Table of Contents

Title Page

Chapitre Un

Chapitre Deux

Chapitre Trois

Chapitre Quatre

Chapitre Cinq

Chapitre Six

Chapitre Sept

Chapitre Huit

Chapitre Neuf

Chapitre Dix

Chapitre Onze

Chapitre Douze

Chapitre Treize

Chapitre Quatorze

Chapitre Quinze

Chapitre Seize

Chapitre Dix-Sept

Chapitre Dix-Huit

Copyright

En zone d’urgenceLes frères Kelly, Livre 6

par

Crista McHugh

Toutes ses actions font tomber ses défenses…

Le linebacker 1vedette Frank Kelly est aussi célèbre pour ses coups hors du terrain que sur le terrain.Alors qu’il finit pour la énième fois avec les menottes aux poignets après une soirée en discothèque,il est sauvé par une femme qui a des relations haut placées et qui peut faire abandonner les chargescontre lui en échange d’un petit service. S’il accepte de se faire passer pour un petit ami amoureuxpendant deux mois, elle lui évitera la prison et elle l’aidera à redorer son image.

Kiana Dyer est peut-être la fille d’un des joueurs de football américain les plus célèbres, mais lafondation caritative dont elle a pris la tête après le décès de son père n’attire pas autant l’attentiondes médias qu’elle le souhaitait. Une fausse idylle avec Frank Kelly constitue le billet idéal dont ellea besoin pour se retrouver sous les projecteurs. Lorsque la frontière entre le vrai et le faux commenceà devenir floue, elle commence à se demander si elle a bien fait de lui sauver la mise. Juste aumoment où tout semble se mettre en place à la perfection, un scandale éclate autour de sa fondation,et c’est à elle de tout faire pour blanchir son nom et laver son honneur.

Recommandé pour ceux qui aiment : Les histoires d’amour sur fond de sportLes histoires d’amour interraciales ou multiculturellesLes histoires d’amour entre une femme noire et un homme blancLes histoires d’amour avec le Sud des États-Unis en toile de fond (Atlanta)Les histoires d’amour avec un bad boy et une fille gentilleL’attirance entre des opposés

1 Linebacker : Un poste de défenseur au football américain

Chapitre Un

« Pu-tain ! »

Frank Kelly décomposa le mot en deux syllabes, une habitude qu’il avait prise et qu’il n’avait pasperdue depuis son arrivée à Atlanta quatre ans plus tôt.

« Mate le cul de cette bombe qui vient d’arriver. »

Son coéquipier, Treson Dyer, ne prit même pas la peine de lever les yeux du message qu’il était entrain d’écrire sur son téléphone.

« Une minute. C’est la dernière chance de pouvoir parier sur les matchs de la Côte Ouest. »

« Non, il faut vraiment que tu regardes cette nana. »

Frank résistait de toutes ses forces pour ne pas baver devant les courbes qui venaient d’entrer dansla boîte de nuit. Il avait toujours aimé les fesses, mais celles de la nouvelle arrivante donnaient unetoute nouvelle dimension à la définition d’un cul d’enfer. La manière dont sa tenue épousait son corpslui donnait l’envie irrépressible de toucher la chair qui semblait tellement attirante sous la finecouche de tissu. Elle se tenait près de l’entrée, tendant son cou pour observer au-dessus des danseurscomme si elle essayait de trouver quelqu’un.

Frank se leva de sa table dans la section VIP et mit une petite tape sur le torse de son ami.

« Finalement, en y repensant, reste là et continue à parier sur des matchs de baseball. Je la veuxpour moi tout seul. »

« Amuse-toi bien, Roméo », répondit Tre sans lever les yeux de son téléphone.

Frank prétexta le besoin de lisser sa chemise pour essuyer la sueur sur les paumes de ses mains.Sur le terrain, il était l’incarnation de l’homme sûr de lui. Rien ne l’atteignait - ni la foule bruyante, niles conditions météorologiques extrêmes, ni les rumeurs qui disaient qu’il était en bonne voie pourêtre le futur quarterback1 du Hall of Fame2. Il se contenta de se concentrer sur sa cible et il se dirigeavers elle.

D’un autre côté, en matière de femmes, les choses étaient totalement différentes. Même si sescoéquipiers l’avaient surnommé Roméo, ils ne savaient absolument pas à quel point il avait le ventrenoué dès qu’il abordait une femme pour la première fois. Il le cachait bien, derrière une attitude sûrede lui et un sourire insolent, mais au fond, il y avait toujours une partie de lui qui était un adolescentmaladroit avec des cheveux roux et un appareil dentaire, un adolescent qui devait rassembler tout soncourage pour inviter une fille à danser.

Il ravala sa peur et il se força à afficher le sourire qui constituait sa marque de fabrique tandisqu’il s’approchait de la jeune femme.

« C’est moi que tu cherches ? »

Des boucles sombres encadraient des yeux couleur miel un visage angélique avec une peau café au

lait sans aucun défaut. Elle leva un sourcil parfaitement dessiné.

« Quoi ? »

Ouch !

Sa réponse était presque aussi cinglante qu’une gifle, mais il décida de changer de méthode. Lecôté serviable remplaça l’arrogance et il s’appuya moins sur son charisme.

« C’est juste que tu as l’air de chercher quelqu’un, et je me suis dit que je pourrais peut-êtret’aider. »

Le coin de la bouche de la jeune femme se souleva dans un sourire ironique, dirigeant l’attentionde Frank vers la couleur rubis des lèvres de la jeune femme. Elle était encore plus séduisante deprès.

« Ta tête me dit quelque chose », dit-elle après ce qui sembla durer une éternité. « Tu es FrankKelly, pas vrai ? »

« Le seul et unique. »

Il n’attendit pas la permission de la jeune femme pour prendre la main de celle-ci et pour la placerdans le creux de son coude.

« Et ça serait un plaisir pour moi que tu viennes à ma table. »

Elle se dégagea.

« Oh, non, Roméo. Je connais ta réputation avec les femmes. »

Merde !

Des sirènes d’alarme se déclenchèrent dans sa tête au moment où la jeune femme utilisa le surnomque ses coéquipiers lui avaient donné.

Mais il continua à lui sourire comme si elle rentrait dans son jeu.

« Est-ce que tu vas croire ces rumeurs ? Ou est-ce que tu as envie de découvrir par toi-même sielles sont vraies ? »

Le sourcil levé fit son retour, cette fois avec une bonne dose d’attitude Est-ce que tu te fous demoi ? Cependant, un coin de la bouche de la jeune femme se souleva et elle finit par éclater de rire.

« Je cherche mon frère, Tre. Tu l’as vu ? »

Et en un instant, la fameuse douche froide éteignit la flamme de son désir. C’était une chose dedraguer une étrangère, mais la sœur de son ami ? Il savait qu’il valait mieux ne pas s’engager surcette voie.

C’était le moment de changer de tactique. Il lui proposa de nouveau son bras, cette fois pluscomme un gentleman que comme un amant potentiel.

« Par ici, jolie demoiselle. »

Elle enroula son bras autour du sien et elle le laissa l’emmener jusqu’au salon VIP. Ce n’était pas

de cette manière qu’il voulait l’y amener, mais mieux valait cela que de se faire frapper pour avoirfait des avances.

Lorsqu’ils arrivèrent à la table, son coéquipier était encore en train d’écrire des messagesrageusement.

La jeune femme posa sa main sur sa hanche.

« Hey, Tre, pose ce truc cinq secondes et dis-moi bonjour. »

Tre sursauta et cligna plusieurs fois des yeux après avoir levé son regard vers sa sœur.

« Kiana, tu es venue. »

Il glissa son téléphone dans sa poche suffisamment longtemps pour se lever et prendre la jeunefemme dans ses bras.

« Pourquoi tu as mis aussi longtemps à arriver ? »

Elle lança un regard vers Frank.

« C’est Roméo, là, qui as essayé me draguer. »

« Tu as essayé de draguer ma frangine, mon pote ? »

Tre mit une tape derrière la tête de Frank tout en lui lançant un regard furieux le mettant en gardePas touche.

« Je ne savais pas. »

Frank frotta l’endroit où Tre l’avait frappé. Ce dernier n’avait jamais mentionné le fait qu’il avaitune sœur, et encore moins que celle-ci devait les rejoindre ce soir-là.

Il se laissa tomber sur son fauteuil et il examina le frère et la sœur. Leurs yeux avaient la mêmeforme et ils avaient les mêmes cils épais. Le même menton. Le même front. Cela suffisait pourindiquer un air de famille, même si la couleur de peau de la jeune femme était plus claire.

« Tu me traites encore comme le secret inavouable de la famille ? », demanda-t-elle sur un tonjovial avant de prendre le fauteuil qui se trouvait à côté de Tre.

« Non, je suis occupé, c’est tout. »

Même son ami avait éludé la question de la jeune femme, elle avait éveillé la curiosité de Frankqui se pencha vers l’avant.

« Je ne peux pas imaginer qu’une personne aussi charmante que toi puisse être considérée commeun secret inavouable. »

« Crois-le, mec », dit Tre d’un ton sec. « Je suis son frère, mais on n’a pas la même mère. »

Kiana leva les yeux au ciel.

« Ce qu’il veut dire, c’est que notre père avait du mal à garder sa braguette fermée. Je suis sademi-sœur. »

« On en a assez dit. »

Les sens aiguisés de Frank lui disaient qu’il s’agissait d’un sujet dont il valait mieux arrêter deparler.

« Mais je t’aime quand même, Kiki. »

Tre déposa un baiser sur la joue de Kiana avant de reporter de nouveau son attention vers sontéléphone.

Le silence gêné qui suivit amena Frank à se tortiller sur son fauteuil. Il était évident que Tre étaitplus intéressé par le fait de regarder les scores des matchs de baseball qui tombaient et de calculerses gains pour la soirée que par la perspective de passer du temps avec sa sœur. Mais si Frank osaitl’inviter sur la piste de danse, il pouvait s’attendre à plus qu’un simple regard d’avertissement de lapart de son ami. Un homme avisé aurait peut-être trouvé une excuse pour quitter la table, mais Frankn’avait jamais eu la réputation d’être ce genre d’homme.

Surtout quand il était question des femmes.

Une chanson de Pitbull 3qui datait un peu hurla dans les enceintes de la boîte de nuit, et Frank seleva de son fauteuil et s’approcha de Kiana.

« Ça te dit de danser ? »

Une lueur d’amusement brilla dans les yeux de la jeune femme.

« Ça dépend. »

« De quoi ? »,

« De tes talents de danseur. »

Elle l’examina des pieds à la tête en arborant une expression de défi.

Frank eut un petit rire avant d’onduler ses hanches au rythme du son latino.

« Je suis plein de ressources. »

Un autre rire sortit de la bouche séduisante de la jeune femme et il se sentit sa poitrine se serrer. Ilretint sa respiration jusqu’à ce qu’elle tende sa main.

« Pas mal pour un blanc », le taquina-t-elle.

« Tu pourrais t’apercevoir que je suis plein de surprises. »

Il prit sa main et il lança un regard vers le frère de la jeune femme pour s’assurer qu’il pouvaitl’inviter à danser sans que cela ne pose problème. Comme Tre ne levait pas les yeux, il la conduisitjusqu’à la piste de danse noire de monde.

La musique vibrait dans la sono et les lumières clignotantes éclairaient la mer de corps en train dese tortiller, avec des ombres qui cachaient des visages et des silhouettes sexy mises en valeur. Unefois qu’ils se furent suffisamment enfoncés dans la foule, Frank trouva le courage de poser ses mainssur la courbe des hanches de la jeune femme. Elle dansait en rythme avec la musique, chacun de sesdéhanchements attisant le feu qui parcourait les veines du jeune homme. Il la laissa diriger, puis ilbaissa sa bouche vers son oreille pour chanter quelques paroles de la chanson.

« I know you want me. You know I want you. »

Le sourire de la jeune femme s’élargit.

« Tu sais danser, mais tu ne sais pas chanter. »

Et encore un coup dans son amour-propre. Au moins cette fois, elle avait adouci l’impact enenroulant ses bras autour de son cou et en l’attirant vers elle.

Il posa ses mains en haut des fesses magnifiques qui semblaient l’appeler depuis la premièreseconde où il l’avait remarquée. À présent c’était à lui de mener la danse. Il se surprit à remercier samère pour avoir insisté pour qu’il prenne des cours de danse de salon quand il était au collège.L’expérience lui rappela les mouvements de la salsa. Il serra la jeune femme contre lui et il guida sesmouvements, attentif au moindre signe pouvant indiquer qu’il allait trop loin. Mais au contraire, il futrécompensé par des yeux mi-clos et par un sourire séducteur qui fit naître en lui un désir qui renditson sexe douloureux.

Ce n’est pas pour rien qu’on me surnomme Roméo.

Et il avait envie d’elle. Tellement.

C’était vraiment dommage qu’elle soit la sœur de Tre. Si les choses avaient été différentes, ilaurait été prêt à l’inviter à venir chez lui après quelques chansons de plus.

Le son de la chanson s’affaiblit pour céder la place à la suivante, mais elle ne fit rien pours’éloigner de lui. Au lieu de cela, elle le regarda droit dans les yeux avec coquetterie et elle fit courirses doigts le long de son cou.

Il se mit à fixer les lèvres de la jeune femme, ressentant une envie pressante de goûter cesdernières. Il sentit des gouttes de sueur se former le long de sa colonne. Il essaya de détourner sonattention pour se concentrer sur la musique, sur les éclairages, sur les gens autour de lui, mais ilfinissait toujours par revenir vers la sirène qu’il tenait dans ses bras. Tellement séduisante et tentante,mais pourtant si dangereuse. Et il savait que s’il cédait à sa tentation, il serait perdu.

Il était sur le point s’abandonner à son piège lorsqu’il la sentit se raidir dans ses bras.

« Merde », siffla-t-elle entre ses dents en fixant quelque chose derrière lui. « Viens, on se tire. »

« C’est quoi le souci ? »

« Ne pose pas de question. »

Elle le prit par la main et elle le tira vers le salon VIP.

Il avait réussi à faire un pas lorsqu’une main le saisit par l’épaule et l’obligea à faire volte-face.Par réflexe, il serra le poing, mais il avait eu suffisamment de démêlées avec la justice pour ne pasfrapper à l’aveuglette.

Un homme noir mesurant quelques centimètres de moins que lui se tenait à moins d’un mètre,entouré de plusieurs de ses amis. L’expression sur son visage indiquait qu’il cherchait clairement desproblèmes, et Frank commença à calculer quelles seraient ses chances s’il devait l’affronter.

« Kiana », dit l’homme en levant légèrement le menton « Je me disais bien que c’était toi. »

« Va te faire foutre, Malcolm. »

La jeune femme tira la main de Frank, mais un membre du groupe de l’homme noir lui barra lechemin, l’empêchant de s’enfuir.

« Ah, est-ce que c’est une manière de me dire bonjour, ma puce ? Comment va mon bébé ? »

Malcolm tendit la main vers le bras de la jeune femme qui l’évita avant de se rapprocher de Frank.Le mélange d’irritation et de peur qui se lisait sur son visage décupla les pulsions protectrices dejeune homme. Il se plaça entre Kiana et le visiteur indésirable.

« Apparemment, elle n’a pas envie de te voir. »

Malcolm répondit par un grognement rempli de dédain.

« Et tu es qui toi, petit blanc ? »

« Celui qui dansait avec elle jusqu’à ce que tu décides de nous interrompre. »

Frank s’obligeait à garder un ton bas et égal en s’inspirant de ce vers d’Hamlet :

Garde toi d’entrer dans une querelle ;

mais, une fois dedans,

que l’adversaire se garde de toi.

Il ne voulait pas avoir de problèmes, mais si l’homme en face de lui ne comprenait pas, il nerenoncerait pas à défendre Kiana.

Malcolm écarquilla très légèrement les yeux avant d’éclater de rire, tout son corps exprimant ladécontraction contrairement à la tension croissante autour de lui.

« J’ai toujours su que tu étais plus blanche que noire », lança-t-il à Kiana.

Elle fit une grimace et Frank planta ses ongles dans les paumes de ses mains. Il aurait donnén’importe quoi pour frapper le visage de Malcolm qui affichait une expression suffisante.

Il fit un pas vers lui, mettant en avant son 1,83m et ses 113 kilos.

« Je vais le dire avec des mots simples pour que tu saisisses. Laisse-la tranquille. »

« Ou sinon quoi ? »

Frank sentit son pouls battre au niveau de ses tempes. Après avoir été pris sur le fait dans uneposition compromettante avec la cousine de Jenny4 avant la cérémonie organisée pour les fiançaillesà Seattle quelques semaines plus tôt, il avait promis à Adam5 d’avoir un comportement irréprochableet d’éviter les problèmes. Mais en cet instant, il n’avait qu’une envie : faire taire ce punk arrogantavec son poing. Il baissa de nouveau les yeux vers Malcolm en attendant que l’homme plus petit quelui batte en retraite. Au lieu de cela, l’expression qui se lisait sur le visage de celui-ci l’incita à selaisser aller.

Un cri aigu lui fit détourner les yeux de son combat de regards. Un des amis de Malcolm tenaitKiana par l’épaule et lui murmurait des paroles lubriques tout en plaquant son corps contre le sien.

La vision de Frank se troubla et il lança son poing.

1 Quarterback : Poste offensif au football américain

2 Hall of Fame : Le temple de la renommée et musée consacré au football américain3 Pitbull : Rappeur américain

4 Jenny : Une des demi-sœurs de Frank5 Adam : Le frère aîné le plus âgé de Frank

Chapitre Deux

Kiana eut le souffle coupé lorsque Frank frappa l’ordure qui était en train d’essayer de la peloter.Elle avait à peine eu le temps de se libérer de son emprise avant que le poing de Frank n’entre encontact avec le nez de l’homme avec un craquement ignoble. Son visage et sa robe furent éclabousséspar du sang, et un cri perçant de dégoût mêlé à de la peur s’échappa de ses lèvres. Elle augmenta ladistance qui la séparait des deux hommes en train d’échanger des coups, mais comme la foule quis’était rassemblée autour d’eux, elle ne parvenait pas à détourner le regard.

La soirée avait si bien commencé. Pour la première fois depuis une éternité, elle s’était sentiesexy, vivante et sûre d’elle. Et plus Frank lui accordait d’attention, plus ces émotions devenaientfortes. Le fait de danser dans ses bras lui avait rappelé l’époque insouciante de l’université où ellepouvait flirter avec les meilleurs sans se soucier des conséquences. Si Malcolm ne les avait pasinterrompus, elle aurait peut-être baissé sa garde suffisamment pour se laisser tenter par un ou deuxbaisers.

Mais elle n’aurait rien accordé de plus à Frank Kelly. Elle savait pertinemment qu’il valait mieuxéviter de jouer avec un joueur. Elle était venue dans cette boîte de nuit dans un seul but, obtenir lesoutien de la star Frank Kelly pour sa fondation. Elle était prête à tout pour l’obtenir, même si celasignifiait rentrer dans son jeu de séduction. Mais son plan avait tourné au cauchemar au moment oùMalcolm avait fait son entrée.

Le dernier joueur qui l’avait consumée se tenait à quelques mètres, encourageant ses amis à selancer dans la bagarre et à passer Frank à tabac, mais sans faire un geste pour ne pas risquer de sesalir les mains lui-même. Il ne frappait que ceux qu’il considérait comme plus faibles que lui.Heureusement, en voyant la raclée qu’il se prenait, ceux qui le suivaient hésitaient à être lesprochains à subir la violence des poings de Frank.

Lorsqu’il s’aperçut qu’aucun d’entre eux n’était prêt à faire sa basse besogne, Malcolm cherchaquelque chose dans sa veste et le cœur de la jeune femme arrêta de battre. Elle ne connaissait quetrop bien la lueur dans son regard qui disait à quel point il était en colère, tout comme le fait qu’ilavait pour habitude de cacher une arme sur lui. D’après ce qu’elle savait, il n’avait jamais tiré avecle calibre 44 qu’il aimait dissimuler sous ses vêtements. Il s’agissait plus d’un moyen d’intimider,pour sa réputation dans la rue, qu’autre chose. Mais la rage qui tordait son visage indiquait qu’ilavait atteint le point où il était prêt à appuyer sur la détente. Et comme le soir où il avait pointé cettearme vers elle, elle était incapable de dire si cette dernière était chargée ou non.

La crosse noire d’un pistolet apparut de sous la veste de Malcolm. Le regard de son ex ne quittaitpas l’homme qui l’avait défié. L’homme qui continuait à rouer de coups ses hommes de main.L’homme qui lui tournait le dos.

Quelque chose céda à l’intérieur de Kiana. Si elle ne faisait rien, Frank se ferait tirer dessus, et ceserait entièrement de sa faute à elle. Et en plus, qui disait que ce ne serait pas elle la prochaine ?Cette fois, elle refusait de se rouler en boule dans un coin et de demander grâce. Cette fois, elleprendrait le contrôle de la situation et elle agirait. Elle se jeta en avant au moment où Malcolm sortitson arme. Sa main entra en contact avec le côté de cette dernière tandis qu’il la levait et elle la fit

voler alors qu’il était en train d’appuyer sur la détente.

Le tir assourdissant résonna dans les oreilles de la jeune femme bien longtemps après que la ballesoit sortie de la chambre du pistolet. Un stroboscope explosa au-dessus d’eux. Des étincelles et deséclats de verre tombèrent sur la foule. Puis ce fut la confusion.

Des cris retentirent dans toute la boîte de nuit et les personnes qui étaient sur place se précipitèrentvers les portes. Frank arrêta de frapper son adversaire suffisamment longtemps pour se relever etpour voir Malcolm qui tenait encore l’arme dans sa main.

« Espèce de salope débile ! », hurla Malcolm en levant sa main libre vers la joue de la jeunefemme.

Le goût familier du sang remplit la bouche de Kiana et elle tomba sur le sol.

Un grognement sauvage s’éleva derrière elle, et elle leva la tête juste à temps pour voir Frank faireun plaquage à Malcolm comme s’ils étaient sur un terrain de football1. Les yeux de son exs’écarquillèrent lorsque l’épaule de Frank entra en contact avec son ventre. Un grognement dedouleur échappa des lèvres de l’homme, suivi par un bruit métallique, et le pistolet de Malcolmglissa dans les ombres sombres de la piste de danse.

« Il faut qu’on t’apprenne les bonnes manières », dit Frank avant de lancer un coup de poingpuissant dans la mâchoire de Malcolm.

Kiana mordit sa lèvre gonflée, luttant pour se retenir d’encourager Frank. Cela faisait deux ansqu’elle attendait que Malcolm récolte ce qu’il avait semé. Elle voulait qu’il ressente la douleur etl’humiliation provoquées par le fait de recevoir des coups de la part d’une personne plus forte. Ellevoulait qu’il vive ce qu’elle avait enduré au cours de leur relation tumultueuse. Et à présent, Frankétait en train de le faire pour elle.

Une main la saisit par l’épaule et Tre la fit redescendre sur terre.

« Il faut qu’on se barre avant que les flics n’arrivent. »

« Et Frank ? »

Elle fit un signe de la tête vers l’homme roux qui était en train faire subir à Malcolm le châtimentqu’elle avait toujours voulu lui infliger elle-même.

« C’est un grand garçon. »

Tre l’entraîna vers la porte de derrière au moment où les policiers firent irruption en passant parl’entrée principale.

« Mieux vaut lui que nous. »

Elle avait parcouru la moitié du chemin menant à sa voiture lorsqu’elle trouva le courage deplanter ses talons dans le sol et d’arrêter son frère.

« Je ne vais pas le laisser porter le chapeau. »

« Est-ce que tu vas utiliser ta tête pendant au moins une putain de seconde ? »

Tre sortit un mouchoir de sa poche et appuya ce dernier contre la lèvre inférieure gonflée de lajeune femme.

« Tu aurais pu te faire tuer là-dedans. »

« Il n’y aurait pas eu de problème si Malcolm avait respecté son ordonnance restrictive. »

« Raison de plus pour sortir de là. »

« Mais on n’a rien fait de mal. »

Elle repoussa son frère.

« Et c’est Frank qui a failli se faire tuer en essayant de me protéger. »

« Frank est connu pour sa bêtise dans ces cas-là. Viens maintenant. »

Tre saisit Kiana par le bras et continua d’essayer de l’entraîner vers sa voiture. Une fois qu’ilsfurent devant cette dernière, il ouvrit la portière et il la poussa dans le siège conducteur.

« Rentre directement chez toi. »

« Et Frank ? »

« Il est tout à fait capable de s’occuper de lui tout seul. »

Son frère jeta un regard autour d’eux, les gyrophares bleus des voitures de police jetaient desombres inquiétantes sur les rides que l’inquiétude creusait sur son visage.

« Va-t’en avant qu’un des membres du gang de Malcolm ne parte à ta recherche. »

« Mais… »

« Putain, Kiana, pense à Savannah. »

Un frisson de peur parcourut la colonne de la jeune femme et raidit ses muscles. Elle ferma lesyeux et elle revit ses priorités. Tre avait raison. Elle devait rentrer chez elle et ne pas risquer sa viedavantage ce soir-là. Il y avait des choses plus importantes. Elle acquiesça et elle inséra la clé dansle contacteur.

« Je t’appelle plus tard. »

Tre appuya sur le loquet de fermeture de la portière avant qu’elle ne ferme cette dernière, puis ils’éloigna.

Elle démarra la voiture et elle s’engagea dans la rue tandis que ses mains commençaient à tremblerà cause de ce qui venait juste de se passer. Sa respiration était rapide et inégale, et elle sentait soncœur battre sur le côté de son visage. Elle sentait des larmes piquer ses yeux, mais elle réussit àtourner pour emprunter la route principale qui passait devant la discothèque.

Elle s’arrêta et elle regarda la police faire sortir un Frank menotté pour le conduire sur le siègearrière d’une voiture de patrouille.

Une nouvelle vague de culpabilité s’abattit sur elle, chassant toute trace de peur. Elle avait été unevictime autrefois, mais elle ne le serait plus jamais. Elle était capable d’agir. Et elle pouvait faire en

sorte que Frank ne soit pas considéré comme responsable pour tout cela. Si la chance était de soncôté, elle pourrait même peut-être obtenir ce pour quoi elle était venue les rejoindre par la mêmeoccasion.

Elle remit le moteur en marche et, une fois arrivée à quelques pâtés de maisons, elle se rangea surle bas-côté et elle sortit son téléphone. Quelques sonneries plus tard, une voix ensommeilléerépondit.

« Tasha, c’est Kiana. Désolée de te déranger à cette heure de la nuit, mais j’ai un énorme service àte demander. »

***

Frank s’assit dans la cellule de prison et appuya la poche de glace contre son œil gonflé.

Comment est-ce que je vais bien pouvoir expliquer ça à Adam ?

Cela faisait presque deux ans qu’il ne s’était pas retrouvé dans une situation délicate de ce genre.Deux ans depuis la fois où il avait perdu son sang-froid et qu’il avait laissé ses poings prendre lecontrôle sur lui. Deux ans depuis qu’il avait passé à tabac quelqu’un et qu’il avait terminé en prison.Il pensait avoir maîtrisé ses problèmes de colère, mais au moment où il avait vu cet homme en trainde tripoter Kiana, il avait perdu le contrôle.

Ce fut seulement à cet instant qu’il se rendit compte d’à quel point il avait été proche de perdre lavie.

Il avait entendu le pistolet avant de le voir, et il ne pouvait que supposer que c’était Kiana quil’avait empêché de recevoir une balle dans le dos. C’était elle qui avait poussé le bras de Malcolmvers le haut lorsqu’il s’était retourné. C’est-à-dire au moment où ce salaud l’avait frappée.

Frank serra le poing. Il n’y avait jamais aucune excuse pour frapper une femme. Jamais. Et il neregrettait qu’une chose, que la police ne l’ait pas laissé terminer de réduire ce connard en bouillieavant de se faire arrêter.

Il se mit à penser à elle. Il ne l’avait plus vue après son coup de tête dans le ventre de Malcolm. Ilespérait seulement qu’elle allait bien. Au lieu d’utiliser son coup de téléphone pour demander àAdam de le faire sortir de prison, il devrait peut-être appeler Tre et s’assurer qu’elle était ensécurité.

La poche de glace commençait à se réchauffer et il la baissa pour tester son œil. Un léger fil delumière passait à travers sa paupière enflée, mais les images étaient trop floues pour être utiles.

Au moins, cela s’était passé hors saison. Il n’avait pas besoin d’avoir une vision parfaite avantl’automne.

Il s’appuya contre le mur en béton froid de sa cellule et il grimaça. Il serait plus courbaturé lelendemain qu’après un match de division. Mais en se rappelant ce qu’il avait ressenti en tenant Kianadans ses bras, il se mit à sourire.

Oui, elle en valait vraiment la peine.

Un faible bourdonnement se fit entendre au bout du couloir et il entendit des pas se rapprocher. La

porte de sa cellule s’ouvrit.

« Venez avec moi, M. Kelly », ordonna l’agent de police.

Il était temps de passer ce coup de téléphone.

Mais au lieu de le conduire vers le téléphone, l’agent le conduisit vers un de ses collègues quitenait les biens qui lui appartenaient.

« Vérifiez que vous avez tout. »

Un sentiment de malaise le parcourut. Il avait été arrêté suffisamment de fois pour savoir qu’il nes’agissait pas du protocole.

« Euh, je suis déjà libre ? »

« Quelque chose dans ce goût-là », répliqua l’agent.

Frank fit un inventaire rapide de ses affaires. Montre. Portefeuille. Téléphone. Talon du ticket deparking. Tout était là, et il n’avait pas l’intention de s’attarder dans la prison du comté de Fulton plusque nécessaire. Il hocha la tête en direction du garde avant d’être escorté vers la sortie.

Il s’arrêta brusquement lorsqu’il vit des courbes familières en train de l’attendre.

« Je vais m’en occuper à partir de là », dit Kiana sur un ton qui ne laissait place à aucunediscussion. « Allons-y, Frank. »

« Tu m’as fait sortir de tôle ? », demanda-t-il.

La jeune femme parcourut la pièce du regard et ses omoplates se raidirent.

« Je t’expliquerai dans la voiture. »

En d’autres termes, il était invité à se taire jusque-là.

Il la suivit dans le parking et il attendit qu’elle ouvre les portes d’un modèle récent de Lexus EScouleur or. Elle monta silencieusement dans le siège conducteur et elle démarra la voiture. Dès qu’ilfut installé dans le siège passager, non sans mal, elle fit marche arrière et elle sortit du parking avantmême qu’il ne puisse attacher sa ceinture de sécurité.

« Garde la tête baissée. »

Il était sur le point de lui demander pourquoi lorsqu’il vit les véhicules des chaînes de télévisionen train d’attendre devant la prison. Un juron sortit de ses lèvres et il recula son siège jusqu’à seretrouver en position allongée. Il s’attendait à des flashs d’appareils photo ou à des projecteurs, maisKiana réussi à passer devant les camionnettes sans déclencher la frénésie qu’avait provoquée sadernière sortie de prison.

Une fois qu’ils furent hors de vue et de danger, il se rassit.

« Merci. »

Elle hocha la tête, et il vit que des signes de contusion commençaient à apparaître sur ses joues.

La colère s’empara de nouveau de lui.

« C’était qui ce connard ? »

« Un ex », répondit-elle, sa réponse en deux mots révélant une légère prudence.

« Où il est maintenant ? »

À chaque fois que ses yeux se posaient sur le bleu, il ressentait l’envie de terminer ce qu’il avaitcommencé.

« Je ne sais pas et je m’en fous. »

La voix de la jeune femme trembla et elle serra le volant. Elle avait du mal à déglutir et lorsqu’elleouvrit de nouveau la bouche, toute trace de peur avait disparu.

« Je voulais te remercier d’être venu à mon secours là-bas. »

« N’importe quoi pour une belle femme. »

Le coin de sa bouche se leva dans un sourire ironique.

« Tu flirtes toujours autant ? »

« Nope. »

Il noua ses doigts autour de sa nuque et il se pencha en arrière.

« Des fois je suis pire. »

Il gagna un gloussement en réponse et il sentit sa poitrine se serrer. Cela lui faisait plaisird’entendre son rire, surtout après les évènements de ce soir-là.

« Bon, combien je te dois pour la caution ? »

« Rien du tout. »

Le sourire disparut et les mains de la jeune femme se remirent à tressaillir.

« N’importe quoi. Je sais combien ça a coûté la dernière fois… »

« Il n’y avait pas de caution parce qu’il n’y avait aucune charge retenue contre toi. »

Il redressa brusquement la tête.

« Quoi ? »

Elle se tortilla dans son siège et elle tourna pour emprunter la route menant au centre-ville.

« J’ai passé quelques coups de téléphone et j’ai fait en sorte qu’ils laissent tomber les chargescontre toi. »

« Comment tu as fait ? Et aussi, ça a coûté combien ? »

« Rien du tout. »

Elle se tourna pour lui offrir un sourire penaud.

« Une fois que j’ai pu expliquer la situation à quelques personnes, j’ai pu faire en sorte que lesaccusations de coups et blessures soient abandonnées en échange d’un petit service. »

Il laissa échapper un faible sifflement.

« Tu dois connaître des gens haut placés. »

« Quelque chose dans le genre », dit-elle en haussant les épaules. « Bon, tu habites où ? SandySprings ? »

« Roswell. »

Il lui donna son adresse tout en continuant à l’observer du coin de l’œil.

« Autant te prévenir, je suis un peu trop en mauvais état pour être à la hauteur de ma réputation cesoir, si c’est ce que tu cherches. »

Elle se mit de nouveau à rire et le cœur de Frank se mit à battre la chamade. Mon Dieu, qu’ilaimait ce son grave et riche.

« Je ne pense pas que tu sois en état de rentrer chez toi tout seul ce soir, alors je ne fais que jouerles taxis. »

« Mais peut-être que quand je serai à nouveau sur pied… »

Elle rit encore plus et elle emprunta la nationale Georgia-400.

« Tu ne sais pas quand lâcher l’affaire, pas vrai ? »

Il lui répondit en lui lançant son sourire provocant, ignorant la douleur qui le lançait autour de sonœil gonflé.

« Nope. Je suppose qu’il y a une raison pour que tu me fasses sortir de taule. »

Le rire se tut et la jeune femme mordit sa lèvre inférieure enflée elle aussi.

« En fait, il y a bien une raison qui explique pourquoi j’ai fait en sorte que les charges contre toisoient abandonnées »

Et cela n’avait rien à voir avec le fait qu’elle avait envie de le chevaucher sauvagement au lit à enjuger par la manière dont ses épaules se raidirent de nouveau.

« Je t’écoute. »

« Alors, avant tout, je tiens à m’excuser pour ce qui s’est passé ce soir. Si tu n’avais pas danséavec moi, tu n’aurais jamais été mêlé à cette bagarre, et je ne sais pas ce que j’aurais fait si on t’avaittiré dessus. »

« Oh », dit-il d’une voix traînante tout en posant sa main sur son cœur. « Alors tu te fais du soucipour moi ? »

Elle leva les yeux au ciel et elle secoua la tête.

« Il y a autre chose chez toi. »

« Tout vient de mon charme irlandais. »

Néanmoins, il reprit son sérieux avant d’ajouter : « Mais j’ai bien compris que si tu as utilisé tesrelations pour me faire sortir, c’est pour une autre raison. »

« Euh, en fait, c’est le cas. »

Elle tortilla plusieurs fois ses mains autour du volant.

« Tu connais mon père, n’est-ce pas ? »

« Qui ne le connait pas ? Marshall Dyer était une légende. Je me rappelle avoir participé à un deses camps d’entraînement pour linebackers quand j’étais petit et que j’étais en totale admirationdevant lui. »

Elle hocha la tête et elle attendit un peu avant de continuer.

« Juste avant son décès, l’année dernière, il a créé une fondation dont le but est de fournir deséquipements adaptés aux programmes de football pour les jeunes. Il a été victime de multiplescommotions cérébrales pendant sa carrière et il voulait faire en sorte qu’aucun enfant ne souffre deséquelles comme ça a été son cas. J’ai pris la relève, et du coup… »

Une grimace se dessina sur son visage, et un pli se forma au-dessus de son nez.

« Je n’ai pas pu attirer autant que je l’aurais souhaité pour la fondation. »

« Et moi j’interviens où dans tout ça ? »

« On organise un gala de charité dans deux mois, et j’apprécierais vraiment si tu pouvais apporterton soutien en tant que célébrité. »

Il prit une lente inspiration tout en réfléchissant à sa demande.

« Et Tre ? »

« On sait tous les deux que Tre est remplaçant et qu’aujourd’hui il risque d’être viré n’importequand. »

Ses mots étaient durs mais honnêtes, sans aucune trace d’amertume ou de colère.

« Tu es un joueur pro du Super Bowl2 et tu es célèbre dans le monde du football. Les gensconnaissent ton nom comme ils connaissaient celui de mon père. Et si ton nom est associé à lafondation, ou même au mien… »

« Et c’est quoi ton rôle dans ce plan ? »

Elle se tortilla sous son regard.

« Je vais être franche avec toi, Frank, je ne suis pas intéressée par le fait d’être en couple ou devivre quoi que ce soit dans ce genre en ce moment. Cependant, je ne serais pas opposée à quelquesrendez-vous mis en scène jusqu’au gala. »

« Un faux couple ? »

Elle se lécha les lèvres et elle acquiesça.

« Si on se montre comme un couple à deux ou trois évènements ou dans des restaurants en ville, lesgens penseront qu’on sort ensemble, et quand ils chercheront des infos sur moi, ils tomberont sur lafondation. »

« Et à quel point tu veux que ces faux rencards aient l’air réalistes ? Tu accorderas un baiser oudeux pour les appareils photo ? »

« Si nécessaire. Je sais que je ne suis pas comme les autres filles avec qui tu es sorti, mais je suisquelqu’un de respectable, et mon image clean bien propre sur moi sera aussi bénéfique pour la tienne.Je vais jouer mon rôle si ça aide la fondation, mais je ne voulais pas te laisser penser que je voyaisça comme quelque chose de réel ou comme si j’allais te tomber dans les bras après le premierrendez-vous. Je ne suis pas ce genre de fille. »

Elle était si directe, si honnête à propos de son implication dans la fondation de son père qu’unepartie de lui était prête à lui dire oui sur-le-champ. Mais une petite voix au fond de sa tête lui disaitd’être prudent. L’idée semblait bonne à première vue, mais il devait creuser un peu plus avantd’associer son nom avec quoi que ce soit. Sans parler du fait qu’il voulait plus que quelques baisersmis en scène de la part de la jeune femme.

« Je dois d’abord en parler avec mon agent. »

« Je comprends. »

Elle prit la sortie menant à Roswell et elle ralentit pour respecter la limitation de vitesse.

« Toutes les informations nous concernant sont sur notre site web et je suis prête à répondre àtoutes les questions que ton agent ou toi vous pouvez avoir. C’est juste que je… »

Il attendit qu’elle poursuive sa phrase, mais voyant qu’elle ne le faisait pas, il demanda : « C’estjuste que quoi ? »

« Je ne veux pas que la fondation se casse la figure. C’était une passion pour papa et j’auraisl’impression de le laisser tomber si je n’arrive pas à poursuivre son travail. Je suis quelqu’un de trèsréservé, mais je suis prête à sortir de ma zone de confort si ça peut aider à faire en sorte que ce galade charité soit un succès. »

Elle devenait de nouveau la demoiselle en détresse, et il était incapable de résister à son appel ausecours.

« Je vais voir ce que je peux faire. »

Elle le récompensa par un sourire qui irradiait de bonheur.

« Merci. »

Un étrange sentiment tirailla son ventre à la vue de ce dernier. D’accord, elle savait comment s’yprendre avec lui. C’était vraiment dommage qu’elle soit un fruit défendu.

Il salua le vigile à l’entrée de sa résidence sécurisée. Heureusement, son statut de célébrité faisaitque les gens le reconnaissaient facilement. Enfin, cela et ses cheveux roux. Le vigile les laissa passer,et avant même qu’il ne s’en rende compte, Kiana s’était arrêtée devant chez lui.

« Ça va aller ? », demanda-t-il. « Si tu veux tu peux dormir chez moi si tu as besoin de te cacherdans un endroit sûr. »

Elle secoua la tête.

« Merci, mais je suis en sécurité chez moi. »

Une gêne familière le submergea lorsqu’il sortit de la voiture. Il voulait la revoir, mais il sedemandait si elle ne voyait en lui qu’un moyen d’aider sa fondation.

« Je t’appelle dans quelques jours. »

« Ça me va. »

Le menton de la jeune femme tremblait malgré l’expression courageuse qu’elle essayait de montrerdevant lui. Elle avait été chamboulée par les évènements de la soirée.

« Tu es sûre que ça va aller ce soir ? », demanda-t-il encore une fois, la portière de la voitureencore ouverte de son côté.

« Oui, ça va aller. » Le tremblement cessa. « Merci encore, Frank, merci pour tout. »

Les yeux de la jeune femme étaient remplis de chaleur, et il se demanda si le tout en questionincluait ce qui s’était passé entre eux sur la piste de danse avant qu’ils ne soient interrompus.

« Avec grand plaisir, charmante demoiselle. »

Il ferma la portière et il regarda la voiture s’éloigner avec un sentiment d’incertitude.

Cependant, une chose était sûre. Il reverrait Kiana Dyer.

Et avec de la chance d’ici peu.

1 Football : Toutes les références au football dans cet ouvrage sont liées au football américain 2 Super Bowl : Finale du championnat defootball américain pour le titre de champion de la NFL (National Football League)

Chapitre Trois

Frank examina son reflet poussa un juron. Comme si cela ne suffisait pas qu’il soit le seul de sesfrères à être affligé de cheveux roux. Maintenant il avait un coquard de la taille d’un poing autour deson œil gauche qui s’ajoutait à son physique si particulier. Au moins, cela avait désenflé depuis laveille. Il ne pouvait qu’imaginer ce que Kiana devait avoir pensé de lui lorsqu’elle l’avaitraccompagné. Pas étonnant qu’elle ait décliné son invitation.

Il partit d’un pas traînant sous la douche et il frotta son corps pour faire disparaître tout ce quirestait sur lui ayant un lien avec la discothèque : la fumée, l’alcool et le sang. La seule chose qu’il nevoulait pas oublier, c’était à quel point la déesse qu’il tenait dans ses bras était séduisante pendantqu’ils bougeaient leurs corps. S’ils avaient couché ensemble, cela aurait été magique - aucun doutelà-dessus. Mais elle était également une source de problèmes.

C’était vraiment dommage, il adorait les problèmes.

Une fois séché et habillé, il chercha son téléphone et il appela Adam.

Son frère aîné répondit avec un : « Alors dans quel pétrin tu t’es fourré cette fois ? »

« Rien du tout. »

« Tu n’appelles que quand tu as besoin que je te fasse sortir de prison », dit Adam sur un tonaccusateur.

Frank sentit es joues le brûler et il se gratta la nuque.

« Ouais, je suppose que je n’ai pas été un très bon frère depuis quelques temps. »

« Et ? »

« Laisse-moi commencer par te dire que je ne suis pas en prison. »

« Pour une fois. »

La gêne se transforma en irritation, mais la sensation de brûlure sur sa peau restait la même.

« Hey, j’ai été calme ces derniers temps. La dernière fois où j’ai eu des problèmes ça remonte àdeux ans. »

« Mais il y a quelque chose dont tu veux me parler, à en juger par la culpabilité dans ta voix et parle fait que tu m’appelles à neuf heures du matin un dimanche. »

Zut, son frère le connaissait trop bien.

« Eh bien, on dit que la confession est bonne pour l’âme. »

« Il te faudra plus de dix Je vous salue Marie pour t’absoudre de certains de tes péchés, surtoutaprès l’accident dans lequel la cousine de Jenny et toi vous vous êtes retrouvés mêlés le moisdernier. Je ne pense pas que la famille Nguyen pourra te le pardonner un jour. »

« C’était son idée de baiser dans la buanderie, et je n’allais pas dire non à une fille aussi canon. »

« Et bien sûr, tu n’étais qu’une pauvre victime. »

Le ton d’Adam était devenu taquin et plus léger.

« Bon, dis-moi ce qui s’est passé. »

« Je suis sûr que ça fait la une des médias. »

À présent, c’était au tour d’Adam de pousser un juron. Le bruit des cliquetis sur un clavierremplirent le silence. Une minute plus tard, d’autres jurons suivirent.

« Je t’en prie, dis-moi que tu n’étais pas au milieu de cette fusillade dans cette boîte de nuit. »

« Bingo. »

La panique monta dans la voix de son frère.

« Merde, tu n’es pas à l’hôpital ou un truc dans le genre ? »

Frank caressa l’idée de faire marcher son frère, mais la panique de ce dernier semblait trop réelle.

« Je vais bien. J’ai juste un magnifique œil au beurre noir en souvenir. »

Des grommellements incompréhensibles remplirent la ligne pendant une bonne vingtaine desecondes.

« Commence par le début, et en disant ça je ne parle pas du fait que tu étais dans cette boîte entrain de faire tes petites affaires. »

« Mais c’est ce que je faisais », dit Frank sur un ton innocent. « J’étais avec Tre quand sa sœur,Kiana, nous a rejoints. On a commencé à danser, et après son ex a débarqué et il nous a pris la tête, etune chose en entraînant une autre… »

« Bon Dieu, Frank, tu es un aimant à problèmes. » Adam marqua une pause. « Ils disent que deuxpersonnes se sont retrouvées à l’hôpital. »

« Je ne les ai pas frappé assez fort pour ça. »

Mais une partie de lui était ravie d’apprendre que ces sales types avaient eu besoin de soinsmédicaux. Avec un peu de chance, ils avaient compris qu’ils ne devaient pas recommencer à toucherà Kiana.

« Frank », son frère dit son nom comme s’il le suppliait de bien se comporter, « Selon l’article, undes deux était celui qui avait une arme. »

« C’était sûrement l’ex de Kiana. »

« Merde ! Tu t’es battu avec un mec qui avait une arme ? Espèce d’idiot sans cervelle. »

Frank se laissa tomber sur immense canapé et il fixa le plafond.

« Il a essayé de sortir son arme au milieu de la bagarre, mais Kiana l’a obligé à la lâcher. »

« Alors la femme était aussi impliquée dans la bagarre ? C’est une première pour toi. »

Il fit un grand sourire. Peut-être que Kiana n’était pas complètement une demoiselle en détresse

après tout. Elle avait assuré ses arrières au bon moment.

« Écoute, la bagarre en elle-même n’a aucune importance. Je vais bien, et la bonne nouvelle c’estque Kiana a fait en sorte que les charges soient abandonnées. »

Une nouvelle pause lui répondit.

« Et d’une manière ou d’une autre tu as réussi à échapper aux médias cette fois. »

C’était une première. Il avait été placé en détention, ce qui voulait dire que n’importe quellepersonne mal intentionnée fouillant dans les dossiers de la prison pouvait trouver son nom. Peut-êtreque les relations de la jeune femme avaient le bras plus long que ce qu’il ne le pensait.

« Mais celui qui était armé est une sorte de célébrité. Un rappeur du nom de King Mal. »

Frank renifla. Ce connard était bien du genre à se faire appeler King Mal.

« Et c’est lui qui devra répondre des accusations, pas moi. »

« On dirait, oui. »

Un grincement se fit entendre et Frank imagina Adam en train de se pencher en arrière dans sonfauteuil de bureau.

« Alors c’est la seule raison de ton appel ? Te vanter d’avoir envoyé deux mecs à l’hôpital sans tefaire arrêter ? »

« C’était plus pour te rassurer et te dire que je vais bien. Je sais à quel point tu peux t’inquiéter. »

« Je vais avoir autant de cheveux blancs que papa avant d’avoir quarante ans. »

« Et Lia et toi vous n’avez même pas encore d’enfant. »

« C’est parce que je suis trop occupé à essayer de m’occuper de tous mes petits frères. »

Le ton d’Adam était devenu mélancolique. Frank savait que son frère aîné et sa femme voulaientdes enfants. S’il cela ne tenait qu’à Adam, ils auraient autant d’enfants que leurs parents.

« Qu’est-ce que tu veux me dire d’autre ? »

« Kiana m’a demandé si je serais d’accord pour apporter mon soutien à la fondation qu’elle dirige,et je voulais creuser un peu avant d’accepter. »

« Tu veux que je demande à Cully de fouiner un peu ? », répondit Adam en citant le nom dudétective privé auquel son entreprise avait fait appel à maintes reprises.

« Pas à ce point-là. Je voulais surtout te demander ton avis. C’est la fondation Marshall Dyer. »

D’autres cliquetis sur le clavier.

« Apparemment c’est réglo. Et je me souviens de combien tu vénérais Dyer quand tu étais gosse. »

« Ouais. »

Le ton traînant sur lequel il avait répondu devait avoir révélé ses hésitations car Adam demanda :« Alors qu’est-ce qui te retient ? »

« La femme qui est aux commandes. »

« Tu t’attends à d’autres bagarres avec des flingues ? »

« C’est plus que je me demande comment je pourrais rester professionnel en sa présence.Apparemment elle pense que si on fait juste semblant d’être ensemble, ça aidera à attirer l’attentionsur la fondation, mais je ne veux pas aller trop loin. Et je sais que je serai tenté à chaque fois que jeserai avec elle. »

Adam eut un petit rire.

« Pour une fois, tu penses aux conséquences avant d’agir. Je suis impressionné. Et je suis en trainde regarder une photo d’elle. Pas mal. »

« Pas mal ? » Frank se redressa. « Tu es aveugle ? Elle est magnifique. »

« Désolée, mais j’ai un faible pour les petites italiennes », répondit Adam avec un rire léger.

« Tu comprends mon dilemme, pas vrai ? En plus c’est la sœur de Tre, et il m’a déjà envoyé lesignal pas touche. »

« Mais… ? »

Frank se renfonça de nouveau dans le canapé et il fit courir ses doigts dans ses cheveux courts. «Mais j’hésite à savoir si je veux prendre le risque d’essayer de me rapprocher d’elle. »

« Tu oublies un détail important. »

« Lequel ? »

« Quels genre de signaux est-ce qu’elle t’envoie elle ? »

« Pas la moindre idée. »

La frustration dans sa voix reflétait celle qu’il avait ressentie la veille au soir lorsqu’elle avaitrefusé son invitation à rester avec lui. Il en avait vu assez pour savoir qu’elle serait difficile àconquérir, mais elle en valait la peine.

« Des signaux contradictoires au mieux. Je veux dire, c’était son idée de faire semblant d’être mapetite amie, donc ça veut dire que je ne lui déplais pas. »

« Hmmm. »

Il pouvait presque imaginer Adam en train de se frotter le menton, plongé dans ses pensées.

« Pourquoi est-ce qu’elle veut un faux couple ? »

« Elle pense que ça attirera plus l’attention sur la fondation. Et elle a dit que le fait d’être vu avecquelqu’un comme elle pourrait aussi aider à redorer mon image. »

« C’est vrai, mais il y a peut-être un moyen de faire en sorte que ça joue en ta faveur. »

Frank fit un grand sourire. Il savait que son frère aîné saurait quoi faire.

« Je suis toute ouïe. »

Chapitre Quatre

Kiana fixait les maquettes affichées sur l’écran de son ordinateur. Elles étaient destinées à unepublicité pour l’Atlanta Journal Constitution qui allait paraître le dimanche suivant. Elle devaitannoncer le gala et la vente aux enchères silencieuses pour la fondation, mais elle n’arrivait pas àobtenir le résultat qu’elle voulait, et elle devait rendre les maquettes dans l’après-midi.

Elle appuya ses doigts contre ses tempes. Le peu de fonds dont elle disposait avaient été utiliséspour l’évènement et pour payer sa seule employée jusqu’à la date de ce dernier. Elle ne pouvait passe permettre de faire appel aux services d’une société de relations de presse huppée qui pourraitgérer cela pour elle. Étant donné le peu de tickets qu’ils avaient vendus, elle aurait de la chance sielle ne finissait pas dans le rouge. Elle devait attirer l’attention des médias, et elle espérait que Frankaccepterait de l’aider, mais près d’une semaine s’était écoulée sans qu’elle n’ait reçu aucunenouvelle de sa part, ni de celle de son représentant.

Elle avait presque envie de demander à Tre de pousser un peu Frank, mais elle était retenue par leséventuelles répercussions. D’abord, Tre serait furieux qu’elle ne lui ait pas demandé son aval. Leursrelations étaient tendues, dans le meilleur des cas, depuis qu’elle avait emménagé avec leur père plusde quinze ans plus tôt. Malgré ses mots apparemment remplis d’amour, elle avait toujours ressenti unpeu de ressentiment chez lui. La tension n’avait fait qu’empirer après le décès de leur père, et elleavait reçu un héritage assez important.

Ensuite, elle avait vu la mise en garde silencieuse que son frère avait lancé à Frank. Comme si elleavait besoin que son petit frère intervienne dans sa vie amoureuse inexistante. Elle avait toujours eudes goûts spéciaux, mais elle avait appris la leçon, trop bien même.

Il ne faut pas jouer avec un joueur.

Et Frank Kelly était un joueur jusqu’au bout des ongles. Cet homme respirait à la fois le sexe et lecharme. Si elle n’avait pas déjà été au courant de sa réputation, elle aurait probablement retiré sapetite culotte avant la fin de la soirée. En l’état, il avait été assez dur de refuser son invitation à venirchez lui le samedi soir. Elle avait vu ce qu’il pouvait faire avec ses hanches sur la piste de danse, etelle ne pouvait qu’imaginer ce qu’il serait capable de faire dans une chambre.

Attention ma fille. Tu sais à quel point les hommes comme lui peuvent être problématiques.

Surtout les hommes qui savaient comment marquer.

Alors qu’est-ce qui avait bien pu la pousser à lui proposer toute cette histoire de faux couple ?C’était comme si elle cherchait les problèmes. Mais elle était désespérée et elle avait décidéd’utiliser l’attirance qu’il avait pour elle à son avantage pour le rallier à sa cause. Plus elle passeraitde temps avec lui, plus elle pourrait lui vendre l’idée d’apporter son soutien à sa fondation. Au moinselle avait été franche dès le début sur le fait que cette relation ne mènerait à rien.

Elle se massa les tempes en faisant attention à ne pas appuyer trop fort du côté droit. Sa jouen’était plus gonflée, mais elle restait sensible. Heureusement, elle avait déjà assez d’entraînementpour ce qui était de couvrir des ecchymoses avec du maquillage.

Quelqu’un toqua à la porte, et son assistante, Sherita, passa la tête dans cette dernière.

« Kiana, Frank Kelly est là pour toi. »

Son ventre se noua et son pouls se mit à battre la chamade.

« C’est vrai ? »

Sherita hocha la tête et un sourire entendu apparut sur ses lèvres.

Kiana regarda le désordre sur son bureau et fut prise d’une frénésie de rangement. Puis elle passasa main dans ses cheveux.

« De quoi j’ai l’air ? »

Son assistante entra et ferma la porte derrière elle.

« Troublée. »

Kiana s’enfonça dans sa chaise de bureau.

« C’est pas bon. »

« Mais parfaitement compréhensible. »

Sherita s’éventa comme si elle était en train d’éteindre des flammes.

Oui, Frank Kelly était sexy, et elle n’était pas la seule à le penser.

Kiana se mit à rire et ses épaules se détendirent.

« Fais-le entrer. »

« Tu es sûre ? Parce que la vue que j’ai de mon bureau ne me dérange pas. »

Kiana continua à rire, mais elle acquiesça.

« Ouais, mais quelle quantité de boulot tu penses que tu pourrais faire s’il restait là ? »

« Rien du tout. »

Sherita fit un grand sourire, mais elle fit demi-tour pour aller chercher Frank.

Kiana utilisa ces dernières secondes pour vérifier son reflet dans le miroir qu’elle conservait dansle tiroir de son bureau. Ce n’était pas parfait, mais au moins elle n’avait pas de rouge à lèvres sur lesdents.

Son regard tomba sur le cadre contenant la photo de sa fille posée sur le coin de son bureau aumoment où la porte s’ouvrit. Elle la saisit et la glissa dans le tiroir avec son miroir. Elle avait réussià faire en sorte qu’elle reste loin des projecteurs depuis sa naissance et elle avait l’intention decontinuer à le faire.

Frank entra lentement dans son bureau et elle eut le souffle coupé. Elle l’avait trouvé sexy dans ladiscothèque, mais ce jour-là, c’était encore un autre niveau. Sexy ne suffisait même pas à décrire lejeune homme. Le T-shirt Notre Dame1 gris collait aux muscles bien dessinés de ses bras et de sonlarge torse, tandis que son jean moulait ses fesses d’une manière qui semblait la supplier de les

pincer.

« Hey, salut beauté », la salua-t-il avec un clin d’œil et un grand sourire.

Son comportement de séducteur la sortit de sa stupéfaction, et elle retrouva sa voix.

« Pourquoi tu as mis autant de temps ? »

« Je devais m’assurer d’être assez beau pour te faire honneur, surtout si tu envisageais de faire desphotos. »

Il toucha son œil fermé tant il était gonflé depuis le samedi soir. Il ne restait de l’ecchymosequ’une légère teinte jaunâtre.

C’était plus comme s’il était en train de jouer à des jeux psychologiques. Les hommes aimaient cegenre de choses. C’était comme quand ils lui demandaient son numéro, puis qu’ils attendaient unesemaine pour appeler. Au moins elle savait où elle en était avec lui.

Elle recula et elle croisa les jambes tout en remarquant la manière dont le regard de Frank seposait sur ces dernières. Un rire silencieux remplit son esprit. Il pouvait essayer de jouer à des jeuxpsychologiques, mais c’était toujours lui qui avait le dessus.

« Alors, quel est le verdict ? », demanda-t-elle.

« C’est OK pour moi ».

Il s’assit dans la chaise qui se trouvait en face de la jeune femme, et sa carrure massive donnaitl’impression que la chaise était plus petite qu’elle ne l’était, et il croisa les bras.

« Mais quand je m’engage dans quelque chose, je ne suis satisfait que quand je me donne à cent dixpour cent. Et j’ai quelques idées qui pourraient permettre à la fondation d’obtenir encore plus depublicité. »

« Comme ? »

« Commençons par un déjeuner. »

Le pouls de Kiana s’accéléra.

« Un déjeuner ? »

Il acquiesça et son sourire s’élargit.

« Il est midi au cas où tu ne l’aurais pas remarqué. »

Ce furent les plaintes de l’estomac de la jeune femme répondirent à sa place.

« Je suppose qu’on pourrait parler de tout ça pendant le déjeuner. »

« Parfait. »

Il bondit de sa chaise comme un enfant qui aurait entendu la cloche annonçant la récréation.

« J’ai pris la liberté de réserver en bas de la rue. Partante pour une petite marche ? »

« C’est loin ? »

Elle baissa les yeux vers ses talons en se demandant s’ils pourraient relever le défi.

Il donna le nom d’un restaurant qui se trouvait au coin de la rue.

Elle se mit à saliver. Il s’agissait d’un de ses restaurants préférés à Atlanta.

« Ça me va. »

Elle saisit son sac et elle fit un signe de la main à Sherita en sortant du petit bureau qu’elle louaitdans le centre-ville. Une fois que la fondation aurait grossi, ils pourraient peut-être s’offrir un plusgrand espace et plus de personnel, mais pour le moment, c’était une affaire de deux femmes.

La main de Frank se posa en bas de son dos lorsqu’ils montèrent dans l’ascenseur, et elle sentit unfrisson la parcourir. Sa main était chaude, mais également possessive. Et même si son corpsappréciait ce contact physique, son esprit lui recommandait d’être prudente.

Concentre-toi sur le business.

« Alors, de quoi tu voulais parler pendant le déjeuner ? », demanda-t-elle en faisant sorte degarder un ton léger.

« D’un moyen infaillible de s’assurer que tout le monde entende parler de la fondation de ton père.»

Quelque chose dans la manière dont les yeux bleus du jeune homme pétillaient lui retournal’estomac.

« Tu n’arrêtes jamais de flirter ? »

« Désolé, c’est naturel chez moi. »

Uh-huh. Une raison de plus pour qu’elle garde ses distances. Bien sûr, elle n’était pas aidée par lefait qu’être aussi proche de lui lui permettait de sentir son parfum épicé. Il était léger tout en étantmasculin. Elle pourrait trouver agréable de respirer son odeur toute la nuit pendant qu’ils lutteraientsous la couette.

L’ascenseur s’ouvrit au rez-de-chaussée et elle en sortit, remplie d’un sentiment d’anxiété à causede leur proximité physique.

Il la rattrapa en quelques foulées.

« Est-ce que je dois gâcher le plaisir en agissant sérieusement pour une fois ? »

« Ça pourrait aider. »

Pour moi et pour ma santé mentale.

« Je ferais tout pour aider une femme aussi charmante que toi. »

Kiana s’esclaffa. Peut-être qu’il était incapable d’arrêter de flirter.

Le sourire espiègle de Frank s’élargit.

« Les rires détendent toujours l’atmosphère. »

Son visage adopta une expression un peu plus solennelle lorsqu’il ajouta : « Alors Sherita et toi

vous gérez tout toutes seules ? »

Elle acquiesça.

« J’espère que le gala de charité nous permettra d’embaucher plus de gens, mais pour le momentelle est tout ce que je peux me permettre pour le moment. Dans l’état actuel des choses, on est déjàdébordées. Les budgets des écoles continuent d’être réduits et les demandes de remplacement pourdes protections et des casques usés continuent de s’empiler. »

« Les gosses méritent mieux que ça. »

« Putain c’est le moins qu’on puisse dire. »

Pendant un instant, elle oublia l’homme sexy à côté d’elle et elle se perdit dans ses pensées àpropos de ce qui était devenu sa mission.

« Tout est prouvé avec les effets à long terme des contusions cérébrales chez les sportifs, pourtantils ne peuvent même pas donner aux benjamins un casque digne de ce nom. »

Et ne me lance pas sur le matériel on est désolés mon cul qu’on a pu voir dans des lycées du coin.Ces mecs y vont à fond et on observe une augmentation alarmante du nombre de blessures, surtoutdans certaines écoles du centre-ville qui ne bénéficient pas des budgets de Roswell. »

Elle marqua une pause pour reprendre son souffle et elle leva les yeux vers Frank. Fini leséducteur coquin. À la place de ce dernier se tenait un homme sincèrement engagé qui la regardaitavec quelque chose qui ressemblait à de l’admiration dans ses yeux.

« Tu es vraiment passionnée par tout ça, pas vrai ? », demanda-t-il doucement.

Elle hocha la tête, la gorge serrée par un souvenir qui lui revenait à l’esprit.

« Comme mon père l’était lui aussi. »

« Alors je vais faire tout ce que je peux pour aider. »

Il fit passer une des boucles rebelles de la jeune femme derrière l’oreille de cette dernière.

La manière dont il la touchait était tellement légère, tellement douce et tellement inattendue de lapart de l’homme qui avait envoyé Malcolm à l’hôpital avec ses poings. L’esprit de Kiana luirecommanda encore une fois de faire preuve de prudence, s’opposant à la sensation de chaleur quiparcourait ses veines. L’expérience lui avait appris qu’elle devait éviter les hommes incarnant unedangereuse combinaison de charme et de violence.

Elle recula d’un pas et elle se remit à marcher vers le restaurant.

« C’est quoi ce moyen infaillible pour attirer l’attention sur la fondation ? »

« Créer un lien subtil avant que j’annonce publiquement mon soutien. »

« Oh ? »

L’étincelle d’intelligence derrière les paroles du jeune homme intriguait Kiana. Peut-être qu’iln’était pas que le stéréotype du sportif débile.

« Toi et moi on se montre en public à partir de maintenant pour que les gens se demandent si on

sort ensemble. On se fait quelques restos, on échange quelques baisers, et on peut faire des allusionsà propos d’une nuit passée ensemble. Ensuite, après deux semaines, je me ferai un plaisir d’apposermon nom et mon image sur tout ce que tu veux. »

Elle s’arrêta pour la deuxième fois sur une distance d’un pâté de maisons.

« Et tu penses que ça va marcher si on fait ça ? »

Il enroula son bras autour de sa taille et il l’attira vers lui.

« C’était ton idée, pas la mienne. Rien ne vaut le présent. Après tout, ces gamins ont besoind’équipements dignes de ce nom. »

Bien sûr, ils utilisaient les enfants à son avantage.

« Mais pour que les choses soient claires, on ne sort pas ensemble. »

La lèvre inférieure de Frank avança dans une moue déçue qui captiva l’attention de Kiana, offrantainsi au jeune homme une occasion de passer son autre bras autour de sa taille pour la rapprocher delui.

« Tu es sûre que je ne peux pas te convaincre de changer d’avis ? »

Pendant une seconde, elle s’autorisa à savourer la chaleur de son étreinte et les étincelles de désirqui brûlaient entre eux. Ils étaient de nouveau sur la piste de danse. Sa voix se brisa dans unedernière demande qui cachait sa résistance en train de voler en éclats.

« Frank…. »

« D’accord », dit-il en effleurant son front avec ses lèvres dans un baiser léger comme une plumeavant de la lâcher.

« Je serai sage. »

Elle recommença à respirer, prenant conscience qu’elle ne s’était pas rendue compte qu’elle avaitretenu sa respiration. Cet homme s’avérait plus séduisant que ce qu’elle avait imaginé au premierabord.

Il ouvrit la porte du restaurant et il donna son nom à l’hôtesse. Une minute plus tard, on lesconduisait à leur table et tous les regards étaient tournés vers eux. Bien sûr, à quoi d’autre aurait-ellepu s’attendre en étant accompagnée par quelqu’un comme Frank Kelly ? Si sa taille et ses cheveuxroux n’attiraient pas l’attention, son charisme indéniable le faisait. Il illuminait la salle comme ilélectrisait le terrain de football. Les gens le remarquaient.

Peut-être que son idée qu’ils apparaissent tous les deux en public n’était pas sans fondement aprèstout. Elle n’avait jamais attiré autant d’attention en entrant seule quelque part.

Il choisit le siège situé à côté d’elle au lieu de celui qui se trouvait en face. !une fois que le serveureut pris leur commande, il se pencha vers elle.

« Alors, maintenant que tu sais que tu as mon soutien indéfectible, que dirais-tu de passer un bonmoment en apprenant à nous connaître l’un l’autre ? »

« Tu veux dire comme pendant un rencard ? »

« Est-ce que j’ai parlé de ça ? », demanda-t-il avec une fausse innocence.

Elle leva les yeux au ciel en souriant. Elle devait bien lui accorder des points pour sa ténacité.

« Souviens-toi, tout ça c’était ton idée. »

Il prit une grande gorgée de thé sucré.

« Tu es plus jeune ou plus vieille que Tre ? »

« J’ai huit mois de plus que lui. »

Elle donna le change à l’air insouciant de Frank et elle ajouta : « On est des jumeaux irlandais2 enquelque sorte. »

Le sourire de Frank s’élargit.

« Moi aussi j’en ai un. Gideon et moi on a onze mois d’écart. Je pense que mes parents ont hissé ledrapeau blanc après ça. »

« À la place de ta mère, j’aurais hissé le drapeau blanc après toi. »

« Ouais, j’ai cassé le moule en quelque sorte. Je suis sûr que si elle devait tout recommencer, ellen’aurait que moi et aucun de mes frères. »

Il était vraiment imbu de lui-même, mais avec de l’autodérision. Elle aimait le mélange de son côtésûr de lui tempéré par un soupçon d’humilité, et elle se sentit encore plus attirée par le jeune homme.

« Est-ce que tu es en train de dire que tu es son préféré ? »

« Ça ne fait aucun doute. »

Le badinage espiègle se poursuivit pendant tout le repas tandis que Frank racontait des anecdotes àpropos de son enfance. Lorsqu’ils eurent commandé le dessert, il se tut et il l’examina, la têtelégèrement penchée sur le côté.

« Désolé si je me mêle de quelque chose dont tu n’as pas envie de parler, mais c’est quoi l’histoireentre Tre et toi ? »

Le dos de Kiana se raidit. Il s’était montré si ouvert et si joyeux en parlant de sa famille qu’ellel’avait envié. Sa propre famille était suffisamment pleine de drames et de secrets pour garantir lesuccès d’une émission de télé-réalité.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« Eh bien, pour commencer, il n’avait jamais parlé de toi avant la soirée de samedi. »

« Je te l’ai dit. Mon père avait du mal à garder sa braguette fermée. Il a eu une aventure avec mamère pendant qu’il était marié avec la mère de Tre. »

Frank hocha la tête, et la lueur dans ses yeux lui disait qu’il comprenait bien plus de choses qu’ilne pouvait le dire. Le métissage de la jeune femme était une chose qui avait poursuivi cette dernièrependant toute sa vie. Sa mère était blonde aux yeux bleus, alors dès que les gens voyaient Kiana, ilssavaient que le père de la jeune femme était noir. La famille de sa mère, issue d’un village perdu de

la Géorgie, la fuyait à cause de son sang noir, toute comme Tre et certains membres de la famille deson père la fuyaient pour son sang blanc. Elle avait grandi en étant tiraillée entre ces deux mondes,sans être réellement acceptée par aucun des deux.

Mais l’homme qui lui rendait son regard ne sembla pas faire une moue de dégoût ou faire uneblague sur ses cheveux crépus. Apparemment, pour lui elle ne se résumait pas à une question de race.Il la regardait comme si la seule chose qu’il voyait en elle, c’était sa beauté.

« Alors tu as grandis entre deux foyers ? », demanda-t-il en faisant comme si ses parents étaientdivorcés et qu’ils s’étaient partagés sa garde.

Si seulement les choses avaient été aussi simples que cela. Son père avait passé des années à nierqu’elle était sa fille, et il n’était venu à son secours que lorsqu’elle avait eu le plus besoin de lui.

« Non, j’ai vécu avec la famille de ma mère jusqu’à mes huit ans. Après, papa m’a emmenée aveclui. »

« Et sa femme était d’accord avec ça ? »

Elle hocha la tête et les coins de sa bouche se levèrent pour former un sourire. Elle préférait deloin parler de sa relation avec sa belle-mère plutôt que de celle qu’elle partageait avec son demi-frère.

« Denise a un grand cœur et elle m’a élevée comme si j’étais sa fille. Elle m’a dit qu’elle lui avaitpardonné son erreur et qu’elle ne m’en tenait pas pour responsable. »

« Ça a l’air d’être quelqu’un de bien. »

« C’est le cas. Elle est autant ma mère que celle de Tre. »

« Elle est active dans la fondation ? »

Kiana acquiesça.

« Autant qu’elle le peut. Je crois qu’elle pleure encore papa, et tout ce qui a un rapport avec luisemble faire remonter des vieux souvenirs. »

« Je comprends. »

Le Frank sérieux resurgit l’espace d’un instant.

« Ma mère a vécu quelque chose dans le même genre quand mon père est mort, mais ça s’estarrangé avec le temps. Je pense que ça l’a aidée d’être active, de s’occuper de son église et de sonclub de bridge. »

« Sans parler du fait de veiller à ce que ses enfants restent sur le droit chemin. »

Il rit et il couvrit la main de la jeune femme avec la sienne.

« Est-ce que tu es en train de dire que je suis un problème ? »

« Absolument. »

Elle se surprit à se rapprocher de plus en plus de lui jusqu’à ce que leurs lèvres ne soient séparéesque de quelques centimètres.

« Mais du meilleur genre, pas vrai ? »

Il ne savait pas du tout à quel point il avait vu juste. Elle connaissait le danger de céder à latentation, et pourtant sa bouche mourait d’envie de toucher celle du jeune homme. Son esprit la mit engarde sur le fait qu’un baiser signifierait commencer à se lancer sur une pente glissante, mais soncorps décida que le risque en valait la peine. Elle ferma les yeux et elle se rapprocha de lui.

Les lèvres de Frank furent fermes et gourmandes dès le début, bougeant contre les siennes avec desubtiles variations de pression qui enflammèrent le sang de la jeune femme et envoyèrent un frissondans ses veines. Pourtant, il s’en tint à un baiser sur sa joue, ce qui aida Kiana à maîtriser ses désirs.Après tout, ils étaient dans un lieu public et elle devait préserver son image de femme respectable.

Mais s’ils avaient été derrière des portes closes, elle aurait sans l’ombre d’un doute cédé à cequ’il avait à offrir.

Lorsqu’elle ouvrit les yeux, elle remarqua le flash d’un appareil photo. Le choc chassa la chaleuret le trouble provoqués par le baiser pour ne laisser qu’un frémissement de peur.

Frank entrelaça ses doigts avec ceux de la main qu’il tenait et il prit la joue de la jeune femmedans son autre main.

« Détends-toi », dit-il d’une voix douce et réconfortante.

« Mais quelqu’un vient juste de prendre une photo de nous pendant qu’on était en train des’embrasser. »

« Um-hmm. »

Il déposa un autre baiser léger comme une plume sur son front.

« Laisse faire. Rappelle-toi ton plan. »

Une partie d’elle voulait reculer, mais elle avait peur des répercussions que cela pouvait entraîner.

« Est-ce que tu as planifié ce baiser ? »

« Nope. »

Mais le regard malicieux du jeune homme lui disait qu’il avait peut-être un lien avec la présencedu photographe.

« Frank Kelly, tu n’es pas celui que tu as l’air d’être. »

« Oh, tu n’es pas au courant de la moitié. »

Il déposa un dernier baiser sur le bout de son nez avant de reculer.

« Prête à partir ? »

Elle hocha la tête et il fit un signe de la main à la serveuse pour demander l’addition. Elle sentitson estomac se nouer, et elle se dit qu’elle aurait aimé pouvoir rejeter la faute sur toutes lesdélicieuses friteuses qu’elle avait mangées. Juste au moment où elle pensait avoir compris qui ilétait, une facette inconnue et inattendue faisait surface. Frank Kelly s’avérait être aussi complexe etéclatant qu’un diamant taillé étincelant. Mais son charme était si éblouissant qu’elle avait failli croire

à quelque chose qui n’était rien de plus qu’une comédie.

Il paya l’addition et il l’escorta jusqu’à la sortie, puis il ouvrit la porte pour la laisser passer.

« Ça faisait longtemps que je n’avais pas trouvé un déjeuner aussi agréable. »

« Tu parles d’avant ou après le dessert ? », demanda-t-elle avec esprit.

Elle lui avait montré qu’elle n’était pas une de ces nunuches crédules qui se faisaient avoir parson numéro de Roméo.

« Le dessert était d’un tout autre niveau. »

Il entoura Kiana de ses bras, pleinement conscient de la scène qu’ils offraient sur le trottoir.

« Tu n’es pas d’accord ? »

Elle commença par le repousser, mais au moment où elle toucha le centre de son torse, elle sentitque le cœur de Frank battait à tout rompre. Malgré son côté taquin, il était excité ou effrayé.

« Ça dépend. »

« De quoi ? »,

« De si on est encore dans l’objectif du photographe. »

Le rire du jeune homme semblait plus tendu qu’en temps normal.

« Ça compte vraiment pour toi ? »

Elle était incapable de lui répondre sur-le-champ. Cela comptait pour une partie d’elle. Ellevoulait être le visage d’une fondation de charité respectable, pas une célébrité de seconde zoneessayant d’élever son statut en couchant avec des grandes stars. Mais lorsque Frank se rapprochaitd’elle au point que leurs fronts se touchaient, elle ressentait une envie irrésistible de l’embrasserencore une fois. Cet homme savait exactement comment rendre les choses sexy.

« Rappelle-toi que je gère une association pour des enfants », finit-elle par dire.

« Bien », dit-il avec une moue enjouée avant de reculer et de tapoter sa propre joue avec son doigt.

« Mais est-ce que tu peux juste m’accorder un baiser de PDG ? »

« Avec plaisir. »

Elle déposa un baiser sur la joue du jeune homme, s’attendant à un autre flash d’appareil photo.

Mais celui-ci ne vint jamais.

« Merci. »

Frank prit sa main avant de se diriger de nouveau vers le bureau de Kiana.

« Alors ce dernier baiser n’était pas pour les appareils photo ? »

« Nope. »

Il lui répondit par un sourire espiègle.

« C’était purement égoïste. Dès que je peux obtenir un baiser d’une charmante demoiselle, j’enprofite. »

Un joueur, exactement comme son père. Au moins, il était honnête à propos de tout cela. Elle luimit une tape sans conviction sur le bras, puis elle sourit.

« Quelque chose me dit que je vais avoir du boulot avec toi. »

« Oh, je suis plus qu’un peu de boulot. »

Un mouvement espiègle de ses sourcils accentua le sous-entendu dans les propos du jeune homme.

« Mais comme j’offre mon soutien à ta fondation, je vais essayer d’être quelqu’un de respectable.»

Une fois rentrés dans les locaux de la fondation, il salua Sherita d’un geste de la main et il suivitKiana dans son bureau, fermant la porte derrière eux. L’espace d’un instant, elle se demanda si Frankessayerait de voler plus qu’un baiser maintenant qu’ils étaient derrière des portes closes, mais au lieude la prendre dans ses bras, il sortit une clé USB.

« Est-ce que je peux te donner quelques fichiers à utiliser pour ta campagne ? »

« Quel genre de fichiers ? »

« Des photos officielles, des interviews. »

Il haussa les épaules.

« Des trucs dans le genre. »

« Mais je croyais que tu voulais te lancer dans cette histoire de fausse relation pendant quelquestemps avant d’associer ton nom et ton image à la fondation. »

« J’ai déjà vu ce qu’il fallait. »

Il lui tendit encore une fois la clé USB.

Elle prit cette dernière, priant silencieusement pour qu’elle ne contienne aucun virus, et elle labrancha sur son PC. Après une analyse rapide pour rechercher des logiciels malveillants, elleexamina les fichiers. Ils contenaient des photos de Frank dans sa tenue de footballeur, comme ill’avait dit. Elle cliqua sur une d’entre elles et elle regarda fixement la contenance radicale del’homme enjoué avec lequel elle venait juste de déjeuner. Le regard intense et la mâchoire serrée dujeune homme indiquaient qu’il était déterminé à obtenir ce qu’il voulait.

« Ouais, je sais, ça a l’air flippant, mais j’ai une réputation à préserver. »

Il saisit la souris et il cliqua sur une autre photo.

« En fait, je souris vraiment sur celle-là. »

Elle examina la photo quelques instants avant d’acquiescer.

« Alors je vais l’utiliser dans nos publicités. »

Elle lui prit la souris des mains, puis elle enregistra la photo avant de la faire glisser vers la

publicité sur laquelle elle travaillait avant que Frank n’arrive.

« Nom de Dieu, c’est quoi ça ? », demanda-t-il.

« Une publicité pour annoncer le gala que je dois envoyer au journal avant ce soir. »

« Bouge. »

Il n’attendit pas sa réponse pour faire rouler sa chaise hors de son chemin et pour prendre lecontrôle de l’ordinateur de la jeune femme.

« Ton espacement est bordélique. »

Il apporta quelques modifications à l’agencement et la curiosité de Kiana fut suffisamment piquéepour qu’elle laisse Frank continuer sur sa lancée.

« Ce sera une publicité en couleur ou en noir et blanc ? », demanda-t-il en continuant de modifierle texte.

« En couleur »

« Alors il faut que tu ajoutes plus de couleurs qui ressortent, comme ça. »

Il fit ressortir la partie importante du texte en lettres dorées pour la mettre en valeur par rapport autexte écrit en noir.

« Et après, bien sûr, il te faut ce qu’il y a de plus important. »

Il prit une photo de lui et il l’inséra dans la publicité. Quelques petites modifications plus tard, ilse penchait en arrière avec un sourire satisfait.

« Voilà, on se rapproche de ce que à quoi ça devrait ressembler. »

Kiana lança un regard au-dessus de l’épaule de Frank, et elle resta bouche bée. Visuellement, lapublicité dépassait ses espérances.

« Où est-ce que tu as appris à faire ça ? »

« Le marketing était une de mes matières principales à la fac. »

Il lissa son T-shirt Notre Dame avec ses mains et il se redressa de toute sa hauteur.

« Même si je suis parti avant le repêchage, j’ai quand même appris deux ou trois trucs utiles. »

Kiana regarda de nouveau la publicité, tout en restant émerveillée par la manière dont il avaittransformé quelque chose d’insipide en quelque chose dont elle pouvait être fière, et ce en seulementquelques minutes.

« Merci. »

« Pas de problème. En plus, si mon beau visage doit apparaître sur quelque chose, alors le résultatdoit être à la hauteur. »

Et le joueur prétentieux réapparut d’un seul coup.

Elle réprima un rire et elle lui répondit par un soupir théâtral.

« Oui, tu as une réputation à tenir. »

Pendant une fraction de seconde, l’expression de Frank chavira, révélant un moment d’hésitation etde doute. Son sourire effronté réapparut, mais pas avant qu’elle ne puisse avoir de nouveau un aperçude l’homme qui se cachait sous le masque. Les apparences étaient totalement trompeuses, et lesbrèves informations qu’elle avait entraperçues le concernant dissipèrent sa peur d’être associée à lui.

« Absolument. »

Il recula d’un pas et il essuya de nouveau ses mains sur son T-shirt, sans jamais quitter les lèvresde la jeune femme des yeux. Il débrancha la clé USB.

« Il me semble qu’on a ce qu’il faut pour mettre notre plan à exécution. »

« Même plus que ça. »

Surtout sachant qu’une photo d’eux deux en train de s’embrasser au moment du dessert pouvaitdéjà faire le buzz sur internet.

« Bon, je te contacte la semaine prochaine pour voir si on peut trouver d’autres idées pour faireconnaître la fondation. »

Il redressa ses épaules, effaçant toute trace de la vulnérabilité dont il avait fait preuve quelquesinstants plus tôt.

« En attendant, charmante demoiselle. »

Il sortit du bureau et il dit quelque chose à Sherita en sortant, provoquant une série degloussements de petite fille. Une minute plus tard, Sherita entra dans le bureau de Kiana en arborantun sourire songeur.

« Ce mec a tout ce qu’il faut où il faut. »

« Oh, il est bien plus que ça. »

Elle hocha la tête devant l’écran de son ordinateur.

« Regarde ce qu’il a fait. »

Sherita se précipita et émit un léger sifflement.

« Des muscles et un cerveau. »

« Avec un côté chevalier servant en cas de problème. »

Elle enregistra la publicité et elle envoya le fichier au journal local qui attendait celui-ci.

« Passons. »

Son amie plaça une main sur son bureau, l’autre étant posée sur hanche.

« Je veux des détails. »

« On a déjeuné ensemble, c’est tout. »

« Et je n’en crois pas un mot. »

Il s’agissait d’un des problèmes liés au fait de travailler avec une amie qu’elle connaissait depuisle lycée. Sherita savait toujours quand elle mentait. Mais dans quelle mesure Kiana pouvait-ellerévéler des informations à propos de la fausse histoire d’amour qu’elle était en train d’essayer demettre sur pied ?

« Il m’a draguée. »

« Dis-moi quelque chose que je ne sais pas. »

Sherita s’éventa comme si la chaleur était accablante.

« Ce mec peut m’exciter et m’attirer d’un simple regard, mais ça ne change rien au fait que tu soisla seule qui l’intéresse. »

« S’il s’intéresse à moi, c’est juste parce que je suis la présidente de la fondation », réponditKiana en reportant son attention vers les e-mails qui étaient arrivés pendant son absence.

« Et moi je suis nonne et je suis vierge. »

Sherita se plaça devant l’écran de l’ordinateur, les bras croisés sur sa poitrine dans une positionindiquant qu’elle ne partirait pas avant de connaître tous les détails croustillants.

Kiana recula dans sa chaise de bureau en grognant.

« D’accord. Je l’ai aidé à sortir d’un mauvais pas et en échange je lui ai demandé de faire de lapublicité pour le gala. »

« Et ? »

« Et une des raisons pour lesquelles il m’a invitée à déjeuner, c’était parce que si on est vus tousles deux en public, les gens penseront qu’on sort ensemble, et ça attirera plus d’attention vers lafondation et ça redorera son image en même temps. »

« N’importe quoi. Tu lui plais, et il est juste en train de jouer pour faire tomber tes défenses. »

Kiana s’assit.

« Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ? »

« C’était quand la dernière fois que tu as eu un rencard ? »

Elle faillit répondre Je viens d’en avoir un, mais au lieu de cela, elle dit : « Tu sais pourquoi je nesuis pas pressée de laisser un mec rentrer dans ma vie. »

« Non, tu te sers juste de ta fille comme excuse. En plus, tous les hommes ne sont pas commeMalcolm. M. Sexy là, par exemple…. »

« Si ses coéquipiers le surnomment Roméo, c’est qu’il y a une bonne raison », finit par dire Kiana.« En plus de ça, il a le sang chaud, et je sais trop bien ce que ça veut dire pour m’engager avec unhomme qui sait comment lancer un coup de poing. »

Sherita se relâcha et baissa la tête.

« Oh, ma chérie, ce n’était pas ce que je voulais dire. Je crois juste qu’il est temps pour toi de teremettre en selle et de te rappeler de ce que ça fait d’être une femme. »

« Est-ce que tu es en train de me dire que je suis en train de me transformer en un vieux pruneauratatiné ? »

« C’est toi qui l’a dit, pas moi. »

Son amie s’éloigna du bureau et se dirigea vers la porte.

« Mais si j’avais un homme comme Frank Kelly qui me court après, j’en profiterai définitivementun peu pendant que je le pourrais. »

Kiana attendit d’être seule avant d’ouvrir les photos que Frank avait enregistrées sur son disquedur. La version souriante semblait correspondre à l’homme avec qui elle avait dansé dans la boîte denuit et qui avait flirté avec elle pendant le déjeuner. Charmant. Insouciant. Sûr de lui.

Mais lorsqu’elle cliqua sur la version avec un visage sévère, un frisson de peur parcourut sacolonne. C’était l’homme qui avait la réputation de mettre à terre des quarterbacks sur la pelouse ledimanche. L’homme qui avait tabassé Malcolm et ses amis et qui les avait envoyés à l’hôpital moinsd’une semaine plus tôt.

Son pouls s’accéléra, et un goût métallique emplit sa bouche, lui rappelant toutes les fois oùMalcolm l’avait frappée jusqu’à ce qu’elle sente le goût du sang. Sa main trembla lorsqu’elle latendit vers la souris. Elle ferma la photo avant que celle-ci ne déclenche une crise de panique chezelle.

Elle avait déjà été bernée avant, mais elle avait appris la leçon. Frank Kelly avait beau l’intriguer,elle devait rester loin de lui.

1 Notre Dame : Ici une équipe universitaire de football américain 2 Jumeaux irlandais : Expression anglo-saxonne décrivant deux enfantsnés des mêmes parents au cours de la même année

Chapitre Cinq

Frank leva l’haltère avec un grognement. Il sentait son pouls battre dans ses tempes, et sespoumons le brûlaient à cause de l’effort dû aux cent kilos qu’il soulevait sur le banc. Mais il allaitfaire une série de quarante.

Il n’en avait fait que trente-deux avant qu’un gros bruit n’interrompe sa concentration. La violencede la porte en métal heurtant le mur de derrière résonna dans la salle de musculation vide voisine,suivi par le martèlement de pas lourds. Frank venait juste de remplacer l’haltère avec l’aide del’entraîneur au moment où le visage rempli de colère de Tre apparut au-dessus de lui.

« Qu’est-ce qui se passe entre ma sœur et toi ? »

Frank sentit son sang se glacer, et de la sueur supplémentaire s’ajouta à la transpiration quicouvrait sa peau suite à sa séance de sport. L’entraîneur s’éclipsa de la pièce judicieusement, mais iln’y avait aucune porte de sortie pour Frank. Il garda une voix nonchalante dans l’espoir que celapourrait apaiser la colère de son ami.

« De quoi tu parles ? »

« De ça. »

Tre sortit une publicité d’une page parue dans le journal de la veille et il enfonça son doigt aumilieu du visage de Frank.

Son anxiété diminua, et il s’assit lentement, puis il essuya son visage avec une serviette. Au moins,Tre ne savait rien à propos du baiser. Il avait demandé au photographe qu’il avait embauché pour setenir dans le restaurant de ne pas vendre les photos de lui et de Kiana. Même si cela ne l’avait pasempêché de les enregistrer sur son téléphone une dizaine de fois pendant le week-end. Ils allaientbien ensemble. Vraiment bien. Mais tant qu’il n’avait pas le feu vert de la jeune femme, il voulaitrespecter sa vie privée.

« Elle m’a demandé si je voulais bien aider à faire connaître la fondation de ton père, et j’ai ditque j’étais d’accord. »

Un muscle se tendit au niveau de la mâchoire de Tre, et ce dernier serra les poings, froissant lejournal dans le même temps.

« D’accord. Mais pas touche - compris ? »

« Et si je n’y arrive pas ? Après tout, c’est elle qui m’a contacté. »

Les veines le long du cou de Tre commencèrent à ressortir, et Frank se força à rire pour romprel’atmosphère pesante.

« Détends-toi, mon pote. Je serai sage. Kiana a la classe, et je l’admire d’avoir pris la suite de tonpère. Ce n’est pas une nana d’un soir. »

« Bien sûr que non. »

Tre jeta le journal par terre et se retourna, mais pas avant que Frank ne sente qu’il y avait quelque

chose d’autre qui contrariait coéquipier. Pourtant, les secondes passèrent et les doigts de Tre sedétendirent, et toute trace de colère disparut dans le même temps.

« En plus, je ne vois pas pourquoi je m’inquiète. Je l’ai déjà mise en garde à propos de toi, et elleest suffisamment intelligente pour t’obliger à garder tes distances. Tu n’as aucune chance avec elle.Elle te dégagera avant que tu ne puisses trop te rapprocher d’elle. »

« Ah ben merci. »

Frank prit la bouteille de Gatorade1 posée à côté de lui et but une gorgée revigorante.

« Par contre, ne fous pas en l’air mes chances avec les autres nanas. »

« C’est toi qui a les cartes en main. »

Tre fit un signe de tête vers l’haltère.

« Et bref, qu’est-ce que tu fais là ? La saison est finie. »

« J’essaye juste de rester au top de ma forme. »

Frank se leva et se dirigea vers la presse à cuisses.

« Les sélections sont dans deux semaines, et je veux être sûr de ne pas me faire piquer ma place detitulaire par un petit rookie2. »

« Comme tu veux, mon pote. »

Tre essayait de faire comme s’il prenait la situation à la légère, mais l’inquiétude transparaissaitdans sa voix. Si quelqu’un risquait d’être rétrogradé, c’était lui.

« Ça te dit de te changer et de t’entraîner avec moi ? »

Le téléphone de Tre vibra, et il tourna son attention vers l’écran.

« J’ai des trucs à faire. Je me dis que je ferais bien une petite virée à Vegas. Ça te dit de veniravec moi ? »

Frank secoua la tête. La dernière fois qu’il était parti avec Tre, ils avaient passé des nuits blanchesà jouer au blackjack ou à surveiller des résultats sportifs. Tre aimait miser gros - parfois il gagnait etparfois il perdait - mais sans en arriver au point d’être dépassé par les évènements.

« J’ai trop de trucs à faire ici. »

« Tu ne sais pas ce que tu perds. »

Tre quitta la salle de sport tout en tapant une réponse à un SMS à une vitesse déconcertante.

Frank s’assit sur le banc, mais sans pour autant reprendre son entraînement. Il y avait quelquechose dans la conversation qu’il venait d’avoir avec Tre qui le dérangeait. Il était sérieux quand ilavait dit que Kiana n’était pas une nana d’un soir, et il savait que sa réputation de Roméo ledesservait. Bon sang, il avait accepté de jouer le jeu de la fausse histoire d’amour parce que cela luioffrait une opportunité de se faire une idée d’à quel point elle pourrait être ouverte à l’idée de sortiravec lui. Mais s’il devait se fier à la chimie dans le baiser qu’ils avaient échangé, ils iraient bienensemble.

Vraiment bien.

Néanmoins, il devait d’abord déterminer s’il lui plaisait ou si elle ne s’intéressait qu’à ce que sonnom pouvait apporter à sa fondation.

***

Frank fixa le numéro sur l’écran de son téléphone, et il ravala sa peur. Il détestait appeler desfilles depuis le collège, et il se dit que les années n’avaient pas émoussé son sentiment d’avoirl’estomac retourné tandis qu’il se tenait au milieu de son salon en réunissant son courage pourenvoyer sur le bouton Envoyer. Les choses auraient été bien plus faciles si Kiana avait été présente àson bureau lorsqu’il s’était arrêté là-bas dans la matinée. En face-à-face, il aurait pu jauger saréaction par rapport à son invitation. Au téléphone, il ne savait absolument pas à quoi s’en tenir.

Le seul côté positif, c’était que Sherita avait été plus que ravie de lui donner le numéro de portablepersonnel de Kiana. S’il n’avait vraiment aucune chance, il était impossible que celle qui était à lafois l’amie et l’assistante de la jeune femme puisse se montrer aussi empressée de partager ce genred’information personnelle. Peut-être que le déjeuner de la semaine précédente s’était mieux passéqu’il ne le pensait.

Bien sûr, la mise en garde que Tre lui avait lancée dans la matinée résonnait encore dans un coinde sa tête. Est-ce que Kiana le repoussait à cause de sa réputation ? Ou est-ce qu’elle toléraituniquement sa compagnie pour ce qu’il pouvait faire pour sa fondation ?

Il n’y avait qu’un seul moyen de le savoir. Il appuya sur Envoyer et il attendit de voir si elle allaitrépondre.

« Allo ? Ici Kiana Dyer. »

Mon Dieu, il adorait sa voix. Elle était riche et remarquable, avec juste assez d’impertinence pourlui donner un côté sexy tout en restant professionnelle.

Il se lécha les lèvres et il rassembla toute son assurance.

« Hey, Kiana. »

« Frank ? »

La voix de la jeune femme devint plus aiguë sous l’effet de la surprise.

« Comment tu as eu mon numéro ? »

« Sherita. »

Il passa sa main sur sa nuque. C’était plus dur qu’il ne se l’était imaginé.

« Je voulais savoir si la pub marchait. »

Une fois le choc passé, elle sembla retrouver le ton professionnel qui la caractérisait.

« Apparemment, ça se passe bien. J’étais absente toute la matinée, je voulais être sûre qu’on avaitfait imprimer assez de tickets pour toutes les personnes qui en ont achetés pour le gala. »

Il se détendit un peu et il s’enfonça dans son canapé.

« Alors ma belle gueule a l’air d’aider, hein ? »

« Peut-être. »

Il nota une pointe de taquinerie et il rit, toute la tension qu’il ressentait s’évanouit.

« Ravi de savoir que j’ai pu aider. Peut-être que je peux faire plus ? »

« Comment ça ? »

« Eh bien pour commencer, il y a tout ce truc de personnalité publique. »

« Tu prévois de faire appel à d’autres photographes qui prendront des photos de nous ? »

Il fit un grand sourire. Si elle acceptait son invitation, il n’aurait pas besoin d’embaucher desphotographes. Il y en aurait déjà un très grand nombre sur place.

« En fait, je me demandais si ça te dirait d’aller voir un match des Hawks3 avec moi demain soir. »

Un silence remplit la ligne et son stress réapparut avec une force qui lui donna des nausées. Il sedit qu’il préfèrerait prendre un coup dans l’estomac plutôt qu’elle ne refuse son invitation.

« Ça aurait été avec plaisir, mais j’ai déjà quelque chose de prévu. »

Il sentit sa bouche devenir sèche et il lutta pour retrouver sa voix.

« Pas de problème. En fait c’est de ma faute, je propose vraiment à la dernière minute. »

« Non, Frank, ce n’est pas ça, c’est juste que… », la voix de Kiana s’affaiblit, mais pas avant qu’ilne surprenne des excuses inexprimées dans son ton.

Elle avait envie de venir, mais quelque chose l’empêchait d’accepter. Peut-être qu’elle avait desprojets. Peut-être qu’elle essayait de le laisser tomber en douceur, mais au moins elle ne repoussaitpas ses avances de manière catégorique.

« Une autre fois alors. »

Il écourta la conversation dans une volonté de mettre un terme à cette dernière le plus vitepossible.

« Je te rappelle plus tard sans la semaine pour qu’on réfléchisse à d’autres idées pour lever desfonds. »

« Je… », elle se reprit avant de changer sa réponse. « Merci. »

L’appel se termina, et Frank regarda fixement son téléphone en regrettant de ne pas savoir pourquoielle lui avait dit non.

***

Le cœur de Kiana battait à tout rompre lorsqu’elle raccrocha. L’espace d’une seconde, elle avaitété tentée de dire oui. Mais ensuite elle avait aperçu la photo de sa fille sur son bureau et elle s’étaitsouvenue de la raison pour laquelle elle ne devait pas céder à la tentation coupable que représentaitFrank Kelly.

« Alors, qu’est-ce Frank voulait ? », demanda Sherita dans l’embrasure de la porte.

« Pourquoi tu ne commencerais pas par me dire comment il a eu mon numéro de téléphone ? »

Elle venait à peine de revenir dans son bureau lorsque le téléphone avait sonné, et maintenant quel’appel était terminé, elle finit de vider sa mallette.

Son amie leva les yeux au ciel et frotta ses ongles rouges brillants sur son chemisier.

« Eh bien, il a dit que c’était urgent. »

« J’aurais dû me douter que tu étais derrière tout ça. »

« Et je veux savoir à quoi tu as dit non. »

Sherita traversa la pièce et s’assit sur le bord du bureau de Kiana.

« Et peut-être qu’après on pourra faire examiner ta tête pour avoir fait ça. »

Kiana ferma les yeux et compta jusqu’à dix. Elle avait espéré que sa meilleure amie comprendraitpourquoi elle refusait de se lier avec quelqu’un comme Frank, et pas qu’elle jouerait lesentremetteuses.

« Peut-être que je devrais changer de numéro. »

« Arrête de changer de sujet. Ce n’est pas comme s’il t’invitait chez lui pour une folle nuit de sexe.»

Une lueur malicieuse brilla dans les yeux de Sherita qui se pencha en avant.

« À moins qu’il ne l’ait fait ? »

« Il m’a proposé d’aller à un match des Hawks avec lui demain soir. »

« Et tu lui as dit non ? »

Sherita fronça les sourcils.

« Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez toi, ma chérie ? Tu adores le basket. »

« Oui, mais qui va s’occuper de Savannah ? »

« C’est pour ça que tu as dit non ? »

Kiana secoua la tête et croisa les bras.

« Et ta baby-sitter ? »

Kiana savait pertinemment qu’elle était en train de s’inventer des excuses, mais il valait mieuxcela plutôt que de prendre le risque de passer une autre soirée en présence de Frank. Cette histoire defaux couple s’avérait être une mauvaise idée. S’il terminait la soirée en l’invitant chez lui, elle n’étaitpas sûre d’avoir la force de dire non.

« Madison a besoin de se reposer elle aussi. Je ne peux pas lui demander de rester tard en laprévenant au dernier moment. »

« Alors c’est moi qui m’occuperais de ton bébé. »

« Sherita, s’il te plaît, je ne peux pas te demander ça. »

« Pourquoi ? Tu ne me fais pas confiance ? »

« Si, mais… »

Kiana poussa un gris soupir et laissa son sac vide tomber sur le sol. C’était le moment d’appelerun chat un chat. Son amie n’abandonnerait pas avant qu’elle ne lui dise la véritable raison pourlaquelle elle avait refusé l’invitation de Frank.

« La vérité, c’est que je ne suis pas prête à prendre le risque de m’engager avec quelqu’un pour lemoment. »

« Qui a parlé de s’engager ? Il t’a juste invitée à un match de basket, pas à un week-end lesfringues sont en option sur une île privée. »

« Mais tu l’as dit toi-même - ce mec peut te rendre dingue et te perturber avec un seul regard et jeme suis tellement éloignée de tous ces trucs de drague que je ne sais pas ce qu’il veut. Peut-être qu’ilveut juste qu’on passe du temps ensemble comme des potes. Peut-être qu’il veut plus. Je n’en ai pasla moindre idée. »

« Il n’y a qu’un moyen de le savoir. »

Sherita tendit le téléphone portable de Kiana.

« Il y a une petite fonction sympa qui te permet de rappeler la personne qui t’a appelée. »

Kiana prit le téléphone et elle le fixa quelques secondes avant de tourner son regard vers son amie.

« Tu es sûre que tu peux t’occuper quelques heures de Savannah ? »

« Ton bébé est un ange. »

« Je te promets de rentrer à la maison après le match. »

« Et de rater un tête-à-tête fougueux avec Frank Kelly ? »

Sherita leva un sourcil dans une expression de défi.

« Tu me déçois. »

« Je veux que les choses se passent bien et petit à petit. »

« OK, tant que tu acceptes sa proposition. Maintenant appelle-le avant qu’il ne trouve quelqu’und’autre à emmener voir ce match. »

Kiana attendit que Sherita soit retournée derrière son bureau avant d’appuyer sur le bouton Rappel.

Elle dut attendre quelques sonneries avant qu’une voix douce et suave ne réponde : « Tu as changéd’avis ? »

Bon sang, cet homme et sa satanée impudence. Cela n’aidait pas à calmer la sensation de sonestomac tressaillant d’avance lorsqu’elle l’imaginait en train de s’exprimer sur le même ton au lit.

« En fait, j’ai réussi à m’organiser et à me libérer demain soir. »

Elle se lécha les lèvres et elle pria silencieusement pour ne pas laisser voir à quel point elle étaitdésespérée.

« Enfin, si l’invitation tiens toujours. »

« Bien sûr. »

Elle pouvait pratiquement l’entendre sourire à l’autre bout de la ligne.

« Est-ce que je viens te chercher ? »

« Non »

La panique serra sa gorge. C’était une chose qu’il sache où elle travaillait, mais son adresseprivée était strictement hors limite.

« Le bureau est fermé. »

« Et si on dînait ensemble avant ? »

Si elle devait considérer le déjeuner du vendredi comme un quelconque indice, le dîner pourrait seterminer par le fait qu’ils oublient le match pour un type d’évènement sportif totalement différent. Àla minute où les lèvres de Frank toucheraient les siennes, tout sens commun s’évanouirait.

« Désolée, mais je vais travailler entre les deux. »

Elle ne put s’empêcher de noter la déception dans la voix du jeune homme lorsque celui-cidemanda : « À quelle heure je viens te chercher ? »

« Le match commence à 19h30, alors si on compte les embouteillages, 18h45, ça devrait êtreparfait. »

« Ça me va. »

Son aisance naturelle était revenue.

« J’ai hâte d’être à demain soir. »

« Moi aussi »

Sa réponse lui échappa avant même qu’elle ne puisse se retenir, et la gêne fit rougir ses joues. Tantpis pour son envie de lui cacher à quel point il l’attirait.

Il eut un petit rire et ce son calma les nerfs tendus de la jeune femme.

« Alors on est deux. À demain, 18h45. »

Il raccrocha et elle tendit la main vers sa bouteille d’eau. Oublié le fait d’être retournée etperturbée par un seul regard. Rien que la voix du jeune homme avait réussi à l’exciter.

Tout en buvant son eau d’une seule traite, elle entendit Sherita en train de glousser dans l’autrepièce.

« Ma chérie, ça tourne en boucle dans ta tête », lui cria son amie.

« Et tout ça, c’est de ta faute », répondit-elle en retour.

Mais si elle devait fréquenter un homme du genre de Frank Kelly, au moins elle passerait de bonsmoments.

1 Gatorade : Boisson énergétique 2 Rookie : Expression désignant une nouvelle recrue 3 Hawks : Une équipe de basketball d’Atlanta

Chapitre Six

Frank émit un faible sifflement lorsqu’il entra dans le bureau de Kiana. Il s’attendait à ce qu’ellesoit dans sa tenue de travail impeccable, mais le jean serré moulait les fesses parfaites de la jeunefemme d’une manière qui lui fit oublier jusqu’à son nom.

« Bonsoir », dit-elle avec un sourire timide.

« Oh bébé, c’est de mieux en mieux à chaque fois. »

Il déposa un baiser chaste sur sa joue et il prit un instant pour laisser son regard s’attarder sur sonfessier parfait et pour se régaler de son apparence toute entière. Un gilet, moulant lui aussi, couvraitun T-shirt à manches longues rouge et soulignait les courbes généreuses qui se cachaient en dessous.Ses boucles légères encadraient son visage et des chaussures à talons aiguilles portant le logo del’équipe complétaient la tenue de la jeune femme. Il s’agissait du parfait équilibre entre sexy etsportif, et pendant un moment il envisagea de la ramener chez lui pour du sport en chambre au lieu del’emmener au match.

Calme tes ardeurs, se lança-t-il comme un avertissement. Il s’agit de Kiana, et pas d’une bimboque tu as ramassée dans une fête.

Il résista à l’envie de tirer sur le col de sa chemise et il se força à arborer un sourire sûr de lui.

« Tu es magnifique. »

« Désolée si j’en ai fait un peu trop, mais je suis une super fan. »

Elle passa ses mains dans ses cheveux.

« J’espère juste que ma chevelure n’est pas énorme au point de cacher la vue à ceux qui serontassis derrière nous. »

« Pas de problème. »

Il enroula une boucle autour de ses doigts, s’émerveillant de la texture douce et soyeuse de sescheveux. La plupart des femmes noires d’Atlanta payaient des sommes astronomiques pour lisserleurs cheveux, mais pas Kiana. Ils adoucissaient son image à la fois dure et lisse.

« Ça te va bien. »

« Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ? »

« Ça veut dire que tu n’as pas d’efforts à faire pour être belle. »

Elle rit.

« Tu n’as pas la moindre idée de tout le travail qu’il faut pour obtenir ce résultat. »

« Eh bien j’apprécie vraiment. »

Il lui offrit son bras.

« Allons-y avant que le match ne commence sans nous. »

Tandis qu’ils attendaient l’ascenseur, il se rappela d’une conversation qu’il avait eue avec sonpère alors qu’il était encore adolescent. Son père lui avait dit qu’il y avait des femmes qu’onemmenait au lit et d’autres qu’on emmenait chez ses parents pour les leur présenter. Idéalement, il encherchait une qui rentrerait dans les deux catégories quand il aurait décidé de se ranger.

Kiana rentrait définitivement dans cette définition. Dès l’instant où il l’avait vue, il avait voulu ladéshabiller, mais plus il passait de temps avec elle, plus elle lui inspirait du respect. Elle étaitdéfinitivement une femme qu’il voulait traiter comme une dame parce que si elle ressentait ne serait-ce qu’une fraction de l’attirance qu’il ressentait pour elle, il ne voulait pas ruiner ses chances avecelle.

Il lui ouvrit la portière côté passager de sa Maserati Quattroporte.

« Les femmes d’abord. »

Elle se glissa dans le siège en cuir et elle admira l’intérieur.

« Joli bolide. »

« Ce n’est pas aussi voyant que les Lamborghini de certains autres mecs, mais elle est quand mêmerapide. »

Il ferma la portière et il bondit dans la voiture. C’était aussi angoissant qu’un vrai premier rendez-vous.

« Prêt pour un moment de plaisir ? »

Elle lui répondit par un sourire avant de dire : « C’est parti. »

Il démarra le moteur et il sortit du garage aussi vite qu’il le put.

Un cri perçant sortit des lèvres de Kiana, mais la rougeur sur les joues de la jeune femme lui disaitque c’était plus dû au plaisir qu’à de la peur. L’autoroute était toujours bondée au moment du pic decirculation, il était donc obligé de s’en tenir aux petites rues latérales tandis qu’il se rendait vers lePhillips Arena1. Ce n’était pas le meilleur moyen de se vanter de ce que sa voiture pouvait faire,mais peut-être qu’après le match…

Il jeta un œil à Kiana et il se demanda si elle serait d’accord pour s’amuser un peu plus tard dansla soirée avec lui.

Le bruit assourdissant d’un klaxon attira de nouveau son attention vers la route. Heureusement, cen’était pas de la faute du conducteur, mais l’incident le secoua suffisamment pour qu’il resteconcentré sur une chose à la fois.

Cela ne l’empêchait pas de discuter un peu avec elle.

« Tu as vu beaucoup de matchs cette saison ? »

Elle secoua la tête.

« J’ai été trop prise. Mais j’y allais tout le temps avec papa. »

Il y avait une pointe de tristesse dans sa voix et il poussa un juron entre ses dents. La dernière

chose qu’il voulait, c’était de faire remonter à la surface des souvenirs désagréables.

« Tu es sûre que veux y aller ? Parce que si… »

« Bien sûr que je veux y aller. »

Elle le regarda avec confusion.

« Je n’aurais pas accepté ton invitation si ça n’avait pas été le cas. »

« Je sais que certains endroits représentent quelque chose de spécial pour les gens, et je ne voulaispas t’emmener à un endroit qui te rappelait qu’il te manquait. »

Il se frotta l’arrière de sa nuque, espérant qu’elle ne poserait plus de questions à ce propos.

Bien sûr, elle était trop intelligente pour ne pas comprendre ce qu’il avait voulu dire.

« J’ai l’impression que tu parles en connaissance de cause. »

Il haussa les épaules et il attendit qu’elle change de sujet.

« C’est quoi ton histoire, Frank Kelly ? »

Il serra le volant et il pesa le pour et contre pour ce qui était de révéler la vérité de Kiana. Il avaitla réputation d’être un dur, un linebacker agressif qui frappait souvent ses adversaires sur la pelouse.

« C’est juste que certains endroits ont une valeur sentimentale. »

« C’est quoi ton endroit à toi ? »

« Soldier Field2. »

Il lui fit un sourire embarrassé.

« C’est une des raisons pour lesquelles je joue pour les Bears3. À chaque fois que je mets un pieddans ce stade, je me souviens de tous les matchs que je suis allée voir avec mon père. On a fait unmatch là-bas quand j’étais à Notre Dame, et quand je suis sorti du terrain, j’étais pétrifié. Je ne suispas arrivé à avoir la tête sur les épaules jusqu’à la moitié du deuxième quart temps. »

« Il te manquait tant que ça ? »

« Je suis sûr que c’était lié au fait que c’était seulement quelques mois après sa mort. »

La gorge de Frank se serra.

« Mais ouais, il me manque. Je lui faisais beaucoup trop de reproches quand il était en vie. »

« Je pense qu’on en a tous voulu à nos parents à un moment ou à un autre. »

« Non, j’étais vraiment le pire de tous mes frère. Je dis que c’est parce que je suis roux », ajouta-t-il en riant et en montrant du doigt ce qui le différenciait de ses frères.

« Ouais, les roux ont la réputation d’avoir le sang chaud. »

Elle donnait l’impression d’essayer d’être désinvolte, mais il ne manqua pas de remarquer lamanière dont elle se trémoussait sur son siège.

Merde ! Après avoir vu la manière décontractée dont son ex l’avait prise en traître dans la boîte denuit, il commençait à se demander s’il n’y avait pas plus dans leur histoire. Si ce salaud l’avaitfrappée…

Il serra le volant au point que ses articulations se mirent à blanchir. Puis il se reprit. Il ne pouvaitqu’imaginer le spectacle qu’il était en train d’offrir à Kiana. C’était probablement proche de ce àquoi ressemblait Hulk dans un accès de rage destructrice.

Frank s’obligea à penser à des choses plus agréables et sa colère s’évanouit.

« Alors, est-ce que c’est un faux rencard ou un vrai ? »

« Quoi ? »

Le côté fougueux de la jeune femme revint avec la même force qu’au moment où il l’avaitrencontrée dans la discothèque.

« Tu sais. Toi et moi, vus en public ensemble, essayant d’attirer l’attention vers la fondation. Est-ce que ce n’est que du business ? Ou est-ce que tu vas t’accorder quelques instants de plaisir ? »

Elle répondit en lui lançant un regard furieux en plissant les yeux.

Il se mit à rire.

« Hey, tu ne peux pas m’en vouloir d’essayer. Il faudrait que je sois gay pour ne pas être attiré parune femme comme toi. »

« Oh, vraiment ? »

« Absolument. »

Il jeta un coup d’œil rapide sur elle pour l’admirer.

« Tu es intelligente, gentille, généreuse, et si sexy que je suis obligé de me rappeler de mecomporter en gentleman à chaque seconde quand je suis avec toi. »

« Qui dit que je veux un gentleman ? », taquina-t-elle.

Tout son sang afflua vers son sexe. À présent c’était au tour du jeune homme d’être mal à l’aise etde se trémousser sur son siège.

« Donc tu es en train de me donner la permission de transformer ça en un vrai rencard ? »

« On verra, Roméo. »

Il fit un grand sourire. Un défi venait juste d’être lancé. Un défi qu’il était ravi d’accepter. Ellelaissa la porte ouverte juste assez pour l’autoriser à la séduire. Maintenant il devait mettre son planen action.

***

Kiana s’arrêta lorsque Frank montra du doigt les sièges en cuir côté cour situés entre les bancs.

« Putain, Frank. Ce sont les sièges Hollywood. »

« Je sais », répondit-il avec la nonchalance de quelqu’un habitué à toujours obtenir le meilleur.

« Mais comment tu les as eus ? »

« Tu n’es pas la seule personne qui connaît des gens hauts placés. »

Il lui fit un clin d’œil et il prit sa main.

« Maintenant assieds-toi et profite du match. »

Elle sentait sa tête tourner à cause de toute cette extravagance, mais Frank n’eut aucun problèmepour faire signe à une des danseuses et à demander un Coca. La demande tira la jeune femme de sonsilence stupéfait.

« C’est une pompomp girl, pas une serveuse. »

« Un des avantages de ces sièges, c’est que tu as droit à une danseuse qui t’amène ce que tu veux. »

Il haussa les épaules.

« Je me suis dit qu’un soda c’était moins risqué qu’une bière. Tu veux quelque chose ? »

Quand la danseuse revint, elle fit un sourire à Frank qui disait qu’elle serait plus que ravie de luiamener ce qu’il voulait, quoi que cela puisse être.

Kiana ressentit un pincement de jalousie et elle enroula son bras autour de celui du jeune hommetout en regardant la pom-pom girl.

Frank eut un petit rire.

« Tu marques ton territoire ? »

« C’est plus pour lui dire de ne pas t’offrir une lap dance alors que tu es le visage célèbre de mafondation. »

C’était vrai, leur relation - si elle pouvait appeler cela ainsi - n’était rien de plus qu’une farcedestinée à faire de la publicité pour son gala de charité. Mais elle ne pouvait pas ignorer l’onde dechaleur qui remontait le long de sa colonne et qui s’installa dans son estomac.

Alors que le match avançait, le malaise disparut. Kiana se laissa prendre dans l’actionsuffisamment longtemps pour oublier qu’il s’agissait d’un faux rendez-vous. La conversation coulaittellement bien entre elle et Frank que c’était comme s’ils étaient de vieux amis. Pour un joueur defootball, il en savait autant qu’elle sur le basketball - peut-être même plus.

Vers la fin du second quart temps, un membre de l’équipe adverse mit un coup de coude à unjoueur qui cherchait à attraper un rebond, et l’arbitre ne siffla pas la faute. Kiana bondit sur ses piedset cria : « Comment vous pouvez ne pas avoir vu ça ? »

Une main ferme prit la sienne et la tira en arrière vers son siège.

« Ils n’ont pas besoin de toi sur le terrain. »

« Mais cet arbitre est aveugle. »

Elle se secoua pour se libérer de son emprise, son corps secoué d’une rage réprimée.

« Mais putain comment il peut laisser passer ça ? »

Les yeux bleus de Frank clignèrent et il sourit.

« C’est qui la tête brûlée maintenant ? »

« Mais tu as vu, non ? »

« Oui, mais des fois les arbitres font des mauvais choix, et discuter leurs décisions ne faitqu’empirer les choses. Crois-moi, je sais de quoi je parle. »

Elle croisa les bras et elle se renfonça dans son siège. Il n’y avait aucune chance qu’elle l’emportedans cette discussion alors qu’il restait d’un calme olympien.

Le second quart temps arriva à son terme, et juste avant que l’équipe ne rentre au vestiaire pour lami-temps, un des joueurs fit un signe de tête à Frank.

« Quoi de neuf, Kelly ? »

« Ben je vous regarde en train de jouer comme des fillettes, Dougie », répondit Frankmalicieusement.

La mâchoire de Kiana se décrocha pour la deuxième fois de la soirée. C’était une chose d’avoirune conversation avec un membre de son équipe préférée, mais lancer une blague à ses dépens ?

Doug rit et entra dans les vestiaires.

Une fois qu’il fut parti, Kiana mit un petit coup dans la poitrine de Frank.

« Tu connais Doug Boutry ? »

« Ouais, pourquoi ? », répondit Frank, ses sourcils se rejoignant dans une expression deperplexité.

« Parce que c’est une des stars de l’équipe. »

Le visage de Frank se détendit pour arborer un sourire spontané.

« Peut-être, mais il est nul à Halo4. »

« Attends une minute. »

Elle avait encore des vertiges après tout ce qu’elle avait vu jusque-là. Son père avait été unelégende, mais cela ne semblait pas le faire rentrer dans les mêmes cercles que ceux dans lesquelsFrank évoluait.

« Tu joues aux jeux vidéo avec lui ? »

Frank acquiesça.

« Et ? »

Elle ouvrit la bouche pour parler, mais aucun mot ne sortit. Frank Kelly avait de nouveau réussi àla laisser sans voix.

« Tu veux que je te le présente après le match ? », proposa-t-il.

Elle continuait d’avoir l’impression que sa langue était une masse informe dans sa bouche.

« Sérieusement ? »

« Oui, si tu veux. »

Il se pencha vers elle et il baissa le ton de sa voix pour chuchoter : « Je vais lui demander de faireun match en un-contre-un avec toi si ça peut me permettre de me faire bien voir. »

Elle ne savait pas si elle devait le croire ou non, alors elle choisit de lever les yeux au ciel.

« Bien sûr, Frank. »

« Non, je vais te le prouver. »

Il commença à se lever, mais cette fois ce fut elle qui l’obligea à se rassoir.

Son cœur battait tellement fort à l’idée de rencontrer un de ses joueurs préférés qu’elle était sûrede s’écrouler victime d’une crise cardiaque si cela se produisait vraiment.

« Peut-être plus tard. Il faut que je rentre et que je dorme avant d’aller au travail demain. »

« Il te suffit de me dire quand ça t’arrange et j’organiserai ça. Je ferais tout pour toi, beauté »,ajouta-t-il avec un clin d’œil et un sourire.

Le retour du Frank séducteur calma ses nerfs tendus et ramena l’ambiance détendue qui régnaitentre eux un peu plus tôt, et les commissures de ses lèvres se relevèrent pour lui répondre avec lemême sourire : « Tu n’abandonnes jamais, pas vrai ? »

Il secoua la tête et il attendit que les danseuses aient terminé leur numéro avant de commanderdeux autres Coca à la fille qui avait été désignée pour les servir ce soir-là.

À la fin du troisième quart temps, la Kiss Cam 5si redoutée fit son apparition sur l’écran. Frankdonna un petit coup de coude à Kiana et dit : « Tu sais, mon frère a rencontré sa future femme grâce àça. »

« Tu me dis la vérité ou est-ce que ce n’est que du baratin ? »

Il écarquilla les yeux dans une innocence feinte et il dessina une croix sur son cœur.

« C’est la vérité. »

Elle était sur le point de lever de nouveau les yeux au ciel, mais quelqu’un derrière elle tapota sonépaule. Elle suivit le doigt du spectateur qui montrait l’écran géant et elle vit son image.

Frank se pencha et murmura dans son oreille : « Est-ce qu’on doit leur offrir un joli spectacle ? »

Elle lécha ses lèvres. Après tout, ce n’était que du faux. Un coup de pub qu’elle avait monté detoutes pièces pour aider à attirer l’attention sur la fondation de son père. Quel mal un petit baiserpourrait-il faire ?

Kiana s’approcha avec l’intention de déposer un baiser timide sur la joue de Frank, mais celui-cil’intercepta en collant ses lèvres sur les siennes.

Doux Jésus !

C’était dix fois plus intense que le baiser qu’ils avaient échangé pendant leur déjeuner. Du feu, de

la passion, de la chaleur - c’était les trois pour elle, pour son plus grand plaisir. Elle ferma les yeuxet elle se laissa aller à profiter de ce qu’il lui offrait, savourant l’intensité de son contact physique etle goût sucré du Coca qui s’attardait sur ses lèvres. Elle était submergée au point de froisser lachemise de Frank dans sa main et de lutter contre l’envie de l’arracher.

Et pourtant, malgré toute cette intensité, le jeune homme réussit à faire en sorte que le spectaclereste tous publics. Sa langue n’intervint pas, au grand désarroi de Kiana, et après qu’ils aient reçudes applaudissements de la part du public, il réussit à se détacher d’elle.

« Attention, Kiana », dit-il d’une voix étouffée. « Pense aux enfants. »

Elle ouvrit et elle cligna des yeux plusieurs fois pour faire disparaître le voile de lubricité quitroublait sa vision. Lorsque ses idées redevinrent claires, elle vit que Frank était en train de laregarder avec quelque chose qui ressemblait à une grimace.

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

« Rien du tout. »

La poitrine du jeune homme se soulevait et se baissait au même rythme haletant que la sienne.

« C’est juste que je lutte contre l’envie de te lancer sur mon épaule et de t’emmener dans unendroit plus intime pour qu’on puisse s’embrasser pour de vrai. »

« Est-ce que tu es en train de dire que tu n’as pas mis en scène ce baiser comme tu l’as fait pourl’autre ? »

« Nope. »

Il se tourna vers le terrain.

« Et si tu avais été quelqu’un d’autre, ils aurait dû censurer ce baiser. »

« C’est-à-dire ? »

Il se retourna vers elle et il leva un sourcil.

« Est-ce qu’il faut que je te montre à quel point tu m’excites ? Ça devient une vraie tortured’essayer de bien me comporter quand je suis avec toi. »

« Et pourquoi tu essayes tellement de bien te comporter ? »

« Parce que tant que tu n’as pas décidé que tu veux que les choses deviennent réelles, je faisattention à mes manières. »

Sa réponse la prit de court. Peut-être que tout cela n’était pas qu’une représentation pour Frank.Dieu sait qu’il n’embrassait pas comme un homme ayant une fausse relation. C’était vraimentdommage qu’elle ne soit pas dans une position dans laquelle elle pouvait faire en sorte que leschoses soient réelles entre eux. Si la situation avait été différente, elle n’aurait eu aucun problèmepour baisser sa garde et sortir avec lui. Mais elle n’était plus la femme insouciante qu’elle avait puêtre autrefois. Elle avait des responsabilités, des obligations et une réputation à préserver. Et aucunde ces éléments ne lui permettait de s’engager avec Frank Kelly.

Le silence remplaça les conversations légères, et lorsqu’il la ramena à sa voiture après le match, il

regardait le sol en traînant les pieds sur le béton.

« Est-ce que j’ai franchi les limites ? »

« Non », répondit-elle avec prudence.

Elle s’attendait à ce qu’il lui ouvre la portière de la voiture, mais il tendit son bras vers la vitrequi se trouvait à côté d’elle.

« Laisse-moi juste clarifier les choses une minute. Je t’apprécie, Kiana. Beaucoup. Trop en fait. Etj’aimerais sortir avec toi, même après que toute cette histoire de collecte de fonds sera finie. Mais situ ne ressens pas la même chose, alors dis-le-moi maintenant s’il te plaît pour que je ne dise ou queje ne fasse pas quelque chose qui me vaudra une gifle en pleine figure. »

L’esprit de Kiana trouva des dizaines de raisons pour ne pas s’engager avec lui, mais son corpsavait d’autres idées. Elle se cambra vers lui, son corps appuyant contre les contours durs de sesmuscles, et elle prit les joues de Frank entre ses mains.

« Et si tu me donnais un de ces baisers qui doivent être censurés ? »

« Si c’est ce que tu veux. »

Elle s’attendait à une réponse taquine ou dragueuse de sa part, mais à la seconde où sa bouches’empara de la sienne, elle eut le souffle coupé; Ce n’était pas un baiser juste pour donner le change.Il était vrai. Sans réserves. Sans comédie. Sans retenue. Juste du désir brut et pur à chaquemouvement de ses lèvres.

Il la suppliait en silence d’ouvrir sa bouche, et lorsqu’elle le fit, un gémissement de plaisiréchappa des lèvres de Kiana. Mon Dieu, cet homme savait embrasser. Il passa ses bras autour de sataille et il la serra contre lui pendant que sa langue effectuait une danse défendue qui lui donnait uneenvie folle d’une nuit faite de corps nus et de draps enchevêtrés. Elle respira son odeur, le parfum deson après-rasage intensifia son désir au point de tout lui faire oublier sauf lui.

Puis il prit sa nuque dans sa main et une vague de souvenir douloureux prit le pas sur tout le plaisirqu’elle pouvait avoir connu. Elle sentit son sang se glacer. Haletante, elle recula dans untressautement. Elle se souvenait de toutes les fois où Malcolm l’avait saisie au même endroit et qu’ilserrait les muscles situés à la base de son crâne juste avant de la frapper.

« Kiana ? », demanda Frank d’une voix inquiète.

Cela suffit pour la faire sortir de ces visions du passé, mais pas pour calmer le tremblement dansses mains. Elle cacha ces dernières derrière son dos et elle s’appuya contre la voiture, luttant contreles larmes qui se formaient aux coins de ses yeux. Des sanglots retenus rendaient sa respirationsaccadée.

« Je suis désolée. »

« Pour ? »

Elle ne voulait pas lui parler de ce chapitre de sa vie, des mois pendant lesquels elle était restéerecroquevillée et où elle avait laissé un homme la battre à la fois physiquement et émotionnellement.Elle avait été suffisamment forte pour fuir Malcolm, mais il restait évident qu’elle n’était pas encore

capable de laisser son passé derrière elle. Elle répondit d’une voix tremblante : « S’il te plaît, Frank,ramène-moi juste au bureau. »

L’inquiétude remplit les yeux bleus du jeune homme, suivi par de la confusion, puis par de larésignation.

« Bien sûr. »

Il ouvrit la portière et elle se laissa tomber sur son siège. Sa terreur fut remplacée par un sentimentde honte, et elle ne trouva pas le courage de le regarder droit dans les yeux tandis qu’ils retournaienten ville.

Plusieurs minutes s’écoulèrent avant que Frank ne demande : « Il te frappait, n’est-ce pas ? Ceconnard de la boîte ? »

Elle se tourna vers lui, prête à lui demander comment il le savait, mais l’expression meurtrière surle visage du jeune homme la réduisit au silence.

« Je regrette juste de ne pas l’avoir frappé plus fort. »

Les mains de Frank serrait le volant avec une rage telle que ses articulations étaient blanches.

« Les mecs comme lui ne méritent aucune pitié. »

« Frank… », la voix de Kiana se brisa et elle tourna la tête vers la vitre. « C’est le passé. »

« Peut-être, mais c’est évident que ça te travaille toujours. »

« C’est mon problème, pas le tien. »

« N’importe quoi. »

Il appuya sur l’accélérateur de sa Maserati et cette dernière s’élança avec suffisamment depuissance pour coller la jeune femme contre son siège. La colère de Frank diminuait au fur et àmesure que la vitesse sur le compteur augmentait. Il ajouta : « Tu sais que je ne te ferai jamais ça, pasvrai ? »

Est-ce qu’elle le savait ? N’était-il pas l’homme qui gagnait sa vie en plaquant des gens au sol ?L’homme qui avait brisé la mâchoire de son ex avec une série de coups de poing bien placés ?

Et pourtant, malgré tous ses antécédents en violence, il n’était que calme et considération enverselle. Si elle laissait de côté la scène dans la boîte de nuit et ce qu’elle voyait à la télévision tous lesdimanches pendant la saison de football, elle pourrait presque croire qu’il n’était pas quelqu’un à quion pouvait se fier.

En l’absence d’une réponse immédiate de sa part, un juron murmuré sortit des lèvres du jeunehomme dont les épaules se baissèrent en signe de renoncement.

« Ce n’est pas grave. »

« Comme je te l’ai dit, ce n’est pas toi. C’est moi. »

Elle frissonna malgré la douceur de la soirée.

« Il y a des choses plus dures à oublier que d’autres, et quand tu m’as touchée à cet endroit-là… »

Cette fois, ce fut elle qui marmonna un juron entre ses dents. Elle détestait l’idée de lui révélerqu’elle était vulnérable. Elle voulait lui montrer son côté sûre d’elle, décidée et indestructible, pas laversion faible et faillible qu’elle était devenue quand elle était sortie avec Malcolm.

« S’il te plaît, on peut juste changer de sujet, OK ? »

« D’accord. »

Cependant, le ton brusque sur lequel il avait dit ce mot montrait qu’il était tout sauf d’accord avecle fait de terminer la conversation ainsi, tout comme la manière dont sa voiture louvoyait entre lesvoitures comme si le Downtown Connector 6était une piste de NASCAR7.

« Parlons du gala de charité. J’ai vu que ça allait être des enchères silencieuses pour des objets decollection liés au sport ? »

Enfin quelque chose dont elle pouvait parler avec lui sans qu’elle ne finisse par être excitée outerrorisée.

« On a quelques objets qui appartenaient à mon père. »

« Je serais ravi de donner deux ou trois trucs aussi, mais je me demandais si tu étais d’accord pourélargir la vente à d’autres sports que le football. »

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

La voiture ralentit et il desserra ses mains.

« Eh bien le football n’est pas le seul sport dans lequel les enfants peuvent se blesser. »

« On se concentre principalement sur le football, mais on peut fournir du matériel à tous lesprogrammes sportifs destinés aux enfants. »

« Exactement, alors je pourrais demander autour de moi et voir si je peux faire en sorte qued’autres sportifs du coin s’impliquent dans le gala. Dougie par exemple. »

Le cœur de Kiana arrêta de battre.

« Tu veux dire que tu pourrais faire en sorte que Doug Boutry donne quelque chose pour la venteaux enchères ? »

« Bien sûr que je peux le faire. »

Il lui lança un sourire charmeur.

« Tu vas t’apercevoir que je peux être plutôt convaincant. Et ça ne va pas juste se limiter à Doug.Je peux demander à mes coéquipiers de donner des trucs, peut-être que je peux même faire en sorteque les propriétaires de l’équipe offrent deux ou trois places dans la loge pour un match. Dis-moijuste ce qu’il faut que je fasse et je le ferai. »

Elle essuya ses paumes moites sur son jean tout en réfléchissant à la proposition de Frank.

« Tu es prêt à faire ça pour moi ? »

« Je suis prêt à tout pour rester dans tes bonnes grâces. »

Il prit la sortie menant au centre-ville située à proximité du bureau de la jeune femme.

« Je suis juste étonné que tu n’y aies pas pensé avant. »

Une dizaine d’excuses restèrent au bout de la langue de la jeune femme, mais ce fut la plus honnêtequi sortit de sa bouche.

« J’ai du mal à demander de l’aide aux gens. »

« Et pourtant tu l’as fait avec moi », dit-il doucement.

« Ouais, mais j’avais un moyen de pression sur toi. »

« Je l’aurais fait, même si tu ne m’avais pas fait sortir de taule. »

Elle eut un petit rire, et la dernière trace de terreur glaciale quitta son esprit, laissant derrière elleune sensation étrange qu’elle n’arrivait pas vraiment à identifier. Il y avait une forme de sincéritédans les paroles de Frank qui lui faisait se demander quelle était la part de vérité dans ce qu’il avaitdit.

« Pour info, je ne t’ai jamais fait sortir de taule. »

« Tu m’as fait sortir du trou et c’est ce qui compte. »

Le sourire de Frank s’élargit.

« Tu imagines ce que quelqu’un avec mon physique aurait dû endurer si j’étais resté là-bas ? »

Sa vanité bonne enfant ramena la bonne humeur et elle rit de bon cœur. Elle pouvait faire confianceà Frank pour l’amener d’un extrême à l’autre de l’éventail des émotions en quelques minutes. Maisc’était agréable d’être avec lui. Même après qu’elle eut révélé ses défauts, il avait réussi à faire ensorte qu’elle se sente mieux. Et il n’avait montré aucun signe indiquant qu’il s’intéressait moins à elleà en juger par la manière dont ses yeux ne cessaient de papillonner vers elle tandis qu’il roulait àvive allure.

Il entra dans le garage de l’immeuble de Kiana et il se gara à côté de la voiture de cette dernière.Avant qu’elle n’ait eu le temps de saisir la poignée de sa portière, il était déjà sorti de la Maserati etil en faisait le tour pour l’ouvrir pour elle.

« Permets-moi, beauté. »

« Tu essayes toujours de rester dans mes petits papiers ? », lança-t-elle malicieusement enréprimant un sourire.

« On peut dire ça comme ça. »

Il prit sa main pour l’aider à sortir, mais il ne la lâcha pas tout de suite. Ses yeux devinrent plussombres et son visage prit une expression sérieuse inhabituelle chez lui.

« Kiana, si je vais trop loin, dis-le-moi, s’il te plaît. »

La respiration de la jeune femme s’accéléra, ce qui permit à l’odeur de Frank de s’attardersuffisamment longtemps dans ses narines pour qu’elle reconnaisse les notes masculines de cuir et decèdre de son parfum.

« Ça dépend de ce que tu prévois de faire. »

« Est-ce qu’on peut essayer de s’embrasser encore une fois ? »

Il leva ses mains dans un geste de capitulation.

« Je promets de ne pas poser un seul doigt sur toi. »

Le baiser qu’ils avaient échangé avait été agréable. Du moins jusqu’à ce qu’il touche sa nuque.Mais peut-être, seulement peut-être, pouvait-elle se faire plaisir en en acceptant un autre. Elle sepencha vers lui et elle appuya ses lèvres contre les siennes.

Si le baiser précédent avait été sauvage et passionné, celui-ci était doux et réservé. Et frustrant dece fait. Frank la laissait contrôler le rythme et la chaleur du baiser, répondant aux exigences de lalangue de Kiana, mais il était évident qu’il se retenait. Elle ouvrit un œil et elle vit que les mains dujeune homme tremblaient le long de son corps. Un gémissement monta dans la gorge de celui-ci,formant une supplication silencieuse qui la convainquit de briser le mur derrière lequel il essayait derester.

Elle saisit ses mains et elle les plaça sur ses fesses.

Une exclamation étouffée suivit, et les chaîne qui retenaient Frank s’envolèrent. Il saisit son culfermement et il la serra contre lui tout en rendant le baiser plus passionné. Un gémissement s’élevadans l’air frais et calme de la nuit, mais elle était incapable de dire qui l’avait poussé. La seule chosedont elle avait conscience, c’était le désir croissant entre eux qui lui donnait envie de tout oublier endehors de lui.

Elle s’abandonna à cet instant de pur bonheur pour tomber dans les bras d’un homme qui savaitcomment l’embrasser d’une manière qui faisait se recroqueviller ses orteils. Un homme qui caressaitses courbes généreuses comme si elle était la femme la plus désirable sur terre. Un homme qui luidonnait l’impression qu’elle était en sécurité dans ses bras, même s’il lui donnait envie d’adopter lecomportement le plus insouciant qu’elle n’ait jamais adopté en plus de deux ans.

Mais elle ne pouvait plus se permettre d’être imprudente. Elle avait un enfant et elle ne voulait pasfaire les mêmes erreurs que sa propre mère. Le fait de penser à sa fille tempéra son désirsuffisamment longtemps pour qu’elle mette fin au baiser avant que les choses ne deviennentincontrôlables.

« Putain, Kiana », dit Frank en haletant. « Tu as le cul le plus attirant que j’ai jamais tenu dans mesmains. »

Il serra encore une fois les fesses de la jeune femme comme pour prouver ce qu’il venait de dire,et elle rit. Frank Kelly ne serait jamais le genre d’homme sérieux qu’il lui fallait pour fonder unfoyer, mais il était définitivement suffisamment amusant pour le garder dans son entourage. Elledéposa un dernier baiser sur ses lèvres avant de détacher ses mains de son jean moulant.

« J’ai une réunion à 8h demain matin. »

« Et j’ai des faveurs à demander. »

Il se dirigea vers la voiture de la jeune femme.

« Laisse-moi quelques jours pour tout mettre en place. »

Après avoir trouvé ses clés, elle ouvrit sa portière et elle démarra le moteur.

« Je te suis reconnaissante pour tout ce que tu peux faire pour aider la fondation. »

« Je ne le fais pas seulement pour la fondation. »

Les yeux de Frank ne se détachaient pas du visage de Kiana tandis qu’il fermait sa portière et qu’ilreculait. Même en silence, il se faisait comprendre. C’était elle qu’il voulait.

Elle sentit son pouls s’accélérer et elle partit avant de perdre la tête et de l’inviter chez elle pource qui aurait très certainement été une nuit de sexe orgasmique. Mais est-ce que le plaisir valait lapeine qui suivrait ?

Non, il valait mieux prévenir que guérir. Il essayait de rester dans ses faveurs et elle devait resterdans les siennes, surtout s’il faisait ce qu’il lui avait proposé. Se lancer la tête la première dans unerelation purement physique avec lui lui couperait le souffle, mais au final chacun devrait poursuivreson propre chemin. Roméo ajouterait une autre encoche sur sa tête de lit tandis qu’elle redeviendraitl’adulte responsable qu’elle devait être pour Savannah et pour la fondation.

Le risque n’en valait pas la peine.

Mais cela ne l’empêchait pas de rester allongée les yeux grands ouverts dans son lit froid et videen se rappelant combien il avait été agréable d’être dans ses bras.

1 Philips Arena : Salle omnisport située dans le centre-ville d’Atlanta 2 Soldier Field : Stade de football américain àChicago 3 Bears : Une équipe de football américain de Chicago 4 Halo : Jeu vidéo

5 Kiss Cam : Baiser filmé pendant la mi-temps, une tradition au Canada et aux États-Unis 6 Downtown COnnector : Une section desautoroutes 75 et 85 passant dans le centre-ville d’Atlanta 7 NASCAR : Association régissant les courses de stock-cars aux États-Unis(Acronyme pour : National Association for Stock Car Auto Racing)

Chapitre Sept

Kiana regarda Savannah sur les vidéos de la baby-sitter et elle vit sa fille marcher en chancelant etmonter sur sa licorne à bascule. Madison, la baby-sitter, encourageait la petite fille de 20 mois qui sepenchait en avant et en arrière sans aucune aide.

Derrière son bureau, Kiana applaudissait et encourageait elle aussi, regrettant de ne pas avoir étélà pour voir tout cela en personne au lieu de le voir sur un écran d’ordinateur. Sa fille ne cessait del’étonner. Chaque journée apportait quelque chose de nouveau. Et elle espérait que Savannahdeviendrait plus tard une jeune fille sûre d’elle qui connaîtrait sa propre valeur.

Mais pour lui apprendre ça, je dois lui montrer l’exemple.

Ce qui voulait dire qu’elle devait se remettre au travail. Si elle pouvait faire en sorte que cettefondation soit un succès, elle ferait un pas de plus vers le fait de devenir le modèle qu’elle voulaitêtre pour sa fille.

Elle éteignit le caméscope de la baby-sitter et elle ouvrit une feuille de calcul. La première pagecontenait les dépenses engagées pour le gala, toutes en rouge. Cependant, la deuxième page la fitsourire. Elle montrait que le nombre de tickets vendus avait plus que triplé depuis qu’elle avait lancéla publicité avec la photo de Frank le dimanche précédent. C’était un résultat plutôt positif pour deuxsemaines de travail, surtout vu la hausse importante après qu’elle soit allée voir le match avec lui dixjours plus tôt.

Bien sûr, par contre elle n’avait pas eu de ses nouvelles depuis. Il avait dit qu’il avait besoin dequelques jours pour rassembler des objets pour la vente aux enchères, mais son silence soulevait desdoutes. Par exemple, elle se demandait si elle l’avait fait fuir en parlant de son histoire avecMalcolm. Ou si sa réaction quand il avait touché sa nuque l’avait amené à se poser des questions àpropos du fait de s’engager avec une cause perdue comme elle.

Elle baissa la tête vers son bureau et elle poussa un profond soupir. Elle avait beau vouloir que leschoses restent professionnelles, il avait réussi à la séduire. Le dernier baiser n’avait fait que leconfirmer. Et dix nuits solitaires n’avait rien fait pour soulager le désir ardent qui brûlait en elle àchaque fois qu’elle se remémorait la scène.

Concentre-toi ma fille. Il y a des choses plus importantes que lui sur lesquelles tu dois teconcentrer.

Elle leva la tête et elle lissa ses cheveux vers l’arrière une seconde avant d’entendre le son graved’une voix d’homme à l’extérieur de son bureau. Elle lança un regard vers l’écran pour s’assurer quela fenêtre de la vidéo de la baby-sitter était fermée.

Le rire haut perché de Sherita retentit dans son bureau lorsque Frank ouvrit la porte de ce dernier.Il arborait son sourire charmeur habituel et il répondit en riant : « Penses-y une minute », dit-il avantde tourner son attention vers Kiana.

« Bonjour, beauté. »

« Tu n’arrêtes jamais de faire du charme ? », demanda cette dernière en se levant de son fauteuil.

« Nope. C’est inscrit dans mon ADN. »

Il lui fit un clin d’œil avant de lui tendre un dossier.

« Je voulais juste passer pour te montrer là où j’en suis. »

Elle prit le dossier et elle l’ouvrit. La première page était un tableau qui contenait la liste desobjets offerts par les membres de l’équipe de Frank. La seconde page celle de ceux venant desHawks, y compris un maillot signé de la part de Doug Boutry. Les autres pages contenaient desphotos des objets.

Elle sentit sa gorge se serrer en les parcourant.

« Frank, c’est extraordinaire ! »

« Ce n’est que le début. »

Il s’assit derrière le bureau et il prit sa souris.

« J’ai parlé à une société informatique du coin et ils ont créé un site d’enchères en ligne pour toiparce qu’on manquera sûrement de place dans la salle de bal au rythme où on va. »

Quelques clics plus tard, elle était en train de regarder un site web professionnel qui répertoriaitcertains des objets présents dans le dossier.

« Frank, c’est beaucoup trop. »

« Non, pas du tout. »

Il prit une expression sérieuse.

« Quand je m’engage à faire quelque chose, je ne me donne jamais à moins de 100 pour cent. Et làje ne fais que m’échauffer. »

« Mais pourquoi ? »

« Je pensais que la réponse était évidente. »

Sa voix s’adoucit et son regard se posa sur les lèvres de Kiana.

Avant qu’elle ne comprenne ce qui était en train de se passer, elle s’était placée entre Frank et lebureau. Ce qui commença par un simple baiser de reconnaissance se transforma rapidement pourdevenir aussi sauvage, passionné et sans retenue que celui de l’autre soir. Elle passa ses doigts dansles cheveux courts du jeune homme et elle taquina l’ouverture de sa bouche avec sa langue. Elle neperdit pas temps lorsqu’il ouvrit ses lèvres et elle sentit le goût du dentifrice à la menthe quis’attardait dans sa bouche. Elle respira son parfum frais et elle s’abandonna à la folie merveilleusedu désir.

Frank se leva et prit son cul dans ses mains avant de la soulever et de la poser sur le bureau. Puisil remonta sa jupe jusqu’à ce que celle-ci forme une boule autour de ses hanches. Il guida doucementses jambes autour de sa propre taille avec ses mains tout en se plaquant contre elle ; chaquemouvement de ses hanches incarnait exactement ce qu’elle voulait qu’il lui fasse au lit. Ils’interrompit suffisamment longtemps pour murmurer son nom dans un grognement sexy qui ne fitqu’augmenter son désir pour lui avant qu’il ne l’embrasse de nouveau sans retenue.

Elle bloqua ses chevilles autour de lui et elle le poussa pour qu’il soit aussi collé à elle quepossible. Jusque-là, elle s’était retenue quand ils avaient échangé des baisers, toujours effrayée àl’idée que quelqu’un puisse la voir perdre le contrôle de cette manière. Mais derrière la porte ferméede son bureau, elle n’avait pas peur d’être surprise par quelqu’un ; il n’y avait que Sherita, et ellesavait déjà que sa meilleure amie se contenterait de l’encourager si elle entrait et qu’elle les prenaitsur le fait.

Frank serra son cul.

« Putain, Kiana. Je ne sais pas combien de temps je vais pouvoir continuer à être un gentleman situ m’embrasses comme ça. »

« Et tu ferais quoi ? », demanda-t-elle.

Les pupilles de Frank se dilatèrent et la chaleur dans sa voix envoya des frissons délicieux dans lacolonne de Kiana.

« Tu sais très bien ce que je ferais. Je te déshabillerais. Et ensuite je savourerais le moindrecentimètre de ta peau. »

Il s’interrompit pour prendre un de ses lobes dans sa bouche et pour le couvrir de coups de langue,provoquant un autre frisson chez la jeune femme.

« Ensuite, une fois que tu serais excitée et mouillée, et prête à m’accueillir, je te ferais jouirtellement fort que tu serais rassasiée et épuisée jusqu’au matin. »

« Et ensuite ? »

Il eut un petit rire grave qui fit trembler l’intérieur de son sexe à cette perspective.

« Et ensuite je recommencerai depuis le début. »

Elle comprenait à présent pourquoi ses coéquipiers le surnommaient Roméo ; en effet, elle étaitplus que prête à s’abandonner à lui et à le laisser mettre ses promesses à exécution sur-le-champ, surle bureau.

Heureusement, leur pause lui permit d’entendre une autre voix.

Celle de son frère.

La peur la fit frissonner et elle repoussa Frank. Un regard vers l’horloge lui indiqua qu’il était11h30.

« Merde ! J’avais oublié que Tre et Denise venaient déjeuner avec moi. »

Elle sauta du bureau et il tira sur sa jupe. Elle sentait une sensation de chaleur sur ses joues, et uncoup d’œil rapide dans le miroir révéla une rougeur coupable et des lèvres indéniablement gonflées.Rien qu’en la voyant, ils sauraient exactement ce que Frank et elle étaient en train de faire quelquesinstants plus tôt. Et elle n’était pas prête à annoncer que Frank et elle étaient en couple, surtout alorsqu’elle ne savait pas où en était leur prétendue relation.

Au moins Sherita semblait essayer de leur faire gagner du temps à en juger par la conversationqu’elle entendait derrière la porte.

De son côté, Franck n’avait pas l’air trop ébouriffé ni froissé après leur séance de pelotage. Sachemise avait réussi à rester dans son pantalon, et ses cheveux courts ne montraient aucun signe dudésordre qu’elle avait causé avec ses doigts lorsqu’elle les avait touchés un peu plus tôt. Il recula enfaisant une grimace et il couvrit la bosse qui tendait son jean avec le dossier, sa poitrine se soulevantet se baissant encore à un rythme anormal.

Mais heureusement, lorsque Tre et Denise entrèrent dans son bureau, Frank et elle avait réussi àremettre de l’ordre dans leurs tenues.

Son frère s’arrêta brusquement lorsqu’il vit son coéquipier et il plissa les yeux.

« Qu’est-ce que tu fais là ? »

« Je montrais juste à Kiana un truc sur lequel je travaille. »

Il redressa ses épaules et il fixa Tre du regard comme s’il avait parfaitement le droit d’être là.

« J’étais en train de lui montrer quelques idées que j’aimerais bien essayer. Enfin, si elle estouverte à cette idée. »

Une nouvelle vague de chaleur monta aux joues de la jeune femme qui se mit à fixer son bureau.S’il faisait ce qu’il avait promis de faire, elle était plus qu’ouverte à cette idée. Malheureusement,une nuit de plaisir dans le lit de Frank n’avait aucun rapport avec la fondation qu’elle devait dirigerle jour.

Le combat de regards s’intensifia, et ce ne fut qu’à cet instant qu’elle subit une partie de la colèrequi remplissait les yeux de Tre. Il fallait faire en sorte qu’elle se dissipe tout de suite avant que lesdeux hommes n’en viennent aux poings.

Après avoir présenté Frank à Denise, elle fit signe à son frère et à sa belle-mère de s’approcher.

« Venez voir ce que Frank a mis en place pour la fondation. »

Denise fut la première à s’avancer et elle sourit en voyant le site d’enchères. Elle cliqua sur desobjets de la liste et son sourire s’élargit.

« Regarde tous les objets ! »

C’était exactement ce qu’il fallait pour que Tre mette un terme à sa confrontation silencieuse. Ilrejoignit sa mère devant l’écran de l’ordinateur.

« Où tu as trouvé tout ça ? »

« J’ai demandé autour de moi, c’est tout », répondit Frank en haussant les épaules. « Cela dit, j’aid’autres trucs dans les tuyaux. »

Ses yeux se posèrent sur Kiana dans un regard de défi silencieux qui lui demandait si elle étaitprête à accepter sa proposition.

Elle se retourna avant qu’il ne puisse voir à quel point elle était tentée d’accepter. Son cœur battaità tout rompre dans sa poitrine, mais elle réussit à garder le contrôle de sa voix lorsqu’elle dit : « Lesenchères sur internet pourraient être une bonne idée. Ça permettra de faire connaître la fondation à unniveau autre que régional et ça nous aider à lever plus de fonds. »

« Je suis totalement d’accord. »

Denise posa sa main sur le bras de Frank avant de le gratifier d’un sourire.

« On ne pourra jamais assez vous remercier pour tout ce que vous avez fait. »

Frank lui répondit par son sourire séducteur.

« Ce n’est que le début, Mme Dyer. Votre mari était une source d’inspiration pour moi et c’estl’occasion de m’acquitter de ma dette. »

« Et qu’est-ce que tu prévois de faire en plus de ça ? », demanda Tre d’une manière qui disaitclairement Ne touche pas à ma sœur.

« Tout dépend de quand Kiana me dira d’arrêter. »

Le pouls de la jeune femme se mit à battre à tout rompre. Oh, Seigneur, est-ce que ces deux-làétaient vraiment des adultes ?

« Jusque-là, j’apprécie tout ce que Frank a fait. »

Y compris ce qui s’est passé il y a quelques minutes.

Frank comprit le message caché dans sa réponse et il bondit sur ses pieds.

« C’est bon à savoir, parce que comme je l’ai dit, j’ai encore des choses dans ma manche. »

« Comme ? », demanda Frank en fronçant encore plus ses sourcils.

« Par exemple, mon frère est en train de demander des objets à ses potes qui font du hockey. Aprèstout, le matériel de hockey peut coûter très cher, mais les gosses ont quand même besoin de casquess’ils veulent jouer. »

Il était si doué pour jouer les innocents que Kiana se demanda combien de fois cela lui avaitpermis de se sortir de situations compliquées. Au moins, grâce à cela elle était protégée de la langueacerbe de son frère, même si elle n’y échapperait pas une fois que Frank serait parti.

Néanmoins, Denise restait celle qui faisait office de médiatrice.

« Et la fondation sera ravie de financer des programmes de hockey pour les enfants qui sont dansle besoin. »

« Je vais le dire à Ben pour qu’il puisse obtenir encore plus de soutien. »

L’expression de Tre s’assombrit, affichant quelque chose qui ressemblait à de la jalousie.

« Bon, c’est bien gentil tout ça, mais on a une réservation pour le déjeuner. »

C’était sa manière de mettre fin à la conversation avant que Frank ne s’attire d’autres louanges,mais Kiana fut reconnaissante qu’ils aient une raison de partir. Si elle passait plus de temps enprésence du jeune homme, elle pourrait perdre le contrôle.

« Vous voulez vous joindre à nous ? », demanda Denise.

Frank lança un regard à Tre avant de secouer la tête.

« Merci, Mme Dyer, mais j’ai un avion à prendre. »

Sa réponse attira l’attention de Kiana. Elle leva les yeux vers lui en essayant de découvrir quelleétait la prochaine étape de son plan.

« Tu vas où ? »

« Orlando », répondit-il comme s’il allait simplement se balader dans une autre partie de la ville.« Après tout, les Braves sont là-bas pour l’entraînement du printemps. »

Sa mâchoire se décrocha, et ce fut la seule raison qui fit qu’elle ne dit rien lorsqu’il l’embrassa surla joue et qu’il se dirigea vers la porte.

« Je te tiens au courant », dit Frank en faisant un signe de la main avant de sortir du bureau.

« C’est un jeune homme vraiment gentil », dit Denise.

« Il est tout sauf ça. » Tre serra les poings. « Qu’est-ce que vous manigancez exactement ? »

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

Si Frank pouvait jouer les innocents, elle pouvait le faire aussi.

« Tu sais exactement ce que je veux dire. »

Il saisit son clavier et il tapa une adresse web.

Une photo de Frank et elle en train de s’embrasser pendant le match des Hawks apparut surl’écran.

Kiana sentit ses pieds se dérober sous elle et sa langue bredouilla à la recherche d’une réponseappropriée.

« C’était pour la Kiss Cam. »

« Uh-huh. »

Le ton de la voix de Tre indiquait qu’il ne la croyait pas.

« Je t’ai déjà mise en garde une fois, mais je vais le faire encore une fois. Reste loin de Frank. Cen’est qu’un joueur. »

Kiana ferma les yeux et prit une profonde inspiration.

« Je sais, je sais. »

« Alors pourquoi tu te laisses avoir par son baratin à la con ? »

« Surveille ton langage », lança Denise d’un ton sec. « Et aux dernières nouvelles, Kiana est uneadulte qui est capable de faire ses propres choix. »

« Ouais, et regarde ce que ça a donné. Elle est exactement comme sa sale blanche de mère ».

« Ne parle pas comme ça de ta sœur. Je t’ai élevé mieux que ça. »

Denise lança un regard furieux à Tre qui répondit en baissant les yeux.

Mais le mal était fait. L’accusation de Tre l’avait frappée comme si elle avait reçu un coup en

pleine poitrine. Les hommes qui faisaient la queue devant la chambre de sa mère. Les disputesbruyantes qui se terminaient parfois par des coups et des meubles cassés. Et ensuite la nuit où touts’était arrêté avec le son d’un seul tir d’une arme à feu.

« Je t’en prie, Tre, tu n’as pas besoin de me rappeler tout ça. »

« Bien, parce qu’il y a encore un truc dont je veux parler. Il faut que tu penses à ta petite fille.Comment tu crois que Frank va réagir quand tu lui parleras de Savannah ? »

Elle mordit sa lèvre inférieure et elle détourna le regard.

« C’est ce que je pensais. »

Tre croisa ses bras sur son torse d’un air suffisant.

« Tu sais aussi bien que moi que ce n’est pas le genre de personne que tu veux autour d’elle, alorstu ferais mieux de t’en rappeler la prochaine fois que Roméo testera un de ses tours sur toi. »

Elle s’effondra intérieurement. Tre avait raison. Frank était peut-être très doué pour embrasser,mais il s’enfuirait probablement en courant au moment où il apprendrait qu’elle avait un enfant. Enfin,si elle lui faisait un jour suffisamment confiance pour lui parler de Savannah. Elle était allée très loinpour protéger sa fille de son ex, y compris en limitant le nombre des personnes qui savaient où ellese trouvait ou même de ceux qui connaissaient son existence. Elle refusait de faire vivre à Savannahl’enfer qu’avait été sa propre enfance avec le défilé des petits amis de sa mère. Elle devait être unemeilleure mère que la sienne ne l’avait été.

« Tu marques un point », murmura-t-elle.

« Bien. Maintenant allons-y avant qu’ils ne donnent notre table à quelqu’un d’autre. »

Tre sortit le premier du bureau, mais Denise s’attarda avec Kiana.

Un sourire compatissant s’attarda sur les lèvres de la femme plus âgée.

« Ne l’écoute pas, Kiana. Écoute ton cœur et ton instinct. Eux, ils ne t’induiront jamais en erreur. »

Le problème, c’était que son cœur et son instinct n’étaient pas du tout d’accord. Son instinct luidisait de garder ses distances avec Frank Kelly, mais son cœur se demandait s’il y avait plus en luique le joueur qu’il prétendait être.

Chapitre Huit

Frank respira l’air parfumé du centre de la Floride qui sentait les fleurs d’oranger. Le soleil s’étaitcouché quelques heures plus tôt, mais la chaleur de la journée s’attardait encore au point qu’il sentitla sueur picoter sa peau lorsqu’il s’assit sur la terrasse, son téléphone dans sa main. Cette foisencore, son ventre était noué par le stress lorsqu’il rassembla son courage pour appeler Kiana.

Mais là, c’était pour une autre raison.

Avant, il n’était pas sûr que l’attirance était mutuelle, mais l’intensité du baiser qu’ils avaientéchangé cet après-midi-là ne laissait aucun doute. Elle avait autant envie de lui que lui avait envied’elle. À présent, c’était la manière dont elle s’était comportée devant sa famille qui l’ennuyaitdavantage. La manière dont elle était devenue si froide d’un seul coup. La manière dont elle avaitrefusé de croiser son regard. La manière dont le regard accusateur de Tre lui était autant destiné àelle qu’à lui.

Et son instinct lui disait qu’il valait mieux éclaircir les choses tout de suite plutôt qu’être pris decourt plus tard.

Il composa son numéro et il attendit qu’elle réponde. Juste au moment où il s’attendait à finir aupurgatoire de la boîte vocale, elle décrocha.

« Bonjour », dit-elle dans une voix à peine plus forte qu’un murmure.

« Salut, beauté. »

Une courte inspiration lui répondit, suivie par une longue pause.

« Attends, je vais dans une autre pièce. »

Il entendit le son étouffé de sa voix, puis la fermeture d’une porte et ses doigts tressaillirent. Oùétait-elle ? Et qu’est-ce qu’elle était en train de faire qui justifiait qu’elle doive s’éloigner pour luiparler ?

« Désolée pour ça, Frank », dit-elle en parlant sur le même ton chuchoté. « Pourquoi tu appellesaussi tard ? »

« Il n’est pas même pas neuf heures. »

Il s’obligea à avoir l’air détendu, même si sa production de transpiration avait doublé en moinsd’une minute.

« Qu’est-ce que tu fais ? »

« Je suis chez moi. »

Il fut tenté de lui demander si elle était seule, mais il connaissait déjà la réponse. Sinon, pourquoidevrait-elle couvrir le téléphone et parler à quelqu’un d’autre avant d’aller dans une autre pièce ? Ilfrotta sa main sur sa chemise et il se frotta la nuque.

« C’est vraiment sympa Orlando. »

« Tu appelles juste pour jubiler ? »

« Peut-être. »

Elle répondit par un de ces soupirs graves et sexy dont elle avait le secret, et il sentit une partie dela tension qui pesait sur ses épaules s’envoler.

« C’est tout ? »

Il regarda derrière lui vers la pièce vide et vers le grand lit tout aussi vide. Dans le passé, il seserait rué dans des boîtes de nuit pour chercher de quoi s’amuser pour la nuit, mais désormais il n’yavait qu’une seule femme avec qui il voulait partager son espace.

« Ça te dirait de venir me rejoindre ? »

« Frank… »

Il entendit le refus dans la voix de la jeune femme, mais il l’interrompit et il se lança, prêt à toutpour lui vendre son idée.

« Je te payerai même un billet en première classe, Kiana. On pourrait aller voir quelques matchs,dîner ensemble, peut-être même qu’on pourrait s’amuser dans des parcs d’attractions. Et puis à la finde la journée… »

Il laissa volontairement la fin de sa phrase en suspens pour la laisser la compléter. Il savait déjà cequ’il ferait si elle était avec lui.

La ligne resta silencieuse, et il pria en silence pour que cela ne signifie qu’elle était en train deréfléchir à sa proposition. Mais lorsqu’elle reprit la parole, il eut un bref aperçu du conflit qui faisaitrage en elle.

« Ça a l’air merveilleux… vraiment… et j’adorerais pouvoir te rejoindre, mais je… »

Elle s’interrompit comme si elle venait juste de glisser et qu’elle s’était reprise juste à temps.

« Je ne peux pas, c’est tout. »

Il sentit ses cheveux se dresser sur sa nuque et il se redressa vivement.

« Pourquoi ? »

« Parce que je ne peux pas. »

« Donne-moi une bonne raison. »

Soit il apprendrait la vérité, soit il la rallierait à sa cause. Jusque-là, il n’accepterait pas saréponse.

« Frank… », dit-elle en prononçant son nom dans un soupir exaspéré. « Contrairement à toi, j’ai untravail où je dois aller tous les jours. »

« Mais c’est le week-end. »

« Ça ne change pas le fait que j’ai des rendez-vous et que j’ai des choses à faire que je ne peux pasrepousser. »

Il grinça des dents et son estomac se noua de nouveau.

« Qu’est-ce qui est si important que tu ne puisses pas faire un break pendant quelques jours ? »

Un autre silence remplit la ligne et il enroula ses doigts autour de la rampe du balcon.

« S’il te plaît, Frank, entre la fondation et ma famille, je n’ai plus une seconde à moi. »

« Alors tu ne peux pas trouver du temps pour moi ? C’est ce que tu es en train de dire ? »

« Non, ce n’est pas ce que j’ai dit », dit-elle sur un ton sec, et pour la première fois au cours decette conversation, il sentit le vent tourner dans sa direction. « Ce que je suis en train de dire, c’estque je ne suis pas du genre à faire des choses à la dernière minute, alors si tu veux faire quelquechose, j’ai besoin que tu me le dises à l’avance pour que je puisse m’organiser. »

L’explication de la jeune femme n’arrangeait pas les doutes qui se formaient dans l’esprit du jeunehomme.

« Prouve-le. »

« Pourquoi… qu’est-ce que tu peux être arrogant… »

Il l’interrompit de nouveau, cette fois avec un petit rire. D’une certaine manière, il réussissait àl’agacer autant qu’elle l’agaçait.

« Excuse-moi de vouloir passer du temps avec toi, surtout après notre rendez-vous de ce matin. »

Un gloussement cachotier lui répondit, et il arrivait presque à imaginer les joues de Kiana en trainde rougir comme cela avait été le cas lorsqu’ils avaient failli être pris sur le fait.

« D’accord. Quand est-ce que tu rentres à Atlanta ? »

« Aucune idée. Peut-être à la fin de la semaine. »

C’était un coup bas, mais si elle pouvait rester vague, lui aussi il pouvait faire en sorte qu’elle sedemande ce qu’il faisait.

Il espérait que cela éveillerait une étincelle de jalousie ou de possessivité, mais au lieu de cela cefut une voix calme et détendue, accompagnée de quelques clics de souris, qui lui répondit.

« Vendredi, ça t’irait ? », demanda-t-elle comme si elle était en train de lui proposer un rendez-vous chez le dentiste et non un rendez-vous sulfureux.

Il la maudit. Elle le déboussolait totalement.

« Vendredi soir ça me convient, mais seulement si ça inclut le dîner. Et le dessert. »

Il dit la dernière partie d’une manière si basse et si séduisante qu’il n’y avait aucun doute dansl’esprit de la jeune femme à propos de ce dans quoi il voulait s’engager après le repas.

La respiration de Kiana devint haletante et il eut un rire silencieux. Peut-être qu’elle seraitd’humeur à sauter le dîner et à passer directement au dessert s’il avait de la chance.

Quelques clics plus tard, la fameuse voix professionnelle faisait son retour.

« Je t’ai provisoirement noté sous réserve pour un dîner vendredi soir à 7 heures. »

Doux Jésus ! Est-ce qu’il allait aussi devoir programmer le sexe avec elle ? Voilà la raison pourlaquelle il détestait les appels téléphoniques avec les femmes. Il était toujours plus facile de lesconvaincre d’accepter ses plans lorsqu’il pouvait exercer tous ses charmes sur elle en personne.Mais il avait tellement envie d’elle qu’il allait jouer le jeu.

« Tu es sûre que tu ne pourrais pas venir ici plus tôt ? »

« Désolée, Frank, mais… »

Elle baissa sa voix dans un murmure et elle se tut.

« J’ai hâte d’être à vendredi soir. »

Il y avait juste une intonation suffisamment sexy dans sa réponse pour qu’il ignore les sonnettesd’alarme qui hurlaient dans sa tête.

« Je vais réserver au STK1. »

Il l’inviterait à boire du vin et à dîner, juste pour lui prouver qu’il pouvait être un gentleman. Maisaprès le dîner, il ne faisait aucune promesse.

« Vendu. »

Elle raccrocha, lui laissant suffisamment de temps pour s’éclaircir les idées et pour disséquer laconversation.

Les allers-et-retours l’ennuyaient, mais au moins il avait réussi à la convaincre de sortir denouveau avec lui. Pourtant, une chose devenait extrêmement claire en se basant sur les chuchotementset les hésitations dans la voix de Kiana.

Elle lui cachait quelque chose.

Il fit les cent pas sur le balcon tandis que les possibilités affluaient dans son esprit. Peut-êtrequ’elle était avec un autre homme. Bon sang, peut-être qu’elle était mariée et qu’elle ne faisait quel’utiliser pour aider sa fondation. Pendant une seconde, il fut tenté d’appeler Tre pour en savoir plus,mais au vu de la tension entre le frère et la sœur, il ne voulait pas causer plus de problèmes à Kiana.

Il avait besoin de réponses, et il n’y avait qu’une personne vers qui il pouvait se tourner pour enavoir.

Il composa le numéro d’Adam.

« Dis-moi que tu n’es pas en prison ou à l’hôpital », répondit son frère aîné dès qu’il décrocha.

« Lâche-moi la grappe, Adam. »

« C’est toi qui parle, Frank. »

Des bruits de voix de femmes remplirent la ligne et devinrent de plus en plus distants, tellementdifférents de la conversation étouffée à sens unique que celle qu’il avait eu lorsque Kiana avaitrépondu.

« Désolé, mais Lia et moi on a invité maman à dîner. Alors, qu’est-ce que tu as fait et combien çava me coûter pour te faire sortir de taule ? »

Frank leva les yeux et retourna dans la chambre d’hôtel climatisée. Le coup de chaud que luienvoyait son frère était suffisant. Il n’avait pas besoin d’humidité en plus.

« Ça n’a rien à voir du tout. Je suis de retour à Orlando, seul, dans ma chambre d’hôtel, jem’occupe de mes trucs. »

« Qui êtes-vous, et qu’est-ce que vous avez fait de mon frère ? »

Un rire naquit dans le centre de la poitrine de Frank.

« Qu’est-ce qui se passe, Adam ? Tu n’as pas l’habitude d’entendre que je me comporte bien ? »

« Encore une fois, c’est toi qui parle. Mais il doit bien se passer quelque chose pour que tum’appelles, et je soupçonne que ça a un rapport avec le fait que tu es seul un vendredi soir. »

« Bingo. »

Frank s’assit devant son bureau et il alluma son ordinateur portable.

« J’essaye de comprendre Kiana. »

Il fit une recherche sur son nom dans Google et il fut surpris de trouver une photo d’eux deuxpendant le match des Hawks en haut de la liste des résultats. Le souvenir de leur baiser de ce jour-làfit affluer le sang de sa tête vers sa queue, et il ferma brusquement son ordinateur avant de perdre latête.

« J’ai comme l’impression qu’elle me cache des informations importantes. »

« Comme ? »,

« C’est ça que je veux découvrir. »

Il sauta du bureau et il passa ses doigts dans ses cheveux trempés de sueur.

« Je sais qu’elle est sortie avec ce connard que j’ai envoyé à l’hôpital, et d’après ce que j’ai puapprendre, il la frappait quand ils étaient ensemble, mais au fond de moi mes tripes me disent que cen’est que le sommet de l’iceberg. »

« Toutes les femmes ont des secrets », dit son frère d’une manière calme et détachée.

« Je sais, mais je n’arrive pas à me sortir de la tête qu’elle en a plus que la plupart des femmes. »

« Et ta raison pour vouloir les déterrer, c’est que ? »

Frank s’assit au bord de son lit en espérant que son estomac cesse de le tourmenter.

« Je l’aime bien. Beaucoup, en fait. Mais je veux savoir dans quoi je me lance avant d’aller troploin, si tu vois ce que je veux dire, mais je n’ai aucune idée de la manière dont aborder le sujet. »

« Hmmmm… »

Il entendit le bruit des touches d’un clavier de l’autre côté de la ligne, et Adam dit : « J’ail’impression que tu n’as aucun problème pour coller tes lèvres aux siennes en public. »

Il avait sans doute lui aussi trouvé la photo du match de basketball.

« Tu me le reproches ? »

« Je suis un homme marié, alors je ne parlerai qu’en présence de mon avocat. »

Frank fit un grand sourire.

« Une Lia inquiète te ferait passer un sale quart d’heure si tu admettais que Kiana est sexy ? »

« Non, sachant qu’il est évident que la femme en question a un penchant pour mon frère. En plus, jete l’ai dit, j’aime les petites italiennes. »

Il entendit un rire féminin au loin, et Frank pouvait quasiment imaginer sa belle-sœur en traind’écouter la conversation.

« Mais je vais appeler Cully demain matin pour voir si je peux trouver des réponses pour toi »,poursuivit Adam.

« Je ne pense pas que ce soit nécessaire d’aller jusque-là. Je voulais juste des conseils sur lamanière dont aborder la question sans me prendre une gifle. »

« Sois juste honnête, mais sans chercher le conflit. Si elle te voit comme une menace, elle se mettrasur la défensive. J’espère que ça t’aide. En attendant, je crois que maman veut te parler. »

Frank gémit. Il avait déjà suffisamment de choses en tête pour ne pas avoir besoin que sa mèreespionne sa vie personnelle. Il espérait qu’Adam aurait assez de bon sens pour cacher la photo deKiana et lui pendant le match, mais la chance n’était pas de son côté ce soir-là.

« Qui est cette charmante jeune femme que je vois, Frank ? », demanda sa mère, la voix remplied’espoir digne d’une marieuse.

« Un rencard, maman. Juste un rencard. »

« Mais elle est superbe. Et vous faites un joli couple. »

Il va falloir que je pense à mettre une claque derrière la tête d’Adam la prochaine fois que jevais le voir.

Il était certain que sa mère était déjà en train de planifier son mariage.

« Elle s’appelle Kiana », répondit-il en donnant à cette dernière aussi peu d’informations quepossible.

« Et qu’est-ce qu’elle fait dans la vie ? »

« Elle dirige une fondation caritative. »

« Oh, comme Becca ? »

Frank réprima un rire amer. La petite amie d’Ethan dirigeait elle aussi une fondation, mais celan’avait rien à voir avec ce que Kiana avait à gérer au quotidien. Les choses étaient faciles pourBecca. Elle avait la fortune de sa famille à sa disposition. Kiana allait au front pour essayer de leverdes fonds pour les enfants qui bénéficiaient de son dur labeur.

« Pas tout à fait. »

« Dans tous les cas, c’est un bien meilleur travail que ceux de certaines des autres femmes que tuas fréquentées. »

Frank jura en silence. Est-ce que sa mère l’espionnait ?

« Oui, maman. C’est une jeune femme charmante qui vient d’une famille respectable d’Atlanta. »

« Tu as rencontré sa famille ? »

Il pouvait pratiquement entendre sa mère en train de demander pourquoi elle n’avait pas encorerencontré Kiana.

« Je suis ami avec son frère. Et c’était juste un rencard. »

Cette conversation devenait de plus en plus étrange à chaque minute qui passait. Il allait tuerAdam.

« Eh bien, j’ai l’impression qu’il y a eu une étincelle entre vous. »

Frank se laissa tomber sur le lit et posa son bras sur ses yeux. Il sentait son visage le brûler.

« C’était pour la Kiss Cam, maman. »

« Ce n’était pas l’excuse que Ben avait utilisée pour le soir où il avait rencontré Hailey ? »

Ce que sa mère était en fait en train de lui demander, c’était si sa soirée s’était terminée commes’était terminée celle de son frère.

« Maman, je ne l’ai pas ramenée chez moi. »

Bien sûr, si cela n’avait tenu qu’à lui, cette soirée se serait passée exactement comme celle de Benavec une session de sexe inoubliable. La seule différence aurait été qu’il se serait assuré de porterdeux préservatifs. Il était bien trop jeune pour se retrouver bloqué avec un enfant.

« Oh, vraiment ? »

Sa mère avait vraiment l’air déçue. Elle voulait tellement avoir des petits-enfants qu’elle ne sesouciait pas de la manière dont elle pouvait en avoir. Elle avait fait grand cas du bébé de Jenny, et cen’était même pas celui de Dan. Il espérait juste que les choses se calmeraient une fois que ses frèreslui auraient donné ce qu’elle voulait.

« Maman, s’il te plaît, est-ce qu’on pourrait arrêter de parler de ma vie personnelle ? »

« Très bien », dit-elle avec un ton chargé de résignation. « Est-ce que tu évites les problèmes ? »

« Oui, maman, je suis un gentil garçon. Je retourne même à Orlando pour du travail debienfaisance. »

« Et est-ce que ce travail a un quelconque rapport avec Kiana ? »

Sa mère était bien trop intelligente.

« Oui, maman. »

« Il va falloir que tu m’en dises plus. »

« Peut-être plus tard. Il est tard et j’ai des rendez-vous très tôt demain matin », mentit-il en utilisantl’excuse que Kiana lui avait donné le soir du match.

« Tu es sûr que tu vas bien, Frank ? »

Il avait envie de parler à sa mère de l’étrange douleur qu’il ressentait dans ses tripes et de lamanière dont sa respiration devenait plus rapide à chaque fois qu’il voyait Kiana, mais cela semblaittrop personnel, surtout sachant qu’il ne savait pas lui-même quoi en faire.

« Oui, ça va. Pourquoi ? »

« C’est juste que je ne suis pas habituée à ce que tu te comportes de manière aussi… euh…responsable. »

Tout le monde savait jouer la comédie, surtout quand il s’agissait de l’embêter.

« Tu préfèrerais que je reviennes à mes anciennes habitudes ? »

« Non, non, non. C’est juste que je suis fière de toi, mon chéri, c’est tout. Tu deviens enfin le jeunehomme bien que j’ai toujours su que tu deviendrais. »

« Contrairement au petit con que j’étais avant ? »

« Je ne dirais jamais que quelqu’un qui a remporté le Super Bowl trois fois est un petit con, monchéri. »

Les lèvres du jeune homme esquissèrent un demi-sourire. Sa mère savait toujours comment fairepour qu’il se sente mieux.

« J’essaye juste de te rendre fière. »

« Tu l’as toujours fait. Et j’espère que tu m’en diras plus à propos de cette charmante jeune filleque tu fréquentes. Peut-être que je pourrais prévoir un petit séjour à Atlanta dans quelques semaines.J’emmènerais même Jasper avec moi. »

« Attends une minute, maman. Une chose à la fois. Il faut d’abord qu’on ait un deuxième rendez-vous. »

Et il n’avait définitivement pas besoin que le gros chien de sa mère qui bavait perde ses poilspartout chez lui s’il voulait avoir une chance de convaincre Kiana de rester pour la nuit.

« Mais il est très doué pour juger les gens. »

« Détends-toi, maman. »

Néanmoins, Frank se frotta le menton comme s’il réfléchissait à la question. Peut-être que le testde Jasper serait plus rapide que d’attendre qu’elle lui dise la vérité.

« Oui, mon chéri. En attendant, repose-toi et n’oublie pas de m’appeler de temps en temps. »

Pouah !

La culpabilité. Il avait oublié combien sa mère pouvait être douée pour critiquer.

« Oui, maman. »

Il raccrocha avant que sa famille ne trouve autre chose pour le taquiner avant de s’étendre sur sonlit. La vie serait bien plus simple si Kiana avait juste accepté son invitation. Au lieu de cela, il restaitdans une position indécise, sans avoir aucune certitude de ce qu’il devait faire ensuite.

***

Kiana raccrocha le téléphone après avoir accepté l’invitation à dîner de Frank et elle éventa sonvisage. Elle commençait juste à préparer Savannah pour le lit lorsqu’il avait appelé, et elle avait eutellement peur qu’elle se mette à hurler et qu’il l’entende. Mais ses peurs n’étaient pas fondées, eneffet Savannah resta totalement silencieuse après qu’elle se soit éclipsée de la chambre d’enfant.

Peut-être qu’il était temps qu’elle lui parle de sa fille. Avant de perdre pied dans cette histoire.Denise lui avait dit d’écouter son cœur et son instinct, mais c’était ses hormones en ébullition quiétaient en train de guider ses décisions en cet instant. Et toutes ses hormones lui disaient de vivre aumoins une nuit de plaisir avec Frank avant de lui révéler l’information qui aurait sur lui l’effet d’unebombe.

Elle envoya un SMS rapide à Madison pour lui demander si cela la dérangeait de rester un peuplus tard le vendredi soir. Si sa baby-sitter ne le pouvait pas, elle se tournerait vers Sherita ouDenise pour une mission de baby-sitting. Heureusement pourtant, Madison répondit en moins d’uneminute qu’elle pouvait.

Une difficulté en moins. À présent, elle devait choisir ce qu’elle allait porter.

Elle jeta un œil dans la chambre d’enfant et elle vit que Savannah était en train de jouer dans sonberceau. Dès qu’elle la vit, sa fille se leva, les bras tendus et dit « Maman ».

Le cœur de Kiana fondit comme c’était le cas à chaque fois qu’il voyait sa petite fille. Laprécieuse enfant l’avait aidée à prendre des décisions difficiles dans le passé, donc il n’y avaitaucune question quant à la place de Kiana sur sa liste de priorités. Aucun homme ne valait la peine derisquer la sécurité et le bien-être de sa fille.

Lorsqu’elle prit Savannah dans ses bras et qu’elle la promena dans sa chambre, elle se demandaquelle serait sa place dans leur famille. Il avait déjà prouvé qu’il avait le complexe du chevalierblanc en armure quand il était venu à sa rescousse ce fameux soir dans la boîte de nuit, et il avaitmontré plus de retenue que tous les autres hommes avec lesquels elle était sortie.

Mais les mots de Tre continuaient de la hanter. Apparemment, Frank était vraiment une personnelégère, et pourtant il avait montré plus que sa part de responsabilité pour la levée de fonds. Commentréagirait-il si elle lui parlait de Savannah.

Elle caressa les douces boucles de sa fille avec sa main et elle demanda : « Alors qu’est-ce quemaman va porter pour son dîner ? »

Savannah lui tendit une framboise couverte de bave.

Kiana fit un grand sourire avant de poser sa fille dans l’endroit que cette dernière préférait dansl’armoire, l’étagère à chaussures, puis elle envoya un autre SMS rapide.

J’ai hâte de dîner avec toi la semaine prochaine.

Une minute plus tard, Frank répondit : Moi aussi, beauté.

Le cœur de la jeune femme fondit de nouveau, mais cette fois pour une raison totalement différente.

Savannah avait déjà attrapé un escarpin à talon aiguille dans lequel elle essayait de glisser sonpied minuscule lorsque Kiana baissa les yeux.

« L’addiction commence tôt à ce que je vois », dit-elle en taquinant la petite fille.

Puis, elle se tourna vers les robes suspendues sur des cintres dans l’armoire.

« Alors, Savannah, est-ce que maman devrait choisir d’être sage ou coquine ? »

Savannah répondit en saisissant une sandale à lanière argenté avec des talons de 13cm et en luitendant la chaussure.

Kiana prit cela comme un signe.

« Ça sera coquine alors. »

1 STK : Chaîne de restaurants de viande haut de gamme

Chapitre Neuf

Assis seul dans un box des meilleurs restaurants de viande d’Atlanta un vendredi soir, Frank Kellyfixait son téléphone.

19h25.

Et aucun signe de Kiana.

Il ne l’avait recontactée qu’une seule fois depuis la semaine précédente car il avait peur de laisseréchapper qu’il cherchait des informations la concernant. Mais au cours de la brève conversationqu’ils avaient eue, il avait eu beau lui proposer à plusieurs reprises de venir la chercher, elle avaitinsisté pour le retrouver au restaurant.

Ce qui, bien évidemment, ne faisait que réveiller de nouveau son sixième sens qui lui disait qu’ellelui cachait quelque chose.

Et voilà qu’elle lui faisait faux bond.

Il essaya de la rappeler pour la troisième fois de la soirée, mais comme les fois précédentes, ilarriva directement sur sa boîte vocale. N’importe qui d’autre en aurait conclu qu’il s’agissait d’unsigne indiquant clairement qu’elle n’était pas intéressée, mais lorsqu’il cliqua sur les informations laconcernant, il vit le SMS qu’elle lui avait envoyé quand il était à Orlando.

J’ai hâte de dîner avec toi la semaine prochaine.

Il éteignit son téléphone et il fit signe au serveur pour demander son addition. Il n’avait pris qu’uneboisson, mais il n’y avait aucune raison de retenir la table plus longtemps. Il laissa un pourboiregénéreux pour s’excuser et il partit vers le seul endroit où il avait des chances d’obtenir des réponses: le bureau de la jeune femme.

***

Kiana avait été mise en attente.

Encore.

Elle tapota du pied sur le sol et elle passa sa main dans ses cheveux tandis qu’elle écoutait lamusique insipide dans le combiné. Après avoir appris qu’ils avaient vendu plus de billets pour legala que ce qu’elles avaient prévu, elle avait passé tout l’après-midi au téléphone. Cela voulait direqu’il fallait trouver un endroit plus grand. Et prévoir plus d’alcool. Et à présent, elle essayaitd’obtenir un devis de la part du traiteur. Et tout le monde la mettait en attente quand elle demandait unchiffre.

Cela suffisait pour lui donner envie de s’arracher les cheveux.

Elle lança un regard vers la robe suspendue dans l’armoire de son bureau. Au moins, elle avaitquelque chose qu’elle avait hâte de faire une fois qu’elle en aurait terminé avec ce dernier appel.Elle avait attendu ce dîner avec Frank toute la semaine, et sa tenue moulante pailletée était unmélange parfait d’un côté osé et d’un côté sage. Sans parler du fait qu’elle était parfaitement assortie

aux chaussures que Savannah avait recommandées.

Une femme avec un fort accent du sud finit par prendre l’appel.

« Ouais, on peut nourrir autant de personnes, mais ça va doubler votre devis. »

« Mais c’est un évènement caritatif, Madame Rosa. »

« Et j’ai une entreprise à faire tourner », répondit la femme.

C’était le moment de négocier âprement.

« Une entreprise qui a pris de l’envergure parce que mon père lui a apporté son soutien au momentoù vous veniez juste de la créer. »

Mme Rosa ne répondit pas tout de suite, et Kiana profita de son hésitation.

« Cette fondation était le rêve de mon père et je fais tout ce que je peux pour la garder en vie. Jesuis sur un petit nuage depuis que je sais qu’il y aura deux fois plus de personnes que prévu, mais jeveux garder autant d’argent que je le peux pour les enfants. S’il vous plaît, est-ce que vous pouvez mefaire un prix ? Si ce n’est pas pour la fondation, au moins en gage de remerciement pour tout ce quemon père a fait pour vous quand il était encore en vie ? »

Des grommellements se firent entendre, suivis par le ronronnement d’une musique assommante.

Merde !

À nouveau mise en attente.

Cependant, cette fois cela ne dura que deux ou trois minutes.

« Si je vous accorde une réduction de 10 pour cent, est-ce que vous me donnerez un reçu pour queje puisse le présenter pour obtenir une déduction fiscale ? »

Mme Rosa ripostait.

Kiana faillit bondir de son siège.

« Vendu ! »

« Après tout, je vous fais déjà un meilleur prix que ce que je propose à la plupart de mes clients, etc’est un ajustement de dernière minute. »

« Je sais, Mme Rosa, merci du fond du cœur pour tenir compte de toutes les personnessupplémentaires. Merci, merci. »

« Encore une chose. »

Mme Rosa baissa la voix et ajouta : « Mon garçon est un très grand fan de Frank Kelly, et c’estbientôt son anniversaire. Si vous pouviez lui demander de signer un petit quelque chose pour lui… »

« C’est comme si c’était fait. »

Il ne serait probablement pas difficile de convaincre Frank de signer un ballon de football ou unmaillot pour un adolescent.

« Merci, Kiana. »

Le traiteur raccrocha et Kiana se leva d’un bond pour se changer pour le dîner.

La nuit était tombée sur Atlanta, et les gratte-ciels scintillaient à l’horizon. Le temps clair avait unprix. Un front froid s’était installé dans la matinée, et il faisait beaucoup moins chaud qu’au momentoù elle était partie de chez elle. Soudain, ses sandales à lanières semblaient moins attrayantes. Maistout cela vaudrait la peine lorsqu’elle verrait l’expression qui s’afficherait sur le visage de Frank.

La robe datait d’avant sa grossesse, et elle avait donc besoin de sa Spanx à toute épreuve. Il étaitimpossible qu’elle ne puisse ne serait-ce que se rapprocher du fait de retrouver son corps del’époque sans utiliser la gaine constrictive en Lycra. Elle tira sur la gaine à taille haute plusieursminutes avant de serrer toutes ses courbes généreuses à l’intérieur ; des gouttes de sueur perlaient surson front. Mais une fois la robe enfilée par-dessus le Spanx, ses efforts furent récompensés.

Elle appliqua du fard à paupières charbonneux sur ses yeux noisette et un rouge à lèvres bordeauxqui était bien trop osé pour aller travailler en journée, mais qui était parfait pour une sortie en soirée.Une fois maquillée, elle attrapa ses chaussures et elle s’assit sur le petit canapé qui se trouvait dansson bureau pour les attacher.

Elle était en train de fermer la boucle de la deuxième lorsqu’elle entendit frapper à la porte.

Frank entra dans le couloir, sa cravate desserrée autour de son cou comme s’il avait commencé àl’enlever. Le costume bleu foncé était assorti à ses yeux, mais l’expression perturbée sur son visagecapta toute l’attention de la jeune femme et le cœur de cette dernière fit un bond.

« C’est un peu tard pour ça », dit-il avant de montrer du doigt l’horloge qui se trouvait derrière lebureau de Kiana.

19h52.

Merde !

La terreur glaça le sang de la jeune femme qui se retrouva incapable de formuler la moindreexplication.

« Frank, je suis désolée… C’est juste que j’ai perdu la notion du temps. Je… »

Les mots gelèrent sur sa langue lorsqu’il s’avança vers elle. Les souvenirs de la manière dontMalcolm trouvaient toujours une excuse pour la frapper l’emportèrent sur tout ce qu’elle savait àpropos de Frank. Tout ce qu’elle voyait, c’était un homme massif de grande taille qui avait toutes lesraisons du monde d’être en colère après elle. Un homme qui pourrait facilement la battre pour cela.

Elle se roula en boule sur le canapé en répétant sans cesse Je suis désolée, je suis désolée.

Il s’arrêta et il fronça les sourcils.

« Kiana, qu’est-ce qui ne va pas ? »

« Je suis désolée d’avoir oublié le dîner. Ça n’arrivera plus. C’est juste que j’étais au téléphoneavec le traiteur, et… »

« Ce n’est pas ça dont je parle. »

Il tendit la main vers elle et elle tressaillit instinctivement sur le canapé. Le bras de Frank retomba,tout comme l’expression sur son visage.

« Jésus, Kiana, qu’est-ce que ce connard a bien pu te faire ? »

Et soudain, le présent reprit le dessus et des larmes se mirent à picoter les yeux de la jeune femme.

« Je suis désolée, Frank. »

« Arrête de dire ça. »

Il se retourna et il passa ses doigts dans ses cheveux en expirant bruyamment.

« Dis-moi juste ce qui s’est passé. Et plus d’excuses. »

Le corps de la jeune femme tremblait, mais elle était incapable de dire si c’était par peur ou parsoulagement. Ou peut-être juste à cause de la gêne. Elle avait automatiquement pensé le pire de lui, età présent la honte brûlait sa peau.

« On a vendu tellement de tickets pour le gala qu’on a dépassé nos prévisions. J’ai passé lajournée au téléphone pour m’assurer qu’on aurait assez de place, de nourriture et de boissons pourles participants. »

« Alors c’est pour ça que tu ne répondais pas au téléphone ? », demanda-t-il en lui tournanttoujours le dos.

Elle hocha la tête, même si elle savait qu’il ne pouvait pas la voir.

« J’étais encore au téléphone avec le traiteur il y a dix minutes. »

Il mit ses mains sur ses hanches et il regarda à travers la fenêtre du bureau.

« Et c’est pour ça que tu m’as posé un lapin. »

« Ce n’était pas mon intention. C’est juste que j’ai perdu la notion du temps, et… ».

Elle prit enfin conscience de l’implication cachée derrière le commentaire du jeune homme. Ill’avait attendue au restaurant, et elle n’était jamais arrivée. Et après qu’elle lui ait dit non pour levoyage à Orlando, qui sait ce qu’il devait penser.

« Oh merde, Frank, je suis désolée. »

« Arrête de t’excuser. »

Il se retourna et il passa sa main sur son visage.

« On n’y peut rien. »

Elle se sentit enfin suffisamment en sécurité pour dérouler ses jambes, mais elle ne faisait pasassez confiance à ces dernières pour se lever du canapé.

« Il est trop tard pour aller dîner ? »

« Ça l’est pour le STK. »

Les yeux du jeune homme errèrent sur le corps de la jeune de la jeune femme, s’arrêtant sur son

décolleté plongeant et généreux.

« Au fait, tu es magnifique. »

Elle sentit la chaleur monter à ses joues, mais à présent pour une raison totalement différente.

« On peut toujours sortir, si tu veux. »

« Chez moi, c’est toujours ouvert. »

Il lui lança un regard séducteur qui faillit la convaincre d’accepter sa proposition.

Mais la réaction qu’elle avait eu face à lui quelques instants plus tôt modéra son enthousiasme.Elle ne lui faisait toujours pas confiance. Pas totalement. Pas encore. Et définitivement pas assez pourle suivre chez lui. Elle secoua la tête.

« Nope. C’est trop loin et j’ai un couvre-feu ce soir. »

Ou du moins, elle avait promis à Madison qu’elle serait rentrée pour onze heures.

« D’accord », dit-il avec une moue exagérée. « Alors il faut passer au plan B. »

Il lui tendit son téléphone et il fit le tour de son bureau.

« Il y a une application pour une pizzeria du coin dessus. Commande ce que tu veux et fais livrerici. »

Elle prit le téléphone, mais elle ne suivit pas ses instructions immédiatement.

« Qu’est-ce que tu as en tête ? »

« Un dîner et un film. »

Il tapa sur le clavier de l’ordinateur de la jeune femme et il tourna l’écran pour montrer la pageweb d’un site sur lequel il était possible de visionner des films.

« J’ai l’impression qu’un break te ferait du bien, et je ne peux plus supporter cette cravate. »

En d’autres termes, il était en train d’essayer de la rencontrer sur son terrain, de lui laisser lecontrôle de la soirée. Les actions du jeune homme faisaient tomber ses défenses et chassaient lesdernières traces de peur qui subsistaient encore dans son sang. Elle n’aurait pas pu souhaiter unmeilleur plan B.

« Merci, Frank. »

« Je préfère ça à des excuses. »

Elle lui fit un sourire optimiste.

« Maintenant commande cette pizza, et quand tu auras fini, choisis un film. »

Elle trouva l’application et elle regarda le menu.

« Quel genre de pizza tu aimes ? »

« À toi de choisir. Tant que c’est une pizza, j’en mangerai. »

Il commença à hausser les épaules et il s’arrêta.

« Sauf s’il y a du tofu. La fausse viande, c’est ma limite. »

Et pour la première fois de la soirée, elle se sentit suffisamment à l’aise pour rire.

« Moi aussi. »

Il rencontra son regard et son sourire s’élargit.

Le cœur de la jeune femme eut un léger soubresaut. Frank était tellement différent de Malcolm. Sonex l’aurait laissé baigner dans son sang sur le sol pour avoir raté leur rendez-vous pour dîner -surtout dans un endroit aussi chic que le STK - mais Frank avait juste fait contre mauvaise fortunebon cœur, et il avait trouvé autre chose. Il était tellement facile à vivre que cela calmait ses nerfstendus. Il était grand. Et oui, il savait comment mettre un coup de poing. Mais elle commençait enfin àvoir qu’elle était en sécurité avec lui.

« Tu vas commander ? », demanda-t-il en la faisant sortir de ses pensées. « Parce que je meurs defaim. »

« Bien sûr. Je veux dire, je suis sûre que tu meurs de faim après avoir attendu aussi longtemps aurestaurant. « Je suis vraiment dés… »

« Je croyais avoir dit plus d’excuses. »

Il y avait une sévérité dans sa voix qui la réduisit au silence, mais la lueur dans son regardatténuait la dureté de ses paroles.

« Tu t’es laissée prendre par ton boulot. J’ai compris. »

« C’est vrai ? »

Il baissa les yeux vers le sol et il se frotta la nuque.

« Ouais. Je veux dire, je suis pareil quand il s’agit de mon boulot. Mais je mentirais si je disaisque je n’étais pas un peu jaloux. »

En entendant cela, les défenses de Kiana refirent surface et ses muscles se tendirent.

« Jaloux de quoi ? »

Il rit comme pour se moquer de lui-même et il tapota le bout de sa chaussure contre le bureau.

« C’est juste que j’aurais aimé qu’il y ait un moyen pour que je captive ton attention autant que tonboulot peut le faire. »

Et elle se sentit à nouveau fondre. Il ne le savait peut-être pas, mais il avait dit exactement ce qu’ilfallait.

« Eh bien, tu as toute mon attention ce soir. Ou en tous cas jusqu’à 22h45. »

« Hey, même Cendrillon avait jusqu’à minuit. »

Elle commanda une grande pizza avec toutes les viandes et deux litres de soda tout en tirant profitde ce temps pour retrouver le fil de sa pensée. C’était sa chance de lui parler de Savannah. Mais elleavait déjà trop abusé de sa chance ce soir-là. Lui parler de son enfant pouvait tout briser. Non, ilvalait mieux y aller lentement et commencer par voir où les choses allaient aller entre eux.

« Cendrillon n’avait pas d’interview à 9h00 du matin avec une chaîne de télé locale le lendemainmatin. J’ai besoin de mes heures de sommeil réparateur. »

« Je ne sais pas. »

Il fit de nouveau le tour du bureau et il s’appuya sur le bord de ce dernier.

« Pour moi, tu es superbe. »

« Et tu ne sais pas tout ce qu’il faut faire pour ressembler à ça. »

Elle finalisa la commande, et elle ne fut pas du tout surprise de s’apercevoir que Frank avait unnuméro de carte bancaire enregistré pour cette pizzeria.

« Tu devrais mieux protéger tes informations personnelles. »

« Il faut d’abord deviner mon mot de passe. Maintenant, choisis le film. »

Il tapota sur l’écran de l’ordinateur.

« Tu es sûr que tu ne veux pas me raconter comment s’est passé ton séjour à Orlando ? »

Il secoua la tête.

« Tu as beaucoup trop travaillé. Il est temps de s’amuser. Dîner. Film. Le travail peut attendrejusqu’à lundi. »

« D’accord. »

Lorsqu’elle se leva, elle chancela légèrement, mais elle reporta davantage la faute sur la lanièrenon attachée de son nu-pied que sur sa frayeur passée. Elle se pencha pour prendre la souris posée del’autre côté du bureau.

« On a une jolie vue d’ici », lança malicieusement Frank, le regard fermement rivé sur les fessesde la jeune femme.

Elle rit de nouveau et elle remua un petit peu pour voir s’il les saisirait comme il l’avait fait lesoir du match de basketball, mais il se contenta de garder les bras croisés sur son torse. Presquebloqués contre son torse plus précisément. C’était comme le soir où il avait promis de ne pas poserune main sur elle.

Peut-être qu’il lisait mieux en elle qu’elle ne le pensait. Il était évident qu’il avait envie de latoucher, mais après qu’elle se soit effondrée, il était probablement en train de la laisser respirer etd’attendre qu’elle lui donne son feu vert.

Et un autre mur fut abattu autour de son cœur. Au rythme où il allait, Frank Kelly était en bonnevoie pour le conquérir.

Elle parcourut la liste des films sur le service de streaming, sans savoir lequel choisir. Puis ellecliqua sur l’onglet des films visionnés récemment et elle vit une liste remplie de comédies, ponctuéede quelques films d’action. Oui, c’était du Frank tout craché. Un homme qui aimait rire, et non voirdes gens en train de s’étriper. Elle fit défiler la liste jusqu’à ce qu’elle trouve son bonheur.

« Et pourquoi pas un film un peu rétro ? »

Elle cliqua sur le film, et quelques secondes plus tard, un titre avec un crâne et des os croisésremplit l’écran de son ordinateur.

« Les Goonies ! », s’exclama Frank comme un enfant surexcité. « Pas de doute, un des meilleursfilms qui ait jamais existé. »

« Ouais, il est plutôt pas mal. »

« Plutôt pas mal ? »

Il la regarda comme si elle avait perdu la tête.

« Ce film est un classique. Allez, je vais te montrer. »

Il prit la main de la jeune femme et il la guida vers le canapé.

« Attends une minute. Je n’ai pas besoin de ça. »

Il retira sa veste.

« Ni de ça. »

Il arracha sa cravate.

Puis il la prit dans ses bras et il se laissa tomber sur le canapé de telle manière qu’elle se retrouvaassise sur ses genoux.

« Et tu n’as pas besoin de ça », finit-il en lui retirant ses nu-pieds brillants à talons aiguilles.

Elle posa ses mains sur les épaules du jeune homme et elle fit un grand sourire.

« Tu es vraiment un cas, Frank Kelly. »

« Tu ne le réalises que maintenant ? »

« J’ai eu quelques aperçus, mais les pièces du puzzle commencent à s’assembler. »

« Bien. »

Il prit la main droite de Kiana et il la fit descendre sur son torse jusqu’à ce qu’elle soit posée surson cœur.

« Parce que j’ai l’intention de te faire sourire ce soir. »

Un élan de désir rebelle naquit dans le bassin de la jeune femme. Il y avait définitivement unmoyen grâce auquel il pouvait lui donner le sourire. Vraiment dommage que le livreur de pizza puissearriver à n’importe quel moment.

Le sourire de Frank s’élargit comme s’il savait exactement ce à quoi elle était en train de penser.Et à en juger par la bosse dure qui appuyait contre ses fesses, il ressentait également quelque chosede similaire. Il la fit glisser de ses genoux pour la déposer à côté de lui.

« Mais d’abord, je dois te prouver que Les Goonies est un chef d’œuvre du cinéma. »

Chapitre Dix

Mon Dieu, c’était la soirée de torture la plus exquise qu’il ait jamais vécu.

Le rire doux et sexy de Kiana.

Ses courbes chaudes appuyées contre lui.

Le parfum enivrant qui s’accrochait à sa peau.

Cela suffisait pour le faire transpirer s’il était de nouveau au lycée à un premier rendez-vous entrain de se demander s’il devait faire le premier pas. Ou même aller au-delà, s’il avait de la chance.

Mais à chaque fois qu’il pensait à la toucher, il revoyait la manière dont elle s’était recroquevilléesur le canapé sur lequel elle était assise calmement en cet instant. Les excuses qu’elle avait répétéesle hantaient. Jésus, qu’est-ce que ce sale type lui avait fait ? À en juger par le comportement qu’elleavait eu, son ex l’aurait battue pour avoir été en retard pour dîner. Cela suffisait pour qu’il soitprudent et qu’il calme ses ardeurs, même si la seule chose qu’il avait envie de faire, c’était de laprendre dans ses bras et de la tenir contre lui jusqu’à ce que ses peurs disparaissent.

Il était sincère quand il avait dit qu’il voulait la faire sourire, et à en juger par sa position détendueet par son sourire décontracté, il avait réussi. Pas comme il l’aurait voulu, mais cela lui convenait.

Heureusement, il avait vu Les Goonies plus de fois qu’il ne pouvait les compter. Cela laissait lasoirée ouverte pour lui permettre d’apprendre tout ce qu’il pouvait à propos de Kiana et de découvrircomment déchiffrer les émotions de cette dernière. Il passa la majeure partie du film à l’observer et àmémoriser le moindre détail la concernant. Par exemple, elle baissait les yeux quand elle riait. Ellepressait ses lèvres tout en enroulant une boucle autour de son doigt quand elle se concentrait surquelque chose. Et elle entrelaçait ses doigts et elle les portait à ses lèvres quand les chosesdevenaient tendues. Plein de choses qu’il enregistrait pour plus tard.

Mais lorsque le générique s’afficha sur l’écran, il se paralysa sans savoir quoi faire ensuite.

« Très bien, Frank », dit-elle avec un de ses rires remplis de douceur qui faisait affluer le sangvers son sexe. « C’était un film sympa. »

« Je te l’avais dit. »

« Attends une minute. »

Elle se tourna vers lui, ses cuisses appuyées contre les siennes.

« J’ai dit qu’il était sympa. Je ne suis pas certaine que ce soit un chef d’œuvre du cinéma.

« Peut-être qu’on devrait le regarder encore une fois pour te convaincre du contraire. »

Pour la première fois au cours de cette soirée, elle leva les yeux pendant qu’elle riait.

Il prit cela comme un signe indiquant qu’elle était enfin remise de sa terreur précédente, et il serapprocha d’elle en baissant le ton de sa voix pour adopter un ton séducteur.

« Ou est-ce que tu as autre chose en tête ? »

La respiration de Kiana devint haletante et il jura en silence.

Je risque de tout gâcher si je suis allé trop loin.

Mais elle ne recula pas. Au lieu de cela, elle le regarda et elle se lécha les lèvres comme s’il étaitune sorte de friandise décadente qu’elle mourait d’envie de dévorer.

Si elle avait été n’importe quelle autre femme, il aurait pris cela comme une invitation à coller seslèvres sur les siennes jusqu’à ce qu’elle le supplie de la prendre sans plus penser à rien d’autre.Mais étant donné qu’il s’agissait de Kiana, il s’obligea à se retenir. Mon Dieu, il refusait même de latoucher. La dernière chose qu’il voulait devenir à ses yeux, c’était un connard tyrannique etautoritaire. La balle était dans le camp de la jeune femme, et il allait la laisser décider de jusqu’oùelle voulait aller.

Il n’eut pas longtemps à attendre. Elle se rapprocha de lui et elle appuya ses lèvres contre lessiennes. Il ferma les yeux et il se perdit dans l’extase de son baiser.

Mais tandis que ce dernier devenait plus pressant, il s’aperçut qu’il était à l’agonie du désir. Ilserra les poings, déterminé à ne pas poser une main sur elle sans son consentement, même si la seulechose qu’il voulait, c’était de tenir toutes les courbes délicieuses de son corps.

Elle s’arrêta et elle se recula.

« Il y a un problème ? »

Il garda les yeux fermés parce que s’il jetait le moindre coup d’œil sur les lèvres gonflées de lajeune femme après leur baiser, il risquait de franchir la limite. Au lieu de cela, il hocha à peine la têteet il essaya d’ignorer la douleur qu’il ressentait dans son aine.

« Tu essayes d’être un gentil garçon ? »

Il acquiesça de nouveau.

Putain, ça fait vraiment mal.

Le souffle de la jeune femme balaya son oreille, augmentant les pulsations dans sa queue.

« Ne le sois pas. »

Et avec ces 4 mots, elle lui donna la permission dont il avait besoin. Il saisit son cul à pleinesmains et il l’attira vers lui jusqu’à ce que les genoux de Kiana chevauchent les siens. Puis ill’embrassa comme il voulait le faire depuis qu’il l’avait vue dans sa robe ridiculement minuscule. Ilavait épuisé toutes ses réserves de douceur pour la soirée. Tout ce qu’il restait en lui, c’était le désirbrut qui palpitait dans ses veines.

Il écrasa ses lèvres contre celles de Kiana, sans s’ennuyer à la supplier d’ouvrir sa bouche. Iln’aurait pas eu besoin de le faire de toute façon. Elle lui donna volontiers accès à cette dernière etelle répondit à son baiser. Pour lui, cela ressemblait au fait de passer un mur de défenseurs depremières ligne et d’arriver à déjouer leur dépense pour mettre le quarterback à terre. La seuledifférence, c’était que Kiana ne luttait pas pour le retenir. Elle luttait contre lui pour être celle quidominait.

Elle prit le col de sa chemise dans ses poings tandis que sa langue faisait toutes sortes de vilaineschoses à sa bouche. Il fit l’erreur d’imaginer à quoi les choses pourraient ressembler si elle faisaitpareil avec sa queue, et cette partie de son anatomie se mit à devenir si dure qu’elle appuya fortementcontre sa fermeture éclair. Un gémissement monta du centre de sa poitrine et il serra le cul de la jeunefemme encore plus fort pour ne pas perdre la tête.

« Putain, Kiana, tu ne sais pas à quel point tu es sexy. »

« Pareil pour toi, Roméo. »

Il aurait été énervé de l’entendre utiliser son surnom si elle n’avait pas adouci le coup en sefrottant contre lui dans une lap dance qui mit tous ses nerfs en dessous de la ceinture à fleur de peau.Lorsqu’elle commença à déboutonner la chemise de Frank, il reçut clairement le message. Elle luidonnait la permission d’aller au-delà de la première base.

Il suivit son exemple et il massa le dos de la jeune femme en remontant jusqu’à ce que ses mains serapprochent de la fermeture éclair qui retenait sa robe. Dans un geste fluide, il la fit glisser et la robetomba sur la taille de Kiana.

Il se sentit enfin assez de courage pour ouvrir les yeux, et lorsqu’il le fit il eut le souffle coupé. Lesoutien-gorge noir transparent en dentelle lui offrait plus qu’un simple aperçu de ses seinsparfaitement ronds. Il prit un des monticules qui débordait dans sa main et il fit courir son pouce surle pic sombre qui se trouvait en son centre.

À présent, c’était au tour de la jeune femme de pousser un gémissement.

Il aimait ce son. Il voulait qu’elle ait autant envie de lui qu’il avait envie d’elle. Il voulait savoirce qu’elle aimait et ce qu’elle n’aimait pas. Il voulait aller dans les bonnes directions, tout commeelle l’avait fait avec lui jusque-là ce soir-là. Et au moment où aucun d’eux ne put se retenir pluslongtemps, il sut que le sexe serait au-delà de tout ce qu’il avait pu connaître avant.

Parce que cette fois, ce serait différent. Au lieu de coucher avec une fille qu’il connaissait à peine,il tenait dans ses bras une femme qui captivait son esprit et ses sens à l’extérieur de la chambre.C’était une personne avec qui il pouvait dormir et avoir une vraie conversation agréable lelendemain. Cela le rendait encore plus impatient.

Elle fit passer sa chemise par-dessus ses épaules, arrachant sa main de son sein, mais il utilisal’impatience de la jeune femme à son avantage. L’action rapprocha ses lèvres de ce pic si tentant, et ilprit ce dernier entre ses dents.

Elle plongea ses ongles dans son triceps et elle prononça son nom d’une voix faible et rauque quiavait un pur accent de sexe.

Oui, c’était indéniablement quelque chose qu’elle appréciait.

Il tira son téton dans sa bouche et il enroula sa langue autour de ce dernier, les bords rugueux de ladentelle contrastant avec la peau satinée qui se trouvait en dessous. Elle était aussi délicieuse qu’il lepensait. Grâce à quelques gestes révélant un bon entraînement, il détacha son soutien-gorge et il le fitvoler à travers la pièce, ne laissant rien entre sa bouche et le corps de la jeune femme.

Les seins nus, elle ne fit rien pour le repousser. Au lieu de cela, elle passa ses doigts dans les

cheveux de Frank et elle cambra son dos pour lui offrir un accès total à ses seins. Lorsqu’il entenditun gémissement dans sa voix, il changea de côté et il recommença.

Après quelques minutes, quelque chose changea dans le comportement de Kiana. Ses crisdevinrent plus désespérés, tout comme la manière frénétique dont ses hanches bougeaient sur lesgenoux du jeune homme.

« Je t’en prie, dis-moi que tu as une capote. »

Il lâcha son sein suffisamment longtemps pour répondre : « Dans ma veste. »

Elle prit les joues de Frank entre ses mains et elle l’embrassa si fort qu’il eut l’impression qu’elleétait en train de lui demander ce qu’il attendait.

Il tâtonna à la recherche de la veste qu’il avait posée sur le canapé un peu plus tôt, et il s’aperçutqu’elle était tombée au sol pendant leurs préliminaires. Il laissa échapper un juron lorsqu’il mit fin aubaiser suffisamment longtemps pour la récupérer.

Dans le même temps, Kiana s’acharnait sur sa ceinture qu’elle fit glisser en quelques secondes.Elle était aussi impatiente que lui, mais lorsqu’elle mit ses mains autour de sa queue, il perdit la tête.

Sainte mère de Dieu, que c’est bon.

Il pourrait rester assis toute la journée et laisser ses mains chaudes caresser sa queue sur toute salongueur.

« Frank ? », demanda-t-elle en le sortant de son fantasme et en lui rappelant ce qu’il avait devantlui. « La capote ? »

Il fouilla dans sa veste avec les mouvements frénétiques et maladroits d’un garçon sur le point deperdre son pucelage. Un autre juron sortit de ses lèvres. Ce n’était pas ainsi qu’il voulait qu’elle levoie. Il voulait avoir l’air calme, suave et expérimenté. Il voulait être à la hauteur des attentes de lajeune femme et tenir sa promesse de la faire jouir.

Sa main se referma sur le sachet en aluminium et il le leva vers elle.

« Trouvée. »

« Bien. »

Elle lui arracha le préservatif de la main et elle ouvrit le sachet. Une seconde plus tard, elle l’avaitdéroulé sur toute la longueur du jeune homme et elle tirait sur son pantalon, tout en capturant sabouche dans le baiser le plus érotique qu’il ait jamais connu.

Peut-être qu’il devait lui retourner la faveur. Il tendit la main vers sa jupe, s’attendant à trouver unepetite culotte en dentelle assortie à son soutien-gorge, mais il toucha une matière industrielle quirefusait de céder.

« Merde ! Comment tu enlèves ça ? »

« Avec un pied-de-biche », taquina-t-elle.

« C’est pour nous empêcher d’aller plus loin tu crois ? »

Elle répondit par un rire sexy et elle leva ses hanches.

« Il est temps que tu découvres les secrets de la Spanx. »

Elle se baissa sur ses genoux, et tout de suite après il était enfoncé en elle.

Putain ! C’était encore meilleur qu’il ne l’avait imaginé. Tellement chaud. Tellement humide.Tellement serré qu’il risquait de jouir tout de suite. La seule qui le retenait, c’était la pureimpossibilité de le faire.

« Comment ça se fait ? »

« Il y une petite ouverture. »

Elle fit de nouveau rouler ses hanches, laissant quelques vagues de plaisir onduler le long de saqueue.

« Maintenant tais-toi et baise-moi. »

« Oui, m’dame. »

C’était un ordre auquel il était plus qu’heureux d’obéir. Surtout sachant qu’il était aussi agréabled’être en elle. Et comme les mains et la langue de la jeune femme le promettaient, elle savaitexactement comment l’exciter au plus haut point. De haut en bas, d’avant en arrière, elle le montaitcomme une femme qui savait ce qu’elle voulait et comment l’obtenir.

Et il la laissa faire. Ses mains ne donnaient quasiment aucun conseil, posées sur les hanches de lajeune femme, et ses lèvres étaient trop occupées à goûter la peau sur son cou et sur ses épaules pourdire quoi que ce soit d’autre. Il n’était pas habitué à ne pas avoir le contrôle. Avec les autres femmes,il contrôlait le rythme. Avec ses dernières aventures, il était rapide et frénétique, concentré sur le faitde jouir aussi vite qu’il le pouvait une fois qu’il avait réussi à les attirer dans son lit. Puis, une foisqu’il avait terminé, il passait à la femme suivante, aucune d’elles ne retenant son intérêt après leurbrève liaison.

Mais cette fois, il n’était pas pressé. S’il l’avait pu, il serait devenu un expert en sexe tantriquepour pouvoir passer autant de temps que possible au fond de Kiana. Dans l’état actuel des choses,elle savait comment l’exciter et comment intensifier chaque sensation jusqu’à la limite de la douleur.Mais quand même, quelle douce façon d’être torturée.

Elle enfonça ses doigts dans les muscles de ses épaules, et ses hanches reprirent leur dansefrénétique. Lorsqu’elle prononça son nom, ce dernier sortit comme un appel au secours.

Et il était plus que disposé à y répondre si cela voulait dire l’emmener au septième ciel. Il avaitpromis de la faire jouir, et il refusait de la décevoir.

Il resserra son étreinte autour de ses hanches et il prit le contrôle du rythme. Les longs coupsfluides se transformèrent en petits coups secs qui arrachaient des cris aigus à la jeune femme.Pourtant, l’expression sur son visage exprimait à peine de la douleur. La ligne de sa bouche tendue, lefrémissement de ses narines, la chaleur dans ses yeux - ils appartenaient tous à une femme si prochede l’orgasme qu’elle attendait le moment où il toucherait le point qui l’enverrait au septième ciel.

Si seulement il n’en était pas aussi proche lui-même. Elle était si belle qu’il n’arrivait pas à

détacher ses yeux d’elle. Combinée à la manière dont ses parois intérieures se serraient autour de saqueue à chaque coup de rein, il se mit à transpirer à cause du simple fait de se retenir. Toute cetteintensité provoquait des douleurs dans ses testicules, et à l’instant précis où il pensait qu’il n’enpouvait plus, elle cria son nom encore une fois et elle se tendit dans ses bras. Elle le serra contre ellelorsqu’il donna le dernier coup de rein et qu’il la suivit dans l’abandon insouciant de l’extase.

Ses sens devinrent flous, et la seule chose dont il fut conscient, ce fut du plaisir vibrant quidéferlait en lui. Mon Dieu, c’était tellement bon. Trop bon. Kiana et sa Spanx l’avaient détruit. Iln’aurait jamais imaginé que le sexe à travers une culotte de grand-mère serait aussi extraordinaire.

Mais lorsqu’il commença à retrouver ses esprits, il découvrit que l’un d’entre eux était en train detrembler. Au début, il pensa qu’il s’agissait d’elle, mais à sa plus grande surprise, il se rendit compteque c’était lui. Son corps était secoué par l’intensité du contrecoup qui irradiait encore en lui. Ilappuya son front contre le sien, luttant pour retrouver son souffle.

« Ne retire jamais cette culotte. Jamais. »

Elle répondit par un petit rire grave et elle passa ses doigts dans ses cheveux et sur son visage.

« Alors tu es en train de dire que tu n’as pas été rebuté par la Spanx ? »

« Oh putain non. »

Il attrapa ses fesses et il la serra tout contre lui.

« Et dès que j’aurais récupéré, je serais prêt pour un deuxième round. »

« Qu’est-ce qui te fait penser qu’il y aura un deuxième round ? », le taquina-t-elle.

Un léger frisson de peur le parcourut, mais il fut immédiatement dissipé par un baiser sensuel ettorride qui laissait penser qu’il y aurait un troisième et un quatrième rounds. Il se détendit et ils’imprégna de l’atmosphère, tout en dessinant de minuscules cercles avec ses pouces en bas du dosde la jeune femme. Kiana avait apprécié autant que lui et, tout comme il le soupçonnait, ils étaientplus que compatibles au lit.

Mais alors que le baiser se faisait plus tendre, une nouvelle peur naquit en lui. Tout était tellementparfait en cet instant qu’il courait le grave danger de tomber amoureux d’elle. Mais si elle ressentaitla même chose pour lui…

Je suis complètement dépassé.

Mais tant qu’elle était dans ses bras, peu lui importait.

Puis la sonnerie d’un téléphone portable retentit et brisa la magie.

Kiana se raidit dans ses bras, ses lèvres se figèrent contre les siennes dès la première sonnerie. Àla seconde où l’entendit, elle bondit de ses genoux et elle tendit la main vers son appareil. Elle neprit même pas la peine de regarder le numéro de l’appelant avant de répondre.

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

Elle remit avec impatience sa robe sur ses seins tout en écoutant son interlocuteur.

« Calme-toi. »

Frank était paralysé sur le canapé, incapable de traiter l’information liée au changement soudaindans le comportement de la jeune femme. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était rester assis pendantqu’elle cherchait son soutien-gorge dans le bureau, son téléphone collé à l’oreille.

« Non, tu as fait ce qu’il fallait. Tu es où là ? »

Elle trouva son soutien-gorge et elle l’enfila en un temps record tout en utilisant son épaule pourmaintenir le téléphone en place.

« Oui, c’est bien. J’arrive le plus vite possible. »

Elle raccrocha et elle se tourna vers lui, une expression complètement paniquée sur le visagependant qu’elle attachait sa robe.

La première chose qui vint à l’esprit de Frank fut que son ex était en train de la menacer.

« Qu’est-ce qu’il y a ? »

Elle ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit. Puis elle la referma et elle saisit les chaussuresconfortables qu’elle avait probablement portées plus tôt dans la journée.

« Je t’expliquerai plus tard. »

« Est-ce que je peux faire quelque chose pour aider ? »

La tête de la jeune femme vacilla et le doute apparut sur son visage. Puis elle baissa les yeux.

« Non, pas là. Je dois juste y aller. »

Elle termina de mettre ses chaussures, mais il réussit à enfiler son pantalon à temps pour la saisirpar le bras avant qu’elle ne se rue en hors du bureau.

« Kiana, je t’en prie, tu as l’air d’avoir besoin d’aide. »

« Je n’ai besoin d’aucune aide », répondit-elle en s’écartant de lui.

« C’est toi qui disait que tu avais du mal à demander de l’aide, eh bien… »

Son regard plein de défi lui disait qu’il n’irait nulle part avec elle.

« Je suis là pour toi si tu as besoin de moi. »

L’expression de la jeune femme s’adoucit.

« Merci, Frank. »

Elle recula d’un pas avant d’ajouter : « Je t’appelle demain. »

Ce n’était pas la réponse qu’il souhaitait entendre, mais c’était mieux que de devoir la voir sefermer complètement avec lui.

« Même plus tôt si tu as besoin. »

Elle hocha la tête et elle sortit en courant de son bureau, le laissant seul avec ses doutes. Quil’avait appelée ? Et pourquoi était-elle aussi secrète à propos de tout cela ?

Il se laissa retomber dans le canapé où il avait atteint le septième ciel quelques instants plus tôt et

il se frotta le menton. Quelle mauvaise manière de terminer la soirée. Juste au moment où il pensaitqu’il avait enfin fait tomber ses barrières, elle le repoussait. Et les actions de la jeune femme nefaisaient que confirmer ses peurs.

Elle cachait quelque chose.

S’il n’avait pas souffert des effets secondaires du sexe, il l’aurait suivie dans le parking, et jusqu’àl’endroit où elle se rendait. Il lui aurait prouvé qu’il ne se laisserait pas mettre de côté aussifacilement. Et il lui aurait montré qu’il était là pour elle si elle avait besoin de lui.

Au lieu de cela, la seule chose avec laquelle il restait, c’était une douleur au centre de sa poitrineet un doute tenace qui lui disait que la vérité finirait par lui tomber dessus tôt ou tard.

Et une fois que ce serait le cas, est-ce qu’il aurait envie de se battre pour elle ?

Chapitre Onze

Les pas de Kiana étaient aussi rapides que les battements de son cœur tandis qu’elle se ruait versles urgences de l’hôpital pour enfants d’Egleston. Dès qu’elle avait entendu la sonnerie de Madison,elle avait su qu’il y avait un problème avec sa fille. La baby-sitter ne l’aurait jamais dérangée si celan’avait pas été le cas. Mais sa peur quadrupla lorsqu’elle apprit la nouvelle.

Savannah avait eu une crise d’asthme et elle n’avait pas réagi à son inhalateur habituel, et leschoses avaient tellement empiré que Madison avait appelé le 9111. Lorsque les médecins étaientarrivés, ils avaient recommandé un transport immédiat et ils étaient en train de la mettre dansl’ambulance lorsque la baby-sitter l’avait appelée.

Kiana récita les mêmes prières que celles qu’elle récitait depuis qu’elle avait quitté son bureau.Mon Dieu, faites qu’elle aille bien.

Elle ne s’arrêta pas avant d’arriver à l’accueil des urgences. À bout de souffle, elle dit : « Je suisKiana Dyer. Ma fille, Savannah, a été amenée ici en ambulance. »

« Laissez-moi vérifier », répondit la femme avec un léger accent traînant.

Kiana résista à l’envie de passer par-dessus le bureau et de secouer la femme. La vie de sa filleétait en danger, et cette satanée réceptionniste ne comprenait pas à quel point c’était urgent. Ellepoussa un juron et elle sortit son permis de conduire. « Voilà ma pièce d’identité. Elle devraitcorrespondre à l’adresse d’où elle venait. »

La réceptionniste regarda le permis de conduire et cliqua plusieurs fois sur sa souris avant dehocher la tête.

« Merci, Mme Dyer. Laissez-moi appeler l’infirmière, elle va vous emmener la voir. »

Kiana serra les poings pour résister à l’envie de piquer une crise de colère dans la salle d’attentesur-le-champ. Heureusement, une infirmière apparut une minute plus tard et lui fit signe de la main.

« Comment va ma fille ? », demanda Kiana.

« Un peu mieux », répondit l’infirmière. « On avait des stéroïdes dans l’ambulance et elle est sousnébulisation continue. Je suis désolée pour l’attente, mais quand un patient est sur la liste despersonnes dont la présence ne doit pas être divulguée, on doit prendre des mesures supplémentairespour garantir la protection de sa vie privée. »

Kiana prit une profonde inspiration avant de hocher la tête. Comment pouvait-elle avoir oubliéqu’elle avait inscrite Savannah sur cette liste ? Elle l’avait fait pour que des gens comme Malcolm nepuissent pas savoir où se trouvait sa fille. Mais la protection de la vie privée avait un prix.

L’infirmière la conduisit dans une pièce où Savannah était assise sur les genoux de Madison quiétait en train de lui lire une histoire. Un masque avec un éléphant couvrait la bouche et le nez de safille, et une fine brume s’échappait sur les côtés.

Dès que Savannah l’aperçut, elle leva les bras et elle dit Maman.

Kiana attira sa fille dans ses bras et elle la serra fort contre elle.

« Hey mon bébé. »

La respiration de Savannah était rapide et elle avait du mal à déglutir, chaque inspiration et chaquedéglutition soulevant ses côtes sous la fine blouse de l’hôpital. Le bourdonnement du nébuliseurremplissait la pièce, couvrant les sifflements dans la poitrine de l’enfant. Kiana avait mal au cœur enregardant sa petite fille lutter pour respirer, mais en même temps elle se sentait bénie car sa fillerespirait encore.

« Merci d’avoir réagi rapidement Madison. »

« C’était plutôt de la panique. »

La baby-sitter se leva de la chaise afin que Kiana puisse s’asseoir.

« J’ai remarqué qu’elle commençait à avoir un peu de mal à respirer et que sa température chutait,alors je lui ai donné quelques bouffées de son inhalateur et elle avait l’air bien jusqu’à ce quej’essaye de la mettre au lit. Ça a empiré tellement vite… »

Kiana ferma les yeux et s’assit au bord de la chaise, tout en continuant à se cramponner àSavannah. La première crise d’asthme de sa fille avait ressemblé à cela elle aussi, seulement cettefois-là elle n’avait pas d’inhalateur. En moins d’une demi-heure, Savannah était passé d’une enfantjoyeuse à un bébé cherchant désespérément à respirer. Après un trajet intense en ambulance, elleavait passé cinq jours à l’hôpital. Combien de temps y resterait-elle cette fois ?

« Qu’est-ce qu’ils ont fait jusqu’ici ? », demanda-t-elle en essayant de chasser les peurs quinaissaient au centre de sa poitrine.

« Ils lui ont donné des médicaments par voie orale, ils ont nettoyé son nez avec un tampon et ils ontlancé ça. »

Cela ressemblait à ce qui s’était passé précédemment. Selon les médecins, la première crise étaitdue à un virus du nom de VRS2. Est-ce qu’il pourrait s’agir de la même chose ?

« Je ne l’ai pas quittée jusqu’ici. »

Elle ouvrit les yeux et elle lança un sourire faible à Madison.

« Pourquoi tu ne rentrerais pas chez toi et que tu ne te reposerais pas un peu. Je t’enverrai desnouvelles dès que j’en aurai. »

« Merci, n’hésite pas. »

Madison ramassa son manteau et son sac avant d’ébouriffer les boucles de Savannah.

« Tu m’as fait une sacrée frayeur, ma puce, mais tu devrais être plus gentille avec ta maman. »

Savannah lui fit un grand sourire à travers le masque du nébuliseur et elle lui dit au revoir en luifaisant un signe de la main.

La respiration difficile de l’enfant s’améliora suffisamment au cours des dix minutes qui suivirentau point que Kiana finit par se sentir suffisamment à l’aise pour poser sa fille dans le berceau et

appeler Denise. Lorsque sa belle-mère répondit, elle dit : « Désolée de te réveiller, maman, maisSavannah est aux urgences à cause d’une autre de ses crises d’asthme. »

« J’arrive le plus vite possible. Egleston ? »

« Oui. »

Elle donna à Denise le numéro de la chambre et elle lui rappela d’apporter une pièce d’identitéavec photo.

Denis raccrocha avant qu’elle ne puisse dire quoi que ce soit d’autre.

Kiana tira sa chaise pour pouvoir se pencher au-dessus du berceau, puis elle appuya son frontcontre le garde-corps du berceau. Elle détestait demander de l’aide, mais elle était déjà épuisée parsa journée. D’abord, les changements pour le gala. Ensuite, la soirée avec Frank. Et le sexe. Oh monDieu, le sexe. C’était spontané et sauvage, et…

Et c’était tellement bon.

Avant qu’elle ait l’occasion de s’interroger sur ses actions, le médecin entra dans la pièce. Lafemme regarda l’âge de Kiana sur le dossier de l’enfant - elle paraissait bien trop jeune pour êtremédecin, mais le badge qui pendait au bout d’un cordon portait la mention MD3. Elle se présenta,puis elle se pencha au-dessus du berceau avec un sourire.

« Beaucoup mieux. »

Savannah fit un effort et elle tendit la main vers sa mère.

Kiana la souleva hors du berceau et la posa sur ses genoux.

« Est-ce qu’un des résultats du labo est revenu ? »

« Tous négatifs. Je suppose que c’est à cause du changement de temps, mais elle avait le nez quicoulait un peu quand je l’ai vue la première fois. »

Le médecin arrêta le nébuliseur et retira le masque avant d’écouter les poumons de Savannah.

« Oui, c’est beaucoup mieux. »

C’était exactement ce que Kiana voulait entendre.

« On peut rentrer maintenant ? »

« Non, je veux la garder sous observation pendant quelques heures si ça ne vous dérange pas.Votre baby-sitter a dit que Savannah avait réagi à son inhalateur un peu avant que les chosesn’empirent, et je veux être sûre qu’elle ne fera pas de rechute une fois que vous serez rentrées. Maispour le moment, donnons-lui du liquide et voyons comment elle réagit. Vous êtes d’accord pourqu’elle boive du jus de fruits ? »

Kiana hocha la tête, et une nouvelle vague de fatigue la submergea.

« Elle aime le jus de pomme. S’il vous plaît, diluez-le dans de l’eau par contre. »

« Bien sûr. »

Le médecin des urgences lui lança un sourire chaleureux avant de quitter la pièce.

Quelques minutes plus tard, une infirmière fit son apparition avec un gobelet de jus de fruits queSavannah saisit dès qu’il fut à sa portée. Il aspira le jus, s’étouffant deux ou trois fois au cours duprocessus. Elle respirait toujours plus vite que la normale, mais sinon elle semblait être redevenuecelle qu’elle était d’habitude.

L’infirmière s’attarda pour noter le rythme cardiaque et les niveaux d’oxygène de Savannah.

« Tout a l’air bien, trésor. »

Une autre demi-heure s’écoula avant que Denise n’arrive.

« Ma pauvre chérie. »

Kiana ne savait pas si c’était à elle ou à Savannah qu’elle parlait, mais peu importait. Denise étaittoujours là quand on avait besoin d’elle.

« Merci d’être venue. »

« Bien sûr. Merci de m’avoir avertie. »

Elle prit Savannah des bras de Kiana et elle s’assit dans un rocking-chair qui se trouvait àproximité.

« Tu as l’air d’avoir eu une journée difficile. »

Kiana se retint de rire.

« Difficile ne serait pas le mot que j’utiliserais pour la décrire. »

Au moins, elle avait pris le temps de se regarder rapidement dans une glace sur le chemin et des’assurer qu’il n’y avait pas de trace de rouge à lèvres ou de mascara étalée sur son visage.

« Tu as envie d’en parler ? »

Denise berçait Savannah dans ses bras et se balançait d’avant en arrière comme si elle avait tout letemps du monde.

« Tous les billets du gala ont été vendus. »

Autant commencer par le plus simple avant plonger dans le dilemme que représentait Frank Kelly.

« Ça n’a pas l’air d’être une mauvaise chose pour moi. »

« Ça ne l’est pas, mais en fait on a vendu plus de billets que prévu, alors j’ai couru toute la journéepour essayer de m’assurer qu’on aurait de place et de nourriture pour tout le monde. »

Denise hocha la tête, son regard errant sur la robe de Kiana.

« Mais je crois comprendre que tu n’as pas travaillé tard au bureau habillée comme ça. »

Eh bien, techniquement, elle était encore au bureau quand Madison avait appelé. Elle était encoreen pleine extase après avoir chevauché Frank.

Kiana sentit une sensation de chaleur sur sa peau au souvenir des grandes mains de ce dernier sur

sa peau nue. Elles avaient été tellement douce, tellement pleine d’adoration. C’était tellementinattendu de la part d’un homme de sa taille et de sa réputation.

Denise s’éclaircit la gorge et sortit Kiana de sa rêverie.

« Je déduis de cette expression rêveuse sur ton visage que la journée n’a pas été aussi difficilequ’elle en avait l’air. »

Kiana répondit par un rire embarrassé.

« Non, elle ne l’était pas. J’ai eu un autre rencard avec Frank. »

« Ça a l’air d’être un gentil jeune homme. »

Un mois plus tôt, elle aurait ri à l’idée que Frank puisse être un gentil jeune homme. Elle neconnaissait de lui que sa réputation, à la fois sur et hors du terrain. Mais maintenant qu’elle avaitappris à le connaître, elle ne pouvait qu’être d’accord avec sa belle-mère.

« C’est le cas. Surtout sachant que le rencard avait mal commencé. »

« Comment ça ? »

Denise baissa les yeux vers le bébé en train de sommeiller tranquillement dans ses bras.

« J’étais tellement occupée par le travail que j’avais presque une heure de retard. En fait, il estvenu au bureau pour voir pourquoi je lui avais posé un lapin. »

Elle sentit la chair de poule couvrir sa peau en se rappelant la terreur qu’elle avait ressentie aumoment où il était arrivé.

« Je pensais qu’il réagirait comme le faisait Malcolm quand je faisais quelque chose de mal, etj’ai un peu flippé. »

Denise arrêta de se balancer sur le rocking-chair et elle se raidit.

« Il ne t’a pas frappé, n’est-ce pas ? »

Kiana secoua la tête.

« Il n’a même pas levé la voix. C’est ce qui a rendu ma réaction vraiment pitoyable. »

Elle se frotta les bras.

« J’ai tout de suite attendu le pire de sa part, et que Dieu le bénisse, il n’a rien fait de mal. Il amême trouvé une solution de rechange pour notre rendez-vous. »

« Qui était ? »

« Une pizza et un film dans mon bureau. »

Suivi par une séance de sexe torride pour le dessert.

« On dirait que tu devrais le comprendre pendant que tu le peux. »

Denise se leva et déposa le bébé qu’elle tenait dans ses bras dans le berceau.

Kiana se raidit.

« Qu’est-ce que c’est censé vouloir dire ? »

« Ça veut dire qu’il est temps de recommencer à faire confiance aux gens au lieu de les repousser.Tous les hommes ne sont pas comme Malcolm. »

« Parfois je me dis que c’est difficile après avoir vu le défilé de losers que ma mère ramenait à lamaison. »

« Ta mère a appris à la dure. Et tu as appris de ses erreurs. Tu as été suffisamment forte pour sortirde cette mauvaise relation avant de terminer comme elle, et maintenant ta fille est hors de danger et tului as épargné de connaître toutes les choses que tu as traversées. »

Denise traversa la pièce et tapota la joue de Kiana.

« Je ne me fais pas de souci pour toi, ma chérie. Tu prendras la bonne décision. Écoute juste toncœur et ton instinct comme je te l’ai appris. »

« J’essaye, maman. C’est juste que… »

Elle lança un regard vers sa fille endormie.

« J’ai peur. »

« Personne n’a jamais dit que l’amour était quelque chose de facile, mais tu dois faire confiance àla personne à qui tu donnes ton cœur. »

Le conseil de Denise provoqua une vive douleur au centre de la poitrine de Kiana. Sa belle-mèreavait donné son cœur à son père, et il l’avait trompée. Pourtant, d’une manière ou d’une autre, elleavait réussi à lui pardonner.

Kiana continuait de regarder Savannah en comptant en silence les respirations rapides de sa filletout en réfléchissant à son futur avec Frank. Elle pouvait lui faire confiance pour ce qui était de soncœur. Mais sa fille ?

« Maman, tu crois que ce que Tre a dit est vrai ? Que Frank partira en courant si je lui parle deSavannah ? »

« Tu le connais mieux que moi. Qu’est-ce que tu en penses ? »

D’après sa réputation de playboy, il lui avait montré à maintes reprises qu’il la voulait elle. Sapersévérance n’avait jamais faibli. Et le sexe allait au-delà de toute espérance. Mais est-ce qu’ilavait la fibre paternelle ?

Kiana enroula son bras autour de son ventre en espérant que cela écraserait le doute qui irradiaitde ses tripes.

« Je pense qu’il faut que je lui en parle avant de perdre mon cœur. »

« Ça a l’air d’être une bonne idée. Tu n’es pas obligée de la lui présenter tout de suite, mais il doitsavoir que tu as des priorités autres que lui. »

« Et s’il décide de ne pas continuer notre relation… »

Elle était bouleversée. Peut-être même un peu anéantie. Mais elle devait aller de l’avant. Sa fille

était la chose la plus importante dans sa vie, et si quelqu’un la voulait elle, cette personne devaitégalement vouloir de Savannah.

« Eh bien ça voudra dire que je serai mieux sans lui. »

Denise la prit dans ses bras.

« Tu vois ? Tu es suffisamment forte pour faire ce qu’il faut. Tu l’as toujours été. D’un autre côté,Tre me donne bien du souci. »

« Qu’est-ce qu’il a encore fait ? »

« Il est parti pour Vegas ce matin. »

« Encore ? Il ne vient pas d’en revenir ? »

Denise hocha la tête et se laissa de nouveau retomber dans le rocking-chair.

« Il dit que ça a tellement bien marché pour lui la semaine dernière qu’il veut y retourner avant quesa chance ne tourne. »

« Elle va finir par tourner de toutes façons. »

Kiana se frotta les tempes et pria en silence pour que son frère ne finisse pas à nouveau sans lesou.

« C’est ce que je n’arrête pas de lui dire, mais il ne m’écoute jamais. Dans des moments commeça, j’aimerais que ton père soit encore là. Marshall savait toujours comment faire entendre raison àce garçon. »

« Peut-être qu’il écouterait Frank. »

Denise eut un petit rire en recommençant à se balancer.

« Si tu penses qu’il y a une chance pour que ça marche, alors vas-y. »

Une toux sèche interrompit leur conversation, et Kiana se précipita vers le berceau. La respirationdifficile de Savannah emplit ses oreilles lorsqu’elle prit cette dernière dans ses bras.

« Je crois qu’on a besoin d’un autre traitement pour l’aider à respirer. »

« Je vais le dire à l’infirmière. »

Denise quitta la pièce pour aller chercher de l’aide tandis que Kiana collait sa fille contre elle.Elle s’inquièterait de Frank et de Tre et de tout le reste plus tard. Pour le moment, il n’y avait qu’unepersonne qui comptait. Savannah avait besoin d’elle. Tout le reste pouvait attendre que sa filleparvienne de nouveau à mieux respirer.

Et lorsque les choses seraient plus calmes, elle parlerait à Frank de Savannah et elle verrait ce quise passerait.

1 911 : Numéro des urgences (police et urgences médicales) aux États-Unis 2 VRS : Virus respiratoire syncytal qui affecte les voiesrespiratoires et les poumons 3 MD : Acronyme pour Medical Doctor (Docteur en médecine)

Chapitre Douze

Frank jeta son sac de sport dans le coffre de sa voiture et il fit courir ses doigts dans ses cheveuxencore humides. Il avait puni son corps pendant tout le week-end en faisant des entraînements d’enferafin de sortir Kiana de son esprit. Il avait besoin d’elle physiquement. Mais le souvenir de la manièredont il s’était senti abasourdi et désorienté le vendredi prit le dessus sur son désir. Elle avait ditqu’elle appellerait, mais elle ne l’avait pas fait. Elle avait juste couché avec lui avant de partir encourant, le laissant uniquement avec une vague promesse de lendemain.

Ok, mon Dieu, je vois toute l’ironie dans tout ça.

Il se glissa dans sa voiture, mais il ne démarra pas le moteur tout de suite. Il devait d’abord savoirdans quoi il s’engageait. Il sortit son téléphone et il appela son frère.

« Aide-moi, Adam. »

Il raconta l’étrange comportement de Kiana avec l’appel téléphonique, et il mentionna le faitqu’elle ne l’avait pas contacté.

« J’en suis au point où j’ai besoin qu’elle soit honnête avec moi, mais j’ai peur qu’elle merepousse si je lui pose trop de questions. »

« Est-ce que Cully t’a déjà contacté ? »

Frank planta ses ongles dans la paume de sa main.

« Qu’est-ce que Cully a à voir avec ça ? »

« Il a passé tout le week-end à Atlanta. Il a dit qu’il avait rencontré des obstacles pour chercherdes choses en personne. Quelque chose à propos de documents sous scellés. »

Merde !

Cully avait trouvé quelque chose sur elle, tout comme il en avait peur. Mais ce n’était riencomparé aux nausées qui lui retournaient l’estomac.

« Pourquoi tu l’as engagé ? »

« Parce que tu n’es pas connu pour avoir un jugement éclairé quand il s’agit des femmes, et le faitque tu avais des soupçons m’a fait en avoir. »

« C’est un peu extrême quand même, tu ne crois pas ? »

« Je fais juste attention à toi. En plus, apparemment tu avais raison sur le fait qu’elle cache quelquechose si Cully a déterré des choses sur elle. »

« Tu as une idée de ce que c’est ? »

« Désolé, mais Cully ne divulgue rien tant qu’il n’a pas tous les faits. »

Un détective privé avec une éthique. Formidable.

Frank démarra le moteur de sa voiture. S’il voulait des réponses tout de suite, alors il n’y avait

qu’un endroit où aller.

« Eh bien, quand tu auras de ses nouvelles, dis-moi s’il y a quelque chose que je dois savoir. »

Sherita était en train de taper quelque chose sur son ordinateur lorsqu’il entra dans le siège socialde la fondation, et elle s’arrêta en le voyant.

« Bonjour, M. Kelly. »

« M. Kelly, c’est mon père. Ou mon frère aîné. Je suis juste Frank. »

Il montra du doigt la porte qui se trouvait en face de lui.

« Elle est là ? »

« Pas pour le moment. »

Sherita s’écarta de son bureau, les lèvres pincées comme si elle était en train de décider desinformations qu’elle devait divulguer.

« Mais elle devrait être de retour dans l’heure qui vient. »

« Bien. Je vais attendre. »

Il ouvrit la porte du bureau et il la referma derrière lui.

Rien n’avait changé depuis son départ le vendredi soir. L’odeur du parfum de la jeune femmeflottait toujours dans l’air, uniquement accentué par une très faible odeur de sexe. Il lança un regardvers le canapé et son sexe commença à palpiter. Ouais, c’était bon. Trop bon. Et une fois ne suffiraitpas.

Il s’assit sur le canapé, ses jambes tendues devant lui, et il ferma les yeux. Les souvenirs duvendredi soir le submergèrent au point qu’il eut peur d’attraper Kiana pour revivre cet instant dèsqu’elle entrerait.

Putain !

Il bondit du canapé et il fit le tour du bureau. S’il voulait des réponses, il avait l’occasion idéalede fouiller dans ses tiroirs et dans son ordinateur. Mais sa conscience le mit en garde en luidéconseillant de s’aventurer sur ce terrain et de respecter l’intimité de la jeune femme. Certaineslignes ne devaient pas être franchies, et Adam en avait déjà franchi une en embauchant Cully.

Cependant, il ne put ignorer la photo d’un bébé dans une robe rose à volants perchée sur le bureaude Kiana.

Il sentit des sueurs froides sur sa nuque en regardant l’image. Le bébé avait la peau noire et unetête couverte de cheveux noirs bouclés, mais ses yeux étaient ceux de Kiana - grands et entourés decils épais.

Des sons de voix de femmes lui parvinrent depuis le bureau situé à l’extérieur et il se replia. Ilréfléchirait à ce qu’il avait trouvé plus tard. Enfin, si Kiana ne répondait pas à ses questions avant. Ileut juste le temps de plonger dans le canapé et de prendre une position décontractée avant que laporte ne s’ouvre.

Kiana entra et se dirigea droit vers son bureau sans regarder dans sa direction.

Frank fit un grand sourire. Sherita avait définitivement bien joué son rôle d’assistante indiscrète.

« Salut, Kiana. »

Elle sursauta en poussant un petit cri et elle se tourna vers lui, sa main posée sur son cœur.

« Qu’est-ce que tu fais là ? »

Sherita posa un doigt sur sa tête.

« Oh oui, j’ai oublié de te dire qu’il t’attendait. Quelle tête de linotte. »

Elle leur fit un signe de la main et elle ferma la porte.

Kiana lança sa mallette dans sa chaise de bureau sans jamais quitter Frank des yeux.

« Tu n’as pas répondu à ma question. »

« Et tu n’as jamais appelé. »

Il se leva et il enfonça ses mains dans ses poches tout en s’avançant vers elle.

« Si je ne te connaissais pas mieux que ça, j’aurais dit que tu essayais de me laisser tomber. »

Les épaules de la jeune s’affaissèrent lorsqu’elle soupira.

« Ce n’est pas ça. »

« Alors éclaire ma lanterne. Après tout, qu’est-ce qu’un mec pourrait penser quand une nanacouche avec lui en se donnant totalement et qu’elle part en courant juste après ? »

Le regard de la jeune femme erra sur le canapé et elle mordit sa lèvre inférieure. Le désir se lisaitsur tout son visage.

« Frank, je… »

Elle s’interrompit et elle baissa les yeux vers le sol.

« Il faut qu’on parle. »

« Sans blague. Pourquoi tu crois que je suis là ? Ce n’est pas juste parce que je veux remettre lecouvert. »

La tête de la jeune femme se balança et elle écarquilla les yeux.

Frank posa ses paumes sur son bureau.

« Et ne te méprends pas. Je veux remettre le couvert. Je le veux vraiment. Mais pas avant qu’onsoit allés au fond des choses. »

La même expression remplie de désir qu’elle avait affiché avant de se jeter sur lui apparut sur levisage de Kiana, mais contrairement au vendredi soir, elle réussit à se retenir, à la grande déceptiondu jeune homme.

« D’accord, allons marcher un peu. »

« On ne peut pas parler ici ? »

Elle regarda de nouveau vers le canapé.

« Non. »

Au moins je sais qu’elle en a envie autant que moi. Il recula et il fit un geste vers la porte.

« Les femmes d’abord. »

***

Je peux le faire. Je peux le faire.

Kiana continuait de se répéter inlassablement les mêmes mots en montant dans l’ascenseur avecFrank. Mais à chaque fois qu’elle ouvrait la bouche pour lui parler de Savannah, rien n’en sortait.

Une partie d’elle voulait que cette conversation reste privée afin que s’il se mettait à paniquer,cela ne tourne pas au spectacle en public. Mais en même temps, elle ne pouvait pas rester dans cebureau. Pas alors qu’il la regardait d’une manière qui mettait ses hormones en ébullition. Elle auraitprobablement fini par recoucher avec lui, et elle ne pouvait pas se permettre de le faire en cet instant.Pas avec l’équipe de télévision qui devait arriver une heure après pour la maquiller pour l’interviewqu’elle avait dû annuler le samedi.

Et pas alors que les doutes faisaient bondir son cœur dans sa poitrine.

Ils arrivèrent au rez-de-chaussée.

« On va où ? », demanda Frank.

« Ça te va si on va au Piedmont Park ? C’est juste à quelques pâtés de maisons. »

« Allons-y en voiture. »

Il montra du doigt les chaussures à talons hauts de la jeune femme.

« Je ne veux pas que tu prennes le risque de trébucher avec ça. »

Un sentiment irrationnel de peur prit naissance dans l’estomac de Kiana. Sa tête lui disait qu’ellepouvait faire confiance à Frank, mais son instinct n’était pas d’accord.

« D’accord, mais je conduis. »

La circulation était relativement fluide dans le centre-ville, et il était facile de trouver des placespour se garer. Il ne leur fallut que quelques minutes pour être entouré par un espace vert ouvertentouré par les gratte-ciels situés à proximité. La brise gardait encore la fraîcheur du front froid quiétait arrivé le vendredi, mais le soleil de la fin du mois de mars et le blazer qu’elle portait était plusque suffisants pour lui tenir chaud pendant qu’ils marchaient.

« Qu’est-ce qui s’est passé vendredi soir ? », demanda Frank, ses mains plongés dans ses poches.

Avant ou après qu’on ait couché ensemble ?

La respiration de la jeune femme était haletante. Il avait ouvert la porte, et c’était à elle de saisirl’occasion.

« J’ai eu une urgence familiale. »

Il glissa avant de s’immobiliser.

« Ta mère ? Tre ? »

Elle secoua la tête et elle pria pour rassembler son courage.

« Non, ma fille. »

Il resta immobile pendant un instant, la bouche grande ouverte, la statue parfaite d’un homme sousle choc. Cela se passait exactement comme elle s’y attendait, jusqu’à la panique dans le regard dujeune homme.

Elle jura dans sa tête et elle commença à faire demi-tour, mais il la saisit par le bras et il l’attirade nouveau vers lui.

« Qu’est-ce qui s’est passé ? »

Et pas Oh mon Dieu, tu as une fille.

Et pas Putain de merde ! Tu as un gosse ?

Et pas Éloigne-toi avant de m’infecter avec tes poux.

Qu’est-ce qui s’est passé ?

La chaleur qu’elle ressentait dans son cœur surpassait l’appréhension qu’elle ressentait dans sestripes.

« Savannah fait de l’asthme, et le changement de temps a déclenché une crise. On n’est rentrées del’hôpital que ce matin. »

Frank jura et se passa la main sur la joue comme s’il venait de se réveiller. Plusieurs secondess’écoulèrent tandis qu’il semblait digérer toutes les informations.

« Mais est-ce que ça va aller pour elle ? »

« Ouais, pour le moment. »

Kiana croisa ses bras sur sa poitrine avant de se remettre à marcher.

Il la rattrapa en trois foulées.

« Pourquoi tu ne me l’as pas dit vendredi tout simplement ? »

« Parce que je ne veux pas qu’il y ait trop de personnes qui soit au courant pour elle. »

« Pourquoi ? »

Elle avait déjà laissé tomber une bombe sur lui, et il n’avait pas pris la fuite. C’était le momentd’en laisser tomber une deuxième.

« C’est l’enfant de Malcolm. »

Le visage de Frank s’éclaira, rempli de compréhension.

« J’étais enceinte de six mois quand j’ai enfin trouvé le courage de sortir de cette relation »,

poursuivit-elle, ses pas lents synchronisés avec le rythme de sa confession. « Il y a des ordonnancesrestrictives qui ont été mises en place, mais on sait bien tous les deux à quel point il les respecte. Jene veux pas qu’il pose un doigt sur elle, jamais. S’il n’y avait pas eu la fondation et ma famille,j’aurais quitté Atlanta il y a longtemps. C’est pour ça que je ne dis pas à beaucoup de gens où je viset que je ne laisse pas n’importe qui la surveiller quand je sors. »

Il hocha la tête, mais il ne dit rien d’autre. Plusieurs secondes passèrent en silence, mais il resta àcôté d’elle, les mains dans les poches.

« Alors, c’est quoi la suite ? », finit-il par demander.

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« C’est quoi la suite pour nous ? »

À présent, c’était au tour de la jeune femme de glisser et de s’arrêter.

« Est-ce que j’ai bien entendu ce que tu viens de dire ? »

Il leva un sourcil.

« Ça dépend de ce que tu as entendu. »

« Tu viens d’apprendre que j’ai un enfant, et tu veux toujours sortir avec moi ? »

« C’est ce que je te demandais. »

Il se rapprocha d’elle.

« La balle est dans ton camp, Kiana. Ça a toujours été le cas. »

Le pouls de la jeune femme se mit à battre plus fort, mais pas à cause de la peur. Elle respira leparfum de Frank et elle trouva l’apaisement.

« Tu ne m’en voudras pas si je ne te la présente pas tout de suite ? »

Il lui répondit par un sourire en coin.

« Ça me va d’y aller doucement pour cette partie de notre relation, tant que tu ne te retiens pas surautre chose. »

« C’est-à-dire ? »

Elle se pencha en avant, attendant de voir s’il allait reculer.

Au lieu de cela, il la prit dans ses bras.

« D’autres secrets ? »

Il y avait des démons dans son passé, mais rien qui pouvait interférer avec leur relation pour lemoment. Le moment venu, elle lui parlerait de son enfance épouvantable. Mais pour le moment, ellelui avait parlé de ce qui représentait le plus gros frein pour leur histoire.

« Je crois que tu connais les plus importants. »

« Alors je peux faire avec. »

Il baissa ses lèvres vers les siennes pour y déposer un baiser rempli de douceur.

« Laisse-moi te raccompagner à ton bureau pour ton interview. Après tout, je viens juste de passerune semaine en Floride à me languir de toi pour ramener plus d’articles pour ton gala debienfaisance, et je ne veux pas que tu rates la moindre occasion de te faire de la pub gratuitement. »

« Tu sais, tu ne m’as jamais vraiment dit ce que tu avais fait là-bas. »

Elle enroula son bras autour du sien et ils commencèrent à revenir sur leurs pas.

« Ça te dérange de m’en dire plus sur le chemin du retour ? »

« Si tu avais regardé sur le site d’enchères, tu aurais vu certains des trucs que j’ai réussi à obtenir,mais comme tu es en train de me donner une occasion de me vanter, laisse-moi t’en dire plus sur ceque tu me dois. »

Elle commença par rire, mais lorsqu’il commença à énumérer tous les objets dédicacés qu’il avaitobtenus de la part de dizaines de joueurs de plusieurs équipes, elle sentit sa poitrine se serrer.

« Doux Jésus, Frank, tu plaisantes, pas vrai ? »

« Nope. Et si j’avais eu plus de temps, je serais allé en Arizona et j’aurais harcelé ces mecs.Comme je te l’ai dit au début, quand je m’engage dans quelque chose, je me donne à fond. »

À en juger par la manière dont il la regardait, il serait tout aussi sérieux dans ses efforts pourcapturer son cœur.

Elle lui sourit et elle serra son bras, heureuse d’avoir écouté son cœur au lieu de son instinct. Ellene savait pas ce que le futur lui réservait avec lui, mais elle avait hâte de le découvrir.

« Merci, Frank. Merci pour tout. »

***

Les pensées de Frank restèrent anormalement sombres lorsqu’il rentra chez lui. Elle avait unenfant. Une adorable petite fille, s’il avait raison en supposant que la photo qu’il avait trouvé sur sonbureau était bien celle de sa fille. Et c’était l’enfant de ce connard.

Il enroula ses doigts autour du volant et il grinça des dents. Quel genre d’homme frapperait sapetite amie enceinte ? Un flot de pensées violentes affluèrent dans son esprit. Il n’avait aucun regretd’avoir cassé la mâchoire de Malcolm. Il ne voulait même pas imaginer ce qui se serait arrivé à cetteenfant innocente si Kiana n’avait pas été suffisamment courageuse pour partir.

Et ce fut cette pensée qui l’apaisa pendant un instant. Kiana avait été suffisamment forte pour s’ensortir. Suffisamment forte pour faire mettre en place des ordonnances restrictives et pour protéger sonenfant. Suffisamment forte pour lui cacher l’existence de sa fille jusqu’à ce qu’elle se sente assez ensécurité pour partager son secret, même si cela signifiait mettre en péril sa relation avec lui.

Il entra dans son allée et il fut pris de court en se disant que son grand jardin serait parfait pour unebalançoire. De la sueur perla sur son front. Son estomac se noua.

Merde, je ne suis pas prêt pour tout ça.

Et pourtant, cela ne l’empêchait pas d’imaginer à quoi pourrait ressembler sa vie s’il rentrait dans

autre chose que dans une maison vide. Entendre une voix enfantine crier d’excitation au moment où ilouvrirait la porte. Être plaqué au sol par des dizaines de petits corps dès qu’il aurait posé sesaffaires, tout comme ses frères et lui accueillaient leur père lorsque ce dernier revenait du travail.

Soudain, l’idée d’avoir une famille sur-le-champ ne lui semblait pas si terrifiante.

Il sortit de la voiture avec l’intention de se servir un bon remontant dès qu’il aurait passé la portede chez lui. N’importe quoi qui pourrait calmer ses nerfs à vif. Et il y avait une bouteille de scotchremplie dans son placard qui n’attendait que lui.

« C’est un bel endroit que vous avez là », dit un homme lorsque Frank entra dans la cuisine.

Il sursauta, la peur battant dans ses veines. Il était tendu et il serra les poings tout en cherchantl’arme la plus proche. Il ne baissa sa garde que lorsque Theodore Cully se leva du canapé et qu’ils’approcha de lui avec un rictus.

« Mais vous devriez vraiment penser à revoir la sécurité », dit le détective privé avec un sens del’humour pince-sans-rire. « Il a été bien trop facile pour moi de forcer l’entrée et de me servir unverre de votre Macallan1. »

L’homme secoua son verre. À l’intérieur de ce dernier, il ne restait que deux glaçons.

« Tant qu’il en reste pour moi. »

Frank trouva la bouteille ouverte sur le bar et il se servit un verre généreux avec des glaçons.

« Il y a une raison à votre présence ici ? Je veux dire en dehors du fait de prouver que vouspourriez être un voleur de premier ordre si vous décidiez de vous lancer dans cette voie ? »

Cully ricana et posa son verre.

« Je suis juste là pour vous apporter ce que votre frère a demandé. »

Il se retira sur le canapé, laissant à Frank suffisamment de temps pour l’étudier. Cully semblaitavoir la trentaine bien tassée ou venir d’entamer la quarantaine à en juger par ses tempesgrisonnantes, mais son corps était mince et musclé comme celui d’un triathlète d’élite. Frank n’avaitaucune idée de ce que cet homme faisait avant de commencer à travailler pour Kelly Properties.Adam et son frère avait tous les deux laisser entendre que Cully avait vécu une vie haute en couleuravant de s’installer dans la profession quelque peu plus ennuyeuse qui consistait à exhumer desdossiers compromettants sur des gens, et Frank n’aurait pas été surpris d’apprendre que les entréespar effraction apparaissaient sur le CV de l’homme.

Cully lui tendit une enveloppe unie en papier kraft.

« Vous aviez raison d’avoir des soupçons sur celle-là. Des dossiers judiciaires scellés et tout letintouin. »

Frank jeta un regard sur l’enveloppe, pas certain d’avoir envie de connaître son contenu. Kianaavait déjà partagé avec lui les raisons pour lesquelles elle ne voulait pas quelqu’un sache où ellevivait et pourquoi elle ne pouvait pas sortir avec lui à la dernière minute. Elle avait dit qu’elle avaitdéjà révélé le plus important. Et pourtant, à en juger par l’épaisseur de l’enveloppe, il y avaitbeaucoup de choses qu’elle ne lui avait pas dites. Il garda son verre à la main tout en se demandant si

la moiteur de sa paume était due à la condensation ou à sa propre transpiration.

« Ça vous dérange de me donner les grandes lignes ? »

Cully secoua la tête.

« Ce n’est pas pour ça qu’on me paye. Mais je dirais que Mme Dyer est une femme trèsintéressante. Un peu paranoïaque, mais pour une bonne raison. »

Frank savait déjà tout cela. Mais l’inconnu l’effrayait encore plus. Il appréciait Kiana. Et il luifaisait confiance. Il pourrait même tomber amoureux d’elle s’il se basait sur le fait qu’il n’avait pasressenti la forte envie de s’enfuir mort de peur lorsqu’elle lui avait dit qu’elle avait un enfant. Maisest-ce que le fait d’apprendre tous ses secrets ruinerait cette jolie chose qu’il y avait entre eux ?

Le détective privé posa l’enveloppe sur le bar et rassembla ses affaires. Il prit un instant pourgriffonner quelque chose sur un bloc-notes et arracher la page en question.

« Au fait, voilà un bien meilleur système de sécurité. Il m’a fallu moins d’une minute pour piratercelui que vous avez actuellement. »

« C’est noté. »

Frank prit le papier et vida son verre de whisky single malt. Il sentit l’alcool descendre et lebrûler jusque dans son ventre, mais cela ne suffit pas pour soulager la tension qui oppressait sapoitrine.

« Autre chose ? »

« Nope. »

Cully singea un salut militaire.

« C’est toujours un plaisir de faire affaire avec votre famille. Je connais la sortie. »

Une fois seul, Frank fixa l’enveloppe fermée pendant ce qui lui sembla une éternité, serranttoujours le verre vide dans son poing. Il finit par le poser avant de briser le cristal et il pritl’enveloppe. Elle pesait plus lourd que ce à quoi il s’attendait et des nœuds se formèrent entre sesépaules. Il tenait dans sa main l’équivalent de la boîte de Pandore, et il hésita en se demandant s’ilvoulait vraiment déchaîner le chaos qu’elle pouvait contenir.

L’image de la jeune femme terrorisée recroquevillée sur le canapé le vendredi précédent réapparutdans son esprit, et un goût amer remplit sa bouche.

Mais si je veux un futur avec elle, je dois connaître son passé, ne serait-ce que pour éviter delui faire peur comme ça à nouveau.

Après un autre verre de whisky, il rassembla son courage pour briser l’autocollant confidentielmaintenant le rabat et il sortit les papiers qui se trouvaient à l’intérieur.

La première chose qu’il vit fut la photo d’une femme blonde aux yeux bleus. Cully avait attachéune note avec un trombone en haut de la pile de papiers portant la mention Mère.

Frank l’examina un instant. La femme était jeune et jolie dans le style de la fin des années 1980.Kiana avait hérité des lèvres charnues et des pommettes hautes de sa mère, mais lorsqu’il mit la

photo de côté, ce qu’il vit ensuite fut un procès-verbal.

Shannon Marie Tisdale, âge 22 ans. Extorsion.

Frank jura en silence et tourna la page.

Shannon Marie Tisdale, âge 23 ans. Fraude.

Les quelques pages qui suivirent contenaient d’autres procès-verbaux allant du simple vol à laprostitution, en passant par la possession de drogues. Juste au moment où il commençait à sedemander s’ils avaient mis la mère de Kiana en prison et s’ils avaient jeté la clé, il trouva unephotocopie d’un article de journal.

Une femme du comté de Forsythe retrouvée assassinée chez elle Son sang se glaça, mais ilcontinua à lire.

Shannon Tisdale, âgée de 30 ans, a été découverte tuée de plusieurs blessures par balleschez elle aux alentours de 23h21 hier soir. La police a été appelée au domicile de lavictime par sa fille de huit ans pour mettre fin à une querelle domestique, mais lavictime était déjà décédée à l’arrivée des forces de l’ordre. Les dossiers du 911 ne sontpas disponibles pour le moment, mais un détective présent sur la scène du crime aconfirmé que la victime était en vie au moment où l’appel a été passé et que le petit amide la victime, Duane Filbert, avait été placé en garde à vue. M. Filbert a été arrêté plustôt ce mois-ci pour violences conjugales contre la victime et il était sorti de prisoncontre le paiement d’une caution de 5.000$.

Frank relut l’article une demi-douzaine de fois, devenant de plus en plus nauséeux à chaque foisqu’il arrivait au passage dans lequel l’article mentionnait l’appel passé par la fille de la femme âgéede huit ans.

Jésus.

Kiana était là la nuit où sa mère avait été assassinée. C’était elle qui avait appelé pour demanderde l’aide. Et la police était arrivée trop tard pour sauver sa mère.

Il se servit un autre verre de whisky et il prit une gorgée avant même d’examiner les autresdocuments. Il avait déjà appris plus qu’il n’aurait voulu en savoir. Kiana avait plein de démons dansson passé, c’était vrai, mais le fait qu’elle ait réussi à s’en sortir et à laisser tout cela derrière elle larendait encore plus précieuse à ses yeux. À présent, il comprenait sa position protectrice lorsqu’ils’agissait de sa fille et de sa vie personnelle, et il attendrait qu’elle lui en dise plus sur son passéquand elle serait prête à le faire.

Il rassembla le reste des documents et il les mit dans son broyeur. Il en avait vu assez. Une minuteplus tard, il ne restait qu’une corbeille remplie de morceaux de papier.

La feuille que Cully lui avait donné sur laquelle ce dernier avait inscrit le nom d’un meilleurservice de sécurité attira son attention. Il la prit avec lui avant d’aller vers son ordinateur et de saisircette information pour trouver un vendeur dans les environs. S’il pouvait convaincre Kiana de resterdormir chez lui, il voulait qu’elle se sente autant en sécurité que possible avec un système de sécuritéde premier ordre.

1 Macallan : Une marque de whisky

Chapitre Treize

Kiana tira sur le corsage de sa robe sans bretelles en mousseline de soie et elle pria pour ne pasêtre victime d’un problème vestimentaire avant la fin de la soirée. La robe lui allait parfaitementlorsqu’elle l’avait essayée un mois plus tôt, mais le stress de l’organisation du gala de charité luiavait fait perdre 5 kilos, dont la majeure partie au niveau de la poitrine. C’était vraiment dommageque ces kilos n’aient pas disparu de ses fesses. C’était une zone où elle avait plus qu’assez à donner.

Sherita lui fit signe de la rejoindre dans un coin de la salle de bal et elle lui glissa deuxrembourrages en silicone.

« Glisse ça dans ton soutien-gorge. »

« Je n’aurais jamais pensé que je rembourrerais à nouveau mon soutien-gorge », grommela Kianaen enfonçant les coussinets sous ses seins.

Quelques petits ajustements plus tard, ses seins remplissaient son décolleté en forme de cœur aupoint qu’elle n’avait plus peur que sa robe ne glisse assez bas pour qu’un de ses tétons se retrouveexposé.

« Merci. »

« Pour quoi sont faites les meilleures amies sinon ? »

Sherita fit un geste du bras vers la salle de bal vide totalement décorée.

« Prête pour ça ? »

« Aussi prête que je peux l’être. »

Elle passa de nouveau sa main sur ses cheveux pour s’assurer qu’aucune boucle n’avait glissé del’enchevêtrement de pinces qui les retenaient dans le chignon qu’elle s’était faite faire plus tôt dansl’après-midi.

« Où on en est niveau chiffres jusque-là ? »

Sherita sortit son iPad et tapota sur l’écran.

« On a vendu 800 places pour le gala. Ici, la valeur pour les articles des enchères silencieuses estestimée à 220.000 dollars, et les enchères en ligne devraient rapporter encore 690.000 dollars deplus. »

Les yeux de Kiana s’écarquillèrent lorsqu’elle additionna les chiffres.

« Ça alors, Sherita, on pourrait dépasser le million de dollars. »

« Si on le fait, tu vas devoir donner à M. J’Ai-Des-Relations un cadeau de remerciement trèsspécial. »

Elle fit un signe de tête vers l’homme roux qui venait vers elle.

« Et j’espère que ça inclut des trucs coquins. »

Kiana sentit ses joues s’enflammer. Elle donna un coup de coude à son amie, mais elle n’arrivaitpas à détacher ses yeux de Frank. La coupe de son smoking dessinait ses épaules larges et ajoutait del’élégance à son physique musclé. Ses cheveux semblaient brûler comme du feu sous la lumièretamisée des chandeliers de la salle de bal, mais cette vision était pâle comparée la chaleur quiirradiait de ses yeux bleus clairs.

Le sourire de Frank s’élargit lorsqu’il les rejoignit.

« Mesdemoiselles, vous êtes charmantes ce soir », dit-il même si son regard restait fixé sur Kiana.

« Tu es très beau toi aussi. »

« Bien sûr. Le fait que je sois un sportif débile ne veut pas dire que je ne peux pas fairel’impossible avec le look de James Bond de temps en temps. »

Il lissa les revers en satin de sa veste et il resserra son nœud papillon.

« Mais je serais encore plus beau avec une charmante jeune femme comme toi à mes côtés. »

Il lui offrit son bras et Kiana accepta en levant les yeux au ciel.

« Tu n’arrêtes jamais ? »

« Il y a une raison qui fait que je devrais ? »

Il baissa sa bouche à hauteur de l’oreille de la jeune femme.

« Tu as l’air aussi appétissante qu’une tarte au citron meringuée. C’est adorable, mais ça me donneenvie de te goûter. »

Il appuya ses lèvres sur la zone sensible située derrière le lobe de l’oreille de Kiana, et un élan dedésir la submergea, faisant trembler ses genoux. Elle n’avait pas eu de rendez-vous avec lui depuisqu’elle lui avait parlé de Savannah - principalement parce qu’elle avait dû se concentrer sur le faitde veiller à ce que le gala se passe sans accroc - mais cela n’empêcha pas Frank de lui donnerquelques baisers passionnés à chaque fois qu’il le pouvait.

Évidemment, avec les portes d’entrée de la salle de bal sur le point d’ouvrir, ce n’était ni le lieu nil’endroit pour coucher avec lui passionnément comme elle l’aurait voulu.

« Tiens-toi bien », dit-elle avec un sourire serré. « Tre est en train de nous regarder. »

« Laisse-le faire. Pour lui, on est en train de revoir les préparatifs de dernière minute pour lasoirée. »

Il passa son doigt sur le dos nu de la jeune femme.

« Par exemple, je meurs d’envie de savoir si ce soir tu portes cette culotte de grand-mère sexyavec son ouverture secrète. »

Mon Dieu, s’il n’arrêtait pas, elle se donnerait en spectacle en l’attirant dans n’importe quelendroit un peu intime qu’elle pourrait trouver juste pour soulager la douleur qui était en train denaître entre ses jambes. Tel quel, sa peau était en train de devenir chaude, elle risquait de se mettre àtranspirer et de ruiner son maquillage.

« Pas ce soir. »

« Vraiment dommage. Je l’aime vraiment bien. Presqu’autant que je t’apprécie toi. »

Il y avait juste assez de sous-entendu dans sa voix pour faire monter un gémissement dans la gorgede Kiana.

« Frank Kelly, si tu ne te tiens pas bien… »

Il rit et il ajouta quelques centimètres supplémentaires entre eux.

« Tu es tellement sexy quand tu rougis. »

« Peut-être, mais c’est censé être un évènement chic, alors je t’en prie, fais dans le décorum. »

« Oui, m’dame. Je promets d’être un parfait gentleman. »

Mais la lueur espiègle dans son œil lui disait qu’il ne continuerait de se comporter ainsi que tantqu’elle ne lui dirait pas d’arrêter.

Elle le guida vers l’endroit où se tenaient Denise et Tre, prêts à accueillir les invités.

Sa belle-mère serra sa main.

« Tu as vraiment fait un travail extraordinaire, Kiana. Ton père serait fier de toi. »

« Ce ne sera un succès que si on réussit à lever les fonds dont on a besoin pour mener à bien samission. »

Elle fit un signe de tête vers le personnel de la salle de bal qui attendait à côté de la porte.

« Il est 18h30, alors que la fête commence. »

L’heure suivante passa en un clin d’œil. Dès que les portes s’ouvrirent, les invités commencèrent àaffluer. L’élite d’Atlanta était venue en nombre, et elle ne pouvait que prier pour qu’ils aient emmenéleurs carnets de chèques avec eux. De la musique douce se faisait entendre en fond sonore tandis quele personnel de Mme Rosa déambulait dans la salle avec des plateaux polis couverts de metsappétissants. Les centaines de voix créaient un faible bourdonnement qui noyait les battements de soncœur, et la chaleur de la foule chassait les frissons de cette soirée du début du mois d’avril qui avaitenvahi la salle de bal un peu plus tôt.

Kiana se fraya un chemin dans la salle, Frank toujours à ses côtés. Il la présenta à certaines despersonnes qu’il avait invitées, en commençant par ses coéquipiers, puis en se dirigeant vers lescélébrités locales. Elle sourit jusqu’à ce que ses joues deviennent douloureuses, et elle discutajusqu’à ce que sa gorge soit à vif, mais en elle-même elle parvenait à peine contenir son excitation.La soirée était en train de se transformer en tout ce qu’elle avait souhaité.

Elle était sur le point de supplier Frank de l’emmener à la table afin qu’elle puisse reposer sespieds lorsqu’elle tourna sur elle-même et qu’elle se retrouva nez à nez avec Doug Boutry. Sa bouchedevint sèche, et toutes les banalités qu’elle avait échangé avec tant de facilité toute la soirée luiéchappèrent.

Frank cogna son poing contre celui de son ami.

« Dougie, tu es venu. »

« Bien sûr que oui, mon pote. Je viens m’assurer que mon maillot dédicacé partira pour au moinsmille dollars. »

La star du basketball tourna son attention vers Kiana.

« Frank parle de toi et de ta fondation en non-stop, et je veux faire tout ce que je peux pour aider. »

Elle ouvrit la bouche, mais aucun mot ne sortit, et elle se mit à hocher la tête comme une idiote.

« Laisse-lui une minute, Dougie. »

Frank fit un grand sourire et lança un clin d’œil à la jeune femme.

« C’est une grande fan, mais si elle voyait à quel point tu es un abruti quand tu joues à Assassin’sCreed1… »

« Ne dénigre pas mes talents à la Xbox devant une femme charmante, Kelly. »

Doug se redressa, montrant qu’il mesurait quelques centimètres de plus que Frank, et il toisa cedernier.

« Si je ne te connaissais pas mieux, je dirais que tu as peur que je te la vole. »

« Ha ! »

Frank essaya d’agir de manière présomptueuse, mais un voile d’inquiétude passa brièvement surson visage lorsqu’il regarda la jeune femme.

Ce n’était pas un concours. Kiana enroula son bras autour de celui de Frank.

« Désolée, Dougie, mais je suis déjà prise. »

« Eh bien, si tu changes d’avis… »

À présent, c’était au tour de Doug de faire un clin d’œil à la jeune femme avant de se lancer à larecherche de sa prochaine conquête.

« Tu sais, tu peux lui parler », taquina Frank. « C’est juste Dougie. »

« Je sais, mais j’ai tout ce qu’il me faut ce soir en termes d’homme. »

Elle fit un sourire à Frank, et ce dernier se demanda comment il avait réussi à se construire uneplace dans son cœur aussi rapidement.

« Ça te dit de danser ? »

Le grand sourire du jeune homme se tordit.

« Danser ? »

« Oui, danser. Je croyais que tu avais plus d’un tour dans ton sac. »

Elle le guida vers la petite piste de danse où des couples se balançaient au rythme d’une doucemélodie de jazz.

« En plus, c’est une danse de blanc. Ça devrait être facile pour toi. »

Mais lorsqu’elle passa son bras autour du cou du jeune homme, une expression de panique envahitle visage de celui-ci.

« C’est le moment de faire une confession. »

« Quoi ? »,

« Je n’ai aucun problème pour aller en boîte, mais je n’ai jamais dansé comme ça depuis le lycée.»

Elle guida son bras autour de sa taille comme s’ils étaient un couple dans une danse scolairemaladroite.

« Et pourquoi ça ? »

« Parce que si je me ridiculise en boîte, je peux dire que c’est à cause de plein de trucs. Tropd’alcool, par exemple. Mais là… »

Sa voix baissa et il fixa le visage de la jeune femme.

« Quand je danse aussi près de toi, j’oublie tout le reste autour de moi. »

« Alors garde les yeux sur moi et sache que je serai avec toi jusqu’au bout. »

« Même si je te marche sur les pieds ? »

Elle rit tout en appuyant son front contre le sien. Il y avait peu de risque. Malgré son hésitation,Frank glissait sur le sol avec la même aisance que celle dont il avait fait preuve quand ils avaientdansé la salsa quelques semaines plus tôt. Dans ses bras, elle se sentait en sécurité et aimée. Et ilétait tellement facile de tomber amoureuse de lui sur la piste de danse.

***

Il y avait six bars installés dans le périmètre de la piste de danse, mais Frank se dirigea vers celuiqui avait été le bar de prédilection de ses amis et de ses coéquipiers pendant toute la soirée. Ilcommanda un verre de whisky pour lui et une coupe de champagne pour Kiana avant de demander àTre : « Comment tu vas ? »

« Bien, je suppose. J’en ai marre de toutes ces conneries excentriques. »

Un frisson parcourut l’échine de Frank qui hésita pendant un instant avant de demander : « Je veuxdire, comment tu vas de manière générale ? »

Comme Tre ne répondit pas tout de suite, il ajouta : « J’ai vu l’annonce. »

« Et ? », répondit Tre de manière très bourrue.

Aucun d’eux ne voulait dire à haute voix que Tre avait été remercié de l’équipe ce matin-là.

« Tu leur as dit ? »

Frank fit un signe de tête vers l’endroit où Kiana et Denise étaient en train de discuter à table.

« Pourquoi ? Pour que je puisse les distraire de tout le merveilleux travail qu’a fait la petite fillede son papa ? »

Tre posa violemment son verre sur le bar, et il indiqua qu’il voulait qu’on le resserve.

« En plus, mon agent est déjà sur le coup. Une autre équipe me prendra. Tout va bien se passer. »

Il avait plus l’air d’essayer de se convaincre lui-même que de convaincre Frank, surtout vu lamanière dont sa voix trembla sur la fin.

« Ça me saoule de te perdre comme coéquipier. »

« C’est plutôt que tu as peur que je t’écrase quand je jouerai pour quelqu’un d’autre. »

Tre prit son verre rempli et partit en titubant.

« Mais que ça reste entre nous pour ce soir. Je ne veux pas que maman et Kiana s’inquiètent. »

« Ne t’en fais pas, Tre. Je suis sûr que je peux trouver plein de manières de distraire ta sœur. »

Tre l’interrompit, ses yeux plissés formant deux fentes.

« À quoi tu joues avec elle ? »

« Je ne joue pas du tout. Je l’apprécie, et j’espère que ça ne te pose pas de problème qu’on sorteensemble. »

Les yeux de Tre se plissèrent encore plus et il bomba le torse.

« Attention, Roméo. Kiana a déjà traversé beaucoup de galères, et elle n’a pas besoin que tu lui enfasses vivre d’autres. »

Galère était un faible mot à en croire par le peu que Frank avait lu de l’enquête de Cully.

« Je sais. Elle m’a parlé de Malcolm et de Savannah, et c’est pour ça que je me comporte le mieuxpossible quand je suis avec elle. »

Tre recula d’un pas et cligna des yeux plusieurs fois, son visage exprimant une surprise totale.

« Elle t’a parlé de Savannah ? »

Frank acquiesça.

« Il y a deux semaines en fait. Je ne l’ai pas encore rencontrée, mais je comprends pourquoi Kianaveut la protéger. »

« D’accord. »

Tre but une longue gorgée.

« Mais souviens-toi juste que je garde un œil sur toi. Tu es mon ami, mais elle c’est ma sœur.Compris ? »

« C’est noté. »

Frank tourna de nouveau son attention vers la femme qui l’avait captivée depuis qu’il était entrédans la salle de bal. Il était sincère quand il avait dit plus tôt qu’elle était suffisamment attirante pourlui donner envie de la goûter. La robe jaune qu’elle portait montrait une bande de peau soyeuse lelong de son dos et de ses épaules qui l’invitait pratiquement à appuyer ses lèvres dessus, et la teinte

rose clair de ses lèvres bouche était innocente et donnait pourtant envie d’embrasser ces dernièrespour les savourer.

Bien sûr, il voulait faire plus que l’embrasser. Deux semaines s’étaient écoulées depuis leurrendez-vous dans son bureau, et il avait été victime d’une série d’érections nocturnes provoquées parson envie de s’enfoncer de nouveau en elle. Mais la date du gala se rapprochant, ils avaient eu trèspeu de temps seuls. Il espérait seulement qu’une fois que cette soirée serait terminée, il pourraitprofiter de plus que quelques baisers torrides avec elle.

1 Assassin’s Creed : Un jeu vidéo

Chapitre Quatorze

Kiana n’était pas sûre que ses étourdissements étaient dus au champagne qu’elle avait bu tout aulong de la soirée, de la chaleur de la main de Frank appuyée en bas de son dos tandis qu’il regardaitpar-dessus son épaule ou des derniers chiffres sur l’iPad de Sherita.

« Ils sont justes ? »

« J’ai vérifié trois fois juste pour être sûre », répondit sa meilleure amie. « Le compte final pourl’enchère de ce soir était de 267.519$. »

Kiana s’enfonça dans sa chaise. Le gala s’était terminé moins d’une heure plus tôt, mais lepersonnel de la salle de bal était encore en train de nettoyer autour d’eux.

« Ça dépasse nos espérances. »

« C’est parce que certaines personnes nous ont fait des dons de fous. »

Sherita sortit le sac bancaire pour lui montrer son contenu.

« Regarde tous les chèques qu’on a récoltés. »

Denise applaudit, puis elle pinça les joues de Kiana.

« Je savais que si quelqu’un devait s’en sortir avec tout ça, ce serait toi. Ton père serait tellementfier. »

La joie de Kiana était tempérée par la moue qui se dessinait sur le visage de Tre. Elle tendit lamain vers lui et elle l’attira vers elle.

« On a fait tout ça ensemble. »

Mais elle savait à qui les remerciements devaient être adressés. Son sourire s’élargit lorsqu’elleleva les yeux vers Frank.

« Je n’aurais pas pu faire ça sans toi. »

« Dis-le tout simplement, Kiana. Tout ça c’est parce qu’il y avait ma belle gueule sur ton annonce.»

Frank lui fit un grand sourire coquin avant de se baisser pour déposer un baiser chaste en haut dela tête de la jeune femme.

« Oh oui, Frank, tout le mérite te revient », dit-elle en plaisantant.

Néanmoins, ce n’était pas loin de la vérité. Tout le soutien qu’il avait pu obtenir de la part de lacommunauté sportive la laissait encore abasourdie. Si ses estimations étaient correctes, il étaitresponsable d’au moins quatre-vingt pour cent de l’argent qu’ils avaient collecté.

« Vous avez tous très bien travaillé. »

Denise bâilla en se couvrant la bouche.

« Et si vous voulez bien tous m’excuser, il est temps pour la vieille femme que je suis d’aller au

lit. »

« Je vais te ramener, maman. Laisse-moi juste une minute. »

Tre se leva de la chaise dans laquelle il était resté avachi une partie de la soirée, et il s’approchade Kiana.

« Si tu veux, je peux déposer les chèques demain matin à ta place. »

« Je peux le faire. »

« Kiana, s’il te plaît, laisse-moi faire quelque chose. En plus, tu mérites bien quelques jours derepos après tous les efforts que tu as fournis. »

Elle était trop fatiguée et trop éméchée pour discuter, surtout alors que son frère faisait enfin uneffort pour aider la fondation. Elle fit un signe de la tête à Sherita.

« Laisse-le prendre le sac. »

Son amie ferma le sac avec une attache.

« Tiens, prêt à être déposé. J’ai même rempli les formulaires pour toi. »

« Merci. »

La bouche de Tre se tordit et il prit le sac, puis il baissa les yeux.

« Maman a raison, tu sais. Tu as fait du bon boulot, Kiana. »

« Merci, Tre. »

C’était ce qui ressemblait le plus à un compliment qu’elle recevait de la part de son frère depuisqu’elle avait repris la fondation.

Son frère quitta la salle de bal avec Denise, et Sherita bondit de sa chaise.

« Bon, maintenant que je suis tranquille, je m’en vais moi aussi. Passez un merveilleux week-endtous les deux. »

Sa meilleure amie était en fait en train de lui dire de faire l’amour avec Frank pendant qu’elle enavait l’occasion. Non pas que la pensée n’ait pas traversé son esprit plus d’une fois ce soir-là. Mêmesi Frank était très beau dans son smoking, elle voulait le voir sans. Elle aurait juste aimé pouvoirpayer Madison pour que celle-ci reste toute la nuit avec Savannah pour qu’elle puisse découcher etdormir chez Frank.

« Je peux te raccompagner jusqu’à ta voiture ? », demanda-t-il, jouant toujours beaucoup trop leparfait gentleman.

Mais en cet instant, elle ne voulait pas du gentleman. Elle voulait le mauvais garçon.

Elle se leva lentement de sa chaise, employant autant de mouvement séducteur qu’elle le pouvait.Elle le regarda droit dans les yeux. Elle mordilla sa lèvre inférieure. Elle appuya sa main à l’endroitoù le cœur du jeune homme battait, suivie par les courbes de son corps.

« Je suppose que tu pourrais. »

Le pouls de Frank se mit à battre à tout rompre et il se lécha les lèvres, mais il ne fit pas lemoindre geste pour la toucher.

« Ou ? »

« Ou tu peux me ramener à la maison. »

Les battements frénétiques du cœur de la jeune femme répondaient aux siens, mais pour une raisontotalement différente. Elle était en train de prendre un risque avec lui. Elle allait lui révéler l’endroitoù elle vivait. Mais son instinct ne la mettait pas en garde. Elle lui faisait confiance.

« Après tout, j’ai bu plusieurs coupes de champagne et je n’habite pas très loin d’ici. »

Il déglutit avec difficulté et il couvrit la main de la jeune femme avec la sienne.

Son hésitation la fit paniquer. Peut-être qu’elle avait mal lu en lui. Peut-être qu’il en avait assez dejouer le rôle du petit ami maintenant que le gala de charité était terminé. Peut-être qu’il étaitsecrètement terrifié par le fait qu’elle ait un enfant. Elle baissa les yeux et elle commença à seretourner.

Frank appuya son autre main sur ses fesses et continua de la tenir serrée contre lui. Sa voix étaitrauque lorsqu’il dit : « Et après ? »

« Et après, on verra comment se passe la soirée. »

Sa réponse semblait trop polie, trop calme pour ce qu’elle voulait réellement. En elle-même, ellecriait qu’elle voulait le traîner au lit et l’y garder pendant une bonne semaine. Elle voulait luiarracher ses vêtements et admirer les muscles saillants de son corps. Elle voulait prendre sa queue aufond de sa gorge et le regarder en train de se tordre de plaisir pendant qu’elle le faisait jouir. Et puis,une fois qu’il aurait de nouveau une érection, elle le chevaucherait comme elle l’avait fait ce fameuxsoir dans son bureau jusqu’à ce qu’elle jouisse.

Pourtant, elle n’avait pas besoin de dire tout cela. Le désir intense dans les yeux du jeune hommelui indiquait qu’il savait exactement ce qu’elle avait en tête. Il prit son châle et il le posa sur sesépaules.

« Je te ramène. »

Elle n’avait pas menti lorsqu’elle avait dit qu’elle habitait à proximité. Son appartement dans lequartier de Buckhead était à à peine dix minutes en voiture à cette heure de la nuit, ce qui était parfait.Si cela avait été plus long, elle aurait pu être tentée de baisser la tête vers les genoux de Frankpendant qu’il conduisait. C’était tout aussi difficile que de se retenir de poser les mains sur lui.

Le fait de le toucher, d’évaluer sa réaction à son contact, aurait fait des merveilles pour soulagerses nerfs à vif. Elle était en train de s’aventurer sur un territoire inconnu. Pour la première fois depuisla naissance de Savannah, elle invitait une personne qui ne faisait pas partie de son cercle familial etd’amis chez elle. Pour la première fois en près de deux ans, elle ramenait un homme chez elle. Ellesavait sans l’ombre d’un doute que Frank ne dirait jamais à Malcolm où elle habitait. C’était lesautres complications possibles qui l’inquiétaient.

Frank s’arrêta à la barrière de sécurité qui bloquait l’accès au parking situé sous le bâtiment, et il

attendit qu’elle lui donne le code. Une fois qu’elle l’eut fait et qu’elle lui eut indiqué où se garer, ilstationna sa Maserati à la place en question, mais il n’éteignit pas le moteur. Il regardait droit devantlui.

« Et maintenant ? »

« Qu’est-ce que tu veux dire ? »

« J’essaye de ne pas trop me faire d’idées, Kiana. Si tu étais n’importe quelle autre femme, jesupposerais qu’une invitation à te ramener chez toi signifierait une seule chose. Mais tu n’es pascomme les autres femmes, et j’ai l’impression de marcher sur des œufs tout le temps parce que mêmesi j’ai vraiment envie de toi, je ne veux pas t’effrayer. Je sais ce que tu as traversé. Je sais que tu asune fille à protéger. Et je ne veux pas tomber au niveau de ce connard en franchissant la limite. »

La poitrine du jeune homme se serra au point qu’il avait du mal à respirer. Lorsqu’elle avaitrencontré Frank pour la première fois, elle était prête à croire qu’il n’était rien de plus qu’un joueur.Mais au cours des semaines qui avaient suivi, elle avait découvert un homme qui valait la peinequ’elle lui ouvre son cœur. Et elle lui faisait confiance pour ça, tout comme elle le faisait pour sessecrets.

« Alors laisse-moi aller droit au but. Je veux que tu montes avec moi. Je veux que tu me suivesdans ma chambre. Je veux que tu fasses toutes les choses que tu as dit que tu me ferais cet après-midi-là dans mon bureau. Mais si tu n’es pas prêt… »

Il pencha la tête vers elle.

« Je suis plus que prêt. »

Le désir sauvage dans ses yeux envoya un frisson de délice dans tout le corps de la jeune femme.

« Mais il va falloir faire attention à ne pas faire de bruit. »

« Je peux le faire. »

Son sourire prétentieux fit son apparition. Il éteignit le moteur et il sortit de la voiture en toute hâtepour ouvrir la portière de la jeune femme. Lorsqu’elle sortit, il l’attira dans un baiser torride quiattisa le désir de Kiana.

« Par contre, je ne te fais aucune promesse. »

Il la taquinait, mais elle avait peu de doute sur le fait qu’il s’y tiendrait.

Elle lui fit signe de la suivre pour traverser les mesures de sécurité de son bâtiment. D’abord, il yavait le code, puis une plaque sur laquelle il fallait poser la main pour entrer dans le bâtiment. Seuleune poignée de personnes étaient enregistrées sur la liste de ceux qui pouvaient passer cette sécuritésans avoir à se signaler auprès du gardien qui se trouvait dans le hall d’entrée - Denise, Tre, Sheritaet Madison. Ensuite, il y avait l’agent de sécurité dans le hall, suivi par un autre code pourl’ascenseur. Et enfin, lorsqu’ils arrivèrent à son appartement, un troisième code permettait dedébloquer le pêne dormant de sa porte blindée.

Elle avait choisi cet immeuble parce qu’elle voulait se sentir en sécurité, mais chaque couche dece système ajoutait à son impatience. Elle avait hâte de conduire Frank dans son lit. Mais d’abord,

elle devait jouer le rôle de la matrone parfaite jusqu’au départ de la baby-sitter.

Madison était en train de lire un magazine lorsqu’ils ouvrirent la porte d’entrée. Elle écarquilla lesyeux lorsqu’elle vit Frank, mais elle réussit à garder une voix calme pour demander : « Comments’est passé le gala ? »

« Un énorme succès. »

Kiana enleva son châle et posa son sac sur la petite table qui se trouvait dans le vestibule.

« Comment va Savannah ? »

« Un parfait petit ange, comme toujours. »

Madison récupéra ses affaires, lançant toutes les secondes un regard vers Frank.

« Euh, vous êtes Frank Kelly ? »

Le sourire de Frank s’élargit.

« Le seul et unique. »

Madison ouvrit la bouche comme si elle voulait s’épancher à propos de l’immense fan qu’elleétait, mais à la manière dont les bras du jeune homme entouraient de manière possessive la taille deKiana, il était très clair qu’ils étaient en couple. La baby-sitter hocha la tête une fois comme si elleavait compris le sous-entendu, puis elle se précipita hors de l’appartement.

« À lundi. »

Frank appuya ses lèvres contre l’épaule nue de Kiana avant de murmurer dans son oreille : «Alors, où est ta chambre ? »

« Par là. Laisse-moi juste aller voir Savannah avant. Et souviens-toi, pas de bruit. »

« Je serais une petite souris. »

Cela ne l’empêcha pas de déposer un baiser léger comme une plume sur sa nuque tandis qu’ilsavançaient dans le couloir, ses bras faisant en sorte que les fesses de la jeune femme restent colléescontre lui jusqu’à ce qu’il tourne pour entrer dans sa chambre.

Elle alla jusqu’à la chambre d’enfant et elle entrouvrit la porte. Tout comme elle s’y attendait, safille était profondément endormie et inconsciente du monde autour d’elle. Avec la certitude que toutallait comme il le fallait, elle retourna vers sa chambre sur la pointe des pieds.

Frank la prit dans ses bras au moment où elle franchit la porte. Une fois cette dernière fermée, sesbaisers devinrent plus ardents. Ses mains montèrent pour prendre ses seins, et un faible gémissementgronda dans son torse. Bientôt, la robe de la jeune femme tomba autour de ses chevilles et elle neportait plus qu’un soutien-gorge sans bretelles et un slip en dentelle noire.

« Même si les culottes de grand-mère ont aussi leurs mérites, j’aime bien ce genre-là aussi. »

Frank fit courir sa main sur la peau nue de Kiana, caressant ses courbes comme si elle était unmannequin de Victoria’s Secret et non une mère avec un peu de formes en trop sur les os.

« Bien sûr, je préfèrerais encore plus quand tu ne le porteras plus. »

En quelques secondes, il avait détaché son soutien-gorge et prit ses seins dans ses mains avides,ses doigts pinçant ses tétons tandis que ses dents effleuraient son épaule. C’était brutal, maisétrangement sensuel, et elle laissa son corps se détendre contre lui.

« Si je me souviens bien, j’ai dit que je te déshabillerais et que je savourerais le moindrecentimètre de ton corps. »

Le désir brut dans sa voix la rendit encore plus impatiente et la rendait beaucoup trop facilementprône à se soumettre à son contrôle. Il la fit se retourner et s’appuyer sur le bord du lit, sans jamaiscesser de la regarder droit dans les yeux, tandis que sa propre respiration devenait haletante etrapide.

Elle s’assit et elle essaya de retirer ses chaussures, mais il l’arrêta.

« Non, laisse-moi faire. »

Il retira sa chaussure ouverte à l’arrière comme s’il s’agissait d’un escarpin en verre, déposant desbaisers tendres le long de son mollet tout au long de l’opération. Il fit la même chose avec l’autrechaussure, puis il passa à son genou et à sa cuisse. Lorsqu’il arriva à son slip, elle s’attendait àmoitié à ce qu’il l’arrache dans son impatience, mais il la fit glisser avec la même douceur.

Mais ce fut à ce moment-là que cette douceur cessa. Soudain, la bouche de Frank appuyafermement entre ses jambes tandis que ses cuisses étaient enroulées autour des épaules du jeunehomme. Il explorait son sexe avec une série de coups de langue et de mordillements avides, chacund’entre eux attisant encore plus le désir de Kiana.

Elle gémit et elle ondula ses fesses pour lui offrir un meilleur accès, mais il s’arrêta au niveau deses hanches et il la maintint immobile tandis qu’il attirait son clitoris entre ses dents. L’onde dedouleur l’obligea à chercher son souffle, mais la montée de plaisir qui suivit libéra sa respirationdans un autre gémissement langoureux qui démentait la tension qui était en train de monter au plusprofond d’elle. Moins elle essayait de lutter contre lui, plus c’était agréable. Et lorsqu’elle finit pars’abandonner totalement à lui, il la poussa totalement à bout.

Elle flottait encore en pleine extase lorsqu’il murmura son nom. Elle entrouvrit les yeux et elle levit en train de la regarder avec un mélange de désir et d’émerveillement.

« Prête à aller plus loin ? »

Elle hocha la tête et elle s’assit pour l’aider à retirer ses vêtements. Une demi-douzaine de baiserspassionnés ralentirent l’opération, mais dès qu’il se fut débarrassé de son boxer, elle l’attira sur elle.Son corps musclé et ferme contrastait avec la douceur du sien. Sa queue en érection appuyait contresa cuisse, elle était tellement dure, tellement large. Elle enroula sa main autour d’elle et elle lacaressa sur toute sa longueur tandis que Frank rendait leur baiser plus torride.

Il se détacha, haletant.

« Capote ? »

« Dans ma table de nuit. »

Il fouilla à la recherche du préservatif, heurtant la lampe et l’écoute-bébé au passage, avant de

récupérer un des sachets en aluminium qu’elle avait caché là une semaine plus tôt. Elle grimaça enentendant le bruit, mais comme un aucun pleur ne provenait de la chambre voisine, elle se détendit etelle enroula ses bras autour de lui.

Frank glissa le préservatif et il ne perdit pas de temps. Il entra en elle d’un seul coup de rein et ilsourit.

« J’ai l’impression d’être au paradis quand je suis en toi, Kiana. »

« Moi aussi quand tu es en moi. »

Il la remplissait complètement, étirant ses parois internes au point que cela en était presquedouloureux, mais dans le bon sens du terme.

La sensation de piqûre disparut lorsqu’il commença à bouger en elle avec des mouvements lents etdoux. Il cala ses bras sous les épaules de la jeune femme et il répartit son poids sur ses coudes posésde chaque côté de cette dernière. Ses pouces dessinaient de minuscules cercles le long de sa nuque aumême rythme que les baisers qu’il lui prodiguait. Il n’y avait rien de précipité ni de frénétique dansson rythme. Ce n’était pas un coup rapide du vendredi. C’était une séance d’ébats amoureux d’undimanche matin détendue et décontractée.

Elle appréciait l’attention et elle laissa ses émotions inexprimées se bousculer dans ses propresbaisers. Elle était en train de tomber amoureuse de Frank Kelly, et quand elle était dans ses bras decette manière, elle oubliait toutes ses peurs et ses soucis. Elle ne ressentait que de l’amour.

Son orgasme la prit par surprise. Habituellement, les contractions croissantes au creux de sonventre lui indiquaient qu’elle était sur le point de venir, mais les ondes de plaisir la submergèrentsans leur signe annonciateur. Elle cria son nom aussi fort qu’elle osa le faire tandis que ses paroisintérieures se contractèrent autour de lui. Il répondit en disant son nom en chuchotant lui aussi avantde donner un dernier coup de rein et de trembler en trouvant son propre plaisir.

« Putain, Kiana », murmura-t-il avant de s’écrouler et de rouler sur le côté. Il tendit les bras verselle et il l’attira de nouveau contre lui.

« Je pourrais mourir, je suis un homme heureux maintenant, tant que tu es allongée à côté de moi. »

Elle se blottit contre lui et elle acquiesça, savourant le confort sécuritaire de ses bras.

« Je suis totalement d’accord. »

***

Des frissons parcoururent la peau nue de Kiana, suivis par un mouvement du matelas sous elle.Cela la sortit du sommeil profond dont elle profitait dans les bras de Frank, mais elle ne futtotalement réveillée que lorsqu’elle entendit Savannah pleurer. Elle bondit sur ses pieds en un instantet elle vit la silhouette d’un homme quitter sa chambre.

La panique serra sa gorge. Elle saisit sa robe de chambre qu’elle enfila en courant après lui. Aufond d’elle, elle savait qu’il ne s’agissait que de Frank et qu’il ne ferait jamais de mal à Savannah,mais cela n’apaisait pas la peur qu’elle ressentait dans ses tripes.

Elle courut dans la chambre et elle s’arrêta juste au moment où il soulevait le bébé agité hors de

son berceau.

Savannah se tut et le fixa avec des yeux ronds.

Frank avait réussi à enfiler son pantalon avant de sortir de la chambre, mais c’était tout. Il pritl’enfant dans le creux de son bras, en la tenant tendrement comme un ballon de football géant contresa peau nue. Après quelques tentatives maladroites pour la bercer, il trouva finalement un rythme quiapaisa l’enfant.

« Là », murmura-t-il à Savannah. « C’est mieux, pas vrai ? »

La fille de Kiana continuait à le regarder avec ses yeux sombres.

« Ok, maintenant voyons si je peux aller jusqu’au rocking-chair sans te faire pleurer. »

Il se retourna et il s’arrêta lorsqu’il vit Kiana debout dans l’embrasure de la porte. Il afficha unsourire penaud.

« Euh, je… »

Savannah recommença à s’agiter et il se remit à la bercer en faisant des petits chut. La petite fillelui sourit et tendit ses mains vers son visage, complètement absorbée par l’étranger qui était en trainde la tenir dans ses bras.

« J’espère que je ne vais pas trop loin, mais tu dormais tellement bien, et quand je l’ai entenduepleurer… »

Il s’interrompit et il baissa les yeux vers Savannah.

« Elle est tout simplement aussi jolie que toi, Kiana. »

Le cœur de la jeune femme tressaillit de nouveau, elle se sentit encore plus profondémentamoureuse de lui en cet instant.

« Laisse-moi la prendre. »

« Non, je la tiens. »

Il recommença à bercer la petite fille, ajoutant un petit rebond à chacun de ses pas tandis qu’ilmarchait dans la chambre.

« Enfin, à moins que ça te dérange que je la tienne dans mes bras. »

« Non, pas du tout. »

Elle aurait pensé que cela aurait été le cas, mais malgré la nervosité avec laquelle il regardaitSavannah pendant qu’il essayait de la calmer, elle lui faisait confiance pour ce qui était de sa fille.

« Tu as vérifié sa couche ? »

Il pâlit.

« Sa couche ? »

Kiana lutta pour ne pas éclater de rire. Voilà un homme qui rouaient de coups des quarterbackspour gagner sa vie, pourtant le simple fait de mentionner le mot couche le terrifiait. Elle fit un geste

pour lui indiquer de la rejoindre à la table à langer.

« D’habitude, quand elle se réveille au milieu de la nuit, c’est parce qu’elle veut qu’on la change.»

Frank posa Savannah et resta immobile pendant que Kiana changeait la couche mouillée. Mais dèsqu’elle eut terminé de reboutonner le pyjama de la petite fille, il la reprit dans ses bras.

« Retourne te coucher. Je gère. »

Incrédule, Kiana leva un sourcil.

« Tu es sûr ? »

« Absolument. »

Elle baissa les yeux vers le visage de sa fille, provoquant un sourire de la part de cette dernière.

« Tu vois, elle ne peut pas résister à mon charme. »

Elle aurait discuté si elle avait eu le choix, mais il n’arrivait pas à détacher ses yeux de Savannah.Kiana resta immobile pendant qu’il portait le bébé jusqu’au rocking-chair et il s’assit. Une minuteplus tard, il avait trouvé comment la tenir contre sa poitrine et il caressait son dos tout en sebalançant.

Les dernières peurs de la jeune femme s’envolèrent. Elle avait eu tellement peur que Frank s’enfuità la minute où elle lui avait dit qu’elle avait une fille qu’elle n’avait pas vu son côté doux. Il y avaitpresque quelque chose de comique, même adorable dans la manière dont il la tenait dans ses bras, enprenant un soin extrême de ne pas la perturber tout en ayant l’air complètement dépassé par lesévènements. Mais il n’était pas parti. Il ne s’était pas enfui terrorisé. Il faisait tout son possible,comme il avait dit qu’il le faisait avec tout ce qui était important pour lui.

Ses yeux croisèrent ceux de la jeune femme et il lui fit un sourire crispé.

« Je gère », répéta-t-il.

Kiana retourna se coucher et attendit, humant le parfum masculin de Frank qui restait encore surses draps chauds. Frank faisait déjà connaître sa présence chez elle, et c’était quelque chose qu’elleappréciait encore plus que ce à quoi elle s’attendait.

Quinze minutes plus tard, il se glissa sous les couvertures à côté d’elle et il la prit dans ses bras.

« C’est le moment de faire une confession. »

« Quoi ? », demanda-t-elle en retenant son souffle.

Est-ce qu’il avait changé d’avis à propos du fait de poursuivre leur relation maintenant qu’il avaitvu sa fille ?

« Je ne vais pas te mentir. Les enfants me foutent vraiment la trouille. Je veux, ils sont tellementpetits et délicats, et moi… je ne le suis pas. »

Il marqua une pause et il prit une profonde inspiration.

« Mais je pense qu’avec Savannah ça peut bien se passer. »

« Tu crois ? »

« Ouais », répondit-il en riant. « Je veux dire, il m’a fallu un peu de temps pour comprendre cettehistoire de couche, mais quand je la regarde, je te vois, et ça vaut la peine de faire des efforts. »

Elle leva la tête et elle vit qu’il était en train de lui sourire.

« C’est vrai ? »

« Ouais. »

Il enleva les cheveux qui couvraient le visage de la jeune femme et il lui caressa la joue. Il n’yavait qu’un léger reflet espiègle qui éclairait le regard rempli de tendresse de Frank.

« J’espère que ça ne te dérange pas de la partager avec moi. »

« Pas du tout. »

Elle lui fit baisser les lèvres vers les siennes et elle l’embrassa avec tout l’amour qui débordait deson cœur.

« Tu es vraiment un cas, Frank Kelly. »

« Ce n’est pas ce que je te dis depuis le début ? », la taquina-t-elle avant de l’embrasser encoreune fois.

***

Frank se réveilla dans un lit vide avec un sentiment de confusion. Il lui fallut plusieurs longuessecondes pour reconnaître la chambre. Des images de ce qui s’était passé pendant la nuit apparurentdans son esprit, de la forte présence de Kiana au gala jusqu’à la manière dont elle avait joui dans sesbras. Mais ce fut le babillement d’un petit enfant qui fit battre son cœur à un rythme irrégulier.

Depuis qu’il avait découvert l’existence de la fille de Kiana, il savait qu’il était dépassé par lesévènements. S’il ne désirait pas autant être avec Kiana, il aurait peut-être envisagé l’idée de s’enfuiren courant. Mais elle n’essayait pas d’en faire un père du jour au lendemain, et c’était quelque chosequ’il respectait. En fait, il était plus soulagé qu’autre chose. Cela lui laissait le temps de se faire àl’idée que Kiana et Savannah étaient un lot. Il ne pouvait pas avoir l’une sans l’autre.

Mais il n’arrivait toujours pas à s’expliquer ce qui s’était passé la nuit précédente. Il avait entenduSavannah s’agiter dans l’écoute-bébé qu’il avait fait tomber sur le sol un peu plus tôt dans la soirée,mais Kiana dormait tellement profondément qu’elle n’avait pas bouger quand les premiers Mamans’étaient faits entendre. Il avait pesé le pour et le contre à propos du fait de la réveiller, mais il avaitfini par se dire qu’il pouvait gérer un enfant. Ou au moins jeter un œil sur le bébé et s’assurer quetout allait bien.

Au moment où Savannah l’avait regardé avec ses yeux grands noisette, il s’était senti perdu.

La seule fois où il avait été en présence d’un bébé, c’était quand il était allé voir la petiteprématurée de la fiancée de Dan dans l’incubateur. Il savait qu’il valait mieux ne pas toucher un bébéaussi petit, surtout sachant que Camille était née avec une sorte de maladie qui faisait que sesintestins étaient à l’extérieur de son ventre. Mais Savannah semblait assez robuste pour qu’il puisse

la gérer, et après quelques tentatives maladroites, il avait trouvé comment la tenir et comment larendre heureuse.

Il trouva ses vêtements et il s’habilla, tout en se rendant compte que son smoking était bien trophabillé pour un samedi matin. Il se contenta de mettre sa chemise et son pantalon avant de s’aventurerhors de la chambre.

Kiana étaient en train de faire des grimaces à sa fille qui était assise dans une chaise haute commeune petite princesse sur un trône. Savannah poussa un cri de joie et applaudit avant de prendre unepoignée de céréales qu’elle enfourna dans ses joues potelées. Elles étaient tellement prises dans leurpetit jeu qu’elles ne remarquèrent pas sa présence avant qu’il ne jette sa veste sur le dos d’une desgrandes chaises qui entouraient l’ilot de la cuisine.

Une teinte rosée vint couvrir les joues de Kiana, la rendant encore plus attirante qu’avant.

« Bonjour, Frank. »

« B’jour. »

Il renifla l’air et il reconnut des odeurs de saucisse et de fromage.

« Qu’est-ce qui sent si bon ? »

« Je suis en train de préparer une quiche. D’habitude j’en fais toujours une le week-end, et on lamange pendant la semaine. »

Elle lança un regard par-dessus son épaule, vers le four.

« Elle devrait être prête dans une dizaine de minutes si ça te dit. »

Il avait suffisamment faim pour manger la quiche à lui seul, mais il essayerait de restreindre sonappétit.

« Ça me va. »

Savannah lui proposa une poignée de céréales trempées, et Kiana se précipita pour les lui prendre.

« Désolée pour ça, Frank. »

« Pourquoi ? Elle est juste en train d’essayer de me faire patienter jusqu’à ce que le petit-déjeunersoit prêt. »

Il s’assit sur la chaise qui était la plus proche de la chaise haute de Savannah et il enfonça sondoigt au milieu du ventre de cette dernière pour la chatouiller. Elle le récompensa par un grandsourire qui soulagea l’anxiété du jeune homme.

« Tu vois ? Elle m’aime bien. »

La douce lueur d’admiration dans les yeux de Kiana était la seule récompense dont il avait besoin.

« Oui, c’est vrai. »

« Et est-ce que tu peux lui en vouloir ? », continua-t-il pour trouver d’autres zones chatouilleuse etsavourant chaque petit rire de l’enfant. « Je sais y faire avec les femmes, c’est tout. »

« Je ne peux rien dire là-dessus. »

Elle fit le tour de l’ilot et elle entoura les épaules du jeune homme de ses bras.

« Tu n’es pas obligé de rester si tu n’en as pas envie, mais avant que tu partes, je voulais juste tedire merci. »

Il tendit instinctivement ses mains vers les hanches de Kiana, puis il les laissa glisser vers sondélicieux fessier.

« Tu es en train d’essayer de te débarrasser de moi aussi vite que ça ? »

« Non, pas du tout. »

Les points roses réapparurent au milieu des joues de la jeune femme.

« Ce que j’essaye de dire, c’est que je ne m’attends pas à ce que tu te sentes tout de suite à l’aiseavec Savannah, alors si ce n’est pas le cas, il n’y a aucune pression, et tu peux partir quand tu en asenvie. »

« Je sais. »

Il l’attira vers lui et il admira son visage magnifique. Même sans son maquillage, elle étaitsuperbe.

« Mais j’aime bien l’endroit où je suis en ce moment. »

Elle murmura son nom, juste avant d’effleurer ses lèvres avec les siennes dans un baiser innocent.

Il posa ses mains sur ses fesses et il l’attira de nouveau vers lui, dans une envie d’encore. C’étaitl’effet qu’elle lui faisait. Juste au moment où il s’inquiétait d’avoir franchi les limites, elle réagit enrendant leur baiser plus passionné. Il se laissa entraîner dans le sort hypnotique qu’elle envoyait surlui à chaque mouvement de sa langue, et il oublia qu’ils n’étaient pas seuls.

Une voix enfantine demandant Encore le ramena brutalement à la réalité.

Kiana lui fit un sourire contrit et recula.

« Désolée pour ça. »

« Ne le sois pas. »

Il prit la boîte de céréales sur l’ilot et il en versa dans le bol de Savannah.

« Alors, tu as des projets pour aujourd’hui ? »

« Non, pourquoi ? »

La minuterie du four sonna et Kiana sortit la quiche du four.

En sentant l’odeur de cette dernière, Frank se mit à saliver. Si son goût était aussi délicieux queson odeur, il serait au paradis.

La perspective d’un petit-déjeuner le distrayait, mais il finit par se rappeler pourquoi il lui avaitdemandé si elle avait des choses de prévues.

« Est-ce que tu as déjà emmené Savannah à l’aquarium ? »

« Je trouve qu’elle est un peu petite pour ça. »

« N’importe quoi. Plusieurs mecs de l’équipe y ont emmené leurs gamins, et certains d’entre euxn’ont qu’un an. »

Il chatouilla le pied de Savannah, son cœur se serrant à chaque petit rire qu’il provoquait chezl’enfant.

Kiana mordit sa lèvre inférieure et se pencha au-dessus de l’ilot.

« Il va falloir que j’y réfléchisse. »

« Je viendrai avec vous, si tu veux. Personne ne l’embêtera si je suis là. »

Elle rit.

« Tu es Frank Kelly. Je vais devoir embaucher des gardes du corps pour que tes fans restent àdistance. »

« Je suis sûr que je peux être discret. »

Il fit courir sa main sur ce qui faisait sa marque de fabrique - ses cheveux roux.

« Peut-être qu’une casquette de baseball pourrait faire l’affaire. »

« Ok, d’accord. Quand est-ce que tu voudrais y aller ? »

« Ce matin, ce serait trop tôt pour toi ? »

Il était déjà en train d’imaginer à quel point Savannah écarquillerait les yeux quand elle verrait lesrequins baleines en train de nager.

« Tu portes encore ton smoking d’hier soir. »

« Ça c’est facile à gérer. »

Il sortit son téléphone et il appela son conseiller shopping à Nordstrom, au Phipps Plaza. Au boutde quelques minutes, il eut la confirmation qu’une tenue serait mise à sa disposition dans la demi-heure qui suivait.

« J’aurai de nouveaux vêtements qui m’attendront après le petit-déjeuner. »

Kiana déposa une part de quiche devant lui.

« C’est facile, hein ? »

« Ouaip. »

Il plongea sa fourchette dans la quiche savoureuse fourrée au fromage, aux champignons, auxépinards et à la saucisse. Un soupir de plaisir sortit de son ventre.

« Aussi délicieuse que celle qui l’a faite. »

Kiana lui donna une tape avec un torchon, mais il ne manqua de remarquer la fierté qui irradiait dusourire de la jeune femme. Elle découpa un petit morceau et souffla sur ce dernier avant de le

proposer à Savannah. Cela ressemblait à une scène pour une publicité dans un magazine.

Une famille parfaite assise autour de la table en train de profiter du petit-déjeuner.

Il n’avait jamais imaginé qu’il serait le genre d’homme à aimer la vie de famille, mais plus ilrestait assis dans la cuisine de Kiana, plus il se sentait bien. C’était comme s’il était à sa place. Ets’il avait la chance de le faire, il ferait en sorte qu’il y encore beaucoup d’autres matins commecelui-ci dans leur futur.

Chapitre Quinze

Tard le lundi matin, Kiana était en train de danser dans son bureau comme un enfant qui viendraitde retourner à l’école après les vacances de printemps. Son week-end avec Frank et Savannahn’aurait pu être plus parfait. Le samedi, ils étaient allés à l’aquarium où Frank avait porté sa fille surses épaules pendant la majeure partie de l’après-midi afin qu’elle puisse mieux voir les poissons. Ledimanche, il les avait invitées à déjeuner chez lui, à Roswell. Savannah s’était révélée effrayée parl’immense pelouse, mais après quelques minutes elle avait ordonné à Frank de cueillir les pissenlitsqui poussaient aux alentours pour le bouquet qu’elle était en train de confectionner. Et il s’était plié àtous les caprices de la petite fille.

Il s’était également plié à tous ceux de Kiana une fois Savannah endormie. Le week-end avait étérempli de petites séances de sexe rapides et torrides pendant les siestes de Savannah, et de longuessessions aux petites heures du matin. Elle avait perdu le compte du nombre de fois où elle avait joui,mais chacun de leurs petits tête-à-tête lui faisait attendre avec impatience le prochain.

Sherita lui fit un grand sourire entendu.

« Apparemment, quelqu’un a passé un super week-end à en juger par l’éclat de tes joues. »

Kiana laissa tomber sa mallette sous son bureau et elle se mit à tourner dans sa chaise.

« Super ne suffirait pas à le décrire. »

« Et je suppose que M. Sexy est responsable de tout ça ? »

Kiana gloussa comme si elles étaient de nouveau au lycée et qu’elle était en train de dévoiler lesdétails de son premier baiser.

« On peut dire ça comme ça. »

« Je savais que vous deux ça collerait. »

Son amie prit une des deux chaises libres et la rapprocha du bureau.

« Tu me donnes des détails ? »

Kiana pressa ses lèvres en essayant de décider à quel point elle était prête à divulguer desinformations.

« Il est doué au lit. »

« Dis-moi quelque chose que je ne peux pas deviner. »

« Et il est vraiment doué avec Savannah. »

Sherita se redressa, la bouche grande ouverte.

« Attends une minute. Tu lui as présenté ta fille ? »

Kiana hocha la tête, un sourire se formant sur ses lèvres lorsqu’elle se rappela à quel point Franks’en était bien sorti avec sa fille.

« Il est doué avec elle. »

« Maintenant, je sais que tu es folle de lui, parce qu’il n’y aurait pas eu moyen que tu le laissesapprocher de Savannah si tu ne l’avais pas bien senti. »

« Qu’est-ce que je peux dire ? Roméo nous a conquises. »

Sherita devint sérieuse.

« Et il est gentil avec toi, pas vrai ? »

L’inquiétude sous-jacente dans la voix de son amie traduisait le véritable sens de sa question.Kiana acquiesça et elle tendit la main vers Sherita.

« Il est aussi gentil qu’il peut l’être pour nous deux. »

« Bien, parce qu’après tous les sales trucs que tu as traversé avec Malcolm, tu mérites quelqu’uncomme lui. »

Sherita lui serra doucement la main avant de se lever.

« J’attendais que tu arrives et que tu me donnes le feu vert pour commencer à envoyer des chèques.On a des enfants qui ont besoin d’équipement, et maintenant qu’on a les fonds pour le faire, ne lesfaisons pas attendre. »

Retour au travail. Elle avait pris un moment le samedi après-midi pour se connecter au comptebancaire de la fondation et confirmer que Tre avait déposé les chèques comme il avait dit qu’il leferait. Elle espérait qu’ils seraient crédités ce jour-là afin qu’elles puissent commencer à accomplirleur mission. Mais lorsqu’elle se connecta de nouveau au compte, le solde n’était que de trois centsdollars.

Kiana cligna des yeux plusieurs fois pour voir si elle n’avait pas manqué quelques zéros, mais peuimportait le nombre de fois où elle regardait l’écran, le chiffre ne changeait pas.

« Sherita », appela-t-elle, sa voix une octave au-dessus de la normale. « Viens et jette un œil là-dessus. »

Son amie se rua à côté d’elle et regarda l’écran, les sourcils froncés.

« Il y a un problème avec la banque ? »

« Je n’en ai pas la moindre idée. Je sais que l’argent du gala a été déposé samedi. »

Elle cliqua sur le compte pour obtenir plus d’informations. Sans surprise, il y avait une longueliste de chèques qui avaient été déposés deux jours plus tôt.

Mais il y avait un retrait de deux mille soixante-quinze dollars qui datait de ce matin-là qui attirason attention et qui lui donna la nausée.

Sherita prit le téléphone et le glissa dans la main de Kiana.

« Ma chérie, appelle-les tout de suite pour savoir ce qui s’est passé avec ton argent. »

Ce n’était pas son argent. C’était celui de la fondation. Il appartenait à tous ces enfants que sonpère voulait protéger en leur offrant des casques et des protections appropriés. Il appartenait à ceux

qui en avaient vraiment besoin, et pas à elle. Et pourtant, lorsqu’elle eut quelqu’un de la banque àl’autre bout du fil, elle dit d’une voix tremblante : « Je suis Kiana Dyer de la Fondation MarshallDyer, et apparemment il y a un problème avec mon compte. »

La personne répondit à ses questions. Mais au fur et à mesure que les informations tombaient, sonestomac se soulevait de plus en plus.

Quelqu’un qui avait accès au compte avait retiré l’argent.

Et cela voulait dire qu’il s’agissait soit de Denise, soit de Tre.

***

Frank sortait juste de la douche lorsque son téléphone se mit à sonner. L’identifiant de l’appelantlui indiqua qu’il s’agissait de Kiana et il décrocha, espérant entendre l’accent doux et sexy dans savoix qui suggèrerait qu’ils se retrouveraient plus tard dans l’après-midi.

Au lieu de cela, il entendit de la panique dans sa voix.

« Frank, est-ce que tu sais où est Tre ? »

« Non, pourquoi ? »

Un juron étouffé lui répondit et il sentit les muscles de sa nuque se tendre.

« Kiana, qu’est-ce qui ne va pas ? »

« Il faut que je trouve Tre. »

« Il y a un problème ? Ta mère… ? »

Il se reprit. Kiana ne lui avait pas parlé du passé de sa mère biologique et il n’était pas sûr qu’elleconsidère Mme Dyer comme sa mère.

« Non, Denise va bien. »

Une grande inspiration se fit entendre et il imagina la jeune femme en train de se mordre la lèvreinférieure comme elle le faisait à chaque fois qu’elle essayait de prendre une décision importante.

« Ça a un rapport avec la fondation. »

« Est-ce que je peux faire quelque chose pour aider ? »

« Je… »

« Ne me mets pas de côté », l’interrompit-il au moment où il entendit la pointe d’hésitation dans savoix. « Je suis aussi impliqué que toi. »

« Je sais, c’est ce qui rend tout ce bordel encore plus compliqué. »

Elle soupira.

« Viens à mon bureau et je te dirai ce qui se passe. Je ne veux pas en parler au téléphone. »

« J’arrive le plus vite possible. »

« Et Frank, si tu peux mettre la main sur Tre, j’aimerais bien. »

« Je le ferai. »

Il raccrocha et il s’habilla en un temps record tout en appelant Tre à trois reprises. La troisièmefois, il laissa un message.

Tre, c’est Frank. Kiana se fait du souci pour toi. Appelle-la dès que tu peux. »

Voilà. Rien de trop extrême, même s’il avait envie d’étrangler son ami pour avoir poussé Kiana às’inquiéter autant. Juste un message qui, il l’espérait, convaincrait Tre d’appeler sa sœur.

Mais lorsqu’il arriva au bureau de Kiana, les rides sur le visage de cette dernière lui apprirent queTre n’avait toujours pas appelé. Les cercles sombres qui s’étalaient sous les yeux de la jeune femmelui disait qu’elle avait suffisamment pleuré pour ruiner son maquillage, quelque chose qu’il ne l’avaitjamais vu faire. La femme calme et sûre d’elle qu’il connaissait avait disparu, laissant à la place unefemme épuisée, proche du point de rupture.

Elle se jeta dans ses bras.

« Merci mon Dieu, tu es là. Je ne sais pas quoi faire. »

« Commence par le début alors. »

Il déposa un baiser sur son front et il la guida jusqu’au canapé.

« Tre a pris l’argent. »

Il se frotta les oreilles, se demandant s’il avait bien entendu.

« Tre a fait quoi ? »

« L’argent de vendredi soir… il a disparu. »

Son estomac se retourna comme s’il venait d’ingérer une dizaine de hot-dogs en moins d’uneminute.

« Mais tu as vérifié le compte samedi et tu as dit qu’il avait déposé les chèques. »

« Il l’a fait, mais quelqu’un a retiré quasiment tout l’argent du compte de la fondation ce matin. Iln’y a que trois personnes qui ont accès à ce compte. Denise, Tre et moi. »

Des images des photos d’identité au poste de police de la mère biologique de Kiana surgirent dansl’esprit de Frank. Extorsion. Fraude.

Pourtant, un regard au visage désemparé de la jeune femme fit taire tous ses doutes avant qu’ils nepuissent prendre forme. La Kiana qu’il avait appris à connaître ne s’abaisserait pas à de telleschoses. Il avait suffisamment été témoin de sa passion et de son dévouement envers la fondation poursavoir qu’elle ne serait jamais celle qui volerait quoi que ce soit aux enfants qu’elle voulait aider.C’était ce qui l’avait encouragé à se proposer pour le gala de charité, et c’était une des nombreuseschoses qui faisaient qu’il était tombé amoureux d’elle.

Amoureux.

Bon sang. Ce mot le prit de court. Mais dès qu’il eut admis qu’il s’agissait de la réalité, sa poitrinese remplit d’émotions au point d’être prête à exploser. Il était tombé amoureux d’elle au fil du temps,

et cela le frappait comme un linebacker attaquant un quarterback de côté.

« Tu as parlé à Denise ? »

Elle secoua la tête et deux larmes se mirent à couler sur son visage.

« Je ne veux pas la mettre dans tous ses états. »

« Et tu es sûre que Tre a pris l’argent ? »

Elle acquiesça.

« Sûre à quatre-vingt-dix-neuf pour cent. Pourquoi mon frère ferait-il quelque chose comme ça ? Jesais qu’il y a toujours eu une espèce de rivalité entre nous, mais c’était le rêve de notre père. »

Frank se frotta les genoux avant de se lever. Les soupçons s’infiltraient dans sa colonne et semêlaient au frisson qui parcourait ses os. Tre lui avait demandé de ne pas dire qu’il avait été évincéde l’équipe, mais ce n’était pas un secret qui méritait d’être passé sous silence.

« Tre a été remercié de l’équipe vendredi. »

Elle ouvrit la bouche, mais aucun son ne sortit.

« Il m’a demandé de ne rien dire avant la fin du gala, mais si tu cherches un mobile, tu en as un. »

Elle grimaça comme une personne obligée d’accepter une vérité douloureuse.

« Quoi qu’il en soit, on doit quand même le trouver. »

« Je lui ai laissé un message pour lui dire qu’il te rappelle. »

Elle eut un rire amer.

« Super. Il sera perdu dans les dizaines de messages vocaux et de SMS que je lui ai laissés. »

« Tu es allée chez lui ? »

« Sherita y est allée. Sa voiture n’est pas là. »

Il fit les cent pas dans la pièce, sans cesser d’essuyer ses paumes moites sur son jean.

« Alors il faut que tu utilises les grands moyens. »

Kiana se leva du canapé et l’arrêta.

« De quoi tu parles ? »

« Si la presse entend parler de tout ça, ils se feront un plaisir de démonter la fondation, et ilsn’auront aucun scrupule pour te montrer du doigt à cause de l’histoire de ta mère biologique. »

Elle écarquilla les yeux et elle recula en trébuchant.

« Comment tu sais ça ? »

« Mon frère a engagé un détective privé pour enquêter sur toi. »

Il baissa la tête, incapable de supporter la douleur et la trahison dans les yeux de la jeune femme,et il enfonça ses mains dans ses poches.

« Je lui ai dit que rien de tout ça ne comptait pour moi, mais il se disait que je devais faireattention avant de trop m’engager. »

Elle serra la mâchoire, mais elle se contenta de hocher la tête.

« Si cela peut faire une quelconque différence, je me suis arrêté quand j’ai lu l’article… »

Il s’interrompit et il jura entre ses deux.

« Putain, Kiana, je n’avais pas besoin de lire tout ça, parce que ça n’a aucune importance pourmoi. Je te connais et j’ai détruit le reste des documents sans les lire. Mais je me suis dit qu’il fallaitque je te le dise. »

Elle se leva et elle regarda par la fenêtre, les bras croisés sur sa poitrine, puis elle tourna denouveau les yeux vers lui.

« Alors qu’est-ce que tu me suggères de faire ? »

« Appelle la police. »

Chapitre Seize

Kiana arrêta de respirer, ce qui augmenta les battements de son cœur dans sa poitrine gonflée.

« C’est mon frère, Frank. »

« Je sais, mais tu dois faire quelque chose maintenant avant qu’il ne s’enfuie et que tu te retrouvesà devoir gérer tout le bordel. »

Frank se rapprocha d’elle et posa ses mains sur les épaules de la jeune femme.

« Je sais que c’est difficile, et si c’était un de mes frères, je me dirais la même chose, mais tu doisle tenir pour responsable de ses actions. »

« Mais si je le dénonce à la police, ils vont l’arrêter et la fondation en souffrira quand même. »

« Pas si tu peux récupérer l’argent. »

Frank prit les joues de Kiana ses mains et la força à lever son menton.

« Plus tu attends, Kiana, plus les choses vont empirer. Tu peux le faire. Et je serai avec toijusqu’au bout. »

Elle ne savait pas si elle devait rire ou pleurer. Il était en train de lui ressortir ses propres paroles.Seulement il s’agissait là d’une situation bien pire qu’une simple pirouette sur une piste de danse. Etpourtant, la détermination dans la position des épaules du jeune homme lui indiquait qu’il n’allait pasl’abandonner. Même si elle avait été extrêmement en colère en apprenant qu’un détective privé avaitcreusé pour déterrer tous les détails sordides de son passé, cette émotion avait diminué lorsque Frankavait avoué avoir déchiré les documents sans les lire. Il ne se souciait pas de son passé et il était àses côtés quand les problèmes frappaient à sa porte.

Elle enleva les mains du jeune homme de son visage, puis elle hocha la tête.

« Alors tiens ma main pendant que je le fais. »

Elle ajouta dans un doux murmure : « Je t’en prie. »

Il entrelaça ses doigts avec les siens et il lui fit un sourire compatissant.

Elle tremblait en composant le numéro de la police. Sa voix ne s’en tira pas mieux lorsqu’elleparla à un agent qui lui dit qu’il contacterait un agent du FBI pour lui communiquer les informationsqu’elle lui donnait.

En raccrochant, elle avait envie de vomir. Elle ne valait pas mieux que les frères de Joseph dans laBible. Elle avait nui à son frère. Elle avait tout simplement demandé à la police de l’arrêter, toutcomme elle l’avait fait pour Malcolm. Et elle avait des doutes quant au fait que Tre pourrait un jourla pardonner.

La seule chose qui lui permettait de garder les pieds sur terre, c’était la main ferme et solide quientourait la sienne. Frank était toujours là, avec elle. Et lorsqu’elle eut terminé, il la prit dans sesbras et il la serra contre lui.

« Je ne peux qu’imaginer à quel point ça a dû être dur pour toi, mais tu as fait ce qu’il fallait. »

« J’espère que tu as raison. »

Elle n’avait aucun idée de combien de temps s’était écoulé, mais la sonnerie stridente de sontéléphone la ramena à la réalité. Elle regarda l’écran en priant en silence pour que l’appel vienne deTre, mais ce fut le numéro de Denise qui s’afficha.

« Qu’est-ce que c’est que cette histoire de Tre qui aurait pris l’argent de la fondation ? », demandasa belle-mère dès qu’elle décrocha.

Un chapelet de jurons traversa son esprit, mais elle n’osa pas les prononcer face à Denise.

« Comment tu as su ? »

« Ça passe aux infos, et ils demandent aussi d’appeler l’agence du FBI de Géorgie si on le voit. Jeme suis dit que je faisais un rêve éveillée, mais quelqu’un du FBI m’a appelée pendant que ça passaità la télé. »

L’estomac de Kiana se tordit et elle ferma les yeux pour empêcher la nausée de prendre le dessus.Comment les médias avaient-ils eu vent de tout cela ? Et pire encore, à quel point la fondation serait-elle impactée par les actions de Tre ?

« Je suis allée au travail ce matin, et je me suis rendue compte qu’une grosse somme d’argent devendredi soir manquait sur le compte, et on n’est que trois à avoir accès à ce compte. »

« Grand Dieu, qu’est-ce que garçon a encore fait maintenant ? »

Kiana lui donna autant d’explications qu’elle le pouvait, ajoutant également qu’il avait été licenciéde l’équipe et qu’il était à présent au chômage. Cela lui donnait un mobile, mais pourquoi avait-ilpris une telle somme ?

« Au moins, il y a un petit côté positif dans tout ça. »

« Et lequel ? », demanda Denise.

« L’argent qui vient des enchères en ligne n’a pas encore été déposé sur notre compte, alors onaura toujours quelque chose à donner aux enfants. »

« Oh, ma chérie », dit la belle-mère de Kiana. « Si je pouvais je viendrais et je te ferais un groscâlin, mais on m’a dit d’attendre ici jusqu’à ce que des agents du FBI arrivent pour me poser desquestions. »

« Je suis désolée pour tout ça, maman. Je sais que tu ne prendrais pas un centime à la fondation. »

« Ne t’excuse pas, ma chérie. Ça fait partie de la procédure. »

Le son étouffé d’une sonnette retentit derrière elle.

« Quand on parle du loup, je crois que les agents sont ici. »

Kiana leva les yeux et elle vit un homme et une femme en costumes qui se tenaient à la porte de sonbureau.

« Pareil ici. Je te dirai si j’apprends quelque chose. »

« Sois forte. »

Denise raccrocha et Kiana fit face aux visiteurs.

L’homme présenta un badge.

« Agent spécial Phillips du FBI. Voilà l’agent spécial Sculler du GBI1. »

La femme tendit un badge différent portant l’insigne de l’état de la Géorgie.

Kiana réussit à rester debout, même si ses genoux tremblaient sous elle. Dieu merci, Frank était làpour l’aider à rester stable. Elle leur tendit la main.

« Kiana Dyer. Merci d’être venus. »

L’après-midi passa en un clin d’œil tandis que les agents les questionnaient tous les deux, Frank etelle. Ils répondirent aussi honnêtement que possible, mais cela n’empêcha pas les agents deconfisquer son ordinateur portable et son ordinateur de bureau en tant que preuves à conviction. À unmoment donné, l’agent Sculler sortit du bureau pour parler à Sherita. Lorsque les agents partirent, lanuit était tombée et le paysage d’Atlanta scintillait à travers la fenêtre.

Elle posa sa tête sur l’épaule de Frank.

« J’ai dû témoigner plus de fois que je n’oserais les compter, mais cette fois c’était la plus dure. »

« Pourquoi ça ? », demanda-t-il en l’attirant vers lui pour la serrer dans ses bras.

« Avant, je savais qui étaient les méchants, et je n’avais aucun problème pour m’assurer qu’ilsobtiennent ce qu’ils méritaient. Mais mon frère ? »

Elle sentait ses yeux picoter et sa voix se brisa.

« Je pense qu’il y a un niveau spécial en enfer réservé pour ceux qui trahissent leur famille. »

« Si c’est le cas, tu n’y a pas ta place. »

Frank leva le visage de Kiana et fit courir son pouce sur la lèvre inférieure de celle-ci.

« Tu n’as rien fait de mal. »

« Alors pourquoi je me sens si coupable ? »

« Parce que tu as un grand cœur qui voit le bien chez tout le monde. Même chez un raté commemoi. »

« Tu n’es pas un raté, Frank Kelly. »

« Bien, parce que j’ai l’impression d’en être un chaque fichue journée qui passe. »

« Je ne pense pas que Savannah te vois de cette manière. »

Il posa sa main sur les fesses de la jeune femme et il l’attira de nouveau contre lui. Un sourireespiègle plissa le coin des yeux de Frank.

« C’est bien, mais je suis beaucoup plus intéressé par ce que pense sa maman sexy. »

« Tu sais déjà ce que sa maman pense. »

Mais juste pour le rassurer, elle lui donna un baiser en espérant que celui-ci soulagerait toutes lesinquiétudes qu’il pouvait avoir. Elle l’aimait. Elle l’aimait parce qu’il avait aidé la fondation. Ellel’aimait parce qu’il adorait sa fille. Elle l’aimait parce que pendant cette journée, il avait été son rocalors que la plupart des hommes se seraient enfuis en courant une fois que les choses se seraientenvenimées. Et peut-être qu’elle n’était pas tout à fait prête à l’exprimer par des mots, mais ellepouvait définitivement le faire à travers ses actes.

Il mit fin au baiser, aussi haletant qu’elle l’était.

« Continue comme ça, et on pourrait à nouveau finir sur le canapé. »

L’idée d’une petite séance de sexe anti-stress la tenta, mais alors que son pouls ralentissait, unbrouillard de fatigue épais commença à tomber sur elle.

« Ça me plairait beaucoup, mais je suis sur les rotules et Savannah attend que je rentre à la maison.»

« Je comprends. »

Il déposa un baiser sur son front et il ramassa la mallette de la jeune femme.

« Pourquoi je ne te ramènerais pas à la maison ? »

Elle hocha la tête sans même essayer de discuter. Elle avait vu les camions de la presse garés dansla rue, espérant pouvoir l’apercevoir. Heureusement, entre l’agent de sécurité au rez-de-chaussée etSherita, personne n’avait pu entrer dans son bureau.

La journée l’avait vidée de ses forces. Tout ce qu’elle voulait, c’était se rouler en boule autour desa petite fille et espérer que le monde serait meilleur pour elle le lendemain.

Une fois qu’ils eurent dépassé les journalistes, le trajet jusqu’à chez elle se fit dans le silence.Frank semblait comprendre pourquoi elle n’était pas d’humeur à parler et il la laissait respirer. Unequestion continuait de tourner dans sa tête tandis qu’ils avançaient dans les rues d’Atlanta.

Pourquoi ?

Pourquoi Tre avait-il fait cela ? Est-ce qu’il avait eu peur d’être parce que l’équipe l’avait évincé? Ou est-ce qu’il y avait une autre raison qui expliquait ce qu’il avait fait ? Et s’il lui donnait unebonne raison, serait-elle capable de le pardonner ?

Frank saisit le code de sécurité pour le parking et se gara sur une place visiteur.

« Tu veux que je monte avec toi ? »

Elle secoua la tête.

« Merci, Frank, mais j’ai juste envie d’être seule là. »

« Si tu changes d’avis, il te suffit de m’appeler. »

Son sourire optimiste atteignit le cœur de la jeune femme et elle serra sa main en réponse.

« Je sais. »

Elle sortit de la voiture et elle se dirigea lentement vers son appartement d’un pas lourd. Elle

n’avait jamais été une grande buveuse, mais ce soir-là exigeait définitivement un verre deChardonnay. Lorsqu’elle arriva chez elle, elle entra le code et la porte s’ouvrit en grand.

Une main la saisit et la tira sèchement à l’intérieur.

Le monde se mit à tourner en cercles déroutants tandis qu’elle trébuchait dans l’entrée. La porte sereferma en claquant derrière elle. Son cœur bondit dans sa gorge et il s’arrêta complètement de battrelorsque le barillet froid en métal d’un pistolet appuya contre sa tempe.

Et de l’autre côté de l’arme, Tre la regardait, des gouttes de sueur le long de sa lèvre supérieure.L’odeur de l’alcool imprégnait son haleine, mais ses paroles furent tout sauf inarticulées.

« Il faut qu’on parle. »

1 GBI : Agence du FBI de la Géorgie (Acronyme : Georgia Bureau of Investigation)

Chapitre Dix-Sept

Frank attendit dans la voiture que Kiana entre dans son immeuble, mais même alors il n’arrivait àse décider à partir. Elle essayait tellement d’être courageuse et forte que tout ce qu’il voulait faire,c’était la bercer dans ses bras jusqu’à ce qu’elle s’endorme. Une partie de lui espérait qu’ellechangerait d’avis et qu’elle l’appellerait une fois qu’elle serait arrivée en haut.

Lorsque dix minutes se furent écoulées sans un mot, il décida de céder et de démarrer le moteur desa voiture. Il décrivit des cercles dans le parking avec une lenteur agonisante, en espérant à chaquetour qu’elle appellerait.

Mais lorsqu’il aperçut une Ferrari rouge avec une plaque d’immatriculation portant l’inscriptionWide out1, il sentit son sang se glacer.

La voiture de Tre.

Frank passa brusquement en marche arrière et se gara sur la place libre la plus proche, sans sesoucier le moins du monde de savoir si elle appartenait à un des résidents de l’immeuble. Il courutvers la porte d’entrée, mais sa main était trop grande pour passer pour celle de Kiana.

Merde !

Il était enfermé à l’extérieur de son immeuble et son frère était en train d’attendre pour faire Dieusait quoi avec elle. Si Tre savait que la police le recherchait, alors sa présence ici n’avait rien d’unegentille visite de la part d’un membre de la famille.

La police.

Frank sortit la carte que l’agent Phillips lui avait donnée et il composa le numéro qui y était inscrit.

« Agent spécial Phillips », répondit l’homme avec le même ton sec et direct qu’il avait utilisé toutau long de l’interrogatoire au cours de l’après-midi.

« C’est Frank Kelly. Vous cherchez Tre ? Eh bien je l’ai trouvé. Il est chez Kiana. »

« On arrive tout de suite. Quoi que vous fassiez, ne vous fiez à aucun d’eux. D’après ce qu’on sait,elle aurait pu le cacher là-bas toute la journée. »

Le doute dans la voix de l’agent lui donna la nausée. Kiana ne se serait jamais rendue compliced’une fraude. Et pourtant, en se basant sur les antécédents criminels de sa mère biologique, ilcomprenait pourquoi l’agent pouvait envisager cette possibilité.

« Est-ce que vous m’avez bien entendu, Kelly ? Restez là où vous êtes. »

Comme s’il allait rester ici alors que Kiana était en danger.

« Je vais essayer. »

Alors qu’il raccrochait, il entendit l’agent l’exhorter à rester en dehors de tout cela, mais cela nefaisait aucune différence. Il avait besoin de savoir qu’elle allait bien.

Le numéro de téléphone qu’il composa ensuite fut celui de la jeune femme, et à chaque sonnerie il

priait pour qu’elle réponde.

***

Kiana restait immobile comme une statue ; les seuls mouvements de son corps venaient desbattements frénétiques de son cœur et des regards qu’elle lançant dans la pièce à la recherche deSavannah. Des souvenirs de la nuit où sa mère avait été assassinée remplissaient son esprit, chacund’entre eux faisant trembler ses mains encore plus. Elle ne voulait en aucun cas que sa fille soittémoin de mêmes choses qu’elle.

« Je t’en prie, Tre », murmura-t-elle d’une voix peu assurée, « Où est Savannah ? »

« J’ai dit à Madison de l’emmener avec elle dans la chambre d’enfant et de rester là-bas jusqu’àce qu’on ait terminé. »

Kiana poussa un petit soupir de soulagement. Peu importe ce que Tre avait prévu de faire avecelle, au moins Savannah ne le verrait pas.

« Merci. »

Il fixa de nouveau son attention vers elle, mais heureusement il baissa son arme.

« Pourquoi tu as fait ça ? »

« Je pourrais te demander la même chose. »

Elle prenait soin de parler calmement et doucement sans cesser de le regarder droit dans les yeux.Cela valait mieux que de lui laisser voir à quel point elle était terrifiée.

Il retroussa les lèvres et il plissa les yeux.

« J’allais rendre l’argent. »

Au moins, il ne niait pas le fait d’avoir pris l’argent. Avec un peu de chance, elle pourrait mêmedécouvrir pourquoi il avait ressenti le besoin de voler la fondation de leur père.

« Je t’écoute. »

Aucun jugement.

Aucune question.

Juste une simple phrase pour lui faire comprendre qu’elle voulait connaître sa version del’histoire.

Cela sembla fonctionner. Il se passa la main sur le visage.

« J’étais dans la merde, Kiki », commença-t-il en utilisant le surnom qu’il lui avait donnélorsqu’ils étaient enfants.

Elle garda ses mains le long de son corps, effrayée à l’idée que si elle tendait les bras pourl’enlacer comme elle avait envie de le faire, il interprète mal son geste et qu’il tire.

« Pourquoi tu ne me l’as pas dit, tout simplement ? »

« Parce que… »

Il inspira et il regarda le plafond, clignant des yeux rapidement comme s’il essayait de retenir deslarmes.

« Ma chance a tourné, et si je ne rembourse pas Malcolm, il va s’en prendre à Savannah et à toi.C’est-à-dire à ce qui compte pour moi. »

« Tu as emprunté de l’argent à Malcolm ? »

« Ouais, il y a longtemps, avant que je sache ce qu’il te faisait. »

Il renifla et il finit par la regarder de nouveau droit dans les yeux.

« Ce soir-là, s’il est venu dans la boîte, c’était parce qu’il me cherchait. J’essayais de trouver unmoyen de me procurer l’argent. J’étais en veine, mais j’ai tout perdu sur la carte d’après. Ensuite,quand on m’a viré de l’équipe, je n’avais plus d’options.

Le soir du gala, je suis rentré chez moi et je l’ai trouvé en train de m’attendre. Il a dit qu’il avaitbesoin de l’argent pour ses factures médicales et pour son avocat. Mais il a dit qu’il laisserait passersi je lui disais où il pouvait vous trouver, Savannah et toi. »

L’estomac de la jeune femme se noua. Son avocate, Tasha, s’était assuré que la caution de Malcolmétait suffisamment élevée pour qu’il ne puisse pas la payer. Et pourtant, il avait réussi à le faire. Et ilétait dehors, quelque part, en train d’essayer de se venger.

« Je ne savais pas quoi faire d’autre. »

Tre passa de nouveau sa main sur son visage.

« Je n’allais pas le laisser te refaire du mal. Pas après ce qu’il t’a déjà fait. Et si je lui avais dit oùvous étiez toutes les deux, qui sait ce qu’il vous aurait fait. »

Cela n’aurait probablement pas été très différent de ce que Tre était en train de faire. Elle ravalasa remarque glaciale et elle hocha la tête.

« Alors je lui ai montré les chèques et je lui ai demandé d’attendre jusqu’à aujourd’hui. Je lui airendu les cent mille dollars que je lui devais, et le reste j’allais l’emmener avec moi à Vegas pourvoir si je pouvais gagner et récupérer l’argent avant que tu ne te rendes compte de sa disparition. »

Il se tourna vers elle, arborant une expression sincère comme s’il pensait que ses actions étaientexcusables.

« J’allais rendre l’argent, Kiana. Tout. Et puis ensuite… »

« Pourquoi tu n’as pas demandé à maman qu’elle te prête de l’argent ? »

« J’étais trop gêné. Tu sais ce qu’elle pense des jeux d’argent et j’étais déjà trop au fond du trou. »

« Mais tu sais qu’elle t’aurait aidé à t’en sortir. L’amour d’une mère est inconditionnel. »

Denise lui avait montré que c’était vrai plus de fois qu’elle ne pouvait les compter, et elle nepartageait pourtant pas le même sang.

« Non. J’avais un plan. Et c’était censé fonctionner. »

Il éleva la voix, rempli de colère, et il braqua de nouveau l’arme sur Kiana.

« Jusqu’à ce que tu décides de me dénoncer aux flics. »

La bouche de la jeune femme devint sèche et elle lutta pour garder une voix calme.

« Qu’est-ce qui t’as fait penser que c’était moi ? »

« Ça ne pouvait être que toi. Personne d’autre n’aurait remarqué que l’argent avait disparu. J’allaisprendre mon avion pour Las Vegas et ils n’ont pas voulu me donner ma carte d’embarquement. Oh, ilsont essayé d’être discrets, mais j’ai entendu un d’entre eux appeler les flics. Et c’est comme ça quej’ai su que tu m’avais dénoncé. Tu m’as trahi. »

Non, Tre, c’est toi qui m’as trahie. Elle mourait d’envie de dire ces mots, mais à en juger par laproximité du doigt de son frère par rapport à la gâchette, cela ne lui vaudrait que de se faire tirerdessus.

La sonnerie de son téléphone déchira le silence, et ils sursautèrent tous les deux. Les premièresnotes de Bad to the Bone 2résonnèrent dans l’appartement.

La sonnerie de Frank. Il lui avait dit qu’il s’agissait de la sonnerie que son frère aîné lui avaitattribuée, et elle avait fait de même pour plaisanter.

Seulement maintenant, il n’y avait pas matière à rire.

Par un petit miracle, Tre ne tira pas sur elle, mais il baissa le barillet vers son sac à main.

« Ne réponds pas. »

« Mais c’est Frank. »

Elle sortit lentement le téléphone et elle lui montra l’écran avec l’identité de l’appelant.

« Si je ne réponds pas, il saura qu’il y a un problème. »

Le corps de Tre ondula comme celui d’un petit enfant en plein accès de colère, complété par despiétinements.

« Merde ! D’accord. Réponds-lui, mais ne lui parle pas de moi. Tout va bien ici. Compris ? »

Il leva l’arme vers elle, et les conséquences en cas de désobéissance de sa part devinrent trèsclaires.

Elle appuya sur le bouton pour répondre à l’appel et elle plaça le téléphone contre son oreille.

« Kiana, est-ce que Tre est avec toi ? »

L’urgence dans la voix de Frank faillit presque causer la perte de la jeune femme. Des larmess’agglutinèrent aux coins des yeux de cette dernière, et elle se couvrit la bouche pour étouffer lesanglot qui voulait s’en échapper. Une seconde plus tard, elle avait retrouvé suffisamment de sang-froid pour dire : « Oui, Frank ? »

Elle rendit sa voix plus aigüe sur la fin afin que Tre pense qu’elle répondait à l’appel plutôt qu’àla question de Frank.

Celui-ci jura.

« Tu vas bien ? »

« Je suis désolée, Frank, mais non. »

Elle lança un regard vers Tre pour voir s’il se laissait berner par sa comédie.

« Ce soir ce n’est pas un bon soir. »

Encore des jurons.

« Je monte. »

« Non, je n’en prie, non. Je suis épuisée. »

Un silence suivit, et elle imagina Frank en train d’assembler les pièces du puzzle.

« Bon sang, Kiana, est-ce qu’il a un flingue ? »

« Absolument. »

Elle regarda le barillet et elle ajouta : « Peut-être qu’on pourrait se retrouver pour dîner dans lasemaine. »

Tre leva les yeux au ciel et lui fit un geste pour lui indiquer de se dépêcher.

Une partie de la terreur qui bloquait la gorge de la jeune femme disparut. Au moins, son frèren’avait pas la moindre idée de ce qui s’était vraiment dit.

« L’agent Phillips est en chemin. Trouve un endroit où tu seras à l’abri si tu peux. Et pareil pourSavannah. »

« Bien sûr. »

Elle lança de nouveau un regard vers Tre.

« Je dois y aller. Savannah a besoin de moi, mais… »

Sa voix se brisa, et une nouvelle peur naquit. Il était possible qu’elle ne puisse plus jamais parlerà Frank, et elle avait besoin de lui dire ce qu’elle ressentait tant qu’elle le pouvait encore.

« Je t’aime. »

Elle raccrocha avant qu’il y ait une pause embarrassée entre eux. Elle voulait croire qu’il l’aimaitlui aussi. Il valait mieux s’accrocher à cet espoir que de se voir présenter une vérité toute autre.

« Qu’est-ce Frank voulait ? », demanda Tre.

« Il voulait nous emmener dîner, Savannah et moi. »

Un mensonge, mais un que Tre devait croire si elle voulait se sortir de tout cela vivante.

« Je l’ai convaincu que ce soir ça ne serait pas possible. »

« C’est bien, tu es intelligente. Maintenant, éteins ton téléphone et donne-le-moi. »

Elle obéit et elle attendit les prochaines instructions de son frère. Si elle arrivait à le faire parlerjusqu’à l’arrivée du FBI, alors peut-être… juste peut-être… peut-être qu’elle vivrait assez longtempspour voir le soleil se lever.

***

Frank regarda fixement dans le vide tandis que le fredonnement glacial de la tonalité remplissaitses oreilles. Une seconde plus tôt, la voix de Kiana était à l’autre bout du fil. Elle était en vie, maiselle était aussi en danger. Mais ce n’était rien comparé aux trois derniers mots qu’il avait entendus desa part.

Elle l’aimait.

Il avait senti sa poitrine se serrer lorsqu’il l’avait entendu dire ça. Il expira et il se laissa emporterpar ses vertiges.

Kiana l’aimait, et en cet instant, il savait que lui aussi il l’aimait.

Seulement elle lui avait volé sa chance de le lui dire en raccrochant.

Il chercha le numéro de l’agent Phillips et il le rappela.

« Dépêchez-vous d’arriver. Tre est chez elle, et il est armé. »

« Compris », répondit Phillips sans une once d’urgence dans la voix. « On prendra ça en compte. »

L’agent raccrocha et Frank se retrouva debout devant la porte fermée qui se moquait de lui. Ildevait y avoir un autre moyen d’entrer dans l’immeuble. C’est alors qu’il se rappela de l’agent desécurité dans le hall d’entrée et qu’il courut vers la porte d’entrée principale.

Tandis qu’il allait du parking vers la rue, il repensa à sa conversation avec Kiana. Elle avait étéintelligente, et elle lui avait parlé de manière codée pour répondre à ses questions tout en faisantsemblant de parler d’autre chose. Il avait ainsi appris que Tre était dans la même pièce qu’elle etqu’il écoutait la conversation.

Une nouvelle vague de peur le submergea et il accéléra. Il devait la sauver. Il devait lui dire cequ’il ressentait pour elle, pour Savannah et pour tout le reste. Mais s’il attendait que le FBI arrive, ilserait peut-être trop tard. Et si Tre en était averti pour une quelconque raison…

Cette pensée le fit ralentir tandis qu’il approchait du hall de l’immeuble de Kiana. Il se força àentrer calmement dans le bâtiment comme il l’avait fait pendant le week-end avec Kiana et Savannah.Il fit un geste de la main à l’attention de l’agent de sécurité.

Heureusement, c’était le même agent qui était en fonction, et ce dernier lui répondit lui aussi par ungeste de la main.

Premier obstacle franchi avec succès. À présent, au suivant.

Il essaya de se rappeler du code que Kiana avait saisi pour l’ascenseur et il le trouva à sadeuxième tentative. À l’intérieur de l’ascenseur, il n’y avait pas de bouton. Il amenaitautomatiquement les occupants aux étages qui correspondaient aux codes saisis. Lorsqu’il s’arrêta àl’étage de la jeune femme, Frank hésita.

Ce n’était pas comme le soir de la boîte de nuit où il avait agi instinctivement et où il avait lancédes coups à l’aveugle. Cette fois, il connaissait les personnes qui se trouvaient à l’intérieur. C’étaitdes personnes auxquelles il tenait. Et il connaissait les enjeux. Un seul faux pas et quelqu’un pouvait

mourir.

Il songea à attendre que le FBI arrive, mais lorsque les portes commencèrent à se fermer, il avançasa main pour les arrêter.

Négociation. C’était ce que cette situation exigeait. Pas une embuscade.

Il sortit de l’ascenseur et il essuya ses mains sur son jean. Il aurait donné n’importe quoi pouravoir Ben ou Dan avec lui. Ses deux frères aînés avaient toujours joué les médiateurs entre ses frères.Ben était les muscles et Dan le cerveau. Ensemble, ils pouvaient toujours mettre un terme aux conflitsquand les choses s’envenimaient ou qu’elles en venaient aux poings.

Il appuya son oreille contre l’acier glacial de la porte de Kiana et il écouta.

Des voix étouffées lui parvenaient de l’intérieur. Il n’arrivait pas à les comprendre, mais cela luioffrait suffisamment d’informations. Kiana était de l’autre côté, et il en allait probablement de mêmepour Tre.

Une seconde plus tard, il se surprit à espérer que Savannah n’était pas dans la pièce. Il venait justede faire la connaissance de la petite fille de Kiana, mais il s’inquiétait déjà pour elle comme si elleétait son propre enfant.

Merde, je suis vraiment à fond.

Mais s’il pouvait faire sortir les deux femmes qu’il aimait de cette situation, il ne perdrait pas detemps pour leur dire à quel point elles étaient précieuses à ses yeux.

La voix de Tre se fit plus forte et Kiana poussa un cri perçant. C’était tout ce qu’il avait besoind’entendre. Elle était en danger et il devait agir sur-le-champ.

Il saisit le code et il ouvrit la porte à la volée.

Tout autour de lui semblait bouger au ralenti.

Tre se tenait à environ trois mètres et il pointait une arme sur Kiana qui se trouvait dans la cuisine.

Tre se tourna pour faire face à Frank.

Ce dernier baissa la main et se précipita sur son ancien coéquipier.

Un coup de feu retentit dans la pièce, suivi par un bruit de verre brisé. Le cri d’une femme suivit.

Ils étaient de nouveau dans la boîte de nuit.

Mais cette fois, Kiana n’était pas là pour faire dévier les tirs.

Un autre coup de feu retentit et une ligne de feu déchira le haut de son bras.

Elle le déséquilibra juste assez pour qu’il ne puisse pas frapper Tre en plein milieu du ventrecomme ses entraîneurs le lui avaient appris. Au lieu de cela, il saisit son bras. Il le tordit et le tintserré, faisant tomber Tre avec lui.

Ils roulèrent sur le sol, mais Frank utilisa sa taille à son avantage et cloua Tre au sol, sous lui.

Une faible sonnerie venant de l’ascenseur attira son attention, mais il refusa de se laisser distraire

et de détourner son attention de l’homme qui se trouvait devant lui.

Un pincement de regret traversa sa poitrine lorsqu’il frappa le visage de son ami.

Puis, il saisit le bras de Tre qui tenait l’arme et il le tordit.

Il sentit des os se briser.

Il entendit le cliquetis de l’arme qui tombait sur le sol.

Frank regarda dans les yeux écarquillés de son ami, et il arma son bras.

« Arrêtez ! »

Au son de la voix de Kiana, il se figea, son poing à quelques millimètres du visage de Tre.

Des bruits de pas résonnèrent derrière lui, mais il ne se souciait que d’une seule personne dans lapièce.

Kiana se tenait dans la cuisine, des larmes coulant sur ses joues, tendant ses mains devant elle.

« Tout le monde, je vous en supplie, arrêtez. »

Frank se détendit et baissa ses poings.

Deux agents l’éloignèrent de Tre et procédèrent à l’arrestation de ce dernier, mais lui ne quittaitpas la jeune femme des yeux.

Elle était en vie, et c’était tout ce qui comptait pour lui.

Les agents du FBI traînèrent Tre vers la porte d’entrée, libérant l’espace entre Frank et Kiana.

Il courut vers elle et il la prit dans ses bras.

« Où est Savannah ? »

« Dans sa chambre, avec Madison. »

« Dieu merci. »

Il serrait Kiana tellement fort qu’il avait peur de la casser. Elle était douce et chaude, tellementvivante.

« Frank, tu es blessé. »

Elle le repoussa et elle montra une tache rouge qui grossissait sur la manche de sa chemise.

« Il faut qu’on aille aux urgences. »

« Je vais bien. »

Il essuya les larmes sur la joue de Kiana.

« Non, il faut que tu te fasses examiner, et ne t’avise pas de discuter avec moi. »

Elle leva son menton dans un geste d’obstination, et il ne put s’empêcher de sourire.

« Est-ce que tu as la moindre idée de combien je t’aime, »

Un sourire hésitant se forma sur les lèvres de la jeune femme.

« Tu m’aimes ? »

« Est-ce que je risquerais ma vie pour ta petite fille et toi si ce n’était pas le cas ? »

Le sourire de la jeune femme s’élargit et elle émit un son qui était un mélange entre un rire et unsanglot.

« Je ne sais pas, Roméo. J’ai juste entendu parler de ta réputation qui dit que tu lances desbagarres », taquina-t-elle.

« Tais-toi donc et embrasse-moi avant que je ne te prenne sur mon épaule et que je ne t’emmène aulit. »

Elle rit même si des larmes continuaient à rouler sur ses joues.

« Avec plaisir. »

Leurs lèvres venaient à peine de se rencontrer que l’agent Phillips s’éclaircit la gorge derrièreeux.

« Je vais avoir besoin de vos déclarations à tous les deux, de préférence avant l’arrivée desmédecins. »

Un filet de liquide chaud glissa sur le bras de Frank, et son biceps commençait à palpiter au fur età mesure que l’adrénaline déclinait. Il était prêt pour les médecins et pour leurs antalgiques.

« Bien sûr, agent Phillips. »

« Laissez-moi juste aller voir si ma fille va bien. »

Kiana retourna en courant dans l’appartement.

L’agent Phillips la suivit.

« Il y avait d’autres otages ? »

Frank entendit les babillages de Savannah depuis le couloir et ses dernières peurs s’envolèrent.Ses deux femmes allaient bien.

Et une fois que tout serait derrière eux, il s’assurerait qu’elles sachent combien elles comptaientpour lui.

1 Wide out : Receveur 2 Bad to the Bone : Chanson du groupe George Thorogood & Destroyers

Chapitre Dix-Huit

Kiana lissa les plis de sa robe en coton tandis que Frank se garait dans le vignoble deWoodinville, dans l’état de Washington. Le soleil de juillet frappait à travers les vitres, contrastantavec le temps pluvieux qu’elle avait toujours associé à Seattle.

« Est-ce que j’ai l’air bien ? »

« Ma chérie, tu es toujours belle, peu importe ce que tu portes. »

Bien sûr, la chaleur dans les yeux du jeune homme lui disait qu’il la trouvait encore plus joliequand elle ne portait rien du tout.

« Mais je veux faire une bonne première impression. »

Ils étaient là pour le mariage de Dan, le frère aîné de Frank. Elle sortit de la voiture et elle ouvritla portière arrière pour prendre Savannah, mais Frank avait été plus rapide.

« C’est la première fois que je rencontre ta famille après tout. »

« Et je n’arrête pas de te dire qu’ils vont adorer mes magnifiques petites femmes. »

Il chatouilla Savannah tout en la détachant du siège-auto.

« Pas vrai, mon petit bout. »

Savannah plissa le nez et fit un grand sourire en entendant le surnom que Frank lui avait donné, etelle tendit la main vers quelque chose qui se trouvait dans le veston de ce dernier.

« Joli ! »

« Oui, tu es jolie. »

Il repoussa la main de l’enfant.

« Non ! Joli ! »

Savannah donna de nouveau un petit coup sur le veston de Frank.

« Maintenant. »

Kiana se précipita vers eux et prit sa fille avant que le petit bébé de deux ans ne pique une crise decolère.

« Tu as une idée de ce qu’elle veut ? »

Frank répondit par un sourire penaud et se gratta l’arrière de la tête.

« Eh bien, je prévoyais de garder ça pour après le mariage, mais… »

« Mais quoi ? »

« Joli ! », insista Savannah qui tendit de nouveau la main vers la poche intérieure du veston.

Frank sortit un petit écrin en velours qu’il tendit à la petite fille.

« Ok, je suppose qu’on peut le donner à ta maman maintenant. »

Savannah fit un grand sourire et donna l’écrin à Kiana.

« Qu’est-ce que c’est ? », demanda cette dernière en se demandant si elle était prête pour ce quipouvait se trouver à l’intérieur.

« Quelque chose que Savannah m’a aidé à choisir. »

Il croisa les bras et il essaya d’avoir l’air fier de lui, mais les pointes rouges de ses oreillesrévélaient ses doutes.

« Ouvre-le. »

Kiana posa Savannah sans jamais quitter la petite boîte carrée des yeux. Elle l’ouvrit, les mainstremblantes. Niché à l’intérieur se trouvait le solitaire en diamant le plus parfait qu’elle ait jamais vu.Sa respiration devint irrégulière.

« Frank ! »

Lorsque son regard passa de la bague au jeune homme, elle le trouva agenouillé sur le sol en trainde tenir Savannah dans ses bras.

« J’ai déjà sa permission. Qu’est-ce que tu dirais d’un mariage à nous dans quelques mois ? »

Elle sentit ses yeux la piquer et sa voix se brisa sous le flot des émotions qui la submergeaient.

« Est-ce que tu es en train de me demander de t’épouser ? »

« Non, je te demande d’organiser un mariage pour moi », la taquina-t-il. « Bien sûr, tu seras lamariée et je serai le marié, et Savannah pourra me donner ta main. »

Elle ressentit un pincement au cœur. Son père n’était plus là. Tre était en prison pour avoirdétourné des fonds de la fondation, pour avoir tiré sur Frank et pour l’avoir prise en otage. Mais ellesavait déjà que Denise adorait Frank et qu’elle descendrait l’allée avec elle.

« Tu as pensé à tout, hein ? »

Il se leva et il la prit dans ses bras.

« J’y réfléchis depuis des mois. Le plus difficile ça a été de convaincre ta fille que j’étais un bonchoix pour toi. »

« Tu l’as toujours été. »

Elle appuya son front contre le sien.

« Et oui, je vais me marier avec toi. »

« Ça fait de moi l’homme le plus heureux sur terre. »

Il effleura ses lèvres avec les siennes pour un tendre baiser qui fut interrompu par un tapotementsur la jambe de la jeune femme et par une petite voix disant Joli.

Kiana rit et sortit la bague de l’écrin.

« Je ferais mieux de la mettre avant que Savannah n’essaye de me la voler pour elle. »

« Comme je te l’ai dit, elle m’a aidé à choisir. »

Frank prit la bague et la glissa à l’annulaire de la jeune femme.

« Magnifique, exactement comme mes deux femmes. »

Kiana le regarda dans les yeux, et elle sut qu’elle avait trouvé l’homme qu’elle attendait. Il lesaimait, elle et sa fille. Il lui donnait le sentiment d’être en sécurité. Et il faisait danser son cœur àchaque fois qu’il la regardait, qu’il la touchait et qu’il lui parlait doucement.

« Je t’aime. »

« Moi aussi, je t’aime. »

Il sourit et il tendit les bras vers Savannah.

« Et toi aussi, mon petit bout. »

Savannah gloussa et lui échappa, tout en ne cessant de regarder par-dessus son épaule. Elle ne vitpas la belle femme aux cheveux argentés qui se tenait devant elle.

Kiana sentit ses joues brûler lorsque sa fille heurta cette dernière, et elle se précipita pour aider lapetite fille à se relever.

« Je suis désolée pour ça », dit-elle à la femme.

« Tout va bien », répondit celle-ci en prenant Savannah dans ses bras. La petite fille se tut et elleétudia la femme plus âgée avec une expression sérieuse.

« Et qui est cette adorable jeune demoiselle, Frank ? »

« C’est Savannah, maman. »

Une nouvelle vague de gêne submergea Kiana. Savannah avait failli faire tomber sa future grand-mère.

« Je peux la reprendre si vous voulez. »

« Bien sûr que non. »

La mère de Frank fit un bisou esquimau1 à Savannah.

« J’ai tellement entendu parler de vous deux, et maintenant que j’ai une petite fille à gâter, je nevais pas la laisser partir. »

Savannah lui répondit par un grand sourire comme si elle comprenait exactement ce qui l’attendait.

La mère de Frank détourna son attention de Savannah.

« Je suis Maureen, la mère de Frank. Je suis ravie de faire enfin votre connaissance. »

« De même pour moi. »

« Si tu t’occupes de Savannah, maman, je vais escorter Kiana jusqu’à son siège. »

Frank prit la main gauche de la jeune femme pour la poser dans le creux de son bras, et la lumière

du soleil fit briller le diamant.

Les yeux de Maureen s’agrandirent, tout comme son sourire.

« C’est ce à quoi je pense ? »

Frank posa son doigt sur ses lèvres.

« Chut ! C’est la journée de Dan et de Jenny. »

Sa mère poussa un petit cri et fit rebondir Savannah dans ses bras.

« Laisse-moi être la première à vous féliciter. »

Puis elle tourna de nouveau son attention vers la petite fille.

« Et tu peux commencer à m’appeler mamie. »

Savannah cracha sa framboise, provoquant un autre rire ravi chez Maureen.

« C’est une vraie petite poupée, Kiana. »

La mère de Frank commença à marcher vers les rangées de chaises qui se trouvaient derrière levignoble tout en tenant Savannah dans ses bras.

« Je vais prendre tellement de plaisir à te gâter. »

Frank fit un clin d’œil à Kiana.

« Tu vois ? J’ai fait passer ça tout naturellement. »

« J’ai toujours su que tu étais un cas, Frank Kelly. »

« Et j’ai toujours su que tu étais celle qu’il me faut. »

Il couvrit sa main avec la sienne et il déposa un baiser sur sa joue.

« Prête à rencontrer le reste de la famille ? »

Elle s’arrêta et elle passa de nouveau sa main libre sur sa robe, mais Frank l’interrompit et lui fitlever le menton pour qu’elle le regarde.

« Je serai avec toi jusqu’au bout », dit-il avec une douce sincérité qui remplit Kiana d’unesensation de chaleur.

Ses dernières peurs s’envolèrent et elle sourit à l’homme avec lequel elle voulait passer le restede sa vie.

« Pareil de mon côté, Roméo. »

1 Bisou esquimau : Un baiser nez contre nez

In the Red Zone Copyright 2015 by Crista McHugh Edited by Gwen Hayes Copyedited by ElizabethMS Flynn Cover Art by Sweet N’ Spicy Designs Translation by Deborah Ilhe

All rights reserved. This book or any portion thereof may not be reproduced or used in any mannerwhatsoever without the express written permission of the author or publisher except for the use ofbrief quotations in critical articles or reviews.

This is a work of fiction. Names, places, businesses, characters and incidents are either the productof the author’s imagination or are used in a fictitious manner. Any resemblance to actual personsliving or dead, actual events or locales is purely coincidental.

ISBN-13: 978-1-940559-33-9