417
Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 du 3 février 1999 Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, Dans la perspective des débats sur l'initiative populaire "Oui à l'Europe!" et du contre-projet du Conseil fédéral 1 nous vous soumettons le rapport sur l'intégration 1999. Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mes- dames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération. Le 3 février 1999 Au nom du Conseil fédéral La présidente de la Confédération: Ruth Dreifuss Le chancelier de la Confédération: François Couchepin 1 Voir message sur l'initiative populaire "Oui à l'Europe!", FF 1999 I.....

Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999

du 3 février 1999

Madame la Présidente, Monsieur le Président,Mesdames et Messieurs,

Dans la perspective des débats sur l'initiative populaire "Oui à l'Europe!" et ducontre-projet du Conseil fédéral1 nous vous soumettons le rapport sur l'intégration1999.

Nous vous prions d'agréer, Madame la Présidente, Monsieur le Président, Mes-dames et Messieurs, l'assurance de notre haute considération.

Le 3 février 1999 Au nom du Conseil fédéral

La présidente de la Confédération: Ruth Dreifuss Le chancelier de la Confédération: François Couchepin

1 Voir message sur l'initiative populaire "Oui à l'Europe!", FF 1999 I.....

Page 2: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international
Page 3: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 Table de matières

Table des matières Page

1 Objectif et structure du rapport sur l'intégration 1999 7

11 Objectif 7

12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8

13 Structure et éléments de base 10

2 Description de la situation dans l'Union européenne et en Suisse: analyse comparativedes répercussions possibles sur la Suisse d'une adhésion à l'UE, d'une participation àl'EEE, des accords sectoriels et du maintien de la situation actuelle 13

21 Cadre institutionnel de l'UE et ordre juridique communautaire 13

211 Caractéristiques 13

212 Répartition des compétences entre l'UE et les Communautés européennes d'unepart, et les Etats membres d'autre part 21

213 Institutions et processus décisionnel au sein de la CE 25

214 Politique d'information et de communication 37

22 Libertés, politiques et programmes intracommunautaires 38

221 Marché intérieur 38

221.01 Libre circulation des marchandises 38221.02 Libre circulation des personnes 51

221.02.1 Circulation des personnes actives et non actives 51221.02.2 Sécurité sociale 57221.02.3 Reconnaissance des diplômes 63221.02.4 Aspects relatifs aux personnes morales 65221.02.5 Citoyenneté européenne et droits des citoyens européens 66221.02.6 Statut juridique des citoyens 68221.02.7 Suisses de l'étranger 72

221.03 Libre circulation des services 74221.04 Libre circulation des capitaux 81

222 Politiques et programmes de l’UE 84

222.01 Politique économique et monétaire 84222.01.1 Union économique et monétaire 84222.01.2 Croissance et emploi 92222.01.3 Politique industrielle; petites et moyennes entreprises 94

222.02 Politique sociale 97222.03 Politique agricole, vétérinaire, alimentaire et forestière 101

222.03.1 Politique agricole 101222.03.2 Droit vétérinaire 111222.03.3 Denrées alimentaires et objets usuels

(protection des consommateurs) 113222.03.4 Economie forestière 116

222.04 Politique en matière de concurrence 117222.04.1 Droit de la concurrence et contrôle des fusions 117222.04.2 Aides d’Etat 120

222.05 Marchés publics 122

Page 4: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 Table de matières- II -

222.06 Droit économique 126222.06.1 Droit des sociétés 126222.06.2 Responsabilité du fait des produits 128222.06.3 Propriété intellectuelle 129222.06.4 Droit international privé 133222.06.5 Procédure internationale 135

222.07 Politique fiscale 136222.07.1 Introduction 136222.07.2 Taxe sur la valeur ajoutée 137222.07.3 Impôts spéciaux de consommation 139222.07.31 Impôt sur les huiles minérales 139222.07.32 Impôt sur le tabac 140222.07.33 Impôt sur les automobiles 141222.07.34 Impôt sur la bière 142

222.07.4 Imposition des sociétés 142222.07.5 Impôts à la source 144222.07.6 Entraide administrative et judiciaire, secret bancaire 145222.07.7 Impôt sur les transactions sur titres 147222.07.8 Impôts sur l'affectation de capital 148

222.08 Politique régionale et structurelle 149222.09 Transports 155

222.09.1 Transports terrestres 155222.09.2 Transport aérien 159

222.10 Politique de l’énergie 161222.11 Politique environnementale 165222.12 Télécommunications, société de l'information 169222.13 Politique de la recherche et de la technologie 174222.14 Génie génétique 176222.15 Politique de la formation et de la jeunesse 179222.16 Egalité des chances 183222.17 Politique du consommateur 186222.18 Protection de la santé 188222.19 Culture et médias audiovisuels 190222.20 Statistique 197222.21 Autres politiques et programmes

(protection civile, sport, tourisme, protection des animaux) 200

23 Relations extérieures de l'Union européenne 204

231 Politique étrangère et de sécurité commune 205

232 Politique commerciale commune 210

233 Elargissement de l'UE 216

234 Autres activités internationales 221

234.01 Relations avec les Etats tiers 221234.02 Coopération avec les pays en développement et en transition 225234.03 Politique des droits de l’homme 228

Page 5: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 Table de matières- III -

24 Coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures 231

241 Aperçu: de Schengen à l'UE 231

242 Politique en matière de visa 235

243 Contrôles aux frontières 238

244 Politique d’asile 241

245 Coopération policière 244

246 Coopération judiciaire 246

25 Financement des activités de l'Union européenne 250

251 Questions financières générales 250

251.01 Principes, ordre de grandeur et structure du budget de la CE 250251.02 Participation actuelle au financement de programmes de la CE 252251.03 Conséquences financières d'une adhésion de la Suisse à l'UE 252251.04 Conséquences financières d'une participation à l'EEE 267251.05 Conséquences financières des accords sectoriels 270

252 Contrôle des finances 271

253 Développement futur de l'UE dans le cadre de l'Agenda 2000 273

3 Instruments permettant d'entretenir les relations Suisse-UE comparés à l'adhésion à l'UE 279

31 Contexte des accords sectoriels, de la participation à l'EEE, des différentes formesde voies solitaires et de l'adhésion à l'UE 279

311 Développements de l'Union européenne 279

311.01 Facteurs déterminants de l'intégration européenne 279311.02 Caractère du projet européen 280311.03 Développement de l'Union européenne depuis 1992 281

311.03.1 Traité de Maastricht 281311.03.2 Elargissement de 1995 282311.03.3 Union économique et monétaire 282311.03.4 Traité d'Amsterdam 283311.03.5 Elargissement en cours 284

311.04 Perspectives d'avenir 285

312 Voie suisse 288

312.01 Stratégie de la politique d'intégration du Conseil fédéral 288312.02 Actions de politique d'intégration du Conseil fédéral 290312.03 Soutien interne à la politique d'intégration 291

32 Instruments de la politique d'intégration autres que l'adhésion 294

321 Conclusion des accords sectoriels 294

321.01 Déroulement des négociations sectorielles bilatérales Suisse-UE 294321.02 Contenu des accords sectoriels 295321.03 Portée de la voie sectorielle 299321.04 Arguments pour et contre la voie sectorielle 300

Page 6: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 Table de matières- IV -

322 Participation à l'EEE 302

322.01 Portée matérielle et institutionnelle d'une participation à l'EEE 302322.02 Développement de l'EEE depuis 1992 305322.03 Questions de principe liées à une participation de la Suisse à l'EEE 306

322.03.1 Procédure décisionnelle de l'EEE 306322.03.2 Champ d'application matériel 306322.03.3 Portée financière de l'EEE 308322.03.4 Procédure d'adhésion à l'Accord EEE 309

322.04 Arguments pour et contre une participation à l'EEE 310

323 Différentes formes de voies solitaires 311

323.01 Généralités 311323.02 Accords sectoriels sans but d'adhésion 312323.03 Voie solitaire avec alignement sur l'UE 312323.04 Voie solitaire avec activités "Offshore" 313323.05 Arguments pour et contre la voie solitaire 314

33 Adhésion à l'UE 314

331 Objet et objectifs 314

331.01 Procédure d'adhésion 314331.02 Objets des négociations et marge de manoeuvre 317331.03 Objectifs de la Suisse en tant que membre de l'UE 319

Questions fondamentales relatives à l'adhésion à l'UE 322

332 Identité, indépendance, fédéralisme et droits populaires 322

332.01 La Suisse: une nation fondée sur la volonté de vivre ensemble 322332.02 Fédéralisme 325332.03 Régions de Suisse 328332.04 Constitution et institutions 329

332.04.1 Constitution fédérale 329332.04.2 Droits populaires 333332.04.3 Assemblée fédérale 340332.04.4 Conseil fédéral et Assemblée fédérale 342332.04.5 La justice et le citoyen 346

332.05 Résumé et mesures internes 348

333 Prospérité 350

333.01 Marché du travail en Suisse 352333.02 Croissance économique 358333.03 Compétitivité de la place économique suisse 362

333.03.1 Economie tournée vers l’exportation 362333.03.2 Agriculture 365

333.04 Place financière 367333.05 Prix, salaires, loyers 369333.06 Union monétaire et taux d’intérêts 371333.07 Politique budgétaire 374333.08 Fiscalité 375

333.08.1 Adaptations requises 375333.08.2 Compensation du relèvement de la TVA 378333.08.3 Incidences sur les prix et les revenus 379

333.09 Résumé et mesures internes 380

Page 7: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 Table de matières- V -

334 Position dans le monde 383

334.01 Sécurité extérieure et neutralité 383334.02 Politique étrangère 386334.03 Politique économique extérieure 387334.04 Résumé 390

335 Sécurité intérieure 390

335.01 Sécurité du citoyen 390335.02 Asile et immigration 395335.03 Résumé et mesures internes 398

336 Arguments pour et contre l'adhésion à l'UE 399

4 Questions fondamentales et conclusion 403

Annexe: Tables de concordance entre les anciennes et les nouvelles numérotations destraités UE et CE 407

Liste des abréviations 413

Page 8: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 Table de matières- VI -

Page 9: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 7 - Chapitre 1

1 Objectif et structure du rapport sur l'intégration 1999

11 Objectif

Le but de ce rapport est de constituer une base cohérente, objective et claire pourtous les intéressés afin de préparer le débat sur l'intégration au vu duquel le Conseilfédéral jugera si les conditions de politique intérieure sont réunies pour engager desnégociations d'adhésion. Le débat ne serait pas complet, si, à côté des avantages etdes inconvénients d'une adhésion à l'UE, les alternatives possibles de la politiquesuisse d'intégration (conclusion d'accords sectoriels, participation à l'EEE, différentesformes de voies solitaires) n’étaient pas examinées.

Outre cette analyse, le rapport présente les mesures internes qui pourraient s'imposeren cas d'adhésion à l'UE. Par ailleurs, il ne remplace pas un message sur l'adhésion dela Suisse à l'UE, ni ne constitue un plan d’action du gouvernement suisse en matièrede politique d'intégration. Le Conseil fédéral décidera du moment de la réactivationde la demande d'adhésion à l'UE non seulement à la lumière du débat sur l'intégration,mais aussi au regard de l'état de la procédure de consultation sur les résultats des né-gociations bilatérales sectorielles et de différentes consultations, notamment auprèsdes cantons. Afin d'éviter malentendus et télescopages, le Conseil fédéral n'a pas l'in-tention de décider de l'ouverture de négociations d'adhésion avant que la procédured'approbation des accords sectoriels ne soit achevée. Le Conseil fédéral part de l'idéeque cette procédure d'approbation pourra être achevée sans ajournements.

Mis à part le présent rapport, le débat sur l’intégration se fondera sur d’autres sources,telles que le message du Conseil fédéral sur les résultats des négociations bilatéralessectorielles, entreprises dans sept domaines et conclues au niveau politique le 11 dé-cembre 19981 à Vienne, et sur les résultats des études que le Conseil fédéral a faitexécuter2.

Le choix du moment de la présentation de ce rapport, a été déterminé non seulementpar l'important besoin d’information, les ajournements de la conclusion des négocia-

1 Voir rapport sur la politique extérieure 98/1+2, FF 1999 ...2 Des mandats ont été donnés pour réaliser les études suivantes (ces dernières seront publiées dans un recueil

à paraître au printemps 1999):

A. Mandats juridiques:1. Etude des effets d'une adhésion de la Suisse à l'UE sur l'exercice des droits de référendum et d'initia-

tive au niveau fédéral (mise à jour de l'étude du prof. D. Schindler de 1995);2. Etude des effets d'une adhésion de la Suisse à l'UE sur l'exercice des droits de référendum et d'initia-

tive au niveau cantonal;3. Evaluation de l'activité législative de la CE;4. Reprise des travaux concernant les conséquences institutionnelles de l'appartenance à l'UE pour l'Au-

triche, la Suède et la Finlande.

B. Mandats économiques:1. Effets économiques à court terme des différents scénarios d'intégration;2. Intégration et marché du travail - Effets d'un rapprochement de la Suisse vers l'UE;3. Effets économiques à long terme des différents scénarios d'intégration.

Page 10: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 8 - Chapitre 1

tions bilatérales sectorielles et la nécessité d'agir en matière de politique d'intégration,mais aussi par l'échéance du délai de traitement de l'initiative populaire "Oui à l'Eu-rope!"3. Dans trois ans au plus tard, cette initiative populaire, qui demande l'inscrip-tion dans la constitution de l'ouverture immédiate de négociations d'adhésion à l'UE,devra être portée devant le peuple pour votation; il reviendra au Conseil fédéral dedéterminer la date de la votation, si cette initiative n’est pas retirée entre-temps reti-rée, par exemple en raison de la réactivation de la demande d'adhésion du 26 mai1992, actuellement gelée.

12 Evolution de la politique du Conseil fédéral

Ces dix dernières années, le Conseil fédéral a expliqué à plusieurs reprises la posi-tion de la Suisse dans le processus d'intégration européenne:

Dans le rapport du 24 août 1988 sur la position de la Suisse dans le processus d'inté-gration européenne, donc antérieur à la chute du Mur de Berlin, le Conseil fédéral,"après avoir examiné les diverses options possibles, (...) est arrivé à la conclusion qu'ilfallait maintenir la politique suisse d'intégration dans la voie où elle s'est engagée. (...)La seule véritable alternative à notre politique actuelle d'intégration et à son potentielde développement serait l'adhésion aux CE"4. Le rapport de 1988 donne un aperçuhistorique, encore utile aujourd'hui, des développements politiques en matière d'inté-gration depuis la deuxième guerre mondiale (voir ch. 2 dudit rapport).

Dans le rapport d'information du Conseil fédéral du 26 novembre 1990 sur la posi-tion de la Suisse dans le processus d'intégration européenne, le Conseil fédéral citeles principaux facteurs qui, indépendamment du projet EEE, pourraient mettre l'adhé-sion à la CE sur le devant de la scène, soit5:

" - un développement du contexte européen tel que l'antagonisme Est-Ouest s'estom-perait complètement pour faire place à une nouvelle architecture européennestructurée, sûre et cohérente;

- le rôle prépondérant que jouerait la CE dans cette nouvelle configuration;

- de nouveaux élargissements de la CE;

- le renforcement de cette tendance de la CE à exiger que les Etats européens non-membres fondent leur coopération avec elle sur une harmonisation de leur législa-tion sur la base du droit communautaire;

- une approche fédéraliste plus affirmée de la CE et une application plus systémati-que du principe de subsidiarité;

- un accroissement significatif du rôle de la CE à l'échelle mondiale".

3 Le message sur l’initiative populaire et sur le contre-projet indirect du Conseil fédéral a été transmis au

Parlement en janvier 1999, FF 1999 ...4 FF 1988 III 233, 364. En ce qui concerne la terminologie relative à l’Union européenne et aux Communau-

tés européennes, voir ch. 211, let. A.1.5 Texte non publié dans la FF, publication séparée, p.100.

Page 11: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 9 - Chapitre 1

Ces hypothèses se sont réalisées pour la plupart.

Le rapport du 18 mai 1992 sur la question d'une adhésion de la Suisse à la Commu-nauté européenne, que les Chambres ont retourné au Conseil fédéral pour complé-ment dans le cadre du débat sur l'Accord EEE, explique les raisons qui ont amené leConseil fédéral à décider, le 19 octobre 1991, "de fixer l'adhésion comme le but denotre politique d'intégration européenne et de considérer l'EEE comme une étape im-portante, en particulier sur le plan intérieur suisse, qui doit conduire à ce but".6

Dans le message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'AccordEEE, la demande d'adhésion à la CE est maintenue, mais il est en même temps cons-taté que "des négociations d'adhésion n’entrent pas en considération tant qu'elles nepeuvent se fonder sur des bases externes (calendrier de l'élargissement de la CE) etinternes. (...) En cas de nécessité ou d'opportunité d'ouvrir de telles négociations, leConseil fédéral soumettra un rapport complet au Parlement".7

Dans le rapport du 29 novembre 1993 sur la politique extérieure de la Suisse dans lesannées 90, le Conseil fédéral justifie comme suit les raisons pour lesquelles il consi-dère une adhésion à l'UE comme étant un objectif stratégique: "(...) il est aussi (du)devoir (du Conseil fédéral), dans l'intérêt du pays et de son avenir, de fixer clairementles objectifs stratégiques de sa politique extérieure. (Le Conseil fédéral) a de bonnesraisons, en dépit des décisions populaires susmentionnées, de maintenir l'adhésion àl'UE et à l'ONU comme objectifs stratégiques, même s'il n'ignore pas le peu de com-préhension que manifestent de nombreux citoyens à cet égard. (...) Il est donc de sondevoir, si l'intérêt du pays l'exige, de relancer le débat sur les solutions actuellementrejetées par le peuple ou fortement contestées en son sein"8.

Enfin, le 29 mars 1995, le Conseil fédéral présente un rapport intermédiaire sur lapolitique d'intégration européenne de la Suisse dans lequel il expose le double objec-tif de l'approfondissement sectoriel prioritaire des relations avec l’UE et ses Etatsmembres: "d'une part pour maintenir la compétitivité de notre économie, d'autre partpour faciliter, le moment venu, notre participation pleine et entière au processus d'in-tégration européenne".9

Le présent rapport répond à un important besoin d'information résultant des change-ments politiques considérables intervenus ces dernières années tant sur le plan inté-rieur qu’extérieur. En effet, en l'espace de quelques années, l'UE a révisé à deux repri-ses sa "constitution" (Maastricht et Amsterdam), réalisé l'Union économique et mo-nétaire, élargi son champ d'activités aux politiques en matière de sécurité intérieure etd'asile, accueilli trois Etats membres supplémentaires et ouvert des négociationsd'adhésion avec six nouveaux candidats.

6 FF 1992 III 1125, 1126.7 FF 1993 I 757, 779.8 FF 1994 I 150, 1929 FF 1995 III 191, 208.

Page 12: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 10 - Chapitre 1

Au plan mondial, le rapport de forces bipolaire a cédé le pas à une politique globale,notamment dans les domaines du soutien à la paix, des droits de l'homme, du déve-loppement, de la protection de l'environnement, de la lutte contre la criminalité, descommunications, ainsi que, sous l'influence de l’Organisation Mondiale du Com-merce, de la compétitivité des places économiques. C’est en premier lieu cette mon-dialisation et cette dimension multilatérale de la politique qui restreignent - et à l'ave-nir limiteront - les marges de manoeuvre nationales et la souveraineté des Etats. Lerapport du Conseil fédéral de 1993 sur la politique extérieure a démontré que les at-teintes à la souveraineté de la Suisse sont davantage le fait du processus inéluctable dela mondialisation que liées à la question de l’adhésion à l'UE.

C'est sur cette toile de fond que le droit suisse a systématiquement été rendu"eurocompatible", que la revitalisation du marché intérieur a été entreprise10 et qued’importantes votations à caractère européen ont abouti11.

13 Structure et éléments de base

En sus de cette introduction (chap. 1) et des conclusions (chap. 4), le présent rapportse compose de deux parties principales:

Le chapitre 2 donne un aperçu des répercussions sur la Suisse des politiques et desprogrammes communautaires, des quatre libertés du marché unique en cas d'adhésionà l'UE, de participation à l'EEE, d’entrée en vigueur des accords sectoriels, ainsi quede maintien de la situation actuelle. En règle générale, l'acquis communautaire n'estprésenté que dans la mesure où il a été modifié ou complété depuis le message du 18mai 1992 sur l'Accord EEE12. Ce chapitre tient compte des perspectives de dévelop-pement au sein de l'UE et en Suisse.

Le chapitre 3 donne, à la lumière de thèmes centraux de la politique intérieure, del'économie, de la politique étrangère et de la sécurité intérieure, une vue d'ensembledes implications de l'option sectorielle, d'une participation à l'EEE, des différentesformes de voies solitaires et d'une adhésion à l'UE. Les questions des citoyens13 re-produites dans ce chapitre et les brèves réponses qui y sont apportées doivent permet-tre de créer un lien avec les discussions en cours en Suisse et de faciliter la lecture

10 Loi sur le marché intérieur, loi sur les cartels, loi sur les entraves techniques au commerce, réforme des

marchés publics aux plans fédéral et cantonal, réforme agricole, ouverture du marché des infrastructures(aviation, rail, télécommunications, poste, électricité), introduction de la taxe sur la valeur ajoutée.

11 Votation sur l’initiative populaire "Négociations d’adhésion à l’UE: que le peuple décide!", retrait del’initiative populaire "Pour notre avenir au cœur de l’Europe" (projet EEE 2), votation sur la NLFA, vota-tion sur la réalisation et le financement des projets d’infrastructure des transports publics (voir ch. 312.03).

12 FF 1992 IV 1; voir W. Linder, Erfordert die Mitgliedschaft in der Europäischen Union eine Anpassung desschweizerischen Regierungssystems?, dans Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne -Enjeux et conséquences, Zurich 1998, p. 427 et ss, avec d'autres renvois.

13 Le présent rapport ne cite que quelques unes des milliers de questions reçues par le Bureau de l'intégrationDFAE/DFE. Les questions, qui en raison de leur caractère personnel ou spécifique, n'ont pas pu être prisesen considération dans le présent rapport, seront traitées séparément ou thématisées dans d'autres publica-tions.

Page 13: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 11 - Chapitre 1

pour les personnes ne possédant pas de connaissances approfondies dans le domainede l’intégration. Dans ce chapitre, il est également fait référence aux mesures internesà prendre en cas d'adhésion à l'UE.

Le rapport présente la situation juridique, politique et économique au tournant del'année 1998. La situation juridique et politique de la Suisse sont décrites telles qu'el-les se présentent actuellement. Les développements sont évoqués lorsqu'ils sontd’ores et déjà clairement prévisibles. Les développements au sein de l'UE sont pris enconsidération dans la mesure où il a été possible d’émettre des prévisions fiables, no-tamment en ce qui concerne l'élargissement de l'UE et les nouvelles règles de finan-cement. Le rapport décrit en outre les principales modifications matérielles résultantde la signature du Traité d’Amsterdam le 2 octobre 1997. Ce traité entrera en vigueurprobablement dans le courant de l'année 1999. A compter de ce moment, les articlesdu Traité sur l'Union européenne et du Traité instituant la Communauté européenne(voir tabelle de concordance en annexe) seront renumérotés.

Il était inévitable, avant tout dans le domaine économique, de formuler certaines hy-pothèses. Ainsi, toute la description des flux financiers (voir ch. 251) se base-t-ellesur l'hypothèse scientifique selon laquelle la Suisse adhérerait à l'UE en qualité de 16e

membre (pour le cas où la Suisse adhérerait en tant que 22e membre, voir ch. 253).S'agissant des calculs relevant du domaine agricole qui, tant en Suisse que dans l'UE,est en pleine mutation, c'est l'année 2007 qui a été retenue. Jusqu'à cette date, les dé-veloppements au sein de l'UE relevant de l'Agenda 2000 font l'objet d'estimations(voir ch. 253). Les hypothèses retenues ne sont pas associées à un message politique.

Page 14: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 12 - Chapitre 1

Page 15: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 13 - Chapitre 2

2 Description de la situation dans l'Union européenne eten Suisse: analyse comparative des répercussions pos-sibles sur la Suisse d'une adhésion à l'UE, d'une parti-cipation à l'EEE, des accords sectoriels et du maintiende la situation actuelle

21 Cadre institutionnel de l'UE et ordre juridique com-munautaire

211 Caractéristiques

A Ordre juridique communautaire

A.1 Sources

L’Union européenne (UE), instituée par le Traité de Maastricht14, repose sur trois pi-liers:- Les trois Communautés européennes (Communauté européenne/CE15 ancienne-

ment Communauté économique européenne/CEE, Communauté européenne ducharbon et de l'acier/CECA et Communauté européenne de l'énergie atomi-que/Euratom), qui sont seules à disposer de la personnalité juridique et à pouvoirconclure des accords internationaux.

- La politique étrangère et de sécurité commune (PESC)

- La coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures (JAI).

Alors que le premier pilier comprend les trois communautés supranationales, les deuxautres sont fondés pour l'essentiel sur une coopération intergouvernementale entre lesEtats membres16. Le Traité d'Amsterdam17, signé le 2 octobre 1997, ne modifie pascette structure.

Le droit communautaire est l'ensemble des règles qui régissent la structure, les com-pétences et l'action de l'Union européenne. Ces règles constituent ce qu'on appelle

14 Traité sur l'Union européenne du 7 février 1992, entré en vigueur le 1er novembre 1993, JO n° C 191 du 29

juillet 1992, p. 1.15 L'abréviation CE désigne soit les trois Communautés européennes, par ex. dans le nom des institutions

communautaires, soit la Communauté européenne qui est le nouveau nom de l'ancienne Communauté euro-péenne économique (CEE) et dont l'importance dépasse de beaucoup celle des deux autres communautés(CECA et EURATOM).

16 Depuis l'entrée en vigueur du Traité de Maastricht en 1993, dans le langage courant, l'expression "Unioneuropéenne / UE" est souvent improprement utilisée à la place de l'expression "Communautés européennes /CE". Du point du vue juridique, l'expression "Union européenne" est correcte lorsqu'elle vise soit l'ensembledes trois piliers, soit le deuxième ou le troisième pilier. Par contre, lorsque l'on vise seulement le premierpilier, l'expression "Communautés européennes" devrait être utilisée (voir aussi la note précédente).

17 JO n° C 340 du 10 novembre 1997, p. 1.

Page 16: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 14 - Chapitre 2

communément l'ordre juridique communautaire. La Cour de justice des CE (CJCE) asouligné que les caractéristiques essentielles de cet ordre juridique "sont, en particu-lier, sa primauté par rapport au droit des Etats membres, ainsi que l'effet direct detoute une série de dispositions applicables à leurs ressortissants et à eux-mêmes."18

L'ordre juridique communautaire comprend, selon la classification usuelle, trois sour-ces principales:

- Le droit communautaire primaire est formé par les traités constitutifs instituant lesCommunautés et le Traité sur l'Union européenne. A ces traités s'ajoutent leursmodifications, la dernière en date étant le Traité d'Amsterdam qui entrera en vi-gueur vraisemblablement pendant le premier semestre de 1999. Les Etats membresgardent la maîtrise des développements de l'UE puisqu'ils sont les seuls à pouvoirmodifier les traités constitutifs de l'UE. Une telle modification doit être décidée àl'unanimité et être approuvée par chacun des Etats selon ses procédures constitu-tionnelles.

- Le droit communautaire secondaire est l'ensemble des actes adoptés par les insti-tutions communautaires en vertu des traités constitutifs. Tous les actes de droit se-condaire sont subordonnés à ces traités.

- Le droit des relations extérieures est constitué de l'ensemble des accords qui lientles CE à d'autres sujets de droit international (Etats, organisations internationales).

L'ensemble de ces règles, y compris la jurisprudence qui s'y rapporte, fait partie de cequ'on appelle "l’acquis communautaire", que tous les nouveaux Etats membres doi-vent accepter en bloc en adhérant à l'UE.

A.2 Instruments juridiques de l'UE

L'article 189 CE énumère les instruments principaux du premier pilier de l'UE (CE,Euratom, CECA19): les actes obligatoires (règlement, directive, décision) et les actesnon obligatoires (recommandation, avis).

Le règlement a une portée générale. Son contenu est généralement normatif. Ils'adresse à tous les sujets de droit communautaire ou à des catégories de personnesdéfinies abstraitement, dans leur ensemble. Il est obligatoire dans tous ses éléments etdirectement applicable dans tout Etat membre.

La directive fixe aux Etats membres destinataires un résultat à atteindre. Elle néces-site une législation de mise en oeuvre dans le cadre juridique national. Les Etatsmembres disposent d'une marge de manoeuvre quant à la forme et aux moyens demise en oeuvre nationale.

18 CJCE, avis 1/91 du 14 décembre 1991, Rec. 1991, p. I-6079, p. I-6102, § 21. Voir let. A.2.19 La Communauté européenne du charbon et de l'acier dispose d'un certain nombre d'instruments juridiques

spécifiques.

Page 17: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 15 - Chapitre 2

La décision est un acte qui lie le destinataire, Etat membre ou particulier, auquel elleest notifiée. Ce n'est pas un acte normatif mais un acte individuel, sous réserve dequelques exceptions.

La recommandation et l'avis ne lient pas leurs destinataires, ils ont une valeur décla-rative.

Le droit secondaire communautaire ne connaît pas encore de hiérarchie des actes ju-ridiques. Celle-ci pourrait être introduite lors de la prochaine réforme institutionnellede l'UE. L'objectif principal d'une telle hiérarchie serait de permettre au législateur dese concentrer sur les aspects politiques des problèmes, plutôt que sur les questions dedétail. Elle conditionnerait le processus décisionnel communautaire en assurant queles actes de rang constitutionnel soient soumis à des procédures plus lourdes (par ex.:unanimité, majorité qualifiée renforcée, avis conforme) que les actes législatifs, eux-mêmes soumis à des procédures plus lourdes (par ex.: procédure de codécision) queles actes d'application (par ex.: délégation institutionnalisée de pouvoirs à la Commis-sion).

Les instruments juridiques actuels du deuxième pilier (PESC) et du troisième pilier(JAI) sont la position commune et l'action commune. Ces actes sont adoptés par leConseil de l'UE à l'unanimité et lient les Etats membres.

Dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), la positioncommune est destinée à rendre la coopération entre Etats membres plus systématiqueet à améliorer la coordination. L’action commune désigne une action coordonnée desEtats membres par laquelle des ressources humaines, financières, intellectuelles oumatérielles sont mises en oeuvre pour atteindre les objectifs concrets retenus par leConseil, sur la base des orientations générales du Conseil européen.

En ce qui concerne la coopération dans les domaines de la justice et des affaires inté-rieures (JAI), la position commune est l'instrument par lequel le Conseil peut promou-voir toute coopération utile à la poursuite des objectifs de l'UE; les Etats membress'engagent à s'y conformer dans leur ordre juridique interne. Par l’action commune, leConseil décide une action coordonnée des Etats membres, faite ou non dans le cadrede l'UE, lorsque les objectifs de l'UE peuvent être mieux servis par une action com-mune que par une action isolée des Etats membres, en raison des dimensions ou deseffets de l'action envisagée. Avec l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam, l'actioncommune sera remplacée par deux nouveaux instruments: la décision-cadre sera utili-sée pour rapprocher les dispositions législatives et réglementaires des Etats membres;elle liera les Etats membres quant au résultat à atteindre et laissera les instances natio-nales décider de la forme et des moyens pour ce faire; la décision servira quant à ellepour tout autre objectif que le rapprochement des dispositions législatives et régle-mentaires des Etats membres; elle sera contraignante et les mesures de mise en oeuvreau niveau de l'UE seront adoptées par le Conseil à la majorité qualifiée.

Page 18: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 16 - Chapitre 2

A.3 Caractéristiques du droit communautaire

D'application largement décentralisée, le droit communautaire est intégré dans l'ordrejuridique interne des Etats membres de l'UE, en raison notamment de son caractèreobligatoire, de son effet direct et de sa primauté sur la règle nationale contraire20.

L'effet direct des règles communautaires signifie que celles-ci créent des droits et desobligations que les particuliers peuvent invoquer en justice lorsqu'elles sont formuléesde façon suffisamment claire, précise et inconditionnelle. Un grand nombre de dispo-sitions du Traité CE ont été déclarées d'effet direct21. Celles des règlements sont géné-ralement d'effet direct. On dit également des règlements qu'ils sont directement appli-cables parce que, contrairement aux directives22, ils s'insèrent automatiquement dansles ordres juridiques nationaux. Certes, les directives ne lient en principe que les Etatsmembres, mais certaines de leurs dispositions se sont vues reconnaître un effet directlorsque les conditions susmentionnées étaient remplies et que le délai de leur mise enoeuvre en droit national avait expiré23. En outre, l'obligation d'appliquer les disposi-tions d'effet direct ne concerne pas seulement le juge, mais l'ensemble des autoritésnationales.

La primauté du droit communautaire vaut à l'égard de tout le droit national. En vertude ce principe, "les dispositions du traité et les actes des institutions directement ap-plicables ont pour effet, dans leurs rapports avec le droit interne des Etats membres,de rendre inapplicable de plein droit, du fait même de leur entrée en vigueur, toutedisposition contraire de la législation nationale existante."24

Il arrive fréquemment qu'un législateur national adopte - consciemment ou non - unacte législatif contraire à la règle communautaire. Deux types de conséquences sontpossibles: d'une part, se fondant sur le droit communautaire, un particulier peut de-mander à un juge national d'écarter la règle nationale contraire à la règle communau-taire; d'autre part, la Commission peut ouvrir contre l'Etat concerné une procédure enmanquement, au terme de laquelle la Cour de justice des CE peut constater la viola-tion du droit communautaire et obliger l'Etat à y mettre fin (art. 169 CE). Dans ce ca-dre, la Cour de justice des CE peut infliger des amendes à l'Etat membre qui n'auraitpas pris les mesures que comporte l'exécution d'un arrêt en manquement. Par ailleurs,les particuliers victimes d'un dommage du fait de la violation du droit communautaire

20 Pour un aperçu des effets du droit communautaire en tant que partie de l'ordre juridique d'un Etat membre,

voir par ex. A. Baas, "The Netherlands in Face of its Community Obligations 1984-1995" dans: CommonMarket Law Review, Nr. 33, Den Haag 1996.

21 Par exemple, les art. 6, 7 § 1, 9, 12, 13 § 2, 16, 30, 31, 32 § 1, 34, 36, 37 § 1 et 2, 48, 52, 53, 59, 60, al. 3,62, 85, al. 1 et 86, 90 § 2, 92, 93 § 3, 95, al. 1 et 3, 95, al. 2, 119, al. 1, CE.

22 Selon l'art. 189 CE, "le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il estdirectement applicable dans tout Etat membre. La directive lie tout Etat membre destinataire quant au résul-tat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens."

23 Voir notamment CJCE, arrêt du 4 décembre 1974, aff. 41/74, Van Duyn, Rec. 1974, p. 1337.24 CJCE, arrêt du 9 mars 1978, aff. 106/77, Simmenthal, Rec. 1978, p. 629, § 17.

Page 19: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 17 - Chapitre 2

par un Etat membre peuvent ouvrir, devant le juge de cet Etat, une action en indem-nité pour obtenir la réparation pécuniaire du dommage constaté25.

A.4 Activité législative communautaire

Au sein de l'UE, c'est presque exclusivement le premier pilier, c'est-à-dire la CE es-sentiellement mais aussi la CECA et l'Euratom, qui déploient une activité législative.Les instruments juridiques utilisés dans le cadre des deuxième (PESC) et troisième(JAI) piliers ont été décrits ci-dessus.

En simplifiant, on note que le champ d'activité de la CE est essentiellement économi-que et qu’il se limite aux relations transfrontières. Les relations juridiques purementinternes ne sont pas régies par le droit communautaire. Le droit civil (par ex. droit despersonnes, droit de la famille, droit des successions, droits réels) et, dans une grandemesure, le droit des obligations (par ex. droit des contrats, droit de change), le droitpénal, le droit de procédure et le droit administratif restent de la compétence des Etatsmembres et ne sont affectés par le droit communautaire que de manière incidente (parex. par les Conventions concernant la compétence judiciaire et l'exécution des déci-sions en matières civile et commerciale, voir ch. 222.06.5 et 246). L'art. 100 est unedisposition importante du Traité CE. Il prévoit que "le Conseil, statuant à l'unanimitésur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen et duComité économique et social, arrête des directives pour le rapprochement des dispo-sitions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres qui ont uneincidence directe sur l'établissement ou le fonctionnement du marché commun."

Depuis 1995, la Commission a pris des initiatives pour rendre la législation commu-nautaire plus claire et plus efficace, et diminuer les charges pour les opérateurs éco-nomiques dans le marché intérieur. Chaque année, la Commission rend compte desprogrès réalisés dans le cadre de son programme "légiférer moins pour agir mieux."26

Elle veille ainsi à la bonne application des principes de subsidiarité et de proportion-nalité, à l'amélioration de la qualité rédactionnelle des projets législatifs, à la simplifi-cation, à la codification ou à la consolidation de la législation communautaire.

Au cours des dernières années, la Commission a exercé son monopole d'initiative lé-gislative de manière plus ciblée, en se concentrant sur les priorités politiques fixéespar les institutions communautaires. Il en résulte une diminution régulière du nombrede propositions de la Commission qui a passé de 790 en 1990 à 550 en 1997, le nom-bre de propositions de législation nouvelle27 tombant de 61 en 1990 à 7 en 1997.

25 CJCE, arrêt du 5 mars 1996, aff. C-46/93 et C-48/93, Brasserie du pêcheur et Factortame, Rec. 1996, p. I-

1029.26 Communication de la Commission du 27 mai 1998, COM (1998) 345 final.27 Le pourcentage des nouvelles propositions législatives est tombé de 8 % en 1990 à 1,3 % en 1997. Les pro-

positions concernent pour la plupart des mesures d'exécution, de poursuite d'actions déjà engagées et de ré-vision de la législation existante.

Page 20: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 18 - Chapitre 2

Alors que la production législative communautaire diminue de façon sensible, celledes Etats membres est en constante augmentation, par exemple dans le domaine desréglementations techniques applicables aux produits industriels: 385 projets ont éténotifiés par les Etat membres en 1993, 670 en 1997. Pour les opérateurs économiques,les charges résultant des législations nationales sont probablement plus lourdes - plusnombreuses à tout le moins - que celles occasionnées par le droit communautaire.

L'Institut européen de l'Université de Bâle a procédé à une évaluation quantitative etqualitative de l'activité législative de la CE entre le 1er janvier 1992 et le 30 juin199828. Pendant cette période, près de 21 000 actes juridiques des institutions com-munautaires ont été publiés au Journal officiel des CE. L'analyse du contenu de cesactes relativise fortement ce nombre.

En examinant la nature des actes recensés, sans tenir compte des institutions qui lesadoptent, on constate que la grande majorité (12 200, 58% du total) sont des actes degestion courante adoptés par la Commission dans le cadre de la politique agricole, surla base de compétences déléguées par le Conseil, et ayant généralement une durée devalidité limitée, que 1 300 actes (6% du total) constituent de simples corrections typo-graphiques (corrigenda) et que 4 800 actes (23% du total) portent modification d'actesexistants. Seul le solde (2 300 actes, 11% du total) constitue de nouveaux actes, soit 2100 règlements et 204 directives (pour une moyenne annuelle de 340 nouveaux rè-glements et de 32 nouvelles directives).

En répartissant les actes par institutions, on note que les actes adoptés par le"législateur communautaire" (Conseil/Conseil et Parlement européen) se réduisent àenviron 2 000, actes nouveaux et actes modificateurs inclus (soit environ 11% du totaldes actes recensés).

Dans le même esprit, si l'on ne considère que les actes adoptés par le "législateurcommunautaire" en excluant les actes pris dans les domaines de l'agriculture, de lapêche et des relations économiques extérieures et les actes modificateurs, on observeque le Conseil et le Parlement ont arrêté près de 400 actes nouveaux, soit unemoyenne annuelle de 67 actes nouveaux, actes devant en principe être mis en oeuvrepar les parlements nationaux.

Enfin, en répartissant les actes par matière, on met en exergue que la part des actesadoptés dans les domaines de l'agriculture, de la pêche, des douanes et des relationséconomiques extérieures (par exemple les mesures antidumping) représente environ85% de l'activité des institutions communautaires.

B Droit international et ordre juridique suisse En droit international général, le principe de la primauté du droit international dé-coule de trois principes fondamentaux: l'obligation d'exécuter la règle internationale

28 Cette étude sera publiée au début de l'année 1999 dans un volume séparé.

Page 21: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 19 - Chapitre 2

en vigueur pour l’Etat en question (principe pacta sunt servanda, art. 26 de la Conven-tion de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités29), le principe de la bonne foi, etl'interdiction - découlant directement des deux premiers principes - faite à toute partieà un traité d'invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exécution de ces traités (art. 27 de la Convention de Vienne sur le droit des traités).

L'ordre juridique suisse s'inspire d'une conception moniste, selon laquelle droit inter-national et droit interne constituent un ordre juridique unique, dont les traités interna-tionaux font "partie intégrante" à partir de leur prise d'effet pour notre pays. Dès cemoment et aussi longtemps que ces règles sont en vigueur pour la Suisse, tous les or-ganes de l'Etat (autorités politiques, administratives et judiciaires) doivent les respec-ter et les appliquer et les particuliers peuvent les invoquer pour en déduire des droitset des obligations à charge des autorités ou d'autres particuliers. Les autorités fédéra-les - en premier lieu le Conseil fédéral et le Tribunal fédéral - ont maintes fois recon-nu la primauté du droit international30.

Pour les justiciables, l'invocabilité en justice de dispositions de droit internationalsuppose que celles-ci, selon les conceptions concordantes du Tribunal fédéral et duConseil fédéral, soient "considérées dans leur contexte et à la lumière tant de l'objetque du but du traité (…), inconditionnelles et suffisamment précises pour produire uneffet direct et s'appliquer comme telles à un cas d'espèce et constituer le fondementd'une décision concrète."31

C Répercussions sur la Suisse

C.1 Adhésion à l'UE

En cas d'adhésion, le droit communautaire ferait partie intégrante, avec rang de prio-rité, de l'ordre juridique suisse. Son application serait guidée par les principes de pri-mauté et d'effet direct, principes qui sont largement connus dans l'ordre juridiquesuisse (voir ch. 211 let. B).

Pour le législateur fédéral et cantonal (voire communal) il s'agirait de procéder - no-tamment pour des raisons de transparence et de sécurité juridique - aux adaptations dudroit interne imposées par l'adhésion à l'UE. On pense notamment aux dispositionslégislatives nécessaires à la mise en œuvre de directives.

29 Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités, RS 0.111.30 Voir par ex. le message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitution fédérale (FF 1997 I 136 et

ss), message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE (FF 1992 IV 83) ou la publicationcommune de l'Office fédéral de la justice et de la Direction du droit international public sur les rapports en-tre le droit international et le droit interne au sein de l'ordre juridique suisse du 26 avril 1989, JAAC53/1989, N° 54 (ci-après Publication commune). Voir récemment ATF 122 II 485.

31 Publication commune p. 447, ATF 112 Ib 184 et rapport sur la position de la Suisse dans le processus d'in-tégration européenne du 24 août 1988, FF 1988 III 233, 332.

Page 22: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 20 - Chapitre 2

Au stade de l’application du droit, l’obligation des Etats membres de prendre toutesmesures générales ou particulières propres à assurer l'exécution des dispositions dedroit communautaire s'imposerait à toutes les autorités administratives et judiciaires.

Les règles de droit suisse contraires à une règle communautaire seraient inapplicables.Le Tribunal fédéral, et toutes les autorités d'application du droit, devraient de leurpropre autorité, laisser inappliquée toute disposition de droit interne incompatibleavec une règle de droit communautaire32. Sous cette réserve, c'est à l'ordre juridiquesuisse qu'il appartiendrait de déterminer la façon d'éliminer les règles internes incom-patibles avec le droit communautaire. Il faut mentionner que les juridictions nationa-les peuvent saisir la Cour de justice d'une question préjudicielle en interprétation dudroit communautaire. Si ces juridictions sont des juridictions de dernière instance,comme le Tribunal fédéral, elles doivent saisir la Cour de justice des CE (voir ch.332.04.5).

C.2 EEE, accords sectoriels et maintien de la situation actuelle

En cas de participation à l'EEE, la primauté du droit de l'EEE sur le droit suisse dé-coulerait du droit international général, de l'Accord EEE lui-même et résulterait éga-lement du droit interne suisse. L'Accord EEE reprend dans une grande mesure les dé-finitions communautaires du règlement et de la directive. Les effets juridiques de cesdeux catégories d'actes seraient quasiment identiques à ceux que ces actes déploienten droit communautaire. Pour plus de détails sur les conséquences pour la Suissed'une participation à l'EEE, voir le message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation del'Accord sur l'EEE33.

Sous réserve de l'accord sur le transport aérien, les accords sectoriels auront les mê-mes effets que des accords internationaux (voir ch. 213, let. B.3).

En cas de maintien de la situation actuelle, la Suisse continuerait à examiner systé-matiquement, dans tous les domaines ayant une dimension transfrontalière, la compa-tibilité de ses dispositions juridiques avec celles du droit communautaire34. Il s'agitd'éviter d'élaborer le droit suisse dans l'ignorance du droit européen (au sens large) etde créer de nouvelles disparités juridiques qui entraveraient les relations entre laSuisse et la CE. Il faut tenir compte du droit européen dans la mesure du possible,présenter les divergences matérielles du projet par rapport au droit européen, et moti-ver celles-ci. A tout le moins formellement, la Suisse garderait son autonomie de dé-cision.

32 CJCE, arrêt du 9 mars 1978, aff. 106/77, Simmenthal, Rec. 1978, p. 629; voir. O. Jacot-Guillarmod, Consé-

quences d'une adhésion à l'Union européenne sur l'organisation judiciaire et le droit procédural suisse, dans:Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences, Zurich 1998, 383 etss, avec d'autres renvois.

33 Message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 5).34 Rapport sur la position de la Suisse dans le processus d'intégration européenne du 24 août 1988, FF 1988 III

233, 365.

Page 23: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 21 - Chapitre 2

212 Répartition des compétences entre l'UE et les Communautés euro-péennes d'une part, et les Etats membres d'autre part

A Système de répartition des compétences au sein de l'UE

L'UE et la CE ne peuvent agir que dans les limites des compétences qui leur sont con-férées et des objectifs qui leur sont assignés par les traités (principe de l’attribution).Selon un système voisin de celui de l'Etat fédéral suisse (art. 3 cst.35), cela signifiequ'en l'absence d'attribution de compétence au profit de la CE, les Etats membres con-servent leurs compétences législatives et décisionnelles. Dans la plupart des situationsde la vie quotidienne, les citoyens restent régis par leur droit national, par exempledans les domaines du droit des personnes, du droit de la famille, du droit des contrats,du droit administratif, du droit pénal et du droit de procédure. En réalité, peu de com-pétences de la CE sont réellement exclusives. Même les domaines de compétencescommunautaires fortement unifiés (droit douanier, droit agricole) ont besoin de nom-breux relais de droit national. Il est plus juste de dire que le dessaisissement limité decertains pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires des Etats membres au profit de laCE constitue en réalité une mise en commun des compétences dans un cadre géogra-phique et institutionnel original. A bien des égards, le droit communautaire constituedavantage un droit interne commun qu'un droit international.

A.1 Compétences dites exclusives

On parle de compétence exclusive de la CE lorsque, dans une matière donnée, lesEtats membres lui ont effectivement transféré l'essentiel du pouvoir législatif. A cejour, seules deux compétences ont été reconnues comme exclusives par la Cour dejustice des CE: la politique commerciale commune et la politique commune de con-servation des ressources maritimes. Depuis l'entrée en vigueur de l'Union économiqueet monétaire (UEM), les politiques monétaires et cambiales sont elles aussi devenuesexclusives.

La Commission défend une conception plus large des compétences exclusives. Elle yinclut les compétences destinées à devenir exclusives avec la réalisation progressivedu marché intérieur (selon le principe de la préemption du droit communautaire), tel-les que les organisations communes des marchés agricoles, la suppression des obsta-cles à la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capi-taux, les règles générales du droit de la concurrence et les éléments essentiels de lapolitique des transports.

A.2 Compétences partagées

Dans la plupart des cas, les compétences attribuées à la CE sont partagées avec lesEtats membres (libre circulation des marchandises, agriculture, libre circulation despersonnes, des services et des capitaux, politique des visas, asile, immigration, trans-

35 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 29 mai 1874 (cst.), RS 101.

Page 24: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 22 - Chapitre 2

ports, concurrence, fiscalité indirecte, emploi, coopération douanière, politique so-ciale, éducation, formation professionnelle, culture, santé publique, protection desconsommateurs, réseaux transeuropéens, industrie, cohésion économique et sociale,recherche et développement, environnement, coopération au développement). Celasignifie que les Etats membres conservent la compétence de légiférer sur toute ques-tion qui ne fait pas l'objet de règles spécifiques au niveau communautaire (principedes compétences résiduelles). Mais il convient de souligner que la CE agit, dans levaste domaine des compétences partagées, le plus souvent par des mesures posant lesbases d'une action commune ou fixant des objectifs à atteindre; dans les limites desrègles communautaires, les Etats membres sont libres de légiférer comme ils l'enten-dent. Dans certains cas, la compétence communautaire est limitée à des actions me-nées sous forme de coopération, de coordination, d'encouragement ou d'appui, leTraité CE excluant expressément toute harmonisation (assurances sociales, éducation,formation professionnelle, santé publique, culture). Le chiffre 22 donne un aperçu desconséquences spécifiques pour chaque domaine de compétences.

Dans les domaines de la coopération en matière de politique étrangère et de sécuritécommune (deuxième pilier) et de la coopération policière et judiciaire en matière pé-nale (troisième pilier), les Etats membres sont amenés à adopter, à l'unanimité, desstratégies communes, des actions communes ou des positions communes (deuxièmepilier) ou des positions communes, des conditions-cadres ou des conventions(troisième pilier).

A.3 Compétences subsidiaires

L'art. 235 du Traité CE prévoit que le Conseil doit agir, même si le traité n'a pas prévude pouvoirs d'action spécifiques, lorsqu'une action apparaît nécessaire pour réaliser,dans le fonctionnement du marché intérieur, l'un des objets de la CE. Cet article tem-père le principe d'attribution décrit ci-dessus. Dans les années 70, le Conseil, statuanttoujours à l'unanimité, a utilisé cette disposition pour renforcer certaines actionscommunautaires ou pour mettre en place des actions qui constituaient le prolonge-ment nécessaire des compétences communautaires dans le domaine des quatre libertés(par ex. en matière d'environnement, d'énergie et de protection des consommateurs).Cependant, l'octroi à la CE de nouvelles compétences par l'Acte unique européen, leTraité de Maastricht et, récemment, le Traité d'Amsterdam a eu pour effet de réduireconsidérablement la portée pratique de l'art. 235 du Traité CE que la Cour de justicedes CE a également interprété restrictivement36.

A.4 Compétences implicites

La théorie des pouvoirs implicites de la CE, développée par la jurisprudence de laCour de justice des CE à partir des années 70, apporte un autre correctif au principed'attribution. Par compétences implicites, on entend les compétences communautairesnon écrites qui découlent d'une interprétation systématique et téléologique des traités.

36 CJCE, Avis 2/94, Adhésion de la CE à la CEDH, Rec. 1996, p. I-1759.

Page 25: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 23 - Chapitre 2

Cette théorie a principalement trouvé application dans le domaine des relations exté-rieures (accords internationaux) où la Cour de justice des CE a précisé que chaquefois que le droit communautaire a établi, dans le chef des institutions de la CE, descompétences sur le plan interne en vue de réaliser un objectif déterminé, la CE estinvestie de la compétence de prendre les engagements internationaux nécessaires à laréalisation de cet objectif, même en l'absence d'une disposition expresse à cet égard(principe du parallélisme des compétences internes et externes). La jurisprudence ré-cente est plutôt restrictive à cet égard.

A.5 Principe de subsidiarité

Le Traité de Maastricht a consacré le principe de subsidiarité en tant que principe ré-gulateur de l'exercice des compétences partagées. L'art. 3b, par. 2 et 3 du Traité CEfixe que "dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusive, la CEn'intervient, conformément au principe de subsidiarité, que si et dans la mesure où lesobjectifs de l'action envisagée ne peuvent pas être réalisés de manière suffisante parles Etats membres et peuvent donc, en raison des dimensions ou des effets de l'actionenvisagée, être mieux réalisés au niveau communautaire." La compétence d'attribu-tion de la CE doit ainsi être lue à la lumière de trois critères d'appréciation: le contenumatériel de la mesure envisagée, sa nécessité (valeur ajoutée de l'action communau-taire, caractère transfrontalier du problème) et son intensité (proportionnalité desmoyens d'action par rapport aux objectifs). Le principe de subsidiarité est un conceptdynamique qui oriente l'exercice des compétences partagées en fonction des nécessi-tés et de l'intensité de l'action envisagée. Il ne permet pas de tracer une frontière pré-cise entre les compétences des Etats membres et de la CE, mais contribue à organiserl'exercice des compétences partagées. Dans le cadre de ses compétences, la Cour dejustice des CE peut être amenée à examiner si la CE a respecté, dans l'exercice de sescompétences, le principe de subsidiarité37. La Commission fait régulièrement rapportau Conseil européen sur l'application de ce principe. Le Traité d'Amsterdam consacreun protocole au principe de subsidiarité. Ce texte n'apporte guère d'innovations et deprécisions.

B Système de répartition des compétences entre la Confédération et lescantons

La pierre angulaire du système de répartition des compétences entre la Confédérationet les cantons est l'art. 3, cst., aux termes duquel les cantons sont souverains en tantque leur souveraineté n'est pas limitée par la constitution fédérale. La Confédérationn'a donc que les compétences qui lui sont attribuées par la constitution fédérale. Enbref, la Confédération a une compétence d'attribution et les cantons ont une compé-tence résiduelle. Le droit constitutionnel suisse distingue, lui aussi, diverses formes decompétences: les compétences exclusives de la Confédération, qui privent les cantonsde tout pouvoir de législation, même tant que la Confédération n'a pas encore légiféréen la matière (par ex: défense nationale, douanes); les compétences fédérales concur-

37 Voir p. ex. CJCE, arrêt du 13 mai 1997, aff. C-233/94, Rec. 1997, p. I-2405.

Page 26: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 24 - Chapitre 2

rentes, au regard desquelles les cantons peuvent continuer de légiférer aussi long-temps que la Confédération n'a pas réglementé la matière de façon exhaustive; lescompétences fédérales d'édicter une législation-cadre, qui permettent à la Confédéra-tion d'édicter dans un domaine donné des lignes directrices, des principes générauxqui s'imposent aux cantons tout en préservant la compétence cantonale de régler lesdétails; les compétences parallèles, selon lesquelles la Confédération et les cantonssont compétents dans le même domaine.

Ce bref aperçu de la répartition des compétences fédérales et cantonales démontrequ'il existe des analogies certaines entre le système fédéral suisse et le système de ré-partition des compétences au sein de l'UE.

C Répercussions sur la Suisse

C.1 Adhésion à l'UE

Une adhésion de la Suisse à l'UE n'impliquerait pas de modifications dans la réparti-tion actuelle des compétences entre la Confédération et les cantons.

Toutefois, l'adhésion aurait des effets significatifs sur l'exercice des compétences fé-dérales et cantonales, en fonction des compétences attribuées à la CE et surtout del'intensité de leur utilisation. Dans les domaines relevant de la compétence exclusivede la CE, les compétences transférées seraient exercées au niveau communautaire(voir let. A.1). En ce qui concerne les compétences partagées (voir let. A.2), leurs ef-fets sur l'exercice des compétences fédérales et cantonales dépendraient, dans unelarge mesure, de l'intensité des mesures adoptées au niveau communautaire(législations harmonisées, législations-cadres). La mise en oeuvre du principe de sub-sidiarité, qui fixe des conditions à l'exercice des compétences communautaires, auraitpour effet de mieux encadrer l'action communautaire et de limiter le risque d'atteintesinjustifiées aux compétences fédérales, cantonales ou communales.

C.2 Participation à l'EEE

L'Accord EEE n'aurait qu'un effet limité sur notre ordre institutionnel, car il ne com-porte aucun transfert de compétences de nos institutions aux institutions de l'EEE. Leslimites que l'accord apporterait à notre autonomie seraient cependant plus importantesque celles que nous impose n'importe quel autre accord déjà conclu, en raison de l'im-portance et de la complexité de l'infrastructure institutionnelle mise en place et duvaste domaine - pratiquement tout le droit économique international - couvert parl'accord.

L'EEE aurait des conséquences moins grandes pour les cantons que pour la Confédé-ration, car il porte avant tout sur des matières qui relèvent de la compétence de laConfédération. En outre, la mise en oeuvre de l'accord sur le plan interne pourrait s'ef-fectuer sans modification de la répartition actuelle des compétences entre la Confédé-

Page 27: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 25 - Chapitre 2

ration et les cantons. Pour les domaines relevant de leur compétence, les cantons toutcomme la Confédération, seraient tenus de se conformer au droit de l'EEE.

C. 3 Accords sectoriels, maintien de la situation actuelle

Les accords sectoriels entraîneront pour l'exercice des compétences fédérales et can-tonales, des restrictions de même nature que tout accord international conclu par laSuisse. Seul l'accord négocié en matière aérienne aura des répercussions institution-nelles. Ces accords, en limitant l'autonomie de chaque partie contractante, se réper-cuteront sur l'exercice autonome des compétences nationales, sans toutefois modifierla répartition des compétences internes entre la Confédération et les cantons.

213 Institutions et processus décisionnel au sein de la CE

A Institutions et processus décisionnel

A.1 Aperçu

Bien que l'art. C du Traité UE indique que l'UE dispose "d'un cadre institutionnel uni-que", les fonctions des institutions dans les deuxième et troisième piliers (politiqueétrangère et de sécurité commune, voir ch. 231; coopération dans les domaines de lajustice et des affaires intérieures, voir ch. 24) sont à distinguer de celles exercées dansle cadre du premier pilier (les trois Communautés européennes). Dans les deuxième ettroisième piliers, le Conseil des ministres détient le pouvoir exclusif de décision et nepeut décider en règle générale qu'à l'unanimité. Le Parlement européen ne dispose enprincipe que du droit à être consulté. Le droit d'initiative en matière de droit secon-daire n'appartient pas uniquement à la Commission, mais est partagé avec les Etatsmembres, et la Cour de justice des CE n'a que des compétences limitées. Les institu-tions susmentionnées travaillent, dans le premier pilier en particulier, selon des méca-nismes de décision subtils, qui sont décrits ci-après.

Par ailleurs, l'Union économique et monétaire dispose de procédures de décision pré-sentant des particularités par rapport aux procédures ordinaires. L'équilibre institu-tionnel qui prévaut dans les autres secteurs est ainsi modifié: les rôles de la Commis-sion et du Parlement européen sont partiellement restreints (pas de procédure de co-décision), alors que le Conseil garde un rôle décisif et que la Banque centrale euro-péenne se voit reconnaître un pouvoir de décision autonome.

A.2 Parlement européen

Le Parlement européen est composé de représentants des Etats membres élus au suf-frage universel direct, indépendants et non liés par des instructions, dont le nombretotal s'élève à 626 députés. Les membres du Parlement sont regroupés selon leur ap-partenance politique et non pas selon leur nationalité. Dans le processus législatif, leParlement peut, en fonction des domaines, donner un avis consultatif (procédure de

Page 28: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 26 - Chapitre 2

consultation), proposer des amendements à une proposition d'acte (procédure de coo-pération; la décision finale revient au Conseil des ministres) ou encore décider sur unpied d'égalité avec le Conseil (procédure de codécision). Le Parlement arrête avec leConseil des ministres le budget annuel et contrôle son exécution. Il agit aussi commeorgane de contrôle, dans la mesure où il approuve la Commission et peut même con-traindre cette dernière à la démission collective (jusqu'à présent, cela ne s'est jamaisproduit, mais cette possibilité a été évoquée dans le contexte de la crise de l'ESB oudes récentes accusations de corruption). Le Parlement se prononce en principe à lamajorité absolue des suffrages exprimés.

Dans le cadre de la procédure de consultation, la Commission, en vertu de son droitd'initiative, élabore une proposition sur la mesure communautaire envisagée. Le Con-seil consulte le Parlement sur cette proposition avant de prendre sa décision finale. Laconsultation du Parlement peut être obligatoire ou facultative, selon les cas.

La procédure de coopération est destinée à garantir le recours à la règle de la majoritéqualifiée au sein du Conseil et à renforcer la participation du Parlement aux décisionsrelatives au marché intérieur. Elle préserve le droit du Conseil à la décision finale,ainsi que le pouvoir d'initiative de la Commission.

Le Traité de Maastricht introduit la procédure de codécision qui donne au Parlementla responsabilité de colégislateur. Lorsque le Parlement a exprimé son avis, le Conseilarrête une position commune, en principe à la majorité qualifiée. Cette position esttransmise au Parlement, qui peut l'approuver à la majorité simple dans un délai detrois mois ou ne pas s'exprimer durant ce délai. Dans ces deux cas, le Conseil ap-prouve l'acte conformément à la position commune. Le Parlement peut également in-diquer, à la majorité des membres qui le composent, son intention de rejeter la posi-tion commune et la porter à la connaissance du Conseil. Le Conseil a la possibilité deconvoquer un "comité de conciliation" paritaire. A l'issue de la réunion de ce comité,ou bien le Parlement confirme le rejet de la position commune, de sorte que la propo-sition d'acte est réputée rejetée, ou bien il propose des amendements.

La procédure d'avis conforme (soit l’obligation, pour le Conseil, de recueillir l’appro-bation formelle du Parlement avant l’adoption d’un acte) s’applique avant tout aux ac-tes qui ont une incidence sur l'identité et la structure de la CE ou de l'UE. Outre lesdécisions relatives à l'adhésion à l'UE ainsi qu'à l'association de pays tiers, qui néces-sitent l'avis conforme du Parlement, l'avis conforme est obligatoire pour la conclusionpar la Communauté de traités internationaux importants (par ex. l'Accord EEE), ainsique pour la définition d'une procédure uniforme d'élection du Parlement. L'absenced'avis conforme du Parlement empêchera l'adoption du texte ou la conclusion de l'ac-cord en cause. Par ailleurs, il faut noter que l'approbation du Parlement n'est pas né-cessaire pour la révision des traités constitutifs qui est de la compétence des Etatsmembres qui décident à l'unanimité. Dans ce cas, ce sont les parlements nationaux desEtats membres qui doivent se prononcer selon les règles constitutionnelles respectivesdes Etats membres.

Page 29: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 27 - Chapitre 2

A.3 Conseil de l’UE

Au sein du Conseil des ministres (Conseil de l’UE), chaque Etat membre dispose d’unreprésentant au niveau ministériel. La composition du Conseil varie selon l'objet desdélibérations. Ainsi, les ministres de l'agriculture délibèrent sur les questions agrico-les, les ministres du travail et des affaires sociales sur les problèmes relatifs à l'em-ploi. Les ministres des affaires étrangères sont compétents pour les relations extérieu-res et se prononcent aussi sur les affaires générales de l'Union. Les travaux du Conseilsont préparés par le comité des représentants permanents des Etats membres(Coreper). Chaque Etat membre exerce à tour de rôle, pour une durée de six mois, laprésidence du Conseil, du Coreper et des comités subordonnés. Le ministre dont l'Etatassure la présidence est chargé de préparer et de diriger les travaux des différentesformations du Conseil (préparation du calendrier de la présidence, des ordres du jourprovisoires, recherche de solutions de compromis, relations avec les autres institutionscommunautaires et représentation internationale de l'UE).

Le droit communautaire secondaire (par ex. les directives et les règlements CE) estavant tout adopté par le Conseil des ministres, en coopération ou en codécision avecle Parlement européen.

Les modalités de vote au sein du Conseil sont réglées dans des dispositions spécifi-ques. Toutefois, sauf dispositions contraires des traités, les délibérations du Conseilsont acquises à la majorité des membres qui le composent. Pour les votes qui requiè-rent une majorité qualifiée, les voix des membres sont pondérées au moyen des indi-ces suivants: Allemagne, France, Italie et Royaume-Uni 10; Espagne 8; Belgique,Grèce, Pays-Bas et Portugal 5; Autriche et Suède 4; Danemark, Finlande et Irlande 3;Luxembourg 2. Actuellement, les délibérations à la majorité qualifiée sont acquises sielles ont recueilli au moins 62 des 87 voix (la minorité de blocage est donc de 26voix38). En conséquence, les cinq grands Etats, à eux seuls, ne peuvent emporter unedécision contre les autres Etats et deux grands Etats ne peuvent empêcher, seuls, unedécision à la majorité qualifiée.

Enfin, certaines délibérations du Conseil sont acquises à l'unanimité (chaque Etatmembre dispose donc d'un droit de veto), notamment dans les domaines de la fiscalitéindirecte, de la culture et de l'industrie.

A.4 Conseil européen

Depuis 1974 les Chefs d'Etat et de gouvernement des Etats membres se réunissent aumoins deux fois par an au sein du Conseil européen, auquel participe aussi le prési-dent de la Commission. Le président du Parlement européen est invité à la séanced'ouverture. Le Conseil européen gagne en importance au sein de l'UE. Il fixe des

38 Au moment de l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, il a été prévu dans la décision du Con-

seil du 29 mars 1994 "Compromis de Ioannina" que si des membres du Conseil représentant un total de 23 à25 voix indiquent leur décision de s'opposer à la prise de décision par le Conseil à la majorité qualifiée, leConseil fera tout pour aboutir à une solution satisfaisante qui puisse être adoptée par 65 voix au moins.

Page 30: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 28 - Chapitre 2

priorités, donne à l'Union les impulsions nécessaires à son développement, détermineles objectifs politiques généraux nécessaires à ce développement et s'occupe desquestions litigieuses qui n'ont pas trouvé de solution au niveau des ministres. Le Con-seil européen décide par exemple des participants à la Conférence européenne (voirch. 233, let. A.6).

A.5 Commission des Communautés européennes

La Commission des Communautés européennes (Commission des CE, dans un con-texte non juridique la Commission se nomme "Commission européenne") est compo-sée de 20 membres, deux membres pour les "grands" Etats comme l'Allemagne, laFrance, la Grande-Bretagne, l'Italie et l'Espagne et un membre pour les autres. LaCommission a le monopole de l'initiative pour les domaines relevant du premier pi-lier, le Conseil des ministres (et le cas échéant le Parlement européen) ne peut doncadopter des actes que sur la base d'une proposition de la Commission. Une autrefonction importante de la Commission consiste dans le contrôle du respect du droitcommunautaire et des arrêts de la Cour de justice des CE. A cette fin, elle peut ac-tionner des Etats membres devant la Cour de justice des CE et décider de sanctions àl'égard des personnes physiques et morales en cas de violation du droit communau-taire dans des cas particuliers, notamment dans le domaine du droit de la concurrence.Elle est aussi un organe d'exécution dans la mesure où elle établit les mesures d'exé-cution de certaines dispositions et administre les moyens budgétaires destinés aux ac-tivités de la CE. La Commission est assistée dans ses travaux par de très nombreuxcomités, en général consultatifs, composés de représentants des Etats membres etsouvent d'experts indépendants. C'est dans le cadre de cette structure mieux connuesous le nom de "comitologie", que les grandes orientations matérielles sont définies.

La Commission exerce son pouvoir d'initiative par le dépôt d'une proposition qui ré-pond souvent à des initiatives d'autres acteurs, notamment des Etats membres, maisaussi par exemple des partenaires sociaux. La Commission peut modifier sa proposi-tion tout au long des procédures conduisant à l'adoption d'un acte communautaire, tantque le Conseil n'a pas statué. Ce droit de modification comprend également le droit deretirer une proposition d'acte. De plus, le Conseil ne peut en principe prendre un acteconstituant un amendement de la proposition de la Commission que par décision àl'unanimité.

La Commission agit en tant que collège; les décisions sont prises à la majorité de sesmembres. Cela n'empêche pas la Commission de confier à ses membres des domainesd'activité spécifiques. Chaque membre de la Commission est ainsi attaché à une di-rection. Tous les membres de la Commission se font assister par un cabinet de septfonctionnaires (dix pour le Président), qui préparent les décisions pour les membresde Commission dans toutes les matières. Les services de la Commission (voir liste ci-après) relèvent selon les cas de la responsabilité d'un ou de plusieurs membres de laCommission et sont dirigés par un directeur général. Le nombre des postes de laCommission s'élevait en 1998 à 16 344 postes permanents et à 750 postes temporaires,

Page 31: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 29 - Chapitre 2

financés par des crédits de fonctionnement. Environ 15% de ces postes sont attribuésau service de traduction. A cela s'ajoutaient 3 598 postes permanents et 114 postestemporaires, financés par des crédits de recherche, ainsi que 525 postes pour l'Officedes publications officielles des CE, 81 pour le Centre européen pour le développe-ment de la formation professionnelle et 83 pour la Fondation européenne pour l'amé-lioration des conditions de vie et de travail (voir ch. 332.04.4).

Directions générales et services de la Commission

DG I Relations extérieures: Politique commerciale, relations avec l'Amérique du Nord,l'Extrême-Orient, l'Australie et la Nouvelle-Zélande

DG IA Relations extérieures: Europe et nouveaux Etats indépendants, politique étran-gère et de sécurité commune, service extérieur

DG IB Relations extérieures: Méditerranée du Sud, Moyen- et Proche-Orient, Amériquelatine, Asie du Sud et du Sud-Est et coopération Nord-Sud

DG II Affaires économiques et financièresDG III IndustrieDG IV ConcurrenceDG V Emploi, relations industrielles et affaires socialesDG VI AgricultureDG VII TransportsDG VIII Développement (relations extérieures et de coopération au développement avec

l'Afrique, les Caraïbes et le Pacifique, Conventions de Lomé)DG IX Personnel et administrationDG X Information, communication, culture, médias audiovisuelsDG XI Environnement, sécurité nucléaire et protection civileDG XII Science, recherche et développementDG XIII Télécommunications, marché de l'information et valorisation de la rechercheDG XIV PêcheDG XV Marché intérieur et services financiersDG XVI Politique régionale et cohésionDG XVII EnergieDG XVIII Crédit et investissementsDG XIX BudgetsDG XX Contrôle financierDG XXI Douane et fiscalité indirecteDG XXII Education, formation et jeunesseDG XXIII Politique d'entreprise, commerce, tourisme et économie socialeDG XXIV Politique des consommateurs et protection de leur santé

Secrétariat général, Inspection générale des services, Service juridique, Service du porte-parole, Service commun interprétation-conférences, Service de traduction, Office statistique,Direction informatique;Centres communs de recherche;Office d'aide humanitaire de la Communauté européenne;Task Force pour les négociations d'adhésion;Agence d'approvisionnement de l'Euratom;Office des publications officielles des Communautés européennes;Représentations de la Commission des CE dans les Etats membres;Délégations de la Commission des CE dans le monde.

Page 32: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 30 - Chapitre 2

A.6 Cour de justice et Tribunal de première instance des Communautés eu-ropéennes

La Cour de justice des Communautés européennes (Cour de justice des CE, CJCE),composée de quinze juges et neuf avocats généraux, a pour mission, conformémentaux procédures prévues par le traité CE, d'assurer le respect du droit dans l'interpréta-tion et l'application du droit communautaire (par ex. procédure en manquement contredes Etats membres ou recours en annulation des Etats membres contre des actesadoptés par les institutions). Dans la procédure de renvoi préjudiciel la Cour de justicedes CE se prononce, à la demande des juridictions des Etats membres, sur des ques-tions d'interprétation du droit communautaire ou sur la validité des actes pris par lesinstitutions. La juridiction doit ensuite trancher le litige en conformité avec les princi-pes du droit communautaire, tels qu'interprétés par la Cour de justice des CE. La Courde justice des CE n'offre cependant pas de voie de droit contre les décisions des tribu-naux nationaux et peut seulement se prononcer sur des questions de droit commu-nautaire.

Le Tribunal de première instance, composé de 15 juges, est compétent pour certainesprocédures, en particulier les litiges concernant la fonction publique européenne et lesrecours des personnes physiques ou morales contre les actes du Conseil ou de laCommission en matière de concurrence et de défense commerciale (dumping). Lesdécisions rendues peuvent faire l'objet d'un pourvoi devant la Cour de justice des CE.Seuls les personnes physiques ou morales concernées par l'acte communautaire atta-qué jouissent de cette voie de recours directe et peuvent être parties à la procédure(protection juridictionnelle des individus).

A.7 Autres institutions

Parmi les autres institutions communautaires, figurent en particulier la Cour descomptes, qui est composée de 15 membres (un par Etat membre) et qui veille à ce queles moyens financiers prévus par le budget soient utilisés conformément à leur desti-nation (voir ch. 252), le Comité des régions (222 membres), qui doit être associé dansde nombreux domaines à titre de comité consultatif et qui se profile en tant que gar-dien du principe de subsidiarité, ainsi que le Comité économique et social (222 mem-bres), qui rend des avis consultatifs à la Commission et au Conseil sur les questionséconomiques et sociales en lien avec la réalisation du marché intérieur.

A.8 Principales modifications institutionnelles apportées par le Traitéd'Amsterdam

Avec l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam39, la procédure de codécision seraconsidérablement simplifiée et son champ d'application étendu. Le déroulement de laprocédure est modifié dans un sens favorable au Parlement européen.

39 Voir aussi ch. 311.03.4.

Page 33: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 31 - Chapitre 2

En outre, un Protocole sur le rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne aété annexé au Traité de Maastricht40. Ce protocole formalise et rend systématique leurinformation sur les activités de l'Union. La COSAC (Conférence des organes spéciali-sés dans les affaires communautaires des parlements des Etats membres de l'UE)41

voit son rôle reconnu, et pourra soumettre toute contribution qu'elle juge appropriée àl'attention des institutions de l'UE.

Un protocole annexé au Traité d'Amsterdam établit qu'à l'occasion du prochain élar-gissement de l'UE, les "grands pays" renonceront à leur deuxième membre de laCommission, à condition que la pondération des voix au sein du Conseil ait été modi-fiée d'une manière acceptable pour tous les Etats membres (nouvelle pondération desvoix ou introduction d'une double majorité). En outre, un an au moins avant que l'UEne compte plus de 20 Etats membres, une conférence des représentants des gouver-nements des Etats membres sera convoquée pour procéder à un réexamen complet desdispositions relatives à la composition et au fonctionnement des institutions.

B Répercussions sur la Suisse

B.1 Adhésion à l'UE

En cas d'adhésion de la Suisse à l'UE, les représentants de la Suisse siégeraient danstoutes les institutions de l'Union et pourraient codécider dans la même mesure queceux des autres Etats membres. En cas de maintien du système actuel, la Suisse dé-tiendrait quatre ou cinq voix pour la prise de décision à la majorité qualifiée au seindu Conseil, comme l'Autriche et la Suède (chacun 4 voix) ou la Belgique, la Grèce,les Pays-Bas et le Portugal (chacun 5 voix). Au Parlement européen, la Suisse pourraitavoir environ 20 sièges de députés, tandis qu'elle aurait un représentant à la Commis-sion, à la Cour des CE et au Tribunal de première instance42. En outre, des Suissespourraient siéger dans les autres institutions, comités et groupes d'experts et travailleren tant que fonctionnaires des Communautés à tous les niveaux de la hiérarchie.

Il n'est pas possible de quantifier l'influence que la Suisse pourrait exercer dans l'UE.Comme les autres "petits" Etats membres de l'UE, la Suisse bénéficierait d'une repré-

40 La place des parlements nationaux dans l'élaboration des positions nationales en matière européenne dépend

de chaque système national. La situation diffère d'un Etat membre à l'autre en fonction de l'importance plusou moins grande donnée au législatif par la constitution et de la nature des rapports entre le parlement et legouvernement qui prévalent dans un Etat. Le rôle des parlements nationaux s'est développé au fur et à me-sure de l'évolution de l'UE. Le Traité de Maastricht a formalisé ce rôle dans deux déclarations qui prévoientessentiellement une information des parlements par les gouvernements sur les propositions législatives de laCommission, et une consultation de la Conférence des parlements sur les grandes orientations de l'UE.

41 La COSAC est composée de représentants des parlements nationaux (chaque parlement national est repré-senté par 6 membres), et de représentants du Parlement européen; elle se réunit deux fois par an depuis1989.

42 Le Conseil compte actuellement 15 membres, la Commission 20, le Parlement européen 626, tandis que laCour de justice des CE et le Tribunal de première instance fonctionnent avec 15 juges chacun. Dans le pro-tocole sur les institutions dans la perspective de l'élargissement de l'UE, les Etats membres ont convenu deréexaminer la composition et le fonctionnement des institutions, avant que le nombre des membres de l'UEne dépasse 20 Etats (voir let. A.8).

Page 34: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 32 - Chapitre 2

sentation proportionnellement importante par rapport aux "grands" Etats membres:aujourd'hui, dans les décisions prises au sein du Conseil de l'UE à la majorité quali-fiée, les cinq "grands" disposent au total de 48 voix et représentent 294 millions d'ha-bitants, alors que les dix "petits" disposent de 39 voix et représentent seulement 66millions d'habitants. Cette bonne représentation est également assurée aux "petits"Etats membres au sein du Parlement européen qui prend en codécision avec le Conseilde l'UE les principales mesures relatives au marché intérieur. Lors des discussions etnégociations à quinze, tous les Etats sont en mesure de participer activement et sur unpied d'égalité à la recherche de compromis et à l'élaboration de solutions communes.Le recours systématique à la négociation, le respect des équilibres entre Etats et entreinstitutions et la consultation généralisée assurent à chaque Etat membre, même auplus petit d'entre eux, une place de partenaire de plein droit dans le processus d'inté-gration européenne43. La majorité des décisions est prise sans procéder à un vote for-mel.

L'Etat qui adhère à l'Union européenne transfère certaines compétences législativesaux institutions communautaires, institutions auxquelles il participe pleinement. Cetransfert de compétences au "législateur communautaire" (Parlement européen etConseil) est décidé en connaissance de cause par le parlement national et le consti-tuant au moment de l'approbation du traité d'adhésion. De plus, ce transfert n'est pasirréversible: bien que le retrait sortie d'un Etat membre de l'UE ne soit pas prévu dansles traités, il est politiquement impensable qu'un Etat membre puisse être contraint derester dans l'UE contre la volonté de son gouvernement ou de son peuple. Une parti-cipation forcée à l'UE ne pourrait qu'aboutir à un blocage de son processus de déci-sion, dans la mesure où nombre de décisions communautaires sont encore prise defacto par consensus, voire de jure à l'unanimité. L'acceptation de la demande de retraitd'un Etat membre correspondrait donc à une nécessité vitale pour l'UE, dont le déve-loppement constitutionnel futur est subordonné à l'accord de tous les Etats membres.

L'adhésion à l'UE signifierait que dans les domaines des compétences transférées àl'UE, l'Assemblée fédérale ne serait pas en mesure d'approuver les actes de droitcommunautaire dérivé (règlements, directives), ni d'approuver les accords internatio-naux conclus par les Communautés européennes avec des Etats tiers (à moins qu'ils'agisse d'accords mixtes, voir ch. 332.04.2). Elle serait cependant amenée, le caséchéant de concert avec les parlements cantonaux et le Conseil fédéral exerçant sonpouvoir réglementaire, à participer à la mise en œuvre des actes communautaires (enparticulier les directives) dans le droit national.

L'adhésion de la Suisse à l'UE aurait des répercussions en matière de droits populai-res44. Les actes du droit communautaire secondaire (règlement, directives) n'étant pas

43 Rapport du 18 mai 1992 sur la question d'une adhésion de la Suisse à la Communauté européenne, FF 1992

III 1129, 1157.44 Voir ch. 332.04.2; voir P. Mahon/Ch. Müller, Adhésion de la Suisse à l'Union européenne et démocratie

directe, dans: Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne – Enjeux et conséquences, Zurich1998, 449 et ss, avec d'autres renvois; A. Epiney/K. Siegwart (éd.), Démocratie directe et Union euro-péenne, Fribourg 1998, avec d'autres renvois.

Page 35: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 33 - Chapitre 2

adoptés par les parlements nationaux, ces actes ne seraient pas exposés au référendumfacultatif (art. 89, al. 2, 3 et 4; art. 89bis, al. 2, cst.). Il s'agit là de la conséquence dudessaisissement, au profit des institutions communautaires, de certaines compétenceslégislatives, fédérales ou cantonales. Une proportion importante des actes adoptés parles institutions communautaires ne priveraient toutefois pas l'Assemblée fédérale deses compétences législatives, parce que les matières couvertes par ces actes relèvent,actuellement, de la compétence réglementaire du Conseil fédéral.

S'agissant d'une initiative populaire tendant à la révision de la constitution, le Conseilfédéral et l'Assemblée fédérale seraient tenus, dans le cadre de leurs compétences res-pectives, de respecter la primauté du droit communautaire.

Les parlements nationaux des Etats membres de l'UE ont tous été amenés à mettre enoeuvre des procédures leur permettant de suivre et de contrôler de manière perma-nente l'évolution du droit communautaire45. L'Assemblée fédérale, qui s'est récem-ment dotée d'un instrument de ce type46, pourrait le cas échéant développer cette pro-cédure en s'inspirant des expériences d'autres parlements nationaux. Par ailleurs, laparticipation des cantons à la politique européenne de la Confédération devra égale-ment être revue à la lumière des premières expériences faites dans l'application antici-pée des principes de la loi sur la participation des cantons à la politique étrangère dontle projet a été soumis par le Conseil fédéral au Parlement le 15 décembre 199747.

Dans le cadre de la réforme de la direction de l'Etat actuellement en cours, certainesmodifications internes relatives à la structure et aux responsabilités du Conseil fédé-ral, qui auraient également une certaine importance en cas d'adhésion à l'UE, sont àl'étude.

B.2 Participation à l'EEE

L'Accord EEE est un accord d'association entre les Etats de l'AELE (sauf la Suisse),d'une part, et la CE, la CECA et leurs Etats membres, d'autre part. Du point de vueinstitutionnel, il y a un associant - la Communauté - dont le rôle directeur est inévita-ble, et des associés, les pays de l'AELE, qui ne peuvent pas bénéficier des mêmesdroits que les Etats membres de la CE puisqu'ils n'ont pas voulu assumer les mêmesobligations que ces derniers en contrepartie des droits que leur confère la qualité demembre à part entière de la CE.

Seul l'Accord EEE - parmi les nombreux accords d'association conclus par la CE -

45 A cet égard, on peut mentionner pour le Danemark, la Commission des Affaires européenne; pour la France,

les délégations pour l'Union européenne de l'Assemblée nationale et du Sénat; pour le Royaume-Uni, le Eu-ropean Communities Select Committee et European Legislation Select Committee de la House of Lords etde la House of Commons; voir B. Ehrenzeller, Auswirkungen eines EU-Beitritts auf die Bundes-versammlung und ihr Verhältnis zum Bundesrat, dans: L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne – En-jeux et conséquences, Zurich 1998, 293 et ss, avec d'autres renvois.

46 Art. 47bis a de la loi fédérale du 23 mars 1962 sur les rapports entre les Conseils, RS 171.11.47 Message du 15 décembre 1997 sur une loi fédérale sur la participation des cantons à la politique étrangère

de la Confédération, FF 1998 I 953 et ss.

Page 36: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 34 - Chapitre 2

offre aux associés une possibilité d'agir au stade préliminaire de la procédure législa-tive communautaire, dans un processus continu d'information et de consultation. Lesexperts des pays de l'AELE sont consultés par la Commission au même titre que lesexperts des Etats membres de la CE lors de l'élaboration des propositions qu'elle sou-met aux comités qui l'assistent dans l'exercice de ses pouvoirs exécutifs.

Dans le cadre de l'Accord EEE, les associés AELE doivent s'exprimer d'une seulevoix, ce qui constitue un handicap procédural pour les Etats de l'AELE qui ont desintérêts hétérogènes. Il en découle une limitation de la possibilité pour un pays del'AELE de faire valoir ses intérêts spécifiques.

La surveillance de l'application de l'Accord EEE repose sur un système à double. LaCommission et la Cour de justice des CE surveillent les Etats membres de la CE, alorsque deux nouvelles institutions (Autorité de surveillance AELE et Cour AELE) ontété établies par les pays de l'AELE comme pendants des deux organes communautai-res.

Par des structures et procédures complexes, les parties à l'Accord EEE se sont effor-cées de concilier deux objectifs contradictoires: la sauvegarde de leur autonomie lé-gislative et l'homogénéité du droit au sein de l'EEE. Aussi l'Accord EEE présente-t-ilcertaines faiblesses institutionnelles, notamment parce qu'il "ne respecte pas dans tousses éléments le principe de l'égalité des parties contractantes."48

Dans l'EEE, les pays de l'AELE doivent quasi obligatoirement intégrer les derniersdéveloppements de l'acquis communautaire, pertinent pour l'EEE. Ainsi, depuis l'en-trée en vigueur de l'Accord EEE, le Comité mixte a intégré plus de 700 nouveaux ac-tes communautaires (total actuel: 2 300 actes). Certes, les pays de l'AELE peuventrefuser la reprise dans l'EEE d'un acte communautaire. Mais, du coté AELE, le refusdoit être collectif, ce qui limite les possibilités d'un tel rejet. Par ailleurs, le rejet d'unseul acte entraînerait la suspension automatique de la partie de l'Accord EEE concer-née. Par ailleurs, il ne faut pas sous-estimer les limites que l'Accord EEE apporterait àl'autonomie de décision de la Suisse; celles-ci seraient plus importantes, quantitative-ment et qualitativement, que celles que nous impose un accord international tradition-nel. Cette situation s'explique d'une part, par l'importance des matières couvertes parl'Accord EEE - pratiquement tout le droit économique international -, d'autre part, parla complexité de l'infrastructure institutionnelle mise en place.

L'Assemblée fédérale pourrait se prononcer sur les nouvelles règles EEE lorsqu'ellesentrent dans le champ de ses compétences, conformément à nos procédures constitu-tionnelles. Par ailleurs, le Parlement pourrait, dans les limites de ces règles, continuerde légiférer dans les domaines couverts par les règles EEE. Dans ces domaines, sonpouvoir de légiférer s'exercerait essentiellement sous forme de mise en œuvre des di-rectives communautaires49. Compte tenu des conséquences sérieuses d'un refus de

48 Message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1, 46.49 Message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1, 60.

Page 37: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 35 - Chapitre 2

reprendre l'acquis communautaire pertinent dans l'EEE, le Parlement serait acculé àapprouver les projets de décisions EEE.

B.3 Accords sectoriels

Les dispositions institutionnelles des accords sectoriels s'appuient en principe sur unecoopération intergouvernementale classique (par le biais de comités mixtes) pour lagestion et la surveillance de l'application des accords. Deux accords prévoient unesurveillance de type juridique et non diplomatique: d'une part, l'accord sur les marchéspublics qui exige de chaque partie contractante qu'elle charge une autorité indépen-dante de la surveillance de l'application de l'accord, et d'autre part, l'accord sur letransport aérien qui confie aux instances communautaires (pilier unique composé dela Commission et de la Cour de justice des CE) la compétence exclusive d'assurer lerespect des règles de concurrence communautaire intégrées dans cet accord. A ce su-jet, il faut relever que le nombre d'agents économiques suisses dans le secteur dutransport aérien est très limité et qu'aujourd'hui déjà, leurs comportements peut êtresanctionné par les instances communautaires dans la mesure où il produit des effetsdans la CE (doctrine des effets).

Contrairement à l'Accord EEE, les accords sectoriels ne sont en principe pas fondéssur une reprise littérale et intégrale du droit communautaire dans les secteurs concer-nés. Ces accords sont généralement fondés sur l'équivalence des règles suisses etcommunautaires (à l'exception de l'accord sur le transport aérien)50. L'autonomie lé-gislative de la Suisse est ainsi formellement préservée, même s'il est évidemment dansl'intérêt de la Suisse de maintenir cette équivalence en tenant régulièrement compte del'évolution du droit communautaire dans les domaines couverts par les accords secto-riels, faute de quoi les divergences entre les règles suisses et les règles communautai-res feraient obstacle à l'application des accords concernés. Le fait que l'autonomie desparties est mieux préservée dans les accords sectoriels que dans l'Accord EEE a pourconséquence que l'homogénéité des ordres juridiques des parties est moins bien réali-sée dans les accords sectoriels.

Malgré le caractère sectoriel des accords négociés et le fait que ceux-ci - sous réservede l'exception susmentionnée - n'incorporent pas l'acquis communautaire, la Suisseobtiendra la possibilité de participer aux comités communautaires pertinents d'unemanière comparable au régime de l'Accord EEE. Elle obtiendra un statut d'observa-teur actif (droit de parole mais sans droit de vote) notamment dans certains domainesoù elle applique un droit équivalent au droit communautaire ou contribue financière-ment à des programmes communautaires au même titre qu'un Etat membre.

50 Dans plusieurs des domaines spécifiques inclus dans les accords "agriculture", "entraves techniques au

commerce", "circulation des personnes", les règles suisses correspondent largement à l'acquis communau-taire pertinent.

Page 38: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 36 - Chapitre 2

B.4 Maintien de la situation actuelle

Dans la situation actuelle, la Suisse n’a aucune influence sur le cours des choses ausein de l’UE.

Comme la Communauté européenne n'admet en principe sur son marché que des pro-duits qui ont été fabriqués selon les prescriptions techniques communautaires ou, lecas échéant, selon des prescriptions équivalentes, la capacité concurrentielle de laSuisse en tant que site de production et marché du travail dépend de manière détermi-nante de l'eurocompatibilité de notre droit. C'est pourquoi depuis 1988, le Conseilfédéral a essayé, dans les domaines d'importance transfrontalière, d'assurer qu'aucunedivergence ne soit créée de manière injustifiée entre l'ordre juridique suisse et le droitcommunautaire51. Depuis lors, tous les messages du Conseil fédéral portant surl'adoption de lois ou de modifications de lois, ainsi que toutes les propositions adres-sées au Conseil fédéral concernant l'adoption d'ordonnances ou de modifications d'or-donnances, contiennent un chapitre "Relation avec le droit européen". On y examined'une part, si une réglementation analogue aux règles juridiques suisses envisagées estdéjà en vigueur ou en préparation dans l'UE, au sein du Conseil de l'Europe ou d'au-tres organisations ou conférences européennes et, d'autre part, si les règles juridiquessuisses proposées sont compatibles. Dans la pratique, le Parlement et le Conseil fédé-ral n'adoptent qu'exceptionnellement des actes juridiques qui ne sont pas compatibles.Cependant, la compatibilité ne signifie pas nécessairement une reprise textuelle, maisplutôt l'effort de parvenir à une réglementation équivalente, les divergences formellesne la compromettant pas.

L'harmonisation avec le droit communautaire est effectuée principalement pour desraisons économiques, afin de faciliter l'accès au marché intérieur. Cependant, seulsdes accords bilatéraux avec la Communauté peuvent juridiquement garantir ces faci-lités sur une base réciproque. Les accords sectoriels conclus au niveau politique endécembre 1998 sont l'illustration de cette méthode. Ils érigent des ponts entre deuxordres juridiques harmonisés. Du point de vue économique, l'adaptation s'imposeégalement pour maintenir la capacité concurrentielle de l'économie suisse, notammentpar des libéralisations52. Par ailleurs, des engagements de droit international peuventnécessiter une législation eurocompatible, laquelle contribue à éliminer des barrières àl'adhésion difficilement surmontables et inutiles. L'harmonisation facilitant l'accès aumarché intérieur est assurée depuis 1996 par la loi fédérale sur les entraves techniquesaux échanges qui contient l'obligation pour le législateur de veiller à ce que les pres-criptions techniques suisses soient compatibles avec celles de la Communauté53 (voirch. 221.01, let. B.2).

L'adoption d'un droit eurocompatible contribue à atténuer les discriminations par rap-port aux Etats membres de l'UE, mais ne permet pas de les éliminer. Seuls des accords 51 Voir rapport du 24 août 1988 sur la position de la Suisse dans le processus d'intégration européenne, FF

1988 III 233, 365.52 Par exemple dans le cadre de l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC).53 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce, RS 946.51.

Page 39: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 37 - Chapitre 2

peuvent jeter des ponts et assurer la réciprocité des facilités en matière d'échange demarchandises et de services et de circulation des personnes.

214 Politique d’information et de communication

Les institutions de l'Union européenne mettent à disposition des médias, du public,des entreprises et des établissements d'enseignement une large gamme de supportsd'information. L'ouverture par l'UE de sites Internet a multiplié les possibilités d'accèsdirect aux informations et textes de l'Union54. Les institutions de l'UE ont pris diffé-rentes mesures pour rapprocher l'Europe de ses citoyens en améliorant la transparencede leurs travaux et en stimulant le dialogue avec les citoyens. Le Traité d'Amsterdamintroduit une obligation précise dans ce domaine: tout citoyen de l'Union et toute per-sonne physique ou morale résidant ou ayant son siège dans un Etat membre aura undroit d'accès aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission.

Depuis quelques années, on observe une augmentation considérable du montant af-fecté, dans le budget de l'Union, aux activités d'information et de communication (35millions d'euros en 1992 contre 102 millions d'euros en 199855). Le Parlement euro-péen a marqué son intérêt pour ce développement, son souci principal étant de veillerà ce que les moyens budgétaires soient mieux utilisés au service des politiques défi-nies par l'Union.

Chaque institution de l'UE dispose de services de presse et d'information (il y a àBruxelles plus de 900 journalistes accrédités). La Commission conçoit et diffuse desbrochures destinées au grand public; en partenariat avec le Parlement européen etavec les Etats membres, elle mène des campagnes sur des thèmes spécifiques. Paral-lèlement à ces actions d'information, la Commission reste à l'écoute de l'opinion euro-péenne à travers ses instruments de sondages dont "Eurobaromètre". Elle a parailleurs établi un réseau d'information destiné aux entreprises (Euro-Info-Centres). Lebudget consacré par la Commission à l'information est déboursé en partie sous formede contributions à des programmes d'information nationaux ou à des organisationsnon gouvernementales. La Commission soutient également la chaîne de télévisionEuronews.

En Suisse, c'est essentiellement le Bureau de l'intégration DFAE/DFE qui est chargéd'informer l'opinion publique en matière européenne. Il le fait notamment par son siteInternet56 qu'il actualise régulièrement. Son mandat est décrit au chiffre 312.03. Enoutre, d'autres sources diffusent en Suisse des informations sur l'UE, telles que leCentre d'information européenne créé par la Fédération Romande des syndicats patro-naux et l'Euro Info Centre Suisse de l'Office suisse d'expansion commerciale (OSEC).

54 Par l'intermédiaire du site Internet du Bureau de l'intégration DFAE/DFE ("http://www.europa.admin.ch"),

on accède facilement aux sites des institutions communautaires ("europa.eu.int") qui donnent accès à l'en-semble des traités et de la législation des CE en onze langues ("europa.eu.int/eur-lex").

55 En raison de la transformation le 1er janvier 1999 de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".

56 "http://www.europa.admin.ch"

Page 40: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 38 - Chapitre 2

L'UE - qui ne dispose pas encore d'une représentation en Suisse - développera en casd'adhésion de la Suisse son activité d'information, destinée à documenter le publicsuisse sur le fonctionnement des institutions et sur les activités de l'Union. Des insti-tutions privées ou publiques (instituts, agences, organisations non gouvernementales)pourront bénéficier de financements de l'Union dans le cadre de campagnes d'infor-mation.

En revanche, ni la participation à l'EEE, ni l’entrée en vigueur des accords sectorielsn'entraîneraient de changement par rapport à la situation actuelle.

22 Libertés, politiques et programmesintracommunautaires

221 Marché intérieur

221.01 Libre circulation des marchandises

A Acquis communautaire

A.1 Aperçu

Au sein du marché intérieur de la CE, les marchandises, soit les biens mobiliers etl’électricité, circulent sans le moindre contrôle à la frontière, comme c'est le cas entrela Suisse et le Liechtenstein. Cette libre circulation comprend, d’une part, les aspectsexternes de l’union douanière57 et, d’autre part, dans le marché intérieur, la suppres-sion de tous les droits de douane, des restrictions quantitatives, des taxes d’effet équi-valent à des droits de douane et des mesures d’effet équivalent à des restrictionsquantitatives. Les principes de la libre circulation des marchandises énoncés aux art. 9à 36 du Traité CE s’appliquent, sous réserve de réglementations spécifiques du droitcommunautaire, par ex. pour le commerce de matériel de guerre. Par la suppressiondes contrôles physiques, techniques, fiscaux et statistiques aux frontières intérieures etpar le rapprochement des taux des impôts indirects au sens du Livre blanc de 1985 surl’achèvement du marché intérieur, un degré élevé de libéralisation a pu être atteint àpartir de 1993, même si, en pratique, il n’a pas encore partout été traduit dans les faits.

Une distinction est faite entre les marchandises communautaires58 et celles des paystiers. Ces dernières ne sont admises à circuler librement à l’intérieur de la Commu-nauté qu’une fois accomplies les formalités d’importation à l’une des frontières exté-

57 A la différence d’une zone de libre-échange (par exemple entre la Suisse et la CE ou entre les pays de

l’AELE), une union douanière applique un tarif douanier unifié, ce qui empêche les pays tiers de passer parun Etat membre qui pratiquerait des tarifs douaniers peu élevés pour éviter d’avoir à s’acquitter des tarifsélevés d’un autre Etat membre. En outre, l’union douanière permet de mettre en oeuvre des politiques com-munes (par ex. des mesures anti-dumping).

58 Voir le règlement (CEE) n° 2913/92 du 12 octobre 1992 établissant le code des douanes communautaire, JOn° L 302 du 19 octobre 1992, p. 1.

Page 41: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 39 - Chapitre 2

rieures de l’UE59 (mise en libre pratique). Par conséquent, toutes les marchandises enprovenance d’un pays tiers, comme la Suisse, sont soumises aux procédures douaniè-res à leur entrée dans l’UE, même si les produits industriels d’origine sont normale-ment admis en franchise douanière en vertu d’un accord de libre-échange. Les con-trôles aux frontières extérieures ne se limitent pas aux seuls aspects douaniers: ilsportent aussi sur des éléments de politiques commerciale, agricole, fiscale et statisti-que et impliquent des contrôles au titre de l’ordre public, de la sécurité et de la santé.

A.2 Au plan externe: union douanière

La Communauté constitue une union douanière au sens de l’art. XXIV du GATT1994. A l’égard des pays tiers s’appliquent les engagements pris par la CE dans lecadre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) ou, le cas échéant, en vertud’accords bilatéraux ou de mesures autonomes. Le prélèvement des droits de douanesur les produits en provenance de pays tiers est effectué sur la base du tarif douaniercommun (TDC). Un droit de douane ad valorem est prélevé, à la différence de laSuisse, qui prélève un droit en fonction du poids. Le droit de douane ad valorem estfonction du prix effectivement payé ou à payer. D’un point de vue géographique,l’union douanière s'étend à l’ensemble des territoires nationaux des Etats membres.Ne font pas partie du territoire douanier de la CE, Büsingen, incluse dans le territoiredouanier suisse, les pays et les territoires d’outre-mer associés à la Communauté, Gi-braltar, etc.

Des modifications ou des suppressions autonomes des taux des droits de douane peu-vent être proposées par la Commission, que le Conseil adopte, le cas échéant, à lamajorité qualifiée. En ce qui concerne les modifications des taux des droits de douanerépondant à des motifs de politique commerciale ou liées à la conclusion d’accordscommerciaux et d’accords douaniers avec des Etats non-membres, l’art. 113 du TraitéCE s’applique (voir ch. 232).

La législation douanière unifiée, qui prévoit, outre les procédures normalesd’importation et d’exportation, des procédures simplifiées, est comprise depuis 1994dans le code des douanes de la CE. Celui-ci représente, partant du concept du marchéintérieur, la base d’une application unifiée des mesures tarifaires ainsi que d’autresmesures (par ex. prélèvement des droits d’accise, protection de la population dans ledomaines de la santé et de l’environnement, lutte contre la drogue) et permetl’application de mesures de politique agricole et commerciale (par ex. prélèvementsagricoles, prélèvement de droits anti-dumping).

Des exceptions aux règles du TDC sont accordées sous forme de franchise douanièrepar ex. pour les marchandises transportées dans les bagages personnels des voyageurset à des fins non commerciales. Des règles spécifiques permettent d’exonérer com-

59 Aux termes de l’art. 10 du Traité CE, les marchandises en provenance des pays tiers circulent librement à

condition que les formalités d’importation aient été accomplies, que les droits de douane et les taxes d’effetéquivalent aient été prélevés, et que ces derniers n’aient pas été entièrement rétrocédés ou ne l'aient été quepartiellement.

Page 42: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 40 - Chapitre 2

plètement ou partiellement les marchandises importées à titre temporaire ou réexpor-tées dans le cadre du trafic de perfectionnement.

A.3 Au plan interne: marché intérieur et libre circulation des marchandises

Entre les Etats membres de l’UE, les marchandises circulent librement au sein dumarché intérieur. Le droit communautaire interdit aux Etats membres de prélever desdroits à l’importation et à l’exportation ainsi que des taxes d’effet équivalent (mesurestarifaires) et les oblige à éliminer les restrictions quantitatives à l’importation et àl’exportation, ainsi que toutes les mesures d’effet équivalent (mesures non tarifaires).Les contrôles des marchandises à la frontière n’ont pas de raison d’être au sein dumarché intérieur60. Les dispositions y relatives sont directement applicables. Une im-portante jurisprudence de la Cour de justice des CE, découlant d’interventionsd’acteurs économiques, a précisé leur application.

L’interdiction des droits de douane et des taxes d’effet équivalent concernent en par-ticulier les impôts frappant les marchandises, susceptibles de provoquer une distor-sion de la concurrence entre les Etats membres, dans la mesure où leur structure estdiscriminatoire. Il en va de même des taxes ou des émoluments prélevés lors del’importation de marchandises. Au sein du marché intérieur sont également interditesles restrictions quantitatives à l’importation et à l’exportation principalement fondéessur des raisons économiques. Cette interdiction s’applique également aux mesuresd’effet équivalent aux restrictions quantitatives. Il s’agit d’empêcher que d’autres en-traves au commerce ne se substituent aux droits de douane; c’est pourquoi la suppres-sion des entraves techniques au commerce est un des buts premiers du marché inté-rieur. Le principe de l’équivalence des législations techniques des différents Etatsmembres applicables aux produits est le point de départ de cette démarche. Ce prin-cipe, appelé principe de "Cassis de Dijon" suite à un arrêt de la Cour de justice desCE, signifie qu’un Etat membre ne peut pas restreindre la libre circulation d’un pro-duit légalement fabriqué et commercialisé dans un autre Etat membre61. Des excep-tions ne sont tolérées que dans la mesure où elles sont nécessaires à la protectiond’intérêts supérieurs (tels que l’ordre public, la sécurité, la santé, la loyauté des trans-actions commerciales, les intérêts des consommateurs) et où elles sont proportionnel-les. Le principe de "Cassis de Dijon" trouve son fondement dans la confiance mu-tuelle que les Etats membres de la Communauté ont dans les législations des autresmembres et a pour conséquence une nécessité d’harmonisation moindre, dans certainssecteurs, de la législation au niveau communautaire.

Lorsque des problèmes apparaissent dans la libre circulation des marchandises àl’intérieur de la Communauté suite à des différences trop importantes entre les légis-lations des Etats membres, la CE prescrit des règles minimales unifiées pour certainstypes de produits, par le biais d’une décision à la majorité qualifiée du Conseil

60 En application de dispositions de procédure douanière dans les Etats membres, par ex. en Allemagne, des

"groupes mobiles de contrôle" peuvent, en dehors des zones frontières, intercepter et contrôler des person-nes et des moyens de transports, lorsqu’existent des soupçons de transport illicite de marchandises.

61 CJCE, arrêt du 20 février 1979, aff. 120/78 Cassis de Dijon, Rec. 1979, p. 649.

Page 43: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 41 - Chapitre 2

("domaine harmonisé"). Cette unification a l’avantage de rendre les règles en vigueurplus transparentes, aussi bien pour les entreprises que pour les consommateurs, étantdonné que les marchandises qui répondent à ces règles peuvent être mises en circula-tion dans tous les Etats membres. L’art. 100a du Traité CE prescrit à cet égard un ni-veau de protection élevé dans les domaines de la santé, de la sécurité, de la protectiondes consommateurs et de la protection de l’environnement. Une fois une mesured’harmonisation édictée, les Etats membres peuvent maintenir des mesures justifiéespar des intérêts supérieurs au sens de l’art 36 du Traité CE ou relatives à la protectiondu milieu du travail ou de l’environnement, pour autant que ces mesures ne représen-tent pas un moyen de discrimination arbitraire ou une restriction déguisée au com-merce. Le Traité d’Amsterdam complétera cette règle en autorisant les Etats membresà édicter des règles nationales plus strictes pour répondre à des problèmes spécifiquesen matière de protection de l’environnement ou du milieu du travail, si de nouvellesdonnées scientifiques le justifient, cela, même après l’entrée en vigueur d’une législa-tion communautaire.

Dans le "domaine harmonisé", une distinction doit être faite entre les directives éta-blies selon l'"ancienne" et la "nouvelle" approche. Il existe par exemple des exigencesdétaillées applicables aux véhicules à moteur, aux denrées alimentaires, aux produitschimiques ou au secteur vétérinaire. Dans les directives suivant la "nouvelle appro-che" par contre, le droit communautaire se limite à définir des exigences fondamen-tales obligatoires et renvoie, en ce qui concerne les précisions, à des normes techni-ques déterminées. Ces dernières sont élaborées sur mandat de la Communauté et del’AELE par les organisations européennes de normalisation62. Les produits qui répon-dent à ces normes techniques sont censés respecter les exigences de base obligatoiresdes directives correspondantes. Des procédures unifiées d’évaluation de la conformitédes produits complètent finalement la "nouvelle" approche pour en faire une approche"globale". Selon le niveau de risque que présentent les produits, l’évaluation de leurconformité est effectuée par le producteur ou par une instance indépendante agréée,cette dernière étant alors chargée d’examiner et d’attester la conformité du produit oudes procédés de fabrication (garantie de qualité) avec les exigences communautaires.A ce jour, 19 directives, qui couvrent environ un cinquième du commerce intracom-munautaire, ont été édictées selon la nouvelle approche globale63. Les produits quirelèvent de ce domaine normatif doivent porter le signe CE apposé par le producteur,qui atteste que le produit concerné répond à toutes les exigences des directives appli-cables et de l’examen d’évaluation de la conformité prévu.

Depuis 1992, la CE a également unifié les réglementations concernant les produitsmédicaux, les récipients sous pression, les ascenseurs, ainsi que divers secteurs du 62 Voir message du 18 mai 1992 relatif à l’approbation de l’Accord sur l’EEE, FF 1992 IV 1, 155.63 Domaines concernés: récipients sous pression, sécurité des jouets, produits de construction, compatibilité

électromagnétique, machines, équipements de protection individuelle, instruments de pesage à fonctionne-ment non automatique, efficacité énergétique des réfrigérateurs et congélateurs ménagers électriques, dispo-sitifs médicaux implantables actifs, installations fonctionnant au gaz, équipements terminaux de télécommu-nication, chaudières à eau chaude, explosifs destinés à des fins civiles, produits médicaux, appareils et sys-tèmes de protection utilisables en atmosphère explosive, bateaux de plaisance, ascenseurs, appareils à bassetension, nouveaux appareils à pression.

Page 44: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 42 - Chapitre 2

droit alimentaire (Novel Food, substituts de repas, bouillies pour nourrissons et en-fants en bas âge, etc.) (voir ch. 222.03.3). Dans le secteur vétérinaire, les prescriptionsconcernant les épizooties, l’hygiène des aliments, la santé et la protection de la santédes animaux, la protection et l’élevage des animaux ont été développées et harmoni-sées (voir ch. 222.03.2). Bien qu’il existât des directives d’harmonisation pour lesmédicaments, des entraves au commerce subsistaient entre les Etats membres, de parle fait que les procédures d’autorisation nationales n’étaient reconnues mutuellementque de manière limitée. C’est pourquoi la CE a introduit le 1er janvier 1995 une auto-risation communautaire pour certains médicaments64. Une demande doit être déposéeauprès de l’Agence européenne pour l’évaluation des médicaments (AEEM) à Lon-dres, qui soumet à la Commission le résultat de son évaluation scientifique et techni-que. Celle-ci décide alors d’accorder ou non l’autorisation communautaire (procédurecentralisée). Pour les autorisations d’un nouveau médicament dans un pays donné, lavoie de la reconnaissance mutuelle est également possible. Les nouveaux produits deconstruction non soumis à des normes sont examinées du point de vue de leur adé-quation par l’Organisation pour les homologations techniques (OHT), nouvellementétablie à Bruxelles; l’autorisation y relative est valable dans l’ensemble de la Com-munauté.

B Politique suisse

B.1 Aperçu

Le territoire douanier suisse comprend le territoire souverain de la Suisse, àl’exclusion de la région de Samnaun. La Principauté de Liechtenstein, avec laquelle laSuisse forme une union douanière65, la commune allemande de Büsingen et Campio-ne d’Italia font aussi partie du territoire douanier de notre pays. La législation doua-nière suisse applicable à la frontière est marquée par de nombreux accords bilatérauxet multilatéraux, dont des accords sur les tarifs douaniers, sur la facilitation des con-trôles douaniers et sur l’harmonisation des règles de procédure. Les dédouanements àl’importation et à l’exportation ne portent pas sur les seuls aspects douaniers ou destatistique du commerce extérieur; ils concernent également des aspects de politiqueagricole, fiscale, environnementale, commerciale, de sécurité et de santé.

B.2 Au plan externe

Lors de l’importation de marchandises en Suisse, des droits de douane et des taxesd’effet équivalent (mesures tarifaires) sont prélevés, et des restrictions quantitatives àl'importation et à l'exportation ou des mesures d’effet équivalent (mesures non tarifai-res) sont appliquées.

64 Voir Communication de la Commission sur la procédure d’autorisation communautaire relative aux médi-

caments, JO n° C 229 du 22 juillet 1998, p. 4.65 Traité du 29 mars 1923 entre la Suisse et la Principauté de Liechtenstein concernant la réunion de la Princi-

pauté de Liechtenstein au territoire douanier suisse (RS 0.631.112.514); voir également le message du 2 no-vembre 1994 concernant l’adaptation des relations conventionnelles entre la Suisse et la Principauté deLiechtenstein à la suite de l’adhésion de la Principauté à l’EEE, FF 1994 V 641.

Page 45: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 43 - Chapitre 2

Le prélèvement des droits de douane et des taxes d’effet équivalent se base sur lesobligations qui découlent de l’appartenance de la Suisse à l’OMC, et sur de nombreuxaccords de libre-échange et sur des mesures autonomes. Toutes ces dispositions tari-faires sont regroupées dans le tarif d’usage de 1986. La majorité des droits de douanesont calculés en fonction du poids brut. Des modifications autonomes ou des suppres-sions de droits de douane peuvent être décidées par le Conseil fédéral sur la base de laloi sur le tarif des douanes66; elles sont soumises à l’approbation ultérieure del’Assemblée fédérale. Il en va de même des concessions tarifaires octroyées de ma-nière autonome aux pays en développement au titre du système généralisé de préfé-rences tarifaires. La loi sur les douanes67 fixe les procédures applicables lors del’importation et de l’exportation, constitue la base légale pour l’exonération totale oupartielle des droits de douane pour des marchandises importées temporairement ouréexportées dans le cadre du trafic de perfectionnement et détermine les marchandisesqui sont en franchise de douane dans le trafic des voyageurs. Les taxes prélevées lorsde l’importation de produits agricoles ont pour but premier d’élever les prix des pro-duits étrangers au niveau des prix suisses et d’assurer ainsi un revenu suffisant àl’agriculture indigène. En 1997, les importations de produits agricoles (y compris lepoisson, les fourrages, les produits alimentaires prêts à l'emploi, les boissons et le ta-bac) se sont élevées à 7,64 milliards de francs. Les droits de douane sur ces produitsse sont montés à 749 millions de francs. 71% des importations provenaient de l’UE,sur lesquelles 575 millions de francs en droits de douane ont été prélevés (voir ch.222.03.1).

Cette même année 1997, la Suisse a importé des produits industriels pour un montanttotal de 102 milliards de francs, dont 68,6% étaient exonérés de droits de douane, envertu des accords de l’OMC, d’accords de libre-échange, du système généralisé depréférences au bénéfice des pays en développement ou de mesures autonomes. Sur lesproduits frappés de droits de douane, d’une valeur totale de 32 milliards de francs, lestaxes douanières se sont élevées à 353 millions de francs, ce qui correspond à uneimposition à la valeur de 1,1%. Ces produits industriels provenaient principalement del’UE (50%), des Etats-Unis (20,4 %), du Japon (8,8%), de Russie (3,3%) et de Chine(2,3%).

La Suisse n’applique des restrictions quantitatives à l’importation pour des raisonséconomiques que dans deux cas: l’alcool et le sel. L’importation de sel est soumise àdes régales cantonales contenues dans les différentes constitutions cantonales; seulsles cantons sont autorisés à importer du sel. La Confédération a pour sa part le droitexclusif d’importer des boissons distillées; la révision du 4 octobre 1996 de l’art. 27de la loi sur l’alcool68 a restreint ce droit exclusif aux boissons distillées dont la teneuren alcool est de 80% du volume au moins. Cette modification entrera en vigueur auplus tard le 1er juillet 1999.

66 Loi fédérale du 9 octobre 1986 sur le tarif des douanes (LTaD), RS 632.10.67 Loi fédérale du 1er octobre 1925 sur les douanes (LD), RS 631.0.68 RO 1997 379: loi fédérale du 21 juin 1932 sur l’alcool, RS 680.

Page 46: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 44 - Chapitre 2

La notion de "mesures non tarifaires" comprend également les mesures d’effet équi-valent à des restrictions quantitatives. En font notamment partie les règles techniques.Après le rejet de l’Accord EEE, le Conseil fédéral a arrêté en janvier 1993 les premiè-res mesures visant à régénérer l’économie de marché69. Il a, dans ce cadre, notam-ment, donné mandat d’examiner au niveau des lois et des ordonnances les règlestechniques existantes sous l’angle de leur compatibilité avec le droit communautaireet de les adapter, si nécessaire. A la suite de cet examen, le Conseil fédéral a adoptéun programme de révision générale des normes applicables aux produits. Dans le ca-dre du programme de revitalisation, mandat a été donné d’élaborer une loi fédéralesur les entraves techniques au commerce (LETC), et les projets de révision de la loifédérale sur la sécurité d’installations et d’appareils techniques (LSIT) et de la loi surles épizooties (LFE), établis dans le cadre du paquet Eurolex, ont été soumis une nou-velle fois aux Chambres pour adoption. La LSIT70 révisée est en vigueur depuis 1995,la LETC71, depuis la mi-1996, en même temps que la loi sur le marché intérieur72 et larévision de la loi sur les cartels73.

La loi fédérale sur les entraves techniques au commerce a pour but d’éviter, de ré-duire ou d’éliminer les obstacles techniques dans la circulation transfrontière desmarchandises. Conçue comme une loi-cadre, elle contient entre autres les principes àrespecter dans l’élaboration, l’adoption et la modification de règles techniques. Cesrègles doivent être conçues de manière à ne pas engendrer d’entraves techniques aucommerce. A cette fin, elles sont élaborées de manière à être compatibles avec cellesde nos principaux partenaires commerciaux, c'est-à-dire, en règle générale, avec cellesde la CE. Des dérogations ne sont admises que si des intérêts publics prépondérantsles rendent nécessaires et qu’elles ne constituent ni un moyen de discrimination arbi-traire, ni une restriction déguisée au commerce. Les intérêts qui peuvent être invoquéspour justifier l’adoption de règles dérogatoires sont les mêmes que ceux que l’on peutfaire valoir en application du droit international public appliqué par la Suisse(notamment l’Accord de l’OMC sur les entraves techniques au commerce), ou queceux prévus par la réglementation et la jurisprudence actuelles de la CE relatives auxart. 30, 36 et 100a du Traité CE74.

La Suisse n’applique plus de restrictions quantitatives à l’exportation pour des motifséconomiques (concernant les restrictions à l’importation et à l’exportation pour desraisons de sécurité, voir ch. 231).

69 Voir message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l’Accord EEE, FF 1993 I 757.70 Loi fédérale du 19 mars 1976 sur la sécurité d’installations et d’appareils techniques (LSIT), RS 819.1.71 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce (LETC), RS 946.51.72 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur (LMI), RS 943.02.73 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les cartels et autres restrictions à la concurrence (Loi sur les cartels,

LCart), RS 251.74 Voir let. A.3 et le message concernant la loi fédérale sur les entraves techniques au commerce, FF 1995 II

489.

Page 47: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 45 - Chapitre 2

B.3 Au plan interne

Dans la mesure où il existe encore des prescriptions cantonales divergentes qui serapportent aux produits, la loi sur le marché intérieur prescrit que les marchandisesqui correspondent aux règles d’un canton donné peuvent être commercialisées et utili-sées dans toute la Suisse. Des restrictions au libre accès au marché ne sont autoriséesque dans la mesure où elles sont indispensables à la protection d’intérêts publics pré-pondérants, proportionnelles et également applicables aux autochtones. La loi sur lemarché intérieur a repris et codifié pour la Suisse le principe de "Cassis de Dijon",appliqué dans la Communauté pour permettre la réalisation d’un marché intérieur aus-si libéral que possible. Actuellement, il existe encore des règles cantonales concernantla plupart des médicaments et certains produits de construction. D’entente avec lescantons, les travaux préparatoires en vue d’une solution fédérale dans le domaine desmédicaments ainsi que pour la commercialisation de produits de la construction sontdéjà bien avancés.

C Relations contractuelles existantes

La Suisse et la CE, ainsi que les Etats membres de celle-ci, sont membres de l’OMCet donc liés par les droits et les obligations qui en découlent. Au-delà des règles mul-tilatérales et du niveau global de libéralisation, il existe, sur le plan bilatéral, un denseréseau d’accords préférentiels relatif aux échanges de marchandises.

Le pilier central dans ce rapport est formé par l’accord de libre-échange de 1972(ALE)75. Pour les produits industriels originaires des parties contractantes, ni droits dedouane, ni restrictions quantitatives, y compris les mesures d’effet équivalent, ne sontadmissibles, et ce, de manière réciproque. Toutefois, notamment de par la structureinstitutionnelle de l’Accord de libre-échange basée sur des organes décisionnels di-plomatiques, ces interdictions sont interprétées de manière moins dynamique que dansle marché intérieur de la CE. Le 1er janvier 1997, les règles d’origine et cellesd’entraide administrative ont été remplacées par des dispositions unifiées pour toutel’Europe. L’Accord de libre-échange ne contient aucune règle spécifique relative àl’élimination des entraves techniques au commerce. Il ne porte pas non plus sur lalibéralisation de l’agriculture, exception faite des produits agricoles transformés, pourlesquels la protection industrielle a été supprimée, la protection agricole étant mainte-nue. Des modifications des protocoles de l’accord sont possibles par le biais de déci-sions du comité mixte, mais ces modifications relèvent de plus en plus souvent, ducôté de la CE, de considérations politiques. C’est ainsi, par exemple, que le protocolerelatif aux produits agricoles transformés n’a pas encore été adapté aux résultats ducycle d’Uruguay du GATT. Même l’adaptation technique de l’accord au Systèmeharmonisé du Conseil international pour la coopération en matière douanière, en vi-gueur depuis 1988, n’a pas encore pu être réalisée.

75 Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne, RS

0.632.401.

Page 48: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 46 - Chapitre 2

Pour les produits agricoles, en particulier pour les fromages et les spécialités carnées,il existe divers échanges de lettres bilatéraux entre la Suisse et la Communauté, les-quels prévoient des réductions des droits de douane et des prélèvements à la frontière.Ils ne font pas partie de l’Accord de libre-échange, même s’ils ont été en partie con-clus parallèlement à ce dernier.

Il existe en outre des accords concernant les procédures douanières, comme l’Accordsur le transit commun, sur l’unification du document unique ou sur la facilitation descontrôles à la frontière, qui ont tous pour but de simplifier les modalités du passagedes marchandises à la frontière entre la Suisse et la CE, sans toutefois supprimer lescontrôles à la frontière en tant que tels.

D Répercussions sur la Suisse

D.1 Adhésion à l’UE

Après une adhésion à l’UE, il faudrait distinguer entre le commerce des marchandisesentre la Suisse et les pays tiers (plan externe) et entre la Suisse et les autres Etatsmembres de l’UE (plan interne).

D.11 Au plan externe

Avec l’adhésion à l’UE, le territoire douanier de la Suisse ferait partie intégrante dumarché intérieur; la Suisse devrait appliquer à l’égard des pays tiers l’acquis de la lé-gislation douanière et les politiques communautaires dans le cadre de l’union doua-nière. La législation douanière suisse correspond aujourd’hui déjà dans bien des do-maines à celle de la CE. Il existe cependant des différences importantes en rapportavec le tarif douanier (nomenclature et fixation des droits de douane) ainsi qu'avec lalégislation de police commerciale et industrielle (dispositions dites de caractère nondouanier). Il y aurait lieu d’examiner, en cas d’adhésion, le statut de Campione et deBüsingen, incluses dans le territoire douanier suisse, et de la région de Samnaun, quien est exclue. Les réglementations concernant le commerce et la mise sur les marchésdes produits agricoles ainsi que celles concernant les zones franches de la Haute-Savoie et du Pays de Gex deviendraient sans objet. La situation établie par le Traitéd’union douanière entre la Suisse et le Liechtenstein devrait être réexaminée par lesdeux pays et la CE.

En tant que membre de l’UE, la Suisse n’aurait pas de frontière extérieure de l’UE,exception faite des aéroports et du port sur le Rhin. Les contrôles de marchandisesaux frontières dans les échanges avec les pays voisins seraient supprimés. Les dé-douanements tels qu'ils sont pratiqués actuellement ne porteraient plus que sur lesmarchandises importées de pays tiers ou exportées vers ces pays. Ils seraient effectuésdans les aéroports et, en application de la procédure de transit, dans un nombre res-treint de bureaux de douane à l’intérieur du pays. Pour l’administration des douanes,cela signifierait une réduction de ses tâches; celles qui subsisteraient pourraient êtreeffectuées par un personnel restreint.

Page 49: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 47 - Chapitre 2

La reprise du tarif douanier commun entraînerait une hausse de la charge douanièrefrappant les produits industriels en provenance de pays non-membres de l’UE aux-quels la Suisse n’accorde aujourd’hui aucune préférence tarifaire (comme les Etats-Unis, le Japon, la Fédération de Russie, Taiwan, le Canada). Sur la base des chiffresde 1995, la charge douanière moyenne pondérée passerait de 1,3 à 3,2%. En admet-tant que la structure des importations ne change pas fondamentalement suite àl’adhésion à l’UE, l’augmentation de la charge douanière frappant les produits indus-triels serait d’environ 270 millions de francs par an. Cette augmentation serait parcontre largement compensée76 par la suppression de tous les prélèvements àl’importation de produits de la CE (1997 : 730 millions de francs, dont la majeurepartie pour les produits agricoles). En ce qui concerne les importations en provenancede pays extérieurs à l’UE auxquels la Suisse accorde actuellement un traitement pré-férentiel (membres de l'AELE, pays d'Europe centrale et orientale, Turquie, Israël,Maroc, pays en développement), la charge douanière resterait à peu près au mêmeniveau qu’aujourd’hui, étant donné que la Communauté accorde, elle aussi, un traite-ment préférentiel à ces pays (dans la plupart des cas, les préférences de la CE vontplus loin que celles de la Suisse). A l’OMC, des compensations devraient être offertesaux pays tiers frappés par des augmentations de droits de douane. La négociation detelles concessions relève de la compétence de la Commission; les compensationséventuelles doivent, le cas échéant, être accordées par l'Etat membre de l'UE concer-né.

En reprenant le tarif des douanes communautaire, la Suisse devrait également adopterle système de droits ad valorem et la nomenclature tarifaire, qui est considérablementplus détaillée que la sienne. Les règles d’origine autonomes et préférentielles ainsique les preuves de l’origine applicables dans le commerce des marchandises avec laCE disparaîtraient presque totalement, ce qui permettrait aux entreprises de faire deconsidérables économies. Les règles et les preuves de l’origine de la CE devraient parcontre être appliquées dans les échanges de marchandises avec les pays tiers77; alorsque les règles d’origine autonomes, qui sont en voie d’être harmonisées au plan mon-dial, ne diffèrent pas pour l’essentiel, les règles d’origine préférentielles sont prati-quement identiques à celles de nos partenaires de libre-échange européens et extra-européens. Enfin, le système de préférences de la CE en faveur des pays en dévelop-pement devrait être repris; ce dernier se base, comme le système de préférencessuisse, sur des préférences tarifaires accordées de manière autonome. A la différencedu système suisse, la CE applique néanmoins pour de nombreux produits des contin-gents tarifaires à taux réduits ou des contingents tarifaires à droit zéro pourl’importation facilitée.

D.12 Au plan interne

La disparition des contrôles matériels et formels à la frontière dans le cadre de la cir-culation des marchandises diminuerait les coûts des livraisons dans la Communauté,

76 Voir la réponse du Conseil fédéral du 27 avril 1998 à la question ordinaire Blocher, (98.1046).77 Pour certaines entreprises, la charge administrative en découlant subsisterait donc.

Page 50: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 48 - Chapitre 2

en particulier de par la suppression des délais d’attente et des formalités douanières,ce qui faciliterait les livraisons "just-in-time". D'après une étude publiée par la CE,selon laquelle la suppression des contrôles à la frontière a entraîné une diminution descoûts de deux tiers, des économies représentant environ 0,7% de la valeur du com-merce entre les pays devraient en découler (soit environ 1 milliard de francs)78. Lasuppression des contrôles à la frontière a entraîné la disparition de la base de donnéesnécessaire à l’établissement de la statistique du commerce extérieur. C’est pourquoil’UE a mis sur pied un système de saisie séparé ("Intrastat") pour établir des statisti-ques du commerce intracommunautaire. Il en résulte un surcroît de travail pour lesentreprises soumises à une obligation de notifier.

La disparition des contrôles à la frontière supprimerait également la protection dontbénéficie notre agriculture; en contrepartie, l’accès au marché de la CE serait entiè-rement libéralisé pour les spécialités agricoles suisses. Le niveau des prix des produitsagricoles tendrait à se rapprocher de celui des pays voisins (voir ch. 222.03.1).

En ce qui concerne les normes applicables aux produits, l’acquis communautaire de-vrait être repris, notamment les règles techniques de la CE. Le principe de "Cassis deDijon" s’appliquerait également aux échanges de marchandises avec les Etats mem-bres (voir let. A.3). Comme les normes suisses applicables aux produits ont été lar-gement adaptées à celles de la CE dans le cadre du programme de revitalisation, desdifférences ne subsisteraient que dans quelques rares secteurs. C’est ainsi qu’une ré-vision totale de la loi sur les toxiques79 serait nécessaire afin de permettre la reprise dela législation communautaire sur les produits chimiques. La nouvelle loi sur les agentsthérapeutiques assurera la compatibilité avec le droit communautaire. En matière dedroit de la construction, une solution, élaborée avec les cantons, qui préserve les com-pétences de ces derniers et de la Confédération, prévoit, au plan fédéral, l’adoptiond’une nouvelle loi relative à la commercialisation des produits de construction, alorsque, au plan des cantons, un concordat sur la suppression des obstacles techniques aucommerce est envisagé. Dans le domaine de la législation vétérinaire, des modifica-tions seraient principalement nécessaires au niveau des ordonnances en ce qui con-cerne l’hygiène des viandes, alors que la législation sur les épizooties est déjà euro-compatible. Les législations sur l’hygiène du lait et l’élevage selon la politique agri-cole 2002 sont équivalentes à celles de la CE (voir ch. 222.03.2). Enfin, certaines mo-difications seraient nécessaires dans la législation sur les denrées alimentaires (voirch. 222.03.3).

Une analyse détaillée des pratiques cantonales et fédérales à la lumière del’interdiction des taxes d’effet équivalent à des droits de douane et des mesuresd’effet équivalent à des restrictions quantitatives pourrait révéler quelques autres in-compatibilités par rapport au droit communautaire.

78 P. Cecchini, M. Catinat, A. Jacquemin, The European Challenge 1992: The benefits of a single Market,

1988 ("Rapport Cecchini"). En 1997, la valeur des marchandises importées des Etats membres de l’UE enSuisse était de 81,25 milliards de francs, celle des exportations de 63,86 milliards de francs (sans les métauxprécieux, les pierres précieuses, les objets d’art et les antiquités).

79 Loi fédérale du 21 mars 1969 sur le commerce des toxiques (loi sur les toxiques), RS 814.80.

Page 51: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 49 - Chapitre 2

A la différence de la situation actuelle, la Suisse pourrait, après son adhésion à l’UE,participer de plein droit à l’élaboration et à l’adoption des normes de la CE applica-bles aux produits. Elle serait en outre associée à la procédure d’autorisation de cer-tains produits (par ex. à l’autorisation, à l’échelle de la Communauté, des médica-ments, des produits phytosanitaires, des produits biocides et des organismes généti-quement modifiés, ou à la déclaration de certaines matières et préparations). Cela si-gnifierait pour la Suisse une intensification de ses activités internationales, puisqu’elleserait appelée à défendre ses intérêts dans les comités et les enceintes intra-communautaires. Les autorisations et les déclarations valables pour l’ensemble de laCommunauté s’appliqueraient également à la Suisse, qui aurait dès lors systémati-quement accès aux dossiers confidentiels pour les produits concernés. Dans le do-maine non harmonisé, les autorisations et les déclarations suisses seraient valablespour tous les Etats membres de la Communauté et inversement.

Une réduction du niveau suisse actuel de protection de la santé, de l’environnement,des consommateurs et des animaux ou de la sécurité au travail ne serait pas à crain-dre80. En cas d’harmonisation des normes applicables aux produits au niveau de laCE, les règles nationales plus strictes pourraient être maintenues, et le Traitéd’Amsterdam autorisera même, à certaines conditions, d’en édicter de plus strictes,qui dérogeraient à la législation communautaire.

La compétitivité de l’économie suisse sur le marché intérieur de la CE s’amélioreraitconsidérablement puisque les contrôles à la frontière tout comme les doubles autori-sations, par ex. pour les médicaments, disparaîtraient. Comme les prescriptions suis-ses applicables aux produits correspondent aujourd’hui déjà largement à celles de laCE, il n'en découlerait pas de changements notables, même pour les cantons.

D.2 Participation à l’EEE

L’union douanière ne fait pas partie de l’Accord EEE. La participation à l’EEE (demême que les accords sectoriels ou le maintien de la situation actuelle) n’impliqueraitpas de modifications fondamentales de la législation douanière par rapport à au-jourd’hui; la Suisse resterait à l’extérieur de l’union douanière de la CE et pourraitdéfinir sa législation douanière de manière autonome. En matière de règles d’originepréférentielles, l’introduction de la notion de produit originaire de l’EEE et du cumultotal serait un avantage. Par contre, les marchandises échangées entre la Suisse etl’UE continueraient d’être soumises à des contrôles à la frontière, avec les coûts et lespertes de temps que ces derniers impliquent pour les acteurs économiques.

En cas de participation à l’EEE, la Suisse devrait adopter les normes de la CE appli-cables aux produits, et le principe de "Cassis de Dijon" serait applicable; la Cour dejustice AELE serait appelée à effectuer en dernier ressort la pesée d’intérêts entre lalibre circulation des marchandises et la protection d’intérêts publics prépondérants. Leniveau actuel de protection de la santé, de l’environnement, des consommateurs et des

80 Voir pour les détails les ch. 222.02, 222.11, 222.17, 222.18 et 222.21.

Page 52: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 50 - Chapitre 2

animaux demeurerait, tout comme celui de la sécurité au travail. De l’avis des Etatsqui font partie de l’EEE, les règles d’exception contenues dans l’accord EEE prévuesà ce titre ont fait leurs preuves dans la pratique. On peut en outre admettre que lesEtats qui font partie de l’EEE recourent aux possibilités qu’ils ont de conserver, voirede développer ultérieurement les normes applicables aux produits, dans les mêmesproportions que les Etats membres de l’UE.

A la différence des Etats membres de l’UE, les représentants des Etats de l’EEE nepeuvent participer à l’élaboration des prescriptions, puis assister aux réunions descomités d’exécution, qu’en qualité d’observateurs. Ils ne disposent pas du droit devote et ne peuvent donc pas approuver les actes juridiques de la CE, ni les autorisa-tions concernant des produits comme les médicaments.

Pour l’économie, les doubles autorisations seraient en partie supprimées, mais lescontrôles à la frontière subsisteraient à l’importation et à l’exportation.

D.3 Accords sectoriels

L'entrée en vigueur des accords sectoriels aura pour conséquences que, grâce àl’accord sur la reconnaissance mutuelle des évaluations de la conformité des produitsindustriels, les échanges des principaux produits d’exportation seront facilités. Celaconcerne les contrôles à la production des médicaments et la mise en circulation deproduits dont la commercialisation dans la Communauté dépend de contrôles oud’inspections effectués par des tiers. Pour les domaines de produits pour lesquels ledroit suisse, de manière autonome, correspond à celui de la CE, l’accord assurera lesmêmes conditions que l’Accord EEE81. Par contre, contrairement à l’Accord EEE,l’enregistrement des médicaments ne tombera pas sous le coup de cet accord. Pour lesmédicaments, la condition nécessaire à la mise en circulation restera une autorisationdélivrée à la fois dans la CE, ou dans l’EEE, et en Suisse par une autorité reconnue. Ilen va de même des catégories de produits pour lesquelles la législation suisse n’estpas équivalente à celle de la CE (par ex. les chaudières ou la plupart des instrumentsde mesure et des systèmes sous pression) ou qui ne tombent pas sous le coup del’accord (comme les produits phytosanitaires, les engrais, les produits biocides, lesproduits de construction, les denrées alimentaires et les cosmétiques). En outre, laSuisse ne profitera pas des avantages dans le commerce transfrontière qu’emporte leprincipe de "Cassis de Dijon" (voir let. A.3).

L’accord sur les produits agricoles apportera des améliorations pour une partie im-portante de notre production agricole à savoir, les fromages, pour lesquels le libre-échange sera introduit à l’issue d’une phase transitoire appropriée. La reconnaissance

81 C’est le cas pour les machines, les équipements de protection individuelle, les produits médicaux, les appa-

reils à gaz, les récipients à pression simple, les terminaux de télécommunication, les appareils utilisables enatmosphère explosive, les appareils électriques et la compatibilité électromagnétique, les véhicules à moteuret les tracteurs utilisés pour l’agriculture et la sylviculture; il en est de même de la reconnaissance des exa-mens pratiqués selon la "bonne technique de laboratoire" pour les produits chimiques, des contrôles à laproduction et de la mise en circulation de médicaments.

Page 53: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 51 - Chapitre 2

de l’équivalence de certains contrôles de commerce agricole, notamment relatifs àl’hygiène du lait et à la production biologique, devrait stimuler les échanges.

Cette amélioration des conditions du libre-échange ne supprimera pas les contrôles àla frontière, au même titre que l’EEE; ils pourraient même être plus nombreux quedans l’EEE, dans la mesure où la législation de la CE n’est pas étendue de manièregénérale à la Suisse.

Par rapport à l’adhésion à l’UE, les entreprises subiront des désavantages, outre lechamp d’application restreint des accords sectoriels, du fait des retards que subiral’adaptation du droit et du fait de la limitation de la reconnaissance des évaluations dela conformité aux marchandises originaires des parties contractantes. Ce dernier as-pect sera également négatif pour les organismes suisses d’évaluation de la conformité,de par le fait que les producteurs extra-communautaires qui veulent écouler leurs pro-duits aussi bien dans l’UE qu’en Suisse n’auront aucune raison de faire effectuer laprocédure d’évaluation de leurs produits dans notre pays.

D.4 Maintien de la situation actuelle

Si l’accord sur la reconnaissance mutuelle des évaluations de la conformité ne pouvaitentrer en vigueur, les désavantages constatés pour la compétitivité de l’économiesuisse de l’industrie et des services subsisteraient. Dans le secteur de l’évaluation dela conformité, les organismes suisses se verraient toujours contraints de n'effectuerque les travaux sous-traités par les services accrédités dans la CE.

Il pourrait s’avérer difficile de procéder aux adaptations de l’Accord de libre-échangeque nécessitent au quotidien les échanges, si la Communauté ne voit pas son propreintérêt dans ces adaptations.

221.02 Libre circulation des personnes

221.02.1 Circulation des personnes actives et non actives

A Acquis communautaire

La libre circulation des personnes, telle qu'elle est définie dans le Traité CE, englobetant les salariés que les indépendants; en d'autres termes, tous les ressortissants desEtats membres de l'UE peuvent choisir librement leur lieu de travail et de séjour ausein de l'Union et y jouissent des mêmes droits que les nationaux. Le droit de séjourest cependant subordonné à l'exercice d'une activité lucrative salariée ou indépen-dante. Les chômeurs ne peuvent prétendre à la liberté de circulation au sein del'Union. Les personnes qui n'exercent pas d'activité lucrative (étudiants, retraités etautres non-actifs) jouissent elles aussi de la liberté de circulation à condition qu'ellesdisposent d'une assurance-maladie et de moyens financiers suffisants pour assurer leurexistence. Le droit de séjour s'étend automatiquement à tous les membres de la fa-mille.

Page 54: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 52 - Chapitre 2

La libre circulation est assortie de deux mesures d’accompagnement: la coordinationdes régimes de sécurité sociale (voir ch. 221.02.2) et la reconnaissance mutuelle desdiplômes (voir ch. 221.02.3).

La libre circulation des salariés implique l'abolition de toute discrimination fondéesur la nationalité en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditionsde travail. Sous réserve des limitations justifiées par des raisons d'ordre, de sécurité etde santé publics, les travailleurs ont le droit de se déplacer et de séjourner librementsur tout le territoire des Etats membres de l'Union pour y prendre ou y exercer uneactivité lucrative. Le droit au regroupement familial leur est garanti, et les membresde la famille sont également autorisés à travailler. Les travailleurs ont en outre ledroit, sous certaines conditions, de demeurer dans un Etat membre après qu'ils ontcessé leur activité lucrative.

La libre circulation des travailleurs vaut également dans le cadre de l'administrationpublique, à l'exception des fonctions se rapportant directement ou indirectement àl'exercice d'un pouvoir souverain. Cette règle est interprétée de telle façon qu'elle neconcerne pour l'essentiel que l'armée, la police, la justice, l'administration fiscale et ladiplomatie.

Pour entrer dans n'importe quel Etat membre ou en sortir, une carte d'identité ou unpasseport valide suffit. Sur présentation de ce document et d'un certificat de travail, letravailleur reçoit un document établissant son droit de séjour, document qui n'a ce-pendant qu'une valeur déclaratoire. Si l'engagement dure plus d'un an, cette carte deséjour a une validité de cinq ans et peut être renouvelée sous les mêmes conditions àson expiration. Si l'engagement dure moins d'un an, la validité de la carte de séjour estlimitée à la durée de l'engagement. Les travailleurs, les touristes, les prestataires etbénéficiaires de services n'ont pas besoin de permis de séjour s'ils ne restent pas plusde trois mois dans le pays.

Selon l'acquis communautaire, les indépendants qui s'établissent dans un Etat membreou fournissent des prestations de services transfrontalières bénéficient également de lalibre circulation. La liberté d'établissement englobe le droit de prendre et d'exercerune activité lucrative indépendante, de créer et de gérer des entreprises dans les con-ditions définies par la législation du pays d'établissement pour ses propres ressortis-sants. La liberté de services s'applique aux prestations transfrontalières fournies pourun temps limité (voir ch. 221.03). Tout comme les salariés, les indépendants ont ledroit de faire venir leur famille et de demeurer dans le pays d'établissement.

La libre circulation des personnes non actives n'est réglementée dans l'UE que depuisle 1er juillet 1992. Elle s'applique aux retraités, aux étudiants et aux autres personnesnon actives. Ces personnes ont le droit de séjourner, avec leur famille, dans n'importequel Etat membre à condition d'être assurées contre la maladie et de disposer demoyens financiers suffisants pour ne pas dépendre de l'aide sociale.

Page 55: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 53 - Chapitre 2

La libre circulation est soumise à la réserve de l'ordre public. Elle peut faire l’objet delimitations justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santépublique. De même, ne sont pas couvertes par le principe de la libre circulation lesactivités dans la fonction publique liées à l'exercice de la puissance publique ainsique, pour les indépendants, les activités liées à l'exercice de l'autorité publique.

Depuis 1992, le domaine de la libre circulation des personnes a connu deux grandsdéveloppements:

- Le Traité de Maastricht prévoit l'introduction d'une citoyenneté européenne (art. 8à 8e du Traité CE). La portée de cette innovation est surtout symbolique; dans lapratique, elle n'apporte pas grand-chose de plus par rapport à la libre circulationtelle qu'elle est déjà réalisée dans le marché intérieur (voir ch. 221.02.5).

- Le Traité d'Amsterdam82 prévoit d'insérer de vastes pans de la politique d'immigra-tion dans un nouveau chapitre du Traité CE (premier pilier) et donc dans le do-maine de compétences de la Communauté. Après une période transitoire de cinqans, le Conseil devra se prononcer à l'unanimité sur l'introduction du système devote majoritaire (majorité qualifiée) pour les affaires d'immigration (voir ch. 24).

B Politique suisse

La politique des étrangers actuellement menée par la Suisse se fonde largement sur lerapport du Conseil fédéral du 15 mai 1991 sur la politique à l'égard des étrangers etdes réfugiés83. Ce rapport développe notamment le modèle des trois cercles qui régis-sait jusqu'ici l'admission au marché du travail suisse. Ce modèle prévoyait de réaliserune liberté de circulation aussi large que possible à l'égard du cercle intérieur, celuides pays de l'UE/AELE. Le cercle médian englobait les autres pays de recrutementtraditionnels, comme les USA et le Canada, dans lesquels le recrutement restait possi-ble moyennant le maintien de la politique de limitation. Le cercle extérieur regroupaittous les autres pays, dans lesquels le recrutement n'était plus autorisé qu'à titre excep-tionnel (dirigeants, spécialistes qualifiés, projets d'aide au développement).

A l'occasion de la révision de la réglementation sur les étrangers de 1998/99, le Con-seil fédéral a décidé d'abandonner le modèle des trois cercles. Il a suivi en cela lesrecommandations de la commission d'experts chargée par lui de concevoir les basesd'une politique migratoire cohérente, dont le rapport avait été présenté au public enaoût 1997. Depuis l'introduction du modèle des trois cercles, la pratique a montré quele cercle médian (USA, Canada) ne jouait qu'un rôle mineur sur le plan quantitatif. Lerecrutement hors espace UE/AELE se limitait de fait dans une large mesure aux tra-vailleurs très qualifiés. C'est la raison pour laquelle le Conseil fédéral s'est rallié aumodèle d'admission à deux termes préconisé par la commission.

82 Voir pour les détails ch. 311.03.4.83 FF 1991 III 316.

Page 56: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 54 - Chapitre 2

L’article 9 de l’OLE84 (contrôle des conditions de salaire et de travail), qui vise no-tamment à protéger les travailleurs indigènes contre la sous-enchère salariale, prendici une importance capitale. Dans le cadre des négociations bilatérales sectorielles, ungroupe de travail de la Confédération, dont faisait partie des représentants des parte-naires sociaux, a élaboré plusieurs solutions de rechange à cet article (voir let. D).

C Relations contractuelles existantes

La Suisse a conclu des traités d'établissement avec tous les Etats de l’UE, hormis leLuxembourg et le Portugal, et avec l'Islande, membre de l'AELE. Ces traités accor-dent aux ressortissants des Etats signataires, titulaires d'un permis d'établissement, ledroit d'exercer une activité lucrative dans les mêmes conditions que celles définies parla législation suisse pour ses propres ressortissants.

A la différence des traités d'établissement, les conventions d'établissement reconnais-sent aux ressortissants des Etats signataires le droit à l'octroi d'un permis d'établisse-ment après cinq ans de séjour régulier ininterrompu. Des conventions d'établissementont été conclues avec l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, l'Espagne, la France, laGrèce, l'Italie, les Pays-Bas, le Portugal, l'Autriche et le Liechtenstein (membre del'AELE). Les ressortissants de la Finlande, de la Grande-Bretagne, de l'Irlande, duLuxembourg, de la Suède et de la Norvège (membre de l'AELE) reçoivent le permisd'établissement pour des motifs de réciprocité (pas de convention d'établissement).

La Suisse a conclu avec l'Espagne le 2 mars 1961 et avec l'Italie le 10 août 1964 desaccords sur l'engagement de travailleurs espagnols et italiens85. Ces accords régissentle recrutement et l'engagement par des entreprises privées, les conditions de salaire etde travail, ainsi que le statut social des travailleurs immigrés.

Par ailleurs, la Suisse a conclu des accords d'échange de stagiaires avec tous Etatsmembres de l'UE (sauf la Grèce) et avec la Norvège, membre de l'AELE86. Ces ac-cords visent à promouvoir la formation professionnelle et linguistique de jeunes pro-fessionnels qualifiés par des stages pratiques de 18 mois au plus dans les Etats signa-taires.

Le 1er août 1946, la Suisse et la France ont conclu un accord sur la situation des tra-vailleurs frontaliers. Il définit pour l'essentiel les conditions et les modalités de travaildes frontaliers suisses et français. Des accords sur le petit trafic frontalier, fixant no-tamment les zones frontalières de marché du travail, ont été signés avec tous les Etatsvoisins87.

84 Ordonnance du 6 octobre 1986 limitant le nombre des étrangers (OLE), RS 823.21.85 Accord du 2 mars 1961 entre la Suisse et l'Espagne sur l'engagement de travailleurs espagnols en vue de leur

emploi en Suisse, RS 0.142.113.328; Accord du 10 août 1964 entre la Suisse et l'Italie relatif à l'émigrationde travailleurs italiens en Suisse, RS 0.142.114.548.

86 Voir par ex. l'Accord du 2 février 1955 entre la Confédération suisse et la République fédérale d'Allemagnesur l'échange de stagiaires, RS 0.142.111.367.

87 Voir par ex. l'Accord du 13 juin 1973 entre la Confédération suisse et la République d'Autriche concernant

Page 57: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 55 - Chapitre 2

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, les ressortissants suisses pourraient, en vertu de l’acquiscommunautaire, aller travailler comme salarié ou comme indépendant dans tous lesEtats membres de l'UE; ils pourraient également s'y établir, aux conditions prévuesdans l'acquis, en qualité de non-actifs. En contrepartie, les ressortissants de l'UE pour-raient faire de même en Suisse. L'attrait de la place économique suisse s'en trouveraitsensiblement améliorée.

S'agissant des domaines de l'administration publique dans lesquels le principe de lalibre circulation des employés est applicable (voir let. A), le droit des fonctionnairesdevrait être adapté, notamment en renonçant au devoir de domicile. La Suisse pourraitéventuellement négocier des délais d'adaptation pour la transposition de l'acquis dansle domaine de la circulation des personnes, mais non des exceptions permanentes. Lesexpériences faites au sein de l'UE montrent que la libre circulation n'a pas provoquéde fortes vagues d'immigration. On n'a pas constaté en particulier, au sein de l'UE, desmouvements migratoires entre les régions à fort taux de chômage et les régions à fai-ble taux de chômage, même lorsqu'elles partageaient la même langue (p. ex. entre lel'ouest et l'est de l'Allemagne, entre l'Allemagne et l'Autriche, ou au sein du marchédu travail scandinave).

La participation à l'EEE impliquerait pour la Suisse la reprise totale de l’acquis com-munautaire dans le domaine de la circulation des personnes, exactement comme uneadhésion à l'UE, avec encore une fois la possibilité de négocier des délais d'adapta-tion, mais à cette différence près que la Suisse ne serait pas associée aux décisions del'Union sur l'aménagement concret de la politique du travail, ni des politiques socialeet migratoire.

Dans le cadre des négociations bilatérales sectorielles, le Conseil fédéral a négociéun accord qui prévoit un passage graduel à la libre circulation. Dès l'entrée en vigueurde l'accord, les ressortissants de l'UE jouiront du traitement national en Suisse et lesSuisses du traitement communautaire au sein de l'UE. La Suisse pourra maintenir lecontingentement pendant cinq ans après l'entrée en vigueur de l'accord sectoriel, mais,à la différence d'aujourd'hui, les ressortissants de l'UE auront droit à une autorisationdans les limites des contingents disponibles. Dès la troisième année après l'entrée envigueur de l'accord, la priorité des travailleurs indigènes et le contrôle des conditionsde rémunération et de travail seront abolis pour les ressortissants de l'UE. Un groupede travail fédéral a été chargé de rechercher des mesures de substitution eurocompati-bles à ces contrôles pour lutter contre les abus, en particulier contre la sous-enchèresalariale. Ses propositions s'articulent autour des idées suivantes: il s'agit pour l'es-sentiel de définir un noyau central de dispositions tendant à la protection des tra-vailleurs et qui, de par leur importance pour un marché du travail équilibré, doiventêtre respectées par tout intervenant sur ce marché, quel que soit son lieu de prove-nance ou de domicile. Les mesures envisagées sont la facilitation de l'extension des

le mouvement des personnes dans le petit trafic frontalier, RS 0.631.256.916.33 .

Page 58: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 56 - Chapitre 2

conventions collectives de travail, la fixation de salaires minima dans les contrats ty-pes de travail, ainsi qu'une loi concernant les travailleurs détachés (application auxtravailleurs détachés des principales dispositions protectrices des travailleurs en vi-gueur en Suisse et harmonisation du droit suisse avec la directive communautairepertinente). En vertu d'une clause spéciale de sauvegarde, la Suisse se réserve le droitde réintroduire les contingents, au terme de cinq ans, si l'immigration dépasse un cer-tain seuil. Sept ans après l'entrée en vigueur de l'accord, la Suisse aura la possibilitéde dire si elle entend poursuivre l'accord (avec possibilité de référendum). La non-poursuite de l'accord risque toutefois de remettre en question l'existence de certains,voire de tous les accords conclus alors avec l'UE.

L'accord sur la circulation des personnes prévoit également une libéralisation partielledu domaine des services. Il dispose d'une part que, dans les domaines régis par unaccord de prestations de services entre la Suisse et l'UE, la libre prestation de servicesne devra pas être entravée par des dispositions sur la circulation des personnes. Il re-connaît, d'autre part, aux prestataires de services le droit de se rendre dans le paysd'accueil et d'y séjourner jusqu'à 90 jours par année pour y fournir leur prestation.Jouiront de ce droit les indépendants et les personnes morales qui enverront leurs tra-vailleurs dans le pays d'accueil.

Synthèse des répercussions de la libre circulation des personnes pour les Suisses surle territoire des Etats de l'UE88:

- Egalité de traitement pleine et entière avec les nationaux, notamment en ce quiconcerne les conditions de rémunération et de travail, les avantages sociaux (parex. logements sociaux) et les avantages fiscaux.

- Accès au marché du travail et à une activité indépendante. Liberté de changerd'emploi et de profession sur tout le territoire de l'UE. Plus de réserves fondées surla nationalité, hormis pour les activités liées à l'exercice d'un pouvoir souverain.

- Plus de restrictions en ce qui concerne l'acquisition de biens immobiliers dans l'UEen cas d'adhésion de la Suisse à l'UE. Après l'entrée en vigueur de l'accord secto-riel, plus de restrictions si l'acquéreur suisse est domicilié dans l'Etat concerné.

- Droit de séjour en qualité de non-actif sur tout le territoire de l'UE. Conditions:disposer de moyens financiers suffisants et d'une assurance-maladie. Ces condi-tions sont particulièrement importantes pour les étudiants et les rentiers. En casd'adhésion à l'UE - mais non en cas de participation à l'EEE, ni en vertu des ac-cords sectoriels -, les étudiants suisses auront le droit de s'inscrire dans les établis-sements de formation de l'UE s'ils remplissent les conditions qui seraient requisesen Suisse (par ex. maturité).

- Carte de séjour normalement valable cinq ans (durée déterminée si le contrat detravail dure moins d'un an et pour les étudiants). Elle ne peut être retirée en cas dechômage involontaire, de maladie ou d'accident. La carte de séjour ne doit pascoûter plus cher qu'une carte d'identité pour les ressortissants de l'UE.

88 En cas d'adhésion à l'UE, comme dans une large mesure, en l'absence d'autres précisions, en cas d'entrée en

vigueur des accords sectoriels, ou encore de participation à l'EEE.

Page 59: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 57 - Chapitre 2

- Regroupement familial selon les règles du droit communautaire. En bénéficient lesconjoints, les enfants jusqu'à 21 ans ou les enfants à charge, ainsi que les ascen-dants à charge. Les membres de la famille ont le droit de travailler.

- Droit de revenir dans l'UE à tout moment si l'immigrant peut prouver qu'il a du tra-vail ou des moyens financiers suffisants pour vivre sans travailler.

- Transfert de cadres facilité. Les ressortissants suisses peuvent être transférés, ausein d'une multinationale qui a son siège dans l'UE, dans n'importe quel pays del'UE, sans restriction relative au marché du travail ou autres conditions restrictives.

- Traitement national et coordination en matière d'assurances sociales. Cela impliquenotamment la totalisation (multilatérale et plus seulement bilatérale à l'égard d'unseul Etat membre de l'UE comme c'est le cas aujourd'hui avec les conventions bi-latérales de sécurité sociale) des périodes de cotisation pour l'acquisition du droit àdes prestations et l'allocation de prestations, normalement selon le principe du prorata temporis. Le paiement des retraites aux travailleurs domiciliés dans un Etattiers reste possible dans les limites actuelles. Contrairement aux actuelles conven-tions bilatérales de sécurité sociale, la couverture d'assurance-maladie est, elle aus-si, assurée sans lacune.

- Reconnaissance mutuelle des diplômes et des certificats professionnels pour l'accèsaux professions dans l'UE, ce qui ouvre l'accès aux activités indépendantes et peuts'avérer important aussi pour les travailleurs dont le salaire est lié à la reconnais-sance d'un titre.

En cas de maintien de la situation actuelle la Suisse pourra continuer à définir sa po-litique des étrangers de manière autonome et à appliquer sa politique de limitationégalement à l'égard des immigrants en provenance de l'espace UE/AELE. Le Conseilfédéral avait exprimé sa volonté de privilégier le recrutement dans cet espace déjàdans la formulation du modèle des trois cercles. Rien ne nous empêchera de poursui-vre dans cette voie, mais il faut être conscient que la stratégie d'autonomie suivie jus-qu'ici ne permettra pas de garantir la réciprocité des avantages accordés aux ressortis-sants de l'UE. Les Suisses qui travailleront dans l'UE, mais aussi les entreprises suis-ses qui désireront transférer leurs travailleurs dans une filiale ayant son siège dansUE, seront dès lors pénalisés. Le maintien de la situation actuelle ne contribuera enaucun cas à augmenter l'attrait de la place économique suisse.

Concernant la question du maintien ou de la suppression des contrôles à la frontièredans les différentes variantes d'intégration, voir chiffre 243.

221.02.2 Sécurité sociale

A Acquis communautaire

La coordination des législations des Etats membres en matière de sécurité sociale estprévue par l'art. 51 du Traité CE. Elle est mise en œuvre par les règlements (CEE)

Page 60: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 58 - Chapitre 2

n°1408/71 et 574/7289. Ces textes s'appliquent aux ressortissants de l'UE, aux réfugiéset aux apatrides, ainsi qu'aux membres de leur famille, et comprennent les branchesd'assurances sociales traditionnelles: maladie et maternité, invalidité, vieillesse, décès(prestations de survivants), accidents du travail et maladies professionnelles, chômageet prestations familiales. Toute la législation d'un Etat est visée, y compris les règle-ments des collectivités publiques régionales (par ex. les cantons), indépendamment dumode de financement des prestations (impôts ou cotisations). La coordination reposepour l'essentiel sur les principes suivants:

- pas de discrimination fondée sur la nationalité;

- assurance pour tous les risques dans un seul Etat;

- exportation sans limites des prestations (prestations d'assurance-chômage: aumaximum trois mois entre deux emplois);

- droit à des soins à l'étranger en cas de maladie ou d'accident;

- prise en compte des périodes d'assurance accomplies dans d'autres Etats; indemni-sation par une prestation entière d'un seul Etat ou des prestations partielles de cha-que Etat concerné.

B Politique suisse

La Suisse s'efforce depuis toujours de supprimer les discriminations contenues dansson droit national et, par le biais de conventions internationales de sécurité sociale, defaciliter pour les ressortissants étrangers l'acquisition d'un droit aux prestations suis-ses, mais aussi d'améliorer pour les Suisses l'accès aux prestations étrangères.

C Relations contractuelles existantes

La Suisse a conclu avec tous les Etats de l'UE des conventions bilatérales de sécuritésociale (sans assurance-chômage). Des conventions en matière d'assurance-chômageconclues avec les Etats voisins régissent la situation des frontaliers. En cas de chô-mage complet, ceux-ci touchent des prestations de l'Etat de domicile. Contrairementaux règles en vigueur dans l'UE, le pays de travail rétrocède au pays de domicile lescotisations perçues sur les salaires des frontaliers.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d'adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE, la Suisse reprendrait l'acquiscommunautaire dans sa totalité. Les accords bilatéraux sectoriels n'entraîneront pasune reprise de l'acquis tel quel, mais une réglementation équivalente sera applicableen Suisse. Certaines adaptations d'ordonnances nécessaires pour la Suisse, telles queconvenues dans le cadre des négociations EEE ou des négociations relatives aux ac- 89 Règlement (CEE) n° 1408/71 du 14 juin 1971 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux

travailleurs salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, JO n° L149 du 5 juillet 1971, p. 2; Règlement (CEE) n° 574/72 du 21 mars 1972 fixant les modalités d'applicationdu règlement (CEE) n° 1408/71, JO n° L 74 du 24 mars 1972, p. 1. Ces deux règlements ont été modifiés endernier lieu par le Règlement (CE) n° 1606/98 du 29 juin 1998, JO n° L 209 du 25 juillet 98, p. 1.

Page 61: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 59 - Chapitre 2

cords sectoriels devraient également être possibles en cas d'adhésion. Quelque soit lavariante (adhésion, participation à l'EEE, entrée en vigueur de l'accord sectoriel sur lalibre circulation des personnes), les règlements communautaires remplaceraient lesconventions bilatérales de sécurité sociale conclues avec les Etats membres de l'UE.La législation suisse, complétée par les conventions bilatérales, correspond déjà engrande partie aux règles communautaires. Ce sont principalement l'assurance-maladieet l'assurance-chômage qui comportent des lacunes. Les modifications et les coûtsqu'engendreraient les trois variantes sont décrits ci-après, avec référence des différen-ces existantes:

- Dans l’assurance-maladie, la Suisse devrait assurer obligatoirement certaines caté-gories de personnes résidant dans un pays de l'UE en conformité avec le droitcommunautaire: les personnes travaillant en Suisse, les bénéficiaires d'une rentesuisse, les bénéficiaires de prestations de chômage suisses, les membres de la fa-mille de personnes assurées obligatoirement en Suisse. Selon le système suisse, cespersonnes seraient assurées personnellement et paieraient des primes individuellescalculées en fonction des coûts à couvrir. Comme ces assurés se font soigner dansleur Etat de résidence, où les coûts des traitements sont en général moins élevésqu'en Suisse, leurs primes devraient également se situer au-dessous des montantssuisses. Un système d'aide au paiement des primes dans les cas pénibles devraitaussi être prévu pour ces assurés. Les conditions posées en Suisse pour l'octroi deces aides ne devraient toutefois pas être appliquées telles quelles; des critères te-nant compte des primes plus basses de ces assurés et des coûts de la vie moins éle-vés dans leur Etat de domicile devraient être la règle. L'assurance en Suisse et leséventuelles aides au paiement des primes n'entreraient toutefois en ligne de compteque si l'Etat de l'UE en question n'a pas fait usage de son droit d'option lui permet-tant d'assurer dans son régime les personnes résidant sur son territoire, soit de ma-nière globale, soit sur demande individuelle.

Lorsqu'une personne assurée dans un Etat membre de l'UE résiderait ou séjourne-rait en Suisse, les prestations en nature au titre de la maladie et de la maternité de-vraient être servies par la Suisse comme si la personne y était assurée, à charge deremboursement par l'Etat compétent de la totalité des coûts facturés sur la base dela loi fédérale sur l'assurance-maladie90. Les personnes assurées en Suisse bénéfi-cieraient dans l'UE des avantages correspondants. Les frais administratifs engen-drés par l'application de ce système en Suisse seraient supportés par les assureurs etles intérêts par la Confédération, comme le prévoit la loi sur l'assurance-maladie.Dans le message relatif à l'Accord sur l'EEE, ces frais avaient été estimés à 5 mil-lions francs par an pour les assureurs et la Confédération; cependant, l'entrée en vi-gueur de la loi sur l'assurance-maladie, qui apporte une modification dans les mo-dalités d'application du système de remboursement, laisse prévoir des coûts moinsélevés.

La création d'une assurance pour certaines catégories de personnes à l'étrangern'entraînerait pas de coûts supplémentaires. Comme dans la loi sur l'assurance-maladie, les assurés paieraient des primes en relation avec les coûts des prestations

90 Loi fédérale du 18 mars 1994 sur l'assurance-maladie (LAMal), RS 832.10.

Page 62: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 60 - Chapitre 2

reçues et les frais administratifs engendrés. On ne peut pour l'instant estimer lenombre d'assurés potentiels, dans la mesure où on ne peut pas encore déterminercombien de personnes choisiraient de s'assurer en Suisse. Tant que le nombre d'as-surés et leur Etat de résidence ne sont pas connus, il est également impossibled'établir les coûts découlant de l'aide au paiement des primes. En considérant àl'heure actuelle les ressortissants étrangers concernés par la nouvelle réglementa-tion, il ne faut pas s'attendre à d'importants coûts supplémentaires: vu les primesd'assurance moins élevées des personnes vivant à l'étranger et les coûts de la vieplus bas, les cas seraient moins nombreux qu'en Suisse et les montants moins im-portants91, même si peu d'Etats feront usage du droit d'option. L'octroi d'aides aupaiement des primes pour les assurés résidant à l'étranger devrait néanmoins êtreaccompagné d'importantes mesures d'exécution et de surveillance.

- Dans le domaine de l'assurance-chômage, la totalisation des périodes de cotisationet le principe de l'égalité de traitement seraient lourds de conséquences surtout pourles travailleurs étrangers dont la durée d'engagement est inférieure à un an(saisonniers ou résidents de courte durée). Aujourd'hui, ces travailleurs touchentl'indemnité de chômage au maximum jusqu'à l'expiration de leur autorisation deséjour et seulement s'ils ont cotisé pendant six mois au moins (période de cotisationminimale requise par le droit suisse). A l'avenir, grâce à la totalisation des périodesde cotisation éventuellement accomplies antérieurement dans l'espace UE, ils pour-raient atteindre la période de cotisation minimale requise par le droit suisse et con-tinuer à toucher des prestations, comme les travailleurs indigènes, à l'expiration deleur autorisation de séjour initiale, à condition de rester domiciliés en Suisse et des'inscrire à l'office du travail pour le placement.

- Dans le cadre de l'accord sectoriel sur la libre circulation des personnes entre laSuisse et l'UE, il est prévu que, pendant une période transitoire de sept ans, laSuisse ne pratiquera pas la totalisation des périodes de cotisation accomplies àl'étranger pour les résidents de courte durée, et qu'ils continueront donc à n'avoirdroit à des prestations de l'assurance-chômage que s'ils ont cotisé pendant six moisau moins. En contrepartie, la Suisse continuera jusque-là à rétrocéder aux pays dedomicile les cotisations perçues sur les salaires des frontaliers et des résidents decourte durée dont le contrat de travail ne dépasse pas six mois. En 1997, quelque90 000 saisonniers et résidents de courte durée provenant de l'UE ont travaillé enSuisse. Si l'on prend ces chiffres comme base de calcul pour les sept années de lapériode transitoire, les coûts supplémentaires seraient de l'ordre de 170 millions defrancs par an. Et ce chiffre ne comprend pas les dépenses pour la rétrocession descotisations à l'assurance-chômage des étrangers travaillant en Suisse pendant moinsde six mois, soit environ 40 millions de francs par an. Les dépenses supplémentai-res occasionnées par les résidents de courte durée et les saisonniers peuvent ainsiêtre estimées, pendant la période transitoire, à 210 millions de francs par an92.

91 Les informations correspondantes seront publiées dans le message du Conseil fédéral aux Chambres sur les

résultats des négociations bilatérales sectorielles, qui paraîtra peu après la signature des accords.92 Il s'agit là d'estimations provisoires, car il est impossible de prévoir quel sera le comportement des résidents

de courte durée et des saisonniers dans des conditions de libre circulation des personnes. Une étude du KOFde l'EPFZ publiée en décembre 1998 arrive à la conclusion que les accords sectoriels engendreront au titre

Page 63: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 61 - Chapitre 2

- Au terme de la période transitoire de sept ans, ou en cas d’adhésion à l'UE ou departicipation à l'EEE, la Suisse n'aurait plus à rétrocéder aux pays de domicile lescotisations des frontaliers à l'assurance-chômage. Ces rétrocessions se montentaujourd'hui à environ à 200 millions de francs par an. Par contre, l'application dutraitement national aux ressortissants de l'UE entraînerait des frais supplémentairesde 370 à 600 millions de francs par an pour l'assurance-chômage.93 Les frais sup-plémentaires, comparés à la période transitoire de l'accord sur la circulation despersonnes, seraient ainsi de l'ordre de 170 à 400 millions de francs par an, contre210 millions dans la période transitoire.

- Les autres branches (assurance-vieillesse et survivants [AVS], assurance-invalidité [AI], prestations complémentaires [PC], prévoyance professionnelle[PP], assurance-accidents [AA], allocations familiales [AF]) sont principalementconcernées par les principes de l'égalité de traitement et de l'exportation sans limi-tes des prestations. Les ressortissants de l'UE pourraient par exemple bénéficier deprestations complémentaires aux mêmes conditions que les Suisses; ces prestationsne devraient toutefois pas être versées à l'étranger. De la même manière, les Suissespourraient avoir accès plus facilement aux prestations des pays de l'UE. Les res-sortissants de l'UE pourraient à certaines conditions adhérer à l'AVS/AI facultative.Après un délai transitoire, le versement en espèces de la prestation de libre passagedans la prévoyance professionnelle ne serait possible que pour les personnes nonassujetties à l'assurance obligatoire dans un Etat de l'UE. Les principes commu-nautaires (égalité de traitement, exportation des prestations) s'appliqueraient aussiaux réglementations cantonales.

Les coûts supplémentaires dans l’AVS/AI (1er pilier), y compris les prestationscomplémentaires, sont estimés à 34 millions de francs par an, dont 21 à la chargede la Confédération et 13 à la charge des cantons94. Ils résulteraient du passaged'un système de rentes partielles à un système au prorata (Confédération: 18 mil-lions; cantons: 5 millions) et de la suppression du délai de carence dans les presta-tions complémentaires en faveur des ressortissants communautaires(Confédération: 3 millions; cantons: 8 millions). Il faudrait également compteravec une augmentation du personnel de la Caisse suisse de compensation. Le nom-bre exact de postes ne peut cependant pas encore être avancé. Dans le domaine dela prévoyance professionnelle (2e pilier), la mise sur pied et la gestion d'un organede liaison engendrerait des coûts administratifs supplémentaires évalués à 10,7millions de francs. La répartition des frais sera présentée dans le message du Con-seil fédéral sur les résultats des négociations sectorielles. Les spécialistes évaluent

de l'assurance-chômage des coûts supplémentaires de quelque 400 à 600 millions de francs par an, ce pourdeux raisons: premièrement, les ressortissants de l'UE au bénéfice d'une emploi de durée limitée (moins d'unan) pourront en cas de chômage rester en Suisse jusqu'à l'échéance de leur droit aux prestations et recevoirl'indemnité de chômage; deuxièmement, une nouvelle réduction de la fonction tampon que représente lamain-d'oeuvre étrangère pourra entraîner un taux de chômage un peu plus élevé, avec les conséquences fi-nancières qui en résultent. En revanche, après la période transitoire, la suppression des prestations à l'égarddes frontaliers (rétrocession) engendrera des économies annuelles de l'ordre de 200 millions de francs.

93 Voir note précédente.94 Le maintien des quarts de rente AI entraînerait des dépenses supplémentaires de l'ordre de 3,5 millions de

francs, dont 2,5 millions pour la Confédération et 1 million pour les cantons.

Page 64: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 62 - Chapitre 2

les coûts pour la Confédération et les cantons en matière d'allocations familiales à2 millions de francs. Les coûts supplémentaires seraient cependant compensés parde notables avantages pour les assurés, comme l'entraide en matière de prestationsdans les quinze Etats membres dans le domaine de l'assurance-maladie ou la priseen compte des périodes accomplies dans un ou plusieurs Etats en vue d'ouvrir undroit aux prestations. Ces améliorations faciliteraient aux ressortissants suissesl'obtention de prestations de sécurité sociale des Etats de l'UE.

Aperçu des conséquences financières (sans l'assurance-chômage) en cas d'adhésion àl'UE, de participation à l'EEE et d'entrée en vigueur des accords sectoriels95.

- Coûts supplémentaires pour la Confédération (en millions de francs par année):

Branche Mesure CoûtsAVS/AI Passage d'un système de rentes partielles à un système au

prorata 18.0PC Suppression du délai de carence en faveur des ressortis-

sants communautaires 3.0PP Mise sur pied et gestion d'un organe de liaison

(frais administratifs) 10.7AM Entraide en matière de prestations en Suisse

(frais administratifs) 5.096

AF Octroi de l'égalité de traitement aux ressortissants com-munautaires dans les allocations de ménage 1.3

- Coûts supplémentaires pour les cantons (en millions de francs par année):

Branche Mesure CoûtsAVS/AI Passage d'un système de rentes partielles à un système au

prorata 5.0PC Suppression du délai de carence en faveur des ressortis-

sants communautaires 8.0AF Octroi de l'égalité de traitement aux ressortissants com-

munautaires dans les allocations de ménage 0.7

Le Conseil fédéral évaluera les conséquences pour les assurances sociales (coûts pourles branches d'assurance) dans sa réponse au postulat du groupe UDC du 10 juin 1998(98.3241) et les publiera dans le message sur les résultats des négociations bilatéralessectorielles, qui paraîtra après la signature des accords.

95 Hypothèse: suppression des quarts de rente dans le cadre de la 4e révision de la loi sur l'assurance-invalidité,

conformément à une décision du Parlement de juin 1998; en cas de maintien des quarts de rente, il faut s'at-tendre à des coûts supplémentaires de l'ordre de 3,5 millions de francs, dont 2,5 millions à la charge de laConfédération et 1 million à celle des cantons.

96 Ce montant englobe les coûts supplémentaires pour la Confédération et les assureurs.

Page 65: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 63 - Chapitre 2

Même en cas de maintien de la situation actuelle, la Suisse devra s'efforcer d'amélio-rer ses relations contractuelles avec les Etats de l'UE. Cependant, comme l'expériencedes négociations bilatérales sectorielles l'a démontré, des solutions particulières seronttrès difficiles à négocier. Dans leurs négociations avec des Etats tiers, les Etats del'UE ne s'écartent pratiquement pas du droit communautaire en vigueur dans le do-maine de la sécurité sociale.

221.02.3 Reconnaissance des diplômes

A Acquis communautaire

Les directives communautaires relatives à la reconnaissance des diplômes prévoient àquelles conditions les citoyens d’un Etat membre peuvent, sur la base de l'attestationde leur formation, exercer dans un autre Etat membre une profession qui y est régle-mentée, et dont l’exercice est réservé aux détenteurs de diplômes ou de certificats pro-fessionnels nationaux. Le droit communautaire distingue entre directives de recon-naissance générales et spéciales. Les premières reposent sur le principe de la con-fiance mutuelle dans les formations enseignées dans les autres Etats membres, les se-condes avant tout sur l’expérience professionnelle attestée dans le pays d’origine. Lesdirectives spéciales pour les professions médicales contiennent des prescriptions enmatière de formation qui sont harmonisées jusque dans les moindres détails.

Depuis les négociations sur l’EEE, plusieurs directives ont été mises à jour. On encitera deux:

- La directive relative à un deuxième système général de reconnaissance des forma-tions professionnelles97, qui étend le système de la première directive générale auxtitulaires de formations autres que celles dispensées par les hautes écoles.

- La directive visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat98, en-trée en vigueur le 14 mars 1998 et qui doit être transcrite au niveau national d’iciau 14 mars 2000. Elle offre la possibilité d’exercer pour un temps indéterminé laprofession d’avocat dans un autre Etat membre de l’UE sous le titre acquis dans lepays d’origine. En cas de représentation de clients devant un tribunal, le paysd’accueil peut imposer à l’avocat exerçant sous son titre d’origine qu’il agissed’entente avec un défenseur ou un conseil agréé par le tribunal en question. Aprèstrois ans d’activité dans le pays d’accueil, l’avocat peut revendiquer le même statutque les avocats indigènes.

B Politique suisse

Pour les professions relevant de la compétence de la Confédération en vertu de l’art.34ter, al. 1, let. g, cst., la responsabilité de la reconnaissance des diplômes de fins

97 Directive 92/51/CEE du 18 juin 1992 relative à un deuxième système général de reconnaissance des forma-

tions professionnelles, en complément à la directive 89/48/CEE, JO n° L 209 du 24 juillet 1992, p. 25.98 Directive 98/5/CE du 16 février 1998 visant à faciliter l'exercice permanent de la profession d'avocat dans

un Etat membre autre que celui où la qualification a été acquise, JO n° L 77 du 14 mars 1998, p. 36.

Page 66: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 64 - Chapitre 2

d'études étrangers est réglée au niveau de la loi99. La pratique constante est de recon-naître les formations équivalentes. Une telle reconnaissance n’est toutefois nécessaireque pour l’accès à l’exercice des (rares) professions réglementées.

Dans le domaine des professions académiques selon l’article 33, al. 2, cst., des effortssont en cours pour réglementer au plan fédéral les spécialisations médicales et, par-tant, pour les adapter aux exigences formelles du droit communautaire100.

Une loi sur la libre circulation des avocats dans l’exercice de leur profession (loi surles avocats) est prévue et sera vraisemblablement traitée par les Chambres fédéralesen 1999.

Dans les professions dont la réglementation est du ressort des cantons - par ex.l’enseignement à tous les niveaux, les professions paramédicales et sociales –, ilexiste depuis le 18 février 1993 un accord intercantonal sur la reconnaissance des di-plômes de fin d’études101, qui accorde une reconnaissance nationale aux diplômescantonaux et qui fournit le cadre juridique de la reconnaissance des diplômes étran-gers.

C Relations contractuelles existantes

Il existe un accord bilatéral avec l’Allemagne sur la reconnaissance mutuelle des cer-tificats de fin d’apprentissage et des titres attestant une maîtrise pour les métiers arti-sanaux. Cet accord date de 1937 et n’a pas été publié, mais il demeure appliqué parles deux parties.

Il y a par ailleurs des accords bilatéraux avec l’Allemagne, l’Autriche et la France surla reconnaissance des diplômes universitaires pour faciliter les échanges d’étudiants,accords qui ne couvrent cependant pas l’accès à l’exercice des professions. Un accordsimilaire avec l’Italie est en préparation.

D Répercussions sur la Suisse

L'adhésion à l’UE entraînerait la reprise du droit communautaire existant. La Suisseparticiperait à l’évolution de cette législation. Pour les citoyens suisses, l'applicationdu droit communautaire signifierait qu’ils pourraient exercer leur profession sur toutle territoire de l'UE pour autant que leur formation tombe dans les domaines de re-connaissance générale décrits plus haut. Dans les domaines de la médecine, del’architecture, dans la profession d’avocat et dans d’autres professions réglementées,la libre circulation des salariés et des indépendants serait également assurée en ce quiconcerne les qualifications professionnelles.

99 Art. 45 et 56, al. 5, de la loi fédérale du 19 avril 1978 sur la formation professionnelle, RS 412.10.100 Révision de la loi fédérale du 19 décembre 1877 concernant l'exercice des professions de médecin, de

pharmacien et de vétérinaire dans la Confédération suisse, RS 811.11.101 Accord intercantonal du 18 février 1993 sur la reconnaissance des diplômes de fin d'études, RS 413.21.

Page 67: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 65 - Chapitre 2

En cas de participation à l’EEE, les règles communautaires devraient également êtrereprises. La Suisse ne participerait toutefois au développement de ces règles que dansune mesure limitée.

Dans le cadre des accords sectoriels, la Suisse reprendra en substance l’acquis com-munautaire, alors que la CE reconnaîtra les diplômes suisses de fin d'études corres-pondant au droit communautaire. La mesure de la participation suisse au développe-ment de la législation CE sera comparable à la situation prévalant en cas de participa-tion à l’EEE.

En cas de maintien de la situation actuelle, les accords bilatéraux conclus à ce jourdemeureront en vigueur. La Suisse devra entreprendre d’autres négociations bilatéra-les afin de conclure des accords renforçant la mobilité des salariés et des indépendantset facilitant l’accès aux marchés du travail étrangers. Les chances de succès d’unetelle démarche bilatérale doivent cependant être considérées comme faibles.

221.02.4 Aspects relatifs aux personnes morales

A Acquis communautaire

Outre les personnes physiques (art. 48 et 52 du Traité CE), les sociétés ont elles aussile droit de libre établissement (art. 58 du Traité CE), ce qui les autorise à fonder desétablissements secondaires (agences, succursales, filiales) et à exercer des droits rele-vant du droit privé, tels que l'acquisition de propriétés et de participations dans dessociétés.

B Politique suisse

Comme la Communauté, la Suisse pratique une politique libérale en matière de droitd'établissement des sociétés. Le droit fédéral et le droit cantonal ne connaissent quepeu de restrictions relatives au droit d'établissement. Au plan fédéral, il s'agit surtoutde limitations sectorielles affectant les domaines de l'énergie, du transport aérien, dela navigation intérieure et des transports maritimes, du film, de la radio et de la télévi-sion, à quoi s'ajoutent quelques rares mesures transsectorielles (droit des obliga-tions102: majorité de ressortissants suisses dans le conseil d'administration d'une so-ciété anonyme et dans l'administration d'une société coopérative; Lex Friedrich103:acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger). Au plan cantonal, les restric-tions frappent principalement certaines professions libérales. En outre, il existe auxplans fédéral et cantonal une série de monopoles (par ex. dans le domaine des assu-rances immobilières cantonales). La révision du 13 décembre 1996 de la loi sur l'utili-sation des forces hydrauliques104 a amené d'importantes mesures de libéralisation, tout

102 Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le code civil suisse (Livre cinquième: Droit des obligations), RS

220.103 Loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (LFAIE, Lex

Friedrich), RS 211.412.41.104 Loi fédérale du 22 décembre 1916 sur l'utilisation des forces hydrauliques (LFH), RS 721.80.

Page 68: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 66 - Chapitre 2

comme la nouvelle loi du 30 avril 1997 sur les télécommunications105 et la révision du30 avril 1997 de la Lex Friedrich (voir ch. 221.04).

C Relations contractuelles existantes

L'accord entre la Suisse et la Communauté concernant l'assurance directe autre quel'assurance sur la vie106 accorde aux compagnies d'assurance, selon le principe de lareconnaissance mutuelle du droit de surveillance, le droit de fonder librement desagences et des succursales.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE, la liberté d'établissement seraitaccordée sur une base réciproque aux sociétés suisses et à celles de l'AELE ou del'UE. En Suisse, il faudrait adapter en conséquence les textes législatifs fédéraux etcantonaux restreignant l'établissement (avec des délais transitoires).

Les Etats de l'UE et de l'EEE ne connaissent aucune limitation sérieuse à l'établisse-ment de sociétés ayant leur siège dans un Etat tiers. En cas de maintien de la situationactuelle, les sociétés suisses ne seront donc guère désavantagées sous l'angle du droitd'établissement. Mais la politique libérale des Etats de l'UE et de l'EEE avec la Suisseen matière de droit d'établissement n'est confortée par aucun accord de droit public etest donc appliquée à bien plaire aux entreprises suisses. Dans le cadre des accordssectoriels négociés entre la Suisse et l'UE, seul l'accord sur le transport aérien contientdes règles relatives au droit d'établissement.

221.02.5 Citoyenneté européenne et droits des citoyens européens

A Droits du citoyen européen

Afin de créer un lien unissant tous les ressortissants des Etats membres et de renforcerleur sentiment d'appartenance à l'Union européenne, le Traité de Maastricht a intro-duit la notion de citoyenneté européenne. Il ne s'agit pas d'une deuxième nationalité,mais plutôt d'un statut particulier que le droit communautaire confère aux ressortis-sants des Etats membres. La citoyenneté de l'Union est attribuée à toute personneayant la nationalité d'un Etat membre (art. 8, par. 1 Traité CE), ce qui implique que lesEtats conservent la maîtrise des conditions d'attribution de leur nationalité. Les art. 8 à8e du Traité CE, introduits par le Traité de Maastricht, font bénéficier les citoyenseuropéens d'un certain nombre de droits.

D'une manière générale, "les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumisaux devoirs" prévus par le Traité CE (art. 8, par. 2 Traité CE). Jusqu'à présent, la ci-toyenneté européenne n'impose pas - malgré la formulation de cet article - de devoirs 105 Loi du 30 avril 1997 sur les télécommunications (LTC), RS 784.10.106 Accord du 10 octobre 1989 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne con-

cernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, RS 0.961.1.

Page 69: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 67 - Chapitre 2

particuliers aux citoyens de l’Union. En se fondant sur cet article, la Cour de justicedes CE a considéré, dans un arrêt récent, que le droit à la non-discrimination en raisonde la nationalité (art. 6 Traité CE) constitue un droit attaché au statut de citoyen euro-péen107.

Les art. 8a à 8e du Traité CE reconnaissent aux citoyens européens un certain nombrede droits spécifiques:

- Les citoyens de l'Union peuvent circuler et séjourner librement sur le territoire desEtats membres (art. 8a). Se trouve ainsi confirmée l'extension du droit à la librecirculation des personnes, limité, dans le texte originel du Traité CEE, à l'exerciced'activités économiques. Le Conseil, après avis conforme du Parlement européen,peut arrêter à l'unanimité des dispositions visant à faciliter l'exercice des droits decirculation et de séjour.

- S'ils résident dans un Etat membre dont ils ne sont pas ressortissants, les citoyenseuropéens ont le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales, ainsi qu'auxélections au Parlement européen dans l'Etat membre où ils résident, dans les mê-mes conditions que les ressortissants de cet Etat (art. 8c). Le Conseil a adopté desdirectives fixant les modalités de l'exercice des droits de vote et d'éligibilité108.

- Tout citoyen de l'Union bénéficie, sur le territoire d'un pays tiers où l'Etat membredont il est ressortissant n'est pas représenté, de la protection de la part des autoritésdiplomatiques et consulaires de tout Etat membre, dans les mêmes conditions queles nationaux de cet Etat (art. 8b). Deux décisions précisant le contenu de ce droitet facilitant son exercice ont été prises par les représentants des gouvernements desEtats membres109.

- Tout citoyen de l'Union a un droit de pétition devant le Parlement européen et ledroit de s'adresser au médiateur européen ("Ombudsman"; art. 138d et 138e TraitéCE)110.

Lorsqu'il entrera en vigueur, le Traité d'Amsterdam apportera certains changementsaux dispositions sur la citoyenneté européenne. D'une part, il sera précisé, à l'art. 8,que "la citoyenneté de l'Union complète la citoyenneté nationale et ne la remplacepas"111. Cette phrase confirme une position qui avait été adoptée par les Etats mem- 107 CJCE, arrêt du 12 mai 1998, aff. C-85/96, Maria Martinez Sala, Rec. 1998, p. I-2691, par. 62.108 Directive 93/109/CE du 6 décembre 1993 fixant les modalités de l'exercice du droit de vote et d'éligibilité

aux élections au Parlement européen pour les citoyens de l'Union résidant dans un Etat membre dont ils nesont pas ressortissants, JO n° L 329 du 30 décembre 1993, p. 34. Directive 94/80/CE du 19 décembre 1994fixant les modalités de l'exercice du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales pour les citoyensde l'Union résidant dans un Etat membre dont ils n'ont pas la nationalité, JO n° L 368 du 31 décembre 1994,p. 38 (modifiée par la directive 96/30/CE du 13 mai 1996, JO n° L 122 du 22 mai 1996, p. 14).

109 Décision des représentants des gouvernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil, du 19 décem-bre 1995 (95/553/CE) concernant la protection des citoyens de l'Union européenne par les représentationsdiplomatiques et consulaires, JO n° L 314 du 28 décembre 1995, p. 73. Décision des représentants des gou-vernements des Etats membres, réunis au sein du Conseil, du 25 juin 1996 (96/409/PESC) concernant l'éta-blissement d'un titre de voyage provisoire, JO n° L 168 du 6 juillet 1996, p. 4.

110 Voir le rapport du médiateur européen pour l'année 1997 adressé au Parlement européen le 20 avril 1998;En 1996 et 1997, le médiateur a reçu 2222 plaintes, dont un tiers seulement relevant de sa compétence. Il aouvert 410 enquêtes et, à l'issue de celles-ci, a adressé, dans 53 cas, des critiques aux institutions.

111 Nouvel art. 8, ch. 1, 2ème phrase du Traité CE.

Page 70: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 68 - Chapitre 2

bres au cours du Conseil européen d'Edimbourg en 1992. D'autre part, le rôle du Par-lement dans l'adoption des dispositions visant à faciliter l'exercice des droits de cir-culation et de séjour (art. 8a, par. 2) sera renforcé. En effet, dans ce domaine, le Traitéd'Amsterdam remplacera la procédure de l'avis conforme du Parlement par la procé-dure de codécision. Enfin, le traité d'Amsterdam consacrera le droit, pour les citoyensde l'Union, d'écrire à toute institution ou organe de la Communauté dans une des lan-gues officielles de l'UE (nouvel art. 8d) et de recevoir une réponse rédigée dans lamême langue.

Ainsi, ces dispositions sur la citoyenneté européenne sont la consécration du statut desressortissants des Etats membres comme sujets de droit communautaire à part entière.

B Répercussions sur la Suisse

En cas d'adhésion à l'UE, les citoyens suisses bénéficieraient du droit de vote et d'éli-gibilité aux élections municipales et au Parlement européen dans l'Etat membre danslequel ils résident. Les ressortissants communautaires en Suisse auraient les mêmespossibilités. De plus, les ressortissants suisses en séjour dans un pays où la Suissen'aurait pas d'ambassade ou de consulat pourraient y bénéficier de la protection de lapart des autorités diplomatiques et consulaires de n'importe quel Etat membre. Parailleurs, ils auraient le droit de pétition devant le Parlement européen, ainsi que lapossibilité de se plaindre auprès du médiateur européen en cas de mauvaise adminis-tration dans l'action des institutions ou organes communautaires.

La citoyenneté européenne ne fait pas partie de l’Accord EEE et elle n'est pas couvertepar les accords sectoriels.

221.02.6 Statut juridique des citoyens

A Protection juridictionnelle des citoyens dans la Communautéeuropéenne

Toute personne bénéficie dans la Communauté européenne d'une protection juridic-tionnelle étendue. Cette situation particulière des personnes (personnes physiques etmorales) est due aux caractéristiques du droit communautaire, en particulier aux prin-cipes de la primauté et de l'effet direct (voir ch. 211, let. A.3). Ainsi, toute personnepeut, dans un litige de droit privé ou de droit public, se prévaloir devant les juridic-tions nationales des droits garantis par le droit communautaire. De plus, elle a égale-ment accès à la Cour de justice des CE.

Chaque citoyen peut directement saisir la Cour de justice des CE dans le cadre detrois procédures: le recours en annulation, le recours en carence et l'action en respon-sabilité extracontractuelle. A cet égard, la protection juridictionnelle n'est pas liée à lanationalité, ni au domicile de la partie plaignante; elle n'est pas non plus limitée auxressortissants de l'UE.

Page 71: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 69 - Chapitre 2

- Le recours en annulation permet à toute personne de contester devant la Cour dejustice des CE la validité d'actes adoptés par les institutions communautaires qui leconcernent directement et individuellement. Il peut invoquer que l'institution encause n'était pas compétente, que les prescriptions essentielles de forme n'ont pasété respectées - ce qui est le cas lors d'une violation de l'obligation de motiver - ouencore que l'institution en cause a abusé de son pouvoir. Dans cette procédure, laCour de justice des CE exerce essentiellement la fonction d'un tribunal administra-tif. Les recours en annulation sont fréquemment intentés par des particuliers dans lecadre de litiges en matière de concurrence, d'aides d'Etat, d'agriculture ou de doua-nes: ainsi, l'importateur peut recourir contre le refus d'octroi d'une licence d'impor-tation, ou une entreprise contre une amende infligée par la Commission dans uneaffaire de cartel. Les règlements prévoyant des augmentations des droits anti-dum-ping peuvent à certaines conditions être contestés par des particuliers.

On peut invoquer toute violation du droit communautaire de niveau supérieur, dontfont partie notamment les accords internationaux qui lient la Communauté. Sontaussi fréquemment invoquées des violations des quatre libertés fondamentales dumarché intérieur, du principe de non-discrimination, de la proportionnalité, de laconfiance légitime ou de la sécurité juridique. Il y a également lieu de mentionnerles droits fondamentaux que la Cour de justice des CE a déduit des traditions cons-titutionnelles communes des Etats membres et de la Convention européenne desdroits de l'homme (CEDH), par exemple la protection de la sphère privée, le res-pect de la vie familiale, la liberté d'expression ou la protection de la propriété. LeTraité d'Amsterdam conférera expressément à la Cour de justice des CE la compé-tence de contrôler les activités des institutions communautaires au regard de laCEDH.

- Le recours en carence permet à toute personne de faire valoir devant la Cour dejustice des CE qu'une institution communautaire s'est abstenue de statuer ou amanqué de lui adresser un acte autre qu'une recommandation ou un avis. Ce re-cours correspond en droit administratif suisse au recours pour déni de justice for-mel.

- Enfin, toute personne peut également agir en dommages et intérêts directementdevant la Cour de justice des CE lorsqu'elle prétend avoir subi des dommages cau-sés par une institution communautaire ou par ses agents dans l'exercice de leursfonctions. La responsabilité étant indépendante de toute faute, la partie plaignanten'a pas besoin de prouver l'intention ni la négligence de l'institution ou de l'agent encause. En revanche, elle peut motiver son action par l'illégalité d'une décision oud'un règlement, lorsqu'elle estime que le dommage en découle.

En pratique, la procédure du renvoi préjudiciel est très importante pour la protectionjuridictionnelle des personnes, même si ces dernières n'ont pas dans cette procédureun accès direct à la Cour de justice des CE. Les procédures de renvoi préjudiciel sontportées devant la Cour de justice des CE par les juridictions nationales. Presque tousles arrêts importants rendus par la Cour de justice des CE sont des arrêts préjudiciels;

Page 72: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 70 - Chapitre 2

il en est ainsi des décisions relatives à l'effet direct et à la primauté du droit commu-nautaire, au principe de la responsabilité étatique en cas de violations du droit com-munautaire, aux libertés fondamentales du marché intérieur, ainsi qu'aux droits fon-damentaux. La procédure du renvoi préjudiciel a pour objectif principal d'assurer uneinterprétation et une application uniforme du droit communautaire. Le fait que cetteprocédure soit indirectement devenue un instrument de garantie des droits individuelstient au fait que de nombreuses dispositions du droit communautaire confèrent desdroits et des obligations aux individus, invocables devant les juridictions nationales.Cette situation est également due à l'obligation, pour le juge national, d'interpréter sondroit conformément au droit communautaire, ainsi qu'à l'obligation des juridictionsnationales de dernière instance de saisir la Cour de justice des CE lorsque des ques-tions d'interprétation du droit communautaire pertinentes pour la solution du litige seposent et pour lesquelles il n'y a pas de jurisprudence bien établie.

La procédure du renvoi préjudiciel se limite à interpréter ou à examiner la validité dudroit communautaire. L'interprétation et l'examen de la validité du droit national nerelèvent pas de la compétence de la Cour de justice des CE. C'est la juridiction natio-nale qui est compétente pour l'application du droit communautaire dans les cas con-crets. La procédure du renvoi préjudiciel est utilisée principalement pour l'interpréta-tion du droit communautaire (traités constitutifs, droit secondaire, accords internatio-naux de la CE). Deux exemples permettent d'illustrer ce qui vient d'être dit: la Cour dejustice des CE a notamment dû se prononcer sur la question de savoir si les disposi-tions du Traité CE sur la libre circulation des marchandises doivent être comprisescomme permettant d'interdire la mise sur le marché allemand de la liqueur "Cassis deDijon", originaire de France, pour la raison que sa teneur en alcool se situe au-dessousde la valeur minimale exigée en Allemagne112. S'agissant de la libre prestation de ser-vices, la Cour de justice des CE a dû se prononcer, dans le cadre d'un litige entre uncitoyen luxembourgeois et sa caisse de maladie, sur la question de savoir si le rem-boursement des prestations de soins dentaires fournies à sa fille par un dentiste établien Allemagne peut être subordonné à l'autorisation de l'organisme de sécurité socialede l'assuré113.

Avec le Traité d'Amsterdam, de larges pans du troisième pilier seront introduits dansle Traité CE (voir ch. 241, let. B). Cela signifie pour les citoyens que des domainestels que la législation sur l'asile et l'immigration seront désormais soumis au contrôlejuridictionnel de la Cour de justice des CE. Par ailleurs, l'élargissement des compé-tences de la Cour de justice des CE dans le cadre du troisième pilier restant, c'est-à-dire les domaines de la coopération policière et de la coopération en matière pénale,

112 CJCE, arrêt du 20 février 1979, aff. 120/78, Cassis de Dijon, Rec. 1979, p. 649: la fixation d'une limite

inférieure du titre alcoométrique pour des liqueurs dans la législation d'un Etat membre relève de l'interdic-tion de l'art. 30 du Traité CE, lorsqu'il s'agit de l'importation de boissons alcoolisées légalement produites etcommercialisées dans un autre Etat membre.

113 CJCE, arrêt du 28 avril 1998, aff. C-158/96, Raymond Kohll c. Union des caisses de maladie, Rec. 1998, p.I-1931: une réglementation nationale qui subordonne à l'autorisation de l'organisme de sécurité sociale del'assuré le remboursement des prestations de soins dentaires fournies par un dentiste établi dans un autre Etatmembre selon les tarifs de l'Etat de l'assurance viole les art. 59 et 60 du Traité CE.

Page 73: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 71 - Chapitre 2

se réfère à l'importance croissante des garanties relatives à l'Etat de droit et de la pro-tection juridictionnelle effective dans tous les domaines d'activités de l'Union.

Il y a également lieu de mentionner dans ce cadre le droit de plainte que toute per-sonne peut exercer auprès de la Commission en tant que gardienne de l'exécution dudroit communautaire. La plainte permet de dénoncer à la Commission les comporte-ments des Etats membres contraires au droit communautaire. Par la suite, la Commis-sion est libre de recourir aux instruments juridiques qu'elle a à sa disposition (par ex.le recours en constatation de manquement dirigé contre un Etat membre).

B Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, les personnes physiques et morales en Suisse pourraientdirectement s'adresser à la Cour de justice des CE dans les cas mentionnés à la let. Aet invoquer le droit communautaire dans un litige devant les tribunaux et les autoritésadministratives suisses (ceux-ci pourraient saisir la Cour de justice des CE de ques-tions préjudicielles).

En cas de participation à l'EEE, les organes des parties contractantes appliqueraientle droit EEE. Les personnes physiques et morales pourraient invoquer devant les juri-dictions nationales les dispositions de l'Accord EEE déployant un effet direct. La pos-sibilité de renvois préjudiciels devant la Cour AELE serait également ouverte. Le re-cours auprès de la Cour AELE contre des décisions de l'Autorité de surveillance seraitégalement ouvert114.

Les accords sectoriels ne prévoient pas de protection juridictionnelle particulière pourles personnes. Ces accords, comme ceux déjà conclus entre la Suisse et la Commu-nauté, pourront être invoqués devant les autorités et les juridictions des parties con-tractantes115, dans la mesure où ils attribuent des droits ou imposent des obligationsaux personnes physiques et morales (question de l'effet direct, voir ch. 211, let. A.3 etB). Dans les procédures devant les juridictions des Etats membres de l'UE, des ques-tions préjudicielles relatives à l'interprétation de ces accords pourront être posées à laCour de justice des CE116.

En cas de maintien de la situation actuelle, les entreprises suisses seront soumises audroit communautaire de plusieurs manières, si elles sont actives sur le territoire desEtats membres. Dans cette hypothèse, elles bénéficieront des droits découlant de laprotection juridictionnelle et pourront exiger leur application auprès des institutionsde la Communauté. Le droit communautaire s'applique avant tout aux entreprises

114 Voir message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 10.31).115 L'accord sur les transports aériens présente la particularité que la surveillance des dispositions sur la concur-

rence qui y sont contenues incombe à la Commission des CE et à la Cour de justice des CE.116 Voir par ex. pour l'interprétation d'une dispositions de l'ancien accord de libre-échange entre la Communauté

et l'Autriche l'arrêt CJCE du 1er juillet 1993, aff. C-207/91, Eurim Pharm c. Bundesgesundheitsamt, Rec.1993, p. I-3723.

Page 74: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 72 - Chapitre 2

suisses dans le domaine des cartels et des fusions, et les procédures devant les institu-tions communautaires ne sont pas rares.

221.02.7 Suisses de l'étranger

A Politique fédérale à l'égard des Suisses de l'étranger

333 726 Suisses vivent dans les Etats membres de l’UE117. Ils représentent 59,3% detous nos compatriotes immatriculés à l'étranger. En fait, 71,42 % des citoyens suissesvivant dans les Etats de l'UE sont des doubles-nationaux, et dès lors en majorité descitoyens de leur pays hôte, voire d'un autre pays de l'UE. On compte néanmoins unpeu moins de 100 000 Suisses dans l'UE qui ne possèdent que la nationalité suisse.

La Confédération a développé depuis des décennies une politique à l'égard des Suis-ses de l'étranger visant à renforcer les liens qui unissent les Suisses de l'étranger entreeux et ceux qui les unissent à la patrie. Cette politique est, depuis 1966, inscrite expli-citement à l'art. 45bis, cst., qui autorise la Confédération à édicter des dispositions,notamment sur l'exercice des droits politiques et l'accomplissement des obligationsmilitaires, mais aussi en matière d'assistance. Dans ce contexte, la Confédération sou-tient des institutions visant le but qu'elle poursuit, comme l'Organisation des Suissesde l'étranger, des écoles suisses à l'étranger et la Fondation pour les jeunes Suisses del'étranger.

De nombreux actes législatifs fédéraux contiennent des dispositions qui sont en rela-tion avec la politique que la Confédération mène à l'égard des Suisses vivant à l'étran-ger118.

117 Etat le 30 juin 1998.118 Notamment le règlement du Service diplomatique et consulaire suisse du 24 novembre 1967 (RS 191.1), la

loi fédérale du 29 septembre 1952 sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse (RS 141.0), la loi fédé-rale du 19 décembre 1975 sur les droits politiques des Suisses de l'étranger (RS 161.5) et l'ordonnance y re-lative du 16 octobre 1991 (RS 161.51), la loi fédérale du 3 février 1995 sur l'armée et l'administration mili-taire et les dispositions y relatives (RS 510.10), l'ordonnance du 11 septembre 1996 sur le service civil (RS824.01), la loi fédérale du 12 juin 1959 sur la taxe d'exemption de l'obligation de servir (RS 661), la loi fé-dérale du 9 octobre 1987 concernant l'encouragement de l'instruction de jeunes Suisses et Suissesses del'étranger (RS 418.0) et l'ordonnance y relative du 29 juin 1988 (RS 418.01), la loi fédérale du 16 décembre1983 sur l'acquisition d'immeubles par des personnes à l'étranger (RS 212.412.41) et l'ordonnance y relativedu 1er octobre 1984 (RS 212.412.411), la loi fédérale du 21 mars 1973 sur l'assistance des Suisses del'étranger (RS 852.1) et l'ordonnance y relative du 26 novembre 1973 (RS 852.11), l'arrêté fédéral du 22 juin1962 concernant l'octroi d'une garantie à la société coopérative "Fonds de solidarité des Suisses de l'étran-ger" (RS 852.8), la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants (RS 831.10), laloi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (RS 831.20) et la loi fédérale du 18 mars 1994 surl'assurance-maladie avec les ordonnances y relatives (RS 832.10).

Page 75: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 73 - Chapitre 2

B Répercussions sur la Suisse

B.1 Répercussions sur les Suisses de l'étranger

Les répercussions sur les Suisses de l'étranger se manifesteraient surtout par les liber-tés intracommunautaires, notamment la libre circulation des personnes. En casd'adhésion à l'UE, de participation à l'EEE ou d'entrée en vigueur de l'accord sur lalibre circulation des personnes, les Suisses de l'étranger vivant déjà dans l'UE profite-raient directement de l'égalité de traitement avec les citoyens de l'UE. Les améliora-tions concrètes de leur situation dans les Etats membres de l'UE sont décrites souschiffre 221.02.1, let. D.

B.2 Répercussions sur la politique à l'égard des Suisses de l'étranger

L'entrée en vigueur des accords sectoriels, une participation à l'EEE ou l'adhésion àl'UE n'influenceraient en substance la politique à l'égard des Suisses de l'étranger quepar les dispositions du droit communautaire en matière de sécurité sociale (voir ch.221.02.2) et de libre circulation des capitaux, ou de libre achat de biens immobiliers(voir ch. 221.04):

- Il s'agit en particulier de l'AVS facultative des Suisses de l'étranger. Cette assu-rance, contrairement à l'assistance sociale, tombe dans le champ d'application ma-tériel du règlement (CEE) n° 1408/71. Le principe communautaire de l'interdictionde toute discrimination en raison de la nationalité est inscrit à l'art. 3, al. 1, de cerèglement. Cela a pour conséquence que l'on devrait prévoir une certaine ouverturede l'assurance facultative pour des ressortissants de l'UE, non seulement en casd'adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE, mais aussi en vue de l'entrée en vi-gueur des accords sectoriels. L'UE a toutefois admis par le passé, pour les régimesfacultatifs d'assurance de trois pays membres, certaines restrictions au principe denon-discrimination. Ainsi, la France, l'Allemagne et la Grèce ont pu fixer des con-ditions d'adhésion à leur assurance facultative plus strictes pour les étrangers quepour les nationaux. Dans le cadre de l'accord sur la libre circulation des personnes,on a prévu la possibilité d'ouvrir l'assurance facultative uniquement aux ressortis-sants communautaires qui ont été assurés à l'AVS obligatoire, soit à ceux qui ontétabli par ce fait un lien particulier avec l'assurance suisse. Cela ne revêtirait del'importance que pour un certain nombre d'entre eux, à savoir ceux qui, après avoirété assurés en Suisse quelques années, émigreraient dans certains pays tiers situéshors de l'UE. Les possibilités d'assurance pour les Suisses de l'étranger seraient li-mitées de manière analogue.

- Les Suisses de l'étranger ne sont pas soumis à la Lex Friedrich. Sur ce point, leursituation juridique actuelle, ancrée dans la politique à l'égard des Suisses de l'étran-ger, ne serait pas touchée. En cas d'adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE,les ressortissants des Etats membres devraient, eux aussi, ne pas être soumis à laLex Friedrich. Pourtant, si on devait négocier une mesure d'exemption prévoyantcertaines limitations d'accès aux résidences secondaires pour les étrangers, y com-pris pour les ressortissants de l'UE, il faudrait s'attendre à ce que, en vertu du prin-

Page 76: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 74 - Chapitre 2

cipe de non-discrimination, les Suisses de l'étranger soient également soumis àcette mesure.

221.03 Libre circulation des services

A Acquis communautaire

La libre circulation des services (art. 59 à 66 du Traité CE), l'une des libertés fonda-mentales du marché intérieur, comprend la prestation transfrontière de services et laprestation de services impliquant un séjour temporaire du prestataire ou du bénéfi-ciaire d'un service dans un autre Etat membre. Elle donne aux ressortissants et auxsociétés établis dans un Etat de l'UE le droit de fournir une prestation de service dansun autre Etat de l'Union à des fins lucratives, aux mêmes conditions que les ressortis-sants du pays d'accueil, sans avoir à déplacer leur siège ni à fonder une succursaledans un autre Etat membre de l'UE. Inversement, la libre circulation des services auto-rise le bénéficiaire à se rendre dans un autre Etat membre pour y solliciter une presta-tion de service, sans la moindre restriction (par ex. séjour dans un hôpital ou fréquen-tation d'une école privée).

La notion de services englobe les activités les plus diverses, telles que transports, ser-vices financiers, informatiques et de télécommunication, professions libérales, tou-risme, pour ne citer que celles-là. La libéralisation concrète dans ces domaines s'estaccomplie progressivement, au fur et à mesure du développement du droit secondairede la Communauté (reposant en partie sur d'autres libertés fondamentales). Depuis1992, l'acquis s'est encore développé dans de nombreux domaines, dans le but de sup-primer les restrictions qui subsistent dans le commerce transfrontière des services.Nous renvoyons ici aux chapitres spécifiques consacrés aux transports (ch. 222.09),aux télécommunications et à la société de l'information (ch. 222.12), à la culture etaux médias audiovisuels (ch. 222.19), aux professions libérales (ch. 221.02.1). Nousnous attacherons plus précisément ci-dessous aux services financiers.

La première directive de coordination du droit bancaire a posé les bases d'un marchéintérieur commun dans le secteur bancaire, qui s'est concrétisé le 1er janvier 1993,avec l'entrée en vigueur de la deuxième directive de coordination du droit bancaire119.Celle-ci instaure le principe de la licence unique, grâce à laquelle les banques et au-tres instituts de crédit, munis d'une première et unique autorisation, peuvent offrirleurs services dans tout le territoire de l'UE. Le marché bancaire unifié repose surtrois principes: (1) harmonisation générale dans l'ensemble des Etats membres dudroit et de la pratique concernant l'accès aux activités bancaires (fonds propres néces-saires pour couvrir les risques de crédit et du marché, coefficients de solvabilité, etc.);(2) contrôle du pays d'origine, qui veut que l'autorité de surveillance du pays dans le-quel se trouve le siège principal soit également responsable de surveiller les succur-sales et les agences ouvertes dans les autres Etats membres; (3) reconnaissance mu-

119 Deuxième directive 89/646/CEE du 15 décembre 1989 sur l'admission des instituts de crédit et l'exercice de

leur activité, JO n° L 386 du 30 décembre 1989, p. 1.

Page 77: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 75 - Chapitre 2

tuelle des règles de surveillance en vigueur et des pratiques suivies par les autorités desurveillance nationales.

Quantité de mesures sont venues compléter la deuxième directive bancaire, afin degarantir aux banques et aux instituts de crédit de la Communauté les mêmes condi-tions de concurrence et d'empêcher le déplacement du siège d'une société dans unpays dont l'autorité de surveillance serait réputée moins sévère. Elles prévoient uncertain nombre de prescriptions concernant l'établissement et la présentation descomptes annuels finals et des justificatifs, l'harmonisation de la notion de "fonds pro-pres" et des coefficients de solvabilité, la prévention de l'utilisation du système finan-cier à des fins de blanchiment d'argent sale, la surveillance des instituts de crédit surune base consolidée, la limitation des risques de crédit, la surveillance des risques dumarché et des systèmes de garantie des dépôts.

D'autres mesures sont en préparation. Il s'agit notamment d'adapter la directive sur lasurveillance des instituts de crédit sur une base consolidée, dans la perspective d'uneautorisation réciproque des contrôles effectués sur place par l'autorité du pays d'ori-gine. D'autres mesures concernent les systèmes de paiement.

La réalisation du marché intérieur en matière d'assurance privée s'est faite séparémentpour l'assurance-vie et l'assurance-dommages, en raison des différences que présen-tent ces branches. Mais leur libéralisation s'est faite de la même manière, c'est-à-direen trois étapes. Les premières directives de coordination ont établi la liberté d'établis-sement pour l'assurance-dommages et l'assurance-vie. Les deuxièmes directives ontintroduit une libéralisation limitée de la prestation de service, d'abord dans le domainede l'assurance-dommages, puis dans celui de l'assurance-vie. Pour ce faire, les deuxdirectives ont institué le principe de la surveillance exercée par le pays où se trouve lesiège de la compagnie, assorti de certaines compétences attribuées à l'autorité de sur-veillance du pays où s'exerce l'activité. La deuxième directive sur les dommages en-globe tous les types d'assurances-dommages, y compris les assurances obligatoires, àl'exception de certains types d'assurance, dont l'assurance responsabilité civile obli-gatoire pour les véhicules à moteur, qui fait l'objet d'une directive particulière.

En 1992, enfin, le Conseil a adopté les troisièmes directives de coordination sur l’as-surance-dommages et l’assurance-vie120, destinées à parfaire le marché intérieur selonles principes de l'autorisation unifiée et de la surveillance exercée par le pays où acompagnie d'assurance a son siège. Elles aboutissent à l'harmonisation des règles na-tionales concernant l'admission à l'exercice de l'activité d'assureur, sa pratique et soncontrôle selon le principe de la surveillance du pays de siège.

En marge de ces directives, la Communauté a légiféré en matière d'assurance respon-sabilité civile pour les véhicules à moteur, d'assurance crédit et d'assurance caution-nement, d'assurance protection juridique, ainsi que sur les comptes annuels et les

120 Troisième directive sur l'assurance dommages 92/49/CEE du 18 juin 1992, JO n° L 228 du 11 août 1992, p.

1 ; troisième directive sur l'assurance vie 92/96/CEE du 10 novembre 1992, JO n° L 360 du 9 décembre1992, p. 1.

Page 78: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 76 - Chapitre 2

comptes consolidés des institutions d'assurance. Elle a en outre institué un comité desassurances, qui doit soutenir la Commission dans sa collaboration avec les autoritésnationales de surveillance des assurances.

Les principaux actes juridiques en préparation portent sur la surveillance des compa-gnies d'assurance appartenant à un groupe d'assurance et sur l'harmonisation des rè-gles régissant l'assurance responsabilité civile pour les véhicules à moteur.

Le marché intérieur en matière de bourses et de papiers-valeurs a été réalisé grâce àl'entrée en vigueur de deux directives le 1er janvier 1996 121. Comme les autres servi-ces financiers, le marché unifié des papiers-valeurs est fondé sur le principe de l'har-monisation, de la reconnaissance mutuelle et du contrôle effectué par le pays d'ori-gine. Au chapitre des fonds de placement, il a été procédé à une coordination mini-male des règles légales et administratives, et le principe du contrôle par le pays d'ori-gine a été introduit. Pour le reste, ce domaine s'en tient au principe de la reconnais-sance mutuelle des règles juridiques de chaque Etat membre. La Commission va pro-poser, dans le cadre de son plan d'action sur les mesures visant à renforcer le marchéunique en matière de fonds de placement, une directive sur l'admission à l'échelle del'UE des gestionnaires de portefeuilles. Ce ne seront ainsi plus les produits financiers,mais les prestataires de ces services, qui feront l'objet de l'admission. Enfin, une ré-glementation unifiée sur le blanchiment d’argent a été mise en vigueur en 1991.

B Politique suisse

B.1 Au plan fédéral

En matière de circulation des services, la Suisse pratique une politique foncièrementlibérale. Différents domaines (comme les télécommunications, le transport aérien et letransport ferroviaire) ont fait l'objet de profondes réformes ces dernières années, etceux qui étaient déjà libéralisés (les services financiers par ex.) ont subi des adapta-tions ponctuelles. Dans le cadre de ces révisions, on a veillé à ce que la nouvelle lé-gislation soit compatible avec le droit communautaire.

Actuellement, le droit suisse en matière de surveillance des banques122 corresponddans une très large mesure au droit communautaire en vigueur. Au titre deSwisslex123, la compétence a été octroyée au Conseil fédéral, dans le cadre de la loifédérale sur les banques, de conclure - sous réserve de réciprocité - des accords de

121 La directive sur les services d'investissement (93/22/CEE du 10 mai 1993, JO n° L 141 du 11 juin 1993, p.

27) accorde aux établissements non bancaires qui font des investissements le droit d'exercer leur activitédans tous les Etats membres, moyennant une seule autorisation (passeport européen). La directive sur lesfonds propres suffisants (93/6/CEE du 15 mars 1993, JO n° L 141 du 11 juin 1993, p. 1) fixe le capital pro-pre exigible de celui qui veut fonder une société d'investissement.

122 Loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les banques et les caisses d'épargne, RS 952.0; ordonnance du 17 mai1972 sur les banques et les caisses d'épargne, RS 952.02; ordonnance de la Commission fédérale des ban-ques du 21 octobre 1996 concernant les banques étrangères en Suisse (O sur les banques étrangères), RS952.111.

123 Voir le message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'Accord EEE, FF 1993 I 757.

Page 79: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 77 - Chapitre 2

reconnaissance mutuelle en matière de surveillance bancaire, ce qui rend désormaispossible l'introduction du système de licence unique. Depuis lors, d'autres dispositionsconcernant la surveillance des banques ont été revues, notamment celles qui concer-nent les fonds propres et la répartition des risques. Dans le cadre de GATT-Lex124,une nouvelle condition d'autorisation concernant les banques étrangères a été intro-duite dans la loi fédérale sur les banques. L'octroi d'une autorisation peut ainsi dépen-dre de la surveillance consolidée exercée par l'autorité de surveillance étrangère. En-fin, la révision en cours de la loi sur les banques doit permettre une surveillance trans-frontière des banques et des négociants en valeurs mobilières (inspections sur place),conformément aux recommandations du comité de Bâle sur la surveillance des ban-ques. La nouvelle prescription est pour l'essentiel compatible avec le droit en vigueurdans la CE. Au demeurant, les règles extrêmement libérales en comparaison euro-péenne qui s'appliquent aux banques étrangères exerçant une activité en Suisse ont étéencore assouplies avec le remaniement complet de l'ordonnance sur les banquesétrangères.

Le droit suisse en matière de surveillance des assurances se développe parallèlementà celui de l'UE. Il vise au premier chef à protéger les assurés contre l'insolvabilité desinstitutions d'assurance. Avec la loi sur l'assurance-dommages125 et la loi sur l'assu-rance-vie126, les moyens d'assurer cette protection ont été adaptés aux première etdeuxième directives de la CE. L'impulsion est venue de l'accord sur l'assurance di-recte conclu avec la CEE en 1989127, qui reprenait pour l'essentiel la première direc-tive sur les dommages, ainsi que du programme consécutif au rejet de l'Accord EEE(Swisslex 128), au titre duquel les première et deuxième directives sur les assurancesont été largement transposées dans le droit suisse. Les intérêts des institutions d'assu-rance suisses, fortement implantées dans l'UE, ont ainsi été pris en compte. Les direc-tives de la CE sur la manière de présenter les comptes ont elles aussi été incorporéesdans la nouvelle forme de présentation du rapport des institutions d'assurance à l'auto-rité de surveillance. Le 16 septembre 1998 a été lancée la procédure de consultationsur le projet de nouvelle loi sur la surveillance des assurances et sur la révision de laloi sur le contrat d'assurance; il s'agit dans les deux cas de renforcer la protection desassurés, affaiblie par la libéralisation, et ce faisant de créer les conditions d'une plusgrande harmonisation avec les directives de la CE129.

124 Voir le message du 19 septembre 1994 relatif aux modifications à apporter au droit fédéral dans la perspec-

tive de la ratification des accords du GATT/OMC (cycle d'Uruguay) (Message 2 GATT), FF 1994 IV 995.125 Loi fédérale du 20 mars 1992 sur l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie (loi sur l'assurance

dommages, LAD), RS 961.71.126 Loi fédérale du 18 juin 1993 sur l'assurance directe sur la vie (loi sur l'assurance-vie, LAV), RS 961.61.127 Accord du 10 octobre 1989 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne con-

cernant l'assurance directe autre que l'assurance sur la vie, RS 0.961.1.128 Voir message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'Accord EEE, FF 1993 I 757.129 C'est chose faite avec l'accord sur les assurances conclu avec la Principauté de Liechtenstein (voir rapport du

15 janvier 1997 sur la politique économique extérieure 96/1+2, FF 1997 II p.1, p.231.). Le champ d'appli-cation de l'accord comprend la libre circulation des services et la liberté d'établissement dans le domaine desassurances vie et dommages, mais seulement sur le territoire de la Suisse et sur celui de la Principauté.

Page 80: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 78 - Chapitre 2

En matière de bourse et de papiers-valeurs, la nouvelle loi fédérale et ses ordonnan-ces d'exécution130 correspondent en bonne partie aux directives de la CE. La loi exigenotamment la publication des participations importantes à des sociétés cotées enbourse et soumet les bourses et les négociants en valeurs mobilières à l'autorisation dela Commission fédérale des banques. La révision du règlement de cotation a permisde mettre en application différentes dispositions du droit communautaire dans le cadredes compétences d'autorégulation de la Bourse suisse. Il existe toutefois une diffé-rence importante dans la définition du négociant en valeurs mobilières: en Suisse eneffet, contrairement au droit communautaire, divers prestataires de services ne sontpas considérés comme des négociants en valeurs mobilières, par exemple les gérantsde fortune qui agissent pour le compte de tiers et au nom de leur clients, les con-seillers en placement, les courtiers et autres intermédiaires en matière de services fi-nanciers, les administrateurs fiduciaires et les négociants qui effectuent des transac-tions en devises au comptant ou à terme non standardisées. Ces prestataires de servi-ces échappent à une surveillance adéquate assurant la protection de l'investisseur et dusystème. Des dispositions conformes au droit communautaire en matière de délitsd'initiés figurent à l'art. 161 du code pénal131. La collaboration entre les autorités desurveillance est assurée par le biais des compétences conférées à la Commission fédé-rale des banques en matière d'entraide administrative. Enfin, la révision en cours de laloi sur les banques en matière d'inspection sur place concernera également les bour-ses.

La révision totale de la loi sur les fonds de placement132 a entraîné un large rappro-chement par rapport à la directive de la CE, à l'exception des dispositions concernantla forme juridique du fonds de placement. En Suisse, seule la forme contractuelle duplacement de fonds collectif est soumise à la loi. Dans l'UE, les placements de fondscollectifs organisés en sociétés, notamment les investissements dans des sociétés d'in-vestissement à capital variable (SICAV), sont couverts par le droit communautaire.Cependant, les SICAV étrangères ne sont aucunement pénalisées en Suisse et sontautorisées à commercialiser leurs parts.

La nouvelle loi fédérale sur le blanchiment d’argent dans le secteur financier133 cor-respond largement à la directive correspondante de la CE, comme d'ailleurs aux re-commandations du Groupe d'action financière sur le blanchiment des capitaux(GAFI), un groupe de travail créé dans le cadre de l'OCDE afin de combattre le blan-chiment d'argent. Désormais, le devoir de diligence en vigueur depuis longtemps dansle secteur bancaire s'applique aussi aux intermédiaires financiers, qui échappaient jus-que là à toute surveillance spécifique.

130 Loi fédérale du 24 mars 1995 sur les bourses et le commerce des valeurs mobilières (loi sur les bourses,

LBVM), RS 954.1; ordonnance du 2 décembre 1996 (ordonnance sur les bourses, OBVM), RS 954.11.131 Code pénal suisse du 21 décembre 1937, RS 311.0.132 Loi fédérale du 18 mars 1994 sur les fonds de placement (LFP), RS 951.31.133 Loi fédérale du 10 octobre 1997 concernant la lutte contre le blanchiment d'argent dans le secteur financier

(loi sur le blanchiment d'argent, LBA), RS 955.0.

Page 81: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 79 - Chapitre 2

B.2 Au plan cantonal

Au plan cantonal, la situation reste inchangée: l’assurance-incendie des bâtimentsdans seize cantons et trois demi-cantons, et l'assurance-incendie du mobilier et duchédail dans deux d'entre eux, restent, en vertu du droit cantonal, des institutions mo-nopolistiques de droit public, incompatibles avec le droit communautaire en vigueur.

C Relations contractuelles existantes

L'accord avec la CE sur les assurances, dont il a déjà été question, est en vigueur de-puis 1993. Sur la base de conditions identiques d'admission et d'exercice de l'activitéd'assureur, les parties contractantes autorisent le libre établissement dans le domainede l'assurance directe, à l'exception de l'assurance-vie. L'accord prévoit en outre queles succursales d'assureurs ayant leur siège dans les pays contractants ne font l'objetd'aucune discrimination réciproque. La libre circulation des services n'est pas com-prise dans cet accord.

D Répercussions sur la Suisse

D.1 Adhésion à l'UE

L'adhésion à l'UE impliquerait, dans différents secteurs de services, des adaptationsde la législation suisse à l'acquis communautaire. Les prestataires de services suisses(personnes physiques et sociétés) auraient le droit de fournir leurs services dans toutle territoire de l'UE, sans aucune discrimination.

Pour ce qui est des services financiers, les prestataires suisses bénéficieraient du libreaccès au marché de l'UE. L'autorisation accordée par les autorités suisses à une ban-que ou à une compagnie d'assurance suisse permettrait à celle-ci d'accéder aux mar-chés de tous les Etats membres (licence unique), soit par le biais de l'implantation desuccursales soit par la prestation transfrontière de services. Conformément au principedu contrôle par le pays d'origine, les succursales et les agences des banques suisses,des négociants en valeurs mobilières et des compagnies d'assurances établis dans leterritoire de l'UE seraient soumises à la surveillance de la Commission fédérale desbanques ou de l'Office fédéral des assurances privées.

La législation sur la surveillance des banques ne nécessiterait pas d'adaptation subs-tantielle. Il faudrait toutefois combler la lacune existant en matière de surveillance desprestataires de services financiers en soumettant ceux-ci à une surveillance légale encréant une loi sur les services financiers. Le droit communautaire en vigueur ne traitepas du secret bancaire en tant que tel. La reprise de l'acquis communautaire en ma-tière de libre circulation des services n'aurait donc aucune conséquence pour le secretbancaire suisse (voir ch. 222.07.6).

Comme indiqué une révision de la législation sur la surveillance des assurances esten préparation qui va dans le sens d'une nouvelle adaptation au droit communautaire.

Page 82: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 80 - Chapitre 2

Au chapitre des fonds de placement, il faudrait étudier l'opportunité de soumettre, enSuisse, les fonds de placement collectifs sous forme de société (SICAV) ou de fonda-tion (fondation de placement) à la loi sur les fonds de placement.

Quant aux systèmes de garantie des dépôts, la Suisse ne connaît pas de dispositionscomparables à celle de la directive de la CE134. La convention de l'Association suissedes banquiers du 1er juillet 1993 sur la protection des dépôts institue un système deprotection de l'investisseur, mais relevant du droit privé. Il conviendrait donc d'éva-luer dans quelle mesure la transposition de l'acquis communautaire pourrait se fairesur la base du droit privé et, le cas échéant, d'en combler les lacunes (obligation d'af-filiation des instituts bancaires, financement des montants garantis) au plan légal.

Au chapitre de la Bourse, peu de changements s'imposeraient du point de vue juridi-que. La loi sur les bourses ne concerne, il est vrai, que le marché secondaire. Mais desdispositions sur le marché primaire, compatibles avec le droit communautaire, figu-rent dans le projet de loi fédérale sur l'établissement et le contrôle des comptes an-nuels (LECCA), mis en consultation le 21 octobre 1998. L'introduction du commerceélectronique a durci la concurrence entre les bourses européennes, et la création del'euro ne fera que renforcer le phénomène. La Bourse suisse est techniquement bienéquipée pour faire face à cette concurrence puisqu'elle possède le premier système aumonde de gestion entièrement électronique des ordres. Par contre, le droit de timbrejoue en sa défaveur (voir ch. 222.07.7).

En vertu des troisièmes directives sur les assurances, les monopoles cantonaux enmatière d'assurance des bâtiments devraient être supprimés en cas d'adhésion à l'UE;certains délais pourraient être négociés.

D.2 Participation à l'EEE

Matériellement parlant, les conséquences pour la Suisse d'une participation à l'EEEseraient comparables à celles de l'adhésion à l'UE.

D.3 Accords sectoriels

Certains éléments de la libre circulation des services ont été réglés dans les accordsbilatéraux sectoriels relatifs à la circulation des personnes (voir ch. 221.02) et auxtransports terrestres et aérien (voir ch. 222.09). Dans le cadre de l'accord sur la circu-lation des personnes, les parties ont indiqué leur intention d'entamer aussi rapidementque possible des négociations sur la libéralisation générale de la libre prestation deservices sur la base de l'acquis communautaire.

134 Directive 94/19/CE du 16 mai 1994 sur les systèmes de garantie des dépôts, JO n° L 135 du 31 mai 1994, p. 5.

Page 83: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 81 - Chapitre 2

D.4 Maintien de la situation actuelle

Les banques suisses bénéficient aujourd'hui déjà des avantages du marché intérieur,grâce aux filiales qu'elles ont constituées dans les pays de l'UE et de l'AELE. A notercependant que la constitution d'une filiale entraîne des frais de financement relative-ment élevés. Les banques suisses sont désavantagées quand elles créent de nouveauxétablissements ou agences (il leur faut à chaque fois obtenir une autorisation de l'auto-rité de surveillance compétente, puisque la Suisse ne peut prétendre aux avantages dela licence unique) et quand elles fournissent des services bancaires sur une base trans-frontière (Internet-Banking, par exemple).

Sa non-participation au marché intérieur fait perdre à la Suisse une partie de son at-tractivité en tant que domicile des fonds de placement. En effet, les fonds suisses doi-vent bénéficier, dans chaque Etat membre de l'UE, d'une autorisation de placement, cequi les désavantage par rapport aux fonds issus d'un pays de l'EEE, alors qu'inverse-ment, l'admission de fonds européens en Suisse ne connaît pratiquement aucune res-triction.

Il en va des compagnies d’assurance suisses comme des banques: par l'intermédiairede leurs filiales établies dans les pays de l'UE et de l'AELE, elles profitent des avanta-ges du marché intérieur, malgré les coûts relativement élevés du financement d'unefiliale à l'étranger. En outre, l'accord sur les assurances confère aux compagnies suis-ses d'assurance-dommages le droit de constituer librement des agences et des filialesdans l'UE. En revanche, les désavantages apparaissent dans les domaines non cou-verts par l'accord, à savoir l'assurance-vie et la prestation transfrontière de servicesd'assurance. Les compagnies d'assurance doivent donc créer des établissements dansles pays où elles veulent travailler, ou faire transiter leurs services par une de leursfiliales d'un pays de l'UE ou de l'AELE.

Il faudrait alors poursuivre les efforts pour assurer l'eurocompatibilité du droit suisse(voir ch. 213, let. B.4).

221.04 Libre circulation des capitaux

A Acquis communautaire

Le but de l’acquis communautaire est d’instaurer la libre circulation des capitaux etdes paiements entre les Etats membres. Les mouvements de capitaux comprennent lesinvestissements directs - y compris les placements immobiliers -, les succursales, lesprestations de services financiers ou l’admission de papiers-valeurs sur les marchésdes capitaux. Le Traité de Maastricht a introduit une nouvelle réglementation pour lacirculation des capitaux, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 1994. Le principe dela libre circulation intégrale des capitaux et des paiements est désormais fixé dans letraité. La monnaie unique représente un complément essentiel au marché intérieur(voir ch. 222.01).

Page 84: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 82 - Chapitre 2

Actuellement, les capitaux peuvent circuler librement entre tous les Etats membres.L’art. 73, let. b, du Traité CE interdit aux Etats membres d’imposer des limitations àla circulation des capitaux, y compris à l’égard d’Etats tiers.

Les dispositions concernant la libre circulation des capitaux ne touchent pas le droitdes Etats membres de traiter différemment des contribuables ayant un domicile diffé-rent ou dont les capitaux sont investis dans des lieux différents, et de prendre des me-sures pour éviter les violations des dispositions légales et administratives nationales,en particulier en matière de droit fiscal et de surveillance des institutions financières.Ces mesures ne doivent toutefois pas être discriminatoires (art. 73, let. d Traité CE).

B Politique suisse

La Suisse poursuit une politique libérale en matière de circulation des capitaux. Desrestrictions existent cependant toujours en raison de la loi fédérale sur l’acquisitiond’immeubles par des personnes à l’étranger135.

Depuis la votation sur l'Accord EEE, le marché immobilier suisse s’est ouvert auxinvestisseurs étrangers sur des points essentiels. Un assouplissement général de la LexFriedrich a été refusé de justesse lors de la votation populaire du 25 juin 1995. Mais lapression politique intérieure en faveur d’une révision de la loi s’est maintenue. C'estpourquoi le Conseil fédéral a proposé au Parlement, dans le cadre de son message du26 mars 1997 sur le programme d'investissement, une nouvelle modification de la LexFriedrich tenant compte des doutes exprimées lors de la votation populaire susmen-tionnée136. Le Conseil fédéral a alors pu fixer l’entrée en vigueur de cette révision dela loi pour le 1er octobre 1997 déjà.

Cette révision a permis d'assouplir les prescriptions concernant les acquisitions prin-cipalement sur deux points. D’une part, les ressortissants étrangers titulaires d’unpermis de séjour valable ont été libérés de l’obligation d’obtenir une autorisationpour l'acquisition d’un logement servant de résidence principale (logement à usagepersonnel). D’autre part, l'acquisition des biens-fonds destinés à l’exercice d’une acti-vité économique n'est plus soumise à autorisation. Les personnes à l’étranger peuventdonc utiliser et acquérir librement des immeubles exploités à des fins industrielles oucommerciales, ou destinés au secteur des services. Elles peuvent également les vendreou accorder des crédits correspondants. Peu importe que ces droits soient exercés di-rectement ou indirectement au travers d’une participation dans une société. Ainsi, laSuisse a franchi une étape d'intégration importante en matière d'opérations immobiliè-res. Les actes d’acquisition restant soumis à autorisation ont été fortement réduits.Seul le noyau dit "dur" de la Lex Friedrich reste soumis à autorisation. Il s’agit deslogements de vacances, pour lesquels un contingentement subsiste, des placements decapitaux sur le marché des appartements en général et de l’interdiction du commerce

135 Loi fédérale du 16 décembre 1983 sur l’acquisition d’immeubles par des personnes à l’étranger (LFAIE,

Lex Friedrich), RS 211.412.41.136 RO 1997 2086.

Page 85: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 83 - Chapitre 2

d’appartements. A ce sujet, nous renvoyons aux explications contenues dans le mes-sage relatif à l’approbation de l’Accord sur l’EEE137.

Des restrictions sectorielles isolées subsistent en outre à l'encontre des investisse-ments étrangers directs dans le secteur de l’énergie, mais elles sont en passe d'êtrelevées (voir ch. 222.10). Les restrictions à l'égard du transfert des actions nominativessous le régime du droit suisse des sociétés, en particulier en ce qui concerne les so-ciétés non cotées en bourse, posent également des problèmes en relation avec le prin-cipe de la libre circulation des capitaux (voir ch. 222.06.1).

C Relations contractuelles existantes

Il n’existe pas de relations contractuelles avec la Communauté ou certains Etatsmembres au plan bilatéral. Cependant, tous les Etats de l’OCDE se sont engagés, dansle cadre du code de libération des mouvements de capitaux de l'OCDE, contraignantdu point de vue du droit international public, à éliminer progressivement et sans dis-criminations les obstacles à la circulation des capitaux qui subsistent. Cette élimina-tion fait l'objet d'un suivi et d'une surveillance systématiques au moyen d'une obliga-tion de notifier, d’examens dans les différents pays et de consultations régulières.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion de la Suisse à l’UE, les ressortissants des Etats membres devraientêtre entièrement libérés du régime des autorisations pour l’acquisition de biens immo-biliers. Dans ce contexte, ce serait en premier lieu le contingentement des apparte-ments de vacances qui devrait être supprimé. En cas d’adhésion à l’UE, la Lex Frie-drich devrait être abrogée pour les citoyens de l’UE, à moins qu’il ne soit possibled’obtenir une dérogation. Dans un protocole annexé au Traité de Maastricht, les Etatsmembres de l’UE ont autorisé le Danemark à maintenir certaines restrictions quant àl’acquisition de résidences secondaires par des ressortissants étrangers, y compris descitoyens de l’UE.

En cas de participation à l'EEE, les effets seraient pratiquement les mêmes qu'en casd'adhésion à l’UE.

Dans le cadre de l'accord bilatéral sur la libre circulation des personnes, les citoyensde l’UE domiciliés en Suisse bénéficieront, s'agissant de l’acquisition d’immeubles,du même traitement que les Suisses sur une base de réciprocité. Les citoyens de l’UEqui séjourneront en Suisse, sans y élire domicile, resteront soumis au régime des auto-risations pour le noyau dur de la Lex Friedrich (acquisition d’appartements de vacan-ces, acquisitions d’immeubles à des fins purement spéculatives, commerce profes-sionnel d’immeubles). Les frontaliers pourront acquérir en Suisse sans autorisationune résidence secondaire, mais pas un appartement de vacances.

137 Message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.52).

Page 86: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 84 - Chapitre 2

Le maintien de la situation actuelle en matière de circulation des capitauxn’entraînera pas de désavantages notables pour la place économique suisse. Cepen-dant, des restrictions discriminatoires dans certains Etats de l’UE, par ex. lors del’acquisition d’immeubles, subsisteront.

222 Politiques et programmes de l’UE

222.01 Politique économique et monétaire

Le marché intérieur, qui comprend la libre circulation des personnes, des biens, desservices et des capitaux, ainsi qu'une politique commerciale, une politique de la con-currence et une politique structurelle et régionale communes, est pratiquement achevédepuis le 1er janvier 1993, bien qu’il ne soit pas encore réalisé de manière optimaledans l’ensemble de l’UE. Les avantages du marché intérieur se trouvent renforcés defaçon décisive par la création d’une monnaie commune. L’introduction de l’euroconstitue une étape logique dans la construction d'une communauté économique glo-bale. Outre l’introduction de la monnaie commune (ch. 222.01.1), nous présenteronsdans cette section la politique relative à la croissance et à l’emploi (ch. 222.01.2) etcelle concernant l’industrie et les petites et moyennes entreprises (ch. 222.01.3).

222.01.1 Union économique et monétaire

A Acquis communautaire

A.1 Participation à l’Union économique et monétaire

Depuis les années 60, on a réclamé à maintes reprises une union monétaire au sein dela CE. L'actuel projet d’Union économique et monétaire (UEM) remonte au rapportd’un groupe d’étude daté d’avril 1989 ("Rapport Delors"), qui prévoyait la mise enplace de l’UEM en trois phases: la première phase consacrée à la coordination et àlibéralisation financière a débuté en juillet 1990 et a coïncidé avec la libéralisationtotale des mouvements de capitaux entre les Etats membres. La deuxième phase por-tant sur les nouvelles institutions et une coordination renforcée se base sur le Traité deMaastricht. Elle a commencé au début de l’année 1994 et a conduit à la création de laBanque centrale européenne (BCE). Au cours de cette phase, plusieurs questions pra-tiques ayant trait à l’introduction de la monnaie unique ont été réglées, telles que lacontinuité des contrats, les règles de conversion et celles applicables aux méthodesd'arrondissage des montants, ainsi que le système des paiements en euros138. La troi-sième et dernière phase de l’Union monétaire concernant le transfert des responsabi-

138 Le règlement (CE) n° 1103/97 du 17 juin 1997 fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de

l’euro (JO n° L 162 du 19 juin 1997, p.1) arrête le principe de la continuité des contrats et règle la conver-sion en euro des monnaies nationales des Etats membres de la zone euro, ainsi que les arrondis. En Suisse,le Conseil fédéral a confirmé la continuité des contrats dans sa réponse du 28 août 1996 au postulat Nabholzdu 22 mars 1996 ("Conséquences pratiques de l'introduction de l'euro dans l'UE", CN 96.3171). Afin de fa-voriser les paiements en monnaie unique, l’UE a introduit un nouveau système de paiement électronique.Les instituts suisses de crédit y seront raccordés et auront donc la possibilité d'effectuer des transactions na-tionales en euro dans la zone voisine de l'euro.

Page 87: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 85 - Chapitre 2

lités a débuté le 1er janvier 1999 avec la fixation irrévocable des cours de conversionen euros des monnaies de la zone euro.

Le passage effectif vers la monnaie unique se déroule en trois étapes:

- La première étape a été lancée avec la décision des chefs d’Etat et de gouverne-ment de l’UE du 2 mai 1998 quant aux pays participant à l’Union monétaire. Lepremier cercle des pays participant à l’euro comprend - conformément à la recom-mandation de la Commission - tous les Etats de l’UE, à l’exception de la Grèce(conditions économiques non remplies), de la Suède (réserves d’ordre politique quise sont manifestées par des statuts de la banque centrale non conformes à l’UEM etpar la non-participation au mécanisme des taux de changes européens), ainsi quedu Danemark et du Royaume Uni. Faisant usage de la possibilité de ne pas partici-per ("opting out") qui leur a été accordée, ces deux derniers Etats membres ont pudécider eux-mêmes s’ils voulaient participer à l’UEM et définir la date de leur en-trée, pour autant qu’ils remplissent les conditions de participation.

- La deuxième étape a débuté le 1er janvier 1999 avec la fixation irrévocable descours de conversion entre les monnaies des pays participants à la zone euro et lamonnaie unique139. En même temps, le système européen des banques centrales(SEBC) a commencé à mettre en oeuvre une politique monétaire unique.

- Trois ans après la fixation des taux de conversion, soit le 1er janvier 2002, débuterala troisième étape avec l’émission de billets de banque et de pièces en monnaieunique et le retrait des monnaies nationales. Les billets et les pièces en euros cir-culeront en parallèle avec les monnaies nationales pendant une période de six moisau plus.

Un Etat membre désireux de participer à l’Union économique et monétaire (UEM)doit remplir les critères de Maastricht, qui visent à garantir un niveau élevé de con-vergence entre la capacité économique des Etats participant. Ces critères compren-nent: la stabilité des prix (le renchérissement ne doit pas dépasser un taux de 1,5% parrapport à la moyenne des trois pays qui ont les prix les plus stables), les déficits pu-blics (en principe 3% au plus du PIB), le niveau de la dette publique (en principe 60%au plus du PIB), les taux de change (participation au mécanisme européen de cours dechange pendant deux ans au moins) et les taux d’intérêts à long terme pour les em-prunts d’Etat (le taux ne doit pas dépasser de plus de deux points la moyenne des troispays ayant les prix les plus stables). En outre, tous les participants doivent disposer destatuts pour leur banque centrale qui garantissent son indépendance et définissent lastabilité des prix comme étant son objectif prioritaire.

A.2 Limites à la politique financière

Les limites supérieures des déficits publics et du niveau de la dette fixée dans leTraité CE ne sont pas seulement des conditions préalables à la participation à la mon-

139 En raison de la transformation le 1er janvier 1999 de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion

1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".

Page 88: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 86 - Chapitre 2

naie unique, elles sont également valables par la suite, et ce pour une période illimi-tée. Dans ce cadre, le pacte de stabilité et de croissance, conclu en juin 1997, et visantune mise en œuvre efficace de la discipline des politiques budgétaires des Etats parti-cipant à l’UEM, est un élément très important de l’UEM.

Le pacte de stabilité et de croissance prévoit que le Conseil peut formuler des recom-mandations dans une forme juridiquement contraignante au cas où un Etat membreatteint un déficit publique excessif. Une telle recommandation a pour but de corrigercette situation dans un délai déterminé. Si le déficit excessif ne peut être éliminé dansun délai raisonnable, le Conseil peut prendre différentes mesures pouvant aller jusqu'àl'amende. En vertu du Traité CE, les gouvernements des Etats membres assument aus-si la responsabilité de la situation financière prévalant dans leurs entités fédérales.

Les Etats qui violent la règle des 3% concernant le déficit, et dont la diminution réelledu PIB ne dépasse pas 0,75% au cours d’une année, doivent impérativement corrigerleur budget selon les recommandations du Conseil des ministres dans un délai déter-miné. S’ils n’y parviennent pas dans le délai imparti, des sanctions sont pronon-cées140. Pour les pays dont le déficit est supérieur à 3% et qui ont subi une baisse duPIB réel entre 0,75 et 2%, c’est le Conseil qui décide si le déficit est excessif et si dessanctions doivent être prononcées. Comme "circonstance atténuante", un pays peutpar exemple faire valoir un ralentissement particulièrement abrupt de la conjoncture.Si un pays a souffert d’une diminution du PIB réel qui dépasse 2%, on considère qu’ils’agit d’une récession grave. Dans un tel cas, un déficit de plus de 3 % n’est pas qua-lifié comme étant "excessif" et aucune sanction n’est infligée à l'Etat membre concer-né.

Pour faire face à des doutes émis en matière de politique de stabilité, les ministres desfinances de l’UE ont également adopté, le 2 mai 1998, la "Déclaration Waigel" reflé-tant les engagements pris au niveau politique et dont l'objectif est d'engager une nou-velle fois explicitement les Etats membres à poursuivre leurs efforts en vue de conso-lider leurs budgets avec la même détermination que celle dont ils ont fait preuve en1997 lors de la désignation des Etats membres participant à l'UEM. Cette déclarationpolitique, qui, sur certains points, équivaut à anticiper le pacte de stabilité, a été com-plétée par un appel particulier aux Etats membres ayant un niveau d’endettement éle-vé. Elle confirme également la clause de "no-bail-out" du Traité (pas de responsabilitéde la Communauté ou d’Etats en particulier pour les engagements des autres Etatsmembres) et se prononce contre une augmentation des paiements de transfert entre lesEtats participant à l’Union monétaire. La discipline en matière de dépenses imposéeaux Etats membres dans le cadre de l’UEM tend à favoriser une harmonisation desrecettes fiscales (voir ch. 222.07).

140 Les sanctions sont prises en premier lieu sous la forme d’un dépôt sans intérêts qui doit être transformé en

amende après deux ans, au cas où le déficit reste excessif. Le montant du dépôt ou de l’amende se composed’un élément fixe de 0,2% du PIB et d’un élément variable de 1/10 du montant qui dépasse le déficit parrapport au chiffre de référence de 3% du PIB. En tout état de cause, le dépôt est de 0,5% du PIB au maxi-mum.

Page 89: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 87 - Chapitre 2

A.3 Politique monétaire commune

Depuis le 1er janvier 1999, la politique monétaire est définie et exécutée par le sys-tème européen des banques centrales (SEBC) pour tous les participants à l’UEM.

L’objectif principal visé par le SEBC, par sa conduite de la politique monétaire, con-siste à maintenir la stabilité des prix. Dans la mesure où cela est possible sans nuire àl’objectif de la stabilité des prix, le système des banques centrales soutient la politiqueéconomique générale de la Communauté. La stabilité des prix sera définie par unecroissance de l'indice des prix à la consommation harmonisé pour la zone euro infé-rieure à 2%. Deux moyens devront permettre d'atteindre cet objectif. Une valeur deréférence sera définie pour la croissance d'un agrégat monétaire. Les perspectives in-flationnistes seront cependant appréciées en fonction de multiples variables économi-ques et financières.

Le système européen des banques centrales se compose de la Banque centrale euro-péenne (BCE), dont le siège est à Francfort, et des banques centrales des Etats mem-bres. Tant la Banque centrale européenne que les banques centrales nationales sont,dans l’accomplissement de leurs tâches, indépendantes des gouvernements. Les orga-nes de décision de la Banque centrale européenne sont le directoire et le conseil desgouverneurs de la BCE, qui se compose des membres du directoire et des présidentsdes banques centrales nationales des Etats participant à l’Union monétaire. En prin-cipe, le conseil des gouverneurs de la BCE prend ses décisions à la majorité simple,chaque membre disposant d’une voix. S'agissant des décisions ayant trait au capital dela Banque centrale européenne et au transfert de réserves monétaires ou à la réparti-tion des recettes monétaires des banques centrales nationales, les voix au conseil desgouverneurs de la BCE sont pondérées en fonctions des parts du capital de la Banquecentrale européenne souscrites par les banques centrales nationales; les voix desmembres du directoire ne sont pas prises en compte141.

Les monnaies des Etats de l'UE ne participant pas à l’Union monétaire peuvent, dansle cadre d’un nouveau mécanisme des taux de change (SME II) qui remplace l’anciensystème monétaire européen (SME), être liées à l’euro dans une marge de fluctuationstandard fixée à +/- 15%. Des marges plus étroites peuvent également être définiesindividuellement. La participation au mécanisme des taux de change n’est pas obli-gatoire.

B Politique suisse

La Banque nationale suisse (BNS) doit, en tant que banque centrale indépendante dupoint de vue juridique et pratique, veiller à un approvisionnement monétaire adéquatde l’économie. En ajustant l’augmentation de la masse monétaire au potentiel decroissance réelle de l’économie, la Banque nationale poursuit une politique monétaire

141 Une description plus détaillée de l’organisation, des objectifs et des tâches du SEBC se trouve dans le pro-

tocole au Traité de Maastricht sur le statut du système européen des banques centrales et de la Banque cen-trale européenne.

Page 90: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 88 - Chapitre 2

axée sur l’intérêt général du pays avec comme priorité l'objectif de stabilité des prix.Elle se base surtout sur les agrégats de la masse monétaire, mais tient compte aussid’autres facteurs tels que l’évolution conjoncturelle et les taux de change. Le francsuisse pouvant, dans l'actuel système de taux de changes flottants, subir d'importantesfluctuations en cas de turbulences monétaires, il est recommandé, lors de très fortesturbulences sur le marché des changes, de s’écarter des objectifs relatifs à la crois-sance monétaire. L’autonomie de la Banque nationale en matière de politique moné-taire est alors restreinte en conséquence (voir let. C.3).

Avec le passage aux taux de changes flottants au début des années 70, un transfert decompétence s'est opéré de fait entre le Conseil fédéral et la Banque nationale quant àla fixation de la valeur extérieure du franc suisse. S'il incombait autrefois au Conseilfédéral de fixer la parité du franc suisse après en avoir discuté avec la Banque natio-nale, aujourd'hui la valeur extérieure du franc appartient, sous le régime actuel de tauxde changes flottants, à la sphère d'influence de la banque centrale. En conduisant lapolitique monétaire, il faut tenir compte du fait que la Suisse est une économie ou-verte avec une monnaie à tendance forte. Dans des situations où le taux de changegénère de graves problèmes pour les entreprises exportatrices et importatrices parexemple, la Banque nationale peut lui conférer temporairement une importance parti-culière. Si l’accent doit davantage être mis sur le cours du franc, le Conseil fédéral etla Banque nationale coordonnent leur activité au titre de leur obligation de s’informerréciproquement. Le rattachement durable du franc suisse à une autre monnaie par untraité international relèverait de la compétence de l'Assemblée fédérale142.

C Répercussions sur la Suisse

C.1 Adhésion à l’UE

Pour autant que la Suisse remplisse les critères d’admission à l’UEM, il est vraisem-blable, qu'en tant que membre de l’UE, elle y participerait (voir ch. 333.06). La duréede la période de transition menant à la participation à l'UEM serait objet des négocia-tions d’adhésion. En cas d’adhésion à l’UE avec participation à l’Union monétaire, laSuisse devrait céder ses compétences en matière de politique monétaire à la Banquecentrale européenne. A titre de compensation pour la perte de son autonomie en ma-tière financière et monétaire au niveau national, la Suisse participerait sur un piedd'égalité à l’élaboration de la politique financière et monétaire européenne dans lecadre du système européen des banques centrales. La Suisse satisferait vraisembla-blement aux critères d’admission à l’UEM (stabilité des prix, taux d’intérêts à longterme, endettement public et déficit budgétaire). Les critères de l'endettement publicet du déficit budgétaire s'appliquent toutefois à l'ensemble des finances publiques dupays. Des mesures appropriées devraient dès lors être prises pour que ces critèrespuissent aussi être remplis à moyen et à long terme aussi bien par la Confédération etque par les cantons, dans le respect de l'autonomie financière de ces derniers. La

142 Voir le message du 27 mai 1998 concernant un nouvel article constitutionnel sur la monnaie, FF 1998 IV

3485.

Page 91: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 89 - Chapitre 2

question de savoir si la Suisse pourrait remplir la condition de la participation au mé-canisme des taux de change pendant deux ans au moins en respectant les limites defluctuation ordinaires serait aussi objet des négociations d'adhésion. Il faudrait négo-cier un taux directeur, puis un taux de conversion du franc suisse par rapport à l'euro.

La participation au Système européen des banques centrales entraînerait un transfertpartiel des réserves monétaires à la Banque centrale européenne. Selon l’art. 30 duprotocole sur le statut du Système européen de banques centrales et de la Banquecentrale européenne, cette dernière reçoit des banques centrales nationales des réser-ves monétaires jusqu’à hauteur de 50 milliards d’euros. Ces réserves restent propriétédes banques centrales qui les ont versées. La participation des différentes banquescentrales est définie en fonction de la part qu'elles souscrivent au capital de la Banquecentrale européenne. Le capital de la Banque centrale européenne s'élève à 5 milliardsd’euros143. Il peut être augmenté par une décision du Conseil des gouverneurs de laBCE. Ce conseil a décidé début juin 1998 que la Banque centrale européenne devaitêtre dotée du montant maximal de 50 milliards d’euros. Cependant, les parts des ban-ques centrales des Etats membres qui ne font pas partie de la zone euro dès le débutseront déduites de ce montant. 15% de ces réserves monétaires doivent être en or. Encas d'adhésion de la Suisse à l'UE, une augmentation du capital de la Banque centraleeuropéenne ne pouvant être exclue, il est difficile de prévoir le montant des réservesque la Banque nationale suisse devrait transférer à la Banque centrale européenne.Les fonds versés par la Belgique et les Pays-Bas peuvent servir d'ordre de grandeur.Ces deux pays participent au capital de la BCE respectivement à raison de 2,89% et4,28%, ce qui correspond à un versement de réserves respectivement de 1,4, milliardset 2,1 milliards euros. Les opérations effectuées avec les réserves qui demeurent au-près des banques centrales nationales nécessitent l’accord de la Banque centrale euro-péenne, afin de garantir la concordance avec la politique des taux de change et la po-litique monétaire de la Communauté. Le bénéfice net de la Banque centrale euro-péenne est, après accumulation d'un fonds de réserve, réparti entre les détenteurs departs de la Banque centrale européenne, en fonction des parts libérées.

Une fois l’euro adopté, la politique monétaire suisse et le niveau des prix qui en dé-coule seraient déterminés par la Banque centrale européenne. Il en résulterait des con-séquences sur le niveau des taux d’intérêts suisses. La différence entre ces derniers etceux des pays de la zone euro disparaîtrait pratiquement. Seules des différences desolvabilité des débiteurs tant publics que privés entraîneraient des taux d’intérêts dif-férents. Selon toute vraisemblance, cet écart serait toutefois moins important qu’encas de rattachement du franc à l’euro144. En tant que membre de l'Union monétaire, laSuisse n'aurait plus la possibilité de mener une politique monétaire autonome, axée

143 La quote-part de chaque banque centrale nationale au capital de la BCE est calculée en fonction de la part

de chaque Etat membre à la population et au PIB de la Communauté. En cas de participation de la Suisse àl'Union monétaire, la Banque nationale suisse transférerait une partie de ses réserves monétaires à la BCE etparticiperait de manière correspondante à ses bénéfices. La plus grande partie des réserves monétaires reste-rait cependant à la BNS qui pourrait continuer à distribuer ses bénéfices comme par le passé.

144 Voir le rapport intitulé "La Suisse et l’Union économique et monétaire européenne" du groupe de travailinterdépartemental "Euro", DFF, juin 1998; s'agissant des répercussions essentiellement négatives d'unehausse des taux d'intérêt en Suisse, voir ch. 333.06.

Page 92: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 90 - Chapitre 2

sur les intérêts spécifiques du pays. La politique monétaire ne pourrait dès lors plustenir compte de la situation différente pouvant régner en Suisse en matière d'inflationet d'évolution économique. Au sein de l'Union monétaire, il n'aurait par exemple pasété possible, comme ce fut le cas à partir de 1992, d'abaisser les taux d'intérêts plusrapidement et plus fortement que la Bundesbank allemande, et de prendre ainsi enconsidération la situation conjoncturelle propre du pays.

Un avantage important résultant de la participation à l’UEM serait la suppression desvariations des taux de change vis-à-vis des clients, fournisseurs et concurrents euro-péens. L'intégration à l’espace économique et monétaire européen permettrait à laSuisse, dont 60% des exportations sont destinées à l’UE, de bénéficier des mêmesconditions-cadres que ses concurrents européens.

C.2 Participation à l’EEE, accords sectoriels et maintien de la situation ac-tuelle

Si la Suisse devait participer à l’EEE, elle garderait en principe son autonomie ac-tuelle en matière de politique monétaire. Les développements décrits sous let. C.3.s’appliqueraient par analogie. L’art. 46 de l'Accord EEE introduit un échanged’informations non contraignant en matière de politique économique et monétairevisant à analyser les effets économiques de l'Accord EEE sur les pays participant. Ildoit entre autres permettre d'identifier à temps des évolutions économiques inquié-tantes pouvant entraîner, le cas échéant, l’application de clauses de sauvegarde.

En cas d'entrée en vigueur des accords sectoriels, comme de maintien de la situationactuelle, la Suisse garderait son autonomie en matière de politique monétaire et n'au-rait pas à renoncer à son pouvoir de disposer d'une partie de ses réserves monétaires.La Suisse serait cependant fortement concernée par l’intégration de la politique mo-nétaire au sein de l’UE. Aujourd'hui déjà, elle est entièrement encerclée par la zoneeuro145. Ce changement considérable de l’environnement monétaire pourrait influen-cer la demande de francs suisses et donc le niveau et les limites de fluctuation ducours du franc. L’étendue de ces effets dépendra principalement de la politique mo-nétaire adoptée par la Banque centrale européenne, mais également de l’importancede l’euro en tant que monnaie d’investissement et de transaction146.

En principe, on peut s’attendre à ce que la Banque centrale européenne poursuive ef-ficacement sa politique monétaire axée sur la stabilité des prix. On peut égalementpartir de l'idée que les restructurations des portefeuilles en rapport avec l’introductionde l’euro ont été achevées avant son introduction le 1er janvier 1999. Si toutefois le

145 A l'exception du Liechtenstein. Depuis 1924, la Principauté de Liechtenstein utilise le franc suisse comme

monnaie légale. Les dispositions suisses relatives à la politique monétaire et à la politique de crédit, ainsiqu'à la protection des pièces de monnaie et des billets de banque sont, sur la base de l'Accord monétaire du19 juin 1980 entre la Confédération suisse et la Principauté de Liechtenstein (RS 0.951.951.4), applicablesau Liechtenstein (voir le message concernant l'accord monétaire avec le Liechtenstein du 12 novembre1980, FF 1980 III 1257.

146 Voir rapport du groupe de travail interdépartemental "Euro", op. cit., p. 21 et ss.

Page 93: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 91 - Chapitre 2

franc suisse devait subir une appréciation excessive par rapport à l’euro, il faudraitrégir de manière souple au niveau de la politique monétaire. Nous disposons à cettefin de trois options principales:

- La Banque nationale peut mener une politique autonome orientée par rapport à lamasse monétaire, soit exploiter l’effet contraire exercé par les taux d’intérêts en casde variations conjoncturelles résultant des taux de change. En laissant agir ces sta-bilisateurs automatiques, le niveau des prix en Suisse n’est pas en danger. Commeles différents secteurs souffrent différemment de la force du franc suisse et bénéfi-cient de la baisse des taux de manière inégale, cette option de la politique moné-taire entraîne un ralentissement de l’activité économique et un transfert des activi-tés à partir des secteurs de l'exportation et du tourisme - sensibles à la variation destaux de change - vers le secteur de la construction - sensible aux taux d’intérêts.

- La Banque nationale peut davantage axer sa politique sur le taux de change et seprotéger contre une demande accrue du franc en augmentant davantage l’offre de lamonnaie. En agissant de la sorte, elle limite partiellement son autonomie en matièrede politique monétaire. La Banque nationale a déjà eu recours à cette stratégie dansle passé. Toutefois, à moyen terme, cette stratégie renforce le risque d’une reprisede l’inflation, dans la mesure où on ne peut ensuite réduire à temps et dans desproportions appropriées l’accroissement de la masse monétaire.

- Afin de donner un signal clair et supprimer les fluctuations de change à court et àmoyen terme, il pourrait être indiqué de rattacher le franc unilatéralement à l’euro.La défense de l’objectif défini pour le taux de change impliquant un élargissementde la masse monétaire, cette option entraîne aussi un risque d’inflation. En décidantun rattachement unilatéral, la Suisse abandonnerait également dans une large me-sure l'autonomie qui lui reste pour mener la politique monétaire et importerait lapolitique poursuivie par la Banque centrale européenne. Si le rattachement devaitêtre durable, les taux d’intérêts suisses se rapprocheraient davantage de ceux appli-qués dans l’UE.

Il faut renoncer à des mesures de régulation pour combattre une hausse du franc (encontrôlant la circulation des capitaux par ex.). De telles mesures entraînent de lourdestâches administratives, conduisent à des distorsions de la concurrence et peuvent au-jourd’hui facilement être contournées au moyen des nombreux instruments de finan-cement.

Si l’euro devient une monnaie forte et stable, il ne devrait pas en résulter une appré-ciation excessive du franc, et dans de telles conditions, la volatilité des taux de changedevrait rester modeste. La Banque nationale pourrait maintenir son actuelle politiquemonétaire. Mais, un euro fort et stable en raison du volume et de la liquidité du mar-ché de la monnaie européenne pouvant gagner en attractivité pour les débiteurs et lescréanciers, il est possible que l’avantage actuel dont bénéficie le franc suisse au ni-veau des taux d’intérêts s'amenuise. Par ailleurs, l'écart des taux d'intérêt actuel de-vrait être conservé car le franc suisse restera une monnaie de substitution importanteaussi longtemps que la BNS pourra mener une politique monétaire autonome.

Page 94: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 92 - Chapitre 2

222.01.2 Croissance et emploi

A Politique de l’UE

A.1 Croissance et emploi en tant qu’objectifs communautaires

La croissance économique et l’emploi sont étroitement liés. Un manque de croissances’accompagne de pertes d’emplois et d’une augmentation du chômage. A l’inverse, ilexiste une tendance - mais sans garantie - qu’une économie en croissance soit généra-trice d’emplois. Il en résulte que le chômage est resté élevé dans beaucoup de régionsde l’UE, ce qui représente un défi important tant pour la politique sociale que pour lapolitique budgétaire. Dans l'UE, la politique de l’emploi, au sens d’une politique ac-tive sur le marché du travail, occupe le même rang que les politiques et les initiativesvisant à la stimulation de la croissance.

La croissance et l’emploi jouent un rôle très important dans les objectifs de la Com-munauté (art. 2 du traité CE) et dans les motivations politiques du Conseil. La politi-que du marché du travail est et reste un domaine réservé à la compétence des Etatsmembres. Cela vaudra également après l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam,qui introduira dans le Traité CE un chapitre sur l’emploi.

A.2 Influences de l'offre et de la demande sur la croissance économique

Dans le cadre de la politique de l’emploi, il existe des limites étroites à une manipula-tion de la demande globale de l'économie. L’objectif prioritaire de la politique moné-taire, eu égard aux particularités de cet instrument, est la stabilité des prix. La politi-que budgétaire n’offre dans le long terme qu’une marge de manoeuvre limitée, carelle doit respecter le pacte de stabilité, qui exige la réduction des déficits publics de-venus trop élevés. La marge de manoeuvre restante en matière de politique budgétairedoit être utilisée pour corriger les évolutions conjoncturelles divergentes dans chaqueEtat membre.

Les facteurs centraux du côté de l’offre sont: la concurrence, des marchés ouverts,l’esprit d’entreprise, ainsi qu'une évolution des salaires en accord avec celle de la pro-ductivité et de l’emploi. Si ces prémisses sont satisfaites, une demande forte dansl’économie ne se traduit pas en inflation, mais en croissance réelle et en places de tra-vail. Au titre de l’offre économique, la Communauté dispose de quelques instrumentstrès puissants. Elle assume notamment la responsabilité de la politique commercialecommune et du fonctionnement du marché intérieur (y compris la politique de la con-currence). Parmi les politiques compensatoires et les mesures d’encouragement effi-caces figurent: la politique régionale et structurelle, les efforts communautaires dé-ployés dans les domaines de la formation et de la recherche, ainsi que les politiquesd’accompagnement au marché intérieur, tel le projet des réseaux transeuropéens dansle secteur des transports.

Page 95: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 93 - Chapitre 2

A.3 Initiatives communautaires dans le cadre de la politique du marché dutravail

La Communauté se base sur un modèle de société libéral et social, fondé sur la démo-cratie et les droits individuels, sur une économie de marché avec libre négociation dessalaires, ainsi que sur l’égalité des chances, avec un rôle toujours plus important de lasécurité sociale et de la solidarité. En raison de la liberté en matière salariale, c'est auxpartenaires sociaux, et non aux Etats membres, qu'incombe la responsabilité d’assurerque l’évolution des salaires s'accorde avec la poursuite et le maintien d’un haut niveaud’emploi dans chaque région et dans chaque secteur économique au sein de l’UE.

Les Etats membres sont coresponsables dans la mesure où il s'agit d'atteindre une ca-pacité concurrentielle et des progrès sociaux grâce à une main-d'oeuvre flexible, bienformée et motivée. Les mesures qui peuvent et doivent être prises par les Etats mem-bres sont décrites dans les "Lignes directrices de la politique de l’emploi", qui sontélaborées parallèlement aux "Principes de la politique économique" présentés chaqueannée par la Commission. Ces "Lignes directrices de la politique de l'emploi" ontpour la première fois été adoptées lors du Sommet extraordinaire sur l'emploi àLuxembourg le 21 novembre 1997. A l’occasion de la réunion du Conseil européende Cardiff en juin 1998, ont été discutés les plans d’action de chaque Etat membre,élaborés sur la base des "Lignes directrices de la politique de l'emploi". Ces lignesdirectrices, ainsi que les plans d’action nationaux qui ont été approuvés, sont des me-sures organisationnelles répondant aux voeux du Conseil européen d’Amsterdam dejuin 1997, lequel avait adopté une résolution sur la croissance et l'emploi. Cette réso-lution a clos une longue série de discussions, qui eurent pour préoccupation la persis-tance d'un taux de chômage élevé dans l’UE.

Les moyens financiers pour les programmes qui satisfont aux "Lignes directrices de lapolitique de l’emploi" proviennent en grande partie des budgets des Etats membres.Dans une mesure limitée, le Fonds social européen (FSE), fondé en 1957, offre aussiun cofinancement. Ces moyens financiers soutiennent avant tout l’intégration dans lavie active des jeunes chômeurs et des chômeurs de longue durée, ainsi que la recon-version des employés particulièrement touchés par les ajustements structurels. De1994 à 1999, le FSE a déboursé des montants de 100 à 150 euros par salarié. La réali-sation des plans du prochain élargissement de l’UE devrait influencer d’une manièrenon négligeable les moyens qui seront mis à disposition des fonds régionaux et struc-turels à partir de l’année 2000 (voir ch. 253).

B Politique suisse

En Suisse également, la politique monétaire est orientée en priorité vers l’objectif destabilité des prix et la marge de manoeuvre de la politique conjoncturelle est limitéesur le long terme par les effets contraignants de l'assainissement des finances publi-ques. Ainsi, la constatation selon laquelle il n'y a intervention de la politique moné-taire et budgétaire que lors de grandes perturbations est aussi valable en Suisse. Lacroissance et l’emploi doivent d'abord résulter de processus d'adaptation de l'offre,

Page 96: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 94 - Chapitre 2

tels que la réalisation des quatre libertés qui fondent le marché intérieur et la garantiede l'accès aux marchés étrangers. Le programme pour la revitalisation de l’économiede marché montre plusieurs similitudes avec des mesures adoptées au même momentpar les Etats de l’UE. On peut citer par exemple la libéralisation simultanée en Suisseet dans l'UE du domaine des télécommunications. De plus, en Suisse aussi des mesu-res ont été adoptées qui complètent ces initiatives de libéralisation dans un sens com-pensatoire ou complémentaire (crédits pour la politique régionale, la promotion dutourisme, la place économique suisse, l'encouragement de la recherche appliquée et dela formation (par ex. Hautes Ecoles Spécialisées)).

Le principe de la liberté des salaires est de rigueur en Suisse, plus strictement quedans l'UE, les partenaires sociaux devant assumer la responsabilité de la garantie d'unniveau élevé d’emplois, en même temps qu'une inflation basse. Les mesures en courspour une politique active sur le marché de travail aux plans fédéral et cantonal de-vraient aujourd'hui déjà largement suffire aux exigences posées par les "Lignes direc-trices de la politique de l’emploi" de la CE. En ce qui concerne le taux de chômagedes jeunes, la Suisse a pu démontrer des avantages par rapport à l’UE, ce qui est àmettre en grande partie au compte du haut niveau de la formation professionnelle.

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion, la Suisse pourrait contribuer à l’élaboration des principes de lapolitique économique, ainsi qu’aux "Lignes directrices de la politique de l’emploi".Selon le traité d’Amsterdam, elle aurait à présenter au Conseil un plan d’action politi-que en faveur de l’emploi. Quelques mesures pour une politique active sur le marchédu travail pourraient être financièrement soutenues par le FSE. Le partenariat socialpratiqué en Suisse à un niveau aussi proche que possible des entreprises, ainsi que lesfondements de la paix du travail, ne seraient pas fondamentalement modifiés.

Une participation à l’EEE, l’entrée en vigueur des accords sectoriels et le maintiende la situation actuelle ne conduiraient à aucun point de friction avec la politiquecommunautaire dans le domaine de la croissance et de l’emploi.

222.01.3 Politique industrielle; petites et moyennes entreprises

A Acquis communautaire

A.1 Politique industrielle

La politique industrielle de la CE est le fruit des différentes approches défendues parles Etats membres. Les Etats membres les plus développés sur le plan économiquevoient dans la notion de politique industrielle communautaire une intervention indési-rable de l'Etat; les autres tablent sur cette politique pour garantir leur développement.La communication de la Commission intitulée "Politique industrielle dans un envi-ronnement ouvert et concurrentiel" est le résultat d'un consensus: l'objectif n'est pas,ou plus, de protéger l'industrie, mais de lui permettre de s'imposer dans un environ-

Page 97: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 95 - Chapitre 2

nement où règne une concurrence globale. Les rôles des autorités publiques d'unepart, et de l'économie d'autre part, y sont clairement définis: les premières sont appe-lées à établir des conditions-cadres favorables par le biais de "politiques horizontalesou intégrées" (par ex.: règles quant à l'accès aux marchés ou aux spécifications desproduits), la seconde doit assumer pleinement ses responsabilités dans le jeu de laconcurrence147. Dans ce contexte, l'intervention des institutions communautaires restesubsidiaire à celle des Etats membres (principe de subsidiarité). La Commission selimite à promouvoir la coordination des actions menées par les Etats membres. LeConseil, quant à lui, peut arrêter à l'unanimité des mesures spécifiques pour appuyerles actions prises au plan national.

Une politique industrielle sectorielle s'est ainsi mise en place, qui a par la suite étéconsacrée par le Traité de Maastricht. Ses objectifs sont les suivants:

- accélérer l'adaptation de l'industrie aux changements structurels;

- encourager un environnement favorable à l'initiative et au développement des en-treprises, et notamment des petites et moyennes entreprises;

- encourager un environnement favorable à la coopération entre entreprises;

- favoriser une meilleure exploitation du potentiel industriel des politiques d'innova-tion, de recherche et de développement technologique148.

En vue d'atteindre ces objectifs, la CE s'efforce d'identifier et d'éliminer les obstaclesadministratifs, réglementaires et législatifs auxquels se heurtent les entreprises, et desimplifier les procédures auxquelles elles sont confrontées. Elle travaille en outre àintégrer les besoins de l'industrie dans ses politiques en matières de recherche, de pro-priété intellectuelle, ainsi que dans le développement de nouvelles formes d'organisa-tion du travail. De plus, elle multiplie les actions visant à encourager les industries às'adapter aux rapides changements des marchés modernes (par ex.: promotion des in-vestissements immatériels, développement de la coopération industrielle).

Ces dernières années, la CE a été très active dans les secteurs connaissant un ajuste-ment structurel (acier, textiles, armements, chantiers navals), de même que dans lessecteurs émergents ou de haute technologie (biotechnologies, société de l'information,commerce électronique, industrie spatiale).

Le volet financier de la politique industrielle communautaire est limité. L'enveloppeannuelle s'élève à quelque cinq millions d'euros et couvre principalement les frais defonctionnement, ainsi que le financement d'études, de conférences, de tables rondes etde réseaux d'échange d'informations.

147 Voir COM (90) 556.148 Voir art. 130(3) du Traité CE.

Page 98: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 96 - Chapitre 2

A.2 Petites et moyennes entreprises (PME)

De nombreuses politiques de la CE contribuent au renforcement de la compétitivité del'industrie européenne. Toutefois, les mesures mises en oeuvre illustrent clairementque la priorité est accordée aux petites et moyennes entreprises (PME).

Le Conseil a adopté le 14 novembre 1996 le troisième programme pluriannuel (1997-2000) pour les petites et moyennes entreprises dans la CE149. Ce programme, dotéd'une enveloppe financière de 127 millions d'euros, visent les cinq objectifs suivants:

- simplifier et améliorer l'environnement administratif et réglementaire des entrepri-ses, notamment en intégrant la dimension des PME à la politique communautaire eten évaluant l'impact des nouvelles réglementations communautaires sur les entre-prises;

- améliorer l'environnement financier des entreprises en soutenant la création d'unevéritable industrie européenne du capital-risque et en cherchant à réduire les pro-blèmes dus aux retards de paiement;

- aider les PME à "européaniser" et à internationaliser leurs stratégies, notammentgrâce à de meilleurs services d'information (il s'agit des services d'information misà disposition des PME par les quelque 230 Euro-Info-Centres (EIC), auxquelless'ajoutent le développement de partenariats en matière de sous-traitance);

- renforcer la compétitivité des PME et améliorer leur accès à la recherche et à l'in-novation en stimulant la formation des dirigeants et en menant des actions pilotesdans le domaine des technologies nouvelles;

- promouvoir l'esprit d'entreprise et soutenir les groupes cibles, notamment en ce quiconcerne l'introduction de nouvelles technologies dans le commerce et la distribu-tion.

Le rôle important des PME a été à nouveau souligné dans la résolution sur la crois-sance et l'emploi adoptée par le Conseil européen d'Amsterdam en juin 1997, puis lorsdu Sommet européen sur l'emploi de Luxembourg en novembre de la même année. Denouvelles mesures visant à faciliter le financement des PME y donnent actuellementsuite, comme l'initiative "Joint European Venture", dotée de 100 millions d'euros pourla période 1998 à 2000 visant à encourager les PME européennes à créer des "jointventures" internationales. Par ailleurs, la Banque européenne d'investissement (BEI)et le Fonds européen d'investissement (FEI) ont lancé des actions en faveur des PMEconjuguant prêts et "Mécanisme Européen pour les Technologies", pour un total deplus d'un milliard d'euros.

149 COM (96) 591 final, JO n° C 61 du 27 février 1997, p. 18.

Page 99: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 97 - Chapitre 2

B Politique suisse

De par son histoire économique, la Suisse ne dispose pas à proprement parler de poli-tique industrielle. Elle s'est en effet "limitée" à favoriser le libre-échange et à encou-rager les petites et moyennes entreprises (PME).

Afin d'offrir aux PME suisses un accès à l'information en matière européenne, laSuisse participe au réseau des EIC par l'intermédiaire d'un "centre de correspondance"dont la gestion a été confiée à l'Office suisse d'expansion commerciale (OSEC). Cettestructure d'information a son centre à Zurich et possède des antennes à Lausanne et àLugano, gérées en collaboration avec les chambres de commerce de la Suisse latine.L'excédent des charges (1,3 millions de francs suisses en 1997) est couvert par laConfédération sur la base de l'arrêté fédéral du 6 octobre 1995 sur la participation àdes actions internationales d'information, d'entremise et de conseil en faveur des pe-tites et moyennes entreprises150. Déjà en 1989 la Fédération Romande des SyndicatsPatronaux avait créé le premier relais EIC en dehors de l'UE.

C Répercussions sur la Suisse

La politique industrielle communautaire étant régie par le principe de subsidiarité, lamarge de manoeuvre laissée aux Etats membres reste entière. En cas d'adhésion àl'UE, la Suisse conserverait une très large liberté d'action en matière industrielle. Uneparticipation à l'EEE, de même que l'entrée en vigueur des accords sectoriels et lemaintien de la situation actuelle, ne modifieraient en rien la politique industrielle dela Suisse telle que pratiquée aujourd'hui.

La politique de la CE à l'égard des PME repose quasi exclusivement sur des méca-nismes d'information, auxquels la Suisse participe en partie (réseau des EIC) et sur lefinancement de projets pilotes, auxquels la Suisse n'a pas accès. Une adhésion à l'UEn’impliquerait pas d’engagements financiers additionnels, compte tenu des engage-ments de la BEI et du FEI (voir ch. 251); l'adhésion ne nécessiterait que peu d'ajuste-ments législatifs, une partie des mesures préconisées par la Commission, comme l'al-légement des charges administratives, étant déjà mise en oeuvre par les autorités suis-ses.

222.02 Politique sociale

A Acquis communautaire

La politique sociale communautaire vise essentiellement à améliorer la situation del'emploi, à relever les conditions de vie et de travail, à garantir une protection socialeappropriée, et à promouvoir le dialogue social entre les travailleurs et les employeurs.Depuis 1992151, plusieurs nouveaux actes communautaires ont été adoptés dans le 150 RS 951.971.151 Pour les développements intervenus jusqu'en 1992 voir message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de

l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.92).

Page 100: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 98 - Chapitre 2

domaine de la politique sociale. Une quinzaine de directives protégeant des groupesde travailleurs particuliers dans certains lieux de travail ou contre certaines substancessont entre autres venues compléter le domaine de la santé et de la sécurité sur le lieude travail. Les plus importants de ces actes concernent la santé des travailleuses en-ceintes, accouchées ou allaitantes au travail152, certains aspects de l'aménagement dutemps de travail liés à la santé et la sécurité des travailleurs153, le droit à l'informationdes travailleurs dans les entreprises et les groupes d'entreprises à dimension commu-nautaire154, la protection au travail des jeunes de moins de 18 ans155, le congé paren-tal156 et enfin le travail à temps partiel157.

Le droit communautaire s'est par ailleurs doté d'une réglementation spéciale à l'égarddes travailleurs détachés158. Chaque Etat membre peut déclarer applicable aux tra-vailleurs détachés temporairement sur son territoire une série de dispositions protec-trices de son propre droit. L'idée consiste à garantir à ces travailleurs des conditionsminimales de travail et de salaire159.

Parallèlement à ces mesures législatives, la CE prévoit de lancer de nouveaux pro-grammes communautaires. La Commission a notamment proposé le 12 juillet 1995 unprogramme en matière de sécurité, d'hygiène et de santé au travail qui vise d'une part,à améliorer la législation communautaire existante et d'autre part, à mettre en oeuvredes projets pratiques pour améliorer les conditions de travail et réduire les risques yrelatifs160. Elle a en outre proposé le 29 avril 1998 un programme d'action sociale àmoyen terme qui définit le cadre du développement de la politique sociale commu-nautaire pour la période 1998 à 2000. Ce programme part de l'idée que "la politiquesociale devrait promouvoir une qualité et un niveau de vie corrects pour tous dans unesociété privilégiant l'activité, l'intégration et la santé, favorisant l'accès à l'emploi, debonnes conditions de travail et l'égalité des chances."161 Ces programmes doivent en-core être adoptés par le Conseil.

Le Traité d'Amsterdam renforcera la politique communautaire en matière de politiquesociale par un nouveau titre VIa dans le Traité CE dédié à l'emploi, de nouvelles dis-positions en matière d'égalité des chances, d'exclusion, de lutte contre la discrimina-tion et de santé publique, ainsi qu'en incorporant l'accord sur la politique sociale jus-qu'alors annexé sous forme de protocole au Traité de Maastricht auquel ne participaitpas le Royaume-Uni. Le Traité d'Amsterdam marque ainsi la volonté de tous les Etats

152 Directive 92/85/CEE du 19 octobre 1992, JO n° L 348 du 28 novembre 1992, p. 1.153 Directive 93/104/CE du 23 novembre.1993, JO n° L 307 du 13 décembre 1993, p. 18.154 Directive 94/45/CE du 22 septembre 1994, JO n° L 254 du 30 septembre 1994, p. 64.155 Directive 94/33/CE du 22 juin 1994, JO n° L 216 du 20 août 1994, p. 12.156 Directive 96/34/CE du 3 juin 1996, JO n° L 145 du 19 juin 1996, p. 4.157 Directive 97/81/CE du 15 décembre 1997, JO n° L 14 du 20 janvier 1998, p. 9.158 Directive 96/71/CE du 16 décembre 1996, JO n° L 18 du 21 janvier 97, p.1.159 Pour ce qui est de la reprise du contenu de la directive 96/71/CE, voir ch. 221.02.1.160 Programme communautaire dans le domaine de la sécurité, de l'hygiène et de la santé sur le lieu de travail

1996-2000, COM (95) 282 final, JO n° C 262 du 7 octobre 1995, p. 18.161 Programme d'action sociale 1998-2000, COM (98) 259.

Page 101: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 99 - Chapitre 2

membres d'aborder au plan européen en étroite collaboration avec les partenaires so-ciaux les questions fondamentales dans le domaine de la politique sociale. Le Conseilprendra ses décisions dans le domaine de l'exclusion sociale à la majorité qualifiée.Par contre, la règle de l'unanimité est maintenue là où l'accord sur la politique socialela prévoyait (notamment dans les domaines de la sécurité sociale, la protection socialedes travailleurs, la protection des travailleurs en cas de licenciement, la représentationet la défense des travailleurs et des employeurs).

B Politique suisse

En matière d'assurances sociales, la politique poursuivie par le Conseil fédéral viseavant tout à consolider et à stabiliser le système, en recherchant un équilibre durableentre prestations et financement. La marge de manoeuvre est étroite tant pour uneaugmentation que pour une réduction des prestations. Dans ce cadre, le Conseil fédé-ral a présenté devant les Chambres fédérales le 25 juin 1997 un projet de loi sur l'as-surance-maternité, lequel est compatible avec le droit communautaire162. Chaque révi-sion législative doit être l'occasion d'une réflexion sur les potentiels de rationalisationet d'économies dont les répercussions sont socialement acceptables. Un des objectifsprioritaires de la politique sociale doit en effet être de garantir à long terme le finan-cement du système social mis en place.

Dans le domaine de la protection de la santé et de la sécurité au travail, ainsi que de laréglementation des relations de travail, la tendance va dans le sens d'un rapproche-ment de notre législation avec le droit international en général et communautaire enparticulier. Le peuple a approuvé le 29 novembre 1998 la révision de la loi sur le tra-vail visant entre autres à assouplir les périodes de travail et à améliorer la protectiondes femmes enceintes (interdiction de certaines activités pouvant mettre en danger lasanté de la femme ou celle de l'enfant, droit au maintien d'une rémunération adéquatedans les cas où une travailleuse doit s'abstenir de travailler en raison des dangers queprésentent son activité et qu'aucune autre occupation ne peut raisonnablement lui êtreproposée) et des personnes occupées la nuit et le dimanche.

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, la reprise de l'acquis communautaire nécessiterait plusieursadaptations de notre législation.

Dans le domaine des prestations sociales, il faudrait introduire le congé parental. Enoutre, pour répondre aux mesures relatives à la sécurité des femmes enceintes et al-laitantes, il y aurait lieu d'introduire un congé maternité payé, comme prévu dans leprojet de loi fédérale sur l'assurance-maternité.

Dans le domaine de la protection des travailleurs, plusieurs points sont incompatiblesavec le droit communautaire. En effet, en matière d'aménagement du temps de travail,

162 FF 1997 IV 881.

Page 102: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 100 - Chapitre 2

la loi fédérale sur le travail est plus restrictive que la directive communautaire en cequi concerne la durée hebdomadaire maximale de travail163 et la durée du travail denuit164. De plus, s'agissant de la protection des jeunes travailleurs, il faudrait revoir ladéfinition des "jeunes gens" qui ne correspond pas à celle des "enfants" en droitcommunautaire, étendre le champ d'application de la loi (administrations publiques) etréviser les dispositions sur la durée du travail et les agences de modèles. En outre, leslois portant sur les rapports de service de droit public aux plans fédéral, cantonal etcommunal devraient être révisées. Enfin, dans l'ordonnance 3 relative à la loi sur letravail165 et dans l'ordonnance sur la prévention des accidents et des maladies profes-sionnelles166, les divergences avec le droit communautaire portent sur le champ d'ap-plication (plus restrictif en droit suisse), la gestion des risques (analyse des risques etdétermination des mesures), ainsi que sur certaines dispositions techniques relativesnotamment aux agents biologiques et aux substances chimiques, aux substances can-cérogènes, aux chantiers et au travail à l'écran.

Dans le domaine de l'information des travailleurs dans les entreprises et les groupesd'entreprises à dimension communautaire, la législation suisse devrait être adaptée(par ex. par une révision de la loi sur la participation ou par l'élaboration d'une loispéciale). Cette législation aurait pour thème la création d'un comité d'entreprise eu-ropéen ou la mise sur pied d'une procédure tendant à l'information et à la consultationdes travailleurs dans les entreprises ou groupes d'entreprises actifs au plan commu-nautaire.

L'introduction d'une assurance-maternité, et du congé-maternité rémunéré qui lui estlié, figurent dans l'agenda politique suisse indépendamment du processus d'intégrationet va dans le sens de ce qu'exige le droit communautaire. Les conséquences financiè-res sont exposées dans le message y relatif167. En cas d'adhésion à l'UE, l'adaptationdu droit suisse au droit communautaire (congé parental non payé) n'engendrerait quedes coûts supplémentaires modestes.

En cas de participation à l'EEE, les effets seraient les mêmes que ceux découlantd'une adhésion à l'UE, dans la mesure où l'acquis communautaire décrit dans le pré-sent chapitre devrait également être repris. En cas d'entrée en vigueur de l'accord surla libre circulation des personnes, des mesures d'accompagnement sont prévues quitouchent à certains aspects de la politique sociale (voir ch. 221.02.2, let. D). Dans le

163 Loi fédérale du 13 mars 1964 sur le travail dans l'industrie, l'artisanat et le commerce (Loi sur le travail, RS

822.11) fixe la durée hebdomadaire maximale de travail à 45 ou 50 heures selon le type d'entreprise et lecontingent annuel d'heures supplémentaires à 170, pour une durée hebdomadaire maximale de travail de 45heures, ou à 140, pour une durée hebdomadaire maximale de 50 heures, alors que la directive communau-taire fixe la durée hebdomadaire maximale de travail à une moyenne de 48 heures sur quatre mois, heuressupplémentaires comprises.

164 La loi fédérale sur le travail fixe la durée du travail de nuit à 9 heures, alors que la directive communautaireprévoit une moyenne de 8 heures par nuit.

165 Ordonnance 3 du 18 août 1993 relative à la loi sur le travail (Hygiène, OLT 3), RS 822.113.166 Ordonnance du 19 décembre 1983 sur la prévention des accidents et des maladies professionnelles

(Ordonnance sur la prévention des accidents [OPA]), RS 832.30.167 Message du 25 juin 1997 concernant la loi fédérale sur l'assurance-maternité (LAMal), FF 1997 IV 881.

Page 103: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 101 - Chapitre 2

cas du maintien de la situation actuelle, et donc indépendamment du processus d'inté-gration, notre législation tend à une harmonisation avec le droit communautaire (voirch. 213, let. B.4).

222.03 Politique agricole, vétérinaire, alimentaire et forestière

222.03.1 Politique agricole

A Politique de l’UE

La politique agricole commune (PAC) repose sur trois principes: l'unicité des marchés(libre circulation des produits à l'intérieur de la CE), la préférence communautaireassortie d'une politique commune en matière de commerce extérieur (priorité accor-dée à la commercialisation des produits communautaires et protection contre les im-portations) et la solidarité financière (financement de la PAC)168. Tout au long de sonexistence, la PAC a subi diverses adaptations. Les mesures prises n'ayant cependantpas suffi à résoudre les problèmes, la CE a procédé en 1992 à une réforme en profon-deur de sa politique agricole. Cette réforme, qui n'a pas remis en question les princi-pes de base de la PAC, s'est traduite par une baisse substantielle des prix des produitsagricoles, la compensation des effets de cette baisse par des aides directes et le re-cours à des mesures limitant l'utilisation des moyens de production. En parallèle, laCE a pris des mesures dites d'accompagnement destinées à renforcer les actions deprotection de l'environnement, à favoriser la cessation de l'activité de certaines caté-gories d'agriculteurs âgés et à faciliter l'utilisation des terres agricoles pour d'autresusages, tels que la forêt ou les loisirs.

La réforme de 1992 a été mise en place durant les années 1993 à 1996. En 1995, laCommission a souligné, dans un document de stratégie agricole, la nécessité d'appro-fondir et d'étendre la réforme de 1992, en accentuant le remplacement des mesures desoutien des prix par des aides directes et en accompagnant ce processus d'une politi-que de développement rural cohérente. Le processus de réflexion ainsi engagé a étéconcrétisé par les propositions faites par la Commission dans le cadre de sa communi-cation "Agenda 2000 - Pour une Union plus forte et plus large" (voir ch. 253).

B Politique suisse

En Suisse, comme dans la CE, la politique agricole fait l'objet depuis 1992 d'un pro-cessus de réforme. La politique menée depuis la Seconde guerre mondiale - qui con-sistait notamment à garantir le revenu par les prix - ayant, pour des raisons à la foisinternes et externes, atteint ses limites, le Conseil fédéral a été amené à poser, dans leSeptième rapport sur l'agriculture du 27 janvier 1992169, les bases d'une réorientationde la politique agricole suisse.

168 Pour les détails, voir rapport du Conseil fédéral du 18 mai 1992 sur la question d'une adhésion de la Suisse à

la Communauté européenne, FF 1992 III 1129 (ch. 5.42).169 FF 1992 II 1.

Page 104: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 102 - Chapitre 2

En 1996, le peuple et les cantons ont créé la base constitutionnelle de la réforme enacceptant, à une large majorité, un nouvel article constitutionnel 31octies. Cette dispo-sition définit les tâches d'une agriculture multifonctionnelle et durable, ainsi que lesmesures de politique agricole. La nouvelle loi sur l'agriculture du 29 avril 1998, quiest entrée en vigueur le 1er janvier 1999170, a un double objectif: d'une part, améliorerla compétitivité du secteur agro-alimentaire par la réduction des interventions étati-ques et, d'autre part, promouvoir une agriculture écologique et durable, les paiementsdirects n'étant octroyés aux agriculteurs qu'à la condition qu'ils remplissent des pres-tations écologiques.

Au vu des réformes en cours aussi bien dans la CE qu'en Suisse, on constate un pro-cessus de rapprochement de la politique agricole suisse et de la PAC. Les deux politi-ques tendent au développement d'une agriculture multifonctionnelle à l'aide de mesu-res semblables: diminution du soutien par les prix et augmentation des aides directes.Dans sa démarche, la Suisse va cependant plus loin que la Communauté, car elle ré-duit de manière plus substantielle les interventions étatiques et met davantage l'accentsur les paiements directs non liés à la production. En dépit du rapprochement quis'opère au niveau de la conception, des objectifs et des instruments, il subsiste cepen-dant une grande différence en ce qui concerne le niveau du soutien.

C Relations contractuelles existantes

Depuis longtemps, la Suisse a conclu des accords bilatéraux agricoles notammentavec des pays voisins: Allemagne, France, Italie et Autriche. Ces accords visaient àpermettre un meilleur accès aux exportations agricoles suisses traditionnelles, tellesque les fromages et le bétail d'élevage, en contrepartie de concessions en faveur deproduits agricoles comme les spécialités de viandes et de fromages.

Au fur et à mesure du développement du processus d'intégration européenne, les ac-cords avec la Communauté ont pris le relais de ces arrangements bilatéraux. Au fil desans, la Suisse et la CE ont conclu quelque trente accords agricoles de portée variable.A titre d'exemple, on peut citer les différents échanges de lettres concernant les fro-mages et le bétail d'élevage. Notons également que le secteur primaire est en principeresté exclu de l'Accord de libre-échange conclu en 1972. Seule une clause évolutivedans le sens d'une déclaration d'intention y figure171. Les relations commerciales entrela Communauté et la Suisse dans le domaine agricole sont avant tout déterminées parles règles et les disciplines générales de l'Organisation Mondiale du Commerce(OMC) et spécifiquement par l'Accord sur l'agriculture.

170 Loi fédérale du 29 avril 1998 sur l'agriculture (loi sur l'agriculture, LAgr), RS 910.1.171 Voir l'article 15 de l'Accord de libre-échange Suisse-CE du 22 juillet 1972, RS 0.632.401.

Page 105: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 103 - Chapitre 2

D Répercussions sur la Suisse

D.1 Introduction

La CE est tout à la fois notre principal fournisseur et notre principal débouché pour cequi est des produits agricoles. Ainsi, en 1997, nos importations de produits agricolesen provenance de la Communauté s'élevaient à près de 5,4 milliards de francs, ce quireprésente 71% de nos importations totales de produits agricoles. Les principaux pro-duits importés de la Communauté sont les vins, les fruits et légumes, les fleurs cou-pées et plantes, ainsi que les fromages. Quant à nos exportations de produits agricolesen direction de la CE, elles atteignaient, en 1997, environ 2 milliards de francs, soit64% des exportations totales de produits agricoles. La Suisse exporte avant tout desfromages et des produits agricoles transformés. Au cours des années, notre dépen-dance envers la CE a augmenté. Cela est dû, d'une part, aux élargissements consécu-tifs et, d'autre part, à la politique communautaire en matière d'exportation de produitsagricoles.

Sur le plan des structures, on constate certaines similitudes en ce sens que c'est l'ex-ploitation paysanne et familiale qui prévaut. En Suisse, la dimension moyenne desexploitations agricoles gérées à titre principal est légèrement supérieure à 13 ha(1996), alors qu'elle s'élève à 6 ha en Italie, 13 ha en Autriche, 28 ha en Allemagne,35 ha en France et atteint même 67 ha au Royaume-Uni (1993).

Sur le plan de l'emploi, le secteur primaire occupe 5,3% (1995) de la population ac-tive dans la CE avec cependant des différences sensibles selon les Etats membres, lapart de la population active occupée dans l'agriculture atteignant 2,1% au Royaume-Uni, 3,3% en Allemagne, mais plus de 20% en Grèce. En Suisse, l'agriculture emploie4,1% (1995) de la population active.

D.2 Adhésion à l’UE et maintien de la situation actuelle

Les conséquences sur notre agriculture d’une adhésion de la Suisse à l’UE ou, aucontraire, de la voie solitaire, font l’objet des lignes qui suivent. En traitant conjoin-tement ces deux variantes, il est possible de les comparer directement.

Une adhésion à l'UE entraînerait, comme conséquence fondamentalement différentepar rapport à l'approche sectorielle ou à l'option EEE, l'obligation pour la Suisse dereprendre intégralement la politique agricole commune. A l'heure actuelle, les effetsd'une adhésion peuvent être évalués de manière tendancielle, mais pas de façon ab-solue, car un certain nombre de facteurs importants ne sont pas connus. Des incertitu-des existent en effet en ce qui concerne l'évolution du processus de réforme dans laCE, les propositions de la Commission (Agenda 2000) devant encore être concrétiséeset appliquées. Il en va de même à l'égard de l'évolution économique générale, desconséquences du processus d'élargissement de l'UE aux pays d'Europe centrale etorientale et des effets des futures négociations commerciales multilatérales dans lecadre de l'OMC. Cela étant, comme l'a montré l'exemple de l'adhésion en 1995 des

Page 106: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 104 - Chapitre 2

anciens pays de l'AELE (Autriche, Finlande et Suède), notre pays devra reprendre lesdifférentes organisations de marché et ouvrir son marché aux produits communautai-res. En contrepartie, le marché européen sera aussi ouvert aux produits agricoles suis-ses.

Si la situation actuelle était maintenue, les dispositions légales introduites dans le ca-dre de la Politique agricole 2002 resteraient déterminantes. Les négociations agricolesdu prochain cycle de l’OMC et l’importance du soutien financier qui sera accordé àl’agriculture pourraient toutefois exercer une influence décisive sur l'évolution future.Il est actuellement impossible de quantifier cette évolution avec précision. On es-compte toutefois qu’à l’issue du prochain cycle de négociations de l’OMC, la protec-tion à la frontière des produits agricoles, le soutien interne lié aux produits et, surtout,les subventions à l’exportation subiront une nouvelle réduction. La coupe décidée parle Parlement en matière de soutien à la production et au placement permettra certesd’autres réductions dans le cadre de l’OMC. En revanche, l’issue desdites négocia-tions renforcera la concurrence sur le marché agricole suisse tant que subsisteront desécarts de prix importants par rapport au marché mondial. On s’attend en outre à ceque les accords de libre-échange prévus avec divers Etats - accords portant en partiesur le commerce agricole - conduisent à un nouvel allégement de la protection à lafrontière. Par contre, le soutien financier de l’Etat en faveur de l’agriculture n’a plusguère de chances d’augmenter.

En dépit des incertitudes existantes, nous essayerons d’exposer ci-dessous dans quellemesure une adhésion à l’UE ou le maintien de la situation actuelle pourraient influersur l’agriculture de notre pays. Les données se fondent en l’occurrence sur les calculsde l’Institut d’économie rurale de l’EPF de Zurich. Celui-ci a été chargé, d’une part,d’évaluer les effets sur l’ensemble du secteur agricole, d’autre part, de démontrer dequelle manière un changement des conditions générales se répercuterait sur diverstypes d’exploitations172.

Ainsi que nous l’avons déjà dit, les politiques agricoles de la Suisse et de l’UE sont enpleine mutation. Les calculs ne se réfèrent donc pas à une comparaison des situationsactuelles, mais partent de l’année 2003 pour une comparaison avec une période pluséloignée dans l’avenir, soit l’année 2007. D’ici là, il sera possible d’évaluer les déve-loppements probables découlant de l’Agenda 2000. Le scénario UE fait état d’unesituation sans tenir compte de mesures transitoires.

Hypothèses formulées pour les calculs173

Les estimations du scénario UE pour 2007 sont fondées sur des prix européens où lesbaisses proposées dans le cadre de l’Agenda 2000 sont déjà prises en compte. Lesprix à la production de l’UE s’aligneront ainsi sur le niveau mondial actuel, pour les

172 P. Rieder/M. Lips/R. Jörin, Auswirkungen eines EU-Beitritts auf die Schweizer Landwirtschaft, Zurich

1998. B. Lehmann/Ch. Eggenschwiler, Einzelbetriebliche Entwicklungsmöglichkeiten verschiedener Be-triebstypen unter EU-Rahmenbedingungen, Zurich 1998.

173 Les hypothèses adoptées pour les calculs n'impliquent aucun message politique.

Page 107: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 105 - Chapitre 2

céréales par exemple, ou ils s’en rapprocheront fortement. Ainsi, pour les céréales, lesproducteurs toucheront un prix minimal de quelque 15 francs le quintal; pour le lait,ce prix sera d’environ 41 centimes le kilo, alors que pour les taureaux, il représenteraà peine 3 francs le kilo de poids mort. Les calculs reposent sur l’hypothèse que lesprix du marché mondial continueront d’augmenter jusqu’en 2007, cela en raison dedifférents facteurs tels que la croissance démographique et le recul des exportationssubventionnées suite aux engagements pris dans le cadre de l’OMC. D’où, selon lesexperts, un dépassement de 15% des prix minima de l’UE prévus dans l’Agenda2000. On estime par ailleurs que l’excellente qualité de divers produits suisses (lait,viande, légumes, par ex.) permettra d’obtenir un prix de 10% plus élevé en moyennesur le marché européen. Cette hypothèse se trouve d’ailleurs étayée par des statisti-ques qui font apparaître des écarts de prix substantiels sur le marché communautaireainsi qu’un dépassement certain des prix d’intervention selon le pays ou la région.

En procédant à la réforme de sa politique agricole en 1992, la CE a elle aussi déve-loppé son système de paiements directs. A titre d’innovation importante, on mention-nera les paiements directs versés en compensation des baisses de prix et des presta-tions écologiques fournies par les agriculteurs. Au cas où elle deviendrait membre del’UE, la Suisse devrait reprendre le système communautaire des paiements directs,lequel sert de référence à nos calculs. Les agriculteurs peuvent, en principe, toucherles paiements directs suivants:

- Paiements directs liés aux produits et destinés à compenser les baisses de prix. Engros, il est fait une distinction entre les primes pour les cultures arables et les pri-mes pour les animaux. Ces paiements sont prélevés intégralement sur le budgetagricole de la CE. Les Etats ne bénéficient que d’une marge de manoeuvre trèsétroite. Les taux prescrits sont contraignants pour l’ensemble de l’UE. L’Agenda2000 met un montant déterminé à la disposition de chacun des Etats, montant qu’ilssont libres de distribuer selon leurs propres critères dans les limites de barèmesmaximums. L’agriculture suisse pourrait s’attendre à des paiements directs liés auxproduits équivalant à quelque 500 millions de francs.

- Paiements compensatoires pour zones défavorisées. Ces paiements sont verséssous forme d’une contribution par hectare et sont cofinancés par la CE. La CE fixedes taux minimums et maximums contraignants et les pays ont l’obligation de leséchelonner dans cette fourchette en fonction des difficultés rencontrées dans les ré-gions. Ces contributions viendraient remplacer les actuelles contributions aux fraisdes détenteurs de bétail. Pour ce qui est des contributions à l’exploitation du sol(terrains en pente et estivage), on admet qu’elles seraient maintenues même en casd’adhésion à l’UE. En tout, quelque 300 millions de francs pourraient être verséspour compenser des conditions de production difficiles et environ 60 millions autitre de contributions d’estivage, comme tel est déjà le cas aujourd’hui.

- Paiements directs pour prestations écologiques. C’est dans ce domaine que le ver-sement des paiements directs bénéficie de la plus grande latitude. Dans son Agenda2000, la CE prescrit des barèmes maximums par hectare, pour lesquels un cofinan-cement de la Communauté est possible. On admet dans les calculs que ces tauxmaximums plafonneront dès que le niveau écologique prévu par la Politique agri-

Page 108: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 106 - Chapitre 2

cole 2002 sera atteint. En l’an 2007, il en résulterait pour l’agriculture suisse desrecettes de l’ordre de 800 millions de francs.

- Autres paiements directs. Il est admis dans les calculs que les paiements directs àvocation sociale (allocations pour enfants), le remboursement de l’impôt sur lescarburants et les contributions prévues à l’art. 18d de la loi sur la protection de lanature et du paysage174 pourront être maintenus. Pour ce qui est des paiements di-rects à vocation sociale, on s’attend à une augmentation par rapport aux prestationsactuelles. Cette progression serait nécessaire pour permettre à l’agricultured’accomplir les tâches qui lui sont dévolues par la constitution, dans le contextegénéral de l’UE. En Allemagne aussi, les paiements directs à vocation sociale con-tribuent d’une manière substantielle à assurer le revenu agricole. On admet géné-ralement que quelque 600 millions de francs de paiements directs financés parl’Etat puissent être versés à ce titre.

Une adhésion à l’UE entraînerait aussi des changements substantiels au niveau descoûts. Les coûts variables subiraient une adaptation rapide. Ainsi, les dépenses liéesaux fourrages concentrés seraient réduites de moitié environ, ce qui diminuerait lescoûts variables d’un quart. Il est par ailleurs admis que les moyens de production se-raient utilisés avec plus d’efficacité du fait de la pression économique, d’où une ré-duction supplémentaire de 15% des coûts variables. En ce qui concerne les coûtsstructurels, il faudrait s’attendre à une diminution de l’emploi pour des motifs d’ordreéconomique. Selon les calculs, les dépenses liées à l’embauche agricole reculeraientd’un quart. On admet par ailleurs que les agriculteurs trouveraient le moyen de cons-truire à meilleur compte, ce qui diminuerait de 50 millions de francs les amortisse-ments. Les calculs impliquent en outre un progrès technique de 1% par année et uneévolution structurelle de l’ordre de 2%.

Si la situation actuelle était maintenue, on admet que d’ici à l’an 2007, l’alignementdes prix à la production sur ceux de l’UE se poursuivrait. On se réfère ici aux prix quiseront pratiqués à l’échéance du délai transitoire avant l’introduction de la Politiqueagricole 2002, en admettant que l’écart entre ces prix et ceux de l’UE en 2007 se ré-duise de moitié. Si la Suisse optait pour la voie solitaire, les coûts baisseraient moinssensiblement qu’en cas d’adhésion à l’UE. On admet aussi que même si la Suissechoisissait la voie solitaire, elle disposerait de 100 millions de francs en moins pourles paiements directs en 2007. Les éventuelles pertes de parts de marché ne sont pasprises en considération dans les calculs.

174 Loi fédérale du 1er juillet 1966 sur la protection de la nature et du paysage, RS 451.

Page 109: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 107 - Chapitre 2

Résultats des estimations

Le tableau ci-après indique les principaux résultats des calculs.

[Montants en milliards de francs] Référence2003

Voiesolitaire

2007

Adhésion àl'UE2007

Production finale (produit des ventes) 6,9 5,7 4,4

Paiement directs175 2,6 2,5 2,3

Total Recettes 9,5 8,2 6,7

./. Coûts variables 2,6 2,1 1,4

./. Coûts structurels (évolution de 2%) 4,4 4,1 3,9

Revenu sectorielmain-d’oeuvre familiale 2,5 2,0 1,4

Les calculs sont de trois ordres. La première colonne sert de référence et montrel’évolution jusqu’en 2003, sous le régime général de la Politique agricole 2002. Sil’année 2003 a été retenue comme référence, c’est parce que nous connaîtrons d’ici làla nature des mesures, ainsi que le montant des moyens financiers disponibles (voir àce propos le message du 18 novembre 1998 concernant l'arrêté fédéral sur les moyensfinanciers destinés à l'agriculture pour les années 2000 à 2003176). C’est à partir decette référence que les scénarios de la voie solitaire et de l’adhésion à l’UE sont com-parés dès 2007.

Si la Suisse devenait membre de l’UE, le produit des ventes de l’agriculture suisserégresserait de quelque 1,3 milliard de francs par rapport à l’option de la voie soli-taire. Par contre, les coûts variables pourraient être réduits d’un tiers. Même ajoutée àla baisse des coûts structurels, cette réduction ne suffirait pas à maintenir au niveauinitial le revenu de la main-d’œuvre familiale engagée dans l’agriculture en 2007.

Il est très difficile de se prononcer dès maintenant sur le déroulement de ce processusd’adaptation, car il dépend de plusieurs facteurs et, en particulier, de la conjoncture.Les calculs de l’EPFZ relatifs aux exploitations individuelles montrent que pour réali-ser un revenu suffisant, les exploitations exclusivement vouées à la culture deschamps devraient s’adjoindre plus de surfaces que les exploitations d’élevage. Il suf-firait que ces dernières accroissent sensiblement leurs capacités de production - parex. leur contingent laitier - pour être en mesure de suivre l’évolution des revenus. Plusles possibilités d’emploi seraient nombreuses en dehors de l’agriculture, plus les en-treprises dont les revenus sont insuffisants se tourneraient vers un moded’exploitation accessoire. Pour que le niveau des revenus puisse être maintenu,

175 Y compris les paiements directs à vocation sociale et le remboursement de l'impôt sur les carburants.176 FF 1999 ...

Page 110: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 108 - Chapitre 2

l’évolution structurelle devrait, au cours des dix prochaines années, osciller entre les2% actuels et un taux de 5% par année.

Selon les calculs de l’EPFZ, si la Suisse se décidait pour la voie solitaire au lieud’adhérer à l’UE, le revenu sectoriel de la main-d’œuvre familiale serait de 0,6 mil-liard de francs plus élevé en 2007. Il faut cependant tenir compte du fait que les ré-sultats du prochain cycle de négociations OMC commenceront seulement à avoir deseffets; les calculs ne tiennent par ailleurs pas compte des éventuelles pertes de partsde marché.

Mesures de transition

Dans un proche avenir, l’agriculture ne pourrait guère supporter une adhésion à l’UEsans délai transitoire ni mesures ciblées facilitant le processus d’adaptation. Comptetenu de la situation générale actuelle et de celle qui est escomptée à moyen terme, ilconviendrait en particulier d’examiner à fond diverses mesures. Voici un traind’interventions, qui a déjà été appliqué dans les pays membres de l’UE ou qui conti-nue de l’être aujourd’hui:

- Paiements directs dégressifs destinés à compenser les baisses de prix et les réduc-tions des paiements directs: ces paiements directs doivent être réduits progressive-ment dans les limites d’un délai transitoire négociable.

- Solution spécifique en faveur des régions de montagne et de la zone préalpine descollines: l’Autriche a négocié un moratoire de dix ans pour la région de montagne,soit une garantie des acquis pour les aides directes pendant cette période. Une so-lution analogue pourrait être envisagée pour la Suisse, afin de maintenir l’évolutionstructurelle en montagne dans des limites raisonnables et d’éviter une déstabilisa-tion sociale de la région.

- Programme de désendettement de l’agriculture: en comparaison européenne,l’endettement de l’agriculture suisse est relativement important, ce qui entrave sacompétitivité177. Les exploitations ne disposent pas d’assez de fonds propres pourse désendetter à court terme. En cas d’adhésion à l’UE, il conviendrait doncd’envisager des mesures de désendettement.

- Programme d’atténuation de l’évolution structurelle: l’UE donne la possibilité auxEtats d’instaurer un système de rentes de préretraite, système que la Suisse pourraitreprendre en cas d’adhésion. Il conviendrait par ailleurs de prévoir un programmed’aide à la reconversion, afin de faciliter la réorientation professionnelle des ex-ploitants qui n’ont pas encore atteint l’âge de la préretraite et dont l’exploitation neleur assure plus les bases d’existence nécessaires.

177 J. Deiss/R. De Rosa: Die Verschuldungssituation der Schweizer Landwirtschaft (cette étude sera achevée au

printemps 1999).

Page 111: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 109 - Chapitre 2

Appréciation générale

Une adhésion à l’UE constituerait, dans un proche avenir, un grand défi pourl’agriculture suisse et exigerait d’elle d’importantes adaptations. Il en est de même dessecteurs situés en amont et en aval.

La Politique agricole 2002 améliore d’ores et déjà la compétitivité de l’agriculturesuisse en Europe. Une adhésion à l’UE exposerait cependant nos agriculteurs à unepression économique beaucoup plus forte. Plus une adhésion serait rapide, plus gran-des seraient les adaptations nécessaires. Si notre pays devenait membre de l’UE,l’agriculture suisse dépendrait pendant un certain temps de mesures facilitant la tran-sition, mesures qui feraient l’objet des négociations d'adhésion.

L’agriculture suisse vient au devant de la réforme agricole lancée par l’UE en 1992 et,en particulier, des mesures plus ciblées liées à l’Agenda 2000. Certes, si ce dernierentraîne une nouvelle réduction des prix de certains produits de base, il prévoit aussiune augmentation des contributions en faveur des zones défavorisées et élargit lamarge de manoeuvre en matière de compensation des prestations écologiques. Lesmoyens financiers destinés à rémunérer lesdites prestations représenteraient, pourl’agriculture suisse, quelque 30% des paiements directs envisageables dans le con-texte de l’UE.

En cas d’adhésion, le soutien de l’Etat sous forme d’aides financières et d’indemnitésau profit de l’agriculture passerait de quelque 4 milliards de francs (dépenses de laConfédération pour l’agriculture et l’alimentation) à 2,9 milliards. Ne sont pas com-pris dans ces chiffres les aides financières supplémentaires qui seraient éventuelle-ment accordées pour faciliter la transition. L’UE financerait 0,9 de ces 2,9 milliardsde francs et utiliserait surtout ce montant pour cofinancer les paiements directs (voirch. 251). Pour ce qui est des domaines relevant de chaque pays, il s’agit des mesuresdestinées à améliorer les bases de production (recherche agricole, formation, vulgari-sation, crédits d’investissements), des paiements directs à vocation sociale et du rem-boursement de l’impôt sur les carburants.

Cela étant, l'adhésion à l'UE offrirait des opportunités nouvelles et procurerait desavantages à notre agriculture. L'ouverture des marchés améliorerait fortement les pos-sibilités d'exportation des produits agricoles suisses vers un grand marché de 370 mil-lions de consommateurs et notamment vers les régions voisines de notre pays, dont lespopulations possèdent un haut pouvoir d'achat.

Le fait d'être membre de l'UE nous permettrait en outre, sur le plan international, demieux défendre les intérêts de l'agriculture suisse envers les pays exportateurs de pro-duits agricoles, l'Union européenne, tout comme la Suisse, défendant le concept d'uneagriculture multifonctionnelle et durable.

Page 112: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 110 - Chapitre 2

Si la situation actuelle était maintenue, il faudrait tout de même s’attendre à une forteaugmentation de la pression concurrentielle sur l’agriculture suisse et à un alignementde nos prix à la production sur ceux que pratiquent nos voisins.

Les futures négociations menées au sein de l'OMC et avec des partenaires de libre-échange auront sans doute pour conséquence un accès facilité au marché agricolesuisse. La pression sur les prix des produits agricoles suisses qui risque d'en résulterdevra être absorbée par la poursuite de l'amélioration de la compétitivité de l'agricul-ture suisse au-delà de la politique agricole 2002. Il convient, par ailleurs, de remar-quer que les futures négociations auront également pour effet de réduire la protectiondu marché communautaire.

D.3 Accords sectoriels, participation à l’EEE

Pour l'agriculture, les deux options que sont les accords sectoriels et la participation àl'EEE seraient largement identiques dans leurs effets. Ni l’une, ni l’autre n’implique-raient la reprise de la politique agricole commune (PAC), si ce n’est, en ce qui con-cerne EEE, l’adoption de l’acquis communautaire dans certains domaines techniques.Les deux démarches se limiteraient pour l'essentiel à faciliter, sur une base récipro-que, les échanges de produits agricoles. Dans le cadre des accords sectoriels, la CE etla Suisse prévoient une amélioration réciproque de l'accès au marché sous forme deconcessions tarifaires dans différents secteurs, dont celui des fromages. Des accordsvisant la suppression des entraves techniques aux échanges sont en outre prévus dansdivers domaines. Les concessions agréées sont à apprécier de manière positive sousl'angle suisse, car elles donnent à plusieurs secteurs, notamment celui des fromagesmais aussi celui des fruits et légumes, de meilleures possibilités d'exportation vers lemarché communautaire, voire même, à moyen terme, le libre accès comme cela estprévu pour les fromages. La Suisse doit disposer d'un meilleur accès au marché com-munautaire si elle entend maintenir une agriculture productive, conformément à l'ob-jectif de la réforme de sa politique agricole. Il ne faut toutefois pas oublier que,compte tenu du principe de réciprocité, notre pays devra également ouvrir son marchéaux produits de la CE dans les secteurs couverts par l'accord sectoriel. La productionindigène devra donc faire face à une concurrence accrue. Cela sera particulièrement lecas dans le secteur des fromages où la libéralisation envisagée aura certainement deseffets importants tant au niveau des prix qu'au niveau des structures de l'industrie lai-tière qui devra s'adapter à la concurrence étrangère. Dans les autres secteurs, les effetsdevraient être beaucoup plus faibles vu la portée relativement modeste des conces-sions agréées.

Cela dit, il convient également de relever que l'approche sectorielle et la voie del’EEE n’empêcheraient pas la pression sur les prix et sur le volume de production quirésultera des futures étapes de libéralisation du commerce international des produitsagricoles (entre autres au sein de l'OMC) et ne permettraient pas à notre agriculture unaccès total au marché communautaire. En outre, les variantes susmentionnées ne per-mettraient pas à notre agriculture de profiter du poids négociatoire de l'UE dans lesnégociations agricoles menées sur un plan mondial ou intercontinental.

Page 113: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 111 - Chapitre 2

222.03.2 Droit vétérinaire

A Acquis communautaire

L'acquis communautaire en matière de droit vétérinaire a pour objectif de protéger lasanté de l'homme et de l'animal. Il concerne les épizooties et les denrées alimentaires,en mettant particulièrement l'accent sur le commerce des animaux et des produitsd'origine animale. Le droit vétérinaire de la CE n'a cessé de se développer; en effet,seule une harmonisation des mesures de police sanitaires par la CE pouvait conduire àlever les entraves aux échanges commerciaux des biens agricoles d'origine animale.

Parmi les récentes et principales nouveautés, on relèvera la stricte réglementation dutransport des animaux. Tous les déplacements de bovins, d'ovins, de caprins et deporcins doivent être consignés, ceux des bovins et des porcins au moyen d'une banquede données électronique.

B Politique suisse

L'objectif de politique européenne de la législation suisse est d'atteindre l'équivalenceavec la législation communautaire, avant tout pour maintenir, ou améliorer, l'accès aumarché. La protection uniforme des consommateurs en est un aspect essentiel. Lesprojets du paquet Eurolex prenaient en compte les normes communautaires adoptéesjusqu'au 31 juillet 1991 et faisaient partie de l'acquis au moment de la votation surl'EEE. La loi sur les épizooties178, révisée dans le cadre de Swisslex179, est aujourd'huieurocompatible. La loi sur les denrées alimentaires180 présente encore des lacunes làoù elle touche au droit vétérinaire (pour plus de détails voir ch. 222.03.3). Il n'existeen Suisse notamment aucune base légale répondant à l'exigence communautaire d'unagrément des établissements de transformation de la viande et d'un contrôle vétéri-naire de ces établissements. Il s'ensuit que les établissements suisses qui produisent dela viande ou des produits à base de viande destinés à l'exportation sont tenus de res-pecter des conditions différentes de celles requises pour le marché indigène. Le droitsur l'élevage des animaux deviendra eurocompatible avec l'entrée en vigueur des dis-positions d'exécution de la nouvelle loi sur l'agriculture, tandis que le droit sur l'hy-giène du lait est équivalent au droit communautaire depuis 1996.

C Relations contractuelles existantes

L'accord relatif au transport des marchandises181 réglemente entre autres choses leséchanges d'animaux et de marchandises d'origine animale. La convention entre la

178 Loi fédérale du 1er juillet 1966 sur les épizooties (LFE), RS 916.40.179 Voir message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'Accord EEE, FF 1993 I 805.180 Loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les denrées alimentaires et les objets usuels (loi sur les denrées alimentai-

res), RS 817.0.181 Accord du 21 novembre 1990 entre la Confédération suisse et la CEE relatif à la facilitation des contrôles et

des formalités lors du transport des marchandises, RS 0.631.242.05.

Page 114: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 112 - Chapitre 2

Suisse et l'Autriche sur les épizooties182, les accords frontaliers avec les pays voisinset le compromis d'arbitrage sur les zones franches de Genève183 contiennent aussi desdispositions de droit vétérinaire.

D Répercussions sur la Suisse

D.1 Adhésion à l'UE

Les actes normatifs à reprendre en cas d'adhésion à l'UE ont déjà été largement trans-posés en droit suisse. Des adaptations seraient nécessaires dans la loi sur les denréesalimentaires et dans le droit sur l'hygiène des viandes.

En matière d'exécution, les adaptations suivantes s'imposeraient:

- Droit sur les épizooties: la réglementation relative à chaque épizootie vise danstoute l'UE un objectif commun défini pour chaque épizootie soumise à déclarationobligatoire. L'ordonnance suisse sur les épizooties est dans son principe conforme àce principe.

Le remplacement des contrôles à la frontière par un contrôle au lieu de départ en-traînerait une réduction des attributions du vétérinaire de frontière. Dans le cadredu marché intérieur, la prévention des épizooties ne se fonde pas sur des contrôlesphysiques approfondis aux frontières sur base de politique nationale. Les animauxsont conduits à leur lieu de destination munis d'un document d'accompagnement(certificat d'origine et de santé, certificat de protection des animaux) attestant lescontrôles effectués au lieu de départ. Des contrôles par sondage effectués au lieude destination permettent de vérifier l'identité des animaux et de s'assurer qu'ilssont exempts d'épizooties. L'instauration de cette manière de faire entraînerait uneadaptation des structures cantonales d'exécution. La mise en place d'un système detransmission électronique des données (Animo) est nécessaire pour que le transportdes animaux dans toute l'Europe ne présente pas de dangers. Ce même système de-vrait être établi en Suisse.

- Droit sur l'hygiène des viandes/droit sur les denrées alimentaires: au sein de l’UE,des vétérinaires officiels agréent et contrôlent les établissements de transformationde la viande. L'instauration de ce système en Suisse entraînerait un surcroît de tra-vail pour les autorités d'exécution fédérales et cantonales, lequel ne pourrait êtremaîtrisé avec les effectifs actuels.

- Droit sur la protection des animaux: la protection des animaux, réglée au sein del'UE par des standards minimaux, reste en outre soumise aux réglementations na-tionales. En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse n'aurait donc pas à renoncer à ses pres-criptions plus sévères à l'égard de la détention des animaux.

182 Convention du 30 avril 1947 entre la Suisse et l'Autriche sur les épizooties, RS 0.916.443.916.31 .183 Compromis d'arbitrage du 30 octobre 1924 entre la Suisse et la France au sujet des zones franches de la

Haute-Savoie et du Pays de Gex, RS 0.631.256.934.95 .

Page 115: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 113 - Chapitre 2

D.2 Participation à l'EEE, accords sectoriels et maintien de la situationactuelle

Comme en cas d'adhésion à l'UE, la participation à l'EEE entraînerait la reprise del'acquis communautaire. Contrairement à ce qui se passerait en cas d'adhésion à l'UE,la participation de la Suisse au Comité vétérinaire resterait limitée. Pour le reste, lasituation serait comparable à celle de l'adhésion à l'UE. Il n'est pas exclu que, pour desraisons de protection de l'homme et des animaux, des réglementations nationales plusstrictes puissent être maintenues. Les abattoirs, les stations d'insémination artificielleet d'autres établissements suisses seraient régulièrement contrôlés par l'autorité desurveillance de l'AELE (ESA) et non par les autorités de la CE.

Contrairement à l'Accord EEE, l'accord bilatéral en matière agricole est un accordd'équivalence: la législation suisse ne devra pas reprendre tel quel le droit de la CE,mais être équivalente, autrement dit conduire à des résultats identiques. Des facilita-tions seront possibles en matière de transport des animaux et de marchandises grâce àla simplification ou à la suppression de certains contrôles frontaliers, pour autant quel'équivalence du droit en matière de santé animale ou de denrées alimentaires soit as-surée dans le secteur concerné. L'obtention de l'équivalence dans d'autres domaines,permettra aussi de réduire les contrôles à la frontière.

La transposition de l'accord sectoriel nécessitera, comme en cas d'adhésion à l'UE oude participation à l'EEE, la mise en place d'un réseau de données permettant la trans-mission d'informations sur le transport des animaux et des marchandises, et l'intensifi-cation leur surveillance officielle. Il faudrait donc compter avec un surcroît de travailadministratif.

Le maintien de la situation actuelle signifie que l'accès au marché restera difficilepour les produits suisses. Ayant un statut de pays tiers, la Suisse doit, lors d'exporta-tions vers la Communauté, se soumettre, au moment du contrôle à la frontière, à desprescriptions plus strictes, qui pour les animaux et marchandises suisses sont autantd'obstacles plus élevés à surmonter pour avoir accès au marché communautaire. Etpourtant le statut sanitaire des animaux de rente en Suisse est généralement plus élevéque dans beaucoup de pays tiers, et est assurément comparable à celui de nombreuxEtats membres de l'UE.

222.03.3 Denrées alimentaires et objets usuels(protection des consommateurs)

A Acquis communautaire

L’acquis communautaire qui s’applique aux produits relevant de la loi suisse sur lesdenrées alimentaires184 englobe plus de 100 actes juridiques de base qui contiennent

184 Loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les denrées alimentaires et les objets usuels (loi sur les denrées alimentai-

res, LDAI) RS 817.0.

Page 116: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 114 - Chapitre 2

d'une part, des exigences spécifiques pour certaines catégories de denrées alimentaireset d'objets usuels185 et, d'autre part, des prescriptions horizontales valables pour toutun secteur de production (par ex. dispositions concernant l'hygiène alimentaire, l'éti-quetage ou l'emballage des denrées alimentaires). Ces actes juridiques visent à préser-ver la santé et, pour ce qui des denrées alimentaires, à protéger le consommateur con-tre les tromperies. Dans les domaines où des prescriptions communautaires font dé-faut, c'est le principe de "Cassis de Dijon" qui s'applique (voir ch. 221.01).

Le droit communautaire sur les denrées alimentaires est actuellement en plein rema-niement. La crise de la vache folle a eu pour effet qu’il a été décidé de tenir davantagecompte des intérêts des consommateurs. La politique économique et la législation ontété séparés des avis scientifiques, des inspections et des contrôles. La confiance desconsommateurs en une protection efficace des consommateurs doit être renforcée parune séparation stricte entre la protection des consommateurs et les activités de pro-duction.

Conformément à l'art. 129a du Traité CE, modifié par le Traité d'Amsterdam, toutesles politiques communautaires doivent tenir compte des exigences de la protection desconsommateurs (voir également ch. 222.17). La Commission pourra dès lors êtreégalement plus active dans le domaine de la politique nutritionnelle. Elle considèrequ'il est indispensable que les consommateurs soient mieux informés sur les effets quel’alimentation peut avoir sur la santé. Il s'agit de prendre des mesures visant à pro-mouvoir la prévention dans le cadre d'une politique nutritionnelle globale.

B Politique suisse

Le principe selon lequel les prescriptions techniques doivent être formulées de ma-nière à ne pas engendrer d'entraves techniques au commerce, inscrit à l'art. 4 de la loisur les entraves techniques au commerce186, s'applique également à la législation surles denrées alimentaires et les objets usuels (voir ch. 221.01). Compte tenu du volumedes échanges de marchandises existant entre l'UE et la Suisse, on admet en principeque c'est aux dispositions suisses en matière de denrées alimentaires et objets usuelsde s'aligner sur le droit communautaire. Dans les domaines non harmonisés de laCommunauté, la Suisse s'alignera sur les normes du Codex Alimentarius.

En matière de politique nutritionnelle, la Suisse poursuit une stratégie analogue àcelle de la Communauté. L'information sur une alimentation saine devient aujourd'huitoujours plus importante. Le lien entre des carences alimentaires et diverses maladiesest depuis longtemps établi. C'est pourquoi la Suisse est sur le point de mettre en oeu-vre les directives de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). On peut raisonna-blement s'attendre à ce que les mesures prises par la Suisse soient un jour adaptées àcelles de la CE.

185 Par ex. Novel Food, substituts de repas, bouillies pour nourrissons et enfants en bas âge, jus de fruits.186 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce (LETC), RS 946.51.

Page 117: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 115 - Chapitre 2

C Relations contractuelles existantes

Jusqu'à présent, seul l'Accord de libre-échange conclu avec la CE en 1972 revêt del'importance. Dans cet accord, les parties contractantes se sont engagées à appliquerleurs réglementations en matière de la santé de façon non discriminatoire (art. 15, al.2) et de renoncer à toute nouvelle mesure qui entraînerait une entrave excessive à lacirculation des marchandises.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d'adhésion à l'UE, le droit suisse sur les denrées alimentaires devrait s'alignersur celui de la CE. Actuellement, il existe notamment des divergences quant à l'éti-quetage des denrées alimentaires génétiquement modifiées (ici, la Communauté, con-trairement à la Suisse, n'envisage pas l'étiquetage obligatoire pour les additifs et lesauxiliaires de fabrication génétiquement modifiés, voir ch. 222.14). Dans d'autressecteurs, les dispositions suisses, bien qu'équivalentes à celles de la Communauté,offrent une plus grande marge de manœuvre que le droit communautaire en raisond'un mode de réglementation, "à grandes mailles" qui s’en tient à l'essentiel. Cela si-gnifie que les produits fabriqués conformément au droit communautaire peuvent êtremis sur le marché suisse, alors que ceux fabriqués conformément au droit suisse nepeuvent être mis sur le marché de la Communauté à moins de satisfaire aux disposi-tions communautaires dans tous leurs détails (cela vaut par ex. pour les vins et les spi-ritueux). La Communauté déplore en outre le fait que les produits CE mis sur le mar-ché suisse sont désavantagés, dans la mesure où les entreprises communautaires nepeuvent fabriquer des produits uniquement pour le marché suisse, relativement res-treint, produits qui, à l'instar de nombreux produits suisses, ne satisferaient qu'à desexigences minimales et pourraient dès lors être fabriqués et vendus à meilleur coût.

Dans les domaines non harmonisés au plan communautaire, ce serait le principe de"Cassis de Dijon" qui s'appliquerait (voir 221.01).

S'agissant de la participation au processus de décision du droit communautaire, uneadhésion à l'UE offrirait à la Suisse l'avantage de siéger dans les comités scientifiqueset de participer au système d'alerte intracommunautaire ("Rapid Alert System") quipermet l'échange rapide d'informations entre les Etats membres sur des denrées ali-mentaires dangereuses pour la santé.

Il n'est pas possible, dans le cadre de ce rapport, de présenter les conséquences quel'adhésion aurait sur les cantons, dans la mesure où cela demanderait l'analyse de 26législations cantonales.

Si la Suisse participait à l'EEE, elle devrait reprendre le droit communautaire et leprincipe de "Cassis de Dijon" serait également applicable. Contrairement aux Etatsmembres de l'UE, la Suisse n'aurait, s'agissant de l'élaboration et de la mise en oeuvredu droit communautaire, qu'un statut d'observateur au sein des comités compétents enla matière.

Page 118: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 116 - Chapitre 2

A l'exception du domaine des spiritueux, pour lequel une harmonisation de la législa-tion suisse est prévue, le domaine des denrées alimentaires n'est pas concerné par lesaccords sectoriels.

Si la Suisse choisissait de s'en tenir à la situation actuelle, elle se verrait obligée dereprendre le droit communautaire afin d'éviter les entraves au commerce, sans toute-fois pouvoir coopérer à l'élaboration des nouvelles prescriptions. De plus, il faut rele-ver que la Communauté a jusqu'à présent refusé de laisser la Suisse participer à sonsystème d'alerte rapide (Rapid Alert System). Enfin, notons que la Suisse n'a pu jus-qu'ici avoir accès aux différents comités scientifiques qu'à de rares occasions.

222.03.4 Economie forestière

A Acquis communautaire

Le Traité CE ne contient aucune disposition spécifique concernant l'économie fores-tière au plan communautaire. Les questions relevant du domaine forestier sont géné-ralement réglées dans le cadre de la politique agricole commune (PAC) et de la politi-que environnementale. D'autres réglementations, telles que celle traitant de la protec-tion phytosanitaire à la frontière, sont traitées dans le cadre de la politique commer-ciale.

Depuis 1989, il existe un plan d'action en sept points qui traite essentiellement des do-maines suivants: protection phytosanitaire, recensement des dégâts causés aux forêts,protection des forêts contre les incendies, mise en place d'une banque de donnéescommune, et création d'un comité forestier permanent. Ce dernier constitue l'instru-ment central pour la formulation d'actions communes dans le domaine forestier. Parailleurs, le Parlement européen a invité la Commission à élaborer d'ici deux ans unestratégie forestière commune. On voit également se dessiner un renforcement de l'ac-tivité dans le domaine des forêts de montagne et du développement rural, ce qui auraune influence sur le secteur de l'exploitation forestière.

B Politique suisse

La Suisse s'est rapprochée de la Communauté dans le domaine de la protection desplantes et des mesures phytosanitaires; la législation suisse en la matière a été conçuede façon à être eurocompatible.

C Relations contractuelles existantes

Il n'y a pas, dans le domaine forestier, d'accords spécifiques entre la Suisse et laCommunauté ou ses Etats membres. Dans certains secteurs toutefois, la Suisse coo-père avec la CE sur une base volontaire. Cette coopération concerne avant tout lamise en place de réseaux de recensement communs et les échanges d'informationsdans le domaine de la protection des forêts (recensement des dégâts causés aux forêts,statistique des incendies de forêts).

Page 119: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 117 - Chapitre 2

Le bois et les produits en bois sont exemptés de droits de douane en vertu de l'Accordde libre-échange conclu en 1972 entre la Suisse et la CE.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, il serait nécessaire de s'aligner sur les standards de laCommunauté (en particulier en ce qui concerne les recensements forestiers, la protec-tion contre les incendies, ainsi que la formation). La représentation de la Suisse dansle comité forestier permanent et dans d'autres organes impliquerait de légères dépen-ses supplémentaires. Les indemnisations et les aides financières accordées aux pro-priétaires de forêts ne devraient en revanche guère provoquer de dépenses supplé-mentaires; les mesures d'encouragement seraient cependant réparties différemment.

Les conséquences pour les cantons ne peuvent être présentées dans le cadre de ce rap-port puisqu'il faudrait pour cela analyser 26 législations cantonales.

On ne doit s'attendre à de grands changements pour l'économie forestière suisse ni encas de participation à l'EEE, ni en cas d'entrée en vigueur des accords sectoriels, nien cas de maintien de la situation actuelle.

222.04 Politique en matière de concurrence

Les distorsions de la concurrence peuvent résulter soit des pratiques des agents éco-nomiques - d'où les règles prévues par le Traité CE (art. 85 à 90) qui s'appliquent tantaux entreprises privées que publiques (voir ch. 222.04.1) - soit découlent d’avantagesde certaines entreprises ou branches de production - d'où les prescriptions sur les ai-des d’Etat qui figurent dans le Traité CE (art. 92 à 94), aides qui sont soumises à uncontrôle (voir ch. 222.04.2) -. La particularité des règles communautaires en matièrede concurrence consiste dans le fait qu’elles ne distinguent pas, comme c’est le cas enprincipe des autres dispositions du Traité CE, entre la compétence de la Communautéd’adopter des actes normatifs et celle des Etats membres de les exécuter, mais confè-rent aussi aux institutions de l'UE la compétence d’exécuter le droit communautairede la concurrence.

222.04.1 Droit de la concurrence et contrôle des fusions

A Acquis communautaire

Le droit communautaire de la concurrence vise à préserver cette dernière de distor-sions et, par conséquent, à garantir l'égalité des chances aux agents économiques. Ilconstitue un important pilier du marché intérieur. Ses caractéristiques principalessont: l’interdiction des cartels, l’interdiction d’abuser d’une position dominante et lecontrôle des fusions.

Sont interdits et nuls (interdiction des cartels) les accords restreignant la concurrencepassés entre les entreprises et qui affectent le commerce entre les Etats membres

Page 120: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 118 - Chapitre 2

(marchandises, services, circulation des capitaux). La Commission n’applique toute-fois pas l’interdiction aux cas d’importance mineure187. En outre, elle peut ne pas ap-pliquer cette règle aux accords ayant des effets économiques positifs, qu'ils soientconclus entre deux entreprises ou par groupes, pour autant qu’ils permettent encoreune concurrence efficace.

Dès lors que non seulement les cartels mais aussi les positions dominantes peuventaffecter la concurrence, le droit communautaire interdit l’exploitation abusive d’uneposition dominante si elle affecte le commerce entre les Etats membres.

Les concentrations d’entreprises sont en principe admises. Toutefois, conformémentau règlement CE sur le contrôle des fusions188, en vigueur depuis 1990 et modifié le1er mars 1998, les concentrations sont contraires aux principes régissant le marchéintérieur lorsqu’elles créent ou renforcent une position dominante qui empêcheraitdans une mesure notable une concurrence efficace. Aux fins de contrôle, les concen-trations qui réalisent un chiffre d’affaires d’un certain montant doivent être annoncées(contrôle préventif des fusions).

Le droit communautaire de la concurrence s'applique dans les Etats membres de l’UEet également - dans la mesure où il est intégré dans l’Accord EEE - dans les pays del'AELE participant à l’EEE depuis le 1er janvier 1994. De plus, la Communauté aconvenu, par les accords européens conclus avec les Etats d’Europe centrale et orien-tale, des règles de concurrence qui correspondent largement à celles de la CE. En fait,les règles communautaires de concurrence ne s’appliquent qu'aux pratiques suscepti-bles d’affecter le commerce entre les Etats membres et aux projets de fusions"d’importance communautaire". Les pratiques dont les effets se limitent à un seul Etatmembre restent de la seule compétence de ce dernier. Les législations des Etats mem-bres se sont, au cours des dernières années, de plus en plus alignées sur le droit de laCE. Les Etats d’Europe centrale et orientale ont convenu par les accords européensd’adapter leurs législations au droit communautaire. On constate dès lors, que les dis-positions matérielles fondamentales des Etats européens en matière de concurrence serapprochent de plus en plus (convergence orientée vers le droit de la concurrence dela CE), même si les règles de procédure laissent encore apparaître des divergences.

B Politique suisse

La nouvelle loi suisse sur les cartels189, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1996, aaussi été influencée par le droit communautaire de la concurrence. Elle ne prévoitcertes pas l’interdiction des cartels, mais présume que les accords sur les prix, sur lesquantités et sur la répartition géographique entraînent la suppression d’une concur-

187 Voir la communication concernant les accords d’importance mineure, JO n° C 372 du 9 décembre 1997, p.

13.188 Règlement (CE) n° 1310/97 du 30 juin 1997 modifiant le règlement (CEE) n° 4064/89 sur le contrôle des

concentrations d’entreprises, JO n° L 180 du 9 juillet 1997, p. 1.189 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les cartels et autres restrictions à la concurrence (loi sur les cartels,

LCart), RS 251.

Page 121: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 119 - Chapitre 2

rence efficace ("cartels rigides") et sont par conséquent illicites. Le caractère licite ounon des autres accords en matière de concurrence doit être examiné sous l’angle del’efficacité; les critères ont été repris de l’examen d’exemption du droit communau-taire sur la concurrence. La définition légale de la position dominante et la réglemen-tation sur le contrôle des pratiques des entreprises qui ont une position dominantes’appuient aussi fortement sur le droit communautaire. Il en va de même pour la no-tion du contrôle (préventif) des fusions190. Contrairement à la procédured’approbation de la CE, le droit suisse sur le contrôle des fusions soumet la concen-tration d’entreprises à l’obligation de notification, la Commission restant libre des'opposer ou non à la concentration.

C Relations contractuelles existantes

Les rapports contractuels avec la Communauté en matière de concurrence se limitentà l’Accord de libre-échange de 1972 (ALE). D'après l'ALE, les ententes entre entre-prises visant à limiter la concurrence ne sont pas compatibles avec le bon fonctionne-ment de l’accord, dans la mesure où la pratique incriminée est susceptible d’affecterles échanges entre la Suisse et la Communauté (art. 23 ALE). Le cas échéant, les par-ties contractantes communiquent au comité mixte les renseignements nécessaires àl’examen de la pratique contestée (art. 27 ALE). Seules sont décrites les conditionspermettant aux parties contractantes d’introduire une procédure de consultation ou desauvegarde en vue de supprimer les entraves aux commerce causées par les personnesprivées; en dernier ressort, des mesures de sauvegarde relevant de la politique com-merciale peuvent être prises. Autrement dit, les dispositions sur la concurrence del’Accord de libre-échange ne contiennent pour les entreprises aucune obligation di-recte, matérielle ou formelle191. La loi sur les cartels (art. 58 à 59 LCart) offre tou-jours la possibilité de supprimer les restrictions à la concurrence qui ont pris nais-sance en Suisse et qui ont des effets à l’étranger, pour autant que ces effets soient in-compatibles avec les règles de concurrence contenues dans des accords internatio-naux: le Département fédéral de l’économie peut décider des mesures propres à sup-primer les restrictions en cause. En pratique, l’art. 23 de l’Accord de libre-échanges’est révélé peu efficace. Cela est dû avant tout au fait que les entreprises suisses quiexportent vers l’UE, ou qui y sont actives, sont soumises au droit communautaire descartels en raison du principe de territorialité.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l’UE, la Suisse devrait reprendre l'intégralité du droit commu-nautaire en matière de concurrence; la loi sur les cartels resterait applicable aux prati-ques contraires à la concurrence qui n’affecteraient pas le commerce entre les Etatsmembres et aux fusions de peu d’importance pour la Communauté. La Suisse devraitégalement reprendre les accords internationaux en matière de concurrence conclus parla Communauté (par ex. l’Accord EEE).

190 Règlement du 17 juin 1996 sur le contrôle des concentrations d’entreprises, RS 251.4.191 Voir également ATF 104 IV 175 (E. 2c).

Page 122: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 120 - Chapitre 2

En cas de participation à l’EEE, la Suisse devrait reprendre le droit sur la concur-rence de l’EEE en vigueur à la date de l'adhésion192. Ce droit est matériellement iden-tique à celui de la CE, mais son champ d’application est différent; il présente en outredes particularités du point de vue institutionnel et procédural. Le droit de la concur-rence de l’EEE serait applicable aux pratiques qui affecteraient le commerce entre lesEtats de l’AELE eux-mêmes (Islande, Liechtenstein, Norvège, Suisse) ou entre lesEtats de l’AELE et ceux de la CE. Les pratiques qui affecteraient le commerce entreles Etats de l’UE seraient examinées et sanctionnées dans chaque cas par la Commis-sion de la CE et en dernière instance par la Cour de justice des CE. Par contre,l’autorité de surveillance AELE serait compétente pour les cas de concurrence quiaffecteraient soit exclusivement le commerce entre les Etats de l’AELE soit celui en-tre un ou plusieurs Etats de l’AELE et la CE, pour autant que les entreprises concer-nées dans l’espace AELE réalisent un chiffre d’affaires d’un certain montant.

Avec l’entrée en vigueur des accords sectoriels, la Suisse acceptera que la sur-veillance de l'accord sur le transport aérien au regard du droit de la concurrence soitexercée par les institutions communautaires (voir ch. 222.09.2).

Si la situation actuelle est maintenue, cela signifie que les deux ordres juridiques - ledroit communautaire de la concurrence en tant de droit supranational et le droit suissede la concurrence - restent applicables en parallèle. Si les dispositions sur la concur-rence de l’Accord de libre-échange continuent d'être négligées, les problèmes vonts’intensifier dans le domaine de la concurrence, notamment sur les plans del’instruction des enquêtes et de l’exécution. La Suisse n’échappera pas à une coopé-ration, qui reste encore à définir, avec les autorités communautaire de la concurrence(voire avec d’autres autorités étrangères). Quoiqu'il en soit, la Suisse entend s’engagerdans le domaine du droit de la concurrence pour obtenir au niveau mondial l'unifor-misation de standards minimaux.

222.04.2 Aides d’Etat

A Acquis communautaire

Les aides d’Etat sont étroitement liées au processus d'adaptation des économies natio-nales des Etats membres et à la mise en place du marché intérieur. Face à l'évolutiondes différents secteurs et branches économiques et aux assainissements structurelsdictés par cette évolution, les Etats membres ont recouru partiellement aux subven-tions pour atténuer les difficultés liées à ces adaptations ou pour réaliser des objectifsde nature politique. L’ampleur de ces interventions est du reste significative: au-jourd’hui les aides d’Etat s’élèvent dans l’UE en moyenne à 4% de la valeur ajoutéeindustrielle. Abstraction faite de la question institutionnelles soulevée par les aidesd’Etat, la compétence nationale en matière de politique économique place les autori-tés communautaires de la concurrence devant une tâche particulière. Car il n’y a passeulement les cartels et les accords privés qui peuvent fausser la libre concurrence; les

192 Voir message du 18 mai 1992 sur l’approbation de l’Accord sur l’EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.8).

Page 123: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 121 - Chapitre 2

subventions ou toute autre aide étatique peuvent également favoriser des agents éco-nomiques d’un Etat membre par rapport aux concurrents d’un autre Etat membre. Lesaides accordées par les Etats à certaines entreprises ou à des branches de productionsont donc incompatibles avec le marché intérieur si elles faussent la concurrence oumenacent de la fausser, et si elles entravent le commerce entre les Etats membres.

Le Traité CE contient les dispositions applicables en la matière aux art. 92 à 94. Desrègles spécifiques existent pour l’agriculture (art. 42 Traité CE) et pour les transports(art. 77 Traité CE). Les dispositions déterminantes de la Communauté économique ducharbon et de l'acier se trouvent aux art. 4, 54 et 95 du Traité CECA.

Les aides d'Etat sont insignifiantes lorsqu’elles ne dépassent pas à plus de 100 000euros sur une période de trois ans (pas d’effets sensibles sur la concurrence)193. C'estégalement le cas lorsqu’elles sont accordées à des entreprises qui produisent des mar-chandises ou offrent des services qui ne font pas l'objet d'un commerce intracommu-nautaire, mais sont commercialisées uniquement sur le marché local.

Conformément à l’art. 93, par. 3 du Traité CE, les Etats membres doivent notifier à laCommission les nouveaux projets d’aides avant de les exécuter. L’Etat membre nepeut pas mettre à exécution les mesures projetées avant que la Commission n'ait tran-ché. D’après la jurisprudence de la Cour de justice des CE, cette interdictiond’exécution a des effets directs sur les législations des Etats membres. Ainsi, les tri-bunaux nationaux doivent s’y conformer s’ils arrivent à la conclusion qu’il existe uneaide au sens de l’art. 92, par.1 du Traité194.

Les modalités de notification, les délais ainsi que les droits et obligations des interve-nants dans le cadre de la procédure ont été développés dans la pratique par la Com-mission et la Cour de justice des CE. Un règlement devra encore être élaboré pourl'application des règles de procédure de l’art. 93 du Traité CE. La Commission a déjàprésenté une proposition allant dans ce sens. Une nouveauté importante quant au fondoblige la Commission à exiger de l’entreprise ou de la branche économique favoriséele remboursement de l’aide incompatible avec le Traité, alors que jusqu'à présent laCommission restait libre d'en décider.

B Politique suisse

La politique économique suisse n'est pas de nature interventionniste. Elle encouragela concurrence et le libre-échange plutôt que la protection et l'aide à certains secteurs.Les aides d'Etat en Suisse n'ont donc qu'une importance mineure: en 1996, le montanttotal des aides d'Etat accordées s'est élevé à 224,9 millions de francs, soit 0,06% duPIB.

193 Voir la communication de la Commission concernant les aides insignifiantes, JO n° C 68 du 6 mars 1996,

p. 9.194 Communication de la Commission sur la coopération entre la Commission et les tribunaux des Etats mem-

bres dans le domaine des aides étatiques, JO n° C 312 du 23 novembre 1995, p. 8.

Page 124: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 122 - Chapitre 2

C Relations contractuelles existantes

Selon l’Accord de libre-échange de 1972, les aides d’Etat qui faussent la concurrencesont incompatibles avec le fonctionnement de l’accord, si elles sont susceptiblesd’affecter les échanges entre la Communauté et la Suisse. Cette disposition n’a eujusqu’à aujourd’hui aucune répercussion en pratique.

D Répercussions sur la Suisse

La question de savoir si les subventions que la Suisse accorde seraient compatibles encas d’adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE, doit être examinée au regard dudroit communautaire. Ce dernier n'interdit les subventions que lorsqu'elles affectentles échanges entre Etats membres et lorsqu'elles sont susceptibles de créer une distor-sion de concurrence. Il faut pour cela qu'elles atteignent un certain volume. Dans lapratique, très peu d'aides sont interdites. La Suisse devrait pouvoir maintenir sa poli-tique régionale ainsi que les autres subventions qu'elle accorde pour autant qu'elle usemodérément de ces instruments.

Par ailleurs, la Suisse serait amenée à prendre des engagements en matière de notifi-cation qui iraient au-delà de l'obligation d'information qui est actuellement la siennedans le cadre de l'AELE et de l'OMC. Des indications supplémentaires devraient êtrefournies notamment pour ce qui touche les allégements fiscaux ou les subventionscantonales. L'introduction d'un nouveau type de subvention serait soumise à un mo-ratoire jusqu'à ce que la Commission des CE - en cas d'adhésion à l'UE - ou l'autoritéde surveillance AELE - en cas de participation à l'EEE - l'ait approuvée.

222.05 Marchés publics

A Acquis communautaire

Les pouvoirs publics des Etats de l’Union européenne dépensent chaque année 720milliards d’euros (environ 1 100 milliards de francs) pour acheter des biens et desservices (dont des services de construction), ce qui correspond à 11% du PIB desEtats membres195.

Le cadre juridique communautaire régissant les marchés publics a été élaboré entre1987 et 1993, conformément au programme fixé dans le Livre blanc de 1985 sur lemarché intérieur. Les directives d’adjudication des marchés publics de fournitures etde constructions ont été actualisées en 1988, puis en 1989, et finalement harmoniséesen 1993196. Les marchés de services sont inclus depuis le 1er juillet 1993 dans le sys-

195 Voir le Livre vert de la Commission du 27 novembre 1996 intitulé "Les marchés publics dans l’Union euro-

péenne: pistes de réflexion pour l’avenir".196 Directive 93/36/CEE du Conseil du 14 juin 1993 portant coordination des procédures de passation des mar-

chés publics de fournitures, JO n 199 du 9 août 1993, p.1; Directive 93/37/CEE du 14 juin 1993 portant co-ordination des procédures de passation des marchés publics des travaux, JO n° L 199 du 9 août 1993, p. 54.

Page 125: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 123 - Chapitre 2

tème d’acquisition libéralisé de la Communauté197. Une directive sur les marchés defournitures et de travaux passés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, del’énergie, des transports et des télécommunications (directive "secteurs spéciaux"),qui couvre à la fois les entreprises publiques et celles auxquelles les Etats membresattribuent des droits exclusifs ou spéciaux, a été adoptée par le Conseil en 1990. Uneversion révisée de cette directive incluant les marchés de services a été adoptée enjuin 1993; elle est en vigueur depuis le 1er juillet 1994198. Les directives sur les mar-chés publics obligent les Etats membres, lors de l’adjudication de marchés publicsdont la valeur dépasse un certain seuil, à respecter une procédure transparente et àlaisser jouer librement la concurrence. Elles règlent en outre la publication des appelsd’offres, les procédures d’adjudication applicables, ainsi que les critères de sélectionet d’adjudication.

Il existe également deux directives spéciales concernant les procédures de recours enmatière de passation des marchés publics: l’une s’applique aux domaines classiques(acquisitions de biens et de services, services de construction des organes publics),l’autre, à la passation de marchés par des entreprises dans les secteurs spéciaux del’eau et de l’énergie, des transports et des télécommunications199. Selon ces directives,les Etats membres doivent veiller à ce que les entreprises aient à disposition une voiede recours en cas de violation des dispositions de passation des marchés et qu’ellespuissent faire examiner leur cas par des instances administratives ou par des tribu-naux. La Commission examine en outre les plaintes déposées par des agents écono-miques qui s’estiment lésés par la décision d'un service acheteur. Elle peut, en vertude l’art. 169 du Traité CE, poursuivre un Etat membre qui se serait rendu coupabled’une violation devant la Cour de justice des CE.

Quant à la publication des appels d’offres, la CE a prescrit, à la fin 1998, qu'elles se-raient publiées dans le supplément du Journal officiel des CE. Les informations sontégalement disponibles sur CD-Rom et, le seront également sur Internet à partir du 1er

juillet 1999.

La CE et ses 15 Etats membres ont par ailleurs adhéré à l’Accord multilatéral del’OMC sur les marchés publics du 15 avril 1994 (Accord sur les marchés publics,AMP), entré en vigueur le 1er janvier 1996. Cet accord ouvre les marchés publics dontla valeur dépasse un certain seuil aux fournisseurs des autres pays signataires à l'Ac-

197 Directive 92/50/CEE du 18 juin 1992 sur l’adjudication des marchés publics de services, JO no L 209 du 24

juillet 1992, p. 1.198 Directive 93/38/CEE du Conseil du 14 juin 1993 portant coordination des procédures de passation des mar-

chés dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des télécommunications, JO no 199 du 9 août1993, p. 84.

199 Directive 89/665/CEE du 21 décembre 1989 portant coordination des dispositions législatives et adminis-tratives relatives à l’application de procédures de recours en matière de passation des marchés publics defourniture et de travaux, JO no 395 du 30 décembre 1989, p. 33 (applicable aux marchés de services con-formément à la directive 92/50/CEE); directive 92/13/CEE du 25 février 1992 portant coordination des dis-positions législatives et administratives relatives à l’application de procédures de recours relatives à la pas-sation de marchés par des mandataires dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des télé-communications, JO n° L 76 du 23 mars 1992, p. 14.

Page 126: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 124 - Chapitre 2

cord. Depuis son adhésion, la CE a adapté ses directives régissant les marchés publicsen conséquence.

B Politique suisse

Fondé sur l’accord GATT relatif aux marchés publics conclu dans le cadre du cyclede Tokyo, l'Accord OMC (AMP) sur les marchés publics200 a obligé la Suisse à revoiret à harmoniser sa réglementation en la matière. La Suisse a cependant prévu desobligations plus étendues que l'Accord OMC ainsi que des dispositions régissant lesachats des services cantonaux compétents et des entreprises dans les secteurs del’approvisionnement de l’eau, de l’électricité, des transports urbains et des installa-tions portuaires et aéroportuaires. Contrairement à la CE, la Suisse n’a encore con-tracté dans le cadre de l’OMC aucun engagement au nom de ses communes.

La loi sur les marchés publics (LMP) et son ordonnance201 ont donné aux marchéspublics de la Confédération de nouvelles bases juridiques qui visent à transposerl’accord OMC dans le droit national. La loi sur les marchés publics s’applique àl’administration générale de la Confédération, à la Régie fédérale des alcools, auxécoles polytechniques fédérales, aux services postaux et aux services des automobilespostales de l’entreprise des postes suisses. L’ordonnance s’applique aussi aux CFF.Le principe général veut que les marchés publics de biens et de services ainsi que desservices de construction soient adjugés selon les règles de la libre concurrence. La loirègle la procédure des appels d’offres et la procédure d’adjudication ainsi que lesvoies de recours. Une commission de recours appelée à statuer sur les plaintes en der-nier ressort, a été créée à cet effet. La loi sur les marchés publics dispose que sont ap-plicables les clauses de protection des travailleurs et les conditions de travail détermi-nantes au lieu où sont fournies les prestations. L’organe de publication des appelsd’offres et des adjudications est la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC).

Les cantons ont transcrit les engagements pris au titre de l’Accord OMC sur les mar-chés publics dans un accord intercantonal sur les marchés publics202. Cet accord pré-cise les principes directeurs déterminant la création d’un marché intérieur en Suissede nature à éviter toute discrimination des fournisseurs extra-cantonaux par rapport àceux résidant dans le canton. La principale différence par rapport à la réglementationfédérale en la matière réside dans les valeurs-seuils fixées par l’Accord OMC. Celles-ci s’élèvent pour la Confédération à environ 250 000 francs pour les achats de biens etde services et à 9,575 millions pour les services de construction, alors que pour lescantons ces limites sont respectivement de 383 000 francs pour les biens et les servi-ces et de 9,575 millions pour les constructions. Les appels d’offres doivent être pu-bliés dans la feuille cantonale officielle.

200 RS 0.632.231.42.201 Loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics, RS 172.056.1; ordonnance du 11 décembre 1995

sur les marchés publics, RS 172.056.11202 Accord intercantonal du 25 novembre 1994 sur les marchés publics, RS 172.056.4 Jusqu'à présent, vingt-

quatre cantons ont adhéré audit accord (tous les cantons, sauf Bâle-Campagne et Appenzell-Rhodes intérieu-res). [Etat le 1er décembre 1998].

Page 127: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 125 - Chapitre 2

La loi sur le marché intérieur (LMI) est entrée en vigueur le 1er juillet 1996203. Ellevise notamment à supprimer en Suisse les entraves à la libre concurrence relevant dudroit public et à fixer des principes consacrant le libre accès au marché et le bonfonctionnement du marché intérieur suisse. Elle contient aussi une disposition sur lesmarchés publics des cantons, des communes et d’autres organes assumant des tâchescantonales et communales (art. 5 LMI). La loi sur le marché intérieur renvoie au droitcantonal et intercantonal en vigueur, applicable à ces marchés publics. Ces disposi-tions ne sauraient toutefois défavoriser les personnes établies ou ayant leur siège enSuisse. Cette exigence vaut indépendamment des valeurs-seuils, ce qui signifie que laloi prévoit des voies de recours quel que soit le montant d’un projet d’acquisition.

C Relations contractuelles existantes

L’Accord OMC sur les marchés publics est le fondement des relations juridiquesqu’entretient la Suisse avec la Communauté en matière de marchés publics. Il assureaujourd’hui pour une large part l'accès réciproque aux marchés publics de la Suisse etdes Etats membres204. Cet accès est garanti à partir des valeurs-seuils fixées dansl’Accord OMC pour les marchés publics passés au plan national et au plan inférieur(cantons, Länder, provinces) et pour les marchés passés par des services d'achats pu-blics ou contrôlés par des organismes publics dans les secteurs del’approvisionnement en eau et en électricité, des transports urbains et des installationsportuaires et aéroportuaires. Par conséquent, 70% des marchés publics de l’UE (dontl’ensemble est estimé à 1 100 milliards de francs) sont ouverts aux fournisseurs suis-ses et inversement, 70% des marchés publics suisses (estimés au total à 36 milliardsde francs) sont accessibles aux fournisseurs de l’UE.

D Répercussions sur la Suisse

Une adhésion à l’UE ou la participation à l’EEE ouvrirait, sur base de réciprocité,l'ensemble du marché public des deux parties. Les valeurs-seuils des directives com-munautaires qui sont en partie inférieures aux valeurs prévues dans l’Accord OMC205,s’appliqueraient aux appels d’offres. En cas de participation à l’EEE il resterait mal-gré cela des différences sur le plan institutionnel (voir ch. 213, let. B.3).

L’ accord bilatéral sur les marchés publics avec la CE vise à libéraliser davantage lesmarchés que ne le permet l’Accord OMC. Premièrement, l’accord bilatéral compren-dra aussi les marchés publics des communes. Deuxièmement, les acquisitions desmandataires privés chargés de l’approvisionnement en eau et en énergie, des trans-ports urbains et des installations portuaires et aéroportuaires seront également soumi-ses à l’accord. Troisièmement, les secteurs des transports ferroviaires et des télécom-

203 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur le marché intérieur (LMI), RS 943.02.204 Les autres membres du GPA sont: les Etats-Unis, le Canada, la Corée, le Japon, Israël, la Norvège, la Prin-

cipauté du Liechtenstein, Hong Kong, Singapour et Aruba [état le 1er décembre 1998].205 Voir N. Michel, les effets de l’adhésion à l’Union européenne sur les marchés publics suisses, dans: Cot-

tier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences, Zurich, 1998, 833 et ss,avec d'autres renvois.

Page 128: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 126 - Chapitre 2

munications seront aussi libéralisés, ce qui supprimera l’obligation faite aux fournis-seurs suisses de présenter des offres plus avantageuses de 3% par rapport à leurs con-currents de l’UE, et - pour autant que l’Etat membre concerné le prévoie - de réaliserau moins 50% de la valeur ajoutée sur le territoire de l’UE. Enfin, l’accord s’étendra àtous les marchés publics dans le domaine de l’énergie (électricité, gaz naturel et pro-duction pétrolière) et une clause de bonne conduite ("best endeavour") s’appliqueraau-dessous des valeurs-seuils ce afin d’instaurer une égalité de traitement complèteentre les fournisseurs. La Communauté (Commission des CE) et la Suisse disposerontchacune d’une autorité indépendante pour veiller au respect des clauses de l’accord.L’échange réciproque d’informations sur les appels d’offres et la législation en vi-gueur se fera par des "points de contact". L’accord sectoriel permettra un accès réci-proque au marché, analogue à celui de l’Accord EEE.

En cas de maintien de la situation actuelle, l’Accord OMC sur les marchés publicscontinuera d’être l’unique base légale régissant un accès réciproque aux marchés pu-blics. Les engagements pris à ce titre pourraient être étendus. Vu la multiplicité desintérêts des parties à l’Accord OMC, il est tout à fait pensable qu’une libéralisationentre certaines parties comme la Suisse et la CE, se produise plus vite qu'une libérali-sation générale entre toutes les parties à l'Accord. La Suisse pourrait donc conclure unarrangement bilatéral avec la CE dans le cadre de l'Accord OMC et atteindre un degréde libéralisation analogue à celui obtenu par l’accord sectoriel ou par une participa-tion à l'EEE.

222.06 Droit économique

222.06.1 Droit des sociétés

A Acquis communautaire

La réglementation propre au droit des sociétés a pour but d'imposer aux sociétés sou-mises aux législations nationales un minimum d'obligations uniformes de nature àpromouvoir un régime prévenant les distorsions de concurrence. Une certaine protec-tion doit être assurée aux personnes qui entrent en relations d'affaires avec des socié-tés. Par ailleurs, le droit communautaire des sociétés vise à lever les obstacles juridi-ques de nature à freiner le développement des sociétés en Europe. L'art. 54, al. 3, let.g du Traité CE, qui depuis l'entrée en vigueur du Traité de Maastricht requiert la ma-jorité qualifiée du Conseil pour l'adoption de nouvelles dispositions, constitue lanorme fondamentale en matière de droit des sociétés.

Depuis 1992 aucun changement significatif n'est intervenu dans le domaine du droitdes sociétés. En ce qui concerne les directives et les règlements en vigueur, nous ren-voyons par conséquent aux explications contenues dans le message relatif à EEE206.Les domaines énumérés ci-après donnent un aperçu du champ réglementé par la CE:

- la publication, les pouvoirs de représentation des organes et la nullité de la société;

206 Message du 18 mai 1992 sur l’approbation de l’Accord sur l’EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.96).

Page 129: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 127 - Chapitre 2

- la fondation, le capital social et le maintien du capital des sociétés anonymes;

- la fusion de sociétés;

- les comptes annuels des sociétés anonymes, des sociétés en commandite par ac-tions et des sociétés à responsabilité limitée;

- la scission de sociétés anonymes;

- le comptes annuels consolidés des groupes de sociétés;

- les exigences concernant les vérificateurs des comptes (réviseurs);

- la publicité des succursales;

- les sociétés unipersonnelles;

- le groupement européen d'intérêts économiques (GEIE).

Pour les explications concernant les projets législatifs, nous renvoyons également aumessage relatif à l'Accord sur l'EEE. Aucun de ces projets n'a été adopté entre temps.Cependant, il faut mentionner la Convention internationale concernant la faillite207

signée le 23 novembre 1995, mais non encore entrée en vigueur. Celle-ci vise notam-ment à uniformiser les conditions ainsi que les effets des procédures d'insolvabilitéétrangères applicables aux sociétés ayant des activités en Europe.

B Politique suisse

Le nouveau droit des sociétés anonymes est entré en vigueur le 1er juillet 1992208.Nous renvoyons aux explications du message relatif à l'Accord sur l'EEE quant auxprincipales différences entre le droit suisse révisé et le droit communautaire des so-ciétés. En outre, l'ordonnance sur les qualifications professionnelles des réviseursparticulièrement qualifiés209, qui se base sur les exigences de la directive relative auniveau de formation, est également entrée en vigueur le 1er juillet 1992. Le Conseilfédéral a ouvert la procédure de consultation concernant l'avant-projet de loi sur lafusion, la scission et la transformation de sujets (loi sur la fusion)210.

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE, il y aurait lieu de procéder auxadaptations du droit suisse à l'acquis communautaire déjà exposées dans le messagerelatif à l'Accord sur l'EEE. Seraient particulièrement visées, la publication descomptes annuels, la restriction des possibilités de refuser des citoyens étrangers entant qu'actionnaires eu égard au principe de non-discrimination ainsi que la suppres-sion des exigences concernant la nationalité des administrateurs. Les dispositions ac-

207 Convention sur les procédures d'insolvabilité du 23 novembre 1995.208 RO 1992 733.209 Ordonnance du 15 juin 1992 sur les qualifications professionnelles des réviseurs particulièrement qualifiés,

RS 221.302.210 Le texte peut être consulté sur Internet: http://www.bj.admin.ch/vernehm/fusion/briefd.htm.

Page 130: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 128 - Chapitre 2

tuelles régissant la restriction à la transmissibilité des actions nominatives devraientêtre adaptées.

Seule une adhésion à l'UE permettrait aux entreprises suisses de participer sur un piedd'égalité avec d'autres entreprises en provenance de l'UE à un groupement européend'intérêts économiques (GEIE) ou à une future société anonyme européenne.

Les dispositions-cadres de la CE en matière de droit des sociétés forment une régle-mentation adéquate dont le but correspond amplement à celui visé par le droit suissedes sociétés. Dès lors, un rapprochement pour le moins ponctuel du droit suisse dessociétés devrait être examiné même en cas de maintien de la situation actuelle (voirch. 213, let. B.4).

222.06.2 Responsabilité du fait des produits

A Acquis communautaire

S'agissant des directives en matière de responsabilité du fait des produits entrées envigueur avant 1992, nous renvoyons au message relatif à l'Accord sur l'EEE211. L'ac-quis communautaire comprend également la directive du Conseil relative à la sécuritégénérale des produits212 en vertu de laquelle les producteurs sont tenus de mettre surle marché des produits dont l'utilisation normale ou prévisible ne présente aucun dan-ger. Il convient en outre de signaler la proposition de la Commission du 18 juin 1996d'adopter une directive sur certains aspects de la vente et des garanties des biens deconsommation213. Cette proposition prévoit une garantie obligatoire de deux ans,permettant aux consommateurs de choisir entre la réparation et la réduction du prix aucas où un produit acheté présenterait un défaut. Enfin, en automne 1997, la Commis-sion a proposé d'étendre la responsabilité du fait des produits aux produits agricoles.

B Politique suisse

La Suisse a adopté le 18 juin 1993 la loi sur la responsabilité du fait des produits214,qui correspond largement à la directive de la CE en matière de responsabilité du faitdes produits défectueux. Il n'existe par contre pas de législation horizontale garantis-sant une sécurité générale des produits. Cette sécurité est toutefois garantie, à un hautniveau, par une multitude de dispositions légales. La législation sectorielle applicableà la sécurité des produits est, dans une large mesure, compatible avec le droit commu-nautaire.

211 Message du 18 mai 1992 sur l’approbation de l’Accord sur l’EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.212).212 Directive 92/59 du 29 juin 1992 relative à la sécurité générale des produits, JO n° L 228 du 11 août 1992, p.

24.213 Voir la position commune (CE) n° 51/58, arrêtée par le Conseil le 24 septembre 1998, en vue de l'adoption

de la directive du Parlement européen et du Conseil sur certains aspects de la vente et des garanties desbiens de consommation, JO n° C 333 du 30 octobre 1998, p. 46.

214 Loi fédérale du 18 juin 1993 sur la responsabilité du fait des produits (LRFP), RS 221.112.944.

Page 131: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 129 - Chapitre 2

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE, l’art. 11 de la loi sur la respon-sabilité du fait des produits devrait probablement être modifié vu qu'il prévoit l'appli-cation de l'art. 44, al. 2, CO215. Cette dernière disposition permet au juge de réduireles dommages-intérêts lorsque la réparation du préjudice exposerait le débiteur à lagêne, alors que selon la directive la loi ne peut fixer qu'une limite maximale de la res-ponsabilité. En outre, il faudrait étendre la responsabilité à tous les produits agricolessi la Communauté modifiait sa directive dans le sens de la proposition faite par laCommission. Les effets liés à l'adoption de la directive relative à la sécurité généraledes produits, en particulier les adaptations qu'elle entraînerait, font actuellement l'ob-jet d'une analyse.

En cas d'adhésion à l'UE, la responsabilité que l'importateur encoure au titre des rela-tions commerciales avec les Etats de l'UE disparaîtrait, levant ainsi une entrave aucommerce. En cas de participation à l'EEE, la responsabilité de l'importateur dispa-raîtrait par rapport aux Etats ayant ratifié la Convention de Lugano (voir ch.222.06.5). Au cas où d'autres accords sectoriels seraient conclus avec l'UE, la Suisseenvisage de proposer la suppression de la responsabilité de l'importateur dans les re-lations commerciales avec l'UE. De son côté, elle peut garantir que son droit nationalaccorde à la personne lésée une protection égale à celle prévue par la directive de laCE. En cas de maintien de la situation actuelle, la responsabilité de l'importateur resteapplicable dans les relations commerciales avec les Etats de l'UE et de l'AELE. Jus-qu'à ce jour, elle n'a pas entraîné d'importants désavantages. Des désavantages sonttoutefois à craindre si, dans le cadre de relations commerciales avec les Etats de l'UE,les importateurs suisses devaient faire l'objet d'actions en responsabilité portant surdes montants élevés.

222.06.3 Propriété intellectuelle

A Acquis communautaire

L’harmonisation du droit de la propriété intellectuelle est une condition essentielle dela mise en place d’un marché unique de produits et de services, régi par une régle-mentation homogène en matière de concurrence. Dans ce but, la Communauté a pro-cédé à des harmonisations importantes depuis 1992216.

Dans le domaine du droit des marques, la Communauté européenne a créé un systèmede marque communautaire, coexistant avec les marques nationales, et mis sur pied un

215 Loi fédérale du 30 mars 1911 complétant le Code civil suisse (cinquième partie; droit des obligations), RS

220.216 Sur l'état des travaux d'harmonisation jusqu'en 1992, voir message du 18 mai 1992 sur l'approbation de

l'Accord EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.86).

Page 132: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 130 - Chapitre 2

office européen des marques217. Des mesures additionnelles ont été prises pour luttercontre l’importation ou l’exportation de marchandises de contrefaçon218.

Dans le domaine du droit d’auteur et des droits voisins, une réglementation en vue del’harmonisation de la durée de protection a été introduite219. Pour toutes les oeuvres, ycompris les programmes d’ordinateur, la durée de protection est de 70 ans à compterdu décès de l’auteur. Une directive relative au droit de location et de prêt a égalementété adoptée220. L’UE entend, en outre, édicter une directive sur la réglementation dudroit de suite, selon laquelle un artiste, en cas de revente de ses oeuvres par des tiers,a droit à un pourcentage sur le prix de la revente. Par ailleurs, la Commission a sou-mis une proposition de directive concernant le droit d’auteur et les droits voisins dansla société de l’information, afin de régler la question de la sauvegarde des droits desauteurs, des artistes, des interprètes et producteurs ou éditeurs d’oeuvres dans le con-texte des nouvelles formes transfrontalières de communication ou d’acquisitiond’informations.

En ce qui concerne le domaine du droit des brevets, il faut avant tout signaler le Livrevert sur le brevet communautaire et le système des brevets en Europe, du 24 juin1997Le Livre vert étudie les différents aspects liés à l’introduction d’un brevet com-munautaire unique dont la protection s’étendrait à tous les Etats membres. La protec-tion juridique des inventions en matière de biotechnologie est réglementée par unedirective qui est entrée en vigueur en juillet 1998221. Une mesure d’harmonisationimportante pour les milieux industriels a été prise avec l’adoption des règlementsconcernant la création de certificats complémentaires de protection pour les médica-ments et les produits phytopharmaceutiques222ces règlements permettent de requérirune prolongation limitée de la protection par brevet pour des produits dont la duréenormale de protection est sensiblement réduite dans la pratique en raison des procédu-res d’autorisation de mise sur le marché longues et coûteuses. Le projet d’harmoniser

217 Règlement (CE) n° 40/94 du 20 décembre 1993 sur la marque communautaire, JO no L 11 du 14 janvier

1994, p.1; règlements d’exécution (CE) no 2868 et 2869/95 du 13 décembre 1995, JO no L 303 du 15 dé-cembre 1995, p. 1 et 33.

218 Règlement (CE) no 3295/94 du 22 décembre 1994 fixant des mesures en vue d’interdire la mise en librepratique, l’exportation, la réexportation et le placement sous un régime suspensif des marchandises de con-trefaçon et des marchandises pirates, JO no L 341 du 30 décembre 1994, p. 8. (Des mesures similaires ontété introduites à l’occasion de l’adaptation de la législation suisse à l’accord OMC.)

219 Directive 93/98/CEE du 29 octobre 1993 relative à l’harmonisation de la durée de protection du droitd’auteur et de certains droits voisins, JO no L 290 du 24 novembre 1993, p. 9.

220 Directive 92/100/CEE du 19 novembre 1992 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voi-sins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle, JO no L 346 du 27 novembre 1992, p.61.

221 Directive 98/44/CE du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques, JOno L 213 du 30 juillet 1998, p. 13.

222 Règlement (CEE) no 1768/92 du 18 juin 1992 concernant la création d’un certificat complémentaire de pro-tection pour les médicaments, JO no L 182 du 2 juillet 1992, p. 1. Règlement (CE) no 1610/96 du 23 juillet1996 concernant la création d’un certificat complémentaire de protection pour les produits phytopharma-ceutiques, JO no L 198 du 8 août 1996, p. 30.

Page 133: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 131 - Chapitre 2

les règles concernant la protection des inventions par les modèles d’utilité a été con-crétisé par une proposition de directive de la Commission.

Dans le domaine de la protection des dessins et modèles industriels, la directive surl’harmonisation de la protection juridique des dessins et modèles est entrée en vigueurle 28 octobre 1998223.

Au-delà de ces quatre domaines traditionnels de la propriété intellectuelle, il faut en-core mentionner l’institution d’un régime de protection communautaire des obtentionsvégétales (y compris la création d’un office communautaire), comme seule et uniqueforme de protection de propriété industrielle pour les variétés végétales ainsi que lacréation d’un système harmonisé de protection des indications géographiques et desappellations d’origine pour les produits agricoles et les denrées alimentaires224. Ledroit européen prévoit une protection juridique spéciale pour les bases de données quine satisfont pas aux critères requis pour la protection par le droit d’auteur225. Enfin, laCommission a mis en consultation une étude (Livre vert) du 3 décembre 1997 sur laconvergence des secteurs des télécommunications, des médias et des technologies del’information.

B Politique suisse

Sachant l'importance que revêt l'harmonisation du droit en matière de propriété intel-lectuelle pour préserver sa compétitivité sur le marché européen, la Suisse est natu-rellement conduite à suivre les développements au niveau de l’UE. Pour cette raison,les révisions des lois suisses en matière de propriété intellectuelle tiennent largementcompte des nouveautés communautaires. Ainsi, sont entrés en vigueur le 1er septem-bre 1995, les nouveaux art. 140a à140m de la loi sur les brevets d’invention (LBI)concernant les certificats complémentaires de protection pour les médicaments226. Ilspermettent de prolonger la durée de protection par brevet des médicaments. Le projetd’une révision partielle de la LBI, actuellement étudié par les Chambres, prévoit enoutre l’introduction de certificats complémentaires de protection pour les produitsphytosanitaires aux fins d’une harmonisation avec le droit communautaire. La com-pétitivité de l’industrie suisse dans ces deux branches économiques pourra ainsi êtremaintenue face à la concurrence des pays de l’UE.

223 Directive 98/71/CE du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessins et modèles, JO n° L 289 du

10 octobre 1998, p. 28.224 Règlement (CE) no 2100/94 du 27 juillet 1994 instituant un régime de protection communautaire des obten-

tions végétales, JO no L 227 du 1 septembre 1994, p. 1. Règlement (CEE) no 2081/92 du 14 Juillet 1992 re-latif à la protection des indications géographiques et des appellations d’origine des produits agricoles et den-rées alimentaires, JO no L 208 du 24 Juillet 1992, p. 1.

225 Directive 96/9/CE du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données, JO no L 77 du27 mars 1996, p. 20.

226 Loi fédérale du 25 juin 1954 sur les brevets d'invention (loi sur les brevets, LBI), RS 232.14.

Page 134: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 132 - Chapitre 2

La loi sur la protection des dessins et modèles industriels227 fait actuellement l’objetd’une révision totale, visant à assurer une compatibilité aussi grande que possibleavec le droit communautaire.

Dans les grandes lignes, la loi sur le droit d’auteur228 est eurocompatible. Il subsistetoutefois des divergences par rapport à quelques directives communautaires, qui nesont entrées en vigueur qu’après l’achèvement de la révision de cette législation. Ain-si le droit suisse actuel ne prévoit pas de protection spéciale («sui generis») pour lesbases de données; celles-ci sont protégées par la loi contre la concurrence déloyale229

et, si les conditions de protection sont remplies, par la loi sur le droit d’auteur. Unautre effort d’harmonisation sera la révision partielle de la législation sur le droitd’auteur nécessitée par la ratification de deux nouveaux traités négociés dans le cadrede l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI): le traité sur le droitd’auteur (WCT) et le traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes(WPPT). Ces deux instruments règlent la protection du droit d’auteur dans le domainedes nouvelles technologies de l’information (Internet, technique numérique, multi-média, etc.). La CE et ses Etats membres préparent la ratification de ces deux traités;la Commission a déjà élaboré un projet de directive à cet effet.

En ce qui concerne la protection des appellations d’origine et des indications géogra-phiques pour les produits agricoles et les produits agricoles transformés, la Suisse ainstitué, par voie d’ordonnance230, un système d’enregistrement conforme à celui de laCE, remplissant ainsi les conditions requises pour la conclusion d’un accord bilatéralsur la reconnaissance réciproque des appellations d’origine et des indications de pro-venance.

C Relations contractuelles existantes

Dans le domaine du droit de la propriété intellectuelle, les efforts d’harmonisation auplan international se font moins au niveau bilatéral qu’au niveau multilatéral parexemple au sein de l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) oude l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC).

Il n’existe pas d’accords bilatéraux relatifs à la propriété intellectuelle entre la Suisseet la CE. L’Accord de libre-échange de 1972 ne comporte pas de réglementationsspécifiques dans ce domaine.

227 Loi fédérale du 30 mars 1900 sur les dessins et modèles industriels, RS 232.12.228 Loi fédérale du 9 octobre 1992 sur le droit d’auteur et les droits voisins (loi sur le droit d’auteur, LDA), RS

231.1.229 Loi fédérale du 19 décembre 1986 contre la concurrence déloyale (LCD), RS 241.230 Ordonnance du 28 mai 1997 concernant la protection des appellations d’origine et des indications géogra-

phiques des produits agricoles et des produits agricoles transformés (ordonnance sur les AOP et les IGP),RS 910.12.

Page 135: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 133 - Chapitre 2

Des accords bilatéraux sur la protection des indications de provenance et d’autres dé-nominations géographiques ont été conclus avec l’Allemagne, la France, le Portugalet l’Espagne.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l’UE ou de participation à l’EEE, la Suisse devrait appliquer leprincipe de l’épuisement régional, en vigueur dans les Etats membres de l’UE et del’EEE231. Ainsi, les produits provenant des Etats de l’UE ou de l’EEE qui ont été li-citement mis en circulation sur le marché suisse, pourraient être réimportés dans l’UEou dans l’EEE, sans que le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle dans l’Etatmembre qui confère la protection puisse empêcher cette réimportation en invoquantce droit. Cela serait également vrai dans le cas inverse d’importations parallèles enSuisse, pour le titulaire suisse d’un droit de propriété intellectuelle.

Pour ce qui concerne le droit des marques, la situation en Suisse est particulière. Se-lon la jurisprudence du Tribunal fédéral232, c’est le principe de l’épuisement interna-tional qui s’applique. L’importation parallèle en Suisse de produits qui ont été mis encirculation pour la première fois dans n’importe quel pays tiers par le titulaire de lamarque ou avec son consentement, ne peut pas, en règle générale, être interdite envertu du droit des marques. Si la Suisse était membre de l’UE, le titulaire d’une mar-que suisse pourrait, en invoquant son droit à la marque, s’opposer aux importationsparallèles provenant de pays tiers qui ne font pas partie de l’EEE233. En cas d'adhésionà l’EEE, la Suisse pourrait maintenir le principe de l’épuisement international pour lesproduits provenant d’Etats qui ne font pas partie de l’EEE234.

En cas de maintien de la situation actuelle, la Suisse élaborera à sa guise sa législa-tion en matière de propriété intellectuelle tout en veillant cependant à son eurocom-patibilité (voir let. B et ch. 213, let. B.4).

222.06.4 Droit international privé

A Acquis communautaire

L’harmonisation des dispositions des Etats membres n’est pas un objectif communau-taire en matière de droit international privé (DIP). Cependant, les lois nationales deDIP doivent être examinées à la lumière du droit communautaire, en particulier à lalumière du principe de non-discrimination prévu dans le Traité CE. Ainsi, les avanta- 231 En vertu du principe de l’épuisement régional, le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle ne peut pas

utiliser ce droit pour s’opposer à l’importation ou à la vente du produit protégé, si le produit a été mis encirculation sur le marché d’un autre Etat de l’espace économique commun (par ex. l’UE ou l’EEE) par letitulaire lui-même ou avec son consentement.

232 ATF 122 III 469, Chanel/EPA. Dans une décision du 20 juillet 1998, le Tribunal fédéral a décidé que leprincipe de l'épuisement international s’applique, en règle générale, également au domaine du droit d'auteur(ATF 124 III 321, Imprafot/Nintendo).

233 CJCE, décision du 16 juillet 1998, aff. C-355/96 Silhouette, Rec. 1998 I, 4799.234 Cour AELE, décision du 3 décembre 1997, aff. E-2/97 Maglite.

Page 136: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 134 - Chapitre 2

ges accordés par un Etat à ses propres ressortissants en vertu de ses normes de DIP nesont-ils pas applicables dans les domaines régis par le Traité CE, car ils violent leprincipe de non-discrimination.

L'unification du droit ne se faisant que par la voie de directives dans le domaine dudroit international privé, le droit national des conflits de lois continue à s'appliquerd'une part, parce que les règles de droit communautaire ne sont souvent que ponc-tuelles et, d'autre part, parce que les objectifs fixés dans les directives peuvent êtremis en œuvre de manière différente dans les Etats membres. En outre, de nouveauxproblèmes de conflits de lois sont apparus dans certains domaines à cause des directi-ves.

L'art. 220 du Traité CE confère aux Etats membres la possibilité de régler si besoin,au moyen d'accords internationaux, les questions de DIP relatives à la reconnaissancemutuelle des sociétés, au maintien de la personnalité juridique en cas de transfert dusiège de pays en pays ainsi qu'à la reconnaissance et à l'exécution réciproques de déci-sions judiciaires et de sentences arbitrales. Les Etats membres ont fait usage de cettepossibilité en ce qui concerne le dernier point (voir ci-après). Il y a toutefois lieu derappeler que la Communauté peut elle-même régler des questions de conflits de loisavec des normes propres, dans la mesure où elle possède une telle compétence (parex. selon l'art. 100 A du Traité CE). Elle en a fait usage dans les domaines où les inté-rêts des consommateurs étaient au premier plan. Les directives ainsi adoptées ont pourobjectif principal d'empêcher que, par le choix du droit d'un Etat tiers, les consom-mateurs ne soient privés de la protection offerte par les directives. L'art. 220 du TraitéCE ne sera pas modifié par le Traité d'Amsterdam.

La Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations con-tractuelles 235 ne fait pas formellement partie du droit communautaire, mais elle estliée à la Communauté de diverses manières. Elle est d'une part, ouverte uniquementaux Etats membres de l'Union européenne, et, d'autre part, la Cour de justice des CEen garantit une interprétation uniforme sur la base d'un protocole qui lui en donne lacompétence. La Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contrac-tuelles contient des règles de conflits universelles qui évincent les règles nationalescorrespondantes de DIP. Par ailleurs, les dispositions de droit communautaire sur lesconflits de lois priment sur les dispositions contenues dans la Convention de Romesur la loi applicable aux obligations contractuelles.

B Politique suisse

La loi de DIP (LDIP)236 satisfait largement aux exigences d'un droit moderne des con-flits de lois. Elle contient les principes-cadres permettant de prendre en considérationles requêtes de nature sociale et économique. Par ailleurs, elle tient compte des solu-

235 La version consolidée est publiée au JO n° C 27 du 26 janvier 1998, p. 34.236 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP), RS 291.

Page 137: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 135 - Chapitre 2

tions envisagées dans la Convention de Rome sur la loi applicable aux obligationscontractuelles.

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, il y aurait lieu de transposer les directives communautairesdans le domaine du "Times-sharing" et de la protection des consommateurs. Celavaudrait également en cas de participation à l'EEE, alors que les dispositions com-munautaires applicables au DIP ne sont pas visées par les accords sectoriels. En casd'adhésion à l'UE, la Suisse devrait adhérer à la Convention de Rome sur la loi appli-cable aux obligations contractuelles; une partie importante de la LDIP deviendraitalors obsolète. Cette convention contient en effet des règles de conflits de lois qui nevalent pas uniquement entre Etats parties mais ont une portée générale (erga omnes).La Convention de Rome sur la loi applicable aux obligations contractuelles ne faitcependant pas partie de l'acquis communautaire de l'EEE; elle ne fait pas non plusl'objet des accords sectoriels. Dans ces deux derniers cas de même qu'en cas de main-tien de la situation actuelle, on pourrait envisager la conclusion d'une convention pa-rallèle par analogie à la Convention de Lugano (voir ch. 222.06.5).

222.06.5 Procédure internationale

A Acquis communautaire

La Convention européenne concernant la compétence judiciaire et l'exécution des dé-cisions en matière civile et commerciale (Convention de Bruxelles) établie sur la basede l'art. 220 du Traité CE237 crée un système uniforme de compétences des autorités etdes tribunaux et garantit, dans le domaine du droit civil et commercial, la libre circu-lation des décisions, des transactions judiciaires et des actes authentiques exécutoires.

Avec l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam238, la coopération judiciaire en ma-tière civile fera partie intégrante du Traité CE et sera ainsi "communautarisée" (voirch. 246). Par ailleurs, l'art. 220 du Traité CE subsistera dans les mêmes termes. Resteà savoir si, avec l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam, les solutions prévues parla Convention de Bruxelles seront transformées en un règlement ou si la libre circula-tion des titres juridiques se poursuivra par le biais de la coopération internationale.

B Politique suisse

En Suisse, la coopération dans le domaine de la compétence judiciaire, de la recon-naissance mutuelle et de l'exécution des décisions est régie par la Convention de Lu-gano239 dont le contenu est quasiment identique à la Convention de Bruxelles. A

237 Convention de Bruxelles du 28 septembre 1968 sur la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en

matière civile et commerciale, JO n° C 27 du 26 janvier 1998, p.1.238 Voir ch. 311.03.4.239 Convention du 16 septembre 1988 sur la compétence judiciaire, la reconnaissance mutuelle et l'exécution

des décisions, RS 0.275.11.

Page 138: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 136 - Chapitre 2

l’heure actuelle, la Convention de Lugano regroupe tous les Etats membres de l’UEainsi que ceux de l'AELE, à l'exception cependant du Liechtenstein; on peut s'atten-dre, dans les années à venir, à ce qu'elle s'étende aux pays d'Europe centrale et orien-tale.

Ces deux conventions parallèles ont pour objectif de réaliser en Europe un espace ju-ridique unifié en matière de procédure civile. Il importe par conséquent de développerune jurisprudence uniforme, de même qu'une interprétation uniforme et coordonnéede ces deux conventions. C'est déjà le cas dans le cadre de la Convention de Bruxellesau travers de la compétence interprétative de la Cour de justice des CE et, en ce quiconcerne la Convention de Lugano, grâce à des principes d'interprétation établis etaux échanges de vues du comité permanent. L'élargissement envisagé du champ d'ap-plication de la Convention de Lugano par l'adhésion des pays d'Europe centrale etorientale rendra nécessaire une coopération institutionnelle renforcée afin de garantirun espace juridique unifié.

Un groupe de travail commun travaille actuellement à la révision des Conventions deBruxelles et de Lugano, de manière à uniformiser les textes le plus largement possibleet à éliminer les difficultés pratiques. Les travaux devraient s'achever en 1999.

C Répercussions sur la Suisse

Quelle que soit la variante envisagée (adhésion à l'UE, participation à l'EEE, accordssectoriels, maintien de la situation actuelle), les principes communs développés dansle domaine de la compétence judiciaire, de la reconnaissance mutuelle et de l'exécu-tion seraient maintenus ou renouvelés - dans le cas d'une adhésion à l'UE, par l'adhé-sion formelle à la Convention de Bruxelles, dans les autres cas, par le maintien de laConvention de Lugano.

222.07 Politique fiscale

222.07.1 Introduction

La souveraineté fiscale n'appartient ni à l'UE ni à la CE, mais aux Etats membres.

L'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée et des impôts spéciaux de consommation estlargement harmonisée dans l'UE. Par contre, leurs taux d'imposition sont comprisdans une fourchette relativement large. Cette harmonisation partielle était indispensa-ble à l'établissement et au fonctionnement du marché intérieur ainsi qu'à la suppres-sion des frontières douanières. On s'est fondé, ce faisant sur l'art. 99 du Traité CE quiest déterminant pour les impôts indirects. Il exige l'unanimité des membres du Con-seil.

En revanche, la base légale visant à rapprocher les impôts directs est rédigée d'unemanière plus générale. Selon l'art. 100 du Traité CE, les directives édictées par leConseil n'ont pour but que de rapprocher les dispositions légales et administratives

Page 139: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 137 - Chapitre 2

des Etats membres, qui influent directement sur l'établissement ou le fonctionnementdu marché intérieur. Il n'existe donc pas de mandat d'harmonisation proprement ditpour les impôts directs. La Commission veut cependant rapprocher les différentesréglementations, ce qui nécessitera l'unanimité des membres du Conseil.

Dernièrement, la Suisse a également révisé plus ou moins profondément son régimefiscal, la révision la plus importante a concerné le passage de l'impôt sur le chiffred'affaires à la taxe à la valeur ajoutée. D'une manière très générale, on peut affirmerque la majeure partie de ces révisions ont rapproché notre législation de celle de l'UE.Citons également les efforts entrepris pour diminuer les taux d'imposition à la sourceprévus dans les conventions de double imposition et la réduction à 1% du droitd'émission sur les droits de participation.

Les régimes fiscaux dans leur ensemble font actuellement l'objet d'une harmonisationpartielle au sein de l'UE. C'est pourquoi, on ne peut pas prévoir en détails toutes lesconséquences fiscales d'une adhésion de la Suisse à l'UE. Une chose est sûre toute-fois: le taux ordinaire de la TVA devra impérativement être porté à 15%. Cette aug-mentation du taux procurerait à la Confédération un supplément de recettes apprécia-ble; on peut donc admettre qu'une refonte du système fiscal et peut-être du systèmefédéral de péréquation financière serait nécessaire.

222.07.2 Taxe sur la valeur ajoutée

A Acquis communautaire

Le 11 avril 1967, le Conseil de la Communauté économique a adopté la première et ladeuxième directives en vue d'harmoniser les législations des Etats membres relativesaux taxes sur le chiffre d'affaires. La sixième directive du 17 mai 1977240 qui a pourobjet d'uniformiser l'assiette de la taxe constitue une nouvelle étape capitale sur lavoie de l'établissement du marché intérieur. Une réglementation transitoire pour leséchanges intracommunautaires est en vigueur depuis le début de 1993241. En vertu decette réglementation, les marchandises fournies par un entrepreneur à un entrepreneurétabli dans un autre Etat membre sont imposables exclusivement par l'Etat dans lequelles marchandises sont livrées (principe du pays de destination). Dans les rapports en-tre les Etats membres, l'élément de l'importation est donc supprimé. Cette réglemen-tation transitoire est applicable jusqu'à l'entrée en vigueur d'une réglementation défi-nitive. Dans la directive sur les taux fiscaux242, les Etats membres se sont engagés àappliquer dès le début de 1993 un taux normal qui ne doit pas être inférieur à 15 %.

240 Sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats mem-

bres relatives aux taxes sur le chiffres d'affaires (système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uni-forme), JO no L 145 du 13 juin 1977, p. 1.

241 Directive 91/680/CEE du 16 décembre 1991,complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutéeet modifiant, en vue de l'abolition des frontières fiscales, la directive 77/388/CEE, JO no L 376 du 31 dé-cembre 1991, p. 1.

242 Directive 92/77/CEE du 19 octobre 1992 complétant le système commun de la taxe sur la valeur ajoutée(rapprochement des taux de la TVA), JO no L 316 du 31 octobre 1992, p. 1.

Page 140: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 138 - Chapitre 2

Ils ont la possibilité d'appliquer un ou deux taux réduits qui ne doivent pas être infé-rieurs à 5 %.

Le but de l'harmonisation de la taxe sur la valeur ajoutée consiste à remplacer la ré-glementation transitoire par une réglementation définitive quant à l'imposition deséchanges entre les Etats membres. Tous les biens livrés et services fournis devrontalors être imposés dans le pays d'origine (principe du pays d'origine). Il n'est actuel-lement pas possible de préciser quand ce but sera atteint.

B Politique suisse

Lors de la votation du 28 novembre 1993, le peuple et les cantons ont accepté de rem-placer l'impôt sur le chiffre d'affaires par une taxe moderne sur la valeur ajoutée(TVA). Se fondant sur les dispositions transitoires de la constitution, le Conseil fédé-ral a édicté le 22 juin 1994 l'ordonnance régissant la taxe sur la valeur ajoutée et fixéson entrée en vigueur au début de 1995243. Cette ordonnance distingue entre les chif-fres d'affaires qui sont imposables au taux normal de 6,5 % et ceux qui sont soumis àun taux privilégié (taux réduit de 2,0 % pour un certain nombre de biens, notammentles produits comestibles, les boissons sans alcool et les médicaments; taux spécial de3% pour les prestations d'hébergement). Sur la base de l'arrêté fédéral du 20 mars1998 sur le relèvement des taux de la taxe sur la valeur ajoutée en faveur del'AVS/AI, le taux d'imposition normal a été augmenté de 1%, le taux réduit de 0,3% etle taux spécial de 0,5%. A moyen et à long terme, il faudra compter avec des aug-mentations sensibles des taux pour assurer le financement des oeuvres sociales.

C Répercussions sur la Suisse

En élaborant l'ordonnance sur la taxe sur la valeur ajoutée, le Conseil fédéral s'est ins-piré des principes du droit communautaire relatif à la taxe sur le chiffre d'affaires,notamment à la sixième directive concernant les taxes sur le chiffre d'affaires. En casd'adhésion à l'UE, la systématique du droit régissant la taxe sur la valeur ajoutée nedevrait subir que des adaptations ponctuelles. Des modifications essentielles concer-neraient les taux d'imposition. Le taux normal devrait en effet être porté à 15% aumoins, le taux réduit et le taux spécial à 5% au moins. En outre, le législateur ne pour-rait se passer de revoir la notion de contre-prestation. Au surplus, certaines modifica-tions seraient nécessaires dans le domaine des chiffres d'affaires qui sont exonérés dela taxe. Sur la base des taux de 1999, le supplément de recettes annuel provenantd'une taxe sur la valeur ajoutée de 15% s'élèverait à près de 15,5 milliards de francs. Ilfaudrait par conséquent revoir complètement le système fiscal puisque le rapport entreles impôts directs et indirects serait complètement modifié (voir ch. 333.08).

L'actuelle charge administrative en relation avec la compensation de la taxe aux fron-tières dans les échanges commerciaux serait également supprimé pour les entreprisessuisses dans le cadre de la réglementation transitoire (voir let. A). Jusqu'au passage à

243 Ordonnance du 22 juin 1994 régissant la taxe sur la valeur ajoutée (OTVA), RS 641.201

Page 141: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 139 - Chapitre 2

la réglementation définitive, c'est-à-dire à l'adoption du principe du pays d'origine,combiné avec le droit à la déduction de l'impôt préalable applicable dans toute laCommunauté, la procédure de remboursement de l'impôt préalable s'appliquera auxpays membres de l'UE. Selon cette procédure, une entreprise qui acquiert des biens oudes services dans un autre Etat membre dans le cadre du chiffre d'affaires nationaldoit demander le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été facturée.

Une participation à l'EEE n'aurait pas de conséquences directes sur la législation ré-gissant la taxe sur la valeur ajoutée. L'importation de biens serait toujours imposée àla frontière et l'exonération des exportations vers l'UE dépendrait toujours de lapreuve de l'exportation. Le travail en rapport avec la compensation de la taxe à lafrontière ne serait pas supprimé (charge administrative accrue pour les contribuableset pour l'administration chargée de percevoir la taxe sur la valeur ajoutée).

En cas de maintien de la situation actuelle, la Suisse resterait à l'écart du marché inté-rieur. La compensation de la taxe aux frontières et ses conséquences subsisteront aumême titre qu'une participation à l'EEE.

222.07.3 Impôts spéciaux de consommation

Afin de garantir au sein de l'UE la libre circulation des marchandises soumises à unimpôt spécial de consommation, les modalités de perception ont été harmonisées pardes directives.

222.07.31 Impôt sur les huiles minérales

A Acquis communautaire

L'imposition des huiles minérales est régie par trois directives: la directive relative aurégime général244 selon laquelle l'impôt naît au moment de l'entrée de la marchandiseà l'intérieur de la Communauté; la directive sur l'harmonisation des structures245 quidéfinit notamment les produits des huiles minérales et fixe les exemptions d'impôtobligatoires et facultatives; enfin, la directive sur les taux d'accises246 qui détermineles taux minimaux des différents produits.

B Politique suisse

Edictée sur la base des art. 36ter, al. 2, 41ter, al. 1 et 4 let. a, cst., la nouvelle loi surl'imposition des huiles minérales247, est entrée en vigueur au début de 1997. L'impôt

244 Directive 92/12/CEE du 25 février 1992 relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux

contrôles des produits soumis à accise, JO n° L 76 du 23 mars 1992, p.1.245 Directive 92/81/CEE du 19 octobre 1992 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur

les huiles minérales, JO n° L 316 du 31 octobre 1992, p. 12.246 Directive 92/82/CEE du 19 octobre 1992 concernant le rapprochement des taux d'accises sur les huiles mi-

nérales, JO n° L 316 du 31 octobre 1992, p. 19.247 Loi fédérale du 21 juin 1996 sur l'imposition des huiles minérales (Limpmin), RS 641.61.

Page 142: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 140 - Chapitre 2

sur les huiles minérales a remplacé les anciens droits de douane fiscaux. Les tauxd'imposition sont fixés en principe sur 1 000 litres à une température de 15° C.

C Répercussions sur la Suisse

Les procédures de la loi sur l'imposition des huiles minérales sont compatibles avecles dispositions de la directive relative au régime général. En revanche, la loi sur l'im-position des huiles minérales diverge sur quelques points (corbeille de marchandiseset allégements fiscaux) des dispositions de la directive sur l'harmonisation des structu-res. Une adhésion à l'UE nécessiterait quelques adaptations de cette dernière direc-tive, lesquelles seraient minimes du point de vue fiscal. Les taux d'imposition mini-maux de la directive sur les taux d'accises sont, pour la plupart des produits, plus fai-bles que les taux d'imposition suisses, hormis pour les huiles de chauffage extra-légères dont la taxe devrait passer de 3 francs à 28 francs 80 par 1 000 litres à 15° C,ainsi que pour les huiles de chauffage moyennes et lourdes, de 3 francs 60 à 20 francs80 par 1 000 kg. De cette augmentation résulterait un surplus de recettes de quelque165 millions de francs. L'affectation liée d'une partie de ces recettes, telle qu'elle estfixée dans la constitution, pourrait être maintenue en cas d'adhésion à l'UE.

Une participation à l'EEE, comme le maintien de la situation actuelle n’auraient au-cune répercussion sur l'imposition des huiles minérales.

Dans l'accord bilatéral sur les transports terrestres, la Suisse s'est engagée à ne pasabaisser l'impôt sur les huiles minérales à des taux inférieurs à ceux applicables dansl'UE.

222.07.32 Impôt sur le tabac

A Acquis communautaire

Le droit communautaire prescrit le prélèvement d'un impôt proportionnel sur les ciga-rettes, ainsi qu'un impôt spécifique248. En outre, les Etats membres sont tenus de rap-procher leurs taxes frappant les cigarettes249, en percevant un impôt minimal global(impôt de consommation spécifique et ad valorem, sans taxe sur la valeur ajoutée) de57% du prix de vente au détail de la classe de prix la plus courante.

B Politique suisse

La structure de l'impôt sur les cigarettes250 est conforme au droit communautaire. Enrevanche, l'impôt sur le tabac (sans la TVA) perçu en Suisse sur les cigarettes est unpeu inférieur à l'imposition minimale prescrite dans l'UE.

248 Directive 95/59/CEE du 27 novembre 1995 concernant les impôts autres que les taxes sur le chiffre d'affai-

res frappant la consommation des tabacs manufacturés, JO n° L 291 du 6 décembre 1995, p. 40.249 Directive 92/79/CEE du 19 octobre 1992 concernant le rapprochement des taxes frappant les cigarettes, JO

n° L 316 du 31 octobre 1992, p. 8.250 Loi fédérale du 21 mars 1969 sur l'imposition du tabac, RS 641.31.

Page 143: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 141 - Chapitre 2

C Répercussions sur la Suisse

En cas d'adhésion à l'UE, il faudrait adapter l'imposition minimale. Le relèvement de51,66% à 57% du prix de vente au détail de la classe de prix la plus courante devraits'effectuer par étapes. A titre d'exemple une augmentation unique engendrerait unsurplus de recettes de 170 millions de francs (prix de vente au détail 4 francs 50 parpaquet ou 225 francs par 1 000 pièces, charge totale 51,66%, soit 116 francs 25;charge totale nouvelle 57%, soit 128 francs 25 par 1 000 pièces; différence 12 francspar 1 000 pièces, soit pour 14,3 milliards de cigarettes vendues en Suisse, un surplusde recettes de 170 millions de francs). S'agissant des cigares et du tabac à pipe, ni lesystème fiscal, ni les taux minimaux pratiqués en Suisse ne sont conformes aux pres-criptions communautaires. Le produit de l'impôt sur le tabac équivaut à moins de 1%des recettes totales.

Une participation à l'EEE comme le maintien de la situation actuelle n’auraient au-cune répercussion sur l'impôt sur le tabac.

222.07.33 Impôt sur les automobiles

A Acquis communautaire

La Communauté européenne ne connaît pas d'impôt spécial de consommation sur lesautomobiles; en revanche, divers Etats membres perçoivent de tels impôts (Autriche:maximum 16%, Danemark: maximum 180%, Espagne: 12%, Pays-Bas: 45,2%). Ilfaut en outre tenir compte du fait que le taux de droit ad valorem pour les importa-tions en provenance de pays tiers (par ex. du Japon) s'élève dans la Communauté à10%.

B Politique suisse

Le taux d'impôt s'élève en Suisse à 4%. L'impôt est prélevé aussi bien à l'importationque sur la fabrication intérieure, mais l'impôt sur le territoire suisse est insignifiant(env. 1%o du produit fiscal). On peut également faire abstraction du droit spécifique(sur le poids) pour les importations originaires de pays tiers, tels que les USA, le Ja-pon, la Corée du Sud (moins de 1% de la valeur).

C Répercussions sur la Suisse

En principe, la perception d'un impôt spécial de consommation sur les automobilesserait également possible en cas d'adhésion à l'UE. La charge fiscale totale s'élèveaujourd'hui à moins de 11% (impôt sur les automobiles + TVA + évent. droits dedouane); en cas d'adhésion elle s'élèverait à 15% au moins pour les véhicules de la CE(TVA), et à 25% pour les véhicules originaires de pays tiers (TVA + 10% de droits advalorem).

Page 144: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 142 - Chapitre 2

Une participation à l'EEE, comme le maintien de la situation actuelle n’auraient au-cune répercussion sur l'impôt sur les automobiles.

222.07.34 Impôt sur la bière

A Acquis communautaire

Le droit communautaire prévoit un impôt spécial de consommation sur la bière251 cal-culé par hectolitre. Le taux minimal s'élève à 0,748 euro par degré Plato ou 1,87 europar pourcentage d'alcool.

B Politique suisse

Le système d'imposition suisse de la bière n'est pas conforme au droit communautaire.La Suisse connaît certes aussi un taux d'impôt spécifique sur la bière, mais la chargeglobale maximale de la bière (par rapport à son prix) est limitée par la constitution.Cette charge globale se compose de l'impôt sur la bière et de la taxe sur la valeurajoutée. Si le prix de la bière est modifié, la charge fiscale doit être adaptée par lebiais du montant de l'impôt sur la bière. La Communauté ne connaît pas d'impôt sur labière dépendant du prix. Le montant de l'impôt sur la bière en Suisse se monte ac-tuellement à 25 francs 57 par hectolitre. Ainsi, la Suisse se situe au-dessus du tauxd'imposition minimal communautaire et se range dans la moyenne des Etats membres.

C Répercussions sur la Suisse

L’adhésion à l'UE nécessiterait une modification matérielle de la constitution et l'éla-boration d'une loi sur l'imposition de la bière (sans relèvement de la charge).

Une participation à l'EEE, comme le maintien de la situation actuelle n’auraient au-cune répercussion sur l'impôt sur la bière.

222.07.4 Imposition des sociétés

A Acquis communautaire

Le 23 juillet 1990 la CE a adopté la directive mère-filiale252 portant suppression de ladouble imposition des flux de revenus transfrontaliers par l'abolition d'une impositionà la source des distributions de bénéfices versés par une filiale à sa société mère ainsique la directive sur les fusions253 afin d'éviter une imposition des réserves latentes

251 Directive 92/84/CEE du 19 octobre 1992 concernant le rapprochement des taux d’accises sur l’alcool et les

boissons alcoolisées, JO n° L 316 du 31 octobre 1992, p. 29.252 Directive 90/435/CEE du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères

et filiales d'Etats membres différents, JO n° L 225 du 20 août 1990, p. 6.253 Directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scis-

sions, apports d'actifs et d'échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents, JO n° L225 du 20 août 1990, p.1.

Page 145: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 143 - Chapitre 2

dans certains cas de restructurations. Depuis 1996, la CE a sensiblement accru sesefforts en vue d’instaurer une politique fiscale communautaire. L’harmonisation dessystèmes, des taux et de l'assiette de l'imposition des sociétés n'est cependant pas en-core à l'ordre du jour. Le Conseil a toutefois adopté, le 1er décembre 1997, un code deconduite en matière d'imposition des sociétés, par lequel les Etats membres s'engagent(sans y être juridiquement contraints) à ne pas introduire de nouvelles mesures fisca-les dommageables à la concurrence entre les Etats membres et, le cas échéant, à abro-ger celles qui sont en vigueur. Un projet de directive sur les intérêts et redevancesversés à des sociétés apparentées vient d'être soumis au Conseil par la Commission.Ce projet prévoit dans un premier temps de supprimer l'imposition à la source despaiements d'intérêts et de redevances effectués entre sociétés associées d'Etats mem-bres différents, dans le pays d'où proviennent les versements et, plus tard, d'étendrecette mesure aux prélèvements sur les intérêts et redevances versés entre sociétés quine sont pas associées.

La plupart des Etats membres, dans les limites des directives applicables254, prélèvedes droits à des taux variant de 2 à 30 % sur les primes d'assurance.

B Politique suisse

L'imposition des sociétés a été modifiée par la réforme de 1997, qui est entrée en vi-gueur le 1er janvier 1998. Les progrès de la CE en matière d'harmonisation de la fis-calité des sociétés ont grandement contribué à cette réforme dont l'essentiel consistedans la suppression de l'impôt sur le capital et une imposition du bénéfice à un tauxproportionnel de 8,5%. Les sociétés peuvent bénéficier à certaines conditions d'uneréduction de l'impôt sur le bénéfice proportionnelle au rapport existant entre leur bé-néfice net total et le rendement net des participations qu'elles détiennent; cette réduc-tion s'étend également aux bénéfices en capital réalisés lors de l'aliénation de partici-pations. La réforme devrait principalement avantager les sociétés holding ainsi que lespetites et moyennes entreprises. La Suisse prélève en outre auprès des sociétés d'assu-rance un droit de timbre de 5% des primes versées sur la base de certains contratsd'assurance compris dans le portefeuille suisse de l'assureur. En règle générale, c'est lepreneur d'assurance qui supporte la charge du droit de timbre.

C Répercussions sur la Suisse

Selon la directive mère-filiale, les dividendes versés par une filiale à sa société mèrene sont pas imposables; en cas d'adhésion à l'UE, il faudrait donc rembourser la tota-lité de l'impôt anticipé. Le paiement des intérêts et des redevances au sens du projetde directive précité ne fait pas l'objet d'une perception à la source en Suisse. Si la di-rective entrait en force, l'exonération à la source des paiements d'intérêts et de rede-vances ne nécessiterait donc pas de modification législative. L'abolition des retenues àla source a en effet pour but de supprimer les distorsions dues à la double imposition.Quant au droit de timbre sur les primes d'assurance, il est compatible avec les taxes

254 Voir ch. 221.03, let. A sur l’acquis communautaire dans le domaine des assurances.

Page 146: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 144 - Chapitre 2

perçues sur les primes d'assurance dans les Etats membres; en outre, le taux du droitde timbre se situe dans la moyenne inférieure de ceux appliqués dans l'UE.

La participation à l'EEE ne nécessiterait pas de modification de la législation surl'imposition directe puisque la politique fiscale de l'UE ne fait pas partie de l'acquiscommunautaire contenu dans l'Accord EEE. La Suisse resterait libre de légiférer à saguise en la matière pour rapprocher son système d'imposition de celui en vigueur dansles Etats parties.

Par ailleurs, en cas de maintien la situation actuelle, il faut signaler que la réforme del'imposition des sociétés s'est déjà faite dans le sens d'une adaptation importante àl'évolution de la politique fiscale de l'UE, c'est à dire vers un allégement de la chargefiscale des sociétés. Pour conserver ses atouts, il n'est pas exclu qu'à plus ou moinslong terme la Suisse adapte librement son régime d'imposition aux mesures fiscalesprises par la CE dans le but de promouvoir le développement économique des Etatsmembres.

222.07.5 Impôts à la source

A Acquis communautaire

La Commission a adopté, le 20 mai 1998, une proposition de directive visant à impo-ser à la source les intérêts de l'épargne des particuliers. Elle propose que les Etatsmembres soit appliquent une retenue à la source d'au moins 20% sur tous les revenusde l'épargne qui sont versés à des personnes résidant dans un autre Etat membre, soitfournissent aux autres Etats membres des informations sur les revenus de l'épargneversés aux résidents de ceux-ci (principe de la coexistence des deux systèmes). Lesystème de retenue à la source recourt au principe de l'agent payeur. Les opinions sontloin d'être faites à ce sujet et on estime que l'acceptation unanime par le Conseil desministres nécessitera encore des débats.

B Politique suisse

L'impôt anticipé sur les revenus de capitaux mobiliers (35%) est perçu essentiellementsur les intérêts et dividendes versés sur les titres d'émetteurs suisses. Le contribuablepaie sa prestation, diminuée du montant de l'impôt, qui est mis à la charge du bénéfi-ciaire des revenus. Celui-ci peut ensuite récupérer l'impôt acquitté en présentant unedemande de remboursement dans sa déclaration d'impôt, s'il est domicilié à l'étranger,par une demande prévue par une convention de double imposition entre la Suisse etl'Etat de résidence.

C Répercussions sur la Suisse

En cas d'adhésion à l'UE, l'impôt anticipé au sens de la directive mère-filiale ne pour-rait plus être perçu sur les dividendes versés par une filiale à sa société mère. De plus,le système de l'impôt anticipé en vigueur ne serait pas compatible, pour ce qui touche

Page 147: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 145 - Chapitre 2

les revenus de l'épargne, avec le système de l'imposition à la source prévu par la pro-position de directive de la Commission. Si cette directive est adoptée, la Suisse seraamenée à revoir son système en cas d'adhésion soit en retenant l'impôt à la source se-lon le principe de l'agent payeur, soit en livrant aux autorités étrangères les informa-tions concernant les non-résidents communautaires qui possèdent des dépôts de pa-piers-valeurs à taux fixe en Suisse. Dans le premier cas, se poserait la question de sa-voir s'il ne faudrait pas réduire le taux de 35%.

Dans les autres cas (participation à l'EEE, entrée en vigueur des accords sectoriels,maintien de la situation actuelle) il faudrait s'attendre, à supposer que la directive surl'imposition à la source des intérêts de l'épargne des particuliers soit adoptée, à ce quela Suisse, comme d'autres pays, soit confrontée à des demandes allant dans le sensd'une imposition de certains placements selon le principe de l'agent payeur pour que lerevenu de l'épargne soit taxé conformément aux règles du projet de directive.

222.07.6 Entraide administrative et judiciaire, secret bancaire

A Acquis communautaire

L'assistance mutuelle des autorités compétentes des Etats membres dans le domainedes impôts directs a été réglée en 1977 par une directive dont le champ d'application aété étendu aux impôts indirects255. Cette directive distingue trois domaines d'échangede renseignements. Elle oblige les Etats membres à échanger:

- toutes les informations susceptibles de leur permettre de déterminer correctementles impôts (échange sur demande);

- des informations, sans demande préalable et d'une manière régulière, pour certainescatégories de cas (échange automatique);

- des informations dans des cas déterminés, sans demande préalable, notammentlorsqu'il y a des raisons de présumer que l'on se trouve en présence d'un délit fiscal(échange spontané).

L'échange d'informations est limité par la législation et la pratique administrative desEtats membres, par le devoir de préserver les secrets économiques, industriels et pro-fessionnels, par l'ordre public et par le principe de réciprocité.

En 1989, la Commission a présenté une proposition en vue de modifier la directive enquestion afin de supprimer les restrictions à l'échange d'informations quand l'Etat re-quérant dispose d'indices concrets lui permettant de supposer qu'un de ses résidents acommis une fraude fiscale.

La directive sur l'assistance mutuelle n'a toutefois guère eu d'effets pratiques jusqu'àprésent, d'une part parce que certains Etats membres ne l'ont pas ou que partiellement

255 Directive 77/799/CEE du 19 décembre 1977 concernant l'assistance mutuelle entre les autorités compétentes

des Etats membres dans le domaine des impôts directs, JO no L 336, du 27 décembre 1977, p. 15; modifiéepar la directive 79/1070/CEE du 6 décembre 1979, JO no L 331 du 27 décembre 1979, p. 8.

Page 148: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 146 - Chapitre 2

transposée dans leur droit et, d'autre part, parce que les Etats membres ont conclu en-tre eux des conventions bilatérales contre la double imposition (CDI) dans lesquellesl'assistance administrative prévue s'en tient pratiquement sans exception aux disposi-tions du modèle de convention de l'OCDE. D'après l'art. 26 de ce modèle, les Etatsmembres sont tenus d'échanger non seulement les informations nécessaires à la bonneapplication de la convention, mais aussi celles qui servent à l'exécution du droit in-terne des Etats membres (grande clause d'assistance administrative).

B Politique suisse

La Suisse a conclu des conventions contre la double imposition (CDI) avec tous lesEtats membres de l'UE. Aux termes de ces conventions, elle se borne à échanger avecles Etats parties les renseignements nécessaires à la bonne application de la conven-tion et à empêcher une utilisation abusive de ces conventions (petite clause d'assis-tance administrative). En revanche, la Suisse n'échange pas les renseignements quiservent uniquement à exécuter le droit interne de l'Etat requérant. Elle a donc fait uneréserve à l'article relatif à l'assistance administrative du modèle de convention del'OCDE et n'a jusqu'à présent jamais accordé la grande clause d'assistance administra-tive à ses partenaires aux CDI. Seule la nouvelle convention contre la double imposi-tion avec les Etats-Unis du 2 octobre 1996 contient une clause d'assistance élargieprévoyant que les Etats parties échangeront les renseignements qui sont nécessaires àla bonne application de la convention ainsi qu'à la prévention des délits de fraude fis-cale en relation avec l'un des impôts visés par la convention.

L'assistance judiciaire est réglée comme suit: d'après la loi sur l'entraide internatio-nale en matière pénale256, la Suisse accorde l'assistance judiciaire à un autre Etat, uni-quement lorsque l'objet de la procédure porte sur une escroquerie fiscale au sens del'art. 14, al. 2, de la loi sur le droit pénal administratif 257. S'il existe un soupçon fondéde fraude fiscale, l'entraide judiciaire est accordée sur la base du droit suisse, soit in-dépendamment de l'existence d'une convention contre la double imposition, si lafraude porte sur un montant important et sous réserve de réciprocité.

Pour ce qui est du secret bancaire, il faut également distinguer entre les informationshabituelles entrant dans le cadre d'une procédure fiscale et les renseignements à uneautorité de poursuite pénale étrangère dans le cadre d'une procédure pénale pourfraude fiscale. Tant la directive de la CE que l'art. 26 du modèle de convention del'OCDE protègent le secret d'affaires et le secret professionnel - aussi le secret ban-caire - s'ils sont invoqués dans une procédure pénale. Ceci correspond également àl'attitude de la Suisse qui ne fournit pas de renseignements en matière de procédurefiscale conformément à l'art. 47 de la loi fédérale sur les banques et les caisses d'épar-gne258. De plus, la Suisse a confirmé sa position dans le cadre de l'adoption du dernierrapport de l'OCDE d'avril 1998 sur la limitation de la concurrence dommageable en

256 Loi fédérale du 20 mars 1981 sur l'entraide internationale en matière pénale (EIMP), RS 351.1.257 Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA), RS 313.0.258 Loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les banques et les caisses d'épargne, RS 952.0.

Page 149: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 147 - Chapitre 2

refusant d’approuver les recommandations de ce rapport. Ceci ne vaut toutefois pasdans les procédures d'entraide judiciaire en cas de fraude fiscale. Dans ce cas, unebanque ne peut pas invoquer l'obligation de garder le secret et, si les conditions léga-les sont remplies, elle est tenue de communiquer les renseignements nécessaires surson client et sur les comptes de ce client.

C Répercussions sur la Suisse

Les Etats membres de l’UE, les Etats membres de l’OCDE et d’autres organisationsinternationales exercent des pressions toujours plus vives sur la Suisse pour qu’elleélargisse son assistance administrative. Cette évolution est indépendante de la ques-tion de l'adhésion de la Suisse à l'UE.

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse devrait reprendre la directive de la CE sur l’assis-tance administrative et, par conséquent, introduire la grande clause d'assistance admi-nistrative dans ses conventions contre la double imposition avec les Etats membres del'UE, ce qui ferait augmenter le nombre des demandes de renseignements provenantde ces Etats. En matière de secret bancaire, la situation actuelle ne devrait pas con-naître de changements.

En cas de participation à l'EEE ou de négociations bilatérales sectorielles dans denouveaux domaines, la pression internationale sur la Suisse devrait s'accroître comptetenu de l'extension de l'entraide administrative.

222.07.7 Impôt sur les transactions sur titres

A Acquis communautaire

Les impôts sur les transactions sur titres n'ont pas fait l'objet de travaux importants ausein de l'UE ces dernières années. La directive du Conseil du 17 juillet 1969 concer-nant les impôts indirects frappant les rassemblements de capitaux259 prévoit la sup-pression des droits de négociation sur les transactions sur titres, réservant toutefois lesimpôts sur les transactions boursières. A l'heure actuelle moins de la moitié des Etatsmembres de l'UE prélèvent de tels impôts dont les taux sont en général inférieurs à1%. Ces impôts sont en principe conçus de manière à ne pas affecter la capacité con-currentielle internationale des différentes places financières et boursières; l'impositionest souvent plus élevée lorsque la transaction ne peut pas être effectuée à l'étranger.

B Politique suisse

En Suisse, la cession à titre onéreux de papiers-valeurs est en principe soumise audroit de timbre de négociation lorsqu'un commerçant de titres suisse participe à latransaction en tant que contractant ou intermédiaire. Le taux d'impôt est de 1,5 ou 3‰

259 Directive 69/335/CEE du 17 juillet 1969 concernant les impôts indirects frappant les rassemblements de

capitaux, JO n° L 249 du 3 octobre 1969, p. 25, modifiée en dernier lieu par la directive 85/303/CEE du 10juin 1985, JO n° L 156 du 15 juin 1985, p. 23.

Page 150: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 148 - Chapitre 2

de la contre-valeur, selon que l'émetteur du titre se trouve en Suisse ou à l'étranger.L'émission d'obligations de débiteurs domiciliés à l'étranger libellées en monnaieétrangère (euro-obligations), ainsi que celle de droits de participation à des sociétésétrangères ne sont plus soumises au droit de négociation depuis la modification légis-lative entrée en vigueur le 1er avril 1993; de même, le commerce de papiers monétai-res et l'entremise dans l'achat et la vente d'obligations étrangères entre deux partiescontractantes étrangères ne sont plus soumis au droit de négociation. Les commer-çants de titres suisses sont enfin exemptés du droit de négociation lorsqu'ils acquièrentou aliènent des titres dans le cadre de leur activité commerciale.

C Evolution générale

Les négociants en titres étrangers qui veulent effectuer des opérations à la Boursesuisse en qualité de "remots members" doivent être traités comme les négociants suis-ses. Ils devront donc verser le droit de négociation sur leurs opérations en bourse etbénéficieront des mêmes exonérations d'impôt pour leurs portefeuilles commerciauxque les négociants suisses. Le Conseil fédéral veut régler ce point et prendre des me-sures pour reconquérir le marché des euro-obligations dans un arrêté fédéral urgentqu'il a remis au Parlement en décembre 1998 accompagné d'un message.

D Répercussions sur la Suisse

En adhérant à l'UE, il n'est pas exclu que la Suisse doive renoncer, au droit de négo-ciation sur le transfert de titres tel qu'il est conçu, dans la mesure où il frappe des opé-rations hors bourse. La diminution des recettes annuelles est difficilement quantifiablecar nous ne disposons pas de données précises au sujet des transactions hors bourse.

222.07.8 Impôts sur l'affectation de capital

A Acquis communautaire

L'harmonisation des droits d'émission sur les droits de participation a fait un pas sen-sible au sein de l'UE. Elle se fonde sur la directive concernant les impôts indirects surles rassemblements de capitaux260. Depuis 1986, les Etats membres ne peuvent plusimposer les apports de capitaux visés dans ces directives qu'au taux de 1%. QuelquesEtats perçoivent le droit au taux de 1%, certains appliquent un taux réduit alors qued'autres ont renoncé totalement à percevoir ce droit. La directive permet cependant deprélever des droits beaucoup plus élevés sur l'apport d'immeubles.

B Politique suisse

L'imposition de l'affectation de capital se fait en Suisse par le droit de timbre d'émis-sion perçu sur la création et l'augmentation de droits de participation. En 1993, le lé-gislateur a réintroduit le droit d'émission sur les obligations suisses, l'émission d'obli-

260 Voir note précédante.

Page 151: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 149 - Chapitre 2

gations étrangères demeurant hors du cadre de l'imposition. Le droit de timbre d'émis-sion a en outre été supprimé sur le transfert du siège de sociétés en Suisse, sur l'émis-sion de parts de fonds de placements suisses et dans les cas de restructurations. Avecl'entrée en vigueur d'une nouvelle modification de la loi sur le droit de timbre en jan-vier 1996, le taux est descendu de 3 à 2% et le capital de fondation des sociétés ano-nymes et de sociétés à responsabilité limitée n'excédant pas 250 000 francs n'était passoumis au droit d'émission. La réforme 1997 de l'imposition des sociétés a finalementréduit à 1% le taux du droit d'émission et étendu la franchise de 250 000 francs à tou-tes les créations de sociétés et augmentations de capital.

C Répercussions sur la Suisse

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse ne pourrait plus soumettre au droit de timbred'émission les obligations et papiers monétaires, seuls les apports de capital proprepouvant être imposés. La renonciation au droit de timbre d'émission sur les obliga-tions et papiers monétaires représenterait pour l'Etat un manque à gagner moyen d'en-viron 340 millions de francs par année.

Etant donné que la réduction du droit de timbre d'émission à 1% s'est déjà faite enrapport avec la réglementation communautaire, quel que soit le cas de figure(participation à l'EEE, entrée en vigueur des accords sectoriels ou maintien de lasituation actuelle), la Suisse ne craindrait pas la comparaison avec les Etats membresde l'UE sur ce plan. Elle est en effet plus généreuse que ne l'exige la directive, nonseulement en raison de la franchise, mais encore dans les cas de restructurations oud'apports d'immeubles.

222.08 Politique régionale et structurelle

A Acquis communautaire

A.1 Politique régionale et structurelle actuelle

La politique régionale de la Communauté est fondée sur l'un de ses principaux objec-tifs, à savoir la cohésion économique et sociale servant à promouvoir le développe-ment harmonieux de l'ensemble de la Communauté (art. 130 a traité CE). Cette tâcheest essentiellement réalisée au moyen des fonds structurels: le Fonds européen de dé-veloppement régional (FEDER), le Fonds social européen (FSE), le Fonds européend'orientation et de garantie pour l'agriculture, section "Orientation" (FEOGA) et, de-puis 1993, l'Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP). S'y ajoute la possi-bilité d'octroi de prêts communautaires par la Banque européenne d'investissements(BEI).

Le Conseil des ministres fixe les tâches, les objectifs et l'organisation des fondsstructurels, ainsi que les dispositions générales pertinentes. Toutes les décisions doi-vent être adoptées à l'unanimité, sur proposition de la Commission. La Commissionest seule compétente en matière d'initiative. Elle adopte en outre des programmes

Page 152: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 150 - Chapitre 2

pour lesquels les Etats membres ont demandé un financement et surveille l'applicationgénérale de la politique.

Les fonds structurels ont été considérablement augmentés au cours des dix dernièresannées et disposent de plus de 163 milliards d'euros261 pour la période de 1994 à 1999(prix courants, ou pour 1999, ceux de 1998), c'est-à-dire plus de 30% du budgetcommunautaire. Les mesures à finalité structurelle soutenues par le FEDER, le FSE,le FEOGA et l'IFOP sont axées sur six objectifs:

- Développement et adaptation structurelle de régions ayant un retard de développe-ment (1);

- Reconversion économique de régions subissant un déclin industriel (2);

- Lutte contre le chômage de longue durée, intégration professionnelle des jeunes etdes personnes menacées d'être exclues du marché du travail (3);

- Adaptation des salariés aux changements de l'industrie et des systèmes de produc-tion (4);

- Adaptation des structures de production, de transformation et de commercialisationpour les produits de l'agriculture et de la pêche (5 a);

- Développement et adaptation structurelle du milieu rural (5 b);

- Adaptation économique des régions très faiblement peuplées (6).

90% des ressources des fonds structurels sont affectés à des programmes que les Etatsmembres élaborent en collaboration avec les collectivités régionales et locales, lesorganisations économiques et les partenaires sociaux et qui correspondent aux objec-tifs mentionnés. Les programmes sont soumis à la Commission pour approbation.

9% des ressources des fonds structurels, soit 14 milliards d'euros pour la période de1994 à 1999, sont réservés à des programmes résultant d'une initiative communau-taire. A cet égard, c'est la Commission qui propose les priorités en matière d'interven-tion. Les programmes d'action correspondants doivent être élaborés par les régionseuropéennes et approuvés par la Commission. Il existe pour la période de 1994 à 1999treize initiatives de ce type, dont INTERREG, à laquelle participe également la Suisse(Confédération et cantons).

Enfin, la Commission a la possibilité de lancer ses propres initiatives; ces dernièressont mises en oeuvre dans de nouveaux domaines politiques sous le titre d'"Actionsinnovatrices". Pour les programmes de la période actuelle, mentionnons plus particu-lièrement des actions dans les domaines de la coopération transfrontalière, interrégio-nale et transnationale, et dans celui du développement des villes, auxquels la Suisseaccorde un intérêt particulier.

261 En raison de la transformation le 1er janvier 1999 de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion

1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".

Page 153: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 151 - Chapitre 2

Par ailleurs, le Fonds de cohésion (art. 130 d Traité CE) a été créé en même tempsque le Traité de Maastricht. Ses ressources (16 milliards d'euros pour la période de1993 à 1999) servent à financer des projets dans les domaines de l'environnement etdes réseaux européens d'infrastructure des transports dans les Etats membres dont lePIB par habitant est inférieur à 90% de la moyenne communautaire, c'est-à-dire l'Es-pagne, la Grèce, l'Irlande et le Portugal.

A.2 Modifications apportées par le Traité d'Amsterdam et l'Agenda 2000

Le Traité d'Amsterdam n'a entraîné qu'une petite modification d'ordre procédural pourla politique régionale et structurelle. Le Comité des régions doit désormais égalementêtre consulté par le Conseil ou par la Commission lorsqu'il s'agit des domaines del'environnement, du Fonds social, de la formation professionnelle, de la coopérationtransfrontalière et des transports.

Compte tenu de l'élargissement prévu par l'adhésion des Etats associés d'Europe cen-trale et orientale, la réforme de la politique structurelle constitue un défi particulierpour la Communauté. Pour concrétiser l'orientation annoncée par l'Agenda 2000, laCommission a présenté, le 18 mars 1998, des propositions relatives aux règlementsdes Fonds structurels pour les années 2000 à 2006 (voir ch. 253). Aucune réforme n'aété proposée par la Commission pour le Fonds de cohésion.

A.3 Schéma de Développement de l’Espace Communautaire (SDEC)

Le projet relatif à un Schéma de Développement de l’Espace Communautaire(SDEC), adopté en 1997, est le fait des ministres de l'aménagement du territoire, laCommunauté n'étant pas elle-même compétente en la matière. Toutefois un certainnombre d'études communautaires ont servi de base à ce projet et, dans l'ensemble, leconcept est l'expression des efforts communs des Etats membres et de la Commission,sur le plan horizontal (entre les différentes politiques ayant un effet sur le territoire) etvertical (entre Bruxelles et les capitales) pour renforcer la cohérence dans le domainede l'aménagement du territoire. Le concept sera une des bases importantes de la pro-chaine politique régionale et structurelle de l'UE. A noter par ailleurs que le Comitéde développement spatial des quinze Etats de l'UE a invité la Suisse à se déterminersur le projet de SDEC. Se basant sur l'une des stratégies des grandes lignes de l'orga-nisation du territoire suisse262 qui prône une participation active de la Suisse à l'orga-nisation du territoire au niveau européen, la Suisse a transmis dans sa réponse despropositions de collaboration avec le comité précité.

262 Rapport du Conseil fédéral du 22 mai 1996 sur les grandes lignes de l'organisation du territoire suisse, FF

1996 III 526.

Page 154: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 152 - Chapitre 2

B Politique suisse

B.1 Généralités

La conception et les mesures de la politique suisse des régions et de l'aménagementdu territoire sont décrites dans le message du 28 février 1996 sur la nouvelle orienta-tion de la politique régionale263 et dans le rapport du 22 mai 1996 sur les grandes li-gnes de l'organisation du territoire suisse264. L'idée directrice de la politique régionaleest la promotion de la compétitivité et du développement durable dans les différentesrégions et le maintien de la qualité du cadre de vie en dehors des centres.

La stratégie du Conseil fédéral vise à: aménager les espaces urbains, à renforcer leszones rurales en ménageant les espaces naturels et les paysages et, dans la perspectivede l'intégration transfrontalière, à établir un lien entre l'aménagement du territoiresuisse et celui de la Communauté. Sur le plan fédéral, il existe des politiques secto-rielles, mais aussi quelques instruments directs de politique régionale, pour mettre enoeuvre cette stratégie, à savoir:

- la loi fédérale du 21 mars 1997 sur l'aide aux investissements dans les régions demontagne (LIM)265;

- l'arrêté fédéral du 21 mars 1997 instituant une aide à l'évolution structurelle en mi-lieu rural (Regio Plus)266;

- l'arrêté fédéral du 8 mars 1995 relatif à la promotion de la coopération transfronta-lière des cantons et des régions dans le cadre de l'initiative communautaire IN-TERREG II pour la période de 1995 à 1999267;

- l'arrêté fédéral du 6 octobre1995 en faveur des zones économiques en redéploie-ment268;

- l'arrêté fédéral du 25 juin 1976 encourageant l'octroi de cautionnements et de con-tributions au service de l'intérêt dans les régions de montagne269;

- la loi fédérale du 1er juillet 1966 sur l'encouragement du crédit à l'hôtellerie et auxstations de villégiature270.

Il faut par ailleurs tenir compte du fait qu'il existe dans plusieurs cantons des mesurespour accompagner les grandes lignes de la politique régionale de la Confédération.

263 FF 1996 II 1080.264 FF 1996 III 526.265 RS 901.1.266 RS 901.3.267 FF 1995 I 313268 RS 951.93.269 RS 901.2.270 RS 935.12.

Page 155: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 153 - Chapitre 2

Il existe actuellement deux grandes différences entre les politiques régionales com-munautaire et suisse. D'une part, la Communauté a pour principal objectif de réduireles disparités pour renforcer la cohésion (objectif de péréquation), alors que la Suisses'intéresse avant tout à la promotion de la compétitivité régionale (objectif d'efficaci-té). D'autre part, en Suisse, les ressources financières affectées à la promotion des ré-gions (de 30 à 50 millions de francs suisses par année - subventions directes et avan-tages financiers sous forme d'allégement d'intérêts) apparaissent modestes par rapportaux pays voisins et à la CE.

B.2 Coopération transfrontalière

Suite au rejet de l'EEE le 6 décembre 1992, les cantons ont manifesté le souhait d'êtreassociés plus étroitement à la politique étrangère. Après une consultation étendue, leConseil fédéral a approuvé le 7 mars 1994 le rapport sur la coopération transfronta-lière et la participation des cantons à la politique étrangère271.

Les compétences des cantons dans le domaine de la coopération transfrontalière sontrégies par les art. 9 et 10, cst. (et 102 ch. 7, cst.). Elles n'ont qu'un caractère subsi-diaire par rapport à la compétence générale de la Confédération dans le domaine de lapolitique étrangère. Cependant, le Conseil fédéral interprète ces dispositions de façonlibérale. Ainsi, les cantons peuvent conclure des traités avec l'étranger dans tous lesdomaines relevant de leur compétence.

La coopération transfrontalière est devenue un élément important de la politique ré-gionale et de la politique d'intégration de la Confédération. Le rapport sur la coopéra-tion transfrontalière et la participation des cantons à la politique étrangère a donnéune nouvelle impulsion à la politique régionale et d'intégration. C'est à cette occasionqu'a été réaffirmée la volonté de la Confédération de favoriser la participation descantons à l'initiative INTERREG de la Commission.

C Relations contractuelles existantes

Dans le domaine de la coopération transfrontalière, un réseau informel de contactss'est établi, au cours des dernières années, entre les cantons frontaliers ou la Confédé-ration et les Etats limitrophes ou la CE, sans qu'il y ait de rapports contractuels. Cer-tains cantons ont déjà participé à INTERREG I (1991-1993) de manière autonome, ettous les cantons frontaliers coopèrent avec les régions limitrophes des pays voisinsdans le cadre d'INTERREG II (1994-1999). Ces activités sont promues conformémentà l'arrêté fédéral relatif à INTERREG de 1995 mentionné plus haut.

Il faut signaler par ailleurs que la Suisse a été invitée à collaborer dans le cadre de lacoopération transnationale soutenue par l'initiative communautaire INTERREG II Cqui concerne la coopération transnationale dans le domaine de l'organisation du terri-toire. C'est ainsi que des cantons de Suisse orientale et des services fédéraux coopè-

271 FF 1994 II 604.

Page 156: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 154 - Chapitre 2

rent dans le cadre d'un programme concernant les Alpes orientales. La Suisse a éga-lement été abordée pour un programme concernant l'espace "Méditerranée occidentaleet Alpes latines".

La réforme de la politique structurelle de la Communauté, mentionnée à la let. A.2,pèsera encore plus lourd sur la coopération transfrontalière. Il y est prévu de poursui-vre la coopération régionale et de la compléter avec des programmes et des projets decoopération transnationale (régions frontalières contiguës d'une certaine étendue) etinterrégionale (régions sans frontières communes) en Europe. La proposition de laCommission prévoit également une augmentation des moyens financiers alloués à cedomaine d'activités qui passeraient de 3 milliards (1994-1999) à 6 milliards d'euros(2000-2006). Le Conseil fédéral prévoit d'élaborer un projet d'arrêté fédéral INTER-REG III qui devrait faciliter la participation des cantons et des régions à ces pro-grammes et projets de la Communauté pour la période de 2000 à 2006. En procédurede consultation, cette intention a été soutenue par tous. Le message correspondantdevrait être transmis au Parlement fin février 1999.

D Répercussions sur la Suisse

Sur le plan de la politique de la concurrence (subventions publiques) et sur celui de lapolitique régionale, la Suisse n'a pas besoin de modifier sa base légale, ni pour uneadhésion à l'UE, ni pour d'autres formes d'intégration.

Alors que la Suisse devrait verser des sommes considérables, en cas d'adhésion à l'UE(voir ch. 251) et au titre de sa contribution au budget communautaire, pour alimenterles fonds structurels et le fonds de cohésion, il ne faut pas s'attendre à un retour deflux financiers importants vers la Suisse dans le cadre des objectifs structurels.

En 1992, la Direction générale de la politique régionale de la Commission CE aconstaté, dans un rapport succinct sur les diverses régions suisses, que seules certainesrégions rurales pourraient éventuellement être soutenues parce qu'elles répondaient àl'objectif 5b (développement et adaptation structurelle de l'espace rural). Cette analyseserait renouvelée dans le cadre de négociations d'adhésion.

Dans certaines initiatives communautaires, telles que celles visant à promouvoir lacoopération transfrontalière (INTERREG) ou la coopération dans les régions rurales(LEADER) et dans les activités pilotes innovatrices, une participation directe des ré-gions suisses susceptibles d'être soutenues serait possible. Dans les domaines où uneparticipation directe des régions serait possible il y aurait en conséquence une réduc-tion des dépenses dans les programmes fédéraux (par ex. INTERREG ou REGIOPLUS).

A l'heure actuelle, la politique régionale suisse vise essentiellement à promouvoir lesrégions de montagne par la loi sur l'aide aux investissements dans les régions de

Page 157: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 155 - Chapitre 2

montagne (LIM)272. En revanche, la Communauté n'a aucune politique structurelleexplicite pour ces zones à la topographique tourmentée. Afin de pouvoir poursuivre ledéveloppement de cet aspect spécifique de notre politique régionale, le dispositif de laLIM devrait être maintenu, même en cas d'adhésion à l'UE, sous la forme d'un instru-ment national et en tant que tâche commune à réaliser par la Confédération et lescantons.

Dans l'hypothèse d'une participation à l'EEE, il n’y aurait pas de changement dans lapolitique régionale et structurelle, c'est-à-dire que la Suisse resterait autonome(compte tenu des dispositions relatives aux subventions publiques) comme elle le seraégalement en cas de maintien de la situation actuelle ou après l'entrée en vigueur desaccords sectoriels. Un mécanisme de financement, négocié dans le cadre de l'EEE,oblige les pays de l'AELE à verser une contribution financière au Fonds de cohésion.En 1992, il avait été estimé que la Suisse aurait dû verser chaque année entre 60 et 70millions de francs sur une période de cinq ans. En cas de participation future à l'EEE,on rediscuterait probablement d'un mécanisme de financement de la cohésion socialeet économique.

222.09 Transports

222.09.1 Transports terrestres

A Acquis communautaire

Jusqu'en 1993, la réalisation du marché unique a constitué l'objectif principal de lapolitique des transports de la CE. Durant cette phase, il s'est agi avant tout d'éliminerles obstacles nationaux aux échanges (libéralisation) et d'harmoniser les réglementa-tions nationales (suppression des restrictions quantitatives dans le domaine des trans-ports routiers de marchandises, introduction progressive du cabotage, libéralisationdes transports routiers de voyageurs, libéralisation dans le secteur de l'accès au mar-ché ferroviaire).

Tout en maintenant l'objectif de préserver et de développer le marché unique, leTraité de Maastricht a souligné l'importance d'autres objectifs, tels une croissancedurable respectueuse de l'environnement, l'amélioration de la sécurité, ainsi que lanécessité d'améliorer la qualité et l'efficacité des infrastructures de transport (réseautranseuropéen). L'amélioration de la qualité par la mise au point de systèmes de trans-port intégrés et par une meilleure prise en compte de l'aspect environnemental(renforcement des normes d'émission des véhicules, promotion de modes de transportplus respectueux de l'environnement), l'amélioration du fonctionnement du marchéunique (réseau du citoyen) et le développement de la dimension extérieure de la CE(amélioration des liaisons de transport avec les pays tiers) constituent les éléments cléde cette nouvelle phase.

272 Loi fédérale du 21 mars 1997 sur l'aide aux investissements dans les régions de montagne (LIM), RS 901.1.

Page 158: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 156 - Chapitre 2

Pour la Commission, une utilisation optimale des capacités de chaque mode de trans-port ne pourra pas être atteinte s'il y a distorsions de concurrence entre les modes detransport. Dans cette optique, des décisions permettent d'harmoniser les systèmes etles niveaux de taxation pour l'ensemble des Etats membres (voir la directive dite"Eurovignette"273) ont été prises lors du Conseil Transports du 30 novembre 1998. Enoutre, le débat en matière d'internalisation des coûts externes a été ouvert par laCommission274. Bien que cette conception de la vérité des coûts ne soit pas acceptéepar certains Etats membres, il semble que la législation communautaire se développedans cette direction.

L'accès au marché routier et ferroviaire275, l'accès à la profession, les règles sociales(temps de conduite et de repos, tachygraphes) et techniques (poids et dimensions desvéhicules)276, ainsi que la fiscalité routière forment l'essentiel de l'acquis communau-taire pertinent en la matière. De plus, les règles de concurrence du droit communau-taire sont également applicables dans le domaine de la politique des transports. Lemode décisionnel est depuis 1967 la majorité qualifiée à l'exception de la fiscalitéroutière (unanimité).

B Politique suisse

Les principaux objectifs fixés par le Conseil fédéral en matière de transports terrestresconsistent à maîtriser la mobilité en respectant l'environnement et à financer de ma-nière sûre le système de transport dans son ensemble. Ces objectifs devraient être réa-lisés, si possible dans un cadre européen. Aussi, sur le plan des négociations bilatéra-les sectorielles avec la CE, la Suisse a accepté, d'ici à 2005, d'augmenter la limite depoids des véhicules lourds à 40 tonnes (changement de paradigme) si une telle mesures'accompagne en parallèle d'une augmentation de la fiscalité routière. Les décisions defond des derniers mois quant aux transports terrestres, à savoir la redevance poidslourds proportionnelle aux prestations (RPLP), la réforme des chemins de fer, la réali-sation et le financement de l'infrastructure des transports publics, ainsi que la concré-tisation de l'article constitutionnel sur la protection des Alpes permettent à la Suissede continuer à assurer son rôle de pays de transit, tout en restant axées sur les objectifscités plus haut.

C Relations contractuelles existantes

L'Accord sur le transit entre la Suisse et la CE277, en vigueur depuis 1993 et conclupour une durée de 12 ans, a pour objectif principal de renforcer la coopération entre

273 Directive 93/89/CE du 25 octobre 1993, JO n° L 279 du 12 novembre 1993, p. 32.274 Voir le Livre vert du 20 décembre 1995 sur la tarification équitable dans les transports, COM (95) 691, et le

Livre blanc du 22 juillet 1998 sur les redevances équitables pour l'utilisation des infrastructures, COM (98)466 final.

275 Directive 91/440/CEE du 29 juillet 1991, JO n° L 237 du 24 août 1991, p. 25.276 Directive 96/53/CE du 25 juillet 1996, JO n° L 235 du 17 septembre 1996, p. 59.277 Accord du 2 mai 1992 entre la Confédération suisse et la CEE sur le transport de marchandises par route et

par rail, RS 0.740.71.

Page 159: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 157 - Chapitre 2

les parties contractantes dans le domaine des transports de marchandises, et plus par-ticulièrement en matière de trafic de transit à travers les Alpes suisses. L'accord portesur la coopération en matière de transport ferroviaire (priorité au transport combiné,infrastructures ferroviaires à réaliser, en particulier construction de la NLFA), ainsique sur la facilitation du transport routier avec toutefois le maintien de la limite des28 tonnes. En matière de fiscalité routière, les parties se sont engagées à développerune politique si possible coordonnée qui prenne en considération tant les coûts d'in-frastructure que les coûts externes (et en particulier les coûts spécifiques aux régionsalpines). L'accord trilatéral de 1991 entre les ministres des transports de l'Allemagne,de l'Italie et de la Suisse concernant l'amélioration du trafic combiné rail/route desmarchandises à travers les Alpes suisses complète l'Accord sur le transit.

Dans le secteur de l'accès au marché des transports routiers, les relations entre laSuisse et les Etats membres sont réglées par des accords bilatéraux (à l'exception del'Irlande). Si certains de ces accords prévoient un régime largement libéralisé, d'autres(Allemagne, Italie, Belgique, France) contiennent des dispositions qui constituent unfrein aux échanges (contingentement).

D Répercussions sur la Suisse

D.1 Adhésion à l'UE

En cas d'adhésion à l'UE, des solutions particulières pour la Suisse ou le cas échéantpour d'autres régions de montagnes (par ex. Arc alpin), devraient être négociées dansle cadre de la reprise de l'acquis communautaire dans la mesure où une dispositionexpresse de cet acquis le prévoit ou qu'un tel acquis fasse encore défaut; des solutionstransitoires seraient également à négocier. Même sans entrée en vigueur de l’accordsectoriel (voir ci-après), on peut partir de l’idée que le régime des 28 tonnes enSuisse, négocié en 1992 dans le cadre des négociations EEE et fixé dans l’Accord detransit, ne pourrait être prolongé sans autres. L'accès au marché des transports routiersnécessiterait la levée de l'interdiction du cabotage national et l'harmonisation des con-ditions de concurrence (en particulier l'adaptation de la limite de poids des véhiculesau droit communautaire).

Avec la réalisation de la réforme des chemins de fer, l'accès au réseau dans le secteurferroviaire ne poserait pas de problème. Dans le domaine des aides d'Etat accordéesau transport combiné, la Suisse pourrait continuer à octroyer des aides concernant lesinvestissements dans l'infrastructure et dans les équipements fixes et mobiles néces-saires au transbordement. En revanche, la possibilité d'octroyer des aides pour lescoûts d'exploitation non couverts des services de transport combiné ne seraient possi-ble qu'à certaines conditions (voir aussi ch. 222.04.2). Reste le problème de la fisca-lité routière. La RPLP que la Suisse prévoit d'introduire dès 2001 s'inscrit dans la lo-gique de la réglementation communautaire, ainsi que celle des propositions de laCommission en la matière même si la directive actuelle ne prévoit pas une redevances'appliquant à l'ensemble du réseau routier. Le débat au sein de la CE sur une révisionà la hausse de la fiscalité routière (Eurovignette, solution particulière pour le Brenner,

Page 160: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 158 - Chapitre 2

internalisation des coûts externes) a progressé. Il est sûr que comparé à aujourd'hui, lafuture réglementation de la Communauté permettra l'application de plafonds plus éle-vés pour les redevances d'utilisation. Par ailleurs, il serait possible que la CE cofi-nance la construction de la NLFA, qui fait partie intégrante du projet de réseau tran-seuropéen. Les subventions communautaires prévues pour un projet prioritaire nepeuvent toutefois s'élever qu'à un maximum de 10% du montant investi. Une coopé-ration avec la Banque européenne d'investissement est par ailleurs possible indépen-damment de la question de l'adhésion à l'UE (octroi de crédits, pas de subventionne-ment de la part de la Communauté). Dans un tel cas, la Banque européenne d'investis-sement peut jouer un rôle de coordination utile.

L'adaptation de la législation suisse au droit communautaire et l'harmonisation de lapolitique de transport qui en résulte nécessiterait l'introduction de mesures d'applica-tion aux conséquences financières peu importantes (octroi de licences de transpor-teurs, contrôles techniques plus fréquents des véhicules, etc.). En revanche, l'intro-duction de la limite des 40 tonnes engendrerait des dépenses élevées (extension del'offre en transport combiné accompagné et non accompagné, subventionnement durail). S'il existe déjà un accord bilatéral sur les transports terrestres au moment del'adhésion, ces coûts n'apparaîtraient pas en sus.

La reprise de l'acquis communautaire aurait également des conséquences pour lescantons, comme un contrôle technique des véhicules lourds, effectué chaque année etnon plus, comme jusqu'ici, tous les deux ans. Enfin, le développement du droit com-munautaire en matière de transport combiné allant dans le sens de réductions de taxes(impôts sur véhicules, RPLP) accordées aux véhicules effectuant des parcours en re-lation avec ce type de transport (zones radiales), de telles réductions pourraient af-fecter également les cantons.

D.2 Participation à l'EEE, accords sectoriels, maintien de la situationactuelle

En cas de participation à l'EEE, des solutions particulières ou transitoires pourraientaussi être négociées, dans le cadre de la reprise de l'acquis communautaire pertinent.La marge de manœuvre de la Suisse ne serait néanmoins pas très importante en raisondu principe de l'homogénéité de l'EEE. On peut, ici aussi, partir de l'idée qu'en cas derenégociation, le régime des 28 tonnes négocié en 1992 ne pourrait être prolongé sansautres. En cas de participation à l'EEE, les conséquences financières et les répercus-sions sur les cantons seraient comparables à celles qui résultent d'une adhésion à l'UE.

L'accord sur les transports terrestres permettra à la Suisse de bénéficier des accèsaux marchés ferroviaires et routiers (à l'exception du cabotage national). Il fonderaégalement les bases d'une politique des transports harmonisée dans l'Arc alpin tout enpermettant à la Suisse de mettre en oeuvre sa politique des transports (transfertroute/rail, utilisation optimale des infrastructures ferroviaires). La Suisse augmenterasa limite de poids à 34 tonnes d'ici à 2001, puis à 40 tonnes en 2005 et en parallèle safiscalité. Enfin, l'accord permettra de renforcer une coordination en matière d'infra-

Page 161: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 159 - Chapitre 2

structure dans l'Arc alpin et en particulier en ce qui concerne les lignes d'accès à laNLFA au nord et au sud de la Suisse. Les conséquences financières résultant de l'ac-cord seront comparables à celles qui découlent de l'adhésion. A cela s'ajouteront en-core les dépenses liées aux solutions applicables durant la période transitoire (2001-2004) telles que l'introduction de contingents pour véhicules de 40 tonnes ou pourvéhicules roulant à vide (octroi d'autorisations, encaissement des redevances et sur-tout contrôles à la douane ou sur les routes). Les conséquences pour les cantons serontégalement comparables à celles qui se produisent en cas d'adhésion.

Le maintien de la situation actuelle ne permet pas d'assurer l'accès au marché ferro-viaire (obligation de négocier avec chaque Etat membre séparément). L'accès au mar-ché des transports routiers n'est quant à lui que partiellement garanti (accords exis-tants). La Suisse n'est pas tenue de modifier la limite de 28 tonnes et peut augmenterd'une manière autonome sa fiscalité routière (avec l'objectif de transfert route/rail).Une telle situation est de nature à accroître encore le trafic de détournement versl'Autriche et la France et rendra le système suisse politiquement inacceptable pour laCE. A cela s'ajoute le fait qu'à partir de 2005 l'Accord sur le transit arrivera àéchéance, créant ainsi un vide juridique entre la CE et la Suisse sur la question du tra-fic de transit à travers les Alpes suisses. Par la mise en place d'une telle politique au-tonome, la Suisse risque d'encourir des mesures de rétorsion et de se voir soumise àune pression accrue pour fixer la limite de poids à 40 tonnes dès 2005. Dans ces cir-constances, l'absence de coordination avec la CE risque de peser très lourd et d'anni-hiler les efforts de la Suisse pour transférer le trafic international (en particulier à lon-gue distance) de la route au rail. La capacité de la Suisse d'influer sur l'avenir de lapolitique européenne, voire transalpine, des transports sera faible si notre pays resteen dehors des institutions de l'UE.

222.09.2 Transport aérien

A Acquis communautaire

La CE a libéralisé le transport aérien par étapes. Le troisième et dernier train de mesu-res de libéralisation comprend trois règlements relatifs aux licences des transporteursaériens, aux droits d'accès aux aéroports communautaires et aux tarifs278. Ces règle-ments sont entrés en vigueur le 1er janvier 1993 et ont été ultérieurement intégrés àl'Accord EEE. Grâce à ces instruments, les compagnies aériennes communautairesbénéficient des libertés de l'air279, de la liberté tarifaire, de l'absence de limitation des 278 Règlements (CE) 2407/92, 2408/92 et 2409/92 du 23 juillet 1992, JO n° L 240 du 24 août 1992, p. 1.279 Pour une compagnie aérienne britannique par exemple, les 'libertés de l'air' signifient:

1e liberté: droit de survol;2e liberté: escales non commerciales;

3e liberté: Londres-Paris; 4e liberté: Paris-Londres;

5e liberté: Londres-Paris-Madrid (possibilité d'embarquement de passagers à Paris à destination de Madrid);6e liberté: Stockholm-Londres-Madrid;7e liberté: Paris-Madrid;8e liberté: Paris-Lyon (il s'agit là de cabotage, soit de vols intérieurs qui peuvent être effectués par des com-

pagnies étrangères de l'UE/EEE depuis avril 1997).

Page 162: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 160 - Chapitre 2

capacités, ainsi que de la liberté d'établissement et d'investissement pour les personnesphysiques et morales dans le cadre du transport aérien. L'acquis communautaire com-prend également des actes notamment dans les domaines technique et opérationnel,du droit de la concurrence et des mesures d'harmonisation. Dans la règle, le Conseil,statuant à la majorité qualifiée, est compétent pour adopter de nouveaux actes dans lecadre de la procédure de coopération réglée à l'art. 189c du Traité CE.

B Politique suisse

La Suisse poursuit une politique libérale dans le domaine du transport aérien. Uneparticipation au marché libéralisé de la CE suppose toutefois l'existence d'un accord.La première demande officielle présentée à la CE en vue de l'ouverture de négocia-tions visant à la conclusion d'un accord bilatéral date de décembre 1988 (demandecollective des Etats membres de l'AELE). En outre, la loi fédérale sur l'aviation civilea été modifiée en vue de supprimer le monopole dont bénéficie actuellement la com-pagnie aérienne Swissair. De plus, la Suisse s'efforce, lors des négociations bilatéralessectorielles relatives au transport aérien, de conclure des accords libéraux avec lespays concernés (voir par exemple le récent accord "open sky" conclu avec les Etats-Unis, ainsi que celui conclu avec le Pakistan).

C Relations contractuelles existantes

La Suisse n'est liée à la CE par aucun accord relatif au transport aérien. Par contre,elle a conclu des accords bilatéraux de trafic avec tous les Etats membres, à l'excep-tion de la France; dans ce dernier cas, les droits de trafic font l'objet de concessionspar ligne sur base de réciprocité. Ces accords bilatéraux sont plus ou moins libérauxselon les Etats concernés, mais n'atteignent dans l'ensemble pas le niveau de libérali-sation appliqué dans la CE. Aucun d'entre eux n'offre la liberté à l'une des partiesd'acquérir plus de 50% du capital d'une compagnie aérienne enregistrée dans l'autrepartie.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion, les compagnies aériennes suisses participeraient pleinement aumarché libéralisé de l'espace aérien de la CE. Leur liberté d'investissement dans lescompagnies aériennes communautaires serait aussi garantie. L'adhésion supposeraiten outre l'abolition des ventes hors taxes dans les aéroports suisses pour les vols intra-communautaires. Les accords bilatéraux existants ne devraient pas être formellementabrogés, mais la législation communautaire primerait en cas de conflit avec ceux-ci.La Suisse participerait à part entière à l'évolution du régime communautaire, y com-pris au niveau de la politique aux aides d'Etats et de la jurisprudence. L'adhésion nedevrait pas avoir de conséquences financière pour la Confédération. Par ailleurs, l'im-pact pour les cantons devrait être minime: il est possible que les cantons aéroportuai-res devraient modifier quelques points de la législation ainsi que des règlements d'ex-ploitation des aéroports.

Page 163: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 161 - Chapitre 2

En cas de participation à l'EEE, la situation des entreprises aériennes suisses seraitsemblable à celle découlant d'une adhésion. Comme dans ce dernier cas, l'abrogationdes accords bilatéraux existants ne serait pas nécessaire. Une participation à l'EEEn'aurait pas non plus de conséquences financières, et les conséquences sur les cantons,comme en cas d'adhésion à l'UE, seraient minimes.

Dans l'accord bilatéral sur le transport aérien, la Suisse reprend en substance la te-neur de l'acquis pertinent en cas d'adhésion, à l'exception des droits de trafic qui se-raient octroyés par étapes aux compagnies aériennes suisses: la 3e et la 4e libertés dèsl'entrée en vigueur de l'accord et la 5e, ainsi que la 7e liberté, deux ans plus tard. L'oc-troi de la 8e liberté peut être négocié cinq ans après l'entrée en vigueur de l'accord. LaSuisse reconnaît la compétence générale des institutions communautaires pour l'inter-prétation et la surveillance de l'application des règles reprises de l'acquis, à l'exceptionde la surveillance des aides publiques et de celle de la limitation des droits d'accès parles autorités aéroportuaires en relation avec des problèmes d'environnement ou decongestion. En contrepartie, la Suisse peut participer aux travaux des comités perti-nents (organes auxiliaires de la Commission des CE dans lesquels sont représentés lesEtats membres), sans jouir d'un droit de vote. L'accord sectoriel n'engendrera pas derépercussions financières et les conséquences sur les cantons, comme en cas d'adhé-sion à l'UE, seront minimes.

Le maintien de la situation actuelle laisse à la Suisse une autonomie complète, maisne permettra pas aux entreprises aériennes suisses de participer pleinement au marchélibéralisé du ciel européen. Les accords bilatéraux parfois restrictifs conclus avec lesdifférents Etats membres sont en effet insuffisants pour garantir aux entreprises aé-riennes suisses une situation concurrentielle équivalente. Les compagnies aériennessuisses risquent de continuer à être défavorisées, comme cela a été le cas lors de l'ou-verture du nouvel aéroport de Milan Malpensa, encore mal relié au centre ville. Swis-sair a dû transférer tous ses vols de lignes à Malpensa, alors que les compagnies aé-riennes des Etats membres de l'UE pouvaient continuer à exploiter une partie de leursliaisons à partir de l'aéroport de Linate, plus proche du centre de Milan.

222.10 Politique de l’énergie

A Acquis communautaire

Le Traité CE n'instaure pas de politique communautaire dans le domaine de l’énergie.Les Etats membres conservent donc la compétence première en la matière, y comprispour ce qui est de l’énergie nucléaire. La CE oriente principalement son activité versla réalisation du marché intérieur, mais d’autres aspects prennent une importancecroissante, telle la protection de l’environnement. Le commerce de produits énergéti-ques, parmi lesquels figure l’électricité, est soumis aux dispositions régissant la librecirculation des marchandises (voir ch. 221.01). L’acquis communautaire dans le do-maine de l’énergie concerne les trois domaines principaux suivants:

Page 164: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 162 - Chapitre 2

- Règles du marché intérieur de l’électricité: la directive concernant les règles com-munes du marché intérieur de l'électricité280 ouvre réciproquement les marchés del’électricité des Etats membres. L’acte le plus récent régit le marché intérieur dugaz281. Depuis le début des années 90, il existe des dispositions relatives au transitde l'électricité et du gaz naturel sur les grands réseaux. La création d'un marché in-térieur exempt de discriminations est également l'objectif de la directive sur l’octroiet l’utilisation d’autorisations pour la prospection, l’exploration et la productiond’hydrocarbures, qui impose des exigences uniformes dans les procédures natio-nales d’approbation.

- Prescriptions relatives à la consommation d’énergie et de ressources des disposi-tifs et appareils ainsi que la façon de les étiqueter (labelling)282: ce sont notam-ment des données sur la puissance requise des générateurs de chaleur pour la pré-paration d’eau sanitaire et le chauffage. Les exigences de rendement ainsi quel’étiquetage uniforme de divers appareils ménagers sont également réglementés.

- Obligation d’informer la Commission: afin de connaître les conditionsd’approvisionnement et de marché au sein de la Communauté, les prix du pétrolebrut et des produits pétroliers, ainsi que les prix de l’électricité et du gaz faits auxclients industriels doivent être communiqués régulièrement. De plus, les projetsd’investissement dans les secteurs du pétrole, du gaz et de l’électricité doivent êtrecommuniqués et les importations de pétrole brut et de produits pétroliers doiventêtre enregistrés.

Quant au droit communautaire sur la libre circulation des capitaux, il est importantpour la législation suisse sur l’énergie, même s’il ne fait pas partie de l’acquis relatif àce domaine (voir ch. 221.04). Il s'agit de la législation sur les conduites et surl’énergie nucléaire (voir let. D).

Les programmes communautaires dans le domaine de l’énergie, en particulier sur lapromotion des agents renouvelables (ALTENER et ALTENER II) ainsi que sur lapromotion du rendement énergétique et des économies d’énergie (SAVE et SAVE II)sont aussi importants. Ces deux programmes doivent contribuer à réduire les rejets deCO2 et à améliorer la capacité concurrentielle et la sécurité de l'approvisionnement.

Dans le contexte de la discussion sur les modifications climatiques, la Commission aprésenté en 1997 une proposition de directive sur l’imposition des produits énergéti-ques ainsi qu’un Livre blanc sur la promotion des agents renouvelables.

La Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom) a été créée pour tenircompte de la situation particulière de l’industrie nucléaire émergente dans les années 280 Directive 96/92/CE du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de

l'électricité, JO n° L 27 du 30 janvier 1997, p.20.281 Directive 98/30/CE du 22 juin 1998 concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz, JO n°

L 204 du 21 juillet 1998, p.1.282 Directive 92/75/CE du 22 septembre 1992 concernant l’indication, au moyen d’étiquettes et d’information

uniformes, de la consommation d’énergie et d’autres ressources des appareils de ménage, JO n° L 297 du 13octobre 1992, p.16.

Page 165: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 163 - Chapitre 2

50. Le Traité Euratom se rapporte uniquement à l’énergie (nucléaire) primaire et nonà l’électricité qu’elle sert à produire. La construction de centrales nucléaires et leurexploitation économique restent du ressort des Etats membres. Le Traité Euratom rè-gle entre autres le marché commun des biens et produits de l'industrie de l'énergieatomique, l’approvisionnement en combustibles, la sécurité nucléaire, l’inspection desinstallations, ainsi que les obligations découlant de l’accord de non-prolifération; ilencourage en outre la recherche dans le domaine de l’énergie nucléaire.

B Politique suisse

Pour ce qui est des prescriptions relatives au marché intérieur de l’électricité, le Con-seil fédéral a soumis à consultation un projet de loi sur le marché de l’électricité(LME) qui s’inspire de la directive CE. Le projet prévoit l’ouverture du marché sur lemodèle de l’accès réglementé des tiers au réseau (Regulated Third Party Access). Dif-férentes mesures sont prévues pour atténuer les effets de l’ouverture du marché, ycompris une introduction par étapes. La directive concernant les prescriptions com-munes du marché intérieur du gaz n’est pour l'instant pas de première importancepour la politique suisse de l’énergie. Au surplus, la loi sur les installations de transportpar conduites prévoit d’ores et déjà le principe de l’accès des tiers au réseau du gaz.

S'agissant des prescriptions qui régissent la consommation d’énergie et de ressourcesdes installations et appareils, la Suisse a introduit dans la loi sur l’énergie des disposi-tions comparables à celles du droit communautaire. La réglementation communautairesur l’étiquetage ("labelling") est appliquée en Suisse de manière autonome. Quant auxexigences minimales concernant l'hygiène de l’air et le rendement énergétique desgénérateurs de chaleur, les prescriptions suisses sont plus sévères que celles de laCommunauté.

L’enregistrement des prix de l’électricité, du gaz, du pétrole brut et des produits pé-troliers, ainsi que la saisie des importations de tels produits relèvent de l’Office fédé-ral de la statistique et de la Direction générale des douanes. Quant aux projets d’in-vestissements dans les secteurs du pétrole, du gaz et de l’électricité, la Confédérationn’est informée que des projets de conduites de haute pression pour le pétrole et le gaz.

Pour ce qui est de la promotion des agents renouvelables ainsi que de l’utilisationéconome et rationnelle de l’énergie, le programme Energie 2000 ouvre un largechamp d’action, avec des objectifs chiffrés pour la consommation d’électricité etd’énergies fossiles, l’utilisation des agents renouvelables et l’amélioration de rende-ment des centrales hydrauliques et nucléaires. Il n’est pas possible d’établir une com-paraison directe avec les programmes thématiques SAVE et ALTENER de la Com-munauté. L’éventail des objectifs d’Energie 2000 est à la fois plus large et plus ambi-tieux.

Page 166: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 164 - Chapitre 2

C Relations contractuelles existantes

L’Accord de libre-échange de 1972 régit les échanges commerciaux de produits éner-gétiques, dont l’électricité, entre la Suisse et la Communauté. Ces produits ne doiventêtre soumis à aucun droit de douane ni à des restrictions quantitatives à l'importationou à l'exportation ou à des mesures d'effets équivalents.

La Charte européenne de l’énergie283 réunit une cinquantaine de pays dont la Suisse,la CE et les Etats membres de l’UE qui se sont engagés à s’accorder mutuellement letraitement national et la clause de la nation la plus favorisée pour les investissementsadmis dans le domaine de l’énergie, ainsi qu’à appliquer le droit de l’OMC au com-merce d’agents énergétiques et de biens d’équipement. Entré en vigueur le 16 avril1998, le traité constitue la base juridique pour le transit non discriminatoire d’énergiesde réseau entre les Etats membres de l’UE et la Suisse.

Par ailleurs, des accords qui régissent l’exportation et la coopération nucléaire, ont étéconclus avec les Etats membres de l’UE dans le domaine de l’énergie. Il faut men-tionner aussi les accords passés avec les Etats limitrophes de la Suisse ayant trait àl’utilisation des eaux internationales pour la production d’électricité.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l’UE, la Suisse prendrait part au marché intérieur de l’énergie, enparticulier de l’électricité et du gaz. Les objectifs visés par la libéralisation du marchéde l’électricité dans le pays à une petite échelle pourraient l’être à l'échelle de laCommunauté: l’industrie suisse, les entreprises distributrices et ultérieurement lesménages pourraient choisir librement leurs fournisseurs de courant également àl’intérieur de l’UE et, le cas échéant, acheter ainsi à meilleur compte. L’industrie del’électricité serait soumise à une concurrence plus rude, qui risquerait de réduire lesrecettes des cantons et des communes. Toutefois, il faut compter avec ces mêmes con-séquences lorsque, comme prévu, le marché suisse s’ouvrira, ce indépendammentd'une adhésion à l'UE.

L'application de la réglementation communautaire sur la libre circulation des capi-taux aurait pour conséquence qu'à l'avenir des sociétés à majorité étrangère pourraientexploiter des installations nucléaires suisses, et inversement, des sociétés suissespourraient faire de même au sein de l’UE. Avec l'actuelle révision de la loi sur lesinstallations de transport par conduites, des sociétés à dominance étrangère serontadmises à exploiter de telles conduites en Suisse.

La reprise des actes concernant l’utilisation efficace et économe de l’énergie ne de-vrait pas entraver les dispositions plus ambitieuses de la loi et de l’ordonnance surl’énergie, ni celles de l’ordonnance sur la protection de l’air. Mais il n’est guère pos-sible d’évaluer l'évolution qui se produira dans ce domaine, dans la mesure où le

283 Accord du 17 décembre 1994 sur la charte de l’énergie, en vigueur depuis le 16 avril 1998, RS 0.730.0.

Page 167: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 165 - Chapitre 2

Traité d’Amsterdam284 autorisera les Etats membres non seulement à maintenir desdispositions existantes sur la protection de l’environnement lorsqu’elles sont plusstrictes, mais encore à en introduire de nouvelles, à condition là aussi qu’elles soientplus sévères. Si cette flexibilité ne modifie pas l’acquis communautaire à reprendrepar les nouveaux membres de l'UE, elle correspond aux visées de la politique énergé-tique suisse.

En cas d’adhésion à l’UE, la Suisse pourrait participer de plein droit aux programmesSAVE II et ALTENER II. Des entreprises suisses opérant dans ces domaines technolo-giques pourraient participer à la recherche et au développement communautaires etmieux profiter du marché en pleine expansion dans l'UE de ces biens et services. Au-tre avantage et non des moindres: de fructueuses synergies s’offriraient entre ces pro-grammes et Energie 2000.

Le devoir d’information et la collecte de données de base selon l’actuel droit commu-nautaire de l'énergie se traduiraient par plus de transparence sur le marché suisse del’énergie. Les avantages qui en résulteraient (par ex. réduction de prix extrêmementélevés) compenseraient le surcroît de travail imposé aux entreprises concernées.

En adhérant à l’UE, la Suisse adhérerait aussi au Traité Euratom. Cela signifierait quedorénavant, les contrats de livraison de matières fissiles pour les réacteurs suisses de-vraient être contrôlés et acceptés par l’agence d’approvisionnement d’Euratom. Lesinstallations nucléaires de notre pays ne seraient plus seulement inspectées parl’Agence Internationale de l’Energie atomique (AIEA), mais aussi par Euratom. Lesconséquences en seraient modestes, dans la mesure où les réglementations suissescorrespondent à celles de la Communauté.

Une participation à l’EEE aurait en gros les mêmes conséquences que l’adhésion àl’UE, notamment pour ce qui est de la participation au marché intérieur de l’énergie.La Suisse n’adhérerait toutefois pas au Traité Euratom.

Si les négociations sectorielles se poursuivaient ou si la situation actuelle était main-tenue, il conviendrait de déterminer dans quelle mesure la Suisse pourrait participeraux marchés intérieurs de l’électricité et du gaz. Cela vaut particulièrement pour lemarché intérieur de l'électricité, la Suisse occupant une place à part dans les échangesd’électricité entre la France, l’Allemagne et l’Italie.

222.11 Politique environnementale

A Acquis communautaire285

Bien que la Communauté ait mené sa propre politique environnementale depuis ledébut des années 70, ce n’est qu’en 1987, avec l’Acte unique européen, qu’un chapi- 284 Voir à cet égard ch. 311.03.4.285 Pour l'acquis communautaire relatif aux produits, voir ch. 221.01. Les forêts sont traitées au ch. 222.03.4 et

la biotechnologie au ch. 222.14.

Page 168: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 166 - Chapitre 2

tre "Environnement" (art. 130r et ss du Traité CE) a été intégré au Traité, puis étendudans le cadre du Traité de Maastricht. Ce dernier permet l'adoption de prescriptionsenvironnementales à la majorité qualifiée, ce qui était toutefois déjà possible avant1993 pour les mesures environnementales liées à des produits, sur la base de l'art.100a du Traité CE. Depuis 1973, cinq programmes d'action environnementaux ontservi de cadre général à la CE pour l'élaboration de sa politique286. A partir des an-nées 90, la CE a légiféré dans le domaine de l'environnement en développant toujoursplus de règles contraignantes (directives et règlements) fixant généralement des stan-dards minimaux. C'est pour l'essentiel les Etats membres qui sont chargés de la miseen œuvre du droit environnemental dans le droit national, ainsi que de son applica-tion.

L'acquis communautaire en matière d'environnement porte principalement sur lessecteurs de l'air, de l'eau, des déchets, du bruit, de la conservation des habitats natu-rels, de la faune et de la flore, des études d'impact et de l'information environnemen-tale. A cela s'ajoutent des innovations communautaires telles que le label écologi-que287, l'éco-audit288, ainsi que la directive relative à la prévention et à la réductionintégrées de la pollution.

Actuellement, la CE entend compléter les actes communautaires existants par d'autresinstruments tels que des accords volontaires, ainsi que par l'intensification de l'infor-mation du public.

La CE a également créé l'Agence européenne pour l'environnement, qui joue un rôleimportant dans l'établissement de bases de données harmonisées289.

Pour les prescriptions liées aux produits, le Traité d'Amsterdam offrira la possibilitéaux Etats membres non seulement de conserver, après l'adoption d'une mesure d'har-monisation, des dispositions de protection de l'environnement plus strictes, lorsqu'el-les existent déjà, mais également d'introduire des dispositions supplémentaires pro-pres à chaque Etat. Les dispositions plus strictes devront se baser sur de nouvellesdécouvertes scientifiques, concerner un problème environnemental national290 et re-cevoir l'aval de la Commission. Pour les dispositions de protection de l'environne-ment basées sur l'art. 130s du Traité CE (non liées aux produits), les Etats membresavaient déjà la possibilité de maintenir des prescriptions plus strictes ou d'en édicterde nouvelles. A l'avenir, les mesures de protection de l'environnement se basant surl'art. 130s du Traité CE devront elles aussi être adoptées dans le cadre de la procédurede codécision (voir ch. 213, let. A.2). 286 Programme communautaire de politique et d'action pour l'environnement et le développement durable et re-

spectueux de l'environnement (5e Programme d'action environnemental), JO no C 138 du 17 mai 1993, p. 5.287 Règlement (CEE) 880/92 du 23 mars 1992 concernant un système communautaire d'attribution de label

écologique, JO no L 99 du 11 avril 1992, p. 1.288 Règlement (CEE) 1836/93 du 29 juin 1993 sur la participation volontaire des entreprises à un système

communautaire de management environnemental et d'audit, JO no L 168 du 10 juillet 1993, p. 1.289 Règlement (CEE) 1210/90 du 7 mai 1990 sur l'institution d'une Agence européenne pour l'environnement et

d'un réseau européen d'information et d'observation pour l'environnement, JO no L 120 du 11 mai 1990, p. 1.290 Voir nouvel art. 100 A, para. 5 Traité CE.

Page 169: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 167 - Chapitre 2

B Politique suisse

La législation suisse est eurocompatible dans une large mesure. Les règles suissessont rarement plus sévères que celles de la CE.

Dans le domaine de la protection des eaux, les exigences de qualité relatives aux mé-taux lourds dans les boues d'épuration sont plus sévères en Suisse que dans la CE. Lalégislation suisse réglemente aussi les débits résiduels, alors que la législation com-munautaire ne contient pas d'équivalent.

Dans le domaine du bruit, le droit suisse réglemente aussi les valeurs d'immixtion debruit (par ex. exposition au bruit dans les zones d'habitation), alors que le droit com-munautaire ne contient pas d'équivalent.

La législation suisse en matière de gestion des déchets est plus stricte. Elle interdit parexemple le PVC pour les emballages de boisson, ce qui crée une entrave technique aucommerce et n'est pas compatible avec le droit communautaire. Elle règle de façonsimilaire les anciennes et les nouvelles installations de traitement des déchets, alorsque le droit communautaire ne règle que les nouvelles installations. La législationsuisse réglemente la gestion des déchets électriques, électroniques et ménagers, alorsque le droit communautaire ne contient pas d'équivalent.

En matière de protection de l’air, la Suisse considère dans sa législation des installa-tions stationnaires (usines) de plus petite taille que la CE. Elle est également plus res-trictive, ne faisant pas la différence entre les usines d'incinération de déchets ména-gers et celles de déchets dangereux quant aux valeurs d'émission et contient aussi desrègles plus exigeantes en matière d'oxydes d'azote. En outre, elle réglemente certainsdomaines non couverts par la CE, ayant introduit par ex. des taxes d'incitation sur lateneur en soufre des huiles de chauffage extra-légères et sur les composés organiquesvolatils.

Le droit suisse relatif à la protection contre les accidents majeurs va plus loin que lesrègles communautaires, dans la mesure où il prévoit des voies de communication ré-servées au transport des marchandises dangereuses.

S'agissant des substances chimiques, voir ch. 221.01, let. D.12.

La législation suisse en matière de conservation des habitats naturels, de la faune etde la flore est plus complète et détaillée, englobant aussi les domaines de la chasse etde la pêche. Elle présente la particularité d'intégrer les paramètres de l'écologie et dupaysage dans les activités sectorielles.

La CE est par contre plus avancée que la Suisse dans le domaine de l'information enmatière d'environnement. La Suisse prévoit toutefois de s'adapter aux règles commu-nautaires afin d'être en mesure de ratifier la Convention de la Commission économi-que pour l'Europe des Nations Unies sur l'accès à l'information, la participation du

Page 170: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 168 - Chapitre 2

public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, si-gnée lors de la Conférence paneuropéenne des ministres de l'environnement en juin1998 à Aarhus (Danemark).

C Relations contractuelles existantes

Il n'existe pas d'accord bilatéral entre la Suisse et la CE en matière d'environnement.Mais tant la Suisse que la CE et les Etats membres sont parties à de nombreux traitésinternationaux traitant de l'environnement (par ex. Convention sur les changementsclimatiques291, Convention sur la protection de la couche d'ozone292, Convention surla protection de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Europe293, Convention sur lecontrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimina-tion294). La ratification par la Suisse de conventions globales ou régionales, égale-ment ratifiées par la CE et les Etats membres, accentue encore l'eurocompatibilité dela législation suisse. Des accords ont toutefois été conclus, parfois depuis longtemps,avec certains Etats membres de l'UE, comme c'est le cas de la Convention relative àla protection du Rhin295, de la Convention sur la protection du lac de Constance296 etde la Convention sur la protection des eaux italo-suisses297.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, les prescriptions environnementales de la Suisse ne néces-siteraient que peu d'adaptations. Dans le domaine de la législation sur les produits, laSuisse pratique déjà l'adaptation autonome à la législation européenne afin d'éviter lesentraves techniques au commerce (voir ch. 221.01, let. B.2). De manière générale, laSuisse pourrait, à certaines conditions, maintenir une législation plus sévère ou inno-vatrice par rapport au droit communautaire:

- Une législation suisse différente pourrait être maintenue pour autant que la CE n'aitpas encore légiféré dans ce domaine. Dans de tels cas, les éventuelles entraves aucommerce créées par le droit national devraient être examinées sur la base des dis-positions relatives à la libre circulation des marchandises (jurisprudence de la Courde justice des CE relative aux art. 30 et 36 du Traité CE).

- Dans les domaines où la CE a par ex. édicté des exigences minimales pour les va-leurs limites, les Etats membres conservent explicitement la possibilité de fixer desvaleurs limites plus strictes.

291 Convention-cadre des Nations Unies du 9 mai 1992 sur les changements climatiques, RS 0.814.01.292 Convention de Vienne du 22 mars 1985 pour la protection de la couche d’ozone, RS 0.814.02.293 Convention du 19 septembre 1979 relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l'Eu-

rope, RS 0.814.02.294 Convention de Bâle du 22 mars 1989 sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux

et de leur élimination, RS 0.814.05.295 Convention du 3 décembre 1976 relative à la protection du Rhin contre la pollution chimique, RS

0.814.284.5.296 Convention du 27 octobre 1960 sur la protection du lac de Constance contre la pollution, RS 0.814.283.297 Convention du 20 avril 1972 entre la Suisse et l'Italie concernant la protection des eaux italo-suisses contre

la pollution, RS 0.814.285.

Page 171: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 169 - Chapitre 2

- En appliquant les clauses de sauvegarde du Traité CE (nouvel art. 100a et art. 130tTraité CE), la Suisse pourrait maintenir ou introduire des mesures plus sévères.

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse s'efforcerait d'obtenir, dans des domaines où lalégislation suisse en matière de protection de l'environnement est plus sévère quecelle de la Communauté, des périodes transitoires, non pas dans l'objectif de réduirele niveau des règles suisses, mais au contraire d'attendre que la législation commu-nautaire ait atteint le niveau des dispositions suisses, comme la Suède, l'Autriche et laFinlande ont pu le faire dans certains domaines (par ex. à l'égard de certaines subs-tances chimiques) pour une période de quatre ans après leur adhésion (voir ch.331.02).Par ailleurs, la Suisse adhérerait à l'Agence européenne pour l'environnement. Ellecollabore avec cette Agence depuis plus de huit ans (collaboration suisse aux pro-grammes CORINAIR, CORINE biotope), mais n'a pu jusqu'ici y adhérer malgré unedemande formelle déposée en 1994.

Les coûts de mise en œuvre de la politique communautaire en matière d'environne-ment seraient en cas d'adhésion à l'UE sensiblement les mêmes que ceux ayant ac-tuellement cours dans le cadre de la politique suisse en matière d'environnement.S'ajouterait toutefois le coût de la participation suisse à l'Agence européenne pourl'environnement, qui s'élèverait à environ 800 000 francs suisses par an. Ces frais se-raient déjà couverts par la contribution suisse au budget communautaire (voir ch.251).

Les répercussions sur les cantons ne peuvent être présentées dans le cadre de ce rap-port puisqu'il faudrait pour cela analyser 26 législations cantonales.

Les conséquences d'une participation à l'EEE sont comparables à celles d'une adhé-sion à l'UE. Dans le montant relatif au coût annuel de la participation à l'Agence eu-ropéenne pour l'environnement (environ 800 000 francs) seraient également compri-ses les mesures de mise en œuvre nationales nécessaires par une participation à l'EEE.

Dans certains domaines (par ex. Agence européenne pour l'environnement, labelécologique), la Suisse pourrait aussi tenter de conclure un accord bilatéral. Une dé-claration commune élaborée dans le cadre des négociations bilatérales sectoriellesprévoit cette possibilité après la conclusion des sept accords sectoriels.

En cas de maintien de la situation actuelle, la Suisse disposerait d'une totale autono-mie dans la fixation de ses standards environnementaux, mais elle ne pourrait guèreéviter de s'aligner sur la CE, sans pour autant disposer d'un droit de codécision lors del'élaboration de nouvelles règles communautaires.

Page 172: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 170 - Chapitre 2

222.12 Télécommunications, société de l'information

A Acquis communautaire

En édictant deux directives, l'une en 1988 sur les terminaux de télécommunication298

et l'autre en 1990 sur les services de télécommunication299, la Commission a pour lapremière fois tenu compte de la réorganisation des télécommunications résultant desprogrès techniques en matière de traitement de l'information et de technologie detransmission. Selon la seconde directive, les Etats membres ne peuvent conserver leurmonopole que sur les infrastructures de réseau et sur un service public de téléphonievocale restreint. En outre, l'accès aux réseaux de télécommunication est à la fois faci-lité et harmonisé par une première directive concernant la fourniture d'un réseau ou-vert (Open Network Provision, ONP). Par la suite, des règles spéciales régissant l'ac-cès aux circuits loués (1992), ainsi que des prescriptions harmonisées relatives au ser-vice téléphonique (1995), sont venues compléter cette directive. Enfin, en 1994, lemarché des communications par satellite a également été ouvert à la concurrence.

A l'heure actuelle, la libéralisation totale des télécommunications au sein de la CErepose essentiellement sur trois autres directives, qui prévoient l'ouverture des réseauxcâblés de télévision pour la fourniture de services de télécommunication300, la libéra-lisation des communications mobiles301 et l'introduction de la pleine concurrence surles marchés des télécommunications302. La pleine concurrence permettra en outre desupprimer les droits réservés dans le domaine des services de télécommunication(surtout des monopoles de services de téléphonie vocale) et des réseaux de télécom-munication. Une période transitoire pour réaliser la pleine concurrence a été accordé àcinq Etats membres disposant de réseaux moins développés. Les trois directives sus-mentionnées ont ensuite été complétées par des mesures d'harmonisation relatives àl'interconnexion de réseaux et de services, à la garantie du service universel, à l'octroide licences, à l'adaptation des règles relatives à la fourniture d'un réseau en général etpour des lignes louées, à la fourniture d'un réseau pour la téléphonie vocale, au conte-nu du service universel et à la protection des données dans le domaine des télécom-munications.

Il est en principe hors de question de réduire le nombre de licences octroyées pourréguler la concurrence. En collaboration avec la Conférence européenne des adminis-trations des postes et télécommunications (CEPT), une décision concernant une ap-

298 Directive 88/301/CEE du 16 mai 1988 relative à la concurrence dans les marchés de terminaux de télécom-

munications, JO n° L 131 du 27 mai 1988, p. 73.299 Directive 90/388/CEE du 28 juin 1990 relative à la concurrence dans les marchés des services de télécom-

munications, JO n° L 192 du 24 juillet 1990, p.10.300 Directive 95/51/CE du 18 octobre 1995 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la suppres-

sion des restrictions à l'utilisation des réseaux câblés de télévision pour la fourniture de services de télé-communication déjà libéralisés, JO n° L du 26 octobre 1995, p. 49.

301 Directive 96/2/CE du 16 janvier 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne les communi-cations mobiles et personnelles, JO n° L 20 du 26 janvier 1996, p. 59.

302 Directive 96/19/CE du 13 mars 1996 modifiant la directive 90/388/CEE en ce qui concerne la réalisation dela pleine concurrence sur le marché des télécommunications, JO n° L 74 du 22 mars 1996, p. 13.

Page 173: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 171 - Chapitre 2

proche coordonnée des autorisations dans le domaine des services de communicationspersonnelles par satellite a été adoptée, qui fixe les procédures à suivre pour harmoni-ser l'utilisation des bandes de fréquences et les conditions d'autorisation pour ces ser-vices.

De plus, les Etats membres doivent veiller à ce que l'entière libéralisation du marchén'entraîne pas une pénurie de numéros disponibles. L'octroi des numéros doit se dé-rouler de manière objective, non discrimination et équilibrée. De plus, les fournisseursde services doivent, au plus tard jusqu'au 1er janvier 2000 et dans le secteur de la télé-phonie fixe, offrir à leurs clients la possibilité de conserver leur numéro lorsqu'ilschangent de fournisseur (portabilité des numéros). En outre, les entreprises de télé-communication puissantes sur le marché sont tenues, dans le même délai, de permet-tre à leurs clients de choisir pour leurs liaisons un autre fournisseur que celui qui metle raccordement à disposition (présélection de l'opérateur)303.

Enfin, des règles ont été établies pour garantir l'indépendance des autorités réglemen-taires nationales304. Il est en particulier prévu que ces dernières doivent être juridi-quement distinctes et fonctionnellement indépendantes des fournisseurs de télécom-munications.

Dans le domaine de la société de l'information, la Communauté accorde une impor-tance primordiale au soutien stratégique et opérationnel des Etats membres. La Com-mission a dès lors mis sur pied un programme de travail ("Rolling Action Plan") quifixe le cadre des mesures politiques à prendre. Il existe en outre le bureau("Information Society Project Office" ISPO) qui vise à encourager la coopération et ledéveloppement dans de nombreux secteurs de la société de l'information. L'ISPO sertde lien entre les services de la Commission et le grand public, en proposant à cette finson site Internet aussi riche que varié 305. Les programmes de recherche et de soutienles plus divers assurent la promotion de la société de l'information dans la CE.

B Politique suisse

La loi suisse sur les télécommunications a été adaptée au droit communautaire dans ledomaine des télécommunications. La nouvelle loi sur les télécommunications(LTC)306 a entièrement aboli, dès le 1er janvier 1998, le monopole de Swisscom SAdans le domaine des réseaux et des services, ce qui a mis la Suisse sur le même planque la majorité des Etats membres de l'UE. La loi sur les télécommunications est con-çue comme une loi régissant le marché par un système de concessions. En principe, ledroit de recevoir des concessions existe lorsque le nombre d'acteurs du marché n'est

303 Directive du 24 septembre 1998 modifiant la directive 97/33/CE en ce qui concerne la portabilité du numéro

et la présélection de l'opérateur, JO n° L 268 du 3 octobre 1998, p. 37.304 Directive 97/51/CE du 6 octobre 1997 modifiant les directives 90/387/CEE et 92/44/CEE en vue de les

adapter à un environnement concurrentiel dans le secteur des télécommunications, JO n° L 295 du 29 octo-bre 1997, p. 23.

305 http://www.ispo.cec.be.306 Loi fédérale du 30 avril 1997 sur les télécommunications (LTC), RS 784.10.

Page 174: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 172 - Chapitre 2

pas réduit pour des raisons techniques, comme cela peut être le cas dans le domainedes radiocommunications. Doivent être en possession d'une concession tous les four-nisseurs de services de télécommunication qui exploitent eux-mêmes une part impor-tante des installations de transmission, les fournisseurs de services de télécommuni-cation chargés du service universel, ainsi que les utilisateurs des fréquences de radio-communication. Le service universel fourni sur toute l'étendue du territoire comprendle service téléphonique, l'accès aux numéros d'appel d'urgence, un nombre suffisantde cabines publiques, l'accès aux annuaires suisses des usagers du service téléphoni-que public, ainsi qu'un service de transcription pour malentendants et malvoyants. Lesprestations relevant du service universel doivent être proposées dans tout le pays à unniveau de qualité déterminé et à des tarifs ne dépassant pas les prix fixés par des pla-fonds. Le Conseil fédéral adapte périodiquement leur contenu aux besoins socio-économiques et au niveau de la technique. Swisscom SA garantit la desserte du terri-toire pendant une période transitoire de cinq ans, après quoi aura lieu un nouvel appeld'offres. S'il s'avère que le service universel fourni dans une certaine région ne permetpas de couvrir les frais, des redevances sont perçues pour son financement auprès desfournisseurs de services de télécommunication soumis à la concession. En outre, la loisur les télécommunications contient des dispositions réglant l'interconnexion entre lesinstallations et les services de télécommunication, la gestion des fréquences, la sécu-rité du réseau et des terminaux, le secret des télécommunications, les télécommunica-tions lors de situations extraordinaires, et la numérotation. Pour ce qui est de la numé-rotation, le régime des télécommunications en Suisse prévoit la portabilité des numé-ros à partir de l'an 2000. Le libre choix du fournisseur de services de télécommunica-tions (présélection de l'opérateur) doit être entièrement assuré à partir du 1er janvier1999. Les décisions d'exécution de la loi sur les télécommunications, portant sur desaspects spécifiques des télécommunications et pouvant donner lieu à un conflit d'inté-rêt pour la Confédération de par sa double qualité de régulateur et de copropriétaire deSwisscom SA, sont prises par une commission de la communication indépendantecomposée de sept spécialistes siégeant à titre accessoire, ce qui constitue un élémentsupplémentaire de conformité aux exigences de la CE. Quant aux questions relevantdu droit de la concurrence en général, elles sont du ressort des autorités compétentesdans ce domaine.

Dans le domaine de la société de l'information, le Conseil fédéral a élaboré une stra-tégie axée sur quatre principes: accès équitable pour tous aux nouvelles techniques;encouragement de la formation relative à l'utilisation de ces techniques dans la viequotidienne; développement dans le contexte de la libre concurrence; motivation de laconfiance dans la société de l'information, en particulier par un mode d'organisationjuridiquement conforme. Ces principes sont complétés par neuf mesures, qui vont dela campagne de formation (infrastructures des écoles, compétence des enseignants,nouvelles formes d'enseignement) au commerce électronique et aux relations avec lesautorités par voie électronique, en passant par de nouvelles formes d'expression cultu-relle (multimédia, accès électronique aux bibliothèques et aux musées) et par l'adap-tation du cadre juridique, jusqu' au suivi et à la coordination internes à l'administrationdes activités de la Confédération dans ce domaine.

Page 175: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 173 - Chapitre 2

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, la reprise de l’acquis communautaire dans le domaine destélécommunications ne demanderait qu'un nombre minime d'adaptations. Pour ce quiest de la liberté des services et d'établissement, les fournisseurs suisses de services detélécommunication ont aujourd'hui déjà, conformément aux accords OMC/GATS unaccès au marché européen comparable à celui des Etats de l'UE. Une adhésion à l'UEfaciliterait la situation pour le séjour des personnes physiques (voir ch. 221.02), etpermettrait en outre à la Suisse de participer à la totalité des programmes de recherchemenés dans le domaine des télécommunications et de la société de l'information. Leplus important de ces programmes est le 5e programme-cadre de recherche et déve-loppement en cours (voir ch. 222.13), qui comprend entre autres des projets relatifs àla technologie de l'information, à la télématique et aux nouvelles technologies de lacommunication. Il existe en outre toute une série d'autres programmes intéressantspour la Suisse, comme Info 2000, Multiannual Programme on the Information Socie-ty, Multilingual Society ou encore Ten-Telecom (Trans European Networks). Pour cequi est du financement, les domaines de l'éducation, de la culture, de l'audiovisuel, del'information et des télécommunications sont compris dans le budget global de la CE,auquel s'ajoutent les crédits opérationnels qui sont octroyés à la Commission. Par con-séquent, les programmes de recherche dans les domaines des télécommunications etde la société de l'information sont entièrement couverts financièrement (voir ch. 251).

Les ajustements auxquelles la Suisse devrait se soumettre en cas participation à l'EEEsont négligeables et comparables à ceux qui résulteraient d'une adhésion à l'UE.

La Suisse et la CE ont négocié un accord bilatéral sur les entraves techniques aucommerce dans le cadre des négociations bilatérales sectorielles (voir ch. 221.01),qui englobe également les installations d'usager dans le domaine des télécommunica-tions. A l'heure actuelle, de telles installations sont lancées sur le marché suisse àcondition qu'elles aient été soumises à une procédure d'évaluation de la conformitéreconnue par la CE. Par contre, les exportateurs suisses n'ont pas la possibilité decommercialiser des installations conformes aux critères communautaires directementsur le marché européen. L'accord susmentionné prévoit cette reconnaissance récipro-que. Il permettra en outre aux personnes travaillant dans le domaine des télécommu-nications de profiter elles aussi, dans le cadre de la libre circulation des personnes, dela suppression des restrictions actuelles à l'établissement dans la CE (voir ch. 221.02).L'accord sectoriel négocié dans le domaine de la recherche est également dans l'intérêtdu secteur des télécommunications (participation de la Suisse au 5e programme-cadrede recherche et de développement, voir ch. 222.13).

En maintenant la situation actuelle, l'autonomie du marché suisse dans le domainedes télécommunications ne sera pas modifiée, mais les améliorations susmentionnéesn'auront pas lieu. Afin d'éliminer les entraves techniques au commerce et d'encouragerla capacité concurrentielle des fournisseurs suisses, il serait indiqué de poursuivre lesefforts visant à coordonner notre droit avec le droit communautaire.

Page 176: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 174 - Chapitre 2

222.13 Politique de la recherche et de la technologie

A Acquis communautaire

La politique communautaire en matière de recherche est mise en oeuvre dans le cadredes programmes-cadres de recherche et de développement technologique (PCRD). Le5e PCRD (1998-2002) a été adopté par le Conseil et le Parlement européen le 22 dé-cembre 1998307. La principale nouveauté du 5e PCRD consiste en la focalisation surdes thèmes - appelés "actions clés" - qui répondent aux problèmes socio-économiquesqui caractérisent la société européenne au tournant de ce siècle (compétitivité, qualitéde la vie, emploi et environnement). La structure du 5e PCRD s'articule autour de septgrands programmes et chacun de ces programmes contient des actions clés (au total ily en aura une vingtaine). Quatre programmes sont thématiques et auront chacun l'undes sujets suivants: "Qualité de la vie et des ressources vivantes", "Création d'une so-ciété de l'information conviviale", "Croissance compétitive et durable" et "Energie,environnement et développement durable" qui comprend également EURATOM308.Les trois autres traitent de l'"Affirmation du rôle international de la recherche com-munautaire", de l'"Innovation et de la participation des PME" et de l'"Accroissementdu potentiel humain et de la base de connaissances socio-économiques". Le 5e PCRDprévoit de renforcer la coopération entre PCRD et d'autres initiatives dans le domainede la recherche, telles que COST (Coopération européenne dans le domaine de la re-cherche Scientifique et Technique) et EUREKA (initiative dans le domaine technolo-gique). Son enveloppe financière se monte à 14,96 milliards d'euros.

Le 5e PCRD continue d'être géré de façon centralisée par la Commission avec le sou-tien des comités de gestion de programme spécifique ("management committees")dans lesquels les Etats membres sont représentés. Le centre de gravité de ces comitésse situe sur le plan stratégique car de nouvelles instances ont été établies sur le planopérationnel: les comités consultatifs "advisory groups" qui accompagneront les"actions clés" et conseilleront directement la Commission.

Depuis 1992309, les PCRD se sont progressivement orientés vers des projets de re-cherche appliquée "précompétitive" plus proche du marché. Ils ont également étenduleur influence sur le plan international grâce à des accords avec d'autres Etats ou or-ganisations et grâce à l'arrivée de nouveaux Etats membres ou associés. Depuis 1995,Israël est pleinement associée au 4e PCRD par un accord bilatéral. Les négociationspour son association au 5e PCRD sont finalisées. En outre, des accords de base ont été

307 Voir la position commune (CE) 3/98 du Conseil du 23 mars 1998 en vue de l'adoption de la décision du

parlement européen et du Conseil relative au 5e programme-cadre de la Communauté européenne pour lesactions de recherche, de développement technologique et de démonstration (1998-2002), JO n° C 178 du 10juin 1998, p. 49.

308 Ces programmes thématiques seront subdivisés en "actions clés" visant une quinzaine d'objectifs économi-ques et sociaux qui devront bénéficier d'une approche multidisciplinaire et intégrée.

309 Pour les développements intervenus jusqu'à cette date, voir le message du 18 mai 1992 relatif à l'approba-tion de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.97).

Page 177: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 175 - Chapitre 2

conclus avec plusieurs Etats non européens dont l'Afrique du Sud, l'Australie et lesEtats-Unis.

Le 5e PCRD prévoit une participation "projet par projet" pour les Etats tiers qui nedisposent pas d'un accord de participation intégrale. Jusqu'à l'entrée en vigueur del'accord sectoriel négocié avec l'UE, les chercheurs suisses ne peuvent prendre part au5e PCRD que selon ce mode de participation.

B Politique suisse

La politique suisse en matière de recherche relève, dans une large mesure, de la com-pétence des cantons. La Confédération dans cette matière poursuit trois objectifs gé-néraux: consolider la position de la Suisse en tant que site scientifique, répondre auxattentes que la société place dans la science et améliorer le rendement des ressourcesengagées. Ces objectifs requièrent une série de mesures qui sur le plan nationals'adressent tant aux universités et centres de recherche qu'aux milieux économiques.Aussi, la Suisse s'emploie-t-elle notamment à définir des priorités thématiques dansles universités et centres de recherche par des pôles de recherche nationaux et desprogrammes nationaux qui tiennent compte des intérêts de la société, renforcent lacoopération entre universités et recherche privée et associent plus étroitement lescantons non universitaires. En outre, un important volet est dédié à la coopération in-ternationale avec comme principal centre d'intérêt l'Europe. La coopération au niveaueuropéen se traduit en majeure partie par la participation de la Suisse aux PCRD surle mode "projet par projet"310; à cela s'ajoute sa participation intégrale au programmecommunautaire "fusion nucléaire contrôlée" en vertu de l'accord de coopération avecla Communauté européenne de l'énergie atomique (Traité Euratom), à EUREKA et àCOST. La Suisse est également membre d'organisations européennes de recherchetelles que l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN), l'Agencespatiale européenne (ESA) ou encore le Laboratoire européen de biologie moléculaire(EMBL). En dehors de ces réseaux européens, la Suisse participe également à desprogrammes internationaux de recherche comme ceux de l'Agence internationale del'énergie (IEA) ou encore ceux menés au sein de l'initiative japonaise "Intelligent Ma-nufacturing Systems" (IMS), et entretient des rapports bilatéraux avec divers Etatsdont les Etats membres de l'UE, les Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud.

C Relations contractuelles existantes

La collaboration entre la Suisse et la Communauté en matière de recherche reposeactuellement sur l'accord-cadre du 8 janvier 1986311. Bien que cet accord ne donnepas aux chercheurs suisses un droit automatique de participer à l'ensemble des projetsdes PCRD, ceux-ci ont été jusqu'à présent globalement ouverts aux Suisses sur lemode "projet par projet". Cette ouverture avantageuse pour la Suisse lui a été accor-

310 L'accord sectoriel en matière de recherche permettra aux chercheurs suisse de participer intégralement au

PCRD (voir let. B).311 Accord-cadre de coopération scientifique et technique du 8 janvier 1986 entre la Confédération suisse et les

Communautés européennes, RS 0.420.518.

Page 178: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 176 - Chapitre 2

dée par la CE uniquement en prévision de la conclusion d'un accord de participationintégrale. La participation "projet par projet" n'est pas exempte de restrictions: il nepeut y avoir de représentants suisses - même comme simples observateurs - dans lesdivers comités du PCRD; quant aux chercheurs suisses, ils doivent trouver au mini-mum deux partenaires dans des Etats membres différents de l'EEE pour lancer unprojet (alors qu'il suffit aux chercheurs d'un Etat membre de l'EEE de trouver un seulpartenaire), ils ne peuvent coordonner un projet (rôle en général assumé par l'initia-teur du projet) et n'ont pas accès aux résultats des projets auxquels ils n'ont pas parti-cipé.

D Répercussions sur la Suisse

En ce qui concerne les négociations bilatérales sectorielles, l'accord négocié dans ledomaine de la recherche permettra aux chercheurs et représentants suisses de partici-per intégralement aux projets du 5e PCRD au même titre que les Etats de l’EEE qui ysont associés312. Les représentants suisses pourront siéger en tant qu'observateurs ausein des différents comités313; les chercheurs suisses pourront coordonner des projetset avoir accès aux résultats de projets auxquels ils n'ont pas participé. L'adhésion àl'UE donnerait aux représentants suisses le droit de codécider des grandes orientationset du budget de la Communauté en matière de recherche ainsi que de siéger dans lescomités au sein desquels ils bénéficieraient d'un droit de vote. La participation suissedans le domaine de la recherche et du développement technologique serait en outreautomatiquement étendue à tous les programmes et études menés en dehors desPCRD, tels ceux ayant cours dans les domaines de la santé, des transports et de l'éner-gie. Le maintien de la situation actuelle signifiera, dans le meilleur des cas, la pour-suite d'une participation sur le mode "projet par projet".

Le coût d’une participation au 5e PCRD est pratiquement le même que celui de la par-ticipation à l'EEE ou de l'entrée en vigueur de l'accord sectoriel: on estime le montanttotal dû par la Suisse pour la période 1999 à 2002 à 900 millions de francs. En cas departicipation "projet par projet", ce montant s'élèverait pour la même période à 570millions de francs. Ces montants n'incluent pas les coûts relatifs aux mesures d'ac-compagnement (réseau d'information et participation à des programmes hors PCRD)qui se montent à 11 millions de francs par an. Enfin, en cas d'adhésion à l'UE, la par-ticipation de la Suisse au PCRD n'engendrerait pas de coûts additionnels, ces derniersétant compris dans le montant global de nos contributions en tant qu'Etat membre(voir ch. 251). Bien entendu, les coûts relatifs aux mesures d'accompagnement inter-nes (réseau d'information) demeureraient.

312 L’actuel projet d’accord porte sur le 4e PCRD. Etant donné que le 4e PCRD s'est terminé en 1998 et a été

remplacé par le 5e PCRD, le 11 décembre 1998, le Conseil de l'UE a invité la Commission à adapter leditprojet d'accord afin d'assurer la participation de la Suisse au 5e PCRD selon des modalités similaires.

313 Au nombre de ces comités figureraient également les comités consultatifs "advisory groups" nouvellementcréés par le 5e PCRD.

Page 179: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 177 - Chapitre 2

222.14 Génie génétique

A Acquis communautaire

Le droit communautaire en matière de génie génétique dans le domaine non humainest en pleine mutation. La révision de la directive relative à l'utilisation confinée demicro-organismes génétiquement modifiés314 est arrivée en phase finale. Il existeégalement une proposition de révision de la directive relative à la dissémination vo-lontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement315 en vue de pré-ciser et d'étendre les prescriptions de déclaration et d'instaurer une obligation de sur-veiller la dissémination des organismes génétiquement modifiés, avec une autorisa-tion limitée à sept ans. Le règlement relatif aux nouveaux aliments et aux nouveauxingrédients alimentaires316, entré en vigueur en 1997, régit la mise dans le commercedes nouveaux aliments, le plus souvent des aliments génétiquement modifiés, ainsique l'autorisation et la déclaration de ces aliments. Etant donné que la mise sur lemarché du soja et celle du maïs génétiquement modifiés ont été autorisées avant l'en-trée en vigueur de ce règlement, ce dernier n'est pas applicable aux denrées alimentai-res fabriquées à partir de ces produits. C'est pour cette raison que la CE a édicté enmai 1998 des prescriptions d'étiquetage supplémentaires pour ce type de denrées ali-mentaires317. Par ailleurs, la CE a édicté en juillet 1998 une directive relative à laprotection juridique des inventions biotechnologique qui prévoit une harmonisationdes droits nationaux des brevets318. Ne sont pas brevetables: le corps humain, la sé-quence ou la séquence partielle d'un gène, les variétés végétales et les races animales.Les inventions portant sur des végétaux ou des animaux sont brevetables si la faisabi-lité technique de l'invention n'est pas limitée à une variété végétale ou à une race ani-male déterminée. Le point commun des actes législatifs sur le génie génétique, est deviser un niveau élevé de sécurité tout en évitant d'entraver la recherche et la produc-tion.

B Politique suisse

Le droit suisse sur le génie génétique a d'ores et déjà été harmonisé avec le droitcommunautaire partout où cela était possible. La révision de la loi sur la protection del'environnement adoptée en 1995 a marqué l'étape la plus importante dans ce sens. Leprojet Gen-Lex, dont l'avant-projet a été mis en consultation en décembre 1997, per-met de faire de nouveaux pas vers l'harmonisation. Ce projet prévoit la modificationde huit lois fédérales et d'un arrêté fédéral. Dès lors que la législation actuelle (loi sur

314 Directive 90/219/CEE du 23 avril 1990, JO n° L 117 du 8 mai 1990, p. 1.315 Directive 90/220/CEE du 23 avril 1990, JO n° L 117 du 8 mai 1990, p. 15.316 Règlement CE 258/97 du 27 janvier 1997 relatif aux nouveaux aliments et aux nouveaux ingrédients ali-

mentaires, JO n° L 43 du 14 février 1997, p. 1.317 Règlement (CE) 1139/98 du 26 mai 1998 concernant la mention obligatoire, dans l'étiquetage de certaines

denrées alimentaires produites à partir d'organismes génétiquement modifiés, d'informations autres que cel-les prévues par la directive 79/112/CEE, JO n° L 159 du 3 juin 1998, p. 4.

318 Directive 98/44/CE du 6 juillet 1998 relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques, JOn° L 213 du 30 juillet 1998 p. 13.

Page 180: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 178 - Chapitre 2

la protection de l'environnement, loi sur la protection des animaux, loi sur les denréesalimentaires, loi sur les épidémies) réglemente déjà de manière circonstanciée les as-pects relevant de la sécurité, l'avant-projet a surtout pour objectif de concrétiser lesaspects éthiques (dignité de la créature, protection de la diversité génétique, dévelop-pement durable), et de préciser les prescriptions de déclaration des organismes géné-tiquement modifiés. Abstraction faite des prescriptions relatives à la déclaration, cesaspects ne sont pas couverts pour l'instant par le droit communautaire. Les Chambresdébattront du projet Gen-Lex en 1999. Si les résultats de l'examen de la nouvelle di-rective relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques montrentqu'une révision de la loi sur les brevets d'invention s'impose, un projet correspondantsera à l'ordre du jour319. Dans le domaine de la déclaration des denrées alimentairesgénétiquement modifiées, la réglementation suisse sur la déclaration des additifs etdes substances auxiliaires dans les denrées alimentaires va plus loin que le droitcommunautaire.

Le Département fédéral de l'intérieur a en décembre 1997 mis en procédure de con-sultation trois projets d'ordonnances qui mettent en œuvre les nouvelles dispositionsde la loi sur la protection de l'environnement, dans la mesure où ces dernièresn'avaient pas déjà été concrétisées dans l'ordonnance sur les accidents majeurs; ils'agit de l'ordonnance sur la protection des travailleurs contre les risques liés à l'expo-sition à des microorganismes, l'ordonnance sur l'utilisation d'organismes en milieuxconfinés (ordonnance sur l'utilisation confinée) et l'ordonnance sur la disséminationd'organismes dans l'environnement (ordonnance sur la dissémination). Ces projetscorrespondent aux prescriptions du droit communautaire en la matière.

C Relations contractuelles existantes

La Suisse n'a pas conclu d'accords bilatéraux en matière de biosécurité, ni avec la CEni avec un de ses Etats membres. Ce domaine est couvert dans toute l'Europe par desrecommandations de l'OCDE, également applicables en Suisse. Ces recommandationstouchent à la sécurité des OGM ainsi qu'à leur utilisation dans des installations indus-trielles à grande échelle, dans l'agriculture et l'environnement. Le rapport de l'OCDEpublié en 1986 sous le titre de "Considérations relatives à l'ADN recombiné"320 cons-titue la base de ces recommandations qui sont régulièrement complétées.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE la reprise de l’acquis communautaire ne devrait pas poser deproblèmes, étant donné que les actes législatifs à transposer ont déjà été, dans unelarge mesure, intégrés dans le droit suisse. Là où tel n'est pas le cas, les actes législa-tifs sont en préparation (projet Gen-Lex, ordonnance sur la protection des travailleurs,ordonnance sur l'utilisation confinée, ordonnance sur la dissémination). En ce quiconcerne la déclaration, des adaptations supplémentaires seraient nécessaires dans le 319 Voir interpellation Randegger (96.3469) du 2 octobre 1996 et la réponse du Conseil fédéral, ainsi que la

motion du Groupe radical-démocratique (98.3248) du 11 juin 1998 et la déclaration du Conseil fédéral.320 "Good industrial large scale practice, recombined DNA safety considerations", OCDE Paris, 1986.

Page 181: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 179 - Chapitre 2

droit sur les denrées alimentaires (voir ch. 222.03.3). Cela ne devrait pas engendrer defrais supplémentaires. Les adaptations législatives en cours sont menées indépen-damment du processus d'intégration à l'Europe.

En cas d'une participation à l'EEE, la situation serait identique.

En cas de maintien de la situation actuelle, les Etats membres de l'UE étant les prin-cipaux partenaires commerciaux de la Suisse, cette dernière pour éviter toutes les en-traves techniques au commerce se devra d'adapter sa législation à celle de la CE.

222.15 Politique de la formation et de la jeunesse

A Acquis communautaire

La politique communautaire de l'éducation, de la formation professionnelle et de lajeunesse s'appuie sur le Traité CE, et plus particulièrement sur les art. 126 et 127. Cesarticles ne prévoient pas une uniformisation des législations des Etats membres maisencouragent, dans les domaines de l'éducation, de la formation professionnelle et de lajeunesse, la réalisation de programmes de mobilité et de coopération entre institutions.Bien qu'on y parle de politique de l'éducation, de formation professionnelle et de jeu-nesse, les Etats membres restent libres d'aménager leur système de formation et leurpolitique de la jeunesse comme ils l'entendent.

La CE a établi et exécuté des programmes dans les domaines précités, au cours desannées 80 déjà. Au nombre de ceux-ci figuraient ERASMUS (coopération dans ledomaine de l'enseignement supérieur et de la mobilité estudiantine) ainsi que CO-METT (coopération entre universités et entreprises dans le domaine de la technolo-gie). A la fin de 1994 et au début de 1995, la CE a adopté les programmes LEO-NARDO DA VINCI321 (formation professionnelle, incluant les activités antérieuresdu programme COMETT), SOCRATES322 (éducation, incluant les activités antérieu-res du programme ERASMUS) et JEUNESSE POUR L'EUROPE III323 (activités ex-tra-scolaires de jeunesse). Pour la période de 1995 à 1999, le budget s'élève à 620millions d'euros pour le programme LEONARDO DA VINCI, à 850 millions d'eurospour le programme SOCRATES et à 127 millions d'euros pour le programme JEU-NESSE POUR L'EUROPE324. Outre les quinze Etats membres de l'UE, trois pays del'AELE/EEE, ainsi que plusieurs pays associés, avec lesquels la CE a conclu des ac-cords bilatéraux325 participent à ces programmes. Depuis quelques années, la Com-munauté coopère aussi avec les Etats-Unis et le Canada dans le domaine de l'ensei-gnement supérieur.

321 JO n° L 340 du 29 décembre 1994, p 8.322 JO n° L 87 du 20 avril 1995, p. 10.323 JO n° L 87 du 20 avril 1995, p. 1.324 En raison de la transformation le 1er janvier 1999 de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion

1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".325 Il s'agit des pays suivants: Chypre, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République tchèque, Roumanie,

Slovaquie, Slovénie. De nouveaux accords avec d'autres Etats sont en cours de négociation.

Page 182: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 180 - Chapitre 2

Parallèlement à ces trois grands programmes, l'UE a établi, dans les mêmes domaines,plusieurs programmes et projets pilotes moins importants. Les programmes sont géréspar la Commission, elle-même soutenue par des bureaux externes et par les comitésdes programmes, dans lesquels sont représentés les Etats membres326. Des agences decoordination nationales sont compétentes pour l'exécution des programmes dans lesEtats participant.

Il est prévu de poursuivre l'exécution des trois principaux programmes durant la pé-riode 2000 à 2006. La proposition de la Commission, qui prévoit notamment de nou-velles activités et une coopération renforcée avec les pays tiers, sera traitée, en 1999,par le Parlement européen et par le Conseil. Le budget global prévu dans la proposi-tion de la Commission se chiffre à trois milliards d'euros. L'importance accordée à laformation, tout particulièrement en rapport avec la problématique de l'emploi, gagneainsi en importance dans les activités de la CE. Il est également prévu de renforcer,par des actions communes, les synergies existantes entre les différents domaines etavec le 5e programme-cadre de recherche.

B Politique suisse

L'éducation est en Suisse organisée selon le modèle fédéral et relève de la compétenceprimaire des cantons. La Confédération est, quant à elle, compétente entre autres pourla réglementation et le soutien de la formation professionnelle dans l'industrie, les artset métiers, le commerce, l'agriculture et le service de maison327. C'est également le caspour les hautes écoles spécialisées dans ces domaines328. La Confédération dirigedeux écoles polytechniques329 et soutient les universités cantonales330. Vu l'impor-tance que les cantons ont dans l'éducation, la Confédération les intègre dans les acti-vités de politique extérieure concernant ce domaine et veille à ce que leurs intérêtssoient convenablement pris en considération.

En matière de politique de la jeunesse, la Confédération a des compétences clairesdans le domaine du travail extra-scolaire des jeunes. La loi sur les activités de jeu-nesse, entrée en vigueur en 1991331, règle la promotion par la Confédération du travailextra-scolaire des jeunes, en particulier le soutien d'associations faîtières et de projetsde portée nationale, par un crédit annuel du Parlement. La commission fédérale de lajeunesse, créée par le Conseil fédéral en 1978, observe en outre la situation des jeunesen Suisse et formule des propositions à l'intention des décideurs politiques. Quelquescantons et communes ont leur propre politique de la jeunesse. Une coordination inter-cantonale a débuté en 1994 sous forme de conférences annuelles des responsablescantonaux. 326 Les États de l'EEE y possèdent un statut d'observateur.327 Loi fédérale du 19 avril 1978 sur la formation professionnelle (LFPr), RS 412.10.328 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les hautes écoles spécialisées (LHES), RS 414.71.329 Loi fédérale du 4 octobre 1991 sur les écoles polytechniques fédérales (loi sur les EPF), RS 414.110.330 Loi fédérale du 22 mars 1991 sur l'aide aux universités (loi sur l'aide aux universités, LAU), RS 414.20.331 Loi fédérale du 6 octobre 1989 concernant l'encouragement des activités de jeunesse extra-scolaires (Loi sur

les activités de jeunesse, LAJ), RS 446.1.

Page 183: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 181 - Chapitre 2

C Relations contractuelles existantes

La coopération internationale dans le domaine de l'éducation a toujours été un desvolets de la politique étrangère suisse. Cette coopération ne consiste pas seulement àfaire connaître le système éducatif suisse et les principes sur lesquels il se base àl'étranger (en particulier, la sauvegarde et le développement de l'identité culturelle dela Suisse), elle ouvre aussi la possibilité à des Suisses de se former à l'étranger, sansavoir à surmonter d'obstacle particulier. Connaissant la grande importance des pro-grammes de formation de la Communauté pour l'éducation et le domaine universi-taire, la Suisse s'est très tôt intéressée à ces programmes, à l'instar des d'autres pays del'AELE.

La participation suisse aux programmes COMETT II et ERASMUS a pu être négo-ciée avec la Communauté en 1990, respectivement en 1991332. Alors que le pro-gramme COMETT a officiellement pris fin à la fin 1994, la Suisse a participé au pro-gramme ERASMUS jusqu'à l'année académique 1995/1996. L'accord de coopérationentre la Suisse et l'UE concernant l'enseignement supérieur dans le cadre du pro-gramme ERASMUS, entré en vigueur en novembre 1991 et conclu pour cinq ans, aété dénoncé par lettre de la Commission du 14 juin 1995, avant son échéance. Dèsavril 1995, le programme ERASMUS a été remplacé par le programme SOCRATES.Le Conseil fédéral a pour objectif d'assurer à la Suisse une participation pleine et en-tière aux programmes communautaires333. Il existe d'ailleurs, depuis 1994 déjà, unmandat de négociation du Conseil fédéral en la matière, en relation avec les négocia-tions dans le domaine de la recherche. Les questions touchant l'éducation, la forma-tion professionnelle et la jeunesse ont toutefois été exclues des négociations bilatéra-les sectorielles conclues au niveau politique en décembre 1998.

En s'appuyant sur le message complémentaire du 24 mai 1994 concernant les pro-grammes scientifiques de la CE, la Confédération a pris des mesures transitoires qui,sous la forme d'un "partenariat silencieux", ont contribué à éviter un isolement com-plet de la Suisse tout particulièrement dans le cadre de ERASMUS/SOCRATES.Cette collaboration au niveau des institutions de formation a permis, notamment en cequi concerne les programmes actuels pour la période 1995 à 1999, d'apprendre à con-naître et de se familiariser avec les actions des trois programmes. Ces mesures transi-toires ne peuvent cependant pallier l'absence d'une base légale, indispensable pourune coopération.

332 Accord du 19 décembre 1989 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne ins-

tituant une coopération en matière de formation dans le contexte de la mise en oeuvre de Comett II (1990 à1994), RS 0.420.518.03; Accord du 9 octobre 1991 entre la Confédération suisse et la Communauté écono-mique européenne instituant une coopération dans le cadre du programme ERASMUS, RS 0.414.91.

333 Des informations supplémentaires sur les buts et les stratégies dans ce domaine sont disponibles dans lemessage du Conseil fédéral du 20 mai 1992 relatif au financement de la participation de la Suisse aux pro-grammes de recherche et d'éducation des Communautés européennes pour la période de 1993 à 1996, FF1992 III 1341 et dans le message complémentaire du 24 mai 1994 concernant les programmes scientifiquesde l'UE 1996-2000, FF 1994 III 1429.

Page 184: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 182 - Chapitre 2

D Répercussions sur la Suisse

Une adhésion à l'UE permettrait à la Suisse de participer pleinement à l'organisationde la politique de l'éducation, de la formation professionnelle et de la jeunesse et àl'élaboration des grands et petits programmes, ainsi que des projets pilotes. La Suisseserait représentée dans chaque comité et posséderait les mêmes droits que tous lesautres Etats membres. Les institutions suisses pourraient coordonner toute sorte deprojets ou participer à des projets dans le cadre des programmes. Les étudiants suissesauraient la possibilité d'effectuer une partie de leurs études dans un pays participantau programme. Les jeunes Suisses pourraient participer à chaque projet mené dans lecadre du programme JEUNESSE POUR L'EUROPE. La participation de la Suisseaux programmes de formation communautaires serait financée par notre contributionglobale en tant qu'Etat membre (voir ch. 251). Les mesures d'accompagnement(gestion du programme en Suisse) engendreraient des coûts annuels supplémentairesde 2,7 à 3,5 millions de francs (selon le budget propre à chaque programme après1999).

Un autre domaine indépendant des programmes de formation communautaires estcelui de l'admission pour une année académique dans un Etat de l'UE. En cas d'adhé-sion à l'UE, le principe communautaire de non-discrimination fondée sur la nationalitéserait également valable en ce qui concerne les conditions d'admission et les fraisd'inscription. De ce point de vue, les étudiants provenant des Etats de l'UE devraientêtre traités de façon identique aux citoyens suisses et une éventuelle uniformisationdes restrictions existantes à l'accès des hautes écoles et des universités suisses (par ex.frais d'inscription différents) devrait faire l'objet d'un examen.

En cas de participation à l'EEE, la Suisse pourrait participer, à l'instar des autres paysde l'AELE, à tous les grands programmes et à un certain nombre de petits program-mes. Des activités bilatérales (par ex. la mobilité estudiantine, l'échange de jeunes)avec d'autres pays de l'AELE ou des pays associés ne seraient, en revanche, pas pos-sibles dans le cadre de ces programmes. Une participation à l'EEE ne garantirait à laSuisse qu'un statut d'observateur au sein des comités des programmes. Il n'y aurait enoutre pas d'obligation d'adapter les actuelles conditions générales d'admission pour lesétudiants des pays de l'EEE voulant étudier en Suisse pendant une année académi-que334.

En cas de négociation d'un futur accord bilatéral sectoriel, la Suisse aurait vraisem-blablement les mêmes avantages et inconvénients qu'en cas de participation à l'EEE,la participation à de petits projets n'entrant toutefois pas en ligne de compte.

Tant en cas de participation à l'EEE qu'en cas de conclusion d'un accord sectoriel, lescoûts induits dépendent du budget total des programmes. Sur la base des budgets to-taux des programmes de l'UE pour la période 1995 à 1999, la participation suisse

334 Voir message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1, 243.

Page 185: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 183 - Chapitre 2

s'élèverait pour l'année 1999 à 27,4 millions de francs (crédit de paiement)335. Si laCommission devait confirmer les budgets proposés pour les nouveaux programmes del'an 2000, la participation annuelle suisse se monterait à environ 35 millions de francs.A ces frais s'ajouteraient, pour ces deux variantes, des frais annuels supplémentairesde l'ordre de 2,7 à 3,5 millions de francs destinés à financer les mesures d'accompa-gnement dans le pays.

Le maintien de la situation actuelle aura pour conséquence l'exclusion de la Suissedes programmes de l'UE dans les domaines de l'éducation, de la formation profes-sionnelle et de la jeunesse, de même que son exclusion partielle de l'espace éducatifeuropéen et de la politique européenne en matière d'éducation, de formation profes-sionnelle et de jeunesse. La mobilité accrue souhaitée par la Suisse en sera compro-mise. Les résultats réjouissant des mesures transitoires - qui ne peuvent cependantfaire l'objet de prolongations à bien plaire - ne sont pas comparables à ceux auxquelson pourrait s'attendre en cas de participation officielle aux programmes. Pour l'heure,la Suisse ne peut profiter que dans une moindre mesure des interactions existant déjàentre les divers domaines des programmes de formation et les programmes de recher-che communautaires (voir ch. 222.13). A titre d'exemple, il sied de relever que lesappels en vue de la soumission de projets se font parfois en commun pour les deuxtypes de programmes.

En l'absence de tout accord, les coûts dépendent du nombre d'activités auxquelles desinstitutions suisses peuvent participer. Le financement pour les bourses de mobilité etla participation d'institutions suisses à des projets officiels correspond, pour l'année1997, à environ 6,7 millions de francs (crédit d'engagement). Actuellement, dans lecadre d'ERASMUS plus de 1000 étudiants par année peuvent effectuer une partie deleurs études dans une université d'un pays de l'UE. La tendance de ces dépenses est àla hausse.

222.16 Egalité des chances

A Acquis communautaire

Les fondements du principe d'égalité entre les femmes et les hommes apparaissentdéjà dans le Traité CE dont l'art. 119 consacre l'égalité de rémunération entre lesfemmes et les hommes pour un travail égal. A partir de 1975, l'acquis communautaireen la matière s'est continuellement développé336. Depuis 1992, il a été complété parcinq nouvelles directives concernant

- l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchéesou allaitantes au travail337 (voir ch. 222.02);

335 Voir message complémentaire du 24 mai 1994 concernant les programmes scientifiques de l'UE, FF 1994

III 1429.336 Pour les développements intervenus jusqu'en 1992, voir message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de

l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1 (ch. 7.111).337 Directive 92/85/CEE du 1992 du 19 octobre 1992, JO n° L 348 du 28 novembre 1992, p. 1.

Page 186: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 184 - Chapitre 2

- le congé parental assurant un congé minimum aux travailleurs, hommes et femmes,suite à la naissance ou à l'adoption d'un enfant et mettant en place des prescriptionsminimales en cas d'absence au travail pour cause de force majeure liée à des rai-sons familiales urgentes338 (voir ch. 222.02);

- l'égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans les régimes profession-nels de sécurité sociale339;

- la charge de la preuve dans les cas de discrimination au travail fondée sur le sexe,aux termes de laquelle il incombe à la partie défenderesse de prouver qu'il n'y a paseu violation du principe d'égalité de traitement340;

- la garantie aux travailleurs à temps partiel d'un traitement comparable à celui dontbénéficie le personnel à plein temps341.

Suite à l'arrêt Kalanke de la Cour de justice des CE de 1995 qui a créé une incertitudequant à la légitimité des quotas et autres formes d'actions positives destinées à ac-croître le nombre des femmes dans certains secteurs ou niveaux d'emploi342, la Com-mission a proposé de modifier la directive de 1976 relative à l'égalité de traitemententre les femmes et les hommes dans l'accès à l'emploi, à la formation et à la promo-tion professionnelle, ainsi que les conditions de travail343 afin de préciser que les me-sures d'actions positives autres que les quotas rigides sont autorisées par le droitcommunautaire. Cette proposition de directive n'a pas encore été adoptée. Toutefois,la Cour de justice des CE dans son arrêt Marschall de 1997 a corroboré la position dela Commission en reconnaissant explicitement la légalité des actions positives prisespar les Etats membres uniquement lorsque ces dernières sont appliquées avec sou-plesse, c'est-à-dire lorsque les femmes ne sont pas favorisées automatiquement344.

Le Traité d'Amsterdam345 marquera un pas important dans la politique communautaireen matière d'égalité. En effet, il fera du principe d'égalité une tâche de la CE (nouvelart. 2 du Traité CE). Dans la réalisation de ses tâches "la Communauté (cherchera) àéliminer les inégalités, et à promouvoir l'égalité, entre les hommes et les femmes"(nouvel art. 3 du Traité CE). En outre, le Traité d'Amsterdam étendra le vote du Con-seil à la majorité qualifiée aux questions relatives à l'égalité des chances et de traite-ment entre les femmes et les hommes.

338 Directive 96/34/CE du 3 juin 1996, JO n° L 145 du 19 juin 1996, p. 4.339 Directive 96/97/CE du 20 décembre 1996, JO n° L 46 du 17 février 1997, p. 20, modifiant la directive

86/378 CEE du 24 juillet 1986 (JO n° L 225 du 12 août 1986, p. 40) dans le but de transposer la jurispru-dence de l'arrêt Barber du 17 mai 1990 selon laquelle les pensions professionnelles constituent un élémentde la rémunération au sens de l'art. 119 du traité CE exigeant ainsi l'égalité entre hommes et femmes dans cedomaine, et ce sans dérogation possible.

340 Directive 97/80/CE du 15 décembre 1997, JO n° L 14 du 20 janvier 1998, p. 6.341 Directive 97/81/CE du 15 décembre 1997, JO n° L 14 du 20 janvier 1998, p. 9.342 CJCE, arrêt du 17 octobre 1995, aff. C-450/93, Kalanke, Rec. 1995, p. I-3051.343 Directive 76/207/CE du 9 février 1976, JO n° L 39 du 14 février 1976, p. 40.344 CJCE, arrêt du 11 novembre 1997, aff. C-409/95, Marschall, Rec. 1997, p. I-6363.345 Voir ch. 311.03.4.

Page 187: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 185 - Chapitre 2

Considérant que l'application seule des actes normatifs ne peut suffire à promouvoirl'égalité des chances dans les faits, la CE s'est efforcée, au travers de programmesd’action pluriannuels successifs, conçus et mis en oeuvre avec le concours des Etatsmembres, de promouvoir des actions concrètes visant à améliorer pratiquement la si-tuation des femmes, notamment en matière d'emploi. Le 4e programme d'action com-munautaire à moyen terme (1996 à 2000)346 a été lancé officiellement à Dublin le 7octobre 1996. Son ambition est d'intégrer l'égalité des chances dans la définition etdans la mise en oeuvre des politiques pertinentes, aux plans communautaire, nationalet régional (principe du "mainstreaming").

B Politique suisse

Entrée en vigueur le 1er juillet 1996, la loi sur l’égalité entre femmes et hommes con-crétise le mandat constitutionnel et transpose dans le droit suisse le principe d'égalitéde salaire et de traitement dans la vie professionnelle 347. Des inégalités entre hommeset femmes subsistent dans l'assurance-vieillesse et survivants (AVS) et dans la pré-voyance professionnelle. Mais ceci sera résolu par la 11e révision de l'AVS, actuelle-ment en préparation qui visera notamment à compléter les mesures d'égalité entre lesdeux sexes. Le droit suisse en matière d'assurances sociales deviendra ainsi compati-ble avec le droit communautaire. Notons enfin que l'"Initiative populaire du 3 mars"visant à une représentation équitable des femmes dans les autorités fédérales a étédéposée le 21 mars 1995.

C Répercussions sur la Suisse

en cas d’adhésion de la Suisse à l’UE, la reprise de l’acquis communautaire ne devraitposer aucun problème, car, en Suisse, l’élimination de discriminations directes et indi-rectes et la mise en œuvre de mesures visant à l’égalité se fait de toute manière sur labase du mandat constitutionnel défini à l’art. 4, al. 2, cst. Par conséquent, la politiquesuisse en la matière ne dépend pas du processus d'intégration européenne. Quant auxconséquences financières de l'adhésion à l'UE, elles seraient moindres et concerne-raient une participation financière au programme d'action communautaire pour l'éga-lité des chances entre les femmes et les hommes (1996 à 2000) dont le budget globalse monte à 30 millions d'euros. Cette participation financière serait comprise dans lemontant global de notre contribution au budget communautaire (voir ch. 251).

Si la Suisse participait à l’EEE, elle devrait également reprendre l’acquis commu-nautaire décrit plus haut, ce qui ne serait pas le cas si les accords sectoriels entraienten vigueur, ni si la situation actuelle était maintenue.

346 Décision du Conseil du 22 décembre 1995, JO n° L 335 du 30 décembre 1995, p. 37.347 Loi fédérale du 24 mars 1995 sur l'égalité entre femmes et hommes (loi sur l'égalité, Leg), RS 151.

Page 188: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 186 - Chapitre 2

222.17 Politique du consommateur

A Acquis communautaire

Bien que le premier programme d’action pour une politique du consommateur date de1975348, cette dernière n'a été dotée d'une base juridique spécifique qu'avec l'adoptionde l'Acte unique européen en 1987. Le Traité de Maastricht a ensuite consacré untitre à la protection des consommateurs349. Le Conseil édicte de nouvelles règles à lamajorité qualifiée (procédure de codécision; voir ch. 213, let. A.2 et A.3).

Le rôle principal de la CE consiste à fixer un niveau minimal de protection du con-sommateur dans le cadre du marché unique. La Communauté a notamment édicté desdirectives dans les domaines de la publicité trompeuse, du crédit à la consommation,de la sécurité des produits et des conditions générales des contrats conclus avec lesconsommateurs. La Commission a en outre présenté une proposition de directive pré-voyant une garantie légale de deux ans en cas d'achat d'un bien de consommation(voir ch. 222.06.2). En outre, la Communauté soutient et complète par des actionsspécifiques la politique des Etats membres en matière de protection de la santé et de lasécurité du consommateur, de défense de ses intérêts économiques, ainsi que de pro-motion de ses droits subjectifs à l'information, à la réparation des dommages subis, àl'accès à la justice, à la représentation de leurs intérêts collectifs et à l'éducation. Lapromotion par la CE des trois derniers droits, non inscrits dans le Traité, est reconnueet confirmée depuis 1975 dans les programmes d'action relatifs à la politique du con-sommateur. Les Etats membres restent cependant libres de fixer des niveaux de pro-tection au plan national plus élevés que ceux de la CE, à condition que les mesuresprises ne constituent pas des entraves aux échanges.

Par le Traité d'Amsterdam, une "clause horizontale" mentionnant pour la premièrefois l'exigence de la prise en compte de la protection du consommateur dans toutes lespolitiques et activités de la CE sera introduite. La promotion des droits subjectifs àl'information, à l'éducation et à la représentation y sera formulée de manière explicite.

Par ailleurs, l'introduction de l'euro permet aux consommateurs de procéder à unecomparaison directe des prix; cette mesure accroîtra donc la transparence.

B Politique suisse

Le droit de la consommation vise à établir un équilibre paritaire dans les rapports deforce entre les fournisseurs et les consommateurs. Les intérêts du consommateur sonttraditionnellement regroupés en cinq catégories de droits fondamentaux: droit à laprotection de la santé et de la sécurité, droit à la protection des intérêts économiques,droit à la réparation des dommages, droit à la représentation, ainsi que droit à l'infor-mation et à l'éducation. 348 Résolution du Conseil du 14 avril 1975 concernant un programme préliminaire de la Communauté pour une

politique de protection et d'information des consommateurs, JO n° C du 25 avril 1975, p. 1.349 Titre XI du Traité CE (art. 129 A).

Page 189: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 187 - Chapitre 2

L’art. 31sexies, cst. est la principale base constitutionnelle de la politique de protectiondu consommateur. Il s'ensuit que la Confédération a le devoir de pratiquer une politi-que en faveur du consommateur qui soit partie intégrante de sa politique économique.

Dans le cadre de l'adaptation du programme Swisslex350, le droit fédéral en matière deconsommation s'est aligné sur la législation communautaire, atteignant ainsi le niveaucommunautaire tel qu'il existait en date du 2 mai 1992351. En outre, dans le cadre duprogramme de revitalisation de l'économie, plusieurs lois ont été adoptées; elles s'ali-gnent dans une très large mesure sur le droit communautaire ou s'inspirent des princi-pes qui gouvernent le marché intérieur352. Demeurent toutefois des divergences no-tamment dans les domaines des conditions générales des contrats conclus avec lesconsommateurs, du "time-sharing", de l'accès à la justice, des virements bancairestransfrontaliers et de la protection des consommateurs dans les contrats à distance.Les effets de la directive communautaire relative à la sécurité générale des produits etles mesures qu'il convient de prendre en Suisse à cet effet sont actuellement à l'étude(voir ch. 222.06.2).

C Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, la Suisse pourrait participer de plein droit au développe-ment de la politique communautaire du consommateur et, dans le cadre de l'art. 129 Adu Traité CE, maintenir ou adopter des dispositions plus strictes. A l'heure de la mon-dialisation accélérée du marché des produits et des services, le consommateur setrouve confronté à une offre dont la provenance et la qualité se diversifient toujoursplus rapidement. Des dispositions uniformes en matière de protection du consomma-teur assureraient au marché davantage de sécurité et de transparence ainsi qu'unemeilleure information, notamment par les indications uniformes sur les produits etl'affichage uniforme des prix. Le consommateur suisse bénéficierait en outre des nou-veaux instruments que la CE met en place afin de faciliter la résolution des litiges enmatière de consommation au plan national et dans le cadre de la Communauté euro-péenne353. De plus, la Suisse aurait la possibilité de prendre part aux divers systèmesd'échange de données existant entre les Etats membres relatifs à des situations à ris-

350 Voir message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'Accord EEE, FF 1993 I 757.351 Par exemple: loi fédérale du 18 juin 1993 sur la responsabilité du fait des produits, RS 221.112.944; loi

fédérale du 8 octobre 1993 sur le crédit à la consommation, RS 221.214.1; loi fédérale du 18 juin 1993 surles voyages à forfait, RS 944.3; loi fédérale du 18 octobre 1993 contre la concurrence déloyale, modifica-tions, RS 241; code des obligations: modification des art. 40b à 40e, du 18 juin 1993, RS 220.

352 Par exemple: loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les cartels et autres restrictions à la concurrence, RS 251(voir ch. 222.04.1); loi fédérale du 19 mars 1976 sur la sécurité d'installations et d'appareils techniques, RS819.1; loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce, RS 946.51; loi fédérale du 6octobre 1995 sur le marché intérieur, RS 943.02; plusieurs lois et ordonnances sur l'accès au marché et lasécurité des produits tels que les denrées alimentaires et les objets usuels (voir ch. 222.03.3), les jouets, lesinstallations et appareils techniques et électriques.

353 Communication de la commission du 30 mars 1998 "la résolution extrajudiciaire des conflits de consomma-tion ", COM (98) 1998; recommandation de la Commission du 30 mars 1998 concernant les principes appli-cables aux organes responsables pour la résolution extrajudiciaire des litiges de consommation, JO n° L 115du 17 avril 1998, p. 31; directive 98/27/CE du 19 mai 1998 relative aux actions en cessation en matière deprotection des intérêts des consommateurs, JO n° L 166 du 11 juin 1998, p. 51.

Page 190: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 188 - Chapitre 2

que, qui permettent ainsi de promouvoir préventivement l'élimination des sources dedanger.

Dans l'ensemble, les coûts inhérents à la politique du consommateur ne devraientguère varier en cas d'adhésion.

En cas de participation à l'EEE, le niveau de protection du consommateur seraitéquivalent à celui obtenu par l'adhésion, à l'exception de la transparence des prix ob-tenue avec l'euro. La Suisse ne pourrait participer que de façon limitée au dévelop-pement des règles communautaires dans le domaine de la politique du consommateur(voir ch. 213, let. B.2).

Si la Suisse choisissait de maintenir la situation actuelle, elle resterait autonomequant à l'élaboration de ses prescriptions dans le domaine de la protection du con-sommateur, mais, dans l'intérêt des consommateurs et de l'économie, ces prescriptionsdevraient en règle générale être adaptées aux dispositions communautaires. La Suissen'aurait aucun droit de codécision lors de l'édiction de nouvelles règles communautai-res (voir ch. 213, let. B. 4).

222.18 Protection de la santé

A Acquis communautaire

En matière de santé publique, l'action de la Communauté a pour but de compléter lespolitiques nationales, toute harmonisation des dispositions législatives et réglementai-res des Etats membres étant exclue354. L'entrée en vigueur du Traité de Maastricht adonné un élan considérable à cette action, la Communauté ayant désormais la possi-bilité de mettre en oeuvre des campagnes d'encouragement adoptées par codécision etd'adopter des recommandations à la majorité qualifiée. Les réalisations communautai-res se subdivisent principalement en huit programmes dont cinq sont déjà en applica-tion:

- La lutte contre le cancer355, que complètent des mesures visant à diminuer la con-sommation du tabac. Au mois de juillet 1998, le Parlement européen et le Conseilont adopté une directive visant à interdire la publicité directe ou indirecte ainsi quele parrainage des produits du tabac356. Des délais de trois à huit ans sont prévuspour la mise en oeuvre de la directive par les Etats membres.

354 L'harmonisation de dispositions concernant la protection de la santé a débuté dans certains domaines. Par

ex: directives techniques dans le domaine du transport des marchandises (voir ch. 221.01), domaine agri-cole, vétérinaire et des produits alimentaires (voir ch. 222.03), génie génétique (voir ch. 222.14).

355 Décision 646/96/CE du 29 mars 1996 concernant un plan d'action pour la lutte contre le cancer (1996-2000), JO n° L 95 du 16 avril 1996, p. 9.

356 Directive 98/43/CE du 6 juillet 1998 concernant le rapprochement des dispositions législatives réglementai-res et administratives des Etats membres en matière de publicité et de parrainage en faveur de produits dutabac, JO n° L 213 du 30 juillet 1998, p. 9.

Page 191: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 189 - Chapitre 2

- Un programme anti-drogues357, en relation avec l'Observatoire européen des dro-gues et toxicomanies (OEDT) fondé à Lisbonne en 1994 qui, avec les agences na-tionales et la Commission forme le Réseau européen d'informations sur la toxico-manie (REITOX).

- La lutte contre le SIDA et les autres maladies transmissibles358 qui inclut entre au-tres la réglementation de la sécurité transfusionnelle.

- La promotion, l'information, l'éducation et la formation en matière de santé359 pré-voyant notamment la création de réseaux européens de promotion de la santé ausein des écoles et des entreprises.

- La surveillance de la santé360 qui vise la mise sur pied d'un réseau de surveillanceépidémiologique et de contrôle des maladies transmissibles.

Les trois autres programmes d'action relatifs aux maladies rares, aux maladies liées àla pollution et à la prévention des blessures devraient bientôt entrer en application.

Comme dans le Traité de Maastricht, le Traité d'Amsterdam prévoit que l'action de laCommunauté complète celle des Etats membres. Par contre, la Communauté devraassurer (et non plus seulement contribuer à assurer) un niveau élevé de protection dela santé dans la définition et la mise en oeuvre de toutes ses politiques et ses actions.En outre, le Traité d'Amsterdam reconnaît de nouvelles compétences à la Commu-nauté. Ainsi, cette dernière pourra adopter des mesures fixant des exigences élevéesde qualité et de sécurité quant aux organes et aux substances d'origine humaine (ycompris le sang et ses dérivés) ainsi que des mesures vétérinaires et phytosanitairesayant directement pour objectif la protection de la santé publique.

B Politique suisse

La santé publique est soumise à un partage de compétences entre la Confédération etles cantons. Au plan national, des actions d'envergure différentes sont entreprises no-tamment dans les domaines du cancer, du SIDA et autres maladies transmissibles, del'épidémiologie, de la drogue, du tabac, de l'alcool, de la radioprotection et de la santéliée à l'environnement, ainsi que de la prévention des blessures. Beaucoup de ces pro-grammes contiennent des éléments de promotion de la santé.

357 Décision 102/97/CE du 16 décembre 1996 concernant un programme d'action de l'Union pour la prévention

des dépendances (1996-2000), JO n° L 19 du 22 janvier 1997, p. 25.358 Décision. 647/96/CE du 29 mars 1996 concernant un programme d'action de l'Union pour la prévention du

SIDA et de certaines autres maladies transmissibles (1996-2000), JO n° L 95 du 16 avril 1996, p. 16.359 Décision 645/96/CE du 29 mars 1996 concernant un programme d'action de l'Union pour la promotion de la

santé, l'information, l'éducation et la formation dans le domaine de la santé (1996 - 2000), JO n° L 95 du 16avril 1996, p. 1.

360 Décision 1400/97/CE du 30 juin 1997 adoptant un programme d'action communautaire en matière de sur-veillance de la santé dans le cadre de l'action dans le domaine de la santé publique (1997- 2001), JO n° L193 du 22 juillet 1997, p. 1.

Page 192: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 190 - Chapitre 2

C Relations contractuelles existantes

Les relations entre la Suisse et la Communauté se situent à un niveau informel. LaSuisse coopère depuis plus de dix ans à la surveillance européenne du VIH et du SI-DA que coordonne le Centre Européen pour la Surveillance Epidémiologique du SI-DA à Paris. Le travail de ce centre est financé principalement par la Communauté etpar le programme des Nations Unies dans le domaine du SIDA. En outre, la Suisse apu être associée de façon informelle à la mise sur pied du futur réseau européen desurveillance épidémiologique et de contrôle des maladies transmissibles. Dans le do-maine de la promotion de la santé, elle fait partie du réseau européen d'écoles promo-trices de la santé, lequel est soutenu par l'OMS-Europe, le Conseil de l'Europe et laCommunauté. Enfin, elle a participé activement, dans le cadre de la coopérationscientifique COST, à l'évaluation des politiques et stratégies en matière de drogues.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, la Suisse pourrait prendre part à l'ensemble des programmesd'action en matière de santé publique et devrait appliquer les mesures prises dans lecadre du Traité d'Amsterdam. Dans le domaine des drogues, elle pourrait participeraux travaux de l'Observatoire européen des drogues et toxicomanies et au Réseau eu-ropéen d'informations sur la toxicomanie.

Dans le cadre de l’EEE, la santé publique fait partie des politiques horizontales etd'accompagnement. Les programmes d'action et les recommandations adoptés par laCommunauté peuvent être intégrés dans l'Accord EEE. La Suisse pourrait donc parti-ciper à part entière à la coopération dans le domaine de la santé publique. En ce quiconcerne l'Observatoire européen des drogues et toxicomanies, la Suisse devrait pou-voir participer à ses travaux comme la Norvège. Les négociations d'adhésion pour laNorvège sont en cours mais les conditions de participation ne sont pas encore déter-minées. Il n'est pas encore clair de ce qu'il adviendra, dans le cadre de l'EEE, des me-sures contraignantes qui pourront être prises en vertu du Traité d'Amsterdam dans ledomaine des organes et substances d'origine humaine et du sang. Une participation dela Suisse aux actions communautaires en matière de protection de la santé implique-rait une intensification des politiques et des mesures cantonales ainsi qu'une coordi-nation.

L'entrée en vigueur des accords sectoriels pourrait avoir un effet positif sur les dis-cussion portant sur une collaboration de la Suisse avec l'Observatoire européen desdrogues et toxicomanies (OEDT) et le Réseau européen d'informations sur les toxi-comanies (REITOX) ainsi qu'avec le réseau européen de surveillance épidémiologi-que et de contrôle des maladies transmissibles.

Si elle maintien la situation actuelle, la Suisse reste exclue de la coopération dans ledomaine de la santé publique mise en place au sein de la Communauté.

Page 193: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 191 - Chapitre 2

222.19 Culture et médias audiovisuels

A Acquis communautaire

Au cours des 40 années de leur coopération, les Etats membres de l'UE ont développéune conscience accrue de leur culture commune, de l’importance de la diversité cultu-relle et de la valeur exceptionnelle du patrimoine culturel commun. Les Etats mem-bres ne pouvait donc manquer de mentionner la politique culturelle dans le Traité deMaastricht. Depuis, la Communauté s'efforce notamment de contribuer àl'"épanouissement de la vie culturelle dans les Etats membres" (art. 3p du Traité CE).A cette fin, le Conseil peut, en vertu de l’art. 128 du Traité CE, adopter, à l’unanimité,des mesures de promotion ou des recommandations. Des mesures d'harmonisations dequelque nature qu'elles soient sont exclues, la culture étant entièrement du ressort desEtats membres.

La politique audiovisuelle communautaire vise à garantir l'établissement et le fonc-tionnement d'un espace de services et de produits audiovisuels et à renforcer l'indus-trie des programmes. Ces objectifs doivent être atteints en garantissant la diversitéculturelle dans la Communauté et en tenant compte des développements technologi-ques, comme par exemple l'avènement du numérique.

La mise en oeuvre de la politique audiovisuelle communautaire se concrétise par lamise en place d'un cadre juridique approprié (voir let. A.1). Des mesures d'encoura-gement et de soutien peuvent être édictées aussi bien dans le domaine de la cultureque dans celui des médias audiovisuels (voir let. A.2). Pour ce qui est de la circulationdes biens culturels, la Communauté a mis en place un système de protection (voir let.A.3).

A.1 Mise en place d'un cadre juridique

Le droit communautaire influe sur la culture et les médias audiovisuels. La libre cir-culation des personnes revêt une grande importance pour la création artistique, tandisque les directives qui unifient le droit d’auteur ont des répercussions aussi bien sur laculture que sur les médias audiovisuels361. Dans le domaine de la radio et de la télévi-sion, le Conseil a adopté une directive spécifique362 pour les règles du droit d'auteur etdes droits voisins pour la radiodiffusion par satellite et la retransmission par câble.L'objectif de cette directive est de promouvoir la radiodiffusion transfrontière de pro-grammes à l'intérieur de la Communauté tout en assurant la protection des auteurs etdes interprètes.

361 Voir, à propos de la libre circulation des personnes le ch. 221.02 et à propos de la propriété intellectuelle le

ch. 222.06.3.362 Directive 93/83/CE relative à la coordination de certaines règles du droit d'auteur et des droits voisins du

droit d'auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et la retransmission par câble, JO n° L 284 du 6octobre 1993, p. 15.

Page 194: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 192 - Chapitre 2

Le Traité d'Amsterdam contient un protocole confirmant le rôle primordial des Etatsmembres dans l'organisation et le financement de leur système de radio et de télédif-fusion publics. A l'exception de ce protocole, seul le secteur des programmes de télé-vision fait l'objet d'un traitement spécial, le secteur de la radio étant soumis aux règlesgénérales du Traité.

La directive Télévision Sans Frontière (TVSF)363 est la pierre angulaire de la politiqueaudiovisuelle communautaire. Elle établit un cadre juridique régi par des règles har-monisées pour que les opérateurs de télévision déploient leurs activités sur le marchéintérieur. Elle fixe un certain nombre de dispositions en matière de publicité, de par-rainage, de protection des mineurs et de droit de réponse. La principale innovationapportée par la directive réside dans les mesures prises pour garantir l'accès du grandpublic aux événements majeurs. Cette directive maintient l'obligation faite aux chaî-nes de télévision de réserver une proportion majoritaire de leur temps de diffusion àdes programmes européens.

La Communauté encourage l'élaboration de règles de base au plan national pour pro-téger les mineurs364. Ces règles devraient être intégrées dans des codes de conduiteque les fournisseurs des services concernés pourraient accepter et mettre en œuvre defaçon autonome.

La Communauté oeuvre aussi dans le domaine de l'harmonisation des normes techni-ques. Des normes techniques harmonisées sont indispensables pour le développementdes moyens de communication audiovisuels, développement qui est un vecteur fon-damental de l'intégration européenne. Deux directives ont été adoptées en la matière.La première365 crée un cadre commun pour les conditions d'accès aux services de té-lévision numérique afin d'éviter les abus de position dominante. Elle établit unenorme analogique commune pour la télévision à haute définition et impose égalementun format commun pour la diffusion de services de télévision grand écran. La se-conde366 permet la transmission de nouveaux services de télécommunication multi-média sur les réseaux câblés de toute la Communauté.

363 Directive 97/36/CE du 19 juin 1997 modifiant la directive 89/552/CEE du 3 octobre 1989, visant à la coor-

dination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des Etats membres relativesà l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle, JO n° L 202 du 30 juillet 1997, p. 60.

364 Recommandation du Conseil du 24 septembre 1998 concernant le développement de la compétitivité del'industrie européenne des services audiovisuels et d'information par la promotion de cadres nationaux visantà assurer un niveau comparable et efficace de protection des mineurs et de la dignité humaine, JO n° L 270du 7 octobre 1998, p. 48.

365 Directive 95/47/CE du 24 octobre 1995 relative à l'utilisation de normes pour la transmission de signaux detélévision, JO n° L 281 du 23 novembre 1995, p. 51.

366 Directive 95/51/CE du 18 octobre 1995 concernant la suppression des restrictions à l'utilisation des réseauxcâblés de télévision pour la fourniture de services de télécommunications déjà libéralisés, JO n° L 256 du 26octobre 1995, p. 49.

Page 195: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 193 - Chapitre 2

A.2 Mesures de soutien et de promotion

Le Conseil a mis en œuvre un programme d'encouragement au développement et à ladistribution des œuvres audiovisuelles communautaires (MEDIA II - Développementet distribution 1996 à 2000) et un programme de formation pour les professionnels del'industrie de la Communauté des programmes audiovisuels (MEDIA II - Formation1996 à 2000)367.

Les actions communautaires en matière de culture se rangent parmi les mesures desoutien et de promotion. Il existe trois programmes d’action. Le programme KALEI-DOSCOPE368 vise à promouvoir les activités culturelles de dimension européenne; leprogramme ARIANE369 permet d'encourager la distribution et la diffusion des litté-ratures européennes, ainsi que la lecture. Le programme RAPHAEL370, enfin, a pourobjectif de promouvoir la coopération dans le domaine du patrimoine culturel euro-péen.

A la demande du Conseil, la Commission a présenté un projet de programme-cadrepour les actions culturelles "CULTURE 2000". Ce programme-cadre, qui devra êtreapprouvé par le Conseil et le Parlement, remplacera les trois actions susmentionnéesqui arrivent prochainement à échéance. Les orientations présentées par la Commissiontendent à concentrer désormais le soutien communautaire sur des projets culturels plu-rinationaux de grande envergure. La "ville européenne" et le "mois européen", mani-festations intergouvernementales dotées d'un grand prestige, existent depuis 1985 et laCE a décidé d'en faire dès 2004 un programme communautaire.

Reconnaissant l'importance stratégique de la télévision à haute définition pour l'indu-strie dans la Communauté de l'électronique, du cinéma et de la télévision, le Conseil aétabli un plan d'action371 visant à promouvoir l'introduction de services de télévisionsavancés en Europe et à favoriser le développement de la technologie numérique.

A.3 Protection des biens culturels

La Communauté a créé deux instruments complémentaires qui mettent en place unsystème de protection pour la circulation des biens culturels. Elle a d’une part édicté

367 Décisions 95/563/CE et 95/564/CE portant sur la mise en œuvre d'un programme d'encouragement au dé-

veloppement et à la distribution des œuvres audiovisuelles européennes (MEDIA II - Développement et dis-tribution 1996 à 2000) et d'un programme de formation pour les professionnels de l'industrie européenne desprogrammes audiovisuels (MEDIA II - Formation 1996 à 2000), JO n° L 321 du 30 décembre 1995, p. 25 et33.

368 Décision 719/96/CE du 29 mars 1996, établissant un programme de soutien aux activités artistiques et cultu-relles de dimension européenne, JO n° L 99 du 20 avril 1996, p. 20.

369 Décision 2085/97/CE du 6 octobre 1997, établissant un programme de soutien dans le domaine du livre etde la lecture, JO n° L 291 du 24 octobre 1997, p. 27.

370 Décision 2228/97/CE du 13 octobre 1997, établissant un programme dans le domaine du patrimoine cultu-rel, JO n° L 305 du 8 novembre 1997, p. 31.

371 Décision 93/424/CEE relative à la mise en œuvre d'un plan d'action pour l'introduction des services de télé-vision avancés, JO n° L 196 du 5 août 1993, p. 48.

Page 196: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 194 - Chapitre 2

un règlement sur la circulation des marchandises avec des pays tiers, qui garantit laprotection des biens culturels des Etats membres de l’UE; il soumet l’exportation debiens culturels à une licence de l’Etat membre compétent pour qu'un contrôle uni-forme de l’exportation de biens culturels aux frontières extérieures de la Communautésoit instauré372. Il existe d’autre part une réglementation sur la restitution, en vertu delaquelle chaque Etat membre peut obtenir la restitution de biens culturels sur son ter-ritoire si ceux-ci sont classés trésors nationaux au sens de l’art. 36 du Traité CE ets’ils ont quitté illicitement le territoire d'un Etat membre en violation de ses prescrip-tions en matière de biens culturels373.

B Politique suisse

En Suisse, l’encouragement de la culture est assuré en priorité par les milieux privés(par ex. des fondations). L’Etat n’intervient que si l’aide privée ne suffit pas. La pro-motion publique de la culture est organisée de manière fédérale. Elle ressort en pre-mier lieu aux cantons. La Confédération ne peut soutenir que des domaines bien pré-cis tels que le cinéma, le patrimoine culturel et les monuments historiques, pour les-quels la constitution le prévoit374 ou les beaux-arts et les arts appliqués, les activitésde jeunesse et l’instruction de jeunes Suisses de l’étranger, pour lesquels il existe deslois ou des arrêtés fédéraux375. La promotion des autres domaines culturels, en parti-culier du théâtre, de la danse, de la musique et de la littérature, incombe principale-ment à la fondation autonome Pro Helvetia376, qui est financée par la Confédération,mais est également assurée par les cantons et les communes. Pro Helvetia a pour mis-sion de promouvoir la création artistique et la diffusion de la culture en Suisse et leséchanges culturels avec l’étranger.

Selon une pratique incontestée, il est admis que l’encouragement de la culture, au senslarge du terme fait partie des tâches de l’Etat. La Confédération gère dès lors des ins-titutions culturelles telles que le Musée national et la Bibliothèque nationale, ainsi queles collections d’art de la Confédération. Il est prévu d’inscrire un article réglant ex-pressément l'encouragement de la culture dans la nouvelle constitution377.

372 Règlement (CEE) n° 3911/92 du 9 décembre 1992 concernant l’exportation de biens culturels, JO n° L 395

du 31 décembre 1992, p. 1.373 Directive 93/7/CEE du 15 mars 1993 relative à la restitution de biens culturels ayant quitté illicitement le

territoire d’un Etat membre, JO n° L 74 du 27 mars 1993, p. 74.374 Art. 27ter et 24sexies cst.375 Arrêté fédéral du 22 décembre 1887 concernant l’avancement et l’encouragement des arts en Suisse, RS

442.1; arrêté fédéral du 18 décembre 1917 concernant le développement des arts appliqués (arts décoratifset industriels), RS 442.2; loi fédérale du 6 octobre 1989 concernant l’encouragement des activités de jeu-nesse extra-scolaires, RS 446.1; loi fédérale du 9 octobre 1987 concernant l’encouragement de l’instructionde jeunes Suisses et Suissesses de l’étranger, RS 418.0.

376 Loi fédérale du 17 décembre 1965 concernant la fondation "Pro Helvetia", RS 447.1.377 Art. 69 de la nouvelle constitution fédérale (arrêté fédéral du 18 décembre 1998 relatif à une nouvelle cons-

titution fédérale, FF 1999 I 162); voir aussi message du 20 novembre 1996 relatif à une nouvelle constitu-tion fédérale, FF 1997 I 289.

Page 197: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 195 - Chapitre 2

Bien que la Suisse ait ratifié et transposé les instruments internationaux réglant laprotection des biens culturels en temps de guerre378, les biens culturels meubles sontconsidérés en temps de paix comme de simples marchandises et soumis aux lois ré-gissant le commerce de ces choses. Sur le plan fédéral, il n’existe pour l’heure aucunedisposition réglant l'importation et l’exportation de biens culturels. Le Conseil fédéralest en train d’élaborer un message concernant l’adhésion de la Suisse à la Conventionde l’UNESCO du 14 novembre 1970 concernant les mesures à prendre pour interdireet empêcher l'importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biensculturels.

En matière audiovisuelle, le Conseil fédéral mène une politique fondée sur la spécifi-cité du marché audiovisuel suisse. Celui-ci se caractérise par ses quatre marchés cul-turels, sa petite assise économique, ses faibles ressources techniques et une concur-rence accrue des médias étrangers.

En matière de radiodiffusion, il garantit à l'échelon national et linguistique que le dif-fuseur national (SSR) assure sa fonction d'intégration. Afin d'optimiser le mandat deprestation du service public (SSR), une plus grande liberté d'action lui est assuréepour s'affirmer sur le marché et affronter la concurrence étrangère avec les armes ap-propriées. Tout en renforçant le rôle de la SSR, l'octroi de concessions pour les télévi-sions régionales et les fenêtres de programme étrangères ouvre la Suisse à la concur-rence. Dans ce domaine, la Suisse a toujours eu pour but de mener une politique euro-compatible. Les révisions de la loi sur les télécommunications379 et de la loi sur laradio et la télévision380 ont été menées dans ce sens381. Sur un grand nombre depoints, la directive Télévision Sans Frontière (TVSF) contient des règles quasi iden-tiques à celles de la Convention européenne sur la télévision transfrontière du Conseilde l'Europe du 5 mai 1989 que la Suisse a ratifiée le 9 octobre 1991. Cette Conventiona été révisée afin d'être adaptée à la directive TVSF382. La loi fédérale sur la radio etla télévision est, dans une large mesure, compatible avec la Convention révisée383.

C Relations contractuelles existantes

S’agissant de la production audiovisuelle indépendante, qui serait impensable sans lacoopération européenne, le Conseil fédéral s’est efforcé très tôt de coopérer avec laCommunauté européenne. La Suisse a adhéré en tant que premier Etat non-membrede l'UE au programme MEDIA I, permettant ainsi à sa création cinématographique deprofiter de toutes les formes de soutien offertes par MEDIA jusqu’au 31 décembre

378 Convention de La Haye du 14 mai 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé (y

compris le protocole additionnel), RS 0.520.3/32.379 Loi fédérale sur les télécommunications du 30 avril 1997, RS 784.10.380 Loi fédérale sur la radio et la télévision du 21 juin 1991, RS 784.48.381 Voir le message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'Accord EEE, FF 1993 I 757.382 Le projet de protocole portant amendement à la convention a été approuvé par le Conseil des ministres en

septembre 1998. Le processus d'adoption de cet amendement a été entrepris immédiatement après en Suisse.383 Seules quelques modifications seront nécessaires, notamment en ce qui concerne l'art. 9 bis (accès du public

à des événements d'importance majeure).

Page 198: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 196 - Chapitre 2

1992. Après le vote de la Suisse sur l’EEE, la Communauté a mis un terme à la parti-cipation de la Suisse aux programmes MEDIA.

La Suisse a conclu avec plusieurs Etats membres des accords bilatéraux de coproduc-tion384 et coopère avec plusieurs pays dans le cadre de la Convention européenne sur lacoproduction cinématographique385. Dans le domaine de la radiodiffusion, aucune re-lation contractuelle entre la Suisse et les Etats membres n'est établie. Cette affirmationse justifie également pour d'autres domaine culturels, dans lesquels la coopération sefait toutefois dans le cadre des activités du Conseil de l’Europe.

D Répercussions sur la Suisse

Dans le domaine de la culture, la répartition des compétences entre l'UE et les Etatsmembres est comparable à celle qui existe entre la Confédération et les cantons. LesEtats membres sont entièrement souverains en matière culturelle. Si la Suisse adhéraità l'UE, cet état de fait laisserait à un petit Etat comme le nôtre beaucoup d’autonomieet une grande marge de manoeuvre, ce qui lui permettrait de prendre en considérationles intérêts régionaux et cantonaux. L’engagement de longue date de la Suisse au seindu Conseil de l’Europe serait complété par la possibilité d’une participation pleine etentière (y compris le droit de vote) aux programmes de la CE. Si la Suisse adhérait àl’UE, la production cinématographique suisse pourrait profiter des programmes ME-DIA, et la coproduction européenne avec des partenaires suisses s’en trouverait sim-plifiée. Depuis la dénonciation de l’accord passé entre la Suisse et la Communauté surla participation aux programmes MEDIA I, l’Office fédéral de la culture prend desmesures compensatoires MEDIA, qui ne permettent toutefois de combler qu’une par-tie du soutien manquant. Dans les autres domaines de la culture, l'adhésion à l'UE ou-vrirait non seulement la pleine participation aux actions ou programmes-cadres cultu-rels, mais permettrait de participer aux délibérations du Conseil culture/audiovisuel etaux travaux des groupes correspondants. Si la Suisse adhérait à l’UE, elle devrait re-prendre l’acquis communautaire en matière de protection des biens culturels (voir let.B).

Au niveau financier, une adhésion à l'UE n'entraînerait pas de coûts d'adaptation im-portants en raison de notre eurocompatibilité avancée en la matière. Pour les troisprogrammes culturels (RAPHAEL, KALEIDOSCOPE et ARIANE) et pour le pro-gramme MEDIA II, la participation de la Suisse sera couverte par la contribution glo-bale de la Suisse au budget communautaire (voir ch. 251).

Pour le cas où la Suisse participerait à l’EEE, elle devrait également reprendrel’acquis communautaire, y compris les prescriptions réglant la protection des biensculturels. La participation à l'EEE ouvrirait à la Suisse une place formellement équi-valente à celle occupée actuellement par chacun des autres partenaires EEE; la Suissepourrait donc participer de plein droit aux programmes culturels communautaires et

384 France, Allemagne, Italie, Autriche et Belgique.385 Convention européenne du 2 octobre 1992 sur la coproduction cinématographique, RS 0.443.2.

Page 199: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 197 - Chapitre 2

au programme MEDIA386. La participation financière de la Suisse pour les program-mes culturels (RAPHAEL, KALEIDOSCOPE et ARIANE) a été estimée sur la basedu budget 1998 à 258 835 euros et à 605 550 euros pour le programme MEDIA II.

Sans faire obstacle à certaines formes de collaboration cas par cas387, le maintien de lasituation actuelle exclut la participation pleine et entière ou la coopération systémati-que aux actions culturelles communautaires. Une participation ne serait envisageableque si nos accords sectoriels avec la CE étaient considérés comme des accordsd’association ou de coopération (avec une clause culturelle), à l’instar des accords quela CE a conclus avec les pays d’Europe centrale et orientale. Les coûts d’une partici-pation de la Suisse aux programmes de la CE dans le domaine culturel et au pro-gramme MEDIA II seraient comparables à ceux qu'impliqueraient une participation àl’EEE. Tout au plus, le Conseil des ministres de la culture de l'UE a-t-il prévu388 quele titre de "ville européenne de la culture" reste accessible à la candidature d'un payseuropéen sans aucune forme d'accord même après 2004. Pour mémoire, rappelons quela région de Bâle a obtenu pour l'année 2001 le titre du "Mois culturel européen" enpartenariat avec Riga, capitale de la Lettonie.

Les dispositions MEDIA permettent la conclusion d’accords bilatéraux spéciaux avecdes Etats tiers à condition que l’ensemble de l’acquis communautaire dans le domaineaudiovisuel soit repris. Comme le montrent les accords passés par la Communautéavec d’autres Etats non-membres389, les requérants suisses ne pourraient disposer toutau plus que du montant du soutien que la Suisse alloue aux programmes MEDIA. Uneparticipation pleine et entière et institutionnalisée aux organes décisionnels serait re-fusée.

En cas de maintien de la situation actuelle, il faudra de plus continuer aligner unilaté-ralement le droit suisse sur le droit communautaire afin que l'industrie audiovisuellesuisse reste compétitive, que la Suisse puisse bénéficier des synergies européennes enmatière de développement technologique et que le public suisse puisse recevoir sansentrave les programmes étrangers.

222.20 Statistique

A Acquis communautaire

Au cours des dernières décennies la CE a développé une politique d'information sta-tistique qui repose sur quatre exigences majeures:

- la nécessité d'une transparence accrue dans tous les domaines d'actions commu-nautaires;

386 Paiement d'une contribution au prorata du PIB; présentation de projets indépendamment du montant versé;

experts dans les comités de sélection.387 A titre d'exemple, on peut citer la coopération active de la Bibliothèque nationale et du Musée national suis-

ses à plusieurs programmes mis sur pied par la Commission dans le domaine de la télématique.388 Sous réserve de l'approbation du Parlement européen.389 Par ex. avec la Hongrie.

Page 200: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 198 - Chapitre 2

- la rigueur et l'impartialité de l'information statistique communautaire, qui doit re-poser sur des bases scientifiques indépendantes de toute considération politique;

- l'égalité de traitement des Etats, des citoyens et des entreprises en matière d'accès àl'information statistique;

- la protection des données des personnes physiques et morales, collectées et traitéesà des fins statistiques.

Le droit communautaire vise à assurer l'harmonisation et la comparabilité des infor-mations des Etats membres. Pour ce faire, il établit un langage statistique commun etdes procédures uniformes pour l'ensemble de la CE. Ainsi, il définit les nomenclatu-res, les règles techniques, les formes de collecte des données, le calendrier de produc-tion des informations et les méthodes de calcul que les Etats doivent appliquer dansleurs activités statistiques. Il établit également les bases et le cadre opérationnel dusystème statistique de la CE et définit en particulier les rôles de la Commission et desEtats membres.

La mise en œuvre de la politique statistique communautaire repose sur des mécanis-mes de concertation et de coordination entre l'Office statistique des Communautéseuropéennes (Eurostat) et les instituts nationaux de statistique des Etats membres. Unprogramme statistique pluriannuel, adopté par le Conseil de la CE, fixe les priorités etdéfinit les actions à mener (enquêtes, travaux de développement, etc.)390. Conformé-ment au principe de subsidiarité, il incombe aux autorités statistiques des Etats mem-bres de réaliser la collecte des données nécessaires à l'élaboration des statistiquescommunautaires. Eurostat reçoit les données nationales, les analyse, les agrège et lesrend publiques. A titre d'exemples, Eurostat mesure l'application par les Etats mem-bres des "critères de convergence" nécessaires à la mise en place de la monnaie uni-que et fournit l'avis technique de base quant à leur intégration dans la zone de laditemonnaie; il produit la documentation et les analyses statistiques préalables aux négo-ciations avec les Etats tiers en vue de leur adhésion à l'UE; il fournit l'information debase pour l'établissement des budgets, pour l'octroi des subventions et pour le lance-ment de nouveaux programmes d'actions communautaires.

B Politique suisse

La loi sur la statistique fédérale391 vise, entre autres, à encourager la modernisation dela statistique fédérale et la coopération internationale. Elle prévoit la création de baseshomogènes qui assurent la comparabilité nationale et internationale de la statistiquefédérale, ainsi que l'établissement d'un programme pluriannuel de la Confédération.Le programme pluriannuel (1995 à 1999) de la statistique fédérale actuellement encours compte, parmi six objectifs majeurs, l'application des règles statistiques inter-

390 Décision 93/464/CEE du 22 juillet 1993 relative au programme-cadre pour des actions prioritaires dans le

domaine de l'information statistique 1993-1997, JO n° L 219 du 28 août 1993, p. 1; proposition de décisiondu Conseil relative au programme statistique communautaire 1998 à 2002, COM (97) 735 final du 14 jan-vier 1998.

391 Loi du 9 octobre 1992 sur la statistique fédérale (LSF), RS 431.01.

Page 201: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 199 - Chapitre 2

nationales et l'adaptation au système statistique européen392. Il indique le degré depriorité des activités et des projets qui sont entrepris en vue de rendre la statistiquefédérale compatible avec la statistique européenne. De plus, il mentionne plusieursprojets importants, liés à des projets prioritaires de la CE, auxquels la Confédération adû provisoirement renoncer par manque de ressources humaines et financières. Ils'agit notamment de projets portant sur les statistiques de l'emploi et du chômage, desprix de l'énergie, des produits industriels, de la valeur ajoutée, des investissements,des indicateurs conjoncturels des secteurs secondaire et tertiaire, ainsi que des comp-tes nationaux.

Malgré les efforts déployés par la Suisse pour adapter les statistiques existantes auxrègles communautaires, un écart important subsiste.

C Relations contractuelles existantes

Même s'il n'existe pas d'accord bilatéral dans le domaine de la statistique, une coopé-ration importante entre la Suisse et la CE a été réalisée depuis 1989, notamment dansle cadre des relations entre l'AELE et l'UE (établissement de parités de pouvoird'achat, informations statistiques dans les domaines des salaires, des prix, de la con-sommation ou de la fiscalité). Eurostat reçoit, analyse et intègre dans ses banques dedonnées toutes les informations statistiques existantes sur notre pays. De plus, la sta-tistique fédérale comprend certains centres excellents et tant Eurostat que les institutsnationaux de statistique des Etats membres sollicitent régulièrement l'avis ou la coo-pération de nos experts. Par ailleurs, la Suisse contribue, dans le cadre du budget del'AELE, au financement des programmes communautaires de coopération techniqueavec les pays de l'Europe centrale et orientale et avec les pays riverains de la Méditer-ranée. Dans ce contexte, la Suisse participe activement à la conception et à l'exécutiondes projets de coopération.

Même si cette coopération est utile, la Suisse ne peut participer ni à la préparation duprogramme statistique communautaire, ni à d'importants projets de développement.Partant, le processus de rapprochement et d'harmonisation entre le système statistiquesuisse et le système statistique communautaire se heurte à de nombreuses difficultés:on assiste, dans certains domaines, à un relâchement des échanges d'informations etd'expertise, ce qui n'est pas sans inconvénients pour la Suisse, comme un retard d'in-formation ou la non-participation des experts suisses à des travaux pilotes.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, des mesures de renforcement de l’appareil statistique de laConfédération devraient être prises dès l'ouverture des négociations en vue de pro-duire, en collaboration avec Eurostat et d'autres organes de la Commission, un dossierde base comprenant des informations statistiques eurocompatibles et agréées par les

392 Programme pluriannuel de la statistique fédéral pour les années 1995 à 1999, approuvé par le Conseil fédé-

ral le 18 mars 1996, Office fédéral de la statistique, Berne 1996.

Page 202: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 200 - Chapitre 2

deux parties. Puis, au cours des négociations, il s'agirait de fixer des priorités et despériodes transitoires permettant à la Suisse de rattraper le niveau de développement dela statistique communautaire. Dans cette perspective, il faudrait procéder à un inves-tissement approprié et par étapes en ressources financières et humaines dans l'appareilstatistique fédéral. En outre, une coopération renforcée entre les organes statistiquesdes cantons et de la Confédération s'imposerait.

En cas de participation à l'EEE, la coopération statistique figurerait au nombre des"politiques horizontales" couvertes par l'Accord EEE. En 1992, il s'agissait de repren-dre 27 règlements et directives; aujourd'hui l'acquis pertinent s'est enrichi de 13 nou-veaux actes communautaires; 13 autres textes sont en outre sur le point d'être adoptés.Dès lors, bien que la Suisse ait au cours des dernières années en partie comblé les la-cunes d'information statistique qui étaient les siennes par rapport aux exigences ini-tiales de l'EEE, les nouveaux actes communautaires auxquels elle devrait s'adapterfont en sorte que les conséquences financières et en personnel d'une éventuelle parti-cipation à l'EEE demeuraient aujourd'hui à peu près être les mêmes que celles annon-cées dans le message du 18 mai 1992 relatif à l'Accord sur l'EEE393.

Le 30 juin 1993, il a été décidé de demander à la CE l'ouverture de négociations envue de la conclusion d'un accord sectoriel portant sur le domaine de la statistique. LaCE ayant décidé de ne pas négocier dans une première phase un accord sur les statis-tiques, le dossier est en veilleuse. Si ce dossier devait être rouvert, un accord pourraitêtre rapidement conclu. La Suisse s'y engagerait à rattraper d'abord par un accord debase et ensuite des compléments par étapes successives, le volume et le rythme com-munautaires de production d'informations dans un certain nombre de domaines clefs,tels les transports et les produits industriels. La Suisse devrait alors contribuer finan-cièrement aux coûts des services dont elle bénéficierait et aux projets auxquels elleparticiperait.

Le maintien de la situation actuelle permet à la Suisse de décider de façon autonomedu rythme d'adaptation de ses statistiques à celles de la CE. La CE étant actuellementprête à coopérer avec la Suisse en vue d'une solution contractuelle, notre pays risqued'être exclu d'une nouvelle coopération avec Eurostat s'il tarde à procéder aux adapta-tions nécessaires sur le plan interne. Les statistiques suisses resteraient en outre lacu-naires dans d'importants domaines.

393 Voir FF 1992 IV 1 (ch. 7.95 et 11).

Page 203: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 201 - Chapitre 2

222.21 Autres politiques et programmes(protection civile, sport, tourisme, protection des animaux)

La Communauté agit également en matière de protection des animaux, de protectioncivile, du sport et du tourisme.

Protection civile

Depuis 1985, le domaine de la protection contre les catastrophes et de la protectioncivile s’est graduellement développé. Le Traité de Maastricht le mentionne expres-sément en tant qu’action de l’Union (art. 3t du Traité CE). Sans qu’il soit question deviser une quelconque uniformisation, la protection contre les catastrophes comprend,d’une part, l’assistance mutuelle entre les Etats membres en cas de catastrophed’origine naturelle ou technique et, d’autre part, une coopération sous la forme d’unéchange d’informations et d’enseignement en matière de préparation de l’aide pourles situations de détresse qui ne sont pas dues à un conflit armé. Les services de con-tact nationaux pour la protection contre les catastrophes ont été réunis en un réseaupermanent et un numéro d'appel d’urgence commun à toute l’Union a été introduit. Enoutre, des séminaires et des exercices en simulation ont lieu. Cette collaboration sepoursuit dans le cadre du programme d’action pour les années 1998 à 99 adopté endécembre 1997394. Les Etats membres peuvent toujours organiser leur protection ci-vile de manière indépendante.

La politique que mène la Suisse vise à garantir la protection de la population face auxconséquences de catastrophes, de situations de détresse et de conflits armés ainsi quela maîtrise de tels événements. La loi sur la protection civile395 et différentes ordon-nances régissent les secteurs les plus importants des activités suisses dans ce domaine.En comparaison internationale, la Suisse dispose d’une protection civile très dévelop-pée. Afin de fournir une aide lors de catastrophes à l’étranger, la Suisse a créé leCorps suisse d’aide en cas de catastrophe avec sa Chaîne suisse de sauvetage. L’aidetransfrontalière en cas de catastrophe et de situation de détresse est déjà aujourd'huiréglée dans différents accords. C’est dans ce cadre qu’une collaboration axée sur lapratique et sur les besoins s’est développée ces dernières années dans les régionsfrontalières.

Une adhésion à l’UE, comme une participation à l’EEE, permettraient à la Suisse departiciper aux actions et aux mesures mentionnées, et aurait pour effet de renforcer lacoopération entre nos organisations spécialisées et celles des Etats membres. Dans lamesure où la compétence en matière de protection de la population relève des Etats,les lois et ordonnances suisses n’auraient pas à être adaptées. La possibilité qu’a laSuisse de conclure des accords bi- ou multilatéraux n’en serait pas non plus affectée.

394 Décision 98/22/CE du 19 décembre 1997 relative à un programme d’action de l’Union en matière de pro-

tection civile, JO no L 8 du 14 janvier 1998, p. 20.395 Loi fédérale du 17 juin 1994 sur la protection civile (loi sur la protection civile; LPCi), RS 520.1.

Page 204: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 202 - Chapitre 2

Sports

La Communauté ne connaît pas de politique qui lui soit propre dans le domaine dusport, dans la mesure où cette compétence relève des Etats membres. En 1994, laCommission a mis sur pied le programme "EURATHLON". Ce programme soutientles manifestations sportives à l’échelon supranational, ainsi que les actions dans ledomaine de la formation sportive et dans celui de l’information. La Commission aégalement mis sur pied un programme de soutien aux mesures visant à promouvoir,par le sport, l’intégration des personnes handicapées. En outre, depuis 1991, se tientannuellement le "Forum européen du Sport", dans le cadre duquel des représentantsdes pouvoirs publics et des organes représentant les milieux sportifs traitent des pro-blèmes du sport. La Conférence intergouvernementale des Etats membres de l’UE aadopté une déclaration (non contraignante) relative au sport dans l'acte final du Traitéd'Amsterdam. Elle y souligne l’importance sociale du sport et invite les institutions del’Union européenne à consulter les associations sportives, lorsque des questions im-portantes ayant trait au sport sont concernées et de tenir tout spécialement compte desparticularités du sport amateur.

De manière générale, les règles communautaires sur la libre circulation des personnesou le droit communautaire en matière de concurrence peuvent s’appliquer aux sportifset aux organes représentant les milieux sportifs (voir ch. 221.02 et 222.04). C’est ainsique la Cour de Justice des CE a, par exemple, statué, dans son arrêt Bosman, sur lesrègles de transfert dans le football professionnel396.

En Suisse, la Confédération a, en s’appuyant sur l’art. 27quinquiès, cst., adopté la loi en-courageant la gymnastique et les sports397 ainsi que différentes ordonnances.L’enseignement du sport à l’école a été déclaré obligatoire. La Confédération soutientles associations privées de gymnastique et du sport, ainsi que la recherche scientifiquedans le domaine sportif et contribue financièrement à la construction d’installationssportives nationales. Elle a également fondé l’Ecole fédérale du sport de Macolin, quidirige notamment le programme Jeunesse+Sport. La Suisse est membre associé duRéseau européen des instituts de sciences du sport de l’Union européenne.

En cas d’adhésion à l’UE, la politique du sport suisse pourrait être poursuivie dans saforme actuelle. La Suisse pourrait participer de plein droit au programmeEURATHLON et au programme de promotion du sport pour les personnes handica-pées, de même que prendre activement l’initiative de projets. En outre, les autorités etles associations sportives suisses pourraient participer activement, et non plus en tantque simples observateurs, au Forum européen du Sport.

Une participation de la Suisse à l’ EEE n’aurait pas de conséquences directes sur ledomaine du sport.

396 CJCE, arrêt du 15 décembre 1995, Rec. C-415/93, Bossant, Slg. 1995, S. I-4921.397 Loi fédérale du 17 mars 1972 encourageant la gymnastique et les sports, RS 415.0.

Page 205: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 203 - Chapitre 2

Le maintien de la situation actuelle aura pour conséquence de maintenir la Suisse àl’écart du dialogue que mènent les acteurs du domaine sportif dans le cadre des pro-grammes et des forums de l’UE ce qui, indirectement, se répercutera sur l’attributionde manifestations ainsi que sur l’attractivité de la Suisse en tant que sièged’organismes sportifs.

Tourisme

Le tourisme reste essentiellement un domaine de compétence nationale: preuve en estl'absence d'un article spécifique dans le Traité CE. Aussi, l'acquis communautaire yrelatif est-il très pauvre puisque depuis 1992 il ne compte qu'une seule directive quirègle la collecte des données statistiques pour le tourisme398. Il n'en demeure pasmoins que la CE essaie, sur la base de l'art. 235 du Traité CE, de développer une poli-tique communautaire en la matière. En janvier 1993 a été lancé un plan d'action com-munautaire en faveur du tourisme pour une période de trois ans399. Ce plan, ouvertaux pays participant à l'EEE et doté d'un budget annuel de 9 millions d'euros, vise àaméliorer les connaissances entre les Etats membres dans le domaine du tourisme et àidentifier au travers d'études et de projets pilotes les meilleures pratiques dans le do-maine. Différentes actions ont été menées touchant à des domaines très variés tels queles touristes en tant que consommateurs, le tourisme et l'environnement, le tourismeculturel et la formation dans le secteur du tourisme. En 1995 la Commission a publiéun Livre vert sur le rôle de la Communauté dans le domaine du tourisme. Suite à cettepublication dans laquelle il est recommandé de renforcer les compétences commu-nautaires et aux résultats de l'évaluation du plan d'action communautaire (1993 à1996), la Commission a proposé de lancer le programme "PHILOXENIA", premierprogramme pluriannuel en faveur du tourisme européen (1997 à 2000). Jusqu'à pré-sent aucun consensus n'a pu être trouvé quant à la teneur de ce programme dont lelancement même est fort controversée par certains Etats membres. Le Traité d'Ams-terdam quant à lui ne modifiera en rien l'absence de compétences communautaires.

En raison de ce qui précède, notre politique en la matière ne serait modifié ni au plancantonal ni au plan fédéral en cas d'adhésion à l'UE ou de participation à l'EEE.

Protection des animaux

Les prescriptions communautaires en matière de protection des animaux fixent desexigences minimales pour la détention des animaux de rente400, le transport d'ani-maux, l'abattage et la protection des animaux d'expérience401. Un protocole au Traité

398 Directive 95/57/CE du 23 novembre 1995 concernant la collecte d’informations statistiques dans le domaine

du tourisme, JO n° L 291 du 6 décembre 1995, p. 32.399 Décision 92/421/CEE du 13 juillet 1992 concernant un plan d'action communautaire en faveur du tourisme,

JO n° L 231 du 13 août 1992, p. 26.400 Directive 98/58/CE du 20 juillet 1998 concernant la protection des animaux dans les élevages, JO n° L 221

du 8 août 1998, p. 23.401 Voir par ex. la directive 91/628/CEE du 19 novembre 1991 relative à la protection des animaux en cours de

transport, JO no L 340 du 11 décembre 1991, p. 17.

Page 206: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 204 - Chapitre 2

d'Amsterdam sur la protection et le bien-être des animaux fixe de manière contrai-gnante que la Communauté et les Etats membres doivent pleinement tenir compte dubien-être de l'animal lorsqu'ils définissent ou exécutent les politiques communautairesdans les domaines de l'agriculture, du transport, du marché intérieur et de la recher-che. Ils doivent tenir compte à cet égard des prescriptions légales et administrativesainsi que des usages des Etats membres. Le Conseil adopte en règle générale les nou-velles réglementations à la majorité qualifiée.

Les principes éthiques sur lesquels se fonde la loi suisse sur la protection des ani-maux402 se fondent sur le principe selon lequel la vie humaine a une valeur plus éle-vée que celle de l'animal. La protection des animaux vise à protéger les animaux con-tre les douleurs, les souffrances, les dommages et les états d'anxiété que peuvent leurcauser le comportement humain. L'ordonnance sur la protection des animaux met enœuvre ces exigences élevées. Si les conditions qui en découlent sont respectées, ledroit d'exploiter et de tuer les animaux n'est pas remis en cause.

Les cinq conventions du Conseil de l'Europe en matière de protection des animauxconcernant le transport international, les élevages, les animaux d'abattage, les ani-maux utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, ainsi que lesanimaux de compagnie, ont été ratifiées par la Suisse et, dans chacun des cas, par lamajorité ou la totalité des Etats membres403. Dans ce domaine, les prescriptions suis-ses et celles de l'UE ou de ses Etats membres se fondent sur les mêmes principes.

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse pourrait maintenir ses prescriptions souvent plussévères. Les prescriptions de protection des animaux de la CE sont des exigences mi-nimales et les Etats membres peuvent édicter des mesures plus strictes. Pour toutes lesdirectives en vigueur dans l'UE en matière de protection des animaux, la Suisse aédicté des prescriptions. Il ne devrait pas y avoir de conséquences pour les cantons.La Suisse ne devrait pas avoir non plus de frais supplémentaires. Il en irait de mêmeen cas de participation à l'EEE.

23 Relations extérieures de l'Union européenne

L'UE entretient des relations avec la quasi-totalité des Etats tiers et est présente dansde nombreuses organisations internationales, tantôt en tant que membre elle-mêmeaux côtés des Etats membres (OMC, FAO, BERD), tantôt avec un statut d'observateuraux côtés des Etats membres (OMS, UIT, CNUCED, Commission sur le développe-

402 Loi fédérale du 9 mars 1978 sur la protection des animaux, RS 455.403 Convention européenne du 13 décembre 1968 sur la protection des animaux en transport international, RS

0.452, et son protocole additionnel du 10 mai 1979, RS 0.452.1; convention européenne du 10 mars 1976sur la protection des animaux dans les élevages, RS 0.454; convention européenne du 10 mai 1979 sur laprotection des animaux d'abattage, RS 0.458; convention européenne du 18 mars 1986 sur la protection desanimaux vertébrés utilisés à des fins expérimentales ou à d'autres fins scientifiques, RS 0.457, conventioneuropéenne du 13 novembre 1987 pour la protection des animaux de compagnie, RS 0.456.

Page 207: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 205 - Chapitre 2

ment durable), tantôt seule en tant que membre à part entière (Organisation interna-tionale sur le sucre, Conseil oléicole international, Organisation des pêches de l'At-lantique du Nord-Ouest)404. Comme le démontre le présent chapitre, ces relations at-teignent des degrés d'intensité variables et empruntent des canaux divers.

La politique étrangère et de sécurité commune (PESC) forme depuis l'entrée en vi-gueur du Traité de Maastricht le deuxième pilier de l'UE (voir ch. 231). Dans le do-maine de la politique économique extérieure, la CE a - pour ainsi dire en complémentau marché intérieur vis-à-vis de l'extérieur - un instrument puissant à disposition, aumoins pour ce qui est de la circulation des marchandises avec les Etats tiers, à savoirla politique commerciale commune (voir ch. 232). Dans le contexte des relations exté-rieures de l'UE, il faut également souligner le processus d'élargissement de l'UE versl'Europe centrale et orientale lancé en avril 1998 (voir ch. 233). Sur la scène interna-tionale, l’UE est en outre active dans d’autres domaines (voir ch. 234).

231 Politique étrangère et de sécurité commune

A Politique de l’UE

La "coopération politique extérieure" entre gouvernements des Etats membres, miseen place sous forme de coopération intergouvernementale informelle en 1970, a pourla première fois été mentionnée dans l'Acte unique européen de 1987. Le Traité deMaastricht a ensuite institué la PESC dans sa forme actuelle, lui a fixé des objectifs etdonné des instruments, et y a inclus les questions relatives à la définition à termed'une politique de défense commune. Le Traité d'Amsterdam405 complétera l'instru-mentation à disposition de la PESC en y ajoutant une part supplémentaire de décisionsà la majorité qualifiée; il confirmera et précisera les compétences de l'UE en matièrede politique de sécurité et conférera au Conseil européen la compétence de décider àl'unanimité d'une défense commune.

Le Traité de Maastricht fixe à la PESC des objectifs qui sont ceux de la politiqueétrangère d'un Etat classique: sauvegarde des valeurs communes de l'Union, de sesintérêts fondamentaux et de son indépendance, renforcement de sa sécurité et de cellede ses Etats membres, soutien à la paix et renforcement de la sécurité internationale,promotion de la coopération internationale, mais aussi développement et renforce-ment de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que respect des droits de l'homme. LeTraité d'Amsterdam retranchera de cette énumération la sécurité des Etats membres,comme pour mieux souligner l'objectif de sécurité commune.

Deux instruments sont à disposition de la PESC: la "position commune" qui, une foisdéfinie, à l'unanimité, par le Conseil de l'UE, doit être respectée par les Etats membresdans le cadre de leurs politiques nationales et l'"action commune", également adoptéeà l'unanimité, qui met des moyens précis au service d'objectifs généraux et particuliers 404 L'UE n'ayant pas la personnalité juridique, seules la CE, la CECA ou l'Euratom peuvent conclure des ac-

cords internationaux ou être membres d'organisations internationales.405 Voir ch. 311.03.4.

Page 208: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 206 - Chapitre 2

(pour 1998, le budget communautaire comprenait une réserve de 40 millions d'eurosdestinée à financer des actions communes406). Le Traité d'Amsterdam ajoutera la"stratégie commune" qui, définie par le Conseil européen à l'unanimité, fixera les ob-jectifs et les grandes lignes de la conduite des relations avec un pays ou sur un thèmedonné pour une durée déterminée. Outre ces instruments, la PESC s'exprime égale-ment par le biais de nombreuses déclarations qui font connaître la position de l'UE surune gamme étendue de questions et d'événements internationaux.

Les décisions relevant de la PESC se fondent sur l'assentiment unanime des Etatsmembres. Avec le Traité d'Amsterdam, la majorité qualifiée sera la règle pour toutedécision prise dans le cadre d'une stratégie commune, ainsi que pour toute décision àprendre en application d'une autre obtenue à l'unanimité. Une ou des abstentionsn'empêcheront plus l'unanimité (abstention constructive407). Un veto pour des raisonsnationales importantes sera cependant toujours possible.

Depuis 1993, l'UE a arrêté un nombre important de positions communes qui ont porténotamment sur les objectifs et priorités de l'UE à l'égard de certains pays (par ex.: Af-ghanistan, Cuba, Rwanda, Burundi), sur des objectifs de négociation en matière decontrôle multilatéral des armements, sur des mesures restrictives non économiques ousur des sanctions économiques (Birmanie, Nigéria, Libye, Soudan, ex-Yougoslavie).Les actions communes ont été déployées sur des terrains divers, comme l'administra-tion de la ville de Mostar en Bosnie-Herzégovine, le soutien au processus de transi-tion démocratique en Afrique du Sud, le contrôle des exportations de biens à doubleusage ou la suppression des mines terrestres antipersonnel.

Malgré ses actions, la politique étrangère de l'Union européenne est jusqu'ici restéed'une efficacité limitée. En dépit de tous les efforts de convergence, elle reste toujoursfortement dépendante des décisions nationales. La politique de l'Union à l'égard de laYougoslavie en est un exemple. Dans quelques cas toutefois, des succès ont été obte-nus. Mais les actions entreprises jusqu'ici par l'Union en matière de politique étran-gère ne correspondent que dans une mesure limitée à son poids politique et économi-que. La volonté d'exercer une politique étrangère commune s'affirme lorsque les"mesures" qu'elle requière présentent une dimension économique. Même dans ces cas,l'efficacité et le succès ne sont cependant aucunement garantis, comme l'ont montréles sanctions prises suite à la crise au Kosovo. La convergence des quinze Etats mem-bres au sein des organisations internationales revêt une plus grande importance. Sil'Union réussit à arrêter une position uniforme et à l'appliquer, elle acquiert un grandpoids; cette circonstance, peut avoir une importance considérable lorsqu'il s'agit d'oc-cuper des postes internationaux importants. La conduite d'une politique étrangère

406 En raison de la transformation le 1er janvier 1999 de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion

1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".407 Nouvel art. J.13 du Traité UE: "tout membre du Conseil qui s'abstient lors d'un vote peut (...) assortir son

abstention d'une déclaration formelle. Dans ce cas, il n'est pas tenu d'appliquer la décision, mais il accepteque la décision engage l'Union. Dans un esprit de solidarité mutuelle, l'Etat membre concerné s'abstient detoute action susceptible d'entrer en conflit avec l'action de l'Union fondée sur cette décision ou d'y faireobstacle et les autres Etats membres respectent sa position (...)".

Page 209: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 207 - Chapitre 2

commune, aux objectifs clairs, et la volonté d'agir de façon déterminée à Quinze de-mandera encore des années d'efforts. Aujourd'hui, on peut constater que la plus im-portante action de l'Union en matière de politique étrangère au cours des années 90 aété, et est encore, la stratégie coûteuse et énergiquement entreprise, de rapprochementdes pays d'Europe centrale et orientale. Ainsi, l'UE, acceptant de payer un prixénorme, accomplit une tâche essentielle à la consolidation de l'unité de l'Europe, etpartant à la sécurité du continent.

L'avènement d'une politique européenne de sécurité au sens étroit du terme n'a pasnon plus pu être décelée jusqu'à présent. La possibilité explicitement réservée à l'UEde faire appel à l'Union de l'Europe Occidentale (UEO), pour mettre en oeuvre sesdécisions qui ont des implications de défense, n'a pas encore été exploitée dans dessituations opérationnelles. Avec le Traité d'Amsterdam, l'UE aura la compétence dedécider à l'unanimité de missions de soutien à la paix. Elle ne recevra cependant pasde bras militaire et devra continuer de transmettre ses demandes à l'UEO. Le proces-sus d'intégration de l'UEO dans l'UE pourra être engagé ultérieurement à la suite d'unedécision prise à l'unanimité, par le Conseil européen, non sans décision des Etatsmembres "conformément à leurs exigences constitutionnelles respectives408".

Dans le cadre de la PESC, l'UE est incarnée à l'extérieur par la présidence assistée parles représentants des Etats des présidences précédente et prochaine (Troïka). LaCommission y est associée. Avec le Traité d'Amsterdam, la composition de la Troïkasera modifiée: elle comprendra en lieu et place de la précédente présidence un HautReprésentant pour la PESC (Secrétaire général du Conseil), assisté par une nouvelle"unité de planification politique et d'alerte rapide" composée d'une vingtaine de di-plomates des Etats membres; la Commission et le secrétariat général de l'UEO y sontégalement représentés.

B Politique suisse

Les objectifs, les instruments, ainsi que les priorités de la politique extérieure suisseont été décrits en détail dans le rapport du 29 novembre 1993 sur la politique exté-rieure de la Suisse dans les années 90409. Les cinq objectifs de la politique extérieuresuisse (maintien et promotion de la sécurité et de la paix, engagement en faveur desdroits de l'homme, de la démocratie et des principes de l'Etat de droit, accroissementde la prospérité commune, promotion de la cohésion sociale, préservation du milieunaturel) sont comparables à ceux de l'UE.

408 Voir nouvel art. J 7 Traité UE. L'UEO est une organisation régionale de défense, juridiquement distincte de

l'UE, et dont la composition est différente. Selon le Traité de Maastricht, elle "fait partie intégrante du dé-veloppement de l'UE". Ne peuvent en devenir membres à part entière que les Etats membres de l'UE quisont aussi membres de l'OTAN. Les membres de l'UE non-membres de l'OTAN ont droit à un statut d'ob-servateur qui ne leur fournit pas de garantie de sécurité.

409 FF 1994 I 150.

Page 210: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 208 - Chapitre 2

C Relations contractuelles existantes

La Suisse ne dispose d'aucune relation formelle avec l'UE en matière de politiqueétrangère et de sécurité. Depuis 1993, elle a établi avec les Etats membres exerçant laprésidence la tradition de visites d'information de délégations suisses, à différents ni-veaux, auprès des officiels en charge de la PESC. Ces rencontres offrent la possibilitéà des représentants du DFAE d'être informés des travaux menés par l'UE dans les dif-férentes parties du monde au titre de la PESC, mais aussi de renseigner leurs collè-gues sur les actions engagées dans ces mêmes régions par les autorités suisses. Ellesportent aussi sur d'autres thèmes tels que les activités de l'OSCE, le partenariat pour lapaix ou la politique des droits de l'homme. Ces échanges de vues n'ont toutefois pas lecaractère d'un dialogue régulier et ne doivent pas être confondues avec ce que l'UEoffre à d'autres partenaires (voir ch. 234.01), car il s'agit de contacts renouvelablesselon le bon vouloir des présidences, qui n'engagent que ces dernières.

D Répercussions sur la Suisse

Le rapport du 18 mai 1992 sur la question d'une adhésion de la Suisse à la CE a déjàtraité des effets de l'adhésion sur la politique extérieure de la Suisse et sur la neutrali-té410; le rapport sur la politique extérieure dans les années 90 énumère les bénéficesd'une adhésion pour la défense des intérêts de la Suisse à l'étranger411; la question dela compatibilité de la neutralité avec l'appartenance à l'UE a été examinée dans le rap-port sur la neutralité du 29 novembre 1993412. La participation de l'Autriche, de laSuède et de la Finlande aux processus de décision de l'UE permet de confirmer l'ap-préciation portée dans ces trois documents: si un Etat désire adhérer à l'UE, il lui in-combe de procéder aux adaptations nécessaires de sa politique étrangère, mais le sta-tut de neutralité n'y constitue pas un obstacle, pour autant que le candidat soit à mêmed'accepter tous les objectifs de l'UE.

L'UE ne disposant d'aucun moyen d'ordre militaire, ni les actions et mesures décidéesdepuis 1993 en vertu de la PESC, ni les mesures communautaires prises consécuti-vement n'auraient constitué des violations des obligations de neutralité en temps deguerre pour une Suisse membre de l'UE. Lorsque le Conseil a considéré les réponsesà donner à la dégradation de la situation au Kosovo au printemps 1998 et encouragéles organisations internationales de sécurité à poursuivre leurs efforts en maintenanttoutes les options, il a précisé que ces options incluaient celles qui nécessiteraient uneautorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies, car les débats à tous niveauxavaient montré que les Etats membres n'étaient pas tous prêts à envisager une inter-vention de l'OTAN sans autorisation du Conseil de sécurité. En cette situation, lesnouveaux Etats membres se réclamant d'une tradition de neutralité ont manifesté net-tement leur souci de ne pas voir l'UE entraînée vers un cautionnement d'actions mili-taires unilatérales. La Suisse, membre de l'UE, ne se comporterait pas différemment.

410 FF 1992 III 1125.411 FF 1994 I 150.412 FF 1994 I 200.

Page 211: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 209 - Chapitre 2

En matière de mesures économiques restrictives, l'Union a affirmé sa capacité à agirmême sans l'aval du Conseil de sécurité. Dans sa réaction à la dégradation de la situa-tion au Kosovo dès le printemps 1998, l'UE a mis en place des mesures contre la Ré-publique fédérale de Yougoslavie sur la seule recommandation du groupe de con-tact413. Poursuivant les mêmes objectifs que l'UE, la Suisse a pris des mesures dumême type (entre autres interdiction de livrer des marchandises pouvant être utiliséesà des fins de répression interne ou pour des actions terroristes, ainsi que le blocagedes avoirs des gouvernements de la République yougoslave et de la République deSerbie) en faisant valoir son intérêt propre et l'impératif de solidarité européenne. Laparticipation à ces mesures est l’expression du chevauchement des intérêts de politi-que de sécurité et de politique étrangère, ainsi que de l’étroite interdépendance éco-nomique de la Suisse avec l’UE.

Dans le domaine du contrôle des exportations de matériel de guerre, l’UE a adopté le8 juin 1998 un code de conduite sur l’exportation des armes. Les critèresd’autorisation qu’il contient recouvrent largement les critères de l’art. 5 del’ordonnance sur le matériel de guerre414. On ne peut toutefois pas parler d’une har-monisation des critères d’exportation, parce qu'en matière d’exportation de matérielde guerre, les intérêts nationaux relevant de la politique étrangère et de la politique desécurité revêtent un poids important.

En cas d’adhésion, la Suisse profiterait en particulier d’un échange d’informationsavec les Etats de l’UE et de son inclusion dans le processus intracommunautaire deprises de décision. Le contrôle des exportations n'est efficace que s'il est convenu etharmonisé sur le plan international.

Dans le domaine des biens militaires spécifiques faisant l'objet d'un contrôle au titrede la loi sur le contrôle des biens (le matériel militaire à l’exception des armes, desmunitions et des explosifs, ainsi que des biens d’équipement de combat et pour laconduite du combat) des autorisations peuvent être refusées. L’embargo militaire del’UE à l’encontre du Myanmar, du Nigéria et du Soudan et des Etats de l’ex-République fédérale socialiste de Yougoslavie (République fédérale de Yougoslavie,Bosnie-Herzégovine et Croatie), ayant été décrété, la Suisse peut refuser l’exportationdans ces pays de biens militaires spécifiques.

Ce qui vaut pour le matériel de guerre et les biens militaires spécifiques, est d’autantplus valable pour les biens à double usage. Dans ce domaine, la Suisse s’efforced’harmoniser aussi largement que possible ses contrôles à l’exportation avec ceux del’UE 415. Ainsi, elle a par exemple repris, dans la nouvelle loi sur le contrôle des biens,

413 Sont membres du groupe de contact: les Etats-Unis, la Fédération de Russie ainsi que quatre Etats membres

de l’UE (Allemagne, France, Grande-Bretagne et Italie).414 Ordonnance du 25 février 1998 sur le matériel de guerre (ordonnance sur le matériel de guerre, OMG), RS

514.511.415 Décision 94/942/PESC du 19 décembre 1994 concernant le contrôle des exportations de biens à double

usage, JO n° L 367 du 31 décembre 1994, p. 8, modifiée en dernier lieu par la décision 232/98/PESC du 16mars 1998, JO n° L 92 du 25 mars 1998, p. 1.

Page 212: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 210 - Chapitre 2

entrée en vigueur le 1er octobre 1997416, la structure des listes de biens de l’UE. Lescritères d’autorisation dans ce domaine s’adaptent aux dispositions des différents ré-gimes de non-prolifération auxquels les Etats de l’UE sans exception sont égalementmembres.

La participation à l'EEE offrirait la possibilité à la Suisse de s'aligner sur les prati-ques introduites en matière de politique étrangère commune: dialogue politique surdes thèmes déterminés chaque semestre d'un commun accord et invitation de l'UE à serallier à ses déclarations et positions communes.

Le maintien de la situation actuelle, comme l'entrée en vigueur des accords secto-riels, sont importants à un double titre. D’une part, la Suisse n'étant pas membre del'UE conserve une certaine marge de manoeuvre en matière de politique étrangère.Mais elle laisse ainsi échapper la possibilité de se servir de la plate-forme de politiqueétrangère que construit l’Union européenne et d'y faire valoir ses intérêts. Cela estregrettable dans la mesure où la Suisse et l’UE ont à relever des défis identiques ousimilaires en matière de politique étrangère - que l’on pense par ex. à l’engagement àl’égard des droits de l’homme. D’autre part, les questions qui se posent en politiqueétrangère exigent souvent une réponse au niveau multi- ou supranational qui, pour laSuisse, en raison de la communauté des valeurs et des objectifs visés, devrait êtredonnée dans bien des cas dans le cadre de l'Union. La relative faiblesse de la politiqueétrangère de l’UE ne nécessite pas aujourd’hui impérativement de la part de la Suisseun alignement systématique sur la politique de celle-ci. Mais la question se pose lors-que l’Union européenne prend des mesures dont le succès dépend d’un soutien aussilarge que possible et de la participation des autres Etats européens (voir le cas dessanctions). Dans de tels cas, il faut s’attendre à ce que l'Union exerce une pressiongrandissante sur la Suisse pour l'obliger à s'aligner.

232 Politique commerciale commune

A Acquis communautaire

L’élément central de la politique commerciale extérieure de la CE est sa politiquecommerciale commune. L’art. 110 du Traité CE contient l’engagement de la CE demener une politique commerciale libérale à l’égard des pays tiers: elle entend contri-buer en tant que partenaire commercial à un développement harmonieux du com-merce mondial. L’art. 113 du Traité CE doit permettre à la CE de trouver un règle-ment uniforme des relations commerciales extérieures. La politique commercialecommune trouve sa pleine expression au sein de l’Organisation Mondiale du Com-merce (OMC), dont la CE et les Etats membres sont membres.

La politique commerciale commune concerne en premier lieu le commerce des mar-chandises avec les pays tiers. Selon la jurisprudence de la Cour de justice des CE, elle

416 Loi fédérale du 13 décembre 1996 sur le contrôle des biens utilisables à des fins civiles et militaires et des

biens militaires spécifiques (loi sur le contrôle des biens, LCB), SR 946.202.

Page 213: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 211 - Chapitre 2

s’étend également à certains aspects du secteur des services (par ex. fourniture deservices transfrontières sans transfert de personnes physiques)417. Cette compétenceexclusive de la CE de gérer la politique commerciale peut s’exprimer de manière au-tonome ou contractuelle. Elle concerne en particulier les modifications tarifaires, laconclusion d’accords douaniers et commerciaux, l’uniformisation des mesures de li-béralisation, la politique d’exportation et les mesures de défense commerciale. Lesembargos à l’encontre de pays tiers dans des cas d’urgence et pour des raisons politi-ques peuvent être décidés depuis l’entrée en vigueur du Traité de Maastricht sur labase des art. 73g (embargos en matière de circulation des capitaux et des paiements)et 228a du Traité CE (embargo en matière de circulation des marchandises). Ces me-sures ne peuvent néanmoins être prises conformément à une décision unanime dans lecadre de la politique étrangère et de sécurité commune (voir ch. 231).

Le Conseil des ministres gère la politique commerciale autonome selon l’art. 113, al.2 du Traité CE. Il adopte pour ce faire le droit secondaire nécessaire, principalementdes règlements, qui sont directement applicables dans les Etats membres. Le Conseildes ministres statue à la majorité qualifiée en se fondant sur des propositions de poli-tique commerciale de la Commission. Si le Conseil entend se départir de la proposi-tion de la Commission, l’unanimité est requise. La Commission est en partie chargéepar le Conseil d’adopter des dispositions d’application et de prendre des décisionsdans le cadre de la gestion courante de la politique commerciale.

La présentation ci-dessous se limite à mentionner les domaines de la politique com-merciale autonome de la CE qui se distinguent dans des cas particuliers de celle de laSuisse:

- Depuis 1995, il n’existe en principe plus de restrictions quantitatives àl’importation dans la CE. Une seule exception subsiste à l’égard des importationsde certains produits textiles de pays en développement ou en transition (en applica-tion de l’Accord de l’OMC sur les textiles et les vêtements418 qui viendra àéchéance en 2004, ces restrictions seront supprimées à partir du 1er janvier2005)419.

- Il n’existe pas non plus de restrictions quantitatives à l’exportation420. Des limita-tions à l’exportation sont uniquement possibles sur la base de l’art. 36 du Traité CE(clause dite d’ordre public), ainsi qu'en cas de perturbation de l’approvisionnementen pétrole et en gaz. Des restrictions spécifiques à l’exportation existent pour lesdéchets et les objets d’art. Un contrôle à l’exportation spécifique s’applique auxmarchandises à double usage (Dual-use).

417 CJCE, Avis 1/94 du 15 novembre 1994 (OMC), Rec. 1994, p. I-5267 e t ss, 5401.418 Accord du 15 avril 1994 instituant l’Organisation Mondiale du Commerce, RS 0.632.20419 En outre, une restriction quantitative des importations d’automobiles du Japon est maintenue conformément

à un "accord volontaire de limitation des exportations".420 Dans le cadre de la crise ESB, ce principe a été remis en cause, l’UE ayant adopté des interdictions

d’exportation pour la viande de boeuf du Royaume-Uni et du Portugal; les mesures concernant le Royaume-Uni doivent être allégées.

Page 214: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 212 - Chapitre 2

- Le droit communautaire prévoit - dans le cadre des accords de l’OMC sur les me-sures anti-dumping, ainsi que sur les subventions et les mesures compensatoires 421

- des mesures de protection sous forme de droits compensatoires contre les impor-tations à prix de dumping et contre les importations subventionnées.

La politique commerciale conventionnelle de la CE est fondée sur l’art. 113, alinéa 3du Traité CE. Les accords commerciaux avec des pays tiers, comme la Suisse, ouavec des organisations internationales sont négociés par la Commission sur la based’un mandat du Conseil. La Commission est soutenue par le comité pour les négocia-tions d’accords douaniers et commerciaux, institué par le Conseil et au sein duquelsont représentés tous les Etats membres de l’UE. En outre, il est d'usage de consulterle Parlement européen. Les accords internationaux de la CE sont adoptés par le Con-seil à la majorité qualifiée. Les accords de la CE ne relevant pas du domaine purementcommercial ne peuvent pas être adoptés sur la seule base de l’art. 113 du Traité CE.Pour la conclusion des accords de coopération et de transfert de technologie, des ac-cords d’aide au développement et d’aide structurelle ou des accords de promotion desinvestissements notamment, il a jusqu'ici été fait usage de l’art. 235 du Traité CE quiprévoit la décision unanime du Conseil. Si ces accords atteignent l'intensité d’une as-sociation, la base légale est alors l’art. 238 du Traité CE. Dans de nombreux cas, laCE ne dispose pas d’une compétence exclusive pour la conclusion de tels accords; lesEtats membres sont alors également, aux côtés de l’UE, parties contractantes et rati-fient les accords ("accords mixtes").

La Communauté a conclu un nombre important d’accords avec des pays individuelsou des groupes de pays, sous forme d’accords commerciaux, d’association ou de coo-pération422.

421 Accord du 15 avril 1994 instituant l’Organisation Mondiale du Commerce, (RS 0.632.20), RO 1995 2272 et

2360.422 Les accords suivants sont mentionnés à titre d’exemple:

Accords commerciaux (basés sur l’art. 113 du Traité CE):

- Accords de libre-échange avec les pays de l’AELE (par ex. accord avec la Suisse du 22 juillet 1972);

- Accords sur le libre-échange et les questions commerciales du 18 juillet 1994 avec l’Estonie, la Lettonie et

la Lituanie.

Accords commerciaux et de coopération (basés sur les art. 113 et 235 du Traité CE)

- Accord-cadre du 26 avril 1991 sur la coopération avec le Mexique;

- Accord de coopération du 5 avril 1993 avec la Slovénie et divers accords de coopération avec des pays de

la CEI.

Accords d’association (basés sur l’art. 238 du Traité CE, en majorité sous forme d’"accords mixtes"):

- Accords européens avec les pays d’Europe centrale et de l’Est et du Sud de l'Europe;

- Accord EEE du 2 mai 1992 avec les pays de l’AELE, l’Islande, le Liechtenstein et la Norvège;

- Accords méditerranéens avec certains pays du Maghreb et du Machrek;

- 4ème accord ACP-CE, signé le 15 décembre 1989 (Accord de Lomé) regroupant 71 pays d'Afrique, desCaraïbes et du Pacifique (pays ACP);

- Accords avec d’autres pays en développement ou groupes de pays (Pacte andin, pays d’Amérique centrale

et Etats du Golfe Persique);

- Accords avec certains pays en transition (par ex. Brésil).

Page 215: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 213 - Chapitre 2

Suite à l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam, le Conseil des ministres peut, àl’unanimité, donner à la Commission la compétence de négocier dans les secteurs desservices et de la propriété intellectuelle, dans la mesure où ces secteurs ne font pasdéjà partie de la politique commerciale commune (nouvel al. 5 de l’art. 113 du TraitéCE).

B Politique suisse

La politique économique extérieure de la Suisse sert à défendre les intérêts del’économie suisse à l’étranger. L’ordre économique suisse étant fondé sur les princi-pes de l’économie de marché, notre politique commerciale extérieure a la mêmeorientation. Cette dernière vise en premier lieu l’ouverture des marchés étrangers pournos produits, services et facteurs de production ou l’amélioration des conditionsd’accès à ces marchés (fonction offensive). A l'inverse, cette politique doit permettrede réagir adéquatement à des mesures de l’étranger ou lors de conditions exception-nelles régnant à l’étranger qui perturbent les échanges commerciaux (fonction défen-sive).

Comme le droit communautaire en matière de politique commerciale, le droit suisseen la matière se fonde en grande partie sur le droit conventionnel international. Cedernier englobe les règles de l’OMC régissant le commerce des biens et des services,la propriété intellectuelle et les marchés publics, ainsi que des conditions-cadres pourle libre-échange régional et le commerce bilatéral. Dans le domaine des accords préfé-rentiels, la Suisse a, avec ses partenaires de l’AELE, conclu de nombreux accords delibre-échange avec des pays tiers, parallèlement à ceux conclus par la Communauté423

De la sorte, un accès non discriminatoire doit être garanti aux opérateurs économiquessuisses sur les marchés des pays concernés. A cela viennent s’ajouter les mesureséconomiques autonomes qui régissent en premier lieu les relations avec l’étranger424.

Du point de vue constitutionnel, le droit économique extérieur se base sur la compé-tence générale attribuée par la constitution à la Confédération en matière de relationsextérieures, qui comprend la compétence de cette dernière de conclure des traités (art.8, cst.) et d'édicter des lois fédérales en relation avec les affaires extérieures. En outre,les articles douaniers (art. 28 et 29, cst.) forment la base implicite pour l’adoption demesures de politique commerciale extérieure (en dérogation à la liberté du commerceet de l’industrie: art. 31, cst.). Ces bases constitutionnelles sont déterminantes pour lesmesures de protection en matière de commerce extérieur425, le matériel de guerre426,

423 Les pays de l’AELE ont conclu à ce jour 13 accords de libre-échange: Estonie, Hongrie, Israël, Lettonie,

Lituanie, Maroc, OLP, Pologne, République tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie et Turquie.424 Voir en ce qui concerne les nouvelles orientations de la politique économique extérieure de la Suisse au vu

de la globalisation: rapport sur la politique économique extérieure 95/1+2 chiffre 1, FF 1996 I 668: en cequi concerne la coopération économique en Europe: rapport sur la politique économique extérieure 96/1+2chiffre 1, FF 1997 II 1.

425 Loi fédérale du 25 juin 1982 sur les mesures économiques extérieures (RS 946.201); loi fédérale du 9 octo-bre 1986 sur le tarif des douanes (LTaD), RS 632.10.

426 Loi fédérale du 13 décembre 1996 sur le matériel de guerre (loi sur le matériel de guerre, LFMG), RS514.51.

Page 216: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 214 - Chapitre 2

les mesures de non-prolifération427, ainsi que pour toutes les mesures de soutien éco-nomique de la Suisse en faveur de l'étranger (coopération au développement et sou-tien des pays d’Europe centrale et orientale). L’art. 102, ch. 8, cst. forme la baseconstitutionnelle pour les mesures autonomes d’embargo faisant suite à des sanctionséconomiques prises par la communauté internationale (par ex. l'ONU). La loi sur lesentraves techniques au commerce (LETC)428 se fonde également sur la compétenceimplicite de la Confédération en matière d’affaires étrangères (art. 8, cst.), ainsi quesur l’art. 31bis, al. 1 et 2, cst. (aspects de police économique de la mise dans le com-merce); la LETC est également un instrument de la politique économique extérieure,dans la mesure où elle vise l’élimination systématique, à l’importation et àl’exportation, des entraves techniques au commerce.

La puissance économique extérieure de l’économie suisse dépend en grande partie desconditions-cadres économiques et sociales de la place économique suisse. La concur-rence entre les places économiques a également lieu ente les Etats membres de l’UE,bien qu’il existe des règles de base en matière économique et sociale qui sont appli-quées de manière uniforme dans l’ensemble des Etats membres de l’UE.

C Relations contractuelles existantes

Dans le domaine de la politique commerciale, la coopération avec la Communauté sebase notamment sur l’accord horloger de 1967429, l’accord de libre-échange avec laCEE430 et l’accord de 1972 avec les Etats membres de la Communauté européenne ducharbon et de l’acier431. A cela s’ajoutent divers accords dans le domaine du com-merce des marchandises (voir ch. 221.01), ainsi que des accords en dehors du com-merce des marchandises (voir les sous-chapitres y relatifs). La qualité de membre del’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) de la Suisse et de l’UE emportel’applicabilité réciproque des règles multilatérales conclues au sein de l’OMC et per-met une coopération sur un plan multilatéral. Ce principe s'applique également àd’autres organisations économiques auxquelles appartiennent la CE ou ses Etatsmembres et la Suisse (par ex. OCDE, Commission économique de l'ONU pourl’Europe).

Divers accords bilatéraux ont été conclus entre la Suisse et des Etats membres del’UE avant l’entrée en vigueur de l’Accord de libre-échange de 1972; ces accords rè-glent surtout des questions commerciales et d’établissement. Certains de ces accordsont entre-temps été adaptés à la nouvelle situation, ces accords n'étant plus applica-

427 Loi fédérale du 13 décembre 1996 sur le contrôle des biens utilisables à des fins civiles et militaires et des

biens militaires spécifiques (loi sur le contrôle de biens, LCB), RS 946.202.428 Loi fédérale du 6 octobre 1995 sur les entraves techniques au commerce (LETC) RS 946.51.429 Accord du 30 juin 1967 sur les produits horlogers, RS 0.632.290.13.430 Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et la Communauté économique européenne (Accord

de libre-échange), RS 0.632.401.431 Accord du 22 juillet 1972 entre la Confédération suisse et les Etats membres de la Communauté européenne

du charbon et de l'acier, RS 0.632.402.

Page 217: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 215 - Chapitre 2

bles aux domaines qui relèvent de la compétence de la Communauté (par ex. lesquestions commerciales)432.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l’UE, le territoire douanier suisse ferait partie du marché inté-rieur et de l’union douanière de l’UE (voir ch. 221.01); la Suisse devrait alors appli-quer l’acquis de la politique commerciale commune aux pays non-membres de l’UE.Elle pourrait participer à l’établissement et à l’adoption de la politique économiqueextérieure de la première puissance économique mondiale (part de 30% au commercemondial). La Suisse participerait dans le cadre de la politique commerciale communeà la définition des directives de négociation de la Commission et aurait un droit de co-décision au sein du Conseil des ministres en matière d’adoption des résultats des né-gociations. Les accords de la CE strictement commerciaux, plutôt rares, sont adoptésà la majorité qualifiée. Lors de la conclusion d'accords de la CE qui dépassent le cadrecommercial et qui requièrent l’accord de tous les Etats membres de l’UE ("accordsmixtes", actuellement les plus nombreux), l'influence de la Suisse dans la prise desdécisions s'accroîtrait considérablement. Cela s’appliquerait par exemple aux négo-ciations avec des pays tiers (par ex. pays d'Europe centrale et orientale, pays du bassinméditerranéen), dans les relations entre les grands blocs économiques (les Etats-Unis,le Japon), ainsi que dans le cadre des négociations multilatérales (OMC, OCDE).

L'orientation de la politique extérieure ne serait pas fondamentalement modifiée puis-que les objectifs sont les mêmes et que la politique libérale est fondée de part etd’autre sur le principe de libre-échange. De plus, aussi bien pour la Suisse que pourl’UE, l’ouverture des marchés reste essentiel même après l’établissement du marchéintérieur.

Les procédures appliquées dans le cadre des règles de l’OMC concernant la définitionde droits compensatoires en cas de dumping et d’autres mesures de protection de l’UEcontre des "pratiques commerciales inamicales" de pays tiers s'appliqueraient à laSuisse. En outre, l’économie suisse tirerait bénéfice de toutes les facilitations d’accèsaux marchés préférentiels que l’UE a obtenu et continuera d’obtenir grâce à sa puis-sance économique.

Pour les cantons, rien ne changerait dans le domaine de la politique économique exté-rieure, étant donné que cette dernière relève de la compétence de la Confédération(art. 8, cst.). La marge de manoeuvre des cantons dans le domaine central de la politi-que économique extérieure, par ex. à l’égard des questions relatives au commercetransfrontalier de marchandises et de services, est réduite (voir l’art. 9, cst.)433.

432 Par ex. l’échange de notes du 13 juin 1996 sur l’adaptation du Traité d’amitié, de commerce et d’établisse-

ment du 19 août 1875 avec les Pays-Bas, RS 0.142.116.361.433 Les cantons détiennent la compétence résiduelle de conclure des traités avec l’étranger sur des sujets rele-

vant de l’économie publique, des rapports de voisinage et de la police. Néanmoins, ces traités ne peuventrien contenir de contraire aux intérêts de la Confédération ou aux droits d’autres cantons.

Page 218: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 216 - Chapitre 2

Dans le domaine de la politique économique extérieure, l’adhésion à l’UE ne devraitpas comporter de coûts particuliers. La Suisse participerait, dans le cadre de sa contri-bution au budget communautaire (voir ch. 251), à l’assistance technique et financièreprévues par les accords de coopération de la Communauté avec des pays tiers et de-vrait contrôler ses aides bi- et multilatérales (voir ch. 324).

La participation à l’EEE ne modifierait pas fondamentalement la politique économi-que extérieure, la Suisse restant d’un point de vue juridique et formel autonome dansla définition et l’application de ses instruments de politique commerciale. Tel seraitégalement le cas dans l’hypothèse du maintien du la situation actuelle et aprèsl’entrée en vigueur des accords sectoriels. La Suisse continuerait à régler, seule ouavec les pays membres de l’AELE, ses relations économiques avec les pays tiers.Dans la plupart des cas, elle devrait néanmoins, parallèlement aux négociations préfé-rentielles de la Communauté avec des pays tiers, s’efforcer d’obtenir, pour nos opé-rateurs économiques, des conditions d’accès à ces marchés si possible équivalentes.

233 Elargissement de l’UE

A Politique de l’UE

A.1 Elargissement par étapes

L'UE a l'expérience des négociations d'élargissement. La Communauté économiqueeuropéenne a été fondée en 1957 par six Etats. Elle s'est élargie progressivement etcomprend actuellement quinze Etats membres. De manière générale chaque nouvelleétape a répondu à un changement des conditions-cadres de la politique européenne:ainsi, en 1972 l'acceptation de la Grande-Bretagne, du Danemark et de l'Irlande acoïncidé avec la conclusion d'accords de libre-échange avec les pays de l'AELE quine voulaient pas devenir membre de la CE. L'adhésion de la Grèce en 1981 a contri-bué grandement à la stabilité du continent. L'inclusion de l'Espagne et du Portugal en1986 a constitué la réponse de la Communauté aux changements politiques fonda-mentaux survenus dans ces deux pays (Révolution des oeillets au Portugal, fin du ré-gime franquiste en Espagne). Enfin, l'adhésion de l'Autriche, de la Suède et de laFinlande en 1995 n'a été possible qu'après la chute du Mur de Berlin et la fin de laguerre froide qui s’ensuivit: pour ces trois Etats neutres, l'Accord sur l'espace écono-mique européen, dont ils étaient devenus membres en 1993, ne leur suffisait plus pourpréserver leur autonomie politique et leur influence en Europe.

A.2 Raisons de l'actuel processus d'élargissement

Il y a quelques années encore, les Etats membres de l'UE n'étaient pas tous favorablesà un élargissement de l'Union à l'Europe de l'Est. On craignait un trop fort déplace-ment du centre de gravité de l'Union vers le nord et le centre de l'Europe avec l'Alle-magne réunifiée comme point géographique central. En principe, tous les Etats mem-bres ont un intérêt politique et économique à l'inclusion des pays d'Europe centrale etorientale dans l'UE: la stabilisation politique et l'affermissement économique de l'Eu-

Page 219: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 217 - Chapitre 2

rope de l'Est devraient réduire le flux migratoire vers l'Ouest, agrandir substantielle-ment le marché intérieur et, en même temps, permettre une coordination à l'échelleeuropéenne des efforts visant à renforcer la sécurité intérieure. En outre, des payscomme la France, l'Espagne, le Portugal et l'Italie sont également intéressés à cequ'une politique méditerranéenne active soit menée qui, moyennant une coopérationéconomique renforcée, contribue à endiguer l'immigration provenant d'Afrique duNord. C'est pourquoi, les Etats membres de l'UE mentionnés n'ont consenti à l'ouver-ture de négociations d'adhésion avec les pays d'Europe centrale et orientale qu'à con-dition que l'UE s'élargisse également en direction du sud (Chypre, éventuellementMalte)434.

A.3 Phase préparatoire à l’élargissement

La stratégie de l'UE, qui consiste à amener progressivement les nombreux candi-dats435 au stade de l'adhésion ("stratégie de pré-adhésion") repose sur trois piliers: lesaccords européens, le dialogue structuré et l'aide financière sous la forme du pro-gramme PHARE.

Des accords européens ont jusqu'ici été conclus avec dix pays d'Europe centrale etorientale. Les caractéristiques des accords résident dans une ouverture asymétriquedes marchés (afin d'ouvrir des perspectives aux économies moins développées) etdans un programme d'adaptation législative au droit communautaire dans les domai-nes politiques les plus variés436. Les accords européens ont ainsi contribué à ce queles pays d'Europe de l'Est parviennent à une réorientation unique en son genre de leurordre social et de leurs relations économiques en un délai extrêmement court437.

Le dialogue structuré entre l'UE et chaque candidat à l'adhésion comprend de multi-ples rencontres bi- et multilatérales entre l'UE et le candidat dans le cadre de conseilset de comités d'association, au cours desquelles sont discutées des questions écono-miques, politiques et culturelles.

434 L'élargissement vers le Sud est cependant mis en question: Malte a gelé sa demande d'adhésion après un

changement de gouvernement en 1996 et l'a renouvelée suite à un nouveau changement de gouvernement en1998; les différends bilatéraux entre la Grèce et la Turquie concernant Chypre ont, en l'état actuel des con-naissances, retardé l'adhésion de Chypre.

435 Il s'agit des Etats suivants (ordonnés selon la date du dépôt de la demande d'adhésion): Turquie (14 avril1987); Chypre (3 juillet 1990); Malte (16 juillet 1990); Hongrie (31 mars 1993); Pologne (5 avril 1994);Roumanie (22 juin 1995); Slovaquie (27 juin 1995); Estonie (28 septembre 1995); Lettonie (13 octobre1995); Lituanie (11 décembre 1995); Bulgarie (16 décembre 1995); République tchèque (23 janvier 1996);Slovénie (10 juin 1996).

436 Les accords européens couvrent, notamment les domaines suivants: la libre circulation des personnes, ducapital, des services et des marchandises, la coopération industrielle, l'encouragement aux investissements,la suppression des entraves techniques aux échanges, la recherche et la formation, l'agriculture, l'énergie, lasécurité nucléaire, la protection de l'environnement, le transport, les télécommunications, les banques, le dé-veloppement régional, ainsi que la lutte contre le crime organisé et le trafic de drogues.

437 Aujourd'hui, 60% des exportations des pays correspondants vont vers l'espace communautaire.

Page 220: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 218 - Chapitre 2

Le programme PHARE438 est le plus important instrument de financement pour lesmesures mises en oeuvre dans le cadre de la stratégie de pré-adhésion. Il a pour butd'assister la réorganisation économique et d'affermir la démocratie dans les Etatspartenaires. L'UE met à disposition son savoir-faire sous forme de conseils profes-sionnels et politiques, ainsi que des possibilités de formation. Des cofinancementsavec d'autres institutions deviennent toujours plus importants. Les moyens mis enoeuvre sont impressionnants: fin 1996 l'ensemble des engagements pris dans le cadredu programme se sont élevés à 6,636 milliards d'euros. Les moyens mis à dispositionpar l'UE pour le programme se sont élevés pour la période 1990 à 1994 à 4,2 milliardsd'euros et ceux de la période 1995 à 1999 à 6,7 milliards d'euros439.

A.4 Phase d’élargissement

La phase préparatoire à l'élargissement a été achevée avec le Conseil européen deLuxembourg (12 et 13 décembre 1997). Le Conseil a convenu de la stratégie d'adhé-sion proprement dite qui englobe les instruments suivants:

Les accords européen continuent d'être valables, mais se superposent aux partena-riats d'adhésion particuliers et à une plate-forme d'adhésion unique. En outre, les ac-tuels instruments de financement sont soumis à un examen et devront à l'avenir mieuxaider le candidat à se préparer à l'adhésion.

- Les partenariats d'adhésion sont des déclarations d'intention réciproques, dans les-quelles l'UE et chaque candidat conviennent du processus d'adaptation législativeet de la négociation d'adhésion. Ainsi, dans un cadre commun, un programmed'adhésion est mis au point pour chaque candidat pour fixer les priorités quant à lareprise de l'acquis communautaire et indiquer les moyens financiers mis à disposi-tion à cet effet. En outre, les deux parties font connaître leurs exigences concernantles périodes transitoires jugées nécessaires.

- La plate-forme d'élargissement vise à réunir, à intervalles réguliers, les Etats aveclesquels des négociations ont été ouvertes ou qui préparent de telles négociations etles Etats membres de l'Union pour discuter ensemble de questions horizontales.

- L'aide financière est conditionnée, c'est-à-dire qu'elle est liée à la reprise graduelledu droit existant dans l'UE. Pour la période 2000 à 2006, l'Union prend en considé-ration les ordres de grandeur suivants (pour tous les candidats à l'adhésion): à côtédu programme PHARE (1,5 milliard d'euros à disposition par an) 500 millionsd'euros sont annuellement prévus pour l'agriculture et 1 milliard d'euros pour lesaides structurelles (en particulier dans les domaines du transport et de l'environne-ment).

438 Ce programme a originellement été conçu seulement pour la Pologne et la Hongrie ("Poland Hungary Aid

for the Reconstruction of the Economy", Phare) et a ensuite été étendu à tous les candidats à l'adhésion d'Eu-rope centrale et orientale.

439 En raison de la transformation le 1er janvier 1999 de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".

Page 221: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 219 - Chapitre 2

Le Conseil Affaires générales de l'UE (Conseil des ministres des Affaires étrangères)a décidé le 15 mars 1998 des principes, priorités, objectifs intermédiaires et condi-tions de chaque partenariat. La Commission a reçu le mandat d'établir un rapport an-nuel sur les progrès réalisés par chaque candidat440.

A.5 Choix des candidats à l’adhésion

S'appuyant sur les trois groupes de critères fixés lors du Sommet de Copenhague(1993)441, la Commission a proposé les candidats aux négociations d'adhésion auConseil européen de Luxembourg442. Il convient de souligner que les négociationsd'adhésion sont conçues comme un processus évolutif: si des candidats n'ayant pas étéinvités aux négociations d'adhésion font, dans le cadre des partenariats d'adhésion, degrands progrès dans l'adaptation à l'acquis communautaire et dans le processus detransformation économique, ils pourront être inclus dans les négociations. En mêmetemps, le processus ne garantit aux candidats avec lesquels des négociations sont encours aucune accession automatique à l'UE. Ils doivent prouver pendant les négocia-tions qu'ils poursuivent résolument le processus d'adaptation. Il s'agit en cela d'unprocessus qui permet, ou empêche chaque candidat d'atteindre l'objectif fixé.

Les négociations proprement dites avec Chypre, l’Estonie, la Hongrie, la Pologne, laRépublique tchèque et la Slovénie et la ont débuté le 31 mars 1998 (les quinze Etatsmembres de l'UE séparément avec chaque candidat). Les autres candidats de l'Europede l'Est (Bulgarie, Lettonie, Lituanie, Roumanie et Slovaquie) ont, conjointement aupremier groupe d'Etats, été inclus, le 30 mars 1998, dans le cadre des partenariatsd'adhésion, aux préparations intensifiées en vue des négociations d'adhésion. S'agis-sant de la Turquie, la Commission a proposé une "stratégie européenne" qui doit éga-lement conduire progressivement ce pays au stade de l'adhésion, mais sans lui offrirpour le moment la possibilité d'ouvrir des négociations d'adhésion. Malte constitue uncas particulier, dans la mesure où elle a gelé sa demande d'adhésion en 1996 et l'a re-nouvelée en 1998, après un nouveau changement de gouvernement. Le Conseil del'UE décidera prochainement d'une stratégie d'adhésion pour Malte.

440 L'aide financière de l'UE fera l'objet d'une décision au plus tôt au printemps 1999, quelques questions finan-

cières concernant la répartition entre les Etats membres devant encore être résolues au sein de l'UE dans lecadre de la discussion sur l'Agenda 2000 (voir ch. 253).

441 Les Chefs d'Etat et de gouvernement ont fixé à Copenhague les critères suivants que chaque candidat àl'adhésion doit remplir pour accéder à l'UE:

- Stabilité des institutions garantissant la démocratie, la primauté du droit, la défense des droits del'homme, de même que le respect et la protection des minorités.

- Economie de marché viable, ainsi que capacité à faire face à la pression concurrentielle et aux forces dumarché à l'intérieur de l'Union.

- Disposition et capacité du pays candidat à assumer les obligations croissantes résultant de l'appartenanceà l'UE et à souscrire aux objectifs de l'Union politique, économique et monétaire.

442 Il s'agit de Chypre, de l'Estonie, de la Hongrie, de la Pologne, de la République tchèque et de la Slovénie.

Page 222: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 220 - Chapitre 2

A.6 Conférence européenne

A côté de la plate-forme d'élargissement, il a également été créé en mars 1998 uneConférence européenne qui, dans un cadre multilatéral de consultations politiques,cherche à rassembler les quinze Etats membres de l'UE, les dix pays d'Europe centraleet orientale, Chypre et la Turquie443. L'UE a défini le cercle des participants de la ma-nière suivante: tous les Etats européens ayant vocation d'adhérer à l'UE ("vocationeuropéenne"), partageant ses objectifs internes et externes et respectant les principesdu droit international public. Des questions d'intérêt commun sont discutées au seinde la Conférence et approfondies par des groupes de travail. Actuellement, la luttecontre le crime organisé, la traite des êtres humains et le trafic de drogues ont la prio-rité.

La Conférence a été ouverte le 12 mars 1998 par les Chefs d'Etat et de gouvernementet doit par la suite se réunir une fois par année au niveau des Chefs d'Etat et de gou-vernement, ainsi qu'à celui des ministres des affaires étrangères. Lors de la phase pré-paratoire, la Suisse avait déjà manifesté son intérêt à pouvoir prendre part à la Confé-rence européenne afin d'atténuer son isolement institutionnel. Le Conseil européen deVienne des 12 et 13 décembre 1998 a formulé l'invitation y relative444, après que lesministres des affaires étrangères de l'UE se furent déclarés favorables à une partici-pation suisse lors de leur séance du 29 juin 1998. La Suisse a déjà pu participer le 6octobre 1998 à une réunion au niveau des ministres des affaires étrangères, notre paysayant été invité par la présidence autrichienne en tant que membre désigné.

B Répercussions sur la Suisse

Après le prochain élargissement, l'UE vouera son attention non seulement à sa conso-lidation interne, mais aussi à sa position sur la scène internationale. Dans un futurproche, elle représentera dans le monde, encore plus qu'aujourd'hui, les intérêts poli-tiques et économiques de l'ensemble de l'Europe. L’agenda communautaire des rela-tions extérieures englobera prioritairement des problèmes globaux: partenariat euro-méditerranéen, relations avec la Russie, l'Ukraine et d'autres Etats de la CEI, pland'action UE/Etats-Unis, structure des relations avec l'Asie et l'Amérique latine, nou-veau round mondial de négociations dans le cadre de l'OMC. Les relations avec lesrares Etats restant hors de l'UE auront alors une importance secondaire.

Pour la Suisse, la stabilité politique de l'Europe revêt une importance fondamentale.L'UE n'est pas seulement de loin le plus important partenaire économique, mais aussi,acquiert de façon croissante, un rôle décisif en matière de politique de sécurité et dansle domaine du droit. La position de la Suisse, en tant que petite économie ouverte,serait menacée si la paix et la croissance économique ne sont pas garanties dans tou-tes l'Europe. Même si le processus d'élargissement devait être retardé, la marge demanoeuvre de la Suisse ne s'élargirait ni avec l'UE, ni avec les candidats à l'adhésion,

443 Jusqu'ici la Turquie n'a pas accepté l'invitation parce que son adhésion n'est actuellement pas envisagée.444 La Suisse a été invitée à participer à la Conférence européenne en tant que "membre désigné".

Page 223: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 221 - Chapitre 2

car les Etats voulant adhérer sont, par les partenariats d'adhésion, déjà fortement liés àl'UE, de sorte que la Suisse ne peut pas négocier avec eux des règles économiques oupolitiques contraires à l'acquis communautaire.

234 Autres activités internationales

234.01 Relations avec les Etats tiers

A Politique de l’UE

Avec la globalisation croissante et de l'approfondissement de l'intégration, l'UE a ren-forcé son réseau de relations extérieures déjà dense. Auparavant, les relations exté-rieures, basées sur la politique commerciale commune, se limitaient surtout aux ques-tions économiques; depuis le tournant de 1989, et notamment depuis l'entrée en vi-gueur du Traité de Maastricht, l'UE applique une stratégie beaucoup plus ambitieusequi vise à resserrer les liens avec les pays tiers dans tous les domaines politiques enrenforçant substantiellement la coopération transfrontière. A l'intérêt de l'UE d'entre-tenir des liens étroits avec les Etats tiers, répond un intérêt similaire, toujours plusmarqué, des Etats non-membres de l'UE. Cela s'explique par le fait que l'UE est deve-nue un acteur incontournable de la scène internationale et joue un rôle déterminantdans l'organisation politique de toute l'Europe, offrant de surcroît à ses partenaires unmarché économique potentiel de 370 millions de consommateurs.

Bien que les relations que l'UE entretient avec les Etats tiers peuvent reposer sur desimples déclarations politiques, elles tendent à aboutir à des accords formels (accordsde coopération ou accords d'association). Par une déclaration ou un protocole aux ac-cords de coopération ou d'association, l'UE a en outre souvent établi un dialogue po-litique formel avec un Etat ou un groupe d'Etats tiers. Indépendamment de tout ac-cord, elle a également ouvert un dialogue politique avec des pays, tels la Chine etl'Iran où la situation, sur le plan interne des droits de l'homme, suscite des critiques.Le dialogue politique peut aussi regrouper face à l'UE plusieurs partenaires disposantd'instruments de coopération bilatérale: le dialogue politique regroupe l'ensemble despays de la zone méditerranéenne dans le cadre du processus de Barcelone; il en va demême pour les pays d'Europe centrale et orientale, candidats à l'adhésion, qui sontinvités ensemble aux réunions de dialogue politique445.

A.1 Relations bilatérales

Sur le plan bilatéral, l'UE a noué des liens avec un grand nombre d'Etats. Seuls lesplus significatifs sont mentionnés ici.

Les relations entre l'UE et les Etats-Unis qui reposaient sur une déclaration conjointedepuis 1990, ont été complétées en décembre 1995 par le "Nouvel agenda transatlan-tique" et le "Plan d'action conjoint UE/Etats-Unis". Ces nouveaux textes fixent les

445 Pour le dialogue politique informel entre la Suisse et l’UE, voir ch. 231.

Page 224: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 222 - Chapitre 2

éléments d'une action commune dans quatre domaines: coopération en matière de po-litique étrangère et de sécurité, coopération dans les domaines de la justice et des af-faires intérieures, contribution à l'expansion du commerce mondial et renforcementdes liens entre les personnes et les institutions dans les secteurs de l'éducation, de l'in-formation, etc. En dépit de certains éléments de contentieux qui jalonnent les relationsentre les deux partenaires (divergences quant aux règles techniques et aux normes,lois Helms-Burton et d'Amato), ces liens tendent à se renforcer et pourraient aboutir àterme à un véritable partenariat. A l'occasion du Sommet transatlantique de Londresdu 18 mai 1998, les deux partenaires ont signé un nouveau "Partenariat économiquetransatlantique (TEP)", qui reprend les principaux points économiques de l'arrange-ment de 1995. La Suisse reste évidemment exclue de cette évolution.

Les rapports entre l'UE et le Japon ont été dominés pendant des années par le déficitcommercial de la première face au second. Tout en maintenant la pression sur le Ja-pon pour obtenir une plus grande ouverture de son marché, l'UE s'est efforcée d'ap-profondir et d'élargir sa coopération au-delà du domaine commercial. Une déclarationconjointe des deux partenaires datant de 1991 énumère leurs objectifs communs dansles domaines politique et commercial et institue un cadre de consultations à haut ni-veau. Dès lors, la coopération entre l'UE et le Japon, institutionnalisée par un Sommetannuel au niveau des Chefs d'Etat et de gouvernement couvre toute une série de do-maines, parmi lesquels la science et la technologie, la politique de concurrence, l'aideau développement, la politique industrielle et les transports446.

L'UE est de loin le plus important partenaire commercial de la Russie447. Depuis le 1er

décembre 1997, les relations politiques et économiques entre les deux partenaires sontrégies par un accord de coopération et de partenariat. Celui-ci instaure un dialoguepolitique à tous les niveaux, réglemente les échanges de combustibles nucléaires, au-torise le libre investissement de l'UE en Russie avec rapatriement des profits et libé-ralise les activités des banques étrangères sur territoire russe, notamment; les disposi-tions commerciales qu'il contient sont en vigueur depuis février 1996. La consolida-tion des liens entre l'UE et la Russie passe également par le programme TACIS, pro-gramme d'encouragement à la transition vers une économie de marché(développement du secteur privé, réforme de l'administration publique, accroissementdes rendements agricoles, etc.).

La Chine est devenue le quatrième marché d'exportation de l'UE et son quatrièmefournisseur. Depuis 1985, un accord de coopération entre les deux partenaires définitle cadre juridique de leurs relations commerciales et prévoit un programme de coopé-ration et de développement. En outre, l'UE intensifie progressivement le dialogueavec la Chine dans le domaine des droits de l'homme et met à l'ordre du jour desquestions aussi sensibles que les arrestations arbitraires, le Tibet et la peine demort448. A l'avenir, les parties entendent mettre l'accent sur l'institutionnalisation de

446 Communication du 8 mars 1995 intitulée "Europe et Japon : les prochaines étapes", COM (95) 73.447 40 % du commerce extérieur russe se fait avec l'UE.448 Ce dialogue amorcé en 1994 a été interrompu entre 1996 et 1997 en raison de la réaction chinoise face à

l'attitude de certains Etats membres qui soutenaient alors le projet de résolution critique de la Commission

Page 225: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 223 - Chapitre 2

contacts réguliers au niveau des Chefs d'Etat et de gouvernement, l'intensification desnégociations d'adhésion de la Chine à l'OMC et le renforcement de la coopérationbilatérale (soutien aux réformes, aide aux secteurs économique et industriel, etc.)449.

A.2 Relations plurilatérales

L'UE a des relations avec plusieurs groupes d'Etats. Dans ce contexte se dégagentquatre processus majeurs:

L'étroite relation que l'UE met progressivement en place avec les pays candidats àl'adhésion est décrite au ch. 234.02.

Fin 1995, l'UE a lancé un programme de coopération euro-méditerranéenne450, quivise la création d'un espace commun prospère comprenant les Etats membres et lespays du Maghreb, du Machrek et Israël451. L'idée consiste à s'engager dans un parte-nariat qui inclut une libéralisation progressive des échanges, soutenue par une aidefinancière substantielle (5,5 milliards d'euros de 1995 à 1999), pour se poursuivre parle resserrement des liens tant économiques que politiques et déboucher sur une asso-ciation étroite. A l'horizon de l'an 2010, une zone de libre-échange pourrait ainsi voirle jour autour de la Méditerranée; elle engloberait 600 à 800 millions d'habitants de 30à 40 pays452. L'intérêt de l'UE de lier davantage la Turquie à l'Europe, son désir dejouer un rôle plus important dans le processus de paix au Proche-Orient (depuis 1993,la contribution totale de l'UE au processus de paix s'est élevée à 1,68 milliard d'eu-ros), la crise politique en Algérie, ainsi que le risque d'extension du fondamentalismeislamique expliquent entre autres une telle initiative. Par ailleurs, pour intensifier lesrelations qu'elle entretient avec le Moyen-Orient, l'UE a renforcé le dialogue avecl'Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis, Bahrein, Koweït, Qatar et Oman, tousproducteurs de pétrole. Des négociations en vue de conclure un accord de libre-échange ont ainsi été lancées en 1992 par la Commission des CE et le Secrétariat duConseil de coopération du Golfe.

Face à l'Asie et à la puissance économique que celle-ci représente, l'UE a choisid'adopter une stratégie volontariste pour accroître la présence et l'influence européen-nes dans cette région. Elle vise en particulier à renforcer ses relations bilatérales avecchaque pays et chaque région d'Asie, à soutenir les efforts de coopération intra-régionale qui s'y développent, à encourager une association plus étroite des pays asia-

des droits de l’homme des Nations Unies.

449 Communication du 5 juillet 1995 relative à une politique à long terme pour les relations avec la Chine,COM (95) 279.

450 Programme lancé à Barcelone les 27 et 28 novembre 1995 au cours d'une conférence à laquelle la Suisse aété invitée à participer en qualité d'observateur.

451 Les pays suivants sont concernés: Algérie, Chypre, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Malte, Maroc, Syrie,Tunisie et Turquie, ainsi que les territoires autonomes de Palestine.

452 Accord de coopération avec la Tunisie: entré en vigueur le 1er mars 1998, JO n° L 97 du 30 mars 1998, p.1;accords de coopération avec le Maroc et la Jordanie: signés le 26 février 1996 et le 24 novembre 1997; ac-cord intérimaire relatif aux échanges et à la coopération avec l'OLP agissant pour le compte de l'Autoritépalestinienne: entré en vigueur le 1er juillet 1997, JO n° L 187 du 16 juillet 1997, p. 1.

Page 226: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 224 - Chapitre 2

tiques à la gestion des affaires internationales et à promouvoir une intégration de cespays dans le système commercial mondial453. Cette politique trouve un écho favorabledepuis le lancement en 1996 du processus ASEM (Asia-Europe Meeting), forum dedialogue réunissant l'Union européenne, les pays de l'ASEAN454, le Japon et la Chine.L'UE participe également au Forum régional de l'ASEAN établi en 1993 afin de four-nir aux pays de la région et aux Occidentaux un cadre informel de dialogue sur lesquestions de sécurité455.

L'UE a également institué des relations avec les pays d'Amérique latine en signant en1995 avec le Mercosur456 un accord-cadre prévoyant une coopération interrégionaledans les domaines économique, commercial, industriel, scientifique, institutionnel etculturel, ainsi que la promotion d'un dialogue politique. Son importance est due aufait qu'il pourrait aboutir à plus long terme à la création d'une zone de libre-échange etservir de modèle à d'autres accords du même type.

A.3 Conséquences pour les relations multilatérales

Dans le cadre des organisations ou conférences internationales (ONU, OMC, OIT,OCDE, OSCE, etc.), l'UE parvient de plus en plus souvent à consolider sa positionqu'il s'agisse de la préparation des travaux, comme de leur suivi. S'exprimer d'uneseule voix, plutôt qu'agir en ordre dispersé permet à l'Union d'affirmer son identité etsa cohésion sur la scène internationale; cela donne en outre un poids certain à sonavis. C'est particulièrement vrai au sein de l’OMC où la Commission depuis des an-nées (cycle Kennedy, 1964) dirige, dans le cadre de la politique commerciale com-mune, les négociations des Etats de l'UE. Les relations bilatérales étroites de l'UEavec les acteurs principaux, notamment les Etats-Unis et le Japon, se soldent en prati-que régulièrement par une coordination préalable au sein des organisations internatio-nales. Lorsque la Communauté et les Etats membres ont des compétences distinctes,comme dans le cas des négociations sur l'accord multilatéral d'investissement (MAI) àl’OCDE par ex., la Commission essaie chaque fois que cela est possible de coordon-ner les positions des Etats membres. Alors que dans ces enceintes, les décisions sontprises selon la règle du consensus, la solidarité communautaire n'empêche pas un Etatmembre de faire valoir des intérêts nationaux spécifiques.

B Répercussions sur la Suisse

L'intensification des relations de l’UE avec les Etats tiers ont en particulier les effetséconomiques, politiques et culturels suivants:

453 Voir communication du 13 juillet 1994 intitulée "Vers une nouvelle stratégie asiatique", COM (94) 314.454 ASEAN (Association des Nations de l'Asie du Sud-Est): Brunei, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Phi-

lippines, Singapour, Thaïlande, Vietnam.455 Le Forum régional ASEAN réunit, outre les neuf pays de l'ASEAN et l'UE, les Etats-Unis, le Canada, la

Russie, la Chine, le Japon, la Corée du Sud, l'Inde, l'Australie, la Nouvelle-Zélande, ainsi que comme obser-vateurs le Cambodge et la Papouasie-Nouvelle-Guinée.

456 Mercosur: Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay.

Page 227: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 225 - Chapitre 2

- Augmentation du risque de discrimination à l'égard des entreprises suisses vis-à-visdes concurrents de l'UE, là où existent des accords préférentiels ou des program-mes de coopération entre la Communauté et un Etats tiers ou une région. L'UEétant en général le partenaire le plus important pour les Etats tiers, il ne reste prati-quement à la Suisse que la possibilité de reprendre les relations existantes entrel'UE et ces Etats. Partant, notre pays peut à peine nouer des relations avec les Etatstiers sur la base de ses intérêts spécifiques.

- Diminution de l’attractivité de la place économique suisse (par ex. comme tête depont des entreprises non communautaires).

- Isolation politique accrue de la Suisse, notamment en raison de l’influence politi-que grandissante de l’UE dans tous les Etats avec lesquels cette dernière mène undialogue politique.

- Dégradation des possibilités de préserver les intérêts de la Suisse sur le plan multi-latéral en raison du renforcement de la coordination interne dans l'UE dans le cadredes organisations internationales457.

- Réduction des moyens d'agir des diplomates suisses qui, dans les Etats tiers ontmoins de possibilités de s'informer et de nouer des contacts que les diplomates desEtats membres de l'UE.

- Isolement culturel accru de la Suisse en raison d'activités croissantes de l'UE dansle domaine culturel (par ex. organisation d'expositions, d'événements culturels).

234.02 Coopération avec les pays en développement et en transition

A Politique de l’UE

Les dispositions dans le Traité CE relatives à la coopération au développement, intro-duites par le Traité de Maastricht, n'ont pas entièrement satisfait ceux qui, à Bruxelles,aspiraient à une politique communautaire plus centralisatrice en la matière. Ellesfixent avant tout le principe de complémentarité de la politique de la Communauté etde celle des Etats membres et mettent de ce fait plutôt l'accent sur la coordination et laconcertation que sur l'action commune proprement dite, qui demeure subsidiaire.

La politique de l'UE dans le domaine de la coopération au développement vise à favo-riser le développement économique et social durable des pays en développement, etplus particulièrement des plus défavorisés d'entre eux, l'insertion harmonieuse et pro-

457 L'expériences acquise à l'OCDE dans le cadre des négociations en cours sur l'accord multilatéral d'investis-

sement (MAI) montrent que l'isolement de la Suisse empêche cette dernière de pouvoir pleinement faire va-loir dans la négociation politique sa position appréciable de septième investisseur (1996: 194 milliards defrancs). Cela tient notamment au fait que la Suisse est exclue de la coordination interne dans l'UE qui s'étendà toutes les questions essentielles avant les rounds de négociations proprement dits (par ex. clause régionale,loi Helms-Burton, exception culturelle, intégration de la politique sociale et de la politique de l'environne-ment, fiscalité). La Suisse perd ainsi la possibilité d'influencer à son profit le compromis interne à l'UE. Parcontre, dans les négociations proprement dites, le marchandage se déroule principalement entre les Etats-Unis et l'UE, de sorte que la possibilité de la Suisse d'intervenir à ce stade est compromise. A cela s'ajoutele fait qu'un éventuel long retard des négociations relatives au MAI pourrait conduire à ce que les Etats-Uniset l'UE s'entendent bilatéralement dans le cadre du "New Transatlantic Marketplace".

Page 228: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 226 - Chapitre 2

gressive de ces pays dans l'économie mondiale, la lutte contre la pauvreté, le dévelop-pement et la consolidation de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que le respectdes droits de l'homme et des libertés fondamentales458. Elle prend la forme de pro-grammes élaborés par la Commission et s'élève à quelque 12 milliards de francs paran, soit un montant équivalent à l'aide annuellement fournie par des Etats membrescomme la France ou l'Allemagne ou par des pays tels que les Etats Unis ou le Japonau titre de leur propre politique de coopération au développement 459.

Les Etats membres contribuent financièrement à la politique d'aide au développementde l'UE par les montants qu'ils sont tenus de verser au budget communautaire, d'unepart et par les sommes qu'ils allouent au Fonds européen de développement (FED),géré par la Commission (voir ch. 251.03, let. A.12), d'autre part. La proportion del'aide de chaque Etat membre qui passe par les institutions communautaires varie con-sidérablement d'un pays à l'autre. Elle représente en moyenne 20% de la somme totaledestinée par chaque Etat membre à la coopération au développement.

Aujourd'hui, l'organe principal de coordination de la coopération au niveau interna-tional reste le Comité d'aide au développement de l'OCDE et ce, tant pour les Etatsmembres de l'UE que pour les autres pays donateurs, tels que la Suisse. Le Traité deMaastricht vise clairement la mise en place d'une coordination plus étroite entre lapolitique d'aide de l'UE et celles des Etats membres. Si elle y arrive l'UE pourrait àl'avenir jouer un rôle beaucoup plus important en matière de coordination, égalementsur le plan international460.

L'aide communautaire est consacrée environ pour moitié aux 71 pays d'Afrique - ledernier en date étant l'Afrique du Sud -, des Caraïbes et du Pacifique (pays ACP) etpour moitié aux pays en développement d'Amérique latine et d'Asie et aux pays entransition. Les accords de Lomé, conclus entre l'UE et les pays ACP dès 1975, cons-tituent le noyau de la politique de coopération de la CE et restent un exemple uniqueen la matière. Le dernier en date "Lomé IV"461, couvrant la période 1990 à 2000,comprend des éléments de politique commerciale (accès préférentiel au marché CE),d'aide financière (assistance technique, ajustement structurel, capital risque, stabilisa-tion des recettes d'exportation, aide humanitaire, aide aux réfugiés, etc.), ainsi que desaspects relatifs au respect des droits de l'homme et à l'encouragement de la démocratieet de l'Etat de droit. Garant d'une grande stabilité, ces accords conduisent aussi à unecertaine rigidité dans les relations de l'UE avec les pays ACP. De nouvelles négocia-tions sur ces accords ont été officiellement ouvertes à la fin du mois de septembre1998. Le mandat donné aux parties est de "préserver l'acquis de la Convention de

458 Voir art. 130 U à 130 Y du Traité CE.459 L'aide totale des Etats membres fournie au titre de leurs propres politiques de coopération au développement

s'est élevée en 1997 à 39,75 milliards de francs soit 0,33% de leur PNB.460 Voir Communication du 3 mai 1995 sur la complémentarité entre les politiques de la CE et celles de ses

Etats membres, COM (95) 160.461 Quatrième Convention ACP-CEE de Lomé du 15 décembre 1989, JO n° L 229 du 17 août 1991, p. 3; Ac-

cord du 4 novembre 1995 portant modification de la quatrième convention ACP-CE de Lomé, JO n° L 156du 29 mai 1998, p. 1.

Page 229: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 227 - Chapitre 2

Lomé tout en réformant radicalement la nature du partenariat, ses objectifs et lesmoyens de les atteindre". Parmi les orientations nouvelles qui se profilent à ce sujet, ilfaut mentionner notamment une aide plus différenciée qui conduirait à adapter lesmodalités et priorités de la coopération en fonction du niveau de développement despartenaires. En outre, il est prévu d'introduire une approche régionale, dont l'un deséléments pourrait consister à créer des zones de libre-échange concernant tout d'abordles partenaires les mieux placés économiquement, ceci dans la perspective d'une inté-gration progressive des pays ACP dans le système économique mondial. A noter queles contributions versées au FED, lequel est reconstitué tous les cinq ans, sont entiè-rement consacrées à l'aide aux pays ACP. Ces derniers ont également accès à desprêts de la Banque européenne d'investissement (BEI) à des taux préférentiels.

B Politique suisse

La coopération au développement menée par la Suisse (Confédération et cantons) viseà soutenir "les efforts des pays en développement en vue d'améliorer les conditions devie de la population". Elle doit contribuer à mettre ces pays en mesure d'assurer leurdéveloppement par leurs propres forces. Elle tend, à long terme, à assurer un meilleuréquilibre au sein de la communauté internationale. Elle "soutient en priorité les effortsdes pays en développement, régions et groupes de population les plus défavorisés."462

Cette aide s'inscrit dans le cadre de la politique extérieure suisse dont les cinq objec-tifs ont été fixés dans le rapport sur la politique extérieure de la Suisse dans les années90463. Ces même objectifs ont été repris dans le rapport sur les relations Nord-Sud dela Suisse dans les années 90464. On peut constater qu'il existe une nette concordanceau niveau conceptuel entre les objectifs de la coopération suisse et ceux de la coopé-ration européenne.

La coopération suisse revêt des formes variées: coopération technique, aide finan-cière, mesures de politique économique et commerciale, aide humanitaire, participa-tion au capital des banques de développement ou encore toute autre forme propre àatteindre les buts fixés. L'aide publique suisse en 1997 s'est élevée à quelque 1,217milliard de francs suisses (0,32 % du PNB).

C Relations contractuelles existantes

La collaboration entre la Suisse et l'UE dans le cadre de la coopération au développe-ment ne repose sur aucune base institutionnelle. La Confédération cofinance de nom-breux programmes et projets conjointement avec des Etats membres, mais très peuavec la Commission elle-même. Il s'agit en général de financements parallèles faisantl'objet de relations contractuelles avec le pays bénéficiaire et l'agence d'exécution,n'impliquant aucun accord avec les Etats membres, ni avec la Commission. Une cer- 462 Art. 5 de la loi fédérale du 19 mars 1976 sur la coopération au développement et l'aide humanitaire interna-

tionales, RS 974.0.463 Voir FF 1994 I 150 et ch. 234.01.464 Voir Lignes directrices Nord-Sud du 7 mars 1994, FF 1994 II 1217.

Page 230: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 228 - Chapitre 2

taine coordination entre les pays donateurs assure cependant à ceux-ci un plus grandpoids dans le cadre du dialogue avec les pays bénéficiaires.

En l'absence de relations contractuelles, la Suisse veille à assurer un dialogue intenseavec l'UE sur les politiques de développement respectives. Dans le cadre des activitésde l'ECHO (European Community Humanitarian Office) notamment, qui couvre l'aidehumanitaire et l'aide d'urgence, la Suisse, sans pouvoir participer au dialogue officiel,entretient des relations régulières avec les responsables communautaires à l'occasionde rencontres bilatérales ou internationales. La Suisse - seule ou conjointement avecdes organisations multilatérales - s'intègre en outre dans des mécanismes gérés parl'UE, comme le processus de coordination de la reconstruction en Bosnie-Herzégovine.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, la Suisse prendrait automatiquement part aux programmesde la CE en matière de coopération au développement et aux décisions y relatives,tout en maintenant sa propre politique nationale de coopération au développement. Saparticipation au financement des activités de la CE s'effectuerait par sa contributionau budget communautaire, d'une part, et par sa quote-part à la reconstitution du FED,d'autre part. S'agissant du FED, la dernière reconstitution de ce fonds couvrant lesannées 1995 à 2000 s'est élevée à 13 milliards d'euros. Par comparaison avec d'autrespays ayant une capacité économique comparable, on peut estimer que la contributionde la Suisse au FED se situerait autour de 100 millions de francs par année (voir ch.251.03, let. A.12). Le moment venu, il faudra se demander si les contributions de laSuisse seront prélevées sur le budget actuel ou si elles seront assurées par l'octroi demoyens financiers supplémentaires.

Par ailleurs, les appels d'offres liés à des fournitures de biens et de services financéspar l'aide communautaire seraient ouverts aux fournisseurs suisses.

En cas de participation à l'EEE ou de maintien de la situation actuelle, la coopérationau développement de la Suisse se poursuivrait dans ses formes actuelles, les problè-mes restant aussi les mêmes.

234.03 Politique des droits de l’homme

A Politique de l’UE

Dans ses relations extérieures, l’UE cherche à promouvoir le respect des droits del’homme. Aussi, le développement et le renforcement de la démocratie et de l'état dedroit, ainsi que le respect de des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont-ils explicitement définis comme objectifs de la politique étrangère et de sécuritécommune de l'Union (art. J.1. al. 2 du Traité UE). Dans la pratique du droit interna-tional de la Communauté, les droits de l’homme constituent en outre un élément es-sentiel du dialogue avec les Etats tiers. Des clauses en la matière sont systématique-

Page 231: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 229 - Chapitre 2

ment intégrées dans les accords d’association et de coopération, définissant la sauve-garde des principes démocratiques et le respect des droits de l’homme en tantqu'"élément essentiel" ou "partie intégrante" de ces accords465. Si les droits del'homme ne sont pas respectés, l'UE peut, conformément à ces clauses, réduire, modi-fier ou même dans les cas extrêmes supprimer la coopération avec les Etats tiers; enoutre ces clauses sont l’expression d’un intérêt commun et constituent un élément dudialogue entre les parties contractantes.

Les moyens d’action de la Communauté en matière de politique des droits del’homme sont divers. Ils consistent, entre autres, en des démarches confidentielles oupubliques, des interventions au sein de forums internationaux, la participation à desmissions de vérification internationales ou régionales, la réduction ou la rupture descontacts bilatéraux à haut niveau ou la proclamation de restrictions commerciales. LaCommunauté soutient financièrement des activités en matière de droits de l’homme,par ex. dans les programmes de coopération PHARE et TACIS et dans le cadre de sapolitique de développement en vertu de l’art. 130 U du Traité CE.

Dans leurs relations internes avec les citoyens de l’Union, l’UE et la CE respectentles droits fondamentaux tels qu'ils sont garantis par la Convention européenne desdroits de l’homme466 et tels qu'ils découlent, en tant que principes généraux du droitcommunautaire, des traditions constitutionnelles communes des Etats membres (voirart. F, al.2 et K.2 du Traité CE).

B Politique suisse

Dans le rapport sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90467, la pro-motion des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit est citée parmi lescinq principaux objectifs de la politique étrangère suisse. L'engagement de la Suissedans ce domaine s'appuie sur une longue tradition et sur la conviction que la paix et lasécurité ne peuvent être garanties à long terme que par des Etats qui, sur le plan inté-rieur également, respectent les droits de l'homme et les libertés fondamentales, recon-naissent la primauté du droit sur l'arbitraire politique et soumettent le pouvoir politi-que au contrôle démocratique. La Suisse observe la distinction usuelle entre évolutiondes dispositions légales en matière de droits de l’homme, d’une part et leur applica-tion et leur contrôle, d’autre part. A cet égard, elle accorde la priorité au second de cesaspects. Ces dernières années, la Suisse est devenue partie à de nombreux accordsinternationaux visant à la sauvegarde des droits de l’homme, si bien que notre paysdispose aujourd’hui d’une solide base en droit international dans ce domaine.

465 Voir à cet égard quelques exemples récents: Accord-cadre sur la coopération avec les pays du pacte andin

(Bolivie, Colombie, Equateur, Pérou, Venezuela), JO n° L 127 du 29 avril 1998, p. 11; Accord Europe-Méditerranée avec la Tunisie, JO n° L 97 du 30 mars 1998, p. 2; Accord de coopération avec le Yémen,JOCE n° L 72 du 11 mars 1998, p. 18; Accord européen avec l'Estonie, JO n° L 68 du 9 mars 1998, p. 3.

466 Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre1950 (CEDH), RS 0.101.

467 Rapport du 29 novembre 1993 sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90, FF 1994 I 153.

Page 232: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 230 - Chapitre 2

Les instruments de la politique suisse en matière des droits de l’homme sont compa-rables à ceux de l’UE. La "clause de conditionnalité" est également traitée de façondifférenciée.

C Relations contractuelles existantes

Dans le domaine spécifique des droits de l’homme, il n’existe pas de relations con-tractuelles avec la Communauté, ni avec ses Etats membres. Cela est dû avant tout aufait que les standards juridiques contraignants en matière de sauvegarde des droits del'homme sont plus judicieusement négociés et définis au niveau multilatéral et quel’adhésion d’un grand nombre d’Etats à un accord de ce genre rend leur applicationplus efficace. Les Etats membres de l’UE ont généralement adhéré à la plupart desaccords qui s’appliquent également à la Suisse, dont notamment la CEDH.

D Répercussions sur la Suisse

La politique institutionnalisée de la Communauté en matière de droits de l’homme ades effets sur ses partenaires. Ainsi, l'UE attend de ses partenaires de l’EEE qu’ilscontribuent à ses déclarations et prises de position, même s’il n’existe aucune obliga-tion légale en la matière. Seul le maintien de la situation actuelle n’aurait aucun effetdirect sur la Suisse. Notre pays cherche souvent déjà à coopérer avec l’UE lorsqu'ilintervient auprès d’un gouvernement, car une démarche effectuée en commun a con-sidérablement plus de poids. Il en va de même pour les efforts visant à coordonner lesactivités des donateurs dans les pays en voie de développement. En matière de politi-que des droits de l'homme, la Suisse partage dans une large mesure les vues de l'UE.

Une adhésion à l’UE amènerait la Suisse à participer à la politique commune de l'UE.Mais elle pourrait continuer, comme tous les Etats de l'UE, à mener sa propre politi-que des droits de l’homme et à fixer ses priorités. Une adhésion n'empêcherait pas laSuisse de suivre une politique plus sévère en matière des droits de l'homme que l’UE.Cependant, en tant qu'Etat membre de l'UE, la Suisse serait en mesure de participer àl’échange d’informations entre les Etats membres (par ex. sur ses points de vues et surla situation dans les Etats tiers) et à la formation de l'opinion au sein de l’Union, ainsique de prendre de propres initiatives.

Pour la Suisse, la situation ne se modifierait pas beaucoup sur le plan financier, le fi-nancement des actions de la Communauté étant assuré par le budget commun de cettedernière (voir ch. 251). Dans certains cas, la Suisse pourrait au besoin soutenir desprojets complémentaires avec les moyens mis à disposition à cet effet.

Page 233: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 231 - Chapitre 2

24 Coopération dans les domaines de la justice et des af-faires intérieures

241 Aperçu: de Schengen à l'UE

A Coopération au sein du Système de Schengen

Les Etats membres de l'UE n'ont déclaré que tard, dans la perspective de la réalisationdu marché intérieur, que la coopération dans les domaines de la justice et des affairesintérieures468 était d'un intérêt commun. Concrétisée dans un premier temps sousforme d'échanges d'informations et d'expériences sur des sujets tels que le terrorismeet la lutte contre les stupéfiants, la coopération s'est progressivement intensifiée. Ce-pendant, tous les Etats membres de l'UE n'étaient pas disposés à supprimer le contrôledes personnes aux frontières intérieures. Seuls les Etats membres de l'UE qui étaientreliés au Système de Schengen ont pratiqué la libre circulation des personnes sanscontrôles à la frontière. A l’exception de la Grande-Bretagne et de l’Irlande, tous lesEtats membres de l'UE ont adhéré à l'Accord de Schengen469.

Les accords de Schengen prévoient la création d'un espace sans frontières intérieures,réalisant ainsi un objectif fondamental de l'UE. Relevant exclusivement de la collabo-ration intergouvernementale, lesdits accords reposent sur le principe du consensus.Les décisions sont prises à l'unanimité. Les Etats de Schengen ont convenu d'impor-tantes mesures de compensation en vue d'assurer la sécurité intérieure, qui consistenten un renforcement des contrôles aux frontières extérieures et en une coopération plusétroite des autorités de justice et de police.

Le système de coopération de Schengen est constitué des points essentiels suivants:principes communs concernant l'entrée et le séjour des ressortissants de pays tiers,politique et pratique uniformes en matière de visas (voir ch. 242), contrôles uniformi-sés des personnes aux frontières extérieures (voir ch. 243), réglementation quant à lacompétence pour traiter des demandes d'asile (voir ch. 244), principes communs ap-pliqués à la coopération transfrontalière en matière policière et judiciaire (voir ch. 245et 246), ainsi que mise en place du Système d'Information de Schengen (SIS). Ce der-nier doit, grâce à un système informatisé, permettre à tous les Etats de Schengend'avoir accès à l'ensemble des données pertinentes pour l'octroi d'autorisations d'en-trée ou de séjour.

468 "Affaires intérieures" au sens des mesures visant à assurer la sécurité intérieure.469 Accord de Schengen du 14 juin 1985 et convention d'application du 19 juin 1990. La Suède, la Finlande et

le Danemark mettront en oeuvre les accords de Schengen vraisemblablement en 1999.

Page 234: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 232 - Chapitre 2

B Coopération au sein de l'UE dans les domaines de la justice et des affai-res intérieures, en application des traités de Maastricht et d'Amsterdam

Tandis que des structures communes ont progressivement été mises en place au seindes Etats de Schengen en vue d'assurer une coopération dans le domaine de la sécuritéintérieure, une coopération au sein de l'UE dans les domaines de la justice et des af-faires intérieures n'a pas été envisagée avant le Traité de Maastricht de 1992. Ce troi-sième pilier de l'UE, dont le champ d'application matériel concorde largement avecl'Accord de Schengen, repose sur la coopération intergouvernementale. Sa mise enoeuvre requiert l'élaboration d'"actions communes" et de "positions communes", ainsique de conventions de droit international public. Dans ce contexte, il y a lieu de men-tionner en particulier la Convention du 15 juin 1990 relative à la détermination del'Etat responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etatsmembres (Convention de Dublin), de même que la Convention Europol du 26 juillet1995. Certes, ces instruments tiennent compte des sensibilités des différents Etatsmembres de l'UE, mais l'impératif de l'unanimité a parallèlement entraîné le blocagede dossiers importants. Au vu de la dimension de problèmes tels que la migrationclandestine, la gestion des demandes d'asile ou la lutte contre le crime organisé, uneforme plus efficace de coopération s'est révélée indispensable.

L'objectif prioritaire du Traité d'Amsterdam470 consiste en la création d'un espacepermettant la libre circulation des personnes, des marchandises et des services et con-férant à tous les citoyens un haut degré de sécurité (voir nouvel art. 73i Traité CE).L’ensemble de l’acquis de Schengen sera repris par l’UE. En d'autres termes, dès l'en-trée en vigueur du Traité d'Amsterdam, la coopération entre les treize Etats qui ontsigné les accords de Schengen s'opérera dans le cadre institutionnel et juridique del'UE. Ainsi, le Conseil de ministres remplacera le Comité exécutif de Schengen, et leSecrétariat de Schengen sera intégré dans le Secrétariat général du Conseil. Selonl'état actuel des connaissances, quelque 80% de la législation de Schengen seront in-tégrés dans le premier pilier, soit le Traité CE (frontières intérieures et extérieures,politiques en matière de visas et d'asile, immigration, protection des droits des ressor-tissants d'Etats tiers, collaboration entre les administrations et coopération judiciaireen matière de droit civil). La coopération dans les autres domaines (titre VI TraitéUE) sera concrétisée et aménagée de manière plus efficace.

Durant une période transitoire de cinq ans à compter de l'entrée en vigueur du Traitéd'Amsterdam, le Conseil prendra, comme à ce jour, ses décisions concernant le pre-mier pilier à l'unanimité sur proposition de la Commission ou sur l'initiative d'un Etatmembre et après consultation du Parlement européen (s'agissant de l'introduction oude la levée de l'obligation du visa, de même que de la conception uniforme de ce der-nier, la majorité suffit déjà). Après cette période transitoire, le droit d'initiative exclu-sif sera conféré à la Commission, comme c'est l'usage dans tous les autres domainescommunautaires. A partir de cette date, le Conseil pourra décider à l'unanimité, aprèsconsultation du Parlement, si les décisions concernant tout ou partie du nouveau titre

470 Voir aussi ch. 311.03.4.

Page 235: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 233 - Chapitre 2

IIIa du Traité CE "visa, asile, immigration et autres domaines politiques relatifs à lalibre circulation des personnes" doivent être prises, au sein du Conseil, à la majoritéqualifiée et moyennant l'approbation du Parlement. La compétence de conclure desaccords avec des Etats tiers dans lesdits domaines sera en principe déléguée à laCommunauté. En revanche, les Etats membres conserveront toute leur souverainetéen matière de maintien de l'ordre public et de la sécurité intérieure, les attributions dela Communauté et de la Cour de justice de la CE étant limitées mutatis mutandis.

Après l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam, le troisième pilier ne comporteraplus que la coopération policière et la coopération judiciaire en matière pénale (voirch. 245 et 246). Afin d'améliorer la prévention et la poursuite des infractions, la coo-pération entre les autorités judiciaires et policières compétentes sera renforcée. Aubesoin, il sera établi dans certains domaines particuliers des prescriptions minimalesque devront satisfaire les dispositions pénales des Etats membres.

C Association de la Norvège et de l'Islande au groupe de Schengen

Membres de l’AELE et de l’EEE, la Norvège et l'Islande ont conclu avec les Etats deSchengen, le 19 décembre 1996, un traité de coopération dont l'entrée en vigueur dé-pend de l'entrée en vigueur de l'Accord de Schengen passé avec les autres Etats nor-diques qui sont membres de l'UE471. Le traité conclu par la Norvège et l'Islande im-plique la reprise intégrale de l'acquis actuel et futur de Schengen, y compris la sup-pression des contrôles aux frontières intérieures et le renoncement au droit de codéci-sion. En cas de non-reprise de futurs actes juridiques, ce lien contractuel est automati-quement rompu. L'association de la Norvège et de l'Islande vise le maintien del'Union nordique, dont font partie les Etats membres de l'UE et de l'espace Schengenque sont le Danemark, la Finlande et la Suède. La Norvège prévoit actuellement uninvestissement initial de quelque 30 millions de francs (surtout pour les moyens élec-troniques, les contrôles aux aéroports et le personnel). Selon ses propres estimations,les coûts devraient s'élever ces prochaines années à quelque 15 millions de francs parannée.

Prévue par le Traité d'Amsterdam, l'intégration de l'acquis de Schengen dans l'UEimplique la négociation d'une nouvelle convention qui associe la Norvège et l'Islande.Cette convention réglera également les obligations financières des deux Etats et préci-sera qu'ils n'ont aucun droit de codécision dans le processus décisionnel de l'UE. Il estprévu que la convention entre en vigueur en même temps que le Traité d'Amsterdam.Le mandat de négociation y relatif a été adopté par l'UE le 26 août 1998. Il prévoitque le traité d'association deviendra automatiquement caduc en cas de non-reprise defutures décisions communautaires par les Etats associés.

471 La Suède, la Finlande et le Danemark mettront les accords de Schengen en oeuvre vraisemblablement dans

le courant de l'année 1999.

Page 236: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 234 - Chapitre 2

D Suisse et système européen de sécurité

La Suisse est entièrement entourée d'Etats – hormis le Liechtenstein - membres dugroupe de Schengen. Cette situation a des conséquences sociales et économiquesmultiples, mais très différentes de celles que connaissent la Norvège et l'Islande. Lessecteurs touchés sont en particulier la politique en matière de visas, les contrôles et letrafic à la frontière, la politique d'asile, ainsi que la coopération transfrontalière enmatière policière et judiciaire. Une marginalisation de la Suisse dans le domaine de lacoopération européenne en matière de sécurité pourrait nuire aussi bien à la sûretéintérieure de la Suisse qu'à ses relations internationales. C'est surtout l'exclusion denotre pays de la Convention de Dublin et du Système d'Information de Schengen quise révèle de plus en plus problématique472. Par rapport à d'autres Etats d'Europe occi-dentale, la pression exercée sur les secteurs de l'asile et des réfugiés est déjà supé-rieure à la moyenne473. Lorsqu'ils ne sont pas enregistrés dans le Système suisse derecherches informatisées, les personnes et les objets recherchés par les Etats deSchengen ou frappés d'une interdiction d'entrer sur leurs territoires peuvent s'intro-duire ou être transférés dans notre pays sans difficulté. De ce fait, la Suisse risque dedevenir la plaque tournante de la migration clandestine, du crime organisé et du terro-risme international. Pareille évolution pourrait notamment inciter les pays voisins àrenforcer leurs contrôles à la frontière suisse, une mesure qui présenterait des incon-vénients considérables pour le trafic transfrontalier, en particulier pour les nombreuxfrontaliers. N'étant pas membre de l'UE, la Suisse ne dispose d'aucun moyen légalpour s'opposer à une telle mesure. Cette mesure nuirait en outre aux intérêts économi-ques et touristiques de la Suisse.

Le Conseil fédéral a régulièrement signalé que les problèmes internationaux de mi-gration et de sécurité ne pouvaient être résolus unilatéralement. L'approfondissementde la coopération transfrontalière avec les pays voisins est un élément important pourle renforcement de la sécurité intérieure de notre pays et pour le bon déroulement dutrafic frontalier. Les accords bilatéraux en matière policière (voir ch. 245, let. C) neremplacent toutefois pas la coopération avec le groupe de Schengen, ni avec les Etatsmembres de l'UE, ni avec Europol. Les pays voisins n'ont pas tous manifesté un inté-rêt identique à collaborer avec la Suisse. Avec le Traité d'Amsterdam, les domainesdes frontières intérieures et extérieures, des politiques en matière de visas et de l'asile,de l'immigration, de la protection des droits des ressortissants d'Etats tiers, de la col-laboration entre les administrations, ainsi que de la coopération judiciaire en matièrecivile seront par ailleurs définis au niveau de l'Union, dans un processus dynamique.En d'autres termes, ce sont précisément les domaines qui revêtent une importanceparticulière en matière de prévention de la migration clandestine, de lutte contre lacriminalité transfrontalière et de répression des actes terroristes qui ne peuvent fairel'objet d'accords bilatéraux entre la Suisse et les différents Etats de Schengen ou del'UE.

472 Voir A. Achermann/M. Hertig, Europäischer Asylraum, Einwanderung von Drittstaatenangehörigen und die

Schweiz, dans: Cottier/ Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne – Enjeux et conséquences, Zu-rich 1998, 573 et ss, avec d'autres renvois.

473 Voir à cet égard la statistique (ch. 335.02).

Page 237: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 235 - Chapitre 2

Une coopération formelle dans certains domaines des accords de Schengen s'est ré-vélée irréalisable pour la Suisse, en raison de l'intégration permanente de l'acquis deSchengen dans l'UE et eu égard à la perception divergente qu'ont de la Suisse les Etatsmembres de l'UE. La question de savoir si la situation de la Suisse changera fonda-mentalement après la conclusion des accords sectoriels entre la Suisse et l'UE et suiteà l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam fera l'objet d'un examen le moment venu.Une éventuelle offre de négociation de la part de la Suisse devrait être considéréedans le contexte de l'ensemble de nos relations avec l'UE.

La consolidation de l'espace communautaire de liberté, de sécurité et de justice rendrad'éventuelles négociations avec des Etats tiers encore plus difficiles au niveau secto-riel. La conception de l'UE reposant sur le juste équilibre entre la libre circulation despersonnes et les déficits en matière de sécurité, les négociations en vue d'une intégra-tion à l'espace de l'UE ne sont en principe envisageables que dans la mesure où l'Etattiers est disposé à accepter comme condition de base tant la reprise des dispositions enmatière de libre circulation des personnes que l'abolition des contrôles aux frontièresdes Etats de l'UE, en compensation d'une protection renforcée des frontières avec lesEtats tiers.

242 Politique en matière de visa

A Politique de l’UE

Avec le Traité de Maastricht, les Etats membres de l’UE ont introduit une politiquecommune en matière de visa. En vertu de l'art. 100C du Traité CE, le Conseil déter-mine les pays tiers dont les ressortissants doivent être munis d'un visa lors du fran-chissement des frontières extérieures des Etats membres. Les décisions sont prises à lamajorité qualifiée. Par contre, les Etats membres de l'UE décident eux-mêmes de l'op-portunité d'étendre l'obligation du visa aux ressortissants de pays qui ne figurent pasdans la liste commune des pays soumis à l'obligation du visa. Faculté leur est en outredonnée, surtout dans des cas particuliers, de prévoir des exceptions à l'obligation duvisa474.

Les Etats du Groupe de Schengen observent en outre les accords de Schengen, subsi-diaires au droit communautaire. Le Système de Schengen a également introduit uneliste contraignante (liste négative) d'Etats tiers soumis à l'obligation du visa475. Le visauniforme de Schengen autorise son titulaire à entrer dans l'espace Schengen et à y sé-journer pour une durée maximale de trois mois. Ce visa uniforme ne peut être délivréà un ressortissant étranger que lorsque ce dernier satisfait aux conditions communesd'entrée de la Convention d'application de l'accord de Schengen et pour autant qu'il nefigure pas dans le Système d'Information de Schengen comme faisant l'objet d'uneinterdiction d'entrée. La délivrance du visa uniforme est soumise à des dispositions

474 Cela vaut par exemple pour les titulaires de passeports diplomatiques, de service ou spéciaux.475 Il existe en outre deux répertoires: l'un sur les Etats tiers non soumis à l'obligation du visa par les pays du

Groupe de Schengen (liste positive; pas de dérogation pour la Suisse) et l'autre sur les différents Etats viséspar une réglementation différenciée de chacun des Etats du groupe de Schengen (liste grise).

Page 238: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 236 - Chapitre 2

contraignantes, contenues dans les "Instructions communes en matière consulaire".L'introduction du visa uniforme a entraîné la diminution escomptée par les Etats deSchengen des demandes de visa. Le bilan annuel de 1995 fait état d'une régressionmoyenne de 17%. Le nombre total des demandes de visa déposées dans les représen-tations établies à l'intérieur de l'espace Schengen est marqué par une baisse moyennede 90%. Pour ce qui est des représentations sises hors de l'espace Schengen, cettebaisse est de 10% au total.

L'harmonisation de la politique en matière de visa revêt une grande importance pour"l'instauration progressive d'un espace de liberté, de sécurité et de justice" (art. 73iTraité CE, modifié par le Traité d'Amsterdam). En intégrant l'acquis de Schengen etl'uniformisation communautaire de la politique et de la pratique en matière de visa, leTraité d'Amsterdam476 fait un pas décisif vers cet objectif. Dès l'entrée en vigueur duTraité d'Amsterdam, le Conseil continuera non seulement d'établir la liste des Etatstiers soumis à l'obligation du visa, mais il désignera aussi ceux dont les ressortissantsen sont exemptés. De plus le Conseil sera habilité à réglementer la procédure et lesconditions d'établissement des visas par les Etats membres, à concevoir le visa uni-forme et à promulguer des prescriptions s'y rapportant. La plupart de ces mesures se-ront adoptées par le Conseil à la majorité qualifiée, sur proposition de la Commissionet après consultation du Parlement. En sont exclues, dans un premier temps, les pro-cédures et conditions de délivrance des visas relevant de l'acquis de Schengen et lesprescriptions relatives à l'instauration d'un visa uniforme, lesquelles feront l'objetd'une décision à la majorité qualifiée, dans les cinq ans qui suivent l'entrée en vigueurdu traité d'Amsterdam. A ce moment-là, la Commission aura le pouvoir exclusif deprendre des initiatives concernant toutes les mesures précédemment citées.

B Politique suisse

Pour le Conseil fédéral, la décision de supprimer ou de réintroduire l'obligation duvisa repose avant tout sur des facteurs migratoires et sur des questions de politique desécurité. Sa politique en la matière rejoint donc largement celle pratiquée par la CE ouplus précisément par les Etats membres de Schengen. Il en va de même de la pratiqueobservée en matière de visa, que le Conseil fédéral vient de modifier pour l'adapter àcelle du groupe de Schengen.

C Relations contractuelles existantes

La Suisse a conclu des accords bilatéraux sur la suppression de l'obligation du visa etsur les documents de voyage reconnus pour le franchissement de la frontière avec tousles Etats membres de l'UE. L'Accord européen du 13 décembre 1957 sur le régime dela circulation des personnes entre les pays membres du Conseil de l'Europe fait enoutre autorité en la matière477. Il n'existe, par contre, aucune relation contractuelle dece genre avec la CE. 476 Voir aussi ch. 311.03.4.477 Accord européen du 13 décembre 1957 sur le régime de la circulation des personnes entre les pays membres

du Conseil de l'Europe, RS 0.142.103.

Page 239: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 237 - Chapitre 2

D Répercussions sur la Suisse

L’adhésion à l'UE entraînerait, outre la reprise de l'acquis communautaire, égalementcelle de l'acquis de Schengen. La Suisse devrait introduire l'obligation du visa enversles 17 Etats actuellement portés sur la liste négative de la CE et de Schengen. Il ne luiserait plus possible de lever, de son propre chef, l'obligation du visa à l'encontre desressortissants de ces Etats. Ses intérêts en matière de politique de sécurité et de mi-gration pourraient être satisfaits, notamment par l'accès direct au Système d'Informa-tion de Schengen, dont elle devrait participer au financement. Sa participation au visauniforme entraînerait, outre un effet positif sur le tourisme et le commerce, un allé-gement du travail au sein de ses représentations à l'étranger. En se basant sur l'expé-rience faite par les Etats du groupe de Schengen (voir let. A), la Suisse pourrait es-compter une économie d'environ 10 postes de travail (quelque 1,2 million de francs)dans ses représentations sises dans les Etats membres de l'UE. La diminution des de-mandes de visa, évaluée entre 10 et 40%, ne manquerait pas non plus d'influer surl'effectif du personnel attaché à d'autres représentations. Des données précises sonttoutefois difficiles à articuler et dépendent de facteurs divers. Il est ainsi impossiblede prévoir le nombre des personnes soumises à l'obligation du visa qui choisiraient laSuisse comme destination principale ou comme pays de première escale. Certainesbranches économiques suisses (par ex. tourisme, compagnies aériennes) y voient leursintérêts particulièrement engagés. La Suisse serait alors compétente pour la délivrancedu visa uniforme. D'autres économies substantielles seraient encore possibles si laSuisse, devenue membre de l'UE, trouvait un accord avec un autre Etat membre del'UE pour déléguer l'examen de certaines demandes de visa. Seule une adhésion àl'UE donnerait à la Suisse un droit de participation et de codécision quant au dévelop-pement de l'acquis en matière de sécurité intérieure.

Une participation de la Suisse à l'EEE de même que l'entrée en vigueur des accordssectoriels (y inclus l’accord sur la libre circulation des personnes) n’influenceraientpas sa politique en matière de visa. On ne peut cependant exclure qu'une participationà l'EEE ou que l'accord sur la libre circulation des personnes puisse être de nature àfaciliter une coopération dans le domaine des visas, à l'instar de la pratique instauréeavec la Norvège et l'Islande. Toutefois, le statut de la Norvège et de l'Islande semble,du point de vue de leur souveraineté, quelque peu délicat (caducité de l'association encas de non-reprise de nouveaux actes; voir ch. 241, let. C).

Le maintien de la situation actuelle permet à la Suisse de gérer son champ d'actionselon les critères qui lui sont propres et de manière autonome. Mais cette situationprésente des désavantages considérables en ce qui concerne les perspectives écono-miques et la politique en matière de migration et de sécurité. Un visa uniforme délivrépour une seule entrée dans l'espace Schengen, n'autorise pas son titulaire à y retour-ner, après avoir transité par notre pays. Par le fait que les agents commerciaux et lestouristes doivent se procurer un second visa et subir un contrôle douanier supplémen-taire, la capacité concurrentielle de la Suisse se trouve entravée. Seule une étroitecoopération avec les Etats membres de l'UE peut permettre à la Suisse d'assurer ses

Page 240: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 238 - Chapitre 2

intérêts politiques en matière de migration et de sécurité; vouloir les imposer contreleur gré est illusoire.

La somme de ces inconvénients a incité le Conseil fédéral à sonder le groupe deSchengen et la CE pour connaître les possibilités de coopération en matière de politi-que des visas et de réalisation des contrôles de frontières dans les aéroports interna-tionaux qui, de facto, constituent des frontières extérieures de l'UE. Or, la conclusiond'un traité partiel de coopération dans ce domaine s'est avérée impossible. PlusieursEtats font dépendre pareille coopération institutionnalisée au moins de la signaturedes accords sectoriels avec la CE. De plus, la question d'une participation au Systèmed'Information de Schengen, qui sera intégré au sein de l'UE, apporte son lot de diffi-cultés. Si l'on se réfère au traité de coopération de Schengen avec la Norvège et l'Is-lande, force est de constater qu'une solution à venir n'ira en tout cas pas sans un res-serrement sensible de la marge de manoeuvre politique de la Suisse.

243 Contrôles aux frontières

A Politique de l’UE

Au sein de l'UE, les contrôles des personnes (pour les contrôles des marchandises voirch. 221.01) n'ont pas encore été entièrement supprimés aux frontières séparant lesEtats membres (frontières intérieures). Il a fallu les accords de Schengen pour que cetobjectif se concrétise (voir ch. 241 concernant les Etats membres et les délais d'appli-cation). Le Traité d'Amsterdam, quant à lui, prévoit que le Conseil de ministres pren-dra, dans les cinq ans suivant l'entrée en vigueur du traité, toutes les mesures nécessai-res pour garantir, à l'intérieur de l'Union européenne, la libre circulation des voya-geurs et l'entière suppression des contrôles de personnes tant pour les citoyens del'Union que pour ceux d'un Etat tiers. Cela signifie que dans cinq ans environ, il n'yaura plus de contrôles aux frontières intérieures de l'Union. Pour l'heure, il y a cepen-dant encore lieu de concilier ce principe avec la position particulière de la Grande-Bretagne et de l'Irlande, qui souhaitent maintenir les contrôles des personnes auxfrontières intérieures.

B Politique suisse

La loi sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE)478 établit le principe del'exécution des contrôles à la frontière et délègue au Conseil fédéral la compétence enmatière de réglementation. Ces contrôles s'effectuent aujourd'hui aux passages rou-tiers, à la frontière verte et aux voies navigables frontière, par le Corps des garde-frontières (Cgfr) et aux aéroports internationaux et dans les trains internationaux, parla police cantonale.

Les contrôles à la frontière s'opèrent par le biais de sondages, en fonction de la situa-tion et du personnel à disposition. Compte tenu de l'arrivée quotidienne de quelque

478 Loi fédérale du 26 mars 1931 sur le séjour et l'établissement des étrangers, RS 142.20.

Page 241: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 239 - Chapitre 2

700 000 personnes, vouloir vérifier systématiquement leur identité et leurs critèresd'entrée tiendrait de la démesure et de l'irréalisme. Aux aéroports, il est procédé à unevérification systématique des passeports, mais pas à un contrôle minutieux des per-sonnes.

C Relations contractuelles existantes

Le petit trafic frontalier entre la Suisse et ses voisins est réglé au moyen d'accordsbilatéraux qui, toutefois, n'entament en rien l'autonomie des Etats signataires en ma-tière d'exécution des contrôles à la frontières. Ces accords ont pour fin de faciliter lesdéplacements de la population des zones frontière. Ils réglementent, outre les dégrè-vements fiscaux et douaniers, en particulier le passage de la frontière au moyen depapiers spéciaux, l'entrée à d'autres endroits qu'aux points de passage admis et en de-hors des heures officielles.

Les accords sur le petit trafic frontalier ne s'opposent pas à l'exécution, en vertu de lalégislation de Schengen, de contrôles plus sévères, voire systématiques et généralisés,à la frontière avec la Suisse. On notera que, depuis l'entrée en vigueur de l'Accord deSchengen, aucun problème particulier n'a été signalé à la frontière suisse avec laFrance et l'Allemagne, alors qu'à la frontière avec l'Italie et l'Autriche les contrôlesétaient plus sévères dans un premier temps. Depuis, la situation s'est de nouveau nor-malisée.

De futurs accords sur le petit trafic frontalier ou les contrôles à la frontière avec lespays limitrophes relèveront du domaine d'application de la Convention de Schengen.Cette dernière prévoit une consultation obligatoire et l'approbation de tous les Etats deSchengen en cas d'assouplissements des contrôles à la frontière. Cette réserve ne s'ap-plique pas aux accords sur le petit trafic frontalier, dans la mesure où ils respectent lesprincipes de la Convention d'application sur le passage des frontières extérieures. LeConseil fédéral considère que cette situation ne changera pas après l'incorporation deSchengen dans l'UE.

Les accords sectoriels sur la coopération policière avec les pays limitrophes (voir ch.245) qui ont été conclus ou qui sont prévus ne remettent pas en question le principedes contrôles à la frontière. Ils portent notamment sur les modalités de l'exécution descontrôles à la frontière, l'échange de données, l'établissement en commun d'analysesde la situation, l'intervention d'équipes mixtes dans la zone frontière, etc. Il s'agit parailleurs de réduire le risque de voir les pays voisins renforcer leurs contrôles à lafrontière avec la Suisse.

Page 242: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 240 - Chapitre 2

D Répercussions sur la Suisse

Il résulterait d'une adhésion à l'UE que la Suisse ne procéderait à plus aucun contrôlede personnes aux frontières avec les Etats communautaires (frontières intérieures del'UE). Seuls resteraient les contrôles aux frontières extérieures dans les aéroports in-ternationaux, lors d'arrivées en provenance d'Etats n'appartenant ni à l'UE ni à l'EEE.Les aéroports internationaux pouvant être à la fois des frontières intérieures et exté-rieures, il est nécessaire d'employer des moyens techniques et du personnel pour sépa-rer les flux de passagers. D'ailleurs, indépendamment d'une adhésion de la Suisse àl'UE, une séparation des flux de passagers pourrait s'avérer judicieuse afin de faciliterle déroulement des opérations. Une évaluation définitive des conséquences financiè-res de telles mesures n'est pour l'heure pas possible 479.

Une réduction des contrôles à la frontière ne signifie pas que l'on renoncera aux con-trôles et aux organes de contrôle (des frontières), tels que le Corps des garde-frontières. Ainsi, la Convention d'application de l'Accord de Schengen prévoit expres-sément qu'une partie contractante, après consultation des autres parties, peut effectuertemporairement des contrôles nationaux à la frontière intérieure, si l'ordre public ou lasécurité nationale l'exigent. Mais en temps normal, un besoin accru de contrôles auxfrontières nationales résulte aussi de la criminalité internationale et des problèmesmigratoires. Leur exécution ne doit toutefois pas remettre en question le principe de lalibre circulation des personnes. Il est courant que les Etats de Schengen procèdententre eux, lorsque la situation l'exige, à des contrôles mobiles (par des brigades vo-lantes) dans les zones frontières. Certains Etats membres de Schengen ont même défi-ni l'étendue du territoire proche de la frontière où de tels contrôles peuvent s'effectuer.Quelques pays voisins ont conclu des accords bilatéraux réglant ces contrôles qui s'ef-fectuent par des équipes composées d'agents des deux Etats. Cette forme de coopéra-tion est également prévue dans les accords bilatéraux sur la coopération policière en-tre la Suisse et les pays limitrophes.

Il ne fait donc aucun doute qu'en cas d'adhésion à l'UE, il y aurait lieu de mettre surpied un organisme capable d'opérer en permanence des contrôles de police régulierssur un espace du territoire à limiter au besoin ou, dans des cas particuliers exception-nels, à la frontière. Le Département fédéral de justice et police examine actuellement,en collaboration avec les cantons, si cette tâche devrait être confiée au Corps suissedes garde-frontières - sous une autre forme, dans une composition différente et avecun nouveau cahier des charges - ou aux cantons eux-mêmes. Pour les motifs indiqués,la suppression des contrôles à la frontière ne devrait avoir que des effets mineurs surle nombre des personnes appelées à intervenir.

Une participation à l'EEE ou l’entrée en vigueur de l'accord sur la circulation despersonnes n'affecteraient que marginalement l'actuelle réglementation sur les contrô-les à la frontière.

479 En 1966, les responsables de l'aéroport de Zurich ont estimé que les frais d'investissement seraient de l'ordre

de 50 à 65 millions de francs, sans les frais d'exploitation.

Page 243: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 241 - Chapitre 2

En maintenant la situation actuelle, la Suisse peut librement décider de conserver telsquels ses contrôles à la frontière, de les renforcer ou de les alléger. Mais il faut plutôts'attendre à ce qu'elle doive alors augmenter ce genre de contrôles pour satisfaire à lapression politique intérieure au vu des problèmes actuels en matière de migration etde sécurité. Une réduction sans mesures compensatoires appropriées - qui, unilatéra-lement, sont irréalisables - ne saurait entrer en ligne de compte. Il serait toutefois illu-soire de penser que des contrôles renforcés à la frontière et la conclusion, avec lespays limitrophes, d'accords bilatéraux en matière de coopération policière transfron-talière permettront de compenser les conséquences négatives pour la politique de lasécurité qu'aurait le maintien de la situation actuelle, sans parler de ses inconvénientspour le trafic des voyageurs (voir ch. 242, let. D). Finalement, la Suisse ne disposed'aucun moyen légal pour empêcher un renforcement des contrôles aux frontières ex-térieures de l'UE avec la Suisse.

244 Politique d’asile

A Politique de l’UE

La politique commerciale et la politique de développement de la CE tiennent compteen partie d'aspects touchant aux migrations et à l’asile. On en donnera pour exempleles accords sur l’aménagement d’une zone de libre-échange avec les Etats du bassinméditerranéen, les nouvelles négociations de la Convention de Lomé avec les paysd'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (pays ACP), le programme PHARE avec lescandidats à l’adhésion d’Europe centrale et orientale ou le programme TACIS avecles Etats de la CEI. La conclusion de tels accords est habituellement liée à une obli-gation de réadmission de ses propres ressortissants. En procédant de la sorte, la CEs’assure que les réadmissions pourront effectivement avoir lieu.

Afin de réaliser les objectifs de l’Union, le Traité de Maastricht fait de la politiqued’asile, dans le cadre du troisième pilier, un domaine d’intérêt commun (art. K.1,Traité UE). En dehors de l’UE, la Convention d’application de l’Accord de Schengencomprend des dispositions relatives à la détermination de l’Etat à qui revient en pre-mier l’examen d’une demande d’asile. Ces dispositions ont été abrogées avec l’entréeen vigueur de la Convention de Dublin le 1er septembre 1997. Cette dernière qui estaujourd'hui une composante du troisième pilier de l’UE, a pour objectif de déterminerl’Etat membre compétent au sein de l'UE pour traiter une demande d'asile etd’empêcher ainsi le dépôt parallèle ou successif, dans l’espace UE, de demandesd’asile émanant de la même personne. L’application de la Convention de Dublin re-quiert un échange, entre tous les Etats membres de l'Union, d’informations généraleset relatives aux personnes. Les efforts de l’UE portent actuellement sur la création desprescriptions d’exécution et des conditions techniques nécessaires à cet effet, notam-ment sur la réalisation d’une banque européenne de données pour la comparaison desempreintes digitales (EURODAC). En outre, des efforts sont déployés au sein du troi-sième pilier pour coordonner le domaine de l’asile entre les Etats membres et rappro-cher les législations nationales (exigences minimales pour la reconnaissance du statutde réfugié, approfondissement et amélioration de la coopération). On assiste, au-

Page 244: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 242 - Chapitre 2

jourd’hui, à la mise en place des bases d'un droit européen de l’asile et des réfugiés,en parallèle à la répartition en Europe des charges liées à l’encadrement des réfugiéset des personnes à protéger.

Dans le Traité d’Amsterdam480, l'asile est traité en même temps que la libre circula-tion des personnes et l’immigration, et passe du troisième au premier pilier (nouveautitre IIIa, Traité CE). Pour concrétiser l’espace recherché en matière de liberté, de sé-curité et de droit, le Conseil des ministres édictera, dans les cinq ans suivant l’entréeen vigueur du Traité d'Amsterdam, les mesures correspondantes dans le domaine del’asile. En font partie des dispositions minimales sur l’admission des requérantsd’asile et sur la protection provisoire des personnes déplacées ou ayant besoin deprotection internationale (nouvel art. 73k, Traité CE). Le protocole du Traitéd’Amsterdam sur l’octroi de l’asile aux ressortissants d’Etats membres de l’UE cons-tate qu’en matière d’asile, tous les Etats membres de l’UE sont à considérer commedes pays de provenance sûrs. Dès lors, les citoyens de l’UE n’ont en principe pas ledroit de déposer une demande d’asile dans un autre Etat membre.

B Politique suisse

Une politique des réfugiés et de l’asile qui accorde refuge aux personnes persécutéeset à celles qui ont besoin de protection fait partie de la tradition humanitaire de laSuisse. La mise en œuvre d’une telle politique nécessite une étroite coordination avecles autres Etats. Aussi la Suisse cherche-t-elle depuis longtemps, dans le domaine dela politique d’asile, à se rapprocher des dispositions légales et de la pratique des au-tres pays européens d’accueil. Jusqu’au milieu des années 90, la Suisse était impli-quée, sur le plan politique tout au moins, dans le processus européen en matièred'asile et y prenait une part active. Depuis lors, elle est entièrement exclue de tous lesorganismes d’Europe occidentale traitant des questions de réfugiés et se réunissant ausein de l’UE.

C Relations contractuelles existantes

En juin 1992, la présidence de l'UE a soumis à la Suisse le projet d'une conventionparallèle et, par la suite, a confirmé à plusieurs reprises qu'elle était prête à négocierun tel accord avec la Suisse après l'entrée en vigueur de la Convention de Dublin. LaConvention de Dublin étant entrée en vigueur le 1er septembre 1997, la présidence del'UE a alors sur demande fait savoir informellement à la Suisse que certains Etatsmembres faisaient maintenant dépendre l'ouverture de négociations sur une conven-tion parallèle de la conclusion des négociations bilatérales sectorielles. Au cas où unedéclaration commune était adoptée lors de la signature des accords sectoriels, onpourrait immédiatement aspirer à l'ouverture de négociations sur un accord parallèle.

Des accords de réadmission visant à contrer les mouvements migratoires illégauxexistent actuellement entre la Suisse et les Etats de l’UE suivants: Allemagne, Autri-

480 Voir aussi ch. 311.03.4.

Page 245: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 243 - Chapitre 2

che et France. Avec l’Autriche, l’accord actuel est rediscuté; avec la France, le nouvelaccord de réadmission a été signé le 28 octobre 1998; les pourparlers menés avecl’Italie ont abouti, le 10 septembre 1998, à la signature de trois accords (coopérationtransfrontalière en matière de police, entraide judiciaire en matière pénale et réadmis-sion).

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l’UE, la Suisse pourrait engager ses moyens de lutte contre lesmultiples causes des mouvements migratoires en étroite coopération avec les Etatsmembres de l’UE. En outre, elle serait liée par les accords de la Communauté visantla création de zones de libre-échange et aux accords de partenariat et de coopérationqui comprennent des engagements de réadmission des propres ressortissants. De plus,la Suisse obtiendrait l’accès aux instruments juridiques correspondant de l’UE, àl’échange d’informations et aux mesures de coordination au sein de l’UE. Si la répar-tition des charges souhaitée dans le domaine de l’asile se concrétisait à moyen ou àlong terme, la Suisse, en tant que principal pays d’accueil en Europe, en profiterait.La Suisse se trouverait intégrée au processus de détermination de compétence prévupar la Convention de Dublin; on peut supposer qu'ainsi une partie des demandesd'asile déposées en Suisse devrait être traitée par d'autres Etats. Vu cette circonstance,on peut estimer les économies annuelles sur base du volume actuel des demandesd'asile à quelque 100 millions de francs.

Les cantons sont indemnisés par la Confédération pour leurs prestations en matièred'asile sur une base forfaitaire. A l'heure actuelle, la Confédération et les cantons éla-borent des mesures communes en vue de réaliser des économies et des améliorationsen matière d'aide sociale, de procédure et d'exécution de la politique d'asile. Ces ré-glementations sont indépendantes d'une adhésion à l'UE.

Une participation à l’EEE conduisant, après une période transitoire, à la libre circula-tion des personnes, pourrait, le cas échéant, réduire les actuels obstacles politiques àla conclusion d’un accord parallèle à la Convention de Dublin (le même raisonnementvaut aussi en cas d'entrée en vigueur des accords sectoriels). Néanmoins, le problèmedes contrôles à la frontière subsisterait (voir ch. 241, let. C), de sorte qu'il n'existe au-cune garantie que des négociations pourraient être ouvertes. Or, faute d’un tel accordparallèle ou d’une adhésion à l’UE, la Suisse deviendra le pays d’accueil pour qui-conque entend déposer une deuxième demande d’asile en Europe occidentale, ce quientraînera une hausse massive des demandes d'asile, ainsi qu'un très important coûtadditionnel.

Si la Suisse choisissait de s'en tenir à la situation actuelle, elle devrait diminuer mas-sivement l’attrait qu’elle exerce sur les requérants d’asile, comparé aux Etats de l’UE.Il conviendrait d’examiner les possibilités d'abaissement des standards en matière deprocédure et d'assistance, en veillant à ce que les éventuels modifications légales etpolitiques restent conformes au cadre étroit défini par le droit international public.Comme en cas de participation à l'EEE ou d'entrée en vigueur des accords sectoriels,

Page 246: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 244 - Chapitre 2

le maintien de la situation actuelle, à moins de la conclusion d'un accord parallèle,fera de la Suisse le pays d’accueil de substitution des demandeurs d'asile en Europeoccidentale. Il en résultera une hausse massive des demandes d'asile, ainsi qu'un trèsimportant coût additionnel.

245 Coopération policière

A Politique de l’UE

Les Etats d’Europe occidentale et centrale, y compris la Suisse, forment aujourd’huilargement une unité sur le plan de la géographie criminelle en ce qui concerne lesformes de menaces les plus actuelles (trafic international de drogue et blanchimentd'argent, terrorisme, tourisme du crime en matière de cambriolages, trafic d'automo-biles, traite d'êtres humains et autres domaines d'action du crime organisé). Interpol,en tant qu'organisation d'étendue mondiale, ne peut pas lutter suffisamment contre lesdéveloppements de la criminalité spécifiques aux continents. Cette situation a conduit,déjà au milieu des années 80, à la création au sein de l'UE de la Convention deSchengen et, plus tard, également de l'Office européen de police Europol.

Avec l'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam, la coopération policière restera undomaine de compétence intergouvernemental (troisième pilier), à moins que le Con-seil ne décide à l'unanimité que, pour une action donnée, les dispositions du Traité CE(premier pilier) sont applicables (nouvel art. K.14 du Traité UE). Le Traité d'Amster-dam prévoit une coopération plus étroite entre les forces de police, les autorités doua-nières et les autres autorités compétentes (nouveaux art. K.1 et K.2 du Traité UE).Cette coopération peut avoir lieu tant directement entre Etats membres de l'UE quepar l'intermédiaire d'Europol. La coopération ne se limite plus à la seule criminalitégrave, ce qui est nouveau, mais peut également englober celle de moindre importance.Les domaines de coopération comprennent, entre autres, la coopération opérationnelleentre les autorités compétentes, l'échange et l'analyse d'informations, la formation etle perfectionnement communs, l'échange d'agents de liaison et la coordination destechniques d'investigation.

Jusqu'à présent, il était prévu qu'Europol fonctionne, en premier lieu, comme"centrale de données" et "plaque tournante d'informations" (ancien art. K.1, ch. 9Traité UE). Comme la Convention Europol n'est entrée en vigueur que le 1er octobre1998, seul le service d'Europol compétent en matière de drogue a pu fonctionner jus-qu'ici. Le 1er janvier 1999, Europol a commencé son activité de prévention et de luttecontre la criminalité organisée et non organisée. Dans les cinq ans suivant l'entrée envigueur du Traité d'Amsterdam, Europol devra recevoir la compétence, nouvelle,d'adresser des demandes aux Etats membres en vue de réaliser des investigations, ain-si que d'encourager et de coordonner des mesures d'investigation des Etats membrespar le biais d'une équipe de soutien. De propres mesures d'investigation ou d'autrescompétences exécutives n'incomberont toutefois pas à Europol.

Page 247: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 245 - Chapitre 2

Enfin, il convient encore de mentionner la Convention du 18 juin 1998 relative auxdécisions de déchéance du droit de conduire481, dont le but est d'augmenter la sécuritédu trafic routier: si le permis de conduire est retiré à un automobiliste en raison d'uneviolation des règles de la circulation dans un autre Etat membre de l'UE, cette mesurea également force exécutoire dans son pays de résidence au sein de l'UE.

B Politique suisse

Dans la mesure où la Suisse, en qualité d'Etat non-membre de l'UE, ne peut adhérer nià Schengen, ni à Europol, elle dépend dans une large mesure, en ce qui concerne lacoopération policière avec l'étranger, de son affiliation à l'Organisation internationalede police criminelle Interpol. S'agissant de cette dernière, la coopération entre les paysse limite à l'échange d'informations de police criminelle. De nouvelles formes de coo-pération opérationnelle, telle que l'observation transfrontalière, ne sont pas couvertespar Interpol. Une analyse systématique des cas de criminalité organisée dans leur in-tégralité fait aussi largement défaut dans le système Interpol.

Le droit suisse d'entraide judiciaire contient des dispositions particulières sur la coo-pération policière internationale. En complément, la Suisse peut, par analogie, appli-quer à la coopération policière internationale des principes concernant l'entraide inter-nationale en matière pénale.

C Relations contractuelles existantes

Afin de combler le déficit évoqué à la let. B, la Suisse a, en 1997, entamé avec tousles Etats voisins des négociations en matière de coopération policière, dans le but deconvenir bilatéralement d'un "standard Schengen". Il conviendrait avant tout de ré-glementer des domaines opérationnels importants, tels que l'observation et la pour-suite transfrontalières, ainsi que la livraison surveillée (transport de drogue et de biensdangereux accompagné et surveillé par des policiers agissant sous couverture en vuede remonter une filière), mais aussi la coopération policière simplifiée directe et unetransmission d'informations efficace. Avec la France, ce but a partiellement pu êtreatteint; l'accord relatif à la coopération policière a été signé le 11 mai 1998, de mêmequ'avec l'Italie, cependant avec un contenu plus modeste (signature le 10 septembre1998). Avec l'Allemagne et l'Autriche, le résultat contiendra probablement des solu-tions innovatrices dans quelques domaines. Par ces accords, les inconvénients d'unenon-appartenance à Schengen et à Europol ne pourront être que partiellement com-pensés. Ces accords ne permettront ni une analyse globale de la criminalité dans lesEtats membres de l'UE, ni un accès au Système d'Information de Schengen (SIS). LaSuisse n'aura également aucun accès aux différents groupes de travail des Etats mem-bres de Schengen ou de l'UE.

L'art. 42 de la Convention Europol permet à Europol d'établir des relations avec desEtats tiers. La Suisse mettra tout en œuvre afin d'instaurer une coopération institu-

481 JO n° C 216 du 10 juillet 1998, p. 1.

Page 248: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 246 - Chapitre 2

tionnalisée avec Europol sur la base de cette disposition. Actuellement, il est avanttout important pour la Suisse de faire partie des premiers Etats tiers avec lesquels Eu-ropol coopérera de la sorte.

De plus, la Suisse promeut activement le détachement d'agents de liaison à l'étran-ger482. Par de tels contacts non officiels, la Suisse ne peut toutefois que participer demanière fragmentaire au flux d'informations de Schengen et d'Europol, et cela uni-quement dans le cadre fixé par nos Etats partenaires. Ces contacts ne peuvent rempla-cer une entière adhésion.

D Répercussions sur la Suisse

En cas d’adhésion à l'UE, l'ensemble de l'acquis en matière de sécurité intérieure se-rait applicable à la Suisse, qui pourrait ainsi participer au Système d'Information deSchengen. De plus, la Suisse pourrait également prendre part à Europol. Une partici-pation au Système d'Information de Schengen et à Europol nécessiterait la création, auplan fédéral, d'offices centraux nationaux correspondants. A titre d'exemple, les res-sources nécessaires à la mise sur pied technique du bureau national de coordination(office central national de Schengen) en Autriche se sont chiffrées à environ 3 mil-lions de francs; à cela sont venus s'ajouter des frais de personnel pour environ trentenouveaux collaborateurs. Pour les cantons, ces efforts en matière de coordinationn'auraient pas de conséquences financières; les cantons pourraient en effet probable-ment se baser sur l'infrastructure existante.

Une participation à l'EEE ainsi que l’entrée en vigueur de l'accord sectoriel sur lalibre circulation des personnes (voir ch. 221.02) n’auraient pas d’effet sur le plan de lasécurité intérieure.

Le maintien de la situation actuelle et, donc, le maintien de la Suisse à l'écart du ter-ritoire européen de sécurité en cours de consolidation, est source de nets inconvé-nients pour les tâches quotidiennes de police. Ainsi, une analyse globale de la crimi-nalité n'est pas possible, et la Suisse ne peut pas non plus participer au Système d'In-formation SIS, substantifique moelle de l'Accord de Schengen. Ces inconvénients nepourront être écartés que partiellement par le biais des accords de coopération poli-cière conclus avec les pays voisins.

246 Coopération judiciaire

A Politique de l’UE

La coopération judiciaire comprend tous les domaines nécessaires à la création d'unespace juridique commun qui permette aux sujets de droit de faire valoir leurs droits

482 Jusqu'à présent à Washington DC (USA), à Lyon (auprès d'Interpol) et à Francfort (auprès du

"Bundeskriminalamt" de Wiesbaden).

Page 249: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 247 - Chapitre 2

devant tous les tribunaux des Etats de l'UE avec les mêmes garanties que devant lestribunaux de leur propre Etat.

Tous les Etats de l'UE sont membres du Conseil de l'Europe. La plupart d'entre euxont ratifié les conventions les plus importantes dans le domaine du droit pénal (voirlet. C). Par ailleurs, l'UE est actuellement en train d'élaborer divers accords en la ma-tière. Ces derniers ont pour but de compléter les conventions de droit pénal du Con-seil de l'Europe et tendent à améliorer ainsi qu'à simplifier la coopération.

La Convention d'application de l'Accord de Schengen comprend également des dispo-sitions relatives à l'entraide judiciaire et à l'extradition483. Ces dernières complètentégalement les Conventions européennes d'entraide judiciaire et d'extradition, de mêmequ'elles facilitent leur application. L'entrée en vigueur du Traité d'Amsterdam rendral'acquis de Schengen immédiatement applicable à tous les Etats de l'UE, à l'exceptionde la Grande-Bretagne et de l'Irlande (voir ch. 241, let. B).

La coopération judiciaire pénale restera, même après l'entrée en vigueur du Traitéd'Amsterdam, un domaine relevant de la compétence intergouvernementale (troisièmepilier EU), pour autant que le Conseil ne décide pas, à l'unanimité, que les disposi-tions du Traité UE (premier pilier) sont applicables à une mesure donnée (nouvel art.K.14 Traité UE). Dans le troisième pilier, les décisions sont prises à l'unanimité. LeTraité d'Amsterdam élargit et concrétise la coopération judiciaire en matière pénaleentre les Etats membres de l'UE (nouveaux art K.1 et K.3 Traité UE). A l'avenir, desmesures communes en vue de faciliter et d'accélérer l'entraide judiciaire, l'extradition,ainsi que l'exécution des décisions, y compris la nécessaire harmonisation du droit,pourront être prises. De même, des mesures en vue de rapprocher les dispositions pé-nales des Etats membres dans les domaines du crime organisé, du terrorisme et dutrafic illicite de drogue pourront être adoptées.

Jusqu'à présent, la coopération judiciaire en matière civile a été éclipsée par la coopé-ration en matière pénale; dans les deux domaines, de nombreux accords multilatérauxétaient à même d'assurer un soutien efficace aux procédures en cours à l'étranger. LeTraité d'Amsterdam484 donnera une dimension communautaire au droit civil de sortequ'une activité renforcée de la CE est à prévoir dans ce domaine. Actuellement, laConvention de Bruxelles sur la compétence judiciaire et l'exécution des décisions enmatière civile et commerciale (voir ch. 222.06.5) fait partie de l'acquis communau-taire; la nouvelle Convention du 26 mai 1997 relative à la signification et à la notifi-cation dans les Etats membres de l'UE des actes judiciaires et extrajudiciaires en ma-tière civile ou commerciale485, la Convention concernant la compétence, la reconnais-sance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale486 et la nouvelle Conven-tion sur les procédures d'insolvabilité (voir ch. 222.06.1) ne sont pas encore en vi-

483 Art. 48 et 59 de la Convention d’application de l’Accord de Schengen.484 Voir à cet égard ch. 311.03.4.485 JO n° C 261 du 27 août 1997, p.1.486 Convention "Bruxelles II", JO n° C 221 du 16 juillet 1998, p. 1.

Page 250: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 248 - Chapitre 2

gueur. En ce qui concerne les quelques règles de conflit nécessaires à la réalisation dumarché intérieur, il convient de se référer à ce qui est exposé concernant le droit in-ternational privé (voir ch. 222.06.4).

B Politique suisse

Dans le domaine du droit pénal, la Suisse est liée aux Etats membres de l'UE par lesconventions du Conseil de l'Europe. En plus des conventions d'entraide judiciaire etd'extradition du Conseil de l'Europe, il existe des accords complémentaires bilatérauxconclus avec plusieurs Etats membres de l'UE (voir let. C). La Suisse applique, encomplément, la loi sur l'entraide pénale internationale. En relation avec beaucoupd'Etats de l'UE, l'actuelle politique de la Suisse refusant l'entraide judiciaire en ma-tière fiscale, de même que l'exécution d'extraditions à la base desquelles se trouve undélit fiscal, posent problème. Toutefois l'entraide judiciaire peut déjà actuellementêtre accordée dans des cas d'escroquerie en matière fiscale487.

La Suisse adhérera, dans la mesure du possible, aux nouvelles conventions du Conseilde l'Europe. Si nécessaire, elle élaborera avec des Etats membres de l'UE des accordscomplémentaires aux conventions du Conseil de l'Europe. Si de nouveaux accords del'UE en matière de droit pénal devaient engendrer des inconvénients à la Suisse, ilconviendrait d'envisager de négocier avec l'UE dans ces domaines.

La LDIP488 contient les bases nécessaires à l'entraide judiciaire (art. 11) ainsi qu'à lareconnaissance et à l'exécution de décisions étrangères (art. 25 ss) en matière de coo-pération judiciaire dans les affaires civiles.

C Relations contractuelles existantes

La Suisse n'a, en matière de droit pénal, aucune relation contractuelle avec l’UE. Lesconventions suivantes du Conseil de l’Europe sont applicables avec tous les Etatsmembres: Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale489, Conven-tion européenne d'extradition490, Convention sur le transfèrement des personnes con-damnées491 et Convention européenne pour la répression du terrorisme492. Le premieret le deuxième protocoles additionnels à la Convention européenne d'extradition493 et

487 Art. 3, al. 3, de la loi fédérale sur l'entraide pénale internationale, RS 351.1, de même qu'art. 24 de l'ordon-

nance sur l'entraide pénale internationale, RS 351.11.488 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP), RS 291.489 Convention européenne d'entraide judiciaire en matière pénale du 20 avril 1959, RS 0.351.1.490 Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, RS 0.353.1.491 Convention du 21 mars 1983 sur le transfèrement des personnes condamnées, SR 0.343.492 Convention européenne du 27 janvier 1977 pour la répression du terrorisme, RS 0.353.3.493 Protocole additionnel du 15 octobre 1975 à la Convention européenne d'extradition, RS 0.353.11 et le

deuxième protocole additionnel du 17 mars 1978 à la Convention européenne d'extradition, RS 0.353.12.

Page 251: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 249 - Chapitre 2

la Convention relative au blanchiment494 sont applicables à l'égard de certains Etats del'UE.

Il existe également des accords complémentaires à la Convention européenne d'en-traide judiciaire et à celle d'extradition avec l'Allemagne et l'Autriche. Récemment,des accords complémentaires à la Convention européenne d'entraide judiciaire ontaussi été négociés avec la France et l'Italie. En outre, des premières discussions explo-ratoires ont été menées avec la France au sujet d'un accord bilatéral complémentaire àla Convention européenne d'extradition. De tels accords complémentaires contribuentà simplifier et à accélérer l'entraide judiciaire et l'extradition. A titre d'exemple, lesaccords complémentaires aux conventions sur l'entraide judiciaire prévoient l'envoidirect par voie postale d'actes de procédure et de documents officiels, ce qui déchargeles autorités. De même, ces accords permettent plutôt que de devoir suivre la voiecompliquée des ministères de la justice, l'établissement de contacts directs entre auto-rités judiciaires des deux Etats ou d'autres simplifications.

Dans le domaine du droit privé, la Suisse est liée à la plupart des Etats membres del'UE par les instruments multilatéraux du Conseil de l'Europe et de la Conférence deLa Haye pour le droit international privé. Par ailleurs, il existe une série de conven-tions bilatérales qui, par rapport aux conventions de La Haye et du Conseil de l'Eu-rope, simplifient les échanges en matière de droit civil.

D Répercussions pour la Suisse

Le Traité d'Amsterdam prévoit une coopération plus étroite entre les autorités judi-ciaires pénales des Etats de l’UE. En particulier dans les domaines de l’entraide judi-ciaire et de l'extradition, les procédures seront simplifiées et accélérées. La coopéra-tion, jusqu'à présent limitée aux formes graves de criminalité internationale, sera nou-vellement étendue à toutes les formes de criminalité. L'actuelle politique de la Suisseen matière fiscale serait problématique en cas d'adhésion à l'UE. En tant que membrede l'UE, la Suisse devrait s'attendre à une augmentation du nombre de demandes derenseignements de la part d'autres Etats de l'UE, et, de ce fait, à une augmentation descas d'entraide judiciaire et d'extradition (voir ch. 222.07.6).

Dans la mesure où la coopération judiciaire dans le domaine du droit civil se dévelop-pera encore, ses effets sur la Suisse en cas d'adhésion à l'UE ne peuvent guère êtreévalués. Pour ce qui est du domaine le plus uniformisé de l'entraide judiciaire en ma-tière civile, à savoir la reconnaissance et l'exécution mutuelles, une adhésion à laConvention de Bruxelles n'apporterait rien de nouveau par rapport à la Convention deLugano déjà en vigueur pour la Suisse. Une reprise des dispositions de la Conventionde 1965 relative à la notification n'entraînerait pas non plus d'importants changementspar rapport à la Convention de La Haye relative à la notification actuellement en vi-gueur pour la Suisse.

494 Convention du 8 novembre 1990 relative au blanchiment, au dépistage, à la saisie et à la confiscation des

produits du crime, RS 0.311.53.

Page 252: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 250 - Chapitre 2

A l'avenir, il ne faudra s'attendre à des changements ou à des coûts additionnels dansle domaine de la coopération judiciaire en matière pénale ou civile ni en cas de parti-cipation à l'EEE, ni en cas d’entrée en vigueur des accords sectoriels, pas plus qu’encas de maintien de la situation actuelle.

25 Financement des activités de l'Union européenne

251 Questions financières générales

Ce chapitre porte sur une estimation des flux financiers qui résulteraient d'une adhé-sion de la Suisse à l'UE, c'est-à-dire des versements qui devraient être faits à l'UE etde ceux qui proviendraient de cette dernière. Il évalue par ailleurs les implicationspossibles d'une adhésion sur le budget de la Confédération dans la mesure où celles-ciont pu être identifiées et chiffrées. En revanche, il ne considère pas les implicationsque l'adhésion pourrait avoir sur les cantons.

Les conséquences financières d'une participation à l'EEE et des accords bilatérauxsectoriels sont également traitées dans ce chapitre. Les implications économiques et,en particulier, l'influence qu'aurait l'adhésion à l'UE sur la croissance du PNB sonttraitées au ch. 333.02.

Les chiffres articulés dans ce chapitre sont à considérer avec prudence, dans la mesureoù ils ne sont que des estimations reposant sur une situation donnée et qu'on peutd'ores et déjà penser que la situation effective sera vraisemblablement différente:évolution de la situation économique et politique en Suisse et au sein de l'UE, régimetransitoire, résultats des négociations, réforme possible des mécanismes de finance-ment de l'UE, etc.

251.01 Principes, ordre de grandeur et structure du budget de la CE

Le budget de la Communauté est l'expression de ses politiques. Il obéit à plusieursprincipes fondamentaux. Parmi les plus importants figure notamment le principe del'unité selon lequel l'ensemble des dépenses et des recettes de la Communauté doiventêtre réunies au sein d'un seul et unique document. Un autre principe important est ce-lui de l'universalité. Il regroupe la règle de non-affectation (selon laquelle les recettesbudgétaires ne doivent pas être affectées à des dépenses précises) et la règle de lanon-contraction (selon laquelle les recettes et les dépenses doivent être inscrites aubudget pour leur montant intégral, sans contraction entre elles). Enfin, le principe dela spécialité des dépenses signifie que chaque crédit doit avoir une destination déter-minée et être affecté à un but spécifique.

En 1998, le budget de la Communauté s'est élevé à 91,01 milliards d'euros495 (env.150 milliards de francs).

495 En raison de la transformation, le 1er janvier 1999, de l'unité monétaire ecu en euro (rapport de conversion

1:1), le présent rapport utilise exclusivement le terme "euro".

Page 253: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 251 - Chapitre 2

Les dépenses de la CE sont divisées en six sections correspondant aux institutionscommunautaires496. Alors que, de manière générale, les crédits attribués à ces sectionsne concernent que des dépenses de fonctionnement (personnel, immeubles, matériel,missions, etc.), la section relative à la Commission est subdivisée en crédits de fonc-tionnement et en crédits opérationnels. La partie concernant les crédits opérationnelsest elle-même subdivisée en six catégories (entre parenthèses: part des dépenses tota-les de 1997)497:

- Politique agricole commune (46,7 %);

- Mesures structurelles (34,9 %)498;

- Politiques internes (6,5 %)499;

- Actions extérieures (6,4 %)500;

- Administration (4,9 %);

- Garanties, réserves, compensations (0,6 %).

Par ailleurs, la Communauté dispose d’autres instruments financiers, qui n'ont pas étéintégrés dans le budget général. Il s'agit notamment du budget opérationnel de laCommunauté européenne du charbon et de l'acier (CECA), 0,2 milliard d'euros, et duFonds européen de développement (FED), 2 milliards d'euros. Il convient de men-tionner également la Banque centrale européenne (BCE, voir ch. 222.01.1) et la Ban-que européenne d'investissement (BEI). La BEI a pour mission de contribuer à l'inté-gration, au développement équilibré et à la cohésion économique et sociale des Etatsmembres par le biais du financement d'investissements communautaires dans plu-sieurs domaines. En 1997, par exemple, deux tiers des financements de la BEI dansl'UE ont visé le développement des régions défavorisées en appuyant notamment degrands projets d'infrastructure dans le domaine des transports. La BEI est sans butlucratif et se finance sur le marché des capitaux501.

La négociation de perspectives financières à long terme, que l'on peut comparer à laplanification financière de la Confédération, permet à la Communauté d'assurer lesuivi budgétaire de ses grandes orientations politiques. Ainsi, par exemple, dans sesdernières perspectives financières 1993 à 1999, la CE a pu dégager une priorité enfaveur des régions les plus défavorisées. Une attention toute particulière a égalementété portée au développement des actions extérieures. Du côté des ressources, un ob-jectif des perspectives financières a été la baisse progressive de la ressource TVA etl'augmentation de la ressource complémentaire. En raison de son importance, l'élar-

496 Parlement européen, Conseil des ministres, Commission, Cour de justice, Cour des comptes, Comité éco-

nomique et social/Comité des régions.497 Source: vade-mecum budgétaire de la Commission européenne, édition 1998.498 Fonds structurels, Fonds de cohésion, mécanisme financier EEE.499 Recherche et développement technologique; formation générale et professionnelle, jeunesse, culture, do-

maine audiovisuel, information et autres mesures sociales; protection des consommateurs, marché intérieur,industrie et réseaux transeuropéens; énergie, surveillance de la sécurité Euratom et environnement.

500 Y inclus Politique extérieure et de sécurité commune (PESC).501 Au 1er janvier 1999 son capital est passé de 62 à 100 milliards d'euros.

Page 254: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 252 - Chapitre 2

gissement de l'UE à l'Autriche, à la Finlande et à la Suède a comporté l'adaptation desperspectives financières 1993 à 1999. Les négociations pour les perspectives financiè-res 2000 à 2006 ont déjà commencé. Elles seront largement influencées par le débatsur l'Agenda 2000 de l'UE (voir ch. 253).

251.02 Participation actuelle au financement de programmes de la CE

Recherche

La Suisse participe actuellement au programme-cadre de recherche et développement(PCRD) "projet par projet" (voir ch. 222.13). La participation d'instituts de rechercheet de chercheurs suisses est financée directement par la Confédération, qui a versé, en1997, 83,3 millions de francs à ce titre.

Formation

La Suisse ne participe pas officiellement aux programmes de formation de la CE (voirch. 222.15). Des mesures transitoires unilatérales prises par notre pays permettent ce-pendant le financement de la participation d'institutions suisses à des projets officielsdans le cadre des programmes de la CE, ainsi que le financement de bourses de mobi-lité pour un montant d'environ 8 millions de francs en 1998.

Fusion nucléaire contrôlée

La Suisse participe également au programme "Fusion nucléaire contrôlée" en versantà la Communauté environ 11,5 millions de francs par année. Cette participation se faiten vertu de l'accord de coopération avec Euratom de 1978.

251.03 Conséquences financières d'une adhésion de la Suisse à l'UE

Au stade actuel, les conséquences financières d'une adhésion de la Suisse à l'UE nepeuvent être estimées, pour des raisons évidentes, que sur la base de certaines hypo-thèses. Celles-ci ne contiennent aucun message politique, mais visent, au plan métho-dique, à limiter les impondérables en faisant des estimations quant aux évolutions fu-tures. Les hypothèses de travail retenues à cet effet sont les suivantes:

- La Suisse adhère à l'UE en tant que 16e membre.

- Les estimations du PIB et du PNB des pays membres de l'UE et de la Suisse pour1998 se basent sur les données publiées par l'Office statistique des Communautéseuropéennes (EUROSTAT, volume n°65, 1998).

- L'euro est évalué à la valeur de CHF 16 280502.

- Les recettes douanières reposent sur des données de l'année 1997.

502 Source: Eurostat, septembre 1998. Le cours de change de référence de l'euro en francs suisses, publié par la

Banque centrale européenne le 4 janvier 1999, s'élevait à 1,6168 (JO n° C 2 du 5 janvier 1999, p. 1).

Page 255: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 253 - Chapitre 2

Les chiffres figurant dans ce chapitre doivent être considérés uniquement comme desestimations reposant sur la situation actuelle.

A Flux financiers liés à l'adhésion

En tant qu’Etat membre de l’UE, la Suisse devrait contribuer au financement du bud-get communautaire, ainsi que de certains fonds et programmes hors budget. Elle béné-ficierait en retour de subventions liées à la mise en œuvre de mesures dans divers do-maines (agriculture, formation professionnelle).

A.1 Flux Suisse - UE

A.11 Contributions au budget communautaire (ressources propres)

La Communauté dispose, pour le financement de ses dépenses, de ressources propresse définissant comme des recettes de nature fiscale qui lui sont affectées une fois pourtoutes et qui lui reviennent de droit sans qu'une décision ultérieure des autorités natio-nales ne doive intervenir. Les ressources propres de la Communauté comprennent lesdroits de douane sur les produits agricoles et les cotisations sucre et isoglucose, lesdroits de douane sur les produits industriels, la ressource TVA et une "quatrième res-source" désignée également sous le terme de "ressource complémentaire", déterminéeen fonction de la somme des PNB de tous les Etats membres503.

Le plafond de ces ressources propres, tel que fixé le 31 octobre 1994, a évolué parétapes, de 1,21% en 1995 jusqu'à 1,27% du PNB de l'UE en 1999. Aux ressourcespropres s'ajoutent les recettes diverses telles que les intérêts de retard et les amendes.Traditionnellement, la ressource TVA a financé entre 50 et 60% du budget général,représentant ainsi de loin la recette la plus importante. Depuis 1997, la ressource TVAet la ressource complémentaire contribuent chacune au financement de 40% environdu budget communautaire.

Remarques générales concernant les droits de douane sur les produits agricoles(ressource 1) et industriels (ressource 2)

En 1997, la Suisse a perçu des droits de douane à hauteur de plus de 1,1 milliard defrancs suisses. De ce montant, 371 millions de francs ont été prélevés sur les importa-tions en provenance de pays autres que ceux de l'Union européenne, dont 173 millionssur les produits agricoles.

Dans l'estimation des rentrées douanières, il convient de prendre en considération plu-sieurs éléments qui vont influencer le montant des droits encaissés.

503 Cette ressource est destinée à équilibrer le budget. Son taux est fixé dans le cadre de la procédure budgé-

taire, compte tenu de toutes les autres recettes du budget.

Page 256: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 254 - Chapitre 2

Il y a tout d'abord le fait que la Suisse n'aurait pas, à l'exception des aéroports et duport sur le Rhin, de frontière extérieure avec des pays non-membres de l'UE. En casd'adhésion, la perception des droits par notre pays pourrait, dans un cas extrême, selimiter aux seules marchandises importées par voie aérienne, étant donné que pour lesautres moyens de transport (rail, route, eau) il serait possible de procéder au dédoua-nement des marchandises aux frontières extérieures de l'UE. En 1997, les importa-tions par voie aérienne ont représenté, pour les produits agricoles, un peu moins de10%, et pour les produits industriels, pratiquement la moitié des importations. Auxfins du présent rapport, et compte tenu des produits que nous importons actuellement,nous avons admis comme hypothèse que la Suisse continuerait à dédouaner le tiersdes produits actuellement importés par la route, le rail ou par voie fluviale.

L'adhésion entraînerait, selon toute vraisemblance et pour diverses raisons, une aug-mentation des importations en provenance des autres Etats membres de l'UE, aug-mentation qui se ferait au détriment des pays tiers. Compte tenu de la compositionactuelle des importations provenant de ces derniers, nous estimons que la baisse desimportations agricoles en provenance de pays non-membres de l'UE pourrait être del'ordre de 20%.

L'estimation est redue difficile pour deux raisons: premièrement, la CE a conclu avecde nombreux partenaires commerciaux des accords préférentiels qui divergent desaccords conclus par la Suisse tant en ce qui concerne les pays et les produits que laportée des concessions faites. deuxièmement, la CE applique en général des droitscalculés sur la valeur de la marchandise (droits ad valorem), alors que la Suisse lesperçoit en fonction du poids de la marchandise (droits spécifiques) et que le niveau dela charge moyenne douanière dans l'UE est supérieur à celui pratiqué par notre pays.

Outre, les droits perçus à la frontière, les ressources propres de la Communauté com-prennent également les cotisations sucre et isoglucose prévues dans le cadre de l'orga-nisation commune des marchés dans le secteur du sucre.

Compte tenu de ce qui précède, l'estimation des recettes douanières encaissées par laSuisse et rétrocédées à l'Union européenne s'élèveraient à:

Ressource 1: droits de douane sur les produits agricoleset cotisations sucre et isoglucose

Prélèvements agricoles: CHF par an

- Droits de douane 53 millions- Cotisations sucre et isoglucose 17 millions./. 10% pour les frais de perception (montant arrondi) 5 millions

65 millions

Page 257: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 255 - Chapitre 2

Ressource 2: droits de douane sur les produits industrielsCHF par an

- Droits de douane 124 millions./. 10% pour les frais de perception (montant arrondi) 12 millions

112 millionsRessource 3: ressource TVA

L'adhésion à l'UE nécessiterait une adaptation du taux de TVA à un taux minimal gé-néral de 15% et un taux minimal réduit de 5% (voir ch. 222.07.2).

La ressource TVA est calculée moyennant affectation d'un taux de 0,84% à l'assietteTVA. Toutefois, étant donné que l'assiette TVA suisse504, qui s'élève à 234 848 mil-lions, représente plus du 50% de l'estimation du PNB suisse pour l'année de référence(408,5 milliards), elle est corrigée et ramenée à 50% du PNB estimé, soit 204,25 mil-liards. Si on applique le taux de 0,84% à cette valeur, la contribution suisse à la 3e

ressource de l'UE s'élèverait par conséquent à 1 716 millions de francs.

Une correction des déséquilibres budgétaires est accordée au Royaume-Uni. Ce ra-bais, qui s'élève à 3,931 milliards d'euros, est cependant entièrement financé par lesautres Etats membres de l'UE. Notre pays devrait payer environ 4% du rabais total, àsavoir environ 260 millions de francs.

CHF par an

- Ressource TVA (contribution suisse) 1 716 millions- Financement du rabais britannique 260 millions

Ressource 3 1 976 millions

Ressource 4: ressource complémentaire (fondée sur le PNB)

La ressource complémentaire est une ressource fondée sur le PNB. Elle est obtenuemoyennant application d'un taux, représentant la part du PNB d'un pays à la sommede tous les PNB des Etats membres de l'UE, au montant total à encaisser pour cetteressource et fixé par les Etats membres pour une année donnée. En 1999, la sommedes PNB des quinze Etats membres de l'UE devrait s'élever à 12 656 milliards defrancs. En ajoutant à cette somme 408 milliards représentant la prévision du PNBsuisse pour cette même année, la somme des PNB de l'UE incluant notre pays se chif-frerait à 13 064 milliards de francs. La part de la Suisse à la somme des PNB repré-sente 3,1%. Dans le projet de budget de la CE pour 1999, le montant du PNB à en-caisser par les Etats membres a été fixé à 67,6 milliards de francs (48,4% du budgetglobal). La contribution de la Suisse à la ressource complémentaire fondée sur le PNBs'élèverait par conséquent à 3,1% des 67,6 milliards de francs précités, soit à 2 097millions.

CHF par an

- Ressource complémentaire (fondée sur le PNB) 2 097 millions

504 Cette dernière est obtenue moyennant application aux recettes TVA prévues (TVA de 7,5 % = 15,5 mil-

liards) du taux moyen pondéré de 6,6%.

Page 258: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 256 - Chapitre 2

Vue d'ensemble de la contribution de la Suisse au budget général de la CE

En tant que 16e Etat membre, la Suisse serait tenue de contribuer au budget général dela CE pour les montants suivants:

CHF par an

- Droits de douane sur les produits agricoles 65 millions- Droits de douane sur les produits industriels 112 millions- Ressource 3:. Ressource TVA (contribution suisse) 1 716 millions. Financement du rabais britannique 260 millions

- Ressource fondée sur le PNB 2 097 millions

4 250 millions

A.12 Contributions hors budget

En tant que membre de l'UE, la Suisse devrait, en plus des contributions effectuées autitre des ressources propres de la Communauté et mentionnées au chiffre précédent,verser des contributions en faveur du Fonds européen de développement.

Fonds européen de développement (FED)

La coopération au développement des pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique(ACP) est essentiellement financée par le Fonds européen de développement créédans le cadre des conventions de Lomé, qui lient actuellement la CE à 71 Etats ACP(voir ch. 234.02). Le FED n'est pas intégré dans le budget général, mais alimenté pardes contributions des Etats membres et doté d'un régime autonome: le montant duFED et le niveau des contributions directes des Etats membres au Fonds sont établispar des accords internes arrêtés par le Conseil. Les contributions exigées des Etatsmembres pour ce Fonds sont principalement déterminées par leur capacité économi-que (PNB). En partant de la constatation que la capacité économique de la Suisse estproche de celle des Pays-Bas, la contribution annuelle de notre pays peut être estiméeà quelque 100 millions de francs par année.

A.13 Participations au capital des banques

Les contributions suisses au capital des banques ont, de par leur nature, un caractèredifférent des transferts mentionnés précédemment. La participation au capital de laBanque européenne d'investissement provoquerait une dépense unique à la charge dubudget de la Confédération répartie très certainement sur plusieurs années, alors quela participation à celui de la Banque centrale européenne conduirait à un transfert desréserves monétaires de la BNS à la BCE.

Participation au capital de la Banque européenne d'investissement (BEI)

En tant que membre de l’UE, la Suisse devrait souscrire au capital de la BEI, quis'élève à 100 milliards d'euros. En se basant sur le même modèle qui a servi à déter-

Page 259: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 257 - Chapitre 2

miner la quote-part des trois pays membres de l'AELE ayant adhéré à l'UE le 1er jan-vier 1995 (Autriche, Finlande et Suède), la part de la Suisse à ce capital s'élèverait à3,11%, soit à 3,11 milliards d'euros, (environ 5,09 milliards de francs). La part à libé-rer étant fixée à 3,11% du capital libéré et des réserves, qui se montent à 17,4 mil-liards, le versement auquel la Suisse devrait procéder serait de quelque 540 millionsd'euros, soit approximativement 880 millions de francs suisses. Le montant exact etl'échelonnement de ces versements devaient faire encore l'objet de négociations. Anoter qu'un tel versement ne constitue pas un placement à fonds perdu. La Suisse res-terait propriétaire de ses fonds.

Participation au capital de la Banque centrale européenne (BCE)

Si la Suisse devenait membre de l'UE et pour autant qu'elle intègre l'UEM, la Banquenationale devrait prendre une part du capital de la Banque centrale européenne ettransférer une partie de ses réserves monétaires auprès de celle-ci. Le montant de laparticipation de la BNS aux réserves de la BCE devrait se situer entre 2,3 et 3,4 mil-liards de francs (voir ch. 222.01.1, let. C.1).

A.2 Flux UE - Suisse

En tant que membre de l'UE, la Suisse recevrait des subventions, dont le financementserait assuré par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, les Fondsstructurels et le Fonds de cohésion. Il s'agit de subventions non remboursables, à ladifférence des prêts remboursables qui peuvent être accordés par la Banque euro-péenne d'investissement.

Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) - "section garantie"

Aux fins de concrétiser le principe de la solidarité financière, qui est un des élémentsessentiels de la politique agricole commune, les Etats membres de l'UE ont créé, en1962, un fonds communautaire: le Fonds européen d'orientation et de garantie agri-cole (FEOGA). Celui-ci fait partie du budget de la Communauté. Ce fonds comprenddeux sections aux objectifs et aux mécanismes assez différents: la section "garantie"et la section "orientation". Seule cette dernière section peut être assimilée à un fondsstructurel.

La section "garantie" a pour objet de soutenir les marchés des produits agricoles afinde stabiliser les prix et d'assurer un revenu adéquat aux agriculteurs européens. Lesdépenses financées par cette section concernent concrètement les restitutions à l'ex-portation des produits agricoles vers les pays tiers, les différentes mesures d'interven-tion sur les marchés agricoles, de même que les actions de développement rural ainsique de contrôle et de prévention. Depuis 1993, date d'entrée en vigueur de la réformede la PAC, cette section englobe également les aides compensatoires (= paiementsdirects), les mesures d'accompagnement prévues par ladite réforme ainsi que les dé-penses au titre du Fonds de garantie pour la pêche.

En cas d'adhésion, la Suisse pourrait s'attendre à recevoir, dans les conditions prévuespar l'Agenda 2000, un montant annuel d'environ 900 millions de francs du FEOGA.

Page 260: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 258 - Chapitre 2

Fonds structurels

Les Fonds structurels contribuent à réaliser l'objectif de cohésion économique et so-ciale de l'UE. Leurs ressources sont consacrées à des actions aidant à réduire l'écartentre les régions défavorisées et les autres et à promouvoir l'égalité de chances profes-sionnelles des différents groupes sociaux, en fonction d'une série d'objectifs prioritai-res. Il existe quatre Fonds structurels:

- Fonds européen d'orientation et de garantie agricole -section "orientation"La section "orientation" vise à financer les mesures d'amélioration des structures agri-coles et rurales, raison pour laquelle elle est regroupée avec les autres fonds structu-rels de la CE. Cette section intervient en participant aux programmes des Etats mem-bres, notamment pour l'installation des jeunes agriculteurs, la modernisation des ex-ploitations agricoles, les investissements dans le domaine de la transformation et de lacommercialisation des produits agricoles ainsi que le développement des zones rura-les. Dans le cadre de l'Agenda 2000 (voir ch. 253), il est prévu de réorganiser les ins-truments actuellement disponibles en matière de politique rurale. Concrètement, celasignifie que les nouvelles mesures d'accompagnement du développement rural, lesmesures horizontales dans le secteur de la pêche ainsi que les aides pré-adhésion àl'intention de pays candidats à l'adhésion à l'UE seront financées à l'avenir par la sec-tion "garantie" et non plus par la section "orientation" du FEOGA.

- Fonds européen de développement régional (FEDER)Le FEDER est l’un des Fonds structurels de la CE qui cofinancent les actions desti-nées à réduire les écarts de développement socio-économique entre les différentesrégions des Etats membres. Les ressources du FEDER sont ciblées sur certaines ré-gions désavantagées et servent principalement à financer l'amélioration des infra-structures, les investissements productifs, le développement local, les ressources hu-maines et la protection de l'environnement. Le FEDER concentre son aide sur quatreobjectifs prioritaires correspondant à quatre types de régions. Ces objectifs sont lessuivants:

- développement et ajustement structurel des régions en retard de développement;

- reconversion économique de régions ou parties de régions sérieusement affectéespar le déclin industriel;

- développement et ajustement structurel des zones rurales sensibles;

- développement structurel des régions très faiblement peuplées.

La Suisse pourrait s'attendre à recevoir de la part du FEDER un montant annuel del'ordre de 5 millions de francs.

- Fonds social européen (FSE)La mission du FSE est centrée sur la formation professionnelle et les aides à l'embau-che. Les allocations versées sont essentiellement consacrées aux victimes du chô-mage. Le FSE est destiné à compenser les déséquilibres résultant de la réalisation dumarché unique et susceptibles de frapper certaines régions ou certains groupes de lapopulation. Sous le régime actuel, les allocations versées par le FSE à la Suisse pour-

Page 261: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 259 - Chapitre 2

raient être estimées à 100 millions de francs par an. Il est prévisible qu'avec l'Agenda2000 ce montant baissera.

- Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP)L'IFOP soutient des mesures de restructuration du secteur de la pêche. Ne disposantd'aucun accès à la mer, la Suisse n'est pas concernée par cet instrument financier.

Fonds de cohésion

Le Fonds de cohésion est un nouvel instrument d'aide et de solidarité. Il contribue aurenforcement de la cohésion sociale et économique dans l'Union européenne et il aideles Etats membres les moins prospères (Espagne, Grèce, Irlande et Portugal). Il pro-cure également un soutien financier aux projets individuels d'investissement et peutparticiper à hauteur de 80 à 85% aux dépenses publiques totales. Les projets financéspar l'intermédiaire de ce fonds doivent contribuer à l'amélioration de l'environnementet au développement des infrastructures de transport dans un des quatre pays précités.

Résumé

Les moyens financiers que la Suisse pourrait recevoir dans le cadre du FEOGA ainsique des Fonds structurels et du Fonds de cohésion peuvent se résumer comme suit:

CHF par an

- Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) 900 millions- Fonds européen de développement régional (FEDER) négligeable- Fonds social européen (FSE) 100 millions- Instrument financier d'orientation de la pêche (IFOP) aucun- Fonds de cohésion aucun

1'000 millions

Politiques internes

En partant du principe que la Suisse pourrait toucher en retour (bénéfice net) entre80% et 100% du montant théorique qu'elle devrait verser à l'UE pour le 5e pro-gramme-cadre de recherche et développement (PCRD) - déterminé sur la base dumode actuel de financement, ce montant s'élèverait à environ 225 millions de francsen 1999, selon le PIB relatif (3,6% du budget du 5e PCRD, ce budget étant d'environ15 milliards d'euros) - après une période transitoire d'adaptation, le flux financier re-venant en Suisse en raison de la participation de notre pays à des projets du 5e PCRDpourrait donc osciller entre 180 et 225 millions de francs par année.

Sur la base du programme 1999, le coût théorique de la participation suisse aux pro-grammes de formation est estimé à 27 millions de francs. La Suisse pourrait espérerrecevoir en retour entre 80 % et 100 % de ce montant, à savoir entre 22 et 27 millionsde francs.

Le reflux financier dans le domaine de la recherche et développement, mais égale-ment dans celui de la formation, n'aurait aucune influence sur le budget de la Confé-

Page 262: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 260 - Chapitre 2

dération puisque ces montants seraient distribués directement aux institutions bénéfi-ciaires.

Dans le cadre du projet des réseaux transeuropéens, la Suisse pourrait recevoir unecontribution de la Communauté pour le financement des transversales alpines, dont laréalisation est d'intérêt européen. Ce montant devrait cependant faire l'objet d'une né-gociation.

Page 263: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 261 - Chapitre 2

A.3 Bilan des flux entre l’UE et la Suisse

L'écart entre les montants versés par la Suisse sous forme de ressources propres et lesflux financiers dont elle pourrait bénéficier ferait de notre pays un contributeur net.

Tableau 1Flux financiers annuels entre la Suisse et l'UE engendrés par l'adhésion

[Montants en millions de francs] Flux de l’UEvers laSuisse

Flux de laSuisse vers

l’UE

Solde- : effet négatif+ : effet positif

Versements à l'UE

Contributions aux ressources propres de l’UE: - 4 250- Droits de douane sur les produits agricoles 65- Droits de douane sur les produits industriels 112- Ressource 3

. Ressource TVA 1 716

. Financement du rabais britannique 260- Ressource fondée sur le PNB 2 097

Contributions hors budget : - 100- Fonds européen de développement 100

Total versements à l'UE - 4 350

Versements de l’UE

Fonds européen d'orientation et de garantieagricole (FEOGA) - "section garantie" 900 + 900

Fonds structurels et Fonds de cohésion: + 100- Fonds européen d'orientation et de garantie

agricole (FEOGA) - "section d'orientation"incl. dans "sec-

tion garantie"- Fonds européen de développement régional

(FEDER) négligeable- Fonds social européen (FSE) 100- Instrument financier d'orientation de la pêche

(IFOP) -- Fonds de cohésion -

Politiques internes : + 225- Recherche et formation 225- Réseaux transeuropéens à négocier

Total versements de l’UE + 1 225

Versements nets à l'UE - 3 125

Page 264: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 262 - Chapitre 2

B Conséquences d'une adhésion de la Suisse à l'UE sur le budget de laConfédération

Sur le plan interne, une adhésion de la Suisse à l'UE exigerait des adaptations dans denombreux domaines. Parmi les plus importants, il faut citer l'agriculture, l'asile et lerégime fiscal (droits de douane, taxe sur la valeur ajoutée, impôts spéciaux à la con-sommation). L'impôt anticipé, celui sur les transactions sur titres, ainsi que l'impôt surl'affectation de capital devraient également être adaptés. L'adhésion à l'UE auraitégalement des répercussions indirectes sur le budget. Celui-ci serait en effet influencépar les effets d'une adhésion sur la croissance économique, l'évolution des taux d'inté-rêt et le marché de l'emploi. Ces effets n'ont pas été pris en compte présentement,étant donné qu'ils sont difficiles à identifier et à évaluer à ce stade. Il en va de mêmedes mesures compensatoires qui devraient être prises suite au relèvement de la TVA à15%.

B.1 Agriculture

Les dépenses de la Confédération en faveur de l'agriculture et de l'alimentation s'élè-veront à quelque 3 970 millions de francs en l'an 2002 d'après le plan financier actuel.En adhérant à l'UE, la Suisse reprendrait la politique agricole commune (PAC) del'Union. Les paiements qui, dans le cadre de cette politique, sont effectués en faveurdes mesures destinées à soutenir le marché et au titre de paiements compensatoiresliés à la production seraient presque entièrement pris en charge par le Fonds européend'orientation et de garantie agricole (FEOGA). En tant qu'Etat membre, la Suisse n'au-rait pratiquement aucune marge de manœuvre pour effectuer des paiements supplé-mentaires au plan national. Les mesures visant à promouvoir des régions défavoriséesainsi que les mesures de protection de l'environnement font en revanche partie deprogrammes nationaux pour lesquels l'UE se contente de fixer des maxima et qu'ellecofinance. Dans certains domaines, tels que la recherche ou les mesures de politiquesociale, la Suisse, en tant que membre de l'UE, pourrait continuer à effectuer des dé-penses de son propre chef. Nous estimons que pour l'agriculture, les prestations de laConfédération se limiteraient à environ 2 000 millions de francs après l'adhésion. Cemontant ne tient pas compte des mesures qui devraient éventuellement être prisespour faciliter le passage à l'UE. Celles-ci feraient l'objet de négociations, et il n'estdonc pas possible d'en évaluer le coût. Sous réserve de ces mesures facilitant le pas-sage à l'UE, les dépenses directes de la Confédération seraient inférieures de près de2 000 millions de francs à celles prévues en l'an 2002. Les versements de la Commu-nauté pour l'agriculture suisse devraient s'élever à environ 900 millions de francsaprès l'introduction de l'Agenda 2000. Avec les prestations de la Confédération, lemontant destiné à l'agriculture s'élèverait dès lors à près de 2 900 millions de francs.,dont 2 300 millions destinés aux paiements directs (voir ch. 222.03.1, let. D.2).

Page 265: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 263 - Chapitre 2

B.2 Asile

En cas d'adhésion à l'UE et partant à la Convention de Dublin, les demandes d'asiletraitées par la Suisse devraient en partie diminuer, leur examen relevant d'autres Etatsmembres de l'UE (voir ch. 244). Ainsi, compte tenu du volume actuel des demandesd'asile, on peut estimer les économies annuelles potentielles à quelque 100 millions defrancs.

B.3 Adaptation du régime fiscal

Eu égard aux développements indiqués aux ch. 222.07 et 333.08, nous nous limitonsici à estimer les conséquences financières d'une adhésion sur le budget de la Confédé-ration. Nous renonçons en particulier à reprendre la question d'une éventuelle com-pensation des recettes supplémentaires TVA par une réduction d'autres impôts (parex. impôts directs).

Droits de douane

La Communauté est conçue comme une union douanière. L'élimination des droits dedouane dans les échanges commerciaux intracommunautaires est complétée par l'ap-plication d'un tarif douanier commun à l'égard des pays tiers. Quel que soit l'Etatmembre qui les prélève, les recettes douanières reviennent de plein droit à la CE, dé-duction faite de 10% de recettes, prélevés au titre de frais de perception. Les recettessuivantes ne seraient plus versées au budget de la Confédération:

CHF par an

- Droits de douane 1 100 millions

Taxe sur la valeur ajoutée

La CE prescrit pour la TVA un taux minimal général de 15% et un taux minimal ré-duit de 5%. En cas d'adhésion, la Suisse devrait donc relever le taux de sa TVA à 15%minimum, soit une augmentation de 8,5 points par rapport au taux de 6,5% valable en1998505.

Compte tenu de l'augmentation du taux de TVA de 1 point intervenu le 1er janvier1999 pour le financement des assurance sociales, le relèvement minimal général de15% se traduirait par une augmentation des recettes au titre de cet impôt de l'ordre de15,5 milliards de francs. Ce montant de recettes supplémentaires ne tient pas comptede la retenue supplémentaire de 2,5% qui pourrait intervenir ultérieurement dans cemême domaine. Si une telle retenue devait être arrêtée, cette augmentation liée à laTVA serait ramenée à quelque 10 milliards (voir ch. 222.07.2).

Impôts spéciaux à la consommation

Une adhésion à l'UE entraînerait une hausse de l'impôt sur les huiles minérales, avecpour conséquence une augmentation des recettes de l'ordre de 165 millions de francs

505 Pour les effets sur les coûts de la vie et sur les revenus, voir ch. 333.08.3.

Page 266: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 264 - Chapitre 2

(voir ch. 222.07.31). Il y aurait lieu d’adapter la charge minimale de l’impôt sur le ta-bac en cas d'adhésion à l'UE, d'où une augmentation des recettes de 170 millions defrancs (voir ch. 222.07.32). L'harmonisation du taux des impôts spéciaux de consom-mation entraînerait par conséquent les recettes supplémentaires suivantes:

CHF par an

- Huiles minérales 165 millions- Tabac 170 millions

335 millions

B.4 Autres répercussions financières annuelles

Impôt à la source (impôt anticipé)

Les conséquences d'une adhésion à l'UE sur les recettes de l'impôt à la source et del'impôt anticipé ne peuvent pas être chiffrées pour le moment (voir ch. 222.07.5).

Impôt sur les transactions sur titres

Il n'est pas exclu que la Suisse doive renoncer, en adhérant à l'UE, au droit de négo-ciation sur le transfert de titres hors bourse. Bien que la diminution des recettes an-nuelles soit difficilement quantifiable, faute de données précises sur les transactionshors bourse, nous avons retenu l'hypothèse d'un manque à gagner de l'ordre de 300millions de francs (voir ch. 222.07.7).

Impôt sur l'affectation de capital

La renonciation au droit de timbre d'émission sur les obligations et papiers monétairesreprésenterait pour la Confédération un manque à gagner de l'ordre de 340 millions defrancs par année (voir ch. 222.07.8).

Remboursement des frais de perception des droits agricoles et des droits de douane

La Confédération pourrait retenir au titre des frais de perception 10% des recettes en-caissées par les douanes. Compte tenu des droits de douane et des prélèvements agri-coles perçus actuellement, cette redevance s'élèverait à 17 millions répartis commesuit:

CHF par an

- Droits de douane sur les produits agricoles 5 millions- Droits de douane sur les produits industriels 12 millions

17 millions

B.5 Conséquences en matière de personnel

Une évaluation des conséquences d'une adhésion sur les effectifs du personnel se ré-vèle extrêmement difficile à ce stade. Il est certain que des augmentations d'effectifss'imposeront dans plusieurs domaines (par ex. sécurité intérieure, domaine de la santé,statistiques, centrale de compensation) alors que des diminutions importantes se ré-

Page 267: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 265 - Chapitre 2

véleront possibles à l'administration fédérale des douanes. Globalement, il est permisde penser que ces dernières l'emporteront sur les premières et que le bilan financiergénéral sera donc positif (voir ch. 332.04.4).

B.6 Bilan des conséquences d'une adhésion de la Suisse à l'UE sur le budgetde la Confédération

Compte tenu des développements qui précèdent, le tableau 2 dresse un bilan provi-soire des conséquences d'une adhésion de la Suisse à l'UE sur le budget de la Confé-dération. Ces chiffres ne sont que des estimations à considérer avec la plus extrêmeprudence. Ils ne tiennent compte ni des coûts indirects liés à une adhésion ni d'éven-tuels allégements des dépenses de la Confédération résultant des contributions com-munautaires au titre d'infrastructures (réseaux transeuropéens), et font abstraction desaspects politiques et des effets macro-économiques de l'adhésion.

Page 268: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 266 - Chapitre 2

Tableau 2Conséquences financières d'une adhésion à l'UE sur le budget de la Confédération

[Montants annuels en millions de francs] Dépenses Recettes Solde - : effet négatif+ : effet positif

- Agriculture (diminution des dépenses de l'ordre de 1,1milliard après une période transitoire et augmentationdes recettes de 0,9 milliard au titre des subventions agri-coles reçues en provenance du FEOGA)506 - 1 100 + 900 + 2 000

- Taxe sur la valeur ajoutée + 1 976 - 1 976- Contribution au titre de la ressource fondée sur le PNB + 2 097 - 2 097- Domaine de l'asile - 300 + 300- Assurance-chômage507 + 10 - 10- Fonds européen de développement + 120 - 120- Domaine de la recherche et de la formation508 - 105 + 105- Autres charges (sect. vétérinaire, statistique, tourisme) +100 - 100- Droits de douane - 1 100 - 1 100- Impôts spéciaux à la consommation:

- Huile minérales + 165 + 165- Tabac + 170 + 170

- Impôt sur les transactions sur titres509 - 300 - 300- Impôt sur l'affectation de capital - 340 - 340- Impôt à la source510 - 250 - 250- Fonds social européen + 100 + 100- Remboursement des frais de perception des droits de

douane sur les produits agricoles et industriels- Réseaux transeuropéens

+ 17à négocier

+ 17

Total intermédiaire (montant arrondi) - 3 600- Taxe sur la valeur ajoutée de +10 000

à +15 500de + 10 000 à + 15 500

Total des implications financières annuelles sur le bud-get de la Confédération sans considérer les mesurescompensatoires au niveau fiscal notamment (arrondi)

de 6 400à 11 900

Contribution unique

Participation au capital de la Banque européenne d'investis-sement (BEI)511 + 880 - 880

506 Il n'est pas tenu compte d'éventuelles mesures transitoires.507 Seulement contribution à fonds perdu. Il s'agit là d'une nouvelle charge supplémentaire du fonds de l'assu-

rance-chômage. 210 millions de francs par an durant les sept premières années de l'accord, puis 370 à 600millions à partir de la huitième année, moins 200 millions de francs de rétrocession aux pays limitrophespour les frontaliers, ce qui donne une charge supplémentaire nette annuelle de 170 à 400 millions de francs.

508 Le flux financier en retour dans le domaine recherche / développement / formation n'a aucune influence surle budget de la Confédération, ces montants étant directement versés aux institutions bénéficiaires.

509 Hypothèse: nous ne disposons pas de données au sujet des transactions hors bourse.510 Ce manque à gagner est imputable au taux zéro, dont l'application devra être prévue avec tous les Etats

membres pour les répartitions de dividendes (voir ch. 333.08.1). La réduction est toutefois déjà applicable àl'un ou l'autre Etat partie à une CDI, même sans adhésion de la Suisse à l'UE.

511 Cette contribution pourrait faire l'objet de versements échelonnés.

Page 269: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 267 - Chapitre 2

251.04 Conséquences financières d'une participation à l'EEE

Hypothèses de calcul et description des contributions

Les conséquences financières d'une participation de la Suisse à l'EEE ne peuvent êtreestimées que sur la base de certaines hypothèses:

- La participation de la Suisse à l'EEE intervient avant un élargissement de l'UE.

- Le calcul repose sur les prévisions budgétaires 1999.

- Le siège de l'autorité de surveillance AELE reste à Bruxelles.

- La Cour AELE demeure à Luxembourg.

- Les accords sectoriels entre la Suisse et l'UE entrent en vigueur.

Obtenus à partir de ces hypothèses, les chiffres figurant dans ce chapitre ne sont quedes estimations. Les contributions effectives devraient faire encore l'objet de négocia-tions.

Trois types de contributions seraient à la charge de la Suisse en cas de participation denotre pays à l'Accord EEE: des contributions aux frais de fonctionnement des troisinstitutions de l'AELE (Secrétariat, Autorité de surveillance AELE et Cour AELE), unpaiement dans le cadre du mécanisme financier et un versement au titre de la partici-pation de la Suisse aux programmes communautaires.

A Contributions aux trois institutions de l’AELE

Les contributions aux trois institutions de l'AELE (Secrétariat, Autorité de sur-veillance AELE et Cour AELE) sont destinées à couvrir leurs dépenses de fonction-nement.

Secrétariat

Actuellement la contribution de la Suisse au Secrétariat de l'AELE est réduite de 25%pour tenir compte du fait que notre pays ne participe pas à l'EEE. Cette réduction se-rait probablement abandonnée en cas de participation suisse à l'EEE. En admettant cetabandon et une augmentation de 5% du budget du bureau de l'AELE à Bruxelles,suite à l'engagement de trois nouveaux collaborateurs, la contribution suisse s'élève-rait à 13,88 millions de francs.

Autorité de surveillance AELE

La surveillance du respect des dispositions de l’Accord EEE par les parties contrac-tantes et par les agents économiques est primordiale pour que des conditions de con-currence homogènes dans tout l'Espace économique européen soient assurées. Sur labase des estimations de l'autorité de surveillance de l'AELE à Bruxelles, une partici-pation de notre pays à l'EEE conduirait à une augmentation de l'effectif du personnelde 25 personnes. Sur la base de la clé de répartition actuelle corrigée pour inclure laSuisse, la contribution de notre pays serait de 13,55 millions de francs.

Page 270: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 268 - Chapitre 2

Cour AELE

La Cour AELE veille au respect des dispositions de l’Accord EEE par les Etats del'AELE. Elle estime que le personnel à son siège de Luxembourg devrait être renforcéde sept personnes en cas de participation suisse. Sur la base de cette estimation, lacontribution de notre pays aux dépenses de fonctionnement de la Cour AELE s'élève-rait à 4,11 millions de francs.

En résumé, la contribution suisse au budget de ces trois institutions de l'AELE s'élève-rait à 31,54 millions de francs se décomposant comme suit:

CHF par an

- Secrétariat AELE 13,88 millions- Autorité de surveillance AELE 13,55 millions- Cour AELE 4,11 millions

31,54 millions

B Participation au mécanisme financier de l'EEE

En vue de favoriser un renforcement continu et équilibré des relations économiques etcommerciales entre les parties contractantes, celles-ci ont convenu de la nécessité deréduire les disparités économiques et sociales entre leurs régions. Un mécanisme fi-nancier a été établi par les Etats de l'AELE, dans le cadre de l'EEE, afin de contribueraux objectifs précités. La participation financière annuelle de la Suisse au mécanismefinancier s'élèverait à quelque 65 millions de francs sur une période de cinq ans (voirch. 222.08, let. D).

C Participation de la Suisse aux programmes communautaires

En cas de participation à l'EEE, la Suisse pourrait obtenir l'accès aux programmescommunautaires en matière de recherche et de développement ainsi que de formation.Sur la base du budget 1999, la participation, aux programmes précités de la CE, desEtats de l'AELE faisant partie de l'EEE est estimée à quelque 4 500 millions d'euros.En admettant qu'une participation de la Suisse à l'EEE conduirait à une augmentationdes programmes en question, on évalue la contribution annuelle de notre pays dansces domaines à environ 260 millions de francs (voir ch. 222.13 et 222.15).

Page 271: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 269 - Chapitre 2

D Résumé des charges financières pour le budget de la Confédération

Tableau 3Charges principales découlant de la mise en œuvre de l'accord EEE512

[Montants annuels en millions de francs] Dépenses Recettes Solde- : effet négatif+ : effet positif

- Concessions suisses sur les produits agricoles "de co-hésion" et concessions agricoles bilatérales Suisse-CE - 112 - 112

- Produits agricoles transformés - 30 - 30- Secteur vétérinaire + 9 - 9- Sécurité sociale + 38 - 38- Assurance-chômage (seulement contribution à fonds

perdu513) + 10 - 10- Recherche et développement514 + 83 - 83- Education et formation + 23 - 23- Statistique +9 -9- Transports routiers515 +55 -55- Augmentation du personnel de la Confédération516 + 10 - 10- Fonds de cohésion517 +65 -65- Contributions aux trois institutions AELE (Secrétariat, ESA, Cour)518 + 25 - 25- Autres charges (mesures d'accompagnement, PME,

médias, police des étrangers, tourisme, protection ci-vile etc.) + 20 - 20

Total des charges financières annuelles supplémentai-res pour la Confédération (arrondi) - 490

512 Le message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE contient une estimation des coûts

découlant d'une participation à l'EEE, FF 1992 IV 506 et ss.513 Hypothèse: mêmes périodes transitoires et mêmes réglementations que dans l'accord sur la circulation des

personnes, voir ch. 251.05.514 Hypothèse: même réglementation que dans l'accord sur la recherche, voir ch. 251.05.515 A partir de l'an 2002, le montant de la subvention sera porté à 180 millions de francs (année de référence

1999: 125 millions). A l'avenir le montant global à disposition sera exclusivement consacré à l'encourage-ment du trafic combiné sur l'axe Nord-Sud. Lorsque le premier tunnel de base des NLFA sera entré en ser-vice, le plafond de 200 millions de francs sera réduit de 5% par an.

516 L'essentiel des besoins supplémentaires en personnel devrait découler de l'application des dispositions rele-vant du droit des assurances sociales. Il s'agirait de créer environ 150 postes supplémentaires durant les cinqà dix ans suivant l'entrée dans l'EEE.

517 Si la Suisse devait entrer dans l'EEE, les autres pays de l'AELE lui demanderaient de restituer les montantsdont elle aurait dû s'acquitter, conformément au protocole d'entente entre les pays de l'AELE et de l'EEE, sielle avait fait partie de l'EEE. Ces montants devraient être versés en sus du montant indiqué.

518 Coût supplémentaire par rapport à la situation actuelle.

Page 272: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 270 - Chapitre 2

251.05 Conséquences financières des accords sectoriels

Les dépenses supplémentaires que la Confédération devrait supporter dans les diffé-rents domaines des sept accords sont décrites dans le tableau 4. Il n'est pas possible dedire dans quelle mesure une réduction des dépenses pourrait alléger le budget de laConfédération ni une augmentation de la croissance économique entraîner une haussedes recettes fiscales.

Les données ci-après sont provisoires et reposent sur des estimations. Le message quele Conseil fédéral adressera aux Chambres sur les résultats des négociations bilatéra-les sectorielles conclues au niveau politique le 11 décembre 1998 contiendra une ap-préciation plus précise des dépenses annuelles supplémentaires.

Tableau 4Charges annuelles supplémentaires pour le budget de la Confédération

[Montants annuels en millions de francs] Dépenses Recettes Solde- : effet négatif+ : effet positif

Concessions douanières sur les produits agricoles - 112 -112Secteur vétérinaire + 2 - 2Sécurité sociale519:- AVS/AI + 21 - 21- Prévoyance professionnelle520 (+ 10) (- 10)- Allocations de ménage et allocations familiales- Assurance-maladie

+ 1+ 5

- 1- 5

Fonds de l'assurance-chômage521 + 10 - 10Politique des étrangers (police des étrangers) + 2 - 2Recherche et développement522 + 83 - 83Transports terrestres523 + 55 - 55Augmentation des effectifs de l'administration fédé-rale524 + 10 - 10

Total (arrondi) - 310

519 Le maintien des quarts de rente entraînerait des charges supplémentaires de 3,5 millions de francs.520 La question de la prise en charge des coûts doit encore être examinée, voir ch. 221.02.2.521 Il s'agit là d'une nouvelle charge supplémentaire du fonds de l'assurance-chômage. Si aucune mesure n'est

prise, il en résultera les charges suivantes: 210 millions de francs par an durant les sept premières années del'accord, puis 370 à 600 millions à partir de la huitième année, moins 200 millions de francs de rétrocessionaux pays limitrophes pour les frontaliers, ce qui donne une charge supplémentaire nette de 170 à 400 mil-lions de francs par année. La part de la Confédération est de 5%.

522 Selon l'accord sur la recherche, la Suisse doit verser une contribution complète à partir du 1er janvier del'année qui suit l'entrée en vigueur de l'accord. Cela signifie que si l'accord entre en vigueur en 1999, laSuisse devra s'acquitter chaque année d'un montant supplémentaire de 83 millions à partir de l'an 2000. Cesmontants comprennent les coûts supplémentaires qu'une participation complète au 5e programme-cadre derecherche entraînerait pour la Suisse.

523 A partir de l'an 2002 le montant de la subvention sera porté à 180 millions de francs (année de référence1999: 125 millions). A l'avenir le montant global à disposition sera exclusivement consacré à l'encourage-ment du trafic combiné sur l'axe Nord-Sud. Lorsque le premier tunnel de base des NLFA sera entré en ser-vice, le plafond de 200 millions de francs sera réduit de 5% par an.

524 L'essentiel des besoins supplémentaires en personnel devrait découler de l'application des dispositions rele-vant du droit des assurances sociales. Il s'agirait de créer environ 100 postes supplémentaires durant les cinqà dix ans suivant l'entrée en vigueur des accords sectoriels.

Page 273: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 271 - Chapitre 2

252 Contrôle des finances

A Acquis communautaire

La Cour des comptes a été intégrée au système institutionnel de la Communauté par lebiais du Traité budgétaire du 22 juillet 1975525. Elle est entrée en fonction fin 1977.Son siège est à Luxembourg. Par la suite, le Traité de Maastricht a renforcé l'autoritéet le caractère indépendant de cette Cour. Le nouveau statut de la Cour lui permetnotamment l'accès aux diverses formes de recours ouvertes à toutes les institutions envue de mieux garantir l'accomplissement de sa mission.

La tâche principale de la Cour des comptes consiste à contrôler les finances de laCommunauté et à signaler les domaines où des mesures susceptibles d'améliorer lagestion doivent être prises.

Le contrôle opéré par la Cour des comptes a lieu sur pièces et, au besoin, sur placeauprès des autres institutions communautaires et dans les Etats membres. Les docu-ments et les informations nécessaires à l'exercice des fonctions de la Cour sont com-muniqués à celle-ci, à sa demande. Cela comprend en particulier l'accès aux docu-ments comptables et administratifs - y compris aux données des systèmes de compta-bilité informatisées tant de la Commission que des Etats membres - en rapport avecles opérations du budget de l'Union.

L'objectif de l'examen des comptes est de s'assurer que ce qui est dû à la Communau-té, de même que ce qu'elle doit, est dûment constaté, enregistré, comptabilisé, perçuou payé, mais aussi de vérifier que l'ensemble des opérations effectuées est étayé pardes pièces justificatives et que les informations disponibles permettent aux autoritésresponsables de la gestion et du contrôle d'accomplir pleinement leur mission.

Le système comptable doit être conforme aux règles généralement admises et doitpouvoir s'appuyer, en particulier, sur des mesures et des procédures appropriées visantà garantir l'enregistrement de l'ensemble des opérations, la protection des biens patri-moniaux, ainsi que la prévention et la détection des fraudes.

En revanche, l'examen de la légalité et de la régularité porte avant tout sur le bien-fondé, par rapport aux dispositions législatives de référence (réglementation secto-rielle, conventions, mandats, accords, contrats), de la constatation comme de la per-ception des recettes et, parallèlement, des engagements comme des paiements. Lecontrôle de la légalité implique également l'examen de l'ensemble de la gestion. Il nes'agit donc pas seulement d'apprécier la conformité des recettes et des dépenses avecles dispositions législatives et réglementaires applicables, mais aussi de contrôler leurlégalité par rapport au Traité et aux sources du droit dérivé (le budget et sa nomen-clature, le règlement financier, la réglementation interne en matière de gestion).

525 Voir art. 188 a à c, 205 et 206 Traité CE.

Page 274: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 272 - Chapitre 2

S'agissant de l'examen de la bonne gestion financière, il est possible d'en identifier lesgrands axes; on notera qu'il vise traditionnellement à établir si les objectifs de gestionont été atteints et, le cas échéant, dans quelle mesure et à quel prix. Ainsi, cette ana-lyse s'appuie sur un examen approfondi et une évaluation des mécanismes et des sys-tèmes internes qui régissent les recettes et les dépenses contrôlées. En outre, elle tientcompte de leurs particularités et de leur nature, ce qui nécessite, en fonction du sec-teur contrôlé, l'analyse de données et d'informations variées, de données internes etexternes à l'administration ou à l'organisme concerné, de données macro-économiqueset d'études comparatives portant sur d'autres systèmes de gestion.

Dans la pratique, le contrôleur examine un nombre important d'opérations et se forgeainsi progressivement un jugement aussi objectif que possible, lui permettant d'expri-mer un avis sur le degré de convergence entre le système tel qu'il est mis en œuvre etles résultats visés. Il appartient également au contrôleur de déceler les insuffisances etles obstacles qui s'opposent à l'obtention d'un résultat optimal en mettant en évidence,par exemple, l'inadéquation entre les moyens et les objectifs, les insuffisances dessystèmes, ou encore l'éventuelle contradiction avec des objectifs établis pour d'autrespolitiques.

B Répercussions sur la Suisse

Le droit communautaire n'impose pas aux Etats membres d'aménager leur organe decontrôle des comptes interne d'une manière uniforme. L'organisation de la sur-veillance financière étatique n'est pas non plus l'objet des politiques dites horizontaleset d'accompagnement de l'Accord EEE (politiques d'accompagnement de la CE526). Ilen résulte que ni une adhésion à l'UE ni une participation à l'EEE n’impliquent dechangements du système de contrôle des finances actuellement en vigueur en Suisse.

Il importe cependant de relever que la Cour des comptes a la compétence, dans lesEtats membres de l'UE, de contrôler de manière indépendante le flux des moyenscommunautaires jusqu'au consommateur final ainsi que les prestations financièresversées par les Etats membres à l'UE. Cette compétence permet également de contrô-ler les flux financiers entre l'UE et des Etats tiers. La Cour des comptes effectue sescontrôles en collaboration avec les autorités de surveillance de l'Etat concerné et,lorsque ces dernières ne disposent pas des ressources nécessaires, de concert avec lesunités administratives nationales compétentes. Afin de pouvoir assurer une coordina-tion et une coopération avec la Cour des comptes, il faudrait envisager un renforce-ment en personnel au sein de l'administration fédérale.

Le Conseil fédéral ayant proposé, dans son message du 22 juin 1998527, d'accorderune plus grande autonomie au Contrôle fédéral des finances vis-à-vis de l'administra-tion fédérale, la conception de la surveillance financière de la Confédération se rap-

526 Message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV 1.527 FF 1998 4101.

Page 275: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 273 - Chapitre 2

proche, en ce qui concerne l'indépendance, du modèle de cour des comptes que l'ontrouve dans la plupart des Etats membres de l'UE.

253 Développement futur de l'UE dans le cadre de l'Agenda 2000

A Discussion interne à l'UE

A.1 Financement de l'élargissement de l'UE, répartition financière au sein del'UE

Le futur développement de l'UE, notamment sous l'angle du financement, dépend,outre de l'évolution de la croissance économique528 en Occident, de deux facteurs: del'élargissement de l'UE dans le cadre de l'"Agenda 2000", d'une part, et du débat entreles quinze Etats membres sur une nouvelle réglementation de la répartition financièreau sein de l'UE ("discussion des contributeurs nets"), d'autre part. Ces deux facteursinterne et externe influencent l'étendue et la structure des "prévisions financières 2000à 2006"529.

L'Agenda 2000530 décrit les grandes perspectives de développement de l'Union et deses politiques à l'aube du siècle prochain, les questions horizontales liées à l'élargis-sement et le futur cadre financier au-delà de l'an 2000, dans la perspective d'uneUnion élargie (voir ch. 233). L'Agenda 2000 considère comme un fait que plusieursnouveaux pays auront rejoint l'UE d'ici la fin de la prochaine période financière(2006), mais il ne fournit pas d'estimation plus précise sur la date du prochain élargis-sement. Il ne donne pas non plus, sinon entre les lignes, d'indications pertinentes surles relations entre la Suisse et l'Union. La Commission part de l'idée que l'élargisse-ment dans le cadre de l'Agenda 2000 peut être effectué sur la base des réformes pré-vues des politiques communautaires (voir let. A.2 et A.3) avec une limite supérieureinchangée des ressources propres de 1,27% du PNB. Les dépenses engendrées par lapréparation des adhésions prévues ont déjà été prises en compte dans les prévisionsfinancières531. En revanche, les flux financiers qui existeront entre l'UE et les candi-dats en cas d'adhésion n'ont pas été intégrés. C'est la raison pour laquelle la "réservepour les dépenses liées aux adhésions" sera constamment relevée dès 2002532. Cetteréserve devrait suffire à éponger les coûts correspondants lors de l'adhésion des can-didats, sans que la limite supérieure des ressources propres de 1,27% du PNB ne soitdépassée.

La "discussion des contributeurs nets" en cours entre les Etats membres n'a rien denouveau. Le système de financement de l'UE (système des ressources propres) a dû

528 Voir les "Prévisions financières 2000 à 2006": l'UE part de l'idée que les quinze Etats membres bénéficie-

ront d'un taux de croissance de 2,5% et les six candidats à l'adhésion d'un taux de 4%.529 Les prévisions financières résument les priorités budgétaires de l'UE sur plusieurs années.530 Communication sur l'Agenda 2000, COM (97) 2000 final.531 Phare, aides de pré-adhésion dans le cadre des lignes directrices en matière agricole et de la politique struc-

turelle, ainsi que soutien dans le cadre des réseaux transeuropéens, de la recherche et de la formation.532 De 0,02% (2002) à 0,11% (2006) des PNB de l'UE.

Page 276: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 274 - Chapitre 2

être constamment adapté au fil des ans pour répondre aux nouvelles réalités économi-ques et politiques. Dans les discussions y relatives, la question de la répartition finan-cière interne à l'UE, à savoir de la répartition des charges, a toujours joué un rôle im-portant. Dernièrement, - avant tout à la lumière du prochain élargissement - les actuelscontributeurs nets se sont fait entendre pour insister sur la nécessité d'une répartitionéquilibrée des charges. Ils ne sont plus disposés à fournir au budget communautaireles mêmes sommes que par le passé. A l'inverse, certains bénéficiaires nets craignentde voir leur statut se dégrader en raison de l'arrivée de nouveaux membres et des ré-formes prévues des politiques communautaires. La Commission a publié un rapport533

sur cette problématique, lequel contient des propositions pour le fonctionnement dufutur financement de l'UE (système des ressources propres) et sert de base à la discus-sion à venir. Une nouvelle répartition financière prévoirait en même temps des mesu-res de compensation pour les dépenses et les recettes. Les Etats membres discutentactuellement cette question dans le but de parvenir à un accord en 1999.

A.2 Réforme de la politique agricole commune

La politique agricole commune (PAC) occupe une place importante dans l'Agenda2000. Ceci s'explique par le fait que cette politique a été, de par ses incidences finan-cières importantes (les dépenses agricoles absorbant la moitié du budget communau-taire), dès le début, au cœur de la construction européenne. La Commission estimenécessaire de procéder à une réforme en profondeur de la PAC afin d'améliorer lacompétitivité de l'agriculture européenne. Les raisons de cette réforme sont avant toutd'ordre interne (risques de pertes de marché dus à un niveau de prix trop élevé, effetsnégatifs actuels de la PAC, nécessité d'une décentralisation afin de mieux mettre envaleur la diversité de l'agriculture européenne) mais également d'ordre externe(élargissement futur de l'Union aux pays de l'Est et processus continu de mondialisa-tion et de libéralisation des marchés et des échanges, accompagné de nouvelles négo-ciations commerciales internationales).

Les propositions de réforme faites par la Commission sont fondées sur un certainnombre de lignes directrices, dont les principales sont les suivantes:

- La compétitivité doit être assurée par des baisses de prix suffisamment importan-tes. La Commission propose de réduire les prix de soutien pour les céréales, oléa-gineux et protéagineux, pour le lait et pour la viande bovine.

- Ces baisses de prix à la production seraient compensées partiellement (à hauteur de50% pour les céréales, 60% dans le secteur laitier et 80% dans le secteur bovin) parle relèvement des aides directes, afin de préserver le revenu des agriculteurs.

- Une partie de cette compensation sera accordée sous forme d'enveloppes nationalesdans les secteurs laitier et bovin, financées totalement par le FEOGA et réparties enfonction de la production. Chaque Etat membre pourra distribuer cet argent en

533 "Le financement de l'Union européenne", rapport de la Commission sur le fonctionnement des ressources

propres, 7 octobre 1998.

Page 277: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 275 - Chapitre 2

fonction de ses propres choix, tout en devant respecter un certain nombre de critè-res communautaires.

- Les Etats membres auront également la possibilité de définir eux-mêmes leurs prio-rités et de faire leurs propres choix dans le cadre du nouveau règlement sur le dé-veloppement rural, qui regroupe dans un cadre unique l'ensemble des mesures yrelatives. Ils disposeront donc d'une plus grande marge de manœuvre. Ces mesuresont trait notamment au soutien de l'adaptation structurelle du secteur agricole et dela pratique de l'agriculture dans des zones défavorisées ainsi qu'à la rémunérationd'activités agro-environnementales.

- La réforme proposée se traduit par certaines orientations nouvelles: l'action en fa-veur de l'environnement est renforcée de manière substantielle, et les bases d'unepolitique de développement rural global sont définies pour la première fois. Le dé-veloppement rural devient ainsi le second pilier de la PAC.

- Afin de corriger un certain nombre d'inégalités ou d'abus, la Commission proposeégalement de plafonner, de façon dégressive, le total des aides directes que peut re-cevoir une exploitation et d'octroyer aux Etats membres les moyens juridiques leurpermettant de réserver le paiement des aides directes à ceux qui exercent réelle-ment une activité agricole.

La mise en œuvre des propositions de la Commission aura également des conséquen-ces sur le plan du financement. Le coût des mesures d'intervention sur les marchésainsi que des restitutions à l'exportation diminuera, alors que les dépenses au titre desaides directes augmenteront. Il en ira de même s'agissant des mesures du développe-ment rural. Selon les estimations de la Commission, les dépenses communautaires enfaveur de l'agriculture devraient passer de quelque 42 milliards d'euros en l'an 2000 àplus de 49 milliards d'euros en 2006. Elles seraient toutefois inférieures à la ligne di-rectrice agricole, qui fixe dans le cadre du budget de la Communauté le cadre maxi-mal des dépenses agricoles.

Il y a lieu de relever que des divergences importantes existent au niveau des Etatsmembres par rapport aux propositions de la Commission. Il n'est par conséquent pascertain que ces dernières soient adoptées dans leur teneur initiale.

A.3 Réforme de la politique structurelle

La cohésion économique et sociale de l'UE doit être maintenue par le biais de la ré-forme des Fonds structurels. Le 18 mars 1998, la Commission a précisé ces stratégiessous la forme d'une proposition de règlement régissant les Fonds structurels pour lesannées 2000 à 2006. Contrairement aux réformes antérieures, la prochaine réformeaura lieu dans un climat de discipline budgétaire rigoureuse dans tous les Etats mem-bres et devra tenir compte de l'intégration des pays d'Europe centrale et orientale avecleurs immenses besoins en matière d'aides structurelles, ce qui constituera un défi nonnégligeable. La réforme s'articulera autour de trois axes principaux: une plus grandeconcentration des mesures d'encouragement, un mode de fonctionnement simplifié etdécentralisé ainsi qu'un renforcement de l'efficacité et du contrôle des fonds. Les

Page 278: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 276 - Chapitre 2

Etats membres actuels visent à concentrer les mesures structurelles sur trois des septrégions bénéficiant actuellement d'une aide. Si les régions les moins favorisées nedoivent pas être défavorisées en même temps, cela signifie une concentration géogra-phique plus stricte au profit des régions qui ont le plus besoin d'aide (objectif 1: ré-gions dont le PNB est inférieur à 75% de la moyenne des PNB de l'UE), de sorte qued'autres régions, bénéficiant jusqu'alors d'aides structurelles, n'en recevront plus aprèsune période transitoire. Le second objectif géographique concerne les régions dontl'économie est en transformation (industrie et services, régions rurales en déclin). Ou-tre cette concentration géographique, il est prévu de procéder à une concentrationthématique qui définit en tant que nouvel objectif 3 une stratégie visant à développerles ressources humaines.

S'agissant du Fonds de cohésion, les Etats membres ne sont pas unanimes quant à laquestion de savoir si ceux d'entre eux qui prennent part à la troisième phase del'Union économique et monétaire (UEM) peuvent continuer à avoir recours à cefonds.

Pour les Fonds structurels et le Fonds de cohésion, on peut s'attendre à ne pas disposerde plus de 0,46% du PNB (275 milliards d'euros), comme jusqu'à présent534. De cettesomme, il est prévu de consacrer dès l'an 2000 un milliard d'euros par année en vue dela préparation des candidats à l'adhésion, et dès l'an 2002, un montant global de 38milliards d'euros pour des dépenses progressivement croissantes dues aux mesuresstructurelles dans les nouveaux Etats membres. Le projet susmentionné prévoit 20milliards d'euros pour le Fonds de cohésion 2000 à2006.

B Répercussions sur la Suisse

Les deux facteurs "répartition financière" et "élargissement" influenceraient le volumede la contribution suisse à la Communauté en cas d'adhésion à l'UE.

Les effets de la discussion interne à l'UE sur la répartition financière sont difficiles àestimer étant donné l'incertitude qui prévaut. Il semble en tout cas invraisemblableque les actuels contributeurs nets acceptent de payer davantage. Pour la Suisse, en tantque contributeur net potentiel, cela signifierait que les montants précédemment indi-qués auraient plutôt tendance à diminuer, ou du moins n'augmenteraient pas.

L'effet de l'intégration de six Etats535 sur la contribution de la Suisse peut être ap-proximativement évalué à l'aide d'un calcul type. A cet effet, on part de l'hypothèseque la Suisse adhérerait à l'UE en tant que 22e membre. Il ressort de ce calcul que lesflux financiers de la Suisse au profit du budget communautaire augmenteraient d'envi-ron 750 millions de francs536. A l'inverse, les reflux au profit de la Suisse ne devraient

534 La somme à disposition n'augmenterait donc que dans le cadre de la croissance de l'ensemble de l'économie.535 Chypre, Estonie, Hongrie, Pologne, République tchèque et Slovénie, (voir ch. 233).536 Montant correspondant à une augmentation de la contribution brute suite à l'élargissement (total: 15 mil-

liards d'euros), calculé pour un 22e membre avec un PNB comme la Suisse. Le montant de 15 milliards d'eu-ros résulte d'une projection pour l'an 2002 basée sur le système actuel des ressources propres de l'UE.

Page 279: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 277 - Chapitre 2

pas varier substantiellement sur la base des propositions de l’Agenda 2000, de sorteque la contribution nette comparée au montant mentionné au ch. 251.03 augmenteraitau total de 700 à 800 millions de francs.

Page 280: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 278 - Chapitre 2

Page 281: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 279 - Chapitre 3

3 Instruments permettant d’entretenir les relations Suisse-UE comparés à l'adhésion à l'UE

31 Contexte des accords sectoriels, de la participation àl'EEE, des différentes formes de voies solitaires et del'adhésion à l'UE

311 Développements de l'Union européenne537

311.01 Facteurs déterminants de l'intégration européenne

"Quelle est la définition légale de l'UE? Quels en sont les objectifs?"(H. B., canton d'Argovie)538

La définition légale des objectifs de l'UE est contenue à l'art. B du Traité sur l'Unioneuropéenne du 7 février 1992539. L'objectif central était alors - et il l'est toujours -d'assurer une paix durable en Europe par une coopération renforcée entre les Etatseuropéens.

La construction européenne constitue l'un des projets majeurs de l'époque contempo-raine. Elle tire les enseignements d'une histoire marquée par un fonds de valeurs par-tagées, une interdépendance et un modèle socio-économique commun, mais aussi pardes conflits continentaux meurtriers, que le principe de l'équilibre des alliances n'estjamais parvenu à endiguer. C'est, après l'expérience des deux guerres mondiales, la

537 Depuis l'entrée en vigueur du Traité de Maastricht en 1993, on utilise dans le langage courant le terme

d'"Union européenne / UE" de façon imprécise au lieu du terme de "Communautés européennes / CE". Dupoint de vue juridique, la notion d'"Union européenne" n'est correctement utilisée que lorsque l'on vise l'en-semble des trois piliers ou exclusivement le deuxième et/ou le troisième pilier. En revanche, dans le contextedu premier pilier seule la notion de "Communautés européennes" est juridiquement correcte (voir aussi ch.211, let. A.1).

538 Pour les questions des citoyens retenues dans ce chapitre, voir aussi ch. 13.539 "Article B. [Objectifs de l'Union; réalisation]

L’Union se donne pour objectifs:- de promouvoir un progrès économique et social équilibré et durable, notamment par la création d'un es-

pace sans frontières intérieures, par le renforcement de la cohésion économique et sociale et par l'établis-sement d'une Union économique et monétaire comportant, à terme, une monnaie unique, conformémentaux dispositions du présent traité;

- d'affirmer son identité sur la scène internationale, notamment par la mise en oeuvre d'une politique étran-gère et de sécurité commune, y compris la définition à terme d'une politique de défense commune, quipourrait conduire, le moment venu, à une défense commune;

- de renforcer la protection des droits et des intérêts des ressortissants de ses Etats membres par l'instaura-tion d'une citoyenneté de l'Union;

- de développer une coopération étroite dans le domaine de la justice et des affaires intérieures;- de maintenir intégralement l'acquis communautaire et de le développer afin d'examiner, conformément à la

procédure visée à l'article N, paragraphe 2, dans quelle mesure les politiques et formes de coopérationinstaurées par le présent traité devraient être révisées en vue d'assurer l'efficacité des mécanismes et insti-tutions communautaires.

Les objectifs de l'Union sont atteints conformément aux dispositions du présent traité, dans les conditions etselon les rythmes qui y sont prévus, dans le respect du principe de subsidiarité tel qu'il est défini à l'article 3B du traité instituant la Communauté européenne."

Page 282: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 280 - Chapitre 3

reconnaissance de cette donnée inéluctable de leur passé qui a poussé des Européens àrechercher un nouveau terrain de coexistence. La tentative de briser une fatalité sécu-laire confère à l'intégration sa qualité politique et volontariste.

L'évolution qu'a connue le système international dans la seconde moitié du vingtièmesiècle, sous l'influence des forces économiques et du progrès technique, a placé l'inté-gration dans une dynamique additionnelle. En premier lieu, nombre de problèmes dé-passent les frontières nationales et exigent une réponse collective. A ce premier fac-teur s'ajoute le double mouvement de globalisation et de régionalisation vers lequeltend le monde économique contemporain. L'interdépendance des marchés et la trans-nationalisation de la production se conjuguent avec la création de zones régionalesintégrées, dont le marché unique européen constitue à la fois l'exemple le plus ancienet le plus accompli. Cette régionalisation favorise les forces d'ajustement et de progrèséconomique au même titre que, dans les siècles précédents, l'unification des marchésnationaux a représenté un facteur de croissance. Enfin, la construction européennerépond à la nécessité de mettre en place, dans un marché où agissent des opérateurspuissants, des institutions collectives capables d'assumer le rôle d'arbitre et de régula-teur.

311.02 Caractère du projet européen

"Comment le Conseil fédéral juge-t-il l'évolution de l'UE?" (H. M., canton de Zurich)L'Union européenne est un instrument des Etats membres visant à assurer la paix.C'est également une association assumant des tâches importantes de politique éco-nomique. Dans un proche avenir, l'UE comprendra pratiquement tous les Etats ducontinent, dont elle est déjà aujourd'hui l'acteur principal.

La construction européenne correspond à un modèle original. Alors que tous lesEtats-nations occidentaux ont été fondés à l'origine soit sous l'influence d'un pouvoircentral monarchique, soit dans des circonstances révolutionnaires, l'Union européenneest le fruit d'une entreprise démocratique. Le transfert de compétences aux institutionscommunautaires a résulté de décisions sanctionnées selon les procédures ancrées dansle droit constitutionnel des Etats membres. La voie empruntée s'est située dans lesdeux axes de l'approfondissement et de l'élargissement.

Le premier pas sur l'axe de l'approfondissement intervint dans la sphère économique,mais avec une justification politique évidente: la création de la CECA. Cette dernièrepermit d'assurer le contrôle commun, par des organes supranationaux, sur les produits(charbon et acier) représentant les matières premières qui étaient essentielles pour lesmachines de guerre de la première moitié du XXe siècle.

Le second pas, essentiellement politique, qu'était la Communauté européenne de dé-fense échoua. Les artisans de l'Europe communautaire choisirent alors la méthoded'une intégration économique et monétaire qui aura pris quarante ans pour se réaliser.Toutefois, cette démarche progressive demeura profondément insérée dans la vision

Page 283: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 281 - Chapitre 3

politique de départ, qui présida à la structure institutionnelle spécifique de l'Union540.Au moment où le marché unique devenait réalité (1er janvier 1993), la vieille ambitiond'une union monétaire put être reprise avec succès dans la foulée de la réunificationallemande. Parallèlement, l'attention s'est portée sur de nouveaux domaines. L'inté-gration de la justice et de la sécurité intérieure a connu une progression importanteavec la conclusion du Traité d'Amsterdam. En revanche, les Etats membres n'ont don-né à l'Union que des compétences limitées dans le domaine de la politique étrangèreet de sécurité commune. Autre mesure de l'approfondissement, la prise collective dedécisions à la majorité qualifiée, a progressé par à-coups au gré des circonstances.Aujourd'hui le nombre d'objets relatifs au marché unique admettant encore un veto aconsidérablement diminué pour ne concerner plus que des problèmes essentiels telsque la fiscalité ou la politique sociale.

L'élargissement de la construction européenne s'est réalisé par vagues. Au noyauconstitutif de l'Europe des Six de 1958 se joignit en 1973 un premier groupe de troispays (Royaume-Uni, Danemark, Irlande). L'adhésion de la Grande-Bretagne, émailléede péripéties, revêtit à cet égard un caractère symbolique. Londres et l'économie bri-tannique comprirent que leur intérêt à long terme leur commandait de rejoindre lemarché commun plutôt que de demeurer dans une AELE reléguée au second rang parl'absence des grandes puissances commerciales européennes. L'entrée de la Grèce,puis de l'Espagne et du Portugal constitua une première occasion de réaffirmer la vo-cation continentale et démocratique du projet européen.

311.03 Développement de l'Union européenne depuis 1992

311.03.1 Traité de Maastricht

Le Traité sur l'Union européenne, signé à Maastricht en 1992, est entré en vigueur le1er novembre 1993541. Le Traité de Maastricht a apporté les innovations essentiellessuivantes:

- Fondements et calendrier pour la création d'une Union économique et monétaire(UEM) avec pour objectif une monnaie unique.

- Introduction de la citoyenneté de l'Union avec des droits politiques au niveaucommunal.

- Accroissement des droits de codécision du Parlement européen.

- Elargissement des compétences de la Communauté à divers nouveaux domaines542.

- Développement d'une coopération intergouvernementale dans les domaines de lajustice et des affaires intérieures.

540 Parlement, Conseil, Commission, Cour de justice (voir ch. 21).541 Voir chif. 211, let. A.1.542 Protection des consommateurs, protection de la santé, politique industrielle, politique en matière de visa,

réseaux transeuropéens, coopération en matière d'aide au développement, formation, culture, recherche,protection de l'environnement et certains aspects de la politique sociale.

Page 284: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 282 - Chapitre 3

- Introduction d'une politique étrangère et de sécurité commune sur la base de lacoopération intergouvernementale.

- Ancrage juridique du principe de subsidiarité (voir ch. 212, let. A.5).

Globalement l'Union s'est ouverte à de nouveaux développements, dans la mesure où,pour la première fois de son histoire, elle a accepté que les Etats membres progressentà des rythmes différents dans la réalisation des objectifs de l'Union543. Dans plusieursEtats membres de l'UE ont eu lieu des référendums portant sur la ratification du Traitéde Maastricht544, qui ont finalement débouché – à la deuxième tentative pour le Da-nemark – sur la ratification du traité par l'ensemble des Etats membres.

311.03.2 Elargissement de 1995

Pour des raisons politiques, institutionnelles (principalement l'absence totale de droitsde codécision dans l'Accord EEE) et économiques, l'Autriche, la Suède, la Finlande,la Norvège et la Suisse545 ont exprimé le souhait, dans la phase finale des négocia-tions sur l’EEE de 1991-1992, d'adhérer à l'Union européenne. Les négociations avecces Etats (à l'exception de la Suisse) ont débuté le 1er février 1993 et, ont pu être con-clues treize mois plus tard, ces pays ayant déjà repris dans le cadre de l'Accord EEEune part importante de la législation sur le marché intérieur de la CE. Les référendumssur l'adhésion à l'UE ont obtenu une majorité de votes positifs en Autriche, en Fin-lande et en Suède. Ces Etats sont donc devenus membres de l'UE le 1er janvier 1995.La Norvège a refusé l'adhésion en votation populaire le 28 novembre 1994 et est res-tée - avec l'Islande et le Liechtenstein - partie à l'EEE.

311.03.3 Union économique et monétaire

Le marché intérieur, qui comprend la libre circulation des personnes, des marchandi-ses, des services et des capitaux, de même qu'une politique commune en matière decommerce extérieur, de concurrence, de structure et de régions, est effectif depuis le1er janvier 1993. Sa mise en œuvre concrète n'est toutefois pas totalement réaliséedans certains Etats membres546.

Avec l'union monétaire (voir ch. 222.01.1), le marché intérieur devient un espaceéconomique harmonisé comprenant une politique monétaire commune. La troisièmeet dernière phase de l'union monétaire a débuté le 1er janvier 1999 avec la fixationirrévocable du taux de conversion des monnaies nationales participantes. Le 2 mai1998, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE ont adopté les décisions formelles

543 Par exemple la Grande-Bretagne en matière de politique sociale et le Danemark à l'égard de l'Union écono-

mique et monétaire.544 Danemark: refusée le 2 juin 1992 par 50,7% de Non, accepté le 18 mai 1993; Irlande: acceptée le 18 juin

1992; France: acceptée le 20 septembre 1992.545 Voir rapport du 18 mai 1992 sur l'adhésion de la Suisse à la Communauté européenne, FF 1992 III 1125.546 Le XVe rapport sur l'application du droit communautaire (JO n° C 250 du 10 août 1998) donne l'aperçu

suivant: sur un total de 1'391 directives en vigueur au 31 décembre 1997, le degré de mise en applications'élevait à 94%.

Page 285: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 283 - Chapitre 3

permettant l’introduction de l’euro en tant que monnaie unique au 1er janvier 1999. Ilsont confirmé quels seraient les Etats membres participant dès le début à l'union mo-nétaire547 et nommé les membres du directoire de la Banque centrale européenne. De-puis le 1er janvier 1999, la politique monétaire des Etats participants est fixée et exé-cutée exclusivement en euros par la Banque centrale européenne. L'intégration mo-nétaire ne sera achevée qu'à partir du 1er janvier 2002 avec l'introduction de pièces etbillets en euros. Le remplacement des moyens de paiement nationaux aura lieu au plustard à la mi-2002.

La marche vers l'Union économique et monétaire a eu pour conséquence significatived'accroître, par le biais des critères de convergence du Traité de Maastricht548, la dis-cipline pour ce qui est des politiques budgétaires nationales et de favoriser l'harmoni-sation des politiques économiques de chaque Etat, avec pour effet particulier, la ré-duction des différences de taux d'intérêt. L'Union économique et monétaire renforcerala concurrence, dans la mesure où l'on pourra comparer directement les prix. Les fraisprovoqués actuellement par la conversion d'une monnaie nationale en une autre dispa-raîtront. La tendance à l'introduction de mesures visant à éviter une "concurrence fis-cale déloyale" augmente, mais reste cependant contestée - comme en Suisse - quant àson envergure.

311.03.4 Traité d'Amsterdam

Le Traité d'Amsterdam, signé le 2 octobre 1997, doit encore être ratifié par tous lesEtats membres de l'Union européenne au plus tard d'ici mi-1999. "Amsterdam" pour-suit l'approfondissement de l'UE. Le modèle des trois piliers est conservé (voir ch.211, let. A.1); des améliorations essentielles ont cependant été apportées quant aucontenu des traités constitutifs. Les innovations principales sont les suivantes:

- Pour maintenir et développer la liberté, la sécurité et le droit, une importante partiede l'ancien troisième pilier "justice et intérieur" a été transférée dans le premier pi-lier, c'est-à-dire "communautarisée" (voir ch. 241). Ainsi, une partie de cette coo-pération (politique d'asile, de visa et d'immigration) n'est plus déterminée sur leplan intergouvernemental, mais par le droit communautaire. En outre, la coopéra-tion qui était jusqu'à présent réglée par treize Etats membres de l'UE dans le cadredu Groupe de Schengen (Convention de Schengen) est transférée dans l'Union eu-ropéenne et largement communautarisée.

- La coopération a été mieux définie dans certains domaines relevant de politiquescommunes549. En outre le principe d'une prise de décision à la majorité à été étenduà de nouveaux domaines.

547 Il s’agit de l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Italie, l’Irlande, le

Luxembourg, les Pays-Bas et le Portugal. Le Danemark, la Grande-Bretagne, la Grèce et la Suède ne fontpas partie du premier groupe.

548 Taux d'inflation et d'intérêt proches des résultats des membres les plus stables de l'UE; déficit public infé-rieur à 3% du produit intérieur brut; dette publique inférieure à 60% du produit intérieur brut.

549 Emploi, politique sociale, environnement, santé, protection des consommateurs, culture et lutte contre lafraude.

Page 286: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 284 - Chapitre 3

- La politique étrangère et de sécurité commune a été renforcée dans la mesure où, àl'avenir, l'abstention de certains Etats membres ne pourra plus empêcher la prise dedécisions en matière de politique étrangère pour lesquelles l'unanimité est requise(voir ch. 231).

- La position du Parlement européen a été renforcée dans la mesure où, pour la plu-part des décisions, ce dernier se voit accorder un droit de codécision de même im-portance que celui du Conseil des ministres (voir ch. 213, let. A.2).

- Les principes de l'Union sont renforcés et précisés dans les domaines suivants:flexibilité, subsidiarité et proportionnalité, ainsi que la transparence (voir ch. 212).

Dans l'ensemble, le Traité d'Amsterdam permettra à l'Union d'agir dans de nouveauxdomaines (justice et intérieur), considérés il y a quelques années encore comme lesdomaines essentiels de la souveraineté étatique. La flexibilisation de l'Union a fait unnouveau pas en avant550. L'organisation démocratique du système a été améliorée(renforcement du Parlement européen). Les réformes institutionnelles souhaitée parcertains Etats membres et pouvant être nécessaires pour un élargissement de l'Union àplus de 20 membres, en particulier la nouvelle pondération des voix au Conseil desministres exigée par les grands Etats membres et la réduction du nombre de commis-saires, n'ont toutefois pas été réalisées. A ce jour, le Traité d'Amsterdam a été ratifiépar dix Etats membres, et deux référendums ont eu lieu551.

311.03.5 Elargissement en cours

L'élargissement en cours est en préparation depuis 1993. La stratégie de l'UE à cetégard consiste à rendre admissibles à l'adhésion les nombreux candidats, par étapessuccessives, en leur apportant une assistance financière, logistique et politique("stratégie de pré-adhésion", voir ch. 233).

A la différence des précédents élargissements de l'Union européenne, l'élargissementactuel vers l'Est et le Sud est un processus ouvert. Cela signifie que chaque candidat àl'adhésion est traité séparément et à un rythme adapté. Cette approche individuelledoit permettre à des candidats rejoignant la négociation avec du retard de dépasser descandidats de la première heure. Il semble plutôt vraisemblable, en fonction des expé-riences réalisées, que ces négociations individuelles débouchent vers la fin sur un re-groupement, ce qui faciliterait la procédure de ratification dans les Etats membres.

Le processus d'élargissement n'en est qu'à son début. Au-delà des engagements priscôté communautaire, des réserves importantes demeurent. L'élan politique initial s'estfait rattraper par des situations intérieures prévalant dans les pays membres, qui for-cent les gouvernements à veiller à la défense d'intérêts particuliers qui seraient forcé-

550 Abstention constructive dans le domaine de la politique étrangère; possibilités d'introduire des dispositions

plus strictes en matière de protection de l'environnement; flexibilité en matière de choix des participants à denouvelles actions communes.

551 Les référendums ont eu lieu en Irlande (22 mai 1998; acceptation par 61,7% de Oui) et au Danemark (28mai 1998; acceptation par 55,1% de Oui).

Page 287: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 285 - Chapitre 3

ment touchés par l'intégration des pays candidats. Au moment où les contours des"positions communes" de l'UE commencent à se dessiner, force est de constater queles Quinze confronteront les candidats avec des conditions dures et des périodes tran-sitoires très longues.

Il est difficile de prévoir la durée du processus de négociation, mais elle pourrait serévéler plus importante que prévu à l'origine. La décision de la Conférence intergou-vernementale d'Amsterdam, selon laquelle il faudra procéder à une révision des insti-tutions de l'UE avant un élargissement à plus de vingt Etats membres, risque de pro-voquer des retards. Des Etats comme la France et l'Allemagne insistent pour que detelles réformes institutionnelles soient réalisées préalablement à tout élargissement(voir ch. 311.04).

311.04 Perspectives d’avenir

L'Union européenne s'oriente-t-elle vers un Etat fédéral supranational ou restera-t-elleune forme mixte de règles nationales et de réglementations supranationales ?" (H.M,canton de Zurich)L'UE se situe dans une phase d'élargissement géographique. Dans le même temps,elle améliore son mode de fonctionnement. Les futures étapes d'approfondissementconcernent des domaines pour lesquels des réglementations communes à tous lesEtats membres sont considérées comme souhaitables. Un passage à "l'Etat fédéraleuropéen" n'est pas envisagé.

Une des questions à trancher est de savoir dans quelle mesure les Etat membres semettront d'accord pour réaliser une certaine harmonisation en matière fiscale et so-ciale.

L'Europe communautaire a en plus, sur sa table de travail, un double projet d'enver-gure qui continuera d'absorber durant les années à venir les énergies des organes del'Union et des Etats membres. Les deux volets de ce projet sont étroitement liés dansla substance et dans le temps. Le premier, qui concerne la réforme financière, la ré-forme de certaines politiques et la réforme institutionnelle, constitue la clé de la réali-sation du second volet, celui de l'élargissement vers les pays d'Europe centrale etorientale. Au plan de la réforme, les travaux relatifs à l'Agenda 2000 - qui regroupe laréforme financière et la réforme de la politique agricole - progressent lentement. Ils'agit de dégager les ressources qui, au-delà du financement de la pré-adhésion desnouveaux candidats, permettront d'insérer ces derniers dans les mécanismes commu-nautaires. Il s'agit également d'adapter la politique agricole européenne au cadre quela globalisation a créé pour l'agriculture mondiale et de préparer, du même coup, laprochaine étape de la réforme du commerce des produits agricoles prévue pour l'an2000 à l'OMC. C'est en 1999 que devront, en principe, être prises les décisions querequiert l'Agenda 2000 (voir ch. 253).

La réforme institutionnelle a enregistré certains résultats dans le cadre du Traitéd'Amsterdam. Mais l'exercice n'est pas terminé. Dans une Union dont le nombre de

Page 288: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 286 - Chapitre 3

membres peut potentiellement doubler par rapport au chiffre actuel de quinze, laquestion de l'efficacité de la gestion devient importante. Les travaux portent sur desquestions incluant la pondération des voix des Etats membres au Conseil, l'augmenta-tion du nombre d'objets requérant des décisions à la majorité qualifiée plutôt qu'àl'unanimité et le nombre de membres de la Commission. Un second aspect, de natureinterne, a trait au fonctionnement du Conseil lui-même et à sa capacité de procéder àdes arbitrages entre les différents intérêts sectoriels en jeu. Un troisième aspect a traitau rôle du Parlement européen. Le Traité d'Amsterdam a renforcé ce rôle et augmentéles sujets sur lesquels une décision du Conseil nécessite l'accord du Parlement("codécision"), mais ce mouvement n'est pas achevé et trouve toujours un ressortpuissant dans la discussion permanente sur la nature démocratique de l'Union552. Cettediscussion est d'ailleurs doublée par l'élément fédéral du système, puisque les parle-ments nationaux chercheront à améliorer leurs positions dans l'exercice de pouvoirstransférés à l'UE.

"L'UE souhaite-t-elle à long terme l'adhésion de tous les Etats d'Europe, y compriscelle de la Russie et des anciens Etats de la CEI?" (L. L., canton des Grisons)Ce n'est pas l'UE qui "souhaite" les adhésions; ce sont exclusivement les Etats quisouhaitent adhérer. L'UE mène des négociations avec ceux pouvant adhérer à l'Uniondans un avenir prochain. La Russie et les autres Etats de la CEI n'en font pas partie.Les conditions requises pour une éventuelle adhésion sont la stabilité économique etpolitique ainsi qu'une reconnaissance des valeurs européennes.

S'agissant de nouveaux élargissements, l'Union obéit à une vocation originelle quil'appelle également à servir de structure d'accueil et d'organisation des pays revenusdans le giron de la démocratie et de l'économie de marché après un demi-siècle d'ex-périence totalitaire forcée. A l'élargissement vers l'Est correspondra un élargissementde portée moins grande au Sud (Chypre, Malte), accompagné d'une politique méditer-ranéenne plus active compte tenu des intérêts sécuritaires dans cette région. Par l'in-corporation de pays d'Europe centrale et orientale, l'Union européenne achèvera sareprésentativité continentale tout en s'affirmant comme le principal organisateur de lanouvelle architecture européenne à l'Ouest de la Russie.

Dans une perspective à plus long terme, la principale question que l'Union devra ré-gler a trait à la politique étrangère et de sécurité commune. En dépit des progrès enre-gistrés depuis le lancement de la "Coopération politique européenne" en 1970, cettepolitique reste insuffisante par rapport aux défis auxquels l'Europe est confrontée(voir ch. 231), ainsi que par rapport aux responsabilités que l'Union devrait pouvoir

552 Le déséquilibre en faveur des Etats les moins peuplés ressort par exemple de la comparaison entre l'Allema-

gne et la Belgique:D B Total UE

Population en millions d'hab.: 81 10 371

Voix au Conseil des ministres: 10 5 87

Représentants au Parlement européen: 99 25 626

Commissaires: 2 1 20

Juges à la Cour de justice des CE: 1 1 15

Page 289: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 287 - Chapitre 3

assumer en raison de son poids économique. La question du développement de la po-litique étrangère et de sécurité commune touche le coeur du domaine sensible de lasouveraineté des Etats membres. Elle requiert la définition d'objectifs clairs et la mo-bilisation de ressources. Elle doit délimiter la place d'une approche plus spécifique-ment européenne dans le cadre de l'Alliance atlantique et de la coopération avec lesEtats-Unis. Tous ces éléments seront abordés avec prudence et pragmatisme, parfoisavec réticence, notamment de la part des forces critiques à l'égard d'une Union forte.Le comportement contradictoire de certains critiques de l'UE qui, d'une part, stigmati-sent les faiblesses de la politique de sécurité de l'Union européenne et, d'autre part,sont totalement opposés à ce que l'on mette plus de moyens à la disposition du"pouvoir central de l'UE" se retrouve non seulement en Suisse mais également dansde nombreux Etats membres.

Après un développement constant durant presque 50 ans, l'Union européenne se ca-ractérise par les particularités suivantes :

- A la différence des Etats, l'UE n'est pas souveraine car elle ne peut exercer que lesattributions qui lui ont été cédées à l'unanimité par les Etats membres. L'UE ne dis-pose donc pas de ce que l'on appelle la "compétence de compétence", l'habilitant àdécider elle-même des domaines dans lesquels elle peut définir des politiques oulégiférer. En outre, le principe de subsidiarité permet de contrôler juridiquement siles mesures prises par l'UE l'ont été conformément au niveau de compétence (voirch. 212, let. A.5). De plus, l'UE n'a pas de monopole en matière de puissance, ni desouveraineté territoriale, ni de droit de citoyenneté global propre.

- Par ailleurs, à l'inverse de la situation qui prévaut dans les domaines de la politiqueétrangère et de sécurité commune, de la justice et des affaires intérieures (deuxièmeet troisième piliers), la Communauté peut, dans le domaine économique(Communautés européennes, premier pilier), légiférer en principe par des décisionsprises à la majorité; le droit qui en résulte étant souvent directement applicable auxpersonnes physiques et morales dans l'UE. La Communauté garantit la protectionjuridique de ses citoyens, en dernier ressort par ses propres autorités judiciaires.Ses mécanismes de décision comprennent deux parties: d'une part, les domainesorganisés au niveau supranational (premier pilier, c'est-à-dire, principalement,l'économie et, nouvellement, la sécurité intérieure), d'autre part, la politique étran-gère et la coopération policière organisées au niveau intergouvernemental.

- Le développement de l'Union européenne est un processus ouvert. La dynamiquequi a marqué son évolution se poursuit. Les "modifications constitutionnelles" ré-pétées et les élargissements par étapes donnent l'image d'une Communauté qui seremet sans cesse en question et qui est devenue, par sa vitalité et la pluralité de sesaspects, un des acteurs marquants de la politique mondiale.

- Le risque de perdre de vue les citoyens en raison de la taille de l'édifice a été perçu.Des travaux ont été entrepris à cet égard. Du point de vue de la Suisse, il reste en-core beaucoup à faire dans ce domaine.

Vu ces particularités, il ne faut pas s'attendre à ce que le développement de l'UEstagne dans un proche avenir. Quiconque en Suisse attend que l'UE se présente sous

Page 290: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 288 - Chapitre 3

la forme d’un produit fini pour décider, en toute connaissance de cause, de l'adhésionou de la non-adhésion, devra encore patienter longtemps.

312 Voie suisse

312.01 Stratégie de la politique d'intégration du Conseil fédéral

Les relations de la Suisse avec le processus d'intégration européenne sont déterminéespar les constantes suivantes :

- le soutien du processus d'intégration;

- le désir d'améliorer l'accès au marché pour les exportations suisses et – depuis 1992– de réduire les désavantages économiques dus au système subis par l'économiesuisse;

- la volonté d'agir contre l'isolement politique et culturel du pays.

Le soutien du processus d'intégration européenne résulte de la position des intérêtssuisses au sein d'une communauté d'Etats européens s'organisant et s'élargissant: unispar une volonté de paix, par le droit, par la perspective d'une prospérité communegrâce à l'économie de marché et par l'esprit de solidarité continental, les Etats de l'UEqui mettent leurs efforts en commun partagent les mêmes valeurs que la Suisse.

Par contre, jusqu'à maintenant, il n'y a pas unanimité en Suisse quant à l'instrumentpolitique, juridique et économique le mieux adapté pour défendre nos intérêts en Eu-rope. Pendant les trente premières années de l'histoire de l'intégration européenne, laconviction qui a prévalu était que, comme en temps de guerre, la solution la plusavantageuse, la plus juste et la plus sûre du point de vue de la politique intérieure con-sistait à se démarquer de l'environnement européen et à se concentrer sur nos particu-larités étatiques, sociales et économiques, quitte à tisser des liens contractuels avecl'Europe occidentale en voie d'intégration. Cette conviction n'a pas tardé à trouver sonexpression dans une demande d'association des Etats neutres (Finlande, Autriche,Suède et Suisse), sur la base de l'art. 238 du Traité CEE553. Dès le 24 septembre 1962,la Suisse a fait valoir devant le Conseil de la CEE qu'elle ne demandait pas d'avanta-ges unilatéraux mais qu'elle recherchait une solution juste et équilibrée permettant depréserver et de développer la coopération déjà existante et l'intégration de fait554.Cette tentative n'a pas été un succès, raison pour laquelle la Suisse a développé uneactivité intense au sein de l'Association européenne de libre-échange (AELE) qu’ellea elle-même fortement encouragée.

Les résultats de cette politique sont l'Accord de libre-échange de 1972 et un nombreimportant d'autres accords entre Etats, principalement dans le domaine économique.

553 Voir au sujet de cette forme d'approche de politique d'intégration R. Bieber/B. Kahil/S.Poralla: Differen-

zierte Integration in Europa – Handlungsspielräume für die Schweiz ? – Université de Lausanne 1998, p. 18et ss (dans le cadre du programme national de recherche PNR 42).

554 Voir rapport du 24 août 1988 sur la position de la Suisse dans le processus d'intégration européenne, FF1988 III 233.

Page 291: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 289 - Chapitre 3

Dans son rapport du 24 août 1988 sur la position de la Suisse dans le processus d'inté-gration européenne555, le Conseil fédéral est arrivé à la conclusion "que la volontéd'une grande majorité du peuple suisse est de conserver les caractères politiques fon-damentaux de la nation". Il est intéressant de remarquer que le Conseil fédéral a éga-lement constaté que notre objectif doit être "d'assurer, dans toute la mesure du possi-ble la compatibilité de nos dispositions juridiques avec celles de nos partenaires euro-péens dans tous les domaines ayant une dimension transfrontalière."556

Ces constatations et l'affirmation ambiguë selon laquelle la Suisse doit être en mesured'adhérer pour ne pas y être contrainte ont ouvert le débat sur la question de savoir sile fait de ne pas adhérer aux nouvelles institutions européennes n'a pas un prix politi-que, celui de l'isolement, du désavantage et de l'obligation de reprendre systémati-quement la législation de l’UE.

Depuis la chute du Mur de Berlin en 1989, l'Union européenne est devenue, de ma-nière toujours plus évidente, le centre politique et économique du continent. En outre,les négociations sur l’EEE ont montré que seuls les Etats membres de l'UE peuventdécider de l'organisation politique et juridique du continent. Enfin, au niveau écono-mique, la courbe de croissance de la Suisse a commencé à régresser derrière celle desEtats voisins. Ce sont là les motifs essentiels qui ont amené le Conseil fédéral à modi-fier sa stratégie le 19 octobre 1991 et à considérer depuis que l'adhésion à l'UE cons-titue l'instrument de politique d'intégration permettant le mieux de défendre les inté-rêts de la Suisse en Europe. Par là même, le Conseil fédéral a pris une décision rele-vant de sa responsabilité en matière de conduite de l'Etat. A ce jour, ni le Parlement,ni le peuple suisse ne se sont encore exprimés sur la question de l'adhésion à l'UE. LeConseil fédéral a toujours été conscient que l'adhésion de la Suisse à l'UE ne pourraêtre engagée que lorsque les conditions de politique intérieure seront réunies, c'est-à-dire lorsqu'il disposera du soutien politique nécessaire à la conduite des négociations.

Par son contre-projet indirect à l'initiative populaire "Oui à l'Europe!"557, formulée le27 mai 1998 sous forme d'une proposition d'arrêté fédéral simple non sujet au réfé-rendum et présentée au public558, le Conseil fédéral veut clarifier la question des con-ditions politiques intérieures. L'art. 3 du contre-projet du Conseil fédéral précise quece dernier décidera, à la lumière des consultations sur le rapport d'intégration, de l'étatde la procédure de consultation relative aux résultats des négociations sectorielles ain-si que sur la base de consultations, notamment avec les cantons, de la date à laquellela demande d'adhésion de la Suisse à l'UE sera réactivée.

Le Parlement peut approuver le contre-projet du Conseil fédéral à l'initiative popu-laire, le rejeter sans contre-projet ou présenter un contre-projet. Dans tous les cas,

555 FF 1988 III 233.556 FF 1988 III 365.557 L’initiative constitutionnelle déposée le 30 juillet 1996 demande l'ouverture immédiate de négociations

d'adhésion.558 Le message relatif à l'initiative populaire "Oui à l'Europe!" a été transmis au parlement en janvier 1999, voir

FF 1999 ....

Page 292: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 290 - Chapitre 3

l’initiative populaire devra être soumise au vote au plus tard à fin janvier 2001, àmoins que les auteurs de l'initiative la retirent. Cette possibilité reste ouverte tant quele Conseil fédéral n'a pas fixé la date de la votation.

Sans tenir compte de sa stratégie d'adhésion, le Conseil fédéral donne actuellement lapriorité absolue à l'entrée en vigueur des accords sectoriels. Ces accords font partie dela politique d'intégration à long terme du Conseil fédéral, telle qu'elle a été fixée dansle rapport sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90559.

312.02 Actions de politique d'intégration du Conseil fédéral

"Pourquoi l'opinion populaire n'est-elle pas tout simplement acceptée et pourquoi nese contente-t-on pas des négociations bilatérales" (R., pas d'indication de lieu)Le Conseil fédéral respecte l'opinion populaire: la Suisse ne participe pas à l'EEE.Aucun gouvernement ne peut travailler sans s'assurer à tout moment du soutien po-pulaire. De même, il doit représenter les intérêts à long terme du pays en poursuivantson but de manière résolue, même si les moyens utilisés sont refusés par une partie dela population. Le peuple pourra s'exprimer sur les accords sectoriels ainsi que surchaque nouvelle étape de politique d'intégration dans le cadre des attributions qui luisont conférées par la constitution.

Après le Non à l'EEE du 6 décembre 1992, le Conseil fédéral a intensifié les contactsavec l'UE et les Etats membres afin de sortir la Suisse de son isolement en matière depolitique étrangère. Outre des visites diplomatiques coûteuses à l'étranger, diversespossibilités formelles et informelles permettant d'entretenir des contacts ont été crééeset exploitées depuis560.

Le 5 février 1993, le Conseil fédéral a présenté un programme consécutif au rejet del'Accord EEE dans lequel, d'une part, il a proposé le programme SWISSLEX consis-tant en une adaptation des lois suisses à celles de la CE dans des domaines économi-ques significatifs, mais sans liens institutionnels avec la CE561 et, d'autre part, il a dé-cidé de proposer à l'UE l'ouverture de négociations sectorielles dans les domaines dé-finis en collaboration avec l'ensemble des milieux intéressés en Suisse562, l'objectifétant d'atténuer les désavantages économiques résultant de la non-participation à l'Es-pace économique européen563. Ce faisant, il a effectué le premier pas en vue de la re-

559 Rapport du 29 novembre 1993 sur la politique extérieure de la Suisse dans les années 90, FF 1994 I 150.560 Rencontres régulières des ministres de l'économie et des finances dans le cadre de l'ECOFIN; échanges de

vues au sein de la Conférence européenne; dialogue politique entre des représentants de l'administration fé-dérale et les présidents des groupes de travail PESC.

561 Voir message du 24 février 1993 sur le programme consécutif au rejet de l'Accord EEE, FF 1993 I 757.562 Voir présentation détaillée dans le rapport intermédiaire du 29 mars 1995 sur la politique d'intégration euro-

péenne de la Suisse, FF 1995 III 191.563 Il s'agit en particulier de la discrimination en matière de marchés publics et de la non-reconnaissance des

contrôles suisses pour divers produits industriels. S'y ajoutent des contrôles fastidieux à la frontière, desconditions de concurrence inéquitables en ce qui concerne le transport aérien et la participation aux pro-grammes communautaires, notamment dans les domaines de la formation et de la recherche, et des allége-ments dans le commerce des produits agricoles transformés.

Page 293: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 291 - Chapitre 3

vitalisation de l'économie suisse564. Dans le même temps, le Conseil fédéral a décidéde suspendre momentanément la demande d'adhésion de la Suisse déposée en mai1992.

"Avez-vous l'impression que l'UE conclura un accord (bilatéral) avec nous, si laSuisse officielle parle en permanence d'adhésion? Ce que le Conseil fédéral fait là,c'est affaiblir notre position de négociation" (R., sans indication de lieu)Pour l'UE, la stratégie d'adhésion du Conseil fédéral a constitué un préalable à l'ou-verture de négociations bilatérales sectorielles avec la Suisse. L'UE négocie encoreplus durement et recherche encore plus ses intérêts avec les pays qui excluent touterecherche de solution multilatérale (participation à l'EEE ou adhésion à l'UE) auxproblèmes qui se posent.

Après des négociations préalables retardées par l'acceptation de l'initiative sur la pro-tection des Alpes par le peuple et les cantons en 1994, la Suisse et l'UE sont conve-nues, fin 1994, de l'ouverture de négociations dans sept domaines (voir ch. 321.02).Au cours d'une réunion des coordinateurs en chef le 16 juin 1998, les sept accords ontpu être largement affinés. Ainsi, les négociations ont pu être conclues au niveau desministres le 11 décembre 1998 à Vienne (voir ch. 321.01).

Le Conseil fédéral est conscient du fait que la Suisse, en se tenant à l'écart de l'UE,peut conserver une marge de manœuvre dont ne disposent pas les Etats membres del'UE. D'une part, il comprend les personnes souhaitant continuer à exploiter cettemarge de manœuvre de manière autonome; d'autre part, les expériences des dernièresannées ont montré qu'en dépit d'une autonomie formelle de la Suisse, la reprise desdéveloppements législatifs et politiques de l'UE se généralise toujours plus (voir chap.2, ch. 22 à 24, let. B).

312.03 Soutien interne à la politique d'intégration

"Vous menez une politique totalement opposée à l'opinion et à la volonté du peuple.Le peuple est opposé aux adhésions à l'EEE, à l'UE, à l'ONU et à l'OTAN." (M. J.-K,canton des Grisons)Depuis le rejet de l'EEE, le Conseil fédéral a tout fait pour mener à bien la voie bila-térale préconisée par les opposants à l'EEE (négociation d'accords sectoriels). LeConseil fédéral maintient l'objectif de l'adhésion à l'UE car il est convaincu ainsi dedéfendre au mieux et de manière globale les intérêts de la Suisse. Comme toujoursdans notre pays, le peuple aura le dernier mot.

Le Conseil fédéral a étroitement associé le Parlement, notamment les commissions depolitique étrangère, à la conduite de la politique d'intégration. Les négociations bilaté-rales sectorielles entre la Suisse et l'UE figurent, depuis des années, à l'ordre du jourde presque chaque session de ces commissions. De même, les commissions sont ré-

564 Voir rapport du Conseil fédéral du 13 juin 1994 sur la poursuite des réformes en faveur de l'économie de

marché, FF 1994 III 1360.

Page 294: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 292 - Chapitre 3

gulièrement informées des derniers développements au sein de l'UE. Les consulta-tions ont lieu dans le cadre de l'article 47bisa de la loi sur les rapports entre les con-seils565.

Le Conseil fédéral et les cantons ont renforcé leur dialogue en matière de politiqued'intégration. D'une part, les principes à la base du projet de loi fédérale sur la partici-pation des cantons à la politique étrangère566 sont déjà appliqués de façon provisoire;d'autre part, l'intégration d'un délégué à l'information des cantons au Bureau de l'inté-gration DFAE/DFE a conduit à une coopération étroite à l'égard tant de questions deprincipe que de questions opérationnelles567.

Le Conseil fédéral et l'administration fédérale ont toujours informé les organisionsfaîtières de l'économie et les partenaires sociaux de toutes les décisions les concer-nant et, notamment s'agissant des négociations bilatérales sectorielles, les ont invités àprendre position avant toutes les modifications des mandats de négociation.

L’information de l’opinion publique en matière européenne se fonde sur la stratégied'information approuvée par le Conseil fédéral le 30 juin 1993 et adaptée par la suite.Cette stratégie a été élargie en fonction des nombreuses interventions parlementairesen la matière568. Le mandat d'information du Bureau de l'intégration DFAE/DFEporte sur deux axes principaux: les négociations bilatérales sectorielles Suisse-UE etla politique d'intégration en général. C'est dans ce cadre que se place l'information liéeau rapport sur l'intégration 1999. Tant pour les accords sectoriels que pour le rapportsur l'intégration, l'information s'appuie sur des supports traditionnels569 et moder-nes570. Le Bureau de l'intégration DFAE/DFE joue principalement un rôle d'approvi-sionnement et de coordination. Un programme d'action spécifique vise à intensifierl'information sur les accords sectoriels. La connaissance du système européen estbeaucoup plus élevée aujourd'hui qu'au début des années 90 dans l'opinion publique.Les sondages effectués au cours de ces dernières années donnent une fourchette quivarie entre 48% et 56% de citoyens favorables à l'adhésion à l'UE571.

565 Loi fédérale du 23 mars 1962 sur la procédure de l'Assemblée fédérale, ainsi que sur la forme, la publication

et l'entrée en vigueur des actes législatifs (loi sur les rapports entre les conseils), RS 171.11.566 Voir FF 1998 I 953 et ss.567 Par exemple un groupe de travail paritaire, coprésidé par un conseiller d'Etat et par le chef du Bureau de

l'intégration DFAE/DFE examine les effets des accords sectoriels au niveau de la Confédération et des can-tons.

568 Notamment en réponse à la motion Cottier du 17 mars 1994 (94.3144), à l'interpellation Epiney du 5 mars1996 (96.3035) et à la motion du Conseil national sur les "Rapports entre l'évolution des situations enSuisse, en Europe et dans le monde", du 23 mai 1996 (96.3195).

569 Fact sheets, brochures, conférences.570 CD-Rom, médias électroniques.571 Ainsi, en été 1998, un sondage de l'Institut de recherche GfS relevait que 53% des personnes interrogées se

déclaraient favorables (30%) ou plutôt favorables (23%) à l'adhésion à l'UE, 60% favorables (36%) ou plu-tôt favorables (24%) à une participation à l'EEE et 59% favorables à des accords bilatéraux.

Page 295: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 293 - Chapitre 3

Dans les années qui ont suivi le vote sur l'EEE, des votations significatives concer-nant l'Europe ou la politique étrangère ont eu lieu :

- Le 20 février 1994, l'arrêté fédéral concernant l'introduction d'une redevance surle trafic des poids lourds liée, soit aux prestations, soit à la consommation a été ac-cepté par le peuple et les cantons. Le même jour, l'initiative populaire "Pour laprotection des régions alpines contre le trafic de transit" a également été acceptée.

- Par contre l'arrêté fédéral sur la révision du droit de la nationalité (naturalisationfacilitée pour les jeunes étrangers) a échoué devant les cantons le 12 juin 1994. Aucours de la même votation, la loi fédérale relative aux troupes suisses chargéesd'opération en faveur du soutien à la paix (projet des casques bleus) a égalementété rejetée.

- Le 25 juin 1995, la loi fédérale sur l'acquisition d'immeubles par des personnes àl'étranger, qui prévoyait une libéralisation partielle, a été rejetée. De même, le 1er

décembre 1996, l'initiative populaire "Contre l’immigration clandestine" a été re-jetée à une nette majorité.

- Le 8 juin 1997, le peuple suisse et l'ensemble des cantons ont nettement rejeté, parpresque 74% des voix, l'initiative populaire "Négociations d'adhésion à l'UE: quele peuple décide!". Cela a confirmé l'argumentation du Conseil fédéral, qui avaitsouligné à plusieurs reprises que l'ouverture de négociations d'adhésion devait res-ter de sa compétence, dans la mesure où le peuple suisse et les cantons devaient detoute façon prendre position sur un traité d'adhésion moyennant le référendumobligatoire. Enfin, en juin 1997, les auteurs de l'initiative populaire "Pour notreavenir au cœur de l'Europe" ont retirée cette dernière, les pro-européens à l'originede cette initiative ayant choisi de se concentrer sur l'adhésion à l'UE et ne voulantpas continuer à soutenir un projet d’EEE plutôt orienté vers l'économie.

- En septembre 1998, une autre votation importante du point de vue de la politiqueeuropéenne a eu lieu: le référendum sur la redevance poids lourds liée aux presta-tions. Le peuple suisse a soutenu la politique du Conseil fédéral par 57% des voixL'arrêté fédéral relatif à la réalisation et au financement des projets d'infrastruc-ture des transports publics a lui aussi été accepté par près de 64% des suffrageslors de la votation du 29 novembre 1998 sur la constitution.

Page 296: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 294 - Chapitre 3

32 Instruments de la politique d'intégration autres quel'adhésion

321 Conclusion des accords sectoriels572

321.01 Déroulement des négociations sectorielles bilatérales Suisse-UE

"Lorsque l'on suit les négociations bilatérales (…), on est amené à constater que lesreprésentants de l'UE ne formulent pratiquement que des exigences à notre encontre."(K.F., canton de Lucerne)Dans l’optique de l’UE, c’est tout le contraire. En effet, le but des accords sectorielsest de moderniser nos relations dans les domaines insuffisamment couverts par leréseau contractuel existant, afin d'atténuer certains désavantages liés à la voie soli-taire que nous avons choisie. Il va de soi que cela implique des concessions récipro-ques.

Avant l'ouverture officielle des négociations bilatérales sectorielles, l'Union a claire-ment fait savoir que ces négociations ne pourraient en aucun cas déboucher sur uneintégration complète de la Suisse dans le marché intérieur européen, ni lui conférer unstatut institutionnel plus avantageux que celui dont bénéficient les Etats membres.Elle a en outre souligné qu'elle n'admettrait pas que la Suisse se compose un "menu àla carte". La stratégie d'adhésion du Conseil fédéral a été une des raisons de l'ouver-ture de négociations bilatérales.

Afin d'éviter l'éventuel rejet, par voie de référendum, d'un des accords négociés, l'UEa posé les conditions suivantes:

- l'UE et les Etats membres ne ratifieront les sept accords que lorsqu'il sera établi quela Suisse de son côté peut tous les ratifier;

- la mise en œuvre et le suivi des sept accords seront liés par une clause stipulant quela résiliation d'un accord se répercuterait sur les six autres (principe du"parallélisme approprié").

La conclusion politique des accords a eu lieu le 11 décembre 1998. A l'heure qu'il est,les textes des accords sont finalisés au plan linguistique et traduits dans les languesofficielles de la Suisse et de l'UE. Les procédures d'approbation prendront environ unà deux ans, de sorte que l'entrée en vigueur des accords peut être prévue pour la fin del'an 2000.

572 Le message du Conseil fédéral sur les résultats des négociations bilatérales sectorielles conclues au niveau

politique le 11 décembre 1998 (sept accords, adaptations nécessaires de la législation et mesures d'accom-pagnement) sera présenté après la signature des accords. C'est la raison pour laquelle les résultats de ces né-gociations ne sont décrits dans le rapport sur l'intégration que de façon générale. L'appréciation des accordssectoriels sera également partie intégrante du message précité.

Page 297: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 295 - Chapitre 3

321.02 Contenu des accords sectoriels

Recherche - L'accord prévoit une participation de la Suisse au 4e programme-cadre derecherche de l'UE au même titre qu'un Etat EEE. Les deux parties sont convenues queles instituts de recherche et les chercheurs suisses pourront participer de plein droit àtous les projets du programme-cadre de recherche de l'UE et qu'à l'inverse, les insti-tuts de recherche de l'UE (universités, entreprises, individus) pourront participer auxprogrammes et projets de recherche suisses. Par ailleurs, des représentants et expertssuisses pourront siéger en tant qu'observateurs dans tous les comités pertinents char-gés d'élaborer les projets scientifiques du programme-cadre. Comme le 4e programmede recherche est arrivé à échéance à la fin de 1998 pour être relayé par le 5e, une dé-claration commune a été élaborée confirmant que toutes les mesures nécessaires se-ront prises pour assurer la participation de la Suisse au 5e programme-cadre, sur labase des modalités négociées pour le précédent. Entre-temps, ces mesures ont été mi-ses en route.

"(...) L'introduction de la libre circulation des personnes entraînera probablement desdépenses supplémentaires au titre de l'assurance-chômage (...). Pour pouvoir maîtriserce surplus de coûts, on envisage d'ailleurs d'ores et déjà de réduire les prestations.Comment comprendre dans ces conditions que le Conseil fédéral et le Parlement par-lent d'un renforcement de la place industrielle suisse par le biais d'un accord"bilatéral", tout en escomptant une augmentation des allocations de chômage? (R.Z.,canton de Berne)Il n'est pas question d'une réduction des prestations de l'assurance-chômage dans lesaccords sectoriels. L'égalité de traitement convenue pour les ressortissants suisses etles citoyens des Etats de l'UE se soldera, tant que le niveau de prestations d'aujour-d'hui demeurera inchangé, par des dépenses supplémentaires annuelles de 170 à 400millions de francs.

Libre circulation des personnes - L’introduction de la libre circulation des personnesse fera par étapes compte tenu de la situation spéciale de la Suisse. Pendant une pre-mière phase de cinq ans après l'entrée en vigueur de l'accord, les conditions de séjouret de travail des ressortissants de l'UE en Suisse seront améliorées. Le traitement pri-vilégié des travailleurs suisses et les contrôles discriminatoires des contrats de travailseront supprimés dans un délai de deux ans au plus tard. Simultanément, les Suissesobtiendront l'entière liberté de circulation sur le territoire de UE. La Suisse continuerade fixer des contingents, aussi pour les ressortissants des Etats de l'UE. Dans unedeuxième phase à partir de la sixième année contractuelle, la Suisse introduira à titred'essai la libre circulation des personnes sans contingentement. Une clause de sauve-garde, pouvant être mise en œuvre de façon unilatérale, lui permettra de réagir à uneaugmentation massive de l'immigration. Pour une nouvelle période de six ans, laSuisse conserve le droit de réintroduire des contingents au cas où le taux d'immigra-tion dépasserait un certain seuil. Après cette période, tant la Suisse que l'UE pourront,en cas de problèmes graves, invoquer une clause de sauvegarde consensuelle ou dé-noncer l'accord.

Page 298: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 296 - Chapitre 3

L'accord est conclu pour une durée initiale de sept ans. A l'expiration de cette pre-mière période contractuelle et sauf décision contraire des parties, il sera reconduitpour une durée indéterminée. La Suisse pourra prendre la décision de poursuivre lesrapports contractuels, le cas échéant, moyennant une votation populaire.

L'accord porte également sur la reconnaissance réciproque des diplômes et des certifi-cats de capacité professionnelle, sur la coordination des systèmes de sécurité socialeet sur l'acquisition ponctuelle et facilitée de biens immobiliers. En ce qui concerne lesprestations de l'assurance-chômage aux travailleurs séjournant pour une courte durée(contrats de travail inférieurs à une année), il a été convenu d'une période transitoirede sept ans pendant laquelle l'addition des prestations (totalisation) qui prévaut dansl'UE ne sera pas appliquée.

"Qui contrôlera les travailleurs au noir qui, profitant de la libre circulation des per-sonnes, travaillent pour des salaires de dumping?" (E.H., canton du Valais)Le droit suisse applicable aussi bien aux ressortissants suisses qu’aux citoyens del'UE permet de lutter contre les abus quant à la sous-enchère salariale et au travailau noir. Les cantons sont chargés de l'exécution de ce droit, en étroite collaborationavec les partenaires sociaux.

Pour les cas où la suppression du contrôle des conditions de salaire et de travail destravailleurs de l'UE, prévue deux ans après l'entrée en vigueur de l'accord, conduirait àdes abus, le Conseil fédéral a élaboré d'entente avec les partenaires sociaux des pro-positions de mesures légales eurocompatibles pour lutter contre ces abus: introductionponctuelle de salaires minimum par les cantons, dérogations exceptionnelles aux dis-positions contraignantes des contrats collectifs, loi sur les travailleurs détachés (voirch. 222.02). Ces propositions, déjà présentées au public, feront prochainement l'objetd'une consultation.

Marchés publics - En complément aux arrangements convenus dans le cadre de l'Ac-cord OMC, les règles OMC seront étendues au niveau communal dans les relationsSuisse-CE; la Suisse atteindra ainsi le même niveau de libéralisation que l'UE. L'ac-cord inclura aussi les marchés publics des entreprises de droit privé opérant dans lessecteurs de l'approvisionnement en eau et en énergie, les transports urbains et régio-naux, ainsi que ceux des entreprises de droit public dans les domaines des chemins defer et des télécommunications. Au-delà de seuils déterminés, ces marchés seront sou-mis aux principes fondamentaux de la non-discrimination et du traitement national(suppression de la règle des 50% de produits d'origine locale et de la règle de la diffé-rence de prix de 3%). Pour les marchés d'une valeur inférieure à ces seuils, la Suisseet l'UE s'engagent à donner comme consigne aux entités adjudicatrices de traiter surun pied d'égalité les soumissionnaires de l'autre partie contractante chaque fois quecela est possible. Deux commissions indépendantes, pour l'UE et la Suisse respecti-vement, sont chargées de la surveillance de l'accord.

Entraves techniques au commerce – L'accord sur la reconnaissance réciproque desrapports de contrôle, des certificats et marques de conformité pour les produits origi-

Page 299: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 297 - Chapitre 3

naires des parties contractantes facilitera les échanges de produits industriels entre laSuisse et l'UE. Il prévoit la reconnaissance des procédures d'examen de conformitéeffectuées dans le pays d'exportation sur la base des dispositions de l'autre partie; dansles cas où les dispositions techniques sont reconnues comme équivalentes, les procé-dures d'examen de la conformité effectuées dans le pays exportateur d'après ses pro-pres dispositions seront également reconnues par l'autre partie, ce qui permettrad'éviter des procédures à double, coûteuses et laborieuses. L'accord prévoit encore desimplifier les procédures de certification, en particulier dans les domaines de pointede l'économie d'exportation suisse (par ex. machines, produits pharmaceutiques etmédicaux, appareils de télécommunication).

"Au train où vont les choses, l'agriculture aura bientôt libre accès au marché commu-nautaire. Est-ce bien sensé?" (H.K., canton de Lucerne)Vu l'importance économique du commerce des produits agricoles, il est dans l'intérêtdes deux parties d'améliorer l'accès au marché pour ces produits par des allégementsà l'exportation. Grâce à une baisse des droits d'importation de l'UE et à la hautequalité des produits, les fromages et les légumes suisses en particulier pourront êtreécoulés plus facilement sur les marchés étrangers.

Produits agricoles – L'accord facilitera le commerce de certains produits agricolesentre la Suisse et l'UE. Il s'agit principalement de produits laitiers (par ex. fromage),de spécialités à base de viande, de fruits et légumes, ainsi que de produits horticoles(fleurs coupées et plantes en pot), pour lesquels des concessions tarifaires ont étéconvenues (droits zéro, contingents tarifaires à droit zéro, réductions tarifaires). L'ac-cord supprimera également des entraves techniques au commerce dans les domainesvétérinaire, phytosanitaire, des semences, des fourrages et des produits biologiques573.Par ailleurs, il renforcera la protection réciproque des indications de provenance pourles vins et les spiritueux.

"(...) Si l'on pense aux effets écologiques de l'augmentation du trafic poids lourds (...),on ne peut parler que d'une intolérable présomption de la part de l'UE (...)." (W.D.,canton de St-Gall).L'accord sectoriel sur les transports terrestres a justement pour but de déplacer de laroute au rail le nombre croissant de transports routiers.

Transports terrestres - L'accord vise l'ouverture réciproque progressive des marchésdes transports par la route et le rail pour l'acheminement des personnes et des mar-chandises, ainsi que la coordination des politiques des transports entre la Suisse etl'UE aux fins d'une mobilité durable, de la protection de l'environnement et de lacomparabilité des conditions, mais aussi pour éviter le trafic de détournement. L'élé-ment central de l'accord est le relèvement par paliers de la limite de poids des ca-mions, parallèlement à l'augmentation de la fiscalité routière. A partir de l'an 2005, lespoids lourds de 40t seront admis en Suisse moyennant une taxe de transit d'environ

573 Les pommes de Thurgovie, par exemple, ne devront plus être expédiées à Stuttgart pour le contrôle de la

qualité avant de pouvoir être vendues en Allemagne.

Page 300: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 298 - Chapitre 3

297 francs. Dès la mise en service du premier tunnel de base des NLFA, mais au plustard le 1er janvier 2008, cette taxe sera relevée et atteindra 325 à 330 francs. L'inter-diction du trafic de nuit en Suisse sera maintenue. Les heures d'ouverture des postes-frontières seront cependant prolongées afin de permettre la pleine exploitation dutemps de circulation admis. Dans le cadre de la solution à long terme, une clause desauvegarde permettra à la Suisse, à certaines conditions, de relever la taxe de 12,5%au plus pour une durée de deux fois six mois. Pendant la période transitoire (jusqu'en2005), l'UE comme la Suisse obtiendront des contingents de 40t à un taux de RPLPsupérieur au taux appliqué aux 34t, ainsi que des contingents de transports à vide etlégèrement chargés à une taxe réduite. En l'an 2001, la limite de poids sera parailleurs relevée de 28 à 34 tonnes.

Transports aériens - L'accord en la matière règle l'accès des compagnies aériennessuisses au marché aérien européen sur la base de la réciprocité. Dès son entrée en vi-gueur, les compagnies aériennes suisses bénéficieront des 3e et 4e libertés574, et deuxans plus tard, des 5e et 7e libertés. Cinq ans après l'entrée en vigueur de l'accord, onprévoit de négocier la 8e liberté qui accorderait aux compagnies aériennes suisses lapleine égalité des droits. Les institutions communautaires sont investies de compéten-ces de surveillance et de contrôle dans le domaine du droit de la concurrence, maispas en ce qui concerne les aides d'Etat, ni les aspects environnementaux. En contre-partie, la Suisse peut siéger dans les comités de concurrence correspondants.

Appréciations des accords sectoriels575

Bien que la Suisse soit déjà fortement liée aux Etats de l'UE au plan économique576 etqu'elle soit parvenue, notamment dans le cadre de l'Accord de libre-échange de 1972,à démanteler des obstacles centraux au commerce des marchandises, les conditionsnécessaires à la création d'une situation comparable à celle qui prévaut au sein dumarché intérieur sont loin d'être réunies. Même si ce n'est pas la réalisation des quatrelibertés qui se trouve au premier plan, mais une partie essentielle de ces libertés dansles domaines de la circulation des personnes et des marchandises577, ainsi que des ser-vices en matière de transports, les sept accords sectoriels amélioreront l'accès au mar-ché et feront baisser les prix de l'offre. Cela donnera des impulsions à la croissance. 574 Les "libertés" du transport aérien sont:

- 1e liberté: droit de survol;- 2e liberté: escales non commerciales;- 3e liberté: Genève-Paris;- 4e liberté: Paris-Genève;- 5e liberté: Genève-Paris-Madrid ("cabotage de correspondance");- 6e liberté: Paris-Genève-Madrid;- 7e liberté: Paris-Madrid;- 8e liberté: Paris-Lyon ("cabotage", soit vols intérieurs pouvant être effectués depuis avril 1997 par des

compagnies étrangères au sein de l'UE).575 Appréciation provisoire et non exhaustive; le Conseil fédéral fera une évaluation complète dans son message

à l'Assemblée fédérale sur les résultats des négociations bilatérales sectorielles.576 Voir rapport du 15 janvier 1997 sur la politique économique extérieure 96/1+2, p. 121 s, FF 1997 II 1.577 Celle-ci comprend la libéralisation des marchés publics, le démantèlement des entraves techniques au com-

merce pour les produits industriels et agricoles, ainsi que le démantèlement des obstacles techniques à l'ac-cès au marché pour les produits agricoles.

Page 301: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 299 - Chapitre 3

Cette plus grande croissance résultera d'abord de la suppression de plusieurs dés-avantages économiques concrets. Mentionnons en premier lieu le surplus de coût dansle domaine du transport aérien, estimé à 200 millions de francs par année, ainsi queles entraves techniques au commerce des produits agricoles (par ex. double contrôlede la qualité) et les doubles évaluations de conformité requises pour certains médica-ments et certaines machines, évaluations pouvant se chiffrer à 0,5% du prix à l'ex-portation. Mentionnons encore la règle des 50% de produits d'origine locale et la règlede la différence de prix de 3% pour les marchés publics dans les domaines des trans-ports ferroviaires et des télécommunications. On reconnaît aisément le potentiel decroissance pouvant découler de la suppression de ces désavantages.

Les accords sectoriels devraient donc avoir des effets globalement positifs sur laprospérité de la Suisse, légèrement inférieurs seulement aux estimations faites préala-blement dans le contexte EEE578.

Quant aux coûts des accords sectoriels, autrement dit leurs effets sur les budgets pu-blics et notamment sur le budget de la Confédération, ils sont estimés à 300 millionsde francs (voir ch. 251.05). Ces coûts sont bien inférieurs au gain de prospérité quel'on attend des sept accords.

321.03 Portée de la voie sectorielle

Dès que les sept accords seront signés, le Conseil fédéral adressera à l'Assemblée fé-dérale un message sur les résultats des négociations sectorielles. Ce message con-tiendra, hormis une évaluation globale, les sept accords, les adaptations requises auniveau du droit national et les mesures d'accompagnement à prendre, notamment dansles domaines de la circulation des personnes et des transports terrestres.

Le Conseil fédéral considère aujourd'hui déjà avoir approuvé la conclusion politiquedes négociations, le 11 décembre 1998, parce qu'il a pu parvenir à la conviction que,vu globalement et sous l'angle des sept domaines considérés, le résultat des négocia-tions est équilibré, avantageux pour l'économie et la population suisse et conforme àl'objectif initial, qui était d'atténuer les effets négatifs du Non à l'EEE en 1992. A ladifférence du rapprochement multilatéral de la Suisse à l'EEE ou de son adhésion àl'UE, la voie sectorielle est bilatérale. Elle ne couvre ni l'ensemble des quatre libertés,ni les politiques horizontales et les politiques d'accompagnement relevant du droit dumarché intérieur. Elle se limite pour l'heure à sept domaines centraux au sein de cedroit, qui sont d'une importance prépondérante pour la circulation transfrontalière desmarchandises, des personnes et des services. Quant à la proximité des solutions négo-ciées par rapport au droit du marché intérieur, elle diffère d'un domaine à l'autre. Re-tenons pour l'essentiel qu'avec cette approche, les contrôles des marchandises et despersonnes à la frontière sont maintenus, avec les désavantages économiques et les

578 Dans une étude commandée par le Conseil fédéral, le professeur Hauser (Haute Ecole de St-Gall) estime ces

effets à 4 à 6% du PIB après une période d'adaptation de dix ans, soit un surplus de croissance annuelle de0,4 à 0,6%. Cette estimation correspond aux pronostics de la CE pour ses propres membres dans le cadre duprogramme du marché intérieur.

Page 302: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 300 - Chapitre 3

coûts qui en résultent; il faut s'en accommoder si l'on choisit la méthode de l'équilibredes intérêts par secteur.

Les dispositions institutionnelles des accords sectoriels s'appuient sur une coopérationintergouvernementale classique pour la gestion et la surveillance de l'application desaccords (par le biais de comités mixtes). Deux accords prévoient une surveillance detype juridique et non diplomatique: d'une part, l'accord sur les marchés publics, quiexige de chaque partie contractante qu'elle charge une autorité indépendante de lasurveillance de l'application de l'accord, d'autre part, l'accord sur le transport aérien,qui confie aux instances communautaires (pilier unique composé de la Commission etde la Cour de justice des CE) la compétence exclusive d'assurer le respect des règlesde concurrence communautaire intégrées dans cet accord. A ce sujet, il faut releverque le nombre d'opérateurs économiques suisses dans le secteur du transport aérienest très limité et qu'aujourd'hui déjà, les comportements de ceux-ci peuvent être sanc-tionnés par les instances communautaires dans la mesure où ils produisent des effetsdans la CE (doctrine des effets).

Contrairement à l'Accord EEE (et à l'exception de l'accord sur le transport aérien), lesaccords sectoriels ne sont pas fondés sur une reprise littérale et intégrale du droitcommunautaire dans les secteurs concernés. Ces accords sont fondés sur l'équivalencedes règles suisses et communautaires. L'autonomie législative de la Suisse est ainsipréservée, même s'il est évidemment dans l'intérêt de la Suisse de maintenir cetteéquivalence en tenant régulièrement compte de l'évolution du droit communautairedans les domaines couverts par les accords sectoriels, faute de quoi les divergencesdes règles suisses et communautaires feraient obstacle à l'application des accords con-cernés. La protection renforcée, par rapport à l'EEE, de l'autonomie législative et ju-risprudentielle des parties à l'accord est contrebalancée par l'homogénéité réduite del'ordre juridique en vigueur.

Malgré le caractère sectoriel et non global des accords négociés et le fait que ceux-ci -sous réserve de l'exception susmentionnée - n'incorporent pas l'acquis communautaire,la Suisse a obtenu la possibilité de participer aux comités communautaires pertinentsdans des conditions comparables à celles prévues par l'Accord EEE. Elle a obtenu unstatut d'observateur actif (droit de parole sans droit de vote) dans les domaines où elleapplique un droit équivalent au droit communautaire ou contribue financièrement àdes programmes communautaires au même titre qu'un Etat membre.

321.04 Arguments pour et contre la voie sectorielle

La conclusion des négociations bilatérales sectorielles le 11 décembre 1998 a montréque la voie sectorielle pouvait aboutir dans des domaines déterminés, à condition qu'ily ait un intérêt réciproque. C'est pourquoi, le Conseil fédéral estime qu'il n'y a pas deraison de s'opposer à la conclusion de nouveaux accords sectoriels avec l'Union euro-péenne, pour autant que de tels accords soient dans l'intérêt équilibré des deux partieset puissent être conclus dans un délai raisonnable. Des accords spécifiques sectorielsont indéniablement une valeur intrinsèque. De ce fait, ils peuvent remporter l'adhésion

Page 303: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 301 - Chapitre 3

même de ceux qui affichent une attitude sceptique, voire de refus, face à l'intégrationmultilatérale de la Suisse dans les institutions européennes. Quant aux partisans del'adhésion, parmi lesquels figure le Conseil fédéral, ils y souscrivent aussi, estimantque ces accords ont une valeur et qu'ils vont dans la bonne direction.

L'histoire des quatre ans de négociations a montré ce qui suit579:

La voie sectorielle présente les avantages suivants: la Suisse peut décider au mêmetitre que l'UE du choix des objets de la négociation, la transposition et l'applicationdes accords en Suisse se fait de façon autonome et les coûts directs demeurent bas, laSuisse n'ayant à verser des contributions à l'UE que dans quelques rares cas (par ex.dans le domaine de la recherche).

La voie sectorielle en tant qu'instrument de politique d'intégration suisse à long termeprésente les inconvénients suivants:

Vu qu'elle doit tenir compte d'une multiplicité d'intérêts internes, l'Union européennese montre très retenue quant au choix des domaines de négociations; seul ce qui inté-resse plus ou moins l'ensemble des quinze Etats membres peut faire l'objet de négo-ciations. En raison des conditions particulières de l'UE, les négociations sont longues et labo-rieuses. Avec quinze Etats membres, l'UE a atteint un degré de complexité qui entravel'approche sectorielle: chaque problème de fond (par ex. la libre circulation des per-sonnes) peut engendrer un nouveau déséquilibre entre les Etats membres, qui doit êtrerétabli à coups de concessions dans d'autres domaines (par ex. l'agriculture). L'ab-sence systématique de la Suisse aux réunions des Quinze fait qu'il est difficile de dis-siper à temps et efficacement les malentendus, vrais ou faux, concernant les positionssuisses.

La conclusion de nouveaux accords sectoriels se heurte à des limites institutionnelles.Pour les questions centrales intéressant les deux parties, une solution contractuellen'entre en ligne de compte que si la Suisse confère à l'UE des droits de souveraineté etreconnaît notamment la suprématie de la Cour de justice des CE, ainsi que la primautédes décisions législatives et politiques du Conseil des ministres prises à la majoritédes voix. Parmi les questions qui ne peuvent être réglées par des accords sectorielsmais seulement par l'adhésion, mentionnons l'abolition des frontières de l'union doua-nière pour le commerce des marchandises, la collaboration entière et sur un piedd'égalité, dans le domaine de la sécurité intérieure, la garantie institutionnelle de lastabilité monétaire et du cours de change, ainsi que la participation à des accords éco-nomiques entre l'UE et les autres régions du globe (ALENA, Mercosur, APEC, bassinméditerranéen, etc.).

579 Une analyse politique des négociations bilatérales sectorielles conclues au niveau politique le 11 décembre

1998 figurera dans le message y relatif.

Page 304: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 302 - Chapitre 3

Si les accords sectoriels ne présentent pas d'inconvénients sous l'angle de la souverai-neté, leur adaptation à de nouvelles contingences (par ex. relèvement des exigencestechniques pour certains produits, nouvelles normes de protection de l'environnement)risque d'être un long et laborieux processus, à plus forte raison si elle nécessite l'ap-probation des Quinze au niveau parlementaire. Le Conseil fédéral a sondé à fond la voie sectorielle ces quatre dernières années etcontinuera de la suivre, d'entente avec l'Union européenne, dans la mesure du possibleet pour autant que les deux parties en manifestent l'intérêt (entrée en vigueur des ac-cords sectoriels, modernisation des règles de libre-échange pour les produits de l'in-dustrie alimentaire, participation à Europol, négociation d'un accord parallèle à laConvention de Dublin relative au pays de premier asile, participation suisse aux pro-grammes de l'UE dans les domaines de la formation, de la promotion du film, des sta-tistiques et de l'observation environnementale). Le Conseil fédéral est toutefois per-suadé que, pour ce qui est du contenu et des procédures, les limites seront bientôt at-teintes en matière d'accords sectoriels entre la Suisse et l'Union européenne.

322 Participation à l'EEE 322.01 Portée matérielle et institutionnelle d'une participation à l'EEE "L'adhésion à l'EEE signifie un accès rapide et sans entrave au marché intérieur etrésout un des principaux problèmes de notre économie." (Eurodossier, cercle de tra-vail Suisse-Europe) Dans l'EEE, les contrôles à la frontière entre les Etats de l'UE et ceux de l'AELE sontmaintenus; aussi les entreprises dont le lieu de production se trouve en Suisse se-raient-elles désavantagées par rapport aux entreprises de l'UE lors d'exportationsvers l'EEE. Outre ces problèmes économiques d'accès au marché intérieur de la CE,la Suisse devrait faire face à d'autres problèmes croissants (asile, sécurité intérieure,stabilité monétaire) qui ne pourraient être résolus par une participation à l'EEE. L'Accord sur l'espace économique européen580 est un accord d'association dynamiquehautement développé, offrant des conditions proches du marché intérieur pour la cir-culation des marchandises, des personnes, des capitaux et des services. L'accord re-pose sur l'extension du droit communautaire aux pays membres de l'AELE parties àl'EEE. Au cas où les pays de l'AELE n'accepteraient pas un nouvel acte juridique de laCE, ils peuvent en commun rejeter sa reprise dans l'accord, ce qui entraîne toutefois lasuspension automatique de la partie de l'accord concernée. Plusieurs domaines d'inté-gration importants de l'UE, tels que l'union douanière, la politique commerciale com-mune, la politique fiscale, l'union monétaire, la politique agricole commune du mar-ché intérieur, ainsi que la sécurité intérieure et extérieure et la coopération judiciairene sont pas couverts par l'Accord EEE.

580 FF 1992 IV 1.

Page 305: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 303 - Chapitre 3

Le Conseil fédéral a toujours soutenu l'Accord EEE comme une étape intermédiaireutile en vue d'une participation suisse globale à l'édifice européen. Il est ressorti desanalyses faites à l'issue du refus de l'EEE le 6 décembre 1992 qu'à côté des avantageset désavantages économiques de la solution EEE, prônés et dénoncés respectivementpar les partisans et les opposants, ce sont avant tout la crainte d'un afflux démesuréd'étrangers et le prix politique d'une satellisation partielle de la Suisse qui ont faitpencher la balance. Selon l'analyse de la votation populaire du 6 décembre 1992 effectuée par l'Institut derecherche GfS et l'Université de Genève, les motifs du rejet se répartissent commesuit581: Classementdes motifs

Motifs Partisans del’EEE

Motifs Opposants àl'EEE

1 Motifs économiques 34 % Motifs économiques 21 %2 Esprit d'ouverture 33 % Manque d'information, manque

de clarté du Conseil fédéral 18 %3 Eviter l'isolement 27 % Perte d'indépendance 14 %4 Pour les jeunes, pour leur

avenir 14 %Méfiance vis-à-vis de la CE 14 %

5 Pas besoin de motiver, c'estla meilleure solution 12 %

Peur du chômage 14 %

6 Pour limiter le chômage 9 % Peur des étrangers 13 %7 La "voie solitaire" n'est pas

une solution 7 %Absence de codécision 9 %

8 Pour la libre circulationdes personnes, les études 7 %

C'est trop tôt, ça va trop vite 9 %

9 Pour s'opposer au "non"nationaliste 2 %

Pour le statu quo 6 %

10 C'est une première étapevers l'adhésion 1 %

Pas besoin de motiver, c'estévident 6 %

11 Autres raisons 10 % L'EEE conduit automatiquementà l'adhésion 5 %

12 Autres raisons 17 %

Le volet institutionnel de l'Accord EEE est tout à la fois d'une complexité formelleextraordinaire et d'une certaine modestie matérielle. D'une part, les structures et pro-cédures institutionnelles de l'EEE sont très complexes582 parce qu'elles règlent d'unefaçon restrictive l'association des Etats de l'AELE au processus décisionnel commu-nautaire dans les domaines que les parties contractantes considèrent comme pertinentspour l'EEE, tout en sauvegardant l'autonomie législative de celles-ci. En réalité, l'in-fluence de chacune des parties contractantes n'est pas identique. En tant que partieassociante, la Communauté exerce un rôle prépondérant, et les Etats de l'AELE ont la

581 Deux réponses étaient admises, c'est pourquoi le total dépasse 100%. Voir p. 54 et 57 de l'analyse telle

qu'elle a été publiée en janvier 1993.582 Coexistence d'organes communs (Conseil, Comité mixte, Comités parlementaire et consultatif) et d'une

structure à deux piliers (Comité permanent des Etats de l'AELE, Autorité de surveillance AELE, Cour AE-LE, d'une part, et institutions communautaires, d'autre part). Processus continu d'échange d'informations etde consultations. Voir le message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE, FF 1992 IV449 et ss.

Page 306: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 304 - Chapitre 3

possibilité d'influencer le processus législatif communautaire relatif aux actes suscep-tibles d'être intégrés dans l'Accord EEE.

D'autre part, la modestie matérielle de l'arrangement institutionnel EEE tient au faitqu'il ne confère pas de droit de codécision aux Etats de l'AELE, mais un systèmecomplexe d'influence sur les décisions ("décision shaping")583. Comme le Conseilfédéral le soulignait dans son message relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE:"l'Accord EEE ne respecte pas dans tous ses éléments le principe des droits et obliga-tions réciproques des parties contractantes (...). Au fond, l'accord reflète la réalité eu-ropéenne d'aujourd'hui et le rôle moteur que joue la CE dans le processus en courspour établir une nouvelle architecture européenne."584 Cette appréciation a trouvéconfirmation à de nombreuses reprises au cours des dernières années puisque les qua-tre grands partenaires AELE dans l'EEE ont insisté pour que leurs négociationsd'adhésion à l'UE soient entreprises dès le début de 1993585, et quatorze autres Etatseuropéens ont déposé une demande d'adhésion pour rejoindre les Quinze586.

En 1992, comparant le volet institutionnel de l'Accord EEE avec son contenu maté-riel, le Conseil fédéral a considéré que "l'accord dans son ensemble ne consacre unéquilibre entre avantages, droits et obligations qu'à la condition d'admettre que lesavantages surtout économiques de l'accord peuvent compenser une inégalité institu-tionnelle."587 Mais le raisonnement de l'époque, mettant sur le même pied deux ordresde valeur différents, s'appuyait surtout sur l'analyse des autres voies de politique d'in-tégration, c'est-à-dire l'adhésion et la politique d'intégration pragmatique et ponc-tuelle. Le Conseil fédéral s'était fixé l'adhésion en tant qu'objectif de politique d'inté-gration en octobre 1991 déjà, et l'Accord EEE était considéré, dans une certaine me-sure, comme une préparation à l'adhésion. Par ailleurs, par son caractère multilatéral,l'Accord EEE devait apporter des avantages économiques considérables.

En 1998, l'appréciation par le Conseil fédéral d'une éventuelle adhésion suisse à l'EEEn'est pas fondamentalement différente de celle de 1992: "Notre participation à l'EEE(...) ne peut pas être un substitut à l'adhésion à la CE".588

Il faut relever que le pilier AELE au sein de l'EEE a perdu une grande partie de saforce d'alors puisque l'Autriche, la Finlande et la Suède ont rejoint l'UE. Avec les pro-chains élargissements, le pilier communautaire au sein de l'EEE continuera de se ren-

583 Il n'est pas possible d'évaluer en termes quantitatifs ou qualificatifs cette possibilité d'influence. Les parties

contractantes ont des opinions divergentes à ce sujet.584 FF 1992 IV 1, 46.585 L'Accord EEE est entré en vigueur le 1er janvier 1994. L'Autriche, la Finlande et la Suède sont devenus

membres de l'UE le 1er janvier 1995. Le peuple norvégien a refusé l'adhésion le 29 novembre 1994 par52,5% des voix.

586 Voir le tableau au ch. 331.01.587 FF 1992 IV 47. Le Conseil fédéral ajoutait: "Il n'est pas dans notre intention d'en rester à une politique d'in-

tégration européenne réduite, pour l'essentiel, à sa composante économique et dépourvue de droit à la co-décision.", (FF 1992 IV 56).

588 FF 1992 IV 56.

Page 307: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 305 - Chapitre 3

forcer à tel point que la volonté politique et la capacité de l'UE de tenir compte desintérêts du pilier AELE pourraient diminuer progressivement. 322.02 Développement de l'EEE depuis 1992 "L'EEE fonctionne et continue d'être respecté par l'UE. Les membres AELE/EEE sontsatisfaits." (Eurodossier, cercle de travail Suisse-Europe)" Pour la Norvège, l'Islande et la Principauté du Liechtenstein, l'Accord EEE est uninstrument utile pour un accès facilité au marché intérieur de la CE. Par contre, laSuède, la Finlande et l'Autriche ont décidé de devenir membres de l'UE, estimantqu'ils pouvaient ainsi mieux défendre leurs intérêts. Depuis le message du 18 mai 1992 relatif à l'approbation de l'Accord sur l'Espaceéconomique européen, l'EEE a connu les développements suivants:

- Après le non de la Suisse à l'EEE le 6 décembre 1992, il a fallu adapter l'Accordsigné à Porto le 2 mai 1992 en raison de la modification du nombre des membres.L'Accord est entré en vigueur au début de 1994. Dans le protocole d'adaptation, laparticipation financière des pays de l'AELE a été redéfinie; en outre, dans une dé-claration commune, les membres ont manifesté leur intérêt à une participation ulté-rieure de la Suisse à l'EEE moyennant une nouvelle demande et de nouvelles négo-ciations. Les périodes transitoires et les dispositions spéciales négociées pour laSuisse ont été supprimées.

- Le 1er janvier 1995, les anciens pays de l'AELE – l'Autriche, la Finlande et laSuède – sont devenus membres de l'UE à l'issue de votations populaires.

- Enfin, après modification des relations spéciales entre la Suisse et le Liechtenstein,lequel participe à l'EEE, l'Accord a pu entrer en vigueur pour le Liechtenstein dé-but mai 1995, moyennant une décision du Conseil de l'EEE du 10 mars 1995.

Après son refus de 1992 de participer à l'EEE, la Suisse a acquis un statut d'observa-teur589, au niveau des fonctionnaires, dans certaines institutions du pilier AELE del'EEE. Ce statut lui permet d'observer systématiquement l'évolution de l'acquis com-munautaire pour autant qu'il concerne l'EEE. La Suisse n'est par contre pas représen-tée dans les organes supranationaux des autorités de surveillance de l'AELE, ni à laCour de justice AELE, ni dans les institutions communes AELE/CE (Conseil del'EEE, Comité de l'EEE). Sa présence en tant qu'observateur est admise seulementdans le comité consultatif des parlementaires de l'EEE. Depuis son entrée en vigueur en 1994, l'Accord EEE a fait l'objet de très nombreuxcompléments. Plus de quatre cents décisions du Comité mixte EEE ont ajouté près desept cent cinquante nouveaux actes communautaires dans l'accord. La majorité de cesactes constituent des révisions - d'ampleurs diverses - de l'acquis EEE pertinent. Envi-ron deux cents de ces actes peuvent être considérés comme substantiellement nova-

589 Dans le comité permanent, dans les cinq groupes de travail (marchandises, personnes, capitaux, services,

droit) ainsi que dans de nombreux groupes d'experts.

Page 308: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 306 - Chapitre 3

teurs590. Le retard initial pris dans l’extension du droit communautaire aux pays EEE-AELE n'a pu être entièrement rattrapé. La reprise de certains actes juridiques, notam-ment, s'est avérée difficile (par ex. Agence européenne des médicaments à Londres;droit vétérinaire). Le système de compensation des prix nets pour les produits agrico-les transformés prévu au protocole 3 de l'Accord EEE n'a pu être appliqué sous uneforme modifiée que dans le courant de l'année 1998. Le poids politique nouvellementaccordé à l'EEE par l'UE suite à l'adhésion des trois anciens membres de l'AELE et laréduction correspondante de l'effectif du personnel engagé par la Commission des CEpour l'EEE ont également contribué à ce retard. Pour les pays de l'AELE, l'EEE semble faire ses preuves, même si le déséquilibre desrapports de force est manifeste. Rappelons à ce propos l'application de mesures desauvegarde communautaires contre certaines livraisons de saumon norvégien ou, toutrécemment encore, l'exigence politique de reconduire le Fonds de cohésion de l'EEE,dont la durée contractuelle était limitée à cinq ans. 322.03 Questions de principe liées à une participation de la Suisse à l'EEE

322.03.1 Procédure décisionnelle de l'EEE

Une brève description du volet institutionnel de l'Accord EEE et son évaluation figu-rent au ch. 213, let. B.2. Les effets de l'Accord EEE sur l'ordre juridique suisse et surnos institutions sont décrits en détail dans le message relatif à l'approbation de cetaccord591. Ils sont résumés au ch. 213, let. B.2.

Pendant toute la négociation de l'Accord EEE, la Suisse s'est fortement engagée pourque les Etats de l'AELE puissent être associés au processus décisionnel communau-taire dans les domaines pertinents pour l'EEE. Le résultat atteint peut être considérécomme juste satisfaisant parce qu'il représente le maximum de ce qu'il était possibled'obtenir de la Communauté qui, invariablement depuis ses origines, a toujours luttépour sauvegarder l'intégrité de son autonomie de décision.

Pour le Conseil fédéral, les faiblesses institutionnelles de l'Accord EEE font que cedernier ne peut être considéré comme une solution indépendante et durable pour lesrelations entre la Suisse et l'UE.

322.03.2 Champ d'application matériel

L'Accord EEE vise une participation étendue, mais non complète, au marché intérieurcommunautaire ainsi qu'à certaines politiques d'accompagnement, dans la mesure oùcelles-ci sont nécessaires au fonctionnement d'un espace économique homogène. Auplan matériel, cela signifie la création de relations semblables à celles qui prévalent

590 A côté de l'annexe I substantiellement modifiée (prescriptions vétérinaires), on notera les modifications

apportées dans le domaine de la libre circulation des services (télécommunications, banques et assurances,notamment).

591 FF 1992 IV 59 et ss (ch. 4.2), 77 et ss (ch. 5.2 - 5.8).

Page 309: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 307 - Chapitre 3

sur le marché intérieur par la reprise de larges pans du droit communautaire des qua-tre libertés en matière de circulation des marchandises, des personnes, des capitaux etdes services (services financiers, de communication et de transport), ainsi que desrègles communes dans les domaines du droit de la concurrence, des aides d'Etat, del'énergie, des marchés publics et de la propriété intellectuelle. S'y ajoutent des politi-ques horizontales et des politiques d'accompagnement, telles que l'égalité de traite-ment entre hommes et femmes, les droits des travailleurs, la participation dans lesentreprises, la protection des consommateurs, la protection de l'environnement, ledroit des sociétés, la formation et la jeunesse, le tourisme, le programme MEDIA et laprotection civile. L'Accord EEE ne couvrant pas les deux domaines centraux que sont l'union douanièreet la politique commerciale commune, il en résulte que, dans le domaine de la circu-lation des marchandises, le passage à la frontière nécessite encore et toujours, hormisles documents d'usage, toutes sortes d'autres papiers: attestations d'origine, certificatsvétérinaires et phytosanitaires, documents de transport, etc. En raison des politiquesagricoles différentes, il faut aussi compenser les différences de prix des produits agri-coles de base à la frontière. Sans compter que le passage à la frontière de marchandi-ses dépend des heures d'ouverture des bureaux douaniers, ce qui occasionne des per-tes de temps. Impossible dans ces conditions de garantir des livraisons "just in time".A la différence des transports au sein de l'UE, il faut en outre garantir la TVA sur lamarchandise lors du passage à la frontière. Les prescriptions techniques harmoniséesau sein de l'EEE et le principe de "Cassis de Dijon" appliqué dans le domaine nonharmonisé facilitent les échanges commerciaux lors de la mise sur le marché (par ex.contrôle de la conformité des produits). Mais, contrairement aux procédures internesde l'UE, le contrôle (par sondages) des marchandises est maintenu. Tous ces facteurs ont pour effet qu'en cas de participation de la Suisse à l'EEE, il yaurait réduction de la fiabilité et de la flexibilité aussi bien des exportateurs que desimportateurs suisses par rapport au cas où la Suisse serait membre de l'UE. Les petiteset moyennes entreprises opérant avec une palette de produits variable et ne pouvantpas appliquer une procédure standard pour le passage à la frontière seraient les pre-mières à en faire les frais. Du point de vue économique, les déficits institutionnels et commerciaux de l'EEE, parrapport à l'appartenance à l'UE, seraient moins importants si les libertés ainsi acquisesaux plans politique et économique pouvaient effectivement renforcer la position de laSuisse face à la concurrence. Or, le Conseil fédéral en doute, car, même dans la situa-tion actuelle où la Suisse n'est pas soumise à la discipline contractuelle de l'EEE, ellereprend de façon autonome, en général dans son propre intérêt, les mesures de politi-que économique de l'UE et se soumet ainsi de plus en plus au rôle dirigeant de l'UE. La dépendance de la Suisse face aux développements de l'UE ne se limite pas auxéléments centraux des quatre libertés du marché intérieur communautaire repris dansl'EEE, mais concerne aujourd'hui également des questions de stabilité monétaire, desécurité intérieure, de politique d'asile et de politique extérieure. L'Accord EEE a ain-

Page 310: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 308 - Chapitre 3

si perdu en importance relative pour la Suisse, même en tant qu'étape intermédiaire envue d'une adhésion ultérieure à l'UE. 322.03.3 Portée financière de l'EEE "L'entrée dans l'EEE coûterait nettement moins à l'Etat que l'adhésion à l'UE."(Eurodossier, cercle de travail Suisse-Europe) C'est vrai. L'EEE ne prévoit pas de taxe d'adhésion. Les coûts annuels de la partici-pation à l'EEE devraient être revus à l'occasion des négociations de participation àl'EEE; ils correspondent à quelque 15% des coûts d'adhésion à l'UE. En 1992, l'Accord EEE constituait un équilibre, également financier, aux yeux despartenaires aux négociations. Mais la situation a évolué depuis, ce qui nécessite unrééquilibrage. A cet égard, il faut tenir compte des facteurs suivants:

- Le cycle de l'Uruguay a été conclu depuis lors dans le cadre du GATT, ce qui aentraîné des adaptations surtout dans le régime de protection à la frontière pour lesproduits agricoles.

- Trois pays de l'AELE sont devenus membres de l'UE, ce qui a entraîné une réduc-tion de l'effectif du personnel dans les organes de l'EEE; cet effectif devrait être ànouveau augmenté, ce qui occasionnerait des frais592.

- Après la renonciation de la Suisse à participer à l'EEE, les autres Etats membres del'EEE ont dû prendre à leurs charges la majeure partie de la contribution suisse auFonds de cohésion. Ils ont expressément convenus que la Suisse devrait rembour-ser ces frais en cas de participation ultérieure à l'EEE.

- Dans aucun des domaines suivants - agriculture, recherche, transports et assurancessociales -, les coûts liés au statut de membre de l'EEE ne seraient plus bas que dansle cadre des accords sectoriels.

Comparés aux coûts d'adhésion à l'UE, les coûts qu'occasionnerait l'entrée dans l'EEEet ceux des accords sectoriels devraient être relativement faibles (voir ch. 251.). Celadit, une comparaison directe des chiffres ne montre pas les bénéfices liés à une parti-cipation. Afin de répondre à plus long terme aux besoins de l'économie, et plus spé-cialement à l'économie d'exportation, seule semble viable une solution qui donneraitaux entreprises domiciliées en Suisse les moyens de soutenir la concurrence avec lesentreprises de l'UE. Et encore faudrait-il que ces moyens ne soient pas réduits à néantpar les obstacles à la frontière. Même si les effets sur les prix et les coûts d'une reprisedu tarif douanier de la CE sont faibles, la suppression des contrôles douaniers et ledémantèlement des obstacles au commerce non tarifaires n'en entraîneraient pasmoins une réduction des coûts et donc aussi, potentiellement, des prix. Dans ce sens,la croissance économique plus importante qui devrait résulter de l'adhésion à l'UE parrapport à une participation à l'EEE devrait plus que compenser les coûts supplémen-taires.

592 Sans compter le renforcement du secrétariat AELE, des autorités de surveillance AELE et de la Cour de

justice AELE.

Page 311: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 309 - Chapitre 3

322.03.4 Procédure d'adhésion à l'Accord EEE

Le 17 mars 1993, les Etats signataires de l’Accord EEE (sauf la Suisse) ont conclu unprotocole d’adaptation de cet accord pour tenir compte du vote suisse de 1992. Ceprotocole a supprimé de l'accord toutes les dispositions spécifiques à la Suisse et tou-tes les références à notre pays. En revanche, l'art. 128 de l'accord a été modifié pourouvrir à la Suisse la possibilité de demander à devenir partie à l'Accord EEE593. Dansune déclaration commune, les parties actuelles à l'accord ont précisé que les négocia-tions à cet effet seront basées sur les dispositions - y compris leurs modifications ulté-rieures - de l'Accord EEE d'origine et celles des accords bilatéraux négociés simulta-nément.

L'Accord EEE de 1999 a évolué par rapport à l'accord signé en 1992 et dont l'acquisle plus récent remontait au 31 juillet 1991. Comme les parties à l'Accord EEE l'ontsouligné dans leur déclaration de 1993, la Suisse devra s'accommoder de l'accord telqu'il se présentera au moment de la négociation. Il est peu probable que les dix-huitEtats parties à l'Accord EEE acceptent des demandes de dérogation de la part de laSuisse, compte tenu du dogme d'homogénéité absolu de l'EEE.

Du point de vue procédural, la demande d'adhésion doit être présentée au ConseilEEE. Celui-ci pourrait soit déléguer au Comité mixte EEE et à ses structures la prépa-ration de la négociation, soit en laisser le soin aux diverses parties contractantes; dansles deux cas, la Commission serait probablement le porte-parole du pilier CE alorsque le Comité permanent des Etats de l'AELE préparerait les positions du pilier AE-LE.

Du point de vue matériel, la négociation portera sur un nombre de points limité. LaSuisse devrait reprendre l'acquis pertinent EEE, qui correspond très largement à l'ac-quis communautaire d'ordre économique à reprendre en cas d'adhésion à l'UE594. Lesdifférences entre la participation à l'EEE et l'adhésion à la CE sont décrites dans lemessage relatif à l'approbation de l'Accord sur l'EEE595. Des règles transitoires pour-raient être négociées si la Suisse démontre qu'elles sont indispensables. Des arrange-ments devraient traiter des relations avec les accords existants entre les mêmes partiesou certaines d'entre elles. Des références à la Suisse devraient être ajoutées chaquefois que cela est nécessaire dans l'acquis pertinent EEE. Du point de vue institution-nel, il n'y aurait probablement rien à négocier, les solutions de 1992 telles qu'adaptéespar la suite devraient être reprises.

593 Dans sa formulation initiale, l’art. 128 de Accord EEE limitait aux futurs nouveaux membres de l’AELE ou

de la CE le droit (il s'agit même d'une obligation pour ceux-ci) de demander à devenir partie à l'AccordEEE. En cas d'adhésion à l'UE et, comme tout nouvel Etat membre, la Suisse devrait obligatoirement deve-nir partie à l'Accord EEE puisque cet accord est intégré dans l'acquis communautaire repris globalement.

594 On fait abstraction des règles des deuxième (politique étrangère et de sécurité commune) et troisième(coopération dans les domaines de la justice et des affaires intérieures) piliers de l'UE.

595 FF 1992 IV 52 et ss (ch. 4.143).

Page 312: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 310 - Chapitre 3

Enfin, pour ce qui est de la durée, les négociations en vue d'une participation à l'EEEne devraient guère durer plus longtemps que celles relatives à l'adhésion à l'UE(formulation des mandats de négociation, négociations elles-mêmes, procédure d'ap-probation interne en Suisse, dans l'UE et dans tous les Etats parties à l'UE et à l'AE-LE). 322.04 Arguments pour et contre une participation à l'EEE Les arguments en faveur d'une participation de la Suisse à l'EEE sont, comparés à uneadhésion à l'UE, les faibles effets en terme de politique nationale et le faible niveaudes coûts.

A la différence d'une adhésion à l'UE, une participation à l'EEE ne nécessiterait pasun alignement dans le domaine de l'agriculture, pas plus que la Suisse ne devraittransformer son ordre financier (pas de reprise de la TVA minimale de l'UE), ni pro-céder à des adaptations à l'Union économique et monétaire. En cas d'échec des accords sectoriels, dans le cadre de la procédure de ratification,l'EEE demeurerait intéressant de par son contenu (les quatre libertés). Cela dit, lessolutions encore à négocier dans tous les domaines, notamment dans celui des trans-ports terrestres et du droit des assurances sociales, pourraient bien être très similairesà celles qui ont été retenues dans les accords sectoriels conclus au niveau politique le11 décembre 1998.

Contre l'entrée dans l'EEE - même en tant qu'étape intermédiaire jusqu'à l'adhésion àl'UE - il faut retenir les faiblesses institutionnelles et matérielles (pas d'union doua-nière ni de politique commerciale commune, pas de politique agricole commune, droitde codécision largement inexistant), la contrainte imposée aux Etats de l'AELE, quidoivent parler d'une seule voix, et le fait que l'EEE ne couvre pas les domaines revê-tant une importance croissante pour l'avenir européen de la Suisse (stabilité moné-taire, politique d'asile, sécurité intérieure et politique étrangère). Certains pensent que les relations entre la Suisse et l'UE pourraient être réglées dura-blement par un accord d'association taillé sur mesure en fonction des besoins de laSuisse et allant matériellement au-delà de l'Accord EEE. Cette attitude présupposetoutefois que l'UE sera disposée à négocier et ne tient pas compte du fait que seuls lesEtats membres peuvent exercer un droit de codécision.

Page 313: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 311 - Chapitre 3

"Le Centre de recherches conjoncturelles bâlois (BAK) arrive à la conclusion que laSuisse ne serait pas défavorisée sur le marché intérieur européen si elle optait pour lavoie solitaire (…)." (Interpellation CN J.-C. Rennwald du 7.10.98) Pour le BAK596, l'influence de l'alignement des taux d'intérêt sur l'Europe serait net-tement plus importante que les effets des appréciations du franc telles qu'elles sontintervenues dans les années 90. Ce faisant, le BAK prend pratiquement le contre-pieddes études597 qui documentent l'effet néfaste d'une monnaie surévaluée sur la marchede l'économie. Par ailleurs, il fait fi des différences d'accès au marché en cas d'adhé-sion à l'UE et en cas de participation à l'EEE. L'alignement des taux sur l'Europe se fera déjà avant l'adhésion à l'UE, au gré del'avancement des discussions relatives aux négociations; il a pour effet un renchéris-sement des crédits - des hypothèques notamment - ce qui exige des corrections de va-leur sur le marché immobilier. Il commande en outre des adaptations dans l'appareilde production avec des coûts correspondants. Enfin, il induira surtout une redistribu-tion entre créanciers et débiteurs en Suisse. Pouvoir mener une politique monétaireindépendante donne à un pays une certaine marge de manœuvre conjoncturelle. Mais,une telle latitude recèle le danger d'une déstabilisation en cas de flux et reflux massifsde capitaux induits par des bouleversements sur les marchés financiers internationaux.Et ce danger est particulièrement grand pour une petite économie telle que celle de laSuisse, fortement axée sur un espace économique et dotée de surcroît d'une place fi-nancière très performante. Les effets négatifs sur l'emploi dans le secteur réel del'économie seraient considérables. Enfin et surtout, le BAK part de l'idée que l'accèsau marché est aussi bon en cas de participation à l'EEE qu'en cas d'adhésion à l'UE.Or, on sait que les contrôles douaniers seraient maintenus en cas de participation àl'EEE. 323 Différentes formes de voies solitaires 323.01 Généralités Par "voie solitaire" ("Alleingang"), le Conseil fédéral entend toutes les formes et tousles instruments de la politique suisse d'intégration qui excluent tout (adhésion à l'UE)ou partie (Accord EEE) d'une coopération institutionnelle multilatérale avec les Etatsde l'UE et qui mettent donc au premier plan l'indépendance et la souveraineté totalesde la Suisse. Trois variantes entrent en ligne de compte: des accords sectoriels sansbut d'adhésion, la voie solitaire avec alignement sur l'UE et la voie solitaire avec acti-vités "Offshore".

596 Die Schweiz in Europa aus volkswirtschaftlicher Sicht, Konjunkturforschung Basel AG, Bâle, septembre

1998.597 Selon le Centre de recherches conjoncturelles de l'EPFZ (rapport semestriel 1996, p. 14 et ss), les pertes

cumulées des exportations réelles ont atteint, suite à l'envol du franc dès le premier trimestre 1993, environ4% en tout durant les années 1994 à 1996 et les pertes au niveau du PIB et de l'emploi environ 2,5 %. Selonl'"Etude économique Suisse 1996" de l'OCDE (p. 135, note de bas de page 2), la hausse du franc entre 1993et 1995 aurait induit une perte de croissance du PIB de 3 à 4% au total; cette estimation repose sur des si-mulations faites sur la base du modèle INTERLINK.

Page 314: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 312 - Chapitre 3

323.02 Accords sectoriels sans but d'adhésion En cas d'accords sectoriels sans but d'adhésion, la politique définie dans le rapport duConseil fédéral de 1988 serait poursuivie (voir ch.11). On tenterait de conclure desaccords sectoriels ou des groupes d'accords, sans toutefois maintenir la stratégied'adhésion à l'UE. Il est inutile de décrire cette variante et ses effets économiques etpolitiques, puisqu'il s'agit de la situation actuelle – hormis la stratégie d'adhésion dé-fendue par le Conseil fédéral. Vu l'expérience faite avec les négociations, le Conseilfédéral doute que cette option facilite la conclusion d'accords sectoriels comme cer-tains le prétendent (voir ch. 312.02). Les conditions actuelles prévalant en Suisse montrent que les pronostics économi-ques, négatifs et positifs, faits à la veille de la votation sur l'EEE en 1992 étaient exa-gérés dans les deux sens. D'un côté, la situation ne s'est pas détériorée de façon dra-matique, et de l'autre côté, on n'a pas réussi à faire redémarrer l'économie suisse endépit des efforts déployés en Suisse et au sein de l'OMC, notamment. A la différencedu débat précédant la votation sur l'EEE, l'appréciation actuelle de la situation se con-centre moins exclusivement sur des questions économiques pour s'étendre égalementà des questions fondamentales d'ordre politique (voir ch. 33). Cela dit, le Conseil fé-déral est conscient que la politique d'intégration définie en 1988 demeurera à l'ordredu jour tant que le Parlement n'aura pas décidé et que le peuple et les cantons n'aurontpas approuvé un changement de cap. 323.03 Voie solitaire avec alignement sur l’UE "Pour ce qui est de la capacité concurrentielle au plan international, la Suisse fait par-tie du peloton de tête. Elle est notamment plus compétitive que les Etats membres del'UE." (C. Blocher, Die Schweiz und Europa, 5 Jahre nach dem EWR-Nein) L'économie suisse a relevé les défis découlant du rejet de l'EEE: par le biais de déré-gulations étatiques (par ex. loi sur le marché intérieur, loi sur les cartels, loi sur lesentraves techniques au commerce, ouverture des marchés des infrastructures, ré-forme de la politique agricole) et des programmes de réduction des coûts internes auxentreprises, elle a réussi à s'affirmer face à la concurrence. Cependant, en raison del'accès plus difficile au principal marché qui est celui de l'UE et des tendances à ladélocalisation, la croissance des exportations de différentes branches (par ex. l'in-dustrie des machines) est relativement modeste depuis des années, surtout en compa-raison avec celles des Etats voisins. Partant, les efforts visant à renforcer la positionconcurrentielle de la Suisse, aux plans interne et externe, doivent être poursuivis. La Suisse pourrait - au sens d'une politique délibérée - reprendre de façon autonomel'intégralité du droit relatif au marché intérieur de la CE, ainsi qu'une partie des politi-ques communes de l'UE (union douanière, politique agricole, sécurité intérieure, poli-tique extérieure, etc.) et l'intégrer en cas de besoin dans son droit national. La reprisedu droit actuel et futur (par ex. critères de Maastricht pour l'UEM, l'acquis de Schen-gen, etc.) ainsi que la poursuite des diverses politiques (par ex. concordance et actions

Page 315: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 313 - Chapitre 3

de politique extérieure, politique de l'emploi et politique sociale, politiques de la santéet de l'environnement) se feraient de façon largement unilatérale. Une telle approche unilatérale au sens d'une politique d'alignement ou de rattache-ment permettrait de créer de bonnes bases, du moins en apparence, pour la conclusiond'accords ultérieurs avec l'UE, toujours à supposer que l'Union soit prête à entamerdes négociations, le cas échéant. Le déséquilibre initial faciliterait par exemple lacommercialisation de produits ou de services CE en Suisse jusqu'à la conclusion d'ac-cords, sans que les produits d'exportation suisses accèdent de plein droit au marchécommunautaire pour autant. Ou alors la Suisse pourrait accorder aux citoyens de l'UEle droit d'exercer une profession et de s'établir sur son territoire, et reconnaître leursdiplômes professionnels, sans que l'UE accorde la réciprocité aux travailleurs suisses. La reprise du droit communautaire n'incluant aucun droit de participation ni de codé-cision, la procédure législative interne dans les domaines traités par l'UE serait large-ment superflue. Quant au fond, c'est le droit communautaire qui serait appliqué; ilserait simplement adapté aux conditions institutionnelles suisses. Pour le Conseil fédéral, une telle politique d'"obéissance prévenante et systématique"est hors de question, pour des motifs de politique de souveraineté d'abord, mais aussiparce que rien ne dit que l'UE honorera les prestations économiques préalablementfournies par la Suisse. 323.04 Voie solitaire avec activités "Offshore" "Ne serait-il pas plus judicieux d'exploiter notre potentiel (atouts) plutôt que de nousbrader à l'étranger?" (G. Z., canton des Grisons) Pour le Conseil fédéral, la question n'est pas de savoir "si", mais "comment" nouspouvons au mieux développer et exploiter nos possibilités, seuls ou en tant que mem-bre de l'UE. Avec cette variante, la Suisse ne viserait justement pas l'eurocompatibilité de sondroit. A l'inverse, et pour autant que cela soit dans l'intérêt politique, économique etculturel du pays, les dispositions juridiques et les politiques seraient à nouveau, ouplus fortement encore, "helvétisées" ou "mondialisées". On pratiquerait à dessein unepolitique entièrement axée sur l'exploitation du potentiel économique suisse face à laconcurrence internationale - et non prioritairement européenne -, ainsi que sur la con-clusion d'affaires offrant les meilleures perspectives de gain, nonobstant le risque demesures de rétorsion de politique commerciale. Dans ce cas de figure, on pourrait parexemple envisager les mesures suivantes:

- réduction substantielle de l'impôt anticipé ainsi qu'abrogation de l'arrêté sur lesabus dans le domaine des accords de double imposition;

- allégements fiscaux supplémentaires pour les sociétés financières, de domicile etde services;

- promotion des activités bancaires "offshore";

Page 316: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 314 - Chapitre 3

- assouplissement de la législation dans le domaine de la protection sociale.

Sur le marché intérieur suisse, une telle politique entraînerait probablement un chan-gement structurel rapide et important au niveau des entreprises et du marché de l'em-ploi. Elle pourrait radicalement transformer la place industrielle suisse en place ter-tiaire. Avec cette politique "offshore" délibérée, la Suisse s'exposerait finalement àdes mesures de représailles directes ou indirectes de la part d'Etats concernés, mesuresqui frapperaient de plein fouet l'économie suisse et ne lui permettraient un retour à lapolitique traditionnelle que dans des conditions aussi difficiles que douloureuses.Sans compter que la Suisse, avec une politique de monoculture économique, seraitvulnérable non seulement face aux pressions extérieures, mais aussi face aux fluctua-tions conjoncturelles.

Vu ce qui précède, le Conseil fédéral rejette aussi cette forme de voie solitaire pourdes raisons de politique nationale, économique et sociale, même s'il est théoriquementpensable que les gains économiques réalisés dans certaines branches puissent com-penser les pertes accusées dans d'autres.

323.05 Arguments pour et contre la voie solitaire

Pour le Conseil fédéral, la poursuite de la politique pragmatique des petits pas prati-quée jusqu'ici, avec ses avantages et ses inconvénients, est moins un choix de politi-que d'intégration que l'expression d'une réalité qui prévaudra aussi longtemps que leschangements politiques qu'il préconise ne seront pas mis en œuvre.

Par contre, ni la voie solitaire avec alignement sur l'UE, ni la voie solitaire avec acti-vités "offshore" ne sont des instruments de politique d'intégration que le Conseil fédé-ral étudie de plus près à l'heure actuelle. Un alignement systématique et unilatéral surle développement juridique de l'UE serait discutable sur le plan politique et risqué surle plan économique, puisqu'il implique que la Suisse fournisse sans cesse des presta-tions préalables. Une politique "offshore" aurait pour effet un changement fonda-mental de la situation économique et sociale du pays, à l'avantage de quelques raresindividus, mais au détriment du pays dans son ensemble, qui perdrait son caractèreactuel. Même des formes mixtes de voie solitaire entraîneraient des déficits en termesde politique générale et de politique économique.

33 Adhésion à l'UE

331 Objet et objectifs

331.01 Procédure d'adhésion

"Combien de temps faudra-t-il encore attendre avant que nous ne devenions citoyensde l’UE?" (H.H., canton de Zurich)Il faut au moins trois ans pour qu'une procédure d'adhésion aboutisse. Mais, pour desraisons dues à l'UE ou à la Suisse, elle peut prendre plusieurs années de plus.

Page 317: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 315 - Chapitre 3

Chaque pays européen peut demander de devenir membre de l'Union européenne.Pour adhérer à l'Union, le pays candidat doit conclure un traité d'adhésion avec lespays qui en sont déjà membres. La procédure d'adhésion est décrite en détails ci-dessous598.

La procédure débute par le dépôt de la demande d'adhésion par le pays candidat au-près du Conseil des ministres de l'UE. Ensuite, le Conseil des ministres donne mandatà la Commission d'examiner les conséquences politiques, économiques, juridiques etinstitutionnelles de l'adhésion. La Commission examine les conditions qui doiventêtre remplies pour adhérer et détermine les points sur lesquels il faudra négocier. Enoutre, la Commission fait connaître l'acquis communautaire que le pays candidat de-vra reprendre (voir chap. 2, not. ch. 211) et lui soumet un questionnaire détaillé. Cetteétape a été franchie après le dépôt de la demande d'adhésion de la Suisse en mai 1992.La Commission avait à l'époque procédé aux premiers travaux d'évaluation. Cepen-dant, la demande d'adhésion de la Suisse n'ayant pas eu de suite de suite en raison durefus de l'Accord EEE par le peuple et les cantons, notre pays devra présenter unenouvelle demande qui réactivera sa demande d'adhésion de 1992.

La Commission présente un résumé de son évaluation dans une prise de position("avis) portant sur la demande d'adhésion. Dans le passé, il fallait généralement à laCommission entre un et deux ans pour élaborer cet avis provisoire. Dans le cadre duprocessus continu d'élargissement, la Commission procède par ailleurs à un examende la législation nationale de chaque candidat. Pour chaque domaine politique (voirch. 22), elle vérifie si le candidat à l'adhésion est en mesure de reprendre l'acquiscommunautaire et s'il a déjà adopté les dispositions pour sa transposition ou quel estl'échéancier qu'il a prévu à cet égard.

Se fondant sur l'avis de la Commission, le Conseil des ministres décide de l'ouverturede négociations qui, compte tenu de l'état d'avancement de l'examen de la législationdu pays en question, ne peuvent dans un premier temps porter que sur certains domai-nes politiques. Les négociations sont ouvertes, sous la présidence du président duConseil, par une Conférence ministérielle qui réunit les membres du Conseil et lesreprésentants du pays candidat. Dans la pratique, les négociations qui s'ensuivent sedéroulent sur deux niveaux, celui des ministres et celui des représentants des ministres(dans la pratique le Coreper). La Commission, qui participe à la procédure, peut no-tamment faire des propositions sur les positions de négociation de l'UE.

Les négociations relatives à l'adhésion du Portugal et de l'Espagne ont duré plus desept ans, dans le cas de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède moins d'un an et demi(voir calendrier des procédures d'adhésion, tableau 5). Les adhésions futures risquentd'être retardées car, en vertu d'un protocole du Traité d'Amsterdam, l'UE veut d'abordprocéder aux réformes structurelles nécessaires (voir ch. 213, let. A.8 et ch. 311.04).

598 Voir l'art. O du Traité sur l'UE qui fixe les principes de l'adhésion à l'UE.

Page 318: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 316 - Chapitre 3

Tableau 5

Calendrier des procédures d'adhésion

Pays Demanded'adhésion

Avis de laCommission

Début desnégociations

Traitéd'adhésion

Adhésioneffective

Danemark Mai 1967 Septembre 1967 Juin 1970 Janvier 1972 Janvier 1973

Irlande Mai 1967 Septembre 1967 Juin 1970 Janvier 1972 Janvier 1973

Grande-Bretagne Mai 1967 Septembre 1967 Juin 1970 Janvier 1972 Janvier 1973

Norvège Mai 1967 Septembre 1967 Juin 1970 Janvier 1972

Grèce Juin 1975 Janvier 1976 Juillet 1976 Mai 1979 Janvier 1981

Portugal Mars 1977 Avril 1978 Octobre 1978 Juin 1985 Janvier 1986

Espagne Juillet 1977 Avril 1978 Février 1979 Juin 1985 Janvier 1986

Turquie Avril 1987 Décembre 1989

Autriche Juillet 1989 Juillet 1991 Février1993 Juin 1994 Janvier 1995

Chypre Juillet 1990 Juin 1993 Mars 1998

Malte Juillet 1990 Juin 1993599

Suède Juillet 1991 Juillet 1992 Février 1993 Juin 1994 Janvier 1995

Finlande Mars 1992 Novembre 1992 Février 1993 Juin 1994 Janvier 1995

Suisse Mai 1992 demande gelée

Norvège Novembre 1992 Mars 1993 Avril 1993 Juin 1994

Hongrie Mars 1994 Juillet 1997 Mars 1998

Pologne Avril 1994 Juillet 1997 Mars 1998

Roumanie Juin 1995 Juillet 1997

Slovaquie Juin 1995 Juillet 1997

Lettonie Octobre 1995 Juillet 1997

Estonie Décembre 1995 Juillet 1997 Mars 1998

Lituanie Décembre 1995 Juillet 1997

Bulgarie Décembre 1995 Juillet 1997

Rép. Tchèque Janvier 1996 Juillet 1997 Mars 1998

Slovénie Juin 1996 Juillet 1997 Mars 1998

Après la conclusion des négociations, le Conseil des ministres sollicite de la Commis-sion un avis sur la demande d'adhésion. Le Parlement européen doit également seprononcer sur cette demande. Après que ce dernier a donné son accord à la majoritéabsolue de ses membres, le Conseil des ministres décide à l'unanimité s’il faut accep-ter la demande.

Après la signature du traité d'adhésion par les gouvernements des Etats membres et del'Etat candidat, chaque Etat membre actuel et futur engage la procédure interne deratification du traité d'adhésion. En Suisse, il découle de l'art. 89, alinéa 5, cst. quel'adhésion à l'UE est soumise au vote du peuple et des cantons. Le traité d'adhésionentre en vigueur dès que toutes les parties contractantes ont déposé les instruments deratification.

599 Demande gelée en 1996, dégelée en septembre 1998.

Page 319: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 317 - Chapitre 3

331.02 Objets des négociations et marge de manoeuvre

En principe, en adhérant à l'UE le nouveau membre est tenu de reprendre la totalité del'acquis communautaire, c'est-à-dire notamment l'ensemble du droit primaire et se-condaire. Le pays qui adhère devient membre des trois communautés (CE, CECA etEuratom) ainsi que partie contractante à leurs actes constitutifs et au Traité de l'UE,avec les mêmes droits et les mêmes obligations que les Etats qui en sont déjà mem-bres. Les nouveaux membres adhèrent immédiatement aux traités internationaux con-clus par la Communauté et s'engagent à adhérer aux traités internationaux conclus parla CE et ses Etats membres ("accords mixtes"). Cet engagement vaut également pourles traités et instruments de coopération dans le domaine de la justice et des affairesintérieures, ainsi que pour les traités conclus entre les Etats membres au sens de l'art.220 du Traité CE (voir ch. 222.06.4 et 222.06.5), comme la Convention de Bruxellessur la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commer-ciale, qui existe toutefois déjà pour la Suisse sous la forme d'un accord parallèle600.En adhérant à l'UE, la Suisse serait également partie par exemple à l'Accord EEE eten tant qu'Etat membre, prendrait part à l'EEE avec les autres Etats membres de l'UEet les pays de l'AELE.

"Sur quoi portent exactement les négociations d'adhésion?" (M.W., canton de Fri-bourg)Les négociations d'adhésion portent essentiellement sur des dispositions transitoiresqui réglementent et facilitent, tant pour le pays candidat que pour les membres del'UE, l'extension du droit et des politiques communautaires au nouveau membre. Ex-ceptionnellement, lorsqu'il s'agit pour ce dernier d'une question particulièrement sen-sible sur le plan politique, la négociation d'adhésion peut déboucher sur un complè-tement ou une modification de l'acquis communautaire.

Des périodes transitoires ont été négociées dans tous les traités d'adhésion conclusjusqu'à présent avec les nouveaux Etats membres. Pour les pays ayant adhéré en 1995,c'est-à-dire pour la Finlande, l'Autriche et la Suède, qui en leur qualité de participantsà l'EEE avaient déjà repris une partie importante du droit communautaire, une périodetransitoire, généralement de quatre ans, n'a été fixée que dans quelques domaines. Desdérogations durables sont contraires au principe de l’application uniforme du droit etpar conséquent ne sont que très rarement adoptées. Il existe dans les traités d'adhé-sion de la Suède et de la Norvège par exemple, une dérogation relative à l'interdictioncommunautaire portant sur la vente des tabacs à usage oral. La disposition relativeaux restrictions sur l'achat de résidences secondaires, qui existait au Danemark depuisson adhésion en 1973, n'était pas compatible avec le nouveau droit communautaire.Le protocole n°1 du Traité de Maastricht de février 1992 a accordé au Danemark ledroit de conserver ses dispositions légales en la matière. Lors des modifications desactes constitutifs certains Etats membres ont obtenu des mesures dérogatoires. Il s'estagi par exemple de la troisième phase de l'Union économique et monétaire pour leRoyaume-Uni et le Danemark (voir protocoles n° 11 et 12 du Traité de Maastricht) ou

600 Convention de Lugano, voir ch. 222.06.5

Page 320: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 318 - Chapitre 3

du protocole social pour le Royaume-Uni (protocole n°14 du Traité de Maastricht). LeTraité d'Amsterdam prévoit - pour le cercle des Etats déjà membres de l'UE - la possi-bilité d'une coopération renforcée (flexibilité), même si tous les Etats membres neveulent ou ne peuvent participer à cette coopération depuis le début601.

Le nouvel Etat membre dispose de délais appropriés pour procéder aux adaptationsinternes de sa législation. A cet égard, rappelons que le droit communautaire ne pres-crit pas aux Etats membres la manière d'organiser et de transposer les dispositions dedroit matériel. L'adhésion entraîne un certain nombre de modifications matérielles,notamment du droit communautaire secondaire (surtout la fixation des contributionsfinancières du futur membre, mais aussi la fixation des différentes quotes-parts ainsique des modifications techniques de moindre importance). Sur le plan institutionnel, ilfaut procéder à des modifications du droit primaire, en vertu du principe selon lequeltout Etat membre est représenté dans chaque institution de l'UE, ce qui entraîne parexemple des négociations sur la répartition des voix au Conseil des ministres.

Au vu des dernières négociations d'élargissement nous constatons que:

En adhérant à l'UE, l'Autriche, la Suède et la Finlande se sont engagées à une reprisede l'acquis communautaire assortie de périodes transitoires plus ou moins longuesselon les domaines. La reprise de l'acquis communautaire n'a toutefois pas empêchéles trois pays candidats de faire valoir leurs intérêts spécifiques dont les plus impor-tants sont les suivants:

- L'Autriche, la Suède et la Finlande peuvent continuer à appliquer leurs règles etnormes en matière d'environnement et de protection de la santé dont le niveau estplus élevé que dans la CE pendant une période transitoire de quatre ans (l'Autrichepeut par exemple maintenir son interdiction relative à l'essence avec plomb) aucours de laquelle la Communauté s'efforcera d'élever ses propres règles au niveaude celles de ses nouveaux Etats membres. Le principe de la révision des disposi-tions et normes communautaires dans le domaine de l'environnement et l'intentionde principe de les amener au niveau des réglementations existantes dans les Etatsmembres est, comparé aux adhésion antérieures, fondamentalement nouveau.L'Autriche et les pays candidats nordiques ont pu obtenir de l'Union qu'elle attribueà ces politique nationales un caractère modèle. S'agissant de la révision nécessairede cette réglementation, la Commission est récemment arrivée aux conclusion sui-vantes: les standards communautaires en matière d'environnement et de santé ontété renforcés dans la plupart des domaines et sont désormais soit aussi stricts queceux des nouveaux Etats membres (par ex. la teneur en souffre du Diesel), soit en-core plus sévères (par ex. la teneur en benzole dans l'essence). Les nouveaux Etatsmembres ont été autorisés à conserver leurs prescriptions nationales plus sévères làoù l'Union n'avait pas encore édicté de nouvelles règles602.

601 Nouvel art. K.15-17 du Traité UE et règles additionnelles dans le Traité CE (nouvel art. 5a Traité CE) et

pour la coopération dans le domaine de la justice et des affaires intérieures (nouvel art. K.12 Traité UE).602 Voir "La clause de révision; Les normes en matière d'environnement et de santé quatre ans après l'adhésion

de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède à l'Union européenne". Communication de la Commission auConseil et au Parlement européen. COM (98) 745 déf., du 14 décembre 1998.

Page 321: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 319 - Chapitre 3

- Soucieuse de mener une politique agricole respectueuse des principes écologiques,l'Autriche a obtenu dans ce domaine un "paquet écologique ", qui - selon les pres-criptions légales déterminantes de la CE - est cofinancé à hauteur de 50% par lebudget communautaire.

- Au titre de l'agriculture encore, la Suède et la Finlande ont pu négocier avec l'UE laprise en compte, dans le cadre de la PAC de "l'agriculture arctique", inconnue jus-que-là des Etats membres.

Quatre ans après leur entrée dans l'UE, l'Autriche, la Suède et la Finlande tirent, auplan économique, des bilans positifs de l'adhésion traduits par une baisse générale duprix des denrées alimentaires et une diminution des taux d'intérêt résultant des prépa-ratifs de mise en place de l'Union économique et monétaire. Il est vrai, toutefois, quela plupart des effets de l'adhésion sont d'ordre structurel et ne pourront être évaluésqu'à plus long terme.

Les trois nouveaux Etats membres évaluent aussi positivement l'encadrement que leuroffre l'Union dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune. LaFinlande en retire un certain apaisement face aux risques encourus sur son flancoriental et l'Autriche apprécie la prédisposition des autres Etats membres à une lutteplus efficace en matière d'immigration illégale.

Comme on a pu le constater lors de précédentes adhésions, lorsqu'il s'agit de résoudredes problèmes politiques sensibles l'UE peut se montrer très souple en ce qui con-cerne la reprise de l'acquis communautaire. Certes, le principe de la reprise de l'acquisn'est pas remis en question, mais les modalités de cette reprise sont partiellement né-gociables là où des intérêts importants de l'Union ou du candidat à l'adhésion sont enjeu.

331.03 Objectifs de la Suisse en tant que membre de l’UE

Aujourd'hui, la Suisse utilise une grande partie des ressources investies dans la politi-que d'intégration pour recueillir des informations, examiner les nouvelles règles etpolitiques communautaires et, lorsque cela est utile et nécessaire, les transposer entemps voulu dans la législation suisse, ainsi que pour défendre face à l'UE les intérêtsnationaux, bilatéralement ou dans le cadre d'organisations et de conférences interna-tionales.

Le Conseil fédéral est convaincu que le moment venu il faudrait fixer les objectifsque la Suisse en tant qu'Etat membre de l'UE pourrait promouvoir avec d'autres dansle cadre des institutions européennes. Cette liste des éléments prioritaires à promou-voir par la Suisse au sein de l'UE devrait être élaborée suite à un vaste débat politiqueorganisé sur le plan national.

L'influence de la Suisse dans le processus européen de formation des décisions ne selimiterait pas au nombre de ses voix et à sa contribution financière au budget commu-nautaire, mais elle serait essentiellement déterminée par l'originalité et l'utilité de sa"dot" politique. La compétence, accumulée au fil des années, en matière de coexis-

Page 322: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 320 - Chapitre 3

tence harmonieuse entre des cultures et des communautés linguistiques différentes,l'acceptation vécue de la démocratie, du fédéralisme, de la concordance, les succès dela paix sociale, l'ordre économique libéral, les avantages d'une protection développéede la personnalité et l'expérience suisse relative à la promotion de l'éducation et de latechnologie et relative à l'utilisation parcimonieuse des ressources naturelles, sontparmi les éléments qui donneraient à la Suisse tout son poids dans le débat européen.

L'Union européenne est notre partenaire commercial naturel, que la Suisse en soitmembre ou non. La Suisse est un pays dont l'économie dynamique et libérale est ca-ractérisée par une forte interdépendance des échanges avec ses partenaires. En tantque telle, elle pourrait militer en faveur d'une liberté économique la plus large possi-ble, aux côtés de partenaires qui partagent ses conceptions. Il faut que ceci soit éga-lement accompagné par des efforts pour déréglementer les activités économiques,renforcer l'idée de la concurrence et développer le potentiel technologique. Quant àl'amélioration des conditions de vie et de travail, la Suisse pourrait se ranger aux côtésde ceux qui, dans l'UE, s'engagent en faveur d'un dialogue entre les partenaires so-ciaux. Sa riche expérience de la solidarité vécue la rapprocherait de ceux qui oeuvrentpour le développement du progrès social. Le développement des régions les plus fai-bles économiquement en ferait également partie. Par le passé déjà, la Suisse s'étaitengagée à promouvoir l'équilibre entre le Nord et le Sud, car c'est la seule manière degarantir, à terme, la prospérité dans notre pays. Ainsi, en étant membre de l'UE laSuisse pourrait participer à la construction d'une Europe plus prospère et donc contri-buer à la stabilité dans l'Union, une stabilité qui à son tour est indispensable au déve-loppement économique de la Suisse.

Dans le passé déjà, la politique des transports du Conseil fédéral rangeait la Suisseparmi les pays européens les plus avancés en la matière603. Notre appartenance àl'Union européenne faciliterait là aussi la constitution de coalitions d'intérêts.

Le développement de modes de transports respectueux de l'environnement (rail,transport combiné, voies navigables), une meilleure prise en compte de l'aspect envi-ronnemental (renforcement des exigences relatives aux émissions des véhicules), ainsiqu'une taxation routière qui tient compte du principe du "pollueur-payeur" constituentdes objectifs clés des politiques communautaires et suisses en matière de transports.De plus, des solutions particulières en faveur d'un Etat membre en raison de spécifi-cités géographiques (pays périphériques) ou environnementales (paquet écologique enAutriche) ne sont pas exclues.

Dans ces circonstances, le Conseil fédéral pourrait poursuivre les objectifs de sa poli-tique des transports, dans le respect des principes communautaires en ce domaine, telsque la non-discrimination ou l'utilisation des mesures d'exécution relevant de l'éco-nomie de marché (par ex. mise en oeuvre de l'article constitutionnel sur la protectiondes Alpes).

603 Accord sur le transit: promotion du rail et du transport combiné, infrastructures ferroviaires à développer;

projet d'accord Suisse-UE sur les transports terrestres: augmentation de la limite de poids en parallèle avecune augmentation de la fiscalité routière.

Page 323: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 321 - Chapitre 3

Notre pays pourrait faire profiter l'Union de sa riche expérience des questions institu-tionnelles. Toutefois, il serait naïf de croire que des instruments qui fonctionnent dansun petit pays comme la Suisse, tels que la démocratie directe, la concordance et laforme très particulière de fédéralisme, pourraient être exportés tels quels dans lesstructures communautaires. Par contre, grâce à son expérience, la Suisse pourrait en-richir les réformes institutionnelles de l'Union avec ses idées sur la démocratie et lefédéralisme, qui devront être adaptées à la situation européenne.

"En Suisse, certaines dispositions en matière de protection de l'environnement sontplus sévères que celles de l'UE. Si nous adhérons, devrons-nous nous adapter à cellesde l'UE?" (F.H., canton de Berne)En Suisse et dans l'UE, les dispositions en matière de protection de l'environnementsont dans une large mesure les mêmes. En principe, tout Etat membre a la possibilitéd'adopter des dispositions plus sévères de protection de l'environnement dans tous lesdomaines (tant ceux liés aux produits ou que ceux liés aux lieux d'implantation), pourautant qu'ils n'entravent pas le fonctionnement du marché intérieur.

Les dispositions suisses relatives à l'environnement sont dans une large mesure euro-compatibles. Notre niveau de protection de l'environnement ne dépasse celui de l'UEque dans quelques rares domaines (voir ch. 221.01). Dans certains domaines, le ni-veau de protection de l'environnement en Suisse est inférieur à celui de l 'UE, notam-ment pour ce qui concerne les instruments604. Le Traité de Maastricht stipulait déjàque les Etats membres pouvaient conserver leur réglementation actuelle en matièred'environnement, même si elle était plus sévère que celle prescrite par le droit com-munautaire. S'agissant de l'environnement des lieux d'implantation industriels (par ex.les rejets des usines) les Etats membres peuvent en outre introduire des dispositionsplus strictes pour protéger l'environnement. Sur le plan national, après l'entrée en vi-gueur du Traité d'Amsterdam, les Etats membres pourront adopter des dispositionsplus sévères pour les produits, lorsque celles-là reposent sur de nouvelles connaissan-ces scientifiques et visent à résoudre un problème environnemental qui se pose sur leplan national.

La Suisse profiterait de son appartenance à l'UE pour promouvoir, toujours avec l'aidede partenaires qui partagent sa position, l'élaboration au sein de l'UE et dans le mondeentier de dispositions de protection de l'environnement qui soient rationnelles sur leplan économique605. Les efforts que nous avons entrepris depuis longtemps pourmieux protéger l'environnement et pour améliorer de manière durable l'exploitationdes ressources naturelles pourraient être poursuivis sur une plus grande échelle.

604 Par ex. les symboles et les informations relatifs à l'environnement, les éco-audits, la directive relative à la

faune, la flore, l'habitat, etc.605 Voir A. Epiney/H. Pfenninger, Auswirkungen eines Beitritts zur Europäischen Union auf das schweizerische

Umweltrecht - Das Problem der Umweltnormung, dans: Cottier/ Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Unioneuropéenne - Enjeux et conséquences, Zurich 1998, p. 949 et ss, avec d'autres renvois.

Page 324: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 322 - Chapitre 3

Questions fondamentales relatives à l'adhésion à l'UE

332 Identité, indépendance, fédéralisme et droits populaires

332.01 La Suisse: une nation fondée sur la volonté de vivre ensemble

"Pour être une véritable patrie pour ses citoyens actuels et futurs, notre pays doit sansaucun doute préserver sa particularité, c.-à-d. son identité linguistique, culturelle, dé-mographique et politique". (A. et O. M.-U., canton de Lucerne)Les membres de l'UE n'ont rien perdu de leur identité. En adhérant à l'UE, la Suissepourrait obtenir que les décisions qui la concernent tiennent compte de son identité etde ses particularités culturelles. Les petits pays membres de l'UE, tels que le Portu-gal, le Danemark ou le Luxembourg, affirment que l'adhésion à l'UE a revigoré leuridentité et a renforcé son rayonnement dans le monde entier.

La Suisse est une remarquable réussite de nos ancêtres. La volonté de s'unir librementcontre des ennemis extérieurs et contre la pauvreté a toujours triomphé de ce qui nousséparait, qu'ils s'agisse des langues, des cultures ou des confessions différentes. L'ex-périence historique commune et les structures et instruments particuliers de la politi-que suisse, en matière de fédéralisme, de démocratie et de sécurité, ont façonnél'identité suisse. Cette identité nous insuffle un sentiment de liberté, de sécurité et deprospérité, valeurs dont nous devons toujours tenir compte dans la défense de nos in-térêts nationaux (art. 2, cst.).

Dans les chapitres suivants, nous examinerons dans quelle mesure les différents as-pects de notre identité nationale, pour autant qu'ils soient concernés, seraient affectésou mis en valeur par une adhésion à l'UE.

La Suisse restera unie par les valeurs qu'elle sert. Elle ne se fonde ni sur un impératifdivin, ni sur une donnée naturelle. Elle dépend plutôt d'intérêts individuels et collec-tifs. Les changements survenus ces cinquante dernières années dans le monde et no-tamment en Europe voisine, nous obligent à réfléchir sur notre identité nationale, maisaussi sur nos intérêts individuels et collectifs.

Comme pour l'identité, il convient de se demander si la liberté, la sécurité et la pros-périté de chacun de nous et du pays tout entier seront garantis de façon optimale parune adhésion à l'Union européenne ou hors de celle-ci. Le présent rapport sur l'inté-gration, ainsi que le dialogue démocratique, devraient aider chacun à mûrir la réponsequ'il donnera, le moment venu, lors d'une votation sur l'adhésion de la Suisse àl'Union européenne.

Il appartient à chacun d'évaluer ses propres intérêts. A ce stade, puisque nous parlonsde perte ou de gain d’identité nationale, des comparaisons générales peuvent néan-moins être faites avec nos voisins de l'UE.

Page 325: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 323 - Chapitre 3

L'Union européenne est caractérisée par une diversification exceptionnelle. Ellecompte quinze Etats membres; onze langues officielles et environ quarante-cinq lan-gues régionales y sont parlées. Son système politique réunit quinze gouvernements etparlements nationaux, doublés sur le plan européen par un grand nombre de conseilsde ministres à composition variée et par un parlement commun.

"Tout le monde sait que dans l'UE quelque 40 personnes prennent toutes les décisionsde A à Z. sans parlement! Faut-il parler de dictature ou de démocratie?" (F.H., cantonde Thurgovie)L'intégration européenne est fondée sur le respect mutuel entre les Etats qui tous,sous des formes différentes, sont organisés de manière démocratique. Tout commenous respectons nos voisins, nos voisins, au sein de l'UE ou hors de celle-ci, sauronsaussi nous respecter.

Il existe sans conteste quelques similitudes entre l'UE et l'Etat fédéral suisse: le sys-tème politique suisse a permis de rassembler des communautés culturelles différentes,sans jamais affecter leur propre perception culturelle. La perception politique que laSuisse a d'elle-même repose sur le partage du pouvoir entre divers organes qui parailleurs agissent à des niveaux différents. Pour sa part, la richesse culturelle de l'Eu-rope est basée sur le respect le plus grand possible des différences nationales, régio-nales et locales, comme c'est le cas actuellement en Suisse. Celui qui suit le débatdans l'UE constate que cette construction jeune et dynamique se remet constammenten question et lutte pour des valeurs qui, précisément, sont depuis longtemps des ca-ractéristiques nationales en Suisse: la diversité culturelle, la subsidiarité ou le fédéra-lisme, la volonté d'être à l'écoute du peuple et de développer la démocratie, la sécuritéintérieure et extérieure, la solidarité régionale et sociale ainsi que la création de con-ditions-cadres en matière économique qui permettent aux entreprises implantées dansl'UE de s'imposer dans une économie caractérisée par la mondialisation606.

"Adhérer à l'UE signifie s'adapter et se soumettre" (F.B., canton de Berne)Aujourd'hui, la Suisse s'adapte systématiquement au droit et aux politiques commu-nautaires sans qu'elle ne soit membre de l'UE. Si elle en devenait membre, la Suisse,au lieu de copier ce que font les autres, pourrait participer de plein droit aux déci-sions, au même titre que les autres Etats.

Les activités de l'Union ont renforcé un sentiment de solidarité dans de nombreusesrégions d'Europe. De la même manière qu'une identité suisse, unissant tous les ci-toyens de notre pays, s'est progressivement forgée dans l'Etat fédéral, l'Europe est entrain, progressivement, de créer une identité supplémentaire dans le cadre de l'Unioneuropéenne. L'"identité européenne" ne se développe pas aux dépens des identitésnationales, régionales ou locales. Au contraire, ces dernières années la volonté de ré-gionaliser et de mieux prendre en considération les petites entités s'est manifestementrenforcée.

606 Voir G. Kreis, Nach der schweizerischen jetzt die europäische Integration: Zur Idee der schweizerischen

Modelhaftigkeit, dans: Cottier/ Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquen-ces, Zurich 1998, p. 189 et ss, avec d'autres renvois.

Page 326: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 324 - Chapitre 3

Le sentiment croissant de solidarité européenne a également influé sur notre pays.Dans notre pays aussi des liens sont créés avec l'Europe, notamment par ceux qui pourdes raisons professionnelles ou personnelles travaillant avec l'Europe et donc de façoncroissante dans les Etats membres de l'Union. Il ne faut donc pas simplement voirl'Union européenne en fonction de ses avantages et de ses inconvénients économi-ques.

Ainsi, nos artistes, tout en restant fermement attachés à la Suisse, sont néanmoinsétroitement liés à l'étranger par leurs activités créatives. Aucun artiste suisse ne peutse développer s'il n'acquiert pas une certaine expérience à l'étranger et s'il ne disposepas d'une ouverture suffisante. L'étranger, c'est essentiellement l'Europe. C'est vrai ence qui concerne la formation: pour obtenir des diplômes dans les domaines de la mu-sique, du théâtre et des arts plastiques, les Suisses doivent généralement s'expatrier.De même dans le cinéma où les acteurs se tournent vers l'Europe et en dépendent. Aune époque où il est devenu vital de comprendre les autres cultures, il faut pouvoircomprendre l'étranger, notamment dans la formation d'un artiste, échanger avec lui,car cela est enrichissant pour le développement de la personnalité et pour l'évolutionprofessionnelle. Afin de permettre à nos artistes d'acquérir une expérience sur le planeuropéen et mondial, les institutions de promotion de la culture leur proposent desséjours dans des ateliers et des appartements à Berlin, Paris, Londres, Rome, etc.Toutes ces villes font partie de l'UE.

Il s'ensuit qu'un nombre croissant de Suisse vivent et travaillent dans l'UE. Ne pas yparticiper est donc considéré par beaucoup comme une aliénation. Il ne s'agit pas dechoisir entre la Suisse et l'appartenance à l'Union européenne, les deux peuvent secompléter à bien des égards. L'identité nationale est vécue et forgée au quotidien. Elleévolue en permanence pour ne pas disparaître. Chaque génération développe sa pro-pre image de la Suisse, sa propre identité suisse.

"Nous ne nous laisserons pas enlever sans résistance l'indépendance et la liberté quenous avons défendues pendant deux guerres mondiales." (K.K.-W., canton de Lu-cerne)L'indépendance d'un pays dépend essentiellement de sa marge de manoeuvre déci-sionnelle, dans laquelle il peut défendre ses intérêts par rapport à d'autres Etats.Cette marge est aujourd'hui plus grande pour celui qui participe aux décisions del'UE.

Sur les plans économique et politique, la Suisse est très étroitement liée à l'Union eu-ropéenne et elle appartient à plusieurs aires culturelles européennes. La réalité nousrappelle quotidiennement la dépendance résultant de ces liens économiques, politi-ques et culturels. Il est essentiel, pour notre identité nationale, de savoir si, contraire-ment à la plupart des autres pays européens, la Suisse doit se contenter de s'adapterpassivement en raison de ces dépendances. Très souvent elle est obligée d'adopter desrègles étrangères pour maintenir sa compétitivité économique, c'est-à-dire que notrepays s'habitue à payer un prix politique en contrepartie d'avantages économiques. Ceprix politique ne nous est pas imposé. En effet, l'unité de l'Europe est fondée sur l'idée

Page 327: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 325 - Chapitre 3

que tous les Etats européens, les grands et les petits, doivent, non se soumettre auxinstitutions européennes, mais participer aux décisions qui détermineront l'évolutionde notre continent, en tant que membres de l'Union européenne607. Nous pouvonschoisir. Ce serait toutefois trompeur de taire que nos obligations de membre nousobligeront à renoncer à certains acquis et à certaines habitudes. Par exemple, les car-tels et les aides d'Etat seront strictement contrôlés et dans certains domaines, notam-ment de nature économique, ce ne seront plus les autorités suisses mais les instancescommunautaires qui auront le dernier mot. Le chapitre 2 de ce rapport apporte desprécisions à ce sujet.

Cependant, lorsque l'on y regarde de plus près, les convergences l'emportent. Parailleurs, le Conseil fédéral est convaincu que seule une Suisse qui conserve sa parti-cularité et la défend sans complexe peut être un membre intéressant et influent del'UE.

"Pourquoi la Suisse devrait-elle adhérer à une organisation qui s'occupe notammentde problèmes tels que la taille des concombres, le calibre des préservatifs, etc.?"(F.H., canton de Berne)Seuls les membres peuvent lutter de manière efficace contre les dysfonctionnements,qui existent aussi dans l'UE. Ce n'est pas la question des concombres - son règlementpeut parfaitement répondre à un intérêt légitime - qui est au cœur du débat à menersur la position de la Suisse en Europe, mais plutôt les questions de la compatibilitéentre l'identité nationale et l'identité européenne.

332.02 Fédéralisme

"Qu'en serait-il de la souveraineté cantonale (...) si la Suisse devenait membre del'UE?" (E.F.L, canton de Berne)La souveraineté cantonale n'est pas remise en cause par une adhésion à l'UE, car lesEtats membres sont autonomes en ce qui concerne leur organisation interne. L'Alle-magne et l'Autriche sont des exemples d'Etats fédéraux membres de l'UE.

Comme la Suisse, l'UE répartit les compétences entre plusieurs niveaux, les Etatsmembres décidant si et comment l'Union doit intervenir dans un domaine donné (voirch. 212). Les Etats membres gardent aussi leur pleine autonomie quant à leur organi-sation. C'est la raison pour laquelle le fait d'être membre de l'UE ne signifie pas quetous les Etats sont organisés de la même manière. Des Etats centralisés comme laFrance, ainsi que des Etats fédéraux tels que l'Allemagne et l'Autriche sont et peuventêtre membres de l'UE.

Les Etats fédéraux doivent savoir si et comment les intérêts des entités fédérées peu-vent être défendus au sein de l'UE. A cet égard, la Suisse devrait prendre des mesurespour garantir aux cantons qu'elle s'attachera à défendre leurs intérêts dans les diverses

607 Voir F. Emmert/D. Bossaert, Die Stellung der Kleinstaaten in der Europäischen Union, dans: Cottier/ Kopše,

L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences, Zurich 1998, p.113 et ss, avec d'au-tres renvois.

Page 328: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 326 - Chapitre 3

instances de l'UE. Chaque Etat membre étant libre de choisir la forme d'organisationqui lui convient le mieux, le choix de ces mesures autonomes n'est limité que dans lamesure où elles ne doivent pas empêcher la Suisse de présenter au moment voulu uneposition cohérente au sein des instances de l'UE. L'exemple de l'Allemagne et del'Autriche nous amènent à conclure qu'une solution efficace consisterait à renforcer laparticipation des cantons dans les décisions de la Confédération à l'égard de l'Europe.L'expérience acquise pendant les négociations sur les accords sectoriels Suisse-UEmontre que dans une telle situation une coopération efficace entre la Confédération etles cantons est possible.

Les Etats fédéraux peuvent conserver leur fédéralisme en tant qu'Etats membres del'UE (Allemagne, Autriche). L'adhésion à l'UE n'a pas obligé ces pays à changer radi-calement leur organisation, il leur a simplement suffi d'introduire des procédures ga-rantissant que la position défendue à "Bruxelles" tienne dûment compte des compé-tences et des intérêts des entités fédérées. Transposé à la Suisse, cela signifie que desprocédures devraient exister au moment de l'ouverture de négociations qui garantis-sent que les cantons disposent du droit de participation correspondant à leurs compé-tences nationales lors de la fixation de la position de négociation de la Suisse ainsique pendant les négociations proprement dites. A cet égard, il faudrait également s'as-surer que la Confédération puisse conserver sa marge de manoeuvre et sa capacitédécisionnelle. L'UE interviendra également dans des domaines (et elle le fait déjà enpartie) qui ne relèvent pas de la compétence de la Confédération mais de celle descantons. Une adhésion à l'UE toucherait, avec plus ou moins d'intensité, les domainesde compétences cantonales suivants, étant entendu que cette énumération n'est pasexhaustive: éducation et culture, santé publique et infrastructures, administration de lajustice, asile, coopération policière et entraide judiciaire, diplômes professionnels,marchés publics et droit de la construction. En réalité les compétences des cantons enmatière de diplômes professionnels et de marchés publics seront déjà affectés si lesaccords sectoriels Suisse-UE, conclus au niveau politique le 11 décembre 1998, en-trent en vigueur. Il faut également dire qu'une adhésion à l'UE influencerait beaucoupplus les compétences actuelles de la Confédération que celles des cantons (par ex. enmatière de politique étrangère, de politique financière, dans l'agriculture et les doua-nes). Si pendant les négociations d'adhésion, ou après cette adhésion, seule la Confé-dération déterminait la position suisse ainsi que l'exécution des décisions adoptées surle plan européen, les cantons risqueraient de ne plus pouvoir assumer leurs compéten-ces et leurs responsabilités. Par ailleurs, au cas où la Suisse adhérait à l'UE, des mesu-res devraient être prises de manière autonome pour permettre aux cantons, lorsquenotre pays détermine l'attitude qu'il doit adopter au sein des institutions communau-taires608, de faire valoir leur avis d'une manière conforme à leurs compétences recon-nues sur le plan national et d'exécuter, de manière appropriée et opportune, les déci-sions adoptées sur le plan communautaire609. Là aussi, il faudrait que la Suisse puisse

608 Surtout dans les conseils. Il n’y a pas de moyen de faire valoir un point de vue national dans la Commission.609 Le besoin des cantons de pouvoir participer aux décisions de politique extérieure de la Confédération a été

pris en considération, entre autres, dans le projet du Conseil fédéral concernant la loi fédérale sur la partici-pation des cantons à la politique étrangère de la Confédération (voir message y relatif du 15 décembre 1997,FF 1998 I 953 et ss), ainsi qu'à l'art. 55 de la nouvelle constitution fédérale (arrêté fédéral relatif à une mise

Page 329: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 327 - Chapitre 3

présenter une position harmonisée aux institutions européennes et qu'elle puisse réagirrapidement. Dans cet esprit, le maintien de l'équilibre entre la Confédération et lescantons dépendrait de la liberté de décision de la Suisse, même au cas où elle adhéraità l'UE.

Même si ces mesures autonomes sont mises en oeuvre, il n'est pas exclu qu'il faillerevoir la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons. Cepen-dant, ce ne serait pas là une conséquence directe de l'adhésion à l'UE, mais une simpleconséquence de l'évolution qui a obligé à redéfinir les compétences de la Confédéra-tion et des cantons. Etant donné que les Etats membres de l'UE décident de leur orga-nisation interne de manière souveraine, ces changements dans la répartition des com-pétences seraient décidés par le peuple et les cantons selon les procédures habituelles.

"La "subsidiarité" de l'UE est dans une large mesure une vue de l'esprit." (H.A., can-ton de Zurich)Le principe de subsidiarité dans l'UE, comme du fédéralisme en Suisse, signifie quedes tâches ne sont exécutées au niveau supérieur que si elles ne peuvent l'être de ma-nière satisfaisante au niveau inférieur dans les Etats.

L'organisation fédérale de la Suisse repose sur le principe que la Confédération n'estcompétente que pour les tâches qui lui sont confiées par la constitution fédérale.Compte tenu du référendum constitutionnel obligatoire prévu par la constitution fédé-rale, la décision politique concernant l'attribution d'une tâche à la Confédération estprise par le peuple et les cantons. Il en va de même au sein de l'Union européenne:l'UE n'est compétente que pour les tâches que lui confie la "constitution" (Traité UE,traités constitutifs CE). Les Etats membres décident si certaines tâches doivent êtrerésolues au niveau de l'UE.

Ainsi, comme nous l'avons déjà expliqué, l'UE n'est pas un Etat centralisé, mais plutôtun ensemble au sein duquel les Etats membres décident de concert si et comment unetâche doit être réalisée en commun. Au fil du temps, de plus en plus de tâches ont étéconfiées à l'UE, d'abord sur le plan économique, puis sur le plan politique. Ce trans-fert de nouvelles compétences reflète la conviction des Etats membres que dans cer-tains domaines une action commune est préférable à des mesures nationales. La sub-sidiarité est donc un des fondements politiques de l'UE, dont chaque Etat membrepeut, lors de chaque modification des traités constitutifs, décider s'il préfère exécuterune tâche de façon indépendante ou plutôt dans le cadre de l'UE.

Par contre, le principe de subsidiarité, consacré par le Traité de Maastricht et précisédans le Traité d'Amsterdam, vise à donner à ce principe politique une assise juridiqueet à s'assurer la possibilité de vérifier si, dans l'exercice de ses compétences, la Com-

à jour de la constitution fédérale du 18 décembre 1998, FF 1999 I 176; texte de l'art. 55: "[1] Les cantonssont associés à la préparation des décisions de politique extérieure affectant leurs compétences ou leurs inté-rêts essentiels. [2] La Confédération informe les cantons en temps utile et de manière détaillée et elle lesconsulte. [3] L'avis des cantons revêt un poids particulier lorsque leurs compétences sont affectées. Dans cescas les cantons sont associés de manière appropriée aux négociations internationales.").

Page 330: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 328 - Chapitre 3

munauté a respecté le principe de subsidiarité. En vertu de ce principe, la Commu-nauté n'intervient dans les domaines qui ne relèvent pas de sa compétence exclusiveque lorsque les mesures adoptées par les Etats membres ne peuvent être réalisées demanière satisfaisante. En revanche, là où seule la Communauté est compétente(compétence communautaire exclusive), le principe de subsidiarité ne s'applique pasdans son acception juridique. Tout Etat membre peut saisir les tribunaux pour fairevérifier si une décision adoptée par l'UE pouvait effectivement l'être sur le plan com-munautaire. Si après examen il s'avère que tel n'était pas le cas, la Cour de justice desCE peut déclarer que la décision concernée est nulle.

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse aurait aussi la possibilité de participer à la décisionpolitique d'attribuer ou non de nouvelles compétences à l'UE. Elle aurait en outre lapossibilité de faire vérifier, devant les tribunaux, le principe de subsidiarité tel que leconsacre juridiquement le Traité UE.

332.03 Régions de Suisse

Il n'y a pas lieu de s'attendre à une régionalisation accrue de la Suisse après son adhé-sion à l'UE. Notre culture politique est déterminée par l'appartenance cantonale et ellele reste. En Suisse, la coopération régionale existe là où cela paraît utile. Cependant,les régions frontalières ont toujours eu une situation particulière. Compte tenu de leursituation exposée, il est manifeste qu'elles ont besoin de coopérer avec l'étranger. Pourdes raisons économiques et pratiques ce besoin s'est renforcé ces derniers temps. Surle plan psychologique, la population perçoit très fortement l'isolement de la Suisse àproximité immédiate des frontières. Il existe également des régions frontalières dansles Etats de l'UE. Le fait d'appartenir à l'UE n'y a nulle part engendré des forces cen-trifuges. La Belgique constituée essentiellement de deux régions peut servir d'exem-ple. Il est même possible d'affirmer à cet égard que le fait d'être membre de l'UE ren-force l'unité de ce pays.

L'expérience montre que les régions frontalières ont certes beaucoup en commun avecles régions limitrophes, mais que la population de part et d'autre de la frontière estparfaitement consciente de sa propre culture et de sa propre mentalité. Ce sont surtoutles problèmes pratiques dus à la proximité qui déterminent le besoin de coopérer.Avant la Première Guerre mondiale, par exemple, la frontière entre Bâle, l'Allemagneet la France n'existait pratiquement pas. A l'époque, comme aujourd'hui, personne nepensait passer de l'autre côté. Les Bâlois, les Badois et les Alsaciens gardent leuridentité politique et culturelle.

La Suisse est entourée des régions européennes les plus puissantes sur le plan écono-mique. Mieux qu'aujourd'hui, l'adhésion de la Suisse à l'UE lui permettrait de cons-truire de nouveaux partenariats et de conquérir de nouveaux marchés. La globalisationde l'économie accroît l'importance des espaces économiques régionaux. En outre, lesréseaux d'infrastructures des transports font que les régions économiquement fortes denos voisins deviennent de véritables axes de développement. Bien que la Suisse sesitue au centre de l'Europe, notre pays est de plus en plus contourné et marginalisé.

Page 331: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 329 - Chapitre 3

En cas d'adhésion à l'UE, il serait donc important pour les régions de la Suisse de par-ticiper à cette évolution en tant que partenaires de plein droit et de rechercher les for-mes de coopération appropriées. A cet égard, ce n'est pas la situation de la région àproximité de la frontière ou à l'intérieur du pays qui serait déterminante, ni les capa-cités de créer des valeurs, mais plutôt la volonté et la capacité de se renouveler et decoopérer sur les plans régional, transnational et interrégional.

La politique régionale de l'UE encourage ces efforts de développement et de coopéra-tion et les renforcera encore (voir ch. 222.08). Au cas où la Suisse deviendrait mem-bre de l'UE, les instruments de politique régionale permettraient au Conseil fédéral des'assurer que les régions suisses participeront à ces efforts sur un pied d'égalité610.

332.04 Constitution et institutions

332.04.1 Constitution fédérale

"En cas d'adhésion à l'Union européenne la constitution fédérale existante serait-ellegarantie dans son intégralité, ou devrait-elle être adaptée aux normes de l'UE?"(L. W., canton de Glaris)La décision d'adhésion qu'il reviendrait au peuple et aux cantons d'adopter serait derang constitutionnel. Elle aurait pour effet que le droit communautaire primerait ledroit national. Il faudrait examiner dans le cadre des travaux préparatoires à l'adhé-sion dans quelle mesure, par exemple pour des raisons de clarté, la constitution de-vrait être adaptée ou complétée au moment où l'adhésion serait décidée, ou plus tard.

Par une adhésion à l'Union européenne la Suisse transférerait des compétences consi-dérables dans des domaines importants de l'activité étatique à une communauté supra-nationale. Mais elle obtiendrait aussi des possibilités de participation et des droits decodécision dans les domaines transférés, qui lui permettraient d'influer effectivementsur la politique et le droit bien au-delà de ses frontières nationales. Il convient de nejamais perdre de vue ces deux dimensions lorsque l'on discute de questions fonda-mentales de droit constitutionnel. Une présentation qui ne met en lumière que le trans-fert des compétences est unilatérale et conduit à des conclusions erronées.

Ces deux dimensions, la cession de compétences à l'UE et le gain en droits de partici-pation au sein de l'UE, concernent la Suisse dans son ensemble et ont des effets à tousles niveaux (Confédération, cantons, communes) et sur tous les organes de l'Etat(peuple, Parlement, gouvernement, tribunaux). Il est vrai que les différents niveaux etorganes de l'Etat ne seront pas touchés de la même manière. L'adhésion à l'UE peutmodifier partiellement l'importance des différentes institutions de la Suisse. Cela s'ex-plique en particulier par le fait que les affaires étrangères relèvent pour l'essentiel dudomaine de compétence de la Confédération et que la participation à une communautésupranationale se caractérise principalement par l'activité gouvernementale. Ces mo-

610 Voir R. Bieber/A.Cornu, Rapports entre la Suisse et une Europe des régions, dans: Cottier/ Kopše, L'adhé-

sion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences, Zurich 1998, p.25 et ss, avec d'autres ren-vois.

Page 332: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 330 - Chapitre 3

difications peuvent cependant assurément être atténuées ou compensées par des mesu-res adéquates.

En présentant les effets juridiques et institutionnels d'une éventuelle adhésion de laSuisse à l'UE, il convient de distinguer clairement entre les conséquences directes quidécoulent de l'appartenance à l'UE et partant de l'applicabilité du droit de commu-nautaire, et les adaptations juridiques ou institutionnelles qui peuvent, le cas échéant,s'imposer en raison de ces conséquences directes. Deux exemples, sur lesquels on re-viendra plus précisément par la suite, aident à mieux comprendre cela:

- Si la Suisse adhère à l'UE, la primauté du droit communautaire s’impose. Le droitnational qui contrevient au droit de l'UE ne peut plus être appliqué611 (voir ch.332.04.5). Cela n'a cependant pas nécessairement pour conséquence, que le Parle-ment doive déclarer nulles les initiatives populaires dont le contenu contrevient audroit communautaire (voir ch. 332.04.2). La Suisse peut, dans cette situation,adopter une réglementation qui préserve la primauté du droit communautaire. Laprimauté du droit communautaire est une conséquence directe de l'adhésion à l'UE.

- Lors du traitement des initiatives populaires il s'agit en revanche de déterminer lesmesures qui doivent être prises pour tenir compte des conséquences directes dansle domaine juridique et institutionnel. Les conséquences directes ne se réalisentpleinement qu'au moment où la décision d'adhésion entre en force. Dans ce con-texte, il conviendrait d'examiner les effets de la décision sur les art. 113, al. 3, et114bis, al. 3, cst., selon lesquels les lois votées par l'Assemblée fédérale sont tou-jours obligatoires pour le Tribunal fédéral: les lois fédérales qui contreviennent audroit de l'UE ne pourraient en effet pas être appliquées en cas d'adhésion à l'UE.(voir ch. 332.04.5).

La situation se présente différemment pour les adaptations à opérer en raison des con-séquences indirectes. Elles ne doivent pas obligatoirement survenir en même tempsque l'adhésion. D'ailleurs, il existe une marge de manœuvre considérable pour de tel-les adaptations. C'est pourquoi on doit se contenter de mentionner que des adaptationssont possibles sans pour autant déjà proposer les mesures à prendre.

Dans le cadre de la réforme de la constitution fédérale, le Conseil fédéral a soumis auParlement des propositions pour la réforme de la justice et des droits populaires. Il aouvert la consultation sur la réforme de la direction de l'Etat et en fera prochainementautant pour la nouvelle péréquation financière entre la Confédération et les cantons.Le Conseil fédéral recherche par ses réformes à renforcer les institutions de l'Etat,

611 CJCE, arrêt du 9 mars 1978, aff. 106/77 Simmenthal, Rec. 1978 p. 629 et ss: " En vertu du principe de la

primauté du droit communautaire, les dispositions du traité et les actes des institutions directement applica-bles ont pour effet, dans leurs rapports avec le droit interne des Etats membres, non seulement de rendre in-applicable de plein droit, du fait même de leur entrée en vigueur, toute disposition contraire de la législationnationale existante, mais encore (...) d'empêcher la formation valable de nouveaux actes législatifs nationauxdans la mesure où ils seraient incompatibles avec les normes communautaires " (principe déjà posé par laCJCE dans son arrêt du 15 juillet 1964, aff. 6/64 Costa/Enel, Rec. 1964, p. 1269). Une exception à la règlede la primauté n'entre en ligne de compte que dans la mesure où le droit national contraire au droit commu-nautaire peut continuer à s'appliquer, dans la mesure où son application se limite à des situations purementinternes et ne déploie pas d'effet transfrontaliers.

Page 333: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 331 - Chapitre 3

renforcement qu'il estime nécessaire indépendamment de l'adhésion à l'UE. A ce su-jet, il ne veut pas anticiper toutes les adaptations institutionnelles qui pourraient dé-couler d'une adhésion. Les réformes sont cependant compatibles avec l'UE, dans lamesure où une adhésion ne rendrait nécessaire tout au plus que des compléments, etnon pas une nouvelle réorganisation.

"Une adhésion de la Suisse à l'UE aurait avant tout pour conséquence la perte de notresouveraineté, de l'autodétermination de notre pays (...)." (A. L., canton des Grisons)"La préservation de notre indépendance est fixée dans la constitution fédérale."(W. A., canton de Thurgovie)L'indépendance et la souveraineté sont conçues dans la constitution fédérale commele plus haut degré possible d'autodétermination de notre avenir. Notre pays doit parconséquent pouvoir influer sur toutes les décisions qui détermineront (aussi) le déve-loppement futur de la Suisse. Ces décisions sont prises de plus en plus souvent en de-hors de notre pays. En participant avec assurance et activement aux travaux des ins-titutions qui prennent des décisions la concernant, la Suisse recouvrera sur le planinternational la marge de manœuvre partiellement "perdue". En Europe, personne nemet en question le fait que les Etats membres de l'UE, même les plus petits d'entreeux, sont restés des Etats souverains. Les Etats de l'UE décident sur un pied d'égalitéet à l'unanimité si et, le cas échéant, quelles questions et problèmes nouveaux doiventêtre résolus en commun au niveau de l'UE.

L'UE n'est pas un Etat, mais une communauté supranationale. Cette circonstance n'estpas toujours appréciée correctement dans la discussion sur l'adhésion à l'UE. Elle estcependant extrêmement importante à plus d'un titre: d'une part, la constitution fédé-rale prévoit à son art. 89, al. 5, que la Suisse peut adhérer à des communautés supra-nationales. Cette disposition a été formulée expressément en vue du processus d'inté-gration européenne612. C'est pourquoi l'opinion parfois défendue qu'une adhésion àl'UE ne serait pas compatible avec les principes fondamentaux de notre constitutionou avec les caractéristiques essentielles de notre Etat n'est pas soutenable. L'art. 89, al.5, cst. fixe toutefois à juste titre une condition élevée pour une adhésion à des com-munautés supranationales (majorité du peuple et des cantons), étant donné que l'ap-partenance à une telle organisation a des conséquences profondes sur certains domai-nes de notre ordre juridique et de nos institutions.

Par ailleurs, l'organisation institutionnelle particulière de l'Union européenne contientquelques éléments qui – précisément en Suisse – sont ressentis comme des déficien-ces des institutions européennes. Ainsi, la coopération entre les Etats membres se faitd'une manière qui ne correspond pas entièrement aux conceptions fédéralistes caracté-risant les relations entre la Confédération et les cantons (pondération des voix au seindu Conseil des ministres, décisions à l'unanimité ou à la majorité selon les domaines,voir ch. 213). En outre, le "déficit démocratique" de l'UE fait souvent l'objet de criti-ques (rôle du Parlement européen, rôle du Conseil des ministres, voir ch. 212 et

612 Voir le message sur la révision de l'art. 89, al. 4 (maintenant al. 5), cst., FF 1974 II 1133.

Page 334: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 332 - Chapitre 3

213)613. Il faut considérer que les structures fédéralistes et démocratiques, dans l'UE,ne se sont développées et différenciées que dans la mesure où elles répondent auxbesoins des Etats membres. Comme les Etats membres de l'UE sont, contrairementaux cantons suisses, des Etats souverains, on doit prendre en considération que laparticipation de différents niveaux répond nécessairement à d'autres conditions. Enréalité, les éléments caractéristiques de l'organisation institutionnelle de l'UE formentla protection la plus efficace contre une éventuelle perte de souveraineté des Etatsmembres.

Si la structure de l'UE se rapproche du modèle fédéral, l'Union en sera renforcée, audétriment des Etats membres. L'unanimité exigée pour les modifications et les com-pléments aux traités constitutifs serait abandonnée au profit du principe de la majori-té. C'est cependant ce principe de l'unanimité qui garantit à la Suisse en tant quemembre de l'UE une influence beaucoup plus importante que par exemple celui dontjouissent les cantons dans l'Etat fédéral suisse.

Les mêmes considérations valent pour une légitimation démocratique accrue des ins-titutions européennes: une augmentation de la légitimation démocratique leur confére-rait plus de poids vis-à-vis des Etats membres et favoriserait une évolution qui affec-terait la souveraineté des Etats membres et par là le contrôle démocratique de l'Unionpar les parlements nationaux. Tout accroissement du pouvoir du Parlement européendirectement élu accroîtrait par exemple l'influence des grands Etats à forte population,à moins qu'une compensation fédéraliste ne soit développée. La prise en compte desexigences fédéralistes et démocratiques en relation avec une adhésion de la Suisse àl'UE est extrêmement importante. Mais cette dernière ne doit pas être envisagée enpremier lieu au niveau européen, mais au contraire pour l'essentiel au niveau interne.

Avec l'adhésion à l'UE, la Suisse transférerait une partie de ses droits souverains àcelle-ci. Mais son influence sur l'exercice de ces droits perdurerait dans une moindremesure cependant que ne le permet le droit national. A cet égard, la Suisse partageraitavec les autres Etats membres sa responsabilité dans le processus de décision. Elle neperdrait toutefois ni sa souveraineté ni son identité nationale. Une adhésion à l'UE nepeut pas être comparée à l'adhésion à un Etat fédéral ou à la création de l'Etat fédéralsuisse en 1848: contrairement à une adhésion de la Suisse à l'UE les cantons ont, àl'époque, entièrement transféré au niveau de la Confédération non seulement certainsdroits souverains, mais aussi la décision concernant le transfert des droits souverainsdes cantons à la Confédération. Cette répartition peut être modifiée en tout temps parune votation constitutionnelle (selon le principe de la majorité). En revanche, les Etatsmembres décident toujours à l'unanimité, comme par le passé, les tâches à confier àl'UE et les compétences à lui transférer à cet effet.

613 Voir R. J. Schweizer, Auswirkungen einer Mitgliedschaft in der europäischen Union auf das schweizerische

Verfassungsrecht, dans: Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne – Enjeux et consé-quences, Zurich 1998, 515 et ss, avec d'autres renvois.

Page 335: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 333 - Chapitre 3

"Entrer dans l'UE est possible à tout moment. Mais il est impossible d'en ressortir.Alors, pourquoi ne pas attendre ?" (M. R., Chypre)"Est-il possible de quitter l'UE? Une telle possibilité est-elle envisageable sur le planinstitutionnel?" (D. H., canton de Berne)Du point de vue juridique, la question est controversée, car les traités constitutifs neprévoient pas expressément qu'un Etat puisse quitter l'UE. Il n'est politiquement pasimaginable qu'un Etat souverain puisse être contraint à rester dans l'UE contre savolonté. Cette possibilité est aussi une nécessité pour l'UE, puisque tout développe-ment exige l'accord de chaque Etat membre.

Une collectivité est considérée comme "souveraine" quand elle dispose de la ditecompétence des compétences, c'est-à-dire qu'elle possède le pouvoir de décider elle-même, dans quel domaine la collectivité agit et peut agir. Dans ce sens la Suisse reste-rait souveraine en cas d'adhésion à l'UE. En tant qu'Etat souverain, elle ne pourraitégalement pas être contrainte contre sa volonté de rester dans l'UE si elle devait déci-der plus tard de se retirer. Cette opinion est certes contestée par une partie des juristes,le Traité sur l'UE ne prévoyant pas la possibilité expresse de se retirer. Le départ d'unEtat constituerait une modification du traité qui nécessiterait l'approbation de tous lesautres Etats membres614. Une décision d'adhésion ne serait cependant politiquementpas irréversible. Jusqu'à présent aucun Etat membre n'a jamais exigé de se retirer del'UE. Deux événements laissent cependant supposer qu'un Etat peut quitter l'UE: en1975, soit trois ans après l'entrée de leur pays dans les CE, les citoyens du Royaume-Uni ont dû confirmer cette adhésion lors d'une votation populaire; cette votation po-pulaire démontre que le gouvernement du Royaume-Uni considérait qu'il était possi-ble de sortir des CE; les citoyens du Groenland - territoire externe du Danemark,jouissant d'une autonomie interne - ont décidé, lors d'une votation populaire en 1982,de quitter les CE. Là-dessus, les traités constitutifs ont été modifiés. La possibilité dese retirer devrait avoir peu de signification dans la pratique, parce qu'une adhésioncrée des modifications durables notamment dans le domaine économique (par ex.dans l'agriculture) sur lesquels il ne serait pas facile de revenir en arrière.

332.04.2 Droits populaires

Il existe une polarité qui ne peut pas être ignorée entre l'appartenance à l'Union euro-péenne et les droits populaires. Il serait cependant faux, de voir dans les droits popu-laires un obstacle insurmontable à l'adhésion et à l'appartenance à l'UE et d'en exiger– en fonction du point de vue politique – soit de renoncer à l'adhésion, soit de res-treindre massivement les droits populaires615. Assurément: l'adhésion rendrait le droitcommunautaire applicable dans notre pays et lui assurerait la primauté. La Suisse

614 La Cour constitutionnelle allemande a par exemple réservé pour la République fédérale d'Allemagne, dans

son arrêt Maastricht, le droit de quitter la Communauté en dernier recours si l'Union monétaire se soldait parun échec.

615 Voir P. Mahon/Ch. Müller, Adhésion de la Suisse à l'Union européenne et démocratie directe, dans: Cot-tier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne – Enjeux et conséquences, Zurich 1998, 449 et ss,avec d'autres renvois; A. Epiney/K. Siegwart/M. Cottier/N. Refaeil, Schweizerische Demokratie und Euro-päische Union, Berne 1998, avec d'autres renvois.

Page 336: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 334 - Chapitre 3

conserverait cependant son autonomie organisationnelle et procédurale et resteraitlibre dans l'aménagement de ses institutions, y inclus des droits populaires. Les insti-tutions doivent uniquement être conçues de telle sorte que la Suisse puisse défendreses intérêts d'une manière aussi efficace que possible et garantir la primauté du droitcommunautaire et la transposition de ce droit en Suisse. Le Conseil fédéral estimequ'il ne serait pas nécessaire de modifier le droit matériel. Le besoin de modifier lanouvelle constitution fédérale serait encore plus faible que pour la constitution ac-tuelle616. Il est vrai qu'il conviendra d'examiner soigneusement les conséquences pos-sibles de l'adhésion à l'UE sur les finances fédérales (voir ch. 333.08).

"Notre démocratie directe traditionnelle serait-elle touchée d'une manière ou d'uneautre par l'adhésion à une organisation internationale de plus et, si oui, dans quellemesure?" (H. T., canton du Tessin)En cas d'adhésion à l'UE nous ne devrions renoncer à aucun de nos instruments fa-miliers de démocratie directe. Il est cependant vrai que la portée pratique et en partieaussi juridique des droits de référendum et d'initiative serait limitée dans certainscas. Ceci est notamment dû au fait que certaines parties de la législation seraient in-fluencées par le droit communautaire et que les décisions du peuple contraires audroit communautaire ne pourraient pas pleinement être prises en compte.

Le référendum et l'initiative populaire sont compatibles avec l'adhésion à l'UE. Leslois fédérales et les arrêtés fédéraux de portée générale, ainsi que les traités qui rem-plissent les caractéristiques formulées à l'art. 89, cst., seraient soumis au référendumfacultatif, même après une adhésion. En d'autres termes: chaque fois que, sur la basedu droit communautaire – aux fins de transposer le droit communautaire ou d'éviterdes divergences entre le droit national et le droit communautaire – une loi est modi-fiée ou adoptée, cette décision est soumise au référendum législatif facultatif. Le droitnational détermine si les adaptations juridiques nécessaires doivent être réalisées auniveau de la loi ou non. Dans ce contexte, il convient de rappeler le principe du pa-rallélisme, selon lequel l'organe compétent pour l'adoption d'une disposition est éga-lement compétent pour les modifications de cette disposition. Les initiatives populai-res seraient également possibles dans le même mesure.

La portée de ces instruments ne serait cependant pas la même, parce que l'adhésion àl'UE implique un transfert de compétences législatives – et aussi de compétences enmatière de conclusion de traités internationaux – et qu'en particulier le processus dedécision pour tout le droit secondaire des Communautés (directives, règlements) neserait soumis à aucun contrôle de démocratie directe, c'est-à-dire ni au référendumlégislatif ni au référendum en matière de traités internationaux. En revanche, le con-trôle par les institutions de démocratie directe resterait possible lors de la mise en œu-vre du droit communautaire en droit interne dans le cadre de la marge de manœuvredont disposeront les Etats membres. C'est pourquoi l'analyse des conséquences ne doitpas se limiter aux seuls aspects formels; elle doit aussi tenir compte d'éléments quan-

616 L'actuelle constitution fédérale contient encore certaines dispositions qui ont déjà été reconnues comme

incompatibles avec le droit communautaire, comme l'art. 24quater, al. 2, cst. concernant l'exportation del'énergie produite par la force hydraulique, qui n'a cependant presque plus de signification pratique.

Page 337: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 335 - Chapitre 3

titatifs et qualitatifs. C'est notamment le cas pour les conséquences sur le référendumlégislatif.

Le recensement des éléments quantitatifs et qualitatifs revient finalement à déterminerles parties de notre droit national influencées par le droit communautaire et l'impor-tance de cette influence. Cette évaluation est extrêmement difficile, parce que descentaines de questions sont à examiner et parce que des jugements de valeur sont àporter sur l'importance de certaines dispositions. Seules des appréciations sommairesou des approximations sont possibles. A cet égard, il convient également d'intégrerdans l'examen de ces questions le fait que la "dimension européenne" influence notredroit même dans l'hypothèse de l'exécution autonome et qu'en cas d'appartenance àl'UE, la Suisse peut elle-même contribuer à l'élaboration commune.

L'Institut européen de l'Université de Zurich a analysé les 46 référendums obligatoireset les 278 objets exposés au référendum facultatif pendant la période du 1er janvier1993 au 30 juin 1998, au plan fédéral617. Une proportion importante d'affaires n'auraitsuscité aucun problème parce qu'elles n'entrent pas dans le champ d'application dudroit communautaire: 35% pour les référendums obligatoires, 44% pour les référen-dums facultatifs. Une même proportion d'affaires n'aurait également pas posé de pro-blème dans la mesure où le vote aurait porté sur la marge de manoeuvre dont dispo-sent les Etats membres pour la mise en oeuvre des directives communautaires: 43%pour les référendums obligatoires, 36% pour les référendums facultatifs. Troisièmecatégorie, une faible proportion d'affaires relevant des compétences des CE aurait puprovoquer des conflits avec le droit communautaire: 11% pour les référendums obli-gatoires, 14% pour les référendums facultatifs. Ainsi, par exemple, l'acceptation del'initiative populaire "Pour la protection de la vie et de l'environnement contre les ma-nipulations génétiques (initiative pour la protection génétique)" ou de l'initiative diteBaumann/Denner (initiative populaire "Pour des produits alimentaires bon marché etdes exploitations agricoles écologiques") aurait posé des problèmes de compatibilitéavec le droit communautaire. Enfin, une faible proportion d'affaires concernent no-tamment des domaines pour lesquels les compétences communautaires consistentdans la promotion de certains politiques qui restent dans la compétence des Etatsmembres (par ex. culture, santé publique), ou pour lesquels les Etats membres prati-quent une coopération intergouvernementale (deuxième et troisième pilier de l'UE;décisions à l'unanimité); 9% pour les référendums obligatoires, 6% pour les référen-dums facultatifs. Ces affaires présentent de petits risques de conflit avec le droitcommunautaire. Dans cette catégorie, l'acceptation des initiatives pour la préventiondes problèmes liés à l'alcool et au tabac aurait pu poser des problèmes quant à l'inter-diction de toute publicité en faveur de ces produits. De même, l'acceptation de l'ini-tiative sur l'interdiction de l'exportation du matériel de guerre aurait pu poser des pro-blèmes quant aux règles communautaires sur l'exportation des biens à double usage.

En réalité, le nombre de conflits effectifs aurait été très faible. En effet, pour qu'unconflit potentiel devienne un conflit réel, encore faut-il d'une part que le référendum

617 Cette étude sera publiée au printemps 1999 dans un volume séparé.

Page 338: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 336 - Chapitre 3

facultatif soit demandé par 50 000 citoyens et, d'autre part, que le peuple, voire lepeuple et les cantons, acceptent le référendum ou l'initiative soumis au vote. Il n'estdonc pas nécessaire de restreindre les droits populaires si l'on considère que la pres-que totalité des conflits potentiels avec le droit communautaire n'aboutirait à aucuneviolation concrète du droit communautaire.

Le Centre d'études et de documentation sur la démocratie directe de l'Université deGenève en collaboration avec l'Institut européen de l'Université de Fribourg ont ana-lysé les votations cantonales618. Parmi les 616 objets cantonaux examinés, soumis auvote populaire entre le 1er janvier 1993 et le 30 juin 1998, un total de 543 objets ou88% s'est révélé comme ne posant pas de problèmes, soit qu'ils n'entrent pas dans lechamp d'application du droit communautaire, soit qu'ils portent sur la marge de ma-nœuvre dont disposent les Etats membres pour la mise en œuvre, soit encore que leur"eurocompatibilité" ne puisse être déterminée qu'au moment de leur application ou deleur exécution.

Ne sont pas touchés par le droit communautaire en particulier les objets tels que laprocédure civile, pénale ou administrative, les dispositions relatives aux systèmesélectoraux ou des règles de procédure particulières à la législation cantonale. Appar-tiennent aussi à cette catégorie tous les objets qui touchent à l'acquisition et à la pertede la citoyenneté cantonale et bourgeoisiale. Les votations sur les ouvrages d'utilitépublic tels que les hôpitaux, les maisons de vieillesse, les établissements pénitentiai-res, les centres de natation et de sport et les écoles ne tombent généralement pas dansle champ d'application du droit communautaire. C'est également la cas pour les objetsrelatifs à la législation fiscale, à l'exception des impôts indirects et de la double impo-sition. Les objets examinés concernant la protection de la nature et du paysage portentsur la marge de manœuvre dont disposent les Etats membres pour la mise en œuvre. Ilen va de même pour les nombreux objets législatifs concernant l'hôtellerie et la res-tauration. Les objets examinés dans le domaine de la législation sur l'énergie, lesconstructions, les forêts et la protection des eaux ne créent pas de difficultés, bien quele droit communautaire doive être pris en compte lors de l'exécution et de l'applica-tion.

38 objets (6%) se sont avérés au moins partiellement incompatibles avec le droitcommunautaire applicable, parmi lesquels seuls 30 objets (environ 5%) lui contreve-naient complètement ou sur des points essentiels. Parmi les objets partiellement in-compatibles avec le droit communautaire applicable, on peut citer par exemple la ré-vision totale de la constitution du canton de Berne, où le conflit se limite au domainedu droit de vote dans les affaires cantonales (exclusion, pour les citoyens de l'UE, devoter et d'être éligibles sur le plan municipal).

Sont également partiellement en conflit avec le droit communautaire applicable lesobjets dans le domaine du droit de vote et d'éligibilité des étrangers sur le plan local:l'incompatibilité y constitue un aspect important de l'objet. Les cinq objets qui sont

618 Cette étude sera publiée au printemps 1999 dans un volume séparé.

Page 339: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 337 - Chapitre 3

totalement en conflit avec le droit communautaire sont: l’initiative genevoise "Pourune transparence fiscale " (contraire à la directive européenne en matière de protec-tion des données), l'initiative bernoise "Pour le droit de vote et d'éligibilité des étran-gers dans le canton de Berne" et le contre-projet du Grand Conseil bernois (contraireaux dispositions de l'UE sur le droit de vote et l'éligibilité aux élections municipales),l'initiative schaffhousoise pour l'octroi d'une subvention étatique en faveur du tou-risme (contraire aux règles communautaires en matière d'aides d'Etat) ainsi que l'ini-tiative zurichoise "Stop au chômage importé" (contraire à la libre circulation des per-sonnes).

En ce qui concerne les aspects qualitatifs, il s'agit avant tout de déterminer, outre lesdomaines touchés, de quelle marge de manœuvre la Suisse disposerait lors de latransposition. La réponse à cette question varie: il est vrai que les directives commu-nautaires, qui en soi fixent uniquement les objectifs et laissent aux Etats membres lacompétence quant au choix de la forme, au contenu et aux moyens, contiennent sou-vent des dispositions relativement détaillées et par là réduisent la marge de manœuvredu législateur national. En outre, les règlements communautaires, qui sont obligatoiresdans tous leurs éléments et qui sont directement applicables dans tous les Etats mem-bres, nécessitent aussi certains mesures de concrétisation et d'adaptation en droit na-tional. Par exemple, il peut être nécessaire de déterminer les autorités compétentes oud'arrêter des règles de procédure. Les adaptations peuvent s'imposer d'elles-mêmes,pour éviter des conflits de normes et l'insécurité juridique qui en découle (voir ch.211, let. A.2).

A cela s'ajoute que la subsidiarité a gagné en importance dans l'Union européenne etprogressera encore. Ce principe oblige l'UE, lors de l'adoption de dispositions dé-taillées, à exercer une certaine retenue et à ménager aux Etats membres plus de margede manœuvre. C'est pourquoi, dans l'ensemble, l'importance de la marge de manœuvredu législateur national en cas d'adhésion de la Suisse à l'UE ne devrait pas être sous-estimée, ce qui donne une signification particulière au maintien sans changement duréférendum législatif facultatif.

Par ailleurs, il convient de se rendre compte que le maintien intégral de cet instrumentde démocratie directe comporterait certains risques. Dans certains cas, les adaptationsnécessaires du droit national risqueraient de ne pas être prises à temps ou d'être refu-sées à cause de l'exercice du droit de référendum. Pour autant qu'il s'agisse d'adapta-tions relatives au droit communautaire directement applicable, cela n'aurait pas degraves conséquences: le droit communautaire directement applicable pourrait et de-vrait même être appliqué. Pour le droit communautaire non directement applicable,une violation de nos obligations conventionnelles entraînerait tôt ou tard et en der-nière conséquence une condamnation judiciaire de la Suisse. Des conflits éventuelsentre le droit de l'UE, qui est obligatoire, et une décision démocratique dans la formed'un référendum accepté provoqueraient sans aucun doute des querelles politiques.

En outre il faudrait se demander s'il serait raisonnable de soumettre un objet lorsque lerésultat du scrutin n'aurait aucun effet sur le droit applicable ou lorsque la marge de

Page 340: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 338 - Chapitre 3

manœuvre du législateur national est très limitée, c'est-à-dire lorsqu'un objet ne con-tient que des dispositions d'exécution qui, même selon notre pratique législative,pourraient et devraient même être adoptées plutôt par le gouvernement que par leParlement, c'est-à-dire le législateur.

Il existe de nombreux moyens de résoudre ces problèmes et difficultés: En cas d'ur-gence, le référendum abrogatif déjà existant (art. 89bis, cst.) permettrait sans aucundoute une transposition rapide et contribuerait à éviter d'éventuels retards. On pourraitaussi envisager la délégation de compétence législative au Parlement ou au gouver-nement, sous réserve du référendum, qui pourrait soit avoir un caractère général, soitêtre limitée à des domaines ou situations particuliers. Une telle délégation serait peut-être envisageable lorsqu'il s'agit uniquement d'adaptations découlant du droit commu-nautaire directement applicable, c'est-à-dire lorsqu'il s'agit uniquement d'éliminer desincompatibilités entre différentes normes, en dérogeant à cet effet au principe du pa-rallélisme. La délégation – en particulier la délégation au Parlement – serait aussiimaginable pour le cas où le droit communautaire à transposer ne laisse qu'une margede manœuvre réduite au législateur national. Mais l'importance de la marge de ma-noeuvre dont on dispose peut donner lieu à des controverses, ce qui fait ressortir lesdifficultés que comportent de telles solutions. En outre, on pourrait examiner la possi-bilité de fixer dans la norme de délégation des conditions matérielles ou procéduralesqui devraient déterminer l'attitude de la Suisse au sein de l'UE ou lors de la transposi-tion du droit de l'UE. Le législateur pourrait déterminer ces conditions sans être sou-mis à des délais.

Aucune modification immédiate ne s'impose non plus en ce qui concerne les initiati-ves populaires. Assurément: si une initiative populaire incompatible avec le droitcommunautaire, était acceptée, cette initiative populaire ou ses dispositions contrairesau droit communautaire, n'auraient d'effet juridique. La primauté du droit de l'UE se-rait également valable dans cette situation (voir ch. 332.04.1). Il pourrait en découlerun conflit entre le droit national et le droit communautaire qui serait impérativementrésolu en faveur du droit communautaire. Cette solution s'applique aussi dans les rap-ports entre le droit fédéral et le droit cantonal; elle est problématique et devrait êtreévitée autant que possible. On peut se demander s'il serait raisonnable, de soumettre àla votation des objets qui, même s'ils étaient acceptés, seraient partiellement ou tota-lement sans effets sur le plan juridique. Cette situation est à rapprocher de celle duréférendum législatif qui pourrait rester sans effet dans le domaine limité du droitcommunautaire directement applicable.

Une possibilité serait de déclarer nulles les initiatives populaires qui contredisent ledroit communautaire. Selon le droit constitutionnel en vigueur, l'Assemblée fédéralepeut déclarer nulles des initiatives populaires contraires au droit international impéra-tif. Dans la nouvelle constitution, elle détient en outre la possibilité de les déclarerpartiellement nulles. Cette compétence pourrait être étendue au droit de l'UE. Le caséchéant, il conviendrait aussi d'examiner, si cette tâche ne devrait pas être transférée àun autre organe, en particulier le Tribunal fédéral, puisqu'il s'agit pour l'essentiel del'appréciation d'une question juridique.

Page 341: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 339 - Chapitre 3

On peut aussi imaginer une solution telle que celle qui est actuellement étudiée dansle cadre de la réforme des droits populaires (paquet B). Cette solution donne mandatde résoudre un conflit de manière appropriée dans un délai raisonnable. Elle tientmieux compte de l'importance des droits populaires et du caractère exceptionnel detels conflits qu'une déclaration de nullité et la renonciation à une votation du peuple etdes cantons qui en découleraient. Dans le cadre de la réforme des droits populaires, leConseil fédéral a en outre proposé l'initiative populaire générale qui a l'avantage de lasouplesse. Cette dernière laisserait une plus grande marge de manoeuvre à l'Assem-blée fédérale pour mettre en oeuvre les initiatives de la manière la plus conforme audroit international et au droit communautaire.

Finalement, il convient encore de mentionner les conséquences sur le référendum enmatière de traités internationaux. L'adhésion à l'UE serait soumise au référendumobligatoire en matière de traités internationaux. Il faut se demander si des modifica-tions ultérieures des traités constitutifs de l'UE et des CE (droit primaire) ou l'élargis-sement de la communauté supranationale seraient aussi soumis au référendum obli-gatoire. La plupart des experts excluent cette solution; elle devrait sans doute êtreexaminée soigneusement et tranchée cas par cas. Pour le moins, le référendum obli-gatoire n'entrerait vraisemblablement pas en ligne de compte pour la modification destraités qui ne sont pas d'une importance fondamentale, qui, en d'autres termes, necontiennent pas de modifications qualitatives des traités, ou pour les élargissementsqui ne modifieraient pas fondamentalement le caractère de l'Union. Mais elles se-raient, le cas échéant, soumises au référendum facultatif en matière de traités interna-tionaux.

En ce qui concerne le référendum facultatif en matière de traités internationaux, ilconvient de rappeler en premier lieu que le droit secondaire de l’UE ne fait pas l’objetdu référendum en matière de traités internationaux. La portée pratique de cet instru-ment de démocratie directe serait réduite en cas d'adhésion, d'autant plus que les ins-titutions de l'UE possèdent certaines compétences propres en matière de conclusionde traités internationaux. Dans le cas des "accords mixtes", c'est-à-dire les traités aux-quels les Etats membres sont parties contractantes aux côtés de la Communauté619, lesrègles internes de compétence sont applicables pour l'approbation par les Etats mem-bres, de sorte que les droits de participation du Parlement et, pour autant que les con-ditions de l'art. 89, al. 3, cst. soient remplies620- du peuple ne sont pas affectés.

Le Conseil fédéral veut accorder, dans le débat qui s'ouvrira, une attention particulièreaux relations entre l'appartenance à l'UE et les droits populaires. Il examinera toutparticulièrement les possibilités d'éviter les conflits entre le droit communautaire etles décisions du peuple. Il a l'intention de soumettre, dans le cadre d'un message rela-tif à l'adhésion à l'UE, des propositions précises sur les moyens de résoudre les con-

619 Comme exemples d’accords mixtes, on peut mentionner l’Accord l’EEE et l’accord conclu en 1999 avec la

Suisse sur la libre circulation des personnes, voir ch. 212.620 Art. 89, al. 3, cst. prévoit le référendum facultatif en matière de traités internationaux pour des traités qui

sont d'une durée indéterminée et ne sont pas dénonçables, pour ceux qui prévoient l'adhésion à une organi-sation internationale et pour ceux qui entraînent une unification multilatérale du droit.

Page 342: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 340 - Chapitre 3

flits les plus patents, notamment en rapport avec l’initiative populaire. Pour les con-flits mineurs, dont la portée pratique n'est pas encore prévisible, il se réserve en re-vanche la possibilité, en cas d'adhésion, de tirer les enseignements de l'expérienceavant de soumettre, en se fondant sur ces enseignements, des propositions concernantla façon de procéder pour les adaptations.

332.04.3 Assemblée fédérale

"(Exposé des) avantages et des inconvénients d'une adhésion (en rapport avec ce) quireste à l'Assemblée fédérale en matière d'autodétermination politique."(B. H., canton de Zurich)L'adhésion tendra à réduire l'influence du Parlement suisse. Cette perte d'influencepourrait être compensée par des mesures appropriées.

La participation à des organisations internationales et supranationales relève en géné-ral fortement des gouvernements. Cela ne concerne pas seulement la Suisse, mais tousles Etats. La représentation d'un pays à l'extérieur appartient traditionnellement augouvernement, parce que c'est en général ainsi qu'il est possible de réagir à temps sides changements surviennent soudainement sur le plan international, notamment aucours de négociations. Le gouvernement entretient des relations avec les représentantsd'autres Etats, négocie des traités et participe à des enceintes internationales ou supra-nationales. C'est pourquoi une adhésion de la Suisse à l'UE renforcerait dans une cer-taine mesure l'importance du Conseil fédéral.

L'adhésion renforcerait une évolution, qui peut déjà être observée depuis quelquetemps et contre laquelle certaines mesures ont déjà été prises sur le plan institutionnel.La forte augmentation des relations bilatérales et multilatérales, le développement desorganisations et instruments internationaux et surtout l'intensification du processusd'intégration européenne ont donné à l'ordre juridique de notre pays une dimension deplus en plus internationale. C'est notamment le cas pour les orientations fondamenta-les de l'activité législative nationale dans le domaine du droit économique et de la lé-gislation sociale d'accompagnement. Le rôle directeur du gouvernement s'explique parla nécessité, pour les représentants de l'Etat, d'agir rapidement et souvent de façondiscrète lors de la prise de décisions sur le plan international. L'adhésion à l'UE necréerait pas de situation complètement nouvelle. Elle renforcerait cependant la ten-dance actuelle et lui donnerait une qualité nouvelle. Cela justifie un examen appro-fondi des conséquences de l'adhésion à l'UE sur l'Assemblée fédérale621.

Il convient de constater que l'affaiblissement de l'Assemblée fédérale ne toucheraitpas les différentes compétences de la même manière. Il se refléterait avant tout dansle domaine de la législation et en matière d'approbation des traités internationaux. Lesautres tâches ou domaines de compétence de l'Assemblée fédérale (finances, élec-tions, haute surveillance) ne subiraient pas de modifications importantes défavorables

621 Voir B. Ehrenzeller, Auswirkungen eines EU-Beitritts auf die Bundesversammlung und ihr Verhältnis zum

Bundesrat, dans: Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne – Enjeux et conséquences,Zurich 1998, p. 293 et ss, avec d'autres renvois.

Page 343: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 341 - Chapitre 3

au Parlement. Il faudrait cependant examiner très sérieusement la possibilité d'accor-der à l'Assemblée fédérale des attributions supplémentaires lors de l'élection de titu-laires de nouvelles fonctions (en particulier lors de la nomination des membres suissesdans les instances communautaires).

La modification de l'équilibre notamment en matière législative pourrait être compen-sée de différentes manières. Le Conseil fédéral envisage en premier lieu de renforcerla participation du Parlement lors de l'adoption de directives ou de règlements au ni-veau européen. A cet égard, le Parlement pourrait donner des lignes directrices auConseil fédéral. Dans ce contexte, il convient de rappeler la réglementation adoptée ily a quelques années sur la participation du Parlement à la politique étrangère: l'art.47bisa de la loi sur les rapports entre les conseils622 oblige le Conseil fédéral à infor-mer le Parlement sur les activités dans ce domaine et prévoit diverses modalités departicipation du Parlement (en particulier des commissions de politique extérieure).Selon l'alinéa. 3 de cette disposition, le Conseil fédéral doit, lorsque des négociationsmenées au sein d'organisations internationales aboutissent à des décisions qui sontdirectement applicables en Suisse ou qui entraînent une modification de la législationsuisse – ce qui serait aussi le cas pour l'adoption de droit communautaire secondairenotamment par le Conseil des ministres – consulter les commissions de politique exté-rieure avant de fixer ou de modifier les directives et les lignes directrices concernantle mandat de négociation. Les commissions de politique extérieure, et par leur entre-mise les deux Conseils, disposent grâce à cette loi d'un moyen important de participa-tion aux décisions législatives.

Il est tout à fait imaginable que l'influence du Parlement sur la législation européennepuissent être renforcée en cas d'adhésion à l'UE. On pourrait examiner de manièreapprofondie les modalités d'une "commission spécialisée chargée des affaires euro-péennes". On pourrait aussi discuter de la manière dont les autres commissions spé-cialisées, et avant tout les deux Conseils, pourraient être eux-mêmes associés. Unusage accru des délégations législatives qui imposent au Conseil fédéral des directivesnormatives pour la participation au processus décisionnel européen pourrait être envi-sagé. Le Conseil fédéral examinera avec attention les possibilités de préserver l'in-fluence de l'Assemble fédérale. Il déterminera alors si de telles mesures devraient déjàêtre prises au moment de l'adhésion ou s'il faudrait avant de procéder à des adapta-tions, se fonder sur les résultats obtenus avec les formes et les mécanismes dont leParlement dispose déjà pour participer à la politique extérieure.

Le Conseil fédéral attache de l'importance à souligner que l'adhésion à l'UE ne doitpas conduire à une perte de poids du Parlement dans notre système politique.

622 Loi fédéral du 23 mars 1962 sur la procédure de l'Assemblée fédérale, ainsi que sur la forme, la publication

et l'entrée en vigueur des actes législatifs (loi sur les rapports entre les conseils), RS 171.11.

Page 344: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 342 - Chapitre 3

332.04.4 Conseil fédéral et Assemblée fédérale

"Dans quelle mesure faudra-t-il augmenter les effectifs de l'exécutif fédéral et lenombre de conseillers fédéraux? (…)" (W.B., Allemagne)Le Conseil fédéral verrait son influence s'accroître par la participation aux instancesde l'UE, en particulier au Conseil des ministres. Le nombre des membres du gouver-nement devrait être augmenté pour des raisons pratiques. L'augmentation de pouvoirdu gouvernement devrait être compensée par une extension des droits de participa-tion du Parlement et des cantons dans le domaine de la politique d'intégration.

L'appartenance à l'UE requiert une participation intensive des représentants des Etatsmembres et les confronte à de nouvelles exigences. Cette remarque ne s'applique passeulement aux membres du gouvernement. Les représentants suisses (fonctionnaires)dans les instances du Conseil (COREPER, groupes du Conseil) devraient égalementfournir un effort considérable.

Il y a lieu de faire une distinction entre les représentants du gouvernement suisse ausein des organes du Conseil des ministres soumis aux instructions et les Suisses sié-geant dans les autres institutions de la CE, soit la Commission, le Parlement européen,la Cour de justice des CE, la Cour des comptes, le Comité économique et social ou leComité des régions (voir ch. 213). Ces derniers n'agiraient pas en tant que représen-tants soumis aux instructions de l'Etat membre que serait la Suisse, mais seraient te-nus de défendre l'"intérêt commun". En cas d'adhésion de la Suisse à l'UE, un certainnombre de sièges dans ces instances nous serait réservé selon une clé de répartitionexistante (voir ch. 213, let. B.1).

Nous examinerons maintenant plus particulièrement les conséquences d'une adhésionsur le Conseil fédéral. En effet, celui-ci verrait ses tâches augmenter notablement dufait de sa participation au Conseil de l'Union européenne (Conseil des ministres) et auConseil européen (Chefs d'Etat et de gouvernement des Etats membres).

Cette charge de travail signifie d'une part que les membres du Conseil fédéral assume-raient de nouvelles tâches importantes et se verraient attribuer de nouvelles compé-tences. En particulier, la participation au Conseil des ministres serait liée à une aug-mentation de ses pouvoirs législatifs, car le droit communautaire secondaire(directives et règlements) est essentiellement adopté par le Conseil des ministres. LaSuisse obtiendrait ainsi des droits de codécision législative pour l'ensemble de l'es-pace UE. On peut se demander si cette participation intensive et ce surcroît de tâchessur le plan européen serait en pratique conciliable avec le mode de fonctionnementactuel et la composition du Conseil fédéral.

A cet égard, il y a lieu de relever que le Conseil de l'UE se réunit environ 100 fois paran dans plus de 20 formations différentes623. Il faut en outre également compter cinq

623 Ces conseils sont en principe présidés par un ministre ou un secrétaire d'Etat. Actuellement dans l'UE le

Conseil se réunit dans les formations suivantes: Affaires générales (ministres des affaires étrangères), Eco-nomie et Finances (ECOFIN), Agriculuture, Pêche, Marché intérieur, Transports, Environnement, Santé,

Page 345: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 343 - Chapitre 3

réunions du Conseil européen de deux jours chacune (depuis 1999; auparavant il n'yavait que trois réunions)624. Au sein du Conseil des ministres, seuls les membres desgouvernements des Etats membres de l'UE ont, selon le Traité CE, le droit de vote;une représentation au niveau des fonctionnaires n'est pas prévue pour la prise de déci-sion. Pour assurer une représentation uniforme et cohérente de la Suisse dans lastructure complexe du Conseil des ministres625, il serait indispensable de créer au ni-veau du gouvernement et de l'administration une structure de coordination avec pou-voir de conciliation, en particulier pour les affaires courantes de la politique d'inté-gration. Celle-ci pourrait être organisée dans le cadre d'une unité existante(Délégation du Conseil fédéral pour les questions d'intégration, Bureau de l'intégra-tion DFAE/DFE).

Dans le projet mis en consultation sur la réforme de la direction de l'Etat de novembre1998, il est fait référence à cette problématique. Les propositions de réforme faites nesont à vrai dire pas conçues en fonction de l'adhésion à l'UE. Il est au contraire ex-pressément mentionné que les propositions formulées devront le cas échéant êtrecomplétées à cet égard. Le Conseil fédéral est d'avis que les deux variantes relatives àla réforme du système gouvernemental qui sont actuellement en discussion, soit lerenforcement du gouvernement collégial au moyen d'une revalorisation de la fonctionprésidentielle liée à une modeste augmentation des membres du Conseil fédéral(variante 1), soit la création d'un gouvernement à deux niveaux avec un Conseil fédé-ral collégial et des ministres (variante 2), permettraient au gouvernement de s'acquit-ter de ses devoirs au niveau européen. La variante 2 pourrait, du fait de sa plus grandeflexibilité, répondre plus facilement aux besoins des relations internationales et enparticulier à ceux de la participation aux institutions de l'UE que la variante 1 qui exi-gerait que l'on prévoit une augmentation plus forte du nombre des conseillers fédé-raux que dans la version actuelle.

Il y a également lieu de mentionner dans ce contexte que la charge de travail supplé-mentaire qu'impliquerait l'adhésion à l'UE pour les membres du gouvernement seraitcompensée par une réduction de certaines tâches dans le domaine des relations bilaté-rales avec les Etats membres de l'UE. En ce qui concerne les relations mondiales quel'UE entretient pour le compte et avec les Etats membres, on peut s'attendre à une

Travail et Affaires sociales, Industrie, Energie, Télécommunications, Jeunesse, Formation, Culture, Protec-tion des consommateurs, Recherche, Développement, Justice et Affaires intérieures, Aménagement du ter-ritoire, Budget.

624 Si on tient compte non seulement des réunions ordinaires et extraordinaires du Conseil, mais également desautres réunions qui ont lieu fréquemment au niveau ministériel dans l'Etat membre qui a la présidence del'UE, on arriverait pour l'année 1998 à une charge hypothétique qui se répartit de la manière suivante entrechaque chef de département (indication selon la charge de travail engendrée):

DFE: 35 réunions d'un total de 50 jours; DFAE: 22 réunions d'un total de 38 jours; DFI: 30 réunions d'untotal de 30 jours; DETEC: 18 réunions d'un total de 25 jours; DFF: 15 réunions d'un total de 21 jours; DFJP:8 réunions d'un total de 11 jours; DDPS: 1 réunion. Pour le président de la Confédération suisse, il faut en-core ajouter les réunions du Conseil européen, qui s'étendent sur 6 à 10 jours par année.

625 Cela concerne en outre de nombreuses réunions des groupes du Conseil et du Coreper au niveau des fonc-tionnaires de même que les fréquentes rencontres au niveau ministériel susmentionnées.

Page 346: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 344 - Chapitre 3

certaine diminution des tâches, les questions se posant au niveau multilatéral dans lesdomaines de compétence communautaire étant discutées dans les instances de l'UE.

"Combien de fonctionnaires supplémentaires seront nécessaires dans le cas d'uneadhésion à l'UE?" (aussi W. B., Allemagne)Le Conseil fédéral estime que l'adhésion à l'UE n'augmentera pas les dépenses enmatière de personnel dans l'administration fédérale, au contraire.

Si la Suisse fait partie de l'UE, le Conseil fédéral et l'administration fédérale seraientfortement sollicités par leur participation dans les nombreux comités d'experts. Il fautcependant mentionner que depuis les négociations EEE certains contacts existent déjàau niveau de l'administration. C'est notamment le cas pour les domaines qui font l'ob-jet des accords bilatéraux sectoriels. L'adhésion à l'UE apporterait à cet égard non unchangement fondamental, mais une extension et une intensification de la coopérationen cours. La Suisse aurait nouvellement la possibilité de formuler des propositionsdans le cadre des discussions qui ont lieu dans les nombreux comités CE - que laCommission ou le Conseil oriente - même si ces comités n'ont pratiquement pas depouvoir décisionnel (comitologie CE).

La "bureaucratie bruxelloise" a en outre des effectifs relativement modestes. En 1998,4 100 personnes travaillaient au Parlement européen, 2 500 dans les instances duConseil et 21 000 dans la Commission; la Cour de justice des CE comptait 950 per-sonnes, la Cour des comptes 550 et le Comité économique et social et le Comité desrégions ensemble 750. Cela représente pour l'année 1998 un total de 30 000 personnesemployées dans les instances de l'UE, dont environ 15% dans le service de traductionpour les onze langues officielles de l'UE. A titre de comparaison, le service public ducanton de Zurich occupe environ le même nombre de personnes (exclusion faite desemployés communaux).

En ce qui concerne les conséquences sur l'effectif du personnel de l'administrationfédérale, le Conseil fédéral, se fondant sur les données disponibles, estime que, dansce domaine, les dépenses pour l'ensemble de l'administration fédérale résultant d'uneadhésion seraient plus que compensées par les économies qui pourraient être faites.Cela ne signifie cependant pas qu'il n'y aurait pas lieu d'envisager des déplacementsde personnel dans les services de l'administration fédérale. L'administration fédéraledes douanes enregistrerait une diminution significative de son personnel, mais d'au-tres services auraient des tâches supplémentaires.

L'effectif des postes permanents de l'administration fédérale ne serait pas fondamen-talement modifié par l'adhésion de la Suisse à l'UE. Les nouvelles tâches ne devraientpas toutes être exécutées dès le début. La diminution prévue dans l'administration desdouanes se ferait progressivement et de manière socialement équitable. La restructu-ration de l'administration fédérale se ferait en plusieurs années. Il va de soi que leConseil fédéral, en accord étroit avec les personnes concernées, ordonnera en tempsutile une étude plus détaillée des conséquences sur l'effectif du personnel et s'efforce-ra de combiner, lorsque cela sera possible, la suppression nécessaire de postes avec

Page 347: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 345 - Chapitre 3

les départs naturels. Certaines innovations structurelles de l'administration fédéraledevraient également être examinées en relation avec l'adhésion à l'UE.

Dans l'administration des douanes, environ 1 600 postes seraient progressivementsupprimés626.

Le Conseil fédéral compte actuellement avec une augmentation des postes dans ledomaine des affaires étrangères, de l'entraide judiciaire et administrative (y comprisl'extradition), de même que dans le domaine fiscal. Il y aurait considérablement plusde tâches dans le domaine de la santé, en particulier en liaison avec les produits chi-miques627, de même que dans les domaines de la sécurité intérieure628 et des trans-ports terrestres629. De plus, l'appareil statistique de la Suisse devrait être adapté630 etdes tâches supplémentaires devraient également apparaître dans le domaine de la con-currence de même que dans celui des marchés publics. Enfin, le droit vétérinaire de-vrait également être adapté631et d'autres services de l'administration fédérale seraientconfrontés à de nouvelles tâches632. S'agissant des conséquences au niveau du person-nel dans le domaine de la politique de sécurité, de l'armée et de la protection de la

626 L'administration fédérale des douanes dispose actuellement d'environ 2 600 postes dans le domaine civil

(c'est-à-dire sans le corps des garde-frontières). Les tâches qui, après une adhésion à l'UE et après l'expira-tion des périodes transitoires, resteraient dans le domaine civil pourraient être exécutées par environ 1 000personnes.

627 Dans les domaines des médicaments, des denrées alimentaires et des produits chimiques, le besoin supplé-mentaire en personnel calculé par un groupe de travail intergouvernemental s'élèverait à environ 45 postespour l'intégration complète du contrôle des produits chimiques suisses dans celui de l'UE. Cela suppose queles dépenses supplémentaires en personnel engendrées par une adhésion à l'UE seraient indépendantes des40 postes pour l'exécution du droit suisse des produits chimiques harmonisé avec le droit communautaire -révision totale de la législation sur les toxiques et adaptations connexes de la législation sur la protection del'environnement, voir ch. 221.01, let. D.12 - qui seraient précédemment déjà couvertes.

628 En ce qui concerne le corps des garde-frontières, qui compte actuellement 1 900 personnes, il y a lieu ded'examiner comment le déficit sécuritaire consécutif à la suppression des contrôles aux frontières pourraitêtre compensé. On pourrait envisager une sorte de corps de protection des frontières avec des structurescentrales au plan fédéral pour certaines opérations de même que pour la coordination ou alors une extensionpersonnelle et matérielle des corps de police cantonaux. Dans le domaine policier, une diminution du per-sonnel ne devrait pas être envisagée, tout au plus un transfert des forces.

629 Besoin supplémentaire dû aux activités en relation avec le contrôle de l'accès au marché (licences, accès à laprofession, etc.), normes techniques des véhicules.

630 Augmentation progressive d'environ 150 postes. La statistique a connu un fort développement dans les Etatsmembres de l'UE durant les dix dernières années. S'agissant des réglementations et de la pratique pour letraitement des informations officielles, notre pays, comparé à l'Union, présente un retard considérable. Dupersonnel supplémentaire devrait être engagé eu égard à la différence et à l'ampleur du travail pour la prépa-ration, la planification et l'organisation des données statistiques exigées. Ce personnel serait en particuliernécessaire pour des travaux dans le domaine de la comptabilité nationale, des statistiques industrielles et detransport, du registre des entreprises et des exploitations agricoles, de même que dans le domaine de la mé-thodologie et de l'extension de l'informatique, de la saisie des informations de même que dans l'échange in-ternational de données statistiques. Il serait d'ailleurs nécessaire selon les données dont nous disposonsd'augmenter de 15 postes la division statistique auprès de la Banque nationale suisse pour les besoins liés àla statistique de la balance des comptes.

631 La crise ESB a démontré qu'il y a lieu d'examiner la répartition actuelle des tâches. Des mandats appropriésont été donnés.

632 Dans le domaine de la reconnaissance des diplômes, on devrait désigner une autorité officielle de la Confé-dération ou des cantons, qui pourrait servir de centre d'information pour les personnes intéressées de mêmeque pour les autorités et les employeurs.

Page 348: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 346 - Chapitre 3

population, celles-ci ne peuvent pas être actuellement chiffrées. Le Conseil fédéralpart de l'idée qu'ici également une augmentation serait nécessaire633.

Lors de l'application du droit communautaire dans le domaine de la sécurité socialeque ce soit par un accord sectoriel, une participation à l'EEE ou une adhésion à l'UE,le Conseil fédéral estime que peu de postes supplémentaires seraient nécessaires dansl'administration fédérale et qu'une augmentation progressive d'environ 150 unités au-près de la Caisse suisse de compensation à Genève suffirait634.

Dans l'ensemble, on peut considérer que les augmentations en personnel selon nosinformations actuelles s'élèveraient à moins de 1 000 postes, alors que la réductionprogressive des effectifs de l'administration des douanes à elle seule libérerait environ1 600 postes.

332.04.5 La justice et le citoyen

"Le Pacte fédéral de 1291, visait à exclure les juges étrangers. Qu'en est-il aujour-d'hui?" (E. F.-K., canton de Soleure).A la Cour de justice des CE siègent des juges de tous les Etats membres. Ils agissentindépendamment de leur nationalité. L'expression "juge étranger" est donc erronée,comme dans le cas des juges de la Cour européenne des droits de l'homme à Stras-bourg. La Cour de justice des CE ne contrôle pas et ne casse pas les jugements duTribunal fédéral.

En cas d'adhésion à l'UE, la Confédération et les cantons garderaient leurs attributionsen matière d'organisation judiciaire et de droit procédural. Le droit communautaire nese prononce pas sur la manière dont ses dispositions matérielles doivent être transpo-sées du point de vue organisationnel et procédural. Les juridictions suisses de tous lesniveaux seraient obligées d'une part, d'appliquer le droit communautaire selon les in-dications d'interprétation uniforme données par la Cour de justice des CE et, d'autrepart, d'imposer la primauté du droit communautaire sur le droit national.

633 Les réformes en cours dans les domaines de la politique de sécurité, de l'armée et de la protection civile vont

engendrer des augmentations en personnel d'un ordre de grandeur encore inconnu. Il y a lieu en particulierde tenir compte de l'accentuation du caractère professionnel de l'armée. Ces augmentations ne sont pas desconséquences d'une adhésion à l'UE, car elles sont à envisager même sans adhésion; elles ont cependant del'importance dans le cadre d'une adhésion puisqu'elles sont destinées à renforcer la capacité de la Suisse àremplir ses obligations de politique étrangère et de sécurité commune dans le domaine des tâches dites de"Petersberg" (voir ch. 334.02).

634 L'application des dispositions de l'UE sur la sécurité sociale signifierait pour la Caisse suisse de compensa-tion à Genève un besoin supplémentaire considérable en personnel. La caisse est d'une part compétente pourle calcul et le paiement des prestations aux personnes vivant à l'étranger dans le domaine de l'assurancevieillesse et survivants et de l'assurance invalidité. La Caisse de compensation agit d'autre part en tantqu'autorité de liaison interétatique en relation avec les assurances étrangères correspondantes. D'ailleurs,l'entrée en vigueur de l'accord bilatéral sur la libre circulation des personnes, comme la reprise des obliga-tions EEE créeraient un besoin supplémentaire d'environ 150 emplois, de sorte que l'adhésion à l'UE seraitneutre du point de vue de l'augmentation en personnel.

Page 349: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 347 - Chapitre 3

"Qui nomme la Cour de justice européenne?" (J. S.-Z., canton de Thurgovie)La Cour de justice des CE est composée de quinze juges et de neuf avocats générauxqui sont nommés d'un commun accord pour six ans par les gouvernements des Etatsmembres. Ces magistrats se prononcent en toute indépendance. Chaque Etat membredésigne le candidat-juge de sa nationalité soumis à nomination.

La Cour de justice des CE n'est pas une cour constitutionnelle suprême européenne.Elle ne peut ni contrôler les jugements du Tribunal fédéral ni les casser. Les jugescommunautaires sont exclusivement compétents pour l'application et l'interprétationdu droit communautaire et les juges nationaux sont compétents pour son applicationcas par cas. Si une question d'interprétation du droit communautaire se pose devantune juridiction nationale, par exemple sur la portée de la libre prestation de services,les juridictions d'instance inférieure sont en droit de poser la question à la Cour dejustice des CE, et les juridictions de dernière instance sont tenues de le faire635. LaCour de justice des CE peut constater qu'une disposition nationale, par exemple unediscrimination des vendeurs étrangers sur le marché des télécommunications, est in-compatible avec le droit communautaire. Une telle décision lierait le tribunal suisse,qui devrait tirer les conséquences de cette "décision intérimaire" et les appliquer dansle cas d'espèce.

L'obligation de saisir la Cour de justice des CE disparaît lorsqu'il s'avère que la Cours'est déjà prononcée dans une autre procédure sur une question qui a la même portée,lorsque la question posée n'est pas décisive pour la solution du cas, lorsque pour laquestion posée il existe déjà une jurisprudence bien établie ou lorsque l'application dudroit communautaire est manifestement correcte.

Dans la plupart des Etats membres, l'adaptation de l'ordre juridique procédural pourcette forme de coopération entre juridictions s'est faite par la jurisprudence et la doc-trine sans révision législative. Le droit communautaire n'est toutefois pas sans inci-dence sur le droit procédural des Etats membres. En résumé, deux exigences décou-lent du droit communautaire: les règles nationales de procédure ne doivent pas avoird'effets discriminatoires sur le droit communautaire et ne doivent pas le rendre inef-fectif, c'est-à-dire que la mise en oeuvre du droit communautaire ne doit pas être pra-tiquement rendu impossible ou excessivement difficile. La Cour de justice des CE adéfini plusieurs principes procéduraux, par exemple le droit à une protection juridic-tionnelle effective, le droit à l'intervention d'un juge national indépendant face à l'ad-ministration, le droit à la célérité de la procédure nationale ou le droit d'avoir un ju-gement motivé. Ces principes procéduraux sont dans une large mesure les mêmes queles garanties que la Cour européenne des droits de l'homme a déduites des art. 6 et 13de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). La Suisse, qui a adhéréen 1974 à la CEDH, a progressivement adapté son droit procédural au plan cantonalet au plan national aux exigences de la Convention. La constitution fédérale réviséereconnaît expressément ces garanties procédurales.

635 Une procédure de renvoi préjudiciel dure en moyenne un peu plus de 20 mois.

Page 350: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 348 - Chapitre 3

De même, le principe constitutionnel (art. 113, al. 3 et 114bis, al. 3, cst.) restreignantle contrôle exercé par le Tribunal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances à l'en-contre des lois fédérales et des arrêtés fédéraux de portée générale devrait être réexa-miné en cas d'adhésion à l'UE. Le droit communautaire exige qu'une juridiction natio-nale rende inapplicable le droit national contraire au droit communautaire. La juridic-tion ne devrait plus par exemple appliquer une disposition relative au droit des étran-gers qui ne garantisse pas aux citoyens communautaires la libre circulation. Cetteobligation de droit communautaire pour la juridiction primerait l'obligation d'appli-quer l'art. 113, al. 3, ou l'art. 114 bis, al. 3, cst. La création d'une règle de primautédans la constitution n'est cependant pas indispensable, mais elle doit faire l'objet d'unexamen approfondi pour des raisons de transparence et de sécurité du droit636. Le trainde réformes concernant la justice prévoit d'autoriser, dans des cas d'espèce, le Tribu-nal fédéral et le Tribunal fédéral des assurances à examiner la constitutionnalité deslois fédérales et des arrêtés fédéraux de portée générale. La solution des conflits entrele droit international et le droit fédéral restera dans les attributions du tribunal.

"Quelles voies de recours aurait le peuple contre les décisions des autorités centralesbruxelloise?" (E. S.-H., canton de Berne)Les citoyens jouissent dans l'Union européenne, sur le plan supranational, d'uneprotection juridictionnelle supplémentaire vraisemblablement unique au monde.

La CE connaît un système de protection juridictionnelle de l'individu unique aumonde en comparaison avec d'autres accords internationaux. Les caractéristiques ty-piques du droit communautaire, en particulier le principe de la primauté et de l'effetdirect, ont donné à l'individu une place particulière (voir ch. 211, let. A.3). Ainsi,toute personne peut invoquer le droit communautaire devant une juridiction nationaledans un litige de droit privé ou de droit public.

Les recours en annulation, en carence et en indemnité permettent à toute personnephysique ou morale dans des cas où elle est directement et personnellement concernéede s'adresser directement à la Cour de justice des CE à Luxembourg. Dans la pratique,la procédure de renvoi préjudiciel a pris une grande importance bien qu'elle n'accordepas au particulier un accès direct à la Cour de justice des CE (pour une descriptiondétaillée des différentes procédures, voir ch. 221.02.6).

332.05 Résumé et mesures internes

Dans le domaine du fédéralisme, il faudrait renforcer la participation des cantons à laprise de décision sur toutes les questions les concernant qui font l'objet des travaux de

636 Voir la pratique de la Cour de justice des CE sur la primauté du droit communautaire: "En vertu du principe

de la primauté du droit communautaire, les dispositions du traité et les actes des institutions directement ap-plicables ont pour effet, dans leurs rapports avec le droit interne des Etats membres, non seulement de ren-dre inapplicable de plein droit, du fait même de leur entrée en vigueur, toute disposition contraire de la lé-gislation nationale existante, mais encore (...) d'empêcher la formation valable de nouveaux actes législatifsnationaux dans la mesure où ils seraient incompatibles avec des normes communautaires" (CJCE, arrêt du 9mars 1978, aff. 106/77 Simmenthal, Rec. 1978 p. 629 et ss; voir aussi l'arrêt de la CJCE du 15 juillet 1964,aff. 6/64 Costa/Enel, Rec. 1964, p. 1269).

Page 351: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 349 - Chapitre 3

l'UE. La Confédération et les cantons seraient amenés en cas d'adhésion à l'UE àexaminer ensemble et avec attention les mesures à adopter, au premier rang desquel-les figurent les mesures visant le renforcement de l'information des cantons, l'amélio-ration de la participation cantonale dans la préparation des décisions, ainsi que l'assu-rance d'une représentation appropriée des cantons dans certaines instances de l'UE.

La politique régionale du Conseil fédéral pourrait être poursuivie et serait, grâce à lacoopération au sein de l'UE, mieux adaptée aux besoins suisses que ce n'est actuelle-ment le cas.

L'adhésion à l'UE serait compatible avec notre constitution fédérale dont l'art. 89 a étérévisé en 1977 précisément pour prévoir qu'une telle décision soit approuvée à ladouble majorité du peuple et des cantons637.

Le fait que les quinze Etats membres de l'UE restent souverains est évident. En tantque membre de l'UE, la Suisse ferait de même en obtenant la possibilité d'influenceret de codécider des règles applicables sur une partie toujours plus grande de notrecontinent. Depuis plusieurs années déjà, compte tenu des paramètres respectifs de laSuisse et de l'UE qu'ils soient géographiques, démographiques, politiques ou écono-miques, la Suisse ne peut se soustraire à l'influence croissante des décisions de l'UE.L'adhésion renforcerait l'indépendance de la Suisse d’une part, en lui permettant departiciper à la prise des décisions qui l'affectent (en faisant alliance avec d'autres Etatsmembres selon les besoins et les circonstances) et, d'autre part, en lui faisant bénéfi-cier du poids massif de l'UE face aux Etats non-membres de l'UE qui chercheraient àfaire pression sur elle.

Si la Suisse faisait partie de l'UE, le peuple suisse et, le cas échéant, les cantons pour-raient continuer de faire usage des droits populaires (référendum, initiative) inscritsdans la constitution. Comme le Conseil des CE l'a souligné dans une réponse à unequestion parlementaire sur la compatibilité de référendums nationaux avec les trai-tés638, l'organisation de référendums relève exclusivement des différents systèmesconstitutionnels des Etats membres, étant rappelé que l'issue d'un référendum ne doitpas porter atteinte aux obligations découlant des traités constitutifs. Les études de plu-sieurs instituts universitaires suisses ont démontré que, dans l'hypothèse où la Suisseaurait fait partie de l'UE depuis 1993, le nombre de conflits effectifs entre le droitcommunautaire et les objets sujets ou soumis au référendum au plan fédéral ainsi queles objets des votations cantonales aurait été faible.

En 1991, dans le contexte des négociations sur l'EEE mais aussi dans la perspectived'une adhésion éventuelle à l'UE, le Parlement a adopté une disposition instaurant saparticipation dans le domaine de la politique extérieure639. Sur cette base, en casd'adhésion, le Conseil fédéral consulterait systématiquement les commissions de poli-

637 FF 1974 II 1133.638 Question écrite n° 147/87 du 9 avril 1987, JO n° C du 10 août 1987, p. 54.639 Art. 47bis a LREC, RS 171.11, approuvé lors du référendum du 27 septembre 1992.

Page 352: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 350 - Chapitre 3

tique extérieure avant de déterminer sa position en vue de l'adoption par le Conseil del'UE de décisions qui seraient directement applicables en droit suisse (règlements) ouqui entraîneraient une modification de la législation suisse (directives). Il conviendralà aussi d'examiner si les procédures existantes sont satisfaisantes. En tout cas, leConseil fédéral est d'avis que l'adhésion ne devrait pas entraîner une diminution durôle ni du Parlement ni des cantons dans notre système politique; l'importance queconservent les parlements nationaux dans les Etats membres lui montre que cela estpossible.

En ce qui concerne son organisation judiciaire, la Suisse resterait autonome en casd'adhésion à condition que son droit procédural ne porte pas atteinte au droit commu-nautaire et ne le rende pas juridiquement ineffectif.

De plus, la Suisse a été jusqu'à maintenant bien intégrée à la coopération européenneglobale en matière civile et pénale par la Conférence de La Haye et par le Conseil del'Europe. Dans le domaine régi par la Convention de Bruxelles sur la reconnaissanceet l'exécution des décisions judiciaires de 1968, la Convention parallèle de Luganogarantit jusqu'ici l'inclusion dans l'espace juridique en question. Si la coopération peutêtre poursuivie de la même manière que jusqu'à présent, la Suisse ne rencontrera pasde difficultés considérables dans ces domaines.

Le Conseil fédéral est d'avis qu'il serait nécessaire, en cas d'adhésion à l'UE, d'exami-ner si des mesures devraient être prises sur le plan constitutionnel dans les domainessuivants:

- Droits des cantons: il y aurait lieu d’examiner avec les cantons les mesures qui leurpermettraient, dès l'ouverture des négociations d'adhésion, de participer de façonappropriée, à l'élaboration de la politique à suivre par la Suisse lors de négocia-tions. Il faudrait en outre déterminer dans quelle mesure les cantons pourraientfaire valoir leur point de vue durant les négociations, en particulier dans les domai-nes relevant de leur compétence.

- Droits populaires et compétence du Parlement: il y aurait lieu dans le cadre d'unmessage sur l'adhésion à l'UE de proposer les moyens qui permettraient de réglerles conflits les plus manifestes entre le droit national et le droit communautaire. Ilfaudrait également examiner comment la participation de l'Assemblée fédérale àl'élaboration de la politique européenne que devrait suivre la Suisse lors de négo-ciations pourrait être assurée.

- Organisation de l'Etat: il conviendrait d'examiner l'organisation et le mode defonctionnement du Conseil fédéral et de l'administration fédérale.

333 Prospérité

Comme l’art. 2 de la constitution fédérale, l’art. 2 du Traité CE (voir ch. 211) formuleégalement un vaste objectif de prospérité. Tout d’abord par l’établissement d’un tarifdouanier commun et du libre échange à l’intérieur de la CE, puis par la création dumarché intérieur (libre circulation des personnes, des biens, des services et des capi-

Page 353: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 351 - Chapitre 3

taux) et récemment avec l’introduction de la monnaie unique, l’UE a développé unedynamique qui se répercute bien au-delà de l’espace européen. La création del’AELE, les cycles de négociations commerciales dans le cadre du GATT au planmondial, les autres accords de libre-échange régionaux comme l'ALENA peuvent êtrecompris comme une réaction des autres pays désirant faire bénéficier dans une mesuresemblable leurs populations et leurs économies des avantages d’un grand espace éco-nomique.

L’UE conservera sa dynamique également dans le futur. Elle perfectionnera le marchéintérieur (passage au principe du pays d’origine pour la TVA), elle intégrera de nou-veaux membres et elle traitera de questions économiques - qui sont en même tempsdes questions politiques primordiales (comme l’immigration en provenance de paystiers) - de plus en plus dans le cadre des structures de l’Union et plus seulement dansle cadre de la coopération intergouvernementale. L’UE jouera en outre un rôle déter-minant dans le prochain cycle de négociations au sein de l’OMC et exercera une in-fluence décisive dans les questions relatives au développement durable.

Lors de tous ces changements, l’UE a su largement éviter des évolutions abruptes,sources de crises. L’intégration n’a pas seulement servi à l’amélioration de la prospé-rité économique de la population européenne. Le renforcement des échanges écono-miques et la réduction des disparités entre les diverses régions apportent égalementune contribution importante à la stabilité politique du continent et même au-delà.

Si l’accroissement des échanges de biens et de services, de même que la libre circula-tion des personnes et du capital constituent une source de croissance de première im-portance, il est également vrai que les différents agents économiques ne participentpas tous dans la même mesure aux bénéfices qui en découlent. En particulier,l’obligation, liée à l’ouverture des marchés, de procéder dans une première phase àdes adaptations en partie douloureuses des structures économiques, est une crainte quiest répercutée, notamment, par les questions des citoyens. Ci-dessous, certaines con-séquences économiques de l’intégration sont décrites640, en partant de la situation ac-tuelle (janvier 1999). Afin d’éviter des spéculations, les explications qui suivent neprennent qu’insuffisamment en compte la dynamique mentionnée ci-dessus. Le faitque l’adhésion à l’UE ne signifie pas la simple conclusion d’un accord réglant pourune période définie les droits et obligations réciproques, mais emporte la participationà un projet dynamique, ne doit pas être oublié.

Le chapitre suivant, aborde la question de la libre circulation des personnes, qui faitégalement l’objet des accords sectoriels. Ensuite, les conséquences de l’adhésion surla croissance de l’économie sont examinées, avant de traiter des situations particuliè-res respectives de l’économie d’exportation, de l’agriculture et de la place financière.Enfin, un essai de présentation des répercussions des différents effets sur les ménages

640 Les affirmations reposent sur des clarifications de l’administration fédérale et de la BNS. Différentes contri-

butions qui répondent de manière plus complète à des questions soulevées dans ce chapitre sont publiées sé-parément. Des analyses macroéconomiques seront achevées ce printemps par des experts externes. Une listedes études en cours figure au ch. 11

Page 354: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 352 - Chapitre 3

est établi. Dans la deuxième partie du chapitre sur la prospérité, des questions de po-litique économique sont examinées, à savoir la question de l’abandon de la politiquemonétaire autonome, mais également celle des nouveaux défis dans la politique bud-gétaire. Des réflexions sur la transformation complexe du système fiscal qui seraitnécessaire en cas d’adhésion précèdent une évaluation finale.

333.01 Marché du travail en Suisse

"Serons-nous submergés par des étrangers en provenance de l’UE?" (W. H., cantond’Argovie)Non. La condition pour une autorisation de séjour est, également dans l’UE, lapreuve d’une activité. L’immigration en Suisse serait ainsi dans une large mesuredéterminée par la demande de main-d’oeuvre étrangère de l’économie suisse.

Dans l’UE, le séjour dans un pays est en principe lié à la preuve d’un emploi. Desexceptions à ce principe existent pour les membres d’une famille, les étudiants, lesrentiers, lesquels doivent toutefois prouver qu'ils sont au bénéfice de moyens finan-ciers suffisants.

Partant de ces dispositions, le nombre d’immigrants éventuels serait déterminé par lademande de main-d’oeuvre étrangère de l’économie suisse, de même que par le nom-bre de personnes à l’étranger à la recherche d’un emploi qui seraient disposées à ac-cepter les conditions de travail en Suisse. Dans le cas des ressortissants de l’UE, cechiffre devrait être faible, comme les réponses aux questions suivantes permettent dele démontrer.

Il est possible que, dans une première phase après l’introduction de la libre circulationdes personnes, l’immigration augmente quelque peu, notamment parce que les limita-tions pour les ressortissants de l’UE travaillant déjà en Suisse disparaîtraient. Cesderniers pourront alors changer de canton et/ou de branche, passer d’une place de tra-vail saisonnière à une place à l’année, quitter les zones frontalières, ou encore émigrerplus aisément en raison d’un retour facilité. Toutefois, dans la mesure où il ne seraitpas facile de repourvoir les emplois devenus vacants avec d'autres ressortissants del'UE, l'immigration temporairement renforcée dont il est question resterait plutôt mo-deste du point de vue quantitatif.

"Avec la libre circulation des personnes de l’UE, notre pays sera soumis à une fortepression d’immigration, même si cela est officiellement contesté" (H.D., canton deBerne)En raison du rapprochement des conditions de vie en Europe ainsi que de l’évolutionstagnante de la population au sein de l’UE, l’introduction de la libre circulation despersonnes ne devrait pas entraîner une immigration massive en provenance de l’UE.

Les expériences de l’UE montrent que l’introduction de la libre circulation des per-sonnes n’a conduit à aucun déplacement extraordinaire de population. Aujourd’hui,

Page 355: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 353 - Chapitre 3

seul en moyenne 1,5% de la population de l’UE vit dans un autre pays de l’UE641.L’élimination d’obstacles institutionnels aux déplacements ne suffit manifestementpas à déclencher des flux migratoires importants.

De plus, les dix dernières années ont montré qu’avec l’égalisation progressive desrevenus au sein de l’UE, la propension à l’émigration a diminué. Ainsi, l’économiesuisse a dû, dès la moitié des années 80, compter dans une proportion accrue sur de lamain-d’œuvre venant de l’extérieur de l’UE. La part des citoyens de l’UE et del’AELE (EEE) au total des étrangers actifs s’est abaissée, entre 1978 et 1997, de 86 à74% (graphique 1). En ce qui concerne les pays d’origine traditionnels de la main-d’œuvre étrangère en Suisse (Italie, Espagne), une émigration nette est observée de-puis quelques années et cette tendance ne devrait pas s’inverser en cas de libre circu-lation des personnes. L’émigration actuelle démontre qu’une égalisation complète desrevenus entre les pays n’est pas nécessaire pour que la pression migratoire disparaisse.

En plus du rapprochement des économies de l’UE, une autre raison plaide égalementpour une atténuation de la pression migratoire vers la Suisse: l’évolution de la popu-lation - outre l’évolution économique - dans les pays de l’UE s’est fortement harmo-nisée. Compte tenu des taux actuels de natalité, la croissance de la population se ré-duit surtout dans le sud de l’Europe, ce qui implique qu’il ne faut pas s’attendre, éga-lement pour des raisons démographiques, à une pression migratoire en provenance deces pays.

Les investissements directs et le commerce extérieur vont en outre toujours plus rem-placer les migrations de main-d’œuvre. L’harmonisation des régimes économiques enEurope a notamment pour conséquence que le capital est aujourd’hui plus mobile quele travail.

641 5,5 millions sur un total de 370 millions; voir le rapport du 3 juillet 1998 sur la communication de la Com-

mission sur le plan d’action pour la libre circulation des travailleurs (A4 - 0269/98).

Page 356: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 354 - Chapitre 3

Graphique 1

Employés étrangers en Suisse selon leur origine, 1978 à 1997

0

200

400

600

800

1’00019

78

1980

1982

1984

1986

1988

1990

1992

1994

1996

1997

Em

ploy

és é

tran

gers

(m

illie

rs)

UE/EEE Non-UE/EEE

Source: Office fédéral des étrangers

La libre circulation des personnes à l’intérieur de l’Union vaut seulement pour lesressortissants des quinze Etats membres de l’UE et les citoyens des trois pays del’EEE/AELE, mais n’est pas applicable aux étrangers originaires de pays tiers vivantdans l’EEE. De plus, l’UE accorde la priorité aux ressortissants de l’UE/EEE par rap-port aux étrangers venant de pays tiers ("priorité communautaire") pour l’accès aumarché du travail, la situation étant analogue à celle de notre pays qui accorde depuisde nombreuses années la priorité aux "indigènes". Si les accords bilatéraux sectorielsentrent en vigueur, les Suisses pourront à l’avenir bénéficier de cette priorité commu-nautaire; dans le cas contraire, les Suisses continueront d’être considérés comme desétrangers en provenance de pays tiers.

En ce qui concerne l’immigration de personnes actives d’autres pays que ceux del’EEE, une adhésion à l’UE leur rendrait l’accès en Suisse par le biais du statut deréfugié ou de requérant d’asile vraisemblablement plus difficile. En revanche, la ré-glementation de l’immigration en provenance de pays tiers pour des motifs relevantdu marché du travail resterait largement une affaire nationale, également après uneadhésion.

"En cas d’élargissement à l’Est et plus tard certainement aussi au Sud-Est, la librecirculation des personnes provoquerait des flux d’immigration de pays dont les res-sortissants considèrent certaines règles de leur religion comme étant au-dessus de no-tre propre législation" (W.F., canton des Grisons).Dans le cadre des négociations d’adhésion qui viennent de débuter avec des pays del’Est et du Sud-Est européen, il est veillé à ce que la libre circulation des personnesn’entre en vigueur que lorsque l’évolution économique dans ces pays sera suffisam-ment avancée afin qu’aucune pression importante à l’émigration n’existe. Pour cela,de longs délais de transition pourraient être nécessaires.

Page 357: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 355 - Chapitre 3

Des modifications dans les régions de recrutement pour les travailleurs étrangers peu-vent intervenir en relation avec l’intégration de nouveaux membres au sein de l’Unioneuropéenne. Après l’adhésion de ces pays, de longs délais de transition seront, selontoute vraisemblance, appliqués avant que ne soit réaslisée une totale libre circulationdes personnes. Pendant ces longues périodes transitoires, les niveaux de vie entrel’Est et l’Ouest de l’Europe vont, dans une large mesure, s’égaliser. De plus, l’Europede l’Est est particulièrement concernée par le problème du vieillissement de la popu-lation.

"La Suisse multiculturelle avec ses quatre langues nationales et son faible taux dechômage exerce sur les travailleurs étrangers un effet d’attraction beaucoup plus fortque les autres pays" (W.F. canton des Grisons)Diverses régions à l’intérieur de l’Union européenne connaissent des taux de chô-mage comparativement aussi bas que la Suisse. Malgré cela, les déplacements àl’intérieur de l’UE n’ont pas été très importants, même entre des régions proches surle plan culturel (Est et Ouest de l’Allemagne, marché du travail nordique) ou entredes pays d’origine et de destination traditionnellement étroitement liés (Portugal versla France).

Même un niveau relativement élevé des salaires ne semble pas déclencher des migra-tions d’une forte amplitude; cela surtout lorsque qu’à un niveau élevé des salaires cor-respond un niveau élevé des prix. Il convient donc de considérer les pouvoirs d’achatqui résultent des salaires. Le rapprochement des conditions de vie en Europe impliquede plus que de nouveaux pays deviennent des pays cibles de la migration. Si l’onpense au facteur de proximité culturelle, il convient de remarquer qu’à l’intérieurmême des pays de l’UE, de grandes différences de salaires existent toujours (nord etsud de l'Italie; anciens et nouveaux Länder allemands), sans que cela ait conduit à degrands flux migratoires.

"Est-ce que les chances de trouver un emploi pour la population active indigène nevont pas se réduire en cas d’adhésion et est-ce que le chômage ne risque pas des’élever au niveau européen?" (H.H. canton de Thurgovie, H. D., canton de Berne)Même pour les personnes peu qualifiées, les chances de trouver un emploi ne vontguère diminuer en raison de l'adhésion à l’UE. A long terme, tous les travailleursdevraient profiter de la compétitivité accrue de l’économie suisse.

Une crainte souvent exprimée est que le chômage en Suisse se rapprocherait du ni-veau de celui prévalant dans l’Union européenne en cas de libre circulation des per-sonnes. A l’intérieur de l’Union européenne et même à l’intérieur des Etats membres,le taux de chômage n’est toutefois pas partout identique642. Dans plusieurs régionsproche de la Suisse, le chômage se situe pratiquement à un taux aussi bas que dans

642 L’Espagne présente avec 22.3 % le taux le plus élevé de chômage des Etats membres de l’UE, le Luxem-

bourg, avec 3.2%, le taux le plus bas. Le niveau respectif des pays limitrophes de la Suisse est le suivant:Italie 11.9%, France 11.8%, Allemagne 9.3 % et Autriche 3.8 % (état: août 1998).

Page 358: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 356 - Chapitre 3

les cantons suisses voisins643. En conséquence, le chômage est plus une question dedynamique des différents espaces économiques que de frontières nationales.

En particulier les personnes peu qualifiées ont peur que leurs chances de trouver unemploi se détériorent en cas de libre circulation des personnes. Compte tenu de l’offreactuelle de main-d’œuvre peu qualifiée, déjà excédentaire en Suisse, la probabilitéque les entreprises suisses se déplacent à l’étranger pour recruter de la main-d’œuvrepeu qualifiée est faible. Il est toutefois important que dans le cadre de la prise des me-sures d’une politique active du marché du travail, l’on aide, par le biais d’unemeilleure qualification, les personnes domiciliées en Suisse à la recherche d’un em-ploi que ce soit en ce qui concerne les connaissances professionnelles ou par uneamélioration des connaissances linguistiques (voir ch. 221.02.2).

Il y a lieu de relever de manière générale que la Suisse, comparée à l'Europe, bénéfi-cie d’un marché du travail flexible. Sur le plan économique, cela constitue une condi-tion préalable essentielle à l’entrée dans une union monétaire où le taux de change, entant qu’instrument d’adaptation, fait défaut et où les déséquilibres doivent être com-pensés par des modifications de certains prix et salaires ainsi que par des change-ments affectant la population active.

Une comparaison des prestations des assurances sociales en Suisse et dans les paysmembres de l'UE ne fait pas penser qu'une force d'attraction supérieure à la moyenneémanerait de notre pays. Qui plus est, on ne peut faire valoir des prestations d'assu-rance sociale que lorsque les conditions donnant droit aux prestations sont rempliesselon le droit national en vigueur.

"Après l'obtention d'un diplôme universitaire, comment se présentent mes chances devoir ce dernier reconnu dans un pays de l'UE et qu’elles sont mes perspectives detrouver un emploi ?" (S.S., canton de Berne)Les diplômes et les certificats sont reconnus réciproquement au sein de l'UE. Con-trairement à la situation actuelle, les Suisses auraient, en cas d’adhésion à l’UE, lesmêmes chances sur le marché européen du travail que les ressortissants des pays del'UE.

Une adhésion à l'UE permettrait aux employés suisses d'acquérir à l'étranger des expé-riences professionnelles et ainsi d'améliorer leurs chances sur le marché du travail.

Depuis le 1er mai 1993, il existe en Suisse une libre circulation relativement largepour le personnel étranger jouissant d'un niveau élevé de qualifications, ceci seule-ment sur base unilatérale. Les Suisses ayant un niveau de qualifications équivalent

643 Les régions limitrophes de la Suisse présentent les taux de chômage suivants (état 1996; Source: Office

fédéral de l’économie et de l’emploi):- Baden-Würtemberg 5.5 % ; Bavière 5.3 %;- Voralberg 4.1 % ; Tirol 5.0 %;- Trentino Alto Adige 3.4% ; Val d’Aoste 5.2 % ; Lombardie 6.3 % ; Piémont 7.6 %;- Alsace 7.7% ; Franche-Comté 9.3% ; Rhône-alpes 10.6 %.

Page 359: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 357 - Chapitre 3

n'ont dès lors pas droit à la libre circulation en Europe. Bien qu’il existe des possibi-lités de transferts des cadres dans le cadre des accords OMC, les membres de la fa-mille des personnes transférées ne peuvent généralement pas exercer de profession,même s’ils désirent le faire dans un but de rapprochement social. La libre circulationdes personnes signifierait un changement positif avant tout pour les employés suisses,car la réciprocité serait acquise. Dans une économie globalisée, où les expériencesprofessionnelles acquises à l'étranger gagnent en valeur, les travailleurs suisses se-raient parmi les premiers gagnants.

Par ailleurs, la libre circulation des personnes augmenterait l’attractivité de la Suisseen tant que lieu de production: un bassin de recrutement plus large conduirait moinsrapidement, pour certaines professions, à des goulots d’étranglement susceptibles defreiner l’expansion des entreprises. Les simplifications administratives pourl’engagement de main-d’oeuvre en provenance de l’espace UE/AELE constitueraientun autre avantage pour les entrepreneurs. En ce qui concerne la protection des tra-vailleurs, il convient de mentionner que le droit communautaire autorise les paysmembres à prendre des mesures contre les abus sur le marché libre du travail (voir ch.333.05). Ces dispositions de protection ne peuvent toutefois pas faire de discrimina-tion entre la population indigène et les ressortissants des autres pays de l’UE.

La libéralisation des marchés au sein de l’UE accélérera aussi l’évolution structurelleen Suisse. A court terme, avec ou sans rapprochement avec l’UE, il y aura toujoursdes situations de déséquilibre sur le marché du travail. Cependant, à moyen et à longtermes, la compétitivité renforcée de l’économie suisse se répercutera positivementsur les chances des employés de trouver un emploi.

"Devons-nous nous laisser prescrire de naturaliser sur demande un détenteur de pa-piers étrangers ou sommes-nous, comme par le passé, légalement libres de lui attri-buer ou non le droit de citoyenneté?"(W.L., canton d’Argovie).Chaque pays de l’UE est libre de fixer ses conditions de naturalisation. La seule li-mitation réside dans le fait qu’il n’est pas possible de faire des discriminations entreles candidats des divers pays de l’UE.

Page 360: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 358 - Chapitre 3

333.02 Croissance économique

Différentes études ont cherché à évaluer l'impact global d'une intégration économiquesous la forme du marché unique, de l'EEE ou de l'adhésion à l'UE. L'étendue des gainsvarie selon les études, comme le montre le tableau suivant:

Tableau 6

Différentes estimations des bénéfices économiques d'une meilleure intégration(comparaison de niveaux; effets cumulés, exprimés en % du PIB)

Seulement le marché uniqueRapport Cecchini de 1988: ....................................................... entre 2.0 et 7.0%(1993-2002)

Rapport de l'université technique d'Athènes,commandé par la commission CE 1998: ................................. entre 1.1 et 1.5%(1992-1994)

Rapport indépendant de Venables&Smith(effets sur le bien-être pour différents pays): ........................... entre 0.4 et 3.2%(1993-2002)

Surtout l'EEE (y compris des réformes internes)Rapport Hauser pour la Suisse: ................................................ entre 4.0 et 6.0%(1993-2002)

Adhésion à l'UE après participation à l'EEERapport du WiFo pour l’Autriche: ............................................ environ 2.8%(1996-2000)

Mis à part l'étude Hauser, une telle étude n'a pas encore été effectuée en Suisse, maisdes résultats sont attendus d'ici le printemps 1999.

Il y a différents mécanismes par lesquels l'intégration économique peut générer unrésultat positif: il s'agit en premier lieu de profiter pleinement des avantages de mar-chés globalisés et de la collaboration internationale, ainsi que de garantir une concur-rence équitable. Les processus par lesquels l'intégration de marchés parvient alors àstimuler l'économie peuvent être explicitement nommés: il s'agit, pour les effets di-rects (au niveau des agents économiques), de l'existence d'effets purement sectoriels(par ex. standardisation), l'abaissement des barrières douanières et des barrières nontarifaires au commerce, les réductions des coûts de transports et bancaires, la stimula-tion du progrès technologique et de sa diffusion, l'augmentation de la variété des pro-duits, l'élargissement du potentiel de restructuration, l'amélioration des anticipationsdes entreprises face à la concurrence et, pour les effets indirects, par l'intermédiaire del'efficacité des marchés, de l'accroissement des investissements directs étrangers etdes flux de capitaux, du changement de la structure du commerce, de la convergencedes prix, de l'amélioration de la compétitivité, y compris sur les marchés publics, de laréalisation des économies d'échelle, de la meilleure allocation du travail par la librecirculation des personnes. Pour que l'intégration économique puisse délivrer ces effets

Page 361: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 359 - Chapitre 3

bénéfiques, il est indispensable que celle-ci ait lieu dans des conditions-cadres favo-rables.

On ne saurait sous-estimer les coûts qu'engendre toute frontière. Seul le simple arrêt àla frontière coûte de l'argent; les investissements en argent et en temps dus à des pres-criptions techniques différentes entre pays encore plus. L'impact de ces barrières nontarifaires au commerce a été évalué à la suite de la mise en place du marché unique.Ils varient de 0.9% (environ 170 millions de francs) de la valeur des exportations pourla chimie et l'énergie644, à au moins 2.5% pour les équipements de transports645

(environ 60 millions de francs), les télécommunications, les transports et les banques.Ces estimations montrent clairement que ce sont souvent les secteurs qui sont aujour-d'hui en pleine croissance qui souffrent de ces barrières non tarifaires. Une étude ef-fectuée pour la Commission européenne646 estime que le marché unique aurait crééune croissance de 20% à 30% du commerce intracommunautaire pour des secteursmanufacturiers. Pourtant les conséquences sur l'économie globale restent plus mo-destes. Ce sont d'abord les secteurs exportateurs qui bénéficient d'une adhésion etparticulièrement les PME exportatrices, car les barrières non tarifaires au commerceles affectent proportionnellement plus que les grandes entreprises qui disposent dedavantage d'options pour contourner et gérer ces coûts. Le meilleur fonctionnementdes marchés produit toute sorte d'effets secondaires, comme l'encouragement à l'amé-lioration des technologies et l'augmentation de la productivité. Si l'on ressent cettedynamisation de la croissance, les modèles économiques peuvent difficilement en te-nir compte faute de données suffisantes.

Il est fréquent que des craintes face à l'adhésion soient émises au regard du maintiende notre niveau de vie. Comme des études économiques le montrent, cette attituden'est pas justifiée. Il ne faut pas oublier que la convergence du niveau de vie des payseuropéens vers celui de la Suisse s'opère régulièrement, comme le montre le graphi-que suivant. En plus, les pays riches qui sont membres de l’UE n'ont observé aucunnivellement par le bas suite à leur adhésion.

644 Valeur des exportations Suisse - CE en 1997: 18’997,2 millions francs (produits de l’industrie chimique 17

844,6 millions; produits énergétiques 152,6 millions.645 Valeur des exportations Suisse - CE en 1997: 2 364.6 millions francs. Un calcul des coûts pour les autres

secteurs est difficile, étant donné que les bases statistiques diffèrent dans l’UE et en Suisse.646 Cambridge Econometrics, Employment, Trade and Labour Costs in Manufacturing, dans: The Single Market

Review, European Commission (editor), 1998, p. 83.

Page 362: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 360 - Chapitre 3

Graphique 2

Evolution du PIB/habitant de l'Europe des douze et des Pays-Bas par rapport àl'évolution en Suisse

50

60

70

80

90

100

110

1960

196219

6419

6619

6819

70197

219

7419

7619

7819

8019

8219

8419

8619

88199

019

9219

9419

96

Europe des 12Pays-Bas

Suisse

100=

PIB

/hab

. en

Sui

sse

Source: Eurostat. Les chiffres sont calculés avec des taux de change conformes à la parité des pouvoirsd'achats.

Mettre en question l'adhésion en raison du niveau de vie plus élevé de la Suisse n'apas de sens, car ce serait renoncer à des revenus substantiels sans changer quoi que cesoit à la convergence des niveaux de vie.

Cette affirmation est étayée par l'évolution économique des nouveaux Etats membresjuste après leur adhésion. Le graphique 3 montre que les nouveaux Etats membres ontconnu en moyenne une meilleure performance que le reste de l’UE dans les annéesqui ont suivi leur adhésion, alors qu'avant leur adhésion la situation était inverse.Après trois ans (doute trimestres), les nouveaux Etats membres ont en moyenne ac-cumulé 1,2% de PIB de croissance de plus que les Etats déjà membres de l'UE. Cer-tains pays ont considérablement et visiblement bénéficié de l'adhésion, tels que l'Ir-lande, le Portugal, la Finlande, l'Espagne, alors que d'autres pays connaissant quel-ques ajustements structurels avant l'adhésion, comme le Royaume-Uni et la Suède,ont vu leur situation se stabiliser. Une comparaison avec la Suisse n’est utile que demanière restreinte; il est certain que l'appartenance à l'UE ne garantirait pas à elleseule le succès économique, comme le cas de la Grèce pourrait l'indiquer, car souventdes réformes internes adéquates sont nécessaires pour pouvoir tirer pleinement partides bénéfices d'une plus grande ouverture. Le même graphique fait également ressor-tir la phase de stagnation en Suisse après le rejet de l'EEE - entré en vigueur le 1er

janvier 1994 (=100) - en raison partiellement de problèmes structurels.

Toutefois, juste après l'adhésion, une certaine désillusion est fréquente dans la popu-lation des nouveaux Etats membres. En effet, les gains économiques sous formed'augmentation des revenus et du PIB ne se font sentir que progressivement, alors queles coûts, qui pourraient se traduire pour la Suisse par exemple par une augmentationdes impôts pour financer la contribution nette au budget communautaire, se font sentir

Page 363: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 361 - Chapitre 3

très tôt647. Ainsi le bien-être moyen des ménages mesuré par le revenu réel disponiblen'augmente pas nécessairement immédiatement dès le premier trimestre. En cas demauvaise conjoncture mondiale au moment de l'adhésion, cette impression risqued'être renforcée, comme ce fut le cas au Royaume-Uni et au Danemark.

Graphique 3

Evolution moyenne du PIB des nouveaux Etats membres juste après leur adhé-sion

85

90

95

100

105

110

115

120

-4 -2 0 2 4 6 8 10 12 14 16

moyenne desnouveaux pays-membresmoyenne del’Europe (OCDE)

Suisse (100=94:1)

Trimestres après l‘adhésion

100=

PIB

au

mom

ent d

e l‘

adh

ésio

n

Source: OCDE MEI, calculs propres OFDE

Dès après l'adhésion, la Suisse se trouverait toutefois dans une situation spécifique quidifférerait de la plupart des autres nouveaux membres. Elle devrait augmenter sontaux de TVA plus fortement, transférer à la Communauté un montant net plus impor-tant et ajuster ses taux d'intérêt à un niveau plus élevé. Ces éléments risquent de ren-dre la phase de transition délicate.

Le chapitre suivant traite des nécessités d’adaptation dans les divers secteurs écono-miques. Ces nécessités provoqueront des coûts, principalement dans la phase initiale.Il est néanmoins parallèlement démontré quelles opportunités additionnelles de mar-ché s’offriront aux entrepreneurs dynamiques. Les effets de croissance à moyen et àlong terme présentés ci-dessous deviendront réalité si les entreprises ouvrent de ma-nière active de nouveaux marchés et ne cherchent pas à obtenir par la voie politiquedes compensations pour d'éventuelles pertes d’affaires.

Des réserves analogues doivent être émises à l’encontre de mesures internes qui pour-raient être prises pour compenser de présumées conséquences néfastes del’intégration, ainsi qu’à l’égard de la mise en oeuvre de directives isolées de l’UE qui,

647 Pour financer la contribution nette au budget communautaire et pour respecter les critères de Maastricht, des

restrictions budgétaires (baisse de certaines dépenses, augmentation d'impôts) ont été nécessaires en Autri-che juste après l'adhésion.

Page 364: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 362 - Chapitre 3

en ce qui concerne la capacité d’adaptation des marchés ainsi que les charges admi-nistratives et financières en découlant, pourraient plutôt déboucher sur un désavantageéconomique. Il serait néanmoins erroné de considérer le tissu réglementaire de l’UEcomme plus contraignant que la densité normative existant aujourd’hui en Suisse.D’importantes ouvertures des marchés ont en effet pu avoir lieu en Suisse ces dernierstemps, notamment sous la pression de l’ouverture des marchés respectifs dans l’UE.

333.03 Compétitivité de la place économique suisse

333.03.1 Economie tournée vers l’exportation

"Quelles seraient les conséquences de l’adhésion à l’UE pour la place économiquesuisse ?" M. W., canton de Fribourg)L’appartenance à l’UE et à l’Union monétaire permettrait à l’économie suisse delutter à armes égales avec la concurrence européenne en ce qui concerne des condi-tions-cadres extérieures aussi fondamentales que l’égalité d’accès au marché inté-rieur et la disparition des fluctuations de change envers l’Union monétaire.

Aujourd’hui, l’économie mondiale s’est globalisée et il y règne une vive concurrencepour attirer les investisseurs. En conséquence, il faut accorder une importance parti-culière à l’optimisation des conditions-cadres offertes par la politique économiqueextérieure, ceci surtout pour une économie fortement orientée vers l’exportation.

"Quelles sont les branches/entreprises dont l’existence est étroitement liée à l’UE ?Quels sont les inconvénients (qualitatifs et quantitatifs) dont il faut aujourd’huis’accommoder et dans quelle mesure la situation s’améliorerait-elle grâce à l’adhésionde la Suisse à l’UE?" (F.K., canton de Zurich)Les enquêtes réalisées à intervalles réguliers auprès des entreprises, par ex. dansl’industrie des machines, montrent que, depuis quelques années, l’activité des entre-prises interrogées est de plus en plus compliquée par divers tracas lors des contrôlesdouaniers et par des difficultés croissantes avec les autorités et les clients localisésdans l’UE. L’engagement et le transfert de main-d’oeuvre suisse dans les filiales sisesdans l’UE deviennent aussi toujours plus difficiles. Une adhésion à l’UE élimineraitces handicaps.

Alors que le marché intérieur de l’UE fonctionne de mieux en mieux, des inconvé-nients, même mineurs, prennent de plus en plus d’importance, en particulier lorsqu’ilss’accumulent par rapport à la situation que connaissent les entreprises produisant di-rectement dans l’UE. Un nombre croissant d’entreprises réagissent en adoptant desstratégies d’implantations ou d’acquisitions à l’étranger, lesquelles se font au détri-ment des investissements, de la production et de l’emploi en Suisse. Sont en particu-lier recherchés les partenariats avec des entreprises situées dans l’UE et/ou la déloca-lisation d’entreprises ou de certaines fonctions, notamment dans les pays limitrophes,l’Allemagne, l’Autriche, la France et l’Italie.

Page 365: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 363 - Chapitre 3

L’évolution des investissements directs reflète aussi la position particulière de laSuisse dans l’espace économique européen. Les Etats membres de l’UE - qu’ils soientde grande ou de petite taille, récemment arrivés ou membres de longue date - connais-sent, depuis le début des années 90, une accélération de leurs investissements directset ceci, dans les deux sens (propres investissements directs à l’étranger et investisse-ments étrangers dans le pays en question). La Suisse présente une toute autre imageau cours des années 90: alors que les investissements directs suisses à l’étranger sonten forte augmentation et se font de plus en plus à destination de l’Europe, les investis-sements étrangers en Suisse sont en stagnation continue648. Cette stagnation dans lesannées 90 est certes à mettre avant tout sur le compte de la faiblesse conjoncturelle enSuisse. Les investissements directs étrangers en Suisse ont en effet nettement aug-menté en 1997, dans le contexte de la reprise économique.

Graphique 4Investissements directs étrangers, flux de capitaux en Suisse(importations et exportations de capitaux, en milliards de francs)

L’évolution asymétrique des investissements directs est à imputer, entre autres, auxprogrès de l’intégration européenne. Ainsi, les préparatifs en vue de l’achèvement dumarché intérieur de la CE ont provoqué, dans des économies comparables à la Suissecomme la Belgique et les Pays-Bas, mais aussi en France, une croissance continue etvigoureuse des investissements directs et des flux de capitaux dans les deux sens. De

648 Voir aussi M. Baldi, Rechtsfolgen einer Mitgliedschaft in der Europäischen Union für schweizerische Di-

rektinvestitionen, dans: Cottier/ Kopše, L’adhésion de la Suisse à l’Union européenne - enjeux et consé-quences, Zurich 1998, pp.713 et ss, avec autres renvois.

Page 366: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 364 - Chapitre 3

même, l’EEE et la perspective de négociations d’adhésion à l’UE ont aussi donné, cesdernières années, un coup d’accélérateur non négligeable sur le plan macro-économique aux investissements directs étrangers dans les nouveaux Etats membresde l’UE, la Finlande et surtout l’Autriche. Dans les deux cas, les investisseurs de paysnon-membres de l’UE, avant tout américains et suisses, ont été particulièrement ac-tifs. En revanche, des facteurs comme la position de la Suisse en Europe, les problè-mes structurels du marché domestique, l’incertitude du taux de change et la persis-tance des barrières douanières ont nui à la Suisse quant à l'implantation d'entreprisesque ce soit en qualité de siège principal de multinationales, de site de fabrication deproduits très sensibles aux prix ou de lieu d’entreposage et de distribution de mar-chandises.

"De quel pourcentage la capacité concurrentielle des exportations va-t-elles’améliorer et les prix des importations vont-ils baisser grâce à la disparition desdouanes ?" (E.F., canton de Thurgovie)Les exportations sont aussi un secteur où la performance de la Suisse est nettementrestée à la traîne ces dernières années. Dans les années 80 - à tout le moins jusqu’en1983 - le volume des exportations suisses de marchandises s’est accru à un rythmecomparable à celui de la moyenne des Etats membres de l’UE. En revanche, dans lesannées 90, la croissance de nos exportations a décroché par rapport à celle de l’UE.

Alors que dès 1993-1994, aussi bien les exportations de l’UE dans son ensemble quele volume des exportations des principaux Etats membres de l’UE se sont sensible-ment accélérés dans le sillage du marché intérieur, et ceci malgré une conjoncture gé-néralement faible, la croissance des exportations suisses s’est en revanche ralentie.Ainsi, dans la plupart des pays européens, les exportations de marchandises réellesont augmenté dans le courant des années 90 au moins deux fois plus et, dans le cas del’Autriche, même quelque trois fois plus que les exportations suisses.

Page 367: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 365 - Chapitre 3

Graphique 5Evolution des exportations réelles de marchandises, 1980 à 1997(Suisse et quelques Etats membres de l’UE en comparaison, base 1990=100)

Les causes traditionnellement avancées (orientation régionale et structure des expor-tations divergentes, goulets d’étranglement au niveau des livraisons) n’expliquent quepartiellement la performance décevante des exportations suisses dans les années 90. Ilfaut aussi tenir compte, en plus de la surévaluation par intermittence du franc suisse,de la situation sur le plan de la politique d’intégration. Les enquêtes menées auprèsdes entreprises le confirment, comme par ex. dans le secteur des machines.

333.03.2 Agriculture

"Quel serait l’impact d’une éventuelle adhésion sur l’agriculture suisse?" (F. H., can-ton de Berne)."Qu’en serait-il de la viabilité de l’agriculture?" (E. F., canton de Thurgovie)Même en cas d’adhésion à l’UE, nous continuerions à avoir une agriculture en Suissequi offrirait à des prix concurrentiels des produits et des services conformes aux be-soins du marché et qui contribuerait comme aujourd’hui au maintien des bases del’existence et à l’entretien du paysage rural. Une adhésion à l’UE constituerait il estvrai un grand défi pour l’agriculture suisse. Des mesures transitoires seraient dèslors nécessaires pour faciliter le processus d’adaptation.

Une adhésion renforcerait la pression économique sur l’agriculture de notre pays. Lesprix à la production seraient déterminés par les marchés de l’UE. Ils sont plus bas queles prix pratiqués en Suisse et pourraient encore baisser dans le cadre de l’Agenda

Page 368: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 366 - Chapitre 3

2000649. L’Agenda 2000 cherche notamment à tenir compte du nouveau cycle de né-gociations de l’OMC et de l’adhésion de nouveaux Etats à l’UE. Le produit des ven-tes diminuerait en conséquence. La baisse des coûts et les paiements directs ne pour-raient que partiellement compenser ces pertes. L’agriculture suisse devrait donc deve-nir beaucoup plus concurrentielle. Ceux qui souhaiteraient vivre de l’agriculture de-vraient produire davantage de lait, de céréales ou de viande que ne le font aujourd’huiles exploitations moyennes. Les propriétaires d’exploitations et les employés agricolesqui n’auraient pas la possibilité de suivre cette voie tout en souhaitant rester actifsdans l’agriculture auraient, en Suisse, de bonnes perspectives d’exercer des activitésaccessoires dans l’entreprise même ou en dehors de celle-ci. La forme du processusd’adaptation dépendra essentiellement de l’évolution globale de l’économie650.

Les secteurs en aval et en amont subiraient, eux aussi, une pression économique ac-crue. C’est surtout dans l’industrie de transformation que le changement serait le plusradical en cas d'adhésion à l’UE. Pour assurer ses débouchés, ce secteur de l'industriedevrait en effet offrir ses produits aux mêmes conditions que ses concurrents euro-péens. Des adaptations structurelles s’imposeraient dans de nombreux domaines pourgarantir la compétitivité nécessaire.

Mais le grand marché européen offre aussi de bonnes perspectives. Une agriculture etune industrie de transformation compétitives permettraient d’y écouler des produitssuisses avec succès. Cela permettrait de maintenir l’agriculture en tant que secteurproductif. Pour ce qui est du commerce des denrées alimentaires, on pourraits’attendre à une internationalisation plus poussée qu’aujourd’hui. D’une part, desfournisseurs étrangers pourraient, par voie d’acquisitions, accéder au marché suissedes produits alimentaires et à ses consommateurs qui sont dotés d’un solide pouvoird’achat; d’autre part, les chances d’une participation et d’une coopération transfron-talières s’en trouveraient améliorées pour les entreprises suisses. Si notre pays deve-nait membre de l’UE, les consommateurs pourraient acheter des denrées alimentairesà meilleur compte. L’exemple de l’Autriche montre que la baisse des prix correspon-drait à peu près à celle des prix à la production.

Le niveau écologique de l’agriculture suisse ne pâtirait pas d’une adhésion à l’UE. Laprotection de l’environnement et du bien-être des animaux ne manquerait pas de jouerun rôle important pour la vente des produits suisses en Europe. Dans le contexte del’Agenda 2000, l’UE prévoit du reste un renforcement des aspects agri-environnementaux. Les Etats devraient disposer notamment d’une plus grande lati-tude financière pour rémunérer les prestations d’ordre écologique.

649 Voir ch. 253650 Voir P. Rieder, Auswirkungen eines Beitritts zur Europäischen Union auf die schweizerische Agrarpolitik

und Landwirtschaft, dans: Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et consé-quences, Zurich 1998, 1149 et ss, avec autres renvois.

Page 369: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 367 - Chapitre 3

333.04 Place financière

En cas d’abandon du franc suisse au profit de l'euro, les risques de change actuelsdisparaîtraient en ce qui concerne le commerce avec l'Union économique et monétaire(UEM). Les entreprises disposeraient de bases plus fiables pour effectuer leurs plani-fications et feraient des économies lors de l'utilisation de monnaies étrangères651.Dans le secteur bancaire, les suppressions des opérations liées à l'arbitrage des mon-naies seraient compensées par de nouveaux travaux dans l'arbitrage des crédits et parla conquête d'une position forte sur les nouveaux marchés.

L'adhésion à l'UE éliminerait les barrières qui limitent actuellement l'accès aux mar-chés. La place financière suisse serait intégrée à la place européenne. La liberté decréer des filiales faciliterait l'accès des établissements suisses au marché. En ce quiconcerne les emplois en Suisse, l'amélioration des possibilités en matière de servicestransfrontières (passeport européen pour les fournisseurs suisses, au sens de la direc-tive CE sur les transactions en papiers-valeurs, par ex.) jouerait un rôle important.D'autres atouts des prestataires locaux seraient toujours appréciés (rapidité et fiabilitédu traitement des affaires en Suisse, par ex.).

La disparition, à l'échelle européenne, du principe de l’ancrage652 pour les émissionsd'emprunts affecterait certaines affaires traitées jusqu'ici en Suisse (emprunts exté-rieurs); mais les établissements domiciliés en Suisse auraient en revanche la possibi-lité de lancer des emprunts en euros à leur domicile actuel et de s'ouvrir ainsi l'im-portant marché des emprunts en euros. Il y a là un secteur d'affaires potentielles quicompenserait d'éventuelles pertes sur le marché des emprunts extérieurs en francssuisses (voir tableau ci-dessous). Ce potentiel ne pourrait cependant être exploité quesi les modifications proposées du droit de timbre étaient réalisées simultanément.

Tableau 7

Marché des emprunts cotés en bourse (1997, en milliards de dollars US)

Suisse UEM USA

Secteur privé 128 2 136 4 871

Secteur public 55 3 486 7 251

L'adoption de l'euro comme principale monnaie de la zone européenne aboutira à unetransparence accrue des coûts et des marges et assurera un surcroît de liquidités surles marchés financiers. Les clients et les investisseurs en seront les premiers bénéfi-ciaires. Pour les fournisseurs de services financiers, la compression des marges signi-

651 L'estimation quantitative de ces effets a été effectuée par la Commission européenne dans l'ouvrage "Un

marché, une monnaie", voir Commission européenne (DG II): "Un marché, une monnaie", Economie euro-péenne cahier 44, octobre 1990.

652 Aujourd’hui, les emprunts en francs suisses ne peuvent être émis que par une banque responsable ou uncourtier dont le siège commercial est en Suisse ou au Liechtenstein (= principe de l’ancrage).

Page 370: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 368 - Chapitre 3

fie qu'ils se verront obligés de poursuivre leurs rationalisations et restructurations(fusions). Sur ce plan, et quel que soit le scénario d'intégration retenu, les financierssuisses se trouveront dans une situation favorable, étant donné qu'ils doivent, en com-paraison internationale, déjà couvrir leurs coûts avec une marge relativement bassedans les affaires de crédit. Sur le marché relativement bas de l'euro, les tentativesd'élargir ces marges se heurteraient sans doute à de plus grandes difficultés653.

Grafique 6

Origine des produits dans le secteur bancaire suisse

Source: BNS: Les Banques en Suisse 1997, tableau 40, calculs propres

"Le secret bancaire suisse continuera-t-il à être garanti?"(W. P., canton de Zurich)L'adhésion de la Suisse à l'UE n'affecterait pas directement le secret bancaire. Il n'estpas exclu, cependant, que les pressions augmentent pour que la Suisse l'assouplisse.

La question du statut du secret bancaire dans l’UE est importante, puisqu’elle joue ungrand rôle dans la gestion des fortunes privées. La part de ce secteur dans le PIBsuisse est d'environ 4%. D’un point de vue strictement statistique, il occupe donc lemême rang que l'agriculture. Et, tout comme cette dernière, il a des retombées sur denombreuses autres branches.

Il convient de relever d'abord qu'au sein de l'UE il n'existe actuellement pas de dispo-sitions visant à interdire ou à supprimer le secret bancaire. Le Luxembourg et l'Autri-che, qui sont membres de l'UE, connaissent aussi un secret bancaire qui va même, àcertains égards, plus loin que le secret bancaire suisse. Aujourd'hui déjà, l'UE et sesEtats membres exercent certaines pressions sur la Suisse en matière d'évasion fiscaleet d'assistance administrative dans le domaine fiscal. Il est incontestable que ces pres-sions augmenteront, comme cela est le cas à l'égard du Luxembourg. La question quise pose est de savoir si cette évolution suivrait un cours différent selon que la Suisse

653 En ce qui concerne les effets des taux d'intérêt dans le secteur bancaire, voir ch. 333.05.

36%

3%

3%14%10%

34%

Solde des intérêts (36%)

Emissions (3%)

Produits dérivés (3%)

Devises (14%)

autres produits (10%)

Gestion de fortunes (34%)

Page 371: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 369 - Chapitre 3

adhère ou non à l'UE. Des efforts d’harmonisation analogues sont d'ailleurs entreprisau sein de l'OCDE et par le groupe des sept principaux pays industrialisés (G-7).

333.05 Prix, salaires, loyers

L'intensification d'une saine concurrence a pour conséquence anticipée une conver-gence des prix. Une étude de la Commission européenne654 a testé cette hypothèse.Les résultats montrent que dans la quasi-totalité des branches on peut observer uneconvergence lente. Cette convergence s'opère surtout pour les biens faisant l'objetd'un commerce international.

Pour la Suisse, le niveau général des prix est très supérieur à celui de l'Union, ce quinuit à la compétitivité et réduit le niveau de vie, comme le montre les estimationsd'Eurostat655:

Tableau 8

Niveau des prix en Suisse en comparaison avec le niveau des prix de l’UE,groupe de produits choisis (UE 15 = 100), valeurs pour 1996

La Suisse est, comparée à la moyenne de l’UE, jusqu’à ...% plus chère:

<= 0% tabac, moyens de transport personnel, huile de chauffage et électricité ;

<= 25% boissons, habillement, poste et téléphone, équipements de loisirs, meubles ;

<= 50% nourriture, souliers, appareils ménagers, loisirs et prestations de servicesculturels, livres et journaux, dépenses de formation, restauration, exploita-tion de véhicules;

> 50% loyers, dépenses de santé, transports publics.

En cas d'adhésion, on peut anticiper, à moyen terme, une convergence des prix pourles équipements domestiques, ainsi que pour les produits agricoles par suite de labaisse des prix à la production. Toutefois les loyers, la construction de logements etles services publics resteraient chers en comparaison internationale, car la concur-rence internationale n'y joue pas un grand rôle. Pour rendre plus compétitive l'écono-mie suisse et augmenter son taux de croissance, des réformes internes, indépendantesd'une adhésion, devraient être poursuivies. Le secteur immobilier a déjà des prix trèsélevés en comparaison internationale. En cas d'adhésion à l'UEM, en raison de l'aug-mentation prévisible des taux d'intérêt, il existerait pour ce secteur des risques d'unenouvelle détérioration.

654 DRI Europe Ltd, Price Competition and Price Convergence, dans: The Single Market Review, European

Commission (editor), 1997.655 Résultats provisoires, non publiés. Le calcul est effectué au niveau de la consommation finale pour les mé-

nages privés. Les prix comprennent ainsi la TVA, qui est largement inférieure en Suisse.

Page 372: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 370 - Chapitre 3

"Comment et pourquoi une adhésion à l’UE influencerait-elle l’évolution des salaireset des prix?" (M.W., canton de Fribourg)"Est-ce que nous ne devrons pas réduire les salaires en Suisse pour rester compéti-tifs?" (E. H., canton du Valais)Les prix et les salaires devraient initialement plutôt baisser après une adhésion àl’UE. Les salaires des personnes peu qualifiées ne seront guère affectés. En revanche,il est plus probable que la croissance des salaires de certains groupes de personnesayant de bonnes qualifications se ralentisse en raison d’une atténuation des goulotsd’étranglement sur le marché du travail. A long terme, tous les travailleurs vont bé-néficier de l’effet positif attendu sur la croissance.

Pour les raisons susmentionnées, il ne faudrait pas s’attendre à un élargissement signi-ficatif de l’offre de travail de la part des personnes peu qualifiées en provenance despays de l’UE656. La pression sur les salaires pour les personnes peu qualifiées devraitplutôt découler du danger de délocalisation de places de travail à l’étranger. Ce dan-ger peut être atténué grâce à une adhésion à l’UE. En cas de tentative d’éviction destravailleurs indigènes par des travailleurs ne provenant pas de la zone communau-taire657 et disposés à accepter des salaires plus bas, la Suisse peut prévoir des mesurespour lutter contre une sous-enchère salariale. Pour les travailleurs qualifiés, une pres-sion sur les salaires serait peu probable, car ces derniers sont également recherchésdans les pays voisins et perçoivent des salaires élevés. Des augmentations de salairesextrêmes pour certaines catégories professionnelles particulières, qui ont résultés parle passé d’une pénurie sur le marché du travail, devraient être moins fréquentes àl’avenir.

En ce qui concerne les salaires en général, on n'observe guère de convergence vers lebas en Europe. Les salaires réels ont tendance à converger vers le haut avec l'évolu-tion de la productivité. Une adaptation intersectorielle des salaires vers le bas n'estque peu dépendante de l'adhésion. Si un tel phénomène se produit, c'est surtout enraison d'une inadaptation, surtout sur les marchés domestiques, de la relation salaireréel/productivité. Un retour vers un ratio plus favorable est donc inévitable avec ousans adhésion, si la Suisse veut réaliser un retour structurel vers la croissance. Uneadhésion ne pourrait que faciliter et raccourcir l'ajustement sans en changer la taille.

Le rapprochement des taux d’intérêt suisse au niveau européen concernerait égale-ment les taux d’intérêt hypothécaires. La répercussion de la hausse des taux d’intérêthypothécaires sur les locataires dépendrait de la situation sur le marché ainsi que de lasurveillance des loyers. Durant la période où le rapprochement des taux d’intérêt suis-ses aux niveaux européens interviendrait, la tendance suivie par les taux d’intérêt in-digènes en général (hausse, baisse) jouera un rôle. Ces multiples considérations qua-litatives ne se laissent pas aisément traduire en termes quantitatifs.En somme, pour les ménages, l'adhésion à l'UE entraînerait des changements autantdans la structure des prix que des revenus. Les prix agricoles baisseraient certes im- 656 Y compris l’immigration vraisemblablement quantitativement très limitée de ressortissants des pays de

l’EEE non-membres de l’UE (main-d’oeuvre du Liechtenstein, d’Islande et de Norvège).657 Y compris d'Etats participant à l'EEE, mais non-membres de l'UE (Islande, Liechtenstein, Norvège).

Page 373: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 371 - Chapitre 3

médiatement, mais durant la phase de transition l'augmentation de la TVA entraîneraitune surcharge pour le panier de la ménagère. Si le cadre législatif actuel reste lemême, les loyers risquent aussi d'être mis sous pression à cause de la hausse des tauxd'intérêt, bien que la plus grande partie de l'adaptation des intérêts aurait déjà eu lieuavant l'adhésion. Dans le long terme, ces renchérissements devraient être plus quecompensés par l'augmentation des revenus et des opportunités d'emploi dues à unemeilleure productivité et par les effets stabilisateurs des marchés pour les produitssoumis à une concurrence internationale, mais aussi pour les biens immobiliers.

333.06 Union monétaire et taux d’intérêts

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse devrait en principe participer à l'Union monétaireet adopter l'euro. Une période transitoire précédant la pleine participation à l'Unionmonétaire serait objet de la négociation d'adhésion. Durant la période de transition, leseffets sur le taux de change et le taux de l'intérêt se feraient déjà sentir. En fait, ils’agit aujourd’hui déjà - dans le cadre de l’intégration monétaire en Europe – d’éviterà l’économie des coûts supplémentaires, notamment des risques liés aux variations dutaux de change, comme cela a été le cas sur le plan interne après la constitution del’Etat fédéral suisse. Vue sous cet angle, la participation de la Suisse à l'Union moné-taire apparaîtrait comme bénéfique.

"Le franc est la monnaie la plus stable du monde, l’euro est incertain."(de: W. Futterknecht: Die EU durchleuchtet, Radika Verlag, Stans)Mener une politique monétaire indépendante permet en effet aux pays d’une certaineimportance de déterminer le taux d’inflation à l’intérieur de leurs frontières. Dans lecadre de l’Union monétaire, les décisions relèvent du conseil de la Banque centraleeuropéenne instituée à Francfort à la fin de l’année 1998. De ce point de vue la par-ticipation de la Suisse à l’Union monétaire est entachée d'incertitude. En tous les cas,la perte de l’autonomie monétaire suisse aurait pour conséquence de rapprocher leniveau actuel des taux d’intérêt, relativement bas, de celui des taux pratiqués au seinde l’Union européenne.

La Banque nationale perdrait son autonomie dans la conduite de la politique moné-taire. Elle se verrait ainsi privée de la possibilité d’adapter le niveau des taux d’intérêtde la Suisse aux conditions économiques. Elle participerait en revanche à la détermi-nation de la politique monétaire pour l'ensemble de la zone euro au sein du Systèmeeuropéen de banques centrales. La disparition des fluctuations de change du franc parrapport à l'euro supprimerait un instrument permettant l'ajustement de l'économiesuisse aux chocs qui lui sont spécifiques. Les fluctuations du taux de change sontthéoriquement utiles lorsque les pays témoignent d'évolutions économiquement diver-gentes. Cependant, les études réalisées jusqu'à présent tendent à montrer que l'évolu-tion économique en Suisse est relativement proche de celle de nos pays voisins.L'avantage de la participation à l'Union monétaire tient à ce que les prix des produitsexportés par la Suisse ne connaîtraient plus subitement des périodes de renchérisse-ment exagéré comme cela a pu parfois être le cas dans le passé. Il paraît raisonnable

Page 374: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 372 - Chapitre 3

de penser que la disparition de l'incertitude concernant l’évolution du taux de changedevrait favoriser les échanges commerciaux et les investissements directs658.

L'inflation au sein de l'Union monétaire dépendra notamment de l'attitude du Systèmeeuropéen de banques centrales face au risque d'inflation. Cette attitude est encore in-connue. Les conditions institutionnelles sont cependant favorables à cet égard. L'atti-tude face au risque d'inflation devrait donc être raisonnable si l'on se fonde sur lemandat du Système européen de banques centrales - qui accorde la priorité à la stabi-lité des prix - sur la forte indépendance de ce Système et sur les résultats récents enmatière d'inflation des pays membres de la future zone euro. Si le Système européende banques centrales parvient à maintenir un taux d'inflation bas, les taux d'intérêtdans la zone euro pourraient encore baisser.

"Quel sera l'effet de l'adoption de l'euro sur les taux d'intérêt?" (K. B., canton du Va-lais)En cas de participation à l'Union monétaire, les taux d'intérêt en Suisse se rappro-cheront des taux d'intérêt prévalant dans la zone euro. Vue sous cet angle, la partici-pation de la Suisse à l'Union monétaire est source de coûts. La question de savoir sil’ajustement des intérêts portera encore à conséquence après une période transitoirede plusieurs années reste ouverte. Il s’agit également de déterminer dans quelle me-sure l’îlot qu’est la Suisse en matière de taux d’intérêt pourrait se maintenir au casoù notre pays n’adhérerait pas à l’Union monétaire.

658 Voir Ph. Gugler/D. Meuwly, Adhésion de la Suisse à l'Union européenne: les enjeux sous l'angle de la poli-

tique monétaire, dans: Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquen-ces, Zurich 1998, 737 et ss, avec d’autres renvois.

Page 375: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 373 - Chapitre 3

Graphique 7Comparaison des taux d'intérêt à long terme en Allemagne et en Suisse (en %)

0

2

4

6

8

10

121

97

2

19

74

19

75

19

77

19

78

19

80

19

81

19

83

19

84

19

86

19

87

19

89

199

01

99

2

19

93

19

95

19

96

19

98

0

2

4

6

8

10

12

Différentieldes tauxd'intérêt

Taux d'intérêten Suisse

Taux d'intérêten allemagne

Source: BNS: Cahiers statistiques mensuels.

Les taux d'intérêt à long terme sont en Suisse inférieurs aux taux à long terme despays de la zone euro. Le graphique 7 retrace à titre d'exemple l'évolution depuis 1972des taux d'intérêt à long terme en Allemagne et en Suisse, ainsi que celle de leur écartqui tend à se réduire. Le rapprochement des taux d'intérêt conduira en principe à unehausse des taux d'intérêt en Suisse. Celle-là pourrait cependant être atténuée si lestaux d'intérêt dans la zone euro venaient à baisser simultanément. L'évolution des tauxd'intérêt dans la zone euro n'étant pas prévisible, l'amplitude de la hausse des taux enSuisse n'est par conséquent pas prévisible non plus. L'écart des taux d'intérêt qui sub-sisterait après l'adhésion devrait être dû essentiellement à des différences de bonité, àl'instar de celles qui existent aujourd'hui, par exemple, entre les divers cantons suis-ses659.

La hausse des taux d'intérêt accroîtrait le coût des investissements. A court terme, elleexercerait un effet négatif sur la croissance économique et sur l’emploi. Cet effet né-gatif ne devrait pas être ressenti si, durant cette phase, une baisse des taux d’intérêtsdans toute l’Europe compensait largement la différence, prévenant une hausse du tauxd’intérêt en Suisse. A long terme, elle diminuerait l’intensité en capital de l'appareil

659 La prime de risque peut également contenir une composante spécifique à chaque pays, pouvant provenir de

divers mécanismes de mise en oeuvre juridique. De plus, l’intérêt dépend de l’évolution du marché descréances considérées et détermine jusqu’à quel point un placement permet une diversification des risques.

Page 376: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 374 - Chapitre 3

de production. Dans cette situation, le plein emploi sur le marché du travail ne peutêtre atteint que si les salaires réels baissent. Sans une certaine flexibilité du marché dutravail, la hausse des taux d’intérêt entraînerait à court et à long terme une augmenta-tion du chômage.

La hausse des taux d'intérêt conduirait aussi à une redistribution du revenu en Suisseen faveur des épargnants et des créanciers. Les débiteurs, autorités publiques et pro-priétaires d'immeubles (dettes hypothécaires), devraient faire face à une augmentationde la charge résultant du service de leur dette. La hausse des taux d'intérêt exerceraitcependant à court terme d'autres effets. Les créanciers subiraient dans un premiertemps une perte sur le prix de vente de leurs avoirs rémunérés à un taux d'intérêt fixe.Dans la mesure où les débiteurs ont une dette fondée sur des instruments à taux varia-ble, l'augmentation de la charge de la dette se fait rapidement sentir. Des conséquen-ces négatives pour le système bancaire et financier pourraient en résulter. Elles se-raient d'autant plus importantes si la situation financière des débiteurs était précaire etsi la situation conjoncturelle était mauvaise. La hausse des taux d'intérêt n'affecteraitpas uniformément les diverses branches économiques. La branche de la constructionrisquerait d'être particulièrement touchée.

333.07 Politique budgétaire

L'adhésion à l'UE et à l'Union monétaire aurait diverses conséquences sur la politiquebudgétaire660, conséquences qui peuvent être résumées en trois formules.

- La hausse du taux de TVA entraînerait la réforme de notre système fiscal.

- Les critères de Maastricht (voir ch. 222.01.1) concernent l'ensemble des budgetspublics et des assurances sociales. L'adhésion à l'UE soulèverait donc des questionsde coordination des politiques budgétaires en Suisse.

- Enfin, la Suisse appartiendrait au groupe des pays contributeurs nets de l'UE (voirch. 251). Dans ce contexte, la question se pose de l'impact de ces contributionsnettes sur la croissance et l'emploi.

Les problèmes consécutifs au relèvement de la TVA suisse faisant l'objet du ch.333.08, seules les deux dernières questions ci-dessus seront abordées ici.

Pour ce qui est de la nécessité de coordonner les politiques budgétaires en Suisse, ils'agit en partie de questions techniques. Mais il y a aussi des aspects politiques, quiconcernent aussi bien la politique économique que le fédéralisme.

Les critères de Maastricht comprennent des plafonds. Le Pacte de stabilité prévoit dessanctions pour les Etats membres qui ne les respecteraient pas. Ces plafonds concer-nent les budgets publics et la plupart des assurances sociales. Pour éviter de les dépas-

660 Voir J. Atteslander/E. Baltensberger, Auswirkungen eines Beitritts zur Europäischen Union auf die

schweizerische Finanzpolitik, dans: Cottier/Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux etconséquences, Zurich 1998, pp. 691 et ss., avec d'autres renvois.

Page 377: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 375 - Chapitre 3

ser, les Etats fédéralistes se voient donc confrontés à un problème de coordinationinterne.

Adhérer à l'Union monétaire signifie pour un Etat renoncer à son autonomie moné-taire, mais non à son autonomie financière, mis à part les limites imposées par lescritères de Maastricht, le Pacte de stabilité ainsi que certaines directives concernant ledroit fiscal des Etats membres. Il est admis que, parmi les instruments de politiqueéconomique, ceux de la politique budgétaire et des réformes structurelles vont gagneren importance. Il conviendra donc de mieux harmoniser les politiques budgétaires desdiverses collectivités publiques et des assurances sociales. En Suisse, il faudrait pren-dre les mesures appropriées pour que les collectivités publiques observent la disci-pline budgétaire requise, tout en sauvegardant largement l'autonomie actuelle de laConfédération et des cantons en matière de politique budgétaire.

"Pour les Suisses et les Suissesses, l'intégration au sein de l'UE signifierait (...) desimpôts supplémentaires et une fiscalité encore plus lourde." (A. B., canton de Berne)Les corrections de politique budgétaire auxquelles la Suisse devrait procéder en rai-son de sa contribution nette auraient certes des incidences négatives sur la croissanceet l'emploi, mais avec le temps, ces dernières seraient largement compensées par leseffets positifs de l'intégration. Il faudrait réformer la fiscalité, ce qui ne revient pasforcément à augmenter les impôts.

En cas d'adhésion à l'UE, les budgets publics seraient alourdis de la charge des contri-butions nettes. L'assainissement requis résulte des versements nets, à quoi s'ajoutentles pertes de rentrées (par ex. droits de douane) et les surcoûts (par ex. augmentationdu service de l'intérêt à cause de taux plus élevés); mais il faut aussi en retrancher ladiminution de certaines dépenses (par ex. dans le domaine de l'asile, si la Suisse parti-cipe à l'Accord de Dublin).

En cas d'adhésion, l'amélioration probable du taux de croissance économique abouti-rait à moyen et à long terme à des recettes supplémentaires. A court terme, cependant,il y aurait un trou à combler, qui ne pourrait guère être couvert par la réduction desdépenses. Attribuer des points supplémentaires de TVA à ce découvert revient à di-minuer le pouvoir d'achat des ménages et des entreprises. Selon les principes théori-ques communément admis, cette restriction freine la croissance et l'emploi pendant uncertain temps.

333.08 Fiscalité

333.08.1 Adaptations requises

"De combien la TVA augmenterait-elle en cas d'adhésion à l'UE?"(K. B., canton du Valais, parmi d'autres)En cas d'adhésion à l'UE, le taux normal de TVA devrait être relevé à 15%. La plusgrande partie des recettes supplémentaires ainsi obtenues pourrait être compenséepar l'abaissement d'autres impôts et redevances.

Page 378: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 376 - Chapitre 3

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse serait obligée de procéder à des adaptations, no-tamment dans le domaine des impôts indirects, lesquels sont largement unifiés (TVA,ainsi qu'impôts spéciaux de consommation). S'agissant de la TVA, la Suisse devraitrelever le taux normal à 15% au moins après une période transitoire à négocier ainsique le taux réduit et le taux spécial à 5% au moins. La Confédération verrait donc sesrecettes augmenter notablement. Depuis le 1er janvier 1999, le taux suisse normal estde 7,5%. Un relèvement de 7 points et demi aboutirait à des recettes supplémentairesde l'ordre de 15 milliards de francs. Il faut cependant tenir compte du fait que le tauxactuel de TVA de 7,5% devra probablement être encore relevé au cours de la pro-chaine décennie pour financer les assurances sociales (notamment l'AVS et l'AI).Dans le projet de 11e révision de l'AVS actuellement soumis à consultation, le Conseilfédéral admet un financement supplémentaire de l'ordre de 2 points et demi de TVA.L'adhésion à l'UE s'accompagnerait donc d'un relèvement du taux normal de TVA de10 à 15%. Sur la base des chiffres actuels, les recettes supplémentaires de la Confédé-ration seraient donc de l'ordre de 10 milliards de francs.

En ce qui concerne les impôts spéciaux de consommation, il conviendrait égalementde procéder à quelques adaptations. Les taux de l’impôt sur les huiles de chauffage etle tabac devraient être relevés. Pour les cigares, le tabac à pipe et la bière, il faudraitrevoir le système de taxation (voir ch. 222.07).

Des adaptations seraient également requises du côté des impôts directs, mais on peut àpriori les estimer limitées.

- En vertu de la directive communautaire sur les sociétés mères-filiales, l'impôt anti-cipé perçu sur les dividendes que les filiales versent à la société mère domiciliéedans l'UE devrait être remboursé intégralement. Inversement, les Etats de l'UE se-raient tenus de ramener à zéro l'impôt à la source qu'ils prélèvent encore sur les di-videndes versés par des filiales étrangères aux sociétés mères établies en Suisse. LaSuisse se verrait donc obligée d'inscrire dans tous les accords de double impositionavec des Etats de l'UE le taux zéro (conforme à la directive susmentionnée) déjàconvenu avec une demi-douzaine d'Etats de l'UE. Les pertes de rentrées fiscalessont évaluées à 200 ou 300 millions de francs.

- Alors que le droit communautaire actuel admet en principe les droits de négocia-tion sur les transactions boursières, on peut admettre que la Suisse se verrait con-trainte de renoncer aux dits droits sur les transactions hors bourse, ce qui réduiraitses recettes d'environ 300 millions de francs.

- Il faudrait abandonner le droit d'émission perçu sur les obligations et les papiers-valeurs, ce qui provoquerait une baisse des recettes d'environ 340 millions defrancs.

- En ce qui concerne l'impôt anticipé sur les intérêts d'épargne, voir les considéra-tions ci-dessous sur la directive relative à l'imposition des intérêts.

La question se pose de savoir si, en cas d'adhésion à l'UE, les autorités fiscales suissesseraient tenues de fournir des renseignements à celles des Etats de l'UE. La réponse

Page 379: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 377 - Chapitre 3

est positive. L'assistance administrative ne serait plus fournie seulement pour vérifierl'application correcte des accords de double imposition, comme c'est le cas actuelle-ment, mais devrait l'être aussi dans l'intérêt du droit national de chaque Etat membrede l'UE. Ces renseignements en matière d'assistance administrative et d'entraide judi-ciaire ne pourraient toutefois être fournis que pour autant que le droit suisse en auto-rise la collecte.

En cas d'adhésion à l'UE, la Suisse serait tenue de reprendre la directive communau-taire de 1977 sur l'assistance administrative, qui s'applique aux impôts directs. Elledevrait passer ensuite de la "petite" clause d'assistance administrative à la "grande"dans les accords de double imposition conclus avec des membres de l'UE. Dans detels accords, la "petite" clause d'assistance administrative se limite à la fourniture desrenseignements requis pour appliquer correctement l'accord et éviter les abus. Avec la"grande" clause, en revanche, des informations sont également échangées qui per-mettent l’application du droit interne respectif des parties contractantes. Les deman-des de renseignements d'ordre fiscal adressées à notre pays augmenteraient donc sen-siblement (voir ch. 222.07.6). Dans le domaine de l'entraide judiciaire concernant desaffaires fiscales, en revanche, il n'y a pas lieu de s'attendre à des incidences sur notresystème juridique.

Depuis des années, l'UE mène un débat sur la question de l’imposition des produits del'épargne. Dans un nouveau projet de directive de 1997 sur l'imposition des intérêts,la Commission européenne propose de taxer les intérêts sur les capitaux d'épargne à lasource d'au moins 20%. Au lieu de retenir cet impôt à la source, l'Etat-source pourraitaussi notifier l'Etat de domicile du créancier (modèle dit de coexistence).

Comme l'impôt à la source est retenu par l'établissement payeur - une banque, en gé-néral -, l'UE craint que les capitaux d'épargne ne fuient les Etats membres. Il est eneffet assez facile de changer rapidement d'établissement. Une des faiblesses du prin-cipe de l'établissement payeur est donc que les dépôts de titres ont tendance à êtretransférés à l'étranger. Inversement, l'un des avantages que l'on reconnaît à ce principeest qu'il est le seul à permettre de déterminer l'ensemble des intérêts versés sur lesavoirs d'épargne.

En Suisse, le principe du débiteur appliqué pour l'impôt anticipé a pour conséquenceque l'impôt est retenu sur tous les intérêts du débiteur domicilié en Suisse, indépen-damment du fait que le créancier soit suisse ou étranger. L'avantage de ce principe estque le débiteur ne peut pas changer facilement de domicile. L'inconvénient majeur duprincipe du débiteur est que l'on peut éviter l'impôt anticipé en investissant dans destitres étrangers. Dans les pays où règne le principe de l'établissement payeur, les per-sonnes qui veulent se soustraire au fisc transfèrent leurs dépôts à l'étranger, alors quedans ceux qui appliquent le principe du débiteur, on choisit des titres de dette étran-gers sans déplacer son dépôt à l'étranger.

Tout bien considéré du point de vue helvétique, le principe du débiteur est supérieur àcelui de l'établissement payeur. Il ne faut cependant pas s’attendre à ce que l'UE re-

Page 380: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 378 - Chapitre 3

nonce au principe de l'établissement payeur si l'unanimité devait y être obtenue unjour en matière d'imposition des intérêts. Dans ce contexte, la manière dont la coopé-ration avec les places financières extérieures à l'UE sera coordonnée avec les exigen-ces du système fiscal de l'UE jouera un grand rôle. L'UE part de l'idée qu'à côté d'au-tres Etats extérieurs à l'Union, la Suisse pourrait elle aussi être le refuge de capitauxen fuite tant qu'elle appliquera le principe du débiteur. Il est donc parfaitement conce-vable que la pression sur la Suisse augmente; celle-ci pourrait par exemple se voirconfrontée à l'exigence que certains investissements soient taxés selon le principe del'établissement payeur, ce, en vue de lui imposer un système de taxation des produitsdes capitaux qui soit conforme aux directives de l'UE. On pourrait ainsi exiger d'elleque, pour la clientèle de l’UE, elle perçoive un impôt selon le principe de l'établisse-ment payeur. Pareille évolution peut se produire indépendamment de la positionsuisse en matière d'intégration européenne. Mais étant donné l'état des discussions, ausein même de l'UE, quant à la proposition de la Commission, il n'y a pas lieu decraindre que des modifications se produisent par rapport à la situation actuelle du se-cret bancaire.

On peut cependant tabler en tout cas sur le fait que le débat va se prolonger au sein del'UE, tant sur le principe de l'imposition des produits des capitaux que sur l'arsenal desmesures possibles, puisqu’il n'existe pas d'acquis communautaire dans ce domaine.

333.08.2 Compensation du relèvement de la TVA

Suite au relèvement inévitable du taux normal de la TVA à 15%, tel que l'exigeraitl'adhésion à l'UE, la Confédération verrait ses rentrées s'accroître notablement. Parailleurs, l’adhésion aboutirait à la diminution de certaines recettes, par exemple dansle domaine des impôts directs ou des droits de timbre, sans parler du fait qu'il faudraitencore financer la contribution nette de la Suisse (voir ch. 251).

Les paiements annuels nets à l'UE, qui conduiraient à augmenter la quote-part del'Etat, devraient très probablement être financés par les recettes supplémentaires ré-sultant de la hausse incontournable du taux normal de la TVA. Pour conserver néan-moins l'attrait de la place fiscale suisse et limiter la quote-part de l'Etat, il faudrait ré-duire la charge fiscale dans d'autres secteurs, afin de compenser partiellement l'excé-dent attendu de recettes. Cette question de la compensation devrait toutefois êtreabordée dans le cadre de la réforme du régime financier actuel, qui arrive à échéanceen 2006. Le présent rapport ne saurait anticiper les décisions politiques requises. Onse contentera donc de quelques considérations générales.

Les mesures de compensation partielle devraient être supportables à la fois sur lesplans économique et social. Il faudrait examiner de très près la répartition des chargesentre consommateurs et personnes morales, entre bas et hauts revenus, de mêmequ'entre les cantons. Ces derniers devront garder en outre des sources suffisantes definancement.

- Compenser (partiellement) les recettes supplémentaires en atténuant les impôts deconsommation spéciaux (tabac, huiles minérales) n'entre guère en ligne de compte,

Page 381: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 379 - Chapitre 3

vu que l'UE a largement unifié ces secteurs en fixant des taux minimum et qu'unehausse de la taxe serait même nécessaire pour les huiles minérales (destinées auchauffage).

- De même, la compensation (partielle) de l'impôt anticipé est pratiquement exclue.Pour que les revenus des capitaux d'épargne puissent continuer à être déterminés enmême temps que l'impôt sur le revenu, il faut que le taux de l'impôt anticipé, quiest un impôt de sécurité, continue à être fixé d'après les barèmes les plus élevés del'impôt sur le revenu. En outre, dans le domaine des impôts à la source, l'UE re-cherche aussi une certaine harmonisation ou coordination.

- Une possibilité qui devrait être étudiée à fond est de compenser l'excédent de re-cettes en diminuant les impôts sur le revenu ou les cotisations aux assurances so-ciales. Pour les impôts sur le revenu, cet examen devrait être effectué en liaisonétroite avec les cantons. Pour les cotisations sociales, il faudrait absolument pren-dre en compte les perspectives générales de l'évolution des œuvres sociales. Lescritères déterminants sont la practicabilité sur les plans économique et social.

333.08.3 Incidences sur les prix et les revenus

"Comment faire accepter au peuple suisse le doublement de la TVA et le renchéris-sement consécutif?" (W. P.-H., canton de Zurich)La hausse de la TVA entraînera immanquablement une hausse unique des prix. L'im-portance de cette hausse dépendra de la conjoncture et des possibilités d'atténuer lechoc sur le plan des impôts.

Le relèvement à 15% de la TVA et la refonte de la fiscalité, pour compenser partiel-lement la surcharge, représenteraient un bouleversement radical de tout le systèmefiscal. Cette réforme aurait des répercussions sur les prix, la répartition du revenu etde la fortune, ainsi que sur la croissance économique. Le chapitre qui suit donne unaperçu des incidences probables d'une telle réforme.

Relever la TVA de cinq points et répercuter intégralement cette surcharge sur les con-sommateurs entraînerait une hausse directe, comprise entre 2 et 3%, de l'indice desprix à la consommation (IPC). Comme il faudrait négocier une période transitoirepour ce relèvement progressif, l'effet sur les prix se répartirait sur plusieurs années.Dans le circuit économique, il faudrait en outre s'attendre à des effets indirects, dus àla répercussion de la hausse des prix sur les salaires, l'emploi et la croissance. L'im-portance du renchérissement effectif des prix dépend surtout de la mesure danslaquelle les entreprises pourraient répercuter la surcharge fiscale sur les consomma-teurs. C'est pourquoi il n'est pas possible de chiffrer exactement la hausse probable del'IPC. Le potentiel de répercussion dépend en effet de la conjoncture au moment duchangement de taux de TVA. En période de haute conjoncture, avec une augmenta-tion marquée de la demande, on peut s'attendre à une répercussion généralisée, avecun effet concomitant sur les prix. Lors de l'introduction de la TVA en 1995, la réper-cussion s'est avérée inférieure aux attentes.

Page 382: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 380 - Chapitre 3

"(...) qui va de nouveau être tondu? Les gagne-petit!" (M. E., canton de Zurich)La hausse de la TVA aurait aussi des incidences sur la distribution des revenus. Leseffets de redistribution dépendent de la conjoncture ainsi que de la forme que prendrala compensation des surcroîts de recette. La TVA peut être conçue dans un esprit dejustice sociale en appliquant des taux spéciaux aux biens de première nécessité.

Il faut tenir compte du fait que les ménages à faible revenu en dépensent une plusgrande partie pour leur consommation que ceux à revenu élevé. Proportionnellementparlant, la TVA grève donc plus fortement les petits revenus que les gros. En chiffresabsolus, cependant, les milieux aisés effectuent plus de dépenses et contribuent doncdavantage au produit de la TVA. L'effet régressif de la TVA est en outre atténué dufait que les biens de première nécessité sont soumis à des taux réduits. Grâce à destaux différenciés, la TVA peut donc être aménagée dans le respect de contraintes so-ciales, même en cas de hausse générale des taux.

Pour les salariés, imposer la compensation du renchérissement et imputer ainsi lacharge aux entreprises dépendra de la conjoncture et de la situation du marché du tra-vail. En outre, si la Suisse adhérait à l'UE, les prix suisses se rapprocheraient du ni-veau de l'UE, ce qui compenserait en partie la hausse de la TVA (voir ch. 333.05).

Avec l'achèvement du marché intérieur, y compris dans le domaine fiscal, l'UE passe-ra, pour la TVA, du principe actuel du pays de destination à celui du pays d'origine.La date du changement de système ainsi que la conception du mécanisme de compen-sation prévu sont encore en suspens. Dans le principe du pays d'origine, les exporta-tions ne sont plus exonérées de la taxe, les importations n'en sont plus grevées. Lesventes à l'intérieur et à l'étranger sont taxées au même taux, celui du pays d'origine.Dans tout l'espace UE, les exportateurs de pays à TVA faible bénéficient donc d'unavantage vis-à-vis de leurs concurrents de pays à TVA forte.

Les exportations n'étant plus exonérées et les importations plus grevées, les pays quiconnaissent un excédent d'exportations en retirent per saldo des recettes supplémen-taires. A l'endroit des pays de l'UE, la Suisse accuse depuis longtemps des importa-tions excédentaires de biens et services soumis à la TVA. Du point de vue des recettesfiscales, le principe du pays destinataire lui est donc plus favorable. Par ailleurs, leprincipe du pays d'origine élimine les formalités compliquées d'exonération, ce qui aun effet positif sur le commerce et la croissance661.

333.09 Résumé et mesures internes

Lors de l’évaluation des effets qu’une adhésion à l’UE entraînerait sur la prospérité enSuisse, il apparaît – ce qui n’est pas tout à fait inattendu – qu'en fait seuls les coûts

661 Pour que la réforme du système fiscal suisse n'affecte pas brutalement l'économie, ni la distribution du reve-

nu et de la fortune, mais qu'elle s'étende sur une longue période, il faudrait qu'elle s'effectue progressive-ment. En cas d'adhésion à l'UE, il conviendrait donc de négocier une période transitoire appropriée, pendantlaquelle l'économie pourrait s'accoutumer aux nouvelles conditions-cadres en matière fiscale.

Page 383: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 381 - Chapitre 3

financiers sont calculables, alors que les effets sur la croissance économique, les prix,les taux d’intérêt, les salaires, les impôts et les loyers ne peuvent être qu'estimés.

Cela tient au fait que la science économique ne constitue pas une science exacte etque la croissance économique dépend considérablement de forces non mesurables del’initiative privée des entreprises, de même que du développement de l'environnementsocial (par ex. les partenaires sociaux). Il en va de même quant à l’analyse des risqueséconomiques: les coûts obtenus sont relativement facile à calculer, par contre le béné-fice perdu en raison d’opportunités manquées ne peut qu’être estimé sur la base decomparaisons et d'estimations. Cette expérience, que le Conseil fédéral a déjà faite àla veille de la votation sur l’EEE de 1992, a pour conséquence que l’argumentationéconomique pour ou contre la modification des conditions-cadres, ou ici pour oucontre une adhésion à l’UE, accroît en règle générale le scepticisme. Les opposants àune ouverture peuvent de manière relativement précise chiffrer les coûts d’un chan-gement (par ex. environ 3 milliards de francs de paiements nets au budget commu-nautaire), tandis que les partisans de conditions-cadres libérales ne peuvent faire va-loir que des tendances, des expectatives et des valeurs comparatives.

Cela dit, les points suivants résument les arguments qu’il est possible de faire valoir:

- A l’intérieur de l’UE, mais également à l’intérieur du même espace linguistique, iln'y a pas lieu de s'attendre à une migration sensible.

- Les différences de salaires restent considérables et des mesures efficaces pour lut-ter contre le dumping social abusif sont également possibles dans l’UE.

- Grâce à une adhésion, la croissance économique devrait partir d’un niveau plusélevé, même si elle dépend aussi fortement d’autres facteurs, par ex. des réformesinternes.

- En l’état actuel des connaissances, on peut partir de l'idée que les bénéfices d’uneadhésion dépasseraient ceux résultant de l’EEE, même si, dans cette comparaison,il faut compter avec un transfert net à l'UE en cas d'adhésion.

- Une dynamique économique croissante et continuelle à long terme devrait contre-balancer les coûts d’adaptation du début.

- La perte d’autonomie en matière de politique monétaire signifierait que la politiquemonétaire ne pourrait plus prendre en considération des évolutions économiquesdifférentes; d’autres mécanismes d’adaptation, tels que des prix et des loyers flexi-bles, seraient nécessaires.

- Les exigences en matière d’adaptation – que ce soit en matière d'égalisation destaux d’intérêts réels au niveau européen ou en matière d'agriculture – ne doiventcependant pas être sous-estimées.

- C'est pourquoi, des étapes préparatoires et d’accompagnement au plan interne, ain-si que des périodes transitoires dans les négociations devraient être prévues.

Page 384: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 382 - Chapitre 3

- La transformation inévitable du système de recettes et de dépenses publiques repré-sente aussi une entreprise complexe sur le plan politique; les propositions y relati-ves devraient remplir les conditions suivantes:

-- les paiements nets annuels à l’UE devraient être financés grâce à la hausse in-évitable du taux normal de TVA, ce qui impliquerait une hausse de la quote-partde l'Etat;

-- l’attractivité fiscale de la place économique suisse ne serait sauvegardée quegrâce à une large compensation de l'augmentation de la TVA dans d'autres do-maines, par exemple par des contributions en matière d'impôts sur le revenu etde cotisations sociales;

-- la transformation du système fiscal devrait être économiquement et socialementsupportable.

Il faut noter qu'une adhésion ne doit pas être considérée comme étant la solution clé àtous nos problèmes économiques. Mais, il serait tout aussi faux de croire que les dés-avantages économiques dus à la voie solitaire pourront être compensés grâce à desmesures internes uniquement. On ne peut alors s'attendre à une dynamique économi-que que s'il y a interaction entre ouverture économique et poursuite de réformes inter-nes.

S'agissant de la prospérité, le Conseil fédéral, en cas d'adhésion, examinerait de ma-nière approfondie les mesures internes suivantes:

- Des mesures pour empêcher la sous-enchère sociale et salariale se trouvent déjàau stade de projets. Ces mesures ont été élaborées par un groupe de travail compre-nant les partenaires sociaux et seront prochainement soumises par le Conseil fédé-ral à la procédure de consultation, afin que la préparation de la transposition dessolutions négociées dans le cadre des accords sectoriels puisse être entreprise enSuisse.

- Dans le domaine de la politique agricole, les étapes déjà entreprises par le Conseilfédéral afin d'améliorer la compétitivité seraient poursuivies; en outre, il faudraitexaminer quelles sont les mesures aptes à atténuer les inévitables adaptationsstructurelles (voir ch. 222.03.1).

- La future transformation du système fiscal suisse, nécessaire en cas d’adhésion, demême que les efforts visant une meilleure coordination de la politique budgétairedes différents niveaux politiques suisses en vue de remplir les critères de Maas-tricht, y compris les assurances sociales, occuperaient le système politique suissependant plusieurs années. Le Conseil fédéral a l’intention d’examiner la questionde la compensation des recettes supplémentaires résultant de la hausse de la TVAlors du remplacement de l'actuel régime financier, encore en vigueur jusqu’en2006. Les critères déterminants pour les mesures à prendre seront l’acceptabilitésur le plan économique et social, ainsi que la préservation de l’autonomie finan-cière de la Confédération et des cantons.

Page 385: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 383 - Chapitre 3

334 Position dans le monde

334.01 Sécurité extérieure et neutralité

"D’après le Traité de Maastricht, une authentique neutralité est exclue au sein del’Union européenne". (A. B., canton de Berne)La participation de notre pays à l’Union européenne est compatible avec notre neu-tralité aussi longtemps que l’Union européenne ne constitue pas une alliance de dé-fense militaire.

Le droit international de la neutralité exige en premier lieu d’un Etat neutre qu'il neparticipe pas activement à un conflit armé entre Etats. En outre, il ne peut pas soutenirmilitairement une partie en guerre. En temps de paix, il n’est pas permis à un Etatneutre de conclure des alliances juridiques qui l’empêcheraient, en cas de conflits, deremplir ses obligations liées à la neutralité. En adhérant à l’Union européenne, laSuisse ne violerait pas ses obligations liées au droit de la neutralité dans la mesure oùl’adhésion à l’Union européenne n’implique pas d’engagements militaires: l’Unioneuropéenne n’est pas une alliance de défense militaire. De surcroît, l'adhésion àl’Union européenne ne créerait pas non plus l’obligation juridique d'adhérer à l’avenirà une communauté de défense.

Par ailleurs, une adhésion à l’Union européenne impliquerait l'obligation politique desoutenir les efforts visant au renforcement de la sécurité de l’Union dans toutes sesformes. La loyauté et la solidarité réciproque entre Etats membres sont des règles debase qui sont également valables pour l'amélioration de la sécurité et la mise en placeprogressive d’une politique commune de défense. Si un dispositif de sécurité solidedevait un jour faire ses preuves dans le cadre de l’Union européenne et qu’il offraitaux Suisses la même sécurité que la neutralité, la Suisse pourrait renoncer à la neutra-lité qui n'aurait plus raison d'être, au profit d’un tel système.

"Dans quelle mesure notre neutralité serait-elle restreinte?" (H. et R. M., canton deLucerne)Notre neutralité ne serait pas restreinte par une adhésion à l’Union européenne; elleservirait également à l’avenir au maintien de la paix et de la sécurité de notre pays.La Suisse pourrait poursuivre sa politique en la matière au sein de l’Union euro-péenne aussi longtemps qu’elle ne serait pas convaincue des garanties offertes par unnouveau système de sécurité européen.

Il est important que la neutralité suisse n'ait jamais été comprise comme une neutralitéd'opinion. La Suisse partage les mêmes valeurs que les Etats membres de l’Union eu-ropéenne, c’est-à-dire la démocratie, l’Etat de droit et l’économie de marché. Nos butsde politique étrangère correspondent également largement à ceux de l’Union euro-péenne. La neutralité ne peut rester crédible que si elle est capable de s’adapter auxchangements des rapports géopolitiques. Ainsi, par exemple, les bouleversementscausés par la fin de la guerre froide et qui ont fait date en Europe exigèrent une nou-velle orientation pragmatique de la neutralité suisse dont les grandes lignes ont été

Page 386: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 384 - Chapitre 3

présentées par le Conseil fédéral dans son rapport du 29 novembre 1993 sur la neu-tralité662. Cette nouvelle orientation et la présentation de principes relevant de la poli-tique de neutralité ont conduit à ce que l’attitude de la Suisse en matière de neutralitéreste prévisible et donc crédible aux yeux des autres Etats.

En effet, l'intégration des Etats européens au sein des Communautés européennes,l'élargissement de celles-ci et l'instauration de l'Union européenne sont allés de pairavec l'avènement, tout autour des frontières de la Suisse, d'un espace de paix et destabilité. Les Etats membres ont jugulé durablement toute propension à poursuivre desbuts politiques par des moyens militaires pouvant entraîner des conflits armés entreeux. L'Union européenne est dans le monde actuel un facteur de stabilité. Cette opti-que de promotion de la paix et de règlement des différends correspond également ausens et à l’esprit de la neutralité suisse663.

Une adhésion à l’Union européenne ne modifierait également en rien l’efficacité et laprévisibilité de notre politique de neutralité. En effet, au vu de la politique actuelle del'Union européenne en matière de relations extérieures et de sécurité commune (voirch. 231 et 334.02), la Suisse, en qualité de membre de l’Union européenne, pourraitpoursuivre la politique de neutralité qu’elle mène en Europe depuis la fin du conflitEst-Ouest. Comme c’est déjà le cas aujourd’hui, la Suisse participerait en principeaux sanctions économiques de l’Union européenne lorsque des mesures concrètesservent au maintien de la paix internationale, empêchent ou punissent les violationsgraves du droit international public. La position de la Suisse au regard des sanctionsmilitaires ne changerait pas non plus car en qualité de membre de l’Union euro-péenne, la Suisse ne serait pas tenue de participer activement à des mesures de con-trainte militaires à l’encontre de ceux qui ne respectent pas le droit. Comme membrede l’Union européenne, la Suisse pourrait par contre décider, de manière autonome etindépendamment de la position d’autres Etats membres, de soutenir passivement detelles mesures, par exemple par l’octroi du droit de survol et de transit lors d'actionsmilitaires. Notre pays, une fois membre de l’Union européenne, jugerait égalementdans chaque cas, après avoir dûment soupesé les intérêts en jeu, si sa participation àdes sanctions ou son abstention sert le rétablissement de l’état de droit international etla défense des intérêts suisses. De toute manière, le droit de la neutralité n’est pas ap-plicable à la participation à des mesures impliquant l’usage de la force mises en œu-vre conformément à la Charte des Nations Unies.

Personne ne conteste aujourd‘hui que le statut d’Etat membre de l’Union européenneet la neutralité soient compatibles. Ainsi, la Suède, la Finlande, l’Irlande etl’Autriche, ont conservé leur neutralité: ni les autres Etats membres ni l’Union euro-péenne elle-même n’ont exigé de ces Etats qu’ils y renoncent. De même, le droit del’Union européenne n’interdit pas aux Etats membres d’être neutres: au contraire, ilprend même en considération la situation particulière des Etats neutres et l’art. J.4,

662 FF 1994 I p. 200 et ss.663 Voir L. Goetschel, Die Zukunft der Neutralität im Rahmen der GASP: Widerspruch, Gleichgültigkeit oder

Ergänzung, dans: Cottier/Kopše, L'ahdésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences,Zurich 1998, p.637 et ss, avec d’autres renvois.

Page 387: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 385 - Chapitre 3

par. 4, du Traité UE prévoit expressément que: "La politique de l’Union (…) n’affectepas le caractère spécifique de la politique de défense et de sécurité de certains Etatsmembres." De plus, le principe de l’unanimité des décisions de l’Union européenneen matière de politique extérieure et de défense commune garantit qu’aucun Etat neu-tre, membre de l’Union européenne, puisse devenir contre sa volonté partie à un con-flit impliquant sa neutralité.

"Ne devons-nous pas nous attendre à ce que nos soldats, au vu de l'affirmation pro-gressive de la politique extérieure de l’Union européenne, mettent en jeu leur vie dansdes guerres à l’étranger?" (E. R., canton de Schaffhouse).L’adhésion de la Suisse à l’Union européenne n’oblige pas notre pays à participer,contre sa volonté, à des actions militaires à l’étranger.

L’Union européenne fait une distinction entre la politique de sécurité commune et ladéfense commune (au sens militaire du terme). Alors que la politique de sécuritécommune s’est peu à peu développée depuis 1992, la mise sur pied d’une politiquecommune de défense apparaît encore aujourd’hui dans le Traité de l’Union comme unbut à long terme, qui pourrait néanmoins conduire un jour à une défense commune(art. J.4, par. 1 du Traité UE). Aussi longtemps que ce but n’aura pas été fixé de façonexpresse et unanime par les Etats membres de l’Union européenne, la défense mili-taire restera de leur compétence unique. Par conséquent, l’Union européenne ne peutpas non plus contraindre ses Etats membres à mettre des troupes à sa disposition pourdes actions militaires.

A la demande expresse de deux Etats membres neutres de l’Union, la Finlande et laSuède, la dernière révision du Traité de l’Union permet aux Etats membres qui lesouhaitent de mettre sur pied des actions de soutien à la paix également dans le cadrede l’Union européenne (il s'agit des "missions Petersberg": aide en cas de catastrophe,opérations humanitaires, opérations militaires de soutien à la paix; voir ch. 231, let.C.). L’Union de l’Europe occidentale (UEO) s’est vue confier la tâche de mener àbien ces missions. La participation à de telles opérations est volontaire pour les Etatsmembres de l’Union européenne qui ne sont pas membres de l’UEO et qui disposentd’un siège d’observateur dans cette organisation. La Suisse, en qualité de membre del’Union européenne et d’observateur à l’UEO, pourrait décider librement d'une éven-tuelle participation, et des modalités de celle-ci, à de telles opérations de soutien à lapaix. Du point de vue de la neutralité, la participation de la Suisse à des opérations desoutien à la paix de l’Union européenne ne poserait aucun problème pour autant queces actions soient menées d'entente avec toutes les parties directement impliquéesdans le conflit ou sur la base d’un mandat exprès du Conseil de sécurité de l’ONU.

Dans ce contexte, la participation totale, sur un pied d’égalité, à de telles actions estréservée exclusivement aux Etats membres de l’Union européenne. C’est pour cetteraison que la Suisse est exclue de l’échange d’informations et, naturellement, des dé-cisions dans des domaines qui l’intéressent également (par ex. le conflit au Kosovo).La communauté internationale attend de plus en plus de la Suisse qu’elle apporte sacontribution, notamment dans le cadre des missions de Petersberg, à la solidarité eu-

Page 388: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 386 - Chapitre 3

ropéenne qui se concrétise progressivement en matière de politique de sécurité. Celaconcerne principalement l’acceptation de certaines charges. Une telle manifestationde solidarité servirait également l’intérêt stratégique de la Suisse, dans la mesure oùelle contribuerait ainsi à la stabilisation de son propre environnement.

La neutralité n’est ni un but en soi ni un but de notre politique extérieure mais unmoyen parmi d’autres servant au maintien de la sécurité et de l’indépendance de laSuisse. La communauté des Etats a, dès le XIXème siècle, reconnu formellement laneutralité suisse. Cela ne signifie pas pour autant que la Suisse soit tenue, au plan in-ternational, à rester indéfiniment neutre. Si la Suisse s’est fait connaître jusqu’à pré-sent pour sa neutralité permanente et armée, elle l’a fait volontairement et en sachantque cet instrument était pour elle le moyen approprié de garantir sa sécurité et sonindépendance. La Suisse est donc libre de décider d'abandonner un jour une neutralitéqu’elle a elle-même choisie. Une éventuelle adhésion à l’Union européenne ne changerien à cette question dans la mesure où le droit de l’Union européenne n’impose pas àses Etats membres de maintenir ou d’abandonner leur neutralité.

334.02 Politique étrangère

La politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne est un domaineapparu tardivement dans les traités, puisque ce n'est qu'avec celui de Maastricht queles Etats membres ont accepté d'assumer des obligations dans ce domaine. Le"deuxième pilier" de l'UE reste cependant une activité intergouvernementale distinctedes structures supranationales de la Communauté et soustraite à la compétence de laCour de Justice des CE. L'unanimité y demeure la base de toute décision importante.Tant dans ses objectifs que dans son fonctionnement ou dans ses résultats, la politiqueextérieure de l'Union se distingue de la politique de puissance telle que l'ont pratiquéede grands Etats.

Elle prend d'abord l'aspect d'une coopération systématique: les Etats membres s'in-forment mutuellement de toute question de politique extérieure représentant un intérêtgénéral, dans le but d'exercer leur influence de manière combinée partout où celas'avère possible. Ils s'astreignent à mettre en oeuvre des positions communes dans dessecteurs bien délimités de leurs relations extérieures. Dans la définition de ces posi-tions, chacun d'entre eux peut faire entendre sa voix (voire même mettre son vetopour des raisons d'intérêt national primordial). La présidence de l'Union représentecelle-ci vis-à-vis des Etats tiers dans les domaines qui ont fait l'objet d'une concerta-tion: les moyens et petits Etats européens peuvent parler au nom de tous, même desplus grands.

La représentation commune connaît cependant des limites: au Conseil de Sécurité desNations Unies, par exemple, la France et la Grande-Bretagne, membres permanents,n'ont nullement manifesté l'intention de céder leurs prérogatives à l'Union. De fait, ladimension politique des relations extérieures de l'Union reste moins développée quesa dimension économique. Le Traité d'Amsterdam, qui complétera les instruments de

Page 389: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 387 - Chapitre 3

la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union, n'entame pas la primautédes Etats membres dans ce domaine.

Il n'y a pas d'incompatibilité entre les objectifs poursuivis par la Suisse et ceux viséspar l'UE en matière de politique étrangère. Qui dit politique étrangère, dit prioritaire-ment défense des intérêts nationaux dans les relations extérieures. A cet égard, lescinq objectifs de la Suisse dans ce domaine sont comparable avec les buts de la politi-que étrangère et de sécurité commune de l'Union fixés par le Traité de Maastricht. Onconstate que la Suisse et les pays de l'UE ont des intérêts similaires en matière de po-litique étrangère et défendent les mêmes valeurs (voir ch. 231).

Les actions et mesures décidées jusqu'ici par l'UE au titre de la politique étrangère etde sécurité commune ne sont pas allées à l'encontre des valeurs défendues par laSuisse. Au contraire, notre pays tend à s'inspirer des mesures adoptées par l'Unionpour prendre les siennes. Les sanctions décrétées par la Suisse à l'encontre de l'ex-Yougoslavie ne sont qu'un exemple parmi d'autres de mesures prises par la Suisse quiont été partiellement calquées sur celles de l'UE. Faisant valoir son intérêt propre, laSuisse adopte aujourd'hui des mesures similaires à celles de l'UE. Membre de l'Union,la Suisse pourrait défendre ses propres objectifs en matière de politique étrangère. Atitre d'exemple, une démarche de l'UE dans le domaine des droits de l'homme qui se-rait initiée par la Suisse aurait plus de poids qu'une entreprise isolée.

"Voulez-vous réellement sacrifier la crédibilité du CICR sur l’autel de l’UE?" (M.M.-B., canton de Zurich)Il n’en est pas question. L’impartialité et la crédibilité du CICR ne seraient aucune-ment touchées par une adhésion de la Suisse à l’UE.

Le Comité International de la Croix Rouge (CICR) est une institution internationaleindépendante. Si il est vrai qu’il a son siège à Genève, il est, du point de vue juridi-que, indépendant de la Suisse. Le CICR accorde beaucoup d’importance à son auto-nomie et poursuit des buts propres qui sont souvent, mais pas nécessairement, sem-blables aux objectifs suisses. Le CICR est reconnu au niveau international en tantqu’institution indépendante de la Suisse. Il possède ses propres représentations etjouit, au sein de l’ONU et d’autres organisations internationales, d’un statut spécial. Ilagit en son nom propre et en toute autonomie. Sur le plan international, il joue depuistoujours un rôle actif dans le cadre de ses missions humanitaires. Rien de tout cela neserait modifié si la Suisse devenait membre de l’UE.

334.03 Politique économique extérieure

La mondialisation de l'économie des années 80 et 90 a entraîné des changements pro-fonds dans la division internationale du travail. Elle a considérablement modifié lesbases décisionnelles et le comportement des entreprises actives à l'échelle internatio-nales. Deux tendances se renforcent dans la politique économique extérieure de laSuisse et dans celle de l'UE: elles devront se concentrer encore davantage sur l'amé-lioration de l'accès aux marchés étrangers ainsi que sur l'augmentation de la compéti-

Page 390: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 388 - Chapitre 3

tivité internationale des centres de production nationaux (amélioration des conditionsd'accueil des entreprises), pour toutes les entreprises quelle que soit leur taille664.

Il s'agit d'améliorer la productivité de tous les facteurs économiquement importants,en Suisse par le programme de revitalisation et dans l'UE par le plan d’action en fa-veur du marché intérieur. Il faudrait également renforcer les droits et les obligationsconsacrés dans les accords de l'OCDE et de l'OMC et poursuivre la libéralisation pro-gressive ainsi que l'élargissement de l'accès au marché par le truchement d'accordspréférentiels avec des pays tiers ou des groupes de pays. Même si l'UE avec sonénorme "marché intérieur" de 370 millions d'habitants et un commerce extérieur chif-fré à 10,2% du PIB a, comme les Etats-Unis (8,2%) et le Japon (9%), un commerceextérieur plus modeste par rapport à des petits pays exportateurs comme la Suisse, elles'intéresse de très près à la conception de la réglementation générale du commerceextérieur dans les organisations multilatérales. Ce cadre contribue, dans l'UE aussi, àla multiplication des opportunités commerciales et donc au maintien ou à la créationd'emplois. Pour la Suisse, dont la part des exportations représente 39,9% du PIB, lesrègles multilatérales appliquées au commerce extérieur, qui sont juridiquement con-traignantes, sont cruciales (40% des exportations suisses sont aujourd'hui écoulées endehors de l'UE et 20% de ses importations proviennent de pays non communautaires).

"Notre pays ne pourrait plus agir et décider de manière indépendante dans le cadre deses relations commerciales avec des pays non communautaires, activités que la Suissea jusqu'à présent menées avec beaucoup de succès." (A. L., canton des Grisons)C'est exact. Cependant, n'oublions pas que la Suisse ne parvient plus à défendre tou-jours ses intérêts. En tant que membre de l'UE, elle profiterait du poids incompara-blement plus important de l'UE dans les négociations, mais elle perdrait la possibilitéde faire valoir ses propres intérêts là où ces derniers ne coïncident pas avec ceux del'UE. Celle-ci peut mieux défendre les intérêts de ses membres que ne pourraient lefaire chacun des Etats, ce qui serait particulièrement important pour la Suisse dontles échanges avec l'étranger sont essentiels. Notre pays serait également moins sou-mis aux pressions extérieures.

Aujourd'hui, l'autonomie formelle ainsi que la liberté d’organisation de la Suisse etdes pays de l'AELE sont limitées lors de la négociation d'accords préférentiels. Géné-ralement, les pays tiers et les groupements régionaux ne sont prêts à accorder à laSuisse et aux pays de l'AELE les mêmes conditions d'accès au marché qu'après lesavoir négociés avec l'UE665. De plus, ni l'AELE en tant qu'organisation, ni la Suisseen tant qu'Etat ne peuvent participer à une coopération élargie, comme celle que l'UEtente d'instaurer dans le cadre du partenariat UE - pays méditerranéens, par exemple.

Si en devenant membre de l'UE la Suisse avait un accès illimité à ce marché intérieurconsidérable et appelé à se développer au fur et à mesure de l'élargissement de

664 Voir S. Breitenmoser, Die globale und regionale Interdependenz des schweizerischen Aussenwirtschafts-

rechts, dans: Cottier/ Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences, Zurich1998, p.49 et ss, avec d'autres renvois.

665 A l'exception actuellement des négociations de l'AELE avec la Slovénie et le Canada.

Page 391: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 389 - Chapitre 3

l'Union, une partie importante de la politique commerciale extérieure de la Suisse se-rait intégrée dans la politique relative au marché unique. Mais, compte tenu du poidsdes échanges avec les pays non européens dans l'économie suisse, notre pays n'auraitpas seulement beaucoup plus intérêt à participer à la conception de la politique com-merciale commune que des Etats membres dont l'économie est plus axée sur le mar-ché intérieur, mais elle serait probablement aussi plus écoutée.

L'entrée de la Suisse dans l'UE gommerait les faiblesses de sa politique économiqueextérieure préférentielle, qu’elle conçoit de manière autonome ou en collaborationavec les pays membres de l'AELE - EEE. La Suisse deviendrait membre d'un réseaud'accords communautaires beaucoup plus vaste. La Suisse ne pourrait pas nouer desrelations contractuelles d'une telle densité, même si elle choisissait la voie solitaire, cequi serait à la fois long et coûteux, ou dans le cadre de l'AELE. La Suisse pourraitainsi profiter des avantages des accords préférentiels de l'UE et des accords de coopé-ration économique et commerciale conclus avec des pays ne faisant pas partie de l'UE(par ex. dans le bassin méditerranéen) ou des associations régionales (ALENA,ASEAN, Etats du Golfe Persique, etc.). Ainsi, des marchés s'ouvriraient aux entrepri-ses suisses aux mêmes conditions que celles qui s'appliquent déjà à leurs concurrenteseuropéennes.

Ces dernières années, un dialogue politique intense s'est développé entre des associa-tions régionales et l'UE. Si elle adhère à l'Union, la Suisse pourrait notamment parti-ciper au dialogue transatlantique entre l'UE et les Etats-Unis, ainsi qu'au projet decoopération avec le Mercosur ou encore au dialogue entre l'Asie et l'Europe (ASEM).Ces formes d’échanges portent non seulement sur la coopération commerciale, maisaussi sur la coopération industrielle, économique et culturelle et contiennent égale-ment un volet politique.

En tant que membre de l'UE la Suisse n'obtiendrait pas simplement le droit de conce-voir et de décider avec ses partenaires de la politique commerciale commune de laCommunauté. Dans ce domaine notamment, pour les nouveaux membres de l'UE telsque l'Autriche ou la Finlande il est particulièrement important de pouvoir bénéficierdu poids de l'UE dans le cadre de la promotion du tourisme national ou du commerceextérieur avec les pays tiers et de pouvoir mener des actions auparavant impossiblesou plus coûteuses.

"L'affaire des plaintes collectives des juifs américains a malheureusement montré queles responsables de notre pays ne résistent pas au chantage. Quelles en seraient lesconséquences dans le cas de futures négociations avec l'UE, voire d'une adhésion? Aquoi pourrait nous servir un prétendu droit de participer aux décisions, si le mondeentier sait que les Suisses finissent par céder au chantage?" (E. S., canton d'Argovie)Si la Suisse était membre de l'UE, les gouvernements de pays non européens y regar-deraient probablement à deux fois avant de menacer la Suisse de sanctions, et parconséquent toute l'UE.

Page 392: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 390 - Chapitre 3

Par ailleurs, la Suisse serait moins soumise à des tentatives de pression de la part decertains partenaires commerciaux. La guerre des Malouines a montré qu'un pays tiersdoit bien réfléchir avant de menacer un pays membre de l'UE de sanctions économi-ques, car il s'expose forcément à une réaction de l'ensemble de l'UE, l'espace écono-mique communautaire n'étant plus divisé en marchés nationaux. Même les Etats-Unisdevraient aujourd'hui y réfléchir à deux fois avant de mettre à exécution des menacesde boycott à l'encontre d'un Etat membre de l'UE.

334.04 Résumé

Personne ne conteste que l'appartenance à l'UE soit juridiquement compatible avec lestatut de neutralité permanente. La politique étrangère et de sécurité commune d'au-jourd'hui permettrait à la Suisse de conserver sa neutralité, même si elle devenaitmembre de l'UE.

La question du maintien de notre neutralité ne se poserait que si les pays de l'UE dé-cidaient à l'unanimité de créer une structure de défense et de sécurité commune. Enqualité de membre de l'UE, la Suisse participerait activement à la conception d'un telsystème et de plein droit au processus décisionnel. Si une structure européenne desécurité devait être créée, offrant aux citoyens suisses au moins autant de sécurité quela neutralité armée, cette dernière pourrait perdre sa raison d'être.

Dans le domaine de la politique de sécurité, la Suisse doit, indépendamment d'uneadhésion à l'UE, redéfinir certaines orientations de sa politique actuelle. C'est la rai-son pour laquelle le Conseil fédéral a donné mandat d'établir pour 1999 un rapport surla politique de sécurité. La réorientation de notre politique de sécurité entraînera pro-bablement des réformes qui amélioreront la capacité de la Suisse à participer à la con-ception de la politique étrangère et de sécurité commune de l'UE.

Du point de vue de la politique économique extérieure la Suisse pourrait aussi défen-dre ses intérêts économiques en tant que membre de l'UE et participer de plein droit àla conception de la politique commerciale commune d'une grande puissance écono-mique.

335 Sécurité intérieure

335.01 Sécurité du citoyen

"La libre circulation des personnes (créerait) des problèmes encore plus importantsque ce n'était le cas jusqu'à présent, la criminalité potentielle est énorme et représenteun véritable danger pour la population." (H. B.-A, canton de Berne)La libre circulation des personnes vise avant tout à ouvrir le marché du travail. Rienne laisse supposer que l'arrivée de main-d'oeuvre étrangère entraînerait une aug-mentation de la criminalité.

Page 393: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 391 - Chapitre 3

L'introduction de la libre circulation des personnes ne créerait pas de nouvelles lacu-nes dans le domaine de la sécurité. Cette conclusion à première vue étonnante est liéeau fait que les pays de l'UE - dans le cadre de Schengen, puis dès l'entrée en vigueurdu Traité d'Amsterdam, au sein de l'UE - ont mis sur pied, parallèlement àl’élimination des contrôles à la frontière, un dispositif complet de mesures compen-satoires pour garantir la sécurité interne.

"Devons-nous ouvrir nos frontières aux bandes de criminels de l'Est?" (H. R., cantonde Thurgovie)L'élimination des contrôles aux frontières des Etats de l'UE est compensée par descontrôles renforcés aux frontières externes de l'UE, ainsi que par une étroite collabo-ration des services de police. Grâce à cette coopération, les pays de l'UE peuventlutter de manière efficace contre le criminalité internationale et le crime organisé auxfrontières de l'Union.

Différents actes juridiques prévoient de renforcer les contrôles aux frontières exté-rieures de l'Union et de mettre en place une collaboration notamment dans le domainedes visas, des contrôles aux frontières, de l'asile et de la police. Il existe, par exemple,des critères communs pour l'octroi par les pays de l'UE de ce que l'on appelle le visaunique. Le Système d'Information de Schengen (SIS), auquel participent pratiquementtous les pays de l'UE, et qui deviendra un instrument communautaire dès l'entrée envigueur du Traité d'Amsterdam, contient notamment des informations sur des crimi-nels recherchés ainsi que sur des personnes auxquelles un Etat membre refuse l'entréesur son territoire. Ce type de coopération permet d'appréhender des personnes recher-chées et d'écarter celles qui sont indésirables pour diverses raisons d’ordre juridique etpolitique.

La disparition des contrôles aux frontières suisses ne serait que partiellement compen-sée par une coopération plus étroite entre les pays de l'UE. La Suisse devrait adopterdes mesures internes complémentaires. Des contrôles par sondages dans les régionsfrontalières pourraient remplacer les contrôles aux frontières. Par conséquent, les or-ganes de contrôle qui contribuent au maintien de l'ordre public et de la sécurité natio-nale garderaient toute leur utilité. Il reste à vérifier comment cela pourra se faire. Il estpossible par ex. d'envisager un organe fédéral pour certaines interventions ou le ren-forcement des polices cantonales, en personnel et en moyens (voir ch. 243, let. D).

"L'ouverture des frontières (Accord de Schengen) entraînerait une nouvelle hausse dela criminalité. Avec 20% d'étrangers dans le pays, il n'y a pratiquement pas une se-maine sans meurtre dans le milieu de la drogue et de la mafia." (G. F., canton d'Argo-vie)Aujourd'hui, la seule manière efficace d'améliorer la sécurité passe par un renforce-ment de la coopération avec l’UE.

La mondialisation a changé la nature des menaces. Le terrorisme est, et demeure, unedes menaces les plus sérieuses pour la sécurité du monde. C'est ce que montre unesérie d'attentats perpétrés ces derniers temps. De même, le crime organisé et le trafic

Page 394: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 392 - Chapitre 3

de drogue internationaux augmentent constamment, ainsi que l’exploitation de clan-destins et la migration illégale à l'échelle planétaire. La Suisse est aussi concernée parces événements que ses voisins européens et les autres pays industrialisés. Le pro-blème le plus important et le plus urgent consiste à identifier les cerveaux de la crimi-nalité organisée, qu'il s'agisse des barons de la drogue, des responsables de la traited'êtres humains ou des personnes actives dans d'autres domaines criminels. Les cer-veaux agissent généralement dans le cadre de groupes difficiles à contrôler, ils sontextrêmement mobiles, parfaitement organisés et réagissent rapidement à toute mesureprise par les autorités. Les autorités nationales de justice et de police ne peuvent réa-gir efficacement à ces nouvelles formes de menaces que grâce à une stratégie harmo-nisée sur le plan international et à des instruments communs.

"L'UE ne peut pas résoudre les problèmes de la drogue et de la criminalité." (I. K.,canton de Bâle-Ville)La lutte commune des pays de l'UE contre la criminalité internationale et le crimeorganisé vient à peine de commencer. Personne en Europe ne doute qu'il faudra desefforts encore bien plus importants. Mais personne ne conteste non plus que seule lacoopération entre tous les pays européens permettra de contrôler la criminalitétransfrontalière.

Des femmes d'Europe de l'Est, d'Asie, d'Amérique du Sud et d'Afrique sont illégale-ment introduites en Europe par divers moyens, parfois exploitées dans des conditionsinhumaines et envoyées, voire vendues, d'une organisation à l'autre, d'un pays à l'au-tre. Les réseaux d'écoulement de la drogue couvrent toute la planète. Le commerce dela pornographie pédophile a pris des dimensions mondiales. Les syndicats nationauxdu crime agissent simultanément dans plusieurs régions et grandes villes d'Europe.Ceux qui blanchissent l'argent se servent du secteur mondialisé des services finan-ciers.

Ce n'est donc pas un hasard si la lutte contre ces nouvelles formes de "relations crimi-nelles internationales" est un des domaines où la coopération entre les pays de l'UE sedéveloppe actuellement très rapidement. Le renforcement de la coopération dans ledomaine de la sécurité intérieure est un des principaux changements introduits par leTraité d'Amsterdam. L'accord de Schengen, auquel tous les membres de l'UEn'avaient pas encore adhéré, sera donc repris par l'Union. Aujourd'hui déjà, Europolanalyse et évalue des informations. Grâce à l'aide de l'organisation, plusieurs cas im-portants de trafics internationaux de drogue ont déjà pu être mis au jour. Europol seradotée de nouvelles compétences au cours des cinq ans qui suivront l'entrée en vigueurdu Traité d'Amsterdam. Elle sera notamment chargée d'appuyer les Etats membresdans leurs investigations et de promouvoir la coordination de ces enquêtes. Cepen-dant, pour l'instant Europol ne pourra pas effectuer ses propres enquêtes.

"Je crains qu'en l'absence de contrôles aux frontières les criminels et les prétendusréfugiés n'envahissent le pays." (M. R., canton d'Argovie)Les frontières ne peuvent à elles seules stopper les flux migratoires et la criminalité.

Page 395: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 393 - Chapitre 3

En adhérant à l'UE la Suisse intégrerait le dispositif de sécurité communautaire et de-vrait donc abandonner les contrôles aux frontières dans leur forme actuelle. Notresystème de contrôle devrait être redéfini. Il s'agirait pour l'essentiel d'harmoniser lescontrôles internes et la coopération transfrontalière. Cette harmonisation pourrait êtreeffectuée sans changement fondamental du système actuel car, compte tenu de lastructure fédérale du pays, les contrôles internes ont toujours été un élément essentieldu contrôle policier. Cependant, comme l'a montrée l'expérience faite par la Suisseces dernières années, les contrôles aux frontières ne constituent pas un instrument suf-fisant pour freiner l'afflux d'immigrants illégaux. Le fait de s'associer à la coopérationeuropéenne en matière de sécurité permettrait à la Suisse de compléter de manièreefficace les outils dont elle dispose pour faire face au problème.

A l'examen, il s'avère que l'alternative à la coopération internationale n'est pas de ren-forcer les contrôles actuellement effectués aux frontières. Les simples refoulementsvers les pays voisins ne résolvent en aucune façon le problème migratoire, sans parlerdu drame humain que cela pose. A cela s'ajoute que toute intensification des contrôlesaux frontières constitue nécessairement une entrave au trafic frontalier qui jusqu'ici neposait pas de problème. Il est dans l'intérêt de la Suisse que le trafic légal des fronta-liers, des hommes d'affaires et des touristes soit fluide. Nul n'ignore que le problèmedu trafic des stupéfiants à Zurich était en majorité dû à des personnes qui ne résidaientpas dans la ville. Si pour y répondre l'on avait introduit des contrôles aux frontièrescantonales plutôt que de renforcer la coopération internationale, cette idée aurait, àjuste titre, été décriée comme étant absurde.

Par conséquent, la lutte contre l'immigration illégale, le trafic des stupéfiants, le crimeorganisé et le terrorisme appelle aussi bien des mesures nationales qu'une coopérationinternationale axée sur la confiance et fondée sur une base légale. Compte tenu de ladimension transfrontalière des organisations criminelles et terroristes, le Conseil fédé-ral ainsi que les gouvernements des Etats membres de l'UE n'ont cessé de rappeler quela coopération internationale doit être développée, intensifiée et accélérée. Cela vautnotamment pour l'harmonisation et la collaboration dans le cadre de la politique devisas et d'asile, la coordination de mesures nationales pour prévenir, découvrir et trai-ter judiciairement les délits transfrontaliers ainsi que la coopération dans le domainedu renseignement. La Suisse n'étant entourée que de pays membres de l'UE, à l'ex-ception du Liechtenstein, une coopération plus étroite avec ces derniers s'impose.

La Suisse mène depuis 1995 des négociations avec tous ses voisins afin de développeret de consolider la coopération transfrontalière. Depuis lors, des accords de coopéra-tion policière et judiciaire ainsi que de réadmission ont été signés avec la France etl'Italie666. Les travaux sont sur le point d'être conclus avec l'Allemagne et l'Autriche.Tous ces accords constituent des éléments essentiels pour le renforcement de la sécu-rité intérieure et de nos relations bilatérales. Mais ils ne permettront pas à la Suisse des'intégrer pleinement dans l'espace communautaire de droit et de sécurité en train de

666 Voir message du 14 décembre 1998 concernant divers accords bilatéraux de coopération policière et judi-

ciaire avec la France et l’Italie ainsi qu’une modification de la loi sur le séjour et l’établissement des étran-gers, FF 1999 I....

Page 396: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 394 - Chapitre 3

se construire en Europe. Les contrôles aux frontières, la politique et l'octroi des visas,la politique d'asile ainsi que le raccordement au Système d'Information de Schengen(SIS) sont notamment exclus de la coopération bilatérale. Ces domaines ne peuventfaire l'objet d'accords bilatéraux entre des pays de l'UE et la Suisse, car dans ce do-maine nos voisins ont transféré leurs compétences à l'UE ou à l'organisation deSchengen. Or, ce sont précisément ces questions qui jouent un rôle particulièrementimportant dans la diminution des migrations illégales. Renforcer la coopération avecInterpol n'est pas une solution non plus. D'ailleurs, tous les pays de l'UE sont mem-bres d'Interpol.

"Europol rassemble des informations sur les citoyens européens mais n'est pas capablede lutter avec efficacité contre la criminalité internationale."(Extrait de: W. Eutterknecht: Die EU durchleuchtet, Radika Verlag, Stans)La convention Europol n'est entrée en vigueur qu'en 1998. Par conséquent, Europoln'avait avant cette date aucune compétence pour stocker des données personnelles. Ace jour, Europol est loin d'être une puissante organisation policière au service desEtats membres de l'UE. Mais il sera impossible de lutter avec efficacité contre la cri-minalité internationale sans renforcer Europol et sans système informatique appro-prié.

Contrairement à la libre circulation des marchandises, des services, des capitaux etdes personnes, la justice et la police restent confinées dans leurs frontières nationales.Par conséquent, les forces de répression et les criminels ne jouent pas à armes égales.Aujourd'hui, les policiers d'Europol sont en quelque sorte en train de jeter des pontsentre les polices nationales des pays de l'UE. Près de quarante chargés de liaison etassistants techniques issus des quinze Etats membres de l'Union travaillent auprèsd’Europol. Ils s'occupent essentiellement d'assurer l’efficacité du flux transnationald’informations. Les activités d'Europol sont soumises à des conditions très strictes enmatière de protection des données, qui offrent des garanties contre toute forme d'abus.Il existe un autre instrument important, le système informatique (SIS), qui donne auxpolices nationales l'accès direct et rapide aux données disponibles. Ceci évite souventdes recourir à Interpol qui, naturellement, met plus de temps pour répondre à une de-mande qu'un service en ligne. Le SIS contient des renseignements sur des délinquantsfaisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sur des témoins, des personnes disparues, des re-quérants d'asile interdits de séjour dans d'autres pays, des véhicules suspects, etc.Aujourd'hui, sur le plan international, il est impensable de vouloir lutter avec effica-cité contre le crime organisé (notamment le trafic de drogue, d'armes et d'êtres hu-mains) sans disposer d'un système informatique performant.

Tant que la Suisse n'aura pas accès à la banque de donnée qu'Europol est en train deconstituer ainsi qu'à celle du SIS, il lui manquera des moyens auxiliaires importantspour accéder à des informations à jour sur des criminels actifs sur le plan internationalet connus des services de police européens. La Suisse ne pouvant pas profiter del'analyse de la criminalité faite dans une perspective européenne, elle risque de dé-couvrir trop tard les projets que le crime organisé est en train d'établir pour pouvoirles étouffer dans l'oeuf. Les traités fondamentaux de la Communauté européenne ne

Page 397: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 395 - Chapitre 3

touchent pas aux compétences des Etats membres en matière de sécurité intérieure. Lacréation de l'Etat fédéral il y a 150 ans n'a pas remis en cause l'existence des policescantonales et communales et ce ne serait pas davantage le cas si la Suisse adhérait àl'UE. Toutefois, dans notre pays aussi, la lutte centralisée contre certaines formes decriminalité (par ex. le trafic de stupéfiants et le blanchiment d'argent) s'est avérée in-dispensable. La coopération en matière de sécurité intérieure relève clairement duprincipe de subsidiarité: des solutions communes ne sont recherchées que pour desproblèmes qui peuvent être mieux réglés dans un cadre élargi.

335.02 Asile et immigration

"A mon avis, la politique à l'égard des étrangers et des requérants d'asile a échappé auConseil fédéral." (E. R., canton de Zurich)La Suisse aurait plus de moyens d’action en tant que membre de l’UE. La politiqueactuelle, taillée aux mesures de la situation dans le pays, pourrait être mieux coor-donnée, ce qui serait avantageux pour la Suisse sur le plan des ressources financièreset humaines. Indépendamment de l'adhésion à l'UE, l'objectif de la politique d'asilesuisse est de mériter le qualificatif d'"humanitaire" et de tenir compte du sentiment dejustice et du besoin de sécurité de la population.

A l'instar de la Suisse, l'UE considère la Convention de Genève sur les réfugiés et laConvention européenne des droits de l'homme comme une des bases d'une politiqueeuropéenne des migrations. La protection offerte à ceux qui fuient la violence, aussilongtemps que cela est nécessaire, en fait également partie. Cependant, avec les mesu-res contraignantes prévues dans la législation relative aux étrangers (1994) et l'arrêtfédéral d'urgence dans le domaine de l'asile et des étrangers (1998), la Suisse lutteaussi contre les abus manifestes d'hospitalité commis.

La Suisse n'étant pas signataire de l'Accord de Dublin qui lie les pays de l'UE (voirch. 244), elle devient le lieu vers lequel convergent les personnes dont la demanded'asile a été rejetée dans l'UE. Ceci deviendra encore plus fréquent lorsque le systèmeautomatisé d’empreintes digitales (Eurodac) deviendra opérationnel dans l’ensembledes Etats membres de l’UE. Ainsi, en adhérant à l’UE, la Suisse pourrait améliorer sacapacité d’action dans le domaine de l’asile.

"Comment expliquez-vous l'arrivée massive de requérants d'asile?" (R. B., canton deZurich)Il y a de nombreux demandeurs d’asile en Suisse en raison du conflit au Kosovo, del'existence en Suisse d'un réseau social de kosovars, de l'isolement de la Suisse enEurope et de l'attrait exercé par le niveau d'assistance offert. Il faut cependant direque ce n'est pas une adhésion à l'UE qui attirerait plus de requérants d'asile, mais lechoix de la voie solitaire.

Ces dernières années, les migrations de masse ont aussi touché l'Europe. Elles ontpour cause les conflits armés, les troubles sociaux, le déclin économique dans certai-nes régions ainsi que l'augmentation de la mobilité. La recherche de la sécurité et de

Page 398: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 396 - Chapitre 3

la prospérité attirent beaucoup de gens en Suisse. En acceptant collectivement les ré-fugiés bosniaques fuyant les violences, la Suisse s'est déclarée prête à accorder provi-soirement refuge à d'autres personnes dans la même situation. Le fossé Nord-Sud etles dispositions plus restrictives en matière d'immigration et de naturalisation, ont faitque la procédure d'asile a également été utilisée à d'autres fins que l'accueil de réfu-giés classiques au sens de la convention sur les réfugiés. Les causes de la situationexceptionnelle que connaît actuellement le domaine de l’asile sont: le conflit au Ko-sovo, l'assistance apportée aux quelques 150 000 travailleurs du Kosovo qui sont lé-galement en Suisses, l'isolement de la Suisse en Europe dans le domaine de la politi-que d'asile et enfin le niveau élevé d'assistance offert par la Suisse.

Il est vrai que la Suisse est particulièrement touchée par le nombre croissant de requé-rants d'asile en Europe occidentale. Si l'on compare le chiffre annuel des demandesd'asile d'autres pays d'Europe de l'Ouest par rapport à leur population et si l'on com-pare ce ratio avec celui de la Suisse, il s'avère que la Suisse qui compte 7 millionsd'habitants reçoit proportionnellement plus de demandes d'asile que les autres paysd'Europe (voir tableau 9). En 1992, l'année où l'on a enregistré le plus grand nombrede demandes d'asile en Europe occidentale, 2,6% des requérants ont déposé leur de-mande en Suisse. En 1996 ce chiffre est passé à 7,6% et il n'est pas impossible qu'ildouble de nouveau en 1998 pour atteindre 15%.

Page 399: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 397 - Chapitre 3

Tableau 9

Statistiques sur l’asile en Europe667

Pays Demandes d’asile1997

Distribution des requérants d'asile dansles pays indiqués en 1997(entre parenthèses: 1996)

Population(en 1000)

Suisse 23 897 8.99% (7.36%) 6 813Allemagne 104 353 39.27% (47.59%) 80 975Belgique 11 575 4.36% (5.08%) 9 998Danemark 5 100 1.92% (2.41%) 5 158Espagne 4 975 1.87% (1.93%) 39 092Finlande 973 0.37% (0.29%) 5 008France 19 983 8.06% (7.12%) 57 182Grande-Bretagne 32 502 15.62% (15.13%) 57 649Irlande - 1.46% (0.37%) 3 486Italie 1 712 0.64% (0.28%) 57 782Norvège 2 277 0.86% (0.73%) 4 288Pays-Bas 34 443 12.96% (9.35%) 15 158Suède 1 241 3.62% (2.36%) 8 652

Distribution des requérants d'asile dans les pays indiqués en 1998

Février Avril Juin Août Septembre OctobreSuisse 11.41% 11.53% 11.45% 11.22% 14.30% 17.02%Allemagne 29.67% 30.22% 32.39% 29.65% 30.12% 30.27%Belgique 5.13% 5.33% 5.80% 8.21% 7.81% 8.03%Danemark 1.65% 2.35% 2.34% 1.37% 1.04% 1.56%Espagne 2.23% 2.69% 1.98% 2.00% 1.93% 1.94%Finlande 0.46% 0.32% 0.51% 0.47% 0.37% 0.32%France 9.37% 8.01% 7.10% 5.57% 5.92% 5.45%Grande-Bretagne 13.07% 14.63% 14.72% 15.64% 13.90% 14.37%Irlande 2.10% 1.90% 1.81% 1.44% 0.98% 0.71%Italie 3.11% 0.78% 1.24% 2.40% 1.56% 0.89%Norvège 5.47% 3.61% 2.31% 2.03% 1.69% 1.89%Pays-Bas 12.55% 14.97% 13.73% 14.63% 15.94% 13.94%Suède 3.79% 3.67% 4.61% 5.36% 4.44% 3.59%

La mesure dans laquelle les prestations d'assistance accordées en Suisse encourage-raient les requérants à présenter leur demande en Suisse n'a pas été scientifiquementétabli. En Suisse, les aides accordées aux requérants d'asile sont inférieures de 20% àcelles dont bénéficient les citoyens suisses. Le niveau d'assistance suisse correspond àpeu près à celui des Pays-Bas et des pays nordiques. Il résulte d'une étude commandéepar la Confédération668 portant sur une comparaison des prestations accordées auxrequérants d'asile qu'au Danemark, en Allemagne et en Suisse les aides étaient four-nies aux requérants d'asile dans le cadre d'un système global. En Italie et en Autricheles aides publiques sont limitées, soit parce que des catégories entières de requérantsd'asile sont complètement exclues des prestations publiques (par ex. les requérantssans papiers, les requérants d'asile provenant de pays sûrs (safe countries), les requé-

667 Source: Inter-Governmental Consultations on Asylum, Refugee and Migration Policies in Europe, North

America and Australia, ainsi que Meyers Lexikon. L'Autriche, la Grèce, le Luxembourg et le Portugal, paysmembres de l'UE, ne sont pas pris en compte dans cette statistique.

668 Comparaison entre les prestations sociales versées aux requérants d'asile dans cinq pays européens,Schweizerisches Forum für Migrationsstudien, Forschungsbericht Nr. 12, Neuchâtel 1998.

Page 400: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 398 - Chapitre 3

rants déboutés après l'expiration du délai fixé pour leur départ), soit parce que lesprestations sont limitées dans le temps. Dans ces cas, ce sont des organisations carita-tives ou privées qui prennent le relais. Si l'on ne tient pas compte de ces limitationscatégorielles ou temporelles, il apparaît que le montant des aides de base varie beau-coup plus entre les cantons suisses qu'entre la Suisse et les autres pays d'Europe occi-dentale669. C'est en fonction de critères objectifs que l'on détermine quel Etat membrede l'UE est responsable du traitement d'une demande d'asile (Convention de Du-blin)670. Par conséquent, les requérants d’asile ne peuvent pas choisir le pays où lesprestations d'assistance sont les plus élevées pour y déposer une demande.

La coopération entre les Etats membres de l'UE a permis de canaliser les migrationsen Europe et de mettre en oeuvre des programmes d'action communs pour faire face àl'afflux massif de réfugiés. Ces Etats disposent ainsi d'instruments pour faire face auproblème des migrations de masse. Ne pouvant pas coopérer avec les pays de l'UE, laSuisse doit se contenter de mesures nationales pour réagir à la pression migratoireconstante. Toutefois, ces mesures nationales sont quasiment épuisées671.

335.03 Résumé et mesures internes

Si la Suisse ne veut pas devenir le refuge de criminels recherchés dans toute l'Europeou la plaque tournante et la base logistique d'organisations criminelles actives sur leplan international - en d'autres termes un îlot d'insécurité - elle devra coopérer davan-tage avec les autres pays pour s'opposer à cette menace, ce qui est aussi dans l'intérêtde l'UE672. Les accords bilatéraux de coopération policière conclus ou en cours denégociation avec les pays voisins, constituent un pas dans cette direction. Les fonc-tionnaires de police chargés de la liaison et présents à différents points chauds de lacriminalité internationale servent le même objectif. A eux seuls, ces instruments necompensent toutefois que partiellement le déficit institutionnel et l'accès limité auxinformations.

Il est impossible de dire à ce jour si les Etats membres de l'UE seront prêts à entamerdes négociations avec la Suisse en matière de sécurité intérieure après l'entrée en vi-gueur du Traité d'Amsterdam. Comme le montrent les expériences faites jusqu'ici, lesnégociations seront longues et difficiles, et le prix à payer sur le plan de la souverai-neté sera élevé. Selon les prévisions, l'adhésion à l'Union serait donc le meilleur

669 Ainsi, l'aide de base pour une personne seule s'élève à 372.- francs par mois à Berne, à 425.- francs au Da-

nemark, à 432.- francs en Allemagne, à 462.- francs en Autriche et à 598.- francs à Genève.670 Parmi ces critères il y a notamment la reconnaissance du statut de réfugiés aux membres d'une famille, une

autorisation de séjour valable ou un visa valable dans un Etat membre. L'Etat responsable de l'entrée sur leterritoire communautaire est un autre élément pour décider de la compétence. Si aucun de ces critères nejustifie concrètement la compétence d'un Etat membre, c'est le premier Etat membre auprès duquel une de-mande a été déposée qui est compétent pour traiter du cas.

671 Voir A. Ackermann/M. Hertig, Europäischer Asylraum, Einwanderung von Drittstaatenangehörigen und dieSchweiz, dans: Cottier/ Kopše, L'adhésion de la Suisse à l'Union européenne - Enjeux et conséquences, Zu-rich 1998, p.573 et ss, avec d'autres renvois.

672 A cet égard, voir: R. Wyss, Die internationale Polizeizusammenarbeit, dans: Solothurner Festgabe zumSchweizerischen Juristag 1998, p. 691 et ss, 703.

Page 401: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 399 - Chapitre 3

moyen de compenser totalement le déficit suisse en matière de sécurité. Dans ce casde figure, la Suisse pourrait créer des centrales nationales qui participeraient au Sys-tème d'Information de Schengen et collaboreraient avec Europol.

Dans le domaine de l’asile, compte tenu de la coopération de plus en plus étroite entreles pays de l'UE, une non-adhésion ferait de la Suisse le pays d'accueil des deman-deurs d'asile déboutés ailleurs. Il faudrait donc s'attendre à une augmentation massivedes demandes d'asile ainsi qu'à des coûts supplémentaires de l'ordre de plusieurs cen-taines de millions de francs par an.

En cas d'adhésion de la Suisse à l'UE, le Conseil fédéral examinera les mesures àadopter dans le domaine de la sécurité intérieure et de l'asile, notamment pour com-penser la suppression des contrôles à la frontière par des mesures internes. Les con-trôles à la frontière pourraient être remplacés par des contrôles par sondages dans leszones frontières. On pourrait imaginer un organe fédéral chargé de certaines interven-tions ou un renforcement des polices cantonales en matériel et en personnel. De tellesadaptations pourraient être apportées sans qu'une refonte totale du système actuel nesoit nécessaire.

336 Arguments pour et contre l'adhésion à l'UE

La présente synthèse des avantages et des inconvénients d'une adhésion de la Suisse àl'Union européenne n'a pour vocation que de servir de base de réflexion au citoyensuisse à qui il appartiendra de peser le pour et le contre. Dans l'optique du Conseilfédéral, qui tient moins compte des intérêts particuliers que de l'intérêt de la Suissedans son ensemble, cette synthèse est le fil d'Ariane dans le dédale des informationsexistantes.

La question d'une adhésion de la Suisse à l'UE est avant tout une question de naturepolitique qui touche aussi l'économie, le bien-être de la population et la paix. Pourbeaucoup d'Etats européens, l'adhésion à l'UE a été, ou est, la clé d'une paix durable,de la prospérité économique et de la codécision quant aux questions intéressant l'en-semble du continent.

Les coût de l'adhésion peut, en l'état actuel de nos connaissances, être situé à entre 3,1et 3,9 milliards de francs par an, que contrebalance une extension importante de lamarge de décision et de manoeuvre. L'utilité d'une adhésion pour notre économie(avant tout pour la production de marchandises et les prestations touristiques) est pro-bable à long terme, mais elle est impossible à démontrer à ce stade. Il faut aussi met-tre dans la balance les meilleures chances dont notre jeunesse, nos chercheurs, nosartistes et les personnes à la recherche d'un emploi disposeraient dans le domaine dela formation et de l'emploi. Il faut en outre tenir compte des mécanismes de solidaritéentre les Etats membres qui permettraient à la Suisse de s'opposer aux tentatives depression exercées par des autorités non européennes (voir ch. 334.03). Le fait que laSuisse pourra rechercher des solutions à des problèmes qui peuvent être au mieux ré-glés à l'échelle du continent (conditions du marché intérieur, libérales et socialement

Page 402: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 400 - Chapitre 3

acceptables sur tout le continent; liberté des personnes, des entreprises et des idées;lutte efficace contre la criminalité; répartition équitable des charges dans le domainedes réfugiés; représentation des valeurs fondamentales de l'Europe dans le monde en-tier) et participer aux décisions que si elle est membre de plein droit de l'UE, à l'égalde la grande majorité des pays européens, plaide en faveur de l'adhésion. Par contre,les positions défendues par la Suisse peuvent être ignorées par une majorité des autresEtats membres et certaines des particularités qui nous tiennent à coeur (droits populai-res, équilibre fédéral, système fiscal, gouvernement restreint) seraient touchées et de-vraient éventuellement être adaptées.

Le fait que certaines questions importantes pour notre pays ne soient pas encore ré-glées sur le plan communautaire (questions fondamentales relatives à la sécurité, à laconcurrence fiscale, au système social et au cadre institutionnel de l'UE) et que laSuisse pourrait donc participer aux décisions qui seront prises, milite en faveur d'uneadhésion prochaine à l'UE. En revanche, la Suisse devrait accepter que la plupart desquestions relevant du droit économique transfrontalier soient déjà réglées dans l'UE etque, dans les secteurs restant, les règles communautaires soient adoptées à la majoritédes voix lors des votes auxquels la Suisse pourrait participer. Le fait que l'adoption dela monnaie unique, l'euro (au terme d'une période transitoire à négocier) ferait baisserles frais de transaction et disparaître le risque de spéculation sur le franc suisse est unautre argument en faveur de l'adhésion. En revanche, il faut s'attendre à ce quel'adaptation soit parfois douloureuse au début, les intérêts et les loyers pourraientaugmenter, alors que les salaires et les prix pourraient baisser.

L'adhésion devrait favoriser une répartition plus équitable des charges en matièred'asile, mais aurait également pour conséquence que les contrôles à la frontière despersonnes et des marchandises disparaîtraient; toutefois, une coopération policièreeuropéenne efficace (contrôle commun des frontières externes de l'UE, Europol) nouspermettra de nous attaquer aux problèmes de sécurité intérieure.

Une adhésion serait désavantageuse dans la mesure où la Suisse perdrait, comme tousles autres pays de l'UE, le droit de conclure ses propres accords commerciaux avecdes pays non européens. Par contre, elle profiterait de la puissance économique del'UE qui conclut de tels accords pour le compte de ses membres.

Les citoyens jouiraient d'une protection juridique élargie car ils pourraient faire valoirles droits que leur reconnaît le droit communautaire devant des tribunaux ordinaires.Ils auraient également la possibilité de saisir la Cour de justice des CE contre certai-nes mesures décidées par les institutions communautaires.

Dans le domaine de l'agriculture, comme pour certaines branches de l'industrie et desservices jusqu'ici protégées de la concurrence étrangère, la protection aux frontièresdisparaîtrait à l'égard de l'UE. Les prix des produits et des services baisseraient. Parailleurs, les moyens de production importés d'Europe seraient moins chers et, surtout,les débouchés pour les produits suisses de qualité s'amélioreraient considérablement.Dans tous les cas, le processus d'adaptation des structures de l'agriculture suisse se

Page 403: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 401 - Chapitre 3

poursuivra, avec ou sans adhésion à l'UE. Cependant, compte tenu des changementsimportants dans l'agriculture, l'adhésion à l'UE nécessiterait des périodes transitoiresappropriées. Le passage de la TVA à 15% qui apporterait des recettes considérables àla Confédération (plus de 15 milliards de francs par année, sans tenir compte d'éven-tuelles augmentations de la TVA dans le cadre de la 11e révision de l'AVS), pourrait,selon la conjoncture, freiner provisoirement la croissance économique de la Suisse etdevrait être compensé par une réduction d'autres charges (par ex. des impôts directs etdes prélèvements sociaux) pesant sur la population. Sur le plan politique, l'augmenta-tion de la quote-part de l'Etat et la refonte radicale du système fiscal suisse qui en ré-sulteraient, donneraient lieu à d'âpres débats dans le pays.

Comme le montrent les exemples de la Finlande et de l'Autriche, l'adhésion à l'UEn'aurait pas d'incidence sur le maintien de la neutralité suisse. En adhérant à l'UE, laSuisse resterait neutre et s'engagerait à participer à la mise sur pied d'un système glo-bal de sécurité sur tout le continent, système qui augmenterait sa sécurité. Cependant,dans les situations mettant en péril sa neutralité, elle pourrait prendre ses distances ens'abstenant de manière constructive.

Dans son évaluation globale des intérêts en jeu, le Conseil fédéral tient en outrecompte d'un certain nombre d'autres facteurs. Il s'attend à ce que l'adhésion à l'UErenforce la cohésion nationale et le rayonnement du pays, que la représentation desintérêts de l'Etat s'améliore nettement grâce à notre participation aux nombreux orga-nes multilatéraux de l'Union européenne, que l'appareil d'Etat et la densité de la ré-glementation aient plutôt tendance à diminuer qu'à s'alourdir, et que la politique d'ou-verture européenne, allant de pair avec une adhésion, renforce la concurrence, ce quiencouragerait les réformes internes et la revitalisation des forces nationales qui sontindispensables.

Les cinq questions fondamentales que le Conseil fédéral estime être au coeur du débatsur l'intégration de la Suisse sont abordées ci-après.

Page 404: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 402 - Chapitre 3

Page 405: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 403 - Chapitre 4

4 Questions fondamentales et conclusion

Comme on le sait, ce qui pour l'un représente un avantage, peut être un inconvénientpour l'autre. Ainsi, un nouveau tronçon d'autoroute entre Aarau et Baden sera unebonne chose pour les pendulaires, mais plutôt une nuisance sonore pour les riverains.Il en est de même de la plupart des changements dans la vie, ainsi que des transfor-mations liées à l'adhésion ou au refus d'adhérer à l'UE. Les instances politiques nepeuvent décréter quels sont les changements positifs et ceux qui sont négatifs. C'est lecitoyen qui doit en juger en fonction de ses intérêts, de ses valeurs et de l'appréciationde l'intérêt global du pays673.

Comme nous l'avons vu au chapitre 1, le rapport sur l'intégration 1999 est censé four-nir une base cohérente, objective et claire pour tous les intéressés en vue du débat surl'intégration que le Parlement et le pays doivent mener. Les faits exposés dans le pré-sent rapport, ainsi que les attentes relatives à l'évolution des relations entre la Suisseet l'UE, devraient contribuer à aider chacun en Suisse à peser le pour et le contre. Acet égard, les intérêts individuels, matériels ou philosophiques, concernant notammentla formation, l'emploi, le revenu, les impôts, la liberté de circulation et l'organisationdes loisirs comptent autant que les intérêts collectifs relatifs aux droits populaires, à lasécurité intérieure et extérieure, ainsi qu'à l'identité et à la dignité nationale. Les par-tis, les associations et d'autres groupes d'intérêt élaboreront d'autres bases décision-nelles en fonction des intérêts de leurs membres.

Conformément aux règles de la démocratie directe, le jour du référendum, la sommedes décisions de tous les Suisses déterminera l'adhésion, ou non, de la Suisse àl'Union européenne.

Après la mise en oeuvre prioritaire des résultats des négociations sectorielles, l'étapela plus importante dans le domaine de l'intégration ne sera pas l'adhésion à l'UE, maisplutôt la décision du Conseil fédéral de préparer concrètement l'adhésion de la Suisseà l'UE, et donc d'entamer des négociations d'adhésion, d'examiner parallèlement enprofondeur les mesures d'ordre politique ou économique, nécessaires ou souhaitablesau cas où le pays adhérait à l'UE et de les préparer en étroite collaboration avec lesintéressés. Sans ces préparatifs, aucune décision démocratique, en faveur ou contrel'adhésion de la Suisse à l'UE ne sera jamais possible.

673 A cet égard, voir R. Von Jhering, Der Kampf ums Recht, 1872: "Au fil du temps, dans le cadre du droit

existant, les intérêts de milliers d'individus et de peuples entiers se sont liés de telle manière que ce droit nesaurait être éliminé sans offenser ces derniers au plus haut point; mettre en cause la règle de droit ou le dis-positif signifie déclarer la guerre à tous ces intérêts, arracher un poulpe qui s'était cramponné avec des mil-liers de bras. Chacune de ces tentatives provoque donc, et cela ne fait que confirmer un instinct de conser-vation naturel, la plus vive résistance de la part des intérêts menacés et par conséquent une lutte où, commedans tout combat, l'issue est déterminée non pas par le poids des arguments, mais par le rapport des forcesqui s'opposent, si bien qu'il n'est pas rare que l'on obtienne le même résultat que dans le parallélogramme desforces: une déviation par rapport à la ligne initiale vers la diagonale."

Page 406: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 404 - Chapitre 4

L'important pour le Conseil fédéral est que notre pays s'éloigne des interminables dé-bats sur le choix de la voie à suivre, sur les avantages et les inconvénients de l'Unioneuropéenne à l'heure actuelle, ainsi que sur la question tactique de savoir si c'est lebon moment pour la Suisse d'accomplir de nouveaux pas vers l'intégration. La straté-gie d'adhésion qu'il a développée depuis 1991 perdra sa crédibilité s'il n'est pas en me-sure d'entreprendre des démarches qui préparent concrètement la décision d'adhésionque le peuple et les cantons devront prendre. Il faut pour cela que le Conseil fédéralait un appui politique dans le pays. C'est le seul moyen pour lui de s'engager dans desnégociations avec détermination et de préparer parallèlement les mesures politiques,économiques et financières nécessaires ou souhaitables en cas d'adhésion.

Le débat qui doit être mené sur l'initiative populaire "Oui à l'Europe!" et sur le contre-projet indirect du Conseil fédéral (voir ch. 312.01) apportera de précieuses indicationssur l'existence d'un appui dans le pays en faveur de la préparation de l'adhésion àl'UE. Le présent rapport doit servir à mener ce débat sur la base d'une représentationréaliste des faits. Afin d'éviter malentendus et téléscopages, le Conseil fédéral n'a pasl'intention de décider de l'ouverture de négociations d'adhésion avant que la procédured'approbation des accords sectoriels ne soit achevée. Le Conseil fédéral part de l'idéeque cette procédure d'approbation peut être achevée sans ajournements.

Le Conseil fédéral estime que les questions de la population, dont des extraits ont étéreproduits au chapitre 3, peuvent être résumées de la manière suivante:

Les intérêts généraux de la Suisse seront-ils mieux défendus si la Suisse est membrede l'UE ou si elle reste en dehors?

Depuis des années le Conseil fédéral examine l'évolution des relations Suisse - UE,ainsi que les possibilités de l'influencer. Certes, tant le Conseil fédéral que les ci-toyens suisses ne pourront juger de manière définitive de la question de l'adhésion quelorsque les résultats des négociations d'adhésion seront connus. Le Conseil fédéralsouhaite néanmoins présenter les faits dans ce rapport, afin que chacun puisse com-mencer à peser le pour et le contre. Le Conseil fédéral n'ignore pas que l'on peut ap-précier de manière très différente les intérêts en jeu. Il lui incombe de promouvoirl'intérêt prépondérant favorisant le bien-être idéal et matériel de toute la Suisse, et depréparer les décisions nécessaires à cet égard, en l'occurrence l'adhésion à l'UE, avantde les soumettre au verdict populaire. Ce n'est qu'au terme des négociations que leConseil fédéral décidera lui aussi, à la lumière de toutes les solutions envisagées et detoutes les modalités d'adhésion, si la Suisse signera le traité d'adhésion.

Comment préserver la liberté d'action et l'autodétermination de la Suisse?

Le Conseil fédéral entend par liberté d'action le degré le plus élevé possible d'autodé-termination de l'avenir du pays (voir le rapport sur la politique étrangère de la Suissedans les années 90). Pour connaître les limites de l'autodétermination il faut aujour-d'hui coopérer étroitement sur le plan international et participer largement aux travauxdes organisations internationales. En Europe, seuls quelques pays pratiquent encore

Page 407: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 405 - Chapitre 4

l'autodétermination dans les limites nationales pour se démarquer des autres, alors quela plupart la pratiquent en collaborant avec les autres Etats pour déterminer ensemblele cadre communautaire. Dans quelle voie la Suisse - un pays qui a beaucoup à perdreet à gagner - doit-elle s'engager? Où serons-nous davantage maîtres de notre destin, àl'intérieur ou à l'extérieur de l'Union européenne, laquelle englobera bientôt pratique-ment tous les pays d'Europe occidentale?

Comment la Suisse peut-elle garantir la prospérité pour les générations futures?

Pour répondre à cette question, il faut avant tout que chacun décide lui-même sil'adhésion à l'Union européenne va plutôt renforcer ou affaiblir le pôle économiquesuisse, ou si le fait de choisir la voie solitaire (que ce soit de manière modérée, parexemple dans le cadre de l'Accord EEE ou de manière plus radicale) profite davan-tage à la majorité des Suisses. Les différents types de calculs économiques effectués àcet égard donnent des résultats divergents sur l'avantage économique d'une adhésionou d'un refus d'adhérer. Cependant, le Conseil fédéral estime que ces résultats sontmoins importants que la question clé qui est de savoir si les opérateurs économiquessuisses sont prêts et déterminés à exploiter de façon optimale les libertés économiqueset les conditions de concurrence en vigueur dans l'UE. Là non plus, il n'y a pas de ré-ponse simple. Voulons-nous continuer de promouvoir notre richesse relative en cam-pant sur un espace économique protégé par des frontières nationales, ou voulons-nousintégrer la Suisse dans la zone économique européenne et la développer sans barriè-res?

Comment protéger au mieux la sécurité de tous les Suisses?

Outre les différentes libertés au sein de l'UE, la construction d'un espace européen desécurité constitue une des principales nouveautés influant directement sur la sécuritédes citoyens. Dans le domaine de l'asile, l'exclusion de la Suisse de la participation àl'espace de sécurité en train de se mettre en place en Europe pourrait avoir pour con-séquence que la Suisse devienne plus attrayante pour les requérants d'asile et ceux quiveulent se protéger, à l'intérieur et à l'extérieur de l'espace communautaire, et que l'onencourage les activités des passeurs qui organisent l'entrée illégale de personnes sur leterritoire suisse. Il existe en outre le danger que la Suisse serve de refuge aux person-nes recherchées dans l'UE ainsi qu'aux organisations criminelles agissant sur le planinternational. Le renforcement des contrôles physiques à la frontière ne permettra pasde pallier ces répercussions négatives, même si la Suisse se dote des moyens finan-ciers et humains pour ce faire.

Comment préserver l'identité suisse?

Contrairement aux questions sur la meilleure façon de préserver la liberté, d'assurer laprospérité et sur les moyens de promouvoir la sécurité intérieure et extérieure où desintérêts divergents peuvent l'emporter en fonction de la manière dont chacun évalue lasituation, en matière d'identité ce ne sont pas les intérêts opposés qui importent leplus, mais plutôt un regard critique sur sa propre histoire et sur la diversité de l'UE

Page 408: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 406 - Chapitre 4

telle qu’elle existe actuellement. Qu’est-ce qui unit le plus les Suisses: un comporte-ment plutôt défensif ou l'engagement confiant dans de nouveaux espaces de liberté?Où pouvons-nous durablement entretenir et développer les valeurs fédérales, démo-cratiques et sécuritaires à la base de l'identité suisse: à l'intérieur ou à l'extérieur del'UE?

Conclusion

Les réponses à ces questions cruciales revêtent une importance fondamentale pourl'avenir de notre pays. Chacun en Suisse doit trouver ses propres réponses. Le rapportsur l'intégration offre à cet égard une base de travail. Le Conseil fédéral suivra, et a laferme volonté de suivre, dans l'intérêt de notre pays et avec un appui politique interne,la voie qui, à ses yeux, sert le mieux les intérêts généraux du pays. Quoi qu'il en soit,dans quelques années le peuple et les cantons suisses auront le dernier mot quant à laquestion de la place future de la Suisse dans une Europe intégrée.

Le Conseil fédéral espère que le débat public sur la politique d'intégration suisse seracontradictoire et animé. Les questions à discuter méritent un débat politique qui ailleau-delà de la répétition de vieux slogans. Le débat devrait avant tout permettre à cha-cun de se forger une opinion en se fondant sur des faits. Le Conseil fédéral ne ména-gera aucun effort pour que ce débat ne divise pas la Suisse, mais la renforce.

Ce n'est que si notre pays s'engage dans cette voie, dans un effort collectif et convain-cu de sa volonté de participer à la construction de l'Europe, en connaissant les chan-gements qu'entraînerait une adhésion à l'UE, que le Conseil fédéral pourra mener lesnégociations d'adhésion avec l'appui nécessaire et donc préparer la position que laSuisse devrait à son avis occuper en Europe.

Page 409: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport d'intégration 1999 - 407 - Annexe

Annexe: Tables de concordance entre les anciennes et les nouvelles numérotations des traités UE et CE

L’article 12 du Traité d’Amsterdam prévoit que les articles, les titres et les sections duTraité sur l’Union européenne (Traité UE) et du Traité instituant la Communauté eu-ropéenne (Traité CE) soient renumérotés pour tenir compte de modifications intro-duites par le Traité d’Amsterdam. Dès l’entrée en vigueur de ce traité (probablementau cours de 1999), c’est la nouvelle numérotation figurant dans les tableaux ci-dessous qui remplacera la numérotation actuelle. Dans le présent rapport, il n’est faitusage que de l’ancienne numérotation.

A. Traité sur l’Union européenne

Numérotation Numérotationancienne nouvelle ancienne nouvelleTitre I Titre I Titre VI (***) Titre VI Article A Article 1 Article K.1 Article 29 Article B Article 2 Article K.2 Article 30 Article C Article 3 Article K.3 Article 31 Article D Article 4 Article K.4 Article 32 Article E Article 5 Article K.5 Article 33 Article F Article 6 Article K.6 Article 34 Article F.1 (*) Article 7 Article K.7 Article 35Titre II Titre II Article K.8 Article 36 Article G Article 8 Article K.9 Article 37Titre III Titre III Article K.10 Article 38 Article H Article 9 Article K.11 Article 39Titre IV Titre IV Article K.12 Article 40 Article I Article 10 Article K.13 Article 41Titre V (***) Titre V Article K.14 Article 42 Article J.1 Article 11 Titre VIa (**) Titre VII Article J.2 Article 12 Article K.15 (*) Article 43 Article J.3 Article 13 Article K.16 (*) Article 44 Article J.4 Article 14 Article K.17 (*) Article 45 Article J.5 Article 15 Titre VII Titre VIII Article J.6 Article 16 Article L Article 46 Article J.7 Article 17 Article M Article 47 Article J.8 Article 18 Article N Article 48 Article J.9 Article 19 Article O Article 49 Article J.10 Article 20 Article P Article 50 Article J.11 Article 21 Article Q Article 51 Article J.12 Article 22 Article R Article 52 Article J.13 Article 23 Article S Article 53 Article J.14 Article 24 Article J.15 Article 25 Article J.16 Article 26 Article J.17 Article 27 Article J.18 Article 28

(*) Nouvel article introduit par le Traité d’Amsterdam.(**) Nouveau titre introduit par le Traité d’Amsterdam.(***) Titre restructuré par le Traité d’Amsterdam.

Page 410: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport d'intégration 1999 - 408 - Annexe

B. Traité instituant la Communauté européenne

Numérotation Numérotationancienne nouvelle ancienne nouvellePremière partie Première partie Article 24 (abrogé) - Article 1 Article 1 Article 25 (abrogé) - Article 2 Article 2 Article 26 (abrogé) - Article 3 Article 3 Article 27 (abrogé) - Article 3a Article 4 Article 28 Article 26 Article 3b Article 5 Article 29 Article 27 Article 3c (*) Article 6 Chapitre 2 Chapitre 2 Article 4 Article 7 Article 30 Article 28 Article 4a Article 8 Article 31 (abrogé) - Article 4b Article 9 Article 32 (abrogé) - Article 5 Article 10 Article 33 (abrogé) - Article 5a (*) Article 11 Article 34 Article 29 Article 6 Article 12 Article 35 (abrogé) - Article 6a (*) Article 13 Article 36 Article 30 Article 7 (abrogé) - Article 37 Article 31 Article 7a Article 14 Titre II Titre II Article 7b (abrogé) - Article 38 Article 32 Article 7c Article 15 Article 39 Article 33 Article 7d (*) Article 16 Article 40 Article 34Deuxième partie Deuxième partie Article 41 Article 35 Article 8 Article 17 Article 42 Article 36 Article 8a Article 18 Article 43 Article 37 Article 8b Article 19 Article 44 (abrogé) - Article 8c Article 20 Article 45 (abrogé) - Article 8d Article 21 Article 46 Article 38 Article 8e Article 22 Article 47 (abrogé) -Troisième partie Troisième partie Titre III Titre IIITitre I Titre I Chapitre 1 Chapitre 1 Article 9 Article 23 Article 48 Article 39 Article 10 Article 24 Article 49 Article 40 Article 11 (abrogé) - Article 50 Article 41Chapitre 1 Chapitre 1 Article 51 Article 42Section 1 (supprimée) Chapitre 2 Chapitre 2 Article 12 Article 25 Article 52 Article 43 Article 13 (abrogé) - Article 53 (abrogé) - Article 14 (abrogé) - Article 54 Article 44 Article 15 (abrogé) - Article 55 Article 45 Article 16 (abrogé) - Article 56 Article 46 Article 17 (abrogé) - Article 57 Article 47Section 2 (supprimée) Article 58 Article 48 Article 18 (abrogé) - Chapitre 3 Article 19 (abrogé) - Article 59 Article 49 Article 20 (abrogé) - Article 60 Article 50 Article 21 (abrogé) - Article 61 Article 51 Article 22 (abrogé) - Article 23 (abrogé) -

(*) Nouvel article introduit par le Traité d’Amsterdam.

Page 411: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport d'intégration 1999 - 409 - Annexe

Traité CE (suite)

Numérotation Numérotationancienne nouvelle ancienne nouvelle Article 62 (abrogé) - Titre V Titre VI Article 63 Article 52 Chapitre 1 Chapitre 1 Article 64 Article 53 Section 1 Section 1 Article 65 Article 54 Article 85 Article 81 Article 66 Article 55 Article 86 Article 82Chapitre 4 Article 87 Article 83 Article 67 (abrogé) - Article 88 Article 84 Article 68 (abrogé) - Article 89 Article 85 Article 69 (abrogé) - Article 90 Article 86 Article 70 (abrogé) - Section 2 (supprimée) Article 71 (abrogé) - Article 91 (abrogé) - Article 72 (abrogé) - Section 3 Section 2 Article 73 (abrogé) - Article 92 Article 87 Article 73a (abrogé) - Article 93 Article 88 Article 73b Article 56 Article 94 Article 89 Article 73c Article 57 Chapitre 2 Chapitre 2 Article 73d Article 58 Article 95 Article 90 Article 73e (abrogé) - Article 96 Article 91 Article 73f Article 59 Article 97 (abrogé) - Article 73g Article 60 Article 98 Article 92 Article 73h (abrogé) - Article 99 Article 93Titre IIIa (**) Titre IV Chapitre 3 Chapitre 3 Article 73i (*) Article 61 Article 100 Article 94 Article 73j (*) Article 62 Article 100a Article 95 Article 73k (*) Article 63 Article 100b (abrogé) - Article 73l (*) Article 64 Article 100c (abrogé) - Article 73m (*) Article 65 Article 100d (abrogé) - Article 73n (*) Article 66 Article 101 Article 96 Article 73o (*) Article 67 Article 102 Article 97 Article 73p (*) Article 68 Titre VI Titre VII Article 73q (*) Article 69 Chapitre 1 Chapitre 1Titre IV Titre V Article 102a Article 98 Article 74 Article 70 Article 103 Article 99 Article 75 Article 71 Article 103a Article 100 Article 76 Article 72 Article 104 Article 101 Article 77 Article 73 Article 104a Article 102 Article 78 Article 74 Article 104b Article 103 Article 79 Article 75 Article 104c Article 104 Article 80 Article 76 Chapitre 2 Chapitre 2 Article 81 Article 77 Article 105 Article 105 Article 82 Article 78 Article 105a Article 106 Article 83 Article 79 Article 106 Article 107 Article 84 Article 80 Article 107 Article 108

Article 108 Article 109 Article 108a Article 110 Article 109 Article 111

(*) Nouvel article introduit par le Traité d’Amsterdam.(**) Nouveau titre introduit par le Traité d’Amsterdam.

Page 412: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport d'intégration 1999 - 410 - Annexe

Traité CE (suite)

Numérotation Numérotationancienne nouvelle ancienne nouvelleChapitre 3 Chapitre 3 Chapitre 2 Chapitre 2 Article 109a Article 112 Article 123 Article 146 Article 109b Article 113 Article 124 Article 147 Article 109c Article 114 Article 125 Article 148 Article 109d Article 115 Chapitre 3 Chapitre 3Chapitre 4 Chapitre 4 Article 126 Article 149 Article 109e Article 116 Article 127 Article 150 Article 109f Article 117 Titre IX Titre XII Article 109g Article 118 Article 128 Article 151 Article 109h Article 119 Titre X Titre XIII Article 109i Article 120 Article 129 Article 152 Article 109j Article 121 Titre XI Titre XIV Article 109k Article 122 Article 129a Article 153 Article 109l Article 123 Titre XII Titre XV Article 109m Article 124 Article 129b Article 154Titre VIa (**) Titre VIII Article 129c Article 155 Article 109n (*) Article 125 Article 129d Article 156 Article 109o (*) Article 126 Titre XIII Titre XVI Article 109p (*) Article 127 Article 130 Article 157 Article 109q (*) Article 128 Titre XIV Titre XVII Article 109r (*) Article 129 Article 130a Article 158 Article 109s (*) Article 130 Article 130b Article 159Titre VII Titre IX Article 130c Article 160 Article 110 Article 131 Article 130d Article 161 Article 111 (abrogé) - Article 130e Article 162 Article 112 Article 132 Titre XV Titre XVIII Article 113 Article 133 Article 130f Article 163 Article 114 (abrogé) - Article 130g Article 164 Article 115 Article 134 Article 130h Article 165Titre VIIa (**) Titre X Article 130i Article 166 Article 116 (*) Article 135 Article 130j Article 167Titre VIII Titre XI Article 130k Article 168Chapitre 1 (***) Chapitre 1 Article 130l Article 169 Article 117 Article 136 Article 130m Article 170 Article 118 Article 137 Article 130n Article 171 Article 118a Article 138 Article 130o Article 172 Article 118b Article 139 Article 130p Article 173 Article 118c Article 140 Article 130q (abrogé) - Article 119 Article 141 Titre XVI Titre XIX Article 119a Article 142 Article 130r Article 174 Article 120 Article 143 Article 130s Article 175 Article 121 Article 144 Article 130t Article 176 Article 122 Article 145

(*) Nouvel article introduit par le Traité d’Amsterdam.(**) Nouveau titre introduit par le Traité d’Amsterdam.(***) Chapitre 1, restructuré par la Traité d’Amsterdam.

Page 413: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport d'intégration 1999 - 411 - Annexe

Traité CE (suite)

Numérotation Numérotationancienne nouvelle ancienne nouvelleTitre XVII Titre XX Article 150 Article 206 Article 130u Article 177 Article 151 Article 207 Article 130v Article 178 Article 152 Article 208 Article 130w Article 179 Article 153 Article 209 Article 130x Article 180 Article 154 Article 210 Article 130y Article 181 Section 3 Section 3Quatrième partie Quatrième partie Article 161 Article 217 Article 131 Article 182 Article 162 Article 218 Article 132 Article 183 Article 163 Article 219 Article 133 Article 184 Section 4 Section 4 Article 134 Article 185 Article 164 Article 220 Article 135 Article 186 Article 165 Article 221 Article 136 Article 187 Article 166 Article 222 Article 136a Article 188 Article 167 Article 223Cinquième partie Cinquième partie Article 168 Article 224Titre I Titre I Article 168a Article 225Chapitre 1 Chapitre 1 Article 169 Article 226Section 1 Section 1 Article 170 Article 227 Article 137 Article 189 Article 171 Article 228 Article 138 Article 190 Article 172 Article 229 Article 138a Article 191 Article 173 Article 230 Article 138b Article 192 Article 174 Article 231 Article 138c Article 193 Article 175 Article 232 Article 138d Article 194 Article 176 Article 233 Article 138e Article 195 Article 177 Article 234 Article 139 Article 196 Article 178 Article 235 Article 140 Article 197 Article 179 Article 236 Article 141 Article 198 Article 180 Article 237 Article 142 Article 199 Article 181 Article 238 Article 143 Article 200 Article 182 Article 239 Article 144 Article 201 Article 183 Article 240Section 2 Section 2 Article 184 Article 241 Article 145 Article 202 Article 185 Article 242 Article 146 Article 203 Article 186 Article 243 Article 147 Article 204 Article 187 Article 244 Article 148 Article 205 Article 188 Article 245 Article 149 (abrogé) -

Page 414: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport d'intégration 1999 - 412 - Annexe

Traité CE (suite)

Numérotation Numérotationancienne nouvelle ancienne nouvelleSection 5 Section 5 Sixième partie Sixième partie Article 188a Article 246 Article 210 Article 281 Article 188b Article 247 Article 211 Article 282 Article 188c Article 248 Article 212 (*) Article 283Chapitre 2 Chapitre 2 Article 213 Article 284 Article 189 Article 249 Article 213a (*) Article 285 Article 189a Article 250 Article 213b (*) Article 286 Article 189b Article 251 Article 214 Article 287 Article 189c Article 252 Article 215 Article 288 Article 190 Article 253 Article 216 Article 289 Article 191 Article 254 Article 217 Article 290 Article 191a (*) Article 255 Article 218 (*) Article 291 Article 192 Article 256 Article 219 Article 292Chapitre 3 Chapitre 3 Article 220 Article 293 Article 193 Article 257 Article 221 Article 294 Article 194 Article 258 Article 222 Article 295 Article 195 Article 259 Article 223 Article 296 Article 196 Article 260 Article 224 Article 297 Article 197 Article 261 Article 225 Article 298 Article 198 Article 262 Article 226 (abrogé) -Chapitre 4 Chapitre 4 Article 227 Article 299 Article 198a Article 263 Article 228 Article 300 Article 198b Article 264 Article 228a Article 301 Article 198c Article 265 Article 229 Article 302Chapitre 5 Chapitre 5 Article 230 Article 303 Article 198d Article 266 Article 231 Article 304 Article 198e Article 267 Article 232 Article 305Titre II Titre II Article 233 Article 306 Article 199 Article 268 Article 234 Article 307 Article 200 (abrogé) - Article 235 Article 308 Article 201 Article 269 Article 236 (*) Article 309 Article 201a Article 270 Article 237 (abrogé) - Article 202 Article 271 Article 238 Article 310 Article 203 Article 272 Article 239 Article 311 Article 204 Article 273 Article 240 Article 312 Article 205 Article 274 Article 241 (abrogé) - Article 205a Article 275 Article 242 (abrogé) - Article 206 Article 276 Article 243 (abrogé) - Article 206a (abrogé) - Article 244 (abrogé) - Article 207 Article 277 Article 245 (abrogé) - Article 208 Article 278 Article 246 (abrogé) - Article 209 Article 279 Dispositions finales Article 209a Article 280 Article 247 Article 313

Article 248 Article 314

(*) Nouvel article introduit par le Traité d’Amsterdam.

Page 415: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 413 - Liste des abréviations

Liste des abréviations

ACP Pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique

AELE Association européenne de libre-échange Suisse-CEE

ALE Accord de libre-échange Suisse-CEE

ALENA Accord de libre-échange nord-américain

APEC Asian Pacific Economic CoopérationCoopération économique des pays du bassin Pacifique

ASEAN Association of South-East Asian NationsAssociation des pays du sud-est asiatique

ASEM Asia Europe MeetingDialogue entre l'Asie et l'Europe

BCE Banque centrale européenne

BEI Banque européenne d'investissement

BERD Banque européenne de reconstruction et de développement

BNS Banque Nationale Suisse

CE Communauté(s) européenne(s)

CECA Communauté européenne du charbon et de l'acier

CEE Communauté économique européenne (aujourd'hui CE)

CEI Communauté des Etats indépendants

Ch. Chiffre

CJCE Cour de justice des Communautés européenne (Cour de justice CE)

Coreper Comité des représentants permanents

Cosac Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautairesdes parlements des Etats membres de l'UE

COST Coopération européenne dans le domaine de la recherche scientifiqueet technique

ECOFIN Conseil des ministres de l'économie et des finances de l'UE

Ecu674 European Currency UnitUnité monétaire européenne

674 Depuis le 1er janvier conversion irrévocable de l'ecu en euro dans un rapport 1:1.

Page 416: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 414 - Liste des abréviations

EEE Espace économique européen

ESA EFTA Surveillance AuthorityAutorité de surveillance AELE

EURATOM Communauté européenne de l'énergie atomique

Eureka Initiative européenne en matière de collaboration technologique

Europol Office européen de police

Eurostat Office statistique des Communautés européennes

FAO Food and Agricultural Organization of the United NationsOrganisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation

FEDER Fonds européen de développement régional

FEOGA Fonds européen d'orientation et de garantie agricole

FED Fonds européen de développement

GATS General Agreement on Trade in ServicesAccord général sur le commerce des services

GATT General Agreement on Tariffs and TradeAccord général sur les tarifs douaniers et le commerce

GPA Government Procurement AgreementAccord OMC sur les marchés publics

JAI Coopération dans le domaine de la Justice et des Affaires intérieures(troisième pilier de l'UE)

JO Journal officiel des Communautés européennes

let. lettre

MAI Multilateral Agreement on InvestmentsAccord multilatéral sur l'investissement

MERCOSUR Mercado Común del SurMarché commun d'Amérique latine

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

OMC Organisation mondiale du commerce

ONU Organisation des Nations Unies

OSEC Office suisse d'expansion commerciale

OTAN Organisation du Traité de l'Atlantique Nord

Page 417: Suisse - Union européenne: Rapport sur l'intégration 1999 · 12 Evolution de la politique du Conseil fédéral 8 ... 222.06.3 Propriété intellectuelle 129 222.06.4 Droit international

Rapport sur l'intégration 1999 - 415 - Liste des abréviations

PAC Politique agricole commune (de la CE)

PCRD Programme-cadre de recherche et de développement de la Communauté européenne

PECO Pays d'Europe centrale et orientale

PESC Politique étrangère et de sécurité commune (deuxième pilier de l'UE)

PHARE Poland Hungary Aid for the Reconstruction of the Economy(Programme d'assistance communautaire aux pays d'Europe centrale et orientale)

PIP Produit intérieur brut

PME Petite et moyennes entreprises

PNB Produit national brut

Rec. Recueil de jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européenne et du Tribunal de première instance

RO Recueil officiel

RS Recueil systématique

SEBC Système européen des banques centrales

SIS Système d'Information Schengen

SME Système monétaire européen

TACIS Technical Assistance to the Commonwealth of Independent States(Programme d'assistance communautaire aux pays de la CEI)

TDC Tarif douanier commun

TRIPS Trade-Related Aspects of Intellectual Property RightsAccord de l'OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce

UE Union Européenne(premier pilier: CE, CECA, Euratom; deuxième pilier: PESC; troisième pilier: JAI)

UNESCO United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture

UEO Union de l’Europe occidentale

UEM Union économique et monétaire