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Souvenirs : textes écrits par des apprenantes et des

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SOUVENIRS

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COORDINATION : Suzanne Benoit, coordonnatrice Centre d'alphabétisation Moi, j'apprends

GESTION DU PROJET : Line L. Chartrand

ILLUSTRATIONS : Rhéal Brisson Arthur St-Amour Lise Lacroix George Poirier

PAGE COUVERTURE : Lise Lacroix

TRAITEMENT DE TEXTE : Lucie Jubinville

MISE EN PAGES/PRÉPARATION POUR IMPRESSION : Albert Paquette

RÉVISION LINGUISTIQUE : Jean Lalonde

AUTEURES ET AUTEURS : Les apprenantes et les apprenants du Centre d'alphabétisation Moi, j'apprends

COMITÉ D'ENCADREMENT : Marie Bourgeois Louis Bourgeois Lucienne Cayer Aurore Boulard Fernande Major Marie-Anne Paquette

ÉDITION : Centre d'alphabétisation Moi, j'apprends 1468, rue Laurier, Rockland (Ontario) K4K 1C7

COORDINATION DE PRODUCTION ET D'IMPRESSION : Centre FORA (Centre franco-ontarien de ressources en alphabétisation)

533, rue Notre-Dame Sudbury (Ontario) P3C 5L1

Tous doits réservés. © Centre d'alphabétisation

Moi, j'apprends, 1993

Il est interdit de reproduire en tout ou en partie le présent ouvrage, par quelque procédé que ce soit.

La réalisation de ce document a été rendue possible grâce à une contribution financière du ministère de la Santé nationale et du Bien-être social par son Programme d'autonomie des aînés/es; projet no 4687-05-90/016.

Les opinions exprimées dans ce document sont celles des auteurs et des auteures et ne sont pas nécessairement celles du Ministère ou du Centre Moi, j'apprends.

ISBN 1-895336-54-6

Dépôt légal - dernier trimestre 1993

Bibliothèque nationale du Canada

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Le Centre Moi, j'apprends remercie le Centre franco-ontarien de ressources en alphabétisation

(Centre FORA) pour toutes les heures dévouées à la production

de ce recueil de textes.

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Préambule

La retraite est un temps privilégié dans la vie d'une personne. C'est le temps de faire tout ce dont on a toujours rêvé. C'est également le moment idéal pour se souvenir... et écrire.

Les personnes âgées ont une vie remplie d'expériences qu'elles pourraient partager si elles en avaient les moyens. Pour la plupart d'entre elles, écrire leurs souvenirs est impensable; elles croient que ce ne sont que les spécialistes en écriture qui en possèdent le monopole.

Nous avons donc conçu un projet ayant pour but de stimuler le goût d'écrire chez nos apprenantes et nos apprenants âgés. Comme plusieurs de nos apprenantes et apprenants sont à l'âge de la retraite, le défi était de taille. Grâce au savoir-faire des animatrices et de la responsable de la gestion du projet, un grand nombre de nos apprenantes et de nos apprenants y ont participé. Tous les textes soumis ont été retenus pour le recueil. Une équipe composée de six personnes âgées a assumé la responsabilité de toutes les décisions concernant la présentation du recueil.

Nous tenons à remercier toutes les personnes qui ont rendu ce projet possible. Nous espérons que ce recueil servira de tremplin pour toutes les personnes âgées qui ont le goût d'écrire.

Suzanne Benoit Coordonnatrice du Centre Moi, j'apprends

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Table des matières

Humour 9 Quelle aventure 10 Voyage à Hawaï 10 Un mauvais tour 11 Pauvre bœuf 12 La boîte à bois 12 Histoire ou légende 13 Une bonne blague à l'école 13 L'erreur de ma mère 14 Les framboises 14 Ma cerise 15 Un malentendu 15 Quelle gêne! 16 Quel souvenir! 17 Un bon tour 17 La chasse aux œufs 18 La belle fille 18

Coutumes religieuses 19 Dans le temps de Pâques 20 Les règlements de la religion 20 Le Jour de l'an 21 La période des fêtes 21 Les messes en latin 22 Les fêtes 22 La messe 23 Sévérité des prêtres 23 Être religieux ou religieuse 24 La Semaine sainte 24 Les sacrements 25 Pauvres mères 25 Pâques 26 Journées religieuses 27 Noël 27 L'eau de Pâques 28 Une histoire 28 Le temps du carême et la tradition 28 La messe du dimanche 29

Commodités d'autrefois s i L'eau douce 32 L'entretien du linge 32 L'hiver était long 32

Les maisons d'autrefois 33 Pas de gaspillage 34 La viande d'autrefois 34 Le courrier 35 Le téléphone 35 Comment on chauffait dans le temps... 36 Pour avoir une maison 36 Tout était fait à la main 37 Se débrouiller 38 L'eau 38 Un souvenir 39 Le service téléphonique 40

Recettes 41 La fabrication du «yeast» 42 La fabrication de la crème glacée 42 Le jambon 42 Le savon 43 Les saucisses au lard 43 Le whisky 44 Le rye et le brandy 44 Le boudin (1933-1936) 45

Vie et éducation d'hier 47 Mon premier travail 48 Quand nous allions à l'école 48 L'eau d'érable 49 La routine 49 L'école 50 L'égalité 51 Les misères de la vie 51 Les petits salaires 52 J'ai changé ma vie 52 Une vie bien remplie 53 Mon travail 54 Le chemin de fer d'Embrun 55 Ma passion : le cinéma 55 Les feux follets 56 Les quêteux d'autrefois 57 Inondation à Embrun 57 Les quêteux 58 La femme qui fumait 58 Mon éducation 59

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Les maîtresses d'école 59 Avoir le choix! 60 Un tremblement de terre 60

Maladies et accidents 63 Les médicaments de notre temps 64 Le meilleur sirop pour guérir 65 Gravé dans ma tête 65 La fièvre typhoïde 66 Les infirmes 67 Ma mère 67 La diphtérie 68 Ma maladie infantile 68 La partie difficile de ma vie 69 La chance 71 Souvenirs 71 Au feu! 72 Le déraillement 72 Mon grand-père 73 L'accident de mon fils 73

Famille 75 Les paroles de mon cœur 76 Ma Clara 76 Mes 44 ans 76 Mes petites soeurs 77 Une décision difficile 77 Quatre mariages 78 Mon arrière-grand-père 79 Mon frère, le barbier 80 La femme au travail 80 Contre la famille 81 Ma terre ne vaut rien 82 Une rencontre change ma vie 82 Mon père 83 Ma vie 83

L'amour de parents pauvres 84 Une famille unie 85 La boulangerie de mon père 85 Les études de mes parents 86 Le bonheur et la fierté de ma famille 87 La prison de L'Orignal 87 Une longue vie 88 Émotions 88 Ma famille 89 L'adoption dans le temps 90 La Sainte-Catherine 90 La fierté d'un parent 91 Mon enfance 92 Que de mauvais souvenirs! 92 La grande demande 93 Les exigences des parents 94 L'autorité ou la soumission 94 La décision de mon père 95 L'autorité du père 96

Textes divers 97 Après tant d'années 98 Mon histoire 98 De retour à ma place natale 99 La vie est un combat 100 Un beau voyage 101 Une histoire vraie 101 Ma contribution 102 Mon été 1992 102 Le respect de l'autre 103 Le grand jour 104 Toute une aventure en train 104 Le fromage 105 Le fromage St-Albert 106

Anecdotes 107

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Humour

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Quelle aventure!

J'étais adolescent et nous avions un cheval qui était très nerveux. Un jour, j'avais préparé le cheval avec le «boggie» pour que mon frère et deux de mes sœurs puissent aller à la messe. J'avais mis une bride au cheval et après cette bride, il y avait des «garde-yeux». Mon frère n'aimait pas ça et voulait les enlever. Mes deux sœurs étaient assises dans le «boggie» et étaient prêtes à partir. Tout à coup, des gouttes de pluie se sont mises à tomber. Mes sœurs ont ouvert un parapluie et le cheval a eu très peur. Il est parti à l'épouvante. Nous avons été chanceux que la barrière soit fermée, sinon il serait probablement arrivé un accident à mes sœurs. Quelle aventure!

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Voyage à Hawaï

Ma femme et moi étions en vacances. Nous avions décidé d'aller voir une partie de hockey à Montréal et d'aller à une messe à l'Oratoire St-Joseph le dimanche matin. Le dimanche après-midi en revenant de Montréal en train, ma femme m'a dit : «J'aimerais faire un voyage.» Je lui ai dit : «Dis-moi. Où veux-tu aller ? Je suis en vacances.» Elle a dit qu'elle voulait aller à Hawaï. Les deux bras m'ont tombé. Je lui ai dit : «Je ne peux pas faire ça en deux minutes. Il faut que ce soit préparé d'avance.» Je connaissais un homme du nom de Greenberg qui avait une agence de voyage à Ottawa. Je lui ai demandé de m'arranger ce voyage. Il m'a dit : «Tu ne me donnes pas beaucoup de temps.» Il a trouvé une solution et nous sommes partis.

Étant donné que je travaillais sur les trains, j'avais une «passe» qui me donnait droit à un rabais sur tous mes voyages. Ça faisait cinq jours que nous étions à Hawaï et je n'avais pas vu une seule station, ni

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un chemin de fer. Je n'avais même pas entendu un sifflet de train. Je trouvais ça bizarre. L'homme à qui appartenait l'hôtel était hawaïen et son nom était Yakamatché. Les Hawaïens ont des noms difficiles à prononcer. Je lui ai dit : «Monsieur Yakamatché, ça fait cinq jours que je suis ici et j'ai visité beaucoup d'endroits. Je n'ai jamais vu un chemin de fer ni une seule station. Voulez-vous m'expliquer pourquoi ?» Il m'a regardé avec un gros sourire et il m'a dit en anglais : «Monsieur Henri, où voulez-vous qu'un train aille sur une île.» J'étais bien mal pris là.

En revenant à Ottawa, j'ai revu mon collègue de travail nommé Crawford. Je lui ai demandé si c'était son idée de me dire d'apporter ma «passe» de train à Hawaï. Il m'a répondu : «Gerry, la même chose m'est arrivée et je voulais te le faire à toi aussi.»

Gédéon Henri Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Un mauvais tour

J'avais environ seize ans. J'aimais beaucoup jouer des tours. C'était le soir de PHalloween. Mon cousin Lionel et moi avions monté un chaudron de fer sur le toit de la maison de notre voisin. C'était un nommé McDonald. Nous avions placé le chaudron à l'envers sur le chapeau de la cheminée.

Imaginez-vous la surprise de la cuisinière, M™ McDonald, quand elle a voulu allumer son poêle à bois et préparer le déjeuner...le lendemain matin.

Croyez-moi, c'est une vérité, c'est une histoire vécue.

François Major Villa St-Albert St-Albert

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Pauvre bœuf

Un jour, quand j'étais plus jeune, je regardais les vaches dans le champ. Je me suis aperçu qu'il y avait un bœuf qui suivait une vache. Quand le bœuf s'est approché de la barrière, j'ai décidé de lui lancer une roche. La roche l'a frappé entre les deux yeux et le bœuf s'est écroulé par terre. J'étais certain que le bœuf était mort. Quelques secondes après, il s'est relevé. Je n'ai jamais rien dit à mon père.

Alcide St- Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

La boîte à bois

La deuxième maison que mon père a achetée avait deux étages. En dessous de l'escalier, il y avait une grosse boîte pour y mettre le bois.

Un jour, mes parents s'étaient absentés pour quelques instants et c'était ma sœur de huit ans environ qui nous gardait. Nous étions sept enfants. Tout à coup, nous avons vu un quêteux qui se dirigeait vers la maison. Ma grande sœur a pensé que nous pourrions nous cacher dans la boîte à bois. Ma plus jeune sœur d'un an et demi ne voulait pas entrer dans la boîte à bois.

Après un bout de temps, entassés dans la boîte, nous avons commencé à trouver le temps long. Nous avons dit à ma petite sœur de pousser le taquet, car nous nous étions embarrés. À force de jouer avec le taquet, elle a fini par l'ouvrir. Nous étions bien contents. C'était toute une mésaventure.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

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Histoire ou légende

J'ai été élevé dans la peur pendant toute ma jeunesse. Certaines personnes du village avaient installé une cage en fer à l'intersection du chemin. Ils disaient que lorsque des personnes mourraient, ils mettraient leurs ossements dans la cage. Quand les gens passeraient sur ce chemin, la cage se mettrait à branler. Tout le monde avait peur. Les gens ont fait pression pour que la cage soit enlevée.

Toutes les semaines, mes oncles et les voisins venaient jouer aux cartes. Souvent, ils contaient des histoires qui nous faisaient redresser les cheveux sur la tête. Un bon soir, j'étais assis à la table et la fenêtre était derrière moi. Quand l'histoire a été finie, je suis resté figé là. Je n'étais pas capable de me retourner vers la fenêtre. Il a fallu que deux personnes de la famille viennent m'enlever de là. Il a fallu aussi que quelqu'un couche avec moi, car j'avais trop peur. Quels souvenirs!

Rhéal Brisson Centre J. Urgel Forget Embrun

Une bonne blague à l'école

Quand j'allais à l'école, j'avais un ami qui s'appelait Gaétan. Il y avait aussi un garçon qui s'appelait Albert. Nous étions tous du même âge, mais Albert était plus gros et grand.

Un jour, la maîtresse qui était une sœur nous a demandé une question de géographie. Le vendredi, nous avions toujours une leçon de géographie. Elle a demandé à Albert : «Quels sont les trois premiers navires à venir au Canada ?» Albert s'est levé pour répondre à la question. Moi j'étais en arrière de lui et je lui ai dit à voix basse : «La grande marmite, la petite marmite et le marmiton.» Albert a répété la même chose. La sœur a dit : «Où as-tu pris cette réponse ?»

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Il a dit : «C'est lui», en me pointant du doigt. La bonne réponse était : La Grande Hermine, la Petite Hermine et l'Émérillon. La sœur s'est mise à rire. Elle l'avait trouvée bien drôle.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

L'erreur de ma mère

Une nuit, il y avait un gros orage avec beaucoup d'éclairs et de tonnerre. Ma mère a eu très peur pour nous. Alors, elle a pris la bouteille qui contenait l'eau bénite et en a lancé quelques gouttes sur les lits où nous étions tous couchés. Le lendemain matin, elle s'est rendu compte qu'elle avait fait un dégât énorme. La bouteille qu'elle avait prise dans la noirceur était la bouteille d'encre. Vous pouvez vous imaginer le scénario.

Marie Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

Les framboises

Un matin, ma grand-mère m'a demandé d'aller aux framboises, car elle attendait de la visite et elle voulait faire des tartes. Je suis parti au champ pour cueillir des framboises. En m'en revenant, je me suis «enfargé» et j'ai renversé mon plat de framboises. J'ai été obligé de tout ramasser. À midi, j'avais très faim. Je voulais manger mon lunch, mais je me suis rendu compte que mon chien l'avait mangé. En arrivant à la maison, ma grand-mère trouvait que je n'avais pas beaucoup de framboises. Je lui ai expliqué ce qui s'était passé. Elle

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m'a demandé si j'avais mangé mon lunch, je lui ai dit non, car elle avait oublié de faire manger le chien et le chien avait mangé mon lunch. J'ai eu toute une journée.

Gérard Bissonnette Villa St-Albert St-Albert

Ma cerise

La veille de mon mariage, tous les oncles de ma femme étaient à la maison. Moi, je n'étais pas supposé être là. Mon frère et moi étions allés chercher la fille d'honneur au train et j'étais pas mal «réchauffé».

J'avais un oncle agaçant et il me disait: «Tu te maries demain et tu ne nous as rien dit encore.» Je leur ai dit que j'aurais aimé lui montrer ma cerise. Ils se demandaient bien ce que je voulais dire. Je suis monté sur la table et leur ai montré ma tache de naissance en forme de cerise sur ma jambe. Ils ont bien ri.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

Un malentendu

Mon oncle et moi conduisions la même auto. Un samedi soir, nous avions tous les deux une sortie à St-lsidore; mais pas au même endroit. Alors, mon oncle a stationné l'auto et est parti à sa réunion. Moi, je suis parti de mon côté. Nous avions tous les deux un ensemble de clé pour la même auto.

Pendant la soirée, mon oncle est allé reconduire quelqu'un chez lui. Il s'était dit qu'après, il ramènerait l'auto au même endroit pour

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je puisse la prendre. Pendant qu'il était parti, je suis sorti et je me suis rendu compte que l'auto n'était pas là. J'ai donc pensé qu'il était reparti à la maison. Alors je suis retourné à la maison moi aussi. Quand mon oncle est revenu, il a mis l'auto au même endroit pour moi et il est revenu à la maison lui aussi.

Le lendemain matin, qui était un dimanche, je suis sorti pour prendre l'auto dans le garage. Je me suis rendu compte que l'auto n'était pas là. Alors je suis rentré à la maison et j'ai dit à mon oncle que nous nous étions fait voler notre auto. Nous nous sommes rendu compte que tous les deux nous avions laissé l'auto à St-lsidore. C'était bien drôle.

George Poirier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Quelle gêne!

Ma femme avait une sœur qui était religieuse. Elle demeurait à la maison-mère à Ottawa. Parfois, elle venait passer deux semaines de vacances à Embrun, dans sa famille.

Une fois, toute la famille était rassemblée pour une messe. Plusieurs personnes étaient assises dans le chœur. En voulant se rendre dans le chœur, madame Dignard a manqué une marche et sa perruque est tombée. Plusieurs se sont mis à rire, y compris son frère qui était religieux et sa sœur qui était religieuse. Elle était très gênée.

George Poirier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

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Quel souvenir!

Chaque année, les religieuses venaient à l'église. Elles nous donnaient des petites banques en carton pour ramasser des sous pour les pauvres. Moi, j'en avais ramassés beaucoup.

Une bonne journée, en partant pour l'école, j'ai vu mes amies qui mangeaient des bonbons. J'ai décidé de prendre les sous dans la banque en carton. Je suis allée m'acheter des bonbons. Ma sœur s'est rendu compte que la banque était vide et elle l'a dit à mon père. Mon père est venu me chercher à l'école et j'ai eu la plus grosse raclée de ma vie. Je n'ai jamais oublié cette raclée.

Irène Hébert Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Un bon tour

Je travaillais à la manufacture de soie à Comwall. Un jour, le contremaître m'a envoyé travailler sur le toit avec un homme. Cet homme qui aimait jouer des tours travaillait à la manufacture juste depuis trois jours. Nous étions en train de travailler près du tuyau où était le sifflet. Il y avait des fissures à réparer sur ce tuyau. Je savais que le sifflet sonnait deux coups à sept heures et cinquante-cinq minutes, pour que les employés poinçonnent leur carte, et un coup à huit heures. Juste avant que le sifflet sonne, j'ai dit à cet homme que je devais descendre chercher un balai. Ce n'était pas vrai. Je voulais juste rire de sa réaction quand le sifflet sonnerait. Je n'ai pas oublié ce bon tour.

George Poirier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

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La chasse aux œufs

Le jour de Pâques, mon père avait emmené mes deux frères à notre maison de campagne. Il leur avait dit de l'attendre pendant qu'il irait à la messe. Il avait organisé une chasse aux œufs qui devait avoir lieu après la messe.

Pendant que mon père était à la messe, mes frères ont changé les œufs pour des vieilles pommes qu'ils avaient trouvées. Mon père n'a pas trouvé la blague très drôle, car c'était un homme très autoritaire. Il pratiquait le proverbe qui dit : «Ne raisonne pas quand tu parles à ton père.»

Betti LeBlond St-Joseph Nursing Home Rockland

La belle fille

Une très belle fille aux cheveux roux et longs était montée dans le train. Elle s'était installée confortablement. Elle avait incliné le fauteuil pour bien dormir, car c'était un voyage de nuit pour North Bay. Elle ne savait pas que ses cheveux étaient pris entre deux sièges. Quand nous sommes arrivés à North Bay, l'homme qui ramasse les billets a crié : «North Bay, next.» La fille s'est levée et en se levant, elle a perdu sa perruque qui est restée prise entre les deux bancs. Elle est devenue blême. Elle était très humiliée. Tout le monde riait aux éclats. Avec la perruque, elle était très jolie. Sans la perruque, ce n'était pas la même jolie fille. Elle a ramassé sa perruque et s'est faufilée au plus vite pour sortir de la gare. Je n'oublierai jamais ce voyage.

Gédéon Henri Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

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Coutumes religieuses

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Dans le temps de Pâques

Chez nous, le Vendredi saint, il n'y avait pas de déjeuner, un petit dîner et juste un morceau de pain le soir. Aussi, nous nous faisions toujours couper les cheveux à trois heures. C'était une tradition autant que le jeûne.

Le samedi soir, à minuit, il fallait arrêter même si nous étions en train de danser ou de fêter. Le dimanche aussi, nous n'avions pas le droit de danser. Il n'y avait pas de mariage dans le temps de Pâques. Le matin de Pâques, nous nous lavions avec de l'eau de Pâques. Il fallait la prendre avant le lever du soleil, à rebours du courant.

Après, c'était la messe. En revenant de la messe, un bon repas composé d'œufs et de jambon nous attendait. Nous passions une belle journée.

Agnès Cloutier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Les règlements de la religion

Autrefois, les règlements de la religion étaient très sévères. Les prêtres ne voulaient rien écouter et rien comprendre. Si nous leur disions que nous avions empêché la famille, nous pouvions être excommuniées. Ils jugeaient sans savoir ce que c'était une vie de famille. S'ils avaient eu une famille, ils auraient compris. C'est peut-être pour ça qu'il y a tant de personnes qui sont révoltées contre la religion. Il y a des femmes qui ont eu neuf ou dix enfants et qui ont été excommuniées pour avoir empêché la famille. C'est désolant et triste.

Thérèse Couture Résidence Lajoie St-Albert

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Le Jour de l'an

La plus grande fête de l'année pour nous, c'était le Jour de l'an. Nous accrochions nos bas de laine et nos parents y mettaient une pomme, une orange et des bonbons clairs. C'était vraiment du spécial pour nous. Nous allions à la messe et, après, nous pouvions prendre ce qu'il y avait dans notre bas. Pour nous taquiner, nos frères mettaient des charbons ou des pelures de patates dans nos bas et prenaient ce qu'il y avait dedans. Quand nous nous en rendions compte, nous nous mettions à pleurer. C'était drôle pour eux, mais pas pour nous.

Texte collectif Résidence Lajoie St-Albert

La période des fêtes

Nos soirées des fêtes commençaient à Noël et finissaient au Mardi gras. Tous les samedis soirs et les dimanches soirs, nous avions des soirées qui duraient jusqu'à cinq ou six heures du matin. C'était une période très fatigante. Un soir, c'était chez une famille, l'autre soir, c'était chez une autre. Chacun notre tour. Nous dansions, mangions, fêtions une grande partie de la nuit. C'était le seul temps de l'année où nous pouvions nous défouler. Les familles étaient très unies dans ce temps-là. Tout le monde s'entraidait.

Texte collectif Résidence Lajoie St-Albert

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Les messes en latin

Jusqu'aux années 60, la messe était dite en latin, sauf le sermon. Les messes pouvaient durer d'une heure à une heure et demie. C'était très long, car on ne comprenait rien. On savait par contre que c'était comme ça partout, alors on écoutait sans rien dire. Quand le pape a changé la loi pour que la messe soit dite en français au lieu d'en latin, tout le monde était bien content.

Thérèse Couture Résidence Lajoie St-Albert

Les fêtes

Dans le temps, Noël était une fête religieuse. Nous nous couchions jusqu'à ce qu'il soit l'heure de nous préparer pour la messe de minuit.

En revenant de la messe de minuit, nous prenions un petit goûter avant de nous recoucher, mais il n'y avait pas de fête. Aujourd'hui, beaucoup de jeunes ne pensent pas que Noël est une fête religieuse. Ils ne pensent qu'aux cadeaux.

Au Jour de l'an, c'était la grosse fête. Nous fêtions longtemps. Il y avait le dîner, le souper, la danse et les chansons. Le matin en nous levant, nous demandions la bénédiction à notre père. Après, nous pouvions ouvrir nos cadeaux. Nous recevions une orange, une pomme, des «peanuts» en écailles et des bonbons clairs. C'était assez rare que nous avions autre chose que cela. Mais nous étions très heureux.

Texte collectif Résidence Lajoie St-Albert

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La messe

Nous allions à la messe tous les dimanches sans exception. Pendant la semaine, nous y allions une fois. Nous faisions le train des vaches et après nous marchions jusqu'à quatre milles pour aller à la messe. Les personnes âgées y allaient chaque jour. C'était une routine pour elles. Elles commençaient leurs journées par la messe. Nous n'avons jamais été poussés à aller à la messe. Nous savions qu'il fallait y aller. Le dimanche, l'église était pleine, mais pendant la semaine nous n'étions pas aussi nombreux.

Rita Montreuil Résidence L'Érablière Limoges

Sévérité des prêtres

Autrefois, les prêtres étaient très sévères. Ils ne voulaient pas que les femmes empêchent la famille. Les prêtres disaient que c'était un péché. Il ne fallait pas laisser nos filles seules en compagnie de garçons, car le prêtre ne voulait plus nous donner l'absolution. Il fallait que nos filles soient toujours chaperonnées.

Un dimanche, à la messe, le prêtre est venu vers moi et m'a dit : «Tu diras à ta mère de poser des manches longues à ta robe.» Nous obéissions à la lettre car, pour nous, le prêtre était le plus instruit et le plus important. Il n'y avait aucune liberté pour la femme dans ce temps-là. Nous étions soumises. Malgré tout, je n'aimerais pas vivre la vie d'aujourd'hui, parce qu'elle est stressante. J'aimerais mieux revivre la vie que j'ai vécue, car nous vivions au jour le jour.

Texte collectif Résidence L'Érablière Limoges

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Être religieux ou religieuse

Dans ce temps-là, il y avait toujours au moins un enfant dans chaque famille qui devenait religieux ou religieuse. Souvent, c'était le plus vieux ou la plus vieille de chaque famille qui s'engageait dans cette voie-là. Souvent, les filles vivant une grosse peine d'amour voulaient entrer au couvent pour oublier. Dans certaines familles, les parents obligeaient la fille ou le garçon. Dans d'autres, on ruinait la vie du jeune, car ce n'était pas du tout sa vocation.

Il y a les sœurs cloîtrées et les sœurs qui s'occupent des pauvres, des malades et des œuvres. Plusieurs personnes trouvent que les sœurs qui aident ceux qui en ont besoin ont plus de valeur que les sœurs cloîtrées. Les sœurs cloîtrées vivent longtemps. Elles n'ont pas eu d'enfants. Elles ne connaissent pas le stress d'aujourd'hui, car elles sont isolées.

Aussi, il y a des personnes qui se rendent compte qu'elles aimeraient devenir religieuse ou religieux après avoir eu une famille. Il y a plusieurs religieux et religieuses qui ont la vocation jusque dans l'âme, car ils se donnent toute leur vie.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

La Semaine sainte

Durant la Semaine sainte, il fallait se priver davantage. Nous ne mangions qu'une rôtie avec un café noir le matin. Au souper, nous n'avions pas de dessert. Ma mère nous obligeait à porter des vêtements foncés. Les Jeudi, Vendredi et Samedi saints, nous devions marcher deux milles pour nous rendre à l'église. Beau temps, mauvais temps, il fallait nous rendre à l'église. Certaines personnes perdaient connaissance. Le Samedi saint, les paroissiens coupaient

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un gros tonneau de bois et le remplissaient d'eau. Le prêtre bénissait l'eau et se promenait dans la grande allée en aspergeant les paroissiens. L'eau bénite servait pour les malades, les mourants et aussi lors de grosses tempêtes. Nous aspergions de l'eau bénite pour nous protéger contre la foudre. À Pâques, nous allions chercher de l'eau de Pâques dans un ruisseau d'eau claire. Il fallait ramasser l'eau avant le lever du soleil.

Apparemment le matin de Pâques, le soleil danse quand il se lève. Nous nous lavions dans l'eau ou nous la buvions. Cette eau nous protégeait contre les maladies et les épreuves. L'eau de Pâques se conserve indéfiniment.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

Les sacrements

Dans notre temps, nous pouvions recevoir trois sacrements la même année : la première confession, la première communion et la confirmation. La cérémonie de la confirmation avait lieu tous les quatre ans, car l'évêque ne venait pas chaque année. Si notre première communion et notre première confession avaient lieu la même année où l'évêque venait, nous recevions trois sacrements la même année. C'était de grandes et longues cérémonies.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

Pauvres mères

Étant donné que le prêtre ne voulait pas que les femmes empêchent la famille, les femmes se sentaient toujours coupables. Ce

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n'était vraiment pas drôle pour les femmes qui tombaient enceintes facilement.

Ma mère est morte à l'âge de 36 ans en mettant au monde son neuvième enfant. Elle suivait les règles de l'Église. Le prêtre l'aurait excommuniée si elle avait empêché la famille.

Tout le monde allait à la confesse chaque semaine. Les femmes avaient peur d'y aller. Si les prêtres avaient eu le droit de se marier et de fonder une famille, ils auraient compris. Ils auraient changé cette loi immédiatement. C'est pourquoi aujourd'hui beaucoup de gens sont révoltés contre l'Église. Maintenant le contrôle des naissances est accepté par l'Église, mais prendre la pilule ne l'est pas.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

Pâques

Le temps de Pâques commençait toujours le mardi soir. Ce soir-là, il y avait toujours une veillée. Il fallait que ça se termine avant minuit, car à partir de minuit, c'était le mercredi des Cendres. À partir de ce jour, c'était le carême. Il ne fallait plus être en fête. Le mercredi des Cendres, il fallait manger des crêpes pour ne pas avoir la gale. À Pâques, nous mangions du jambon comme aujourd'hui. Nous allions aussi chercher de l'eau de Pâques.

L'eau de Pâques était miraculeuse pour beaucoup de maladies. Les gens y croyaient beaucoup.

Texte collectif Résidence Notre-Dame Embrun

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Journées religieuses

Dans notre temps, la journée de l'Halloween n'était pas une fête pour nous. C'était une journée de pénitence. Nous devions prier pour les morts. Ce soir-là, c'était bien dangereux de sortir seul. Nous ne pouvions pas rencontrer nos amis.

Le 2 novembre, les catholiques ne pouvaient pas labourer. Tous disaient que les morts étaient sur la terre. Si on labourait quand même, on verrait le sang couler et on verrait aussi des têtes de morts. Il n'y avait que les Anglais qui labouraient cette journée-là.

Ella Gibeault Résidence Notre-Dame Embrun

Noël

Le jour de Noël, ma mère nous demandait toujours : «Qui est né le jour de Noël ?» Elle faisait une crèche avec des petits anges, la Sainte Vierge et saint Joseph. Elle couvrait l'Enfant Jésus jusqu'à Noël. Elle enlevait la couverture à Noël puis elle nous disait : «C'est Jésus-Christ, le fils de la Vierge Marie et le fils adoptif de Joseph.»

L'ange Gabriel est apparu à Marie et lui a demandé si elle voulait être la mère de Jésus. Alors Marie a enfanté l'Enfant Jésus. Elle l'a mis au monde avec saint Joseph, père adoptif de Jésus.

Jésus-Christ a fait beaucoup de miracles sur la terre. Avant de mourir sur la croix, Jésus nous a donné sa mère comme mère sur la terre. Il nous a donné à Marie pour qu'elle nous aide. Jésus est mort sur la croix entre deux voleurs. Un des voleurs lui a dit : «Vous, vous êtes innocent et vous n'avez pas péché.»

Jeanne D'Arc Sabourin St-Joseph Nursing Home Rockland

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L'eau de Pâques

À Pâques, il fallait prendre l'eau avant le lever du soleil et à rebours du courant. L'eau de Pâques était très bonne pour les rhumatismes, les yeux et bien d'autres choses. C'était miraculeux. Un enfant faisait de l'eczéma et avec de l'eau de Pâques, il a été guéri. L'eau de Pâques ne se gâte pas, elle reste toujours belle. Elle est bonne à boire.

Texte collectif Villa St-Albert St-Albert

Une histoire

Le premier novembre, c'était la Toussaint. C'était une journée religieuse importante. Le lendemain, il ne fallait pas travailler, car c'était la journée des morts. Une histoire disait qu'un homme avait travaillé cette journée-là à labourer son champ de patates. Son champ était devenu un champ de roches. Nous n'avons pas été témoin de cet incident, mais plus tard nous avons vu le champ de roches. Un champ qui est bien labouré s'appelle un guéret.

François Major Villa St-Albert St-Albert

Le temps du carême et la tradition

Dans notre temps, le temps du carême était plus sévère qu'aujourd'hui. Nous ne mangions pas entre les repas. Nous ne mangions pas de viande le mercredi et le vendredi. Nous ne

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mangions pas de bonbons. Il fallait dire notre rosaire tous les soirs. Le jour de Pâques, il y avait une tradition qui n'a pas changé : le

bon jambon avec des œufs dans le sirop. Le jambon n'était pas apprêté de la même façon qu'aujourd'hui. On prenait un bidon à lait et on faisait un feu dans le fond. On mettait des cotons d'épis de blé d'Inde séchés dessus pour contrôler la cuisson. Après on attachait la fesse de jambon avec une broche. On entrait une barre de métal à travers la broche. Le jambon pendait dans le bidon et était retenu par la barre de métal qui traversait l'ouverture du bidon d'un bord à l'autre. On mettait un linge dessus pour que la fumée reste à l'intérieur. Ça prenait environ deux jours pour que le jambon soit bien fumé. Quand nous le mangions, il avait un goût délicieux.

François Major Villa St-Albert St-Albert

La messe du dimanche

Quand nous étions jeunes, nous allions à la messe tous les dimanches à dix heures. Avant la messe, nous devions aller à la confesse. La messe durait de deux heures à deux heures et demie dépendant du curé. Toute la famille se rendait à la messe dans une voiture tirée par un cheval. Nous étions six en tout. Pauvre cheval, il devait trouver ça difficile.

Texte collectif Résidence L'Érablière Limoges

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Commodités d'autrefois

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L'eau douce

Dans le temps, pour laver le linge et se laver, nous prenions de l'eau douce. L'eau douce, c'était de la neige que nous entrions en grosse quantité le soir pour la laisser fondre toute la nuit. Il fallait en entrer chaque soir. Il y avait toujours une certaine quantité d'eau qui chauffait dans le «boiler» ou sur le poêle. Pour boire, on prenait l'eau du puits.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

L'entretien du linge

Pour laver, nous prenions la planche à laver. Ceux qui avaient plus d'argent, avaient un moulin à laver avec un bras sur le côté pour brasser.

Le lundi, c'était la journée du lavage et nous lavions toute la journée. Nous étendions le linge dehors, même durant l'hiver. Alors, ça ne séchait pas vite. À la fin de la journée, nous entrions le linge gelé et nous retendions dans la maison pour qu'il finisse de sécher. Souvent, il fallait attendre au lendemain pour plier le linge. Le lendemain, nous passions encore une journée complète à repasser. Chaque semaine, c'était à recommencer.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

L'hiver était long

Autrefois, l'hiver était beaucoup plus long qu'aujourd'hui. Le froid était plus intense et nous avions moins de commodités. Nous ne

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sortions pas souvent. Pour nous déplacer, il fallait le faire à pied ou dans des voitures tirées par des chevaux. Il n'y avait pas d'ensembles de neige comme aujourd'hui. Si nous voulions être bien habillés, nous mettions des bas de laine, des combinaisons et des bottes de caoutchouc par dessus nos souliers. Nous nous amusions dehors beaucoup plus longtemps que les jeunes d'aujourd'hui. Nous étions heureux même si nous n'étions pas riches. Aujourd'hui, les enfants n'en ont jamais assez. Plus ils en ont, plus ils en demandent. Quand nous leur parlons de notre enfance, ils n'en reviennent pas. Ils sont contents de ne pas avoir grandi à ce temps-là. Nous leur répétons que nous étions heureux.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

Les maisons d'autrefois

Les maisons d'autrefois n'étaient pas comme aujourd'hui. Il n'y avait pas d'isolant. Il n'y avait que deux rangées de planches de bois.

Pour chauffer, il n'y avait que le poêle à bois. Durant les nuits d'hiver, nous étions contents quand nous couchions en bas, car le poêle ne chauffait que le bas de la maison. Si nous couchions en haut, nous prenions plusieurs couvertures et nous ne voulions pas nous lever durant la nuit. Nous avions hâte au matin pour aller aux toilettes et nous réchauffer près du poêle. Quand nous avions de la visite à coucher, nous installions un lit de plumes au-dessus de la cuisine. Nous avions un peu plus de chaleur. Nous ne connaissions pas autre chose que cela; alors, nous étions bien à notre façon.

Blanche Servais Résidence L'Érablière Limoges

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Pas de gaspillage

Dans notre temps, chaque famille avait des vaches. La plus grosse ferme pouvait avoir dix vaches. C'était beaucoup dans ce temps-là. Tout le monde était cultivateur et se contentait de peu. Nous faisions notre beurre, notre pain et notre fromage. Nous préparions nos morceaux de viande nous-mêmes. Nous faisions du beurre en grosse quantité et nous le vendions aux marchands.

Avec un séparateur, nous séparions le lait de la crème. Nous transvidions la crème dans une grosse baratte pour en faire du beurre. Nous faisions du fromage avec le lait de beurre. Quand le lait de beurre était sûr, nous le faisions cuire jusqu'à ce qu'il se brise en morceaux. Ça ressemblait au fromage cottage d'aujourd'hui. Nous étions tous pauvres, mais nous ne manquions pas de nourriture.

Texte collectif Résidence L'Érablière Limoges

La viande d'autrefois

La viande d'aujourd'hui n'est pas aussi bonne que la viande que nous avions autrefois. Les animaux étaient bien engraissés. Il n'y avait pas les produits chimiques d'aujourd'hui.

On leur donnait de l'avoine. Si l'animal n'est pas tué de la bonne façon et qu'il est gardé longtemps au réfrigérateur avant d'être vendu, il ne goûtera pas ce qu'il goûtait dans notre temps. Nous assaisonnions notre viande avec du clou de girofle, de la cannelle, de l'ail ou des oignons. Pour faire boucaner une fesse de cochon, nous l'enveloppions dans du coton à fromage et nous la mettions dans la cheminée pendant huit jours. La huitième journée, nous la tournions

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de bord et nous attendions huit autres jours. C'était la boucane qui montait dans la cheminée qui fumait la viande. La viande était délicieuse.

Texte collectif Résidence L'Érablière Limoges

Le courrier

En 1902, les timbres coûtaient 10 chacun. On distribuait le courrier à cheval et non en voiture tirée par un cheval. La première année, le courrier se distribuait une fois par jour. Le salaire du facteur était de 19 $ par année. Alors le facteur avait un autre emploi, car il ne pouvait pas vivre avec ce petit salaire. Un peu plus tard, le courrier passait deux fois par jour et le salaire du facteur était de 360 le voyage. Alors, ce n'était pas beaucoup plus. La plupart des emplois ne rapportait pas de gros salaires.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Le téléphone

En 1902, le service téléphonique a commencé à Embrun. La centrale faisait fonctionner les lignes téléphoniques de six heures le matin jusqu'à neuf heures le soir. Durant la nuit, personne ne pouvait téléphoner car les lignes étaient fermées. Cela a fonctionné de cette façon jusqu'en 1909. Cette année-là, nous avons eu notre propre centrale à Embrun. La première année, cinq familles s'y sont abonnées : les avocats, les médecins et le curé. En 1920, à Embrun,

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nous étions 145 personnes abonnées. En 1972, il y avait 2 000 abonnés. Le nombre d'abonnements augmentait vite.

Le téléphone est une très bonne invention. Il facilite beaucoup de choses.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Comment on chauffait dans le temps

Quand nous étions jeunes, tout le monde chauffait au bois. Dans la cuisine, nous avions un poêle qui réchauffait toute la maison. Imaginez les femmes qui cuisinaient près du poêle. Il y avait une grosse chaleur dans la cuisine. Par contre, à l'autre bout de la maison ou au deuxième étage, il faisait froid.

Quand nous nous couchions la nuit, nous espérions ne pas avoir à sortir de sous les couvertures, car nous étions gelés. Autant que possible, nous restions dans la cuisine jusqu'au coucher le soir. Pour se réchauffer le plus possible avant de se coucher, il fallait se couvrir de bonnes couvertures chaudes. C'était ce qui se passait dans le temps, alors on s'y habituait.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Pour avoir une maison

Les personnes qui pouvaient acheter une maison sans emprunter à la banque ou de quelqu'un d'autre étaient très rares. Souvent, on ne pouvait pas emprunter à la banque. Par contre, il fallait absolument avoir une maison, car les familles étaient nombreuses. Alors, on louait

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comme c'est encore le cas aujourd'hui. Nous avons déjà acheté une grande maison avec 90 acres de

terrain pour quatre mille dollars. Nous avons payé un certain montant par mois jusqu'à ce qu'elle soit payée au complet.

Les gens qui possédaient une maison n'étaient pas nombreux. C'était la plus grande richesse que les personnes pouvaient avoir dans ce temps-là.

Éva Jérôme Bourget Nursing Home Bourget

Tout était fait à la main

Notre famille était pauvre. Ma mère savait coudre. Elle tricotait en se servant de la laine de nos moutons. Nous n'avons jamais manqué de nourriture. Dans une ferme, il y a tout ce qu'il faut pour bien se nourrir. Par exemple, en tuant un cochon, nous avions du lard pour longtemps. Nous préservions le reste de la viande dans des pots. Les vaches donnaient du bon lait frais et les poules donnaient des œufs.

Le savon que nous faisions était fait de graisse animale et d'arcanson. Il n'y avait pas de taches qui résistaient à ce savon. Nous avions un ensemble pour la semaine et un ensemble pour le dimanche. Bien souvent, nous étions deux à partager le même manteau propre le dimanche. Alors, nous allions à la messe chacun notre tour. Nous étions toujours en famille pour les travaux quotidiens. Et malgré la pauvreté, nous étions tous heureux ensemble.

Éva Jérôme Bourget Nursing Home Bourget

Page 37: Souvenirs : textes écrits par des apprenantes et des

Se débrouiller

Quand on manquait de chandelles et d'huile à lampe, on utilisait une «chienne». On mettait de la graisse de grillade dans une petite soucoupe. On prenait un gros bouton à quatre trous et on passait une corde dans le bouton. On imbibait le tout avec de la graisse. On mettait le feu à la corde et la «chienne» nous éclairait comme une lampe.

Jeannette Cousineau Résidence Notre-Dame Embrun

L'eau

Autrefois, il n'y avait pas l'eau courante dans les maisons comme aujourd'hui. Nous avions des pompes pour pomper l'eau. À certains endroits, l'eau du puits était tellement dure que si nous mettions du savon dedans, ça ressemblait à du lait. Aussi quand il pleuvait, nous ramassions l'eau de pluie au moyen de gros barils. C'était l'eau la plus douce que nous aurions pu trouver. Nous lavions le linge et nos cheveux avec cette eau. Aujourd'hui, tout le monde aurait peur de se servir de l'eau de pluie.

Nous ne lavions pas tous les jours, car à la ferme, nous ne nous changions pas chaque jour. La journée du lavage, nous lavions longtemps et nous étendions notre linge dehors même durant l'hiver. Quand il était bien essoré, nous retendions dans la maison pour qu'il finisse de sécher. Évidemment, il n'y avait pas les commodités d'aujourd'hui.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

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Un souvenir

En 1957, je demeurais à la ferme de ma grand-mère Gravelle à Plantagenet. En ce temps-là, j'avais de bons yeux - pas comme maintenant. Je coupais le bois pour le chauffage. En quinze jours, je faisais quinze cordes de bois.

Je me souviens d'un automne en particulier. Je m'étais rendu dans le bois à un mille de chez nous pour abattre un arbre avec une sciotte et une hache. J'avais choisi un érable de 40 pieds de haut, trop proche des autres arbres. En tombant de biais, l'arbre a accroché la clôture et a cassé un poteau. Je n'étais pas heureux de ça. Pour me sortir de ce pétrin, j'ai dû retourner à la maison chercher le cheval et une chaîne de 25 pieds de long. Quelle misère! La tête de l'arbre était prise dans les autres arbres. J'ai travaillé pendant un long moment afin de l'ébrancher pour pouvoir le sortir de là. Avec ma chaîne et la force du cheval, j'ai pu rendre le tronc au «roadway» (lieu où l'on pile le bois avant de le scier). J'étais très fier de ma journée.

Quand je suis revenu à la maison, ma grand-mère, qui ne connaissait rien de l'histoire et de mes efforts, m'a fait des reproches parce que j'étais en retard pour le souper. Je m'étais bien promis que la prochaine fois, je reviendrais à temps pour le souper!

Gérard Bissonnette Villa St-Albert St-Albert

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Le service téléphonique

Quand le service téléphonique a commencé, nous étions seize sur la même ligne. La compagnie de téléphone avait assigné un nombre de sonneries à chaque famille. Quand le téléphone sonnait, nous savions si c'était pour nous ou pour une autre personne. C'est arrivé plusieurs fois que nous avons écouté quand même, car c'était intéressant de tout savoir ce qui se passait chez les voisins.

Texte collectif Résidence LÉrablière Limoges

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Recettes

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La fabrication du «yeast»

Du «yeast», c'est des bactéries. La levure est bonne d'année en année. Les gens faisaient de la levure avec de l'eau de patates. Ils la laissaient fermenter une journée entière. Le soir, ils faisaient leur levain et le lendemain, ils faisaient le moulage.

Alméria Bourdeau Résidence Notre-Dame Embrun

La fabrication de la crème glacée

Pour faire de la crème glacée, nous prenions de la crème épaisse. Nous la mettions dans une chaudière entourée de glace et de gros sel. Ça prend absolument du gros sel pour que la crème glacée devienne dure. Il ne fallait pas arrêter de brasser. Si nous faisions les étapes de la recette comme il le fallait, la crème glacée était délicieuse.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

Le jambon

Aujourd'hui, quand nous apprêtons le jambon, nous ajoutons de la moutarde, de la cassonade ou d'autres assaisonnements. Autrefois, les cochons n'étaient pas engraissés de la même façon que de nos jours. Alors, nous n'avions pas à ajouter quoi que ce soit, car le jambon était plus frais et avait un très bon goût. Pour garder la

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viande fraîche, nous la mettions sur la glace. Nous mettions du brin de scie sur la glace. Le brin de scie empêchait la glace de fondre.

Texte collectif Résidence Notre-Dame Embrun

Le savon

Pendant l'année, je conservais dans une chaudière tout le gras que je trouvais. Au printemps, je préparais un bon feu dehors. Je mettais tout le gras dans une grosse marmite et je mettais un peu d'eau pour ne pas que ça colle. J'ajoutais du caustique pour que ça fasse du bon savon. Il fallait toujours brasser pour ne pas que le mélange renverse.

Le soir, je l'enlevais du feu et je le laissais refroidir jusqu'au lendemain matin. Le lendemain, j'ajoutais encore du caustique. Je prenais juste le dessus et je coupais des morceaux de savon. Ce qui restait en dessous, dans le chaudron, c'était de la potasse. C'était bon pour laver les planchers de bois. Ça ressemblait à du jello. C'était le caustique qui faisait que le linge se lavait bien. Il devenait blanc et propre.

Laurence Gagné Résidence St-François Casselman

Les saucisses au lard

Après avoir fait boucherie, ma mère prenait une ou deux fesses de lard cru et les passait dans le petit moulin à viande. Ensuite il fallait ajouter du sel, du poivre, de l'oignon haché fin et aussi des épices au goût, comme la cannelle et le clou.

Page 43: Souvenirs : textes écrits par des apprenantes et des

Il fallait gratter les tripes du cochon sur une planche spéciale avec un couteau peu tranchant pour ne pas les percer. Ensuite on les tournait à l'envers pour les gratter et les laver plusieurs fois.

On attachait le bout de la tripe. Avec un entonnoir à gros bec et à l'aide de nos doigts, on remplissait la tripe. Ensuite on l'a tournoyait à différents endroits. Elle était prête à faire cuire.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

Le whisky

Étant donné que nos parents n'avaient pas le droit de faire leur boisson, ils la faisaient en cachette durant la nuit. Ils se servaient d'un gros «drum» pour faire leur mélange. Dans ce mélange, ils mettaient du blé d'Inde, du «yeast», des patates et de la mélasse. Ils laissaient fermenter le tout durant toute une nuit. Ce mélange donnait un très bon whisky.

Le rye et le brandy

Pour faire du bon rye ou du bon brandy, on prenait du sucre brun un peu brûlé, pas trop, et on le mettait dans le whisky blanc. Ça donnait une belle couleur dorée et c'était bon.

Nos parents disaient que le meilleur remède pour la grippe était le gin.

Texte collectif Résidence Notre-Dame Embrun

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Le boudin (1933-1936)

Moi, j'ai souvent ramassé le sang des cochons que mon père et mon oncle Euclide avaient abattus. On brassait le sang continuellement dans un poêlon en ajoutant une poignée de sel pour que le sang ne fige pas. Ceci se faisait pendant que mon père saignait le cochon en lui transperçant le coeur avec un couteau à boucherie. Après avoir tout extrait le sang, ma tante rassemblait les ingrédients pour le reste de la recette. N'ayant pas de boyaux en plastiques comme aujourd'hui, il fallait se servir des tripes intestinaux du cochon. Les tripes du petit intestin étaient trempées dans l'eau salée. Ensuite on les grattait avec un couteau non tranchant, jusqu'au moment où les tripes étaient transparentes et propres pour recevoir le mélange de sang. Voici comment on faisait le boudin :

2 livres de panne fraîche de porc (la belle graisse blanche de porc, d'après ma tante Guildée)

4 gros oignons hachés fins 5 à 6 cuillères à soupe de sel 1 cuillère à thé de poivre frais, moulu 1 à 2 cuillères à soupe de cannelle 5 à 6 tasses de sang de porc 1 tasse de lait riche, mais pas de la crème

1. Couper la panne (graisse) en petits dés et faire fondre à demi.

2. Mettre quelques cuillerées de gras fondu dans un poêlon, y ajouter les oignons hachés très fins. Laisser cuire sans qu'ils ne deviennent colorés. Ajouter les autres ingrédients.

3. Mélanger le tout dans une grande terrine. Remplir les boyaux avec le mélange. Ficeler le boudin à la longueur voulue. Plonger les boudins dans une grande bassine remplie d'eau bouillante. Retirer du feu et laisser pocher 30 minutes. Au fur et à mesure que les boudins montent à la surface du liquide, les piquer avec une épingle afin d'en faire sortir l'air qu'ils contiennent. L'air ferait

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éclater les boyaux. Bien égoutter les boudins, bien les couvrir avec un linge pour les empêcher de trop se dessécher. Garder au froid, bien couvert.

4. Couper le boudin en longueurs de deux pouces. Pour le cuire, mettre un peu de graisse ou de beurre dans une poêle de fonte et faire cuire à feu moyen, lentement. Ne les tourner qu'une seule fois. Retirer du poêle lorsqu'il est cuit, y ajouter trois ou quatre pommes non pelées, coupées en tranches épaisses et faire cuire de huit à dix minutes en brassant souvent. Verser autour du boudin.

Rose Lefebvre Résidence de Pauline Scott Bourget

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Vie et éducation d'hier

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Mon premier travail

À Plantagenet, quand j'ai eu mes vingt ans en 1951, ma grand-mère m'a demandé si je voulais vendre des légumes durant l'été.

Chaque matin, je partais à sept heures pour finir le soir à sept heures et demie. C'était des journées bien remplies. Le soir, quand je revenais, je remettais l'argent à ma grand-mère pour qu'elle le compte. Je faisais des bonnes journées dans ce temps-là. Pendant une semaine je pouvais gagner 60 $. À l'automne, je vendais des poulets et des coqs. J'ai fait ça pendant trois ans. Ma grand-mère était contente.

L'été suivant, ma grand-mère voulait que j'augmente les prix. Moi, je n'étais pas d'accord. J'allais vendre de village en village. Je pouvais marcher jusqu'à trois milles pour me rendre à un village. Étant demi-voyant à ce moment-là, j'aimais bien faire ça pour aider ma grand-mère qui s'occupait de moi, car ma mère travaillait en ville.

Gérard Bissonnette Villa St-Albert St-Albert

Quand nous allions à l'école

Pour nous rendre à l'école, nous avions tous de longs trajets à parcourir. Matin et soir, nous marchions un à deux milles. Il n'y avait pas d'autobus ou d'automobiles comme aujourd'hui, car ça n'existait pas. À marcher comme ça, nous étions en pleine santé. Il n'y avait qu'une seule maîtresse qui enseignait de la première à la huitième année. Alors, il pouvait y avoir de quarante à cinquante enfants de différents âges dans la classe. Dans ce temps-là, c'était une vocation d'être maîtresse. La maîtresse s'occupait de tout, même de mettre le bois dans le poêle. Les plus vieux qui étaient bons en classe lui donnaient un coup de main. La maîtresse préparait aussi les examens

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et les bulletins. Les plus vieux n'avaient pas de récréation. Pendant que les jeunes étaient en récréation, les plus vieux travaillaient dans leurs cahiers pour s'avancer. C'était comme ça si nous voulions apprendre.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

L'eau d'érable

Chaque printemps, on accrochait un seau à chaque érable. La sève tombait dans le seau. On ramassait l'eau et on la transvidait dans un tonneau. On la versait ensuite dans une grande «panne» en tôle et on la faisait bouillir.

Nous aimions goûter à la trempette. La trempette, c'est l'eau d'érable retirée du feu juste avant qu'elle devienne du sirop. C'était délicieux. Il faut que l'eau bouille toute la journée pour devenir un bon sirop. Il faut ramasser 40 gallons de sève pour faire un gallon de sirop. Une partie de l'eau d'érable s'évapore toujours.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

La routine

Autrefois, nous avions toujours des journées bien remplies. Par contre, nous n'avions pas de stress comme aujourd'hui. Nous nous levions très tôt le matin. Nous allions traire les vaches avant d'aller à l'école. Nous aidions aussi en revenant. Les mères s'occupaient de la maison, du lavage et des repas. S'il restait du temps, elles aidaient

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pères dans les champs ou dans le jardin. Le soir, quand tout était ramassé et que les enfants étaient

couchés, elles se mettaient à coudre et cousaient longtemps. Elles ne dormaient pas plusieurs heures, car elles étaient très occupées. C'était des journées bien chargées. Nous vivions au jour le jour, sans stress. La vie est une routine, mais elle peut être agréable si on le veut.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

L'école

Lécole était tellement loin que parfois, nous faisions l'école buissonnière. Nous devions marcher quatre milles juste pour s'y rendre.

Alors, quand la température ne le permettait pas, nous pouvions passer une semaine sans aller à l'école. Quand nous retournions à l'école, nous étions en retard dans nos travaux. Le midi, nous avions un petit lunch et à quatre heures, nous retournions à la maison. C'était très long de retourner à la maison, car nous étions fatigués de notre journée.

Il ne faut pas oublier que le matin, avant de partir pour l'école, il fallait faire le train des vaches. Quand nous arrivions à l'école, nous nous mettions tous ensemble autour du poêle à bois pour nous réchauffer. Nous allions à l'école même le samedi. Car le samedi, c'était la catéchèse de persévérance. Et le dimanche, à jeun, il fallait traire les vaches avant d'aller à la confesse et à la communion. C'était des journées bien remplies.

Alexina Forget Résidence L'Érablière Limoges

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L'égalité

Dans le temps, les hommes ne faisaient rien qui concernait les travaux de la maison. Ils ne changeaient pas la couche du bébé, même si la femme était occupée. Ce n'était pas bien vu qu'un homme aide sa femme. Si l'homme était en train de souper et qu'il lui manquait quelque chose, c'était la femme qui se levait et qui le servait. La femme était très soumise. Les seuls métiers qu'une femme pouvait faire, c'était maîtresse d'école, religieuse ou mère de famille.

Beaucoup d'eau a coulé sous les ponts depuis ce temps-là. Aujourd'hui, les femmes font le choix qu'elles veulent. Elles travaillent ou elles restent à la maison. Si elles travaillent, les hommes font leur part dans la maison et s'occupent des enfants. Nous suivons le fil des ans.

Juliette Beauchamp Résidence L'Érablière Limoges

Les misères de la vie

Quand mon mari est venu au monde, sa mère est décédée des suites de l'accouchement. Son père et ses frères ne l'ont jamais aimé. Ils l'ont toujours blâmé. Son père le battait souvent. Il a donc toujours été nerveux. Tous ses frères ont eu une terre sauf lui. Son unique sœur s'est mariée à trente-cinq ans, car elle n'avait pas le choix. Elle devait s'occuper de ses frères jusqu'au dernier.

Quand la guerre s'est déclarée, mon mari a dû y aller. J'ai rencontré mon mari après la guerre, en 1925. Nous avons eu dix enfants, six filles et quatre garçons. J'aimais beaucoup regarder mes enfants jouer dehors. C'était ma joie! Aujourd'hui, la plus jeune a 46 ans.

Nous sommes déménagés souvent, mais toujours dans la ville d'Embrun. J'étais très soumise. Je ne disais jamais rien. Il partait quand il voulait, sans me le dire et quand il revenait, je ne posais

Page 51: Souvenirs : textes écrits par des apprenantes et des

jamais de questions. Je le laissais faire. C'était sa façon de s'évader car il avait eu une enfance tellement difficile. J'ai eu une vie très compliquée avec cet homme. Il est mort d'une crise de cœur il y a vingt et un ans.

Dora Bourdeau Résidence L'Érablière Limoges

Les petits salaires

Dans ce temps-là, les salaires étaient très petits. Nous vivions une très grande pauvreté. En faisant du ménage dans les maisons, nous pouvions gagner de neuf à douze dollars par mois. Même les femmes qui devenaient maîtresses d'école ne gagnaient pas cher.

La maîtresse d'école enseignait de la première à la huitième année. Les élèves étaient tous dans la même classe. Aussitôt qu'elles se mariaient et qu'elles avaient des enfants, les maîtresses d'école cessaient de travailler. Celles qui continuaient étaient rares. Quelques femmes retournaient travailler quand les enfants étaient tous mariés ou partis de la maison familiale.

Texte collectif Résidence L'Érablière Limoges

J'ai changé ma vie

Je me suis mariée à 24 ans. À cause des études et du travail de mon mari, nous voyagions beaucoup. Mon premier enfant est né aux États-Unis, mon deuxième à Ottawa, mon troisième à Québec et mon quatrième en Afrique.

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Un jour, je me suis rendu compte qu'il fallait que je me prenne en main et que je fasse autre chose que juste l'entretien de la maison. Je voulais faire un métier que j'aimerais et qui serait valorisant sans jamais oublier l'amour que j'avais pour mes enfants. Je suis retournée aux études au Collège Algonquin pour apprendre le métier que j'avais toujours voulu faire, agente de voyages.

Mais j'avais un mari qui avait des idées bien arrêtées. Nous avions des problèmes de dialogue. Étant donné qu'il ne voulait rien entendre et rien comprendre, j'ai demandé le divorce. Le divorce n'était pas fréquent à ce temps-là. Les enfants n'ont rien dit contre mon retour aux études, car ils savaient que quand j'avais une idée dans la tête, j'allais jusqu'au bout. Pendant ce temps, mon mari a été envoyé en Afrique pour son travail pendant un an. Je pensais qu'un an c'était assez pour qu'il se fasse manger par les cannibales. Je me suis trompée. Il est revenu à la fin de cette année-là sans problème. N'ayant pas de revenu, je ne pouvais subvenir aux besoins des enfants. J'ai dû laisser les enfants vivre chez leur père.

J'ai fait le métier d'agente de voyages pendant quinze ans. J'ai atteint le but que je visais.

Betti LeBlond St-Joseph Nursing Home Rockland

Une vie bien remplie

Je suis allé à l'école jusqu'en quatrième année. J'étais bon en calcul, car j'aidais la maîtresse pour certains problèmes. Après ma quatrième année, j'étais assez vieux pour travailler à la ferme. Quand je travaillais chez les habitants, je gagnais 15 $ par mois. Plus tard, j'ai appris le métier d'ouvrier. J'ai été ouvrier toute ma vie.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

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Mon travail

J'ai commencé à travailler chez ma cousine à l'âge de douze ans. Elle avait cinq enfants et elle gardait son père.

Ma cousine travaillait à leur magasin. Moi, je prenais soin de ses enfants et je tirais la vache. J'ai travaillé là à peu près un an. Après, j'ai travaillé chez un autre cultivateur. J'ai fait ça un bon bout de temps. Je faisais l'ouvrage de la maison, car la famille avait six enfants dont un bébé.

À toutes les deux semaines, j'allais faire un tour dans ma famille. J'ai travaillé comme ça jusqu'à l'âge de dix-sept ans. À ce moment, j'ai travaillé dans une manufacture pour la finition du linge. J'ai travaillé là durant treize ans, jusqu'au jour de mon mariage, à l'âge de 29 ans. Mon mari ne voulait pas que je travaille en dehors de la maison. Je demeurais sur une ferme à Embrun et je me suis mariée à Cornwall.

Mon mari était chauffeur de «boiler» à la manufacture de coton. Un jour, il est tombé malade et s'est fait enlever une partie de l'estomac. Il ne pouvait plus travailler et il était au lit. Chaque jour, je lui donnais son bain et lui donnais à manger. Alors, je me suis mise à garder des jeunes en pension. La mère d'une jeune fille que je gardais en pension ne m'a payé que le premier mois. J'ai décidé de la garder quand même. Je l'ai gardée jusqu'à son mariage. Elle est décédée le 14 janvier 1992. Elle avait 50 ans et demeurait à Rochester, dans l'état de New York. Elle a eu huit enfants. Il y en a sept vivants. Sa plus jeune a quinze ans.

J'ai toujours demeuré à Cornwall. J'ai vécu seule dans ma grande maison pendant une vingtaine d'années. Maintenant ça fait trois ans que je suis à la Villa St-Albert et j'aime ça. Maintenant je suis vieille, car j'ai 88 ans.

Clara Brisson Villa St-Albert St-Albert

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Le chemin de fer d'Embrun

Il fallait absolument avoir un train à Embrun pour envoyer les produits ou la marchandise comme le foin, le fromage et les animaux dans les autres pays.

Le curé Forget s'en est mêlé, car il était bon pour améliorer les choses et faire évoluer le village. La compagnie des chemins de fer a décidé de fournir 10 000 $ pour commencer les travaux du chemin de fer. Elle offrait aux propriétaires habitant le long du trajet prévu pour le chemin de fer, quatre à six dollars l'arpent. Il fallait assez large de terrain pour le chemin de fer (150 pieds de large). Ça donnait beaucoup d'emplois pour les hommes d'Embrun et des alentours. Les travaux se sont terminés en 1924.

Le train faisait le trajet Ottawa, Embrun, Cornwall et New York. Il y avait aussi un train pour les passagers, deux fois par jour. En 1927, il y a eu le premier déraillement, mais ça n'a pas fait trop de dégâts. L'évolution du train a toujours continué.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Ma passion : le cinéma

J'ai commencé à fumer quand j'étais très jeune. Je fumais en cachette. Un jour, ma mère a trouvé mes cigarettes et m'a dit : «Hélène, tu as fumé ?» J'ai répondu : «Non maman». Mais elle savait bien que c'était moi. J'ai fumé jusqu'à l'âge de 31 ans.

Vers l'âge de huit ans, quand j'allais à l'école et que la maîtresse me posait des questions, je ne savais jamais les réponses. Elle me battait chaque jour. Le matin, elle m'envoyait à genou dans le coin jusqu'à quatre heures. Avant de partir, elle me reposait la même question. «Qui t'a mise au monde ?» Je répondais : «C'est ma

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mère.» Elle était très fâchée, car elle voulait que je lui réponde que c'était le bon Dieu.

Le matin, l'école commençait à neuf heures. Je disais à ma mère que je devais partir de bonne heure parce que j'avais des choses à faire à l'école. Je partais avec mon amie. En passant, nous mettions nos livres sous la galerie et nous partions pour le cinéma. Je m'en allais au cinéma français à Ottawa, car je demeurais à Hull dans ce temps-là. Le cinéma était sur la rue St-Patrick. Après avoir traversé le pont qui sépare Hull et Ottawa, ce n'était pas loin. Je demeurais sur la rue Montpetit à Hull. J'ai fait ça jusqu'à l'âge de douze ans, puis j'ai laissé l'école. Vous pouviez me demander le nom de tous les théâtres dans ce temps-là et je pouvais vous les nommer. Il y avait le Capitol, le Vendôme, le Français, le Rideau et le Regent. J'aimais bien les films anglais.

J'ai toujours demeuré à Hull. Ça ne fait que quinze ans que je suis à St-Albert. J'ai déménagé à St-Albert pour prendre soin de mon beau-père. Je me suis mariée deux fois. Le premier mariage a duré 23 ans et le deuxième a duré 21 ans. Le deuxième mariage a été un enfer. J'ai été malheureuse et aujourd'hui si je suis malade, c'est à cause de lui. Je l'avais marié par pitié. Mais mon premier mari, je l'ai bien aimé. Quand il est décédé, j'ai été bien triste.

Hélène Sabourin Résidence Lajoie St-Albert

Les feux follets

Dans ce temps-là, les terres n'étaient pas défrichées. Alors au fur et à mesure que les terres étaient défrichées, les gens les vendaient.

À un certain endroit, les défricheurs se sont aperçus qu'il y avait du gaz dans la terre. S'ils allumaient une allumette, le feu prenait au

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gaz. Si le feu éclatait, tout brûlait sur son passage. Alors les hommes qui fumaient viciaient leurs poches avant de se mettre au travail.

Rhéal Brisson Centre J. Urgel Forget Embrun

Les quêteux d'autrefois

Dans notre temps, nous appelions les religieuses, des quêteuses. Elles passaient toujours de foyer en foyer pour quêter de l'argent pour les pauvres.

Le vrai quêteux dans ce temps-là était épeurant. Quand nous le voyions arriver près de la maison, nous nous cachions. Il était mal habillé et sale. Nous avions peur de nous faire enlever comme dans l'histoire de Pierre Cholet que l'on nous racontait. Un quêteux les avait enlevés et les avait vendus. C'était très épeurant. Nous ne voulions pas rester seuls à la maison.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

Inondation à Embrun

En 1944, il y a eu une inondation à Embrun. L'eau passait par dessus le pont St-Jacques. Il y avait plusieurs fermes et plusieurs maisons qui étaient inondées.

L'inondation a commencé pendant la nuit. Les vaches ont été obligées de nager jusqu'au bord, car l'endroit où étaient les vaches se situait au bord de l'eau. Ça s'est passé au printemps, au temps de Pâques. Le courant était tellement fort qu'il a détruit le pont en l'emportant avec lui.

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Les élèves du secondaire qui demeuraient de l'autre côté de la rivière devaient traverser en chaloupe pour venir à l'école. Ils ont réparé le pont temporairement juste pour les piétons. Entre-temps, ils ont construit un nouveau pont juste à côté. Il y avait deux autres chemins par lesquels nous aurions pu passer, mais c'était de très longs détours.

Texte collectif Résidence Notre-Dame Embrun

Les quêteux

Les quêteux qui venaient chez nous étaient des hommes qui venaient de l'Ouest canadien. Ils se cherchaient du travail. Ils n'étaient pas méchants, mais ils n'étaient pas gênés non plus. Ils venaient se coucher dans la grange sans demander la permission. Ils pouvaient même manger des œufs de poule et boire du lait des vaches. Parfois mon père les invitait à coucher dans la maison, mais il les surveillait pendant la nuit. Il y avait plus de quêteux en campagne qu'en ville.

Texte collectif Résidence Lajoie St-Albert

La femme qui fumait

Dans le temps, une femme qui fumait était mal vu. Même si la femme était mariée, il fallait qu'elle fume en cachette. Dans un couple, c'était juste l'homme qui fumait. Tout le monde trouvait qu'une femme qui passait dans la rue avec une cigarette à la bouche avait l'air vulgaire. Dans le temps, il y avait tellement de préjugés contre la

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femme. Même si aujourd'hui la femme peut fumer, il y a plus d'hommes qui fument que de femmes.

Texte collectif Résidence Lajoie St-Albert

Mon éducation

J'ai commencé l'école aux États-Unis. Je ne savais pas un mot d'anglais. Quand je suis arrivée en troisième année, l'enseignante me trouvait trop avancée. Alors, on m'a mise en quatrième année. Rendue là, on a changé d'idée. J'ai dû redescendre en troisième. Je suis allée à cette école jusqu'en cinquième année. Après, je suis revenue au Canada.

Arrivée au Canada, je ne suis pas retournée à l'école. Je me suis mise à travailler avec mon père. J'avais douze ans et j'ai commencé à bûcher du bois de corde avec mon père infirme. L'hiver, nous apportions notre lunch pour le dîner. Pour nous réchauffer, mon père nous faisait un petit feu et nous nous faisions des toasts sur ce feu. Je ne me rappelle pas d'avoir eu froid.

Ella Gibeault Résidence Notre-Dame Embrun

Les maîtresses d'école

Dans le temps, à peu près le seul métier acceptable pour une femme était celui de maîtresse d'école.

Les femmes commençaient à enseigner assez jeunes. Quand elles avaient l'âge de se marier, elles continuaient rarement à

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enseigner. Il y en avait seulement quelques-unes. La plupart des maîtresses d'école dans ce temps-là étaient sévères. J'ai le souvenir d'une maîtresse d'école tellement sévère qu'elle se servait de tout ce qui l'entourait contre nous.

Texte collectif Résidence Notre-Dame Embrun

Avoir le choix!

Si nous avions le choix entre la vie d'aujourd'hui ou la vie d'autrefois, nous choisirions la vie d'autrefois sans hésiter. La vie d'aujourd'hui n'a pas de sens. C'est une course, un stress quotidien. Autrefois, nous nous contentions de peu et nous étions heureux malgré tout cela. Nous avions une vie saine et tranquille. Il faut avouer qu'il n'y avait pas tous les progrès d'aujourd'hui au niveau des soins médicaux, des emplois et des commodités. Mais dans ce temps-là, nous ne connaissions pas autre chose.

Texte collectif Résidence Notre-Dame Embrun

Un tremblement de terre

En 1942, à Cornwall, il y a eu un tremblement de terre que nous n'avons jamais oublié.

Il était environ six heures du matin. Les maisons tremblaient beaucoup. Des briques de la cheminée sont tombées sur le toit de la maison. J'ai eu tellement peur. Quand je me suis fait réveiller par le

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bruit, je me suis mis debout dans le lit ne sachant pas ce qui arrivait. Au début, je pensais que c'était un rêve. J'ai pris ma couverture et j'ai brisé la vitre de la fenêtre. En même temps, le cadran est tombé par terre et a réveillé mon frère. Il a eu assez peur pour avoir une attaque de cœur. Le tremblement de terre n'a duré que quelques secondes, mais il était si fort que personne n'a voulu se recoucher.

Nous avions tous eu très peur. Le dimanche qui a suivi le tremblement de terre, l'église était pleine, car tout le monde avait eu peur de mourir.

Louis Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

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Maladies et accidents

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Les médicaments de notre temps

Quand les enfants avaient une grippe ou un rhume, nous leur faisions une ponce chaude. Nous mélangions ensemble la moitié d'une tasse d'eau chaude, un peu de sucre et un peu de boisson. Pour les frictionner, nous prenions un mélange d'herbages, de la gomme de pin et de la boisson. Pour un mal de gorge, nous leur donnions une cuillerée d'huile à lampe et nous les frottions aussi avec cette même huile. Pour l'appendicite, nous frottions le ventre du malade avec du fumier de vache. Aussi, le médecin disait de mettre du chaud, car il nous affirmait que ça pouvait se passer. Mais aujourd'hui, nous savons bien que mettre du chaud sur un abcès, ça le fait aboutir. Nous avons été chanceux que ça ne tourne pas en péritonite dans bien des cas.

Le médecin qui nous soignait n'avait pas d'étude dans ce domaine. Il avait appris à soigner en allant à la guerre. C'est comme ça qu'il est devenu médecin. Nous avions confiance en lui et il avait quand même appris à bien nous soigner. Quand nous nous cassions une jambe ou un bras, il n'y avait pas de plâtre. Le médecin mettait un bandage bien serré et pour soulager le mal, il donnait un peu de boisson. Quand nous avions mal au ventre, nous y mettions un fer chaud enveloppé dans un linge pour nous soulager. Pour diminuer la fièvre, le médecin mettait des compresses très froides et des tranches de patates sur notre front ou des oignons sous nos pieds. La corne de cheval soulageait le mal de dents. L'ail était bon pour la haute pression. Pour la coqueluche, nous prenions du fumier de mouton. Quand j'avais cinq ou six ans, j'ai connu un homme qui avait un don pour guérir.

Texte collectif Résidence L'Érablière Limoges

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Le meilleur sirop pour guérir

Quand j'étais jeune, j'ai eu une inflammation des poumons. Le médecin me soignait comme il le pouvait, mais je ne guérissais pas. Quand la voisine a vu que j'étais malade comme ça, elle est allée chez elle, me chercher du sirop fait avec de la savoyanne. C'était un sirop fait à la maison.

La savoyanne est une plante jaune qui pousse dans la terre. Ses feuilles sont dentelées. On prenait les racines de ces plantes et on les faisait bouillir. On ajoutait un peu de sucre pour enlever le goût amer.

Il n'y avait pas un sirop de docteur qui soignait mieux que ce sirop maison.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

Gravé dans ma tête

En 1918, ma sœur aînée est morte de la grippe espagnole. Le soir de son enterrement, mon autre sœur plus jeune que moi est morte elle aussi de la grippe espagnole à l'âge de dix-sept ans. Ma mère avait, elle aussi, attrapé cette grippe. Durant le mois de novembre, elle avait tellement de fièvre que sans le savoir, elle est sortie dehors. Elle a sauté dans la «tank» pour les vaches. Il y avait un trou dans la glace, car les vaches allaient y boire. Cela l'avait sauvée.

En 1922, ma mère est morte. Elle était enceinte de son onzième enfant et elle a eu une opération au sein. Elle est morte d'une hémorragie. Pendant son séjour à l'hôpital, un des enfants est mort à la maison d'une inflammation des poumons. Elle est venue le voir à la maison et est retournée à l'hôpital pour mourir. J'avais quinze ans et j'ai donc eu la charge d'élever les enfants, dont un bébé de neuf mois.

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Je n'avais pas beaucoup d'aide. Comme j'étais très jeune et très petite, je me fatiguais jusqu'à perdre connaissance. Mon père ne comprenait pas ça et était très sévère. Il n'était pas méchant avec nous. Mon père était très occupé à la grange et aux travaux de la terre, car nous n'avions pas d'argent. Mon père allait tous les samedis soirs au village pour faire le barbier. Il coupait les cheveux et faisait la barbe aux hommes du village. Une coupe de cheveux ou de la barbe coûtait 250. L'argent était rare. Nous étions très pauvres. J'ai maintenant 86 ans.

Aurélia Legault Villa St-Albert St-Albert

La fièvre typhoïde

À l'âge de seize ans, j'ai eu la fièvre typhoïde. C'est une fièvre qui rend une personne très faible. J'ai passé six semaines au lit. Je n'étais pas capable de me lever la tête pour manger. La seule chose qu'on pouvait me donner, c'était des biscuits soda ébouillantés.

Mes parents s'assuraient que, pendant la nuit, la porte de la cuisine était verrouillée. Car si j'avais réussi à me lever pour manger, j'aurais pu en mourir. Je ne pouvais rien manger qui était sec, comme du pain. Le médecin avait dit que si je mangeais quelque chose de sec, je me crèverais les tripes car elles étaient rendues trop minces.

J'avais attrapé cette fièvre d'un nommé Wawa Brisson à Embrun. Il ne fallait pas aller à la même salle de bain qu'une personne qui avait la fièvre typhoïde. C'est comme ça que la fièvre s'attrapait. Ma mère l'a attrapée deux ans après moi. Elle s'en est sauvée elle aussi.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

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Les infirmes

Dans notre temps, il y avait moins de personnes infirmes qu'aujourd'hui, car les femmes accouchaient à la maison. Si à l'accouchement il y avait une complication, l'enfant était rarement sauvé. Le bébé ne pouvait pas avoir de soins médicaux immédiatement et il n'y avait pas d'incubateur.

Les enfants sauvés qui étaient infirmes ne sortaient jamais. Ils restaient enfermés toute leur vie. Ceux qui étaient infirmes physiquement ne pouvaient même pas aller à l'école pour s'instruire. Aujourd'hui, il y a de l'aide pour les intégrer à une vie normale et saine. Ils vont même à l'école.

À l'époque, plusieurs personnes se mariaient entre cousins et cousines sans s'inquiéter des enfants qu'ils mettraient au monde un jour.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

Ma mère

Nous demeurions à deux milles et demi de Monkland sur une terre de roche. En 1916, en plein cœur d'hiver, c'était froid et il faisait une très grosse tempête.

Ma mère était sur le point d'accoucher. Nous avons dû la transporter à l'hôpital de Cornwall situé à environ 22 milles de chez nous. Le transport s'est fait en «sleigh» et ça a pris trois heures et demie pour se rendre à l'hôpital. Mon père avait fait chauffer des briques pour garder ma mère au chaud, car elle avait beaucoup de fièvre. Il y a eu des complications et ma mère en est morte. Le bébé a survécu jusqu'à l'âge de sept mois et il est mort d'une inflammation des poumons.

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Vous savez, dans ce temps-là, il n'y avait pas de maisons isolées comme aujourd'hui. L'air entrait de partout et c'est comme ça qu'il a attrapé son inflammation des poumons.

George Poirier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

La diphtérie

Mon frère avait cinq ans quand il est décédé de la diphtérie. Quelque temps après, c'est moi qui ai eu la diphtérie. Mais moi, j'ai survécu. Le prêtre était tellement sûr que je mourrais aussi qu'il m'avait rendu visite. Ma mère a eu douze enfants et moi j'en ai eu onze.

Aujourd'hui, j'ai 95 ans. Je m'ennuie, car mes enfants ne me rendent pas visite souvent.

Éva Jérôme Bourget Nursing Home Bourget

Ma maladie infantile

Un bon matin en 1914, j'ai eu très mal aux jambes. J'avais six ans. Plus tard dans la journée, ça s'est passé.

Après le dîner, tous ensemble nous sommes allés chercher du grain avec mon père. Tout à coup, je me suis mis à crier. J'avais très mal au dos. En réalité, c'était ma colonne vertébrale qui n'allait pas bien. Mon père m'a ramené à la maison et m'a couché sur mon lit. Ce mal a duré trois jours. Je ne pouvais pas bouger mes jambes.

Deux semaines après, c'est mon frère qui a eu la même chose. Il ne l'a pas eu aussi fort que moi. Mon père est allé chercher le

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médecin. Mon frère a eu un médicament à prendre. Tous les matins, il fallait faire des exercices pour vérifier si nos jambes pouvaient bouger. Un jour, avec de l'exercice, une de mes jambes a commencé à bouger. Je voyais souvent ma mère pleurer, car elle voulait tellement m'aider. Un soir du mois de janvier, mes parents ont décidé de me coucher toute la nuit, couvert d'une épaisse couche de fumier jusqu'au cou. Ils pensaient que ce serait un bon remède pour guérir ma jambe. Rien à faire; je n'ai jamais guéri. Tous les jours, le médecin venait me frotter la jambe qui était paralysée. Mon frère, lui, était guéri.

Pendant 27 ans, j'ai marché sur une jambe. Ma jambe a allongé, mais elle n'est pas plus grosse que celle d'un enfant de six ans. En 1941, à l'âge de 33 ans, j'ai eu une prothèse. Je n'ai jamais compris pourquoi personne ne m'avait conseillé de porter une prothèse. Des gens m'ont regardé sauter sur une jambe pendant 27 ans. Ma prothèse m'a coûté 125 $. Il a fallu que je me rende à Montréal pour la trouver.

Pendant 43 ans, j'ai travaillé comme mécanicien à examiner des tracteurs. À 64 ans, je me suis marié pour la première fois. La célébration a eu lieu le 16 décembre, durant une très grosse tempête. Il y a déjà dix-neuf ans que nous sommes mariés.

Louis Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

La partie difficile de ma vie

En 1929, j'avais 28 ans et j'avais trois enfants malades. Un des enfants en particulier était plus malade que les deux autres. J'ai demandé à mon mari d'aller chercher le docteur car, dans ce temps-là, le médecin venait à la maison.

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J'avais une fille de quatre ans et demi, un garçon de deux ans et demi et une fille de un an. Le médecin est arrivé et a examiné les deux plus jeunes, car je ne pensais pas que la plus vieille était aussi malade que les autres. Le médecin l'a examinée elle aussi et m'a dit que c'était elle qui était la plus malade, mais ça ne paraissait pas. Il m'a dit de la coucher et que le lendemain matin, de bonne heure, il viendrait me porter un médicament.

Le matin, mon aînée avait beaucoup de fièvre. C'était la fièvre scarlatine. Elle a été malade pendant trois jours et elle est morte. Le médecin avait fait placarder la porte parce que la fièvre scarlatine est une maladie très contagieuse. Nous n'avions pas le droit de sortir et personne ne pouvait venir. Nous avons téléphoné pour avoir un petit cercueil. Mon frère et mon beau-frère sont allés creuser une fosse. Ils sont venus chercher la petite et ils l'ont enterrée. Nous sommes restés un mois enfermés, ne sachant pas si nous perdrions nos deux autres enfants.

Pour que je me repose un peu, mon mari m'a offert d'aller chercher la voisine pour qu'elle prenne soin des enfants. Elle était très gentille et nous la connaissions très bien. À quatre heures, la voisine m'a réveillée. Elle m'a dit que ma fille n'allait pas bien. Elle faisait beaucoup de fièvre. Elle est restée avec une bosse dans le cou. On dirait que la fièvre s'est ramassée là. Quant à mon fils Robert, je lui ai enlevé son linge. La peau venait avec le linge tellement la fièvre était haute. C'était des moments très durs.

Deux mois après, j'ai eu mon quatrième bébé. Nous l'aimions tellement ce bébé-là, que nous lui avons donné le même nom que celui de mon autre fille qui était décédée. Mon mari l'emmenait partout où il allait. Ce sont des moments très difficiles que je n'ai jamais oubliés.

Oliva Brière Villa St-Albert St-Albert

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La chance

Autrefois, des poêles à bois et à charbon chauffaient les maisons. Quand on mettait du charbon, il fallait toujours surveiller. Un gaz pouvait s'en dégager. Ce gaz pouvait endormir tous les gens sans qu'ils s'en rendent compte.

Je me rappelle d'un matin. Il était temps qu'on se réveille, car le gaz que le charbon dégageait commençait à nous engourdir. Mon fils, ma femme et moi avons été chanceux de nous réveiller à temps.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Souvenirs

J'avais quinze ans. En m'en allant à l'école, le voisin m'a frappé avec son auto. J'ai rebondi sur l'auto et en retombant vers l'avant de l'auto, j'ai roulé sur l'aile et ensuite dans le fossé. J'avais des blessures. C'est arrivé un vendredi et je suis retourné à l'école le lundi suivant. Mes blessures ont pris un mois à guérir.

* * * * *

À notre ferme, on avait un chien qui s'appelait Bijou. Des quatre garçons, le chien n'aimait que moi. Il n'aimait pas se faire gronder par mes trois autres frères. Je pouvais l'amener où je voulais.

Rhéal Brisson Centre J. Urgel Forget Embrun

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Au feu!

Nous avions plusieurs chevaux. Alors, nous avions fait plusieurs balles de foins. Nous avions battu tout le foin avec le gros moulin à Navan.

Un soir, vers 9 h 30, le feu a éclaté sur le tas de foin. C'était de la paille folle. Alors mon père a fait débouler un gros tas de foin sur le tas qui était en feu. Mais le feu ne s'est pas éteint. Alors mon père a jeté un autre tas de foin et cette fois, il s'est éteint.

Nous étions bien contents, car nous avions eu très peur de passer au feu.

Alcide St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Le déraillement

En 1974, j'étais conducteur de train. Un soir entre Noël et le Jour de l'an, j'étais à 22 milles d'Ottawa. Nous avions pris deux heures et demie de retard. Il faisait très froid, 28 degrés au-dessous de zéro. Tout à coup, les treize wagons ont glissé dans le fossé. Il y avait 337 passagers. Il n'y a eu aucun mort, car il y avait beaucoup de neige dans le fossé et la neige a amorti le choc. Le train est tombé sur le côté. Une demi-heure plus tard, 24 ambulances sont arrivées. Il y avait une dame qui était enceinte de huit mois et qui ne voulait pas aller en ambulance. Elle voulait continuer son trajet en train jusqu'à Montréal. Il y a eu 24 personnes qui sont allées à l'hôpital.

Quand un train déraille, on envoie un train spécial pour les passagers. Les hommes de sections ont fait une route avec des flambeaux rouges pour se rendre au train. Il n'y a que le wagon des bagages et les deux «engins» qui sont restés sur la «track». Tous

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les autres wagons sont tombés dans le fossé. Le lendemain, je ne suis pas allé travailler, car j'étais très nerveux. J'ai des photos de ce déraillement-là. Je ne l'ai pas oublié.

Gédéon Henri Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Mon grand-père

Mon grand-père Dubé s'est fait couper le bras en travaillant au moulin à scie. Mais après son accident, il a continué à travailler aussi fort qu'avant. Il faisait le train des vaches et coupait son bois. Seul, il pouvait couper deux cordes de bois de pin par jour. Nous avons dû déménager car le gouvernement faisait construire la route 417. Il y a déjà 25 ans de cela. Nous sommes toujours demeurés à Limoges.

Rita Montreuil Résidence L'Érablière Limoges

L'accident de mon fils

Mon fils est un amateur de chasse. Un jour, mon fils et son cousin étaient en train de nettoyer un vieux fusil et tout à coup une balle est sortie. Mon fils a reçu la balle dans le coin de l'œil et il saignait beaucoup. Il ne voyait plus de cet œil. Nous avons fait venir le médecin à la maison. Quand le médecin a examiné l'œil de mon fils, il a dit que c'était urgent qu'il se rende à l'hôpital Hôtel-Dieu de Montréal. Arrivé à l'hôpital, le médecin lui a demandé de lever la tête, mais il n'était pas capable. Il ne le savait pas, mais il avait la méningite.

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Si je me rappelle bien, il avait entre dix-huit et vingt ans. il a été chanceux, car il n'a aucune séquelle de cet accident. Il ne porte même pas de lunettes. Depuis ce temps, il n'a jamais été malade et il s'est marié à 23 ans. Il ne retient pas de son père, car son père est petit. Mon fils mesure six pieds. C'est un homme instruit qui lit beaucoup. Je suis fière de mon fils.

Agnès Cloutier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

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Famille

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Les paroles de mon cœur

Je vous écris une petite récitation que j'ai faite il y a 76 ans. C'était au mariage de mon frère et j'avais neuf ou dix ans.

«À l'aube de ce beau jour de fête, j'ai cherché dans ma tête quels seraient les mots les plus beaux et les plus brillants que mon cœur pourrait vous offrir. Richesse, santé, joie, bonheur sont présents à mon esprit. Alors voilà le cadeau que je viens vous offrir avec la tendresse de mon petit cœur. Que le ciel exauce tous mes vœux et vous garde longtemps heureux.»

Fernande Major Villa St-Albert St-Albert

Ma Clara

Quand j'avais trois ans, ma sœur, l'aînée de la famille, a décidé de devenir une sœur grise. Vous pouvez vous imaginer la peine que j'ai eue. Chaque jour, je regardais par la fenêtre en pensant qu'elle pourrait revenir, ma Clara. Moi qui pensais qu'elle reviendrait. Elle n'est jamais revenue.

Comme j'étais très jeune, je ne me souvenais plus de cet incident. Ce sont mes parents qui me l'ont raconté.

Fernande Major Villa St-Albert St-Albert

Mes 44 ans

Un jour lors d'une grosse tempête, ma mère a décidé d'aller au magasin pour acheter des chemises pour mon père. Elle se rendait au magasin en autobus.

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Elle a demandé à mon père de nous donner à dîner, à ma sœur et à moi quand nous reviendrions de l'église, car nous chantions dans une chorale. Mon père était un peu paralysé depuis treize ans. Quand je suis revenu à la maison, mon père était étendu par terre, inconscient. Alors ma tante m'a dit d'aller chercher le voisin pendant qu'elle téléphonait au docteur et au prêtre.

Quand je suis revenu, on m'a dit que mon père était mort. Ça m'a donné un gros choc. Quand ma mère est revenue à la maison, mon père était déjà parti pour la morgue. Quand elle a su la mauvaise nouvelle, sa pression a monté très haut. J'ai eu peur de perdre mes deux parents en même temps. C'est pour vous dire qu'on ne sait jamais ce que le lendemain nous réserve.

Gérard Bissonnette Villa St-Albert St-Albert

Mes petites sœurs

Ma mère s'est mariée à seize ans. Un an plus tard, elle m'a mis au monde. J'ai été le seul garçon dans la famille. Entouré de trois filles, j'étais heureux et gâté. Mes sœurs prenaient soin de leur François.

François Major Villa St-Albert St-Albert

Une décision difficile

Je suis née en 1910. Je suis la sixième d'une famille de neuf enfants. Ma vie a changé vers l'âge de trois ans. Ma mère est tombée malade.

Dans le temps, on a dit que c'était de la faiblesse. Il a fallu faire

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de gros changements dans nos vies. Au mois d'octobre, elle a écrit aux sœurs de mon père et aussi à son frère qui vivait à Québec. Elle avait quelque chose à leur demander et elle voulait qu'ils viennent la voir. Dans ce temps-là, les services n'étaient pas payés à la piastre. De la bonne volonté, tout le monde en avait. Ils sont donc venus à Montréal pour savoir ce qu'y en était.

Ils se sont rendus sur la rue St-Charles, à Montréal. Il me semble les voir. C'était des parents qui n'avaient pas peur de se retrousser les manches pour aider.

La grande phrase fut dite. La décison a dû être très dure pour ma mère malade et mon père aussi, car elle savait qu'elle allait mourir. Elle voulait que les trois plus jeunes, âgées de cinq ans, quatre ans et treize mois, soient placés dans la famille. Pendant le reste de sa maladie, elle leur prêtait ses enfants, elle ne les donnait pas.

Marie Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

Quatre mariages

Quand ma mère est décédée, je n'avais que huit ans. Plus tard, mon père s'est remarié avec une femme qui avait déjà des enfants.

Lorsque mon père est décédé, ma mère adoptive s'est remariée deux fois. Alors il y a eu quatre mariages dans la même maison. Moi, je me suis marié une seule fois et j'ai eu sept enfants. J'ai un garçon et une fille qui ont eu le cancer et qui sont décédés. Mon garçon n'avait que 28 ans et il a été ordonné prêtre sur son lit de mort.

Josephat Dazé Résidence L'Érablière Limoges

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Mon arrière-grand-père

Mon arrière-grand-père, Vital Potvin, demeurait à Beauharnois. Dans cette ville, il y avait plusieurs Anglais. Un jour, il est entré dans un hôtel pour prendre un verre. Il y avait un gros Anglais qui se prenait pour un autre et qui n'arrêtait pas de déranger mon arrière-grand-père. Mon arrière-grand-père n'était pas un batailleur, alors il est parti. Les amis de mon arrière-grand-père sont partis après lui et lui ont dit : «Ne te laisse pas faire, reviens et affronte-le.»

Il a commencé à bouillir et il est revenu à l'hôtel. L'Anglais a commencé à avoir peur et il est sorti. Mon arrière-grand-père est sorti aussi et ils se sont batailles. C'est mon arrière-grand-père qui a gagné. Après, tout le monde voulait que mon arrière-grand-père se batte contre Jos Montferrand car Jos Montferrand était grand et fort. Jos Montferrand a dit à Vital Potvin : «Toi, tu es fort avec tes mains; moi, je suis fort avec mes pieds. Mais que dirais-tu si on se serrait la main ?»

Un jour, Jos Montferrand était en train de traverser le pont Des Chaudières entre Hull et Ottawa. Les Anglais l'attendaient sur le pont et voulaient le jeter en bas du pont. Un ami français est parti chercher Vital Potvin pour qu'il défende Jos Montferrand. Vital a pris un Anglais par les deux jambes pour se protéger des coups de bâtons des Anglais. Il voulait traverser le pont avec l'Anglais sur lui pour se protéger des batailleurs. Les Anglais ont tenté de jeter Jos Montferrand en bas du pont. Jos Montferrand s'est retenu avec ses mains sur le bord du pont et les Anglais lui ont donné des coups de talons de bottes sur les mains pour qu'il tombe. Vital Potvin est venu l'aider à remonter sur le pont. Il l'a sauvé des rapides. Vital Potvin jettait les Anglais à l'eau comme des billots de bois. Les Anglais étaient à genoux pour lui demander pardon.

Vital Potvin s'est marié et est déménagé à Embrun. Il a eu seize enfants. Après il est déménagé à Maniwaki. Il a eu treize autres enfants. Ma grand-mère me disait qu'elle était la vingt-cinquième. Est-ce que vous saviez qu'auparavant Maniwaki s'appelait «le désert» ?

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À l'âge de 70 ans, mon arrière-grand-père est parti à la chasse. Il est revenu avec deux chevreuils, un dans chaque bras. C'est là qu'il a eu son inflammation des poumons et qu'il en est mort. C'est son petit-fils qui m'a raconté tout ça.

Louis Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

Mon frère, le barbier

Dans ma famille, nous étions dix enfants : neuf garçons et une fille. Tous mes frères travaillaient à la ferme paternelle. Quand ils étaient en âge de se marier, ils s'achetaient une ferme. J'ai un frère, le deuxième de la famille, qui a dû se faire enlever les amygdales et il ne pouvait plus travailler à la ferme. Alors il est parti à Montréal pour apprendre le métier de barbier. Après, il s'est ouvert une «shop» sur la rue Craig, à Montréal. Il avait trois hommes qui travaillaient pour lui. Pour se faire couper les cheveux, ça coûtait 500.

Il a eu cette «shop» toute sa vie. Il est décédé à 71 ans.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

La femme au travail

Dans ce temps-là, une femme travaillait rarement à l'extérieur. Moi, j'ai toujours travaillé à l'extérieur et j'ai eu trois enfants. J'ai enseigné durant sept années et après, j'ai travaillé pour le gouvernement pendant 30 ans. Je me suis déjà demandé si j'avais bien fait.

Peut-être que si je n'avais pas travaillé à l'extérieur, je me serais

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posé la même question. Dans le temps, il n'y avait pas de congé de maternité. Alors je gardais mes vacances pour le temps de la naissance. Je ne pouvais prendre que trois semaines de congé. Ce n'était pas beaucoup. À la naissance d'un de mes fils, j'avais cessé de travailler à la fin du mois de septembre et il est venu au monde le 3 octobre.

J'avais une bonne amie dans le temps qui avait fait six fausses couches. Elle ne pouvait jamais rendre ses grossesses à terme. Étant donné que le couple adorait les enfants, elle nous a offert de garder nos enfants pendant la semaine. Nous allions les chercher le vendredi soir pour la fin de semaine. Pendant la semaine, nous allions les voir souvent. C'était comme une deuxième famille pour eux. Ils étaient très gâtés. Je ne pense pas qu'ils ont souffert de cela. Nous en avons discuté quelques fois. Mon mari est décédé trois ans après que j'ai arrêté de travailler.

Juliette Beauchamp Résidence L'Érablière Limoges

Contre la famille

Ma mère ne voulait pas que mon mari et moi ayions des enfants. Ma grand-mère aussi avait la même opinion. Ma mère a quand même eu deux filles. Il y a douze ans de différence entre ma sœur et moi.

Une fois que ma sœur et moi étions mariées, ma mère ne se mêlait plus de notre vie privée. Moi, j'ai eu trois filles et quatre garçons. Les garçons n'ont pas vécu longtemps. Ma sœur s'est mariée elle aussi. Elle n'a jamais voulu d'enfants. Elle avait la même opinion que ma mère et ma grand-mère.

Rita Montreuil Résidence L'Érablière Limoges

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Ma terre ne vaut rien

Le premier été que ma femme et moi étions mariés, nous demeurions chez les parents de ma femme.

Je travaillais sur la «track» et je ne revenais que le samedi. À la fin d'un été, mon père m'a acheté une terre. J'ai réparé la maison pour y passer l'hiver. L'été suivant, j'ai semé et je n'ai rien récolté de ce que j'avais semé. J'ai vendu mes animaux et je suis allé parler à mon frère.

- Veux-tu ma terre ? - Si j'avais de l'argent, je l'achèterais ta terre. - Si tu me donnes une piastre, je te donne ma terre. - Es-tu fou ? - Si tu veux me donner une piastre, je te donne ma terre.

Il m'a donné une piastre et j'ai attelé mon cheval pour aller changer les papiers en ville. Pour moi, cette terre ne valait rien, car rien n'y poussait. Alors, je me suis trouvé un travail pour gagner un peu d'argent.

René Gagnon Résidence L'Érablière Limoges

Une rencontre change ma vie

Il y avait une soirée dansante chez notre voisin. Mon oncle voulait que j'y aille, mais je ne trouvais pas ça convenable.

J'ai fini par me décider et j'y suis allée. Je n'ai pas regretté, car j'ai rencontré l'homme qui est devenu mon mari. J'ai pris l'habitude d'y aller, en compagnie de ma sœur. J'avais toujours l'espoir de voir cet homme qui m'avait plu. Nous partions toujours ensemble ma sœur et moi. Je me suis mariée à dix-huit ans. J'étais folle n'est-ce pas ? Trois semaines avant le mariage, le père de mon mari est mort. Alors,

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nous sommes allés demeurer avec ma belle-mère. C'était fréquent dans ce temps-là. Plus tard, nous avons eu notre ferme près de celle de mon père. J'ai eu onze enfants.

Diana Amyot Bourget Nursing Home Bourget

Mon père

Mon père était ingénieur pour le C.P.R. Dans ce temps-là, c'était un très bon emploi. Le seul inconvénient, c'était qu'il pouvait partir pour plusieurs jours.

Nous étions cinq enfants. Quand il était à la maison, il s'occupait bien de nous. Nous formions une belle famille. Le chemin de fer passait près de la rivière où nous demeurions. Alors quand mon père passait par là, nous lui envoyions la main. C'était plaisant.

Avec le travail de mon père, nous n'avons jamais eu à déménager. Après chaque voyage qui durait quelques jours, il revenait à la maison. Nous étions toujours très contents de le revoir.

Marie Cécire Bourget Nursing Home Bourget

Ma vie

Je suis allée au couvent Notre-Dame à Ottawa jusqu'à ma dixième année. Aujourd'hui, le couvent n'existe plus. Après, j'ai travaillé à la Banque Provinciale pendant dix ans. Les Banques Provinciales n'existent plus maintenant. Ensuite j'ai travaillé à l'orphelinat St-Joseph pendant cinq ans.

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Nous étions douze enfants. Maintenant il n'en reste que cinq, trois filles et deux garçons. J'ai une sœur qui est religieuse et qui enseigne l'anglais à Hull.

Louise Rinfret Bourget Nursing Home Bourget

L'amour de parents pauvres

Mon père a connu ma mère en «allant travailler». Chaque matin, il partait en bicyclette. Il parcourait dix milles chaque jour. Il a tellement voyagé en bicyclette sur des chemins de terre, qu'il nous a dit que jamais nous aurions une bicyclette.

Il a fréquenté ma mère quelques mois et après ils se sont mariés. Ils étaient très pauvres, mais ils s'aimaient beaucoup. Ils ont eu dix enfants, cinq filles et cinq garçons. Au début, ils ont demeuré dans une très petite maison de dix pieds sur douze pieds, sur le bord de la rivière. Comme meubles, ils n'avaient qu'une table, trois chaises et un lit avec une paillasse remplie de paille. Il n'y avait pas d'eau ni de toilette à l'intérieur. Ils s'éclairaient avec une lampe à l'huile.

Après deux ou trois ans, ils sont déménagés dans une plus grande maison. En six années de mariage, ils ont eu six enfants. Alors ils ont dû déménager encore près de chez mon grand-père. Plus les années passaient, plus la famille augmentait. Alors nous sommes déménagés sur une terre de cent arpents. J'avais six ans. J'ai demeuré là 32 ans.

Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

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Une famille unie

Mon père et ma mère se sont mariés le 23 janvier 1913. Ils ont eu dix enfants. Le premier enfant est venu au monde le 8 décembre la même année. Les autres enfants ont une différence d'âge d'un an et demi, sauf un qui est venu au monde trois ans après l'autre.

Nous étions une famille unie. En hiver, nous faisions des soirées dansantes. Pendant les fêtes, deux hommes s'installaient dans un coin et jouaient du violon. Nous préparions tout ce qu'il fallait pour le réveillon : des boulettes de viande, des patates et des biscuits. Nous avions aussi de la liqueur et de la boisson.

Rhéal Brisson Centre J. Urgel Forget Embrun

La boulangerie de mon père

Je n'avais que quatre ans quand ma mère est morte. Elle est morte pendant son neuvième accouchement. Le bébé est mort deux semaines après sa naissance. Ma mère n'avait que 36 ans.

C'est ma grand-mère qui est venue demeurer avec nous pour aider mon père à s'occuper de nous. Trois années plus tard, mon père s'est remarié avec une femme qui avait deux enfants. Alors, nous étions dix enfants dans la maison, ma grand-mère, mon père et sa nouvelle femme. Nous l'avons appelée maman peu de temps après, car elle était aussi bonne que ma vraie mère. Elle s'est toujours occupée de nous tous.

Mon père était propriétaire d'une boulangerie à Vars. C'était beaucoup de travail. Le matin, mon père se levait à trois ou quatre heures et commençait à pétrir sa pâte. Il préparait du pain pour plusieurs villes. Ma mère l'aidait beaucoup. Dans la famille, il n'y avait qu'eux qui préparaient la pâte. Il fallait toujours peser la pâte

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pour que chaque pain soit du même poids. Nous, les filles, nous nous occupions de mettre les pains au four avec l'aide de grandes baguettes. Nous devions les surveiller et quand ils étaient cuits, nous devions les retirer du four. Pendant qu'ils étaient chauds, nous les badigeonnions de graisse fondue avec un pinceau. Mon père faisait la distribution des pains avec mes frères. L'été, ils la faisaient en camion et l'hiver avec une voiture tirée par des chevaux.

Nous avons eu cette boulangerie jusqu'à mes dix-huit ans. Après nous sommes déménagés à Cornwall.

Simone Richard Résidence Lajoie St-Albert

Les études de mes parents

Ma grand-mère avait une maison de chambres à louer aux étudiants. Mon père en avait loué une, car il venait des Cantons de l'Est. C'est comme ça que mes parents se sont rencontrés.

Ma mère étudiait pour devenir infirmière en pédiatrie. C'était rare dans ces années-là qu'une femme se rendait aussi loin dans ses études. C'était en 1919-1920. Mon père, lui, étudiait pour devenir pathologiste hygiéniste. Ils se sont mariés en 1926. Tout de suite après leur mariage, ils sont partis trois ans à Paris pour poursuivre leurs études. Ils voulaient approfondir leurs études comme il le faut.

Après trois années passées à Paris, ils sont revenus demeurer à Québec, car ma mère était native de Québec. Ils ont eu dix enfants, sept filles et trois garçons. Ils nous ont élevés avec beaucoup d'amour. Nous avons été très heureux.

Betti LeBlond St-Joseph Nursing Home Rockland

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Le bonheur et la fierté de ma famille

J'ai eu la chance de vivre dans le vieux Québec. J'y ai passé toute mon enfance. Nous sommes sept filles et trois garçons dans la famille.

À l'âge de quatre ans, j'ai eu la fièvre scarlatine qui a provoqué une très grosse infection dans une oreille. J'ai dû subir une opération. J'ai porté un bandage sur l'oreille pendant quelques mois. J'avais le rang du milieu dans la famille, ce qui m'a donné le droit à quelques spéciaux de plus. La fierté de mon père était de partir le dimanche avec ses sept filles pomponnées pour une promenade. Ça nous faisait penser à un coq dans sa basse-cour.

Les trois garçons sont arrivés dans la famille en dernier. Comme ils suivaient sept filles, ils étaient portés à parler au féminin sans s'en rendre compte. Ça mettait mon père dans tous ses états. Mais avec le temps, ils ont changé.

Betti LeBlond St-Joseph Nursing Home Rockland

La prison de L'Orignal

Étant donné que ma mère et mon père travaillaient à la prison de L'Orignal, nous demeurions sur le terrain de la prison.

Ma mère travaillait du côté des prisonnières et mon père, du côté des prisonniers. Ils ont travaillé à cette prison pendant à peu près sept ans. Ils ne travaillaient que le jour, car nous étions cinq enfants. Pendant qu'ils travaillaient, nous n'avions pas besoin de gardienne, car les plus vieux des enfants avaient l'âge de garder. À la maison, nous ne jouions pas avec de petits amis. Puisque nous étions cinq, nous jouions entre frères et sœurs.

Pour aller à l'école, nous marchions, car il n'y avait pas d'école

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sur place. Nous n'avions pas des parents trop sévères. Ils décidaient tout ensemble. C'est une expérience assez unique que j'ai vécue. Maman est morte le 4 avril, il y a trois ans. Un soir, elle s'est couchée et elle ne s'est jamais réveillée. Papa est âgé de 92 ans et demeure dans un foyer. Ma soeur Huguette demeure à Pierrefond, Raymond demeure en Alberta et Jean-Claude à Toronto. Ma sœur Huguette s'occupe de moi et de mon père.

Jeanne-D'Arc Sabourin St-Joseph Nursing Home Rockland

Une longue vie

La guerre s'est réglée au mois de novembre 1918. Le 20 janvier 1919, nous nous sommes mariés. Ça fait 73 ans de cela.

Quand je me suis mariée, j'avais 23 ans et mon mari, 26 ans. Le 15 décembre prochain, j'aurai 96 ans et mon mari, 99 ans. C'est une longue vie à deux. J'ai toujours été très heureuse. Je suis fière de mon mari, car il faisait n'importe quoi de ses mains. C'est un homme qui n'a jamais bu et qui a toujours travaillé très fort.

Agnès Cloutier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Émotions

Parfois la joie, la peine, l'émotion se rencontrent au même moment dans la vie. Le 6 mai 1910, mon mari et moi avons vécu ces trois sentiments.

Âgé de onze ans, le petit garçon de ma sœur est venu nous

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porter une lettre dans le milieu d'une tempête de neige. Ma sœur nous demandait de prendre soin de ses deux enfants. Après avoir lu la lettre, nous sommes partis la voir. Quand la tempête de neige s'est calmée, elle est partie pour l'hôpital où elle est morte.

Je venais de perdre ma sœur bien-aimée. J'avais beaucoup de peine. D'un autre côté, mon mari et moi étions heureux. Après quinze années de mariage, nous allions devenir parents. Deux enfants orphelins entraient dans notre vie. L'émotion était si grande que le silence y prenait place. Pas un moment d'hésitation, pas un recul, pas une crainte. Ils faisaient partie de notre vie et pour toujours, comme toutes les belles histoires. Il y a eu de la joie, de la paix et du calme dans notre vie de couple. La famille était complète : un garçon, une fille, le père et la mère.

Aujourd'hui, à l'automne de ma vie, je me penche sur tous ces beaux souvenirs. En regardant mes vieilles photos, je découvre toujours mes sentiments d'autrefois.

Alexina Brisson Résidence Notre-Dame Embrun

Ma famille

Mon père s'appelait Albert et ma mère Claude. C'est à Lemieux dans la province de l'Ontario que Papa et Maman se sont rencontrés et mariés.

Ils se sont mariés le 8 ou 9 avril, un lundi de Pâques. Mon oncle Raphaël qui est prêtre a célébré la cérémonie. C'est lui aussi qui a célébré la plupart des baptêmes dans la famille. Mon oncle Raphaël m'a baptisée le même jour où je suis née, le 13 juin 1926. Mon oncle Aimé avait une fille et c'était maman qui en était la marraine. Elle l'a appelée Claudette qui ressemblait à son nom Claude. La petite n'avait que quatre ans quand sa mère est morte. Ma grand-mère Filiatrault

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est morte à l'âge de 24 ans seulement. Elle est morte d'un cancer ou de l'appendicite. On ne connaissait pas ces maladies dans ce temps-là.

À cause de la mort de ma grand-mère, ma mère, mon oncle Aimé, mes tantes Claire et Anna sont partis demeurer au presbytère, car mon grand-oncle était curé au presbytère à Lemieux. Mon grand-père s'est remarié et a élevé une autre famille.

Jeanne D'Arc Sabourin St-Joseph Nursing Home Rockland

L'adoption dans le temps

La plupart des familles étaient nombreuses et souvent les mères mouraient pendant un accouchement.

Plusieurs familles étaient pauvres, alors le père ne pouvait pas élever les enfants seul. Souvent, les enfants étaient placés chez un oncle et une tante ou chez un couple qui n'avait pas d'enfants. Par contre, ils étaient aimés autant que si c'était leurs propres enfants. Ce qui était le plus triste, c'est que souvent les enfants étaient séparés et que même parfois, ils ne se retrouvaient plus. Ce côté de l'adoption était triste et difficile.

Richard Allard Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

La Sainte-Catherine

Chaque année, mon grand-père Besner fêtait la Sainte-Catherine et tous les enfants étaient invités.

Je me souviens de la veille de la Sainte-Catherine une année, il y

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a 70 ans. Il avait plu et la neige était collante. Le soir, il avait fait très froid. Nous demeurions dans une concession et les chemins n'étaient pas en bonne condition. Comme les chemins n'étaient pas passables en voiture, l'oncle qui m'a élevé a décidé de prendre un «stone-boat» et d'y mettre un siège de voiture à lait. Le tout était tiré par des chevaux. J'étais assis seul en arrière. Je vous dis que ça brassait.

Le jour de la Sainte-Catherine, toute la parenté est venue chez mon grand-père et ils ont bien ri de cela.

George Poirier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

La fierté d'un parent

Les treize premières années de notre mariage, nous avions une ferme et nous étions heureux. Mais la dépression est arrivée. Alors nous avons dû déménager au village.

Le plus vieux de nos enfants s'est toujours souvenu de cette dépression, car il a dû laisser l'école pour travailler. Il n'avait que treize ans. Il allait travailler chez un fermier pour deux dollars par semaine. Je me rappelle qu'en revenant de sa première semaine de travail, il m'a ramené un sac de farine au lieu de s'acheter quelque chose pour lui. J'étais fière de lui, car je me suis rendu compte à quel point il était responsable et raisonnable pour un garçon de son âge.

Je n'oublierai jamais qu'il n'a pas continué l'école. Il a dû nous aider en travaillant.

Agnès Cloutier Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

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Mon enfance

Nous étions une famille de dix enfants. Nous avions une maison à deux étages, mais il n'y avait aucune commodité. Un jour, mon père s'est décidé et s'est mis au travail. Il a installé l'électricité et a rénové la maison au complet. Quand il a eu fini, il a attrapé une pneumonie et il est mort.

Après son décès, nous sommes déménagés à Hammond, juste en dehors du village près du cimetière. Notre maison était une ancienne école que nous appelions l'école rouge. Il n'y avait aucune commodité. Ma mère ne pouvait pas travailler, car elle n'avait pas d'argent pour nous faire garder. Nous recevions un peu d'argent du bien-être social. Nous avions un voisin à la peau noire qui était très gentil. Il a tout rénové et a installé l'électricité et l'eau sans demander un sou. Il a même payé pour le matériel.

Nous sommes demeurés là un an. Après, ma mère est tombée malade. Alors, les dix enfants ont dû être placés en foyer nourricier. Nous étions tous séparés, mais en sachant où était chacun de nous. Tous mes frères et mes sœurs sont à Ottawa. Il n'y a que moi qui suis à Casselman. J'ai habité dans plusieurs foyers nourriciers. Mais le seul foyer nourricier où j'ai été maltraité a été le premier. Il m'en est resté des marques. Après, j'ai été heureux dans les autres foyers.

Richard Allard Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Que de mauvais souvenirs!

Mon père était un soldat. Pendant qu'il était dans l'armée, il a écrit plusieurs lettres à ma mère. Il n'a pas pu rester dans l'armée, car il a fait une crise de cœur.

Ma mère travaillait sur la terre. Je n'ai que de mauvais souvenirs.

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J'avais peur du bonhomme sept heures et du loup-garou. On me disait qu'ils me mangeraient. Mon grand-père prenait un petit fanal et nous faisait peur dans les bois. Si on avait peur, nos frères nous traitaient de farouches. Je lavais les planchers à genoux avec une barre de savon lessive. J'en avais des blessures aux genoux. Je n'ai jamais célébré aucune fête et je n'ai jamais eu un cadeau, même pas une pomme.

Je suis partie travailler en dehors à l'âge de neuf ans. Mais je suis revenue en marchant dix milles, car l'endroit où je travaillais ne me traitait pas bien. À l'âge de treize ans, je suis allée travailler à Ottawa. Je n'ai jamais joué, car j'ai toujours travaillé.

Thérèse Bourgeois Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

La grande demande

Autrefois, c'était très gênant la demande en mariage, que se soit pour la fille ou pour le garçon. Quand le garçon faisait sa demande en mariage au père, souvent toute la famille était autour. Alors le couple était très gêné.

Aujourd'hui, la demande en mariage se fait rarement. Nous pensons même qu'il n'y en a plus. Nous trouvions que c'était une marque de respect. Il nous semble que c'était important de faire la demande comme la tradition le voulait, car la demande en mariage, c'était pour la vie. C'était un engagement l'un envers l'autre.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

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Les exigences des parents

La plupart des familles étaient nombreuses. Dès que le premier enfant venait au monde, c'était déjà décidé. Il deviendrait un religieux ou une religieuse. C'était vraiment injuste, car même si ce n'était pas sa vocation, il n'avait pas un mot à dire. C'était malheureux, car un jour plusieurs se rendaient compte qu'ils n'étaient pas à la bonne place et démissionnaient.

L'avenir du plus jeune était décidé aussi. Il prendrait la ferme en main quand les parents ne pourraient plus s'en occuper. Il y avait une condition cependant. Il fallait qu'il prenne ses parents en pension jusqu'à la fin.

Leurs destins étaient déjà tracés. Dans ce temps-là, c'était la coutume et personne ne se plaignait.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

L'autorité ou la soumission

Dans le temps de nos parents, les femmes étaient très soumises. Elles obéissaient autant que les enfants à l'autorité de l'homme ou du père. Certaines femmes n'ont jamais eu de porte-feuille. C'était l'homme qui allait faire les achats ou qui donnait l'argent exact à sa femme. Il y avait beaucoup de pauvreté dans le temps.

Aujourd'hui, nous pensons que l'autorité et la soumission dans le temps étaient bien tristes. C'était une vie monotone. Pourtant les femmes s'y habituaient. Plusieurs hommes partaient au chantier pour l'hiver. Quand ils revenaient, les enfants étaient gênés envers eux. Ils étaient partis plusieurs mois. C'était comme des étrangers. Quand le père parlait, il n'avait pas à élever la voix ou à taper. Il n'avait qu'à nous regarder. Nous écoutions tout de suite, car son regard voulait tout dire. Il arrivait parfois que nous avions une permission à

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demander et notre mère disait de demander à notre père. Nous préférions ne pas la demander plutôt que de se la faire refuser.

Il y a aujourd'hui des hommes qui sont restés avec cette mentalité. Ils ne sont pas très appréciés.

Texte collectif Résidence St-François Casselman

La décision de mon père

Nous demeurions aux États-Unis et mon père avait un bon emploi. Il avait à voyager souvent.

Un jour, il a dû se rendre à Limoges pour son travail. Il a trouvé le village de Limoges tellement beau que, sans nous en parler, il a acheté une terre.

Quand il est revenu chez nous, il nous a annoncé la nouvelle. Mon père nous a dit qu'il voulait laisser son travail et partir pour la ferme à Limoges. Nous n'étions pas contents, car nous étions plusieurs qui gagnaient de l'argent en travaillant. Ma mère avait aussi deux cousins en pension. Alors, l'argent entrait bien à la maison. En demeurant à Limoges, mon père ne travaillerait que sur la ferme. Il était certain que nous ne trouverions pas un travail tout de suite.

Arrivés à Limoges, l'argent ne rentrait plus. Nous n'avions plus les commodités que nous avions aux États-Unis comme la laveuse pour le linge, l'électricité et une plus grande facilité de trouver du travail. Nous avons trouvé cela très difficile. Mon père, lui-même, a trouvé cela très difficile, mais il ne nous l'a jamais dit. Il allait se vider le coeur chez ma tante.

Yvonne Gagnon Résidence St-François Casselman

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L'autorité du père

Que la famille soit nombreuse ou pas, le père possédait une grande autorité dans chaque famille.

Nous étions très gênés avec notre père, car il partait pour travailler quelques semaines ou même quelques mois. Alors, quand nous avions une permission à demander et que notre père était là, notre mère nous disait de la lui demander. Mais nous étions tellement gênés que nous préférions ne pas lui demander et rester à la maison. Il était comme un étranger pour nous.

Nous aimions notre père, mais le dialogue et les discussions n'existaient pas dans ce temps-là. Tout ce qui régnait, c'était l'autorité.

Yvonne Gagnon Résidence St-François Casselman

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Textes divers

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Après tant d'années

J'avais 89 ans quand j'ai arrêté de fumer. Ça ne fait que quatre ans que j'ai arrêté. J'ai fumé tellement longtemps que je ne peux même pas vous dire le nombre d'années.

C'est mon gendre qui m'a proposé d'arrêter de fumer, car il venait d'apprendre qu'il avait le cancer. Il me restait un paquet et demi. Alors, je suis allée dans ma chambre avec mes cigarettes et je les ai toutes fumées. Quelque temps après, on m'a offert une cigarette et je n'ai pas eu le goût du tout d'en prendre une.

Ella Gibeault Résidence Notre-Dame Embrun

Mon histoire

Mon nom est Aurore Boulard. Je demeure à la Villa St-Albert. Je suis née à Embrun, il y a 86 ans.

J'ai commencé l'école à l'âge de six ans et mon éducation s'est terminée à l'âge de treize ans. Après l'école, j'aidais maman dans la maison. Mes parents étaient fermiers depuis longtemps. Nous avions des vaches laitières et des poules.

Comme les enfants vieillissaient, nous sommes déménagés dans la ville de Cornwall. Dès la première journée, à l'heure du dîner, mon frère m'a dit que si cela m'intéressait, je pouvais travailler à la manufacture de coton. Pour débuter, je gagnais 14 $ par semaine et je n'avais que treize ans. Après quatre ans à cette manufacture, je me suis mariée, le Jour de l'an, avec mon ami d'enfance Albert Mayer. J'avais dix-sept ans. Nous avons élevé neuf enfants et nous en avons perdu deux, dont nous avons gardé le souvenir. Lorsque mon mari Albert est mort à l'âge de 54 ans, j'en avais 52. J'ai été seule pendant cinq ans.

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J'ai rencontré mon deuxième mari, Florent Boulard, lors d'une visite chez mon frère Charles Tessier. C'est un homme avec un grand cœur et bien travaillant. Aujourd'hui mon mari a 81 et moi 86 ans. Nous sommes bien nourris et c'est très bien entretenu à la Villa St-Albert. On passe le temps de loisirs à jouer aux cartes, au bingo et à se raconter des histoires de notre temps.

Aurore Boulard Villa St-Albert St-Albert

De retour à ma place natale

Je m'appelle Oliva Brière. Je suis née à St-Albert, le 19 mars 1901. J'ai donc 91 ans. Je restais dans la huitième concession au bord de la rivière Nation. Ce terrain appartient maintenant à monsieur Fernand Piché.

Plus tard, mon père a acheté 100 arpents de terre dans la septième concession, là où est bâtie maintenant la ferme de Germaine Laflèche. Ma famille a habité là jusqu'en 1915. Cette même année, ma famille est venue rester chez grand-père Pagé dans le village, sur le même terrain où est bâtie la nouvelle résidence de monsieur Jacques Sanche, la Villa St-Albert.

Grand-père avait un lot de terre de cinq acres et une maison bâtie près du cours d'eau qui se trouve aujourd'hui à l'arrière de la Villa St-Albert. Plus tard, la maison a été déménagée dans la neuvième concession. Aujourd'hui, elle est habitée par la famille de Jacques Bourgeois. Grand-père avait planté un verger d'arbres fruitiers. On pouvait y cueillir des pommes, des pommettes, des framboises, des groseilles et des gadelles. C'était de toute beauté! Plus tard, il a donné le terrain à mon père qui devait lui assurer des soins jusqu'à sa mort.

J'ai demeuré à St-Albert jusqu'à mon mariage en 1924. Je suis

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arrivée à la Villa St-Albert le 1 e r janvier 1990. Je suis très bien ici. Je veux dire aussi que je suis fière qu'il y ait une résidence dans le village de St-Albert pour les gens de la place. Ça fait toujours mal au coeur de partir pour une paroisse voisine quand on ne peut pas rester dans notre maison. Quant à moi, je suis bien ici et je voudrais finir mes jours ici, chez nous.

Oliva Brière Villa St-Albert St-Albert

La vie est un combat

Nous nous sommes mariés en 1934. C'était le temps de la crise. Nous n'étions pas riches, mais nous vivions bien. Le Bon Dieu nous a guidés à poursuivre la bonne route. Nous avons gardé notre amour et notre bonheur.

La vie est un combat! C'est avec de la patience et du courage que nous sommes venus à bout de réussir.

Mon mari est décédé il y a trois ans. Ça été pour moi la plus grosse peine de ma vie. Nous avons eu cinq enfants et je les adore. Ils sont bons pour moi. Maintenant j'ai trouvé la maison de mes rêves pour y rester, là où on fait la belle vie.

Je vous encourage à venir vivre avec moi. On est bien accueilli avec un beau sourire et un grand coeur. J'habite dans un château. Là, j'y ai trouvé le bonheur et l'amitié, grâce à Lucie et Jacques Sanche. Un gros merci!

Marie-Anne Paquette Villa St-Albert St-Albert

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Un beau voyage

Il y a plusieurs années, nous avons fait un voyage dans l'Ouest canadien, plus précisément en Alberta. Nous n'avons pas oublié ce voyage, car nous avons vu une aurore boréale. C'était de toute beauté. On nous disait dans le temps qu'une aurore boréale, c'était le soleil qui reflétait sur la mer.

Louis et Marie Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

Une histoire vraie

Pendant les années 1900, un «peddleur» se promenait d'une ferme à l'autre pour vendre du linge. Il est arrivé à une ferme. La femme semblait intéressée, car elle regardait tout le linge qu'il y avait dans la voiture.

Quand elle a fini de tout mettre sens dessus dessous, elle a décidé de ne rien acheter. L'homme est reparti très fâché. Pour se venger, il est revenu plus tard et a enlevé les trois enfants qui jouaient au champ. Il les a attirés en leur donnant des bonbons. Il les a emmenés sur un bateau et les a vendus. On ne les a jamais retrouvés.

Les années ont passé et un jour, le seul survivant des trois enfants, devenu un homme, est revenu dans la région. Il a raconté son histoire à tout le monde, car il avait espoir de retrouver exactement l'endroit d'où il venait. Il était tellement jeune quand il a été enlevé qu'il ne se rappelait pas de quelle ville il venait. Il ne se rappelait pas de la région. C'était triste d'entendre son histoire.

Louis Bourgeois Villa St-Albert St-Albert

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Ma contribution

J'ai travaillé durant toute ma vie pour ma paroisse. J'ai été un des pionniers et fondateurs de la Coopérative agricole d'Embrun. J'ai participé à la fondation puis à la direction de la Caisse populaire d'Embrun. En fait, j'ai été membre de son comité de direction pendant au-delà de 30 ans, soit de 1945 à 1975.

Aussi j'ai été membre de la Coopérative de lin de Casselman. Cette coopérative a rempli un rôle important au début de la Deuxième Guerre mondiale. En 1927, j'ai fondé un syndicat agricole pour l'achat d'un moulin à battre, spécialement utilisé pour le grain de trèfle. C'était une «cash crop» à l'époque. En 1929, j'ai recruté 25 membres, à raison de dix dollars chacun, pour l'achat d'un crible à grains de semence. À l'époque, j'ai gagné plusieurs prix pour mes étalages de semences aussi bien aux expositions locales qu'aux expositions d'Ottawa et de Toronto.

J'ai été membre fondateur de l'Association pour l'amélioration des sols et des récoltes pour les Comtés-Unis de Prescott-Russell. J'ai été conseiller scolaire pour l'école primaire d'Embrun pendant quinze ans, puis conseiller pour l'école secondaire pendant dix-huit ans. Même après ma retraite, j'ai continué à servir en qualité de comptable pour ma paroisse. Maintenant, je suis membre actif de l'Âge d'Or.

Charles-Hubert Bruyère Villa St-Albert St-Albert

Mon été 1992

L'été 1992 a été particulièrement froid et humide. Plusieurs sorties à l'extérieur, prévues par la personne responsable des activités, ont été annulées à cause de la pluie et du mauvais temps. Cependant, une sortie a été particulièrement réussie : l'épluchette de

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blé d'Inde chez Micheline Mador. Il faisait un temps radieux. Le blé d'Inde était délicieux. C'était du «peach and cream». J'avais beaucoup entendu parler de cette variété de blé d'Inde. C'était la première fois que j'en mangeais. Sa réputation n'est pas à faire. Seul les «Délices de Bourgogne» qu'on trouve dans la région de Québec m'avaient aussi agréablement surprise. Et il y en avait encore et encore. On se serait cru à de nouvelles noces de Cana.

La journée a débuté par une messe célébrée par le frère de Micheline. Il y avait plusieurs cantiques dans son programme. Pour la première fois, je constatais le lien étroit entre les cantiques et la musique «country». Je m'attendais un peu à ce que nous chantions «Le Seigneur est venu derrière la montagne».

Toutes les bonnes choses ont une fin hélas! Presque tous les participants et les participantes sont revenus de cette belle journée avec un coup de soleil. Évidemment les endroits chauffés variaient selon l'endroit où nous étions assis. J'ai rapporté le mien au genou gauche. Au fur et à mesure que le temps passe, je vois les rougeurs disparaître avec tristesse. Quand l'endroit sera complètement revenu au naturel, je saurai que l'été est fini, bien fini.

Betti LeBlond St-Joseph Nursing Home Rockland

Le respect de l'autre

Dans ce temps-là, il y avait beaucoup plus de respect de l'autre qu'aujourd'hui. Nous respections nos parents, nos voisins et l'autorité en dehors de la maison. Nous étions habitués comme cela et ce n'était pas difficile. Aujourd'hui, plusieurs jeunes ont de la difficulté à respecter l'autorité, les règlements et même parfois leurs parents. Ils veulent aller de l'avant sans aide et sans savoir où ils vont. Le respect est une chose que l'on doit apprendre très jeune si on veut le pratiquer

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toute notre vie. C'est sûr que même dans ce temps-là il y avait quelques exceptions, mais elles n'étaient pas nombreuses. Aujourd'hui, il y a des gens qui ne pensent qu'aux biens matériels en oubliant le respect de l'autre.

Le respect est une chose qu'il faut garder durant toute sa vie.

Texte collectif Bibliothèque Casselman

Le grand jour

Le jour du mariage, le père du marié partait en voiture avec le marié pour aller rencontrer la mariée chez elle. La mariée suivait avec ses parents.

Le marié ne devait pas regarder la mariée. Ils partaient pour l'église en se suivant. Il n'y avait pas de robes blanches. C'était des robes de couleur. Après la cérémonie à l'église, la fête se passait à la maison. Il n'y avait pas de salle de réception ou de restaurant. Les parents de la mariée préparaient le repas pour tous les invités. C'était beaucoup de préparatifs, car la fête durait toute la journée et toute la soirée. Nous ne pouvions pas oublier cette belle journée.

Rita Montreuil Résidence L'Érablière Limoges

Toute une aventure en train

Je travaillais dans les trains. Une fois, je faisais le trajet d'Ottawa à Sudbury. À Montréal, un homme est monté dans le train. Cet homme avait été interné dans une institution pendant un an pour se

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faire soigner, il ne fallait pas le laisser seul, mais personne ne s'en est occupé.

De Montréal, le train passait par Ottawa. Moi, je suis monté dans le train à Ottawa. Je m'occupais des passagers. Cet homme s'est bien comporté jusqu'à Pembroke. Traversé Pembroke, il a commencé à changer d'attitude. Alors deux hommes qui travaillaient pour moi sont venus m'avertir de son comportement. C'était mon devoir d'aller l'avertir de rester tranquille. À Odenback, il s'est levé et je suis allé l'avertir de s'asseoir. Il m'a écouté et s'est assis. Mais aussitôt que j'ai eu le dos tourné, il s'est jeté sur moi avec un couteau et il m'a mis le couteau à la gorge. Je n'ai pas eu peur de lui, car je savais qu'il était malade.

À North Bay, la police provinciale et la police du C.N.R. l'ont fait descendre du train. Ils ne l'ont pas emmené en prison mais à l'hôpital à North Bay. Le lendemain, quand je suis revenu de mon voyage, je suis arrêté à North Bay pour demander où était rendu l'homme. On m'a dit que l'homme était décédé trois heures après que la police l'avait emmené à l'hôpital. Il fallait avertir sa femme qui l'attendait avec ses trois jeunes enfants. Cet homme n'avait que 33 ans.

Je vous dis que de voyager pendant 37 milles, le couteau à la gorge, m'a paru très long.

Gédéon Henri Résidence MON CHEZ NOUS Casselman

Le fromage

Quand j'étais petite, nous faisions notre fromage nous-mêmes avec du lait caillé. Quand le lait était bien caillé, ma mère le mettait dans un sac de coton et le pendait sur la corde à linge. Avec le vent, il séchait et au bout de trois semaines, il devenait du fromage en petits

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morceaux. Plus le fromage est vieux, meilleur il est. Qui ne connaît pas le fromage St-Albert ? Plusieurs personnes

disent que le fromage St-Albert, c'est leur fromage préféré. Depuis qu'il existe, tout le monde le connaît. Il y a une grande variété de fromages St-Albert. Il y a des gens qui font plusieurs milles pour se rendre à St-Albert. C'est tellement bon du fromage.

Alexina Forget Résidence L'Érablière Limoges

Le fromage St-Albert

La fromagerie de St-Albert existe depuis 98 ans. En 1994, elle fêtera son centenaire. La fromagerie que l'on connaît aujourd'hui a été construite en 1950.

Le lait qui arrive à la fromagerie doit avoir une très bonne senteur, car il pourrait être refusé. Ceux qui ont une ferme laitière doivent laver les pis des vaches avec de l'eau de javel diluée dans l'eau pour s'assurer qu'ils sont bien stérilisés. Il y a des inspecteurs qui visitent les fermes laitières pour s'assurer que tout est bien propre. Il est important d'être très minutieux à chaque étape lors de la fabrication du fromage. Le fromage est vendu partout, même en Californie. Il est moins cher quand on l'achète à la fromagerie même. À l'épicerie, il peut coûter de un à deux dollars de plus du kilo.

Il y a plusieurs variétés de fromages à la fromagerie St-Albert.

Texte collectif Résidence Lajoie St-Albert

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Anecdotes

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Textes produits par Arthur St-Amour Centre J. Urgel Forget Embrun

Quand j'étais petit, on vivait dans une grande maison. On était dix enfants. Il arrivait à l'occasion des petites chicanes entre frères et sœurs. Un jour, mon frère avait mon fusil avec un bouchon de liège et il ne voulait pas me le donner. J'ai couru après lui et quand je l'ai rejoint, il m'a lancé le fusil sur la tête. J'avais la tête fendue. Quand ma mère m'a vu, elle m'a rentré dans la maison et m'a nettoyé la tête à trois reprises. J'avais une fente longue de deux pouces sur la tête. Quand ma blessure a été nettoyée, ma mère a puni mon frère pendant une semaine.

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Un jour, il y avait un grand vent dehors. Un de mes frères tenait le cheval, car il était un peu affolé. Tout à coup, il s'est mis à éclairer et à tonner. Le cheval a eu peur et mon frère est tombé par terre. Le cheval lui a passé sur la jambe. Quand ma mère l'a vu, elle l'a emmené à la maison et il est resté au lit pendant une semaine.

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C'était l'hiver et l'argent était rare. Nous n'avions pas grand chose à manger. Un jour, mon père est parti vendre un panier d'œufs pour pouvoir acheter quelque chose à manger. Les chemins étaient dangereux, car il y avait eu une tempête de neige.

La voiture s'est renversée et mon père a mis le pied dans le panier d'œufs et il les a tous écrasés. Nous ne pouvions rien acheter avec des œufs brisés. Plus tard, nous avons bien ri de cette mésaventure.

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En 1916, le R-100 est passé à Ottawa. Il est arrêté un bon moment. Il était fait comme un gros cigare. Tout était illuminé et j'entendais de la musique. Plus tard, j'ai vu le premier avion. J'avais environ dix ans. Je n'ai jamais oublié cet instant. J'ai suivi l'avion très longtemps, jusqu'à ce qu'il soit gros comme une mouche.

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Un jour, mes frères, mes sœurs et moi étions en train de jouer dans le grenier de la soue à cochons. Nous avions beaucoup de plaisir. Ma sœur se berçait dans le grenier. Elle est tombée en bas sur une grosse truie, parmi un lot de cochons. Nous étions jeunes dans ce temps-là. Cette mésaventure nous a fait rire pendant plusieurs jours.

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Mon père chassait les rats musqués et laissait toujours sa chaloupe sur le bord de la rivière. En revenant de l'école, mon frère et moi avons eu l'idée de faire une promenade en chaloupe. Mais nous n'avions pas d'avirons, ni de bâtons. Alors nous nous en allions à la dérive. La peur nous a pris. Nous avons décidé de sauter à l'eau. Nous étions dans l'eau jusqu'au cou. Alors, nous avons eu peur de nous noyer. C'est la plus grosse peur de ma vie!

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Un de mes plus beaux souvenirs, c'est le congrès mariai à Ottawa en 1950. J'ai trouvé ça tellement beau que je me sentais au ciel. La plupart des gens pleuraient, car c'était très touchant. Il y avait des centaines et des centaines de lampions qui brûlaient chaque jour.

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Chers enfants, vous savez que la vie a bien changé. J'espère que vous n'aurez pas la misère que nous avons eue. Peut-être une autre sorte de misère vous attend. Quand j'ai commencé l'école, je demeurais dans une ferme et j'avais deux milles à marcher, matin et soir. De temps en temps, je travaillais dans le champ. À l'âge de quatorze ans, j'ai commencé à travailler pour quelques sous. Je commençais à sept heures le matin pour terminer à six heures le soir.

Aujourd'hui, les gens travaillent pour de gros salaires.

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À l'âge de dix-huit ans, j'ai commencé à sortir. Je sortais en voiture tirée par un cheval. Ça ne coûtait pas cher, mais c'était agréable. Il fallait être bien habillé l'hiver, car en voiture ce n'était pas chaud. Parfois la voiture renversait et le cheval se sauvait. Il fallait courir après le cheval pour le ramener. La misère ne fait pas mourir, mais ça fait souffrir.

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Je me souviens bien de la guerre de 1914 à 1918. J'avais huit ans. Cette guerre a fait peur à bien du monde. La grippe espagnole a fait plus de morts que la guerre. Le monde avait peur d'aller chez les voisins qui avaient la grippe. Mon frère et moi allions faire le train chez notre voisin, mais nous n'entrions pas dans la maison. Un jour, nous avons appris que le voisin était mourant. Ma mère nous a dit : «Je brave ma peur et je vais soigner notre voisin.» Croyez-le ou non, elle l'a sauvé et elle a été épargnée.

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Le Centre de ressources pour l'alphabétisation et l'enseignement des langues

21, chemin Park Toronto (Ontario! M4W 2N1 Téléphone: (416) 397-5902 1-800-463-7880 ATS: 397-5901 Télécopieur: 397-5915

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