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Makromol. Chem. 180,2947-2969 (1979) 2941 Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires”), 1 Modele mathematique et systemes d’ordre I Dominique Durand*, Claude-Marcel Bruneau Laboratoire de Physico-Chimie Macromoleculaire, Equipe de Recherche Associee au C.N.R.S., Faculte des Sciences, Route de Laval, 72017 Le Mans Cedex, France (Date de reception: 7 juin 1978) SUMMARY Markov chain theory combined with graph theory gives a mathematical model for the description, in li- near elements, of the random evolution of polymerizing macromolecular systems. Applying this mathemati- cal model to the study of molecular distribution in linear systems of order I, i.e. systems having identical functional groups (a link being able to occur between any two sites), allows one to obtain molecular distri- bution functions with a general form which can be applied to many different systems. The use of matrix cal- culus gives simple mathematical expressions which are well suited for computer programming. I. Introduction La theorie des chaines de Markov, permet de decrire l’evolution de graphes stochastiques representatifs de divers systemes macromoleculaires‘).Elle permet, en particulier, de caracten- ser avec generalite les distributions moleculaires dans les systemes macromoleculaires lineaires, c’est-a-dire composes uniquement de monomeres monofonctionnels et bifonctionnels. C‘est ce dernier aspect que nous developpons dans ce travail. L’etude des distributions moleculaires dans les polycondensats lineaires a ete envisagee, par le passe, essentiellement par deux methodes, une methode statistique nee des premiers travaux de Flory’), et une methode cinetique issue des etudes de Dostal et reprise, d‘ailleurs, plus recemment par Margerison et East’) d’une part, Watterson et Stafford6)d’autre part. A la suite de Flory, de nombreuses etudes theoriques’- ’*), basees sur un modele probabiliste, ont ete realisees essentiellement par Case*-”) sur des distributions moleculaires de polycondensats lineaires presentant des differences de rtactivite intrinseque entre sites d’une m&me espece. La generalite du modele mathematique que nous proposons ici et qui est base d’une part, sur la theorie des graphes et d’autre part, sur la theorie des chaines de Markov, permet d’obtenir pour les systemes macromoleculaires lineaires, des fonctions de distribution moleculaire qui, grlce a leurs expressions matricielles, peuvent s’appliquer a l’etude de systemes vanes et com- plexes. La nature des sites reactifs portes par les monomeres, nous amene a considerer deux ty- pes de systemes: a) les systhes homogames OM d’ordre I dont les sites appartiennent a une espece unique a l’interieur de laquelle une liaison peut s’etablir entre deux quelconques des sites; c’est le cas par exemple des systemes formant des polyethers, des polyanhydrides, des polysiloxanes. Extrait de la these de doctorat d’Etat de D. Durand, Paris VI - Le Mans, 1976.

Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

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Makromol. Chem. 180,2947-2969 (1979) 2941

Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires”), 1

Modele mathematique et systemes d’ordre I

Dominique Durand*, Claude-Marcel Bruneau

Laboratoire de Physico-Chimie Macromoleculaire, Equipe de Recherche Associee au C.N.R.S., Faculte des Sciences, Route de Laval, 72017 Le Mans Cedex, France

(Date de reception: 7 juin 1978)

SUMMARY Markov chain theory combined with graph theory gives a mathematical model for the description, in li-

near elements, of the random evolution of polymerizing macromolecular systems. Applying this mathemati- cal model to the study of molecular distribution in linear systems of order I, i.e. systems having identical functional groups (a link being able to occur between any two sites), allows one to obtain molecular distri- bution functions with a general form which can be applied to many different systems. The use of matrix cal- culus gives simple mathematical expressions which are well suited for computer programming.

I. Introduction

La theorie des chaines de Markov, permet de decrire l’evolution de graphes stochastiques representatifs de divers systemes macromoleculaires‘). Elle permet, en particulier, de caracten- ser avec generalite les distributions moleculaires dans les systemes macromoleculaires lineaires, c’est-a-dire composes uniquement de monomeres monofonctionnels et bifonctionnels. C‘est ce dernier aspect que nous developpons dans ce travail.

L’etude des distributions moleculaires dans les polycondensats lineaires a ete envisagee, par le passe, essentiellement par deux methodes, une methode statistique nee des premiers travaux de Flory’), et une methode cinetique issue des etudes de Dostal et reprise, d‘ailleurs, plus recemment par Margerison et East’) d’une part, Watterson et Stafford6) d’autre part. A la suite de Flory, de nombreuses etudes theoriques’- ’*), basees sur un modele probabiliste, ont ete realisees essentiellement par Case*-”) sur des distributions moleculaires de polycondensats lineaires presentant des differences de rtactivite intrinseque entre sites d’une m&me espece.

La generalite du modele mathematique que nous proposons ici et qui est base d’une part, sur la theorie des graphes et d’autre part, sur la theorie des chaines de Markov, permet d’obtenir pour les systemes macromoleculaires lineaires, des fonctions de distribution moleculaire qui, grlce a leurs expressions matricielles, peuvent s’appliquer a l’etude de systemes vanes et com- plexes. La nature des sites reactifs portes par les monomeres, nous amene a considerer deux ty- pes de systemes:

a) les s y s t h e s homogames O M d’ordre I dont les sites appartiennent a une espece unique a l’interieur de laquelle une liaison peut s’etablir entre deux quelconques des sites; c’est le cas par exemple des systemes formant des polyethers, des polyanhydrides, des polysiloxanes.

Extrait de la these de doctorat d’Etat de D. Durand, Paris VI - Le Mans, 1976.

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b) les systemes heterogames dont les sites appartiennent a plusieurs especes, les liaisons s’e- tablissant exclusivement entre paires de sites appartenant a des especes bien determinees. Nous envisagerons ici uniquement des systemes hetkrogames d’ordre ZZ, c’est-a-dire comportant des sites n’appartenant qu’a deux especes distinctes A et B coreactives. Par exemple, les sites A peuvent &re des sites acide et les sites B, des sites alcool: c’est le cas des polyesters. Dans le cas des polymeres obtenus par reaction du type Diels-Alder, les deux doubles liaisons conjuguees du diene peuvent &re considerees comme un site A et la double liaison du dienophile comme un site B.

Nous raisonnerons dans un premier temps sur des systemes a sites equireactifs dans l’espace et dans le temps. Dans ce cas, nous avons montre‘) que si, dans notre modtle, le nombre des unites monomeres tend vers l’infini, la probabilite de reactions intramoleculaires conduisant a des structures cycliques tend vers zero tant qu’il n’y a pas de molecule de taille infinie, c’est-a- dire gelification; or, les systhes lineaires ne gelifient pas. Aussi, dans notre modele, en ne de- crivant que les molecules non cycliques, nous aurons decrit la totalite des molecules constituti- ves des systemes envisages. Notons que les etudes theoriq~es’~-‘~) et experimentales, bastes sur la determination du taux d’avancement de la reaction et la mesure de la masse moleculaire mo- yenne en n~mbre”- ’~) , montrent clairement que le pourcentage de cyclisation pour un tres grand nombre de systemes lineaires polycondenses en masse est tres faible et peut &re negli- ge.

11. Modele mathematique

Le modele mathematique propose ici est general et peut s’appliquer egalement, comme nous l’avons montre par ailleurs‘), a la description de chaines ou d’elements de chaines lineaires con- stitutifs de reseaux macromoleculaires. Aussi, si pour le lecteur, l’abstraction du modele mathe- matique developpk ici, peut ne pas paraitre indispensable pour traiter la distribution molecu- laire dans les systemes lineaires d’ordre I, elle s’avere necessaire pour permettre une etude CO-

herente et homogene des diverses descriptions que nous avons envisagees’) et qui seront publie- es ulterieurement. Ce modele mathematique comporte deux aspects: un modele topologique (A) et un modele stochastique (B).

A . Modde topologique

Dans le modele topologique, nous montrons comment l’kvolution d‘un systeme macromole- culaire, dans le sens de sa synthese aussi bien que dans celui de sa degradation, peut &re repre- sente par une succession de graphes. La theorie des graphes a et6 appliquee tres t6t a la chimie organique, c’est ainsi que les theories combinatoires de Cayley”), vers 1830 et Polya”), vers 1937 fournirent les bases necessaires a l‘etude du denombrement des isomeres. Depuis lors, de nombreuses applications de la theorie des graphes a la chimie ont ete developpees et l’ouvrage r h n t de BalabanZ2) en met bien en evidence les multiples facettes. Dans le domaine qui nous interesse plus particulierement ici, nous mentionnerons les travaux de Gordon et coll. qui pu- blierent dans un serie d’articles intitults: ((Graph-like State of Matter)) ‘‘,23-26) un certain nom- bre de considerations generales sur la structure de la matiere.

Les differentes donnees de la theorie des graphes que nous utiliserons ici sont tirees des OUV-

rages de Berge”) d’une part, et Harary”) d’autre part. Nous definirons tout d’abord les notions de site, graphe monomerique, graphe polymerique et graphe de soutien.

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1. Sites

Soit un ensemble S = (siJiP,, I = {1,2, ... ,N} dont les elements sont appeles ((sites)) et repres- entent l'ensemble des sites reactifs du systeme considere. Nous supposerons toujours que le car- dinal s des sites est pair.

Soit une partition E de S definie par une famille I? de parties deux a deux disjointes, de reu- nion S, notees Ej , j E J, J = { 1,2 ... , n} et appelees ((especes)).

8= {Ej}, jEJ

Nous n'envisagerons ici que des systemes contenant une ou deux especes; dans les systemes d'ordre Z, il n'y a pas de partition de S, dans les systdmes d'ordre ZZ, nous avons une partition de S en deux ensembles disjoints A et B, representant les deux especes de sites coreactifs.

de parties deux a deux disjoin- tes, de reunion s, notees MI,, k E K, K = { 1,2 ... m} et appelees ((monomeres).

Soit une deuxikmepartition M de S definie par une famille

M = {Mk}, kEK

Ces ensembles de sites representent les monomeres constituant le systeme.

2. Graphe monomerique M

I1 est defini par l'ensemble S et l'application M de S dans S constituee par la partition M de S dtfinie ci-dessus. L'application M se traduira sur le graphe par un ensemble d'arktes que nous appelerons liaisons de structure et qui joignent les couples de sites appartenant a un m&me mo- nomere. Le graphe monomerique M a donc pour sommets l'ensemble S des sites et pour aretes, l'ensemble des liaisons de structure. Chaque composante du graphe M est un graphe complet et represente un monomere. L'ensemble des composantes du graphe monomerique constitue l'en- semble des monomeres et represente donc le systeme a l'instant initial, au seuil de son evolu- tion chimique.

Les differentes composantes du graphe monomerique, comme les monomeres chimiques qu'elles representent, pourront &re classees selon deux criteres: la fonctionnalitt, (c'est-a-dire le nombre de sites appartenant a chaque composante) et la composition; ce dernier critere n'a evi- demment de sens que si les sites reactifs appartiennent a plusieurs especes (systemes d'ordre

Tab. 1. Representation schematique des elements constitutifs des graphes monomenques dans le cas des systemes lineaires

S y s t e m e d'ordre I

0 0

Site Liaison de structure Monomere monofonctionnel

S y s t e m e X 0 - d'ordre I1 A B

X

0

Sites Liaison de structure Monomeres monofonctionnels

0-0

Monomere bifonctionnel

x-x x-0 0-0 Monomer e s bifonctionnels

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3 11). Deux monomeres seront de meme nature s'ils ont m&me fonctionnalite et m&me composi- tion.

Les representations schematiques des elements constitutifs des graphes monomeriques dans le cas des systemes lineaires sont donnees dans le Tab. 1.

3. Graphe polymerique T

Entre les divers monomeres qui constituent le graphe monomerique M, par l'intermediaire des sites reactifs qui le composent, la reaction chimique R engendre une partition conduisant a la formation d'ensembles disjoints de monomeres lies entre eux qui constituent les molecules du polymere. Cette application R de M dans M se traduit sur le graphe par des aretes entre mo- nomeres - ou plus exactement entre sites constituant les monomeres - que nous appelerons liai- sons d'kvolution et qui correspondent aux liaisons chimiques. Leur nombre depend donc sim- plement du taux d'avancement de la reaction.

Le graphe polymerique T a donc pour sommets l'ensemble des monomeres constituant le graphe monomerique M et pour aretes l'ensemble des liaisons d'evolution correspondant au taux d'avancement de la reaction. Les composantes du graphe T representent l'ensemble des molkcules existant dans le systtme macromolkculaire.

4. Graphe de soutien g du systeme. Prockdure de generation

A partir du graphe monomtrique M d'un systeme considere, nous allons construire, pour un taux d'evolution donne du systeme, un graphe aleatoire, appele graphe de soutien du systeme, par la prockdure suivante:

Cas du s y s t h e d'ordre I:

- Dans un premier temps, nous tirons au hasard uniforme un site monofonctionnel parmi les N, sites monofonctionnels du graphe monomerique M. Puis, parmi les sites monofonctionnels restants, nous tirons un deuxieme site et nous joignons le couple de sites ainsi tires par une are- te que nous appelons non-liaison de structure. Nous poursuivons ce tirage jusqu'a ce que nous ayons tire N m / 2 couples de sites monofonctionnels.

- Dans un deuxieme temps, nous tirons un site parmi tous les sites du graphe monomerique M; puis, parmi les sites restants, nous tirons un deuxieme site que l'on joint au premier site tire, par une ar&te. Nous recommenCons la meme prockdure jusqu'a Cpuisement des s sites. Nous avons ainsi forme s/2 aretes. (Rappelons que nous avons pris comme hypothese que le cardinal des sites est toujours pair). - Dans un troisieme temps, nous considtrons l'ensemble des aretes formtes dans la deuxieme

ktape et pour chacune d'elles, nous effectuons un tirage independant: avec la probabilitt p , l'arete sera appelee liaison d'evolution, avec la probabilite (1 - p ) elle sera appelee pre-liaison d'kvolution. Nous avons ainsi construit un des graphes de soutien possibles du systeme.

Cas du s y s t h e d'ordre II:

- Premierement, nous tirons un site monofonctionnel parmi les N , sites monofonctionnels du graphe monomerique M. Puis parmi les sites monofonctionnels restants, nous tirons un deu-

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xieme site et nous joignons le couple de sites ainsi tires par une ar&e que nous appelons non-li- aison de structure. Nous poursuivons ce tirage jusqu'a epuisement des N,-sites monofonction- nels. - Deuxiemement, nous tirons un site parmi les sites formant l'espece exddentaire, B par

exemple. Puis, parmi les sites B restants, nous tirons un autre site et nous joignons le couple de sites B ainsi tires par une ar&te que nous appelons non-liaison d'evolution. Nous continuons ce tirage jusqu'a ce que nous ayons tire (Ns - N A ) / 2 couples de sites B.

- Troisiemement, parmi l'ensemble des sites B restants a la fin de cette seconde etape et l'en- semble des sites A, nous tirons un site, soit A par exemple. Nous tirons alors un autre site parmi l'espece adjacente a celle du premier site tire, soit ici B. Puis nous relions ce couple de sites (A, B) par une arete. Muni de cette procedure, nous continuons le tirage jusqu'a epuisement des si- tes A et B. - Pour chacune des ar&tes ainsi formees, on effectue un tirage independant avec la probabili-

tip,, l'arkte sera appelke liaison d'evolution, avec la probabilite (1 -pA), elle sera appelee pre- liaison d'evolution. Nous avons ainsi construit un des graphes de soutien possible du syste- me.

Le sous-ensemble du graphe de soutien g, compose par l'ensemble des sites, des liaisons de structure et des liaisons d'evolution constitue un graphe polymerique qui est une des represen- tations possibles du systeme a ce stade de son evolution.

Les elements constitutifs des graphes de soutien engendres par la proddure precedente et qui seront utilises dans le modele stochastique sont donc les suivants:

- les sommets qui representent les sites reactifs du systeme se repartissent en diverses classes selon le type des sites, le type d'un site etant caracterise a la fois par l'espece du site et la nature du monomere qui le porte. - les arCtes qui lient entre eux les sommets se repartissent en deux grandes categories: (1) les

argtes de structure et (2 ) les arCtes d'evolution. (1) Les arktes de structure se divisent elles-m&mes en deux types: les liaisons de structure qui

joignent deux a deux tous les sites appartenant a un m&me monomere et les non-liaisons de structure qui unissent deux sites monofonctionnels independemment de l'espece a laquelle ils appartiennent.

(2) Les aretes d'evolution se repartissent en trois types: les liaisons d'evolution qui unissent deux sites ayant reagi mutuellement; lespreliaisons d'evolution qui unissent deux chimiquement coreactifs n'ayant pas reagi et les non-liaisons &evolution qui n'existent que dans les systemes d'ordre I1 non stoechiometriques et qui joignent deux sites de l'espke exddentaire.

Tab. 2. Representation schematique des differents types d'aretes presentes dans les graphes de soutien

Liaisons Anti-liaisons

Structure: - - - - - - Liaison de structure Non-liaison de structure

Aretes

I Evolution: - - - - - - ,

Pre-liaison devolution

Non-liaison d'evolution Liaison d'evolution + + + + + +

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Nous serons egalement amenes a etablir une autre classification des arCtes en 2 grandes clas- ses: d’une part, les liaisons qui regroupent les liaisons de structure et les liaisons d’evolution et d’autre part, les antiliaisons qui regroupent les non-liaisons de structure, les pre-liaisons d’evo- lution et les non-liaisons d’tvolution.

Les representations schematiques de ces differents types d’arCtes sont consignees dans le Tab. 2.

Nous dirons qu’une chaine est liante lorsque la sequence d’arCtes comprise entre les extremi- tes n’est constituee que de liaisons.

5. Taux d’evolution d‘un systeme macromoleculaire

Le taux d‘evolution est mesure par la proportion des liaisons d‘evolution realisees parmi les liaisons chimiquement realisables, c’est-a-dire, les liaisons d‘evolution et les pre-liaisons d’evo- lution. Le taux d‘evolution designe egalement la probabilite de realisation d’une liaison parmi les liaisons chimiquement realisables.

Dans les systemes d’ordre I, nous designerons par p le taux d‘evolution. Dans les systemes d’ordre 11, nous designerom par r le rapport du nombre NA de sites A au

nombre NB de sites B et parpA et p B , les proportions respectives des sites A et B qui participent a des liaisons d’evolution avec la relation:

N A p B = r p A , r = - NB

Le nombre de liaisons chimiquement realisables ne pouvant qu’Ctre au plus egal au nombre de sites appartenant a l’espece minoritaire, le taux d’evolution s’exprimera par:

B. Modde stochastique

Comme nous le verrons, la theorie des chaines de Markov est tres bien adaptee a la determi- nation de la distribution la plus probable de differentes chaines lineaires que l’on peut former a partir des elements constitutifs des graphes que nous venons de dtcrire. En effet, le schema de Markov est a la fois assez general pour pouvoir representer de nombreuses situations et assez simple pour permettre des etudes detaillees. De plus, il se prCte particulierement bien aux me- thodes de calcul automatique.

Dans le domaine de la chimie et de la physique macromoleculaires, la theorie des chaines de Markov a deja ete largement employee et si, mmme le montre Lowryzg), elle a permis la resolu- tion de quelques problemes, en particulier l’etude de la conformation des chaines macromole- c u l a i r e ~ ~ ~ - ~ ~ ) et la determination de la composition des copolymeresg3), il faut signaler que la theorie des processus en cascade, developpee tout particulierement par Gordon et ses collabo- rateurs dans le cadre de l’etude des reseaux macromoleculaires, peut &re considtree comme un processus de nature Mark~vienne~~) . Ainsi par exemple, la forme matricielle des grandeurs mo- yennes caracterisant la distribution moleculaire de polymeres branches obtenus par transfert de chaine r ad i~a la i r e~~) est-elle a rapprocher de celles etablies dans cet article.

Examinons maintenant les diverses etapes du modele stochastique.

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1 . Decomposition des graphes de soutien en evenements elementaires

Par definition, nous appelerons kvenements elhentaires les arCtes et les sites qui constituent les graphes de soutien. Ces evenements elementaires se repartissent en deux grandes classes: la classe EA qui renferme l'ensemble des ar&tes et la classe Es qui renferme l'ensemble des sites.

Comme nous l'avons vu, les aretes constituant les graphes peuvent Stre de plusieurs types; ceci se traduit par une partition de l'ensemble EA nous definissant une famille eA= { E ~ i ) i ~ i , I = {I, 2 ... n} , les ensembles EA, , EA2, ... , EAn etant formes respectivement des arttes des types 1,2 ,..., n.

De mCme, les sites constituant les sommets des graphes peuvent &re de types differents, ce qui entraine une partition de l'ensemble Es definissant une famille: 8,= {Es,) , ,~, J = { 1,2 ... m}, les ensembles E,, , ESz, ... E,, etant formes respectivement par les sites des natu- res 1,2, ... ,m.

Nous avons ainsi realist une partition de l'ensemble & des evenements elementaires en L sous-ensembles disjoints (8= n + m), notees El , E2, ... , En appelees especes et constituant la fa- mille 8, avec Ies relations suivantes:

2. Processus de Markov associe

Soit une urne U contenant un ensemble & de N boules representant les evenements elemen- taires generateurs des graphes de soutien g. Formons une partition de cet ensemble ben [sous- ensembles notes E l , E2 ... E,appeles Cgalement especes et qui representent les differentes espe- ces d'evenements elementaires, l'ensemble des especes de &' formant la famille 8.

Selon le mCme type de raisonnement que Raynaud3'), nous associerons a cette urne, un pro- cessus discret qui evolue entre Ptats que nous noterons, sans confusion possible, egalement E l , EZ, ... El. Nous designerons aussi par 8 l'ensemble de ces etats. Dans ce processus, les trans- itions ont lieu a chaque unite de temps. Supposons que le systeme ait evolue jusqu'a l'instant n. Son evolution est decrite par une suite X. de n elements de 8. Le processus sera dote d'une grammaire e, application de l'ensemble des suites d'elements de l? dans l'ensemble des parties de l?. Une grammaire e sera dite d'ordre f si quel que soit n, l'image de X, par e depend au plus des f derniers etats constituants la suite X, . Le processus associe sera dit d'ordre f egalement.

Nous designerons par Ekl, Ek2, ... Ek, l'image de X, par e. Alors, parmi les Nkl , Nk2, ... Nkq boules d'especes respectives Ekl , ... EL,, nous tirons avec remise une boule au hasard uniforme. Son espece est Ek et nous obtenons x,,, en ajoutant Ek a la suite x,. Cette procedure nous de- finit de faqon unique les probabilites de transition.

Si la grammaire est d'ordre f, la probabilite de transition a l'instant (n + 1) depend unique- ment de la connaissance des f derniers etats du systeme ecrits dans la suite X,.

Nous avons ainsi defini une chaine de Markov, homogene, stationnaire, d'ordre f. La grammaire e peut Ctre representee par un graphe oriente. Les sommets du graphe repres-

entent les differents etats possibles du systeme (eventuellement ce sont des suites d'etats d'au plus f elements) et les arcs du graphe representent les transitions permises.

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Avant d'entreprendre une etude mathematique plus detaillee, signalons que le formalisme et les divers concepts de la theorie des chaines de Markov que nous utiliserons seront empruntes a Feller3@ Girauld3') et Gordon").

3. Reduction d'une chaine de Markov d'ordre f a une chaine de Markov d'ordre 1

Toute chaine de Markov d'ordre f peut se ramenener a une chaine de Markov d'ordre 1. Pour cela, si nous notons par X, l'etat du systeme a la date n, il suffit de considerer un autre sy- steme dont l'Ctat a la date n sera represent6 par le f-uple (X,-,+,, Xn--f+z, ... X,). Le nouveau systeme ainsi form6 suit une chaine de Markov d'ordre 1 et sa grammaire est donc aussi d'ordre 1. L'ensemble de tous les differents f-uples possibles que l'on peut former a partir de l'ancien systtme constitue les etats du nouveau systeme. Ces nouveaux etats representent des suites d'especes d'evenements eltmentaires que nous appelerons des lors tout simplement Pvt%ements. L'ensemble de ces evenements constitue ce que nous appelerons par la suite l'univers des ev2ne- ments et l'ensemble des etats correspondants du processus de Markov associe d'ordre 1, l'espace des etats. Soit r le nombre de ces evenements (ou etats) que nous designerom par (E, , Ez, ... , E,) et soit el la nouvelle famille formee par ces sous-ensembles (l'exposant 1 indique que le proces- sus de Markov est d'ordre 1).

Dans tous les systemes que nous etudierons, nous nous ramenerons toujours a une chaine de Markov d'ordre 1. Notre premier travail consistera donc a definir l'univers des evenements et de ce fait, l'espace des etats.

4. Etude probabiliste de l'univers des evenements et de l'espace des etats

Nous sommes donc ramenes a effectuer un tirage auec remise dans une urne U1 contenant un ensemble 8' de N' boules. A chacune des boules de l'urne U' correspond une suite de bou- les de l'urne U. Nous formons egalement une partition des boules de l'urne U' en r sous-en- sembles notes El , Ez, ... , E, appeles egalement especes, mais cette fois-ci representatifs des di- vers evenements.

L'epreuve consistant a realiser le tirage d'une boule d'esptce Ei , pouvant avoir lieu une infi- nite de fois puisque le tirage est effectue avec remise, nous prendrons comme mesure de la pro- babilite de tirage d'une boule d'espece Ei, la frequence des boules d'espece Ei parmi toutes les boules. Cette frequence determine la probabilite de realisation de l'evenement Ei, notee p a , parmi tous les evenements. C'est Cgalement la probabilite, pour le systeme de Markov associe, d'ktre initialement dans l'etat Ei, parmi tous les &tats. Les evenements El , EZ, ... , E, constituent un systeme complet d'evenements, c'est-a-dire un systeme exhaustif d'evenements mutuelle- ment exclusifs.

I

5. Developpement temporel du processus de Markov

Supposons defini l'espace des etats et designons par X, l'ktat du systeme a l'instant n, la des- cription d'un systeme physique en evolution par la theorie des chaines de Markov, necessite la connaissance de deux lois: la loi initiale et la loi d'evolution du systeme.

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Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires, 1 2955

La loi initiale est la loi de probabilite de l'etat &. Elle est definie par les wmposantes d'un vecteur ligne Po.

La loi d'evolution du systeme entre les instants (n - 1) et n est definie par la donnee des r2 probabilites conditionnelles suivantes:

P,j = Prob [X. = Ej/X, -, = Ei]

pour i= l ,2 , ..., r pourj=1,2, ..., r

La suite de Markov etant homogene, ceci est valable quel que soit n. Nous avons une fonction de deux variables, Ei et Ej, pouvant prendre chacune r valeurs;

l'ensemble des valeurs possibles de cette fonction sera reprtsente par une matrice carre M a r lignes et r wlonnes qui est la matrice desprobabilites de transition (Pij). L'indice de la ligne (in- dice que l'on enonce habituellement en premier) designera l'etat (Ei) a l'instant n - 1, et l'indice de colonne, l'etat (Ej) a l'instant n.

Pour definir une suite de Markov homogene d'ordre I, il suffit donc de se donner la loi initia- le Po et la matrice M des probabilites de transition.

6. Classification des etats

Dans toutes les etudes effectuees a partir du modele developpe ici, nous formerons d'abord une partition Q de l'ensemble des etats (et evenements) en deux classes:

- la classe EM : classe des dtats morcelants (evenements morcelants) - la classe ET: classe des etats de transition (evenements de transition) Dans toute la suite de ce travail, nous appelerons ctchaineu toute suite X, de n etats (n pou-

vant tendre vers l'infini) dont l'etat initial et l'etat final appartiennent tous deux, et eux seuls, a la classe des etats morcelants, tous les etats intermediaires etant des etats de transition.

Afin de pouvoir utiliser les proprietes des chaines de Markov absorbantes, il est necessaire que l'etat initial de la chaine, qui est un etat rnorcelant ne soit pas un ttat absorbant; c'est pour- quoi, nous regroupons en un seul etat initial les deux premiers etats pris par le systeme lors de la generation d'une chaine. Les suites de Markov qui wmmencent par ces nouveaux etats initi- aux peuvent alors &re considerees comme des chaines de Markov absorbantes, puisque seuls, les etats finals morcelants de ces chaines forment une barriere absorbante. Nous pouvons alors decrire les differentes chaines que Yon peut former et determiner leurs frequences d'appari- tion.

Nous serons amenes egalement a distinguer deux types d'etats de transition (ou de suites d'e- tats de transition): ceux par lesquels le systeme peut passer plusieurs fois (et m&me une infinite de fois) au wurs de la generation d'une chaine et que nous qualifierons de repetitvs et ceux par lesquels il ne passe obligatoirement qu'une fois.

Dans le cadre de cette publication, nous appliquerons ce modele mathematique a l'etude de la distribution moleculaire dans les systemes monodimensionnels d'ordre I.

Page 10: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

2956 D. Durand, C.-M. Bruneau

111. Distribution moleculaire dans les systemes d’ordre I

A. Etude gknerale du systgme

1. Caracteristiques

Dans les systemes d’ordre I, tous les sites sont identiques et le graphe monomerique est for- me de monomeres bifonctionnels (D) et de monomeres monofonctionnels (M). Les differentes especes d’evenements elementaires generateurs des graphes de soutien sont schematisees dans le Tab. 3.

Soit p et 6, les proportions des sites ((m)) et ((d)) appartenant respectivement aux unites mo- nofonctionnels M et aux unites bifonctionnelles D, avec la relation p + 6 = 1, et soit p, la pro- portion des liaisons d’evolution parmi toutes les arBtes d’evolution (ou proportion des sites qui ont rkagi).

2. Univers des evenements. Espace des etats

Afin d’avoir un processus de Markov d’ordre 1, nous wnsidererons 5 evenements auxquels wrrespondront 5 etats dans le processus associe et qui sont schematises ainsi:

E, _ _ _ _ a E4 -a m m

Ez ----a E5 -0-• m d d

E3 ----a -a d d

Pour faciliter l’etude des distributions moleculaires, nous avons envisage des etats tels que toute transition entre ces etats wnduise a ajouter un monomere a la chaine. Le graphe de la grammaire regissant les transitions est le suivant:

Les transitions qui conduisent a ajouter ccchimiquements un monomere a la chaine (par liai- son d‘evolution) seront qualifiees de transitions liantes. Ici, ce sont celles qui conduisent aux etats E4 et E5. Les autres transitions seront appelees transitions non liantes.

Soit N le nombre total de sites repartis en p N sites m et 6 N sites d. Pour un taux d’evolution p du systeme, les couples ar&e d’evolution-site en nombre N se repartissent enpN wuples liai-

Page 11: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires, 1 2957

Tab. 3. Representation schematique des differents elements constitutifs du graphe de soutien du systeme d‘ordre I

Sommets: Sites 0 . m d

Arstes: Aretes de structure

- - - - - - Liaison de structure Non-liaison de structure

Aretes d‘evolution

_ _ _ - - _ Liaison d’evolution Pre-liaison d’evolution

son d’evolution-site et ( 1 - p ) N couples pre-liaison d’evolution-site. Les nombres d’elements NEi composant les divers elements Ei sont:

Les probabilites associees a chaque evenement (ou etat) parmi tous les evenements (ou etats), sont donnees par la relation generale:

d’OU

La matrice M, des probabilites de transitions du systeme est la suivante:

Remarquons que comme dans toute matrice stochastique, la somme des termes de chaque ligne est egale a l’unite.

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2958 D. Durand, C.-M. Bruneau

B. Etude des distributions moleculuires

I. Generalites

Pour que les chaines definies dans le modele stochastique correspondent bien aux molecules, nous etablirons la classification suivante entre les etats: les ttats El , El, E3 seront des etats mor- celants (les transitions conduisant a ces etats &ant des transitions non liantes), les etats E4 et Es seront des etats de transition et parmi ceux-ci, seul l’ktat E5 sera un etat repetitif.

La probabilite d’&tre dans un etat morcelant parmi tous les etats est:

La loi initiale du processus de Markov est representee par le vecteur de probabilite:

up etant la probabilite pour que le systeme soit dans l’etat Ei initialement, sachant que les etats initiaux possibles pour le systeme sont les etats morcelants E, , E2, E3.

Remarquons que, pour un systeme exempt &unites monofonctionnelles (p=O) et amve au terme de son evolution @ = I), certaines composantes de Po sont indkterminees. Pour lever cette indetermination, envisageons un systeme limite compose de deux unites monofonctionnelles, I’expression de Po pour p = I est alors la suivante:

L‘etat du systeme apres la premiere transition est represente par le vecteur de probabilite: PI =Po&

soit

La matrice M de la deuxieme transition, ou d‘une fawn plus gknerale, de la nibme transition (n a 2) est la suivante:

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Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires, 1 2959

0 0 0 0 "1 M=[: 0 1 0 1

1 0 0

1 0 0 0 ( 1 - P ) P

Cette matrice M est la matrice des probabilites de transition d'un processus de Markov ab-

Cette matrice M peut &re decomposee en 4 sous-matrices: sorbant, dont la loi initiale est donnee par les composantes de P I .

I: matrice unite correspondant au sous-ensemble des etats absorbants. 0: matrice nulle qui traduit l'impossibilite d'atteindre un etat de transition a partir d'un etat absorbant. R: matrice des probabilites de passage entre etats de transition et etats absorbants. Q: matrice carree qui donne les probabilites de passage entre etats de transition.

2. Distribution en nombre

a) Frequence en nombre des differents i-meres

Les trois premieres composantes de P, expriment respectivement les probabilites pour que le systeme soit dans les etats morcelants El , E2, E3, apres une transition. Nous en deduisons faci- lement la fraction en nombre nl des monomeres:

Dune facon generale, nous designerons par Ui un vecteur colonne dont les composantes au

La fraction en nombre n2 des dimeres s'ecrit: nombre de i sont toutes egales a l'unite.

n2 = VT R U3 en posant VT = [a:, a:]

La fraction en nombre n3 des trimeres s'ecrit:

D'une fawn generale, la fraction en nombre ni des i-meres (i L 2) s'ecrit:

Les expressions analytiques des fractions en nombre sont donnes dans le Tab. 4.

Page 14: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

N

W 8

Tab

. 4.

Exp

ress

ions

ana

lytiq

ues

des

fonc

tions

de

dist

ribu

tion

mol

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Frac

tions

en

nom

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Deg

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e po

lym

erisa

tion

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e

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poid

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Deg

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lym

6ri-

satio

n m

oyen

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poid

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Indi

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ol6c

ular

ite

P

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Thbrie des chaines de Markov et distribution moleculaire dam les copolycondensats lineaires, 1 2961

L'exhaustivite de cette distribution est bien verifiee, en effet:

en posant

N = (I - Q) - ou I est la matrice unite d'ordre 2.

Or, on montre facilement que NRU3 = UZ

D'ou:

b) Degre de polymerisation moyen en nombre

A partir de la definition meme du degre de polymerisation moyen en nombre,

m - DP,= x i n i

i = l

nous pouvons ecrire:

En utilisant les relations mathematiques suivantes:

n! avec C i = ~

n = p (1 -u)P+l p! (n - p)! 1 m 1 Ciu"-P=

et en posant: N = (I - Q) nous obtenons:

VMU3+VTNRU3=1 et NRU3=U2

d'OU

- DPn=1+VTNU2

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2962 D. Durand, C.-M. Bruneau

L'expression analytique du m, donnee dans le Tab. 4 s'obtient directement de faCon classi- que, mais peut egalement Ctre obtenue simplement en considerant que le degre de polymerisa- tion moyen en nombre est l'inverse de la probabilite d'etre dans un etat morcelant:

- 1 P+l-P DP, = - avec PEM = ~

PEM l + w

3. Distribution en poids

a) Frequence en poids des differents i-meres

Si nous supposons que toutes les unites monomeres ont la mCme masse et qu'il ne se forme aucun produit &elimination, connaissant les fractions en nombre ni des i-meres, nous pouvons en deduire les fractions en poids wi des i-meres a I'aide de la relation suivante:

Les fractions en poids des i-meres se deduisent donc directement des fractions en nombre, d'oil:

et d'une faCon generale pour i 2 2

1 w. - - VTQi-*RU3 ' - 07, (7)

Les expressions analytiques des frequences en poids des differents i-meres sont donnees dans le Tab. 4.

b) Degre de polymerisation moyen en poids

Par definition,

m - DP,= 1 iwi

i = l

Soit ici:

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Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires, 1 2963

Posons: j = i + 1

Or:

et

v) m A 2 A 2

1 j(j - 1) e-' = 1 Q 4 Q = Q % [Q(I - Q) - I ] j = l j = 1 dQ dQ

en posant a nouveau N = (I - Q)-'. Nous obtenons le relation:

en appliquant egalement quelques autres identites donnees preddemment, nous pouvons ecri- re:

en utilisant les relations (3), (4), et (5 ) , nous avons:

L'expression analytique du degre de polymerisation moyen en poids est donnee dans le Tab. 4.

4. Distribution en z

En nous plaGant toujours dans la mCme hypothese, les fonctions de distribution en z s'obtien- nent aisement a partir des fonctions de distribution en poids ou en nombre a l'aide des relations suivantes:

i2 - Zi _ - zi i wi DP, ni DP,-DP, - et

ainsi. nous obtenons:

1 DP, . DP, ZI = - V M u3 (9)

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2964 D. Durand, C.-M. Bruneau

et pour i 3 2

et le degre de polymerisation en z s’ecrit (cf. Annexe):

- _ avec la relation: DP, . DP, = 1 + 3 VT NU2 + 2 VT QN2 U2

5 . Polymolecularite

L‘indice de polymolecularite I est defini par la relation:

Soit ici:

1 + 3 VT N U2 + 2 VTQ N2 U2 (1 + V T N U ~ ) ~

I =

L’expression analytique de l’indice de polymolecularite est donnee dans le Tab. 4.

6. Etude de cas particuliers

Nous donnons dans le Tab. 5 les expressions de quelques unes des fonctions, preckdemment etablies, pour quelques cas particuliers.

7. Distribution moleculaire par categories

Nous pouvons classer les molecules en trois categories selon la nature de leurs sites extremite. Ainsi nous distinguerons:

1. Les molecules dd dont les deux sites extrdmitt sont des sites d qui n’ont pas encore reagi (le premier element de cette categorie est le monomere D).

2. Les molecules md dont un site extremite est un site monofonctionnel m et l’autre, un site d qui n’a pas encore reagi (le premier element de cette categorie est les monomtre M).

3. Les molecules rnm dont les deux sites extremite sont des sites m appartenant a des unites monofonctionnelles (Le premier element de cette categorie est le dimere MM).

En utilisant les elements de probabilites dtfinis dans le vecteur Po et la matrice Mo, nous pouvons aisement determiner les diflerentes fonctions de distribution moleculaire et leurs grandeurs moyennes associees pour chaque categorie. Les differentes expressions sont donnees dans le Tab. 6.

Page 19: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

Tab

. 5.

Fonc

tions

de

dist

ribu

tion

de s

yste

mes

mon

odim

ensi

onne

ls p

artic

ulie

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'ord

re I

Syst

eme

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Fr

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n en

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i

Syst

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Pp

=l

Syst

eme e

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pt

d'un

itts m

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onc-

tio

nnel

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(P =

0)

(&=

I)

Syst

eme

exem

pt

d'un

itts b

ifonc

- tio

nnel

les

(6=0

) (P

= 1

)

n, =

~(

1-

w)

'-'

ia2

ni = (1

-p)p

'- I

iai

P nz

= -

2 -P

ip2(

1 -p

)'-z

1

+P

l+P

P

w

, =

-

i32

w,=

i(t -

~)~

p'-

'

ial

WI =

1 -p

wz=

p

1

1 -P

2 -

2-P

l+p

1 -P

1 +P

1 +P

Page 20: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

h)

W

m m

Tab

. 6.

Dis

trib

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n m

olec

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re p

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ules

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Frac

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e n =

1 ni

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i

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oids

w= 1 wi

Deg

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e po

lym

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atio

n m

oyen

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s m,

Mol

ecul

es d

d M

olec

ules

md

Mol

ecul

es m

m

ial

ia1

is

I

iz

1

is2

P M

Page 21: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires, I 2967

o ' 2 L d Y 0 0 0,2 0,5 0,8 1,0

P Fig. 2

Fig. 1. de la reaction p. Systeme d'ordre I: p=0,20, 6=0,80

Fig. 2. de la reaction p. Systeme d'ordre I: p=0,20, 6=0,80

Frequences en nombre des differentes categories de molecules n en fonction du taux d'avancement

Frequences en poids des differentes categories de molecules w en fonction du taux d'avancement

Les Figs. 1 et 2 donnent respectivement l'evolution des frequences en nombre et en poids des differentes categories de molecules en fonction du taux d'avancement de la reaction pour un systeme compose de 20% d'unites monofonctionnelles (p = 0,20). La Fig. 3 represente l'evolu- tion des degres de polymerisation moyen en nombre des differentes categories de molecules en fonction du taux d'avancement de la reaction pour un systeme compose de 20% d'unites monofonctionnelles (p = 0,20) et un systeme compose de 70% d'unites monofonctionnelles (p = 0,70).

mn 6 -

5 -

4-

- Fig. 3. Degres de polymerisation moyens en nombre DP. des differentes categories de molecules mm, md et dd (voir le texte) en fonction du taux d'avancement de la reaction p. Systeme d'ordre I: ~ p=0,20, 6=0,80; ----- p=0,70, 6=0,30. (mndd=mEd; my = 1 + m:d)

0 0,2 0,4 0,s 0,8 1,O P

IV. Conclusion

Dans ce travail, nous avons, dans un premier temps, propose un modele mathematique per- mettant de decrire l'evolution de divers systtmes macromoleculaires. Nous avons d'abord de- veloppe l'aspect topologique du probleme en montrant comment l'evolution d'un systeme mac-

Page 22: Théorie des chaîcnes de markov et distribution moléculaire dans les copolycondensats linéaires, 1. Modèle mathématique et systèmes d'ordre I

2968 D. Durand. C.-M. Bruneau

romoleculaire peut &re representee par une succession de graphes. L'aspect stochastique du probleme qui consistait a obtenir une description des elements linkaires de ces graphes et a de- terminer un certain nombre de parametres caracterisant leur evolution peut &re realist, comme nous l'avons montre, a l'aide de la theorie des chaines de Markov. Le schema de Markov se pr&e en effet tres bien a une telle analyse car il est a la fois assez general pour pouvoir repre- senter de nombreuses situations et assez simple pour permettre des etudes detaillees, tout en s'adaptant parfaitement aux methodes de calcul automatique.

Dans un deuxieme temps, ce modele mathematique a ete applique a l'etude de la distribu- tion moleculaire dans les polycondensats d'ordre I. Cette etude a mis en evidence la generalite des fonctions de distribution molkculaire lorsqu'elles sont exprimkes sous forme matricielle ainsi que la facilitt d'obtention, egalement sous forme matricielle, de leurs grandeurs moyen- nes associees de tous ordres.

V. Annexe

Determination du degre de polymerisation moyen en z, m, - DP,= C i z i

i = l

en posant i =j + 1 nous obtenons:

Or nous avons les relations suivantes, avec N = [I - Q] -

m

2 J 3 VTQI-' R U2 = VTII + 4 Q + Q'] N4R U3 j = l

m

d'oh:

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Theorie des chaines de Markov et distribution moleculaire dans les copolycondensats lineaires, 1 2969

en utilisant les relations: NR U3 = U2

nous obtenons:

I) D. Durand, These de Doctorat d’Etat No CNRS A 0 12322, Paris VI-Le Mans, 1976 *) P. J. Flory, J. Am. Chem. Soc. 58,1877 (1936)

H. Dostal, R. Raff, Monatsh. Chem. 68, 247 (1936) 4, H. Dostal, R. Raff, Z. Phys. Chem., Abt. B: 32,117 (1936) 5 , D. Margerison, G. G. East, ((An Introduction to Polymer Chemistry)), Pergamon, Oxford 1967 6, J. C. Watterson, J. W. Stafford, J. Macromol. Sci., Chem. 5, 679 (1971) 7, H. E. Grethlein, Ind. Eng. Chem., Fundam. 8, 206 (1969) ’) L. C. Case, J. Polym. Sci. 29, 455 (1958) ’) L. C. Case, J. Polym. Sci. 37, 147 (1959)

l o ) L. C. Case, J. Polym. Sci. 39, 175 (1959) ‘ I ) L. C. Case, J. Polym. Sci. 39, 183 (1959) 1 2 ) L. C. Case, J. Polym. Sci. 48, 27 (1960) 1 3 ) H. Jacobson, W. H. Stockmayer, J. Chem. Phys. 18, 1600 (1950) 14) M. Gordon, W. B. Temple, Makromol. Chem. 160, 263 (1972) I s ) J. L. Stanford, R. F. T. Stepto, J. Chem. SOC., Faraday Trans. 1, 71, 1292 (1975) 16) J. L. Stanford, R. F. T. Stepto, D. R. WaywelI, J. Chem. SOC., Faraday Trans. 1, 71, 1308 (1975) ”) D. B. Fordyce, J. D. Ferry, J. Am. Chem. SOC. 73,62 (1951) ”) M. Gordon, B. M. Grieveson, I. D. Mc. Millan, J. Polym. Sci. 18, 497 (1955) ”) R. F. T. Stepto, D. R. Waywell, Makromol. Chem. 152,263 (1972) 20) A. Cayley, <<Collected Mathematical Papers)), Cambridge University Press, Cambridge 1889-1897,

Vols. 3, 9, 11 et 13 ’ I ) G. Polya, Acta Mathematica 68, 145 (1937) 22) A. T. Balaban, ((Chemical Applications of Graph Theory)), Academic Press Inc., London LTD, 1976 23) M. Gordon, T. G. Parker, Proc. R. SOC. Edinburgh, Sect. A: 69,181 (1971) 24) M. Gordon, J. W. Kennedy, J. Chem. SOC. Faraday, Trans. 2,69,484 (1973) 2 5 ) W. B. Temple, Makromol. Chem. 160, 270 (1972) 26) K. Kajiwara, M. Gordon, J. Chem. Phys. 59,7, 3623 (1973) 2 7 ) C. Berge, ccGraphes et Hypergraphes)), Dunod, Paris 1970 28) F. Harary, ((Graph Theory)), Addison-Wesley Publishing Company Inc., Reading 1972, 3 ed. 29) G. G. Lowry, ctMarkov Chains and Monte-Carlo Calculations in Polymer Science)), Marcel Dekker,

Inc., New York 1970 30) M. V. Volkenstein, (Configurational Statistics of Polymer Chains)) traduit de I’edition ruse de 1959 par

S. N. Timasheff et M. J. Timasheff, Wiley-Interscience, New York 1963 3 1 ) T. M. Birshtein, 0. B. Ptitsyn, <(Conformation of Macromolecules)), traduit de l’edition russe de 1964

par S. N. Timasheff et M. J. Timasheff, Wiley-Interscience, New York 1966 32) P. J. Flory, <<Statistical Mechanics of Chain Molecules)), Wiley-Interscience, New York 1969 33) F. P. Price, J. Chem. Phys. 36, 209 (1962) 34) C. Wolf, W. Burchard, Makromol. Chem. 177, 2519 (1976) 35) H. Raynaud, Ann. Inst. Henri Poincare, Sect. B: Calcul des Probabilites et Statistique, 4, 255 (1968) ’‘) W. Feller, <<An Introduction to Probability Theory)), John Wiley and Sons, Inc., New York 1957, 2nd

edition 37) M. Girault, ccProcessus aleatoiresn, Dunod, Paris 1965 ”) P. Gordon, <<Theories des chaines de Markov finies et ses applications)), Dunod, Pans 1965