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Synthetic Metals, 7 (1983) 33 - 37 33 SUR L'EXISTENCE DE PHASES TERNAIRES NON ISOLEES GRAPHITE-MERCURE-ALCALIN ET GRAPHITE-THALLIUM- ALCALIN PHILIPPE LAGRANGE, MOHAMED EL MAKRINI et ASMA.~ BENDRISS Laboratoire de Chimie Mindrale Appliqude, Universitd de Nancy I, B.P. 239, 54506 Vandoeuvre-lds-Nancy Cddex (France) 1. Introduction Nous avons montr~ que les alliages mercure-alcalin lourd et thallium- alcalin lourd pouvaient s'ins~rer dans le graphite en conduisant ~ des ternaires tr6s riches en m6tal [1 - 3]. Ces diverses phases ont ~te isol6es et identifi~es et ont fait l'objet de nombreuses ~tudes physiques. En dehors de ces phases, d'autres ternaires ont 6t~ mis en 6vidence, mais l'impossibilit~ de les isoler nous a emp~ch~ de les identifier et a conduit ~ n~- gliger leur ~tude. Nous allons d~crire ici ces compos~s, en m~me temps que les conditions dans lesqueUes ils se forment. 2. Compos~s graphite-mercure-alcalin Les amalgames de potassium et de rubidium s'ins~rent facilement dans le graphite. On a pr6par6 ainsi les phases suivantes [1] : ler stade 2~me stade KHgC4 (rose) KHgCs (bleu) RbHgC 4 (rose) RbHgC s (bleu) Le compos~ KHgC4 est pr6par~ par action sur le graphite (HOPG) de l'a- malgame fondu KHg ~ 200 °C. En fin de r~action, l'~chantillon a fortement gonfl~ et est devenu rose. Cependant, dans certains cas, cette coloration rose fait place ~ une couleur jaune p~le. I1 ne s'agit pas 1~ d'un simple ph~nom~ne de surface, car le clivage de l'6chantillon indique clairement que coexistent en son coeur des plages roses (KHgC4) et des plages jaunes. L'examen radio- cristallographique de l'~chantillon (r6flexions 001) indique bien la pr6sence de deux phases, dont les p~riodes d'identit6 selon l'axe ~ valent respective- ment 10,16 )k pour KHgC4 et 10,76 A pour la phase jaune (Fig. 1). 0379-6779/83/$3.00 (~) Elsevier Sequoia/Printed in The Netherlands

Sur l'existence de phases ternaires non isolees graphite-mercure-alcalin et graphite-thallium-alcalin

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Synthetic Metals, 7 ( 1 9 8 3 ) 33 - 37 33

SUR L'EXISTENCE DE PHASES TERNAIRES NON ISOLEES G R A P H I T E - M E R C U R E - A L C A L I N ET G R A P H I T E - T H A L L I U M - ALCALIN

PHILIPPE L A G R A N G E , M O H A M E D EL M A K R I N I et ASMA.~ B E N D R I S S

Laboratoire de Chimie Mindrale Appliqude, Universitd de Nancy I, B.P. 239, 54506 Vandoeuvre-lds-Nancy Cddex (France)

1. Introduct ion

Nous avons montr~ que les alliages mercure-alcalin lourd et thall ium- alcalin lourd pouvaient s'ins~rer dans le graphite en conduisant ~ des ternaires tr6s riches en m6tal [1 - 3]. Ces diverses phases ont ~te isol6es et identifi~es et ont fait l 'objet de nombreuses ~tudes physiques.

En dehors de ces phases, d'autres ternaires ont 6t~ mis en 6vidence, mais l'impossibilit~ de les isoler nous a emp~ch~ de les identifier et a conduit ~ n~- gliger leur ~tude. Nous allons d~crire ici ces compos~s, en m~me temps que les conditions dans lesqueUes ils se forment.

2. Compos~s graphite-mercure-alcal in

Les amalgames de potassium et de rubidium s'ins~rent facilement dans le graphite. On a pr6par6 ainsi les phases suivantes [1] :

ler stade 2~me stade

KHgC4 (rose) KHgCs (bleu) RbHgC 4 (rose) RbHgC s (bleu)

Le compos~ KHgC4 est pr6par~ par action sur le graphite (HOPG) de l'a- malgame fondu KHg ~ 200 °C. En fin de r~action, l '~chantillon a for tement gonfl~ et est devenu rose. Cependant, dans certains cas, cette coloration rose fait place ~ une couleur jaune p~le. I1 ne s'agit pas 1~ d 'un simple ph~nom~ne de surface, car le clivage de l '6chantillon indique clairement que coexistent en son coeur des plages roses (KHgC4) et des plages jaunes. L 'examen radio- cristallographique de l'~chantillon (r6flexions 001) indique bien la pr6sence de deux phases, dont les p~riodes d'identit6 selon l 'axe ~ valent respective- ment 10,16 )k pour KHgC4 et 10,76 A pour la phase jaune (Fig. 1).

0 3 7 9 - 6 7 7 9 / 8 3 / $ 3 . 0 0 (~) Elsevier Sequo i a /P r in t ed in The Ne the r l ands

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X

X

x phase jaune

I. I I 17o I'3o 90 ~o to

Fig. 1. Rdflexions 001 du compos~ KHgC4 et de ]a phase jaune, en mdlange (anticathode: Mo).

Cette phase appartient au premier stade et met en jeu un ~cartement des plans carbon,s sup~rieur ~ celui qui appara~ dans KHgC4. Le fait qu'elle n'ait pu ~tre isol~e n'a pas permis de d~terminer sa formule chimique.

Les mercurographitures de potassium peuvent aussi ~tre synth~tis~s par chauffage ~ 200 °C d'un m~lange de poudres de graphite et d'amalgame KHg darts des proportions bien d6finies: C/KHg = 4 pour le stade 1, C/KHg = 8 pour le stade 2. En choisissant un rapport C/KHg = 12, on pouvait esp6rer obtenir un ternaire de stade 3 (de formule KHgC)2). I1 a effectivement ~t6 obtenu, mais toujours en presence de KHgC8 et de graphite. Sa p~riode d'identit~ vaut 16,85 A (soit 10,16 A + 2 × 3,35 A) : le feuillet d'amalgame ins~r6 pr6sente donc la m~me ~paisseur que dans KHgC4 et KHgC8; on ima- gine qu'il poss~de aussi la m~me structure [4], c'est-~-dire une couche de mercure encadr~e de deux couches de potassium. Cependant, le fair qu'il n'ait pu ~tre isoM ~ l'~tat put n'a pas permis de confirmer sa formule chimique.

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On sait que les binaires graphite-c~sium sont bien plus stables que leurs homologues du rubidium et du potassium. Ceci explique peut-~tre le fait qu 'on n'ait pu preparer de mercurographitures de c~sium dans les m~mes conditions.

Cependant, des ternaires graphite-mercure-c~sium ont ~t~ observes, mais non isol~s. Ils sont obtenus lors de l 'action de mercure vapeur ~ 120 °C sur le binaire CsCs: ils apparaissent alors toujours en m~lange avec CsC8 et parfois du graphite pur. Ces compos~s appartiennent vraisemblablement aux stades 2 et 3, et leurs p~riodes d'identit~ respectives valent 14,30 A et 17,70 A. Mais on ne connai't ni la structure ni la composit ion des feuillets ins~r~s. I1 faut rappeler que, dans les m~mes conditions, RbCs et KCs conduisent ~ la formation des ternaires de second stade RbHgCs et KHgCs.

Le compos~ de stade 3 qui vient d 'etre ~voqu~ a pu ~galement ~tre observ~ au cours du chauffage ~ 280 °C d 'un m~lange de graphite et d'amal- game CsHg dans les proport ions C/CsHg = 8. On aboutit , dans ces conditions,

un m~lange de CsCs et du ternaire de stade 3 (I¢ = 17.70 A). Notons ici que d'autres auteurs [5, 6 ]on t ~galement observ6 des com-

pos~s ternaires graphi te-mercure-potass ium autres que les deux plus connus; ils n'en donnent pas la formule chimique, mais ont cependant pu r~aliser cer- taines mesures physiques.

3. Composds graphite-thaUium-alcalin

Les alliages thal l ium-potassium et thal l ium-rubidium s'ins~rent dans le graphite et conduisent aux composds temaires suivants:

ler stade 2~me stade

KTII.sC 4 (vermeil) KTll,sC s (rose) RbTll,sC4 (vermeil) RbTll,sCs (rose)

Ainsi l'alliage fondu KTll,s s'ins~re dans le graphite ~ 340 °C en formant le ternaire KTll.sC 4 de stade 1. Mais, si l 'on fait varier faiblement la composi- t ion de l'alliage r~actionnel autour de la valeur pr~c~dente, il est possible de faire apparaftre d'autres phases ternaires de stade 1, mais toujours en m~lange avec le compos~ principal KTll.sC 4 (Fig. 2):

KT11,33 + graphite: KTll,sC4 + phase ternaire (Ic = 10,80/~) KTll,s + graphite: KTII,sC 4 ( I c = 12,10 A) KTll,s + graphite: KTll,sC4 + phase ternaire (Ic = 11,88 A)

Ces deux nouvelles phases poss~dent donc des p~riodes d'identit~ inf~- rieures ~ celle de KTll,sC 4. Mais on ne conna~ pas bien stir les formules chi- miques de ces compos~s.

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x

(a)

xKTII.~C4 o +phase (10,80-~) °phase (11,88.~)

o ¢

0 1 ~ . ll5 . 113. 1 =1" ~ 7" 5" 3" 1"

(b)

Fig. 2. R6flexions 00l des compos6s temaires de premier stade graphite-thal]ium-potassium en pr6sence du temaire KTII,sC4 (anticathode: Mo): (a)phase de p6riode d'identit6 1 c =

10,80 A; (b) phase de p(~riode d'identit6 1 c = 11,88 A.

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Dans le cas du rubidium, un ph~nom~ne plus marqu~ a ~t~ observ& en effet, on a pu isoler et identifier deux compos~s ternaires de stade 1 et de p~- riodes d'identit~ selon l 'axe ~ sensiblement diff~rentes:

Ic = 12,65 A pour la phase Ic = 13,40 A pour la phase

Ces deux ternaires poss~dent la m~me formule chimique (RbTl,.sC4) et la m~me couleur {vermeil). De plus, comme nous l 'avons d~jfi indiqu~ [3], la phase ~ semble ~tre m~tastable, tandis que la phase ~ est thermodynamique- ment stable: la phase ~, qui appara~ la premiere, finit toujours par se trans- former en la phase fl par recuit, et ceci en presence ou en l 'absence d'alliage r~actionnel libre.

4. Conclusion

On peut ~tre surpris par le nombre important de compos~s ternaires qu'il est possible de synth~tiser fi partir des alliages d'alcalin et de mercure ou de thallium. On est peu habitu~ no tamment ~ observer la formation de com- pos~s de m~me stade, contenant les m~mes esp~ces atomiques, mais de p~- riodes d'identit~ diff~rentes, et ceci en partant de r~actifs identiques ou presque identiques.

I1 faut cependant ne pas oublier que les feuillets ins~r~s dans ces com- pos~s sont extr~mement ~pals; de ce fait, divers arrangements atomiques l'int~rieur des feuillets deviennent possibles et peuvent ne diff~rer que tr~s peu sur le plan thermodynamique. Ceci pourrait expliquer l 'observation fr~- quente de phases m~tastables, ou de plusieurs phases stables dont les condi- tions thermodynamiques d 'existence seraient tr~s voisines.

Remerciements

Ils s 'adressent au Dr. A. W. Moore de l 'Union Carbide, qui nous a gra- cieusement fourni les dchantillons de graphite pyrolyt ique HOPG.

References

1 M. E1 Makrini, P. Lagrange, D. Gu~rard et A. Hdrold, Carbon, 18 (1980) 211. 2 M. E1Makrini, P. Lagrange et A. H~rold, Carbon, 18 (1980) 374. 3 P. Lagrange, M. E1Makrini et A. Hdrold, C.R. Acad. Sci. Paris, Ser. C, 290 (1980) 283. 4 P. Lagrange, M. E1Makrini et A. H~rold, Rev. Chim. Miner., 20 (1983) 229. 5 G. Timp, B. S. Elman, R. A1Jishi e t G. Dresselhaus, Solid State Commun., 44 (1982)

987. 6 G. Timp, B. S. Elman et M. S. Dresselhaus, Annual Meeting of the Materials Research

Society, Boston, MA, Novembre 1982.