36
UNE FENÊTRE OUVi NOVEMBRE 1963 (XVIe ANNÉE) - FRANCE : 0,70 F. - BELGIQUE : 10 Fr. - SUISSE : 0,80 Fr. m- Tf Constantin Stanislavski UNE RÉVOLUTION DANS LE THÉÂTRE

Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

  • Upload
    haque

  • View
    215

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

UNE FENÊTRE OUVi

NOVEMBRE 1963 (XVIe ANNÉE) - FRANCE : 0,70 F. - BELGIQUE : 10 Fr. - SUISSE : 0,80 Fr.

m- Tfl

Constantin Stanislavski

UNE RÉVOLUTION

DANS LE THÉÂTRE

Page 2: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

LES EGLISES

PEINTES

DE ROUMANIE

Photo © Unesco

Couvertes de fresques, les églises moldaves, dans le nord-est de la Roumanie, évoquent de géantslivres d'images. Cette somptueuse fresque du XVIe siècle, « Le Jugement Dernier », illuminela façade ouest de la chapelle du monastère de Voronet. Quelques-unes des plus belles de cesduvres d'art sont reproduites dans « Roumanie : les églises peintes de Moldavie », un nouvelalbum de la Collection Unesco de l'Art Mondial. Publié par la New York Graphie Society en accordavec I'Unesco, cet album, imprimé en Italie, contient 32 reproductions en couleurs. Il est venduau prix de 18 dollars U.S. ou l'équivalent.

Page 3: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Le CourrierNOVEMBRE 1963

XVie ANNÉE

NUMERO 11

PUBLIÉ EN

9 ÉDITIONS

FrançaiseAnglaiseEspagnoleRusse

Allemande

Arabe

U. S. A.

JaponaiseItalienne

NOTRE COUVERTURE

On commémore cette année

le centième anniversaire de

la naissance de Constantin

Stanislavski, acteur et met¬

teur en scène russe. Artiste

inspiré et scrupuleux, tra¬vailleur infatigable, il donna

à Tait dramatique une for¬me nouvelle. Son influence,

vingt-cinq ans après samort, s'exerce toujours dans

le monde entier. (Voir ar¬

ticle page 12).

Photos officielles soviétiques

Pages

4 L'UNESCO AU CONGO

Par Garry Fullerton

12 UNE RÉVOLUTION DANS LE THÉÂTRE

Constantin Stanislavski, acteur et metteur en scène

Par Grigori Kristi

15 MA VIE DANS L'ART

Le testament spirituel de Stanislavski

20 NOTATIONS ARTISTIQUES

Les carnets de Stanislavski

23 A LA RECHERCHE D'UNE LANGUE UNIVERSELLE

Par Mario Pei

24 " ALLO ! HALLÓ ! " OU L'ART DE COMMUNIQUER

Un film Unesco sur l'histoire de l'information

28 CARTES DE V DE L'UNICEF

30 LE MYSTÈRE DE MARAJO

Une civilisation disparue

Par Alfred Métraux

33 NOS LECTEURS NOUS ÉCRIVENT

34 LATITUDES ET LONGITUDES

Mensuel publié par :L'Organisation des Nations Unies pour l'Education,la Science et la Culture

Bureaux de la Rédaction :

Unesco, Place de Fontenoy, Paris-7", FranceDirecteur-Rédacteur en Chef :

Sandy Koffler

Rédacteur en Chef adjoint :René Caloz

Secrétaires de rédaction :

Edition française : Jane Albert Hesse (Paris)Edition anglaise : Ronald Fenton (Paris)Edition espagnole : Arturo Despouey (Paris)Edition russe : Veniamin Matchavariani (Moscou)Edition allemande : Hans Rieben (Berne)Edition arabe : Abdel Moneim El Sawi (Le Caire)Edition japonaise : Shin-lchi Hasegawa (Tokyo)Edition italienne: Maria Remiddi (Rome)

Maquettiste :Robert Jacquemin

Ventes et distribution :

Unesco, place de Fontenoy, Paris-7*.Belgique : Louis de Lannoy, 22, Place de Brouckère, Bruxelles.

Les articles et documents non-copyright peuvent être reproduits àcondition d'être accompagnés de la mention « Reproduit du Courrierde I'Unesco », en précisant la date du numéro en question. Deuxjustificatifs devront être envoyés à la direction du Courrier. Les articlessignés ne pourront être reproduits qu'avec la signature de leur auteur.Les manuscrits non sollicités par la Rédaction ne sont renvoyés ques'ils sont accompagnés d'un coupon-réponse international. Les articlesparaissant dans le Courrier expriment l'opinion de leurs auteurs etnon pas nécessairement celles de I'Unesco ou de la Rédaction.

ABONNEMENT ANNUEL : 7,00 francs français ;lOOfr belges; 8 fr suisses; 10 -stg. Envoyer lessouscriptions par mandat C.C.P. Paris 12598-48,

Librairie Unesco, Place de Fontenoy, Paris.MC 63-1-185 F

Toute la correspondance concernant la Rédactiondoit être adressée au nom du Rédacteur en Chef.

Page 4: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

L'UNESCO

AU CONGOpar Garry Fullerton

la fin de 1960, nul ne savait, à Léopoldville, ni, où que ce soit au Congo, si les écoles secon¬

daires seraient ouvertes. Et si elles devaient l'être, nulne savait combien de professeurs seraient à leurs costespour assurer la rentrée scolaire.

Comme tous les autres services publics, l'enseignementétait victime de l'instabilité politique et militaire lorsdes premiers mois d'indépendance de la nouvelle répu¬blique. Le personnel européen technique et professionnelavait quitté le pays par milliers, professeurs, médecins,juristes, fonctionnaires, journalistes, Ingénieurs, commer¬çants et industriels et seuls quelques spécialistes congo¬lais étaient en mesure de le suppléer.

Répondant à l'appel du Gouvernement congolais, lesNations Unies et leurs agences spécialisées tentèrent decombler ce vide. Un vaste programme coordonné d'assis¬tance civile, qui couvrait à peu près tous les secteurs del'activité du pays, fut établi en juillet et août 1960. Il pritvite une telle extension qu'il représenta l'un des plusconsidérables efforts de cette nature jamais entreprissur le plan international.

Dans la partie du programme qui concernait I'Unesco,le problème des écoles secondaires était de loin le plusurgent à résoudre. D'abord, il n'y avait pratiquement pasde professeurs congolais, et l'on ignorait combien de pro¬fesseurs belges regagneraient le pays, après avoir passéleurs vacances d'été en Europe.

Ensuite, bien que l'on eût désespérément besoin dediplômés des écoles secondaires, tant au gouvernement quedans l'industrie, dans toutes les branches, le nombre desinscriptions était très peu élevé, et 152 Congolais seule¬ment avaient obtenu leur diplôme en 1960.

Dans l'enseignement primaire, le tableau n'était pasmoins sombre, mais là, il s'agissait d'un problème de qua¬lité plutôt que de quantité. Selon les statistiques officielles,il y avait pour tout le Congo, près de 1 500 000 enfants dansles écoles primaires en 1960. Us représentaient 71,5 % desenfants de cinq à quatorze ans, c'est-à-dire, l'une des plusfortes proportions d'inscriptions scolaires en Afrique. Maissur 16 000 écoles, il n'y en avait que 3 500 où l'enseigne¬ment était dispensé au-delà du cours élémentaire, et prèsde 70 % des élèves quittaient l'école avant d'avoirterminé le cours moyen, c'est-à-dire d'avoir assimiléle minimum indispensable. 9 % seulement des élèves

Photo Unations

terminaient le cycle des six années d'études primaires.

Même état de choses dans le domaine de la science et

de l'information, qui était également du ressort deI'Unesco : beaucoup de journalistes européens avaientquitté le pays, et les quelques Congolais qui avaient uneformation journalistique étaient appelés à des postesimportants dans le nouveau gouvernement. Si bien quepresse et radio étaient tombées aux mains d'équipesdénuées à la fois de qualification professionnelle et deculture générale.

Pour résoudre le problème de l'enseignement secondaire,I'Unesco aida les autorités congolaises à recruter des pro¬fesseurs à l'étranger et à fonder un Institut PédagogiqueNational pour y former des professeurs congolais.

Le recrutement se fit lentement au début, mais I'Unescoparvint cependant à envoyer 66 professeurs au Congopendant l'hiver 1960-1961. Avec un certain nombre de pro¬fesseurs belges qui demeurèrent volontairement à leurspostes dans un programme bilatéral d'assistance techni¬que, ces professeurs permirent de rouvrir ou de garderouvertes un certain nombre d'écoles qui, sans eux, eussentdû fermer leurs portes ou réduire le nombre de leursclasses.

Pour l'année scolaire 1962-1963, 556 professeurs furentrecrutés pour les écoles du Congo, avec l'aide de I'Unesco

soit environ le tiers du corps enseignant. Ces profes¬seurs sont en fait employés par le gouvernement congo¬lais, mais I'Unesco paie le tiers de leur salaire de base enmonnaie étrangère, plus une prime de 1 200 dollars par an.

Dans ce contingent de professeurs. 25 nationalités sontreprésentées. Les Haïtiens sont les plus nombreux ; puisviennent les Belges, les Français et les Libanais. Mais ily a aussi des professeurs arrivés d'Espagne, d'Italie, de laRépublique Arabe Unie, de Syrie, de Grèce, d'Afghanistan,de Pologne, du Canada, du Honduras, du Vietnam, desEtats-Unis, de Norvège, de Suisse, des Pays-Bas, de Chine,du Luxembourg, du Mexique, du Rwanda, du Royaume-Uni, de Colombie et de Suède. Dans plusieurs facultés, iln'y a pas moins d'une douzaine de nationalités chez lesenseignants, et 15 dans l'une, l'athénée de Goma.

En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam¬ment pour l'alimentation et le logement et des diffi¬cultés de l'enseignement, ces professeurs ont accompli unetâche, dont ils peuvent être fiers. Certains ont été tout àfait remarquables.

SUITE PAGE 6

ÉTUDES SOUS LE RɬVERBÈRE. Avides d'étu¬

dier. Les jeunes Congolais,passent de longues heures,la nuit, à lire sous les ré¬

verbères qui bordent lesrues de Léopoldville (àdroite) si la maison fami¬liale est mal éclairée. De

1959 à 1962 dans les éco¬

les secondaires les inscrip¬tions scolaires ont plus quedoublé au Congo. A gau¬che, l'un des professeursrecrutés avec l'aide' de

I'Unesco pour enseigner auCongo, faisant un coursd'histoire dans une école

secondaire de Luluabourg.

Page 5: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Photos Unesco - Unations - Basil Zarov

Page 6: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Photos Unations

LES JOURNAUX, selon un rapport de I'Unesco, ontune diffusion plus grande au Congo que dans tout autrepays africain de langue française. Les six quotidienscongolais tirent actuellement 34 000 exemplaires au total,pour 24 000 avant l'indépendance, et il existe une douzained'hebdomadaires. Au cours de l'année dernière, les jour¬nalistes congolais ont suivi des cours de journalisme et deculture générale dispensés par les spécialistes de I'Unesco.Ci-dessous, Antoine DesRoches, un expert de I'Unesco,explique quelques détails d'une mise en page de « une ».

L'UNIVERSITÉ LOVANIUM, ci-dessus, a son originedans une fondation médicale et un centre agricole créés prèsde Léopoldville par l'Université belge de Louvain. Le Lovaniumreçut le statut d'université en 1 956, et comprend aujourd'huidiverses facultés : droit, médecine, philosophie et arts,théologie, science, sciences sociales et politiques, étudespolytechniques. Son équipement de recherches comprendun réacteur nucléaire, le premier de l'Afrique. En 1951-52,1 100 étudiants ont été inscrits dans les établissements

d'enseignement supérieur au Congo qui, outre le Lovaniumsont aujourd'hui au nombre de sept.

CONGO (Suite)

" Pour la

« L'aide de I'Unesco a été pour nous extrêmement pré¬cieuse dans les années difficiles qui suivirent l'indépen¬dance », me disait en mal dernier le ministre del'Education nationale, M. Michel Colin. Les autres autoritéscongolaises reconnaissent également que sans l'arrivée desprofesseurs étrangers, il n'y aurait pas eu d'enseignementsecondaire au Congo.

Selon le ministère de l'Education nationale, les besoins

ne cesseront de grandir jusqu'en 1967, où il faudra alorsavoir recours à 7 000 professeurs étrangers, avant que nesoit assurée la formation pédagogique des Congolais quiles remplaceront. Cependant, il semble peu problablequ'un contingent aussi considérable puisse être garantipar l'assistance internationale ou l'assistance techniquebilatérale, et il se peut que les écoles secondaires congo¬laises n'aient que des équipes enseignantes réduites pourquelques années.

Mais, à partir de 1964, une centaine d'étudiants sorti¬ront chaque année de l'Institut Pédagogique Nationalmunis de leur diplôme d'enseignants. L'Institut, qui aouvert ses portes en 1961, constitue un exemple parfaitde coopération internationale. Le directeur est congo¬lais, et le personnel enseignant comprend des experts de12 nations, envoyés par I'Unesco. L'Institut bénéficie d'uneassistance financière du gouvernement congolais et desNations Unies comme du programme d'aide des Etats-Uniset du British Council.

Page 7: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

DES ÉQUIPES MOBILES DE L'UNESCO font actuellement des tournées au

Congo, pour donner des cours de perfectionnement à beaucoup des 42 000 ensei¬gnants des écoles primaires. Chaque équipe est composée de trois éducateurs deI'Unesco et d'un spécialiste de l'Unicef pour la nutrition et l'hygiène. Ci-dessus, dejeunes institutrices congolaises prennent une « vivante » leçon de puériculture.

mentale "

Quant aux étudiants de l'INP, ce sont des jeunes gensoriginaires de toutes les provinces du Congo, choisis sans-distinction d'origine ethnique ou d'appartenance religieuse.De plus et c'est là une innovation dans un pays où lesfemmes recevaient traditionnellement fort peu d'instruc¬tion, et où le professorat était surtout un monopole mas¬culin l'Institut est ouvert aux femmes comme aux

nommes.

Le programme d'études comporte les grands courantslinguistiques africains, l'histoire de l'Afrique et du Congo,l'anthropologie et la sociologie. En insistant sur l'héritageparticulier du Congo, il vise à devenir ce que Joseph Nga-lula, ancien ministre de l'Education nationale, appelait« un instrument de décolonisation mentale ».

Antonio Chiappano, l'expert de I'Unesco chargé des pro¬grammes d'études, est profondément convaincu qu'il fautcombiner les expériences les plus remarquables réaliséesdans tous les pays, en les adaptant toutefois aux besoinsspécifiques du Congo.

« Nous savons que l'expérience d'un pays ne peut êtreappliquée directement à un autre pays », dit-il, « maiscependant nous ne savons pas ce qui peut être retenu etce qui doit être éliminé. Nous devons procéder à une révisioncontinue et nous nous corrigeons sans cesse. L'Institutest, au premier chef, expérimental. Ce que nous appre¬nons ici pourra être appliqué dans d'autres Institutionsde formation pédagogique, quand elles seront créées. »

C'est encore la même philosophie pragmatique quioriente le travail de la commission de réforme, établie parle gouvernement congolais avec l'aide de I'Unesco, pourréviser et déterminer toute la structure de l'enseignementsecondaire au Congo. La réforme embrasse à la fois lamodernisation du système pour bénéficier des toutes der¬nières recherches en matière d'enseignement (des effortsanalogues sont faits dans la plupart des autres pays) etl'africanisation des disciplines, particulièrement de l'his¬toire et de la géographie.

Constituée en février 1961, la commission était présidéepar Henri Takizala, secrétaire général du ministère del'Education nationale du Congo. Elle comprenait desreprésentants de l'administration, du bureau catholiquede l'enseignement, du bureau protestant de l'enseigne¬ment, de l'Université de Lovanium, de l'enseignement pri¬maire et de l'enseignement technique, et des conseillersde I'Unesco.

Ce conseil proposa de créer deux cycles dans l'enseigne¬ment secondaire : l'un serait un cycle « d'orientation »de deux ans, pendant lesquels tous les étudiants sui¬vraient les mêmes cours ; le second cycle s'étendrait surquatre ans, et comprendrait des sections spécialisées :sciences, humanités, commerce et administration, agricul¬ture, pédagogie et technologie (mécanique, électricité,construction et chimie industrielle).

SUITE PAGE 8

Page 8: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

CONGO (Suite)

Sur le long chemin de l'école

t La différence essentielle entre le nouveau système etl'ancien tient à ce que le nouveau se fondait sur la « pro¬motion » et cherche à pousser le plus grand nombrepossible d'étudiants, sans abaisser toutefois le niveau desétudes, au lieu de se borner à former une étroite élite enpratiquant une sélection intransigeante. Dans l'anciensystème, bon nombre de ratés étaient incapables d'exer¬cer un métier quelconque; le nouveau système, lui, estconçu de telle manière que les étudiants qui interrom¬pent leurs études, à quelque niveau que ce soit, peuventcommencer à exercer utilement un métier auquel lesconnaissances acquises les ont préparés.

Quant au cycle « d'orientation », il a déjà porté sesfruits dans la plupart des écoles congolaises, et la pre¬mière année d'études du second cycle de quatre ans vientde commencer. Certes, le programme est bien établi noirsur blanc, mais il y a des obstacles énormes à son applica¬tion : pour commencer, pénurie de professeurs, pénurie delivres de classe et manque de crédits. Un système scolaireidéal et c'est à cela que tend le programme est fortcoûteux, et plusieurs années peuvent s'écouler avant quene soit achevée la transition entre l'ancien et le nouveausystème.

Enfin, bien que la réforme ait reçu l'approbation sansréserve de la plupart des enseignants congolais, une mino¬rité, petite mais bruyante, y reste opposée. Pour une part,cette opposition tient au conservatisme spontané des tra¬ditionalistes ; d'autre part, elle traduit la crainte, d'ail¬leurs dénuée de fondements, que la réforme ne tented'abaisser à outrance le niveau de l'ancien programme, àseule fin de le mettre à la portée de tous les Congolais.

IAIS peu à peu, on surmonte ces obstaclespsychologiques et si l'on peut résoudre les

problèmes ardus qui concernent les professeurs, les livreset l'argent, la réforme peut devenir effective. Et dansce cas, il est hors de doute qu'elle constituera la plusimportante des contributions de I'Unesco pour le Congo.

Avec l'aide de I'Unesco, le gouvernement congolaiss'attaque simultanément à tous les aspects de l'enseigne¬ment, à tous les niveaux. Au début de cette année, unexpert de I'Unesco en architecture scolaire a parcouru35.000 km en un laps de temps de cinq mois, pour faire desplans et superviser la construction de salles de classe, debâtiments pour les laboratoires, de facultés, de maisonsd'étudiants, tant pour l'enseignement secondaire que pourl'enseignement supérieur. Un autre est chargé de l'achatde tous les livres et fournitures scolaires nécessaires àtous les degrés, et supervise la vente des coupons deI'Unesco à cet usage. Jusqu'ici, ces coupons ont été utilisésau Congo pour une valeur de plus de 7 000 000 de dollars.D'autres experts encore aident le gouvernement central etles gouvernements provinciaux à réorganiser et à renfor¬cer les services administratifs et financiers des ministèresde l'Instruction publique.

Mais l'un des travaux les plus passionnants est celuiqu'accomplirent quatre équipes mobiles de I'Unesco voya¬geant à travers le Congo pour donner des cours de perfec¬tionnement aux enseignants des écoles primaires. Aucontraire des professeurs des écoles secondaires, ces insti¬tuteurs sont presque uniquement des Congolais, mais leniveau de leur qualification professionnelle et de leurculture générale est souvent fort peu élevé.

Un jour d'avril dernier, j'ai rencontré dans le portfluvial de Kindu l'une de ces équipes mobiles, composée dedeux Français, d'une Française et d'un Haïtien. Quelquesjours plus tôt, ils avaient quitté Bukavu, à 700 km de là,pour traverser les chaînes parallèles de montagnes quiséparent les lacs d'Afrique orientale du bassin du fleuveCongo. Il leur avait fallu trois jours pour faire le voyage.Leur Jeep lourdement chargée avait fait 20 km à l'heureen moyenne sur des routes qui n'étaient guère plus quedes pistes, traversant des ponts glissants qui oscillaientsous la poussée du flot bouillonnant, passant dans desmarécages où la boue bloquait les moyeux et où l'eauenvahissait la voiture.

De tels voyages ne sont pas le lot quotidien des équipes° mobiles, mais ils illustrent bien le genre de difficultés que

SUITE PAGE 10

UN FOYER SCIENTIFIQUE

important, au Congo, est l'Institutpour la Recherche Scientifique enAfrique Centrale. Les installationsprincipales (ci-dessous) à Lwiro,sur le Lac Kivu, sont dotées du

meilleur équipement existant enAfrique pour les mesures séismo-logiques et géomagnétiques, ainsique de vastes laboratoires bota¬niques et zoologiques. L'Institutest aussi un rendez-vous pour lescongrès régionaux et internatio¬naux. Lors d'un séminaire de séis-

mologie et de géophysique pa¬tronné par I'Unesco en avril 1963,des visites d'études ont été or¬

ganisées au Niragongo, volcandu voisinage, et aux champs delave de Goma (à droite).

*ê V

ftfc!Photos Unesco - Unations - Basil Zarov

arçfSrÇJtaX:

»«111«'. , J»**fi&.'

Page 9: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

>*

LE CENTRE DE RECHERCHE

de Uvira, sur les rives du Lac Tan¬

ganyika, se consacre aux étudeshydrobiologiques. Les savants tra¬vaillant sur un navire de recherches,

comme le « président Paul Ermens »(à droite) ont identifié et classéplus de 400 espèces de poissonsvivant dans les eaux du lac, un fait

de la plus grande importance pourle régime alimentaire des Congolaiset des Tanganyikais. Parmi les autresinstallations scientifiques au Congo,citons un réseau de plus de 100 sta¬tions d'observation météorologiquereliées au Bureau central de Binza,

près de Léopoldville, où les étu¬diants (ci-dessous) apprennent àutiliser le matériel météorologique.L'Organisation MétéorologiqueMondiale forme des Congolais spé¬cialistes de météorologie. WEHamMMMMuw

Photo A. Gille

Photo Unations

Page 10: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

D'ÉNORMES RESSO

Avec ses 15 millions d'habitants

dispersés sur un territoire aussigrand que l'Europe Occidentale,le Congo (Léopoldville) est l'undes plus vastes et, virtuellement,des plus riches pays d'Afrique.Il possède d'énormes ressourcesd'énergie hydro-électrique inex¬ploitées, et quelques-uns des plusgrands gisements minéraux dumonde. Les mines du Katanga (àdroite) fournissent sept pour centdu cuivre utilisé dans le monde, etles deux tiers du cobalt. Il est pos¬sible de développer l'industrie tou¬ristique dans la région des lacs,à la frontière orientale du Congo

autour du Lac Kivu (à gauche),par exemple qui bénéficie en

Photo Unesco-Unations-Basil Zarov

CONGO (Suite)

Un pays vaste comme le quart de l'Europeces pionniers des temps modernes doivent affronter.L'amélioration de l'enseignement primaire au Congo leurdonne également beaucoup de fil à retordre. Comme nousle disions tout à l'heure, la qualité des moniteurs et desinstituteurs, dans beaucoup d'écoles primaires, n'est pasfameuse.

Théoriquement, c'est le français qui est maintenant lalangue officielle d'enseignement dans toutes les écoles duCongo. Mais, pratiquement, la plupart des classes pri¬maires sont faites dans les auatre langues principales quisont utilisées au Congo : ïingala, kikongo, tshiluba etswahili.

Il y a aussi la question de l'équipement scolaire. Certes,dans les grandes villes, quelques écoles sont bien équi¬pées, mais la petite école de la brousse un toit dechaume sur quatre perches est très souvent démuniede tout : tables, chaises, bureaux ou bancs. Pas de tableau

noir, pas de craie, pas de cahier ni de crayons. Juste quel¬ques livres de classe et aucun matériel visuel quel qu'ilsoit.

Etant donné cette situation, les quatre équipes mobilesde I'Unesco (auxquelles s'ajoute une cinquième qui pro¬cure le matériel audio-visuel) ne peuvent guère s'attaquerau fond du problème. Cependant, preuve a déjà été faitede la valeur du projet mis en en octobre 1962 surune base expérimentale.

A Kindu, par exemple, je me suis entretenu avec Benoît10 Kayombo, un inspecteur d'école primaire, qui m'a dit

comment il avait mis en pratique certaines idées quil'avaient frappé pendant l'un des premiers cours de per

fectionnement à Bukavu. Aujourd'hui, tous ses institu¬teurs enseignent l'hygiène à leurs élèves (un des pointssur lesquels insistent les équipes), et il a commencé àcharger ses meilleurs instituteurs des classes de premièreet de seconde année, où ils sont très utiles, au lieu deles réserver aux plus grandes classes.

Jusqu'en avril 1963, 1 702 instituteurs congolais ontparticipé aux cours donnés par les équipes mobiles dansquatorze endroits différents, et bien davantage ont étécontraints d'attendre les sessions ultérieures. Les pro¬grammes actuels réclament la création de nouvelleséquipes et de cours plus nombreux, qui s'étendront sur deplus longues périodes et comprendront moins de partici¬pants. On espère aussi que les experts congolais pourrontbientôt s'associer aux équipes et former par la suite leurspropres équipes afin de poursuivre le travail.

En plus de l'amélioration de l'enseignement primaire etde l'expansion de l'enseignement secondaire, I'Unesco aaidé le Congo à créer deux nouveaux instituts de forma¬tion technique au niveau post-secondaire. Ce sont l'Ins¬titut de la Construction et des Travaux Publics, à Ozone,dans la banlieue de Léopoldville, et, à l'autre bout duCongo, un Institut des Mines, à Bukavu.

Ces deux instituts, dont le personnel est entièrementconstitué d'experts de I'Unesco, dispensent une formationpratique et théorique intensive à un nombre limité d'étu¬diants qui veulent devenir techniciens, chefs de chantierset conducteurs de travaux dans les mines et les industriesdu bâtiment. Quelques-uns d'entre eux continuent leursétudes au niveau universitaire pour obtenir leurs diplômesd'architectes ou d'ingénieurs. Beaucoup, au moins pendant

Page 11: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

URCES NATURELLES

outre d'un climat tempéré fortagréable; les lacs sont entourésde volcans. C'est dans cette régionqu'est situé le Parc national Albert(ci-dessous) qui s'étend sur800 000 ha. Aucune partie dumonde tropical n'a été l'objetd'une étude aussi longue, atten¬tive et approfondie, comme entémoigne « l'Enquête sur les res¬sources naturelles du Continent

africain », que vient de publierI'Unesco. Elle a été effectuée pardes spécialistes de 15 nationalitésdifférentes. Ces recherches se

poursuivent et il faudra plusieursannées avant de terminer l'examen

de tous les renseignements recueil¬lis au cours de ces travaux

Photo A. Gille Photo Unations

les prochaines années, seront détachés à des postes admi¬nistratifs du gouvernement central ou des gouvernementsprovinciaux.

Après des commencements relativement modestes,fin 1960, le travail de I'Unesco au Congo s'est tellementdéveloppé qu'aujourd'hui il englobe, en fait, tous les pro¬blèmes à résoudre dans le domaine de l'enseignement.Mais cette activité ne serait guère efficace si elle ne visaiten même temps à former des experts congolais, qui puis¬sent assumer les tâches qu'accomplissent actuellement lesspécialistes étrangers dans les ministères de l'Educationnationale du gouvernement central et des gouvernementsprovinciaux. On y est parvenu de deux manières : d'aborden assurant leur formation au Congo même, ensuite enenvoyant le personnel congolais faire à l'étranger desétudes spécialisées. Deux groupes de fonctionnaires impor¬tants du ministère de l'Instruction publique par exemple,ont été envoyés à Genève pendant neuf mois pour rece¬voir une formation accélérée, dans le cadre d'un pro¬gramme établi conjointement sous l'égide de I'Unesco etdu Bureau International de l'Education. A leurs études à

l'université de Genève et dans des séminaires spécialisés,se sont ajoutés des voyages d'études consacrés aux diverssystèmes scolaires en Suisse, en France, en Italie et enAutriche.

L'aide de I'Unesco pour le Congo dans le domaine del'enseignement s'est doublée d'une assistance pour le déve¬loppement de l'information et de la science. Pendantl'année 1963, quatre experts de la radio et de la presseécrite ont aidé le gouvernement congolais à réorganiserle ministère de l'Information, ont rédigé les statuts d'éta¬blissement de la radio congolaise et des agences d'infor¬mation nationales, assuré la formation de reporters, derédacteurs et de commentateurs et amélioré le nombre

et l'efficacité des programmes radiophoniques éducatifs.

Pour la science, l'effort essentiel a porté sur la sauve¬garde au Congo des principales institutions pour larecherche scientifique. L'une d'elles en particulier, l'Insti¬tut pour la Recherche scientifique en Afrique Centrale(IRSAC) s'enorgueillit de quelques-uns des plus beauxéquipements de laboratoires de l'Afrique pour l'étude dessciences de la terre. Un autre, l'Institut des Parcs Natio¬naux au Congo (IPNC) joue un rôle extrêmement impor¬tant pour la conservation de la faune sauvage africaine.En obtenant des ressources financières des gouvernementsbelge et congolais et des fondations privées, I'Unesco acontribué à assurer la continuité de ces institutions. Enmême temps, un expert de I'Unesco a aidé à établir unecharte pour la coordination de toutes les recherches scien¬tifiques dans la nouvelle nation, et une autre pour assurerla transformation des instituts, d'organisations belges enorganisations congolaises.

A la fin de 1963, les activités de I'Unesco au Congoauront sans doute atteint leur maximum. Près de 800 pro¬fesseurs étrangers, recrutés avec l'aide de I'Unesco, ensei¬gneront cette année dans les écoles du Congo. Plus de100 experts pour l'enseignement, la science et l'informationaident le gouvernement central et les gouvernements pro¬vinciaux de la République à préparer un avenir meilleur.

Dans le courant de l'année prochaine à quelque choseprès on attend ce qui devrait être une diminution pro¬gressive de cette forme d'aide d'urgence et une « norma¬lisation » des relations entre le Congo et les diversesagences spécialisées des Nations Unies.

Nous signalons à nos lecteurs la brochure (à paraître prochai¬nement) « L'Unesco au Congo », par Garry Fullerton, qui retrace]]la participation de I'Unesco dans le vaste programme d'assistancides Nations Unies à la République du Congo.

Page 12: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

STANISLAVSKIune révolution

dans le théâtre

par Grigori Kristi

On commémore cette année le centenaire

de la naissance de Constantin Stanislavski,

acteur et metteur en scène russe, quirénova l'art du théâtre. Son influence

fut immense et s'exerce toujours dansle monde entier, « Le Courrier de I'Unes¬

co » présente ici quelques aspects de lavie et de l'tuvre de ce très grand artiste.

Photo officielle soviétique

LE SYSTÈME de Stanislavski (àgauche), issu de longues recherchessur la formation de l'acteur, a exercéune influence déterminante dans le

monde du théâtre, puis du cinéma.En Amérique en particulier le « sys¬tème », plus communément désignésous le nom de « méthode », constitue

la base même de l'apprentissage ducomédien. Le fameux Actors'Studio,

à New York, est aujourd'hui associéà des noms célèbres de la scène et

de l'écran, comme ceux de PaulNewman, Maureen Stapleton, Mar¬lon Brando. On voit ce dernier (ci-dessus) dans le film: «Sur les Quais»rriis en scène par Elia Kazan, l'an¬cien co-directeur de l'Actors'Studio.

Il y a un demi-siècle, Stanislavskiécrivait : « Ce sont les acteurs

du cinéma moderne qui enseignerontce que doit être un acteur. L'écranrévèle tout, et le moindre effetconventionnel est enregistré à jamais.On perçoit alors clairement la diffé¬rence entre l'ancien et le nouvel art. »

Page 13: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

siTANisLAVSKi est né à Moscou en 1863, peu'après l'abolition du servage en Russie. Les

soixante-quinze ans de sa vie ont été marqués par deprodigieux événements. Il a vécu la Grande Guerre et laRévolution russe et il est mort en 1938, alors que l'incendied'une nouvelle Guerre mondiale allait s'allumer en Europe.D'énormes changements sont intervenus durant cessoixante-quinze années. L'art de Stanislavski, qui faisaitécho aux exigences de l'époque, ne cessait lui-même d'évo¬luer. Son développement artistique est fait de recherchescontinuelles, méticuleuses, de nouveaux essais, de nou¬velles réalisations.

Constantin Alexéev (il adopta par la suite le pseudonymede Stanislavski), est issu de la bourgeoisie moscovite qui,à partir de la deuxième moitié du xrx° siècle, allait par¬ticiper de plus en plus à la vie culturelle et sociale de laRussie. Au nombre des amis de sa famille, citons PavelTrétiakov, fondateur du musée d'art, le mécène SavvaMamontov, créateur d'un opéra privé, l'éditeur Sabachni-kov, et l'industriel Morozov, amateur éclairé qui devaitapporter une aide matérielle considérable à la construc¬tion du Théâtre d'Art de Moscou.

Dès l'âge de quatorze ans, le jeune Stanislavski jouait surune scène familiale. Tout le système de son éducationentretenait en lui la passion du théâtre ; c'était une tra¬dition dans sa nombreuse famille : sa mère était la fille de

l'actrice française Marie Varley, ses deux sBurs et sesdeux frères devinrent acteurs ou metteurs en scène.

En 1888, Stanislavski participe à la fondation et à ladirection d'une troupe créée à Moscou près la « Sociétédes amateurs d'art et de littérature ». Il joue un trèsgrand nombre de rôles, qui vont de personnages de vaude¬ville à ceux des tragédies de Shakespeare et de Schiller.

C'est à cette époque qu'il fait ses premières armescomme metteur en scène, ce qui lui vaut immédiatementl'attention des milieux artistiques de Moscou. Les specta¬cles de Stanislavski frappent par leur réalisme et les solu¬tions originales qu'il trouve. Il découvre de nouveaux pro¬cédés de présentation, de nouveaux aperçus sur le jeu del'acteur, créant ainsi un ensemble scénique homogène.Dès ses premiers pas, il s'engage dans la voie des innova¬tions hardies, déclarant la guerre aux vieilles conventions

Photo Columbia Pictuies

théâtrales, aux critères esthétiques périmés. « Croyez-moi, écrit-il à un critique français qui l'avait accusé d'avoirenfreint la tradition dans la mise en scène d'Othello,la tâche de notre génération consiste à chasser de l'art lestraditions périmées et la routine, à donner libre champ àla fantaisie et à la création. C'est seulement ainsi que noussauverons l'art. »

En 1898, Stanislavski et Vladimir Némirovitch-Dant-

chenko, critique théâtral et auteur dramatique bien connu,fondent le célèbre Théâtre d'Art de Moscou. Sa création

est marquée par la première de la tragédie historiqued'Alexis Tolstoï « Le Tsar Fédor Ioannovitch ».

Mais la véritable naissance du Théâtre d'Art est la mise

en scène de la « Mouette », de Tchékov. En la personned'Anton Tchékov et, peu après, de Maxime Gorki, Stanis¬lavski et Némirovitch-Dantchenko trouvent des auteurs

dont l' répond aux préoccupations vitales de l'épo¬que. Leurs pièces contribuent à l'épanouissement rapide duThéâtre d'Art et déterminent pour longtemps les voies de

son développement. Ce n'est pas par hasard que la« Mouette » devient l'emblème du Théâtre qui sera baptiséplus tard du nom de Gorki.

Stanislavski est lié à Tchékov par des affinités spiri¬tuelles et artistiques qui se transforment peu à peu en uneprofonde amitié. Les pièces de Tchékov sont originales,inédites ; elles exigent des procédés nouveaux. Avec ellesnaît l'art de la mise en scène dans son acception moderne.

Stanislavski excelle dans l'interprétation des personna¬ges de Tchékov et de Gorki. Mais le Théâtre d'Art estcélèbre également pour ses mises en scène d' d'au¬teurs étrangers : Hauptmann, Ibsen, Maeterlinck... Presquechaque nouveau spectacle, chaque nouveau rôle a la portéed'une découverte. Si dans sa jeunesse Stanislavski chercheà créer une illusion scénique proche du naturalisme, ilapprofondit par la suite sa conception de l'art. A une cer¬taine époque, il se passionne pour le symbolisme, mais,avec les années, ses recherches s'orientent vers des formes

plus dépouillées et plus expressives, susceptibles de ren¬dre sur la scène toutes les complexités « de la vie del'esprit humain ».

Après l'avènement du régime soviétique, Stanislavski^

SUITE PAGE 14

Page 14: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

STANISLAVSKI (Suite)

poursuit sa lutte en faveur du réalisme. Le nouveau spec¬tateur populaire auquel la révolution a ouvert les portesdu théâtre veut, affirme Stanislavski, « une nourriturespirituelle simple et substantielle ; pour l'art comme pourla nourriture, il n'est pas habitué aux mets relevés ni auxfinesses gastronomiques destinées à aiguiser l'appétit ».

Stanislavski ne se limite pas à la production de piècesmodernes. Il se tourne aussi vers les classiques russes etétrangers, et met en scène des pièces d'Ostrovski, de Gogol,de Pouchkine, de Shakespeare, de Molière, de Beaumar¬chais... Sa réforme n'est pas seulement une réforme duthéâtre dramatique : en 1922, dans son appartement de larue Léontievski, il présente l'opéra de Tchaïkovski « Eu¬gène Onéguine », dans une interprétation foncièrementnouvelle qui modifie toutes les conceptions traditionnellesdu théâtre lyrique. A partir de ce jour, il se partageraentre l'opéra et le drame.

SI 'appuyant sur son expérience propre comme-.mmJ sur celle de ses prédécesseurs et de ses contem¬

porains, Stanislavski cherche à mieux définir les principesqui régissent le jeu des acteurs.

Pour les jeunes, à qui tout semble simple et facile, ilcite les qualités nécessaires pour devenir comédien : ilfaut, dit-il, que l'acteur possède l'esprit d'observation, qu'ilsoit impressionnable, qu'il ait une bonne mémoire, du tem¬pérament, de la fantaisie et de l'imagination, qu'il sacheentrer dans la peau du personnage, qu'il ait du goût, del'intelligence, le sentiment de la cadence et de la mesure,qu'il soit musical, sincère, spontané, ingénieux, qu'il sachese maîtriser ; il faut qu'il soit prêt « à suivre un chemindur et pénible, couvert de ronces et d'épines, en dédai¬gnant la gloire et en aimant son métier ».

De nombreuses années de recherches et d'efforts abou¬tissent à l'élaboration du « système » de Stanislavski, quidevient par la suite célèbre. Ce « système » est un ensem¬ble de méthodes dont le but essentiel est de mettre l'acteurdans la bonne voie, en l'incitant à l'étude plus ou moins« systématique » du double instrument dont il dispose :son âme et son corps, et des techniques psycho-physiquesde l'art dramatique qui en découlent. Il se fonde surl'expression de la pensée et des émotions de l'acteur,considéré lui-même comme un créateur apte à enrichirspirituellement son auditoire. « Le théâtre, écrit Stanis¬lavski, est la plus importante de toutes les chaires d'en¬seignement, plus importante encore par son influence queles livres et la presse... La tâche que j'accomplis, dans lamesure de mes forces, consiste à révéler à la générationmontante que l'acteur est l'apôtre de la beauté et de lavérité. »

La tâche est difficile : Stanislavski doit lutter contre ledilettantisme et la routine ; sa méthode vise à éliminerégalement le naturalisme stérile et l'esthétique sans âme.

Se basant sur ce système, Stanislavski a formé plusieursgénérations de metteurs en scène, dont les plus connus enU.R.S.S. sont Meyerhold, Vakhtangov, Soulierjitski etDikii. De nombreux acteurs et chanteurs célèbres ont étéégalement ses élèves ou ses disciples. Certains, commeMikhaïl Tchékov, Sanine et Boleslavski, ont propagé sadoctrine dans d'autres pays d'Europe et en Amérique.Stanislavski s'est lié d'amitié avec de nombreux hommes

de théâtre occidentaux qui venaient en Russie ou dontil avait fait la connaissance pendant les tournées duThéâtre d'Art : Gordon Craig, Max Reinhardt, AndréAntoine, Jacques Copeau, le considéraient comme leurmaître.

Aujourd'hui encore, l'influence de ce metteur en scènerusse s'exerce en profondeur et avec une ampleur crois¬sante sur l'évolution du théâtre dans le monde entier. De

grands artistes de France et d'Italie tels que Jean Vilaret Eduardo de FUippo en portent témoignage, de mêmeque des hommes de théâtre de Grande-Bretagne, d'Amé¬rique, du Japon, de Chine, de Tchécoslovaquie, de Pologneet de divers pays nouvellement indépendants.

Photo officielle soviétique

Grigori Vladimirovitch Kristi, metteur en scène soviétique, estprofesseur à l'école du Studio du Théâtre d'Art de Moscou. Il fut

14 l'ami et l'élève de Stanislavski, sous la direction duquel il fit sesdébuts de metteur en scène d'opéra et de professeur au Studiod'Art dramatique que Stanislavski créa en 1935.

UNE TRADITION DE FAMILLE. Stanislavski avait

trois ans quand il monta pour la première fois surune scène, dans le petit théâtre de la maison decampagne que ses parents possédaient à Lioubimovka,près de Moscou (à droite). Dès l'âge de 14 ans, ilapparut régulièrement sur la scène familiale. Tout sonentourage avait la passion du théâtre et favorisaitsa vocation. Sa grand-mère maternelle était uneactrice française, Marie Varley; les deux s etles deux frères de Stanislavski devinrent eux aussi

acteurs ou metteurs en scène. Ci-dessus, Stanis¬

lavski en 1881, à l'âge de 18 ans, alors qu'il jouedans une troupe d'amateurs « Le secret d'une femme ».L'année suivante, il mettait en scène sa première pièce.

Page 15: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

.....

:- .-

4 :.-

X^^'X'M:. .

: . :

- : ':*""

"MA VIE DANS L'ART"Dernières pages

du testament spirituel

de StanislavskiJ e ne suis plus jeune ; le dernier acte de ma vie artistique appro-

' che. Le temps est venu de faire le bilan et de fixer le plan demes derniers travaux. Régisseur et acteur, j'ai travaillé, d'une part, dansle dómame de la mise en scène, d'autre part dans celui de la création spiri¬tuelle de l'acteur.

J'ai essayé toutes les voies et tous les moyens ; j'ai payé mon tribut àtous les modes de mise en scène réaliste, historique, symboliste, idéolo¬gique ; j'ai étudié les courants et principes les plus divers réalisme, natu¬ralisme, futurisme, architecture, statuaire, stylisation par le moyen de dra¬peries, paravents, tulles, effets de lumière. Je suis arrivé à la convictionqu'aucun de ces moyens ne crée pour l'auteur le fond que réclame son art.Après avoir étudié le décor, pour en venir à constater l'extrême pauvreté deses possibilités, je ne puis que répéter qu'elles sont usées jusqu'à la trame.

Le seul maître de la scène, c'est l'acteur de talent. Mais je n'ai pas réussi,en fin de compte, à lui trouver un milieu scénique qui faciliterait son travailau lieu de l'entraver. Ce milieu doit être simple, d'une simplicité provenantd'une invention non point pauvre, mais abondante. Et je ne- sais commentm'y prendre pour que cette riche simplicité ne soit aussi criarde que le luxeoutré, car l',il habitué à l'ambiance théâtrale en est plus fortement frappé.Peut-être, un jour, naitra-t-il un grand peintre pour résoudre ce problème,le plus difficile de tous les problèmes scéniques.

En ce qui concerne l'euvre spirituelle de l'acteur, tout est abandonné autalent, à l'intuition, au dilettantisme effréné de chacun. Les lois profondesde la création dramatique ne sont pas connues ; beaucoup estiment qu'il estinutile, sinon nuisible, de les étudier.

-

La patiente poursuite de la véritéPour les uns, l'acteur n'a besoin que d'avoir du talent et d'être inspiré ;

pour les autres, la technique prime tout ; si l'on a, en plus, du talent, tantmieux ! Si ces derniers craignent tellement la vie de l'esprit, n'est-ce pasparce qu'eux-mêmes ne savent ni sentir ni vivre sur la scène ?

Puisque neuf dixièmes du travail de l'acteur consistent -à sentir le rôle, àle vivre, et que, ceci fait, la tâche est presque achevée, il est absurde d'aban¬donner ces neuf dixièmes au hasard. Les lois ne sont pas faites pour lestalents exceptionnels, et ce sont plutôt eux qui les dictent. Mais commentse fait-il que jamais aucun de ceux-ci ne m'ait confié que toute techniqueétait inutile, qu'ils m'aient au contraire déclaré que c'est à elle qu'appar¬tient la première place ? Plus l'acteur est grand, plus il s'intéresse à latechnique de son art.

Pas d'art sans virtuosité. Degas ne disait-il pas : « Si tu as pour centmille francs de maîtrise, achètes-en encore pour cinq sous. »

Cette nécessité est particulièrement évidente dans notre art. Tandis queles traditions des autres arts sont conservées dans les musées, les livres,les partitions, la tradition théâtrale ne vit que- par l'acteur. Le flambeaune peut être transmis que de main en mam ; et non pas du haut de lascène, mais à l'aide de l'enseignement, au moyen de révélation et deconstantes indications, d'une part, de labeur tenace et inspiré, de l'autre.

L'art de l'acteur diffère des autres en ce que tout autre créateur peutattendre l'inspiration. L'acteur doit savoir commander à l'inspiration et lafaire surgir quand l'affiche le réclame. Tout est là, contre quoi la techniqueextérieure la plus parfaite, les dons les plus heureux restent inefficaces.Malheureusement le secret en est jalousement défendu. A quelques raresexceptions près, les grands maîtres de la scène non seulement ne cherchentpas à le transmettre à leurs jeunes émules ; ils le dissimulent sous un voileépais, et nous avons perdu la tradition. Or, faute de cette tradition, notreart est voué au dilettantisme. Faute de pouvoir se frayer consciemment lechemin de la création inconsciente, les acteurs en vinrent au funeste pré¬jugé qui rejette la technique intérieure, spirituelle. Ils s'immobilisent sur lepoint mort du métier, prenant une quelconque émotion d'acteur pour del'inspiration.

Des pensées isolées des grands législateurs de notre art ont été conser¬vées, pensées formulées par Shakespeare, Molière, Riccoboni père et fils,Less'ing, le grand Schrrder, G Talma, Coquelin, Irving, Salvini et biend'autres. Mais ces réflexions et ces conseils précieux ne forment pas unsystème, ne sont pas ramenés à un même dénominateur ; et notre art nepossède toujours pas de principes solides capables de guider l'enseignement.Tout ce qui est écrit sur le théâtre est soit philosophie, parfois très inté¬ressante, mettant fort bien en lumière les résultats souhaitables, soitexamen 'critique raisonnant de l'utilité des résultats obtenus.

SUITE PAGE 17

15

Page 16: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

« Je suis un acteur de composition » disait de lui-même Stanislavski.En scène, sa métamorphose physique tenait du prodige, en partieparce qu'elle était provoquée par l'exacte compréhension d'uncaractère, en partie parce que, sous le masque du maquillage, Stanis¬lavski pouvait sans contrainte exprimer les sentiments du personnagequ'il incarnait beau ou laid, bon ou méchant, ridicule ou sublime.Ces six photos de Stanislavski dans divers rôles permettent demesurer l'étonnant registre de l'acteur. Ci-dessous, Argan, le« Malade Imaginaire » de Molière.

Photos officielles soviétiques

L'ACTEUR

AUX CENT VISAGES

Dans «Un mois à

la campagne » deTourgueniev.

16

Dans «Le cadavre

vivant» de Léon

Tolstoï.

Dans «Oncle Va¬

nia » de Tchékov.

Dans « Le mal¬

heur d'avoir tropd'esprit » de Gri-boïedov.

Dans « Lili », opé¬rette de Hervé.

Page 17: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

STANISLAVSKI (Suite)

Tous ces travaux, précieux et indispensables, n'apportent pratiquementet immédiatement rien, car ils passent sous silence la question du« comment » ? Comment aboutir ? Par où commencer ? Puis, comment allerplus loin, au cours de l'enseignement tant avec le débutant qu'avec unacteur expérimenté, Voire gâté ? Quels exercices lui proposer, semblables àceux du solfège ? Quels arpèges, quelles gammes sauront développer le sen¬timent créateur et celui de la vie ? Il faut les énumérer par articles, commedans des manuels d'arithmétique avec exemples systématiques, a l'écolecomme dans le privé. Pas un des livres écrits sur le théâtre n'en parle. Pasune seule méthode pratique : des essais, dont il est Inutile ou dont il estprématuré de parler.

Est-il besoin de dire qu'il ne peut y avoir de système pour créer l'inspira¬tion, comme il ne peut y avoir de système pour être un violoniste génial oupour chanter comme Chaliapine ? Ceux-ci possèdent l'essentiel, le don desdieux. Si peu que ce. soit, il y a cependant quelque chose de pareillementindispensable à Chaliapine et au dernier choriste, puisque l'un et l'autrepossèdent des poumons, un système respiratoire, des nerfs et tout un orga¬nisme physique, plus parfait chez l'un, moins parfait chez l'autre, qui,pour émettre les sons, suivent les mêmes lois humaines. De même pour la viepsychique. Tous les acteurs sans exception absorbent la nourriture spiri¬tuelle selon les lois naturelles établies ; ils conservent leurs perceptionsdans la mémoire intellectuelle, affective ou musculaire, ils transformentces matériaux à l'aide de leur imagination d'artiste, ils conçoivent uneimage avec toute la vie qu'elle implique, et ils l'incorporent d'après deslois obligatoires et connues.

Tel un chercheur d'or...

Ces lois de la création, accessibles à notre conscience, ne sont pas nom¬breuses ; leur rôle n'est pas un rôle honorifique, 11 a ses tâches précises.Ces lois doivent être étudiées par tout acteur. C'est par elles seules quel'on peut mettre en marche le superconscient, dont l'essence, à ce qu'ilsemble, restera pour nous à jamais miraculeuse. Plus le génie est grand,plus le secret est grand et mystérieux, et moins il peut se passer desprocédés techniques, accessibles à la conscience ; c'est par eux qu'il pénètredans les refuges secrets où repose l'Inspiration.

Nous devons chercher à comprendre les perspectives, le but final qui atti¬rent la jeune génération. Il est extrêmement intéressant de vivre et d'obser¬ver ce qui se passe dans les jeunes c et les jeunes esprits.

Cependant, dans cette situation nouvelle, je voudrais éviter deux atti¬tudes : celle du petit vieux qui se maquille et qui fait la cour aux jeunes,espérant passer pour leur contemporain, et celui du vieillard trop chargéd'expérience, ayant tout compris, intolérant, hargneux, coléreux, quin'admet aucune nouveauté, oubliant les recherches et les erreurs de sapropre jeunesse.

Pendant les dernières années de ma vie, je voudrais être ce que je suisen réalité, ce que je dois être suivant les lois mêmes de la nature, selonlesquelles j'ai travaillé et vécu. Mais qui suis-je ? Qu'est-ce que je représentedans cette nouvelle vie théâtrale qui naît ? Puis-je, comme par le passé,comprendre jusqu'à la moindre nuance tout ce qui se passe autour de moi,tout ce pour quoi se passionne la jeunesse ?

.. Organiquement, je ne le puis pas toujours. Il faut avoir le courage del'avouer. M'ayant lu, vous savez comment nous fûmes élevés. Compareznotre vie d'alors avec celle qu'a endurée la jeune génération dans les dan¬gers et les épreuves de la Révolution !

En outre, nous savons, par expérience, et non seulement en théorie, cequ'est l'art éternel et la voie qui lui est tracée par la nature, et nous savonségalement ce qu'est la mode et ses courts sentiers. Nous avons pu nousconvaincre qu'il est bon parfois pour un homme jeune de quitter la granderoute et d'errer quelque temps par les sentiers. Mais il est dangereux deperdre tout à fait la grande route, sur laquelle l'art avance depuis des tempsimmémoriaux.

Comment pourrais- je communiquer aux jeunes générations les résultatsde mon savoir et les avertir des erreurs engendrées par l'inexpérience ?Quand je jette un coup d'*il rétrospectif sur ma vie dans l'art, j'ai enviede me comparer à un chercheur d'or qui eut longtemps à errer dans labrousse pour découvrir le filon et qui dut ensuite laver des quintaux desable pour en extraire quelques pépites. Comme le chercheur d'or, je nepuis transmettre ni mes peines, ni mes joies, ni mon labeur, mais ce quej'ai obtenu de noble métal.

Le texte ci-dessus est extrait de « Ma Vie dans l'Art », de Constantin Stanislavski,traduit par Nina Gourfinkel et Léon Chancerel (© Librairie Théâtrale, Paris, Editeur.(Deuxième édition, avec une Préface de lacques Copeau). Un autre ouvrage importantde C. Stanislavski, « La Formation de l'Acteur », a paru chez Olivier Perrin © Paris(Traduit par Elizabeth lanvier, avec une introduction de lean Vilar). La publicationdes de Stanislavski en 8 volumes est actuellement en cours en U.R.S.S. auxEditions de l'Académie des Sciences de 1'U.R.S.S.

17

Page 18: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

STANISLAVSKI (Suite)

Pnotos officielles soviétiques

« Toutes les créations des acteurs russes du Théâtre d'Art de Moscou sont admirables », écrivait

le célèbre metteur en scène anglais Gordon Craig en 1908. « Qu'ils aient à traiter un épisode dela vie ou la passion contemporaine, ou un conte de fées, toujours ils y apportent un doigté sûr,délicat, magistral. Rien qui soit brouillonne. » Ci-dessus, séance de travail pour « la Mouette »de Tchékov, en 1898. Le lecteur est Tchékov lui-même; assis près de lui, Stanislavski (à gauche),et l'actrice Lilina (à droite), son épouse. A l'extrême gauche, debout, Vladimir Némirovitch-Dantchenko, auteur dramatique qui fonda avec Stanislavski le Théâtre d'Art. A l'extrême droite,assis, Vsévolod Meyerhold, metteur en scène, disciple de Stanislavski. Ci-contre, une page desCarnets de Stanislavski, avec un dessin et des commentaires de travail pour « La Mouette ».Stanislavski a très souvent préparé par écrit, dans le détail, ses mises en scène.

LE

METTEUR

EN

SCÈNE

/ e 7 A ZM> ' .-

. ,f*l í/IAaaí \sc^++s> iaam ¿£J;q U-£aj SA.AÍX. ÇMJK-AIAaJ. *-0 ! AA.A>..AV<..<

a,ouj> %Lmj*z*j.¿a*, f~~ \

/iiutXk. ym-fyMÎLaJt^.:M« )l ;/."!}« ¡M.AÍM t¿év*7

J*,,<i !..

S tUt.A ' <''Z¿J>*-<.Í.- ï

\rtUuJi tfy: vi ¿JiA«au./> XX"') tUA.jt-.iA) CaaA^a..

¡J£*'-«¿¿-^ce.X"/¿Ht tAA,At*A^cM

s , ^ <¿«A^l/ UaV ¡f/.MU*. C::<AJ^U' , âct^t j^ , fru

r<>-f < KJ-Si..JP\ t,*.A,.<j-*-f.^i t .<x-- w>.je.-) ¿A^.A tt.-i, /Ua^lJ. j t-CAX/./A ^^s\_ (J/r>illjiif~ [jl^f'. :(.X ... , _..,,. CAljUAA 1^*-&~¿4-Áa\*£ tU¡l¿M<*--*C*A < .i.A." M^MaÇ, , V ^/. ( , .,

Xv_ m<; i^<i« Í «j,' A il< , Vt.AA.At.

< Sa.,,

18

Page 19: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Photos officielles soviétiques

A la perfection de la miseen scène et du jeu drama¬tique, Stanislavski n'attei¬gnit qu'après maints tâton¬nements, au prix d'uneréflexion rigoureuse et d'untravail incessant, sans né¬

gliger jamais aucun détail.« Il n'y a pas de petitsrôles, disait-il, il n'y a quede petits acteurs. » Ci-des¬sus, « Tartuffe », de Molière ;Stanislavski en fit la mise

en scène peu avant samort, survenue le 7 août

1938, et la pièce ne futreprésentée qu'en 1 939. Adroite, «les Bas-Fonds», deMaxime Gorki (1902).L'extraordinaire évocation

de l'asile de nuit boule¬

versa la conception duréalisme au théâtre, en

Russie d'abord puis danstoute l'Europe. Au centrede la scène, Stanislavski

dans le rôle d'un vagabond.Pour créer «les Bas- Fonds»,il travailla en étroite colla¬

boration avec Gorki. A

gauche, une scène du« Révizor » de Gogol (1 908)

Page 20: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

NOTATIONS ARTISTIQUES

Tout au long de sa vie, Stanislavski notait sur des carnetsles observations et les réflexions que lui inspiraient les évé¬nements quotidiens de sa vie professionnelle. Une centainede ces carnets sont conservés au musée du Théâtre d'Art deMoscou. Ses notes, dont nous donnons ci-après une petitesélection, constituèrent les éléments de base de ses livresoù il nous lègue son expérience et son enseignement.

crois l'importance de l'acteur en faisantde lui un collaborateur de l'auteur. Ce

rôle est infiniment plus flatteur que celuique les acteurs choisissent eux-mêmes. Ilsdésirent utiliser les créations des autres

pour jouer leur propre personnage. Il estplus flatteur de collaborer avec Shakes¬peare, par exemple, que de l'exploiter.

1899-1911

Si vous jouez un méchant, cherchez sesbons côtés. .

L'intuition n'est pas pour un acteur lemeilleur des guides. Ainsi, quand je m'ou¬blie mol-même, je joue mal ; je parle trop,je fais des gestes inutiles, ma voix déraille,je grimace et je gâche tout.

On va au théâtre pour se divertir, et l'onen sort plus riche de savoir, ou bien enayant résolu des problèmes, ou en seposant des questions que l'on tentera,chacun pour sol, de tirer au clair ; oubien encore conscient d'une réalité quoti¬dienne que seul un génie a notée (« LeRévizor » de Gogol, par exemple).

Aussi longtemps qu'un acteur lutte pouratteindre un idéal, il est un artiste ; maisquand il a atteint cet idéal, il devient unartisan.

Pour rendre sensible le silence, il doit

y avoir une sorte de bruit. Pour suggérerune rue vide, il faut que quelques figurantss'y promènent. Pour exprimer la gaieté,vous devez avoir l'air morose. Tous ces

états dépendent de leurs rapports avecleurs contraires.

Si le metteur en scène manque desensibilité ou d'imagination et ne peutajouter ne serait-ce qu'un détail insignifiantqui n'est pas indiqué par l'auteur, ou quecelui-ci a omis, un détail que l'auteur nepuisse désavouer, alors il n'est pas dignede sa vocation. Même quand il s'agit dugrand Shakespeare, le metteur en scènedoit en travaillant inventer des détails pourinterpréter l'idée de l'auteur, et le fairemieux comprendre, ou pour aider l'acteurqui ne possède peut-être pas les dons né¬cessaires pour communiquer la pensée del'auteur ; car il n'est pas possible à l'auteurlui-même de prévoir tous les hasards dansla vie complexe de la scène.

Des critiques et des spectateurs bornésqui ne réussissent pas à saisir l'ampleurd'une d'art sont effrayés par lanouveauté quelle qu'elle soit, et ont peurde s'y perdre. Ils accumulent autour del'art force règles et conventions sans les¬quelles ils ne peuvent vivre.

On me reproche de sous-estimer l'im¬portance de l'acteur, et d'exagérer le rôlede l'auteur. C'est faux. Au contraire, j'ac-

1912-1928

Ce matin, 16 décembre 1912, épuisé aprèsla représentation d'hier, je me sentais maien train pour jouer « Oncle Vania ». C'étaitcrucifiant. Mais le public écoutait si atten¬tivement que j'étais forcé d'agir, et aumilieu du Premier Acte, je me trouvaismoi-même sous l'influence de l'excellent

climat qui régnait dans la salle, et je jouaisavec autant de plaisir que dans un rô|enouveau que j'aurais parfaitement dominé.Ce qui tendrait »a prouver que le publicest le troisième créateur d'une représen¬tation théâtrale I

Les théoriciens se cassent la tête contre

la théorie, et ne voient rien de l'autre côtéde ce mur.

L'académisme n'a pas de défauts, il n'aque des qualités, et c'est pourquoi il estmort, sec et sans vie.

La sentimentalité est supportable tantqu'elle exalte votre sensibilité pour letravail Créateur et qu'elle vous réchauffele céur ; mais dès l'ïnstant qu'elle com¬mence à envahir la sensibilité, substituant

à de vrais accents d'amour un lyrismelarmoyant, elle devient mauvaise.

Quand je suis dans la salle, je comprendstout, exactement ce que j'ai à -faire, et

20

Page 21: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

comment je dois le faire. J'entre en scène,et je deviens sur le champ un idiot, quine comprend pas la chose la plus simpleeh matière de sentiments et de rapportsentre des sentiments divers. Comprendre,se souvenir et sentir voilà des domainesdifférents.

N'analysez pas une intonation, maisl'émotion qu'elle fait naître.

Un jeu d'acteur constitue l'exécutiond'un certain nombre de tâches créatrices,correspondant aux intentions de l'auteurpleinement accomplies si l'acteur vit véri¬tablement son rôle.

Il est clair aujourd'hui que la crise duthéâtre de divertissement, du théâtre conçucomme pur spectacle a déjà, commencé etqu'elle est d'ailleurs inévitable. Du point devue des effets extérieurs, du point de vuepurement professionnel, la cinématographiea vaincu le théâtre. Le décor, qu'il s'agissede stylisation ou de naturalisme, leséclairages de masses, les défilés, lesscènes de la vie quotidienne, les tem¬pêtes, le vent, tout cela au cinéma estincomparable. Et pour que le cinémasoit sonore, ce n'est qu'une question d'an¬nées. Et ce n'est qu'au cinéma que peuventse répéter indéfiniment ces émotions queressent l'acteur dans les premières phasesde son travail, quand son rôle est encoretout frais, avant que ses sentiments nesoient devenus rassis et stéréotypés. Les-acteurs peuvent se voir jouer eux-mêmes,juger de leur travail, ce qui leur donnela possibilité de se perfectionner eux-mêmes.

SUITE PAGE 22 Après la Révolution, en 1918, Stanislavski se vit confier ladirection du Studio de l'Opéra du Grand Théâtre de Moscou etentreprit de débarrasser l'opéra des conventions du genre. Ci-dessus, devant un portrait de la danseuse Anna Pavlova,Stanislavski (assis) et le chanteur Féodor Chaliapine (à gauche).

Au cours de ses voyages à traversl'Europe et les États-Unis, Stanis¬lavski a partout été accueilli etcélébré comme le grand réforma¬teur de l'art dramatique. Le voici(à droite) en 1924 à New York,assis auprès du fameux acteurRudolph Valentino, dans les stu¬dios de Paramount, où l'on tour¬nait le film « Monsieur Beaucaire »;assises à droite, les actrices BebeDaniels et Lois Wilson. Les photosde gauche montrent Stanislavskien compagnie de la chanteuseMarian Anderson, et à table, avecl'écrivain britannique G.B. Shaw,en 1931.

Photos officielles soviétiques

Page 22: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Photo Agnès VardaUNE INFLUENCE UNIVERSELLE. De son vivant déjà, Stanislavski a vu son influence s'exercerbien au-delà des scènes de son pays. « Et ce n'est pas terminé, écrit à ce sujet le grand metteuren scène français Jean Vilar. Les milliers de spectateurs qui vont au théâtre, le soir, à New Yorkaussi bien qu'à Moscou, à Rome aussi bien qu'à Paris, à Berlin aussi bien qu'à Londres, ignorentque ce qu'ils admirent ¡ci ou là, sur la scène, depuis le jeu de l'acteur jusqu'à la tenue des groupes,vient souvent de la leçon de Stanislavski. » Ci-dessus Jean Vilar (au premier plan) dans « LeFaiseur », pièce de Balzac, au Théâtre National Populaire, à Paris.

NOTATIONS ARTISTIQUES (suite)

22

Shakespeare est illimité, si bien quechacune de ses iuvres requiert une formede mise en scène particulière.

1) La Tempête à monter comme un mys¬tère (dieu, peuple, les primates ancestraux).A l'avant-scène un chlur (l'orchestren'est pas nécessaire, un chrur lèvres clo¬ses, les voix ne prononçant pas de mots).

2) Jules César, Coriolan doivent être luscomme des discours au parlement.

3) Le Marchand de Venise. Trouver uneforme de conte de fées. Sur toile de fond

jaune et un mur sale.

4) Le Roi Lear. Sur fond de draperiesnoires quand . éclate la terrible douleurde Lear, sur fond de riche tapisserie quandil est dans toute sa gloire, sur fond blancquand Cordelia est pure, sur fond rougequand les ssurs diaboliques révèlent leurvraie nature.

Les acteurs sont superstitieux parce qu'ilsse soumettent eux-mêmes aux aléas de

l'inspiration.

... Plan d'un nouveau théâtre, avec unmusée derrière la scène, de la musique,des conférences..., etc. Dans le nouveauthéâtre, l'orchestre ne devra pas êtrecomme aujourd'hui dans la fosse, mais der¬rières les praticables.

Les mots doivent être un moyen et nonun but.

Vous pouvez imaginer, voir et entendreintérieurement comment vous-même joue¬riez ou parleriez à un moment donné, enétudiant un rôle vous, ou une personneque vous imaginez. Ces évocations inté¬rieures amènent l'acteur à copier l'ima¬ginaire. En d'autres termes, cette méthodeconduit à une imitation, à une descriptionressemblante d'un rôle. Mais vous pouvezaborder un rôle par une autre méthode,-en vous mettant en lieu et place d'unpersonnage. Vous pouvez sentir votre par¬tenaire à vos côtés comme l'âme même

du personnage qu'il incarne : vous pouvezvous assigner un but précis et peu ouprou exercer une influence sur votre parte¬naire et l'âme même du personnage qu'ilincarne. Et vous commencerez alors à

atteindre votre but qui est de jouerinstinctivement, d'après votre expériencede la vie. Cette méthode permet à l'acteurde vivre son propre rôle, de créer enjouant.

Quand ils jouent, les acteurs siintéres-sent toujours au "comment" et non pas au"quoi".

Les metteurs en scène commettent une

grave erreur quand Ils imposent à l'acteurleurs propres sentiments et leur propreconception d'un rôle. C'est là un abus.La fonction d'un metteur en scène estautre. Avant tout, le metteur en scène doit

comprendre les penchants de l'acteur, ildoit saisir les contours de tous ceux quiparticipent à un spectacle. Il doit prendreen considération ce qu'ils sont susceptiblesde créer en esprit, puis se rendre comptede ce qui peut être exprimé et de lamanière dont il faut l'exprimer. S'il imposesa sensibilité personnelle, il ne pourraobtenir des acteurs des éléments de vie

frémissante, et d'éléments morts fera uneauvre morte.

Si un critique a du talent, il peut êtreun ami pour l'acteur et l'aider dans sontravail en assumant le rôle d'un intermé¬

diaire capable d'expliquer ses qualités d'ac¬teur au public. Un critique qui manque detalent fait du tort à l'acteur, même quandil lui décerne des louanges.

Dans la vie, rien ne se répète. Il n'ya pas deux personnes, deux pensées nideux sentiments semblables. Les sentiments

que l'acteur exprime aujourd'hui sur lascène, il ne pourra les répéter demain.C'est pourquoi l'émotion ne peut jamaisêtre définie une fois pour. toutes, elle doittoujours être spontanée.

Page 23: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

A LA RECHERCHE

D'UNE LANGUE UNIVERSELLEpar Mario Pei

L'universalité était implicitement contenuedans la notion du monde antique des Romains

comme dans celle du monde médiéval. Le latin, langue del'Empire romain universel et de l'Eglise chrétienne uni¬verselle, est resté celle de tous les érudits occidentauxjusqu'à l'avènement de la Renaissance.

Mais l'essor du progrès, l'invention de l'imprimerie etl'extension de l'instruction aux classes supérieures et

moyennes jadis illettrées, à quoi s'est ajoutée la forma¬tion d'Etats nationaux modernes, ont assuré la promo¬tion des langues vernaculaires que parlaient les masses.Le xrv" siècle a vu le triomphe définitif des langues natio¬nales sur le latin qui avait occupé la première place pen¬dant le millénaire suivant la chute de l'Empire romaind'Occident, et l'Europe a pris dès lors son aspect linguis¬tique moderne, avec toute une série de langues natio¬nales, tant littéraires qu'officielles.

Il n'est donc pas surprenant que nombre de gens àl'esprit éclairé aient commencé à se pencher sur le pro¬blème d'une langue unique, qui puisse servir aux multi¬ples échanges culturels alors en voie d'établissement. Lelatin ne suffisait plus. Au xnr siècle, l'érudit qui voya-

joint à sa missive une notice latine anonyme concernantl'intérêt qu'aurait une langue internationale le grandphilosophe exposa ses propres vues sur la question. Aprèss'en être pris aux difficultés des grammaires nationales,qui empêchent les étrangers de saisir le sens d'un pas¬sage à l'aide du seul dictionnaire, Descartes poursuivit enpréconisant la création d'une langue dont la grammaireserait si simple, d'une régularité et d'une logique si abso¬lue qu'elle pourrait être apprise sans effort par n'importequi. Parallèlement, il proposait l'adoption d'un systèmede fabrication des mots, grâce auquel les conceptions del'intelligence humaine se présenteraient dans un ordreIdentique à celui des nombres, si bien qu'il y aurait danscette nouvelle linguistique tout comme en mathéma¬tiques progression logique du connu à l'inconnu. Unefois cela réalisé, concluait Descartes, les paysans pour¬raient arriver à la vérité bien mieux que les philosophesne le font aujourd'hui.

Ce que Descartes proposait ainsi, mais sans fournird'exemple, était une langue artificielle du type a priori,ou philosophique, dont la grammaire différerait des gram¬maires existantes en ce sens qu'elle obéirait à des règlesne souffrant pas d'exception, et dont le vocabulaire ne

LEBTOREONFO PEETOFOSENSEN

PIFTOFOSENSEN

(Tes père et mère honoreras)

geait ne tenait à s'entretenir qu'avec ses pairs, et toussavaient le latin. Au xvir siècle, en revanche, l'érudit dé¬sirait entrer en communication orale avec toutes sortes

de gens négociants, marins, soldats, nobles, peut-êtremême paysans qui ignoraient le latin. Quant aux lan¬gues vernaculaires, non seulement elles étaient trop nom¬breuses, mais elles étaient aussi trop subdivisées en dia¬lectes locaux.

Cependant, Comenlus, un éducateur du xvir siècle dontla culture était véritablement internationale, lança uneproposition stupéfiante : les principales langues d'Europeorientale et occidentale seraient employées pour l'usageInternational, le russe dans l'Est, le français et l'anglaisdans l'Ouest.

Depuis lors, jusqu'à l'heure présente, diverses proposi¬tions du même ordre ont été énoncées. Le mouvement

du « monde-bilingue », la conception de Staline relativeaux « langues zonales », la théories de l'emploi généraliséde L'anglais anglais normal, « Basic English » ou l'an¬glais à orthographe révisée ne représentent que troisdes nombreuses suggestions visant à utiliser pour lesrelations internationales des langues nationales, existanteset naturelles, soit indépendamment soit en combinaison,sous leur forme originale ou sous une forme modifiée.

La proposition avancée en 1629 par le philosophe fran¬çais Descartes est d'une nature radicalement différente.

En réponse à une lettre du père Mersenne lequel avait

se serait pas construit au hasard mais selon des asso¬

ciations logiques. Pareille langue, fondée sur le principed'analogie des opérations mathématiques, pourrait cer¬tainement être mise au point, mais sa structure ne coïn¬ciderait avec celle d'aucune langue connue.

Si Descartes n'a pas présenté d'échantillon de sa langueinternationale idéale, plusieurs de ses contemporainsDalgarno, Urquhart, Wilkins, Leibniz l'ont fait aussitôt.En 1657, Cave Beck a proposé un système ingénieux,fondé sur des combinaisons de lettres et de chiffres à

employer pour l'écriture, les chiffres étant remplacés pardes sons dans le langage parlé. D'après ce système, « Tespère et mère honoreras » s'écrirait « leb2314 p2477pf2477 » et se lirait « lebtoreonfo peetofosensen piftofo-sensen » (chaque chiffre correspond à une syllabe orale).Les raisons de l'échec de ce système sont assez évidentes :il imposait à la mémoire un effort colossal.

Depuis l'époque de Descartes, Leibniz et Beck, on estimeà six cents au moins le nombre de suggestions diffé¬rentes qui ont été proposées pour résoudre les problèmeslinguistiques du monde. Leur succession chronologiqueest intéressante à observer. Après le xvir siècle, l'intérêtpopulaire semble fléchir.

De 1800 à 1850, il n'est pas mis au point plus de quatreprojets importants ; mais l'un d'eux est le célèbre « Sol-

résol » de Sudre, fondé sur les notes de la gamme, qui 23

SUITE PAGE 26

Page 24: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

"Alio! Hallo!" - ou Tart de

Ces dessins ont été faits spécialement pour le Courrier de I'Unesco parl'artiste roumain Ion Popesco-Gopo, l'un des maîtres du dessin animé, quioffre à nos lecteurs quelques ¡mages inédites de son film « Alio! Hallo!Petite Histoire Universelle de l'Information ». Ce petit chef-d'auvre pleinde grâce et d'humour narre l'aventure de l'homme apprenant à commu¬niquer avec son semblable. Homo sapiens, le drolatique héros de ces dessins,va de découvertes en découvertes parfois fortuites toujours l'espriten alerte, du signal d'un panache de fumée aux graffiti, des hiéroglyphesau téléphone, de la radio aux réseaux internationaux de télévision grâceaux satellites de relais. Quand Gopo achève son histoire, il entrevoit hardi¬ment les communications interplanétaires de demain. «Alio! Hallo!» a étéproduit pour I'Unesco par les Studios Bucarest, avec la collaboration dela Commission Nationale roumaine pour I'Unesco.

Photos Unesco

24

IONPOPESCO-GOPO,quel'on voit ici travaillant à

« Alio I Alio I » dans les

studios de Buftea, près deBucarest, a été caricaturiste

de presse. C'est le dessinanimé qui lui a révélé savéritable vocation. Depuis1960 ses films ont reçunombre de prix dans diversfestivals de cinéma (Edim¬bourg, Cannes, Tours, Kar-lovy-Vary, San Francisco).Tenté par le long métrage,il a réalisé l'année dernière

un film dont le thème est

l'emploi exclusif de l'énergieatomique à des fins paci¬fiques. Il travaille actuelle¬ment à un long métrage :« Des pas sur la Lune ».

Page 25: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

communiquer

-O:v *..

¿V¿er*

m 1 it 4

m&52 ! '

®

ffl¡D1000

i&iIk

CD<±r*>

1,4 i"

Ma1 Tß^«5>J

P**

feÄt^x. « * -

.; ? ¿X ' ¿.:f«!*25

Page 26: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

A la recherche d'une langue universelle(Suite de la page 23)

a suscité un grand intérêt et bénéficié au cours des annéesdu patronage.de personnalités telles que Victor Hugo,Lamartine, Humboldt et Napoléon III ; à certain moment,

cette langue a été parlée par un grand nombre de gens,et elle a gardé des partisans irréductibles jusqu'en 1900.Du point de vue statistique, les différentes combinaisonsdes syllabes do, ré, mi, fa, sol, la et si donnent 7 motsd'une seule syllabe, 49 mots de deux syllabes, 336 mots detrois, 2 268 mots de quatre et 9 072 mots de cinq. En faisantpasser l'accent d'une syllabe sur une autre, on peut chan¬ger la fonction d'un mot, faire d'un substantif un verbe,un adjectif ou un adverbe. Cette langue peut être chantée,jouée ou fredonnée au lieu d'être parlée. Il est possible del'écrire sur une portée musicale ; pour des communica¬tions à distance, on peut indiquer les syllabes en frappantdes coups ou même à l'aide de couleurs. L'expression « Jen'aime pas » se rend par « doré do mïlasi ».

L'idée d'une langue artificielle du type a priori, sansaucun rapport avec les langues existantes, n'est pas entiè¬rement morte, comme le prouvent deux systèmes intéres¬sants mis au point au xx« siècle, l'un et l'autre d'origineaméricaine. Il s'agit, d'une part, du « Ro » de Foster(1912), dans lequel le début du Notre Père se traduitcomme suit : Abze radap av el in suda, ace rokab ecosugem ; ace rajda ec kep ; ace va eco uz in suda asi inbuba ». L'autre langue est la « Suma » de Russell (1957),dans laquelle le premier livre de la Genèse commenceainsi : « Talo moti sima baki boto e beto e beto te peka

e ena gide e ena doba ».

Bien plus nombreuses et plus variées sont les languesdu type a posteriori, ayant leur base dans une ou plu¬sieurs langues naturelles existantes. Ici, il convient d'éta¬blir une distinction entre les systèmes qui apportent desmodifications à une langue existante unique et ceux oùil y a fusion de langues de divers genres.

Exemple typique de langue naturelle modifiée, le « BasicEnglish » est de l'anglais ordinaire dont le vocabulaireest limité de telle sorte qu'il faut rendre « participate »

(participer) par « take part » (prendre part) , et « selfish »(égoïste) par la paraphrase « without thought of others »(sans penser à autrui). Ses créateurs prétendent (sansque ce soit absolument justifié) qu'avec les 850 mots

s'est dégagé au xvin" siècle, remplaçant l'idée premièred'une langue fondée sur la logique, est le suivant : « Laplus grande facilité pour le plus grand nombre. »

Mais étant donné qu'à l'époque où cette théorie a étéénoncée le plus grand nombre dont il s'agit parlaient uni¬quement des langues du type occidental, beaucoup de cesmélanges ne sont autres, même aujourd'hui, que des com¬binaisons de latin, de grec, de roman, parfois de languesgermaniques, plus rarement encore de langues slaves, et netiennent pas compte, ou bien peu, de la multiplicité desindividus qui parlent d'autres types de langues.

La première langue a posteriori accueillie avec faveurest le « Volapuk » de Schleyer, qui apparut en 1885, lan¬gue où s'amalgamaient des éléments néo-latins, anglaiset allemands. « Je ne veux pas le livre mais un livre »se dit, en Volapuk : No vilob eli bvJci, sod uni buki.

La vogue du Volapuk ayant déjà cessé vers 1890, c'estÏ' « Espéranto », inventé par Zamenhof, qui acquit alorsune importance internationale. Là aussi, on constate uneprédominance d'éléments classiques, néo-latins et germa¬niques, tandis que les éléments d'autres langues, notam¬ment de langues slaves, n'y jouent qu'un rôle mineur(chose surprenante, car Zamenhof était polonais) *.

La popularité de l'Espéranto subsiste encore, et l'onestime à 8 millions le nombre de gens qui, dans les di¬

verses régions du monde, le parlent d'une manière oud'une autre. Il semble d'ailleurs que cette popularité aitplutôt encouragé que découragé d'autres tentatives. Plusde 400 langues artificielles, en effet, ont fait leur appa¬rition depuis le début du xx* siècle.

La plupart d'entre elles sont, au fond, du même typeque l'Espéranto, étant dotées d'une grammaire plus oumoins arbitraire et d'un vocabulaire dérivé des languesoccidentales. Cette observation s'applique même aux lan¬

gues créées par quelques-uns des plus grands linguistesdu monde (comme de Saussure et Jespersen, pour ne citer

que deux noms).

Par ailleurs, quelques systèmes très ingénieux ont étéproposés pour assurer une certaine représentation à d'au¬tres groupes linguistiques importants. Par exemple, le« Népo », de Techechikhine, apparu en 1910, ajoute des

NO VILOB ELI BUKI

SOD UNI BUKI

(Je ne veux pas le livre mais un livre)

26

anglais dont elle est composée cette langue peut satis¬faire la totalité des besoins linguistiques de l'humanité.

Si le « Basic English » conserve les sons et la gram¬maire de l'anglais normal, les auteurs d'autres languesmodifiées ont préféré ne conserver que le vocabulaire ettransformer la structure grammaticale. En 1903, Peanoa présenté un système appelé « Latino sine flexione »(Latin sans flexion), dans lequel les terminaisons latinessont supprimées ou uniformisées : « Studio theorico pro¬ba que es necessario nullo regula de grammatica, nullosuffixo de derivatione » (Une étude théorique prouvequ'aucune règle grammaticale, aucun suffixe de dériva¬tion ne sont nécessaires).

Les mélanges de langues sont très variés, allant de mo¬difications à peine déguisées du latin et du roman jusqu'àdes combinaisons où sont, en fait, représentées propor¬tionnellement toutes les grandes familles linguistiques,du monde. Le principe original qui est à leur base, et qui

éléments slaves à la combinaison d'éléments néo-latins et

germaniques (le « Notre Père » débute, en Népo, de lamanière suivante : « Vatero nia, Ikotoryja estas in la nje-boo, heiliga estu nomo vie. ») L' « Interglossa », créépar Hogben en 1943, a un vocabulaire gréco-latin, maissa syntaxe est d'inspiration chinoise (« Na Parenta inUrani ; Na dicte voló ; tu Nomino gene revero »).

La « Pasilingua » de Steiner, qui date de 1885, offredes synonymes d'origine néo-latine et d'origine germani¬que : « bon » peut se dire soit bono, soit guto ; « Dieu »se dit Deo ou Gotto ; « souvent » se dit saepe ou oftis.

En 1893, Fred Mill est allé encore plus loin avec son

« Anti-Volapük », qui combine des mots internationauxde connection, issus en grande partie du néo-latin, avec

* Voir dans le « Courrier de ¡'Unesco » de décembre 1959 l'arti¬

cle sur « Zamenhof, père de l'Espéranto ».

Page 27: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

des substantifs et des verbes tirés de la propre langue decelui qui parle, étant supposé sans doute que chaqueinterlocuteur aura appris un nombre suffisant des

substantifs et des verbes utilisés par l'autre pour êtretout au moins capable de les comprendre. La phrase « Jene sais pas où est votre frère, mais je crois qu'il est dansla rue », par exemple, serait libellée comme áuit dans les

versions anglaise, française, italienne, espagnole et russe :Io think ke le es in le street ;

Io croire ke le es in le rue ;Io credere ke le es in le strada ;lo creer ke le es in le calle ;Io dumat ke le es in le ulitsa.

Le plus large des projets tendant à assurer la représen¬tation de toutes les grandes familles linguistiques a étéformulé récemment par Leidenfrost, qui a proposé de

du terroir, ne peut être le support de valeurs culturelles.Toutefois, pour une langue destinée de prime abord àdevenir un instrument de communication matérielle plu¬

tôt qu'à servir les fins d'un Impérialisme culturel, il nes'agit pas là d'un Inconvénient, bien au contraire. L'His¬toire enseigne que les cultures se développent autour delangues qui étaient initialement des instruments de com¬munication rudimentaires, grossiers, purement matériels.Si une culture universelle se développe de manière ana¬logue autour d'une langue universelle, on ne pourra ques'en réjouir. Quoi qu'il en soit, l'Espéranto, par les nom¬breux ouvrages originaux, en prose ou en vers, qu'il apermis de produire, apporte la preuve qu'une langue arti¬ficielle est parfaitement capable, dès qu'elle est utilisée,de créer ses propres valeurs culturelles.

Deux observations de caractère essentiellement pratique

charger une commission de linguistes d'élaborer une gram¬maire et un vocabulaire universels, en amalgamant dix

langues représentatives : l'arabe iraquien, le chinois man¬darin, l'anglais, l'hindoustani, le hongrois, l'indonésien, lekpel, parlé au Libéria, le russe, l'espagnol et le swahili.

Cependant, deux grandes familles linguistiques sont ainsinégligées : le japonais coréen et le dravidien de l'Indeméridionale, parlés l'un et l'autre par plus de 100 mil¬lions de personnes.

Les dangers que peuvent présenter des mélanges si hété¬rogènes sont mis en relief par Gode, l'un des promoteursd' « Interlingua », langue élaborée par une équipe delinguistes, sur la base habituelle d'une combinaison delangues occidentales.

Il donne comme exemple le passage suivant, rédigé en« Interlingua » pure : « Le sol dice : « Io me appellasol. Io es multo brillante. Io me leva al est, e quandoio me leva, il es die. Io regurda per tu^ fenestra con mioculo brillante como le auro, e io te dice quando il es

tempore a levar te. » Puis, il en donne une version inter¬continentale qui comprend des éléments chinois, japonais,indonésiens ou issus d'autres langues orientales : « Mata-hari yu : « Wo-ti nama Mata-harl. Wo taihen brillante.Wo leva wo a est, dan tokl wo leva wo, ada hari. Womiru per ni-ti fenestra sama wo-ti mata brillante como

kin, dan wo yu ni toli ada tempo a levar ni' ». Gode faitobserver qu'aucun Occidental ne comprendra quoi que cesoit à la deuxième version s'il n'a pas spécialement étu¬dié le système et (ce qui est peut-être plus importantencore) qu'un interlocuteur indonésien, dont la languea donné mata-hari, ne comprendra pas les termes chi¬nois wo-ti, ni et yu, ni le terme japonais taihen.

Ajoutons un dernier mot au sujet de l'utilité que peutou non présenter une langue artificielle, par comparai¬son avec une langue nationale promue au rang de lan¬gue internationale. L'un des grands avantages invoquéspar les partisans des langues artificielles est leur inter¬nationalité, ou neutralité, aucune nation n'ayant lieu des'en défier sous le prétexte qu'elles sont le véhicule etle porte-drapeau de cultures étrangères.

Cet argument est tout à fait pertinent pour ce qui estdes langues a priori, qui ne se fondent sur aucune lan¬gue connue, mais il est loin de l'être pour la majorité deslangues a posteriori, qui ne sont, en fait, qu'un amal¬game de langues d'Europe occidentale, laissant de côtéd'autres familles linguistiques qui acquièrent de plus enplus d'importance dans le monde moderne.

L'inconvénient correspondant, souligné par bien deslinguistes est que la langue artificielle, n'étant pas issue

trouvent ici leur place. Qu'elles soient grandes ou petites,les langues nationales ont rarement un système parfait

de notation phonétique. Cela est particulièrement vrai delangues comme le français et l'anglais, qui sont au ser¬vice de civilisations existant depuis des siècles : le déca¬lage entre l'évolution normale du langage parlé et lamodernisation de l'orthographe tend à creuser plus pro¬fondément le fossé entre la parole et l'écriture. Les lan¬gues artificielles, au contraire, sont, en principe, entiè¬rement « phonétisées », la correspondance entre son etsymbole étant absolue (l'Espéranto offre à cet égard unexcellent exemple).

Par conséquent, toute langue nationale choisie commelangue auxiliaire internationale devrait, avant de pouvoir

être convenablement employée, subir une réforme d'ortho¬graphe (tout au moins en vue de son utilisation à des fins

internationales), tandis qu'une langue artificielle pour¬rait entrer immédiatement en usage, sans autre rechercheni modification.

Voici qui est encore plus important : les langues natio¬nales présentent habituellement de profondes disparitésde caractère dialectal, et il y a souvent incertitude quantà la forme « normale » des termes. Il en est particuliè¬rement ainsi de l'anglais et de l'espagnol et, dans une

mesure un peu moindre, du français et du russe, oùexiste une norme « correcte », qu'elle soit ou non res¬pectée par tous ceux qui parlent la langue. Par contre,une langue artificielle est d'ordinaire complètement nor¬

malisée, et le seul problème en l'espèce est d'assurer le

respect de la norme quand la langue entre en usage.

Ces deux caractéristiques des langues artificielles laphonétisation et la normalisation ont peut-être plusd'importance que la « neutralité » qui, en fait, est rare

et qui, en aucun cas, ne saurait être vraiment parfaite.Nous estimons qu'elles sont suffisamment importantespour que l'on envisage sérieusement d'utiliser sur le planinternational une langue artificielle, de pair avec les nom¬breuses langues nationales, anciennes ou nouvelles, dontla candidature est mise en avant.

Mario Pei, linguiste américain, est professeur de philologieromane à l'Université de Columbia, à New York, Etats-Unis. Ilest l'auteur d'une « Histoire de la langue anglaise » qui vient deparaître aux Etats-Unis. Le lecteur trouvera dans son ouvrage« One Language for the World » (Une seule langue pour lemonde), publié par Devin-Adair Co, 23 East 26 Street, New 27York 10, N.Y. (U.S.A), un développement des idées que MarioPei expose ici.

Page 28: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

« Devoirs », du peintrefrançais Jean Commère, vi¬vante évocation des enfants

à la maison, occupés à leursjeux et à leurs travaux.

CARTES

DE VUUX

DE

L'UNICEF

L'ANNÉE dernière, le Fonds des Nations Unies pourl'Enfance (UNICEF) a vendu plus de 26 millions de

cartes de vnux; le bénéfice de cette vente est utilisépour acheter du lait, des vaccins, et permet de protégerde la maladie des millions d'enfants nécessiteux dans le

monde. L'UNICEF espère vendre cette année 30 millionsde cartes. Chaque boîte de cartes de l'UNICEF vendueassure un verre de lait quotidien pendant une semaine à45 enfants, ou une quantité de vaccin suffisante pourprotéger 60 enfants de la tuberculose. Pour aider leFonds, des artistes de divers pays font don chaqueannée de dessins et de peintures. Les 18 cartes qui sonten vente cette année ont été créées par 11 artistes.Nous reproduisons ici quelques-unes de ces uuvres.D'autres sont dues à Gordon McCoun, un peintredu dimanche, de nationalité américaine, qui vit actuel¬lement au Pérou; à Otto Nielsen, artiste danois; àJeanyee Wong, artiste américain d'origine chinoise.

« Une étoile brille » parAdolf Oehlen (RépubliqueFédérale d'Allemagne). Cet¬te carte sera imprimée surpapier Avion.

« La Famille » par le sculp¬teur britannique HenryMoore. Cette carte sera la

carte officielle des Nations

Unies pour 1963. Elle seraéditée en grand formatspécial (16 cm x 14 cm)Prix : 1 2 F fr. la boîte de 1 0.

28

Pour obtenir gratuitement unebrochure illustrée, en couleurs,donnant tous détails, écrire à :UNICEF, Fonds des Cartes deVrux, 24, rue Borghèse, Neuilly-sur-Seine, France.Pour \e Canada :

National UNICEF Committee,280 Bloor St. West, Toronto 5,Ont., Canada (Attention Mrs.G. Richards).Les cartes sont vendues par boite de 10au prix de 6 F fr. la boite.

mwêu >Xi ' **<«L" /ffî.

r*m »M=ợ3í»

><5x 'M>:

Page 29: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

« Le Marché », l'une desdeux cartes dues à Lena

Stockli, artiste suisse, imagedu Pérou traduite en collagesur fond peint.

« Renne Fantaisie », pein¬ture de Ruben Freidwall,

qui est né au pays du renne,c'est-à-dire dans le nord

de la Suède.

« Le Tapis Magique »,l'une des cinq illustrationsde rêves d'enfants de divers

pays du monde, par EdwardArdizzone, artiste britan¬nique.

« Sucre candi », l'une des

deux Muvres joyeusementcolorées de Aida Marini,

peintre libanais.

« Le Clown », l'un des deuxdessins offerts par KarelSvolinsky, artiste tchèque.

29

Page 30: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

'armi les nombreuses civilisations dont les

débris jalonnent le Nouveau Monde, peu ontautant intrigué les archéologues que celle qui a fleuridans l'île de Marajo à l'embouchure de l'Amazone. Sesartisans nous sont inconnus et leur disparition est, sansdoute, antérieure au débarquement des Européens sur lacôte du Brésil.

L'existence de ce foyer de civilisation dans une régionaussi insolite avait, dès le xix<> siècle, suscité les spécu¬lations les plus hardies. Que n'a-t-on écrit à ce sujet ?Tour à tour, Egyptiens, Phéniciens et même Vikingsfurent évoqués pour expliquer le contraste entre ces ves¬tiges d'un peuple ayant atteint à un niveau de civilisationrelativement avancé et la pauvreté du milieu physique ethumain. Il y avait, en fait, quelque chose de paradoxaldans la présence d'un art à la fois original et raffinédans une partie du continent que l'on imagine avoir tou¬jours été le domaine de tribus barbares.

En outre, rien ne destinait cette terre alluviale, situéesous l'Equateur, à devenir un centre artistique. Selon lessaisons, cette grande île se transforme en lacs et enmarécages ou en plaines poussiéreuses. Çà et là, à l'époquedes crues, des monticules, les uns naturels, les autresartificiels, émergent des eaux et servent de refuge auxhommes et aux animaux. Ce cadre convient à peine à desgroupes primitifs pratiquant une agriculture rudimen-taire à laquelle s'ajoutent les produits de la pêche ou dela chasse.

Tel était, en fait, le genre de vie des tribus que lesPortugais y trouvèrent au xvir siècle et qu'ils s'empres¬sèrent d'exterminer. Cependant, une partie de l'île a étéoccupée jadis par un peuple sédentaire qui a su admira¬blement tirer parti du territoire qui lui était échu. Sesvillages s'élevaient sur des tertres que jonchent aujour¬d'hui des tessons de poterie. Ses cimetières abondent enpièces de poterie et en objets en argile, qui ont permisune reconstruction partielle de la culture d'un peupledont le nom même nous est inconnu.

Ces « Marajoaras » ainsi nommés pour éviter lespériphrases étaient certainement dotés d'une organi¬sation sociale et politique relativement complexe. En

effet, les travaux qu'ils ont entrepris nous font entrevoirune société disciplinée, régie par des chefs ou une aristo¬cratie.

Sans une volonté et une direction d'ensemble, on expli¬querait mal la construction de collines artificielles hautesde 8 m, longues de 120 m et larges de 40. Des commu¬nautés isolées, du type de celle des Indiens modernes,n'auraient pu réaliser un tel effort. Le caractère hiérar¬chique de l'ancienne société de Marajo peut être inférédu luxe de certaines tombes mises au jour dans desnécropoles où elles voisinaient avec des sépultures plusmodestes.

L'île de Marajo contient peu de roches. La céramique

30

Aussi grande que le Dane¬mark, l'île de Marajo estsituée à l'embouchure de

l'Amazone, à proximité del'Equateur. C'est l'une desgrandes régions d'élevagedu Brésil, avec un cheptelde plus de 600 000 têtes.Les paysans sont des cava¬liers accomplis; outre leschevaux, ils montent des

b sellés (à gauche),qui offrent plus de sécuritépendant la saison des pluies,quand les plaines devien¬nent lacs et marécages. Les« vaqueiros » (ou vachers)de Marajo montent piedsnus, en passant le grosorteil dans un n de

corde, et sautent à terre

avec une grande agilité.Photo © Marcel GautherotRio de Janeiro

Page 31: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

est à peu près tout ce qui subsiste de ce peuple énigma-tique. De même que les Sumériens et les Babyloniens,les habitants façonnaient en argile de nombreux objets,dont les prototypes sont faits d'autres matières. Ainsi descylindres en terre cuite semblent avoir servi d'ornementspour les lèvres et les oreilles. On a trouvé des sièges >enterre cuite d'une forme identique à ceux que les Indienssculptent dans des billes de bois.

Enfin, les fouilles nous ont livré en abondance des

plaques triangulaires, légèrement bombées et perforées àleurs extrémités. La forme, une certaine usure et enfinl'association de ces objets avec des squelettes fémininsleur ont valu le nom de tanga, cache-sexe. Ils ne sontpas sans rappeler ces pièces d'écorce triangulaire, seulvêtement des femmes dans certaines tribus amazoniennes.

De leurs croyances religieuses, nous ne connaissons queles rites funéraires. Ils incinéraient leurs morts ou

recueillaient leurs os dans des urnes. Des statuettes repré¬sentant des femmes accroupies provenant de tombes ontpeut-être eu une signification rituelle. Le style de lacéramique de Marajo, essentiellement géométrique, secaractérise, en outre, par l'emploi de plusieurs techniquesde décoration-modelage, champlevé et peinture. Certainsvases sont agrémentés d'ornements en relief figurant deshommes et des animaux.

Sur quelques urnes funéraires, peintures et reliefs évo¬quent l'image sommaire d'un être humain. Les yeuxpastillés sont souvent coupés d'un trait oblique qui confèreau visage une expression triste comme si l'artiste avait

Océan Atlantique

# ILE DE MARAJO

voulu ainsi suggérer le deuil et le chagrin. Quant à larichesse des motifs et à leurs combinaisons, seules lesillustrations en donnent une idée adéquate.

Que savons-nous des origines de cette civilisation ?C'est en vain que les érudits ont consulté vieilles chroni¬ques et documents sur l'exploration et la conquête del'Amazone, dans l'espoir d'y trouver une allusion à cepeuple mystérieux. Tous sont silencieux. L'énigme seraitdonc restée totale sans le labeur de deux ethnographesaméricains, Mr. Clifford Evans et Mrs. Betty Meggers.

En dépit des obstacles de toutes sortes que la brousseet les marécages- opposaient à leurs efforts, ils effectuèrentune série de fouilles dans l'île de Marajo. Us purentétablir que la civilisation des « Marajoaras » avait étéprécédée de trois autres phases archéologiques beaucoupplus rudimentaires, la première correspondant à l'exis¬tence d'un peuple de chasseurs et de pêcheurs. Entre cescultures archaïques qui, à beaucoup d'égards, différaientpeu de celles des Indiens amazoniens contemporains, et laphase la plus orillante, il n'existe aucun lien.

une date que les deux archéologues estimentLêtre le xir siècle de notre ère, un peuple mys¬

térieux émerge à l'embouchure de l'Amazone, y apportantune tradition artistique déjà formée. Ces envahisseursprennent pied dans les plaines de la grande île et s'éta¬blissent dans de nombreux villages construits au sommetde collines artificielles. Loin de prospérer dans leur nouvelhabitat, ils déclinent lentement.

Dans les sites les plus récents, la poterie est moinssoignée et moins belle que dans les gisements plus anciens.Autre détail troublant : le mobilier funéraire s'appauvritet s'uniformise. Ce phénomène semblerait indiquer quesous l'effet de la décadence générale, les classes socialestendent à se niveler.

Enfin, à une époque sans doute de peu antérieure à ladécouverte de l'Amérique, la civilisation de Marajos'éteint comme si ceux qui l'avaient créée étaient devenusincapables de la maintenir. Us semblent avoir succombéà l'action de forces mystérieuses, car les fouilles n'ontapporté aucun indice de guerres ou d'invasions.

La civilisation de Marajo est donc tardive. Elle a étéintroduite déjà formée par des emigrants qui, coupés deleur base, n'ont pu la développer ni même la conserver.Ces faits acquis, il restait à retrouver le berceau dupeuple inconnu qui s'est établi sur les rives de l'Atlantique.Evans et Meggers, se fondant sur des comparaisons qu'ilnous est impossible de discuter ici, étaient persuadés queles recherches devaient s'orienter vers la région andine,notamment en Colombie.

Des trouvailles sporadiques le long de l'Amazone sem- 31

SUITE PAGE 32

Page 32: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

MARAJO (Suite)

Ils étaient venus

par l'Amazone

blaient jalonner la route suivie par les « Marajoaras ».C'est dans l'espoir de découvrir de nouvelles traces decette migration qu'ils entreprirent récemment des fouillessur les berges du rio Ñapo, un des affluents de l'Amazone,qui de tout temps a été une voie d'accès des Andes àl'Amazonie. Les onze sites archéologiques qu'ils explo¬rèrent confirmèrent entièrement l'hypothèse qui- les avaitguidés. Les ancêtres des « gens de Marajo » avaientdescendu le Napo et y avaient séjourné.

Les poteries qu'ils mirent au jour étaient souvent iden¬tiques à celles de Marajo et le Napo avait donc été unedes étapes de la migration qui, partie de la Colombie,devait aboutir à l'embouchure de l'Amazone, quelque5 000 kilomètres plus loin.

La tribu inconnue qui s'était déplacée à traversle continent l'a fait en un temps rela¬

tivement court, car les gisements archéologiques du Naposont peu épais et correspondent à une occupation relati¬vement courte. Il est probable que les porteurs de cettenouvelle civilisation se sont arrêtés en cours de routesur le Moyen Amazone, car dans la région de Manaos, despoteries ont été découvertes qui, par leur forme et leurornementation, se rapprochent à la fois de la céramiquedu Napo et de celle de Marajo.

Cependant, le berceau même de la civilisation deMarajo, qui doit se situer quelque part en Colombie, n'apas encore été découvert. De nombreuses ressemblancesentre diverses cultures colombiennes et celles de l'Amazoneont été signalées, mais jusqu'ici, les archéologues n'ontpu identifier la zone où les éléments typiques de la civi¬lisation de Marajo se seraient constitués. Il est vrai quela Colombie, du point de vue archéologique, est malconnue.

Tout ce qui subsiste du peuple énigmatique qui vécutjadis sur l'île de Marajo, ce sont des céramiques, commeces vases en poterie (ci-dessus et ci-dessous). Cescéramiques étaient ornées de dessins géométriquestrès subtils, champlevés ou peints.

Photos Musée de l'Homme. Paris

32

' HHH31 ^ ^ 31^^WmPG*

^m

'%^Xi''-r'X3»fa l)- p*t*m- ... . .'

x _ol a .,¿

P4éM

\t \«tS;\t3- ¡pu

i S. .- m>tóiWÈ W,

XX!

t m

. !V- ^^-MiM^j^^^ê

HHÉ

Selon les archéologues Evans et Meggers, la décadence,puis la disparition de la civilisation de Marajo seraientdues exclusivement à des causes économiques. La cultureitinérante sur brûlis, qui était la forme d'agriculture pra¬tiquée par les « Marajoaras » comme par toutes les tribustropicales, a épuisé le sol en quelques siècles.

Un moment est venu où les gens de Marajo n'ont putirer de leur milieu les ressources nécessaires à une popu¬lation quelque peu dense. La population ayant diminué,la spécialisation artisanale qui avait favorisé le dévelop¬pement de la céramique et d'autres industries ne put semaintenir. Il en résulta un effondrement progressif detoute la civilisation. Le destin de Marajo n'est pas sansrappeler celui de l'ancien empire Maya qui, lui aussi,s'arrêta brusquement dans son essor.

Cette cause économique de la mort des civilisations tro¬picales est aujourd'hui contestée. La question est doncloin d'être résolue et force nous est d'avouer que fauted'explication le mystère subsiste entier.

Cet article est l'un des derniers qu'Alfred Métraux a écrit pour« Le Courrier de I'Unesco ». Alfred Métraux, qui colla¬borait régulièrement à la revue depuis sa création en1948 est mort en avril dernier. Anthropologue et écrivairses expéditions à l'Ile dePâques et chez les Indiensd'Amérique du Sud, ainsique son activité en faveur del'égalité raciale lui valurentune réputation internatio¬nale. Parmi ses ouvrages

les plus importants, citons :L'Ile de Pâques (1941),Le Vaudou Haïtien (1959)et Les Incas (1962). Lasérie de livres consacrée

au problème racial queI'Unesco a publiée au coursdes douze dernières années

avait été préparée sous sadirection.

Page 33: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Nos lecteurs nous écriventAUTANT EN EMPORTE LEVENT

Votre numéro de septembre 1963comporte une erreur. Le commentairede la photo de la couverture de dos,dit : « ...Il ne s'agissait, en l'occur¬rence, que d'une cérémonie comme¬morative en l'honneur de Jules Verneet de son fameux « Tour du monde

en quatre-vingts jours », accompli enballon par l'inoubliable Philéas Fogg. »Le Tour du monde en quatre-vingtsjours de Jules Verne a bien été accom¬

pli en ballon par Philéas Fogg enutilisant tous les moyens, sauf le bal¬lon. Le roman de Jules Verne relatif

au ballon s'appelle « Cinq semainesen ballon ».

A. Desouche

Lyon, France

N.D.L.R. Philéas Fogg n'a, eneffet, jamais emprunté le ballon aucours de son voyage contre la montre.La cérémonie en l'honneur de JulesVerne (notre photo) a eu lieu lors dela parution du film inspiré par « LeTour du monde en quatre-vingtsjours », film qui comporte une étapeaccomplie en ballon, pure invention duscénariste.

LES CARTES ET LE MONDE

Votre revue est vraiment bonne et

d'un contenu varié pour tous ceux quis'intéressent à ce qui se passe dans lemonde. Je suis cartographe, je m'in¬téresse tout particulièrement aux car¬tes et aux nouvelles méthodes tech¬

niques de la cartographie. Evidem¬ment, je pense qu'il s'agit là d'undomaine spécialisé et qu'il ne vousest pas possible de publier des arti¬cles relatifs à ces questions dans votrerevue. Mais il va sans dire que lesarticles géographiques m'intéressentégalement et que je suis enchantée desdivers numéros de votre revue.

Agnes Szendro,Budapest, Hongrie

NOIR ET BLANC PÉRIMÉS

Je suis abonné au « Courrier » de

i'Unesco dans son édition anglaisedepuis un an, et je vous fais part demon intention de ne pas renouvelermon abonnement. Je vais essayer devous en donner brièvement les rai¬

sons. Tout d'abord, rien à dire surla qualité du papier, de l'impressionet de la mise en pages. Par contre, aupoint de vue de l'illustration, il est àdéplorer qu'il n'y ait jamais de photosen couleur... Ainsi, si J.-J. Rousseauavait vu et décrit la nature en noir

et blanc, jamais il n'aurait eu l'hon¬neur de votre numéro de mars 1963.

A propos des articles, il me semblequ'ils sont souvent un peu tropabstraits ; j'aimerais de grands repor¬tages sur un pays, sa manière devivre, la philosophie de la vie de seshabitants. Je pense que de tels arti¬cles contribueraient à la paix dumonde. Les lecteurs du « Courrier »

apprendraient à se connaître entre

eux ; ils verraient que, dans chaquepays, sous des formes différentes, cesont toujours les mêmes problèmes quise posent à l'homme, et chacun pour¬rait tirer profit de la manière dont ilssont résolus par les habitants desdifférentes contrées du globe. Dans lemême esprit, le « Courrier », grâceà son caractère international, pourraitservir de courrier entre les lecteurs. Il

pourrait s'établir de véritables dialo¬

gues, des discussions sur les problèmesintéressants entre les différents lec¬teurs.

Jean-Michel Schneider,Paris, France

LES CLEFS

DE LA CONNAISSANCE

Dans votre numéro de décembre

1962, E.D. Allen, de Dunebin, Nou¬velle-Zélande, suggère d'adopter l'es¬péranto comme seconde langue dansle monde entier, puisqu'à présent lescommunications modernes ont rap¬proché plus étroitement les nationsles unes des autres.

Que les nations soient maintenantplus proches voisines constitue, eneffet, un phénomène remarquable, quirend au grand public la connaissancedes cultures étrangères beaucoup plusaccessible que par le passé, où elleétait réservée à quelques privilégiésou à des spécialistes. Les langues sontles clefs de la connaissance, car lesidées et les valeurs culturelles trou¬

vent une expression vivante dans lelangage national. Le séminaire del'enseignement des Langues modernes,organisé par I'Unesco à Ceylan en1953, a clairement prouvé que celuiqui étudie les langues étrangèresprend la voie la plus sûre, la plusdirecte et probablement la seulepossible pour accéder à la connais¬sance et à la compréhension des autrescultures et des autres peuples. Il n'ya pas de meilleure méthode pourpénétrer l'esprit d'une culture étran¬gère.

A une époque où des possibilitéssans précédent s'ouvrent aux échangesculturels, devrions-nous les limiternous-mêmes en nous bornant à l'étude

d'une langue artificielle, seul ajout ànotre propre langue ?

Reconnaissant que l'on ne peut faireétat de considérations d'utilité prati¬que pour restreindre l'horizon spirituelde l'humanité, la Fédération interna¬tionale des Femmes diplômées desUniversités a adopté la résolution sui¬vante à propos de l'étude des langues,lors de sa dernière conférence à

Mexico, en 1962 :

« La FIFDU affirme l'importanceque revêt l'étude de la langue et dela culture des gens du monde entier,car c'est là un des moyens essentielsde créer une compréhension et uneamitié internationales ; et presse lesfédérations et les associations natio¬

nales d'encourager l'étude au moinsd'une langue et d'une culture étran

gères, sous la direction de professeursqualifiés, non seulement par les élè¬ves des écoles secondaires et les étu¬

diants, mais aussi, dans la mesuredu possible, par les enfants des écolesprimaires et par les adultes dans lesdivers programmes extra-scolaires. »

Je suis convaincue que vous pour¬rez apporter une contribution utilepour résoudre nombre de problèmesqui se posent.

Magda Staudinger,Fribourg-en-Brisgau,

République Fédérale d'Allemagne

PITIÉ POUR LES LIONS

Depuis vingt ans, je vis seule auCentre Afrique avec des fauves etautres animaux sauvages, et je tra¬vaille avec d'autres défenseurs de la

faune africaine à essayer de freiner,sinon d'endiguer le massacre qui estdevenu général malgré de soi-disant mesures, de bonnes intentions,des parodies de protection des bêtessauvages. Au Tchad, en particulier,notre travail restera sans effet tant

qu'on ne freinera pas l'entrée massivedes armes de chasse, tant qu'il n'yaura pas un personnel suffisant etconsciencieux pour faire respecter lesrèglements de chasse, qui ne le sontpratiquement jamais. D'autre part, lesservices vétérinaires sont autorisés à

détruire tous les carnivores par lepoison.

J'entretiens encore, sans aucuneaide du gouvernement, mon « Refugedes Lions », qui m'aide énormémentdans mon travail de propagande, tantauprès des Africains que des Euro¬péens. Mes lions adultes et étonnam¬ment sociables sont connus en Europeet en Amérique. Leur exhibition estpeut-être la façon la plus convain¬cante de dissuader les chasseurs de

continuer leurs massacres. Notre slo¬

gan : « Ne les tuez pas, photogra¬phiez-les. Remplacez le fusil par lacaméra. » Mais tout cela est bien

difficile, mes bêtes me coûtant très

cher, et je n'ai pour tout moyend'existence que mon traitement desecrétaire au secrétariat de la Cham¬

bre de Commerce d'Abéché.

Johanna Luciani,Abêché,

Tchad

Mme Luciani montre Tanit, salionne, à un visiteur africain.

33

Page 34: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

Latitudes et Long

J E COSMONAUTE YOURI GAGA-^~ RINE, qui accomplit le premier vol

autour de la Terre le 12 avril 1961,

a prononcé une allocution devant leXIVe Congrès International d'Astro¬nautique qui s'est tenu à Paris, ausiège de I'Unesco, du 25 septembre

au 1er octobre 1963. A cette occasion,

l'astronaute soviétique a été reçu parle Conseil exécutif de I'Unesco ;

le président, M CE. Beeby, l'a saluécomme « le vivant symbole des possi¬bilités de l'esprit humain capable detranscender son milieu physique.

Photo Unesco Dominique Roger

Le colonel Gagarine à I'Unesco, entouré (de gauche à droite) de M. AlexeiP. Pavlov, délégué permanent de l'URSS auprès de I'Unesco; M. SergeVinogradov, ambassadeur d'URSS en France; M. Georges Fleury, présidentde la Société Française d'Astronautique; M. Edmond Brun, président delàFédération Internationale d'Astronautique.

LE KOWEIT ET L'UNRWA. LeKoweït a offert à l'UNRWA (Office

de Secours et de Travaux des Nations Unies

pour les Réfugiés de Palestine) la contri¬bution la plus élevée (par rapport à lapopulation d'un pays) que l'Office ait reçueen 1963 : 220 000 dollars, soit 0,68 dollarpar habitant. 100 000 dollars seront distri¬bués sous forme de bourses à 200 jeunesréfugiés inscrits dans les écoles del'UNRWA en Syrie et en Jordanie.

LIRE EN ESPAGNE. Afin d'instruire

les 3 millions d'analphabètes quecompte encore l'Espagne, une campagned'éducation de base est entreprise avec leconcours de 5 000 nouveaux instituteurs.

Tous les Espagnols seront tenus de possé¬der le certificat d'études primaires. Ceuxqui ne l'ont pas encore obtenu devront pas¬ser les examens organisés dans le cadre dela campagne. Les entreprises employant desanalphabètes devront permettre à ceux-cide suivre des cours d'adultes.

LIAISONS POUR L'AFRIQUE. L'UnionInternationale des Télécommunications

vient d'envoyer une mission à Addis-Abebaafin de contribuer à l'établissement d'un

nouveau réseau de télécommunications pourl'Afrique. La mission a pour but de déve¬lopper les liaisons directes entre pays afri¬cains en vue de contribuer à leur expansionéconomique. A l'heure actuelle, de nom¬breux pays sont encore obligés de fairepasser leurs communications par l'Europe.

'N LONG VOYAGE. En août dernier,on a trouvé en Haute-Volta une météo¬

rite qui a été étudiée scientifiquement en34 France et aux Etats-Unis ; ces études ont

permis d'établir qu'elle avait voyagé dansl'espace 470 millions d'années. Ce corps

céleste, pareil à une ferraille rouillée, pèse8 kilos. C'est l'une des 40 météorites donton connaisse la date d'arrivée sur la croûte

terrestre. Elle est susceptible d'apporter deséclaircissements au sujet des rayons cosmi¬ques, de l'âge et l'origine du systèmesolaire et autres problèmes du même ordre.

OISEAUX ET MALADIES. Les migra¬tions annuelles des oiseaux peuvent

expliquer la dissémination, à des milliers dekilomètres, d'épidémies très localisées demaladies transmises par les tiques commel'encéphalite, la fièvre Q et certaines affec

tions du bétail. Or, d'après une étude faiteen Egypte au moment des migrations d'au¬tomne, 40 variétés d'oiseaux sont suscepti¬bles d'être infestées des tiques : hirondelles,tourterelles, coucous, pigeons figurentparmi les oiseaux parasités. On estime à600 millions le nombre des oiseaux migra¬teurs qui vont d'Europe orientale enAfrique.

|TN OUVRAGE DE FOND. Nous signa-Ions aux lecteurs français l'ouvrage de

P. Piganiol et L. Villecourt « Pour unepolitique scientifique » (Editions Flamma¬rion, prix 20 F), u s'adresse autant aupublic soucieux de s'informer qu'aux spé¬cialistes de disciplines diverses, et s'attacheà dégager trois aspects essentiels des pro¬blèmes actuels : le progrès scientifique dansson essence et ses répercussions ; le déve¬loppement, l'organisation, la structure et lapolitique de la science en France ; enfin,une comparaison avec les structures scienti¬fiques des autres Etats européens, des Etats-Unis et de la Russie soviétique.

En bref

Des chiffres qui traduisent l'importancecroissante du rôle de l'Afrique dans htravail de ¡'Unesco : les Etats africainsmembres de ¡'Unesco, de 8 avant 1960,

ont passé aujourd'hui à 32; plus de 27 %du budget total de ¡'Unesco, y compris lesressources extra-budgétaires, sont consacrésà des activités qui concernent l'Afrique.

%\ Le recrutement a doublé cet automne àl'Université de Moscou : 6 540 jeunes gensvont y commencer leur première annéed'études supérieures. La plupart d'entreeux ont déjà travaillé deux ans et p¡usdans l'industrie et l'agriculture.

fg 44 pays (dont le dernier est la Somalie)appliquent aujourd'hui ¡'Accord institué parI'Unesco pour l'importation d'objets decaractère éducatif, scientifique et culturel,qui supprime les taxes d'importation sur leslivres, les journaux et les d'art.

i( On met au peint actuellement des géné¬ratrices miniatures susceptibles de fournirde l'électricité d'origine nucléaire à dessatellites et des vaisseaux spatiaux. Cesappareils pourraient avoir également desapplications terrestres. Ils sont déjà utilisésdans des stations météorologiques automa¬tiques et dans des dispositifs de guidagepour les bateaux.

EN HOMMAGE A L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE

DES NATIONS UNIES

r-:

Le quatrième timbre commémoratifdes Nations Unies pour 1963 a étéémis en l'honneur de l'Assemblée

générale des Nations Unies, en deuxvaleurs de 5 et 11 cents. Le dessin

représente le siège des Nations Unies,à New York. Comme agent en Francede l'Administration postale des NationsUnies, le service philatélique deI'Unesco détient tous les timbres des

Nations Unies ainsi que les timbresémis par les Etats membres deI'Unesco pour commémorer des évé¬nements importants dans l'histoire deI'Unesco et des Nations Unies.

Pour tous renseignements, écrire auService philatélique de I'Unesco, placeFontenoy, Paris (7e).

u

z<oc

z

O

Page 35: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

CATALOGUE UNESCO

DE REPRODUCTIONS EN

COULEURS DE PEINTURES

t&^H^

catalogue

antérieures à 1860

*: catalogueof colour reproductions

of paintingsprlor*^1860| w

S '%S' . "fr %catálogo «le%; 'It -%

reproducciones en colorde pinturas

anteriores a 1860

unesco paris

Volume I: Peintures antérieures à 1860

Le répertoire présente près de 900 reproductionsen couleurs y compris une large sélection de pein¬tures d'Asie, d'Afrique, d'Australie et d'EuropeCentrale. 323 pages.

Prix 21 F français - 6 dollars - 30/-stg.

Dans la République Fédérale d'Allemagne, en Suisseet en Autriche, une coédition Unesco-OldenbourgVerlag Munich est disponible en langue allemande.

Deux volumes qui donnent une liste mise à jour dereproductions en couleurs de peintures célèbres dansle monde entier; ce répertoire a été établi d'après lacollection de reproductions de I'Unesco, choisie pardes experts de réputation internationale. La fidélitéde la reproduction, l'importance de l'artiste et l'intérêtde l'original ont déterminé la sélection.

Dans ces catalogues, chaque tableau est reproduiten noir et blanc; des indications détaillées sontfournies tant sur l'ruvre originale que sur la repro¬duction en couleurs (prix et nom de l'éditeur).

cataloga.de reproductions

en couleurs de peintures1860 à 1963

VIENT DE

PARAITRE

Volume II : Peintures de

1860 à 1963

Nouvelle édition revue

et augmentée. 519 pages.Descriptions et illustra¬

tions de 1 440 reproductionsen couleurs, où apparaissentles noms de 28 artistes quine figuraient pas dans leséditions précédentes.Prix 21 F français - 6 dollars-30/-stg.

Agents de vente des publications de I'UNESCOVous pouvez commander les publications de

I'Unesco chez tous les libraires ou en vous adressant

directement à l'agent général (Voir liste ci-dessous).

Vous pouvez vous procurer, sur simple demande,les noms des agents généraux non inclus dans laliste. Les paiements peuvent être effectués dansla monnaie du pays. Les prix de l'abonnementannuel au « COURRIER DE L'UNESCO » sont

mentionnés entre parenthèses, après les adressesdes agents.

ALBANIE. N. Sh. Botimeve, Nairn Frasheri, Tirana.ALLEMAGNE. : R. Oldenbourg Verlag, Unesco-Vertriebfür Deutschland, Rosenheimerstrasse 145, Munich 8.Unesco Kurier(Editionallemandeseulement) BahrenfelderChaussee 160, Hamburg-Bahrenfeld, CCP 276650.(DM 8). AUTRICHE. Verlag Georg Fromme et C°,Spengergasse 39, Vienne V. (Seh. 60.-). BELGIQUE.Editions " Labor " 3 42. rue Royale, Bruxelles 3 N. V.Standaard-Boekhandel, Belgiëlei 151, Anvers. Seule¬ment pour le « Courrier » (1 00 FB) et lesdiapositives (488 FB) : Louis de Lannoy, 22, Place deBrouckère, Bruxelles. C. C. P. 3380.00. BRɬSIL. Librairie de la Fundaçao Getulio Vargas, 186,Praia de Botafogo. GB-ZC-02, Rio de Janeiro.BULGARIE. Raznoïznos, 1, Tzar Assen, Sofia.CAMBODGE. Librairie Albert Portail, 14, avenueBoulloche, Phnom-Penh. CANADA, Imprimeurde la Reine, Ottawa, Ont. ($ 3.00). CHILI.Editorial Universitaria, S.A., Avenida B. O'Higgins 1058,casilla 1 0220, Santiago. « Le Courrier » seulement :Comisión Nacional de la Unesco en Chile, Av. O' Higgms1611-3 piso, Santiago (E° 4,20). CONGO. Le LibraireInstitut politique congolais B. P. 23-07 Léopoldville.- DANEMARK. Ejnar Munksgaard A/S, Tidsskriftafde-

lingen, 47 Prags Boulevard, Copenhague S(Kr. 1 2). ES¬PAGNE. Librería Científica Medinaceli, Duque de Me¬dinaceli 4, Madrid, 1 4. Pour le « Courrier de I'Unesco » :Ediciones Iberoamericanas, S.A., calle de Oñate 1 5

Madrid, (Pes 90). Sous-agent « Le Courrier » :Ediciones Liber Apartado de correos, 17, Ondàrroa(Vizcaya). ETATS-UNIS. Unesco Publica¬tions Center, 317 East 34 th. Street. New York16, N.Y. ($ 5) et, sauf pour les périodiques :Columbia University Press, 2960 Broadway, New York27, N.Y. FINLANDE. Akateemmen Kirjakauppa,2, Keskuskatu, Helsinki, (mk. 540). FRANCE. Li¬brairie Unesco, Place de Fontenoy, Pans, C.C.P. 12.598-48. (F. 7.00). GRÈCE. Librairie H. Kauffmann, 28,rue du Stade, Athènes. HAITI. Librairie « A la Cara¬velle », 36, rue Roux, B.P. 111, Port-au-Prince.HONGRIE. Kultura, P. O. Box 149, Budapest 62.ILE MAURICE. Nalanda Co. Ltd., 30 Bourbon Str.

Port-Louis. INDE. Orient Longmans Private Ltd. :17 Chittaranjan Avenue, Calcutta 13. Bellard EstateChamber, Nicol Rd., Bombay 1; 36a. Mount Road,Madras 2. Gunfoundry Road, Hyderabad 1 ; KansonHouse, 1/24 Asaf Ah Road, P. O. Box 386, Nouvelle-Delhi. IRAN. Commission nationale iranienne pourI'Unesco, avenue du Musée, Téhéran. IRLANDE.The National Press, 2 Wellington Road, Ballsbridge,Dublin (10/-). ISRAEL. Blumstein's Bookstores,Ltd., 35, Allenby Road and 48, Nahlat Benjamin Street,Tel-Aviv. (1$ 5.50). ITALIE. Librería CommissionariaSansoni, via Gino Capponi 26, Casella Postale 552,Florence (lire 1.200)., et, sauf pour les périodiques :Bohgne : Librería Zanichelli, Portici del Pavaglione.Milan : Hoepli, via Ulrico Hoepli, 5. Rome : LibreriaInternazionale Rizzoli. Gallería Colonna, Largo Chigi & Li¬breria Internazionale Modernissima, via délia Mercedes 43-45 Turin: Librairie Française, Piazza Castello, 9. JAPON.Maruzen Co Ltd, 6, Tori-Nichome, Nihonbashi, P.O.Box 605 Tokio Central, Tokyo (Yen 670). LIBAN.Librairie Antoine A. Naufal et Frères B. P. 656, Bey

routh. LUXEMBOURG. Librairie Paul Brück,22, Grand'Rue, Luxembourg. MAROC. Centre dediffusion documentaire du B.E.P.I., 8, rue Michaux-

Bellaire, Boîte postale 21 1 , Rabat. (DH : 7,1 7). MAR¬TINIQUE. Librairie J. Bocage, Rue Lavoir B.P. 208,Fort-de-France. (F. 7,00). MEXIQUE. EditorialHermes, Ignacio Mariscal 41 , Mexico D. F., Mexique.($ 18 M. mex.). MONACO. British Library, 30, Biddes Moulins, Monte-Carlo (F. 7,00). NORVÈGE.A.S. Bokhjornet, Lille Grensen, 7, Oslo. Pour le « Cour¬rier » seulement : A.S. Narvesens, Stortingsgt. 4, Oslo.(Kr. 1 3,20). NOUVELLE-CALÉDONIE. Reprex, Av.de la Victoire, Immeuble Paimbouc, Nouméa(1 30 fr. CFP).PAYS-BAS. N.V. Martinus Nijhoff Lange Voorhout 9,La Haye (fl. 6). POLOGNE. « RUCH » Ul. Wiloza Nr.46, Varsovie 10 (zl. 50). PORTUGAL. Dias & An-drada Lda, Livraria Portugal, Rua do Carmo, 70, Lisbonne.

ROUMANIE. Cartime"x Str. Aristide-Bnand 14-18.

P.O.B. 134-135, Bucarest. ROYAUME-UNI. H. M.Stationery Office, P.O. Box 569, Londres S.E.I. (10/-).SÉNÉGAL. La Maison du livre, 13, av. Roune. Dakar

SUÈDE. A/B CE. Fritzes, Kungl. Hovbokhandel,Fredsgatan 2, Stockholm, 16. Pour « Le Courrier »seulement : Svenska Unéscoradet, Vasagatan 1 5-1 7,Stockholm, C. (Kr. 7.50). SUISSE. Europa Verlag, 5.Ramistrasse, Zurich. C.C.P. Zürich VIIJ 23383. Payot,40, rue du Marché, Genève. C.C.P. 1-236. Pour « LeCourrier » seulement : Georges Losmaz, 1 , rue des Vieux-Grenadiers, Genève, C.C.P. 1-4811 (Fr. S 8). TCHɬCOSLOVAQUIE. Artia Ltd. 30, Ve Smeckàch, Prague2. TUNISIE. Société Nationale d'édition et de

diffusion, 10, rue de Russie, Tunis. TURQUIE.Librairie Hachette, 469, Istiklal Caddesi, Beyoglu, Istanbul.

U.R.S. S. Mezhdunarodnaja Kniga, Moscou, G-200.URUGUAY. Oficina de representación de Edito¬

riales, Plaza Cagancha 1342, 1" piso, Montevideo (20pesos). VIETNAM. Librairie Papeterie XuanThu,185-193, rue Tu-Do, B.P. 283, Saigon. YOUGO¬SLAVIE. Jugoslovenska-Knijga, Jerazije 27/1 1, Belgrade.

Page 36: Stanislavsky: une révolution dans le théâtre; The ...unesdoc.unesco.org/images/0006/000633/063381fo.pdf · En dépit des difficultés de la vie quotidienne notam ... soit assurée

i *<SÍf'.

, ' . . . '- XX '^W- ;

. ' i- '*X' X "- á" ;\:~: <.*..' y. -a.-

, &-XV M-W¡^:"' ^*y.i'i,;í.-v*^ y?.

Depuis qu'elle est devenue une nation africaine indépendante, la République du Congo,aidée par I'Unesco, a réformé et développé son système d'enseignement à tous les degrés(voir page 14). Au cours de cette même période, la population de Léopoldville, la capi¬tale, a doublé et atteint aujourd'hui plus d'un million. On voit ici un Africain, l'une desstatues du monument à Henry M. Stanley, le fameux explorateur, élevé sur une collinequi domine le majestueux fleuve Congo, près de Léopoldville.