trouvesuffisammentàsongoûtpourmiserde l’argentafind’obtenirunrendez-vousavecelle?Surtoutaprèsmonexpériencedudébutdesoirée.

–Àquoi ça sert, les amis ? Jeveuxdire entre la lutte acharnéedes enchérisseurs, labagarrepoursavoirquiétaittonsoupirantpotentiel…etlamêléegénéralequiasuivi…

Ilpousseunprofondsoupir,leregardpétillantd’humour.–Oh,n’enrajoutepas!J’éclatederire,c’estlapremièrefoisdelasoiréequejemedétends.–Non,sérieusement,combienest-cequej’aicollecté?–Écoute-toi!Laplupartdesfemmesdiraient:«Àcombienest-cequejesuispartie?»Ilsemoquedemoienprenantunevoixhautperchéeetmaniérée,etjerisdeplusbelle.–Etladeuxièmequestionserait:«Etmonsoupirant,ilestsexy?»Jemetournevers lui, lessourcilsfroncés.Lesgaminsdufoyer,quandilsmevoientfaireça,

s’empressentderépondreouvontvitesemettreàcouvert.–Ehbien?Commeilnerépondpasetmeregardel’airfaussementhorrifié,jem’autoriseàfairecomme

cesfemmesgeignardesquim’entourent.–Dane,donne-moidesdétails.–Ehbienmachérie,tuasrapporté…Jeprendsl’airscandaliséparcesmots.–Pardon.Tonrendez-vousadépensévingt-cinqmilledollarspourpasserunesoiréeavectoi.Quoi?Putain,jen’enrevienspas!Jesaisquelamiseàprixétaitdequinzemillepourtousles

inscrits,maisquelqu’unaréellementsurenchéridedixmille?Unsentimentdefiertémonteenmoietvient réparer lesdommagesqueDonavana infligésàmonegoaudébutde lasoirée.L’idéequ’uninconnu a offert autant d’argent pour obtenir un rendez-vous avec moi me semble totalementinsensée. C’est sûrement un desmembres de notre conseil d’administration avec qui j’ai travaillé.C’est la seule explication plausible. La plupart des femmes qui étaient sur la scène font partie ducercle très fermédesœuvrescaritativesd’Hollywood,ellesavaientdesamisetdesparentsdans lasalle pour enchérir sur elles. Moi pas. Je soupire et me détends un peu en pensant que je vaisprobablementdevoirpasserunesoiréeavecunmonsieurâgéetveuf,etmêmeavecunpeudechance,pasdutout.Siçasetrouve,cettepersonneveuttoutsimplementfaireundonetj’yéchapperai.Quelsoulagement ! L’idée du rendez-vous m’inquiétait un peu. Un loser qui attend quelque chose enéchanged’undongénéreux,beurk!

–Ettuasvuquiaremportél’enchère?–Désolé,chérie.Letypeétaitsurlecôté.J’étaisdanslefond,jenelevoyaispas.–Oh…d’accord.Ladéceptions’entenddansmavoixetjerecommenceàm’inquiéter.–Net’enfaispas.Jesuissûrquec’estundesvieuxtypesduconseild’administration.Ils’interromptquandilserendcomptequ’ilvientdelaisserentendrequepersonned’autrene

seraitprêtàoffrirdel’argentpourmoi.Sachanttrèsbienquejenesuispasd’humeuràrigoler, ilreprendenpesantsesmots.

–Tuvoiscequejeveuxdire,Ry.Ilst’adorenttous!Ilsferaientn’importequoipourtesoutenir.

Ilmelanceunregardinquietetserendcomptequ’ils’enfonce.Jepousseunprofondsoupir,etjemedétendsquand je réaliseque je suisà fleurdepeauencemoment. Je remarquequepresquetouteslesparticipantesontquittélescoulisses.

–Bon,ilfaudraitquej’aillerejoindrelesinvités.Jeme lèveen lissantma robeet jegrimacequandmespieds réintègrentmeschaussures trop

étroites.–Moi,entoutcas,j’enaiassezfaitpourcesoir.Jesuisprêteàrentrerchezmoiretrouverle

confortdemarobedechambreetdemoncanapéetmejetersurcechocolatetceverredevin.Daneselèveetm’emboîtelepas.Jerougisquandnouspassonsdevantl’alcôvequeDonavanet

moioccupionstoutàl’heureetjebaisselatêtepouréviterlesquestions.–Tuneveuxpasresterpoursavoiràcombiensemontentlesdons?–J’aidemandéàStelladem’envoyeruntextoquandlescomptesserontfaits.Jen’aipasbesoin

d’êtrelàpourça…Je pousse la porte et je laisse ma phrase en suspens quand je vois Donavan appuyé

négligemmentcontrelemuretparcourantlafouleduregard.Visiblement,cethommesesentàl’aisepartout. Il émane de lui une puissance sauvage mêlée de quelque chose de plus profond, de plussombre, que je ne parviens pas à identifier. Voyou. Rebelle. Téméraire. Ces trois qualificatifs luiconviennentet,endépitdesonallureraffinée,cethommeévoquelesennuis.

Sonregardscrutateurcroiselemienetjem’arrêtesibrutalementqueDanemerentrededans.–Rylee…Danes’interrompt,comprenantpourquoij’aipilé.–Disdonc,est-cequeceneseraitpasMonsieurRenfrogné?Qu’est-cequisepasse,Ry?JelèvelesyeuxaucielenpensantauparistupidedeDonavan.–L’arrogancedanstoutesasplendeur.Ilfautquejerègleuntruc,j’enaipouruneminute.JemedirigeversDonovan,conscientequesesyeuxsuiventchacundemesmouvementseten

mêmetempsagacéededevoirréglercelamaintenant.Notrejouteverbaleaétéunmoyenamusantdepasserlasoirée,maiselleestterminéeetjesuisprêteàrentrerchezmoi.Lapartieestfinie.Ils’écartedumuretseredressequandjem’approchedelui.Ilesquisseunsourireenessayantvisiblementdedevinermonétatd’esprit.Jelèvelamainsansluilaisserletempsdeparler.

–Écoutez,Ace,jesuisfatiguéeetd’unehumeurmassacrante.Ilesttempspourmoideprendrecongé…

– Juste quand j’allais vous proposer de vous emmener dans des endroits dont vous ignorezjusqu’àl’existence.Vousn’avezpasidéedecequevousperdez,chérie.

Jeledévisageenoublianttoutebienséance.–Vous rigolez ?Vous voudriezme faire croire que vous emballez avec des répliques aussi

nulles?–Vousmevexez.Vousseriezétonnéedevoircequemaboucheobtientavecdetellesphrases.Ilsourit,lesyeuxpétillants,d’humour,enposantlamainsursoncœur.

Jeleregarde,stupéfaite.Lavanitédecetypeestjusteincroyable.–Jen’aipasdetempsàperdreaveccesenfantillages.Jeviensdesubirunehumiliationpireque

dansmes pires cauchemars et je suis plus furax que vous ne pouvez imaginer. Vous êtes bien ladernièrepersonneaveclaquellej’aienviedediscuterencemoment.

Si ma diatribe le choque, il n’en laisse rien paraître. Son visage demeure impassible, àl’exceptiond’unmusclequitressaillesursamâchoireserrée.

–J’adorelesfemmesquisontaussidirectes,murmure-t-ilpourlui-même.Jeposelesmainssurleshanchesavantdepoursuivre.–Commejedisais,jeparsdansunedizainedeminutes.Lasoiréeestfinie.J’aigagnénotrepari

idiot,doncvousferiezbienderemplirvotrechèqueparcequecesoirvousallezrentrerchezvousaveclespochespluslégères.

Unsourireamuséflottesurseslèvres.–Pluslégèresdevingt-cinqmilledollars,pourêtreexact.–Non,onavaitditvingt…Soudainjecomprends.Putain!Nonseulementilamisésurmoi,maisenplusilagagné!Jelui

dois officiellement un rencard. Je serre les dents en levant la tête vers le plafond. J’inspireprofondémentpouressayerdemecalmeret,d’unregardglacial,jel’empêchedeparler.

–Non,non.Toutça,c’estdesconneriesetvouslesavezparfaitement.Cen’estpascequenousavionsdit.Jen’aipassignépourça.

Jesuissiexaspéréequejedisn’importequoi.–Unpariestunpari,Ryles.–Jem’appelleRylee,espècedeconnard!Ilseprendpourqui?D’abordilm’achèteetensuiteilsepermetdemedonnerunsurnom?Je

saisquelafemmeirrationnellequiestenmoiaressortisatêtedeGorgone,mais,encemoment,jem’enfichecomplètement.

–Etmoi,pourautantquejelesache,jenem’appellepasAce!Ilfautreconnaîtrequ’iln’apastort.Lesonrocailleuxdesavoixestaussiirritantquedupapier

deverre.Ils’appuiedenouveaunonchalammentcontrelemur,commesinousparlionsdelapluieetdubeautemps.Sadécontractionmerendfolle.

–Vousaveztriché.Espècede…espècede…aaaargh!Mafrustrationm’empêchedeformerunepenséecohérente.Ilhausselesépaules.–Quelqu’unestvenuvouschercheravantquenousayonseuletempsdedéfinirlesrèglesetles

conditionsdecepari.Decefait,touslescoupsétaientpermis.

Sonsourireetl’amusementquejelisdanssesyeuxvertsfascinantsmemettenthorsdemoi.Bonsang,jem’efforced’argumenterrationnellementavecluiettoutcequej’arriveàfaire,c’estd’ouvriretderefermerlabouchecommeunpoissonhorsdel’eau,incapabledeprononcerunmot.Ils’écartedumurets’approchedemoi.Deseffluvesdesonparfumm’enveloppent.

–J’imaginequejeviensdeprouverqu’enfaitilvousarriveparfoisdeperdre,Ryles.

Iltendlamainpourécarterunemèchefollequimetombesurlevisage,sonsourirevictorieuxcreusesafossetteunique.Jemerétracteàsoncontact,maisiltientmonmentond’unemainferme.

–J’attendsnotrerendez-vousavecimpatience,Rylee.Dupouce,ilmecaresselajoueeninclinantlatête,l’airderéfléchiràcequ’ilvadireensuite.– À vrai dire, avec plus d’impatience que pour aucun des autres rendez-vous que j’ai eus

dernièrement.Jefermelesyeuxuninstantetjepenchelatêteenarrière.–Ohlàlà!Quellesoirée!–C’estàcelaqueçaressemblera?Quandjerouvrelesyeux,déconcertéeparsoncommentaire,ilmeregarded’unairperplexe.–Quoi?–Cesmots :Oh là là.Maintenant, je sais exactement comment sonneront cesmots que vous

prononcerezquandjevousauraipénétréebienprofondément.Choquée,jerestebouchebéedevanttantd’audaceetd’aplomb.Sonsouriresuffisantmetapesur

lesnerfs.Espècedeconarrogant!–Waouh!Onpeutdirequevousêtesdrôlementsûrdevous,Ace.Il glisse sesmains dans ses poches, le sourire radieux. Il se penche versmoi avec un regard

salaceetmurmured’untonprovocant.–Mais,chérie,j’aibeaucoupderaisonsdel’être.Ilpousseunpetitrirequimefaitcourirunfrissondansledos.–Jevousappelle.Surcesmots,MonsieurArroganttournelestalonsets’éloignesansunregard.Jesuisdesyeux

seslargesépaulesjusqu’àcequ’ildisparaissedanslafouleetc’estseulementàcemoment-làquejerecommenceàrespirernormalement.

Qu’il aille se faire voir, lui et sa bouche sexy, ses yeux d’un vert incroyable, bordés de cilsépais,etsesmainsexpertesetses…ses…sestout!Jesuissifurieusequej’entremble.Donavanestdédaigneux,sûrdeluiettoutàfaitàl’aisedanssonrôledemâledominant.Pourmoi,iln’yariendeplusattirantchezunhomme.Maislà,jesuishorsdemoi.Ilm’estentrédanslapeauetjenesaispassic’estunebonnechoseoupas.Cequejesais,c’estqu’ilaramenéàlaviecertainespartiesdemoiquejecroyaismortesdepuiscejourhorrible,ilyadeuxans.

Dèsqu’ilaposélamainsurmoi.Jeresteplantéelà,àessayerd’analyserlesévénementsinattendusdecettesoiréeet,auboutd’un

moment,jesuissûrededeuxchoses.Toutd’abord,ilestabsolumenthorsdequestionquej’honorecetengagementbidon.Ensuite,aufonddemoi,endépitdemarésolutioninébranlable,jesaisquejen’enaipasfiniavecceDonavan.

4

Jepianotesurmonbureautoutenconsultantlesitewebdenotresociétémère.J’aiuntasdetrucsàfairemais,aulieudeça,jeregardelesphotosdetouslesmembresdenotreconseild’administrationainsiquecellesdesmembresducomitéenchargedel’organisation.Jen’arrivepasàdevinerlequelest le père deDonavan, ce qui commence sérieusement àm’agacer. Si je connaissais son nomdefamille, ça m’aiderait. Je n’aurais pas dû dire à mon équipe que la paperasse pouvait attendrequelquesjours.Jetrouvaisqu’ilsavaientbienméritéunpetitbreakaprèstoutletravailqu’ilsavaientfourni.Pourtants’ilsétaientlà,j’auraisdéjàlaréponse.Biensûr,jepourraisappelerStellaouDaneetleurdemanderlenomdemonfuturrencard,maiscelaleurmettraitlapuceàl’oreille.Ilssaventbienque,généralement,cegenredechosenem’intéressepas.Etcesdeux-làsonttropportéssurlescommérages,jenetienspasàleurfournirunesibellecetteoccasion.

Etpuisjem’enveuxdechercheràsavoirquiilest.Qu’est-cequej’enaiàfaire?–Unqueutard!Jemefrotte lesyeuxetmepasselamaindanslescheveuxenpoussantunprofondsoupir.Ce

week-endaétélongetfatigant,jesuiscrevée.Jejetteuncoupd’œilàlapendule.Ilfautquejepartedans un quart d’heure si je veux être à l’heure au foyer pour démarrerma permanence de vingt-quatreheures.

Unealertesurmonordinateurmesignaleunmailentrant.Jecliquesurmaboîte,etmêmesijenereconnaispasl’adresse,jedevinel’identitédel’émetteur.C’estreparti.J’ouvrelemessageparcequel’objetapiquémacuriosité.

De:AceÀ:RyleeThomasObjet:LiaisonsgalantesencoulisseRyles,Auriez-vousouvertcemailsil’objetétaitsimplement«Rencardavecleplusoffrant»?

Jenecroispas.Vousmedevezunrendez-vous.Dites-moiquandvousêteslibrepourquejem’organise.Vousavezvingt-quatreheurespourrépondre.Sinon…Ace

Jepousseunsoupirdesoulagementmi-figue,mi-raisin.Cetultimatumabsurdem’agace.Maisc’estsurtoutmapropreréactionquim’agace.Pourquoi,alorsquejeneveuxpassortiraveclui,suis-jeexcitéecommeunecollégienneenconstatantqu’ilm’aenvoyéunmail?Commequandlegarslepluspopulaireetcoolducollègeremarquelagodicheordinaire.Aprèsqu’ilaflirtéaveclacapitainedesmajorettesderrièrelesgradinsdustade,çavasansdire.

Seigneur,cequ’ilpeutêtreagaçant!Jeregardelapendulepourm’assurerquej’ailetempsderépondre.

De:RyleeThomasÀ:AceObjet:Autocensure?Ace,Quelleexigence!Vousavezdissimulél’objetdevotremail,n’est-cepas?Est-cequejedevraism’inquiéterdu nombre de mails que vous avez envoyés, avec le même intitulé, à toutes vos autresconquêtesdesamedisoir?Ryl-E-E

Jesourisencliquantsur«envoyer».Jerevoissonvisage.Sonsourire.Sesyeuxémeraude.Safaçonderéduiremonself-controlàzéro.Ilnes’estécouléquedeuxjoursdepuislesenchèresmais,déjà, jemedemandesimamémoiren’enjolivepaslesouvenirdeDonavan,toutenminimisantsestransgressions.Unenouvellealertedemaboîtemailm’empêched’approfondircetteréflexion.

De:AceÀ:RyleeThomasObjet:L’espritchevaleresquen’estpasmortRyl-E-E,Un gentleman ne se vante jamais de ses opportunités ni des ses conquêtes, Ryles. Vousdevriezlesavoir.Quandvouspenserezàmoi,prenezbiensoindenoterquemesexigencesn’ontqu’unseulbut:vousfaireplaisir.

D’autrepart,vousn’avezpasréponduàmaquestion.Nousavonsparié,vousavezperdu.Ilesttempsdepasseràlacaisse,chérie.Ace

J’éclatederireenlisantsaréponse.Peut-êtrequesijenerépondspasàsaquestion,illaisseratomber.Ceseraittropbeau!Toutendétestantlepetitjeuauquelilselivre,jemesurprendsàsourireentapantmaréponse.Jereprésenteundéfipourlui,c’estaussisimplequeça.Sij’avaisaccédétoutde suite à ses exigences, ou peut-être même si j’avais continué à l’embrasser dans le couloir, ilm’aurait oubliée instantanément. Il aurait fait ce qu’il voulait avec moi et il serait parti sans seretourner.

De:RyleeThomasÀ:AceObjet:GrossesdamesetcanarisAce,J’ailuquelquepartqu’ungarçonordinaireabesoind’êtreadulépardenombreusesfillespourêtresatisfait,alorsquel’adorationd’uneseulefemmesuffitàcomblerungentleman.Cettedéfinitionàelleseulemontrequevousn’êtesdécidémentpasungentleman.Cequiveutdirequevousdevriezchantercommeuncanari,donc.Deplus,unrendez-vousavecvousestBIENAU-DESSUSdemesmoyens.RyleePS:Nevousinquiétezpas,jenepensepasàvous.Pasdutout.

Prendsça!Jenesuispaspeufièredemontraitd’espritendépitdumensongeéhontéduderniercommentaire. Je me lève, mets de l’ordre sur mon bureau et prends mes affaires. Au momentd’éteindremonordinateur,maboîtemailm’alerteencoreunefois.

De:AceÀ:RyleeThomasObjet:IlvousfautuneaugmentationRylee,Jesuisunhomme,c’estvrai,maisjesuisloind’êtregentil.Enfait,jepensequevousêtescurieuse, juste comme j’aime.Sautez le pas avecmoi,Ryles, je vous tiendrai lamain etprendraiplaisiràvousfaireperdreceself-controldontvousêtessifière.Jeserai toutetn’importequoi,saufgentil.Jevouslepromets.Commentconnaîtrevoslimitessivousnelesrepoussezpas?

Sivousrefusezdemedonnervosdisponibilités,jepourraisbienêtreobligédeprendreleschosesenmain.Peut-êtreest-ceprécisémentcequevoussouhaitez?Quequelqu’unprennelesrênesàvotreplace?Peut-êtrequec’estcedontvousavezbesoin?Ace.

–Espèced’enfoiréégocentrique!Cettefois,j’éteinsmonordinateursansprendrelapeinederépondre.Commes’ilsavaitceque

jeveux,cedontj’aibesoin!Pourtant,malgrémacolère,sesmotsrésonnentenmoi,plusqu’ilsnedevraient.

*

Enroutepourlefoyer,montéléphonesonnedanslavoiture.Jesuisd’unehumeurdechiensanstrop savoir pourquoi. En fait, c’estDonavan et ses fichusmails. Pourquoi a-t-il fallu qu’il vienneréveillermesmanques,mesbesoinsetmesdésirs?Jegrogneenvoyantlenomd’Haddiesurl’écrandemontéléphone.Depuislasoiréedesamedi,j’aisoigneusementévitémacolocetmeilleureamie.Elle et ses questions prévisibles. Heureusement, elle avait des plans qui l’ont retenue loin de lamaison,sinon,illuiauraitsuffid’uninterrogatoirepoursavoirqu’ils’étaitpasséquelquechose.

–SalutHad!–Ry!Oùétais-tu?Tum’évites?Bonsang,ellen’apasdittroismotsqu’ellecommencedéjà!–Maisnon,c’estjustequenousavonstouteslesdeuxététropoccupéesavec…–Arrêtes tes conneries ! J’aiparléavecDaneet je suis aucourant !Pourquoinem’as-tupas

réveilléeenrentrantpourmeraconter?Jepâlis.Qu’est-cequeDaneabienpuluidire?Ah,elledoitparlerdesenchères,biensûr.–Iln’yavaitrienàraconteràpartl’humiliationabsoluequej’aisubie.C’étaithorrible.–Arrête,çan’apasdûêtresiterrible!Etpuistuyasgagnéunrencardd’enfer.Quiest-ce?Jelèvelesyeuxaucielenarrivantdansl’alléedufoyer.–Untype…–Jem’endoute.Jesuiscontentequecenesoitpasunefille,tuvois,parcequeçachangeraitla

donne.Elleritetjenepeuxretenirunsourire.–Allez,vas-y,accouche!–Sérieux,Haddie.Iln’yarienàraconter.Bon,jeviensjusted’arriveraufoyer,jetelaisse.–Tuimaginesquejevaistecroire,Ry!T’inquiète,jet’obligeraiàcracherlemorceaudèsque

turentrerasduboulotdemainsoir.Jefaislagrimace.QuandHaddieMontgomerymenaced’alleraufonddeschoses,ellenelâche

jamais.Jecapituleenespérantquesi jeluidonnequelquechose,elleserasatisfaiteetnechercherapasàensavoirplus.

– Écoute, je ne connais pas le gars. Teddy nous a présentés avant que je sois contrainte deremplaceruneconcurrente.Ils’appelleDonavanquelquechoseetc’estlefilsd’undesmembresdenotreCA.C’esttoutcequejesais.

Je suis gênée de cemensonge éhonté. J’entends unmurmure d’approbation au bout du fil etj’imaginetrèsbienlatêtequ’ellefait.Ellefroncelenezetretrousseleslèvresenformedecœurenessayantdedevinersijedislavérité.

–Bon,jesuisaufoyer,Had,ilfautvraimentquejetelaisse.Bisous,bisous,àplus.–Bisous,àplus.

*

Àmonarrivée,c’estlebazarcommed’habitude.Jedoisenjambersixcartablesjetéspêle-mêledans l’entrée. En passant dans le hall, j’entends des chansons du Top 40 qui proviennent d’unechambreetundébutdedisputedansuneautre.

Par la fenêtre ouverte, je perçois le bruit d’une balle qui tape dans un gant de base-ball, àl’arrière du bâtiment, c’est Kyle et Ricky qui jouent à la balle, comme souvent. D’une minute àl’autre,l’undesdeuxvaseplaindrequel’autrenesaitpastirer.Ilvontdiscutaillerpuisilspasserontàuneautreactivité,unepartiedeBakuganoudebase-ballsurlaWii.

Enarrivantdans lagrande salle, j’entendsScooterqui rigole endébattant avecmoncollègueJacksondesméritescomparésdeSpidermanetdeBatman.Lagrandesalleestlapiècecommunedufoyer,ellecomprendunecuisineouvertesurunlivingspacieux.Degrandesfenêtresdonnentsurlejardinoùlesgarçonsjouentauballon.D’uncôtédelapièce,plusieurscanapésformentunUautourducoinmédia;enfacesetrouveunegrandetableenboisrecouverteenpartie,pourl’instant,parcequisembleêtredesdevoirsinachevés.Lemobiliern’estpasneuf,maisiln’estpasminablenonplus,simplementpatinéparl’usage.

–Salut,lesgars.–Salut,Rylee.JacksonlèveversmoiunregardamuséparsondébatavecScooter,ungarçondehuitans,etme

sourit.–Onfaitunepetitepause.Ilsaurontfinileursdevoirsavantquelerepassoitprêt.Je pose mon sac sur le plan de travail dans la cuisine avant d’aller jeter un coup d’œil à

l’avancementdurepasquimijotedansdeuxgrandesmarmites.Jesoulèveuncouvercleetjetouillecequiressembleàduporcavecdeslégumes.Monestomacgargouille,cequimerappellequej’aisautéledéjeunerdemidiaubureau,ausiègedel’association.

–Mmm,çasentbon.JedonneunetapesurlamaindeShanequiessaiedefaucherunmorceaudepaintoutfraisposé

surunpapier,surledessusdelacuisinière.–Baslespattes!C’estpourledîner.Vateprendreunfruitsituasfaim.Illèvelesyeuxaucielcommeseulunadodequinzeanssaitlefaire.

–Hé,çanecoûteriend’essayer!Ilpasseàcôtédemoienrepoussantlamècheblondequiluitombesurlesyeux.–Faudraitpenseràtecouperlescheveux.Ilhausselesépaulesenmedécochantcesourireencoinquimefaitfondreàtouslescoups.–Tuasfinitarédaction,quejepuisselarelire?Ilseretourneversmoitoutencontinuantàmarcheràreculons.–Oui,Maman!L’affection contenue dans ce terme ne m’échappe pas. C’est exactement ce que nous

représentons pour ces garçons, les parents qu’ils ont perdus.Or, la plupart du temps, les chancesd’être adoptés diminuent de façon dramatique, passé un certain âge.L’État a délégué leur tutelle àmonassociation.

Je travaillesurtoutausiègequiestàquelqueskilomètresd’ici,mais j’insistepourque tout lepersonnel qualifié fasse aumoins une permanence de vingt-quatre heures toutes les semaines. Cetemps leur permet de connaître les garçons et de ne jamais oublier pour qui nous nous battonsquotidiennement.Cesgaminsetmonéquipesontmadeuxièmefamille.Ilsmedonnentdel’énergie,meprovoquentémotionnellementetm’obligentà resteralertementalement.Parfois, ilsmettentmapatienceàrudeépreuveetmepoussentàbout,maisjelesaimedetoutmoncœur.Jeferaisn’importequoipoureux.

Connorarriveencourantdanslacuisine,portantquelquechosesouslebras,etressortaussitôtparl’autreporte,poursuiviparAidenquihurlequ’ilvalerattraperetlefairepayer.

–Ehlesgars,calmez-vous!–Çasuffit,lesgarçons!Jackson se lève du canapé pour surveiller leur échange. Ces deux-là ont l’habitude de se

provoqueraupoint,parfois,d’allerjusqu’àsebattre.Jesensdespetitesmainss’accrocheràmajambe.Jebaisselesyeuxetcroiseleregardangélique

deScooter.–Salut,toi.Jesourisenprenantmontempspourluirendresonembrassade.Jelevoisseraidiràl’idéeque

jel’approche,maisilneflanchepas.Ilm’afalluseizemoispourobtenircetteréponsedelapartd’unenfantdehuitansquin’avaitconnucommeseulcontactavecsamèrequedescoupsdepoingoudesobjetslancésàlafigure.Jem’accroupispourêtreàsahauteuretjel’embrassedoucementsurlajoue.Sesyeuxchocolatmeregardentavecconfiance.

–Jesuisd’accordavectoi,SpidermanestbienpluscoolqueBatman.IlpossèdeunsixièmesensquimanqueàBatman.

Ilmesouritenhochantlatêteavecenthousiasme.–Etsituallaisrangertesaffaires?Ledînerestpresqueprêt.IlacquiesceensouriantetretournedanslapiècecommuneoùsesBDfavoritessontétaléesen

vracsurlesol.Jereportemonattentionsurlasilhouetterecroquevilléesurl’autrecanapé.Zanderest

statique.Depuis troismois qu’ilm’a été confié, il n’est pas sorti de sonmutisme. Replié sur lui-même,levisageimpénétrableetlesyeux,auregardhanté,rivéssurl’écrandetélévision,ilserresursoncœur,telleunebouéedesauvetage,unchienenpelucheéliméquinelequittepas.Sescheveuxbrunsbouclentsursanuque.Ilssontbeaucouptroplongs,mais j’entendsencoreseshurlementsdeterreurlemoisdernierquandjemesuisapprochéedeluiavecdesciseauxpourlescouper.

–Pasdechangement,Jax?Jacksonvientdemerejoindre,sansquitterZanderdesyeux.Ilpousseunprofondsoupirplein

decompassion.– Non. Sa consultation avec le docteur Delaney s’est déroulée comme d’habitude. Il s’est

contentédelaregarderfixementquandelleaessayédelefaireparticiperàl’atelierdeludothérapie.–Quelquechosefinirabienparservirdedéclencheuretlesortirdesonétatdechoc.Ceserait

bienquecelanetardepastropsinousvoulonslimiterlesdégâtsdanssoninconscient…etaiderlapoliceàcomprendrecequis’estpassé.

LapolicenousaamenéZanderaprèsl’avoirtrouvéchezlui,couvertdesang.Arméd’uneboîtedepansementsadhésifs,ilessayaitd’arrêterlesangquicoulaitdesmultiplescoupsdecouteauquesamèreavaitreçus.Unvoisinquipromenaitsonchienavaitentendulesappelsausecoursetprévenulapolice.Lamèreestmorteavantleurarrivée.OnpensequelepèredeZanderestl’auteurdescoups,maissansletémoignagedeZander,lesévénementsquiontprécédérestentunmystère.Sonpèreayantdisparu,ilestleseulàpouvoirdirecequis’estpassécettenuit-là.

Zandern’apasprononcéunseulmotdepuislemeurtredesamère,ilyatroismois.C’estmonboulotdem’assurerquenousluiapportonstoutel’aidepossibleafinqu’ilpuissesortirdel’étatdetorpeurcatatoniquedans lequel il se trouve.Ensuite seulementnouspourrons l’aider à entamerunlongprocessusdeguérison.

Pour m’extraire de ce crève-cœur, je m’emploie à terminer avec Jackson les préparatifs durepas.Nousœuvronsensilence, l’unàcôtéde l’autre,parfaitementsynchronisés,commeunvieuxcouple. Nous partageons cette permanence depuis deux ans maintenant, et chacun est capabled’anticiper les gestes de l’autre. Nous ne parlons pas, attentifs au débordement d’activité dans lamaison.

–Alors,onm’aditquelesenchèresontfaituntabac,avecuneconcurrenteinattendue.Ilmeregardeenhaussantlessourcilsetjelèvelesyeuxaucielenguisederéponseavantdeme

retournerversl’évier.–Onm’aparléaussid’uneséancedeflirtérotiquetrèspoussédanslescoulisses.J’enlâchelecouteauquej’étaisentraindelaveretquitombedansl’éviereninoxavecunfracas

épouvantable.JesuiscontentequeJackson,àquijetourneledos,nepuissepasvoirlastupéfactionsurmonvisage.C’estquoicebazar?Quelqu’unadûmevoiravecDonavan.Jem’obligeàrespirerpour ne pas paniquer. Je ne sais pas comment réagir. Je n’ai pas envie que lesmembres demonéquipealimententlescomméragesàproposdemarencontredanslescoulisses.

–De…dequoiest-cequetuparles?

J’essaie de prendre un ton dégagé, mais j’espère être la seule à discerner la détresse demaproprevoix.Jefermelerobinetenattendantsaréponse.Jacksonpartd’unrirechaudetprofond.

–J’auraisadorétevoirenaction,Ry.Merde,merdeetmerde!Moncœurs’emballe.Commentest-cequejevaisexpliquerça?Jesens

lerougememonterauxjoues.Aumomentoùjevaisrépondre,ilreprend,l’amusementperceptibledanssavoix.

–Tevoirparadersurscènepourunévénementquetuastellementcombattu.Bonsang,tudevaisêtrehyperfurax!

–Tun’aspasidée!J’aipratiquementmurmurésansmeretournerbienquejen’aieplusrienàlaver.Maisjecrains

ledéferlementdequestionss’ilvoitmonvisage.–Etenplus,Baileym’aracontéqu’ellearencontrécemechypersexy–c’estellequiledit–et

l’aentraînédanslescoulisses–tusaiscommentelleest–oùelleaeuuneséancedeflirttrèspousséaveclui.

Jerelâchelesoufflequejeretenais,heureused’apprendrequ’ils’agitdenotrestagiaire,Bailey,quis’estvantéedesesexploitsetnondecomméragesàproposdeceuxdesapatronne.Etsoudain,jeréalise que cette bombe de Bailey, avec qui tous les mecs au boulot rêvent de sortir, étaitvraisemblablementlapremièreconquêtedeDonavan,samedisoir.

Si c’était le cas,pourquoivoudrait-ilpasserdecettebeautébruneaux jambes interminablesàmoi?Toutàfaitcequ’ilmefautpourrenforcermonsentimentd’êtretoujoursledeuxièmechoix.Jesoufflepouréloignerlescheveuxquimetombentdanslafigure.

–Bah,tulaconnais.Elleaimebiens’amuser.Jaxrigoleetmetapoteledosenpassantderrièremoi.–C’estunefaçonsympadeprésenterleschoses.Ilentreprenddepréparerlespique-niquedesgarçonspourdemainmidi.–C’estunefillesuper,elletravaillebien,lesgaminsl’adorent…maiscen’estpaslegenrede

copinequejechoisiraispourmonfils.J’acquiescedansunmurmure enpensant à notre séduisante stagiaire, qui n’aque cinq ansde

moinsquemoi,etàsesmanièresparticulièrement libérées.J’ai toujoursétéunpeuenvieusedecegenre de filles. Des filles qui jettent leur bonnet par-dessus les moulins, totalement libres, et quivivent leur vie sans regrets, en flirtant avec des inconnus au hasard de leurs rencontres, sans seprendrelatête,quipartentenbaladesuruncoupdetêteetsonttoujourslesreinesdelafête.Jemedissouventavecangoissequ’unjourjemeretourneraisurmavieavecl’impressionquejenel’aipasvécue.Quejen’aipasprisassezderisques,pasassezprofitédemajeunesse,quejenemesuispassuffisammentaventuréehorsdemonpérimètredeconfort.

Jemèneunevieprotégée,prévisible,contrôléeet toujoursenordre.Laplupartdutemps,elleme convient comme ça. Ce n’est pas parce qu’elle a embrassé Donavan la première que je suisjaloused’elle–enfin,peut-êtreunpeuquandmême–maisplutôtparcequ’ellevitsansregrets.

Je me sors de mes pensées, de celles que j’ai de plus en plus fréquemment à mesure quel’anniversaireapproche.J’auraisdûaumoinsapprendrequelavieestcourteetquejedoislavivrepleinementau lieuderesterdansmoncoin tranquillementen la regardants’écouler.Jemeforceàreportermonattentionsurcequejedoisfairemaintenant.

–Lesgarçons,ilesttempsdevenirfinirvosdevoirs.Desgrognementsdiversmeparviennentdesdifférentespièces.Sixgarçonsentrehuitetquinze

anss’approchentdelatableentraînantlespiedsetengrommelant.Jejetteuncoupd’œilversledivanoùZander,recroquevillésurlui-même,sebalanced’avanten

arrière.Jevaislentementversluietjem’agenouille.–Zander,tuveuxveniravecnous?Jepeuxtelireunlivresituveux.Jeluiparled’unevoixdouceentendantlamainlentementpourqu’ilnesetrompepassurmes

intentions,puisj’effleuresamainposéesursongenou.Ilcontinueàsebalancer,maissesyeuxbleusvacillentetviennentsefixersurlesmiens.Cequejevoisdansceregardmesecoueauplusprofonddemoi-même.Jeluisourisenserrantsamain.

–Nousserionstrèsheureuxquetuviennesavecnous.Ilgardelesilence,maissesyeuxnequittentpas lesmiens.Uninfimeéclaird’espoir jailliten

moiparcequed’habitudeildétourneleregardauboutdequelquessecondes.–Allez,Zander,prendsmamain,jenetelâcheraipas,saufsituleveux.Ilcontinueàmeregarderfixementunmoment,et jenebougepas,unsourirerassurantsurle

visage.Sapetitemainvientsurlamienneetilentouremapaumedesesdoigts.Ilselèvelentementetnousallonsrejoindrelesautresgarçonsassisautourdelatable.

5

Jemarcheauralenti.J’arriveàlafindemapermanenceaufoyeretleslonguesheuresdecesdeuxderniers jours commencent à se faire sentir. Les garçons se sont montrés particulièrement dursaujourd’hui.

Ma collègue Kellen joue à chat avec les garçons dans la cour ; leurs rires et leurs cris meparviennent par les fenêtres ouvertes. Je suis dans la cuisine, en train de préparer le repas de lapermanencesuivantequandletéléphonesonne.

–Allô?–Ah,trèsbien.Tuesencorelà.–Pluspourlongtemps.Jeterminedansunquartd’heure.Qu’est-cequejepeuxfairepourtoi,

Teddy?– Je sais que tu es probablement épuisée, mais est-ce que tu pourrais passer au bureau en

rentrant?J’adoreTeddy,maisc’estbienladernièrechosequej’aienviedefaire.Jevoudraisjusterentrer

chezmoi,meglissersouslacouetteetdormirjusqu’àdemain.–Hum,ok,d’accord.Ilyaunproblème?–Aucontraire,jepensequenousavonstrouvélasolutionpourlesfondsquinousmanquaient

pour les nouvelles installations. Je t’expliquerai dès que tu seras là. On est justement en train definaliserlesdétails.

–C’estvrai?C’estsuper!Mes espoirs reprennent.Même après la fête de charité et les nombreux dons que nous avons

collectés,ilnousmanqueencoreplusieursmillionsdedollarspouratteindrenotreobjectif.–Je…jefaisaussivitequepossible,çavadépendredelacirculation.Je raccroche, tout excitée. Tout le travail que j’ai fourni depuis deux ans pour obtenir les

consentements,lesoutienduCA,lesprojets,lefinancement–toutcelavapeut-êtreportersesfruits,finalement.

J’achève de préparer le dîner pour que l’équipe suivante n’ait plus qu’à le mettre à cuire.J’attrapemonsacàmainetmonsacdeweek-endet,toutenrassemblantmesaffaires,jejetteuncoupd’œil à mon téléphone pour, sans enthousiasme, regarder mes mails. Je pourrai peut-être passerquelquescoupsdefildanslesembouteillages.

Enconsultantmesmessages,jeremarqueuncourrierqueDonavanm’aenvoyéunpeuplustôtdanslajournée.J’hésiteàlesupprimer,maismacuriositél’emporteetjel’ouvre.

De:AceÀ:RyleeThomasObjet:mainsexpertesRylee,Vous nem’avez pas laissé le choix.Votre absence de réponsem’a obligé à prendre leschosesenmain.Vousn’avezpasoubliéleurtoucher,j’ensuissûr.Ace

Quelconnardarrogant!Jesupprimelemail.Qu’est-cequ’ilvafaire?Jem’enfiched’autantplusque,maintenant,jesaiscequis’estpasséentreluietBaileydanslevestiaire.Quandonypense,ilssontparfaitementbienassortis.Unqueutardavecunedévoreused’hommes.Cettepenséemefaitsouriretandisquejefinisderangermesaffairesavantdedireaurevoiràlapetitetroupe.

Contrairement auxautres jours, la circulationest fluide sur le trajetdubureau. Jemedisquec’estdebonaugure.Parcebeaujoursouslesoleilcalifornien,exceptionnellementchaudpourunefinjanvier,jedonneraisn’importequoipourattraperuneserviette,alleràlaplageetm’allongersurlesableausoleilpourmerégénérer.

En un rien de temps, je me gare sur le parking de Corporate Cares. Je traverse le hall dubâtimentàgrandspasenvérifiantmatenueaupassagedanslesfenêtresquimeserventdemiroir.Jeportemonjeanpréférétaillebasseavecunt-shirtmoulantrougeenV.Heureusementj’enavaisunderechangedansmon sac parce que je ne crois pas queTeddy aurait apprécié celui que je portais àl’origineetquiestmaintenantmaculéduvomideRicky. Jeprendsunmomentpourarrangermescheveux,jeretiremapinceetlaisseretombermesbouclessurmesépaules.

Profitantde lamontéeenascenseur, je remetsunpeudeglosssurmes lèvresetmepince lesjouespour leur redonnerde la couleur avant d’arriver à l’étagedesbureaux.Enpassant devant lemien, je fais signe à différentes personnes et j’échange quelques mots en allant jusqu’à laréceptionniste,devantceluideTeddy.Jesuissurprisedevoirquelesstoressontbaissésdanslasallederéunion.

–Salut,Sandy.–Salut,Rylee.Jevaisleprévenirdetonarrivée.Ilt’attend.

–Merci.Par la baie vitrée, j’aperçois une longue file de voitures sur l’autoroute qui va chezmoi.On

diraitdesfourmisavançantàlaqueueleuleu.–Tuasfaitvite!Jemetourneversmonpatronquiarboreunlargesourire.–Jemeursd’impatiencedetemettreaucourant.–Etmoijemeursd’impatiencedesavoircequisetrame.Jeluiemboîtelepasetjeprendsplacedanslefauteuildecuirnoirquiluifaitface,heureusede

m’asseoir.Teddys’installeenfacedemoi,incapabledecontenirsonenthousiasme.–J’aireçuuncoupdefilcematinetj’aipassél’après-midienréunionpourmonterunprojet.

Écouteça.Ilsepencheversmoi,lesmainsposéessursonbureau.–CDEntreprisem’acontacté,ilsveulentnousdonnerlamoitiédecequinousmanquepournos

installationsets’engagentà leverlerestedesfondsenobtenantd’autressociétésqu’ellesapportentleurcontributionouqu’elleslessponsorisent.

Il a débité son flot de paroles sans reprendre sa respiration, les yeux brillants d’excitation.J’essaied’intégrerlesensdesesmots,j’aidumalàcroirequejenerêvepas.

–Quoi?Maiscommentça?Waouh!Jerigole,prisedansletourbillond’excitationdeTeddy.–Jesuisencoreentraindepeaufinerlesdétails.Coltonesttoujoursdanslasallederéunionen

cemoment.Jevaisteleprésenterànouveaudansuneseconde.–Jel’aidéjàrencontré?–Oui,jetel’aiprésentésamediàlafêtedecharité.Jeris.–Tum’asprésentéuntasdegenscesoir-là.Tellementquejen’airetenunileursnomsnileurs

visages.Espéronsquejemesouviendraidequoinousavonsparléetquejenepasseraipaspouruneidiote.

Sonrirerassurantrésonnedanslapièce.–Jesuissûrquetuvastrèsbient’entirer!Entoutcas,c’estparti,monpetit!Toutletravailque

tuasfourniporteenfinsesfruits.–C’estsuper,Teddy!Unsentimentdesoulagementm’envahitsoudain.Audébutdelasemaine,nousavonsapprisque

fauted’unfinancementintégral,leprojetrisquaitd’êtreencorereportédehuitàdouzemois.–C’estinespéré,enfait.Ilsecouelatête.–Maisilfautquejetedise,Ry,tuvasêtremiseàcontribution.Ilveulentunepersonnedétachée

decheznouspourtravailleràleurcôté,etilsontexigéquecesoittoi.

Jehochelatêtetoutenmedemandantpourquoietcommentlasociétémeconnaît.Maisçan’apasd’importance.Cequicompte,c’estlefinancement.

– Bien sûr. Je ferai tout ce qu’il faudra, tu le sais. (Je pose la main sur mon cœur.) C’esttellementincroyable!Jeferaitoutcequiseranécessairepourobtenircefinancement–pourlancerleprojet.

–Bravo,jesavaisquejepouvaiscomptersurtoi.Ilselève.–Viens,j’aihâtequeturencontresColtonànouveauetquenousmettionslatouchefinaleàcet

accord.Ilmefaitsignedelesuivredanslecouloir.Jenesuispastrèsàl’aise,jen’aipaslatenuequi

convientàuneréuniondetravail,maissiTeddys’enmoque,jen’aipasàm’enfaire.–Lavoici,Colton.Teddymeprécèdedanslasallederéunion.J’entreàsasuiteetjem’arrêtenet.Donavanestassis

à l’autre bout de la table de conférence, une pile de documents devant lui. Il a les bras croisésnégligemment sur la poitrine et ses biceps sont visibles sous lesmanchesde sonpolo.Quandnosregardssecroisent,ses lèvress’écartentenunlargesouriresuffisant.C’estquoicebordel?Figéedansl’embrasuredelaporte,jeregardealternativementTeddypuisDonavan.

–Je…jene…jenecomprendspas!LeregardhorrifiédeTeddymefaitcomprendrequejeviensdefaireunebourde.–Rylee?Il jette un rapide coup d’œil àDonavan pour voir si je ne l’ai pas offensé, puisme lance un

regardd’avertissement.– Rylee, de quoi parles-tu ? Voici Colton Donavan, qui est, entre autres, le PDG de CD

Entreprise–jevousaiprésentésl’autresoir,tutesouviens?Toutd’uncoup,monuniversestentièrementbouleverséparlefaitquel’hommequimefaitface

–l’hommequim’aréduiteàunebouledesensationsl’autresoir–n’estautrequeColtonDonavan.LE Colton Donavan – le pilote de course sexy et branché, le fils d’un célèbre metteur en scèned’Hollywood et le séducteur impénitent qui alimente les colonnes people des tabloïds. Le ColtonDonavanquim’alaisséeavecdesrêvesérotiquesetundésircharnelinsatisfaitdepuissamedidernier.Putain!

C’estincroyablequejenel’aiepasreconnutoutdesuite.Jeluiavaisbientrouvéquelquechosedefamilierquejen’arrivaispasàidentifierquandjel’airencontré,maismaintenantjeréalisequejen’étaispasdansmonétatnormal.J’aiunpeudemalàcomprendrecequisepasse.Lesoufflecoupé,jeregardetouràtourTeddyetDona–heu–Colton.ÀlafaçondontTeddymeregarde,j’imaginequejenedoispasavoirl’airaimable.Jebaisselesyeux,prendsuneprofondeinspirationetj’essaiedecomposermonvisageetdecalmer lesémotionsqui sebousculentdansma tête. Jenepeuxpaslaissermessentimentsfoutreenl’aircettedonation–lesenjeuxsonttropimportants.

–Hum…excusez-moi,c’estjusteque…jepensaisqueDonavanétaitvotreprénom.

Jepénètreplusavantdanslapièceenprenantdel’assurance.Jemedisquejepeuxlefaire.–Jen’aipasbiencomprisquandnousavonsétéprésentésl’autresoir.LebrefsouriredeColtonm’arrêtenet.Tupeux le faire. Jeme répète cettephrase commeunmantra.Pasquestionde lui laisservoir

l’effetqu’ilproduitsurmoi.La tête haute, jeme dirige vers lui avec détermination et je lui tends lamain en plaquant un

souriresurmonvisage.–Raviedevousrevoir,MonsieurDonavan.Teddypousseunsoupirdesoulagement.Ilretenaitsarespiration,craignantquemaréactionne

vienneremettreleuraccordenquestion.Sonvisagesedétend.–Appelez-moiColton,jevousenprie.Donavansedéplieavecgrâceetselèvepourprendremamaindanslasienne.Illagardeunpoil

pluslongtempsquenécessaire.–Ravidevousrevoir,moiaussi.Unéclairtraversesesyeuxémeraude.–Asseyons-nous,jevousprie,ditColtonavecenthousiasme.–Colton,jetelaisselesoind’expliquerlapropositiondetasociétéàRylee.–Avecplaisir,Teddy.Colton, très professionnel, déplace son siège pour me faire face et dépose une liasse de

documentsdevantmoi.–CDEntreprises’emploieàredistribuersesgainsànotrecommunauté.Unefoisparan,avec

monéquipe,nouschoisissonsuneassociationetyconsacronsdu temps,nos relationsetdes fondspourattirerl’attentionsurlacausequ’elledéfend.Aprèsavoirassistéinopinémentàvotresoiréelasemaine dernière, à la place demamère qui est tombéemalade, j’ai trouvé que votre associationméritaittoutenotreattention.

Jel’observe,quicontinueàalignerdesfaitsetdeschiffresrelatifsàdesorganisationsqueCDEntreprise a sponsorisées par le passé. J’ai du mal à admettre que cet homme si posé, siprofessionnel, soit lamêmepersonnequim’a fait fondre etm’a réduite àune chose tremblante etgémissanteentresesmains.

C’estlegenred’hommepourlequeljecraquehabituellement.Toutennoiretblanc,sansdemi-teinte.Passionnéetcompétent.C’estçaquejetrouvesexy.Pasleconnardarrogantetprétentieuxdel’autre soir, impudique et sans retenue.Dieumerci, je sais à quoim’en tenir, je ne risque pas detomber dans le panneau. Du moins, c’est ce que je suis en train de me dire quand je l’entendsprononcermonnom.Jemesecouepourmesortirdemespensées.

–Pardon?–Avez-vousdesquestions?Colton incline la tête, l’airpensif. J’ai lanette impressionqu’il sait exactementque l’objetde

mespensées,c’estlui.

–Toutd’abord,permettez-moidevousdemanderdesnouvellesdevotremère.Ensuite,quefaitCDEntrepriseexactement,MonsieurDonavan?

–Mamèrevamieux, jevous remercie.Quant àCDE, l’activitéprincipalede la société est lapropriétéetladirectiond’uneécuriedecourseautomobile.Monécuriedecourseautomobile,ajoute-t-il avec fierté. Notre projet principal est, entre autres choses, une technologie de pointe qui vapermettre d’accroître la sécurité des pilotes. Nous avons déposé une demande de brevet. Noussommesencoursd’homologation.

–Hmmm.Jenesaisispastrèsbiencommenttoutecettehistoirepeutfonctionner.– Et comment comptez-vous relier une voiture ou une écurie de course automobile à une

collectedefondsauprofitd’enfantsorphelinsetdeCorporateCares?Je suis de retour en mode business, et son charme n’affecte plus mon raisonnement. Plus

entièremententoutcas.Maisj’aidansl’idéequ’ilyaunpiège.Chatéchaudé…–Merci de m’offrir cet enchaînement. Lundi, j’ai attiré l’attention de mon équipe sur votre

association. Après quelques recherches, des discussions et une réflexion de toute l’équipe, noussommesarrivésàlapropositionsuivante:

Ilouvreledossierqu’ilaposédevantmoiet,quandilmeregarde,leplaisiradoucitsestraits.– CD Entreprise propose de faire une donation d’unmillion et demi de dollars à Corporate

Cares.Putain!Jem’efforcedenepasprononcerlesmotsquisebousculentdansmabouche.Lafierté

selitdanssesyeuxalorsqu’ilmeregarded’unairpensif,enévaluantsilencieusementmaréactionavantdecontinuer.

– En plus de ce premier versement, nous prévoyons de dédier une partie des placardspublicitairesdemavoitureàpromouvoirvotrecauseouvotremissionpourlasaisonàvenir,sicelavousconvient.

Ilvoitlaperplexitésurmonvisageetlèvelamainpourfinir.– Nous prévoyons d’utiliser ce support publicitaire pour inciter d’autres sociétés et d’autres

écuriesdecourseàvoussponsoriser,ellesaussi.Monéquipevalespousseràs’engageràpayersoitunmontantpréfixépartourquemavoitureeffectuera,soitunparrainagetotal.

J’écarquillelesyeux,incrédule.Celareprésenteraitunesommehallucinantepourl’association.JejetteunregardversTeddy,siexcitéqu’ilnetientpasenplace,unsourireradieuxilluminantsonvisage. Je regardeColtondenouveauetnos regardssecroisent, l’émeraudeet l’améthyste, je suispartagéeentrelagratitudeetlaperplexité.Pourquoinous?Pourquoijustementnotreorganisation?

Il me sourit doucement comme s’il lisait dans mes pensées et comprenait mon dilemme.Accepterladonationsignifiequej’acceptedesortiraveclui.

–Nousn’avonspasencoredécidésinousproposonsleparrainagecourseparcourseoupourtoute la saison.Mon équipe travaille là-dessus aumoment où je vous parle, étant donné que nous

avonsunpeumoinsdetroismoisavantl’ouverturedelasaison,etnousdevonsobtenirleparrainageduplusgrandnombrepossibledesociétés.

–N’est-cepasincroyable?Teddyhurleàcôtédemoi.Jemetourneversluietjeluisourisavecsincéritéavantdereporter

monregardsurColton.–C’estextrêmementgénéreuxdevotrepartetdecelledevotresociété.Cequim’intrigue,ce

sontlesraisonsquivouspoussentàfaireça.PourquoiCorporateCares?Unsourireeffleureseslèvres.–Disonsquevouspouvezêtretrèspersuasive,MademoiselleThomas.Ilgardelesyeuxrivéssurlesmiensetjeretiensmarespiration.–Jepensequecelavameplairedetravailleravecunepersonneaussipassionnéeet…Ildétournelesyeuxencherchantlemotjuste.–…réactive,commevousm’avezsemblél’êtresamedisoir.Sonvisageafficheune impassibilitéque sesyeuxdémentent tandisqu’ilpasse lapointede sa

langue sur sa lèvre inférieure. Tout le sang de mon visage semble refluer dans mes joues etdescendredansmoncou.Ilplisselesyeux.Sonregardinsistantmemetmalàl’aiseetjevoudraismetrouvern’importeoù,ailleursqu’ici.

Dansun lit, parexemple, soncorps sur lemien,avec sesdoigts sebaladant surmapeau, seslèvresécrasantlesmiennes.C’estquoi,cebordel?Cen’estpassuffisantqu’ilsoitenfacedemoi,ilfautenplusqu’ilviennecorrompremespensées?Çanevapasdutout.

Jeréprimelacolèrequesonculotfaitmonterenmoi.Jen’arrivepasàcroirequ’ilaitditça.Ilavraiment besoin deme rappelermamauvaise conduite en face demonpatron ?Comment ose-t-ilveniràmonbureaupourmeprovoqueretmerappelerunépisodedontjenesuispasfière.Etquejenesuispasprèsd’oublier.

–Réactive.C’estbienlemotquiconvientpourdécriremaRylee.Ellevatoujoursdel’avant.Teddymetapoteledos,lafiertés’entenddanssavoix.ColtonregardeTeddyquin’arienperçudelatensionsexuellequis’estinstalléeentrenous,et

hochelatête.–C’estexactementça.Etcen’estpascourant.Jel’aiobservéeenactionsamedisoiretj’aiété

impressionné.J’enaiassezentendu,maisjeneveuxpasluidonnerlasatisfactiondevoirqu’ilmetrouble.Je

n’aipasenviedetravailleraveccethomme,maisjedoismerendreàl’évidence,CorporateCaresn’apasd’autrechoixquederécolterlesfruitsdetoutlesang,leslarmesetlasueurquej’aiverséscesdeux dernières années. C’est lui qui se présente, même si ses intentions ne sont pas totalementdésintéressées. Jedoisconsidérercettecollaborationcommeunmoyenpourarriveràmes fins. Jedoispenseràmesgaminsetàtousceuxquibénéficierontdecesnouvellesinstallations.

–Donc,MonsieurDonavan…–Appelez-moiColton,jevousenprie.

Jedécidederemettrelaconversationsursesrails.– Colton, j’ai compris le principe. Maintenant, quel est exactement mon rôle dans cette

collaboration?– Eh bien,Mademoiselle Thomas, je n’aurai pas vraiment besoin de vous d’un point de vue

purementprofessionnel.J’aiuneéquipeparfaitementrodéepourcegenredechoses.Maisilvasansdire que j’aurai besoin que vous soyez notre contact pour répondre à leurs questions et pourdifférentesautreschoses.

Cesontces«différentesautreschoses»quim’inquiètent.–Maisalors,pourquoi…Coltonm’interromptenlevantlamainunefoisdeplus,etcettehabitudecommenceàmetaper

surlesnerfs.–Commejel’aiditàTeddy,lasignatureducontratentrenosdeuxsociétéspourladonationest

soumiseàplusieursfacteurs.Ilmarqueunepauseetarrangelespapiersdevantlui.Il lèvelesyeuxenconcentranttouteson

attentionuniquementsurmoi.– Pendant lesmois à venir, je vais avoir besoin d’un représentant deCorporateCares àmes

côtésendenombreusesoccasions.Ils’arrêteetjefaislamoueenarrondissantlesyeux,j’espèremetromper.–Moi?Maisjeconnaisdéjàlaréponse.–Oui,vous.Je remarqueque sesyeux rétrécissent quand jepasse la langue surmes lèvres sèches.Tout à

coup, j’ai chaud. Ses lèvres s’entrouvrent légèrement tandis qu’ilm’observe et je suis obligée derepousserlespenséesinconvenantesquimeviennentàl’esprit.

–Enplusdel’annoncedenotreaccord,ilyauraplusieursévénements,certainsici,d’autresendehorsdelaville,descocktails,desinterviewsàlapresse,etc.,oùvousdevrezm’accompagner.

–Quoi?Stupéfaite,jemelèveenrepoussantbrutalementmonsiègeetjeregardealternativementColton

etTeddy.Quelculot!Jedéclineunrendez-vous,jelerepoussedanslescoulissesduthéâtreetlui,ilélaboreunmoyendemelieràluiparcontrat?Quelsombrecrétin!Sonegoavraimentdûsouffrirdemonrefus.

Jesuissidérée.Rienàfaire!Iln’estpasquestionquej’accepte.Ilmepasseparlatêtequelquesexpressionsbiensentiesquej’adoreraisluienvoyeràlafigure.

–Celateposeunproblème,Rylee?Moi,jetrouvequec’estuneidéebrillante.Teddymesortdemastupeur.Jemetourneversluipourluirépondre,maisaucunsonnesortde

mabouche.–SiColton est prêt à faire jouer sonnom, ses relations et sa popularité pour faire parler de

CorporateCaresensemontrantavectoiaucoursd’événementscouvertsparlesjournaux,alors…

–Pourquoinepasenprofiter?Colton termine la phrase de Teddy en arborant un large sourire insolent. La tournure que

prennent les événements commenceàme tourner la tête et jemesens tout étourdie.Enposantunemainsurlatablepourmesoutenir,jemelaissetomberlentementdanslefauteuil,fixantduregardunpointimaginairesurlapilededocumentsdevantmoi.

–Ry?Çava?Teddysembleinquiet.–Hein?Jerelèvelatêteetjecroisesonregardpleind’empathie.–Tuesunpeurouge.Tutesensbien?–Oui,çava.C’estjuste…j’aieuunelonguepermanence.C’esttout.J’essaiedemereprendre.Quiveutlafinveutlesmoyens,commeondit.–Désolée.Excusez-moi. Je suis complètement bouleversée à l’idée que ce nouveau projet va

devenirréalité.Coltonmescruteensilence,jem’agitesurmonsiège,malàl’aisesoussonregardinsistant.–ÉcouteRiley,jesaisquetuessurbookéeencemomentetquecelavaconstituerpourtoiune

chargedetravailsupplémentaire,maisnoussommessiprèsdubut!Jen’accepteraipersonned’autrepourreprésenternotreassociation.Iln’yaquetoi,monpetit.

Le compliment deTeddymevadroit au cœurmalgré la paniqueoùmeplonge l’impressiond’être piégée.D’être embarquée de force dans une histoire qui sera sans aucun doute profitable àCorporateCaresmaisqui,pourmoi,risqued’êtredévastatrice.

Teddyjetteuncoupd’œilàsamontreetmetapotelamain.–J’aiunevidéoconférencedanscinqminutes.Ilselève,imitéparColton.–Jesuissûrquevouspourrezvouspasserdemoipourréglerlesderniersdétails.IltendlamainàColton,pourscellerl’accordparunepoignéedemain.–Mercipourcettegénérositéàlaquellenousnenousattendionspas.Tun’aspasidéedunombre

deviesquivontpouvoirchangergrâceàcedon.UnombreinexpliquéepassesurlevisagedeColton.– Je comprendsbienplusde chosesqueceque lesgens croient engénéral, ajoute-t-il.Merci

d’avoiraccueillimapropositionsichaleureusement.Monavocattecontacteradanslamatinéepourrédigerlapaperasse.

Teddyacquiesceavantdesortirdelapièce.Jeresteplantéeàregarderlaporte,tournantledosàColton,enréfléchissantàcequejevaisfaire.Jesuissubmergéeparsagénérosité.Parsatentativederéalisermesrêves,alorspourquoiest-cequejeneressenspasdegratitudeenverslui?Pourquoiest-cequej’aijusteenviedemeretourneretdel’étrangler?Jedétestequ’onmeforceàfairequelquechose.Cen’estpasparcequejeveuxtoutcontrôler–enfinpeut-êtreunpeuquandmême.Mais,au

moins, je veux être enmesuredeprendremespropresdécisions et nepas être traitée commeunefemmedocilequiditouiàtoutsansdiscuter.

Pourquoiest-cequ’ilm’énervetant?Est-ceparcequechaquefoisquejeregardeseslèvresousesdoigtsquipassent sur samâchoire,moncorps se contracte en souvenirde ceque j’ai ressentiquandilssesontposéssurmoi?Oubienparceque,dansmesrêves,j’entendssavoixrauquequimeditàquelpointilmedésire?Merde!Jemenaisunevieparfaitementtranquillejusqu’àlasemainedernière. Et puis je l’ai rencontré et depuis, je perds tous mes moyens. Je devrais me moquercomplètementqu’ilaitflirtéavecBaileyetDieusaitquoiencore,maisjen’yarrivepas.Jesuisgênéeà l’idéequ’il croieprobablementque je laisse lepremier typevenuposer lesmains surmoi.Celam’énerve de penser que la seule raison qu’il ait deme poursuivre, c’est que je neme laisse passéduireparsescomplimentsniparsonbaratinéloquent.Jemedemandepourquoiunhommecommelui,quiembobinedesfemmesbienplusjoliesetplussexyquemoi,portesonregardsurmoi.Mavien’estpasunedecesromanceshollywoodiennesoùunefilleennuyeuseetunhommecélèbretombentfollement amoureux. Je n’ai pas la naïveté de croire que c’est ce qui va m’arriver. En plus, messentimentspourMaxne fontquecompliquer les choses. Je culpabilise enpensantque,bienque jel’aime,aveclui,jenemesuisjamaissentieaussivivantequ’avecColton.

Jepousseunprofondsoupir,conscientedelaproximitéentrenous.Quandjemetourneverslui,ilsentmonirritationetçalefaitrire.Ilestassis,appuyéaudossier

desonfauteuil,unechevilleposéesursongenou,lesbrasnonchalammentposéssurlesaccoudoirs.Nous nous observons, nous nous scrutons pour la première fois sans le regard d’observateursextérieurs. Son regard se balade paresseusement sur mon corps et s’arrête sur mon décolleté. Jeremarquequesonsourires’élargitetjesupposequ’ilapprécielesrondeursfémininesengénéral,passeulementlesmiennes,puissesyeuxreprennentleurexploration.

Ilestvraimenttrèsbeau.Sesépaiscilsnoirscontrastentdemanièrefrappanteaveclevertdesesyeux.Sonnezpuissantestlégèrementincurvé,commes’ilavaitétécassé.Cetteimperfectionsurunvisageparfaitparailleursnefaitqu’ajouteràsonsex-appealrenversant.Jedétailleseslèvrespleines–lalèvresupérieureestlégèrementplusfine–,labarbenaissantequiombragesonvisageetlepoulsqui bat régulièrement sous la courbe de sa mâchoire. Je suis prise d’une envie soudaine del’embrasser et deme blottir contre lui, de sentir le pouls de cet homme vibrant sousmes lèvres.D’êtreenveloppéedanssonodeurpropreetterreuse.Jesecouelatêtepouressayerdesortirdecettetranse.Ilhausselessourcilsetattendquejefasselepremierpas.Nouscontinuonsànousobserverunmomentennousjaugeantl’unl’autre.C’estfinalementmoiquirompslesilence.

–C’estçaquevousappelezprendreleschosesenmain?–Qu’est-cequinevapas?Vousavezdumalàrésisteràlatentation,Ryles?Ilmelanceunsourirearrogant.Malgrémonenviedeleverlesyeuxauciel,jenepensequ’àlui.–Tuparles!Ilhausselesépaulesavecindifférence.–Ilfallaitbien,Ry,vousnem’avezguèrelaissélechoix.

–Paslechoix,vraiment?Vousêtesqui?Unadoquipiquesacriseparcequ’iln’obtientpascequ’ildésire?

–Vousmedevezunrencard.–Toutçapourunfouturencard,Ace?N’est-cepasplutôtparcequej’airefusévosavancesune

foisquej’aieuretrouvémesesprits?Oh,cequ’ilpeutêtreénervant!Sardonique,ilajouteenlevantunsourcil:–Oh,vousyseriezvenuesansproblème.Quantàvosesprits,d’aprèsmonsouvenir,ilsétaient

répandusenvracsurlesoldecescoulisses.Gros malin ! Comment fait-il pour me mettre tellement hors de moi alors qu’il m’en faut

beaucoupplusd’habitude?–Donc, comme je vous ai dit non, vous offrez desmasses d’argent et vousme coincez par

contrat.Vousmeforcezàpasserdutempsavecvous?Del’argentenéchanged’unrendez-vous?Jenesuispasuneputain,Colton.Etcertainementpaslavôtre!

Jemedirige vers la fenêtre pour essayer de dissiperma colère. Je l’entends bouger derrièremoi,jecomprendsqu’ilselèveets’approchedelafenêtre.Nosregardssecroisentdanslerefletdelavitreetilsoutientlemien.Moncorpssemetàvibrer.

– Mettons les choses au clair. Premièrement, j’ai mes raisons pour faire ce don qui n’ontabsolumentrienàvoiravecvous.Riendutout!Deuxièmement,jenepaiejamaispourunrencard,Rylee.Jamais.J’aiplusdeclassequeça.

Jesenslafureurquiémanedelui.–Vousavezbienpayépourunrendez-vousavecmoi.–Vousn’allezpascompareruneenchèrepouruneœuvredecharitéavecunserviced’escort-

girls.Etpourfinir…Ils’approchedemoiengardantlesyeuxrivésauxmiens,etm’attrapelebraspourdonnerplus

deforceàsonargument.–Pourfinir,jeneveuxplusjamaisvousentendreemployerlemotputainpourparlerdevous.Nous restons silencieux alors que cesmots flottent autour de nous.Qu’est-ce que ça peut lui

faire,lamanièredontjeparledemoi?Iln’aaucundroitsurmoi.Jesaisbienqu’ilestplussagedene pas provoquer quelqu’un qui est en colère, mais je ne peux pas m’en empêcher. Sans savoirpourquoi,j’aienviedelepousseràbout.Aprèstout,puisqu’onm’obligeàfairequelquechose,autantdirecequej’aisurlecœur.Jedégagemonbrasbrusquement.

–Alorspourquoicecontrat?Lesévénementsoùjesuistenuedevousaccompagner?Ondiraitque jeblessevotreegoen refusantde succomberàvotrecharme irrésistible.Vousavezbesoindem’attacherpourvousprouverquelamagieColtonopèretoujours?

Ilmeregardeavecunsourireencoin.–Jen’aijamaisparlédevousattacher,maissic’estvotretruc,Rylee,jenedemandepasmieux

quedevoussatisfaire.Jepeuxvousmontrerlesficelles.

Jen’enrevienspas.Ledoublesensdesesparolesmefaitmonterlerougeauxjouesetdétournerlesyeux.

–Jeferaicommesijen’avaispasentenducecommentaire.J’aiparlésèchement,maisj’essaiedemerappeleroùj’enétais.Ilm’afaitperdrelefil.Ahoui!–Votre orgueil en prend un coup parce que je ne tombe pas à vos pieds et que je refuse de

devenirvotreobjetsexuel,alorsvousvenezsurmonlieudetravail,vousprenezlaseulechosequejeveuxvraiment,lachosesurlaquellejetravailledepuisplusdedeuxans,etvousmelaservezsurunplateau.

–Etoùestleproblème?–Leproblèmeestquevousmel’offrezdansdestermesquisontgratifiantspourvous…J’hésiteparceque jemerendscompteque jemeperdset j’aipeur,si jecontinueàparler,de

laisserpasserdespensées intimes,despenséesqui leconcernent.Etsicelaarrive,alors…il sauraquejepenseàluibienplusquejenedevrais.

Colton se glisse près demoi et appuie son épaule contre la vitre pourm’observer de profil.Notresilenceseprolongeunmoment,monanxiétéaugmentesoussonregardinsistant.C’estluiquiromptlesilenced’unevoixdouceetpressanteàlafois.

–Pourquoinevoulez-vouspassortiravecmoi?Waouh,changementdesujet!Unrirenerveuxs’échappedemeslèvres.Jecontinueàregarder

dehors,sansleverlatête.– Pourquoi le ferais-je ?Vous etmoi venons demondes différents, Colton, desmondes qui

obéissentàdesrèglesdifférentes.Vousvoulezunrencardpourpouvoirm’ajouteràlalonguelistedevosconquêtes.C’estvousquiavezditquevousvouliezmebaiserpourpouvoirmesortirdevotreesprit et passer à autre chose. (Du coin de l’œil, je le vois pâlir.) Les femmes que vous côtoyezhabituellementvousdéclarentprobablementleuramourets’offrentàvousquandvousleursortezcegenredesubtilités,maisavecmoiçanemarchepas.

Coltons’apprêteàrépondre.Jesaisqu’ilvamelancerundesestraitsd’esprit,medirequejen’aurai aucun problème àm’offrir à lui. Je l’interromps d’un geste de lamain, lui empruntant sapropretactiqueaupassage.

–Notrerencontren’aétéqu’unmomentd’égarementpassager,encequimeconcerne.Celanesereproduirapas.

Jemetournepourleregarderdanslesyeux.–Jenesuispascegenredefille,Ace.Ilmeconsidèreunmoment,unmuscle tressaille sur samâchoire. Il sepencheversmoiet sa

voixrauquerecèledesaccentsdevérité.–Voussavezbienqu’aufonddevous-même,unepartminusculedelafemmerespectableque

vousêtesdésireexplorercettepartie intrépide,sexy,désinhibée,quiestenvousetquinedemandequ’às’exprimer.Unepartiedevous-mêmequejepeuxsansproblèmevousaideràdécouvrir.

Mesyeuxlancentdeséclairstandisquej’essaiedenepasvoirlavéritéderrièresesparoles.Ilobservemalutteintérieurejusqu’àcequejemedétournepourretournerverslatabledeconférence.Jenetienspasàcequ’ildécèlelemoindredésespoirdansmesyeux.

–Vousnejouezpasfranc-jeu,Colton.–Etalors?Onestparfoiscontraintdesemontrerdéloyalpourobtenircequ’onveut.–Etqu’est-cequevousvoulez,exactement?Je croise les bras surmapoitrine pour ériger une barrière invisible de protection contre lui.

Commesiquelquechosepouvaitvraimentmeprotéger!Coltons’éloignedelafenêtreetsedirigeversmoi,commeunlionprêtàbondirsursaproie.Ils’immobilisedevantmoi,plusprèsqu’iln’estnécessaire,iltendlamainet,duboutdesdoigts,ilmerelèvelementonpourm’obligeràleregarderdanslesyeux.

–Vous.J’ail’impressionquetoutl’aircontenudanslapièceabrusquementétéaspiré.Jenepeuxplus

respirer. Incrédulité et acceptationm’envahissent unmoment devant la simplicité de cette réponse.Maismasympathiesedissipequandjecomprendsquec’estsafaçondeprocéder.C’estcommeçaqu’ilobtienttantdenomssursaliste.Ilvousmanipuledetellesortequevousvoussentezuniquedanssonsonradar.Ilestbon.Ilestvraimentbon.Maisjenevaispastomberdanslepanneau.

Jem’écartedeluipourcréerunedistanceetpouvoirpenserplusclairement.–Alorspourquoiuncontrat?Qu’est-cequevouscherchezàobtenir?Jecontournelatabledelasalledeconférence.Unefoisdel’autrecôté,jemeretournepourlui

faireface.–Vousallezmefaireperdremonboulotsijenecouchepasavecvous?Unsouriredésabusérelèvelescoinsdesabouche.–Non…maiscelaresteuneoption.–Ehbien,pourquoiest-cequ’onnes’épargnepasunepertedetempsetdeseffortsetqu’ons’en

débarrasse toutde suite ?Commeça,onpourrapasser auxchoses importantes.Bon sang,onpeutmêmeutiliserlatabledeconférencesivousêtesaussidésespéréqueça.

–Onpourrait,eneffet.L’airsincèrementamusé,ilappuiedesdeuxmainssurlatablepourtestersastabilité.–Elleestassezsolide.Ilhausselesépaules.–Mêmesicen’estpasexactementcequej’avaisentête.Ilfaitpasserdanssonregardtoutessespenséeslascivesinexprimées.–Etvouspouvezmecroire,chérie,jesuisloind’êtredésespéré.Sonregardfaitcourirdesfrissonsdansmondos.J’essaiedechangerdestratégie.Ilestclairque

cellequej’aichoisien’apasréussiàledissuader.–Noussavonstouslesdeuxquevousn’avezpasbesoind’uneescortepourassurercestâches.

Pourquoinedemandez-vouspasàunedevospetitesamiesdevousaccompagner?

Jecontinueàmedéplacerparcequejesaisquesijeresteimmobile,jerisqued’entrerencontactaveclui.Etl’attractionqu’ilexercesurmoiesttropfortepourquejerésisteàcecontact.Ets’ilmetouche,alorsjepensequetoutemarésolutionvas’écrouler.

–Jesuissûrequevousaveztouteunebandedefillessuperbesquin’attendentqu’unclaquementdedoigtsdevotrepart.

–Lespetitesamies,cen’estpasmontruc.Jem’arrêtenet.–Ah,jevois.Votretruc,c’estplutôtlesplanscul?Apparemment,j’avaisraisondenepasme

faired’illusionsàvotresujet.J’ai le temps de voir la colère briller dans ses yeux avant qu’il ne la domine et la dissimule

derrièreunpetitsourirenarquois.– Pourquoime lier à une seule femme alors qu’il y en a tant qui se battent pour attirermon

attention?Ilmeprovoquepourmefaireréagir.–Vousycroyezvraimentàvotrebaratin?Seigneur !Cethommeestaussiexaspérantqu’irrésistible. Ilm’adresseunsouriremielleuxet

croiselesbrassursapoitrine.J’essaiedenepasconcentrertoutemonattentionsursesmusclesquiroulentsoussachemise.Denepasimagineràquoiilressemblesanssachemise.

–Onpeutdirequevousêtesdrôlementpénétrédevous-même,Ace.Ilinclinelatêteetmeregarde.–Sivousdésirezl’êtreàmaplace,jepeuxm’arrangerpourvoussatisfaire.Cettefoisencore,sesparolesmelaissentsansvoixet,malgréleurcôtédirectetgrossier,tous

mesmusclessituéssouslaceinturesecontractentdedésir.Lachaleurmemonteauvisage,etjemeforceàfixerunpointinvisiblesurlemurenespérantqu’ilneserendracomptederien.Ilrigoleenvoyant ma réaction et je relève vivement les yeux en m’efforçant de dissimuler sous un masqued’incrédulitél’effetquesesmotsonteusurmoi.C’estseulementencherchantvainementuneréponsedestinéeàleremettreàsaplacequejecomprendsqu’ilplaisante.Unsourireflottesurseslèvresetilplisselesyeux.

–Allez.Vousl’avezbiencherché.Jen’aipaspurésister.Jeconnaisça.Jeleregardefixementensecouantlatête.–D’accord. Jevais fairecommesivousn’aviezpasdit ça.Nonmais sérieusement,pourquoi

vousn’avezpasdepetiteamie?Ilhausselesépaulesd’unairdétaché.– Ce n’est pas mon truc. Je n’aime pas avoir d’attaches. Une relation, c’est synonyme de

complications.Unmecquirefusedes’engager.Riendenouveausouslesoleil.–Doncj’avaisraison?–Àproposdequoi?

Ils’approchedemoilentement,latêteinclinéesurlecôté.Moncœursemetàbattreplusvite.Letondesavoixetsonallureontchangé.Jesenssondésirbrutàmesurequ’ilserapproche.Ledanger.Moncorpssetenddedésiralorsquemoncerveaumeconseilledebattreenretraite.

–Cequejevousaiditsamedidernier–baiseretlarguer,c’estçaquivousplaît.J’aiditçaàvoixbasse.Latéméritéquisous-tendmesparoless’évaporeàchaquepasqu’ilfait

dansmadirection.– Je vous ai déjà dit que je n’appréciais pas les insultes.Et voilà quevous recommencez.Ne

serait-cequepourça,vousméritezlafessée.Mescuissessecrispentdedésir. Jenesuispasportéesurcegenrede trucs.Etpourtant,avec

Colton,l’idéedesesmainssurmoi,mepossédant,mepoussantàsurfersurlafrontièreinfimeentreleplaisiretladouleurm’exciteau-delàdetoutecohérence.

Meslèvress’écartentquandilarriveàquelquescentimètresdemoi.Moncorpslereconnaît,sonodeur,sonsoufflecourt.Mondoss’arc-boutequandiltendlamainversmajoue.

–Çacraint,non?Non?ajoute-t-il,alorsqueduboutdudoigtilsuitlecontourdemamâchoire,s’arrête,puisvienteffleurermalèvreinférieure.

–Quoi?–Dedevoircampersursespositionsparprincipeaulieudecéderàlatentationquiseprésente.

Iln’yapasdehonteàaccorderàvotrecorpscequ’ildésirepar-dessustout,Rylee.Noussommeslà,àquelquescentimètresl’undel’autre,tandisquelepoidsdecequ’ilvientde

dires’installedansmapsyché.Jesaisqu’ilaraison.Ledésirdeplusenpluslancinantquiagitemoncorpsmeledit.Quejeveuxexactementcequ’ilestentraindem’offrir.

–Vouspouvezdifficilementlenier,chérie,c’estécritentouteslettressurvotrecorps.Jem’écartebrusquementdelui,commesij’avaisétémordue.Cequ’ilvientdedirearaniméma

colère.–Non!Je…Ilrevientversmoietmeposeundoigtsurleslèvres,lesyeuxbrillantsd’uneintensitésalace.–Chut…Sachezseulement,Rylee,quelesexeavecmoi…vousn’aurezjamaismieux.Il dit ça d’une voix basse, hypnotique, qui semble vider tout l’air de mes poumons, et toute

raisondematête,d’ordinaireplutôtsensée.Jefaisunbondenarrière,j’aibesoindem’éloignerdesondiscourssensueletdesonarrogance

sanslimites.Ilestsidirect,sisûrdelui,qu’ilendevientpresquedéplaisant.Presque.Ilestindéniablequecethommeestdouépourvantersespropresmérites.Malheureusementpourlui,jen’iraijamaisvérifiers’ilditvraioupas,neserait-cequepourdonnerunebonneleçonàsonegosurdimensionné.

– Je vais accepter ce fichu accord, Colton. Je vais le faire pour mes gamins. Pour tous lesgaminsquiviendrontaprès.Paspourvous.Nipourlesmachinationsdébilesqu’ilyaderrière.

Je vais vers la table pour ramasser mes affaires. Je rassemble les documents en les tapantbruyammentsurlatable,c’estleseulbruitqu’onentenddanslapièce.Jelèvelatêteetjeleregardedroitdanslesyeux.

–Jenecoucheraipasavecvous,Ace.–Maissi,vousleferez.Ilsouritd’unairsuffisant.Malgrélecoupvicieuxquesesmotsprovoquententremesjambes,je

réussisàpousserunpetitrire.–Nepensezpasunseulinstant…–Colton!Unronronnementsexym’interrompt,venantdelaportedelasallederéunion.Jerelèvelatête

brusquementpourapercevoir lamince silhouettedeBailey,un sourire séducteur sur levisage, lesyeux écarquillés et battant des cils.Mon sentiment d’insécurité remonte à la surface et je déglutisbruyammentenguettantlaréactiondeColton.Jecroisesonregard.Enfait,malgrécetteinterruption,ilnem’apasquittéedesyeux.Jenesaispascommentjedoisprendreça.Ilretrousseleslèvres,lesquestionsnonrésoluesrestentensuspensentrenous.

Tout à coup, je neme sens pas bien. J’éprouve un besoin impérieux dem’échapper de cettepièce.Defuircethomme.JeneveuxpasêtretémoindelafamiliaritéquiexisteentreBaileyetlui.Niéprouvercettejalousie,alorsquejeviensdedirequejenevoulaispasdelui.

Ignorantlatensionquirègneentrenous,BaileypénètredanslapièceenroulantdeshanchesetsedirigeversColtonen jouantavecunemèchedesescheveuxaubrushingetà la teintureauburnimpeccables.

Un regret passe furtivement dans les yeux deColton quand il se tourne vers elle en souriantchaleureusement, toujours le parfait gentleman. En pivotant brusquement pour sortir, jeme cognedansmonfauteuilquiraclebruyammentleparquet.

–Jenemerappellepasvousavoirentenduclaquerdesdoigts.J’entreprendsdenouveaudecontournermonsiège.Coltonritdeboncœurdansmondos,cequi

mefaitsouriremalgrémacolère.Ensortant,jel’entendsquim’appelle.Jenem’arrêtepas,dansmahâtedemettredeladistanceentrenous.

–Nousn’enavonspasfini,Rylee,vouspouvezmecroire.Jepassedevantmonbureausansrépondreetjevaisdroitàl’ascenseur.Sansprêterattentionà

l’appel de Stella ni au clignotement du répondeur de mon téléphone, j’approche des portes del’ascenseur qui, heureusement, s’ouvrent juste à ce moment-là. J’ai besoin de prendre l’air pourm’éclaircir les idées. Je neme reconnais plus, d’ordinaire je suis sûre demoi et je ne crains pasd’exprimermessentiments,etlàjemesenscommeunedecesgaminespleurnichardesquejenepeuxpas supporter.Comment se fait-ilqu’avecColton je sois réduiteàunebouled’hormones, furieuseuneminuteetdésirantsentirseslèvressurlesmienneslasuivante?

Je me laisse aller contre la paroi de l’ascenseur. Il me met dans un état pas possible,complètementhorsdemoi.Jen’arrivepasàsavoircequejedésireleplus,luimettremamaindanslafigureoubaiseraveclui.

6

Jeme détends dans mon jardin en buvant un verre dans la chaleur du soleil californien. Je suisallongéesurunechaise longue,et jeprofitedesderniers rayonsavantqu’ilnesecouche.Labriselégèrequifaitfrémirlespalmierslelongdenotreclôturem’apaise.

Lesévénementsdelajournéem’ontépuisée.Pourtoutarranger,Josieestaulitaveclagrippe.Jevaisdevoirretourneraufoyerdansmoinsdevingt-quatreheurespourlaremplacer.Ilestencoretôtmais,raisonnablement,jedevraisallermecoucherpoureffacerunepartiedecettefatigueparunebonnenuitdesommeil.MaisjemesuislaisséconvaincreparHaddiedeprendreunverreavecelleetdepartagerlapizzaqu’elleestentraindepréparerdanslamaison.

Jefermelesyeuxetjemedétendscontreledossierdelachaiseensoupirant.J’aienviedecroirequelesnouvellesinstallationsvontseconcrétiseretdevenirréalité.Quenotrenouvelleapprochedel’actionàmenerauprèsdesorphelinspourrasedévelopperet,avecunpeudechance,devenirleferdelanced’unerévolutiondansnotresystèmed’accueildecesenfants.Nouspourronsdémontrerquelefaitderegrouperdespetitsnombresd’enfantssousunmêmetoit,oùilstrouverontenpermanencedestuteurs,desrègles,unenseignement,desconseils,leurpermettradedevenirdesadulteséquilibrésetbienadaptés.Ilsaurontunendroitoùilsserontchezeux.

Unfrissondefiertémetraversequandjepenseàtouteslespossibilitéset touslesespoirsquenouspourronssusciterenfinalisantceprojet.

Brusquement,jemesensmalenpensantàlui.Jenecomprendstoujourspascequ’ilveutdirequandilditquelespetitesamies,«cen’estpassontruc».Pourquoiest-cequejecontinueàpenseràluis’ilnesepasserien?Parcequ’enfaitilsepassequelquechose.Jenepeuxpasnierqu’ilsoitplusqu’agréableàregarder.Etjenepeuxdécidémentpasfairecommesilesétincellesquicourentsurmapeauquandilmetoucheétaientimaginaires.Maisjen’aivraimentpasenvied’êtreconfrontéeàluietàsesmanièresdedragueur,surtoutmaintenantquej’ysuisobligéepourdesraisonsprofessionnelles.

Jepousseunprofondsoupirquandj’entendslaportecoulissantes’ouvriretHaddiesortirdansle jardin avecunebouteille devin, deuxverres et un cartondepizza sur lequel sont empilées desassiettesetdesserviettesenpapier.Jemerendscomptetoutàcoupquejemeursdefaim.Ellevient

vers moi, sa longue silhouette encadrée par les rayons du soleil qui font de sa chevelure blondecommeunhaloautourdesatête.Seslonguesjambesélancéessontmisesenvaleurparunminishortkaki,etsapoitrinegénéreuseestcontenuedansuncaracoorange.Commetoujours,elleesthabilléeavecstyleetungoûtparfait.Et,endépitdesaperfectionsansfaillequimedonnedescomplexes,jel’aimecommelasœurquejen’aijamaiseue.

–Jemeursdefaim.Jemeredressepourl’aideràtoutmettresurlatable.–Etmoijemeursd’impatiencedesavoircequit’arrive.Etpourquoituresteslà,plongéedans

tespensées.Elleverselevinrougedansnosverrespendantquejecoupelapizza.–ÇamerappellequandnousétionsdansnotrechambreàlacitéU.Jemontrenotrerepasenrigolant.Haddie était ma coloc en première année de fac. Je n’aurais jamais pensé au cours de cette

première semained’intégrationque laBarbiequipartageaitmachambredeviendraitmameilleureamie. Elle était entrée en tourbillonnant dans la chambre, on aurait dit un mannequin sorti d’unecampagnedepubpourRalphLauren,incroyablementsûred’elle-même,suiviedesafamillemodèlevenue l’accompagner.Elleavait regardé lentementautourd’elle,notreenvironnementspartiate, lesmursdebriquesrecouvertsd’unecouchedepeintureetlesplacardsexigus.Jel’observais,maldansma peau, en me disant que chaque matin allait me rappeler à quel point j’étais inférieure à cettesplendidecréature.

Unefoissesparentspartispourdebon,j’étaisrestéeimmobileàtirersurl’ourletdemarobe.Elleavaitfermélaporte,s’étaittournéeversmoiavecunsourireimmensesurseslèvresenformedecœuretm’avaitdit:

–Bonsang,j’aicruqu’ilsnepartiraientjamais!Ducoindel’œil,jel’avaisvues’adossercontrelaporte,l’airsoulagé.Elleavaitinclinélatête,

mejaugeantduregard.–Jepensequelemomentestvenud’arroserça!Etelles’étaitprécipitéesursavalisepourensortirunebouteilledetequilabiencachéeaumilieu

de ses affaires. Puis elle s’était laissée tomber sur mon lit à côté de moi. Elle avait débouché labouteilleetl’avaitlevéeentrenous.

–Ànotrepremièreannéeàlafac!Àl’amitié,àlaliberté,àtouslesbeauxmecsetàlasolidaritéentrecolocsquisecouvrentl’unel’autre.

Elleavaitfaitunegrimaceenbuvantunegorgéedecetalcoolfortetm’avaittendulabouteille.J’avaisnerveusementregardé labouteille,puiselle,maiscommejevoulaisdéjàdésespérément luiplaire,j’avaisbuunegorgéedontlabrûlurem’avaitfaitmonterleslarmesauxyeux.

–Seigneur,cequ’onpouvaitêtrenaïvesencetemps-là!Etsijeunes!Ils’estpassétellementdechosesdepuiscettepremièreannée.

–Ilsuffiraitdecettetequilabonmarchépournousyramener.

Je rigole puis je regarde en silence les rayons du soleil disparaître, emportés par la nuit quis’avance.

–Huitans,çafaitunbail,Had.Jeprendsunelonguegorgéedecevinâpre,lelaissantcalmerl’angoissequipointelenezdans

monesprit.– Ça fait assez longtemps pour que je sache que quelque chose te tracasse. Qu’est-ce qui se

passe,Ry?Jesouris,heureused’avoiruneamiecommeelle.Enmêmetemps,c’estembêtantparcequeje

ne peux rien lui cacher. Je sens les larmes me monter aux yeux, surprise par ce soudain affluxd’émotion.Haddiesepencheversmoi,enpliantsousellesesjambesparfaitementbronzées,etelleposeunemainsurlamienne.

–Qu’est-cequ’ilya,Rylee?Qu’est-cequitemetdanscetétat?Ilmefautunmomentpourretrouvermavoix, j’aienviedetout luiraconter,desavoirsielle

trouvequejesuisbornéeencequiconcerneColton.Peut-êtrequejesaiscequ’ellevamediresijeluiraconteetquec’estlaraisonpourlaquellejegardetoutpourmoi.Peut-êtrequejen’aipasenviedem’entendredirequec’estnormaldeselaisseralleràéprouverdenouveaudessentiments.Quedesortiravecquelqu’und’autren’enlèveraitrienàMax,niàsonsouvenir,niàcequenousavonsvécuensemble.

–Ilyatellementdechosesàdire,jenesaispasparoùcommencer.Jesuiscrevée,àcauseduboulot, jem’inquiète pour Zander, qui ne fait aucun progrès, ce qui annihile tous les bienfaits dusuccèsdelasoiréedesamedidernier.

Jemepasselamaindanslescheveux.–Et,enplus,ilfautquejeretourneaufoyerdemainpourremplacerJosiequiestmalade…– Il n’y a personne d’autre pour la remplacer ? Tu as déjà fait beaucoup trop d’heures cette

semaine,jenet’aipratiquementpasvue.–Non,personnen’estdisponible.Pascettesemaine.Toutlemondeafaitexplosersesheuresà

causedugaladecharité…etcommejesuissalariée…iln’yaquemoi.–Jesaispourquoitulefais,Ry,jecomprendsquetuadorestonboulot…maisnetelaissepas

dévorer,mapuce.–Jesais,jesais.Oncroiraitentendremamère.Jeprendsunebouchéedepizzaquejemâchelentement.–Ilyaunebonnenouvelle,quandmême.Jecroisquenousavonstrouvélerestedufinancement

pourlesinstallations.–Quoi?Elleseredressevivement.–Pourquoitunedisaisrien?Ças’arrose!Ellecognesonverrecontrelemien.–Ques’est-ilpassé?Comment?Jeveuxdesdétails.

– Nous peaufinons les derniers détails avant de rendre la chose publique, nous ferons uneannonceàcemoment-là.

J’essaiedenepaslaissertransparaîtreledégoûtquejeressensenpensantàquellesconditionslemarchéaétéconclu.J’espèrequ’ellevasecontenterdecetteréponsesansmeposerplusdequestions.

–D’accord.Ellemedévisage,visiblementsurprisequejen’endisepasplus.–Oh!Etqu’enest-ildecerencardauxenchèresdontDanem’aparlé?Jebaisselesyeuxetjetournel’anneauquejeporteàl’annulairedelamaindroite.Jefaisçatout

letempssansm’enrendrecompte.–Jenesaispasencore.Enrelevantlesyeux,jevoisqu’ellearemarquémongeste.Sesyeuxs’emplissentdelarmes.– C’est parce que la date anniversaire approche, hein? C’est pour cela que tu as l’air si

accablée?Elleselèveetvients’asseoiràcôtédemoipourmeprendredanssesbras.Pendant unbref instant, jem’abandonne àmes souvenirs et auxpensées qui accompagnent la

datequiapproche.Jen’avaispasvraimentfaitlerapprochemententremonsentimentalismesoudainet la confusion de mes sentiments envers une relation inexistante avec Colton. Je supposequ’inconsciemmentjerefusedepenseràcettedatetraumatiqueetauchagrinàjamaisvivantauplusprofond de mon âme. J’essuie une larme sur ma joue et me soustrais à l’étreinte chaleureused’Haddie.

Jehausselesépaules.–Ouais,j’imaginequeçafaitbeaucoupd’unseulcoup.C’estlavérité,maisjemesenscoupabledeluiencacherunepartie.–Ehbien,sœurette,nousallonsboirepleindevin,nousapitoyersurnotresortetnousmoquer

denous-mêmesetdenotrestupidité.Lasincéritédesonsouriremeremontelemoral.Jetrinqueavecelle,heureusedesonamitié.–Àlatienne,machérie!

ÀSUIVRE…