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www.hommenouveau.fr • N° 1609 • Samedi 27 février 2016 • LXX e année • Bimensuel • France : 4 € Cardinal Robert Sarah : De l’importance du silence dans la liturgie p.12 L’ESSENTIEL DE JOËL HAUTEBERT : « Loi » Taubira, girouettes et reniements… p.24 Ce jeudi 25 février sur hommenouveau.fr : des homélies de saint Ambroise et de saint Augustin pour le Carême. AU SOMMAIRE DÉCRYPTAGE > Jeunes : face à la foi, des attitudes différentes. p.4 > La Realpolitik du Pape François. p.5 >Y aura-t-il encore des humains dans cinquante ans ? p.6 > Où sont passés les lecteurs de journaux ? p.8 > La Libye divisée en deux. p.9 LES R.-V. DE LA QUINZAINE > L’éditorial de Philippe Maxence. p.3 > L’humeur de Pasquin. p.5 > Le billet de François Foucart. p.7 > Carte blanche à Didier Rance. p.16 CULTURE > Revisiter Lourdes avec Mgr Perrier. p.17 FIGURE SPIRITUELLE > Bienheureux Noël Pinot, un prêtre sous la Terreur, fidèle jusqu’à l’échafaud. p.22 MAGISTÈRE > En Carême, retrouver notre identité chrétienne. p.23 Tribune libre : L’Église face à la politique : un autre regard p. 10 Chemins de pardon, chemins de paradis p.18 Anne Bernet L’Église, pendant le Carême, invite à avoir un regard lucide sur les fautes et à en demander pardon. Exemple de cette piété pratiquée en paroisse : les pardons bretons. Orthographe : les dessous d’une réforme p.7 Azur Guirec Le gouvernement exhume un projet de réforme de l’orthographe qui ne saurait faire oublier la nécessité de « revoir totalement notre système éducatif ». Il signe avec elle sa haine du passé, son mépris de la langue et de la culture. @

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www.hommenouveau.fr • N° 1609 • Samedi 27 février 2016 • LXXe année • Bimensuel • France : 4 €

Cardinal Robert Sarah : De l’importance du silence dans la liturgie p.12

L’ESSENTIEL DE JOËL HAUTEBERT : « Loi » Taubira, girouettes et reniements… p.24

Ce jeudi 25 février sur hommenouveau.fr : des homélies de saint Ambroise et de saint Augustin pour le Carême.

AU SOMMAIRE◗ DÉCRYPTAGE> Jeunes : face à la foi, des attitudes différentes. p.4

> La Realpolitik du Pape François. p.5>Y aura-t-il encore des humains dans cinquante ans ? p.6> Où sont passés les lecteurs de journaux ? p.8> La Libye divisée en deux. p.9

◗ LES R.-V. DE LA QUINZAINE> L’éditorial de Philippe Maxence. p.3> L’humeur de Pasquin. p.5> Le billet de François Foucart. p.7> Carte blanche à Didier Rance. p.16

◗ CULTURE > Revisiter Lourdes avec Mgr Perrier. p.17

◗ FIGURE SPIRITUELLE> Bienheureux Noël Pinot, un prêtre sousla Terreur, fidèle jusqu’à l’échafaud. p.22

◗ MAGISTÈRE> En Carême, retrouver notre identité chrétienne. p.23

◗ Tribune libre : L’Église face à la politique : un autre regard p. 10

Chemins de pardon, chemins de paradis p.18Anne BernetL’Église, pendant le Carême, invite à avoir un regard lucide sur les fautes et à en demander pardon. Exemple de cette piété pratiquée en paroisse : les pardons bretons.

Orthographe : les dessous d’une réforme p.7Azur GuirecLe gouvernement exhume un projet de réforme de l’orthographe qui ne saurait faire oublier la nécessité de « revoir totalement notre système éducatif ».Il signe avec elle sa haine du passé, son mépris de la langue et de la culture.

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L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 20162 | ENTRE NOUS

❚ Le sacrifice de la CroixL’abbé Barthe a bien voulu sefaire l’écho dans L’Homme Nouveau(n° 1607 du 30 janvier 2016) d’uneétude sur le sacrifice eucharistiqueque j’ai fait paraître dans lenuméro 1 de la Revue thomistede 2015. Son analyse, fort sym-pathique au demeurant, élogieuseà mon égard, contient malgrétout une erreur. Il laisse entendreque via Maritain, je critiqueraisle langage du magistère récentà propos du lien qui unit le sacrificede la Croix et le sacrifice de lamesse lorsqu’il enseigne que lamesse rend présente le sacrificedu calvaire (par exemple, dansle CEC, n. 1366). En réalité, je distingue certainesformules de ce genre, parfaitementacceptables et autorisées, deleur explication hyperréaliste àla manière de Maritain. Le magistèrese garde de préciser en quelsens technique il faut entendrela formule : « Le sacrifice du calvaireest rendu sacramentellement pré -sent sur l’autel ». De quelle manièreest-il rendu présent ? Sacramen-tellement, sans aucun doute,mais qu’est-ce à dire : réellement ?physiquement ? intentionnel-lement ? par mode de signe ?substantiellement ? Rien dans

les textes du magistère ne leprécise, et pour cause car cen’est pas, jusqu’à nouvel ordre,la fonction du magistère de fairela théorie d’une affirmation dela foi. C’est vrai qu’à la messenous sommes rendus contem-porains du sacrifice de la Croix,mais selon quel mode ? de quellemanière ? Le magistère, depuisle concile de Trente, dit bien quec’est le même sacrifice mais selondeux modes d’offrande : sanglantd’abord, non sanglant ensuite ;il ne dit nulle part qu’il s’agitd’une identité pure et simple,c’est-à-dire une unité numériqued’acte à la messe et à la Croix.Maritain a cherché une voie pourl’affirmer, il a tenté une explicationque je ne crois pas recevable etqui ne peut s’autoriser de saintThomas d’Aquin. Il n’y a pas àop poser mon explication auxdocuments du magistère, enparticulier au magnifique Credode Paul VI de 1968, c’est irrecevableen ce qui me concerne. Que l’abbé Barthe soit remerciéde son chaleureux compte-rendu,mais sur ce point il se trompe.Cela dit sans intention de polé-mique, mais de simple vérité.Fr. Philippe-Marie Margelidon,op ◆

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ENTRE NOUS | 3L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

UNE ÉCONOMIE SINISTRÉE

A lors que les prochaines électionsprésidentielles se profilent à

l’horizon, les mesurettes gouverne-mentales ou les « raccros » del’opposition commencent aussi leuropération de séduction de l’électorat.

Pour beaucoup de Français,devenus au fil des décennies

des déçus du système etpar là même, malheu-reusement, méfiantsenvers toute politique,cette danse du ventre

politicienne ne réglera aucun problèmevéritable. Comment leur donner tort ?Directs ou indirects, les impôts aug-mentent. Les petites entreprises,véritable tissu économique et socialde ce pays, non seulement ne peuventembaucher, mais croulent littéralementsous le poids de l’imposition et decette double peine que constitue lapaperasserie administrative. Les agri-culteurs sont réduits à se suicider ouà quitter leurs terres, sauf à entrerdans une logique industrielle quiépuise les sols et les placent dans ladépendance féodale des banques. Letragique déplacement de populations,venant du Proche-Orient, mélangeantvrais réfugiés et véritable immigrationde peuplement, entraîne un terrible

choc des civilisations qui passe tra-giquement des vues de l’esprit à uneincarnation barbare pendant que lespseudos « élites » se réjouissent duremplacement démographique quis’opère ainsi après la terrible tabularasa européenne qu’ils ont organiséepar l’avortement, l’hédonisme et lematérialisme conjugués.

GUETTEURS DE L’ESPÉRANCE

D ans ce contexte, à couper parfoisle souffle, ce n’est évidemment

pas sans appréhension que je doisaborder ici la situation de L’HommeNouveau. Face à ce qui s’apparenteà une véritable crise de civilisation,il faut bien avouer que nous n’appa-raissons pas comme un élémentdécisif, capable de renverser à luiseul la conjoncture. Notre vocation s’apparente plutôt àcelle du guetteur et de la sentinelledans la nuit, chargés autant d’annoncerles dangers qui menacent à l’horizonque l’espérance qui pointe au petitjour. Une vocation exigeante quinous assimile parfois aux prophètesde malheurs (« vous êtes trop néga-tifs… »), parfois à des gentils iréniques(«vous êtes décidément bien naïfs…»). À cette place difficile, mais que jecrois utile dans la perspective duservice du bien commun, nous n’échap-pons nullement, nous aussi, au contextegénéral, et plus particulièrement aucontexte économique. Alors que nousne cessons de diminuer nos frais,jonglant parfois à la limite duraisonnable, nous sommes à l’imagedes autres petites entreprises de ce

pays plus que jamais taxées et nousdevons faire face à une augmentationgénérale des coûts. La dernière endate ? Celle des frais postaux, vitauxen ce qui concerne l’acheminementde votre journal jusqu’à votre boîteaux lettres ! Un service loin d’êtreparfait et loin de remplir tous ses en-gagements, mais dont nous ne pouvonsévidemment nous passer, sauf à arrêternotre activité. Il s’agit d’un exemple.Prenons-en un autre : alors que nousaurions besoin d’embaucher pourdévelopper nos projets – nombreuxet qui permettraient de mieux répondreà l’attente de nos lecteurs –, nonseulement nous ne remplaçons pasles départs à la retraite, mais noussommes confrontés à une augmentationdes charges sociales ou assimilées,lesquelles nous asphyxient !

QUE FAIRE ?

A près avoir longtemps hésité,réfléchi et pris conseil, nous

sommes contraints aujourd’hui d’aug-menter le prix de l’abonnement. Tousles produits ont connu une telleévolution. Depuis onze ans et demi,seul le prix de l’abonnement deL’Homme Nouveau (alors à 20 pages)n’avait subi aucun changement. Nousaurions aimé continuer ainsi. Maismalheureusement, ce n’est plustenable, sauf à mettre la clef sous laporte à brève échéance. Vous trouverezdans le tableau ci-dessous un résuméde l’évolution de nos principauxtarifs. Ces derniers rentreront envigueur à partir du numéro du 26mars prochain.

Nous sommes bien conscients del’effort que nous demandons à noslecteurs et que les foyers subissenteux aussi l’alourdissement du coûtde la vie. Pourtant, je dois confesserque cette augmentation ne couvremalheureusement pas l’ensemble denos charges et ne nous permettrapas à elle seule d’être à l’équilibre.Nous devons compenser par desdons et par le mécénat culturel. Mais là aussi, malheureusement,nous constatons en ce début 2016une terrible baisse de ce type dedons, ce qui risque de nous mettredans une situation délicate à partirde juillet, alors que grâce à notreaccord avec l’organisme « Presseet Pluralisme », ces dons, indispensablespour notre développement, permettentaux donateurs, dans le cadre del’aide au développement de la presse,de réduire leurs impôts (66 % pourles particuliers et 60 % pour les en-treprises). Dans une situation de crise, il estplus que jamais nécessaire de noussoutenir les uns les autres et deresserrer les rangs. Notre secrétariatest à votre disposition, non seulementpour répondre à vos questions, maispour satisfaire vos attentes si cetteaugmentation s’avère vraiment troplourde pour vous. N’hésitez pas ! Ilne faut évidemment pas qu’un seullecteur puisse être privé de L’HommeNouveau car la solidarité doit joueraussi dans ce sens. Plus que jamais,il s’agit bien d’avancer au large. Ducin altum !

NOTRE QUINZAINE : L’Homme Nouveau,une sentinelle dans la nuit

L’ÉDITORIAL

DE PHILIPPE MAXENCE

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L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

Jeunes : face à la foi, des attitudes différentes

YVES CHIRON

U ne première enquête a étémenée sous la direction de

Sébastien Roché, professeur àSciences Po Grenoble. Un ré-sumé détaillé de 11 pages en aété publié sur le site du CNRS.L’enquête a porté sur 11 000 col-légiens de l’académie d’Aix-Marseille, scolarisés dans lesclasses de 5ème, 4ème et 3ème dequelque 90 établissements pu-blics ou privés sous contrat.L’enquête ne porte pas en to-

talité sur la religion, mais sur« Les adolescents et la loi ».Seule une des huit parties del’enquête porte sur les ques-tions religieuses.

Une différence patente entre les jeunes38 % des adolescents interro-gés se disent athées, 30 % ca-tholiques, 25 % musulmans,les autres ne se prononcent pasou disent appartenir à une autrereligion. Un des éléments saillantsde cette enquête est la grandedifférence entre musulmans etcatholiques dans l’affirmationde leur foi. Ceux pour qui lareligion est « importante outrès importante » dans la vie quo-tidienne sont qualifiés par cet-

te enquête comme « affirmés ».Si la très grande majorité desadolescents qui se déclarentmusulmans sont des « musul-mans affirmés » (83 %), ils sontseulement 22 % chez les jeunescatholiques.Autres différences : 53 % desjeunes qui se déclarent musul-mans pensent que les livres etles films qui attaquent la reli-gion doivent être interdits, etseulement 32,3 % des catho-liques. Pareillement, à la ques-tion « Si une loi heurtait tes

principes religieux, que ferais-tu ? », 68,1 % des musulmansrépondent qu’ils suivraient leursprincipes religieux, contre33,9 % des catholiques.On pourrait citer d’autres ré-ponses chez les jeunes musul-mans qui sont « autant de signesdu fondamentalisme » commele souligne Sébastien Roché, ledirecteur de l’enquête, cité parLe Figaro (8 février 2016).Néanmoins, penser que la loidivine ou la loi naturelle doitprimer sur les lois humaines(faillibles et changeantes) n’estpas du fondamentalisme. C’estrefuser de cantonner la foi auseul domaine privé.Dans L’Obs (4 février 2016),Najat Vallaud-Belkacem, le mi-

nistre de l’Éducation nationa-le, cherche à expliquer la « cris-pation identitaire », observablechez nombre de jeunes musul-mans, par une relégation so-ciale : « Les jeunes musulmanssont également les plus nom-breux à habiter en HLM ou àsouffrir d’horizons profes-sionnels bouchés. » La mon-tée du fondamentalisme chezles jeunes musulmans serait lerésultat d’une double pression :« Il y a à la fois des pressionsinacceptables dans certains

quartiers de la part d’unislam radicalisé dont onvoit aujourd’hui partoutdans le monde la pro-gression, et un discourssur l’islam porté par l’ex-trême droite, et reprispar une partie de la droi-te, qui a donné le senti-ment à beaucoup de cesjeunes qu’ils ne faisaientpas partie de la com-munauté des citoyens. »

Le fixisme de la religion musulmaneL’explication fait l’im-passe sur le contenu mê-me de l’islam et une in-terprétation littérale duCoran. La religion mu-sulmane ne connaît pas,à la différence de l’Égli -se catholique, ce que

Newman appelle « le dévelop-pement du dogme » ou le « dé-veloppement de la doctrine ».D’où la tendance, comme na-turelle à la religion musulma-ne, du littéralisme et du fixis-me.Une autre enquête, réalisée parl’institut Opinionway pour laConférence des religieux et re-ligieuses de France (Corref),porte sur la religion et la vo-cation religieuse. Elle donnedes résultats différenciés selonla tranche d’âge : d’une partles réponses données par l’en-semble des Français, d’autrepart les réponses données parles personnes âgées de 18 à 40ans et, pour certaines questions,les réponses données par les

jeunes croyants de 40 ans etmoins.Sans s’arrêter ici sur les ques-tions qui portent spécifique-ment sur la vocation religieu-se (les raisons de l’engagement,les difficultés de la vie reli-gieuse, etc.), on relève que lestranches d’âge les plus jeunes(18-40 ans) sont moins indé-cises en matière de foi que l’en-semble des personnes interro-gées : 40 % des 18-40 ans croientque l’existence de Dieu est cer-taine ou probable contre 38 %pour l’ensemble des personnesinterrogées. 39 % des tranches les plusjeunes pensent que la dimen-sion religieuse et spirituelle estimportante pour réussir sa viepersonnelle contre 37 % del’ensemble des personnes in-terrogées. En revanche ils nesont que 28 % à penser que

l’engagement dans la vie reli-gieuse est une réponse à un ap-pel de Dieu contre 32 % pourl’ensemble de la population.De ces deux enquêtes, il res-sort que la religion tient une pla-ce plus importante qu’on pour-rait le croire chez les jeunes,phénomène que Jean Sévilliaa analysé aussi dans son récentlivre (La France catholique [1])et qui s’observe dans les uni-versités et les grandes écoles.Mais ce n’est que rarement unefoi affirmée et structurée. Pourl’Église s’ouvrent deux vasteschamps : la formation des ca-tholiques affirmés ou hésitantset la mission d’évangélisationauprès des jeunes athées ouagnostiques comme aussi au-près des jeunes musulmans. ◆

1. Jean Sévillia, La France catholi -que, Michel Lafon, 238 p., 29,95 €.

◗ Deux enquêtes récentes montrent que les jeunes, en général, sontmoins éloignés de la religion qu’on pourrait le croire. ◗ Cependant ces adolescents témoignent de l’urgence de l’évangélisa-tion même auprès des jeunes catholiques tant ils sont peu nombreux àêtre formés et affirmés dans la foi.

4 | DÉCRYPTAGE | France

Si les jeunes musulmanes affirment la place de leur religion dans leur vie, les jeunes catholiques sont moins convaincus.

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Église | DÉCRYPTAGE | 5 L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

La Realpolitikdu Pape François

CHRISTOPHE DICKÈS

L a rencontre historique àLa Havane du 12 février

entre le Pape François et le pa-triarche de toutes les Russies,Cyrille, revêt une telle dimen-sion qu’il nous semble bien dif-ficile d’embrasser la totalité del’évènement en quelques lignes.Tentons donc ici de voir l’es-sentiel.Depuis le concile Vatican II etla déclaration commune du pa-pe Paul VI et du patriarche deConstantinople Athénagoras,le Saint-Siège n’a eu de cessede chercher le chemin de l’uni-té avec une orthodoxie elle-même divisée. Depuis le pon-tificat de Benoît XVI, ami deCyrille du temps où il était pré-sident du département des Re-lations extérieurs du patriarcatde Moscou (1989-2009), le pro-cessus s’est nettement accélé-ré si bien que plusieurs prochesdu dossier estiment que la ren-contre aurait eu lieu si le papeRatzinger n’avait pas renoncéà sa charge.

Un pape ouvertLe Pape François bénéficiedonc, comme dans bien desdossiers, du travail de son pré-décesseur. Néanmoins, sa per-sonnalité propre et sa politiqueont aussi été déterminantes.Promoteur de la synodalité, ne

cessant de se dire évêque de Ro-me, le pape argentin, moins at-taché au prestige de la papau-té, se révèle aussi étranger auxanciennes querelles européennes.Son ouverture d’esprit, sa vo-lonté d’aller de l’avant et sonpeu d’attachement aux conceptsabstraits ont fait le reste.De son côté, le patriarche Cy-rille souhaite restaurer la gran-deur de l’Église russe et re-nouer avec l’ensemble desÉglises en dehors des frontièresdu pays. À la tête de la plus gran-de communauté orthodoxe dansle monde (150 millions de fi-

dèles), le patriarche de Moscousait bien que le Saint-Siège estun élément majeur de l’échi-quier politique et religieux mon-dial, un acteur incontournablede la diplomatie. À la veille duConcile panorthodoxe qui vaavoir lieu en Crète au mois dejuin prochain, il était néces-saire pour lui de se montrer auxcôtés du Pape François alors quele patriarche de Constantinopleest, depuis des décennies, lié àRome.

Un lieu de rencontre privilégiéLe choix de Cuba pour la ren-contre n’est pas un hasard. Mê-me s’il s’agit d’un endroitneutre, éloigné de l’Europe, ilfaut savoir que le patriarcheCyrille est un habitué des lieuxpuisqu’il a consacré dans lacapitale cubaine une cathédraleorthodoxe en 2008. Il s’agit même de son quatrième voya-ge sur l’île : « Les populationsrusse et cubaine sont unies parde nombreuses années de col-laboration, de coopération etd’amitié » a-t-il déclaré à l’oc-casion. La Russie n’est pas cet-te terre repliée sur elle-mêmesi bien qu’après La Havane, lepatriarche se rendait au Para-guay et au Brésil. Quant au

Pape, de par ses origines, noussavons qu’il est dans son jar-din.Dans les faits, la rencontre entreles deux hommes s’inscrit dansle cadre d’une étroite conver-gence des intérêts diploma-tiques entre Rome et Moscou.C’est ce que l’on appelle dé-sormais « l’œcuménisme dusang ». Le 25 janvier dernier,à Saint-Paul-hors-les-Murs, lePape a affirmé que l’unité s’opè-re grâce au sang des martyrs.Plus prosaïquement, l’allian-ce russe avec le Saint-Siège, ren-due possible grâce au rétablis-sement des relations diploma-tiques entre les deux partis en2009, est absolument néces-saire dans le but de protéger leschrétiens d’Orient persécutés.Contrairement à ce qu’a dé-claré le porte-parole du pa-

triarche, le Père Alexandre Vol-kov, la rencontre du 12 févrierpossède donc une forte di-mension politique : l’ombre dela Syrie et de Bachar El-Assadplanait indéniablement sur l’îledes Caraïbes.Depuis son élection, la poli-tique du Pape François est sansambiguïté. Il l’a répété dans unentretien accordé au Corrieredella Serra le 8 février : « LaRussie peut donner beaucoup »pour la paix et il existe entrele Saint-Siège et Moscou des« convergences » de vue. Certes,la Crimée et les gréco- catholiquesd’Ukraine sont sacrifiés surl’autel de cette réconciliationentre catholiques et orthodoxes.Certains blâmeront même cet-te Realpolitik. Mais pour le Pa-pe François, la paix orientaleest à ce prix. ◆

◗ Partageant un œcuménisme de sang et un même intérêt pour la paixnotamment en Orient le Pape François et le Patriarche Cyrille se sontrencontrés en terrain neutre à La Havane le 12 février dernier. ◗ Une commune recherche de l’unité lie les deux hommes.

Le patriarche de toutes les Russies, Cyrille, et le Pape François.

“L e but du Carême est de faire mieux son devoird’état, alors si tu as besoin d’un triple Macdopour le faire, n’hésite pas… » Évidemment,

il n’y a qu’un « curé à jeunes » pour sortir ça, du genrequi confond sa paroisse avec facebook, les fans avecles fidèles et les likes avec les « fiat », qui pense avoirfait un sermon alors qu’il n’a tweeté que deux phrases.Il faut aussi sérieusement manquer de réalisme : on voit mal dans quelle situation il faudrait absolu-ment un triple Macdo pour être en mesure d’exécuterson devoir d’état. Le bon sens chrétien, lui, aurait plutôt prêché l’inverse : « Si pour faire ton devoir d’étattu peux te passer de ton triple Macdo, alors n’hésitepas ! ». On se souvient de certains curés « progres -sistes » des années soixante-dix qui disaient : « Les bourgeois feraient mieux de manger de la viande le vendredi et de donner leur argent ». Ils pensaient choquer ; et de fait, ils dérangeaient, tant ils n’exigeaient pas assez : ils auraient dû dire : « Les bourgeois feraient bien de manger du poisson le vendredi et de donner leur argent ! ». Chaque année, c’est le même cirque : il y a toujours un coupeur d’ailes pour nous expliquer que les efforts surla nourriture ne sont pas l’essentiel du Carême. Qu’un artilleur dise que l’important ce n’est pas le canon mais la victoire et le voilà de corvée depluches ; personne ne confond le moyen et la fin. Faut être théologiquement culotté alors que Jésus, les apôtres, les saints de toutes espèces ont tous mis le jeûne et la maîtrise du ventre en basiques de la pénitence pour en minimiser l’importance. Que tous ces experts en essentiel nous montrent un seul saint qui beurrait grassement sa tartine de petit-déj, un seul bienheureux qui tortorait du piedde cochon pané le vendredi et nous commencerons àles écouter. En attendant, on continue (ou on prend !)les bonnes vieilles méthodes. On comptera les pointsLà-haut. ◆

Selon une tradition populaire de Rome, Pasquin était un tailleur de la cour pon-tificale au XVe siècle qui avait son franc-parler. Sous son nom, de courts libellessatiriques et des épigrammes (pasquinades) fustigeant les travers de la sociétéétaient placardés sur le socle d’une statue antique mutilée censée le représen-ter avec son compère Marforio à un angle de la Place Navona et contre le PalaisBraschi.

L’HUMEUR DE PASQUINCarême… ou pas !

L’ŒIL DE MIÈGE

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ADÉLAÏDE POUCHOL

Q uel est le point communentre le fait que, en Fran-

ce, 97 % des enfants triso-miques sont avortés, et le faitque des scientifiques planchenten ce moment même sur la créa-tion d’un placenta artificiel quipermettrait de concevoir un en-fant intégralement hors du seinmaternel ? Ce point communs’appelle le transhumanisme.Un mot qui évoque plus un filmde science-fiction qu’une an-thropologie nouvelle qui se dé-ploie sous nos yeux… Et pour-tant !

Une humanité nouvelleUne partie de la communautéscientifique, des penseurs etdes décideurs économiques –occidentaux pour la plupart –dessinent les contours d’unehumanité nouvelle. Une hu-manité composée d’individusfabriqués sans que rien ne soitlaissé au hasard, tant et si bienque la frontière entre l’humainet la technique sera de plus enplus floue. Mettre en place une humanitéparfaite, c’est, avant de fabri-

quer des humanoïdes faits d’unmélange entre nature et tech-nique, supprimer les humains« défectueux ». Les PremièresVictimes du transhumanisme (1),comme le démontre Jean- MarieLe Méné, président de la Fon-dation Jérôme Lejeune, dansson dernier ouvrage, sont les

personnes tri-somiques. Unepopulation dé-cimée à 97 % :un eugénismede masse, symp-tomatique de lalogique trans-humaniste. Ilprocède de lavolonté d’éra-diquer toute« imperfection»de l’humanité,en même tempsqu’il constitueun marché ex-trêmement ju-teux, notam-ment par la mi-se en place detests de dépis-tage de la tri-somie 21 tou-jours plus per-

formants. Car c’est cela le trans-humanisme, une anthropologienouvelle portée par des scien-tifiques mus par la seule vo-lonté d’aller toujours plus loinet des décideurs économiquesprêts à tout pour s’enrichir.Mais que se passe-t-il vraimentdans l’ombre des laboratoires ?

La recherche sur l’intelligen-ce artificielle ou l’utérus arti-ficiel n’est-elle qu’une légen-de urbaine ? Le docteur Jean-Pierre Dickès présente, dansLa Fin de l’espèce humaine (2),un aperçu très bien documen-té de l’avancée des recherchesen biologie, génétique et ro-botique. Il nous fait entrer dansle repère de savants fous, quirêvent de remplacer l’hommepar les robots, et y œuvrentd’autant plus facilement que

nous n’osons pas croire quetout cela est vrai. ◆

1. Jean-Marie Le Mé-né, Les Premières Vic-times du transhuma-nisme, Pierre Guillau-me de Roux Éditeur,176 p., 19,50 €.2. Jean-Pierre Dickès,La Fin de l’espèce hu-maine, Éditions de Chi-ré, 368 p., 23 €.

L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

Y aura-t-il encore des humains dans cinquante ans ?

6 | DÉCRYPTAGE | Société

◗ Deux ouvrages récents – Les Premières Victimes du transhumanisme de Jean-Marie Le Méné et La Fin de l’espèce humaine de Jean-Pierre Dickès – lèvent le voile sur plusieurs aspects du transhumanisme, cette idéologie qui voudrait fabriquer une humanité augmentée… ◗ Tellement augmentée qu’elle n’est plus véritablement humaine.

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UNE FORCE D’ACTION POUR LA VIE

12 mars 2016 à Paris 1er forum européen « Un de nous »« Un de nous », « One of us » dans sa for-mulation anglaise, était d’abord le nomde l’initiative citoyenne européennelancée en 2012 pour défendre l’embryon dans les législationseuropéennes et stopper le financement des programmes d’avor-tement. L’initiative avait rassemblé 1,897 million de signatures.Il fallait transformer l’essai. Aujourd’hui, « Un de nous » ras-semble une trentaine d’associations à travers l’Europe pourporter le combat de défense de la vie devant les institutionseuropéennes et internationales. Un forum est organisé pour lelancement de cette « force d’action pour la vie » le 12 mars pro-chain à Paris.Informations et inscriptions : www.undenous.fr – [email protected]

Jean-Marie Le Méné, président de la FondationLejeune, dénonce le transhumanisme.

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France | DÉCRYPTAGE | 7L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

Orthographe : les dessous d’une réforme

AZUR GUIREC

Q uelle n’est pas la surpri-se du peuple français lors-

qu’il découvre la dernière me-sure de son gouvernement !Dépoussiérant un projet oubliédepuis vingt-six ans dans lesgreniers de l’Académie française,le ministère de l’Éducation na-tionale se lance dans une réformeorthographique d’environ 2 400mots, qui s’appliquera dans lesprogrammes scolaires dès sep-tembre prochain, malgré l’op-position des Immortels. La France, en guerre eten état d’urgence, se pas-sionne en ce moment pournénufar, ognon, accentcirconflexe ou trait d’union.Pour simplifier, affirme-t-on !

Quelques exemplesVingt et un s’écrit désor-mais obligatoirement vingt-et-un, mais extra-terrestredevient ex traterrestre.L’accent circonflexe « dis-parait seulement sur i etu ». Le tréma se dépla-ce d’ambiguë à ambigüe,et s’ajoute sur des motstels qu’argüer ou ron-geüre. Simplification a-t-on dit ? Cet-te nouvelle écriture qui « s’im-pose » fourmille d’exceptions,ce que le document officiel ré-pète sans cesse par la mention« dans un certain nombre decas ». Elle impose donc deconnaître les deux orthographes,et la liste des mots modifiéset de ceux qui ne le sont pas.Tentons un petit exercice pra-tique : sachant que j’amoncel-le devient j’amoncèle, qu’enest-il de j’appelle ? (1) Rien,il conserve ses deux ailes !Simplification, service géné-reux rendu aux élèves, sont ma-nifestement des prétextes. Et quidit prétexte cache autre cho-se…Ces nouvelles règles nous sé-parent délibérément d’un pas-

sé pourtant proche, pour pé-nétrer dans une ère plus mo-derne. Ce n’est pas le change-ment en lui-même qui pose pro-blème, car l’orthographe n’estpas vouée à se figer, mais bienl’intervention inappropriée dupolitique qui déclare officiel-lement Proust ou Flaubert té-moins d’un siècle passé, tam-ponnés de l’école du « vieuxfrançais ». C’est une victoirede l’homme moderne sur l’idéed’un héritage qui enracine. Orle langage n’est-il pas ce pré-

cieux instrument qui, fort de sonintemporalité, nous offre denous comprendre, nous et notreprésent ? Peu importe finale-ment l’accent circonflexe, maisentendons le sens du geste :s’attaquer au langage commun,n’est-ce pas travailler à déra-ciner l’homme ?L’Enfant sauvage de T.C. Boy-le, à qui l’on apprend à parlerpour le délivrer de son état sau-vage, rappelle l’essence du lan-gage, qui est de cultiver un liencordial pour favoriser le sensdu commun et l’attention à au-trui. Et même si paresseux d’êtrecourtois, les hommes inventè-rent les politesses formelles,ils refusèrent cependant de som-brer dans l’incorrection. Ain-si, « on peut, si on veut, rame-

ner tout l’art de vivre à un bonusage du langage » déduit pournous Simone Weil. Or quandl’homme ne peut plus puiser dansune large gamme lexicale pourexprimer posément son mé-contentement, il l’exprime au-trement, comme il peut, par laviolence verbale ou physique.

On crée un contexte de violenceFinalement s’attaquer au lan-gage, c’est travailler aussi àisoler l’homme, le dépouillant

de ses armes de défense, etcréant un contexte de violen-ce et de division sociale.Mais le langage est plus qu’unoutil pratique de communica-tion ou le reflet d’une majori-té : précédant l’écrivain, il estaussi un art. La littérature dé-gage une force que la menta-lité contemporaine exècre : lanuance, contre l’efficacité del’outil. Ouvrons ce roman- fleuve qu’est Madame Bova-ry : un travail si précis sur lechoix des mots pour conter unehistoire d’amour des plus or-dinaires. C’est la beauté queFlaubert recherche. La littéra-ture est cette recette qui mèneau monde de la finesse, del’ajustement, de la précision.Antidote d’un esprit trop scien-

tifique, elle affine et enrichit l’es-prit de ses nuances, le rendantplus profond et plus vrai. Li-mitant l’exploitation de la pro-fondeur de l’intelligence, lasimplification du langage ri-me avec une simplification del’esprit.Oui, nous avons pour beau-coup grandi au côté du dic-tionnaire Larousse, et acquisune grande fierté à maîtrisercette langue de Molière, Raci-ne, et La Fontaine, à compo-ser enfin d’une plume habile,sûrs de l’accord ou non du par-ticipe passé après le verbe avoir.

Fiers, car ces règles, gour-mandes des larmes des enfants,nous firent entrer dans la courdes grands.Mais voilà qu’aujourd’hui la ba-taille recommence… Et nousvoici désormais revenus à lacase départ : têtes blondes et têtesblanches se gratteront le crâned’un même geste pour savoirsi gratte prend maintenant unou deux t. ◆

1. http ://www.orthographe-recommandee.info/enseignement/regles.pdf

◗ Manifestement à court d’idées le gouvernement socialiste exhume un projet de réforme de l’orthographe qui ne saurait faire oublier la nécessité de « revoir totalement notre système éducatif ».◗ Il signe aussi avec elle sa haine du passé, son mépris de la langue et de la culture.

LE BILLET DE FRANÇOIS FOUCART

Servir en Église

Quel service rendre en Église pour un laïc ?D’abord, ne pas vouloir « prendre la place descurés », c’est-à-dire vouloir tout régenter et

prendre un certain pouvoir. C’est le cas des fameux« commandos liturgiques » (de femmes notamment)et l’on voit des « aumôniers » d’hôpitaux dont le titreme semble abusif et, dans certains déserts campa-gnards, des maîtresses femmes qui conduisent un pe-tit troupeau façon ADAP (Assemblée dominicale enl’absence de prêtres). Cela dit, nombre de laïcs aidentles prêtres et cela est devenu indispensable. C’est ainsique près de 100 000 femmes font le catéchisme !Il y a de modestes contributions comme lire desÉpîtres ou… faire la quête. En revanche, je ne m’explique pas que l’on s’obstine (sauf foule, genre pèlerinage) à faire donner la communion par des laïcsqui sont très demandeurs mais n’ont pas été consacréspour cela. En fait, c’est pour préparer un avenir jugésombre et mettre les laïcs dans le coup, faute deprêtres. À mon avis, une erreur et une démission, sans compter une certaine désacralisation du mystèreinouï qu’est l’Eucharistie.Autre possibilité (que je remplis) : l’accueil des famillesen deuil et la préparation de la cérémonie d’À Dieu.Souvent très affectés, bien sûr (mais pas toujoursquand il s’agissait d’un grand vieillard incurable…), les gens sont… gentils, un peu affaiblis par leur deuil,intimidés, mais retrouvent vite des exigences pas toujours compatibles avec la liturgie. Il y a, et c’est trèsbien, leur liberté de choix pour les lectures, l’Évangile,les chants. Et il faut naturellement les guider, car c’est,hélas, la première observation : la plupart n’y connais-sent rien, « catholiques non pratiquants » ne mettantguère les pieds à l’église. Certains demandent des airsà la mode, du jazz, du blues, tout à fait hors liturgie, et l’on ne peut admettre certaines fantaisies qu’aprèsla bénédiction finale. En revanche, la passion c’est la prise de parole pourévoquer le défunt. Il y a toujours : « Tu n’es pas loin, tues dans la pièce à côté… ». Et puis : « On se souviendrade tes confitures de groseilles, Mamie, et de ton immensegentillesse » ou « Tu as été un Papy merveilleux et je mesouviens de nos barbecues… ». On fait venir des petitsenfants qui ânonnent quelques mots, on pleure etc’est assez naturel. Mais il n’est guère question du bonDieu là-dedans, de la vie éternelle et de l’Espérance.Cependant ils ont fait l’effort de passer par l’église et c’est déjà bien. Il faut prier pour les disparus et les accueillir tous avec affection, ce sont nos frères humains… ◆

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Où sont passés les lecteurs de journaux ?

JEAN-MICHEL BEAUSSANT

O n lit peu les journaux enFrance. De moins en moins,

depuis que les organes d’opi-nion ont quasiment disparu.Encore moins que dans lesautres grands pays européens.La faute peut-être à notre pen-sée et école uniques, à notre Édu-cation nationale qui apprend simal aux enfants à lire et demeureen queue également de la clas-se européenne. Mais aussi, plusgénéralement, à cause de laculture de l’image fugace quidéconstruit la lecture classiqueet la transforme en activité dezapping souvent superficiellemais chronophage. Toujoursselon le rapport de ZenithOp-timedia, d’ici 2017 le temps delecture sur internet devraitconnaître une hausse de 143 %par rapport à 2010 contraire-ment aux journaux papiers quieux subiront une baisse qui fe-ra tomber le temps de lectureà 7,3 minutes.

Le lecteur moderne…Avant même l’invasion de laversion numérique des jour-naux par la toile avec leur pu-blicité digitale, le Centre d’Étu -de des supports de publicité(CESP), qui contrôle la diffu-sion et l’audience des journauxqui y adhèrent, donnait une cu-rieuse définition du lecteur mo-derne, un peu à la manière du« messalisant » qui est consi-déré comme pratiquant à par-tir du moment où il va au moinsune fois par mois à la messe !« La lecture dernière pério-de (1) consiste à considérercomme lecteur toute personnequi a déclaré avoir lu ou feuille-té un numéro d’un quotidien aucours d’une période de référence,quelle que soit la façon dont ilse l’est procuré » (par abon-nement, au kiosque ou chezson docteur…), indiquait sonvice-PDG d’alors, CorinneFabre (Humanisme et entre-prise n° 187, juillet 1991).

Quand le CESP parle de pres-se, il pense bien sûr d’abord «sup-port de publicité », sans que ce-la ne soit au reste contesté parles directeurs desdits « sup-ports » (cf. L’HN n° 1597 du12 septembre 2015 : « Publi-cité, médias et politique… »).Or les deux notions importantesqu’on utilise sur le marché pourmesurer l’audience d’un jour-nal sont « la lecture dernièrepériode » et « la lecture d’unnuméro moyen ». Ce dernierconcept est un critère encoreplus flou que le premier : à par-tir de numéros lus (ou feuille-tés) d’un quotidien sur les septderniers jours, on recalculel’audience sur les six jours deparution. Si tel « lecteur » af-firme avoir lu (ou feuilleté) telquotidien deux fois dans la se-maine, on extrapole (à partir dece chiffre) l’audience de cejournal pour les six jours deparution : on affirmera que,chaque jour, il a lu (ou feuille-té)… un tiers de ce journal, ad-ditionné dans le total quanti-tatif de son audience. Calcul etreconstitution évidemment ar-bitraires, car on suppose uneattitude constante là où le lec-teur sondé a pu se procurer lequotidien de manière purementoccasionnelle (deux fois) cet-te semaine-là seulement…

On saisit à ces approximations« sondagères » à quoi on ré-duit aujourd’hui le supposé lec-teur du journal papier qui au-trefois passait tout de mêmeen moyenne sa demi-heure quo-tidienne à la lecture de « son »journal, même s’il n’en lisaitdéjà souvent qu’une part mi-noritaire de la surface rédac-tionnelle. Feuilleter occasion-nellement l’imprimé à desseinpublicitaire suffit maintenant àdéfinir officiellement un lec-teur, lequel devient un consom-mateur d’un produit concur-rentiel comme un autre. Com-ment alors considère-t-on lelecteur numérique ? Il en vadu lecteur du journal commedu lecteur du livre. La publi-cité, le marketing et la « com »font encore vendre des jour-naux comme la télévision faitencore vendre des livres, maisà des gens plus ou moins ma-nipulés qui ont de moins enmoins le goût de la lecture etde la culture. Pour une mino-rité de lecteurs attentifs, com-bien lisent convenablement leslivres ou les journaux qu’ilsont achetés ? ◆

1. Il s’agit pour un quotidien dela veille, pour un hebdomadairedes sept derniers jours et pour unmensuel des trente derniers jours.

◗ Selon un rapport sur « la consommation des médias » réalisé parZenithOptimedia, le temps de lecture des journaux est passé de21,9 minutes par jour en 2010 à 16,3 minutes en 2014. ◗ Quant aux journaux en ligne, leur temps de lecture est passé de 1 h 22en 2010 à 2 h 07 en 2014. Mais est-ce le même mode de lecture ?

Combien de personnes prennent encore le temps de lire leur quotidien ?

REVUE DE PRESSE◗ Le prétexte Zika

Le moustique Zika augmenterait le taux de micro-céphalie. Aussitôt, l’Onu demande aux paysd’Amérique latine d’autoriser l’avortement, mais ya-t-il vraiment un lien ? « Albert Barrois, directeurde recherche et bloggeur, a pour sa part analysé

la situation au niveau scien-tifique et déclare que “le lienentre microcéphalie et levirus Zika est au mieux trèsfaible”. Mais “Nature, TheLancet, et jusqu’au Bulletin

de l’OMS ont beau répéter ce simple constat,rien n’y fait”, l’ensemble des alertes et des dispo-sitions sanitaires s’appuie sur ce lien hypothé-tique. » De son côté, la Conférence des évêques duBrésil a rappelé son opposition à l’avortement :« Une moindre qualité de vie ne veut pas dire unmoindre droit de vivre, avec moins de dignité. »

11 février 2016

◗ L’Académie contre la réformeContrairement à ce qui a pu être dit, l’Académie fran-çaise n’est pas favorable au sabotage de l’ortho-

graphe. Hélène Carrèred’Encausse le redit : « Laposition de l’Académien’a jamais varié sur cepoint : une opposition

à toute réforme de l’orthographe mais un accordconditionnel sur un nombre réduit de simplifica-tions qui ne soient pas imposées par voie autori-taire et qui soient soumises à l’épreuve du temps. »La langue est soumise à l’usage, non à l’État.

13-14 février 2016

◗ Le numérique à l’école ? Ce n’est pas une bonne idée estime L’Écologiste.« On nous répondra que “la technique (donc lenumérique) est neutre et qu’elle dépend surtoutde l’usage qu’on en fait”. Or une technique est jus-tement un mode opératoire pour passer d’un étatà un autre, c’est la condition pour une transforma-

tion. Donc, loin d’êtreneutre, la technique estambivalente. (…) Les pro-moteurs du numérique éta-blissent souvent un parallè-

le entre son utilisation et l’apprentissage de l’au-tonomie. On peut s’étonner de voir mis sur le mê-me plan deux éléments antinomiques car on perdplutôt en autonomie et on aggrave sa dépendan-ce quand on se tourne vers des machines pourfaire des choses qu’on est déjà capable de réaliserpar ses propres moyens. »

Janvier-mars 2016

◗ La religion revient-elle ?L’Obs cite un extrait du dernier livre de Jacques Der-rida : « Le religieux n’avait pas disparu, il n’étaitpas mort, seulement réprimé dans les sociétés totalitaires, communistes, dans les colonies, etc. ;

l’islam n’était pas mort ouparti, seulement dominé,censuré, réprimé dans tantde sociétés coloniales. (…)D’ailleurs, on n’a qu’à voir ce

qui s’est passé en Russie et ailleurs. On a l’impres-sion qu’elle n’a jamais été aussi vivante, la religion,que cachée pendant soixante-dix années de tota-litarisme. Et voici que tout d’un coup, intacte, ellerevient sur la scène, plus vivante que jamais. »

Du 11 au 17 février 2016

L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 20168 | DÉCRYPTAGE | Société

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International | DÉCRYPTAGE | 9 L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

ALAIN CHEVALÉRIAS

À la mi-février la situationest figée en Libye. Pour

combien de temps encore ?Après la chute de MouammarKadhafi, en 2011, le pays aéclaté en une multitude de zonescontrôlées par des milices auxmains d’organisations isla-mistes ou tribales comme cel-le de Zenten. Face à ce désordre,un semblant de légalité s’est misen place. En juillet 2012, un par-lement était élu sous le nom deCongrès général national. Pro-blème, il était largement do-miné par les islamistes.En mars 2014, de nouvellesélections sont organisées. Nonréélus, plusieurs députés refu-sent alors les résultats et décrètenttoujours légitime l’ancien par-lement. Ce dernier demeure àTripoli et se dote d’un gou-vernement, largement dominépar « Al-Fajr » (l’Aube en ara-be), une fédération de milicesislamistes. Mais les nouveauxélus ne l’entendent pas de cet-te oreille. Sous le nom deChambre des représentants, ilsforment un autre parlement et,pour échapper à la guerre, s’in -stallent à Tobrouk, à l’est dupays, où eux aussi nommentun gouvernement.

Le choix de l’OccidentConfrontées à cette dualité, lesinstances internationales fontle choix de l’est, la gouver-nance de Tobrouk, il est vraiplus facile à soutenir parcequ’issue d’élections plus ré-centes. En outre, à l’est, les anti-islamistes dominent lar-gement, rassurant l’Occident,même si dans leurs rangs on comp-te des anciens du régime deKadhafi et des nationalistesqu’en Europe, pourtant, l’ondénigre.S’appuyant sur Tobrouk, deWashington à Bruxelles, onvoudrait bien se débarrasserdes factions islamistes qui sé-vissent à Tripoli. À partir duprintemps 2014, on va jusqu’à

soutenir un ancien général deKadhafi, Khalifa Haftar, pourmener la reconquête, l’opéra-tion « Karama » ou « Digni-té ». Aux yeux des Libyens,l’homme est pourtant d’unecrédibilité douteuse : capturé auTchad en 1987 lors d’une of-fensive libyenne, il était passéaux côtés des Américains.D’abord utilisé pour tenter derenverser militairement Kadhafi,il fut finalement exfiltré à Lan-gley, à côté du siège de la CIA,en 1990, pour réapparaître enLibye à partir de 2011.Mais la reconquête d’Haftarne répond pas aux attentes. Pi-re, Daech (l’État islamique)s’implante dans le pays allantjusqu’à s’emparer de Syrte,d’où ces radicaux partent à laconquête de la Libye. Au pre-mier rang, pour s’opposer àeux, apparaissent les instancesde Tripoli avec les milices d’Al-Fajr. Plus grave encore, lan-çant des missions du territoirelibyen, Daech s’infiltre au Sa-hel, menaçant un peu plus lapaix relative instaurée par la Fran-ce dans cette région.L’analyse de l’étranger, prin-cipalement des Occidentaux,change alors. Encore récem-

ment, Jean-Yves Le Drian, notreministre de la Défense, le di-sait : il est « urgent » de trou-ver une solution politique enLibye pour pouvoir aider ungouvernement d’union natio-nale à combattre Daech.Le 17 décembre dernier, onsemblait arrivé au bout du tun-nel : à Skhirat, au Maroc, lamajorité des factions libyennes,pas toutes cependant, accep-tait un gouvernement sous leparrainage des Nations unies.Mais le parlement de Tobroukle refusait. Sous prétexte queles ministres étaient trop nom-breux, il cherchait à protégerHaftar, le ministère de la Dé-fense ayant été confié à unautre.Depuis, on s’enlise. On tailledans les effectifs du gouver-nement, on promet et l’on s’in-vective, mais en vain. Pendantce temps-là, Daech avance, enLibye et en Afrique noire. Auprintemps 2011, deux de nosarticles évoquaient dans L’Hom-me Nouveau les risques duchaos et de la montée de l’is-lamisme radical en Libye, à lafaveur de l’intervention mili-taire occidentale. Nous y sommes.

La Libye se trouve contrôlée par la Chambre des représentantset ses alliés (en rose), le Congrès général national et ses alliés(vert), l’État islamique et/ou Ansar al-Charia (gris), les « Conseilsde la Choura » (djihadistes) [blanc], et les Touaregs (jaune).

La Libye divisée en deux◗ Deux parlements et deux gouvernements pour un pays : c’est l’exploitréalisé par les successeurs de Kadhafi à la tête de la Libye. En prime, la frange islamiste ultra-radicale de Daech grignote le pays. ◗ Quant à l’Occident, il passe en Libye d’une stratégie à une autre sans beaucoup plus de résultat.

REVUE DE PRESSE◗ Vers la fin du Concordat en Espagne ?

L’Espagne est actuellement lié au Saint-Siège parun Concordat, mais le parti socialiste espagnol(PSOE) et le parti d’extrême-gauche Podemos récla-ment sa fin. Dans le gouvernement autonome deCastille-La Manche, ces « deux partis ont déjàimposé au cours des négociations, mardi, le geldes fonds publics alloués aux écoles sous contratespagnoles, catholiques dans leur immense

majorité, et l’arrêtdes subventionspour les aumône-ries dans les établis-sements de santé

publics. Plus généralement, Podemos et le PSOEont demandé qu’une proposition (…) soit pré-sentée au gouvernement de l’Espagne en vue desuspendre le Concordat avec le Vatican. (…)Cette nouvelle démarche anticléricale dePodemos s’ajoute à celle entreprise enAndalousie pour exproprier l’Église catholiquede nombre de ses bâtiments et de ses lieux deculte. (…) Le leader régional de Podemos, JoséGarcia Molina, a regretté de ne pouvoir éliminertout à fait les subventions publiques à desœuvres d’Église en raison du Concordat, raisonpour laquelle l’ensemble de la gauche dans larégion autonome a demandé sa suspensionpour le pays tout entier. »

10 février 2016

◗ L’euthanasie en question« Ces derniers mois, la question de l’euthanasiepour cause de souffrance psychique est revenueplusieurs fois sur le devant de l’actualité enBelgique. À chaque fois, le même débat se pose.

Une maladie purementpsychique peut-elle êtrejugée incurable aupoint de conduire augeste d’euthanasie ?

Une question qui divise les experts. (…) ArianeBazan, professeure (sic) à l’ULB, estime qu’“il fautchanger l’offre de soins et ne pas faire droit à lademande de mourir de gens aussi désespérés”que ceux qui demandent l’euthanasie pour des causes psychiques. »

15 février 2016

◗ Prières contre dette« La justice a validé, vendredi 12 février, unaccord supprimant la dette du diocèse ortho-doxe de Nijni-Novgorod envers une entreprised’ingénierie locale, en échange de prières pourles dirigeants de cette société. Une société d’in-

génierie de la régionavait déposé plainteen août contre le dio-cèse orthodoxe russede Nijni-Novgorod, àl’est de Moscou, qui ne

lui avait payé que la moitié de travaux deconception et d’installation d’une nouvelle chau-dière. L’entreprise exigeait du diocèse la sommede 458 000 roubles (5 150 €). Les deux partiesont finalement conclu un accord à l’amiabled’une forme originale (…) : les autorités reli-gieuses se sont engagées à verser au plaignantprès de la moitié de la somme, soit 200 000roubles (2 250 €), et à remplacer la deuxièmemoitié par des prières “pour la santé” du PDG etdu responsable technique de la société, ainsique pour “leur prospérité” ».

15 février 2016

Libye

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L’ ouvrage collectifÉglise et politique(1) procède à un

examen critique de « la politiquede Vatican II » exposée prin-cipalement dans deux textesDignitatis humanæet Gaudiumet spes. Les auteurs, reprenantla formule de Mgr Minnerath,ont pour thèse que Vatican IIa effectué « un changementde paradigme dans l’élaborationdoctrinale des relations Église-État » (2). Ce changementconsiste selon eux en une mi-noration doctrinale et un aban-don pratique de l’exigencefaite aux pouvoirs publics dereconnaître la vraie religionet de rendre un culte publicà Jésus-Christ. Les auteursn’ont pas de mal à établirque la doctrine de la royautésociale de Jésus-Christ, clefde voûte de la résistance àl’ordre politique moderne, apour ainsi dire disparu de laprédication et de l’enseignementmagistériel.

Condamnations ou insertion ?Le motif de ce changement«a été, selon Bernard Dumont,le désir de sortir du conflitavec la culture héritée desLumières » (p. 353). En effet,la stratégie élaborée au XIXe siè-cle faite de condamnationset de protestations d’une partet d’insertion dans les rouagesdu nouveau régime d’autrepart, a échoué. « Plutôt quede se livrer à un examen desraisons de ce double échec,le Concile a préféré opterpour une systématisation dela deuxième voie, ne réclamantdésormais que la liberté »(idem). Et Bernard Dumontde citer le Message du papePaul VI aux gouvernants(8 décembre 1965) fortementinspiré de Maritain.Formulons d’emblée deuxobjections à un tel propos.

Premièrement, si les auteursde ce livre reconnaissentl’échec de la stratégie pré-conciliaire et critiquent lastratégie postconciliaire, queproposent-ils ? Réclamer unretour comme tel à ce qui aéchoué ne semblerait pas co-hérent. Il faut alors envisagerautre chose, mais quoi ? Àcette question, les 380 pagesde ce livre n’apportent pasle début d’une réponse. Onpourrait répondre que tel n’estpas le but de ce livre, consacréà établir un diagnostic de lasituation présente. Mais qu’est-ce qu’un diagnostic qui nedébouche sur aucune propositionde thérapie ? Certes un secondlivre viendra peut-être complétercelui-ci mais en l’état, l’absencede toute proposition concrètede thérapie fragilise singu-lièrement la portée du diagnostic.Ou bien alors il faut conclureque la solution, proposée « encreux », consisterait à revenirmalgré tout à la stratégie an-térieure, faite de condamnationsde la modernité politique etde réaffirmation du droitpublic ecclésiastique. Maisalors derechef, commentpenser que ce qui a échouéau XIXe siècle quand l’Égliseétait bien plus installée etpuissante que maintenantserait couronné de succès au-jourd’hui, alors même qu’ellese trouve dans un état degrande faiblesse ?De là, et c’est la deuxièmeobjection, on peut se demandersi la stratégie conciliaire seréduit à « la systématisationde la deuxième voie » commel’affirme Bernard Dumont ?Cette deuxième voie est celledu Ralliement décidé parLéon XIII afin que les ca-tholiques reviennent pleinementdans le jeu politique moderneet puissent peser positivementsur la législation afin de l’in-fléchir dans le bon sens. Il

est indéniable que cette solutiona échoué, le régime politiqueissu des Lumières n’étant pasun contenant neutre qu’ils’agirait de remplir par unbon contenu mais une formedéterminant un contenu pro-portionné. Dans le cas français,exemplaire à plus d’un titre,Jules Ferry avait compris quela laïcité n’était pas un simpledispositif institutionnel maisbien un esprit ayant vocationà imprégner les mentalitéset les pratiques afin d’excluredéfinitivement la foi catholiqueet le droit naturel du gouver-nement de la chose commune.

Les fruits du laïcismeLa politique laïciste a portéses fruits escomptés et… sesfruits sont, d’un point de vuecatholique et humain, catas-trophiques. Au XXe siècle ladémocratie libérale est certessortie victorieuse de son af-frontement avec les totalita-rismes, ces idéologies du malniant Dieu et donc l’homme,mais la démocratie libéralea elle-même sombré dansl’hybris. Saint Jean-Paul IIl’a rappelé avec force dansson dernier livre, sorte detestament spirituel Mémoireet identité (3), en osant comparernotre régime mental et politiqueaux totalitarismes. La questionest dès lors de savoir si depuisVatican II la voie « d’insertiondans les mécanismes consti-tutionnels » a été systématiséecomme le présupposent lesauteurs ou si au contraire ils’est agi de prendre les chosesà nouveaux frais, selon untout autre point de vue ; rupturedans le point de vue ne signifiantpas nécessairement rupturedans la continuité doctrinale.Il nous semble que la « solutionconciliaire » incarnée avecconstance et déterminationpar saint Jean-Paul II etBenoît XVI consiste, d’une

part, à reconnaître la relativeautonomie de l’ordre temporelpuisque la vie politique,relevant de la nature crééepar Dieu, est accessible à laraison ; et, d’autre part, àexiger que les fidèles laïcss’engagent dans la vie de lacité afin d’« animer chré-tiennement l’ordre temporel »finalisé par le bien commun.L’abandon de toute prétentionà former un État chrétien,

certes matériellement enrupture avec les discours despapes, est motivé par l’échecantérieur d’une telle reven-dication et le caractère ac-tuellement inaudible, et donccontre-productif, d’une tellerevendication. Mais une foisque le cœur du messagepolitique de l’Église ne porteplus sur l’État chrétien, ilpeut prendre pour objet lacritique des causes nihilistes

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L’Église face à la politique : un autre regard

« Jules Ferry avait compris que lalaïcité (…) était bien un esprit ayantvocation à imprégner les mentalités

et les pratiques afin d’exclure définitivement la foi catholique. »

THIBAUD COLLIN

En donnant la parole dans notre dernier numéro à Bernard Dumont, directeur de la revue Catholica, à propos du livre collectif Église et politique, changer de paradigme (Artège), nousavons continué le débat ouvert lors de notre rencontre avec Pierre Manent. Le philosopheThibaud Collin a souhaité discuter certains points soulevés par les auteurs d’Église et politique à travers cet article initialement prévu dans le dossier consacré à ce livre.

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de l’État laïciste au nom de lajustice fondée sur la loi naturelle,donc sur Dieu mais accessibleà la raison. Le laïcisme n’estplus frontalement antichrétiencomme sous la IIIe République.Il s’identifie au relativisme,c’est-à-dire concrètement audroit du plus fort (arbitraired’une majorité manipulée pardes lobbies), même si tout celaest maquillé et cherche à sauverles apparences de la raisondroite dans l’éthique de la dis-cussion.

Le jeu de la raisonDans cette nouvelle configuration,toute intervention explicitementportée par la foi est discréditée,quand bien même son contenuserait accessible à la raison. Ils’agit donc pour l’Église dedéjouer ce piège de la confes-sionnalisation et jouer le jeunon pas de la démocratie pro-cédurale relativiste mais de laraison et de ses exigences propresen matière morale et politique.Ici l’analogie avec les dissidentsde l’Est est éclairante. Bien quebeaucoup aient été chrétiens,ils n’ont pas critiqué le régimecommuniste au nom de leur foimais au nom de ce que formel-lement (et hypocritement) lerégime reconnaissait et garantissait(depuis les accords d’Helsinkien 1975), à savoir les droits del’homme.Est-ce à dire que la foi doiveêtre cantonnée dans la sphèreprivée comme le laïcisme actuell’exige ? Autrement dit, l’Églisea-t-elle fait siennes les exigencesde la modernité et consent-elleà se limiter à la seule vie indi-viduelle abandonnant toute di-mension publique ? Il n’en estrien et un des aspects essentielsdu discours magistériel post-conciliaire est absent dans cecollectif : la critique de ce quesaint Jean-Paul II nomme « lesstructures de péché ». Rappelonsque ce terme désigne des dis-positions aux péchés inscritesdans des procédures institu-tionnelles. Il n’est pas à prendrecomme synonyme de « péchésocial», terme issu de la théologied’influence marxiste, car lepéché ne peut être au sens strictque personnel. Mais la structurede péché est médiatrice du péchéen tant qu’elle est créée par despéchés personnels ; ceux-ci dès

lors se démultiplient en s’ob-jectivant dans des structuresanonymes et impersonnellesconditionnant les mentalités etles pratiques. Il est évident quesaint Jean-Paul II a esquisséune réflexion capitale sur lesstructures de péché propres àla démocratie libérale fondéesur les droits de l’homme. Ilaurait été intéressant que nosauteurs reconnaissent et déve-loppent cet apport magistérielpour penser et diriger l’agir desfidèles dans notre situation his-torique.Mais cette critique des structuressuffit-elle ? Comme le dit la

Note doctrinale sur l’engagementdes chrétiens dans la vie politique,signée par le cardinal Ratzinger(2002) : « Il ne suffit pas depenser, et ce serait réducteur,que l’engagement social descatholiques puisse se limiter àune simple transformation desstructures, car, si à la base iln’y a pas une culture capablede recevoir, de justifier et d’en-visager les exigences qui découlentde la foi et de la morale, lestransformations reposeront tou-jours sur des fondements fragiles.»(n. 7) Or la culture de vie pourlaquelle les papes récents ontœuvré ne peut prétendre effi-cacement contrer la culture demort et les idéologies du malque si elle est fondée sur unejuste conception de la personnehumaine et de son vrai bien. Etlà, nous touchons un des pointsles plus saillants de la critiquedéveloppée par le collectif Égliseet politique. Pour le résumeren une formule : le personnalisme,voilà l’ennemi ! Interprétant la déclaration conci-liaire sur la liberté religieuseDignitatis humanæ comme unralliement à l’idéologie indi-

vidualiste des droits de l’homme,Sylvain Luquet considère quele magistère actuel, influencépar Maritain, aboutit à cautionnerles thèses du philosophe américainJohn Rawls, notamment l’abandondu bien commun au profit d’uneconception du juste en termesprocéduraux afin de fonder unesociété pluraliste formellementrelativiste. C’est ignorer la richedoctrine de saint Jean-Paul IIsur la nature objective du bienhumain, exposée dans Veritatissplendor et appliquée dansEvangelium vitæ.

La doctrine de la personneEn effet, s’il existe un vrai bienhumain par lequel la personneréalise sa nature humaine ethonore sa dignité d’être créé àl’image de Dieu, il est absurdede considérer que ce bien puisseêtre mesuré par l’opinion dechacun et que cette doctrinepuisse cautionner ainsi une dé-

mocratie relativiste et individualiste.Le fondement du bien communtemporel est à découvrir danscette doctrine anthropologiqueet éthique de la personne quesaint Jean-Paul II a reprise àsaint Thomas d’Aquin, contredes lectures modernistes destextes du Concile. Lecture quefinalement nos auteurs partagentnon pour les approuver maispour les condamner. L’apportpropre du Concile, explicitépar le pape polonais, est l’ap-profondissement d’une droiteconception de la subjectivité.Face au subjectivisme indivi-dualiste qui fonde la politiquemoderne, il s’agit de relever ledéfi de la subjectivité en pro-mouvant une subjectivationadéquate de la doctrine et dela vie chrétiennes. Bref, sauverla subjectivité du subjectivisme !Qu’un tel programme soitexigeant et représente une lignede crête peut expliquer qu’ilsoit l’objet d’incompréhensions,

et donc de critiques mais celles-ci restent enfermées dans uncadre antimoderne acceptantles présupposés de la lecturemoderne de la subjectivité.En conclusion, la critique dé-veloppée dans ce collectif reposesur l’affirmation que le magistèreactuel aurait abandonné la di-mension politique et sociale dela foi, bref que la chrétienté neserait plus une finalité pourl’Église d’aujourd’hui. Celanous semble faux. Certes lachrétienté n’a jamais été unefin en soi, puisque le Royaumede Dieu n’est pas de ce monde.L’Église a toujours clairementrefusé tout messianisme maiscela ne signifie pas qu’elle n’apas considéré à sa juste placele rôle prépondérant du politiquedans l’agir chrétien.

La foi dans les œuvresLa foi a à s’incarner dans desœuvres et en retour les institutionsexercent une causalité dispositive,bonne ou mauvaise, sur lescroyances et les pratiques. Il ya bien « une responsabilitésociale de la foi»comme l’affirmele cardinal Ratzinger. La «politiquede Vatican II» et de ses interprètespontificaux s’enracine dans leconstat que la chrétienté n’estplus. À partir de là, il ne s’agitpas de se rallier à la modernitéantichrétienne, il s’agit de releverle défi de la subjectivité pourmanifester que la foi assume lanature humaine dans ses différentesmédiations. Pour refaire la chré-tienté, il ne sert à rien de s’arc-bouter sur des stratégies qui ontfait long feu, comme le recon-naissent eux-mêmes les auteurs,mais de repartir du centre, laliberté humaine, afin de l’amenerà découvrir en Dieu son vraibien, personnel et collectif. ◆

1. Collectif, Église et politique :changer de paradigme, Artège,384 p., 19,50 €.2. Roland Minnerath, L’Église ca-tholique face aux États. Deux sièclesde pratique concordataire 1801-2010, p 167-168, Cerf, 2012, 650 p.,55 €.3. Jean-Paul, Mémoire et identité,Flammarion, 224 p., 17,30 €.

« La structure de péché est

médiatrice dupéché en tant

qu’elle est crééepar des péchés

personnels. »

Tribune libre : article d’une personnalitéextérieure à la rédaction du journalet qui n’engage que son opinion. Lestitres et les intertitres sont de la ré-daction.

Planned Parenthood est un exemple de structure de péché,qui embrigade une jeunesse sans repères.

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CARDINAL SARAH : DE L’IMPORTANCEDU SILENCE DANS LA LITURGIE

Avec son autorisation, nous publions un texte fondamental de son Éminencele cardinal Robert Sarah, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, paru initialement dans l’édition italiennede L’Osservatore Romano. Consacré à l’importance du silence dans la liturgie, ce texte souligne combien celui-ci n’estpas seulement une absence de bruit. De ce fait, il joue un rôle à part entièrepour mieux entrer dans la profondeur des mystères célébrés dans la liturgie,permettant à sa place une véritable participation des fidèles.

CARDINAL ROBERT SARAH

Préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements

B eaucoup de fidèles se plaignentavec raison de l’absence de si-

lence dans certaines formes de célé-bration de notre liturgie romaine. Ilnous a donc semblé important, danscette brève étude, de rappeler le sensdu silence en tant que valeur ascé-tique chrétienne (I), et donc commeune condition nécessaire pour uneprière profonde et contemplative (II),sans oublier aussi que des temps desilence sont officiellement prévuslors de la célébration de la sainte Eu-charistie (III), afin de mettre en évi-dence l’importance du silence pourun renouveau liturgique de qualité (IV).

I. LE SILENCE COMMEVALEUR ASCÉTIQUE CHRÉTIENNEAu sens négatif, le silence est l’ab-sence de bruit. Il peut être extérieurou intérieur. Le silence extérieurconcerne l’absence de silence aussibien en paroles qu’en actions (bruitsde portes, de véhicules, de marteaux-piqueurs, d’avions, le fonctionne-ment bruyant des appareils de pho-tographie, souvent accompagné del’éblouissement des flashes, et aus-si cette horrible forêt des téléphonesportables, qui sont brandis à bout debras au cours de nos liturgies eu-

charistiques). Le silence vertueux –voire mystique – doit évidemment sedistinguer du silence réprobateur, durefus d’adresser la parole, du silen-ce d’omission par couardise, égoïs-me ou dureté de cœur. Bien entendu, le silence extérieurest un exercice ascétique de maîtri-

se dans l’usage de la parole. Avanttout, il peut être bon de rappeler cequ’est l’ascèse, ce mot qui est loind’être porté au pinacle de notre so-ciété de consommation, et même, ilfaut l’avouer, qui effraie nos contem-porains, y compris très souvent les1chrétiens, qui subissent l’influen-

ce de l’esprit du monde. Alors, qu’est-ce que l’ascèse ? L’ascèse est unmoyen indispensable qui nous aideà enlever de notre vie tout ce quil’alourdit, c’est-à-dire ce qui entra-ve notre vie spirituelle ou intérieu-re, et donc ce qui constitue un obs-tacle à la prière. Oui, c’est bien dansla prière, que Dieu nous commu-nique sa Vie, c’est-à-dire manifestesa Présence dans notre âme en l’ir-riguant des flots de son Amour tri-nitaire : le Père par le Fils dans l’Es-prit Saint. Et la prière est essentiel-lement silence. Le bavardage, cettetendance à extérioriser tous les tré-sors de l’âme en les exprimant, estsouverainement nuisible à la vie spi-rituelle. Emporté vers l’extérieur parson besoin de tout dire, le bavard nepeut qu’être loin de Dieu, superfi-ciel et incapable de toute activitéprofonde.Les livres sapientiaux de l’AncienTestament (Pr 10, 8,11,13-14,18-21,31-32 ; 15, 1-7 ; Sir 19, 7-12 ;20, 1-2, 5-8 ou 23, 7-15 ; 28, 13-26)regorgent d’exhortations destinées àéviter les péchés de la langue (no-tamment, la médisance et la calom-nie). Les livres prophétiques, de leurcôté, évoquent le silence comme ex-pression de la crainte révérencieuseenvers Dieu ; il est alors une prépa-

>>> Suite page 13La prière est essentiellement silence.

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ration à la théophanie de Dieu, c’est-à-dire à la révélation de sa Présence dansnotre monde (Lm 3, 26 ; So 1,7 ; Ha2, 20 ; Is 41, 1 ; Za 2, 17). Le NouveauTestament n’est pas en reste. En effet,il y a la lettre de Jacques, qui demeu-re évidemment le texte classique à pro-pos de la domination de la langue (Jc3, 1-10). Toutefois, on sait que JésusLui-même nous a mis en garde contre

les paroles mauvaises, qui sont l’ex-pression d’un cœur dépravé (Mt 15,19) et même contre les paroles oiseuses,dont il nous sera demandé compte (Mt12, 36). À l’opposé, on ne peut que res-ter impressionné par le silence de Jé-sus face au Sanhédrin, au gouverneurromain Pilate et au roi Hérode : Jesusautem tacebat (Mt 26, 63). Hérode luidemandait un miracle pour lui, et sescourtisans s’en seraient amusés. MaisJésus-Christ, qui était enchaîné, Lui,le Dieu de majesté, ne consentit pas àdevenir le bouffon du roi Hérode, ni àaccomplir pour cet homme orgueilleuxet d’une curiosité malsaine ce qu’Il ac-cordait si généreusement aux humbleset aux simples.En réalité, le vrai et bon silence ap-partient toujours à celui qui veut lais-ser sa place aux autres, et surtout auTout Autre, à Dieu. En revanche, le bruitextérieur caractérise l’individu quiveut occuper une place trop impor-tante, qui veut se pavaner ou s’exhi-ber, ou encore qui veut remplir son vi-de intérieur, comme c’est le cas dansnombre de magasins et de services pu-blics, et aussi notamment dans les sallesd’attente de certains dentistes, coif-

feurs…, où l’on vous impose une mu-sique de fond incessante. Le silence intérieur, quant à lui, peutêtre constitué par l’absence de sou-venirs, de projets, de paroles inté-rieures, de soucis… Plus important en-core, grâce à un acte de la volonté, ilpeut résulter de l’absence d’affec-tions désordonnées, ou de désirs ex-cessifs. Les Pères de l’Église accor-

dent une place éminente au silence dansla vie ascétique. Qu’on songe à saintAmbroise (In Psalm. 37, 12-15), àsaint Augustin, à saint Grégoire leGrand (Moralia II, 48 ; XXII, 16 ;XXX, 16), sans parler du chapitre VIde la Règle de saint Benoît de Nur-sie, sur la « taciturnité », ou de sonchapitre 62, sur le silence de nuit, oùil se fait disciple de Cassien. À par-tir de ces maîtres, tous les fondateursmédiévaux d’ordres religieux, suivispar les mystiques de la Réforme ca-

tholique, insistèrent sur l’importan-ce non seulement ascétique, mais en-core mystique du silence.

II. LE SILENCE COMME CONDITIONDE LA PRIÈRE CONTEMPLATIVEDans l’Évangile, il est dit que le Sauveurlui-même priait dans le silence, notam-ment la nuit (Lc 6, 12), ou en se retirantdans des lieux déserts (Lc 5, 16 ; Mc 1,

35). Le silence est typique de la médita-tion de la Parole de Dieu ; on le retrou-ve notamment dans l’attitude de Mariedevant le mystère de son Fils (Lc 2, 19,51). La personne la plus silencieuse del’Évangile est bien entendu saint Jo seph,dont le Nouveau Testament ne nous rap-porte pas une seule parole. Saint Basileconsidère le silence non seulement com-me une nécessité ascétique de la vie mo-nastique, mais encore comme une condi-tion de la rencontre avec Dieu (Lettre 2,2-6 : PG 32, 224-232). Le silence pré-

cède et prépare ce moment privilégié oùnous avons accès à Dieu, qui, alors, peutnous parler face à face comme nous leferions avec un ami (cf. Ex 33, 11 ; Nb12, 8 ; Dt 34, 10).Rappelons à ce sujet que nous accédonsà la connaissance de Dieu par voie decausalité, d’analogie, d’éminence, maisaussi de négation : une fois affirmés lesattributs divins, qui sont connus par la

raison naturelle (c’est la voie catapha-tique), il faut en nier le mode de réali-sation limité que nous connaissons ici-bas (c’est la voie apophatique). Le silenceest inscrit dans la voie apophatique d’ac-cès à Dieu, si chère aux Pères surtout grecs,qui leur fait réclamer le silence des rai-sonnements face au mystère de Dieu(Clément d’Alexandrie, Grégoire de Na-zianze, Grégoire de Nysse).Il n’en est pas moins vrai que le silen-ce est surtout l’attitude positive de ce-lui qui se prépare à l’accueil de Dieupar l’écoute. Oui, Dieu agit dans le si-lence. D’où cette observation si im-portante du grand saint Jean de la Croix :« Le Père n’a dit qu’une parole, à sa-voir son Fils et dans un silence éternelIl la dit toujours : l’âme aussi doit L’en-tendre en silence ». (1) Le livre de laSagesse (Sg 18, 14) avait déjà noté ce-la à propos de la manière dont Dieu in-tervint pour délivrer le peuple élu desa captivité d’Égypte : cette action in-oubliable eut lieu pendant la nuit :« Alors qu’un silence paisible enve-loppait toutes choses et que la nuit par-venait au milieu de sa course rapide,

>>> Suite page 14

« Le silence extérieur est un exercice ascétique(…). L’ascèse est un moyen indispensable

qui nous aide à enlever de notre vie tout ce qui (…) entrave notre vie spirituelle ou

intérieure, et donc ce qui constitue un obstacle à la prière. Oui, c’est bien dans la prière,

que Dieu nous communique sa Vie. »

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du haut des cieux, ta Parole toute- puissante s’élança du trône royal ».Plus tard, ce verset sera compris par laTradition liturgique chrétienne commeune préfiguration de l’Incarnation si-lencieuse du Verbe éternel dans la crèchede Bethléem. Quant à la bienheureuseÉlisabeth de la Trinité, elle insisterasur le silence comme condition de lacontemplation du Dieu Trinité.Ainsi, il faut faire silence : il s’agit biend’une activité, et non d’une oisiveté. Sinotre « téléphone portable intérieur »sonne toujours occupé, parce que noussommes « en conversation » avec d’autrescréatures, comment le Créateur peut-Ilavoir accès à nous, comment peut-Il« nous appeler » ? Nous devons doncpurifier notre intelligence de ses cu-riosités, la volonté de ses projets, pournous ouvrir totalement aux grâces delumière et de force que Dieu veut nousdonner à profusion : « Père, non pasma volonté, mais la tienne ». « L’in-différence » ignacienne est donc elleaussi une forme de silence.

III. LE SILENCE PRÉVUPAR LES NORMES LITURGIQUESLa prière est une conversation, un dia-logue avec le Dieu Trine : si, à certainsmoments, on s’adresse à Dieu, à d’autres,on fait silence pour L’écouter. On nes’étonnera donc pas que l’on doiveconsidérer le silence comme une com-posante importante de la liturgie.Certes, pour leur part, les rites orien-taux (qui ne relèvent pas de la compé-tence de ma Congrégation) ne prévoientpas de temps de silence pendant la Di-vine Liturgie. En effet, lorsque le prêtrene chante pas lui-même, c’est-à-direquand il prie en silence (ou « secrète-ment », qui vient du mot latin : secre-to), notamment pendant l’anaphore,c’est-à-dire la Prière eucharistique, saufpour les paroles de la consécration, quisont chantées à voix haute, on peut re-marquer que ce sont le diacre, les chœurs,ou encore les fidèles qui chantent sans

discontinuer. Néanmoins, ils connais-sent intensément la dimension apo-phatique de la prière, exprimée partoutes sortes d’adjectifs et d’adverbesqualifiant le Souverain Maître de l’Uni-vers et Sauveur de nos âmes. Par exemple,la « préface » du rite byzantin dit ce-ci : « Vous êtes un Dieu ineffable, in-compréhensible, invincible, insaisis-sable… ». De plus, pour l’essentiel, laDivine Liturgie est en quelque sorteune plongée dans le « Mystère », c’est-à-dire que, concrètement, elle est célé-brée derrière l’iconostase, et le prêtre,qui se tient à l’autel du Sacrifice, priesouvent en silence.En Occident, en revanche, dans tous sesrites (romain, romano-lyonnais, cartu-sien, dominicain, ambrosien, etc.), laprière silencieuse du prêtre n’a pas sanscesse été doublée par des chants duchœur ou des fidèles. La messe latinecomprend donc depuis toujours destemps de silence complet. Jusqu’à la ré-forme du bienheureux pape Paul VI, c’étaitle cas surtout pendant le Canon, ouPrière eucharistique, qui était pronon-cée par le célébrant en silence (secre-to), sauf dans les cas rares de la concé-lébration sacramentelle. Il est vrai qu’encertains lieux, on avait voulu comblerle vide de ce silence de quelques mi-nutes (cinq à huit tout au plus) qui, enréalité, n’était qu’apparent, par le sonde l’orgue, ou par des chants polypho-niques, mais il faut avouer que cette pra-tique ne correspondait pas à l’esprit deces rites.Le concile Vatican II a prévu le main-tien d’un temps de silence pendant leSacrifice eucharistique. Ainsi la consti-tution sur la Liturgie SacrosanctumConcilium, n. 30, a décrété que « pourpromouvoir la participation active, (…)on observera aussi en son temps un si-lence sacré. » La Présentation géné-rale du Missel romain (PGMR) du bien-heureux pape Paul VI, rééditée en l’an2002 par saint Jean-Paul II, a préciséles nombreux endroits de la messe où

il faut observer un tel silence. On trou-ve d’abord ce rappel général, qui ex-plicite SC n. 30, cité ci-dessus : « Unsilence sacré, qui fait partie de la cé-lébration, doit aussi être observé enson temps (Sacrosanctum Concilium,art. 30. ; Instr. Musicam sacram, n. 17[2]). Sa nature dépend du moment oùil trouve place dans chaque célébration.Car, dans la préparation pénitentielleet après l’invitation à prier, chacun serecueille ; après une lecture ou l’ho-mélie, on médite brièvement ce qu’ona entendu ; après la communion, le si-lence permet la louange et la prière in-térieure. Déjà avant la célébration elle-

même, il est bon de garder le silencedans l’église, à la sacristie et dans leslieux avoisinants, pour que tous se dis-posent à célébrer les saints mystères aveccœur et selon les rites. » (PGMR, n. 45[ancien 23]). Comme il est triste, etc’est presque un sacrilège, d’entendreparfois des prêtres et des évêques ba-varder sans discontinuer à la sacristie,et même pendant la procession d’en-trée, au lieu de se recueillir et de contem-pler en silence le mystère de la mort duChrist sur la Croix, qu’ils s’apprêtentà célébrer, et qui ne devrait leur inspi-rer que stupeur et tremblement !Le premier moment particulier, où lesilence est prescrit, est la préparationpénitentielle : « (…) Après une brèvepause en silence, toute la communau-té se confesse (…). » (PGMR, n. 51 [29]).Ensuite, pour la collecte : « (…) le prêtreinvite le peuple à prier ; et tous, avecle prêtre, font silence pendant un peude temps, pour prendre conscience qu´ilsse tiennent en présence de Dieu, qu’ilss’adressent à la Majesté divine et pourmentionner intérieurement leurs in-tentions de prière. (…) » (PGMR, n. 54[32] ; cf. n. 127 [88]). Puis, la « litur-gie de la Parole doit se célébrer de ma-nière à favoriser la méditation, c’est-à-dire en évitant toute forme de préci-pitation qui empêche le recueillement.Il est (…) bon qu’elle comprenne mêmequelques brefs moments de silence,adaptés à l’assemblée réunie : par cemoyen, avec l’aide de l’Esprit Saint, leVerbe de Dieu est accueilli dans le cœuret la réponse de chacun se prépare dansla prière. Ces moments de silence peu-

« On ne peut que rester impressionné par le silence de Jésus face (…) au gouverneur romain Pilate. »

>>> Suite page 15C’est dans le silence de la nuit que Dieu intervint pour délivrer le peuple élu de sa captivité d’Égypte

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Église | DOSSIER | 15L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

vent opportunément être observés (…)après la première et la seconde lectu-re, et enfin après l’homélie. » (PGMR,n. 56). La rubrique 128 [89] abondedans le sens de cette recommandationpour la première lecture, et le numéro130 [91] pour la deuxième lecture. Ceconseil vaut également pour l’homélie,qui doit être accueillie et assimilée dansun climat de prière (cf. PGMR, nn. 66[42] et 136 [97]). Il devient enfin unevéritable prescription adressée aux fi-dèles pour la Prière eucharistique, oùle « peuple s’associe au prêtre dans lafoi et en silence (…) » (PGMR, n. 147[108]).On retrouve la possibilité de demeureren silence après la sainte communion(cf. PGMR, n. 164 [121]), ou pour se

préparer à entendre la prière de la « post-communion » (PGMR, n. 165 [122]).À la messe célébrée en l’absence du peuple,un moment de silence est même conseilléau célébrant : « Lorsque la purifica-tion du calice est achevée, il convientque le prêtre observe un temps de si-lence (…). » (PGMR, n. 271 [230]). Le silence n’est donc nullement absentde la forme ordinaire du rite romain,du moins si on suit ses prescriptions,et que l’on s’inspire de ses recomman-dations. Malheureusement, trop sou-vent « on a oublié que le Concile pla-ce aussi dans l’actuosa participatio lesilence, qui favorise une participationvraiment profonde, personnelle, nouspermettant d’écouter intérieurement laparole du Seigneur. Or, de ce silence,il n’y a plus trace dans certains rites. » (3)

En outre, en dehors de l’homélie, il fautbannir tout autre discours ou présenta-tion de personnes, pendant la célébra-tion de la Sainte Messe. En effet, ondoit éviter de transformer l’église, quiest la maison de Dieu destinée à l’ado-ration, en une salle de spectacle où l’onvient applaudir des acteurs qui seraientde plus ou moins grande qualité en fonc-tion de « leur capacité plus ou moinsgrande de communiquer », selon uneexpression que l’on entend souvent dansles médias. Or, de nos jours, on a par-fois l’impression « que le culte catho-lique est passé de l’adoration de Dieuà l’exhibition du prêtre, des ministreset des fidèles. La piété a été abolie, ycompris le mot lui-même. Elle a doncété “liquidée” par les liturgistes qui l’ont

qualifiée de bigoterie, tandis qu’eux-mêmes faisaient subir au peuple leursexpérimentations liturgiques, tout enniant les diverses formes spontanéesde dévotion et de piété. On a réussi àimposer les applaudissements, y com-pris durant les funérailles, à la placedu deuil, qui normalement s’exprimepar les larmes : le Christ n’a-t-il paspleuré lorsque Lazare mourut ? Quandles applaudissements font irruptiondans la liturgie, c’est un signe très sûrqu’on a perdu l’essence de la litur-gie ». (4)

IV. L’IMPORTANCE DU SILENCEPOUR LA QUALITÉ DE LA LITURGIEEnfin, il faut s’efforcer de comprendreles motivations de cette discipline li-turgique concernant le silence, et de

s’en imprégner. Deux auteurs particu-lièrement qualifiés peuvent nous aiderdans ce domaine, et donc achever denous convaincre au sujet de la néces-sité du silence dans la liturgie. En pre-mier lieu, S. Exc. Mgr Guido Marini,maître des cérémonies pontificales, ex-prime le principe général en ces termes :« Une liturgie bien célébrée, dans sesdifférentes parties, prévoit une alter-nance heureuse de silence et de paro-le, où le silence anime la parole, per-met à la voix de résonner avec une ex-traordinaire profondeur, et garde chaqueexpression orale dans un juste climatde recueillement. (…) Le silence requisne doit (…) pas être considéré commeune pause entre un moment de la célé-bration et le suivant. Il doit plutôt êtreconsidéré comme un véritable momentdu rituel, complémentaire de la paro-le, de la prière vocale, du chant, desgestes… (…) ». (5)Il est vrai que le cardinal Joseph Rat-zinger notait déjà dans son fameux ou-vrage L’esprit de la liturgie : « le grandmystère qui dépasse toute parole nousappelle au silence. Et le silence, à l’évi-dence, appartient aussi à la liturgie. Ilfaut que ce silence soit plein, qu’il nesoit pas simplement l’absence de dis-cours et d’action. Ce que nous atten-dons de la liturgie, c’est qu’elle nousoffre ce silence substantiel, positif, oùnous pouvons nous retrouver nous-mêmes. Un silence qui n’est pas une pau-se où mille pensées et désirs nous as-saillent, mais un recueillement qui nousapporte la paix intérieure, qui nouslaisse respirer et découvrir l’essen-tiel ». (6) Il s’agit donc d’un silence oùnous regardons simplement Dieu, où nouslaissons Dieu nous regarder et nous en-velopper dans le mystère de sa Majes-té et de son Amour. Le même cardinal Ratzinger mention-nait aussi quelques temps de silenceparticuliers, comme par exemple celui-ci : « Il arrive aussi que le moment del’offertoire se déroule en silence. Cet-te pratique convient en effet à la pré-paration des dons et ne peut être queféconde, pour autant que la prépara-tion soit conçue non seulement commeune action extérieure, nécessaire audéroulement de la liturgie, mais com-me une démarche essentiellement inté-rieure. (…) il s’agit de nous unir au Sa-crifice que Jésus-Christ offre au Père(…). » (7) Il faut déplorer, ici, les pro-cessions d’offrandes, longues et bruyantes,comportant des danses interminables,dans certains pays d’Afrique. Elles don-nent l’impression que l’on assiste à desexhibitions folkloriques, qui dénatu-rent le Sacrifice sanglant du Christ surla Croix et nous éloignent du mystèreeucharistique ; or, celui-ci doit être cé-lébré dans le recueillement, car nous sommesplongés, nous aussi, dans sa mort etson offrande au Père. Ainsi, il convientd’insister sur le silence des laïcs pen-dant la Prière eucharistique, comme leprécise Mgr Guido Marini : « Ce silencen’est pas synonyme d’oisiveté ou demanque de participation. (Il) a pour

but de faire entrer tous les fidèles dans(…) l’acte d’amour par lequel Jésus s’offreau Père sur la Croix pour le salut dumonde. Ce silence, véritablement sa-cré, est le moment liturgique pendantlequel il faut dire oui, avec toute la for-ce de notre être, à l’agir du Christ, afinqu’il devienne aussi notre agir dans lequotidien de la vie. (…) ». (8)Enfin, selon le cardinal Ratzinger, deleur côté, les « prières silencieuses duprêtre le préparent précisément à sepénétrer personnellement de sa tâcheet à se donner au Seigneur dans la to-talité de son propre “moi”. (…) ellesexistent toujours et doivent continuerà exister ». (9) Enfin, pour tous, le « si-lence qui suit la réception de l’eucha-ristie est (…) le moment privilégié dudialogue intérieur avec le Seigneur quivient de se donner à nous, moment decommunion intime avec Lui, qui nousfait entrer dans cette réciprocité del’amour sans laquelle la réception ex-térieure du sacrement ne serait qu’ungeste purement rituel, et donc stéri-le. » (10). ◆

SON ÉM. LE CARDINAL ROBERT SARAH

Préfet de la Congrégation pour le culte divin

et la discipline des sacrements

1. Saint Jean de la Croix, Maximes, 147,éd. du P. Lucien-Marie de Saint-Joseph,ocd, Bruges, DDB, 1949, p. 1314.2. Rappelons au passage ce texte de Musi-cam sacram : « 17. Sacrum quoque silen-tium suo tempore servetur ; per illud enimfideles non modo non sunt habendi tamquamextranei vel muti spectatores actionis litur-gicæ, sed arctius in mysterium inseruntur,quod celebratur, per dispositiones internas,quae e verbo Dei audito, e cantibus et pre-cibus prolatis, atque ex spirituali coniunc-tione cum sacerdote, suas partes proferen-te, dimanant. » DC 1965, n. 1490, col. 500 :« On observera aussi en son temps un si-lence sacré. Par ce silence, en effet, les fi-dèles ne sont pas réduits à assister à l’ac-tion liturgique comme des spectateurs muetset étrangers, mais ils sont associés plus in-timement au mystère que l’on célèbre, grâ-ce à cette disposition intérieure qui décou-le de la parole de Dieu que l’on entend, deschants et des prières que l’on prononce, etde l’union spirituelle avec le célébrant pourles parties qu’il dit lui-même. »3. Cardinal Joseph Ratzinger, Entretien surla foi avec Vittorio Messori, Paris, p. 151,Fayard, 1985, 252 p., 19 €. 4. Nicolas Bux, La réforme de Benoît XVI,pp. 142-143, Éd. Tempora, 2009, 208 p., 17,90€.5. Mgr Guido Marini, La Liturgie. Gloirede Dieu, sanctification de l’homme, p. 71-72, Artège, 2013, 132 p., 14 €.6. Cardinal Joseph Ratzinger, L’esprit dela liturgie, p. 164, Ad Solem, 2001, 18 €,en réimpression. 7. Cardinal Joseph Ratzinger, L’esprit dela liturgie, Ad Solem, p. 165-166. 8. Mgr Guido Marini, La Liturgie. Gloirede Dieu, sanctification de l’homme, p. 71-72, Artège. 9. Cardinal Joseph Ratzinger, L’esprit dela liturgie, Ad Solem, p. 167. Voir aussip. 168. 10. Cardinal Joseph Ratzinger, L’esprit dela liturgie, Ad Solem, p. 165.

« Le silence qui suit la réception de l’eucharistieest (…) le moment privilégié du dialogue inté-rieur avec le Seigneur. » (Cardinal Ratzinger)

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our un chrétien, l’horizon de lapersécution, du martyre est aussi

temps de grâce : « Mes frères, quandvous butez sur toutes sortes d’épreuves,

pensez que c’est une grande joie » écrivaitdéjà saint Jacques. Remercions ceux qui nous aident

à le discerner, ainsi hier Cordula ou l’épreuve décisivede Hans Urs von Balthasar (1), et aujourd’hui Rien quel’amour, Repères pour le martyre qui vient de MartinSteffens (il n’est pas outrecuidant de mettre ce jeunephilosophe au côté d’un monument chrétien, mais onn’est pas obligé de le suivre en tout) [2]. L’avant-propos dit tout : « Ce livre est pour ceux etcelles qui ont peur mais qui craignent aussi de se per-dre dans cette peur… (les chrétiens) ont reçu pourmandat de vivre dès aujourd’hui non pas seulementdans l’amour (car ce ne sont pas des temps d’amourqui s’annoncent) mais de l’amour, et quelle que soit labrutalité avec laquelle la haine se déchaîne alentour ».La menace est celle des refus de l’ouverture vers leHaut, qui sacrifient l’homme à l’idée qu’on se fait delui (fut-elle minable, ainsi l’Occident actuel) ou auxdieux – à l’inverse de la Croix où c’est Dieu qui sedonne Lui-même en sacrifice. La mission du chrétienest d’être son coopérateur, « et plus ce monde est laidet mal-aimable », plus il a besoin de notre amour, sanspeur car « il ne peut rien m’arriver que l’Amour ». Que répondre ? La guerre, face à Daech, « face obscure d’un libéralisme devenu fou », suscité par« l’abaissement sauvage et généralisé » qui dévastenos cités depuis des décennies ? Répondre à la vio-lence par la force est possible, mais « quand le mondevacille, il est illusoire de croire qu’on peut y trouver sa juste place ». La soumission ? Bonne pour des Occidentaux exténués, mais le chrétien ne pourrait y consentir, lui que Dieu a libéré.Le martyre, donc ? Ce monde est impossible mais lemartyre témoigne qu’il y a une issue, que le meilleur,l’amour de Dieu, est désormais sûr. Il est le dévoile-ment de la réalité du monde marqué par le péché, il estla face interne de l’Histoire, il est le choix qui noussomme, il est l’œcuménisme le plus convaincant. Il ne s’agit pas d’y être prêts, « car nous ne sommespas faits pour la mort, mais pour la vie », mais de se tenir prêts, comme Jésus à Gethsémani, pour la vie la plus grande, pour le Royaume. Martin Steffens dramatise-t-il indûment ? Je ne le crois pas. Mais le transhumanisme, suicide programmé del’homme, n’est-il pas un danger plus grand ? Qu’im-porte, nous savons avec sainte Thérèse de Lisieux que si la persécution peut changer de forme, les apô-tres du Christ, eux, ne changent pas de sentiments. ◆1. Beauchesne éditeur, 126 p., 16,50 €.2. Salvator, 90 p., 10 €.

L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 201616 | CULTURE | Votre quinzaine

L’épreuve décisive

CARTE BLANCHE

À DIDIER RANCE

Le CD

MéditationAngélique

L’ union fait la forcedans une indus-trie du disque en

bouleversement perma-nent. Les éditions BayardMusique, annexe musi-cale de Bayard Presse,ont ainsi fusionné en2013 avec ADF (réper-toire Jo Akepsimas-AndréGouzes) et le Studio SM,connu pour son riche catalogue de chant grégo-rien. À l’écoute de la de-mande d’auditeurs surtoutcatholiques, le nouveaugroupe cherche des formules plus enracinéeset plus grand public.Ainsi est née la collection« Méditation » quicompte déjà 27 titres.Malgré un titre et une accroche (« calme et séré-nité ») qui sonnent un peuNew Age, l’amateur d’authentique spiritualitéchrétienne peut y butineravec profit. Après uneMéditation Noël tout à fait honorable, voici le recueil Méditation Angélique. Le programmeen est bâti autour de lavoix, dans ce qu’elle peuttraduire de plus haut, la prière. Nous sommesici invités à partager lesdifférentes traditionschrétiennes qui s’inspi-rent des chœurs angé-liques, du chant grégorienaux monodies armé-niennes, orthodoxes ou chaldéennes, de Hilde-garde de Bingen à Benjamin Britten en pas-sant par Clérambault oule compositeur roumainGheorghe Cucu, élève de Vincent d’Indy à la Schola Cantorum.BENOÎT SÉNÉCHAL

Bayard Musique, 11 € env.

La spiritualitéÀ l’école duSacré-Cœur

S ait-on réellement àquel point le Christnous aime et a soif

de notre amour ? Pasvraiment et il Lui a fallurevenir plusieurs foisnous le rappeler. À Paray-le-Monial à sainteMarguerite-Marie puis en Pologne à sainte Faus-tine, Il a dévoilé la pro-fondeur de sa miséri-corde. En commentantles trois messages reçuspar la visitandine de Pa-ray, le Père Guédas, rec-teur des sanctuaires deParay-le-Monial, rappelleavec force et talent l’im-portance de l’appel duChrist qui souhaite sefaire proche des pé-cheurs, à conditionqu’eux-mêmes fassentappel à sa miséricorde.Certaines conditions sefont jour également.Ainsi le fait que le Christapparaissait à la reli-gieuse quand elle étaitdevant le Saint Sacre-ment, montrant par làl’importance de ce sacre-ment de l’amour. L’au-teur montre bien que leChrist, en demandant saparticipation à sainteMarguerite-Marie et àtravers elle à chacun de nous, nous appelle àdevenir nous aussi des« disciples bien-aimés » à Le consoler et réparerles offenses qui Lui sontfaites et à rayonner de sa miséricorde. Tout un programme ! Un petit livre très clair,bienvenu en cette Annéede la Miséricorde. BLANDINE FABRE

Benoît Guédas, Le Réveilde la miséricorde,Éd. de l’Emmanuel, 158 p., 12 €.

L’enquêteEnlever Pie XII !

I l y a longtemps que leshistoriens sérieux ontfait la lumière sur l’at-

titude de Pie XII pendantla Seconde Guerre mon-diale et sur l’absence to-tale de collusion du Sou-verain Pontife avec le na-zisme. Maria Dal Bello,professeur de littérature etjournaliste, s’est attachédans ce livre à mettre lalumière sur le projet d’enlèvement du papeconcocté par Hitler, pourle retenir en otage etavoir, si besoin, un moyend’échange dans de possi-bles négociations avec lesAlliés. Le fait n’était pasinconnu, mais l’auteur lereplace ici dans l’actiongénérale d’abord dunonce Pacelli en Alle-magne, pendant la Pre-mière Guerre mondiale,puis comme secrétaired’État de Pie XI et enfincomme pape, face au na-zisme. On regrette parmoments l’absence de ré-férences historiques (ce-pendant, certaines se trou-vent en note à la fin du li-vre) et le renvoi clair auxArchives secrètes du Vati-can, censées pourtant êtrela raison du livre. L’auteura préféré visiblements’adresser au grand pu-blic, en offrant un livre li-sible comme un roman.On y voit ainsi Pie XII si-gner un acte d’abdicationen cas d’enlèvement. Loind’être inventé, ce faitmontre que le pape étaitbien décidé à répondre àHitler avec ses propresarmes. STÉPHEN VALLET

Mario Dal Bello, La conju-ration de Hitler, Balland,240 p., 18 €.

P

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Église | CULTURE | 17L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

Propos recueillis par Yves Chiron

La littérature, au sens noble, sur Lourdes est considérable. Votre livre est original parce qu’il se veut une « petite encyclopé-die sur Lourdes ». Pouvez-vous présenter votre projet ?

>>Mgr Jacques Perrier : Comme dit lesous-titre du livre, il s’agit de regarder le« phénomène » Lourdessur plus d’un siècle etdemi et sous trois anglesdifférents : principalementdu côté de l’Église ca-tholique, mais aussi dansl’environnement culturelet le contexte social, ausens large. Vouloir touttraiter, en même temps,par grandes périodes,aurait abouti à des chapitresinterminables. Or, quitteà écrire, autant être lu.De plus, chaque lecteurne s’intéresse pas auxmêmes sujets. Cependant,à la différence des ency-clopédies habituelles,c’est le même auteur quia rédigé les cinquante-trois notices : les recou-pements sont donc facileset sont, d’ailleurs, indiqués.

Ce qui est frappant, dans votre livre, c’est la continuité de Lourdes :un lieu qui a connu bien des déve-loppements mais pour rester fidèle

à une mission que vous définissezpar un triptyque : « faire prier,transmettre et accueillir ».

>>Dès la deuxième apparition, le 14 février1858, Bernadette est accompagnée. Bientôt, ceseront des centaines, des milliers de personnesqui attendent Bernadette, chaque matin, au petitjour. Ils ne sont pas là pour essayer de « voir »,mais pour prier, en regardant Bernadette : sansaucune consigne, elle les entraîne à prier. Lourdes

est une « école de prière pour les nuls », selonla formule aujourd’hui bien connue. C’estpourquoi Lourdes s’est toujours voulue accueillanteau tout-venant, espérant qu’à la Grotte, toutvisiteur devient un peu pèlerin.

Mgr Jacques Perrier, évêque de Tarbes et Lourdes pendant près de quinze ans,publie son huitième livre sur Lourdes. Cette petite encyclopédie englobe sous ses aspects ecclésial, culturel, sociétal l’histoire de ce lieu saint de 1858 à nos jours.

Revisiter Lourdes avec Mgr Perrier Horizontale-

ment1. Prennentavec précau-tion la tempé-rature de l’eau(trois mots). 2.Les souris ensouffrent, avecraison… 3. Fa-tigue – En ap-née – Le nou-veau est fêté.4.Tombent duciel. 5. Dansl’ethnie – Sepasse pourtransmettre –Doublé pourdiminué. 6.Surla Tille – Hé-breux ou gau-loise ? – Quartier de Talence. 7. Leur poids se fait sentir – Possessif– Lieu de grève. 8. Dans un sens, c’est un type d’aujourd’hui –Proches des coutumes. 9. Ne passe pas. 10. Donne de l’importance.11. Commune en Mayenne – Biner n’importe comment. 12. Nerécolte pas que des haricots.

VerticalementA. N’appartiennent pas toutes au gratin… B. Région des Alpessituée dans les départements de l’Isère et des Hautes-Alpes –Nom d’un réflexe de défense chez le nouveau-né. C. Mal lier –Corrigé. D. En guimauve – Mis en tas. E. Spécialités administratives.F. Elle en a eu des malheurs… – Chasseur russe. G. En adposition– Grasses dans le canard – Matière à pot, symboliquement. H.Interpelle – Parmi (deux mots). I. Bisque parfois – Pas du Brésil.J. Dans le vestibule – Va toujours bien – Sacré. K. Une de nosvoisins – Commune dans les Côtes-d’Armor. L. Ont un beauport – Auxiliaire. Daniel Hamiche(La solution au prochain numéro)

Solution du n° 1608 daté du 13 février 2016Horizontalement : 1. Planisphères. 2. Huile de coude. 3. Et –Ni. 4. Lô – Cric – Nus. 5. Agoraphobe. 6. Ni – UM – Iode. 7. TNT– Set. 8. Horoscope – Ré. 9. OCSR – Haber. 10. Oppresseur. 11.Pi – En – Er – III. 12. Écartèlement.Verticalement : A. Philanthrope. B. Lu – Ogino – Pic. C. Aïe –Trop. D. NL – Cru – Ocrer. E. IE - Ramassent. F. SDEIP (pieds) –CRS. G. Petchi – Sel. H. HC – Oosphère. I. Éon (Noé) – BD – Eau.J. Ruinées – Brie. K. ED – Ère – IN. L. Sens interdit.

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K

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Mots croisés

Mgr Jacques Perrier qui fut évêquede Tarbes et Lourdes de 1997 à 2012consacre à Lourdes un ouvrage originalet riche. Plutôt que de raconter unehistoire linéaire de Lourdes des originesà nos jours, Mgr Perrier publie unesorte d’encyclopédie qui permetd’aborder tous les aspects de l’histoiredu sanctuaire. En 53 entrées ouchapitres classés par ordre alphabétique :d’« Apologétique et polémiques » jusqu’à «Tra-dition », en passant par Bernadette, Cinéma,Liturgie, Pèlerinages, Processions, Statistiqueset bien d’autres. Un index thématique trèsdétaillé permet une consultation encore pluspointue.

Qu’il s’agisse des évêques successifsde Lourdes, de la visite des papes (oufuturs papes), de la franc-maçonnerieengagée à différen tes époques contreLourdes ou des articles consacrés auxmalades, aux hospitalités, aux guérisons,aux miracles, tout est très bien raconté.L’auteur a su tirer parti des nombreusesrevues qu’a connues Lourdes, depuis

le Journal de la Grotte, et de l’imposantebibliographie déjà existante (il en donne uneidée à l’article « Livres », p. 209-215). ◆

YVES CHIRONMgr Jacques Perrier, Lourdes dans l’Histoire.Église, Culture et Société de 1858 à nos jours,L’Harmattan, 376 p., 38 €.

Pour aller plus loin

Mgr Perrier (vignette) s’appuie sur ses souvenirs pour relater l’histoire de la cité qui reçut la visite de la Vierge.

Dans l’accueil, les maladesont eu très vite la priorité, grâceau service des bénévoles. Celademeure. Mais dans les charismesde Lourdes, il y a aussi l’accueildes jeunes, des adolescents :Bernadette avait leur âge en1858.

Quant au message à trans-mettre, le plus original est laparole de la Vierge : « Je suisl’Immaculée Conception. » In-demne de toute trace de péché,Marie est totalement libre pourdire à Dieu le Fiatde l’Incarnation.Elle nous dit quel est le cheminde la vraie liberté.

Quel souvenir le plusmarquant avez-vousgardé de votre ministère épiscopal à Lourdes de 1997 à 2012 ?

>>Ce souvenir est double :le pèlerinage des papes Jean-Paul II en 2004 et Benoît XVIen 2008. De toute façon, accueillir

le pape est, pour un catholique,un moment particulièrementintense. À cela s’ajoute la res-ponsabilité d’accueillir les troiscent mille personnes qui, àchaque fois, sont venues prieravec le pape. Jean-Paul II, dansun état d’extrême fatigue, avoulu se faire pèlerin à Lourdesen 2004 pour célébrer les centcinquante ans du dogme del’Immaculée Conception. Soncourage dans le handicap quile frappait aida ceux qui se trou-vaient dans la même situationà reprendre conscience de leurdignité. Quant au pape BenoîtXVI,quelques mois après son élection,il promit de venir pour les centcinquante ans des Apparitions.Sur place, il eut des parolesd’infinie délicatesse sur le « sou-rire » de la Vierge. Avec lui,nous avons vécu un très beauet long moment d’adoration eu-charistique : lui-même en futheureux. Comment l’évêque dulieu ne l’aurait-il pas été ?

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L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

ANNE BERNET

À la fin du XIXe siècle, les ethnologuesqui se penchaient sur les spécificités

de « l’âme bretonne » et sur les pardons,manifestations religieuses uniques enEurope, tenaient le phénomène pourcondamné à brève échéance tant il leursemblait aller à rebours de la modernitétriomphante. Pourtant, en ce début duXXIe siècle, les faits leur donnent tort.L’étude que leur consacre le journalisteBernard Rio, Sur les chemins de pardonset pèlerinages en Bretagne (1) le prouve.Il faut pourtant le dire : les pardonsreviennent de loin et même de très loin.Il y a des lustres, tout s’est ligué pourles faire disparaître. L’exode rural, letourisme, les ricanements des observateurs,

deux guerres mondiales, l’intrusion ducinéma puis de la télévision dans la viequotidienne, l’abandon de la pratiquereligieuse, et surtout la volonté assuméed’un certain clergé d’en finir avec desusages qu’il méprisait à l’instar desurvivances païennes et superstitieuses,ont failli avoir raison de coutumes parfoisvieilles de trois mille ans et plus. Le re-nouveau est récent et participe de ceréveil de la catholicité française auquelnous assistons partout sous diversesformes.

Une manifestation religieuseLe pardon, comme son nom l’indique,est l’occasion annuelle pour une paroissed’expier ses fautes en rendant publiquementet avec une ferveur débordante un culteà son saint protecteur, puissant intercesseurcéleste auquel l’on peut tout, ou presque,demander. Telle quelle, la manifestation,

essentiellement religieuse,où se succèdent confes-sions, messe, commu-nions, procession aulong d’une immémorialevoie sacrée et bénédiction,souvent suivies de l’em-brasement d’un bûcher,le tantad, « le feu père »dont les brandons sontréputés préserver humains,animaux et bâtimentsdes périls, serait peusujette à caution si ellene s’accompagnait dediverses « dérives » qui,dès le VIIIe siècle, in -spirèrent de saintesfrayeurs à des observateurs

et clercs étrangers auxmentalités celtiques.C’est que le pardon,quoique incontestable-ment catholique, est lasurvivance, christianiséepar des évangélisateursintelligents venus d’Irlande ou de Grande-Bretagne, d’anciens usages. Si l’évan-gélisation du monde celte ne fit pas demartyrs, ce fut, certes, parce que la foidu Christ répondait à une antique attentede ces peuples mais aussi parce que lesmissionnaires se gardèrent de heurterde front les croyances ancestrales etchoisirent de les baptiser. Un substratpaïen subsista, fait de bains lustrauxdans des fontaines sacrées, de ritessolaires venus du fond des âges, d’at-touchements parfois scabreux de mégalithes,démonstration que le saint, la sainte,Notre Dame, désormais invoqués ences lieux, avaient simplement pris la

place, parfois la vêture et les usages del’ancienne divinité celtique.Faut-il se scandaliser que sainte Annesoit l’héritière d’Ana ou Dana, damedu séjour des morts, aïeule des dieuxet des hommes ? Que Notre Dame, etc’est vrai ailleurs en France, ait supplantéles Matrae gauloises, les « tria fata »,triple figure de divinité féminine vierge,mère et reine ? Que saint Cornély, cheraux Morbihannais, protecteur des bêtesà cornes, soit l’avatar du dieu cerfKernunos, tout comme le mystérieuxsaint Télo ? Que sainte Yuna et ses deuxfrères, les jumeaux pareillement baptisésEnvel, figurent une autre triade celtique :

la nuit, l’aurore et le jour ? Que l’archangeMichel ou l’ermite Ronan aient détrônéun culte solaire préexistant ?Beaucoup l’ont fait et ils ont eu tort.Bernard Rio ne se cache pas d’êtremoins attaché à l’aspect ecclésial, trop« romanisé » à son goût, des pardonsqu’à ce qu’ils continuent à dire d’untrès vieux temps et de nos plus lointainsancêtres. Quiconque a du sang bretonsaisira ce qu’il entend par là. En effet,il sourd une immense, une ataviqueémotion à l’idée de refaire ces gestesqui remontent aux peuples mégalithiques,de remettre ses pas dans ceux d’ancêtresdont les noms et la trace se sont perdus

18 | CULTURE | Patrimoine

Chemins de pardon, chemins de paradisL’Église, pendant le Carême, invite à avoir un regard lucide sur les fautes et à en demander pardon. Exemplede cette piété pratiquée en paroisse, les pardons bretons. De tradition millénaire, les pardons des plus hum-bles aux plus renommés ont su résister aux assauts du scepticisme et du modernisme. Ils naissent ou renais-sent grâce à certains évêques et un jeune clergé dont la foi enthousiaste rejoint celles de fidèles toujoursplus nombreux à renouer avec ces pèlerinages, qui allient réparation et dévotion.

« Le pardon est l’occasion pour une paroisse d’expier ses fautes en

rendant publiquement un culte à sonsaint protecteur, puissant intercesseur

céleste auquel l’on peut tout, ou presque, demander. »

La grande troménie de Locronan est un des plus importants pardons de Bretagne. Elle se déroule tous les six ans sur un parcours de 12 km.

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Patrimoine | CULTURE | 19L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

mais qui revivent quand s’embrasentles bûchers du solstice, que la grandetroménie de Locronan ressuscite lesarcanes d’un immémorial calendrier ouque le pèlerin se livre autour du sanctuaireà la triple circumambulation avant d’allerboire à la fontaine. Nul relent de paganismelà-dedans, mais la démonstration queles attentes de l’humanité se sont réaliséesdans le christianisme, que la foi deshommes reste la même, faite d’uneconfiance sans borne dans les pouvoirsdivins et la compassion des saints enversceux qui partagèrent leur pérégrinationterrestre. Cette fusion s’était faite na-turellement. En témoignait le martyrologeantérieur à Vatican II qui avait su insérerles fêtes du sanctoral précisément où ilconvenait. Bernard Rio, grand connaisseurde la question, le rappelle : tout étaitfait pour permettre cette fusion harmonieuse.Ce n’est pas pour rien que saint Hubertse fête le 3 novembre, l’histoire duchasseur converti par le cerf crucifèrerenvoyant à l’antique vénération indo-européenne envers les cervidés, animauxpsychopompes, à l’instar des chiens quiles poursuivent ; or, le 3 novembre,dans le comput celtique, clôturait lestrois jours de Samain, marquant le chan-gement d’année et correspondant à l’ou-verture des portes entre le monde desvivants et celui des morts. Il en allaitde même de dizaines de fêtes en Bretagne,attachées à de moindres personnages,mais dont les réjouissances correspondaientau passage des saisons, aux cycles dela vie, dates déplacées, voire suppriméesdans le nouvel ordo, de sorte que toutle sens de la célébration s’en trouva ets’en trouve encore altéré. Maintes

chapelles ou églises, Bernard Rio le faitremarquer, avaient été construites detelle manière que l’autel ou la statue dusaint patron reçoive la lumière du soleilau jour de sa fête et uniquement alors.Cela aussi a disparu. À ces remaniementsse sont ajoutées les décisions de nombreuxrecteurs de déplacer le pardon à unedate plus commode : dimanche précédantou suivant, plein été. Encore ceux-làfaisaient-ils au moins l’effort de maintenir,fût-ce abrégée et simplifiée au possible,la tradition. D’autres, entre 1970 et ledébut des années 2000, avaient cessétout bonnement de célébrer le pardon,ou n’y faisaient qu’une apparition sym-bolique. Rien d’étonnant, alors, si, danscertaines paroisses, en général cellesque des villes tentaculaires ont absorbéesdans leurs banlieues, ce qui est le casde Saint-Armel à Rennes, ou cellesenvahies par les estivants plus désireuxde voir du folklore que de prier, lepardon ait périclité pour n’être plusl’affaire que d’un prêtre cacochyme etd’une poignée de vieillards, quand ilne se muait pas en foire et en attractiontouristique, sauvegardé vaille que vaillepar la commune plutôt que par le curé…

Quelques débordementsL’Église, en Bretagne, a espéré que lespardons mourraient de leur belle mort,faute de fidèles. N’étaient maintenus,sérieusement encadrés, que ceux desgrands sanctuaires, tels Sainte-Anned’Auray, Saint-Yves de Tréguier, protégépar l’attachement des professionsjudiciaires, Notre-Dame du Folgoët,Notre-Dame de Tout Remède à Rumengol,de Toute Aide à Querrien, d’Espérance

à Saint-Brieuc, encorecelui-ci, trop lié aux des-tinées de la patrie, n’allait-il pas sans susciter descritiques…On ne peut nier qu’il yait eu, dans le passé, parfoisde fâcheux débordements,objets répétés des foudresépiscopales. Après les cé-lébrations religieuses, –mais saint Cyprien dénonçaitdéjà, à Carthage, au IIIe

siècle, ces comporte-ments –, les fidèles se li-vraient à des plaisirs pro-fanes : on ripaillait aupardon, on s’y enivrait etla fête souvent tournait àl’empoignade générale,paroisse contre paroisse,au point qu’il arrivait derelever des morts à la finde la nuit, le crâne fenduà coups de penn batz…Les bosquets ombreux del’été offraient l’occasionde rapprochements peuédifiants. L’adage « ons’en va deux au pardon,l’on s’en revient trois… »,rappelait qu’en dehors duchaste Léon, « le pays desprêtres », la vertu de lajeunesse bretonne n’était

pas toujours irréprochable. Au vrai, ceschoses-là n’arrivaient pas seulement enBretagne. L’épiscopat s’en préoccupaitmais moins que de pratiques plus occulteset qui prouvaient qu’en certains endroits,l’antique divinité demeurait trop pré-sente.À Rumengol, où l’on venait demanderla guérison à Notre Dame, certainspèlerins accomplissent la triple circu-mambulation à reculons, réclamant dela Vierge la santé ou la mort rapide pourle malade, prière plus compréhensiblequ’il y semble en un temps où unelongue maladie, sans secours sociaux,ruinait toute une famille. C’était pire àTréguier où, en parallèle du culte officielrendu à Yves Hélory de Kermartin,nombre de plaideurs allaient benoîtementvouer la partie adverse à Saint Yves dela Vérité, ou à sa parèdre, Notre Damede la Vérité. Il s’agissait ni plus ni moinsque de condamner à la mort dans l’annéecelle des deux parties qui n’avait pasle bon droit de son côté… Il fallait, audemeurant, être bien sûr du sien carl’invocation possédait un effet boomerangqui renvoyait la malédiction à celui quil’avait prononcée si sa cause se révélaitinjuste. La démolition de la chapelle,au XIXe siècle, n’empêcha pas ce culteétrange de se poursuivre, et peut-êtreaujourd’hui encore…Notre Dame du Roncier à Josselin aurait,dit la légende, jeté une malédiction surcertaines familles : ayant pris les traitsd’une vieille mendiante, la Vierge auraitdemandé l’aumône à des femmes quilavaient au lavoir de Bignan. Celles-cila chassèrent avec des insultes et desmoqueries. Reprenant alors son aspect

accoutumé, Notre Dame les châtia deleur manque de charité, les condamnant,elles et les filles de leurs filles à perpétuité,à se mettre à aboyer comme chiennesfolles dès qu’elles poseraient le piedsur les terres du Roncier. Si l’Égliseréfute telle vengeance de la Mère deMiséricorde, il n’en reste pas moinsque, voilà cinquante ans encore, lesfemmes des lignées supposées maudites,surnommées « Aboyeuses », entraienten transe à la date du pardon et sitôt surle domaine du sanctuaire, ne se calmantqu’après avoir été conduites de force àembrasser la statue miraculeuse. Ons’interroge sur les causes médicales oupsychosomatiques d’un phénomèned’abondance étudié depuis sa premièremanifestation publique en 1728 et qui,selon Rio, renverrait au mythe païende la Morrigan et au rôle mortuaire deslaveuses.Le pardon de Saint Servais, protecteurdes récoltes, qui rassemblait les paroissesdu Vannetais, de Cornouaille et du Léon,dégénérait en mêlée générale d’une rareviolence pour s’emparer de la statue dusaint, le camp vainqueur ayant l’assurancede moissons abondantes.

Des pardons toujours nouveauxOn ne s’entretue plus à Saint-Servais,pas plus que l’on n’aboie à Josselin.Pourtant, les pardons existent toujourset même, il s’en est créé de nouveaux,celui de Notre-Dame de Porcaro, patronnedes motards, fondé en 1979, étant leplus connu. En parallèle, sous l’impulsionde Mgr Centène à Vannes, qui ne manquejamais de s’associer aux étapes du TroBreizh, le tour des évêchés bretonnants,rené de ses cendres après un long oubli,ou de Mgr Moutel à Saint-Brieuc,désireux de rendre son lustre au pardonde Notre-Dame d’Espérance, le dernierdimanche de mai, les anciennes fêtesrenaissent. Les vieux recteurs quirefusaient de bénir le tantad ou de pro-cessionner sous la pluie laissent la placeà de jeunes prêtres décomplexés quiont souvent repris la soutane et quesuivent des foules d’année en annéeplus impressionnantes, bravant lesregards des curieux et les commentairesd’ignorants qui, n’ayant jamais vul’Église déferler dans les rues bannièresen tête croient au défilé de groupes fol-kloriques… Le pardon, pas plus que la foi catholique,n’est sur le point de disparaître. Longtempsencore, les chemins et les rues bretonsentendront résonner les paroles ducantique du Tro Breizh : « Da feiz hontadou coz/Ni paotred Breizh Izell/Nizalc’ho mat atav/Feiz caro hon tadou/Morseni ho nac’ho !/Kentoc’h ni ar varvo ! »« À la foi de nos pères, nous, hommesde Bretagne, nous tiendrons bon toujours !Foi armée de nos pères, jamais nous nete renierons ! Plutôt mourir ! » ◆

ANNE BERNET

1. Bernard Rio, Sur les chemins de pardonset pèlerinages en Bretagne, Le Passeuréditeur, 368 p., 21 €.

Saint Cornély, sur la façade de l’église qui lui est dédiée à Carnac. Il est réputé protéger les bêtes à cornes.

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L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 201620 | CULTURE | Jeunesse

L’HISTOIRE EN BDPas facile de traiter de la complexitédu second conflit mondial en bandesdessinées ! Pourtant le défi a été relevépar Reynald Secher, habitué à transcrirel’Histoire de cette manière. Continuantpatiemment son œuvre éducative fortutile, il donne au lecteur l’occasionde plonger dans un passé assez prochedont notre société actuelle découledirectement. Dans ces deux tomes,qui couvrent chacun trois années, 1er septembre 1939-18

avril 1942 et 18 avril 1942-8 mai1945, sont racontées par le menunon seulement les étapes importantesde cette période, mais aussi despetites anecdotes comme si nousy étions. Tous les fronts sont évoquésavec cartes à l’appui. Et pour s’y re-trouver plus sûrement encore, untableau chronologique en débutd’album redonne les repères né-cessaires. Que dire des magnifiques dessins,

sinon que leur excellence, autant pour les scènes quepour les personnages, avec mention spéciale pour lesportraits, sert parfaitement les desseins des auteurs derendre accessible et compréhensible cette période ? Àmettre en toutes les mains. NATACHA

Reynald Secher, Guy Lehideux, Jean-Claude Cassini,W.H. Williamson, La Seconde Guerre mondiale, tomes I et II, Reynald Secher Éditions, 48 p., 12 € chacun.

RELIGION

Frère Dominique,« Va et prêche ! », Bernard Cattanéo, Téqui,coll. « Les Sentinelles »,118 p., 10,50 €.

Consacré auSeigneur parsa mère dèsson plus jeuneâge, le petitD o m i n i q u en’aura eu decesse de ré-pondre à l’ap-

pel de la grâce en se dévouantcorps et âme au service de sesfrères. Jeune étudiant, n’a-t-ilpas vendu tous ses chers livrespour soulager la misère enfondant un hospice ? Et n’a-t-il pas fondé un ordre mendiantet prêcheur, répondant par sapauvreté et sa science de Dieuà la soif spirituelle de sonépoque ? Ce livre à lire dès 8ou 9 ans retrace la vie du fondateurdes dominicains de manièretrès vivante, dans un style alerteet direct, en une longue lettreà ses neveux Timothée et Alice.Une bonne manière de célébrerles 800 ans de la fondation del’ordre des Frères prêcheurs.MARIE LACROIX

Le Seigneur est mon BergerJuliet David, ill. Julie Clay,Éditions des Béatitudes,32 p., 8 €.

Cette versionun peu simpli-fiée du psaume22 est illustréede charmantesaquarelles touten douceur et

pourra accompagner nos tout-petits dans la découverte decette forme de prière. À lirepour eux et avec eux dès 2 ou3 ans et le plus souvent possible.Attention, le livre est relié maisles pages ne sont pas cartonnées.Elles ne résisteront pas à despetites mains ! M.L

HISTOIRE

Racontez-moi la France…Des Gaulois auxpremiers ValoisMarie-Magdeleine Del Peru-gia, Éd. Des Petits Chouans,coll. « Racontez-moi laFrance… », 94 p., 12 €.

Paul est toujours heureux depasser ses vacances chez ses

grands-parents. C’est l’occasionpour lui d’apprendre tant dechoses grâce à eux. Cette fois-ci, Grand-mère emmène sonpetit-fils en promenade, dansun sur vol de l ’Histoire deFrance, sur vol qui débute auNéolithi que et s’arrêtera auxValois. Saluons cet ouvrage, qui res-

pec te lachronolo-gie, vrai-ment facileà lire seulpar des en-fants de 9ou 10 ans,et que desp a r e n t sp e u v e n tégalement

lire aux plus jeunes. Les chapitressont courts, uniquement desdialogues entre les grands-parents et Paul, illustrés dejolies reproductions en couleurs,sans oublier des dates impor-tantes et des arbres généalo-giques pour bien s’y retrouver.Un livre très utile à l’enseigne-ment de l’Histoire de Francetant négligée de nos jours,dont on espère prochainementla suite. M.L

Joëlle d’Abbadie

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| 21L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016 L’esprit de la liturgie |VIE CHRÉTIENNE | 21

Beaucoup de Français se ré-jouissent du départ de ChristianeTaubira, estimant que le suc-cesseur ne saurait être pire, etde ce point de vue, on ne peutpas vraiment leur donner tort.Le Premier ministre tenait cer-tainement à ce départ pourconforter l’image « sécuritaire »qu’il veut donner de lui-même.En revanche, le souvenir de ladéconvenue de Lionel Jospinà la présidentielle de 2002 doiten faire frémir quelques-uns.En effet, l’ancienne garde desSceaux ne manque pas de cha-risme et elle peut fédérer lagauche du PS ainsi que les éco-logistes et quelques autres. Àmoins qu’elle n’accepte uncadeau de rupture de grandevaleur, pour prix de sa neutralité !Pour ma part, je pense que legouvernementva encore perdredes soutiens ausein de la ma-jorité parlemen-taire à un mo-ment où deuxgrands dangersnous menacent. Le premier dan-ger, c’est celuide notre santééconomique,qui continue àse dégrader dansun contextemondial fragilisé et fébrile dansle domaine des monnaies. Ilest vrai que nous ne sommesplus en 1929 mais cela n’a riende rassurant, car la crise mondialequi se profile promet d’êtrebien pire en raison de la glo-balisation. Le deuxième danger, c’est celuidu jihâd, car les difficultésmilitaires de Daech ne peuventqu’inciter ses dirigeants à dé-clencher des attentats terroristesd’envergure, sans communemesure avec ceux que nousavons connus jusqu’à présent.Nous nous rapprochons doncà grande vitesse de ce queMarthe Robin m’avait dit en1973 : « Vous n’imaginez pasjusqu’où la France dégringole -ra ! ». On y arrive et si, à monavis, il faut en priorité s’y préparerspirituellement, il n’est pasinutile de s’y préparer dansl’ordre prudentiel. Mes souvenirs de la périodede la Deuxième Guerre mondiale

me disent que la solidarité etla complémentarité des talentspermettent de faire face à beau-coup de difficultés. Le profondégoïsme, engendré par la pros-périté économique et la foliede consommation qui en arésulté, commence à se lézarderlentement mais sûrement. Enrevanche, ce qui reste très préoc-cupant, c’est la fragilité des mé-nages et les dégâts qu’elle en-gendre sur la jeunesse.

Les véritables dangersAutre préoccupation, la rentabilitédu trafic de la drogue a fait semultiplier les bandes de trafi -quants, équipés d’armes deguerre et habitués à s’en servir.Toutes ces considérations m’ontconduit à estimer qu’en définitive

le départ deChristiane Tau-bira ne relevaitque des ma-nœuvres poli-ticiennes quiexcitent le mon -de des médiasmais n’ont pasd’importanceréelle sur l’étatdu pays. L’avenir de laFrance, en der-nier ressort, nepeut se jouer

que dans l’ordre surnaturel.Que le Seigneur veuille la rétablirdans sa mission de Fille aînéede l’Église ne fait aucun doute.Qu’Il provoque des conversionsincroyables de personnes situéesaux antipodes de la foi, je viensencore d’en avoir un témoignagebouleversant tout récemment.Qu’Il entre en relation directeavec des musulmans, cela semultiplie et commence à inquié -ter les autorités religieusesislami ques. Mais il est capital que le renouveauactuel de la prière et notammentde celle du Rosaire, celui del’adoration eucharistique, celuiplus discret de la confession,incontestables chez les catholi -ques pratiquants, devienne unvérita ble « ouragan » spirituelqui balaie les ruines causéespar cette ignoble contre-culturemondialiste, amorale, matérialiste,venue d’outre-Atlantique.

◆PÈRE YANNIK BONNET

Question au Père BonnetQue penser du départ

de Christiane Taubira ?

PIERRE JULIEN

L’Église romaine qui, depuisle Ve siècle environ, lisait

l’Écriture à l’office de nuit, in-troduisit au XVIe siècle, pourles féries dotées d’un évangilepropre, l’extrait d’une homélied’un docteur de l’Église. En Ca -rême, ces homélies remplacèrentla lecture suivie du Pentateuque. Ces prochains jours on lira,dans les deux formes, deuxévangiles sur la conversion :le fils prodigue (samedi 27 fév.[f. extra.] et dim. 6 mars [f.ord.]) et la femme adultère(sam. 5 mars et dim. 13). Voyonsce que nous enseignent les Pèressur ces passages célèbres.Le fils prodigue (Lc 15, 11-32). « En demandant sa part,affirme saint Ambroise (Comm.sur l’Év. de saint Luc), le jeunehomme se jugeait capable dela gérer. » L’évangile dit alorsque le fils partit « pour un payslointain».Et notre commentateurne voit pas de « pire éloignementque de s’éloigner de soi-même(…) et d’être en divorce avecles saints par la barrière brûlantede la luxure mondaine ». Puisl’évêque de Milan expliqueainsi le manque : « C’est aprèsavoir déserté la maison paternellequ’il commença à manquer. »

Tous des fils indignesLe fils dilapide ensuite sesbiens : « On a bien raison dedire qu’il a dissipé son patrimoi -ne, celui qui s’est éloigné del’Église. » Pour autant, Ambroisene considère pas ce fils commeune exception : « nous aussi,nous avons vécu dans une régionlointaine, comme l’enseigneIsaïe : “Pour ceux qui demeuraientdans la région de l’ombre dela mort, une lumière s’est levée”(Is 9, 1) ». Le fils eut faim, car

« celui qui s’écarte de la Parolede Dieu est affamé », puis revientà lui, car « revenir au Seigneur,c’est se retrouver et qui s’éloignedu Christ se renie ».« Je me lèverai, et j’irai versmon Père. » « Le Christ a choisiceux qui sont debout, commenteAmbroise. Debout donc, courezà l’Église : là est le Père, làest le Fils, là est l’Esprit Saint.À votre rencontre vient Celuiqui vous entend converser dansle secret de votre âme ; et quandvous êtes encore loin, Il vousvoit et accourt. (…) Il accourt,pour que nul ne vous retarde ;Il embrasse aussi. (…) Le Christse jette à votre cou, pour dégagervotre nuque du joug de l’esclavageet suspendre à votre cou sonjoug suave. (…) Telle est lamanière dont Il vous étreint, sivous vous convertissez. »La femme adultère (Jn 8, 1-11). Saint Augustin, dans sonTraité 33 sur saint Jean, voitdans cet épisode la « mansuétudeadmirable» du Seigneur. Interrogépar les scribes et pharisiens,Jésus ne leur dit pas de ne pas

lapider la pé-cheresse «pourn’avoir pasl’air de parlercontre la loi »,n i non p lus de la lapider,mais : « Quecelui qui n’apas péché lan-ce la premiè-re pier re ».« Comme il lesremettait bienà leur place !Au dehors,ils portaientcontre unefemme une ac-cusation pas-sionnée et ils

ne rentraient pas au-dedansd’eux-mêmes pour y scruterl’état de leur âme. » Et la leçondoit porter jusqu’à nous : « Quechacun d’entre nous se considèrelui-même, qu’il rentre au-dedansde lui ! ». « Va, et ne pècheplus » : Jésus « a condamné,le péché, et non le pécheur ».Et tout en admirant la miséricordede Dieu, Augustin met en garde :« Ceux qui aiment le Seigneurdoivent se souvenir de sa man-suétude, sans oublier de craindreson immuable vérité ».« Puissiez-vous aujourd’huientendre la voix du Seigneur :“N’endurcissez pas votre cœur !”»(Ps 94, 7-8). Ce verset du psaumeinvitatoire des matines, choisicomme antienne pour la fin duCarême, ne nous invite-t-il pasà nous attendrir devant la paroleet l’exemple de Jésus, en cetteannée où le Pape nous invite àêtre miséricordieux comme lePère ? ◆

Pour lire les textes intégraux deces deux homélies : www.hommenouveau.fr rubrique religion.

La richesse des homélies de Carême

Spiritualité• Au Sanctuaire Notre-Damede Montligeon : du 7 au 11mars Session Soleil Levant,pour personnes en deuil, avec les chapelains du Sanc-tuaire et les sœurs de la Nou-velle Alliance ; pèlerinage de la Miséricorde le dimanche3 avril (veillée de prière laveille à 20 h 30) ; école deprière le samedi 30 avril pour enfants de 5 à 11 ans sur

« Mais priez mes enfants, mon Fils se laisse toucher » ;W.-E. spirituel pour les fa-milles du 5 au 8 mai, avec une journée à Alençon.Rens. et insc. : Sanctuaire Notre-Dame de Montligeon, 26, rue Principale CS40011,61400 La Chapelle-Montligeon.Tél : 02 33 85 17 00 – [email protected] – www.montligeon.org

• Avec les Pères de la FraternitéSaint-Vincent Ferrier : retraitede Semaine Sainte pour j. h. de17 à 30 ans au couvent deChémeré-le-Roi ; sessions depréparation au mariage avec lePère Puibaraud à Poissy les 12-13 mars et à Notre-Dame duChêne près de Sablé-sur-Sarthe (72) les 23-24 avril.Rens : tél. : 02 43 98 64 25 –www.despierresquiprechent.org

Dans sa miséricorde, le Père nous tend les brascomme le père du fils prodigue.

« L’avenir de la France, en

dernier ressort, ne peut se jouerque dans l’ordre

surnaturel. »

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L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 201622| VIE CHRÉTIENNE |Figure spirituelle

UN MOINE BÉNÉDICTIN

N oël Pinot voit le jour à Angers, le19 décembre 1747. Tandis que son

père lui inculque le goût du travail bienfait, le jeune garçon apprend de sa mèreà prier. En 1765, à 18 ans, Noël entreau séminaire. Le 22 décembre 1770, ilest ordonné prêtre. Au cours des dixannées qui suivent, l’abbé Pinot exercele ministère de vicaire dans différentesparoisses. Partout où il passe, il manifesteune charité attentive aux pauvres et auxmalades, si bien qu’en 1781, son évêquele nomme aumônier des Incurablesd’Angers. Cette maison accueille desmalheureux qui, bien souvent, n’y sontconduits que pour attendre la mort.Déchargé de toute préoccupation matériellepar de charitables chrétiennes, il sedonne corps et âme à son nouveauministère : son grand souci, c’est lasanctification et le salut de ses malades.

Un curé dévouéL’évêque d’Angers nomme Noël Pinotà la cure du Louroux-Béconnais. Il enprend possession le 14 septembre 1788.Cette paroisse, la plus étendue de toutescelles du diocèse d’Angers, se composede petits hameaux assez éloignés lesuns des autres et reliés par de mauvaischemins. Bien qu’il soit assisté d’unvicaire, le curé doit accomplir un travailconsidérable, mais son dévouementpare à tout. Deux ans se passent ainsi,mais, après le déclenchement de la Ré-volution, l’orage gronde au ciel del’Église de France : après la nationalisationdes biens du clergé (2 novembre 1789)et l’abolition des vœux solennels desreligieux (15 février 1790), intervientle vote de la Constitution civile duclergé, sanctionnée par Louis XVI le24 août 1790. Une loi du 27 novembre décide queseront obligés à prêter serment de fidélitéà la Constitution civile du clergé lesévêques, curés, vicaires, supérieurs deséminaires et tous les autres ecclésiastiquesfonctionnaires publics. Bien que le papene se soit pas encore prononcé, le curédu Louroux a pris sa résolution : il neprêtera pas le serment. Sans attendre,le curé monte en chaire le dimanche 27février, à l’issue de la messe. Il se metà expliquer dans un discours longuementmédité devant le tabernacle, pourquoi,en tant que prêtre catholique rattachépar son évêque au successeur de Pierre,chef unique de toute l’Église de Jésus-

Christ, il s’est refusé à prêter le sermentconstitutionnel, qui est attentatoire auxdroits de Dieu et de l’Église. Le maire,présent au premier rang de l’assistance,interrompt le prêtre d’une voix irritée :« Descends de cette chaire ! Tu nousdis que c’est une chaire de vérité, et tune débites que des mensonges ! ». Lesfidèles se dressent, suffoqués d’unepareille insolence. Une voix forte domineles autres : « Restez en chaire, Monsieurle Curé ! Vous parlez bien, nous voussoutiendrons ! ». Dès le soir, les habitantsdes paroisses voisines témoignent autourd’eux de ce qui s’est passé. La municipalitéa rédigé, séance tenante, un rapport auTribunal révolutionnaire d’Angers oùelle réclame l’arrestation de ce « curéincendiaire » et « perturbateur du repospublic ». Le vendredi suivant, un déta-chement de la garde nationale arriveau bourg, pendant la nuit, par craintede la population, pour arrêter le curé.Les juges le condamnent à rester, pendantdeux ans, éloigné de sa paroisse d’aumoins huit lieues (trente kilomètres).Noël Pinot se retire à l’hospice desIncurables, où il est accueilli avec joie.Mais les révolutionnaires prennent viteombrage de sa présence ; l’abbé se retiredonc, en juillet 1791, dans le pays des

Mauges, proche de Beaupréau, et vit làen proscrit, se dévouant avec zèle pourles âmes. En 1793, les évènements dela guerre de Vendée lui donnent l’occasionde rentrer dans sa paroisse.

Sous la garde de ses fidèlesLa vaste étendue de sa paroisse, permetà l’abbé Noël Pinot de se cacher dansdes fermes isolées. L’affection vigilanteet la discrétion absolue des fidèles fontbonne garde autour de ses cachettes ;il doit cependant en changer souventcar la garde nationale soupçonne saprésence et les perquisitions sontfréquentes. Durant le jour, il demeureenfermé dans des greniers ou des étables.La nuit venue, il sort pour aller administrerles sacrements aux malades. Il baptiseles nouveau-nés, instruit les enfants,reçoit les fidèles, les confesse, lesréconforte. À minuit, on prépare lenécessaire pour la célébration de lamesse, et les fidèles peuvent participerau Saint Sacrifice et communier. La viereligieuse continue, digne de celle descatacombes.L’année 1794 commence dans le sanget les larmes. Le Comité de salut publicapplique impitoyablement le décret du21 octobre 1793, qui punit de mort tout

prêtre réfractaire non expatrié dans ledélai de dix jours. Les mailles du filetse resserrent autour de Noël Pinot. Onlui propose de se retirer dans un lieuéloigné plus tranquille, mais il refuse.Chaque jour, il se prépare à la mort. Le 8 février, à la nuit tombante, il prendl’air dans le jardin d’une pieuse veuvequi l’héberge, lorsqu’un ouvrier, surnomméNiquet, le reconnaît malgré l’obscurité.Niquet court dénoncer Noël Pinot. Im-médiatement, la garde nationale se meten route. Chez la veuve, on a juste letemps de cacher le prêtre dans un grandcoffre. Comme la vaillante veuve refusede parler, on fouille la maison sans rientrouver. Un des gardes, en passant prèsdu coffre soulève le couvercle d’un airdistrait puis le laisse retomber en pâlissant.Il vient de découvrir le proscrit et hésiteà le dénoncer. Mais Niquet a toutremarqué : « Tu as trouvé le curé, luicrie-t-il, furieux, et tu veux le cacher ? ».Il soulève le couvercle et le prêtre sort,le visage grave et tranquille. Injurié,frappé, Noël Pinot se laisse lier sansrésistance. Ses ornements sacerdotauxsont saisis avec lui. Il est conduit auLouroux, puis à Angers, où il comparaîtdevant le Comité révolutionnaire. Taxéde « très contre-révolutionnaire », lecuré est jeté dans un cachot et condamnéau pain et à l’eau.Le 21 février, le réfractaire est introduitdevant le tribunal révolutionnaire. Lacommission est présidée par le citoyenRoussel. La sentence prononcée, Roussel,regardant les ornements de la messeexposés devant le tribunal, propose aucondamné par dérision : « Ne serais-tupas bien aise d’aller à la guillotineavec tes habits sacerdotaux ? – Oui,acquiesce sans hésiter le confesseur dela foi, ce sera pour moi une grande sa-tisfaction. – Eh bien, réplique l’autre,tu en seras revêtu et tu subiras la mortdans cet accoutrement. »L’exécution a lieu le jour même. Cevendredi, à trois heures de l’après-midi(heure de la mort du Seigneur en croix),Noël Pinot se retrouve au pied del’échafaud. On lui retire sa chasuble ;l’étole croisée sur la poitrine, il seprésente au bourreau. De loin, l’abbéGruget lui donne l’absolution. Unroulement de tambour… Le couperettombe… Le sacrifice est consommé :l’âme du bon pasteur a atteint l’autelde Dieu ! Ainsi meurt, le 21 février1794, à l’âge de 48 ans, l’abbé Noël Pi-not. ◆

Un prêtre sous la Terreur, fidèle jusqu’à l’échafaud

Bienheureux Noël Pinot

« En tant que prêtre catholique, il se refuse à prêter le serment constitutionnel, qui est

attentatoire aux droits de Dieu et de l’Église. »

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Homélie du 10 février |PAROLE DU PAPE | 23L’Homme NouveauN° 1609 du 27 février 2016

Retrouver notre identité chrétienneL a Parole de Dieu, au début de ce

chemin de Carême, adresse à l’Égliseet à chacun de nous deux invitations.La première est celle de saint Paul :« Laissez-vous réconcilier avec Dieu »(2 Co 5, 20). Ce n’est pas juste un bonconseil paternel ni une simple suggestion ;c’est une véritable supplication au nomdu Christ : « Nous le demandons aunom du Christ, laissez-vous réconcilieravec Dieu » (ibid.). Pourquoi un appelaussi solennel et vibrant ? Parce que leChrist sait combien nous sommes fragileset pécheurs, Il connaît la faiblesse denotre cœur ; Il le voit blessé par le malque nous avons commis et subi ; Il saitcombien nous avons besoin de pardon,Il sait que nous avons besoin de noussentir aimés pour accomplir le bien.Tout seuls, nous n’en sommes pascapables : c’est pourquoi l’Apôtre nenous dit pas de « faire quelque chose »mais de « nous laisser réconcilier » parDieu, de Lui permettre de nous pardonner,avec confiance, parce que « Dieu estplus grand que notre cœur » (1 Jn 3, 20).

Le premier pasIl est vainqueur du péché et nous relèvede nos misères, si nous les lui confions.C’est à nous de reconnaître que « nousavons besoin de miséricorde » : c’estle premier pas du cheminement chrétien ;il s’agit d’entrer par la porte ouvertequ’est le Christ, où Il nous attend Lui-même, le Sauveur, pour nous offrir unevie nouvelle et joyeuse.Il peut y avoir quelques obstacles quiferment les portes de notre cœur. Il y ala tentation de « blinder les portes »,c’est-à-dire de cohabiter avec son péché,en le minimisant, en se justifiant toujours,en pensant ne pas être pire que lesautres ; mais de cette façon, les verrousde l’âme se ferment et l’on reste enferméà l’intérieur, prisonnier du mal.Un autre obstacle est la « honte d’ouvrirla porte » secrète de son cœur. En réalité,la honte est un bon symptôme parcequ’elle indique que nous voulons nousdétacher du mal ; pourtant, elle ne doitjamais se transformer en crainte ou enpeur.

Et il y a une troisième embûche, cellede « s’éloigner de la porte » : cela seproduit quand nous nous cloîtrons dansnos misères, quand nous ruminons conti-nuellement, reliant entre elles les chosesnégatives jusqu’à sombrer dans lescaves les plus obscures de notre âme.Nous finissons alors par devenir familiersde la tristesse que nous ne voulons pas,nous nous décourageons et nous sommesplus faibles face aux tentations. Celase produit parce que nous restons seulsavec nous-mêmes, nous enfermant etfuyant la lumière, alors que seule lagrâce du Seigneur nous libère. Laissons-

nous alors réconcilier, écoutons Jésusdire à ceux qui sont fatigués et oppressés :« Venez à moi » (Mt 11, 28). Ne restezpas en vous-mêmes, mais allez à Lui.Là se trouvent le repos et la paix.Dans cette célébration, sont présentsles Missionnaires de la miséricorde,pour recevoir le mandat d’être signeset instruments du pardon de Dieu.Chers frères, puissiez-vous aider à ouvrirles portes des cœurs, à dépasser la honte,à ne pas fuir la lumière. Que vos mainsbénissent et relèvent paternellementvos frères et sœurs ; qu’à travers vous,le regard et les mains du Père se posent

sur ses enfants et soignent leurs bles-sures !Il y a une seconde invitation de Dieuqui dit, par l’intermédiaire du prophèteJoël : « Revenez à moi de tout votrecœur » (2, 12). S’il faut revenir, c’estparce que nous nous sommes éloignés.C’est le mystère du péché : nous noussommes éloignés « de Dieu, des autreset de nous-mêmes ». Ce n’est pas difficilede s’en rendre compte : nous voyonstous combien nous avons du mal à avoirvraiment confiance en Dieu, à nous enremettre à Lui comme notre Père, sanspeur ; combien c’est ardu d’aimer lesautres, au lieu de penser du mal d’eux ;combien il nous coûte de faire notrevéritable bien, tandis que nous sommesattirés et séduits par tant de réalitésmatérielles qui s’évanouissent et, à lafin, nous laissent pauvres.

Trois moyensÀ côté de cette histoire de péché, Jésusa inauguré une histoire de salut. L’évangilequi ouvre le Carême nous invite à en êtreles protagonistes, en embrassant troisremèdes, trois médicaments qui guérissentdu péché (cf. Mt 6,1-6 ; 16-18).En premier lieu, la prière, expressiond’ouverture et de confiance dans leSeigneur : c’est la rencontre personnelleavec Lui, qui raccourcit les distancescréées par le péché. Prier signifie dire :« je ne suis pas autosuffisant, j’ai besoinde toi, tu es ma vie et mon salut ».En second lieu, la charité, pour dépasserle manque d’intérêt pour les autres. Levéritable amour, en effet, n’est pas unacte extérieur, ce n’est pas donner quelquechose de façon paternaliste pour apaisersa conscience, mais accepter celui quia besoin de notre temps, de notre amitié,de notre aide. C’est vivre le service,vaincre la tentation de se satisfaire.En troisième lieu, le jeûne, la pénitence,pour nous libérer des dépendances vis-à-vis de ce qui passe et nous entraînerà être plus sensibles et miséricordieux.C’est une invitation à la simplicité etau partage : enlever quelque chose denotre table et de nos biens pour retrouverle vrai bien de la liberté.« Revenez à moi, dit le Seigneur, de toutvotre cœur » : non seulement par quelquesactes extérieurs, mais du plus profondde nous-mêmes. En effet, Jésus nousappelle à vivre la prière, la charité et lapénitence avec cohérence et authenticité,en surmontant l’hypocrisie.Que le Carême soit un temps pourélaguer la fausseté, la mondanité, l’in-différence : pour ne pas penser que toutva bien si je vais bien ; pour comprendreque ce qui compte n’est pas l’approbation,la recherche du succès ou du consensus,mais la propreté du cœur et de la vie ;pour retrouver notre identité chrétienne,c’est-à-dire l’amour qui sert et nonl’égoïsme qui se sert. ◆

« Le véritable amour (…) n’est pas un acte extérieur (…), (c’est) accepter celui qui a besoinde notre temps, de notre amitié, de notre aide. »

INTENTIONS DE PRIÈREPOUR MARS

– Pour que les familles en difficultéreçoivent le soutien nécessaire etque les enfants puissent grandirdans un environnement sain et se-rein.– Pour que les chrétiens, discriminésou persécutés à cause de leur foi,gardent la force dans les épreuveset la fidélité à l’Évangile grâce à laprière incessante de toute l’Église.

Retraites• Retraite avec la Frater-nité Saint-Pierre : pourdames et jnes filles (à p.de 17 ans) du 11 au 16avril à La Bergerie (74).Rens. et insc. : [email protected] – http://fsspfondation.wix.com/fondation

• Retraite salésienne du26 au 29 avril en Suisseavec les chanoines del’Institut du Christ-RoiSouverain prêtre. Partici-

pation : 195 €.Rens. et insc. : ICRSP Re-traites, Maison Saint-François-de-Sales, 47 ter,av. de l’Abreuvoir, 78160Marly-le-Roi. Courriel : [email protected] –www.retraites.icrsp.org

• Avec les pères de Saint-Joseph de Clairval : exer-cices spirituels pourhommes (à p. de 17 ans)du 3 au 8 avril en Alsace,du 5 au 10 avril en Vendée

et du 19 au 24 avril et du 2 au 7 mai à Flavigny.Rens. : Abbaye Saint-Josephde Clairval, Exercices spiri-tuels, 21150 Flavigny-sur-Ozerain. Tél. : 03 80 96 2231 – fax : 03 80 96 25 29 –[email protected] –www.clairval.com

Retrouver vos autres rendez-vous dans la ru-brique Agenda du site deL’Homme Nouveau :www.hommenouveau.fr

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L e 15 novembre 2014, NicolasSarkozy affirmait que « la loi

Taubira devra être réécrite de fond encomble. (…) Quand on dit “devra êtreréécrite de fond en comble”, si vouspréférez qu’on dise qu’on doit l’abrogerpour en faire une autre, en français çaveut dire la même chose et ça aboutitau même résultat ». Et au bout dequinze mois le discours changea. Lapublication du livre (La France pourla vie– sic) dans lequel l’ancien présidentde la République et actuel présidentdu parti Les Républicains (LR) a rendupublique sa position actuelle provoquede profonds remous. Coupable dereniement, il aurait retourné sa veste,manqué à sa parole, trahi. Le voilàqualifié de girouette, de menteur.

Une même stratégieN’y voyons pas un épisode isolé dela saga politicienne puisque dans lemême temps Jean-François Copé aamorcé la même stratégie. L’ancienprésident du même mouvement a faitson retour médiatique en publiant luiaussi un livre (Le sursaut français –sic). À l’occasion de la promotionde cet ouvrage, l’auteur nous apprendqu’en qualité de chef de l’UMP en2012, il avait considéré que l’oppositionradicale à la loi Taubira pourrait porterpréjudice au gouvernement socialisteet contrer le Front National. Maisquatre ans plus tard, il affirme quece n’était pas sa position personnelleet que si c’était à refaire, il ne lereferait pas. Revirement ? Reniement ?Jean-François Copé a-t-il lui aussiretourné sa veste ? Pas vraiment. Ilregrette un choix à ses yeux purementstratégique. L’engagement de l’UMPdans ce combat résultait donc d’unchoix politicien ne reposant aucunementsur une position de principe. Notre étonnement provient finalementde l’engagement officiel de ce particontre le projet de loi en 2012 et nondes supposés « revirements » soudainset simultanés de ses deux présidentssuccessifs. Sans aucun doute, l’UMPn’a pas évalué à l’époque l’ampleurdu mouvement initié et encore moins

sa persévérance dans le temps. Uneréelle épine dans le pied du parti LRrésulte de cette erreur de casting. Levoilà maintenant un peu embarrassé.Que faire de cette frange non négligeablede l’électorat qui pourrait aller voir« ailleurs » ? Alors on dit à ces bravesgens : « Vous avez toute votre placechez nous ». Et puis, regardez bien,il y a dans nos rangs de nombreuxélus et mêmes quelques responsablesdu mouvement qui pensent exactementcomme vous et le disent haut et fort.Nous vous accordons sur nos listesquelques places éligibles, certes mi-nutieusement comptées, afin qu’ellesne pèsent pas trop sur les choixpolitiques du mouvement mais çanous ne vous le disons pas. Enfin, un jeu de balancier savammententretenu permet d’attribuer des postesà responsabilité un jour à un représentantdu lobby LGBT, un autre jour à unreprésentant opposé. Ce qui en termesclairs veut dire : votez pour nous,mais nous ne tiendrons pas comptede ce que vous attendez de nous.Éventuellement, nous ferons à lamarge quelques toutes petites réformettes,dont vous serez priés de vous satisfaire,parce qu’elles prouveront notre bonnevolonté à votre égard, c’est-à-direnotre prise en considération du rôlelimité que nous vous accordons dansla vie politique française.

Face aux élections…Si nous nous trompons en écrivantces lignes, tant mieux ! Mais franchementcette manière d’agir n’est pas nouvelle.Elle surgit aujourd’hui ouvertementparce que le temps joue pour l’enra-cinement de la « loi » et que lesélections approchant, il faut satisfairetout le monde tout en démontrant sonattachement au « progrès », conditiond’accès au pouvoir. Jamais un partilibéral n’est revenu sur une régressioncivilisationnelle de la gauche au coursdes dernières décennies, la droiteréalisant même quelquefois l’exploitde devancer la gauche. Et que dire de l’extrême faiblessedes arguments avancés ! Nicolas

Sarkozy s’est permis de justifier saposition actuelle en disant que l’onne pouvait envisager de démarier lesgens… idée que personne ne revendique,mais reprise en boucle par d’autrespolitiques et par les médias en recourantcomme toujours à la grosse ficelleémotionnelle comme seul argument.Pourtant, alors que messieurs Sarkozyet Copé prenaient leurs distances àl’égard des défenseurs de la famille,un think tank de juristes publiait sonlivre blanc sur le droit de la famille,sous le titre Le mariage et la loi.Protéger l’enfant (1). Cet ouvragerappelle que la « loi » Taubira a ouvertla boîte de Pandore en matièred’adoption, de GPA, etc. C’est pourquoila réponse ne peut être que globaleet implique nécessairement une refontedu droit de la famille et bien évidemmentl’abrogation de cette « loi », sanseffet rétroactif bien évidemment. Cequi veut dire que les paires de mêmesexe, unies avant l’abrogation, neseront fort logiquement pas démariées.Simplement, aucune autre union dece genre ne sera plus légalisée, cequi entraînera à court terme unedisparition complète des effets decette « loi », sans bouleversement

brutal pour le statut des personnes.Ce livre écrit par des juristes, envoyéà Nicolas Sarkozy comme à l’ensembledes responsables politiques de tousbords, entre dans le détail de tous lesmoyens juridiques, tant législatifsque procéduraux, pour mettre enœuvre l’abrogation. Avec cette do-cumentation complète mise à leurdisposition, les politiques ne pourrontplus dire qu’ils ne savaient pas. Ce constat ne disqualifie nullementl’action de ceux qui asticotent en per-manence les élus afin qu’ils soientplus combatifs. On peut mener cescombats vigoureusement sans fairedes courbettes et sans appeler à voterpour des hommes et des femmes sansconviction, sous prétexte qu’ils nousaccordent une petite place.La vraie question est ailleurs : Commentdonner une traduction politique à cevaste mouvement de défense de lacivilisation et de l’identité française ?Question difficile et complexe, maisd’une brûlante actualité. ◆

1. Livre à commander ici : http://www.institutfamilleetrepublique.fr/travaux-livre/ Vouspouvez vous le procurer et le faire parveniraux divers élus que vous connaissez.

« Loi » Taubira, girouettes et reniements…

Après s’être posés un moment comme champions de la famille, deux candidats« LR » à la primaire, Nicolas Sarkozy et Jean-François Copé, ont amorcé le même virement stratégique en faveur du maintien de la loi sur le « mariage » gay. Cependant la publication d’un livre blanc intitulé Le mariage et la loi. Protéger l’enfant fournit l’arsenal juridique pour l’après-Taubira.

Nicolas Sarkozy, spécialiste des revirements intéressés.

JOËL HAUTEBERT

24| L’ESSENTIEL | ÉgliseL’Homme Nouveau

N° 1609 du 27 février 2016