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Vendredi 26 mai 2017 #2 Le journal du festival Le Pôle du cheval et de l’âne, terrain de jeu idéal pour évoquer veaux, vaches, cochons, coqs et hérissons, terroirs et rura- lité en péril. L a formule est proche de nos livres-contes d’enfance. Ceux avec la petite clochette qui rap- pelle qu’on doit tourner la page. Un conteur, l’orches- tre à cordes qui plante le décor et les histoires qui s’enchaînent. La chauve- souris amoureuse, le coq déplumé, le squelette mort de la foire du Trône « qui n’en fait pas un drame », certainement car il fait en- core crier les femmes. Et ce centenaire libidineux qui aimerait finir comme Félix Faure. Même les ostéo- pathes (de lapin, à tarte, ou à crêpes – il faut dire que les fables de notre chan- teur nous inspirent) sont à l’honneur. Mais chez Tho- mas Fersen, la femme géante craquante l’en- traîne, en caleçon fantaisie, dans une « Patchanga » thérapeutique. Il y a quelques années, on faisait des farandoles aux concerts de Thomas Fer- sen. Pour Lignières et L’Air du Temps, Thomas Fersen s’offre une parenthèse plus classieuse et parfois jazzy. Un quintette à cordes l’ac- compagne - à moins que ce ne soit un quatuor - auquel se mêlent un banjo, une mandoline. Thomas Fersen alterne le piano et son uku- lélé, sa guitare de poupée. Thomas Fersen est un grand raconteur. Les inter- mèdes qui rythment le concert donnent un nou- veau relief à ces histoires en vers. Spectacle de mo- nologues ? Histoire de blouson de mauvais garçon abandonné aux puces dé- couvrant Neuilly, grain de beauté marqueur de dy- nastie callipyge, ou dépu- celage à la pelle « qu’on roule sur les sofas » par une anglaise un peu canaille. Après dix albums, la sur- prise est toujours tapie dans l’ombre, comme « la mort assise sur un ca- napé ». Le public est at- tentif et malgré les invectives de Thomas Fer- sen, ne veut pas aller se coucher. Il faut dire qu’après ces histoires de saillies, d’in- firmières, d’obsessions médicales « tu n’as [déci- dément] pas les oreil- lons »), les festivaliers sont maintenant accro- chés au corsage dégrafé de cette fille de cam- pagne. Des festivaliers pourtant bien sages. Au Pôle de l’âne, on reste cu- lotté, même face à Tho- mas Fersen déboutonné. Francine Moronvalle Belle plume à poil ! AU MANÈGE - HIER SOIR Marylène Eytier La valeur n’attend pas le nombre des années. Tim Dup, révélation musicale du moment, nous l’a encore prouvé hier soir. L a salle du manège est pleine comme un RER aux heures de pointe, surchauffée comme un com- partiment non climatisé. Le jeune Timothée, ouvre avec son titre TER centre, chro- nique ferroviaire du quoti- dien de ce banlieusard. « Matin et soir soir et matin je change de wagon de train, sans entrain… ». Un piano mélodieux soutenu par une rythmique électro/pop ac- compagne sa voix claire, sin- cère. Seul au clavier, Tim nous regarde bien en face sans insolence ni insou- ciance. Il ne joue pas les grands, les (déjà) blasés, nous parle du premier concert auquel il a assisté il y a quelques années, celui d’un certain Thomas Fer- sen… la boucle est bouclée. A 21 ans, celui qui vient de mettre ses études de com- munication entre paren- thèses, est de cette génération hashtag qui scrute le profil Facebook des filles de la fac qu’il cherche à « pécho », s’enivre parfois jusqu’à errer dans les rues de Paris. Voyage en terre incon- nue pour certains specta- teurs du Manège assis face à ce « gamin » qui pourrait être leur petit-fils. Mais Tim ne se résume pas à cela. Il évoque ses paradoxes, sa mélancolie, ses besoins d’évasion. Le captivant titre « vers les ourses polaires » lui fait prendre de la hauteur et achève de convaincre les derniers sceptiques. Tim a toujours voulu « devenir un ramasseur de souvenir ». Il nous en laisse un très bon … Thibaud Moronvalle Carte jeune Thomas Fersen, animaux d’amour #premièreclasse À la sortie du concert de Sy- rano, l’intensité est palpa- ble : il y a de larges sourires, des larmes d’émotion et le sentiment d’avoir vécu un moment rare. Une paren- thèse de vérité et de ten- dresse dans un monde de questions et de colères. À ses interrogations existentielles, qui sont aussi les nôtres, Syrano donne des ré- ponses à la fois person- nelles et collectives. D’ailleurs, ses derniers mots avant de quitter la scène sont à cette image : « Continuez à vivre dans la joie et le métissage, le combat continue, c’est ça la France ! ». Une heure et quinze mi- nutes plus tôt, tout avait commencé par un pro- logue musical en forme de générique : lumières bleues, musiciens seuls sur scène, on s’attendait presque à voir surgir le personnage d’un film de Tim Burton… Mais c’est Syrano qui entre en scène avec « L’apprenti sorcier », chanson qui introduit éga- lement son nouvel album ou plus exactement sa nouvelle BD-CD : œuvre hybride génétiquement modifiée. Le dernier opus de Syrano est une bande- dessinée musicale qui s’écoute, se lit ou se re- garde selon l’envie du mo- ment. Toujours adepte du métissage et du mélange des genres, Syrano a conçu son spectacle comme une série de ta- bleaux chantés où la créa- tion lumière a une place de choix. Étrangement, ce trente- naire qui avoue écouter exclusivement du rap (Orelsan et Vald en tête), présente un spectacle qui rappelle parfois la chan- son réaliste du début du XX e siècle. Entre accor- déon très présent, tenues sobrement noires, ges- tuelle marquée et valse à trois temps, il y a du Piaf dans ce Syrano-là qui nous chante la misère acide et la détresse des zones ur- baines du XXI e siècle. Oui, 2017 n’est jamais très loin, avec ce qu’il faut de machines électroniques, de rythmique et de basses, et le rappeur qui repointe souvent le bout de son flow. Et puis il y a de l’énergie, de la lutte et de la joie : Syrano rit, Sy- rano vit. En dehors de la scène, l’engagement de Syrano dépasse sa démarche ar- tistique. Venu à Lignières l’au- tomne dernier pour créer ce nouveau spectacle, il accompagne également les élèves du collège dans le cadre des Territoires et Résidences d’Éducation Artistique et Culturelle. D’ailleurs, hier dans la salle, les habitués du fes- tival se mêlent aux élèves et à leurs familles. Ce mé- lange a quelque chose d’exemplaire et Syrano met tout le monde d’ac- cord ! Il tutoie son public, le taquine et s’adresse à lui en toute spontanéité : «ç a suffit les conneries maintenant, tu lèves ton cul, sinon tu vas le regret- ter ». Et puis le spectacle se ter- mine dans une belle eu- phorie après que Syrano a pris soin d’embrasser un à un, du sol au plafond et du parterre au balcon, les 209 spectateurs présents. Alors décidément non, Sy- rano n’est pas le pire des hommes ! Néda Yazdanian Touchant Le pire des hommes ? HIER APRÈS-MIDI AUX BAINS-DOUCHES Cathy Beauvallet Une question à Syrano Quels artistes du festival avez-vous envie de dé- couvrir ? Sans hésiter, François Morel. J’ai été en contact avec lui il n'y a pas long- temps, parce que je vou- lais lui demander s’il acceptait de tourner un clip avec moi. Il m’a ré- pondu personnellement et très gentiment qu’il n’avait pas le temps. J’ai trouvé que c'était vrai- ment humain de sa part, et ça colle exactement à l’image que j’ai de lui. J’ai grandi avec Les Des- chiens et j’ai une image très forte de lui, comme un homme droit, qui fait ce qu’il aime, et ne se prend pas la tête. J’aime ces artistes qui pour moi sont de vrais artistes, et avant même d’être des artistes, sont de vrais êtres humains. Je serai également très content de revoir Volo, avec qui j’ai déjà fait des dates. Je suis heureux aussi d’avoir rencontré Guillaume Farley hier. On a découvert qu’on avait beaucoup d'amis en commun, on a bu des coups ensemble (de jus de pomme !). J’ai hâte de découvrir aussi Cyril Mokaiesh, Pomme, et tous les au- tres. Propos recueillis par Néda Yazdanian Syrano lève le mystère sur ses talents cachés. Pour entrer dans son univers ou pour pro- longer l'expérience de son concert, on peut découvrir ses dessins dans l'exposition Mys- terium Tremendum, dans le hall des Bains-Douches. A vant de vivre de sa mu- sique, Syrano voulait être dessinateur. Il a com- mencé par illustrer les chansons de son premier album, Mu- siques de chambre. Puis l'ani- mation d'ateliers avec les scolaires l'a tout naturellement conduit à créer un album pour le jeune public, qui laissait une plus grande part à l'illustration. En 2010, la maison d'édition Actes Sud Junior lui commande un livre-disque, et Monsieur et Madame Neige prennent corps. Mais c'est en discutant de l'ave- nir du disque avec les membres du Collectif 13 (dont Guizmo de Tryo et Gari Grèu de Massilia Sound System) qu'il réalise la nécessité de produire un bel objet pour vendre sa musique. Le dessin devient donc un véri- table atout. L'exposition s'organise en qua- tre parties. La première montre des extraits du Dernier des fils du bourreau de Sombreclair. Dans un sombre décor médié- val, l'effroyable ( tremendum en latin) bourreau brandit sa hache ensanglantée : vous pourrez ad- mirer «ses gracieux mouve- ments ». Syrano semble croiser Tim Burton avec le manga. Puis vous découvrirez Le Manège dans lequel les politiciens de- viennent d'abominables Joker manipulateurs de foules. Les couleurs beaucoup plus flashy soulignent l'acidité du propos. La satire sociale reste présente dans Alice, très librement inspi- rée de Lewis Caroll, mais le des- sin se veut beaucoup plus réaliste. Alice est devenue une prostituée qui cherche dans la nuit une voie vers le bonheur, ou au moins une issue dans les méandres de cette ville glauque. On termine l'exposition par des story-boards. Manquait-il en- core une corde à l'arc de notre Syrano des bois ? La voilà : le ci- néma. Pour préparer la réalisa- tion de ses clips, Syrano dessine évidemment. Ce petit parcours nous fait par- tager les différentes étapes de création en juxtaposant des planches avant et après colori- sation. C'est Syrano lui-même qui nous guide sur les panneaux explica- tifs, mais aussi avec les mots de ses chansons, que vous retrou- verez sur les BD. Syrano, vous chantiez, nous en sommes fort aise. Eh bien, des- sinez maintenant ! Charlotte Bonneau Extrait de Manège EXPOSITION Illustre Syrano Marylène Eytier Marylène Eytier

Thomas Fersen, animaux d’amour #premièreclasse

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Page 1: Thomas Fersen, animaux d’amour #premièreclasse

Vendredi 26 mai 2017 #2

Le journal du festival

Le Pôle du cheval et del’âne, terrain de jeu idéalpour évoquer veaux,vaches, cochons, coqs ethérissons, terroirs et rura-lité en péril.

La formule est prochede nos livres-contesd’enfance. Ceux avec la

petite clochette qui rap-

pelle qu’on doit tourner lapage. Un conteur, l’orches-tre à cordes qui plante ledécor et les histoires quis’enchaînent. La chauve-souris amoureuse, le coqdéplumé, le squelette mortde la foire du Trône « quin’en fait pas un drame »,certainement car il fait en-core crier les femmes. Et ce

centenaire libidineux quiaimerait finir comme FélixFaure. Même les ostéo-pathes (de lapin, à tarte, ouà crêpes – il faut dire queles fables de notre chan-teur nous inspirent) sont àl’honneur. Mais chez Tho-mas Fersen, la femmegéante craquante l’en-traîne, en caleçon fantaisie,dans une « Patchanga »thérapeutique.Il y a quelques années, onfaisait des farandoles auxconcerts de Thomas Fer-sen. Pour Lignières et L’Airdu Temps, Thomas Fersens’offre une parenthèse plusclassieuse et parfois jazzy.Un quintette à cordes l’ac-compagne - à moins que ce

ne soit un quatuor - auquelse mêlent un banjo, unemandoline. Thomas Fersenalterne le piano et son uku-lélé, sa guitare de poupée. Thomas Fersen est ungrand raconteur. Les inter-mèdes qui rythment leconcert donnent un nou-veau relief à ces histoiresen vers. Spectacle de mo-nologues ? Histoire deblouson de mauvais garçonabandonné aux puces dé-couvrant Neuilly, grain debeauté marqueur de dy-nastie callipyge, ou dépu-celage à la pelle « qu’onroule sur les sofas » par uneanglaise un peu canaille. Après dix albums, la sur-prise est toujours tapie

dans l’ombre, comme « lamort assise sur un ca-napé ». Le public est at-tentif et malgré lesinvectives de Thomas Fer-sen, ne veut pas aller secoucher. Il faut dire qu’après ceshistoires de saillies, d’in-firmières, d’obsessionsmédicales « tu n’as [déci-dément] pas les oreil-lons »), les festivalierssont maintenant accro-chés au corsage dégraféde cette fille de cam-pagne. Des festivalierspourtant bien sages. AuPôle de l’âne, on reste cu-lotté, même face à Tho-mas Fersen déboutonné.

Francine Moronvalle

Belle plume à poil !

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La valeur n’attend pas lenombre des années. TimDup, révélation musicale dumoment, nous l’a encoreprouvé hier soir.

La salle du manège estpleine comme un RERaux heures de pointe,

surchauffée comme un com-partiment non climatisé. Lejeune Timothée, ouvre avecson titre TER centre, chro-nique ferroviaire du quoti-dien de ce banlieusard.« Matin et soir soir et matinje change de wagon de train,sans entrain… ». Un pianomélodieux soutenu par unerythmique électro/pop ac-compagne sa voix claire, sin-cère. Seul au clavier, Timnous regarde bien en facesans insolence ni insou-ciance. Il ne joue pas lesgrands, les (déjà) blasés,nous parle du premierconcert auquel il a assisté il y

a quelques années, celuid’un certain Thomas Fer-sen… la boucle est bouclée.A 21 ans, celui qui vient demettre ses études de com-munication entre paren-thèses, est de cettegénération hashtag quiscrute le profil Facebook desfilles de la fac qu’il cherche à« pécho », s’enivre parfoisjusqu’à errer dans les rues deParis. Voyage en terre incon-nue pour certains specta-teurs du Manège assis face àce « gamin » qui pourrait êtreleur petit-fils. Mais Tim ne serésume pas à cela. Il évoqueses paradoxes, sa mélancolie,ses besoins d’évasion. Lecaptivant titre « vers lesourses polaires » lui faitprendre de la hauteur etachève de convaincre lesderniers sceptiques. Tim atoujours voulu « devenir unramasseur de souvenir ». Ilnous en laisse un très bon …

Thibaud Moronvalle

Carte jeune

Thomas Fersen, animaux d’amour #premièreclasse

À la sortie du concert de Sy-rano, l’intensité est palpa-ble : il y a de larges sourires,des larmes d’émotion et lesentiment d’avoir vécu unmoment rare. Une paren-thèse de vérité et de ten-dresse dans un monde dequestions et de colères.

Àses interrogationsexistentielles, quisont aussi les nôtres,

Syrano donne des ré-ponses à la fois person-nelles et collectives.D’ailleurs, ses derniersmots avant de quitter lascène sont à cette image :« Continuez à vivre dans lajoie et le métissage, lecombat continue, c’est çala France ! ».Une heure et quinze mi-nutes plus tôt, tout avaitcommencé par un pro-logue musical en forme degénérique : lumièresbleues, musiciens seulssur scène, on s’attendaitpresque à voir surgir lepersonnage d’un film deTim Burton… Mais c’est Syrano quientre en scène avec« L’apprenti sorcier »,chanson qui introduit éga-lement son nouvel albumou plus exactement sanouvelle BD-CD : œuvrehybride génétiquementmodifiée. Le dernier opusde Syrano est une bande-dessinée musicale quis’écoute, se lit ou se re-garde selon l’envie du mo-ment. Toujours adepte dumétissage et du mélangedes genres, Syrano aconçu son spectaclecomme une série de ta-bleaux chantés où la créa-

tion lumière a une placede choix. Étrangement, ce trente-naire qui avoue écouterexclusivement du rap(Orelsan et Vald en tête),présente un spectacle quirappelle parfois la chan-son réaliste du début duXXe siècle. Entre accor-déon très présent, tenuessobrement noires, ges-tuelle marquée et valse àtrois temps, il y a du Piafdans ce Syrano-là qui nouschante la misère acide etla détresse des zones ur-baines du XXIe siècle. Oui,2017 n’est jamais trèsloin, avec ce qu’il faut demachines électroniques,de rythmique et de

basses, et le rappeur quirepointe souvent le boutde son flow. Et puis il y ade l’énergie, de la lutte etde la joie : Syrano rit, Sy-rano vit.En dehors de la scène,l’engagement de Syranodépasse sa démarche ar-tistique. Venu à Lignières l’au-tomne dernier pour créerce nouveau spectacle, ilaccompagne égalementles élèves du collège dansle cadre des Territoires etRésidences d’ÉducationArtistique et Culturelle.D’ailleurs, hier dans lasalle, les habitués du fes-tival se mêlent aux élèveset à leurs familles. Ce mé-

lange a quelque chosed’exemplaire et Syranomet tout le monde d’ac-cord ! Il tutoie son public,le taquine et s’adresse àlui en toute spontanéité :« ça suffit les conneriesmaintenant, tu lèves toncul, sinon tu vas le regret-ter ». Et puis le spectacle se ter-mine dans une belle eu-phorie après que Syrano apris soin d’embrasser un àun, du sol au plafond etdu parterre au balcon, les209 spectateurs présents.Alors décidément non, Sy-rano n’est pas le pire deshommes !

Néda Yazdanian

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Le pire des hommes ?HIER APRÈS-MIDI AUX BAINS-DOUCHES

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Une questionà Syrano

Quels artistes du festivalavez-vous envie de dé-couvrir ?

Sans hésiter, FrançoisMorel. J’ai été en contactavec lui il n'y a pas long-temps, parce que je vou-lais lui demander s’ilacceptait de tourner unclip avec moi. Il m’a ré-pondu personnellementet très gentiment qu’iln’avait pas le temps. J’aitrouvé que c'était vrai-ment humain de sa part,et ça colle exactement àl’image que j’ai de lui.J’ai grandi avec Les Des-chiens et j’ai une imagetrès forte de lui, commeun homme droit, qui faitce qu’il aime, et ne seprend pas la tête. J’aimeces artistes qui pour moisont de vrais artistes, etavant même d’être desartistes, sont de vraisêtres humains.Je serai également trèscontent de revoir Volo,avec qui j’ai déjà fait desdates. Je suis heureuxaussi d’avoir rencontréGuillaume Farley hier.On a découvert qu’onavait beaucoup d'amisen commun, on a bu descoups ensemble (de jusde pomme !).J’ai hâte de découvriraussi Cyril Mokaiesh,Pomme, et tous les au-tres.

Propos recueillispar Néda Yazdanian

Syrano lève le mystère sur sestalents cachés. Pour entrerdans son univers ou pour pro-longer l'expérience de sonconcert, on peut découvrir sesdessins dans l'exposition Mys-terium Tremendum, dans lehall des Bains-Douches.

Avant de vivre de sa mu-sique, Syrano voulait êtredessinateur. Il a com-

mencé par illustrer les chansonsde son premier album, Mu-siques de chambre. Puis l'ani-mation d'ateliers avec lesscolaires l'a tout naturellementconduit à créer un album pourle jeune public, qui laissait uneplus grande part à l'illustration.En 2010, la maison d'éditionActes Sud Junior lui commandeun livre-disque, et Monsieur etMadame Neigeprennent corps.Mais c'est en discutant de l'ave-nir du disque avec les membresdu Collectif 13 (dont Guizmo deTryo et Gari Grèu de MassiliaSound System) qu'il réalise lanécessité de produire un belobjet pour vendre sa musique.Le dessin devient donc un véri-table atout. L'exposition s'organise en qua-tre parties. La première montredes extraits du Dernier des filsdu bourreau de Sombreclair.Dans un sombre décor médié-val, l'effroyable (tremendum enlatin) bourreau brandit sa hacheensanglantée : vous pourrez ad-mirer «ses gracieux mouve-ments». Syrano semble croiserTim Burton avec le manga. Puisvous découvrirez Le Manègedans lequel les politiciens de-viennent d'abominables Joker

manipulateurs de foules. Lescouleurs beaucoup plus flashysoulignent l'acidité du propos.La satire sociale reste présentedans Alice, très librement inspi-rée de Lewis Caroll, mais le des-sin se veut beaucoup plusréaliste. Alice est devenue uneprostituée qui cherche dans lanuit une voie vers le bonheur, ouau moins une issue dans lesméandres de cette ville glauque.On termine l'exposition par desstory-boards. Manquait-il en-core une corde à l'arc de notreSyrano des bois ? La voilà : le ci-néma. Pour préparer la réalisa-tion de ses clips, Syrano dessineévidemment.Ce petit parcours nous fait par-tager les différentes étapes decréation en juxtaposant desplanches avant et après colori-sation. C'est Syrano lui-même qui nousguide sur les panneaux explica-tifs, mais aussi avec les mots deses chansons, que vous retrou-verez sur les BD.Syrano, vous chantiez, nous ensommes fort aise. Eh bien, des-sinez maintenant !

Charlotte Bonneau

Extrait de Manège

EXPOSITION

Illustre Syrano

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Page 2: Thomas Fersen, animaux d’amour #premièreclasse

ALBUM

Conception graphique : Le Centre de la Presse 18170 Maisonnais. Téléphone : 06.21.09.38.28. [email protected]

Participent à REPORT’AIR : Cathy Beauvallet, Charlotte Bonneau, Olivier Brunhes, Virginie Canon, Violette Dubreuil, Marylène Eytier, Pascal Miara, Francine Moronvalle,

Thibaud Moronvalle, Pascal Roblin, Néda Yazdanian.

FESTIVAL ORGANISÉ PAR

LES PRINCIPAUX PARTENAIRES DE L’AIR DU TEMPS

La température est encoremontée de quelques degrésavec le voyage africain au-quel Gabriel Saglio et sesVieilles Pies nous ontconviés.

Il est 17 h 30, ils sont nom-breux à s’être installés sousla halle et aux abords, des

hommes, des femmes, desjeunes, des moins jeunes, unpublic populaire curieux etimpatient. La plupart neconnaissent pas les artistesqui vont se présenter devanteux. Direction la découverte.Gabriel Saglio, chanteur, au-teur et compositeur, entre enscène, accompagné de sonéquipe de Vieilles Pies. Il y aFlorian Tatard à l’accordéon,Toups Bebey aux percussionset au saxophone, Yoan Her-nandez à la guitare, VincentBarrau à la basse et auxchœurs, et Alban Cointe à labatterie. C’est leur premièrefois à Lignières. C’est partipour le grand dépaysement.Les musiques nous invitentau voyage. Gabriel Saglios’est forgé au fil des annéesun répertoire riche de ses pé-riples et de ses rencontres. Sil’Europe de l’Est l’a long-temps influencé, il est depuisquelques années tourné versle continent africain. Son pro-chain album « Le Chant desRameurs » en sera d’ailleursun témoignage complet.

Nous voilà rapidement trans-portés au cœur de l’Afrique,au Mali, au Niger et dans tousces pays où musique et danserythment la vie. Timidement, nos pieds com-mencent à frapper le sol, etnos fesses à se remuer. Lesmorceaux s’enchaînent et lepublic se déchaine. Mon voi-sin de quatre-vingt-deux prin-temps, sourire aux lèvres, meglisse à l’oreille : « Ça vousétonne que j’aime ça à monâge ? ». Bien au contraire,c’est du bonheur ! Les spectateurs sont en com-munion, avec l’envie mu-tuelle de bouger, de frapperdans les mains, de « s’am-biancer » avec Gabriel Saglioet ses talentueux musiciens.

Belle parenthèse musicalepour nous tous rassemblés,heureux de partager ceschauds instants. J’auraispresque envie de prendremon voisin dans les bras pourdanser avec lui. Et puis, il y a les mots, destextes forts, interprétés avecles tripes. Gabriel est unange, transmetteur de bon-heur et d’optimisme bienveil-lant. « Vivre partout où l’autrene fait pas peur ». Son der-nier morceau « Dansons à lavie, à la mort » aurait pu nousfaire danser et nous aimerjusqu’au bout de la vie… En cette période électorale, ilest bon d’entendre des motsvécus au quotidien qui vontplus loin que de simples dis-

cours et de bons sentiments.Pour que ces instants d’unionne s’arrêtent jamais, GabrielSaglio et ses Vieilles Pies nousinvitent à découvrir en octo-bre prochain leur nouvelopus. Nous pourrons y re-trouver toutes ces chansonsmétissées qui nous ont faitdanser hier sous la halle. Surl’album ils sont accompagnésd’artistes prestigieux : Ma-mani Keita (Mali), SekoubaBambino (Guinée), ChristineSalem (La Réunion). Comme le chante Gabriel Sa-glio « La vie souffle sur lesbraises lorsqu’on est aimé parles siens » alors aimons-noussans frontière !

Virginie Canon

Gabriel Saglio et ses drôles d’oiseaux.

Gabriel et ses anges embrasent la Halle

HIER APRÈS-MIDI

MICRO-BAL(L)ADE

Si on part sur les derniers quim'ont touché, c'est Loïc Lantoine,qui porte une charge émotion-nelle dans sa voix, son coeur etson esprit. Ça fait partie des der-niers qui m'ont transporté cestemps-ci, que ce soit seul ou avecle Toubifri Orchestra ; et si on de-vait mettre un contrepied à Loïc,je mettrais Fersen, qui a une ma-nière différente de s’exprimer,tout en retenue, en sagesse, endouceur, avec un petit brin d'hu-mour acide.

Pascal

On prendrait La Belle Bleue,un groupe qu'on avait vu ici ily a trois ans, car on aime biendécouvrir de nouveaux ar-tistes à Lignières, et NicolasJules.Ce chanteur est décalé,drôle, son spectacle est hu-moristique, alors que la BelleBleue chante des paroles en-gagées.

Mélanie, Thomas,Mathis et Toan

J'adorerais associer TomPoisson et David Sire,parce qu'ils ont tous lesdeux des univers assezlointains, mais leur poésieet une certaine folie semarieraient super bien.David Sire m'évoque l'uni-vers du cirque et TomPoisson un univers entrebohème et liberté, un mé-lange de tout ça.

Corinne, Maxime et Arthur

Je dirais NTM et quelqu'un duclassique, comme AndréeDupré, pour faire un truc ri-golo, à la fois classique ettrash.Andrée Dupré, c'est doux,c'est posé, alors que lestextes de NTM sont plutôt ré-voltés.

Camille

Associa-sonNous avons profité de la promenade chantée, parenthèse verte et nuancée, pour poser cette question à quelques

festivaliers : « Si vous pouviez réunir deux artistes de deux univers différents, qui choisiriez-vous ? »

Photos et propos recueillis par Charlotte Bonneau et Violette Dubreuil

Petite chronique des jours de joie

DANS L’ŒIL D’O.

Olivier BrunhesDe

la tendresse, bordel ! Entre pa-renthèses, les gros mots sont des mots

juste un peu plus gros que les petits, c’est commele chocolat, faut pas en abuser, mais qu’est-ce que ça fait

du bien… Pendant ce temps-là, l’amour dégouline dans l’airdu temps. Comme de la confiture de myrtille sur nos cœurs de

midinettes. Syrano nous embrasse, Fersen nous attendrit,Farley garde le fil et la caravane reste sur place, le

reste nous ravit. Gentils, belles et beaux, cesjours-ci dans le Berry, c’est l’hymne à

la vie !

Poppée (8 mois)la plus jeune festivalière

Photos: Marylène Eytier,Charlotte Bonneau,

Pascal Roblin

Il y a les artistes sur scène, programmés pour ce 26e festival. Et il y a ceux que nous avons le plaisirde croiser dans les allées de L’Air du Temps. Sur la photo, L’Affaire Capucine et Anita Farmine. D’au-tres sont présents comme Lili Cros et Thierry Chazelle, des habitués des lieux, ou Carine Achard

qui nous a parlé de son second album, dont la sortie est prévue dans les mois à venir. On a égalementvu Valérian Renault, le duo Léonard, Bastien Lucas, et même TiM ! qui participe cette année encoreà l’équipe de rédaction de Report’Air. Les autres ont dû rester cachés, car nous ne les avons pas encoreaperçus !

Ce sont «les yeux» du Festival. Marylène Eytier, Guy Fasolato et Yannick Pirot, fidèles photographesqui, à eux trois, sont la mémoire visuelle de L’Air du temps.

Sous le soleil exactement !

Marche à l'ombre des bouchures

PROMENADE CHANTÉE

L’originalité cette année,c’est le trio fil rouge : l’écri-vain Olivier Brunhes s’asso-cie à Syrano et GuillaumeFarley pour mener la danse.

ÀMontlouis, en plein so-leil, on se presse dansle cimetière. Il y a tou-

jours quelque chose d'irrévé-rencieux à se rassemblerdans cet auguste lieu sanschagrin. Mais un Brassens, ças'emmène partout, ça ac-compagne tous les momentsautour d'un feu, d'un verreou pourquoi pas d'unetombe, ça se chante avec ma-lice et recueillement. Guil-laume Farley et lespromeneurs du vendredi si-gnent son « Testament » enfredonnant. Olivier Brunhesreprend le flambeau et ra-mène dans cette parenthèsele paysage bucolique : « C'estpas ch'ti le Berry, c'est toutbieau, y’a des vieaux, y’a deschieuv, y’a des lieux ». Le slam

berrichon a de beaux joursdevant lui. À ce ciel sansnuage, il adresse desprières : « Que ta volontésoit fête ! ».« La servante du château »nous mène sur le petit che-min de terre. Derrière l'ac-cent de Ricet Barrier, certainsmarcheurs à l'oreille affutéeentendent en écho la viellede Valentin Clastrier. Chaquechanson est comme une ma-deleine de Proust pour Flo-rence, fidèle spectatrice deL'Air du Temps et ferventeamatrice de la promenadechantée : les petits décou-vrent le patrimoine musicalde leurs aînés revisité par desguides instrumentés, ceschanteurs souvent citadinsavec qui on partage notrebelle campagne. Sur le che-min, on échange naturelle-ment. Il ne faut pas gratterlongtemps Guillaume Farleypour qu'il sorte de sa guitaretout le répertoire de Jacques

Debronckart, comme ça,spontanément, juste pour leplaisir.À l'orée d'un champ presquetrop beau pour être honnête,à la lisière de l'ombre, Syranosans chapeau nous saisit : « Jesuis le pire des hommes »,c'est lui qui le dit. Son texteobtient une écoute toute par-ticulière dans ce recoin defond du monde.Après une rapide mise aupoint (« sol mineur ? sol ma-jeur ? ok »), le trio de têtenous ramène à l'école pournous faire chanter en canon :en progrès, mais il faudra ac-centuer nos efforts l'annéeprochaine ! Nous sommes deplus en plus nombreux, c'estvrai, et c'est bon de se retrou-ver, de prendre le temps,c'est un peu la récré. Mais lacloche sonne : les trois lar-rons terminent en funam-bules, quoi de mieux pourdes fils rouges !

Charlotte Bonneau

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