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Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER Yolaine CARPIN 1 Thème 1 : La longue histoire de lhumanité et des migrations Adaptation des programmes : La civilisation amérindienne des Petites Antilles Auteures : Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER Yolaine CARPIN Le thème des civilisations amérindiennes des Antilles dans le cycle 3 amène « à présenter les premières traces d’occupation des territoires ultramarins à partir d’un site ou d’un objet symbolique » en CM1 et « d’évoquer les premiers peuplements à travers l’histoire des premières migrations » en classe de 6è. Ce premier thème de l’adaptation demande de « souligner les spécificités chronologiques et culturelles » en classe de 6è mais permet aussi d’évoquer les héritages. Pourquoi enseigner cette question dans le cadre de l’adaptation des programmes ? L’étude des migrations amérindiennes permet de contextualiser cette approche en soulignant le caractère particulier du peuplement de l’archipel antillais, d’une civilisation « caraïbe insulaire » 1 et amène à se poser la question d’un temps spécifique des Amérindiens. En effet, Jean Pierre SAINTON pose le problème du temps amérindien par rapport au temps occidental : peut-on parler de Préhistoire amérindienne ? 2 Problématique scientifique Comment les Amérindiens ont-ils peuplé les îles de l’archipel antillais, quelles informations les objets archéologiques apportent-ils sur notre connaissance de ces civilisations, comment les textes des Européens et les sources de l’anthropologie permettent-elle de comprendre et connaître la complexité de cette civilisation ? Problématique didactique Comment les Amérindiens ont-ils peuplé les îles de l’archipel antillais ? Quelle civilisation ont-ils développée. ? Quels héritages ont-ils laissés ? 1 Sous la direction de Bernard GRUNBERG -Les Indiens des Petites Antilles,-Editions l’Harmattan- 2011 2 Jean-Pierre SAINTON L’intrusion de l’Histoire : la Caraïbe et les premiers chroniqueurs français des Antilles in Les civilisations amérindiennes des Petites Antilles-Conseil Général/Musée Archéologie- 2004

Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

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Page 1: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 1

Thème 1 : La longue histoire de l’humanité et des migrations

Adaptation des programmes :

La civilisation amérindienne des Petites Antilles

Auteures :

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN

Le thème des civilisations amérindiennes des Antilles dans le cycle 3 amène « à

présenter les premières traces d’occupation des territoires ultramarins à partir d’un

site ou d’un objet symbolique » en CM1 et « d’évoquer les premiers peuplements à

travers l’histoire des premières migrations » en classe de 6è. Ce premier thème de

l’adaptation demande de « souligner les spécificités chronologiques et culturelles »

en classe de 6è mais permet aussi d’évoquer les héritages.

Pourquoi enseigner cette question dans le cadre de l’adaptation des

programmes ?

L’étude des migrations amérindiennes permet de contextualiser cette approche en

soulignant le caractère particulier du peuplement de l’archipel antillais, d’une

civilisation « caraïbe insulaire »1 et amène à se poser la question d’un temps

spécifique des Amérindiens. En effet, Jean Pierre SAINTON pose le problème du

temps amérindien par rapport au temps occidental : peut-on parler de Préhistoire

amérindienne ?2

Problématique scientifique

Comment les Amérindiens ont-ils peuplé les îles de l’archipel antillais, quelles

informations les objets archéologiques apportent-ils sur notre connaissance de ces

civilisations, comment les textes des Européens et les sources de l’anthropologie

permettent-elle de comprendre et connaître la complexité de cette civilisation ?

Problématique didactique

Comment les Amérindiens ont-ils peuplé les îles de l’archipel antillais ?

Quelle civilisation ont-ils développée. ? Quels héritages ont-ils laissés ?

1 Sous la direction de Bernard GRUNBERG -Les Indiens des Petites Antilles,-Editions l’Harmattan-

2011 2 Jean-Pierre SAINTON – L’intrusion de l’Histoire : la Caraïbe et les premiers chroniqueurs français des

Antilles in Les civilisations amérindiennes des Petites Antilles-Conseil Général/Musée Archéologie-

2004

Page 2: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 2

La place de la séquence dans la programmation

Cette séquence sera placée après l’étude de la Révolution du Néolithique.

Elle pourra être réinvestie en géographie dans le thème « le monde habité » en

géohistoire dans l’étude des foyers de peuplement à différentes époques.

Quels sont les points forts du thème pour l’enseignant ?

Á l’arrivée des Européens, l’archipel antillais était occupé depuis plusieurs millénaires

par des populations amérindiennes. Notre connaissance des origines et des

dynamiques de la civilisation amérindienne des Petites Antilles est largement tributaire

des découvertes archéologiques, débutées dans les années 1930 ; ces données sont

à croiser avec celles des sources historiques, celles des linguistes et des

anthropologues.

Les documents sources, datant du XVIIème siècle, témoignages des Chroniqueurs qui

décrivent les populations du sud de l’archipel, sont à interpréter avec prudence,

puisque ces civilisations avaient déjà été modifiées par plus de cent ans de contacts.

Une nouvelle chronologie plus neutre a donc été mise en place par les archéologues,

et remplace celle qui découpait le temps amérindien en temps Arawak et Caraïbe. Les

archéologues préfèrent donc découper la période précolombienne en une période

« Précéramique » et une période « Céramique ».

Le Céramique est divisé en quatre périodes : le Saladoïde Ancien, le Saladoïde

Modifié, le Troumassoïde, et le Suazoïde (différentes dénominations tirées des sites

archéologiques Saladero au Vénézuéla, Troumassé à Sainte-Lucie, et Suazey à

Grenade.

LE PRÉCÉRAMIQUE (5000 av J-C)

Le premier peuplement des Antilles ne semble pas antérieur au Vème millénaire avant

notre ère. Il est le fait de populations nomades qualifiées de précéramiques en raison

de l’absence de poteries.

Deux hypothèses sont établies sur leur origine : une arrivée depuis le Yucatan ou

depuis le nord du Vénézuéla ; cette thèse est la plus communément admise. Ces

sociétés de chasseurs-cueilleurs utilisaient la pierre taillée et polie et le coquillage.

L’extension de leur migration s’est faite vers Porto-Rico, les Îles Vierges (entre -4000

et 500) mais leur présence dans le sud des Antilles n’est pas certifiée ; il existe

quelques indices en Martinique (sites de Boutbois et de Godinot au Carbet) mais sans

datation fiable.

LE CÉRAMIQUE (vers -500 à 1450)

Cette période débute par le Saladoïde Ancien (de-500 à 350 ap J-C) ; durant cette

période les premières données fiables sur l’occupation des Petites Antilles

correspondent à l’arrivée de populations originaires du Bassin de l’Orénoque. Certains

spécialistes pensent que vers -250, la migration aurait continué à travers les îles

jusqu’à Porto-Rico, puis Hispaniola, atteinte au IIIème siècle après J-C ; ce serait un

Page 3: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 3

phénomène de conquête, pionnier et réfléchi. Il est mis en évidence aujourd’hui que

ces vagues migratoires n’ont été ni brutales, ni massives, ni même organisées comme

certains historiens ont pu l’affirmer.

Ces populations saladoïdes de l’Orénoque, des horticulteurs qui maîtrisent la culture

des tubercules, en particulier le manioc, sont aussi des potiers qui produisent une

poterie fine aux décors variés, aux motifs géométriques peints en blanc sur rouge,

avec notamment des « adornos », ces éléments de préhension anthropomorphes et

zoomorphes. Il s’agit de coupes, de bouteilles, de platines, ces grands disques en

céramique destinés à la cuisson du manioc. Ces céramiques sont retrouvées dans tout

l’archipel.

Dans les Petites Antilles, ces populations s’installent sur des terres agricoles, en

hauteur, près de paysages similaires à celui de leur terroir d’origine (les rivières et la

forêt tropicale) : c’est le cas à Grenade, en Martinique, à Saint Martin où la culture sur

brûlis est attestée. Ils cultivent la patate douce, le coton, les plantes médicinales et le

manioc.

Leurs outils sont en pierre polie, en coquillage ; les pierres taillées sont utilisées pour

les « grages » à manioc (râpes à manioc).

Cependant, « l’hypothèse d’une agriculture sur brûlis comme principal support de

subsistance est inexacte, car les dégâts dans la végétation auraient été presque

irréversibles, et les descriptions des découvreurs de nos îles auraient été

diamétralement opposées » 3

Dès le Vème siècle, les échanges sont attestés entre les îles, « ce champ d’îles était

au Vème siècle complètement reconnu des Amérindiens, y compris sur les marges les

plus orientales. Même si toutes les terres n’ont pas été forcément habitées au même

moment et avec les mêmes densités, à chaque île était distribuée une fonction

précise »4.

Durant le saladoïde modifié, de 350 à 700 ap J-C, dans toutes les îles, on assiste à un

glissement de

l’habitat vers la mer. Les groupes apparaissent bien adaptés à leur environnement

maritime.

Les céramiques sont plus variées avec un nouveau répertoire de couleurs (bordeaux,

marron,

orange ou peinture rouge soutenue couvrant tout le vase) les objets sont moins

stéréotypés. Un des sites caractéristiques est celui de Dizac au Diamant. C’est à cette

période que l’on voit apparaître les premières pierres à trois pointes, à associer sans

doute au culte des Zémis, représentations des ancêtres et des esprits.

3 JOSEPH Philippe « L’Homme amérindien dans son environnement » in Les civilisations amérindiennes des

Petites Antilles- Conseil Général/ Musée Archéologie- 2004

4 SAINTON Jean-Pierre -Histoire et civilisation de la Caraïbe – édition Maisonneuve et Larose -2004

Page 4: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 4

L’âge céramique se poursuit avec les périodes troumassoïde (750-1050 après J-C) et

suazoïde (1050-1450 ap J-C). Durant cette période des différences apparaissent entre

Grandes et Petites Antilles : l’apparition des chefferies, la hiérarchisation de la société

et une agriculture permanente. « Ainsi dans les Grandes Antilles commencent à se

développer les phénomènes sociaux et économiques qui vont être à l’origine de

l’émergence des sociétés taïnos » 5

Dans les Petites Antilles, aucune migration n’est identifiée et l’évolution est endogène. Il semble y avoir eu une étape d’insularisation, avec le développement sur place de cultures insulaires proprement antillaises ; on ne trouve pas de traces d’une autre migration massive depuis le continent, celle des Kalinas6, qui aurait refoulé les Arawaks, comme il a pu être affirmé dans les récits des Chroniqueurs européens du XVIIème siècle. Durant ces périodes, la vie et les activités sont de plus en plus tournées vers la mer

ou les zones de mangroves, avec une forte consommation de coquillages (site de

Macabou en Martinique).

L’outillage reste semblable à celui des périodes antérieures et s’il existe une forte

continuité dans la céramique avec les décors de peinture rouge, noire et blanche, les

spirales, les incisions, la céramique évolue vers plus de sobriété. La proportion d’objets

décorés diminue avec quelques nouveautés cependant : on voit apparaître les platines

à manioc tripodes aux pieds plus massifs.

Les caractères généraux des sociétés précolombiennes des Petites Antilles.

Pour aborder la vie quotidienne des Amérindiens des Petites Antilles, on se reporte au

corpus des sources historiques, des récits de voyageurs, de missionnaires ayant vécu

dans les îles. Mais la prudence s’impose car ces ressources traitent des Amérindiens

de la période de contact, particulièrement ceux du sud de l’archipel, les Kallinagos.

Ce corpus de textes des XVIIème et XVIIIème a été à l’origine de la différenciation

entre les dits Arawaks, populations pacifiques présentées comme les occupants les

plus anciens des Antilles, et les dits Caraïbes, décrits comme belliqueux et

5 BÉRARD Benoît « Caraïbes et Arawaks , caractérisation culturelle et identification ethnique » in Les civilisations

amérindiennes des Petites Antilles- Conseil Général /Musée d’Archéologie 2004

6 On peut citer Jean-Pierre SAINTON : « la civilisation kallinago des Petites Antilles […]est une civilisation originale qu’à défaut d’un terme qui lui soit spécifiquement consacré, nous pourrions qualifier de marine et semi-nomade, mais qu’il ne serait pas inexact d’appeler amphibie. En effet, son territoire physique est autant la mer que les parties émergées des terres. L’identité des individus et des groupes ne s’ancre pas dans une île particulière mais dans la totalité de l’espace intra-insulaire à l’intérieur duquel la mobilité par mer, d’une île à l’autre est la norme ». Sainton Jean-Pierre – Histoire et civilisation de la Caraïbe, Paris, 2005. NB : Il y a bien des expéditions guerrières, mais aussi des échanges ; Il faut donc éviter de transposer la notion de « frontière » sur l’espace amérindien

Page 5: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 5

anthropophages, qui auraient migré plus récemment pour occuper le sud de l’archipel

antillais.7

Mais on sait que cette différenciation n’est pas fondée, que ces populations sont de

langue Arawak, « les termes Arawak et Caraïbe ont une signification précise pour les

linguistes : ce sont les noms de deux grandes familles de langues parlées par les

Amérindiens de la zone amazonienne. Toutes les langues amérindiennes des Antilles

appartiennent à la famille Arawak même celles des Kalinagos dits Caraïbes »8.

L’archéologie donne une idée de la manière de vivre de ces groupes humains, de la

structure du village composé de cases (on peut citer des vestiges du site amérindien

de l’Anse à la Gourde en Guadeloupe, site du Céramique Moyen (de 400 à 1350) et

du site de Vivé datant du IVème siècle).

Mais on ne peut écarter les descriptions des Chroniqueurs qui font vivre ces vestiges

archéologiques, évoquent des modes de vie, des techniques qui ont évolué sur un

temps plus long.

Le Père BRETON, dans le Dictionnaire caraïbe-français précise « les sauvages n’ont

que des bois abattus là où ils demeurent, à savoir la place d’un carbet et quelques

maisonnettes à l’entour ».

Dans cette société égalitaire, le pouvoir n’est pas héréditaire, l’unité de base est le

village autonome, les hommes tirent de l’environnement l’essentiel de leurs ressources

en touchant à peine à l’équilibre écologique.

L’habitat est familial ou multifamilial, l’organisation du travail est communautaire ou

collective est répartie selon le sexe et l’âge : les occupations masculines sont la

7 « Les peuples des Petites Antilles, qui se désignaient comme Kalinas, appelés Caribe ( Caraïbe) et/ou Canibales

(Cannibale) par les Espagnols et les Chroniqueurs français, ont été décrits comme étant particulièrement

belliqueux, idolâtres , anthropophages et opposés aux « bons sauvages Taïnos des Grandes Antilles. Ils ont été

considérés juste bons à être anéantis ou asservis. (il suffit qu’un groupe soit désigné comme comme Caraïbes pour

pouvoir être réduit en esclavage) ».GRUNBERG Bernard- Les Indiens des Petites Antilles – Edition l’Harmattan-

2011

8 BÉRARD Benoît « Caraïbes et Arawaks , caractérisation culturelle et identification ethnique » in Les civilisations

amérindiennes des Petites Antilles- Conseil Général /Musée d’Archéologie 2004

Peu de certitudes quant aux croyances et coutumes religieuses : les éléments les mieux connus

viennent essentiellement de la civilisation Kallinago et évoquent « une perception de

l’ordonnancement ouvert de l’univers »⁹ et des mythes reliant la terre, le ciel et l’eau. Les pierres à trois

pointes, objets cérémoniels et rituels, associés aux zémis de bois et de pierre , représentations des

ancêtres et des esprits seraient à rattacher à la protection des âmes des ancêtres et à des rites de

fertilité Autre signe à caractère sacré sans doute, les pétroglyphes, roches gravées de dessins, à l’instar

de ceux de Sainte-Luce ou Trinité en Martinique et Trois Rivières en Guadeloupe. Le sens des

pétroglyphes qui se sont développés durant la période saladoïde « est à rechercher dans les mythes

qui traitent de la sécheresse (monde brûlé) ou des inondations (monde noyé). Ils représentent le monde

et protègent l’humanité contre les risques qui les menacent (sècheresse, ouragans et inondations), ces

catastrophes qui mettent en péril la survie de l’humanité»₁₀.

Page 6: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 6

chasse, la pêche, l’abattage des arbres, la construction des cases, des pirogues, la

manufacture du bois, de la pierre, la fabrication des

Instruments de chasse, de pêche. Aux femmes sont dévolues les plantations, les

récoltes, les tâches domestiques, le tissage, tâches moins prestigieuses et se

déroulant près du foyer.

Peu de certitudes quant aux croyances et coutumes religieuses : les éléments les

mieux connus viennent essentiellement de la civilisation Kallinago et évoquent « une

perception de l’ordonnancement ouvert de l’univers »9 et des mythes reliant la terre,

le ciel et l’eau. Les pierres à trois pointes, objets cérémoniels et rituels, associés aux

zémis de bois et de pierre, représentations des ancêtres et des esprits seraient à

rattacher à la protection des âmes des ancêtres et à des rites de fertilité Autre signe

à caractère sacré sans doute, les pétroglyphes, roches gravées de dessins, à l’instar

de ceux de Sainte-Luce ou Trinité en Martinique et Trois Rivières en Guadeloupe. Le

sens des pétroglyphes qui se sont développés durant la période saladoïde « est à

rechercher dans les mythes qui traitent de la sécheresse (monde brûlé) ou des

inondations (monde noyé). Ils représentent le monde et protègent l’humanité contre

les risques qui les menacent (sècheresse, ouragans et inondations), ces

catastrophes qui mettent en péril la survie de l’humanité».10

Quels héritages de la civilisation amérindienne ?

L’héritage amérindien est visible dans des survivances alimentaires comme la pratique

du « jardin caraïbe » héritier de l’ichali amérindien dans lequel on associe plusieurs

plantes, fruits et tubercules, dans les techniques artisanales : la pêche à la nasse, à

la senne (au filet), la vannerie, l’utilisation de la conque de lambi, de la calebasse, la

survivance du gommier (embarcation faite d’une seule pièce à partir d’un tronc de

gommier). Il faut y ajouter le lexique de la faune dérivé de langues amérindiennes

utilisés dans les langues créoles et françaises : acajou-ajoupa-anoli-arawak-balaou-

carbet-calalou-cassave-coulirou-lambi--manioc-mabouya- matoutou-pipiri-titiri-yinyin,

etc.

9 Sous la direction de Jean-Pierre Sainton : Histoire et Civilisation de la Caraïbe – Tome 1- Editions Maisonneuve et Larose – 2004

10 PETITJEAN ROGET Henri – « Actes du XXIIIème Congrès de l’Association d’Archéologie de la Caraïbe »

-Antigua 2009

Page 7: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 7

Comment mettre en œuvre le thème dans la classe ?

Les compétences travaillées

Ce thème permet de travailler la compétence : se repérer dans le temps - construire

des repères historiques pour permettre aux élèves de comprendre la notion de temps

long et la spécificité de la périodisation de la civilisation amérindienne

Les élèves pourront également se repérer dans l’espace, construire des repères

géographiques, nommer et localiser les lieux dans un espace géographique.

Avec la compétence Raisonner, ils seront amenés à établir des hypothèses, se poser

des questions et vérifier la validité de celles-ci. Ils pourront ainsi comprendre l’intérêt

et les limites des traces archéologiques et comprendre les enjeux de la recherche.

Pour cela, ils seront amenés à analyser et comprendre le sens des documents, à

classer et à mettre en relation

L’écriture d’un petit texte pour décrire les migrations et les caractéristiques étudiées

de la civilisation amérindienne pourra être travaillée.

Les objectifs de connaissances

Savoir comment l’archipel antillais a été peuplé depuis le continent,

Comprendre la particularité de la chronologie amérindienne, différente de celle des

migrations préhistoriques.

Connaître les caractéristiques majeures de cette civilisation et leurs évolutions

Les notions à retenir

Amérindiens - Langue arawak - céramique - civilisation du manioc - migration

Principaux repères à construire

Occupation de l’Amérique : 10 000 ans avant J-C

Pré-céramique : vers 5000 av J-C

Céramique : vers 500 av J-C à 1450 ap J-C

Période des premiers contacts c : XVè-XVIIè

Quels écueils éviter ?

Etablir une chronologie archéologique trop détaillée.

Montrer seulement des ruptures brutales.

Présenter des aspects stéréotypés sur la civilisation amérindienne (opposition entre le

«gentil Arawak » et le Caraïbe).

Page 8: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 8

Propositions d’activités pour les élèves

Tâche complexe : rédaction d’un texte pour décrire le mode de vie des Amérindiens.

Les élèves peuvent effectuer un travail de groupe à partir d’un dossier documentaire.

Visite au Musée : compte-rendu de visite à partir d’une fiche-questionnaire.

Situer dans le temps et l’espace des vestiges archéologiques.

Construction de frises simples avec les repères majeurs.

Comparaison avec une frise des périodes de la préhistoire et de l’Histoire pour montrer

les périodes du temps amérindien.

Travail sur cartes : mise en relation des toponymies amérindienne et actuelle à partir

de carte

Repérage des sites sur une carte de la Martinique.

Analyse de textes sur quelques aspects de mode de vie.

Prolongements possibles

En histoire des Arts : étude de la céramique amérindienne.

Page 9: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 9

Éléments de bibliographie

BÉRARD Benoît : L’occupation saladoïde cédrosane ancienne de la Martinique

https://hal.univ-antilles.fr/hal-01216058

Archéologie précolombienne dans les Petites Antilles

https://hal.univ-antilles.fr/hal-00975450

Jacques Adélaide Merlande : Histoire générale des Antilles et de la Guyane -Éditions

Caribéennes 1994

Petitjean -Roget Henri : Les populations amérindiennes, aspects de la Préhistoire

antillaise in Historial Antillais 1982

Sous la direction de Jean-Pierre Sainton : Histoire et civilisation de la Caraïbe Tome

1, Éditions Maisonneuve et Laporte- 2005

Sous la direction de Bernard Grunberg : Les Indiens des Petites Antilles, des

premiers peuplements aux débuts de la colonisation européenne. É ditions

l’Harmattan- 2011

Les civilisations amérindiennes des Petites Antilles - Musée départemental

d’Archéologie Précolombienne et de Préhistoire-2004

Les Amérindiens des Petites Antilles à travers les sources et la littérature du

Vème siècle avant J-C à nos jours -- Musée départemental d’Archéologie

Précolombienne et de Préhistoire- 2011-

R P J-B Du Tertre, Histoire Générale des Antilles Editions Koloziej- 1978

Père Raymond Breton, Relation de l’île de la Guadeloupe-Dictionnaire français

Caraïbe.

Archéologie Martinique – Guide des collections – Musée départemental

d’archéologie

Page 10: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 10

DOCUMENTS ANNEXES

Pour la compétence : construire des repères spatiaux

FIGURE 1 CARTE DES MIGRATIONS AMERINDIENNES -MUSEE D’ARCHEOLOGIE

PRECOLOMBIENNE ET DE PREHISTOIRE.

FIGURE 2 TOPONYMIE AMERINDIENNE –

Page 11: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 11

FIGURE 3 TOPONYMIE AMERINDIENNE11 –

NB : La carte et l’explicitation de la toponymie permettent de mettre en œuvre la

compétence se repérer dans l’espace en appréhendant la réalité de l’espace

amérindien. Chaque île a son utilité en fonction de ses ressources.

FIGURE 4 LES SITES AMERINDIENS EN MARTINIQUE.

Page 12: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 12

FIGURE 5 COUPE - SALADOÏDE ANCIEN – SITE DE FOND -BRULE AU LORRAIN- MUSEE DE

MARTINIQUE

NB : Les coupes de cette période sont représentées par des bases annulaires, en

forme de cloche renversée avec un décor caractérisé par une ornementation en lignes

courbes et des incisions , peinte en blanc et brun rouge sur fond de couleur naturelle

de l’argile.

:

FIGURE 6 VASE A OUICOU – SALADOÏDE MODIFIE – MUSEE DE MARTINIQUE

NB :Vase à ouicou ( boisson de manioc fermenté consommée dans les fêtes à ouicou

qui ponctuaient les moments importants comme les naissances, les rites de passage,

les expéditions, les visites d’un hôte de marque)

On assiste en Martinique à une évolution dans la céramique. La peinture et le

modelage remplacent les techniques de motifs gravés ou incisés ; on retrouve des

motifs blancs peint sur un fond brun-rouge.

Page 13: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 13

FIGURE 7 PLATINE A MANIOC -TROUMASSOÏDE ( 800 A 1500) LA COURONNE -GUADELOUPE

NB :Ces platines servaient à faire cuire les cassaves* de manioc .

Cassaves : galettes de manioc.

Les céramiques présentées peuvent servir de fil conducteur pour évoquer des aspects

de ces civilisations du manioc. On utilisera avec profit les très riches collections des

musées de Martinique, Guadeloupe .

FIGURE 8 PIERRE A TROIS POINTES (300-600 AP J-C)-SITE DE MOREL EN GUADELOUPE -

MUSEE EDGAR CLERC¹

FIGURE 9 CHRONOLOGIE PROPOSEE DANS L’OUVRAGE HISTOIRE ET CIVILISATION DE LA

CARAÏBE -TOME 1

NB : La compétence construire des repères historiques peut être mise en œuvre avec

l’utilisation ou la réalisation d’une frise simplifiée par les élèves.

Page 14: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 14

Ces pierres à trois pointes ne se retrouvent pas sur le continent. Elles sont le produit

d’une culture purement insulaire. On suppose qu’elles étaient la symbolisation d’un

principe de fertilité et de fécondité.12

FIGURE 10 SITE DE VIVÉ -LORRAIN -FOUILLES DE 2018 – PHOTO MARIE-LAURE MOUSTIN-

DUBOYER

NB Les fouilles qui ont eu lieu à Vivé en archéologie préventive ont mis à jour un village

amérindien datant du IVème siècle ; on note le trous qui supportaient les poteaux des

éléments d’habitation.

Document : L’usage des poteries d’après les archéologues

« Nous pouvons distinguer dans l’ensemble de ces céramiques deux types bien

distincts : les unes, d’usage domestique, et d’autres d’utilisation plus rituelle […] Les

canallis, sortes de marmites font penser aux « canaris » martiniquais, car leur base

noircie profondément par le feu prouve que de toute évidence elles servaient

normalement à la cuisson des aliments[…] Nous insisterons sur une dernière sorte de

poterie ménagère : le récipient servant à la fabrication de boissons fermentées (ouicou

). Si nous interprétons leur usage de la sorte, c’est que les parois intérieures sont

profondément rongées sur toute leur surface et nous savons que la fermentation

alcoolique attaque la terre cuite, tandis que l’extérieur parfaitement conservé ne

présente pas la moindre trace de feu. »

Premier congrès international d’Études des Civilisations précolombiennes des Petites

Antilles (1961).

Société d’Histoire de la Martinique, Fort-de-France, 1964.

NB : Ce texte permet aux élèves de confronter leurs hypothèse émises lors de la mise

en œuvre de la compétence Raisonner , avec celles des scientifiques »

12 SAINTON Jean-Pierre – Histoire et civilisation de la Caraïbe -Edition Maisonneuve et Larose -2005

Page 15: Thème 1 : La longue histoire de l humanité et des

Marie-Laure MOUSTIN-DUBOYER – Yolaine CARPIN 15

Document : Quelques aspects de la vie quotidienne des Amérindiens d’après les

Chroniqueurs du XVIIème siècle.

« Après ce repas, quelques-uns vont à la pêche, qu’ils pratiquent de plusieurs

manières : les uns tirent le poisson à coups de flèches et plongent aussitôt pour le

prendre, d’autres, lorsqu’ils voient des homards […] prennent une grosse pièce dans

leurs deux mains et plongent la tête en avant, laissant la pierre au fond et rapportent

les homards […]. On en voit qui font des lignes pour pêcher en haute mer […] les

autres font des arcs, des flèches, des catolis (c’est une espèce de hotte dont se servent

les femmes sauvages) les plus diligents s’occupent à faire des canots et des pirogues

et y passent souvent une année entière. Quand ils sont priés d’aller abattre le bois de

l’habitation de leur voisin, ils y vont tous ensemble […].

Cela achevé, elles (les femmes) mettent la pain à la pâte : : à faire du pain pour le

déjeuner […] puis elles font cuire ce que leurs maris et enfants leur ont apporté de la

chasse et de la pêche […] Après cela elles vont cultiver leurs jardins et labourer la

terre avec un gros bâton pointu, tel un épieu. Elles ont aussi le soin de planter les

vivres, de les cultiver, d’arracher le manioc, de le gratter, de le presser, et de le faire

cuire en cassave (…] Celles qui demeurent à la case s’occupent à faire des lits en

coton […] Il faut observer que ce serait une infamie à un homme d’avoir touché à un

travail de femme. »

Révérend Père Du Tertre – Histoire générale des Antilles

Figure 1 Carte des migrations amérindiennes -Musée d’Archéologie

Précolombienne et de Préhistoire. 9

Figure 2 Toponymie amérindienne – 9

Figure 3 Toponymie amérindienne – 10

Figure 4 Les sites amérindiens en martinique. 10

Figure 5 Coupe - Saladoïde ancien – Site de Fond -Brûlé au Lorrain- Musée de

Martinique 11

Figure 6 Vase à ouicou – Saladoïde modifié – Musée de Martinique 11

Figure 7 Platine à manioc -Troumassoïde ( 800 à 1500) La Couronne -

Guadeloupe 11

Figure 8 Pierre à trois pointes (300-600 ap J-C)-site de Morel en Guadeloupe -

Musée Edgar Clerc¹ 12

Figure 9 Chronologie proposée dans l’ouvrage Histoire et Civilisation de la

Caraïbe -Tome 1 12

Figure 10 site de VIVÉ -Lorrain -Fouilles de 2018 – Photo Marie-Laure

MOUSTIN-DUBOYER 13