50
078 GOOD TO KNOW GOOD HOURS NEWS 1. Adopté par les pilotes de course pour ses performances, sa fiabilité et sa lisibilité hors pair, ce chronographe Oyster Perpetual Cosmograph Daytona, a été créé en 1963, en hommage au célèbre circuit automobile américain Daytona. Boîtier en alliage d’or, lunette monobloc en Cerachrom et bracelet en cuir. Rolex, 23 400 . 2. Porsche Design relance le légendaire Chronographe I, première création horlogère de la marque en 1972, mais également première montre noire. Le P’6510 Black Chronograph a été élargi de 6 mm (44 mm). Mouvement à remontage automatique, boîtier et bracelet en acier microbillé recouvert de PVD noir. Edition limitée à 911 exemplaires. Porsche Design, 5 300 . 3. La marque Nixon s’allie avec le rallye automobile de 3 000 miles à travers les Etats-Unis, l’Europe et l’Asie, le Gumball 3000, pour augmenter sa collection « Grand Prix » d’une montre nommée The Magnacon. Il s’agit d’un chronographe 6-aiguilles de fabrication suisse, avec boîtier en acier et bracelet en silicone. Nixon, 700 . 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard a créé la Mille Miglia GMT Chronographe 2012, à la lisibilité sans pareille. Les compteurs de chronographe, à 12 h et à 6 h, inspirés des tableaux de bord de bolides anciens, sont surdimensionnés. Edition limitée à 2012 pièces, en acier. Chopard, 4 950 . 5. Le Chronographe Calibre 17 célèbre le 80 e anniversaire de Jack Heuer, l’initiateur de la fameuse Carrera en hommage à la course épique Carrera Panamericana, au Mexique. Boîtier en acier, lunette de 41 mm de diamètre et bracelet en veau perforé. Edition limitée. Tag Heuer, 3750 . 6. Le partenariat conclu entre Jaeger-LeCoultre et Aston Martin Racing, l’écurie sportive du constructeur automobile britannique, célèbre sa septième année avec l’AMVOX5 World Chronograph LMPI. Mouvement mécanique à remontage automatique, boîtier en céramique et titane et bracelet en veau. Edition limitée à 250 pièces. Jaeger-LeCoultre, 15 900 . Tableaux de bord Par Anne-France Remy Sur les circuits et les rallyes de légende, ces chronographes très sportifs et très élégants rivalisent de précision. PHOTOS : DR 2 1 3 4 6 5

Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

  • Upload
    others

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

078

GOOD TO KNOW

GOOD HOURS NEWS

1. Adopté par les pilotes de course pour

ses performances, sa fiabilité et sa lisibilité

hors pair, ce chronographe Oyster Perpetual

Cosmograph Daytona, a été créé en 1963,

en hommage au célèbre circuit automobile

américain Daytona. Boîtier en alliage d’or,

lunette monobloc en Cerachrom et bracelet

en cuir. Rolex, 23400 €.

2. Porsche Design relance le légendaire

Chronographe I, première création horlogère

de la marque en 1972, mais également

première montre noire. Le P’6510 Black

Chronograph a été élargi de 6 mm (44 mm).

Mouvement à remontage automatique, boîtier

et bracelet en acier microbillé recouvert

de PVD noir. Edition limitée à 911 exemplaires.

Porsche Design, 5300 €.

3. La marque Nixon s’allie avec le rallye

automobile de 3000 miles à travers les

Etats-Unis, l’Europe et l’Asie, le Gumball 3000,

pour augmenter sa collection «Grand Prix»

d’une montre nommée The Magnacon.

Il s’agit d’un chronographe 6-aiguilles

de fabrication suisse, avec boîtier en acier

et bracelet en silicone. Nixon, 700€.

4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire

course italienne Mille Miglia, Chopard a créé

la Mille Miglia GMT Chronographe 2012,

à la lisibilité sans pareille. Les compteurs

de chronographe, à 12 h et à 6 h, inspirés

des tableaux de bord de bolides anciens,

sont surdimensionnés. Edition limitée à 2012

pièces, en acier. Chopard, 4950 €.

5. Le Chronographe Calibre 17 célèbre

le 80e anniversaire de Jack Heuer, l’initiateur

de la fameuse Carrera en hommage

à la course épique Carrera Panamericana,

au Mexique. Boîtier en acier, lunette de 41 mm

de diamètre et bracelet en veau perforé.

Edition limitée. Tag Heuer, 3750 €.

6. Le partenariat conclu entre Jaeger-LeCoultre

et Aston Martin Racing, l’écurie sportive

du constructeur automobile britannique,

célèbre sa septième année avec

l’AMVOX5 World Chronograph LMPI.

Mouvement mécanique à remontage

automatique, boîtier en céramique

et titane et bracelet en veau. Edition limitée

à 250 pièces. Jaeger-LeCoultre, 15900 €.

Tableaux de bord

Par Anne-France Remy

Sur les circuits et les rallyes de légende, ces chronographestrès sportifs et très élégants rivalisent de précision.

PH

OT

OS

: D

R

21

3 4

65

Page 2: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard
Page 3: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

080

GOOD TO KNOW

TOP GOOD HIGH TECH #1

Petits, mais costauds

1_Nikon 1 V1

Le premier compact

à objectifs interchangeables

de Nikon s’adresse

aux débutants qui veulent

enrichir leur vocabulaire

photo. Les contrôles font

donc la part belle aux aides

à la prise de vue,

comme le mode qui prend

20 images/seconde

et choisit automatiquement

les cinq meilleures.

Too good : Simple et design.

Too bad : Capteur de taille

réduite et pas de flash.

Nikon 1 V1, en kit avec

un objectif 10-30 mm, 799 €.

2_Fujifilm X-Pro1

Ce modèle présente un avantage

sur ses concurrents : il dispose

d’un capteur de qualité

pro au format APS. Le piqué

est donc exceptionnel, même

en basses lumières, et s’aligne

avec les standards des reflex.

Too good : Le look vintage,

la visée optique confortable

et l’ensemble cohérent

formé avec les objectifs

haut de gamme.

Too bad : L’autofocus un brin

capricieux et l’ergonomie pas

forcément évidente au départ.

X-Pro1, boîtier nu, 1599 €.

3_Pentax K-01

Signé du designer Marc Newson,

cet appareil est compatible

avec tous les objectifs Pentax.

Il embarque un capteur APS-C

qui délivre un excellent piqué

et un écran de visée hyperfidèle.

Too good : Le design…

Too bad : Le poids, supérieur

à celui de ses concurrents.

K-01, en kit avec un objectif

18-55 mm, 849 €.

4_Sony Nex-5N

Avec sa série NEX, Sony

s’est imposé comme une acteur

incontournable du secteur.

Le principal intérêt de cet

appareil, c’est son format

et le capteur au format APS-C

de 16 Mpx. De quoi capturer

un maximum de détails sans

que vos images ne soient trop

bruitées. Le mode vidéo

est surprenant de qualité

et de réactivité. Il filme en HD

à 50 images/seconde.

Too good : La vaste

gamme d’optique Sony/Zeiss

est exploitable grâce

à un adaptateur (en option).

Too bad : Des photos

un peu sombres.

NEX-5N, boîtier nu, 600 €.

5_Panasonic Lumix GX-1

Cet appareil bénéficie

de l’expertise de Panasonic

en matière d’appareils compacts.

Malgré son petit gabarit, il produit

des images au piqué précis

et aux couleurs fidèles.

Le design est pensé pour fluidifier

la prise en main et l’interface

est hyperintuitive.

Too good : Le poids plume

et la facilité d’utilisation grâce,

notamment, aux commandes

de zoom placées sur le côté

de l’objectif.

Too bad : L’autofocus qui peine

en basses lumières.

Lumix GX-1, en kit avec

un objectif 14-42 mm, 799 €.

Baptisés hybrides ou compactsà objectifs interchangeables,ces nouveaux appareilscombinent un format de pocheet des optiques de qualité,adaptées à toutes les circonstances.

Par Jean-Christophe Camuset

PH

OT

OS

: D

R

1

2

3

4

5

Page 4: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard
Page 5: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

082

GOOD TO KNOW

TOP GOOD HIGHTECH #2

Juste une histoire

de mise au point…

Depuis quelques mois, le petit monde de

la photo est en véritable ébullition. Une

révolution technologique serait en route

dans les laboratoires d’une jeune start-up

californienne. Son nom ? Lytro. A la tête

de ce nouveau venu sur le marché déjà pas-

sablement encombré de la photo

numérique, il y a un homme : Ren Ng.

Cet ancien chercheur en optique, spécia-

lisé dans les champs lumineux et titulaire

d’un doctorat à Stanford, a construit sa

thèse autour d’un postulat (presque) sim-

ple : les rayons lumineux parcourent

l’espace en tous sens et un appareil photo

classique ne capture qu’une partie d’entre

eux lors de la mise au point, « écrasant »

ainsi les perspectives. Les recherches de

Ren Ng ont porté sur la façon de capter

l’ensemble des rayons lumineux d’une

scène lors de la prise de vue.

Au terme de longues phases d’études, il a

élaboré un ingénieux système de prismes

disposés sur le capteur numérique de l’ap-

pareil. Présenté dans la Silicon Valley, le

prototype provoque l’emballement des

venture capitalist firms, dont la star,

Andreessen Horowitz, créée par Marc

Andreessen et Ben Horowitz, investit mas-

sivement dans la structure naissante.

Ren Ng se concentre alors sur la concep-

tion d’un modèle commercialisable à

grande échelle. Le Lytro, premier du nom,

est disponible depuis l’automne dernier

aux Etats-Unis, et nulle part ailleurs pour

le moment. Cet appareil dit plénoptique,

le premier destiné aux particuliers, réserve

bien des surprises… D’abord, son format.

Ce drôle de parallélépipède fait un pied de

nez aux standards du marché. Grâce à son

revêtement de caoutchouc, on l’attrape

facilement et on le tient bien dans le creux

de la main. Pour s’en servir, on vise comme

avec une longue-vue et on ajuste le cadrage

via le petit écran de format carré, dont la

faible définition se révèle vite un handicap

de poids quand on compose sa photo. Nul

risque cependant de se perdre dans les

boutons : le Lytro n’en possède que deux ;

un pour le déclenchement et un autre pour

ajuster le zoom x8.

La magie de la profondeur de champ

C’est sur l’ordinateur que tout se joue

ensuite. Un logiciel maison à l’interface

minimaliste, disponible pour Mac et PC,

se charge de vos clichés. On choisit, grâce

à un simple clic, de faire la mise au point

sur le premier plan ou sur l’arrière-plan.

Comme par magie, la profondeur de

champ se déplace alors de l’un à l’autre.

On peut ensuite exporter son fichier en un

Jpeg aplati utilisable sur le web ou dans un

format propriétaire qui permet à ceux qui

visitent votre blog ou votre page Facebook

de faire eux-mêmes le focus là où ils sou-

haitent sur votre photo.

Malgré d’importants handicaps dus à sa

jeunesse, le Lytro est comparable à un

Polaroid, un appareil avec des caractéris-

tiques techniques limitées mais qui propose

une autre façon d’envisager la photo. La

révolution est en marche… !

Lytro, 100 % américain

Pour ses débuts, Lytro a décidé

de tester son premier produit

aux Etats-Unis et nulle part ailleurs.

L’appareil est distribué via le site web

de la compagnie et les livraisons

ne se font que sur le territoire américain.

Une drôle de politique commerciale

qui s’explique sans doute par le côté

inabouti de ce premier appareil

qui en annonce d’autres plus en accord

avec les canons de la photo numérique.

Pour l’instant, la technologie limite

le capteur à 1,2 Mpx et la mémoire

interne est disponible en version 8 Go

(399 $) ou 16 Go (499 $) sans possibilité

d’extension. Pas d’inquiétude pour ceux

qui n’envisagent pas de voyager bientôt

outre-atlantique : la direction de Lytro

nous a confirmé que ses produits

devraient prochainement débarquer

en Europe. www.lytro.com

PH

OT

OS

: D

R

1. L’APPAREIL LYTRO

EST DISPONIBLE

EN DEUX CAPACITÉS

(8 GO OU 16 GO)

ET 3 COLORIS.

2. REN NG, LA TÊTE

PENSANTE

DE LYTRO.

2

1

En matière de photo numérique,vous pensiez avoir tout vu ?C’était sans compter sur Lytro,dont la technologie pourrait bienchanger radicalement la façondont nous capturons le mondequi nous entoure…

Par Jean-Christophe Camuset

Page 6: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

RIO

GR

AN

DE

- P

AR

IS

P

HO

TO

: LO

UIS

DA

VID

NA

JA

R-

AC

CR

O’

AU

X B

OW

EN

Bowen addict ?

Collection Automne/Hiver 2012

"Country” DerbyScotch Grain pleine fleurTriple semelle cuir sur double trépointe390 €

La collection BOWEN est en vente dans les boutiques BOWEN et dans les magasins MANFIELDAdresses au 01 78 35 10 00

Renseignements et vente en ligne sur www.manfield.fr

Page 7: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard
Page 8: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

085

Good world

Page 9: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

LA SHIVA FRANÇAISE

DE COCA-COLA EUROPE

Dominique Reiniche

C’est une sorte de Shiva

terrestre, une main

aux commandes de !e

Coca-Cola Company, dont

elle est la présidente Europe

depuis 2005, l’autre sur

le guidon d’AXA, où elle siège

au conseil d’administration,

et aussi un bras au volant

de Peugeot SA, qu’elle

a rejoint comme membre

du comité de surveillance

le 25 avril dernier. Esprit

véloce, travailleuse acharnée,

cette diplômée française

de l’Essec a croqué trois par

trois les barres hiérarchiques

de la grande consommation :

Procter&Gamble,

Kraft Jacob Suchard, puis

Coca-Cola France en 1992,

dont elle devient présidente

six ans plus tard. «Je n’ai pas de plan de carrière, proclame

la numéro un française classée

par Fortune dans le top 15 des

femmes les plus influentes du

monde. Mais j’aime regarderloin !» La cinquantaine

épanouie, Madame

Coca-Cola Europe règne

sur 38 pays et 60000 salariés

(embouteilleurs inclus). Ses

équipes la définissent comme

une bâtisseuse qui «rassemblepour régner». Et cette battante

de faire sien ce trait d’humour

de Françoise Giroud : «Il yaura égalité entre les hommes et les femmes le jour où l’onnommera des incompétentes à des postes à responsabilité.»

086

GOOD WORLD

GOOD BRAINS

RÉUSSITESglobales

Ils ont des têtes bien faites, des idées qui font bouger les lignes, des convictions qui changent la donne et ils font avancer leur monde !

Par Laura Cordin

IL RÉINVENTE PHILIPS

POUR UN FUTUR RADIEUX

Frans Van Houten

Il est la preuve

qu’aujourd’hui peut

se conjuguer avec hier,

et que son profil

de «pur produit Philips»

ne l’empêche pas d’innover.

Diplômé de l’université

Erasmus de Rotterdam,

ce Néerlandais au physique

de coureur automobile signe

une brillante trajectoire

au sein de l’écurie Philips :

numéro deux de Philips

Kommunications

Industrie, en Allemagne,

puis codirecteur de Philips

Electronics et directeur

de Philips Semiconductors.

Nommé président en avril

2011, Frans Van Houten

ose alors amputer Philips

de son ancestrale branche

téléviseurs – revendue à

TP Vision, une coentreprise

de Hong Kong dont la

branche néerlandaise détient

30% du capital –, pour axer

la marque sur la santé,

l’éclairage et le bien-être,

des marchés innovants

sur lesquels elle peut briller

par son savoir-faire haut

de gamme. Une stratégie

payante, si l’on en juge

par les 167 millions d’euros

de bénéfice net engrangés

par Philips au deuxième

trimestre 2012, contre

118 millions espérés.

Prudent, Frans Van Houten

reste presque aussi zen

que ses nouveaux produits.

L’ICÔNE MONDIALE

DU JEU VIDÉO

Robert Kotick

Seul Steve Jobs

lui en imposait. Patron

d’Activision Blizzard,

le numéro un mondial

du jeu vidéo né d’une fusion,

en 2007, entre Activision

et Vivendi Games, Robert

Kotick n’a pas la réputation

d’être un tendre, lui qui,

à l’instar des héros meurtriers

de son Call of Duty, un jeu

vidéo dont la huitième version

a engrangé un jackpot record

de 750 millions de dollars

en cinq jours, guerroie sans

pitié sur la planète business.

Américain épris de la France,

il a créé sa toute première

entreprise à Saint-Cloud,

avec pour partenaire

Jean-Louis Gassée, l’ancien

vice-président d’Apple.

D’où cette rencontre,

en 1983, avec Steve Jobs,

quand Kotick venait

lui proposer des logiciels,

et qu’il essuyait les colères

de l’intransigeant patron

d’Apple. Depuis, Robert

Kotick s’est taillé l’étoffe

d’un roi du jeu vidéo

mondial, l’œil rivé

sur le couperet rentabilité,

sans état d’âme lorsqu’il s’agit

de mettre fin à certaines

licences – Guitar Hero,

DJ Hero et Tony Hawk’s,

en 2011 – ou de tailler

dans les effectifs. Et déjà

prêt, a-t-il laissé entendre,

à devenir le numéro un

des jeux sur Facebook.ILL

US

TR

AT

ION

: Z

Page 10: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

087

GOOD WORLD

GOOD BRAINS

LE ROI DE LA GRANDE

DISTRIBUTION AMÉRICAINE

Jim Sinegal

Il a un look de farmerdu Midwest, un profil

«golf-pêche-chasse»

comme on n’en trouve que

de l’autre côté de l’Atlantique.

Mais Jim Sinegal est

le fondateur de Costco,

le numéro trois américain

de la grande distribution,

dont la spécificité est

de vendre du haut de gamme

à petit prix… uniquement

en grande quantité, et à des

adhérents fidèles. En 2013,

cela fera presque trente ans

que ça dure. Et Costco

d’aligner fièrement ses fatdonnées économiques :

93 milliards de dollars de

chiffre d’affaires en 2011 pour

1,5 milliard de bénéfices,

et de multiples implantations

hors Etats-Unis, dont bientôt

la France, avec un entrepôt

à Marne-la-Vallée en 2014.

A 76 ans, Jim Sinegal

s’apprêterait à publier

le roman vrai de sa vie,

de l’orphelinat de Pittsburgh

à l’université de San Diego,

de ses débuts comme baggerchez FeldMart jusqu’aux

cimes du marketing, dont il a

été l’un des pionniers les plus

inventifs. Très respecté de ses

employés nettement mieux

payés qu’ailleurs, Jim Sinegal

n’hésite pas à faire état de sa

fibre sociale. «La satisfactiondurable de mes clients passe évidemment par celle de mes salariés», affirme-t-il.

ELLE AIGUILLE SNCF

VOYAGES

Barbara Dalibard

Voilà un peu plus de deux ans

qu’elle a pris les manettes

de SNCF Voyages,

dans un climat qui lui allait

comme un gant : un sérieux

mouvement de grève, doublé

d’une rentabilité alors jugée

très incertaine. Barbara

Dalibard est de ces dirigeants

au long cours dont le talent

ne s’exprime bien que par gros

temps. Chez Orange, déjà,

où cette polytechnicienne

– normalienne – agrégée

de maths a accompli

une longue trajectoire

(après un crochet par Alcatel),

on louait sa capacité à

transformer les moins en plus,

à résoudre les équations les

plus complexes. Méthodique

et fluide dans la gestion

de son équipe rapprochée,

Barbara Dalibard n’hésite pas

à se fondre dans la foule

des voyageurs lors des grands

départs. Bien consciente

que cette locomotive SNCF

Voyages qu’elle conduit

– 30000 cheminots,

7,6milliards de chiffre

d’affaires en 2011 – se frotte

à une concurrence toujours

plus vive. D’où cette notion

de service au client qu’elle

entend aujourd’hui ressusciter

avec le lancement d’ID Bus,

une flotte d’autocars

qui dessert Amsterdam,

Londres et Bruxelles,

et d’un programme de fidélité

voyageurs plus attractif.

LE POLYGLOTTE

ADMINISTRATEUR DE PPR

Jochen Zeitz

C’est un charismatique

businessman que

François-Henri Pinault vient

de faire entrer au conseil

d’administration de PPR

(6,4 milliards d’euros de

chiffre d’affaires, +17%

au premier semestre 2012).

CSO (Chief Sustainability

Officer) de PPR, l’Allemand

Jochen Zeitz a d’abord été

le sauveur de Puma – dont

il reste aujourd’hui président

du conseil d’administration –,

cette griffe emblématique

passée, sous sa gouverne

en 1993, de simple logo

de sport essoufflé à marque

lifestyle métissée sport-mode,

capable de séduire les dieux

du stade comme les snobs

des boîtes de nuit. Formé à

l’école de Colgate Palmolive,

à New York, Jochen Zeitz

devient, à 30 ans, en 1993,

le plus jeune président d’une

société cotée au DAX/MDAX

allemand. Stature d’athlète,

allure de prince, polyglotte

(6 langues à son actif, dont

le swahili !)… cet adepte

du développement

durable surprend même

ceux qui pensent le connaître,

lui qui consigne des pensées

philosophiques sur de simples

Post-it, s’offre une pause

méditation dans

un monastère bénédictin

et rejoint, dès que possible,

son immense ferme africaine

au pied du mont Kenya.

L’EX-STAR DE GOOGLE

« ENLEVÉE » PAR YAHOO

Marissa Mayer

Les vols de cerveaux

sont légion dans la Silicon

Valley, où les grands

noms de l’informatique

et de la cybertechnologie

s’arrachent leurs élites avec

l’aisance d’un pickpocket

convoitant un sac à main !

Ainsi de Marissa Mayer,

première femme ingénieur

à avoir intégré Google

en 1999, et dont elle est

devenue, dix ans plus tard,

l’influente vice-présidente

qui compte Barack

Obama parmi ses hôtes.

Depuis, on s’arrache

la belle Marissa,

dont la plastique

exceptionnelle fait jeu

égal avec son mental

de diplômée de Stanford.

A peine le géant

de la distribution

Walmart vient-il

de la nommer à son

conseil d’administration

afin de doper

son e-commerce,

que Yahoo la kidnappe

au début de l’été pour

lui confier la gouverne

de son site de Santa Clara,

essoufflé de courir derrière

le puissant challenger

Facebook. Etonnante,

avec ses allures

de baby-doll et son parler

en haut débit, Marissa

Mayer, 37 ans, entend

bien faire surfer Yahoo

sur la vague du succès. PH

OT

OS

: D

R

Page 11: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

088

GOOD WORLD

GOOD BRAINS

LE BUSINESSMAN CHINOIS

QUI VEUT CROQUER L’EUROPE

Wang Zong Nan

Sa dernière acquisition

a un parfum de victoire

pour Bright Food, le grand

groupe alimentaire chinois

(12,2 milliards de dollars

de chiffre d’affaires en 2011)

dont il est aujourd’hui

l’hyperactif président.

En avalant Weetabix, la

marque anglaise de céréales

dont Bright Food a pris

le contrôle en mai dernier,

Wang Zong Nan offre au

puissant conglomérat d’Etat,

fondé il y a six ans à peine, à

Shanghai, sa toute première

part du gâteau européen,

propre à le doter des

dimensions internationales

qu’il convoite. Depuis son

arrivée à la tête de Bright

Food (bonbons, gâteaux,

jus de fruits, surgelés…)

Wang Zong Nan lance

des OPA tous azimuts, avec

l’espoir que son opiniâtreté

finira par payer. Et ça paie :

en dépit de ses tentatives

de rachat avortées sur Yoplait

ou Choco BN, Bright Food

à déjà réussi à croquer

La Vache qui rit (Bel) ou

les biscuits écossais Walkers

Shortbread (Manassen

Foods). Et le patron

de déclarer, tout sourire :

«Ces acquisitions étrangèresnous sont indispensables pouratteindre une taille influentesur la scène mondiale.»Un petit pas en Europe, et un

grand pas pour la Chine…

LA CHIMISTE

QUI VA LIFTER AVON

Sheri McCoy

Le temple de la cosmétique

n’est guère habitué à un tel

transfuge : une ingénieur

chimiste diplômée

de Princeton, Dartmouth

et Rutgers, qui, après trente

années de règne

pharmaceutique, s’arrache

de la vice-présidence du

groupe Johnson&Johnson

pour aller guerroyer

sur les palettes de beauté

à la tête d’Avon. C’est

au terme d’une expertise

affinée que le numéro un

mondial de la vente

directe de cosmétiques

– 11 milliards de dollars

de chiffre d’affaires

en 2011 – a choisi Sheri

McCoy pour raffermir son

look de marque légendaire,

alors que l’action Avon

a perdu 36 points

en dix-huit mois, et que

les ventes se flétrissent.

A Sheri McCoy

d’extraire de ses fioles

la potion roborative

apte à requinquer cette

marque inscrite dans

l’ADN des consommatrices

américaines,

qui connaissent

les démonstratrices Avon,

comme celles

de Tupperware, de mère

en fille depuis…1886.

Et de faire barrage

aux OPA qui, tels des

rapaces, tournoient autour

du fleuron mal en point.

LES AS DU BUSINESS ÉTHIQUE

100 % ÉCOLO

François-Ghislain Morillon

et Sébastien Kopp

«Veja!» C’est le cri de guerre

de ces deux jeunes

alteréconomistes audacieux

de la mode, dont la marque

de baskets en coton bio,

caoutchouc d’Amazonie

et cuir tanné sans chrome

– Veja – fait un véritable

carton dans les milieux

branchés de Paris

et de Londres : 120000 paires

vendues en 2011 ! Veja donne

une leçon aux marques fundont le marketing consiste

à sous-payer les fabricants,

mais à surpayer les spots

publicitaires. La chaussure

made in Brésil fait l’inverse :

conçue équitable, donc cher,

la chouchoute des médias

et des people – qui les

chaussent gracieusement –

se vend sans pub…

Récemment couronnés par

!e Observer et !e Guardiande roboratifs ethical awards,les French créateurs – 65 ans

à eux deux –, diplômés de

Dauphine et d’HEC devenus

entrepreneurs au lendemain

d’un passionnant,

mais décevant, tour

du monde des départements

«développement durable»

des grandes entreprises, en

profitent pour allonger leur

foulée. En septembre, une

paire de Veja plus féminine,

dessinée par l’illustratrice

Domino Lattès, pointera

le bout de ses baskets.

L’OXYGÈNE

DE LA COMÉDIE-FRANÇAISE

Muriel Mayette

C’est une première

dans la longue

et prestigieuse histoire

de la Comédie-Française :

«une» administratrice pour

la diriger, une de ces femmes

que Molière n’aurait sûrement

pas qualifiées de «savantes»

ou de «précieuses». Nommée

en 2006 à la direction

du #éâtre-Français,

Muriel Mayette (47 ans,

une vingtaine de rôles,

15 mises en scène) excelle

dans ce numéro de funambule

qui consiste à faire souffler

un vent contemporain sous les

nobles lambris de la salle

Richelieu, sans risquer

de ternir les grands classiques

qui font sa renommée.

Et le public d’applaudir :

forte de ses 36 millions

d’euros de recette,

la Comédie-Française

enregistre un taux de

fréquentation de 15 à 20%

supérieur à celui de 2006.

Dynamique, passionnée,

Muriel Mayette ouvre sa porte

aux écrivains étrangers. Ainsi

de Naomi Wallace, premier

auteur américain vivant joué

place Colette en mai 2012,

et de Saadallah Wannous,

premier auteur de langue

arabe, inscrit au répertoire

pour 2013. C’est aussi sous

son impulsion que la troupe

renoue avec la tradition

itinérante des grandes

tournées internationales. PH

OT

OS

: D

R

Page 12: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

Offr

e sp

écia

le é

té, à

rése

rver

ava

nt le

15/

09/1

2 - *

Prix

par

per

sonn

e à

ce jo

ur s

ous

rése

rve

de d

ispo

nibi

lités

. Vol

+ 7

nui

ts a

vec

petit

déj

eune

r + v

éhic

ule

priv

é av

ec c

hauf

feur

. Va

labl

e du

24/

08 a

u 15

/09/

12. T

oute

s ta

xes,

rede

vanc

es e

t fra

is d

e do

ssie

r. Li

c : I

M07

5100

400

- Que

lle B

elle J

ourn

ée.

90, CHAMPS-ELYSÉES. 01 45 62 62 62. WWW.DIRECTOURS.COM

Imaginez-vous dans le berceaude mille et une civilisations, empruntant les chemins de Moïse et les rives de la Mer Morte. Imaginez le plus beau circuit à remonter le temps.Il vous attend ici, en Jordanie.

JORDANIE : PETRA - AQABA - MER MORTECIRCUIT PRIVÉ AVEC VÉHICULE ET CHAUFFEUR

8 jours / 7 nuits à partir de 1569€ TTC*

Page 13: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

analysées et, surtout, étudiées afin de met-

tre en place une action préventive. Si

l’électricité est coupée dans une zone, les

responsables du métro sont prévenus et les

carrefours routiers sont encadrés de poli-

ciers. Dans ce Centre d’opérations,

400 employés se relaient jour et nuit.

Comme à la Nasa, les agents portent une

bouse blanche, brodée, sur le bras gauche,

d’un drapeau brésilien pour souligner le

sérieux de leur tâche : ils sont au chevet

virtuel de cette ville de 6,5 millions

d’habitants. Vigilance on-line permanente.

Un traumatisme est à l’origine de la créa-

tion de ce Centre : en avril 2010, des

pluies torrentielles avaient provoqué des

inondations et des glissements de terrain,

bloqué rues et secours et fait une centaine

de morts. L’impuissance des pouvoirs

publics avait obligé le maire à mobiliser

les médias, seul moyen d’action interac-

tif. Le 31 décembre 2010, le Centre était

inauguré. « Ce Centre d’opérations est

090

GOOD WORLD

GOOD TRENDS

«Regarder devant nous, construire ensemble», prônait en mai dernier, à Paris-

la Défense, les acteurs d’un sommet

consacré aux nouvelles villes. Leur credo :

rendre les villes intelligentes, créer des

smart cities, afin d’offrir aux citadins un

meilleur environnement pour vivre, tra-

vailler et se divertir. Des villes qui ne

doivent pas ressembler à celles que roman-

ciers et cinéastes ont imaginées dans leurs

œuvres, de Metropolis à Brazil, en passant

par Blade Runner ou 1984. Car ces cités

futuristes, où régnaient l’inégalité sociale,

la vigilance permanente de l’Etat ou une

architecture fantasmagorique, sont déjà

dépassées par notre développement tech-

nologique accéléré. Un avenir high-tech

vers lequel s’est tourné Rio de Janeiro,

devenu le premier exemple mondial de

gestion informatisée de la ville, grâce à son

Centre d’opérations, récemment installé

dans le quartier de Cidade Nova, entre la

mairie et le sambodrome, qui accueille les

défilés nocturnes du Carnaval. Eduardo

Paes, le maire de Rio, s’enorgueillit encore

de son audace. «Ici, bat le cœur de la ville.Rio est sous surveillance 24 heures sur 24, etles Cariocas savent que nous prenons soind’eux», assure-t-il devant un mur d’écrans

sur lequel sont observés les rues et les habi-

tants en mouvement. Ce video-wall de

80 m2, assemblage de 80 moniteurs, est

alimenté en images par 600 caméras et des

milliers de capteurs répartis aux quatre

coins de la ville. Ici, convergent les don-

nées les plus diverses, communiquées par

les 30 directions des services municipaux,

par des services publics, comme les pom-

piers ou la police militaire, et par les

concessionnaires de transports et de distri-

bution d’énergie. Les données sont traitées,

Le XXIe siècle sera le premiersiècle urbain de l’humanité. La moitié de la populationmondiale vit actuellement en ville ; en 2050 ce seront les deux-tiers. Il faut donc se préparer à cet avenir deconcentration démographique.Les ingénieurs se penchentsur le destin de ces nouvellesmégapoles. Ville pilote, Rio de Janeiro est l’une de ces premières smart cities.

Par Annie GasnierILLUSTRATIONS : Emmanuel Romeuf

SMART CITIESbienvenue dans

le siècle des villes

!

Rio est passé à la gestioninformatisée de la ville.

Page 14: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

091

GOOD WORLD

GOOD TRENDS

unique, car il est le premier à permettre desuivre, dans une grande ville, les différentesétapes d’une gestion de crise, des premierssignes jusqu’aux interventions et aux solutions. Nous pouvons envoyer des infor-mations aux services concernés et auxusagers », explique Carlos Roberto Osório,

adjoint au maire chargé de la gestion des

services publics.

Des données centralisées et analysées

Rio de Janeiro a misé sur la technologie

en pensant aux Cariocas, mais pas seule-

ment : l’objectif lointain est d’assurer une

organisation parfaite de la Coupe du

monde de football de 2014 et des jeux

Olympiques de 2016. Tout est

aujourd’hui affaire d’image autour de ces

événements planétaires ; il faut que ce soit

un succès. En juin dernier, le sommet

Rio+20 a donc servi de test d’envergure :

«Nous avons pu coordonner au mieux ledéplacement des chefs d’Etat vers le centre deconvention, lieu des négociations. Et lorsque400 Indiens ont décidé de manifester auxabords du Riocentro, il nous a suffi d’orien-ter et de dévier, depuis ici, la circulationautomobile dans le quartier de Barra daTijuca, sans gêner les officiels », explique

Carlos Roberto Osório. La salle de gestion

de crise se trouve au troisième étage de

l’immeuble en verre fumé. De là, les auto-

rités locales sont en contact avec tous leurs

services. Rio l’a utilisée lorsque trois

immeubles se sont effondrés en centre-

ville, en janvier 2011, et lorsqu’un violent

Une ville privée, en Inde

Lavasa est la première ville privée

du monde, conçue par l’entreprise Lavasa

Corporation Ltd. Le projet, programmé

sur deux décennies, se veut un point

d’équilibre entre les infrastructures

urbaines et la nature. Concentrés

sur 100 km2, les bâtiments sont lovés

au creux d’une vallée touristique autrefois

sauvage, au sud-est de Bombay, dans

l’Etat du Maharashtra. La ville planifiée

de Lavasa se situe au bord d’un lac,

et son inventeur, Ajit Gulabchand,

à la tête de l’entreprise de BTP Hindustan

Construction Compagny (HCC), a pris

Portofino pour modèle, l’une des stations

balnéaires les plus huppées de la Riviera,

en Italie. Ce Martin Bouygues indien,

folie des grandeurs oblige, voulait

que ses 300000 futurs habitants puissent

«vivre, travailler, étudier et se distraire

en harmonie avec la nature». La nature

bucolique a fait les frais du chantier,

le ministère de l’Environnement indien

est intervenu, car des lois étaient violées.

Ce projet a suscité beaucoup

de controverses et engendré des

problèmes de corruption, de népotisme…

L’université d’Oxford, associée à un projet

d’université, s’est retirée. D’autres

programmes, comme celui lié à l’Ecole

hôtelière de Lausanne ou celui

d’une académie de football en partenariat

avec le Manchester City Football Club,

champion d’Angleterre, subsistent

encore… sur le papier. Mais Lavasa

commence à vivre, au fil de quartiers

achevés, comme celui de Dasve,

et des hôtels. L’ensemble ne devrait

finalement pas être terminé avant 2020,

alors que la ville voisine de Pune s’étend

et se rapproche, pour le plus grand

dépit d’Ajit Gulabchand, qui ne voulait

pas reproduire de mégapoles. Mais ville

privée ne veut pas dire ville fermée,

les autorités y veillent. Ajit Gulabchand

espère faire école dans cette Inde qui

aura besoin d’autres villes pour assouvir

le désir d’urbanité d’une population

chaque jour plus instruite. «Lavasa est

le premier modèle de cité planifiée privée,

explique Ajit Gulabchand. L’idée est

de l’abandonner d’ici dix ou quinze ans

à un partenariat public-privé (PPP).»

Son projet a été récompensé par

des architectes de l’American Society of

Landscape Architects. www.lavasa.com

!

Page 15: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

092

GOOD WORLD

GOOD TRENDS

attirer des investisseurs, va se faire sur ceséquipements intelligents », assure Cécile

Tuil, directrice du secteur Influence des

smart cities chez Schneider Electric. La

société française intervient dans plus de

200 villes, notamment à Barcelone, qui

ambitionne de devenir la plus smart du

monde. L’entreprise de télécommunica-

tions suédoise Ericsson a, pour sa part,

misé sur les réseaux sociaux entre citadins :

«Actuellement, 6 milliards de téléphonesportables sont utilisés. Avec l’augmentationdu nombre des smartphones, les connexionsvont servir à informer et à être informé, viaSMS, Twitter… bref, à être connecté à l’ave-nir », prévoit Hans Vestberg, président

d’Ericsson. Qu’ils soient acteurs des trans-

ports ou fournisseurs d’énergie et de

télécommunication, tous se mobilisent.

«Nous travaillons déjà ensemble, affirme

Christine Lhoste. Car la complémentaritéet la transversalité nous permettent de mieuxgérer les données destinées à nos clients. »

Vers une science des villes

En France, les villes de Paris, Bordeaux,

Nice et Montpellier ont lancé des

réflexions sur le recours et la mise en place

de moyens intelligents pour faciliter la vie

de leurs habitants. La logistique est évi-

demment facilitée lorsqu’une ville sort de

terre, comme dans les pays émergents :

câbles, fibre optique, capteurs sur

conduites et tuyaux, caméras et indica-

teurs sont installés facilement. IBM l’a

constaté en participant à la construction

d’un Intelligent Operations Center dans

incendie a ravagé, à la veille du carnaval,

en février de la même année, les ateliers de

plusieurs écoles de samba, remplis de leurs

chars et de leurs costumes. La coordina-

tion des secours et la prévention des

usagers concernés ont alors été bien plus

efficaces. Pour prévenir les pluies parfois

torrentielles sous ces latitudes, il existe

maintenant le service Alerta Rio. Grâce à

un radar installé au sommet de la colline

du Sumaré, un programme unique au

monde de prévisions météo de haute

résolution (PMAR) fournit aux météoro-

logues du Centre d’opérations des images

reflétant les caractéristiques de la géogra-

phie de Rio, où s’entrelacent végétation

tropicale et béton. Avec parfois 48 heures

d’avance, les prévisions sont affinées par

quartier, au plus près, sur 2 km2. La mai-

rie a également installé des sirènes, reliées

au Centre d’opérations, et des abris desti-

nés aux habitants des favelas qui devraient

abandonner leur logement. Les résidents

cadastrés sont prévenus par SMS sur leur

téléphone portable. Pour mener à bien

cette tâche de centralisation et d’analyse

des données, la mairie de Rio s’est asso-

ciée, à travers un appel d’offres, à la

multinationale américaine IBM, elle-

même associée à d’autres opérateurs,

comme Schneider Electric et Cisco.

«L’expérience de Rio est la plus aboutie denotre secteur Smarter Cities, précise

Christine Lhoste, chargée de communica-

tion chez IBM France. IBM sait traiterd’énormes volumes de données, de sourceshétérogènes, et leur donner un sens. » Reste à

l’humain à prendre les bonnes décisions.

De multiples domaines d’application

Et des secteurs de plus en plus divers

profitent désormais de directives « intelli-

gentes » issues de données centralisées. Les

transports urbains, la distribution d’eau

potable et d’énergie, la santé, la sécurité et

les moyens d’urgence, en cas d’incendie

ou d’accident. Singapour, selon IBM, a

amélioré la fluidité des transports de

90%, en anticipant les problèmes de cir-

culation par le biais, notamment, de cartes

à puce aux péages, témoins de l’affluence.

Si un train est en retard, les bus avertis

attendront les voyageurs, et leur fréquence

sera augmentée. A New York, un autre

programme a permis de prévenir et de

réduire la criminalité de 27% ces der-

nières années. Toutes les sociétés de

technologies sont mobilisées autour de ce

challenge et des perspectives d’un marché

prospère. Une étude du cabinet américain

ABI Research rapporte que 90 milliards

d’euros seront investis, d’ici à 2016, vers

les villes intelligentes : réseaux de données

sans fils, comme le wi-fi, organisation des

transports, régulation de la distribution

d’eau et d’électricité, optimisation du

ramassage et du recyclage des déchets…

«La concurrence entre les grandes villes, pour

Page 16: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

093

GOOD WORLD

GOOD TRENDSP

HO

TO

: D

R

The Good Life : Pourquoi cette

fondation a-t-elle été créée ?

Pourquoi avez-vous organisé

ce premier sommet?

Mathieu Lefèvre : Nous sommes

entrés dans le siècle des villes,

ce sera l’enjeu principal du XXIe siècle,

et notre quotidien urbain dépendra

de leur organisation, de leur

développement, de leur capacité

aussi à absorber une forte croissance

démographique. Les problèmes

de la ville sont ceux du monde

d’aujourd’hui. Et il a semblé essentiel

à notre président, John Rossant,

l’un des organisateurs du Forum

économique mondial de Davos,

de rassembler des responsables

de tous horizons, universitaires,

chercheurs, innovateurs, architectes,

P-DG d’entreprises… au sein

de notre fondation basée à Genève,

pour préparer ce futur urbain

et être au centre du raisonnement.

Une mission aussi excitante que

de se plonger dans une mégapole !

TGL : Quel rôle entend jouer

la fondation ? Celui de

coordinateur ou celui d’acteur ?

M. L. : Cette urbanité future va

évoluer autour de deux axes :

l’innovation technologique urbaine

pour aboutir aux smart cities, les villes

intelligentes, et des partenariats

inédits. A l’exemple des programmes

Vélib’ ou Autolib’, ces moyens

de transport en libre service

qui allient acteurs publics et privés.

La fondation ambitionne de favoriser

ces alliances et va donner au sommet

New Cities un rythme annuel.

L’an prochain, il se tiendra dans

un pays émergent. Par ailleurs,

elle parraine des projets pilotes,

comme celui de Rio de Janeiro

dans le domaine de la santé,

dans lequel des universitaires, des

médecins et des habitants de favelas

sont reliés par la technologie. Ou bien

comme à San José aux Etats-Unis,

où un projet permet de fluidifier

la circulation automobile grâce

à la coordination de réseaux sociaux.

Nous évaluerons ces projets fin 2012.

TGL : Quel bilan tirez-vous de ce

premier sommet organisé à Paris ?

M. L. : Nous avons, j’en suis

persuadé, remporté un grand succès,

car nous avons réuni au CNIT,

à la Défense, plus de 700 personnes,

qui représentaient une cinquantaine

de villes de tous les continents,

une trentaine d’universités

et une centaine de grandes

entreprises… Tous ces acteurs

doivent se parler pour travailler dans

un même objectif autour des villes

du futur, et la fondation a le sentiment

d’avoir engendré ce dialogue.

www.newcitiesfoundation.org

Mathieu Lefèvre est

le directeur exécutif

de la New Cities

Foundation, qui

travaille sur l’avenir

des villes de demain. Un premier

sommet organisé par ce think-thank

s’est tenu à Paris en mai dernier.

la ville chinoise de Zhenjiang, sur les rives

du Yangtsé, devenue un pôle de 3 mil-

lions d’habitants. Ancien président du

Santa Fé Institute, aux Etats-Unis, le pro-

fesseur Geoffrey West propose de créer

une science des villes : «Nous ne pouvonsmanquer cet énorme défi car, en 2050,1 million de personnes s’urbanisera chaquesemaine… Ce sera comme si, chaquesemaine, une ville de la taille de Paris étaitcréée ! » Le professeur West estime que

«penser les villes permettrait de tout ratio-naliser, d’économiser les infrastructures et derespecter la nature, qui approvisionne lesvilles en nourriture et en eau».Un futur de villes dynamiques et intelli-

gentes en perspective donc. Et les

autorités politiques pourraient l’anticiper,

pour prévoir, gérer et optimiser, dans un

contexte de crise économique, cette tran-

sition vers un monde de villes. !

Page 17: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

094

GOOD WORLD

GOOD PROBLEM

Le nord magnétique se déplacede plusieurs mètres par jour.Conjugué à l’anomalie du champmagnétique qui sévit dansl’hémisphère Sud, cela pourraitengendrer une inversion despôles. Arnaud Chulliat, physicienà l’Institut de physique du Globede Paris, établissementd’enseignement supérieur et derecherche associé au CNRS,explique à The Good Life lescauses et les enjeux de cedéplacement des pôles.

!e Good Life : Tout d’abord, quelle estla définition du champ magnétique ter-restre et comment est-il produit ?Arnaud Chulliat : Un champ magnétique

est une grandeur physique remplissant tout

l’espace et caractérisant l’interaction à dis-

tance de courants électriques, de matériaux

aimantés et de particules chargées. Dans le

cas de la Terre, le champ magnétique est

généré à environ 99% par des courants

électriques qui se produisent à l’intérieur

du noyau. A cela s’ajoutent d’autres

champs produits par des roches aimantées

que l’on trouve dans la croûte terrestre ou

par des courants électriques dans l’atmo-

sphère terrestre ou dans la magnétosphère,

à une plus grande distance.

TGL : C’est donc la composition même dunoyau qui joue un rôle capital dans la pro-duction du champ magnétique terrestre…A. C. : C’est sa source principale, qui le fait

évoluer dans le temps. C’est la dynamique

à l’intérieur du noyau – les courants – qui

produit le champ magnétique. Si l’on

creuse sous nos pieds, à un peu plus de

3000 km, on trouve le noyau liquide, prin-

cipalement composé de fer, qui est très peu

visqueux, un peu comme de l’eau. Il s’agit

d’un écoulement convectif qui évacue, petit

à petit, la chaleur accumulée au centre de la

Terre depuis sa formation. Notre planète

tourne très vite : les effets de la rotation et

du refroidissement de la Terre se conju-

guent pour produire des tourbillons et du

champ magnétique, par un processus phy-

sique appelé « instabilité dynamo».

TGL : On assiste, petit à petit, à unedérive du nord magnétique. Nos boussolesvont-elles devenir folles ?A. C. : Oui, le pôle nord magnétique

bouge. J’ai eu l’occasion d’aller mesurer sa

vitesse de déplacement en 2007 sur le ter-

rain, en Arctique, avec un collègue

canadien et l’association Poly-Arctique. On

constate même une accélération de cette

vitesse. Jusqu’au début des années 90, le

pôle nord dérivait d’environ 15 km par an.

La vitesse est plus rapide depuis une dizaine

d’années : elle est d’à peu près 55 km par

an. C’est un phénomène nouveau, assez

spectaculaire, et cela nous a poussés à réflé-

chir sur la dynamique du noyau. Mais

s’agissant de la variabilité du champ

magnétique d’une manière générale, ce

n’est pas extraordinaire. On peut rencon-

trer des tendances équivalentes à d’autres

endroits de la Terre, mais où il n’y a pas de

pôle pour les matérialiser. Par exemple, en

France, la déclinaison, c’est-à-dire l’angle

entre la direction du champ magnétique et

le nord géographique, est très proche de

zéro degré, alors qu’au début du XIXe siècle

elle valait plus de 20 degrés vers l’est. La

cause de cette dérive est la variabilité des

écoulements à l’intérieur du noyau terres-

tre : ces écoulements sont un peu comme

les courants océaniques, mais beaucoup

plus lents, puisque leur vitesse moyenne

n’est que de quelques kilomètres par an.

Sur une longue durée, cela représente des

mouvements importants, mais tout à fait

naturels, et, comparés aux 6400 km de

rayon de la Terre, quelques kilomètres par

an, c’est peu. Il n’y a donc rien d’anormal.

TGL : Avec cette dérive du nord magné-tique, peut-on penser à un risqued’inversion des pôles magnétiques ?A. C. : C’est un phénomène banal à l’aune

de l’histoire géologique : les pôles s’inver-

sent jusqu’à plusieurs fois par million

d’années. On est aujourd’hui dans une

situation où cela dure depuis longtemps

sans s’inverser : la dernière inversion a eu

lieu il y a 780000 ans. C’est un intervalle

assez long, mais ce n’est pas anormal, car il

n’y a pas de fréquence typique d’inversion.

Le Soleil, lui, a une fréquence typique d’in-

version des champs magnétiques, qui est

d’une fois tous les onze ans. Dans le cas de

la Terre, il n’y a pas de périodicité, c’est un

phénomène chaotique, cela peut s’inverser

au bout de quelques centaines de milliers

d’années ou, au contraire, rester stable pen-

dant quelques dizaines de millions d’années,

comme cela a déjà été le cas dans le passé.

TGL : Un scénario catastrophe dû à unebrutale inversion des pôles est-il impossible ?A. C. : Il n’y a pas de danger à court ou

moyen terme. Et pour deux raisons.

D’abord parce que cela s’est déjà produit de

nombreuses fois, y compris depuis qu’il

existe des êtres vivants sur Terre et même

des êtres humains. Cela paraît relativement

inoffensif et on n’a jamais vraiment réussi à

en montrer les conséquences sur les êtres

vivants. Ensuite parce que, en imaginant

LA TERRE perdrait-elle le nord ?

Par David Dibilio ILLUSTRATIONS : Greygouar

Page 18: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

095

GOOD WORLD

GOOD PROBLEM

qu’une inversion commence demain matin,

cela prendrait plusieurs milliers d’années

avant qu’elle se réalise et que le pôle nord

magnétique passe dans l’hémisphère Sud.

On aurait donc le temps de voir venir.

TGL : Le pôle sud magnétique est-il sou-mis lui aussi à des modifications ?A. C. : Oui, mais actuellement sa dérive est

nettement moins rapide que celle du pôle

nord. Il n’y a donc pas de symétrie entre les

mouvements des pôles magnétiques, qui ne

sont pas situés exactement aux antipodes

l’un de l’autre. En revanche, la structure du

champ est particulière dans l’hémisphère

Sud, car on y note une anomalie d’inten-

sité : il y a une zone où l’intensité est deux

fois moindre que ce qu’elle peut être en

Sibérie ou dans le nord du Canada ; on

appelle ça l’anomalie magnétique de

l’Atlantique Sud (AMAS). Le champ

magnétique terrestre agit comme un bou-

clier et repousse les particules énergétiques

en provenance du Soleil ou les rayons cos-

miques. Ce bouclier est donc moins fort

dans l’Atlantique Sud. L’AMAS occasionne

un certain nombre de désagréments pour

les satellites en orbite autour de la Terre, qui

vont subir, statistiquement, davantage

d’avaries causées par les bombardements de

particules chargées provenant du Soleil.

TGL : Quelle est la raison de cette moin-dre intensité ?A. C. : Cela est dû à ce qui se passe à la sur-

face du noyau, à la verticale de l’Atlantique

Sud. Si l’on descend jusqu’au noyau, là où

le champ magnétique terrestre a sa source,

on arrive à la surface du noyau terrestre ; on

y trouve une zone où la polarité du champ

est inverse. Concrètement, au lieu de ren-

trer dans le noyau, le champ en sort. On

note alors une inversion localisée du champ

à la surface du noyau, et si l’on s’en éloigne,

cette petite structure disparaît et il ne reste

plus, à la surface de la Terre, qu’une ano-

malie d’intensité. En terme de danger, on

peut prévoir, à court terme, que si l’AMAS

continue de s’accentuer, comme c’est le cas

actuellement, on pourra constater une

moindre protection face aux bombarde-

ments des particules énergétiques solaires.

Il y a donc un risque technologique, notam-

ment pour tous les systèmes faisant appel à

l’électronique, mais aussi un risque accru

pour la santé des personnes qui séjournent

dans la station spatiale internationale.

TGL : Comment fait-on pour étudier lenoyau terrestre et prévoir ses mouvementsest ses évolutions ?A. C. : Le noyau se trouve à 3000 km sous

nos pieds. Aujourd’hui, on ne dispose pas

de la technologie nécessaire pour forer au-

delà de quelques dizaines de kilomètres. A

cause de la chaleur, de plus en plus intense

à l’approche du noyau, et aussi, bien

entendu, pour des raisons de coût. Tout

cela rend très compliquée l’étude du noyau.

Pour tenter de comprendre son évolution,

on procède à des mesures régulières du

champ magnétique terrestre, dans un

réseau d’observatoires répartis partout à la

surface de la Terre et qui, pour certains, sont

en activité depuis plus d’un siècle et demi.

On dispose également de satellites magné-

tiques comme, par exemple, ceux de la

prochaine mission Swarm, de l’Agence spa-

tiale européenne, qui sera lancée en

novembre 2012. Toutes ces observations

sont intégrées dans des modèles empiriques

qui permettent de fabriquer des cartes du

champ magnétique à la surface de la Terre,

qui sont ensuite prolongées jusqu’à la sur-

face du noyau grâce à des méthodes

mathématiques. En plus de l’observation,

on peut faire des simulations numériques

sur ordinateur, qui reproduisent la dyna-

mique interne du noyau, un peu comme

on peut modéliser le climat ou l’évolution

de l’atmosphère terrestre. Avec une diffi-

culté supplémentaire cependant : l’absence

de mesures in situ. Si l’on veut modéliser la

vitesse du vent, on peut toujours envoyer

un ballon dans le ciel pour la mesurer ; il

est beaucoup plus difficile d’aller vérifier les

écoulements dans le noyau liquide. !

François Pétrélis est chercheur au

laboratoire de physique statistique

de l’Ecole normale supérieure

(laboratoire ENS, CNRS, UPMC et

université Paris-Diderot).

«Au cours de l’histoire de la Terre,

le champ magnétique s’est inversé

à de nombreuses reprises, mais selon

une fréquence qui n’est pas constante.

Il y a 100 millions d’années, il n’y avait

pas eu de renversements depuis 10

ou 30 millions d’années. Si ce phénomène

trouve son origine dans le noyau liquide

de la Terre, il est sensible à ce qui

se passe en dehors, plus précisément

dans le manteau terrestre, la couche

intermédiaire entre le noyau et la croûte,

qui représente 80 % du volume de

la planète. L’idée était de trouver quelque

chose qui varierait sur des centaines de

millions d’années et qui expliquerait que

l’écoulement dans le noyau se modifie.

Or, nous savons que les continents

finissent par changer de position, sur

une période courant sur des centaines de

millions d’années, au rythme de quelques

centimètres par an. Il y a 200 millions

d’années, la Pangée (le supercontinent

rassemblant la quasi-totalité des terres)

a commencé à se disloquer

en une multitude de morceaux qui

ont façonné la Terre telle que nous

la connaissons aujourd’hui. En faisant

le bilan de la surface des continents situés

dans l’hémisphère Nord et de ceux de

l’hémisphère Sud, on a calculé un degré

d’asymétrie, par rapport à l’équateur,

dans leur répartition durant cette période.

La conclusion ? Il y en a deux. Primo :

les plaques terrestres pourraient être

directement responsables des variations

de la fréquence des renversements. Après

leur plongée dans le manteau terrestre

au niveau des zones de subduction, les

plaques parviendraient jusqu’au noyau, où

elles modifieraient les écoulements de fer.

Secundo : les mouvements des plaques

ne feraient que refléter le brassage de

matière à l’œuvre dans le manteau et

à la base de celui-ci. Dans les deux cas,

ce sont bien des mouvements de roches

extérieures au noyau qui provoqueraient

l’asymétrie des écoulements à l’intérieur

et détermineraient la fréquence

des inversions.»

Page 19: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

096

GOOD WORLD

GOOD TV

GIDEONRAFF

coup double

La scène se déroule fin mai, dans les rues

de Jaffa, transformées pour les besoins du

tournage en allées de Beyrouth. Casquette

vissée sur la tête, tee-shirt noir, Gideon (dit

Gidi) Raff, l’auteur de la série israélienne

«Hatufim» («kidnappés», en hébreu) dis-

cute à bâtons rompus avec Gilad Shalit, le

jeune soldat de Tsahal, qui vient de retrou-

ver la liberté après avoir passé cinq ans dans

les geôles du Hamas. Sous leurs yeux,

le tournage de la seconde saison de

«Homeland», l’adaptation américaine de

«Hatufim», dont Gidi Raff est aussi le

cocréateur aux côtés de Howard Gordon

et Alex Gansa (le duo de «Vingt-quatre

heures chrono»), vient de commencer. Le

showrunner israélien, qui, depuis trois ans,

partage son temps et son cerveau entre les

deux séries, a le triomphe modeste.

Avec un taux d’audience proche de 30%,

«Hatufim» – produite par la chaîne israé-

lienne Keshet – est pourtant considérée

comme un joyau télévisuel. La série, qui

raconte le retour au bercail de deux soldats

israéliens après dix-sept ans de captivité,

a été acclamée par la critique tant dans

l’Etat hébreu (où vivent 1500 anciens pri-

sonniers de guerre) qu’au Royaume-Uni,

après sa diffusion au printemps sur la

chaîne britannique Sky… De son côté,

«Homeland», qui compte Barack Obama

dans son fan-club, a reçu le Golden Globe

de la meilleure série dramatique, tout

en pulvérisant l’audience de la chaîne

Un peu schizophrène, ce showrunner israélien a tenu son pays en haleine avec «Hatufim», une série télévisée sur les prisonniers de guerre. Il est aussi le cocréateur de«Homeland», son adaptationaméricaine, déjà considéréecomme la meilleure réalisation de la saison.

Par Nathalie Hamou

Showtime («Dexter»). Le thriller, qui fera

son retour avec la saison 2, le 30 septem-

bre, sur le petit écran américain, avant que

que la saison 1 ne débarque à la rentrée sur

Canal+, suit l’histoire du sergent Nicholas

Brody, un marine revenu d’Irak alors qu’on

le croyait mort, et soupçonné par un agent

de la CIA de travailler pour Al Qaida.

Vu de Tel Aviv, Gidi Raff, tout juste

40 ans, a signé un exploit. « Il a abordé unthème ultrasensible pour le pays, auquelaucun scénariste n’avait osé s’attaquer, et l’araconté dans la langue télévisuelle améri-caine, ce qui a conféré à la série une portéeuniverselle », juge Ruta Kupfer, la critique

télé du quotidien Haaretz. «C’est assezremarquable qu’un sujet très national enIsraël ait pu se transformer de façon à réson-ner aux Etats-Unis puis dans le reste du

monde », renchérit Virginia Mouseler,

directrice du cabinet "e Wit, la vigie des

programmes télévisés internationaux.

Le parcours américain de Gidi Raff n’est

pas étranger à ce doublé gagnant. «J’ai passéune bonne partie de ma vie entre Israël et lesEtats-Unis. Au point de me sentir comme unétranger quand je revenais au pays. Cette sen-sation m’a donné l’idée d’écrire “Hatufim”»,raconte le scénariste réinstallé à Tel Aviv,

après un séjour de neuf ans à Los Angeles.

Parti pour étudier à l’Institut du film amé-

ricain, il fait ses classes comme premier

assistant réalisateur sur le tournage de

Mr. and Mrs. Smith, avec Brad Pitt et

Angelina Jolie. Deux longs métrages plus

tard, Gidi Raff devient le premier auteur à

vendre sur scénario une série télévisée israé-

lienne à un studio américain (Fox 21)…

Le timing lui est favorable. «Avec la grèvedes scénaristes de 2007, Hollywood s’est ouvertaux formats étrangers», raconte le créateur.

Et Israël s’est engouffré dans la brèche : le

pays est le premier exportateur de formats

de fiction aux Etats-Unis, devant le

Royaume-Uni. Comme Hagai Levi, l’au-

teur de la série israélienne vedette «Be

Tipul» – alias « In Treatment» («En ana-

lyse») aux Etats-Unis –, Gidi Raff travaille

à l’économie. «Le pilote de “Homeland”équivaut au budget de deux saisons de“Hatufim” !» glisse le scénariste qui, après

avoir touché au film d’horreur et au thril-

ler, espère s’essayer à la comédie. «Il y aquelques années, un job de rédacteur de conte-nus dans une start-up m’a inspiré un romanplutôt drôle, repéré par un producteur. Maisà l’époque, on nous a dit : personne n’a enviede regarder une série sur la vie de bureau.»Un an plus tard, «"e Office» faisait son

entrée fracassante sur le petit écran… ! PH

OT

OS

: D

R

Lancement : «Hatufim», mars 2010.

«Homeland», octobre 2011.

Audience : «Hatufim», 2,3 millions

de spectateurs en Israël (8 millions

d’habitants). «Homeland», un pic

à 2,7 millions sur Showtime.

Coût d’un épisode :

«Hatufim», 200000 dollars.

«Homeland», 1 million de dollars.

1. GIDEON RAFF.

2. LA SÉRIE «HATUFIM» A ÉTÉ ADAPTÉE

AVEC SUCCÈS AUX ETATS-UNIS.

1

2

Un thème ultrasensibleauquel aucun scénaristen’avait osé s’attaquer.

Page 20: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

TGL_21235_097.indd 1 10/08/12 15:13

Page 21: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

098

GOOD WORLD

GOOD SURPRISE

Air France est en pleine crise et a décidé

de limiter ses investissements. Au mieux,

cinq nouvelles destinations seront ouvertes

cette année, contre le double en 2011.

Mais pas question de faire l’impasse sur le

vol direct Paris–Wuhan. Le 11 avril der-

nier, Jean-Cyril Spinetta, le président d’Air

France-KLM, a été accueilli en grande

pompe par les représentants de la ville et de

la province du Hubei, lors du voyage inau-

gural. Dix-huit mois de négociation ont

précédé l’ouverture de la ligne. Les autori-

tés locales ont promis à la compagnie

aérienne de rénover l’aéroport pour mieux

accueillir les passagers et d’aider au démar-

rage. Un Boeing 777 relie, trois fois par

semaine, Wuhan à Paris. Sur les deux pre-

miers mois d’exploitation, le taux de

remplissage a dépassé 60%, ce qui est

«conforme aux objectifs que se fixait AirFrance», indique la direction. Une ligne fré-

quentée majoritairement par des Chinois.

Car, qui connaît Wuhan en France ? Située

dans le centre de la Chine, cette ville, qui

possède de puissantes industries sidérur-

giques et automobiles, attire peu les

touristes. Air France n’étant pas en mesure

Le nom de Wuhan, capitale de la province du Hubei(10 millions d’habitants),n’évoque absolument rien pourla majorité des Français. Or, les industriels n’ont cessé d’y investir depuis les années 90.Savez-vous qu’un tiers des investissements français en Chine sont réalisés à Wuhan et que deux tiers des investissements européensà Wuhan sont français ?Enquête sur une incroyableattractivité mutuelle.

Par Mireille BroussousIllustration : Cruschiform

de faire des cadeaux à «nos amis chinois»,

c’est que l’investissement en vaut vraiment

la chandelle. Aujourd’hui, Wuhan est

encore une «vraie» ville chinoise, à des

années-lumière de la très internationale

Shanghai. Mais elle se modernise à toute

vitesse. La capitale du Hubei est l’objet de

toutes les attentions du gouvernement cen-

tral, qui s’attèle au développement des villes

intérieures, trop longtemps délaissées au

profit des villes côtières. «Wuhan est en trainde rattraper son retard, son PIB a doublé encinq ans pour atteindre 551 milliards deyuans en 2011, soit 60 milliards d’euros»,assure Serge Lavroff, consul général de

France à Wuhan.

De nouveaux quartiers d’habitation, de

nouvelles zones industrielles sortent de

terre tous les mois. Une forêt de grues

s’élève dans cette cité de 10 millions d’ha-

bitants, traversée par le Yangtsé et le Han.

Cinq mille chantiers sont en cours. Une

nouvelle ligne de métro est mise en service

chaque année. Wuhan est devenue la ville

leader du centre de la Chine. «On sent unbouillonnement extraordinaire, une véritableeffervescence», s’enthousiasme Patrick Cervi,

directeur de l’Alliance française à Wuhan.

Bien qu’inconnue du grand public, un

lien profond unit la France à la ville chi-

noise. Au point que près d’un tiers des

investissements français en Chine y sont

réalisés ! Certes, de grands groupes alle-

mands y sont également présents, comme

"yssenKrupp et Siemens. Les Britan -

niques, les Italiens y possèdent aussi des

usines. Mais deux tiers des investissements

européens à Wuhan sont français.

En 1992, PSA a ouvert le bal et entraîné

des équipementiers tels que Valeo, Faurecia

et Acome. En partenariat avec l’un des

principaux constructeurs automobiles chi-

nois, Dongfeng, le groupe français a

construit deux usines, d’où sortent

450000 voitures par an. Surtout pas des

monospaces : les Chinois les détestent.

Mais des berlines haut de gamme, comme

les Citroën C-Elysée, C-Quatre ou C4 L,

et, pour la marque Peugeot, des 408 et des

307 Sedan. La filiale chinoise renouvelle

sans cesse ses gammes pour coller au

marché. Les modèles destinés à la Chine

sont conçus dans le bureau de style de

Shanghai, où travaillent 650 designers et

chercheurs. La stratégie de conquête de

PSA s’intensifie. Une nouvelle usine est en

construc tion à Wuhan, qui sera capable de

produire 300000 véhicules par an en 2015.

WUHANles Français

à la conquête de

l’Ouest… chinois

1

Cinq mille chantiers sont en cours : devenue la ville leaderdu centre de la Chine, Wuhan se modernise à toute vitesse.

Page 22: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

099

GOOD WORLD

GOOD SURPRISEP

HO

TO

S:

DR

– S

IPA

– L

ILI

/ C

HIN

E N

OU

VE

LL

E –

F.

DE

LA

MU

RE

/ M

AE

E

1. L’INAUGURATION DE LA LIGNE DIRECTE

PARIS–WUHAN PAR AIR FRANCE-KLM.

2. DESTRUCTION D’ANCIENS BÂTIMENTS.

3. LA CITROEN ELYSÉE SUR UNE CHAÎNE DE

MONTAGE DE L’USINE DU GROUPE PSA.

4. UN CARREFOUR IMPORTANT EN CHINE.

4

Poser ses valises à Wuhan

Quand PSA Peugeot Citroën

a débarqué à Wuhan, au centre

de la Chine, en 1992, dans le cadre

d’une joint-venture avec

le constructeur chinois Dongfeng,

son premier réflexe a été

de créer une «base vie» : un vrai

«village gaulois» doté de magasins

d’alimentation, d’une école,

d’un dispensaire et d’un club

de loisirs, bâti à deux pas des usines.

«Je ne suis pas sûr que le constructeur

ferait la même chose aujourd’hui,

indique un diplomate français. Mais

il faut se remettre dans le contexte

de l’époque. S’implanter à Wuhan,

il y a vingt ans, c’était l’aventure.»

Entre-temps, la capitale du Hubei

n’est pas devenue une destination

touristique, mais c’est «une ville

assez agréable, où il fait plutôt bon

vivre, assure Patrick Cervi, directeur

de l’Alliance française. Bien que

la mégapole se modernise rapidement,

les temples sont préservés,

et les hutongs [quartiers constitués

de ruelles et de passages étroits,

NDLR] réhabilités.»

Un enthousiasme pour Wuhan que

partage Gilbert Mennetret, ancien

directeur du Novotel et fondateur

de l’UFE (Union des Français

de l’étranger) locale : «On y mange

vraiment bien et les balades autour

des lacs sont très agréables.»

La petite communauté française

de Wuhan – environ 1000 personnes

(780 personnes inscrites

au consulat) – est éparpillée

dans trois grands centres urbains :

Wuchang, le quartier des universités

et de l’Alliance française, Hankou,

le centre des affaires, et Hanyang,

la zone industrielle où vivent

les salariés de PSA. Il est facile

de s’y installer, car l’offre de locations

meublées dépasse la demande.

Les prix ont grimpé ces dernières

années, mais ils restent bien

inférieurs à ceux de Pékin ou

de Shanghai. De grands appartements

meublés sont accessibles

dans les quartiers résidentiels

pour un loyer mensuel variant

entre 600 et 1000 €.

Objectif : occuper 5% de parts de marché

d’ici à trois ans, contre 3,3% actuellement.

Les entreprises françaises très présentes

PSA est l’entreprise française la plus emblé-

matique et la plus connue des Wuhanais,

ne serait-ce que parce qu’elle y emploie

13000 salariés, pour la plupart chinois.

Mais 90 entreprises françaises sont pré-

sentes dans la ville, parmi lesquelles la

fonderie Delachaux, l’énergéticien Alstom,

le groupe Seb (qui a doublé sa capacité

de production d’articles culinaires en 2011)

et le groupe agroalimentaire Roquette.

Dans leurs unités de production, elles

emploient des centaines, voire des milliers,

de salariés. La grande distribution n’est pas

en reste avec Carrefour (8 magasins),

Metro et Decathlon. Côté banques, la

Société générale a ouvert une agence à

Wuhan dès 1997. «A l’origine, nous avonssouhaité accompagner Peugeot et son fournis?

2 3

seur Acome. Aujourd’hui, nous avons pourclients de grandes entreprises françaises, maisaussi chinoises», explique Philippe Lelarge,

responsable du développement commercial

pour la Chine. La Société générale est la

seule banque française à proposer des pro-

duits aux particuliers. Les 40 salariés de

l’agence de Wuhan soignent leurs riches

clients, leur apportant qualité de service et

conseil personnalisé. Ils les initient même

au F rench lifestyle via des cours de cuisine

ou des dégustations de vin. Les revenus et

le nombre de clients de la Société générale

à Wuhan augmentent de 30% par an.

Bien implantées, possédant une connais-

sance fine des marchés, les entreprises

françaises progressent avec succès. Un

exemple : présente à Wuhan depuis 1990,

l’entreprise Delachaux s’est vu confier la

conception et la fabrication du rail d’ali-

mentation électrique de la ligne 2 du métro

de Wuhan et a dû construire une nouvelle

Page 23: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

100

GOOD WORLD

GOOD SURPRISE

usine en 2010. La crise mondiale touche la

Chine côtière, mais n’atteint pas Wuhan.

«L’activité économique est entraînée par lesimmenses travaux qui sont en train de trans-former la ville. Wuhan connaît un âge d’oréconomique qui durera encore au moinsdix ans», prévoit Serge Lavroff.

A l’abri de la crise mondiale

Ce potentiel n’a pas échappé aux entreprises

françaises. Au cours des dernières années,

une nouvelle vague s’y est implantée.

Certaines ont remporté des appels d’offres.

C’est le cas de Keolis, l’opérateur de trans-

port public de voyageurs choisi par la ville

de Wuhan, l’an dernier, pour optimiser son

réseau de transport collectif et faciliter les

solutions intermodales. Keolis établira son

quartier général «Asie» à Wuhan.

C’est aussi le cas de Suez Environnement,

qui a emporté, en novembre 2011, le pro-

jet de construction et d’exploitation pour

trente ans d’une usine de traitement des

effluents du parc chimique industriel de

Wuhan. D’autres entreprises y rejoignent

des partenaires. Bureau Veritas, fournisseur

de services dans les domaines de la qualité,

de la sécurité et de l’environnement, y a

ouvert une agence il y a quatre ans. «Nousassistons les sociétés dans la gestion de leurs

projets. C’est ainsi que nous avons aidéFaurecia et Seb à construire leurs usines. Nouscontrôlons aussi les fournisseurs des entreprisesfrançaises. Néanmoins, 60% de nos clientssont des entreprises chinoises qui exportent versles Etats-Unis ou l’Union européenne et ontbesoin de certifications soit de leur système demanagement, soit de leurs produits», indique

Wenjiang Li, directeur des ventes de la divi-

sion industrie et infrastructures de Bureau

Veritas en Chine. Les autres investisseurs

ont pour noms Saint-Gobain, qui prévoit

d’y ouvrir une usine de fabrication de

vitrage, Eurocopter, qui vient de créer un

bureau de commercialisation à Wuhan,

espérant ainsi profiter de la récente libéra-

lisation de l’espace aérien chinois à basse

altitude. Le groupe Renault y est attendu

de pied ferme, mais le suspens demeure.

Un protocole d’accord a été signé avec son

partenaire chinois Dongfeng – le même

que celui de PSA ! –, mais le groupe assure

ne pas avoir encore choisi le lieu de sa

future implantation. La décision ne devrait

1. LE WUHAN GREENLAND CENTER

(EN CONSTRUCTION) S’ÉLÈVERA À PLUS

DE 600 MÈTRES ET SERA LE QUATRIÈME

GRATTE-CIEL LE PLUS HAUT DU MONDE.

2. SERGE LAVROFF, CONSUL GÉNÉRAL

DE FRANCE À WUHAN, LORS DE LA POSE

DE LA PREMIÈRE PIERRE DE LA TROISIÈME

USINE DONGFENG PEUGEOT CITROËN

1

pas être annoncée avant 2014. Jusqu’à pré-

sent, Schneider Electric n’avait qu’une

agence commerciale à Wuhan. En 2011, le

groupe a décidé d’y construire une usine de

fabrication de produits «basse tension»,

une plate-forme logistique, un centre

d’appels, et d’y implanter des fonctions

support (finance et achats). Un projet d’in-

vestissements qui s’étend sur 40000 m2 !

«A Wuhan, le potentiel est énorme. La Chineréalise 50% de son PIB dans les régions ducentre. Nous allons faire de Wuhan notre qua-trième hub en Chine», indique Patrick

Gaonach, directeur stratégie et business

développement en Chine. Comme tou-

jours en Chine, tout va très vite. Cinq cents

salariés travaillent aujourd’hui chez

Schneider Electric, à Wuhan. Dans cinq

ans, il y en aurait 2000.

Plusieurs arguments ont poussé Schneider

Electric à choisir Wuhan : une situation

géographique idéale à quatre heures de

TGV de Pékin, de Shanghai et de Canton.

Un réseau de transport local de plus en plus

performant, qui permet de diffuser les pro-

duits dans toutes les provinces voisines. Et,

last but not least, une main-d’œuvre de

qualité : 200000 jeunes diplômés sortent

chaque année des universités de Wuhan, la

plus grande ville universitaire chinoise !

Un âge d’or économique quidevrait durer encore dix ans.

3

2

AUTOMOBILES (DPCA), EN MAI 2011.

3. DANS UNE USINE DE DONGFENG,

L’UN DES PRINCIPAUX CONSTRUCTEURS

AUTOMOBILES CHINOIS.

Page 24: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

101

GOOD WORLD

GOOD SURPRISE

Elle compte 1,2 million d’étudiants pour

70 établissements universitaires, dont cer-

tains caracolent en tête du fameux

classement de Shanghai.

Un lien profond avec la France

La confiance de Wuhan dans les entreprises

françaises est telle que, pour faire face aux

grands défis de l’avenir, c’est vers elles

qu’elle se tourne. La ville veut proposer aux

Wuhanais – 30 millions en 2020, selon les

prévisions – une meilleure qualité de vie.

En 2010, une lettre d’intention a été signée

avec la France pour une coopération en

matière de développement urbain durable.

Une première opération doit être réalisée

avec l’association Urba 2000 concernant la

protection écologique de la zone du lac

Liangzi. L’AFD (Agence française de

développement) finance en partie la réha-

bilitation énergétique d’une trentaine de

bâtiments publics de Wuhan. Sogea, filiale

du groupe Vinci, lance une étude sur le

recyclage des boues urbaines. Cette

confiance réciproque entre la France et

Wuhan est le fruit d’une longue coopéra-

tion industrielle, mais aussi et surtout d’une

très ancienne coopération universitaire

dans les domaines scientifique et médical.

Elle remonte à l’époque où de Gaulle et

Zhou Enlai ont décidé de faire de Wuhan

un modèle de coopération franco-chinois !

Des liens se sont tissés entre les universités,

notamment celles de Lille 2 et de Nancy.

Par exemple, au cours des dix dernières

années, 200 étudiants chinois ont suivi une

partie de leurs études de médecine à Nancy.

Des professeurs vont également y enseigner

leur spécialité. Le plus grand hôpital de

Wuhan est franco-chinois, son vice-prési-

dent est français.

En 1998, bien avant Séoul et Washington,

Paris a installé un consulat dans cette ville

industrielle alors peu attractive. «Jusqu’en2008, le seul consulat présent à Wuhan étaitle consulat français», rappelle Serge Lavroff.

Dès 2001, l’Alliance française s’y est éta-

blie. De quoi créer des liens profonds.

Cinq mille étudiants y suivent aujourd’hui

des cours. L’intérêt que les Français ont su

prêter avant les autres à Wuhan leur per-

met de tracer leur route dans une région

où désormais, comme le disait le grand

timonier, « l’avenir est radieux». !

Tchin Chine !

A Wuhan, tout le monde connaît, au

moins de réputation, le «château-lafei»

(lafite) ou le «château-latu» (latour).

Et certains Chinois sont prêts

à les déguster moyennant 900 €

la bouteille. «Contrairement à Shanghai

ou à Pékin, où les crus bourgeois de

bon rapport qualité-prix sont de plus en

plus appréciés par les connaisseurs,

on ne trouve à Wuhan que des vins

médiocres vendus relativement chers

ou, au contraire, de grands crus»,

explique Christelle Chêne, chargée

de mission export au conseil général

de la Gironde pour la filière vins

et agroalimentaire. La situation devrait

rapidement évoluer. Car, jumelée avec

Wuhan, la ville de Bordeaux a fait

de la mégalopole sa base arrière pour

diffuser ses vins dans tout le centre

de la Chine. En 2009, tout était à faire.

Seule une vingtaine d’entreprises

distribuaient les vins de Bordeaux.

«En 2011, nous avions une centaine

de contacts. Des boutiques de vin

se créent un peu partout», poursuit

Christelle Chêne. La petite structure ne

ménage pas ses efforts. Elle organise

tous les ans, en novembre, un Festival

des vins de Bordeaux et d’Aquitaine

destiné aux professionnels et prépare,

en partenariat avec Ubifrance,

des rencontres d’affaires individuelles

ou collectives entre producteurs

de bordeaux et sociétés chinoises.

Trouver les bons contacts pour s’ouvrir

les portes de la Chine centrale

est essentiel et c’est maintenant que

les producteurs doivent se mettre

sur les rangs : 60% des vins importés

en Chine sont français et 70% sont

des vins d’Aquitaine. L’empire du Milieu

est désormais le cinquième importateur

mondial de vin français en valeur

(539 millions d’euros en 2011, ce qui

représente une hausse de 94% par

rapport à 2010). Pour l’instant, la Chine

ne compte que 2% de consommateurs et

si le vin, notamment en Chine centrale,

reste un produit de luxe, un cadeau que

l’on offre dans les grandes occasions,

il commence à devenir une passion,

consolidée par de nombreux

magazines spécialisés et sites Internet.

4. UNE FOIRE DE L’EMPLOI, À WUHAN.

5. ICI AUSSI, ON SUIT DE TRÈS PRÈS

LES COURS DES MARCHÉS BOURSIERS.

6. LES ÉLÈVES DE L’UNIVERSITÉ DE

SCIENCES ET TECHNOLOGIE HUAZHONG,

LORS DE LA REMISE DES DIPLÔMES.

6

4 5

PH

OT

OS

: D

R –

CH

INA

OU

T –

XIA

O Y

IJIU

/ X

INH

UA

/ S

IPA

PR

ES

S

Page 25: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

102

GOOD WORLD

GOOD BOOST

Zodiac Aerospace est devenue la mascotte des analystesfinanciers. Avec une action qui a doublé en deux ans et un chiffred’affaires qui, pour l’exercice2011, a grimpé de 28%,l’équipementier aéronautiquerécolte les fruits d’une stratégieoffensive d’acquisitions ciblées sur des niches à hautevaleur technologique. Derrière cette sucess-storyboursière, il y a une belle aventureindustrielle à la française, qui remonte à la constructiond’aéronefs, au XIXe siècle.

Par Catherine Trocquemé

Zodiac : un nom presque commun. On

dit un Zodiac, comme on dit un Frigidaire

ou du Scotch. Pour le grand public, il

évoque tout de suite les bateaux pneuma-

tiques gris de nos vacances, rendus

célèbres, entre autres, par le commandant

Cousteau. Pour les avionneurs, les compa-

gnies aériennes ou la Nasa, ce sont des

toboggans d’évacuation, des cuisines et des

sièges pour les avions, des systèmes de

circulation du carburant ou de dégivrage,

ou bien encore les parachutes des vols

spatiaux. Pour les ingénieurs, Zodiac

représente avant tout une société pionnière

dans la construction de ballons dirigeables,

à la fin du XIXe siècle. Enfin, les investis-

seurs et les analystes financiers, eux,

pensent à la stratégie d’un groupe qui a

réussi à passer de la PME familiale réali-

sant 40 millions de francs de chiffre

d’affaires (environ 6 millions d’euros)

en 1974 à un groupe international pesant

2,7 milliards d’euros de chiffre d’affaires

en 2011. Derrière le nom commun, se

cache, en réalité, une saga industrielle

amorcée il y a plus de cent ans.

A l’origine, Zodiac est une société de

conception et de fabrication d’aéronefs

fondée par des familles d’explorateurs et

d’aéronautes réunies autour de Maurice

Mallet, en 1896. Née à l’époque bouillon-

nante des grands entrepreneurs-inventeurs,

comme les Lumière ou les Michelin, la

petite entreprise de Maurice Mallet innove

sur le plan technique, mais également

commercial, en proposant ses engins

volants aux entreprises comme support de

réclame. Ses salariés participent à des com-

pétitions de ballons dirigeables pour

décrocher des records du monde. C’est

d’ailleurs grâce à ces ingénieurs aéronautes

intrépides que Zodiac crée, en 1934, le

prototype du fameux bateau pneumatique

et envahit un marché des loisirs en plein

essor dans les années 60. Tout au long de

son histoire, d’autres familles entrent au

capital et restent fidèles aux destinées de

l’entreprise. Encore aujourd’hui, l’équipe-

mentier aéronautique peut compter sur

cet actionnariat d’inconditionnels. Sept de

ces familles ont ainsi signé, en juin 2012,

des engagements collectifs de conserva-

tion, qui portent sur 24% du capital et

35% des droits de vote. Les années 70 ont

bien failli être fatales pour l’entreprise, mal

gérée et engluée dans des conflits de per-

sonnes. Elle allait droit à la banqueroute.

Didier Domange, l’un des actionnaires,

fait alors appel, en 1974, à un homme

venu de l’extérieur, son ami d’enfance,

Jean-Louis Gérondeau. Ce sera l’occasion

d’un nouveau départ.

Trente ans de croissance effrénée

Le nouveau patron de Zodiac s’entoure

d’une équipe de jeunes talents issus de

prestigieuses écoles de commerce, redresse

les comptes, optimise les process de fabri-

cation et part à la reconquête du marché

aéronautique. Dès 1977, l’entreprise

renoue avec les dividendes. Les caisses

à nouveau pleines, Zodiac rachète son

ancien concurrent Aerazur, positionné sur

les parachutes et les équipements pour les

avions (barrières d’arrêt, flotteurs pour

hélicoptères…), et double son chiffre d’af-

faires. Suivent trente années d’acquisitions.

Une trentaine d’entreprises sont ainsi

croquées par Zodiac rien que sur le marché

de l’aéronautique. L’une des dernières en

date, fin 2011, le britannique Contour

Aerospace, spécialiste des sièges d’avion

classe affaires et première classe, propulse

même Zodiac Aerospace à la place de

numéro un mondial du segment. Pour

ZODIAC AEROSPACE

sous le signe de l’air

Vents contraires

L’avenir du bateau pneumatique,

à qui la notoriété de Zodiac doit tant,

reste incertain. Depuis qu’il a rejoint,

avec les activités piscine, le giron du

fonds d’investissements Carlyle, en 2007,

l’embarcation insubmersible du docteur

Bombard navigue à vue. L’actionnaire

américain, désormais propriétaire

de la marque Zodiac, a lancé un plan

de redressement, depuis 2008, pour faire

face à un marché des loisirs impacté

par la crise, la flambée du prix du fuel

et des coûts de fabrication des bateaux

semi-rigides élevés. Le site girondin

de Zodiac Marine & Pool, menacé

de fermeture, devrait perdre

une soixantaine d’emplois en 2012.

1

2

3

Page 26: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

103

GOOD WORLD

GOOD BOOST

soutenir cette croissance externe, Zodiac

entre en Bourse en 1983. Mais une déci-

sion doit être prise sur la branche

Marine & Pool, dont les activités cycliques

et volatiles ne collent plus au profil de

Zodiac. En 2007, cette activité ainsi que la

marque Zodiac sont vendues au groupe

Carlyle, une société d’investissement amé-

ricaine. Très connue dans le monde

aéronautique, Zodiac a toutefois réussi à

négocier l’utilisation du nom à condition

qu’il soit accompagné d’«Aerospace». Peu

de temps après cette transaction, Jean-

Louis Gérondeau passe la main. Une

nouvelle page se tourne.

Les hommes et les marchés

de demain

Olivier Zarrouati prend alors les rênes,

dans la continuité de la stratégie menée

par Gérondeau. Zodiac Aerospace affiche

de solides perspectives de développement.

«Son positionnement sur les programmesB787, A380 et A350 devrait lui assurer unecroissance durable et rentable », précise

Antoine Boivin-Champeaux, analyste

financier, responsable du marché aéro-

nautique et défense au sein de Cheuvreux.

Quant à la stratégie de croissance externe,

elle est toujours d’actualité, malgré des

rumeurs récurrentes et persistantes d’OPA

de Safran (le groupe industriel, fruit de la

fusion entre Sagem et Snecma, pesant

11 milliards d’euros de chiffre d’affaires)

sur Zodiac. Certains disent d’ailleurs que

ces rumeurs ont eu un effet dopant sur le

cours de l’action Zodiac Aerospace. Il faut

donc continuer à grossir tout en optimi-

sant l’organisation d’un groupe très

décentralisé. En effet, chaque société

acquise garde une grande autonomie.

Héritage du traumatisme de la crise des

années 70, seul le contrôle de gestion et

des finances avait été consolidé. Depuis

deux ans, pourtant, de nouveaux services

transversaux se mettent en place, autour

de l’optimisation de la gestion de produc-

tion – le lean manufacturing – ou encore la

synergie des activités d’après-vente. «Nousnous organisons pour produire toujoursmieux », affirme Pierre-Antony Vastra,

directeur de la communication.

En 2012, un pas de géant est même fran-

chi avec la création d’une toute nouvelle

direction des ressources humaines. Zodiac

Aerospace prépare la relève du leadership

et structure, au niveau du groupe, la

gestion des carrières. Au programme :

valorisation de la filière technique des

ingénieurs, mise en place de dispositifs de

détection des talents et de parcours de for-

mation, renforcement des relations avec

les grandes écoles pour ouvrir le recrute-

ment de hauts potentiels et déploiement

d’outils de recrutement auprès des diffé-

rentes sociétés. Comme il faudra toujours

équiper des avions de plus en plus nom-

breux sur un marché mondial qui a

complètement explosé, l’avenir de Zodiac

semble tout tracé. !

Les hommes clés

• Le fondateur visionnaire : Maurice

Mallet. Cet aéronaute passionné

organisait au bois de Boulogne,

à Paris, des baptêmes de l’air

en ballon dirigeable et a fait voler

Guy de Maupassant et Jules Verne.

• L’ingénieur inspiré : Pierre

Debroutelle. Cet aviateur confirmé

a créé le prototype du fameux bateau

pneumatique en 1934. Ces deux

boudins gonflés aux bouts pointus ont

été utilisés pendant la guerre, glissés

sous les hydravions, pour transporter

des torpilles et des bombes.

• Le patron emblématique : Jean-Louis

Gérondeau. Ce jeune polytechnicien,

diplômé d’Harvard, venait chaque soir,

après sa journée chez McKinsey,

pour gérer l’urgence. En effet,

la comptabilité n’avait pas été tenue

depuis plus de huit mois.

En plus de trente ans, il bâtira

le groupe Aeropsace tel qu’on

le connaît aujourd’hui.

Zodiac Aerospace en chiffres

• 30 sociétés.

• 2,7 milliards d’euros de chiffre

d’affaires.

• 238 millions d’euros de résultat net.

• 21157 salariés dans le monde,

dont 6000 en France.

• 116 sites : 50 en Europe,

43 en Amérique du Nord, 11 en Asie,

8 en Afrique et 4 en Amérique latine.

• 24% du capital et 35% des droits

de vote détenus par sept familles.

Les 5 secteurs d’activité

de Zodiac Aerospace

• Aerosafety&Technology : systèmes

d’évacuation d’urgence, systèmes d’arrêt

d’urgence, systèmes d’interconnexion,

télémesure et télécommunications,

airbags…

• Aircraft Systems : circulation carburant,

surveillance et gestion de systèmes,

oxygène et protection physiologique,

commandes et signalisation dans

le cockpit, éclairage et actionneurs…

• Seats : sièges passagers et équipage.

• Galley&Equipment : galleys et

équipements embarqués, équipements

de galley, équipements cargo…

• Cabin Interiors : équipement de cabine,

systèmes cabine.

1. LE TOBOGGAN ARCHE GONFLABLE,

DU PONT SUPÉRIEUR DU BOEING 747.

2. ENTRE AUTRES ÉQUIPEMENTS, UN GALLEY.

3. LE CONCEPT DE SIÈGES AIR LAIR, PRÉSENTÉ

AU SALON DE HAMBOURG EN 2012.

4. OLIVIER ZARROUATI.

5. UN MASQUE À OXYGÈNE.

5

4

PH

OT

OS

: D

R

Page 27: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

104

GOOD WORLD

GOOD BUSINESS

Sous la direction de cetAméricain de 54 ans, passépar GAP, Tommy Hilfiger et Esprit, la marqueaméricaine de bagages de luxe Tumi a parfaitementréussi son entrée en Bourseen avril dernier. Un indice ?Le chiffre d’affaires a bondide 31 % en 2011 !

Par Elisabeth Guédel-Treussard

Jerome Griffith aime tout ce qui estbeau et tout ce qui roule. Il a conduit sapremière Harley-Davidson à 16 ans et enpossède aujourd’hui quatre. Si le patronde Tumi voyage encore dans le mondeentier avec un enthousiasme d’adolescent,il est sûrement le premier et le meilleurclient de sa marque, connue pour sesbagages et ses accessoires de luxe. Luxe ?Jerome Griffith s’en défend un peu. «Nosproduits ont un certain prix, c’est vrai, carleur qualité et leur design sont excellents.Mais ce ne sont pas des bagages qui restentdans les placards. Ils sont conçus pour uneutilisation régulière. » Le président n’hésitepas à taper violemment du pied sur unevalise cabine en Tegris, un matériau com-posite réputé indestructible égalementutilisé pour les voitures de course Nascar ;impressionnant ! Il est convaincant, c’estun très bon vendeur. « C’est pour ça queTumi m’a embauché. »

Du bagage à l’accessoireLe sourire aux lèvres, il raconte son par-cours. Né « dans une ferme », à Oxford,une petite ville de Pennsylvanie, il est lepremier de sa famille à faire des étudessupérieures, à Penn State, la célèbre uni-versité de Pennsylvanie. A 22 ans,fraîchement diplômé, il s’installe à NewYork, est embauché chez Lord &Taylor,

la plus ancienne chaîne de grands maga-sins américains. Pendant dix ans, il yapprend toutes les ficelles de la vente àdifférents postes de management. C’estensuite la traversée de l’Atlantique avec legroupe GAP, pour qui il dirige les ventesEurope et en développe la présence en lefaisant passer de 20 à 240 boutiques. Dixans plus tard, il devient patron des venteschez Tommy Hilfiger, puis président del’enseigne Esprit, dont les ventes passe-ront, en six ans, de 1 à 5 milliards dedollars, avant de quitter, en 2009, lemonde de l’habillement pour celui dubagage. « En trente ans, j’ai appris beau-coup de choses, et surtout ce que je ne doispas faire ! J’ai notamment appris à ne pasprendre de trop grands risques. Il vautmieux profiter au maximum de ce que l’oncomprend bien plutôt que d’essayer deschoses qu’on ne comprend pas. » Une sagessequi n’est pas très surprenante chez cet

JEROME GRIFFITH

le bagage lui va si bien

Tumi en quelques dates :

1975 : Création par un entrepreneurglobe-trotter américain, CharlieClifford. Nom donné d’après le symbole du Pérou, le tumi, un couteau cérémonielprécolombien.

1990 : Tumi débarque en Europe.2001 : Après les attentats

du World Trade Center, les ventes plongent de 40%.

2004 : Rachat par le fondsd’investissement privé britannique DoughtyHanson&Co.

2012 : Entrée à la Bourse de New York,le 19 avril. Jerome Griffithsonnne la cloche au NYSE.

Page 28: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

105

GOOD WORLD

GOOD BUSINESSP

HO

TO

S:

DR

Louis Vuitton, Coach ou Tod’s. » JeromeGriffith travaille beaucoup sur le design,avec les créateurs maison, mais aussi descollaborateurs extérieurs. Une collection« Papillon », en noir et violet, conçue parla designer Anna Sui, a même défilé à lafashion-week de New York l’an dernier.Une édition limitée d’un millier debagages, mise au point avec l’artiste new-yorkais venu du Bronx John Matos, aliasCrash, l’un des grands noms du graffiti, aété sold-out en un mois. Ça collabore tousazimuts. Avec des constructeurs automo-biles, comme l’italien Ducati et lejaponais Lexus. «Toutes les grandesmarques automobiles nous ont contactéspour travailler avec nous », déclare fière-ment ce passionné de belles voitures. Avecle leader (80 % du marché) des casquesaudio Monster… Dans les cartons égale-ment : la création, avec un « célèbrechausseur français », d’un bagage féminindédié aux chaussures, « car, en fait, 45 %de nos clients sont des femmes et 2 acheteursen ligne sur 3 sont des acheteuses ! »explique-t-il, inspiré par les habitudes deses deux filles âgées de 20 et 22 ans.Jerome Griffith assure beaucoup s’amuseret compte bien continuer. !

Jerome Griffith en quelques dates :

1957 : Naissance à Oxford, Pennsylvanie.

1979 : Diplômé, en marketing, de

l’université de Pennsylvanie (Penn

State). S’installe à New York.

1979 : Manager chez Lord&Taylor,

occupe différents postes.

1989 : Directeur des ventes Europe

chez GAP. Basé successivement

en Angleterre, en France

et en Allemagne.

1998 : Retour aux Etats-Unis, directeur

des ventes à la J. Peterman

Company (ligne de vêtements

vendue sur catalogue et Internet).

1999 : Directeur des ventes chez

Tommy Hilfiger.

2002 : Retour en Europe, président

d’Esprit.

2006 : Président d’Esprit Amériques

du Nord et du Sud.

2009 : Président de Tumi, basé

à New York. Vit entre Manhattan

et les Hamptons (Long Island).

Tumi aujourd’hui :

– Siège à South Plainfield, New Jersey.

– 1 400 points de ventes,

dont 183 boutiques dans 65 pays.

– Un millier d’employés dans le monde

– Chiffre d’affaires : 330 millions

de dollars en 2011 (soit une

augmentation de 31% par rapport à

2010) et 390 millions prévus en 2012.

– Bénéfice net : 16,6 millions de dollars.

– Premier marché : l’Amérique du Nord.

Deuxième marché : la Chine.

Et un tiers du business réalisé en

Asie : Chine, Japon et Corée du Sud.

1

adepte des arts martiaux que les nouveauxinvestisseurs de Tumi doivent apprécier.Le bagagiste est en effet entré à la Boursede New York le 19 avril dernier.L’entreprise, valorisée à plus de un mil-liard de dollars – deux fois moins que legéant Samsonite –, n’a évidemment plusrien à voir avec celle créée en 1975 parl’entrepreneur américain Charlie Clifford.A cette époque, le marché du bagage deluxe se résumait essentiellement à lalourde valise rigide du businessman.Aujourd’hui, Tumi vend des dizaines demodèles de sacs souples, de valises trolleyset d’attachés-cases, dans des matériauxultra-innovants et au design sophistiqué.Depuis l’arrivée de Jerome Griffith, lesaccessoires ont pris une place très impor-tante dans le catalogue de Tumi.Protection de tablettes numériques – un

best-seller – et de smartphones, adapta-teurs électriques, portefeuilles ou encorematériels électroniques… 75 % des produits vendus ne sont plus,aujourd’hui, liés directement au voyage.Histoire, notamment, d’être mieux arméen cas de nouveau coup d’arrêt dans lesvoyages d’affaires, comme cela a été le casaprès les attentats du 11 septembre 2001ou lors de la crise financière de 2008-2009. Jerome Griffith n’aspire toutefoispas à une mutation complète. «Tumi estconnue pour ses bagages. Il n’est pas ques-tion de changer cela. » Il garde à l’espritl’erreur de Volkswagen. « Le constructeurallemand a sorti, en 2002, la Phaeton, unevoiture de luxe à 100 000 dollars, superbe,comparable à une Audi ou à une Mercedes.Mais invendable ! Car les gens n’associentabsolument pas la marque Volkswagen àune voiture de luxe. »

Des podiums aux graffitis du BronxRester fidèle à son image, c’est la garantiede rester à part pour Tumi. «Nous n’avonspas vraiment de concurrents directs. Noussommes entre les marques moyen de gammecomme Samsonite et Rimowa, et les trèsgrandes marques de luxe comme Burberry,

1. VALISE CABINE DROR INTERNATIONAL

EXPANDABLE ONYX.

2. VALISE CABINE GRAPHITE TEGRA

LITE CONTINENTAL.«J’ai appris beaucoup de choses, et surtout ceque je ne dois pas faire ! »

2

Page 29: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

106

GOOD WORLD

GOOD MIND

PH

OT

O:

KA

TH

LE

EN

DO

OH

ER

FO

R T

HE

HO

WA

RD

HU

GH

ES

ME

DIC

AL I

NS

TIT

UT

E,

20

04

Quand il parle de progrèsmédicaux, tout paraît simple : ilsuffit de lutter contre les maladiespour lutter contre le vieillissementet la mort. Douglas Melton dirige,à l’université d’Harvard, l’un deslaboratoires les plus à la pointedans la recherche scientifique.C’est dans ses éprouvettes quese prépare l’homme de demain.

Par Elisabeth Guédel-Treussard

Le docteur Douglas Melton vient de voirse réaliser le rêve de tout chercheur : l’abou-tissement concret de décennies de travail.Le laboratoire qu’il dirige au sein du dépar-tement de biologie régénérative et d’étudedes cellules souches, à l’université d’Har-vard, a signé un contrat de 8 millions dedollars (6,5 millions d’euros) avec une filialepharmaceutique du géant de la grandeconsommation Johnson & Johnson et unecompagnie allemande de biotechnologie,Evotec. L’enjeu : le développement demédicaments contre le diabète, une pre-mière dans le traitement de cette maladie.A 59 ans, Douglas Melton est l’un des plusgrands spécialistes des maladies dégénéra-tives au monde, ces maladies déclanchéespar la dégradation d’un ou de plusieurs

organes. «Au lycée, j’étais intéressé par lessciences, mais probablement plus encore par letennis et le basket», aime-t-il raconter à sesétudiants. Ce n’est qu’à l’université, dans lesannées 70, qu’il découvre le clonage des cel-lules et son immense champ d’application.Il se lance dans l’étude du diabète lorsqueson fils, puis sa fille révèlent la forme detype 1 de cette maladie, ou «diabète juvé-nile», différent du diabète de type 2, lié ausurpoids ou à l’obésité. Le diabète de type 1touche 22 millions de personnes dans lemonde. Le coût du diagnostic seul est éva-lué à 175 millions de dollars (143 millionsd’euros), rien qu’aux Etats-Unis.

Vaincre toutes les maladiesDepuis des années, le professeur d’Harvardessaie de comprendre le mécanisme de lamaladie qui apparaît lorsque le pancréas neproduit pas suffisamment d’insuline, l’hor-mone qui régule la concentration de sucredans le sang. Il s’est d’abord plongé dans lepancréas des grenouilles et des souris, dansles années 90. Puis, de la cellule animale, ils’est tourné vers la cellule embryonnaire etles cellules souches. Ces dernières, plus rareschez l’adulte que dans l’embryon, sontcapables de produire d’autres cellules spé-cialisées (celles du cerveau, du cœur, dufoie…) et peuvent se reproduire quasi indé-finiment en laboratoire. «Il faut être capablede reproduire la maladie pour regarder ce quise passe, encore et encore. Les cellules souchesservent à cela», explique-t-il au journalisteaméricain Charlie Rose, en 2009, lorsqu’il aété nommé l’une des cent personnalités lesplus influentes au monde par le magazineTime. Aujourd’hui, l’obstacle principal à larecherche est davantage son financementque la technologie, estime Douglas Melton.En 2001, le président George W. Bush a faitinterdire le financement de ce type de tra-vaux par des fonds publics. Durant huit ans,les scientifiques n’ont pu compter que surdes fonds privés. Douglas Melton n’a pashésité à défier l’interdiction en cultivant descellules souches et en les distribuant gratui-tement aux laboratoires pour la poursuitede leurs recherches. Malgré la levée de l’in-terdiction, la course aux financements resteune nécessité et la concurrence est rudeentre laboratoires. Le contrat signé par celuide Douglas Melton sur un traitement médi-camenteux du diabète arrive donc à point.Chaque molécule qui sera mise sur le mar-

ché rapportera des centaines de millions dedollars à Harvard, de quoi financer lesrecherches à venir. Car Douglas Meltonestime n’être qu’à ses débuts. Son travail surle diabète est applicable à toutes les mala-dies dégénératives, comme le cancer, lamaladie d’Alzheimer ou encore celle de Par-kinson. Le scientifique va plus loin : selonlui, dans plusieurs décennies, on sera capa-ble d’éliminer toutes les maladies et dereculer le vieillissement de l’homme, phy-sique et intellectuel. «Nous pouvonscertainement arrêter la mort, assurait-il àRoger-Pol Droit et Monique Atlan, lesauteurs du livre Humain, publié en janvier.Je suis convaincu qu’on peut trouver les moyensd’allonger la durée de vie des vertébrés grâce àdes modifications génétiques.» L’homme irachez son médecin pour un check-up de sescellules comme il y va aujourd’hui pour unbilan de santé. Le patient pourra remplacer,par transplantation, ses cellules vieillissantesou défectueuses par des cellules toutesneuves. Une vision à très long terme, prochede la science-fiction. L’espoir d’améliorerl’espèce humaine selon Douglas Melton etles scientifiques de sa génération. !

DOUGLASMELTON

repousser les limites de l’humain

Douglas Melton

1953 naissance à Chicago,

le 26 septembre.

1975 maîtrise de biologie à l’université

de l’Illinois.

1977 maîtrise d’histoire

et de philosophie des sciences

à l’université de Cambridge,

en Angleterre.

1980 doctorat de biologie moléculaire

à l’université de Cambridge,

en Angleterre.

Depuis 1988 professeur de biologie

moléculaire et cellulaire

au département de biologie

régénérative et d’étude

des cellules souches à l’université

d’Harvard.

2007 et 2009 compte parmi

les 100 personnalités les plus

influentes au monde selon le Time.

● Cofondateur de l’Institut d’étude

des cellules souches à l’université

d’Harvard.

● Membre de l’Académie nationale

des sciences.

● Membre de l’Institut de médecine.

Page 30: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX

AG

1390

8

Prendre le temps de la réflexionTracer les perspectives pour agir

Page 31: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

108

GOOD WORLD

GOOD FACTORY

Certains ont leur USM commed’autres ont leur Porsche ou leur Rolex. Avec ses structuresen acier et ses parois en tôle aux couleurs vives, ce mobilier a fait son entrée, en 2001, dans les collections permanentes du MoMA, à New York. Un joyaumodulaire représentatif de la célèbre précision suisse. Un sujet The Good Life !

Par Serge GleizesPHOTOS : Scarlett Coten

Suisse alémanique, Berne. Quelquesfaubourgs plutôt cossus, des champs par-faitement verts et, enfin, Münsingen.Quatorze fanions arborant les couleurs dela firme ondulent au vent : USM. PourUlrich Schärer Münsingen. Tout com-mence en 1885, lorsque Ulrich Schärerfonde un atelier de forge qui deviendra,un peu moins de quarante ans plus tard,sous la houlette de son fils Alfred (aidé deses frères Robert, Paul et Hans), un atelierspécialisé dans la production d’espagno-lettes. Dans les années 50, la productionmétallique et l’usinage de la tôle se déve-loppent, ainsi que la production desystèmes de fermeture de fenêtres. PaulSchärer, troisième du nom, qui a rejointla société en 1961, confie à Fritz Haller laconstruction d’un nouveau site, endehors de la ville : « C’est le credo quianime ma vie, affirme l’architecte. Maprofession n’est pas à but lucratif, mais s’ins-crit dans la recherche constante de ce quipeut faire chanter les œuvres. »Forts du succès rencontré par le bâtimentlivré à Münsingen, en 1965, et qui reposesur un système de construction basique etmodulable, les dirigeants d’USM ont uneidée de génie : adapter ce principe à unsystème de mobilier en acier réalisé demanière industrielle. Ainsi voit le jour lefameux système Haller (développé en1963 avec Paul Schärer et Kurt Scherrer),qui repose sur le principe du système

ouvert, modifiable à l’infini, permettantau meuble de s’adapter à l’organisation den’importe quel poste de travail. L’idée ?Rudimentaire. Une structure composéede tubes de jonction et d’une boule surlaquelle se greffent des parois horizontalesou verticales. Résultat : un assemblagetrès résistant à la pression et à la traction,habillé de plaques en tôle. Bingo ! fin1969, quand la banque Rothschild com-mande 600 modules. Très vite, les filialesse développent : près de Baden-Baden, enAllemagne, en 1975, à New York en2002, à Paris en 2003, à Tokyo ensuite…L’usine de la petite ville de Münsingenfournit alors des bureaux, des hôtels, desaéroports, des bâtiments publics, desmusées, des demeures privées et même denombreuses grandes marques commePorsche et Hugo Boss, pour lequel ellecrée un gris spécifique. En 1992, USMabandonne même son activité d’originepour se concentrer uniquement sur lessystèmes d’aménagement.

Une merveille de précision Devenu trop exigu, le bâtiment d’Hallers’est métamorphosé en lieu d’expositionet de conférence. Siège, bureaux, show-room et ateliers sont alors installés dansun énorme parallélépipède entouré d’ungazon taillé au cordeau, au centre duqueltrône une sculpture de Schang Hutter. Aufond du gigantesque open space, le bureau

USMrangement

affectif

Les créations phares d’USM

1963 Naissance du système

d’aménagement USM Haller.

1989 Lancement d’USM Display, créé

par Fritz Haller et Rudolf Graf.

1990 Lancement d’USM Kitos,

dessiné par Paul Schärer

et Rudolf Graf, composé

de plans de travail et de tables

de conférence modulaires,

réglables électriquement

ou manuellement.

1996 Lancement du système USM

Inos.

1999 Lancement d’USM Eleven 22,

dessiné par Alexander Schärer,

Florin Baeriswyl et André

Gerber, qui se résume

à un cadre vertical sur lequel

sont suspendus des parois,

des supports d’ordinateurs,

des rangements et des plans

de travail rabattables.

2011-2012 Lancement des concepts

Living et Working Essentials,

avec les nouvelles tables USM

Kitos E et USM Haller Advanced,

munies d’un compartiment

intégré permettant de cacher

les câbles et les branchements,

et équipées pour accueillir

des écrans plats, des lampes,

des clés USB…

1

Page 32: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

109

GOOD WORLD

GOOD FACTORY

du dirigeant actuel, Alexander Schärer,quatrième du nom, est séparé de ceux deses employés par des œuvres d’art, unesculpture d’Oscar Wiggli, une œuvre deBen posée sur une étagère – Parlez-moi etje vous répondrai peut-être –, des photosde Chicago, en noir et blanc, de BalthasarBurkhard. Dans les salles d’assemblageattenantes, les chaînes de production sontentièrement robotisées. Un matériel, bienqu’extrêmement coûteux, qui peut êtreamorti en cinq ans ! Le montage final desmeubles est, en revanche, resté complète-ment manuel. Pour mériter la gratificationde la légendaire fabrication suisse, chaquemeuble USM se doit d’être une petitemerveille de précision et de rigueur.L’autre grande force de l’entreprise résidedans l’attention qu’elle porte à l’environ-

nement. Un nouveau bâtiment est enconstruction et va accueillir les prochainsateliers de peinture époxy. Tout sera sou-terrain, pour des raisons d’économied’énergie. Même souci de l’écologie pourla fabrication des poudres de couleursrésistant à la lumière et dépourvues desolvant. Les plateaux de table sont vitrifiésavec des laques multicouches solublesdans l’eau et inodores, séchant sousrayonnement, et les colles utiliséescontiennent peu de formaldéhyde, extrê-mement toxique. Les ouvriers quisurveillent les pistolets à laque travaillentd’ailleurs sans masque ni gants. Autant deparamètres qui ont valu à la marque derecevoir, dès mai 2007, le certificat del’institut Greenguard. Alors à quand vosbureaux en USM ? !

4 5

3

1. LES BUREAUX D’USM, ÉQUIPÉS

EN MOBILIER DE LA MARQUE.

2. ET 3. DANS LES ATELIERS DE FABRICATION,

LES CHAÎNES DE PRODUCTION SONT

ENTIÈREMENT ROBOTISÉES.

4. DES ROULEAUX DE TÔLE AVANT D’ÊTRE

DÉCOUPÉS EN PAROIS, QUI SERONT ALORS

RECOUVERTES DE PEINTURE EPOXY.

4. DANS UNE CABINE DE PEINTURE, SANS

MASQUE NI GANTS !

2

Alexander Schärer,CEO d’USM

!e Good Life : Qu’est-ce qui a changé chezUSM depuis votre arri-

vée, en 1993? Alexander Schärer : Pas grand-chose, carl’une des valeurs de notre entreprise est lalongévité. Notre production est toujours réa-lisée en Suisse et une partie du montage enAllemagne. En revanche, le haut de gammes’est développé, le moyen de gamme a baissé.Le franc suisse est devenu très fort par rap-port à l’euro, ce qui a engendré, chez nous,l’augmentation de nos ventes et de notrechiffre d’affaires en Allemagne et en France. TGL : Un rangement USM est-il design ? A. S. : Oui, plus que jamais, car il répond àl’idée que l’on se faisait du design dans lesannées 60. A l’époque, ce dernier avait uncôté confidentiel et élitiste. Dans lesannées 80, il a connu de nombreux déve-loppements parallèles. Aujourd’hui, ledesign fait partie de notre quotidien.TGL : Vous financez des bourses universi-taires du Virginia Polytechnic Institute etde la State University de Blacksburg. Pourquelle raison ? A. S. : Parce que nous misons toujours surl’avenir. Cela dit, cette collaboration nedate pas d’hier. Elle a été le fruit de mer-veilleuses rencontres avec des étudiants etdes professeurs passionnés. TGL : A quel marché répond la nouvelleligne Living Essentials ? A gagner le sec-teur de l’habitat privé ?A. S. : A revenir surtout à plus de simpli-cité, à l’essence des choses, afin de créer unedifférence entre l’univers du public et duprivé. Avec Living Essentials, nous essayonsde développer un réseau de distribution pluspointu, avec des magasins spécifiquementdesign, pour répondre à une nouvelleapproche sociétale et à de nouveaux stylesde vie. En outre, c’est la première fois quedes prix sont indiqués dans la brochure.TGL : Vous semblez, par ailleurs, accorderune grande importance au développementdurable…A. S. : Oui, c’est très culturel chez nous, etpas seulement du marketing. Dans notrenouveau bâtiment souterrain, nous ferons35% d’économie sur les énergies primaires.Le coût de cette nouvelle installation seraamorti en sept ans. !

Page 33: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

110

GOOD WORLD

GOOD FACTORY

1. 3. ET 4. PAS MOINS DE 1000 PAROIS

EN TÔLE SONT PRODUITES CHAQUE HEURE,

DANS DE NOMBREUX COLORIS.

2. LOTS DE CONNECTEURS, LES FAMEUSES

BOULES AUTOUR DESQUELLES

LES STRUCTURES SONT ARTICULÉES.

1

2

3

4

Le mobilier USM en quelques infos

Couleurs best-sellers : blanc, 31% ;

noir, 24% ; gris clair, 17%.

Longueur et poids d’un rouleau de tôle servant à réaliser les parois du mobilier : 1,5 km ; 3,5 t.

Nombre de parois réalisées par heure : 1000.

Surface de revêtement des tôlesproduite par an : 1,5 million de m2, soit

l’équivalent de 180 terrains de football.

Diamètre de la boule, l’élémentfédérateur : 2,5 cm.

Profondeurs, largeurs et hauteursd’un module : 10,15 et 25 cm ;

35 et 39,5 cm ; 50 et 75 cm.

Pascal Buisson,directeurgénéral Europe,Etats-Unis et Japon.

!e Good Life : Que représenteaujourd’hui USM pour le réseau de distri-bution français ? Pascal Buisson : USM est devenu unemarque quasi incontournable. Ce qui estvraiment étonnant, c’est de constater le suc-cès toujours égal, voire grandissant, d’unecréation qui a vu le jour il y a quarante-cinqans, et cela sans avoir à développer degrandes nouveautés chaque année.TGL : Quelles sont les raisons de cettepérennité ? P. B. : L’attention obsessionnelle que nousportons à la qualité de nos créations et à cellesde nos prestations, deux notions qui ont tra-versé les époques sans jamais se déprécier.Autre élément déterminant, la direction suitla même voie depuis son origine, et restefamiliale puisque Alexander Schärer, le fils dePaul Schärer, qui fut à l’origine du produit,est aujourd’hui président-directeur général.TGL : Comment la marque est-elle perçueaux Etats-Unis ? P. B. : Fort bien. Mais là-bas, le marketingest capital, tout doit être simple, un meubleentièrement monté doit être livré en deuxsemaines. Point final. D’autant plus qu’auxEtats-Unis USM est perçu comme du trèshaut de gamme. Ma mission est de créer unréseau de distribution adapté aux spécifici-tés de chaque Etat, de faire comprendre cequ’est la modularité et de développer lesventes d’un produit technique dans un paysqui apprécie la qualité suisse. TGL : Cela s’applique également à l’ex-portation ?P. B. : Absolument. Si les principaux grandsmarchés se concentrent en Allemagne et enSuisse, la maison met de plus en plus l’ac-cent sur l’international, notamment par lebiais des filiales françaises, américaines etjaponaises. Et les résultats progressent dansces zones géographiques. En France, USMconnaît un succès considérable, notammentauprès des entreprises qui apprécient la soli-dité et la sécurité de nos rangements, maiségalement auprès des particuliers qui nousprouvent que l’attachement affectif à lamarque est très fort. !

USM en chiffres

Surface du site suisse : 34000 m2

répartis sur 3 bâtiments.

Chiffre d’affaires : 150 millions d’euros

environ.

Chiffre d’affaires du showroomet de la filiale française : 6 millions

d’euros en 2011, en augmentation de 40%

par rapport à 2010, et continuité de la

progression sur le premier semestre 2012.

Principales filiales : Allemagne, France,

Grande-Bretagne, Etats-Unis, Japon,

Autriche, Espagne…

Exportation : 70% de la production.

Nombre de commandes : 100000,

en Suisse, l’année dernière.

Montant d’une commande : environ

3000 euros pour une commande

moyenne, hors gros projets.

Page 34: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

Nouveau Streetfighter 848Domptez la route !Le Streetfigther 848 est synonyme de précision et d’agilité grâce à son cadre et à sa légèreté, 169 kg. Sa nouvelle position de conduite le rend plus maniable et plus confortable. Propulsé par un nouveau moteur 848 Testastretta 11°, sa puissance est maîtrisée par le Contrôle de Traction Ducati (DTC). Le nouveau règne du Streetfighter 848 a commencé.

Nouveau Streetfighter 848 disponible au tarif de 12 490 euros TTC, prix public conseillé au 1er janvier 2012. Prenez RDV pour un essai dans le réseau officiel Ducati en contactant le Distributeur de votre région. Liste disponible sur www.ducati.fr

Powered byDeveloped withOfficial Sponsor

5762-AP-SF848-TGLife-200x265.indd 1 14/06/12 17:14

Page 35: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

112

GOOD WORLD

GOOD PROFILE ADVERTISING

PH

OT

O :

DR

C’est un talent qui n’attend pas le nombre des années. A seulement34 ans, David Leclabart vient de s’installer dans le cockpit de TBWA Paris, la troisième agencequ’il est amené à diriger, aprèsCLM BBDO et McCann. Les boîtes de pub se l’arrachent,mais ce booster d’équipes détonnepar sa normalité ostentatoire : anti-bling-bling, anti-grosse tête,presque à contre-emploi, tant ilsemble imperméable au superficiel.

Par Laura Cordin

Son ambition ? Redonner à la pub leprestige de sa fibre créative, une créativitéà la fois intuitive et pro, où la liberté d’in-venter se blinde, en amont, d’un sévèrebriefing. Regard droit, sourire clair, poi-gnée de main chaleureuse et un cerveau…qui tourne très, très vite. C’est la premièreimpression qui fuse au contact de ce jeuneboss, dont le bureau vitré, fiché au cœurdu vaste bâtiment de TBWA, à Boulogne,est à l’image de son hôte : une pièce touteblanche pour étudiant haut de gamme, oùun sélect ordinateur portable semble fairebon ménage avec une cafetière électrique.Vêtu d’un pantalon noir et d’une chemiseblanche, les cheveux sagement bouclés auras de l’épaule, David Leclabart dégageune sobriété qui ne laisse pas indifférent.Pas de self-pub, nulle trace d’ego sous-jacent, mais, à l’inverse, un autoportraitqui pourrait tenir du hara-kiri, s’il ne s’ac-compagnait d’une vision stratégique :« Moi, je suis assez moyen, et ça n’a pasd’importance. J’ai lu des livres que presquetout le monde a lus, je suis bon public aucinéma et je vais un peu au théâtre, maissans plus… Je suis dans la mouvance et,avec le recul, ce profil de moyen s’avère idéalpour tenter de faire la synthèse du mondequi nous entoure, rapprocher des universdifférents, créer des ponts entre la réalitéd’un produit et son image. Au fond, c’est ça,être publicitaire. »

Priorité à la liberté de créerLa douceur du timbre de voix contrasteavec un parler à la mitrailleuse, d’où nes’échappent que des mots utiles. «Ce quiest un peu triste, poursuit-il, c’est qu’on ataylorisé ce métier. La pub, aujourd’hui, c’estune espèce de chaîne de production de jobsdifférents : planeurs stratégiques, produc-teurs, commerciaux, créatifs. A vouloir troporganiser, on ne trouve que de bons techni-ciens, de bons sociologues. Et on perd de vueque notre savoir-faire, c’est d’abord la créa-tion. » David Leclabart en sait quelquechose, lui dont le père et l’oncle sontpublicitaires. Même s’il affirme avoir vrai-ment découvert ce métier en s’y collantlui-même, quand, à 20 ans à peine, il

s’essayait au planning stratégique chezBETC Euro RSCG, parallèlement à sescours de l’Edhec. Autonome dans sa tête,collectif dans ses actes, David Leclabart nes’approprie rien, sinon cette volonté demuscler la pub française d’un certain per-fectionnisme à l’anglo-saxonne, de tenterd’ouvrir le recrutement des créatifs à denouveaux profils et leur offrir ce challengepermanent d’une liberté d’expression unli-mited, mais adossée à un briefing trèsserré. Un métier où l’on ne s’ennuiejamais. Et David Leclabart d’évoquerl’aventure Clooney-Nespresso, dont il aété un temps le chef d’orchestre chezMcCann : « Je repense à ce jeune commer-cial que l’on a envoyé avec Clooney, partis’assurer lui-même de l’éthique des cafésNespresso chez les caféiculteurs de Colombie,et qui a passé des soirées mémorables à dis-cuter et à boire des coups avec le plus grandacteur de la planète. Quel autre métier offreça aujourd’hui ? »… What else ? !

DAVIDLECLABART

« think different »

Pedigree pub

1978 Né à Paris. Son père et son oncle,

Jérôme et Vincent Leclabart,

sont publicitaires.

1998 Diplômé de l’Edhec.

1999 Planneur stratégique chez BETC.

2000 Responsable du développement

chez BETC (Air France, Total).

2001 Cofonde Le Singe, filiale

de RSCG.

2004 Directeur du développement

chez CLM/BBDO (Wrigley, Total,

PepsiCo Monde).

2008 Directeur général de CLM/BBDO.

2010 Directeur général de McCann

Paris (Opel, Nespresso).

2012 Directeur général de TBWA Paris

(McDonald’s, GMF, McCain).

Ses spots préférés

Lynx Getting Dressed,signé BBH London, 2004.

Here’s to the Crazy Ones (Apple),signé TBWA/Chiat/Day, 1997.

The Independent Litany,signé Lowe (Worldwide), 2010.

FedEx Dad,signé BBDO New York, 2004.

Bud Light Real Men of Genius,signé DDB Chicago, 2001.

Sa force de frappe : réunir des talents

«bien meilleurs que lui»

«Ce qui m’intéresse dans ce métier,

c’est de m’entourer de gens bien

meilleurs que moi, et de faire en sorte

qu’ils puissent me surprendre. Etre moins

bon qu’eux ne me pose aucun problème.

Mon job, c’est de réunir des gens

talentueux : seuls, ils ne seraient pas

grand-chose, mais ensemble, ils forment

un tout hyperefficace. Quant aux juniors

de la boîte, je leur dis d’entrée de jeu :

“Vous êtes là pour prendre ma place !”»

Page 36: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

113

Cette page est intentionnellement libre de toute publicité

… avec les compliments de The Good Life !

Page 37: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

114

GOOD WORLD

GOOD ADVERTISING

Certaines pubs marquent les esprits et méritent qu’on s’y arrête, parce qu’elles pétillentd’intelligence et/ou d’insolence.Chaque année le jury des D&AD Awards examineenviron 20000 campagnes dans le monde avant de décerner ses Yellow Pencils et, plusexceptionnellement, ses BlackPencils. Cette organisation à but non lucratif, créée en 1962 par des designers et directeursartistiques londoniens,récompense chaque année la créativité, l’originalité,l’excellence technique,l’innovation et, bien sûr, le talentdans le design et la publicité.Sans commentaires : nul besoinde mots, quand une publicité estbonne, ça se voit tout de suite !

Par Charles !ouvenot

COUPS DE PUBqui font boom

Yellow Pencil 2012 catégorie Art Direction for Press Advertising

Stunt

Client : Wrangler

Année : 2011

Agence : Fred & Farid, Paris

Directeurs créatifs : Frédéric Raillard et Farid Mokart

Rédacteurs : Frédéric Raillard et Farid Mokart

Directeurs artistiques : Juliette Lavoix, Céline Moeur, Frédéric Raillard

et Farid Mokart

Photographe : Cass Bird

Page 38: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

115

GOOD WORLD

GOOD ADVERTISING

PH

OT

OS

: D

R

Yellow Pencil 2012 catégorie Press Advertising

Sexidents

Client : MTV

Année : 2011

Agence : Grey Worldwide

Directeurs créatifs : Moritz Crub

et Regner Lotz

Rédacteur : Janus Hansen

Directeurs artistiques : Alphons Conzen,

Federico Gasparian et Reto Oetterli

Illustrateur : Gary Davidson

Yellow Pencil 2012 catégories Art Direction for Press

Advertising et Press Advertising

Heaven and Hell

Client : Samsonite

Année : 2011

Agence : JWT Shanghai

Directeurs créatifs : Hattie Cheng

et Rojana Chuasakul

Rédacteur : Marc Wang

Directeurs artistiques :Rojana Chuasakul, Danny Li, Haoxi Lv

et Surachai Puthikulangkura

Illustrateurs : Surachai Puthikulangkura

et Supachai U-Rairat

D&AD The Copy Book, édité

par Taschen, reprend les meilleurs

projets créatifs de chaque année.

Ici, l’édition 2011, 592 pages, 40 €.

L’édition 2012, en cours d’élaboration,

doit sortir courant septembre.

Page 39: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

bureau, Ward Koeser, le maire deWilliston, se prépare à une longue jour-née entre les permis de construire à signer,un projet de nouvel aéroport, les repasavec les directeurs de compagnies…«Cette ruée dépasse tout ce qu’on pouvaitimaginer… souffle-t-il. Ça va beaucouptrop vite. » En 2007, la ville comptait15000 habitants. Combien aujourd’hui ?25000, 30000 ? Ward Koeser n’est passûr. Il gère comme il peut sa ville-cham-pignon. Et les compagnies pétrolièresmanquent encore de bras. Dans une Amérique en récession, ellesproposent des salaires de 100000 dollarspar an. Les hommes en mal de job accou-rent de tout le pays, des jeunes sansdiplôme aux seniors avec des traites à rem-bourser. A Williston, le taux de chômageest de 1%. L’immobilier explose : uneplace de parking au milieu de nulle partse négocie 1500 dollars par mois, unechambre meublée, 3000 dollars. Plus cherqu’à Manhattan. «On construit pour troispersonnes, il en arrive cinq ! Les compagnieslouent tous les appartements, ça tire les prixà un niveau incroyable », déplore l’élu. AWatford, qui compte officiellement1744 habitants, même le shérif vit dansun mobil-home, mais il paie 800 dollars« seulement» au lieu des 5000 habituelle-ment demandés aux ouvriers ! «On doitaugmenter les fonctionnaires et les loger pour

116

GOOD WORLD

GOOD BOOM

DAKOTA DU NORD

la ruée vers l’or noir

Trois heures que la Subaru a quittéBismarck, la capitale du Dakota duNord, et roule plein ouest entre ciel etprairie. Le portable ne capte plus deréseau, le trafic sur l’Interstate 94 estproche du zéro absolu. La région duBakken, nouveau pays de l’or noir, n’estplus très loin. Ici, tout le monde n’a queça en tête. Les habitants eux-mêmesreconnaissent que « le seul truc qui tient lacomparaison, c’est la ruée vers l’or de1848 ». Sur un panneau, à l’entrée de laville d’Alexander, en guise de bienvenue :les dix commandements de la Bible. Lespremières pompes à pétrole apparaissentdans les champs. Couleur rouille, ellesrépètent inlassablement leur mouvementde pompage. Puis c’est le derrick : cetteplate-forme à tour de 40 m de haut quisoutient le dispositif de forage des puits. Aujourd’hui, il y en a 200 dans le Bakken(contre 30 en 2009), et il faut au moins100 personnes à plein temps pour en fairetourner un seul. A l’approche de la villede Williston, on compte toujours plus depompes et de derricks. Les camions-citernes engorgent maintenant la route etklaxonnent à tout-va. Les routiers sontpressés, ils sont payés au baril. Entre despelleteuses Caterpillar et des maisonspréfabriquées, un bar karaoké proposedes pintes de bière à 2 dollars. Dans lesvilles du Bakken, le taux de testostérone

a fortement augmenté en deux ans. Lesmobil-homes et les caravanes pullulent :ce sont les man-camps où dorment lesouvriers. Pour loger ses employés, lafirme Halliburton est allée jusqu’àimporter le village olympique deVancouver au cœur de cet oil country.

Produire davantage que le Texas En mai dernier, une conférence intitulée«Bakken Gold, le meilleur est encore àvenir » a réuni hommes politiques, lob-byistes et compagnies pétrolières au palaisdes congrès de Bismarck. Le gouverneurde l’Etat, Jack Dalrymple, et le régulateuren chef de l’industrie, Lynn Helms, entreautres, se sont succédé au micro. Ils savou-rent et voient loin, et ont annoncé40 000 puits en exploitation d’ici à 2020et un objectif clair : dépasser le Texas etdevenir les premiers producteurs du pays,«pour le Dakota du Nord, pour l’indépen-dance énergétique de la nation». Une vieillechimère réalisable d’ici à cinq ou huit anssi les choses suivent leur cours : le Dakotadu Nord dépasse déjà l’Equateur, membrede l’Opep. De bon matin, dans son

Cela fait au moins un demi-siècleque les Etats-Unis n’ont pasconnu un tel boom. Les plainesdésertes du Dakota du Nord se couvrent de puits et de derricks, et voient affluerune main-d’œuvre avide de salaires mirobolants.

Par Maxime RobinPHOTOS : Dave ArntsonILLUSTRATIONS : Zoé

1

«Cette ruée dépasse toutce qu’on pouvait imaginer.Ça va beaucoup trop vite. »

Page 40: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

117

GOOD WORLD

GOOD BOOM

1. JACK DALRYMPLE, GOUVERNEUR

DU DAKOTA DU NORD, À LA CONFÉRENCE «BAKKEN GOLD».

2. LES POMPES ONT ENVAHI LA RÉGION.3. LES CAMIONS TRANSPORTANT LES BARILS

PARE-CHOCS CONTRE PARE-CHOCS.4. WARD KOESER, MAIRE DE WILLISTON.

2

4

moins cher. Sinon ils partent », expliqueWard Koeser. Deux policiers de Watfordont même rendu leur insigne l’an dernierpour rejoindre l’oil business, au momentoù on aurait le plus besoin d’eux. Leboom apporte son lot de nuisances : bou-chons, accidents, vols, prostitution…Habitués aux relations de voisinage faciles,les locaux grincent des dents. Ils suppor-tent mal les camps de nomades. «On lesappelle les gipsy truckers», siffle un habi-tant de Watford. Les « routiers gitans ».

Un milliard de dollars de royalties Le bassin de Bakken dort à 3 000 m deprofondeur. Cette formation géologiquede 520 000 km2 (la France fait543 965 km2) s’étend sous une partie duDakota du Nord, du Montana et de laSaskatchewan, au Canada. S’agissant depétrole de schiste, seules les nouvellestechniques de forage par fracking (fractu-ration hydraulique) le rendentexploitable. Cette technique coûte dixfois plus cher qu’un puits classique, maispermet d’extraire beaucoup plus.Motivés par le cours mondial élevé dubrut, les investisseurs ont lancé l’assaut.« Ce n’est pas le boom le plus spectaculairede l’histoire de l’humanité. Mais il entrefacilement dans mon top 10 », concèdeDavid Hobbs, analyste stratégique enhydrocarbures. Qui y gagne ? Les com-pagnies pétrolières, bien sûr. L’Etat aussi,dont les caisses débordent, et les habi-tants : le nombre de millionnaires adoublé en deux ans. Les heureux pro-priétaires des droits minéraux se sont

partagé, en 2009, 1 milliard de dollars deroyalties. En 2012, ce sera encore biendavantage. Beaucoup de ces chèquess’envolent hors de l’Etat, vers de lointainshéritiers qui ont fui depuis longtemps cedésert humain, mais, selon les estima-tions, la moitié de cet argent reste toutde même au Dakota du Nord. Ici, le fer-mier qui possède une terre ne détient pasforcément les droits minéraux du sous-sol. Jusqu’à 16 personnes peuvent separtager les droits d’un seul acre. Maiscombien leur rapporte le pétrole ? Selonplusieurs sources, les droits minérauxdémarreraient à 500 dollars et grimpe-raient jusqu’à 80 000 dollars par moisselon le contrat signé, la qualité du puitset le cours du brut. Le président del’Association nationale des détenteurs deroyalties (NARO), Jerry Simmons, a cal-culé qu’« ici, environ 67 000 personnespossèdent des droits minéraux. » Uncontrat bien ficelé leur assure 20 % duprix du baril pompé dans leur sol.Pourtant, on ne croise pas de grosses voi-tures allemandes ni de limousines sur lesroutes. On ne voit pas non plus degrosses maisons qui en jettent, mais descaravanes et des bêtes à cornes qui pais-sent dans des enclos immenses. Où val’argent ? « Les habitants ne le montrentpas. Ils l’envoient à la banque ou le cachentsous le matelas », explique NathanConway, directeur d’exploitation pour la

3

Le Dakota du Nord en chiffres

Population : environ 684 000 habitants, 3e Etat le moins peuplé des Etats-Unis.Taux de chômage : 3% en mai 2012 (le plus bas des Etats-Unis).Rang : 2e état producteur de pétrole des Etats-Unis (10% de la productionnationale totale), après le Texas et devant l’Alaska. Nombre de puits et derricks :7000 en activité. Production : 575000 barils de bruts par jour (près de 91,5 millions de litres).Salaire annuel moyen à Williston en 2011 : 71000 $ (environ 56000 €)contre 31000 $ (24500 €) en 2006.Taxe : 1,2 milliard de dollars (environ950 millions d’euros) de taxespétrolières récoltées par l’Etat en 2011.

Page 41: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

118

GOOD WORLD

GOOD BOOM

Ward Williston Oil Company. Le terri-toire est profondément conservateur. ABismarck, l’unique « gratte-ciel » est hautde 16 étages, et c’est le Capitole. LeDakota du Nord n’est pas un Etat bling-bling. « Ici, vous ne croiserez pas depéquenauds qui veulent refaire leur vieavec yachts et manteaux de vison », souritDennis Johnson, procureur à Watforddepuis trente ans. Une affaire de menta-lité, donc. « Certains se construisent unenouvelle maison, s’achètent un tracteur, c’estfréquent, admet le procureur. Mais guèreplus. Les rares familles qui détiennentbeaucoup de droits minéraux étaient déjàtrès riches avant ce boom. »

Vingt hommes pour une femme Les travailleurs migrants, eux, n’ont pas depudeur à dire combien le boom leur rap-porte. Les plaques d’immatriculation despick-up indiquent qu’ils viennent de tousles Etats-Unis. Joe Martin, 52 ans, a pla-qué son commerce de joaillerie de Fargo, àla frontière avec le Minnesota, pour deve-nir routier. Il travaille douze heures parnuit pour 134000 dollars par an. Ilhéberge son fils Jeff pour un job d’été :laveur de camions. Jeff devrait toucher19000 dollars en quatre mois, qui lui per-mettront de financer ses études. Mais àpart travailler, dormir ou chasser le faisan,on s’ennuie vite au Dakota du Nord. Sans

parler de l’hiver, qui peut être glacial. Lestravailleurs fuient la région dès qu’ils lepeuvent pour rejoindre leur famille ou par-tir au soleil. Une situation que regrettentles élus. «Ils n’amènent pas leur famille et nes’intègrent pas à la communauté, ils ne vontpas à l’église, soupire Dennis Johnson. Ici,le ratio démographique est de vingt hommespour une femme.» Dans la salle d’attente dela gare de Williston, Josh Newmannattend le premier train. A 21 ans, il gagne13000 dollars par mois sur les derricks. «Jebosse quatorze heures par jour, 28 jours desuite. Ensuite je pars deux semaines. C’est lerythme. J’aime bien partir dans les îles, auxBahamas…» Après deux ans de ce régime,Josh a déjà acheté trois maisons enArizona. «Je suis jeune, je n’ai pas de copine.

A 27 ans, j’arrête. Je ferai le tour du monde,je démarrerai de bonnes études. »Josh le sait comme tout le monde ici : leboom ne durera pas. « Ça pourrait durerdix ans, peut-être vingt…» suppose l’ana-lyste David Hobbs. «Même le meilleur desgéologues ne sait pas où la nappe s’arrête etcombien de temps on l’exploitera », recon-naît Nathan Conway. En tout cas, leDakota du Nord ne maîtrise pas son des-tin. L’interdiction du fracking par leCongrès stopperait net le boom. «En unenuit, plus rien ! » frémit un routier. Autremenace : un cours mondial du brut sousla barre des 60 dollars. Le dernier boom,dans les années 80, avait mal fini. Les rueslaissées en plan ne menaient nulle part,Williston était plombée par une dette de

No fracking : no boom

Pour «fracker» un puits, il faut :8 millions de litres d’eau (soit troispiscines olympiques), 1500 tonnes de sable, des produits chimiques commel’alcool isopropylique, le méthanol,l’éthylène glycol (utilisé dans le liquide de refroidissement des voitures) et d’autres substances parfoiscancérigènes en très grande quantité.Cette mixture devient un déchet. Le Dakota la réinjecte dans le sol, dansdes puits nommés «saltwater disposal»(collecteur de saumure). En 2005, le Congrès a décidé que le frackingpasserait outre les critères du SafeWater Drinking Act (loi sur l’eau potable),accélérant son développement, et,actuellement, l’Environmental ProtectionAgency (EPA) n’est pas autorisée à contrôler la qualité de l’eau autour des puits. Des opposants au frackingexistent au Dakota du Nord, mais ils sontminoritaires. Les industriels et beaucoupd’habitants assurent que les forages sonttrop profonds pour agir sur la qualité de l’eau potable… Le 1er avril dernier, les régulateurs locaux ont légèrementdurci leurs exigences. Les exploitantsdoivent désormais déclarer les solvantsutilisés et stocker les millions de mètrescubes d’«eaux sales» dans des conteneurs : avant, ils étaient laissésà l’air libre. La France, quant à elle, a étéle premier pays au monde à interdire le fracking, en juin 2011.

1. DENNIS JOHNSON, PROCUREUR DE WATFORD. 2. ET 3. LES VILLES SE DÉVELOPPENT

DE MANIÈRE ANARCHIQUE AUTOUR DES PUITS.

1

2 3

Page 42: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

Chaine disponible en exclusivité** sur :

Canal 68 Canal 132C l 132

*

i*V

oi*V

oiV*VVoVo*VoV*VVVV*VV*

ci q

ci q

ci q

ci q

ccui

nui

nui

nui

nnui

nninnnnnnnnni i i uiiiuou

s ou

so

som

mm

mso

mm

ms

es.

es. se**

Ex**

E**

Ex**cl

uscl

uscl

usiv

itvit

saé

saé

saé

tell

tell

tell

teli

te

teete e

tAet A

et AA

ettD

SL

DSL

D

SD

Ssu

rsu

r r r su

r s

Cana

Cana

CaCals

atls

atls

als

ZI. ZIIG

ZA

G ZA

G ZAZA

G Pr P

rG

PrG

oduc

oducdu

cdu

ctio

ntio

nN

GN

GGN

s/N

Gs/

NN/NNC.

C.

C.

TBW

ATB

WA

BWA

BWA

TBW

AW

AW

TBW

\PAR

\PARAR

\PAR

\PARPAA\PA

\P\P\ISISSISSIS

Megafactories vous fait pénétrer dans les coulisses des industries les plus légendaires au monde.

MEGAFACTORIES TOUS LES MARDIS À 20H40.

natgeotv.com/fr

TGL_1235_119.indd 1 14/08/12 11:47

Page 43: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

1. ET 3. CARAVANES ET MOBIL-HOMESS’ENTASSENT AUTOUR DES PUITS DE PÉTROLE.

2. JOE MARTIN, ROUTIER À WATFORD. 4. NASIR KHAN, VENU TENTER SA CHANCE.

5. LES LOGEMENTS SONT RARES ET CHERS.

120

GOOD WORLD

GOOD BOOM

28 millions de dollars. Un ancien se sou-vient des autocollants collés sur lespick-up. « Ça disait : “le dernier qui partde Williston éteint la lumière”. » Trente ansaprès, les locaux aimeraient contrôlerdavantage les événements. « S’il n’y avaitque 100 forages, la vie serait tranquille ettout le monde aurait du boulot. Mais200 derricks en même temps, c’est troptendu ! » estime un habitant. Pour l’ins-tant, l’Etat et les pétroliers se dépêchentd’engranger avant que la musique ne s’ar-rête, et le Dakota du Nord fait rêver

même les jeunes de la côte Est. Nasir,26 ans, a passé deux jours dans le train,depuis le New Jersey, pour venir àWilliston : « J’avais entendu sur CNN qu’ily avait des jobs ici. » Il a trouvé un travaildans l’heure, « bien mieux payé que dansles casinos d’Atlantic City ». Pourtant, ilrepart au bout de deux jours, faute d’en-droit où dormir. « Un type sympa m’ahébergé la nuit dernière, sinon j’auraisdormi dans une église. » Nasir repart enbus tenter sa chance à Minot, une autreville du boom, jusqu’à ce qu’il trouve untoit et un job. «N’importe lequel. » !

industrie, gagnent plus de 200000 $ par an…TGL : A quels défis le Dakota du Nordfait-il face ?N. C. : Il a toujours été pris pour un Etatlow performer, alors le boom fait plaisir !Par contre, rien n’a été planifié pour faireface à ce surcroît d’activité. Le Dakotadu Nord a été pris par surprise ; l’histoirese répète. Il faut davantage de pipelinespour écouler le brut. Aujourd’hui, la moitié du pétrole sort du Dakota par le fret. Un wagon se loue très cher :4000 $ par mois, plus 1 $ par bariltransporté. Notre brut, compétitif à la base, se retrouve plus cher que le pétrole texan sur les marchés. TGL : Que pensez-vous de la nouvelleloi qui oblige les compagnies à stocker les eaux toxiques dufracking dans des cuves et à déclarerla liste des composants chimiquesutilisés, qui pénètrent les sols ?N. C. : Ça nous coûte entre 100000 et 200000 $ par puits. Les compagniespétrolières devraient faire seulement ce qu’elles font le mieux : produire.L’augmentation des coûts est nocivepour la compétitivité et pour l’emploi.Nous avons toujours eu affaire à un Etatoil-friendly, mais des groupes de pressionl’orientent vers davantage de régulation.Je le regrette. !

The Good Life : Comment fonctionneWard Williston ?Nathan Conway : Depuis notre premierpuits foré en 1952, nous possédionsdeux divisions différentes : une brancheprestataire de services et une brancheproduction. C’est rare. En mars 2011,nous avons revendu la branche serviceau Missouri Basin Well Service [le montant de la plus-value reste secret,NDLR]. On recapitalise, on investit dans la prospection et la production.Nous sous-traitons toutes les tâchesphysiques. TGL : Comment êtes-vous entré dans le business du pétrole ? N. C. : J’ai débuté comme contrôleur de puits, à 16 ans. J’ai ensuite démarré àWard Williston en 2001 comme assistantdu CEO, avant de devenir analyste en prospective et développement, puis chef des opérations en 2010. TGL : Quel est votre salaire ?N. C. : Je ne peux pas vous le dire.Disons que les dirigeants, dans cette

NathanConway 35 ans, directeur

des opérations au Dakota du Nordde la Ward Williston Oil Company.

2

5

4

3

1

L’Etat et les pétroliers se dépêchent d’engranger.

Page 44: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

TGL_1235_121.indd 1 14/08/12 11:49

Page 45: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

Bibliographie

• L’Aide fatale. Les Ravages

d’une aide inutile

et de nouvelles solutions

pour l’Afrique, éd. Lattès, 2009.

• How the West Was Lost. Fifty

Years of Economic Folly

– and the Stark Choices Ahead

éd. Allen Lane

(Grande-Bretagne), 2011,

non publié en français.

• Winner Take All. China’s Race

for Resources and What

It Means for the World,

éd. Allen Lane

(Grande-Bretagne), 2012,

non publié en français.

122

GOOD WORLD

THE GOOD WOMAN

PH

OT

O:

DR

Elle est considérée commel’une des 100 personnalités les plus influentes du monde.Dambisa Moyo, née en Zambieet installée aujourd’hui à Londres, est devenue, à 43 ans, l’une des expertes de la mondialisation les plus en vue du monde anglo-saxon.

Par Béatrice Toulon

La carte de visite de cette ancienne collaboratrice de la Banque mondiale et deGoldman Sachs nécessite un format A3 :administratrice de sociétés – Barclays,Lundin Petroleum, SABMiller, BarrickGold –, chroniqueuse pour le FinancialTimes et le Wall Street Journal et, surtout,auteur d’essais sur l’économie et la financemondiales, des best-sellers apocalyptiquessur le déclin de l’Occident à vous réjouirde disparaître avant la fin du siècle.Dambisa Moyo appartient à une nouvelleclasse de femmes venues des pays

émergents, brillantes et ambitieuses, surdi-plômées, sûres d’elles, de leur talent, deleur féminité. Et qui clament qu’il esttemps de changer le monde. Elle le clametrès fort. La première fois, c’était en 2009.Son livre, L’Aide fatale. Les Ravages d’uneaide inutile et de nouvelles solutions pourl’Afrique (publié en France chez Lattès),met un beau bazar chez les intellectuels etles experts du développement. Et la révèle.Ce brûlot froid explique pourquoi « ladépendance à l’aide» détruit l’Afrique plusqu’elle ne la développe et ce qu’il faut faireà la place : des obligations ou du micro-crédit, par exemple. Depuis, l’aide à

l’Afrique a été largement coupée, mais seu-lement à cause de la crise.

La cohérence de la politique chinoise

Qu’est-ce qui fait qu’un pays s’en sort oupas ? La question obsède cette diplôméed’Harvard, qui en a fait son sujet de thèse.Tout comme l’obsède le déclin del’Occident, dont elle règle le compte dansson deuxième livre : How the West Was Lost.Fifty Years of Economic Folly – And the StarkChoices Ahead (2010, pas encore traduit enFrance). Elle y dénonce les trois plaies desEtats-Unis : l’endettement, la consomma-tion et la spéculation immobilière, quandil aurait fallu épargner et investir dans lesnouvelles technologies. « Le mauvais sangaméricain a contaminé tout l’Occident »,déplore-t-elle en appelant l’Europe etl’Amérique à se ressaisir avant d’être écra-sées par les pays émergents, Chine en tête.Cette Chine dont Dambisa Moyo refusede faire le nouveau Belzébuth. Dans sondernier livre, sorti en juin et déjà best-sel-ler, Winner Take All, China’s Race forResources and What It Means for the World(pas encore traduit en France), elleexplique la cohérence de la politique chinoise et son esprit de responsabilité :«Les dirigeants chinois ont besoin de sortirdes centaines de millions de personnes de lapauvreté. » Et parce qu’ils possèdent l’armefatale de l’épargne, ils peuvent aller cher-

cher en Afrique et en Amérique latine lesterres, les énergies et autres minerais dontils auront besoin demain. Les Africains,assure-t-elle, ne sont pas tous hostiles àcette présence davantage trade qu’aid.

Une Cassandre zen et chic

A chaque livre, cette intellectuelle aubazooka renforce sa notoriété… et les cri-tiques qui dénoncent ses approximations,son libéralisme pour les uns, ses outrancespour les autres. Il faut voir, à la télévision,les financiers, souvent des hommes plusâgés, se faire tacler par cette jolie femmetoujours zen et chic en robes couture et sti-lettos. Mais si Cassandre s’habille enLanvin, ce n’est pas demain qu’on la verradans Vogue. Que fait-elle entre deux livreset deux conseils d’administration ? Est-ellemariée, aime-t-elle la mode, le sport, lesvoyages ? Personne ne le sait vraiment. Ladame a cadenassé sa vie privée. Peut-êtreaime-t-elle échanger avec ses parentsretournés à Lusaka, où sa mère a été la pre-mière femme patronne de la fédération desbanques de Zambie. Dans la préface deson premier livre, la jeune femme racontesa culpabilité de n’être pas retournée dansson pays, l’un des plus pauvres du monde.« Trouver une solution durable à l’Afrique estune quête personnelle. » Mais trouver unesolution durable pour le monde est uneuniverselle nécessité. !

DAMBISAMOYO

la mondialisationet l’Apocalypse

« Le mauvais sang américaina contaminé tout l’Occident. »

Page 46: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

TGL_1141_2X1-2H.indd 1 13/08/12 11:40

Page 47: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

124

GOOD WORLD

GOOD PAPER

Premier quotidien espagnol,dont le site web jouit de l’audience la plus large de tout le monde hispanique,El País n’est pas épargnépar la tempête qui secouel’Espagne et fait sombrer les médias par dizaine. Mais,contre vents et marées, le journal madrilène tient son cap et continue à fournirune information de qualité.

Par Alain LouyotPHOTO : Stevens Frémont

Chaque jour, en se rendant à leurbureau, les journalistes d’El País détour-nent le regard pour ne pas s’appesantirsur leur affligeant voisinage. Juste en facedu siège du prestigieux quotidien madri-lène, situé 40, calle de Miguel Yuste, surles murs décrépis d’une fabrique de car-relage en faillite, des pancartes et desbanderoles à moitié déchirées indiquent :« Liquidación » et « Se vende ». Dans uneEspagne en pleine récession, ce spectaclequi tend à se banaliser les affecterait sansdoute moins si leur prestigieuse publica-tion, créée voilà trente-six ans, n’était pas,elle aussi, touchée de plein fouet par lacrise. Une double crise, en fait, puisques’additionnent les effets désastreux dumarasme économique sur les recettespublicitaires et ceux, ravageurs pour lapresse écrite, de la crise de mutation desmédias. Et pourtant, dans le hall d’entréecossu d’El País, décoré d’une vénérablelinotype et des unes célèbres du quoti-dien – dont celle du 23 février 1981, jourdu coup d’Etat manqué, titrée « El País,con la Constitución » –, pas le moindreindice de cette très mauvaise passe quifait pourtant dire aux journalistes au sor-tir des réunions d’information : « estamosen la mierda… »

Au fil de ses 76 pages, denses et sobrescomme celles du quotidien françaisLe Monde auquel il ressemble et avec lequelil a noué un partenariat finalement tombédans l’oubli, les lecteurs d’El País auraient,quant à eux, bien du mal à déceler en cesjours si sombres un relâchement éditorial,une baisse de qualité dans l’enquête ou

l’écriture. Pas question en ces temps de criseet de déprime, comme le font parfois, parfacilité, d’autres quotidiens espagnolscomme El Mundo ou ABC, d’essayer dedistraire les lecteurs d’une crise trop anxio-gène en mettant à tout bout de champ lavictoire à l’Euro de football ou un faitdivers sensationnel à la une. «Certes, nousavons de sérieux problèmes financiers du fait

de la chute de quelque 30% en un an de nosrecettes publicitaires, qui constituaient plus dela moitié de nos revenus. Mais tous les gensnous disent que le journal n’a jamais été aussibien, aussi intéressant », assure SabrinaTahiri, sa nouvelle directrice du marketing.Et il est vrai que, en dépit des plans d’éco-nomie drastiques qu’impose la crise et desplans sociaux qui se succèdent au seinmême de la rédaction, le premier quoti-dien espagnol – 340000 exemplaires, enmoyenne, par jour, en semaine, et400000, le week-end – parvient à se tenirà la hauteur de sa réputation en continuantde décrypter, vaille que vaille, l’actualitéavec rigueur, exigence et talent.Cette tradition de sérieux, mais aussi devigie de la démocratie, qui en a fait « le »journal de référence espagnol, remonte àses origines. Fondé le 4 mai 1976, El Paísest né des volontés réformatrices quis’étaient manifestées à la toute fin de l’èrefranquiste sous l’impulsion de personnali-tés prestigieuses comme Manuel FragaIribarne (l’un des pères de la Constitutionde 1978) ou José María de Areilza (l’undes artisans de la transition espagnole).Ainsi, dirigé par Jesús de Polanco et JuanLuis Cebrián, proches d’Areilza – qui serale ministre des Affaires étrangères du pre-mier gouvernement du roi Juan Carlos –,El País est autorisé à paraître deux moisavant la mort de Franco. De sensibilitésocialiste, le nouveau quotidien se montred’emblée très critique envers Adolfo

EL PAÍSvigie de la

démocratie

1

2

1. LA RÉDACTION D’EL PAÍS EMPLOIE

ENCORE AUJOURD’HUI PLUS DE

300 JOURNALISTES.

«Le journal n’a jamais étéaussi bien, aussi intéressant.»

Page 48: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

125

GOOD WORLD

GOOD PAPER

5 6

7

3. SABRINA TAHIRI, LA NOUVELLE DIRECTRICE

DU MARKETING DU JOURNAL. 4. 5. ET 7. LE SIÈGE D’EL PAÍS, À MADRID.6. JAVIER MORENO, LE DIRECTEUR

DE LA RÉDACTION D’EL PAÍS.

Suárez, président du second gouverne-ment de la monarchie restaurée etconducteur de la politique de transition.Aux élections de l’automne 1982, El Paíssoutient naturellement le parti socialisteouvrier espagnol (PSOE) mais cela nel’empêche pas de devenir bientôt aussitrès sévère vis-à-vis du gouvernement degauche de Felipe González, à qui ilreproche, notamment, sa gestion de l’or-dre public, de la lutte contre le terrorisme

2. CRÉÉ IL Y A 36 ANS, LE QUOTIDIEN

A CONCLU DES PARTENARIATS AVEC

PLUSIEURS TITRES AMÉRICAINS

ET LATINO-AMÉRICAINS.

4

El País

Les Editions El País appartiennent augroupe Prisa, présidé par Ignacio Polanco.Depuis fin 2010, Prisa est détenu à 57,1 %par le fonds d’investissement LibertyAcquisition dirigé par Nicolas Berggruen.Le groupe Prisa a enregistré une pertenette de 8,04 millions d’euros au1er trimestre 2012 (chute de 170% par rapport à début 2011 !). Le quotidienEl País est présidé par Juan Luis Cebrián.Directeur de la rédaction :Javier Moreno. Fondation : 4 mai 1976. Diffusion : 340000 exemplaires en semaine (34500 en Amérique latine)et 400000, le week-end (avril 2012). Abonnés : 60000. Audience Internet : 14,1 millionsd’internautes, dont 8,2 millions en Espagne et 5,9 millions dans le restedu monde (source comScore). Chiffre d’affaires :2,69 milliards d’euros Perte : 72,9 millions d’euros en 2010(contre 120 millions de bénéfice en 2007). Réduction des coûts : 25% en un an(2010-2011, audit en cours). Effectifs : 420 journalistes,correspondants compris. Editions : 8 – Madrid, Barcelone,Valence, Pays basque, Andalousie,Galice, une édition européenne et une édition latino-américaine. Version digitale gratuite : 1 million de téléchargements. Abonnement mensuel à la versiondigitale du quotidien : 9,90 €. Publicité : chiffre d’affaires en baisse de plus de 30% en 2010-2011 par rapport à l’exercice précédent (85%des recettes publicitaires pour la versionpapier et 15% pour la version web).

3

Page 49: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

126

d’ETA et, évidemment, ses multiplesscandales. En 2012, le quotidien n’a rienperdu de sa vigilance à l’égard des puis-sants. Tout récemment, il épinglaitl’Académie royale d’histoire, qui n’a pasosé qualifier le général Franco de dicta-teur dans son Diccionario biográficoespañol. Et publie presque chaque jour desdessins cruels pour l’Espagne, proche dela banqueroute, comme celui de ce mata-dor agitant piteusement sa muleta devantle squelette d’un taureau…

Premier site d’info hispanophone «Nous avons toujours eu notre franc-parler.Ainsi, dans ce maelström qu’est devenuel’Espagne aujourd’hui, nous avons été, unefois de plus, les premiers à avertir nos lecteursde la gravité de la situation économique, cequi nous a valu de recevoir, de la part de laclasse politique, une volée de bois vert ! »s’exclame Jan Martínez Ahrens, 46 ans,l’un des rédacteurs en chef, qui collaboredepuis une vingtaine d’années à El País.En charge, notamment, du web, ce licen-cié en philosophie, barbu et en veste destyle battle-dress, avoue, comme sesconfrères, être «dans le brouillard le plusopaque» et ne pas savoir «d’où le journaltirera demain son financement». Et, tout enregardant avec envie les nombreuses et élé-gantes pages de publicité du derniernuméro de !e Good Life qu’il feuillette, ilajoute, sans avoir l’air d’y croire : «Si d’icideux ou trois ans la situation économiques’améliore dans notre pays, je pense qu’enprincipe nos revenus proviendront alorsessentiellement de l’offre digitale. »D’ores et déjà, avec une audience de plusde 14,1 millions de lecteurs recensés enfévrier 2012 par comScore, le siteInternet d’El País s’impose comme le pre-mier site mondial d’information enlangue espagnole. Sur ce chiffre, près de lamoitié de ses visiteurs hispanophonesrésident en Amérique latine ou aux Etats-Unis. «Nous avons, souligne Jan MartínezAhrens, des racines profondes en Amériquelatine. Ainsi, c’est notre bureau de Mexicoqui, dès minuit, prend le relais de la gestiondu site global d’El País puisque avec le déca-lage horaire, là-bas, c’est alors le jour. » Maisle quotidien madrilène a aussi noué despartenariats avec nombre de titres étran-gers et en particulier latino-américains :El Economista, au Mexique, La Tercera deChile, à Santiago, El Nuevo Herald, à

1

4 5

Miami… tandis qu’un supplément enanglais d’El País est diffusé, depuis 2001,avec l’édition espagnole de l’InternationalHerald Tribune dans le monde hispa-nique. Par ailleurs, depuis 2004, lequotidien édite, avec le New York Times,un supplément hebdomadaire en espa-gnol sur ce qui se passe dans le monde,traité du point de vue du quotidien amé-ricain. Comptant encore, malgré les planssociaux et les départs en retraite anticipée,plus de 300 journalistes, le journal dis-pose toujours de news-rooms etd’éditions locales à Bilbao, à Valence, àSéville ou en Galice ; de correspondants àWashington, à Paris, à Pékin, à Moscouou à Jérusalem ; d’une imprimerie ausiège madrilène, ainsi que dans de nom-breuses villes du monde, commeBarcelone, Burgos, Palma de Majorque,Las Palmas, Mexico, Tananarive…«El País est encore un grand journal,concède un confrère de la télévision espa-

gnole RT Noticias. J’insiste sur le “encore”,car le groupe Prisa, qui en est le propriétaire,prend l’eau de toutes parts. » Cette situationest due à des investissements hasardeux, àun manque d’anticipation de la crise éco-nomique, à l’impact de l’arrivée du digital.Et les 650 millions d’euros injectés par lefinancier germano-américain NicolasBerggruen, via son fonds d’investissementLiberty Acquisition, n’ont pas suffi au ren-flouage. Surnommé par le Wall StreetJournal le «homeless billionaire » (le mil-liardaire SDF) – parce qu’il vit dans sonavion et a installé son QG ambulant dansun palace californien, à Berveley Hills –,Nicolas Berggruen a acquis, fin 2010,57,1% du groupe Prisa (lire #e GoodLife n°1, p. 120). Le groupe reste cepen-dant lourdement endetté de quelque2 milliards d’euros et a entrepris de bra-der diverses de ses acquisitions peurentables dans la télévision et dans laradio. Simultanément à ces ventes, des

1. ET 5. L’IMPRIMERIE D’EL PAÍS, À MADRID. 2. RÉALISATION DU NUMÉRO DU 8 JUIN 2012. 3. JAN MARTINEZ AHRENS, L’UN DES

RÉDACTEURS EN CHEF DU QUOTIDIEN.4. MIGUEL ANGEL BASTENIER, ÉDITORIALISTE

ET ANCIEN RÉDATEUR EN CHEF.

32

GOOD WORLD

GOOD PAPER

Page 50: Tableaux de bord - QoQa · 2015. 12. 22. · et bracelet en silicone. Nixon, 700€. 4. Pour célébrer l’édition 2012 de la légendaire course italienne Mille Miglia, Chopard

127

6 7

diversifications et des partenariats sontprudemment explorés, comme celuiconclu, pour l’Espagne, avec le siteHuffington Post, dont la fondatrice,Arianna Huffington, s’est déplacée toutexprès au siège d’El País courant juin.

Des réductions de coûts tous azimuts

«Accepter ce job dans un tel contexte écono-mique et financier, cela tient à la fois duchallenge et du suicide », laisse échapper ladirectrice du marketing, qui a récemmentquitté l’agence de presse EFE pour ElPaís. De toute façon, pour la péninsuleibérique, et particulièrement pour le sec-teur de la presse, l’herbe n’est pas plusverte ailleurs. En moins de quatre ans,57 médias espagnols ont mis la clé sous laporte et une bonne vingtaine de planssociaux concernant une dizaine de mil-liers de journalistes ont été mis en place.L’un des prochains pourrait concerner legroupe Prisa dès la rentrée…«En France, où il existe une véritable sociétécivile, une fibre patriotique, le gouverne-ment se mobiliserait au moins pourempêcher les grands journaux de sombrer,mais pas en Espagne, où on a raté, au XIXe

siècle, la construction d’une nation. Ici, onest d’abord catalan ou basque… soupireMiguel Angel Bastenier, ancien rédacteuren chef et aujourd’hui éditorialiste àEl País et professeur à la célèbre école dejournalisme gérée par le quotidien. Lemétier change et, hélas ! pas toujours pourle meilleur… Il faut cependant tenir lecoup, car on n’est qu’au tout début de lacrise de mutation de la presse…» Et, lissantde la main ses cheveux blancs, il conclutavec tristesse : « Quand je pense à 1992,

l’année des JO de Barcelone, de l’Expositionuniverselle de Séville, des cérémonies du500e anniversaire de la découverte del’Amérique par Christophe Colomb, à cetteépoque bénie où la seule édition du week-end d’El País se vendait à 1,3 milliond’exemplaires !… » Comme lui, IgnacioCembrero, autre brillant journaliste duquotidien, se souvient avec nostalgie dutemps de l’opulence, quand la directionde la rédaction « vous envoyait royalementà l’autre bout du monde juste pour voir s’ily avait un sujet à traiter ».Grande signature, lui aussi, du quotidien,José Manuel Calvo, sous-directeur et res-ponsable des pages «Opinion», énumèrequant à lui tous les efforts déjà consentispar le journal pour compenser l’effondre-ment de la publicité et l’érosion desventes : allègement du grammage dupapier, réduction de la pagination, impi-toyable tour de vis sur les notes de frais,gel et parfois baisse des salaires et, biensûr, réduction des effectifs de 15 %, lesdéparts étant jusqu’ici négociés et baséssur le principe du volontariat. Et ce n’estsans doute pas fini. «C’est très douloureux,mais nos journalistes acceptent sans bron-cher ces sacrifices, car ils sont tous conscientsde l’extrême gravité de la situation, à la foispour la presse et pour le pays », explique-t-il. Puis il ajoute, comme pour conjurer lemauvais sort : «Nous savons aussi que nousdevons, coûte que coûte, poursuivre notremission d’informateurs, car jamais, depuisla fin du franquisme, nos lecteurs, débous-solés par la dérive du pays et de l’Europe,n’ont eu autant besoin de notre travail quo-tidien d’analyse et de décryptage del’information. » Alors ¡ arriba El País ! !

The Good Life : Que pensez-vous

des difficultés de la presse

papier ?

Javier Moreno : Les journaux font toujours partie de la vie des gens, même si leurs habitudesde lecture changent. Tôt ou tard, les journaux papier disparaîtront,mais les meilleurs d’entre euxsurvivront un certain temps. Il ne faitguère de doute qu’à long terme les journaux trouveront leur salutgrâce au web. Ce n’est pas une fatalité, c’est un challenge. TGL : La crise économique

espagnole affecte-t-elle El País ?

J. M. : Certainement. Par la baisse de la publicité, bien sûr, mais aussi parce que les acheteurs en kiosque se font plus rares, pour des raisons budgétaires.TGL : Avez-vous trouvé le bon

business-model ?

J. M. : Les médias cherchent encore leur voie dans un monde qui a changé très rapidement. Mais le business-model des journaux reste basé sur la pratique du journalisme dont la triple finalité demeure inchangée :informer, éduquer, distraire. La société aura toujours besoin d’être informée et la démocratie aura toujours besoin de relais pour l’opinion publique.TGL : En cette période de crise

économique, avez-vous un rôle

à jouer ?

J. M. : Aucune démocratie ne peutfonctionner sans une presse libre et forte. Il demeure que nousappartenons, qu’on le veuille ou non, à l’establishment. Du coup, le mouvement de défiance qui se manifeste en ce moment contrel’establishment en général nousaffecte nous aussi. Nous devons donc redoubler d’efforts afin de sécuriser l’avenir. Pour nous et pour la démocratie. !

JavierMoreno directeur de larédaction d’El País

6. IGNACIO CEMBRERO, JOURNALISTE

DU QUOTIDIEN EL PAÍS.7. JOSÉ MANUEL CALVO, SOUS-DIRECTEUR

ET RESPONSABLE DES PAGES «OPINION».

GOOD WORLD

GOOD PAPER