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1
Étape 3 de Parlons télé:
une conversation avec
les Canadiens
(Avis de consultation de
radiodiffusion 2014-
190)
Mémoire d’Unifor
Le 27 juin 2014
Présenté par :
Howard Law, directeur des
médias d’Unifor
Randy Kitt, président du
Conseil des médias d’Unifor
Angelo DiCaro, Service de
recherche d’Unifor
2
Résumé
1. Unifor représente plus de 12 500 travailleurs dans le secteur des médias au Canada,
dont près de 5 000 dans l’industrie de la télévision.
2. Le système de télévision offre une production de grande qualité avec un vaste éventail
de services flexibles aux téléspectateurs. À plusieurs égards, la télévision n’a jamais été
aussi dynamique, mobilisatrice et divertissante qu’aujourd’hui.
3. Néanmoins, le système présente des points faibles. Le modèle économique qui sous-
tend la télévision conventionnelle (notamment la télévision locale) souffre, devant la
baisse des revenus publicitaires, d’une fragmentation de l’auditoire et d’autres éléments
négatifs.
4. Le système télévisuel est confronté aussi à des progrès technologiques importants qui
pourraient avoir des impacts économiques substantiels, si l'on ne fait rien. Le Conseil
peut s’attaquer à plusieurs de ces préoccupations de manière appropriée par le biais de
solides décisions en matière de politiques. Nous craignons que les changements
règlementaires importants proposés par le Conseil (ciblant presque exclusivement
l’amélioration du « choix des consommateurs ») dans l’avis de consultation de
radiodiffusion 2014-190 sont trop agressifs et mineraient l’architecture totale du
système télévisuel, par le fait même faisant plus de mal que de bien.
5. Une analyse du milieu commandée par Unifor et d’autres organisations souligne
l’impact des propositions du Conseil en vue de retirer la substitution de signaux
identiques, d’introduire un système de télévision à la carte, de réduire les obstacles à
l'entrée des services de programmation non canadiens et des dépenses au titre des
émissions canadiennes (DÉC). Prises ensemble, ces réformes pourraient éliminer 31 460
emplois (mesurés en équivalents à temps plein) et provoquer une perte de 2,9 milliards
de dollars du PIB canadien.
6. L’impact de ces changements pourraient aussi inciter les détenteurs de licences de
radiodiffusion de demander un plus grand allègement réglementaire quant aux
obligations découlant des licences afin de rester viables, tout en minant davantage la
programmation locale et la production canadienne.
7. Si le Conseil décide d’aller de l’avant avec ces réformes règlementaires proposées, nous
craignons que l’ensemble du système télévisuel pourrait être déstabilisé, créant de
nouveaux problèmes, involontaires, à court et à long terme.
3
8. Unifor recommande que le CRTC :
a. N’adopte pas de modèle de télévision à la carte compte tenu de son effet
déstabilisant sur les revenus télévisuels et, par le fait même, sur les services de
programmation canadiens;
i. si le Conseil décide d'imposer des changements sur la manière dont les
services de télévision par câble sont offerts et vendus, il devrait procéder
d’une manière progressive et mesurée;
b. maintienne des règles de prépondérance canadienne;
c. n’impose pas son test proposé de « l’impact négatif déraisonnable » et exige à la
place que les services de programmation étrangers démontrent que leur entrée
dans le marché canadien ne provoquera pas de « dommages importants »,
notamment en ce qui a trait aux services de télévision ethniques et en langue
étrangère;
d. maintienne la substitution simultanée;
e. maintienne le Fond d’amélioration de la programmation locale et examine des
mécanismes alternatifs de financement pour le maintenir à long terme;
f. clarifie la définition de la programmation locale, afin de la distinguer de la
production originale et interne et des segments de rediffusion;
g. renforce les exigences en matière de diffusion pour la programmation locale
originale, exigeant un minimum de 14 heures d’émissions par semaine pour tous
les télédiffuseurs, mise en place lors du prochain renouvellement de licences par
groupe de propriété;
h. établisse des seuils minimaux de journalistes pour la couverture de nouvelles
locales;
i. s’assure que tout changement de réglementation n’ait aucun impact défavorable
sur la radiodiffusion en langue étrangère et ethnique;
j. prévoit une audience sur l’avenir de la CBC-RC à la suite de la phase 3 de Parlons
télé, mais d’une manière qui soit liée à l’effort plus vaste de consultation;
k. recueille davantage de données sur les fournisseurs de services par
contournement (OTT), dont les services étrangers opérant au Canada;
l. mette à jour la définition des revenus de radiodiffusion pour refléter toutes les
activités de radiodiffusion des détenteurs de licences, de concert avec
l’imposition d’exigences obligatoires de contribution (10 %) des services par
contournement aux dépenses au titre de programmation d’émissions
canadiennes.
4
I. Introduction
9. Unifor est le plus grand syndicat du Canada du secteur privé, représentant plus de
300 000 travailleuses et travailleurs dans un vaste éventail de secteurs économiques.
10. Unifor représente plus de 12 500 membres dans le secteur des médias. Ce secteur
comprend les journaux imprimés, les communications graphiques et l’impression
commerciale, l’industrie du cinéma et le secteur de la radiotélévision. Les membres
d’Unifor créent et distribuent le contenu de la programmation canadienne aux
collectivités et à l’ensemble du pays. Nos membres travaillent pour des stations de radio
et de télévision, desservant des collectivités locales et offrant à l’échelle du pays des
services de programmation facultatifs, notamment des services de télévision payante et
spécialisée, et des services de distribution incluant la téléphonie par câble, satellite et
sans fil.
11. Près de 5 000 membres d’Unifor travaillent au sein du système télévisuel canadien et
seront touchés, comme nous pouvons le prévoir, par les décisions en matière de
réglementation du Conseil à la suite du processus d’examen en cours.
12. Les membres d’Unifor sont à l’emploi des principaux radiodiffuseurs et distributeurs
privés canadiens, dont Bell Média, Shaw et Rogers, ainsi que des stations indépendantes
de télévision communautaire (comme CHCH TV à Hamilton, en Ontario) et des stations
de télévision publique (comme TV Ontario). Il va sans dire que les membres d'Unifor - à
l'instar de plusieurs travailleurs dont le gagne-pain est lié à cette industrie vitale -
anticipent avec anxiété les résultats de l'examen du Conseil.
L’avenir de la télévision
13. Nous apprécions l'effort réel du Conseil de stimuler un dialogue national au sujet de la
télévision au Canada, comment la télévision (à titre de média de divertissement) est
consommée et appréciée, comment la télévision (à titre de média de réflexion) soutient
la diversité et contribue au développement de la culture canadienne, et comment la
télévision (à titre de média pour la mobilisation sociale et démocratique) contribue à
bâtir une collectivité de citoyens mieux informés.
14. La place centrale qu’occupe la télévision dans plusieurs foyers ne fait aucun doute. Elle
attire des millions de téléspectateurs qui écoutent un vaste éventail d’émissions
canadiennes (et étrangères) de qualité servant les intérêts de diverses communautés (à
la fois géographiques, étrangères et ethniques), de différents genres, de différentes
langues et plateformes.
5
15. La magnifique qualité et la valeur de la production des émissions dramatiques, l’éventail
sans précédent de services télévisuels offerts aux consommateurs, la flexibilité des
services, les volets complémentaires entre la télévision et d’autres formes de médias
sociaux et l’interaction possible, entre autres facteurs, ont créé de nouvelles formes de
communication dynamiques entre la télévision et son auditoire. Ce qui contribue à
mobiliser, informer et divertir les téléspectateurs.
16. Mais il ne fait aucun doute aussi que le système télévisuel se heurte à des défis. Le
modèle économique, en particulier, qui sous-tend la programmation (notamment
locale) de la télévision traditionnelle se porte mal. Le Conseil reconnaît les « pressions à
long terme » auxquelles la télévision locale est confrontée comme conséquences de « la
fragmentation de l'auditoire, de la baisse des revenus de publicité et de la
concurrence ».1 Ce qui est inquiétant.
17. Le système télévisuel est confronté aussi à des progrès technologiques importants qui
pourraient avoir des impacts économiques substantiels, si l'on ne fait rien. À quel degré
(et à quel rythme) les services de programmation par Internet et par contournement
vont réformer les habitudes d’écoute de la télévision canadienne reste à voir. Toutefois,
des signes précoces laissent entendre que le changement a déjà lieu2.
18. L’initiative « Parlons télé » arrive à un moment critique pour le système télévisuel
canadien. En premier lieu, la télévision traditionnelle et par câble terrestre – en dépit de
sa vaste étendue dans les foyers canadiens – est confrontée à des défis structurels et
des perspectives de croissance « sombres ».3 L’écoute de la télévision traditionnelle a
connu un déclin, de même que les ventes nationales de publicité4, en partie en raison de
la concurrence accrue des autres formes de médias.
19. On se préoccupe aussi du fait que le marché de la télévision payante au Canada a
presque atteint sa pleine maturité, relevée par un récent ralentissement des taux de
croissance des abonnements annuels et le ralentissement à venir des conversions au
service numérique (la transition vers la télévision numérique et les ventes incitatives des
forfaits de programmation ont donné aux fournisseurs de télévision payante l’occasion
d’augmenter les niveaux d’abonnement des foyers)5. Dans l'avis de consultation de
radiodiffusion 2014-190, le Conseil note aussi que l’année 2013 a connu pour la
1 Avis de consultation de radiodiffusion 2014-190 [66]
2 Voir: http://www.cbc.ca/news/business/cord-cutting-continues-as-canadians-ditch-tv-landlines-1.2601373; et
http://www.theglobeandmail.com/report-on-business/more-canadians-cutting-the-cord-tv-subscriber-numbers-fall-for-first-time/article18685129/ 3 Progress Amid Digital Transformation: A Macro Perspective on the Trends Impacting Investments in the Media Sector;
Scotia Capital Inc – Canada (Novembre 2013); page 30 4 Ibid; 30
5 Ibid; 38/39
6
première fois une baisse des abonnements des EDR, « alors que certains Canadiens
choisissent de refuser le système traditionnel au complet ».
20. Ces tendances vont naturellement instaurer des conditions défavorables pour les
travailleurs du secteur des médias dans l’ensemble de l’industrie, y compris les
membres d’Unifor. La réduction des activités pour atteindre des cibles de revenus a non
seulement mené à d’importantes pertes d’emplois ces derniers mois6, mais a aussi
instauré des pressions à la baisse sur l’offre de services et créer des conditions qui
pourraient limiter la qualité de la programmation offerte.
21. Grâce à des solutions créatives et innovatrices en négociation collective, notre syndicat
a pu tempérer les défis cycliques du passé. Toutefois, les défis actuels sur le plan des
revenus sont aggravés par des transferts technologiques importants qui prennent place
dans le système de télédistribution et de radiodiffusion.
22. Il n’y a pratiquement pas une semaine qui passe sans qu’un rapport, commentaire ou
une nouvelle ne soit publié qui souligne le spectre des nouvelles formes de médias,
notamment la présence accrue des services Internet et par contournement, ainsi que les
conséquences potentiellement perturbantes qu’ils auront sur le modèle économique
actuel de la télévision7. Un modèle qui a été construit pour soutenir (en partie par les
règles de diffusion et de financement) le développement de l’expression, du
multiculturalisme et de la souveraineté culturelle du Canada, entre autres principes et
objectifs établis dans la Loi sur la radiodiffusion.
23. Ces exemples montrent les points faibles qui existent dans le système actuel. Il y a une
préoccupation réelle concernant l’avenir de la télévision traditionnelle et de la
programmation locale. Nous pensons que ces préoccupations peuvent être traitées de
manière appropriée par le Conseil, par de solides décisions en matière de politiques
(notamment en ce qui a trait à ses orientations en matière de politique de radiodiffusion
ainsi que les exigences liées aux licences). Nous craignons que le Conseil décide
d'adopter une approche trop agressive pour réformer la politique télévisuelle, ce qui
éroderait l’architecture du système. Cette approche ferait plus de mal que de bien.
24. Nos commentaires dans le cadre de l'avis de consultation de radiodiffusion 2014-190
vont principalement se faire sous cette lentille critique (et prudente), comme le Conseil
6 Au cours des douze derniers mois, d’importantes suppressions d’emplois ont été annoncées par les principaux radiodiffuseurs
canadiens, dont Rogers (94 suppressions d’emplois annoncées en novembre 2013 qui ont suivi 62 suppressions d’emplois annoncées en mai 2013); Shaw Media (400 suppressions d’emplois annoncées en mai 2014); CBC (a annoncé 657 suppressions d’emplois en avril 2014 à la suite d’une compression budgétaire de 130 millions de dollars); et Bell Média (a annoncé jusqu’à 120 suppressions d’emplois de ses activités télévisuelles à Toronto en juin 2014). 7 Le Conseil présente un exemple pertinent du modèle de financement reposant sur la publicité qui sous-tend la
programmation de la télévision locale (Avis de consultation de radiodiffusion 2014-190 [29])
7
pourra les lire ci-dessous. Il est encourageant de voir que le Conseil adopte une
approche et un examen exhaustifs du paysage réglementaire et concurrentiel de la
télévision à ce moment particulier et critique de l'histoire. Toutefois, nous sommes
préoccupés du manque de propositions et de recommandations significatives mises de
l’avant par le Conseil sur les manières de soutenir et d’étendre efficacement la palette
de revenus, à la lumière de ce que nous considérons être des réformes règlementaires
déstabilisantes.
Participation d’Unifor à Parlons télé
25. Notre syndicat a suivi de près les phases 1 et 2 des audiences de Parlons télé depuis leur
début en octobre 2013. Nous avons vivement encouragé nos membres de partout au
pays à se pencher et à commenter le questionnaire du « cahier de choix ». Il nous est
difficile de déterminer avec précision le nombre de membres qui ont participé, mais
nous pouvons dire avec certitude que nos efforts de sensibilisation ont atteint des
milliers de personnes intéressées d’un océan à l’autre.
26. Nous avons aussi reçu des rétroactions directement de la part des membres dont
plusieurs ont pris le temps de présenter une réflexion candide, personnelle, sur l’avenir
de la télévision à leurs yeux et pour d’autres qui sont sur la ligne de front – les
travailleurs fournissant les services de programmation que les Canadiens apprécient.
Afin d’exprimer ces voix, nous avons inclus des extraits d’un choix de réponses reçues et
nous pensons que le Conseil les trouvera informatifs.
a. « J’ai commencé ma carrière aux nouvelles locales dans les années 1980 en
travaillant dans une entreprise bien financée qui couvrait toutes les nouvelles de
la journée. Nous avons aussi initié et enquêté sur d’importants sujets dans la
société, sept jours par semaine, avec une programmation de nouvelles toute la
journée. Je travaille maintenant pour une émission matinale peu financée qui
détient seulement suffisamment de ressources pour réagir à certaines nouvelles
quotidiennes… Ce qui nous fait en sorte que lors de conférences de presse, nous
obtenons seulement une partie de la nouvelle. Ce changement d’engagement au
financement de la programmation locale a été le plus visible durant la couverture
des élections provinciales de l'an passé. [L’employeur] n’avait pas de journaliste
sur l’autobus de la campagne et a décidé plutôt de couvrir seulement ce qui se
déroulait dans les régions de Vancouver et Victoria. Réagissant aux messages
politiques très contrôlés plutôt que de mobiliser les électeurs directement sur des
questions identifiées par le public. Aucune couverture spéciale des élections,
même pas lors de la soirée électorale… Il manque un lien avec la communauté en
ayant accès à la rue, et ce type de couverture exige un engagement en matière
de financement qui ne soit pas capturé par un modèle de politique qui dicte les
8
heures de la programmation locale avec peu ou aucune responsabilité sur le
contenu diffusé pendant ces heures. » Stephen, caméraman (Vancouver,
Colombie-Britannique)
b. « Lorsque j’ai commencé à travailler à la station en 1979, c’était un lieu de travail
dynamique. Malheureusement, notre station comme bien d’autres est devenue
l’ombre de ce qu’elle a déjà été. Les régies ont été centralisées, ce qui a fait que
nous sommes devenus des bureaux de nouvelles. Lorsque les règles ont changé,
je ne sais pas ce que le CRTC pensait qu’il arriverait, mais pratiquement toute la
programmation locale à l’exception des nouvelles a été annulée partout au pays.
Chaque année, nous réalisions des téléthons, des émissions de variétés et de
musique, d'affaires publiques et des dramatiques présentant des talents locaux.
C’est à des stations comme celle pour laquelle je travaillais que certains des plus
grands talents du Canada ont fait leurs dents. Gordon Lightfoot et Stompin’ Tom
Connors ont commencé [ici].
Notre station de 120 employés a été réduite à une coquille de 38. Oui, nous
produisons encore des nouvelles deux fois par jour plutôt que trois… Les nouvelles
locales sont importantes, mais c’est juste un aspect du paysage local d'une
communauté.
Il faut se demander d’où vont venir les prochains artisans de la télévision? »
Jim, technicien télévisuel (Barrie, Ontario)
II : Encadrer la conversation
Si les consommateurs sont les premiers, qui sont les deuxièmes?
27. L’examen de l’avenir de la télévision, dont la définition est large, par le Conseil semble
nettement plus étroit en perspective après avoir lu ses résultats attendus décrits dans
l'avis de consultation8. De manière plus spécifique, le Conseil cherche des avis sur les
façons d'améliorer le système télévisuel canadien de sorte à favoriser plus de « choix et
de souplesse » qui encourage la « création de programmation canadienne captivante et
diversifiée ».9
28. Dans l’avis de consultation, le Conseil reconnaît (bien qu’à un degré nettement moindre)
l’importance économique de la télévision (paragraphe 12) et que les besoins de
« l’intérêt public » devraient guider ses décisions de réglementer ou de ne pas
réglementer (paragraphe 35). Le Conseil soulève aussi d'importantes questions
8 Il y a un écart notable dans le langage entre les « résultats attendus » énumérés dans l’avis de consultation et les « objectifs »
établis par le Conseil dans Parlons télé : un rapport sur les commentaires reçus à l’étape I, où le Conseil soulignait son objectif de positionner les Canadiens « au centre de leur système télévisuel » en tant que « citoyens, consommateurs et créateurs ». 9 Avis de consultation de radiodiffusion 2014-190 [36 i, ii, iii]
9
concernant l'appui pour la programmation locale, la diversité et l'inclusion dans
l'ensemble de l'avis, ce qui est bien accueilli. Néanmoins, l’étendue de la réforme
envisagée dans un effort d’aborder les questions de préoccupation des consommateurs
porterait atteinte à toute future considération.
29. La décision du Conseil d’explorer les réformes de la télévision, axées sur les
consommateurs, répond certainement aux commentaires faits par le premier ministre
Stephen Harper dans un sous-section de son discours du Trône en 2013 intitulé Protéger
les intérêts des consommateurs canadiens :10
« Notre gouvernement a déjà pris des mesures pour accroître la concurrence.
Les Canadiens et les Canadiennes savent que la concurrence profite à tout le
monde : elle permet de réduire les coûts et évite que les entreprises
deviennent complaisantes. Depuis 2008, ces mesures ont permis de réduire
de près de 20 pour cent les taux de services sans fil. Mais beaucoup reste à
faire.
Notre gouvernement prendra des mesures afin de réduire les frais
d’itinérance sur les réseaux au Canada. Notre gouvernement croit que les
familles canadiennes devraient pouvoir choisir les forfaits de chaînes sur
mesure qu’elles souhaitent obtenir. Il exigera que les chaînes soient
dissociées dans les forfaits tout en protégeant les emplois. Notre
gouvernement continuera de veiller à l’amélioration des réseaux haute
vitesse à large bande pour les Canadiens et Canadiennes dans les régions
rurales. »
30. Il faut souligner que la notion de consumérisme est notablement absente des modalités
et conditions établies dans la Loi sur la radiodiffusion, tout comme la notion de la
concurrence des prix. Il existe une distinction importante à faire entre la plus récente
expression de volonté politique de la part d’un gouvernement en place et le maintien
des principes de la loi applicable. Unifor apprécie la tentative du Conseil d’apaiser les
souhaits de certains téléspectateurs qui cherchent plus de souplesse dans le choix des
canaux et de la programmation, l'accès à l'écoute (en temps réel) des premières
commerciales de la télévision américaine, et d'autres questions. Cependant,
ultimement, la considération de l’intérêt public doit guider ces décisions ainsi que la
stabilité et le développement du système conformément aux objectifs de la Loi sur la
radiodiffusion, par dessus tout.
31. Il faut aussi souligner qu'une plus grande souplesse ne nécessite pas une approche à la
carte pour choisir des services de programmation. En fait, jusqu’à quel point le Conseil
s’oriente à partir du discours du premier ministre, il ne fait jamais référence de manière
10
Discours du Trône, octobre 2013: http://speech.gc.ca/fra/discours-integral
10
spécifique à des services « à la carte ». Des alternatives existent, moins déstabilisantes,
des formes de souplesse – y compris le choix d’un propre ensemble de services – que le
Conseil devrait prendre en considération dans ses délibérations aussi.
Négligence à l’égard de la société CBC/RC
32. L’initiative Parlons télé ne tient aucunement compte du rôle (et des difficultés) des
télédiffuseurs publics au Canada. La discussion est complètement centrée sur des sujets
liés au secteur télévisuel privé.
33. Avec tout le respect envers le Conseil, il est incongru que le résumé des entités que
comprend le système télévisuel canadien fait par le Conseil (Avis de consultation de
radiodiffusion 2014-190 [14]), il n’y a aucune mention de la CBC/RC. En tant que
radiodiffuseur national public, la CBC/RC génère plus de 500 millions de dollars de
revenus par la télédiffusion, contribue pleinement au quart des dépenses totales11 au
titre de la programmation canadienne, et joue un rôle distinct dans la promotion de la
culture et de l’identité canadiennes (tel que mentionné dans la Loi sur la radiodiffusion).
Son rôle dans l’avenir de la télévision traditionnelle est aussi central que celui des
radiodiffuseurs privés, et non périphérique.
34. La CBC/RC est susceptible de modifier les courants politiques. Des compressions
budgétaires ont entraîné un sous-financement, ce qui a mené à des réductions de
programmation et d’effectifs. Hier encore, la CBC/RC a annoncé une diminution
importante de la production interne, ce qui va entraîner des compressions de plus de
1 000 emplois d'ici 202012. Aujourd’hui le budget de la CBC/RC est près de la moitié de
ce qu’il était en 1990. Depuis 2008, la CBC/RC a coupé plus de 2 000 emplois. Nous ne
pouvons nous empêcher de percevoir ces tendances comme un lent et constant
démantèlement de notre radiodiffuseur national, avec une attention de plus en plus
grande vers la participation du secteur privé dans l’offre de services. Il est difficile de ne
pas percevoir ce changement comme le produit d’une motivation politique et
idéologique. C’est une source de grande préoccupation pour l’avenir de la
programmation canadienne de qualité et du dynamisme de la démocratie canadienne.
35. De manière surprenante, les compressions à la CBC/RC surviennent à un moment où les
Canadiens valorisent encore le rôle de la Société dans le renforcement de la culture et
de l’identité canadiennes.13 Pourtant, pour des raisons que nous ne comprenons pas, ce
11
Rapport de surveillance des communications, CRTC 2013 12
http://www.cbc.ca/news/canada/cbc-to-cut-back-supper-hour-news-in-house-productions-1.2688409 13
Un sondage Nanos Research commandé par les Amis de la radiodiffusion canadienne en 2013 (http://www.friends.ca/poll/11549) a révélé que 80 % des Canadiens sondés croient que la CBC/RC joue un rôle important dans le renforcement de la culture et de l’identité canadiennes.
11
n’est pas un sujet dans le cadre de la conversation actuelle.
36. Nous ne savons pas si une conversation a lieu en parallèle ou si une conversation
subséquente sera tenue sur l’avenir de la télévision « publique », alors nous considérons
incomplète l’initiative Parlons télé.
La télévision comme moteur économique
37. Le secteur télévisuel au Canada joue un rôle économique important ainsi qu’un rôle
culturel au pays. Près de 60 000 personnes travaillent dans le secteur de la télévision14,
dont plus de 12 000 emplois concentrés sur le développement de contenu de
production interne, y compris les nouvelles locales et la programmation d’émissions
sportives15. Les emplois en radiodiffusion sont considérés comme des « emplois de
qualité » qui procurent des salaires au-dessus de la moyenne, allant de 24,73 $ à 26,66 $
de l’heure16. De façon globale, les secteurs du cinéma et de la télévision au Canada
génèrent plus de 12,5 milliards de dollars en revenus de travail et ont contribué plus de
20 milliards de dollars au PIB en 201117.
38. La menace de conséquences économiques négatives des réformes réglementaires
envisagées par le Conseil dans cet examen est réelle. Les conséquences négatives de ces
changements doivent être prises en considération. En dépit des assurances de la part du
gouvernement fédéral que les emplois seront protégés18 dans l’éventualité où le Conseil
accepte d’aller de l’avant avec toute proposition de réforme, il y a eu peu de signes dans
le cadre du processus de Parlons télé pour défendre cette prétention.
39. En fait, il n’y a eu aucune évaluation de l’impact des réformes en matière de politique
présentement envisagées par le Conseil dans l’avis de consultation de radiodiffusion
2014-190, y compris l'élimination possible de la substitution de signaux identiques, le
retrait des règles de prépondérance canadienne, moins de contrôle des services
étrangers, entre autres.
40. Unifor de concert avec l’Alliance des artistes canadiens du cinéma, de la télévision et de
la radio (ACTRA), les Amis de la radiodiffusion canadienne, l’Association canadienne de
production des médias (ACPM), la Guilde canadienne des médias (GCM) et la Guilde des
14
Avis de consultation de radiodiffusion 2014-190 [12] 15
Rapport économique sur l’industrie de la production médiatique sur écran au Canada, 2013 (page 97) 16
Statistique Canada, Enquête sur l’emploi, la rémunération et les heures de travail. Les taux des salaires horaires comprennent les heures supplémentaires, ils sont basés sur les moyennes annuelles (à partir des données disponibles les plus récentes) et énumérés pour SCIAN 5151 (radio et télévision) et 5152 (télévision payante et spécialisée). 17
Nordicity, The Economic Contribution of the Film and Television Sector in Canada (juillet 2013) (voir le sommaire exécutif, page ii) 18
Déclaration émise par la ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles le 24 avril 2014: http://www.marketwired.com/press-release/statement-shelly-glover-minister-canadian-heritage-official-languages-on-crtc-report-1902904.htm
12
écrivains du Canada ont commandé une analyse du milieu de la télévision canadienne
(un rapport contenu en annexe à ce mémoire) qui examine, plus en détail et en partie,
les conséquences possibles sur l’emploi selon un éventail de scénarios, ainsi que les
impacts sur les revenus au titre des dépenses en matière de programmation canadienne
et d'autres questions d'importance.
41. Nous espérons que cette analyse du milieu servira à combler l’écart en recherche et
analyse sur comment les emplois risquent d'être touchés à la suite d’une réforme
réglementaire. Nous allons citer des éléments de ce document dans notre mémoire,
mais nous encourageons aussi le Conseil à le prendre en considération dans ses
délibérations.
III-Équilibre entre le choix des consommateurs et la viabilité
économique
42. En principe, Unifor ne s’oppose pas à la notion de choix des consommateurs. Permettre
aux consommateurs de faire des choix plus informés et de choisir des services de
programmation plus près de leurs intérêts est une bonne chose. Et jusqu’à une certaine
mesure, le système télévisuel actuel procure de la souplesse. Les services VSD, par
exemple, remplissent cette fonction. La prévalence accrue de Netflix et des fournisseurs
de services par contournement offrent aussi pas mal la même chose. Plusieurs EDR
offrent aussi aux consommateurs le choix d’ajouter des canaux à des forfaits établis.
43. Soyons clairs quant au fait que les consommateurs ont le choix de la télévision qu’ils
souhaitent regarder, alors qu’il n’y a jamais eu autant d’options et de plateformes
offertes aux téléspectateurs dans cet « âge d’or » de la télévision.
44. Le cadre de cette discussion est axé sur le mot « choix » et le concept de choix
autonome du consommateur en lien avec sa capacité à exercer plus d’influence sur ce
qu’il écoute à la télévision, au moment et à l’endroit qui lui convient.
45. À notre avis, le concept plus approprié à prendre en considération dans cette discussion
est le terme « équilibre » et non d’un choix hors contrôle.
46. L’évolution technologique restructure le système télévisuel canadien, un système, tel
que souligné plus haut, qui vise à atteindre les objectifs très clairs et spécifiques
contenus dans la Loi sur la radiodiffusion. Et il revient au Conseil d’identifier le centre de
gravité du système, pour ainsi dire, afin d’assurer que le système puisse se maintenir.
47. Il est clair que sur le plan politique le gouvernement fédéral a établi la « protection des
emplois » comme le pivot à partir duquel l'équilibre doit se faire (un point souligné par
13
la ministre du Patrimoine canadien et des Langues officielles). Si nous présumons au
départ que ce fut la volonté politique du gouvernement qui a conduit à l’examen
actuel des services à la carte (parmi d’autres changements au système télévisuel),
alors nous devrions aussi concevoir la question de la protection des emplois avec le
même degré d’importance.
Il y aura des pertes
48. Si le Conseil décide de retirer la substitution de signaux identiques, d’introduire un
système à la carte et de baisser les obstacles à l’entrée de la programmation étrangère,
ces décisions vont profondément perturber le modèle de revenus de la télévision (ce qui
à son tour va toucher le financement de la production de contenu canadien)19 et avoir
des impacts importants sur les emplois dans le secteur.
Tableau 1
Retrait de la substitution simultanée
À la carte + réduction des
obstacles (EDR)
À la carte + réduction des obstacles
(Payante/Spécialisée/VSD)
Perte de financement
de la production
(DPC)
Totaux
2015 2020 2015 2020 2015 2020 2015 2020 2015 2020 Emplois
(ÉTP) -530 -1 050 -6 610 -
13 230 -2 330 -4 630 -7 420 -
12 550 -
16 890 -31 460
Directs -170 -330 -3,350 -6 700 -740 -1 470 -2 920 -4 940 -7 180 -13 440 Indirects -360 -720 -3,260 -6 530 -1 590 -3 160 -4 500 -7 610 -9 710 -18 020
Source: Analyse du milieu de la télévision canadienne: 2014 – Peter H Miller, P. Eng., LL.B.
49. Le tableau 1 présente les résultats de l’analyse du milieu sur les impacts sur les emplois.
50. En étudiant les trois principales propositions de réforme, il y a un impact négatif sur les
emplois, tel que mesuré en équivalents à temps plein (et conformément avec l’analyse
des emplois fournie par le rapport économique sur l’industrie de la production
médiatique du cinéma et de la télévision au Canada).20
51. Considérés ensemble, ces résultats devraient susciter une bonne dose de
préoccupation. Une totale adoption des propositions de réforme du Conseil pourrait
faire perdre plus de 31 000 emplois dans le système de la radiodiffusion d’ici 2020, dont
la majorité provenant du segment des EDR.
52. Le rapport souligne aussi que la diminution des revenus provoquée par ces réformes sur
les services privés traditionnels et facultatifs va réduire de manière globale les dépenses
19
Voir le rapport en annexe, pages 51 à 57 pour une ventilation des incidences économiques provenant des changements réglementaires et une explication des hypothèses de modélisation aux pages 60 à 69. 20
Menée en partenariat avec l’Association canadienne de production des médias, l'Association québécoise de la production médiatique, le Nordicity Group et le ministère du Patrimoine canadien.
14
au titre des émissions canadiennes de plus d’un milliard de dollars d’ici 2020. Ces pertes
stupéfiantes se conjuguent à un déclin de 176,5 millions de dollars des contributions des
EDR pendant la même période, retirant ainsi 1,2 milliard de dollars en dépenses de
programmation qui auraient pu être faites dans le système.
53. Il est attendu à ce que les deux tiers des pertes des dépenses au titre des émissions
canadiennes proviennent des dépenses de la production interne ou de la
programmation acquise. Le reste (près de 400 millions de dollars) proviendrait de
dépenses non réalisées sur le contenu original canadien.21
54. Au total, l’impact réglementaire sur le secteur de la télévision est stupéfiant : une perte
annualisée de 31 460 emplois d'ici 2020 (ou près de 12 % des ETP de l'industrie en 2011)
avec une perte de 2,9 milliards de dollars au PIB (ou 14,5% des contributions de
l'industrie en 2011 au PIB canadien).
La spirale descendante
55. Il n’est pas déraisonnable de présumer qu’un déclin important des revenus de télévision
comme conséquence d’une réforme réglementaire va instaurer les conditions pour que
les radiodiffuseurs demandent davantage d’allègement réglementaire (par exemple un
allègement des obligations liées aux licences) pour protéger leurs bilans.
56. Des demandes récentes d’allègement réglementaire, y compris celles faites par Rogers
Broadcasting Limited (RBL) plus tôt cette année (concernant les exigences de
programmation pour la télévision ethnique en direct) illustrent ce que peut représenter
l’avenir au sein d’un environnement de radiodiffusion plus concurrentiel, reposant sur
un plancher de revenus instables. L’intégrité du système télévisuel et les objectifs de la
Loi sur la radiodiffusion vont subir d’intenses pressions dans un climat qui encourage la
baisse des normes en matière de réglementation.
Risque en matière de réglementation avec peu de récompense
57. Il y a beaucoup en jeu dans la décision du Conseil. À la première ligne de l'avis de
consultation 2014-190, le Conseil considère que la télévision est une « industrie
florissante ». Cette affirmation est audacieuse, et exagérée, mais sonne vraie à un
certain niveau.
58. Des points faibles existent au sein du système certes, et ils méritent qu’on leur prête
attention.
21
Miller rapporte aussi que la perte des dépenses au titre des émissions canadiennes des radiodiffuseurs aurait une incidence négative sur les paiements de crédits d’impôt fédéral et provincial en 2020, totalisant 179 millions de dollars.
15
59. L’accès (et le financement) aux nouvelles locales originales et de qualité et aux
émissions autres que les nouvelles est un lien faible évident du système télévisuel. Le
secteur de la télévision traditionnelle (y compris la télévision en direct) se heurte à des
défis sur le plan des revenus qui doivent être abordés. Les contraintes de financement
auxquelles fait face la CBC/RC et d’autres radiodiffuseurs publics sont une
préoccupation importante. S’assurer que le système télévisuel réponde aux besoins
d’une population en croissance et diversifiée est primordial. La hausse constante de la
distribution par contournement doit être surveillée de près, et le Conseil doit prendre
en considération un éventail d’options pouvant intégrer ces services dans le champ de la
réglementation.
60. Loin de résoudre ces problèmes, si le Conseil décide d’aller de l’avant avec les réformes
réglementaires proposées qui pourraient déstabiliser le système (tel que souligné plus
haut), ils auront créé de fait un ensemble de nouvelles préoccupations et peut-être des
problèmes imprévus à court et à long terme.
61. Dit très simplement : si l’industrie est « florissante », pourquoi alors risquer de la
démanteler?
IV-Recommandations
Prendre en considération les conséquences involontaires de la télévision à la
carte
62. Dans sa réponse au décret 2013-1167, le Conseil a reconnu que « les forfaits
préassemblés ont procuré une source de revenus stable aux distributeurs et aux services
de programmation au fil des ans »22.
63. En termes généraux, le Conseil reconnaît aussi la forte probabilité que certains canaux
ne « survivront pas » dans un monde de télévision à la carte et qu’une diminution des
services de programmation discrétionnaires affecterait négativement le financement de
la programmation canadienne.23
64. Le Conseil a reconnu l’impact potentiel que la dissociation des forfaits aurait sur le
secteur de la production, bien qu’il ait indiqué que les « producteurs »
(vraisemblablement ceux consultés sur la question des services à la carte) ont fourni des
« preuves limitées » de ces impacts. Nous espérons que l’étude en annexe sera perçue
22
CRTC Réponse au décret C.P. 2013-1167 (24 avril 2014) 23
Ibid
16
utile au Conseil, car elle fournit des preuves pour renforcer les préoccupations à l’égard
de la production.
65. Le Conseil a aussi souligné que « les options comme les forfaits à la carte ou les forfaits
sur mesure ne sont pas interdites par le cadre réglementaire actuel »24. Le Conseil a fait
référence aux expériences au Québec25 et dans la région de l’Atlantique où des options
de forfaits à la carte sont offertes par certains fournisseurs.
66. Il y a une valeur évidente à l’utilisation de blocs préformatés, non seulement pour leur
potentiel de revenus (et la certitude de revenus associée qui sous-tend le système
télévisuel), mais aussi pour augmenter la diffusion auprès des téléspectateurs d’un
éventail diversifié d’offres d’émissions - des émissions (canadiennes et étrangères) qui
ne sembleraient pas attirantes à première vue. En fait, le groupage a été fondamental
dans l’ensemble du système.
67. Cet avantage tangible aux consommateurs lié au groupage est peut-être la raison qui
explique pourquoi le Conseil a proposé de conserver des offres de blocs facultatives
dans sa proposition ainsi qu'un ensemble minimaliste de canaux.
68. Il y a un détriment évident à une offre agressive d’un modèle de forfaits à la carte où les
consommateurs supportent 100 % du coût des canaux. En fait, deux des rapports
publics disponibles (réalisés aux États-Unis) cités par le Conseil à la note de bas de page
6 du décret 2013-1167 présentent des critiques accablantes de la dissociation des
forfaits sur l’écosystème de la télévision en général.
69. Dans un rapport intitulé « Pricing Strategies in a Digital World », les auteurs font valoir
que les forfaits groupés ne sont pas « mauvais » pour les consommateurs. Les auteurs
notent :
« Cet écosystème d’offre limitée finance beaucoup plus de voix
(canaux) que dans un monde de services à la carte. La règle 80/20 qui
prévaut dans le monde numérique suggère que seulement 20 à 30
canaux survivraient (et avec des structures de coûts moindres) dans
un monde de services à la carte par rapport aux >150 canaux actuels.
24
Ibid 25
Il est très difficile de tirer des conclusions à partir des expériences au sein du marché québécois de l’adoption des services à la carte qui pourraient orienter les attentes du côté de la télévision anglaise, compte tenu de la concentration plus élevée de services de programmation en français (et de la pénétration relativement limitée du marché de la programmation télévisuelle américaine en anglais).
17
Des canaux minoritaires et d’intérêts spéciaux auraient peu de
probabilité de survivre. »26
70. L’autre rapport intitulé « The Future of TV » conclut que :
« En dépit des demandes pour la dissociation des forfaits parce
qu’elle donnerait plus de choix aux consommateurs, nos calculs
arrivent à la conclusion que près de 50 % des revenus totaux de
l’écosystème télévisuel s’évaporeraient et moins de 20 canaux
survivraient parce que les services à la carte forcent les
consommateurs à supporter 100 % du coût du canal, alors
qu’aujourd’hui les publicités télévisuelles supportent 50 % du coût. »27
71. Nous comprenons que toute analyse de l’impact de la dissociation des forfaits doit
prendre en considération l’étendue de la migration des consommateurs vers des
services exclusifs à la carte (et en s’éloignant des offres de forfaits actuelles). Le Conseil
l’a souligné avec raison dans le décret C.P. 2013-1167. À ce sujet, nous encourageons le
Conseil à examiner les hypothèses de modélisation relativement conservatrices
(concernant les pertes anticipées d’abonnement et d’autres sujets) utilisées pour
l’analyse du milieu de la télévision disponibles aux pages 56 à 65.
Unifor recommande de :
Ne pas instaurer de services à la carte
72. Le risque pour les emplois, le financement de la production et la viabilité du système
causé par ce changement réglementaire est élevé. Le Conseil aurait intérêt à se
concentrer sur l’amélioration de l’offre d’une programmation de qualité dans le cadre
du système actuel, plutôt que de risquer de miner sa structure de revenus en vertu d’un
régime ambitieux et déstabilisant de services à la carte qui pourraient très certainement
(tel que souligné plus haut) contribuer à l’élimination d'émissions et de canaux
canadiens. En outre, Unifor n’est pas en faveur du dérangement inutile du système
actuel de radiodiffusion en combinant des forfaits minimalistes avec des services à la
carte (comme l’envisage le CRTC dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190).
Si le Conseil va de l’avant avec les changements aux blocs télévisuels des EDR, alors il
faut prendre en considération une offre progressive et mesurée
73. Si le Conseil décide d’imposer des changements à la manière dont les forfaits des
services de télévision par câble sont conçus et vendus (qu’il s’agisse de forfaits à la
26
Needham Insights; Pricing Strategies in a Digital World (8 mars 2011); page 2 27
Needham Insights; The Future of TV (11 juillet 2013); page 20
18
carte, sur mesure ou autre), Unifor estime qu’il est impératif que ce programme soit
offert progressivement et sous l’attention méticuleuse du Conseil, notamment en :
a. choisissant des lieux d’essais dans l'ensemble du pays, suivi d'une procédure de
dépôt public et d’analyse économique détaillée;
b. prévoyant une reddition des comptes publique sur les impacts sur les prix;
c. recueillant des données pour aider le Conseil à prévoir de manière plus précise
les conséquences sur les revenus et les impacts possibles sur les dépenses au
titre des émissions canadiennes et les contributions aux émissions d’intérêt
national.
Le maintien de la règle de prépondérance canadienne
74. L’élimination proposée de la règlementation de catégorie A est essentiellement liée aux
règles existantes assurant la protection des genres. Si la règlementation de catégorie A
est démantelée, Unifor estime que la règle de prépondérance canadienne va devenir un
outil politique de plus en plus important. L’absence de prépondérance de services de
programmation canadiens (conjuguée avec l’autorisation accordée à tous les services
étrangers d’être distribués au Canada) va ouvrir la porte à une concurrence étrangère
(notamment américaine) accrue qui pourrait potentiellement écraser les services
canadiens au détriment des émissions canadiennes.
75. Le maintien de la règle de prépondérance (si le Conseil va de l’avant avec les services à
la carte) pourrait aussi mitiger les impacts négatifs sur les emplois et les impacts
économiques soulignés plus haut ainsi que dans l'analyse du milieu de la télévision.
76. En outre, nous pensons que le test de « l’incidence négative indue » (proposé dans l’avis
de consultation de radiodiffusion 2014-190) comme protection contre des
conséquences dommageables possibles provenant d’une pleine entrée des services
étrangers au Canada est totalement insuffisant. Cette mesure est non seulement trop
subjective et imprévisible comme test, mais elle s’attaque au problème après qu’il ait
lieu. Des preuves tangibles pour démontrer l’incidence négative indue exigeraient
certainement des preuves de profondes réductions des émissions, de pertes d’emplois,
de perturbations des prix et d’autres facteurs qui seraient survenus après (et
potentiellement irréversibles). Quelle serait la pertinence de ce test pour corriger une
mauvaise situation? À notre avis, le Conseil devrait renverser le fardeau de la preuve de
ce test et exiger des distributeurs qu’ils démontrent que des services étrangers ne
causeraient « aucun dommage important » au système (ce test est particulièrement
pertinent pour la radiodiffusion ethnique au Canada). Le Conseil serait aussi tenu de
proposer un calendrier de surveillance clair, avec des mesures claires (sujettes à un
processus de consultation public et rigoureux) afin d’identifier ce qui constitue une
19
« incidence négative » sur le système.
Le maintien de la substitution simultanée
77. La substitution simultanée a été une politique utile sur le plan des revenus pour le
système télévisuel canadien et devrait être maintenue. Permettre aux radiodiffuseurs
canadiens de garantir des sources de revenus publicitaires en échangeant le signal des
émissions américaines (plus souvent qu’autrement) pour des publicités destinées au
marché canadien a du sens. Compte tenu des défis auxquels est confrontée la télévision
traditionnelle aujourd’hui sur le plan des revenus publicitaires, il est encore plus sensé
de maintenir cette politique qui a bien servi le système pendant des dizaines d’années.
78. Nous ne voyons aucune bonne raison pour que le Conseil restreigne ou élimine l’emploi
de la substitution simultanée à un moment où la télévision traditionnelle lutte déjà pour
sa survie.
79. Le Conseil évalue le bénéfice annuel de la transmission simultanée à près de 200
millions de dollars – ou près du double du montant des revenus annuels générés en
vertu du Fonds d’amélioration de la programmation locale (qui sera bientôt démantelé).
Nous pensons qu’il s’agit là d’un montant important de revenus qui contribue de
manière importante à la viabilité du système. Tel que souligné dans les estimations de
l’analyse du milieu de la télévision, l’élimination de la substitution simultanée
provoquerait une perte de près de 500 emplois en 2015. Nous craignons que les pertes
de revenus de cette étendue menaceraient aussi les plus petites stations.
80. Nous reconnaissons que des téléspectateurs ont exprimé un certain degré d'irritation au
Conseil en raison de conflits d'horaires des émissions, des erreurs de la transmission
simultanée et de l’incapacité de regarder les premières publicités du Super Bowl, par
exemple. Dans l’ensemble, la politique est encore pertinente pour le marché de la
télévision au Canada.
Les réformes du système télévisuel ne doivent pas miner par
inadvertance la programmation locale ni le contenu canadien
81. Nous sommes encouragés par les résultats du Conseil lors des étapes I et II de l’initiative
Parlons télé indiquant que la grande majorité des Canadiens perçoivent la
programmation de nouvelles locales comme un élément important de l’écosystème
télévisuel. En fait, selon le rapport de recherche quantitative de Parlons télé (diffusé en
20
avril 2014), les nouvelles locales se rangent parmi les plus importants types d’émission,
tel que mentionné par les répondants au sondage28.
82. Ce qui est encore plus encourageant porte sur le fait que les jeunes participants (âgés en
18 et 34 ans) perçoivent les nouvelles locales comme le plus important type d’émissions.
Plus de la moitié de tous les répondants estiment que les « émissions canadiennes » et
les « émissions locales » sont importantes aussi.
83. Le développement de la programmation canadienne et locale de qualité dépend des
ressources qui y sont investies. Ce qui comprend le financement des émissions, comme
le Fonds des médias du Canada de 300 millions de dollars (parmi d’autres fonds de
développement); les investissements publics dans la CBC/RC; et le Fonds d’amélioration
de la programmation locale. Le Fonds des médias du Canada, par exemple, a contribué à
soutenir 1,15 milliard de dollars en production télévisuelle en 2012/2013, y compris plus
de 26 000 emplois (mesurés en équivalents à temps plein)29.
84. Néanmoins, les ressources consacrées au renforcement de la programmation
canadienne et locale subissent des pressions. Les compressions budgétaires imposées à
la CBC/RC et la disparation du FAPL en août 2014 exercent des pressions sur la capacité
du système télévisuel à offrir un contenu local et régional de qualité aux
téléspectateurs. Les changements proposés au modèle de revenus en vertu de services
à la carte diminueraient aussi les contributions de financement au secteur de la
production (tel que souligné plus haut et dans l’analyse du milieu de la télévision).
85. Le Conseil a raison de souligner les défis structurels auxquels sont confrontées les
stations de télévision locales. Des pressions à la baisse sur les revenus publicitaires ont
perturbé l’ensemble du modèle d’affaire, sans que l’on sache clairement à quel moment
ces tendances vont être renversées. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-
190, le Conseil souligne que les revenus des stations privées de télévision locale ont
baissé de 100 millions de dollars entre 2011 et 2012. Un ajustement structurel prend
place, et aura des incidences négatives sur les services de programmation qui sont si
précieux pour plusieurs Canadiens.
86. La télévision locale est à un carrefour.
87. À ce jour, la réponse à ces tendances a été décourageante. Pour s’attaquer à ces
pressions sur les revenus, les détenteurs de licences demandent (ce qui n'est pas
surprenant) un allègement réglementaire sur les obligations actuelles liées à la
28
http://www.crtc.gc.ca/fra/publications/reports/rp140424.htm (mené par Harris/Decima pour le CRTC) 29
Rapport économique sur l’industrie de la production de contenu sur écran au Canada, 2013
21
programmation. Au cours des douze derniers mois, par exemple, des demandes ont été
faites pour ajuster la manière dont les exigences liées à la programmation locale sont
mesurées30, ainsi que pour diminuer les seuils réglementaires sur les services de
programmation ethnique et étrangère31. Dans d’autres cas, des emplois et des
émissions sont coupés.32
88. Nous prévoyons d’autres pressions exercées sur le Conseil pour alléger les exigences en
matière de diffusion d’émissions locales lors des prochains renouvellements de licences
à moins que des mesures soient prises pour s’attaquer à ces défis sur le plan du
financement. Nous prévoyons aussi que ces pressions seront exacerbées par une
réduction des sommes investies dans les dépenses au titre des émissions canadiennes si
les services à la carte sont introduits.
89. Le Conseil a soulevé des questions pertinentes dans son avis de consultation [Q23-Q27]
qui préoccupent la plupart des intervenants, y compris Unifor. « Existe-t-il des manières
alternatives d’encourager la programmation locale? »; « Quel rôle, le cas échéant,
devrait jouer le Conseil pour s’assurer de la présence d’une programmation locale? »;
« Quelles mesures pourraient être mises en place? ». Ces questions sont fondamentales.
Néanmoins, il est décourageant de constater que le Conseil a consacré une quantité
importante de temps et d’attention pendant ses consultations dans le cadre de Parlons
télé à proposer des solutions pour s’attaquer aux enjeux entourant le choix des
consommateurs (en élaborant une proposition sur les assemblages souples), mais très
peu d’attention sur le problème nettement plus important (à notre avis) concernant la
programmation locale.
90. La seule solution tangible proposée par le Conseil dans l’avis de consultation de
radiodiffusion était d'envisager l'élimination de la transmission de la télévision en direct.
Apparemment, cette mesure libèrerait du capital qui pourrait être redirigé vers le
renforcement des revenus épuisés aux stations locales. Les sommes que cette
proposition génèrerait pourraient servir à compenser certaines des pertes qui vont avoir
lieu lorsque le FAPL cessera d’exister. Cependant, il n’est pas garanti que ce nouveau
revenu retourne à la production interne et à la programmation, et proviendrait aussi
aux dépens d'un accès important à la télévision, notamment pour les auditoires en
régions éloignées, rurales et à faibles revenus. Le coût de l’élimination de la
transmission de la télévision en direct est un prix trop cher à payer.
30
Amendement à une condition de licence (obligations de programmation locale), demande 2013-1475-7 31
La demande de renouvellement des licences de radiodiffusion de Rogers pour les stations traditionnelles de langue anglaise et les stations ethniques multilingues, et pour certains services spécialisés, Avis de consultation de radiodiffusion 2014-26 32
http://www.caj.ca/cuts-at-rogers-and-cbc-will-hurt-canadians-caj/
22
Unifor recommande :
Le maintien du FAPL
91. Ultimement, toute conversation entourant la protection et l’amélioration de la
programmation locale doit résoudre les problèmes liés aux revenus auxquels la
télévision locale est confrontée. À un certain niveau, cette conversation porte sur l'accès
et l'inclusion. Il existe des moyens novateurs que les stations locales (en coordination
avec leurs plus grandes organisations) peuvent explorer pour offrir des services aux
auditoires, qu'il s'agisse de contenu ou de plateforme. À un autre niveau, l’amélioration
de la télévision locale est une question d'argent et de ressources. À notre avis, ce défi
immédiat doit être relevé.
92. La décision du Conseil d’éliminer progressivement le FAPL était fondée sur l’idée
optimiste que la baisse des revenus des services de la télévision locale était cyclique
plutôt que structurelle.
93. Le déclin des revenus publicitaires de la télévision traditionnelle semble irréversible33.
De nouveaux modèles de financement doivent être envisagés à court terme avant que
le système ne se replie davantage afin d’éviter d’autre pertes en termes de couverture
journalistique sur le terrain, de réduction d'autres émissions locales (remplacées par des
émissions nationales souscrites), et possiblement d’autres pressions de la part des
détenteurs de licences cherchant à alléger davantage les règles de diffusion. La
télévision locale est un point faible du cadre télévisuel plus large et elle doit être
protégée.
94. Ce n’est pas le moment de mettre fin au Fonds d’amélioration de la programmation
locale, et Unifor recommande que le Conseil offre un répit aux stations locales ayant
accès au Fonds. Le FAPL devrait être prolongé temporairement en rétablissant le 1,5 %
de frais de détournement des revenus des EDR. Le Conseil devrait envisager un
financement à long terme du FAPL par d’autres moyens, notamment en générant des
recettes de l’utilisation étendue de la diffusion de vidéos en ligne34 (dédiant une partie
des nouvelles dépenses au titre des émissions canadiennes au FAPL) bénéficiant aux
EDR (ainsi qu’aux fournisseurs de services Internet), en plus des fonds générés en
fonction d'une part des futurs bénéfices tangibles de la programmation locale35.
Précision de la définition de la programmation locale
33
Peter Miller souligne cet argument dans l’analyse du milieu de la télévision, 2014 [10.22] 34
Ibid, voir l’argument de Miller au point 4.15, suggérant que les EDR obtiennent une marge bénéficiaire plus élevée en tant que fournisseurs de services Internet auprès d’un nombre accru de consommateurs écoutant des vidéos en ligne. 35
Voir le mémoire d’Unifor, janvier 2013: Appel aux observations sur l’approche du Conseil concernant les avantages tangibles et la façon de déterminer la valeur de la transaction, Avis de consultation de radiodiffusion du CRTC 2013-558 (Ottawa, 21 octobre 2013)
23
95. Nous exhortons le Conseil d’enclencher un processus ayant pour but de définir
clairement les émissions de nouvelles locales, y compris les émissions autres que les
nouvelles, afin de s’assurer qu’il fasse la distinction, notamment, entre les segments
originaux et rediffusés, et de contribuer à l’atteinte d’objectifs clairs et sans équivoque.
Les dépenses au titre de la programmation locale originale interne (en les distinguant de
la programmation originale de nouvelles locales) devraient être surveillées
attentivement par le Conseil, rapportées annuellement par les radiodiffuseurs (sur une
base de services distincts) et examinées lors des audiences régulières sur l’attribution
des licences.
96. Nous exprimons des frustrations et préoccupations semblables à celles de l’intervention
de la Guilde des écrivains du Canada. L'absence d’une date précise (désagrégée) et
exacte concernant les dépenses sur des sujets comme les dépenses au titre des
émissions locales originales produites à l’interne ainsi que les dépenses au titre des
émissions canadiennes et des émissions d’intérêt national ne fait qu’augmenter la
difficulté à établir des recherches pertinentes basées sur des données probantes, ainsi
qu’une modélisation économique au moment du renouvellement des licences et
d'autres consultations publiques. Nous appuyons la Guilde des écrivains canadiens dans
son exhortation au Conseil à s’attaquer à cette question.
Le renforcement des exigences en matière de diffusion pour la programmation locale
originale
97. Le Conseil devrait demander des exigences minimales de 14 heures d’émissions chez les
télédiffuseurs locaux au moment des prochaines audiences sur le renouvellement des
licences par groupe de propriété en 2016 (peu importe la taille du marché en question),
ce qui comprend aussi des heures de programmation « originale » obligatoires. Ces
nouvelles exigences, plus agressives, en matière de programmation locale originale
pourraient aussi être imposées auprès d'un éventail de plateformes de radiodiffusion, y
compris la diffusion de contenu en ligne.
Couverture obligatoire sur le terrain
98. Lors de prochains renouvellements de licences, le Conseil devrait établir des seuils
minimaux pour les journalistes couvrant les nouvelles locales. Plus tôt cette année,
Unifor a soulevé des inquiétudes concernant les demandes de renouvellement de
licences de Rogers pour CJEO (OMNI-Edmonton) et CJCO (OMNI-Calgary) en notant que
le radiodiffuseur n’exploite pas un bureau de nouvelles chargé de rapporter des
nouvelles ethniques locales originales dans la province de l’Alberta, en dépit de licences
accordées pour exploiter deux stations de télévision ethniques en direct. Si la
programmation locale et les nouvelles locales sont aussi importantes aux Canadiens que
ce qui a été rapporté, cette pratique devrait être perçue par le Conseil comme
24
totalement inacceptable et être corrigée par cet examen du système télévisuel. Le
Conseil devrait aussi exiger des radiodiffuseurs qu’ils fassent rapport sur ces niveaux
d'affectation de personnel chaque année.
Préserver (et renforcer) la radiodiffusion ethnique
99. Le Conseil doit s’assurer que toute réforme réglementaire actuelle et future ne limite ou
ne restreigne pas l’accès à la programmation de tierce langue et ethnique qui est offerte
aux collectivités au pays. Les changements réglementaires proposés dans l’avis de
consultation de radiodiffusion 2014-190 pourraient affecter négativement les
radiodiffuseurs ethniques de catégorie A, créant de l’espace pour des services étrangers
pouvant supplanter d’importants services canadiens. C’est une situation inacceptable.
Tout changement réglementaire qui aurait une incidence sur la radiodiffusion ethnique
devrait être mis en suspens en attendant un examen de la Politique relative à la
radiodiffusion à caractère ethnique du CRTC.
100. Toute réforme que le Conseil entreprend (par exemple offrir un ensemble minimaliste
d’émissions conjointement avec des services à la carte), doit :
a. exiger des stations OMNI qu’elles soient distribuées à l’intérieur du forfait de
base peu importe qu’elles soient locales ou non; et
b. réserver de l’espace sur le signal « minimaliste » pour d’autres services
ethniques qui ne remplissent pas les mêmes créneaux de programmation.
Aborder la question de l’avenir de la CBC/RC
101. Tel que souligné plus haut, l’absence notable de toute référence à la CBC/RC dans l’avis
de consultation de radiodiffusion 2014-190 est préoccupante. Unifor croit en un
radiodiffuseur public national qui soit bien financé, robuste, dynamique et non
commercial. La CBC/RC est un élément vital de l’ensemble de l’écosystème télévisuel, et
(à toutes fins pratiques) elle est menacée.
102. Unifor encourage le Conseil a prévoir une audience sur l’avenir de la CBC/RC après
l’étape III de la consultation de Parlons télé et qui soit en lien avec l’examen plus général.
Repenser la télévision et révolutionner la règlementation en matière de
radiodiffusion: une approche dynamique, tournée vers l'avenir, du CRTC
est nécessaire
103. Il est encourageant de savoir que le Conseil est prêt à envisager d’intégrer les services
de programmation pour le contenu en ligne et VSD dans le cadre réglementaire plus large
(quant aux contributions des dépenses au titre des émissions canadiennes). Unifor perçoit
25
cela comme une étape dans la bonne direction et un effort de modernisation du cadre de
travail réglementaire de la télévision qui est sur le point de connaître une transformation
fondamentale à long terme.
104. Pour certains, l’émergence de services par contournement fiables (et abordables) et de
services télévisuels par Internet va attirer une masse critique de consommateurs,
menaçant l'existence du système télévisuel traditionnel. En fait, un rapport sur le marché
du secteur des médias réalisé par Scotia Capital en novembre 2013 souligne que les
services par contournement représentent « le principal risque pour les radiodiffuseurs de
télévision payante au Canada »36 . Nous sommes d’accord qu’il y a un risque important au
système de télévision canadien de la croissance sans surveillance des services par
contournement sans licence.
105. Nordicity rapporte que le tiers des Canadiens de 18 ans et plus regardait des émissions
de télévision sur Internet en 2011. La part d’adultes regardant la télévision en ligne a plus
que doublé en cinq ans.37 Les fournisseurs de services par contournement comme Netflix,
YouTube, iTunes, Apple TV et d’autres gagnent en popularité38, bien qu’il reste à voir
jusqu’à quel point les consommateurs coupent réellement le cordon des services de
télévision traditionnelle et quelle est l’incidence néfaste à court terme39.
106. En fait, l’immédiateté de l’incidence des services par contournement (ainsi que la
présence de programmeurs et d’agrégateurs de contenu en ligne) sur l’écosystème
télévisuel n’est pas notre principale préoccupation. Bien qu’il ne fasse aucun doute que la
menace soit réelle et imminente.
107. Le succès de cette consultation Parlons télé pourrait certainement influencer la manière
que le Conseil aborde la question entourant l’inclusion des services par contournement.
Les lignes entre les radiodiffuseurs et distributeurs traditionnels et les services par
contournement, comme Netflix, sont non seulement de plus en plus floues, mais il y a une
incidence certaine de ces services sur les autres. La question est de savoir quel sera le
point critique, et est-ce que le système tel que nous le connaissons aujourd’hui sera
suffisamment prêt?
36
Scotia Capital Inc. Progress Amid Digital Transformation: A Macro Perspective on the Trends Impacting Investments in the Media Sector; novembre 2013. 37
Nordicity, The Economic Contribution of the Film and Television Sector in Canada; juillet 2013. 38
En date de 2012, Netflix avait plus d’abonnés canadiens (3,5 millions) que la télévision payante, et il est prévu que le nombre augmente à 4,5 millions d’ici la fin de 2014 (OTT – Nearing an Inflection Point, Canaccord Genuity, Aravinda Galappatthige et Haesu Lee, 3 juin 2014). 39
Voir Deloitte, « The Reality of Cord Cutting in North America. » http://www2.deloitte.com/content/dam/Deloitte/global/Documents/Technology-Media-Telecommunications/dttl_TMT_Predictions2013_RealityofCordCuttingNA.pdf Le rapport note que moins de 1 % des abonnés à la télévision payante en Amérique du Nord auront interrompu leur abonnement en 2013.
26
108. Le Conseil déclare que « les services de radiodiffusion acheminés par Internet ou sur des
appareils mobiles… font partie du système de télévision » (paragraphe 15), et reconnaît
que « Le mandat du Conseil est de réglementer et de surveiller tous les aspects du
système canadien de radiodiffusion en vue de mettre en œuvre les objectifs de la
politique de radiodiffusion énoncés à l’article 3(1) de la Loi » (paragraphe 33). Pourtant,
le Conseil semble étrangement à l’aise avec le maintien de l’exemption des services par
contournement.
109. Comme Miller le souligne dans son analyse du milieu de la télévision, les services par
contournement au Canada représentent près de 2,5 % des revenus du système
présentement. En 2020, ils pourraient « facilement représenter 10 % ». Nous convenons
avec Miller que les conséquences de cette situation ne peuvent être ignorées. Non le
moindre étant les contributions sous la moyenne des services par contournement,
comme Netflix, au contenu canadien et à la programmation canadienne. Pour
l'essentiel, il s'agit d'une contribution volontaire de Netflix de diffuser du contenu
canadien alors que les faits démontrent que la proportion est nettement sous la
moyenne des autres radiodiffuseurs en ligne au Canada40.
Unifor recommande :
Une collecte plus approfondie de données sur les fournisseurs de services par
contournement (OTT), dont les services étrangers opérant au Canada
110. En nous appuyant sur l’analyse fournie au Conseil par Miller et Rudniski en 2012, nous
pensons qu’il est impératif que le CRTC s’engage dans une surveillance rigoureuse de la
présence des services par contournement dans le marché de la télévision au Canada, y
compris les niveaux de contenu canadien et la diffusion par les fournisseurs de services
par contournement. Il y a de bonnes raisons pour que le Conseil développe des « points
de bascule » prédéfinis qui vont déclencher une discussion plus approfondie sur une
intervention possible.
Mettre à jour la définition des revenus de radiodiffusion pour représenter toutes les
activités de radiodiffusion des détenteurs de licences
111. Il s’agit là d’une première étape importante (et raisonnable) d'aborder la fuite des
revenus du système, et elle devrait être entreprise par le Conseil pour les raisons
exprimées plus haut. La radiodiffusion évolue et le système réglementaire devrait aussi
évoluer. Nous percevons cette évolution comme inévitable et elle fournira des leçons
utiles pour le développement réglementaire futur. Les EDR et les entreprises à structure
verticale sont bien placées financièrement pour appuyer cette exigence, bien que le
Conseil devrait faire attention de ne pas miner leur position concurrentielle parmi les
40
Forum for Research and Policy in Communications, « Canadian Content in Online TV » (en anglais)
27
services par contournement et en ligne comparables.
112. Cette mesure devrait être prise seulement de concert avec un examen plus complet des
modèles de contribution et d’attribution de licence alternatifs pour les services par
contournement opérant au Canada. Le Conseil doit s’assurer de ne pas créer de
déséquilibre dans les règles du jeu de la concurrence entre les radiodiffuseurs
détenteurs de licences et les autres radiodiffuseurs en ligne et les agrégateurs. À cet
égard, nous appuyons et encourageons le Conseil à prendre en considération la
proposition des Amis de la radiodiffusion canadienne dans leur intervention à l’avis de
consultation de radiodiffusion 2014-190 concernant l’exigence de 10 % de contribution
obligatoire de la part des services par contournement opérant au Canada. Ces fonds
seraient dirigés vers les dépenses au titre de la programmation canadienne ainsi que
vers les parties tierces.
113. Nous estimons que cette proposition est utile (et concrète), et nous exhortons le Conseil
à la prendre sérieusement en considération.
V-Remarques finales
114. Unifor souhaiterait comparaître devant le Conseil lors des audiences prévues en
septembre 2014. Notre syndicat sera au cœur de son premier Conseil canadien qui se
tiendra à Vancouver, en Colombie-Britannique. Nous serons disponibles pour participer
aux audiences en septembre à Ottawa les 8 et 9 septembre. Nous serons disponibles de
participer de Vancouver les 10, 11, 12 et 15 septembre. Nous serons encore disponibles
à Ottawa le 16 septembre et par la suite.
Présenté par :
Howard Law, Directeur du secteur des médias d'Unifor Randy Kitt, Président du Conseil des médias d’Unifor Angelo DiCaro, Service de recherche d’Unifor
***FIN DU DOCUMENT***
ADC/kw:sepb.343
28
Le 27 juin 2014
John Traversy
Secrétaire général
CRTC
Ottawa, Ontario K1A 0N2
OBJET : Étape 3 de Parlons télé : une conversation avec les Canadiens
(Avis de consultation de radiodiffusion CRTC 2014-190)
Monsieur le secrétaire général,
1. Au nom d’Unifor, le nouveau syndicat national créé le 31 août 2013, nous avons le plaisir de
vous présenter l’intervention en pièce jointe relativement à l’avis de consultation de
radiodiffusion 2014190.
2. Créé par la fusion du Syndicat canadien des communications, de l’énergie et du papier et des
Travailleurs canadiens de l’automobile, Unifor compte plus de 300 000 membres travaillant dans
20 secteurs économiques partout au Canada.
3. Unifor est l’un des plus grands syndicats du secteur des médias au Canada, représentant plus de
12 500 travailleurs dont 5 000 dans les industries de la radiodiffusion et du cinéma.
4. Unifor demande au Conseil de prendre en considération les commentaires suivants dans ses
délibérations sur la phase 3 de son examen complet du système de télévision au Canada
(« Parlons télé »).
5. Unifor attend avec intérêt la décision du CRTC sur la question et demande de comparaître
devant le Conseil lors des audiences censées commencer le 8 septembre 2014.
Sincères salutations,
Howard Law
Directeur, secteur des médias
416-456-1675 (cell.)
905-678-7868 (bureau)